Séance en hémicycle du lundi 4 décembre 2023 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

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L'ordre du jour appelle la discussion, en application de l'article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution de M. Hadrien Ghomi et plusieurs de ses collègues visant à défendre les démocraties face aux multiples menaces et tentatives de déstabilisation (1923).

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Dans la discussion générale, la parole est à M. Hadrien Ghomi.

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Avant toute chose, je souhaite dire combien je suis ému à la suite de l'attaque survenue samedi soir à Paris ; j'apporte mon soutien aux victimes, à leurs familles. Je tiens à remercier les forces de l'ordre pour leur grande réactivité, elles qui assurent quotidiennement notre protection, avec bravoure et dévouement.

Terrorisme, extrémisme, fanatisme, obscurantisme, populisme, autoritarisme, impérialisme : autant de menaces qui pèsent sur nos modèles démocratiques, et en premier lieu sur celui des démocraties européennes. Ces tentatives de négation des valeurs universelles auxquelles nous sommes attachés mettent à l'épreuve ce que nous sommes. Elles salissent notre histoire, tentent de remettre en cause notre identité et obscurcissent notre avenir. Avec une intensité rare, des acteurs pyromanes et prédateurs attaquent nos modèles démocratiques, par la manipulation, parfois ; par la violence, souvent ; par des pratiques malveillantes, toujours.

Agression russe en Ukraine contre l'intégrité territoriale d'un peuple souverain ; attaques terroristes, parmi lesquelles celle menée par le Hamas en Israël ayant ôté la vie à plus de 1 200 civils, dont quarante de nos ressortissants, ; succession de coups d'État menés par des putschistes instrumentalisés par des groupes paramilitaires comme la milice Wagner au Sahel et en Afrique de l'Ouest ; vives tensions en mer de Chine méridionale ; agression azerbaïdjanaise dans le Haut-Karabagh, dans une stratégie d'épuration ethnique, ayant contraint plus de 100 000 Arméniens à quitter leur territoire ancestral ; tentatives de déstabilisation du Proche-Orient par la République islamique d'Iran, qui agit dans la région via ses « proxys » et mène également en interne une répression sanglante des aspirations légitimes à la liberté… La liste n'est malheureusement pas exhaustive et appelle une forte réaction de notre part, car la menace de voir les démocraties reculer est réelle : rappelons que 54 % de la population mondiale vit d'ores et déjà sous un régime autoritaire ou un régime « hybride », qui bafoue les droits fondamentaux des populations.

Parallèlement, la foi absolue dans le modèle démocratique et sa capacité à prospérer dans le monde entier sont affaiblies de manière insidieuse et sournoise par l'action de nombreux acteurs déstabilisateurs. Ceux-ci tentent d'influencer les opinions publiques et de semer la discorde au sein de nos sociétés par des ingérences numériques, des menaces sur la sécurité économique et le recours au chantage énergétique et alimentaire.

La récente implication du réseau russe RRN dans l'amplification artificielle sur les réseaux sociaux de certaines publications en est un parfait exemple. En propageant des fake news, en relayant des théories du complot, leurs campagnes de déstabilisation visent à exacerber les oppositions au sein de nos sociétés et à altérer la confiance que nos concitoyens accordent aux autorités légitimement élues. Ils surfent, voire détournent le fonctionnement des réseaux sociaux à leur profit et affectent ainsi les bases de la délibération démocratique. Les faits alternatifs amènent à contester la crédibilité de réalités tangibles.

Cette situation doit nous conduire à un réarmement matériel et intellectuel pour défendre nos intérêts et les valeurs de liberté, de défense du droit international et de multilatéralisme auxquelles nous sommes attachés. Par cette proposition de résolution, nous invitons le Gouvernement à renforcer notre résilience collective, à réarmer nos institutions et processus démocratiques et à poursuivre la construction de l'autonomie stratégique de l'Europe.

Au-delà de la nécessaire condamnation des récentes attaques terroristes que certains peinent à qualifier, nous encourageons le Gouvernement à demander un régime de sanctions ad hoc dédié à la lutte contre le Hamas, à prolonger les sanctions à l'encontre des personnes et entités responsables de graves violations des droits humains en Iran et à réengager les pays d'Afrique subsaharienne, du Proche et du Moyen-Orient dans la lutte contre le terrorisme djihadiste. Nous souhaitons également que la préservation du droit à l'information et du droit d'informer des médias soit effective partout. Enfin, nous appelons de nos vœux un saut qualitatif de l'Union européenne : les États de l'Union qui partagent les mêmes analyses, valeurs et espérances doivent prendre l'engagement de mener une véritable politique étrangère et de défense commune.

Comme nous avons été un soutien constant de l'Ukraine face à l'invasion russe, notre histoire et nos valeurs doivent nous porter à faire preuve de solidarité envers l'ensemble des peuples qui aspirent à vivre en démocratie. « Pour triompher, le mal n'a besoin que de l'inaction des hommes de bien » : John Stuart Mill nous enjoint à l'action. Alors, agissons !

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

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Cette proposition de résolution reflète la volonté des semeurs de chaos que vous êtes de se placer en rupture avec la diplomatie française. Elle dit tout et son contraire, enchaîne les phrases vides et les déclarations caricaturales et, à force d'errance, perd tout son sens et sa crédibilité.

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Quelle hypocrisie ! C'est vous-mêmes qui pensez répandre la démocratie à coups de bombes et de massacres. C'est pour cela que les trois quarts du monde vous détestent. C'est vous-mêmes qui avez apporté un soutien inconditionnel à Israël et qui, devant les massacres de civils, de journalistes et d'humanitaires, avez appelé à un cessez-le-feu, après trente et un jours.

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On attend toujours la condamnation du Hamas !

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Pourtant, ce matin, quinze chars sont rentrés dans le sud de Gaza. Votre parole est inaudible ; votre parole est faible.

Quelle hypocrisie, lorsque vous évoquez la situation en Arménie, alors qu'aucun d'entre vous ne dénonce les accords gaziers entre l'Union européenne et l'Azerbaïdjan, soutenus coûte que coûte par la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, que vous avez accueillie en grande pompe lors de la rentrée politique européenne.

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Quelle hypocrisie, quand vous vantez votre grande Union européenne, quand vous vantez vos valeurs communes, quand vous voulez une politique de défense commune, mais que seule une minorité d'États est d'accord avec vous ! Alors, vous faites cette politique européenne avec seulement une minorité d'États. Vous avez inventé « la désunion européenne ».

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Quelle hypocrisie, lorsque vous défendez les valeurs démocratiques et la préservation du droit à l'information, alors qu'à chaque fois que le peuple cherche à s'exprimer, le Gouvernement ne répond que par le mépris et la stigmatisation.

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Quelle hypocrisie, alors que le Gouvernement use de toutes les subtilités constitutionnelles pour esquiver le débat et qu'il refuse non seulement le vote, mais aussi de débattre avec la représentation nationale, si bien que la Première ministre a eu recours à un vingtième 49.3, moyen qu'elle avait déjà utilisé pour faire passer l'odieuse réforme des retraites.

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Quelle hypocrisie, quand vous nous parlez de manipulations de l'information, alors que neuf milliardaires détiennent plus de 90 % des médias français et qu'ils participent, dans le traitement de l'information, à diffuser une vision du monde qui est insupportable. Force est de constater que l'inaction de votre gouvernement est une menace à la liberté de la presse et au droit à l'information.

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Parlons de ce que votre président a dit hier sur Ruth Elkrief !

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Vous assumez que l'information soit pilotée par des propriétaires milliardaires aux projets politiques impensables. Sans oublier qu'en France, Ariane Lavrilleux est intimidée et mise en cause pour avoir exercé son métier de journaliste.

Quelle hypocrisie, quand vous nous parlez de listes de personnes et de groupes impliqués dans des actes de terrorisme, alors que l'extrême droite marche dans les rues de France, que plus de 1 300 militants d'ultradroite sont désormais fichés S et que treize attentats d'ultradroite auraient été déjoués depuis 2017. Vous préférez, vous, ici, à l'Assemblée, vous associer à la supercherie du Rassemblement national en votant main dans la main contre l'augmentation des petites retraites ,

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES

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contre le gel des loyers, contre le blocage des prix des produits de première nécessité et, bien évidemment, contre la taxation des yachts et des superprofits. La liste est longue.

Vous êtes tout simplement contre le peuple. Nous chérissons les valeurs de la démocratie, vous chérissez l'hypocrisie. Nos convictions valent bien mieux que ce texte : nous voterons donc contre.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Avant toute chose, permettez-moi d'exprimer, au nom du groupe Les Républicains, notre émotion à la suite de l'attentat qui a coûté la vie à un jeune Allemand et de témoigner tout notre soutien aux forces de l'ordre, particulièrement exposées lors des attaques terroristes.

Cet après-midi, nous examinons une proposition de résolution déposée par le groupe Renaissance qui vise à défendre les démocraties face aux multiples menaces et tentatives de déstabilisation.

De prime abord, nous pourrions nous interroger sur l'opportunité d'un tel débat, sachant qu'une résolution n'emporte aucun effet juridique et alors que nos concitoyens attendent des résultats concrets en matière de sécurité, de pouvoir d'achat ou d'environnement. Le groupe Les Républicains accueille cependant avec intérêt la tenue de ce débat : pour nous, prendre du temps pour la démocratie est toujours opportun et bienvenu.

On l'oublie trop souvent, la démocratie est fragile ; alors que nos concitoyens seraient frappés par ce que les sociologues appellent une « fatigue démocratique », il peut être pertinent d'ouvrir un débat à son sujet, dans l'idée de la défendre. En effet, elle est aujourd'hui attaquée parce qu'elle est un choix de civilisation, choix dont nous sommes les héritiers et les dépositaires.

Mais cette proposition de résolution est-elle le bon instrument pour la défendre ? Notre groupe ne le pense pas, et ce pour plusieurs raisons. En premier lieu, en voulant établir une liste des pays dans lesquels la démocratie est menacée gravement, on risque des oublis,…

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…ce qui peut conduire à une indignation sélective. Comment, en effet, ne pas citer explicitement le Liban, notre pays ami profondément déstabilisé ;…

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…comment ne pas évoquer la démocratie taïwanaise, menacée et assiégée par les velléités chinoises ;…

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…comment ne pas avoir une pensée pour les communautés chrétiennes persécutées au Pakistan, au Nigeria ou au Proche-Orient ?

À l'inverse, nous sommes surpris par certains de vos choix. Comment placer sur le même plan les attaques terroristes du Hamas et la situation de la démocratie hongroise ? Nous pouvons même nous inquiéter du procès politique sous-jacent : ce que vous contestez, en réalité, à propos de ce qui se passe en Hongrie, ce sont les choix politiques faits démocratiquement par sa population. Or, comme le disait très justement François-Xavier Bellamy à la tribune du Parlement européen, « nous n'avons pas à imposer à une démocratie l'orientation qu'elle doit prendre ». Il semble que, pour vous, n'est démocratique que ce qui va dans le sens de vos opinions.

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Dès lors, nous nous inquiétons de votre volonté, exprimée comme telle dans la présente proposition de résolution, de « combattre la propagation de discours clivants ». Est-ce vous qui allez définir ce qui est clivant et ce qui ne l'est pas ? Drôle de conception de la démocratie !

En fait, ce qui se cache derrière cette distribution de bons et de mauvais points, c'est la tentation du moralisme. L'hebdomadaire Le 1 titrait d'ailleurs la semaine dernière : « Qui écoute encore la France ? » Et dans l'interview qu'il y donnait, l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin dénonçait ce moralisme en regrettant que nous ayons perdu « l'équilibre entre le souci de défendre nos valeurs et celui de prendre en compte la réalité avec lucidité, pour éviter les actes purement déclaratifs, qui finissent par nous aliéner beaucoup d'acteurs dont nous avons par ailleurs besoin ».

En plus de ce moralisme prétentieux, il y critiquait ce qu'il appelle le démocratisme par ces mots : « Nous défendons, bien sûr à juste titre, une certaine idée de la démocratie. Mais, ce faisant, nous ne prenons pas suffisamment en compte la multiplication des entorses faites dans nos propres pays. Notre vision, perçue comme idéologique, a du mal à convaincre toute une partie du monde, qui se trouve être aujourd'hui majoritaire. » Dans ce domaine, la France n'a de leçons à donner à personne, tant les atteintes aux libertés s'y sont multipliées depuis quelques années.

Enfin, l'examen de cette proposition de résolution nous amène à nous interroger sur l'affaiblissement de notre diplomatie. Comme le disait encore Dominique de Villepin,…

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Écoutez Dominique de Villepin ! Les gaullistes vous le disent, et les communistes aussi !

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…« une diplomatie qui n'a pas de succès est une diplomatie qui s'épuise. Or nous n'avons pas eu suffisamment de succès au cours des dernières années ». En effet, les maladresses élyséennes, les revirements et les changements de posture au gré des interlocuteurs ont conduit à une série de revers diplomatiques – marginalisation par l'Allemagne dans l'Union européenne, brouille avec le Maroc et l'Algérie, expulsion de diplomates français de pays africains, entre autres.

Notre politique étrangère est contaminée par le « en même temps », ce qui lui ôte toute lisibilité et toute efficacité. Dans ce contexte, nous devrions avoir deux priorités pour notre pays : d'abord, lui redonner une ligne diplomatique claire ; ensuite, mieux respecter l'État de droit et les libertés fondamentales sur notre territoire.

Votre proposition de résolution – on vient de le voir – ne répondant à aucune de ces deux priorités, le groupe Les Républicains ne participera pas au vote.

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La démocratie est le fondement politique et moral de notre société, ainsi que de l'Union européenne et des États qui la composent. C'est ce système qui garantit nos droits et nos libertés fondamentales, reconnus dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, à laquelle nous adhérons. Par leur bon fonctionnement, les démocraties protègent les citoyens que nous représentons, permettent les alternances politiques, atténuent les tensions sociales et suppriment l'arbitraire judiciaire, ce qui garantit notre paix civile et notre prospérité. Mais elles sont aussi fragiles et se trouvent attaquées de toutes parts. L'étendue des menaces qui pèsent sur nos sociétés démocratiques est large, car les moyens permettant de leur nuire sont protéiformes.

Les tentatives de déstabilisation sont d'abord de nature géopolitique. Je pense évidemment à la guerre d'agression russe menée contre la souveraineté et l'intégrité ukrainienne, et aux risques d'escalade et de propagation qu'elle implique ; mais aussi aux velléités territoriales et maritimes de la Chine dans l'Indo-Pacifique, aux vues hégémoniques de l'Azerbaïdjan, aux coups d'États putschistes en Afrique subsaharienne et aux provocations nucléaires et balistiques nord-coréennes.

Les menaces sont ensuite sécuritaires, comme l'illustre la multiplication des attaques terroristes commises sur notre territoire. Ce fut encore le cas samedi soir dans notre capitale et, en tant qu'élue de Paris, je veux dire mon émotion face à cet acte terroriste ; Paris, une nouvelle fois, est meurtrie, et je veux bien évidemment avoir une pensée pour les victimes, leurs proches, et dire toute ma reconnaissance aux forces de l'ordre pour la rapidité de leur intervention.

La menace sécuritaire prend aussi la forme d'actes commis dans d'autres États, comme le 7 octobre contre la population israélienne, par le groupe terroriste Hamas – 1 200 morts, dont 40 de nos concitoyens, et des corps blessés, violentés, violés, brûlés.

Les menaces, enfin, sont hybrides : elles résultent du développement constant des nouvelles technologies et de leur utilisation dans le cadre de la guerre informationnelle. Les cybermenaces et la désinformation sont les armes les plus répandues ; elles visent à saper nos démocraties en affaiblissant la confiance des citoyens dans nos institutions, tout en remettant en cause la légitimité et l'efficacité du politique. Certaines puissances s'en sont fait une spécialité, et je pense évidemment aux tentatives de déstabilisation qui ont eu lieu il y a encore quelques semaines lors des élections organisées en Slovaquie.

Ces menaces se concrétisent aussi par des pressions et des embargos sur les ressources énergétiques et alimentaires, qui apparaissent comme de nouveaux vecteurs de disruption économique. Elles s'ajoutent à la détérioration des relations entre la Chine et les États-Unis, du fait d'une concurrence acharnée sur le plan commercial et technologique.

La réponse engagée depuis plusieurs années par notre démocratie s'appuie sur une variété de moyens mais aussi, dans le contexte européen, sur une articulation entre le niveau national, qui reste souverain dans de nombreux domaines, et le niveau européen. À l'échelle communautaire, notre spécificité repose sur la cohésion des États membres, qui est un objectif mais aussi une condition des prises de décision. Elle s'affirme par le renforcement de notre autonomie stratégique, et je veux donc redire ici à quel point notre union est une force pour agir concrètement.

La présente proposition de résolution nous invite donc à réaffirmer la nécessité de défendre nos démocraties et de renforcer la résilience de nos institutions. Cela passe par la condamnation des actions menées par les régimes autoritaires et par les organisations terroristes à l'encontre des populations ; par un appel à soutenir le développement de la politique étrangère et de sécurité commune (Pesc) de l'Union européenne ; mais aussi par un encouragement à poursuivre les efforts que nous menons déjà en faveur de la préservation des valeurs démocratiques, des principes de droit international et aussi de la lutte contre toutes les attaques que subissent le droit à l'information et l'indépendance des médias.

Il est essentiel que l'ensemble des moyens qui sont à notre disposition soient mis en œuvre pour préserver nos idéaux et les institutions démocratiques françaises et européennes. Démocratie, liberté, égalité, fraternité, solidarité : toutes ces valeurs européennes nous unissent dans l'action. Le groupe Démocrate votera naturellement en faveur de la proposition de résolution.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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La proposition de résolution que nous examinons contient des mesures dont l'objectif est de préserver la démocratie, et plus précisément les régimes politiques revendiquant une visée démocratique, contre les attaques qu'ils subissent. Les motivations qui poussent à vouloir fragiliser les régimes démocratiques sont multiples : la faiblesse géopolitique de certains, qui les conduit à adopter une attitude agressive pour se protéger ; la volonté de leadership de telle ou telle puissance sur une partie du monde ; ou encore l'intention d'annexer des territoires et d'accéder à des ressources.

J'ajoute que les modalités de diversion et d'attaque sont nombreuses et sont même, malheureusement, aussi infinies que l'imagination ; je pense notamment aux ingérences dans les processus électoraux, à la manipulation d'images et de récits, aux cyberattaques et au terrorisme.

La proposition de résolution livre de nombreux exemples d'États se livrant à des manipulations, à des menaces et à des intrusions. Elle ne peut évidemment en établir la liste complète, mais elle pourrait mentionner des États qui sont fortement suspectés de financer des organisations dont les branches armées mènent des attaques contre des civils.

Si l'objectif du texte se conçoit facilement, plusieurs des réponses qu'il propose pour défendre la démocratie peuvent être interrogées, et je me contenterai ici d'en montrer quelques limites. Sont proposées, entre autres, des sanctions telles que le gel des avoirs d'États ou de familles impliqués dans des organisations criminelles, mais aussi une meilleure coordination en matière de lutte contre le terrorisme et une responsabilisation des États.

Par exemple, le gel et la réutilisation des avoirs de la Russie semblent être efficaces sur le papier, mais c'est une solution fragile. Environ 300 milliards de dollars de réserves de change de la banque centrale russe se trouveraient dans les pays du G7 et en Australie, dont deux tiers dans des pays de l'Union européenne. Les règles actuelles prévoient que dans le futur, lorsque les sanctions seront levées, les propriétaires de ces avoirs – à savoir la banque centrale de Russie – devront les récupérer intégralement. Si l'UE étudie la possibilité d'en gérer les intérêts au bénéfice de l'Ukraine, le réalisme conduit à penser que l'effet d'une telle mesure sera – en droit et en fait – limité.

Quant au gel d'avoirs de familles impliquées dans des actions terroristes, il peut se révéler fragile sur le plan juridique : on aurait pu l'assortir de modalités plus solides et plus explicites, comme le fait de restreindre l'exportation de certains composants vers les États qui les utilisent pour armer des belligérants intervenant dans les conflits au Moyen-Orient.

En matière de lutte contre le terrorisme, le texte aurait pu rappeler l'intérêt d'informer tous les acteurs mobilisés contre ce phénomène, et notamment les parlements. C'est d'ailleurs ce que s'emploie à faire l'ONU.

Appeler à la responsabilisation est facile, mais ce qui manque pour rendre effectives les mesures déjà en place et, à l'avenir, les sanctions qui seront prises, ce sont des alliances diplomatiques solides au sein des instances internationales. À l'évidence, la diplomatie de l'Élysée n'est plus vue comme une exception, susceptible de rapprocher des États qui ont certes des intérêts différents mais ont en commun la volonté, dans un monde multipolaire, d'exprimer une voix à la fois réaliste et indépendante.

Nous nourrissons en effet une grande inquiétude à l'égard de la politique étrangère menée depuis six ans : nous craignons de voir la France perdre encore de son influence, y compris dans des pays avec lesquels les relations sont traditionnellement bonnes. Cela a été le cas en Afrique et c'est le cas au Moyen-Orient, comme l'illustrent de récentes analyses et prises de position, en France et dans les pays concernés.

En Europe, les relations franco-allemandes traversent une crise persistante, qui se traduit par des choix divergents en matière de défense européenne. Oui, nous partageons l'objectif formel de la proposition de résolution, mais des interrogations de fond émergent. Elles ont trait d'une part aux modalités concrètes de sa mise en œuvre, pour tenir le cap face aux défis qui se posent aux démocraties ; et d'autre part à la façon dont l'Élysée mène en solitaire la politique étrangère de la France. Beaucoup jugent qu'une telle attitude fragilise nos positions, davantage qu'elle ne renforce les alliances que nous devons nouer pour rendre effectives des initiatives et des sanctions à même de préserver l'idéal démocratique.

Le groupe des députés Socialistes et apparentés votera donc en faveur du texte, car il approuve son objectif, tout en exprimant ses interrogations et ses réserves.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et RE.

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Partout – absolument partout – où nous portons le regard, au-delà de nos frontières, notre modèle de démocratie libérale est en péril. Une grande partie de la population mondiale – 54 %, avez-vous dit, monsieur Ghomi – vit sous le joug de régimes autoritaires ; leurs dirigeants voient la liberté comme un danger pour la stabilité de leur pays et, souvent, pour leurs privilèges.

Toutefois, l'ouverture et les échanges internationaux montrent chaque jour à leurs habitants les avantages des pays où des élections libres permettent aux peuples d'exercer leur souveraineté et où la protection des libertés fondamentales assure aux citoyens la maîtrise de leurs responsabilités.

Les autres régimes n'ont alors que deux possibilités pour asseoir leur pouvoir : ou bien cadenasser, isoler la population et lui donner une vision faussée du monde par la voix de la propagande ou bien s'attaquer directement aux fondements des démocraties, ailleurs dans le monde. Ils peuvent d'ailleurs avoir recours aux deux à la fois.

Cette proposition de résolution s'inscrit contre les menaces d'ingérence et les tentatives de déstabilisation de nos équilibres démocratiques qui en découlent. Les populismes et les totalitarismes multiplient les agressions en utilisant l'ensemble des champs de conflictualité. Ils investissent le registre informationnel, usant de la propagande et des fake news sur les réseaux sociaux. Ils s'attaquent au fondement de notre contrat social, à la confiance de nos concitoyens dans leurs institutions.

Face à ces menaces, nous sommes en droit d'attendre que la France, patrie des droits de l'homme, agisse résolument pour protéger les libertés fondamentales, aussi bien sur notre sol qu'à travers le monde. C'est pourquoi nous soutenons l'ensemble des préconisations de cette proposition de résolution : pour une véritable politique étrangère et de défense commune européenne, pour le développement des valeurs démocratiques à l'international et pour la lutte contre le terrorisme et la désinformation.

Il ne s'agit surtout pas de jouer les donneurs de leçons mais simplement de réaffirmer ces valeurs au plus grand nombre, afin de conserver la confiance de nos alliés, et de dire à ceux qui voudraient s'opposer à la démocratie que nous continuerons à la promouvoir et à la défendre.

Il ne s'agit pas non plus d'oublier que le succès de ces attaques dépend aussi de ce que nous faisons au sein même de nos démocraties pour renforcer la confiance de nos concitoyens. La désinformation et les attaques asymétriques menées par les régimes autoritaires et les organisations terroristes se nourrissent des désillusions et du mécontentement. Leur entreprise atteint en premier lieu ceux qui voient les inégalités s'accroître et perdent confiance en l'avenir et en la capacité des élus à changer la donne. Pour protéger notre contrat social et notre démocratie, nous devons donc aussi poursuivre nos efforts chaque jour, entre ces murs et sur le territoire, pour faire en sorte que le travail paie et que le mérite prime sur la rente.

Parce qu'il faut condamner aujourd'hui les régimes autoritaires et leurs menaces sur les démocraties, le groupe Horizons votera en faveur de cette proposition de résolution.

M. Hadrien Ghomi applaudit.

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Les crises géopolitiques sont de plus en plus nombreuses et complexes. Dans un monde où les équilibres évoluent rapidement, il devient manifeste qu'une approche occidentalo-centrée ne permet plus d'appréhender l'ensemble des défis mondiaux. Dès lors que nous reconnaissons pleinement notre interdépendance mondiale, nous devons accepter que la construction de ponts, plutôt que l'érection de murs, constitue un impératif moral. À l'heure où nous devons réinventer nos démocraties, il faut prendre du recul avant de chercher à imposer un modèle. Nous ne sommes plus les gendarmes du monde.

Les menaces sont là, les démocraties sont bel et bien en crise. Si nous partageons votre constat sur les menaces grandissantes, nous regrettons votre absence d'analyse sérieuse sur l'origine de ces menaces et votre postulat consistant à dédouaner nos démocraties de toutes responsabilités.

Le premier point – et non des moindres – sur lequel vous manquez de clairvoyance est le suivant : si vous condamnez à juste titre les actes terroristes du Hamas du 7 octobre, vous omettez de condamner explicitement les actions militaires récentes du gouvernement israélien à Gaza. Les bombardements intensifs, qui ont entraîné des pertes civiles considérables et exacerbé la crise humanitaire, ne peuvent être passés sous silence lorsque l'on parle des dérives autoritaires et guerrières de certains États. Ce manquement découle d'une approche partiale qui ne tient pas compte des souffrances du peuple palestinien ; elle est malheureusement caractéristique de l'aveuglement coupable de la France.

Alors que la trêve n'a duré que quelques jours et que les combats ont repris, entraînant chaque jour davantage de morts tragiques, il est impératif d'exiger une intervention de la Cour pénale internationale. Une enquête impartiale sur la situation à Gaza est essentielle pour garantir que ces violations graves du droit international ne restent pas impunies.

La politique étrangère française, sous la présidence d'Emmanuel Macron, a manqué de clarté et de cohérence sur ce dossier. Elle a oscillé entre différentes positions sans parvenir à adopter une ligne ferme et équilibrée qui reconnaisse les droits et torts de toutes les parties. Cette hésitation affaiblit, voire annihile, notre capacité à agir en tant que médiateur crédible et respecté.

Cette question du besoin de justice et d'équité, si cruciale dans le cadre du conflit israélo-palestinien, trouve également un écho dans notre approche d'autres contextes géopolitiques. Les séquelles de la colonisation en Afrique et les interventions occidentales au Proche et au Moyen-Orient ont indéniablement façonné l'histoire qui s'écrit aujourd'hui.

La lutte contre les multiples menaces et tentatives de déstabilisation suppose de traiter tous les pays avec la même rigueur et la même fermeté s'agissant du respect des droits humains et des libertés individuelles. Une telle approche est la seule voie envisageable pour tenter de prévenir de nouveaux coups d'État. Ces basculements – n'ayons pas peur de le dire – ont été rendus possibles en partie par la complaisance de la France à l'égard de certains dirigeants autocratiques dont les régimes, bien que contestables, servaient nos intérêts militaires, économiques et financiers. C'est en rompant avec cette tradition héritée des pires relents de la Françafrique que nous pourrons véritablement contribuer, à notre juste part, à la stabilité et à l'autonomie démocratique de ces pays.

Nous devons faire preuve d'une fermeté constante – et qui ne s'infléchisse pas en fonction de nos relations commerciales – envers les régimes autoritaires. Le « en même temps » si cher à Emmanuel Macron n'a aucun sens à l'échelle internationale.

Or, dans la proposition de résolution que vous nous présentez aujourd'hui, vous ne remettez pas en question nos vieilles manières de faire ni ne reconnaissez la pluralité des voies de développement et des systèmes de valeurs. Nous le regrettons.

Aujourd'hui, pour construire un avenir commun, nous devons nous engager dans une approche respectueuse de la souveraineté et des aspirations des nations et sortir de nos perspectives historiquement ancrées. Alors que la France a trop longtemps privilégié une approche ultramilitarisée, l'Europe de demain devra soutenir des solutions durables, fondées sur la compréhension des réalités locales.

Quelques jours après le décès d'Henry Kissinger, architecte de la dictature de Pinochet, et cinquante ans après le coup d'État au Chili qui a mené ce dernier au pouvoir, nous ne pouvons plus encenser un ordre mondial régi par des grandes puissances qui interfèrent avec les politiques d'autres pays dans le but de poursuivre leurs propres intérêts nationaux. En France, comme en Europe et partout dans le monde, nous devons œuvrer à l'émergence de nouveaux blocs démocratiques qui se construisent autour d'un socle de valeurs : le social, l'écologie et l'humanisme.

Le groupe Écologiste votera donc contre cette proposition de résolution.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.

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Cette proposition de résolution est une farce, au sens littéraire du terme, c'est-à-dire une scène dont le comique repose sur l'aspect caricatural des personnages.

Le personnage central de cette farce, c'est le peuple. Un peuple manipulable, donc dangereux – bête, en somme, incapable de réfléchir par lui-même.

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Ce n'est pas du tout ce que dit le texte ! Vous ne l'avez pas lu !

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C'est là que le deuxième personnage apparaît, porté en majesté, luttant contre les forces obscures du mal : votre majorité. Placés au-dessus des peuples imbéciles, vous distribuez les bons et les mauvais points au monde entier en y allant à la louche – on y trouve un peu de Corée du Nord et un peu d'Iran mais aussi du Hamas et de la Russie. Tout y est !

Voici donc la troisième galerie de personnages : la ribambelle des mauvais. On appréciera d'ailleurs vos deux passages sur l'Azerbaïdjan qui, comme chacun sait, est un peu méchant mais pas trop quand même – puisque nous lui vendons beaucoup d'armes et qu'il nous cède son gaz.

Le passage sur le Sahel est évidemment une caricature hallucinante ; on y retrouve tout le déni de l'exécutif s'agissant de son rôle dans cette région. La France est tellement parfaite que si elle n'est plus la bienvenue au Mali ou au Burkina Faso, ce ne peut être qu'à cause de manipulateurs extérieurs ; cela n'a évidemment rien à voir avec le franc CFA ou la diplomatie à géométrie variable dans la région !

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Un troisième mandat validé par Paris ici, un troisième mandat condamné par Paris là… Nous pourrions passer des heures à commenter ce texte caricatural mais concentrons-nous sur l'essentiel. Lorsqu'on critique à tour de bras, il faut quand même s'attendre à se voir suggérer de balayer devant sa porte.

Pour vous aider à passer ce coup de balai, voici nos propositions. Puisque la démocratie ne fonctionne que si l'on respecte le peuple, il faudrait que figure dans cette proposition de résolution quelque chose comme « encourage le Gouvernement à stopper ses réformes lorsque plus des deux tiers des Français les refusent ». Hélas, ce n'est pas le cas.

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Le rapport, c'est la défense de la démocratie !

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La démocratie au sein de la NUPES, parlons-en !

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La réforme des retraites a fait du mal à la démocratie ; c'est la faute de votre majorité et de l'exécutif, qui ont agi contre le peuple.

Une démocratie à la française, forte, doit faire résonner au quotidien les trois mots inscrits au fronton de tous nos édifices publics.

Liberté, tout d'abord. Comment faire vivre la liberté à la française lorsque vous enfermez à tour de bras les manifestants et donnez aux policiers l'ordre d'user de moyens de répression inédits ? Ou lorsque vous empêchez les citoyens de manifester leur solidarité à l'égard du peuple palestinien, qui meurt sous les bombes, au prétexte que ce serait du racisme à l'encontre de ceux qui les lui envoient ?

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Comment faire vivre la démocratie quand vous refusez de lutter contre la concentration des médias ?

Égalité, ensuite. Comment faire vivre la démocratie alors que les inégalités entre les Français n'ont jamais autant explosé que sous le quinquennat Macron et que les déserts médicaux couvrent presque toute la carte de l'Hexagone et des outre-mer ?

Fraternité, enfin. Comment renforcer la démocratie alors que vous soufflez sur les braises pour diviser les Français – en chassant les migrants ou en rendant l'asile presque impossible, au mépris du droit international ?

Et comment pouvez-vous donner des leçons au monde entier quand vos indignations sont à géométrie variable ? Pourquoi la France n'applique-t-elle pas à l'encontre de Netanyahou le même régime de sanctions qu'envers Poutine ? Après tout, l'un comme l'autre pratiquent la colonisation illégale et ensanglantent toute une population. Pourquoi ne faites-vous rien pour résoudre les conflits gelés des Nations unies ? Pourquoi, alors que vous évoquez à juste titre l'importance de la Cour pénale internationale, n'avez-vous jamais rien fait pour que le rythme des enquêtes en cours – notamment celle sur la guerre menée en 2014 par Israël à Gaza – s'accélère ?

Cette résolution internationale et politique est donc bien une farce, qui met en scène des personnages parfaitement caricaturaux et ne laisse aucune place à la nuance.

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Mais là s'arrête la comparaison car l'état du monde et celui de la France méritent mieux qu'un tel texte. Cette farce ne nous fait pas rire. Elle nous accable, tant votre déni et votre posture morale sur la scène diplomatique sont étouffants.

Alors, s'il vous plaît, la prochaine fois, choisissez plutôt l'humilité ! Ce trait de caractère aidera bien plus nos diplomates, qui doivent en avoir par-dessus la tête de vos gesticulations contre-productives.

Enfin, au nom de mon groupe, permettez-moi d'avoir une pensée pour les victimes de l'attentat survenu ce samedi à Paris et de saluer tous ceux qui œuvrent pour notre sécurité.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.

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C'est bien ! La France insoumise, elle, ne l'a pas encore dit !

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Chaque jour, le contexte international nous rappelle les menaces qui pèsent sur la démocratie. La montée en puissance des populismes et des extrémismes, partout dans le monde, nous interpelle et nous inquiète. Face à cette situation, il semble dérisoire que la représentation nationale soit amenée à examiner un texte non performatif, dont le seul objet est de condamner ce qui est condamnable tout en demandant au Gouvernement de ne rien changer.

Je le dis avec d'autant plus de franchise que le groupe LIOT s'est joint à toutes les initiatives de cette assemblée pour affirmer son opposition à toutes les formes d'autoritarisme, en particulier la répression en Iran, le terrorisme du Hamas, le non-respect du droit humanitaire dans les territoires palestiniens, l'invasion en Ukraine et l'Holodomor ainsi que l'invasion du Haut-Karabakh par l'Azerbaïdjan.

Soyons un peu sérieux. Le débat de cet après-midi conforte l'idée selon laquelle notre travail se limiterait à des déclarations d'intention et à une politique verbeuse, d'autant que les questions relevant des relations internationales sont peut-être celles qui échappent le plus à notre compétence – même si elles font l'objet d'un consensus plus large que d'ordinaire dans l'hémicycle.

Certes, la menace qui pèse sur le modèle démocratique est souvent extérieure : je pense aux ingérences du régime chinois, à la désinformation menée par la Russie de Vladimir Poutine. Mais le péril est intérieur aussi, car les démocraties ne s'écroulent du dehors que lorsqu'elles sont essoufflées au-dedans.

À ceux qui disent que la démocratie est vivante dans ce pays, je répondrai qu'elle manque de vitalité et que là est le plus grand danger. La défiance des citoyens, leur abstention, leurs positions de plus en plus radicales ne s'expliquent pas uniquement par des influences extérieures, elles trouvent leurs sources dans une désillusion et une insatisfaction croissante envers la mise en œuvre de l'idéal démocratique.

Ainsi, les nombreux recours au 49.3, les attaques systématiques contre les corps intermédiaires, l'injustice fiscale, la concentration des pouvoirs dans les mains d'une poignée de dirigeants, la non-reconnaissance des langues et des cultures de nos territoires, les affaires du monde politique et j'en passe, épuisent les citoyens.

La démocratie représentative a indéniablement besoin d'un nouveau souffle. Le groupe LIOT appelle à une réforme du référendum d'initiative partagée, de la démocratie locale – pour plus d'autonomie – et de l'initiative européenne. Ces trois strates, respectivement nationale, locale et européenne, sont insuffisamment à l'écoute directe des citoyens. La Convention citoyenne pour le climat et le Grand débat n'ont pas répondu à cette attente. Ce que les citoyens demandent, ce que nous demandons en tant qu'élus, c'est plus de démocratie directe et plus de démocratie territoriale.

Défendre la démocratie, c'est également écouter les voix qui s'expriment à l'échelle régionale. Lorsque nous autres, Corses, demandons au Gouvernement plus d'autonomie, de compétences et un véritable statut pour notre peuple, notre île, notre histoire et notre culture, nous ne sommes pas antidémocrates, bien au contraire ! Le Président de la République semble avoir entendu cet appel et, surtout, avoir pris la mesure du caractère profondément légitime de cette aspiration. Son discours du 28 septembre à Ajaccio est à cet égard un signal très positif ; il faut maintenant le traduire en actes.

Le groupe LIOT est profondément attaché à la démocratie, à la justice sociale et à la reconnaissance des territoires ; il s'oppose à toute forme de pression sur l'idéal démocratique et rejette toute tendance à l'oligarchie dans les partis politiques. C'est pourquoi il mène à l'Assemblée nationale un combat pour montrer qu'il est possible de trouver une autre voie dans cet hémicycle, entre opposition et construction.

Nous partageons donc le propos de cette proposition de résolution. En revanche, nous estimons qu'elle est incomplète et qu'elle enfonce des portes ouvertes.

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Notre assemblée devrait éveiller les consciences citoyennes plutôt que de tourner en rond. C'est pourquoi nous ne participerons pas au vote.

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Si nous partageons évidemment l'ambition revendiquée par le titre de votre proposition de résolution, chers collègues, nous restons bien circonspects quant à la méthode. Celle-ci semble le reflet de l'action de votre gouvernement : encore des paroles, des incantations et des prophéties, insuffisantes, certainement inutiles – elles n'auront aucune conséquence.

Auriez-vous été trompé, tel Narcisse, par votre propre reflet ? Dans votre suffisance et votre autocontemplation, vous distribuez les sanctions, les bons points, les leçons, alors que vous donnez régulièrement de piètres exemples de démocratie… De résolution en résolution, qu'est ce qui a changé ? Vos propositions de résolution n'ont-elles d'autre but que de satisfaire votre bonne conscience ?

Votre gouvernement, à l'image du Président de la République, est persuadé de la valeur performative d'une parole, mais répéter une chose n'en fera jamais, ni une vérité, ni un fait. Nous, au Rassemblement national, nous sommes convaincus qu'il faut avoir la volonté politique d'agir.

Ainsi, vous faites un amalgame entre les atrocités de la guerre, la lutte contre la désinformation et vos échecs en matière de politiques européennes et internationales. Si vous défendez la démocratie, faites-le vraiment ! et nous serons toujours là pour vous soutenir. Mais vous la piétinez en permanence, drapés dans votre hypocrisie, et restez sourds à la volonté des Français !

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N'oubliez jamais que c'est au peuple de choisir son destin, et la démocratie le lui permet tant qu'il en a la liberté. Or cette liberté, que nous chérissons tous, est le corollaire de la souveraineté des nations, souveraineté que vous souhaitez abandonner à une Europe qui se rêve État tout-puissant. Ce faisant, vous anéantiriez la liberté dans un conseil fonctionnant à la majorité. Devant les difficultés croissantes, vous êtes dans une permanente fuite en avant vers une construction européenne omnipotente. Nous pensons au contraire qu'une union de nations libres, souveraines, sera bien plus forte, mais surtout garante de la démocratie et des valeurs de la République !

Comment pouvez-vous défendre l'idée d'abandonner notre indépendance diplomatique et sécuritaire, diluée dans une politique de défense européenne commune ? Abandonner notre voix singulière dans le concert des nations est un renoncement inacceptable que de Gaulle dénonçait déjà par ces mots : « Mais l'Europe, l'Europe supranationale […] on va sur des chimères, on va sur des mythes. […] Il y a les réalités, et les réalités ne se traitent pas comme ça. Les réalités se traitent à partir d'elles-mêmes. Et c'est ce que nous nous efforçons de faire. » Et nous aussi, au Rassemblement national.

En cela, votre texte nous amènera à nous abstenir. Pour agir efficacement, il faudrait en effet renforcer notre diplomatie. Or si les moyens déployés et annoncés ces derniers mois sont nécessaires et bienvenus, la réforme des corps diplomatiques et de la haute fonction publique fera perdre à notre pays des compétences précieuses et favorisera le clientélisme.

Je vous livre les paroles de Rigoberta Menchú Tum, prix Nobel de la paix en 1992.

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Ces mots devraient être au cœur de notre réflexion : « La démocratie ne peut exister sans le respect de l'identité et de la valeur des cultures des peuples. » C'est exactement le sens de la Déclaration des peuples et des nations que nous proposons.

Pour réussir, il faut combattre la source du mal en commençant par l'identifier, ce que nous, nous avons fait : il s'agit de l'islamisme et de l'extrémisme, ce gauchisme ou ce cryptocommunisme.

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Mais si vous êtes capables de dénoncer ce mal à l'étranger, pourquoi ne pas faire preuve de fermeté envers ceux qui sont confortablement installés dans notre pays ?

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Une France forte, protectrice de sa souveraineté, au sein d'une Europe grandie par la liberté de ses nations, non par une ouverture déraisonnée qui ne conduirait qu'a plus de chaos et appauvrirait l'ensemble des pays Européens. Voilà ce que nous défendons,…

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…voilà ce que pourront choisir les Français, le 9 juin prochain, en votant Jordan Bardella !

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Si on ne peut que souscrire à la visée globale de cette proposition de résolution, je m'étonne qu'elle passe sous silence ce qui, à mon sens, est la menace principale pour les démocraties, mais surtout pour la nôtre.

Car au-delà des menaces extérieures, bien réelles et de plus en plus nombreuses, ce sont surtout les menaces intérieures qui gangrènent notre démocratie et qui la sapent chaque jour davantage auxquelles il faut répondre. Oui, notre démocratie est fragile et traverse une crise sans précédent. Comme le rappelait en avril dernier le président du comité d'histoire parlementaire et politique, il y a aujourd'hui une remise en cause de tout le dispositif institutionnel et des acteurs qui le font fonctionner. Et ce n'est pas une énième résolution qui permettra à notre démocratie de retrouver du souffle ! Assez de bavardage, les Français ne sont plus dupes !

Plus qu'une crise de la démocratie au sens restreint du terme, puisque les institutions continuent de fonctionner et que les élections ont lieu, la nôtre traverse une crise existentielle. Sentiment de dépossession, disparition des services publics, crise sociale qui tourne en boucle, fièvre révolutionnaire des mélenchonistes : tout donne le sentiment que notre démocratie est emportée dans un processus d'autodestruction.

J'en veux pour preuve la progression constante du taux d'abstention, des niveaux record étant atteints depuis quelques années à chaque scrutin. Les chiffres sont alarmants : plus de 55 % des Français se sont abstenus lors des dernières élections législatives, et 28 % au second tour de la dernière élection présidentielle. C'est bien une crise de légitimité que traversent nos institutions. Les Français sont las de voir la violence de nos débats, de voir chaque semaine les comportements toujours plus brutaux et indignes de certains de nos collègues, de se sentir bafoués par une pluie de 49.3 qui ternissent nos débats – quand ils ont lieu – alors que notre président se met en scène dans Pif Gadget et qu'une ministre pose, comble du narcissisme moderne, pour Playboy.

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Je suis abonné à Pif Gadget mais pas à Playboy !

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L'orgie législative – vingt textes cette semaine… – de notre assemblée donne l'impression que tout se passe dans la précipitation, entre deux plans d'urgence. Pire, parce que l'Assemblée nationale est devenue difficilement gouvernable, voilà qu'on nous propose des conventions citoyennes à tout va, sur tout et n'importe quoi, et qui ne sont, au fond, que de tristes simulacres de démocratie ! Où sont passées les réformes d'ampleur promises par Emmanuel Macron ? Où sont passées ses grandes idées permettant le renouveau de la politique en France ? Plus personne n'y croit, tant elles manquent de vision à long terme et d'ambition.

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Après que les attaques terroristes du groupe islamiste Hamas contre la population israélienne ont ôté la vie, le 7 octobre, à plus de 1 200 civils – faisant de la France, avec 40 ressortissants tués, la deuxième nation la plus touchée, à l'heure où la lutte à mort des islamistes contre ce que nous sommes a de terribles conséquences sur notre sol – j'adresse mes condoléances à la famille de la personne tuée samedi, mon soutien aux victimes et mes remerciements aux forces de l'ordre qui ont, une fois encore, agi avec beaucoup de courage –, à l'heure où la lutte des Ukrainiens pour leur liberté nécessite que nous soyons plus que jamais à leurs côtés – l'avenir de notre Europe se joue là-bas –, à l'heure où la Chine toute-puissante étend sa main menaçante sur Taïwan, il est grand temps de reprendre notre destin en mains !

Il faut bien l'avouer : l'idéal démocratique incarné par l'Union européenne n'est plus guère séduisant, tant elle est trop souvent un monstre froid et technocratique, éloigné du quotidien des gens,…

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…bien loin des promesses de ses pères fondateurs. Personne, d'ailleurs, n'a oublié avec quelle facilité les résultats du référendum de 2005 ont été balayés…

Alors oui, bien sûr, je voterai cette proposition de résolution. Mais de grâce, préoccupons-nous en priorité de redonner foi au peuple français en son histoire, en sa culture, en ses modes de vie et en quelques-unes de ses vertus cardinales. Elles seules peuvent protéger notre démocratie contre les attaques de ceux qui cherchent à l'affaiblir, qu'ils viennent de l'islam politique et radical ou de mouvements politiques démagogiques. Ceux-ci ont délaissé la misère pour faire fructifier leur pactole électoral, à coups de discours anti-France, anti-Charlie, et même anti-flics ! À l'opposé, notre devoir est de dire le monde tel qu'il est, sans faux-fuyant. En un mot, d'être à la hauteur de la France !

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La discussion générale est close.

Sur la proposition de résolution, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'Europe.

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

Tout d'abord, permettez-moi d'avoir une pensée pour le ressortissant philippino-allemand décédé samedi soir à Paris et pour ses proches, et d'exprimer mes remerciements aux forces de l'ordre.

Je tiens à remercier le président du groupe Renaissance, Sylvain Maillard, le président de la commission de la défense nationale et des forces armées, Thomas Gassilloud, les députés Hadrien Ghomi, Anne Genetet et leurs collègues du groupe Renaissance d'avoir proposé à la représentation nationale l'examen de cette proposition de résolution.

Vous l'avez souligné à juste titre dans l'exposé des motifs du texte : nous vivons, depuis quelques années, un moment de brutalisation des relations internationales. Dans un monde où les compétitions s'exacerbent chaque jour davantage, où les règles sont de plus en plus bafouées, des pays autoritaires cherchent à saper notre modèle démocratique. L'emploi de la force brute pour agresser et éliminer un État souverain, comme en Ukraine ; les attaques terroristes les plus abjectes, comme celles qui ont touché Israël le 7 octobre dernier ; les opérations de désinformation qui visent à manipuler les opinions des sociétés démocratiques pour mieux les déstabiliser en y semant le trouble et la discorde : c'est tout le modèle d'organisation et de régulation des rapports internationaux visant à construire la paix au lendemain de la seconde guerre mondiale qui est attaqué. C'est le modèle démocratique, libéral, social, de confiance qui est attaqué ; c'est donc aussi le modèle européen.

Certains veulent balayer la paix, la démocratie, les règles qui devaient assurer la stabilité mondiale. La primauté du droit sur la force, le règlement pacifique des différends, l'universalisme des droits et des principes contenus dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée à Paris il y a soixante-quinze ans, presque jour pour jour, forment le socle de notre capacité à vivre dans la confiance, la tolérance et la liberté. C'est à tout cela que les régimes autoritaires veulent s'attaquer. Face à ce constat, nous devons tous – républicains, Gouvernement, Parlement, citoyens, associations – affirmer et défendre ces principes fondamentaux ; nous devons tous combattre la désinformation, nous interroger sur les manipulations. En effet, ces droits humains, ces principes, sont au fondement de notre République comme de l'Union européenne ; ils sont la raison pour laquelle des dizaines de millions d'hommes et de femmes de pays européens veulent rejoindre l'Union européenne.

Ce sont ces principes et ces valeurs que nos diplomates, ainsi que les ministres Catherine Colonna et Sébastien Lecornu, sous l'autorité du Président de la République, défendent en ce moment même au Proche-Orient. Le Hamas compte parmi les menaces qui pèsent sur la France. Quarante de nos compatriotes figurent au nombre des victimes des massacres barbares qui ont été commis le 7 octobre 2023 ; quatre d'entre eux sont toujours portés disparus. Vous avez également raison de mentionner l'Iran : ce pays arme, équipe et finance non seulement le Hamas, mais également de nombreux autres groupes non étatiques dans la région, comme le Hezbollah au Liban ou les Houthis au Yémen, qui n'ont en commun que leur haine d'Israël.

Face à ces menaces, le Gouvernement agit. Nous avons mis sur la table européenne des propositions de sanctions à l'encontre des principaux commandants du Hamas. Nous sommes engagés pour lutter contre le financement des groupes terroristes, dont le Hamas, et contre leur propagande, y compris la haine en ligne.

Nous avons pris des sanctions contre l'Iran ; à ce jour, plus de dix trains de sanctions ont visé des officiels du régime iranien, en réaction à la fois à la répression féroce qu'ils ont menée contre leur peuple après la mort de Mahsa Amini, et à la coopération militaire avec la Russie. Nous poursuivrons cette politique de sanctions. Le Hezbollah et l'Iran agitent la menace d'embrasement de la région : nous y répondons de manière ferme, sans ambiguïté. Le Président de la République et la ministre de l'Europe et des affaires étrangères ont passé des messages très fermes à leurs homologues iraniens sur ce point.

Nous agissons aussi pour le long terme : avec nos partenaires, nous œuvrons à créer les conditions pour une paix juste et durable au Proche-Orient. Certains – nombreux – ont pu un temps oublier les aspirations des Palestiniens. Ce n'est pas le cas de la France, qui les a toujours soutenues.

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

Elle continuera de le faire jusqu'à ce qu'il y ait un État palestinien viable, qui réponde aux aspirations du peuple palestinien.

Le Président de la République a multiplié les consultations depuis des semaines, et encore lors de son déplacement de jeudi à samedi dans la région ; l'ensemble de la diplomatie et du Gouvernement fait de même, sans relâche.

Face à la guerre d'agression que la Russie mène en Ukraine, la France a également répondu sans hésitation, réclamant l'exigence du respect du droit international et des principes fondamentaux – ce droit et ces principes que la Russie n'a cessé de bafouer depuis bientôt deux ans. C'est le sens de notre soutien civil et militaire à l'Ukraine : nous ne pouvons pas laisser la Russie gagner cette guerre. C'est aussi la raison pour laquelle la lutte contre l'impunité est une de nos priorités, à travers notre soutien à la Cour pénale internationale (CPI), mais aussi aux juridictions ukrainiennes. Il y va – je regrette que cela ne vous intéresse pas plus – du droit qui a permis la paix depuis soixante-dix ans sur notre continent,…

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Cela nous intéresse, mais nous n'aimons pas les indignations sélectives !

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

…il y va de nos intérêts fondamentaux de sécurité et de la stabilité du continent européen pour les années à venir.

Nous ne pouvons tolérer l'impunité pour les crimes de guerre que la Russie a commis dans le cadre de son agression. Par ailleurs, il est totalement légitime qu'elle contribue à la réparation des destructions qu'elle a engendrées en Ukraine – c'est ce que vous demandez. La France soutient l'idée d'une mobilisation des avoirs russes gelés aux fins de reconstruction. Des travaux sont en cours au niveau du G7 et de l'Union européenne. Nous y participons de manière active, afin d'identifier une solution respectueuse du droit international, mais également de notre propre cadre constitutionnel.

J'en profite, monsieur Lecoq, pour vous dire que la France n'exporte aucune arme en Azerbaïdjan,…

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

…sous embargo de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), et n'importe aucun gaz de ce pays.

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L'Europe en importe ! Vous êtes secrétaire d'État chargée de l'Europe !

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

Pour l'Europe, il s'agit de 4 % de ses importations gazières seulement. C'est l'Azerbaïdjan qui dépend de nous, non l'inverse !

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

La France n'en importe pas.

La ministre de l'Europe et des affaires étrangères a eu l'occasion d'évoquer ici même, le 21 novembre, l'action de la France en Afrique. Je veux redire que nous soutenons les voix démocratiques africaines – sans ingérence, sans donner des leçons de démocratie de l'extérieur.

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

Nous appuyons les acteurs de la société civile : ils sont essentiels à la résilience des sociétés démocratiques. Je pense notamment à notre soutien à la Fondation de l'innovation pour la démocratie d'Achille Mbembe. Au Mali, au Burkina Faso et au Niger, les juntes instaurent des régimes autoritaires et populistes, faisant de la communauté internationale un bouc émissaire. Les conséquences sont tristement claires : recul des libertés et des droits de l'homme, crise humanitaire et sécuritaire, incapacité à lutter contre le terrorisme, et, dans le cas du Mali, recours à Wagner, avec son cortège de prédation et de crimes de guerre. Face à de tels régimes, nous ne pouvons pas maintenir nos projets de développement, mais nous restons aux côtés des populations : aide humanitaire, projets universitaires et culturels, appui aux sociétés civiles. Et, surtout, nous soutenons la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) quand elle se bat pour la défense de la démocratie et contre la multiplication des coups d'État. Partout où il y a eu des putschs, nous appuyons les organisations africaines qui demandent la tenue d'élections et le retour à l'ordre constitutionnel.

Mesdames et messieurs les députés, vous l'avez exprimé clairement dans votre proposition de résolution : il n'y a pas de démocratie sans une information libre, fiable et de qualité. L'espace informationnel numérique est devenu un champ de manœuvres pour des actions hostiles à notre encontre.

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

Des campagnes de manipulation de l'information cherchent à polariser notre société, particulièrement en période électorale, et à salir l'image de notre pays auprès des opinions publiques étrangères.

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

Elles s'appuient sur les failles des grandes plateformes numériques, et parfois sur un certain laisser-faire de la part de celles-ci. Nous avons pris la mesure de ces menaces et nous nous sommes organisés pour y répondre : à l'échelle internationale, à travers le Partenariat pour l'information et la démocratie, lancé en 2019 avec Reporters sans frontières, qui réunit aujourd'hui cinquante-deux États de toutes les régions du monde ;…

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Vous savez ce que dit Reporters sans frontières sur Gaza ?

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

…à l'échelle européenne, à travers le règlement européen relatif à un marché unique des services numériques (DSA), entré en vigueur l'été dernier, qui donne des armes juridiques pour lutter contre la désinformation en demandant des comptes aux plateformes et en impulsant des actions chaque fois que cela est nécessaire ; à l'échelle nationale, en renforçant nos moyens de veille et de riposte informationnelle, et en n'hésitant plus à nommer les responsables de ces attaques. Avec davantage de moyens donnés au Quai d'Orsay et la création, en 2021, du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum), nous avons su nous doter d'outils efficaces. En novembre dernier, nous avons ainsi déjoué l'action du réseau russe Recent Reliable News dans l'amplification artificielle et la primo-diffusion sur les réseaux sociaux des photos des tags représentant des étoiles de David dans le 10e arrondissement de Paris.

Nous agissons aussi en faveur de la presse libre et indépendante, qui est au cœur de notre projet européen.

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Où ça ? Chez nous ? Indépendante de qui ? De la finance ? Vous avez de l'humour, madame la secrétaire d'État !

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

Les états généraux de l'information voulus par le Président de la République, qui se déroulent en ce moment même, ont vocation à proposer de nouvelles actions à l'échelle nationale comme européenne, car l'information n'a pas de frontières dans un monde libre.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Une poignée de milliardaires possèdent 90 % des médias en France !

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

La liberté de parole, c'est aussi cela !

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

C'est aussi pour cette raison que nous aidons les professionnels de l'information qui cherchent à développer une information libre et de qualité à l'étranger, et que nous accueillons en France des journalistes en exil pour les aider à poursuivre leur travail sur leurs pays en crise, à l'exemple de ce que font certains journalistes ukrainiens.

Je terminerai mon propos en parlant plus encore d'Europe. Depuis l'agression de l'Ukraine par la Russie, l'Union européenne a su montrer sa force à travers son unité. Elle est sortie de sa condition de minorité géopolitique pour prendre en main son destin. Le renforcement de nos industries et de nos capacités de défense, le combat contre l'autoritarisme, la construction d'une communauté politique européenne ou encore la réglementation de l'espace numérique, tout cela forme un tout cohérent. C'est l'affirmation d'une Europe souveraine, qui défend tête haute ses intérêts et ses principes, c'est-à-dire la démocratie et l'État de droit.

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

L'Union européenne joue un rôle de premier plan dans le soutien militaire apporté à l'Ukraine ; elle a considérablement renforcé son influence au sein de l'Otan et s'est dotée, avec l'adoption de la Boussole stratégique, d'un cadre conceptuel commun pour agir.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe RN

C'est long !

Debut de section - Permalien
Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe

Ne vous inquiétez pas, j'ai bientôt fini.

Il s'agit maintenant de s'accorder des moyens à la hauteur des enjeux, dans l'objectif de développer des outils permettant le soutien à l'innovation, l'acquisition conjointe et la production de matériel militaire par les industries européennes.

Vous l'aurez compris, la défense du modèle démocratique est au cœur de notre diplomatie comme de toute l'action du Gouvernement. Parce qu'il y va des intérêts de la France et des Français, et de nos valeurs les plus fondamentales, le Gouvernement apporte tout son soutien à la proposition de résolution.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs des groupes Dem et HOR.

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Je mets aux voix l'article unique de la proposition de résolution.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 108

Nombre de suffrages exprimés 87

Majorité absolue 44

Pour l'adoption 52

Contre 35

L'article unique est adopté, ainsi que l'ensemble de la proposition de résolution.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

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Je demande une suspension de séance de dix minutes.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt-cinq.

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L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de Mme Nicole Le Peih, M. Sylvain Maillard et les membres du groupe Renaissance et apparentés, visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels (1602, 1912).

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La parole est à Mme Nicole Le Peih, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

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La proposition de loi que je vous présente aujourd'hui concerne l'engagement de la responsabilité civile en cas de trouble anormal de voisinage. Rappelons le contexte : cette responsabilité est une création jurisprudentielle ; elle ne repose sur aucune disposition législative, mais sur un principe autonome révélé par la Cour de cassation en 1986, selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage. C'est une responsabilité sans faute.

Le propriétaire du bâtiment dans lequel le trouble trouve son origine peut être tenu responsable, mais la jurisprudence a étendu la responsabilité au locataire et à l'occupant du bâtiment. Les tribunaux sont allés jusqu'à consacrer la responsabilité du voisin occasionnel, à savoir le constructeur qui réalise des travaux dans le bâtiment.

L'anormalité du trouble est appréciée in concreto par le juge, c'est-à-dire au cas par cas. Je vous épargne le panorama complet de la jurisprudence en la matière, mais il ressort des décisions des juridictions qu'elles apprécient non seulement la gravité et la durée du trouble, mais également le contexte dans lequel il se produit. Un même trouble pourra être anormal en milieu urbain – par exemple le chant du coq – mais acceptable en milieu rural, et inversement.

J'en viens aux conditions exonératoires de cette responsabilité. Le législateur a souhaité réduire la portée de la responsabilité sans faute en prévoyant que le juge pourrait l'écarter s'il constatait la réunion de trois critères cumulatifs : l'activité à l'origine du trouble est antérieure à l'installation du requérant, elle s'est poursuivie dans les mêmes conditions et elle respecte la législation en vigueur.

Le champ d'application de cet article est toutefois restreint, pour ce qui regarde tant les activités – il ne concerne que les dommages causés par des activités industrielles, artisanales, commerciales, agricoles, aéronautiques, culturelles ou sportives – que les personnes : seuls les dommages causés aux occupants du bâtiment en relèvent. La jurisprudence a ainsi exclu son application aux rapports des copropriétaires entre eux.

Si cet article a pu être interprété comme un « droit à polluer » pour le premier occupant, le Conseil constitutionnel a rappelé en 2011, à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité, que les obligations réglementaires et législatives incluaient évidemment la préservation et la protection de l'environnement et que ces dispositions ne préjugeaient en rien de l'engagement de la responsabilité pour faute.

On se trouve ainsi face à un fait curieux : un principe jurisprudentiel doté d'une exception fixée par la loi. D'où la présente proposition de loi, qui vise à créer un article 1253 du code civil comportant deux alinéas.

Le premier codifie la théorie de la responsabilité pour trouble anormal de voisinage. Il s'inscrit dans la continuité de plusieurs projets de réforme de la responsabilité civile, comme celui de Pierre Catala, celui de François Terré ou celui du ministre Urvoas en mars 2017.

L'alinéa reprend, à une exception près, les cas soulevés par la jurisprudence. La rédaction que je propose écarte néanmoins la responsabilité sans faute du constructeur, qui avait été questionnée par plusieurs universitaires. En effet, s'agissant de troubles occasionnés par des travaux, de deux choses l'une : soit le constructeur a commis une faute, et sa responsabilité pour faute peut être engagée ; soit les troubles sont occasionnés par les travaux eux-mêmes, auquel cas il revient au propriétaire d'en répondre. Je proposerai d'ailleurs un amendement visant à écarter la responsabilité du constructeur tout en garantissant que les personnes ayant la jouissance du bien, comme l'usufruitier, sont bien concernées.

Le deuxième alinéa inscrit dans le code civil la clause exonératoire de responsabilité, en énumérant les trois critères cumulatifs nécessaires à son application : l'antériorité de l'activité, la conformité à la législation et la poursuite de cette activité dans les mêmes conditions. Il procède à un élargissement du champ d'application de la théorie de la pré-occupation : toutes les activités seront concernées – y compris les activités sportives.

Je me suis interrogée sur l'articulation à prévoir entre la règle générale posée par le code civil et la règle spéciale prévue par le code de la construction et de l'habitation (CCH). Il me semble qu'une telle coexistence serait source de confusion ; c'est pourquoi je proposerai un amendement tendant à abroger l'article L. 113-8 du CCH, qui applique la théorie de la pré-occupation.

En matière de trouble anormal de voisinage, il est nécessaire de trouver un juste équilibre pour préserver les intérêts de tous. Tel est l'objet de cette proposition de loi. Cette préoccupation est d'ailleurs partagée par plusieurs groupes, dont le groupe GDR et le groupe LR, qui ont déjà déposé des propositions de loi sur le sujet.

Certains parmi vous ont la tentation de profiter de cette codification pour élargir l'exception de responsabilité. Cependant, un tel élargissement se ferait au détriment du droit au recours des personnes qui subissent le trouble. De plus, soyons réalistes : même une exonération complète de responsabilité ne mettrait pas fin aux conflits entre voisins ; elle entraînerait plutôt un glissement vers l'abus de propriété et la responsabilité pour faute.

Aller en justice doit constituer le dernier recours. C'est le message que nous avons envoyé en prévoyant une médiation obligatoire avant toute saisine du juge en matière de trouble anormal de voisinage. Il faut aussi veiller à la bonne information des parties ; dans mon département du Morbihan, une convention conclue entre les notaires et la préfecture prévoit ainsi que les nouveaux arrivants sont sensibilisés à leur environnement immédiat, afin qu'ils ne soient pas surpris. De telles initiatives locales, visant à apaiser les relations entre voisins, sont à encourager. L'objectif est le bien vivre ensemble sur un même territoire.

« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

En mars dernier, au Salon de l'agriculture, alors que j'allais à la rencontre de ceux qui nous nourrissent, j'avais fait part de mon intention de mettre un terme aux procès abusifs en matière de voisinage, dont les médias se font régulièrement l'écho.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Je pense ainsi à Maurice : c'est le nom d'un coq de l'île d'Oléron, qui est devenu celui d'une affaire, en juin 2020 – car Maurice chante au lever du soleil, comme tous les coqs. Il y eut aussi l'affaire des cloches des Bondons ou encore celle de la mare aux grenouilles de Grignols. Certains estent en justice parce qu'ils sont incommodés par le bruit des moissonneuses-batteuses. Comment manger du pain si l'on ne coupe pas les blés ? Toutes ces affaires n'ont aucune raison d'être.

Ces exemples pittoresques pourraient prêter à sourire mais ils recouvrent, pour nos compatriotes vivant dans les campagnes ou pour les citadins en proie à un conflit de voisinage, des situations humaines et professionnelles extrêmement difficiles.

Nous devons apprendre à mieux vivre ensemble, à nous respecter. La présente proposition de loi vise à améliorer et à équilibrer les droits de tous : nouveaux ruraux et citadins de longue date, voisins des villes et voisins des champs.

Elle est le fruit d'un intense travail collectif, entre le Parlement et le Gouvernement, et transpartisan, entre la majorité et l'opposition. Je tiens d'ailleurs à saluer l'engagement remarquable de votre rapporteure, Nicole Le Peih, et à la remercier chaleureusement pour la qualité de ses travaux.

« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Nous étions ensemble vendredi à Pleucadeuc, dans ce beau département du Morbihan, pour visiter une exploitation agricole et nous avons vu à cette occasion combien ce texte était attendu par les agriculteurs.

D'abord, il consacre dans le code civil un principe général de responsabilité résultant d'un trouble anormal de voisinage – ce n'était jusqu'alors qu'un principe jurisprudentiel, prétorien. Le droit de la responsabilité civile, pilier du code napoléonien, s'est en effet progressivement affiné au fil de la jurisprudence. En 1986, la Cour de cassation a tiré du principe général et centenaire de responsabilité un fondement autonome en matière de trouble de voisinage, aux termes duquel « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal du voisinage ».

Ce régime de responsabilité est objectif : seule importe la démonstration d'un fait dommageable issu d'une nuisance du voisinage, qui doit être anormal, c'est-à-dire excessif. L'excès de ce trouble est apprécié in concreto par le juge, qui se fonde sur son intensité, sa durée, sa récurrence, sa localisation. Il peut s'agir, par exemple, d'odeurs, de bruits ou encore de fumées.

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De la fumée, il y en a dans l'hémicycle aussi : la vapeur de la Première ministre…

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Près de quatre décennies plus tard, cette construction purement prétorienne n'existe toujours pas dans la loi. Demeurés presque inchangés depuis 1804, les articles 1240 et suivants du code civil ne suffisent plus pour appréhender la réalité du droit français. C'est pourquoi le premier alinéa du nouvel article 1253 du code civil créé par la proposition de loi consacre le principe prétorien d'une responsabilité de plein droit de l'auteur d'un trouble anormal de voisinage : chacun a le droit de jouir paisiblement de sa propriété, de son logement, de son fonds et a droit à réparation du préjudice qu'il subit. Introduire ce principe général dans le code civil le rendra plus accessible et renforce la sécurité juridique du droit français, tout comme l'égalité de nos concitoyens devant la loi.

Deuxième objectif visé par le texte : trouver un juste équilibre entre les intérêts en présence. Si la proposition de loi pose un principe large de responsabilité, elle prévoit, à l'alinéa 2 de l'article 1253, une exception – c'est là tout l'intérêt de ce débat.

Cette exception est fondée sur la théorie de la pré-occupation. Aux termes de l'alinéa, l'auteur d'un trouble anormal de voisinage pourra s'exonérer de cette responsabilité de plein droit dès lors que le trouble résulte d'une activité préexistante à l'installation du nouveau voisin, conforme à la réglementation en vigueur et qui s'est poursuivie dans les mêmes conditions après l'installation du nouvel arrivant.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Disons-le plus simplement : celui qui choisit de s'installer à proximité d'un lieu bruyant ou odorant ne pourra pas se plaindre d'un trouble anormal du voisinage si la nuisance était présente au moment de son installation. Il s'agit là, me semble-t-il, d'une disposition de bon sens.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Je tiens à rassurer ceux qui auraient des craintes : en encadrant cette exception par ces trois conditions cumulatives, la proposition de loi assure un équilibre entre les intérêts en présence.

L'objectif est clair : préserver la vie, les habitudes, les activités des habitants et exploitants de nos territoires et de nos quartiers ; respecter ceux qui étaient implantés sur ces territoires avant l'arrivée des nouveaux voisins.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Ces dispositions s'inscrivent dans la continuité de la loi du 29 janvier 2021, texte déposé à l'initiative de Pierre Morel-À-L'Huissier – que je salue – et par lequel le Parlement avait reconnu le « patrimoine sensoriel des campagnes françaises ». Elles auront pour effet de dissuader les nouveaux venus de lancer abusivement des procédures judiciaires qui menacent l'activité de nombre de nos compatriotes, notamment en milieu rural et agricole.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

On dénombre plusieurs centaines de procédures en cours engagées contre des agriculteurs par des voisins quérulents se plaignant de nuisances liées à leur activité. L'odeur du bétail, le bruit de tracteurs, le chant du coq ou encore le meuglement des vaches poussent parfois les nouveaux habitants à saisir la justice, à l'instrumentaliser et à s'opposer à des installations qui étaient là bien avant leur arrivée.

Pour tout dire, j'ai parfois l'impression que l'on marche sur la tête : comment voulez-vous que l'on mange du pain si l'on ne peut plus couper le blé au motif que certains sont incommodés par le bruit de la moissonneuse ?

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

On s'attaque là à des gens qui se lèvent tôt, qui travaillent et qui méritent notre respect et notre aide.

Cela pèse sur le moral de nos compatriotes ruraux, encombre les tribunaux de procédures ubuesques et dissuade d'éventuels candidats de rejoindre des professions essentielles à notre souveraineté alimentaire et à la préservation de nos campagnes. Il est grand temps de mettre un terme à ces abus.

Permettez-moi d'insister sur un point : l'introduction dans le code civil de la théorie de la pré-occupation ne sera pas au seul bénéfice des habitants de la campagne. Cette protection profitera à tous, tout simplement parce que nous l'intégrons dans le code civil, et non dans le code rural.

Oui, ce principe général de responsabilité entre voisins pourra être invoqué par tous, habitants des villes et habitants des champs. Il participera d'un mieux vivre ensemble que nous appelons de nos vœux. Dans les villes aussi, les nouveaux arrivants ne doivent pas perturber abusivement l'activité économique ni la rénovation des infrastructures des propriétaires et occupants. Je pense par exemple aux habitants de grandes villes qui voient s'installer des dark stores dans les locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée de leur immeuble.

Ceux qui subissent un dommage lié à des troubles du voisinage pourront désormais s'appuyer sur un texte « en dur », sécurisé juridiquement.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Cette codification du trouble anormal du voisinage et de son exception favorisera en outre la résolution amiable des litiges entre voisins. Vous le savez, le développement de l'amiable est l'une de mes priorités. Je tiens à remercier chaleureusement Mme Caroline Yadan, ici présente, qui est très active sur cette question.

Mme Laetitia Saint-Paul applaudit.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Les conflits de voisinage font en effet partie des litiges qui doivent, à peine d'irrecevabilité, être soumis à une tentative préalable de médiation ou de conciliation avant la saisine du juge. Or il est plus facile de transiger lorsque l'on dispose d'une norme juridique claire et précise ; nous allons précisément établir une telle norme.

Vous l'aurez compris, je soutiens pleinement cette proposition de loi de bon sens – de bon sens paysan, comme je le disais à Pleucadeuc. Elle nous permettra de fixer un cadre clair à la vie en commun à l'échelle de nos territoires et de nos quartiers. C'est une loi de respect : respect de ceux qui étaient là avant, respect de ceux qui travaillent, respect des autres, respect de tous. C'est, en somme, une loi de concorde nationale et, j'ose le dire, de réconciliation. Par les temps qui courent, nous en avons grandement besoin.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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Dans la discussion générale, la parole est à Mme Sandrine Rousseau.

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La présente proposition de loi aborde un sujet d'intérêt, puisqu'elle vise à pacifier les relations de voisinage en définissant, dans le code civil, la notion de trouble anormal du voisinage. Si ce texte tend à simplifier le cadre législatif, il est nécessaire d'émettre une alerte afin qu'il ne soit pas contre-productif. En effet, il ne doit pas offrir un droit à polluer aux industriels et aux gros exploitants. Nous le savons, des procès fondés sur le trouble anormal du voisinage se sont tenus par le passé. Ce fut notamment le cas du procès dit de Fos-sur-Mer, qui opposa ArcelorMittal à quatorze riverains se plaignant de la pollution industrielle du site. Les exceptions fixées par cette proposition de loi permettront-elles toujours aux riverains de faire valoir leurs droits ?

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Pouvez-vous nous assurer que ce texte n'ouvrira pas, par ses exceptions, une faille dans la nécessaire prise en compte de la santé environnementale ? Nous devons redoubler de vigilance dans l'étude de cette proposition de loi, car l'image souvent fantasmée des néoruraux – précisément ciblés par le texte – ne doit pas cacher les milliers de ruraux qui habitent la campagne depuis des générations et se plaignent, comme à Fos-sur-Mer, de la mise en danger de leurs conditions de vie.

La proposition de loi risque aussi d'être contre-productive dans la mesure où le code civil s'applique à toutes et à tous. En faisant de ce texte l'étendard d'une défense de la ruralité, la majorité se risque à glisser dans une caricature qui pourrait nuire aux nombreuses autres personnes qui seront également concernées par cette évolution législative.

Lors d'un déplacement dans le Morbihan, monsieur le ministre, vous avez déclaré : « Vous achetez un appartement au-dessus d'un magasin qui génère des nuisances sonores. Vous le saviez, donc vous acceptez un certain nombre de désagréments. » Ces paroles sont déconnectées de la réalité vécue par des milliers de Français et de Françaises. Les personnes les plus pauvres sont celles qui sont les plus soumises aux nuisances sonores.

En ville, compte tenu du marché de l'immobilier, un grand nombre de locataires n'ont pas la possibilité de choisir le lieu où ils logent. On choisit rarement d'habiter aux abords du périphérique ou au pied d'une gare. La précarité financière de ces personnes ne doit pas les condamner à habiter dans un logement invivable, à subir des pollutions ou à s'exposer à une dégradation de leur santé environnementale. Notre rôle n'est pas de silencier les personnes, qu'elles vivent dans une zone rurale ou urbaine, mais de leur laisser à chaque instant la possibilité de trouver les moyens d'un recours.

En définitive, ne mythifions pas le droit des ruraux face à des néoruraux présumés dangereux ! Ne tombons pas dans la caricature de l'affrontement !

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Ce n'est pas le cas !

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II ne s'agit pas ici de la question du rapport des agriculteurs au territoire et à ses habitants, anciens ou nouveaux.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Si !

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Une telle modification du code civil aura un impact sur l'ensemble de la société.

Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – Mme Martine Étienne applaudit également.

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Je ne peux que saluer la volonté d'intégrer dans le code civil le trouble anormal du voisinage, même si cette proposition de loi reprend pour partie, il faut bien le reconnaître, des articles existants d'autres codes. Il est indéniable que ces troubles sont trop souvent la cause de querelles et d'actions judiciaires qui pourrissent le quotidien d'un trop grand nombre de foyers.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui !

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La notion de trouble du voisinage est déjà abordée dans notre législation, notamment par les articles L. 1240 et L. 1241 du code civil et les articles R. 1336-4 et suivants du code de la santé publique. Cependant, elle reste majoritairement sujette à l'appréciation du juge du fond, qui se fonde sur une jurisprudence particulièrement fournie. Cette proposition de loi lui laissera une grande marge d'interprétation, car elle ne donne pas la définition d'un trouble anormal du voisinage. Ainsi, nous continuerons à retrouver devant les tribunaux des griefs analogues à ceux qui étaient soulevés antérieurement à son éventuelle promulgation. Il nous faut toutefois reconnaître que s'attaquer à définir, de manière exhaustive,…

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

L'anormalité.

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…les troubles anormaux du voisinage serait un exercice particulièrement ambitieux et très périlleux.

Je note en outre que le dernier alinéa est quelque peu redondant. En effet, sa rédaction est pratiquement similaire à celle de l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation, créé par l'ordonnance du 29 janvier 2020 en remplacement de l'article L. 112-16 du même code. En effet, cet article dispose déjà que les activités professionnelles préexistantes n'ouvrent pas droit à réparation. N'est-ce pas là, monsieur le ministre, faire bégayer notre législation ?

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Non, pas bégayer !

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D'ailleurs, vous avez rappelé qu'il s'applique sans préjudice des articles du code de la santé publique qui portent notamment sur l'intensité, la fréquence et la durée des bruits.

Néanmoins, ne pourrions-nous pas éviter certains contentieux liés aux troubles du voisinage ? En effet, une grande majorité de ces actions en justice sont évitables. C'est notamment le cas en milieu rural lorsque de nouveaux arrivants acquièrent une propriété à la campagne. Il est fréquent de voir des situations dégénérer, alors que le litige repose à l'origine sur des raisons futiles. L'action des forces de l'ordre est même parfois requise pour ramener momentanément le calme entre les parties adverses.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui !

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Et il y a quelquefois des drames.

En milieu rural, les troubles du voisinage sont essentiellement dus aux activités agricoles ou, tout simplement, au mode de vie à la campagne.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui !

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Combien de chants de coq, de cloches annonçant l'angélus, de bruits d'engins agricoles, d'odeurs d'excréments émis par des animaux d'élevage sont-ils à l'origine d'actes d'enrôlement ?

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui !

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Et il ne s'agit pas seulement de cela. Les plus anciens d'entre nous ou les cinéphiles se souviennent sûrement de la mésaventure arrivée aux compères de Jean Rochefort lorsqu'ils firent l'acquisition d'une maison située à proximité d'une piste d'atterrissage, dans le film d'Yves Robert Nous irons tous au paradis. C'est la méconnaissance de l'environnement qui entraîne bien souvent les conflits de voisinage. Si le nouvel acquéreur s'était au préalable renseigné sur son futur environnement, il n'aurait peut-être pas acheté, ou bien il aurait acheté en parfaite connaissance de cause.

Les élus et les représentants de l'État le savent bien, de même que les médiateurs et conciliateurs si souvent sollicités pour résoudre ces situations et trouver une solution amiable satisfaisant les deux parties. En cas d'achoppement de ces démarches s'ensuit une bataille juridique, avec des délais importants et la diabolisation de chacune des parties, …

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui !

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…source de très grandes souffrances. Ces situations peuvent rapidement tourner au drame, notamment si les acquéreurs ont investi toutes leurs économies dans l'achat immobilier en question, se retrouvant alors prisonniers d'une situation non voulue.

Des démarches simples permettent pourtant de les éviter. Ainsi, de nombreuses études notariales appliquent une recommandation de la chambre des notaires du Morbihan qui impose aux futurs acquéreurs d'accomplir toutes les diligences utiles et nécessaires afin de s'informer sur l'environnement proche du bien acheté, notamment sur les éventuelles nuisances liées à des activités industrielles, artisanales, agricoles ou sportives. Lorsqu'elles sont contractualisées dans l'acte authentique de vente, ces diligences limitent, voire annihilent, toute velléité d'ester en justice. Toutefois, elles demeurent soumises à la bonne volonté des notaires ;…

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

C'est cela.

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…elles ne sont pas généralisées sur l'intégralité du territoire national. Voilà une avancée que nous pourrions introduire dans le texte.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

C'est vrai !

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C'est ce que je vous proposerai par un amendement qui reprend une proposition de loi que j'ai déposée il y a quelques mois.

En conclusion, la proposition de loi recueillera bien évidemment un vote favorable du groupe Gauche démocrate et républicaine. Si vous me permettez ce trait d'humour, madame la rapporteure, nous voterons en sa faveur même s'il ne casse pas trois pattes à une volaille fermière du Morbihan !

Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe RE. – Mme Marietta Karamanli applaudit également.

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Dans la vie politique, il y a parfois des moments difficiles, mais il y a aussi des moments sympathiques. Il y a trois ans, j'avais pris l'initiative d'une proposition de loi visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises. Que n'ai-je entendu alors !

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Eh oui !

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« C'est un sujet léger » ; « À quoi sert-il de légiférer là-dessus ? »… J'ai tenu à soumettre cette proposition de loi au Conseil d'État. Au début, celui-ci m'a considéré avec un regard un peu moqueur. Ensuite, Mme Sylvie Hubac, présidente de la section de l'intérieur, m'a dit que je mettais le doigt sur un sujet compliqué.

La question intéresse non seulement des voisins, mais aussi des maires – toujours embêtés –, des préfets, des procureurs, des juridictions. On dénombre globalement près de 18 000 dossiers invoquant un trouble anormal du voisinage.

Le maire de Gajac a souhaité la réalisation d'un inventaire de tout ce qui fait la spécificité des territoires. Mme Fesseau, charmante personne, a défendu son coq, prénommé Maurice. Le problème a fait l'objet d'une médiatisation importante : près de 300 journaux l'ont évoqué – non seulement la presse quotidienne régionale, mais aussi des médias internationaux. Un groupe de chanteurs, Aïoli, a défendu la cigale. Un groupe d'artistes, les Apaches !, dirigé par Julien Masmondet, a mis en musique le coq Maurice.

Au Beausset, dans le Var, des habitants ont demandé au maire d'acheter des pesticides pour éradiquer les cigales, trop bruyantes. Aux Bondons, ce sont les cloches de l'église qui dérangeaient. Je passe sur les grenouilles, les abeilles et les ânes. La voirie rurale est elle aussi concernée : dans ma petite commune de 400 habitants, on a demandé au maire de nettoyer la route car elle était maculée de bouses ! Vous rendez-vous compte des conceptions que l'on peut avoir, parfois ?

L'article 1er de la loi issue du texte que j'avais proposé a inclus dans le patrimoine commun de la nation les sons et les odeurs qui caractérisent les espaces naturels. L'article 2 prévoyait la réalisation d'inventaires, région par région. Je me suis heurté en la matière à un peu d'incompréhension de la part de certains ministères – cela arrive souvent, car les administrations centrales ne sont guère ruralisées. Quant aux régions, elles n'étaient pas très au fait du problème ; seules d'eux d'entre elles ont lancé un tel inventaire.

L'article 3 prévoyait la remise d'un rapport du Gouvernement à ce sujet. Ce rapport, monsieur le ministre, vous l'avez réalisé, d'ailleurs en lien avec le Conseil d'État, et vous l'avez remis dans les temps, en décembre 2021. Merci d'avoir respecté la volonté du législateur ! Ledit rapport traitait de nombreux sujets et proposait plusieurs orientations. In fine, vous en avez retenu deux. Contrairement à ce que j'ai pu entendre, la création d'un nouvel article dans le code civil est chose rare…

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui !

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…et importante. L'article 1253 permettra de codifier dans le droit positif une construction prétorienne – cette démarche est tout à votre honneur, monsieur le ministre, madame la rapporteure. Il prévoira une exception pour les activités préexistantes, le tout demeurant soumis à l'appréciation souveraine du juge du fond. On ne bloque donc pas la possibilité d'un procès.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Bien sûr !

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On donne simplement un cadre juridique stabilisé aux magistrats.

Je vous remercie aussi, monsieur le ministre, de la lettre que vous m'avez adressée le 28 novembre 2023. Vous y mentionnez la loi relative au patrimoine sensoriel et rappelez l'objectif du rapport. Vous y évoquez la médiation ou la conciliation préalable.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui, obligatoire.

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Je pense que nous faisons œuvre utile et que ce cadre juridique bénéficiera largement à des individus, à des voisins et même à des maires.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Oui.

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Je voudrais saluer mon ami avocat Timothée Dufour qui chaque jour essaie de défendre le bien vivre en milieu rural.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Bien sûr.

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Il faut respecter un certain nombre de valeurs et en particulier l'authenticité de nos territoires. Je suis, à ce titre, très heureux que le préfet du Morbihan ait lancé, avec les notaires, une convention notariale qui permet d'intégrer, avant toute chose, la ruralité du milieu et les spécificités qui s'y attachent. Élu depuis vingt-deux ans de la Lozère, je suis très heureux que nous fassions œuvre utile pour la ruralité.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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Nous sommes aujourd'hui réunis pour examiner la proposition de loi de notre collègue Nicole Le Peih, dont je salue la qualité du travail.

Le droit existant prévoit une exception à la possibilité de demander l'indemnisation d'un préjudice lié à un trouble anormal du voisinage, lorsque ce préjudice résulte de l'activité normale d'une exploitation agricole ou commerciale, et que cette dernière préexistait à l'installation du voisin qui s'en plaint.

Toutefois, si cette exception à la possibilité de demander l'indemnisation d'un préjudice lié à un trouble anormal de voisinage est bien inscrite dans la loi, cette notion de trouble anormal de voisinage reste jurisprudentielle.

Dans son application quotidienne, le droit de la responsabilité civile présente une forte dimension humaine et économique. Elle se définit notamment comme l'obligation de répondre du dommage causé à autrui et surtout d'assumer les conséquences civiles qui en découlent par la réparation.

Ce droit repose pour l'essentiel sur cinq articles du code civil, datant de 1804 et demeurés pratiquement inchangés. L'adaptation de ce droit aux bouleversements sociaux, économiques, scientifiques et technologiques résulte d'une importante construction jurisprudentielle élaborée depuis plus de deux siècles par la Cour de cassation. Dès lors, la lecture des articles 1240 et suivants du code civil ne suffit plus à appréhender la réalité du droit français de la responsabilité civile et peut être source d'incertitude juridique pour les justiciables qui se querellent.

En raison des enjeux qu'ils suscitent, les troubles anormaux du voisinage constituent un premier pan à adapter. La responsabilité pour trouble anormal de voisinage ne résulte pas, en effet, de la loi, mais d'une création dite prétorienne des juges, en vertu du principe selon lequel : « Nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage. » Cette disposition a également pour objectif de répondre aux préoccupations du monde rural et urbain ; de la campagne et des citadins. Elle tend en effet à limiter les conflits de voisinage entre les nouveaux habitants d'un territoire et les acteurs, notamment économiques, culturels ou encore touristiques, qui y sont déjà établis.

L'article unique de cette proposition de loi inscrit dans le code civil cette fameuse notion de trouble anormal du voisinage ainsi que l'exception au principe de responsabilité lorsque le trouble résulte d'activités préexistantes à l'installation et lorsqu'elles se poursuivent dans des conditions normales. Il s'agit, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, d'une proposition de bon sens, qui nous protège contre tous les abus.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Eh oui !

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L'examen en commission a permis d'adopter un amendement de Mme la rapporteure qui clarifie – si besoin en était – la référence faite dans le texte initial à l'installation sur le fonds, qui visait bien l'installation sur le fonds du requérant et non de la personne à l'origine du trouble.

Un problème de voisinage est celui auquel on demande à son voisin de pallier… Le voisin de palier est aujourd'hui notre hémicycle.

Sourires.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Beau jeu de mots !

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Cette proposition de loi transpartisane est simple et utile. Elle nous permet aussi, comme vous l'avez rappelé monsieur le ministre, de poursuivre nos engagements vers ces modes alternatifs de règlement des différends, auxquels nous sommes, et continuerons d'être attachés. Chacun l'aura compris : ce sont les raisons pour lesquelles le groupe Renaissance votera, bien évidemment, en faveur de ce texte.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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Cette proposition de loi, qui ne vient pas révolutionner l'état du droit dans la mesure où elle consacre la jurisprudence civile en matière de troubles anormaux du voisinage, intervient à un moment crucial pour la France rurale.

Nos plus de 26 millions d'hectares de surfaces agricoles utilisées sont la marque de la France qui respire, des champs et du travail quotidien, celui des 400 000 exploitants agricoles qui nous nourrissent et participent au rayonnement de notre agriculture et de notre alimentation.

Ces surfaces agricoles, qui représentent 45 % de la surface totale du pays, nécessitent du labeur, de l'entretien, du dévouement et des équipements. Depuis des siècles, l'image de notre pays a été forgée par le travail quotidien des agriculteurs et des éleveurs, et nous pouvons tous en être fiers.

Néanmoins, l'accroissement des zones urbaines et périurbaines et l'augmentation de l'exode des citadins vers la ruralité ont généré des contentieux en responsabilité civile en matière de troubles anormaux du voisinage. Ces nouvelles formes de mobilité, mais aussi l'évolution des modes de vie, ont donné lieu à des cas fameux, médiatiques, que M. le garde des sceaux vient de citer. En outre, ce phénomène s'est amplifié avec la crise sanitaire, quand de nombreux citadins ont rejoint les campagnes pour y passer les confinements successifs, et y sont parfois restés.

Je salue l'action résolue des maires et des élus locaux des petites communes rurales qui doivent faire face à de nombreuses difficultés. Ces élus sont le cœur battant de notre nation et sont en première ligne pour tenter de résoudre les conflits en amont, et pour maintenir la concorde dans les territoires entre les ruraux et les nouveaux arrivants.

S'il faut évidemment indemniser les atteintes disproportionnées à la tranquillité du voisinage, bien souvent, le litige est causé par l'installation de néoruraux qui ne connaissent pas les nécessités du travail agricole et les éventuels désagréments inhérents à la vie rurale. Avec l'essor de l'individualisme et l'effritement malheureux des liens sociaux, la cohabitation et le dialogue semblent de plus en plus difficiles.

Il était donc essentiel que les juges trouvent un équilibre entre les exigences de la vie agricole et rurale et le droit de pouvoir jouir de son bien sans trouble qui excède les inconvénients normaux de voisinage. La jurisprudence a donc réalisé cette conciliation de bon sens, notamment en tenant compte de l'antériorité du trouble par rapport à la date d'installation du demandeur pour prévoir des cas de non-indemnisation.

Dans ce texte, malgré son intitulé quelque peu ambitieux madame la rapporteure, il n'y a pas de réelle extension du droit de la responsabilité civile…

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… mais simplement une consécration de la jurisprudence au sein du code civil – ce qui est une bonne chose. Cette codification permettra de garantir l'application homogène de ce principe sur l'ensemble du territoire. Le groupe Rassemblement national votera en faveur de cette proposition de loi de bon sens.

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Ce texte introduit dans le code civil le principe d'une responsabilité fondée sur les troubles anormaux de voisinage – nous l'aurons bien compris, je suis le sixième à le répéter – tout en prévoyant comme exceptions l'antériorité de l'activité, sa poursuite dans les mêmes conditions, ainsi que sa conformité à la législation en vigueur. Cette consolidation de la jurisprudence au sein du code civil est plutôt bienvenue. Elle met fin à une lecture très subjective du principe de troubles anormaux de voisinage.

L'histoire du coq Maurice qui nous a été contée est chatoyante, elle m'est familière puisque j'ai grandi dans la campagne arrageoise… Néanmoins, l'exception introduite pour les activités économiques peut avoir des conséquences non négligeables sur des contentieux qui impliqueraient des exploitations agricoles polluantes, passées, par exemple, d'un élevage moyen à un élevage intensif, ou des activités industrielles, comme Sandrine Rousseau l'a rappelé en prenant l'exemple de Fos-sur-Mer.

Nous regrettons que cette modification ait été préférée à une transcription pure et simple de la jurisprudence de la Cour de cassation. Dès lors, en l'état actuel du texte, le groupe LFI s'y opposera.

Néanmoins, ce texte appelle de ma part un certain nombre de remarques. Transcrire une jurisprudence de la Cour de cassation peut être intéressant, dès lors qu'elle n'est pas modifiée ou que la portée de la modification est assumée. Heureusement que nous n'avons pas agi de même, en matière pénale, pour la prise illégale d'intérêts ! Cela aurait pu emporter des conséquences problématiques pour un certain nombre de mis en cause… qui n'auraient alors pas pu éviter une condamnation, au détour d'un jugement prenant quelques latitudes avec la jurisprudence constante de la Cour de cassation.

Par ailleurs, si l'on applique la logique du principe de responsabilité fondée sur les troubles anormaux de voisinage, qui prévoit une exception en cas d'antériorité de la situation, de poursuite de l'activité dans les mêmes conditions et de respect de la législation en vigueur, il me faut remarquer que le président de la commission des lois peut se prévaloir d'une antériorité dans le fait de ne pas respecter les usages, contrairement à ce qui est habituellement convenu.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Il y a là poursuite de l'activité dans les mêmes conditions, puisque, dans ces mêmes conditions, l'opposition est empêchée d'examiner ses propres textes lors de sa niche parlementaire…

Protestations sur les bancs du groupe RE. – Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Chez vous, on peut parler de trouble, tout court !

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… et voit son texte visant l'abrogation de la retraite à 64 ans rendu irrecevable, au mépris du règlement de l'Assemblée nationale mais dans le respect, je dois l'admettre, de la législation actuelle.

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On se demande alors si le président de la commission des lois est tout à fait fondé à organiser ce trouble anormal de voisinage avec ses oppositions. La question reste pendante.

Pour aller au bout de cette explication, j'ai pu lire que certains entendaient « tourner la page » et « regarder vers l'avenir. » Je propose de reprendre cette méthode, à défaut de pouvoir plaider moi-même devant la Cour de justice de la République.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Ça lui ressemble.

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Applaudissez, c'est sa première !

Cette proposition de loi vise à moderniser le droit de la responsabilité civile, qui repose sur cinq articles du code civil n'ayant pas évolué depuis leur entrée en vigueur, en 1804. Elle vise à introduire dans le code civil le principe, consacré par la jurisprudence, de responsabilité fondée sur les troubles anormaux de voisinage, afin qu'il puisse être appliqué uniformément sur l'ensemble du territoire.

Ce texte propose une évolution très attendue du droit en s'appuyant sur un rapport d'information de la commission des lois du Sénat de 2009, intitulé « Responsabilité civile : des évolutions nécessaires » ainsi que sur les jurisprudences successives.

La rénovation des règles de la responsabilité civile est un chantier majeur, lourd de conséquence pour la vie quotidienne de nos concitoyens et la compétitivité de nos entreprises. Ce droit est en effet omniprésent dans nos vies. Les accidents de la circulation, l'exécution du contrat de vente, l'indemnisation des dommages causés par un enfant mineur relèvent tous de la responsabilité civile.

Dans la plupart des cas, le bon sens et la communication permettent de régler les désaccords. Trop souvent, malheureusement, face aux enjeux économiques, psychologiques, esthétiques, nos concitoyens saisissent de plus en plus les tribunaux.

La proposition de loi entend moderniser et compléter le droit de la responsabilité civile en lui ajoutant un volet relatif aux conflits de voisinage.

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Il s'agit d'un sujet particulièrement important en milieu rural, où les activités agricoles peuvent troubler le mode de vie de ces nouveaux habitants, les « néoruraux ». Ces derniers peuvent engager des poursuites destinées à faire cesser les nuisances liées à l'activité agricole : chant du coq, odeurs à proximité d'une exploitation, bruit des tracteurs et des moissonneuses, sans parler du son des cloches.

Toutefois, la question concerne aussi les habitants des villes, avec de fréquents conflits de voisinage liés aux commerces : odeurs de cuisine, bruits causés par les climatiseurs ou les livraisons nocturnes, nuisances liées aux terrasses. Tout cela peut sembler anecdotique et éloigné de l'actualité, grave, qui bouleverse notre pays. Pourtant, au quotidien, l'effet est pesant pour de nombreux citoyens, et les maires, souvent sollicités à l'occasion de ces conflits, demandent une règle claire.

Le risque, en s'attaquant au droit de la responsabilité civile deux cent vingt ans après son adoption, serait d'en remettre en cause les règles fondatrices. Toutefois, l'apparition de contentieux nouveaux requiert une consolidation et une clarification des acquis jurisprudentiels, ainsi qu'une amélioration innovante des mécanismes de réparation.

Les avancées contenues dans cette proposition de loi vont dans le bon sens, et le groupe Les Républicains les soutiendra.

Nous avons déposé les amendements n° 1 et identiques pour mieux tenir compte de l'évolution de l'activité agricole, comme l'a suggéré le Conseil d'État dans son avis sur la proposition de loi visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises du 16 janvier 2020. Cela permettra d'éviter que des troubles anormaux du voisinage puissent ouvrir droit à des réparations lorsque l'activité causant des nuisances préexistait à l'installation du plaignant, et qu'elle se poursuit dans des conditions normales, c'est-à-dire sans changer de nature.

Notre collègue Josiane Corneloup a proposé, à juste titre, d'exclure des troubles anormaux du voisinage les effets sonores causés par les enfants accueillis en crèches. En effet, les enfants doivent bénéficier d'un espace extérieur pour s'épanouir et jouer, et ce risque de plaintes pour « trouble sonore »…

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…ne doit pas freiner le développement des crèches, déjà entravé par une pénurie préoccupante de personnel. J'espère, madame la rapporteure, que nous pourrons compter sur votre soutien.

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Ce texte, par la plus grande cohérence et la clarification qu'il entend apporter au droit de la responsabilité civile, vise un objectif louable : limiter au maximum les conflits de voisinage, en particulier entre nouveaux habitants des territoires ruraux et acteurs économiques, culturels ou touristiques déjà établis.

Sans tomber dans la caricature, il s'agit notamment de protéger nos agriculteurs contre les actions intentées par certains néoruraux, dont la vision de la ruralité est autant fantasmée que déformée.

J'ai été confronté personnellement à ce type de situation dans ma circonscription, laquelle a l'avantage d'être relativement proche de Paris, tout en étant essentiellement rurale. Elle est donc pourvue d'un grand nombre de résidences secondaires. Cela me conduit régulièrement à devoir faire preuve de pédagogie, en expliquant à quelques citadins que la campagne est aussi un lieu d'activités essentielles, particulièrement pour notre souveraineté alimentaire.

N'en déplaise à certains néoruraux, les coqs chantent – et pas que le matin –, les vaches meuglent, les moutons bêlent et les cochons grognent ! Oui, les épandages de lisier peuvent parfois être sources d'odeurs !

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Oui, les tracteurs doivent parfois rouler tôt le matin ou tard le soir ! Ces odeurs et ces bruits font le quotidien de nos campagnes depuis des décennies, et ils doivent perdurer si nous voulons conserver une agriculture forte, ce à quoi notre majorité s'attache depuis six ans. Votre présence cet après-midi, monsieur le garde des sceaux, est bien la preuve que le Gouvernement est pleinement mobilisé à cette fin.

Si j'osais un parallèle, et n'y voyez bien sûr aucun lien avec les odeurs et les bruits que j'évoquais – quoique, s'agissant des bruits… –, je dirais que la ruralité est un peu comme cet hémicycle : il faut que ça vive ! Il faut que ça bouge ! Il faut que chacune et chacun puisse s'exprimer pleinement. Tout cela, bien sûr, dans le respect de l'autre et de ses aspirations – ce que certains, dans cette assemblée, semblent malheureusement avoir oublié, mais c'est une autre histoire.

Sourires.

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Ce texte ne vise pas seulement à protéger nos agriculteurs, il a aussi pour objet de mieux sécuriser les activités industrielles et artisanales qui font vivre nos campagnes. Après quarante ou cinquante ans passés à faire croire que la métropolisation à outrance pourrait irriguer les territoires ruraux, nous ne pouvons que constater l'échec de cette stratégie ; raison pour laquelle nous avons clairement engagé, depuis plusieurs années, le mouvement inverse – ce texte y contribue, madame la rapporteure, c'est essentiel.

En pratique, il s'agit de consacrer une jurisprudence bien établie en matière de responsabilité civile, en introduisant dans le code civil le principe de la responsabilité sans faute en cas de troubles anormaux du voisinage.

La proposition de loi prévoit cependant une exception à ce principe, dès lors que trois critères sont remplis : l'activité à l'origine du trouble est antérieure à l'installation dans le bâtiment exposé aux troubles ; elle se poursuit dans les mêmes conditions ; elle s'exerce en conformité avec la législation.

Si la rédaction du second alinéa peut, à première vue, faire craindre un dispositif dans lequel la ruralité se trouverait quelque peu figée, plusieurs amendements entendent redonner des marges de manœuvre aux acteurs économiques. Je pense en particulier à votre amendement n° 19 , madame la rapporteure, qui étend le principe de l'exception aux activités « poursuivies dans les mêmes conditions ou dans des conditions nouvelles qui ne sont pas à l'origine de l'aggravation du trouble anormal ». Cette rédaction nous semble plus conforme à ce qu'attendent nos territoires ruraux, et nous la défendrons.

Vous l'aurez compris, le groupe Démocrate soutiendra cette proposition de loi, dans son esprit général comme dans les dispositions qu'elle prévoit.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

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Les querelles de voisinage, qu'elles soient picrocholines, pittoresques ou justifiées, sont aussi vieilles que les relations humaines. Elles donnent parfois lieu au combat du pot de terre contre le pot de fer ; en d'autres occasions, le bon sens et le dialogue permettent heureusement de régler le différend et de restaurer les conditions du vivre ensemble. Dans certains cas, les enjeux économiques, moraux, esthétiques ou psychologiques sont tels que le litige doit être porté devant les tribunaux.

Depuis l'examen en commission de cette proposition de loi, le groupe Socialistes s'interroge sur son opportunité, sans pour autant y être hostile. Quel est l'intérêt de toucher à la responsabilité civile à travers un texte qui ne va pas au-delà d'une simple reconnaissance formelle de principes déjà bien établis par la jurisprudence, laquelle est utile et ne saurait être confondue avec du « bavardage » ?

Depuis près de quarante ans, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ». Il s'agit d'un régime de responsabilité objective, c'est-à-dire qu'il ne dépend pas de la démonstration d'un comportement fautif mais requiert la démonstration d'un trouble excédant la gêne normalement attendue dans le cadre des relations de voisinage – gêne évaluée par le juge en tenant compte des circonstances spécifiques dans lesquelles le plaignant se trouve.

Ainsi, l'absence de faute ne constitue pas un moyen d'échapper à une condamnation et, inversement, la simple existence d'une faute ne suffit pas à caractériser un trouble anormal du voisinage. La jurisprudence a élargi la notion de voisinage au-delà des immeubles contigus englobant une aire de proximité où vivent plusieurs personnes, en ville comme à la campagne. Enfin, pour qu'un trouble soit reconnu, il doit excéder les inconvénients normaux du voisinage et présenter un caractère continu et permanent.

Ce texte vise à consacrer dans la loi ces principes jurisprudentiels, en introduisant dans le code civil le principe de responsabilité fondé sur les troubles anormaux du voisinage, avec une exception, liée notamment à l'antériorité du trouble constaté.

Nous avons participé aux travaux en commission, et suivi la discussion générale, mais nous continuons à nous interroger sur la pertinence de cette initiative. Était-ce une priorité, pour la commission des lois et l'Assemblée, de traiter cette question alors que la jurisprudence a déjà défini avec précision les éléments constitutifs d'un trouble du voisinage et les exceptions qui l'entourent ? N'y avait-il pas d'autres urgences à régler, monsieur le ministre, pour conforter le vivre ensemble ?

Le code civil, comme les autres codes, n'a pas besoin d'être exhaustif et, s'agissant de troubles complexes à évaluer, l'appréciation du juge est précieuse. Il est évidemment louable de vouloir rendre le droit plus lisible, mais il peut être préjudiciable de l'enfermer dans des dispositions strictes.

En définitive, cette proposition de loi, à travers un article unique, entend simplement inscrire dans le marbre de la loi la construction prétorienne présentée précédemment. Espérons tout de même que ces dispositions pourront alléger la charge des élus locaux – et en premier lieu des maires –, qui se trouvent bien souvent en position de médiateurs ou de conciliateurs de situations conflictuelles inextricables.

Bien que ce texte ne change pas grand-chose…

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Ce n'est pas vrai !

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Pascal Lavergne applaudit également.

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À la campagne comme à la ville, les troubles du voisinage ont toujours existé. Nos territoires vivent, ce ne sont pas des lieux de silence ; mais jusqu'où la gêne, dans les rapports entre voisins, est-elle acceptable ? C'est un problème ancien.

La médiatisation de certaines affaires est, en revanche, plus récente. Qui n'a pas entendu parler, notamment dans la presse régionale, du chant des coqs ou des cigales, du tintement des cloches, des cancanements de canards et d'oies, entre autres ? Tout cela est sans doute très pittoresque, mais entraîne des problèmes récurrents, qui perturbent la vie de certains territoires et qui sollicitent considérablement nos élus – j'en dirai un mot tout à l'heure.

La Cour de cassation a posé le principe de règlement de ces différends. Dans sa décision du 13 novembre 1986, les juges ont consacré une responsabilité sans faute, aux termes de laquelle « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ». Le caractère excessif de ce trouble relève de l'appréciation souveraine, in concreto, des juges du fond.

La proposition de loi défendue par notre collègue Le Peih consiste à codifier cette jurisprudence. C'est une démarche utile dans un contexte de judiciarisation croissante des problèmes de voisinage. Le cadre juridique proposé est clair, équilibré, et il se combine avec l'exception que le législateur a introduite, à défaut d'avoir lui-même posé le principe.

Cette exception reprend la théorie de la pré-occupation, une clause exonératoire de responsabilité qui figure à l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation. Cet article requiert que trois conditions cumulatives soient remplies : le respect de la législation, l'antériorité du trouble, et la poursuite, dans les mêmes conditions, de l'activité qui en est à l'origine.

Il ne s'agit évidemment pas d'un « droit à polluer », comme le Conseil constitutionnel l'a très clairement indiqué dans sa décision du 8 avril 2011 : l'exonération n'est possible que si la loi a été respectée – c'est une des conditions requises par l'article susmentionné – et la loi s'entend évidemment du respect du code de l'environnement et de toutes les dispositions environnementales. Bien que la clause exonératoire soit élargie, elle ne laisse donc pas la place à une violation quelconque de la loi ou à un comportement irresponsable.

Dans la pratique, les maires, exerçant leur pouvoir de police, répriment les atteintes à la tranquillité publique. En première ligne, ils sont souvent interpellés et sollicités pour résoudre les troubles de voisinage.

C'est grâce à leur action que certains litiges sont réglés et échappent au contentieux judiciaire. Il arrive néanmoins que des désaccords profonds l'emportent, sur fond de tensions. Les maires sont alors « à portée d'engueulade », pour reprendre l'expression consacrée, ou pire encore. Le maire de Gourdourville, petite commune du Tarn-et-Garonne, a été menacé de mort le 6 novembre après qu'il a adressé un courrier banal à l'un de ses administrés, lui expliquant que les aboiements récurrents de son chien perturbaient ses voisins.

À l'ensemble des maires de France et à leurs équipes, je tiens à rappeler le soutien de mon groupe, ainsi que de la représentation nationale dans son ensemble, face à la recrudescence des incivilités et des agressions dont ils sont victimes. Elles attestent de l'affaissement du lien social et du respect de l'autorité, et appellent bien évidemment des sanctions fermes.

En réformant le droit de la responsabilité civile, cette proposition de loi contribue, au fond, au juste équilibre entre les droits et les devoirs de chacun, et traduit les nouveaux équilibres de la société. D'un côté, il y a les contraintes sonores ou olfactives, liées au développement d'activités économiques ; elles sont inhérentes à certaines activités agricoles. De l'autre, il y a de nouveaux habitants, dont certains considèrent leur lieu de vie comme des îlots déconnectés du reste du monde, et d'anciens habitants aussi, dont la tolérance envers les troubles environnants est de moins en moins élevée.

Bien sûr, il ne faut pas oublier de favoriser la solidarité de proximité, à l'échelle du quartier, et les interactions sociales qui l'accompagnent, car elles demeurent les meilleurs remèdes à ces maux humains. C'est en dernier recours que la loi doit s'appliquer et, dans ce cas, celle-ci doit être lisible et offrir un cadre solide, afin de permettre une vie paisible en communauté. C'est le sens de ce texte.

Le groupe Horizons réitère donc son soutien à votre démarche, madame la rapporteure, et votera la proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

À dix-sept heures trente, Mme Naïma Moutchou remplace Mme Élodie Jacquier-Laforge au fauteuil de la présidence.

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J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, l'article unique de la proposition de loi.

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La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 5 .

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Alors que le texte dresse la liste exhaustive des personnes pouvant voir leur responsabilité engagée pour troubles anormaux du voisinage, je propose de retenir la jurisprudence de la Cour de cassation, selon laquelle « nul ne doit » en causer.

Nous en discutons régulièrement dans l'hémicycle : lorsqu'une liste de personnes est établie, le risque est d'en oublier une. Ainsi, plutôt que d'énumérer celles pouvant être responsables de troubles, à savoir le propriétaire, le locateur, l'occupant sans titre ou encore l'exploitant d'un fonds, s'en tenir aux mots « toute personne » présenterait l'avantage de n'oublier personne.

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Vous souhaitez inscrire dans le code civil une définition très large de la responsabilité pour trouble anormal du voisinage. Or notre objectif est justement de limiter la possibilité d'engager celle du constructeur. Soit celui-ci a commis une faute pendant les travaux et sa responsabilité peut être engagée, soit les troubles dont il est à l'origine ont lieu dans un contexte normal et c'est alors le propriétaire du terrain qui doit en répondre. J'émets donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Même avis.

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Pardonnez-moi d'insister, mais j'avoue ne pas très bien comprendre. Si je ne me trompe pas, aux termes de la proposition de la loi, seule la responsabilité des personnes mentionnées à l'article unique pourra être engagée. Ainsi, le constructeur ne serait pas le seul autre acteur dont la responsabilité ne pourrait être engagée. Il me semble donc que la rédaction que je propose est plus adéquate.

J'ajoute que le texte de l'article unique détonne avec l'article 1246 du code civil, qui dispose que « toute personne responsable d'un préjudice est tenue de le réparer ». Voilà pourquoi je propose une formulation plus générale qui, je le répète, aurait le mérite de n'exclure personne.

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Pour compléter les propos de Mme la rapporteure, sachez, madame Ménard, qu'ouvrir un droit nécessite d'énumérer les situations juridiques dans lesquelles celui-ci pourrait s'appliquer, raison pour laquelle nous listons précisément les acteurs dont la responsabilité pourrait être engagée pour trouble anormal du voisinage. Je le répète, c'est un préalable obligatoire à la création d'un droit.

L'amendement n° 5 n'est pas adopté.

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La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 20 .

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Par cet amendement, je propose de reprendre un élément de l'avant-projet de réforme de la responsabilité civile de mars 2017. En effet, il m'est apparu à plusieurs reprises, au cours des travaux et des auditions que j'ai menées, que la notion d'exploitant d'un fonds pourrait être interprétée de manière trop restrictive et conduire, par exemple, à écarter la responsabilité d'un usufruitier.

Cet amendement vise donc à remplacer cette notion par celle de « bénéficiaire d'un titre ayant pour objet principal de l'autoriser à occuper ou à exploiter un fonds ». Une telle formulation permettrait d'exclure la responsabilité du constructeur, dont le titre n'a pas pour objet principal l'occupation du fonds.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Je suis favorable à cet amendement, même si j'émettrai certaines réserves. En effet, la formulation que vous proposez pourrait – je m'exprime au conditionnel, mais on n'est jamais trop prudent – être sujette à interprétation, dans la mesure où elle est susceptible de réintroduire la notion de « voisin occasionnel ». Or, comme je l'ai indiqué en repoussant l'amendement n° 5 , je suis défavorable à ce que la responsabilité de ces personnes puisse être engagée pour trouble anormal du voisinage.

Si je suis totalement favorable à votre amendement sur le principe, madame la rapporteure, je propose de retravailler sa rédaction au cours de la navette, afin d'éviter tout effet de bord.

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Dois-je comprendre que vous demandez le retrait de l'amendement, monsieur le ministre ?

La parole est à M. le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Non, c'est un avis favorable, assorti des réserves que j'ai indiquées.

L'amendement n° 20 est adopté.

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La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement n° 12 .

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Préciser dans le texte que la responsabilité d'une personne ayant causé des troubles anormaux du voisinage serait « de plein droit » nous semble superfétatoire, dans la mesure où elle le serait de facto. Par souci d'économie, nous proposons donc de supprimer ces mots du texte.

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Nous avons déjà eu ce débat en commission avec votre collègue Coulomme. La responsabilité extracontractuelle pouvant être une responsabilité pour faute, il est bien nécessaire de préciser que la responsabilité pour trouble anormal du voisinage est une responsabilité de plein droit, c'est-à-dire engagée en l'absence de faute. Mon avis est défavorable.

L'amendement n° 12 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

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Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 7 et 13 .

La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 7 .

L'amendement n° 7 est retiré.

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La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement n° 13 .

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Cet amendement a également été défendu en commission, mais je le ferai de nouveau, car notre position n'a pas changé depuis.

L'alinéa 5 reprend les critères retenus dans la jurisprudence de la Cour de cassation, mais d'une certaine manière. Pour notre part, nous préférons que le principe de responsabilité figure dans la loi en tant que tel, et non comme conséquence de la jurisprudence.

Quant aux éléments des litiges, nous souhaitons que le juge s'en remette à une casuistique stricte, c'est-à-dire qu'il apprécie les faits in concreto, comme l'a dit l'un des orateurs de la discussion générale. Cela suppose de ne pas l'enfermer dans des dispositions trop rigides, de sorte que ses décisions reflètent la diversité des situations auxquelles il est confronté. Dans le cas contraire, certains acteurs pourraient en effet être dédouanés de leurs responsabilités au motif que leur situation correspondrait de manière trop évidente aux critères d'exception énumérés par la loi.

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Vous souhaitez conserver l'exception prévue par le code de la construction et de l'habitation. Nous faisons un choix différent : celui d'élargir cette exception, afin de mieux l'aligner avec la responsabilité pour trouble anormal du voisinage.

Je précise toutefois que cet élargissement est limité au champ d'application de l'exception : il ne concerne que les personnes ayant subi le dommage et les activités l'ayant causé. Nous ne modifions pas sur les trois critères qui justifient cette exception et en limitent la portée. Avis défavorable.

L'amendement n° 13 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

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La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 16 .

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Cet amendement rédactionnel vise à rendre la loi plus compréhensible. Je propose de supprimer les mots « toutefois » et « causé à la personne lésée », et de substituer aux mots « son installation » les mots « l'installation de la personne lésée ».

L'amendement n° 16 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

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La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement n° 11 .

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Il vise à circonscrire la portée de l'exception prévue à l'alinéa 5, les mots « quelle que soit leur nature » pouvant poser problème. En effet, des installations générant des pollutions non pas uniquement sonores ou olfactives, mais environnementales pourraient être concernées. Nous ne souhaitons pas porter atteinte à l'action des personnes qui cherchent légitimement à éviter toute irresponsabilité des pollueurs.

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Nous avons également débattu de cette question en commission et je répéterai la position que j'avais tenue à cette occasion. La théorie de la pré-occupation des lieux ne constitue pas un blanc-seing, mais bien la contrepartie d'une responsabilité sans faute. Je ne vois donc aucune raison d'introduire une exception au sein de l'exception au bénéfice des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE).

Il me semble même que vous vous trompez de débat, monsieur Bernalicis, en vous focalisant sur la théorie de la pré-occupation plutôt que sur la législation réglementant les ICPE. Avis défavorable.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Même avis.

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Contrairement à vous, monsieur Bernalicis, j'estime qu'il est très important de conserver les mots « quelle que soit leur nature » à l'alinéa 5. Il s'agit d'une formulation très générale, qui ne concerne pas nécessairement les ICPE. Dans la mesure où cette proposition de loi s'adresse aussi bien au monde rural qu'au monde urbain, il est préférable de s'en tenir à une généralité qui profite à tous, et qui laisse au juge une marge de manœuvre indispensable.

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Une ICPE peut se trouver aussi bien dans le monde rural que dans le monde urbain, la définition retenue étant d'ailleurs assez large. Cet amendement est, pour sa part, circonscrit, dans la mesure où il ne concerne que ce type d'installations. En effet, notre objectif est de renforcer la protection de l'environnement, afin qu'il n'existe aucune exception, même d'antériorité de l'activité, permettant de continuer de polluer – quand bien même il en a toujours été ainsi, que c'était génial et que personne ne s'est jamais plaint.

Je comprends que nous n'ayons pas le même avis sur cette question. C'est pour cette raison que nous avons déposé cet amendement et que nous ne voterons pas ce texte.

L'amendement n° 11 n'est pas adopté.

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Sur l'article unique et sur l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par le groupe Renaissance de demandes de scrutins publics.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 19 .

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Il s'agit de codifier un principe appliqué par la jurisprudence : si les conditions d'une activité évoluent mais qu'il n'en résulte aucune aggravation du trouble qui préexistait, la responsabilité ne peut être engagée.

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Comme pour l'amendement n° 20 , nous craignons de possibles effets de bord. Il s'agit cependant d'une simple question de rédaction – rien d'autre. Je suis donc favorable à l'amendement, auquel nous retravaillerons afin de placer correctement les virgules, si j'ose dire.

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Je souhaiterais revenir sur l'amendement n° 11 , défendu par M. Bernalicis, qui visait à exclure du bénéfice de la protection prévue au second alinéa les activités relevant du régime des ICPE. En effet, n'importe quel élevage de cochons, de bovins ou de poulets est une installation classée pour la protection de l'environnement, qu'elle soit soumise à autorisation ou à déclaration.

Dites donc les choses plus clairement que vous ne l'avez fait en défendant votre amendement, cher collègue de La France insoumise :…

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…vous ne voulez pas que les agriculteurs bénéficient du dispositif que nous voulons inscrire dans la loi ! Il est important de le dire.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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Il est dommage que le débat n'ait pas eu lieu lorsque nous examinions l'amendement en question, madame la présidente : cela aurait été plus clair.

En effet, je ne suis pas d'accord pour que les agriculteurs, les industriels ou qui que ce soit d'autre polluent le voisinage de manière anormale et excessive sans que leur responsabilité puisse être engagée. Cela ne veut pas dire que leurs voisins gagneront, mais ils pourront au moins avoir une discussion juridique devant le tribunal.

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En visant les activités préexistantes à l'installation, « quelle que soit leur nature », on permet à une entreprise qui bénéficierait des conseils juridiques avisés de grands cabinets d'exploiter les interstices de cette rédaction pour faire valoir un droit qui ne me paraît pas légitime.

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Ce sont les agriculteurs que vous visez : dites les choses correctement !

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Relèvent du régime des installations classées bien d'autres activités que celles des agriculteurs, cher collègue ; vous semblez méconnaître le sujet.

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Ça commence à bien faire. Vous êtes bien content que les agriculteurs vous nourrissent !

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Le mal est dans le pré…

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Du reste, si certaines installations sont classées, c'est pour protéger l'environnement, comme cela est précisé dans l'intitulé même du dispositif.

M. Antoine Léaument applaudit.

L'amendement n° 19 est adopté ; en conséquence, les amendements identiques n° 1 , 2 et 8 tombent.

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La parole est à M. Philippe Pradal, pour soutenir l'amendement n° 10 .

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Il s'agit de reconnaître le droit qu'ont les enfants de faire du bruit dans leur cour de récréation, même si celle-ci se trouve à proximité d'une habitation. Dans un monde normal, cet amendement ne serait pas utile. Hélas, de telles situations font l'objet de recours. Nous proposons donc de compléter l'article unique par l'alinéa suivant :

« Les effets sonores causés par les enfants dans les services aux familles, les aires de jeux pour enfants, les établissements scolaires et les installations similaires ne constituent pas un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage. » Laissons nos enfants s'amuser !

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et LFI – NUPES.

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J'entends votre préoccupation non seulement en tant que députée mais aussi en tant que mère et grand-mère : l'épanouissement de nos enfants passe par les activités extérieures. Sachons les préserver !

Néanmoins, inscrire dans le code civil que les effets sonores causés par les enfants ne sont pas des troubles anormaux reviendrait à priver de tout recours les riverains de ces structures, ce qui pose un réel problème au regard de notre Constitution. Au demeurant, votre amendement va nettement plus loin que la disposition allemande qui est prise en exemple dans plusieurs exposés sommaires. Avis défavorable, donc.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Rien n'est plus difficile que de définir l'anormalité ou la normalité.

Je vais vous faire une confidence. Le jardin de la Chancellerie jouxte celui d'une école qui accueille des tout-petits, lesquels s'en donnent évidemment à cœur joie lors des récréations, si bien que je ramasse régulièrement des ballons ou des balles, que je leur renvoie – avec un certain bonheur, pour ne rien vous cacher.

Je veux rappeler que la responsabilité n'est engagée qu'en cas de trouble anormal, excédant les inconvénients normaux du voisinage. Pour ma part, j'estime que le bruit des petits dans la cour de récréation ne peut guère être considéré comme un trouble anormal, sauf cas très particulier. Je vous suggère donc de retirer l'amendement, monsieur le député.

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Monsieur Pradal, nous comprenons tous le sens de votre amendement. Mais il demeure possible de saisir un juge lorsqu'on a affaire à un trouble anormal de voisinage ou lorsqu'on subit un dommage causé par un fait quel qu'il soit. Ainsi, le juge qui serait saisi par un riverain du trouble causé par le bruit anormalement élevé d'une cour de récréation pourrait statuer en droit sur son existence. Laissons-lui la possibilité de se prononcer sur ce type de troubles éventuels.

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Je ne suis pas d'accord avec Mme Yadan. L'amendement vise les « effets sonores causés par les enfants » et non la structure en tant que telle. Son objet est donc parfaitement circonscrit. Il est tout de même assez lunaire que les coqs soient mieux défendus que les enfants. Il ne faudrait pas que nous en arrivions à cette situation – quel est l'adjectif employé par le ministre, déjà ? – ubuesque, je crois.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Il y a des hurlements qui sont bien plus pénibles que ceux des enfants.

Sourires. – Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

L'amendement n° 10 n'est pas adopté.

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La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 17 .

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Cet amendement vise à régler le problème de l'articulation entre la règle spéciale du code de la construction et de l'habitation et la règle générale énoncée par le code civil. Pour éviter la coexistence de deux régimes, aux conditions identiques mais aux périmètres différents, qui serait source de confusion, cet amendement tend à abroger l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation. Ainsi, l'exception prévue au code civil s'appliquera à toutes les activités.

L'amendement n° 17 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 77

Nombre de suffrages exprimés 72

Majorité absolue 37

Pour l'adoption 61

Contre 11

L'article unique, amendé, est adopté.

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Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l'article unique.

Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 14 et 18 .

L'amendement n° 14 de M. Jean-François Coulomme est défendu.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 18 .

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Il s'agit d'un amendement que je qualifierais de préventif : en matière de justice, lorsqu'on peut prévenir des conflits, autant le faire.

Cet amendement est inspiré d'une réalité de terrain puisqu'il vise à reprendre une clause conçue il y a plus de trois ans par la chambre des notaires du Morbihan et avalisée par le préfet de ce département, qui recensait alors de nombreux courriers de nouveaux arrivants se plaignant de l'environnement de leur bien.

Ainsi proposons-nous de compléter la sous-section 1 de la section 2 du chapitre unique du livre II du code de la construction et de l'habitation par un article L. 271-6-1 ainsi rédigé :

« Pour tout acte ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation, l'acquérant accomplit toutes diligences et s'entoure de toutes les informations nécessaires relatives à la situation de l'immeuble, ou du terrain sur lequel repose l'immeuble, et aux activités professionnelles, ou non, dans le proche environnement du bien acquis ou construit. Ces diligences sont formalisées dans l'acte authentique portant sur la vente. »

En commission – je n'étais pas présent lors de la discussion –, vous avez indiqué, madame la rapporteure, que lesdites diligences n'auraient aucun caractère opposable. Mais ne pensez-vous pas qu'il soit possible de stopper des velléités de recours en opposant à l'acquéreur non pas le fait qu'il aurait dû se renseigner, mais le fait qu'il s'est renseigné et que ce qu'il qualifie de nuisances préexistait à son acquisition ?

Généraliser cette clause et l'appliquer sur l'ensemble du territoire national non seulement imposerait une obligation de renseignement préalable à l'achat – qui, actuellement, n'existe pas de manière formelle –, mais éviterait de nombreuses actions en justice, ce qui me paraît très important.

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Cet amendement reprend le dispositif d'une proposition de loi déposée l'année dernière par le groupe GDR, qui vise à obliger les acheteurs à s'informer sur l'environnement du bien qu'ils acquièrent. Je comprends votre intention : il revient effectivement à chaque acquéreur de se renseigner sur son environnement. Je vous alerte néanmoins sur la normativité de votre proposition. En aucun cas, l'acheteur ne s'engagerait à ne pas poursuivre en justice ses voisins, et les diligences que vous évoquez n'auraient aucun caractère opposable.

C'est plutôt au niveau local – nous allons y réfléchir plus longuement – que doivent se développer de telles initiatives. J'ai évoqué dans mon intervention liminaire l'initiative prise dans le département du Morbihan ; j'en profite pour saluer le préfet qui était en fonction à l'époque, M. Faure, et la chambre des notaires, qui ont permis d'éviter bien des conflits dans notre beau département. Avis défavorable,…

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur le président Chassaigne, je pourrais dire que cela ne casse pas trois pattes à un canard – mais vous avez employé l'expression dans la discussion générale.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Trois raisons me conduisent à vous suggérer un retrait. Premièrement, la rédaction semble trop large et risque d'entrer en contradiction avec des obligations d'information qui sont mises à la charge de l'acquéreur par d'autres dispositions. Je pense, par exemple, à l'information concernant un bien situé dans une zone couverte par un plan d'exposition au bruit.

Deuxièmement, la mesure paraît contraire à la logique de la législation protectrice de l'acquéreur de locaux d'habitation.

Troisièmement, la rédaction proposée n'est assortie d'aucune conséquence juridique, comme Mme la rapporteure vient de le souligner.

L'objectif poursuivi me semble satisfait par la nouvelle rédaction de l'article 1253 du code civil. Toutefois, nous pouvons contacter le Conseil supérieur du notariat – avec lequel je travaille en parfaite intelligence, en ma qualité de ministre de tutelle – et examiner avec lui la possibilité d'étendre cette bonne pratique dont vous avez indiqué qu'elle a cours dans le Morbihan – on me l'a d'ailleurs rappelé vendredi dernier, lorsque je me suis rendu dans ce département. Si vous le souhaitez, monsieur le président Chassaigne, vous serez bien entendu associé à cette démarche. Je vous propose donc de retirer l'amendement.

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Je tiens à soutenir l'excellent amendement du président Chassaigne. Je me dois d'insister et d'apporter un témoignage d'«outre-mer » – comme vous aimez, ici, appeler nos pays.

Beaucoup d'hexagonaux viennent s'installer à la Réunion, et se plaignent ensuite de nuisances sonores – elles sont millénaires, chez nous, car liées à nos croyances et à nos coutumes. Certains portent même plainte ou en viennent aux mains. Ils disent que nos traditions les empêchent de vivre la vie de carte postale dont ils rêvaient. Mais une carte postale n'est qu'une image : il n'y a pas le son !

Chez nous, en effet, c'est vivant. Il est hors de question que nous renoncions à des traditions qui existent depuis fort longtemps pour préserver la tranquillité de quelques personnes en quête d'exotisme. J'appuie donc naturellement l'amendement du président Chassaigne, pour dire à ces personnes : renseignez-vous avant de venir, et, si nos usages ne vous plaisent pas, ne venez pas !

M. Antoine Léaument applaudit.

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Nous sommes face à une alternative : soit je maintiens l'amendement, et il sera rejeté, ce que je peux comprendre au regard des arguments qui ont été avancés, soit je le retire et je prends acte de la proposition de M. le garde des sceaux,…

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Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Tout à fait !

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…ce qui permettra de travailler sur cette question avec les notaires.

Soyons également sensibles, dans ces discussions, aux propos tenus par mon collègue de la Réunion : ces questions se posent dans l'Hexagone, mais aussi, parfois avec plus d'acuité, dans les territoires d'outre-mer, dotés de traditions locales très fortes. Pour être clair, je retire cet amendement, en plaçant ma confiance dans les propositions formulées par le garde des sceaux.

L'amendement n° 18 est retiré.

L'amendement n° 14 est retiré.

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Dans les explications de vote, la parole est à M. André Chassaigne.

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Je retire la demande d'explication de vote : j'ai tout dit dans la discussion générale, j'ai pris note des avancées, et je me réjouis que nous puissions voter ce texte.

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Comme André Chassaigne, j'ai développé mes observations pendant la discussion générale. Je remercie la rapporteure et le ministre de soutenir ce qui a été lancé il y a deux ou trois ans. Nous faisons œuvre utile : cette notion, qui était prétorienne, reçoit enfin un cadre juridique – le droit positif français s'améliore. Je salue donc le travail que nous accomplissons aujourd'hui.

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Madame la rapporteure, monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir défendu ce texte avec enthousiasme.

Beaucoup d'agriculteurs, qui exercent une profession déjà assez difficile, sont remis en cause par des voisins, qui se sont acheté une résidence secondaire, ou principale, aux abords de leur exploitation. Ils vivent très mal cette situation, doivent se défendre, constituer des dossiers et affronter la justice, ce qui n'est jamais facile.

Ça l'est encore moins lorsque l'agriculteur est jeune et qu'il vient de s'installer, armé de tout le courage nécessaire pour diriger une exploitation. J'ai vécu à titre personnel cette situation et je connais nombre de personnes victimes de ce type d'attaques.

Nous voyons bien ce qui nous sépare, dans cet hémicycle, de l'extrême gauche – je ne parle pas ici de la gauche raisonnable.

Protestations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

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– , qui instruit constamment le procès de l'agriculture.

Je remercie la majorité d'avoir proposé ce texte – je suis très fier, en tant qu'agriculteur, d'en faire partie.

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C'est beau ! Bientôt le remaniement, gardez l'espoir !

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Faire un procès à un agriculteur, remettre en cause son activité, cela revient à importer un peu plus de matière première alimentaire et, parallèlement, à aggraver la déforestation – je le dis à l'endroit du groupe Écologiste.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

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Nous n'avons pas changé d'avis depuis l'examen de l'article unique. Je réaffirme donc notre opposition à cette version du texte, qui transcrit dans le droit une interprétation de la jurisprudence de la Cour de cassation qui ne nous convient pas. Je rappellerai brièvement quelques éléments, qui sont loin de la vision défendue par le garde des sceaux.

Ce dernier nous a expliqué que le texte était très important, notamment pour la ruralité, au motif que des agriculteurs, redoutant des contentieux – et Maurice le coq est passé par là – renonceraient à s'installer.

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Je crois, et je ne pense pas être le seul, qu'il existe des problématiques liées à l'agriculture et au monde rural bien plus importantes que le risque de se faire attaquer au tribunal pour trouble anormal de voisinage. Je pense notamment à l'accès au foncier pour les jeunes agriculteurs, un vrai sujet sur lequel nous devrions travailler et avancer.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

C'est phénoménal : dès qu'on regarde quelque part, on nous demande d'agir ailleurs !

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Je pense aussi aux zones d'activités commerciales, implantées un peu partout, qui dévitalisent les centres-bourgs. Je pense encore aux résidences secondaires, qui fleurissent sur certains territoires, notamment insulaires et d'outre-mer, et créent une telle pression sur le foncier que les gens ne peuvent plus s'installer chez eux. En voilà de beaux sujets !

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J'en ai encore quelques autres : l'accès à l'eau, par exemple. Doit-on vraiment construire des mégabassines ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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L'accaparement de l'eau n'est-il pas susceptible de générer des conflits de voisinage ? Il faudrait traiter ces sujets-là.

S'agissant des services publics de proximité, je me réjouis que nous ayons remporté une victoire politique jeudi dernier…

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…en votant le rétablissement d'un accueil physique de proximité pour toute procédure administrative.

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En voilà des sujets importants sur lesquels il faut avancer !

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…apporte son soutien à cette proposition de loi. Les élus des territoires ruraux peuvent en témoigner : nous avons tous été interrogés dans nos circonscriptions au sujet des nuisances que subissent les agriculteurs – on pense souvent à celles subies par les autres habitants, mais les agriculteurs en sont aussi victimes.

Dans l'Oise, une affaire a fait beaucoup de bruit. Une famille d'éleveurs, les Verschuere, a été condamnée à payer une amende de plus de 100 000 euros pour des nuisances olfactives. Elle a dû ouvrir les portes de son exploitation pour que les élus, les syndicats et les manifestants puissent se rendre compte de la réalité.

Nous en avons ras-le-bol de cet agri-bashing constant qui émane d'une partie de la population, et surtout d'une partie des députés ! Nous en avons assez de ces discours qui prônent la souveraineté alimentaire mais refusent la présence des agriculteurs sur le territoire.

Nous, élus Républicains, nous aimons les agriculteurs et nous les soutenons. C'est pourquoi nous voterons cette proposition de loi.

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Où étiez-vous quand il s'est agi, avec les prix planchers, d'assurer un meilleur revenu aux agriculteurs ?

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Je me réjouis que nous votions ce texte. La disposition, si elle avait été adoptée plus tôt, aurait sauvé un agriculteur de ma circonscription d'un quasi burn-out quand une éditrice de grand renom lui a reproché d'installer des bovins, issus d'une race en voie de disparition, sur son exploitation – et en bio qui plus est ! L'odeur du fumier et du lisier déplaisait à cette dame, qui n'occupait sa résidence secondaire que vingt week-ends par an.

Vous voyez, monsieur Bernalicis, c'est toute la différence entre vous et nous : il nous suffit d'un exemple de ce type pour nous donner envie de soutenir les agriculteurs concernés.

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Mais vous avez voté les accords de libre-échange !

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Peut-être le texte proposé par Mme la rapporteure ne résoudra-t-il pas tout. Évidemment, il faut être attentifs aux questions environnementales.

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Est-ce pour cela que vous vous êtes abstenus sur le glyphosate ?

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Mais il a été démontré que nous restons dans le cadre de la loi et de ce qui a été adopté. Par conséquent, ne vous faites pas de souci pour l'environnement ! Les agriculteurs, quels qu'ils soient, méritent notre soutien car nous avons besoin d'eux.

Pour le reste – le foncier agricole, l'eau –, il ne tient qu'à vous de proposer des textes, que nous étudierons. D'autres le feront aussi.

Si l'Assemblée devait rejeter ce texte, mon ami Loïc, installé dans la belle commune d'Adainville, aurait frôlé le burn-out pour rien. Je ne vous remercie pas, monsieur Bernalicis.

Mme Laetitia Saint-Paul applaudit.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe LFI

Ce n'est pas très sympa !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voterons ce texte ; ce n'est pas une surprise, puisque mon excellent collègue Thomas Ménagé l'a dit tout à l'heure.

Mon collègue Minot – l'un des trois députés de l'Oise dans cet hémicycle – a fait référence à une affaire assez symbolique. Dans l'Oise, nous avons une particularité : nos fermes sont insérées dans les villages. L'affaire remonte à 2010,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…quand un agriculteur exploitant, qui possédait aussi des vaches, a voulu étendre son exploitation. Sa demande de permis de construire hors la commune lui a été refusée ; sur le peu de foncier qu'il possédait à l'intérieur du village, il a donc construit un hangar et y a mis des vaches, après avoir obtenu toutes les autorisations possibles et imaginables. Entre-temps, des néoruraux se sont installés dans la commune et lui ont intenté des procès. Résultat : il a dû payer une amende de 100 000 euros, ce qui l'a complètement ruiné !

Certes, il y a quelques mouches l'été – du bruit et des odeurs, comme disait un ancien Président de la République, qui ne parlait ni de vaches ni d'exploitations agricoles…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ne vous plaisez pas à répéter la petite phrase !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voilà du concret. Il faut savoir que des procédures de ce type mettent en péril les exploitations agricoles.

Du reste, c'est un peu contradictoire. Si nous n'avons plus de vaches chez nous, que ferons-nous ? Nous devrons signer des accords de libre-échange…

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Vous les avez déjà signés ! Vous ne protégez pas les agriculteurs !

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…avec des pays comme la Nouvelle-Zélande, pour importer des bestioles gavées d'organismes génétiquement modifiés (OGM) et d'antibiotiques. Soyez donc cohérents ! Nous, nous voterons ce texte.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous nous sommes abstenus en commission et nous aurions pu nous en tenir à cette position, tant ce texte ne répond pas au problème posé – pas seulement la problématique agricole, mais le vivre ensemble, dans les villages comme dans les villes. S'il s'était agi d'un projet de loi, nous aurions disposé d'une étude d'impact et nos travaux en commission auraient été plus approfondis.

Cela a été dit de diverses façons – le président Chassaigne a utilisé une expression rurale, et je pourrais en utiliser une autre que connaît le camarade Wulfranc : tout cela ne vaut pas un coup de cidre !

Toujours est-il que ce texte peut permettre d'alléger sensiblement les différends locaux, et le travail de conciliation et de médiation mené par les maires. C'est pourquoi nous le voterons, sans grand enthousiasme.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 93

Nombre de suffrages exprimés 90

Majorité absolue 46

Pour l'adoption 78

Contre 12

La proposition de loi est adoptée.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem, LR et RN.

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J'adresse mes sincères remerciements à tous les collègues présents dans l'hémicycle. J'en profite pour revenir sur une réflexion relative à l'avenir de l'agriculture et à la souveraineté alimentaire, qui a été faite tout à l'heure.

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Arrêtez donc de signer les accords de libre-échange !

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Le Morbihan est le département qui produit le plus de volailles de façon conventionnelle. Pourtant, depuis un an, aucune exploitation avicole n'y a été créée. Pourquoi ? Parce que nous importons de plus en plus de volailles, qui ne présentent aucune garantie, qu'il s'agisse de sécurité alimentaire ou de traçabilité.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Vous avez signé les traités de libre-échange !

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Je reviens d'un déplacement à l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), à Rome. Voici le message que j'y ai entendu : demain, nous pourrions manquer de marchandises.

En France, nous savons produire en garantissant la sécurité alimentaire et la traçabilité ; nous avons de l'expérience et du recul dans toutes les productions agricoles. Nous devons en être conscients et ne pas freiner les initiatives dans le secteur. Ce texte le permet.

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Cette proposition de loi vise la concorde nationale, dont nous avons grandement besoin. Sachons réconcilier la France des villes et la France des campagnes. Puisque nous sommes en décembre, permettez-moi de former un vœu pour l'année 2024 : dépassons ensemble le triangle de l'inaction !

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Dans le cadre de l'élaboration de cette proposition de loi, j'ai fait beaucoup de rencontres dans le monde paysan – Mme Le Peih le sait. Ce texte y était attendu et cette attente nous obligeait. Nous sommes au rendez-vous, avec ce texte de bon sens et de concorde.

Faire de la politique consiste parfois à changer la vie des gens ; à tout le moins, cela sert à l'améliorer. Je vous remercie chaleureusement d'avoir été présents à ce rendez-vous.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures trente.

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L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de MM. Daniel Labaronne, Sylvain Maillard et les membres du groupe Renaissance et apparentés, relative au contentieux du stationnement payant (736, 1874).

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La parole est à M. Daniel Labaronne, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

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Je suis très heureux de vous présenter aujourd'hui une proposition de loi (PPL) relative au contentieux du stationnement payant, un sujet qui me tient à cœur depuis plusieurs années et auquel je me suis intéressé en premier lieu en ma qualité de rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission "Conseil et contrôle de l'État" .

Depuis le 1er janvier 2018, la sanction encourue en cas d'absence ou d'insuffisance de paiement des sommes dues au titre du stationnement payant sur la voie publique n'est plus une amende contraventionnelle, mais un forfait de post-stationnement (FPS) qui constitue une redevance d'occupation du domaine public. Son montant est fixé par la collectivité compétente en matière de voirie, c'est-à-dire la commune, l'établissement public de coopération intercommunale ou le syndicat mixte. En cas de non-paiement du FPS dans les trois mois suivant sa notification, un titre exécutoire est émis par l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (Antai) pour le recouvrement du FPS majoré. Environ 12 millions d'avis de paiement de FPS et près de 5 millions de titres exécutoires ont été émis en 2022, pour un produit minimum total estimé à 450 millions d'euros.

La dépénalisation du stationnement payant s'est traduite par une perte de compétence du juge judiciaire au profit du juge administratif. Afin d'éviter d'encombrer les tribunaux administratifs et pour traiter ce contentieux très spécifique, une juridiction administrative spécialisée a été mise en place : la commission du contentieux du stationnement payant (CCSP).

Initialement, un article du code général des collectivités territoriales (CGCT) subordonnait le recours contentieux devant cette commission au paiement préalable de l'avis de paiement du FPS et de la majoration lui ayant été éventuellement appliquée.

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Cette disposition avait été votée d'une part pour éviter les recours dilatoires, dans un but de bonne administration de la justice, et d'autre part pour garantir le recouvrement rapide de la recette pour les collectivités concernées. Par une décision QPC – question prioritaire de constitutionnalité – du 9 septembre 2020, le Conseil constitutionnel a jugé cet article contraire à la Constitution pour deux motifs. Premièrement, aucune disposition législative ne garantit que le montant de la somme à payer pour contester des FPS et leur majoration éventuelle ne soit pas trop élevé. Deuxièmement, il n'est pas prévu d'exception à l'obligation de paiement préalable du FPS pour tenir compte de certaines circonstances ou de la situation particulière de certains redevables. Le Conseil constitutionnel a ainsi jugé que « le législateur n'a[vait] pas prévu les garanties de nature à assurer que l'exigence de paiement préalable ne porte pas d'atteinte substantielle au droit d'exercer un recours juridictionnel effectif ».

La censure du Conseil constitutionnel a contribué à accroître le nombre de recours enregistrés par la CCSP.

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Ce n'est pas vrai ! C'était déjà le cas avant !

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À l'origine, cette juridiction anticipait une activité proche de 100 000 recours par an. Au 31 décembre 2022, le stock des affaires en instance s'établissait à plus de 183 000 dossiers et les délais de jugement à environ deux ans.

Cette situation compliquée pénalise nos concitoyens. Prenons le cas de M. Martin, qui a été verbalisé à deux reprises à Paris au mois d'avril alors qu'il avait bien payé son abonnement de stationnement pour la semaine. Suivant la procédure, il formule un recours administratif préalable obligatoire (Rapo) auprès de la Ville de Paris ; celui-ci est rejeté. Au début du mois de juin, il dépose une requête devant la CCSP, dont les services sont engorgés.

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Depuis, il n'a eu aucune nouvelle. Bien entendu, entre-temps, ses FPS ont été majorés et prélevés sur son compte en banque.

Pour que cette situation ne se reproduise plus, nous devons attaquer le problème à la racine.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Cette proposition est le résultat de quatre ans de travail : j'aimerais pouvoir m'exprimer pendant dix minutes, si vous le permettez.

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Heureusement que nous avons demandé un débat en séance publique !

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Dans un but de bonne administration de la justice, la présente proposition de loi, que j'ai déposée le 17 janvier 2023, vise à apporter des améliorations au contentieux du stationnement payant. Rédigée avec la commission du contentieux du stationnement payant et le secrétaire général du Conseil d'État, elle a été adoptée en commission des lois il y a deux semaines, après avoir été modifiée par les amendements rédactionnels ou de précision que j'avais déposés.

L'article 1er rétablit l'obligation de paiement préalable du FPS et de son éventuelle majoration, dans la limite d'un plafond fixé par décret en Conseil d'État – c'est une innovation.

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Pour tenir compte de l'avis du Conseil constitutionnel, cette obligation est assortie d'exceptions dans les cinq situations suivantes : le vol ou la destruction du véhicule, ou l'usurpation de la plaque d'immatriculation ; la cession pour destruction du véhicule ; la cession du véhicule ; le bénéfice d'une carte mobilité inclusion ; la perception de revenus inférieurs à un montant fixé par décret en Conseil d'État. Enfin, cet article prévoit que ce recours contentieux a un effet suspensif sur le délai de trois mois à l'issue duquel le conducteur doit avoir réglé la totalité du FPS, sur le délai de prescription dans le cas où un titre exécutoire a été émis et sur le recouvrement des sommes dues, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Ces dispositions s'appliqueraient d'une part aux requérants bénéficiant de la dispense de paiement préalable à l'introduction du recours contentieux, et d'autre part aux requérants soumis à cette obligation, mais dont le montant dû est supérieur au plafond fixé par le décret en Conseil d'État – il s'agit d'une protection. L'exercice du recours contentieux ferait alors obstacle à la poursuite du recouvrement pour la fraction non payée.

L'article 2 modifie le nom de la CCSP, qui devient « tribunal du stationnement payant » pour mieux rendre compte de son caractère de juridiction administrative. Nous avions initialement pensé renommer la CCSP « cour nationale du stationnement payant », mais notre choix s'est finalement arrêté sur le nom de tribunal en commission.

L'article 3 crée un Rapo contre le titre exécutoire émis en cas d'impayé du FPS. Ce recours serait une condition de recevabilité du recours contentieux. Aujourd'hui, le Rapo ne peut être intenté que contre l'avis de paiement du FPS, ce qui soulève une difficulté. Cela signifie que les personnes qui n'ont pas payé leur FPS peuvent déposer directement un recours contentieux contre le titre exécutoire émis trois mois après la notification du premier forfait, alors que les personnes qui contestent le FPS doivent d'abord effectuer un Rapo. Bref, l'affaire est compliquée. Cet article a donc pour objet d'aligner les deux procédures à des fins de simplicité. En commission, nous avons adopté un amendement qui précise que le Rapo contre le titre exécutoire conditionne le recours contentieux uniquement lorsque le FPS n'a pas déjà fait l'objet d'un recours. En effet, le but n'est pas d'imposer deux Rapo, ce qui constituerait une double charge pour les collectivités territoriales, mais d'harmoniser les procédures afin que chaque recours contentieux ait d'abord fait l'objet d'un Rapo.

L'article 4 étend le champ d'application du pouvoir d'injonction de la CCSP à toutes les personnes morales de droit public concernées par sa décision, y compris les tiers contractants désignés pour exercer cette mission, à savoir les entreprises privées.

Enfin, l'article 5, introduit en commission, prévoit d'abord que les modalités d'application de l'ensemble des articles du texte sont définies par un décret en Conseil d'État. En second lieu, il prévoit une entrée en vigueur différée des articles 1er et 3, fixée au plus tard au 30 juin 2026, notamment en raison des développements informatiques nécessaires pour permettre au tribunal du stationnement payant de vérifier l'exactitude des situations entraînant la dispense du paiement préalable à l'introduction du recours contentieux.

Bien entendu, la navette parlementaire permettra de préciser le dispositif que je propose, notamment son aspect opérationnel. L'Antai a en effet souligné la nécessité de bien examiner toutes les contraintes informatiques induites par la proposition de loi. Je suis ouvert au dialogue, car je souhaite qu'elle s'applique dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et de la défense des droits des usagers. Par conséquent, je vous invite à voter ces dispositions techniques, mais très utiles pour l'ensemble de nos concitoyens.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Jean-Luc Warsmann applaudit également.

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, Mme Dominique Faure, présente lors de l'examen du texte en commission, qui est retenue par un déplacement. Nous examinons aujourd'hui une proposition de loi de M. Daniel Labaronne relative aux conditions de recours contre les amendes en matière de stationnement payant.

Depuis une ordonnance de 2015, l'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales subordonnait la recevabilité d'un recours contre une décision relative aux forfaits de post-stationnement devant la commission du contentieux du stationnement payant au paiement préalable du montant de l'avis de paiement de ce forfait et de la majoration éventuellement appliquée. Dit autrement, il fallait payer son amende pour être en droit de former un recours.

Dans sa décision QPC 2020-855 du 9 septembre 2020, le Conseil constitutionnel a relevé que cette condition préalable était prévue « pour éviter l'introduction d'un trop grand nombre de recours contentieux ». Estimant qu'aucune disposition législative ne garantissait que la somme à payer ne soit pas trop élevée et qu'aucune exception à ce principe n'était prévue, il a toutefois jugé que l'exigence de paiement préalable portait une atteinte excessive au droit d'exercer un recours juridictionnel. Ces dispositions ont donc été jugées contraires à la Constitution et les dispositions concernées du CGCT abrogées.

Prenant acte de la décision du Conseil constitutionnel, M. Labaronne – dont je salue l'implication de longue date sur le sujet – a souhaité déposer une proposition de loi pour corriger cette situation. Je veux insister sur son engagement et sa persévérance : en ma qualité de ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, j'ai mesuré à quel point il avait fait preuve de pédagogie, de ténacité et de force de conviction sur ce sujet très technique, mais qui pourrit la vie de nos compatriotes au quotidien. Nous évoquons parfois les difficultés rencontrées par nos concitoyens face à la machine administrative. Cette proposition de loi est l'exemple concret d'un texte qui simplifiera la vie de nos compatriotes dans leurs relations avec l'administration au sens large.

Il rétablit le principe du paiement du forfait post-stationnement et de sa majoration préalablement à toute contestation – toujours dans l'objectif d'éviter les recours abusifs ou dilatoires. Il prévoit toutefois un plafonnement du montant de ce paiement, défini par décret en Conseil d'État. Par ailleurs, il assortit cette obligation de paiement préalable de certaines exceptions, qui s'appliqueront aux personnes en situation de mobilité réduite, aux victimes de vol ou de destruction de véhicule, aux personnes ayant cédé leur véhicule, et enfin aux personnes percevant des revenus limités.

Ces dispositions répondent bien aux observations formulées par le Conseil constitutionnel, en ce qu'elles instaurent un dispositif garantissant que les paiements exigés ne soient pas trop élevés, afin d'ouvrir l'accès au recours, et définissent des exceptions pour lesquelles le recours est suspensif du recouvrement des sommes dues.

Par ailleurs, la proposition de loi prévoit de modifier le nom de la commission du contentieux du stationnement payant et introduit un recours administratif préalable obligatoire contre le titre exécutoire. Enfin, elle étend le champ des personnes auxquelles la commission peut adresser des injonctions, afin d'accélérer les décisions de la juridiction.

Lors de son examen par la commission des lois, la proposition de loi a fait l'objet d'améliorations et de précisions à l'initiative de M. le rapporteur. S'agissant du délai d'application de la réforme, il faut ainsi tenir compte du temps que prendront les développements informatiques, qui peut être long. C'est pourquoi la commission a différé l'entrée en vigueur des articles 1er et 3, qui aura lieu au plus tard en 2026. Cette décision est tout à fait pertinente.

S'agissant ensuite du nouveau nom donné à la CCSP, il est ressorti des échanges avec cette dernière et le Conseil d'État que la dénomination « tribunal » était préférable à celle de « cour nationale » du stationnement payant, car elle fait mieux comprendre aux requérants comme aux collectivités territoriales qu'il s'agit bien d'une juridiction.

Enfin, la clarification apportée par le rapporteur au sujet de l'articulation des recours nous semble tout à fait salutaire : elle permet de ne pas dédoubler les procédures de recours – contre le forfait d'une part et contre la majoration d'autre part –, en rendant le paiement de la majoration suspensif uniquement lorsqu'un recours n'a pas déjà été engagé contre le forfait.

Compte tenu de ces améliorations et conformément à l'avis donné en commission des lois, le Gouvernement est favorable à cette proposition de loi.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – M. Jean-Luc Warsmann applaudit également.

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Dans la discussion générale, la parole est à M. André Chassaigne.

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Le texte qui nous est soumis vise à tirer les conséquences d'une censure du Conseil constitutionnel à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité concernant la contestation des FPS. Le Conseil a en effet jugé inconstitutionnel le fait de subordonner la possibilité de contester une amende à son paiement préalable. Derrière l'aspect technique de cette proposition de loi, c'est le respect de l'un des principes cardinaux de notre régime juridique qui nous occupe : celui du droit au recours.

Bien entendu, la question des contestations abusives et de l'engorgement des autorités administratives traitant ces demandes est un élément qui doit être pris en considération. Pour autant, cet enjeu matériel ne saurait constituer un argument pour limiter le droit du citoyen à contester des décisions prises à son égard.

C'est d'autant moins contestable qu'il faut tenir compte des évolutions intervenues depuis 2018 en ce qui concerne le stationnement payant : le transfert de la compétence vers les collectivités prévu en 2014 par la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite Maptam, a également été l'occasion d'opérer la délégation de cette compétence aux opérateurs privés. Dans de nombreuses grandes villes, ce sont désormais des opérateurs privés qui procèdent aux contrôles et aux verbalisations, avec une seule logique : la rentabilité. Plus il y a de verbalisations, plus il y a de profits pour les quelques entreprises, filiales de grands groupes, qui se partagent le marché et qui, disons-le, ne sont pas là pour beurrer les sandwichs !

À l'aide du système de lecture automatisée des plaques d'immatriculation (Lapi), les prunes tombent les unes après les autres, et ce sans aucun discernement, du fait de la lecture automatisée des plaques conjuguée à la recherche de rentabilité des opérateurs privés. Quelqu'un parlait des eaux glacées du calcul égoïste…

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Résultat : le nombre de verbalisations explose. Entre 2018 et 2022, le nombre des amendes pour stationnement est passé de 7,8 à 13,7 millions, pour atteindre des recettes record de l'ordre de 340 millions d'euros. Il faut reconnaître que c'est du brutal, mais le grisbi est au rendez-vous.

En même temps que celui des verbalisations et des recettes, le nombre des contestations et des annulations explose lui aussi : selon un récent rapport sénatorial, plus d'une contestation sur deux aboutit à une annulation, preuve de l'absence de discernement des agents verbalisateurs, mais aussi de la nécessité de garantir à chacun le droit effectif à contester la verbalisation. Dans ce contexte, la réponse de notre collègue Labaronne ne nous semble pas satisfaisante.

Les exceptions prévues pour certaines situations – le vol ou la destruction du véhicule, l'usurpation de la plaque d'immatriculation, la cession du véhicule, la perception de revenus limités, la détention de la carte mobilité inclusion – et le plafonnement du paiement préalable constituent des mesures très ciblées qui ne permettent pas, selon nous, que le droit effectif au recours soit parfaitement assuré.

Nous contestons le fait que vous répondiez à un problème matériel – celui de l'engorgement de l'autorité qui traite les contestations – par la limitation d'un droit. Les droits fondamentaux ne peuvent jamais être relatifs : ils ne prévoient pas d'obligation de moyens, mais une obligation de résultat ; c'est aux moyens de s'adapter au respect du droit, et non l'inverse. Si engorgement il y a, c'est que les autorités compétentes manquent de moyens pour traiter les contestations. C'est aussi parce que le système, automatisé et offert au privé, constitue une source d'erreurs en trop grand nombre. C'est à cela qu'il faut répondre.

Dans ces conditions, nous ne soutiendrons pas la proposition de loi qui nous est soumise aujourd'hui.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.

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Je l'avais annoncé en commission des lois fin novembre : le groupe LIOT est, sans surprise, favorable à cette proposition de loi. Tirant les conséquences d'une censure du Conseil constitutionnel, ce texte est devenu nécessaire dans la mesure où tout le cadre juridictionnel du stationnement payant est mis à mal. Il s'agit donc d'un texte très technique, mais néanmoins important.

À cette occasion, notre groupe tient à rappeler – cela fait partie de son ADN – l'importance de la décentralisation du stationnement payant prévue par la loi Maptam de 2014, qui a permis de renforcer les compétences des collectivités – à commencer par les municipalités – dans ce domaine. La possibilité donnée au maire d'adapter sa politique de stationnement aux contraintes locales doit ici être réaffirmée.

Le contentieux du stationnement payant soulève des enjeux essentiels pour les collectivités. Le premier est évidemment d'ordre budgétaire : les FPS représentent 12,8 millions d'avis de paiement par an.

Le deuxième est un enjeu civique évident, lié à la lutte contre les incivilités.

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Enfin, j'insiste sur la question de l'accessibilité des centres-villes : le stationnement payant permet d'éviter les « voitures-ventouses » en assurant une rotation des véhicules.

Les aménagements prévus par la proposition de loi de notre collègue Daniel Labaronne en réaction à la censure du Conseil constitutionnel, notamment le rétablissement du principe d'un paiement préalable du FPS avant tout recours, nous satisfont. Nous espérons que les procédures dilatoires qui encombrent nos tribunaux seront ainsi évitées.

La prise en compte des réserves du Conseil pour éviter de priver les citoyens de tout droit au recours effectif nous convient également, tout comme le choix de plafonner le montant de ce paiement préalable, dans la mesure où il s'agit d'une condition de recevabilité d'un recours contentieux.

Nous sommes aussi sensibles au choix de dispenser certains citoyens de tout paiement préalable, notamment les personnes en situation de handicap ou de précarité. J'avais interrogé le rapporteur au sujet d'une formulation du texte qui nous paraissait imprécise : les personnes percevant des « revenus limités », qui seront dispensées de paiement préalable. Nous espérons que la dispense sera suffisamment large pour protéger tous les individus en situation de précarité. Vous nous avez répondu que le décret d'application traiterait bien de cette question, monsieur le rapporteur ; nous voulons bien vous croire.

Pour finir, le changement de nom de la CCSP est bienvenu, car il permettra de clarifier tant son rôle que son statut de juridiction administrative spécialisée.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – M. Jean-Luc Warsmann applaudit également.

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Nous examinons aujourd'hui la proposition de loi portant sur le contentieux du stationnement payant défendue par notre collègue Daniel Labaronne. En 2020, le Conseil constitutionnel, saisi d'une QPC, a jugé inconstitutionnel un article du code général des collectivités territoriales relatif à la recevabilité devant la CCSP des recours contentieux portant sur des décisions de FPS notifiées individuellement. Le texte tire les conséquences de cette décision en proposant des évolutions qui sont à la fois pertinentes sur le plan juridique et nécessaires à l'amélioration du contentieux du stationnement payant.

Il introduit plusieurs exceptions, notamment pour les personnes les plus fragiles – celles ayant des revenus limités ou qui sont titulaires d'une carte mobilité inclusion portant la mention « stationnement pour personnes handicapées ». Il prend également en considération certaines circonstances exceptionnelles – vol, destruction ou cession du véhicule – afin de ne pas infliger une double peine à nos concitoyens.

Face à l'augmentation du nombre des requêtes – passé de 100 000 à 180 000, comme l'a rappelé le rapporteur –, souvent liées à l'absence de notification du FPS, le texte et les amendements du rapporteur proposent justement que le Rapo contre le titre exécutoire ne conditionne le recours contentieux que lorsque le FPS n'a pas déjà fait l'objet d'un recours.

Lors de son examen en commission des lois, le 20 novembre, le texte a été adopté en tenant compte de plusieurs améliorations proposées par le rapporteur. La réduction du nombre de Rapo à un seul permettra de mettre fin à l'embolie dont souffrent les collectivités et les tribunaux ; ils pourront ainsi apporter une réponse rapide et efficace aux usagers.

L'article 5 prévoit que les modalités d'application du texte seront définies par un décret en Conseil d'État. L'entrée en vigueur des dispositions des articles 1er et 3 était à l'origine prévue en 2024, mais ce délai nous a semblé trop contraignant pour permettre les développements nécessaires, notamment la mise à niveau des outils informatiques pour vérifier les exceptions au principe du paiement préalable, permettre les paiements directs et indirects aux collectivités territoriales et instaurer un Rapo contre le titre exécutoire.

Bien que nous soyons conscients de la nécessité d'agir pour tenir compte de la décision du Conseil Constitutionnel, nous avons donc prévu un délai supplémentaire. Nous soutiendrons par conséquent cet article 5, qui permettra une application plus rigoureuse et plus sereine de la loi.

Enfin, le changement de dénomination de la CCSP en tribunal du stationnement payant est pertinent. Il permettra de faire concorder le nom et le rôle de cette juridiction administrative, que les usagers et l'ensemble de nos concitoyens comprendront désormais mieux.

Le groupe Renaissance soutiendra donc ce texte équilibré, élaboré avec le Conseil d'État et le ministère de la justice. Il répond à un besoin administratif et prend en compte les réalités que vivent nos concitoyens.

M. le rapporteur applaudit.

À dix-huit heures cinquante-neuf, Mme Élodie Jacquier-Laforge remplace Mme Naïma Moutchou au fauteuil de la présidence.

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Cette proposition de loi tient davantage de la mise en conformité suite à la décision du Conseil constitutionnel que d'une réelle avancée en matière de stationnement payant.

Sur le fond, il est nécessaire de s'attaquer aux vrais fraudeurs plutôt qu'aux potentiels recours d'honnêtes automobilistes sanctionnés pour quelques minutes de stationnement ou un paiement oublié.

Permettez-moi de rappeler que la hausse du contentieux provient d'abord des nouveaux dispositifs comme la lecture automatisée des plaques d'immatriculation. Pour faire payer les Français, vous savez innover ! Utilisés dans plusieurs grandes villes, ces dispositifs conduisent à une augmentation des constats d'absence ou d'insuffisance de paiement des redevances de stationnement. La Ville de Paris est à l'origine d'environ 40 % des contentieux portés devant la CCSP !

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Concrètement, les Parisiens, comme ceux qui seront obligés de venir travailler à Paris durant les Jeux olympiques, auront le choix entre payer un ticket de métro à 4 euros, ce qui est scandaleux, ou obtenir une dérogation matérialisée par un QR code, et prendre le risque de devoir payer une amende de stationnement.

La hausse du nombre de recours devant la CCSP est également liée à l'augmentation incessante du montant des amendes de stationnement. Vous avez laissé faire : elles s'élevaient à 17 euros en 2018 et peuvent désormais atteindre 75 euros dans certains arrondissements de Paris. Nous avons affaire à une véritable chasse aux automobilistes, parfois organisée par des maires écolos alliés à ce gouvernement roi de la taxe.

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La hausse du nombre de contentieux peut également être liée à des problèmes informatiques, par exemple sur le site de l'Antai. Doit-on vraiment payer une amende avant de la contester à cause d'un bug informatique ?

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Permettez-moi ensuite de vous alerter au sujet des forfaits de stationnement dans les hôpitaux privés, qui deviennent scandaleux. Je vais vous donner quelques exemples.

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D'abord, celui de l'hôpital de Nancy, public celui-là : au-delà de trois heures de stationnement, il faut débourser plus de 30 euros supplémentaires.

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Pour de nombreux hôpitaux, à l'instar de celui de Troyes, dans ma circonscription, le stationnement est devenu payant et les prix s'accentuent parfois d'heure en heure, alors même que l'attente aux urgences est de plus en plus longue. C'est toujours plus injuste.

Si le stationnement ne relève pas de la compétence des hôpitaux publics et qu'ils sont libres d'en déléguer la gestion à des opérateurs privés, il conviendrait que l'État et le Gouvernement agissent rapidement,…

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…car cette situation a de lourdes conséquences sur le pouvoir d'achat des Français et leur accès aux soins.

Au lieu d'apporter des solutions pour lutter contre les fraudeurs et de protéger les automobilistes qui utilisent leur voiture par nécessité, vous nous proposez un changement de nom : la cour nationale du stationnement payant, rien que cela ! À quand la création de la cour nationale des Crit'Air pour entrer dans les ZFE – zones à forte exclusion – qui excluent les ruraux des grandes villes ? Mais surtout, à quand la création du diplôme de meilleur taxeur du monde pour le Gouvernement ?

Les Français attendent de vous des solutions concrètes pour que leur quotidien s'améliore, car ils sont déjà lourdement touchés par l'inflation, la hausse des prix de l'électricité et des carburants, ou celle des produits de la vie quotidienne. Maintenant, vous créez des surplus administratifs en les obligeant à payer avant de pouvoir effectuer un recours !

Si vous mettiez autant d'énergie à sanctionner les délinquants qui s'en prennent aux biens et aux personnes qu'à incriminer les automobilistes qui roulent quelques kilomètres par heure au-dessus des limitations

M. Antoine Léaument s'exclame

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ou oublient de payer leur stationnement pour quelques minutes, notre pays n'en serait pas là ! Oui, vous préférez vous attaquer aux automobilistes et vous faire de l'argent sur leur dos, plutôt que d'aller chercher l'argent chez les trafiquants et les délinquants dans nos quartiers !

M. Antoine Léaument s'exclame.

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Nos centres-villes sont maintenant largement concurrencés par les centres commerciaux situés plus loin dans les agglomérations, et dont les parkings sont gratuits. Les commerçants de nos centres-villes subissent donc aussi votre politique anti-bagnole. Accéder au centre d'une ville est devenu un enfer, au coût exorbitant, ce qui dissuade beaucoup de nos compatriotes ruraux de s'y rendre.

M. Antoine Léaument s'exclame.

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Votre politique vise à rembourser vos dettes en sanctionnant les automobilistes. Il est urgent de changer de mentalité – et sans doute de gouvernement ! Depuis les gilets jaunes, rien n'a changé : vous n'avez pas fait baisser le prix du carburant, vous n'avez pas fait baisser le prix de l'électricité et vous avez augmenté les impôts – dont la taxe foncière. Enfin, vous avez augmenté la dette de notre pays ! Où va l'argent, où passe le pognon ? Les Français nous le demandent chaque jour !

Cette proposition de loi est technique, sans envergure politique,…

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…à l'image du Titanic macroniste qui se rapproche de son iceberg : il connaîtra une première secousse le 9 juin 2024, et l'impact final est prévu en mai 2027 ! D'ici là, nous le disons aux Français : tenez bon, on arrive !

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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En Macronie, le monde se divise en deux : d'un côté, ceux qui triment et qui paient ; de l'autre, ceux qui profitent et s'enrichissent.

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Les chiffres sont là : 11 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté – c'est 500 000 de plus qu'en 2017 ; 4 millions sont mal ou non logés ; 52 % des Français indiquent ne pas pouvoir consommer trois repas par jour de manière régulière ; 45 % d'entre eux disent s'être retrouvés dans l'incapacité de payer certains actes médicaux ; 18 % vivent à découvert.

Frappé par les difficultés, notre peuple vit à côté d'une oligarchie prospère.

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Les 500 premières fortunes du pays ont vu leur patrimoine doubler depuis 2017 ; les cinq premières fortunes françaises possèdent désormais à elles seules autant que les 28 millions de Français les plus modestes.

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Ce monde violent et révoltant n'existe que par volonté politique. Pour dépouiller les pauvres et gaver les riches, il faut un gouvernement. C'est le vôtre, et vous vous y consacrez à coups de lois et de 49.3, sans trêve depuis bientôt sept ans.

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En supprimant l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), en instaurant le prélèvement forfaitaire unique (PFU), également appelé flat tax, en réformant l'impôt sur le revenu au profit des plus riches, en créant des niches fiscales et des exonérations de cotisations supplémentaires à hauteur de 80 milliards d'euros, vous avez fait de l'injustice le fondement de votre politique fiscale.

M. Antoine Léaument applaudit.

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Avec vous, le taux d'imposition de Bernard Arnault est équivalent à celui appliqué à un couple avec un enfant gagnant 91 000 euros par an !

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Donner toujours plus à ceux qui ont tout coûte cher à ceux qui n'ont rien ou pas grand-chose : cher aux locataires que la baisse des aides personnelles au logement (APL) prive de 1 milliard par an ; cher aux chômeurs, à qui votre réforme de l'assurance chômage coûte des mois d'indemnisation ; cher aux travailleurs qui devront s'épuiser jusqu'à 64 ans pour accéder à leur retraite.

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Le système fiscal que vous avez construit est comparable à celui de l'Ancien Régime : semblables à la noblesse d'hier, les grandes fortunes d'aujourd'hui jouissent de privilèges fiscaux payés par les plus modestes.

Pareille injustice nécessite détermination. La proposition de loi que nous étudions illustre le perfectionnisme macroniste – un talent pour accabler les gens.

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Elle vise à maximiser le rendement des amendes de stationnement, appelées FPS depuis 2018, date à partir de laquelle s'est constitué un véritable marché de la verbalisation et sont entrées en action des sulfateuses à procès-verbaux (PV) qui mitraillent les plaques d'immatriculation.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

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Sous le double effet de l'automatisation des contrôles et de leur privatisation, le nombre d'amendes pour stationnement a doublé entre 2018 et 2022. Les recettes tirées de ces contraventions ont flambé, passant de 157 à 340 millions d'euros. Selon certaines estimations, elles pourraient dépasser le milliard d'euros en 2023.

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Pour presser tout le jus du citron, vous souhaitez à présent décourager les automobilistes de contester leurs contraventions, en conditionnant la possibilité de le faire à leur paiement préalable. Un rapport sénatorial publié en 2019 révèle pourtant que 55 % des requêtes en annulation de FPS ont été jugées recevables, preuve du caractère plus que contestable de très nombreuses amendes.

Mme Clémence Guetté et M. Antoine Léaument applaudissent.

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Partout dans le pays, la verbalisation de véhicules de personnes en situation de handicap, de parents déposant leurs enfants à l'école…

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…ou de citoyens s'arrêtant un instant acheter du pain scandalisent les usagers de la voie publique, qui dénoncent à raison la dérive d'un système qui ne vise qu'à faire du fric sur le dos des automobilistes !

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

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Tout s'achète en Macronie, même le droit de protester contre une verbalisation jugée excessive. En 2020, le Conseil constitutionnel a pourtant abrogé les dispositions subordonnant la possibilité de contester une amende à son paiement préalable, y voyant une atteinte excessive au droit d'exercer un recours juridictionnel.

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Vous tentez de passer par la fenêtre et vous aviez initialement imaginé faire adopter cette disposition par une procédure d'exception – celle de la législation en commission – avec l'appui du Rassemblement national. Cinq ans après les gilets jaunes, vous continuez à souffler sur les braises de l'injustice et du mépris.

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Continuez, vous réveillerez à nouveau la colère populaire !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Pour notre part, nous combattrons sans cesse l'injustice, fondement du macronisme.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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Cette proposition de loi vise à adapter le droit en matière de contentieux du stationnement payant suite à une QPC et à la décision du Conseil constitutionnel de 2020 qui a abrogé l'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales. Cet article disposait que la recevabilité du recours contre une décision individuelle relative aux FPS devant la commission du contentieux du stationnement payant était subordonnée au paiement préalable du montant figurant sur l'avis de paiement et de l'éventuelle majoration.

Il convient donc d'adapter notre droit positif pour tenir compte de cette décision du Conseil constitutionnel et permettre à la commission de régulariser le stock des affaires en instance – plus de 180 000 dossiers –, les délais de jugement étant de deux ans.

L'article 1er procède au rétablissement de l'obligation de paiement préalable, dans la limite d'un montant plafonné, tout en précisant les situations qui permettent au requérant d'en être dispensé. Il suspend également les actions en recouvrement du FPS et de son éventuelle majoration si le requérant a déposé un recours recevable auprès de la commission du contentieux du stationnement payant.

L'article 2 modifie le nom de cette CCSP en cour nationale du stationnement payant, sur le modèle de la Cour nationale du droit d'asile, autre juridiction administrative spécialisée. Néanmoins, cela a été rappelé lors des débats en commission, un changement de nom ne réglera pas les nombreux dysfonctionnements de cette structure.

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Près de 33 000 titres exécutoires ont été émis en double pour le recouvrement de FPS impayés, et 4 800 titres exécutoires ont été notifiés avant l'avis de paiement.

L'article 3 introduit un recours administratif préalable obligatoire contre le titre exécutoire. Enfin, l'article 4 étend le champ des personnes publiques auxquelles la CCSP peut adresser des injonctions, ce qui facilitera l'exécution des décisions de la juridiction.

Cette proposition de loi purement technique constitue donc une adaptation de notre droit positif suite à une décision du Conseil constitutionnel. Elle répond à un besoin administratif, tout en prenant en compte les réalités et l'intérêt de nos concitoyens. C'est pourquoi les députés Les Républicains la voteront.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RE.

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Le droit au recours est un principe général du droit à valeur constitutionnelle, qui permet aux citoyens de contester les décisions prises à leur égard. Ce principe fondamental est au cœur de notre État de droit et du fonctionnement de la justice.

Par une décision du 9 septembre 2020, le Conseil constitutionnel a indiqué que la subordination du droit au recours au paiement préalable du montant du FPS et de son éventuelle majoration était contraire au principe du droit au recours et contrevenait à nos dispositions constitutionnelles.

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En conséquence, les dispositions de l'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales ont été abrogées. Il nous revient donc de légiférer pour adopter un régime juridique garantissant le droit au recours pour ces FPS.

Le régime juridique censuré subordonnait la recevabilité du recours au paiement préalable de la contravention afin de prévenir l'introduction d'un trop grand nombre de recours contentieux. Mais la proposition de loi nous semble toujours porter atteinte à l'application du principe plein et entier du droit au recours, car elle réintroduit l'obligation de paiement préalable…

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… dans la limite d'un montant plafonné, tout en prévoyant des exceptions pour certaines situations – vol ou destruction du véhicule, usurpation de la plaque d'immatriculation, cession du véhicule, perception de revenus limités, détention de la carte mobilité inclusion.

Malheureusement, cela ne garantit pas l'effectivité du droit au recours pour tous les usagers. L'exposé des motifs de la proposition de loi indique d'ailleurs que cette rédaction tient compte de l'avis du Conseil constitutionnel, tout en veillant à limiter le nombre de recours dans un souci de bonne administration de la justice.

Nous ne pouvons être d'accord : le droit au recours est un principe cardinal de notre régime juridique ; introduire une limitation de ce droit pour pallier une défaillance de l'administration est donc une erreur, monsieur le rapporteur. Comment accepter cette réduction des droits au motif d'une absence de moyens ? Je ne doute pas que vous tenterez de nous répondre.

Pour garantir l'effectivité du droit au recours, il conviendrait au contraire de donner à la justice et aux services en charge de la gestion des recours les moyens d'effectuer leur travail.

De plus, la recherche de profit par certains opérateurs privés délégataires des collectivités locales – par exemple à travers le dispositif Lapi – a contribué à la multiplication des erreurs et des contestations et donc des contentieux, sans doute bien davantage que les recours abusifs et les démarches dilatoires souvent évoqués. La nouvelle appellation de la commission du contentieux n'y changera rien, surtout pas les dysfonctionnements déjà évoqués et documentés.

Aussi les députés du groupe Socialistes et apparentés défendent-ils l'ouverture pleine et entière du droit au recours relatif au forfait de post-stationnement sans limitation. Nous considérons donc qu'en l'état, ce texte ne va pas assez loin pour préserver le droit au recours pour tous les citoyens : nous ne pouvons le soutenir et voterons contre.

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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La proposition de loi de notre collègue Daniel Labaronne porte au premier abord sur un sujet technique, mais ses implications sont importantes pour les contribuables comme pour les collectivités territoriales et la justice administrative. Plusieurs orateurs l'ont souligné, elle vise à réformer le contentieux du stationnement payant suite à la décision du Conseil constitutionnel du 9 septembre 2020 qui a déclaré contraire à la Constitution l'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales.

Cet article considérait que le paiement du forfait post-stationnement – en clair, de l'amende de stationnement – devait être préalable à l'engagement d'une procédure de contestation. Le Conseil constitutionnel a fondé sa décision sur deux motifs : l'absence d'exception permettant de tenir compte de certaines circonstances ou de la situation particulière de certains redevables ; l'absence de disposition législative garantissant que la somme à payer pour contester le forfait post-stationnement et sa majoration éventuelle ne soit pas trop élevée.

L'article 1er du présent texte rétablit l'article du code général des collectivités territoriales en question en tenant compte des griefs du Conseil constitutionnel. Ainsi, l'obligation de paiement préalable du FPS est réintroduite, mais son montant sera limité à un plafond fixé par décret. En outre, plusieurs exceptions sont énumérées : le vol ou la destruction du véhicule, la cession du véhicule, le bénéfice d'une carte mobilité inclusion ou encore la perception de revenus inférieurs à un montant fixé par décret.

L'introduction d'un plafonnement du montant de ces exceptions est de nature à sécuriser le dispositif et à permettre le bon fonctionnement de la justice administrative tout en protégeant les contribuables, car la situation induite par la décision du Conseil constitutionnel a des implications pratiques problématiques tant pour le contribuable que pour l'administration : moindre lisibilité du droit, explosion des recours, engorgement de la commission du contentieux du stationnement payant.

La proposition de loi ne s'en tient pas au rétablissement du paiement préalable du forfait post-stationnement : elle permet également de répondre à plusieurs demandes fortes et récurrentes de la commission du contentieux du stationnement payant, à commencer par la modification de son nom. L'article 2, amendé par la commission, la renomme ainsi tribunal du stationnement payant, afin de rendre son appellation plus conforme à son statut de juridiction.

L'article 3 introduit quant à lui un recours administratif préalable obligatoire contre le titre exécutoire, c'est-à-dire le document écrit rendant l'usager redevable d'un forfait de post-stationnement. Il est précisé que le Rapo sera nécessaire uniquement lorsque le FPS n'a pas fait l'objet d'un tel recours. Cela permettra de redonner aux collectivités territoriales la compétence qui leur revient – examiner en premier le bien-fondé des forfaits de post-stationnement – et de désengorger par là même le tribunal du stationnement payant d'un certain nombre de recours.

Enfin, l'article 4 permet l'extension du champ des personnes publiques auxquelles le futur tribunal du stationnement payant, appelé à remplacer la CCSP, peut adresser des injonctions. Là encore, cet article va dans le sens d'une plus grande fluidité dans les contentieux du stationnement payant.

Vous l'aurez compris, les députés du groupe Horizons et apparentés saluent le travail de qualité effectué par l'auteur et rapporteur de cette proposition de loi, qu'ils voteront.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

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Depuis le 1er janvier 2018, la sanction en cas d'absence ou d'insuffisance de paiement des sommes dues au titre du stationnement payant sur la voie publique a évolué. Exit donc l'amende contraventionnelle, et place au forfait de post-stationnement, une redevance d'occupation du domaine public fixée par la collectivité compétente.

Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel, par une décision du 9 septembre 2020, a abrogé l'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 9 avril 2015 relative à la gestion, au recouvrement et – nous en reparlerons, puisque c'est de cela qu'il s'agit – à la contestation du forfait de post-stationnement prévu à l'article L. 2333-87 dudit code.

Les sages ont considéré que « le législateur n'a pas prévu les garanties de nature à assurer que l'exigence de paiement préalable ne porte pas d'atteinte substantielle au droit d'exercer un recours juridictionnel effectif », dès lors que rien ne garantissait que la somme à payer pour contester les forfaits de post-stationnement…

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…et leur majoration n'était pas trop élevée pour le requérant et qu'aucune exception n'avait été prévue pour tenir compte de circonstances ou de situations particulières. Tirant les conséquences de cette décision du Conseil constitutionnel,…

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…ce texte propose donc des mesures qui rétablissent l'obligation de paiement préalable du forfait de post-stationnement, tout en introduisant des exceptions telles que le vol, la destruction du véhicule, l'usurpation de la plaque d'immatriculation, la cession du véhicule, la perception de revenus limités ou encore la détention d'une carte mobilité inclusion. Il s'agit de garantir la recevabilité d'un recours contentieux.

Je n'en suis pas moins stupéfaite que personne ne s'émeuve que ce texte oblige des personnes qui ne devraient pas être sanctionnées à devoir non plus payer dans les cas d'exception, mais réclamer pour leurs droits. C'est tout de même extravagant ! Voilà un premier point.

L'article 2 vise à changer la dénomination de la commission du contentieux du stationnement payant, qui deviendrait le tribunal du stationnement payant et bénéficierait d'un pouvoir d'injonction étendu à toutes les personnes morales de droit public concernées. Il s'agit là de modifications qui devraient contribuer à clarifier son rôle pour le grand public. On peut l'entendre et améliorer l'efficacité de ses décisions.

Le texte introduit par ailleurs un recours administratif préalable obligatoire contre le titre exécutoire, dit Rapo, conditionnant ainsi la recevabilité du recours contentieux, avec pour objectif d'aligner les procédures et de simplifier le processus pour les requérants.

Cette proposition de loi ne règle donc pas tous les problèmes – elle en règle même très peu. Je pense par exemple à ceux liés aux dysfonctionnements persistants ou aux erreurs du système de verbalisation – je viens d'évoquer le fait qu'on est verbalisé quand on ne devrait pas l'être. Nous partageons à ce titre les préoccupations exprimées en commission, notamment au sujet de la limitation du droit au recours, principe général à valeur constitutionnelle – c'est bien pour cela que nous avons été sanctionnés, ou plutôt que le Gouvernement a été sanctionné –, ou encore de l'insuffisance des moyens humains et financiers du service chargé de la gestion des recours – et là est bien le problème.

Le texte démontre encore une fois l'utilité d'un engagement fort et assorti d'un plan de financement massif en faveur des transports publics afin de favoriser les alternatives à l'automobile, et donc à la contravention éventuelle. Nous regrettons que plusieurs propositions adoptées en ce sens en commission aient été balayées par des 49.3 successifs. En ces temps de forte restriction des prérogatives du Parlement, nous dénonçons également le recours à la procédure de législation en commission, qui limite notre droit d'amendement en séance publique. Le 49.3 ne suffisait pas : on nous limite encore, même concernant les propositions de loi.

Pour finir, ce texte, qui se voulait un pas vers l'amélioration de la gestion du contentieux du stationnement payant, persiste à réduire nos droits fondamentaux au motif de la célérité administrative à défaut de moyens suffisants. Puisque la rédaction actuelle ne donne pas toutes les garanties d'un bon équilibre entre la nécessité de protéger les droits des citoyens et la gestion efficace du contentieux, le groupe Écologiste votera contre.

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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La discussion générale est close. La parole est à M. le rapporteur.

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J'ai trouvé la discussion générale intéressante et riche. Je sais que je ne vous convaincrai pas, mais dans la mesure où je me bats pour cette proposition de loi depuis un certain temps, je tiens à apporter quelques précisions.

Tout d'abord, le Conseil constitutionnel n'a pas remis en cause le principe du paiement préalable pour exercer un recours contentieux. Notre collègue Chassaigne a estimé que nous portions atteinte à un principe constitutionnel, ce que vous avez répété les uns et les autres. Non : le Conseil constitutionnel a considéré que le principe du paiement préalable pour exercer un recours peut se concevoir ; reste que la loi votée en 2014 rendait l'exercice d'un recours compliqué pour, par exemple, les personnes en situation de handicap.

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Elles n'avaient pas à être verbalisées, tout simplement !

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La loi n'a en effet pas prévu d'exception à ce principe. En outre, rien n'assurait que le montant du prélèvement – augmenté d'une éventuelle majoration – ne soit pas excessif. Voilà les deux motifs de censure des dispositions issues de la loi Maptam.

Pour ce qui est du droit de tout citoyen à exercer un recours, je veux donc bien qu'on invoque les grands principes constitutionnels, mais le principe même du paiement pour exercer un recours n'a pas été contesté.

Ensuite, actuellement, on ne paie pas préalablement à l'exercice d'un recours auprès de la commission du contentieux du stationnement payant. Vous avez raison : personne ne paie pour engager un recours. Mais quelques semaines après ce recours, on vous demande tout de même de payer – avec des majorations. En définitive, tout le monde paie, soit immédiatement pour exercer un recours, soit quelque temps plus tard, mais à un moment donné, tout le monde paie avant même que le recours n'ait été examiné – y compris les personnes en situation de handicap.

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Ma proposition de loi permet tout de même une avancée. D'abord, elle ne va pas à l'encontre de la décision du Conseil constitutionnel s'agissant du principe de paiement préalable. Ensuite, elle crée des exceptions à ce principe pour les personnes en situation de handicap, les personnes dont on a usurpé la plaque d'immatriculation ou bien l'identité, les personnes qui ont été victimes d'un bug lors de la cession de leur véhicule, les personnes aux revenus modestes… Ces personnes ne seront pas obligées de payer pour engager un recours.

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C'est donc que le paiement introduit une entrave !

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Aujourd'hui, les personnes que je viens de mentionner sont obligées de payer, non au moment où elles déposent un recours – je suis bien d'accord avec vous – mais trois, quatre semaines, deux mois plus tard.

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Cela a d'ailleurs été relaté dans plusieurs articles du Canard enchaîné. J'en ai un exemple devant moi : la personne en situation de handicap qui contestait un forfait de post-stationnement s'est retrouvée dans une situation inextricable, car cette contestation n'était pas suspensive du paiement de l'amende.

Avec ma proposition de loi, ces personnes n'auront rien à payer tant que leur recours n'aura pas été examiné, et l'issue leur sera favorable. C'est tout de même une avancée majeure par rapport à la situation actuelle ! Je voudrais vraiment vous en convaincre : non seulement le texte ne remet pas en cause le principe constitutionnel du recours, mais au-delà de dispositions techniques, il améliore la situation de ces personnes. Certes, il arrive qu'elles ne paient pas avant d'engager un recours, mais trois mois plus tard, on toque à leur porte en leur disant : « Monsieur, il faut payer. » Cela peut poser des problèmes de trésorerie insurmontables pour les personnes en situation de handicap.

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C'est parce qu'il n'y a pas assez de moyens ! Sans cela, la décision serait prise tout de suite !

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On ne leur demandera désormais plus de payer. C'est, de mon point de vue, une avancée significative. Je suis fier d'avoir porté cette proposition de loi qui améliorera le dispositif du contentieux du stationnement payant.

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J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

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Sur l'amendement n° 3 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.

Sur les amendements n° 8 et 9 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.

Sur l'article 1er , je suis saisie par les groupes Renaissance et Rassemblement national de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Laurent Jacobelli.

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Pourrir la vie des automobilistes et les considérer comme des vaches à lait, cela semble décidément être l'alpha et l'oméga de votre politique.

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Vous avez voté pour le texte en commission !

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Il y a eu d'abord les zones à faibles émissions, qui interdisent les centres-villes aux Français qui ne peuvent pas changer immédiatement de voiture. Il y a eu ensuite le slalom dans les grandes villes entre les voies pour vélo, les voies pour bus et les trottinettes électriques. Il y a, enfin, le moteur à essence que vous allez interdire au milieu des années 2030,…

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…poussant une partie de la population soit à abandonner la voiture, soit à s'endetter à vie – c'est notamment le cas de la population la plus défavorisée, qui n'a d'autre moyen que d'utiliser la voiture, puisque vous fermez des lignes de train. Bref, vous voulez pourrir la vie des 40 millions d'automobilistes français. Pire encore, vous avez privatisé le contrôle du stationnement. Depuis, les sociétés privées s'en donnent à cœur joie pour distribuer des PV à tire-larigot, souvent de manière indue. Quelle est votre réponse à ce scandale ? « Vous paierez, messieurs et mesdames les automobilistes, et vous verrez ensuite si vous avez eu raison de payer. »

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C'est déjà le cas ! Si vous aviez écouté ce qui a été dit…

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Cela suffit ! Il faut arrêter de s'en prendre à ces 40 millions de Français qui sont obligés de prendre leur automobile, soit pour aller au travail, soit pour emmener leurs enfants à l'école, soit pour aller voir leur famille. Faites votre boulot et créez des lignes de train, mais foutez-leur la paix !

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Paul Vannier, pour soutenir l'amendement n° 3 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est un amendement de réécriture de l'article 1er , qui est le cœur de la proposition de loi.

Pour le dire en termes simples, ce que l'article propose, c'est de rendre payant le droit au recours contentieux.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le texte prévoit des exceptions, sans doute parce que vous considérez que rendre ce droit payant en freinera l'exercice.

Ce n'est donc pas une loi de simplification, mais une loi liberticide qui va réduire la capacité des usagers de la voie publique à contester les amendes pour stationnement. Or nous savons que sous l'effet de leur automatisation et de la création d'un marché de la verbalisation, actuellement dominé par des filiales de grands groupes du CAC40, certaines sont plus que contestables. Il y a même parfois des amendes fictives : en lisant la presse quotidienne régionale, on apprend que récemment, à Aix-en-Provence, on a demandé à des dizaines d'automobilistes de payer des amendes déjà réglées. Bref, il y a quantité de motifs légitimes de recours.

Le Sénat lui-même a constaté que plus de la moitié des recours étaient fondés ; c'est la preuve qu'il y a un grave problème dans la formalisation de ces amendes.

Vous freinez les recours en les rendant payants, parce que vous êtes confrontés au problème d'engorgement des tribunaux qu'a fait naître la loi Maptam. Plutôt que de leur accorder de nouveaux moyens, vous choisissez de réduire le droit de nos concitoyens. C'est la raison pour laquelle nous proposons de réécrire cet article.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Une fois de plus, vous parlez d'une proposition de loi liberticide. Si tel avait été le cas, le Conseil constitutionnel n'aurait pas admis le principe du paiement préalable avant un recours effectif. Vous vous mettez en surplomb du Conseil constitutionnel ; c'est quand même très étonnant.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Deuxièmement, l'amendement propose de supprimer le paiement préalable, en introduisant une notion nouvelle par rapport à celui que vous aviez présenté en commission : il rend le recours suspensif. Il y a déjà des incivilités et des recours dilatoires, mais vous peaufinez le système : désormais, n'importe qui pourra faire un recours qui arrête le paiement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est un principe un peu curieux. La raison pour laquelle je suis défavorable à votre amendement, c'est que le paiement préalable n'est pas anticonstitutionnel et que le texte propose, pour un grand nombre d'exceptions, un recours suspensif qui supprimera ce paiement préalable. Cela va dans le sens de la justice sociale et de la simplification.

Mes chers collègues du Rassemblement national,…

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…ma proposition de loi est très éloignée de votre plaidoyer pour les automobilistes. Elle vise justement à simplifier la vie des personnes qui se sont fait voler leur voiture, dont la plaque d'immatriculation ou l'identité a été usurpée, ou encore qui ont eu un problème au moment de la cession du véhicule. Ne venez pas me dire que je participe à je ne sais quel traquenard contre les automobilistes ! Je note d'ailleurs qu'en commission, vous vous étiez prononcés en faveur du texte.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Même avis.

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Vos explications, cher collègue, n'étaient pas les bonnes. Comme l'a très bien dit M. le rapporteur, le texte apporte une clarification. Actuellement, les procédures sont juxtaposées. À l'avenir, il n'y en aura qu'une : en cas de recours, le texte exigera le paiement du forfait, tout en prévoyant des exceptions.

Cet amendement va contre le bon sens. En proposant de réécrire l'article, il laisse à penser que le recours vaut actuellement non-paiement de l'amende, alors que des poursuites peuvent être engagées. Vous ne pouvez pas laisser croire le contraire. En ne leur indiquant pas l'état actuel du droit, vous ne respectez pas nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je terminerai mon explication par ce parallèle : actuellement, si vous contestez le bien-fondé de votre imposition sur le revenu, vous devez tout de même vous en acquitter. Le groupe Renaissance votera contre l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En effet, vous clarifiez : désormais, tout le monde devra payer pour contester une amende de stationnement.

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Vous emmenez votre enfant à l'école, vous restez quelques instants en double file, la sulfateuse à PV passe… Vous voulez contester cette verbalisation ? Vous devez payer. Vous vous arrêtez une minute pour acheter une baguette de pain, le soir, en rentrant chez vous,…

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…la sulfateuse à PV passe et vous inflige une amende. Vous la contestez ? Vous devez payer. Demain, tout le monde paiera.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tout le monde, sauf les exceptions, monsieur Labaronne.

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Toutefois, en reconnaissant qu'il faut des exceptions, vous faites vous-même la démonstration que la proposition de loi introduit une entrave au droit au recours juridictionnel. Tout le monde paiera, donc.

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Si nous ne votons pas le texte, il n'y aura pas d'exceptions !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans un contexte où les Français paient déjà beaucoup, c'est une nouvelle façon pour vous de les matraquer. Le nombre d'amendes a été multiplié par quatre ou cinq en autant d'années. Ces recettes viennent compenser l'austérité de votre politique, puisque vous avez gelé les dotations aux collectivités.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

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Celles-ci sont désormais en difficulté. Alors, vous mettez à contribution les automobilistes en multipliant les amendes et en rendant difficile, voire impossible, en tout cas payante, la contestation de ces amendes de plus en plus souvent infondées.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 77

Nombre de suffrages exprimés 63

Majorité absolue 32

Pour l'adoption 19

Contre 44

L'amendement n° 3 n'est pas adopté.

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La parole est à M. Jordan Guitton, pour soutenir l'amendement n° 7 .

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Il vise à supprimer l'alinéa 6, lequel me semble inutile. En effet, puisque l'alinéa 7 mentionne « la cession de leur véhicule », il ne sert à rien d'indiquer à l'alinéa 6 : « la cession pour destruction de leur véhicule ». C'est un amendement rédactionnel de bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je salue votre lecture attentive de ma proposition de loi. Toutefois, sur ce point précis, vous n'avez pas raison. Vous aurez raison sur un autre amendement.

« Ah ! » sur les bancs du groupe RN.

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Vous considérez que la mention de la cession pour destruction du véhicule est superfétatoire. Je rappelle cependant que cette notion a deux acceptions : la cession libre, c'est-à-dire la vente du véhicule à une autre personne, que ce soit un particulier ou un garagiste, et la cession pour destruction, pour laquelle la procédure est différente. C'est la raison pour laquelle j'évoque séparément ces deux acceptions dans le texte. Cela rend mon dispositif plus solide que le vôtre. Je suis donc défavorable à votre amendement.

L'amendement n° 7 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.

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La parole est à M. Jordan Guitton, pour soutenir l'amendement n° 8 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement de repli, que j'espère consensuel, vise à inclure parmi les exceptions, à l'instar des bénéficiaires d'une carte mobilité inclusion portant la mention « stationnement pour personnes handicapées », les bénéficiaires d'une carte de priorité d'accès aux lieux publics. Ce sont principalement des femmes enceintes et des personnes ayant des enfants à charge qui ne seraient pas mécontentes de conserver un fonds de trésorerie. Dans certains arrondissements de Paris, l'amende peut monter jusqu'à 75 euros, voire 150 euros en cas de majoration ; au vu de l'inflation actuelle et des problèmes de pouvoir d'achat de nos compatriotes, il me semble que nous pouvons nous permettre de les exonérer du paiement de l'amende. J'espère que vous donnerez un avis favorable à cet amendement !

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Mes chers collègues, je me permets de faire un point sur la situation, puisque nous sommes à un quart d'heure de la fin de la séance et que la suite de l'examen du texte n'est programmée que mercredi. Je vous propose que nous essayions de terminer avant de lever la séance ,

« Oui ! » sur divers bancs

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il suffit que le rapporteur dise « favorable » à nos amendements !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je précise tout d'abord que de manière générale, je serai défavorable aux amendements qui n'entrent pas dans le cadre des exceptions formulées par le Conseil constitutionnel. Typiquement, le présent amendement risque d'ouvrir la boîte de Pandore : à sa suite, nos amis sénateurs, au cours de la navette, risqueraient d'introduire tout un tas d'exceptions. J'y suis donc défavorable, d'autant qu'on ne peut pas tout à fait comparer…

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Défavorable.

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Arrêtons-nous un petit instant sur cet amendement du Rassemblement national – c'est important, je pense : il introduit une exception à l'obligation de rendre payant le droit à recours contentieux que propose le rapporteur. C'est peut-être le signe d'un remords,…

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…puisqu'en commission, le Rassemblement national a soutenu la proposition de M. le rapporteur, a voté pour,…

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…ce qui tranche avec le plaidoyer vibrant de M. Jacobelli en défense des automobilistes. Nous verrons, à l'heure du vote, la véritable position du Rassemblement national.

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Peut-être pouvons-nous être éclairés par le choix effectué par le vice-président du Rassemblement national,…

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…M. Louis Aliot, qui, à Perpignan, a choisi de pratiquer la sulfateuse à PV – …

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Et à Grenoble ? On en parle, de ce que font les écolos ?

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…il la dénonçait quand il était dans l'opposition, mais depuis qu'il est aux responsabilités, il agit comme les macronistes nous proposent de le faire aujourd'hui.

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Il était important, je crois, de dénoncer cette tartufferie : une fois de plus, le double discours de l'extrême droite est sa caractéristique.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voyez-vous, monsieur Vannier, collègues de La France insoumise – je le dis très rapidement, parce que nous voulons éviter de nous appesantir là-dessus –, nous, en commission, nous travaillons ; nous n'empêchons pas les séances de se dérouler, nous ne faisons pas d'obstruction, nous ne gueulons pas, nous n'arrivons pas dans des états pitoyables !

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Vous y êtes surtout très silencieux ! Vous n'avez aucune proposition !

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Nous sommes un parti républicain et nous avons envie d'arriver au pouvoir. Nous travaillons et nous n'avons pas levé la main, en commission, au moment de voter le texte. Vous pouvez donc raconter ce que vous voulez, mais vu le comportement que vous avez eu, vous feriez mieux de vous taire !

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 77

Nombre de suffrages exprimés 72

Majorité absolue 37

Pour l'adoption 17

Contre 55

L'amendement n° 8 n'est pas adopté.

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L'amendement n° 9 de M. Jordan Guitton est défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À cause de cet article, il faudra désormais, pour pouvoir contester une amende, l'avoir payée au préalable. Depuis que les communes fixent le prix du stationnement, les villes qui ont fait le plus de profit en France sont d'abord Paris, ensuite Marseille, et au troisième rang Montpellier, où je suis élue.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Montpellier, donc, a récolté 5,54 millions d'euros à ce titre en 2022. Nous avons déjà exposé le caractère injuste de ces amendes ; parmi les rues de Montpellier…

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…dans lesquelles le stationnement est devenu payant depuis deux mois figurent celles qui entourent le CHU – centre hospitalier universitaire. Or le parking du CHU est payant ; jusqu'alors, les gens qui y travaillent – je crois qu'on les appelle « les essentiels » en Macronie –…

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…se garaient à l'extérieur. Je pense aussi aux rues situées autour des universités : on demande aux étudiants et aux étudiantes, qui font partie des populations les plus précaires, de payer leur stationnement.

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Je croyais qu'ils n'avaient pas de voiture ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Des quartiers résidentiels sont également concernés : c'est – ni plus ni moins – du racket !

Collègues du Rassemblement national, lorsqu'on regarde quelles sont les villes qui appliquent le stationnement payant, on se rend compte que Perpignan apprécie assez, finalement, cette mesure, et surtout les amendes qui vont avec.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En même temps, vous, vous n'avez pas de ville !

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À Perpignan, donc, par exemple, ce sont presque 1 million d'euros de profits qui ont été faits en 2022 grâce à l'amende à 25 euros ;

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN

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et à Béziers, l'amende à 30 euros a rapporté 474 000 euros !

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Le temps de parole est limité à deux minutes, madame la présidente !

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Vous avez parlé du contexte d'inflation sur les denrées alimentaires, sur les carburants…

Mme la présidente coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 75

Nombre de suffrages exprimés 72

Majorité absolue 37

Pour l'adoption 17

Contre 55

L'amendement n° 9 n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur les articles 2, 3 et 4, je suis saisie par le groupe Renaissance de demandes de scrutin public.

Sur l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par les groupes Renaissance et Rassemblement national de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jordan Guitton, pour soutenir l'amendement n° 6 .

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Il est rédactionnel ; c'est très simple et j'espère que le rapporteur lui donnera un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En effet, à l'alinéa 10 du présent article, il est judicieux de préciser que la « notification » mentionnée est bien celle « de la décision ». Je vous remercie pour votre lecture attentive et vigilante de ma PPL, sur ce point très précis, et je donne un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nos PPL à nous, elles sont bien rédigées, mais elles ne sont jamais mises à l'ordre du jour !

L'amendement n° 6 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 87

Nombre de suffrages exprimés 83

Majorité absolue 42

Pour l'adoption 47

Contre 36

L'article 1er , amendé, est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement rédactionnel effectue, dans le code général des collectivités territoriales, les coordinations nécessaires suite au changement de nom de la commission du contentieux du stationnement payant, qui devient le tribunal du stationnement payant. J'y suis bien évidemment favorable.

L'amendement n° 10 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 86

Nombre de suffrages exprimés 63

Majorité absolue 32

Pour l'adoption 59

Contre 4

L'article 2, amendé, est adopté.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 83

Nombre de suffrages exprimés 50

Majorité absolue 26

Pour l'adoption 46

Contre 4

L'article 3 est adopté.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 85

Nombre de suffrages exprimés 50

Majorité absolue 26

Pour l'adoption 46

Contre 4

L'article 4 est adopté.

L'article 5 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 1 portant article additionnel après l'article 5.

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Je vais essayer de faire court. Je m'interroge en particulier sur la gestion des exceptions au paiement préalable du FPS et sur la mise en œuvre du recours administratif préalable obligatoire, qui pourraient accroître la complexité administrative du dispositif pour les communes, et sur l'introduction de nouvelles procédures et exceptions, qui pourrait ralentir le processus de recouvrement des FPS, affectant potentiellement les revenus des communes issus du stationnement payant. En rendant le processus de contestation plus accessible, la proposition de loi pourrait en outre conduire à une augmentation des contestations des FPS ; les communes devraient ainsi probablement investir davantage de moyens pour gérer tout cela.

Mon amendement propose donc la rédaction d'un rapport pour faire le point sur la pertinence juridique et pratique de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je comprends tout à fait votre préoccupation, qui est légitime. Cependant, compte tenu du caractère complexe de la mise en œuvre de la proposition de loi, il est précisé qu'elle ne pourra entrer en application que deux ans après sa promulgation. Or vous souhaitez qu'un rapport soit établi dans les six mois suivant la promulgation. Il y a donc un petit souci !

Cela dit, il faudra en effet faire le bilan de cette loi. En tant que rapporteur spécial de la commission des finances pour la mission "Conseil et contrôle de l'État" , je publie tous les ans un rapport qui traite notamment de ce qui s'appellera désormais le tribunal du stationnement payant. Je suivrai donc cette affaire de près.

Par ailleurs, la commission du contentieux du stationnement payant publie tous les ans un rapport d'activité. Nous disposons donc de tous les éléments d'information nous permettant de contrôler que la loi s'applique bien.

L'amendement n° 1 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Paul Vannier, pour soutenir l'amendement n° 2 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est une demande de rapport sur les moyens humains et financiers de la commission du contentieux du stationnement payant. Actuellement, seuls une quinzaine de magistrats y travaillent ; c'est absolument insuffisant pour faire face aux presque 180 000 dossiers qui étaient en cours en décembre 2022 – et l'ordre de grandeur est le même aujourd'hui. C'est d'ailleurs ce volume qui motive la proposition de loi liberticide qui est présentée à l'examen de notre assemblée ! Il paraît donc indispensable d'examiner les moyens humains et financiers dont dispose cette commission, pour savoir si les renforcer permettrait d'éviter de s'en prendre aux droits des automobilistes et, plus généralement, de nos concitoyens.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les moyens humains, budgétaires et matériels dont bénéficie la commission du contentieux du stationnement payant ont été fortement augmentés depuis sa création. Je veux profiter de cette occasion pour rendre hommage à l'ensemble des magistrats, des greffes et des agents administratifs de ladite commission ,

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE

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qui ont eu à faire face à un contentieux de masse et qui ont instauré des procédures leur permettant de rendre des jugements dans les délais les plus courts possibles.

C'est en pensant à tout ce personnel,…

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Arrêtez de penser à eux, donnez-leur des moyens !

Exclamations sur les bancs du groupe RE.

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Cette PPL a été coconstruite avec les magistrats de la commission du contentieux du stationnement payant et avec le Conseil d'État ; l'ensemble du dispositif a donc fait l'objet de réflexions poussées et je veux saluer leur engagement pour rendre la justice le plus rapidement possible, face à un contentieux de masse.

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Je pense que mon texte leur permettra justement de rendre une justice plus efficace et plus rapide en faveur de tous ceux qui engagent un recours contentieux,…

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Parce que je n'aurai pas l'occasion de le faire plus tard, je voudrais profiter de ce moment pour féliciter, au nom du groupe Renaissance, le rapporteur Labaronne pour sa proposition de loi …

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE

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…et dire que cet amendement, venant de députés de La France insoumise, ne manque pas de saveur : ils viennent déplorer le manque de moyens et de magistrats alors qu'ils n'ont même pas été capables de voter la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice, qui a augmenté le budget de la justice de 5 milliards d'euros…

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…et qui va permettre de recruter plus de 1 500 magistrats, 1 800 greffiers et 10 000 personnels de justice !

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous venez vous émouvoir de l'absence de moyens alors que vous n'avez même pas été capables de voter cette loi. C'est lamentable !

Mêmes mouvements.

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Lors d'un récent débat budgétaire, avant que soit déclenché le 49.3, nous avions déposé un amendement visant à augmenter le nombre de greffiers sur cinq ans en le portant à 20 000 équivalents temps plein. Vous, députés macronistes, aviez voté contre cet amendement.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Monsieur le rapporteur, vous êtes très affirmatif. Or, dans le rapport annuel d'activité de la CCSP pour 2021,…

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…on peut lire que « la juridiction n'a pas obtenu pour 2022 le relèvement du plafond d'emplois des agents de greffe qu'elle sollicitait », que « [les] moyens alloués sont même en diminution par rapport à 2021 » et que « [cette] réduction des effectifs des agents de greffe place la CCSP en difficulté ».

Vous le voyez, un rapport est nécessaire pour évaluer de façon objective et précise les moyens humains et financiers dont, manifestement, cette commission ne dispose pas – ou pas en quantité suffisante, car je rappelle qu'elle est submergée par le nombre de requêtes.

Au-delà de notre désaccord sur le fond de cette proposition de loi, notre amendement va dans le bon sens et est à la hauteur de l'intérêt que nous portons tous les deux à cette question – vous depuis plus longtemps que moi, certes, mais vous remarquerez qu'au fil de nos débats, j'ai peu à peu pris conscience de son importance.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

L'amendement n° 2 n'est pas adopté.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 88

Nombre de suffrages exprimés 68

Majorité absolue 35

Pour l'adoption 45

Contre 23

La proposition de loi est adoptée.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Discussion de la proposition de loi visant à interdire les dispositifs électroniques de vapotage à usage unique ;

Discussion de la proposition de loi améliorant l'efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels ;

Discussion de la proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos ;

Discussion de la proposition de loi visant à assurer la pérennité des établissements de spectacles cinématographiques et l'accès au cinéma dans les outre-mer.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt heures.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra