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Intervention de Pierre Dharréville

Séance en hémicycle du jeudi 23 novembre 2023 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

Malheureusement, nous ne parlerons pas. Alors que le système de santé et de protection sociale est bien malade, nous ne parlerons pas. C'est un problème que nous ne puissions pas discuter de votre projet, de votre politique du tournevis selon nous désastreuse, qui se répète chaque année. C'est un problème, parce que si nous ne parlons pas ici, où parlons-nous dans notre pays ? Où parle-t-on du monde, du réel qui finira par vous rattraper ? Où se prennent les décisions ?

Détrompez-vous, nous ne sommes pas désabusés, nous ne renonçons à rien ; nous sommes déterminés et combatifs, comme toujours. Mais je refuse de vous aider à sauver les apparences ; je refuse de banaliser ce moment trouble et brutal.

Puisque vous êtes là, je vais tout de même vous parler un peu, puisqu'il paraît que cela contribue à la guérison. Que reste-t-il à discuter ? Formellement, rien ; mais en réalité, tout. Il reste à discuter de la situation de la sécurité sociale, presque entièrement étatisée et massivement privée de cotisations, parce que vous avez décidé de comprimer les dépenses de santé, en continuant à demander des économies en dépit de leur augmentation tendancielle. Ce n'est pas la première année et cela finit par lézarder tout l'édifice.

Tout est à discuter, parce que face à la crise de l'hôpital public, aux déserts médicaux et aux défis de l'autonomie et du grand âge, il est nécessaire de changer de logiciel et d'investir massivement dans les moyens humains.

Tout est à discuter, parce que la financiarisation gagne du terrain et qu'il faudrait démarchandiser certaines réponses aux besoins de santé, comme le médicament. Tout est à discuter, parce que ce budget prévoit un droit à la retraite raboté, alors qu'il faudrait le rabioter.

Tout est à discuter, parce que nous avons besoin d'une ambitieuse politique de santé au travail. Tout est à discuter, parce que la société, fragilisée, précarisée et fracturée a besoin d'une grande politique de solidarité. Tout reste à discuter.

« Parler, c'est guérir », écrit le poète. Finalement, j'ai un peu parlé, comme je l'avais fait l'an dernier, en expliquant que je ne voulais pas déranger. Au fur et à mesure du discours, votre prédécesseur, monsieur le ministre, s'enfonçait dans son siège ; il a fini par y disparaître, lui aussi, au moment où le 49.3 nous effaçait, nous qui sommes le Parlement. Cela mériterait que nous en tirions quelques leçons.

Malgré vos 49.3, il existe une autre vision du monde et de son devenir. Il fallait que ce soit dit, parce que nous en aurons besoin pour guérir, vite.

Madame la présidente, je ne faisais que passer ; je file.

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