Je suis très favorable à cet amendement, car il répare une injustice. Lorsqu'au niveau local, la vie politique s'arrête, il est fréquent que le téléphone cesse de sonner et que la gratitude que l'on vous témoignait s'estompe. Tel n'est pas forcément le cas des insultes de ceux qui se souviennent que vous avez pris une décision qui leur était défavorable. On se retrouve ainsi dans une situation parfaitement asymétrique : ceux qui vous en veulent continuent de déverser leur bile tandis que ceux qui vous doivent quelque chose ne s'en souviennent plus ou que les décisions que vous avez prises dans l'intérêt général ont été oubliées. Cet amendement est donc une véritable mesure de justice.
Madame la rapporteure, je sais la frustration que d'aucuns ressentent du fait de l'application de l'article 40, qui ne nous permet pas de discuter d'une extension éventuelle de la protection fonctionnelle aux élus d'opposition. La question est sensible ; je ne l'évacue pas car je ne considère pas que le débat soit illégitime. Mais, en l'état, compte tenu des rédactions dont nous disposions – peut-être parce que nous n'y avons pas consacré le temps de cerveau nécessaire –, le risque était grand que la mesure devienne un nid à contentieux.
Admettons qu'élus de la majorité comme de l'opposition puissent bénéficier de la protection fonctionnelle sans que le système soit correctement organisé. Si, dans un débat municipal, une dénonciation calomnieuse finit par répondre à une diffamation, c'est le premier élu qui déposera plainte qui bénéficiera de la protection fonctionnelle, de manière à éviter que deux avocats mandatés par la même commune et payés tous deux sur le même budget communal ne se retrouvent dans un prétoire. Sans compter que les deux élus peuvent être eux-mêmes avocats, inscrits au même barreau…
Au-delà de la boutade, on ne peut pas balayer la question d'un revers de la main. Le dispositif doit donc être calibré de manière à éviter que l'on aille à l'encontre de l'objectif recherché. Nous souhaitons apaiser le débat et non le judiciariser. Vous prévoyez, à l'article 3, les conditions qui permettront de protéger un élu si, par des insinuations, des insultes, du harcèlement ou des agressions, le débat franchit la limite démocratique. Mais, en l'espèce, le texte relatif au statut de l'élu nous semble être le véhicule approprié pour ajuster le dispositif et prendre le temps d'en discuter dans un cadre parfaitement transpartisan.