La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
Suite de la discussion d'un projet de loi
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant aux amendements identiques n° 1649 et 3071 à l'article 10.
Chers collègues, il nous reste 936 amendements à examiner. Je vous invite à débattre dans un esprit constructif afin que nous puissions achever la discussion du projet de loi aujourd'hui. Je laisserai évidemment les échanges se dérouler pour que le débat soit aussi complet que possible.
Il vise à prendre en compte la place particulière des femmes dans le parcours d'installation en agriculture. Les agricultrices se heurtent encore à des difficultés dans l'accès aux prêts bancaires, souvent moins élevés pour elles, et aux terres, en raison de la méfiance des vendeurs. Certains stéréotypes subsistent au sujet des projets des agricultrices, souvent atypiques, tournés vers de plus petites surfaces et des modèles agricoles durables. Il est important de porter une attention particulière à leur parcours d'installation et de les soutenir dans leurs projets.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à Mme Manon Meunier, pour soutenir l'amendement n° 3071 .
En complément des propos de ma collègue, auxquels je souscris pleinement, je précise que seulement 37 % des personnes accompagnées dans un parcours d'installation et 20 % de celles qui touchent la dotation jeunes agriculteurs (DJA) sont des femmes. Leur accompagnement mériterait donc d'être renforcé. Ce pourrait être l'une des missions du service que nous créons à l'article 10.
La parole est à M. Pascal Lecamp, rapporteur de la commission des affaires économiques pour le titre III, pour donner l'avis de la commission sur ces deux amendements identiques.
Nous en avons parlé hier : l'installation d'un grand nombre de nouveaux agriculteurs, hommes et femmes confondus, sera nécessaire, dans les années à venir, pour répondre au défi du renouvellement des générations. Le principe de l'égalité entre les hommes et les femmes découle de la Constitution, et nous y tenons tous beaucoup. La mention que vous proposez est superfétatoire. Avis défavorable
La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, pour donner l'avis du Gouvernement.
Un amendement de Mme Annie Genevard précédemment adopté répond à votre préoccupation. Nous approuvons bien sûr l'objectif de vos amendements, mais il est déjà inscrit dans le projet de loi. Je vous invite à les retirer ; à défaut, mon avis sera défavorable.
L'amendement n° 3885 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Stéphane Mazars, pour soutenir l'amendement n° 4424 .
Il tend à introduire la notion de « vivabilité » dans les objectifs des politiques publiques visant à favoriser l'installation et la transmission en agriculture. Cette notion permet d'appréhender, de manière large, les conditions de vie d'un agriculteur. Nous le savons : un agriculteur travaille vingt-quatre heures sur vingt-quatre, tous les jours de l'année ; il reste agriculteur même pendant ses loisirs et ses congés. Les jeunes agriculteurs qui décident d'embrasser cette belle profession doivent être informés du rythme et des conditions de travail de leur futur métier.
Prenons l'exemple d'un jeune agriculteur qui commence son activité alors que ses parents travaillent toujours dans l'exploitation. Il travaille avec son père dans le groupement agricole d'exploitation en commun (Gaec). Son rythme de travail change radicalement le jour où celui-ci prend sa retraite, ce qui a des conséquences importantes sur sa vie, ses loisirs et ses congés, lesquelles doivent être anticipées.
Cet amendement s'inscrit dans la continuité du rapport d'Olivier Damaisin, présenté pendant la législature précédente, sur l'accompagnement des agriculteurs en difficulté et la prévention du burn-out et du suicide.
Je comprends la distinction que vous souhaitez introduire entre « vivabilité » et « viabilité », mais je ne suis pas certain qu'elle favorise la lisibilité du texte. L'alinéa 22 prévoit « un accompagnement pour assurer la viabilité économique, environnementale et sociale [du] projet » de l'agriculteur : cette rédaction englobe la problématique que vous soulevez. Je vous invite à retirer l'amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Je comprends également votre préoccupation, mais le diagnostic modulaire prévu par l'article 9, dont nous avons parlé hier, intègre les conditions de travail et de vie des agriculteurs. Il n'est pas nécessaire de reprendre le sujet à l'article 10. Votre amendement est satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable.
Sans juger de la pertinence légistique de l'amendement, il me semble que la question soulevée par M. Mazars est d'une grande acuité. Hier, en raison d'un incident de séance dont je suis à l'origine, je n'ai pas pu défendre un amendement sur un sujet qui me tient à cœur et auquel je vous sais attentif, monsieur le ministre : la situation des agriculteurs membres d'un Gaec qui souffrent d'une affection de longue durée et qui perdent leur statut au terme d'une dispense de travail d'un an. On ajoute alors à la souffrance de la maladie des problèmes sociaux et économiques insurmontables. Le ministère de l'agriculture s'est engagé à intervenir sur ce sujet par voie réglementaire. Nous en serions particulièrement satisfaits.
Vous me donnez l'occasion de vous répondre sur ce sujet dont nous avons débattu en commission, monsieur Potier. La situation des chefs d'exploitation qui font face à la maladie est parfois très difficile. Votre demande est légitime et relève d'un décret en Conseil d'État. Nous vous informerons de l'avancement du dossier dans les prochaines semaines.
L'amendement n° 4424 est retiré.
L'amendement n° 2931 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Éric Martineau, pour soutenir l'amendement n° 4624 .
Il tend à insérer la phrase suivante après la première phrase de l'alinéa 22 : « Elles préparent les agriculteurs aux contrôles administratifs dans les exploitations agricoles. » En 2023, la commission des affaires économiques a confié à Anne-Laure Blin et à moi-même la direction d'un groupe de travail relatif aux contrôles opérés dans les exploitations agricoles. Nous avons conclu de nos travaux que les contrôles administratifs étaient réels mais méconnus des agriculteurs et qu'il était important de les y préparer.
Je salue le travail que vous avez mené avec notre collègue Anne-Laure Blin – nous y avons fait référence à plusieurs reprises. Votre amendement propose de confier aux structures de conseil et d'accompagnement la mission de préparer et d'accompagner les agriculteurs lors de ces contrôles – nous avons évoqué le sujet hier soir –, en particulier les nouveaux agriculteurs. Le texte répond déjà à votre préoccupation, même si la question n'est pas spécifiquement évoquée. Je comprends votre intention, mais je vous suggère de retirer l'amendement pour ne pas alourdir le texte.
Je salue également le travail que vous avez conduit avec Anne-Laure Blin. Cependant, il ne semble pas opportun de mentionner les contrôles administratifs à l'alinéa 22, sous peine d'avoir à énumérer tous les champs couverts par les structures de conseil et d'accompagnement. En outre, pour que ces contrôles se déroulent dans de bonnes conditions, la réglementation doit être claire. Ils ne doivent pas être perçus comme infamants par les exploitants agricoles. Nous reviendrons sur ce point dans la suite du texte lorsque nous examinerons le quantum de peine. Je vous invite à retirer l'amendement.
Je le retire et je compte sur vous pour que les agriculteurs soient accompagnés lors de ces contrôles !
L'amendement n° 4624 est retiré.
Dans le même esprit que nos précédents amendements, celui-ci propose que les structures de conseil et d'accompagnement à l'installation « valorisent les pratiques agroécologiques et explorent avec le porteur de projet l'opportunité de s'installer en agriculture biologique », le mot « explorent » indiquant que cette possibilité n'a rien d'obligatoire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 3847 de Mme Marie Pochon est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques ?
L'objectif que nous visons avec la création d'un guichet unique est d'organiser un réseau de services au bénéfice des agriculteurs. L'article 10 n'a pas pour objet d'expliquer leur métier aux personnes compétentes en matière de conseil et d'accompagnement, d'autant que leur mission portera sur des problématiques et des modèles d'exploitation divers, qui ne sont pas liés uniquement à l'agriculture biologique. Chaque agriculteur devra bénéficier d'un accompagnement personnalisé en fonction de son projet. Il n'est pas possible d'imposer un modèle. Avis défavorable.
Il vise à intégrer un module de formation à la reconception des systèmes des exploitations agricoles dans le parcours d'accompagnement à l'installation. La diversification et la restructuration facilitent la transmission des exploitations et l'installation de nouveaux porteurs de projet puisqu'elles répondent au problème d'inadéquation entre l'offre d'exploitations à céder et les attentes des porteurs de projet en matière de taille, de type de production ou de mode de production. Elles permettent aux agriculteurs d'envisager de nouvelles orientations et productions pour une exploitation agricole et, ainsi, de faire davantage coïncider les projets avec le profil des exploitations à céder.
Les structures agréées proposeront un conseil et des formations adaptés à chaque projet. Il serait vain de faire la liste exhaustive des questions évoquées dans le cadre de leur accompagnement. Avis défavorable.
L'amendement n° 3845 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les structures agréées par l'État pour accompagner les candidats à l'installation doivent informer les candidats des critères du schéma directeur régional des exploitations agricoles (Sdrea) et accompagner uniquement les projets conformes à ces critères.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 1950 .
Un grand nombre d'organisations privées et parapubliques informent les agriculteurs sur les manières de contourner certaines politiques. Ce n'est pas être bavard que d'inscrire, dans le projet de loi, l'obligation pour les structures de conseil et d'accompagnement de rappeler aux porteurs de projet les critères de priorité du Sdrea. Celui-ci fixe des limites, des perspectives et un plan à même d'assurer le renouvellement des générations. Il est important de rappeler, lorsqu'il existe des avocats ou des centres de gestion gérés par les agriculteurs, qui passent leur temps à élaborer des stratégies de contournement, qu'il existe une règle et que, dans la République, les règles doivent être appliquées.
L'amendement n° 1644 de Mme Aurélie Trouvé est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
J'espère que les professionnels du conseil et de l'accompagnement auront le réflexe de rappeler les critères du Sdrea. Il est évidemment souhaitable que le cahier des charges du guichet unique agréé par le comité régional installation-transmission (Crit) et le Comité national installation-transmission (Cnit) le prévoie. Avis défavorable.
L'amendement est satisfait par la rédaction actuelle. En outre, il me semble qu'il ne nous appartient pas de lister les exigences auxquelles les porteurs de projet sont tenus de se conformer : c'est aux professionnels qui les accompagneront de s'assurer que leur projet s'inscrit dans le Sdrea. De toute façon, vous savez aussi bien que moi que, même si on les inscrit dans la loi, certains essaieront de contourner les règles. Je vous demande donc de bien vouloir retirer l'amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je suis saisie de plusieurs amendements, n° 4663 , 3958 , 1460 , 4155 , 4559 , 4570 , 2576 et 2363 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 1460 et 4155 sont identiques, de même que les amendements n° 4559 et 4570 .
La parole est à M. Stéphane Mazars, pour soutenir l'amendement n° 4663 .
Le texte prévoit que la formation à destination des porteurs de projets sera conçue et dispensée par les structures agréées de conseil et d'accompagnement et les établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles (Eplefpa). Élu de l'Aveyron, département où s'installent le plus de jeunes agriculteurs actuellement, j'y vois un problème : les jeunes qui se lancent dans l'aventure de l'installation ont en moyenne 29 ans, et il me semble inapproprié de les renvoyer sur les bancs d'un établissement public local d'enseignement. Compte tenu de sa nature, il me semblerait plus adapté que la formation proposée au moment de l'installation soit dispensée dans un centre de formation professionnelle agréé.
Cet amendement vise également à rendre obligatoire cette formation, qui a fait ses preuves et sur laquelle nous avons des retours très positifs. En outre, cela habitue les futurs agriculteurs à la formation au fil de l'eau : la vie n'est pas un long fleuve tranquille, et ils seront nécessairement amenés à devoir se former pour faire face aux diverses difficultés qu'ils rencontreront dans le cadre de leur activité professionnelle.
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 3958 .
Dans la rédaction actuelle de l'alinéa 24, la structure de conseil et d'accompagnement sera à la fois juge et partie, puisqu'elle dispensera la formation dont elle aura elle-même défini le contenu. Pour pallier cette difficulté, l'amendement tend à prévoir que la structure de conseil et d'accompagnement propose à l'agriculteur qui en a besoin une formation fondée sur une méthodologie définie conjointement par les services de l'État, l'autorité académique compétente en matière agricole et la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf). Le porteur de projet sera ensuite libre de choisir un organisme de formation, qu'il soit public ou privé.
Cet amendement permet à la fois d'éviter le mélange des genres, puisque les rôles de chacun seront ainsi parfaitement délimités, et d'assurer une égalité de traitement entre les structures de formation publiques et privées.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement n° 1460 .
Dû à notre collègue Isabelle Périgault, il vise à systématiser l'analyse des besoins de formation des porteurs de projets, à travers la réalisation d'une évaluation de compétences.
J'en appelle au retrait de tous les amendements – j'en profite pour remercier ceux qui ont exposé leurs motifs – au profit de l'amendement n° 3958 de Mme Genevard, auquel je suis tout à fait favorable, car il permet à la fois de clarifier les rôles respectifs des structures de conseil et d'accompagnement, de l'autorité académique et des organismes de formation, tant publics que privés, dans le parcours de formation, et d'offrir au porteur d'un projet d'installation ou de reprise la liberté du choix de l'organisme de formation.
L'amendement de Mme Genevard me semble répondre à l'ensemble des préoccupations qui se sont exprimées à travers les différents amendements : il rappelle que le parcours de formation doit découler de l'évaluation des besoins – M. Mazars en a parlé –, garantit la liberté de choix de l'organisme de formation – ce qui permet de cibler la formation sur les compétences dont les porteurs peuvent avoir besoin –, et clarifie les responsabilités de chacun dans la définition du référentiel de formation, en soulignant notamment le rôle de l'autorité académique. Je vous demande donc de bien vouloir retirer tous les amendements au profit de l'amendement n° 3958 , sur lequel j'émets un avis favorable.
Avant de retirer les amendements – ce que je ferai d'autant plus volontiers que c'est au profit de celui de ma collègue Annie Genevard –, je voudrais m'assurer que l'évaluation des compétences du porteur de projet figure bien dans la nouvelle rédaction de l'alinéa 24,…
Oui !
…car c'est une étape particulièrement importante pour les personnes en reconversion qui ne sont pas issues du milieu agricole.
Au-delà de la liberté de choix de l'organisme de formation, mon amendement prévoyait de rendre cette dernière obligatoire. En outre, le dispositif prévu par notre collègue Genevard me semble de nature à alourdir la procédure, mais peut-être pourrez-vous m'éclairer, monsieur le ministre.
Quoi qu'il en soit, je retire mon amendement.
Je ne crois pas que cette rédaction alourdisse la procédure, monsieur Mazars. En outre, il ne me semble pas souhaitable de rendre la formation obligatoire : certaines personnes accueillies par les guichets France Services agriculture (FSA) auront déjà des diplômes, et il s'agit simplement d'identifier d'éventuels besoins spécifiques au moment de l'installation.
L'amendement de Mme Genevard répond bien à notre volonté collective.
Sourires.
L'amendement n° 4396 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il tendait à prévoir un temps d'échange collectif pour les porteurs de projets, mais nous avons adopté hier une disposition y répondant. Je le retire donc.
L'amendement n° 3194 est retiré.
Nous avons effectivement prévu un stage de vingt et une heures pour répondre à cette préoccupation. Avis défavorable.
Nous en avons débattu hier – M. Benoit, en particulier, défendait la liberté de choix. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Cet amendement de M. Schellenberger vise à préciser que les structures intervenant dans le cadre de FSA doivent assurer une formation tout au long de la vie.
L'amendement n° 3512 de M. Romain Baubry est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Même si ce ne sera pas dans le cadre de leur agrément France Services agriculture, toutes les structures de conseil et d'accompagnement assureront évidemment la formation continue auprès de tous les actifs agricoles. Avis défavorable.
Comme vous tous ici, je partage l'idée qu'il est nécessaire d'assurer une formation continue, mais confier la formation des actifs aux structures d'accueil et de conseil agréées par France Services agriculture affecterait la lisibilité de l'offre existante et l'efficacité du système actuel, qui fonctionne bien et auquel les agriculteurs ont volontiers recours. Je rappelle qu'en 2021, 117 000 chefs d'exploitation ont pu se former grâce à Vivea et Ocapiat. Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Sur les amendements n° 124 et identiques, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Sur les amendements n° 3574 et identiques, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de trois amendements identiques, n° 124 , 3740 et 3937 .
La parole est à Mme Anne-Laure Blin, pour soutenir l'amendement n° 124 .
L'alinéa 26… Mais qu'est-ce que vous nous avez fait là ? Alors qu'on ne cesse de vous répéter que les agriculteurs n'en peuvent plus des démarches administratives – ils nous le disent tout le temps –, l'alinéa 26 prévoit une nouvelle attestation qui pourra être exigée par l'autorité administrative. Que vous choisissiez de ripoliner les chambres d'agriculture en les rebaptisant, soit ; ça ne servira pas à grand-chose, mais on a l'habitude de vos opérations de communication – et les agriculteurs aussi, malheureusement. Mais vous ne pouvez pas exiger une nouvelle attestation, qui n'a en plus aucun intérêt !
Sur tous les bancs de l'hémicycle, nous vous l'avons répété : si le dispositif de conseil et d'accompagnement est facultatif, il ne sert à rien de prouver que l'on y a eu recours. Nous discuterons ensuite de la conditionnalité des aides que vous voulez mettre en place. Il est de bon sens de supprimer cet alinéa : il est l'illustration typique de la bureaucratisation à outrance dont ne veulent plus nos agriculteurs.
Le présent amendement vise à empêcher que les aides publiques à l'installation et à la transmission soient refusées aux exploitants qui n'auraient pas souhaité bénéficier du dispositif de conseil et de l'accompagnement prévu aux alinéas précédents. Il est profondément indigne de faire un tel chantage aux aides publiques pour assurer le succès du dispositif que vous voulez adopter, et que vous annoncez à grand bruit comme un outil révolutionnaire à même de faire naître de nouvelles vocations agricoles. Vous rendez obligatoire le recours à des cabinets de conseil pour tout jeune agriculteur qui ne demande qu'à commencer son activité. Nous dénoncerons de toutes nos forces cette manipulation. Alors que le projet de loi est malheureusement incapable de s'attaquer aux véritables problèmes de l'agriculture, ce dispositif d'attestation risque de mettre en difficulté des agriculteurs pour un simple document manquant. Je vous invite donc à accepter nos amendements.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.
Il faut que les débats demeurent constructifs. Nous avons longuement discuté de ce point en commission. Comme l'avait souligné, à juste titre, Mme Batho, dès lors que toute personne accompagnée sera enregistrée dans le répertoire départemental unique, il sera possible d'accéder à une attestation dématérialisée, si besoin est, comme cela se fait pour les avis d'imposition.
Je suis tout à fait favorable à ce que cette attestation ne soit pas obligatoire. Nous examinerons d'ailleurs de nombreux amendements demandant sa suppression.
En revanche, la conditionnalité des aides publiques est la moindre des choses : c'est de l'argent public, dont le Parlement vote l'emploi. Je vous demande donc de retirer votre amendement, au profit de celui que j'ai déposé, qui tend à supprimer l'obligation de présenter une attestation tout en maintenant la conditionnalité des aides. Avis défavorable.
Nous avons en effet eu ce débat en commission. Des amendements identiques, et notamment un amendement déposé par votre rapporteur, visent à répondre à la question de l'attestation. Nous pouvons toujours être caricaturaux…
Je ne m'adresse pas à vous, madame Blin, ne vous sentez pas visée.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Pouvez-vous citer un régime d'aide ou d'exonération qui ne soit pas soumis à certaines conditions ? Nous n'inventons rien. Pour percevoir les aides de la politique agricole commune (PAC), il faut remplir des conditions. Dans toutes les régions de France, vous pouvez réaliser librement votre projet, car la liberté d'entreprendre n'est pas entravée, mais il faut respecter certains critères si vous voulez bénéficier d'une aide, par exemple pour changer vos fenêtres. Lorsque de l'argent public est en jeu, il y a toujours un cahier des charges, c'est le droit commun ; sinon, ce serait des subventions à l'aveugle. Il n'y a pas pour autant d'atteinte à la liberté d'entreprendre, madame Laporte : chacun fait ce qu'il veut, j'en suis le garant. Le versement de l'argent public peut cependant être conditionné. Je vous assure que c'est un principe général qui n'est pas réservé à l'agriculture. Avis défavorable.
Je souhaite m'exprimer car, si les présents amendements sont adoptés, les suivants tomberont et nous ne pourrons plus les défendre. Je m'étais concentré sur la partie de l'alinéa qui exige la remise d'une attestation : cela crée une charge supplémentaire, alors que nous répétons depuis le début que ce texte ne doit pas augmenter les contraintes ou les difficultés qui pèsent sur les agriculteurs – en voici un beau contre-exemple. C'est pourquoi je pensais voter en faveur de la suppression de l'attestation.
Après avoir écouté les arguments de ma collègue Blin, il me semble également contraignant que les aides soient conditionnées au conseil et à l'accompagnement. Certes, tous les appels à projet et tous les dispositifs d'aide s'appuient sur des cahiers des charges auxquels les porteurs de projet doivent se soumettre. Pour autant, faire du recours aux structures de conseil et d'accompagnement de France Services agriculture une condition sine qua non pour bénéficier des aides, alors même que le projet est en soi pertinent et que le porteur de projet est déjà expérimenté, revient à mettre en doute les compétences de ce dernier. La suppression de l'alinéa me semble donc opportune.
Le principal problème de l'alinéa, c'est qu'il est flou. Lorsqu'il désigne « certaines aides publiques accompagnant l'installation ou la transmission », desquelles s'agit-il ? Toutes peuvent être concernées par une telle rédaction. Je répète que le parcours d'installation est vécu comme un parcours du combattant par ceux qui l'ont traversé. Or, vous vous apprêtez à conditionner le bénéfice des aides publiques à un tel parcours. Nous sommes en plein dans la complexité et les contraintes que les agriculteurs ont dénoncées pendant des semaines sur les barrages.
Ce qui est terrifiant avec vous, c'est l'entre-deux que vous tentez d'entretenir. D'un côté, vous prévoyez de créer des structures de conseil et d'accompagnement : les agriculteurs se félicitent que le Gouvernement se montre sympathique et leur offre les moyens d'agir. Vous les rassurez à grand renfort de « c'est facultatif », « ce n'est pas obligatoire », « ils feront ce qu'ils veulent », « ce n'est pas inscrit dans la loi ». Mais, de l'autre côté, très discrètement, vous conditionnez les aides.
Le problème tient à la lecture que vous faites de la situation : les agriculteurs n'ont pas besoin que vous les surchargiez de nouvelles démarches. Je vois bien à vos regards, à vos attitudes, que vous vous moquez de tout ce que l'on peut dire.
Mais nous ne sommes pas là pour adopter un texte de moindre mal, qui ne créera aucune obligation, qui aidera les agriculteurs, ou peut-être pas, peu importe… Non ! Nous sommes là pour répondre à ce qu'ils nous demandent sur le terrain.
C'est caricatural !
Je me rends sur les exploitations à la rencontre des agriculteurs, ils me disent ce qu'ils attendent, et ce n'est certainement pas que je vote cet alinéa. Vous proposez un entre-deux pour ménager certains agriculteurs qui ont votre oreille. Mais ce que les agriculteurs nous demandent véritablement sur le terrain, c'est de changer de paradigme pour les soulager. Ces fameuses mesures de conseil et d'accompagnement doivent donc être crédibles et réalistes. Or, l'exigence d'une attestation conditionnant les aides ne l'est absolument pas.
Pour ma part, je suis toujours favorable au contrôle des aides publiques.
J'en profite pour répondre à M. le ministre que ce contrôle ne s'applique pas toujours : nous pourrions citer des multinationales qui perçoivent des aides publiques alors qu'elles licencient à tout-va – mais ce sont les eaux glacées du capitalisme.
Je trouve ce débat quelque peu paradoxal. Il n'est pas très compliqué de délivrer une attestation, c'est un acte informatique. Cela va même simplifier l'obtention des aides, qui seront soumises à d'autres critères : le parcours d'accompagnement sera un élément facilitateur, qui apportera de la visibilité.
Je n'ai pas la même lecture que vous de cet alinéa, madame Blin. Il est tout à fait normal que l'on conditionne les aides : sinon, à quel titre certaines personnes les percevraient-elles et pas les autres ?
M. Dominique Potier applaudit.
Nous avons en effet eu ce débat en commission des affaires économiques, et nous partageons les interrogations qui ont été exprimées sur l'attestation. Nous avons demandé, sans les obtenir, des précisions sur les modalités de délivrance de cette attestation. Qui les délivrera, et comment ? Et surtout, est-ce que cela créera une charge administrative supplémentaire pour les agriculteurs ? Nous avons déposé un amendement visant à supprimer la première phrase de l'alinéa, qui pose l'exigence d'une attestation.
J'évoque également la conditionnalité des aides, car elle serait également supprimée si le présent amendement venait à être adopté. Nous n'étions pas opposés à cette conditionnalité, qui répond à une demande des Jeunes Agriculteurs (JA). Nous regrettons cependant de ne pas avoir reçu de garantie quant à la gratuité du dispositif de conseil et d'accompagnement et à l'absence de charges supplémentaires.
Nous rejoignons donc une grande partie des interrogations soulevées par nos collègues du groupe Les Républicains – c'était déjà le cas en commission des affaires économiques.
Ce débat est stupéfiant. Jean-Paul Mattei a tout dit : il est normal que ceux qui demandent des aides publiques doivent remplir des conditions. C'est de l'argent public, personne ne nous oblige à le demander ! Le vrai combat est celui des dérégulations sournoises qui minent le monde agricole. Pour le reste, il s'agit du contrat républicain, qui comporte à la fois des droits et des devoirs. Je suis stupéfait que la droite veuille le rompre.
Mme Blin a parlé d'obligation au sujet de l'attestation. Ce débat nous a occupés pendant plus d'une demi-heure en commission. Nous étions unanimement opposés à la délivrance d'une attestation. Dès lors que l'on crée un répertoire départemental unique, comme cela a été fait pour les impôts, l'attestation sera disponible au besoin. Je serai donc favorable à sa suppression, afin de ne pas émettre un papier supplémentaire. J'en ai moi-même fait les frais cette semaine : on m'a demandé mon attestation papier d'affiliation à la sécurité sociale, car elle a changé depuis que je suis devenu député – c'est fou, au XXI
En revanche, comme l'ont rappelé MM. Potier, Chassaigne et Mattei, si les gestionnaires des aides disposent, à portée de main, de l'attestation dans le système informatique, conditionner leur versement à celle-ci contribuera à la simplification et à la lisibilité des parcours d'installation ; cela pourra également favoriser l'accès aux aides publiques, en réduisant les formalités administratives à accomplir.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 54
Majorité absolue 28
Pour l'adoption 20
Contre 34
Je suis saisie de plusieurs amendements, n° 3574 , 4521 , 4661 , 4703 , 4720 , 3074 et 4111 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 3574 , 4521 , 4661 , 4703 et 4720 sont identiques, de même que les amendements n° 3074 et 4111 .
La parole est à M. Julien Dive, pour soutenir l'amendement n° 3574 .
Je voudrais tordre le cou aux propos tenus sur les bancs des groupes GDR et Dem, selon lesquels nous serions prêts à verser des aides publiques sans les contrôler. Ma collègue Blin n'a jamais dit ça.
Il s'agissait seulement d'éviter de créer de nouvelles contraintes. J'ai d'ailleurs dit qu'il était normal qu'un porteur de projet qui demande des aides doive répondre à un cahier des charges, prévoyant notamment des contrôles. Je souhaitais seulement que cela ne figure pas dans la loi, pour ne pas l'alourdir.
Cela dit, nous tomberons peut-être d'accord sur le fait que l'attestation en elle-même est une réelle charge. En réponse aux propos tenus sur plusieurs bancs, y compris ceux de la majorité, en commission comme en séance, le présent amendement vise à supprimer la mention de l'attestation.
La parole est à M. Nicolas Pacquot, pour soutenir l'amendement n° 4521 .
Le présent amendement vise à supprimer l'obligation, pour les agriculteurs, de présenter aux autorités administratives l'attestation de recours aux structures de conseil et d'accompagnement de FSA. D'une part, cette précision ne semble pas relever du domaine de la loi, mais du règlement. D'autre part, cette obligation particulière à la charge des agriculteurs n'est en adéquation ni avec la politique de dématérialisation des procédures ni avec l'objectif de simplification administratif défendu par le titre IV du texte.
Le candidat à l'installation qui s'oriente vers France Services agriculture est enregistré dans le répertoire unique départemental et est donc connu de l'autorité administrative. Par conséquent, comme cela a été dit par le rapporteur et plusieurs collègues, il n'y a pas lieu d'exiger une attestation écrite. Cet amendement de mon collègue Luc Lamirault vise donc à simplifier le processus.
La parole est à M. Pascal Lecamp, rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 4720 .
Nous en venons à la deuxième série d'amendements identiques, les n° 3074 et 4111.
La parole est à Mme Catherine Couturier, pour soutenir l'amendement n° 3074 .
Nous avons déjà consacré plusieurs heures à discuter de l'article 10, et force est de constater que la création du réseau France Services agriculture s'apparente à une usine à gaz. Franchement, je ne sais pas si les agriculteurs qui sont candidats à l'installation et qui écoutent nos débats s'y retrouveront, alors que ces dispositions entreront en vigueur au 1er
Cet amendement vise à supprimer l'obligation de présenter une attestation. Dans la mesure où l'objectif du texte est d'aider à l'installation, prévoir un accompagnement ne pose bien sûr pas de problème ; mais rendre l'attestation obligatoire, si ! D'autres amendements de suppression ont été déposés ; toutefois, si celui-ci était adopté, nous irions dans le bon sens afin de simplifier les choses.
L'amendement n° 4111 de M. Grégoire de Fournas est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Avis favorable à la première série d'amendements identiques et défavorable aux suivants.
Avis favorable également à l'amendement du rapporteur et aux amendements identiques. Dès lors que l'administration dispose de l'attestation, il n'est pas utile de la réclamer de nouveau. C'est donc faire œuvre de simplification, et c'est utile pour tout le monde. Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire mène d'ailleurs actuellement, en réaction à la crise agricole, un travail de simplification : ne demandons pas aux agriculteurs des informations dont l'administration dispose déjà – sous réserve, bien sûr, de développer la capacité à échanger les données.
Je me réjouis que nos débats en commission des affaires économiques vous aient convaincus de la nécessité de supprimer cette demande d'attestation – tant mieux !
Cependant, la deuxième phrase de l'alinéa restant inchangée, je souhaite appeler l'attention sur le conditionnement des aides à l'installation – conditionnement que nous avons plutôt défendu – au fait de s'inscrire dans un parcours de conseil et d'accompagnement. En effet, actuellement, un tiers seulement de ceux qui s'installent perçoivent des aides à l'installation : c'est trop peu. Par ailleurs, 30 % des installations s'opèrent hors du cadre familial, dans des projets alternatifs d'agroécologie, à forte valeur ajoutée, ou en circuit court, etc. Puisque nous ne débattrons malheureusement pas du plan stratégique national (PSN) dans l'hémicycle, veillons, compte tenu de ce conditionnement supplémentaire, à une pluralité des aides à l'installation – nous devrons y travailler. Nous savons tous que ces aides aux jeunes agriculteurs sont décisives, afin que leur projet soit viable.
L'amendement de M. Dive est, à mes yeux, un amendement de repli et je le soutiens. Toutefois, le maintien de la deuxième phrase de l'alinéa appelle des observations et une demande de précisions. Quels critères retiendrez-vous pour conditionner ces aides ? Cela en raison de ce que j'avais dit en commission et que j'ai rappelé dans l'hémicycle : ça gronde dans les campagnes. La manière d'ailleurs un peu hautaine avec laquelle vous m'avez répondu a choqué et scandalisé les agriculteurs.
Je suis hautain, moi ?
Les aides à l'agriculture biologique accordées dans le cadre de la PAC ne sont pas versées dans les campagnes ! Nous avons d'ailleurs renforcé hier la visibilité sur ce que vous entendiez par bio. Par conséquent, appliquez-vous déjà cet alinéa, par anticipation ? La réalité, c'est que beaucoup d'agriculteurs sont dans l'attente des versements – vous allez me répondre qu'il a fallu préciser les choses, que cela a pris du temps et qu'il y avait un manque de moyens techniques. Toutefois, connaissez-vous un citoyen français qui ne soit pas sanctionné lorsqu'il ne déclare pas ses impôts sur le revenu ? Non ! Ses impôts sont immédiatement majorés. Par conséquent, l'État envisage-t-il la majoration des aides de la PAC qui n'auront pas été versées dans les temps, contrairement à ce qui avait été promis ?
Le groupe Renaissance soutiendra bien sûr les amendements identiques de simplification. Je souhaite néanmoins réagir aux propos de notre collègue Catherine Couturier qui a évoqué, en parlant de FSA, une usine à gaz ! Sincèrement, compte tenu de ce que vous exigez des agriculteurs, dans les articles suivants, en matière de normes ou de conditions, je saurai me souvenir de ce que vous venez de dire !
Oui, c'est vrai !
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 64
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 63
Contre 0
L'amendement n° 1654 est retiré.
L'amendement n° 3104 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement de mon collègue Lionel Vuibert. Conditionner l'accès à certaines aides publiques à un accompagnement préalable risque d'exclure certains porteurs de projet, notamment ceux qui n'ont pas besoin ou ne souhaitent pas un tel accompagnement. Or il est important de garantir l'égalité d'accès aux aides, quelle que soit la situation du porteur de projet.
L'amendement n° 4324 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 2529 de M. Pascal Lecamp, rapporteur, est rédactionnel.
L'amendement n° 2529 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il vise à renforcer le cadre législatif applicable aux dispositifs de suivi de l'application de la politique d'installation et de transmission, dont les chambres d'agriculture ont la charge. En effet, ce suivi est actuellement mal documenté, tant au niveau national, pour lequel Chambres d'agriculture France ne publie que peu d'éléments, qu'au niveau local, où il existe de fortes disparités quant aux éléments disponibles.
Il est néanmoins établi qu'une proportion importante de candidats à l'installation abandonnent en cours de route : c'est le cas d'un tiers, en moyenne, des personnes qui se présentent au point accueil installation (PAI) chaque année. Un suivi fin et précis est d'autant plus important que l'instauration du point d'accueil départemental unique et du réseau France Services agriculture modifiera en profondeur le parcours à l'installation.
C'est pourquoi nous proposons que Chambres d'agriculture France, ainsi que les chambres départementales et régionales d'agriculture, publient, annuellement, un bilan des actions menées à leur échelon et dans le cadre de leurs missions. Ces bilans seraient construits sur la base d'indicateurs standardisés définis par décret, après avis de l'instance nationale associée à la gouvernance de la politique d'installation et de transmission en agriculture, afin d'en faciliter le suivi.
Vous aviez rejeté cet amendement en commission, considérant que les rapports existaient. Nous vous avions demandé de nous fournir les données avant la séance. Peut-être pourrez-vous nous préciser ce qu'il en est, tant au plan local que national ? Il est de notre intérêt de disposer de bilans annuels si nous voulons que la loi dont nous débattons aujourd'hui soit effective et véritablement appliquée sur le terrain.
Nous n'avons pas dit que les rapports existaient, mais que la loi prévoyait qu'ils existent !
L'Observatoire national de l'installation et de la transmission (Onit) n'a peut-être pas fait l'ensemble du travail prévu par la loi, c'est vrai. Toutefois, la création du guichet unique France Services agriculture au sein des chambres d'agriculture, qui sont chargées de récupérer auprès de l'Onit les différents rapports, permettra sans doute, avec le répertoire unique, de rendre la loi effective. N'ajoutons pas une couche supplémentaire, alors qu'il est question de simplification !
Nous pouvons espérer que le répertoire unique permettra d'établir ce rapport annuel.
C'est prévu par la loi ! Vous voulez faire une loi pour dire que la loi s'applique ? Notre rôle, en tant que parlementaires, c'est de faire en sorte que l'exécutif applique la loi. Avis défavorable.
Nous avons déjà eu ce débat en commission. Je me tiens à votre disposition, madame Pochon, pour vous présenter le rapport annuel. France Services agriculture nous permettra de collecter des éléments qui renforceront ce bilan, prévu par la législation en vigueur.
Si ! Avis défavorable sur cet amendement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 58
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l'adoption 16
Contre 32
L'amendement n° 3835 n'est pas adopté.
Il vise à rétablir la version initiale de l'article 10, qui a été modifiée en commission pour donner la possibilité de déléguer la gestion du point d'accueil à une autre structure que France Services agriculture. En effet, compte tenu de ce qui a été évoqué hier, y compris sur la nécessité de garantir une unité d'action, il nous semble préférable de revenir à la version initiale du texte et de supprimer cette possibilité. Le guichet unique, au niveau départemental, garantira davantage un traitement commun et des conditions équivalentes d'un département à un autre. Tel est l'objectif du présent amendement.
Je suis heureuse de constater que le Gouvernement a déposé exactement le même amendement que moi. Serait-ce pour éviter de donner un avis favorable au mien ?
Mais non !
Je ne le défendrai donc pas, puisque le ministre l'a fait brillamment. Permettez-moi néanmoins de revenir sur l'amendement précédent. Que ferez-vous pour garantir l'application de la loi et faire en sorte que nous disposions des données nécessaires concernant les politiques d'installation et leur efficacité ?
Par ailleurs, je note des propos contradictoires entre ceux du rapporteur et ceux du ministre. M. le rapporteur reconnaît qu'on a du mal à obtenir des données en matière de politique d'installation, alors que M. le ministre affirme que nous en disposons déjà. Il faudrait peut-être accorder vos violons !
Je serai sympathique d'abord avec le ministre : pour les raisons qu'il vient d'évoquer, j'émets un avis favorable à l'amendement du Gouvernement.
Sourires sur plusieurs bancs.
J'avais, évidemment, prévu de donner le même avis sur votre amendement, madame Pochon ! Il y va de la lisibilité et de la cohérence du dispositif.
Je vous fais part de ce que je ressens : les remontées de données à l'Onit sont hétérogènes. Nous espérons qu'en centralisant dans un répertoire unique dans toutes les chambres d'agriculture de France les données relatives aux installations, l'Onit disposera, en complément des données de l'agence de services et de paiements (ASP) et de la Mutualité sociale agricole (MSA), d'une source plus fiable, ce qui lui permettra de mieux appliquer la loi en étant plus précis dans son rapport. J'émettrai un avis favorable aux amendements de M. le ministre et de Mme Pochon.
Un amendement ayant été adopté en commission contre l'avis du Gouvernement, notre amendement rétablit le texte initial. J'émettrai un avis favorable à l'amendement de Mme Pochon puisqu'il s'agit d'amendements identiques.
Je souhaiterais une précision, monsieur le ministre, sur les personnels de ces points d'accueil. Seront-ils issus du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire ou seront-ils placés sous la responsabilité des chambres d'agriculture ?
Plus précisément, seront-ils salariés par les chambres ou par le ministère de l'agriculture ?
C'est à désespérer ! Nous vous l'avons déjà expliqué en commission et en séance publique, hier : il s'agit d'une porte d'entrée, d'un guichet unique adossé aux chambres d'agriculture, dont je rappelle qu'elles sont des établissements publics – je ne vois pas bien quelle différence cela pourrait faire. Derrière, se trouveront des salariés de structures de conseil et d'accompagnement – Terre de liens, les chambres d'agriculture. Par définition, France Services agriculture est un point d'accueil unique dans lequel différentes structures répondront aux besoins d'accompagnement et de formation des porteurs de projets.
Cet amendement prévoit l'organisation de temps collectifs à destination des porteurs de projets, dont nous avons suffisamment parlé hier. Je le retire.
L'amendement n° 673 est retiré.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 949 .
Même si nous avons déjà débattu des compétences, des moyens d'intervention et du périmètre des guichets uniques lors de l'examen de plusieurs amendements, je tenais à défendre cet amendement déposé par Mme Karine Lebon, députée de La Réunion. Je précise à l'attention de M. le rapporteur que le mot « collectif » dans l'expression « temps collectifs » ne s'écrit pas avec un k comme dans kolkhoze – il renvoie à la synergie entre des personnes qui veulent s'installer.
Sourires.
L'amendement n° 949 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 4175 de Mme Marie Pochon est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
J'émettrai un avis favorable à l'amendement de Mme Pochon relatif à la neutralité dans l'accompagnement. Il ne peut en être autrement.
Nous avons adopté hier un amendement au contenu semblable, monsieur le rapporteur. Je veux bien que nous mentionnions la neutralité à chaque alinéa, comme pour Agribio et pour le reste, mais, je vous préviens, cela finira par se voir – c'est déjà précisé trois paragraphes plus haut. Je maintiens : avis défavorable.
L'amendement n° 4175 est adopté.
Mme Marie Pochon applaudit.
L'amendement n° 2530 de M. Pascal Lecamp, rapporteur, est un amendement de coordination.
L'amendement n° 2530 , accepté par le Gouvernement, est adopté
Il est proposé que les instances nationales et régionales associées à l'application de cette politique soient chargées d'en produire une évaluation annuelle. Cela est d'autant plus important que la mise en place du point d'accueil départemental unique et du réseau France Services agriculture modifieront en profondeur le parcours d'installation.
Votre amendement vise à supprimer l'Onit, dont nous avons déjà beaucoup parlé. Avis défavorable.
Avis défavorable.
Nous soutenons évidemment cet amendement qui est tout à fait pertinent. Ma question, qui est en lien avec celle que mes collègues ont posée tout à l'heure, est la suivante : qui finance les moyens humains supplémentaires de ce point service ? J'ai suivi tout l'examen du texte en commission des affaires économiques et nous n'avons pas vraiment obtenu de réponse à cette question. Des moyens supplémentaires sont-ils prévus pour les chambres d'agriculture et pour les structures de conseil et d'accompagnement comme la Fédération des associations pour le développement de l'emploi agricole et rural (Fadear) ? Quels sont les moyens publics supplémentaires prévus ? Vous engagez-vous à inclure dans le prochain projet de loi de finances une ligne budgétaire spécifique prévoyant des moyens supplémentaires adéquats ? Les moyens des chambres d'agriculture ne sont pas extensibles à souhait – il en est de même pour les Fadear et les Centres d'initiative pour valoriser l'agriculture et le milieu rural (Civam).
L'amendement n° 4159 n'est pas adopté.
Sur l'amendement n° 3834 , je suis saisie par le groupe Écologiste – NUPES d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 1463 et 1899 .
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement n° 1463 .
Cet amendement déposé par ma collègue Isabelle Périgault vise à préciser que les chambres d'agriculture assurent la promotion du dispositif France Services agriculture. Vous nous avez répondu sur ce point, monsieur le ministre, mais l'amendement vise aussi à inclure la promotion du dispositif dans les missions de service public de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture grâce à une modification de l'article L. 513-1 du code rural et de la pêche maritime.
L'amendement n° 1899 de M. Nicolas Forissier est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Les chambres d'agriculture seront les ambassadeurs de France Services agriculture. Nous leur demandons d'en être la vitrine – cela fera partie de leurs missions de service public, je le répète. Avis défavorable.
Madame Trouvé, concernant les moyens, je le répète, il est prévu, lors du projet de loi de finances pour 2025, de porter le budget du dispositif de 20 à 27 millions d'euros afin de le rendre plus crédible. Cela offrira une meilleure visibilité aux structures de conseil et d'accompagnement. Ces montants augmenteront par la suite en fonction des demandes et de la trajectoire du dispositif.
Quant aux amendements, j'y suis défavorable.
Défendre un projet de loi relatif à l'installation, c'est bien, pouvoir en mesurer l'efficacité et l'améliorer, c'est mieux. Cet amendement vise à concrétiser la mission de l'Observatoire national de l'installation et de la transmission, en prévoyant qu'il renseigne des indicateurs de suivi et en publie une synthèse annuelle.
Nous avons inscrit à l'article 8 un objectif chiffré en matière de nombre d'exploitations – c'est le minimum syndical. Nous devons y associer un suivi fin des dynamiques d'installation pour nous donner les moyens de l'atteindre. Je le répète, un tiers des candidats à l'installation qui se présentent aux points d'accueil installation abandonnent leur projet. Nous devons mieux comprendre pourquoi. Nous avons beau jeu de parler d'attractivité des métiers agricoles : si nous ne parvenons pas à installer celles et ceux qui sont déjà intéressés et volontaires, nous allons juste remplir un seau qui fuit.
Monsieur le rapporteur, lors de l'examen de l'amendement précédent, vous avez répondu que vous n'aviez pas dit que de tels rapports existaient, mais que le projet de loi les prévoyait. J'ai l'impression que vous vous satisfaites de l'absence de données et de connaissances sur l'efficacité des politiques d'installation en France. Je vous alerte car c'est important : nous légiférons afin de créer un nouveau dispositif – un guichet unique qui accompagnera les politiques d'installation. Des objectifs chiffrés – plus ou moins ambitieux – figurent dans le projet de loi et c'est une bonne chose. Nous avons besoin d'y associer des moyens et une évaluation de l'efficacité de la politique – des bilans annuels. Disposer de données sur l'efficacité des politiques publiques me semble être un minimum.
Tout d'abord, madame Pochon, j'ai affirmé que les rapports n'étaient pas à la hauteur de nos espérances – des départements nous ont remonté cette information. En dépit de la loi, de l'existence de l'Onit et de recensements, des données fournies par l'ASP et la MSA, cela fonctionne mal. Nous espérons, en créant une nouvelle structure qui centralisera les informations, disposer de données plus fiables. Votre amendement prévoit que de nouveaux indicateurs de suivi seraient renseignés par une nouvelle instance nationale de pilotage de la politique d'installation et de transmission.
Vous ajoutez une nouvelle strate de contrôle – nous sommes très loin de l'objectif de simplification. J'espère – en tant que législateur – que, grâce à France Services agriculture, qui sera un lieu de convergence des entrants et des sortants des exploitations agricoles françaises, nous serons enfin capables de sortir à un instant T des chiffres sur le nombre d'installations et de transmissions tous les mois ou tous les six mois, sans que cela suppose nécessairement des rapports – ce chiffre sera présent naturellement dans les systèmes informatiques, si les renseignements transmis sont les bons. Nous partageons vos objectifs, mais nous considérons que des indicateurs de suivi et une instance supplémentaires ne sont pas nécessaires pour assurer ce suivi. Avis défavorable.
Madame Pochon, si vous voulez me faire dire que les données dont nous disposons depuis vingt-cinq ans sont imparfaites, je ne peux que vous répondre que c'est le cas.
Cela tient notamment au fait qu'elles sont collectées de façon éparse. Toutefois, grâce au réseau France Services agricultures, nous disposerons d'informations quantitatives et qualitatives complémentaires. Point n'est besoin, comme vous le proposez, de créer une structure. Celles qui existent suffisent, simplement elles devront fournir de meilleurs éléments relatifs à l'installation. Avis défavorable.
L'amendement de Marie Pochon me semble bien dimensionné. Si créer une nouvelle structure pose problème, un sous-amendement suffirait à transformer l'observatoire en mission. Ce qui importe, c'est d'assurer la fonction de veille. Comme je soulignais hier, lors d'un échange avec Jean-Paul Mattei, les données existent mais elles ne sont pas consolidées. Il y a aujourd'hui 500 000 agriculteurs et si nous voulons qu'il y en ait 500 000 demain, il faut pouvoir suivre les évolutions : 4 millions d'hectares sur les 10 millions d'hectares exploités seront mis sur le marché dans les deux ans qui viennent. Nous aurons totalement échoué si, dans cinq ans, nous constatons que nous nous orientons plutôt vers une trajectoire de 200 000 paysans.
Grâce à la consolidation des données fournies par la Mutualité sociale agricole, les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer), les commissions départementales d'orientation de l'agriculture (CDOA) et les répertoires, un pilotage annuel fin nous mettrait en mesure de corriger les défauts constatés et d'ajuster les politiques. Le risque est sinon que, dans dix ans, se produise le désastre annoncé.
Nous avons besoin d'assurer une veille, fonction qui ne doit pas forcément être remplie par l'observatoire proposé dans l'amendement. Nous pouvons retenir une autre solution dans un sous-amendement, du Gouvernement ou de n'importe quel groupe parlementaire, dès lors que nous nous accordons sur la nécessité de disposer de données consolidées.
Mon intervention portera non sur l'amendement de notre collègue, que nous soutenons pour les raisons qui viennent d'être avancées, mais sur le budget dévolu aux points d'accueil sur lequel je poursuis mes questions. Si j'ai bien compris, monsieur le ministre, 7 millions d'euros supplémentaires seraient prévus dans le projet de loi de finances pour 2025. Je doute fortement que cela soit suffisant pour financer les moyens humains et matériels du guichet unique, ainsi que toute l'offre de services de conseil et d'accompagnement.
Deuxièmement, j'aimerais savoir si les agriculteurs souhaitant s'installer devront payer pour bénéficier de ces nouveaux services. Si oui, leur prix a-t-il déjà été évalué ?
J'appelle l'attention sur le fait qu'un nombre important d'agriculteurs passent sous les radars. En France, 14 % des agriculteurs sont cotisants solidaires, statut qui ne leur ouvre pas de droits à la retraite. Il existe un vide car je ne pense pas que tous soient recensés par la MSA.
Nous n'avons aucune visibilité non plus sur les conjointes et les conjoints d'exploitants qui ne sont pas considérés comme des conjoints collaborateurs. Il s'agit d'ailleurs d'un problème que nous avions évoqué lors de l'examen des lois sur les retraites agricoles.
Ce phénomène risque d'être amplifié par les nouvelles formes d'exploitation, Mme Trouvé l'a évoqué avec des mots différents. Des personnes s'installent en effet en dehors de tout système or, en France, contrairement à d'autres pays de l'Union européenne comme la Pologne, nous n'avons jamais eu de définition de la petite ferme.
Je maintiens ma position sur l'amendement. Madame Trouvé, je vous confirme publiquement qu'il n'y aura pas de charges nouvelles pour les agriculteurs, le cadre sera le même que celui qui prévaut actuellement. En matière budgétaire, nous sommes sur une trajectoire de montée en puissance : l'objectif est bien de passer de 20 millions à 27 millions. L'élément nouveau, c'est que nous accueillerons davantage d'agriculteurs, lesquels seront redirigés vers différentes structures ; cette ventilation sera soutenue par les 7 millions supplémentaires.
Par ailleurs, il ne vous aura pas échappé que, dans le budget pour 2024, les chambres d'agriculture, contrairement aux deux autres catégories de chambres consulaires, bénéficient de crédits supplémentaires, d'un montant de 22 millions d'euros, ce qui, sans mauvais jeu de mots, n'est pas une paille même si, bien sûr, ils ne seront pas entièrement consacrés au guichet unique.
Je le répète, la personne qui se rendra au point d'accueil bénéficiera d'une gratuité des services. Le but est de faire converger les porteurs de projet vers cette structure afin qu'ils bénéficient d'un accompagnement pluraliste, dimension que vous avez tenu à inscrire dans le texte.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 70
Nombre de suffrages exprimés 67
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 18
Contre 49
L'amendement n° 3834 n'est pas adopté.
Les amendements identiques n° 84 de M. Julien Dive, 582 de M. Vincent Descoeur, 2313 de M. Dominique Potier et 4024 de M. David Taupiac sont défendus.
Sur l'article 10, je suis saisie par les groupes Renaissance et Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Les amendements identiques n° 1176 de M. Joël Giraud, 2314 de M. Dominique Potier, 2533 de M. Pascal Lecamp, rapporteur, 3177 de M. Raphaël Schellenberger et 4025 de M. David Taupiac sont défendus.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 49
Majorité absolue 25
Pour l'adoption 36
Contre 13
L'article 10, amendé, est adopté.
Sur l'amendement n° 2325 , je suis saisie par les groupes Socialistes et apparentés et Renaissance d'une demande de scrutin public ; sur l'amendement n° 2320 , je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l'article 10.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir les amendements n° 2325 , 2324 et 2327 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
L'amendement n° 2325 fait l'objet d'un sous-amendement n° 5584 .
Ces amendements sont inspirés de l'initiative de notre collègue Charles Fournier qui, en commission des affaires économiques, a introduit l'idée d'un plafonnement des surfaces pour servir à une politique de contrôle des structures. Nous proposons d'instaurer un seuil de superficie au-delà duquel les exploitants devraient revendre les hectares excédentaires. Sans doute faudrait-il aussi comme d'autres pays limiter le versement des aides de la PAC, à travers le PSN, et des aides nationales, dès lors que ce plafond est dépassé.
Les amendements proposent diverses manières de calculer ce seuil : les n° 2325 et 2324 en le fixant à 1,5 fois la surface agricole utile (SAU) pondérée à partir des données du Sdrea, l'amendement n° 2327 en le renvoyant à un décret afin de laisser au ministère de l'agriculture le soin de moduler selon la pression foncière observée à l'échelon de chaque région.
Je le dis avec force, en matière foncière, si nous ne mettons pas en place des mécanismes de régulation puissants pour contrer les dérégulations actuelles, qu'elles prennent la forme du travail délégué, du démembrement de propriété ou du phénomène sociétaire que la loi du 23 décembre 2021 portant mesures d'urgence pour assurer la régulation de l'accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires, dite loi Sempastous, n'est pas parvenue à contrôler, tout ce que nous faisons ici ne fera que relever d'un aimable bavardage.
Nous assistons en effet à un accaparement des terres à travers l'agrandissement des exploitations et la compétition joue nettement en faveur de ceux qui ont les moyens de la soutenir. Border par le haut, en établissant un seuil laissant la souplesse nécessaire au développement de différents écosystèmes, constitue un levier efficace.
Depuis le début de nos discussions, si nous mettons à part l'amendement que nous avons défendu pour mieux dissocier nue-propriété et usufruit, aucune disposition n'est venue remettre en cause la dynamique actuelle, que les préfets et les responsables de directions départementales des territoires (DDT) et donc le ministre de l'agriculture ne peuvent ignorer. Nous nous sommes jusqu'à présent contentés de déclarations.
Il ne nous reste plus que ces quelques amendements sur la quinzaine que nous avions déposés au sujet des mécanismes de limitation, beaucoup ayant été déclarés irrecevables, et je vous remercie, madame la présidente, de m'avoir laissé le temps de les défendre.
Je remercie Dominique Potier pour la constance dont il fait preuve dans sa volonté de réguler le foncier. Mon sous-amendement vise à inclure les personnes morales pour éviter tout effet d'aubaine et tout contournement par les structures sociétaires.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements en présentation groupée et sur ce sous-amendement ?
Monsieur Potier, je comprends votre embarras concernant la fixation du seuil de surface agricole utile pondérée régionale pouvant être contrôlée par une même personne. Vous proposez plusieurs solutions pour border par le haut, selon vos termes : un savant calcul, un décret. La notion de contrôle à l'œuvre dans vos amendements reste toutefois floue et, si nous sommes tous favorables à une meilleure régulation des concentrations et des extensions, je ne vois pas comment parvenir à une solution efficace avec les différentes stratégies de calcul que vous proposez.
Avis défavorable sur les amendements et le sous-amendement.
Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement et les amendements ?
Vos amendements visent à redéfinir à l'échelle nationale les seuils d'agrandissement excessifs des structures définis par les Sdrea, ainsi qu'à ramener ces seuils à la personne physique. Votre proposition est incohérente car elle évoque un plafond national calculé sur la base d'une SAU régionale par actif non salarié. Comme votre rapporteur, je ne comprends donc pas comment le dispositif pourrait fonctionner.
De plus, vous proposez d'exempter de cette mesure des personnes physiques ou des sociétés, sur la base d'engagements – concernant notamment le prix de revente ou la mise en fermage –, c'est-à-dire de promesses à l'horizon de trente ou parfois quarante ans, que vous et moi serions bien en peine de contrôler.
C'est pourquoi il me semblerait plus pertinent de mieux faire fonctionner les dispositifs existants que d'inventer – le terme n'est pas péjoratif – un mécanisme tout à fait inefficace, créé à l'échelle nationale au mépris de la diversité régionale et mâtiné d'exemptions que personne, ni dans cette assemblée ni ailleurs, ne pourrait contrôler. Avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
Monsieur le ministre, vous invoquez des arguments techniques à propos d'un sujet éminemment politique. Nous avons déposé trois amendements, car réécrire la partie du code rural et de la pêche maritime relative à cette question majeure suppose de l'humilité et nécessite la participation et l'expertise des services de l'État, ainsi qu'un dialogue que, malgré notre insistance, nous n'avons pas réussi à nouer avec le ministère de l'agriculture, pas seulement depuis que vous êtes en fonction, mais depuis plus longtemps.
À force de repousser la réforme des plafonnements et de l'action coordonnée des CDOA et des Safer, visant à la rendre transparente et plus efficace, certaines évolutions nous échappent totalement. Face à une question politique majeure, vous arguez d'imprécisions techniques ou juridiques relatives à l'articulation entre les échelons national, régional et départemental. Avouez simplement que vous n'avez pas traité ce sujet, qui devrait pourtant nous préoccuper à lui seul, car se dessine sous nos yeux une France à 200 000 voire 150 000 exploitants. Or, ce n'est pas l'objectif que nous nous fixons, c'est pourquoi je dénonce une forme d'hypocrisie – le mot n'est pas trop fort, me semble-t-il.
Faire semblant, c'est parfois pire que de ne rien faire. S'agissant du plafonnement de la surface des exploitations, de la transparence et de l'action régulatrice de la puissance publique, nous sommes devant des défis majeurs. Nous proposons trois variantes que vous pouvez à votre guise, monsieur le ministre, remplacer par une quatrième. Il est encore temps, dans la discussion de ce projet de loi, d'aller à l'essentiel et de cesser de bavarder.
Je remercie le collègue Potier de s'être inspiré de nos propositions et de les avoir complétées et améliorées. Monsieur le ministre, vous dites qu'il vaudrait mieux faire fonctionner les dispositifs et outils existants, mais ceux-ci ne permettent pas de traiter tous les cas et ils sont inefficaces. La loi Sempastous est déjà dépassée par certaines évolutions. Dans ma circonscription, il y a deux ou trois ans, lors de la transmission d'une exploitation de 2 200 hectares et de sa reprise par un montage sociétaire constitué d'une holding et de nombreuses filiales, seuls 40 hectares ont été réservés à l'installation : c'est insuffisant !
Il convient donc de trouver les moyens de limiter la concentration des terres, afin de permettre à des jeunes de s'installer, en réduisant s'il le faut les surfaces des exploitations existantes. Nous regrettons une nouvelle fois que la question absolument centrale du foncier ne soit pas davantage abordée par ce projet de loi, à l'exception d'une proposition initiale qui allait plutôt dans le sens de la concentration des terres. C'est pourquoi nous soutenons toutes les propositions du collègue Potier et nous vous invitons à faire des propositions, vous aussi, plus acceptables peut-être sur le plan légistique. Il nous faut absolument prendre ce problème à bras-le-corps et réagir. Nous sommes là pour cela.
Pour participer à nos débats et contribuer à l'adoption de ces amendements, je fais remarquer à M. le ministre qu'il peut, s'il le souhaite, remplacer le terme « national » par « régional », puisque c'est le point qui, visiblement, le fait tiquer. Nous pourrons ainsi voter largement en faveur de cet amendement extrêmement utile.
Nous pouvons regretter que ce texte ne traite pas tous les problèmes relatifs au foncier, mais on peut encore moins les traiter dans le cadre d'un amendement. Le contrôle des structures ou la réglementation des cumuls d'exploitations agricoles ne fonctionne pas de manière satisfaisante. J'avais déjà souligné les manques de la loi de notre collègue Sempastous lors de son adoption. Son application a montré qu'il fallait l'améliorer, en adoptant une approche globale des sujets fonciers. Il faut veiller au respect du droit constitutionnel de propriété tout en maintenant des équilibres auxquels je souscris, mais il ne me semble pas raisonnable de traiter un problème global en discutant d'un amendement.
Même s'il faut mieux les appliquer et les contrôler, les règles relatives à l'agrandissement des exploitations existent : il n'y a pas de non-droit en la matière. La problématique du foncier en matière agricole mérite donc une réflexion beaucoup plus globale.
Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 62
Nombre de suffrages exprimés 49
Majorité absolue 25
Pour l'adoption 17
Contre 32
Le sous-amendement n° 5584 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 63
Nombre de suffrages exprimés 61
Majorité absolue 31
Pour l'adoption 18
Contre 43
L'amendement n° 2325 n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 2322 .
Il vise à conditionner la bonification de l'aide à l'installation à l'application de systèmes de production agroécologiques – je n'ai pas dit bio pour me montrer inclusif –, qui répondent à la triple performance économique, sociale et environnementale, dans l'esprit de la loi du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, dite loi Le Foll. Le système de bonifications, trop large, doit privilégier certaines formes d'agriculture. Vous vous apprêtez peut-être, sur le plan fiscal, à faire un cadeau aux plus privilégiés du monde agricole. Au contraire, je vous demande de soutenir massivement, par la voie budgétaire, les Nima – non-issus du milieu agricole – qui, sans être enfants d'agriculteurs, entrent dans le métier et mènent des projets agroécologiques. L'aide à l'installation est un levier puissant pour ceux qui n'ont pas de capital et à qui la République doit offrir les chances d'entreprendre.
Vous souhaitez que l'aide à l'installation ne soit bonifiée ou modulée que pour favoriser les systèmes de production agroécologiques. Ce sont les termes exacts de votre amendement. Le code rural et de la pêche maritime prévoit déjà que les candidats à l'aide à l'installation élaborent un projet global d'installation qui intègre les aspects économiques et environnementaux. Son article L. 330-1 prévoit que les autorités de gestion régionales fixent le cadre réglementaire applicable à ces aides, dans le respect du plan stratégique national. Votre amendement empiète donc sur les compétences régionales. Avis défavorable.
Il s'agit d'une question de répartition des compétences. Les régions ne partagent pas les mêmes dispositifs de soutien, et je ne suis pas sûr que le dispositif que vous proposez, plutôt que de favoriser une politique agricole nationale commune, ne crée pas des inégalités supplémentaires. Vous étiez présent lorsque nous avons débattu des joies et des vices de la décentralisation – si vous me permettez l'expression.
Par ailleurs, votre proposition introduit une coercition extrêmement forte. Je ne comprends pas le lien que vous introduisez entre la politique d'installation et la politique fiscale. J'ai dit hier qu'il n'était pas question d'introduire un tel lien s'agissant du foncier et de la transmission. Je vous donne raison sur ce point.
Notre seul objectif est de favoriser l'installation de nouveaux exploitants. Or, votre proposition ne favorise ni l'installation ni le renouvellement des générations, mais introduit des critères pour privilégier des systèmes de production particuliers. Je pense que ce n'est pas la solution mais qu'il faut au contraire, par l'intermédiaire de France Services agriculture, accompagner chacun dans l'accès à l'aide à l'installation. Plus de 40 % des nouveaux agriculteurs n'accèdent pas à la dotation jeunes agriculteurs : nous devons remédier à cette situation, et non ajouter un critère supplémentaire relatif à la pratique de production, ce qui créerait une distorsion générale et une forte illisibilité du système d'aide. Avis défavorable.
Je rejoins les propos du ministre sur les risques de distorsion de concurrence. Ainsi, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) a rendu il y a quelques jours un avis positif sur l'acétamipride pourtant interdite en France. Que fait-on de cette distorsion de concurrence au sein du marché unique ? C'est une question importante.
Par ailleurs, nous trouvons séduisant le principe de régulation foncière proposé par notre collègue Potier dans ses amendements précédents, afin de conserver des exploitations à taille humaine. Cependant, le Parti socialiste, il me semble, a défendu l'entrée dans le marché unique de pays comme la Pologne…
…dont les exploitations agricoles ont des surfaces très différentes des nôtres. Pour démontrer la cohérence de leurs propos, nos collègues Socialistes devraient nous expliquer comment, en régulant le foncier agricole, nous pourrions rester compétitifs face à des pays avec lesquels vous nous avez mis en concurrence directe et qui n'ont pas du tout le même modèle d'exploitation agricole.
Je le confirme à M. de Fournas, s'il en était besoin : le groupe Socialiste est pro-européen, en faveur d'une harmonisation sociale, économique et écologique – à l'échelle européenne et par le haut. Il n'y a pas d'ambiguïté : nous ne sommes pas pour le Frexit.
Monsieur le ministre, il n'y a pas de modèle unique, mais un modèle de référence : c'est l'agroécologie. Ce n'est pas un choix philosophique ou secondaire, c'est un choix vital pour notre sécurité alimentaire – pour notre sécurité tout court. Cela ne se discute pas. Le paradoxe que j'essayais de vous démontrer, c'est que notre fiscalité favorise les 10 % de paysans les plus privilégiés. Par les aides de la PAC, nous donnons à tous ceux qui contournent la politique des structures une prime à l'agrandissement. Vous demander que les schémas directeurs régionaux modulent l'aide à l'installation ou privilégient l'accompagnement de ceux qui optent pour les pratiques de polyculture-élevage ou les systèmes différenciés n'est pas le bout du monde, mais simplement un rééquilibrage des chances en faveur de ceux qui ne sont pas des héritiers et qui respectent la loi.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.
L'amendement n° 2322 n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 2320 .
Cet amendement, auquel nous avons consacré un effort de rédaction, vise à combler un vide abyssal. Je me rappelle que trois présidents de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), lors de réunions organisées dans notre enceinte, ont toujours posé la question de la métrique en matière d'installation et de répartition des aides : il s'agit de la définition de l'actif agricole. La FNSEA, particulièrement influente sur la question, déclare que nous sommes proches de cette définition. Je suis parlementaire depuis douze ans et j'espère qu'à la fin de mon parcours parlementaire – dans trois ans –, nous aurons mis fin à l'hypocrisie qui consiste à ne pas définir ce qu'est un actif agricole.
Nous rappelons en permanence les valeurs qui sont les nôtres, sans prétendre les avoir toujours bien traduites sur le plan légistique – nous ne sommes pas parfaits. Si on ne dit pas clairement qu'un paysan est celui qui possède sa ferme, y travaille et prend les décisions et qu'on laisse se développer une agriculture de rente, de spéculation et de holding, comment définirons-nous précisément – Jean-Paul Mattei l'a rappelé récemment – ce qu'est un paysan, un agriculteur et ce que la loi qualifie d'actif agricole ?
Le flou profite à tous ceux qui trichent ; la clarté sert l'intérêt général. Il s'agit de clarifier un point précis. Quel est l'indicateur de réussite de la politique agricole dont nous débattons depuis deux semaines ? C'est l'actif. Qu'est-ce qu'un actif ? C'est ce que vise à définir très simplement cet amendement.
Le registre des actifs agricoles, supprimé en 2023, a été remplacé par le registre national des entreprises, qui inclut des données relatives aux actifs agricoles. Par ailleurs, la définition de l'agriculteur actif a fait l'objet d'un travail de concertation lors de l'élaboration du PSN français de la PAC. Par exemple, une limite d'âge a été fixée à 67 ans, pour éviter le cumul entre la retraite et le bénéfice des aides de la PAC.
Une définition de l'actif agricole existe déjà : elle se trouve dans le PSN. Votre proposition me semble donc satisfaite. Avis défavorable.
De bonne foi – je le précise souvent car j'ai l'impression qu'on nous soupçonne de répondre de mauvaise foi –,…
…je peine à comprendre votre intention, car comme l'a rappelé M. le rapporteur, nous disposons déjà d'une définition de l'agriculteur actif. Elle résulte d'ailleurs de concertations assez complexes menées au sein de la profession à l'occasion du PSN. Cette définition permet de déterminer si une personne a droit ou non aux aides de la PAC ; je souscris d'ailleurs à la décision de mon prédécesseur d'instaurer une limite d'âge pour éviter que des agriculteurs à la retraite fassent croire qu'ils sont encore actifs mais ont recours au travail à façon, empêchant par là un plus jeune de s'installer.
À moins que vous ne souhaitiez redéfinir ce que nous avons récemment défini dans le PSN de la PAC, je ne vois pas où vous voulez en venir. Nous n'allons tout de même pas rédiger trois définitions distinctes valables respectivement pour la PAC, pour la MSA et pour d'autres fins. La définition du PSN me paraît assez claire ; quand bien même elle susciterait votre désaccord, vous ne pouvez nier qu'elle existe. Avis défavorable.
Un effort de définition a été accompli, notamment pour éviter le cumul des aides de la PAC avec la retraite, mais il n'est pas suffisant. Sans les nommer, je pense à plusieurs exemples d'agriculteurs habitant à quelques centaines de mètres d'ici, dans le 7
M. Thierry Benoit acquiesce.
Nous voilerons-nous hypocritement la face en faisant semblant que ce phénomène n'existe pas, ou déciderons-nous que les agriculteurs sont ceux qui travaillent sur leur exploitation et en assurent la gestion ? Choisirons-nous le renouvellement des générations, ou laisserons-nous prospérer, grâce aux aides de la PAC, des structures agricoles cachées derrière leur organisation administrative, qui n'ont rien à voir avec l'agriculture à taille humaine que nous cherchons à défendre au nom de l'intérêt général ?
Elle s'inscrit dans la continuité du débat que nous avons tenu, en commission comme en séance, à propos du nombre d'exploitations et du nombre d'exploitants que nous souhaitons voir en France. L'amendement de M. Potier nous prépare à la nécessaire révision de la PAC, dans le but de réorienter les aides vers les actifs agricoles.
Le modèle agricole français se caractérise encore par sa diversité. En lui coexistent l'agriculture de proximité, les associations pour le maintien d'une agriculture paysanne (Amap), les circuits courts, les exploitations familiales conventionnelles, l'agriculture bio ou encore l'agro-industrie. Néanmoins, on sent depuis quelques années une tendance à l'agrandissement, à l'accaparement du foncier et à la spéculation.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR. – Mme Lisa Belluco applaudit également.
Je suis favorable au maintien de l'écosystème agricole tel qu'il existe aujourd'hui ; pour cela, je suis convaincu de la nécessité d'un cadre juridique capable de faire cesser les dérives d'agrandissement, d'accaparement et de spéculation.
M. de Fournas nous a fait remarquer que nous avons fait entrer la Pologne dans l'Union européenne et que nous avons noué des liens commerciaux avec l'Ukraine. Pour ma part, je considère que dans le cadre d'un projet de loi d'orientation agricole, la France doit affirmer sa volonté politique de préserver la diversité de son modèle agricole, sa dimension humaine – la possibilité de transmettre une exploitation de génération en génération – et surtout de maintenir un nombre élevé d'exploitations et d'actifs agricoles répartis également sur l'ensemble du territoire hexagonal et ultramarin. C'est pourquoi, à mon avis, cette proposition va dans le bon sens.
Je souhaite apporter au débat quelques précisions avec lesquelles, je crois, M. Potier sera d'accord. Il existe un réel problème s'agissant de l'attribution des aides. Par exemple, dans les zones montagneuses éligibles à l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) – qui n'a d'ailleurs pas été revalorisée depuis 2015
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC
–, celle-ci est attribuée en fonction de la surface agricole utile et non en fonction du nombre d'unités de gros bétail (UGB). Or en zone d'élevage, pour que les aides aillent aux actifs, il importe de les faire dépendre des UGB.
Pour les primes PAC, c'est exactement la même chose. Dans mon département de Corrèze, le passage du critère des UGB à celui de la surface a fait perdre en moyenne 4 500 euros d'aides PAC aux éleveurs. Qu'il s'agisse de l'ICHN, qui porte très bien son nom, ou des aides à l'agroécologie que vient de mentionner M. Potier à propos de l'amendement n° 2322 – dans le Cantal, en Corrèze et dans toutes les zones de montagne, les agriculteurs protègent l'environnement –, il importe au plus haut point de faire en sorte qu'elles aillent aux actifs agricoles.
Par exemple, l'aéroport de Paris touche des subventions au titre de la PAC, ce qui ne serait pas le cas si cette aide dépendait des UGB et non de la surface. Je doute en effet que l'aéroport installe des vaches sur ses terrains au risque de répéter l'accident de l'aéroport d'Aurillac, où un avion qui décollait est entré en collision avec deux vaches Salers.
Sourires.
Encore une fois, il faut identifier des critères pertinents d'attribution des aides, plutôt que de les faire toujours dépendre de la surface agricole utile.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Le débat soulève plusieurs questions intéressantes. Il s'agit d'une part de distinguer les pluriactifs des actifs uniquement agricoles, d'autre part de faire la part des biens – foncier comme entreprise – affectés à l'activité.
Je doute de l'efficacité de votre amendement. Je comprends votre intention : vous voulez que les aides aillent à de vrais agriculteurs.
Néanmoins, comme je l'ai rappelé hier, nous devons prendre en considération le cas des personnes exerçant plusieurs activités. L'équilibre économique de certaines exploitations agricoles repose sur la pluriactivité.
Soyons donc prudents. Votre démarche est intéressante, mais la définition des actifs agricoles, du foncier et des entreprises agricoles demande une vision globale ; il faut tenir compte de celui qui dirige l'exploitation, de celui qui vit de son activité et des biens mis à disposition pour exercer l'activité. Je pense donc que l'amendement mériterait d'être retravaillé.
En vous écoutant, une phrase d'Honoré de Balzac m'est revenue à l'esprit : « Les lois sont des toiles d'araignée à travers lesquelles passent les grosses mouches et où restent les petites. » Ce constat s'applique aux aides de la PAC. C'est pourquoi il convient d'encadrer davantage leur distribution en s'appuyant sur une idée précise de ce qu'est un exploitant agricole.
Je ne suis pas certain qu'il ait été judicieux de retirer aux retraités agricoles le bénéfice des aides de la PAC.
Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, acquiesce.
D'ailleurs, la plupart des pays de l'Union européenne n'ont pas fait ce choix. Je trouverais opportun de contrôler et d'évaluer les conséquences de cette politique. Qui plus est, l'ASP et la MSA qualifient ce dispositif d'usine à gaz : le retrait des aides aux retraités agricoles nécessite une procédure administrative d'une lourdeur incroyable.
Ainsi, les retraités agricoles, dont beaucoup maintiennent les terres actives et les sauvent de l'enfrichement, ne bénéficient plus des aides de la PAC, mais d'autres en profitent sans exercer le moins du monde le métier d'agriculteur.
Je ne sais pas si cet amendement – d'autant qu'il a vocation à être retravaillé – est la meilleure manière de traiter la question, mais il touche à un problème crucial. Je vous remercie, madame la présidente, d'avoir choisi de laisser tous les groupes politiques s'exprimer.
Je souhaite émettre deux remarques à propos de la répartition des aides PAC. Premièrement, même si la France peut encore s'améliorer, elle répartit mieux les aides que la moyenne des pays de l'Union européenne. On cite souvent le « ratio 20-80 » – 80 % des aides de la PAC sont captées par 20 % des agriculteurs –, mais je rappelle qu'il s'agit du ratio européen ; le ratio français est de 20-50. La France a certes une marge de progression en la matière, mais elle est bien meilleure que la moyenne de l'Union européenne, à plus forte raison que certains États-membres dont le ratio est en dessous de la moyenne. Nous devons garder cela à l'esprit : nous cherchons tous, je pense, à maintenir cette tendance à la péréquation.
Deuxièmement, cette péréquation est en danger. Nous devons donc agir collectivement aux niveaux français et européen pour que la prochaine PAC permette au moins de maintenir l'équité imparfaite à laquelle la France est parvenue.
Je rappelle à M. le ministre que, dans le cadre du rapport d'information de la commission des affaires européennes sur la souveraineté alimentaire européenne, cosigné par M. Rodrigo Arenas et moi-même, des députés des groupes La France insoumise et Renaissance sont tombés d'accord – c'est la proposition n° 8 du rapport – sur la nécessité de « renforcer la démarche péréquatrice de la PAC et les aides qui favorisent l'intensité en emplois agricoles dans le cadre de la prochaine programmation de la PAC, en complément de l'activation des leviers de redistribution existants ». Je tenais à le répéter, car il est manifeste que nous avançons de manière transpartisane sur cette question. Monsieur le ministre, nous souhaiterions donc savoir comment la France entend mener les prochaines négociations de la PAC s'agissant des exploitations intensives en main d'œuvre.
M. Benoit a exprimé le désir de préserver, face à la concurrence polonaise, le modèle français reposant sur l'exploitation familiale. Nous partageons ce souhait, mais la cohérence exige alors de cesser de soutenir le marché unique et de cesser de faire subir à l'agriculture française non seulement la concurrence déloyale des autres pays du marché unique, mais également celle de pays tiers, qui passe par les couloirs d'importation organisés par les traités de libre-échange que vous avez signés. Vous créez ainsi une formidable distorsion de concurrence et une surtransposition des normes, c'est-à-dire tout ce que dénoncent les agriculteurs. Vous organisez une concurrence déloyale
Mme Clémence Guetté s'exclame
et vous l'aggravez ensuite par des normes supplémentaires qui pénalisent l'agriculture française.
Monsieur Potier, je suis navré que vous tombiez ainsi dans la caricature, mais je vais vous répondre : on peut très bien repenser le marché unique sans vouloir le Frexit. Peut-être y a-t-il par exemple un combat à mener en ce qui concerne le droit de la concurrence. Comment se fait-il que nous soyons incapables de donner la priorité aux produits français dans le cadre de la commande publique ? Cela est réellement problématique, et un Frexit n'est pas nécessaire pour faire évoluer ce point.
Vous comprenez mal le marché unique ! Vous n'avez pas écouté le Premier ministre lors du débat télévisé d'hier soir !
Hier, dans un tweet, M. le ministre a écrit, comme si cela était rassurant, que seule la moitié de la viande bovine consommée dans le secteur de la restauration collective est importée. Vous rendez-vous compte à quel point nous en sommes ? La moitié de la viande bovine dans la restauration collective est importée !
Sortons donc des idéologies et des incantations sur le marché unique et l'Union européenne : sans aller vers les caricatures et le Frexit, nous devons mener des combats à Bruxelles pour remettre ce fonctionnement en question.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je voudrais revenir sur la qualité d'agriculteur actif : telle qu'elle est définie par le décret du 13 mai 2023, une personne qui acquiert une part majoritaire du capital d'une exploitation, y place un gérant qui détient 5 % des parts, et n'y met jamais les pieds, pourrait bénéficier des aides de la PAC et des droits afférents au statut d'agriculteur actif. Cette définition, qui permet que soient considérées comme agriculteurs actifs des personnes qui ne mettent pas les pieds dans une ferme, ne convient pas.
Cela fait écho à ce que Thierry Benoit a dit au sujet de l'Ukraine, où 185 agri-holdings contrôlent 4,5 millions d'hectares et où toute la production est destinée à l'exportation. Nous ne voulons pas de ce modèle-là en France ; c'est pourquoi il faut bien définir ce qu'est un actif agricole.
Il est vrai, monsieur Sitzenstuhl, que la France répartit mieux les aides de la PAC que d'autres pays. Néanmoins, nous pouvons encore faire mieux.
En effet, le problème de l'agrandissement des fermes en France est réel. Il faudra donc revoir l'attribution de ces aides pour les orienter davantage vers les véritables actifs afin de limiter l'agrandissement et de favoriser les moyens humains.
Les interventions ont abordé des sujets divers. Je voudrais d'abord corroborer ce qu'a rappelé M. Sitzenstuhl et que nous avions évoqué au début de l'examen de ce texte : la France est loin d'être le pays européen où les aides sont les plus concentrées, loin s'en faut – même si, madame Hignet, vous avez raison de souligner que nous pouvons sans doute faire mieux. On voyage parfois pendant vingt-cinq ans avec des poncifs, comme celui d'après lequel 20 % des agriculteurs percevraient 80 % des aides.
Monsieur Chassaigne, je ne suis pas entièrement d'accord avec ce que vous avez dit au sujet des retraités agricoles qui ne peuvent plus bénéficier des aides de la PAC au-delà de 67 ans. Quand j'ai été nommé ministre de l'agriculture, tout le monde était d'accord pour supprimer les aides,…
…en soutenant que cela permettrait d'éviter les effets d'aubaine que nous connaissons vous et moi. Certes, ce n'est pas là le seul effet, mais il y a un fort effet d'aubaine pour ceux qui continuent de bénéficier des aides de la PAC. Reconnaissons également que l'application de cette disposition est complexe, car il faut prendre en considération les Gaec, que nous avons rendus conformes au principe de transparence, et d'autres structures. Cette disposition a contribué à complexifier le versement des aides de la PAC : si un agriculteur était associé avec quelqu'un qui avait fait valoir ses droits à la retraite, il fallait revoir les aides. Je pense cependant que l'idée était bonne, même si nous accomplissons un important travail pour réaliser un ajustement significatif en 2025, à mi-parcours. Nous cherchons en effet à trouver un système qui évite les effets d'aubaine, selon des intentions qui, je crois, sont partagées par tous, sans pénaliser les agriculteurs qui ont plus de 67 ans et continuent leur activité pour des raisons diverses. C'est une des réponses que nous apportons au problème soulevé par M. Potier.
Sans doute devrons-nous reconsidérer les règles de l'attribution des aides, soit à mi-parcours, soit lors des négociations de la future PAC. Il y a le ratio d'actifs par exploitation, mais ce n'est pas le seul critère pertinent dans cette affaire. Il y a aussi la question, posée à maintes reprises, du plafonnement…
Tous ces sujets sont sur la table. Ce n'est pas l'objet du texte, comme chacun le sait, mais il est bon que nous en parlions.
Ensuite, je voudrais répondre à M. Dubois sur la spécificité des territoires du Massif central.
Reconnaissons que nous sommes le seul pays à avoir réussi à sauver l'ICHN dans ses modalités actuelles. Pour dire les choses un peu vertement, nous ne sommes pas passés loin de la correctionnelle : nous avons failli voir disparaître ce dispositif.
Pour le versement des aides, il faut définir des zonages et des principes de répartition ; je comprends que chacun défende son territoire, mais nous pouvons nous accorder sur le principe. Le maintien de l'ICHN est à mettre au crédit de tous. Les montants de l'ICHN ont été préservés, mais il est vrai qu'ils n'ont pas été revalorisés. Je le répète, dans une enveloppe de 9 milliards, l'ICHN représente plus de 1 milliard – ce n'est pas rien. L'intention politique – qui était aussi celle de mon prédécesseur – qui a présidé à la définition de cet équilibre était de favoriser l'engraissement en France plutôt qu'à l'étranger, car tel est l'intérêt de la filière, en particulier pour la viande bovine.
Lors des négociations de la PAC, il faudra aussi revenir sur la question des services environnementaux. C'est le troisième étage des aides consacrées au développement rural, tandis que l'ICHN vise à compenser des handicaps spécifiques. Je le répète, l'enveloppe globale sera identique, donc il faudra faire des choix.
Monsieur Benoit, je vous accorde qu'il faut se poser la question d'une modification de la répartition. Il faut également corriger certains dysfonctionnements, car la PAC doit aussi aider les agriculteurs lorsque survient une crise, et pas simplement dans les années qui sont bonnes. Nous devrons mener ce travail ensemble.
Enfin, je voudrais répondre à M. de Fournas. Je comprends que vous ayez envie de refaire le débat d'hier, comme vous vous y employez depuis ce matin. Cependant, il faut revenir à la réalité. Vous dites : on ne veut pas du marché unique, mais ce n'est pas un Frexit.
C'est gentil à vous de dire cela ; j'ai du mal…
C'est vrai que ma caractéristique, monsieur Brutal, c'est d'être brutal !
Sourires.
J'essaye d'être nuancé.
Monsieur de Fournas, si vous dites que vous ne voulez pas de la Pologne dans le marché unique, il y a deux solutions : soit vous faites sortir la Pologne, soit vous faites sortir la France !
Assumez vos propos, monsieur de Fournas ! Vous dites à M. Benoit que toutes les difficultés que nous connaissons, comme l'agrandissement des propriétés, résultent de la mise en concurrence de la France avec différents pays, dont la Pologne, puisque vous acceptez le principe que la Pologne soit dans le marché unique. Quelle solution proposez-vous ? Soit on fait sortir la Pologne, soit on fait sortir la France. Ce n'est pas brutal de dire cela.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – M. le rapporteur Pascal Lecamp applaudit également.
Ce n'est pas une caricature. De la même façon, vous pouvez dire : je suis dans la monnaie unique, mais je ne respecte pas les traités qui la régissent ; je suis colocataire, mais je ne paie pas les charges ; je ne respecte pas les règles, mais je vis en société. On peut toujours le dire.
Ce n'est pas caricatural, mais factuel. Ce n'est pas grave : assumez-le.
M. Grégoire de Fournas brandit le règlement.
J'espère que vous ne ferez pas un rappel au règlement pour mise en cause personnelle, car il ne s'agit pas d'une attaque personnelle.
Vous faites preuve d'une sensibilité excessive.
Sourires.
C'est le débat public, le débat politique ! À ce compte-là, vous pourriez y voir aussi une attaque contre le peuple polonais.
Sourires.
Certaines difficultés françaises ne sont pas liées à l'Europe, mais à la France ; c'est ce que nous essayons de résoudre. Ne venez pas dire à chaque fois que c'est la faute de l'Europe, alors que la solution sous-jacente à une telle accusation est finalement, quand même, la sortie de l'Union européenne. Voilà ce que je voulais vous dire.
Sur le fondement de l'article qui proscrit les mises en cause personnelles.
Oh, ce n'en est pas une !
Je voudrais que le ministre réponde à nos questions au lieu de tomber dans la caricature.
J'ai très clairement précisé qu'il n'était pas nécessaire de faire le choix d'un Frexit pour réformer les règles du marché unique.
J'ai posé une question sur le droit de la concurrence. M. le ministre, exposant une vision très binaire et caricaturale, a refusé de répondre à cette question.
Je demande qu'il réponde précisément à nos propos et renonce aux caricatures qu'il partage avec la gauche.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 69
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 19
Contre 44
L'amendement n° 2320 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à onze heures dix, est reprise à onze heures vingt.
Cet amendement vise à créer un registre national des exploitations agricoles. Dans le contexte actuel, les statistiques agricoles ne permettent de connaître ni le nombre réel d'unités de production, ni les bénéficiaires effectifs des aides. De ce fait, la concentration foncière agricole est parfois sous-évaluée. Ainsi, pour une exploitation qui rassemble cinq sociétés civiles d'exploitation agricole (SCEA), les statistiques comptent cinq unités, alors qu'il n'y en a qu'une. L'attribution des aides se fonde sur des chiffres surestimés, car l'administration ne prend pas en compte les exploitations agricoles, mais seulement les entités qui les composent. Il nous faut donc disposer d'une maille plus fine pour mieux piloter l'attribution des aides, éviter la concentration foncière et donner des outils aux Safer.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 1089 .
J'ajouterai aux explications de M. Taupiac que bien connaître la réalité agricole grâce à un registre national des exploitations comptabilisant les unités de production permettrait d'éviter des détournements. Je pense à l'aide redistributive complémentaire pour les 52 premiers hectares : certains exploitants peuvent la toucher quatre ou cinq fois, simplement parce que leur exploitation est divisée en plusieurs entités. Nous avons dénoncé ce problème et nous devons nous y attaquer, car il est très mal vécu dans le monde agricole.
Les amendements n° 1639 de Mme Mathilde Hignet et 2815 de Mme Lisa Belluco sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Ces amendements rejoignent ceux défendus précédemment par M. Potier. Le registre national des entreprises a remplacé le registre des actifs agricoles. Le plan stratégique national a, quant à lui, donné une définition de l'agriculteur actif. Les amendements sont donc satisfaits par cette définition. Monsieur Chassaigne, je prends note de votre remarque concernant la démultiplication des aides à mesure que l'on découpe les territoires. Nous devons être vigilants sur ce point. Avis défavorable.
Nous avons déjà débattu de ces questions. Avis défavorable.
L'amendement n° 2321 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à corriger l'inégalité de traitement qui affecte le fonds Vivea par rapport aux autres fonds d'assurance formation et le met en difficulté, alors même que la formation continue des actifs agricoles est au cœur du défi des transitions agroécologique et climatique.
Contrairement aux autres fonds d'assurance formation, Vivea ne peut déduire de son calcul annuel d'excédent les avances de cotisations recouvrées pendant l'année N au titre de l'année N+1. Le calcul de ces excédents est donc artificiellement gonflé. Cet amendement vise à y remédier.
L'amendement n° 4303 est adopté.
Sur les amendements n°
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de plusieurs amendements, n° 2508 , 3819 , 563 , 1640 , 4157 et 4482 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 2508 et 3819 sont identiques, de même que les amendements n° 563 , 1640 et 4157 .
L'amendement n° 2508 de Mme Christelle Petex n'étant pas défendu, la parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir l'amendement n° 3819 .
Cet amendement, identique à celui de Mme Christelle Petex, vise à insérer un nouvel article après l'article 10. Il prévoit que « l'État met en place un réseau d'expérimentation, d'ici 2025, visant à soutenir la création et la diffusion de projets innovants de restructuration-diversification au sein d'exploitations agricoles volontaires ». Il s'agit de faciliter l'installation de nouveaux porteurs de projets et la transmission des exploitations agricoles considérées comme difficiles à transmettre du fait d'une spécialisation importante, d'un manque d'ergonomie ou d'une production peu attrayante pour les porteurs de projets. Ce réseau d'expérimentation contribuerait également à diversifier les productions et à renforcer la résilience des exploitations face aux perturbations économiques, géopolitiques ou climatiques. L'agriculture française est faite d'expérimentations ; le réseau national proposé pourrait les mettre en avant et les accompagner, ce qui n'a jamais été aussi nécessaire.
Cet amendement vise à créer un réseau d'expérimentation pour la restructuration-diversification des exploitations. Dans la phase de transmission d'une exploitation entre cédants et repreneurs, la structure de l'exploitation peut être source de difficultés. En effet, certains nouveaux agriculteurs ne sont pas issus du milieu agricole et arrivent avec des projets très différents. L'expérimentation permettrait d'accompagner ces profils et de faciliter la transmission des exploitations ne répondant pas aux nouvelles attentes.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement n° 4482 .
Il vise à mettre en place un réseau d'expérimentation destiné à soutenir les projets résilients de restructuration-diversification. Il est souvent très difficile de céder de grandes fermes en monoproduction, car de nombreux jeunes privilégient, pour s'installer, des modèles agroécologiques. Cette expérimentation est intéressante en ce qu'elle faciliterait l'accès des nouvelles générations aux exploitations.
Pour soutenir les projets innovants et faciliter l'installation comme la transmission d'exploitations agricoles, ces amendements proposent de lancer une expérimentation de restructuration-diversification. C'est tout l'objet de cette loi, mais c'est au réseau France Services agriculture qu'il reviendra d'accompagner ces projets ; notre rôle est d'organiser ce réseau et de lui fournir les moyens de sa tâche. Avis défavorable.
Vous demandez à l'État de mettre en place un réseau d'expérimentation. Pour commencer, une série d'expérimentations sont d'ores et déjà conduites, notamment par les chambres d'agriculture. Ensuite, comme vient de le dire votre rapporteur, l'important est d'accompagner le porteur de projet si, au moment de son installation, il souhaite conduire la diversification ou la restructuration de l'exploitation. Mais relancer un réseau d'expérimentation ne me paraît pas opportun, dès lors que l'accompagnement, y compris vers la diversification ou vers ce que vous qualifiez de restructuration, fait déjà partie des objectifs de France Services agriculture. Avis défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 53
Majorité absolue 27
Pour l'adoption 16
Contre 37
L'amendement n° 3819 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 58
Nombre de suffrages exprimés 58
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 15
Contre 43
L'amendement n° 4482 n'est pas adopté.
L'une des préoccupations majeures des agriculteurs, le foncier, n'est pas traitée dans ce texte. La seule proposition en la matière renvoie au groupement foncier agricole d'investissement (GFAI), sur lequel nous allons revenir à l'occasion d'un amendement qui, je l'espère, sera à nouveau rejeté. L'article 10 bis est loin d'être suffisant, mais je voulais profiter de cette discussion pour évoquer la manière dont nous avons abordé le foncier en région Occitanie.
Depuis sa première politique d'accompagnement, lancée en 2017, la région a mobilisé près de 30 millions d'euros pour faciliter l'installation de nouveaux agriculteurs et la transmission d'exploitations. Cela porte ses fruits : près de 2 100 installations par an et un des meilleurs taux de renouvellement de France – même s'il reste insuffisant. En 2022, la Foncière agricole d'Occitanie a été créée pour accompagner l'installation de nouvelles exploitations avec des projets durables, viables et rentables. Son statut privé lui confère l'agilité dont elle a besoin pour répondre aux demandes des agriculteurs. Pour ce faire, la société acquiert tout ou partie du foncier des projets, le porte pour le compte de l'agriculteur en différant la charge d'acquisition de quatre à neuf ans, le lui loue et lui permet de le racheter à moyen terme. Cela permet une transmission sécurisée des exploitations.
Je le redis, nous devrions organiser un vrai débat sur ce sujet, monsieur le ministre. J'espère qu'une grande loi foncière suivra ce texte qui est très insuffisant sur la question du foncier, mais aussi sur celle du revenu.
L'article 10 bis définit le droit à l'essai qui permet à de futurs associés de Gaec de tester le travail en commun. C'est une forme particulière de ce qu'on appelle plus généralement le test d'activité agricole. Notre collègue Charles Fournier est très attaché au test d'activité : il considère que ce sujet est trop rarement évoqué alors qu'il s'agit d'un levier très utile pour faire entrer les jeunes, notamment les jeunes Nima, dans le métier. Il faut soutenir ce dispositif, et cela commence par son encadrement légal. La définition du droit à l'essai est un premier pas, mais le droit à l'essai n'est qu'un mode d'installation progressive parmi d'autres. Quid des autres formes de test d'activité ?
Je pense notamment à ce que l'on appelle les espaces-test agricoles, qui donnent la possibilité à un candidat à l'installation d'expérimenter son projet en taille réelle sur une parcelle qui est mise à sa disposition soit par une association, soit par un exploitant bientôt à la retraite et qui prévoit de la céder. Ces espaces-test se développent dans nos territoires ces dernières années, notamment dans la région de mon collègue Fournier, le Centre-Val de Loire, qui soutient leur développement par le biais du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). Les espaces-test accompagnent l'émergence des projets, facilitent les transmissions et l'installation de personnes Nima, favorisent les projets en agriculture biologique, qui constituent la majorité des projets d'installation en espace-test, et dynamisent l'économie du territoire en s'intégrant aux projets alimentaires territoriaux comme celui du Grand Angoulême ou de Tours Métropole Val de Loire.
C'est pour cela qu'à l'article 1er , nous proposions de viser non seulement le droit à l'essai, mais aussi d'autres formes d'expérimentation, comme les espaces-test agricoles ou encore le compagnonnage, qui répondent à bien des objectifs affichés dans ce projet de loi d'orientation agricole. Il est regrettable que l'encadrement légal du droit à l'essai n'ait pas été l'occasion de reconnaître aussi ces autres formes de tests comme des outils pertinents pour faciliter l'installation-transmission.
Je veux saluer à mon tour le principe du droit à l'essai, qui a une belle et longue histoire dans les pays de Savoie, notamment en Haute-Savoie, et qui correspond à la réalité qui a été décrite à l'instant par mes collègues. Les personnes non issues du monde agricole sont de plus en plus nombreuses à s'installer. Les cadres évoluent et l'incertitude associée au fait de s'installer est parfois trop importante. Le droit à l'essai ouvre des possibilités en réduisant le risque ; c'est donc une excellente chose que de l'inscrire dans la loi. L'article 10 bis est à la fois un signal et une base législative qu'on pourra ensuite décliner pour préciser les conventions et le statut d'associé, et ainsi ouvrir de nouvelles possibilités pour nos jeunes agricultrices et agriculteurs.
L'article 10 bis du projet de loi de programmation agricole propose de créer un droit à l'essai permettant à une ou plusieurs personnes d'expérimenter un projet d'agriculture en commun pour une période d'un an, renouvelable une fois. L'intention initiale peut paraître louable mais l'article est problématique, et ce pour trois raisons.
Premièrement, le texte souffre d'un manque de clarté, avec des alinéas peu compréhensibles compromettant notre capacité à évaluer pleinement ses implications. C'est pour cette raison que nous avons déposé un amendement rédactionnel.
Deuxièmement, l'article élude les conséquences financières du dispositif qu'il propose. Introduire un tel projet sans une évaluation claire de son coût et sans définir qui en assumera la charge n'est pas concevable. Les agriculteurs méritent de savoir qui financera ce droit à l'essai et quel impact ce dispositif aura sur les opérations et leur viabilité financière.
Troisièmement, puisque cette proposition d'association cherche à aider les chefs d'exploitation qui veulent définir un projet d'agriculture en commun, il est nécessaire que les participants possèdent au minimum, à défaut de l'expérience, les diplômes requis pour exercer cette profession en tant que chef d'entreprise. Le droit à l'essai ne doit en aucun cas se résumer à un stage de découverte pour candidats à la reconversion.
En l'état, il nous est difficile de voter pour un dispositif aux contours encore flous, mais si le ministre prend en compte nos inquiétudes et se montre ouvert à nos propositions, nous serons amenés à reconsidérer notre position.
Monsieur Taupiac, vous nous offrez l'occasion de reparler de foncier agricole – sujet qu'on a peu abordé. Comme l'article 12 a été supprimé, nous n'aurons pas l'occasion de discuter d'une série de questions. Existe-t-il un besoin d'accompagnement à l'installation ? A-t-on besoin de maîtriser le foncier ? Doit-on réserver la propriété foncière aux fonds nationaux et éviter l'échappement vers des actifs étrangers ? A-t-on besoin d'un outil de portage à long terme du foncier ? Faut-il bâtir un nouvel outil ou réformer l'existant ? Faut-il un financement public ou un financement privé ? Faut-il attendre une grande loi foncière ou répondre à un besoin spécifique ?
Je considère que le rapporteur général a livré une bonne analyse. On a besoin d'un renouvellement des générations, et pour accompagner ce processus, il nous faut des fonds et un outil. Cet outil nous manque. Nous aurions pu combler ce manque dans ce projet de loi ; peut-être l'outil n'aurait-il pas été parfait à l'issue des travaux de l'Assemblée nationale, mais il est dommage de se priver du dialogue. Je vous invite donc à réfléchir à nouveau, tous ensemble, à la manière d'organiser le travail au Sénat et en commission mixte paritaire (CMP) pour parvenir à construire un outil de portage – qui doit impliquer les Safer – capable d'accompagner nos jeunes agriculteurs dans leur installation.
L'intervention d'Henri Alfandari ne me semble pas porter sur le bon article. Quant au foncier, on a commencé à en parler hier après-midi et on a poursuivi ce matin. Tous ceux qui connaissent bien le sujet estiment que l'enjeu essentiel, c'est la régulation ; pour le portage, on attend les fonds Entrepreneurs du vivant et Élan. Nous sommes tout à fait favorables à l'idée de diversifier les formes d'économie sociale de portage. Malheureusement, cette loi n'intègre pas la régulation du foncier. Vous n'allez pas vous amuser à réintroduire un instrument relatif au foncier, alors que vous nous expliquez depuis dix jours que ce n'est pas une loi foncière, et que nous en avons pris acte. C'est une question de cohérence intellectuelle.
S'agissant de l'article 10 bis, je veux dire à Antoine Armand que je suis heureux d'être d'accord avec lui : les Alpes ont innové. L'article 10 bis, qui a été introduit à l'initiative de députés du groupe Socialistes, va être amélioré. Un petit regret : Tour de France Agri – un réseau de militants de l'installation issu du Mouvement rural de jeunesse chrétienne – proposait de créer un service civique dans ce domaine, mais l'amendement a malheureusement été jugé irrecevable. Je vous invite, monsieur le ministre, à le prendre en compte dans le cadre de la navette pour peaufiner le dispositif des essais, afin que nous ayons toute une gamme à proposer à nos jeunes candidats entrepreneurs.
Cet article m'apparaît essentiel. D'abord, il permet à plusieurs exploitants d'expérimenter le travail en commun ; ensuite, et surtout, il répond à l'enjeu du renouvellement des générations et permet d'intégrer les Nima en leur donnant la possibilité de tester une activité agricole. On sait en effet qu'au bout de deux ou trois ans, l'installation peut conduire à un désenchantement ; le droit à l'essai permettrait d'éviter des situations complexes.
Néanmoins, le sujet mérite plus que ces quelques alinéas : il faut traiter la question du statut de l'associé, de sa responsabilité, de sa rémunération, de son régime fiscal et social. Ce n'est donc pas aujourd'hui que nous allons résoudre le problème : il faut un travail de fond. Le Sénat aura peut-être plus d'éléments pour le faire, mais je suis favorable à un effort transpartisan. Il faut construire un dispositif qui protège l'exploitation comme l'associé.
Dans le prolongement du propos de notre collègue Alfandari, et même si la discussion ne peut porter ici sur l'article 12, je voudrais souligner que nous réclamons une loi foncière depuis des années. La loi Sempastous n'a pas permis de résoudre toutes les difficultés, qui ont été abondamment commentées dans ce débat. Nous vous redisons notre grande crainte de voir les groupements fonciers agricoles (GFA), en cas d'ouverture à l'épargne publique, devenir des produits financiers et échapper ainsi à la régulation du foncier. Il faut impérativement l'empêcher.
Par ailleurs, selon les données de 2023, le besoin de financement du foncier ne semble pas avoir augmenté. Par conséquent, il n'y a peut-être pas d'urgence à traiter cette question. Le portage est actuellement assuré par les propriétaires privés grâce aux outils existants, notamment les Safer. Il faut bien sûr réfléchir à la question du portage du foncier, et sans doute la traiter dans un texte ad hoc, mais nous, députés du groupe Les Républicains, vous redisons notre hostilité absolue à la réintroduction des GFA dans le présent projet de loi.
Nous avons bien compris l'objectif du droit à l'essai introduit par l'article 1er . Déposé par ma collègue Virginie Duby-Muller, cet amendement vise à en assouplir l'encadrement afin qu'un associé qui se serait engagé dans cette logique ne se voie pas contraint par les conséquences d'une éventuelle rupture.
La suppression de deux alinéas dépourvus de portée normative va dans le bon sens, en contribuant à rendre le dispositif plus lisible. Telle était d'ailleurs la conclusion que nous avions tous tirée en commission. Avis de sagesse.
J'aimerais rappeler ce qu'est le droit à l'essai, pour répondre aux interrogations qui ont été exprimées. Il s'agit d'un droit d'association à l'essai, concernant en particulier les Gaec. Il arrive en effet trop souvent que des gens entrent dans une telle structure, s'y intègrent, mais découvrent rapidement que le fonctionnement ne leur convient pas. Cela conduit à des ruptures, excessivement difficiles à gérer. Conformément à ce qui avait été prévu dans le pacte pour le renouvellement des générations en agriculture, le texte prévoit la possibilité d'être associé à l'essai pour une période déterminée. Tel est le principe posé aussi bien à l'article 1er que dans le présent article.
Le dispositif n'est pas celui des espaces-test agricoles, où l'on évalue sa capacité à devenir exploitant agricole. Je réponds du même coup aux interrogations exprimées par M. Alexandre Sabatou : l'essai en question n'intervient pas préalablement à l'installation, mais au moment de choisir la forme qu'elle prendra, en Gaec ou non ; il ne s'agit donc pas de revenir sur la nécessité d'avoir les capacités pour s'installer, mais uniquement de permettre à quelqu'un de vérifier au cours d'une période d'essai, par exemple d'une année, ses capacités à travailler au sein d'un groupement – sans remettre en cause ses capacités en général –, tout en lui laissant la possibilité d'en sortir. Je l'ai peut-être dit lors de la discussion générale, et certainement en commission comme lors de la présentation du pacte, c'est ce principe qui est inscrit dans la loi.
Nous travaillons avec le Conseil d'État sur cette question, qui pose des problèmes d'une extrême complexité en matière de droit des sociétés, de droit social et de droit du travail. Quelle est la responsabilité civile de l'associé à l'essai vis-à-vis de ses associés, de la société et des tiers ? Comment est-il couvert pendant cette période ? J'attends les réponses depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Lors de la rédaction du pacte, nous avions décidé d'en poser le principe dans la loi, puis de prendre le temps d'élaborer un dispositif juridique solide avec l'aide du Conseil d'État, lequel devrait rendre son avis aux alentours du 10 juin.
Le principe reste de permettre à celui qui envisage de s'installer sous une forme sociétaire de ne pas s'engager tout de suite de façon définitive, un tel engagement pouvant décourager l'adoption de la forme sociétaire, notamment la forme Gaec, que je juge intéressante. Nous voulons donner cette liberté, mais compte tenu des enjeux sur le plan juridique, il nous faut encore l'inscrire dans un cadre solide. Il n'y a donc pas lieu de toucher à la rédaction de l'article 10 bis, puisque des éléments complémentaires devraient être apportés, sans doute à l'occasion de la navette. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Quoique intéressant, l'article 10 bis mérite d'être retravaillé. Le droit à l'essai ne doit pas se confondre avec une simple visite, qui ne comporterait aucun engagement : on ne peut s'associer à la légère pour s'en aller ensuite.
Je défendais pour ma part une forme de transmission au sein du Gaec – dont je sais qu'elle poserait des problèmes juridiques, notamment vis-à-vis du droit européen. Il faut en tout cas poser les problèmes clairement : si je m'installe comme agriculteur, je peux bénéficier du statut du fermage, disposer de terres comme propriétaire ou comme locataire. Il existe tout un environnement juridique.
Il faut que nous menions une réflexion, notamment pour permettre aux membres d'un Gaec de rester associés même quelques années après avoir pris leur retraite, comme cela se fait dans certaines sociétés d'exercice libéral. Cela favoriserait une forme de tutorat. Cet article, sur lequel j'ai quelques réserves, doit en tout cas être retravaillé, notamment dans le cadre de la navette, ne serait-ce qu'à propos de la rémunération : comment l'associé, qu'on pourrait dire en simple visite, sera-t-il rémunéré ? Le mouvement est lancé, il faut maintenant aller plus loi : osons donner un véritable statut à une structure qui permette la transmission à de futurs agriculteurs.
Permettez-moi, monsieur le ministre, une remarque caustique : votre loi semble candidate au concours Lépine de la plus belle usine à gaz.
Sourires
Avez-vous prévu de sous-amender en suggérant une formation des juges des tribunaux paritaires des baux ruraux ? En tant qu'avocat, je me réjouis de ce que j'ai entendu : il y a du contentieux dans l'air. Analyser le droit des sociétés, caractériser les relations entre associés, déterminer l'existence d'un éventuel lien de subordination, tout cela va nous donner du boulot. Le dispositif que nous sommes en train d'examiner risque de complexifier les choses au lieu de les simplifier.
Je voudrais apporter mon soutien au Gouvernement. L'alinéa 3 définit le droit à l'essai. Cette définition que nous avions adoptée en créant l'article mérite d'être traitée avec toute la prudence qu'ont recommandée le ministre et notre collègue du Modem. Le dispositif touche en effet nombre de droits sociaux et de droits relatifs aux politiques du sol, très complexes à manipuler.
En revanche, si on enlève l'alinéa 3, le dispositif s'effondre. Il convient donc de le consolider au cours de la navette, et surtout de rejeter cet amendement.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
La question du foncier s'est posée dès la discussion de l'article 1er . Une loi foncière est prévue depuis 2017 et l'on ne peut que constater les difficultés à la faire aboutir. Au vu des discussions que nous avons depuis le début de l'examen de ce projet de loi, je propose que la commission des affaires économiques se saisisse de la question. Dès l'automne, une belle mission, associant des représentants de tous les groupes parlementaires, pourrait entamer un travail transpartisan et formuler des propositions de nature à nourrir le débat. Les membres de l'actuelle majorité, ou d'une majorité à venir, pourraient s'inspirer des travaux de la commission – nous travaillons aussi pour le futur – pour élaborer une loi foncière, complément indispensable des dispositions que nous avons prises sur les questions agricoles, qu'il s'agisse des revenus, des moyens de production ou de la compétitivité.
Outre qu'elle favoriserait, dans les semaines et les mois à venir, un traitement serein et approfondi de la question du foncier – auquel nous travaillerons en commission des affaires économiques –, la solution que je propose éviterait qu'elle revienne constamment dans nos discussions touchant le projet de loi d'orientation agricole et au cours de la navette.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Je souhaite d'abord répondre à M. de Lépinau : sauf le respect que je vous dois, l'intention n'est pas de nourrir le contentieux. La définition juridique de l'association à l'essai n'est pas encore claire : malgré de nombreuses expérimentations, le droit n'est pas encore consolidé sur le sujet.
Pour répondre ensuite au président Mattei, il ne s'agit pas de permettre qu'on entre et sorte des groupements agricoles sur un coup de tête, mais de donner aux personnes qui voudraient s'associer la possibilité de faire, pour un an, l'expérience de l'association, dont les Gaec constituent la forme la plus courante, de façon à éviter qu'une dissolution du groupement intervienne au bout de deux ou trois ans, créant une situation parfois inextricable.
Le travail qui nous reste à faire concerne les droits et les obligations relatives à l'entrée, à la sortie et pendant la phase d'association à l'essai. Ce que nous déciderons pourra d'ailleurs avoir des répercussions au-delà de la question agricole, puisque nous touchons notamment au droit des sociétés – cela satisfera peut-être M. de Lépinau. Telle est la raison pour laquelle, tant dans ce texte que dans le pacte d'orientation, nous avons inscrit ce droit comme nous l'avons fait, dans l'intention d'apporter, avec l'aide du Conseil d'État, des compléments qui puissent en consolider l'écriture.
Pour autant, il ne s'agit pas d'un droit à l'essai de touriste : je viens, je vois, je sors, je rentre. Toujours est-il que la vie en commun dans un Gaec n'est pas simple – cela donne d'ailleurs lieu à de nombreux contentieux. Entrées dans une telle structure – avec toutes les compétences requises, là n'est pas le problème –, certaines personnes ne s'y font pas. Or nous pensons collectivement que ces structures offrent une voie d'avenir.
Sur les articles 10 bis et 11, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 823 n'est pas adopté.
La parole est à M. Alexandre Sabatou, pour soutenir l'amendement n° 4408 .
Nous comprenons bien l'idée de ce dispositif d'association à l'essai : même si les personnes sont de bons agriculteurs, il peut arriver qu'elles ne s'entendent pas et que la coopération ne puisse donc fonctionner. Par conséquent, nous ne sommes pas foncièrement hostiles à la période d'essai proposée.
Malgré la réponse du ministre à mon propos liminaire, je maintiens qu'il faut préciser dans l'alinéa 3 que seules peuvent bénéficier du dispositif des personnes qui exercent déjà comme chef d'exploitation ou disposent de diplômes attestant de leurs connaissances sur le sujet – faute de quoi cet essai entre agriculteurs risque de se transformer en stage, voire en simple expérience pour des personnes qui voudraient se reconvertir dans le secteur agricole.
Je suis convaincu de l'intérêt d'encadrer le droit à l'essai dont il est fait mention à l'article 1er
Je comprends l'attachement de M. Sabatou aux conditions de diplôme requises pour s'installer et éventuellement bénéficier du statut dont nous discutons. Le texte ne les remet pas en cause : il ne comporte aucune dérogation aux règles qui prévalent en matière de diplôme et de qualification.
Je répète que le dispositif ne s'adresse pas à ceux qui voudraient tester leur désir de devenir agriculteur. Vous l'avez dit vous-même, ce n'est pas du tout l'objet du droit à l'essai. Il s'adresse à ceux qui veulent être agriculteur, sont tentés de s'associer, sans toutefois être certains de l'aboutissement de leur projet à l'horizon de trois ou cinq ans, et souhaitent donc une forme d'organisation provisoire.
Encore une fois, le droit à l'essai ne sert pas à tester son envie d'être éleveur ou maraîcher – pas du tout ! Il s'adresse à des gens qui veulent s'installer, qui hésitent entre une forme individuelle et une forme collective – le Gaec – et qui ne veulent pas s'engager trop fortement. Vous savez que le Gaec engage beaucoup : les dispositions de cet article intéresseront quelqu'un qui a accompli toutes les démarches nécessaires, qui a créé un Gaec, mais qui se rend compte, au bout d'un an, que les choses ne se passent pas bien avec ses associés. Il ne s'agit pas du tout de remettre en cause les principes de l'installation, tels qu'ils sont déclinés dans le projet de loi. En revanche, ouvrir la possibilité d'entrer dans un groupement et d'en sortir, même s'il faut que cela reste limité – ce sont les règles de droit commun qui s'appliqueront –, me paraît pertinent.
De nombreux témoignages me parviennent en effet en ce sens – certains ont d'ailleurs trait au versement du solde des aides de la PAC, qui obéit à un processus complexe : ils émanent de gens qui se sont engagés en Gaec lors de leur installation et qui, au bout de trois ans, voudraient en sortir. Le groupement auquel ils appartiennent est alors menacé de dissolution, ce qui crée des contentieux entre associés et de nombreuses difficultés.
Je voulais juste apporter un éclairage concret à notre débat. J'ai un ami qui, petit-fils d'agriculteur, s'est installé en Gaec avec son beau-frère et sa belle-sœur. Ancien chauffeur routier, il n'avait jamais exercé dans une exploitation agricole, mais il avait la passion de l'agriculture et l'envie de s'installer. Je ne vois donc pas pourquoi on interdirait ce droit à l'essai à des gens qui se découvrent la vocation d'agriculteur : il faut vraiment l'ouvrir au maximum et donner la possibilité à chacun de s'installer. Tout se passe très bien pour lui ! Je suis donc défavorable à cet amendement.
L'amendement n° 4408 n'est pas adopté.
La parole est à M. Alexandre Sabatou, pour soutenir l'amendement n° 4335 .
L'alinéa 3 de l'article n'est pas assez précis. Il est question d'« une personne physique majeure ou plus », ce qui n'a pas vraiment de sens : on se demande s'il s'agit bien de plusieurs personnes. L'amendement vise donc à clarifier la rédaction.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur, vous dites que l'article pourra être amélioré dans le cadre de la navette. Nous pouvons très bien commencer à l'améliorer maintenant !
L'amendement n° 4335 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 4655 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 4561 est retiré.
L'amendement n° 2259 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 68
Nombre de suffrages exprimés 57
Majorité absolue 29
Pour l'adoption 57
Contre 0
L'article 10 bis est adopté.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Nous sommes plutôt favorables à l'article 11 car il vient renforcer les groupements d'employeurs, dont on sait à quel point ils sont utiles. Je pense surtout aux services de remplacement, qui permettent notamment à de petites exploitations de polyculture-élevage de travailler dans des conditions plus favorables en mettant en commun des salariés. Dont acte.
Cela dit, puisqu'il a été supprimé lors des débats en commission des affaires économiques, grâce à notre mobilisation et contre l'avis de la minorité présidentielle ,
Exclamations sur quelques bancs du groupe RE
On va le remettre !
…dont on trouve des traces après l'article 12. Dans ce projet de loi pourtant censé permettre le renouvellement des générations agricoles et favoriser l'installation, il n'y a rien sur le foncier – nous l'avons assez dit. Rien sur la régulation du foncier en faveur de ceux qui veulent s'installer ; rien non plus qui permette de réguler les prix du foncier et d'éviter leur hausse trop importante, ou de combler les failles juridiques des Safer pour empêcher l'accaparement des terres par des sociétés d'investissement.
Pire, la minorité présidentielle a introduit le GFAI, un instrument de financiarisation des terres agricoles et d'accaparement par de grands investisseurs privés. Nous l'avons assez mis en lumière en commission des affaires économiques, où l'ensemble des groupes parlementaires d'opposition ont voté contre la minorité présidentielle. L'article 12 a été supprimé, mais il en reste quelques relents après l'article 12, puisque je vois que l'amendement n° 4467 de Jean-René Cazeneuve, qui porte article additionnel après l'article 12, n'a pas été retiré. S'il n'est pas là pour le défendre, tant mieux ! Il est certes seul signataire, mais il a bel et bien essayé de revenir à la charge.
Comptez sur nous pour rejeter fermement tout ce qui vise, d'une façon ou d'une autre, à réintroduire le groupement foncier agricole d'investissement, auquel tout le syndicalisme agricole s'est opposé !
Nous en ferons autant pour ce qui concerne les investisseurs locaux, qui font aussi l'objet d'une série d'amendements portant article additionnel après l'article 12.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est vrai qu'en commission, nous n'avons pas vraiment échangé sur la question des groupements d'employeurs, mais je voudrais tout de même en dire un mot, pour que l'article 11 ne soit pas adopté sans discussion. En zone rurale notamment, ils jouent vraiment un rôle essentiel, à la fois pour les salariés et pour l'ensemble de nos entreprises agricoles.
Le type de contrat de travail qui a été promu et développé par les groupements d'employeurs est utile, parce qu'il permet la stabilisation d'une relation contractuelle entre un salarié et les entreprises qui font appel auxdits groupements – et ce n'est pas, contrairement à ce que certains peuvent penser, de l'intérim. C'est donc une source de stabilité pour le salarié : il a beau avoir plusieurs employeurs, un unique contrat de travail recouvre toutes les missions qu'il accomplit de manière saisonnière dans des entreprises différentes. Mais ça l'est aussi pour l'employeur : il bénéficie de la mise à disposition de salariés qui lui sont indispensables dans les périodes de recrudescence de son activité – en agriculture, on sait que certaines périodes mobilisent davantage de saisonniers.
Les agriculteurs membres de ces groupements nous avaient signalé la différence de traitement dont ils pâtissaient en matière de créances relatives aux salaires et aux charges sociales, et il était indispensable de corriger ce problème. Les dispositions de l'article 11 sont donc les bienvenues ; elles viendront soutenir et promouvoir les groupements d'employeurs qui, encore une fois, sont vitaux pour l'ensemble des territoires – et particulièrement le mien, qui en compte de très actifs.
La suite de l'examen du texte ne permettra pas de s'exprimer sur la question du foncier et il semble qu'en la matière, la messe est dite : le foncier n'est pas traité dans ce projet de loi. Une petite lueur d'espoir nous vient tout de même du président de la commission – et je veux l'en remercier –, qui a ouvert la perspective d'un travail susceptible d'alimenter les réflexions à ce propos, d'autant que, si je ne me trompe, le congrès des JA porte sur le même sujet. Nous disposons donc de tous les éléments nécessaires à l'instauration, en 2025, de ce que nous voulions introduire à l'article 12, à savoir des instruments de régulation de l'ensemble des marchés fonciers.
Faisons preuve d'honnêteté politique et intellectuelle : il n'est plus temps de réintroduire des dispositifs de portage foncier, quels qu'ils soient, alors que nous n'avons pas évoqué le partage – le portage sans partage, cela n'a absolument aucun sens. La bonne nouvelle, c'est la proposition de Stéphane Travert, que je remercie de nouveau.
Il y a quelques mois, lors d'une réunion du bureau de la commission, il avait été question de lancer une évaluation de la loi Sempastous. C'était un peu trop tôt, mais j'ai depuis échangé avec des administrateurs territoriaux, de l'État ou du secteur parapublic, et leur analyse est déjà unanime : les failles de la loi Sempastous sont béantes. Nous aurions pu les corriger dans le cadre de ce projet de loi ; nous avions déposé des amendements qui permettaient de le faire. C'est partie remise, mais de grâce, ne nous faites pas le coup de réintroduire une disposition que nous avons rejetée en commission et sur laquelle nous nous sommes déjà prononcés.
Je voudrais d'abord réagir aux propos de Mme Blin. Il est vrai que cet article n'a pas provoqué de débats particuliers ; c'est presque dommage, d'une certaine façon. Les groupements d'employeurs, qui se sont d'ailleurs développés en dehors du monde agricole, ont en effet souvent montré leur utilité, compte tenu de la saisonnalité de certains emplois et de leur morcellement : le fait, pour un salarié, de travailler pour plusieurs employeurs appartenant au même groupement est un facteur de stabilisation, qui contribue à l'attractivité des métiers. Dans des départements comme le vôtre – et dans bien d'autres, d'ailleurs –, c'est une nécessité.
Une faille avait été constatée dans le dispositif depuis très longtemps ; elle mettait en situation de risque juridique et financier les groupements d'employeurs qui, comme d'autres structures collectives agricoles, nécessitent d'être consolidés. C'est bien l'objectif de l'article 11, qui répond pleinement, je crois, aux attentes, aux besoins, aux demandes et aux inquiétudes qui étaient jusqu'alors celles des groupements d'employeurs.
Ensuite, plusieurs d'entre vous ont parlé du groupement foncier agricole d'investissement ; je vais donc l'évoquer à mon tour. Ne vous inquiétez pas : je n'ai pas l'intention de redéposer, à la dernière minute, l'amendement gouvernemental. Peut-être cela vous aurait-il réjouis ?
Je n'ai peur de rien, madame Blin, ce n'est pas la question ! Vous ne pouvez pas nous demander d'écouter l'Assemblée, puis nous reprocher de le faire. J'ai une assez longue carrière professionnelle et politique pour ne pas avoir peur des échecs.
Sur le sujet qui nous occupe, je suis souvent en désaccord avec Dominique Potier – mais ce n'est pas grave, cela ne nous empêche pas d'échanger : ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de partage qu'il ne peut y avoir de portage. Les 400 millions d'euros du fonds Entrepreneurs du vivant, c'est du portage foncier ! Et c'était aussi ce que nous voulions faire en créant les groupements fonciers agricoles d'investissement. Manifestement, certains pensent que le Gouvernement avait des intentions cachées, mais je vous assure que non ! La version améliorée de cette opinion, si je puis dire, celle de Dominique Potier, consiste à dire qu'il y a des « failles béantes » que nous n'avons pas vues. L'amendement de réécriture du rapporteur général avait pour but d'y remédier, mais il n'est pas nécessaire d'insister ni de s'énerver à ce sujet : c'est une question qui sera traitée.
Je salue ensuite, même si cela ne me regarde pas, l'initiative qui a été proposée par le président de votre commission des affaires économiques, mais je nous mets en garde collectivement. Au sujet du foncier, tout le monde dit qu'il faut y travailler mais à la fin, tout le monde – y compris, peut-être, vos interlocuteurs, monsieur Potier – prêche pour le statu quo.
C'est ainsi que les choses se passent depuis vingt ans. Beaucoup de gens disent qu'il faut changer le système car il ne fonctionne pas…
Vous confirmez ! Ils ne cessent de dire qu'il faudrait changer ceci ou cela, mais quand on leur dit « d'accord, on s'y met ! », le miracle du conservatisme se produit : plus rien ne bouge.
Dans cette affaire, il va donc falloir que chacun se prenne en main. C'est d'ailleurs pour cette raison que ce texte n'est pas une loi foncière – je l'ai dit depuis le début : il y a beaucoup de non-dits – c'est un euphémisme – et de conservatisme, et beaucoup de gens qui trouvent que tout va très bien comme ça. Quant à moi, vous me trouverez toujours prêt à faire évoluer les choses, mais je vous préviens : attention à tous ceux qui, dès qu'on introduit un nouveau dispositif, le démolissent avant d'expliquer qu'il faut que tout change pour que rien ne change.
M. Henri Alfandari applaudit.
C'est exactement ce dont il s'agit.
Ceux qui nous disent qu'il faut que tout change sont bien contents, à la fin, que rien ne change. Et ça, il va falloir que ça change !
Sourires.
Je crois que mes propos sont assez justes, monsieur Potier. Cela fait vingt ans que ça dure, et chacun va devoir prendre ses responsabilités.
Je confirme enfin à Mme Trouvé que je ne redéposerai pas l'amendement gouvernemental. Le débat a eu lieu et je constate que nous n'avons pas trouvé d'accord là-dessus, mais nous devrons remettre l'ouvrage sur le métier.
Sourires.
C'est la vie politique !
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 72
Nombre de suffrages exprimés 67
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 67
Contre 0
L'article 11 est adopté.
Il nous reste 772 amendements à examiner ; je vous propose donc d'accélérer un peu. Nous avions bien commencé, mais nous avons un peu calé.
Cet amendement de notre collègue Jérôme Nury vise à créer un guichet unique dématérialisé qui permettrait aux vignerons de gérer plus facilement leurs démarches administratives et leurs obligations réglementaires. Il s'inscrit dans le processus de simplification que vous menez en supprimant les doublons déclaratifs et en fusionnant les déclarations grâce aux données déjà renseignées.
Il n'aura échappé à personne que nous avons voté, à l'article 8, la création d'un guichet unique pour tous les acteurs du monde agricole, dont font partie les vignerons. Cela étant, vous avez raison de soulever à nouveau le problème, ce qui nous permet de réaffirmer que nous porterons une attention particulière à la filière viticole. Le Gouvernement le prouve, puisqu'il n'a eu de cesse de leur accorder des aides supplémentaires à chaque nouvelle crise qu'ils avaient à surmonter.
Aide à l'arrachage, à la distillation, création d'un fonds d'urgence : le soutien s'est traduit par un effort d'environ 230 millions d'euros.
Cela étant dit, la création d'un guichet unique relève de l'organisation administrative de l'État, et non de la loi. Je suis corapporteur, avec Sylvain Carrière, d'une mission d'information relative aux stratégies de marché du secteur viticole, et nous ne manquerons pas de vous soumettre des recommandations pour revoir l'organisation des services de l'État afin de renforcer l'efficacité de l'accompagnement du monde agricole. Par conséquent, je vous invite à retirer vos amendements, sinon j'y donnerai un avis défavorable.
Combien de fois nous sommes-nous promis de créer un guichet unique ? En vérité, les outils d'aide à la filière viticole sont déjà nombreux. FranceAgriMer les accompagne dans l'investissement et l'Agence de services et de paiement se tient également à leur disposition, pour ne citer que ces deux établissements. Bref, quoi que l'on décide, ce sera compliqué.
En revanche, je me suis lancé avec Thomas Cazenave et des représentants de la profession dans un vaste travail de simplification qui aboutira, dans les prochaines semaines, non pas à créer des guichets uniques, mais à faciliter les démarches administratives, par exemple les déclarations douanières. Cette démarche s'inscrit dans le processus de simplification réglementaire destiné à libérer les viticulteurs de contraintes administratives qui n'ont pas évolué depuis trente ou quarante ans et dont on se demande bien pourquoi elles existent encore. La création d'un guichet unique ne nous semble pas la réponse la plus adaptée : avis défavorable.
Le guichet unique, c'est l'Arlésienne. On en parle partout, pour régler les problèmes qui se posent dans le milieu de l'industrie ou de l'économie ou, plus simplement, pour faciliter le quotidien de nos concitoyens. Nous avons voté, à l'article 8, la création d'un guichet unique par l'intermédiaire du réseau France Services agriculture, mais celui-ci aurait pour seule vocation d'aider les agriculteurs à s'installer. Ce n'est pas la même chose qu'ouvrir un guichet unique pour faciliter les démarches administratives, répondre aux sollicitations, simplifier les demandes d'aide, etc. Les viticulteurs tirent la sonnette d'alarme parce qu'ils sont peut-être plus souvent que d'autres obligés de solliciter l'aide de l'État pour compenser les pertes de leur production, particulièrement vulnérable aux aléas climatiques. Nous avons entendu votre engagement à simplifier. Attendons de voir ce que cela donnera, car la simplification est souvent un vœu pieux. Nous allons tout de même retirer nos amendements, car nous avons senti que vous étiez sincères – mais pardonnez-nous, nous restons quelque peu sceptiques.
Je n'ai pas bien compris la réponse du rapporteur général, qui nous a renvoyés à la création d'un guichet unique à l'article 8 alors que le ministre a rappelé que celui-ci ne servirait qu'à accompagner la transmission et l'installation. Tout cela reste assez flou. Pourriez-vous nous apporter des précisions ?
Le ministre nous a expliqué qu'il avait lancé une mission de simplification avec le ministre Cazenave. Je suis allé voir de quoi il retournait, et je me permets de vous signaler que le processus ne peut se résumer à la simplification de quelques formulaires. Un viticulteur, ne serait-ce que pour gérer ses stocks, doit remplir quatorze déclarations chaque année sur un site des douanes incompréhensible ! Ce n'est pas seulement le viticulteur de 60 ans qui s'y perd – même moi, je n'y arrive pas ! Et il suffit d'une toute petite erreur pour emporter des conséquences gravissimes. Par exemple, un viticulteur s'est vu annuler les aides de FranceAgriMer parce qu'il n'avait pas validé un brouillon !
J'ai bien compris que vous aviez l'intention de vous attaquer au problème, monsieur le ministre, mais je vous invite à vous retrousser les manches : il y a du travail ! On ne peut pas continuer à fonctionner avec ce système soviétique qui inflige des amendes pour des broutilles – par exemple, faire une déclaration le 11 du mois alors qu'elle doit être faite le 10 !
Et que dire de Telepac ! Il faut changer de mot de passe tous les six mois – pour une déclaration annuelle –, mais pour changer le mot de passe, il faut adresser un courrier à la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM).
Monsieur le rapporteur général, vous demandez la parole ? Les amendements ayant été retirés, le débat est terminé. Je vous laisse la parole, mais si nous continuons ainsi, nous ne réussirons pas à conclure.
Je voudrais prendre quelques minutes pour revenir sur le projet de création d'un outil de portage du foncier dont nous aurions dû débattre.
Il n'y a plus d'amendements, monsieur le rapporteur général ! M. de Fournas n'aurait même pas dû s'exprimer.
L'amendement n° 3994 est retiré.
L'amendement n° 4622 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Sur les amendements n°
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir l'amendement n° 4227 .
Cet amendement de mon collègue Charles Fournier vise à démocratiser le mode de prise de décision dans les groupements fonciers agricoles en modifiant l'article L. 322-10 du code rural et de la pêche maritime, qui impose dans les GFA un droit de vote proportionnel à la quotité de capital que représentent les parts détenues, lorsque les statuts obligent le groupement à mettre en bail la totalité de son patrimoine immobilier. D'après cet article, ce mode de décision vaut même en cas de clause contraire.
Rédigé avec Terre de liens et Agter – association pour contribuer à l'amélioration de la gouvernance de la terre, de l'eau et des ressources naturelles –, l'amendement vise, tout en garantissant la liberté contractuelle des associés, à donner de la flexibilité aux GFA en leur permettant d'établir une clause qui instaure un mode de décision différent. Ce ne serait qu'une possibilité, destinée par exemple à assurer une prise de décision plus démocratique, notamment en appliquant le principe « un associé, une voix », comme cela se fait au sein des sociétés civiles immobilières.
Vous souhaitez donner la possibilité aux GFA de prévoir dans leurs statuts une clause instaurant un mode de décision différent de celui qui institue un droit de vote proportionnel à la quotité de capital détenu, notamment par la possibilité d'appliquer le principe « un associé, une voix ».
Ce principe vaut pour les sociétés coopératives agricoles.
J'ai d'abord eu un a priori favorable à cette ouverture en commission – celle-ci a d'ailleurs donné un avis favorable à l'amendement. Réflexion faite, je ne suis pas convaincu qu'il faille toucher à l'équilibre qui vaut pour les GFA, d'autant qu'il ne semble pas susciter de difficultés particulières. Avis défavorable.
Défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 70
Nombre de suffrages exprimés 69
Majorité absolue 35
Pour l'adoption 20
Contre 49
L'amendement n° 4227 n'est pas adopté.
Cet amendement de mon collègue Nicolas Ray vise à instaurer un prêt à taux zéro. Si l'on veut que les générations se renouvellent, il faut favoriser l'installation des jeunes agriculteurs en leur permettant d'acquérir du foncier.
Même avis. L'État a dédié 2 milliards d'euros à la création de prêts garantis qui permettront d'atteindre cet objectif.
Vous proposez, d'une certaine manière, de restaurer les prêts à taux bonifié de la politique agricole commune. C'est une bonne idée. Toutefois, les députés de La France insoumise s'abstiendront sur cet amendement, car le seuil de 70 000 euros que vous prévoyez nous paraît trop élevé et pourrait exclure des petites et moyennes exploitations. C'est notre seule réticence, mais sachez que nous sommes prêts à voter cette mesure pour peu que vous y retravailliez.
L'amendement n° 768 n'est pas adopté.
Il s'agit d'ouvrir la possibilité de recourir à une formalité simplifiée dans les diverses hypothèses où le contrôle des mouvements de parts sociales de sociétés détenant ou exploitant du foncier à usage ou à vocation agricole ne trouve pas à s'appliquer : une simple information fournie à la Safer permettrait, en quelques minutes, de déclarer que l'opération n'entre pas dans le champ d'application du dispositif.
Je ne pense pas souhaitable de remettre sur le métier la loi Sempastous pour prévoir une dérégulation ponctuelle. Avis défavorable.
L'amendement n° 692 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements, n° 1760 rectifié , 3893 rectifié , 4026 rectifié , 3895 et 2335 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 1760 rectifié , 3893 rectifié et 4026 rectifié sont identiques.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement n° 1760 rectifié .
Cet amendement de notre collègue Josiane Corneloup vise à relever à 20 000 euros de recettes par associé – plutôt que 10 000 – le plafond des activités commerciales accessoires que peut pratiquer une société civile agricole, toujours dans la limite de 50 % du chiffre d'affaires.
Les amendements identiques n° 3893 rectifié de M. Dominique Potier et 4026 rectifié de M. David Taupiac sont défendus, de même que les amendements n° 3895 et 2335 de M. Dominique Potier.
Quel est l'avis de la commission ?
L'article 12 bis a été ajouté par la commission des affaires économiques. Il n'était donc pas prévu dans le projet de loi initial, mais il a le mérite de poser les termes d'un débat intéressant sur les activités annexes. Tel qu'il est rédigé, il me convient et je comprends votre volonté de sécuriser juridiquement le dispositif. Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée nationale, en considérant que cet avis vaut invitation à y retravailler au cours de la navette. L'article étant né des travaux de votre commission, il faudra en effet associer le Sénat à la réflexion. Par ailleurs, il me semble que certaines dispositions ne relèvent pas du domaine législatif, mais du domaine réglementaire.
Le jeu est encore ouvert, puisque M. le ministre a émis un avis de sagesse.
Cet article est issu d'un amendement du groupe Socialistes et apparentés, inspiré par une proposition des Jeunes Agriculteurs et présenté en commission.
Contre toute attente, celle-ci l'a adopté, avec le soutien de tous, y compris la majorité – et c'est très bien.
La question qu'il pose, celle de la défiscalisation des activités commerciales, est délicate. Il faut se montrer prudent ; c'est pourquoi j'approuve vos réserves, monsieur le ministre.
Je pourrais néanmoins citer des exemples très concrets de personnes qui ont dû créer une société commerciale pour des activités représentant 10 000 à 15 000 euros de recettes, qui ne font que consolider des activités représentant 1 million d'euros sur un Gaec. Cela semble un peu disproportionné.
Cependant, il faut veiller à ce que le monde agricole ne vienne pas, grâce à cette défiscalisation, concurrencer l'activité des professionnels – le boucher du coin, le transformateur de fromages ou tout autre commerçant local.
S'il faudra donc trouver un équilibre, je me réjouis que ces amendements recueillent votre approbation. Ils consolident une agriculture diversifiée à valeur ajoutée, qui représente un contre-modèle face aux phénomènes d'accaparement et de banalisation que nous condamnons parce qu'ils appauvrissent nos territoires et nos campagnes.
Sur l'article 12 bis, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Francis Dubois.
Je rappelle à mon collègue Dominique Potier qu'il ne s'agit pas uniquement d'une initiative socialiste, puisque j'avais moi-même déposé un amendement identique en commission.
Je vous donne à présent un exemple concret. Un éleveur en agriculture bio m'a expliqué qu'il souhaitait s'approvisionner chez un collègue voisin – lui aussi installé en bio – parce qu'il manquait d'œufs pour fournir sa clientèle, mais que cela n'était pas autorisé. Avec ces amendements, nous leur offrons cette possibilité, l'objectif étant de satisfaire le consommateur, notamment lorsqu'il souhaite s'approvisionner en productions bio.
L'amendement de notre collègue Corneloup prévoit de rehausser le plafond, qui passerait ainsi de 10 000 à 20 000 euros de recettes par associé. Il faut soutenir ces amendements car ils nous permettent, de façon très concrète, de satisfaire le consommateur. C'est important pour notre agriculture, notamment d'excellence.
Cette disposition entraîne une modification du code rural et de la pêche maritime. Je veux mettre en garde sur la nécessité de prendre en considération la dimension fiscale. Nous parlons du régime de translucidité fiscale, ce qui signifie que le Gaec en question pourra rencontrer des difficultés – je pense par exemple au risque d'être soumis à l'IS, l'impôt sur les sociétés.
Il faut donc avoir une vision globale, incluant le volet fiscal, de ces recettes complémentaires qui ne constituent pas des bénéfices agricoles, mais des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
Les amendements identiques n° 1760 rectifié , 3893 rectifié et 4026 rectifié sont adoptés ; en conséquence, les amendements n° 3895 et 2335 tombent, de même que les amendements n° 3042 , 2337 et 3894 .
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 67
Nombre de suffrages exprimés 46
Majorité absolue 24
Pour l'adoption 46
Contre 0
L'article 12 bis, amendé, est adopté à l'unanimité.
Je profite de l'examen de cet article qui porte sur les coopératives agricoles pour alerter sur la situation des caves coopératives, en particulier leur exclusion des récentes mesures d'accompagnement annoncées pour soutenir la filière viticole malgré leur contribution significative à la production nationale de vin. Je vous ai d'ailleurs déjà posé une question à ce sujet, monsieur le ministre, et j'attends votre réponse.
Si je soulève ici ce problème, c'est parce que les caves coopératives jouent un rôle crucial dans le maintien du revenu des exploitants, particulièrement dans le contexte post-covid, marqué par des défis climatiques et économiques accrus. Malheureusement, de nombreuses coopératives sont dans l'incapacité de garantir le revenu de leurs membres. Il faut intégrer des mesures spécifiques au sein des initiatives de soutien.
Plusieurs dispositions qui se révèleraient bénéfiques sont attendues, par exemple la mise en place du stockage privé, la création d'une mesure de soutien à la trésorerie similaire à celle qui fut instaurée après le gel de 2021 – attribuée sous forme de subvention en cas de perte d'excédent brut d'exploitation –, ou encore l'instauration d'une année blanche pour les coopératives, incluant la prise en charge des intérêts et le report des annuités et des amortissements en fin de tableau.
En outre, il est urgent de prévoir un plan de restructuration adapté afin d'éviter une déstabilisation des coopératives face aux crises et aux changements prévus dans le secteur. Le plan d'arrachage qui a été annoncé, qui concernera 100 000 hectares, représente également un enjeu déterminant pour la restructuration des coopératives – il ne faudra pas les oublier.
En l'absence de telles mesures, les exploitations restantes pourraient être confrontées à leur tour à des difficultés insurmontables. Cette question est importante pour mon territoire puisque, vous le savez, les vignes couvrent 50 % du département du Gers.
L'amendement n° 2338 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 12 ter est adopté.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 1968 .
Les députés d'outre-mer du groupe Gauche démocrate et républicaine sont à l'initiative de cet amendement qui porte sur le système agricole alimentaire des outre-mer.
Dans les territoires ultramarins, le système agricole repose principalement sur de grandes monocultures essentiellement orientées vers l'export. Afin de favoriser l'autonomie alimentaire de ces territoires, qui se caractérisent par un fort taux de dépendance aux importations alimentaires, cet amendement propose de porter une attention particulière à l'agriculture familiale de petite échelle. Celle-ci doit être encouragée en raison du rôle qu'elle joue dans la valorisation des espaces difficiles et des savoir-faire agroécologiques, ainsi que pour assurer la sécurité alimentaire des territoires.
Outre-mer, l'agriculture de petite échelle représente en effet 65 à 99 % des exploitations, variant de 2 à 5 hectares, loin des 19 hectares de surface moyenne à l'échelle nationale.
La Cour des comptes a eu l'occasion de souligner la répartition inégale des dispositifs d'aide, aussi bien à l'échelle européenne que nationale, entre les territoires ultramarins en raison d'une logique de filière.
Cet amendement propose donc d'accorder une attention particulière aux petites agricultures d'outre-mer, et de favoriser une répartition plus équilibrée et donc plus équitable des soutiens publics, aussi bien à l'échelle nationale qu'européenne.
Je vous remercie pour cet exposé et considère qu'il s'agit d'un amendement d'appel à propos des orientations de la politique agricole outre-mer, et en particulier de la capacité exportatrice des petites exploitations agricoles – une question à laquelle je suis très sensible. Au passage, si la part de l'export réalisé était aussi élevée dans l'ensemble du pays qu'en outre-mer, notre balance commerciale ne serait pas déficitaire. Cependant, cette question ne saurait faire l'objet d'une disposition législative spécifique. Par conséquent, avis défavorable.
Je vais prendre le temps de répondre, car c'est une question qui tient à cœur à de nombreux députés de votre groupe, monsieur le président Chassaigne.
Tout d'abord, le dispositif de l'amendement comporte trop d'éléments précis.
Ensuite, cette question est déjà abordée dans l'article 1er .
Par ailleurs, vous demandez aux collectivités territoriales – conformément aux dispositions des articles 73 et 74 de la Constitution – d'élaborer avec l'État des plans de filière et d'autonomie alimentaire. Nous le faisons déjà et nous continuerons à le faire.
Le principal enjeu est celui de la diversification. Admettons toutefois que dans plusieurs territoires ultramarins, les équilibres économiques reposent sur une spécialisation, voire une hyperspécialisation – sur le sucre ou la banane par exemple. Il faut donc bien préparer une transition, mais dans des conditions soutenables, dans la mesure où ces activités économiques restent très importantes pour ces territoires.
Si l'avis est défavorable, ce n'est pas sur le fond. Une grande partie de l'amendement est satisfaite par l'adoption de celui que vous aviez déposé à l'article 1
Par ailleurs, une des dispositions de l'amendement ne me paraît pas relever du domaine de la loi. Au demeurant, nous l'avons déjà mise en œuvre – je ne dis pas que nous avons atteint notre objectif, mais l'intention du Gouvernement est bien là.
Je vous remercie pour vos réponses. Néanmoins, les députés d'outre-mer – et pas uniquement ceux qui font partie du groupe de gauche que je préside, loin de là – ont souvent le sentiment d'être maltraités. Vous avez beau parler d'amendements d'appel et affirmer que les problèmes peuvent se résoudre, il n'empêche que ces collègues demandent du concret. Sans concret, il ne reste que la poussière. J'ajouterai : c'est dire l'importance du plumeau !
L'amendement n° 1968 n'est pas adopté.
Il vise à accentuer la protection de nos éleveurs confrontés à des abattages sanitaires imposés par l'État et qui visent la totalité de leur troupeau, notamment dans le cas de la tuberculose bovine.
Il prévoit donc de supprimer la charge fiscale pesant sur les indemnités versées aux éleveurs dans le cadre de ces abattages. Les exemples qui illustrent les difficultés occasionnées par l'imposition de ce versement exceptionnel sur l'année fiscale en cours ne manquent malheureusement pas. Nous proposons d'y mettre un terme.
Je me réjouis qu'une vraie solidarité s'exprime pour accompagner les éleveurs contraints par l'autorité administrative d'abattre leurs élevages dans ces situations. Cependant, cette solidarité est un peu égratignée par l'imposition de l'indemnisation versée aux éleveurs.
Je sais qu'il existe un équivalent de cette indemnisation pour les grandes cultures, par exemple les viticultures : c'est l'ISN, l'indemnité de solidarité nationale, prise en charge à 90 % par l'État et à 10 % par les assurances. Aussi aimerais-je vous demander, monsieur le ministre – car je ne m'en souviens plus moi-même – si, de la même manière que pour les éleveurs, l'ISN versé aux exploitants concernés est imposée.
La parole est à M. Pascal Lavergne, rapporteur de la commission des affaires économiques pour les articles 5 à 7 bis et 13 à 20, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements.
Je suis sensible à ces questions puisque sur mon territoire, le sud-Gironde, la tuberculose sévit et frappe des troupeaux – je sais qu'un troupeau de 200 bêtes devait être abattu dans le Libournais, ce qui pose d'autant plus de soucis qu'il s'agit de vaches de race bazadaise, dont les effectifs sont déjà peu nombreux.
Ces opérations posent également des problèmes en matière de fiscalité, puisqu'il faut inscrire les stocks d'animaux au bilan. Or le montant de l'indemnisation perçue est bien souvent supérieur à la valeur en stock des animaux – si l'évaluation a été réalisée correctement, bien sûr. La fiscalisation qui s'applique alors pose certaines difficultés.
Il faut bien savoir que cette situation plonge les éleveurs dans la détresse. Il n'est jamais drôle de se lever le matin et de voir que la stabulation est vide. Pour avoir assisté à de telles scènes chez des voisins, je sais à quel point tout cela est dramatique.
Je comprends que dans un tel contexte, l'imposition soit perçue comme une forme de pénalisation rapide et inattendue, alors que les éleveurs essaient déjà de se remettre d'une épreuve. Je pourrais d'ailleurs en dire autant des cotisations sociales – surtout que dans ce cas, le principe de progressivité ne s'applique pas. Certes, on peut toujours avoir recours à des dispositifs fiscaux tels que la moyenne triennale ou l'étalement des revenus.
J'émettrai cependant un avis défavorable, car je considère qu'il s'agit d'un amendement d'appel. À plusieurs reprises, au cours de nos débats sur ce texte, nous avons émis le souhait d'aller plus loin en matière fiscale. J'aimerais surtout – nous en avons d'ailleurs parlé avec le président Travert, le ministre et Jean-Paul Mattei pas plus tard qu'hier – que nous menions, au cours de cette législature, et même assez rapidement, dans la continuité de cette loi d'orientation, une réflexion globale sur le revenu des agriculteurs. Alors qu'ils sont déjà soumis à des aléas importants – je pense par exemple au climat ou aux épizooties –, il n'est pas acceptable qu'ils subissent, en plus, des contraintes fiscales et sociales qui ne sont pas proportionnées.
Il s'agit d'un sujet important. Les agriculteurs subissent des crises difficiles, notamment du fait de la tuberculose.
Pour répondre à la question de M. Dive, le système est le même pour l'ISN : une indemnité est versée pour compenser la perte d'un produit, il est logique qu'elle soit fiscalisée.
Je souhaite évoquer deux sujets complémentaires. En premier lieu, la revalorisation des barèmes : nous l'avons faite.
En second lieu, les modalités d'indemnisation. Vous le savez aussi bien que moi, la question de la tuberculose est complexe. Nous devons être très prudents afin de conserver le statut de pays indemne de la maladie ; à défaut, les bêtes ne pourraient plus sortir des régions touchées. Il convient de demeurer sous le taux d'incidence critique, étant observé qu'il est très difficile d'éradiquer cette maladie.
La prévalence est longue ; les troupeaux doivent être isolés ; on ne peut plus vendre leur lait et, dans l'attente de l'abattage, il est impossible d'en faire quoi que ce soit.
Je suis conscient de la tension vécue par les éleveurs concernés, parfois plusieurs fois successivement, par une épidémie. Je pense en particulier à l'exemple dramatique d'un élevage de Gironde. Nous travaillons sur ce sujet.
Pour autant, il ne faut pas en rabattre sur la prophylaxie. Le concept « une seule santé » est d'importance et a des impacts économiques. Si nous perdions le statut de pays indemne, les conséquences seraient catastrophiques. Nous devons travailler sur la revalorisation de l'indemnisation et sur l'adaptation des mécanismes sanitaires, grâce à des tests qui permettront probablement une détection plus rapide de la maladie.
Nous avons besoin de rester sérieux et solides pour des raisons non seulement sanitaires, mais aussi économiques.
Mon avis est défavorable, même si je comprends l'intention de lever la tension sur les éleveurs qui ne parviennent pas à se débarrasser de la maladie, également présente en faune sauvage. Le sujet est large ; nous ferons des propositions, par voie réglementaire, dans les semaines qui viennent.
Pour un grand nombre d'éleveurs, l'abattage pour des raisons sanitaires représente un drame économique et psychologique. Il fragilise bien souvent les petites exploitations qui ont déjà des difficultés d'endettement et de revenus.
Vous le savez, le groupe La France Insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale est dubitatif, voire sceptique sur la défiscalisation des aides – pour ne pas dire qu'il y est opposé. Il nous semble préférable de les revaloriser, notamment pour les petites exploitations d'élevage, et d'assurer un meilleur accompagnement des exploitations frappées par l'ensemble des structures de l'État.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous connaissez ma position sur la nécessaire évolution du protocole d'abattage, monsieur le ministre. Dans l'attente des mesures à venir, je vois cet amendement d'un œil favorable, tout en partageant une grande partie des observations de ma collègue Trouvé sur la réévaluation des indemnisations, notamment pour les races locales ayant une vocation spécifique, par exemple, en montagne, les races transhumantes.
Je note que le rapporteur a souligné la nécessité d'un ajustement sur les cotisations et l'ensemble des frais qui continuent à courir malgré l'abattage.
Nous devons mener une réflexion sérieuse sur ce sujet. En effet, certains agriculteurs sont en détresse ; des petites exploitations ont, et auront, du mal à se relever. Vous avez cité un cas en Gironde ; il y en a également plusieurs sur mon territoire, dont un auquel les services du ministère sont particulièrement attentifs.
Nous devons avancer sur le protocole. J'entends vos propos sur le statut indemne, mais nous ne pouvons nous abriter derrière ce terme. Il nous faut mener une véritable réflexion avec les agriculteurs pour sortir de ces difficultés. Nous n'avons pas assez avancé sur le sujet ces dernières années.
Ces amendements soulèvent une question difficile pour nos agriculteurs. Je pense notamment à la détresse d'une jeune agricultrice dont le cheptel a dû être abattu. Elle se plaint d'être restée de longs mois sans réponse des services administratifs. Il s'agit d'un signal d'alerte. Les services administratifs doivent accompagner nos éleveurs lorsqu'ils se trouvent dans une situation de fragilité qui leur coûte ;
M. Inaki Echaniz applaudit
j'en ai fait mon combat.
Nous ne pouvons nous contenter de dire que nous mettons en place des dispositifs et que tout va bien aller.
Nous votons la loi, mais nous devons aussi nous assurer qu'elle est bien appliquée. Je ne mets pas les services en cause, mais en l'espèce, cela ne semble pas être le cas – tout du moins, l'ensemble des moyens n'ont pas été mobilisés pour accompagner cette jeune femme qui a dû lancer une cagnotte face à ses difficultés financières.
En ce qui concerne la grippe aviaire, la cartographie, et notamment la définition des zones indemnes, a des répercussions pour nos éleveurs. Mon département est classé zone indemne. Pourtant, certains éleveurs ont mis la clef sous la porte : ils n'étaient plus alimentés en canards ou en oies et se trouvaient dès lors dans l'impossibilité de poursuivre leur exploitation.
Au-delà de l'abattage des élevages, nous avons tué, par effet collatéral, un certain nombre d'éleveurs français – j'ose le dire : les plus petits, au profit des plus grands. .
M. Inaki Echaniz applaudit
Cet article fragilise le régime de répression des atteintes à l'environnement en restreignant la qualification de délit aux atteintes à la biodiversité. L'amendement de réécriture proposé par le Gouvernement est encore moins souhaitable ; il est contraire au droit européen et ouvre la voie à de nombreux contentieux.
Si nous partageons la volonté de créer un cadre plus clair et sécurisant pour les entreprises de travaux forestiers, qu'il convient de soutenir, cela ne doit pas passer par un affaiblissement de la réglementation sur les espèces protégées. Nous avons besoin d'améliorer l'accès à la formation et de renforcer les outils à la disposition des gestionnaires et propriétaires forestiers pour réduire l'impact des opérations sylvicoles sur les espèces protégées et leurs habitats.
Nous proposons donc de supprimer cet article, ou au moins, si l'amendement du Gouvernement est adopté, son II. L'intentionnalité ne saurait en effet être écartée du seul fait de l'existence d'un document de gestion forestière, lequel n'a aucune valeur informative ni, a fortiori, prescriptive, en matière de protection des espèces.
« Les atteintes à l'environnement, à l'origine de violents dérèglements climatiques, de graves crises sanitaires, de la destruction d'écosystèmes et de très importantes pollutions, ne sont pas sanctionnées à la hauteur des drames qu'elles provoquent. […]
La justice environnementale est en effet confrontée à de nombreux obstacles […]. Un manque de moyens, un nombre trop faible de juges, de procureurs, ou d'enquêteurs spécialisés, sans compter les délais de traitement des dossiers, ainsi qu'une surabondance des lois qui rend la législation peu claire.
En particulier, la réponse pénale à la délinquance environnementale – troisième activité criminelle la plus rentable dans le monde – demeure insignifiante. .
Mme Delphine Batho applaudit
Ce contentieux représente moins de 1 % des affaires jugées par les tribunaux français, contre 2 % dans les années 1990. Une majorité d'atteintes se règlent par des procédures alternatives (rappel à la loi, régularisation…). Et les condamnations prononcées demeurent, dans l'immense majorité des cas, dérisoires. Ce qui confère aux pollueurs et autres délinquants environnementaux une forme d'impunité.
Pour répondre à l'attente de justice légitime de nos concitoyens, nous vous demandons donc de faire de la lutte contre les atteintes environnementales une priorité nationale.
Cela exige d'augmenter les budgets alloués aux tribunaux amenés à traiter des affaires environnementales, de former et de recruter davantage de procureurs, qui, dans le ressort de leur parquet, ne disposent bien souvent que d'une demi-journée par semaine pour traiter ce type de contentieux, de mettre enfin sur pied un véritable service d'enquête environnementale, mais aussi de renforcer la législation actuelle, toujours inadaptée, en adoptant des lois plus robustes, plus compréhensibles, et plus contraignantes pour dissuader les contrevenants. »
Ces mots ne sont pas les miens. Ils sont parus dans Le Nouvel Obs du 22 mai 2024 et sont signés par 70 personnes, dont François Molins, procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris de 2011 à 2018 puis procureur général près la Cour de cassation.
Que faites-vous avec votre réécriture de l'article 13 ? Exactement l'inverse : une réduction des sanctions en cas d'atteintes à l'environnement sans étude d'impact. C'est honteux !
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.
Dans cet article, nous habilitons le Gouvernement à légiférer pour adapter l'échelle des sanctions réprimant les atteintes causées à l'environnement et, éventuellement, pour en modifier la nature en substituant à des sanctions pénales des sanctions administratives. C'est une nécessité.
En effet, dans le faisceau des malaises qui sont évoqués après la crise agricole figure le sentiment des agriculteurs d'être surveillés, voire « fliqués » matin, midi et soir, au-delà du raisonnable, dans leurs activités ,
M. Loïc Prud'homme s'exclame
notamment lorsqu'ils travaillent en lien avec la nature – c'est-à-dire en permanence, car telle est l'essence du métier d'agriculteur.
En France, le débat public se fonde sur de tels fantasmes, et parfois sur un tel manque de confiance vis-à-vis des agriculteurs, que nous opposons l'agriculture à l'environnement.
L'intervention de notre collègue écologiste l'a illustré en creux.
Les propos auxquels vous faites référence évoquent les atteintes environnementales dans leur globalité, sans viser l'agriculture. Or ici, nous débattons d'agriculture.
Que dit l'étude d'impact ? À l'inverse de ce que vous venez de dire – en un flou entretenu qui ne sert pas l'agriculture –, selon les services statistiques du ministère de la justice, il y a une excessive pénalisation des atteintes à l'environnement en agriculture. Les agriculteurs payent pour d'autres délinquants environnementaux.
Je regrette le flou que vous avez entretenu. Il est nécessaire de revenir à davantage de rationalité…
…et de modération dans l'esprit des lois relatives au travail des agriculteurs dans leur environnement.
L'amendement du Gouvernement visant à réécrire l'article 13 est un camouflet, pire, une insulte envers nos agriculteurs.
Non !
Il prévoit qu'en cas d'atteinte irréversible à la conservation d'espèces animales non domestiques, d'espèces végétales non cultivées ou d'habitats naturels, l'administration peut imposer sans préavis un stage de sensibilisation – en d'autres termes, un stage de rééducation environnementale – aux agriculteurs responsables.
Un stage de rééducation, rien que cela ! Vous semblez avoir du mal à comprendre la dureté du métier de nos agriculteurs pour imposer à nouveau de telles mesures coercitives.
Ordonner de telles sanctions sans préavis procède d'une démarche autoritaire et punitive. Les agriculteurs, déjà soumis à une accumulation de normes et de régulations, sont traités comme des coupables par défaut.
Cette présomption de culpabilité, sans possibilité de défense préalable, est injuste et souligne le mépris de l'administration pour les réalités du terrain. Contrairement aux bureaucrates déconnectés des réalités de la terre, les agriculteurs doivent jongler avec des contraintes économiques, climatiques, réglementaires de plus en plus lourdes. Prescrire un stage de rééducation à leur frais constitue une double peine imposant une pression financière supplémentaire à une profession déjà en détresse.
Ce gouvernement fait preuve d'une ignorance crasse des difficultés économiques chroniques du secteur agricole. Les lourds investissements nécessaires pour se conformer aux exigences de l'Union européenne, combinés à la baisse des prix des produits agricoles, rendent quasiment impossible le remboursement des dettes pour de nombreux agriculteurs.
Ajouter une nouvelle charge financière pour un stage obligatoire ne ferait qu'aggraver cette situation précaire.
En outre, les conditions de travail des agriculteurs sont très difficiles, sans vacances ni week-ends. La pression constante, les longues heures de travail, le stress financier contribuent à une crise de la santé mentale dans la profession. En France, un agriculteur se suicide tous les deux jours – un chiffre alarmant qui reflète la désespérance et l'épuisement moral de ceux qui nourrissent la nation.
Le groupe Rassemblement national ne votera pas l'amendement de réécriture de l'article 13.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Le droit de l'environnement, la protection des espèces végétales ou animales, n'a pas été élaboré par des extrémistes de l'environnement. Il existe depuis longtemps, il est maintenant installé,…
…et ce pour une bonne raison : l'environnement est un bien commun. Nous nous devons tous d'être conscients du besoin de préserver les espèces et de ne pas être négligents à cet égard. Bref, comme les autres droits qui constituent aujourd'hui notre République, nous devons les connaître dans la mesure du possible et les respecter.
Quant à l'article 13, soit nous acceptons la rédaction qui nous est proposée actuellement, et nous donnons alors tout pouvoir au Gouvernement pour faire par ordonnance ce qu'il souhaite,…
…ce que nous refusons, car nous n'avons pas confiance, soit nous acceptons la réécriture générale du Gouvernement, ouvrant alors la boîte de Pandore. En effet, elle aboutira notamment à ce que l'intentionnalité soit forcément présumée positive et les dégâts involontaires. Ainsi, par exemple, un forestier qui abat par négligence un arbre à cavités abritant une biodiversité précieuse, des espèces protégées, ne sera pas poursuivi. On validera aussi le fait que si un porteur de projet éolien détruit des chauves-souris parce qu'il aura négligé de faire ce qu'il fallait pour les protéger,…
…ou si un particulier ne se renseigne pas sur les conditions d'utilisation d'un produit phytosanitaire, entraînant la destruction d'une espèce protégée, ni l'un ni l'autre ne seront poursuivis. Vous êtes en train d'acter le fait que la protection des espèces va être rendue complètement caduque, que le droit de l'environnement sera complètement…
Mme la présidente coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est écoulé.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est peu dire que depuis le début de l'examen de ce texte, j'éprouve une réelle insatisfaction et même une grande déception. Mais parce que les agriculteurs nous l'ont demandé, j'ai assisté aux débats – et je ne lâche rien, je continue à défendre leurs positions.
Après cet article, il y aura l'article 13 bis, pour moi primordial et sur lequel j'ai formulé un certain nombre de propositions. Il est également primordial pour mes collègues du groupe Les Républicains, qui ont obtenu la création d'une mission d'information sur les contrôles dans les exploitations agricoles. C'est à ce titre que je me suis rendue dans des exploitations avec mon collègue Martineau pour observer comment cela se passe. Les agriculteurs eux-mêmes nous ont fait part de leur malaise, non qu'ils refusent d'être contrôlés – j'entends déjà certains collègues le prétendre à l'envi –, mais parce qu'ils sont contre les contrôles abusifs, contre les injustices et surtout contre les suspicions que certains laissent en permanence planer à leur sujet,…
Il y en a quand même qui veulent s'affranchir du courant environnemental !
…les faisant passer, comme j'ai pu l'entendre, pour les premiers pollueurs de l'environnement alors même qu'ils en sont les premiers protecteurs, eux les premiers amoureux de la nature, et qu'ils savent précisément de quoi il retourne.
Aujourd'hui, la question de l'échelle des peines est cruciale parce que, on le voit sur le terrain, nos agriculteurs sont traités comme de véritables délinquants. L'agent de l'OFB, l'Office français de la biodiversité, a d'ailleurs certaines prérogatives d'un agent de police judiciaire et peut à ce titre transmettre directement au parquet toute information relative à l'infraction suspectée ou qu'il estime avoir constatée. Cela veut dire potentiellement garde à vue, menottes et conséquences pénales.
Ne dites pas non, c'est la vérité ! Il est indispensable de dépénaliser. Nous reviendrons sur le contenu de l'amendement du Gouvernement, mais ce qui est sûr, c'est qu'il y a une grande impréparation qui nous oblige, une nouvelle fois, à une réécriture globale. Autrement dit, ce n'est vraiment pas clair. Mais je le redis, l'intention de dépénaliser est vitale pour nos agriculteurs.
Nous abordons le titre IV, qui vise à sécuriser, à simplifier et à libérer l'exercice des activités agricoles. Il ne s'agit pas d'un recul par rapport aux problématiques de l'écologie et de l'environnement, mais d'adapter le régime de répression des atteintes à la conservation des espèces animales non domestiques, des espèces végétales non cultivées et des habitats naturels, ainsi que des sites géologiques. Est-il normal que notre législation prévoie des peines pouvant aller jusqu'à trois ans de prison et 150 000 euros d'amende pour des dégâts causés par des agriculteurs ? Il y a nécessité de réexaminer les sanctions pénales, quitte à substituer des sanctions administratives à certaines d'entre elles et en identifiant bien celles qui sont inadéquates. Certes, nous devons instituer des obligations de restauration écologique à la charge des auteurs des actes incriminés, y compris s'il s'agit d'agriculteurs indélicats, mais nous devons aussi accompagner, voire former.
Libérons l'exercice des activités agricoles en soutenant nos agriculteurs et nos forestiers sans nous opposer à l'environnement et à l'écologie. Le groupe Démocrate soutiendra ces dispositions.
M. Pascal Lecamp applaudit.
L'élu local, ou même le député qui circule beaucoup dans les communes de sa circonscription, voit affiché ceci quand il se rend dans une mairie : la Charte de l'environnement. Déjà député, j'avais participé, dans le cadre de la commission du développement durable, à l'écriture de cette charte, avant d'intervenir lors du Congrès du 28 février 2005 qui a abouti à son adoption le 1er mars suivant. Mais je me demande, monsieur le ministre, si la Charte de l'environnement est affichée dans votre ministère et si, quand vous écrivez un article de loi, vous en tenez compte.
Bien sûr que oui.
J'ai un doute. En tout cas, j'ai la conviction – l'avenir montrera si j'ai tort ou raison – que ce qui proposé dans cet article, comme d'ailleurs dans l'article d'origine, risque de se fracasser contre la Charte de l'environnement. Relisons-la. Article 2 :« Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement » ; article 3 : « Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences » ; article 4 : « Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu'elle cause à l'environnement, dans les conditions définies par la loi » ; et j'en passe. Voilà qui prête à réfléchir. Je n'ai évidemment aucun doute sur le fait que votre réécriture sera majoritairement votée. Je rappelle tout de même à mes collègues Les Républicains qu'à l'époque, le Premier ministre était Jean-Pierre Raffarin, sous la présidence de Jacques Chirac, que la Charte représentait une avancée extrêmement importante,…
… et que dans certains cas, il faut écrire la loi d'une main tremblante. Peut-être faut-il aujourd'hui que la vôtre tremble, cet article risquant d'être en contradiction totale avec une avancée historique !
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture.
La séance est levée.
La séance est levée à treize heures dix.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra