La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.
Suite de la discussion d'une proposition de loi
Le ministre vient d'arriver, il était temps ! Nous sommes là pour faire respecter les députés !
On a eu peur qu'il soit victime d'un remaniement ministériel pendant le dîner !
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé la discussion des articles de la proposition de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 116 portant article additionnel après l'article 1er bis .
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 116 .
Il vise à inscrire en circonstance aggravante l'outrage sexiste ou sexuel envers une élue, cet outrage aggravé étant, depuis avril 2023, un délit et non plus une infraction. De très nombreuses femmes en ont témoigné : être une femme en politique, c'est la double peine, et ce n'est pas vous, madame la rapporteure, qui me soutiendrez le contraire – je me souviens en effet de votre témoignage en commission des lois la semaine dernière.
En politique, les femmes subissent les violences que tout élu connaît, souvent et de plus en plus fréquemment, et qui traduisent une défiance vis-à-vis des institutions politiques et leurs représentants, mais elles se retrouvent également victimes d'agressions que subissent spécifiquement les femmes – sexisme, appels au viol, propos à caractère sexuel dégradants. Comme le reste de la société, les institutions politiques peuvent être le lieu de propos sexistes et à connotation sexuelle ; les élues qui en sont victimes de la part d'autres élus, doivent donc être protégées.
La parole est à Mme Violette Spillebout, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission.
Je vous invite à retirer l'amendement mais je vais prendre le temps de vous expliquer pourquoi. J'ai été personnellement touchée par des outrages sexistes ou sexuels, si bien que je comprends que vous évoquiez ce sujet. Je pense d'ailleurs que beaucoup d'élues sont victimes de ce genre d'outrage, d'insulte ou de la diffusion de fausses informations concernant leur vie privée.
Avec Sébastien Jumel, j'ai reçu, dans le cadre de la mission d'information de la délégation aux collectivités de l'Assemblée nationale relative au statut de l'élu et à la lutte contre les violences envers les élus, des représentantes de l'association Élues locales, qui formule différentes propositions de soutien et de valorisation des femmes engagées en politique. Celle que vous défendez ne s'y retrouve pas, car le code pénal sanctionne déjà plus sévèrement l'outrage à l'égard d'une personne chargée d'une mission de service public que l'outrage sexiste ou sexuel : l'auteur du premier encourt une amende de 7 500 euros et jusqu'à six mois d'emprisonnement, alors que l'auteur du second risque une amende de 3 750 euros.
La nouvelle qualification de l'outrage amoindrirait donc la peine induite, mais nous pourrons revenir sur les violences sexistes et sexuelles lorsque nous débattrons de la proposition de loi relative au statut de l'élu, défendue par Sébastien Jumel et moi-même. Nous pourrons alors réfléchir à une aggravation de la peine encourue par les auteurs d'outrages sexistes ou sexuels.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, pour donner l'avis du Gouvernement.
L'amendement est satisfait et je vous invite à le retirer car la définition de l'outrage à l'égard d'une personne chargée d'une mission de service public ne spécifie pas les conditions dans lesquelles cette qualification est retenue. Aussi cette définition s'applique-t-elle également aux outrages sexistes ou sexuels, dont nous pourrons à nouveau évoquer le traitement lors de l'examen de la proposition de loi relative au statut de l'élu.
Dès lors que l'outrage à l'égard d'une personne chargée d'une mission de service public est plus sévèrement puni que ceux commis contre d'autres catégories de personnes, l'adoption de votre amendement aurait pour effet d'amoindrir la peine encourue par les auteurs que vous visez.
La proposition de loi dont nous débattons concerne les élus locaux : c'est donc maintenant, et non à une date ultérieure, qu'il faut modifier la loi. Je soutiens pleinement mes collègues lorsqu'ils rappellent que les femmes subissent ce genre de violences, lesquelles méritent d'être évoquées maintenant.
L'amendement étant repris, je me permets d'insister sur le fait que son adoption aurait pour conséquence de substituer l'outrage sexiste ou sexuel à l'outrage à l'égard d'une personne chargée d'une mission de service public, alors que ce dernier est puni plus sévèrement. Si nous avons demandé le retrait de cet amendement, c'était moins pour contester son fondement que pour éviter que de bonnes intentions aient pour effet de diminuer le quantum des peines. Notre avis est donc défavorable.
L'amendement n° 116 n'est pas adopté.
Le projet de loi prévoit d'infliger une peine de travail d'intérêt général (TIG) aux auteurs d'injures publiques à l'égard d'un élu. Cette disposition est parfaitement logique, car même si cette peine est trop rarement ordonnée par les juridictions, elle répare une injure publique par un travail public.
Dans le même esprit, l'amendement tend à ce qu'une peine de travail d'intérêt général puisse également être prononcée en cas de diffamation publique contre un élu.
Favorable également.
Notre groupe est favorable à cet amendement qui donne un sens à la peine et satisfait notre volonté de bien faire comprendre que l'agression d'un élu ne peut rester impunie. À cette fin, une peine de travail d'intérêt général nous paraît tout à fait pertinente.
L'amendement n° 90 est adopté.
On ne protégera pas les élus en aggravant une peine et je crois que vous frappez à tort et à travers.
Vous venez de dire l'inverse en défendant l'amendement précédent ! On marche sur la tête !
Oui, il faut punir ceux qui insultent et harcèlent un tiers. Comme un homme qui harcèle son ancienne compagne doit être durement puni, ceux qui insultent et harcèlent les élus locaux doivent l'être également.
La justice frappe déjà, me semble-t-il. Dans ma circonscription, le maire de Saint-Guilhem-le-Désert, Robert Siegel, a par exemple fait condamner son harceleur.
Notre objectif ne doit pas être d'alourdir les peines. L'ancien élu local que je suis est favorable à la condamnation des harceleurs mais il n'a toujours pas été prouvé que l'alourdissement des peines réduisait le nombre de passages à l'acte. Quelles sont les données chiffrées qui le démontrent ? J'aimerais avoir une réponse.
Cher collègue, permettez-moi de marquer mon désaccord, tant l'épuisement moral de bon nombre d'élus harcelés, en particulier des maires, est une réalité. Ce midi, alors que j'étais interviewée sur France Bleu, j'ai été confrontée à l'émotion très palpable du maire d'Erquy, M. Henri Labbé, qui relatait le harcèlement dont il avait été victime.
Contrairement à vous, je crois que nous ne pouvons pas nous permettre de supprimer des dispositions qui renforceront les sanctions infligées à ceux qui harcèlent des élus. J'irai même plus loin : en préparant la proposition de loi, nous avons émis l'idée d'interdire l'usage des réseaux sociaux à ceux qui ont harcelé en ligne des élus locaux. Une telle disposition a d'ailleurs été étudiée dans le cadre de l'examen du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique (Sren) : ce texte devra passer en commission mixte paritaire et si la disposition que je mentionne est retenue dans la dernière version du projet, nous veillerons à ce qu'elle s'applique à ceux qui ont harcelé en ligne des élus du fait de leur fonction. L'avis de la commission est donc défavorable.
Je partage l'avis de la rapporteure, pour une raison simple : il n'est pas possible de dénoncer les violences que subissent les élus sans se demander comment les accompagner pour faire face à leur recrudescence.
Je vous invite à discuter avec l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), à moins que les députés de La France insoumise considèrent que les associations d'élus ne sont pas représentatives et que quelques voix dissonantes dans le paysage municipal pèsent plus que celles des associations rassemblant des élus de toutes tendances. Comme l'AMF, dont nous partageons la position, nous pensons que les femmes et les hommes qui portent l'écharpe tricolore, qui représentent la République et qui ne sont pas seulement visés pour ce qu'ils sont, mais aussi pour ce qu'ils représentent, méritent une protection, assortie d'une aggravation des peines prononcées à des fins de dissuasion.
Une fois de plus, les députés de La France insoumise ont déposé un amendement visant à supprimer une peine. Ceux du groupe RN n'expriment qu'un enthousiasme mesuré à l'égard du travail d'intérêt général, car ils considèrent qu'un recours excessif aux peines dites alternatives pourrait affaiblir la dissuasion.
L'article 2 donnerait la possibilité d'une peine supplémentaire, mais bien que les TIG existent depuis quarante ans, il est encore difficile de mesurer leur efficacité. Les magistrats n'y recourent que pour 4 % des peines qu'ils prononcent et d'après les données que nous avons réussi à nous procurer, 34 % des tigistes récidivent. Cela étant posé, l'article va dans le bon sens ; sans enthousiasme, nous le soutiendrons et voterons donc contre l'amendement n° 19 .
Vous n'avez toujours pas fourni les données qui vous permettent d'affirmer que l'alourdissement des peines découragerait les auteurs de passer à l'acte. Par ailleurs, notre proposition trouve toute sa pertinence en matière de harcèlement : celui-ci prospère dans une commune lorsqu'il ne s'y trouve pas rapidement confronté à une réponse judiciaire. Nous réclamons précisément qu'un juge intervienne rapidement pour prononcer une sanction avant que les situations ne s'enkystent. Le harcèlement peut perdurer des mois, voire des années, sans que la justice intervienne. Nous demandons qu'elle mette fin au plus vite à ces actes délictueux, ce que ne permet pas l'alourdissement des peines.
L'amendement n° 19 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras, pour soutenir l'amendement n° 59 .
Il vise à faire de la motivation politique une circonstance aggravante de l'agression ou du harcèlement. Lors des campagnes électorales, il arrive que des militants soient agressés alors qu'ils collent des affiches, par exemple. Dès lors, pourquoi la proposition de loi ne viserait-elle pas les militants politiques ?
La proposition de loi tend à renforcer la sécurité et la protection des élus. Nous avons eu le débat au sujet des collaborateurs. Il ne s'agit pas de nier les violences commises à l'encontre de militants ou de bénévoles qui tractent pour défendre leurs idées, mais bien de circonscrire le champ d'application de la proposition de loi aux élus locaux.
D'autre part, pour caractériser un acte de harcèlement, l'infraction doit être individuelle, c'est-à-dire commise sur une personne, alors que l'action des militants est collective – tractage et collage –, mais elle doit aussi se répéter durablement, ce qui n'est pas le cas d'une action ponctuelle. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement, à regret d'ailleurs car les militants peuvent également être victimes de harcèlement. Nous devrons nous pencher sur ce problème.
J'émets un avis défavorable pour plusieurs raisons. Lors des campagnes politiques que j'ai menées, certains militants qui m'ont prêté main-forte ont parfois été pris à partie à des degrés divers. Je comprends donc la raison pour laquelle vous avez déposé cet amendement. Néanmoins, la notion de militant est floue. Par ailleurs, si l'agression a lieu avant ou après le tractage ou le collage, l'infraction, telle qu'elle a été définie dans la proposition de loi, ne sera pas caractérisée. Ces militants seraient donc dépourvus de protection juridique, ce qui pose problème.
Enfin, on essaie d'envoyer un message aux élus.
Dans l'écrasante majorité des cas, en particulier dans les plus petites communes, ce ne sont pas nécessairement des militants qui collent ou qui tractent – les campagnes électorales s'y passent souvent de tracts ni affiches.
Par ce texte, nous devons envoyer un message à ceux qui occupent des fonctions électives et je vous confirme donc mon avis défavorable, en dépit du bien-fondé de l'amendement.
Je vous fais part de quelques réflexions dans le désordre. D'abord, j'ai été militant. J'ai collé des affiches et j'ai distribué des tracts. Il ne m'est jamais rien arrivé – mais peut-être ai-je été chanceux. En ma qualité de maire et d'élu local, j'étais davantage à portée de bises que de baffes. Mais cela ne m'empêche pas de considérer que toute atteinte à un élu, qu'il soit victime de harcèlement ou d'une tentative de déstabilisation, mérite une réponse adaptée et symboliquement forte.
Je le dis en toute fraternité à notre collègue Sébastien Rome, qui est un type bien, que je respecte, qui a été maire et sait donc de quoi il parle. La question est non pas celle de l'efficacité de la mesure, mais celle de son caractère symbolique. La République protège et prend soin de ceux qui sont engagés au service des autres. C'est le sens de cette proposition de loi.
S'agissant de l'efficacité de la mesure, Violette Spillebout et moi, nous avons fait part de nos réflexions dans notre rapport d'information sur le statut de l'élu local. Nous avons proposé de doter les services déconcentrés de l'État de moyens et de préciser les circulaires adressées au procureur de la République, afin que le pack sécurité, à destination des élus, soit mieux connu. Nous sommes d'accord pour dire qu'il y a des marges de progression. Nous souhaitons autant renforcer le statut des élus et leur pouvoir d'action, qu'inscrire symboliquement le fait qu'on ne touche pas aux dépositaires de l'ordre public – on ne touche pas aux toubibs, ne touchons pas aux urgentistes de la République, sans quoi la République ne tient plus.
Enfin, nous examinons une proposition de loi du Sénat. Nous aurons l'occasion d'en examiner une autre, de l'Assemblée nationale. Nous devons faire passer le message que tous les contentieux politiques ne se régleront pas en saisissant un procureur ou un tribunal. Ils doivent également se résoudre dans le cadre du débat démocratique, en confrontant les idées, en recourant au suffrage universel. C'est cela, la démocratie vivante.
L'amendement n° 59 n'est pas adopté.
L'article 2, amendé, est adopté.
La parole est à M. Didier Paris, pour soutenir l'amendement n° 46 , tendant à supprimer l'article 2 bis .
L'article, introduit par la commission des lois du Sénat, vise à allonger les délais de prescription pour les délits d'injure et de diffamation publiques de trois mois à un an. Je comprends le sens de cette disposition, qui, en théorie, permettrait à un élu de disposer de davantage de temps pour réagir, dans l'hypothèse où il serait victime d'une agression ou d'injures sur la toile.
Néanmoins, cette disposition se heurte à deux difficultés. La première est que la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse nous a permis de parvenir progressivement à un équilibre. Tous les délits de presse prévus par cette loi font l'objet d'une prescription courte de trois mois. Comment peut-on prévoir l'allongement du délai de prescription pour les seules infractions dont seraient victimes les élus sans réfléchir à l'allongement du délai de prescription des délits de presse ? Je soulève un problème de fond très sérieux, auquel il n'a pas été suffisamment réfléchi.
La seconde difficulté est l'envoi de signes opposés. Nous voulons une réaction rapide de la part des autorités publiques, en particulier du parquet. Or porter le délai de prescription de trois mois à un an me paraît contre-productif. En effet, encore faut-il que le parquet puisse agir rapidement ! Les élus qui sont agressés ont impérativement besoin de cette célérité. Dans ces conditions, il serait préférable de supprimer purement et simplement cette disposition, quitte à réfléchir à une nouvelle version au cours du délai plus long qui nous serait imparti.
Nous avons tous les deux discuté de ce sujet qui touche à la fameuse loi relative à la liberté de la presse de 1881 – nous en avons également débattu en commission des lois. Un équilibre subtil et fragile entre la liberté d'expression, essentielle en France, et la sanction des abus qui peuvent en découler a été atteint dans cette loi.
L'article 2 bis a été introduit au Sénat à l'initiative de la rapporteure, Mme Catherine Di Folco ainsi que de M. Hussein Bourgi, membre du groupe Socialiste, écologiste et républicain. Cet article porte de trois mois à un an le délai de prescription des délits d'injure publique et de diffamation, pour répondre aux pratiques de notre époque.
Tous les maires et les élus locaux qui nous ont interpellés se plaignent du fait que l'infraction, qu'il s'agisse de messages injurieux ou de diffamation en ligne, ne soit pas portée à leur connaissance dans le délai de trois mois en vigueur, en raison de la multiplicité des nouveaux canaux qui favorise la recrudescence de la haine en ligne, en particulier sur les réseaux sociaux. En effet, c'est parfois un tiers qui leur montre une copie d'écran d'un message très injurieux. Ils doivent alors porter plainte contre son auteur pour faire cesser les faits.
Je comprends l'argument selon lequel la justice risque de mettre plus de temps à traiter les dossiers. Il faudra encadrer le dispositif pour ne pas allonger les délais, ce qui nous tient tous à cœur. Nous l'avons fait en commission, en limitant le champ d'application aux candidats ou aux élus, afin d'éviter la multiplication disproportionnée de plaintes supplémentaires.
Enfin, on ne crée pas un régime dérogatoire pour les élus et les candidats puisqu'on complète le dispositif proposé par le Sénat. On ne modifie qu'à la marge la loi de 1881 qui devait être adaptée, compte tenu de l'importance des réseaux sociaux et de la nécessité de lutter contre la haine en ligne. Avis défavorable.
Il est nécessaire que la justice réagisse rapidement lors de la survenance de tels faits. En délayant les délais, on ne remplit pas certains objectifs. Ne pas modifier le délai de prescription en vigueur tout en aggravant les peines encourues semble être la bonne réponse.
Madame la rapporteure, vous avez évoqué l'équilibre fragile que la loi de 1881 avait atteint. Le Gouvernement s'est demandé où placer le curseur pour ne pas la déséquilibrer, prenant en considération les arguments que vous avez très bien présentés mais aussi ceux de M. Paris. En mon âme et conscience, je suis donc favorable à cet amendement.
Notre collègue Didier Paris et le ministre sont de trop fins juristes pour confondre le délai de prescription avec le délai d'instruction par les parquets. Cela n'a rien à voir. Le délai de prescription est déclenché dès le dépôt de la plainte, tandis que le délai d'instruction est lié aux moyens dont dispose la justice – à savoir les parquets – pour instruire une plainte. Du reste, j'ai cru comprendre que la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice renforcerait les moyens des parquets. Il n'y a donc pas d'inquiétude à avoir sur la rapidité avec laquelle ils traiteront les plaintes déposées par les élus victimes d'agressions, de violences, de harcèlement – ils ont d'ailleurs reçu une circulaire en ce sens.
Les auditions que nous avons menées avec ma collègue rapporteure l'ont attesté : les élus n'ont pas toujours connaissance des faits au moment où ils sont rendus publics – sur les réseaux sociaux, par voie de tracts ou autres. Ils doivent donc bénéficier d'un délai de prescription allongé, afin d'être mieux protégés dans l'exercice de leur mission. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à l'amendement déposé par notre collègue Didier Paris. Si, désormais, les délais de prescription deviennent des injonctions données au parquet de prendre le temps d'instruire, on peut s'inquiéter de la rapidité de la justice. Je ne suis pas sûr que le garde des sceaux partage cette vision des choses.
Nonobstant le respect que j'ai pour la rapporteure, l'amendement de M. Paris répond à notre volonté de fixer les délais de prescription, de les rendre lisibles. Nous préférons ne pas les allonger encore davantage car les élus ne s'y retrouveraient plus.
Le délai de prescription de trois mois en vigueur est convenable au regard des conséquences d'une diffamation, même si l'argument de la rapporteure, qui nous renvoie à la problématique des réseaux sociaux, est légitime. Je lui répondrai qu'une diffamation se propage rapidement sur les réseaux sociaux, et qu'à une diffamation en succédera une autre.
Au contraire, respecter ce délai de trois mois est tout à fait essentiel. Je ne confonds pas le délai de prescription avec celui de l'instruction, qui doit être le plus court possible. Si l'on veut envoyer un message de rapidité, l'on ne peut pas dire à la victime de prendre son temps et au juge d'aller très vite. Le dispositif doit être encadré par un délai de prescription qui favorise la réactivité. Je rejoins ce que Sébastien Rome a dit : les élus seront satisfaits de ce dispositif si le juge est réactif.
L'amendement n° 46 n'est pas adopté.
L'amendement n° 64 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 12 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'avis du Gouvernement au sujet du délai de prescription était le bon, me semble-t-il. Nous avons l'occasion de maintenir l'équilibre de la loi relative à la liberté de la presse.
Ça n'a rien à voir ! Il y a une différence entre un élu et un candidat.
Rattrapons notre erreur de tout à l'heure, car je ne suis pas certain – a-t-on fait les comptes ? – que nous étions minoritaires lors du vote de l'amendement de suppression défendu par M. Paris.
Vous parlez dans votre exposé sommaire d'une justice d'exception pour les élus. Je crois que vous êtes complètement à côté de l'objet du texte :…
…il ne s'agit pas de créer une exception pour les élus, mais de tenir compte du fait qu'ils sont les urgentistes de la République, qu'ils sont particulièrement exposés et font davantage l'objet d'injures et de harcèlements en raison de leur fonction. C'est pourquoi nous estimons qu'il faut leur permettre de porter plainte dans un délai suffisant pour prendre connaissance de la masse d'injures et de diffamations dont ils sont parfois victimes, en particulier sur les réseaux sociaux. En leur facilitant ainsi la tâche, ils ne renonceront pas à leur droit au seul motif qu'ils n'auraient pas eu le temps d'en prendre connaissance. Avis défavorable.
Défavorable.
Il y a quand même des principes fondamentaux dans la loi de 1881, et une jurisprudence qui indique qu'en période de campagne, il est possible de participer à une polémique « normale ». Je peux dire, par exemple, que la ministre de l'éducation nationale affiche un mépris de classe et des classes. Cela relève de la polémique normale, en période électorale comme, plus généralement, en démocratie. Je peux dire que la nouvelle ministre du travail s'apprête à casser le socle du modèle social français et qu'elle a d'ailleurs un pedigree qui m'inquiète en la matière…
Cela relève de la polémique normale en démocratie. En revanche, la loi de 1881 ne me permet pas de procéder à des insinuations touchant à la vie privée de la ministre. Voilà quelle est la frontière étanche que nous voulons préserver. Je vais continuer – vous vous en doutez – à critiquer avec force et conviction la politique du Gouvernement, mais je dois le faire dans le respect de ceux qui ont été investis de responsabilités. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à l'amendement.
J'observe que les convictions du Gouvernement sont à géométrie variable. Si l'argument de M. Paris – je vous le concède, madame la rapporteure – était bien meilleur que le mien, la conséquence de mon amendement sera toutefois la même : je ne vois donc pas pourquoi vous lui donnez un avis défavorable, monsieur le ministre.
Soyons cohérents, soutenez-le afin que l'allongement du délai de prescription ne profite pas aux seuls élus ou candidats.
Si les raisons étaient les mêmes, le vote connaîtrait la même issue et vous seriez battus de nouveau. Je ne m'oppose pas à votre amendement parce que je préfère Paris à Rome.
Sourires sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Sébastien Jumel sourit également.
Ma raison est plus objective : votre exposé sommaire, en refusant de distinguer entre les élus et les citoyens, me pose une difficulté par rapport à notre objectif. J'accepte l'idée de ne pas distinguer les élus, pas celle consistant à aligner les droits des citoyens sur ceux des élus dans un texte qui concerne d'abord les élus.
Ensuite, si l'on peut faire passer beaucoup de choses avec le sourire, et bien qu'ils s'inscrivent dans le cadre d'un débat démocratique, sans diffamation ni injure, je n'aimerais pas que quiconque puisse penser que j'encaisse intérieurement, sans les contester profondément, les propos injustes et outranciers de M. Jumel mettant en cause mes collègues ministres.
M. Sébastien Jumel sourit.
L'amendement n° 20 n'est pas adopté.
L'amendement n° 65 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 2 bis, amendé, est adopté.
L'amendement de suppression n° 21 de M. Sébastien Rome est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Défavorable. Il est absolument essentiel que les atteintes à la vie privée des candidats à une élection puissent être sanctionnées à la hauteur du préjudice subi. Lors d'une campagne électorale, ces atteintes peuvent déstabiliser profondément les candidats et contrevenir à une défense équitable des idées. Nous devons à la fois protéger les candidats et préserver la vitalité de notre démocratie. Je suis d'ailleurs très heureuse que la proposition de loi, grâce à l'article 10 que nous examinerons tout à l'heure, permette d'avancer avec courage, originalité et ambition pour protéger les candidats à un mandat électif, notamment en vue des élections municipales de 2026, date à laquelle le texte sera applicable.
Défavorable.
Je comprends que M. Rome ne défende pas son amendement. Je pense qu'il est très mal à l'aise, parce qu'il a été désavoué, en commission des lois, par deux personnalités de la NUPES. Sébastien Jumel, ici présent, ainsi que Raquel Garrido ont rappelé l'importance de défendre l'honneur et l'intégrité de nos familles et de nos proches. Ces derniers, contrairement à nous, n'ont pas fait le choix de s'engager personnellement dans des combats politiques. Les dispositions du texte prévoyant des circonstances aggravantes lorsque des attaques sont commises contre nos familles et nos proches sont très importantes. Voilà pourquoi nous sommes opposés à l'amendement.
L'amendement n° 21 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 117 .
L'article du code pénal qui punit la mise en danger de la vie d'autrui par la divulgation d'informations relatives à la vie privée ne date que de 2021. Le rapport d'information de Mme la rapporteure et de mon collègue Sébastien Jumel sur le statut des élus locaux propose de nombreuses choses, notamment de procéder à un bilan de l'application de cet article du code pénal. Il paraît préférable d'évaluer le dispositif avant de l'étendre aux conjoints, ascendants et descendants des élus et personnes candidates aux élections.
Faire des bilans, évaluer les lois, cela fait partie de nos missions. Renoncer à durcir les atteintes à la vie privée, en revanche, est exclu. L'amendement que j'ai défendu en commission prévoit de sanctionner plus durement ceux qui attentent à la vie privée des proches des personnes visées à l'article 223-1-1 du code pénal.
Je vais simplement reprendre les mots de Sébastien Jumel qui défendait cet article en commission des lois car je pense – j'espère – qu'ils emporteront notre adhésion à tous. Il invitait alors à « comprendre qu'un candidat ou un élu engage sa famille, qui doit être protégée. En effet, si nous sommes armés pour supporter les coups, même ceux en dessous de la ceinture, qui nous sont portés, tel n'est pas le cas de nos enfants et de nos conjoints. Il me semble essentiel de protéger la vie privée si l'on veut éviter de décourager l'engagement citoyen. » Tout est dit. J'émets donc un avis défavorable à votre amendement.
Si on réalisait un sondage auprès des maires en leur demandant s'ils préfèrent que nous conservions une circonstance aggravante pour eux ou que nous en instaurions une pour leur famille, je suis sûr qu'ils choisiraient tous leur famille. Quand on s'engage dans un mandat local, on sait à quoi on s'expose, mais on considère comme profondément injuste que nos enfants ou nos conjoints puissent se retrouver salis d'une manière ou d'une autre. J'émettrai donc un avis profondément défavorable, monsieur le député, en dépit de ce que vous demandez, car je pense que ce type d'attaques, contre un entourage qui n'a pas décidé de s'engager publiquement, est encore plus infâme.
Je n'ai pas grand-chose à ajouter. C'est peut-être l'alinéa le plus important de l'article. Nous avons une permanence. Nous choisissons de nous exposer sur les réseaux sociaux. Cela a des bons et des mauvais côtés, mais nous sommes normalement capables de gérer cette situation, qui fait partie de notre profession. En revanche, lorsque la violence ou les harcèlements font irruption dans nos vies privées, devant les écoles ou au domicile, cela devient très compliqué. Je vous invite vraiment à ne pas supprimer cet alinéa, chers collègues.
L'amendement n° 117 est retiré.
L'amendement n° 68 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 2 ter, amendé, est adopté.
La parole est à M. Rémy Rebeyrotte, pour soutenir l'amendement n° 105 qui fait l'objet d'un sous-amendement.
Nous avions déjà plaidé en ce sens lors de l'examen de la loi pour une sécurité globale préservant les libertés : le présent amendement tend à protéger la vie privée des élus en sanctionnant la révélation d'informations sur la localisation de leur domicile ou de leur résidence en vue de porter atteinte à leur tranquillité ou à leur sécurité, notamment à celles de leur famille.
La parole est à Mme Sylvie Bonnet, pour soutenir le sous-amendement n° 130 .
Il propose de sanctionner également la révélation d'informations sur les lieux de villégiature des élus afin de garantir leur tranquillité et leur sécurité, même durant leurs congés.
Demande de retrait, chers collègues, car si j'en comprends bien l'esprit, l'amendement crée une nouvelle infraction qui est déjà en grande partie réprimée par le code pénal. Celui-ci sanctionne « le fait de révéler, de diffuser ou de transmettre, par quelque moyen que ce soit, des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d'une personne permettant de l'identifier ou de la localiser aux fins de l'exposer ou d'exposer les membres de sa famille à un risque direct ».
La notion d'atteinte à la tranquillité est en outre difficile à caractériser en droit et pourrait mettre en péril la rédaction actuelle du code. Il nous faudra peut-être retravailler cette question lors de l'examen de la proposition de loi portant réforme du statut de l'élu local.
Je demanderai également le retrait de l'amendement et du sous-amendement, mais pour une autre raison : à l'heure actuelle, quand l'atteinte vise une personne qui assure des fonctions électives, l'article du code pénal cité par la rapporteure prévoit une amende pouvant atteindre 75 000 euros. L'amendement ramènerait le quantum à 45 000 euros.
Ensuite, que ce soit le lieu de villégiature ou la maison, il s'agit bien de localiser le lieu de résidence, sans préciser si celui-ci est temporaire ou durable. La rédaction actuelle présente un avantage : si vous passez une soirée chez un oncle ou un parent et que cette information est diffusée, elle tombe sous le coup de la règle, là où votre amendement limiterait cette dernière au domicile ou à la résidence secondaire. Conservons le droit actuel : il est plus large, plus sévère et il existe déjà.
La parole est à Mme Edwige Diaz, première oratrice inscrite sur l'article.
Le caractère automatique de la protection fonctionnelle est essentiel, car il permet aux élus de bénéficier d'une protection immédiate sans avoir à engager des démarches administratives lourdes, dont ils n'ont parfois même pas connaissance. Cette mesure permettrait de garantir l'effectivité de cette protection, peu utilisée par les maires des petites communes.
Dans les communes de plus de 20 000 habitants, la protection fonctionnelle est en effet sollicitée dans 45 % des cas. Le taux s'effondre dans les communes de moins de 1 000 habitants, pour s'établir à 30 %. L'article va donc dans le bon sens, même si je regrette qu'ait été jugé irrecevable notre amendement visant à élargir l'automaticité de la protection fonctionnelle à l'ensemble des élus. Ceux qui ne disposent pas de délégations ou qui font partie de l'opposition sont pourtant les plus fragiles : ils ont moins de moyens, n'ont ni cabinet ni service juridique. L'élargissement leur aurait bénéficié en priorité.
La violence est de plus en plus présente dans notre société, et les élus locaux y sont particulièrement exposés. Je pense à plusieurs maires de ma circonscription, dans la Drôme, notamment à Marie-Hélène Thoraval, maire de Romans-sur-Isère, qui a reçu d'abjectes menaces de mort après s'être exprimée, en novembre dernier, à la suite du drame de Crépol au cours duquel le jeune Thomas a été lâchement tué. Je veux, devant la représentation nationale, lui redire tout mon soutien.
Face à la violence dont les responsables publics sont victimes, la protection que nous devons offrir aux élus est d'autant plus légitime que ceux-ci sont exposés du fait même de leur engagement au service de la collectivité. L'article 3, qui confère un caractère automatique à l'octroi de la protection fonctionnelle aux maires et aux adjoints qui en font la demande pour des faits commis dans l'exercice de leur mandat – y compris en cas de menaces, de chantage ou d'outrage –, va donc dans le bon sens, de même que l'extension du champ d'application de cet article aux conseillers départementaux et aux conseillers régionaux exerçant des fonctions exécutives.
Nous devons manifester unanimement la solidarité de la collectivité envers ceux qui la représentent.
On peut se réjouir de la future adoption de l'article 3, qui prévoit, je le rappelle, l'automaticité de l'octroi de la protection fonctionnelle aux maires et adjoints aux maires ainsi que l'extension de la disposition aux conseillers départementaux et régionaux. Cependant, je tiens à attirer votre attention sur le fait que cette protection n'est pas absolue ; elle a des limites.
Ainsi, deux élus de ma circonscription, qui ont fait l'objet de menaces de mort dans le cadre de leurs fonctions, ont décidé de porter plainte. Or le montant de la consignation qui leur a été demandée est substantiel : 3 000 euros pour l'un, 6 000 euros pour l'autre. Certes, cette consignation, qui permet d'éviter les procédures abusives, fait partie des frais de justice pris en charge dans le cadre de la protection fonctionnelle. Mais, un certain nombre de recours ayant été formés dans des communes où l'opposition est excessivement procédurière – et il y en a beaucoup ! –, il est parfois conseillé au maire de régler personnellement le montant de la consignation afin de se prémunir contre une accusation de détournement de fonds publics ou de prise illégale d'intérêts.
Non seulement, une telle accusation implique des années de procédure, mais, dans l'opinion, le mal est fait, quand bien même cette accusation porterait uniquement sur le paiement par la commune des frais de consignation.
J'ignore si des solutions existent mais nous devrons réfléchir ensemble aux moyens de pallier cette dérive, sans quoi d'autres élus hésiteront à déposer plainte et à se défendre.
Je veux tout d'abord revenir sur la discussion que nous avons eue tout à l'heure. Lorsqu'on vit sa ville, qu'on la respire, qu'on y est immergé, tout le monde sait où l'on habite.
Je suggère d'ailleurs à l'Assemblée de rester connectée à la réalité des communes rurales ou des villes moyennes. Je n'ai pas à cacher mon adresse : tout le monde sait où j'habite. Du reste, il est bon de savoir où l'on habite lorsqu'on fait de la politique.
Sourires.
Quant à la protection fonctionnelle, il est juste de l'octroyer à tout élu qui en fait la demande sans qu'aucune délibération soit nécessaire, et il est tout aussi juste qu'elle inclue un éventail plus large de prestations afin de couvrir les besoins des élus victimes. À cet égard, l'article 3 permet une amélioration substantielle.
Nous avons considéré, avec ma collègue rapporteure, qu'il faudrait, bien entendu, protéger l'ensemble des élus, mais que l'enjeu est tout de même de protéger ceux qui exercent des responsabilités. Des chieurs, des spécialistes de la procédure qui passent leur temps à chercher chicane, il y en a, nous le savons.
Il ne faudrait pas leur permettre de le faire aux frais de la princesse ; nous devons donc fixer des limites. Assurer la protection fonctionnelle des élus, c'est prendre soin de ceux qui exercent une mission au service des autres. Pour le reste, si vous voulez mon adresse, je vous la donne quand vous voulez !
Sourires.
Je suis tout à fait favorable à l'article 3, mais se pose le problème de l'articulation entre, d'une part, la protection fonctionnelle et, d'autre part, les assurances juridiques que souscrivent, à titre personnel – sur leurs propres deniers, donc –, la plupart des élus. Le montant de l'assurance est plafonné : dans un contrat type comme le mien, par exemple, le plafond est de 1 500 euros par contentieux. Autant vous dire qu'il peut arriver que vous payiez le reste de votre poche.
Peut-être conviendrait-il, monsieur le ministre, que vous vous rapprochiez de votre collègue de l'économie et des finances…
…et du ministre de l'intérieur pour étudier la possibilité d'améliorer ces contrats ou de baisser les primes puisqu'une fois que l'article 3 sera adopté, une partie du risque sera assumée par la collectivité locale concernée.
Je ne compte pas déposer un amendement à ce sujet. Je suggère simplement…
…de mieux articuler l'assurance privée que beaucoup d'entre nous avons souscrite et le futur article 3.
La parole est à M. François Cormier-Bouligeon, pour soutenir l'amendement n° 99 .
Cet amendement tout simple et de bon sens résulte d'une réflexion menée avec l'association des anciens maires du Cher, notamment son président, Pierre-Étienne Goffinet.
Il se trouve qu'un ancien élu peut être pris à partie, voire violenté, pour des décisions qu'il a prises durant son mandat. Il peut s'agir d'un refus de permis de construire, de l'exclusion d'un enfant violent d'une cantine… – nous avons tous maints exemples en tête, hélas. Nous proposons donc, par cet amendement, que les anciens élus bénéficient de la protection fonctionnelle après l'expiration de leur mandat.
Je remercie le ministre Béchu, Mme Violette Spillebout et Thomas Rudigoz pour l'écoute bienveillante qu'ils m'ont témoignée en raison, probablement, de leur expérience d'élus locaux à Angers, à Lille et à Lyon.
Par ailleurs, nous avons encore entendu, lors de ce débat, que les maires étaient à portée d'engueulade. Je réfute cette expression qui légitime insidieusement les violences faites à ces élus. Je considère, pour ma part, qu'en tant que premiers maillons de la République, les maires devraient plutôt être à portée de gratitude, de remerciements, de soutien et de protection.
En adoptant cet amendement, nous leur témoignerons cette gratitude et nous leur offrirons cette protection. La République s'honorera de protéger ceux qui se sont dévoués à elle par le passé.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Permettez-moi de répondre tout d'abord aux orateurs inscrits sur l'article 3.
Madame Anthoine, vous avez eu raison de rappeler les terribles menaces de mort dont a été victime la maire de Romans-sur-Isère, à qui nous témoignons tous notre soutien. On sait que beaucoup d'élus sont la cible de menaces très injustes à la suite de faits survenus dans leur commune ou à des décisions politiques.
Nous regrettons, nous aussi, de ne pas avoir pu étendre le bénéfice de la protection fonctionnelle à l'ensemble des élus, en particulier aux conseillers sans délégation et aux conseillers d'opposition. Sébastien Jumel et moi sommes plutôt favorables à ce qu'elle puisse leur être octroyée sur délibération, et non de façon automatique. Il faut en effet être prudent, notamment en raison des violences entre élus ; je pense aux injures qui peuvent relever, soit d'un débat démocratique un peu virulent, soit d'une véritable violence. Elles ne doivent pas être considérées de la même façon. Nous avons donc de longues discussions avec M. le ministre ainsi qu'avec le ministère de la justice pour trouver une solution à ce problème, mais elle ne figurera pas dans cet article.
Enfin, madame Bergantz, je suis très sensible à la question que vous avez soulevée. Le montant des consignations est un véritable enjeu, qui devra être pris en compte dans le cadre de la réflexion sur le statut de l'élu.
Vous avez raison, monsieur Cormier-Bouligeon. J'ai indiqué, dans mon intervention liminaire, que les maires sont à portée d'engueulades, certes, mais aussi d'embrassades – ou de gratitude, avez-vous dit, et j'aime beaucoup cette expression. Il convient de reconnaître leur engagement en continuant de les protéger durant les six années suivant l'expiration de leur mandat, s'ils ont pris une décision qui les a mis en danger. Cet amendement est, à cet égard, un élément symbolique mais très important de la loi ; il sera, j'en suis certaine, efficace. Avis favorable.
Je suis très favorable à cet amendement, car il répare une injustice. Lorsqu'au niveau local, la vie politique s'arrête, il est fréquent que le téléphone cesse de sonner et que la gratitude que l'on vous témoignait s'estompe. Tel n'est pas forcément le cas des insultes de ceux qui se souviennent que vous avez pris une décision qui leur était défavorable. On se retrouve ainsi dans une situation parfaitement asymétrique : ceux qui vous en veulent continuent de déverser leur bile tandis que ceux qui vous doivent quelque chose ne s'en souviennent plus ou que les décisions que vous avez prises dans l'intérêt général ont été oubliées. Cet amendement est donc une véritable mesure de justice.
Madame la rapporteure, je sais la frustration que d'aucuns ressentent du fait de l'application de l'article 40, qui ne nous permet pas de discuter d'une extension éventuelle de la protection fonctionnelle aux élus d'opposition. La question est sensible ; je ne l'évacue pas car je ne considère pas que le débat soit illégitime. Mais, en l'état, compte tenu des rédactions dont nous disposions – peut-être parce que nous n'y avons pas consacré le temps de cerveau nécessaire –, le risque était grand que la mesure devienne un nid à contentieux.
Admettons qu'élus de la majorité comme de l'opposition puissent bénéficier de la protection fonctionnelle sans que le système soit correctement organisé. Si, dans un débat municipal, une dénonciation calomnieuse finit par répondre à une diffamation, c'est le premier élu qui déposera plainte qui bénéficiera de la protection fonctionnelle, de manière à éviter que deux avocats mandatés par la même commune et payés tous deux sur le même budget communal ne se retrouvent dans un prétoire. Sans compter que les deux élus peuvent être eux-mêmes avocats, inscrits au même barreau…
Au-delà de la boutade, on ne peut pas balayer la question d'un revers de la main. Le dispositif doit donc être calibré de manière à éviter que l'on aille à l'encontre de l'objectif recherché. Nous souhaitons apaiser le débat et non le judiciariser. Vous prévoyez, à l'article 3, les conditions qui permettront de protéger un élu si, par des insinuations, des insultes, du harcèlement ou des agressions, le débat franchit la limite démocratique. Mais, en l'espèce, le texte relatif au statut de l'élu nous semble être le véhicule approprié pour ajuster le dispositif et prendre le temps d'en discuter dans un cadre parfaitement transpartisan.
Enfin, je réponds à l'interpellation de votre doyen. Actuellement, monsieur de Courson, le dispositif repose sur l'assurance que l'on vous demande de prendre à titre personnel. J'ai été moi-même très étonné lorsqu'une fois élu maire, alors que je croyais naïvement que la protection fonctionnelle me permettrait de faire face à l'ensemble des contentieux, on est venu me demander de souscrire la même assurance que mon prédécesseur en m'indiquant que ce n'était pas une obligation mais qu'il serait risqué d'y renoncer. Les années passant, j'avais oublié mon étonnement d'alors.
Je propose donc de confier à Alain Chrétien, le maire de Vesoul, qui réfléchit à la problématique de l'assurabilité des communes, de traiter cette petite question, qui concerne l'ensemble des communes, dans le cadre de son rapport. Faut-il se tourner vers le ministère de l'économie et des finances ou peut-on imaginer un dispositif dans le cadre du texte sur le statut de l'élu ? Il s'agit, en tout cas, d'accompagner plus intelligemment les élus qui ressentent une forme d'injustice lorsqu'ils s'aperçoivent qu'ils doivent payer une prime d'assurance pour pouvoir exercer à peu près tranquillement leurs responsabilités.
L'extension de la protection fonctionnelle aux anciens élus ayant exercé des fonctions exécutives telle qu'elle est prévue dans l'amendement fait partie des dispositions qui vont dans le bon sens.
Pour autant, je ne peux pas vous laisser faire votre coup de com'…
…quand vous affirmez être les défenseurs des élus locaux. Ce n'est pas vrai. Nous en sommes à l'article 3, et en seulement trois articles, vous avez réussi à refuser l'élargissement de la protection aux collaborateurs,…
…et l'instauration de peines plancher. Alors que nous vous pensions attachés au principe d'accorder la protection fonctionnelle à l'ensemble des élus locaux, et surtout à ceux de l'opposition, vous expliquez que cet élargissement éventuel de la protection fonctionnelle devra passer par une délibération de l'organe correspondant. Or vous savez pertinemment qu'au sein des exécutifs où les élus d'opposition sont très minoritaires, cette décision revêtira un caractère politique. Ne cherchez pas à donner l'illusion que vous défendez les élus locaux, puisque cette protection ne bénéficiera pas à ceux de l'opposition.
M. David Valence s'exclame.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
L'amendement n° 99 est adopté.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement n° 51 .
Il vise à simplifier la rédaction de la première phrase de l'alinéa 5 de l'article 3.
Cette modification rédactionnelle va dans le bon sens puisqu'elle rend le texte plus intelligible. Avis favorable.
Pour harmoniser la rédaction relative aux élus départementaux et régionaux, j'ai déposé les sous-amendements n° 125 à l'amendement n° 52 et n° 126 à l'amendement n° 53 . Ils assurent la coordination des différents points du texte.
Pour vous répondre, madame Diaz, je suis moi-même élue d'opposition dans une commune. Croyez bien que je me suis efforcée, avec notre collègue Sébastien Jumel, qui a davantage une expérience d'élu de la majorité, d'avoir une appréciation juste du nombre de conflits que nous pouvions apaiser, comme le disait le ministre, sans favoriser une augmentation exponentielle des conflits, en particulier entre majorité et opposition, qui se trouveraient judiciarisés.
Ne pas rendre automatique une protection fonctionnelle et la soumettre à la délibération du conseil municipal implique que s'y tienne un débat public sur le sujet. Si vous êtes élu de l'opposition, et que vous ou votre famille êtes par exemple victime d'une attaque physique à votre domicile, il me semble que si vous demandez la protection fonctionnelle, il sera difficile à un maire, même s'il vous est très opposé, de la refuser publiquement lors d'un conseil municipal.
Le référent « atteintes aux élus », en lien avec la préfecture, sera également présent pour rappeler le bon sens dans ce genre de situation. Ne caricaturons pas, et comptez sur moi pour que les oppositions municipales soient entendues dans le travail que nous menons sur le statut de l'élu.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
L'amendement n° 51 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 92 rectifié .
Il vise à modifier la rédaction de plusieurs alinéas de l'article 3, afin d'améliorer la cohérence et la lisibilité du dispositif d'octroi automatique. Il fallait préciser les conditions de la demande de déclenchement du dispositif, elle-même liée à un fait générateur, ainsi que celles de sa transmission à la préfecture, de l'octroi du dispositif et des délais correspondants. Nous avons ainsi précisé qu'en quatre mois, l'organe délibérant peut retirer ou abroger une décision de protection, à compter de la naissance de la décision d'octroi de la protection.
L'amendement n° 92 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, les amendements n° 54 , 55 et 56 tombent.
Sur l'amendement n° 32 , je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Sur l'article 3, je suis saisi par les groupes Rassemblement national et Socialistes et apparentés, d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Sébastien Rome, pour soutenir l'amendement n° 32 .
Je souhaite exposer la logique que nous défendons face à l'aggravation des peines. Nous avions déposé plusieurs amendements, jugés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution, qui visaient à instaurer des médiateurs pour les élus, faisant le lien entre ces derniers et les citoyens.
À défaut, cet amendement vise à permettre la saisine du médiateur territorial en cas de demande de protection fonctionnelle. Cela présente plusieurs d'intérêts. D'abord, de permettre une intervention rapide, ce qui peut dissuader le harcèlement et les conflits entre citoyens et élus.
D'autre part, cela encourage la désescalade des conflits, et la possibilité de renouer le dialogue entre élus et citoyens. Enfin, cela permet d'éviter des procédures coûteuses. Il faut remettre de l'humain dans notre démocratie locale. La semaine dernière, nous avons adopté à l'unanimité la proposition de loi visant à reconnaître les métiers de la médiation sociale. Soyons cohérents, et faisons en sorte que ce qui est vrai le lundi 29 janvier le soit aussi le mardi 6 février, en votant cet amendement. Il constitue une petite avancée vers une solution alternative à l'aggravation des peines.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Merci, monsieur Rome, de nous rappeler l'importance de la médiation sociale, et la belle proposition de loi déposée par Patrick Vignal et adoptée à l'unanimité la semaine dernière. Vous avez raison, lorsqu'on parle de sanction, il faut toujours parler de médiation.
M. Emmanuel Mandon s'exclame.
La création du médiateur territorial est une mesure importante de la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique ; ce dispositif se développe dans toutes les collectivités territoriales, et le travail des médiateurs est utile et reconnu.
Cependant, s'agissant de la protection fonctionnelle, l'urgence s'impose. Si nous prévoyons une protection automatique, c'est bien parce que tout délai supplémentaire créerait un préjudice pour l'élu, qu'il soit victime ou mis en cause, dans son accès au droit. L'article 3 vise ainsi à accélérer la protection fonctionnelle, non à la ralentir par une saisine du médiateur territorial, qui a par ailleurs d'autres sujets à traiter. Je vous demande donc le retrait ; à défaut, avis défavorable.
J'adore la médiation.
Je suis convaincu qu'on manque, de façon générale, de médiation. Cependant, dans le cas d'une violence commise contre un élu, va-t-on saisir un médiateur territorial, plutôt que d'offrir à cet élu la possibilité de se défendre en justice, et de se faire aider d'un avocat, notamment si on a sectionné les freins de sa voiture ou si on s'en est pris à lui physiquement ?
Le médiateur demandera-t-il des excuses à celui qui a infligé des jours d'incapacité totale de travail (ITT) à un élu local ? Nous ne pouvons pas mettre un médiateur face à des faits de violence touchant des femmes et des hommes qui assument une mission au service des autres !
Le deuxième problème est qu'il n'y a pas de médiateur territorial partout.
Lorsqu'un maire d'une commune de soixante-dix habitants voit sa voiture défoncée, par un individu venu avec un tractopelle déverser des déchets de chantier et des gravats le long de l'église, nous n'allons pas demander à cette commune de nommer un médiateur territorial, et de considérer que le problème relève de la médiation ! Je suis donc profondément défavorable à cet amendement.
C'est la réalité !
Si un élu est agressé, et que les faits justifient d'aller en justice, il faut évidemment qu'il y aille ! Personne ne peut supporter qu'on sectionne les freins de voiture d'un élu, et il est évident qu'on ne demandera pas un médiateur dans un tel cas !
Mais pour des faits bien moins graves, à l'issue desquels le dialogue est encore possible…
Cela constituerait une petite avancée, dans ce texte, de montrer autre chose que de la répression : une volonté de renouer le dialogue entre élus et citoyens.
Exclamations prolongées sur plusieurs bancs du groupe LR.
Il est essentiel de faire en sorte que notre démocratie fonctionne d'abord par le dialogue, plutôt que par la sanction. C'est quelque chose d'assez simple !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Cet amendement est révélateur de la déconnexion de l'extrême gauche face à la réalité de la vie.
Soyons très clairs. Que demandera l'élu agressé ? Une sanction qui soit dissuasive, pour que d'autres ne fassent pas de même. Deuxièmement, en matière de délit de presse – injure ou diffamation –, une mesure immédiate est prévue, très importante par l'information qu'elle permet de diffuser : la condamnation à des frais de publication. Un médiateur ne sera jamais en mesure de le faire. Ce qui intéresse l'élu outragé ou diffamé, c'est qu'il y ait une réparation, et le rétablissement de la vérité. Le fait de publier, notamment dans la presse quotidienne régionale, le dispositif de la décision, permet de rétablir l'élu dans son honneur. De grâce, arrêtons le saupoudrage bisounours qui caractérise l'extrême gauche. De toute évidence, cette dernière n'est pas intéressée par la protection de l'élu.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 147
Nombre de suffrages exprimés 145
Majorité absolue 73
Pour l'adoption 17
Contre 128
L'amendement n° 32 n'est pas adopté.
Il vise, comme le sous-amendement n° 125 le précise, à ce que l'élu adresse une demande de protection au président du conseil départemental.
Le sous-amendement n° 125 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 52 , ainsi sous-amendé, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement n° 53 qui fait l'objet d'un sous-amendement.
L'amendement, dont la rédaction devrait être corrigée par l'adoption du sous-amendement, vise à ce que l'élu adresse une demande de protection au président du conseil régional.
Le sous-amendement n° 126 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 53 , ainsi sous-amendé, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 148
Nombre de suffrages exprimés 148
Majorité absolue 75
Pour l'adoption 148
Contre 0
L'article 3, amendé, est adopté.
Lorsque j'ai présenté cet amendement en commission, on m'a répondu qu'il était satisfait. Or j'ai découvert, en me rapprochant de l'antenne du Morbihan de l'association Régions de France, qu'il ne l'était pas. Les dépenses liées à la protection fonctionnelle sont bien inscrites au budget de la commune mais lorsque l'autorisation d'engagement est inférieure à la somme que le maire doit payer, le comptable public refuse de procéder au paiement, car la dépense n'a pas été inscrite comme il convient dans le budget. En qualifiant d'obligatoires les dépenses liées à la protection fonctionnelle des élus, le problème serait résolu.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l'amendement n° 8 .
Cet amendement permet de prévoir et d'inscrire, dans le budget primitif de la collectivité, la possibilité de régler les sommes nécessaires pour assurer la protection fonctionnelle des élus. En qualifiant cette dépense d'obligatoire, le droit à la protection fonctionnelle est rendu plus effectif.
Vous avez eu raison de rouvrir ce sujet, monsieur Molac, à la demande de l'association Régions de France. Nous avions donné une première réponse en commission, nous avons retravaillé depuis, et effectivement, ce n'est pas si simple. Si le code général des collectivités territoriales impose à la commune d'accorder sa protection au maire et aux élus municipaux ayant reçu délégation, il ne les oblige pas à inscrire ces dépenses, et les crédits correspondants, dans le budget primitif.
Aussi nous semblerait-il plus sécurisant et plus juste de retenir la disposition que vous proposez.
M. Benoit Mournet applaudit.
Je serai donc favorable à votre amendement, monsieur Molac, et je demanderai à Mme Brulebois de bien vouloir retirer le sien ; le n° 89 englobe en effet toutes les fonctions, tandis que le n° 8 ne concerne que les maires. De cette manière, nous atteindrons notre objectif commun consistant à garantir une protection fonctionnelle à tous les élus exerçant des fonctions exécutives.
M. Benoit Mournet applaudit.
Il est tout à fait conforme à celui de Mme la rapporteure. Je souhaite cette inscription parmi les dépenses obligatoires. De plus, la protection fonctionnelle doit concerner tous les élus, et non uniquement les maires. Grâce à l'amendement de M. Molac, celui de Mme Brulebois sera satisfait.
Chers collègues, le problème vient du fait que, contrairement au budget de l'État, les finances locales ne prévoient pas de crédits évaluatifs. La seule solution est donc celle que propose Paul Molac, c'est-à-dire une dépense obligatoire. Cessez-le-feu !
L'amendement n° 8 est retiré.
L'amendement n° 89 est adopté.
Madame la rapporteure, j'avais déposé en commission un amendement semblable à l'amendement n° 5 et vous m'aviez suggéré de le redéposer en séance, afin que M. le ministre réponde. En effet, je m'inquiète d'un éventuel oubli dans le texte qui nous est ici soumis.
Nous avons évoqué les maires, les adjoints au maire, les conseillers municipaux, les conseillers départementaux et les conseillers régionaux, mais, au sein des intercommunalités, il arrive qu'un président, un vice-président ou un conseiller délégué communautaire ne soit pas élu municipal par ailleurs. Par cet amendement, je propose donc de compléter le code général des collectivités territoriales afin d'obliger les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à accorder leur protection fonctionnelle à leurs présidents et, lorsqu'ils ont reçu délégation, aux vice-présidents ainsi qu'aux membres de l'organe délibérant qui seraient « victimes de violences, de menaces ou d'outrages à l'occasion ou du fait de leurs fonctions ».
Je vais de nouveau essayer de vous rassurer, monsieur Bazin. Deux éléments montrent que les choses vont déjà dans le sens que vous souhaitez.
Premièrement, vos amendements sont satisfaits par les articles L. 5215-16, L. 5216-4 et L. 5217-7 du code général des collectivités territoriales, qui prévoient que les dispositions de protection fonctionnelle relatives aux élus municipaux leur sont également applicables s'ils sont membres d'un EPCI.
Deuxièmement, l'article 6 de la proposition de loi prévoit des dispositions spécifiques pour combler le vide juridique concernant l'application de ces dispositions aux élus membres des communautés de communes.
M. le ministre le confirmera, je l'espère : ce que vous proposez est totalement satisfait par le code général des collectivités territoriales et le présent texte. En conséquence, je demande le retrait.
Je veux rassurer M. Bazin, qui a toutes les raisons d'être satisfait, sinon dans la vie ,
M. Thibault Bazin sourit
du moins s'agissant de ses amendements, qu'il peut donc retirer, car ils ne changeraient rien au droit. En effet, des dispositions existent déjà et l'article 6 de la proposition de loi vient combler les éventuels derniers manques. Il n'y a pas de problème !
M. Benoit Mournet applaudit.
Je vous remercie pour ces réponses, mais je continue de me demander si la protection fonctionnelle dont les conseillers municipaux bénéficient au titre de cette qualité s'applique bien s'agissant des fonctions spécifiques exécutives qu'ils peuvent exercer au sein d'une intercommunalité, car celles-ci ne leur sont pas conférées par la commune dont ils sont élus. Je souhaite que la proposition de loi soit adoptée, mais il me semble qu'une question juridique se pose ici.
J'insiste, les fonctions d'un vice-président d'EPCI ayant reçu délégation du président, ou encore d'un conseiller communautaire n'émanent pas d'un conseil municipal. Il me semble donc que l'assurance payée par ce dernier pour assurer la protection fonctionnelle de ses membres ne s'appliquerait pas, par exemple, aux fonctions attribuées par un président d'intercommunalité. Je crois qu'il existe une distinction dans la mesure où il ne s'agit pas des mêmes compétences, et je vous invite à considérer cette question.
M. Emmanuel Mandon s'exclame.
Vos amendements sont-ils maintenus, monsieur Bazin ?
La parole est à M. Thibault Bazin.
M. Bazin a un mérite. Non que son inquiétude soit fondée : je confirme que les amendements peuvent être retirés les yeux fermés et qu'ils ne modifieraient rien. Mais il existe bien un tout petit trou dans la raquette. En effet, des élus de syndicats intercommunaux peuvent ne pas être en même temps conseillers municipaux. On pourrait imaginer que les syndicats intercommunaux votent une protection fonctionnelle pour leurs membres non élus au suffrage universel, mais désignés par les conseils municipaux sans nécessairement avoir la qualité de conseillers. C'est un peu capillotracté.
Toujours est-il que vos amendements ne résoudraient pas le problème puisqu'ils portent sur les EPCI, dont les membres sont, par définition, élus municipaux.
Vos amendements de ce soir, monsieur Bazin, sont donc bien satisfaits.
L'amendement n° 5 est retiré.
Si, vous l'avez fait en même temps que l'amendement n° 5 . J'ai annoncé dès le départ qu'ils feraient l'objet d'une présentation groupée.
Ils sont satisfaits de toute façon !
L'amendement n° 4 n'est pas adopté.
L'article 5 est adopté.
L'article 6 est adopté.
Nous en venons à l'amendement n° 39 portant article additionnel après l'article 6.
Il fait l'objet d'une demande de scrutin public de la part du groupe Socialistes et apparentés.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Stéphane Delautrette, pour le soutenir.
Cet amendement vise à ce que la responsabilité pénale personnelle des maires et des présidents d'EPCI et de collectivités territoriales pour blessure ou homicide involontaires ne puisse être engagée qu'en cas de manquement délibéré à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou un règlement, c'est-à-dire lorsque ces élus avaient parfaitement connaissance du risque.
Nous ne nions pas l'importance de la jurisprudence et de ses évolutions en la matière, ni le fait que celle-ci tend à s'équilibrer. Il n'en demeure pas moins qu'elle nous paraît toujours insatisfaisante. Nous avons eu ce débat en commission et notre collègue Jumel avait évoqué certains cas dont il avait connaissance. Nous estimons que c'est plutôt la responsabilité de la collectivité concernée, en tant que personne morale, qui devrait être recherchée.
Nous cherchons ici à traduire dans la loi une demande forte des associations d'élus afin, j'insiste sur ce point, de rééquilibrer les choses s'agissant de l'engagement de la responsabilité pénale personnelle des élus.
En commission, madame la rapporteure, vous m'aviez demandé de revoir la rédaction de mon amendement de sorte que la mesure qu'il contient ne concerne que les maires et les présidents d'exécutif local pour des faits relevant de leurs fonctions, sans incidence plus large sur la loi pénale. Nous avons effectué ce travail et nous avons retenu une disposition qui figure également dans ma proposition de loi visant à améliorer l'attractivité des mandats locaux.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.
Je vous remercie, monsieur Delautrette, d'aborder le sujet si important du périmètre de la responsabilité pénale des élus, et particulièrement des maires qui, nous le savons, assument parfois – certes de moins en moins souvent – une responsabilité qu'ils ne devraient pas assumer pour des fautes en rien intentionnelles.
Vous proposez de supprimer la possibilité d'engager la responsabilité pénale personnelle de ces élus pour les cas que vous avez cités. Rappelons tout de même que sur le fondement de la jurisprudence, le juge apprécie avec justesse l'application des dispositions légales de la loi du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non intentionnels – loi Fauchon –, laquelle a institué un régime de responsabilité spécifique pour les cas où il n'y a ni intention, ni faute.
À cet égard, le nombre d'infractions non intentionnelles faisant l'objet de poursuites est tout à fait marginal. Sur les six dernières années, nous dénombrons une cinquantaine de cas, ce qui correspond à 3 % des poursuites pénales contre des élus. Vous me répondrez – je vous entends déjà – que c'est déjà trop. Soyez assuré que j'entends votre inquiétude.
Il conviendrait de faire expertiser les conséquences de cet amendement qu'il me sera difficile d'accepter en l'état sans cette évaluation, pour des raisons juridiques. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer, sachant que je m'engage, tout comme – j'en suis sûre – Sébastien Jumel, à de nouveau aborder cette question dans le cadre de l'examen de notre proposition de loi portant réforme du statut de l'élu local. Dans la mesure où notre texte traite de la responsabilité pénale des élus, notamment en matière de conflit d'intérêts, il constitue le véhicule législatif qui convient pour un amendement dont la rédaction bénéficiera des réponses aux questions que je posais.
Je me permettrai enfin de vous interpeller, monsieur le ministre. Je crois que votre avis est défavorable sur cet amendement, mais peut-être avez-vous connaissance de cas invitant à être sensible à cette question et à trouver une solution pour réduire cette part de 3 % des poursuites pénales contre les élus.
Je suis effectivement sensible à cet amendement de M. Delautrette, et ce pour une raison simple. La presse s'est fait l'écho, il y a quelques jours, de l'émotion de maires des Hautes-Pyrénées après la condamnation à huit mois de prison avec sursis d'un édile de ce département en raison de la noyade dramatique d'une enfant de deux ans installée dans une poussette. Cette enfant avait été emmenée par sa mère, alcoolisée et sous l'emprise de stupéfiants, à une fête autorisée par le maire à se tenir à proximité d'un lac, sur un lieu en pente et avec la présence d'un débit de boissons alcoolisées.
Le fait qu'un maire d'une petite commune ait écopé de huit mois de prison avec sursis alors que la mère de l'enfant a été relaxée m'invite sincèrement à considérer qu'il y a matière à réflexion.
Cependant, accepter cet amendement sans qu'une véritable étude ait été conduite pose également un problème. Il convient en effet de s'assurer qu'améliorer la rationalité de la loi dans certains cas n'entraînerait pas une forme d'irresponsabilité des élus dans certaines autres situations graves.
Ainsi, plutôt que d'aboutir à un rejet de votre amendement, je vous invite à le retirer, étant entendu que ce chantier pourra être ouvert dans le cadre de l'évolution du statut de l'élu local.
Oui, ajoutez cette disposition à notre proposition de loi, que vous cosignerez !
Vous avez à la fois un engagement du Premier ministre qui veut « mettre en place un véritable statut » et un texte transpartisan.
J'insiste, on ne peut pas ne pas examiner cette question, mais il faut le faire de manière très précautionneuse et en se fondant sur des études préalables un peu plus poussées.
Le Gouvernement demande le retrait. À défaut, je serai défavorable à l'amendement et, en tout état de cause, je m'engage à ce que nous examinions ce sujet dans le détail.
Madame la rapporteure, dans la mesure où nous avons eu ce débat en commission il y a une semaine, l'évaluation de la portée de cet amendement aurait pu avoir lieu avant la séance. On ne peut pas toujours remettre ce type de questions au « coup d'après », d'autant que tout le monde assure pourtant en reconnaître l'intérêt.
M. Emmanuel Taché de la Pagerie applaudit.
C'est d'ailleurs parce qu'on nous propose toujours de reporter les choses à plus tard que je ne retirerai pas l'amendement.
Monsieur le ministre, vous reconnaissez que ce sujet est important, et vous évoquez même l'un des cas injustes sur lesquels nous fondons notre proposition. J'invite tous mes collègues à adopter cet amendement.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Sébastien Rome applaudit également.
Je confirme que j'ai évoqué en commission de nombreuses situations dans lesquelles des maires ont été mis en cause par le parquet, voire ont été mis en examen, pour des délits non intentionnels dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions.
J'ai notamment évoqué le cas d'un camion benne ayant renversé une personne alcoolisée en reculant dans une rue piétonne. On a demandé au maire de la commune concernée s'il avait bien pris et diffusé auprès des conducteurs tous les mois une circulaire indiquant qu'il fallait regarder son rétroviseur avant de reculer, qu'il ne fallait pas reculer dans une rue piétonne… Il y a bien des exagérations de nature à fragiliser la fonction d'élu : l'exemple cité par M. le ministre en est une autre illustration.
Il ne s'agit pas de reporter cet important sujet aux calendes grecques, mais de faire en sorte que, dans la proposition de loi que vous avez cosignée, nous nous engagions à traiter ce sujet, et beaucoup d'autres, dans un titre qui donne du contenu au statut de l'élu. Cela sécuriserait juridiquement votre dispositif alors que cet amendement fait peut-être plaisir, mais il sera retoqué par le Conseil constitutionnel car il est mal étayé.
M. Delautrette a raison de soulever ce problème, mais il y a un problème et je suis surpris que le Gouvernement ne l'évoque pas : nous avons affaire à un cavalier au regard de l'article 45 de la Constitution.
Bien sûr !
La proposition de Mme la rapporteure et de notre collègue Jumel me semble donc pleine de sagesse, d'autant que leur texte sur le statut de l'élu nous est promis pour le premier semestre…
Il ne s'agit ainsi pas de reporter le sujet ad vitam æternam. Même si, sur le fond, notre collègue a raison, la sagesse veut que nous ne votions pas cet amendement.
M. Inaki Echaniz s'exclame.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 128
Nombre de suffrages exprimés 91
Majorité absolue 46
Pour l'adoption 16
Contre 75
L'amendement n° 39 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 104 .
L'article 8 engage les communes à prendre en charge le reste à charge des frais médicaux ou psychologiques d'un élu ou de sa famille quand ces frais sont liés à une attaque ou à des violences.
Mon amendement vise à supprimer le barème de remboursement, par mesure de simplification. Cela permettra à la commune d'assurer la juste réparation à hauteur de chaque cas particulier qui lui sera présenté. En outre, il s'agit d'élargir le périmètre de la prise en charge, afin que les dépenses médicales et psychologiques ne soient pas seules concernées. Enfin, la commune conservera son pouvoir d'appréciation, comme c'est le cas pour la réparation des autres préjudices. C'est important pour éviter les abus, et cela permet de laisser la main à la commune concernée, d'autant que c'est elle qui gère son budget.
L'amendement n° 104 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 8, amendé, est adopté.
La parole est à M. Dominique Da Silva, pour soutenir l'amendement n° 94 qui tend à supprimer l'article 9
Même si je partage l'objectif poursuivi, l'article 9, en l'état, est juridiquement inapplicable. Permettre aux élus et aux candidats d'assurer leur permanence électorale et leurs lieux de réunion publique est une nécessité – tout le monde en convient. Attention, cependant, aux désillusions d'une fausse promesse !
En effet, le bureau central de tarification (BCT) des assurances est incompétent en l'espèce, car il ne l'est qu'en cas d'obligation d'assurer, pour les garanties obligatoires. Si le législateur peut parfaitement modifier la loi concernant les compétences du BCT, cela n'entre pas dans l'objet de l'article 9.
En outre, l'obligation pour l'assureur d'assurer impliquerait que tout élu ou candidat déclaré serait dans l'obligation de s'assurer, alors que c'est aujourd'hui facultatif. Sommes-nous prêts à légiférer dans ce sens ? L'obligation d'assurer va de pair avec une obligation d'assurance afin de permettre la mutualisation des risques.
Bien légiférer, c'est avant tout garantir l'applicabilité d'un dispositif. Prenons le temps de réfléchir à une solution viable.
Je vous remercie pour ces explications détaillées, mais elles ne m'ont pas convaincue. Je ne souhaite pas supprimer l'article 9, proposé et voté par le Sénat, car il répond à un besoin très souvent exprimé par les élus, qui souhaitent pouvoir assurer plus facilement leur permanence, leur local électoral ou le lieu où ils organisent une réunion publique.
Malgré tout, votre amendement est intéressant car il nous permet d'évoquer un sujet que beaucoup d'élus ignorent : ils ne sont pas obligés d'assurer ces locaux. Pourtant, qui ne le ferait pas ? À notre époque, les menaces et les risques de dégradation sont trop importants – nous l'avons tous vécu. Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j'y serai défavorable.
J'entends les difficultés juridiques que soulève l'article. Il reste que le dispositif permettra à tout élu, même s'il n'y est pas obligé, de disposer d'une assurance sans avoir à pleurer auprès de cinquante courtiers pour trouver une solution. Les élus ont autre chose à faire, et doivent être protégés.
Faisons-nous confiance : nous pourrons améliorer le texte jusqu'en commission mixte paritaire.
Je comprends l'intention de la rapporteure, ainsi que l'avis de la commission et du Sénat, mais je suis favorable à l'amendement de suppression de l'article 9. Cet article est totalement anticonstitutionnel.
Les seules assurances obligatoires sont les garanties catastrophe naturelle et tempête.
Ajouter les permanences électorales aux catastrophes naturelles et aux tempêtes me semble juridiquement assez… trivial.
Sourires.
Certes, il peut arriver que des permanences conduisent à des catastrophes, mais elles ne sont pas naturelles.
Sourires.
Que dit l'article 9 dans la rédaction issue du Sénat et des travaux en commission ? Il ouvre la possibilité de saisir le BTC lorsqu'on n'a pas pu obtenir de contrat d'assurance. Mais le BTC n'est compétent que pour les assurances obligatoires.
En résumé, l'accroche est anticonstitutionnelle et le moyen n'est pas opérant. Il s'agit simplement d'une pétition de principe, mais elle heurte le principe constitutionnel de liberté contractuelle, et celui de liberté des prix issu du droit de l'Union européenne.
Afin de ne pas diluer l'efficacité de la proposition de loi, et de ne pas procrastiner, je vous propose de confier le sujet à la mission menée par Alain Chrétien, maire de Vesoul. Avant l'été, elle est chargée de préciser les conditions d'assurabilité des collectivités locales. Je préfère que nous ajoutions ce sujet dans sa besace plutôt que voter un dispositif dont le but est noble, mais qui se heurtera aux principes que j'ai évoqués.
J'ai été assureur, monsieur le ministre. Permettez-moi en conséquence de vous corriger : certaines assurances sont obligatoires – c'est le cas de l'assurance automobile.
Non, elle n'est pas obligatoire !
Bien d'autres le sont d'ailleurs.
Le BCT est parfaitement compétent quand plus aucun assureur ne veut vous assurer. Ainsi, en matière d'assurance automobile, vous pouvez solliciter n'importe quel assureur, qui devra vous assurer au tarif fixé par le BCT.
En outre, il ne s'agit pas d'un cavalier au titre de l'article 45 puisqu'un tel dispositif est bien lié à l'objet même du texte – vous n'avez d'ailleurs pas soulevé cet argument. Je ne vois pas pourquoi la loi ne pourrait pas étendre la compétence du BCT à ces cas. Les locaux de collègues sont régulièrement attaqués et leur assureur peut dénoncer le contrat. Quelle est alors la situation ? Plus aucun assureur ne veut les assurer ! Honnêtement, connaissez-vous beaucoup de parlementaires qui n'assurent pas leur permanence ?
Il ne s'agit pas uniquement de s'assurer contre les violences, mais également contre les incendies ou les dégâts des eaux par exemple. Je soutiens la position de la rapporteure car les arguments du ministre ne sont pas solides.
Peut-être est-ce l'heure tardive, mais je ne comprends pas vraiment le débat. Bien sûr, certains députés ne manquent pas d'assurance.
Sourires.
M. Benjamin Lucas applaudit.
Quand on signe le bail de location d'un appartement, il faut transmettre une attestation d'assurance.
En copropriété oui, mais pas en maison individuelle.
De même, quand je roule avec ma voiture, si je ne peux pas me prendre une prune, mon attestation d'assurance doit être visible.
Comme le ministre, je regrette que des assurances se fassent du beurre sur le dos des collectivités et refusent d'assurer des mairies ou des centres communaux d'action sociale (CCAS).
Il faut régler ce problème ! J'espère que la mission Chrétien apportera des réponses concrètes. Pour autant, aucun candidat à une élection ne peut prendre le risque de ne pas assurer sa permanence ! D'ailleurs, aucun bailleur n'accepterait de lui louer un local dans le cas contraire.
En outre, quand je m'assure, c'est dans un esprit de responsabilité : je n'assure pas seulement le lieu, mais aussi les gens qui s'y trouvent. Quand j'assure ma permanence électorale, j'assure les bénévoles, les militants, les gens que j'accueille, les électeurs et même, le cas échéant, le personnel employé dans le cadre de la campagne électorale. Cela devrait être obligatoire. C'est pourquoi il ne faut pas supprimer l'article 9.
Est-il maintenu, monsieur Da Silva ? Je vous redonne la parole une minute pour que vous me répondiez, mais ne rouvrez pas le débat.
En donnant compétence au BTC, on rend obligatoire cette assurance facultative.
Il y a un problème de mutualisation des risques. Relisez le code : il est clair que le BTC n'est pas compétent pour ce type d'assurance. L'article est mal rédigé. On peut le voter, mais il sera inapplicable.
L'amendement n° 94 n'est pas adopté.
M. Maxime Minot rit.
Il s'agit d'inclure les permanences parlementaires dans le dispositif de saisine du bureau central de tarification prévu pour les permanences électorales. En effet, les permanences parlementaires subissent trop souvent des dégradations et constituent des cibles pour certains mouvements contestataires et sociaux. Or elles sont essentielles à la vie locale. Nous y recevons nos concitoyens, des élus, des représentants des forces économiques et sociales, et les compagnies d'assurances peuvent devenir réticentes à les assurer, surtout si elles ont subi des dégradations à répétition.
Je vous remercie pour cette proposition. Bien entendu, j'y suis sensible car nous sommes nombreux à avoir rencontré des difficultés pour assurer nos locaux parlementaires. Je vous demanderai néanmoins de bien vouloir retirer votre amendement – à défaut, mon avis sera défavorable – car notre proposition de loi cible les élus locaux, afin de leur signifier notre reconnaissance et notre souci de leur protection. Par cohérence, je ne souhaite pas y inclure des dispositions concernant les parlementaires.
Je m'en veux beaucoup de ne pas avoir réussi à vous convaincre s'agissant de l'amendement précédent. Aujourd'hui, une mairie peut ne pas être assurée…
…– les CCAS, les centres culturels et les autres bâtiments publics au cœur de la mission confiée au maire de Vesoul peuvent ne pas l'être non plus. Vous avez voté l'obligation pour les permanences de l'être.
Le candidat devra donc trouver un assureur.
S'il n'en trouve pas, il devra obligatoirement saisir le BCT, une instance qui n'intervient normalement que dans les cas qui relèvent de l'intérêt général – par exemple l'assurance automobile des personnes physiques.
C'est sur ce point que je n'ai pas été assez précis : ces cas d'intérêt général se limitent, pour les personnes morales, aux catastrophes naturelles et aux tempêtes. Une permanence électorale ne dépend souvent pas d'un individu, mais d'une liste ou d'un collectif.
Vous vous apprêtez à élargir ce dispositif pour y inclure les permanences de parlementaire, ce qui vous obligera à les assurer.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Aujourd'hui, vous n'êtes pas dans l'obligation d'assurer votre permanence parce que c'est une permanence, mais parce qu'elle se trouve dans une copropriété qui l'impose ou parce que vous louez les locaux.
Vous voulez pouvoir saisir le BCT si vous ne trouvez pas d'assureur. Ce n'est pas parce que vous pourrez le saisir qu'il sera davantage compétent !
Nous légiférons en empilant les dispositifs à l'aveugle. En naviguant ainsi sans visibilité et sans consolider ces ajouts législatifs, nous risquons d'aboutir à une sorte de monstre juridique – même si l'intention de départ est louable.
Avis défavorable.
Monsieur le ministre, je suis atterré par vos réponses. Je peux vous garantir que tous les parlementaires ici ont signé un bail contenant une clause précisant que l'assurance est obligatoire – c'est vrai pour les permanences parlementaires comme pour les permanences électorales.
…vous avez confié avoir rencontré des problèmes pour assurer vos locaux. En ce qui nous concerne, nous rencontrons des problèmes depuis des décennies – une seule compagnie d'assurances accepte de nous assurer en France. Je me réjouis que vous preniez enfin conscience de difficultés rencontrées par les partis politiques et les parlementaires !
Monsieur le ministre, vous devriez revoir vos notes : je vous garantis que l'obligation de souscrire une assurance est inscrite dans les baux !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Si le bien vous appartient, vous n'avez pas l'obligation de l'assurer !
Monsieur le ministre, en l'occurrence vous pouvez vous prévaloir de l'article 45 de la Constitution : cet amendement est sans lien avec les problèmes des élus locaux. Nous ne pouvons donc pas le voter. Bien qu'il soit intéressant, il devra tout simplement être examiné dans un autre cadre.
Je retire mon amendement, davantage en raison des arguments présentés par Mme la rapporteure que par M. le ministre.
Exclamations sur plusieurs bancs.
L'amendement n° 87 est retiré.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement n° 57 .
Nous souhaitons que les modalités permettant aux candidats de justifier leur droit à saisine du BCT soient précisées.
Je vous demande de retirer votre amendement car la précision demandée ne relève pas du domaine de la loi.
Même avis.
L'amendement n° 57 est retiré.
L'article 9 est adopté.
L'article 10 revient sur la définition du candidat et sur la période au cours de laquelle il peut bénéficier d'une protection.
Il prévoit que chaque candidat bénéficie pendant les six mois précédant le premier jour du mois de l'élection et jusqu'au dernier tour de l'élection auquel il participe de la protection prévue à l'article L. 134-1 du code général des collectivités territoriales. Ce dispositif ne nous semble pas satisfaisant car la protection prend fin dès le résultat du scrutin connu. Or chacun sait – surtout ici – qu'en pratique certains candidats doivent poursuivre leurs déplacements et leurs interventions médiatiques les jours suivant l'élection, et qu'ils restent donc exposés.
C'est pourquoi le Rassemblement national avait déposé un amendement, malheureusement déclaré irrecevable, pour prolonger cette protection jusqu'au dépôt des comptes de campagne. Nous en défendrons donc un autre tendant à faire entrer l'article 10 en vigueur dès l'entrée en vigueur de la loi, et non un an après sa promulgation comme le prévoit le texte actuel. Je compte sur l'esprit de responsabilité de cet hémicycle pour adopter notre amendement.
Il aligne les dispositions du nouveau chapitre V ter du code électoral sur certaines dispositions du V bis s'agissant du remboursement des comptes de campagne. Il précise également la notion de candidat et la période ouvrant droit au remboursement des dépenses de sécurité.
En effet, lorsque le Sénat a voulu, à bon escient, aborder ce sujet, il n'a pas précisé à quel moment un candidat le devient. Après audition de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), nous avons travaillé pour définir précisément le début de la période de candidature – soit le dépôt d'un nom de mandataire, soit une déclaration publique – et la fin de la période électorale concernée par ces remboursements – le jour du scrutin du deuxième tour.
L'amendement n° 72 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je présenterai aussi par avance l'amendement n° 24 pour des raisons de clarté.
Nous demandons la suppression des alinéas 6 à 10 de l'article 10. En effet, ces dispositions reviennent à étendre la protection fonctionnelle des fonctionnaires aux candidats. Cela nous paraît complexe à mettre en place et un peu tiré par les cheveux – même si nous comprenons la logique d'une protection des candidats. Avons-nous vraiment intérêt à fonctionnariser ces derniers, car c'est bien ce dont il est question ?
Intégrer les dépenses de sécurité privée comme la vidéosurveillance dans les comptes de campagne nous pose également problème – cela nous semble excessif.
L'amendement n° 24 , vise, dans les rares cas où un candidat serait inquiété, à faire intervenir la force publique, c'est-à-dire la police ou la gendarmerie plutôt qu'une police privée. C'est par exemple ce qui s'est produit récemment lorsque les préfets nous ont contactés pour nous rappeler que la police ou la gendarmerie était à notre disposition pour nous protéger en cas de besoin.
Nous proposons de supprimer les dispositions de l'article 10 qui prévoient la prise en charge par l'État des frais engagés par les candidats pour assurer leur sécurité personnelle pendant la campagne électorale. Cette disposition qui nous paraît déraisonnable, voire inopportune, pourrait en effet être instrumentalisée par les candidats dans le cadre de leur campagne. Par ailleurs, elle aboutirait à octroyer aux candidats des droits supérieurs à ceux des élus, l'État ne prenant pas en charge les frais que ces derniers décideraient d'engager pour assurer leur sécurité personnelle.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 114 .
Nous proposons nous aussi de supprimer l'ouverture de la prise en charge des frais de sécurité des personnes candidates à une élection. Nous considérons que ce serait la porte ouverte à de nombreuses dérives et à des excès au profit de sociétés de sécurité privée. Si une candidate ou un candidat fait l'objet de menaces, il revient aux forces de police ou de gendarmerie d'en assurer la protection – c'est leur métier. En outre, les dépenses électorales permettent déjà d'assurer la protection des locaux de campagne et des salles où se tiennent les réunions publiques.
Vous videz l'article 10 de toute sa substance alors qu'il s'agit d'un article très important qui permet de mieux protéger les candidats à une élection.
Protéger les candidats, c'est protéger la vitalité démocratique en faisant en sorte que des personnes compétentes et investies dans leur commune et leur territoire, des personnes qui ont envie de s'engager en politique, n'y renoncent pas en voyant que certains candidats ne sont pas suffisamment protégés ou sont trop exposés aux violences. Lors des élections précédentes, nous avons en effet été témoins d'une multiplication des dégradations de locaux de campagne, des menaces à l'encontre du personnel qui y travaille et des situations qui obligent le candidat à se faire escorter par la police ou à engager un ou plusieurs agents de sécurité pour assurer la sécurité d'une réunion publique. Tout cela a un coût.
Contrairement à ce que vous avez dit en défendant vos amendements, depuis la mission d'information que j'ai menée avec Sébastien Jumel et pour préparer l'examen de cette proposition de loi, nous avons pris le temps de travailler main dans la main avec la Commission nationale des comptes de campagne. Sa jurisprudence prend désormais en compte quelques dépenses de sécurité – beaucoup d'élus locaux ne le savent pas car ce n'était pas vraiment le cas en 2020. À présent, la vidéoprotection du local ou un accompagnement par un agent de sécurité au cours d'une déambulation potentiellement dangereuse, au milieu d'une foule par exemple, peuvent être pris en charge. En revanche, d'autres dépenses ne le sont pas – un gardiennage, un système d'alarme ou un accompagnement de sécurité plus permanent.
Les autres dispositions qui n'existaient pas concernent les communes les plus petites, de moins de 9 500 habitants. Les candidats aux élections dans ces dernières ne sont pas soumis à l'obligation de dépôt des comptes de campagne. Ce faisant, ils ne pouvaient pas bénéficier de la prise en charge de frais de sécurité. La CNCCFP a travaillé avec nous pour créer un compte spécifique permettant aux candidats menacés pendant la période définie à l'article 10, y compris dans le cadre d'une élection dans une petite commune, d'établir le relevé des dépenses de sécurité – même s'il n'y a que deux ou trois factures – et d'être remboursés par l'État. L'article 10 permet de pérenniser ce dispositif qui existe déjà.
Enfin, vous essayez de faire croire que les candidats engageraient des agents de sécurité privée pour le plaisir, pour se protéger de menaces imaginaires – et qu'en cas de réel danger il y a la police et la gendarmerie.
Je rappelle qu'existe un dispositif qui est le même pour tous les élus et les candidats : l'unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat). L'Uclat, qui n'est peut-être pas assez connue, est saisie par la préfecture en cas de menace grave et persistante – par exemple des menaces de mort. L'unité évalue la menace et fournit le cas échéant une protection rapprochée, comme ce fut le cas pour le maire de l'Haÿ-les-Roses après l'attaque dont il a été victime.
Le dispositif que nous proposons concerne des menaces temporaires parfois persistantes durant une campagne électorale, mais de moindre intensité, qui obligent cependant le candidat à prendre des mesures pour se protéger, comme la vidéoprotection, le gardiennage, ou le recours à un accompagnement. Nous espérons que ce besoin se fera de moins en moins ressentir, en particulier pendant la campagne des élections municipales de 2026 – c'est ce que nous souhaitons tous.
Voilà les raisons pour lesquelles je suis défavorable à l'ensemble de ces amendements.
J'ajoute à l'argumentaire très clair de la rapporteure que le dispositif prévu par les alinéas que vous souhaitez supprimer est encadré : les dépenses ne seront prises en charge que si la menace est « avérée », par exemple.
Il ne faudrait pas que, faute de prise en charge, les dépenses de sécurité constituent l'essentiel des dépenses de campagne, au détriment de la promotion des idées du candidat – voire qu'elles entraînent un dépassement du plafond des comptes de campagnes. Cette protection est nécessaire à la démocratie : partant, je suis défavorable aux trois amendements.
La rapporteure a été très claire et précise. Certains collègues redéposent en séance des amendements dont nous avons déjà débattu en commission, et pour lesquels ils ont déjà obtenu une réponse. M. Jumel y avait insisté sur l'importance d'ouvrir la possibilité de prendre en charge les dépenses de sécurité engagées par les candidats. En effet, comme nous le savons tous, face à l'impossibilité pour la police et la gendarmerie d'assurer la sécurité de tous les candidats pendant leurs meetings, le recours à la force publique est réservé à ceux dont la préfecture estime qu'ils courent un grave danger et nécessitent une protection particulière.
Depuis 2020, une jurisprudence existe en la matière, mais elle reste incomplète, et il faudrait aller plus loin. L'article 10 vise ainsi à élargir le champ des dépenses de sécurité prises en charge par la CNCCFP, et, surtout, à étendre cette prise en charge aux candidats des communes de moins de 10 000 habitants : c'est une grande avancée, que nous devrions tous soutenir en rejetant ces amendements.
L'amendement n° 23 n'est pas adopté.
Pour votre bonne information, mes chers collègues, je lèverai la séance à minuit quoi qu'il arrive.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 75 rectifié .
Cet amendement technique vise à préciser la période de prise en charge des dépenses de sécurité des candidats.
Favorable, comme sur tous les amendements de la rapporteure à cet article.
Sourires.
Cet amendement va dans le bon sens selon nous : il reconnaît explicitement l'ensauvagement de notre société et admet que les élus y sont particulièrement exposés.
Il y a néanmoins dans tout cela un peu d'hypocrisie. Certes, grâce à l'article 10, davantage de dépenses en matière de sécurité – caméras ou agents de sécurité, par exemple – pourront être prises en charge dans le cadre des comptes de campagne, mais le plafond des dépenses remboursables n'est pas rehaussé.
Dans le cas d'une élection régionale, le plafond de dépenses fixé par la loi – qui peut atteindre 1 million d'euros, par exemple – permet au candidat de s'offrir les services d'un agent de sécurité s'il se sent menacé. Ce n'est pas le cas pour un candidat à l'élection départementale, dont les comptes de campagne sont moindres, et encore moins pour un candidat aux municipales, surtout dans une petite commune. Vous vous donnez donc bonne conscience à pas cher !
L'amendement n° 75 rectifié est adopté.
L'amendement n° 24 de M. Sébastien Rome a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Sourires.
L'amendement n° 24 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 76 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Sur l'amendement n° 45 , je suis saisi par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Sur l'article 10, je suis saisi par les groupes Renaissance et Rassemblement national de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 73 rectifié .
L'amendement n° 73 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement technique important pour les relations entre la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) et la CNCCFP permet de consacrer dans la loi et de sécuriser le principe de la transmission à cette dernière commission des informations et données à caractère personnel concernant les communes de moins de 9 500 habitants.
L'extension à ces communes de la prise en charge des dépenses de sécurité des candidats rendue possible par le texte nécessite cette évolution.
L'amendement n° 84 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il tend à supprimer l'alinéa 11 afin que les dispositions de l'article 10 entrent en vigueur dès la promulgation de la loi, et non dans un an, comme le prévoit actuellement le texte. En effet, les prochaines élections municipales arriveront rapidement, et certains candidats se mettent déjà en ordre de bataille pour la campagne.
…et je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi cela serait nécessaire.
En commission, madame la rapporteure, vous avez invoqué des lourdeurs administratives – les mêmes contre lesquelles manifestent actuellement les agriculteurs. Si vous les avez réellement entendus, comme vous le prétendez, c'est donc le moment de le prouver, d'autant que ces lourdeurs concernent toutes les strates de l'État. J'en appelle donc à votre bon sens pour appeler à voter en faveur de notre amendement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Vous pouvez compter sur mon bon sens pour ne pas voter pour votre amendement, pour être honnête et ne pas verser dans la démagogie.
Les nombreux dispositifs juridiques prévus par cette proposition de loi vont changer la vie des élus : laissons le temps à nos administrations de rédiger au mieux les décrets d'application pour qu'ils soient réellement opérationnels et efficaces.
En revanche, nous devrons être très vigilants quant à la qualité des décrets d'application et nous assurer, dans le cadre de nos travaux de contrôle, qu'ils sont pris dans les délais et fidèles à l'esprit de nos débats d'aujourd'hui, afin que tous les candidats soient protégés pour les prochaines élections municipales – et cela concerne un certain nombre d'entre nous, sur tous les bancs. Je rappelle qu'en matière de prise en charge des dépenses de sécurité dans le cadre des prochaines municipales, le délai courra officiellement six mois avant l'élection.
Défavorable, principalement pour des raisons juridiques : outre la prise d'un décret en Conseil d'État, les dispositions que vous adoptez nécessiteront une coordination avec la Commission nationale des comptes de campagne. Le « Guide du candidat et du mandataire » doit être finalisé avant l'ouverture de la période de financement électorale, qui débute le sixième mois précédant le premier jour du mois de l'élection. En prévoyant un délai d'un an, cela laisse donc au maximum six mois pour prendre l'ensemble des textes réglementaires relatifs aux nouvelles dispositions et assurer la communication afférente, ce qui demandera déjà d'être particulièrement diligents. Il n'est pas question de repousser indûment l'entrée en vigueur des dispositions : je vous assure que c'est le délai le plus court possible à compter de la date de promulgation de la loi.
Ces arguments ne sont pas recevables. Vous nous accusez de faire de la démagogie mais si vous ne votez pas pour cet amendement, alors que vous prétendez que ce texte est la clé en matière de défense des élus locaux, c'est bien vous qui ferez de la démagogie.
Vous n'invoquez que des arguments de mauvaise foi pour rejeter un amendement de bon sens, uniquement au motif qu'il est issu des bancs du Rassemblement national.
« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.
Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, deux tiers des citoyens renonceraient à se présenter à une élection parce qu'ils se considèrent insuffisamment protégés.
À l'aube des prochaines élections municipales, nous avons l'occasion de leur assurer qu'ils seront protégés, et vous ne le faites pas : je le regrette profondément.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 92
Nombre de suffrages exprimés 91
Majorité absolue 46
Pour l'adoption 24
Contre 67
L'amendement n° 45 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 90
Nombre de suffrages exprimés 89
Majorité absolue 45
Pour l'adoption 78
Contre 11
L'article 10, amendé, est adopté.
L'article 11 est adopté.
La parole est à M. Stéphane Delautrette, pour soutenir l'amendement n° 41 portant article additionnel après l'article 11.
Il vise à renforcer l'information des élus, en imposant au procureur de la République territorialement compétent d'informer l'élu, dans un délai de trois mois, des suites données à la plainte qu'il aurait déposé du fait de dommages subis dans le cadre de ses fonctions, et de transmettre chaque année à l'ensemble des maires de son ressort territorial un bilan du traitement de la répression des atteintes aux élus. C'est une disposition que nous avons inscrite dans notre propre proposition de loi visant à améliorer l'attractivité des mandats locaux.
Comme je l'ai indiqué en commission, si je ne suis pas défavorable, sur le fond, connaissant la façon dont nos procureurs travaillent, je m'en tiendrai, par pragmatisme, à un avis de sagesse.
Lors des travaux de la mission d'information que j'ai menée avec Sébastien Jumel, j'ai pu constater combien il était nécessaire de renforcer les liens entre les maires et les procureurs – raison pour laquelle nous avons prévu plusieurs dispositions en ce sens à l'article 12 de la proposition de loi portant réforme du statut de l'élu local. Cependant l'obligation que vous proposez de leur imposer et sa fréquence créeraient pour les procureurs une contrainte très forte, difficilement compatible avec l'ensemble de leurs charges, en particulier au regard de l'augmentation des procédures et de l'exigence de rapidité dans leur traitement que vous formulez tous.
Défavorable. Nous ne contestons pas l'importance de l'information des élus, qu'il s'agisse des suites à donner – nous en avons d'ailleurs fait une obligation – ou du bilan des plaintes déposées. En revanche nous ne pouvons pas valider la temporalité de votre proposition, qui s'appliquerait à toutes les procédures, quelle que soit leur complexité. Trois mois d'enquête ne suffisent pas toujours au procureur pour disposer des éléments permettant de décider des suites à donner à la procédure, notamment dans les cas compliqués. En outre, cela reviendrait à « prioriser » le travail des procureurs, ce qui ne me semble pas souhaitable : mieux vaux qu'ils se concentrent sur l'enquête pour retrouver les auteurs des faits, plutôt que sur l'exigence de communiquer dans un délai contraint.
Une telle « priorisation » ne serait sans doute d'ailleurs pas constitutionnelle, monsieur le ministre.
L'amendement de Stéphane Delautrette ne vise pas à ce que soit communiqué le résultat de l'enquête, mais simplement les suites qui lui sont réservées. Les procureurs ont pris l'habitude de recevoir les élus, de ne pas les laisser seuls sans information, et une circulaire du ministre de la justice prévoit d'ailleurs que le procureur reçoit les élus qui le souhaitent : cela va dans le bon sens. De bonnes pratiques se développent en ce moment, comme au tribunal judiciaire de Mâcon, qui propose un site dédié qui permet aux élus de contacter directement le procureur afin de lui faire part d'observations ou obtenir des renseignements utiles concernant leur dossier. Au-delà des mesures législatives, nous devons encourager le développement de bonnes pratiques.
C'est une bonne idée, mais cela ne relève pas de la loi : une instruction, une circulaire du garde des sceaux demandant au parquet d'informer les élus dès qu'ils disposent d'éléments nouveaux suffiraient amplement. En outre, je partage le souci de Mme Untermaier : je ne suis pas tout à fait sûr qu'adresser une injonction au parquet soit constitutionnel.
Nous ne voterons donc pas l'amendement, mais peut-être, monsieur le ministre, pourriez-vous en toucher un mot à votre collègue garde des sceaux, afin qu'il prenne les dispositions pour le satisfaire.
L'amendement n° 41 n'est pas adopté.
L'article 12, amendé, est adopté.
L'amendement n° 91 de Mme Edwige Diaz, tendant à supprimer l'article 13, est défendu.
L'amendement n° 91 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge, pour soutenir l'amendement n° 107 .
Cet amendement a pour origine mes échanges avec le maire de ma commune de Bilieu, dans l'Isère, car il est extrêmement important de pouvoir porter la parole des élus locaux dans cet hémicycle.
Il s'agit d'une proposition un peu particulière, relative à la publicité des contentieux, mais je la crois utile pour faire comprendre à nos concitoyens les coûts, la mobilisation des agents et le stress des élus locaux que peut engendrer la multiplication des procédures déposées à l'encontre des communes. Au-delà du nombre des recours nos concitoyens devraient pouvoir en connaître les auteurs – je rappelle qu'il arrive que, dans un village, une ou deux personnes seulement soient à l'origine de la quasi-totalité des procédures.
Il faut toujours écouter les témoignages des élus locaux sur leur expérience quotidienne.
Ça dépend d'où ils viennent ! Quand ils viennent de chez nous, vous vous en fichez !
La multiplication des contentieux et la judiciarisation de la vie politique créent des difficultés, en particulier dans les petites communes. Notre mission d'information, avec Sébastien Jumel, a largement évoqué le sujet. Judiciariser tous les dossiers de la commune, c'est finalement empêcher le maire d'agir alors qu'il a été élu avec un projet, pour prendre des décisions qu'il peut légitimement assumer.
Cependant, même si je comprends l'intention de l'amendement, je vais vous demander de le retirer. Il s'agit plutôt d'un amendement d'appel, pour appeler notre attention sur ce sujet. Cette rédaction large, imprécise n'a pas vraiment sa place dans la proposition de loi. Il conviendrait aussi d'expertiser, en lien avec les procureurs, la question de la confidentialité des affaires judiciaires.
Votre amendement pose une difficulté qui me conduit à vous demander son retrait. En effet, sa rédaction qui évoque « les contentieux opposés à la mairie de la commune » me paraît juridiquement discutable et floue. Jusqu'où entendez-vous aller ? S'il s'agit d'évoquer les frais de procédure, le procureur n'a pas à intervenir. S'il s'agit de publier les contentieux dans lesquels la mairie est partie prenante, je comprends l'idée, mais donner la faculté à un procureur de s'exprimer dans un bulletin municipal ne me semble pas aller dans le sens de la simplification et de l'allégement des normes que nous souhaitons les uns et les autres.
Je retire cet amendement, dont vous avez compris l'objet et le champ effectivement assez large. Il attire néanmoins notre attention sur l'ampleur du coût des procédures pour des communes au budget limité. Il faut trouver un moyen d'en informer nos concitoyens, même si j'ai conscience que la loi ne peut pas tout.
L'amendement n° 107 est retiré.
L'article 13 est adopté.
L'amendement vise à désigner « les parlementaires concernés » comme membres de droit des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD), sachant que le préfet et le procureur de la République bénéficient déjà de ce statut. Les parlementaires doivent réinvestir le terrain et s'occuper des questions de sécurité et de prévention de la délinquance.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir le sous-amendement n° 127 .
Je suis favorable à l'amendement de M. Bru, sous réserve que mon sous-amendement soit lui-même adopté. Vous proposez que les parlementaires soient membres de droit des CLSPD, ce qui leur imposerait une contrainte nouvelle car être membre de droit implique une obligation de présence. Je propose pour ma part que les parlementaires participent aux CLSPD à leur demande. En effet, le député n'est pas toujours le bienvenu au CLSPD quand il n'est pas du même bord politique que le maire qui le préside. Prévoir une demande qui ne pourra pas être refusée me semble constituer un bon compromis.
Le Gouvernement n'est pas favorable à la présence des parlementaires au sein du CLSPD.
Le CLSPD est un lieu privilégié, un conseil présidé par le maire, où sont discutées les priorités des actions de la police municipale et de la police nationale. Je n'ai pas de doute sur le fait que l'écrasante majorité des parlementaires membres de droit de ces instances, quand bien même ils en auraient plusieurs dans leur circonscription, assisteraient à ces travaux. Toutefois, le fait qu'existe un lieu de dialogue entre polices nationale et municipale, en petit comité, ne me semble pas s'opposer à l'association des parlementaires à la définition des politiques de sécurité.
Or, la présence d'un grand nombre de personnes autour de la table – ma commune, par exemple compte quatre députés tous membres de la majorité – aboutirait à transformer un lieu opérationnel, où il peut s'agir de choisir le meilleur moment pour intervenir dans une cage d'escalier, en une enceinte de discussion et de débat sur la politique pénale ou les moyens de police locaux. Mon avis n'est donc pas dirigé contre le Parlement ; il entend préserver une prérogative locale instituée à la demande des maires, qui changerait de nature si vous adoptiez un tel amendement.
J'ai très bien compris pourquoi vous ne voulez pas de la présence des parlementaires dans les CLSPD. Elle nous permettrait en effet de jauger la réalité et la vérité des propos que le ministre de l'intérieur nous assène à longueur de séance.
Je vais vous donner un exemple très simple. À Carpentras, on nous avait annoncé la création de sept postes supplémentaires. Malheureusement, entre les maladies, les transferts d'effectif et les retraites, quatorze départs ont eu lieu et finalement, on se retrouve avec sept agents en moins. Le CLSPD nous permet de disposer de ce genre d'informations et de les remonter auprès de nos collègues qui peuvent être confrontés aux mêmes situations.
Ce n'est pas l'objet du CLSPD !
Le sous-amendement est intéressant car il ne rend pas obligatoire la participation des parlementaires aux CLSPD. Nous commençons à connaître nos circonscriptions et leurs zones de température – c'est la terminologie des gendarmes – où la délinquance et la criminalité sont très marquées. Participer aux CLSPD nous permettrait de connaître les moyens qui y sont mobilisés et de savoir si le ministre de l'intérieur nous dit la vérité.
Je suis d'accord avec le ministre. Un maire est un maire, il est officier de policier judiciaire et jouit d'une relation privilégiée avec les forces de police de sa commune. Un bon parlementaire est d'ailleurs au courant de ce qui se passe dans sa commune.
Le maire m'informe des problèmes de sécurité et j'en discute avec le commissaire et les gendarmes.
L'intérêt de l'article que nous avons enrichi en commission est de renforcer la mission d'officier de police judiciaire du maire, trop réduite à une coquille vide jusqu'alors. Le Parlement serait bien inspiré de réfléchir aux moyens de densifier encore cette mission capitale, pour que le maire soit le pivot des problématiques de sécurité de sa commune, en lien avec le préfet et le procureur de la République.
Pour vérifier les moyens déployés par le ministère de l'intérieur sur son territoire, le député contrôle la loi de finances, pose des questions au Gouvernement, crée des commissions de contrôle, vérifie lors des semaines de contrôle la véracité des moyens employés. Ce n'est pas la vocation des CLSPD d'effectuer ces missions. Une fois n'est pas coutume, je suis donc d'accord avec le ministre.
Je pensais que les députés devaient s'investir davantage sur leur territoire et tisser un lien naturel avec lui, notamment sur des questions très sensibles comme la sécurité.
J'approuve le sous-amendement de la rapporteure car il évite de rendre obligatoire la participation des parlementaires aux CLSPD. Je maintiens mon amendement.
Monsieur de Lépinau, votre intervention me prouve que vous n'avez pas besoin de siéger aux CLSPD pour savoir comment évoluent les effectifs de la police nationale. Pire, en venant d'indiquer que vous vouliez y siéger pour savoir si le ministre de l'intérieur tenait ses engagements, vous renforcez mon opposition à cet amendement. Penser que le CLSPD a un tel objectif relève en effet du mépris pour les maires qui font reculer la délinquance au quotidien. Vous voudriez donc nationaliser jusqu'aux aspects opérationnels des dispositifs de sécurité !
J'ai été maire, j'ai moi-même critiqué l'État à propos des effectifs de police. Mais quand vous présidez un CLSPD, même si vous souhaiteriez davantage d'effectifs, vous vous demandez comment utiliser au mieux des effectifs constants, en ayant connaissance des situations qui demandent la coordination des moyens.
Si votre obsession pour le ministre de l'intérieur vous amène à chercher en permanence des outils pour le contrôler, vous disposez de biens d'autres lieux et moyens pour le faire. En revanche, utiliser les CLSPD qui sont des lieux opérationnels pour y parvenir, c'est prendre en otage des politiques de proximité, des forces de l'ordre et des agents locaux. Je serais curieux de connaître l'avis du maire de Perpignan sur ce sujet.
Mes chers collègues, si un tel amendement était voté, les maires organiseraient, hors CLSPD, des temps de coordination entre les forces de l'ordre nationales et locales, car nous ne pouvons pas transformer des instances locales et opérationnelles, qui ne sont pas si nombreuses, en lieux où viendrait s'inviter le débat national. Vous avez suffisamment de moyens de contrôler et de voter des budgets. Je vous demande de préserver cet outil concret et opérationnel. Je réitère un avis défavorable sur l'amendement et le sous-amendement.
Notre rôle n'est pas de voter une loi pour vérifier si le ministre de l'intérieur dit la vérité, mais de voter une loi pour que les élus locaux puissent exercer leurs missions paisiblement et que la sécurité des élus – c'est l'objet du texte que nous examinons – et des citoyens soit assurée.
Si je souhaite participer à un CLSPD en tant que parlementaire, quand je le demande, ce n'est pas pour contrôler le ministre de l'intérieur, ni le maire de Lille qui d'ailleurs ne réunit pas son CLSPD – ce dont je pourrais m'inquiéter !
La sécurité et la prévention de la délinquance concernent les députés sur le plan local de leur circonscription : voilà ce qui motive mon amendement. J'entends, monsieur le ministre, que nous ne sommes pas d'accord et que mon corapporteur de la mission d'information, Sébastien Jumel, est d'accord avec vous. Nos points de vue sont complexes, peut-être parce que les pratiques des CLSPD sont hétérogènes selon les territoires, qu'ils sont parfois trop politisés, et qu'il faut assainir leur fonctionnement.
En tout cas, faisons en sorte que nos votes soient bien motivés par l'objet de la loi que nous avons à examiner aujourd'hui.
Le sous-amendement n° 127 est adopté.
L'amendement n° 85 , sous-amendé, est adopté.
Prochaine séance, demain, à quatorze heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la discussion de la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires.
La séance est levée.
La séance est levée à zéro heure.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra