La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Nous sommes réunis pour la seconde lecture de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) et, depuis que je me suis exprimé devant vous, le 24 octobre, peu de choses ont changé.
Ces dernières semaines, nombre de responsables hospitaliers, de représentants des fédérations, de parlementaires et d'élus locaux se sont inquiétés de l'impact d'une inflation marquée sur les établissements de santé en particulier.
D'ores et déjà, nous en tenons compte en rehaussant de plus de 8 milliards d'euros l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) en 2023 ; nous continuerons à y être attentifs, je vous l'assure. Cela signifie que jusqu'au dernier jour de l'année, à l'heure du bilan global de l'activité des établissements et des effets de l'inflation sur ces derniers, nous n'en laisserons aucun dans l'impasse.
Il en sera de même en 2024. En dépit des affirmations contraires répétées sur certains bancs, je rappelle que l'Ondam augmentera de 3,2 %, hors dépenses liées à la crise sanitaire, soit un chiffre supérieur à l'inflation prévisionnelle – il est difficile de faire mentir les chiffres – représentant 8 milliards d'euros supplémentaires pour notre assurance maladie : autant de nouveaux moyens pour mieux rémunérer celles et ceux qui nous soignent chaque jour et pour tenir compte de la hausse des dépenses de soins de ville, sans nous exonérer pour autant d'une réflexion globale à ce sujet.
Comme vous le savez, cette réflexion est en cours, l'assurance maladie ayant repris formellement, la semaine dernière, les discussions sur la négociation conventionnelle avec les médecins libéraux. Ces prochains jours, je signerai la lettre de cadrage relative à l'avenant à la convention nationale des pharmaciens titulaires d'officine.
Nous prévoyons ensuite de nouveaux moyens pour continuer à investir dans notre système de santé. Le projet de loi a d'ailleurs été enrichi par le Parlement, j'y reviendrai. L'augmentation des moyens doit toutefois rester soutenable. Les caisses de la sécurité sociale – qui n'appartient pas à l'État mais aux assurés et aux partenaires sociaux qui la gèrent – ne sont pas un puits sans fond. Le système tient grâce aux seules cotisations des Françaises et des Français et n'a pour seul objet que de répondre à leurs besoins. Par nature, il suppose un équilibre. Les besoins changent : certains augmentent, et nous en tenons compte, d'autres nécessitent des réponses adaptées.
Le Gouvernement souhaite réaliser des économies, non pas pour le principe, mais au service de l'efficience. Tel est le sens des nouvelles mesures que nous proposons pour maîtriser la dépense publique : garantir aux assurés sociaux que les moyens mis à disposition répondent adéquatement à leurs attentes. Les négociations entamées avec les médecins vont dans le même sens, celui de la pertinence des soins, qui suppose aussi une maîtrise des dépenses médicales. L'effort d'économies demandé est important, mais pas sans précédent : par rapport au tendanciel de dépense, la trajectoire diminuera de 3,5 milliards en 2024.
Cet objectif d'équilibre ne sera pas atteint grâce à des mesures cachées…
…ni par le biais de mesures culpabilisantes, mais grâce à des mesures discutées et documentées. Dans l'hypothèse où il s'avérait nécessaire de faire évoluer les textes réglementaires consacrés aux niveaux des franchises, le Gouvernement se ralliera d'ailleurs à la proposition, formulée par l'ensemble des groupes au Sénat, de revenir débattre de cette idée devant les commissions compétentes au fond pour qu'elles puissent donner leur avis.
Nous atteindrons également cet objectif d'équilibre grâce à des mesures qui réclament la mobilisation de tous et dont les deux maîtres mots sont la pertinence et la responsabilisation. Les partenaires sociaux en témoignent, qui se sont engagés à discuter à nouveau d'un sujet très sensible dans cet hémicycle : l'Agirc-Arrco. La Première ministre l'a répété à plusieurs reprises, le Gouvernement fait confiance aux partenaires sociaux pour faire preuve de responsabilité et trouver un accord ; il soutiendra ainsi des amendements rédactionnels pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté sur ce point.
En fixant les montants et les grandes orientations des moyens de la sécurité sociale pour l'année 2024, le PLFSS est un vecteur essentiel de l'action publique en matière de santé et de protection sociale. Mais il ne sera pas le seul. Parce qu'il faut replacer le budget dans le contexte macroéconomique, d'autres leviers d'action assureront la cohérence de la stratégie d'intervention de l'État.
La convention médicale est l'un de ces leviers. La reprise de la négociation conventionnelle avec les médecins libéraux suivra quatre axes principaux : améliorer l'accès aux soins ; soutenir l'attractivité de la médecine libérale ; renforcer la qualité et la pertinence des soins ; refondre et simplifier les modes de rémunération.
Par ailleurs, se tiendra bientôt la réunion de la commission mixte paritaire (CMP) sur la proposition de loi, adoptée au Sénat, visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels. Ce texte aura, lui aussi, des effets concrets sur l'organisation de l'offre de soins partout en France. Elle s'appuiera sur l'augmentation structurelle des effectifs médicaux et du personnel soignant – permise par la suppression du numerus clausus – et sur celle du nombre de places en formations paramédicales, grâce aux efforts consentis en partenariat total avec les régions.
L'offre de soins bénéficiera également des 19 milliards d'investissement du Ségur de la santé alloués à la construction ou à la rénovation des établissements de santé.
Franchement, mieux vaudrait passer tout de suite au 49.3 plutôt que de devoir écouter ça !
On le constate déjà sur le terrain : j'inaugurais ainsi en début de semaine au Havre deux magnifiques bâtiments de psychiatrie et de pédopsychiatrie qui renforcent l'attractivité globale de l'hôpital de la ville.
Vos très nombreux amendements, mesdames et messieurs les députés, ont permis de révéler plusieurs préoccupations importantes.
Je me réjouis qu'un certain nombre d'entre eux aient pu être adoptés, issus du Sénat comme de l'Assemblée, venant de la majorité comme des oppositions.
Ils permettent d'enrichir utilement le texte. Je pense à la campagne de vaccination contre les infections liées au papillomavirus, dont le champ a été étendu aux établissements accueillant des enfants en situation de handicap, au dépistage précoce des situations de handicap induites par la contraction du cytomégalovirus et, bien sûr, au lancement de nouveaux parcours de soins. Je signale d'ailleurs à cette assemblée, qui s'était largement intéressée à la question, la création, au Sénat, d'un parcours destiné à accompagner les personnes traitées pour un cancer, intégrant des séances d'activité physique adaptées.
Je pense également à la lutte contre les addictions. Je présenterai bientôt les détails du nouveau plan de lutte contre le tabac.
Ici comme au Sénat a également été soulevé le problème des rendez-vous non honorés chez le médecin. Si, comme je le crois, le PLFSS n'est pas le vecteur adéquat pour agir spécifiquement contre ce problème sensible, je m'engage à le traiter, en lien avec tous les parlementaires qui ont travaillé sur le sujet, en fonction des avancées de la négociation conventionnelle.
Je ne peux pas être exhaustif, je vais donc conclure…
…en mentionnant, tout de même, les mesures vouées à compléter notre arsenal de lutte contre les pénuries de médicaments – un enjeu décisif, en particulier durant la période hivernale – qui traduisent l'engagement soutenu du Gouvernement pour assurer le suivi, au quotidien, des stocks des médicaments les plus cruciaux. À ma demande expresse, une charte d'engagement réciproque vient d'être établie par l'ensemble des acteurs de la chaîne du médicament pour mieux réguler le système de distribution, et permettre aux assurés sociaux d'accéder facilement à ces médicaments lorsque surviennent des tensions d'approvisionnement. En parallèle, avec mon collègue Roland Lescure, nous présenterons une feuille de route actualisée de lutte contre les pénuries.
Ces actions, tout comme les dispositions du PLFSS, répondent aux attentes des Français qui aspirent à un système de protection sociale équitable, ambitieux et pérenne, sans se voiler la face quant aux difficultés. De nombreux défis restent à relever. Ils ne pourront l'être que collectivement, afin de mieux appréhender la financiarisation du système de santé, renforcer la politique en matière de santé mentale et de santé des femmes, ou encore accentuer la lutte contre les fraudes. Avec réalisme et détermination, bloc après bloc, nous poursuivons la rénovation de notre système de santé.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.
Le ministère des solidarités et des familles est au cœur des besoins essentiels de nos concitoyens. Il les accompagne dans leur vie quotidienne, à tous les âges de leur vie, à chaque étape de leur existence.
Après l'examen du texte au Sénat, je tenais à rappeler devant vous, lors de cette nouvelle lecture, les grands axes prioritaires que comporte ce PLFSS pour toutes les familles.
Notre ambition est claire : aider l'ensemble des familles et s'en donner les moyens, dans un contexte marqué par l'accentuation de la baisse de la natalité au cours des dix dernières années. Je crois profondément à la capacité de nos politiques familiales de réduire l'écart entre le désir d'enfant et sa réalisation concrète. Rien ne doit empêcher les familles de se constituer sereinement.
Aider les familles, ce n'est pas seulement leur verser des prestations, aussi importantes soient-elles pour les soutenir ; c'est également leur donner des droits, les accompagner dans leurs choix et dans l'organisation de leur vie.
Les moyens de la branche famille augmenteront de 2 milliards d'euros en 2024, notamment pour mener le chantier du service public de la petite enfance, définitivement adopté par le Parlement il y a deux semaines – je salue les rapporteurs du texte à l'Assemblée, Paul Christophe et Christine Le Nabour. Nous accompagnerons les communes et les intercommunalités dans son déploiement : 6 milliards d'euros relevant de la sécurité sociale seront consacrés à ce service public jusqu'en 2027, afin d'augmenter le nombre de solutions d'accueil financées, d'investir et, surtout, de revaloriser la rémunération des professionnels de la petite enfance.
Toujours dans l'optique d'offrir davantage de choix aux familles, la réforme du complément de libre choix du mode de garde (CMG) entrera en vigueur en 2025. Son bénéfice sera étendu à toutes les familles monoparentales jusqu'aux 11 ans révolus de l'enfant. Il sera encore renforcé en 2025 pour que le reste à charge soit enfin le même pour toutes les familles, qu'elles choisissent de faire garder leur enfant en crèche ou par une assistante maternelle.
À cela s'ajoutera, comme je l'ai annoncé, l'institution, dès 2025, d'un nouveau droit : un congé familial, mieux rémunéré, après les congés maternité et paternité. Il donnera enfin à tous les parents qui le souhaitent la possibilité de s'arrêter pour s'occuper de leur jeune enfant dans ses premiers mois.
Par ailleurs, l'autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap est, plus que jamais, au cœur de notre engagement. Ainsi, l'objectif global de dépenses, qui finance nos établissements et services, augmentera de 4 % en 2024, soit davantage que les 2,5 % d'inflation anticipée. Cette hausse des moyens traduit les engagements que nous avons pris envers les familles et les professionnels du secteur, parmi lesquels le développement de centres de ressources territoriaux pour accompagner le virage domiciliaire, le recrutement de 50 000 professionnels soignants en Ehpad, la fixation d'un tarif plancher pour soutenir les aides à domicile ou encore le financement de deux heures de convivialité pour lutter contre l'isolement social.
Mais nous allons plus loin, puisque la proposition de loi « bien vieillir », dont l'examen se poursuit ce soir, comporte des éléments de réponse concrets, qu'il s'agisse de la carte professionnelle pour les aides à domicile, du fonds de soutien à la mobilité ou de la lutte contre les maltraitances grâce au droit de visite des familles en Ehpad. Je salue, là aussi, le travail des rapporteures du texte, Laurence Cristol et Annie Vidal.
Comme l'a confirmé la Première ministre hier, une loi de programmation relative au grand âge verra prochainement le jour. Le projet de loi sera déposé avant l'été et soumis au vote du Parlement avant la fin de l'année 2024. Nous le construirons ensemble : Gouvernement, parlementaires – dans un cadre transpartisan associant tous les groupes politiques qui le souhaiteront – et élus locaux, de manière à répondre ensemble à cette légitime demande des parlementaires et, surtout, des Français.
Cette loi de programmation nous permettra de nous poser trois questions cruciales : quels seront les nouveaux besoins liés au vieillissement de notre population à l'horizon 2030 ? Comment les financer ? Selon quelle trajectoire ?
Je n'ignore évidemment rien des difficultés financières d'un trop grand nombre d'Ehpad et de services d'aide à domicile. Du reste, avec la Première ministre, nous avons débloqué, dès cet été, un fonds d'urgence de 100 milliards, pardon : 100 millions d'euros.
Sourires.
Les commissions départementales créées pour assurer le suivi de son déploiement ont toutes été installées avant fin septembre ; elles seront pérennisées et pourront mobiliser tous les leviers disponibles pour soutenir les établissements en difficulté.
Le PLFSS pour 2024 apporte une première réponse structurelle en offrant aux départements qui le souhaitent la possibilité de fusionner les sections soins et dépendance. Cette mesure importante en matière de financement sera expérimentée, une fois le PLFSS adopté, dans quelques départements pilotes. À la suite de la discussion au Sénat, et comme je m'y étais engagée, nous avons opté pour une véritable expérimentation dont le processus d'évaluation rigoureux nous permettra de nous assurer que cette nouvelle possibilité fonctionne effectivement avant, le cas échéant, de la généraliser. J'ajoute que nous modifierons les modalités de l'expérimentation afin qu'un plus grand nombre de départements puissent s'y engager s'ils le souhaitent, comme l'a demandé notamment la rapporteure Caroline Janvier.
Je compte également sur la réforme des concours de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) pour mieux soutenir les départements dans leurs efforts et rendre véritablement lisible la politique publique que nous menons en matière d'autonomie. Cette réforme que nous coconstruisons avec les départements pour 2025 doit nous permettre de proposer une compensation de l'État à la hauteur, forte et lisible, à savoir – je m'y suis engagée – la prise en charge à hauteur de 50 % de toutes les dépenses nouvelles, allocation personnalisée d'autonomie (APA) et prestation de compensation du handicap (PCH) incluses, en particulier pour le virage domiciliaire.
Cette ambition, nous avons souhaité qu'elle commence à prendre forme dès l'année prochaine. Par un amendement adopté au Sénat, le PLFSS intègre ainsi en 2024 une enveloppe de 150 millions supplémentaires, qui s'ajoute à la progression des concours historiques, en ciblant mieux l'effort pour viser un taux de compensation de 40 % de l'APA par département.
Je souhaite que les moyens nouveaux bénéficient en priorité aux départements qui agissent le plus fortement en faveur du bien vieillir ; je pense notamment aux services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad).
Par ailleurs, le PLFSS pour 2024 nous permet, comme vous le savez, de tenir nos engagements concernant le handicap, notamment ceux qui ont été annoncés par le Président de la République lors de la dernière Conférence nationale du handicap. Je pense d'abord au déploiement de 50 000 nouvelles solutions pour les personnes en situation de handicap, d'abord – c'est la priorité que Fadila Khattabi et moi avons fixée – pour les adultes, c'est-à-dire les 10 000 personnes qui se trouvent encore, en application de l'amendement dit Creton, dans des établissements pour mineurs. Nous devons en finir avec cette situation : c'est une question de justice et de dignité.
N'oublions pas tous ceux qui sont à l'étranger, notamment en Belgique !
Je pense en effet également aux personnes qui ont parfois dû, hélas ! partir loin de notre pays.
Nous créons, en outre, un véritable service de repérage et d'orientation des situations de handicap chez les enfants dès le plus jeune âge – entre zéro et six ans –, qui doit nous permettre d'en finir avec les pertes de chance.
Nous facilitons, par ailleurs, le quotidien des personnes handicapées en améliorant leur pouvoir d'achat. Nous participons tous, je l'espère, aujourd'hui, au DuoDay. Nous savons donc que certaines personnes ont besoin d'un fauteuil roulant. Or, lors de l'achat de ce matériel, le reste à charge est considérable pour les familles, dont certaines sont contraintes d'organiser des cagnottes sur les réseaux sociaux. Dès 2024, elles n'auront plus à débourser un seul euro pour acheter un fauteuil adapté. C'est un progrès majeur !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Les progrès dans l'accompagnement des personnes âgées et des personnes en situation de handicap sont possibles grâce à la création de la cinquième branche relative à l'autonomie et à la part supplémentaire de 0,15 point de contribution sociale généralisée (CSG), soit 2,6 milliards d'euros, qui lui est dévolue à compter de l'an prochain. Nous consommons désormais plus de la moitié de ce surplus dès 2024 et la trajectoire de dépenses ambitieuse déjà prévue – nous parlons d'une augmentation de près de 30 % sur le quinquennat – l'utilisera intégralement.
Les réformes à venir des concours de la CNSA, l'adoption – je l'espère – de la proposition de loi « bien vieillir » et la future loi de programmation sur le grand âge devront bien entendu intégrer des évolutions majeures.
Enfin, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 s'est enrichi, au cours de son examen, de plusieurs amendements émanant tant du Sénat que de l'Assemblée nationale. Je pense à nos territoires ultramarins et à la création d'une véritable maison territoriale pour les personnes handicapées à Saint-Martin, qui permettra d'assurer, enfin, au territoire le soutien plein et entier de la CNSA, un soutien notamment financier, qui n'était pas possible jusqu'à présent.
Je pense également à nos aidants. Je salue, à cet égard, le travail de Paul Christophe, Annie Vidal, Thibault Bazin et Servane Hugues. Nous rendrons possible le renouvellement des droits à l'allocation journalière du proche aidant pour chaque nouvelle personne aidée, car on peut être aidant plusieurs fois dans sa vie ou en même temps au bénéfice de plusieurs personnes. Nous prolongerons également en 2024 l'expérimentation du dispositif de relais au domicile des personnes, en attendant – en tout cas, je le souhaite – la généralisation de ce dispositif.
La nouvelle méthode de coconstruction doit s'amplifier au cours de l'année 2024, avec les associations d'élus et les départements s'agissant de la réforme des fonds de concours, et avec vous tous s'agissant du projet de loi de programmation relatif au grand âge.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
La parole est à Mme Stéphanie Rist, rapporteure générale de la commission des affaires sociales.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 comptait initialement 49 articles. Après une lecture dans chacune des deux assemblées, 115 articles restent en discussion, 31 ayant été adoptés conformes. Cinq articles retenus par le Gouvernement à l'Assemblée nationale ont été supprimés et 52 ont été ajoutés par le Sénat.
Au-delà des statistiques, il se trouve que, si nous pouvons nous féliciter que les deux assemblées se soient rejointes sur de nombreux sujets, les divergences entre les deux textes adoptés sont, cette année encore, assez nombreuses.
Parmi les éléments de convergence, je voudrais d'abord saluer, comme je l'avais fait l'année dernière, la responsabilité dont le Sénat a fait preuve en rétablissant un certain nombre d'articles de la première partie indispensables au respect de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. D'autres dispositions témoignent du fait que l'Assemblée et le Sénat trouvent régulièrement des terrains d'entente, y compris sur les textes budgétaires. J'en évoquerai brièvement quelques-uns.
S'agissant des recettes et de l'équilibre général, le Sénat a complété l'article adopté à l'initiative de nos collègues Jean-René Cazeneuve et Marc Ferracci, afin d'encadrer le gel des bandeaux famille et maladie, qui rapportera, dès 2024, 600 millions à la sécurité sociale.
S'agissant de la santé et de la prévention, je me réjouis de l'adoption conforme des articles 18 et 19, qui portent respectivement sur la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans et le remboursement, sous certaines conditions, des protections menstruelles réutilisables pour les femmes de moins de 26 ans et les bénéficiaires de la complémentaire de santé solidaire, de l'article relatif au dépistage systématique du cytomégalovirus chez la femme enceinte – qui me tient à cœur – et de l'article 24 portant sur la régulation de la permanence des soins dentaires.
S'agissant de l'autonomie, je note les modifications apportées à l'article 37 et la transformation de la fusion des sections, optionnelle, en une expérimentation. Je relève également l'insertion d'un article prévoyant le versement par la CNSA d'un complément financier de 150 millions d'euros aux départements au titre des concours d'APA. Par ailleurs, en ce jour de DuoDay où Pauline, membre du conseil municipal des enfants et des jeunes de Saint-Cyr-en-Val m'accompagne – je la salue, car elle est ici présente –, je tiens à réaffirmer notre engagement en faveur de l'autonomie et des personnes en situation de handicap dont atteste le PLFSS pour 2024.
Ainsi, je me réjouis de la création d'un service de repérage et d'intervention précoce pour les enfants de moins de 6 ans présentant des troubles du développement ou encore de la prise en charge à 100 % du coût des fauteuils roulants, qu'ils soient manuels ou électriques. Ces mesures témoignent de l'engagement de notre majorité en faveur de la prévention.
S'agissant de la branche vieillesse, je me réjouis que le Sénat ait complété le texte, dans le prolongement des travaux des députés, pour tirer certaines conséquences de la réforme des retraites d'avril dernier, notamment en ce qui concerne la surcote parentale et la prise en compte des trimestres validés en tant que parent au foyer ou proche aidant dans le calcul des minima de pension.
Ces points d'accord, réels et importants, ne suffisent cependant pas à masquer des divergences sur des sujets pourtant essentiels, divergences sur lesquelles notre commission est revenue.
S'agissant des recettes et de l'équilibre général, les sénateurs ont supprimé l'article 6, qui prévoyait notamment la mise en place d'un précompte des cotisations dues par les utilisateurs de plateformes numériques. Cette mesure de simplification devrait pourtant nous permettre de sécuriser le recouvrement de ces cotisations, qui font l'objet d'importantes sous-déclarations, à l'origine de 175 millions d'euros de cotisations éludées par la sécurité sociale chaque année. Il s'agit également d'une mesure de progrès pour les microentrepreneurs qui utilisent ces plateformes, car la sous-déclaration des cotisations minore l'accès à certains droits sociaux, en particulier en matière de retraite.
À l'article 9, les sénateurs ont supprimé l'accroche légale permettant à l'Agirc-Arrco, dans un cadre conventionnel, de tirer les conséquences financières de la fermeture des régimes spéciaux, empêchant ainsi de récupérer les bénéfices de la réforme des retraites.
À l'article 10, le Sénat a adopté un transfert de taxe sur les salaires de la branche maladie vers la branche famille pour un montant de 2 milliards d'euros, correspondant notamment au transfert à la branche famille du financement des indemnités journalières versées pendant le congé maternité, adopté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. C'est la raison pour laquelle la commission a proposé le rétablissement de la version adoptée à l'Assemblée nationale tout en affectant à la branche vieillesse les économies liées au gel du bandeau famille, à hauteur de 100 millions d'euros pour l'année 2024.
Les sénateurs ont par ailleurs supprimé la possibilité pour l'État de récupérer une partie des sommes versées en compensation des allégements généraux à l'Unedic. La version adoptée par le Sénat ampute ainsi chaque année le budget de l'État d'un montant compris entre 2 et 3,5 milliards qui, je le rappelle, doit permettre le renforcement des politiques de l'emploi et donc, à terme, une augmentation des ressources de la sécurité sociale. Cette possibilité intervient dans un contexte où l'assurance chômage connaît des excédents structurels liés aux réformes menées par notre majorité et le Gouvernement.
Je déplore également la suppression de l'article 16 portant approbation du rapport annexé, qui présente la trajectoire financière des régimes de base et l'Ondam pour les quatre années à venir. En responsabilité, la commission a rétabli l'article 43 relatif à l'Ondam pour 2024, fixé à 254,9 milliards.
Je rappelle que l'Ondam est en hausse de 3,2 % par rapport à l'objectif rectifié pour 2023, hors dépenses de crise. Cela représente, à champ constant, une augmentation de 8 milliards d'euros par rapport à 2023, et de plus de 54 milliards d'euros par rapport à 2019 !
En ce qui concerne la santé et la prévention, le Sénat a voulu reporter à 2028, après une phase expérimentale, l'application de la réforme du financement des activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), pourtant primordiale car elle permettra d'assurer un financement plus juste et plus adapté aux hôpitaux – les maternités en particulier.
L'article 20 sur les rendez-vous de prévention – dont nous souhaitons l'organisation la plus rapide possible – a été rendu plus complexe.
Je ne partage pas non plus plusieurs des modifications proposées à l'article 27 sur la lutte contre les arrêts de travail injustifiés et, à l'article 28, sur l'encadrement de la téléconsultation.
Pour ce qui est de la branche accidents du travail-maladies professionnelles, je ne peux que m'opposer à la réduction à 1 milliard d'euros du montant, fixé à 1,2 milliard, du transfert vers la branche maladie au titre de la sous-déclaration des AT-MP.
En conclusion, je tiens à saluer le travail de la commission des affaires sociales qui est revenue à la substance du texte retenu par le Gouvernement en première lecture, tout en gardant les mesures importantes votées par le Sénat. Je remercie par ailleurs les administrateurs de l'Assemblée ainsi que nos collaborateurs qui ont réussi à travailler sur un très grand nombre d'amendements en un temps réduit. Je forme désormais le vœu que l'Assemblée, en responsabilité, garde l'esprit de cohérence et d'équilibre qui a présidé à nos travaux hier en commission.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Permettez-moi, en votre nom à tous, de saluer l'ensemble des participants au DuoDay présents dans les tribunes.
Applaudissements sur tous les bancs.
J'ai reçu de Mme Mathilde Panot et des membres du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à Mme Élise Leboucher.
Nous nous retrouvons une nouvelle fois dans cette situation : vous faites de mauvaises lois, personne n'en veut, vous passez par-dessus la représentation nationale et un Insoumis vient vous rappeler à l'ordre. J'y vois une sorte d'acte manqué. Je crois qu'au fond vous voulez donner à chaque député insoumis la chance de venir se présenter à cette tribune pour vous expliquer en quoi vos choix sont mauvais ; et je vous comprends car nous avons de très bons arguments.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Au nom du groupe insoumis, je suis chargée de vous dire : « stop ». Nous ne souhaitons pas alimenter une relation toxique avec la Macronie.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Et nous jugeons qu'il y a d'autres façons de faire connaissance : laisser débattre cette assemblée serait un moyen opportun. Vous pourriez aussi venir à l'une des réunions publiques que nous tenons dans l'ensemble du territoire.
Murmures sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
J'en tenais encore une hier soir, dans la Sarthe, avec mon camarade Damien Maudet, sur la santé. Nous avons abordé les problèmes du quotidien – que les citoyens présents comprenaient bien mieux que vous. Voilà qui me permet, au passage, de renouveler ici, à l'intention de M. le ministre de la santé et de la prévention, mon invitation à venir constater sur place les résultats de vos choix, dont vous savez qu'ils ne règlent rien, bien au contraire.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Les 49.3 en série, en plus d'être la preuve que vous êtes minoritaires ici comme dans le pays, sont la marque de votre mépris. Il n'y a rien que vous considérez moins que la souffrance engendrée par vos choix. Vous êtes incapables de vous la représenter autrement que sous la forme d'un tableur Excel ou d'un Ondam dévoyé. Or cette souffrance est le quotidien de mes anciens collègues – car, voyez-vous, avant d'être députée, je suis une soignante.
Il y a plus d'un an, je me rendais, lors d'une de mes premières actions, sur mon ancien lieu de travail, l'établissement public de santé mentale (EPSM) de la Sarthe. Une collègue me disait alors : « On n'est plus au pied du mur, il est déjà tombé. » Depuis, dans ce même établissement, quatre-vingt-cinq lits d'hospitalisation ont fermé au cours de l'été 2022, puis quarante-deux lits et trois services l'été dernier. Les soignants me disent : « À chaque annonce de l'agence régionale de santé (ARS), à chaque conseil d'administration, nous angoissons de voir nos conditions de travail se dégrader un peu plus et, derrière, de devoir mal prendre en charge les patients. Jusqu'à quand allons-nous pouvoir tenir ? »
Cette angoisse, je la connais bien. L'angoisse, mais aussi la rage de voir des patients et des familles laissés sans solution alors que les équipes soignantes se démènent, s'épuisent, luttent pour préserver ce qui fait la vocation de ce métier : le soin et le respect de la dignité humaine.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Et c'est au nom de cette angoisse, de cette rage, de cette lutte, celle de mes collègues de l'EPSM, de tous les soignants, des patients et des familles que je vous appelle, chers collègues, à voter contre ce budget.
L'année 1996 est celle de la création des lois de financement de la sécurité sociale. En 2023, pour la première fois en vingt-sept ans, le texte a été rejeté en commission des affaires sociales.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Rendez-vous compte de l'ampleur de l'échec : pour la première fois ce texte n'a été validé par personne ! Vous continuez de contourner la représentation nationale, les élus du peuple, par vos 49.3 que vos députés continuent d'applaudir. Soyons donc logiques et votons contre ce budget.
Mais au-delà de la logique et de la cohérence, je vous appelle à revenir à la raison, à écouter les soignants, les fédérations hospitalières, les syndicats, les associations, les patients, les élus locaux, la France entière, quand ils vous disent : ce budget, nous n'en voulons pas. Nous n'en voulons pas car il ne fait rien pour sauver un système au bord du gouffre. Pire, il promet de l'achever. « Quoi qu'il en coûte », qu'importe que cela se fasse au prix d'un énième 49.3, au prix de la souffrance des travailleuses et des travailleurs, au prix des droits les plus fondamentaux.
Plus les besoins de santé augmentent, plus vous resserrez l'étau et contribuez à l'asphyxie budgétaire. Depuis 2010, le nombre de personnes souffrant d'une affection de longue durée (ALD) a augmenté de 34 %. À l'heure où la population vieillit, nos aînés ont besoin d'un système de sécurité sociale et de santé fort pour se voir garantir un niveau de vie digne et préserver leur autonomie. Or, en 2023, les soignantes en Ehpad – celles de ma circonscription étaient en grève la semaine dernière – travaillent dans des conditions qui portent atteinte à la dignité des personnes : une douche tous les quinze jours, pas le temps de discuter avec les résidents, de les rassurer. Elles parlent de travail d'abattage, qui les épuise et les met à mal psychologiquement.
Face à cette situation, le Gouvernement rogne chaque année un peu plus sur les dépenses. Chaque année, au Parlement, c'est la même chose : le Gouvernement prévoit un objectif de dépenses totalement insuffisant, la pénurie devient un mode de fonctionnement et des rallonges, elles-mêmes insuffisantes, sont adoptées. Cette année n'échappe pas à la règle : un Ondam pour 2024 dont l'augmentation est largement inférieure à l'inflation, à la hausse des charges médicales, hôtelières et générales, et qui aggravera donc encore plus l'endettement des hôpitaux. Qui paie le prix de cette asphyxie budgétaire ? Les soignants et les patients.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous vivons une crise de la démographie médicale. Ce problème est connu de longue date et pourtant le Gouvernement n'a supprimé que tardivement le numerus clausus, sans pour autant permettre d'accueillir plus d'étudiants à l'université et sans démocratiser les études de santé. Malgré la proposition de loi Valletoux, aucune mesure forte n'a été prise pour mieux répartir les médecins sur le territoire. C'est la Macronie, main dans la main avec le groupe RN, qui a refusé l'amendement transpartisan visant à réguler l'installation des médecins.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le choc d'attractivité promis par Mme Borne se fait toujours attendre. Les revalorisations salariales sur les heures de nuit et le week-end ne suffisent pas à compenser les années de sous-investissement ni les conditions de travail catastrophiques. Près d'une structure d'urgence a fermé au moins une fois au cours de l'été 2023. Dans un sondage Elabe publié début novembre, près d'un Français sur deux déclare avoir un accès compliqué, long ou partiel aux services de soin. Une personne sur dix déclare n'y avoir aucun accès. Et cela mène à des situations catastrophiques, voire à des drames que nous pourrions et devrions éviter.
Je tiens à revenir sur l'une des grandes absentes de ce PLFSS : la psychiatrie. Chaque année, une personne sur cinq est touchée par un trouble psychique, soit 13 millions de personnes. Plus de 70 % des médecins généralistes reçoivent chaque semaine au moins un patient ou une patiente souffrant d'une dépression. Six élèves de primaire sur dix souffriraient potentiellement de troubles psychiques. Selon une enquête de la Fédération hospitalière de France (FHF), 58 % des établissements en psychiatrie ont vu leurs capacités diminuées.
Pourtant, faites le test, cherchez le mot « psychiatrie » dans le PLFSS, il n'y est mentionné qu'une seule fois, pêle-mêle avec d'autres spécialités.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Rien, donc, sur le financement de la psychiatrie, menacé par une tarification à l'activité (T2A) qui ne dit pas son nom. Rien sur le maillage, alors que de nombreux territoires manquent cruellement de psychiatres et de soignants, comme nous le constatons tous, chers collègues, dans nos circonscriptions. Rien non plus sur la formation des professionnels et la reconnaissance de leurs qualifications. Rien pour permettre l'accueil digne des patientes et des patients.
Alors, malgré leur engagement, beaucoup de soignants ne tiennent plus. Un système qui repose uniquement sur le sacrifice de ses travailleuses et de ses travailleurs est un système voué à l'échec. Monsieur le ministre, quand vous maltraitez les soignants avec vos coupes budgétaires, vous portez atteinte à la santé des patients et à notre santé à toutes et tous.
Mêmes mouvements.
Vous répétez sans cesse que nous n'avons pas d'autres choix. Pas d'autres choix que l'austérité, pas d'autre choix que la gestion par la pénurie. Pour Élisabeth Thatcher, il n'y a pas d'alternative.
Mais cette situation est le résultat de choix que vous ne voulez pas assumer. Vous décidez une énième fois de faire des cadeaux à l'industrie pharmaceutique, laquelle prévoit déjà d'augmenter de 10 % les prix de médicaments remboursés – comme l'amoxicilline. Votre vision de la santé est comptable et c'est encore et toujours les citoyens qui en paient le prix. Par un rare éclair de lucidité, vous avez certes renoncé à inclure dans le texte le doublement des franchises médicales ; mais avec vous, il faut toujours se méfier, car la mesure pourrait revenir par la petite porte – par la voie réglementaire.
Alors qu'un Français sur quatre a dû renoncer à se soigner pour des raisons financières, répondez-nous enfin, monsieur le ministre : renoncerez-vous définitivement à doubler le montant des franchises médicales ? Renoncerez-vous également à vos attaques incessantes contre les salariés ? Les risques psycho-sociaux explosent, ils représentent 22 % des arrêts maladie. Chaque année, seulement 30 000 pathologies psychiques sont reconnues et indemnisées sur les 110 000 qui devraient l'être. Pourtant, ce PLFSS est celui de la surveillance, du flicage des assurés en arrêt et des médecins prescripteurs, alors même que 25 % des arrêts maladie ne sont pas pris ou de façon partielle. Vos choix révèlent où vous placez vos priorités : les chiffres, les comptes, la rigueur plutôt que la santé, la solidarité, la dignité du peuple.
Devant vous, j'affirme, au nom du groupe La France insoumise, qu'une autre voie est possible. La maltraitance institutionnelle et l'enrichissement des grands capitalistes aux dépens des plus pauvres ne sont pas une fatalité.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous pouvons et nous devons gouverner à partir des besoins, investir pour l'hôpital, instaurer des ratios soignants-patients, mettre en place le pôle public du médicament, financer un service public de la dépendance, sauver d'urgence la psychiatrie.
Votre projet de loi n'est pas à la hauteur et comme la nature a horreur du vide, nous voyons fleurir des initiatives que je qualifierai de farfelues. Ainsi, la SNCF prévoit l'installation de 300 cabines de télémédecine dans des gares. Quand j'ai vu cette information, je me suis demandé si nous n'étions pas un 1er
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Revenons à quelque chose de plus sérieux. Selon UFC-Que choisir, 83 % des Français résideraient dans un désert médical. Près d'un quart des femmes n'ont pas accès à un gynécologue ne pratiquant pas le dépassement d'honoraires à moins de quarante-cinq minutes de chez elles, 30 % des enfants n'ont pas accès à un pédiatre. Le renoncement aux soins ne cesse d'augmenter et c'est le cas pour 37 % des Français au cours des quatre dernières années. Pour les plus aisés, accéder aux soins rapidement, moyennant espèces sonnantes et trébuchantes ; pour les plus pauvres, attendre, voire renoncer en espérant que ça aille mieux. Est-ce cela, votre vision ?
UFC-Que choisir dépose un recours devant le Conseil d'État contre le Gouvernement pour inaction face aux inégalités croissantes en matière d'accès aux soins. Mais j'imagine qu'après avoir déjà été condamnés pour inaction climatique, vous n'en aurez que faire.
Vous vous trompez, cette condamnation concerne le précédent président !
Alors, au-delà de défendre une motion de rejet, je suis venue exprimer l'émotion populaire, le rejet que votre politique d'austérité inspire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
…car, au fond, vous avez compris que l'austérité du Gouvernement n'est pas la seule option. Dans quelques minutes, la Première ministre, ou son hologramme Franck Riester, viendra à cette tribune et dégainera un énième 49.3. Je vous invite donc à voter pour cette motion de rejet.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES, dont la plupart des membres se lèvent.
Ni la clarté ni la transparence ne font manifestement partie de votre corpus.
Ce texte a été voté en commission des affaires sociales hier soir – peut-être étiez-vous ailleurs... Votre groupe, madame la députée, sauf quand il noue des alliances improbables,…
…n'a pas de majorité dans cette assemblée. Vous n'avez pas, madame la députée, le monopole de la santé, de la solidarité ou de la dignité.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Vous n'avez pas le monopole de la lutte contre la maltraitance et pour l'amélioration de la situation des patients.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je ne vous laisserai pas soutenir, madame la députée, malgré vos cris, qu'il n'y a rien pour les soignants dans ce PLFSS,…
…quand nous allons consacrer 8 milliards d'euros à l'augmentation de leurs salaires.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Oui, madame la députée, vous avez manifestement un problème avec les chiffres : 3,2 % d'augmentation de l'Ondam,…
Compte tenu de l'inflation, c'est plutôt vous qui avez un problème avec les chiffres !
…pour une prévision d'inflation de 2,5 %. Voilà qui donne une différence de 0,7 point.
Exclamations continues sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ces 8 milliards d'euros supplémentaires, c'est plus que le budget du ministère de la justice il y a deux ans.
J'ai l'impression, madame la députée, qu'il y a quelque chose que vous ne supportez pas,…
Monsieur Le Gall, s'il vous plaît, seul monsieur le ministre a la parole.
…c'est qu'à côté d'éléments qui, dans notre système de santé, sont d'une extrême fragilité, certes, il y ait aussi des points qui s'améliorent…
…parce que les collectivités locales, parce que le Gouvernement y mettent l'énergie nécessaire. Nous avons mené cette année la plus grande campagne de recrutement de personnels paramédicaux depuis dix ans.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur de nombreux bancs du groupe Dem.
Je suis malheureux de voir à quel point je vous fais de la peine en vous donnant cette information.
Enfin, la clarté et la transparence. Des questions ont été posées à propos de l'Agirc-Arrco, qui ne relève pas de mes attributions ministérielles. Nous soutiendrons le sous-amendement présenté par M. Neuder
Mme Nathalie Oziol s'exclame
sur l'amendement adopté en commission pour compléter et préciser l'article 9, afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur la confiance que nous faisons aux partenaires sociaux pour régler ce sujet en responsabilité.
Madame la députée Leboucher, à cette étape de l'examen du PLFSS, vous avez beau employer des mots aussi violents que « rage », « indignité » ou « maltraitance », la vérité est que ce gouvernement et cette majorité agissent – leur cri de rage est dans l'action plutôt que dans l'imprécation !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Sur la motion de rejet préalable, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine – NUPES d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous en venons aux explications de vote.
La parole est à M. Jean-François Rousset.
Le PLFSS est indispensable au bon fonctionnement de la sécurité sociale. Vous fustigez ce texte, qui n'aurait pas été suffisamment débattu à vos yeux.
Pourtant, ce sont près de 3 000 amendements qui ont été étudiés en première lecture – un chiffre record. Plus de quarante heures de débats ont eu lieu en commission des affaires sociales.
Vous choisissez de rejeter en bloc un texte qui nous apparaît au contraire responsable, solidaire et ambitieux. Responsable, car il veille à la bonne gestion des deniers publics…
C'est irresponsable ! Allez expliquer cela aux gens qui ne peuvent plus accéder aux urgences !
Cela se traduit notamment par l'objectif d'un retour du déficit à moins de 3 % dès 2027,…
…par un renforcement de la lutte contre les fraudes et par une exigence d'exemplarité de la part des professionnels.
Ce texte est aussi solidaire et ambitieux : il vise à renforcer la politique de santé préventive, à améliorer l'accès aux soins, à faire évoluer la politique de l'autonomie, et à maintenir l'accès aux médicaments.
Vous prétendez que l'utilisation du 49.3 reviendrait à balayer le travail législatif. Ce n'est pas le cas, puisque le texte présenté au Sénat intégrait trente amendements de l'opposition sur la centaine retenue…
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et LFI – NUPES.
Vous vous opposez donc à vos propres demandes d'améliorations en rejetant ce PLFSS, qui octroie des moyens particuliers pour la prévention. Nous avons, au contraire, décidé d'avancer.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Alors que les impôts vont augmenter de 17 milliards d'euros l'année prochaine, que les problèmes de l'hôpital ne sont pas résolus, laissant ces derniers – mais aussi les Ehpad, les établissements médico-sociaux et les centres d'accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP) – dans une situation fragile, alors que les Français voient augmenter leur participation financière en matière de soins – lorsqu'ils parviennent à y accéder –, alors que l'évolution de l'Ondam ne compense pas intégralement l'inflation, le PLFSS pour 2024 ne répond pas à cette situation.
Le débat ayant été interrompu par l'utilisation du 49.3, et pour beaucoup d'autres raisons que l'on a pu entendre, notre groupe votera la motion de rejet.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je dois reconnaître une chose, monsieur le ministre de la santé – cela ne m'arrivera pas souvent de le dire : qu'est-ce que j'aimerais être comme vous !
Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Venir ici avec autant d'assurance, défendre un budget rejeté par toutes les fédérations hospitalières – qui soulignent un manque de 3 milliards d'euros – et par les syndicats, qui indiquent qu'entre 2020 et 2022, nous sommes passés de 7 500 à 60 000 postes vacants !
Les associations de patients regroupées dans France Assos Santé jugent également que ce texte n'est pas à la hauteur des enjeux. Même à la Caisse nationale de l'assurance maladie, personne n'a voté pour ! .
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Pierre Dharréville applaudit également
Enfin, en commission des affaires sociales, en première lecture, même les macronistes n'ont pas voté pour ce PLFSS !
C'est tout de même très fort d'avoir autant d'assurance. Je ne sais pas d'où cela vient, ni comment cela se travaille…
…mais venir ici avec un texte rejeté par tout le monde, ne même pas être capable d'en mener la discussion à son terme, être obligé d'utiliser le 49.3 pour le faire passer, et nous dire que tout cela est bien-fondé, franchement, ce n'est pas possible !
Faites voter ce texte, monsieur le ministre, allons au bout du débat, et nous verrons s'il est accepté par tout le monde !
Pourquoi défendez-vous une motion de rejet, si vous voulez aller au bout du débat ?
Demandez aux Français ce qu'ils en pensent ! La vérité est que tout le monde sait que ce texte est catastrophique et qu'il ne résoudra rien pour l'hôpital !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous avions posé, dès le début de l'examen de ce texte, plusieurs lignes rouges. La première concerne les franchises médicales ; nous souhaitons, suivant la demande du Sénat, qu'aucune décision ne soit prise en la matière sans repasser devant le Parlement, contrairement à ce qui s'est passé pour le déremboursement des soins dentaires. Je vous demande donc à nouveau, monsieur le ministre, de vous engager à soumettre au Parlement toute discussion à ce sujet, que les franchises concernent les boîtes de médicaments ou les consultations.
La deuxième ligne rouge concerne le système Agirc-Arrco ; nous sommes très clairs sur ce point : nous ne souhaitons pas que le Gouvernement fasse les poches de ce régime complémentaire…
…et nous ne voulons pas qu'il le mette à contribution « au titre de la solidarité financière au sein du système de retraite ». Nous avons déposé en ce sens le sous-amendement n° 600 : les fonds de l'Agirc-Arrco, particulièrement bien gérés, ne doivent pas servir à financer la réforme du régime général. Compte tenu de cette modification, nous ne voterons pas la motion de rejet.
M. Jean-Yves Bony applaudit.
Collègues insoumis, cela devient une habitude : examiner une énième motion de rejet déposée par votre groupe.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
…vous qui ne cessez de dénoncer le déni démocratique provoqué par les utilisations successives du 49.3…
…et qui, dans le même temps, déposez à chaque examen budgétaire des centaines d'amendements afin de paralyser les débats. Vous proposez de rejeter sans discussion chaque budget, chaque mesure pouvant améliorer le quotidien de nos concitoyens,…
…vous faites fi de l'intérêt général ! Sans budget, qui payera les hôpitaux au 1er janvier ? Les Français devront-ils cesser d'être malades, et de se soigner ? Les retraités devront-ils se passer de pension ? Les familles devront-elles rester sans solution pour leurs enfants et leurs aînés ?
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le texte que vous proposez de rejeter prévoit 640 milliards d'euros de budget pour la sécurité sociale, presque 300 milliards pour les pensions,…
…252 milliards pour l'assurance maladie. Des augmentations ciblées de salaires sont programmées, dans la continuité du Ségur de la santé. La généralisation du vaccin contre le papillomavirus, le déploiement des bilans de prévention aux âges clés de la vie et encore tant d'autres mesures sont prévues pour améliorer l'accès à des soins de qualité, assurer la bonne santé de nos concitoyens et préserver notre système de santé solidaire.
Collègues insoumis, nous sommes plus persévérants que vous. Le groupe Démocrate votera, des deux mains, contre cette motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Le groupe Socialistes avait également déposé une motion de rejet, et le tirage au sort a décidé que la présentation en reviendrait à nos collègues de La France insoumise.
Exclamations sur divers bancs.
C'est ce que prévoit le règlement de l'Assemblée nationale, cher collègue, renseignez-vous avant de lancer des interpellations, c'est assez ridicule !
Nous avons de bonnes raisons de voter cette motion de rejet. En effet, le débat n'a pas eu lieu – écourté par le 49.3 –, et de nombreux amendements, y compris ceux votés par la commission des affaires sociales, n'ont pas été retenus à l'issue de la première lecture.
Vous êtes bien sympathique avec ce gouvernement, monsieur Isaac-Sibille ! Votre amendement visant à taxer les boissons sucrées, qui avait été adopté en commission en première lecture, a été balayé d'un revers de main par le Gouvernement, dans l'opacité des bureaux de Matignon, sur le fondement d'arguments inconnus.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Sur la forme comme sur le fond, nous voterons cette motion de rejet parce qu'elle est l'unique moyen dont disposent les parlementaires, en cet instant, de se prononcer sur le budget – essentiel – de la sécurité sociale. Depuis des mois, vous nous privez de la possibilité de nous prononcer ! Le vote de cette motion de rejet est, malheureusement – j'en suis le premier meurtri –, le seul moyen de dire avec force au Gouvernement que le compte n'y est pas.
Monsieur le ministre, vous vous êtes mis en colère tout à l'heure ; mais j'ai senti que cette colère était d'abord dirigée contre vous-même. Quand vous dénoncez les arrangements improbables de tel ou tel député, posez-vous la question des arrangements honteux que vous-même et votre majorité avez conduit au Sénat, en laissant voter la suppression de l'aide médicale de l'État, le Gouvernement s'en remettant à la sagesse de la Haute Assemblée !
Vous regardiez vos chaussures à ce moment-là, monsieur le ministre ! Votre ministre déléguée aux professions de santé a donné un avis de sagesse, vous avez donc beau dire que…
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Le groupe Horizons ne soutiendra évidemment pas cette motion de rejet préalable.
Nous venons de l'entendre lors de sa présentation : elle ne contient rien, sinon la posture de la dénonciation permanente. Rien de constructif ni d'alternatif n'est proposé
M. Arnaud Le Gall mime un épais dossier de propositions
et il n'y a pas l'esquisse d'une majorité pour porter un projet différent du nôtre. Nous sommes là dans des postures minoritaires et des dénonciations outrancières, loin des réalités, loin du contenu de ce texte, loin des heures passées en commission des affaires sociales à l'examiner, loin des débats constructifs qui s'y sont tenus, à l'écoute de l'ensemble des groupes, et loin des chiffres à rappeler sans cesse, qui témoignent d'un effort sans précédent en faveur de notre système de santé.
Nous sommes également loin des 154 milliards d'euros supplémentaires consacrés aux dépenses de l'assurance maladie par ce gouvernement depuis cinq ans ; loin de la vérité de ce que vivent les soignants au quotidien, au service d'un système de santé effectivement traversé de tensions, mais auquel ce PLFSS apporte des moyens d'investissement, d'équipement et d'accompagnement salarial des soignants.
Nous sommes, encore une fois, face à une posture de nos collègues de La France insoumise. Le groupe Horizons ne votera pas cette motion de rejet, puisque rien de ce qu'elle contient ne nous a semblé convaincant, précis ou adapté à la situation.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.
Nous attendons tous et toutes un 49.3 sur ce texte. Pour reprendre la référence de mon collègue Dharréville en commission, nous avons régulièrement l'impression de revivre le Jour de la marmotte ! Nous travaillons les textes et les amendements, sommes présents en commission et, au moment de la séance publique, bim ! Un 49.3. Même chose en nouvelle lecture.
Cette motion de rejet est donc aussi une question d'honneur parlementaire. Il s'agit de rejeter le texte avant de se le voir imposer ; de rejeter, avec un peu de panache, ce qui contrevient à l'esprit de la démocratie.
Il s'agit également de rejeter ce PLFSS pour dénoncer la trajectoire d'austérité qu'il porte : le Gouvernement souhaite réaliser une économie globale de 15 milliards d'euros, en réduisant notamment les dépenses de santé ; l'évolution prévue de l'Ondam sera inférieure à celle de l'inflation, et donc insuffisante ; enfin, la Fédération hospitalière de France met en garde contre une dégradation de la situation des hôpitaux en 2024, du fait du sous-investissement latent depuis des années et de l'inflation. Et toujours pas de grand plan pour sauver l'hôpital !
En 2023, trois Ehpad publics sur quatre sont déficitaires. La branche autonomie appelle à un financement de 6 milliards d'euros dès 2024 puis de 9 milliards à partir de 2030. Or rien ne figure dans le PLFSS sur ce point.
Les personnes les plus précaires ont trois fois plus de chances de renoncer aux soins que les autres. Les infections de longue durée dues à nos modes de vie polluants explosent et concernent, elles aussi, prioritairement les plus vulnérables d'entre nous. Je rappelle à cet égard qu'une différence d'espérance de vie de treize ans sépare les 5 % d'hommes les plus riches des 5 % d'hommes les plus pauvres.
Quand il a fallu sauver les entreprises, la main sur le cœur, vous avez affirmé que vous le feriez quoi qu'il en coûte. Mais où est donc le « quoi qu'il en coûte » pour les malades, les personnes âgées, les personnes handicapées, les enfants, les femmes, les personnes vulnérables, ou encore celles qui sont à la rue ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur quelques bancs du groupe Dem.
Faute d'un big bang de la protection sociale, le groupe Écologiste ne pourra souscrire à un budget qui ne prend pas la mesure de l'urgence.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
De nombreux arguments ont été évoqués par mes collègues. Pour ma part, je fais part de notre satisfaction de pouvoir nous prononcer sur ce texte par l'intermédiaire de cette motion de rejet préalable ,
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES
Par ailleurs, vous n'êtes pas sans savoir, monsieur le ministre, que l'UFC-Que choisir vient de saisir le Conseil d'État pour des motifs qui pourraient d'ailleurs également intéresser les collègues de la majorité. En effet, l'association souhaite « faire constater et sanctionner la coupable inaction gouvernementale et enjoindre l'État à prendre les mesures à la hauteur des enjeux ».
Je ne sais pas si vous avez lu l'étude de l'UFC-Que choisir, mais celle-ci est accablante. Or vous expliquez depuis tout à l'heure que les chiffres sont bons et que davantage de moyens sont consacrés grâce à ce PLFSS. Vous avez même osé dire, monsieur le ministre, que la situation s'améliore.
Pourtant, entre 2021 et 2023, ce sont 29 millions de personnes qui ont vu leurs conditions d'accès à un généraliste se dégrader. L'accès aux ophtalmologistes s'est également amoindri pour 46 millions de nos concitoyens, aux pédiatres pour 1,8 million d'enfants et aux gynécologues pour 15 millions de femmes. Dans ces conditions, comment pouvez-vous affirmer que la situation s'améliore, sachant que 80 % de nos concitoyens vivent dans un désert médical ?
Oui, nous soutiendrons cette motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 179
Nombre de suffrages exprimés 176
Majorité absolue 89
Pour l'adoption 53
Contre 123
La motion de rejet préalable n'est pas adoptée.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Mme la présidente de la commission des affaires sociales applaudit également.
Je l'avais dit en première lecture, je le répète alors que nous abordons la nouvelle lecture : le PLFSS est l'un des plus puissants ciments de notre cohésion sociale et nationale.
Nous soutenons ce texte qui investit dans l'avenir aussi bien pour l'accès aux soins – c'est une évidence –, que pour l'amélioration de la prévention, l'accompagnement de la perte d'autonomie et le soutien des familles.
Soulignons-le, le PLFSS pour 2024 accélère aussi le virage préventif de notre système de santé. Grâce, entre autres, à la campagne de vaccination contre le papillomavirus humain (HPV), à la prise en charge des préservatifs pour les moins de 26 ans, à l'instauration des rendez-vous de prévention aux âges clés de la vie, nous œuvrons en ce sens.
Je pense aussi aux progrès dont le texte est porteur pour nos établissements de santé et nos soignants, avec une revalorisation des salaires et un plan d'attractivité pour les personnels dont les montants respectifs s'élèvent à 1,7 milliard et 1,1 milliard d'euros. Nous prévoyons aussi la disparition du tout-T2A, que beaucoup appelaient de leurs vœux depuis si longtemps. C'est ce PLFSS qui réalise cette mesure !
Et parce que nous voulons un système de protection sociale pérenne, nous refusons les tabous que certains préféreraient voir perdurer et soutenons pleinement les mesures de lutte contre les fraudes.
Contrairement à une idée véhiculée par certains, nous avons su débattre et travailler en commun sur ce PLFSS pour 2024. Comme le rappelait mon collègue Jean-François Rousset, ce sont plus de trente mesures issues des groupes d'opposition qui ont été retenues au terme de la première lecture.
Le groupe Renaissance a également été force de proposition pour améliorer le texte. Je fais ici référence aux amendements que nous avons défendus pour réformer le financement des dialyses et de la radiothérapie : c'était attendu depuis longtemps et c'est ce PLFSS qui le permet ! De plus, nous avons lancé des débats dans les domaines où nous souhaitons aller plus loin à l'avenir : je pense bien sûr au financement pérenne de l'activité physique adaptée (APA) dans notre système de santé.
Par ailleurs, je ne peux pas ne pas parler de l'autonomie, qui est au cœur de chaque PLFSS depuis 2020.
S'agissant du handicap, d'abord, le texte traduit les engagements pris au plus haut niveau de la Conférence nationale du handicap (CNH) avec, bien sûr, les 50 000 solutions nouvelles, la création d'un service précoce de repérage et d'accompagnement, mais aussi le remboursement tant attendu des fauteuils roulants.
Quant aux personnes âgées, notons bien, chers collègues, cher Jérôme Guedj plus particulièrement, qu'à rebours du discours ambiant, jamais leur autonomie n'aura été aussi prioritaire dans l'agenda politique.
Dès l'année prochaine, nous disposerons d'une loi de programmation pluriannuelle qui nous permettra de rassembler toutes les parties prenantes et de s'accorder sur les besoins et les moyens que nous souhaitons voir accordés par la nation pour faire face au défi de la longévité.
Dès ce soir, nous adopterons – je l'espère – la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, laquelle suscite désormais le consensus au sein de notre assemblée.
Dès ce PLFSS, et au-delà des engagements budgétaires du Gouvernement, nous officialisons la fusion des sections « soins » et « dépendance » pour le financement de nos Ehpad. Cette mesure également était attendue depuis de très nombreuses années : c'est ce texte qui la prévoit !
Enfin, pour les 10 millions d'aidants que compte notre pays, après l'adoption d'une nouvelle stratégie en octobre, nous allons plus loin. Nous prolongeons l'expérimentation dérogatoire sur le baluchonnage auquel nous tenons tous et nous dirigeons vers un droit rechargeable à l'allocation journalière du proche aidant, sous l'impulsion de notre collègue Servane Hugues.
Ce sont bien ces mesures concrètes et leur application future qui intéressent les Français et qui devraient être au cœur de nos discussions, et non la théâtralisation de nos débats. Le groupe Renaissance continuera de soutenir pleinement ce PLFSS pour 2024.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE, ainsi que sur quelques bancs du groupe HOR.
Nous nous retrouvons cet après-midi pour entamer un débat qui, une fois de plus, ne mènera probablement à rien. En effet, dans les prochaines heures, Mme la Première ministre recourra une nouvelle fois à l'article 49, alinéa 3 de notre Constitution, lequel lui permet d'engager la responsabilité de son gouvernement sur ce texte, ce qui nous privera de débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.
Mes chers collègues, cet hémicycle est le témoin de l'histoire ; de notre histoire grâce aux nombreuses discussions que nous avons sur le bien de nos concitoyens.
Alors que notre ministre de l'économie se satisfait d'une inflation à près de 4 %, les Français n'ont jamais éprouvé autant de difficultés. Avec 14 % de la population française en situation de privation, notre pays, sixième économie mondiale, compte 15 % de personnes sous le seuil de pauvreté, soit 9,2 millions de nos concitoyens.
Les Français sont victimes du Gouvernement, dont les leçons de morale n'arrêtent pourtant jamais. Avec une augmentation de la fiscalité de 17 milliards d'euros pour l'année 2024, le Gouvernement maintient son cap avec le PLFSS, engendrant une dégradation marquée de notre système de santé au détriment des patients.
En définitive, vous présentez un budget d'austérité sans éviter les effets de l'inflation et rien – absolument rien – n'est prévu, chers collègues, pour pallier le creusement du déficit de la sécurité sociale, qui s'élèvera à 8,8 milliards d'euros fin 2023 et qui atteindra 11,2 milliards fin 2024 et près de 17 milliards en 2027.
Dès que ça n'augmente pas, on parle d'austérité : c'est lunaire ! Il faut vous acheter un dictionnaire, monsieur Frappé !
Examinons la situation avec sérieux. Depuis plusieurs mois, vous envisagez des économies, en réduisant la prise en charge des soins dentaires, laquelle passera de 70 à 60 %, et en doublant la franchise médicale, la faisant passer de 50 centimes à 1 euro pour les médicaments et de 1 à 2 euros pour les consultations. Bien que ces mesures soient momentanément en suspens, nous constatons bien le choix délibéré de faire payer les Français – tous les Français.
Tomber malade n'est pas un choix, monsieur le ministre, et je tiens à rappeler à cette tribune qu'un Français sur trois a déjà renoncé à des soins pour des raisons financières. Cette proportion devrait vous interloquer, vous choquer, vous décontenancer. Comment, mes chers collègues, pouvons-nous lire et entendre une telle statistique et expliquer à nos concitoyens que des étrangers clandestins ne sont, eux, pas obligés de payer la franchise médicale ? Selon cette logique, il serait donc préférable d'être clandestin que Français dans notre pays au moment de s'acquitter de certains soins.
Ces éléments étant évoqués, le groupe Rassemblement national se satisfait des articles 23 et 33 du texte, lesquels portent respectivement sur le financement de la tarification à l'activité et sur la délivrance de médicaments à l'unité, et sont directement inspirés des propositions soutenues par notre présidente, Marine Le Pen, lors des dernières élections présidentielles.
Cependant, même si le texte a été amélioré par le Sénat, l'article 30 est maintenu. Cet article revoit les modalités de recours au transport sanitaire individuel, au profit d'un transport de fait partagé : tout citoyen souhaitant bénéficier d'un transport individuel aura désormais l'obligation d'en avancer les frais. Nous nous opposons à cette disposition qui contrevient au respect de l'intimité des patients lors de leur transport vers un établissement de santé.
La motion de rejet préalable n'ayant pas été adoptée, je conclurai mon intervention en demandant au Gouvernement de maintenir les débats. Nous souhaitons un budget pour notre pays, mais un budget juste, conjuguant les obligations et les responsabilités de l'État envers nos concitoyens. Ayez donc un peu de courage, chers collègues : ne fuyez pas le débat !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La Première ministre sera là d'ici trente à quarante minutes pour recourir au 49.3, si bien que, comme d'habitude, cette discussion est inutile.
J'en profiterai donc, monsieur le ministre de la santé et de la prévention, pour vous dire le plaisir que je ressens de vous voir. En effet, au début de l'examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, on ne vous a pas vu : pour nombre d'entre nous, vous étiez un illustre inconnu.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Si nous ne vous avons pas vu, c'est parce qu'au moment de parler de la santé des Français, on nous a envoyé le ministre délégué chargé des comptes publics.
Nous devons soigner des gens et on nous envoie un comptable ! C'est probablement la scène la plus macroniste jamais vue dans cette assemblée.
Protestations sur quelques bancs du groupe RE.
Et si nous étions nombreux à ne pas vous connaître, monsieur le ministre, vous n'êtes pas n'importe qui pour autant.
En tant qu'ancien directeur de cabinet de notre Première ministre, Élisabeth Borne, vous êtes l'un des artisans du 49.3 sur la réforme des retraites, l'un des ingénieurs de la sulfateuse à 49.3 qui fait feu sur notre Parlement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
…s'est-il dit que, puisque vous aviez si bien conseillé la Première ministre – constatez les résultats ! –, il n'y avait qu'à vous demander de faire avec la santé exactement ce que vous avez fait avec la démocratie, c'est-à-dire tout détruire !
Je dis bien tout détruire, car c'est au fond le sentiment partagé par les Français. Quand j'avais 8 ans, ce qui n'est pas si ancien, – c'était il y a quinze ans –, mes parents me disaient que l'hôpital public français était l'une des fiertés de notre pays et que beaucoup de gens dans le monde nous l'enviaient. Aujourd'hui, je ne connais pas un seul parent capable de prononcer cette phrase les yeux dans les yeux avec son gosse !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
À cet égard, nul besoin de chercher midi à quatorze heures. Si l'hôpital public en est là, c'est à cause de gens comme vous, qui passent leur temps à faire des économies sur le dos de la santé des Français.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – Protestations sur quelques bancs du groupe RE.
On aurait d'ailleurs pu penser qu'après la crise sanitaire, au cours de laquelle les soignants ont littéralement sauvé le pays, vous alliez arrêter d'agir de la sorte, mais non ! Macron a décrété la fin du « quoi qu'il en coûte ».
Quoique, cela dépend ! Quand il s'agit de faire des économies, oui, c'est clairement la fin du quoi qu'il en coûte ! Mais qu'en est-il au moment d'en payer les conséquences et de constater que la mortalité infantile augmente ? Vous poursuivez les économies, quoi qu'il en coûte.
Qu'en est-il, également, quand nous apprenons que 100 à 150 personnes sont mortes seules, sur un brancard, dans les couloirs d'un service d'urgences, car aucun soignant n'a pu s'occuper d'elles ? Vous continuez les économies, quoi qu'il en coûte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Qu'en est-il quand on apprend que des milliers de soignants démissionnent à cause de leurs conditions de travail, qui leur donnent davantage le sentiment d'être des maltraitants que des soignants ? Vous continuez à faire des économies, quoi qu'il en coûte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La Fédération hospitalière de France vous indique qu'elle a besoin de 3 milliards pour boucler l'année 2023 ; vous répondez : « Très bien, vous aurez 1,5 milliard ». À quoi vous attendez-vous ? À ce que les hôpitaux deviennent soudainement rentables ? À ce qu'ils continuent de creuser pour faire des économies ? Le plus triste, c'est que les technocrates que vous êtes attendent probablement un peu les deux…
Nous aurions également préféré que de tels technocrates ne s'occupent pas de la pénurie de médicaments. Anticancéreux, antibiotiques, médicaments pour soigner les maladies cardiovasculaires… notre pays traverse une crise. Je vous imagine lors d'une réunion, monsieur le ministre : un premier conseiller vous dit : « On pourrait relocaliser la production de médicaments pour devenir autosuffisants. Notre pays en a la capacité. » Un deuxième estime qu'il est possible de créer un pôle public du médicament, afin d'extraire les médicaments de la logique marchande. Puis un troisième, au fond de la pièce – prestataire salarié de McKinsey –, conclut : « On n'a qu'à faire comme d'habitude : on augmente le prix des médicaments et on fait des cadeaux fiscaux aux laboratoires pharmaceutiques. »
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
McKinsey vous coûte cher, vous écoutez donc ce conseiller. Résultat, vous allez augmenter les prix des médicaments. Or plus ils sont chers, moins les Français pourront en acheter. Ainsi, il n'y aura plus de pénurie – c'est la logique McKinsey ! Dans le même temps, vous faites 500 millions d'euros de cadeaux fiscaux aux entreprises pharmaceutiques.
C'est d'ailleurs la solution que vous choisissez à chaque fois qu'il y a un problème. Du chômage dans notre pays ? Vous diminuez les aides aux chômeurs, tout en prévoyant des dizaines de milliards d'exonérations de cotisations sociales pour les très grandes entreprises. Des problèmes de logement ? Vous baissez les aides personnelles au logement (APL), tout en créant des niches fiscales pour les propriétaires. Une pénurie de médicaments ? Vous augmentez leurs prix tout en faisant des cadeaux aux laboratoires pharmaceutiques.
Pourquoi Emmanuel Macron n'avait-il pas de programme à la présidentielle ?
Parce qu'à chaque fois qu'il a un problème, il n'a qu'une solution : augmenter les prix pour les Français et faire des cadeaux aux ultrariches !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme la rapporteure générale proteste.
Vous donnez énormément d'argent à des gens qui ont les moyens d'aller dans les cliniques privées, alors que l'hôpital public n'a plus de moyens et qu'il s'effondre sous vos yeux.
Voilà pourquoi tout le monde s'oppose à votre budget : caisses d'assurance maladie, syndicats nationaux interprofessionnels, associations d'usagers, monde mutualiste, fédérations hospitalières, professionnels, Assemblée nationale, peuple français, tout le monde est contre !
C'est la raison pour laquelle la Première ministre arrive dans trente ou quarante minutes…
…pour, à nouveau, utiliser l'article 49.3 !
Certains estiment qu'avec vous, c'est plus ou moins l'hôpital qui se fout de la charité. Vous me permettrez de simplifier les choses : c'est plutôt Macron qui se fout à la fois de l'hôpital et de la charité !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Encore une fois, ce débat aura été inutile ; le 49.3 aura eu raison de la démocratie. Mais cela a été un plaisir de vous rencontrer, monsieur le ministre de la santé.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Bravo, monsieur Boyard ! Le meilleur ! Il n'y a que la vérité qui blesse !
Durant son examen par l'Assemblée en première lecture, Les Républicains n'ont cessé de dénoncer le manque d'ambition de ce texte, qui n'est pas en mesure de rétablir l'équilibre des comptes publics ; pire, il aggrave le déficit – dans le PLFSS pour 2023, il était de 14 milliards en 2026 ; dans celui-ci, il est de 18,7 milliards, soit 4,7 milliards de plus !
Nous dénoncions également la grande absence de la politique familiale, alors que la natalité n'a jamais été aussi faible depuis la seconde guerre mondiale.
Nous pointions également du doigt le sous-financement de la branche autonomie et un Ondam insincère et sous-évalué, qui ne permettra pas de résoudre la crise de l'hôpital, ni de financer nos Ehpad.
Malgré les avancées obtenues au Sénat, nous resterons très vigilants quant à l'augmentation des franchises médicales – elle est pour le moment exclue –, ainsi qu'à l'absence de ponction sur l'Agirc-Arrco, qui ne saurait payer ce que l'État ne veut pas financer, notamment la revalorisation des petites retraites. Nous serons notamment vigilants s'agissant d'un sous-amendement que nous avons déposé sur le texte.
Nous espérons que le Gouvernement y sera également sensible.
Le Sénat nous a permis d'obtenir quelques avancées, pour lesquelles les députés Les Républicains s'étaient également battus. Elles constituent des messages clairs concernant les grands équilibres du texte. Il s'agit du rejet de la trajectoire financière proposée par le Gouvernement jusqu'en 2027, marquée par une aggravation du déficit, du rejet de l'Ondam pour 2024, de la suppression de cette disposition prévoyant une contribution de l'Agirc-Arrco au titre de la solidarité au sein du système de retraite et du transfert de 2 milliards d'euros de taxes sur les salaires, de la branche maladie vers la branche famille – excellente nouvelle pour notre politique familiale, si cette avancée est conservée et que l'on s'en saisit.
Comme nous, les sénateurs ont également fait preuve de pragmatisme s'agissant de la pénurie de médicaments : ils ont assoupli les conditions d'exécution des préparations hospitalières et officinales pour maintenir la disponibilité des médicaments en tension et ils ont supprimé l'obligation de délivrance à l'unité des médicaments, compte tenu de son caractère inopérant dans la grande majorité des situations de rupture.
On pourrait également citer d'autres victoires, telles que l'incitation des patients à honorer leurs rendez-vous médicaux par la mise en place d'une taxe « lapin » – j'avais moi-même plaidé en ce sens en commission.
Malgré tout, nous dénonçons toujours une réforme de l'hôpital et de la T2A en trompe-l'œil, sans étude d'impact satisfaisante, une trajectoire de financement insuffisamment objectivée mais, surtout, une vision peu rassurante pour nos établissements, qui ont besoin de stabilité.
Je me réjouis en revanche que le Sénat ait reporté la réforme du financement du champ médecine, chirurgie, obstétrique au 1er janvier 2028, après trois années d'expérimentation.
Nous regrettons toujours que le PLFSS ne nous donne pas tous les moyens pour lutter efficacement contre la fraude. Pour rappel, le coût de la fraude sociale avait été estimé par Gabriel Attal à 8 milliards d'euros par an. Les Français de bonne foi en ont marre – si vous me permettez l'expression – de payer pour ceux qui fraudent.
Nous regrettons également votre manque d'ambition pour le grand âge ou les soins palliatifs – la Cour des comptes estime à près de 1,6 milliard d'euros le besoin de financement de ces derniers. Le PLFSS est bien loin de cet objectif…
Les Républicains ne baisseront jamais les bras et restent très engagés auprès des professionnels de santé et paramédicaux qui maillent notre territoire et assurent l'accès des Français aux soins. Ils sont le nerf de la guerre du virage ambulatoire et domiciliaire. Pourtant, ils subissent une inflation record. Face à leur cri de colère, vous avez proposé une revalorisation dérisoire, qui n'était d'ailleurs pas destinée à tous, et voilà que ce PLFSS met à mal les négociations conventionnelles !
Suite au 49.3, le Gouvernement a bien voulu intégrer un de mes amendements et le Sénat l'a conservé. Il vise à étendre la campagne de vaccination des collégiens contre le papillomavirus aux établissements médico-sociaux accueillant des enfants en situation de handicap. Réjouissons-nous que ces enfants, qui ne sont pas scolarisés en milieu ordinaire, puissent désormais bénéficier de la campagne de vaccination.
Si j'insiste sur ce point, c'est qu'aujourd'hui, 23 novembre 2023, la journée est dédiée aux personnes en situation de handicap, trop souvent marginalisées, voire oubliées. La France participe à la sixième édition du DuoDay visant à favoriser l'insertion des personnes en situation de handicap dans le monde du travail et à lutter contre les préjugés. Ainsi, un jeune Isérois de ma circonscription, Aymeric, assiste à notre débat depuis les tribunes de cet hémicycle.
N'en déplaise à certains, notre assemblée examine en nouvelle lecture le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, conformément au fonctionnement de nos institutions. Il s'agit d'un projet de loi ambitieux, qui perpétue les principes et les exigences du modèle social dont nous sommes les héritiers, près de quatre-vingts ans après la fondation de la sécurité sociale au sortir de la seconde guerre mondiale.
Le groupe Démocrate salue le caractère hautement solidaire, responsable et émancipateur de ce projet de loi car c'est en sachant répondre à cette triple exigence de solidarité, de responsabilité et d'émancipation que nous ferons œuvre utile tant à l'égard de nos aïeux du Conseil national de la Résistance (CNR), qui ont créé la sécurité sociale, qu'envers les générations qui nous succéderont. Si nous avons une dette envers les esprits novateurs de 1945, nous avons aussi le devoir d'assurer l'avenir de nos enfants et celui de nos petits-enfants.
C'est dans cet esprit que les députés Démocrates ont abordé l'examen du texte en première lecture.
Monsieur le ministre, nous saluons les avancées notables de ce budget, tant en matière de financement que pour plusieurs politiques sociales de santé – nous l'avons déjà évoqué. Les amendements que nous avions présentés permettaient de garantir une meilleure protection sociale pour tous, sans obérer notre capacité à faire face à nos engagements budgétaires et financiers. Plusieurs d'entre eux n'ont pas été retenus dans la version du texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité, notamment en matière de prévention – sujet cher à notre collègue Cyrille Isaac-Sibille, que je salue.
Cependant, le groupe Démocrate continuera d'agir et de défendre ses convictions dans un esprit de concertation et au service du progrès social. Dans le cadre de la navette parlementaire, notre groupe se félicite de l'adoption en commission d'une nouvelle version du projet de loi.
C'est d'abord un PLFSS de solidarité, et plusieurs dispositions traduisent cette exigence : meilleure articulation des droits à la complémentaire santé solidaire avec les minima sociaux comme l'allocation aux adultes handicapés, l'allocation supplémentaire d'invalidité ou celle destinée aux chômeurs en fin de droits ; suppression des jours de carence en cas d'arrêt de travail pour une interruption médicale de grossesse ; renouvellement de l'allocation journalière de proche aidant, prise en charge par la collectivité, pour mieux accompagner ceux qui prennent soin d'un proche malade plusieurs fois au cours de leur vie.
C'est ensuite un PLFSS de responsabilité : notre modèle social repose aussi sur cette logique ; c'est même la condition sine qua non pour garantir un système solide aux générations futures, et aussi protecteur que celui que nous connaissons.
Les dépenses doivent être compensées par des recettes équivalentes, c'est aussi simple que cela ! Transmettre à nos enfants des comptes en grave déficit année après année, c'est les condamner à porter le fardeau d'une dette sociale qui n'est pas la leur, mais la nôtre. C'est pourquoi cette majorité prévoit des mesures d'économies sur la consommation et le prix des médicaments, mais également sur les sommes versées à l'Unedic afin de tenir compte des effets des réformes de l'assurance chômage et de l'amélioration du marché de l'emploi – les excédents de l'Unedic se sont élevés à 4,3 milliards d'euros en 2022.
Il s'agit aussi de réduire les arrêts de travail non justifiés et d'inciter au recours au transport partagé, de petits gestes aux effets majeurs pour nos comptes publics, comme pour l'acceptabilité des prélèvements sociaux.
Agir de manière responsable, c'est être mieux préparés aux crises. Le projet de loi présente plusieurs mesures pour lutter contre les pénuries de médicaments.
Enfin, c'est un PLFSS d'émancipation : la sécurité sociale remplit pleinement son rôle lorsqu'elle permet à chacun d'être acteur de son destin, notamment quand sa santé se dégrade. C'est l'objet des rendez-vous de prévention aux âges clés de la vie, que le texte propose de généraliser. C'est aussi l'intérêt du remboursement, inédit, des moyens de contraception.
Pour toutes ces raisons, le groupe Démocrate soutient résolument le projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.
L'orateur soupire.
Oui, la lassitude nous envahit : encore une discussion générale qui précède un 49.3, qui lui-même balaiera allègrement les quelques amendements sur lesquels nous aurions pu échanger, et que nous aurions parfois pu adopter. Cette lassitude ne concerne pas seulement les bancs de l'opposition. Elle étreint l'ensemble des parlementaires, y compris certains de la majorité.
Il y a un mois, lors de la première lecture en commission, le groupe Socialistes et apparentés avait fait adopter plusieurs amendements sur la fiscalité comportementale, chère à notre collègue Cyrille Isaac-Sibille – qui en a aussi fait adopter. Un de nos amendements créait une contribution assise sur les bières aromatisées, sucrées ou édulcorées – les fameux prémix – et son produit aurait pu être affecté à l'assurance maladie. Un autre amendement instaurait un prix minimum pour les boissons alcoolisées.
En ce qui concerne la coordination des professionnels de santé, nous avions enrichi le texte en proposant d'expérimenter la possibilité de solliciter l'avis d'un orthophoniste dans le cadre de la télé-expertise. Nous avions aussi déposé un amendement pour que les patients ayant été placés en arrêt de travail à l'issue d'une téléconsultation soient obligatoirement orientés vers une consultation en présentiel, ou du moins avec leur médecin traitant, lorsque leur état de santé nécessite une prolongation de l'arrêt. J'aurais pu citer d'autres amendements, provenant de tous les bancs.
Quels que soient nos désaccords, nous pouvons être attachés à cet enrichissement dont le 49.3 et l'arbitrage opaque qui s'ensuit nous privent une nouvelle fois. Je salue à nouveau la qualité des échanges que nous avons eus avec vous, monsieur le ministre, lors de l'examen des articles qui ont fait consensus – sur le papillomavirus, les protections menstruelles ou les préservatifs. Nous regrettons que ces échanges n'aient pas pu se poursuivre : le contenu intrinsèque des dispositions que nous n'avons pas eu le temps de discuter, mais aussi les jalons que nous aurions pu poser ensemble pour la suite en valaient pourtant la peine.
Il vous faudra procéder à une refonte de votre méthode de travail. À défaut, nous nous retrouverons dans une impasse, la même depuis deux PLFSS : si nous continuons ainsi ad vitam aeternam – nous pouvons le faire, mais pour les acteurs que nous représentons, notamment nos concitoyens, c'est plus grave – la frustration grandira et risque de se transformer en colère. Ainsi, le Ségur de la santé n'a été qu'un exercice purement formel, et n'a débouché sur rien de concret. Il a souffert d'une convocation de dernière minute, d'un agenda changeant et d'un ordre du jour qui n'a pas été correctement transmis. Comment mieux procéder ? Je vous l'ai dit hier en commission, je vous le répète : si vous voulez vraiment changer la donne, il faut préparer le prochain PLFSS à partir de janvier – au moins les états budgétaires si ce n'est les articles proprement dits, mais cela impliquerait de changer votre vision budgétaire du pays.
Autre source de frustration : la déconsidération du travail transpartisan, pourtant efficace. Avec Marc Ferracci, nous avions par exemple mené un travail sur les exonérations de cotisations sociales sans effet sur l'emploi ou la compétitivité. Nous avions proposé de supprimer le « bandeau famille », mais vous avez préféré une mesure a minima à cette première étape.
La méthode n'est pas au point ; le fond non plus. Ainsi, nous examinons encore la proposition de loi « bien vieillir », qui concerne la branche autonomie de la sécurité sociale. Notre collègue Laurence Cristol nous a assuré que tout allait pour le mieux : c'est formidable. Cependant, lors de sa dernière campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait fait la promesse de créer 50 000 postes supplémentaires d'aides-soignants et d'infirmiers en Ehpad d'ici à la fin du quinquennat en 2027 ; c'était notoirement insuffisant, les besoins étant estimés à 20 000 postes par an au minimum. Dans le PLFSS pour 2023, vous avez créé 3 000 postes ; cette année, vous n'en prévoyez que 6 000, soit 9 000 en tout, ce qui n'est certainement pas de nature à améliorer la prise en charge de nos aînés. Pire : en réponse à une motion de censure, la Première ministre a subrepticement annoncé que l'échéance n'était plus 2027, mais 2030. Il faudra donc huit ans pour honorer la promesse présidentielle ! Voilà le problème de cette trajectoire – j'espère que nous le corrigerons dans la future loi de programmation consacrée au grand âge.
Tous ces éléments sont à l'image de votre vision. Vous nous avez certes donné des gages sur les franchises ; dont acte, mais elles peuvent toujours être décidées par décret. Cet impôt sur la maladie est une erreur – il contribue à la casse sociale, que Bruno Le Maire vient d'ailleurs d'accentuer dans un autre domaine, en annonçant une baisse de l'indemnisation des chômeurs de plus de 55 ans.
Frustration, lassitude : c'est Un jour sans fin, mais nous sommes toujours là.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Il faut rester optimiste, monsieur Guedj : c'est un film qui finit bien !
La sécurité sociale, héritée du Conseil national de la Résistance, est le pilier de la cohésion sociale de notre pays. « Elle est la garantie donnée à chacun qu'il disposera, en toutes circonstances, d'un revenu suffisant pour assurer à lui-même et à sa famille une existence décente » : c'est ainsi que la définissait Pierre Laroque, son père fondateur.
Que nous soyons députés ou membres du Gouvernement, nous avons tous le devoir de préserver cet héritage qui, depuis près de quatre-vingts ans, a été une formidable source de progrès, permettant d'améliorer les conditions de vie et de faire reculer la pauvreté. Les valeurs qui l'ont fondée sont toujours au cœur de notre pacte républicain – nous pouvons en être fiers.
Lors de nos débats sur le PLFSS, dans cet hémicycle comme en commission, j'ai souligné à plusieurs reprises combien il est important de prolonger et d'amplifier l'investissement dans notre système de santé, déjà mal en point, tout en maîtrisant nos dépenses. La maîtrise des dépenses, notamment celles de santé, est bien nécessaire pour préserver le système à court et à moyen terme. Nous devons tenir un discours de vérité aux Français, et tourner le dos au « quoi qu'il en coûte », si douloureux et difficile que ce soit.
Pendant la crise sanitaire, le Gouvernement a su, en responsabilité, mettre en œuvre de nombreuses mesures pour protéger les Français ; mais aujourd'hui, trois ans et demi après le premier confinement, il nous faut résolument changer de cap.
C'est pourquoi il nous incombe, en tant que législateurs, de maîtriser les dépenses quand elles peuvent l'être : nous devons proposer des économies raisonnées, qui garantissent l'équilibre global du système tout en préservant les droits des Français.
Pour redresser nos comptes, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 prévoit 3,5 milliards d'économies dans le champ de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Résultant d'un effort partagé demandé à tous les acteurs, ces économies sont nécessaires – le groupe Horizons y souscrit pleinement.
Elles s'accompagnent de mesures de lutte contre la fraude sociale, enjeu de soutenabilité autant que de justice sociale. Le présent PLFSS pointe du doigt, à juste titre, l'explosion des arrêts maladie. Afin d'éviter tout arrêt de travail qui ne serait pas médicalement justifié ou qui cesserait de l'être, il renforce les modalités de contrôle tant des prescripteurs que des assurés.
Comme l'avait exprimé le Président de la République en janvier dernier, à l'occasion des vœux aux soignants, il nous faut aussi mettre fin au gaspillage du temps médical par excès d'imprévoyance, en particulier par les rendez-vous non honorés. Je salue ainsi l'adoption au Sénat d'un amendement permettant de sanctionner les patients qui n'honoreraient pas leurs rendez-vous médicaux. C'est une mesure de bon sens qui permet de responsabiliser davantage les patients.
Je me réjouis plus globalement des débats qui ont eu lieu au Sénat, et qui ont permis d'enrichir le texte. Les sénateurs ont ainsi approuvé le lancement d'une expérimentation d'une durée de deux ans, confiée aux agences régionales de santé, afin de tester le financement par l'État de l'activité physique adaptée sur prescription médicale pour les patients traités pour un cancer. Nous pouvons cependant aller plus loin, par exemple en rendant les personnes souffrant de diabète éligibles au sport sur ordonnance. Ce serait un signal majeur de notre engagement en faveur de la prévention. Le développement du sport santé est en effet essentiel : il s'avère efficace pour guérir et retrouver la forme après une maladie.
J'en suis donc convaincu : dans un contexte favorable, à un an des Jeux olympiques de Paris, le présent PLFSS doit être l'occasion d'avancer sur le remboursement du sport sur ordonnance.
Lors de l'examen en première lecture, le groupe Horizons et apparentés a été force de proposition. Je me permets de revenir sur quelques-uns des amendements que nous avons déposés et qui ont été repris par le Gouvernement dans le texte issu du 49.3.
S'agissant de la santé des femmes, nous avons proposé d'expérimenter un parcours de prise en charge de la dépression post-partum, une belle avancée pour les 10 à 20 % de nouvelles mères qui souffrent de cette pathologie dépressive – elles bénéficieront demain d'un meilleur accompagnement. L'instauration d'un dépistage systématique du cytomégalovirus chez les femmes enceintes était aussi une mesure cruciale…
…qui permettra de mieux identifier les mères et les fœtus potentiellement infectés.
Le groupe Horizons s'est aussi pleinement engagé en faveur du dispositif Mon soutien psy. Les médecins scolaires pourront orienter les jeunes vers ce dispositif afin qu'ils bénéficient d'un accompagnement psychologique. Compte tenu des chiffres du harcèlement scolaire dans notre pays et des besoins croissants en santé mentale, du fait, notamment, de la crise sanitaire du covid-19, c'est une bonne nouvelle pour nos enfants.
Nous ne devons toutefois pas oublier que ce véhicule législatif ne peut pas contenir l'ensemble de notre politique sociale. Il faut engager des réformes structurelles et obtenir des acteurs de santé qu'ils changent certaines de leurs habitudes. Tel est l'objet de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, qui a été adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale et le Sénat. Je suis convaincu que le changement viendra des territoires : les acteurs concernés doivent assurer l'accès aux soins des Français en agissant de façon plus responsable et collective.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Il nous faut prendre une nouvelle direction pour refonder notre système de santé ; c'est pourquoi notre groupe soutient le PLFSS.
Applaudissements sur les bancs des commissions.
« Qu'est-ce donc que la sécurité sociale ? Je crois qu'on peut la définir ainsi : la garantie donnée à chacun qu'il disposera en toutes circonstances d'un revenu suffisant pour assurer à lui-même et à sa famille une existence décente, ou à tout le moins un minimum vital. » Ces mots de Pierre Laroque, l'un des fondateurs de la sécurité sociale, vous laissent-ils une impression de déjà-vu ? Cela n'aurait rien d'étonnant, puisque je les ai déjà prononcés il y a tout juste un mois dans cet hémicycle lors de la première lecture du PLFSS.
Alors que la deuxième lecture de ce texte devrait être l'occasion de débattre et de l'enrichir dans l'intérêt de notre système de santé, je répète ces mots car nous nous retrouvons ici une nouvelle fois, pour répéter cette même mise en scène absurde d'un débat dont l'issue est connue d'avance, cette chronique d'un 49.3 annoncée.
Je répète ces mots dans l'espoir qu'ils vous rappellent à quel point nous sommes à mille lieues de l'ambition initiale de la sécurité sociale – garantir une existence décente à chacun.
Certes, les moins de 26 ans pourront disposer gratuitement de préservatifs et de protections menstruelles réutilisables, ce que nous saluons.
Mais nous ne sommes pas dupes : ce saupoudrage de mesures bénéfiques sert avant tout à maquiller un budget qui ne répond pas aux besoins. Vous demeurez toujours aussi allergiques à toute mesure d'investissement dans la santé. Chez vous, toute annonce d'augmentation des moyens dissimule, au mieux, une stagnation des dépenses, au pire, un budget incapable de compenser l'inflation.
Ce n'est pas faute d'avoir formulé des propositions ambitieuses pour doter notre sécurité sociale d'un budget décent. Toutes ont été systématiquement – pour ne pas dire frénétiquement – rejetées : la contribution sur les superprofits de la grande distribution, de l'agroalimentaire et du secteur pharmaceutique ? Balayée d'un revers de main ! La création d'une équipe mobile de diagnostic et de soin en santé environnementale ? Enterrée !
Les Restos du Cœur ont annoncé qu'ils refuseront du monde cet hiver ; nous venons de subir deux catastrophes naturelles en dix jours en Bretagne et dans le Nord ; des médecins reconnaissent être obligés de réanimer des bébés dans les couloirs faute de place. Tout cela montre bien que nous sommes aujourd'hui à un point de bascule. Alors que les besoins augmentent mais que les moyens ne suivent pas, la situation n'est pas viable financièrement, et elle met même en péril notre système de soin et ses bénéficiaires. Alors, monsieur le ministre, soyez honnête : un tel budget améliorera-t-il cette situation ? Pas en l'état.
Si vous faisiez de la santé la boussole de nos politiques publiques, vous vous seriez opposé au renouvellement de l'utilisation du glyphosate, qui contamine aussi bien les terres que nos poumons.
Si vous faisiez de la santé la boussole de nos politiques publiques, vous n'iriez pas faire la chasse aux arrêts de travail au mépris des causes structurelles à l'origine de leur augmentation.
Si vous faisiez de la santé la boussole de nos politiques publiques, vous n'iriez pas donner un avis de sagesse à la droite et à l'extrême droite pour détruire ce qu'il reste de l'aide médicale de l'État, quitte à mettre en danger la santé des plus vulnérables, mais aussi de toute la population. Il est assurément plus simple, et surtout plus lâche, de céder aux lubies racistes de l'extrême droite en montant les plus précaires les uns contre les autres, plutôt que de prendre la responsabilité de garantir l'accès de tous à la santé. Cette lâcheté, qui s'accompagne d'un profond mépris pour la représentation nationale, encourage un rejet massif de nos institutions.
La foi en notre système politique et en la démocratie s'amenuise à mesure que votre gouvernement échoue avec brio à améliorer concrètement la vie des gens et à apporter des réponses concrètes à l'inflation, à l'accroissement des inégalités et au changement climatique. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, faussement soumis à notre approbation, est à l'antithèse de cet horizon désirable pour préserver la santé humaine.
Si j'ai insisté récemment pour parler de prise en soin et en accompagnement et non de prise en charge, c'est parce que, si pour vous s'occuper des anciens ou des malades chroniques est une charge dont il convient de contrôler le coût, pour nous c'est une responsabilité et un devoir d'humanisme et de solidarité qu'une véritable société de la pleine santé doit prendre en compte.
Face à la contamination des sols, de l'eau et de l'air, qui chaque jour mettent davantage en péril notre santé, nous ne pouvons nous contenter de demi-mesures. Car de la même manière qu'il n'y a pas de planète B, nous n'avons qu'une seule santé. Il faut donc révolutionner la protection sociale, qui doit prendre en compte aussi bien la santé de notre environnement que celle de la population. Or, en nous présentant ce budget, ou plutôt en nous l'imposant, ce n'est plus le coche que vous avez raté, mais le plus grand défi de notre millénaire.
Le groupe Écologiste ne se tiendra pas plus à vos côtés qu'en première lecture.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Je ne fais que passer, madame la présidente. On ne vous a pas prévenus ? Il ne faut pas rester là, messieurs-dames, la discussion n'aura pas lieu ; elle avait déjà été largement escamotée, mais là c'est fini !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Je croyais que vous étiez au courant : la discussion n'aura pas lieu. La guerre de Troie, elle, a bien eu lieu, d'après Homère ; ce fut sans doute un terrible drame. Mais la discussion, elle, n'est pas près de revenir, comme Ulysse !
Mêmes mouvements.
Monsieur le ministre, avez-vous lu ce texte magnifique de Simon Abkarian, Hélène après la chute ? J'en profite pour citer des auteurs, parce que nous avons besoin des pas de côté et de l'emphase que permet la littérature ; nous avons besoin de sa vérité pour réenchanter la politique, pour qu'elle demeure ce geste individuel et collectif d'émancipation, ce geste de dépassement qui permet à l'humanité de se réaliser.
Dans ce texte, alors que Troie est en cendres, Ménélas, dans un moment de lucidité douloureuse, a cette formule qui m'a frappé : « Parler, c'est guérir ». Si c'était vrai, cela vous arrangerait sans doute, monsieur le ministre, mais cette formule signifie avant tout qu'il faut parler pour guérir.
Malheureusement, nous ne parlerons pas. Alors que le système de santé et de protection sociale est bien malade, nous ne parlerons pas. C'est un problème que nous ne puissions pas discuter de votre projet, de votre politique du tournevis selon nous désastreuse, qui se répète chaque année. C'est un problème, parce que si nous ne parlons pas ici, où parlons-nous dans notre pays ? Où parle-t-on du monde, du réel qui finira par vous rattraper ? Où se prennent les décisions ?
Détrompez-vous, nous ne sommes pas désabusés, nous ne renonçons à rien ; nous sommes déterminés et combatifs, comme toujours. Mais je refuse de vous aider à sauver les apparences ; je refuse de banaliser ce moment trouble et brutal.
Puisque vous êtes là, je vais tout de même vous parler un peu, puisqu'il paraît que cela contribue à la guérison. Que reste-t-il à discuter ? Formellement, rien ; mais en réalité, tout. Il reste à discuter de la situation de la sécurité sociale, presque entièrement étatisée et massivement privée de cotisations, parce que vous avez décidé de comprimer les dépenses de santé, en continuant à demander des économies en dépit de leur augmentation tendancielle. Ce n'est pas la première année et cela finit par lézarder tout l'édifice.
Tout est à discuter, parce que face à la crise de l'hôpital public, aux déserts médicaux et aux défis de l'autonomie et du grand âge, il est nécessaire de changer de logiciel et d'investir massivement dans les moyens humains.
Tout est à discuter, parce que la financiarisation gagne du terrain et qu'il faudrait démarchandiser certaines réponses aux besoins de santé, comme le médicament. Tout est à discuter, parce que ce budget prévoit un droit à la retraite raboté, alors qu'il faudrait le rabioter.
Tout est à discuter, parce que nous avons besoin d'une ambitieuse politique de santé au travail. Tout est à discuter, parce que la société, fragilisée, précarisée et fracturée a besoin d'une grande politique de solidarité. Tout reste à discuter.
« Parler, c'est guérir », écrit le poète. Finalement, j'ai un peu parlé, comme je l'avais fait l'an dernier, en expliquant que je ne voulais pas déranger. Au fur et à mesure du discours, votre prédécesseur, monsieur le ministre, s'enfonçait dans son siège ; il a fini par y disparaître, lui aussi, au moment où le 49.3 nous effaçait, nous qui sommes le Parlement. Cela mériterait que nous en tirions quelques leçons.
Malgré vos 49.3, il existe une autre vision du monde et de son devenir. Il fallait que ce soit dit, parce que nous en aurons besoin pour guérir, vite.
Madame la présidente, je ne faisais que passer ; je file.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Participer à la discussion générale sur un projet de loi de financement de la sécurité sociale en deuxième lecture, entre deux 49.3, est un exercice un peu difficile. Par conséquent, je vais simplement m'employer à vous faire connaître le ressenti des députés du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires.
L'honnêteté intellectuelle oblige à reconnaître qu'il ne s'agit pas d'un projet d'austérité.
Toutefois, le texte qui nous est présenté, dans un contexte de très forte inflation s'ajoutant à une crise structurelle des établissements hospitaliers et médico-sociaux, repose sur une volonté de maîtrise des dépenses budgétaires, sans recherche de ressources supplémentaires, ce qui rend impossible toute ambition réelle pour relever le système de santé.
S'agissant de la branche autonomie, chacun sait que nous ne pourrons faire l'économie de financements importants et nouveaux pour répondre à cet enjeu de société. Nous devrons créer des ressources nouvelles et pérennes pour la branche autonomie. Toutes nos propositions en ce sens ont été rejetées : c'est un reproche et un regret que nous formulons à l'égard de ce PLFSS. Malgré quelques enveloppes supplémentaires débloquées par le Gouvernement au Sénat, nous continuons de fonctionner à coups de petites enveloppes budgétaires, lâchées çà et là sans vision durable.
En revanche, nous sommes réellement satisfaits de l'instauration d'une loi de programmation pluriannuelle dès l'année prochaine. Elle sera l'occasion d'aborder régulièrement la question du grand âge dans sa globalité. Avec d'autres, nous avons défendu son instauration et nous espérons qu'à cette occasion se fera enfin jour une réelle volonté de répondre aux immenses enjeux auxquels nous faisons face.
Je ne peux pas ne pas évoquer l'engagement du Président de la République à créer 50 000 postes de soignants supplémentaires dans les Ehpad d'ici à la fin du quinquennat, en 2027. Mardi dernier, je me suis appliqué à être précis dans ma question au Gouvernement à ce sujet ; j'ai apprécié le talent avec lequel Mme la ministre des solidarités ne m'a pas répondu. Il semble que l'exercice consiste précisément en cela.
En 2023, 3 000 postes ont été créés ; 6 000 sont programmés en 2024. Nous sommes très loin de l'engagement pris, que nous n'atteindrons manifestement pas. Je me permets d'insister, parce que cet engagement répondait de manière très pertinente à un réel besoin des établissements. Il était parfaitement réalisable en associant la formation de nouveaux professionnels et le retour des aides-soignantes et infirmières qui ont quitté ce métier précisément parce que les conditions de travail y étaient trop dures ; ils aiment leur métier et auraient à cœur de l'exercer à nouveau. Ces 50 000 postes, soit six à sept par établissement, sont tout simplement indispensables pour soigner correctement les résidents des Ehpad.
S'agissant de l'hôpital, nous avons tenté de défendre la prise en compte des déficits structurels des établissements, renforcés par l'inflation exceptionnelle qui perdure. L'Ondam a bénéficié d'abondements pour compenser l'inflation, mais ceux-ci ne sont pas à la hauteur des besoins réels des établissements. Il est compliqué pour les hôpitaux publics de devenir plus attractifs et d'investir dans leur transformation ou leur réhabilitation, lorsque leur situation budgétaire connaît de grandes difficultés. Il est difficile de parler d'une ambition pour les hôpitaux, les malades et les professionnels, alors qu'on maintient les premiers dans une situation déficitaire.
Le passage du texte au Sénat nous a apporté quelques satisfactions, puisque certaines de nos propositions ont été reprises : la révision annuelle des coefficients géographiques ; le cumul de l'allocation journalière de présence parentale (AJPP) et de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) pour les enfants corses et ultramarins contraints de se soigner dans l'Hexagone. La majorité et le Gouvernement vont-ils revenir dessus ?
Enfin, ce texte est marqué par deux absences majeures. Premièrement, il ne contient aucune mesure d'envergure de lutte contre la désertification médicale, alors que c'est un enjeu crucial pour les territoires, où les difficultés d'accès à un professionnel de santé sont croissantes. Nous y revenons systématiquement, parce que l'urgence de la lutte contre la pénurie de médecins et contre leur inégale répartition doit être une priorité. Il n'existe pas de solution miracle pour lutter contre la désertification médicale, mais un arsenal d'outils que nous devons utiliser. De ce point de vue, l'absence de propositions est d'autant plus saisissante que beaucoup reste à faire.
Deuxièmement, la santé mentale et la psychiatrie sont absentes de ce texte. Nous sommes pourtant tous conscients de l'état critique de ce secteur essentiel, silencieusement sinistré, en totale contradiction avec l'aspiration de nombre de nos concitoyens à une société bienveillante et du prendre soin. Comment expliquer cet oubli, alors que nous sommes sortis d'une épidémie il n'y a pas si longtemps et que la situation économique et sociale tendue abîme autant les corps que les esprits ?
Notre système de protection sociale mérite mieux que de simples économies : il a aussi besoin de nouvelles ressources. Pas seulement parce qu'il est en difficulté depuis plusieurs années, mais surtout pour faire face aux besoins à venir, qui sont croissants. Nous regrettons le manque d'ambition de ce texte, que nous ne voterons pas.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES. – MM. Pierre Dharréville et Jérôme Guedj applaudissent également.
J'appelle maintenant les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées n'ont pu parvenir à un texte identique.
Je m'étonne de ne pas entendre la réponse du ministre à l'issue de la discussion générale,…
…puisque c'est habituellement le moment où l'on peut échanger à nouveau nos visions d'ensemble à la suite de quelques interpellations, mais c'est ainsi.
À de nombreuses reprises, dès la première lecture et jusqu'à hier soir en commission, on nous a demandé comment nous pouvions voter contre l'article liminaire, qui n'est qu'une photographie. La première réponse est évidente : quand le législateur organique – je profite de l'occasion pour saluer Thomas Mesnier – a prévu cet article liminaire, il a également prévu la possibilité de voter pour, de s'abstenir ou de voter contre. Voter contre un article de loi n'est donc pas un crime de lèse-majesté ; sinon, il ne fallait pas prévoir cette possibilité dans la loi organique.
Sur le fond, l'article liminaire est en effet une photographie de l'exécution des précédents PLFSS. Cette photographie ne nous convient pas : ni le cadre, ni la netteté des couleurs, ni la précision des détails. C'est pourquoi, en cohérence avec l'opposition que nous avons exprimée lorsque ces PLFSS ont été votés, nous confirmons notre opposition à la trajectoire budgétaire proposée.
Cette trajectoire relève-t-elle de l'austérité ou non ? Intellectuellement, force est de reconnaître que non, puisque le budget ne diminue pas. Même si elle ne dit pas son nom, ce n'en est pas moins une austérité, puisque l'augmentation du budget n'est pas à la hauteur de la progression des besoins et aboutit mécaniquement à la dégradation de l'accompagnement, dans les secteurs hospitalier et médico-social, comme dans toutes les autres politiques sociales.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 93 .
Effectivement, en commission nous avons employé à de nombreuses reprises le terme « photographie » pour désigner l'article liminaire. Cet amendement vise à supprimer ce tableau – cette photographie. Non pas parce que nous ne souhaitons pas avoir accès à ces documents et à ces chiffres, qui sont très importants, mais parce que la trajectoire figurant dans ce tableau, entérinée par le premier 49.3 de la saison 2, cantonne les dépenses de santé sous la barre des 22 % de PIB jusqu'en 2027. Compte tenu de l'état des services de santé et de l'augmentation des besoins – dont nous ne sommes pas près de voir la fin –, cette trajectoire ne sera pas à la hauteur.
La société de la protection de la pleine santé que les députés du groupe Écologiste appellent de leurs vœux requiert deux grands mouvements : sortir de la logique de l'enveloppe budgétaire fermée pour passer à une logique d'investissements pluriannuels, afin de déployer une vision de long terme ; en finir avec le cloisonnement des politiques de santé, de solidarité et de transition écologique. Sans ces deux mouvements, il est impossible d'être à la hauteur des besoins des établissements de santé, notamment en matière de transition écologique. C'est pourquoi cet amendement a pour objectif la suppression de l'article liminaire.
Cet article, sur lequel nous devons nous prononcer – et nous le ferons, puisque c'est ce qui nous est demandé – arrête les soldes des administrations de sécurité sociale pour 2023 et 2024. Nous ne donnerons pas quitus de cette disposition.
En premier lieu, nous constatons une stabilité des dépenses entre 2023 et 2024, qui s'élèvent à 26 % du produit intérieur brut. Or il est indéniable que les besoins en santé et les besoins sociaux augmentent, en raison du vieillissement de la population, de l'augmentation des maladies chroniques, de la désertification médicale qui retarde de nombreuses prises en charge – non sans conséquence –, de la crise de l'hôpital public ou encore des interruptions de soins qu'ont subies de nombreux patients pendant la pandémie et qui continuent à produire certains effets. Force est donc de reconnaître que les dépenses de santé sont en augmentation par rapport au PIB.
Par ailleurs, depuis 2022, le solde des administrations de sécurité sociale (Asso) est redevenu positif. Il est censé être de nouveau excédentaire en 2023, et à nouveau en 2024, s'établissant respectivement à 0,7 et 0,6 % du PIB. Or ce solde est en trompe-l'œil : les recettes n'augmentent pas d'une année sur l'autre et la photographie des dépenses révèle que des économies drastiques seront de nouveau réalisées. Ce tableau maquille ainsi la réalité, à savoir la politique d'austérité que vous menez en matière de santé. D'ailleurs, l'exposé des motifs souligne que les excédents de la Cades, la Caisse d'amortissement de la dette sociale – 18,3 milliards en 2023 et 16 milliards en 2024 –, « contribuent largement au solde positif » des Asso. Or ce sont autant de ressources qui devraient être affectées à l'assurance maladie. Si tel était le cas, la part des dépenses sociales et de santé serait bien différente de celle prévue à l'article liminaire. L'absence de ressources nouvelles pour la sécurité sociale tout comme les économies drastiques qui lui sont imposées apparaîtraient plus clairement. Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons souscrire à ce tableau du solde des Asso.
Lors de l'adoption de la loi organique du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, nous, parlementaires, avions souhaité compléter le PLFSS par un article liminaire, qui donne des informations plus fournies des dépenses et des recettes à venir, tant des régimes de base de la sécurité sociale que, dorénavant, de toutes les administrations de sécurité sociale. Ces dépenses, qui représentent 26 % du PIB en 2024, augmenteront afin de répondre aux besoins de la population.
Cet article propose une photographie exhaustive et sincère, conformément aux souhaits que nous avions exprimés lors de cette réforme. Il nous donnera la possibilité de comparer les chiffres chaque année, afin d'observer leur évolution. Il est donc important de le conserver. Je vous comprends : parfois, on souhaiterait pouvoir supprimer des informations qui nous déplaisent – la vie serait sans doute plus jolie. Néanmoins, ces chiffres reflètent la réalité. Je donne donc un avis défavorable à ces amendements de suppression.
Ces amendements visent à supprimer l'article liminaire, introduit par la loi organique votée au mois de mars 2022 par les deux chambres, en vertu de laquelle les lois de financement de la sécurité sociale doivent comporter un article liminaire. Je vous rejoins, MM. Guedj et Dharréville, sur le fait que la loi organique n'impose pas de voter en faveur de cet article.
Sourires.
Il est donc possible de ne pas s'en tenir à cette question.
Je souhaite revenir sur les arguments évoqués au soutien des amendements de suppression. Selon l'exposé des motifs de l'amendement n° 180 de M. Maudet, la Cades prive la protection sociale de ressources importantes – M. Dharréville a également évoqué ce point. Pour rappel, les recettes affectées à la Cades sont allouées au remboursement de la dette sociale, ce qui garantit la pérennité et la soutenabilité du système. Ainsi, les 136 milliards d'euros de reprise de déficit, votés en 2020, permettent de financer à la fois des déficits antérieurs à la crise et ceux des exercices 2020 à 2023, qui sont le résultat de la crise sanitaire.
Selon les exposés des motifs d'autres amendements, le Gouvernement masquerait le déficit de certaines branches de la sécurité sociale, en présentant le solde consolidé de toutes les administrations de sécurité sociale – c'est une question de méthode. Il n'en est rien : la présentation des soldes est conforme à la loi organique. Le solde est une notion de référence de la comptabilité nationale, régulièrement utilisée aux niveaux national et européen et inscrite dans la loi de programmation des finances publiques.
Du reste, j'insiste sur l'effort de transparence qui caractérise toute loi de financement de la sécurité sociale. Je ne le mets pas au crédit du Gouvernement, mais à celui du législateur organique, qui a réclamé que le texte et ses nombreuses annexes soient transparents. À ce titre, je me permets de saluer l'énorme travail accompli par les équipes des ministères sociaux pour produire ces annexes. Jérôme Guedj a d'ailleurs régulièrement l'occasion de vérifier le caractère documenté de leur travail. Ces documents donnent une vision claire de la situation financière de la sécurité sociale.
Enfin, M. Dharréville a mentionné la stabilité des dépenses et du solde des Asso par rapport au PIB. Mais c'est oublier la revalorisation des prestations, qui sont indexées sur l'inflation, ou encore l'augmentation de l'Ondam, qui sera supérieure à l'inflation en 2024 et pour les années suivantes. Je ne referai pas les débats, puisque nous avons tous en tête ces éléments. Pour toutes ces raisons, je ne peux qu'être défavorable à ces amendements.
Sur la forme, il est paradoxal de proposer la suppression de cet article introduit récemment par le Parlement, qui vise essentiellement à donner des informations en vue de renforcer l'intelligibilité de la loi.
Sur le fond, l'article liminaire répond à plusieurs interventions faites dans le cadre de la discussion générale, tant sur les bancs de l'extrême droite que sur ceux de certains groupes de la NUPES, tendant à affirmer que ce budget serait austéritaire. Or, d'après cet article liminaire, les budgets sociaux et de la santé étaient en hausse en 2023 et le seront encore en 2024. Le débat public s'élève lorsqu'il se fonde sur des éléments factuels, et non lorsqu'il donne lieu à des effets de manche. Très concrètement, le budget du PLFSS augmente. On peut critiquer le texte sur le fond, notamment les priorités qu'il définit, mais l'argument selon lequel il serait austéritaire est nul et non avenu.
C'était limpide ! S'il y a plus d'argent, c'est que le texte n'est pas austéritaire !
Je souhaitais justement m'adresser au ministre, mais j'en profite pour m'adresser également aux députés de la majorité. Vous avez beaucoup évoqué les chiffres, soulignant que, de manière factuelle, les budgets augmentaient. Très bien. Donnez-moi un seul indicateur qui montre que la situation s'améliore en matière d'accès aux soins ,
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
que les gens sont mieux soignés et en meilleure santé ! La question n'est pas de savoir si les budgets augmentent, mais s'ils répondent aux besoins. Malheureusement, les chiffres sont votre seule obsession.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Je suis saisie de douze amendements, n° 52 , 173 , 51 , 177 , 50 , 175 , 49 , 176 , 48 , 178 , 47 et 174 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 52 et 173 , sont identiques, de même que les amendements n° 51 et 177 , 50 et 175 , 49 et 176 , 48 et 178 , 47 et 174 .
La parole est à M. Yannick Neuder, pour soutenir l'amendement n° 52 .
C'est un amendement d'appel qui vise à revaloriser les gardes des internes à l'hôpital, conformément à ce que le Gouvernement a annoncé. Les internes assurent une grande partie des soins, notamment la nuit.
Bien que tous ces amendements soient budgétaires, ils ont trait à des sujets très différents les uns des autres. Néanmoins, je veux bien vous faire plaisir, madame la présidente, si vous souhaitez que les débats s'accélèrent. Après tout, il reste énormément d'amendements à examiner. Je n'ose imaginer que nos débats prendront fin après l'examen de la première partie ; nous aurons donc à débattre des amendements des deuxième et troisième parties.
Sourires.
J'espère que le ministre apportera enfin des réponses, ici ou ailleurs, à ces amendements d'appel que j'avais déjà déposés en première lecture. Certains font écho à des courriers que j'avais envoyés ou à des questions écrites qui sont restés sans réponse.
L'amendement n° 173 est relatif aux centres de soins non programmés (CSNP). Monsieur le ministre, une réunion relative à ces centres s'est tenue à l'échelle nationale. Des obstacles entravent leur développement, alors qu'ils permettent vraiment de désengorger les urgences. Il est nécessaire de disposer d'un plateau technique à proximité, de matériel de suture ou d'immobilisation, d'un laboratoire de biologie médicale, d'un centre d'imagerie médicale, d'une médecine de spécialité. Or un obstacle législatif entrave le recrutement d'infirmiers diplômés d'État. Un centre médical de soins non programmés peut se situer en ville ou à proximité du CHU – centre hospitalier universitaire – ou du CHRU – centre hospitalier régional universitaire –, parfois en zone très dotée. Dès lors, il ne concurrence pas les infirmiers libéraux. Monsieur le ministre, pourriez-vous travailler sur cette question ?
L'amendement n° 177 est relatif aux proches aidants. Monsieur le ministre, lors de la discussion générale, vous avez évoqué, tout comme Mme Bergé, l'enjeu des aidants. Étant donné que nous amorçons un virage domiciliaire et que la population vieillit, le nombre d'aidants augmentera. Certaines recommandations proposées par l'Inspection générale des affaires sociales – Igas –, dans le rapport Soutenir les aidants en levant les freins au développement de solutions de répit, publié en 2022, relèvent du domaine législatif. Je me suis concentré sur celles-ci, et non sur celles qui relèvent du domaine réglementaire. Vous le savez, les aidants sont exposés à un risque d'épuisement et d'isolement social. Nous devons prévoir un accompagnement, en trouvant des solutions de répit qui visent à limiter ces risques, dans une logique de prévention en santé et de cohésion sociale. Cet amendement vise à élargir la compétence des conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées aux personnes handicapées, en y associant les caisses d'allocations familiales. Aujourd'hui, ce n'est pas prévu.
D'ailleurs, la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, que nous achèverons bientôt d'examiner, se concentre sur les personnes âgées en faisant l'impasse sur les personnes handicapées. Pourtant, la prise en considération du handicap représente un réel enjeu, qui n'est pas traité comme il se doit. J'ai eu l'occasion de dire lundi soir, ce qui a d'ailleurs fait sourire certains, que c'est un problème de tuyauterie. Si on ne prévoit pas la tuyauterie appropriée, toute nouvelle initiative recevra une réponse similaire à celle que m'a donnée l'ARS lorsque je lui ai soumis un projet de maison de répit. Il m'a été indiqué que si mon projet était financé, ce serait au détriment du financement de l'Ehpad voisin. Mon but n'est pas de prendre des lits à un Ehpad, je ne veux pas déshabiller Pierre pour habiller Paul !
J'en demande pardon à M. le rapporteur pour les dispositions relatives à la branche famille, mais je maintiens qu'il y a un problème de tuyauterie à résoudre. Financièrement, cela ne coûterait pas grand-chose ; il suffit de mettre en place la tuyauterie budgétaire adéquate.
L'amendement n° 175 vise à vous appeler à permettre le financement par la prestation de compensation du handicap des frais liés à l'exercice du droit au répit, pour soi ou pour un proche aidant. Cette mesure semble intéresser tout le monde, mais elle n'est pas encore traduite dans la loi. Cette nouvelle lecture du texte, ou la lecture définitive, peuvent être l'occasion pour le Gouvernement de déposer un amendement à ce sujet. En tout cas, il faut avancer concrètement, sans quoi les beaux discours – j'avoue que Mme la ministre Bergé a tenu tout à l'heure des discours séduisants, par exemple au sujet de la natalité – ne seront pas suivis d'effet.
L'amendement n° 176 tend à ajouter aux cas d'emploi de la dotation de la branche autonomie les actions permettant la mise en place d'un service de suppléance ponctuelle de l'aidant. Plusieurs d'entre nous – je pense notamment à Paul Christophe – ont émis des recommandations, rédigé des rapports dans le cadre d'une commission, voire déposé des propositions de loi en ce sens. Quand instaurerons-nous cette mesure ? Là encore, elle n'est pas très coûteuse ; il s'agit simplement d'un problème de tuyauterie.
Vous me répondrez peut-être qu'il faut attendre la loi sur le grand âge annoncée pour l'année prochaine, mais il faudra bien, tôt ou tard, créer les tuyaux sur lesquels devra s'appuyer une telle loi de programmation. Étant donné que le PLFSS nous permet de débattre de la branche autonomie et de la branche famille, nous pourrions saisir cette occasion de forger la tuyauterie nécessaire.
L'amendement n° 178 vise à ajouter les personnes atteintes de pathologies chroniques et les proches aidants à la liste des catégories de public ciblées par le 2
Enfin, l'amendement n° 174 vise à vous appeler à reconnaître ces précieux outils que sont les plateformes d'accompagnement et de répit (PFR) comme des services médico-sociaux directement éligibles à l'objectif de dépenses de la CNSA. Cette mesure de bon sens est recommandée par l'Igas ; pourtant, nous n'avons pas encore créé le tuyau. Elle ne figure pas non plus dans la proposition de loi relative au bien vieillir, qui contient pourtant certaines mesures intéressantes, dont toutes ne sont d'ailleurs pas financées.
Si nous manquons le rendez-vous budgétaire, ces diverses recommandations très concrètes ne seront pas mises en pratique. J'ai conscience que je me sers de l'article liminaire, photographie des dépenses, pour présenter des amendements d'appel qui n'ont pas vocation à le modifier. Je vous demande au moins d'entendre ces demandes et d'y donner suite. Donnez-nous rendez-vous pour y travailler ensemble ! J'espère que chacune de ces propositions sera effectivement traitée.
Il s'agit d'une série d'amendements d'appel dont le premier, soutenu par M. Neuder, concerne l'attractivité des métiers. La fonction de l'article liminaire consistant à refléter le plus justement possible l'état des comptes, il n'y a pas lieu de les adopter. Je tâcherai toutefois de répondre à vos appels.
En réponse aux amendements identiques n° 52 et 173 , je rappelle que, dans le prolongement des accords du Ségur de la santé, la rémunération des gardes médicales des étudiants de troisième cycle a été revalorisée à hauteur de 25 % à compter du 1er novembre. De plus, nous étudions actuellement de nouvelles mesures. Toutefois, je suis défavorable à la proposition promue dans les amendements, car ce n'est pas la bonne méthode.
Je ne souhaite pas me montrer désobligeant envers M. Bazin, qui a présenté les autres amendements.
L'orateur se tourne vers M. Thibault Bazin, qui circule dans les travées avec sa liasse d'amendements à la main.
Il semble qu'il ne veuille pas écouter ma réponse…
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Les séries d'amendements identiques visant à déplacer des crédits recevront de ma part un avis défavorable. Je répondrai plus longuement à deux de vos propositions.
Monsieur Bazin, je ne partage pas votre avis au sujet des centres de soins non programmés. Je pense que certains d'entre eux proposent la meilleure offre de soins qui soit, quand d'autres emploient des médecins qui profitent de n'être pas – contrairement au médecin traitant – responsables du parcours de soin du patient pour faire de l'abattage.
Mon objectif est de faire en sorte que la ressource médicale et paramédicale – l'exposé sommaire de l'amendement n° 173 fait référence aux infirmières diplômées d'État (IDE) – ne soit pas absorbée par les CNSP. La charge de travail d'un professionnel de santé qui y exerce est moins lourde que celle d'un médecin traitant. Or je crois que le médecin traitant doit être au cœur de nos dispositifs, même s'il est vrai qu'il n'exerce pas sa profession seul et que d'autres professionnels de santé interviennent.
Je vous concède qu'à certains endroits, le système des CNSP fonctionne de manière responsable. En tout état de cause, ces centres ne relèvent pas d'une qualification juridique unique – le Gouvernement y travaille – ce qui explique que nos outils de régulation soient imparfaits. Je pense donc que nous débattrons de la place des soins non programmés lors de l'examen du PLFSS pour 2025.
Plusieurs de vos amendements traitent des proches aidants. Le 6 octobre, le Gouvernement a présenté une stratégie nationale de mobilisation et de soutien 2023-2027 pour les aidants. Vous estimez que le déploiement de plusieurs des mesures contenues dans cette stratégie nécessiterait l'adoption préalable de dispositions législatives. Pour notre part, nous prévoyons de repérer, d'informer et d'accompagner les aidants ; en outre, nous lancerons des expérimentations, dont nous débattrons dans le cadre du projet de loi de programmation annoncé avant-hier par la Première ministre. Contrairement à ce que vous affirmez, cette année ne sera donc pas vide de toute action en la matière, mais inclura des expérimentations qui concerneront, entre autres, la PCH, que vous avez mentionnée.
Quant aux autres arguments de M. Neuder et de M. Bazin, j'y répondrai par d'autres canaux.
Je me permettrai deux remarques, qui tiendront lieu de défense aux amendements que je n'avais pas soutenus dans le détail.
Premièrement, j'invite à la prudence quant à la qualification qui sera attribuée aux CNSP, car il convient de distinguer les CNSP qui suivent des horaires classiques, faisant concurrence aux centres hospitaliers publics et risquant de dépeupler leurs services d'urgence, des CNSP qui suivent des horaires décalés, travaillant parfois jusqu'à minuit, samedi et dimanche compris. Certains territoires ne disposent pas de structure d'hospitalisation, ce qui oblige systématiquement les patients à avoir recours au transport médical pour se rendre dans un hôpital situé à 50 kilomètres de distance. Parfois, ces territoires – le cas se présente dans ma circonscription – ne sont plus couverts par la structure mobile d'urgence et de réanimation (Smur) et dépendent uniquement des sapeurs-pompiers volontaires. Il faut donc faire preuve de discernement et ne pas traiter tous les CNSP de la même manière.
Deuxièmement, s'agissant des Ehpad, je souhaite appeler votre attention sur la double peine que subissent certaines structures déficitaires. Ces établissements, qui ont joué le jeu de l'attractivité et ont rempli leurs effectifs sans laisser de poste vacant, se trouvent en proie à un endettement structurel lié à leurs charges de personnel. Cela les empêche d'obtenir auprès des banques une ligne de trésorerie sans laquelle ils ne seront pas en mesure de payer leurs employés dans six mois. Je connais plusieurs Ehpad dans ce cas et vous alerte au sujet de ces établissements vertueux affichant un tableau des emplois et des effectifs complet.
Je regrette de ne pas avoir pu répondre à M. le ministre, d'autant plus qu'il m'aurait semblé intellectuellement plus correct de retirer, après les avoir défendus, ces amendements d'appel n'ayant rien à faire à cet endroit du texte.
J'ai donné la parole à M. Neuder en vertu de la règle du « un pour, un contre », étant donné que vous n'aviez pas manifesté l'intention de retirer vos amendements.
J'avais demandé la parole dans le but de les retirer, mais tant pis : cela ne change pas grand-chose. Je précise que ma proposition relative aux CSNP est plébiscitée, dans mon territoire, par le responsable du service des urgences du centre hospitalier régional universitaire et par les médecins généralistes. Le développement de ces centres me semble vertueux en ce qui concerne ma circonscription, même s'il est possible qu'il faille, ailleurs, le réguler. Au-delà de la portée symbolique de la mesure, j'estime donc important de favoriser concrètement le développement des CSNP.
J'en viens aux amendements en discussion commune, qui ont trait à la politique familiale et que je défendrai ensemble. Je ne veux pas vous embêter, monsieur le ministre ; je sais que ce domaine ne relève pas de votre portefeuille ministériel. La ministre des solidarités et des familles n'était pas là lorsque j'ai abordé le sujet en première lecture et n'est encore pas là aujourd'hui. Mon appel tombe mal : il risque de n'être pas reçu, ce qui est dommage, car la branche famille est, une fois de plus, la grande oubliée du PLFSS. Le texte ne contient quasiment rien en la matière, si ce n'est un article additionnel. Cela pose problème, car au vu des données démographiques particulièrement inquiétantes que nous connaissons, nous avons besoin d'une politique familiale ambitieuse pour assurer le renouvellement des générations et ainsi garantir la pérennité du système de protection sociale.
L'amendement n° 186 vise à vous appeler à étudier la question de la garde d'enfants au-delà de 6 ans, d'autant que Mme la ministre a évoqué tout à l'heure le service public de la petite enfance. Il convient de s'y intéresser pour lever les freins à l'emploi et soutenir le pouvoir d'achat des familles, car le crédit d'impôt pour la garde d'enfants hors du domicile s'arrête à 6 ans ; or les parents ne peuvent pas laisser leur enfant de 7 ou 8 ans sans surveillance après l'école, le mercredi ou pendant les vacances scolaires.
L'amendement n° 185 concerne l'allocation de rentrée scolaire. Il arrive qu'elle ne soit pas utilisée à bon escient, c'est-à-dire dans l'intérêt des enfants, ce qui suscite un sentiment d'injustice sociale. Je vous invite donc à vous interroger sur l'opportunité d'une expérimentation visant à verser cette allocation sous la forme de bons d'achat, afin de lutter contre son dévoiement. Il s'agit d'une question de justice et d'efficacité.
L'amendement n° 183 vise à fusionner l'ensemble des prestations familiales en une prestation unique afin de limiter les démarches administratives coûteuses en temps et en énergie que doivent effectuer les familles. Cela pourrait également être un moyen pour lutter contre le non-recours au droit. Je pense que la question du non-recours, aux prestations familiales notamment, peut nous rassembler.
L'amendement n° 187 tend à revenir sur une autre mesure : quand il a été décidé d'instaurer un malus écologique, des pondérations ont été établies pour favoriser l'achat de voitures servant à véhiculer des enfants. Cependant il demeure difficile de faire l'achat d'une voiture familiale. Si nous voulons que certaines familles comptent trois enfants ou plus, il faut créer des dispositifs d'accompagnement pour des voitures familiales. C'est là un beau sujet de débat, d'autant qu'il est également nécessaire d'inciter les constructeurs à accompagner les familles. Cela leur permettra de se déplacer pour travailler et pour amener leurs enfants à l'école, car il n'y a pas de transports en commun partout ; dans les territoires ruraux, ils ne sont pas toujours adaptés.
L'amendement n° 188 vise à rendre la prestation d'accueil du jeune enfant plus accessible. En effet, en 2018, elle a été rabotée : pour un couple au sein duquel chacun des deux parents gagne le Smic, cela entraîne une baisse de pouvoir d'achat de 546 euros. Je vous invite à rétablir la prestation d'accueil du jeune enfant, versée pour les naissances comme pour les adoptions, en supprimant les conditions de ressources.
L'amendement n° 181 vise à revenir sur la décision prise par François Hollande de baisser à deux reprises, en 2013 puis en 2014, le plafonnement du quotient familial. Je vous propose de le rétablir.
Nous avons cru à un certain moment que le Président de la République y était favorable, puis la ministre des solidarités et des familles Aurore Bergé a semblé vouloir examiner cette question. Je vous propose de vous y atteler dès maintenant, en le réévaluant aussi par rapport à l'inflation.
Je présenterai également les amendements n°
L'amendement n° 179 vise à garantir l'universalité des allocations familiales en débloquant le versement des allocations familiales dès le premier enfant.
Mme la ministre des solidarités et des familles n'arrête pas de parler d'universalité, mais je ne sais pas si, au-delà de la sémantique, nous désignons la même réalité par ce terme.
En rétablissant l'universalité des allocations familiales, nous soutiendrons les familles qui travaillent. Les familles de classe moyenne qui ont été pénalisées, rabotées, seraient ainsi soutenues immédiatement, surtout dans un contexte inflationniste.
Enfin, l'amendement n° 184 vise à renforcer la politique familiale dans un sens plus large, en rétablissant une ambition qui combine les différents éléments que je vous ai proposés. Vous soutiendrez que cela coûte cher, cependant je rappelle que la branche famille est excédentaire. L'excédent est de 1 milliard d'euros cette année et, s'il est appelé à diminuer, la branche restera excédentaire jusqu'en 2027. La natalité est en baisse, mais nous avons les moyens de retrouver les conditions pour que, quand une famille désire accueillir la vie, elle puisse le faire.
Mme la ministre l'a rappelé : le désir de maternité n'a pas évolué depuis dix ans et demeure autour de 2,3 enfants par femme, tandis que le taux de fécondité a baissé et se situe autour 1,6 enfant par femme – 1,7 enfant par femme si on prend en compte Mayotte. C'est un vrai problème.
Pour y répondre, des mesures concrètes sont nécessaires. Il est dommage de procrastiner, notamment en reportant à 2025 la création du congé familial.
Je défendrai les amendements n°
L'amendement n° 53 vise à appeler votre attention sur les indemnités kilométriques : je rappelle qu'elles sont passées de 2,30 euros en 2009 à 2,50 euros en 2012. Cela concerne non seulement les infirmières à domicile, mais plus généralement tous les personnels soignants qui travaillent à domicile. La revalorisation de 0,04 euro laisse dubitatif. Pour permettre les virages domiciliaire et ambulatoire, il faut prendre en compte la réalité économique des prix du gazole et ses répercussions sur tous les acteurs des soins à domicile.
L'amendement n° 54 vise à appeler votre attention sur les soins palliatifs, auxquels est consacrée une ligne budgétaire du PLFSS. Je rappelle que la Cour des comptes a estimé qu'il était nécessaire de renforcer ces soins, dont le montant est actuellement de l'ordre de 1,5 milliard d'euros.
Si nous voulons pouvoir évoquer sereinement le projet de loi sur la fin de vie, nous devons parler davantage de soins palliatifs et permettre leur généralisation sur l'ensemble du territoire – il est en effet nécessaire qu'ils soient accessibles à tous.
S'il était possible de réaliser des hospitalisations à domicile dans chaque Ehpad, cela permettrait d'assurer des soins palliatifs, car ceux-ci doivent être réalisés de manière continue. Cela ne signifie pas que chaque structure réalisera en permanence des soins palliatifs, mais que les soins seront continus sur vingt-quatre heures, jour et nuit, car on ne peut pas réaliser des soins palliatifs, en fin de vie, seulement durant les heures ouvrables.
Ces amendements d'appel n'ont pas vocation à être votés, mais visent à vous sensibiliser à ces sujets importants.
L'amendement n° 179 de M. Thibault Bazin est défendu.
Les amendements identiques n° 53 de M. Yannick Neuder et 184 de M. Thibault Bazin sont défendus.
Sur l'article liminaire, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur ces dix amendements en discussion commune ?
Ce sont des amendements d'appel, sur lesquels la commission a émis un avis défavorable.
Je ne peux pas répondre à tous les amendements, mais je reviendrai sur certains d'entre eux, qui me paraissent demander des précisions fondamentales.
D'abord, à travers l'amendement n° 185 , M. Thibault Bazin a proposé que l'allocation de rentrée scolaire soit versée sous la forme de bons d'achat.
Je ne demanderai même pas le retrait de cet amendement, mais j'émettrai un avis défavorable. Il s'agit en effet d'un marronnier,…
…de l'affirmation récurrente selon laquelle les personnes les plus en difficulté utilisent à tort l'allocation de rentrée scolaire. Je pense que cette aide constitue en tout état de cause un soutien au foyer. Du reste, les chiffres parlent d'eux-mêmes : deux études de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) montrent que 95 % des bénéficiaires déclarent l'utiliser pour des dépenses de fournitures scolaires ; 89 % pour des vêtements, qui constituent la principale dépense induite par la rentrée scolaire ; 42 % pour les services liés à l'école, comme le paiement des frais de cantine, de transport ou d'assurance scolaire. Je considère que cette proposition stigmatise de fait les pratiques supposées des personnes qui bénéficient de ce soutien de la collectivité. Il n'est même pas besoin d'ajouter que les frais de gestion seraient énormes. J'émets donc un avis défavorable sur l'amendement n° 185 , même s'il agissait d'un amendement d'appel.
L'amendement n° 188 tend à élargir le versement de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje). Toutefois, l'existence d'un plafond de ressources vise à aider davantage les familles dont les ressources sont faibles, conformément à l'un des objectifs de la politique familiale depuis que celle-ci existe dans notre pays. Cet objectif est en effet d'aider les familles les plus vulnérables et de leur permettre d'avoir le nombre d'enfants qu'elles souhaitent sans être contraintes par leurs revenus.
Je vous rappelle que ces plafonds sont réévalués chaque année au 1er janvier ; ils sont évidemment aussi modulés selon la composition de la famille et la situation d'emploi de chaque parent.
Avec l'amendement n° 53 , M. Neuder m'interpelle sur le montant des indemnités kilométriques des infirmiers. Vous le savez, monsieur le député, des négociations dites flash ont été menées au printemps dernier par l'assurance maladie sur la question de l'inflation. Elles ont permis de revaloriser l'ensemble des professions paramédicales conventionnées afin de les accompagner. Je me félicite que cela ait conduit, pour les infirmières, à l'adoption de l'avenant 10 à la convention nationale des infirmiers, qui prévoit explicitement cette augmentation d'environ 20 % des indemnités kilométriques. Ainsi, les forfaits de déplacement passent de 2,50 euros à 2,75 euros et le point kilométrique augmente de 10 %, l'ensemble des dispositions aboutissant à une augmentation de 20 % de ces indemnités pour les infirmières.
M. Neuder, vous soulignez également la nécessité de structurer l'offre de soins palliatifs pour qu'elle soit la moins hétérogène possible sur le territoire. Le Gouvernement partage évidemment cet objectif, notamment dans le cadre du plan « soins palliatifs », qui lui dédie 60 millions d'euros.
Je ne vous apprendrai rien, cher docteur Neuder, en rappelant que cette question représente un enjeu particulier dans notre pays. Alors que, pour le traitement du cancer, il y a une école française, si je puis dire, et de grands spécialistes du sujet, les spécialistes des soins d'accompagnement et en particulier des soins palliatifs sont beaucoup moins nombreux.
En même temps que nous mobilisons des ressources financières pour structurer l'offre de soins palliatifs, nous devons accompagner les études médicales et la recherche, en mettant les moyens pour structurer une filière d'excellence qui soit tirée par des professeurs d'université-praticiens hospitaliers qui puissent incarner cette mobilisation. Ce n'est pas seulement une question de moyens.
Pour l'ensemble des raisons que je viens d'exposer, je demande le retrait de l'ensemble de ces amendements d'appel et j'émets un avis défavorable à l'amendement n° 185 , portant sur la prime de rentrée scolaire.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 81
Nombre de suffrages exprimés 80
Majorité absolue 41
Pour l'adoption 50
Contre 30
L'article liminaire est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.
J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement, en commençant par les dispositions relatives à l'exercice 2023.
Sur les amendements identiques n° 2 , 94 , 182 , 204 et 258 , je suis saisie par les groupes Socialistes et apparentés et Écologiste – NUPES d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Il s'agit de la suppression de l'article 1er du PLFSS, qui rectifie les prévisions de recettes, de dépenses et de solde des branches de la sécurité sociale de 2023. C'est aussi l'occasion de s'interroger sur la trajectoire. Comme on est là dans une démarche un peu vaine, j'en profite pour rebondir sur ce qu'a dit tout à l'heure le ministre au sujet de la Cades, en réponse à l'amendement n° 256 de notre collègue Dharréville : c'est une question sur laquelle il faudra qu'on revienne régulièrement, car elle naturellement indissociable de celle de la trajectoire.
En août 2020, vous avez fait le choix – vous avez d'autres responsabilités, les uns et les autres – d'affecter la totalité de la dette covid à la Cades. Oui, c'était un choix politique, par lequel vous avez décidé de priver durablement la sécurité sociale de recettes. Nous avions alors tous en tête l'idée qu'une partie des recettes de la Cades pouvait être fléchée vers le financement de la protection sociale.
Pourquoi est-ce que je vous en parle ? Parce que maintenant qu'on sait qu'on va avoir une loi de programmation sur le grand âge, je vous rappelle qu'avant la crise covid, l'arbitrage obtenu par Agnès Buzyn consistait à flécher les recettes de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), qui alimente la Cades, pour financer la fameuse loi sur le grand âge – qui avait alors été repoussée. Ainsi, au moment où nous demandons une conférence du financement pour la branche autonomie, il faut sans cesse remettre cette proposition sur la table. Quelle est l'alternative ? C'est d'affecter la dette covid à la dette de l'État, qui roule, comme vous le savez. Si on fait le calcul, cette dette covid de 136 milliards ne coûterait que 1 milliard d'euros de remboursement d'intérêts, alors que là, en étant exagérément vertueux, vous remboursez 10 milliards chaque année. Pourquoi êtes-vous obligés d'être vertueux ? Parce que vous financez cette dette Cades sur les marchés financiers et devez donc la financer par intérêts et capital.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 94 .
Nous proposons de supprimer cet article 1er . La raison en est assez simple : tout à l'heure, nous avons débattu pour savoir s'il y avait ou non une logique d'austérité. En tout cas, pour 2023, toutes les fédérations hospitalières considèrent que la question de l'inflation n'est pas totalement prise en compte. L'ensemble des mesures de revalorisation du travail de nuit et des gardes ne le sont pas non plus. Il manquerait 1,9 milliard d'euros, et l'on sait également que trois Ehpad publics sur quatre sont en situation déficitaire. Nous ne pouvons pas trouver cette situation satisfaisante, c'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 1er .
L'article 1er a pour objet de demander au Parlement d'approuver le tableau d'équilibre, par branche, de l'ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale. Il mentionne un montant de recettes et de dépenses qui est sujet à de grandes interrogations. En effet, le groupe Rassemblement national conteste cette allocation des dépenses – tant sur les différentes branches qu'à l'intérieur même de celles-ci – qui se fait publiquement et grossièrement aux dépens de l'avenir de notre pays, et plus particulièrement de sa démographie et de son indépendance sanitaire. Les différentes trajectoires de dépenses qui y sont mentionnées reflètent des choix politiques auxquels nous sommes opposés : par exemple, le choix systématique de l'hôpital aux dépens de la médecine de ville, avec son corollaire qui est de faire reposer les économies uniquement sur les produits de santé, sans améliorer l'efficience de la dépense hospitalière. Nous demandons donc la suppression de cet article.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement n° 258 .
Vous êtes amenés à corriger les prévisions de recettes pour 2023, ce qui était évidemment inévitable puisque vous aviez sous-estimé les dépenses nécessaires. Cela étant dit, vous êtes encore en dessous de la réalité, comme l'indique la Fédération hospitalière de France : il manque 1,5 milliard d'euros au titre de l'inflation dont 1 milliard d'euros pour les seuls hôpitaux publics, 1 milliard au titre des mesures de soutien au pouvoir d'achat des agents de la fonction publique et 400 millions d'euros au titre de la reconduction des mesures transitoires prises à l'été 2022 pour les agents hospitaliers publics. Au total, l'Ondam hospitalier devrait être augmenté de près de 3 milliards d'euros : nous en sommes loin !
On va continuer à mettre la tête sous l'eau aux structures, c'est cela qui va se passer avec la modification que propose le Gouvernement. Sans revenir sur les arguments exposés à l'instant, fort brillamment, par notre collègue Jérôme Guedj à propos de la Cades, je veux rappeler les non-compensations d'exonérations de cotisations sociales, qui, au bout du compte, viennent aussi peser sur le budget – pour environ 2 milliards, je crois.
Donc, quand vous nous parlez de 8 milliards de déficit, nous ne sommes pas d'accord avec cette estimation. Nous proposons de supprimer cet article, car nous considérons que ce n'est pas comme cela qu'il faut compter.
Cet article 1er rectifie les prévisions des recettes, des dépenses et du solde des branches de la sécurité sociale. Sur le fond, cet article met en évidence une augmentation des dépenses de 3,2 % pour 2023, ce qui représente du concret pour nos concitoyens. Au cours de l'année 2023, nous avons financé de nouvelles mesures, par exemple la hausse de l'allocation de soutien familial, les revalorisations salariales dans le secteur public ou les premières étapes de la mise en place du service public de la petite enfance – et j'en passe. Cela met aussi en évidence, en rectificatif, une augmentation de 5,3 milliards des recettes, liée au dynamisme de la masse salariale et des politiques menées par le Gouvernement. Pour ces raisons, avis défavorable.
Je vous rappelle que nous sommes là dans un article obligatoire tel que l'a défini le législateur organique. Dans ce que vous évoquez, il y a deux points essentiels qui selon moi méritent discussion. Je crois que vous l'avez dit, monsieur le député Guedj : le choix qui a été fait en août 2020 de faire porter la dette covid par la Cades, et ensuite de lui demander d'amortir cette dette, est un choix politique – j'en conviens tout à fait, en précisant que ce choix a été fait dans le contexte d'une autre majorité parlementaire. Oui, vous avez raison, ce qui a été initialement envisagé, c'est-à-dire le financement d'une loi sur le grand âge, devra passer par d'autres mécanismes que cela. On peut dire aujourd'hui qu'il aurait fallu procéder autrement, mais c'est plus facile de le dire a posteriori, et il ne faut pas perdre de vue ce que le poids de la dette covid a pu représenter dans le contexte d'août 2020. Cependant, je reconnais qu'un débat politique peut avoir lieu sur ce point.
Je le dis ici simplement : pour ce qui est du tableau d'équilibre 2023, nous sommes dans une situation qui fait que nous ne savons pas encore où nous devons atterrir – sur le plan financier, s'entend. Je pense notamment à la dépense hospitalière que je défends, monsieur le député du Rassemblement national, parce que je ne crois pas que, dans notre pays, il soit sain d'essayer de demander aux Français de choisir entre la médecine de ville et l'hôpital. Essayer de favoriser l'un au détriment de l'autre, ce serait une erreur politique qui ne correspond pas du tout à notre histoire.
Ensuite, une grande partie des acteurs considèrent qu'à ce stade, nous n'avons pas pris en compte dans ces tableaux la totalité des impacts de l'inflation, ce qui est tout à fait vrai, je vous le concède. Ce que je peux vous dire aujourd'hui – mais vous connaissez cela par cœur, mesdames et messieurs les députés – c'est que les trajectoires de la dynamique de la dépense de ville et de la dépense hospitalière au sein du sous-objectif hospitalier, comprenant les secteurs privé, public et privé non lucratif, sont assez difficiles à lire à l'heure actuelle. En tout état de cause, nous ne laisserons pas dans l'impasse les hôpitaux confrontés à des difficultés en raison de l'inflation, et prévoyons donc de procéder, comme nous le faisons chaque année, aux ajustements nécessaires – ce qui nécessitera cette fois une intervention un peu plus conséquente que d'ordinaire.
Je le répète, nous n'avons pas actuellement de trajectoire d'atterrissage sur l'inflation, qui nous permettrait d'en connaître l'impact réel et définitif. C'est pourquoi nous faisons effectivement le choix de prendre – comme on le fait chaque année – des mesures de gestion, que vous serez amenés à valider en loi de règlement. Voilà pourquoi je donne un avis défavorable sur ces amendements.
Avec l'honnêteté qui vous caractérise, monsieur le ministre, vous avez reconnu qu'il aurait peut-être fallu procéder autrement.
Cela m'a fait dresser l'oreille. Pourquoi ? Parce qu'à l'époque, à l'instar de ce que vient de dire Jérôme Guedj en défendant son amendement, de nombreux membres de l'opposition ont proposé qu'on arrête de transformer une dette de l'État en dette sociale : cela a donc bien été dit, ce n'est pas comme si personne n'y avait pensé ! Ce qui justifie la critique de la solution retenue, c'est d'abord le fait qu'il s'agisse de sommes indues, mais aussi que cela nous coûte plus cher et que cela nous place dans une situation de soumission aux marchés. Vous convenez qu'il aurait peut-être fallu procéder autrement. Fort bien, mais dans ce cas, sachez tirer une leçon des erreurs du passé ! Connaissant votre sens du dialogue, monsieur le ministre, je vous incite donc à considérer autrement certains amendements présentés par l'opposition dans le cadre du PLFSS pour 2024 : n'excluez pas d'emblée qu'ils aient raison, cela vous évitera peut-être de dire dans un an qu'il aurait fallu procéder autrement !
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 62
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 24
Contre 38
Cet amendement, qui vise à corriger le tableau d'équilibre des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, vous offre l'occasion de rectifier le tir, monsieur le ministre.
Nous proposons de transférer à la branche maladie les 18,3 milliards d'euros de dette indûment affectés à la dette sociale en 2023. Votre choix de considérer les dépenses liées aux mesures prises au plus fort de la crise de covid-19 comme une dette sociale, et donc de les faire supporter à la Cades, est très contestable, car elles ne relevaient pas des missions ordinaires de la branche. La sécurité sociale a ainsi supporté le coût des arrêts maladie des personnes fragiles et des congés de garde d'enfant, en plus des dépenses de soins et des arrêts maladie des personnes atteintes du covid-19. Parallèlement, les recettes du régime ont accusé l'effet de la récession et du report des cotisations sociales versées par les entreprises.
La gestion de cette dette par l'État aurait donc eu plus de sens, et, d'un point de vue financier, aurait été plus favorable au régime de la sécurité sociale. En effet, contrairement à la dette d'État, qui peut courir sur le long terme grâce à la sécurisation de taux d'intérêt très bas, la dette sociale doit être remboursée, intérêts et principal. En faisant supporter le remboursement de la dette liée au covid-19 par la sécurité sociale, on se prive d'autant de recettes issues de la CSG et de la CRDS qui pourraient financer les besoins sociaux.
Afin d'assurer la coordination avec le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023, cet amendement vise à modifier à la marge le tableau d'équilibre afin de tenir compte des conséquences de l'actualisation de la prévision de rendement de la TVA pour 2023 sur la branche maladie.
Sur l'article 1er , je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Sur les amendements identiques n° 3 , 97 et 261 , je suis saisie par les groupes Socialistes et apparentés et Écologiste – NUPES de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission ?
Il faut replacer cette décision dans son contexte : si, au moment de la crise de covid-19, le choix a été fait de transférer une partie de la dette sociale à la Cades, c'était pour soulager la pression que l'accumulation des déficits et l'aggravation de la dette font peser sur l'Urssaf, qui assure la trésorerie des cinq branches de la sécurité sociale. Sans cette décision, les organismes de sécurité sociale se seraient retrouvés dans l'incapacité de financer les prestations qu'ils doivent aux assurés sociaux. Je suis donc défavorable à l'amendement de M. Monnet et favorable à celui du Gouvernement.
Aujourd'hui, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) se finance à des taux très satisfaisants, pas très différents de ceux de l'État. Sur le fond, était-ce à l'État ou à la sécurité sociale de prendre en charge les dépenses liées à la crise sanitaire ? C'est un éternel débat, qui mériterait presque un Grenelle !
Sourires.
Nous pouvons bien sûr en discuter, mais même dans les tables de la loi de Laroque, Croizat ou Parodi, nous ne trouverions pas la réponse à cette question. On peut toujours questionner certains choix a posteriori, mais, comme M. Peytavie le rappelle au début de chacune de ses interventions, l'objectif de la sécurité sociale est avant tout de protéger nos concitoyens, y compris dans les périodes difficiles. En outre, si la dette lui a été transférée, les ressources de la Cades ont, parallèlement, été préservées.
Par cohérence, nous présentons un tableau d'équilibre conforme aux choix qui ont été faits souverainement par le législateur à l'époque. Avis défavorable.
Nous avons manifestement une divergence d'appréciation, monsieur le ministre, et le débat mérite d'être poursuivi. Vous arguez qu'il est facile de remettre en cause certains choix a posteriori ; mais il est aussi possible, a posteriori, de les rectifier – il est encore temps : ce sont les décisions publiques prises par l'État et le Gouvernement qui ont engendré la dette que nous faisons supporter à la Cades, donc à la sécurité sociale, et qui empêche aujourd'hui cette dernière de répondre aussi bien qu'elle le devrait aux besoins de santé et aux besoins sociaux.
Je rappelle que, dans le cadre du PLFSS pour 2023, notre assemblée avait adopté, à mon initiative, un amendement – peut-être le plus cher de l'histoire ! – visant à transférer les 18 milliards d'euros de dette liés à la crise sanitaire à l'État afin d'alléger la charge pesant sur les épaules de la sécurité sociale, ce qui lui permettrait de répondre à un certain nombre de besoins – ce qu'elle est, pour l'heure, dans l'impossibilité de faire. Il me semble que l'adoption de cet amendement illustrait avec force la volonté de notre assemblée de soutenir ce qui me semble effectivement être une bonne décision.
L'amendement de M. Monnet est l'occasion de réaffirmer cette volonté auprès du Gouvernement.
L'amendement n° 257 n'est pas adopté.
L'amendement n° 585 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 67
Nombre de suffrages exprimés 67
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 44
Contre 23
L'article 1er , amendé, est adopté.
L'article 2 vise à corriger le montant de l'Ondam pour 2023. Seulement, comme de nombreux acteurs l'ont déjà démontré, l'augmentation prévue n'est pas suffisante. Je ne prendrai qu'un seul chiffre : la FHF estime qu'il faudrait au moins 2,2 milliards d'euros supplémentaires pour porter l'Ondam hospitalier et celui du secteur médico-social – qui finance les objectifs pour les personnes âgées et les personnes handicapées – à la hauteur des besoins remontés par les acteurs de terrain. C'est un chiffre intéressant car, comme le soulignait Pierre Dharréville, les exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires sont les seules à n'être toujours pas compensées par l'État. Or, elles s'élèvent justement à 2,5 milliards d'euros. Si vous êtes vraiment un défenseur de la sécurité sociale, vous devez compenser la désocialisation des heures supplémentaires – même si cela a évidemment un coût pour l'État –, conformément au principe de la compensation à l'euro près des exonérations décidées pour d'autres motifs, posé par Simone Veil en 1994.
Cela me permet d'évoquer la fameuse dette liée du covid-19. Vous avez décidé de faire supporter par la Cades des dépenses liées à l'assèchement des cotisations de sécurité sociale découlant de décisions de l'État. Pour ma part, je n'aurais aucun problème à affecter les dépenses supplémentaires liées au covid à l'assurance maladie – c'est l'esprit même des PLFSS : si l'État prend une décision pour soutenir une de ses politiques publiques – celle de l'emploi, par exemple – ou pour faire face à un contexte exceptionnel, il doit compenser la perte de recettes qu'elle engendre. Tout cela est affreusement technique, mais en l'espèce, il aurait dû prendre en charge l'assèchement de la masse salariale et ses conséquences sur les cotisations.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 97 .
Depuis un mois, nous n'avons eu de cesse de contester la sincérité de votre budget. Même si le Sénat l'a augmenté de 200 millions d'euros, l'Ondam reste bien insuffisant. Après avoir initialement été fixé à 100,7 milliards d'euros, puis corrigé à 101,3 milliards, l'Ondam hospitalier pour 2023 a finalement atteint 102,5 milliards – il y a un sérieux souci. Même si vous nous répétez que vous ne proposez qu'une trajectoire, nous savons d'ores et déjà que ce ne sera pas suffisant. Nous contestons donc la sincérité de votre budget et demandons, par cet amendement, la suppression de l'article 2.
L'Ondam fait décidément beaucoup parler. Partons de la réalité : l'Ondam pour 2023 aura été corrigé à trois reprises : fixé à 244 milliards en octobre 2022, il a été révisé à 247 milliards en mars, pour finalement aboutir à 244,8 milliards d'euros.
Nous contestons l'Ondam parce qu'il nous semble déconnecté des besoins – et, au vu des revalorisations successives, nous avons manifestement raison de nous interroger sur le bien-fondé qui préside à sa définition.
Je ne prendrai qu'un exemple : selon la Fédération hospitalière de France, pas moins de 3 milliards d'euros supplémentaires seraient nécessaires pour permettre à l'ensemble des établissements de santé de boucler leur budget pour 2023. Sans cette rallonge, ils démarreront l'année 2024 déjà en déficit, ce qui aggravera leur fragilité. Le vrai problème du PLFSS, c'est que vous ne vous préoccupez pas des besoins.
Nous avons déjà eu ce débat en première lecture. Je profite néanmoins de l'occasion qui m'est donnée pour poursuivre le raisonnement de M. Guedj, qui estimait que l'État devrait reprendre une partie de la dette générée par les décisions qu'il a prises pendant la crise de covid-19 pour soutenir l'emploi. Dans ce cas – et je pose sincèrement la question –, ne serait-il pas logique qu'il récupère aussi le produit des réformes qu'il a menées, comme celle des retraites ou celle de l'assurance chômage ? Je ne pense pas que c'était l'esprit de vos amendements. Avis défavorable.
La situation fait figure d'oxymore : vous nous reprochez de ne pas nous préoccuper des besoins, mais vous cherchez à supprimer l'article 2, qui prévoit une augmentation de l'Ondam de 2,8 milliards d'euros afin, notamment, de financer intégralement les mesures salariales. Si nous ne nous préoccupions pas des besoins et utilisions l'Ondam hospitalier comme une variable d'ajustement, nous ne proposerions pas de corriger l'Ondam dans ces proportions. Par ailleurs, monsieur Guedj, vous savez aussi bien que moi que les mesures non compensées ne représentent qu'environ 4 % du budget, toutes les autres étant financées par une fraction de la TVA ou des taxes affectées.
Je répète que les travaux d'évaluation du niveau d'inflation menés en lien avec les fédérations des établissements vont se poursuivre. Vous présentez tous des chiffres savants, mais une partie des besoins qui auraient nécessité 3 milliards supplémentaires seront effectivement financés par l'augmentation de 2,8 milliards d'euros de l'Ondam. Nous ne laisserons pas le système hospitalier dans l'impasse, mais quelques semaines supplémentaires sont nécessaires pour chiffrer précisément les besoins. Je rappelle que l'Ondam pour 2023 prévoyait 800 millions d'euros de compensation aux établissements de santé, 200 millions pour les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS), et 300 millions pour le bouclier énergétique. Quoi que vous en disiez, notre aveuglement n'était donc manifestement pas total. Avis défavorable.
Vous nous demandiez, madame la rapporteure, si notre souhait était que l'État récupère les produits tirés des réformes des caisses de cotisation et de solidarité. Il se trouve que c'est exactement ce que vous faites !
Vous venez de le faire avec le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023, qui prévoit une ponction de l'Unedic à hauteur de 2 milliards d'euros, et c'est ce que vous auriez fait avec l'Agirc-Arrco si une levée de boucliers de tous les partenaires sociaux ne vous en avait dissuadés.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 65
Majorité absolue 33
Pour l'adoption 21
Contre 44
Cet amendement vise à accroître le montant des Ondam hospitalier et médico-social, afin de tenir compte de l'inflation galopante que nous avons connue plus tôt dans l'année, et qui du reste persiste dans une moindre mesure. Nous saluons l'introduction dans le texte, lors de son examen au Sénat, de 200 millions d'euros supplémentaires, comme l'a rappelé M. Peytavie, mais la somme n'est pas suffisante ; c'est pourquoi nous appelons à la compléter, afin qu'à un déficit structurel ne s'ajoutent pas les effets de l'inflation.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 95 .
Nous sommes contraints à un exercice quelque peu absurde : proposer de prendre aux uns, ce dont il n'est en réalité pas question, pour pouvoir donner aux autres – puisque, comme le précédent, cet amendement vise à augmenter l'Ondam hospitalier afin de compenser l'inflation, les dispositions retenues n'étant pas à la hauteur.
Je ne reviens pas sur les propos tenus à juste titre par les orateurs précédents, mais, monsieur le ministre, ce n'est pas parce que vous avez été nommé à ce poste il y a quelques mois que vous n'êtes pas l'héritier de ce qui s'est fait ces dernières années. La situation difficile de l'hôpital découle de l'instauration, en 2004, de la tarification à l'activité : reste que ce texte ne la modifiera en rien. Seriez-vous en mesure de certifier qu'au moment de l'examen du prochain PLFSS, le pays ira mieux en matière de santé ? Cela fait vingt ans que nous attendons un projet de loi qui puisse donner lieu à une telle promesse !
Il vise à accroître le montant de l'Ondam de 1,9 milliard pour les établissements de santé et d'environ 220 millions pour la contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour les personnes âgées. En 2023, l'augmentation de l'Ondam était de 1,4 % alors que, selon la Banque de France, l'inflation aura atteint 5,8 %, ce qui se solde donc par 4,4 % de perte ; la Fédération hospitalière de France estime pour sa part qu'il manquera à l'Ondam hospitalier pour 2024 pas moins de 15 % de sa valeur, ce qui correspond au montant de 1,9 milliard que j'ai évoqué. Nous vous proposons donc, ainsi que l'ont dit nos collègues, de permettre une réelle amélioration de la situation des hôpitaux publics et des Ehpad.
Tout à l'heure, en regardant la télévision, j'ai appris que la Première ministre venait d'annoncer aux maires réunis en congrès que la dotation globale de fonctionnement (DGF) augmenterait en 2024 de 100 millions d'euros, sans doute par voie d'amendement au projet de loi de finances (PLF), dont le Sénat entamait aujourd'hui la première lecture. C'était à peu près le contenu d'amendements que nous aurions aimé voir examiner lors de notre propre première lecture du même texte. Je vous invite donc, chers collègues, à prendre en compte les amendements issus de l'opposition qui visent à répondre à des besoins objectifs et manifestes : mieux vaut faire ainsi honneur à la démocratie parlementaire que d'apprendre – bien que je ne mégote pas sur ces 100 millions – l'annonce de la même augmentation par la Première ministre, les besoins étant tels qu'il faut se résoudre in fine à débourser la somme nécessaire si l'on ne veut pas, en l'occurrence, laisser couler l'hôpital public.
La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l'amendement n° 301 .
Il s'agit d'un amendement d'appel, dû à David Taupiac, qui vise à appeler l'attention sur les oubliés du Ségur de la santé et des accords du 28 mai 2021, dits Laforcade : rappelons qu'une demande de rapport à ce sujet, adoptée, à l'initiative du groupe LIOT, lors de l'examen du PLFSS pour 2023, n'a toujours pas été honorée par le Gouvernement. Nous précisons par ailleurs que nous ne souhaitons aucune diminution des dépenses liées aux soins de ville, mais sommes contraints d'en prévoir une afin de respecter les règles de recevabilité financière des amendements : il nous faut prélever à un endroit les moyens que nous souhaitons allouer à un autre.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Il est défavorable, sauf, par définition, au n° 473, dû à la commission elle-même.
Même avis que Mme la rapporteure générale : nous avons suffisamment traité le sujet de la prise en compte de l'inflation. Concernant l'amendement n° 195 de Mme Leboucher, faisant partie de cette discussion commune, mais non défendu, et qui avait trait à la psychiatrie, je ferai observer que le problème majeur ne réside pas dans le défaut de crédits, mais dans le manque de professionnels : lorsqu'on en trouve, on adapte les moyens en conséquence.
L'amendement n° 96 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 248 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 2, amendé, est adopté.
Je suis saisie de trois amendements identiques, n° 99 , 190 et 268 , tendant à supprimer l'article 2.
Sur ces amendements, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Les amendements n° 99 de M. Sébastien Peytavie et 190 de M. Damien Maudet sont défendus.
La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l'amendement n° 268 .
Depuis des années, en raison de l'inflation et du coût des produits innovants, le montant M, c'est-à-dire le chiffre d'affaires au-delà duquel les entreprises pharmaceutiques paient une contribution, est revu à la hausse. En 2021, il était fixé pour l'ensemble de ces entreprises à 23,99 milliards d'euros ; en 2023, à 24,6 milliards ; cet article prévoit de le porter à 24,9 milliards. Or, en 2023, la branche maladie aura ainsi été privée de 120 millions d'euros de recettes. Selon l'étude d'impact du texte, cette nouvelle augmentation s'inscrirait dans le cadre d'un « ''new deal'' garantissant un accès égal et durable des patients à tous les produits de santé », un accord entre les pouvoirs publics et l'industrie du médicament, laquelle s'est engagée « à conduire en 2024 des efforts plus importants de baisse de prix […] et des actions de régulation des volumes de ventes sur le marché français ».
Or le fait de favoriser les marges des industriels afin d'accroître leur motivation ne relève pas d'un « new deal » qui transformerait en profondeur le marché du médicament, mais d'une perpétuation de la logique de celui-ci, dont les patients subissent pourtant chaque année plus durement les effets pernicieux. Les pénuries de médicaments matures, comme le Doliprane, devraient nous conduire, non à prévoir d'augmenter les franchises médicales ou de vendre à l'unité, sous-entendant ainsi que les patients abusent de ces produits, mais à nous interroger au sujet des modalités de production. Il y a trente ans, 80 % des principes actifs de médicaments étaient produits en Europe ; aujourd'hui, 60 à 80 % sont importés. La France compte environ 270 sites de production pharmaceutique, dont une grande majorité de PME : ne pourrait-on envisager de créer un pôle public du médicament, garant de la transparence, de prix justes, et capable d'investir massivement en vue de relocaliser au moins la production des 450 médicaments jugés essentiels par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ?
Même avis. Le montant M, dont le dépassement déclenche l'application de la clause de sauvegarde touchant les médicaments, a effectivement été revu, mais dans la perspective d'un nouveau pacte en vue du financement de l'accès aux produits de santé : cet après-midi même, un grand laboratoire a ainsi annoncé investir en France 2 milliards d'euros, ce qui n'aurait sans doute pas été le cas si nous n'avions pas renoué le lien, rétabli le dialogue. En outre, les baisses de prix consenties par les industriels devraient nous faire économiser 850 millions d'euros, et la clause de sauvegarde produire 1,6 milliard.
Je tiens à préciser que le Doliprane a pour génériques d'autres médicaments à base de paracétamol, qu'il est fabriqué par Sanofi, et le Dafalgan par Upsa. Employez donc le terme « paracétamol » !
Sourires.
Chacun sa spécialité ! Les liens que vous dites avoir renoués avec les entreprises pharmaceutiques, qui figurent souvent au CAC40, vous ne les aviez jamais rompus : elles reçoivent de nombreuses aides publiques, ce qui ne les a pas empêchées de distribuer à leurs actionnaires 51 milliards d'euros. Sanofi, par exemple, a bénéficié d'abattements fiscaux représentant 125 à 130 millions par an – et supprimé l'année dernière 2 000 emplois.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 61
Majorité absolue 31
Pour l'adoption 14
Contre 47
Nous pouvons en effet nous féliciter de ce qu'un grand groupe prévoie d'investir 2 milliards afin de développer la production en France de médicaments contre le diabète ; il n'en est pas moins vrai que dans un autre département appartenant à la même région, une entreprise contribuant à la fabrication des vaccins Moderna va fermer, entraînant la suppression de 200 emplois. En outre, ce groupe étant étranger, il y a là une question de souveraineté ; nous ne vaincrons pas les pénuries par un simple saupoudrage de subventions et d'aides. Sanofi a dernièrement entrepris de coter en bourse la production du Doliprane, sur laquelle la France risque donc de perdre la main : je regrette d'ailleurs que le Gouvernement n'ait pas réagi à cette initiative néfaste.
Avis défavorable.
L'amendement n° 207 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 4, amendé, est adopté.
Sur la première partie du projet de loi, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l'amendement n° 384 .
L'amendement n° 384 , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 4 bis est supprimé.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 66
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 45
Contre 21
L'ensemble de la première partie du projet de loi est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq, sous la présidence de Mme Yaël Braun-Pivet.
Nous abordons maintenant la deuxième partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre pour l'exercice 2024.
Même quand vous avez la majorité, vous passez par le 49.3 ; c'est de l'addiction !
Nous nous retrouvons de nouveau dans une position que nous connaissons toutes et tous, et qui ne surprendra personne : une position de principe des groupes d'opposition, qui ne souhaitent pas bâtir des majorités sur les textes financiers,…
Ce PLFSS est ambitieux : 640 milliards d'euros d'investissements pour 2024 ; 640 milliards d'euros pour notre santé, pour les familles, pour l'autonomie de nos aînés et des personnes en situation de handicap, pour nos retraites ; 640 milliards d'euros qui tomberaient si vous rejetiez cette deuxième partie du texte.
Celle-ci nous permet de répondre à des enjeux majeurs : renforcer la lutte contre la fraude, faire évoluer les cotisations sociales des travailleurs indépendants pour améliorer leurs retraites, prendre des mesures importantes pour les agriculteurs, pour les jeunes des lycées professionnels.
Cette partie a été enrichie par des amendements de la majorité comme des oppositions en première lecture dans cette assemblée et par des amendements du Sénat.
Mesdames et messieurs les députés, le projet de loi de financement de la sécurité sociale est le cœur même de notre modèle social. Il rassemble et protège les Français. Nous ne pouvons pas prendre le risque de les en priver.
Aussi, sur le fondement de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution ,…
« Ah ! » sur les bancs des groupes LFI – NUPES et SOC
…j'engage la responsabilité du Gouvernement sur la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
L'Assemblée nationale prend acte de l'engagement de la responsabilité du Gouvernement conformément aux dispositions de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. Le texte sur lequel la Première ministre engage la responsabilité du Gouvernement sera inséré en annexe au compte rendu de la présente séance.
En application de l'article 155, alinéa 1er , du règlement, le débat sur ce texte est immédiatement suspendu. Ce texte sera considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée avant demain, dix-huit heures quarante-sept, est votée dans les conditions prévues à l'article 49 de la Constitution.
Dans l'hypothèse où une motion de censure serait déposée, la conférence des présidents fixera la date et les modalités de sa discussion.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq, sous la présidence de Mme Élodie Jacquier-Laforge.
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mardi 21 novembre, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la proposition de loi, s'arrêtant à l'article 13.
Nous soutiendrons l'article 13 qui ouvre la possibilité aux organismes HLM de louer des locaux communs afin d'y mettre en œuvre un projet de vie sociale et partagée dans un habitat inclusif. Favoriser les colocations dans le parc social est une démarche que nous encourageons.
Monsieur Guedj, vous avez de nouveau la parole pour soutenir l'amendement n° 708 .
Il importe de prendre en compte les difficultés propres à l'accès à l'habitat inclusif et aux nouvelles formes de chez-soi. Notre amendement propose donc de mieux encadrer la colocation en intermédiation locative, en proposant une nouvelle rédaction pour l'article 13.
La parole est à Mme Laurence Cristol, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour donner l'avis de la commission.
S'agissant de la sous-location d'un logement aux personnes en perte d'autonomie, votre amendement est satisfait par les dispositions de la loi « 3DS », la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, comme par celles figurant dans l'actuelle rédaction de l'article 13.
Vous proposez par ailleurs de modifier le droit existant à Saint-Pierre-et-Miquelon en appliquant plusieurs mesures figurant dans la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement ou loi ASV. Or je ne crois pas que nous disposions à ce jour de données spécifiques sur l'applicabilité de telles dispositions dans cette collectivité d'outre-mer.
Avis défavorable.
La parole est à Mme la ministre des solidarités et des familles, pour donner l'avis du Gouvernement.
Avis défavorable également.
L'amendement n° 708 n'est pas adopté.
L'article 13 est adopté.
Notre amendement, issu d'un travail avec la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF), concerne un enjeu important : l'application des règles de sécurité contre les risques d'incendie propres aux établissements recevant du public (ERP) aux habitats inclusifs, qu'ils accueillent ou non des personnes âgées. Elle implique des coûts élevés qui constituent autant de freins.
Il paraît excessif d'appliquer des normes destinées aux établissements recevant du public à des lieux de vie, même si la pièce commune qu'ils peuvent comporter leur confère une dimension collective. Ce sont avant tout des locaux privatifs d'habitation.
La parole est à Mme Anne Bergantz, pour soutenir l'amendement n° 1329 .
Nombre d'entre nous ont été alertés sur la nécessité de clarifier la réglementation de la prévention des incendies applicable aux habitats inclusifs. S'ils restent assimilés à des ERP, ils seront exposés au risque de devoir débourser des sommes très élevées. Je citerai l'exemple d'une structure de ma circonscription : le devis qu'elle a reçu pour une mise aux normes atteignait 120 000 euros, hors taxes, ce qui est considérable. Une réglementation doit bien sûr leur être appliquée mais elle doit être adaptée.
Vous avez été nombreux à déposer des amendements concernant la réglementation contre l'incendie applicable aux habitats inclusifs. Néanmoins, je vous inviterais à les retirer, au profit de l'amendement n° 1146 dont la rédaction me paraît plus sécurisante.
Nous avons effectivement abordé ce sujet lorsque j'ai réuni l'ensemble des responsables des groupes politiques, l'objectif étant de clarifier les règles applicables à l'habitat inclusif en matière d'incendie. Toutefois, l'amendement n° 1146 , que nous examinerons juste après, me paraît en effet plus adéquat, en ce qu'il permet d'attribuer aux habitats inclusifs les règles de sécurité incendie fixées pour les lieux à usage d'habitation. Il me semble donc davantage sécurisant et il permettra de renvoyer les modalités à un décret.
Il nous faut en effet fixer des normes à la fois efficaces et sécurisantes : elles ne doivent pas être appliquées au détriment de la sécurité des personnes. L'amendement n° 1146 reste dans le même esprit que les vôtres, mais il permet de clarifier la réglementation tout en conservant un bon niveau d'exigence.
Je suis encore choquée par la visite que j'ai effectuée, avec la Première ministre, à Wintzenheim, quelques jours à peine après ma prise de fonction, lorsqu'un gîte a été incendié : cet événement a mis en lumière la nécessité de clarifier la réglementation. Par conséquent, oui, il faut clarifier les choses, mais cela ne doit pas se faire au détriment de la sécurité des personnes. C'est donc une demande de retrait.
L'amendement n° 1329 est retiré.
Le constat est partagé entre tous et l'intention est effectivement la même. Il me semble que nous pouvons vous faire confiance, y compris s'agissant du décret qui concrétisera cette intention. C'est pourquoi je retire mon amendement.
L'amendement n° 913 est retiré.
Permettez-moi d'exprimer une inquiétude : l'amendement que vous soutenez ne concerne que l'habitat inclusif, alors que nos propositions s'appliquaient aux lieux de vie, qui peuvent être des lieux associatifs et ne sont pas considérés comme de l'habitat inclusif. Ces derniers se retrouveraient donc à devoir appliquer certaines normes, ce qui risquerait de créer une contrainte pour des petites structures qui accueillent au maximum trois, quatre ou cinq personnes seulement. Compte tenu de cette réserve, je maintiens mon amendement.
L'amendement n° 489 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour soutenir l'amendement n° 1146 .
L'habitat inclusif est constitué de lieux de vie sécurisés et adaptés aux besoins des personnes âgées ou en situation de handicap. Il représente une solution de substitution à la vie en établissement ou à domicile, autour d'un projet de vie sociale partagé, coconstruit par les habitants en perte d'autonomie, qui leur permet de s'insérer au sein de cet habitat et à l'extérieur. C'est une mesure d'inclusion que nous devons soutenir et promouvoir.
L'amendement a pour objectif de rappeler la nature de « logement ordinaire » des logements et des parties communes des habitats inclusifs. Il implique, dès lors, que les règles de sécurité contre les risques d'incendie qui leur sont appliquées sont celles concernant les bâtiments à usage d'habitation, tout en laissant la possibilité de prévoir des mesures complémentaires de sécurité.
En effet, certaines commissions de sécurité chargées de donner un avis aux maires ou aux préfets sur le respect de la réglementation de sécurité contre l'incendie considèrent l'habitat inclusif comme relevant de la catégorie des établissements recevant du public, ce qui introduit une logique quantitative liée au nombre de personnes en perte d'autonomie ou en situation de handicap habitant le même domicile. Ceci a pour conséquence directe de ralentir le développement de nouveaux projets – les financeurs et les bailleurs devenant réticents –, et entraîne même un risque de fermeture de ce type de logements.
Il s'agit donc d'améliorer l'accès à un logement de droit commun pour les personnes en situation de handicap et les personnes âgées, et d'encourager ainsi le virage domiciliaire.
L'amendement n° 1146 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Oui, je présenterai ces deux amendements de mon collègue Pascal Lecamp. J'en profite également pour saluer les députés Servane Hugues et François Gernigon, qui ont travaillé sur des amendements similaires.
Il est beaucoup question du virage domiciliaire : donner aux personnes la possibilité de rester chez elles le plus longtemps possible est une bonne chose. Toutefois, cela entraîne une baisse du taux d'occupation des résidences autonomie. La réglementation est ainsi faite qu'elle leur impose des seuils maximaux d'accueil des personnes classées dans un groupe iso-ressources (GIR), d'une part, et limite à 15 % le nombre de places destinées à des personnes plus jeunes, tels que des étudiants, des jeunes travailleurs ou encore des personnes handicapées, d'autre part.
Nous proposons donc simplement d'assouplir ces critères, ce qui offrirait de nombreux avantages : développer l'intergénérationnel, assurer un meilleur remplissage et, par conséquent, soutenir financièrement ces résidences ou encore développer les possibilités d'accueil dans l'ensemble du territoire, les résidences autonomie existant partout. Il ne s'agit pas de fixer des quotas, ni de créer une obligation, mais bien de donner aux résidences autonomie et aux collectivités qui en sont souvent les gestionnaires ou les propriétaires la possibilité de procéder à cette ouverture, si elles le souhaitent.
Par l'amendement n° 1336 , vous supprimez les seuils maximaux d'accueil des personnes les plus dépendantes dans les résidences autonomie. J'y suis favorable dans la mesure où il s'agit d'une demande du secteur, même si nous devons faire preuve d'une grande vigilance pour que cela ne porte pas préjudice aux personnes les plus dépendantes. J'émets un avis favorable à cet amendement, ainsi qu'au n° 1337.
Je salue l'engagement de Mme Bergantz et de M. Lecamp sur ce sujet. Nous devons développer l'habitat intermédiaire et l'habitat inclusif : la suppression du seuil maximal va dans ce sens. C'est pourquoi je suis favorable à ces deux amendements.
Parlons franchement : de nombreux amendements avaient été déposés afin d'enrichir la proposition de loi de dispositions qui n'y figuraient pas à l'origine – je pense à celles sur le logement, par exemple –, dans le but d'avancer.
Cependant, dès l'instant où nous avons la perspective d'une loi de programmation sur le grand âge, il ne sert à rien de s'appesantir sur ces amendements, dont je connais à l'avance le destin. J'espère simplement que, dans la coconstruction annoncée, nous pourrons aborder des sujets un peu disruptifs.
Le présent amendement, que je m'apprête à retirer, était inspiré du rapport de Luc Broussy, à la suite d'une visite qu'il avait effectuée près de Lyon, avec Brigitte Bourguignon et Emmanuelle Wargon alors ministres, dans un lieu d'accueil géré par Habitat et Humanisme. Il appelait l'attention sur le fait qu'il est juridiquement compliqué de monter des maisons des générations, c'est-à-dire des lieux sociaux et médico-sociaux pouvant accueillir des publics différents : personnes en situation de handicap, personnes âgées ou encore personnes en situation de précarité. Il s'agit d'une piste à creuser, qui figurait dans l'un des rapports préparatoires à la loi de programmation sur le grand âge.
L'amendement n° 714 est retiré.
Il vise à favoriser le développement de l'habitat inclusif dans le parc social, en ouvrant la location ou la sous-location dans le logement social à des personnes salariées vivant dans l'habitat inclusif. Il est ainsi dérogé au principe selon lequel le logement social ne peut être lié à un contrat de travail ni pour son attribution ni pour sa résiliation.
Les amendements identiques n° 1282 de M. Freddy Sertin et 1324 de Mme Anne Bergantz sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Permettez-moi, une fois encore, de saluer le travail de François Gernigon sur ces sujets. Nous sommes favorables à tout ce qui permet de développer l'habitat inclusif.
Il vise à favoriser un axe qui nous semble important dans la politique du grand âge, à savoir la cohabitation intergénérationnelle solidaire. Cette forme d'habitat partagé répond à l'objectif de préservation et de soutien de l'autonomie des personnes âgées ou en situation de handicap, et promeut le lien social. C'est une solution d'engagement portée par un jeune et un senior solidaires, qui a fait la preuve de ses effets bénéfiques et vertueux non seulement pour les personnes concernées mais aussi pour la société. Elle permet en outre de lutter contre l'isolement des seniors et de faciliter la mobilité et le pouvoir d'achat des jeunes en leur proposant un loyer inférieur au marché.
Cependant, nous devons limiter certaines pratiques pouvant nuire au développement de ce modèle vertueux. En effet, certains acteurs chargés d'intermédiation entre les seniors et les jeunes choisissent de facturer leurs services non pas au moyen d'une cotisation annuelle, mais en prélevant un pourcentage sur le loyer versé, ce qui entraîne de facto une hausse des loyers, qui atteignent parfois des niveaux comparables à ceux des locations classiques.
C'est pourquoi, pour préserver le principe de solidarité posé par la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, la loi Elan, il convient d'encadrer le dispositif en prévoyant un seuil maximal à ne pas dépasser. Tel est le but de cet amendement.
La parole est à M. François Gernigon, pour soutenir l'amendement n° 1236 .
Cet amendement a pour objectif de garantir l'esprit de solidarité de la cohabitation intergénérationnelle créée par la loi Elan de 2018, en veillant à ce que la contrepartie financière modeste versée par la personne hébergée soit significativement inférieure au loyer habituel du même type de logement. Ce texte vise ainsi à renforcer l'attractivité de cette forme d'habitat partagé, qui offre l'expérience d'un vrai lien intergénérationnel dans la durée, soulage les aidants familiaux, permet de reculer de plusieurs années l'entrée en Ehpad et participe, en outre, à la réussite des étudiants qui n'ont pas à travailler pour financer leur hébergement.
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour soutenir l'amendement n° 555 .
Je me contenterai de faire quelques remarques pour compléter les propos de mes collègues. Historiquement, la cohabitation intergénérationnelle était organisée par des associations qui avaient pour but de mettre en relation des jeunes avec des seniors qui ressentaient un besoin de contacts ou d'assistance. Elles réussissaient, contre une simple cotisation annuelle, à associer des paires et à négocier des contrats très avantageux pour les jeunes. Désormais, dans les régions en tension en matière de logements, on trouve des plateformes d'intermédiation qui mettent en relation n'importe quel propriétaire un peu âgé souhaitant louer une partie de son logement avec un locataire, qui devra signer un contrat non plus à un tarif avantageux mais au prix du marché. Il faut concrétiser la notion de contrepartie financière modeste et faire en sorte que les plateformes ou certains propriétaires ne puissent pas se servir de ce type de contrats pour déroger à la loi de 1989, qui tendait à améliorer les rapports locatifs.
Vous souhaitez vous assurer que la contrepartie financière modeste versée par la personne hébergée dans le cadre d'une colocation intergénérationnelle sera significativement inférieure aux loyers habituels pour le même type de logement : c'est tout à fait louable.
Toutefois, ces amendements n'apportent pas une plus-value évidente par rapport à la notion de contrepartie modeste déjà prévue dans la loi. Ils risqueraient, au contraire, de complexifier l'établissement d'un juste tarif, puisque la référence au prix du marché calculé par les observatoires locaux des loyers semble particulièrement complexe d'utilisation pour les ménages, ce qui risque d'induire inutilement des sources d'incertitude, voire de conflits et de contentieux dans les rapports locatifs. Même si nous ne pouvons que louer l'intention de votre proposition, elle ne semble rien apporter à la loi en vigueur. Demande de retrait.
L'amendement n° 1236 est retiré.
Nous avons tous pour objectif de développer l'habitat inclusif, qu'il faudrait peut-être renommer l'habitat « accompagné, partagé, et inséré dans la vie locale » (API), selon la jolie formule proposée par Denis Piveteau et Jacques Wolfrom dans leur rapport sur l'habitat API – qui pourrait être joyeux, aussi. Pour cela, ils proposaient la création de 150 000 places à l'horizon 2030, une cible qui suppose une stratégie de pilotage, de coordination. Je comprends que l'amendement ne sera pas adopté mais je souhaiterais avoir votre avis à ce sujet, madame la ministre.
Puisque les enjeux de gouvernance seront au cœur de la loi de programmation, l'amendement propose que les conseils départementaux puissent remplir cette mission de planification. Ils délivrent déjà l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH) dont bénéficient les résidents de ces habitats API. En prévision de la négociation avec les départements, il faudrait songer à leur confier la planification du développement des habitats inclusifs sur leur territoire. Cela serait non seulement utile et efficace – dans une logique de prévention –, mais donnerait aussi du grain à moudre au moment de renégocier leurs compétences.
Votre demande nous semble déjà satisfaite par la loi « 3DS ». Les départements sont déjà responsables au premier chef en matière d'adaptation du logement au vieillissement de la population comme d'habitat inclusif, lequel est d'ailleurs pris en compte dans les programmes locaux de l'habitat (PLH). La loi confie au président du conseil départemental la coordination de ces politiques. Demande de retrait ou, à défaut, défavorable.
Nous devrons aborder ces questions sans tabou dans la loi de programmation sur le grand âge. Je ne peux pas vous répondre avant même que nous commencions cette construction transpartisane, donc demande de retrait, ou avis défavorable.
L'amendement n° 705 est retiré.
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour soutenir l'amendement n° 547 .
Il supprime l'obligation, lors du départ du locataire d'un logement, de remettre les aménagements d'accessibilité entrepris par ce dernier dans leur état d'origine.
Le nombre de logements adaptés ou accessibles dans le parc locatif demeure très largement inférieur aux demandes. Il faudrait plus d'une dizaine d'années pour que les bailleurs sociaux parviennent au nombre de logements demandés. Il est absurde de demander aux locataires la remise en l'état des logements aménagés à leur charge. Cela constitue un frein au maintien à domicile des personnes en situation de handicap car, si les familles sont généralement aidées lors des travaux initiaux, elles financent en revanche seules, sans aide, les travaux de remise en état, en cas de départ ou de décès de l'occupant. C'est notamment le cas pour les transformations de baignoires en douches : actuellement, le propriétaire peut exiger du locataire qu'il remette, à sa charge, la douche en état.
Je vous remercie pour cet amendement, au sujet duquel nous avions déjà échangé en commission. Je suis totalement d'accord avec vous, il est absurde de demander à un locataire qui a transformé une baignoire en douche pour disposer d'un logement adapté à son niveau d'autonomie, de remettre la douche à l'état de baignoire au moment de son départ. C'est pourquoi j'y suis favorable.
L'amendement n° 547 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 13 bis est adopté.
L'amendement n° 1218 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 13 ter, amendé, est adopté.
L'article prévoit la remise au Parlement d'un rapport établissant un cadre juridique et financier pour l'hébergement mixte. Nous voudrions pouvoir disposer de ce rapport en vue de l'élaboration de la loi de programmation sur le grand âge, dont le calendrier a été annoncé hier par la Première ministre en réponse à une question de la présidente de la commission des affaires sociales.
Je profite de l'occasion – car vous avez compris, madame la ministre, que nous sommes dans une démarche constructive – pour vous redire que nous aimerions voir gravé ce calendrier dans le marbre de cette proposition de loi, laquelle aurait ainsi le mérite, au-delà des articles – positifs mais insuffisants au regard des enjeux – qu'elle comporte, de confirmer qu'une loi de programmation sur le grand âge est bien planifiée.
L'amendement n° 1219 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 13 quater, amendé, est adopté.
La parole est à M. Emmanuel Pellerin, pour soutenir l'amendement n° 1266 .
Une large majorité de Français a exprimé le souhait de vieillir et de mourir à domicile. Cette question du libre choix est devenue prioritaire pour le Gouvernement, qui y consacrera près de 1 milliard d'euros d'ici à 2025. Plusieurs plans, décrets et circulaires proposent déjà des mesures favorisant la dispense de soins, l'hospitalisation et le recours aux soins palliatifs à domicile. Toutefois, aucune disposition législative ne crée expressément de droit à une prise en charge à la maison. Cet amendement d'appel vise à pallier ce manque en ajoutant aux grands principes du code de la santé publique le droit à une prise en charge médicale et paramédicale au domicile.
Cher collègue, je ne peux qu'être d'accord avec vous. Malheureusement, inscrire dans la loi que « toute personne en perte d'autonomie ou en fin de vie a le droit à une prise en charge médicale et paramédicale à domicile » ne suffira pas à garantir ce droit, qui suppose des mesures concrètes et des moyens. Je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, j'y serai défavorable.
L'objet de votre amendement correspond à celui du plan décennal « douleurs et soins palliatifs » annoncé par le Président de la République. Il est donc satisfait. Demande de retrait ou, à défaut, défavorable.
L'amendement n° 1266 est retiré.
Il aborde la fin de vie et les soins palliatifs, un vaste sujet effectivement, qu'il nous faudra aborder plus tard.
L'amendement n° 1150 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Martine Etienne, pour soutenir l'amendement n° 655 .
Il concerne le rapport évaluant les effets sur la loi de financement de la sécurité sociale de l'instauration d'un ratio d'encadrement minimal des résidents par le personnel soignant dans les établissements hospitaliers pour personnes âgées dépendantes. Vous constaterez que cet amendement et ceux qui suivent proposent plusieurs dates de remise afin de vous laisser – largement – le temps de le finaliser, mais il nous le faut au plus vite.
Il y a longtemps que nous vous demandons d'instaurer un ratio de six soignants pour dix patients : le 14 mars 2018, les députées Monique Iborra et Caroline Fiat remettaient un rapport d'information consacré à la situation catastrophique dans les Ehpad ; quelques semaines plus tard, Caroline Fiat le remettait en mains propres au Président de la République ; à l'automne dernier, nous avons adopté un amendement au PLFSS pour 2023 demandant au Gouvernement un rapport sur ce ratio minimal d'au moins six professionnels pour dix résidents, qui aurait dû être remis le 23 mars dernier.
Or force est de constater qu'aucun rapport n'a été remis. Ça suffit, madame la ministre, on ne peut plus attendre ! Pendant ce temps, des gens souffrent, des résidents baignent des heures dans leurs excréments ,
« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe RE
faute de temps ou de moyens. Les toilettes des patients sont réalisées en moins de six minutes sur des corps souvent meurtris. Il est question de malnutrition, de personnes alitées vingt-quatre heures sur vingt-quatre sans changer de position, d'escarres non soignées, de pleurs et de larmes, de soignants qui quittent la profession, d'accidents du travail à répétition, d'épuisement professionnel ou, pire, de suicides. Ce rapport, tout comme l'embauche de personnels soignants, ne peut plus attendre ; votre loi de programmation sur le grand âge, non plus !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Mme Fiat nous a d'ailleurs remerciés en commission. Demande de retrait ou avis défavorable.
Je m'étais engagée ici même à remettre ce rapport. Caroline Fiat l'a reçu, elle l'a dit publiquement hier en commission des affaires sociales.
L'amendement n° 655 est retiré.
Ces amendements visent toujours le même rapport, qui a été remis, comme Caroline Fiat l'a reconnu elle-même. Demande de retrait ou, à défaut, défavorable.
L'habitat inclusif ne représente qu'une solution parmi d'autres pour lutter contre l'isolement social et assurer le « bien vieillir » des personnes âgées. Il reste insuffisant pour répondre à la diversité des profils et des demandes de ces derniers, dont 82 % refusent la maison de retraite. D'autres options doivent être promues, comme les béguinages ou d'autres formes de logements participatifs et associatifs, ainsi que les colocations privées intergénérationnelles et inclusives.
Cet amendement n'entend pas diviser, il se veut simple et nécessaire, il vise l'unanimité. Le Gouvernement l'a souligné : il est urgent d'offrir des solutions modulables et adaptées à chaque profil. Pourtant, la proposition de loi se focalise sur l'aide à domicile et l'habitat inclusif. Je demande donc un rapport sur la création ou l'extension d'autres formes d'habitat, propres à faciliter la visibilité, la mise en relation ou l'aide administrative afin de lutter contre l'isolement et garantir le « bien vieillir ».
L'amendement n° 313 de M. Vincent Descoeur est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Nous œuvrons concrètement, notamment depuis la loi « 3DS », pour favoriser le déploiement de l'habitat inclusif à grande échelle sur l'ensemble du territoire. Ainsi, l'an dernier, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, nous avons considérablement augmenté les aides publiques allouées à ce type de logements, dont le montant, qui était de 45 millions d'euros en 2022, sera porté à 73 millions en 2025, soit une augmentation d'environ 20 millions en trois ans.
Votre demande de rapport ne me paraît donc pas utile. Regardons plutôt ce que nous réalisons concrètement ! Avis défavorable.
Nous nous accordons tous, je crois, sur la nécessité de développer l'habitat inclusif. Il faut sortir de la logique du tout-domicile ou du tout-Ehpad. Une offre intermédiaire doit pouvoir voir le jour ; c'est le type même de mesures que nous devrons examiner dans le cadre du projet de loi de programmation. Mieux qu'un rapport, nous aurons, dès 2024, des outils pour agir directement dans ce domaine. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.
L'amendement n° 313 est retiré.
L'amendement n° 1222 est retiré.
La parole est à Mme Caroline Colombier, pour soutenir l'amendement n° 882 .
En 2022, selon la Fédération 3977 contre les maltraitances, le nombre de signalements a connu une hausse importante, en particulier pour des faits survenus en établissement. D'abord accentué par la médiatisation de l'affaire Orpéa – les signalements ont augmenté de 24 % au premier semestre –, le phénomène s'est maintenu au fil des mois.
La hausse importante du nombre des appels adressés à cette plateforme depuis 2021 doit faire l'objet d'une attention particulière. Car, si la Fédération 3977 n'intervient pas directement, elle joue un rôle d'intermédiaire auprès de nombreux acteurs. Ce rôle de conciliateur n'est pas à prendre à légère puisque la plateforme est parfois le premier contact de la famille ou de la personne victime d'une situation de maltraitance. Il convient donc d'avoir une idée du nombre des situations qui ont connu une issue favorable et des points de blocage récurrents qui empêchent les améliorations.
La proposition de loi prévoit déjà des outils concrets pour lutter contre les maltraitances ; il s'agit de mesures véritablement opérationnelles, plus intéressantes qu'un nouveau rapport sur le sujet. Avis défavorable.
La Fédération 3977, dès lors qu'elle perçoit des subventions publiques, doit produire un bilan annuel, que nous pourrons vous communiquer, s'il n'est pas public. Demande de retrait.
L'amendement n° 882 est retiré.
Le rapport d'activité pour 2021 de la plateforme 3977 indique que 73 % des maltraitances ont lieu au domicile de la personne âgée. S'il est positif que les cas de maltraitance en Ehpad suscitent l'intérêt des médias et des pouvoirs publics, ils ne doivent pas nous faire oublier que de tels actes peuvent également être commis au domicile de la personne aidée.
Lorsqu'une personne aidée à domicile signale un fait de maltraitance, elle doit bénéficier d'une prise en charge spécifique qui pourrait l'amener à quitter son logement. Que les actes aient été commis par une aide à domicile ou par un proche aidant, le traumatisme peut pousser la personne victime à vouloir s'éloigner de son domicile.
L'accueil en hébergement temporaire pour personne âgée pourrait être une solution de transition : il permettrait à la personne aidée de quitter un environnement stressant et d'être prise en charge tout en s'organisant pour la suite. Des places d'urgence pourraient ainsi être réservées aux personnes ayant subi des actes de maltraitance afin de les accueillir au plus vite.
Là encore, la présente proposition de loi vise à instaurer un dispositif de recueil, de traitement et de suivi des alertes de maltraitance envers les personnes majeures vulnérables, dispositif qui nous paraît bien plus utile qu'une demande de rapport sur le sujet. Avis défavorable.
Sur le fond, la lutte contre les maltraitances est évidemment une priorité. Il est vrai que les maltraitances qui sont le plus difficiles à appréhender sont celles qui sont commises au domicile, notamment parce que la personne maltraitante peut être la seule à rendre visite à la personne âgée. Dans un tel cas, comment faire ? À qui parler ? C'est tout l'enjeu de la stratégie nationale de lutte contre les maltraitances, qui sera présentée en décembre, et du dispositif prévu dans la proposition de loi, qui vise à créer un véritable circuit de signalement des maltraitances pour accompagner les personnes vulnérables. La stratégie nationale vous apportera des réponses plus précises et plus concrètes. Demande de retrait.
L'amendement n° 884 est retiré.
Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai également l'amendement n° 943 , car les deux amendements portent tous les deux sur une simple demande de rapport.
Madame la ministre, madame la rapporteure, vous avez refusé tous ceux de nos amendements qui visaient à supprimer la récupération sur succession de l'aide sociale à l'hébergement, au motif que ces amendements n'étaient pas financés et qu'une telle mesure ferait perdre trop d'argent aux caisses de sécurité sociale.
Nous vous proposons donc d'y réfléchir, de trouver des sources de financement et de mesurer tous les avantages d'une telle suppression. Puisque nous allons devoir, dès demain, réfléchir, ensemble – j'espère ! –, à un projet de loi de programmation sur le grand âge, le moment est idéal pour réaliser un rapport sur la récupération sur succession, dont je rappelle qu'elle est l'une des premières causes de non-recours.
En effet, les potentiels bénéficiaires de l'aide sociale à l'hébergement n'en font pas la demande car ils ne veulent pas pénaliser leurs enfants ou leurs petits-enfants. Il est terrible de voir des personnes âgées en souffrance renoncer à leurs droits pour cette raison.
Madame la ministre, vous vous êtes dites prête à entendre les propositions de l'ensemble des groupes dans le cadre de la préparation du projet de loi relatif au grand âge. Voilà l'une des nôtres ! Remettez-nous un rapport sur le sujet : il servira de base à nos discussions lors de l'examen du texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce que vous dites est tout à fait pertinent – nous avons eu de nombreuses discussions sur cette question, qui concerne beaucoup de personnes âgées. Mais je crois que le rapport proposé n'aurait pas d'utilité dès lors que Mme Pires Beaune nous a remis les conclusions de ses travaux, sur lesquelles nous nous appuierons pour réfléchir à la question. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.
Il s'agit de deux demandes de rapport. Je vais retirer les amendements, par cohérence avec ce que j'ai indiqué tout à l'heure.
Si la discussion avance rapidement, c'est parce que nous avons la perspective d'un projet de loi de programmation sur le grand âge. Mais, hier et avant-hier, nous vous avons demandé – puisqu'un amendement, cosigné par huit groupes, avait été adopté à l'unanimité sur le sujet et qu'il est désormais caduc – une seconde délibération pour inscrire dans le texte le délai dans lequel le projet de loi de programmation devra être présenté. Accepter, ce serait rendre hommage à la mobilisation unanime des parlementaires, qui a sans doute en partie contribué, si cela était nécessaire, à convaincre le Gouvernement d'agir.
Volontiers, madame la présidente. Il s'agit, là encore, d'une demande de rapport sur le développement d'un réseau de maisons de retraite publiques dans lesquelles serait appliqué un tarif harmonisé et accessible à tous.
En effet, les Ehpad privés à but lucratif refusent bien souvent les personnes âgées les plus pauvres. Prenons l'exemple d'un couple de ma circonscription. Le mari, qui est moins autonome, est en Ehpad tandis que son épouse – l'amour de sa vie – est à domicile, seule, parce qu'ils n'ont pas assez d'argent pour payer deux places en Ehpad. Après plus de soixante ans de mariage, ils vivent leurs vieux jours séparés parce que les Ehpad privés sont trop chers !
Le scandale Orpea a enfin mis en lumière la réalité crue des Ehpad à but lucratif : quelques personnes s'enrichissent grâce à la maltraitance des personnes âgées. Pour mettre fin à cette immense escroquerie, nous vous proposons d'adopter cet amendement et, ce faisant, de commencer dès maintenant à étudier nos propositions. Nous y reviendrons lors de l'examen du projet de loi sur le grand âge.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le reste à charge est en effet une véritable problématique mais, comme je vous l'ai indiqué il y a quelques minutes, tous les éléments figurent dans le rapport de Mme Pires Beaune. Avis défavorable.
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour soutenir l'amendement n° 1116 .
Nous proposons que, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'opportunité de réformer la gouvernance actuelle du secteur médico-social. Ce rapport comporterait des propositions pour améliorer la lisibilité de ces politiques, que ce soit pour les professionnels du secteur ou pour les personnes âgées et leurs proches.
L'amendement n° 1116 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Sur le vote de l'amendement n° 953 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such, pour soutenir l'amendement n° 1223 .
Encore une fois, la proposition de loi reste cramponnée à deux solutions : celle de l'aide à domicile et celle de l'habitat inclusif. Pourtant, sur le marché, nos concitoyens sont déjà nombreux à proposer, sous la forme de différents modes d'habitat associatif ou privé, des solutions à nos aînés.
Or non seulement ces offres ne sont pas encouragées, mais elles sont découragées légalement et administrativement. Ainsi, il est compliqué pour le bailleur d'un habitat collectif ayant un projet d'inclusion et de lutte contre l'isolement de donner congé à un locataire qui nuirait à ce projet, intentionnellement ou non. Très souvent, les solutions ne correspondent pas aux situations rencontrées dans ces nouveaux types d'habitat, du fait de la fragilité et de la diversité des résidents. Que faire, par exemple, si une personne adopte un comportement anormal avec les autres locataires ou se drogue ?
Les logements intermédiaires entre domicile et hôpital doivent bénéficier d'un système d'accompagnement des bailleurs pour que le bien vieillir puisse être assuré dans ces logements. Ce serait un premier pas.
L'amendement n° 1223 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Anne Bergantz, pour soutenir l'amendement n° 1343 .
Il s'agit de s'inspirer, pour l'aide aux personnes âgées, de la réussite des services de remplacement qui existent dans le secteur agricole : un agriculteur sur cinq est adhérent à l'un de ces services, qui sont au nombre de 320 en France.
Nous proposons donc que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant l'opportunité de créer des services de remplacement départementaux, qui emploieraient du personnel – qu'il s'agisse de personnel soignant, de personnel hôtelier ou d'animateurs – ayant vocation à être mis à disposition des Ehpad et des résidences autonomie.
Une telle structuration faciliterait la recherche de personnel qualifié et de confiance, notamment au cours des périodes estivales, durant lesquelles les problèmes de recrutement sont criants. Dans un second temps, ces services pourraient être développés pour recruter des personnels qui interviendraient de manière régulière, et non plus temporaire, dans le cadre d'un temps complet partagé entre plusieurs établissements. Ils auraient ainsi une seule relation contractuelle.
Cela permettrait aux petits établissements de recourir au service, notamment, de soignants et d'ergothérapeutes dont le modèle économique ne permet pas le recrutement d'une personne à temps complet. Enfin, la démarche de regroupement pourrait également répondre en partie à la faiblesse du partage de bonnes pratiques et de communication entre les établissements, faiblesse que regrettent les acteurs du secteur.
L'attractivité des postes du secteur médico-social est une question importante mais un nouveau rapport sur le sujet ne m'apparaît pas opportun. J'émets donc un avis défavorable.
L'amendement n° 1343 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 14 concerne la compensation des charges. Comme il s'agit d'une proposition de loi, faute d'étude d'impact, nous ne savons pas quel montant sera compensé. Au début de la discussion du texte, j'ai demandé à votre prédécesseur au banc du Gouvernement, Jean-Christophe Combe, alors ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, à combien il estimait ce texte. Il m'a répondu qu'on verrait en fonction des amendements qui auront été votés. De notre côté, sur la base des quatorze premiers articles, nous avions évalué son coût à environ 200 ou 220 millions d'euros. Pouvez-vous donc nous donner, à ce stade, madame la ministre, votre estimation des dépenses créées et qui devront être compensées par la levée de gage du Gouvernement. Il est important que la représentation nationale soit éclairée et dispose d'une estimation, fût-elle grossière.
La parole est à Mme Martine Etienne, pour soutenir l'amendement n° 989 .
Le présent amendement vise à supprimer le gage de la proposition de loi. En effet, les politiques publiques du grand âge nécessitent des financements supplémentaires, et il revient au Gouvernement de faire un effort.
J'en profite pour faire remarquer que nous avons déposé plusieurs propositions de loi visant à abroger la réforme des retraites imposée sans un vote des députés. La présidente et le bureau – à majorité macroniste – de l'Assemblée ont décidé qu'elles étaient irrecevables parce qu'elles créaient une dépense supplémentaire.
La dernière proposition de loi que nous avons déposée à l'occasion de notre niche parlementaire, était gagée sur le tabac – exactement comme la présente proposition de loi. Nous aimerions donc bien y voir plus clair. Pourquoi, quand les propositions de loi viennent des macronistes, elles peuvent créer des charges, alors que les nôtres, qui visent à supprimer la réforme des retraites, sont déclarées irrecevables ?
Mme Clémence Guetté applaudit.
Je peux bien vous poser la question, madame la ministre, puisque vous avez participé au bureau qui a examiné la proposition de loi du groupe LIOT et qui l'a déclarée irrecevable pour les mêmes raisons. Le présent texte coûtera plusieurs millions d'euros, or vous allez le gager exactement de la même manière que nous avons gagé le nôtre, et pourtant la présidente de l'Assemblée lui a réservé un traitement différent.
Vous sapez la démocratie, les règlements et toute la jurisprudence en vigueur, afin de parvenir à vos fins politiques, pour obliger le peuple à travailler deux ans de plus et pour diminuer l'espérance de vie en bonne santé.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Sans vouloir polémiquer ni trop prolonger les débats, j'estime que notre collègue, au début de son intervention, a dit vrai : le présent texte, qui a pour ambition de bâtir une société du bien vieillir, fait complètement l'impasse sur les moyens qui seraient consacrés à l'adaptation de la société au vieillissement de la population. Vous faites l'impasse sur le volet financier, et pourtant nous sommes toutes et tous conscients que, sans moyens, la proposition de loi ne servira à rien, qu'elle ne présente aucun intérêt – j'y reviendrai dans mon explication de vote –, et n'est qu'une déclaration de très bonnes intentions.
Malheureusement, sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres, à un moment donné, il faut de l'argent.
L'amendement n° 989 n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté.
J'insiste sur l'estimation du coût des mesures votées – nous y reviendrons peut-être.
Le présent amendement est quelque peu symbolique. Le titre serait ainsi rédigé : « Proposition de loi portant diverses mesures concernant la perte d'autonomie des personnes âgées ». Il ne s'agit pas de minorer la portée du texte mais d'en revenir à ce qu'il est : une première étape. Parallèlement, je vous fais une proposition pour rendre hommage aux rapporteures et à ceux qui ont été à l'initiative de la proposition de loi : Laurence Cristol, Annie Vidal et nous pouvons également avoir une pensée pour Monique Iborra.
La loi de programmation à venir pourrait s'intituler : loi de programmation pour bâtir une société du bien vieillir. Puisque c'est cette loi de programmation qui répondra réellement aux enjeux et que c'est la présente proposition de loi qui l'aura permise, nous rendons hommage à la première en lui donnant le nom initialement choisi pour la seconde – ramenée à une ambition plus modeste. Nous marquerions ainsi la continuité entre les deux textes.
La parole est à Mme Martine Etienne, pour soutenir l'amendement n° 1041 .
Nous avons déploré l'abandon puis avons noté le retour surprise de l'idée d'une loi sur le grand âge. En effet, au mois d'avril, au début de l'examen de la présente proposition de loi, nous ne nous y attendions pas. Nous venons d'examiner, pendant plusieurs heures, un texte très mal nommé portant sur le « bien vieillir », fait de mesurettes, très loin d'être à la hauteur des besoins de nos aînés, des personnes dépendantes et des personnels soignants. Si Emmanuel Macron avait respecté ses promesses, nous n'en aurions pas eu besoin. Voilà déjà plusieurs années, en effet, que nous aurions dû avoir une grande loi de programmation sur le grand âge.
Vous nous promettez donc de la remettre à l'ordre du jour mais sans que nous sachions quand ni comment, ni non plus avec qui et dans quel contexte. Quand on parle d'autonomie, on parle de financement. Quand on parle des aides à domicile, on parle salaires, indemnités kilométriques. Quand on parle des Ehpad, on parle des soignants, de la bien-traitance et du recrutement. Vous n'avez rien dit de tout cela dans votre proposition de loi. Vous ne prévoyez aucun financement ; vous n'y mettez pas d'argent. Nous nous retrouverons donc à l'occasion de l'examen du texte sur le grand âge et nous espérons qu'il sera autrement plus ambitieux que celui-ci.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous souhaitons renommer la proposition de loi : elle porterait « diverses mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France sans disposition permettant d'améliorer le statut des proches aidants ». Eh non, nous n'avons pas évoqué les proches aidants, pourtant nombreux et si invisibles. Plus de 3 millions de personnes de plus de 60 ans vivant à domicile déclarent être aidées régulièrement dans les activités de la vie quotidienne. Dans 82 % des cas il s'agit d'un membre de l'entourage, souvent un enfant ou un compagnon. Un article du Monde publié cette semaine et dont je ne sais pas si vous l'avez lu, révélait que 16 % des étudiants sont des aidants. C'est énorme. C'est un travail invisible, une charge mentale considérable, qui coûte cher et n'est pas reconnu – et qui mériterait de l'être.
Je sais de quoi je parle : je suis moi-même proche aidante de ma maman, 96 ans. Et, franchement, en tant que députée, je suis frustrée de parler du grand âge en examinant une proposition de loi aussi creuse.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
En tant qu'aidante, je ne me sens pas du tout reconnue. On n'évoque pas le reste à charge des aidants, les solutions de répit, de remplacement, les formations ou la gestion de la charge mentale.
Vraiment, encore une fois, j'ai l'impression de me répéter, il faudra vraiment y revenir au moment de l'examen du projet de loi de programmation sur le grand âge. En tout cas, je serai là.
Mêmes mouvements.
Je vous remercie pour vos interventions, mais la proposition de loi, au contraire de ce que vous avancez, nous semble très importante.
Nous avons commencé à travailler il y a plus de six mois et, si ce n'est que ce soir que nous achevons l'examen du texte, c'est parce qu'il a fait l'objet de nombreux débats, d'apports, d'amendements, certains ajoutant des articles. Il s'agit bien, par conséquent, d'une proposition de loi visant à bâtir la société du bien vieillir et nous l'assumons totalement. J'émets donc un avis défavorable.
Je suis également défavorable à ces amendements, dont certains vont peut-être un peu loin et d'autres restent un peu courts. Quant au projet de loi de programmation sur le grand âge, je vous propose d'en déterminer le titre dans le cadre transpartisan que j'ai fixé.
Si ce texte était si important, madame la rapporteure, nous n'aurions pas attendu autant de temps pour en finir l'examen. Il faut être sérieux, un peu de décence tout de même !
Mme Clémence Guetté et M. Ian Boucard applaudissent.
Nous avons commencé en avril, nous arrêtant à l'article 6, pour reprendre l'article 7 six mois plus tard !
Sept mois plus tard ! Je le répète : soyons sérieux ! Quand on considère qu'une proposition de loi est importante, on la traite immédiatement – ce qui n'a pas du tout été le cas, ici – et on en termine.
Or si nous achevons son examen ce soir, c'est sans doute plus pour des raisons politiciennes qu'à cause de son importance.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 77
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 12
Contre 54
L'amendement n° 953 n'est pas adopté.
Nous souhaitons remplacer les mots : « bâtir la société du bien vieillir en France », par les mots : « réorganiser la transition démographique, la perte d'autonomie et le vieillissement de la population française ». L'usage d'un vocabulaire dans l'air du temps ne donne pas de force au texte de loi mais aura comme seule conséquence de très vite dater le texte et de ne pas lui donner la portée intemporelle que nous sommes en droit d'attendre ici.
Le souci louable – ou non – de faire de la communication à tout prix ne doit pas déterminer l'écriture de la loi.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
En application de l'article 101 du règlement, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération de l'article 2 bis B.
Vendredi dernier, j'ai annoncé que nous pourrions examiner un projet de loi de programmation. La Première ministre a confirmé cet engagement et en a même précisé le calendrier : le texte devra être déposé au plus tard l'été prochain, de manière à être définitivement adopté avant la fin de l'année 2024.
Pour satisfaire les demandes des parlementaires et l'amendement adopté à l'unanimité le 13 avril dernier, je vous propose une seconde délibération – demandée, de manière un peu inhabituelle, par les députés –, afin d'inscrire dans la loi, conformément aux engagements du Gouvernement, l'obligation d'adopter la loi de programmation pour le grand âge avant la fin de l'année 2024. Cela permettra de garantir son dépôt avant l'été, dans un esprit transpartisan.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR et sur quelques bancs du groupe RN. – M. Jérôme Guedj applaudit également.
Je le dis peut-être de manière présomptueuse mais, au nom de l'ensemble des parlementaires, qui ont voté le 13 avril dernier cet amendement – il s'avère que c'était le mien, mais des amendements identiques provenaient de tous les bancs – demandant une loi de programmation pour le grand âge avant le 1er septembre 2023, je vous remercie.
En répondant à cette demande, vous établissez une continuité entre cette proposition de loi et la loi de programmation annoncée. Ce n'est pas qu'une disposition symbolique, puisque vous avez précisé, madame la ministre, que ce texte qui prendra d'abord la forme d'un projet de loi – d'ordinaire conçu, dans cette satanée V
Ce résultat, lors du lancement de l'examen du texte en avril, n'était pas acquis. Je veux donc mettre à votre crédit les avancées qui ont pu être obtenues.
La forme est là, nous allons à présent la faire vivre sur le fond ; c'est le sens du travail de coproduction législative auquel vous nous invitez. Sans esquiver les débats de fond, il permettra de répondre à l'attente des personnes âgées, des professionnels et des familles qui les accompagnent.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR et sur quelques bancs du groupe Écologiste – NUPES.
Sur l'amendement n° 1 , je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Rires.
Monsieur Guedj, n'aviez-vous pas épuisé tout ce que vous aviez à nous dire ce soir ?
Sourires.
La demande de scrutin public ne m'ayant été communiquée que très tardivement, les cinq minutes réglementaires ne sont pas écoulées mais, si tout le monde en est d'accord, je vais procéder au scrutin, sans attendre.
Approbations sur l'ensemble des bancs.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 89
Nombre de suffrages exprimés 89
Majorité absolue 45
Pour l'adoption 89
Contre 0
L'amendement n° 1 est adopté.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR. – MM. Louis Boyard et Jérôme Guedj applaudissent également.
L'article 2 bis B, amendé, est adopté.
Sur la proposition de loi, la conférence des présidents a décidé qu'il serait procédé à un scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Cette proposition de loi est la quintessence de ce que fait quotidiennement la Macronie.
Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.
Lors du quinquennat précédent, Emmanuel Macron avait promis d'engager une loi d'envergure sur le grand âge. Après la pandémie, tout le monde s'en réjouissait, ayant constaté à quel point les personnes âgées pouvaient être touchées par des épidémies de cette ampleur. Nous avons également découvert le scandale Orpea, et les Ehpad privés lucratifs qui organisent la maltraitance des personnes âgées.
Toutefois, malgré tout cela, le Gouvernement n'a rien trouvé de mieux à faire que de nous mentir. Il n'aura jamais fait de loi sur le grand âge ; pire, il a imposé une réforme des retraites sans vote à l'Assemblée nationale,…
…en imposant deux ans de plus de travail forcé à l'ensemble des travailleurs, et en engendrant le plus grand mouvement social depuis cinquante ans.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il aura considérablement dégradé les conditions de vie des personnes âgées et réduit l'espérance de vie en bonne santé. Pour se faire pardonner, les députés de la minorité présidentielle ont sorti cette proposition de loi, promettant de « bâtir la société du bien vieillir ». C'était ambitieux mais, encore une fois, insuffisant.
Cette proposition de loi n'est qu'une succession de mesurettes, de fausses bonnes idées, et d'effets d'annonce venant maladroitement masquer l'inaction gouvernementale sur la question de l'autonomie. Sachez que nous ne sommes pas dupes !
Il y a quelques jours, vous avez enfin annoncé, madame la ministre, une loi de programmation sur le grand âge. Mais si les effets d'annonce passent bien dans les médias, on aimerait qu'ils soient concrétisés. Nous avons demandé plusieurs fois quand, comment et avec qui vous vouliez mettre en place votre projet de loi. Nous avons même proposé une date…
…et, cette fois, vous l'avez acceptée – il était plus que temps. Nous nous retrouvons cependant à débattre d'une proposition de loi vide, suspendue durant des mois, et qui sera balayée un jour par une hypothétique loi sur le grand âge, dont nous ne savons rien.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Madame la ministre, s'il s'agit là du brouillon de cette future loi, nous sommes inquiets, et nous sommes mal partis ! Cette proposition de loi ne s'appuie sur aucun budget, ne porte aucune mesure sur les proches aidants, ne lutte pas contre la maltraitance en Ehpad et n'améliore pas les conditions de travail des aides à domicile.
Mêmes mouvements.
Les personnes âgées, les professionnels de la dépendance, les familles et les proches aidants méritent davantage de considération.
Nous espérons que la loi tant attendue sur le grand âge sera à la hauteur des ambitions affichées, et qu'elle abondera comme il se doit la cinquième branche de la sécurité sociale. Les personnes âgées représentent, en effet, plus de 20 % de la population, en forte croissance – ils seront plus de 20 millions en 2030, et 24 millions en 2060.
Pour réellement bâtir la société du bien vieillir, il faudra instaurer la retraite à 60 ans et retirer enfin votre réforme des retraites injuste et délétère.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il faudra lutter contre l'isolement des personnes âgées, créer des postes en Ehpad et ouvrir des lits. Il faudra qu'il y ait au moins six soignants pour dix résidents, afin de lutter contre la maltraitance. Enfin, il faudra transformer les Ehpad privés à but lucratif en structures associatives ou publiques…
…pour stopper l'enrichissement des grands groupes sur le dos des personnes âgées.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Il faut impérativement revaloriser le salaire des aides à domicile, améliorer leurs conditions de travail, généraliser les CDI à temps plein, et mettre en place un fonctionnement à la tournée. Je ne vois rien de tout cela dans cette proposition de loi.
Soyez sûrs que nous travaillerons sur la loi relative au grand âge. La nôtre est déjà prête et s'articule autour d'une évidence : pour garantir la dignité des personnes âgées et les assurer de pouvoir bien vivre et bien vieillir, il faut créer un réel service public de la dépendance.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Mes chers collègues, nous avons déjà dépassé l'horaire normal ; puis-je vous inciter à la concision ?
Cette proposition de loi aborde un sujet essentiel – celui du vieillissement – et questionne la capacité de notre société à y faire face. Il faut répondre à la peur de celles et ceux qui vieillissent, qui craignent de se trouver isolés, seuls, de ne pas avoir les moyens d'affronter la perte d'autonomie, de ne pas pouvoir compter sur leur famille ou au contraire de trop les solliciter. Comme le disait la grande actrice Jeanne Moreau, « la peur de vieillir abîme plus que l'âge ».
Nous avons repris l'examen du texte, après une interruption de sept mois, ce qui en dit long sur le niveau de priorité accordé par la majorité à la question du vieillissement. Néanmoins, elle reste sympathique et pleine de bonnes intentions, et nous n'avons aucune raison de voter contre. Quelques petites avancées sont même à souligner, à l'instar de l'article 8 ou de l'ouverture que vous venez de consentir à l'article 2 bis B ; au nom de mon groupe, je vous en remercie sincèrement.
C'est cependant une proposition de loi qui se contente de bonnes intentions, bien loin de la loi sur le grand âge que nous attendons depuis 2017, pour la simple raison qu'il s'agissait d'une promesse du candidat Emmanuel Macron, reprise par de nombreux ministres telle Agnès Buzyn, qui l'a souvent réitérée sans cet hémicycle. Il y a bien longtemps qu'Agnès Buzyn n'est plus ministre, et pourtant cette loi n'est toujours pas advenue.
Je veux cependant croire en votre sincérité, lorsque vous annoncez une loi de programmation sur le grand âge, nécessaire puisqu'il n'y a toujours pas de financement pérenne pour la cinquième branche de l'assurance maladie dédiée à l'autonomie. Nos aînés méritent mieux ; les aidants et les associations aussi.
Nous n'avons, par conséquent, pas de raison de voter contre cette loi, ni de voter pour ; nous nous abstiendrons donc sur ce texte.
Nous attendons la loi sur le grand âge ; c'est sur elle, madame la ministre, que nous vous jugerons.
Nous pouvons nous féliciter de voir cette proposition de loi aboutir. Je tiens à remercier le travail des rapporteures, Annie Vidal et Laurence Cristol, et celui de madame la ministre, qui s'est saisie avec énergie, pragmatisme et un grand esprit d'ouverture de cette proposition de loi.
Ce texte constitue une fondation, une pierre, une brique supplémentaire – clin d'œil à nos débats – sur la question du grand âge et apporte des avancées concrètes pour un meilleur accompagnement de nos aînés.
Il a permis d'identifier les points de convergence, d'accueillir un foisonnement d'idées, et une volonté commune de voir progresser la prévention, l'information des personnes âgées, la bientraitance et la valorisation des métiers qui y sont liés.
Je salue votre engagement, madame la ministre – réaffirmé par le vote auquel nous venons de procéder –, pour la loi de programmation pluriannuelle tant attendue.
S'agissant des questions de financement – fusion des sections soins et dépendance des Ehpad, forfait global pour les soins à domicile –, je partage la vision du Gouvernement selon laquelle l'expérimentation avant la généralisation est un choix raisonnable.
Il faut travailler et construire conjointement avec les départements et le secteur de l'autonomie des solutions pragmatiques, tenant compte des réalités de terrain et de la grande complexité du financement de cette politique – c'est la bonne méthode.
Vous l'aurez compris, le groupe Démocrate votera pour ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.
Il y a quelques semaines encore, nous étions dubitatifs quant à l'arrivée à son terme de cette proposition de loi. Ce n'était pas tant les mesures qu'elle contenait qui nous laissaient perplexes, que le sens que vous leur donniez. Nous étions inquiets que la volonté des parlementaires du groupe Renaissance à l'origine de ce texte – Annie Vidal, Laurence Cristol, Astrid Panosyan-Bouvet –, celle de ne pas laisser en jachère la promesse faite par le président de la République dès 2017, n'aboutisse qu'à la tentative frustrée de faire quelque chose malgré tout.
Chacune des mesures, prise isolément, allait dans le bon sens, mais il manquait une vision globale – celle qu'aurait dû contenir la loi annoncée sur le grand âge.
Nous avons cependant joué le jeu et enrichi le texte. À cet égard, il faut vous remercier pour l'intégration d'une disposition facilitant le partage de données entre départements et CCAS – centres communaux d'action sociale – afin de mieux lutter contre l'isolement ; il faut également saluer l'amendement n° 1247 à l'initiative du Gouvernement, créant dans chaque département un service public territorial de l'autonomie.
Une inquiétude demeurait néanmoins : que cette proposition de loi fasse office de solde de tout compte, uniquement destiné à cocher la case d'un travail législatif sur le vieillissement. Nous nous y serions alors opposés.
Toutefois, le groupe Socialistes a choisi de vous faire confiance. Chat échaudé aurait pourtant pu craindre l'eau froide ! Après les promesses d'Emmanuel Macron, d'Édouard Philippe, d'Agnès Buzyn et d'Olivier Véran, nous aurions pu considérer qu'aucune concrétisation supplémentaire n'était à attendre de votre part.
Je suis un optimiste, d'autant plus que j'ai constaté votre volonté de voir le sujet avancer.
Je suis aussi un réaliste, un lucide. Vous avez annoncé une stratégie relative au bien vieillir. Celle-ci aborde l'ensemble des sujets mais, je vous le dis sincèrement, à l'image de cette proposition de loi, elle reste à l'état de préliminaires s'agissant de la lutte contre l'isolement, des mobilités, des moyens consacrés à la formation et au personnel des Ehpad, des services à domicile et de leur tarification, et de l'ambition de voir la ville avec un œil de vieux.
Ainsi, après les préliminaires, nous avons rendez-vous avec la loi sur le grand âge, pour laquelle nous sommes disponibles. Ce travail n'évacuera pas nos points de divergence, notamment sur la question centrale du financement, raison pour laquelle je réitère la recommandation qui vous a déjà été faite de lancer très vite une conférence du financement de la branche autonomie et, plus largement, de la politique du vieillissement et de la longévité. J'ajoute qu'il faut aussi très vite installer le comité interministériel de la longévité que vous avez annoncé et dont la création ne dépend pas de la loi. Une action interministérielle doit en effet avoir lieu sans attendre et en parallèle de celle que les parlementaires mèneront de manière transpartisane.
Voilà le cadre optimiste dans lequel nous nous inscrivons, ce qui ne m'empêche pas de préciser, non avec fermeté mais avec une certaine solennité, que nous comptons sur vous pour ne pas trahir l'esprit de notre accord de ce soir. Nous pourrons avoir des désaccords de fond, mais, si le ministre de l'économie et des finances indique d'emblée que la politique du vieillissement ne pourra compter sur aucun euro supplémentaire et notamment sur aucun prélèvement obligatoire supplémentaire ou redéploiement de cette nature, nous rencontrerons une difficulté. La lucidité oblige à dire qu'il faudra faire des choix.
Nous souhaitons que ce débat ait enfin lieu devant les Français et qu'il associe l'ensemble des personnes âgées ; l'ensemble des vieux comme certains d'eux aiment se désigner. « Rien pour les vieux sans les vieux », comme le dit le conseil national autoproclamé de la vieillesse.
Si ce cahier des charges est respecté, nous réussirons peut-être à faire quelque chose de beau, de grand. Ce serait inédit dans cette législature et si vous parvenez à produire ce compromis, madame la ministre, je serai le premier à vous applaudir. Nous serons vigilants et exigeants, à la hauteur des attentes de nos concitoyens, quel que soit leur âge.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à M. François Gernigon, à qui je demande, ainsi qu'aux orateurs qui lui succéderont, de se montrer aussi synthétique que possible.
Je serai bref, madame la présidente, car je suis très heureux du déroulement, depuis plusieurs jours, de la deuxième partie de l'examen de cette proposition de loi, qui contient de véritables avancées. Au départ, beaucoup pensaient qu'elle n'était qu'une coquille vide et qu'elle permettrait seulement de passer un modeste pied dans la porte. Pour ma part, je considère que vous avez ouvert la porte en grand, madame la ministre, en annonçant qu'une loi de programmation serait élaborée et qu'une mission serait confiée à des députés et à deux présidents de département.
Beaucoup de choses restent à penser et à accomplir, mais cette proposition de loi comporte déjà de nombreux éléments. Le groupe Horizons et apparentés vous accorde toute sa confiance pour mener à bien la loi de programmation et, dans cette attente, votera ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR, sur quelques bancs des groupes RE et Dem, ainsi que sur les bancs des commissions.
Nous n'y croyions plus, mais la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, dont nous avions entamé l'examen en avril, a bien été remise à l'ordre du jour. Initialement composée de quatorze articles, elle a été portée à trente-trois articles à l'issue de son examen en commission, et terminera encore davantage enrichie par sa discussion en séance.
Ce doublement du nombre d'articles signifie-t-il que nous serions passés d'un texte à l'ambition limitée à une véritable loi sur le grand âge ? Non. Nous en sommes loin, constat que partagent l'ensemble des groupes et des acteurs du secteur. Mais dès lors qu'il est question de voter des avancées concrètes auxquelles notre groupe souscrit, nous refusons la posture. Pour mémoire, quand il a fallu soutenir la création d'un service public de la petite enfance au milieu de l'examen d'un texte qui nous révulsait, nous avons été avec vous, et non contre vous.
Reprenons. Lancer une conférence de l'autonomie : nous sommes pour. Développer un service public territorial de l'autonomie : nous sommes pour. Lutter contre l'isolement social de nos aînés : nous sommes pour. Garantir le droit de visite en Ehpad : nous sommes pour. Fixer l'indemnité kilométrique à 45 centimes par kilomètre : nous sommes pour – la mesure était d'ailleurs attendue. Prévenir et lutter contre toutes les formes de maltraitance : nous sommes pour. Contrôler et sanctionner davantage ceux qui s'enrichissent sur le dos de nos anciens : nous sommes pour. Mieux protéger les majeurs vulnérables et créer un groupement hospitalier de territoire (GHT) médico-social : nous sommes pour.
Sur ce dernier point, nous aurions toutefois aimé que les mesures inclues dans la proposition de loi n'apparaissent pas en dernière minute par voie d'amendement, sans étude d'impact et, pour certaines d'entre elles, sans avis au fond de la commission des lois.
De fait, la construction de ce texte a manqué de méthode, d'anticipation, et, encore en début de semaine, il était dépourvu de moyens. Sur le grand âge, il est en effet inutile d'avoir des ambitions d'Américains avec des moyens soviétiques ; cela ne fonctionne pas.
Mme la ministre sourit.
Le rapport de Dominique Libault est clair : 6 milliards d'euros devront abonder la branche autonomie dès 2024 et 9 milliards à partir de 2030.
Par ailleurs, nous ne pouvons que nous réjouir qu'une loi de programmation pluriannuelle soit désormais attendue courant 2024. Le groupe Écologiste fut le premier à défendre un amendement en ce sens en commission : nous sommes heureux que celui de notre collègue Jérôme Guedj ait été accepté en séance. Cette avancée majeure étant désormais confirmée, elle fait basculer notre position vers un vote en faveur du texte.
Exclamations et applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Cela étant, ne vous méprenez pas, madame la ministre, car ce vote positif n'est certainement pas un blanc-seing pour la future loi relative au grand âge, dont nous ne connaissons ni le contenu ni les montants qui seront engagés. C'est d'autant moins un blanc-seing que nous avons bien relevé l'ajout du mot « familles » à l'intitulé de votre ministère lors de votre nomination. Ce changement n'est pas passé inaperçu sur nos bancs, surtout quand vous vous tournez vers la droite de cet hémicycle pour vanter votre volonté de relancer une politique nataliste.
Puisque pour cette majorité, le « quoi qu'il en coûte » ne vaut que pour les entreprises, nous ne pouvons également que nous méfier des pistes de financement que vous identifierez pour le grand âge. À ce titre, je me dois de rappeler les mots de ma collègue Sandrine Rousseau, lors de la réforme des retraites : « Le ventre des femmes n'est pas la variable d'ajustement » du système de protection sociale.
Murmures sur les bancs du groupe RN.
Ainsi, dans la mesure où nous prenons rendez-vous pour une future loi de programmation pluriannuelle sur le grand âge, je le dis dès à présent : tout financement qui attenterait au libre choix des femmes sera pour nous une ligne rouge.
La solidarité intergénérationnelle, ce n'est pas inciter à faire des bébés pour financer des Ehpad : c'est changer de regard sur la vulnérabilité, afin d'appréhender la vieillesse et le handicap avec bienveillance. Ce changement de regard implique nécessairement la fin du productivisme à tout prix.
La solidarité intergénérationnelle, c'est créer du lien, de l'inclusion, mais aussi lutter contre l'invisibilisation, en assurant une représentativité suffisante des personnes âgées dans nos espaces publics.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES, sur quelques bancs du groupe RE, ainsi que sur les bancs des commissions.
Je vous rassure, notre vote ne mettra pas en danger l'adoption de la proposition de loi. Si nous ne pouvons la soutenir, c'est parce que nous ne voulons pas faire croire au secteur, qui est en grande souffrance, qu'elle réglera quoi que ce soit. Je rappelle en effet que, fin 2022, 85 % des Ehpad étaient déficitaires.
Si nous sommes contre ce texte, c'est aussi parce que, contrairement à certains de mes collègues, et n'y voyez rien de personnel, je ne vous fais pas confiance, pas plus que je ne fais confiance à Mme la Première ministre, qui a été nommée par un président de la République qui n'a cessé de mentir sur ce sujet.
Murmures sur quelques bancs du groupe RE.
J'ajoute que si vous aviez réellement eu des intentions ambitieuses s'agissant du grand âge, nous l'aurions senti dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, ce qui n'a pas été le cas : ce que ce texte contient n'est pas à la hauteur des besoins du secteur. À cet égard, si certains souhaitaient que la proposition de loi précise un calendrier pour la future loi de programmation, je suis pour ma part davantage intéressé par son contenu – encore faut-il qu'il y en ait un –, que par une date d'examen.
Si nous ne votons par cette proposition de loi, ce n'est donc pas tant à cause de ce qu'elle contient, car il y figure des choses intéressantes quoique très inoffensives compte tenu des besoins, mais à cause de ce qu'elle ne contient pas. Les mesures dont il est ici question agiront à la marge, dans un secteur du grand âge en grande mutation.
Mêmes mouvements.
Souffrez que j'émette un avis différent du vôtre, chers collègues.
Pourquoi les structures sont-elles en grande difficulté ? En raison de l'inflation, de l'augmentation des coûts de l'énergie, mais surtout de la mutation du secteur. Les directeurs d'établissement le disent, l'aide à domicile se renforce, certes avec un manque de moyens évident, si bien que les personnes âgées intègrent les structures comme les Ehpad avec un niveau de dépendance nettement plus élevé. Or, eu égard aux moyens financiers dont elles disposent, ces structures ne sont pas en mesure de faire face à cette situation – élément que nous n'avons néanmoins pas évoqué.
C'est pourquoi, quand j'entends certains députés de la majorité crier victoire au sujet de cette proposition de loi alors que le secteur est en grande souffrance, je trouve cela tout à fait indécent. Cela me fait d'ailleurs penser, mesdames et messieurs de la majorité, que vous ne mesurez pas les difficultés du secteur, car si tel était le cas, nous nous serions dépêchés de voter ce texte pour très vite passer à la loi de programmation.
Vous le savez très bien, les personnes âgées ne peuvent pas attendre, pas plus que les structures, car leur situation en 2023 est très alarmante. Voilà pourquoi nous nous prononcerons contre la proposition de loi et que nous serons très attentifs à la future loi de programmation, afin que le secteur et ses financeurs, dont les départements, bénéficient enfin des moyens dont ils ont besoin.
Ce texte avait mal débuté, souffrant de la comparaison avec la grande réforme annoncée et attendue depuis 2017. Elle a néanmoins bénéficié, il faut le reconnaître, d'apports significatifs depuis le mois d'avril. Je tiens à citer quelques exemples positifs : le service public départemental de l'autonomie, la fin de l'obligation alimentaire pour les petits-enfants, le droit de visite en établissement – qui est absolument essentiel –, mais aussi la promesse d'une loi de programmation, que nous avions demandée avec d'autres groupes. À mon tour, je souhaite vous remercier pour cet engagement, madame la ministre.
J'émettrai toutefois aussi quelques regrets. La fusion des sections « soins » et « dépendance » a été obtenue, mais n'aura pas lieu au profit des conseils départementaux, qui ne pourront donc piloter l'ensemble des trois sections « hébergement », « dépendance » et « soins ». Par ailleurs, il conviendrait d'apporter un soutien spécifique aux Ehpad habilités qui, élément paradoxal, disposent de moins de souplesse que les établissements non habilités en matière d'évolution des tarifs. Nous attendons donc plus pour le grand âge : je pense également, mais vous le savez, madame la ministre, aux 50 000 créations de postes promis dans les Ehpad.
Toujours est-il que le bilan de la proposition de loi est positif : la situation sera meilleure après qu'avant, ce qui justifie que nous la votions.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT, sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR, ainsi que sur les bancs des commissions.
Nous y sommes arrivés ! Depuis le printemps dernier, nous débattons de ce sujet, concluant toutes et tous que celui-ci est complexe et qu'il ravive avec force nos engagements politiques et nos convictions personnelles. En effet, face au vieillissement de sa population, la France se doit de disposer d'un arsenal juridique et réglementaire à la hauteur des enjeux relatifs au grand âge et à l'autonomie, et ce qu'il s'agisse des structures spécialisées ou du maintien à domicile.
Nous avons été nombreux, au sein de la majorité, à vouloir faire du grand âge et de l'autonomie des priorités de nos travaux parlementaires. Ainsi voyons-nous aboutir une nouvelle étape de la profonde transformation que nous nous efforçons de mener au sein de notre pays. Cette transformation ne date pas d'hier : elle est engagée depuis 2017 et la création d'une cinquième branche de la sécurité sociale dédiée à l'autonomie.
Comme le rappelait Mme la Première ministre lors de la dernière séance de questions au Gouvernement, ce sont près de 10 milliards d'euros supplémentaires qui seront alloués à cette profonde transformation dans les prochains mois, aussi bien pour nos aînés et leurs familles que pour l'ensemble des acteurs de l'ensemble du secteur.
De plus, une véritable loi de programmation pluriannuelle sur le grand âge devrait voir le jour d'ici à l'été prochain.
Ce texte est attendu par tous, et le groupe Renaissance se mobilise depuis l'origine pour qu'il voie le jour. À cet égard, je tiens à saluer les annonces confirmant l'engagement du Gouvernement, que vous représentez, madame la ministre, et que la majorité prolongera, cet enjeu de société nous concernant tous.
Je salue également l'engagement de nos deux rapporteures qui, dans une démarche de coconstruction avec les différents groupes, ont permis d'enrichir le texte tant en commission des affaires sociales que lors de nos débats dans l'hémicycle.
Mes chers collègues, le chemin nous a semblé long et sinueux mais, ensemble, en nous montrant déterminés et investis, nous avons su conserver notre cap afin de permettre aux personnes âgées ou vulnérables de bénéficier à la fois d'un accompagnement, de prestations de qualité et de mesures promouvant la bientraitance. Instauration d'un droit de visite, création d'une conférence nationale de l'autonomie, création d'un guichet unique pour la totalité des démarches administratives à destination de nos aînés et de leurs aidants, création de cellules départementales d'alerte sur les faits de maltraitance, création d'une carte professionnelle pour les aides à domicile et auxiliaires de vie : telles sont les principales mesures attendues par nos concitoyens et que nous concrétisons grâce à cette proposition de loi, laquelle constitue la première brique d'une politique beaucoup plus vaste.
En votant ce texte, nous affirmons notre volonté et nous engageons à améliorer l'attractivité des métiers de l'accompagnement et de l'aide à domicile, en redonnant une place essentielle à ces professionnelles qui sont au cœur de nos préoccupations.
Peu importe le banc sur lequel nous siégeons, nous partageons toutes et tous la volonté de faire avancer ces causes, raison pour laquelle je vous invite à voter cette proposition de loi. Montrons à nos aînés ainsi qu'à celles et ceux qui les soutiennent que nous nous occupons d'eux au quotidien et que nous pouvons œuvrer ensemble en faveur de leurs droits.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR, ainsi que sur les bancs des commissions.
Nous avons, enfin, terminé l'examen de cette proposition de loi sur le bien vieillir, et nous nous en félicitons. Bien sûr, ce texte est à mille lieues des véritables problématiques du grand âge, nous n'avons cessé de vous le rappeler depuis des mois. Votre volonté politique reste insuffisante pour agir dans la durée sur la prévention, l'anticipation et l'articulation des financements nécessaires.
Vous nous avez annoncé un projet de loi sur le grand âge. Sachez que nous l'attendons, madame la ministre, car il est urgent de préparer notre société à bien vieillir, et 85 % des Français souhaitent vieillir à domicile. Nous devons amplifier les mesures en faveur d'un véritable virage domiciliaire. Nos méthodes d'accompagnement de la vieillesse doivent profondément changer, afin de garantir aux personnes âgées le bénéfice d'un suivi de qualité.
Le groupe Rassemblement national votera néanmoins pour ce texte, essentiellement du fait de son article 3, qui consacre ce droit de visite auquel nous tenons tant, et qui était un des éléments phares du programme de notre candidate aux dernières élections présidentielles
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.
Nous tenons beaucoup à ce droit pour les personnes hébergées : c'est le droit au maintien d'un lien social et à une vie familiale, qui doit être garanti à toute personne prise en charge par des établissements sociaux et médico-sociaux. Rappelons qu'entre mai 2021 et janvier 2023, le Défenseur des droits a reçu 280 réclamations individuelles, dénonçant des atteintes aux droits et confirmant le caractère systématique de la maltraitance au sein des Ehpad. Je le répète, ce droit de visite est essentiel : il permet le maintien des liens sociaux et familiaux.
Avant de conclure, permettez-moi de rappeler notre opposition initiale à l'article 9, qui supprime l'obligation alimentaire des petits-enfants et de leurs descendants envers leurs grands-parents, s'agissant de l'aide sociale à l'hébergement. Il nous paraît important de maintenir cette obligation alimentaire, qui consiste à aider matériellement des personnes de sa famille lorsqu'elles se trouvent dans le besoin, selon les termes de l'article 205 du code civil.
La solidarité familiale n'a jamais été aussi menacée ; il faut renforcer la famille. Nous comptons sur vous – comme vous nous l'avez proposé – pour réfléchir ensemble à une nouvelle rédaction de cet article qui nous tient à cœur.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 147
Nombre de suffrages exprimés 147
Majorité absolue 74
Pour l'adoption 116
Contre 31
La proposition de loi est adoptée.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Je remercie tous les parlementaires, sur l'ensemble des bancs, pour la qualité de nos échanges. Nous avons repris ce texte après plusieurs mois d'interruption, et nos débats auraient pu être parfois plus vifs. Au contraire, les échanges ont été constructifs avec tous, à la hauteur du défi, qui est devant nous.
Je tiens à rendre hommage aux rapporteures et à leur opiniâtreté, ainsi qu'à la présidente de la commission des affaires sociales.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Jean-Paul Mattei applaudit également.
Mais, surtout, je vous donne rendez-vous dans un esprit transpartisan afin qu'ensemble – groupes politiques représentés à l'Assemblée et au Sénat, associations d'élus, fédérations –, nous relevions cet immense défi, qui est aussi une chance pour notre pays.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.
Prochaine séance, lundi, à seize heures :
Débat en salle Lamartine sur le thème : le chlordécone en Martinique et en Guadeloupe, l'action de l'État face aux nécessaires réparations.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures trente-cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra