Alors que nous sommes appelés à adopter un texte au cheminement complexe – c'est le moins qu'on puisse dire –, j'aimerais tout d'abord revenir sur nos débats.
À la proposition initiale – une nationalisation très formelle d'EDF – s'est rapidement greffée une généralisation du TRVE. Or, si les sénateurs ont effectué un remarquable travail de rationalisation du texte – à l'instar d'autres collègues –, que je salue, cela n'a pas suffi à clarifier son véritable objet.
La refonte du secteur de l'énergie est un serpent de mer, un immense sujet que nous ne saurons régler sans disposer à tout le moins d'une étude d'impact ou de l'avis du Conseil d'État.
La situation actuelle est le résultat de plusieurs facteurs : la guerre en Ukraine, un marché européen fluctuant, le lien entre le prix du gaz et le prix de l'électricité, la corrosion sous contrainte qui affecte certains réacteurs – phénomène découvert en 2021 à la centrale de Civaux, dans ma circonscription, dont la deuxième tranche vient tout juste de redémarrer.
Nous sommes prêts à engager une réflexion d'ensemble – des négociations sont d'ailleurs en cours à l'échelle européenne –, mais elle ne passera pas par des amendements qui font miroiter des solutions certes faciles, mais qui n'existent pas.
Au cours de nos discussions, nous avons abordé le sujet des prix de l'énergie, celui de la souveraineté énergétique, les difficultés financières d'EDF, mais de manière partielle, débouchant sur des embryons de réponse – parce que le véhicule choisi n'est pas le bon. Ce débat peu transparent, alambiqué, à l'image de la coalition de circonstance qui l'a voulu, donnerait bien du mal au juriste qui, si cette proposition de loi était adoptée, tenterait de déterminer l'intention du législateur : c'est d'ailleurs là l'un des facteurs d'insécurité juridique associés au texte.
Chers collègues, notre responsabilité pour l'avenir est double : assurer la souveraineté énergétique et la transition vers une production décarbonée. Les députés Démocrates considèrent tout simplement que la proposition de loi ne nous met pas sur la bonne voie pour atteindre ces objectifs. L'extension des TRVE demande du temps : il faut que la CRE redéfinisse les tarifs, il faut renégocier tous les contrats, informer la Commission européenne. Cela ne peut être fait du jour au lendemain. Disons la vérité aux Français : quoique séduisante, cette mesure ne serait pas sécurisante, en particulier pour les entreprises. D'une part, celles nouvellement éligibles aux TRVE ne bénéficieraient pas automatiquement du bouclier énergétique, comme l'a suffisamment rappelé le président Coquerel. D'autre part, si l'extension aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), objet de certains amendements, venait à être retoquée par la Cour de justice de l'Union européenne, et sans parler des conséquences budgétaires que le ministre délégué a évoquées tout à l'heure, les sommes en cause seraient-elles remboursées par les entreprises ?