France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Il y a près de trois mois, le 9 février, nous discutions, en première lecture, de cette proposition de loi défendue par M. le rapporteur Philippe Brun. À l'époque, je l'avais qualifiée de superflue, voire d'inutile. J'avais souligné qu'elle présentait un risque juridique pour l'opérateur national, puisqu'elle mettait en danger l'offre publique d'achat en cours. J'avais ajouté qu'elle était anticonstitutionnelle, par son caractère quelque peu cavalier, et qu'elle était extrêmement coûteuse : je chiffrais la facture à plus de 18 milliards d'euros.
Il y a un mois, le Sénat – temple de la raison –, a voté une version de la proposition de loi amplement amendée, qui me semble apporter quelques aménagements sensés. Elle comporte certes encore des risques budgétaires, mais ils sont plus limités – dix-huit fois moins – que dans le texte initial. Elle résout en outre le problème d'insécurité juridique. Ce risque est malheureusement présent dans le texte que nous examinons ce jour ; il persistera si celui-ci est adopté dans la version amendée par la commission des finances, voire si vous adoptez certains amendements qui seront présentés aujourd'hui.
J'ai malgré tout grand plaisir à vous retrouver pour débattre de ce texte important.
Nos précédents échanges dans l'hémicycle ont été quelque peu chahutés, tandis qu'ils ont été plus apaisés au Sénat. J'ai le sentiment qu'ils seront calmes aujourd'hui.
Je m'y suis senti un peu seul, et pas forcément très bien entouré !
Je ne referai pas l'histoire d'Électricité de France (EDF),…
…mais je profiterai de cette proposition de loi pour rappeler, en quelques mots, notre vision de l'opérateur national, qui doit rester au cœur de la transition énergétique. L'histoire d'EDF a commencé avec les années fastes de l'électrification de la France et s'est poursuivie avec la construction du deuxième parc nucléaire au monde. Nous en percevons encore les fruits : le mix électrique français est parmi les moins émetteurs de gaz à effet de serre au monde, et parmi les plus compétitifs.
Je l'ai dit en première lecture, et je le redirai autant que nécessaire : le groupe EDF est – et restera – un élément essentiel de la mise en œuvre de la politique énergétique de l'État français. Il est par ailleurs un champion à l'exportation – dimension importante pour la filière et pour le ministre délégué chargé de l'industrie que je suis. Les principaux enjeux d'EDF résident donc dans la production d'énergie, dans la conduite de grands projets industriels et dans la sécurisation de sa capacité d'investissement. Une fois encore, je crains que cette proposition de loi, si elle est adoptée, ne nous détourne de ces objectifs essentiels.
Dans les années à venir, EDF investira à hauteur de dizaines de milliards d'euros par an : cela requiert des moyens et une crédibilité financière. L'opérateur doit retrouver sa maîtrise industrielle dans le nucléaire : c'est nécessaire pour l'entreprise, pour la filière et pour le pays. Il doit aussi accroître sa production d'énergies renouvelables et s'est donc fixé, en la matière, des objectifs ambitieux pour les trente prochaines années. EDF est aussi le moyen des ambitions que je défends en tant que ministre délégué chargé de l'industrie : il n'y aura pas de réindustrialisation verte ni de décarbonation de l'industrie traditionnelle sans un EDF fort, capable de livrer des électrons à bas prix, capable d'offrir une visibilité sur le long terme à des industriels déjà implantés en France ou à des futurs investisseurs.
EDF, c'est également un projet industriel en soi, sans doute le plus grand projet industriel des années futures : construction d'EPR – réacteurs pressurisés européens –, d'éoliennes, d'infrastructures de production d'énergies renouvelables, etc.
Ne nous trompons pas de priorité en votant des textes par pur opportunisme, au risque de fragiliser le groupe.
Le Gouvernement a pris ses responsabilités vis-à-vis d'EDF. L'État l'a accompagné dans ses opérations de recapitalisation chaque fois que c'était nécessaire, en 2017 et en 2022. Nous n'avons jamais autant investi dans le nucléaire que depuis 2017, à hauteur de 7 milliards d'euros par an. Nous avons de surcroît sécurisé le calendrier de l'EPR 2 grâce au projet de loi « nucléaire » – projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes –, que vous avez voté en première lecture, et qui fait l'objet en ce moment même de discussions en commission mixte paritaire.
Mme Christine Arrighi s'exclame.
Rappelons-le : EDF est une société endettée, qui a d'énormes besoins d'investissement. Conformément aux engagements de campagne du Président de la République, nous avons lancé, dès l'été 2022, une offre publique d'achat pour prendre le contrôle du capital d'EDF à 100 %. À cette fin, 9,7 milliards d'euros de crédits budgétaires ont été validés par le Parlement dès le vote du projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat. Par cette nationalisation, nous renforçons les moyens d'EDF pour lui permettre d'investir ces prochaines années, et nous renforçons son sérieux financier.
Depuis l'examen de la proposition de loi en première lecture, il y a trois mois, notre plan poursuit son déroulement. L'État détient 96 % du capital d'EDF, plus que les 90 % nécessaires pour exercer le retrait obligatoire. Un recours a certes été déposé en cour d'appel sur la décision de conformité de l'Autorité des marchés financiers (AMF), mais il vient d'être rejeté. Mardi, la cour d'appel de Paris a ainsi donné raison à la stratégie de nationalisation de l'État.
L'offre publique d'achat est donc rouverte dès aujourd'hui, jusqu'au 17 mai inclus, afin de finaliser le rachat des parts minoritaires. En définitive, le Gouvernement répond aux vrais enjeux du groupe EDF, de l'industrie française et de notre avenir commun.
Les sénateurs ont fait preuve de bon sens en réécrivant largement le texte issu de l'Assemblée nationale. Les discussions avaient été difficiles début février, puisque les oppositions unies s'étaient prononcées favorablement sur un texte bancal, contre-productif et pénalisant pour EDF. Il était donc nécessaire de le réécrire. Cela a été fait en grande partie, dans un esprit de responsabilité – je dois le reconnaître, et j'en appelle à poursuivre nos travaux dans cet esprit. Le texte issu du Sénat a supprimé les articles 1er et 3 visant une nationalisation du groupe EDF, qui pouvaient fragiliser l'offre publique d'achat en cours et qui arrivaient à contretemps. Le Sénat a également retiré de l'article 2 la référence aux activités d'un groupe unifié dont le capital aurait été incessible : cela aurait totalement entravé les opérations courantes de gestion d'actifs par EDF, et fragilisé sa capacité à investir.
Visiblement, ces arguments ne vous ont pas pleinement convaincus : lors de l'examen du texte en deuxième lecture en commission, vous n'êtes pas revenus sur les articles 1er et 3 – fort heureusement –, mais vous avez réintroduit une liste d'activités qu'EDF devrait assurer en France. Je réitère notre opposition ferme à l'égard de cette disposition, et je vous alerte une fois de plus sur sa portée juridique douteuse. En effet, EDF ne dispose pas d'un monopole sur la production d'énergies renouvelables. À l'heure où nous avons un contentieux avec la Commission européenne concernant les concessions hydrauliques, nous devons aussi nous garder de fragiliser la position de la France – vous en conviendrez tous. Enfin, je le réaffirme, nous avons renoncé au projet Hercule. M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique l'a affirmé dès juillet 2022 dans l'hémicycle ; il l'a redit le 9 décembre à Penly, au cœur de l'appareil productif nucléaire français ; je l'ai répété en séance le 9 février, et j'y procède à nouveau aujourd'hui – cela figure d'ailleurs dans la lettre de mission que Mme la Première ministre a adressée au PDG d'EDF, Luc Rémont. Ce dernier présentera la feuille de route qui en découle avant l'été, comme je m'y suis engagé.
Au pire, vous déployez une stratégie de la terre brûlée, qui risque de fragiliser l'opérateur national.
M. le rapporteur Philippe Brun s'exclame.
Au mieux, vous vous battez contre des chimères. Je préférerais que nous unissions nos forces pour soutenir l'opérateur national – c'est essentiel.
Sans passer en revue chacun des articles de la proposition de loi, je m'attarderai sur son article 3 bis, dont j'ai l'impression qu'il a rempli l'Assemblée nationale de viennoiseries toute la matinée…
Je n'y ai pas touché, madame la députée !
Le texte issu du Sénat prévoit l'extension du tarif réglementé de vente d'électricité (TRVE) à toutes les très petites entreprises (TPE), alors qu'il est pour le moment réservé aux TPE dont la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kilovoltampères. Sur le fond, je réitère la position que j'ai exprimée au Sénat : j'y vois une tentative de récupération politique, qui fait son beurre sur la crise de l'énergie.
Le TRVE est hors sujet dans une proposition de loi portant sur EDF. Son extension ne résoudrait aucunement les difficultés des entreprises face à la crise de l'énergie. Elle impliquerait une mise en place longue et complexe, impliquant une négociation avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE) et la Commission européenne. Le TRVE n'est pas un bouclier tarifaire – vous le savez. Le Gouvernement a déjà déployé un dispositif d'aide massif pour faire face au coût de l'énergie, de 120 milliards sur les années 2021 à 2023. Nous le redisons : l'extension pure et simple du TRVE dans ce texte n'est pas conforme à l'article 45 de la Constitution ; elle est surtout contre-productive, extrêmement coûteuse et risquée.
Comme je l'ai déjà indiqué, nous sommes disposés à renvoyer aux futures discussions budgétaires la question de l'ouverture du TRVE aux TPE. Ce sera l'occasion d'évaluer les dispositifs actuels, d'analyser précisément l'impact financier d'une telle extension pour EDF, et d'avancer dans un esprit plus consensuel. Alors que le dispositif voté par l'Assemblée nationale il y a trois mois coûte 18 milliards, celui qui a été voté par le Sénat est bien plus raisonnable – même s'il coûte la bagatelle de 1 milliard d'euros. Si vous adoptez les quelques amendements que j'ai vu apparaître, notamment celui de M. le rapporteur Sébastien Jumel, la note sera décuplée : elle atteindra 11 milliards.
Cela ferait peser un risque budgétaire majeur sur les comptes de l'État, puisque le dispositif serait ouvert aux prix du marché ; en cas de nouvelle hausse de ces derniers, la facture serait éminemment salée.
Il a beaucoup été question des boulangeries ces derniers temps – y compris sur les bancs de Mme Le Pen, qui a écrit à tous les boulangers de France et de Navarre pour leur promettre des faillites en cascade et la fin des haricots. Depuis, les chiffres sont parus : nous avons ouvert à peu près autant de boulangeries qu'il s'en est fermé en France en 2022 – nous en avons même ouvert davantage.
Je le répète : nous avons ouvert un peu plus de boulangeries en 2022 qu'il en a fermé.
En moyenne, six boulangeries ferment chaque jour en France – je le regrette – ; en contrepartie, il en ouvre sept par jour.
M. Charles Sitzenstuhl applaudit.
L'année dernière, nous avons ouvert un peu plus de boulangeries qu'il en a fermé.
Et vous savez quoi ? En mars 2023, les boulangeries ayant malheureusement mis la clé sous la porte sont au nombre de quatre-vingt-dix, c'est-à-dire moins qu'en mars 2022 ou qu'en mars 2021.
Nous sommes tous à l'écoute des boulangers, des TPE et des PME. Les dispositifs d'aide mis en place par ce gouvernement et voté par cette majorité ont très probablement permis de limiter les dégâts en 2023, malgré la hausse des prix.
Cela ne signifie nullement, bien sûr, que les boulangers ne subissent pas de réels surcoûts.
Où pensez-vous que je sois ? Pensez-vous que je passe ma vie à la tribune ?
Je me rends deux ou trois fois par semaine dans les territoires, monsieur le député : ne me donnez pas de leçons en la matière !
Nous avons accompagné et continuerons à accompagner les boulangers, les TPE et les PME, mais gardons-nous de créer des dispositifs qui, je le répète, sont anticonstitutionnels, juridiquement fragiles, requerront des mois de négociation et coûteront une fortune à l'État.
Sur ce, je serai ravi de poursuivre ces discussions lors de l'examen des articles.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
La parole est à M. Sébastien Jumel, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Je ne vais pas ouvrir à nouveau le débat sur la politique énergétique, car tel n'est pas l'enjeu de la proposition de loi, que nous voulons efficace, pragmatique et concrète – notez que nous aurions pu aller plus loin, si nous avions laissé parler notre cœur et notre raison. L'objectif du texte est triple.
Premièrement, il vise à tirer les enseignements de trente ans de libéralisation du secteur de l'énergie. Quand l'État stratège disparaît, l'État protecteur et régulateur s'affaiblit ; la situation que nous vivons confirme ce diagnostic.
Deuxièmement, il s'agit de tirer les enseignements de la commission d'enquête présidée par notre collègue Raphaël Schellenberger, qui est parvenue à d'excellentes conclusions : elle nous rappelle ainsi que l'énergie est « l'industrie de l'industrie », insiste sur l'importance de l'intégration d'EDF pour la construction d'un mix énergétique équilibré et intelligent, laissant à la fois une place au nucléaire et à la transition énergétique. Vous l'aurez compris, la proposition de loi est un texte anti-Hercule.
Elle est donc inutile !
Elle vous obligera à passer devant le Parlement si, d'aventure, vous aviez à nouveau la mauvaise idée de découper le groupe EDF pour le vendre à l'encan.
J'en viens au troisième objectif du texte. Peut-être les boulangers de votre circonscription se portent-ils bien, monsieur le ministre délégué ; dans la mienne, ils sont dans le pétrin.
Comme les artisans, les PME ou encore les TPE, les boulangers sont confrontés à l'explosion des prix de l'énergie, qui fragilise leur compétitivité et souvent leur existence. Cela justifie que nous les soutenions, non en ouvrant la boîte de Pandore de la dépense publique, mais en faisant preuve d'efficacité. Je vous renvoie à l'Arenh – accès régulé à l'électricité nucléaire historique –, instauré par une mauvaise loi, et à son coût pour les finances publiques et les finances d'EDF, et vous invite à y mettre fin, ainsi qu'à la corrélation du prix de l'électricité à celui du gaz.
Voilà les principes selon laquelle le texte a été conçu. Défendu en première lecture par mon collègue Philippe Brun, il a été repris par le groupe communiste à l'occasion de sa niche parlementaire. Il a vocation à réunir un arc politique large, dans une réinvention du Conseil national de la Résistance (CNR) – celui de Marcel Paul, qui considérait l'énergie comme un bien commun –, pour en puiser la sève afin de ramener définitivement EDF dans le giron public et de protéger ainsi ce bien commun.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
La parole est à M. Philippe Brun, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Nous y sommes. Grâce à une union nationale réinventée, nous avons réussi l'impossible et l'inédit. Cette proposition de loi adoptée en première lecture le 9 février par l'Assemblée nationale, puis le 6 avril par le Sénat, nous est revenue par la navette parlementaire en un temps record. Après qu'un rapporteur socialiste l'a présentée en première lecture à l'Assemblée nationale, puis un rapporteur du groupe Les Républicains en première lecture au Sénat, un rapporteur communiste la défend désormais en deuxième lecture devant notre assemblée. Au nom des députés socialistes, je tiens à remercier le groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES, dont les députés communistes se montrent fidèles à leur histoire et à l'engagement de Marcel Paul en inscrivant ce texte à l'ordre du jour de leur niche parlementaire.
Cette union nationale repose sur un double refus. D'une part, le refus du mécanisme si bien huilé de la dérégulation et de la libéralisation du marché de l'énergie, qui a prouvé toute son inefficacité. Je pense en particulier, monsieur le ministre délégué, au projet de démembrement d'EDF, qui est toujours à l'étude.
Dans le rapport spécial que j'ai remis, il y a quelques mois, à la commission des finances, j'ai pu en prouver l'actualité, ayant constaté l'existence d'un projet de cession de 30 % de nos actifs dans la transition énergétique dès la fin de l'offre publique d'achat (OPA), ou encore celle d'un projet d'ouverture au capital de RTE, le Réseau de transport d'électricité, qu'il est question de faire sortir du groupe EDF.
Je pense enfin, bien sûr, au projet de privatisation de Dalkia. Monsieur le ministre délégué, les députés réprouvent ce projet de démembrement et se battront jusqu'au bout pour l'empêcher.
Notre deuxième point d'accord consiste dans le rétablissement des tarifs réglementés de vente d'électricité, face au désordre néolibéral et au chaos du marché européen de l'énergie. Je souhaite rendre hommage aux artisans boulangers dans les territoires, en particulier à ceux qui sont venus nous observer : M. Frédéric Roy, boulanger à Nice et M. Pascal Wozniak, boulanger dans les Pyrénées-Atlantiques.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES. M. le rapporteur Sébastien Jumel applaudit également.
Ils représentent un collectif de 4 000 boulangers qui se sont mobilisés dans toute la France, auprès de la CGT, lors des manifestations contre la réforme des retraites, pour défendre notre service public de l'électricité.
Mêmes mouvements.
C'est la première fois en France que des petits artisans et des commerçants manifestent aux côtés des salariés pour défendre notre énergéticien national. C'est ce peuple nouveau, si longtemps divisé et désormais réuni, que nous avons aujourd'hui vocation à incarner et à défendre.
M. Charles Sitzenstuhl applaudit.
Monsieur le rapporteur général de la commission des finances, je comprends que mes propos vous posent un problème : les boulangers, comme l'ensemble des Français, vous regardent.
Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Ils ne toléreront pas que ce gouvernement continue à défendre la libéralisation du marché de l'électricité, restant insensible à la souffrance des artisans sur l'ensemble du territoire ! Dix boulangeries dans ma circonscription risquent de fermer en raison de votre politique absurde et sourde !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et LFI – NUPES. M. Benjamin Lucas applaudit également.
Chers collègues, en ce jeudi 4 mai, les députés diront à nouveau, sur l'ensemble des bancs, comme ils l'ont fait le 9 février, leur attachement au service public de l'énergie.
J'ai la conviction qu'en juin ou en juillet, le Sénat, pour la première fois, votera ce texte d'équilibre contre l'avis du Gouvernement de la République.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
« Depuis un an et demi, l'explosion des prix de l'électricité a provoqué une crise économique et sociale qui n'épargne personne. Confrontés à l'explosion de nos factures d'électricité, nous sommes des milliers d'entreprises à risquer la faillite, à être obligées de baisser notre production, d'augmenter les prix, de licencier, voire de délocaliser… rien que dans l'industrie, jusqu'à 117 000 emplois sont en danger en France. » Vous avez reconnu ces mots : ils sont ceux d'une tribune que des dizaines de dirigeants de TPE et de PME nous ont adressée, en notre qualité de parlementaires, dans Le JDD de cette semaine. Ils la concluent en évoquant le soulagement qu'ils ont ressenti lorsque le texte a été adopté en première lecture, ainsi que la déception qu'a engendrée la remise en question par le Sénat de l'élargissement de l'accès aux tarifs réglementés de vente d'électricité.
La détresse, mais aussi l'espoir, que dépeint cet appel des TPE et des PME, est une des raisons évidentes qui me pousse à soutenir le texte, comme elle y poussera, je l'espère, toute notre assemblée. Ils nous rappellent l'importance de traiter dans le cadre souverain du Parlement des questions ayant trait à des besoins humains fondamentaux, comme l'accès à l'énergie, un bien commun qu'il convient de ne pas laisser aux mains du marché.
Le passage de la proposition de loi qui concerne les tarifs réglementés a, en première lecture, suscité parmi nous un débat houleux relatif à la recevabilité financière de l'amendement devenu article 3 bis, dont je suis le garant au sein de cette assemblée. Je ne souhaite nullement raviver cette controverse ; j'espère que le temps et les autres avis éclairés rendus à ce sujet ont su apaiser les esprits, certifiant que nous pouvons bien sûr tenir sur ce point un débat politique, mais non juridique. Je pense ici aux analyses de M. le rapporteur Gérard Longuet
M. le ministre délégué chargé de l'industrie signifie son désaccord
et à celles de mon homologue du Sénat, M. le président Claude Raynal, qui ont tous deux pleinement confirmé mon interprétation quant à la recevabilité financière de l'amendement.
M. le rapporteur Philippe Brun et M. Benjamin Lucas applaudissent.
Si j'ai choisi d'évoquer d'abord ce point, ce n'est pas pour vous parler de recevabilité, mais parce que cet article illustre parfaitement à mes yeux tout le sens et l'intérêt du texte. En effet, cette proposition de loi a vocation à redonner du pouvoir au Parlement en tant que garant de l'intérêt général, et, par son intermédiaire, au peuple. Les crises que nous traversons montrent bien que nous avons plus que jamais besoin de souveraineté, non seulement en matière de production et d'acquisition de l'énergie, mais également en matière de gestion, de prix et de réglementation de l'énergie.
Ce besoin de souveraineté est d'autant plus pressant que la crise énergétique et économique se mêle à la crise écologique. Je rappelle que l'énergie est un des deux piliers majeurs de la bifurcation écologique – les transports constituant le second pilier –, et qu'elle doit être traitée comme tel. Cela implique de disposer des outils et du pouvoir nécessaires pour planifier sa production et ses usages, et pour garantir à nos concitoyens un accès juste à l'énergie. Pour cela, il faut commencer par protéger totalement EDF de tout risque de démembrement et de toute résurgence future du projet Hercule.
Les activités d'EDF doivent être définies clairement dans la loi, comme le proposent mes collègues Sébastien Jumel et Philippe Brun – que je remercie à nouveau –, et comprendre les énergies vertes d'avenir qui s'avèrent les plus lucratives. Le capital d'EDF doit non seulement être intégralement détenu par l'État, mais surtout devenir incessible, de sorte qu'il ne puisse être bradé au privé, même partiellement, par les méthodes habituelles de collectivisation des pertes et de privatisation des profits dont les néolibéraux se sont fait les spécialistes aux dépens de toute logique d'intérêt général.
L'idéal serait bien sûr de pousser cette logique jusqu'au bout – j'espère que ce sera l'étape suivante – en créant un pôle public de l'énergie, bâti sur une véritable renationalisation d'EDF et offrant une garantie de contrôle citoyen à tous les niveaux. À défaut de pouvoir aller jusque-là, je salue et soutiens pleinement cette proposition de loi visant à protéger EDF de tout projet de démembrement et à garantir un contrôle du Parlement sur cet enjeu fondamental. Elle nous aidera non seulement à gérer à court terme la crise que nous traversons, mais aussi à protéger l'avenir de la France et à réussir la bifurcation écologique.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES et sur les bancs des commissions.
Non, monsieur le ministre délégué : cela ne va pas, en France. Vous ne pouvez pas nous assurer que tout va bien, puisque de nouvelles boulangeries ouvrent tous les jours. Vous pourriez au moins reconnaître que, malgré tous vos efforts, vous êtes loin du compte.
Laissez-moi vous faire part d'une expérience. J'ai réuni l'ensemble des PME et TPE de ma circonscription confrontées à la crise énergétique, en prenant soin de convier également les représentants du préfet et de la direction générale des finances publiques (DGFIP), pour qu'ils leur expliquent les différents dispositifs instaurés par votre gouvernement et votés par votre majorité.
M. Erwan Balanant s'exclame.
J'ai également invité les représentants d'EDF et de TotalEnergies, afin de proposer une solution appropriée à chacune des entreprises présentes. Les artisans ont apporté leur facture d'électricité du mois de février, dont le montant, qui s'élevait l'année dernière à 2 000 ou 3 000 euros, atteint 15 000 à 20 000 euros.
Ce n'est pas vrai !
Si, c'est vrai, monsieur le ministre délégué ! Faut-il que j'apporte ces factures à la tribune pour que vous me croyiez ? C'est la réalité ! Lorsque le préfet leur a indiqué les dispositifs auxquels ils avaient droit, ils ont répondu qu'ils avaient déjà fait appel à ces aides.
C'était quand, votre réunion ?
Malgré tout cela, les factures atteignent des sommets. C'est simple : si vous pouvez prendre le ferme engagement que chacun paiera la même facture cette année que l'an dernier, vous contenterez tout le monde ! Mais vous ne le pouvez pas.
Ne faites pas croire que vous pourriez prendre en charge la totalité des surcoûts liés à l'énergie !
Votre bouclier énergétique est un bouclier en carton, une passoire ! En outre, c'est un millefeuille bureaucratique qui contraint les artisans et les commerçants à remplir des papiers pendant des heures, ne serait-ce que pour espérer avoir droit à quelques centaines d'euros d'aides. Bref, vous êtes très loin du compte.
Je souhaite remercier mes collègues Sébastien Jumel et Philippe Brun d'avoir mis ce texte à l'ordre du jour pour, au moins, garantir que notre entreprise publique ne sera pas démantelée.
Je regrette profondément les politiques menées au cours des vingt dernières années qui ont complètement démantelé notre outil industriel, qui ont abandonné notre souveraineté énergétique, de sorte que notre pays n'est plus capable de garantir des tarifs bas pour les entreprises, pour les ménages, pour les services publics, pour les communes. C'est le fruit de vingt ans de libéralisme et de cette concurrence libre et non faussée inscrite dans le traité de Maastricht dont la ratification a été votée en 1992.
Personne ne peut remettre en cause la cohérence des communistes et de leurs parlementaires qui, tout au long de leur histoire, depuis 1945 jusqu'à présent, ont défendu cette souveraineté énergétique. Ils ont construit une entreprise publique et ont créé le statut des énergéticiens. Nous sommes fiers de l'outil industriel bâti par ces travailleurs et ces travailleuses, qui permet normalement de garantir notre souveraineté énergétique.
Je le répète : la France a la capacité de garantir à tous, aussi bien aux entreprises qu'aux ménages, aux services publics et aux communes, l'électricité la moins chère et la plus décarbonée d'Europe. Nous avons tout cela entre nos mains, avec les centrales nucléaires et les barrages hydrauliques notamment. Y compris en période de pic de consommation, nous avons tous les moyens pour répondre aux besoins de notre pays.
Malheureusement, les tarifs de l'électricité sont fixés à la bourse européenne, celle des Pays-Bas, de sorte que nous n'avons même plus la possibilité de fixer nos propres tarifs. Oui, nous demandons à retrouver une entreprise publique,…
…un établissement public industriel et commercial (Epic) garantissant à EDF la maîtrise totale de la production de son électricité, de sa distribution et des tarifs. Nous demandons à sortir du marché européen de l'énergie. Nous demandons l'abrogation de la loi du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (loi Nome) et la fin de l'Arenh.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et SOC. M. Benjamin Lucas applaudit également.
Il faut mettre fin à ce système par lequel l'électricité nucléaire française est vendue à bas prix à des fournisseurs privés comme Total, qui la revendent ensuite trois fois ou dix fois plus cher à nos services publics et à nos entreprises. Cette situation est indécente. Il est temps de mettre fin à ce scandale d'État. Je suis heureux de la possibilité qui nous est offerte aujourd'hui de réparer en partie cette situation et de rétablir une entreprise unifiée qui ne sera pas démembrée. Je compte sur la mobilisation des députés sur tous les bancs de cette assemblée afin de garantir cette unité pour nos énergéticiens, mais aussi pour l'indépendance et la souveraineté énergétique de notre pays.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, SOC et Écolo – NUPES. M. François Ruffin applaudit également.
Construction européenne a souvent rimé avec libéralisation. C'est particulièrement vrai en ce qui concerne l'énergie. Sous l'influence des directives européennes, le marché national s'est ouvert à la concurrence, obligeant l'énergéticien EDF à ouvrir son capital en 2005.
La pandémie et la guerre en Ukraine ont révélé les limites de cette politique. L'hiver dernier, la France a dû se préparer à des coupures de courant. Ce risque a constitué un choc pour l'opinion publique d'un pays jusque-là exportateur d'électricité.
Certes, nos concitoyens n'ont finalement pas eu à subir les conséquences de pannes généralisées, mais la situation est loin d'être revenue à la normale : la pénurie d'électricité a conduit à l'explosion des factures énergétiques, entraînant des conséquences sur l'inflation et sur le budget des ménages
Face à cette situation inédite, ni l'Union européenne, ni l'État n'ont été à la hauteur. Non seulement les outils mis en place ont été coûteux pour nos finances publiques, mais ils ont aussi manqué d'efficacité.
Le bouclier tarifaire, par exemple, a limité la hausse pour les particuliers et pour une partie des petites entreprises. Mais combien ont été laissés de côté ? Je ne veux pas rouvrir le débat, mais chacun d'entre nous a entendu parler, dans sa circonscription, d'un boulanger ou d'un artisan qui a vu sa facture exploser et qui lutte pour ne pas mettre la clé sous la porte. C'est pourquoi mon groupe est favorable à la proposition sénatoriale de supprimer le seuil de 36 kilovoltampères qui écartait un certain nombre de PME du dispositif. Ce n'est que justice d'y mettre fin.
De même, nous considérons qu'il faudrait étendre le bouclier tarifaire à l'ensemble des collectivités territoriales. Elles sont nombreuses à fonctionner au ralenti pour limiter les conséquences des hausses des prix de l'énergie sur leur budget. Piscines, musées, gymnases voient leurs horaires d'ouverture rognés pour limiter la consommation énergétique.
Au-delà du bouclier tarifaire, c'est l'ensemble du fonctionnement du marché de l'électricité qu'il conviendrait de revoir. Faire de l'énergie un bien comme un autre a été une erreur. Cela n'a pas permis d'accroître la production, bien au contraire, mais cela a déstabilisé le marché français. Prenez l'Arenh, qui contraint EDF à vendre une partie de son électricité à des concurrents. Il a laminé les comptes du groupe et réduit sa capacité d'investissement sans que n'émergent vraiment de concurrents sérieux. Désormais EDF est considérée, selon les circonstances, comme un service public ou comme une entreprise en concurrence, et ce choix se fait toujours au détriment des intérêts du groupe.
Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires considère qu'il est temps de trancher le débat. C'était tout l'intérêt de la proposition de loi initiale.
Certains voyaient dans l'article décrétant la nationalisation du groupe un symbole. Pour nous, c'était un message fort, qui témoignait d'une inflexion de notre politique énergétique, d'une volonté de rendre à l'État les rênes de la production électrique du pays.
La réécriture sénatoriale n'a pas la même portée, puisqu'elle écarte cette dimension symbolique. Elle comporte néanmoins quelques dispositions dignes d'intérêt. Elle fixe dans la loi le principe d'une capitalisation à 100 % détenue par l'État. Cela permet de garantir l'intervention du Parlement en cas de projet de réouverture du capital du groupe. C'est une solution minimale mais nous la considérons néanmoins comme essentielle.
L'énumération des activités du groupe, réintroduite à l'Assemblée, constitue une garantie contre un éventuel démantèlement. On a beau nous répéter que le projet Hercule a été enterré, nous craignons que ce renoncement n'ait rien de définitif. Préciser dans la loi les activités d'EDF constitue une protection contre de futurs assauts. Aux détracteurs de cette énumération, je rappelle que cette liste n'est pas exclusive : elle n'empêche pas le groupe de développer d'autres activités. Elle fixe un plancher et non un plafond.
Avec la reprise de 100 % du capital d'EDF, l'État confortera sa mainmise sur le groupe. L'adoption de cette proposition de loi prémunira le groupe contre un démantèlement. Il restera cependant à relever des défis colossaux : le financement des investissements dans le parc nucléaire, les réformes indispensables du marché européen de l'énergie, ou encore la maîtrise des prix de l'énergie pour les ménages, les entreprises et les collectivités en sont quelques exemples éloquents.
Vous l'aurez compris, le groupe LIOT soutiendra cette proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT, ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC et GDR – NUPES.
L'opération de rachat d'EDF est un succès pour le Gouvernement. En effet, depuis mardi 2 mai, la cour d'appel de Paris en a validé la méthode et le prix.
Pourtant, les oppositions entendent faire voter une proposition de loi qui repose sur une alliance négative pour aboutir à ce qu'on appelle, dans notre jargon, un vote conforme au Sénat.
Nous saluons tout de même l'initiative de ce débat, car toute occasion de tracer le futur énergétique du pays et de travailler à la stabilité financière d'EDF est bienvenue. Cependant nous constatons qu'il ne sera pas question de l'avenir mais bien plutôt du passé. Du fait de la manière dont vous abordez ces questions, EDF passe même, en quelque sorte, au second plan. En effet, la grande affaire des oppositions est tactique : vous avez identifié EDF comme un objet pour constituer une alliance contre, peu importe vos désaccords.
En conséquence de votre absence de projet commun, le contenu de la proposition de loi après son examen par le Sénat est largement édulcoré, même s'il n'est pas inoffensif.
Au pire ou au mieux – on ne sait –, nous débattons d'un exercice sémantique : de « nationalisation » on est passé à l'estampillage « d'utilité publique ». À la place de l'incessibilité des actifs dont nous avions parlé et qui est désormais oubliée, on est passé à un objet social défini par la loi. Mais l'obsession du démantèlement est restée au faîte de cette proposition de loi, dans le titre. Il couronne un texte écrit dans un langage relevant des fins ultimes caractéristique du XXI
Pour l'essentiel en effet, la sagesse du Sénat a rendu votre texte « inerte », comme on le dit d'une barre de combustible. Pourtant, même si votre proposition de loi est méconnaissable, il faut néanmoins protéger les TPE et EDF contre elle.
Les boucliers tarifaires ont été un succès et les cours ont baissé, alors que vous proposez, avec l'extension du tarif réglementé, la désorganisation des contrats. C'est là le principal problème posé par l'article 3 bis . Vous voulez traiter les entreprises comme des particuliers, ce qu'elles ne souhaitent pas. Plus grave, vous voulez forcer à la résiliation des contrats de droit privé avec les opérateurs alors qu'ils ont été souscrits sur une base pluriannuelle. Cela va entraîner une hausse des primes sur ces contrats et, au final, une augmentation des tarifs pour tous les consommateurs, comme vous le savez. C'est bien pour cette raison que le Gouvernement avait recouru au bouclier, à l'accélérateur et, pour les boulangeries, aux guichets départementaux. Nous avons empêché que ces contrats, lorsqu'ils ont été conclus sur la base de tarifs trop élevés, au mois d'août 2022, remettent en cause la viabilité de notre tissu commercial. De grâce, n'inventez pas de nouveaux délais nocifs à nos entreprises.
Surtout, nous devons protéger EDF de cette proposition de loi. La commission des finances, du fait d'une singulière fusion temporaire des oppositions, a produit une vision statique de l'entreprise. Mais EDF ne veut pas de l'immobilisme.
Vous voulez unir ceux qui ne veulent pas du nucléaire et ceux qui ne veulent pas des énergies renouvelables. Vous alliez ceux qui affirment ouvertement leur volonté de faire de nouveau d'EDF un monopole, avec ceux qui, au Sénat, se souviennent, comme les consommateurs, que les prix de l'énergie, avant la crise, ont baissé quand on a ouvert le marché à de nouveaux producteurs et à de nouveaux distributeurs. Vous avez agrégé des éléments épars au fil du texte, ce qui aboutit à un curieux inventaire, incomplet et varié, des activités du groupe. Vous avez fait précéder cette liste de l'adverbe « notamment » et vous l'avez rebaptisée « objet social » d'EDF, comme si votre intention était de recréer un service de l'État alors que nous parlons du plus grand groupe d'énergie au monde, qui sera désormais possédé à 100 % par l'État. Comme l'a dit M. le ministre délégué, vous plongez dans l'incertitude le groupe EDF.
L'heure doit être au rassemblement pour l'énergéticien national, qui n'est jamais sorti du secteur public depuis 1946. Au sein de l'entreprise, personne ne songe à revenir en arrière ou à évoquer un âge d'or perdu. L'âge d'or du groupe EDF est devant lui, car il doit relever le défi de la décarbonation de l'ensemble de notre industrie et des transports à l'horizon 2050.
Hier, nous étions plusieurs parlementaires à nous rendre à la centrale à cycle combiné gaz de Blénod-lès-Pont-à-Mousson. Sur les rives de la Moselle, on construit des batteries uniques au monde pour permettre à EDF de suivre le rythme élevé d'équipement solaire et éolien du pays, qui constitue l'objectif que nous devons nous fixer.
Entre vous, vous n'êtes pas d'accord. Vous éviterez donc soigneusement de parler de vos stratégies concurrentes de démantèlement.
En outre, pour essayer – en vain – de cacher l'irrecevabilité financière de l'article 3 bis, vous avez refusé d'inscrire la compensation qui est due à EDF dans la loi – nous y reviendrons.
La directive européenne est pourtant claire sur ce point : l'État doit compenser les pertes pour EDF.
Contrairement à vous, nous protégerons les intérêts financiers d'EDF au cours de ce débat. Nous agirons dans l'intérêt des salariés et des fournisseurs d'énergie, afin d'assurer la stabilité d'un nouveau pacte d'avenir pour le groupe EDF.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Le 9 février dernier je me tenais déjà devant vous pour défendre la proposition de loi de notre collègue socialiste Philippe Brun. Sous la direction de notre présidente, Marine Le Pen,…
…le groupe Rassemblement national avait amendé de manière constructive cette proposition de loi pour la rendre plus ambitieuse en rétablissant sans ambiguïté le monopole d'EDF sur l'électricité française. Hélas les institutions européennes mettent de lourdes entraves au rétablissement d'un champion énergétique français, à cause de la pression constante de l'Allemagne.
En septembre 2021, le ministre des finances, Bruno Le Maire, reprenait enfin l'analyse historique de Marine Le Pen en critiquant le fonctionnement du marché européen de l'électricité, qu'il a qualifié d'« aberrant » et d'« obsolète ». Il a alors affirmé qu'il fallait « revoir de fond en comble son fonctionnement : les Français en paient la facture d'une manière incompréhensible pour eux et totalement inefficace d'un point de vue économique ». En commission des finances, en juillet 2022, alors que je le priais de mettre fin à ce dispositif injuste pour les Français, M. le ministre m'avait également indiqué qu'il se battait contre l'Arenh.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Lors de son audition du 28 mars au sujet du pacte de stabilité et de croissance, Bruno Le Maire a annoncé son objectif de réformer le marché européen de l'électricité, pour que le prix de l'électricité ne soit plus corrélé à celui de gaz et tende vers celui de l'électricité d'origine nucléaire. Cependant, la réforme ne s'appliquera qu'à compter du 1er janvier 2025. Alors, devant l'impuissance coupable du Gouvernement,…
Arrêtez avec ça !
…les Français sont-ils condamnés à revivre chaque année les faillites en cascade de boulangers, de bouchers, d'artisans ?
En refusant de prendre ses responsabilités et de sortir de l'Arenh, le Gouvernement sera-t-il contraint de dilapider l'argent public dans un onéreux bouclier tarifaire ?
Lors de la première lecture du texte, mon amendement tendant à permettre aux salariés de détenir 2 % du capital d'EDF a été adopté. Notre groupe a toujours favorisé l'actionnariat salarié, qui implique et récompense les forces vives des entreprises françaises, et le refus du Gouvernement d'instaurer cette mesure est d'autant plus incompréhensible que, dans le même temps, il affirme vouloir développer l'actionnariat salarial et invoque son projet de loi visant à transposer l'accord entre patronat et syndicats pour généraliser le partage aux salariés des bénéfices des entreprises. La commission des finances a décidé de renvoyer à un décret la définition de l'actionnariat salarial d'EDF, nous semble dévoyer le projet. Une telle modification nous semble dévoyer l'objectif et même aller à son encontre. Quant au Sénat, s'il a maintenu notre amendement, il s'agit probablement simplement d'un oubli de sa part :
M. le rapporteur Philippe Brun sourit
en effet, je suis étonné de voir revenir la proposition de loi vidée de son essence par le Sénat, où LR, et non Renaissance, est pourtant majoritaire.
Seul rescapé de la navette parlementaire : l'article 3 bis, qui prévoit l'extension du bouclier tarifaire pour les petites entreprises – même s'il est probable que ce maintien doit plus au calendrier électoral qu'à une volonté propre des sénateurs. En février, les députés Les Républicains avaient pourtant été à nos côtés pour défendre cette proposition de loi, dont ils ont d'ailleurs voté chaque article, du premier au dernier. Même si aucun des députés LR n'est présent aujourd'hui…
Quel sens du timing !
Sourires.
Je dois le dire : je préfère les députés LR à leurs collègues sénateurs ! Comme moi, les Français ne comprennent pas la trahison des sénateurs à votre égard. J'espère que vous avez pu leur faire entendre raison et que le texte sera adopté conforme au Sénat.
Car ce n'est pas un sujet anodin dont il est question : nous parlons de notre indépendance énergétique, celle que le Général de Gaulle a lancée pour rendre notre nation indépendante et souveraine.
Exclamations sur les bancs du groupe RE. – Protestations sur les bancs du groupe RN.
Je constate que, cette fois, les députés du groupe Renaissance n'ont pas encore quitté l'hémicycle : j'espère que cette fois-ci, vous resterez jusqu'au bout, chers collègues, et que vous ne ferez pas à l'anglaise, vous qui n'aimez la démocratie que lorsqu'elle vous arrange, c'est-à-dire uniquement quand elle va dans votre sens. Mais ce n'est pas cela la démocratie, car le débat démocratique ne peut passer par le boycott de nos institutions quand vous êtes en minorité. Et, quand vous ne fuyez pas les débats, vous les sabotez, comme vous l'avez fait, avec la complicité du Gouvernement, lors du débat sur la réintégration des soignants non-vaccinés.
Alors, de grâce, acceptez ce débat ; sans fuite, sans sabotage. Je sais, un débat sans 49.3, cela vous effraie,…
…mais n'ayez pas peur : la démocratie, c'est débattre, confronter des idées et des faits. Il semblerait que vous n'y soyez guère habitués, aussi je vous invite à rester parmi nous pour essayer.
La proposition de loi s'inscrit pleinement dans les valeurs défendues depuis des années par le Rassemblement national :…
…redonner à la France sa souveraineté énergétique, contrer l'inflation galopante par des prix de l'énergie maîtrisés et garantir à nos entreprises, nos industries, nos TPE et PME des tarifs compétitifs.
Ce texte me semble une étape essentielle pour industrialiser le pays, comme paraît le souhaiter la quasi-totalité de l'hémicycle : alors ne ratons pas cette occasion ! Au nom du bien commun, les députés du Rassemblement national soutiendront donc la proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Monsieur le ministre, je suis ravie de constater que depuis février, vous et certains députés du groupe Renaissance êtes toujours dans le déni : vous nous dites que tout va bien, que, globalement, la crise est très bien gérée. Et, lorsque nous vous répétons les témoignages que nous recevons en circonscription, lorsque nous vous annonçons le montant des factures que l'on nous montre – je peux les imprimer et vous les apporter, si vous voulez : 16 000 euros d'électricité en février pour une boulangerie de ma circonscription ! –, vous nous répondez qu'il y a autant de boulangeries qui ouvrent que de boulangeries qui ferment. Mais où ouvrent-elles, et où ferment-elles ? Vous posez-vous la question de ce qui se passe lorsqu'un commerce ferme dans des villes où il n'y a déjà plus rien, comme c'est le cas dans certaines communes de ma circonscription ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ces boulangeries n'ont pas encore fermé, elles ne sont pas encore dans les statistiques.
« D'accord », bon. Je vais parler au nom de Yassine, de Sophie, dont l'activité n'a plus que quelques mois à vivre …
Exclamations sur quelques bancs du groupe RE
Vous réagissez parce que j'ai cité des prénoms ? Mais on parle de la vie de vraies personnes ! Il y a dans les tribunes de vraies personnes, qui vous regardent !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. le rapporteur Philippe Brun applaudit aussi.
Je vais élever le débat : je ne vais pas vous parler simplement des boulangeries mais, plus largement, des PME. Puisque vous aimez les statistiques, je vais vous donner des chiffres – des vrais chiffres.
Allez-vous me laisser parler ?
Savez-vous quel est le pourcentage d'augmentation des faillites de PME en un an ? 43 % ! Dans l'agroalimentaire, on atteint même 86 % de faillites supplémentaires rien que ce mois-ci.
Aujourd'hui, pas moins de 117 000 emplois industriels sont menacés parce que vous n'agissez pas.
Mais bien sûr que si ! Ça suffit maintenant : je vous donne de vrais chiffres ; ils viennent du cabinet Altares.
L'inflation alimentaire, quant à elle, est due à la spéculation dans le secteur alimentaire, elle-même alimentée par la spéculation dans le domaine énergétique. Aujourd'hui, en France, un smicard sur deux saute des repas : telle est la réalité !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Alors que le prix de l'électricité n'a jamais été aussi haut, EDF, qui produit 80 % de l'électricité française, enregistre des pertes colossales. Pendant ce temps, Engie et TotalEnergies ont augmenté leurs bénéfices de 42 %. Trouvez-vous cela normal ? Ouvrez les yeux : vous défendez l'indéfendable ! Vous êtes de plus en plus isolés.
J'en veux pour preuve les cinq fédérations de PME de l'agroalimentaire, de l'emballage, de la mécanique, qui représentent plus de 600 000 emplois dans le pays, qui vous demandent d'adopter la proposition de loi et de permettre un retour au tarif réglementé de l'électricité pour les PME.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC.
Pour finir, je vais partager avec vous les messages de patrons de TPE que je reçois depuis des semaines.
« Bonjour madame, merci beaucoup de votre aide, vraiment, car c'est insupportable de travailler dans ces conditions, de ne pas être concentrés dans notre travail, de ne pas dormir la nuit à se poser la question de savoir à quelle sauce on va être mangé. Je ne sais pas si je dois licencier. J'évite de me prendre un salaire pour assurer. »
« Merci de nous aider pour le bouclier tarifaire : nous sommes une TPE, nous employons huit personnes. Si ça continue, on sera tous au chômage et nous aurons perdu le travail de toute une vie. Pas de facture pendant trois mois, et là, bam, 11 000 euros ! Impossible à payer. Tant d'années de travail pour tout perdre, ça fait mal. C'est très dur, on ne sait pas combien de temps on va tenir. »
« Bonjour. Merci de mettre la politique au service du peuple et non pas l'inverse. »
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je veux commencer par remercier Sébastien Jumel et le groupe GDR – NUPES d'avoir repris cette proposition de loi
M. Benjamin Lucas applaudit
que les parlementaires Les Républicains ont soutenue et votée, lui permettant d'être adoptée en première lecture tant, à l'Assemblée nationale qu'au Sénat.
Je tiens à réaffirmer devant la représentation nationale la force de notre attachement à cette grande entreprise nationale qu'est EDF.
En produisant et distribuant l'électricité partout dans le territoire, celle-ci assure deux missions hautement stratégiques. Collectivement, nous pouvons donc être fiers de cette grande construction de l'après-guerre, qui est une référence au niveau mondial, et qui, plus que jamais, doit redevenir le bras armé de la France au service de sa souveraineté énergétique.
Car à l'heure où les prix du gaz et de l'électricité s'envolent, et alors que nous risquons un black-out, la souveraineté énergétique n'a jamais été aussi cruciale. Hélas, elle est pourtant menacée par des décisions politiques prises en dépit du bon sens et au détriment de l'intérêt national, et qui ont conduit notre pays, jadis deuxième plus gros exportateur mondial – il faut le rappeler –, à devenir désormais importateur net d'électricité.
Nous payons donc chèrement les choix hasardeux, les erreurs stratégiques et les décisions coupables de l'actuel Président de la République et de son prédécesseur – je pense en particulier à l'abandon du projet Astrid ou encore à la fermeture de la centrale de Fessenheim.
Relancer notre nucléaire est donc une impérieuse nécessité. Depuis 2012, ce fleuron français que nous devons au génie visionnaire du gaullisme n'a cessé d'être saccagé, par pure idéologie ou pour servir des visées électoralistes. Et l'horizon pourrait s'assombrir encore, puisqu'EDF est aujourd'hui menacée d'un démembrement qui entraînerait des conséquences dramatiques.
En effet, fidèle à sa logique de banquier, Emmanuel Macron cherche de longue date à démanteler EDF pour en privatiser les activités les plus rentables – le secteur des énergies renouvelables –, tandis que les investissements dans le nucléaire continueraient d'être financés par l'argent public. Ce projet, dit « grand EDF », reviendrait donc à socialiser les pertes et à privatiser les profits du service public de l'énergie.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Fort heureusement, grâce à la mobilisation de tous ceux qui étaient hostiles à cette pure folie contraire à l'intérêt des Françaises et des Français, le projet Hercule a été abandonné.
MM. les rapporteurs applaudissent.
Mais ne nous berçons pas d'illusions : nous n'avons absolument pas confiance dans la politique industrielle du Gouvernement, qui n'a, quoi qu'il puisse dire, jamais réellement renoncé à son projet de démantèlement d'EDF.
Nous avons même tout à craindre que le Président de la République souhaite faire de l'État l'actionnaire unique d'EDF, grâce à une OPA, afin d'avoir les mains libres pour procéder à ce démantèlement qui viendrait casser le fleuron national créé en 1946 par le général de Gaulle.
C'est la raison pour laquelle nous devons tous voter cette proposition de loi, dont l'objectif est la défense d'EDF comme groupe public unifié. À ce titre, nous ne pouvons que nous satisfaire du choix du Sénat d'inscrire dans le texte l'objectif d'une détention d'EDF à 100 % par l'État, puisque cela imposera au Gouvernement de saisir le Parlement de toute nouvelle évolution de la participation publique au capital de la société. Cette rédaction est donc un garde-fou pour éviter le spectre d'un démantèlement d'EDF par l'exécutif.
Par ailleurs, Les Républicains se félicitent que les sénateurs aient maintenu le bénéfice des tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVE) à l'ensemble des très petites entreprises, sans considération de puissance de compteur électrique. Même si elle arrivera hélas bien tard, la suppression de ce verrou que constitue le seuil absurde de 36 kilovoltampères reste indispensable et vitale, en particulier pour nos boulangers – je salue ceux qui sont présents aujourd'hui – et qui sont très souvent étranglés par la flambée des prix de l'énergie ; beaucoup d'entre eux ont d'ailleurs dû mettre la clé sous la porte. Nous défendrons donc des amendements tendant à élargir la suppression de ce seuil de 36 kilovoltampères aux collectivités locales et aux PME. Néanmoins, il s'agit là de rustines temporaires. En effet, la solution de fond ne passera que par une révision des tarifs de l'électricité – j'insiste sur ce point –, dont le mode de fixation est une aberration totale qui dessert lourdement notre pays.
Mais, sur ce point, comme sur tant d'autres, nous déplorons l'inaction et la passivité chroniques et totales de notre Gouvernement, qui n'a pas eu le courage de l'Espagne ou du Portugal qui sont sortis du marché européen de l'électricité.
En conclusion, pour protéger EDF de prédations éventuelles et pour préserver nos boulangers d'un risque réel de faillite, les députés Les Républicains voteront donc en faveur de cette proposition de loi, qu'ils ont d'ailleurs largement contribué à enrichir et à améliorer, et chercheront à maintenir l'équilibre trouvé avec la rédaction issue des travaux du Sénat, qui leur semble la plus sage.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – MM. les rapporteurs applaudissent également.
Alors que nous sommes appelés à adopter un texte au cheminement complexe – c'est le moins qu'on puisse dire –, j'aimerais tout d'abord revenir sur nos débats.
À la proposition initiale – une nationalisation très formelle d'EDF – s'est rapidement greffée une généralisation du TRVE. Or, si les sénateurs ont effectué un remarquable travail de rationalisation du texte – à l'instar d'autres collègues –, que je salue, cela n'a pas suffi à clarifier son véritable objet.
La refonte du secteur de l'énergie est un serpent de mer, un immense sujet que nous ne saurons régler sans disposer à tout le moins d'une étude d'impact ou de l'avis du Conseil d'État.
La situation actuelle est le résultat de plusieurs facteurs : la guerre en Ukraine, un marché européen fluctuant, le lien entre le prix du gaz et le prix de l'électricité, la corrosion sous contrainte qui affecte certains réacteurs – phénomène découvert en 2021 à la centrale de Civaux, dans ma circonscription, dont la deuxième tranche vient tout juste de redémarrer.
Nous sommes prêts à engager une réflexion d'ensemble – des négociations sont d'ailleurs en cours à l'échelle européenne –, mais elle ne passera pas par des amendements qui font miroiter des solutions certes faciles, mais qui n'existent pas.
Au cours de nos discussions, nous avons abordé le sujet des prix de l'énergie, celui de la souveraineté énergétique, les difficultés financières d'EDF, mais de manière partielle, débouchant sur des embryons de réponse – parce que le véhicule choisi n'est pas le bon. Ce débat peu transparent, alambiqué, à l'image de la coalition de circonstance qui l'a voulu, donnerait bien du mal au juriste qui, si cette proposition de loi était adoptée, tenterait de déterminer l'intention du législateur : c'est d'ailleurs là l'un des facteurs d'insécurité juridique associés au texte.
Chers collègues, notre responsabilité pour l'avenir est double : assurer la souveraineté énergétique et la transition vers une production décarbonée. Les députés Démocrates considèrent tout simplement que la proposition de loi ne nous met pas sur la bonne voie pour atteindre ces objectifs. L'extension des TRVE demande du temps : il faut que la CRE redéfinisse les tarifs, il faut renégocier tous les contrats, informer la Commission européenne. Cela ne peut être fait du jour au lendemain. Disons la vérité aux Français : quoique séduisante, cette mesure ne serait pas sécurisante, en particulier pour les entreprises. D'une part, celles nouvellement éligibles aux TRVE ne bénéficieraient pas automatiquement du bouclier énergétique, comme l'a suffisamment rappelé le président Coquerel. D'autre part, si l'extension aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), objet de certains amendements, venait à être retoquée par la Cour de justice de l'Union européenne, et sans parler des conséquences budgétaires que le ministre délégué a évoquées tout à l'heure, les sommes en cause seraient-elles remboursées par les entreprises ?
Par ailleurs, le fait de graver dans le marbre de la loi la liste des activités du groupe EDF ou sa détention exclusive par l'État vont à l'encontre de la nécessité qu'EDF reste flexible, agile, afin de s'adapter à un marché concurrentiel et de jouer pleinement son rôle au service de la transition énergétique dont nous avons un besoin urgent. En outre, nous, membres du groupe Démocrate, sommes convaincus que la souveraineté énergétique française ne se construira pas contre l'Europe, mais avec elle. Certes, le passage au marché intérieur de l'énergie ne s'est pas opéré sans douleur, mais seule l'option européenne permettra une meilleure intégration de nos productions et ressources respectives.
Au demeurant, nous ne nous bornons pas à critiquer sans proposer de solutions alternatives : nous avons élaboré et appliqué des mesures concernant précisément les deux principaux enjeux qu'aborde la proposition de loi. Le 10 février 2022, le Président de la République annonçait la mise à l'étude ou la construction de quatorze nouveaux EPR ; afin de permettre ces investissements, le Gouvernement a lancé le rachat de l'intégralité des parts d'EDF, prévoyant pour cela une somme de 9,7 milliards. La cour d'appel de Paris a rejeté mardi le recours intenté contre l'OPA et dont l'issue incertaine avait servi à justifier la première version de ce texte ; le retrait obligatoire sera mis en œuvre le 8 juin. Concernant le projet de loi relatif à l'accélération des procédures en matière nucléaire, la commission mixte paritaire se réunit en ce moment même. Bref, nous agissons !
Concernant l'explosion des coûts de l'énergie, nous avons fait le choix, avec le Gouvernement, d'un accompagnement immédiat au plus près des besoins. Nous avons été au rendez-vous : le bouclier tarifaire, l'amortisseur, le guichet d'aide au paiement des factures d'énergie, enfin le tarif maximal garanti de 280 euros le mégawattheure protègent les plus vulnérables, y compris les boulangers, que je salue également,…
…les bouchers-charcutiers et les exploitants agricoles. À lui seul, le plafonnement du prix du mégawattheure touche 600 000 PME, qui le payaient hier jusqu'à 1 500 euros ! Pour conclure, je dirais qu'il n'y a pas entre nous et le rapporteur Brun…
Sourires sur les bancs de la commission.
…mais plutôt une difficulté à nous écouter qui devient malheureusement récurrente dans cet hémicycle. Je le répète, nous sommes prêts à engager une réflexion d'ensemble, mais ce texte ne contribuera en rien à une souveraineté énergétique décarbonée. Les députés Démocrates voteront donc contre la proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Charles Sitzenstuhl applaudit également.
Je tiens à souligner une nouvelle fois l'excellent travail des rapporteurs, MM. Philippe Brun et Sébastien Jumel, qui présentent un texte nécessaire pour inscrire dans la loi la détention publique du groupe Électricité de France, rendant ainsi impossible son démantèlement et protégeant nos TPE et PME de la hausse des prix de l'énergie. Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je souhaite également remercier nos partenaires du groupe GDR d'avoir accepté de soutenir ce texte à nos côtés et de l'inscrire à l'ordre du jour de leur journée d'initiative. Dans le contexte actuel de crise écologique et sociale, adopter cette proposition de loi serait nous montrer à la hauteur du défi qu'il nous incombe de relever :…
…passer outre nos divergences en vue d'assurer l'indépendance énergétique de notre pays, de garantir à nos concitoyens, à nos entreprises, une électricité enfin abordable.
En tant que représentants de la nation, nous devons être capables de nous réunir autour d'un texte qui vise à protéger. D'une part, face au changement climatique et au besoin d'investissements importants dans la transition énergétique, nous devons absolument disposer d'un acteur fort, public, unifié. D'autre part, la hausse des prix de l'énergie et plus généralement l'inflation précarisent les usagers : il est primordial que l'État continue d'assumer son rôle de protecteur en maintenant, je le répète, les tarifs de l'électricité à un niveau accessible, y compris pour les TPE et PME,…
…lesquelles se trouvent en grande difficulté, créant des risques en matière d'emploi, mais aussi de report de ces surcoûts sur la facture du consommateur, ce qui alimente l'inflation et réduit encore le pouvoir d'achat des ménages.
L'Assemblée nationale peut et doit être au rendez-vous : il y va de l'indépendance énergétique de notre pays. Encore une fois, il serait digne de nous que la classe politique dépasse ses clivages afin d'assurer à l'État le contrôle exclusif d'EDF et aux particuliers, aux TPE, aux PME des tarifs abordables.
Protéger EDF et notre souveraineté énergétique, c'est protéger les Français, répondre à l'urgence de la situation. Je n'en dirai pas plus long, chers collègues : vous l'avez compris, nous voterons en faveur du texte et vous invitons à le soutenir massivement !
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Nous nous retrouvons afin d'examiner en deuxième lecture un texte dont l'objet, il faut le dire, a beaucoup changé : de proposition de loi visant à la nationalisation du groupe Électricité de France, il est devenu au cours de sa première lecture à l'Assemblée une proposition de loi visant à protéger le groupe Électricité de France d'un démembrement. Son contenu même a été substantiellement modifié : la nationalisation n'y occupe plus qu'une place marginale, la protection face au démembrement n'y est plus que cosmétique, le changement majeur résidant dans l'introduction de dispositions qui visent à étendre à divers consommateurs finals le bénéfice des TRVE.
Concernant l'objet initial du texte, les modifications opérées par le Sénat correspondent en fait aux réserves que nous avions exprimées lors de la première lecture. Recourir à la loi en vue de nationaliser EDF ne relevait que de l'effet d'annonce, puisqu'une OPA annoncée par la Première ministre, l'été dernier, lors de sa déclaration de politique générale, était sur le point d'aboutir. La cour d'appel de Paris a confirmé il y a quelques jours la validité de cette offre au regard des dispositions législatives et réglementaires applicables. L'État détient d'ores et déjà plus de 95 % du capital d'EDF : l'opération touchera bientôt à sa fin.
L'analyse du Sénat a également rejoint la nôtre au sujet de l'incessibilité de ce capital. Le fait que le législateur détermine les activités exercées par EDF n'apporterait que rigidité de gestion et instabilité juridique, et nous regrettons que la commission des finances de l'Assemblée soit revenue à une énumération, quand bien même la rédaction de celle-ci serait modifiée. En tout état de cause, je tiens à rappeler que l'article L. 111-67 du code de l'énergie permet déjà un contrôle étroit du Parlement sur EDF,…
…puisqu'il dispose que la participation de l'État y est supérieure à 70 % ; en outre, la nomination du PDG d'EDF est soumise au vote des commissions des affaires économiques de l'Assemblée nationale et du Sénat, sans compter le fait que la politique énergétique de la nation doit être validée par le pouvoir législatif.
Enfin, la question des TRVE, sans doute celle qui nous intéresse le plus aujourd'hui, appelle une réponse modérée, tant l'enjeu est important. Le problème concerne à la fois la forme et le fond. En ce qui concerne la forme, il est évident que les dispositions en cause n'ont pas grand-chose à faire dans une proposition de loi visant à la nationalisation d'EDF ; leur intégration au texte par voie d'amendement, sans étude d'impact, ne constitue pas une panacée. Le texte adopté par l'Assemblée en première lecture risquait fortement l'inconstitutionnalité, l'inconventionnalité, et ne précisait pas les modalités du financement – 18 milliards d'euros – du dispositif.
Les sénateurs ont restreint celui-ci aux TPE, quelle que soit la puissance de leur compteur électrique : nous saluons cette rédaction, plus responsable financièrement et concentrée sur les destinataires qui ont le plus besoin d'une telle mesure. Cependant, les obstacles pratiques subsistants suffiraient à la priver de toute efficacité. Tout d'abord, l'article 3 bis a trait aux tarifs réglementés, mais non au bouclier tarifaire, si bien que le TRVE proposé aux TPE serait probablement plus élevé…
…que le prix – 280 euros par mégawattheure – que les fournisseurs se sont engagés à ne pas dépasser en 2023. Ensuite, l'instauration d'un tarif réglementé prendrait plusieurs mois et ne remédierait donc pas au problème qui se pose actuellement. Enfin, je le répète, le financement n'est pas un sujet mineur, notamment s'agissant des effets d'un tel dispositif sur EDF.
Les évolutions de notre modèle énergétique depuis plusieurs décennies doivent nous inciter à l'humilité. Comme vous, nous estimons qu'il faut une réforme complète du marché européen de l'électricité, une réforme qui améliore la compétitivité de nos entreprises et protège nos concitoyens. En revanche, ce texte n'est pas le véhicule qui convient à une mesure concernant les TRVE ; nous pensons sincèrement que son adoption ne susciterait que de fausses joies…
…chez les boulangers, bouchers et autres artisans en difficulté. La poursuite des négociations autour du marché européen devrait permettre d'aborder tous ces sujets sans tabou.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Le groupe GDR – NUPES a choisi de reprendre une proposition de loi transpartisane que Philippe Brun avait défendue lors de sa première lecture, à l'occasion de la niche du groupe Socialistes et apparentés, et qui avait alors fait l'objet d'un large consensus. Ce choix témoigne à nouveau de l'importance du sujet, de la place qu'occupe le groupe Électricité de France, surtout après l'échec du projet Hercule, qui visait à faciliter son démantèlement et la vente de ses composantes. Il faut éviter à tout prix qu'un nouveau projet en ce sens – « Hercule 2.0 », dirait le rapporteur Sébastien Jumel – aboutisse. C'est là l'un des objectifs de la proposition de loi : protéger EDF d'un démembrement.
Lors de l'examen du texte adopté par le Sénat en commission des finances, notre collègue Jumel a rappelé à juste titre « que le nouveau président-directeur général d'EDF et le ministre de l'économie eux-mêmes considèrent que, pour se doter d'un mix énergétique équilibré et intelligent, il faut une entreprise intégrée »…
…« et que le projet Hercule est donc malvenu et inopérant – bref, caduc ». On peut donc conclure, encore une fois, à l'existence sur ces bancs d'un large consensus. Les Écologistes soutiennent cette mesure de protection, qui empêchera tout démembrement du groupe EDF au profit d'intérêts privés.
L'incessibilité des actions constitue un autre élément majeur du texte. La décision de l'État de récupérer l'intégralité du capital d'EDF est en cours d'exécution. Nous soutenons pour notre part le maintien, à l'issue de l'OPA simplifiée, d'une participation du personnel à la gestion de l'entreprise sous forme d'actionnariat salarié : tout comme l'existence même d'EDF, il s'agit là d'un bon acquis de longue date, qu'il convient de préserver. Les 100 000 actionnaires salariés y sont également favorables ; ils ne souhaitent pas sortir du capital, même s'ils y sont entrés pour un prix bien supérieur à celui correspondant à la valorisation actuelle, ce qui témoigne de leur fidélité à ce fleuron national. M'entendez-vous, monsieur le ministre délégué ?
Nous voterons en faveur de l'amendement déposé en ce sens par le rapporteur Philippe Brun, d'autant qu'une telle mesure contribuerait à ce que soit atteint l'objectif inscrit dans la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, qui prévoit que d'ici à 2030, 10 % du capital des entreprises françaises soit détenu par leurs salariés. La facilitation de l'actionnariat salarié, auquel les Écologistes sont extrêmement attachés et favorables, constitue également l'un des quatre piliers de l'accord national interprofessionnel du 10 février 2023.
Il est un outil très structurant et bénéfique dans la relation entre les actionnaires, la direction et les salariés de l'entreprise, particulièrement adapté pour fidéliser le personnel et propice à un dialogue social de grande qualité. Certaines entreprises pourraient vous en parler – par exemple Latécoère, à Toulouse, que je connais bien.
S'agissant de l'accès aux tarifs réglementés de vente, nous soutenons son élargissement aux plus fragilisés : les artisans, les PME et les collectivités locales, lesquelles s'expriment avec force sur ce sujet. Depuis un an et demi, l'envolée spectaculaire des prix de l'électricité a provoqué une crise économique et sociale majeure, entraînant faillites d'entreprises, baisses de productions industrielles, menaces sur les emplois, risques de délocalisations, coupes budgétaires pour les collectivités locales – notamment celles dont l'ensemble des établissements sont en régie directe – freins aux investissements et alimentation de l'inflation.
Cela étant dit, nous devons impérativement nous interroger sur ce qu'est un mix énergétique équilibré et intelligent au XXI
Le modèle énergétique actuel est basé essentiellement sur les combustibles fossiles et sur le nucléaire. Il ne survit que sous perfusion d'aides et de subventions. Nous avons d'ailleurs proposé des amendements visant à informer les bénéficiaires du tarif réglementé des coûts économiques et écologiques réels de l'énergie nucléaire dont ils disposent, et à assurer la clarté de la comptabilité et du financement de chaque filière énergétique au sein du groupe EDF. La séparation des différents bilans comptables par filière énergétique facilitera la distinction du soutien public à chacune d'entre elles.
L'électricité est un bien commun. En ce sens, le développement d'un mix énergétique vert et durable doit prendre en compte l'apport des communautés d'énergie, que les Écologistes ont réussi à faire entrer dans le droit européen.
Leur contribution constituera un complément crédible au service de notre souveraineté énergétique, grâce à une réappropriation de la production d'énergie par les collectivités locales et les coopératives d'habitants.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Le texte qui nous revient aujourd'hui est bien différent de celui que nous avions voté le 9 février dernier en première lecture, presque à l'unanimité, après que les députés de la majorité avaient quitté, vexés, notre assemblée. Passé sous les fourches caudines des sénateurs, le texte a malheureusement été vidé de sa substance toute symbolique. Alors que la première version prévoyait de nationaliser Électricité de France, le Sénat a préféré supprimer toute mention de cet objectif. Du texte initial, il ne reste rien ou presque. À défaut de nationalisation, il faudra nous contenter d'une étatisation et d'un objectif de détention de 100 % du capital d'EDF par l'État.
C'est déjà pas mal, non ?
Cela revient peu ou prou à ce qui était prévu par l'offre publique d'achat annoncée par la Première ministre lors de son discours de politique générale et engagée depuis. Hasard du calendrier, la cour d'appel de Paris a tranché mardi dernier en faveur du Gouvernement, contre les petits actionnaires qui contestaient le montant de rachat de leurs actions.
Ce texte n'est donc plus que l'ombre de lui-même, et la crainte de voir ressurgir un nouveau projet Hercule et son absurde saucissonnage semble avoir abandonné les sénateurs. C'était elle, pourtant, qui avait motivé le présent texte transpartisan. Que l'on se rassure : trop heureuse de voir s'éloigner une nationalisation dont elle ne veut pas, la majorité nous répète à l'envi que le projet Hercule est définitivement mort et enterré – jusqu'au prochain changement de cap, probablement…
Malgré tous ces abandons, le texte n'est pourtant pas inutile. Les sénateurs ont conservé le bénéfice des tarifs réglementés de vente d'électricité pour l'ensemble des très petites entreprises et des petites communes. Il faudra maintenant les mettre en place et, pourquoi pas, les étendre à nos PME, comme prévu initialement. N'en déplaise au rapporteur général, nous pouvons nous en réjouir pour les artisans et les petits commerçants de nos circonscriptions.
Le texte prend également en compte – il était temps ! – la situation de Mayotte, dont l'actualité nous rappelle chaque jour brutalement à quel point les politiques – ou l'absence de politiques – mises en œuvre sur place ont été des échecs.
La commission d'enquête menée par notre collègue Raphaël Schellenberger a montré parfois jusqu'à l'absurde combien les trente dernières années ont été un fiasco en termes de souveraineté énergétique. La guerre en Ukraine s'est chargée de nous le rappeler cruellement. Dommage pour les Français, qui paient chaque jour au prix fort les compromissions idéologiques d'élus souvent peu clairvoyants ou, pire, peu courageux.
Nous aurons beau accélérer les procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires, il faut voir à long terme. Quand aurons-nous enfin un plan ambitieux en matière de souveraineté énergétique ? Les annonces du Président de la République ne suffisent pas. Elles ne suffisent plus, parce que l'électricité n'est pas un bien comme un autre. Une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec le rapporteur Jumel lorsqu'il dit que l'électricité est « un bien commun, une exception ».
Ce bien, nous l'avons bradé. Entre la loi Nome et le mécanisme chaque jour plus absurde de l'Arenh, nous sommes devenus les idiots utiles de l'énergie européenne. Non seulement il n'a pas préservé notre économie et nos industries, mais il a encore dégradé la qualité de la fourniture d'électricité. Peut-être serait-il temps d'avoir le courage de tenir tête à l'Allemagne, qui vient de débrancher ses derniers réacteurs et qui rêve de nous voir faire la même chose. Il y va de la compétitivité et de l'indépendance de la France, qui nous fait cruellement défaut depuis vingt ans au nom du sacro-saint couple franco-allemand. En témoigne encore le blocage allemand sur l'hydrogène bas-carbone, produit à partir du nucléaire. Il est un temps pour la négociation, le compromis, et un temps pour l'action.
S'il est encore loin d'être suffisant, le texte dont nous débattons aujourd'hui aura eu un mérite : à défaut d'une nationalisation d'EDF qui, il faut bien le reconnaître, n'aurait pas résolu tous nos problèmes, il était urgent de voir la représentation nationale se saisir à nouveau des enjeux de souveraineté énergétique face à un Gouvernement qui fait trop souvent cavalier seul.
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre délégué.
Beaucoup a été dit et je vais prendre un peu de temps pour répondre, si vous m'y autorisez,…
…à un certain nombre d'interpellations et, malheureusement, de contrevérités.
Je voudrais d'abord me féliciter, au nom du Gouvernement, de l'issue positive de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif au nucléaire ; le Gouvernement en soutient les conclusions et espère que le Sénat et l'Assemblée pourront voter le texte très rapidement. Cela montre que, sur le sujet du nucléaire, nous pouvons nous mettre d'accord – en tout cas je l'espère –, même quand la majorité est présente dans l'hémicycle.
Monsieur Jumel, vous avez beaucoup parlé de l'Arenh, en le présentant comme un scandale et un produit dérivé du marché européen de l'énergie.
La réalité, c'est que l'Arenh – A.R.E.N.H., monsieur Lecoq – est un bouclier énergétique avant l'heure inventé par la France, qui a eu beaucoup de mal à convaincre l'Europe sur ce sujet. Des boulangers sont présents en tribune ; grâce à l'Arenh, une part de 40 % à 50 % de leur facture électrique est limitée à 42 euros le mégawattheure en permanence, et non pas seulement lorsque le prix augmente. C'est…
…un système absolument unique. Il est vrai – sans doute est-ce la raison pour laquelle vous avez été alerté, monsieur Jumel – que lorsque la production d'EDF baisse, comme à l'automne dernier, ce système protecteur pour les consommateurs, les boulangers, les salariés et les industriels qui me sont chers risque de fragiliser les comptes de notre opérateur national, comme ce fut le cas l'an dernier. Mais aujourd'hui, heureusement que nous avons l'Arenh ! Heureusement que les boulangers et les industriels l'ont !
Monsieur Brun, il ne vous a fallu qu'une minute trente pour mentionner la réforme des retraites – dont je ne sais pas ce qu'elle a à voir avec le Schmilblick –, mais vous avez aussi beaucoup insisté sur la protection des consommateurs et des entreprises qui procurerait le vote de l'article 3 bis tel qu'amendé par vos soins. Mais pourquoi n'avez-vous pas voté les dispositifs d'aide présentés et votés par la majorité ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Mme Nadia Hai s'exclame.
Ces dispositifs font qu'aujourd'hui…
Vous auriez bien aimé les voter ? Peut-on le noter au compte rendu s'il vous plaît ? M. Brun aurait bien aimé voter le bouclier énergétique !
M. Brun déclare dans Ouest France qu'il l'a voté, mais il ne l'a pas fait !
120 milliards d'euros d'aides aux ménages et aux entreprises votés par notre majorité, monsieur Brun, ont permis de soutenir l'économie française. N'en déplaise à la litanie de propos misérabilistes que j'ai entendue depuis une heure, l'économie française ne va pas si mal ! Elle n'est certes pas en pleine forme, monsieur Roussel.
Elle n'est pas dans une situation merveilleuse, ce n'est pas le paradis, mais elle va beaucoup mieux que d'autres, monsieur Jumel ! J'ai entendu des discours qui laissent à penser que l'économie française serait en récession ; pourtant, elle croît !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe GDR – NUPES.
J'ai entendu des discours aujourd'hui qui laissent à penser qu'elle serait en hyperinflation ; or l'inflation y est la plus faible d'Europe. J'ai entendu des discours qui laissent à penser que le chômage serait au plus haut, alors qu'il est au plus bas !
Les gens sortent dans la rue par millions pour vous dire que ça ne va pas !
Reconnaissons ensemble que, grâce notamment aux mesures de soutien portant sur l'énergie, l'économie française ne va pas si mal, ne vous en déplaise.
Par ailleurs, monsieur Brun, vous avez exprimé votre volonté – et vous le répétez lors de chaque examen de la présente proposition de loi – d'interdire les cessions d'actifs d'EDF.
Eh si ! Plus exactement, il faudrait à chaque cession d'actif demander l'autorisation du Parlement. Autrement dit, les ventes d'activités intervenues depuis un an et demi, qui ont permis à l'opérateur de restaurer sa solidité financière et de quitter des activités annexes – comme la vente de Dalkia Wastenergy à Paprec, acteur français de grande qualité –, seraient désormais impossibles, à moins de voter une nouvelle proposition de loi, nécessitant les délais habituels. Ne vous en déplaise, lorsque nous nationalisons un opérateur – et nous l'avons fait –, nous ne souhaitons pas gérer l'entreprise à sa place.
Ce n'est ni à M. Brun, ni à M. Jumel ni à M. Lescure de gérer EDF aujourd'hui : c'est à Luc Rémont. Nous vous l'avons proposé comme PDG, vous l'avez choisi, et je suis certain qu'il remplira très bien sa mission
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Si vous avez voté contre, vous le regretterez sans doute : c'est quelqu'un de très bien.
Monsieur Coquerel, vous faites partie des mousquetaires du projet Hercule qui, sur tous les bancs, pensent…
Pardon : vous pensez, monsieur le président de la commission des finances, que bien que mort et enterré, le projet Hercule renaîtra de ses cendres. Non ! Hercule, nous l'avons enterré ! C'est terminé.
Phénix ou encore Highlander ! Mais Hercule, lui, est mort dans le mythe grec comme ici ! Il ne renaîtra pas de ses cendres.
J'entends votre argument au sujet de l'article 40. En tant qu'ancien président de la commission des affaires économiques, j'ai eu à déterminer, au cours de mon unique mandat, si un certain nombre d'amendements respectaient ou non l'article 45. Or ce que je vous reproche, je dois le reconnaître, c'est que l'amendement voté en commission des finances ayant conduit à l'adoption de l'article 3 bis dans sa rédaction actuelle n'a rien à voir avec le Schmilblick : il aurait pu – voire, aurait dû – être jugé irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution. Le député Alfandari l'a très bien expliqué.
Exactement. Il est là pour ça et, même s'il est plutôt occupé ces temps-ci, il prend des décisions raisonnables.
Monsieur le député Roussel, je regrette votre discours extrêmement misérabiliste. Il ne reflète pas la détermination et le volontarisme de l'industrie française, que je constate chaque semaine, devant les défis que nous affrontons ensemble. J'en ai marre du défaitisme ! Aujourd'hui, je vois des salariés, des dirigeants, des actionnaires de l'industrie française qui sont prêts à faire face à la crise, prêts à se serrer les coudes !
M. Frédéric Descrozaille applaudit.
Ils sont prêts à décarboner l'industrie, à créer de l'emploi et des revenus !
Mais oui, vous êtes pour l'industrie depuis des décennies, monsieur Roussel ! Alors, qu'est-ce qu'il vous prend aujourd'hui ? Pourquoi ne reconnaissez-vous pas que l'industrie française va bien…
…en partie grâce à l'Arenh et à une électricité moins chère qu'ailleurs. Qu'ils soient petits, moyens ou grands, les industriels que je rencontre croient à l'Arenh et nous demandent même de le préserver.
Brouhaha sur divers bancs.
Monsieur le ministre, s'il vous plaît, il vous est demandé de vous rapprocher du micro. Mes collègues n'arrivent pas à bien vous entendre, raison pour laquelle il règne un léger brouhaha.
Pardon, je vais parler plus fort ! Voulez-vous que je recommence mon intervention ?
« Non ! » sur plusieurs bancs des groupes SOC et GDR – NUPES.
Monsieur le député Roussel, vous avez fait votre travail de député en réunissant des chefs d'entreprise dans votre circonscription, le préfet et les responsables de l'État. Vous nous parlez d'une facture qui serait passée de 1 000 ou 2 000 euros à 11 000 ou 12 000.
J'espère que vous avez fait votre boulot jusqu'au bout, car ma collègue Olivia Grégoire vous l'a demandé plusieurs fois en vous répondant lors des questions au Gouvernement : envoyez-nous ces factures ! Nous avons échangé avec 25 000 entreprises.
Nous avons, vous le savez, plafonné les factures à 280 euros le mégawatt pour toutes les TPE de France. Si un boulanger paie dix fois plus en 2023 qu'en 2022, c'est qu'il payait 28 euros le mégawatt l'année dernière. Trouvez-le moi car c'est un sacré négociateur : je le féliciterai pour 2022 et je l'aiderai pour 2023 !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Monsieur Castellani, vous avez indiqué souhaiter qu'EDF continue à développer ses activités, y compris en les diversifiant. Si la proposition de loi est adoptée, ce sera impossible, car pour financer de nouvelles activités, il faut en vendre. Je vous engage donc, si vous croyez à ce que vous dites, à voter contre ce texte.
Monsieur Lacresse, merci d'avoir concentré votre discours sur l'objet de la proposition de loi, EDF, et de l'avoir basé sur des faits et non sur des fantasmes – d'où son caractère convaincant.
Monsieur Sabatou, merci d'avoir mis dix secondes avant de mentionner Marine Le Pen.
Sourires et applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Sur l'énergie, elle a dit, depuis quinze ans, tout et son contraire.
Elle a été pour le nucléaire et contre le nucléaire, pour la nationalisation et contre la nationalisation.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Ce ne sont pas les derniers de la classe qui vont nous donner des leçons !
Elle a tenté sans succès de mettre le feu aux campagnes en prédisant à nos boulangers la fin du monde, alors que ceux-ci, grâce aux mesures de la majorité, résistent à cette crise difficile – et tant mieux !
Monsieur Sabatou, vous nous avez donné une leçon de démocratie. Je vous rappelle pourtant que depuis le début de la législature, vingt-sept lois ont été adoptées par cet hémicycle…
…dont trois grâce au 49.3 – merci de m'avoir posé cette question. C'est le signe d'une démocratie qui fonctionne.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Madame Dufour, tout va mal, c'est la fin du monde, les faillites explosent… Oui, entre mars 2022 et mars 2023, on compte en France 45 000 défaillances d'entreprises. C'est trop, vous l'avez dit, et c'est plus qu'en 2021 ; certes, mais en 2021, nous étions au plus bas historique, au cœur du « quoi qu'il en coûte ». Nous avons tenu toutes les entreprises à bout de bras, grâce à des mesures adoptées sur ces bancs – vous n'y étiez pas, mais vos collègues y étaient –, que les vôtres ont régulièrement, systématiquement refusé de voter.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Puisque vous connaissez les chiffres du cabinet Altares, je vous engage à aller vérifier : entre 2000 et 2019, en moyenne, 60 000 défaillances d'entreprise ont eu lieu par an ; on est aujourd'hui à 45 000 ; au plus bas, on était à 30 000. Le « quoi qu'il en coûte » est terminé : quelques entreprises qu'on a tenues à bout de bras, alors qu'elles n'avaient pas vocation à survivre, sont aujourd'hui en train de défaillir, et je le regrette. Mais, depuis six ans, on a créé en France plus d'entreprises que jamais auparavant. C'est à cette majorité qu'on le doit. J'espère que vous saurez le reconnaître puisque vous suivez les chiffres de près.
Monsieur Hetzel, vous l'avez dit : cet opérateur est crucial et la stratégie doit être choisie avec soin. Vous avez également affirmé que les prix du gaz et de l'électricité s'envolent. Mais vous reconnaîtrez malgré tout, j'espère, que – grâce, entre autres, aux efforts des Françaises et des Français, qui ont fait preuve d'une sobriété exemplaire – les prix du gaz et de l'électricité sont au contraire en train de baisser.
Vous avez évoqué le risque de blackout. J'espère que vous reconnaîtrez qu'il n'y en a pas eu – là encore grâce aux efforts des Françaises et des Français, y compris des entreprises, qui ont fait preuve de sobriété.
M. Jumel parlait tout à l'heure de ma circonscription ; je n'y reviens plus, mais je la suis de loin. C'est en Amérique du Nord qu'il y a des blackouts, car le marché n'y est pas intégré, chaque État ayant le sien. Celles et ceux qui veulent sortir du marché commun de l'électricité devraient y réfléchir à deux fois !
Bien sûr, il faut le réformer ; c'est ce que nous faisons. Mais attention aux mauvaises solutions !
Vous faites partie des mousquetaires du démembrement qui, sur tous les bancs, nous prêtent de coupables intentions cachées. Non, nous ne souhaitons pas démembrer EDF ; Hercule est mort et enterré.
Je l'ai dit à la gauche, je le dis à la droite, comme je l'ai dit aux députés du centre – qui, eux, me croient.
Monsieur Lecamp, merci d'avoir montré, de manière encore plus convaincante que moi-même, l'insécurité juridique qu'induirait pour l'opérateur national l'adoption de la proposition de loi. Les articles 2, 3 et 3 bis induiraient des coûts, des incertitudes, des aléas que nous ne souhaitons pas couvrir. Merci également d'avoir rappelé que, pour le marché de l'énergie, l'Europe fait partie de la solution et non du problème.
Monsieur Bouloux, vous souhaitez le plein contrôle de l'État ; cela tombe bien puisque nous l'avons. Ne votez donc pas le texte !
Exclamations sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Monsieur Alfandari, merci d'avoir rappelé…
Je réponds à M. Alfandari, monsieur Jumel, comme je vous ai répondu à vous !
Exclamations sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Je réponds de façon systématique, ne vous en déplaise. Madame Arrighi…
Monsieur le président Chassaigne, laissez le ministre délégué répondre.
Monsieur le président Chassaigne, j'ai énormément de respect pour vous. Je réponds, de manière – j'espère ! – simple et concise,…
…et peut-être même convaincante, à toutes les questions qui m'ont été adressées dans la discussion générale. Il me reste deux réponses à faire.
Madame Arrighi, vous avez évoqué l'actionnariat salarié, mentionnant un amendement qui sera discuté tout à l'heure, et qui nous obligerait à l'ouvrir dès aujourd'hui, alors que nous sommes en train de racheter ces titres. Cela n'aurait aucun sens. La disposition introduite par amendement au Sénat, que je vous engage à conserver, permettrait d'ouvrir le capital de l'entreprise à l'actionnariat salarié une fois que celle-ci en aura les moyens ; aujourd'hui, soyons clairs, ce n'est pas le cas. En attendant, l'entreprise doit faire appel à tous les outils de rémunération qui sont à sa disposition, et qu'elle utilise d'ailleurs – je ne rappelle pas le résultat des négociations annuelles obligatoires de cette année, mais il est assez favorable aux salariés.
Quant à votre remarque sur le nucléaire, j'espère que tout le monde a compris que la tarification que vous proposez ferait augmenter considérablement le prix de l'électricité pour les Françaises et les Français – je traduis vos propos.
Madame Ménard, nous rachetons 100 % du capital, dès aujourd'hui. J'engage les 3 % ou 4 % des actionnaires d'EDF qui ne l'ont pas encore fait à apporter leurs titres. Hercule n'est pas Achille ; celui-ci est mort et nous l'avons enterré.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Merci, monsieur le ministre délégué : tout à l'heure, vous avez dit entendre mon argument relatif à l'article 40. Après Claude Raynal, président de la commission des finances du Sénat, et du sénateur Gérard Longuet, vous acceptez donc les arguments que j'ai défendus quant à la recevabilité financière de ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
C'était important de le noter puisque j'ai cru comprendre que certains pourraient soumettre la question au Conseil constitutionnel.
En revanche, permettez-moi de vous expliquer pourquoi l'article 45 de la Constitution n'a pas été invoqué – y compris par les collègues de la majorité. Cet article, en effet, autorise des amendements ayant un lien, même indirect, avec le texte, et la tradition de la commission des finances, qui ne date pas de ma présidence, est d'adopter une interprétation souple, donc favorable à l'initiative parlementaire, de cette disposition en autorisant des amendements ayant un lien indirect avec le thème du texte.
Dernier exemple en date – mais il y en a beaucoup d'autres : en 2022, Éric Woerth lui-même a accepté trois amendements à la proposition de loi sur la nationalisation de sociétés concessionnaires d'autoroutes – je vous fais grâce de leur texte, mais je le tiens à votre disposition –, qui avaient trait non à la nationalisation des autoroutes, mais aux autoroutes elles-mêmes. Le Conseil constitutionnel non plus n'a rien trouvé à redire sur plusieurs amendements que le Sénat avait votés, notamment à la loi Egalim – loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous – et à la loi « climat et résilience » – loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Au départ, ces amendements avaient été jugés problématiques par la commission des affaires économiques de l'Assemblée, qui a, il est vrai, une tradition un peu plus sévère en la matière.
Plus rigoureuse !
Ils ont été introduits au Sénat et validés par le Conseil constitutionnel. Je pense donc, monsieur le ministre délégué, que si vous faites un recours, on va rigoler !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES. – M. Philippe Brun, rapporteur, applaudit également.
Rappel au règlement
Exclamations sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Je me fonde sur l'article 100 du règlement, relatif au bon déroulement de nos débats.
Monsieur le président Chassaigne, avec tout le respect que je vous dois, ce n'est pas correct d'agresser M. le ministre délégué simplement parce qu'il répond à vos questions et à vos interrogations.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Combien de fois nous avez-vous reproché de ne pas vous répondre ? Lorsqu'on le fait sagement, merci d'écouter !
De plus, je vous encourage à compter le nombre d'amendements que notre groupe a déposés sur les sept textes : moins de quarante !
Sourires.
Dès lors, comment peut-on nous accuser de faire de l'obstruction ? Au contraire, nous voulons absolument que le débat ait lieu.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Vous avez plusieurs fois affirmé en conférence des présidents que le nombre de textes qui pouvaient être examinés dans le cadre d'une niche ne devait pas être excessif.
Nous avons compris, monsieur Cazeneuve. Merci de terminer votre propos.
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur. – Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi sur lesquelles les deux assemblées ne sont pas parvenues à un texte identique.
Sur amendement n° 11 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Alexandre Sabatou, pour soutenir l'amendement.
Comme cela avait été souligné en commission des finances, une entreprise est considérée comme nationalisée quand elle est détenue à plus de 50 % par l'État, ce qui est déjà le cas d'EDF, avant même l'OPA du Gouvernement. Mais la nationalisation d'EDF est l'essence de cette proposition de loi – c'est d'ailleurs le premier nom qui lui avait été donné. L'amendement tend par conséquent à rétablir la rédaction de l'article 1er issue des travaux de l'Assemblée nationale en première lecture. Il s'agit de réaffirmer clairement qu'EDF appartient à l'État français et de garantir par la loi la réussite de sa nationalisation.
Je ne doute pas que l'amendement recueillera un avis favorable des rapporteurs car, comme M. Jumel l'a dit en commission, cette mention, quoique symbolique, est pour nous pleine de sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'avis de la commission est défavorable, tout comme l'avis personnel des rapporteurs.
D'abord, l'effet juridique du rétablissement de l'article 1er serait de procéder à la nationalisation du groupe et donc à une expropriation des actionnaires. Nous avons accueilli, comme il se doit, la décision de la cour d'appel, intervenue mardi dernier. Nous nous inscrivons donc désormais dans le cadre de l'OPA, et n'avons plus besoin d'un tel article.
Par ailleurs, nous souhaitons nous conformer au dialogue avec le Sénat, dans l'espoir que celui-ci adopte ce texte conforme dans les prochaines semaines. Je vous demande donc de retirer l'amendement.
Sourires.
Je remercie le rapporteur Brun de s'être rangé aux arguments que le Gouvernement avançait il y a trois mois pour s'opposer à cet article. Il est vrai que la cour d'appel de Paris n'avait alors pas rendu son jugement.
J'avais insisté sur l'insécurité juridique que générait votre article pour le déroulement même de l'OPA, dans la perspective de cette décision de justice. Ce risque, vous l'avez parfaitement cerné.
Nous sommes défavorables à l'amendement car le principe même de la nationalisation d'EDF par la loi va à l'encontre de l'OPA en cours, qui est déjà un succès. Les titres acquis par l'État jusqu'à présent et ceux qui seront rachetés jusqu'à l'éventuelle promulgation de la loi relèveront de sa pleine propriété. La proposition de loi, si cet article était rétabli, serait totalement superflue. Manifestement dépourvue de toute portée normative, elle serait contraire à la Constitution.
Cher collègue du Rassemblement national, votre amendement rend l'article 1er plus absurde encore. Souhaitez-vous remettre en cause la procédure d'OPA en cours et la fixation du prix d'achat à 12 euros ? Rappelons que ce montant, validé par un expert indépendant, a été déclaré conforme par l'AMF. Ce choix a, en outre, reçu le soutien d'une majorité des actionnaires minoritaires. Nous l'avons bien vu puisque 75 % des titres détenus ont été apportés à l'offre publique. Enfin, la cour d'appel de Paris a rejeté le recours déposé par une minorité d'actionnaires minoritaires ce mardi 3 mai.
Quel objectif poursuivez-vous donc ? Vous parlez de symbole mais savez-vous quelles conséquences aurait l'adoption de votre amendement pour nos finances publiques ? Le prix d'achat actuel serait remis en cause ; les actionnaires minoritaires que sont BlackRock, Fidelité, Soros et autres fonds d'investissement n'attendent que ça. S'il est relevé à 15 euros, cela alourdirait la dette de l'État français de 1 744 millions d'euros, et 92 % de cette somme irait dans les poches de ces actionnaires. Est-ce cela que vous souhaitez ?
Cessez vos atermoiements : laissez l'OPA en cours aller jusqu'à son terme et rejetons cet amendement.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 157
Nombre de suffrages exprimés 153
Majorité absolue 77
Pour l'adoption 29
Contre 124
L'amendement n° 11 n'est pas adopté ; en conséquence, l'article demeure supprimé.
Comme l'a souligné M. le rapporteur général, les groupes de la majorité et le groupe Renaissance en particulier ont déposé très peu d'amendements sur ce texte, et quasiment aucun visant à rerédiger, car nous souhaitons voir se développer le débat, en particulier sur cet article 2, qui est au cœur de la proposition de loi.
Il comporte trois éléments principaux : la détention à 100 % par l'État, qui n'a pas encore fait l'objet de discussions dans notre assemblée car il s'agit d'un ajout du Sénat ; la détention par les salariés d'une partie du capital, disposition que nous souhaitons voir maintenue ; la possibilité pour l'entreprise de céder des actifs.
Revenons sur l'archéologie de cet article. Initialement, il prévoyait une incessibilité du capital d'EDF qui revenait à empêcher le groupe d'agir et d'évoluer. L'incertitude juridique complète qui entourait la rédaction de l'article à l'issue de son examen en première lecture par notre assemblée a-t-elle disparu ? Nous ne le pensons pas. Nous redoutons qu'avec le soutien des oppositions alliées, elle ne condamne EDF à l'immobilisme.
Dans le prolongement des discours de Belfort et de Saint-Nazaire, le Gouvernement entendait résoudre deux défis auxquels était confronté EDF, en achetant l'intégralité des titres et en retirant le groupe de la cote.
Il s'agit d'abord, compte tenu de sa situation financière, de le restabiliser, notamment à l'égard des détenteurs d'obligations, dont le montant s'élève à plusieurs dizaines de milliards d'euros. C'est l'objectif prioritaire qu'il ne faut pas perdre de vue car même si le groupe est en totalité dans des mains publiques, il y aura toujours des détenteurs d'obligations. Évidemment, il y a toujours une composante conjoncturelle mais nous estimons que le groupe rétablira sa situation grâce au dynamisme de son nouveau management, à l'implication de tous ses salariés et au soutien de l'État.
Le deuxième objectif est évidemment que le groupe soit en mesure de faire face au mur des investissements mais nous y reviendrons.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Cet article, même s'il a fait l'objet de nombreuses modifications, dont la suppression – que nous saluons – de la notion de groupe public unifié, n'est toujours pas satisfaisant sur le plan juridique. D'une part, la notion de société anonyme d'intérêt national est totalement inopérante car elle n'existe pas dans notre droit. D'autre part, en fixant une liste d'activités pour EDF, l'article priverait le groupe de l'agilité dont il a besoin, notamment pour ses futurs investissements dans la transition énergétique et le nucléaire.
Il n'a, à nos yeux, aucun intérêt. Nous y reviendrons au cours de la discussion sur les amendements.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Sur les amendements n° 24 et identique, 21 et identique, 22 et identique, 42, 23 et identique, 33, ainsi que sur l'article 2, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés (membre de l'intergroupe NUPES) d'une demande de scrutin public ; sur l'amendement n° 42 , la demande est également formulée par le groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES ; sur le sous-amendement n° 62 à l'amendement n° 42 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une autre demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 24 et 43 , visant à supprimer l'article 2.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir l'amendement n° 24 .
J'ai sous les yeux la proposition de loi initiale déposée par Philippe Brun, dont je salue le travail, et je vous incite, chers collègues, à comparer sa rédaction avec celle qui nous est soumise aujourd'hui. Elles n'ont pas un mot en commun !
Même le titre a changé : il mentionnait la nationalisation, il n'en est plus question. La notion de groupe unifié a disparu. Nous vous disions qu'elle ne tenait pas la route d'un point de vue juridique et vous semblez vous être rendus à l'évidence. Vous évoquiez un prix plus élevé que celui proposé et vous semblez avoir été convaincus par nos arguments.
Je me félicite du travail qu'a effectué le Sénat pour débarrasser ce texte de tous ses articles qui n'avaient aucun sens.
Vous nous dites que cette proposition de loi vise à protéger les artisans de la montée des prix de l'électricité. C'est faux ! Dans la version initiale, nous ne trouvons pas la moindre trace d'une mention au tarif réglementé de vente d'électricité.
Qui a eu le courage de faire passer la part du capital d'EDF détenu par l'État à 100 % ? C'est notre majorité !
Oui, c'est notre majorité ! C'est la Première ministre qui, en juillet 2022, a décidé de monter à 100 %.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
C'est grâce à elle que l'État détient actuellement 96 %. C'est grâce à elle que nous avons surmonté le dernier obstacle juridique, ce qui nous permettra d'atteindre les 100 % dans les prochains jours ou les prochaines semaines.
La proposition de loi, comme nous n'avons eu de cesse de le dire, ne sert à rien.
« Quand les événements nous dépassent, feignons d'en être l'organisateur » : dirai-je en m'inspirant de la formule de Cocteau. C'est bien de cela qu'il s'agit !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
On m'indique que les orateurs sont difficilement audibles, je vous invite donc, chers collègues, à faire baisser le niveau sonore dans l'hémicycle.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 43 .
M. le rapporteur général a souligné avec raison la plasticité de l'article 2, qui a connu bien des évolutions depuis les premiers débats en commission. La première mention des dispositions du code de l'énergie, aux termes desquelles il est nécessaire d'obtenir l'accord du Parlement pour abaisser le taux du capital d'EDF détenu par l'État au-dessous de 70 %, a été faite par le groupe Renaissance en commission des finances alors que personne n'en parlait.
La rédaction de l'article 2 nous paraît néfaste pour le groupe car elle se traduit par une grande incertitude juridique. Que recouvre son périmètre, qu'il s'agisse des cessions d'actifs ou de la possession des titres de l'entreprise ? En relisant les déclarations de l'auteur du texte, nous nous rendons compte que son intention première était d'empêcher des cessions de filiales sans accord du Parlement. Cette intention n'a pas été démentie.
Par ailleurs, la liste des activités du groupe EDF, dont le contenu a beaucoup varié lui aussi, renforce la sensation d'improvisation que l'on éprouve en lisant ce texte. Elle n'aura pour effet que de plonger dans un certain désarroi une entreprise qui a besoin d'avoir une vision claire de son avenir et de savoir si la représentation nationale est prête à soutenir une stratégie cohérente face au défi de la décarbonation.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
De deux choses, l'une : soit notre texte ne sert à rien et alors on se demande pourquoi vous mettez autant d'énergie à le combattre ; soit il sert bel et bien à quelque chose et alors on se demande pourquoi vous vous y opposez.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
Son objectif est simple : il s'agit de graver dans la loi la participation de l'État à hauteur de 100 % du capital, sous réserve d'une ouverture à 2 % pour les actionnaires salariés – nous y reviendrons. Autrement dit, il s'agit d'empêcher que l'on fasse entrer Hercule par la fenêtre.
Voilà pourquoi nous émettons un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Monsieur le rapporteur, Hercule ne rentrera pas par la fenêtre : il est mort et enterré !
Le Gouvernement, vous le comprendrez, est favorable à ces excellents amendements de suppression…
…parce qu'il est défavorable à cette proposition de loi. Vous nous prêtez l'intention cachée de démembrer le groupe EDF. C'est faux, bien sûr : l'État s'apprête à devenir l'actionnaire unique d'EDF, projet que nous avons mûri bien avant que ce texte ne soit déposé.
Si le Gouvernement n'est pas opposé à ce qu'on inscrive dans la loi la détention à 100 % du capital d'EDF par l'État, mis en avant par le Sénat dans sa grande sagesse, l'énumération des activités du groupe ne semble pas opportune, en particulier pour les activités de production selon la source d'énergie concernée. La notion de « service énergétique » reste, par ailleurs, non définie.
Monsieur le ministre délégué, vous affirmez que le Gouvernement n'a aucune volonté de démembrer EDF mais si c'est bien le cas, de quoi avez-vous peur ? Pourquoi vous opposer à l'adoption de la proposition de loi ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR – NUPES.
Chacun est dans son rôle : vous dans celui l'exécutif ; nous, dans celui du législatif. Ce que nous souhaitons, c'est que les parlementaires puissent contrôler l'exécutif.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES.
Ce texte vise précisément à inscrire dans la loi le contrôle de l'exécutif par le législatif, autrement dit, il ne fait que graver dans notre législation les paroles que vous venez de prononcer. C'est aussi simple que cela et c'est pour cela qu'il faut voter le texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR – NUPES.
Avec cette proposition de loi, nous sommes passés d'une volonté de nationaliser le groupe EDF à une extension, non financée ou, au mieux, inutile, des tarifs réglementés de vente de l'électricité. Que prévoit en effet l'article 2 ? Vous procédez en réalité à l'administration de l'économie à son plus haut degré, en dressant la liste des activités d'EDF : cela interdira toute rotation d'actifs, comme l'a d'ailleurs souligné le rapporteur, et toute réorganisation, même minime. En figeant dans la loi les activités d'EDF, vous optez pour le contraire de ce qu'il convient de faire en économie, où il faut savoir être un peu agile – mais peut-être manquez-vous un peu d'agilité.
Ensuite, s'agissant des activités, vous mentionnez la prestation de services énergétiques sans fournir la moindre précision à ce sujet. Comment définissez-vous cette prestation ?
Tout cela n'a aucun sens et contrevient évidemment au principe de clarté et d'intelligibilité de la loi. Vous définissez par ailleurs les activités d'EDF en matière d'énergie thermique. Mais comment ferez-vous le jour où EDF voudra sortir définitivement de cette énergie ? Redéposerez-vous une proposition de loi visant à supprimer le mot thermique ?
Tout cela n'a aucun sens, je le répète, et contrevient même à l'impératif de décarbonation de notre économie. Nous voterons donc ces amendements de suppression de l'article.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Nous allons procéder au scrutin sur les amendements identiques.
Pardon, monsieur le ministre délégué, je n'avais pas vu que vous demandiez la parole.
La parole est à M. le ministre délégué.
Protestations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
S'il vous plaît ! Je n'avais pas vu la demande de M. le ministre délégué. Je lui donne la parole et nous procéderons ensuite au vote.
« Oh ! » sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je serai bref ; loin de moi l'idée de faire durer le débat !
Rires sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
J'ai été interpellé par un parlementaire, permettez-moi de lui répondre ; j'espère que vous m'en saurez gré, monsieur Hetzel.
J'ai répondu dans mon intervention générale à votre question : le projet Hercule est mort et enterré. Toutefois, la proposition de loi, telle qu'elle est formulée, va beaucoup plus loin. Comme l'a très bien exposé le député Lefèvre à l'instant, nous souhaitons supprimer l'article 2 parce qu'il coupe les ailes de l'opérateur national qui, s'il veut se développer ou céder des actifs, devra, chaque fois, venir devant vous défendre son projet.
Eh oui ! C'est bien ce que nous voulons. Cela vous gêne de passer devant le Parlement ?
Trois milliards de cessions d'actifs sont en cours, d'ici à la fin de l'année 2024. Elles visent à vendre des activités connexes qui ne sont pas au cœur de l'activité d'EDF et qui permettront de restaurer la crédibilité financière de l'opérateur, laquelle, reconnaissons-le, est actuellement un peu fragilisée. Si l'article est adopté, M. Rémont devra venir devant la commission des finances et moi dans l'hémicycle chaque fois que nous souhaiterons vendre une activité connexe d'EDF !
C'est impossible. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons supprimer cet article et nous pensons, depuis le début, que votre proposition de loi est contre-productive.
En faisant croire que vous protégez EDF, vous lui coupez les ailes. Connaissant votre attachement à l'opérateur national et notre volonté à tous de développer le nucléaire, je pense que vous commettez une erreur stratégique en défendant la proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Beaucoup de contrevérités ont été énoncées sur l'article 2. Premièrement, celui-ci n'a ni pour effet ni pour objet de fixer dans le marbre les quarante filiales actuelles d'EDF ; il vise à définir les activités dont nous pensons que l'opérateur national doit assurer la maîtrise,…
…activités exercées soit directement par la holding de tête, soit par des filiales auprès desquelles peuvent d'ailleurs intervenir des participations privées. Nous ne fixons donc en rien la structure d'EDF telle qu'elle est aujourd'hui. Nous affirmons simplement qu'EDF doit rester un groupe public unifié…
…qui exerce ses activités dans l'ensemble de la chaîne de valeur de l'électricité, en particulier dans le domaine des services. La vérité, monsieur le ministre délégué, c'est que vous voulez vous séparer des activités les plus rentables : 600 millions d'euros de dividendes par an de RTE, 1,5 milliard de dividendes annuels d'Enedis et 500 millions de dividendes de Dalkia. Par cet article, nous vous empêchons de le faire. En revanche, l'article 2 n'interdit en rien des rotations d'actifs : il n'empêche pas non plus qu'EDF se sépare de ses activités exercées à l'étranger, voire en France, en redéfinissant certains périmètres. Il vise simplement à prévenir un démantèlement de grande ampleur du groupe ; il n'est en rien liberticide vis-à-vis des entreprises.
Depuis la loi sur la nationalisation d'EDF défendue en 1946 par le ministre Marcel Paul et jusqu'en 2004, les activités d'EDF étaient inscrites dans la loi. Durant cette période, le groupe EDF a-t-il régressé sur les marchés ? Grâce à cette loi, nous avions fondé le premier énergéticien d'Europe !
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
L'article 2 n'est en rien attentatoire à la liberté des entreprises : il n'empêche pas le mandataire social de redéfinir les activités du groupe, d'en vendre ou d'en acheter de nouvelles. Il garantit seulement la maîtrise, sur l'ensemble de la chaîne de valeur, des activités du groupe.
Mêmes mouvements.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 261
Nombre de suffrages exprimés 260
Majorité absolue 131
Pour l'adoption 109
Contre 151
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, LR, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES et sur quelques bancs des groupes RN et LIOT.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe GDR – NUPES.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures quinze.
La séance est reprise.
La parole est à M. Alexandre Sabatou, pour soutenir l'amendement n° 12 .
L'amendement n° 12 est retiré.
M. Jean-René Cazeneuve, entrant dans l'hémicycle, s'approche d'un micro situé à l'extrême droite.
C'est un emplacement inhabituel mais, s'il ne pose de problème à personne, vous pouvez parler.
Cet amendement revient sur l'alinéa 2. Je crois qu'il existe une confusion entre ce que pensent, en toute bonne foi, certains députés, et ce qui figure dans le texte.
Actuellement, le code de l'énergie protège le contrôle d'EDF par l'État en fixant un seuil minimum sous lequel nous ne descendrons pas. Le contrôle d'EDF par l'État va donc perdurer. J'ajoute qu'il est paradoxal de nous soupçonner – alors que nous avons pris la décision de monter au capital d'EDF – de vouloir en sortir ; nous n'aurions aucun intérêt à en prendre le contrôle pour en ressortir aussitôt !
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Par ailleurs, M. le rapporteur Brun a indiqué qu'EDF pourrait vendre des filiales et céder des actifs. Alors, pourquoi d'autres députés, dont M. le rapporteur Jumel, considèrent-ils qu'aucune décision concernant les activités d'EDF ne pourra être prise dans l'hémicycle ? Une fois de plus, c'est un article bavard qui n'apporte rien en matière de contrôle et qui bride EDF dans son activité de tous les jours.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 44 .
Ce qui frappe, dans cet article, c'est le caractère exceptionnel des contraintes auxquelles on soumettrait EDF. On a la sensation que, de toutes les entreprises du secteur public, cet acteur serait le seul à qui on imposerait un régime spécifique. Certes, dans le code de l'énergie figurait un seuil de 70 % – supprimé au Sénat et dont il n'a jamais été question ici – qui paraissait réaliste ; ce seuil permettait de garder le contrôle total sur le groupe tout en permettant la participation d'actionnaires. Nous l'avons vu, cette stratégie n'était pas la bonne, pour des raisons purement financières, mais l'avenir n'est pas écrit.
Par ailleurs, les auteurs du texte ont beaucoup erré autour de la notion d'utilité publique. Durant une partie des discussions en commission des finances, on est même allé chercher l'exemple de la SNCF, où l'infrastructure guide la production, c'est-à-dire l'exploitation – alors que c'est tout l'inverse du modèle sur lequel fonctionne le système de production d'énergie, et sur lequel il fonctionnera plus encore à l'avenir si la distribution, premier enjeu de l'investissement, devient le sujet clé.
Il en va de même pour la notion d'intérêt national. L'existence du secteur public tout entier a été inspirée par le préambule de notre Constitution, et personne ne remet en cause l'importance particulière de ses groupes. Alors, pourquoi préférer ce terme complètement improvisé à celui qui avait été examiné auparavant, en gardant à l'esprit l'orientation que nous avons prévue pour ce groupe et pour son avenir ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Je l'ai dit et je le répète : Hercule est mort – M. Jumel est sans doute immortel, mais Hercule, lui, ne l'est pas. Si le Gouvernement ne s'oppose pas à ce qu'on inscrive dans la loi la détention à 100 % d'EDF par l'État, le caractère d'intérêt national reconnu à EDF ne semble comporter aucune utilité.
EDF est une entreprise publique ; elle remplit de nombreuses missions d'intérêt général qui lui sont confiées par la puissance publique dans le cadre de dispositions législatives et réglementaires en conformité avec la réglementation européenne. Le Gouvernement est donc favorable à ces amendements visant à supprimer l'alinéa 2 de l'article 2.
Pour reprendre des termes précédemment utilisés, je crois que personne, depuis le début de ce débat, y compris en commission, n'a jamais remis en cause le caractère d'intérêt national d'EDF : sur aucun banc, à aucun moment, on n'a vu la volonté de démembrer ce groupe.
Le caractère d'intérêt national est une notion qui existe pour les marchés publics, en matière de transport ferroviaire, mais il n'a pas lieu d'être ici. Je ne conteste pas le fait que le groupe EDF soit d'intérêt national – les débats que nous avons sur le sujet en sont la preuve. Je rappelle seulement, pour compléter les propos de mon collègue Lefèvre concernant les implications économiques de l'expression, que le Sénat a réintroduit dans le texte les termes « une société anonyme d'intérêt national ». Je l'ai indiqué à M. le rapporteur Brun pendant la suspension : en droit, cela n'existe pas. Nous voterons donc ces amendements de suppression.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 236
Nombre de suffrages exprimés 236
Majorité absolue 119
Pour l'adoption 101
Contre 135
Applaudissements sur les bancs des groupes RN, LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES, GDR – NUPES et LIOT.
Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI – NUPES. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je regrette que M. le rapporteur n'ait pas daigné répondre à nos arguments sur les amendements précédents et qu'il ait donné un avis défavorable sans aucune explication.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Si mes propos ne vous convainquent pas, je citerai ceux d'un professeur de droit public, Philippe Coleman, dans un article paru dans Le Monde il y a quelques semaines : « On pourra donc regretter que l'Assemblée nationale, par une alliance de circonstance, privilégie les effets d'annonce aux réflexions de fond sur l'avenir du groupe EDF, son rôle dans la transition énergétique et sa place au sein du marché européen de l'électricité. » C'est bien ce dont il s'agit : vous faites de l'affichage. Vous souhaitez une nationalisation alors que nous avons déjà pris le contrôle à 100 % d'EDF.
Et vous avez l'outrecuidance de dresser un inventaire à la Prévert des activités d'EDF, lequel ne sert à rien, puisqu'il n'a pas de portée juridique. Alors, chers collègues, s'il vous plaît, retirez cet article.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 45 .
Il est nécessaire de supprimer cette liste.
Tout d'abord, pourquoi modifier l'objet social d'une entreprise par la loi ? L'objet social d'une entreprise est déterminé par son fonctionnement, sa manière, son histoire, ainsi que par les nécessités et les besoins. À un moment de nos débats, on a même évoqué l'idée que certains domaines d'activité, comme le chauffage urbain, la climatisation et les bornes de recharge, soient précisés dans la liste qui est donnée aujourd'hui. Il est évident qu'un groupe de l'ampleur d'EDF a des activités si variées que l'exercice est voué à l'échec, même si l'on y introduit un « notamment » censé résoudre tous les problèmes, comme on le fait quand on rédige une circulaire. Ce n'est pas une circulaire, c'est la loi !
Tel est le résultat de l'accord minimal qui a été trouvé au Sénat entre les diverses oppositions. Il est normal, lorsqu'on s'allie contre quelque chose sans avoir de projet commun, d'aboutir au plus petit dénominateur, d'où cette liste introduite par un « notamment ». Ce que le texte proposait, au départ, c'était la création d'un véritable service public et le retour au monopole. Évidemment, il ne pouvait pas y avoir d'accord sur une telle disposition.
Ce qui reste, comme vient de l'expliquer M. le rapporteur général, c'est une incertitude totale. Que vont devenir les filiales ? Ce qui est marquant, dans les propos tenus tout à l'heure par l'auteur des éléments de l'article issu de l'accord conclu il y a quelques semaines avec le Sénat, c'est qu'il parle non plus de filiales, mais d'activités et de secteurs. Il faut être plus précis et surtout, il faut avoir une vision bien plus confiante dans l'avenir de ce groupe ainsi que dans la capacité de ses dirigeants et de ses salariés à tracer son avenir dans le contexte que nous connaissons.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Monsieur Cazeneuve, monsieur Lacresse, je me demande parfois si vous lisez vos propres amendements :
Exclamations sur les bancs du groupe RE
ces deux amendements identiques n'ont rien à voir avec ce que vous venez de dire !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ils visent à supprimer les mots « d'intérêt national », et pas du tout la liste des activités énumérées par la proposition de loi – nous venons de voter sur ce point et vous avez perdu ! Les mots « d'intérêt national » vous gênent. Ce n'est pas moi qui les ai ajoutés dans le texte, mais le Sénat – en l'occurrence, le rapporteur de la commission des finances, Gérard Longuet, connu pour n'être ni « dépensophile » ni « étatolâtre ».
Je note que la notion d'intérêt national vous pose des difficultés. Quant à nous, nous sommes favorables à ce qu'elle apparaisse dans la proposition de loi. Avis défavorable.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et LFI – NUPES.
Pour avoir siégé au Sénat, je me souviens bien du débat qui s'y est déroulé. En qualifiant la société anonyme de « société anonyme d'intérêt national », il s'agissait de lister toutes les activités auxquelles vous êtes attachés, ce qui, je le répète, fait peser un risque juridique sur l'opérateur national, dont nous souhaitons tous le développement et dont nous sommes très fiers.
Pour les mêmes raisons que celles que j'ai mentionnées au sujet des amendements précédents, le Gouvernement est favorable aux amendements identiques n° 22 et 45 , qui proposent de supprimer la qualification « d'intérêt national » apportée à la société anonyme d'EDF.
Monsieur le rapporteur, notre collègue Emmanuel Lacresse est un fin connaisseur du sujet dont nous débattons. Lui reprocher de ne pas avoir lu son amendement est pour le moins méprisant.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Vous manquez cruellement de confiance dans l'État, monsieur le rapporteur. Croyez-moi, un État qui détient à 100 % une entreprise la considère évidemment comme d'intérêt national.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
En refusant ces amendements identiques, vous faites en réalité preuve de défiance à l'encontre des agents et des participations de l'État,…
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.
Dans votre rapport, vous souhaitez que les prises de participation et les rotations de capitaux à hauteur de 30 % soient soumises à l'approbation du Parlement. Pourquoi pas les prises de participation et les rotations de capitaux à hauteur de 25 % ou de 35 % ? De même, la suppression intégrale d'une filière ne devrait-elle pas être examinée par le Parlement ?
De toute évidence, votre texte résulte davantage d'une construction politique que d'une construction économique.
Pour ces différentes raisons, j'appelle l'Assemblée à voter les deux amendements.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 237
Nombre de suffrages exprimés 237
Majorité absolue 119
Pour l'adoption 98
Contre 139
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Au cours de la navette parlementaire, nous avons adopté des dispositions permettant aux salariés d'EDF de participer à des programmes d'actionnariat salarié. La majorité présidentielle et les partis de l'opposition sont par ailleurs engagés dans des travaux visant un meilleur partage de la valeur dans l'entreprise. Plusieurs rédactions ont été proposées pour l'article 2, mais la commission a adopté un amendement du groupe Démocrate (MODEM et indépendants) visant à fixer par décret la limite supérieure de la rétrocession d'actions aux salariés. Il se trouve que l'article 34 de la Constitution empêche que ce seuil soit fixé par décret. L'amendement n° 42 propose donc d'organiser la rétrocession d'actions pour un minimum de 1,5 % du capital de l'entreprise et pour un prix initial de souscription ne dépassant pas le prix de 12 euros – soit celui de l'OPA.
La parole est à M. Alexandre Sabatou, pour soutenir le sous-amendement n° 62 .
Comme je l'ai déjà indiqué, le groupe Rassemblement national est favorable à cet amendement qui améliore la disposition proposée en première lecture. Plusieurs groupes politiques ont exprimé leur volonté de ne pas limiter la part du capital salarié à 2 %. Ainsi M. Lecamp a-t-il proposé de fixer par décret la limite supérieure à 10 %. Tel est l'objet du sous-amendement. L'actionnariat salarié est un outil de fidélisation et de motivation des salariés, dans l'intérêt du service public.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement et le sous-amendement ?
L'État revient à 100 % du capital d'EDF pour que l'entreprise puisse mener à bien les chantiers annoncés par le Président de la République il y a un peu plus d'un an à Belfort. La perspective d'une réouverture de son capital n'est donc pas d'actualité. L'amendement et le sous-amendement sont problématiques car ils contraindraient inutilement l'ouverture du capital aux salariés et aux anciens salariés.
Je rappelle que, dans son extrême sagesse, le Sénat a simplement ouvert la possibilité d'une ouverture du capital…
…à travers l'épargne salariale et l'actionnariat salarié. Il n'a aucunement envisagé de contraindre EDF à une telle opération en précisant son calendrier, son montant et le prix de l'action.
Avec l'amendement de M. Brun, vous faites les trois à la fois ! En effet, vous souhaitez inscrire dans la proposition de loi un montant minimal d'actionnariat salarié – en l'espèce, 1,5 % du capital de l'entreprise –, ce qui est dangereux puisque l'actionnariat salarié ne représentait pas plus de 1,3 % du capital avant le lancement de l'OPA. Forcer les salariés à détenir 1,5 % du capital, soit plus de 60 millions d'actions, revient à leur demander de mobiliser 700 millions d'euros de cash, dont 100 millions supplémentaires. Si l'on en croit la manière dont vous décrivez la situation économique de notre pays, il est peu probable que les Français disposent de cette liquidité.
En outre, l'amendement fixe un prix maximum de 12 euros par action alors que, d'après les textes, il appartient à la Commission des participations et des transferts de déterminer le bon niveau de prix. En fixant un prix maximum de 12 euros, vous n'envisagez absolument pas la possibilité que le groupe EDF améliore sa performance et que la valeur de l'action augmente.
Enfin, vous limitez le bénéfice de l'offre aux seuls salariés et anciens salariés détenteurs d'actions. Pourquoi les autres anciens salariés en seraient-ils exclus ?
Sur un sujet comme celui-ci, qui soulève des difficultés considérables, la loi peut parfaitement déléguer au Gouvernement le soin d'arrêter les modalités d'une orientation, sans le contraindre outre mesure. Par ailleurs, je n'approuve pas l'opinion de Philippe Brun selon laquelle le partage de la valeur et la fidélisation des salariés passent uniquement par l'actionnariat salarié. L'intéressement est une autre possibilité offerte par l'entreprise. Il peut d'ailleurs être indexé sur sa performance, y compris – ce qui devrait vous plaire – sur sa performance extrafinancière, qui repose sur une variable collective, liée aux collectifs de travail, et sur une variable individuelle, liée aux conditions de travail de chaque salarié. Bref, les outils ne manquent pas !
Forcer l'opérateur national à reconstituer l'actionnariat salarié à un prix que vous déterminez, sans lien avec la valeur qu'aura demain l'entreprise, c'est la contraindre beaucoup trop, notamment du point de vue financier. Or nous avons tous, je le sais, la volonté de protéger la situation financière d'EDF. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement et a fortiori au sous-amendement.
Ce dernier propose de porter le capital salarié entre 1,5 % et 10 % du capital d'EDF : c'est superfétatoire puisque la limite supérieure ne sera vraisemblablement jamais atteinte – je le répète, l'actionnariat salarié ne représentait pas plus de 1,3 % du capital avant le lancement de l'OPA. Au prix de 12 euros par action, c'est 4,6 milliards d'euros que les salariés d'EDF devraient mobiliser pour atteindre le seuil de 10 % du capital de l'entreprise. Je ne pense pas qu'ils soient assez riches pour cela !
Je remercie le député Philippe Brun pour l'hommage qu'il rend, par son amendement, à l'accord national interprofessionnel, à la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, la loi Pacte, et au projet défendu par le Gouvernement et la majorité sur le partage de la valeur. Cette position ne se rencontre pas les jours sur les bancs du parti socialiste !
Applaudissements et sourires sur les bancs du groupe RE.
Malheureusement, cet amendement est doublement irrespectueux du dialogue social.
Rires et exclamations sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES.
En effet, le dialogue social doit inclure, outre la question de l'actionnariat salarié, le calendrier et les conditions de travail, toutes questions qui doivent être discutées avec les partenaires sociaux au sein de l'entreprise.
L'amendement est également irrespectueux du dialogue social national, puisque nous devons défendre le partage de la valeur, non pas entreprise par entreprise, mais pour l'ensemble des entreprises françaises. Nous nous y attellerons au cours des prochaines semaines et nous vous donnons rendez-vous à ce moment-là pour défendre avec nous une grande ambition.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Nous aimerions davantage d'explications, monsieur le rapporteur Jumel. Pourquoi êtes-vous défavorable à notre sous-amendement ? Est-ce parce que nous sommes du Rassemblement national et que vous êtes de la NUPES ?
Exclamations prolongées sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Car nous voulons la même chose que vous : au Rassemblement national, nous nous battons pour l'intérêt général et le bien commun. Nous apprécierions donc que, à tout le moins, vous fassiez preuve de respect à notre égard et que vous nous expliquiez pourquoi vous êtes contre notre sous-amendement, qui va dans le bon sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 214
Nombre de suffrages exprimés 211
Majorité absolue 106
Pour l'adoption 30
Contre 181
Le sous-amendement n° 62 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 227
Nombre de suffrages exprimés 224
Majorité absolue 113
Pour l'adoption 128
Contre 96
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Cette fois-ci, présentez votre amendement !
Je vais essayer, cher collègue, mais j'aimerais bien aussi que M. le rapporteur Jumel se lève et apporte des réponses précises aux députés qui ne sont pas d'accord avec lui !
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Quel culot ! C'est notre majorité qui a décidé que l'État devait prendre le contrôle d'EDF !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
C'est elle qui a décidé d'investir massivement dans EDF pour lui donner les moyens de se développer, elle qui a fait voter des textes visant l'accélération des énergies renouvelables et du nucléaire, précisément pour conforter ce développement.
Quant à vous, chers collègues, vous n'êtes pas à un paradoxe près. Voyez l'attelage formé par les deux rapporteurs : l'un veut développer le nucléaire ; l'autre appartient au parti socialiste, qui revendique sa sortie.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Et vous voulez nous faire croire que c'est vous qui défendez EDF ? Je n'en crois pas un mot !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.– Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 46 .
Monsieur le rapporteur Brun, vous êtes trop fin juriste pour ne pas savoir qu'on ne parle pas de l'utilité publique d'un objet sans le décrire. Vous auriez pu décider de ne vous intéresser qu'à ses finalités, mais vous ne partagez malheureusement pas la même position que vos alliés sur ce point. Quant à nous, nous sommes clairs : nous voulons soutenir le groupe EDF.
Ces deux amendements de suppression visent à réaffirmer l'autonomie du groupe dans le choix de ses activités, qu'elles concernent les énergies nucléaire ou renouvelables. Rappelons qu'EDF mène des activités carbonées. La liste des activités d'EDF ne peut faire office de stratégie pour le groupe. Ce qui compte, ce sont les moyens consacrés aujourd'hui à ces activités et ceux qui seront mobilisés demain – les moyens inscrits dans la loi de finances pour 2023, contre lesquels vous avez voté.
Pourquoi avez-vous besoin de deux amendements pour dire la même chose ?
Vives exclamations sur les bancs des groupes RE et Dem.
Les exclamations s'intensifient sur divers bancs.
Voulez-vous s'il vous plaît écouter l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?
Pour quoi faire ? Encore perdre du temps ? Commencez par tenir vos rangs !
J'interviens sur le fondement de l'article 100 de notre règlement, relatif à la bonne tenue de nos débats.
Protestations sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
L'article 100, oui, madame Regol, vous n'avez qu'à lire le règlement ; il est devant vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Madame la présidente, les rapporteurs ont été interrogés à plusieurs reprises sur un article essentiel de la proposition de loi, qui concerne les activités d'EDF. Nous n'avons pas obtenu de réponse concernant nos amendements. Vous devez répondre car c'est un sujet crucial pour l'avenir de l'entreprise et de la filière, mais aussi par respect pour nos débats.
Je comprends que les rapporteurs et les groupes politiques auxquels ils appartiennent veuillent aller très vite pour débattre de ce sujet essentiel, mais la majorité a besoin d'obtenir des réponses quant à leurs intentions réelles ,
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem
alors que l'on voit la gauche réunie agir de concert avec le Rassemblement national et Les Républicains. Nous voulons des réponses précises !
Pouvons-nous maintenant écouter l'avis du Gouvernement, s'il vous plaît ?
Peut-on retrouver un peu de calme ? Si M. le ministre délégué s'exprime, nous pourrons continuer nos débats. Je vous invite donc à le laisser parler.
Dites-leur que s'ils avaient été là en première lecture, ils auraient eu des réponses !
Le Gouvernement – cela ne vous aura pas échappé – est défavorable à la proposition de loi, dont le présupposé est l'idée fausse selon laquelle nous aurions le projet caché de démanteler EDF. L'énumération des activités du groupe, en particulier celles liées à la production de différentes sources d'énergie, ne semble pas opportune. L'entreprise doit pouvoir décider si elle souhaite continuer à exploiter, par exemple, un parc de production thermique – le député Mathieu Lefèvre l'a très bien dit. En tout état de cause, il n'appartient pas à la loi d'en décider. Le Gouvernement est donc très favorable à cet excellent amendement de suppression.
Je rappelle que ces amendements ont reçu un avis défavorable de la commission.
Je ne suis pas éclairé par l'avis du rapporteur. Il nous faut des jumelles pour y voir clair !
Sourires.
Je rappelais simplement les avis qui ont été donnés, chers collègues.
La parole est à M. Pascal Lecamp.
Nous nous trouvons dans une enceinte démocratique : nous avons des idées différentes, mais elles ont une même finalité.
Nous voulons un groupe EDF fort, qui regagne les parts de marché qu'il avait à l'étranger. Ayant moi-même passé trente ans de ma vie à l'étranger, je peux vous le dire : au début des années 2000, EDF représentait 3 % des exportations de la France vers l'Italie. Si l'on veut que l'entreprise retrouve cette capacité, cette force dans un concert national très ouvert et au sein du marché européen de l'énergie, il faut éviter de fixer ses activités, de les lui imposer au mépris de possibles évolutions du marché et de ce que commanderait l'intérêt national. Je pense, comme l'ensemble du groupe Démocrate, qu'agir ainsi serait nuisible à cette entreprise que nous souhaitons tous protéger. EDF a besoin d'agilité et de souplesse pour engager sa transformation d'ampleur vers une production décarbonée – M. le ministre délégué vient de le rappeler –, à laquelle la COP21 nous engage tous,…
…et pour enfin retrouver sa place de leader du marché mondial de l'électricité. C'est un choix stratégique que nous devons assumer : il faut donner à la direction d'EDF les moyens d'exercer pleinement ses responsabilités, pour que ce fleuron de notre industrie retrouve la place qu'il n'aurait jamais dû perdre.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Sur le fondement de l'article 100, madame la présidente. Les groupes d'opposition disposent d'un seul jour dans l'année pour leur niche parlementaire. Le nôtre a été raisonnable pour ce qui est du nombre de propositions de loi déposées : pour pouvoir aller au fond des débats, nous avons même retiré un des textes auquel nous tenions.
Nous l'avons fait pour pouvoir discuter. Et à quoi assistons-nous aujourd'hui, dans cette démocratie où les groupes d'opposition ne disposent que d'une journée par an pour défendre leurs textes ? À un blocage !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
« C'est faux ! » sur les bancs du groupe RE.
Si ! Monsieur le ministre délégué, vous avez parlé des « cent jours » au cours desquels il serait possible de discuter ; mais en réalité, vos cent jours, ce sont les Cent-Jours de Napoléon ! Vous sentez que ce qui se profile pour vous, c'est Waterloo, et vous voulez reculer, comme à Waterloo. Vous me faites penser à cette garde qui « meurt mais ne se rend pas ».
Vous voulez prolonger les débats jusqu'à minuit pour que nous n'arrivions pas au vote : nous estimons que c'est indécent et que ce n'est pas démocratique. Vous montrez votre vrai visage !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe LIOT. – Plusieurs députés, continuant d'applaudir, se lèvent.
Monsieur le président Chassaigne, franchement, vous me décevez. Je me suis efforcé, à la fin de la discussion générale, de répondre à chacun des arguments énoncés par chaque député.
Or beaucoup d'arguments supposent une longue réponse. Si j'avais procédé différemment, vous auriez été en droit de me le reprocher.
M. André Chassaigne proteste.
Monsieur Chassaigne, je vous ai écouté – comme toujours – religieusement. Et depuis, sur chaque amendement, j'apporte des réponses brèves et factuelles. Tout à l'heure, je n'ai pas rebondi sur l'attaque du rapporteur lorsqu'il a gentiment sous-entendu que je n'avais rien compris à son texte.
J'ai répondu à chaque orateur. Au passage, j'ai noté avec intérêt que vous n'avez pas pprotesté quand j'ai répondu à votre intervention. En revanche, je vous ai vu sauter comme un cabri…
…quand j'ai commencé à répondre aux députées Arrighi et Ménard. Si vous n'aimez pas les écolos et les indépendants, dites-le ! Mais moi, je réponds à tout le monde ou je ne réponds à personne.
Et maintenant, comme je le fais depuis que la discussion des amendements a commencé, je répondrai de manière succincte et factuelle à tous les arguments présentés, qu'ils le soient par l'opposition ou par la majorité, ne vous en déplaise !
Je suis peut-être un cabri, mais je ne suis pas un perdreau de l'année !
Nous ne sommes pas au temps de Napoléon ; nous ne sommes pas non plus au temps du centralisme démocratique. Cette assemblée s'exprime, le Gouvernement s'exprimera aussi !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Sur le fondement de l'article 100, alinéa 7, du règlement, madame la présidente.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je serai très bref, pour qu'on ne m'accuse pas de faire de l'obstruction.
Ce texte est trop important pour que nous l'examinions sans obtenir de réponse de la part du rapporteur. Nous lui avons posé une question : si le texte était adopté, dans quels cas faudrait-il repasser devant le Parlement pour qu'EDF puisse procéder à une cession ? Nous n'avons pas eu de réponse sur ce point.
Je suis désolé, monsieur Chassaigne, quelle que soit l'importance de votre niche parlementaire, on ne peut pas expédier l'examen d'un tel texte, d'autant qu'il a beaucoup évolué. Ce qui était une proposition de loi visant à la nationalisation d'EDF – au passage, vous aviez rejeté les crédits qui ont permis de procéder à cette nationalisation – est devenu un texte visant à étendre le bénéfice des tarifs réglementés de l'énergie, sans aucune portée juridique et normative. Souffrez que nous posions des questions et que nous regrettions de ne pas obtenir de réponses.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 232
Nombre de suffrages exprimés 232
Majorité absolue 117
Pour l'adoption 94
Contre 138
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Il vise simplement à supprimer l'énergie thermique de la liste des sources d'énergie établie à l'article 2. En effet, si elle y figure, EDF ne pourra absolument pas arrêter ses activités carbonées. Est-ce ce que vous souhaitez, monsieur le rapporteur ?
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
J'apporterai une réponse rapide à M. Lefèvre. Nous voulons maintenir en France des moyens pilotables en cas de problème lié à la fourniture d'énergie, et personne ne peut penser qu'il n'y aura plus aucune centrale à gaz en France !
Nous devons être capables de mobiliser des moyens pilotables de production d'énergie en cas de pic de consommation.
C'est le cas dans tous les pays du monde, monsieur Lefèvre ! Il est donc bien normal d'intégrer l'activité thermique d'EDF – que nous souhaitons évidemment résiduelle – dans la loi, puisqu'elle existe à l'heure actuelle. Ce n'est en rien contraire à nos engagements pour le climat !
Je le répète : nous avons besoin de sources d'énergie dont la production puisse être pilotée, et c'est la raison pour laquelle nous avons fait figurer l'énergie thermique dans notre proposition de loi. Avis défavorable.
Il est évidemment favorable en raison de tous les arguments susmentionnés, auxquels j'ajouterai le suivant : puisque le scrutin sur cet amendement est public, j'attends avec impatience de voir quel sera le vote des députés écologiques ;…
…oui, des députés écologistes, madame Rousseau, sur l'amendement et sur cet article qui force Électricité de France à exploiter du thermique.
J'attends cela avec impatience.
Quand le débat verse à ce point dans la mauvaise foi, il faut le souligner ! Ce n'est pas parce que le mot « thermique » est présent dans une liste d'activités que le thermique a vocation à rester ou à redevenir majoritaire dans la production d'énergie en France.
Je trouve une telle position un peu hypocrite de la part de gens qui ont fermé Fessenheim…
…et qui, cet hiver, ont effectivement rouvert une centrale à charbon à côté de Saint-Avold. Le rapporteur l'a très bien dit : dans des situations de pic ou de panne, on a besoin de sources d'énergie très réactives. Ce peut être du gaz ou du charbon ! Et je vais vous dire ce qui me semble, de votre part, le comble de l'hypocrisie : quand nous ne sommes pas capables d'assurer nos besoins énergétiques, que faisons-nous ? Nous recourons à des sources d'énergie qui sont produites en Allemagne, en Italie, en Suisse ou en Grande-Bretagne, et qui sont très largement carbonées. Or les procédés de production de ce charbon sont beaucoup plus polluants que les nôtres ! Votre amendement, monsieur Lefèvre, procède donc d'un jeu de dupes qui n'est pas acceptable.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Vous parlez d'hypocrisie, nous parlons d'absurdité : il est évident que cet amendement a pour objet de montrer le caractère inapplicable de telles dispositions, ou en tout cas la confusion qu'elles feraient désormais régner autour de la manière dont sera géré le groupe EDF.
Nous étions hier à Blénod-lès-Pont-à-Mousson,…
…où nous avons visité une des centrales thermiques les plus performantes au monde, qui ne cesse d'innover et qui se consacre désormais exclusivement à la montée en puissance de nos projets en matière d'aérien et de solaire, en particulier dans cette région que vous connaissez bien, monsieur Di Filippo, pour en être issu, comme moi.
À l'avenir, nous aurons en tête les propos tenus par M. le rapporteur lui-même – nous accordons beaucoup d'importance à ce que vous avez dit ces derniers temps sur le sujet, monsieur Brun, même si vous ne semblez pas toujours penser ce que vous dites. En commission, vous aviez déclaré : « Si EDF n'exerce plus aucune activité dans un domaine, ce sera illégal. » À partir de quand sera-t-il légal – selon le mot que vous avez utilisé – pour un groupe tel qu'EDF, d'exercer certaines activités, eu égard à la liste que vous proposez ? C'est pour nous une réelle préoccupation, et mon collègue Lefèvre vous a demandé de préciser la nature et la finalité des cessions qui seront permises, ainsi que le seuil de détention autorisé. Évidemment, nous ne le saurons jamais, et tout cela créera une grande incertitude quant à la gestion du groupe.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 218
Nombre de suffrages exprimés 211
Majorité absolue 106
Pour l'adoption 91
Contre 120
L'amendement n° 33 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Christine Arrighi, pour soutenir l'amendement n° 40 .
Dans la droite ligne de mon intervention pendant la discussion générale, cet amendement vise à apporter plus de clarté comptable et financière pour chaque filière énergétique au sein du groupe EDF. Pour ce faire, je propose de séparer les bilans comptables par filière énergétique afin de faciliter la distinction du soutien public à chacune de ces filières. La clarté présente également une utilité démocratique dans la mesure où elle permettra aux citoyens de voir clairement comment la puissance publique est amenée à soutenir telle ou telle énergie, notamment les énergies renouvelables ou le parc nucléaire actuel ou à venir.
« Ah, une réponse ! » sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem
Nous sommes favorables à cet amendement. La transparence est de nature à permettre le contrôle démocratique, y compris lorsqu'il s'agit d'une transparence comptable. Voilà l'explication vos deux commissaires.
Alors là, je dois avouer que les bras m'en tombent ! Votre amendement est tout à fait légitime, madame la députée, mais c'est l'avis du rapporteur qui me sidère. L'amendement ne propose rien de moins que le démantèlement d'EDF, à rebours de l'objectif de consolidation de l'opérateur historique, affiché dans l'exposé des motifs de la proposition de loi.
Les activités de production d'électricité d'origine nucléaire, thermique et hydraulique en France sont actuellement directement intégrées dans la société EDF, ce qui contribue à son efficacité opérationnelle. Cette gestion totalement intégrée permet d'établir des bilans comptables disjoints. Néanmoins, la documentation très complète publiée par EDF devrait permettent de répondre à vos interrogations.
Le document d'enregistrement universel du groupe, publié en mars 2023, comporte plus de 200 pages dédiées à l'information financière. S'il s'agit de vous pencher sur les coûts de production du système électrique, d'excellents rapports de RTE ou de la Cour des comptes sont également librement accessibles. Nous sommes donc défavorables à l'amendement.
On nous propose de produire des bilans comptables ainsi que des rapports annuels pour chacune des entités mentionnées à l'alinéa 4.
Si je compte bien, nous avons la production, le transport, la distribution, la commercialisation, l'importation et l'exportation d'électricité – ce qui nous fait six. Nous avons ensuite le développement, la construction, l'exploitation et la maintenance des énergies hydrauliques, nucléaires, renouvelables et thermiques – ce qui nous fait quatre fois quatre, donc seize. Il faut y ajouter les prestations de services énergétiques. En tout, nous arrivons chaque année à vingt-trois rapports annuels et autant de bilans comptables.
Techniquement, c'est déjà impossible à faire : il faudrait une armée de comptables chez EDF. Vous avez aussi oublié de prévoir la création d'une nouvelle commission permanente à l'Assemblée et au Sénat pour que nous puissions lire et comprendre tous ces rapports.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 211
Nombre de suffrages exprimés 208
Majorité absolue 105
Pour l'adoption 90
Contre 118
L'amendement n° 40 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 220
Nombre de suffrages exprimés 220
Majorité absolue 111
Pour l'adoption 131
Contre 89
L'article 2, amendé, est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
La parole est à M. Alexandre Sabatou, pour soutenir l'amendement n° 13 .
L'amendement n° 13 est retiré ; en conséquence, l'article demeure supprimé.
Heureusement que nos boulangers et nos pâtissiers ne vous ont pas attendus ! Vous nous proposez aujourd'hui une mesure absolument inopérante car non assortie de tarifs plafonnés – si elle l'avait été, elle aurait dû être gagée, à moins que vous nous disiez le contraire. Or vous avez refusé le plafonnement du prix à 280 euros le mégawattheure et la prise en charge de 50 % de la facture d'électricité au-delà de 180 euros le mégawattheure pour toutes les TPE. Vous avez aussi refusé le guichet d'aide pour toutes les TPE.
Cet article est de la pure hypocrisie,…
En l'absence de gage et de plafonnement, cette mesure ne fait pas gagner un euro de pouvoir d'achat aux boulangers, aux pâtissiers et aux artisans, auxquels la majorité rend hommage et en faveur desquels elle a pris des mesures extrêmement rapides. Comment ces mesures ont-elles été financées ? Par la fameuse contribution sur la rente inframarginale, sur les superprofits, qui a rapporté plus de 20 milliards d'euros au budget de l'État. C'est nous, en Européens, qui l'avons mise en place, permettant de financer cet amortisseur électricité pour l'ensemble de nos TPE et de nos PME.
Appliquée d'abord aux TPE, cette mesure a ensuite été élargie aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI). Je parle d'hypocrisie car, vous apercevant que vous n'aimiez pas tant les ETI que cela, vous la restreignez maintenant aux TPE et aux PME.
Agir ainsi, c'est faire non de la bonne politique mais de la politique politicienne, ce qui doit toujours être dénoncé. En outre, vous prétendez apporter une aide rapide, ce qui est absolument faux : cette mesure devra être notifiée à la Commission européenne, que vous le vouliez ou non.
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.
Mais bien sûr, chers collègues du Rassemblement national, à moins que vous ne vouliez sortir de l'Union européenne. Il faudra que la CRE définisse les tarifs réglementés et que vous changiez de contrats d'électricité. Voilà la vérité.
Pour toutes ces raisons, nous voterons évidemment contre cet article hypocrite.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Cet article 3 bis, qui n'existait pas dans la version initiale du texte et a été beaucoup modifié au Sénat, crée de la confusion quant à l'objet de la proposition de loi. Même si sa version actuelle est intéressante, il ne faut pas donner de faux espoirs aux entreprises qui seront bien vite déçues puisque la mesure ne sera pas applicable dans l'immédiat. Nous proposons donc d'étudier cette mesure ou au moins d'en décaler la mise en œuvre, comme je le propose dans mon amendement n° 35 qui sera appelé ultérieurement.
Sur les amendements identiques n° 27 et 47 , l'amendement n° 48 , les amendements identiques n° 26 et 49 , l'amendement n° 35 et l'article 3 bis, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés (membre de l'intergroupe NUPES) d'une demande de scrutin public.
Sur l'amendement n° 6 , les amendements identiques n° 4 , 10 et 37 et sur les amendements n° 56 et 57 , je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine – NUPES d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 27 et 47 .
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir l'amendement n° 27 .
Je souhaite indiquer au président Chassaigne que le groupe Renaissance a déposé précisément quarante-trois amendements sur l'ensemble des sept textes de votre niche parlementaire. Si vous appelez cela de l'obstruction… Pour ma part, je considère que c'est le débat minimum.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Je retiens que vous vous engagez à ne pas déposer plus de six amendements par texte au cours des semaines à venir.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RE.
C'est notre majorité qui, depuis le début de la crise, soutient les entreprises, les artisans, les petites entreprises. Quant à vous, vous n'avez pas voté pour la création du bouclier tarifaire, qui a permis de préserver des centaines de milliers d'artisans. C'est aussi simple que cela. Et je ne vous parle pas des autres dispositifs ! Les artisans auraient été dans une situation très délicate si nous avions appliqué votre politique.
Vous fustigez sans cesse les aides que nous apportons aux entreprises, ce dont nous sommes fiers. Vous nous le reprochez, mais aujourd'hui, comme par hasard, vous nous en proposez une autre.
De même, vous nous reprochez sans cesse de ne pas conditionner les aides que nous accordons aux entreprises. Or celle que vous nous proposez ici est généralisée et non conditionnée. Je vous demande un peu de cohérence, chers collègues.
Nous soutenons les entreprises, l'effort étant proportionnel notamment au coût de leur facture d'électricité. Quant à vous, il est clair que vous essayez de vous rattraper, de vous acheter une bonne conscience alors que vous n'avez pas voté pour les mesures de soutien précédentes.
Je suis désolée, mais vous avez dépassé votre temps de parole de deux minutes.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 47 .
L'amendement est identique à celui qui vient d'être présenté, mais je m'attacherai plus particulièrement aux effets néfastes de cet article pour EDF et les producteurs d'énergie en général, alors que les auteurs de la proposition de loi prétendent vouloir renforcer le groupe.
Rappelons que les TPE, PME et commerçants sont déjà protégés par le bouclier tarifaire et l'amortisseur électricité. Ces dispositifs ont été conçus car il n'est pas possible de rompre des contrats pluriannuels généralement signés pour trois années. Ils se réfèrent à la date de signature des contrats, souvent à la mi-2022, au moment où les cours étaient les plus hauts.
Ceux qui sont en contact avec les boulangers et leurs fédérations professionnelles savent parfaitement de quoi l'on parle et reconnaissent la réactivité avec laquelle nous avons agi pour que les dispositifs gouvernementaux puissent compenser les effets des contrats existants sans les casser.
J'en viens aux désagréments – pour ne pas dire plus – que cet article causerait aux énergéticiens s'il était adopté : tous les contrats devaient être défaits. Or les énergéticiens, notamment EDF, se sont engagés sur le long terme vis-à-vis de leurs propres fournisseurs à compenser la différence pour leurs consommateurs, c'est-à-dire les PME dont nous parlons. Cela, personne ne le dit, ne l'expose ni ne l'assume vis-à-vis d'EDF.
Enfin, il faut prévoir une compensation pour EDF, dans le respect des directives européennes. Vous avez choisi de ne pas le faire, afin de ne pas tomber sous le coup de l'article 40 de la Constitution. Nous ferons valoir cet argument auprès de Conseil constitutionnel. En attendant, le groupe EDF supporterait la charge à lui seul.
Pour toutes ces raisons, nous sommes très défavorables à cette extension du tarif réglementé.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Je ne refais pas le débat sur l'article 40, le président de la commission des finances ayant développé des arguments irréfragables sur ce point.
Nous n'allons pas non plus recommencer la discussion générale. Nous ne nions pas le fait que vous ayez mis en place des aides pour faire face à l'explosion du coût de l'énergie, mais nous constatons qu'elles ne permettent d'absorber que 30 à 35 % de l'augmentation pour les professionnels concernés – fleuristes, boulangers, poissonniers et autres.
Elles ne sont donc pas au niveau de la fragilisation de l'économie réelle, à laquelle nous apportons une réponse concrète. Avis défavorable.
Je n'ai pas, moi non plus, l'intention de refaire la discussion générale. Je voudrais seulement donner quelques éléments factuels concernant les conséquences d'une adoption de l'article 3 bis tel qu'issu du Sénat – je ne parle même pas des amendements à venir qui en élargissent le champ de manière importante.
Soyons précis : celles et ceux à qui vous avez assuré que cet article leur bénéficierait immédiatement doivent savoir à quoi ils feront face. Si l'article 3 bis était adopté, il faudrait notifier une nouvelle fois le dispositif concerné à la Commission européenne, définir une nouvelle formule de calcul du TRVE par la CRE, créer de nouvelles offres tarifaires et changer les contrats d'électricité. Tout cela prendrait évidemment plusieurs mois.
J'ajoute que les TRVE sont construits en partie sur la base du coût d'approvisionnement sur les marchés, obtenu en lissant les prix observés sur vingt-quatre mois. Tout changement de cible devrait donc être anticipé d'au moins deux ans pour permettre aux opérateurs proposant ces tarifs réglementés de constituer un approvisionnement en électricité selon ces modalités.
Bref : vous préparez peut-être, grâce à cet article, la crise d'après-demain – merci de la prévoir, même si nous ferons tout pour qu'elle n'ait pas lieu –, mais vous ne traitez en aucun cas la crise d'aujourd'hui, ni même celle d'hier. Cette dernière a été réglée grâce aux aides adoptées par la majorité et dont bénéficient déjà, depuis de nombreux mois, les artisans de France.
J'émets donc un avis favorable aux amendements de suppression de l'article 3 bis .
Nous avons déjà débattu plusieurs fois de cette question dans l'hémicycle. D'abord, nous devrions nous rassembler autour de la défense des boulangers et, plus généralement, des millions de commerçants de proximité indépendants, qui, rencontrant chaque jour des dizaines de millions de Français, font l'économie du quotidien.
Par ailleurs, si certains exhibent régulièrement les statistiques des défaillances d'entreprise, je rappelle, sans nier en rien l'existence de drames professionnels et parfois humains, que la France a enregistré, en janvier 2023 – les chiffres plus récents ne sont pas encore disponibles –, autant d'installations de nouvelles boulangeries que de défaillances.
Il peut, bien sûr, paraître tentant, au premier abord, d'appliquer le tarif réglementé de vente à toutes les TPE – et même sans doute, plus largement, à toutes les PME. Au-delà de son coût – qui n'est peut-être pas l'enjeu principal, même si nous pourrions évidemment en débattre –, une telle mesure ne s'appliquerait néanmoins pas immédiatement, car elle supposerait de changer les compteurs de tous les usagers qui ne bénéficient pas du TRVE. Une telle considération peut paraître technique, mais c'est la réalité.
Nous avons donc préféré prendre des mesures immédiates, dont les effets se sont cumulés. Chacun s'en souvient en effet : nous répondons à la crise de l'énergie de la même façon que nous avions répondu à la crise liée au covid, c'est-à-dire en nous adaptant à la dureté et à la durée de la crise, en rendant possible le cumul des dispositifs. Pour répondre à M. Jumel, ce n'est d'ailleurs pas seulement 30 % ou 35 %, mais bien jusqu'à 50 % du montant total des factures – et non pas seulement de leur augmentation – qui sont pris en charge, et ce depuis le 1er janvier 2023.
Je ne prétends pas que ces mesures permettront de résoudre toutes les situations, mais j'estime que l'enjeu prioritaire est de nous assurer que les 30 000 boulangers de France aient accès le plus rapidement possible à toutes ces aides. C'est ce que nous avons fait en mobilisant les préfectures. Les chambres de métiers et de l'artisanat (CMA) nous en remercient.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 213
Nombre de suffrages exprimés 213
Majorité absolue 107
Pour l'adoption 82
Contre 131
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 6 de M. Michel Sala est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Sans surprise, il est défavorable. L'extension du champ des bénéficiaires des TRVE qui y est proposée n'est tout simplement pas permise par le droit européen. La définition des PME n'est pas suffisamment claire pour qu'elles soient intégrées dans un dispositif de ce type. Il est donc indispensable de rejeter cet amendement, dont l'adoption, accessoirement, coûterait 11 milliards d'euros au groupe EDF – le fragilisant d'autant plus – ou à l'État, et ce alors même que le dispositif n'entrerait en vigueur qu'aux calendes grecques.
Je n'avais pas terminé ma défense de l'amendement n° 27 , visant à supprimer l'article 3 bis . Je ne suis pas d'accord avec le président de la commission des finances : j'estime que cet article viole très clairement deux articles de la Constitution.
Le premier est l'article 45. Je vous renvoie à la rédaction initiale de la proposition de loi, qui visait à nationaliser EDF et ne concernait nullement les TRVE : l'article 3 bis est clairement un cavalier législatif.
Ce n'est pas parce que vous dites que c'est un cavalier que c'en est un : à l'évidence, tout le monde n'a pas la même interprétation !
Le second est l'article 40 : il suffit de suivre les débats – certains ici évoquent les boucliers tarifaires, d'autres les TRVE – pour constater que les dispositions dont il est question auront un coût. Au fur et à mesure de l'examen de la proposition de loi et de son cheminement, les rapporteurs ont d'ailleurs modifié la rédaction du texte afin de justifier le fait que l'État ne compenserait pas la nationalisation d'EDF, ce qui prouve bien qu'il était initialement prévu qu'il le fasse. Le texte a donc clairement vocation à créer une charge supplémentaire pour les finances publiques.
Enfin, l'amendement n° 6 aborde une vraie question : pourquoi limiter l'application du TRVE aux entreprises de moins de dix salariés ? Après tout, certaines boulangeries emploient onze salariés.
C'est pour cette raison que les dispositifs que nous avons déployés couvrent toutes les PME, jusqu'à 250 salariés – et même au-delà, grâce au guichet unique, qui permet aux entreprises rencontrant un problème particulier du fait de l'augmentation des coûts de l'énergie de recevoir une réponse personnalisée.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
C'est toujours faire un mauvais procès à l'Europe que de prétendre à tort que certaines dispositions seraient contraires au droit européen, monsieur le rapporteur général.
Je vous invite donc, une nouvelle fois, à lire l'article 5 de la directive européenne n° 2019/944, qui permet bien de créer des tarifs réglementés. Quant aux PME, elles sont mentionnées à l'article 12 de cette même directive. Nous pouvons donc créer des tarifs réglementés spécifiques à ces entreprises dans un certain nombre de cas, en respectant les contraintes désormais fixées par le règlement européen n° 2022/1854, qui permet de recourir à des interventions d'urgence pour faire face aux prix élevés de l'énergie.
L'amendement n° 6 de Michel Sala n'est donc nullement contraire au droit européen : il est conforme à l'ensemble des dispositions que je viens d'évoquer. Il les respecte d'ailleurs davantage que votre propre amortisseur électricité, dont je rappelle qu'il contrevient à l'article 12 du règlement de 2022, puisqu'il porte sur la totalité de la facture d'électricité des PME, alors que l'article 12 impose de tenir compte de la consommation annuelle du bénéficiaire au cours des cinq dernières années.
Vous aurez bien compris que nous nous livrons ici à des arguties juridiques et que certains cherchent à faire porter à l'Europe une responsabilité qui n'est pas la sienne. Je tiens donc à rassurer l'Assemblée : l'amendement n° 6 est bien conforme au droit européen.
M. le rapporteur Brun connaît suffisamment le droit européen pour savoir que nous appliquons des mesures temporaires, liées à la crise en Ukraine, et que le droit européen autorise, dans ce cadre, les dispositifs proposés par le Gouvernement et adoptés par la majorité. Vous en avez eu la confirmation.
J'espère que la guerre en Ukraine le sera également. Vous prétendez que les mesures adoptées par la majorité ne sont pas conformes au droit européen.
Elles sont pourtant totalement conformes au dispositif transitoire lié à la crise en Ukraine, comme la Commission européenne l'a d'ailleurs confirmé.
La France n'est d'ailleurs pas la seule à avoir pris de telles mesures ! À vous écouter, la moitié de l'Europe serait dans l'illégalité !
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 149
Nombre de suffrages exprimés 125
Majorité absolue 63
Pour l'adoption 102
Contre 23
L'amendement n° 6 est adopté.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Sur l'amendement n° 8 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Les amendements n° 10 et 37 de M. Nicolas Ray sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Tous les élus présents ici ont été confrontés aux alertes des maires et des élus locaux de leur circonscription, qui ont vu la hausse du coût de l'énergie fragiliser leur capacité à mettre en œuvre des missions de service public. Les amendements de notre collègue sont raisonnables. Peut-être aurait-il fallu en étendre le champ à l'ensemble des collectivités territoriales, mais nous proposons d'adresser un premier signal aux villes moyennes concernées par cette explosion des coûts, en donnant un avis favorable à l'extension des tarifs régulés aux communes visées par l'amendement n° 10 ou, à défaut, par l'amendement n° 37 .
M. Olivier Marleix applaudit.
Pour les mêmes raisons que celles mentionnées au cours de la discussion générale, puis, à l'instant, à propos du droit européen, je suis évidemment défavorable à l'extension des tarifs réglementés proposée dans ces amendements. N'oubliez pas que leur adoption et celle de l'article 3 bis ainsi rédigé permettraient de régler le problème qui pourrait se poser dans trois ans, mais en aucun cas celui auquel nous faisons face actuellement.
Cette extension des TRVE, si elle était adoptée, risquerait, comme je l'ai indiqué au cours de mon intervention en discussion générale, de faire l'objet d'une saisine de la CJUE par la Commission européenne, pour non-conformité au droit européen. C'est une possibilité. Une décision de la CJUE pourrait ainsi, le cas échéant, obliger toutes les entreprises bénéficiaires à rembourser les aides d'État indûment perçues. Nous ferions courir un grand risque aux entreprises françaises en les exposant ainsi.
Mme Ségolène Amiot s'exclame.
Notre rôle est de protéger les entreprises, et non de les exposer à verser des remboursements l'année prochaine. Ne mentons pas aux Français en adoptant un amendement susceptible, à terme, de nuire aux entreprises et dont il est certain qu'elles ne bénéficieront pas instantanément, d'autant que les TRVE ne les concerneront pas toutes.
Comme le ministre délégué l'a souligné, l'extension des tarifs réglementés prendrait plusieurs mois et nécessiterait de nombreuses étapes. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé un amendement n° 35 , visant à reporter l'application de cette mesure. En outre, les entreprises concernées ne bénéficieraient pas du bouclier énergétique. Elles seraient ainsi doublement perdantes et courraient un risque non négligeable de devoir rembourser les sommes indûment perçues d'ici un an ou deux. Nous sommes donc opposés à cet amendement.
Je remercie le rapporteur pour son avis favorable aux deux amendements déposés par notre collègue Nicolas Ray. Pour prolonger ses propos, je précise que, la semaine prochaine, dans le cadre de l'examen des textes transpartisans inscrits à l'ordre du jour, notamment de la proposition de loi visant à soutenir les petites entreprises et les collectivités territoriales en cas de crise énergétique, je défendrai un amendement tendant à étendre le bouclier tarifaire à l'ensemble des collectivités territoriales – conseils départementaux, conseils régionaux, mais aussi communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) –, quelle que soit leur taille. Les amendements dont il est question ici constituent un premier pas, que nous espérons pouvoir franchir aujourd'hui.
Plusieurs demandes d'intervention m'ont été adressées. Souhaitez-vous que je donne la parole à plus de deux orateurs par amendement ?
« Non ! » sur plusieurs bancs à gauche de l'hémicycle.
Non : une telle décision requiert l'assentiment de l'ensemble des députés présents.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Il vise à répondre au cri de détresse que de nombreux députés, de tous bords politiques, ont entendu dans les quartiers populaires de leur circonscription. Je pense aux locataires de HLM, qui ont appris, ces derniers mois, que leurs charges locatives mensuelles augmenteraient de 50, 100, 150, voire 200 euros, du fait de l'augmentation des prix de l'énergie. Je suis sûr que vous avez rencontré certains de ces locataires et que vous avez mesuré leur détresse. Les occupants des HLM sont en effet des personnes qui travaillent dur, touchent de faibles salaires et perçoivent des petites retraites. Certaines d'entre elles sont tout simplement incapables de payer 100 ou 200 euros supplémentaires chaque mois et se trouvent plongées dans des situations terribles.
Si leurs charges locatives augmentent, c'est tout simplement parce que les bailleurs sociaux n'ont pas accès aux tarifs réglementés de l'électricité et du gaz, et qu'ils sont exposés aux prix du marché.
Vous me rétorquerez peut-être, monsieur le ministre délégué, qu'un bouclier tarifaire a été mis en place pour l'habitat collectif. Or tous nos déplacements sur le terrain nous ont permis de constater qu'il ne fonctionnait pas, qu'il ne protégeait pas réellement les locataires de HLM. D'ailleurs, l'USH, l'Union sociale pour l'habitat, a dit très clairement que ce dispositif était défaillant car il ne permettait pas d'assurer l'égalité de traitement entre un locataire de HLM et un consommateur individuel.
À moins que vous estimiez qu'il est normal qu'un locataire de HLM paie les superprofits de Total ou d'Engie avec ses charges locatives, vous devez agir en permettant aux bailleurs sociaux – et, in fine, aux locataires de HLM – d'accéder aux tarifs réglementés. C'est ce que nous vous demandons.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est clair que les milieux modestes, les habitants des quartiers populaires sont les premières victimes de la crise et de l'inflation que nous connaissons. Le coût de l'énergie explose tandis que celui de l'essence reste supérieur, à hauteur de 16 %, au niveau qui était le sien au moment du déclenchement de la guerre en Ukraine. Nous savons aussi que l'inflation des produits alimentaires de première nécessité percute, de plein fouet, ceux qui perçoivent les revenus les plus modestes.
C'est la raison pour laquelle, même si la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, les rapporteurs que nous sommes émettent un avis favorable. Nous souhaitons que soit prise en compte la situation spécifique des locataires de HLM, considérablement fragilisés par la période que nous traversons.
M. William Martinet applaudit.
Il est défavorable pour toutes les raisons déjà évoquées, entre autres le délai nécessaire, le fait que vous vous battiez pour la crise d'après-demain ou encore le coût budgétaire.
Par ailleurs, il est évidemment impossible de prendre une telle mesure, contraire au droit européen – même si, ici, certains ont tendance à s'asseoir dessus.
Surtout, nous avons intégré les organismes HLM collectifs au dispositif du bouclier tarifaire. La Première ministre s'y est engagée en septembre et cela a été mis en application. Si vous avez observé, ici ou là, des exceptions, c'est-à-dire des tarifications qui ne correspondraient pas à ce qui a été voté par la représentation nationale, contactez-nous – comme vous pouvez le faire à propos des boulangers, des TPE et des PME. Nous nous assurerons que les organismes concernés bénéficient bien du dispositif voté par cette majorité – à laquelle vous n'avez malheureusement pas souhaité vous joindre.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 182
Nombre de suffrages exprimés 166
Majorité absolue 84
Pour l'adoption 96
Contre 70
L'amendement n° 8 est adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe Écolo – NUPES.
L'amendement n° 39 de Mme Christine Arrighi est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Cet amendement vise à sensibiliser les consommateurs, ménages comme entreprises, à l'impact écologique de la production d'énergie.
La commission a émis un avis défavorable. À titre personnel, j'y suis favorable. Néanmoins, dans un souci d'efficacité, il serait peut-être préférable de ne pas trop alourdir notre texte car cela accroîtrait les risques de contentieux. Or nous souhaitons aboutir à une adoption après vote conforme par le Sénat. C'est pourquoi je formule plutôt une demande de retrait.
Je tiens d'abord à préciser que beaucoup a déjà été fait en la matière. Conformément au code de l'énergie, les TRVE, sont calculés par la CRE de manière à être contestables – j'ajoute que les délibérations sont publiques.
D'autre part, le code de la consommation prévoit déjà l'information du consommateur. Des dispositifs tels que Ecowatt – une application que, j'espère, vous avez tous téléchargée sur votre téléphone – ou des campagnes de publicité contribuent à la bonne information de tous sur les enjeux de sobriété.
Enfin, il ne nous paraît pas opportun d'informer uniquement certaines classes de consommateurs – en l'espèce, les bénéficiaires d'un TRVE. Après tout, la sobriété concerne tout le monde. L'ensemble des consommateurs devrait, le cas échéant, en bénéficier. Avis défavorable.
J'aimerais préciser qu'un travail important a été mené par les services concernés, par l'administration, par l'État ou encore par EDF et les énergéticiens, afin que notre consommation baisse. Je veux saluer l'effort fait par l'ensemble de nos concitoyens mais aussi par les entreprises et par les collectivités territoriales. Le résultat, en matière de sobriété, est assez remarquable puisque, si l'on isole les effets liés à la température extérieure, la baisse atteint près de 10 %.
On sait donc comment informer. Les dispositifs existent déjà, il ne me semble pas nécessaire d'en ajouter.
Soucieux de faciliter une adoption conforme, nous allons retirer l'amendement. Je tenais cependant à bien préciser que si nous prenons cette décision, c'est parce que nous avons été sensibles à l'argumentation de M. le rapporteur et non à celle du Gouvernement.
Le ministre vient en effet de saluer les efforts faits en matière d'information sur la sobriété. Or nous devons aller beaucoup plus loin qu'une campagne consistant à nous encourager à porter des cols roulés dans les maisons pour résoudre le problème de la transition énergétique. Chacun doit être conscient du coût économique et écologique réel de notre modèle énergétique, de son impact environnemental. C'est un facteur clé de la transition énergétique.
L'amendement n° 39 est retiré.
Ils sont retirés. À la suite de l'adoption de l'amendement n° 6 , le n° 56 est satisfait. Il en va de même pour le n° 57 à la suite de l'adoption du n° 7.
Lorsque les amendements sont repris, il n'y a pas de discussion. En revanche, je demande l'avis des rapporteurs et du Gouvernement.
Quel est l'avis de la commission ?
Vous aurez noté la manœuvre – avortée – de notre collègue qui a tenté de faire obstruction.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Au risque de déplaire au rapporteur général du budget et à la majorité, le Gouvernement, de façon assez surprenante, est d'accord avec le rapporteur Jumel, qui vient d'émettre un avis défavorable sur ses propres amendements.
L'extension du champ des bénéficiaires des TRVE n'étant pas permise par le droit européen, je suis défavorable à ces deux amendements et vous invite à les repousser.
Je remarque tout d'abord que l'extension du champ des bénéficiaires des TRVE à laquelle nous venons de procéder, pour des sommes considérables, nous catapulte dans le passé, plus précisément dans la nuit de l'examen des programmes 174 et 345 du projet de loi de finances pour 2023. La discussion avait alors été interrompue, faute de ressources pour compenser les dépenses votées par des oppositions qui avaient déjà conjugué leurs forces sur des questions liées à l'énergie – décidément.
Cet amendement vise à préciser que cette extension n'entraîne pas l'application des dispositions de la loi de finances créant le bouclier, les contrats couverts par la loi de finances étant bien ceux que permet la directive de 2019, mentionnée tout à l'heure par l'un des rapporteurs et bien expliquée à l'instant par le ministre délégué.
Il faut être cohérent. Cette mesure ne doit pas représenter un coût budgétaire, et il convient donc d'être clair sur le fait que cette charge ne sera pas compensée par l'État.
Certes, cet amendement prive la disposition prévue à l'article 3 bis de sa portée, mais elle n'était de toute façon pas nécessaire puisque d'autres dispositifs sont déjà prévus.
La parole est à M. Alexandre Sabatou, pour soutenir le sous-amendement n° 59 .
La réalité, c'est que, si l'extension des nouveaux tarifs réglementés ne s'accompagne pas de l'application du bouclier tarifaire, la charge incombera à EDF. Par cet amendement, c'est donc EDF que vous sacrifiez.
Comme je l'ai expliqué dans la discussion générale, on pourrait éviter le bouclier tarifaire en se séparant du système spoliateur qu'est l'Arenh et en reformant enfin le marché européen de l'énergie, ce que vous refusez de faire. Bruno Le Maire dit pourtant depuis 2021 qu'il veut s'y atteler mais il ne le fera qu'en 2025 – et encore, seulement si l'Europe l'accepte.
Ce sous-amendement prévoit donc que l'extension des tarifs réglementés s'accompagne d'une dérogation au mécanisme de l'Arenh afin de ne pas pénaliser EDF.
L'avis de la commission et des rapporteurs est défavorable à l'amendement de M. Lacresse, qui me semble contradictoire avec l'argumentation que nous subissons depuis la première lecture du texte. On nous répète en effet que les dispositions de l'article 3 bis seraient contraires à l'article 40 de la Constitution parce qu'elles créent une charge. Or voilà que vous proposez un amendement qui consiste à ne pas prévoir de création de charge.
En première lecture, nous avions adopté un amendement visant, comme le vôtre, à préciser que nous ne voulions pas créer de charge. Le Sénat a supprimé cette précision, considérant que le président Coquerel avait eu raison de rappeler que l'article 181 de la loi de finances pour 2023 ne s'appliquait qu'aux tarifs réglementés déjà existants en 2022 et non à ceux qui allaient être créés par notre texte.
Nous maintenons cette position. L'amendement de M. Lacresse est satisfait, puisque l'Assemblée comme le Sénat ont clairement affirmé que l'article 181 de la loi de finances pour 2023 ne s'appliquait pas aux dispositions que nous avions votées.
S'agissant du sous-amendement de M. Sabatou, nous pouvons certes partager la volonté de supprimer l'Arenh.
Tel n'est pas, cependant, l'objectif de cette proposition de loi. Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.
Si vous supprimez l'Arenh, il faudra nous dire comment vous faites pour protèger les entreprises, les ménages, les consommateurs, les TPE, les PME ou encore les artisans tels que les boulangers.
C'est la question que nous posons depuis des semaines, nous n'avons pas de réponse !
Tous bénéficient en effet aujourd'hui d'un tarif de l'électricité inférieur.
Je m'apprêtais à émettre un avis très défavorable à l'amendement de M. Sabatou pour ces mêmes raisons. Mais les masques tombent et je suis surpris de constater que vous êtes tous d'accord aujourd'hui pour augmenter les factures de tous les Français – des plus riches aux plus modestes en passant par les classes moyennes – d'au moins 50 % et pourquoi pas de les multiplier par deux, trois ou quatre.
Non seulement vous voulez supprimer l'Arenh et augmenter les factures pour tout le monde mais, par ailleurs, pour simplifier l'affaire, vous ajoutez un TRVE pour des entreprises qui n'en ont pas besoin. Car celles qui en ont besoin sont déjà couvertes par les dispositifs votés par la majorité.
Plus nous avançons dans l'examen de cette proposition de loi, moins je comprends quoi que ce soit à vos objectifs, si ce n'est, bien sûr, de donner l'impression de défaire la majorité grâce à une alliance assez improbable entre deux visions extrêmement différentes de l'Europe, de l'énergie et du développement de l'industrie.
Pour être plus précis, monsieur Sabatou, si l'objectif de votre sous-amendement est de préciser que les consommateurs bénéficiaires de ces nouveaux TRVE sont exposés au marché parce qu'ils ne seraient pas protégés par l'Arenh, alors ce ne sont plus des TRVE. Dès lors, la mesure est vidée de son sens car l'Arenh doit permettre de protéger l'ensemble des consommateurs, ne vous en déplaise – eh oui, elle protège les grands, les petits, les industriels, les TPE et les ménages. Il n'y a donc pas de raison d'en exclure certains.
L'amendement de M. Lacresse est très intéressant parce qu'il permet de faire tomber les masques. Il montre qu'aujourd'hui vous refusez d'admettre que, si jamais vous étendiez le champ des TRVE à d'autres acteurs, vous souhaiteriez en faire un bouclier tarifaire et donc engager des charges qui incomberaient soit à l'opérateur national – que vous fragiliseriez – soit à l'État.
Avis défavorable au sous-amendement et favorable à l'amendement.
Depuis le temps que nous avons ce débat sur le prix de l'énergie, je suis tout de même assez stupéfait par le fait que le Gouvernement ne cherche pas de solution à la hauteur du problème. Vous vous cachez systématiquement, monsieur le ministre délégué, derrière la position de la Commission européenne qui vous interdirait de faire davantage. En réalité, vous avez accepté les règles de marché européennes, vous n'avez pas cherché un seul moment à en sortir – sauf avant que le chancelier allemand fasse comprendre qu'il ne le voulait pas, et le Gouvernement y a alors très vite renoncé.
On aurait pourtant pu s'extirper de ces règles de fixation des prix, en concevant un système proche, voire identique, au système de la dérogation ibérique, ou bien un système de fixation des prix plaque par plaque, au sein de l'Union européenne. Mais votre gouvernement n'y a pas vraiment travaillé. Les patrons de plusieurs organismes, auditionnés dans le cadre de la commission d'enquête présidée par Raphaël Schellenbererger, ont indiqué qu'il n'y a pas eu de commande du Gouvernement pour travailler sur le sujet. Vous avez accepté les règles européennes, condamnant ainsi nos entreprises, nos collectivités locales et les bailleurs sociaux à payer une électricité à un prix de marché totalement délirant. Vous les avez même incités à renouveler leur contrat, parfois au pire moment, en novembre ou en décembre, au moment du pic spéculatif.
C'est donc bien vous qui avez mis tous ces gens dans des situations extrêmement difficiles. Vous nous dites : « Pas de problème, on vous a mis en place le bouclier tarifaire. » Cela ne vous pose jamais de problème d'utiliser l'argent public sous forme de subventions, c'est censé être la solution. Vous mettez de l'argent public pour subventionner un prix spéculatif,…
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – M. le rapporteur Sébastien Jumel applaudit également.
Mais vous n'avez à aucun moment cherché à échapper à ce délire, à sortir de ce carcan. C'était pourtant possible, puisque notre code de l'énergie prévoit une clause de sauvegarde qui vous permet de faire temporairement ce que vous voulez.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous avez su l'utiliser pour construire ce bouclier tarifaire, mais sans aller jusqu'au bout. Aussi, beaucoup de nos PME n'ont pas de réponse aujourd'hui pour faire face à la situation. Je rappelle que l'amortisseur consiste en des subventions de 23 % à 25 % en moyenne, quand la facture a été multipliée par sept, par huit, par neuf, voire par dix, ce qui leur laisse un reste à charge totalement insupportable. Et la conséquence de tout cela, regardez-la en face, monsieur le ministre délégué : c'est le taux de défaillance de nos entreprises, qui est en train d'exploser et auquel vous n'apportez aucune réponse.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et LFI – NUPES. – M. Davy Rimane et M. le rapporteur Philippe Brun applaudissent également.
M. le président du groupe Les Républicains vient d'expliquer en creux la pertinence du dispositif que nous proposons. Nous ne voulons pas utiliser le TRVE comme dispositif de protection de nos entreprises et de nos commerces mais bien le bouclier tarifaire, dont le fonctionnement s'adapte au fur et à mesure de l'évolution des cours.
Si notre amendement est adopté, il permettra d'empêcher que la gauche de l'hémicycle crée, par pure idéologie, un dispositif d'extension du monopole et des tarifs réglementés qui marquerait le retour à l'ancienne réglementation.
Or il appartient bel et bien à la loi de finances de définir les conditions dans lesquelles sont protégés les TPE et les commerçants.
Monsieur le président Marleix, pas vous ! Je regrette que vous ayez loupé une partie des débats, notamment la discussion générale et les réponses que j'ai eues l'occasion de faire à la députée Alma Dufour sur les défaillances, mais je connais votre rigueur, votre attachement aux chiffres…
…et vous savez très bien que, si les défaillances ont augmenté en mars 2023 par rapport à celles enregistrées en mars 2022, où elles étaient à un niveau historiquement bas, c'est parce que le « quoi qu'il en coûte » avait mis alors l'économie sous formol. On est aujourd'hui aux alentours de 30 000 à 35 000 défaillances annuelles, contre plus de 40 000 tous les ans depuis la nuit des temps ! On a aujourd'hui un retour à la normale. On peut le regretter, mais vous croyez comme moi, je le suppose, à la création destructrice : il y a tous les ans des entreprises qui meurent… et d'autres qui naissent. Et depuis six ans il naît des centaines de milliers d'entreprises de plus par rapport à celles qui meurent…
…et c'est en grande partie le résultat de la politique de ce gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
On a créé 1 700 000 emplois dans ce pays depuis six ans, et, derrière ces emplois, des entreprises que l'on a protégées contre la hausse des coûts de l'énergie.
Si vous voulez reprendre le débat sur le marché de l'énergie, reprenons-le, mais avec rigueur. Vous savez bien que ni l'Espagne ni le Portugal ne sont sortis du marché de l'énergie : ils ont compensé la baisse subventionnée de l'énergie par des taxes prélevées sur les contribuables, et ce dispositif coûte une fortune.
Je rappelle aussi que, grâce à notre bouclier tarifaire, l'inflation en France est inférieure à celle de tous les autres pays européens…
…parce que, si nos compatriotes font certes face à une inflation alimentaire importante, ils ont bénéficié d'un bouclier énergétique qui les a protégés plus qu'ailleurs en Europe.
Pour conclure, je note que votre argumentation a un seul intérêt : elle vous conduit à voter contre l'article, puisque celui-ci prévoit de faire exactement ce que vous nous reprochez, à savoir accorder des subventions, totalement à l'aveugle, qui vont coûter des milliards à l'État. Si vous tenez à la tenue des comptes publics, votez contre l'article 3 bis et demandez aux collègues de votre groupe de faire de même. Il n'a aucun sens, il coûte une fortune, il est anti-européen et ne servira à rien avant deux ans. Votez contre, votez avec nos députés !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Le sous-amendement n° 59 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 182
Nombre de suffrages exprimés 182
Majorité absolue 92
Pour l'adoption 72
Contre 110
L'amendement n° 48 n'est pas adopté.
Nous avons mis en place, pour aider les entreprises, plusieurs dispositifs qui répondent à leurs difficultés de manière ciblée, ce qui est, je pense, plus raisonnable que d'avoir une réponse tous azimuts, comme le proposent certains.
Votre réponse est inadaptée ! Il fallait s'inspirer de l'Espagne ou du Portugal !
Il faut néanmoins rester vigilants car, si la crise devait durer, voire s'amplifier, il faudrait enrichir ou modifier les dispositifs actuels, mais en aucune manière comme le proposent nos collègues. Si nous étendons le TRVE aux PME, elles paieront le mégawattheure 340 euros !
« Eh oui ! » sur quelques bancs du groupe RE.
Alors que le dispositif que nous proposons aboutit à 280 euros maximum après l'amortisseur. L'application de l'article 3 bis, se traduirait donc par une augmentation du tarif pour nos entreprises.
Ce serait évidemment différent s'il était prévu un bouclier, mais il n'en est pas question.
De surcroît, on a déjà expliqué qu'il faudrait des mois et des mois, probablement une année, pour modifier l'ensemble des contrats en cours, et sans aucune garantie de pouvoir tous les revisiter. Il y a des différences très importantes d'une entreprise à une autre, certaines étant protégées parce qu'elles se sont engagées sur trois ans avant la crise et qu'elles n'ont donc pas besoin aujourd'hui de soutien : pourquoi dès lors leur appliquer un TRVE ? Il y en a d'autres, au contraire, qui ont contracté au pic des prix de l'énergie et pour lesquelles il faut prévoir un soutien spécifique, dans le cadre du guichet unique.
Par conséquent, pour des raisons financières et par souci d'efficacité, il faut prévoir l'aide ciblée que nous proposons, et non une aide qui arrose à tout va, mettant en péril les finances de l'État.
M. David Valence applaudit.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 49 .
M. le rapporteur Brun a ouvert la boîte de Pandore des citations de la directive de 2019, et je lui emboîte le pas une fois encore en rappelant que l'alinéa 4 de l'article 9 qu'il a cité tout à l'heure est tout à fait clair sur ce point : il faut notifier le dispositif à la Commission européenne. Le tarif n'est pas un élément anodin, puisque l'unification du marché européen de l'électricité s'est construite par rapport à lui et même en partie contre lui. Ce marché européen unifié permet aujourd'hui à de nombreux Européens de bénéficier de l'électricité, à un coût moindre.
Ainsi, tous les soirs, nous en échangeons avec nos partenaires allemands des quantités importantes d'électricité, selon les besoins liés à nos modes de vie respectifs ; cela évite le gaspillage d'investissements qui, sans cela seraient inutilisés. Nous tenons donc à respecter ce cadre, ce qui suppose de respecter la règle de la notification.
J'en profite pour appeler l'attention de notre assemblée et du Gouvernement sur d'autres dispositions de la directive de 2019 qui n'ont pas été débattues à l'occasion de l'examen de cette proposition de loi, notamment l'article 47, sur la dissociation des réseaux, qui renvoie à un autre débat sur les activités de transport d'électricité. Ces dispositions seront une grande ressource pour la deuxième lecture au Sénat et dans la perspective probable d'une saisine du Conseil constitutionnel.
S'agissant de la notification, il est vrai que les dispositions que nous venons d'adopter concernant les collectivités nécessitent une notification, mais nous ne sommes pas obligés de l'écrire dans la loi. Je crois savoir, monsieur Lacresse, monsieur le rapporteur général Cazeneuve, que vous connaissez des membres du Gouvernement à qui vous pouvez demander de procéder à la notification. Ces amendements sont donc superfétatoires, et l'avis est défavorable.
J'ai beaucoup du respect pour le rapporteur Brun et pour le rapporteur général du budget, mais je n'attends pas qu'ils me disent ce que je dois faire. Cela étant, je me conformerai évidemment au choix de votre assemblée. Je tiens à préciser néanmoins que la mise en place de tarifs réglementés d'électricité ne relève pas du droit des aides d'État. Je le répète, la notification au titre du droit européen sectoriel, plus précisément de l'article 5 de la directive 2019-944, demeure nécessaire, et j'émets donc, évidemment, un avis favorable à ces amendements identiques.
Je salue le fait que nos collègues Cazeneuve et Lacresse en aient appelé au cadre européen, parce que je pense qu'il ne faut pas l'oublier. Nous n'évoluons pas en huis clos, mais dans le cadre du marché européen de l'énergie, ce qu'il faut toujours avoir en tête. Nous devons donc en respecter les règles, posées depuis 1996 par les trois paquets énergie. C'est pourquoi le groupe démocrate est favorable à ces amendements.
Monsieur le ministre délégué, pourquoi perdez-vous toutes vos demandes de vote ou presque depuis le début de l'après-midi ?
Exclamations sur divers bancs du groupe RE.
C'est bien parce qu'il y a la même union dans le pays contre cette folie. Vous nous dites, monsieur Cazeneuve, que les entreprises paieront au maximum 280 euros le mégawattheure… Mais quand le coût de production est de 60 euros, cela apparaît à tout le monde comme une folie ! Vous pouvez aller demander aux boulangers ou aux bouchers, mais il en est de même chez les sous-traitants de l'industrie automobile, et jusqu'au patron des patrons, Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef, qui dit que c'est une folie ! Cela apparaît aussi comme une folie pour les maires. Encore une fois, c'est ce que tout le monde considère comme une folie que vous justifiez depuis un quart d'heure dans cet hémicycle, uniquement au nom d'une directive européenne, de l'unification du marché européen et du cadre européen !
Comment se peut-il qu'on soit capable de produire en France au niveau national ou au niveau local, à un prix de 60 euros le mégawattheure, et qu'on se retrouve à devoir passer par un marché européen qui nous le fait monter, et en plus avec un effet yo-yo ? ! L'évidence, pour tout le pays, c'est qu'il faut sortir de cette folie ! Et vous, vous maintenez des dogmes avec fanatisme alors que l'évidence pour tous, c'est que ça ne fonctionne plus, si tant est que cela ait jamais fonctionné.
Il faut en sortir.
On pourrait très bien avoir un marché national avec des prix réglementés autour de 60 euros, et, lorsque nous avons besoin de consommer plus d'énergie que nous pouvons en produire, faire appel au marché européen et au marché international, même s'il y a beaucoup plus de spéculation.
En tout cas, il apparaît comme une évidence que ce que vous poursuivez ne fonctionne plus et que désormais il faut en sortir !
Applaudissements sur divers sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Merci d'être là, monsieur Ruffin ! Vous vous obstinez à ouvrir des tiroirs qui le sont déjà depuis quatre heures ; plusieurs députés, ici, ont posé des tonnes de questions au Gouvernement sur ce sujet et nous ont même reproché d'y répondre un peu trop longuement. Et vous, vous débarquez dans l'hémicycle comme une fleur et, j'insiste, vous ouvrez des tiroirs déjà ouverts. Vous parlez d'un sujet qui n'a rien à voir avec la présente proposition de loi et, de surcroît, vous m'interpellez personnellement, comme d'autres l'ont fait auparavant, en donnant de la France une de ces visions misérabilistes dont vous avez le secret !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Monsieur Ruffin, aujourd'hui, les entreprises industrielles que vous avez décrites comme moribondes depuis des semaines sont en train de redémarrer. Je le sais car je leur rends visite toutes les semaines, qu'il s'agisse d'Arts Energy, de Duralex, d'Aluminium Dunkerque ou de Carelide, au sujet de laquelle vous m'aviez d'ailleurs interpellé il y a six mois. Alors que, depuis, nous avons retrouvé un repreneur français de qualité pour cette entreprise, vous n'avez jamais manifesté une quelconque satisfaction.
Mêmes mouvements.
Si un jour vous venez au pouvoir, je peux vous assurer que l'entrepreneur ira ailleurs, parce qu'il fait partie de ces soi-disant profiteurs que vous montrez du doigt ! Vous avez tort de penser cela, car c'est un entrepreneur de qualité, qui a créé de la richesse et de l'emploi en France depuis des années, notamment à Lyon et même chez vous, à Tourcoing, où il s'est rendu pour reprendre une entreprise.
Alors arrêtez le misérabilisme et épargnez-nous vos leçons ! Notre gouvernement a fait plus pour l'économie française que vous ne le ferez jamais.
Nous sommes aujourd'hui en train de redémarrer l'industrie ;…
…et je peux vous dire une chose : ce n'est pas grâce vous et à vos incantations.
Quant au marché européen de l'énergie, arrêtez de rêver en couleur.
Oui, nous sommes vingt-sept en Europe et, de ce fait, les négociations sont difficiles.
Nous les prenons à bras-le-corps en vue d'une réforme en profondeur de ce marché. Et, ne vous en déplaise, nous allons y arriver, parce que cela fait six ans que nous changeons l'Europe comme vous ne l'avez jamais changée, comme ceux qui rêvent d'en sortir tous les jours.
MM. Ian Boucard, Jocelyn Dessigny et Laurent Jacobelli s'exclament.
Vous savez quoi ? Nous allons continuer ! De toute évidence, cette Europe est imparfaite – je sais que le drapeau européen n'est pas hissé sur le fronton de toutes nos mairies. Mais grâce à elle, nous avons de l'électricité, en hiver comme en été, ne vous en déplaise !
« Excellent ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Il se fonde sur l'article 100, relatif à la bonne tenue des débats. Une précision s'impose : M. Ruffin a eu des difficultés à trouver les termes pour définir l'alliance qui se dessine ici entre la NUPES et l'extrême droite.
Clairement, on ne peut pas la qualifier de social-démocratie. Pour ma part, je vous propose de la désigner sous le nom de « front populiste » – voilà qui simplifiera les choses !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Ce n'est pas un rappel au règlement, cher collègue ! Nous poursuivons donc nos débats.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 184
Nombre de suffrages exprimés 184
Majorité absolue 93
Pour l'adoption 73
Contre 111
L'article 3 bis prévoit d'étendre les TRVE à l'ensemble des entreprises. Cet amendement entend seulement proposer une application réaliste et opérationnelle de cette extension, si elle devait avoir lieu. Il s'agit de ne pas mentir aux Français, en particulier aux entreprises. Il existe des contraintes techniques et juridiques au niveau européen – elles ont été rappelées – et la CRE doit pouvoir fixer les nouveaux tarifs. Tout cela prend du temps. Aussi, par respect des administrations, des opérateurs et de tous ceux qui seront concernés par ces nouveaux TRVE appliqués à l'ensemble des entreprises, je vous demande de reculer la date d'entrée en vigueur du texte au 1er octobre 2024. Cela nous permettra de disposer des moyens objectifs pour sa mise en œuvre.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Cet amendement me semble extrêmement raisonnable et pragmatique, en ligne avec la réalité de ce qui a été voté ici. L'article 3 bis vise à élargir les conditions d'accès aux TRVE ; je le répète, nous sommes contre. Mais s'il est adopté, nous veillerons à ce que la date d'entrée en vigueur du texte soit fixée au plus tard le 1er octobre 2024 – encore une fois, ce n'est que le reflet de la réalité des mesures que vous avez votées, ne vous en déplaise. J'envisageais de m'en remettre à la sagesse de cette assemblée mais, finalement, j'émets un avis favorable.
C'est un amendement de bon sens que présente là M. Lecamp ; le groupe Renaissance va évidemment le voter.
Nous avons été interpellés au sein de cet hémicycle par M. Ruffin, qui fait ici ses apparitions de manière très spontanée – comme à chaque débat, d'ailleurs. Finalement, il est plutôt cohérent que la majorité se fasse battre sur ce texte, car une alliance de circonstance se forme entre la NUPES et le Rassemblement national :…
…ils ont exactement le même projet et proposent le même montant de dépenses.
Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI – NUPES.
Plus de 11 milliards d'euros ne sont pas financés au travers de ce texte, et nous ne savons pas qui en sera comptable : sera-ce l'État ou EDF, ou seront-ce les entreprises ? Nous n'avons pas cette réponse. En réalité, cela va à l'encontre des leçons de morale que Marine Le Pen passe son temps à donner sur les plateaux de télévision, expliquant que cette majorité n'a pas la maîtrise du déficit public ni de la dette.
Pourtant, aujourd'hui, vous vous apprêtez à signer un chèque en blanc de 11 milliards d'euros, en ne sachant absolument pas qui en sera comptable.
Encore une fois – peut-être même une dernière fois, puisque ce débat arrive bientôt à son terme –, j'aimerais appeler à une certaine raison nos collègues du groupe Les Républicains, eux qui ont voté contre le programme de stabilité et qui nous reprochent de ne pas lever davantage de recettes ou, en tout cas, de diminuer les dépenses publiques jusqu'à 2027.
Or ils s'apprêtent à signer ce chèque en blanc sans savoir, eux non plus, qui en sera comptable.
Ce texte montre une seule chose : l'incohérence des projets des uns et des autres, et la collusion entre la NUPES et le Rassemblement national, qui s'allient dans le populisme et la démagogie
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
et font croire aux Français qu'ils vont pouvoir régler leurs problèmes. En réalité, ils vont voter un texte qui n'a aucune cohérence et ne devrait normalement pas exister.
Nouvelles protestations. – M. Thomas Rudigoz applaudit.
Il semble que le groupe Renaissance s'égare. La majorité, qui est aujourd'hui en minorité sur tout le territoire français, essaye de nous donner des leçons de morale et fait croire, depuis tout à l'heure, qu'il existe une alliance insensée et contre-nature entre le Rassemblement national et l'extrême gauche. Il faut vous poser les bonnes questions : en réalité, c'est vous qui êtes contre-nature, contre le peuple, et qui n'avez plus de légitimité !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Aujourd'hui, s'il y a une telle alliance, c'est à cause de vous et de votre gouvernement qui se bat contre le peuple ;…
Nouveaux applaudissements sur les bancs du groupe RN et exclamations sur les bancs du groupe RE. – Mme Nadia Hai et M. Jocelyn Dessigny s'interpellent mutuellement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 185
Nombre de suffrages exprimés 166
Majorité absolue 84
Pour l'adoption 77
Contre 89
L'amendement n° 35 n'est pas adopté.
Ces amendements sont les deux faces d'une même médaille. L'alliance entre la NUPES et le Rassemblement national, dont nous venons de parler et qui se manifeste à chaque instant, décide de créer un dispositif coûteux pour EDF, sans le compenser par l'argent de l'État, de façon à éviter le couperet de l'article 40. Nous sommes en droit de nous interroger ! Parmi les directives dont il a été enfin abondamment question dans cet hémicycle, on trouve la directive de 2019, qui prévoit une obligation de compensation à la charge du budget de l'État.
Les rapports que nous demandons au travers de ces amendements seront utiles pour déterminer l'ampleur du soutien qu'il faudra apporter à EDF. Au fond, cette proposition de loi se voulait un étai à EDF mais, en réalité, elle va lui coûter beaucoup. Je pense moins au texte du Sénat qu'à celui dont nous discutons cet après-midi – plusieurs milliards d'euros semblent ne pas être compensés mais, évidemment, cette évaluation ne pourra être vérifiée que beaucoup plus tard.
Les deux amendements sont légèrement différents : l'amendement n° 50 vise à évaluer la charge pour le budget de l'État, tandis que l'amendement n° 51 tend à évaluer la charge pour EDF, qui ne pourra probablement pas être compensée, au sens des directives, sur le budget de l'État. C'est un coup à défaire tous les contrats pluriannuels avec les fournisseurs dont nous parlons depuis le début de l'après-midi. Pour EDF, cette désorganisation aura un coût, c'est certain.
En général, compte tenu des charges qui reposent sur les services de l'État, nous ne sommes pas très gourmands des demandes de rapport. Mais, en l'occurrence, l'un et l'autre me semblent pertinents. Nous avons eu un débat de quelques heures où certains, croyant en l'existence de l'argent magique, ont affirmé qu'il n'y aurait de charge pour personne. Pour ma part, je pense que voter ces deux amendements serait une excellente idée, car ces rapports, dans l'intérêt de tous les groupes, assureraient la transparence nécessaire sur le coût réel de cette proposition de loi. J'avais prévu un avis de sagesse, mais j'émets finalement un avis favorable.
Je serais extrêmement bref : je soutiens les amendements de M. Lacresse et ces demandes de rapport.
À vrai dire, je suis agréablement surpris de voir, ces dernières semaines, toutes les oppositions manifester un intérêt particulier, parfois impressionnant, pour les agences de notation. Sur les bancs de la gauche, comme sur ceux de la droite, mes collègues semblent très attachés au sérieux financier, au respect de nos deniers publics et à notre trajectoire budgétaire. Il y a quelques jours, ils ont hurlé au loup, nous reprochant d'avoir fait de la gabegie financière. Aujourd'hui, ils s'allient au sein d'un consortium pour faire peser 11 milliards de dépenses supplémentaires sur l'État. Il est donc tout à fait légitime qu'un rapport vienne expliquer les conséquences qu'entraînera cette nouvelle charge.
M. Alexis Corbière s'exclame.
Il est procédé au vote à main levée.
C'est la NUPES, encore une fois ! Que se passe-t-il, chers collègues ? Vous aimez les rapports, pourtant !
Vous pouvez être soit pour soit contre, ou vous pouvez être ni pour ni contre, mais pas tout à la fois !
Rires. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE et Dem.
Nous allons de nouveau procéder au vote, chers collègues. Aussi, je vous prie de bien vouloir vous concentrer ; je sais que nous approchons de la suspension de vingt heures, mais il nous reste encore quelques minutes importantes de débat. Qui est pour ?
Une certaine confusion se manifeste sur les bancs du groupe LFI – NUPES, plusieurs députés ne sachant s'ils doivent lever la main.
J'ai encore vu des collègues voter à la fois pour et contre. Nous allons donc procéder au vote par scrutin public.
Protestations sur les bancs du groupe RE.
Je n'ai pas une immense expérience de la présidence de séance, mais le fait que certains d'entre vous votent à la fois pour et contre appelle la tenue d'un scrutin public – au moins, il n'y aura pas de difficultés !
Ce n'est qu'un rapport, chers collègues ! Vous n'aimez pas les chiffres ?
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 191
Nombre de suffrages exprimés 166
Majorité absolue 84
Pour l'adoption 80
Contre 86
L'amendement n° 50 n'est pas adopté.
Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est de nouveau procédé à un scrutin public.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 194
Nombre de suffrages exprimés 169
Majorité absolue 85
Pour l'adoption 77
Contre 92
L'amendement n° 51 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 195
Nombre de suffrages exprimés 195
Majorité absolue 98
Pour l'adoption 123
Contre 72
L'article 3 bis est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, RN, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
L'article 3 ter porte sur un sujet annexe par rapport à l'objet initial de la proposition de loi. Néanmoins, le groupe Démocrate n'est pas opposé au rapport qu'il prévoit.
Applaudissements sur quelques bancs.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à dix-neuf heures vingt-cinq.
La séance est reprise.
Nous en venons aux amendements à l'article 3 ter .
Je suis saisie de trois amendements, n° 58 rectifié , 28 et 53 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 28 et 53 sont identiques.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement n° 58 rectifié .
Aux termes de l'article 3 ter, le Gouvernement doit remettre au Parlement, avant le 31 août 2023, un rapport qui présente de manière détaillée l'intérêt de nationaliser la société Électricité de Mayotte, dont EDF est actionnaire minoritaire. Notre collègue Estelle Youssouffa, auteure de l'amendement, propose que ce rapport soit remis « au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi ». Autrement dit, nous fixerions un délai un peu plus long, plus adapté à la production d'un tel rapport.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir l'amendement n° 28 .
Nous soutenons la demande d'un rapport relatif aux spécificités de Mayotte, introduite dans le texte à l'initiative de nos amis d'outre-mer. Toutefois, il y a un problème de calendrier, car la date butoir indiquée est le 31 août 2023. J'ignore si la proposition de loi sera définitivement adoptée et quand elle le sera, mais soyons réalistes, les administrations n'auront en aucun cas le temps de faire correctement leur travail dans le délai imparti. Je vous propose donc de repousser la date butoir au 31 décembre 2023.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 53 .
À l'instar du rapporteur général, je souhaite permettre à l'administration de faire son travail dans de bonnes conditions, d'autant qu'il lui faudra mener une enquête, probablement sur le terrain. S'agissant de la date, nous nous en remettons à nos collègues du groupe LIOT ; je suis tout à fait prêt à retirer le présent amendement. Le 31 décembre 2023 ou six mois après la promulgation de la loi, cela revient au même.
Le programme n° 345 Service public de l'énergie consacre une ligne budgétaire à l'électrification des territoires éloignés, notamment insulaires. Cette enveloppe a amplement augmenté cette année : cela témoigne d'un dynamisme mais induit aussi un contrôle accru. Cette évolution met en lumière les besoins de ces territoires en matière d'électricité. Sachez que certains week-ends, lorsque la consommation énergétique de l'industrie ou des services diminue, des territoires d'outre-mer utilisent une énergie entièrement décarbonée – c'est le cas de la Polynésie, certains dimanches. Il serait précieux de savoir comment l'État et l'opérateur national pourraient contribuer encore davantage à des situations exemplaires de ce type.
Nous émettons un avis favorable sur l'amendement n° 58 , car il propose un délai glissant qui nous paraît pertinent. Si nous considérons qu'il sera adopté, les deux amendements suivants tomberont.
Je remercie Mme Youssouffa pour son amendement, qu'a présenté M. Castellani. Il est frappé au coin du bon sens, puisqu'il vise à donner à l'administration le temps d'élaborer un rapport de qualité sur un sujet complexe. Nous en avons discuté en première lecture et en avons également débattu au Sénat. Un délai minimal de six mois et une remise du rapport après la fin de l'année nous semblent opportuns. Je suis favorable aux trois amendements, et je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée pour choisir lequel elle souhaite adopter.
L'amendement n° 58 rectifié est adopté ; en conséquence, les amendements n° 28 et 53 tombent.
L'article 3 ter, amendé, est adopté.
Sur les amendements n° 29 et identiques, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés (membre de l'intergroupe NUPES) d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Dans un objectif de cohérence, il vise à rétablir le gage de charge pour l'État qui figurait dans la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture. Élargir le bénéfice du TRVE à de nouveaux bénéficiaires revient en effet à étendre une aide publique, ce qui générera une charge publique.
J'en appelle à un minimum de cohérence, chers collègues : ce gage figurait dans le texte qui a été approuvé par les rapporteurs et qui a été voté en première lecture, mais il a été supprimé au cours de la navette. Il est indispensable de le réintroduire : nous devons savoir qui paiera. Je n'ai toujours pas entendu de réponse satisfaisante des rapporteurs à ce sujet. Qui va payer ? Est-ce que ce sera EDF, alors que notre majorité est mobilisée pour soutenir son développement et sa capacité d'investissement – tandis que vous voulez lui imposer une charge supplémentaire ? Est-ce que ce sera l'État ? Dans ce cas, où trouvera-t-il l'argent pour payer ces 11 milliards ?
Un gage est absolument essentiel. Je demande aux rapporteurs de donner des réponses claires. Nous n'en avons eu aucune depuis le début de la séance ! Je les enjoins également d'adopter une position cohérente avec celle qu'ils ont eue en première lecture – même s'il est vrai qu'ils ont changé d'avis à de nombreuses reprises, tout au long de l'examen du texte. La proposition de loi précise que cette mesure ne doit pas constituer une charge supplémentaire pour l'État, mais c'en est bien une – sinon, il faut expliquer pourquoi ce n'est pas le cas. J'appelle donc l'hémicycle à faire preuve de cohérence.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Soit cette proposition de loi ne coûtera rien aux finances publiques, auquel cas elle sera inefficace et n'apportera pas un euro supplémentaire de pouvoir d'achat aux boulangers, aux artisans et aux commerçants ;…
…soit elle pèsera sur les finances publiques, puisque l'État plafonnera les tarifs réglementés à un niveau inférieur aux tarifs réglementés actuels – M. le rapporteur général vient de l'expliquer. Lors de la réunion que nous avons tenue au titre de l'article 88 du règlement, M. le président Coquerel a admis avoir changé de position sur ce sujet : il a reconnu que le premier amendement qui avait été déposé était irrecevable au regard de l'article 40 de la Constitution. Une jurisprudence parfaitement établie, constante et respectée par les présidents de la commission des finances, veut en effet qu'un amendement ne puisse pas être gagé s'il se chiffre à plusieurs milliards d'euros. À titre d'exemple, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) n'aurait pas pu être introduit par l'amendement d'un parlementaire, car il n'aurait pas pu être gagé par une augmentation de la fiscalité sur le tabac. Pour ces raisons, il convient impérativement de rétablir le gage dans la proposition de loi – à moins que vous reconnaissiez que celle-ci est inutile.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 52 .
Nous sommes désormais tous familiers de la directive de 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité – cela nous fait prendre de l'avance sur le débat relatif à la transposition de l'accord européen sur les prix de l'énergie. Pourquoi le Sénat a-t-il supprimé le gage ? Les Sénateurs ont probablement considéré que le montant de 1 milliard supporté par les finances publiques à la suite d'une extension modérée du TRVE était suffisamment faible pour être assumé par l'opérateur.
Pour ces sénateurs qui pensaient soutenir EDF, ce milliard devait paraître supportable. Ce raisonnement n'est toutefois pas suffisant sur le plan juridique : il faut préciser qui s'acquittera de quelle somme. En l'occurrence, une dizaine de milliards d'euros, voire davantage, risquent d'être à la charge d'EDF, sans aucune compensation. S'il y a compensation, il faut prévoir un gage – c'est inévitable.
N'ayant pas assisté à la commission, je n'ai pas bénéficié d'un débat éclairé, monsieur le rapporteur ; je dois donc vous croire sur parole. Je reste néanmoins surpris que ce gage, qui avait été voté en pleine sagesse par l'Assemblée en première lecture, ait disparu de la version examinée en deuxième lecture. Les explications de M. Lacresse peuvent s'entendre : un montant de 1 milliard peut paraître supportable, mais il en va tout autrement de 11 milliards. Si le gage s'appliquait au tabac, comme le proposent M. le rapporteur général et M. Lacresse, le prix du paquet de cigarettes augmenterait de 5 euros – il est important d'avoir ces ordres de grandeur en tête. Les excellents amendements de M. le rapporteur général et de M. Lacresse relèvent de la simple logique : ils constatent que la proposition de loi pourrait créer une charge publique. Le Gouvernement y est donc évidemment favorable.
La parole est à M. Mathieu Lefèvre, qui sollicite un rappel au règlement.
Il se fonde sur l'article 40 de la Constitution. M. le rapporteur Jumel nous répond : « Circulez, il n'y a rien à voir. » Pardon, mais il y a quelque chose à voir ! Soit la proposition de loi ne coûte rien, auquel cas elle est inutile…
« Ce n'est pas un rappel au règlement ! » sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Soit la proposition de loi est coûteuse, auquel cas il faut rétablir le gage.
Je le répète, ce n'est pas un rappel au règlement au titre de l'article 40 de la Constitution, monsieur le député.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve.
Je ne comprends pas nos collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine. Je déplore que nous ne puissions pas avoir un débat serein, alors que nous voulons tous permettre au groupe EDF de se développer. Chacun a pu le constater et la vidéo en témoignera : lorsqu'il donne son avis sur un amendement de la NUPES, M. Jumel se lève et répond ; mais lorsqu'il s'agit d'un amendement de notre majorité relative, il ne se lève pas.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
M. Jumel affirme qu'il a déjà répondu à la question, mais je n'ai rien entendu : qui va payer ? S'agira-t-il d'EDF ou de l'État français ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Expliquez-nous pourquoi vous avez voté l'amendement introduisant un gage en première lecture, et pourquoi vous ne voulez pas le voter en deuxième lecture. Cela demande un minimum d'explications !
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Il se fonde sur l'article 100, alinéa 7. Je souscris aux propos de Jean-René Cazeneuve : un certain nombre de questions ont été posées aux rapporteurs, mais ils n'ont pas daigné y répondre.
Ils se sont prononcés sur des demandes de rapport, dont nous savons pertinemment qu'ils ne seront lus par personne, mais, lorsqu'il s'agit de préciser qui devra s'acquitter des 11 milliards d'euros, nous n'avons aucune réponse.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Le débat n'a absolument pas été éclairé, et votre proposition de loi est floue – or chacun sait que, quand c'est flou, il y a un loup.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
En l'occurrence, c'est un loup-garou ! Cela en devient ridicule, mesdames et messieurs les députés : vous nous invitez à voter une proposition de loi qui n'est même pas chiffrée. Nous ignorons qui sera redevable de 11 milliards d'euros ! Bravos aux députés du groupe Les Républicains et du Rassemblement national ; rejoignez la NUPES dans l'irresponsabilité budgétaire !
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
La demande de scrutin public ayant été retirée, le vote s'effectuera à main levée.
Protestations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Nous ne pouvons pas voter sur un article qui a été supprimé !
L'article 4 avait été supprimé, et le scrutin public demandé par le groupe Socialistes et apparentés sur les amendements identiques a été retiré. Par conséquent, le vote s'effectuera à main levée.
Nous ne votons pas sur l'article 4, mais sur les amendements identiques !
Le vote porte en effet sur les amendements n° 29 et identiques. Est-ce bien compris ?
« Oui ! » sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES. – « Non ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.
Il se fonde sur l'article 100. Quand vous avez annoncé que le scrutin public était supprimé, madame la présidente, l'article 4 était affiché à l'écran. Il y a donc eu une confusion sur l'objet du vote.
Par cet amendement visant à rendre la proposition de loi plus lisible pour nos concitoyens, j'en appelle, là encore, à la cohérence de MM. les rapporteurs. Ce texte s'est d'abord appelé « Proposition de loi visant à la nationalisation du groupe Électricité de France », puis « Proposition de loi visant à protéger le groupe Électricité de France d'un démembrement ». Un changement de titre peut légitimement résulter d'un travail parlementaire mais, en l'occurrence, il s'ensuit que le titre du texte ne reflète pas son objet. Par souci de cohérence, je vous propose donc de l'intituler plutôt « Proposition de loi visant à étendre le bénéfice des tarifs réglementés de l'électricité sans accompagnement du bouclier tarifaire ». Voilà en effet ce que contient la proposition de loi ; la clarté et la transparence voudraient que nous votions cet amendement pour que nos concitoyens le sachent.
Force est de constater que le texte a beaucoup évolué depuis son dépôt. Il s'agissait d'abord d'une proposition de loi visant à nationaliser EDF, mais ses auteurs se sont ensuite rendu compte que cet objectif était en passe d'être satisfait grâce aux crédits votés par la majorité dans le cadre de la loi de finances pour 2023, qu'ils ont eux-mêmes rejetée.
Le groupe à l'initiative du texte en a donc modifié le titre, tout en proposant une extension du bénéfice des tarifs réglementés, dont nous ne savons toujours pas comment elle sera financée, ni quelle en sera l'efficacité si elle n'est pas plafonnée.
Avec des actions – j'entends bien. Mais vous n'avez toujours pas répondu à ces questions, et vous n'avez pas expliqué comment ce changement affecterait les professionnels. Devront-ils changer de contrat, passant d'un contrat de gré à gré à un contrat réglementé ? Seront-ils indemnisés ? Qui va payer ?
M. Ugo Bernalicis s'exclame.
Silence sur le banc des rapporteurs. Silence également sur les bancs du groupe à l'initiative du texte.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons modifier l'intitulé de la proposition de loi, par souci de clarté et d'intelligibilité, comme l'a indiqué M. le rapporteur général. Nous aurions d'ailleurs pu l'appeler « Proposition de loi visant à fragiliser le groupe EDF », car c'est bien ce que vous faites !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – M. Andy Kerbrat s'exclame.
Il vise également à modifier le titre ; en l'occurrence, nous réfutons l'idée que le groupe EDF serait menacé de démembrement. Ce mot reflète mal le fait qu'un tel projet n'est d'actualité pour personne, si j'en crois les propos tenus tout au long de l'après-midi. Aujourd'hui, pas un seul député n'envisage une seule seconde de soutenir un démembrement d'EDF. Hercule est enterré, comme l'a rappelé M. le ministre délégué.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Pour faire disparaître ce terme, je propose donc de substituer aux mots « protéger le groupe Électricité de France d'un démembrement » les mots « adapter le secteur de l'électricité ». Le titre sera ainsi plus extensif et plus utile pour l'avenir.
La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour soutenir l'amendement n° 54 .
Je propose, anticipant un peu sur les explications de vote, de faire la liste des manières dont cette proposition de loi fragilisera EDF. Il y a d'abord la fragilisation financière : puisque vous avez refusé la compensation, nous ne savons pas combien le texte en coûtera au groupe EDF. Dans sa version adoptée par le Sénat, les ordinateurs de Bercy prévoyaient qu'il coûterait 1 milliard d'euros. Désormais, ce chiffre s'élève probablement à plus de 10 milliards. Pourtant, le groupe se trouve dans une situation financière qui justifie la mobilisation de l'État et le rachat de 100 % des actions.
À cause de qui ? On peut remercier Emmanuel Macron d'avoir mis EDF dans cette situation !
Ensuite, inscrire dans la loi la liste des activités d'EDF pose un problème. Comment peut-on prétendre aider un groupe en corsetant à ce point ses activités et son management ? Dans notre engagement politique, nous sommes ennemis du nominalisme, c'est-à-dire de cette pratique qui consiste à donner à une chose un nom qui ne correspond pas à son être. En l'occurrence, en prétendant soutenir EDF, vous le fragilisez.
Debout et avec un profond respect, j'émets un avis défavorable aux quatre amendements proposés.
Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et SOC.
Ne vous inquiétez pas, je vais l'annoncer.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces quatre amendements ?
Madame la présidente, je vous remercie d'abord pour l'excellente tenue des débats de cet après-midi, qui doit beaucoup à votre présidence exemplaire.
Le Gouvernement n'a pas l'habitude de se prononcer sur l'opportunité d'un changement de titre, et encore moins de choisir entre trois titres, dont je dois reconnaître que chacun présente un intérêt certain. Ayant suivi dans tous ses méandres le cheminement du texte depuis trois mois, force est toutefois d'avouer qu'il ne vise plus à nationaliser EDF – car le Gouvernement l'a fait –, qu'il rejette l'idée d'un démembrement mais opère un découpage comptable qui laissera cette possibilité à de futures majorités, qu'il laisse EDF faire tout ce qu'elle veut, y compris du thermique, mais la force à le faire, et qu'il met en place, dans l'objectif d'aider les artisans, une véritable usine à gaz qui, apparemment, ne coûtera rien à personne…
Je rends bien sûr un avis de sagesse sur les quatre amendements mais, si je devais m'exprimer à leur sujet, je conseillerais à M. le rapporteur général de compléter son titre, qui deviendrait alors : « Proposition de loi visant à étendre le bénéfice des tarifs réglementés de l'électricité sans accompagnement du bouclier tarifaire, qui coûte 11 milliards d'euros, mais à personne ». Cela serait bien mieux.
Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe RE.
J'accorde la palme de la simplicité et de la finesse à Pascal Lecamp, qui a d'ailleurs fait preuve de ces qualités dans chacun des arguments qu'il a défendus cet après-midi, pour sa « proposition visant à adapter le secteur de l'électricité ».
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Ce titre n'exprime pas grand-chose, mais le texte non plus, donc ce n'est pas mal, au fond.
Quant à M. Lacresse, il mérite la palme de la vérité, car je suis convaincu que cette proposition de loi, si elle est adoptée, fragilisera effectivement le groupe EDF. Cela est dommage, car je pense que la majorité des députés souhaitent au contraire renforcer EDF, lui permettre de se développer, d'accélérer à la fois le développement des énergies renouvelables – vous avez voté un projet de loi en ce sens – et le développement du nucléaire – vous vous êtes mis d'accord sur ce point, aujourd'hui même, avec les sénateurs, dans le cadre d'une commission mixte paritaire. Vous fragiliseriez donc un groupe dont nous avons tous besoin et que nous souhaitons soutenir. Changez le titre si vous le souhaitez, mais surtout n'adoptez pas le texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Je l'annoncerai juste après l'intervention de M. Sitzenstuhl. De toute façon, certains groupes procéderont à des explications de vote : le délai de cinq minutes sera respecté.
Ces amendements vont dans le bon sens, car nous, législateurs, sommes tenus de voter des lois intelligibles. Nous sommes attachés au principe d'intelligibilité de la loi, qui a valeur constitutionnelle.
Nos débats ont mis en évidence le fait que l'intention initiale de la proposition de loi a été modifiée du tout au tout au cours du cheminement du texte. Elle ne correspond plus à la réalité du texte qui sera soumis au vote dans quelques instants. Ces amendements sont donc très importants, car ils permettront à nos concitoyens de comprendre le contenu du texte au sujet duquel nous nous apprêtons à nous prononcer.
Par ailleurs, vous n'avez toujours pas répondu à la question fondamentale relative à l'article 40 de notre Constitution, qui concerne l'aggravation des charges publiques : qui paie ?
Il s'agit de milliards d'euros ; qui les paiera ? Nous n'avons toujours pas obtenu de réponse.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
Sur l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par les groupes Renaissance, Socialistes et apparentés et Gauche démocrate et républicaine – NUPES d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 36 n'est pas adopté.
L'amendement n° 54 n'est pas adopté.
Après cette séance, que reste-t-il du débat que nous nous étions promis de tenir sur l'avenir énergétique de la France, sur l'avenir d'EDF et de nos finances publiques, sur la protection des TPE, des PME et des commerçants ? Nous nous étions promis d'étudier un renforcement du groupe EDF pour l'avenir, mais le débat a montré que le texte conduirait au contraire à le fragiliser à de nombreux égards.
La stratégie du Gouvernement, posée depuis l'origine, est claire : elle consiste à renforcer immédiatement ce groupe qui fait face à des engagements financiers, à un défi technologique et à un défi humain. Il importe de trouver les formations nécessaires et de ne pas distraire le management de la tâche sur laquelle il se concentre, c'est-à-dire décarboner notre économie d'ici à 2050.
Nous nous sommes livrés à des exercices sémantiques – moins que d'habitude, il est vrai. Nous avons discuté de nationalisation ou encore d'incessibilité. Comme cela a été rappelé, ce texte est totalement méconnaissable. Ce n'est pas une coconstruction ni une réflexion commune qui a présidé à son élaboration, mais bien le hasard ; c'est ainsi que, sorti du Sénat avec un coût projeté de 1 milliard d'euros, il quittera ce soir l'Assemblée avec un coût d'environ 11 milliards, ou de 16 milliards si on y inclut la charge pour les collectivités locales. Certes, les amendements n° 56 et 58 ont été retirés in extremis – afin, nous dit-on, d'obtenir un vote conforme du Sénat –, mais ces incertitudes prouvent que le texte n'était pas aussi bien préparé qu'il l'aurait fallu.
Comment expliquerez-vous aux salariés d'EDF, que vous prétendez défendre, qu'au lieu d'apporter au groupe la totalité du capital que le Gouvernement s'est engagé à lui apporter vous lui léguez au contraire des charges ? Vous promettez un résultat comptable dont il vous a été prouvé avec brio qu'il est impossible à atteindre.
L'enjeu consiste bien à protéger les TPE et les commerçants. Nos échanges ont fourni la démonstration que la voie que nous avons choisie, celle du bouclier énergétique, de l'accélérateur, de l'ouverture d'un guichet départemental pour les boulangers, était la seule possible. Cela est vrai tant au regard du cadre juridique européen que de la rédaction des contrats. Nous vous l'avons rappelé : il est impossible de désavouer ces contrats en moins de vingt-quatre mois. Cela nécessiterait un dispositif issu des travaux de la commission de régulation de l'énergie ; surtout, cela contraindrait EDF à défaire tous ses contrats de fournisseur et à supporter elle-même le coût des fournitures dont elle serait incapable de s'acquitter dans le cadre de ses obligations de marché de long terme.
Vous n'avez pas pris cela en considération, car vous n'avez pas commandé d'expertise. Le Gouvernement, lui, en était conscient. Nous avons longuement débattu de la compensation, car cette question est centrale en matière financière, mais, au regard de la directive européenne, la seule voie praticable est celle que le Gouvernement a choisie dès la loi de finances rectificative pour 2022 – que vous avez refusé de voter – : la voie de l'aide directe et rapide. Cette méthode a prouvé son efficacité en protégeant EDF et les autres fournisseurs d'énergie dans cette période difficile. Nous avons eu raison d'y avoir recours ; aucun argument formulé aujourd'hui ne permet de prouver le contraire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Quant à la protection d'EDF et à la manière dont nous devons concevoir son avenir, nous aurions pu débattre ce soir d'une stratégie de court terme, qui consisterait à lui apporter les ressources nécessaires et à définir son projet. Pourtant, il n'en a pas été question, pour une raison simple : les oppositions alliées ne peuvent concilier leurs stratégies énergétiques. Certains ne veulent entendre parler que d'énergies renouvelables, d'autres veulent tout miser sur le nucléaire, d'autres enfin prônent la décroissance. Ces derniers sont d'ailleurs muets ce soir, mais ont voté tous les amendements. Ils prétendent vouloir renforcer EDF, mais souhaitent en réalité que le groupe produise moins d'énergie ; pourtant, nous savons bien que son avenir consiste à produire davantage d'électricité décarbonée et que seuls les moyens dont nous l'avons doté grâce aux lois budgétaires que vous avez refusé de voter sont de nature à renforcer l'autonomie et la résilience de la France en matière énergétique.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe RE. De nombreux députés se lèvent pour applaudir.
Nous partageons deux objectifs : atteindre la neutralité carbone en 2050 et garantir la souveraineté énergétique.
Pour cela, des investissements d'EDF sont nécessaires, et elle doit avoir les coudées franches pour mettre en œuvre ses orientations stratégiques. Nous partageons donc le constat du rapporteur Philippe Brun. Mais, premièrement, nous assurons déjà la réalisation de ces objectifs. Le rachat des parts d'EDF par l'État pour qu'il en possède 100 % permettra au groupe d'asseoir sa position de leader de la transition énergétique dans son pays et de gagner des parts de marché à l'étranger. La fixation de la détention à 100 % et l'inscription de la liste de ses activités dans la loi n'entraîneraient que des contraintes de gestion et de développement que nous avons déjà évoquées.
Deuxièmement, certains groupes parlementaires s'allient soi-disant pour protéger EDF, mais on voit bien qu'ils ne partagent pas la même ambition. Vous voulez reprendre le contrôle d'EDF, mais à quelle fin ? Pour cesser de développer les énergies renouvelables ?
Pour cesser de développer le nucléaire et se concentrer exclusivement sur les énergies renouvelables ? Chacune de ces options est défendue par certains d'entre vous. Voilà quelles sont vos contradictions. Cette alliance de circonstance n'aboutirait qu'à vous doter d'un outil que vous voulez engager dans des trajectoires opposées.
Pour mémoire, je rappelle ce que contenait la plateforme de la NUPES en 2022 sur l'énergie : « Planifier le passage à 100 % d'énergies renouvelables et la sortie du nucléaire avec un double mot d'ordre : sobriété et efficacité. Abandonner les projets d'EPR, planifier le démantèlement, la réhabilitation et la reconversion des sites nucléaires et de l'ensemble de leur bassin de vie. »
Exclamations sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Je cite le programme que l'on peut consulter actuellement sur le site www.nupes-2022.fr
Troisièmement, il est impossible d'appliquer immédiatement l'extension du TRVE.
Mêmes mouvements.
Il faut renégocier les contrats, ce qui, d'après EDF elle-même, nécessiterait plusieurs mois. Le directeur régional d'EDF en Nouvelle-Aquitaine, avec lequel j'ai parlé hier, considère qu'il est impossible de le faire avant l'été 2024. Il faut laisser le temps à la Commission de régulation de l'énergie d'établir le nouveau tarif.
Quatrièmement, nous ne sommes pas favorables au démembrement d'EDF, comme je l'ai dit tout à l'heure. Ce n'est pas ce qui se joue aujourd'hui, contrairement à ce qui a été dit. À ceux qui prétendent que nous voulons le retour du projet Hercule, je réponds que nous n'avons aucun intérêt à affaiblir EDF alors que nous portons une politique très ambitieuse de développement de notre parc nucléaire et de déploiement des énergies renouvelables. On vient de voter une loi en ce sens. Monsieur le ministre délégué, vous avez indiqué que la loi sur le nucléaire a été adoptée en commission mixte paritaire aujourd'hui. Nous contestons donc les allégations d'après lesquelles nous voudrions le démembrement d'EDF.
Pour ces quatre raisons majeures, que nous avons développées pendant cinq heures, le groupe Démocrate votera contre cette proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.
Il est plus de vingt heures et il n'y a pas de consensus pour continuer l'examen de ce texte.
Protestations vives et prolongées sur les bancs des groupes RN, LFI – NUPES, LR, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Le scrutin public a été annoncé ! En outre, la seconde suspension de séance accordée au groupe Renaissance s'est indûment prolongée !
J'ai été informée du retrait par son auteure de la proposition de loi visant à promouvoir l'emploi et le retour des fonctionnaires d'État ultramarins dans les territoires d'outre-mer. Il est pris acte de ce retrait.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à protéger le groupe Électricité de France d'un démembrement ;
Discussion de la proposition de loi organique visant à indexer la dotation globale de fonctionnement sur l'inflation.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra