La commission des affaires économiques a poursuivi l'examen du projet de loi d'orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture (n° 2436) (M. Éric Girardin, rapporteur général, Mme Nicole Le Peih et MM. Pascal Lavergne et Pascal Lecamp, rapporteurs).
Après l'article 12 (suite)
Mes chers collègues, il nous reste trois cent soixante amendements à examiner. Nous pouvons espérer terminer vers treize heures, si chacun y met de la bonne volonté, sans pour autant escamoter les débats importants.
Amendements CE1291 de M. Francis Dubois, CE2895 de M. Julien Dive, CE1296 de M. Francis Dubois et CE95 de M. Fabrice Brun (discussion commune)
Cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement sur les prêts à taux zéro destinés aux agriculteurs qui s'installent pour la première fois.
Les prêts à taux bonifié ne sont pas le bon outil pour aider nos agriculteurs à s'installer. C'est d'un outil permettant un financement public-privé pour les reprises d'exploitation que la loi doit se doter, en particulier pour les installations des jeunes agriculteurs. Le Gouvernement travaille sur la mise en place d'une nouvelle enveloppe de prêts garantis par l'État, dont le ministre pourra certainement vous donner les contours. Avis défavorable.
Une mission a été conduite il y a quelque temps sur la question des prêts bonifiés. Trois défauts majeurs avaient été identifiés : la perte d'efficacité et d'attrait du fait de l'évolution des taux ; la complexité et la lourdeur administrative des dispositifs ; l'importance des frais de gestion pour l'État. C'est pourquoi nous avons fait le choix des prêts garantis. Le Gouvernement va renouveler et renforcer ce dispositif, en déployant 2 milliards d'euros de prêts garantis agricoles pour accompagner les installations et les transitions. Les échanges avec les différentes OPA (organisations professionnelles agricoles), en particulier ceux avec les banques, ont montré que c'était le meilleur modèle possible. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je soutiens cet amendement. Le différentiel de taux entre les jeunes agriculteurs qui se sont installés en 2020 et ceux qui se sont installés en 2024 peut aller jusqu'à 3 points. L'effet du taux pèse énormément sur les revenus. Les prêts à taux zéro ont été une pratique très fréquente pendant les années d'inflation, que nous sommes malheureusement en train de revivre. Un rapport sur le sujet serait bienvenu. Fixer, par exemple, un plafond de 100 000 euros à taux zéro permettrait de disposer d'un vrai outil d'égalité et d'atténuation des fluctuations du marché.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements CE2243, CE2246 et CE2245 de M. Thierry Benoit
Je vais retirer mes trois demandes de rapport, pour ne pas encombrer les services du ministère. Je préfère qu'ils se concentrent pour peaufiner le texte, qui en a besoin. Puisque l'on ne peut pas aborder le volet fiscal dans ce projet de loi, je souhaitais interpeller le Gouvernement sur trois points.
Premier sujet : examiner les effets d'un avantage fiscal attribué aux agriculteurs cédants qui transmettent leur exploitation hors cadre familial, au lieu de les consacrer à l'agrandissement. Deuxième sujet : analyser les effets d'un doublement du crédit d'impôt accordé aux agriculteurs nouvellement installés les cinq premières années. Un jeune dans l'élevage, le maraîchage ou l'arboriculture a besoin de main-d'œuvre. Le faire bénéficier de mesures fiscales pour l'encourager à recruter des coups de main pourrait être intéressant. Enfin, dernier sujet : étudier les effets d'une suppression du plafond du plan épargne retraite pour les personnes exerçant la profession d'agriculteur.
Les amendements sont retirés.
Amendement CE3056 de Mme Marie Pochon
En 2022, les exonérations de cotisations sociales patronales se sont élevées à plus de 2 milliards d'euros en agriculture – un montant en constante progression. Elles représentent une intervention publique importante en faveur du secteur agricole et un manque à gagner certain pour les finances publiques. Il nous apparaît judicieux, à l'heure où l'on resserre de toutes parts les vis sur les dépenses publiques, d'évaluer leur efficacité, en matière d'emploi non salarié ou d'emploi salarié, de plus en plus précaire. Ce projet de loi visant à développer l'installation agricole et à valoriser les métiers de l'agriculture, on ne peut pas mettre sous le tapis une évaluation de cette nature.
Vous abordez un sujet qui fait l'unanimité chez les agriculteurs, puisqu'ils demandent tous, chaque année, le maintien du dispositif du TODE (exonération de cotisations patronales pour l'emploi de travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi). Chaque automne, en commission des finances, nous recevons toutes les statistiques sur les utilisations du TODE. Avis défavorable.
Monsieur Benoit, dans le cadre de la mission confiée à l'inspection générale des finances (IGF) et au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), dont j'ai déjà parlé hier, vos demandes seront satisfaites. Nous y intégrerons la partie sur les départs à la retraite. Le rapport sera publié avant l'été, de manière à ce que ses préconisations soient prises en compte dans le PLF pour 2025.
Avis défavorable sur l'amendement de Mme Pochon. Personne n'a de doutes sur l'efficacité du TODE, qui permet d'alléger la charge des agriculteurs, en particulier de ceux qui ont une haute intensité de main-d'œuvre.
Implicitement, dans votre amendement, vous plaidez pour la suppression du TODE. Mais vous êtes-vous demandé pourquoi notre filière fruits et légumes s'est effondrée et que nous sommes largement importateurs ? C'est très simple : les Allemands avaient des prix de revient de leur main-d'œuvre de l'ordre de 6, 7 ou 8 euros, alors que nous sommes à 20 ou 21 euros. Si vous supprimez le TODE, vous ferez exploser les importations et détruirez la filière fruits et légumes.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE2921 de M. Julien Dive
Le rôle crucial des coopératives agricoles pour accompagner les agriculteurs dans les transitions et les aider à apprivoiser les nouvelles techniques n'est plus à démontrer. Un rapport sur leurs besoins en fonds propres et les voies de financement à explorer, notamment la majoration du plafond des parts sociales d'épargne, serait intéressant.
Même avis. Ce sont des sujets sur lesquels nous avons besoin d'être éclairés, compte tenu de l'importance que prennent les coopératives.
Notre collègue a raison de poser cette question, car le plafond actuel est trop bas pour attirer les capitaux des agriculteurs vers les coopératives. On pourrait envisager un dispositif variable en fonction des taux du marché, par exemple.
La commission adopte l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CE105 de M. Fabrice Brun.
Amendement CE310 de M. David Taupiac
Selon le rapport « La souveraineté alimentaire de la France. Tirer les leçons de la pandémie de covid-19 », après une étude menée entre mai 2020 et mai 2021 par la Coopération agricole : « La France se positionne de façon encore plus accentuée que par le passé comme un exportateur de produits bruts et un importateur de produits transformés, cédant ainsi du terrain à des partenaires européens comme l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Italie ou la Belgique. » L'une des causes de cette perte de valeur est le manque de cohérence entre les productions agricoles françaises et les capacités des industries de transformation de ces productions. L'atomisation des acteurs agricoles entrave l'investissement, mais aussi la constitution d'une stratégie efficace de conquête des marchés internationaux.
Cet amendement vise à trouver des solutions à ce déficit de structuration, en demandant un rapport relatif à la structuration des organisations de producteurs et aux moyens à mettre en œuvre pour les développer.
Une structuration des organisations de producteurs est indispensable pour rééquilibrer en faveur du producteur le rapport de force existant dans la négociation des contrats de vente des produits agricoles. C'est tout l'objet de la mission de nos collègues, Anne-Laure Babault et Alexis Izard, mais pas celui de ce texte. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE995 de M. Dominique Potier
Nous demandons des rapports, parce que nous n'avons pas pu raccrocher au texte plusieurs sujets essentiels, dont celui de la régulation du foncier. Le détournement du travail à façon en vue d'un accaparement par l'usage du marché foncier n'est pas sans lien avec l'accaparement de propriété. Ce lien a d'ailleurs été établi par plusieurs missions d'information, dont l'une que j'ai menée avec Anne-Laurence Petel. Cet abus crée un phénomène de concentration absolument délétère. Nous proposons de renseigner au minimum, dans le code rural, dans les commissions départementales d'orientation de l'agriculture (CDOA), les décideurs sur les pratiques d'abus du travail à façon, qui sont un mode d'accaparement nuisant à l'installation et au renouvellement des générations.
Le travail délégué représente une solution adaptée pour de nombreux exploitants et n'est pas un problème en soi. Si tous les excès sont problématiques, vous vous éloignez du sujet du texte et je ne vois pas le lien de votre amendement avec le projet de loi. Avis défavorable.
C'est surréaliste ! C'est le sujet ! Le travail à façon et le phénomène sociétaire sont les deux voies par lesquelles on empêche l'installation des jeunes. Si mon amendement est hors-sujet, c'est que le texte l'est aussi…
La commission rejette l'amendement.
Avant l'article 13
La commission adopte l'amendement rédactionnel CE3429 de M. Éric Girardin, rapporteur général.
TITRE IV SÉCURISER, SIMPLIFIER ET LIBÉRER L'EXERCICE DES ACTIVITÉS AGRICOLES
Article 13 : Habilitation à prendre par ordonnance toute mesure permettant d'adapter la répression de certaines atteintes à la conservation des espèces et des habitats
Amendements de suppression CE457 de Mme Chantal Jourdan, CE1622 de M. Loïc Prud'homme, CE2327 de M. David Taupiac, CE2455 de Mme Lisa Belluco et CE3046 de Mme Marie Pochon
Cet amendement vise à supprimer l'article 13, qui habilite le Gouvernement à prendre une ordonnance pour revoir les dispositifs de répression de nombreuses infractions. Cet article répond à une mauvaise lecture des mouvements de mobilisation des agriculteurs, en laissant entendre que les règles environnementales seraient les principales responsables du malaise de la profession agricole. Le Gouvernement évite ainsi de traiter les sujets de fond sur lesquels il n'apporte aucune réponse : la concurrence déloyale et le revenu des agriculteurs.
Cet article, originellement circonscrit aux manquements commis à l'occasion d'activités agricoles ou forestières, a été élargi à tous les manquements, quelles que soient les activités concernées. Est notamment concerné le non-respect des législations suivantes : protection d'espèces ou de leur habitat, législation sur l'eau ou autorisations environnementales. Il précise notamment que le Gouvernement pourra transformer des sanctions pénales en sanctions administratives.
Les sanctions administratives sont généralement décidées par le préfet. Cela va priver la police environnementale de pouvoirs d'investigation. Dès lors, le rôle d'enquêteur de l'OFB (Office français de la biodiversité) serait réduit à néant, faisant peser sur l'environnement et les espèces protégés des risques importants.
Cet article est à l'image de la façon dont le Gouvernement s'en est sorti après la crise agricole : au lieu de pointer du doigt les vrais problèmes et de mettre en face de vraies solutions, en fixant des prix minimum rémunérateurs et en s'opposant aux traités de libre-échange, il pointe du doigt l'environnement. Cela conduit à opposer frontalement l'agriculture et l'environnement, alors que le monde scientifique insiste sur le fait qu'il faille accompagner les agriculteurs, qui subissent encore plus fortement que d'autres professions la crise climatique et les conséquences de la chute de la biodiversité. Mais l'article leur dit que l'on va continuer à s'opposer à l'environnement et même qu'on va leur permettre de le faire en détricotant le droit de l'environnement, ce qui est votre spécialité.
Les sanctions restent faibles même pour des dégâts importants. L'environnement est le cadre de travail des agriculteurs. Les dégâts causés à l'environnement par certains ont un impact sur tous les autres.
Cet article a pour objet de toiletter les règles environnementales. Cela pourrait être intéressant, étant donné qu'elles sont nombreuses et pas toujours lisibles. Néanmoins, la proposition pose deux énormes problèmes : une réforme par ordonnance, alors que la moindre des choses serait de consulter le Parlement sur ce type de sujet pour progresser en bonne intelligence ; la transformation de sanctions pénales en sanctions administratives, ce qui pose un vrai problème de séparation des pouvoirs, en passant du pouvoir judiciaire au pouvoir exécutif.
Nous trouvons cet article gravissime. Ce n'est porter offense ni aux agriculteurs, ni à quiconque de dire que les dommages environnementaux causés par certains ont toujours des conséquences négatives sur d'autres. Notre agriculture a besoin d'infrastructures fonctionnelles, c'est-à-dire de haies, de cours d'eau et de sols en bon état écologique. Absoudre ceux qui ne respectent pas cet outil de travail collectif qu'est la nature porterait préjudice à l'ensemble des agriculteurs. Par ailleurs, cette disposition ne satisfera en rien les besoins du monde agricole : améliorer les revenus, mieux partager la valeur, être protégés face aux crises géopolitiques et à la concurrence déloyale, réguler le foncier ou faire face au plus grand défi que l'humanité ait eu à affronter, le défi climatique. Cet article n'est ni efficace, ni cohérent.
Je suis atterré d'entendre de tels discours et étonné de voir qui a signé ces amendements. De la part de certains, ce n'est pas une surprise, plutôt la confirmation que, pendant les manifestations agricoles, ils n'étaient pas sur les ronds-points ou les autoroutes, ni dans leur circonscription avec les agriculteurs, mais enfermés dans une grotte sans le moindre contact avec le monde paysan. Une colère très forte s'est exprimée. On sait que les réglementations relatives aux haies se sont empilées et qu'il faut les simplifier. Il faut également adapter l'échelle des peines à la réalité des choses. On ne peut pas appliquer le même niveau de peines à celui qui a volontairement tué un enfant qu'à celui qui a détruit une haie. Si la voie des ordonnances n'est pas forcément la meilleure, un rapport étant à l'étude, nous souhaitons nous appuyer dessus pour travailler sur un texte co-construit avec les parlementaires. Avis très défavorable.
Je ne partage pas du tout le diagnostic établi par les porteurs de ces amendements de suppression, selon lesquels l'article ne répond pas aux revendications. Je sais que vous êtes tous allés à la rencontre des agriculteurs, mais ne pas voir qu'il y a un problème autour des échelles de peines et de la façon dont s'applique le droit à l'erreur, c'est louper une grande partie de la crise agricole. L'article 13 et les suivants ont d'ailleurs essentiellement pour vocation de répondre à ces questions. Cinq ans de prison et 400 000 euros d'amende parce que vous auriez non intentionnellement arraché un bout de haie, cela pose un problème. Nous avons conduit une mission inter-inspections pour voir comment graduer les peines. Certaines choses relèvent du pénal, comme les atteintes très graves à l'environnement – et je ne dirai jamais autre chose –, d'autres de l'administratif. Ce n'est pas parce que cela se passe sous l'autorité de telle ou telle administration que ce n'est pas appliqué avec la diligence et le discernement nécessaires. D'autres relèvent du contraventionnel, comme pour les délits routiers. On ne risque pas la prison pour un excès de vitesse de 10 kilomètres heure ; on a une contravention. L'article doit permettre de réévaluer cette échelle de peines et d'y inscrire le droit à l'erreur. Certains délits sont non intentionnels.
J'avais pris un engagement devant la plupart d'entre vous, au moment du dépôt du texte : écrire l'article en dur pour la séance. La rédaction est quasiment finalisée. Nous aurons donc l'occasion d'examiner en séance ce que vous en pensez. Se priver de l'examen de cette question, c'est ne pas prendre en compte une partie des griefs que le monde agricole fait à son administration. Nous avons besoin de retravailler ces points, parce que les textes ne sont pas opérants. Ils introduisent également des procédures infâmantes. Passez un coup de pulvérisateur au mauvais endroit et vous vous retrouvez avec une injonction, voire une garde à vue. Il ne s'agit pas d'en rabattre sur l'environnement. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.
J'ai rencontré les mêmes agriculteurs que M. le ministre sur les ronds-points et les autoroutes. Je ne vois pas, dans cet article, une volonté de détricoter le code de l'environnement : il s'agit simplement d'ajuster les peines. Le fait que des petits délits ou des fautes non intentionnelles puissent les conduire en prison leur pose, notamment, un véritable problème psychologique. Je suis tout à fait d'accord avec cet article, d'autant que le ministre s'est engagé à proposer un texte en dur pour la séance.
Cet article est une nécessité : nous avons besoin d'ajuster les peines. La lutte contre la concurrence déloyale, l'amélioration du revenu des agriculteurs ou la protection de notre souveraineté alimentaire passent forcément par cet ajustement. Il n'est pas normal qu'un agriculteur parte au travail la boule au ventre. En réalité, 99 % des pommes que vous consommez n'ont pas respecté la loi, que ce soit en bio ou en conventionnel. En effet, vous ne pouvez pas intervenir dès que la vitesse du vent dépasse 19 kilomètres heure. Or, lorsque vous êtes agriculteur, surtout en bio, ce qui est mon cas, je vous promets qu'aux mois de mars et avril, avec les giboulées, vous devez traiter vos arbres même s'il y a du vent – la boule au ventre. Ensuite, le consommateur se donne bonne conscience en mangeant des pommes bio.
Ce qui a alimenté la colère des agriculteurs, ce sont les problèmes d'accès à un revenu digne, le maquis normatif qui s'est étoffé ces dernières années, le sentiment d'être au quotidien, dès qu'on sort le tracteur, menacé d'un contentieux, d'être attaqué au tribunal, de se retrouver en situation illégale, sans forcément le savoir, quand, dans le même temps, des zozos, des zadistes, viennent les sacs à dos chargés de boules de pétanque détruire des infrastructures agricoles, des équipements d'élevage, pénétrer de manière illégale dans les exploitations en restant impunis. Oui, il faut remettre du sens dans l'application des peines. Il ne s'agit pas de laisser les erreurs impunies, mais il ne s'agit pas non plus de durcir le ton dans les sanctions prononcées.
Nous avons rencontré des agriculteurs et les avons écoutés. La première chose qu'ils demandent, c'est un revenu digne et non pas une remise en cause des normes environnementales. Ils ont conscience des enjeux climatiques. Ce qu'ils veulent, c'est être accompagnés dans la transition. Certes, il faut revoir la législation pour parvenir à plus de cohérence, mais nous ne voulons pas faire régresser le droit environnemental et maintenons, à ce stade, notre amendement de suppression.
L'environnement a bon dos ! Vous laissez penser que de nombreux agriculteurs seraient en prison pour avoir arraché des haies, mais le code pénal ne réprime que des délits intentionnels. Sur ce point, je vous invite à lire l'étude d'impact. En 2022, on a dénombré, en tout et pour tout, 136 procédures pénales sur les 4 millions d'affaires traînées devant les parquets. À chaque fois, il s'agissait de délits intentionnels.
Nous sommes ici plusieurs à très bien connaître le monde agricole, dont certains sont d'ailleurs issus, comme M. Potier ou Mme Hignet. Tout autant que vous, nous sommes allés voir les agriculteurs sur les piquets de mobilisation : ce qu'ils demandent, c'est un revenu digne, c'est qu'on les soutienne et qu'on les protège pour leur donner les moyens de prendre la bifurcation écologique, dont ils ne sont pas des adversaires. Or, ce n'est pas avec de tels articles, qui ne visent que la régression environnementale, qu'on réglera le problème.
Madame Trouvé, vous avez entièrement raison de rappeler la différence entre culpabilité pénale et responsabilité civile – c'est le fameux « responsable, mais pas coupable » de Georgina Dufoix. De fait, c'est l'intention qui est condamnée par le code pénal. Toutefois, l'intention est parfois inévitable et nous connaissons tous, à cet égard, des exemples très concrets d'incohérence. Lorsqu'au moment des labours et semis, en octobre, une circulaire interdit de labourer à moins de 2 mètres du cours d'eau, puis, au printemps, une autre circulaire interdit de traiter à moins de 5 mètres du cours d'eau et, enfin, lorsqu'on a la chance que la préfecture réponde à la question de savoir ce qu'il faut faire dans la bande de 3 mètres qui a été semée et qu'on ne peut pas traiter, elle dit à l'agriculteur qu'il n'a qu'à broyer. Ça rend dingue !
J'ai suggéré au Premier ministre le lancement d'une mission parlementaire pour faire l'inventaire exhaustif de toutes les normes légales – je dis bien « légales », et non pas « réglementaires » – qui s'appliquent à l'exercice de la profession agricole, tant dans le code de l'environnement que dans le code de l'urbanisme, dans le code du patrimoine, dans le code rural et dans le droit social, en vue d'un déclassement de 30 % à 40 % des normes et d'une réécriture de ces dispositions à droit constant, afin de de reconstituer une cohérence autour de principes de portée générale et en opérant enfin une simplification digne de ce nom, avec une latitude réglementaire qu'aucun gouvernement n'a jamais eue. Cet article de réévaluation est le minimum que nous puissions faire à ce stade.
Monsieur le rapporteur, respectons-nous, s'il vous plaît ! Nous sommes tous allés sur les ronds-points et sur le terrain, et nous parlons tous à des agriculteurs, qui ne constituent pas un bloc monolithique. N'allons pas faire croire qu'ils sont d'un côté ou de l'autre de cet hémicycle, car nous avons tous des amis parmi eux, et ils ne défendent pas tous les mêmes choses – la preuve en est qu'on en trouve sur tous nos bancs. Adopter une vision simpliste, c'est prendre les agriculteurs pour des idiots.
Je remercie le ministre de nous proposer d'inscrire en dur dans le texte les modifications proposées, ou du moins les grands principes. En effet, si nous ne sommes pas opposés à une simplification, nous le sommes à une destruction des règles. La moindre des choses est de savoir où nous allons. C'est une question de respect du Parlement. Nous pourrions donc supprimer l'article 13 en attendant que vous en proposiez une nouvelle rédaction. Ce serait faire un pas vers nous.
Je rappelle par ailleurs qu'en février 2023, nous avons introduit dans le code pénal la pénalisation de ceux qui se promènent dans la nature. Votre souci de ne pas trop recourir au pénal dépend apparemment des personnes visées.
Sur le fond, il est nécessaire de toiletter tout cela, mais il faut prendre garde de ne pas dresser les non-agriculteurs contre les agriculteurs. Il est très regrettable, monsieur le ministre, que l'article 13 ne comporte pas ce que vous proposez. Ainsi, l'alinéa 2 vous délègue même le soin de supprimer certaines incriminations, ce qui est très important du point de vue des libertés publiques.
Pourquoi, si votre réflexion en la matière est très avancée, ne déposez-vous pas des amendements en vue de l'examen du texte en séance publique ? Cela éviterait de recourir aux ordonnances et nous permettrait d'avoir un vrai débat serein.
Je n'ai fait grief à personne de n'avoir pas rencontré les agriculteurs. Cependant, nous n'avons pas la même perception de ce que j'ai entendu.
Madame Trouvé, l'intentionnalité est dite par la jurisprudence de la Cour de de cassation. Nous allons donc faire exactement ce que vous dites, en posant le principe de la non-intentionnalité. Il est vrai que très peu de procédures vont au bout, mais elles sont engagées. Lorsqu'un agriculteur, pour une infraction non intentionnelle, reçoit un courrier lui annonçant qu'il risque cinq ans de prison et 300 000 à 400 000 euros d'amende, et qu'il sera convoqué à la gendarmerie, c'est infamant et générateur de stress, et cela contribue au mal-être de la profession. Voilà la réalité à laquelle nous sommes confrontés.
Monsieur de Courson, il y aura des amendements du Gouvernement à l'article 13 et j'ai dit d'emblée que la question donnerait lieu à une rédaction complète, qui sera examinée en séance publique. Je fais donc droit à votre demande et il ne s'agit pas d'une manœuvre dilatoire qui nous permettrait de traiter dans notre coin cette question importante.
Vous avez raison de dire qu'il ne s'agit pas d'opposer l'environnement et l'agriculture, qui doivent se faire écho. Il faut bien définir intentionnalité et négligences graves, et dépénaliser les atteintes non intentionnelles – qui ne peuvent pas relever du pénal, mais du contraventionnel ou de la réparation. Les agriculteurs faisaient l'objet d'un droit spécifique qui faisait peser sur eux cette lourde charge nous devons donc travailler sur la présomption de bonne foi. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à ces amendements.
Comme M. Dive vient de le rappeler, la simplification est au cœur des revendications. Nous y avons répondu sur le plan européen et nous faisons en sorte d'y répondre pour certaines normes, sur le plan réglementaire comme sur le plan législatif, comme le recommande M. Descrozaille. C'est d'ailleurs le sens du travail que nous poursuivons, car il n'est pas facile de détricoter et retricoter ce qui a été patiemment tricoté depuis vingt ou vingt-cinq ans, ces dispositions renvoyant à des articles de loi. Or, c'est précisément ce que nous avons l'intention de faire, en particulier pour ce qui concerne l'échelle des peines. Nous serons donc au rendez-vous de la promesse qui a été faite de réexaminer cette dernière. D'autres questions se posent, certes, mais il s'agit là de celle dont il est question avec l'article 13.
C'est aussi ce qui permettra de reconnaître enfin le droit à l'erreur, qui suppose en effet une distinction entre ce qui est intentionnel et ce qui ne l'est pas, faute de laquelle nous ne faisons que bavarder depuis des années.
Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CE3320 de Mme Brigitte Klinkert.
Amendement CE2454 de Mme Lisa Belluco
Si on supprime l'alinéa 2, il ne reste plus grand-chose de l'article.
Monsieur le ministre, pourrions-nous connaître les statistiques des peines réellement prononcées, indiquant pour quel délit, et dans quelles conditions elles l'ont été et faisant apparaître le nombre de poursuites et de plaintes ? Nous avons besoin de ces données pour savoir où le dispositif pèche et pour pouvoir procéder à un travail intelligent de simplification.
Pour prendre un exemple, une atteinte à l'environnement s'apparentant au naufrage de l' Amoco Cadiz et l'arrachage d'une haie sont passibles de la même peine de prison. N'y a-t-il pas là un problème ? Avis défavorable.
Je souscris à l'objectif de cet article et de cet alinéa, tout en regrettant qu'ils n'aillent pas assez loin. Lors de la mission d'information que j'ai menée avec M. Martineau sur les contrôles dans les exploitations agricoles, nous avons observé que la peine posait un problème. Toutefois, en légiférant par ordonnances, vous devrez tout de même travailler de pair avec le Parlement. De fait, au cours de ce travail, nous n'avons pas pu obtenir de chiffres relatifs au quantum des peines, ni à l'application de ces mesures par les juridictions.
Madame Trouvé, les agents de l'OFB, l'Office français de la biodiversité, sont des officiers de police judiciaire et ont obligation de transmettre au procureur les faits dont ils ont connaissance, et donc d'engager une procédure pénale. Pour les exploitants, c'est une machine pénale qui se met en route, avec garde à vue et menottes. Certains agriculteurs sont ainsi confrontés à une procédure qui les dépasse, parce qu'on a retenu dans le droit des infractions de nature pénale.
Je n'ai pas le sentiment que, malgré son titre, vous visiez véritablement avec l'article 13 la simplification que les agriculteurs appellent de leurs vœux.
L'article 121-3 du code pénal retient que l'intentionnalité est nécessaire pour qu'un acte soit punissable. Si donc on a malencontreusement arraché une haie ou déversé des pesticides dans la mauvaise période, il faut que l'intentionnalité soit prouvée – à moins, il est vrai, que l'on ne prouve l'imprudence ou la négligence. Le code pénal me semble bien fait de ce point de vue.
Quant au fait que l'on puisse être convoqué par la police ou la gendarmerie en cas de doute, ce n'est pas surprenant, puisque même une présidente de groupe parlementaire peut être convoquée par la police pour apologie du terrorisme.
L'argument le plus précieux que nous ayons entendu ce matin est celui de M. Taupiac : les premières victimes des atteintes graves à l'environnement sont les paysans eux-mêmes, touchés non seulement dans leur réputation, mais aussi dans leurs moyens de production et dans la fertilité des sols et des écosystèmes. Évitons donc d'opposer la société et le monde paysan.
Deuxièmement, monsieur le ministre, le groupe Socialistes n'est pas opposé à une révision de l'échelle des peines. Nous sommes prêts à étudier sur pièces un meilleur équilibre entre droits et devoirs, entre pénalité et responsabilité. Il n'y a pas de dogme en la matière, mais nous ne voulons pas donner de blanc-seing pour autant.
Enfin, s'il existe des légendes urbaines, il existe aussi des légendes rurales. Pouvez-vous nous donner connaissance de l'état des peines, de leur nature, de leur montant et de leur géolocalisation ?
J'entends que certaines peines peuvent paraître disproportionnées, mais nous avons besoin de savoir ce qui se passe sur le terrain, quelles sont les peines réellement prononcées. J'appuie donc fortement la demande de M. Potier.
Par ailleurs, je rappelle que de nombreuses autres activités, et même quasiment toutes, sont contrôlées par des agents investis de pouvoirs de police judiciaire. L'industrie, par exemple, est inspectée très régulièrement, et parfois beaucoup plus que les exploitations agricoles, sans que nous entendions les industriels pleurer à longueur de temps en se plaignant de ces contrôles. Je ne dis pas qu'il faut contrôler sans arrêt tous les agriculteurs, car ce serait insupportable, mais il est normal que des contrôles soient opérés pour faire respecter la loi. Nous aussi sommes contrôlés lorsque nous circulons en voiture, et personne ne s'en plaint.
Madame Blin, les inspecteurs des installations classées ont aussi des pouvoirs judiciaires, au même titre que de très nombreux autres agents de l'État qui contrôlent de nombreuses activités économiques, et ce n'est pas choquant en soi.
Monsieur le ministre, merci d'avoir précisé que vous apporterez pour la séance publique les amendements qui permettront d'entrer dans le détail. Nous ne sommes pas opposés à une révision de la proportionnalité des peines.
Pour faire écho aux propos de M. Potier, j'ai été saisi ce matin encore de la situation d'un agriculteur sur les terres duquel une bande de 10 mètres plantée de féverolles a été désherbée par son voisin. Souvent, en effet, les atteintes à l'environnement viennent d'autres agriculteurs, parfois par mégarde.
Par ailleurs, nous n'avons pas évoqué la proportionnalité des contrôles sur le terrain, qui est pour les agriculteurs d'Occitanie une plus grande cause de mal-être que les peines. Le droit à l'erreur que vous avez évoqué est certes déterminant, mais la proportionnalité des contrôles doit également se concrétiser sur le terrain, car elle concerne tout le monde, tandis que les peines ne concernent que des cas particuliers et peu nombreux.
Nous avons besoin de cet alinéa 2, qui prévoit d'adapter l'échelle des peines et de réexaminer leur nécessité. Comme nous l'avons vu avec Mme Blin lors de la mission que nous avons menée, les agriculteurs se sentent toujours en danger et nous n'avons pas seulement besoin de savoir combien de peines ont été prononcées, mais combien de plaintes ont été déposées. Lorsqu'on est maire d'un petit village, comme cela a été mon cas, il faut pouvoir tenir compte des plaintes déposées par les rurbains pour mille raisons, par exemple parce qu'une vache est dehors en plein mois de janvier.
Il y a là plusieurs questions. Pour ce qui est du quantum de peines, je suis heureux de constater que certains de ceux qui présentaient initialement des amendements de suppression sont prêts à examiner cette question. C'est une intéressante évolution intellectuelle collective. Il est bon que nous nous en rendions compte, car voilà vingt-cinq ans que nous traînons ce problème.
Madame Trouvé, vous faites une erreur en droit. La règle de droit général est certes l'intentionnalité, mais la juridiction de la Cour de cassation s'en tient au fait qu'il y a eu dégradation, et c'est précisément cela qu'il faut corriger.
En troisième lieu, j'ai déclaré, en présentant le texte en Conseil des ministres, que nous inscririons ces dispositions en dur pour la séance. La tâche n'est pas facile, car nous devons respecter le principe constitutionnel d'égalité – car il n'y a pas une justice pour les agriculteurs et une autre justice pour les autres –, le principe de proportionnalité et certaines dispositions européennes. Nous avons réussi à le faire dans un temps très court et, dans quelques jours ou quelques heures, nous disposerons d'un texte qui permettra de répondre à ces injonctions constitutionnelles et européennes, qui sont normales.
Enfin, comme l'ont souligné plusieurs des orateurs qui se sont exprimés contre les amendements de suppression, personne ne dit qu'il faut supprimer les peines et laisser chacun faire ce qu'il veut.
Non, nous ne sommes pas tous d'accord, puisque des amendements de suppression de l'article ont été déposés. Assumons donc que nous ne le sommes pas – et, sur ce point, pour une fois, Mme Trouvé est d'accord avec moi ! Monsieur Potier, ne cherchons pas des compromis là où il n'y en a pas, car nous savons très bien que nous ne serons pas d'accord sur cet article. Vous avez souvent dit, en effet, que nous étions en décalage à propos de la gradation des peines, du quantum et des contrôles. Je maintiens donc mon avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE3431 de M. Éric Girardin
Il s'agit d'un amendement de précision rédactionnelle et juridique sur la nécessité des incriminations.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CE3047 de Mme Marie Pochon
Il s'agit également d'un amendement de suppression. Une infraction pénale intentionnelle doit être sanctionnée pénalement. Je ne comprends pas la volonté de distinguer les agriculteurs du reste des citoyens qui, lorsqu'ils commettent un délit pénalement répréhensible, sont sanctionnés pénalement. Le ministre souhaite établir une présomption de bonne foi, mais c'est au juge de juger de l'intentionnalité et de la bonne foi des personnes déférées devant lui.
Alors que nous avons besoin de construire de la confiance dans la société envers le monde agricole, et que c'était précisément là l'une des demandes fondamentales qui s'exprimaient lors des mobilisations de janvier, nous sommes en train de créer un droit différent pour les agriculteurs et pour le reste des citoyens. C'est dangereux pour la manière dont les uns et les autres vivront ensemble dans nos campagnes.
Par ailleurs, nous ne sommes pas opposés à la révision de l'échelle des peines. Nous nous félicitons que l'article soit réécrit en vue de la séance publique – même si nous regrettons que tel n'ait pas été le cas pour l'examen du texte en commission. Mais il faut pouvoir objectiver ce débat. Nous demandons donc, à cette fin, des données précises sur les contrôles et les sanctions appliquées.
Cette suppression irait à l'encontre de la réforme que nous défendons, qui vise à nous assurer que les sanctions sont adaptées aux infractions. Si une adaptation est possible, il ne faut pas nous en priver. Avis défavorable.
Pour ce qui est des statistiques, je vous renvoie aux pages 66 et suivantes de notre pré-rapport ou au rapport du service statistique du ministère de la justice, cité dans l'étude d'impact.
Avis défavorable. Pour vous rassurer, madame Pochon, je rappelle que j'ai bien dit que le principe d'égalité devant la loi et le principe de proportionnalité s'appliqueraient.
Monsieur le ministre, je vous propose simplement de juger sur pièces le quantum des peines. Pourquoi créer des clivages ? Cela semble vous arranger de faire alliance avec les droites sur ce sujet, mais les choses ne sont pas si simples, car on trouve aussi à gauche des voix pour considérer que le quantum de peines pose question. Pourquoi ne disposons-nous pas aujourd'hui en commission du texte qui nous permettrait de nous prononcer sur pièces ? C'est là que se trouve la vraie question. Ne nous renvoyez pas à des clivages idéologiques qui n'existent pas pour ce qui nous concerne. Pourquoi vos services n'ont-ils pas préparé ce texte ?
Je m'interroge sur votre volonté de passer de la justice pénale à la justice administrative. En effet, la justice pénale est rendue par un juge qui adapte la peine en fonction de l'infraction ou du délit. Il s'agit en quelque sorte d'une justice personnalisée selon le contexte et la situation. La justice administrative, en revanche, applique des amendes forfaitaires et des prescriptions de compensations, sans que l'on passe devant un juge. Je ne suis donc pas sûre que cette mesure aille dans le bon sens car, avec tout le respect que j'ai pour les agents de l'État, ce n'est pas leur métier que de juger.
J'ai retenu de mes rencontres avec les agriculteurs sur leurs points de mobilisation qu'ils demandaient du discernement, et non pas de l'acharnement. Ils demandent ainsi que les contrôles soient effectués dans une perspective de conseil et de prévention plutôt que de suspicion permanente et de sanction. Aujourd'hui, en effet, un agriculteur qui est contrôlé a le sentiment – et c'est parfois une réalité – qu'il fait l'objet d'un acharnement et d'une suspicion, alors que nous avons affaire à des professionnels honnêtes, même si, comme nous tous, ils ne sont certes pas infaillibles. L'article 13 doit nous permettre d'appliquer ce discernement, grâce notamment à la proportionnalité des peines.
L'article 1246 du code civil prévoit un principe de réparation écologique et permet notamment, sur le plan pénal, à des parties extérieures de se joindre à la procédure civile, et donc de percevoir des dommages-intérêts, ce qui se traduit par des gains importants pour certaines associations environnementales ou dites telles. Cela pose problème, car cela alourdit les peines pour nos agriculteurs, et nous devrons nous en préoccuper dans la rédaction des ordonnances.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE1580 de M. Antoine Villedieu
L'alinéa 3 met à la charge des auteurs des manquements des obligations de restauration écologique, cela semble être la moindre des choses que d'inscrire dans la loi le principe de proportionnalité.
Les Écolos semblaient très déterminés pour défendre les contrôles et les gardes à vue pour les agriculteurs suspectés ou accusés d'avoir arraché une haie. C'est assez paradoxal de la part d'une gauche qui, dans le même temps, regrette les contrôles prétendument abusifs effectués dans certains quartiers à l'encontre des trafiquants de drogue.
Cette précision n'est pas nécessaire, puisqu'elle est parfaitement couverte par la notion d'adaptation mentionnée à l'alinéa 2 de l'article et qu'il s'agit, plus généralement, de la logique d'ensemble de cet article 13. Avis défavorable.
C'est l'arbre qui cache la forêt. Dans leur rapport de 2022 sur la justice pénale environnementale, les magistrats de la Cour de cassation font état d'une baisse du nombre d'infractions portées devant les tribunaux correctionnels et d'une chute des quantums des peines prononcées, qui posent question compte tenu des défis écologiques que doit affronter la société. Cela nous détourne, en outre, de la vraie question, qui est celle de la rémunération des agriculteurs et de la féroce concurrence mondialisée qu'ils subissent de la part de pays qui n'appliquent pas les mêmes normes environnementales que nous.
Je m'interroge encore sur votre volonté de passer de la justice pénale à la justice administrative ? En effet, même si les mêmes agents peuvent être investis des deux pouvoirs, ils dépendent du préfet pour l'aspect administratif, alors qu'ils ne dépendent que du procureur pour l'aspect pénal. Pourquoi donc vouloir faire appliquer de plus en plus la justice par les préfets, lesquels, je le rappelle, obéissent au pouvoir exécutif ?
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 13 modifié.
Après l'article 13
Amendements CE2892 de M. Julien Dive, faisant l'objet du sous-amendement CE3698 de M. Antoine Armand, amendements CE83 et CE653 de Mme Anne-Laure Blin (discussion commune)
Mon amendement reprend un travail réalisé durant plusieurs mois par une mission parlementaire menée par Mme Anne-Laure Blin et M. Éric Martineau. Mme Blin a d'ailleurs déposé une proposition de loi reposant sur le principe du droit à l'erreur dans l'agriculture et je la laisserai donc exposer ses arguments à ce propos.
Sans préempter les arguments de Mme Blin, je tiens à dire que je soutiens le principe du droit à l'erreur. Il importe que nous ayons une discussion sérieuse sur ce point, au terme du travail important réalisé par nos collègues.
Sur les péages, les points de blocage et les nombreux autres sites où les agriculteurs sont venus exprimer leur colère, nous les avons entendus dire leur sentiment, parfois justifié et parfois sans doute exagéré, d'être les seuls à ne pas avoir de droit à l'erreur, les seuls à être punis lorsqu'ils sont confrontés à des normes contradictoires, les seuls qui, embarqués par une spirale de sanctions et de procédures que nous évoquions à propos de l'amendement précédent, sont incapables de régulariser une situation qui ne fait que s'alourdir. Le sous-amendement vise donc à préciser que, pour qu'il y ait sanction, le manquement ne doit pas être supposé, mais bel et bien constaté.
J'ajoute, même si cela ne figure pas dans le sous-amendement, que la notion de délai devrait, elle aussi, faire l'objet d'une réécriture en vue de l'examen du texte en séance publique.
Au cours des travaux réalisés avec mon collègue Éric Martineau, j'ai constaté que les contrôles dans les exploitations, sans concession pour les pratiques agricoles, pouvaient être effectués sur des fondements juridiques distincts conduisant à apprécier de manière radicalement différente la conformité d'une même situation ou d'un même acte. Nous aurons l'occasion d'y revenir lors des débats sur l'article 14 sur la gestion des haies qui est, avec la gestion des cours d'eau, un sujet typique de crispation.
L'État ne doit pas seulement contrôler et sanctionner, il doit aussi accompagner davantage. Il faut changer de paradigme et retenir qu'un droit à l'erreur a été reconnu pour l'ensemble des Français, notamment en matière fiscale, dans la loi pour un État au service d'une société de confiance (Essoc). Cependant, ce texte comporte des restrictions qui empêchent les agriculteurs de voir reconnaître leur bonne foi.
Nous proposons de partir du principe que l'agriculteur est de bonne foi. En cas de manquement constaté pour la première fois, nous indiquons que « l'exploitant peut régulariser sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invité à le faire par l'administration dans le délai indiqué par celle-ci ». Enfin, nous prévoyons que si le manquement supposé repose sur une norme qui entre en contradiction avec une autre norme, l'exploitant agricole ne peut être sanctionné.
Contrairement à ce qu'a sous-entendu la collègue Belluco, nous ne sommes pas contre le contrôle des agriculteurs – qui n'y sont d'ailleurs pas opposés non plus –, mais nous constatons que les modalités de ces contrôles posent problème.
Madame Blin, je vais essayer de vous éclairer sur notre intention, mais je constate que vos amendements mélangent droit à l'erreur et temps de réponse de l'administration.
Si je n'ai rien contre le fait d'inscrire la notion de bonne foi présumée dans la loi, je pense que ce que vous proposez en cas de manquement constaté pour la première fois ne tient pas : la réponse ne peut pas être identique quel que soit le manquement, notamment lorsqu'il est de nature sanitaire. Vous partez du principe qu'un premier manquement ne peut être sanctionné, quelle que soit sa nature, qu'il soit intentionnel ou non. Une telle disposition pose un problème de proportionnalité et se heurte aussi à la législation européenne. Le pire serait de faire croire aux agriculteurs que nous allons simplifier les règles pour, en définitive, nous heurter à des décisions contraires des juridictions supérieures.
Je vais vous faire une proposition qui permette de conserver la philosophie de départ sur le droit à l'erreur, sans donner quitus à tout manquement, ce que revient à faire votre amendement tel qu'il est rédigé. Il existe des manquements graves, comme le fait de déverser un fond de cuve de pesticides dans un cours d'eau, même si les cas sont rares dans le monde agricole.
Je vous propose donc de conserver la première partie de votre amendement sur le droit à l'erreur : « Lors d'un contrôle opéré dans les exploitations agricoles, la bonne foi de l'exploitant est présumée. » Je ne peux pas approuver la partie de votre amendement qui concerne les manquements constatés pour la première fois, car elle ne tient pas sur le plan juridique et envoie un mauvais signal. Sur les normes contradictoires, je suis prêt à m'inspirer de l'amendement CE2892 tel que modifié par le sous-amendement CE3698 de M. Armand, ce qui pourrait donner la rédaction suivante : « Lorsqu'il est constaté un manquement reposant sur une norme qui entre en contradiction avec une autre norme, l'exploitant agricole ne peut être sanctionné. » L'idée serait ici qu'on ne peut pas obliger un exploitant agricole à débroussailler pour prévenir les incendies, tout en lui infligeant une amende pour destruction d'habitat d'une espèce protégée.
Enfin, je considère qu'on ne peut pas non plus retenir la proposition que vous faites dans votre amendement CE653 : « En matière agricole, le silence gardé pendant deux mois par l'administration vaut décision d'acceptation. » Certaines procédures sont plus longues que d'autres, notamment lorsqu'elles concernent la création d'un bâtiment soumis à des règles de nature différente selon la taille de l'exploitation. Le silence vaut parfois accord, et sans doute faut-il généraliser cette règle. Néanmoins, on ne peut pas écrire que le silence vaut toujours accord au bout de deux mois, notamment parce que certains dossiers méritent que l'on laisse à l'administration le temps de les examiner.
Ma proposition répond à vos préoccupations concernant la présomption de bonne foi et l'incohérence des réglementations, tout en évitant de reprendre des dispositions hasardeuses sur le plan juridique, qui posent problème vis-à-vis du droit européen et même en matière d'environnement.
Monsieur le ministre, cette proposition vaut-elle dans l'immédiat – auquel cas, nous allons devoir interrompre nos travaux le temps que vous rédigiez votre sous-amendement – ou seulement dans la perspective des débats en séance ?
La séance, suspendue à 10 heures 45, est reprise à 11 heures.
Sous-amendement CE3699 du Gouvernement.
Ce sous-amendement vise donc à supprimer les alinéas 3 et 4 de l'amendement CE83. Nous conservons la notion de bonne foi, et donc de droit à l'erreur, c'est-à-dire les alinéas 1 et 2 : « Le chapitre III du titre II du livre Ier du code des relations entre le public et l'administration est complété par un article L. 123-3 ainsi rédigé : « Art. L. 123-3 – Lors d'un contrôle opéré dans les exploitations agricoles, la bonne foi de l'exploitant est présumée. »
En revanche, nous supprimons de l'amendement CE83 les mesures ayant trait aux manquements constatés et à la contradiction des normes, car la rédaction proposée est trop générale. Lors de la rédaction d'amendements, nous ne pouvons faire abstraction de la Constitution, des principes d'égalité et de proportionnalité – cette remarque vaut pour tous. Nous sommes d'accord pour faire entrer les agriculteurs dans le droit commun, mais il ne s'agit pas de créer pour eux un droit d'exception qui poserait un problème constitutionnel. Dans ces matières, la référence peut d'ailleurs aller de l'arrêté municipal à la réglementation européenne, en passant par la réglementation nationale.
Sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement, j'émettrais un avis favorable à l'amendement de Mme Blin.
Tout cela témoigne d'une grande impréparation. Je suis atterrée, monsieur le ministre : alors que vous aviez pris des engagements avant la suspension, vous vous contentez de supprimer purement et simplement les dispositifs qui ne vous conviennent pas, en invoquant des règles qui vous obligeraient à le faire. Le rapport, que j'ai fait avec mon collègue Martineau, vous a été remis en mains propres en octobre 2023. Alors que nous avions insisté sur le fait que la reconnaissance du droit à l'erreur était une demande précise et très importante de nos agriculteurs, vous n'en avez pas fait mention dans le texte initial. Il y a eu le mouvement de nos agriculteurs, puis le grand raout du Président de la République au Salon de l'agriculture où, au détour de la conversation, il a repris mon amendement, disant qu'il fallait corriger les manquements de la loi Essoc et mettre en place un droit à l'erreur.
Cet amendement a été déposé de longue date ; les membres du groupe Les Républicains vous ont dit à quel point ils y tenaient. Et vous nous proposez, après une brève suspension de nos travaux, une réécriture qui n'en est absolument pas une. Ce texte est totalement impréparé. Nous ne pouvons pas accepter votre proposition, qui n'intègre pas un véritable droit à l'erreur, tel que nous l'avons formulé. Nous ne nous satisferons pas d'effets de manche visant à faire croire que vous auriez agi : votre proposition n'aura aucun effet concret pour les agriculteurs.
Croyez-vous que c'est aussi simple que cela, madame Blin ? Votre amendement accorde un droit au manquement, pas un droit à l'erreur – lié à la présomption de la bonne foi. Ne me reprochez pas une impréparation alors que votre amendement, tel que rédigé, est inconstitutionnel et non conforme au droit européen.
Non, je ne suis pas de mauvaise foi : je vous ai dit d'emblée qu'il y avait un problème avec votre disposition sur le manquement, notion que nous ne savons d'ailleurs pas qualifier. Que vous soyez d'accord ou pas, c'est la position que j'ai exprimée. Conformément aux engagements pris, j'ai répété que nous allions écrire tout cela en dur. Libre à vous de trouver que ce n'est pas satisfaisant.
Si nous pouvions éviter la caricature et la démagogie, madame Blin, cela vaudrait vraiment mieux.
J'étais assez d'accord avec votre analyse de l'amendement. En revanche, votre sous-amendement pose un problème : une présomption de bonne foi, cela veut dire qu'il n'est plus nécessaire de faire aucun contrôle. Si les gens sont présumés de bonne foi, on ne contrôle plus et on passe notre temps à accompagner. Or, c'est le contrôle qui détermine la bonne foi éventuelle. Cette présomption de bonne foi n'est pas conforme au raisonnement que vous avez développé dans l'analyse de cet amendement. Cela crée un précédent.
La commission adopte le sous-amendement CE3698 et rejette l'amendement CE2892 sous-amendé.
Elle adopte successivement le sous-amendement CE3699 et l'amendement CE83.
En conséquence, l'amendement CE653 tombe.
Amendement CE3438 de M. Éric Girardin.
L'amendement est retiré.
Amendement CE3433 de M. Éric Girardin.
Il vise à demander au Gouvernement de faire un rapport évaluant la faisabilité et l'impact sur la filière bovine de la généralisation de l'identification électronique. Cette pratique, qui existe déjà pour les ovins, répond au besoin de simplifier, de réduire la paperasse et d'améliorer la traçabilité. C'est aussi un moyen d'assurer un suivi des troupeaux en tenant compte du changement climatique. Selon l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), il serait ainsi possible d'individualiser l'alimentation des bovins et aussi de l'adapter de manière à ce qu'ils dégagent moins le méthane. Outre son intérêt sur le plan administratif, l'identification électronique permettrait donc d'apporter des améliorations concernant le suivi du troupeau et l'environnement.
Nous avons engagé des travaux sur l'identification électronique qui a, en effet, des incidences en matière de simplification. Concernant cette demande de rapport, je m'en remets à la sagesse de votre commission.
Avant que nous en terminions avec les contrôles, je voudrais faire une suggestion au Gouvernement. Imaginez l'écosystème d'agents et d'organismes de contrôle auquel un agriculteur peut avoir affaire : direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), direction départementale des territoires (DDT), direction départementale de la protection des populations (DDPP,) direction régionale de l'agriculture et de la forêt (Draf), agence de services et de paiement (ASP). Ne serait-il pas judicieux de travailler sur la fusion de certains corps de contrôle, afin de réduire le nombre d'interlocuteurs pour les agriculteurs ?
La commission adopte l'amendement.
Article 14 : Simplification du régime de protection des haies
Amendement de suppression CE1637 de Mme Aurélie Trouvé
En introduction de cet article, je pense utile de rappeler que nous avons perdu 70 % du linéaire de haies depuis les années 1950. Nous tenons à saluer la création d'un guichet unique concernant l'arrachage des haies, afin de clarifier le droit applicable et les procédures à suivre. En revanche, nous regrettons que la séquence ECR, pour éviter-réduire-compenser, qui est toujours mise en avant sur ces bancs lors des débats sur l'environnement, se transforme systématiquement en séquence C comme compenser. Or, une haie replantée n'équivaut pas à une vieille haie, que l'on parle d'intérêt paysager, écologique, biodiversitaire ou même économique pour l'agriculteur. Nous proposons donc de revoir complètement cet article pour y introduire des mesures visant à accompagner les agriculteurs dans la création de filières de revalorisation économique de ces haies, afin de conserver ce patrimoine paysager et écologique.
Avis défavorable pour cet amendement, qui interroge tant sur le fond que sur la forme. Dans votre exposé des motifs, vous écrivez que vous tenez à saluer la création d'un guichet unique concernant l'arrachage des haies, mais vous demandez la suppression de l'article. Vous jugez aussi que la simplification administrative proposée n'est pas assez ambitieuse. Dans ce cas, pourquoi ne pas proposer des pistes d'amélioration ?
Cet article est très attendu pour compléter le pacte en faveur de la haie, adopté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024. Dans ce domaine, nous devons jouer sur l'incitation et non pas sur la crainte. Avis défavorable.
Chantal Jourdan, qui a travaillé sur le sujet, va défendre les amendements de notre groupe. Je tenais cependant à indiquer que nous ne voterons pas pour la suppression de cet article, car nous sommes dans une logique d'amélioration du texte, en vue de son effectivité. Vous n'avez cessé, monsieur le ministre, de nous dire que ce texte n'était qu'un élément des politiques publiques. Alors je voulais aussi souligner l'immense paradoxe que représentent les dernières négociations à Bruxelles sur les allégements, voire les suppressions des obligations concernant les infrastructures écologiques. Combien de milliers de kilomètres de haies vont être sacrifiés par ces mesures de remise en cause du Pacte vert ? L'absence d'une loi de régulation du foncier favorise un agrandissement qui détruit des haies. Les métapolitiques publiques sont à front renversé par rapport à nos débats sur cet article.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE255 de Mme Chantal Jourdan
Nous voudrions modifier le titre de la section nouvellement créée au sein de l'article 14, afin d'ajouter l'objectif de valorisation à celui de protection des haies. Celles-ci sont un élément vivant de l'écosystème de la ferme et de l'environnement. Nous présenterons d'autres amendements sur son aspect environnemental et économique.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
Amendement CE2308 de Mme Mélanie Thomin
Il tend à introduire une réflexion sur la reconstruction des haies. Le remembrement a fait partie de l'histoire agricole du XXe siècle. Pour faire de la France la première puissance agricole du Marché unique, la réorganisation du bocage a consisté à araser nos haies et talus, en particulier dans le Grand Ouest. Cet amendement permettrait de graver dans le marbre l'ouverture d'une politique de reconstruction des haies et de l'agriculture bocagère. Les chambres d'agriculture, les collectivités locales, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les régions soutiennent le monde agricole dans cette dynamique de protection mais aussi de reconstruction, dans un contexte de transition environnementale. Il est utile de retrouver cette ambition dans la loi d'orientation agricole, car la logique de réparation a aussi du sens en matière d'environnement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Amendements CE2307 et 2309 de Mme Mélanie Thomin
Il s'agit d'introduire une réflexion sur la protection des talus qui, avec les haies, forment un écosystème propre à l'agriculture bocagère – la protection des haies va donc de pair avec celle des talus. Il y a parfois 10 mètres, 30 mètres, 4 kilomètres de talus arasés, ce qui constitue une atteinte à l'environnement à laquelle il est nécessaire de sensibiliser la population. Bien que partie intégrante de la réalité du paysage bocager, le talus n'a pas d'existence juridique propre. Ils ont toute leur place dans ce projet de loi, ne serait-ce que pour leur rôle en matière de biodiversité et de rétention des eaux de pluie.
Nous avons tous la volonté de voir se développer les linéaires de haies. Vous qui êtes habituellement de bonne foi, monsieur Potier, vous savez que vous venez de faire preuve d'une légère mauvaise foi concernant les modifications de la politique agricole commune (PAC). Ce ne sont pas les infrastructures écologiques, mais les jachères qui seront affectées par ces modifications. La PAC comporte toujours l'obligation de maintenir le linéaire de haies, rien n'a changé à cet égard. Ne dites pas des choses inexactes pour nous faire peur.
Inscrit dans le cadre de la planification écologique et doté d'un budget de 100 millions d'euros, le pacte en faveur de la haie est plutôt apprécié par les collectivités locales et les différents acteurs. Il s'agit de replanter des linéaires de haies et de construire des filières. En voulant ajouter le talus, madame Thomin, vous allez créer une nouvelle contrainte, alors que notre idée est de simplifier. Comme l'ont reconnu certains d'entre vous, l'initiative majeure est de créer un guichet unique pour les agriculteurs : c'est à l'administration qu'il reviendra de définir la notion de haie et de leur donner tous les éléments pour leur déclaration, en veillant à ce qu'ils ne subissent pas un régime d'exception. Nous avons tous, notamment les agriculteurs, intérêt au développement des linéaires de haies en France. Avis défavorable pour ces amendements.
Je voulais rebondir sur la PAC et les décisions prises la semaine dernière, dont nous avons une lecture différente. Comme vous le savez, je travaille actuellement à la rédaction d'un rapport sur le lien entre la politique européenne et la loi d'orientation agricole pour la commission des affaires européennes. Il n'y a pas de changement concernant le maintien et la taille des haies existantes, fort heureusement. En revanche, l'affaiblissement de la norme Bonne condition agricole et environnementale 8 (BCAE 8), qui fixe à 4 % le taux d'infrastructures agroécologiques – haies, mares, bosquets et autres –, allège les obligations des exploitations qui n'atteignent pas ce taux. Les infrastructures écologiques existantes dans certaines régions d'élevage, qui ont déjà beaucoup de bocages et de haies, seront protégées. Tant mieux. En revanche, il va continuer à n'y avoir aucun arbre à l'horizon sur le plateau de la Beauce.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE3432 de M. Éric Girardin et sous-amendement CE3697 de Mme Lisa Belluco, amendement CE3514 de la commission développement durable, amendements identiques CE143 de M. Julien Dive, CE711 de Mme Anne-Laure Blin, CE911 de M. Francis Dubois, CE1382 de M. Charles de Courson et CE2251 de M. Thierry Benoit (discussion commune)
Il s'agit de proposer une nouvelle définition de la haie, différente de celle prévue à l'alinéa 4. Comme vous pourrez le lire dans le pré-rapport, les définitions de la haie sont nombreuses, souvent contradictoires et parcellaires, aucune n'ayant valeur légale. La définition de la haie proposée dans le texte comporte notamment deux éléments : son origine humaine, ce qui est toujours le cas d'un point de vue historique ; le fait qu'elle doit être multiessences. Or, ces deux éléments ne se retrouvent dans aucune définition existante de la haie. Il est donc proposé de supprimer ces deux éléments, tout en gardant l'exception retenue par le Conseil d'État, à savoir que seules sont concernées par cette réglementation les haies qui se trouvent implantées en milieu agricole et naturel et non celles qui bordent des bâtiments ou qui se situent dans un jardin privé. Cette définition répondra au souhait de nombreux députés – je pense notamment aux amendements CE1624 et CE1625 de La France Insoumise et à l'amendement CE367 de nos collègues socialistes.
Cette nouvelle définition va dans le bon sens : l'origine humaine était difficile à démontrer ; une haie peut ne contenir qu'une seule essence. À notre avis, elle comporte encore un défaut, celui de se référer à des haies « d'arbres et d'arbustes ». Notre sous-amendement vise à mentionner plutôt des haies « d'arbres ou d'arbustes, ou des deux ». Il existe en effet des haies d'arbres, des haies d'arbustes, et des haies constituées d'arbres et d'arbustes.
Avis défavorable au sous-amendement. On pourrait considérer comme une haie un simple alignement d'arbres. Or, une haie comprend un étage et un sous-étage. Avis favorable, en revanche, à l'amendement CE3432, qui permettra une consolidation de la définition dans notre droit positif.
Je soutiens ce sous-amendement qui précisera la définition de la haie. Exclure les alignements d'arbres nous ennuierait.
Nous souhaitons la suppression de la mention de l'origine humaine, mais nous sommes également pour le sous-amendement : il faut se fixer un objectif maximal, et la définition serait plus difficile à saisir si on entrait dans la question des différents étages. Il faut aussi préserver des linéaires d'arbres existants, qui jouent parfois un rôle similaire à celui des haies.
Je soutiens l'amendement du rapporteur – je ne suis pas du tout favorable à celui qui a été adopté par la commission du développement durable.
Mon amendement CE143 tend à s'aligner, comme l'a fait la commission du développement durable, sur ce qui est prévu dans le cadre de la PAC. Une définition trop large conduirait à inclure d'autres éléments linéaires ligneux et à appliquer la réglementation à des surfaces jusque-là non concernées. Néanmoins, je me rallie à la proposition du rapporteur.
Je suis tout à fait d'accord avec l'amendement du rapporteur, au profit duquel je retire également le mien. Une rangée d'arbres n'est pas une haie : cela ne se taille pas. Faisons preuve d'un peu de bon sens. Le sous-amendement ne correspond pas du tout à la réglementation prévue pour les haies.
Notre rapporteur a dit tout à l'heure qu'il n'existait pas de définition des haies, mais ce n'est pas exact : il y en a une dans le cadre de la PAC et tous ces amendements tendent à se caler là-dessus, ce qui me paraît la seule option logique.
Je préfère, évidemment, mon amendement. Je vous propose donc de retirer tous les autres.
Pour répondre à M. de Courson, je précise que, s'il existe effectivement une définition de la haie dans le cadre de la PAC, il n'en existe aucune dans notre droit positif, hormis un arrêté ministériel cité dans le pré-rapport. Le présent amendement va remédier à ce manque.
Je rejoins le rapporteur. C'est bien d'avoir une définition dans notre droit et celle qui vous est proposée n'est pas très éloignée de ce que prévoit la PAC.
Demande de retrait au profit de l'amendement du rapporteur ; sinon, avis défavorable.
Les amendements CE143, CE711, CE911 et CE2251 sont retirés.
La commission rejette le sous-amendement CE3697 et adopte l'amendement CE3432.
En conséquence, les autres amendements se rapportant à l'alinéa 4 tombent.
Amendements CE257 de Mme Chantal Jourdan, CE1626 de M. Loïc Prud'homme et CE2501 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)
Notre amendement vise à introduire la notion de bon état écologique, qu'une gestion durable des haies doit permettre d'assurer pour fournir les nombreux services que nous connaissons bien et contribuer à atteindre nos objectifs en matière d'adaptation au changement climatique.
Par l'amendement CE1626, qui a été travaillé avec l'Afac-Agroforesteries, nous souhaitons définir ce qu'est une gestion durable des haies. Il est important de faire référence à la continuité des étages de végétation, à la largeur minimale des houppiers ou encore au maintien d'une emprise au sol minimale. Le projet de loi évoque un « caractère dynamique dans le temps et dans l'espace », ce qui sous-entend qu'on pourrait déplacer des haies et les faire évoluer : c'est dix fois trop flou.
Nous proposons, par ailleurs, d'énumérer les différents services écosystémiques assurés par les haies, comme la protection de l'eau, qui n'est même pas mentionnée dans la rédaction actuelle, et d'établir un système de certification de la gestion durable des haies.
Dans le même esprit de précision, même si notre amendement est un peu différent, nous souhaitons donner une définition du bon état écologique des haies.
Le premier de ces amendements essaie de dresser la liste des fonctions des haies mais, lorsqu'on commence à faire une liste, on court toujours le risque d'être incomplet. Par ailleurs, je ne vois pas ce que recouvre la notion de « bon état écologique » des haies. Je préfère qu'on retienne une rédaction peut-être moins parlante, mais plus large : la formulation actuelle de l'alinéa 5 permet d'englober davantage de fonctionnalités. Par conséquent, demande de retrait.
Il faut quand même penser aux agriculteurs. Si on prévoit que la gestion durable des haies « implique une continuité dans le temps des étages de végétation, une largeur minimale de houppier ou un potentiel de développement de la végétation, ainsi que le maintien d'une emprise ligneuse au sol minimale associée à un ourlet enherbé », plus personne n'aura envie de planter une haie, ce qui est exactement le contraire de ce que nous voulons.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE3515 de la commission du développement durable
La commission rejette l'amendement.
Amendements CE2311 et CE2310 de Mme Mélanie Thomin
Les programmes de restauration des haies sont excellents pour le réaménagement du territoire, mais on se rend compte, en échangeant au niveau local avec les exploitants, qu'il existe quelques contraintes. On se voit ainsi imposer les essences à planter, quand bien même elles seraient malades. Par ailleurs, il n'y a pas de filet de protection pour les agriculteurs lors de la croissance des plants, et ces derniers ne sont pas forcément issus des pépinières ou des productions locales. Nous voulons souligner, par ces amendements, qu'on peut considérer comme étant d'appel, que les programmes manquent parfois de bon sens.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE259 de Mme Chantal Jourdan
Cet amendement vise à développer la valorisation économique des haies, dans le cadre d'une gestion durable, afin qu'on ne les perçoive plus comme une contrainte, mais comme un atout dans les exploitations agricoles. Il faudrait, pour cela, que les politiques publiques appuient le travail important qui a été engagé en la matière dans certains territoires, notamment grâce à l'Afac-Agroforesteries, en favorisant le développement économique des filières et les systèmes de valorisation des haies. Je pense, par exemple, aux filières bois énergie et bois bocage gérées durablement. Nous devons créer des conditions permettant aux agriculteurs de s'intéresser de nouveau à la question de la haie, et de concilier ainsi les aspects économique et écologique.
Suivant l'avis du rapporteur Pascal Lavergne, la commission rejette l'amendement.
Amendements CE3516 de la commission du développement durable et CE260 de Mme Chantal Jourdan (discussion commune)
Sur le principe, je suis d'accord, mais je vous propose de retirer ces amendements en vue de la séance publique. Ils font référence à la biomasse agricole au sens de l'article L. 211-2 du code de l'énergie. Or, cet article ne traite que de la biomasse en général.
Avis défavorable. J'ajoute qu'il serait peut-être utile de travailler sur la notion, intéressante, de multifonctionnalité.
L'amendement CE3516 est retiré.
La commission rejette l'amendement CE260.
Amendements identiques CE3517 de la commission du développement durable et CE1007 de Mme Chantal Jourdan, et amendement CE2502 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)
L'amendement CE1007 vise à intégrer les gestionnaires de haies, qu'elles soient situées en bord de voirie ou de ligne ferroviaire, pour que l'enjeu du changement des pratiques de gestion soit réellement partagé par l'ensemble des acteurs. Le développement et le bon entretien des haies souffrent régulièrement d'entraves, notamment lors du déploiement d'infrastructures telles que la fibre optique aérienne. Le manque de concertation avec les agriculteurs concernés les décourage d'assurer l'entretien, n'incite pas à planter des haies et peut même conduire à les faire disparaître.
Les agriculteurs ne sont pas les seuls, loin de là, à gérer des haies, et il n'y a pas de raison que d'autres acteurs n'aient pas les mêmes engagements à respecter et les mêmes responsabilités. Mon amendement est un peu mieux-disant, dans la mesure où il fixe une échéance pour la mise en place d'un plan de gestion des haies.
Demande de retrait ; sinon, avis défavorable. Il faudra néanmoins retravailler sur ces questions. Je considère, à titre personnel, qu'il faut traiter à peu près de la même façon les agriculteurs et les autres détenteurs de haies.
Même avis, y compris au sujet du travail à faire. Nous avons déjà intégré les gestionnaires, et je ne suis pas sûr que les formulations proposées soient bonnes.
On constate qu'il y a beaucoup de dégâts en ce moment, notamment en raison du déploiement de la fibre aérienne. Il faudrait proposer assez rapidement un plan de concertation.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE1627 de Mme Mathilde Hignet
Nous proposons tout simplement de rétablir une mesure détricotée par l'Union européenne la semaine dernière, qui est l'obligation, pour chaque exploitation agricole, d'avoir au moins 4 % de surfaces en infrastructures agroécologiques, les haies étant considérées comme en faisant partie.
Selon le site internet du ministère de l'agriculture, la BCAE 8, relative au respect d'un taux minimal d'éléments favorables à la biodiversité – jachères et infrastructures agroécologiques –, « pour laquelle la France avait d'ores et déjà demandé des assouplissements pour 2024, est complètement supprimée ».
Le maintien des haies restera obligatoire pour tous ceux qui ont plein de bocage, comme les éleveurs, mais on va laisser tranquilles les grands céréaliers, qui ont 1, 2 ou 3 % d'infrastructures agroécologiques. C'est vraiment une décision pro-grands céréaliers de la Beauce, au détriment des acteurs qui ont des kilomètres de haies.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Amendements CE1629 et CE1630 de M. Loïc Prud'homme
Nous demandons que l'État fasse de la sanctuarisation de l'ensemble du système de haies bocagères un objectif prioritaire. En effet, l'une des principales conclusions du rapport de la mission d'information portant sur l'agriculture et la biodiversité est qu'une haie récemment replantée n'est pas équivalente, du point de vue des services apportés à l'agriculteur et à la biodiversité, à une haie qui existait déjà. Le pacte en faveur de la haie que vous évoquez a pour objectif un gain net de 50 000 kilomètres d'ici à 2030, alors qu'on a perdu 1,4 million de kilomètres depuis les années 1950. Emmanuel Macron veut qu'on plante des arbres à titre de compensation. Nous souhaitons protéger ceux qui existent déjà : il faut lutter contre l'arrachage des haies, qui offrent de réels avantages économiques et écologiques aux agriculteurs. Il faut créer des filières, des débouchés pour valoriser les haies, comme le propose notamment l'Afac-Agroforesteries, avec qui ces amendements ont été travaillés.
Je trouve dommage que vous n'argumentiez pas plus. Une haie qui existe depuis dix, vingt ou trente ans n'a pas du tout la même valeur écologique qu'une haie qu'on vient de planter. C'est une réalité scientifique.
M. de Courson m'a interpellée au sujet des grands céréaliers. Là où il n'y a aucune haie, aucune mare, aucun bosquet, aucune infrastructure agroécologique dans le paysage, ce n'est pas tellement chez les petits céréaliers. Si j'ai cité la Beauce, c'est parce que c'est le cas le plus caricatural. Ce que je dis concerne une très petite minorité d'agriculteurs, qui sont précisément ceux qui devraient faire des efforts. Or, ils n'y seront plus tenus à cause de la décision prise la semaine dernière, manifestement avec le soutien du ministère de l'agriculture, tandis que les autres continueront à devoir respecter les règles.
Si Mme Trouvé connaissait le plateau champenois, qui va des Ardennes à la Marne et à l'Aube, elle saurait qu'on l'appelait autrefois la Champagne pouilleuse. Il faut respecter l'histoire : ne reprochez pas à des gens de ne pas avoir des haies alors que leur région n'en a jamais connu.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE261 de Mme Chantal Jourdan
Cet amendement vise à préciser la notion de « destruction de haies ». Outre l'arrachage, des techniques d'entretien dégradantes, comme des broyages répétés, amenuisent la haie et finissent par la détruire. Nous voulons que ce soit reconnu.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CE3518 de la commission du développement durable, CE1631 de Mme Aurélie Trouvé et CE2504 de Mme Lisa Belluco
J'espère que nous pourrons avancer sur la question de la destruction des haies, qui a beaucoup été évoquée lors des auditions.
Je voudrais répondre à M. de Courson. J'ai encadré des diagnostics agraires dans la Champagne crayeuse : il existait, il y a des dizaines d'années, des haies, des infrastructures agroécologiques dans ce paysage. Je pourrai lui envoyer des études.
On ne peut pas prétendre qu'il n'y a jamais eu d'infrastructures agroécologiques à certains endroits de notre pays. Il faut absolument restaurer des corridors agroécologiques dans toute la France, comme tendent à le faire, fort heureusement, les politiques menées depuis des années pour restaurer la biodiversité, qui s'effondre dans les territoires.
Ces amendements visent à donner une définition plus complète de la destruction des haies, en précisant quels sont les actes qui peuvent y concourir.
Même avis. Le principe du maintien des haies est déjà posé. Il n'est pas nécessaire de préciser ce qu'est leur destruction.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques CE262 de Mme Chantal Jourdan et CE2506 de Mme Lisa Belluco
Il s'agit de préciser le délai dans lequel a lieu l'instruction de tout projet de destruction de haie. La rédaction actuelle laisse au pouvoir réglementaire le soin de fixer ce délai. S'il était trop court, ce serait problématique. Nous prévoyons donc deux mois, afin de nous assurer que l'administration pourra analyser les demandes.
J'ajoute simplement que cet article de simplification, que le groupe écologiste soutient par ailleurs, risque de conduire dans un premier temps à une hausse du flux de dossiers déposés. Nous craignons que le délai prévu ne soit pas suffisant.
Avis défavorable. Je ne pense pas qu'il y aura un afflux de dossiers : les agriculteurs sont raisonnables et ils ont bien compris l'importance des haies pour l'environnement, mais également pour leurs propres activités.
La commission rejette les amendements.
Amendements CE1632 de Mme Mathilde Hignet, CE3519 de la commission du développement durable et CE2507 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)
Nous pensons qu'il faut prévoir un délai, ne serait-ce que pour qu'on puisse savoir à quel moment on recevra une réponse et que l'administration réponde assez rapidement.
Suivant les avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE1633 de Mme Manon Meunier
Nous souhaitons que l'absence de réponse vaille opposition au projet de destruction de haie, et non approbation. L'administration ne sera pas forcément en mesure, en tout cas dans un premier temps, de répondre assez vite aux agriculteurs.
Avis défavorable. Je répète que les agriculteurs sont dans une dynamique de plantation, et non de destruction.
Même avis. Cette question relève, par ailleurs, du domaine réglementaire.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CE263 de Mme Chantal Jourdan, CE1634 de M. Loïc Prud'homme et CE3520 de la commission du développement durable (discussion commune)
Notre amendement vise à préciser les règles d'autorisation pour tout projet de destruction de haie. Nous proposons de mettre à la charge de l'administration une obligation, afin de sécuriser les agriculteurs quant à la procédure applicable.
Je tiens à rappeler l'importance de la haie et de la préservation de la biodiversité pour les agriculteurs. Les insectes auxiliaires permettent notamment de les aider dans leur travail. Il est également important, compte tenu du changement climatique et des tempêtes que nous avons subies ces derniers mois, de préserver les haies. Elles protègent, par exemple, les serres des maraîchers et les cultures.
On perd 20 000 kilomètres de haies par an. Il faudrait donc revoir l'idée selon laquelle les agriculteurs sont dans une dynamique de plantation plutôt que d'arrachage. En Bretagne, après la tempête Ciaran, le président de la Sica (société d'initiatives et de coopération agricoles) de Saint-Pol-de-Léon m'a fait la réflexion qu'il faudrait peut-être conditionner les aides à la reconstruction des serres à la plantation de haies. On a vu, en effet, que les serres devant lesquelles se trouvaient des haies ont été mieux protégées.
J'ajoute que les 20 000 kilomètres en question concernent l'ensemble du linéaire, dont une grande partie ne dépend pas du monde agricole.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements CE2508 de Mme Lisa Belluco et CE1635 de Mme Aurélie Trouvé (discussion commune)
Afin d'éviter qu'une haie soit détruite par tronçons successifs dans le but de passer sous le seuil de l'autorisation, il est proposé de prendre en compte le cumul des interventions sur les haies.
Nous proposons que toute demande de destruction d'une haie faite dans les cinq ans suivant la demande précédente et sur la même parcelle soit automatiquement soumise à autorisation.
Avis défavorable. Les haies et les arbres des agriculteurs sont déclarés dans leur dossier PAC et sont de ce fait très surveillés.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE264 de Mme Chantal Jourdan
Il s'agit de prévoir un délai de deux mois au cours duquel l'autorité instructrice indiquera au demandeur si son projet est soumis à autorisation.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CE336 de M. Julien Dive, CE921 de M. Francis Dubois et CE1383 de M. Charles de Courson
Il est proposé de limiter la consultation publique au seul cas de la dérogation aux interdictions édictées pour les espèces protégées.
Avis défavorable, car ces amendements font courir un véritable risque d'inconstitutionnalité. En effet, l'article 7 de la Charte de l'environnement prévoit que « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement. » Par son caractère général, votre amendement risque de s'opposer frontalement à ce droit. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendements CE2123 de Mme Lisa Belluco et CE3521 de la commission du développement durable (discussion commune)
Il s'agit de mettre en cohérence différentes réglementations avec la nouvelle procédure relative aux haies, et d'inclure une nouvelle catégorie concernant les autorisations de porter atteinte aux alignements d'arbres.
L'objectif est d'intégrer les différentes réglementations, notamment celles concernant les ICPE (installations classées pour la protection de l'environnement) et les procédures IOTA (installations, ouvrages, travaux et activités), dans la procédure simplifiée.
Ces amendements vont dans le sens de la simplification, puisqu'ils visent à regrouper plusieurs procédures en une seule.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques CE337 de M. Julien Dive, CE922 de M. Francis Dubois et CE1385 de M. Charles de Courson
Nous proposons de simplifier la procédure d'obtention des avis requis au titre du code de l'urbanisme.
Pour réaliser la plupart des opérations décrites dans le code de l'urbanisme, on requiert soit l'avis conforme, soit un accord exprès ou tacite des collectivités territoriales. Instaurer un avis simple, que l'on n'est pas tenu de suivre, pourrait poser un problème au regard du principe de libre administration des collectivités territoriales consacré à l'article 72 de la Constitution. Avis défavorable.
Même avis. Je comprends votre intention, mais on ne peut déroger au principe de libre administration.
Il ne s'agit que d'une mesure de simplification. Vous êtes très conservateur, monsieur le rapporteur !
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques CE610 de M. Vincent Descoeur, CE1307 de M. Julien Dive, CE2103 de Mme Anne-Laure Blin et CE2334 de M. David Taupiac,
Il s'agit d'autoriser la taille des haies durant la période d'interdiction en cas de catastrophe naturelle ou d'aléa climatique, par exemple après le passage d'une tempête.
Je suis plutôt d'accord avec ces amendements, mais il y a tout de même une réflexion à mener sur ce sujet. Demande de retrait pour procéder à une réécriture en vue de la séance.
Vous souhaitez traiter de la question de la réparation des réseaux en cas de force majeure. Je partage toutefois l'avis du rapporteur. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Cela soulève la question des dates d'entretien des haies, qui sont fixées de façon trop rigide. Quand un exploitant est obligé de décaler de quelques jours, cela le place dans une situation d'illégalité ou, du moins, de non-respect des règles. Il peut en outre subir un préjudice et être attaqué au tribunal. Je retire mon amendement dans le but de parvenir à une rédaction convenable pour la séance.
Ces amendements visent à harmoniser et à simplifier la procédure de dérogation en cas de force majeure. Le Gouvernement s'était engagé à recenser les arrêtés pris dans tout le territoire, mais force est de constater que rien de concret n'a été fait. Je ne retirerai donc pas mon amendement.
Six mois après le passage de la tempête Ciarán, plusieurs centaines d'habitants de mon territoire ne sont toujours pas raccordés à internet ou au téléphone, les réseaux étant toujours enchevêtrés dans les haies et les arbres qui sont tombés, et que l'on ne peut dégager. Cela illustre l'importance du débat sur les possibilités de dérogation en cas d'aléas climatiques.
La question des dérogations relève de la PAC et non du présent projet de loi. Je précise toutefois que j'ai accordé cette année une dérogation générale en raison de la pluviométrie, qui n'a pas permis l'entretien des haies avant la date limite du 15 mars – même au 15 avril, il était encore compliqué d'intervenir.
Concernant la procédure à suivre en cas de force majeure, chacun doit faire sa propre demande de dérogation et justifier, exploitation par exploitation, qu'il répond bien aux critères. Il est nécessaire de clarifier et de simplifier les modalités à respecter en la matière. Quand il est tombé 180 ou 200 millimètres en un mois, il n'est pas nécessaire que chacun fasse une demande de dérogation à telle ou telle obligation de la PAC. Nous travaillons sur ce point au niveau européen.
L'amendement CE1307 est retiré.
La commission rejette les amendements CE610, CE2103 et CE2334.
Amendements identiques CE338 de M. Julien Dive, CE923 de M. Francis Dubois, CE1433 de M. Charles de Courson et CE3078 de M. Benoît Bordat
Pour ma part, j'aurais tendance à donner un avis de sagesse. Ces amendements visent à faire converger les réglementations, s'inscrivant ainsi dans la logique du guichet unique. Il me semble que cela pourrait être utile.
C'est la raison pour laquelle j'étais partagé. Puisque M. le ministre donne un avis de sagesse, je donne un avis favorable !
Je voulais essayer de faire basculer le rapporteur du bon côté. C'est chose faite et je l'en félicite !
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques CE3522 de la commission du développement durable et CE2509 de Mme Lisa Belluco
Nous proposons de supprimer l'alinéa 25, car il va à l'encontre de l'objectif poursuivi en excluant certains cas de la procédure unique.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette les amendements.
Amendement CE2510 de Mme Lisa Belluco
Je vais défendre en même temps les amendements CE2510, CE2513, CE2514 et CE2518, qui portent tous sur la séquence ERC (éviter, réduire, compenser). La meilleure haie, c'est celle que l'on ne détruit pas et si une destruction doit avoir lieu, elle doit être limitée au maximum. Malheureusement, cet article prévoit seulement la dernière étape, à savoir la compensation de la haie détruite.
L'amendement CE2510 rappelle la séquence ERC, rehausse la compensation, fixe des prescriptions complémentaires nécessaires à la compensation et rend obligatoire la demande de conseil avant la destruction. Les trois autres amendements sont des solutions de repli.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Amendements CE3523 de la commission du développement durable, CE265 de Mme Chantal Jourdan, CE1636 de Mme Manon Meunier et CE2513 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)
Comme cela a déjà été dit par notre collègue Aurélie Trouvé, une haie ancienne n'a pas la même valeur écologique qu'une haie plus jeune. C'est pourquoi la commission du développement durable souhaite inclure dans le texte le rappel de la séquence ERC. J'insiste donc pour que cela soit pris en compte.
Il est en effet important de rappeler cette séquence. L'amendement vise également à préciser qu'une haie détruite doit être remplacée par une haie d'un linéaire au moins équivalent – en réalité, il faudrait un linéaire bien supérieur pour compenser l'impact de la destruction.
On ne peut pas se satisfaire de simples mesures de compensation : il est nécessaire en premier lieu d'éviter toute destruction. M. Alexandre Boissinot, ingénieur écologue à la réserve naturelle régionale du Bocage des Antonins, dans les Deux-Sèvres, que nous avons auditionné, a souligné l'urgence à conserver l'existant, citant l'exemple des arbres têtards, dont les troncs creusés de cavités constituent d'importants réservoirs de biodiversité et jouent un rôle tampon face aux changements climatiques. Les haies stockent du carbone, facilitent le maintien de l'eau dans les sols et apportent de la fraîcheur sur les parcelles : plus une haie est ancienne, plus il est important de la conserver.
Le principe général inscrit dans le code de l'environnement, c'est justement « éviter, réduire, compenser » : il est donc inutile de le rappeler.
Certes, c'est inscrit dans le droit, mais dès que l'on veut construire quelque part, la séquence ERC se transforme en séquence C. Il me semble donc indispensable de rappeler cet objectif.
Je ne suis pas d'accord : dans le PLUI (plan local d'urbanisme intercommunal) que nous sommes en train d'élaborer, nous indiquons les haies qui doivent être conservées – pas toutes, il est vrai, mais la plupart. C'est la règle.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques CE339 de M. Julien Dive, CE924 de M. Francis Dubois, CE1435 de M. Charles de Courson et CE3079 de M. Benoît Bordat
Ces amendements visent à supprimer le principe d'une compensation systématique des destructions de haies. Il faut être raisonnable : il est normal de prévoir une compensation en cas de destruction. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques CE340 de M. Julien Dive, CE926 de M. Francis Dubois, CE1303 de Mme Anne-Laure Blin, CE1535 de M. Charles de Courson et CE1581 de M. Antoine Villedieu
L'objectif est de supprimer la possibilité pour l'autorité compétente d'ajouter des prescriptions complémentaires.
Ces trois alinéas permettent d'imposer des prescriptions supplémentaires à la discrétion de l'autorité compétente, ce qui provoque une réelle instabilité juridique pour le pétitionnaire. Supprimer ces alinéas est donc une question de bon sens.
Nous avons tous compris l'importance de la haie. Il ne faut pas voir ce dispositif sous un angle administratif tatillon ou inutilement prescripteur : ce sera l'occasion d'accompagner la personne qui aura détruit une haie et qui devra mettre en place un dispositif de compensation. On peut dialoguer avec l'administration.
La commission rejette les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements CE840 et CE841 de M. Hubert Brigand.
Amendement CE266 de Mme Chantal Jourdan
Cet amendement précise que les mesures de compensation doivent être proportionnelles à l'impact environnemental de la destruction de la haie. Il insiste également sur l'importance de la protection de la ressource en eau, pour laquelle la présence de haies est fondamentale. Enfin, il instaure une obligation pour le demandeur de solliciter un conseil préalable avant toute opération de destruction.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CE2514 et CE2518 de Mme Lisa Belluco
Imposer un conseil supplémentaire pour de si petites surfaces aurait un coût de fonctionnement qui me paraît disproportionné. L'administration est chargée d'instruire : c'est son travail.
La commission rejette successivement les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CE842 de M. Hubert Brigand.
Amendement CE366 de M. Guillaume Garot
Il s'agit de préciser que des règles spécifiques s'appliquent aux haies qui bordent les voiries, car celles-ci sont régies par des dispositions relevant de différents codes.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Amendement CE2521 de Mme Lisa Belluco
L'objet de cet amendement est de permettre un suivi des haies replantées, afin de s'assurer que la compensation est bien effective et efficace.
Pas de suradministration : faisons confiance aux agriculteurs sur le terrain ! De plus, les déclarations PAC permettent de vérifier ce que vous souhaitez.
Déclarations auxquelles s'ajoutent les observations pouvant être faites par satellite. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CE267 de Mme Chantal Jourdan et CE2523 de Mme Lisa Belluco
Il s'agit de disposer d'une grille d'observation et d'évaluation simple, solide et homogène, afin d'évaluer l'ensemble des aspects qui entourent la destruction de la haie.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette les amendements.
Amendements CE3524 et CE3525 de la commission du développement durable
Ces amendements visent à préciser que toute destruction de haie doit être subordonnée à des mesures de compensation et à prévoir les moyens dont disposent les services instructeurs pour évaluer les impacts environnementaux.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE925 de M. Francis Dubois
Cet amendement rédactionnel vise à remplacer le mot « compensation » par les mots « replantation hors dérogation ».
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE3526 de la commission du développement durable
Cet amendement vise à inclure les objectifs et les critères permettant d'atteindre le bon état écologique de la haie. Cette notion de « bon état écologique » n'est certes pas définie, mais elle est déjà utilisée pour décrire les rivières et les cours d'eau.
Suivant l'avis du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Amendement CE2022 de M. David Taupiac
L'interdiction de taille des haies entre le 16 mars et le 15 août vise à protéger la biodiversité, en préservant les habitats naturels pendant cette période critique. Qui peut croire que les dates des saisons peuvent être fixées à l'échelle européenne, puis nationale ? Entre le nord et le sud de la France, les disparités sont importantes. Il est donc proposé d'établir ces dates chaque année au niveau départemental, à l'issue d'une concertation du préfet avec les acteurs du territoire, afin de s'adapter à la réalité du terrain. Un peu de bon sens paysan, s'il vous plaît !
Je suis partagé sur cet amendement. J'en demande le retrait, à moins que le ministre n'émette un avis de sagesse, auquel cas j'y serais favorable.
Votre intention est d'adapter les dates à la réalité territoriale. Demande de retrait de votre amendement au profit de l'amendement CE1025, dont je préfère la rédaction et auquel je donnerai un avis de sagesse.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE1025 de M. Julien Dive
Chaque département présente des caractéristiques géographiques, climatiques et pédologiques uniques, qui influent directement sur la croissance et la santé des haies. En effet, certaines régions peuvent être soumises à des périodes de sécheresse prolongée, tandis que d'autres peuvent être confrontées à des précipitations abondantes. De même, la composition du sol peut varier considérablement d'un territoire à l'autre, ce qui influe sur la capacité des haies à se développer et à remplir leurs fonctions écologiques. Plutôt que d'imposer une approche uniforme à l'échelle nationale, cet amendement reconnaît la nécessité d'ajuster les périodes d'interdiction de perturbation en fonction des conditions spécifiques à l'échelle départementale.
Dans ma déclaration générale, j'ai prôné le pragmatisme. Je suis donc favorable à cet amendement pragmatique.
Les règles doivent être adaptées à la spécificité des territoires. Il est évident que cela doit être le cas pour les haies – je suis d'ailleurs étonné de voir une date uniforme – car la période de nidification n'est pas la même au nord et au sud ou dans les zones de montagne. Avis favorable.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'amendement CE180 de M. Julien Dive tombe.
Amendement CE930 de M. Francis Dubois
Cet amendement a pour but de supprimer la réglementation relative à la protection des boisements linéaire et des haies dans le cadre de l'aménagement foncier.
Le principe est la préservation. Cet amendement n'allant pas dans ce sens, mon avis est défavorable.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CE927 de M. Francis Dubois, CE1302 de Mme Anne-Laure Blin, CE1536 de M. Charles de Courson et CE2891 de M. Julien Dive
Le principe de proportionnalité ne peut s'appliquer que s'il existe une sanction. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette les amendements identiques CE345 de M. Julien Dive, CE429 de Mme Véronique Louwagie, CE931 de M. Francis Dubois et CE1540 de M. Charles de Courson.
Amendements identiques CE342 de M. Julien Dive, CE928 de M. Francis Dubois et CE1537 de M. Charles de Courson
Cet amendement propose d'étendre aux projets de destruction et aux travaux d'entretien des haies le mécanisme de présomption légale, déjà instaurée au bénéfice des projets de production d'énergie renouvelable, qu'un tel projet répond à une raison impérative d'intérêt public majeur.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette les amendements.
Amendements identiques CE344 de M. Julien Dive, CE428 de Mme Véronique Louwagie et CE1539 de M. Charles de Courson
Cet amendement a pour but de supprimer la réglementation relative à la protection des boisements linéaires.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CE368 de M. Guillaume Garot.
Amendements identiques CE343 de M. Julien Dive, CE929 de M. Francis Dubois et CE1538 de M. Charles de Courson
Cet amendement vise à supprimer l'intégration des haies dans la réglementation des espaces boisés classés.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette les amendements.
Elle adopte l'article 14 modifié.
Après l'article 14
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CE2532 de Mme Lisa Belluco.
Amendement CE2833 de M. André Chassaigne
Cet amendement de bon sens propose une dérogation à l'obligation de compensation dans les zones à reconquérir. Dans les communes fortement boisées notamment, la compensation rend impossible la mise en œuvre de la reconquête des terres agricoles.
Cet amendement ouvre la voie à une solution, à laquelle je vous propose que nous réfléchissions en séance, à un vrai problème, notamment dans les zones de forte déprise qui sont considérées comme boisées alors qu'elles ne le sont pas vraiment. Avis défavorable.
Monsieur le rapporteur, l'inscription dans le code rural ne suffit pas : il faut l'inscrire dans la loi.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CE2548 de Mme Lisa Belluco.
Amendement CE2530 de Mme Lisa Belluco
Cet amendement prévoit la mise en place d'une certification de gestion durable des haies. Elle vise à garantir, pour tous les types de haies et de territoires, une amélioration des pratiques, permettant d'atteindre un bon état écologique des haies et une distribution équitable et durable du bois issu de ces haies.
Je salue le sénateur Daniel Salmon, dont je reprends ici la proposition.
Il existe déjà un label haie. Son inscription dans la loi n'est pas nécessaire. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements CE2534 de Mme Lisa Belluco, CE2932 de M. Benoit Mournet et CE1009 de Mme Chantal Jourdan qui font l'objet d'une discussion commune.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CE1811 de M. Guillaume Garot.
Article 15 Contentieux de certaines décisions en matière agricole
Amendements identiques CE1018 de M. Dominique Potier, CE1648 de Mme Manon Meunier, CE2384 de M. Sébastien Jumel, CE2539 de Mme Lisa Belluco et CE3048 de Mme Marie Pochon
Le groupe Socialistes et apparentés n'a pas de position dogmatique sur l'usage de l'eau dans l'agriculture, mais j'aimerais souligner deux points.
Le premier est que le Conseil d'État estime que cet article est inefficient et qu'il est nul et non avenu dans sa forme. Comme nous sommes en train de faire la loi, nous aimerions disposer d'un texte plus abouti pour pouvoir nous prononcer.
Le second concerne notre position générale sur l'usage de l'eau dans l'agriculture. Il doit être pensé de façon territoriale, après un débat scientifique et démocratique sur chaque bassin. Un usage corporatiste ou singulier ne peut se faire au détriment de l'intérêt général. Tout usage de l'eau doit être précédé d'une étude globale sur le bassin et d'une hiérarchisation des usages.
L'avis du Conseil d'État mentionné par notre collègue Potier doit être pris en compte et l'article 15 doit être supprimé.
Pour une fois en politique, j'aimerais que l'avis des scientifiques soit pris en compte. Lors de son audition, Jean-François Soussana, membre du Haut Conseil pour le climat (HCC), nous a alertés sur les mégabassines, qui sont une maladaptation au changement climatique puisque le puisement dans les nappes phréatiques empire leur assèchement. En outre, cette pratique ne prépare pas les agriculteurs à la transition vers des cultures alternatives moins consommatrices en eau.
En attendant, la construction de ces mégabassines est un gaspillage d'argent public qui ne bénéficie qu'à quelques-uns et qui ne prépare personne.
Le groupe Écologiste est défavorable à cet article, qui vise à accélérer le déploiement des réserves de substitution et des élevages industriels.
Je ne reviens pas sur les problèmes de fond posés par ces installations. Je me contenterai de souligner que le Conseil d'État prévient que cette nouvelle procédure risque de ralentir les délais d'instruction. Elle est donc une fausse promesse, même pour les irrigants et pour les éleveurs industriels. La possibilité de recourir au référé dans un délai resserré risque de pousser tous les requérants à y recourir et donc à augmenter les contentieux.
Je vous propose de réserver le débat sur les mégabassines, les réserves de substitution et les élevages industriels à l'examen du texte en séance. Dans cette perspective, je retire l'ensemble de mes amendements à l'article 15.
Dans son avis, le Conseil d'État souligne que l'étude d'impact ne fait pas apparaître de difficultés particulières en ce qui concerne le contentieux de ces projets, notamment en termes de délais, de jugement ou de complexité, et que les aménagements contentieux qu'il est proposé d'apporter à la procédure de droit commun n'ont pas fait l'objet d'une évaluation.
Il souligne que l'efficacité d'une telle mesure, qui porte atteinte au droit de recours, n'est pas établie et que la suspension automatique de la durée de validité de toutes les décisions relatives à un même projet peut être source d'incertitudes et de contestations.
Il souligne également que la multiplication de règles contentieuses spéciales ne peut que nuire à la lisibilité d'ensemble des règles applicables au contentieux administratif.
Enfin, il rappelle que cette disposition est susceptible de présenter des risques de constitutionnalité au regard notamment du principe d'égalité devant la justice.
Cet avis clair et précis du Conseil d'État nous démontre la nécessité de supprimer cet article.
Je tiens à préciser d'emblée que l'article 15, auquel nous tenons particulièrement, n'a pas pour objectif de simplifier le droit applicable aux agriculteurs : il s'agit en vérité d'un article technique visant à accélérer la procédure contentieuse en cas de recours formés devant le juge administratif contre des décisions portant sur certains projets, afin de ne pas décourager les initiatives. Avis défavorable.
Madame Meunier, je voudrais revenir sur vos propos sur la science. La gestion de l'eau est un sujet très sensible ; c'est un enjeu politique respectable, qui peut nous diviser, mais il ne fait pas l'objet d'un consensus scientifique.
Il existe un vrai problème en France dans le rapport à la science, surtout depuis la crise du covid-19. La confiance des Français dans la science s'est effondrée, du fait d'une confusion entre science et recherche. Un scientifique qui, lorsqu'on l'interroge, répond « je pense que » est dans la recherche, pas dans la science. Il n'y a pas de consensus scientifique sur les retenues collinaires, le niveau d'évaporation : tout dépend des bassins. Aucune généralité scientifique ne peut être faite en la matière. Nous pouvons discuter de ces questions au niveau politique, mais n'invoquons pas de vérités définitives, car elles n'existent pas.
Il n'est pas normal qu'un justiciable puisse continuer à faire des recours en appel et en cassation alors qu'il les perd tous, sans aucune sanction. En droit américain, les recours abusifs peuvent être sanctionnés par le juge d'une amende allant jusqu'à trois fois le montant des pertes occasionnées. De telles sanctions responsabilisent tout le monde. Nous devrions adopter un dispositif similaire.
Cet article est nécessaire. Je rappelle qu'il existe actuellement cinquante-sept contentieux sur des retenues d'eau et cinquante-quatre sur des projets d'élevage. Il faut attendre en moyenne quatre ans et six mois pour obtenir une décision des tribunaux. En tant que politiques, notre devoir est de ne pas laisser les agriculteurs aussi longtemps dans l'incertitude. Il faut partager la ressource.
Monsieur Descrozaille, vous avez raison de rappeler que la science évolue au fur et à mesure des recherches et des discussions. Elle ne peut donc produire de vérités avec un grand « V ». Toutefois, il existe un consensus scientifique sur les risques de la maladaptation. En proposant des solutions de maladaptation aux agriculteurs, nous les envoyons dans le mur, à moyen terme. Mieux vaut les accompagner maintenant vers la transition.
Je voudrais ensuite apporter une précision sémantique : il faut distinguer les réserves de substitution des réserves collinaires. Ces dernières ont été évoquées, mais elles ne sont pas l'objet de cet article.
Je voudrais enfin rappeler que la majorité des recours contre les projets de mégabassines ou de réserve de substitution sont plutôt gagnés par les requérants. Dans ces conditions, peut-on considérer qu'ils sont abusifs ?
Nous ne disons pas qu'il existe une science absolue. La science permet cependant de dégager des consensus, comme celui sur la maladaptation – et ce ne sont pas des scientifiques d'extrême gauche qui le soutiennent ! Je rappelle que Jean-François Soussana, membre du Haut Conseil pour le climat, qui a été mis en place par Emmanuel Macron, a parlé de maladaptation devant la commission du développement durable.
Vous citez souvent une étude du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), que nous ne remettons pas en question et qui n'est effectivement pas alarmante. Mais elle ne prend pas en compte les sécheresses que nous avons vécues ces dernières années et n'intègre donc pas leur impact sur la biodiversité, par exemple. En outre, nous avons interrogé des hydrogéologues, comme Marie Pettenati du BRGM. Ils nous mettent en garde sur ces bassines qui peuvent aggraver la sécheresse. Les scientifiques du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) ou du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), comme M. Bretagnolle, recommandent de recourir à des solutions de sobriété.
Le débat scientifique est intéressant, mais nous devons revenir à la loi et au titre IV, qui vise à simplifier les démarches et à éclairer les agriculteurs pour les quinze, vingt prochaines années.
M. Martineau a mentionné la longueur des procédures judiciaires. Dans ma circonscription, plus de cent agriculteurs attendent une décision depuis treize ans. Ils se trouvent donc dans l'incertitude pour prendre des engagements ou investir.
J'aimerais que nous soient communiquées d'ici à la séance les études scientifiques justifiant la construction de mégabassines pour assurer la sécurité d'approvisionnement en eau.
On nous parle de proportionnalité des sanctions, mais il faudrait également évoquer l'illégalité de certains ouvrages, qui a été constatée par plusieurs décisions de justice. Que faire par exemple de la réserve de Caussade, qui est illégale ?
Face à des recours dont l'intention est d'entraver le développement d'un projet, il faut pouvoir accélérer le contentieux. Cela vaut pour les projets hydrauliques comme pour les projets d'élevage, ce qui ne supprime pas la nécessité de mener des études. Que la réponse soit positive ou négative, elle doit être rapide.
La commission rejette les amendements.
Les amendements CE2549, CE2550, CE2552, CE2553, CE2554 et CE2555 de Mme Lisa Belluco sont retirés.
Amendement CE1318 de M. Philippe Schreck
L'amendement CE1318 est défendu. Je voudrais connaître la position du ministre sur l'amendement CE1760, bien qu'il n'ait pas été défendu. Pourquoi les ouvrages destinés au prélèvement des eaux souterraines sont-ils exclus du dispositif prévu à l'article 15 ?
Avis défavorable.
Ces ouvrages sont exclus du dispositif car le projet de loi vise des mesures de simplification et d'accélération des décisions de justice sur les contentieux portant sur des projets à enjeu pour la souveraineté alimentaire.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE2039 de M. David Taupiac
Plus de la moitié des élevages français sont des ICPE, qui relèvent à 90 % du régime de la déclaration, à 8 % du régime de l'enregistrement et à 2 % du régime de l'autorisation.
Nous proposons d'exclure la dernière de ces catégories du bénéfice de l'article 15, car ce sont des élevages de type industriel, néfastes pour l'environnement. Il importe de favoriser les élevages à taille humaine et familiaux, en lien avec notre territoire. Cette distinction me paraît essentielle si l'on veut faciliter l'installation d'éleveurs.
Au regard du profil des contentieux en matière agricole, ces élevages et ces installations sont une cible privilégiée de la part des contestations contentieuses ; il importe évidemment de les laisser dans le périmètre de l'article 15. Avis défavorable.
Même avis. Nous avons besoin de bâtiments et ce que vous décrivez comme des installations industrielles n'en sont pas du tout.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE1759 de Mme Hélène Laporte
Il s'agit d'ajouter au dispositif les élevages d'ovins et de caprins, dont se demande pourquoi l'article 15 ne les couvre pas.
Tout simplement parce qu'ils ne sont pas dans le champ des ICPE. Mais votre amendement les y ferait entrer… En voulant simplifier, on complique.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE1643 de Mme Aurélie Trouvé
Je défendrai tous les amendements déposés par le groupe La France insoumise à l'article 15, chacun consistant à supprimer un alinéa.
Nous pensons qu'il faut fonder nos décisions politiques sur la science, et la science nous alerte : les mégabassines sont une maladaptation au changement climatique dont les agriculteurs seront les premiers à souffrir ; ils en souffrent déjà. Lorsque vous consacrez des millions d'argent public à la création de mégabassines, vous réduisez de fait les chances des petits maraîchers qui s'installent et qui ont des besoins en eau bien moindres. Or, ils ne peuvent pas puiser dans la nappe, parce qu'ils refusent de participer à la coopérative de l'eau qui finance les mégabassines, celles-ci ne profitant qu'à un nombre minime d'agriculteurs. À côté, on ne met pas assez de moyens pour aider les petits maraîchers à faire face aux sécheresses et pour préparer la conversion à des cultures moins gourmandes en eau.
Cet article va accélérer la création des mégabassines et limiter les contentieux relatifs à l'environnement. Si nous nous y opposons fermement, c'est avant tout pour les agriculteurs qui sont engagés dans la démarche de transition agroécologique. D'ailleurs, les agriculteurs ne sont pas du tout contre la transition agroécologique. Dans le cadre de notre mission d'information sur l'agriculture et la biodiversité, nous avons reçu tous les syndicats agricoles, de la Coordination rurale au Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef), en passant par la Confédération paysanne, les Jeunes Agriculteurs et la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA). Tous nous ont dit être sensibles au changement climatique, mais avoir besoin de moyens financiers pour faire cette transition. Or, vous mettez ces moyens sur une fausse solution, qui ne fait en réalité qu'aggraver le problème. Voilà ce que nous dit le monde scientifique.
Avis défavorable. En pratique, ce sont les autorisations environnementales qui sont à l'origine de la plupart des contentieux ; les exclure du dispositif va à l'encontre de l'objectif que nous visons. J'émets par avance un avis défavorable sur vos autres amendements.
Vous n'arrêtez pas de parler de mégabassines, mais c'est un terme que vous avez inventé. Chez moi, on attend trente réserves de substitution d'une certaine taille pour alimenter un peu plus d'une centaine d'agriculteurs – le projet est connu depuis treize ans.
Je suis évidemment favorable à la transition écologique : à l'article 1er, j'ai défendu le principe selon lequel la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) doit rester notre boussole. Mais la transition écologique, même si tous les syndicats souhaitent pouvoir la réaliser et comptent sur le renouvellement démographique pour y arriver, ne veut pas dire que l'on peut faire une agriculture sans eau. Il faut donc donner les moyens aux agriculteurs de faire leur travail, dans des conditions contrôlées où la science aurait sa place.
Cet article entend mettre fin aux recours interminables – ils durent depuis treize ans chez moi – pour que les petits agriculteurs qui veulent vivre de leur métier aient une réponse à leur projet d'investissement.
Personne ne dit qu'il faut faire de l'agriculture sans eau. L'agriculture irriguée est très minoritaire en France, puisqu'elle concerne moins de 10 % de la surface agricole utile. Nous avons conscience que cette surface risque d'augmenter du fait du réchauffement climatique mais, plutôt que de réserver des volumes pour les surfaces actuellement irriguées – puisque tel est le but des réserves de substitution –, il faudrait réfléchir à un meilleur partage de l'eau des nappes. Il n'est pas très respectueux de dire de la grande majorité des agriculteurs qu'ils feraient de l'agriculture sans eau ; ils ne sont pas idiots, ils font de l'agriculture avec l'eau pluviale.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements CE1319 et CE1320 de M. Philippe Schreck, CE2142 de M. Dominique Potier et les amendements identiques CE1321 de M. Philippe Schreck et CE1644 de Mme Aurélie Trouvé.
Amendement CE3527 de la commission du développement durable
Nous proposons que le juge des référés puisse, avec l'accord des deux parties, organiser une médiation afin de trouver un accord entre elles, dans les conditions prévues aux articles L. 213-7 et suivants du code de justice administrative.
Il me semble que la médiation arrive trop tard si l'on est déjà engagé dans le contentieux. D'autres dispositifs existent déjà, comme le projet de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE) ou la consultation préalable du public pour les ICPE, qu'il convient peut-être d'améliorer.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE2312 de Mme Mélanie Thomin
Nous avons déjà souligné que le Conseil d'État a tué dans l'œuf cette proposition de simplification et que la disposition introduite par l'article 15 n'est sans doute pas la meilleure façon d'aborder le problème de l'extension des bâtiments d'élevage.
Dans le Finistère, tout projet d'extension d'un bâtiment d'élevage fait systématiquement l'objet d'un recours, y compris sur les petites exploitations familiales, qui n'ont pas les moyens d'y faire face. Cela crée une insécurité forte, à un moment où l'on veut favoriser la transmission des exploitations dans ces filières stratégiques. Je retire mon amendement, mais j'attends beaucoup du débat qui aura lieu en séance.
L'amendement est retiré.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements CE1645 de Mme Aurélie Trouvé, CE2143 de M. Dominique Potier et CE1646 de Mme Aurélie Trouvé.
Amendement CE3528 de la commission du développement durable
Les études d'impact que les porteurs de projet ont l'obligation d'assumer sont souvent remises en cause pour manque d'objectivité par les opposants, du fait de ce financement direct. Revoir les modalités de celui-ci à travers sa prise en charge par des organismes tiers, sur fonds publics ou privés, permettrait de limiter les recours et de soulager les petits porteurs de projet, pour qui ces études sont très coûteuses.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 15 non modifié.
Après l'article 15
Amendement CE2037 de Mme Nathalie Bassire
Il est arrivé, à La Réunion, que des plans locaux d'urbanisme (PLU) soient partiellement annulés par le tribunal administratif en raison d'erreurs de classement de certaines parcelles à vocation agricole. Selon la jurisprudence du Conseil d'État, la commune concernée doit lancer une procédure de révision du PLU, afin de le mettre en conformité avec la décision juridictionnelle. Or, c'est une procédure très longue, qui peut prendre plusieurs années. Dans l'esprit du projet de loi de simplification des procédures et de facilitation de l'accès au foncier agricole, nous proposons qu'une simple délibération du conseil municipal puisse régulariser le PLU annulé conformément au jugement, lorsqu'il s'agit de parcelles agricoles.
Demande de retrait ou avis défavorable. Votre amendement pose un problème de constitutionnalité.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE1650 de Mme Clémence Guetté
« Là où il y a des retenues illégales, elles seront démontées. Les décisions de justice seront respectées et l'État les fera appliquer », a fait savoir le cabinet du ministre à l'occasion d'une conférence de presse sur le plan Eau, le 7 novembre 2023. L'amendement tend à traduire ces propos dans la loi, en sorte que les ouvrages déclarés illégaux par des décisions de justice définitives ne puissent faire l'objet d'aucune régularisation et qu'ils soient démantelés. Ma collègue Marie Pochon a évoqué tout à l'heure le barrage de Caussade, qui est toujours debout alors qu'il est illégal. Le droit ne peut pas être à géométrie variable.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Article 16 : Règles applicables aux détenteurs de chiens de protection de troupeaux
Amendement CE1661 de Mme Aurélie Trouvé
Nous ne sommes pas opposés au contenu de l'article 16, mais nous souhaitons supprimer son premier alinéa, qui instaure une exception au principe de non-régression selon lequel la protection de l'environnement ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment. Poser une exception à ce principe ouvrirait la porte à de futures dérogations : nous ne voulons pas d'une telle jurisprudence, qui serait délétère pour le droit de l'environnement.
Avis défavorable. Vous voulez supprimer une mesure de bon sens, qui vise à simplifier la vie de nos éleveurs. Sans remettre en cause la protection de l'environnement, il est question de permettre au pouvoir réglementaire de faire une place à part aux chiens de protection de troupeaux dans la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement. Cela évitera de faire tomber sous le coup de cette réglementation les éleveurs de brebis qui détiennent, par exemple, quatre patous, trois chiens de conduite du troupeau et deux chiens d'agrément.
C'est une question de bon sens : on ne peut pas appliquer à des gens à qui on demande d'avoir des chiens en nombre pour protéger leurs troupeaux une réglementation qui les pénaliserait. Vous parlez de régression environnementale, mais le vrai risque, ce serait une régression de l'élevage et du pastoralisme.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE1663 de Mme Aurélie Trouvé
Nous demandons la suppression des alinéas 2 et 3, qui habilitent le Gouvernement à légiférer par ordonnances, car nous y sommes opposés par principe.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CE1662 de M. Léo Walter.
Amendements identiques CE3050 de Mme Marie Pochon et CE3529 de la commission du développement durable
L'amendement vise à porter de six à douze mois le délai pour prendre par ordonnance les mesures destinées à encourager les éleveurs à recourir aux chiens de protection des troupeaux. Le délai initial est en effet trop court pour pouvoir associer pleinement les professionnels concernés.
Il s'agit d'un amendement identique, adopté à l'initiative notamment de Mme Pascale Boyer, présidente du groupe d'études sur le pastoralisme.
La réflexion du Gouvernement ayant bien avancé, nous travaillons ensemble à un dispositif que nous espérons pouvoir présenter en séance publique. Avis défavorable.
Nous serons en mesure d'inscrire dans la loi les dispositions que nombre d'éleveurs attendent depuis des années – six mois supplémentaires de délai, c'est trop.
Il s'agissait de laisser le temps nécessaire pour mener un travail rigoureux sur un sujet essentiel pour les territoires.
La commission rejette les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CE3391 de M. Pascal Lavergne, rapporteur.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CE1277 de M. Lionel Tivoli.
La commission adopte l'article 16 modifié.
Après l'article 16
Amendement CE1664 de Mme Sylvie Ferrer
L'amendement a pour objet la remise par le Gouvernement d'un rapport sur les conditions de travail des gardiens de troupeau, ainsi que sur l'opportunité de doter la profession d'un régime spécifique. Ces derniers ne bénéficient pas d'un tel régime, contrairement aux marins, alors que leur métier est très dur et marqué par l'intermittence.
Je m'étonne de la faiblesse de votre argumentation. Comment peut-on se contenter de dire « hors sujet » alors que l'article 16 concerne l'agropastoralisme, sans compter que l'amendement a été déclaré recevable ?
Nous avons adopté mon amendement à l'article 1er imposant de « garantir le maintien et accompagner le développement de l'agropastoralisme ». Cet amendement est donc parfaitement dans le sujet.
On constate par ailleurs que les installations sont plus fréquentes dans les zones pastorales. Pour assurer le maintien des exploitations pastorales, il serait intéressant d'accompagner par des mesures spécifiques les bergers ou les éleveurs pastoraux.
La commission rejette l'amendement.
Article 17 : Règles applicables au compostage de la laine et à l'aquaculture
Amendement CE2562 de Mme Lisa Belluco
Nous proposons de supprimer l'article car, d'une part, nous sommes gênés par le contournement du principe de non-régression du droit de l'environnement, et, d'autre part, nous refusons de donner un blanc-seing au Gouvernement.
Monsieur le ministre, pouvez-vous prendre l'engagement d'inscrire dans la loi les dispositions au cours de la navette plutôt que de recourir aux ordonnances ?
Défavorable. Dans l'intérêt de notre économie et de nos territoires, nous avons besoin de développer le secteur de l'aquaculture qui est largement déficitaire. Il n'est cependant pas exclu de présenter des mesures au cours de la navette. Les discussions avec la filière sont en cours.
L'objectif est bien d'introduire les dispositions dans la loi.
J'appelle votre attention sur la nécessité de simplifications drastiques pour rétablir notre souveraineté, alors que nous importons 90 % du poisson que nous consommons. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE3052 de Mme Marie Pochon
L'amendement vise à réécrire l'article entièrement, pour définir une stratégie de structuration et de valorisation de la filière laine française.
La délocalisation de l'industrie du textile française et des sites de lavage vers l'Asie, le développement des fibres synthétiques au détriment des fibres naturelles, ainsi que la baisse du prix à l'échelle mondiale ont conduit les éleveurs ovins français à se désintéresser de leur laine, au point de la brûler. Pourtant, la laine est une ressource naturelle pour la confection textile, la construction ou la protection des sols. Elle pourrait constituer une source de revenu additionnel pour les éleveurs, mais aussi un outil de relocalisation industrielle.
Je soutiens l'amendement, qui me semble bien plus pertinent que le texte initial. Nous avons besoin de bâtir une stratégie de structuration et de valorisation de la filière laine française.
J'ai l'exemple dans le nord du Limousin d'une exploitation ovine qui s'est effondrée à la suite notamment de l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et la Nouvelle-Zélande. Il faut absolument soutenir les agriculteurs qui ne savent plus quoi faire de leur laine alors que celle-ci pourrait être revalorisée et servir la réindustrialisation de notre pays.
Les écologistes devraient accorder leurs violons : on passe d'une proposition de suppression de l'article à une nouvelle rédaction.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE1665 de M. Loïc Prud'homme
Il s'agit de supprimer l'alinéa 1, qui instaure une exception au principe de non-régression. Or, la protection de l'environnement ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques.
La dérogation que vous introduisez pour les sous-produits lainiers est la porte ouverte à des dérogations futures pour d'autres secteurs.
Défavorable. Plutôt que d'une quelconque régression, il est question d'apporter une solution à un problème.
Si on suit votre logique, on ne valorise pas les sous-produits lainers en France.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CE1666 de Mme Manon Meunier et CE3216 de Mme Sandrine Rousseau
Il s'agit une nouvelle fois de contester la dérogation au principe de non-régression que vous introduisez, d'autant que, dans les deux secteurs visés – la laine et l'aquaculture –, des mesures peuvent être prises sans remettre en cause le droit de l'environnement.
Nous restons également gênés par le recours aux ordonnances, mais nous avons compris que le ministre nous proposerait des dispositions lors de la navette.
Avis défavorable. Il est nécessaire d'adapter le cadre juridique afin de favoriser le développement de l'aquaculture.
La commission rejette les amendements.
Amendement CE1667 de M. Loïc Prud'homme
Face à la multiplication des projets de ferme aquacole gigantesque, telle l'usine à saumons d'une capacité de production de 8 000 tonnes de poisson par an dont l'installation est envisagée à Plouisy, dans les Côtes d'Armor, il est proposé d'exclure du champ d'application de l'article les installations aquacoles dépassant un seuil de densité d'élevage de 25 kilogrammes de saumons par mètre cube d'eau.
Avis défavorable. Cela ne relève pas de la loi. Nous devons absolument essayer de développer la filière aquacole.
La France consomme, par an et par habitant, 34 kilogrammes de poisson, dont 80 % sont importés. Il ne faut rien s'interdire pour restaurer notre souveraineté.
Les élevages hyper-intensifs, comme le projet de l'entreprise Pure Salmon en Gironde, permettraient certes de reconquérir un peu de souveraineté, mais à quel prix ? En produisant des saumons de mauvaise qualité, qui ne sont pas bons pour notre santé et qui génèrent des pollutions excessives. Nous devons promouvoir une pisciculture respectueuse de l'environnement et de la santé.
Alors que nous sommes très importateurs de poisson et en dépit d'une réglementation très sévère, la gauche monte au créneau pour interdire tout projet de développement de pisciculture. Allez voir dans quelles conditions sont élevés les saumons en Norvège, ensuite nous en reparlerons !
Dans le projet Pure Salmon, qui est situé dans ma circonscription, la densité d'élevage est inférieure aux seuils réglementaires. Certes, les infrastructures sont imposantes, mais les conditions d'élevage sont bien plus respectueuses qu'en Norvège. Renseignez-vous davantage sur les projets que vous combattez et arrêtez de les diaboliser !
La France est l'un des premiers pays consommateurs de saumon. En développant les projets aquacoles, nous pourrons le produire localement, plutôt que de l'acheminer par des cargos qui polluent depuis la Norvège.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette successivement l'amendement CE1668 de M. Loïc Prud'homme et les amendements identiques CE1669 de Mme Anne Stambach-Terrenoir et CE3217 de Mme Sandrine Rousseau.
Amendement CE1670 de Mme Aurélie Trouvé
Pourquoi tant d'acharnement contre la pieuvre ?
La philosophie du texte n'est pas d'ajouter des normes mais d'en soustraire, vous l'aurez compris.
Nous croyons en la capacité du législateur à ajouter dans la loi des mesures positives. Il existe déjà des élevages de poulpes en Espagne.
Compte tenu de l'extrême sensibilité des pieuvres, il n'est pas possible de les élever dans des conditions respectueuses de leur bien-être. Je vous invite à lire le rapport de CIWF « Élevage industriel des pieuvres : désastre annoncé ».
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 17 non modifié.
Après l'article 17
Amendement CE1399 de M. Jorys Bovet
Avis défavorable. Des rapports sur les filières textiles sont déjà rédigés par divers organismes, comme Inter Chanvre – l'interprofession du chanvre –, l'Alliance du lin et du chanvre européen, ou encore le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER).
La commission rejette l'amendement.
Article 18 : Capacité d'intervention des départements en matière de gestion de l'approvisionnement en eau destinée à la consommation humaine
Amendements de suppression CE1674 de Mme Aurélie Trouvé et CE2390 de M. André Chassaigne
L'étude d'impact se caractérise, pour ce qui est de l'article 18, par sa légèreté. Nous aimerions être mieux informés, d'ici à l'examen du texte en séance, sur les tenants et les aboutissants de cet article, qui vise à accroître les compétences des départements en matière de transport, de production et d'approvisionnement en eau. En l'occurrence, il s'agit de leur permettre de construire des ouvrages multiusages qui permettent de stocker de l'eau destinée à la fois à l'irrigation et à la consommation humaine, conformément à la volonté du Gouvernement de multiplier les projets de ce type.
Nous estimons, au contraire, que la politique de l'eau doit être conduite au plus près des besoins, dans une logique de sobriété et de résilience, afin de pomper moins d'eau et de mieux relever le défi du changement climatique.
Avis défavorable, pour des raisons que je développerai en séance. J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer la rivière du Drot, qui arrose ma circonscription, et je pourrai le refaire à l'envi.
La commission rejette les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CE1804 de M. Stéphane Delautrette.
Amendement CE1313 de M. Philippe Schreck
Dans la mesure où le transfert des compétences eau et assainissement aux intercommunalités ne sera obligatoire qu'en 2026, il nous semble important de laisser aux communes les ayant conservées la possibilité de donner mandat aux départements pour construire les ouvrages mentionnés à l'article 18.
La loi ne s'appliquera certes qu'à compter de 2026, mais il ne vous aura pas échappé que nous sommes en 2024, et la création des ouvrages visés par l'article prendra du temps. En adoptant cet amendement, nous créerions une instabilité juridique peu souhaitable. Avis défavorable.
La loi permet aux communautés de communes de sous-traiter la compétence eau aux communes. Je me demande donc si, en conservant la rédaction actuelle, nous ne risquons pas de créer l'instabilité juridique que vous redoutez pour les communes concernées.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CE297 de M. Vincent Descoeur.
La commission adopte l'article 18 non modifié.
Après l'article 18
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements CE2134 de M. Dominique Potier et CE1863 de Mme Anaïs Sabatini.
Article 19 : Règles relatives à la représentativité des organisations professionnelles d'employeurs propres au secteur agricole
La commission adopte l'amendement rédactionnel CE3392 de M. Pascal Lavergne, rapporteur.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CE1958 de M. Philippe Naillet.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CE3393 de M. Pascal Lavergne, rapporteur.
Amendements identiques CE2083 de M. David Taupiac et CE3054 de Mme Marie Pochon
L'amendement vise à interpeller le ministre sur un décret en cours de préparation, qui viendra modifier les règles de répartition des financements publics des syndicats d'exploitants agricoles, dans le contexte des élections aux chambres d'agriculture qui se tiendront l'année prochaine. Où en est la rédaction de ce décret ? Nous devrons veiller à garantir le pluralisme des syndicats représentés au sein de ces instances.
Le projet de loi prévoit de renforcer les compétences des chambres consulaires que sont les chambres d'agriculture, notamment l'exercice de leurs missions de service public. C'est en ce sens que nous, parlementaires, devons assurer le juste financement des organisations syndicales d'exploitants agricoles et leur juste représentation au sein de ces instances.
Les critères d'appréciation de leur représentativité, les modalités de représentation dans les différentes instances et la clef de répartition des financements publics entre syndicats sont fixés par décret. Ces règles sont souvent remaniées à l'approche des élections aux chambres d'agriculture, en vertu d'une simple décision politique émanant du ministère de tutelle. Cette année encore, il semble que nous n'échappions pas à ce procédé. Même si le ministre s'est engagé en décembre dernier devant la commission des affaires économiques à ce que le pluralisme soit garanti par le futur décret, il serait bon de conforter ce principe dans la loi.
On s'éloigne ici quelque peu de l'objet de l'article 19, qui porte sur la représentativité nationale et multi-professionnelle des organisations professionnelles d'employeurs. Avis défavorable.
Même avis. Cette disposition relève du domaine réglementaire. En revanche, je réaffirme la nécessité d'assurer le pluralisme au sein des chambres d'agriculture, principe que nous avons d'ailleurs veillé à intégrer dans le présent texte.
Les chambres d'agriculture obéissent aux mêmes modalités d'élection que les communes, où elles me semblent fonctionner correctement.
La commission rejette les amendements.
Elle adopte l'article 19 modifié.
Après l'article 19
Amendements identiques CE901 de M. Julien Dive, CE1524 de M. Dominique Potier et CE2110 de M. Frédéric Descrozaille
Je présenterai simultanément les amendements CE2110, CE2107, CE2108 et CE2111. Ils visent à simplifier la vie des organisations interprofessionnelles demandant une extension d'accord. Depuis l'adoption de la loi Egalim 1, on demande beaucoup à ces organisations, indispensables pour structurer les filières.
Alors que les demandes d'extension d'accord sont pour elles un moment de fragilité, il arrive que l'administration se permette, de manière indue, d'émettre des refus non motivés et de prononcer un jugement en opportunité sur le contenu de l'accord, pourtant conclu par un syndicat de producteur, un représentant de la grande distribution et un industriel. À cela s'ajoutent des délais de traitement déraisonnables et même l'interdiction de faire figurer dans les accords des dispositions contraignantes afin d'en garantir l'application.
Cette situation consternante n'est pas justifiée juridiquement. Il est temps que le législateur replace l'administration dans son rôle, qui consiste à contrôler la conformité des accords à la loi, et non à juger de leur opportunité. Chacun des quatre amendements reprend un des motifs que je viens de synthétiser.
Je demande le retrait de l'amendement CE2108. Les délais réglementaires étant clairement normés, il me semble difficile d'y déroger. En revanche, je suis favorable aux amendements identiques CE900 et CE2111, qui visent à imposer la motivation des avis, même si la rédaction devra peut-être en être légèrement modifiée. Si des parties prenantes se mettent d'accord entre elles, l'administration ne doit pas pouvoir remettre en cause le processus sans justifier sa décision.
Certaines interprofessions subissent la mainmise de la grande distribution et défendent parfois des décisions qui ne servent pas de façon cohérente les intérêts des producteurs. Dans ce contexte, ne devrions-nous pas laisser à l'administration la possibilité de suggérer un rééquilibrage des accords conclus ?
Une fois qu'une interprofession est reconnue, sa légitimité politique est établie. Si un déséquilibre se fait sentir, il est lié à la composition de l'organisation. La responsabilité du ministre consiste à reconnaître les interprofessions, dont la représentativité est appréciée à l'aune de critères définis à l'échelle communautaire.
Sur cette base, ne soyons pas plus royalistes que le roi. Les décisions sont prises à l'unanimité des collèges, voire des personnes morales qui les composent. Il n'y a donc pas lieu de charger une tierce partie de procéder à un quelconque rééquilibrage ou d'expliquer aux parties prenantes comment elles auraient dû rédiger leur accord. Piloter une interprofession est déjà suffisamment compliqué.
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques CE899 de M. Julien Dive, CE1526 de M. Dominique Potier et CE2107 de M. Frédéric Descrozaille
Demande de retrait pour ces amendements, ainsi que le CE2108 de M. Descrozaille qui va suivre.
La commission adopte les amendements.
Amendement CE2108 de M. Frédéric Descrozaille.
J'ai bien entendu la demande de retrait exprimée par le ministre, mais je maintiens mon amendement. Si des éléments nouveaux devaient m'être communiqués avant l'examen du texte en séance, je ferai toutefois évoluer ma position sans difficulté.
Contre l'avis du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
Amendements identiques CE900 de M. Julien Dive et CE2111 de M. Frédéric Descrozaille
La commission adopte les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements CE2935 de M. Benoit Mournet, CE1702 de M. Aurélien Lopez-Liguori, CE2236 de Mme Mathilde Hignet et CE3061 de Mme Marie Pochon.
Amendement CE50 de M. Julien Dive
Cette demande de rapport reprend l'une des préconisations du rapport de la mission d'information relative à l'autonomie alimentaire de la France et au sein de ses territoires, menée par Pascale Boyer et moi-même au cours de la précédente législature. À l'heure où chacun débat de la surtransposition et de la nécessité de toiletter certaines règles, il importe de dresser un bilan des écarts normatifs observés entre la France et l'Europe.
Ne surchargeons pas les services de l'État, qui sont déjà bien occupés à simplifier les choses. Avis défavorable.
Disposer d'un état des lieux des surtranspositions serait tout de même la moindre des choses. En tant que rapporteur de la commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté alimentaire de la France, j'avais d'ailleurs demandé officiellement au ministre, il y a maintenant plus d'un mois, de me communiquer ce document, s'il existe. Je réitère cette demande, qui devient maintenant assez pressante.
Mes services vérifieront dans quels délais nous pourrons y répondre.
La commission rejette l'amendement.
Titre
Amendement CE1228 de M. Vincent Descoeur
Dans la mesure où on ne saurait assurer la souveraineté alimentaire sans se soucier des facteurs de production, il nous paraît judicieux de parler de « souveraineté alimentaire et agricole ». Avis favorable.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CE2984 de Mme Marie Pochon
Je ne crois pas que le texte adopté par la commission permettra d'atteindre les objectifs d'installation et de transmission que j'entendais promouvoir en modifiant le titre du projet de loi. Je retire donc mon amendement.
L'amendement est retiré.
Malgré tout le temps que vous y avez consacré, le projet de loi n'a pas été sérieusement rédigé ; la preuve en est que vous nous promettez d'en réécrire des articles entiers, et pas des moindres. La commission sera-t-elle chargée d'évaluer ces nouveaux articles ?
Nous nous joignons à la demande du groupe Socialistes d'obtenir des éléments complémentaires concernant le groupement foncier agricole d'épargnants (GFAE), si ce dernier est conservé.
La définition de la souveraineté alimentaire figurant à l'article 1er ne nous paraît pas acceptable. Nous nous opposons au diagnostic prévu à l'article 9, et regrettons que l'article 10 apporte de la complexité.
En définitive, le projet de loi n'introduit que des dispositions mineures, dont le Conseil d'État doute même qu'elles soient opérationnelles ; ce n'est pas ainsi que nous redresserons l'agriculture française. En l'état, le texte mériterait que nous le rejetions. Nous avons toutefois remporté une victoire avec le retrait du groupement foncier agricole d'investissement (GFAI). Si nous votions contre le projet de loi, cette disposition risquerait d'être réintroduite dans l'hémicycle ; c'est pourquoi nous nous abstiendrons, en espérant que le texte sera sensiblement amélioré en séance.
Je tiens à remercier les rapporteurs et le ministre pour la préparation du projet de loi et le marathon que fut son examen en commission. Le texte avait certes été annoncé il y a deux ans, mais l'objectif de simplification s'y est invité entre-temps.
La version initiale a été passablement désossée : les articles 1er et 9 sont à réécrire, et l'article 12 a été supprimé. Il faudra pourtant bien prévoir des dispositions relatives au portage du foncier.
En dépit de nos divergences, nous avons eu des débats de fond intéressants et respectueux. Nous voterons le texte en l'état, car il comporte des avancées par rapport à la version initiale, à laquelle nous étions opposés. La commission doit continuer à l'améliorer en vue de la séance : je suis convaincu que nous pourrons le tirer vers le haut.
Lorsque nous avons entamé l'examen du texte, j'ai indiqué que nous serions vigilants et exigeants, et que nous n'avions pas encore arrêté notre vote. L'une de nos lignes rouges reste bien présente : l'article 9. Nous continuerons de nous mobiliser au sujet du diagnostic des sols.
Je regrette que plusieurs de nos amendements, ayant notamment trait à l'abrogation de la séparation entre le conseil et la vente, aient été jugés irrecevables au titre de l'article 45 de la Constitution, même s'ils semblaient faire l'objet d'un consensus.
Grâce au travail de Mme Blin, nous avons posé des jalons – encore insuffisants – en ce qui concerne le droit à l'erreur ; il faudra aller plus loin en séance. Enfin, plusieurs articles doivent être réécrits.
Nous attendions du texte qu'il mette fin aux stigmatisations qui touchent le monde agricole, qu'il simplifie la vie des agriculteurs, qu'il supprime certaines surtranspositions du droit européen et qu'il renforce la compétitivité de l'agriculture française. Ces enjeux sont partiellement abordés, voire pas du tout. Nous nous abstiendrons en commission.
Au vu du travail qui sera mené avant la séance, et des débats dans l'hémicycle, nous choisirons entre trois options : déposer une motion de rejet du texte ; déposer une motion de renvoi en commission – ce qui répondrait à la volonté de plusieurs rapporteurs, de députés et du ministre de réécrire certains articles ; laisser filer les débats en séance et prendre position in fine.
Nous restons circonspects, puisque l'article 1er est à réécrire, alors qu'il devait déterminer les grandes orientations.
S'agissant de la formation, l'objectif était de consacrer le niveau bac + 3 par un examen reconnu officiellement, une licence professionnelle. Écrivons-le clairement.
Le diagnostic modulaire doit être simplifié. Il doit s'agir d'un plan d'action stratégique permettant aux jeunes repreneurs de juger de la viabilité de leur projet économique, afin de les encourager et de les sécuriser.
Dès lors que nous voulons faciliter le financement des acquisitions et des mouvements de terres, nous devons aussi renforcer le volet foncier ; un outil existe déjà à cette fin, les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer). Renforçons leurs missions et consolidons les aspects relatifs à la spéculation et à la régulation. Soyons innovants et audacieux ; expérimentons une fusion des commissions départementales d'orientation de l'agriculture (CDOA) et des Safer. Nous sommes confrontés depuis quarante ans à l'agrandissement des exploitations ; ce phénomène doit cesser, pour que des jeunes puissent s'installer dans des conditions acceptables.
Pour ce qui est de la simplification et des contrôles, partons du principe que les agriculteurs sont des professionnels honnêtes ; traitons-les avec confiance plutôt qu'avec défiance et suspicion, comme c'est trop souvent le cas.
Nous voterons le texte à ce stade, mais je suis prêt à voter contre en séance s'il n'apporte pas des solutions concrètes pour l'installation des agriculteurs, la transmission des exploitations et l'avenir de l'agriculture française.
Au nom du groupe Démocrate, je tiens à saluer le travail du ministre, des agents du ministère, des rapporteurs et des administrateurs, sans oublier les députés qui ont œuvré à l'élaboration de ce texte en faveur de l'agriculture. Même si nous empruntons parfois des chemins différents, nous partageons la même ambition : une agriculture française forte.
Le projet de loi comporte des avancées indéniables. En affirmant le caractère d'intérêt général majeur de l'agriculture – dans un article certes perfectible –, il envoie un signal fort aux agriculteurs. Soutenir l'enseignement agricole, mieux former les exploitants, accompagner l'installation, simplifier : ces orientations sont à saluer.
Je regrette que certains collègues aient opposé l'agriculture biologique – censée incarner le bien – à l'agriculture non biologique – censée incarner le mal. Cela a pu heurter les agriculteurs qui ont suivi nos débats. Il n'y a pas lieu d'opposer les modèles.
J'espère que nous aurons des rendez-vous constructifs avant le débat en séance, pour consolider ce texte utile et introduire des outils permettant de garantir notre souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations.
Après quatre jours de débats sur un projet de loi attendu depuis de nombreux mois, plusieurs fois reporté, nous restons dubitatifs. Le texte est mal écrit. L'article 1er doit être retravaillé, car il n'offre pas une vision claire et stratégique de la souveraineté alimentaire et agricole.
L'article 9 appelle de nombreuses clarifications : le diagnostic modulaire sera-t-il obligatoire ? Quelle incidence aura-t-il sur les aides ?
Malgré tout, certains amendements intéressants ont été adoptés : des objectifs chiffrés ont été définis en matière de formation ; l'agroécologie et l'agriculture biologique seront promues. Nous déplorons toutefois que nombre de nos amendements, touchant en particulier à la fiscalité, aient été jugés irrecevables. L'appréciation de la recevabilité semble être modulable, en fonction des groupes qui déposent les amendements… Il est regrettable que les déclinaisons territoriales et ultramarines, auxquelles le groupe LIOT est très attaché, n'aient pas été abordées : ma proposition d'expérimentation pour l'agriculture méditerranéenne, par exemple, a été jugée irrecevable.
Il faudrait également avancer sur les questions de calendrier ; certains délais nécessiteraient d'être adaptés en fonction des territoires.
La suppression du GFAI détermine notre vote : nous nous abstiendrons. Nous ne souhaitons pas qu'en cas de rejet en commission, le texte initial revienne en séance avec le GFAI. Notre abstention est aussi motivée par des carences criantes concernant le revenu – première revendication des agriculteurs –, le foncier et l'adaptation au changement climatique.
Nous étions déjà très déçus par la version initiale du projet de loi, et nous le restons : malgré les quelque 200 amendements déposés par le groupe LFI-NUPES, nous ne constatons guère d'amélioration, hormis la suppression du GFAI.
Deux visions du modèle agricole se sont opposées. Derrière un bel affichage, la vision défendue par le texte ne change rien à la situation actuelle. Vous avez affirmé votre volonté de soutenir la production, monsieur le ministre ; mais dans un marché mondialisé, les concurrences déloyales persisteront tant que les accords de libre-échange ne seront pas remis en cause. Notre vision, quant à elle, appelle à travailler sur le revenu des agriculteurs, le foncier – mais pas avec des GFAI –, la protection de l'environnement, qui est l'outil de travail des agriculteurs, l'agriculture biologique et le partage de l'eau. Nous voterons contre ce texte, qui ne répond en rien à l'urgence de la situation.
Le groupe Socialistes a soumis des propositions et a voté les articles 2 à 11 : dix ans après la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, il nous semblait nécessaire de mettre à jour certains dispositifs. Peut-être restent-ils imparfaits, mais nous y avons apporté notre contribution.
Restent les articles 1er et 13, qui touchent à la régulation de la production et à la protection de l'environnement. Leur impréparation et leur ambiguïté nous ont empêchés de les adopter. Le travail doit être remis sur l'ouvrage en séance.
Nous voterons contre le texte, car, conformément au discours que nous tenons depuis le début, nous estimons qu'il omet une question essentielle : un accès au foncier garantissant le renouvellement des générations. Je le dis avec force, pour le groupe Socialistes, comme pour de nombreux collègues d'autres bords, sans justice foncière, il n'y aura ni renouvellement des générations, ni agroécologie, ni souveraineté alimentaire.
Comme je ne doute pas que vous reprendrez la funeste idée d'introduire la titrisation dans les marchés fonciers, monsieur le ministre, je vous soumets une proposition qui pourrait changer la donne en séance : puisque l'article 12 prévoyant la création de GFAI a été supprimé, travaillons sur une grande loi foncière.
Malgré des jours et des nuits de débats, le projet de loi reste indigent et inutile. Il invente des notions, comme l'intérêt général majeur, qui n'apportent rien aux agriculteurs. Il ne fixe aucun objectif chiffré en matière d'installation, n'assure aucune transparence sur les données utilisées, ne démontre pas l'efficacité des dispositifs et n'est accompagné d'aucun moyen de mise en œuvre. Sans compter qu'il ne propose rien dans le domaine foncier, hormis la mauvaise solution du GFAI, alors qu'il faudrait lutter contre l'agrandissement des exploitations et la concentration des terres. Le rejet du GFAI démontre que le texte ne suscite pas l'enthousiasme, même dans vos rangs.
Le texte sera presque entièrement réécrit avant la séance ; c'est la preuve de son impréparation. Il était pourtant attendu depuis deux ans par les députés et, surtout, par les agriculteurs – leur mobilisation en a témoigné.
Ce texte est véritablement dangereux, car il ne s'appuie sur aucune donnée pour justifier de reculs en matière de droit pénal environnemental. C'est inquiétant à l'heure où sévissent la crise climatique et l'effondrement du vivant.
Enfin, le projet de loi ne répond pas aux enjeux agricoles qu'ont clairement exprimés les agriculteurs lors des mobilisations : revenu, lutte contre la concurrence déloyale, régulation du foncier et accompagnement de la transition écologique. Un modèle agricole est en train d'en tuer un autre. Nous voterons contre.
La commission adopte l'ensemble du projet de loi modifié.
Je vous remercie pour les débats que nous avons eus ; mes remerciements vont particulièrement au président de la commission, qui a conduit les échanges avec souplesse et efficacité, et aux fonctionnaires de l'Assemblée.
Le texte avait pour vocation première de favoriser la transmission et l'installation ; les articles correspondants sont d'ailleurs ceux qui ont le plus fait consensus. Après la crise, nous y avons ajouté des chapitres relatifs à la souveraineté et à la simplification, qui soulèvent davantage d'interrogations ; c'est bien normal, puisqu'ils sont apparus plus récemment.
Vous ne pouvez pas nous reprocher, à la fois, de ne pas prendre en considération vos amendements et de vouloir réécrire le texte pour trouver un terrain d'entente, notamment en ce qui concerne la souveraineté. Il est important que l'article 1er suscite un large consensus : le monde agricole a besoin que nous affirmions d'une même voix le sens que nous donnons à son travail et ce qui est attendu de lui. C'est l'objet de l'article 1er.
D'autres sujets doivent être retravaillés – c'est l'utilité de l'examen en commission. La mise en échec du GFAI témoigne d'un désir assez unanime d'introduire des éléments relatifs au foncier, au-delà de la sécurisation du GFAE.
Enfin, le texte comporte des dispositions habilitant le Gouvernement à adopter par ordonnance des mesures du domaine de la loi : il n'y a aucune surprise. Le délai de deux mois était très court pour rééchelonner l'échelle des peines sanctionnant les atteintes à l'environnement et pour réviser les règles applicables aux ICPE.
Malgré nos désaccords – voire, parfois, nos visions opposées –, nous avons eu des échanges intéressants. Ma vision, la voici : que le monde agricole retrouve du sens et comprenne ce que nous attendons de lui ; que nous lui donnions les moyens de passer le cap du renouvellement des générations ; que la loi introduise de la simplification.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du samedi 4 mai 2024 à 9 h 30
Présents. – M. Antoine Armand, Mme Anne-Laure Babault, Mme Nathalie Bassire, Mme Lisa Belluco, M. Karim Ben Cheikh, M. Thierry Benoit, Mme Anne-Laure Blin, Mme Françoise Buffet, M. Charles de Courson, M. Frédéric Descrozaille, M. Julien Dive, M. Francis Dubois, M. Frédéric Falcon, M. Grégoire de Fournas, M. Éric Girardin, Mme Florence Goulet, Mme Mathilde Hignet, M. Alexis Izard, Mme Chantal Jourdan, M. Luc Lamirault, M. Pascal Lavergne, Mme Nicole Le Peih, M. Pascal Lecamp, M. Aurélien Lopez-Liguori, Mme Sandra Marsaud, M. Éric Martineau, M. Nicolas Meizonnet, Mme Manon Meunier, M. Yannick Monnet, Mme Louise Morel, M. Philippe Naillet, Mme Anne-Laurence Petel, Mme Marie Pochon, M. Dominique Potier, M. Charles Rodwell, Mme Danielle Simonnet, M. David Taupiac, Mme Mélanie Thomin, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé
Excusés. – Mme Hélène Laporte, M. Jiovanny William