Séance en hémicycle du mercredi 22 novembre 2023 à 14h00

Sommaire

La séance

Source

La séance est ouverte à quatorze heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre de l'intérieur et des outre-mer, depuis plusieurs mois, et cette semaine encore, vous avez reçu des maires des Henua Enana, les îles Marquises. Ils souhaitent la création d'une communauté d'archipel des îles Marquises, en espérant qu'elle puisse se voir attribuer des compétences élargies et surtout des financements plus importants. Certains ont même évoqué la création d'une autre collectivité polynésienne qui, selon nous, est synonyme de partition de la Polynésie.

Monsieur le ministre, des Henua Enana aux Tuhaa Pae, de Mangareva aux Tuamotu, et des Raromatai aux Nià mataì, nous sommes un seul peuple et un seul pays. Une partition serait un désastre culturel et social, un non-sens face à l'histoire. Comme pour la Kanaky – la Nouvelle-Calédonie –, la Polynésie est engagée dans un processus de décolonisation et d'émancipation. Notre pays doit rester uni et la France n'a plus à décider des frontières d'autres pays à l'autre bout du globe. Nous souhaitons connaître la position officielle du Gouvernement sur ce sujet.

Nous entendons et comprenons l'appel des archipels polynésiens. La nouvelle majorité indépendantiste, dont est issu le président Moetai Brotherson, est favorable à une évolution statutaire assurant une plus grande décentralisation en faveur des archipels.

Par ailleurs, l'application indifférenciée du code général des collectivités territoriales (CGCT), inadapté à nos réalités, doit nous inquiéter. C'est pourquoi nous souhaitons revenir à un code des communes de Polynésie française, voté par l'assemblée de Polynésie. Il nous faut repenser les communes, leur donner une fiscalité propre, augmenter les financements et mieux répartir les compétences entre l'État, le Pays, les archipels et les communes. Pour cela, monsieur le ministre, envisagez-vous d'ouvrir le dialogue sur la réécriture du code des communes de Polynésie française ?

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre délégué chargé des outre-mer.

Debut de section - Permalien
Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer

Je sais combien vous êtes attaché à ce sujet institutionnel, aussi vous répondrai-je sans détour. Le 20 octobre dernier, vous vous êtes rendu au déjeuner de travail organisé par le Président de la République, en présence de la Première ministre, comme l'ensemble des parlementaires, des présidents de collectivités et des présidents d'associations des maires des territoires ultramarins. Le Président de la République a dit une chose très simple : « Il n'y a pas de tabou sur les évolutions institutionnelles. » Mais ne comptez ni sur lui, ni sur la Première ministre, ni sur les autres ministres du Gouvernement pour écrire à votre place l'avenir de ces territoires.

Deux personnalités qualifiées vont être choisies dans les prochains jours par le Président de la République pour rencontrer l'ensemble des acteurs concernés. Nous étudierons ensuite les demandes qui sont formulées par les uns et les autres en matière d'évolution institutionnelle. Et si celle-ci devait se produire un jour, je vous rappelle, à vous qui êtes parlementaire, qu'elle supposerait de réunir le Parlement en Congrès à Versailles. Mais il faudrait au préalable parvenir à un accord local, puis défendre une réforme qui devrait recevoir l'assentiment des trois cinquièmes des parlementaires.

Sachez que nous n'avons nullement la volonté de démanteler les territoires de la République ; nous entendons seulement apporter plus de souplesse, plus de compétitivité, plus d'attractivité – bref, nous voulons simplifier les relations entre l'État et les collectivités.

Je profite de cette question pour vous dire que la Polynésie n'est pas oubliée. Un statut de fonctionnaire a enfin été conféré aux agents polynésiens – Sébastien Lecornu, qui était chargé de ce ministère avant moi, ne le sait que trop bien. En cette semaine du Salon des maires et des collectivités locales (SMCL), il ne me semble pas inutile de rappeler qu'en Polynésie, la dotation globale de fonctionnement (DGF) par habitant est 30 % supérieure à celle dont bénéficient les communes de l'Hexagone.

Comptez sur nous pour toujours aider la Polynésie !

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous n'avez pas répondu à ma question, laquelle portait sur l'application d'un code des communes polynésien plutôt que le CGCT. Quant aux îles Marquises, il faut être clair : nous ne souhaitons pas finir comme les Comores et Mayotte ; la Polynésie, qu'elle devienne ou non indépendante, doit rester unie, parce que le peuple maohi est uni.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans un contexte de vie chère exacerbé en outre-mer et d'un énième 49.3, vous avez fait le choix unilatéral de ne pas retenir, parmi les mesures du budget pour 2024 adoptées par l'Assemblée, mon amendement visant à accorder 500 millions d'euros à la continuité territoriale en outre-mer pour faire baisser les prix des billets d'avion. Il avait pourtant été repris par la commission des finances ! En revanche, vous avez choisi de retenir l'article 55, non débattu, en vertu duquel l'État incite « les personnes résidant en France métropolitaine » à s'installer dans ces territoires d'outre-mer grâce à l'argent public.

Le modèle de transport public entre la Corse et l'Hexagone pour les passagers et les marchandises est un modèle d'égalité et d'équité. Les insulaires des outre-mer, eux, sont captifs du seul moyen de mobilité extérieure que représente l'avion et sont condamnés à utiliser un transport privé à des tarifs insupportables.

« Il a raison ! » sur les bancs du groupe SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous refusez ainsi aux citoyens dits ultramarins l'égalité des droits, inscrite dans la Constitution, et le droit légitime à la mobilité durable à l'intérieur de la République française.

Enfin, les outre-mer, importants contributeurs à la puissance française dans le monde, sont otages d'un modèle économique caractérisé par le développement de monopoles et d'oligopoles. Ce système économique historique consolide des concentrations verticales et horizontales sans précédent, dans un silence assourdissant de l'État ! Il produit également un mal développement, qui se traduit notamment par d'extrêmes dépendances, des inégalités, des injustices profondes et des crises socio-économiques récurrentes. Les conséquences sont graves : elles provoquent une colère collective et un fort rejet de l'État, jusqu'à nourrir la violence, le risque de chaos et l'avènement d'une nouvelle crise majeure, tout en faisant le lit des extrémismes.

Face à ces ruptures d'égalité profondes et à la dégradation continue des niveaux de vie, porteuse d'un désastre annoncé, acceptez-vous de revoir votre position ? Confirmez-vous devant la représentation nationale l'engagement qu'a pris le ministre Gérald Darmanin, ce matin, de retirer l'article 55 ? Acceptez-vous d'ouvrir une concertation avec les parlementaires et collectivités locales d'outre-mer, pour prendre en compte nos réalités de vie ?

Par ailleurs, le Gouvernement est-il prêt, entre autres, à faire voter la loi qui garantit aux outre-mer le même modèle de continuité territoriale que celui accordé à la Corse ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans le respect de la dignité humaine, il s'agit d'ouvrir des perspectives de progrès et de donner des réponses à la hauteur des enjeux…

Mme la présidente coupe le micro de l'orateur, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – Mme Ségolène Amiot applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre délégué chargé des outre-mer.

Debut de section - Permalien
Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer

Je connais votre attachement à la question de la continuité territoriale, dont nous avons eu l'occasion de parler à plusieurs reprises. L'aide à la continuité territoriale (ACT) consiste en une prise en charge forfaitaire des billets d'avion par l'État, afin que les citoyens ultramarins qui se trouvent dans l'Hexagone puissent rentrer en outre-mer dans les meilleures conditions possibles.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il faudrait en faire autant pour les députés !

Debut de section - Permalien
Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer

Le budget pour 2024 augmente l'ACT de 70 à 93 millions d'euros. Je sais que vous auriez souhaité qu'on aille plus loin en l'augmentant encore de 60 millions d'euros. J'entends votre message, mais – et je regarde le rapporteur général du budget et tous les parlementaires ici présents – je crois que nous avons décidé d'une aide majeure et indispensable pour l'année 2024.

Debut de section - Permalien
Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer

Par ailleurs, vous savez très bien que les étudiants de première année, qu'ils soient boursiers ou non, bénéficieront dès Noël prochain de l'aide à la continuité territoriale. En outre, nous avons relevé le quotient familial de 12 000 à 18 000 euros : cela signifie que 77 % des ultramarins pourront en bénéficier.

Nous agissons dans un contexte financier particulier ; la Première ministre a bien voulu offrir de nouvelles possibilités aux outre-mer et les préserver, même après avoir activé le 49.3. C'est ainsi que nous renforçons de manière significative le fonds exceptionnel d'investissement (FEI), en le portant de 110 à 160 millions d'euros. De même, nous consolidons l'expertise pour aider les collectivités, en augmentant les crédits jusqu'à 20 millions d'euros.

Vous voyez bien que nous sommes au rendez-vous pour les outre-mer. Nous continuerons à travailler ensemble pour élargir encore cette offre – je peux vous l'assurer. Vous faites la comparaison avec la Corse, mais vous tenez uniquement compte de l'aide à la continuité territoriale ; n'oubliez pas les défiscalisations, qui sont nombreuses. En faisant le total, vous vous rendrez compte que les outre-mer ne sont pas oubliés : je vous en ferai la démonstration quand vous le voudrez !

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la Première ministre, en 2040, près d'un Français sur trois sera âgé de plus de 60 ans. D'ici une dizaine d'années, une forte progression du nombre de personnes âgées de 75 ans et plus est attendue. Face au vieillissement de la population et à la perte d'autonomie, qui préoccupent fortement nos concitoyens, le Gouvernement, notre majorité et tous les collègues de cette assemblée sont mobilisés.

En 2020, nous avons créé la cinquième branche de la sécurité sociale, dédiée à l'autonomie.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme Caroline Fiat s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024, les recettes de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) sont en augmentation de 2,5 milliards d'euros et l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) prévoit 15 milliards d'euros pour les personnes âgées. Le PLFSS prévoit également la création de places et de recrutements professionnels dans les Ehpad, de même que des investissements à destination des Ehpad et des résidences autonomie.

Jamais aucune majorité n'aura alloué autant de moyens à l'autonomie !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette semaine, l'Assemblée nationale examine la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, qui pose une nouvelle brique pour améliorer le quotidien des personnes âgées et des professionnels.

Mme Caroline Fiat s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cependant, pour répondre aux inquiétudes de nos concitoyens, il nous faut aller plus loin. C'est ainsi, madame la Première ministre, que vous avez confirmé, hier, votre volonté de mettre en œuvre une loi de programmation en 2024.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n'est pas la première fois qu'on entend ça !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous connaissez l'attente et l'espoir que suscite une telle annonce. Pouvez-vous nous confirmer votre engagement pour l'année 2024 et détailler votre stratégie interministérielle ?

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Madame la présidente Parmentier-Lecocq, la question du bien vieillir nous concerne collectivement et doit nous rassembler, car elle touche chacun d'entre nous : nos grands-parents, nos parents et nous-mêmes, mais aussi tous ceux qui ont besoin d'aide dans leur vie de tous les jours et les familles qui ont un parent en Ehpad.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

C'est un enjeu essentiel dès aujourd'hui, mais il le sera encore plus demain. En effet, avec l'augmentation de l'espérance de vie, la question de l'autonomie et du grand âge sera l'un des défis majeurs de notre société.

Vous l'avez rappelé, depuis 2017, beaucoup a été fait. En pleine crise sanitaire, nous avons notamment créé la cinquième branche de la sécurité sociale, la branche autonomie.

Cette réforme était attendue depuis de longues années. Nous y avons consacré des moyens inédits, que nous augmenterons de 10 milliards d'euros sur le quinquennat. Et, grâce à la proposition de loi sur le bien vieillir que vous examinez actuellement, nous allons franchir une nouvelle étape.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Concrètement, ce texte permet des avancées importantes en faveur de la prévention de la perte d'autonomie, de la lutte contre les maltraitances, d'un service public départemental de l'autonomie et d'une meilleure reconnaissance des aides à domicile.

Je tiens à saluer votre travail, madame la présidente de la commission des affaires sociales, ainsi que celui des deux rapporteures de la proposition de loi, Annie Vidal et Laurence Cristol.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Je veux également remercier les groupes de la majorité, comme ceux des oppositions, qui contribuent à enrichir le texte.

Face au défi démographique qui se profile devant nous, nous devons aller encore plus loin. Nous devons répondre à quatre grandes questions : quels sont nos besoins ? Comment les financer ? Comment disposer des compétences et des personnels nécessaires ?

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Comment améliorer la gouvernance sur ce sujet majeur ? De nombreux parlementaires ont défendu l'idée d'une loi de programmation sur le grand âge.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Comme je l'ai annoncé hier, en marge de mon déplacement à Strasbourg, cette loi de programmation, nous la ferons !

« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC. – « Il serait temps ! » sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mais comment allez-vous la financer ? C'est la seule question qui compte !

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

J'ai donc demandé à la ministre des solidarités et des familles, Aurore Bergé, d'engager des concertations avec les parlementaires de tous les groupes, les conseils départementaux et les professionnels du secteur. Nous voulons nous doter, ensemble, d'une vision partagée des besoins, des financements et des responsabilités. Nous avancerons dans l'esprit constructif et transpartisan qui a prévalu jusqu'à présent sur ce sujet.

Je souhaite qu'un texte puisse être présenté d'ici l'été,…

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

…pour un examen et une adoption au second semestre 2024.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette fois-ci, nous veillerons à ce que vous teniez votre promesse ! Je le dis à vous et à votre successeur !

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Mesdames et messieurs les députés, l'autonomie et le grand âge sont des enjeux centraux pour l'avenir de notre société. Cette loi de programmation nous permettra d'y répondre ensemble.

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du logement.

Dans trois jours aura lieu la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Je commencerai par rappeler que cette date a été choisie en commémoration d'un assassinat politique, celui des trois sœurs Mirabal, Patria, Minerva et Maria Teresa, tuées le 25 novembre 1960 en République Dominicaine en raison de leur combat contre la dictature. Soixante-trois ans plus tard, la violence politique continue de s'abattre sur les femmes qui osent résister à l'oppression, comme en Iran.

À ces violences politiques, et aux guerres dont les premières victimes sont souvent les femmes, s'ajoutent les violences sexistes ordinaires. Ces violences-là, les femmes de France n'y échappent pas. L'accès à l'hébergement d'urgence pour les femmes victimes de violences devient critique. Depuis cet été, beaucoup d'entre elles sont laissées sans aucune solution d'hébergement. Le manque structurel de places est aggravé par les consignes préfectorales qui imposent au 115 un tri drastique. Monsieur le ministre, ces femmes sont en danger si on les force à cohabiter avec leur agresseur : le comprenez-vous, au moins ?

Par ailleurs, de plus en plus de femmes enceintes ou de mères avec des jeunes enfants, parfois des bébés, se retrouvent à la rue. La majorité d'entre elles sont des femmes étrangères qui ont subi de graves violences durant leur parcours migratoire ; leur grossesse est souvent la conséquence d'un viol. En restant à la rue, le risque qu'elles subissent de nouvelles violences est très élevé – sans parler de celui qu'encourent leurs enfants.

Heureusement les parlementaires sont mobilisés aux côtés des associations féministes. Mais le problème ne pourra être résolu que si l'État joue correctement son rôle.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, quand le Gouvernement s'attaquera-t-il au problème ? Quand ? Il est inutile de prétendre faire de la lutte contre les violences faites aux femmes une priorité des politiques publiques ou de vouloir réduire le nombre de féminicides, si vous ne mettez pas ces femmes à l'abri !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES – M. Jiovanny William applaudit aussi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard, ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations

Vous abordez plusieurs sujets. S'agissant, tout d'abord, de la journée de lutte contre les violences faites aux femmes et des mesures que nous avons prises depuis 2017, je peux vous assurer que nous avons fait de ce combat une priorité et que nous nous sommes attaqués, en particulier, aux violences commises au sein du couple. Nous avons ainsi doublé le nombre de places en hébergement d'urgence. En 2017, il n'y en avait que 5 000 ; nous en comptons plus de 10 000 à présent. Lorsqu'elles appellent le 115, les femmes victimes de violences conjugales et celles qui sont victimes du système prostitutionnel sont prioritaires pour l'attribution d'un logement.

Mais la quantité de logements disponibles n'est pas la seule donnée à prendre en considération, encore faut-il qu'ils soient de bonne qualité. Je demanderai en début d'année prochaine un état des lieux pour savoir si les femmes et les enfants sont hébergés dans des conditions dignes.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il y a urgence ! C'est maintenant qu'il faut le faire !

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard, ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations

C'est un travail que j'ai déjà engagé avec le ministre du logement et je tenais à vous rassurer.

Une femme, avant de réussir à quitter définitivement son domicile, aura essayé d'en partir sept fois en moyenne. Elle doit au préalable, en effet, parvenir à se défaire de l'emprise qu'exerce sur elle son conjoint violent mais également surmonter nombre de contraintes administratives et financières. C'est pourquoi nous lançons le pack nouveau départ dès cette année, dans cinq départements, et nous octroyons une aide universelle d'urgence dont le montant variera entre 243 euros et plus de 1 500 euros, selon les ressources et les besoins de la victime.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre de la santé, une étude publiée lundi par l'agence régionale de santé (ARS) d'Île-de-France révèle une contamination généralisée des œufs et des sols à plusieurs polluants organiques persistants. Pas moins de 410 communes de l'agglomération parisienne sont concernées. En Seine-et-Marne, dans les Yvelines, l'Essonne ou le Val-d'Oise, les taux de polluants sont jusqu'à dix fois supérieurs aux seuils de dangerosité. Pas moins de 90 % des œufs analysés dépassent les valeurs seuils.

L'exposition aux polluants organiques persistants, y compris au cours du développement fœtal, peut avoir des conséquences pour la santé à long terme : augmentation du risque de cancers, troubles de la fertilité, perturbations du système endocrinien ou troubles du métabolisme. Cette alerte en région parisienne est la dernière d'une liste qui s'allonge et concerne une part croissante de nos territoires.

Il y a quelques mois, la préfecture de la Haute-Savoie interdisait la consommation des poissons pêchés à proximité de la commune de Rumilly du fait de la contamination à une famille de polluants organiques persistants, les Pfas (substances polyfluoroalkylées). Peu avant, la préfecture du Rhône appelait, elle aussi et pour les mêmes raisons, à ne pas consommer les œufs pondus dans la région lyonnaise.

Les conclusions de ces études sont convergentes : la contamination des sols et des aliments par les polluants organiques persistants semble généralisée. La révélation au compte-goutte de ces scandales sanitaires sème le doute. Comment ne pas y voir une préoccupation de santé publique majeure ?

La représentation nationale, de même que nos concitoyens, doit disposer d'une information suffisante, claire et transparente sur les risques sanitaires.

Monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager à diligenter dans tous les grands bassins de vie des études similaires à celle menée en Île-de-France ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Je vous sais très mobilisé autour de ce sujet essentiel et je salue l'amendement que vous avez défendu lors de l'examen du projet de loi de finances pour augmenter de 10 millions d'euros le budget alloué à la prévention des risques liés aux Pfas.

Mieux prendre en compte les conséquences du recours aux polluants éternels est une urgence environnementale et sanitaire, les exemples que vous venez de citer en témoignent. Le Gouvernement, en particulier les ministères concernés, est mobilisé. Des mesures ont été prises pour prendre en compte les recommandations émises par l'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail), pour améliorer le contrôle sanitaire de la qualité des eaux réalisé par les ARS, mais aussi pour renforcer la surveillance et dépasser les objectifs fixés par les directives européennes pour 2026, puisque nous avons décidé d'allonger la liste des molécules Pfas contrôlées.

En Nouvelle-Aquitaine, l'ARS a lancé, dans le cadre de son plan régional santé environnement, une étude qui permettra de renforcer encore davantage le contrôle de l'eau potable.

Concernant les mesures curatives, le plan d'action ministériel relatif aux Pfas vise à éliminer les polluants déjà installés. Un travail a été engagé pour établir la cartographie des rejets au niveau national et les réduire. Les résultats vous seront communiqués.

Depuis l'arrêté de juin 2023, les sites qui relèvent de secteurs d'activités émetteurs de Pfas doivent analyser la présence de Pfas dans leurs rejets dans l'eau.

Des mesures préventives sont également prévues puisque le plan Eau, appliqué au niveau interministériel, prévoit de renforcer la protection des captages et que la nouvelle stratégie Écophyto entrera bientôt en vigueur.

La santé des enfants et les mesures de prévention que nous devons prendre pour la protéger sont au cœur de la biosurveillance et des études que nous menons avec Santé publique France.

Des parlementaires sont engagés dans le groupe santé environnement, présidé par Mme Anne-Cécile Violland, d'autres font partie de la mission relative aux Pfas confiée par Mme la Première ministre à M. Cyrille Isaac-Sibille. Je vous invite à vous associer à ces travaux.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Cyrille Isaac-Sybille applaudit aussi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous n'avez pas répondu à ma question, qui était pourtant simple : comptez-vous mener à l'échelle du territoire des études similaires à celle engagée en Île-de-France ?

Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la Première ministre, beaucoup de nos compatriotes se sentent autant israéliens que palestiniens et nous sommes collectivement meurtris de la situation au Proche-Orient. Le Hamas et ses atrocités du 7 octobre ont plongé ces deux peuples dans un abîme sans fond. Il devra en payer le prix. Le peuple palestinien n'est pas le Hamas, il est la victime collatérale de cette organisation terroriste. Aujourd'hui, des centaines de milliers de femmes, d'hommes et surtout d'enfants sont privés de toit, d'électricité, de nourriture, d'eau, de soins et n'ont aucune possibilité de s'enfuir.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les accords de cette nuit constituent le premier pas depuis quarante-six jours vers une accalmie. En échange de la libération de cinquante otages par le Hamas, ce qui est encore trop peu, l'État d'Israël accepterait de cesser ses opérations durant cinq jours. Cet accord doit aussi permettre d'intensifier l'aide humanitaire apportée aux civils palestiniens – c'est important.

Madame la Première ministre, où en sont les otages ? Cet accord pourrait-il être un premier acte vers un cessez-le-feu ?

D'autre part, comment la France peut-elle agir pour aider les populations civiles en danger, avec quels moyens opérationnels ? Enfin, quelles actions diplomatiques d'envergure pourraient-elles être menées ? Le conflit israélo-palestinien n'a que trop duré. Comme l'a très bien dit mon collègue, le président Bourlanges, nous devons affirmer encore plus haut et encore plus fort la nécessité d'une solution à deux États où chacun devra reconnaître les besoins légitimes de l'autre.

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux.

Debut de section - Permalien
Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Dès les attaques terroristes du Hamas, nous avons fait de la libération des otages une priorité. Aujourd'hui, l'espoir est permis car un accord a été trouvé hier pour libérer cinquante d'entre eux. La France est mobilisée pour favoriser ces libérations. Le Président de la République, la ministre de l'Europe et des affaires étrangères ainsi que le ministre des armées se sont rendus dans la région pour se donner toutes les chances d'atteindre ces objectifs. Je tiens à remercier tous les États qui ont participé à l'aboutissement de l'accord : le Qatar, Israël, l'Égypte et les États-Unis.

La France a considérablement renforcé son aide à Gaza et nous mobilisons tous les moyens possibles pour soutenir sa population. La France a acheminé plus de 110 tonnes d'aide humanitaire vers l'Égypte. Elle participe également à l'effort européen en embarquant du fret humanitaire sur les vols européens des 23 et 30 novembre. L'aide médicale envoyée par notre pays, en particulier deux postes sanitaires mobiles, devrait permettre de soigner jusqu'à 1 000 blessés graves. Le porte-hélicoptère Dixmude partira dans les prochains jours. Enfin, nos établissements hospitaliers sont prêts à accueillir jusqu'à cinquante patients en provenance de Gaza, en particulier des enfants blessés ou malades qui auraient besoin de soins urgents. La trêve humanitaire permettra de renforcer ces actions et d'alléger les souffrances des populations civiles.

Nous travaillons par ailleurs pour qu'un cessez-le-feu soit décidé, comme le demande le Président de la République.

La présidente coupe le micro de la ministre, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'associe à ma question les députés ultramarins et ceux de nos collègues qui ont compris le sens de notre combat pour retirer l'article 55 du projet de loi de finances pour 2024. Cet article a déclenché la colère dans nos territoires. Les députés ultramarins ont été reçus ce matin, à leur demande, par M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer. Nous lui avons expliqué les effets pervers de cet article qui prévoit une aide à l'installation professionnelle pour tous les actifs, qu'ils soient originaires d'un territoire ultramarin ou non.

Nous lui avons rappelé que c'est le Gouvernement, et lui seul, qui a choisi de maintenir cet article en dépit de notre opposition unanime. Nous lui avons demandé de le retirer et il l'a accepté, ce dont nous le remercions.

Nous souhaitons en revenir aux mesures prévues dans la proposition de loi n° 1159 destinée à renforcer le principe de la continuité territoriale en outre-mer, que j'ai présentée avec Olivier Serva. Notre demande est claire : créer un passeport mobilité retour au pays pour les ultramarins résidant dans l'Hexagone et dont les centres d'intérêt moraux et matériels sont dans leur territoire d'origine. Soit nous parvenons à un accord pour réécrire l'article 55 en ce sens, soit nous demanderons le maintien de son retrait.

Monsieur le ministre, quelle décision prendrez-vous dans le cadre de la navette parlementaire ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre délégué chargé des outre-mer.

Debut de section - Permalien
Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer

Vous posez une question importante, celle du déclin démographique en outre-mer, particulièrement en Martinique et en Guadeloupe. Je ne rappellerai qu'un chiffre : un jeune sur deux, entre 2011 et 2021 a quitté définitivement son pays d'origine, la Martinique ou la Guadeloupe.

Debut de section - Permalien
Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer

C'est pourquoi nous avons prévu ce fameux article 55 au projet de loi de finances pour 2024 afin d'accorder des aides au retour vers les territoires ultramarins. Disons-le sans détour, cet article, qui n'est ni compris, ni accepté, soulève beaucoup d'émotion.

Ce matin, à l'initiative de la Première ministre, Gérald Darmanin et moi avons reçu l'ensemble des parlementaires qui nous ont interrogés sur cette question – vous étiez présent, monsieur Mathiasin. Je suis d'ores et déjà en mesure de vous annoncer que nous allons retirer l'article 55. Ensemble, nous sommes convenus, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président de la délégation aux outre-mer, qu'une rédaction commune serait élaborée dans le cadre d'une coconstruction entre les parlementaires et le Gouvernement, de manière à vous apporter satisfaction. Nous tiendrons notamment compte, conformément à ce qu'avait souhaité M. Serva dans sa proposition de loi, du centre des intérêts matériels et moraux (CIMM), de sorte que l'on accorde une priorité aux ultramarins pour qu'ils puissent retourner au pays.

Enfin, puisque nous terminons l'examen du projet de loi de finances, je rappelle que le dispositif Cadres d'avenir bénéficiera de 2 millions d'euros de crédits supplémentaires afin que des jeunes formés dans l'Hexagone puissent retourner exercer leurs compétences dans les territoires ultramarins.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Des crues torrentielles ont frappé, après les Hauts-de-France, le département de la Savoie dans la nuit du 14 au 15 novembre dernier. Par chance, aucune victime n'est à déplorer.

Permettez-moi de remercier l'ensemble des élus locaux, pompiers, gendarmes, associations de sécurité civile, agents des collectivités ainsi que, bien sûr, tous les bénévoles qui ont prêté main-forte aux sinistrés.

M. Joël Giraud applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

De nombreuses habitations et infrastructures sont néanmoins endommagées. Au niveau de Notre-Dame-de-Briançon, commune de La Léchère, la ligne SNCF entre Albertville et Bourg-Saint-Maurice est coupée – sachant que la voie ferrée l'est également dans la vallée voisine de la Maurienne. Cette rupture des liaisons a évidemment des répercussions immédiates sur les usages quotidiens et suscite de vives inquiétudes quant à la prochaine saison hivernale.

Étant donné que l'on dénombre dans la région 400 000 lits touristiques, dont une partie desservie par le train, les professionnels de la montagne s'inquiètent légitimement à l'approche de la saison. Idem pour l'entreprise MSSA, l'usage du chemin de fer étant indispensable pour assurer le transport sécurisé du chlore. Bref, l'accessibilité ferroviaire est essentielle pour ce territoire, tant pour les usagers que pour le tourisme et l'industrie.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la Première ministre, pouvez-vous prendre l'engagement que l'état de catastrophe naturelle sera reconnu dans les plus brefs délais, afin de rassurer les nombreuses familles dans le désarroi ? Les enjeux économiques étant considérables, quand sera rouverte la ligne SNCF ?

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Debut de section - Permalien
Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Vous l'avez dit : dans la nuit du 14 au 15 novembre, une crue de l'Arve a battu le record historique établi le 1er mai 2015 : jamais depuis que l'on mesure ces crues, c'est-à-dire depuis 1904, on n'avait atteint un tel niveau. On a enregistré un débit allant jusqu'à 1 000 mètres cubes par seconde.

Debut de section - Permalien
Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Le phénomène est directement lié au dérèglement climatique : à l'intensité extrêmement forte des précipitations s'est ajouté le fait qu'à cause de la douceur des températures, ce qui aurait dû tomber sous forme de neige est devenu de l'eau, ce qui a accru les dégâts dans la vallée. Vous avez cité les lignes ferroviaires ; je voudrais avoir aussi une pensée, si vous le permettez, pour les maraîchers de Gaillard et les usines de Magland.

Exclamations sur certains bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Je veux prolonger ce que vous avez dit, et saluer les investissements réalisés par les collectivités locales et les programmes d'actions de prévention des inondations (Papi) engagés en 2012 et en 2020.

Vous me demandez si, compte tenu de l'ampleur de la crue, l'état de catastrophe naturelle sera reconnu. Dans les prochains jours, le ministère de l'intérieur, qui est à la fois chargé d'examiner les dossiers et de piloter la demande de reconnaissance, va examiner la situation de ces territoires. Je viens d'évoquer une crue historique : vous avez une petite idée de la manière dont la commission sera amenée à statuer.

De façon encore plus concrète, les maires concernés doivent transmettre les dossiers dans les plus brefs délais afin que la commission puisse se tenir à Beauvau. Nous sommes en train de consolider les hypothèses de réouverture des lignes ferroviaires. Nous avons bien conscience que le calendrier lié à la saison touristique suscite une pression encore plus forte, et je puis vous assurer que ce dossier retient toute mon attention ainsi que celle du ministre de l'intérieur.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, je vous interrogeais sur les vallées de la Tarentaise et de la Maurienne en Savoie, non sur celle de l'Arve en Haute-Savoie !

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Eh oui ! On dirait que vous ne connaissez pas vos départements !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la Première ministre, le lundi 20 novembre se tenait la Journée internationale des droits de l'enfant.

Je sais qu'au-delà de cette date symbolique, un large consensus existe sur ces bancs pour protéger les plus jeunes contre les dangers susceptibles d'entraver le chemin de leur épanouissement. Preuve en a été faite par l'adoption à l'unanimité, le mercredi 28 juin 2023, de la proposition de loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne.

Cette proposition de loi, je l'avais déposée avec humilité, en ayant conscience qu'elle ne pourrait pas tout résoudre. Son objectif est simple : permettre aux parents de mieux superviser la vie en ligne de leurs enfants, alors que les utilisateurs de réseaux sociaux sont de plus en plus jeunes et que des études scientifiques soulignent les risques d'une exposition intensive à un âge précoce.

Chaque jour, les réseaux sociaux sont submergés par des contenus de plus en plus violents, erronés, indécents. Pour préserver la santé mentale de nos enfants, une véritable course contre la montre est engagée.

Je prendrai pour exemple la dernière émission de téléréalité qui inonde les réseaux sociaux : « Frenchie Shore ». À la limite de la pornographie, elle verse dans le trash et la vulgarité permanente. Combien de collégiens, combien d'écoliers sont ainsi exposés à tout ou partie de cette émission ?

Madame la Première ministre, je connais votre engagement sur cette question, comme en témoigne l'avis favorable que vous avez émis sur la proposition de loi. Malgré la promulgation de la loi par le Président de la République le 7 juillet dernier, son application reste suspendue à une appréciation de la Commission européenne. Or le temps presse. Pouvez-vous indiquer à la représentation nationale quelle est la position du Gouvernement sur le sujet ?

Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et Dem.

Debut de section - Permalien
Élisabeth Borne, Première ministre

Vous avez raison de le dire : la protection des mineurs dans l'espace numérique est un enjeu majeur, et je tiens à saluer, monsieur le président Marcangeli, le travail remarquable que vous avez effectué dans ce domaine, notamment en étant à l'origine de la loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne. Ce texte protège nos enfants, en interdisant aux mineurs de 15 ans de créer un compte sur un réseau social sans l'autorisation de leurs parents. Ce texte, le Gouvernement l'a soutenu et il a été adopté à la quasi-unanimité de l'Assemblée comme du Sénat.

Face au défi de la régulation numérique, c'est avec l'Union européenne que nous pourrons peser et trouver des solutions efficaces. Cette conviction nous rassemble. C'est un dossier que nous avons défendu durant la présidence française du Conseil de l'Union européenne. Après vingt années de tentatives infructueuses, nous sommes parvenus à imposer aux géants du numérique, avec le règlement dit DSA (Digital Services Act), une régulation européenne conforme à notre vision et à nos valeurs. La règle que nous leur avons imposée est simple : tout ce qui est interdit hors ligne doit l'être également en ligne. Le DSA nous donne les moyens d'agir face aux grands acteurs du numérique, qui ne pourront plus jouer sur la diversité de nos normes. Par la voix du ministre délégué Jean-Noël Barrot, le Gouvernement a défendu devant le Parlement un projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique, dont l'objet est d'appliquer ce règlement ainsi que de protéger les enfants à travers de nouvelles mesures comme la protection des mineurs contre la pornographie en ligne, la lutte contre le cyberharcèlement ou l'instauration d'une peine de bannissement des réseaux sociaux.

Dans le cadre du droit européen, nous pouvons naturellement agir et légiférer – je pense en particulier à la question de la majorité numérique. Nos actions au niveau de l'Union européenne et au niveau national se complètent ; nous pouvons – et devons – les coordonner parfaitement. C'est pourquoi nous travaillons en ce moment même avec la Commission européenne afin d'articuler votre loi avec les travaux européens et permettre son entrée en vigueur dans les meilleurs délais.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci pour la clarté de votre réponse, madame la Première ministre. J'insiste à nouveau sur l'enjeu de cette action. Ce qui se passe sur les réseaux sociaux est gravissime. Il y a des ingérences étrangères, des violences inacceptables. Il s'agit d'un enjeu de civilisation. Nous devons apporter une réponse forte.

Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ma question s'adresse au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Ces derniers jours, de nombreux villages de France ont vu leurs panneaux retournés par des agriculteurs, qui manifestaient ainsi leur colère contre votre écologie punitive, imposée par la stratégie bruxelloise dite de la ferme à la fourchette, elle-même inspirée par la philosophie décroissante de l'extrême gauche. « On marche sur la tête » : tel est le mot d'ordre proclamé par les agriculteurs dans cette nouvelle forme de mobilisation.

Et il est vrai que lorsque vous laissez notre agriculture en concurrence déloyale avec la terre entière et qu'en même temps vous plombez une fois de plus la compétitivité des exploitations en augmentant les taxes sur le gazole non routier (GNR), les produits phytosanitaires ou l'eau, « on marche sur la tête ».

Alors que les trois lois dites Egalim – pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous –, et les clauses miroirs ont échoué à garantir des prix rémunérateurs et que chaque jour la situation de nos agriculteurs s'aggrave, des décisions urgentes doivent être prises. Pourtant, vous donnez l'impression de gagner du temps par un enfumage permanent qui masque mal votre inaction.

Les agriculteurs n'en peuvent plus des bavardages et des milliers d'heures de concertation pour préparer une loi d'orientation et d'avenir agricole, texte maintes fois repoussé et qui s'annonce dérisoire au regard des immenses défis auxquels l'agriculture française est confrontée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, les agriculteurs ont compris qu'ils n'ont plus rien à attendre de cette majorité pour redresser notre agriculture, mais, compte tenu de leur détresse, pouvez-vous au moins annoncer que vous renoncez à l'augmentation des taxes sur le GNR et sur l'eau ainsi qu'à la hausse de la redevance pour pollutions diffuses (RPD) ? Il s'agit de décisions injustes et d'obstacles insurmontables eu égard à la situation dramatique des exploitations agricoles françaises.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Évidemment, on a le droit de dire tout et n'importe quoi sur les sujets agricoles – pardon de le dire ainsi.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

D'abord, nous avons fixé dès 2017 un premier cap, au travers de la rémunération. Je ne connais pas un agriculteur qui voudrait qu'on revienne sur les lois Egalim 1 et 2 ou sur la loi Descrozaille, ou loi du 30 mars 2023 tendant à renforcer l'équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Exactement ! Personne ne l'avait fait auparavant !

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Jusqu'alors, personne n'avait travaillé sur la question de la rémunération. Cela ne veut pas dire qu'il ne subsiste pas des difficultés et qu'il ne faut pas progresser encore dans ce domaine, mais pas un agriculteur ne conteste qu'Egalim a permis aux agriculteurs de voir leurs revenus progresser.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Deuxième cap : celui de la souveraineté de la transition. Certains, comme vous – c'est en tout cas ce que j'ai compris –, voudraient ne rien changer.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

La meilleure façon de faire disparaître l'agriculture, c'est de ne pas l'adapter et de ne pas lui permettre de faire face à la grande transition liée notamment au dérèglement climatique. Les baisses de production, que vous vivez vous-même dans le vignoble bordelais, sont en partie liées au dérèglement climatique.

Pour effectuer cette adaptation, nous avons besoin d'outils de planification.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Nous y travaillons, afin de mettre en cohérence nos objectifs et nos moyens.

Pour être crédible, il faut en effet des moyens. Or la hausse de plus de 1,3 milliard d'euros des crédits de l'agriculture, vous ne l'avez pas votée –…

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

…ou, du moins, vous ne vous apprêtiez pas à le faire. Jamais les crédits de l'agriculture n'avaient augmenté dans de telles proportions, afin d'engager la décarbonation, d'accompagner les agriculteurs vers des pratiques moins consommatrices de produits phytosanitaires, de faire face aux grandes transitions. Voilà les faits.

Il y a aussi ce qui est réalisé à travers le plan Eau. C'est ainsi que nous arriverons à mener la transition à bien.

Pour ce qui concerne le pacte et la loi d'orientation et d'avenir agricoles, la Première ministre aura l'occasion de s'exprimer prochainement sur le sujet. Nous serons au rendez-vous, dans la continuité du dialogue que nous avons engagé avec les agriculteurs et du travail que nous avons effectué.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Votre politique d'adaptation est une politique de la décroissance et de l'écologie punitive. Je me réjouis d'ailleurs du rejet ce matin, au Parlement européen, du règlement dit SUR sur l'utilisation des pesticides – rejet obtenu grâce aux députés du Rassemblement national.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Toujours les mêmes mots et jamais de solution ! Nous, nous en proposons, et nous y travaillons. Et au niveau européen aussi, nous essayons de trouver des positions d'équilibre – je m'attache à le faire.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à quatorze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise (1859).

La parole est à M. Louis Margueritte, rapporteur de la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les dispositifs de partage de la valeur sont conçus pour associer les salariés aux fruits de la croissance des entreprises, étant entendu qu'il faut créer la richesse avant de la redistribuer. Vous le savez, ils sont davantage répandus en France que dans la plupart des États européens. Ils demeurent néanmoins l'apanage des moyennes et, plus encore, des grandes et très grandes entreprises, en dépit des réformes engagées depuis une dizaine d'années pour en accroître la diffusion au sein des petites structures. En 2020, dans les entreprises de 50 à 99 salariés, 39 % des salariés avaient accès à la participation et 25 % à l'intéressement, tandis que, dans les entreprises de 1 000 salariés et plus, 70 % des salariés avaient accès à l'un comme à l'autre dispositif. Les marges de progrès sont bien réelles.

C'est donc très opportunément et très pertinemment que notre assemblée s'apprête à transposer, grâce au présent projet de loi, l'accord national interprofessionnel (ANI) relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise. Je tiens à saluer le travail très précieux que les organisations syndicales et patronales ont consenti à mener dans le contexte que nous connaissions en février dernier. Ils sont parvenus à se mettre d'accord sur cet accord et à le signer ; c'est historique. Ils ont ainsi adressé un excellent signal en faveur de la démocratie sociale. Si nous votons très massivement ce projet de loi, comme je le souhaite, nous montrerons que nous sommes au rendez-vous et à la hauteur de cet événement.

La commission mixte paritaire (CMP) s'est conclue de manière positive. Je rappellerai quelques éléments clés du texte, sans entrer dans le détail de toutes les dispositions. Le titre II concentre la plupart des mesures importantes.

Les entreprises de moins de 50 salariés ne sont pas tenues d'appliquer un régime de participation. L'article 2 leur ouvre la possibilité de le faire, par accord, en retenant une formule de calcul dérogeant à la formule de droit commun.

L'article 3 est très novateur – je salue de nouveau le travail des organisations patronales et syndicales. Il fait désormais obligation aux entreprises employant 11 à 49 salariés qui ne disposent pas déjà d'un dispositif de partage de la valeur et dont la situation économique le permet – un résultat bénéficiaire trois années de suite – d'appliquer au moins un des dispositifs de partage de la valeur.

Vous le savez, l'Assemblée avait décidé à l'unanimité d'avancer d'un an l'entrée en vigueur de cette mesure. Souhaitant s'en tenir strictement au texte de l'accord, le Sénat a rétabli la rédaction initiale. Dans un esprit de compromis, afin d'obtenir un accord en CMP, nous en sommes restés à cette version, à savoir une entrée en vigueur en 2025. Bien évidemment, cela n'empêchera pas les entreprises qui le peuvent et le souhaitent de la mettre en œuvre dès 2024.

L'article 3 bis ouvre cette même possibilité aux organismes relevant de l'économie sociale et solidaire (ESS).

L'article 5, qui a fait l'objet de longs débats dans notre assemblée, vise à ce que les résultats d'une augmentation exceptionnelle des bénéfices soient mieux partagés au sein des entreprises de 50 salariés et plus qui disposent d'au moins un délégué syndical. C'était une demande très forte des organisations syndicales. Près de 8 000 entreprises sont potentiellement concernées par cette mesure. Vous le savez, nous avions déjà enrichi la liste des critères pris en compte pour décider d'un tel partage. En CMP, nous avons ajouté un nouveau critère : la survenance d'une ou plusieurs opérations de rachat d'actions.

La loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat avait pérennisé le principe d'une prime exonérée de cotisations sociales. Les articles 6 et 8 du présent projet de loi permettent en outre d'inscrire la prime de partage de la valeur (PPV) parmi les dispositifs de partage de la valeur, tout en prorogeant son régime fiscal actuel jusqu'à la fin de 2026 pour les entreprises de moins de 50 salariés. Rappelons que la PPV est plébiscitée.

L'article 7 introduit un nouvel outil, le plan de partage de la valorisation de l'entreprise (PPVE), que je n'évoquerai pas de manière détaillée. Les articles 9 à 12 procèdent à des ajustements sur lesquels je ne reviens pas.

Le titre IV porte sur l'actionnariat salarié. Bien que spécifique à certains types de sociétés, celui-ci constitue un outil très efficace d'association des salariés à l'entreprise, que nous souhaitons encourager. En ce sens, les articles 13 et 14 modifient les plafonds d'attribution d'actions gratuites.

Je termine par un mot sur le titre Ier . Dans un contexte d'inflation qui continue à peser sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens – même si nous pouvons noter qu'elle commence à se stabiliser –, l'article 1er vise à affirmer l'importance qui s'attache à une révision plus régulière des classifications sur lesquelles se fondent les grilles salariales. D'autre part, l'article 1er bis consacre l'engagement des branches en faveur de l'égalité professionnelle.

Si nous adoptons ce texte à une large majorité, nous enverrons un très bon signal en faveur de la démocratie sociale. Je vous invite donc à le voter massivement.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, vice-présidente de la commission mixte paritaire, et Mme Maud Petit applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion

Le Gouvernement accueille avec une grande satisfaction l'accord trouvé en commission mixte paritaire sur la transposition de l'ANI du 10 février dernier relatif au partage de la valeur. Du point de vue du Gouvernement, c'est une double satisfaction, non seulement pour le dialogue social mais aussi pour la démocratie parlementaire. Les deux assemblées se sont illustrées par leur sens du dialogue et de la responsabilité. C'est ce qui mène à cette transposition réussie, qui trouve un équilibre entre l'écoute du dialogue social et le respect de la compétence du législateur. Ce succès doit beaucoup à la qualité des discussions parlementaires, et je tiens plus particulièrement à saluer le travail accompli par le rapporteur, M. Louis Margueritte, en lien avec sa collègue du Sénat.

Ce projet de loi répond à deux demandes majeures des Français : une action en faveur du pouvoir d'achat et la participation des salariés dans leur entreprise. Il s'inscrit dans la continuité de réformes précédentes en faveur du pouvoir d'achat, notamment la loi du 22 mai 2019, dite Pacte, relative à la croissance et la transformation des entreprises, les mesures d'urgence au moment de la crise sanitaire et les dispositions inscrites dans la loi en juillet 2022 pour lutter contre l'inflation.

Sans jamais substituer au salaire les dispositifs de partage de la valeur, ce texte complète l'arsenal au service du pouvoir d'achat des Français. Ce gain de pouvoir d'achat par le partage de la valeur créée dans l'entreprise renvoie à une conception particulière du travail : l'idée que partager la valeur, c'est d'abord et avant tout revaloriser le travail et renforcer la solidarité de destin entre l'entreprise et le salarié.

Le 16 septembre 2022, lorsque j'ai invité les partenaires sociaux à ouvrir une négociation à ce sujet, l'aboutissement de celle-ci n'avait rien d'évident, et nombreux étaient ceux qui en doutaient. Pourtant, malgré les débats agités du printemps, les partenaires sociaux sont parvenus le 10 février dernier à un accord, qui a été signé par les trois organisations patronales représentatives et quatre des cinq organisations syndicales représentatives.

Fort de cet esprit de consensus, que je tiens de nouveau à saluer, je m'étais engagé auprès des partenaires sociaux à une transposition intégrale et fidèle de l'accord, en fixant un principe : l'accord, tout l'accord, rien que l'accord. Sans rien trahir de cet état d'esprit, le Parlement s'est penché sur l'accord et ses améliorations possibles. Les débats de qualité ont fait converger la vision des partenaires sociaux et celle des parlementaires vers un meilleur partage de la valeur dans notre pays.

Tout d'abord, parmi un certain nombre de simplifications et d'assouplissements, le texte prévoit l'obligation d'engager, d'ici au 31 décembre prochain, une négociation pour examiner la nécessité de réviser les classifications des branches qui n'ont pas procédé à un tel examen depuis plus de cinq ans. Il s'agit là non seulement d'améliorer les rémunérations, mais aussi de faire écho aux chantiers ouverts par Mme la Première ministre à l'occasion de la conférence sociale.

S'agissant plus particulièrement des outils de partage de la valeur, il convient de rappeler qu'à ce jour, rares sont les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) qui proposent ces dispositifs de participation, à la fois parce qu'elles n'en ont pas l'obligation et parce qu'ils sont très complexes à mettre en œuvre. Ainsi, seuls 9 % des salariés des entreprises de 11 à 49 salariés bénéficient d'un dispositif d'intéressement ou de participation.

Pour mettre fin à cette inégalité de fait entre les salariés des petites et des grandes entreprises, le texte fait confiance au dialogue social pour organiser des négociations débouchant sur un accord de branche ou d'entreprise. Il s'agit de trouver des formules dérogatoires plus adaptées à la taille et aux moyens des entreprises en question. De même, les entreprises de 11 à 50 salariés auront jusqu'au 31 décembre prochain pour instituer un dispositif de partage de la valeur dès lors qu'elles ont réalisé un bénéfice net fiscal supérieur à 1 % de leur chiffre d'affaires pendant trois années consécutives. Grâce à ces deux dispositions pourtant d'apparence très technique, près de 1,5 million de salariés auront plus facilement accès à des dispositifs de partage de la valeur. Je crois que nous pouvons tous nous en féliciter.

Le texte crée en outre un nouvel outil, le PPVE. Créé par accord pour une durée de trois ans, il permettra à l'ensemble des salariés ayant au moins un an d'ancienneté de bénéficier d'une prime lorsque la valeur de l'entreprise aura augmenté sur ces trois années. Cet outil permettra à la fois de fidéliser les salariés et de les intéresser à la croissance de leur entreprise.

Le texte prévoit une autre mesure favorable au pouvoir d'achat des salariés : jusqu'au 31 décembre 2026, la prime de partage de la valeur continuera à être exonérée d'impôts pour les salariés qui travaillent dans les entreprises de moins de cinquante salariés et dont la rémunération est inférieure à trois Smic.

Aucune de ces évolutions ne s'éloigne d'un principe essentiel, réaffirmé à l'Assemblée nationale comme au Sénat : la non-substitution au salaire. Les partenaires sociaux l'avaient établi ; les parlementaires l'ont consacré dans la loi, pour en rappeler le caractère intangible.

De surcroît, le texte engage le développement de l'actionnariat salarié. Dans l'ANI, les partenaires sociaux avaient défini plusieurs leviers pour en assurer le développement : l'extension de la portion du capital ouverte aux salariés actionnaires, grâce à l'augmentation des plafonds de versement d'actions gratuites aux salariés ; l'amélioration de la gouvernance des fonds d'actionnariat salarié en demandant davantage de transparence sur la politique d'engagement actionnarial ; la promotion d'une épargne verte, solidaire et responsable, en exigeant qu'au moins un fonds responsable soit proposé parmi les plans d'épargne entreprise (PEE) et les plans d'épargne retraite (PER) d'entreprise.

Les travaux de la commission mixte paritaire, que je salue, ont permis d'affiner le texte et de préciser utilement certains dispositifs. Je pense par exemple au dispositif de rachat d'actions, inscrit non plus dans le projet de loi de finances, mais dans ce projet de loi. Les rachats d'actions par l'entreprise seront désormais l'un des critères pris en compte dans la définition d'une augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal de l'entreprise. Je relève deux autres évolutions utiles : l'accord entre les deux assemblées sécurise le régime fiscal des apports d'actions consécutifs à une attribution gratuite ; le texte protège le secret des affaires en prévoyant l'absence de publicité des accords de partage de la valorisation de l'entreprise.

Enfin, le suivi annuel de l'expérimentation des dispositifs de partage de la valeur institués dans les entreprises d'au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés sera transmis aux partenaires sociaux. Le texte confirme que seront aussi transmis aux partenaires sociaux le suivi annuel d'une autre expérimentation, celle de la formule de participation dérogatoire, ainsi que le rapport d'évaluation qui intègre les évolutions envisageables de la formule de calcul de la réserve spéciale de participation.

Pour techniques qu'ils soient, tous ces éléments sont très utiles. Le Gouvernement soutient ces précisions et compléments nécessaires proposés par les deux chambres.

Le texte correspond aux attentes des Français en matière de pouvoir d'achat et de participation à la vie de l'entreprise. L'accord en CMP parachève son parcours exemplaire, de la signature d'un accord interprofessionnel à une transposition fidèle mais enrichie. Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement appelle l'Assemblée nationale à adopter les conclusions de la CMP.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai reçu de Mme Mathilde Panot et des membres du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à Mme Aurélie Trouvé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Eh oui, voici encore une motion de rejet de La France insoumise ! Mais vous allez vite comprendre pourquoi nous ne cessons de vouloir rejeter les textes désastreux de ce gouvernement. Cette fois-ci, je vais revêtir mes anciens habits de professeur d'économie et vous faire un cours d'économie macroniste, que j'ai intitulé « L'Horreur économique ».

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur divers bancs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est le titre d'un excellent bouquin de Viviane Forrester – je le précise à l'attention de ceux qui ne le connaîtraient pas.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce cours d'économie macroniste est en trois chapitres. Abordons le premier : « à quoi ressemble cette horreur économique ? » Depuis maintenant six ans et demi, le Gouvernement dépèce méthodiquement la protection sociale que nous avons mis cinquante ans à construire ; il le fait à coups de rabotage des cotisations sociales, de la durée de la retraite et des indemnisations chômage. Il détruit un à un les mécanismes de redistribution des richesses, à commencer par l'impôt sur la fortune, qu'il a supprimé. Il accorde à tour de bras des cadeaux fiscaux aux grandes entreprises, le dernier étant la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui coûtera à terme 15 à 16 milliards d'euros par an – une folie !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En fait, la Macronie est convaincue que gouverner un pays revient à manager un open space. L'horreur économique qui résulte de ces six ans et demi de macronisme est totalement à l'opposé de ce qui nous a été promis en 2017. La zone euro est en quasi-stagnation et la politique de taux d'intérêt ultra-élevés imposée à Francfort étouffe la reprise. Or la France dit amen à cette politique monétaire désastreuse.

Elle l'accompagne en plus d'une politique d'austérité budgétaire elle aussi absolument désastreuse. Le 1er décembre, nous nous attendons à ce que Standard & Poor's, l'agence de notation financière, abaisse à nouveau la note de la France. Bruno Le Maire, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, nous dira alors qu'il faut encore serrer la vis.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Eh bien non ! Les États-Unis ont fait un choix tout à fait différent de relance budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Leur choix débouche sur 6 % de croissance par rapport à l'avant-crise et une demande interne très dynamique. En France, la croissance est de 0,9 % cette année, 0,8 % l'an prochain. Côté emploi, la France vient de passer de 2,2 à 2,3 millions de chômeurs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il faut nous comparer à la moyenne de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) prévoit 2,5 millions de chômeurs l'an prochain. Pourraient y être ajoutés les 2 millions de chômeurs inclus dans le halo du chômage. Le tout dans un contexte de précarisation croissante du travail, où le nombre de CDI diminue tandis que les CDD et les contrats d'intérim ne cessent de croître.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion

C'est faux !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les macronistes se disaient les champions du travail, certains que les Français n'étaient qu'une bande de paresseux qu'il était possible de remettre vite fait au travail.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion

La seule paresse, c'est celle dont vous faites preuve.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mais voilà, le chômage reprend et va s'accroître.

Côté pouvoir d'achat, il baisse pour toutes les classes sociales, à l'exception des plus riches. On se demande, là aussi, s'il s'agit d'une fatalité. Eh bien, non ! En Belgique, où les salaires sont indexés sur l'inflation – ce que nous avons proposé à maintes reprises et que vous avez toujours rejeté – les salaires réels ont augmenté de 2,9 % en un an ; ils ont diminué de 2 % en France.

Côté inflation, nous sommes très loin de la sortie de la crise inflationniste annoncée par le ministre Bruno Le Maire. En deux ans, les prix de l'alimentation ont augmenté de 20 %, ceux l'essence de 15 %. Et les prix continuent d'augmenter, plongeant tout une partie de la classe moyenne dans la pauvreté.

Voilà la conséquence de la démission totale des ministres Bruno Le Maire et Olivia Grégoire face aux multinationales de la transformation et de la distribution. Gouverner, ce n'est pas seulement asséner des TED Talks aux patrons et des sermons aux PME. Gouverner, c'est faire des choix pour le pays, lorsque les groupes d'intérêt n'ont plus le sens de l'intérêt collectif. Je déplore que le groupe Renaissance et une partie du groupe Les Républicains aient empêché ce matin, en commission des affaires économiques, toute régulation des marges des multinationales, pour bloquer la proposition de loi du groupe La France insoumise visant à lutter contre l'inflation. J'ose espérer que vous reviendrez à la raison, dans huit jours, lorsque cette proposition de loi sera examinée dans l'hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous êtes économiste, mais vous ne savez pas faire la différence entre marge et revenu !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Une fatalité, là encore, l'inflation ? La réponse est aussi dans les chiffres : tandis que la France a, selon Eurostat, un taux d'inflation de 4,5 %, la plupart des pays de la zone euro atteignent des niveaux bien plus faibles. Certains parviennent même à baisser les prix. C'est le cas, là encore, de la Belgique.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui, la Belgique a fait baisser les prix de 1,7 %. Eh oui, c'est possible !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour compléter cette horreur économique, les difficultés des TPE et PME sont croissantes, en raison, notamment, de l'explosion des prix de l'énergie. Nous vous avons pourtant sans cesse proposé de les plafonner. Manifestement, la politique macroniste ne sert que les intérêts des entreprises multinationales. L'horreur économique n'est pas pour tout le monde. J'en arrive au chapitre 2.

« Qui profite de cette horreur ? » Les dividendes versés aux actionnaires sont au top. Ils vont même atteindre un nouveau pic cette année. Sur ce point, au moins, la France est l'un des meilleurs performeurs de l'Union européenne. Nos concitoyens, qui galèrent pour payer leurs factures de chauffage, seront ravis de savoir qu'Engie fait partie du peloton de tête du versement des dividendes. Il en est de même pour Axa, ce qui devrait enchanter celles et ceux qui paient des primes d'assurance toujours plus élevées. Sanofi complète ce trio, mais ne semble pas trouver que les médicaments sont assez rentables dans notre pays, puisque l'entreprise a annoncé dernièrement la revente de son usine de Normandie, qui produit le Doliprane.

Dans cette ambiance de fête pour les grands patrons, leurs salaires continuent d'augmenter : + 25 % sur trois ans. Il est vrai que le pauvre M. Tavares a vu le sien divisé par trois, faisant chuter la moyenne d'ensemble. Néanmoins, avec un salaire de 66 millions d'euros l'an dernier, on n'est pas trop inquiet pour lui…

Passons au chapitre 3 sur le prétendu partage de la valeur opéré par votre projet de loi, qui s'inscrit parfaitement dans cette horreur économique, monsieur le ministre Dussopt. Partager la valeur sans augmenter les salaires, en favorisant les primes, il fallait le faire ! Ce texte, qui vous a amené à ressasser la beauté du dialogue social, reflète la réalité du rapport de force actuel dans le monde du travail. Les salariés pèsent trop peu dans les négociations face aux organisations patronales, pour faire valoir leurs attentes. Elles sont pourtant raisonnables : vivre de son salaire, nourrir et loger sa famille de façon décente, payer le chauffage, se soigner, voir la mer, la campagne, la montagne, de temps à autre. Plus rien de tout cela n'est désormais garanti dans ce pays, même avec un travail à plein temps.

Pour préparer l'examen ce texte, je suis allée dans ma circonscription rencontrer des caissières de Monoprix, des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), des éboueurs, toutes celles et tous ceux qui gagnent à peine au-dessus du Smic après vingt ou trente ans de carrière et à qui vous dites qu'ils n'ont pas besoin d'augmentations des salaires et qu'ils vont toucher des primes. Ces primes, justement, elles leur sont retirées quand ils ont osé être absents pour raison médicale par exemple. Elles représentent un moyen de pression supplémentaire pour les patrons, mais surtout beaucoup moins d'argent pour la sécurité sociale puisqu'elles sont exonérées de cotisations. L'ensemble de ces exonérations coûte au total 75 milliards d'euros aux caisses de sécurité sociale ; 85 milliards si l'on y ajoute l'actionnariat salarié.

Pour faire reculer, même très légèrement, cette horreur économique, nous avons proposé une conditionnalité, même très limitée, des exonérations de cotisations patronales : en les subordonnant par exemple, à des obligations de transparence sur le partage de la valeur, au respect de l'égalité des droits entre les femmes et les hommes, ou encore à des critères de performance environnementale – une horreur pour vous, sans doute. Mais vous avez tout rejeté.

Ce texte ressemble, trait pour trait, à l'horreur économique que la Macronie nous impose, depuis six ans et demi. C'est pourquoi nous vous invitons donc, avec beaucoup de vigueur, à rejeter ce texte dans l'espoir d'un chapitre 4 qui verrait le peuple reprendre son destin en main et tourner la page de cette horreur économique.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur la motion de rejet préalable, je suis saisie par le groupe La France Insoumise d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Nous en venons aux explications de vote.

La parole est à Mme Félicie Gérard.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il vise à mieux rémunérer les salariés, à aider nos chefs d'entreprise et à répartir de manière plus juste la valeur créée. Quelle surprise de voir déposer une motion de rejet sur un tel texte ! Peut-être est-elle déposée par principe.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Rejeter ce texte nuirait aux entreprises et aux salariés et serait irrespectueux de leur dialogue. Le projet de loi transpose à un accord signé par les partenaires sociaux. S'y opposer revient donc à refuser le résultat du dialogue social.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ceux qui soutiennent cette motion iront expliquer aux salariés qu'ils ne pourront plus bénéficier de la prime de partage de la valeur.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ils iront dire aux salariés de notre pays qu'ils ne pourront pas bénéficier de la participation, de l'intéressement et de tous les dispositifs essentiels à l'attractivité de nos entreprises et à l'augmentation de la rémunération des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette motion de rejet préalable n'a aucun autre intérêt que de retarder l'adoption d'un texte essentiel pour l'attractivité des entreprises et la juste rétribution des salariés. Le groupe Horizons et apparentés votera résolument contre cette motion de rejet préalable opportuniste et incohérente.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous partageons, avec nos collègues de La France insoumise, le double constat que ce texte n'est pas à la hauteur de l'enjeu, et que le premier instrument de partage de la valeur devrait être l'augmentation des salaires, en particulier dans cette période inflationniste. Pour autant, nous ne pouvons pas ignorer que ce texte est le fruit d'un accord national interprofessionnel.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe RE

Ah ! Enfin !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans notre pays, où la démocratie parlementaire est tant mise à mal, nous avons la responsabilité de respecter la démocratie sociale à laquelle, nous, écologistes, sommes très attachés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous croyons à la démocratie sociale, nous souhaitons même renforcer le rôle des syndicats dans notre pays. Pour cette raison, nous nous abstiendrons sur cette motion de rejet.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai entendu dire, il y a quelques instants, que ce texte était essentiel. Il ne faut pas se payer de mots en la matière. Ses effets positifs seront très minimes et il aura également des effets négatifs que vous escamotez rapidement. La discussion, suscitée par le Gouvernement sur ce sujet, s'est déroulée dans un cadre très contraint. Les organisations syndicales ont été empêchées d'échanger sur l'ensemble du sujet du « partage de la valeur ». Nous aboutissons à un résultat qui n'est bouleversant pour personne, y compris pour celles et ceux qui ont signé l'accord. Toutes et tous ne l'ont d'ailleurs pas signé. Nous émettons notre avis sur le résultat de cette discussion, impulsée par le Gouvernement, qui s'est placé d'un certain côté du rapport de force, et qui a abouti à l'accord que nous examinons.

Pour notre part, nous tenons à envoyer un autre signal. Ce n'est pas de cette façon que nous répondrons correctement aux questions de pouvoir d'achat et – disons le mot – de salaire, sujet absolument nécessaire mais absent de cet accord. Pour toutes ces raisons, nous allons voter cette motion de rejet.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le groupe LIOT est favorable à la démocratie sociale, et au dialogue social. Il est vrai que l'accord n'a pas été unanime, mais à l'exception de la CGT, toutes les confédérations l'ont signé. Nous sommes pour le respect des décisions très majoritaires des partenaires sociaux. Respectons le dialogue social de ceux qui ont réussi, après de longues négociations, à aboutir à cet accord qui nécessite une transposition législative. Nous voterons donc contre cette motion de rejet.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le groupe Renaissance est très attaché à ce texte de transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise. Cet accord entre les partenaires sociaux est historique. En matière de partage des profits, il est le plus ambitieux depuis cinquante ans. Le texte transpose fidèlement l'accord signé le 10 février 2023 par la quasi-totalité des partenaires sociaux : le Medef, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), l'Union des entreprises de proximité (U2P) pour les organisations patronales ; la Confédération générale des cadres (CGC), Force ouvrière (FO) et la CFDT pour les organisations salariales.

Près de 1,5 million de salariés seront concernés par les avancées du texte, notamment par sa mesure phare, la généralisation de la participation pour les entreprises de moins de 50 salariés. Grâce à ce texte consensuel, le partage de la valeur concernera désormais tous les employés d'entreprises de plus de 10 salariés. Ce texte a été enrichi, adopté assez largement par l'Assemblée nationale en juin 2023. On peut, bien sûr, être pour, contre, ou s'abstenir. Mais proposer une motion de rejet préalable sur un texte transposant un accord entre organisations syndicales représentatives en dit long sur la conception du paritarisme de certains élus dans cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Depuis quand les organisations syndicales vous intéressent ?

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe LFI – NUPES

Et les retraites ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Notre groupe votera contre cette motion de rejet qui va à l'encontre de l'intérêt des salariés…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et qui s'oppose au paritarisme dans notre modèle social.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE, sur quelques bancs du groupe Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous aussi, nous voterons contre cette motion de rejet.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe RE

Voilà ! Bravo !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Leur soutien ne vous dérange pas, cette fois ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce texte transpose dans la loi une majorité des trente-cinq articles de l'accord national interprofessionnel…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…qui a été voté par la quasi-totalité des organisations syndicales, à l'exception de la CGT, et par les organisations patronales. Nous voulons rester fidèles à ce qui a été négocié.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame Trouvé, il ne s'agit pas d'économie mais de pratique. Les salariés attendent des améliorations.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne recommencerai pas, ou du moins, pas tout de suite.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Certaines mesures, il est vrai, posent problème, comme le nouveau plan de valorisation de l'entreprise qui peut concurrencer l'actionnariat salarié dans les sociétés cotées. De même, le partage de la valeur ne doit pas se faire au détriment de l'augmentation des salaires. À l'avenir, il faudra bien distinguer les deux négociations.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Enfin, le texte ne contient aucune disposition pour lutter contre la fraude fiscale, évaluée à 40 milliards d'euros, qui grève la participation des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Toutefois, le projet de loi va dans le bon sens. Il permet d'étendre la participation aux entreprises de moins de 50 salariés, de reverser aux salariés une partie des bénéfices exceptionnels de leur entreprise et de développer l'actionnariat salarié dans le capital des entreprises françaises, ce qui renforcera la souveraineté industrielle et économique de notre pays. Nous rejetterons donc cette motion de rejet préalable.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce projet de loi relatif au partage de la valeur porte bien mal son nom. On a beau chercher, on ne voit pas en quoi il fera que la valeur sera mieux partagée.

Debut de section - Permalien
Un député du groupe LFI – NUPES

Eh voilà !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On se demande qui, parmi vous, a créé de la valeur…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est, en réalité, un texte qui facilite le versement des primes. Mais quels salariés, dans notre pays, demandent des primes, quand les salaires augmentent deux fois moins vite que l'inflation sur un an, quand cela fait vingt ans que les salaires stagnent et que les rémunérations se concentrent de plus en plus autour du Smic ? Pensez-vous vraiment que ce sont les primes qui régleront le problème ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les primes ne sont ni obligatoires, ni régulières ; elles sont une rémunération flexible, quand l'employeur le veut bien. Ce n'est pas du partage de la valeur quand les primes sont aussi exonérées de cotisations sociales, ce qui vide les caisses de la sécurité sociale.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n'est pas du partage de la valeur quand les primes se substituent à hauteur de 30 % au salaire. Ce n'est pas non plus du partage de la valeur quand, en 2020, près de 60 % des profits des entreprises partent en dividendes. Et cela dure depuis plus de dix ans.

Partager la valeur, c'est augmenter les salaires.

« Eh oui » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous refusez de vous battre pour cela. Alors, assumez réellement les conséquences de votre obstination. Il y a dans notre pays 1 million de travailleurs pauvres, principalement des femmes. Vous parlez de courbe du chômage, mais on entend moins votre baratin quand les gens qui travaillent sont contraints de recourir à l'aide alimentaire. Rappelez-vous les femmes de Vertbaudet : elles sont entrées en grève précisément parce qu'elles ne voulaient pas de prime, mais des augmentations de salaire.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le texte ne résoudra rien. Les leçons sur la démocratie sociale, c'est bien quand ça vous arrange !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous nous donnez des leçons ; nous, nous faisons avancer le droit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pendant la réforme des retraites, la totalité des organisations syndicales étaient contre, mais vous les avez écrasées, méprisées, piétinées.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voterons évidemment pour cette motion de rejet préalable.

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voterons contre la motion de rejet préalable pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, j'ai écouté avec attention votre leçon d'économie. Je constate toutefois qu'aucune économie marxiste n'a jamais apporté ni valeur ajoutée, ni sérénité pour les salariés.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RE et RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On peut refaire l'histoire, mais le modèle que vous décrivez a toujours été contraire aux libertés publiques individuelles, aux libertés fondamentales et, surtout, au progrès social.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur le fond, nous en sommes au stade de la commission mixte paritaire, c'est-à-dire que le texte a été bonifié par des lectures successives qui nous ont permis de proposer le meilleur sur le sujet. Je ne vois pas pourquoi il faudrait remettre à plat tout le travail effectué par les parlementaires à l'Assemblée et au Sénat en considérant que la copie est à revoir. Ce n'est pas notre conception des travaux en commission mixte paritaire.

Le message de votre part est clair : vous faites fi du dialogue social.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le projet de loi n'est que la transcription d'un accord national interprofessionnel dont les termes ont été définis par les organisations patronales et salariées. On pouvait espérer que nous irions au-delà de cet accord. Toutefois, le message que vous renvoyez, avec cette motion de rejet préalable, c'est que vous vous défiez de la démocratie sociale et que vous ne faites pas confiance aux partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous n'aimez pas la démocratie sociale ! C'est cela, la réalité.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est la raison pour laquelle nous voterons contre la motion de rejet préalable.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR et HOR. – M. le rapporteur applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Comme cela a été rappelé par les orateurs précédents, le projet de loi a pour objet la transposition de l'accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur. Il se doit donc seulement d'être fidèle aux mesures négociées entre les partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ces mesures représentent un équilibre entre les intérêts des salariés et ceux des entrepreneurs. J'entends la frustration que peut entraîner l'impossibilité d'amender le texte, mais nous ne pouvons pas détricoter un texte issu du dialogue social, un texte âprement négocié entre les organisations syndicales et patronales. Ce n'est pas possible. La position du groupe Démocrate était claire depuis le départ : c'est l'ANI, rien que l'ANI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voterons donc contre la motion de rejet préalable.

Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 148

Nombre de suffrages exprimés 146

Majorité absolue 74

Pour l'adoption 43

Contre 103

La motion de rejet préalable n'est pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Félicie Gérard.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je me réjouis de vous retrouver aujourd'hui pour examiner les conclusions de la commission mixte paritaire sur ce projet de loi relatif au partage de la valeur dans l'entreprise, qui me tient particulièrement à cœur. L'accord national interprofessionnel qu'il transpose est un réel succès à mettre au crédit du dialogue social entre entreprises et salariés de notre pays. Signé par la majorité des organisations patronales et syndicales représentatives, il témoigne de la force du dialogue et de l'ambition que nous pouvons nourrir dans ce cadre.

Certaines des mesures de l'ANI nécessitaient une transposition législative. C'est pourquoi nous sommes réunis pour voter l'accord trouvé en CMP. Comme pour toute transposition, la tâche des parlementaires était complexe : pour écrire la loi, il a fallu trouver des compromis entre le travail légitime qui est le nôtre et la nécessité de rester fidèle au texte à transposer. Son examen à l'Assemblée nationale, tout d'abord en commission des finances, saisie pour avis, puis en commission des affaires sociales, aura permis d'améliorer le texte sans pour autant remettre en cause les grands équilibres trouvés dans l'ANI par la majorité des partenaires sociaux. Le Sénat a partagé la même ambition de respecter l'accord, nous permettant d'aboutir à une CMP conclusive.

Les députés du groupe Horizons et apparentés se félicitent de cet accord car le texte final inclut, à nos yeux, de nombreux progrès.

Tout d'abord, il permet de développer la participation en entreprise. Dans un premier temps, à titre d'expérimentation, et en application d'un accord conclu au niveau de la branche, les entreprises de moins de 50 salariés pourront déroger à la formule de participation. Dans un second temps, le Gouvernement sera chargé de nous remettre un rapport sur les modalités d'évolution de cette formule de participation que nos entreprises jugent parfois trop complexe.

Deuxième progrès : le projet de loi crée des dispositifs pour mieux partager la valeur créée. En effet, les entreprises comptant entre 11 et 49 salariés et réalisant des bénéfices seront tenues de mettre en place au moins un dispositif de partage de la valeur avec leurs salariés.

Troisième progrès : le texte renforce le développement de la prime de partage de la valeur, prime que les salariés pourront désormais placer sur un plan d'épargne salariale, comme il est déjà possible de le faire pour les primes d'intéressement et de participation.

Quatrième progrès : le texte permet de développer l'actionnariat salarié, un dispositif auquel je crois beaucoup et qui a fait ses preuves. L'actionnariat salarié représente un important levier pour améliorer la confiance des salariés dans leur entreprise et il leur permet de participer davantage au développement de leur entreprise.

Ces mesures concrètes témoignent de l'importance du texte pour les entreprises et pour les salariés. Je souhaite vous dire la confiance que j'ai en eux, dans leur capacité à dialoguer, dans leur capacité à échanger et à conclure des accords d'entreprise ou de branche. Ce dialogue est primordial pour intégrer pleinement chaque acteur dans le fonctionnement et le développement de son entreprise. L'ANI est la preuve que le dialogue entre employeurs et salariés fonctionne et que ce dialogue est souhaitable et bénéfique pour tous.

Par ce texte équilibré de transposition, le Parlement démontre qu'il respecte et qu'il accompagne le dialogue social dans l'intérêt des entreprises de notre pays et dans l'intérêt des salariés.

Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et Dem. – M. le rapporteur applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous examinons ce projet de loi sur le partage de la valeur à l'issue de la commission mixte paritaire conclusive entre le Sénat et l'Assemblée nationale.

Le partage de la valeur dans l'entreprise et dans la société, voilà un sujet majeur qui aurait pu intéresser tous les Français. Hélas, force est de constater que le Gouvernement l'a pris par le petit bout de la lorgnette. En ne soumettant aux partenaires sociaux que la question des instruments de redistribution du résultat dans l'entreprise – l'intéressement, la participation et autres primes Macron –, il n'est pas à la hauteur de l'enjeu.

Le principal outil de partage de la valeur dans l'entreprise, c'est bien l'augmentation des salaires. Voilà un sujet d'actualité : l'inflation devrait atteindre 5,8 % en 2023, chiffre à mettre en regard d'une augmentation salariale moyenne prévue de seulement 4,5 %. L'inflation reste soutenue, les salaires ne suivent pas le rythme et les Français perdent chaque année du pouvoir d'achat.

Nous vous avions pourtant proposé plusieurs amendements, et même une proposition de loi visant à relancer la dynamique salariale, en augmentant le Smic en conditionnant les aides aux entreprises à la revalorisation des grilles salariales et en réservant les exonérations sur les bas salaires à une augmentation des salariés au Smic après deux ans dans l'entreprise. Mais votre seule obsession est de développer toutes les alternatives possibles pour freiner les hausses de salaire : déplafonnement des heures supplémentaires exonérées, monétisation des RTT, prime Macron… Et, maintenant, ce texte sur le partage de la valeur, fruit d'une négociation lancée à grand renfort de communication, laquelle aura, comme toujours, accouché d'une souris.

On espérerait que les salariés des entreprises de 11 à 49 salariés bénéficieraient de la participation. Ce ne sera même pas le cas, puisque l'employeur pourra y substituer une prime Macron, et ce sans minimum prévu. Rappelons que l'Insee a constaté que les primes Macron, habilement rebaptisées « primes de partage de la valeur », avaient un effet de substitution estimé à 30 % sur les augmentations de salaire. Pourtant, rien n'est prévu dans le texte pour limiter cet effet. Tout juste avions-nous pu faire adopter à l'Assemblée, avec le rapporteur Louis Margueritte, l'avancée d'un an de la première distribution de la prime, mais le Sénat et la CMP n'ont pas pris en compte cette avancée, et cette distribution n'aura lieu qu'en 2025. Les salariés des entreprises de 11 à 49 salariés, touchés, comme tous les Français, par l'augmentation des prix alimentaires et de l'énergie, apprécieront.

Enfin, le texte aurait été l'occasion d'avancer sur l'incidence de l'optimisation fiscale sur la participation des salariés. Aujourd'hui, une partie des multinationales échappe à l'impôt en déplaçant la valeur ajoutée dans des pays à fiscalité plus favorable, notamment par les prix de transfert. C'est un problème pour nos finances publiques et c'est une injustice envers les salariés de ces groupes, qui se voient privés de participation : les affaires McDonald's, Xerox, General Electric ont ainsi défrayé la chronique. Chaque fois, les comités sociaux et économiques (CSE) se sont vu opposer l'article L. 3326-1 du code du travail, lequel les empêche de contester le calcul du résultat arrêté par le commissaire aux comptes. Cet article constitue un verrou injustifiable qui empêche les salariés de faire valoir leurs droits. Pourtant, vous refusez de l'abroger. Vous parlez de partage de la valeur mais, de fait, vous protégez les employeurs qui flouent leurs salariés, et le fisc par la même occasion. Le CSE de Procter & Gamble a porté l'affaire devant le Conseil constitutionnel, lequel devrait statuer en janvier. Pour notre part, nous ne renoncerons pas à faire abroger cet article inique et à défendre les droits des salariés à une juste rétribution de leurs efforts.

Vous l'aurez compris, les membres du groupe Écologiste estiment que ce texte n'est pas à la hauteur de l'enjeu, que les avancées pour un meilleur partage de la valeur sont plus qu'insuffisantes et surtout qu'il s'agit là d'une véritable occasion manquée, sur un sujet qui est en réalité central. En effet, faire société, c'est aussi en partager les richesses équitablement.

Néanmoins, parce que le texte apportera à certains salariés un complément de rémunération et parce qu'il est le fruit du dialogue social interprofessionnel, nous ne nous opposerons pas à son adoption. La démocratie sociale est un bien précieux, que vous avez malheureusement trop souvent ignoré.

M. Pierre Dharréville applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Partager la valeur, c'est beau. En découvrant le titre du texte, j'ai même cru que vous aviez repris une de mes propositions de loi.

Sourires sur les bancs des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous imaginez bien que partager la valeur, partager les richesses, construire de l'égalité, partager les avoirs, les savoirs et même les pouvoirs, je suis pour ! Je suis à fond pour. Mais en ce qui vous concerne, j'avais cru comprendre que, non, vous n'étiez pas trop pour.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Alors je me suis dit : il doit y avoir un problème. Et le problème, en réalité, c'est que nous n'avons pas les mêmes valeurs : nous ne partageons pas la même définition du mot « partage ». En effet, si c'est cela le partage de la valeur, Bernard Arnault est communiste ! Or j'ai l'impression qu'il n'est pas au courant.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En réalité, il n'est pas vraiment communiste et ce texte ne partage pas vraiment la valeur.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voyant que cette affaire devenait un peu difficile à assumer, vous vous êtes dit : « on va dire qu'on partage la valeur, mais sans vraiment le faire ». C'est pour cela que vous avez fixé un cadre très étroit, minuscule, aux acteurs socio-économiques, en leur disant : « surtout, ne débordez pas du cadre ! »

À ce propos, faisons un jeu : celui du mot tabou, qu'il ne faut jamais employer. C'est le mot « salaire »

« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Or le premier outil de partage de la valeur produite, c'est le salaire, qui est la juste contrepartie du travail et de la richesse produite par celles et ceux qui travaillent.

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le salaire est à tout point de vue – individuellement et collectivement, immédiatement et pour l'avenir – plus puissant que tous vos dispositifs de participation, d'intéressement et de primes.

M. Matthias Tavel applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est le premier élément négocié dans un contrat de travail ; il vient en partie encadrer la subordination du salarié à son employeur, il reflète une qualification et il évolue en cours de carrière. Le salaire socialisé ouvre et garantit des droits en matière de santé, de chômage et de retraite, même si ces deux-là ont pris un sacré coup sur la carafe ces derniers mois. Pour des raisons évidentes, vous refusez donc de parler salaire et cotisations. Cotisations : c'était le deuxième mot tabou. Encore perdu !

Le salaire est aux antipodes de l'intéressement et des primes qui sont aléatoires, limités dans le temps et désocialisés. Ainsi, ces dispositifs de « partage de la valeur », qui reposent sur un nombre croissant d'exonérations de cotisations sociales, ont un coût non négligeable pour la sécurité sociale : près de 1,7 milliard d'euros en 2021. C'est d'autant plus contestable que, comme le confirment de nombreuses études, ils se substituent partiellement – jusqu'à 30 % pour la prime Macron – aux augmentations de salaires. Non contente d'être précaire, la prime déprime le salaire, la sécu et le pouvoir de vivre.

C'est pour cette raison que les organisations syndicales avaient posé comme préalable incontournable à l'équilibre du texte l'inscription dans la loi du principe de non-substitution des primes de partage de la valeur au salaire. Vous l'avez discrètement mais obstinément refusé, et ce refus en dit long.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Votre politique a des effets et votre constance montre que vous visez des objectifs précis : entretenir la spirale des bas salaires et faire du salaire un élément subsidiaire, dans une logique de financiarisation de la rémunération. Vous hissez la prime désocialisée et défiscalisée au rang de première contrepartie du travail. Vous rapprochez le salarié et l'ubérisé puisque, dans le sillage de l'ubérisation que vous avez toujours soutenue et développée, vous dégradez consciemment le salaire et le statut de salarié. Ce faisant, vous remettez un peu plus en cause le sens du travail et vous attisez le sentiment d'injustice sociale.

En effet, comme le montrent là aussi de nombreuses études, la répartition des primes de participation et d'intéressement – tout comme l'accès à l'épargne salariale – est plus inégalitaire que celle des salaires. Cette inégalité entre salariés vaut également en ce qui concerne les montants versés : vos primes de « partage de la valeur » ne profitent pas en premier lieu aux salaires les plus bas, bien au contraire.

Alors que l'inflation demeure à un niveau très élevé – près de 5 % en 2023 – et que selon la Dares – direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques –, le salaire réel de base recule du fait de cette inflation persistante ; alors que le nombre de travailleurs pauvres ne cesse de s'accroître – 1 million de travailleurs et de travailleuses vivent avec moins de 918 euros par mois,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…selon l'Observatoire des inégalités –, alors que le travail paie de moins en moins bien, le Gouvernement et la majorité présidentielle agissent comme ils l'ont toujours fait : ils font semblant, et le tour est joué.

Dans un monde où les richesses produites par le travail sont toujours davantage captées par un petit nombre et englouties dans la financiarisation, le partage est plus qu'une urgence incontournable : c'est un droit. Au partage de « l'avaleur », nous préférons le partage du partageur.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous arrivons au terme de l'examen de ce texte important, attendu par beaucoup de nos concitoyens, sur le partage de la valeur dans les entreprises. Nous le savons, cette thématique s'inscrit pleinement dans le quotidien des Français, le pouvoir d'achat demeurant pour eux, naturellement, une préoccupation quotidienne et essentielle.

Le groupe LIOT a toujours insisté sur la nécessité de prendre des mesures fortes en faveur des travailleurs, en ayant comme unique boussole l'impératif de rendre au travail son caractère rémunérateur et émancipateur. Dans cet esprit, nous estimons que le texte issu de la commission mixte paritaire va dans le bon sens, car il est porteur d'avancées.

En dix ans, dans les cent plus grandes entreprises françaises cotées, la dépense par salarié n'a augmenté que de 22 %, là où les versements de dividendes ont progressé de 57 %. Nous pointons ici du doigt une réalité inquiétante et ressentie par tous : notre système de justice sociale et de répartition de la richesse souffre d'un déséquilibre qui est pour le moins regrettable et nocif. Le présent projet de loi ne résoudra certes pas l'ensemble de ces problèmes et ne doit pas être considéré comme une fin, mais il constitue le point de départ d'un travail dense auquel le Parlement, nous l'espérons, saura s'employer.

Sur le fond, je veux saluer le travail mené par la commission mixte paritaire. Il permettra l'adoption d'un texte faisant, dans la mesure du possible, consensus. Nous nous félicitons du développement de divers outils de partage de la valeur, et en premier lieu de leur ouverture aux plus petites entreprises. Nous savons tous que les PME sont le premier employeur de France, et il apparaît juste que les salariés de ces petites structures puissent eux aussi bénéficier des fruits de leurs efforts.

Notre groupe approuve également le dispositif de négociation obligatoire sur les bénéfices exceptionnels. Nous avions été de ceux qui souhaitaient une contribution sur les résultats exceptionnels réalisés par les grands groupes à l'occasion des crises sanitaire et énergétique. Le dispositif établi par le texte pourrait être plus encadré mais il nous semble juste : une bonne performance économique n'est jamais décorrélée du travail des salariés, et il est bon de le rappeler.

Enfin, nous tenons à saluer le rehaussement des plafonds globaux d'attribution d'actions gratuites. Je me suis exprimé ici même à plusieurs reprises sur le dividende salarié, qui demeure encore trop peu développé. Cette mesure va permettre aux salariés de prendre une part plus importante dans la vie et dans la conduite de leur entreprise, mais aussi de bénéficier de ses résultats de manière plus conséquente ; c'est une bonne chose.

Le groupe LIOT tient cependant à rappeler ses deux principales critiques – nous en avons parlé –, qui tiennent d'une part à l'absence de la question des salaires, et d'autre part à la prise en compte encore trop partielle des effets de bord des outils de partage de la valeur. Le salaire reste la principale source de revenus pour les travailleurs, mais il est malheureusement le grand absent de nos échanges. Si nous voulons mener une politique salariale satisfaisante, les primes ne peuvent en aucun cas s'y substituer.

Par ailleurs, notre groupe rappelle qu'en de nombreux cas, les dispositifs de partage de la valeur demeurent imparfaits ; il en résulte des effets de bord non négligeables, au premier rang desquels la stagnation des salaires. Ne pas agir clairement en faveur des salaires fait peser des contraintes lourdes sur la vie quotidienne des Français, sur leur consommation et sur leur épargne, mais aussi sur les comptes publics. Huit milliards d'euros de recettes en moins pour la sécurité sociale entre 2018 et 2022 : c'est ce qu'a coûté la stagnation des salaires à notre modèle social.

Il est enfin impossible de conclure sans évoquer l'ensemble des travailleurs qui ne bénéficieront jamais de ces dispositifs, du fait de leur statut ou de l'entreprise à laquelle ils appartiennent. L'absence de débat sur les salaires a mis à la marge de ce texte un nombre de Français encore bien trop important.

Malgré ces points de désaccord, notre groupe se satisfait de voir un texte de loi transposer, même en partie seulement, un accord national interprofessionnel signé par sept organisations syndicales et patronales. C'est la preuve que lorsqu'on ne brime pas les corps intermédiaires, ces derniers sont capables de faire vivre, dans l'intérêt de tous, notre démocratie sociale. Conscient de pouvoir apporter son soutien aux travailleurs ainsi qu'aux corps intermédiaires, le groupe LIOT sera donc favorable au projet de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Depuis 2017, nous menons des réformes pour favoriser le développement des dispositifs de partage de la valeur. En 2019, grâce à la loi Pacte, nous avons notamment instauré des accords d'intéressement et de participation dans les PME. Plus récemment, en août 2022, grâce à la loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, nous avons une nouvelle fois facilité le recours à l'intéressement au sein des PME et instauré une nouvelle prime de partage de la valeur, qui a remplacé la prime dite Macron : la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (Pepa).

Mais nous souhaitons aller plus loin. C'est pourquoi en septembre 2022, le Gouvernement a invité les partenaires sociaux à engager une négociation nationale interprofessionnelle, afin de renforcer le partage de la valeur au sein des entreprises et d'améliorer l'association des salariés aux performances de leur entreprise. Les partenaires sociaux se sont donc emparés de ce sujet et ont entamé des travaux, et c'est sur cette base qu'un accord national interprofessionnel, l'ANI, a été conclu le 10 février 2023. Il a été signé par les organisations patronales, Medef, CPME et U2P, ainsi que par plusieurs organisations syndicales, CFDT, CFE-CGC, CFTC et FO.

Le projet de loi a pour objectif d'assurer la transcription des mesures de cet accord nécessitant des modifications législatives, et nous saluons cette démarche de respect du dialogue social ; en effet, le rôle des partenaires sociaux est essentiel pour bâtir notre droit du travail. Lors de l'examen du texte par notre assemblée, le groupe Renaissance a défendu certaines modifications, par exemple l'ajout de l'article 4 de l'ANI sur la mixité des métiers, placé à l'article 1er bis du projet de loi, ou encore l'expérimentation d'une obligation de partage de la valeur dans les entreprises de l'économie sociale et solidaire. Ces avancées ont été maintenues par la commission mixte paritaire.

Notre groupe se réjouit de l'issue positive de la CMP, qui respecte avant tout le dialogue entre les partenaires sociaux. Je souhaite ainsi saluer le travail commun accompli par notre rapporteur Louis Margueritte et la rapporteure du Sénat, Frédérique Puissat.

Le projet de loi contient donc des mesures ambitieuses.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La première est l'instauration obligatoire, pour les entreprises de 11 à 49 salariés, d'un dispositif de partage de la valeur, qui peut être au choix un accord de participation, un accord d'intéressement, le versement d'une prime de partage de la valeur ou l'abondement à un plan d'épargne salariale.

La seconde est l'instauration d'une obligation de négociation, dans les entreprises d'au moins 50 salariés, sur la prise en compte des résultats exceptionnels.

Le Sénat, bien qu'ayant adopté conformes six des articles du projet de loi, est revenu sur certains de ceux que nous avions modifiés ou ajoutés. En guise de compromis, nous sommes revenus à la version initiale en ce qui concerne la date d'entrée en vigueur d'un dispositif de partage de la valeur dans les entreprises de 11 à 49 salariés, à l'article 3. Ainsi, cette obligation s'appliquera aux exercices ouverts après le 31 décembre 2024.

Malgré ce travail de fond, accompli dans le respect du dialogue social, et de nouvelles mesures très favorables aux Français, un groupe d'opposition a déposé une motion de rejet préalable. Aucun respect du dialogue social !

Vous rejetez donc un accord signé par les partenaires sociaux,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…grâce auquel 1,5 million de Français bénéficieront de pouvoir d'achat supplémentaire. Comment pouvez-vous piétiner ainsi le dialogue social et des avancées souhaitées par les partenaires sociaux ? Soyez un peu sérieux !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le groupe Renaissance, fidèle à son engagement de respect de la démocratie sociale,…

Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…soutiendra le texte issu de la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le partage de la valeur dans les entreprises entre les salariés et les actionnaires constitue un des enjeux majeurs des prochaines années, à la fois en matière de pouvoir d'achat et pour réconcilier les Français avec le monde de l'entreprise.

Un fossé s'est creusé ces dernières années entre salariés et actionnaires s'agissant de la répartition entre travail et capital ; on observe ainsi, au cours des trente dernières années, une déformation du partage de la valeur ajoutée en faveur du capital et au détriment du travail.

L'accord national interprofessionnel voté en février 2023 voit une majorité de ses articles transposés dans ce projet de loi, ce qui permet de faire un pas de plus vers le développement des dispositifs existants au profit des salariés. Le déploiement de la participation et de l'intéressement dans les entreprises de moins de 50 salariés devrait se traduire par plus de productivité dans ces entreprises.

La possibilité de négocier un accord de participation d'ici à juin 2024 avec une liberté totale sur la fixation de la formule du calcul de la participation – qui peut être moins-disante que la formule légale – ou la généralisation des dispositifs de partage de la valeur aux entreprises de 11 à 50 salariés qui réalisent des bénéfices récurrents doivent favoriser le développement de la participation dans ces entreprises.

Faire profiter les salariés des bénéfices exceptionnels de leur entreprise répond à un enjeu de justice sociale même s'il est regrettable que le législateur n'ait pas défini ce qu'est une augmentation exceptionnelle du bénéfice – ce qui a d'ailleurs été dénoncé par le Conseil d'État.

L'inscription dans le temps, et dans le champ de l'épargne salariale, de la prime de partage de la valeur, qui peut être prolongée jusqu'au 31 décembre 2026, est destinée à soutenir le pouvoir d'achat. Le Conseil d'État estime toutefois que le critère de la taille de l'entreprise – moins de 50 salariés – permettant de bénéficier de l'exonération de l'impôt sur le revenu en cas de placement dans de l'épargne salariale porte atteinte au principe d'égalité devant l'impôt.

L'augmentation des plafonds de capital attribuable pour les attributions d'actions gratuites devrait contribuer à l'objectif affiché de 10 % d'actionnariat de salariés français dans le capital des entreprises françaises à horizon 2030. Une telle évolution est positive du point de vue de la souveraineté économique, de la confiance et de l'engagement à long terme des salariés dans leur entreprise mais aussi du renforcement de la responsabilité sociale des entreprises.

Toutefois, certains dispositifs posent question, comme le nouveau plan de valorisation de l'entreprise qui consiste à intéresser financièrement les salariés à la croissance de la valeur de leur entreprise. Ce nouveau dispositif, qui entre en concurrence avec l'actionnariat salarié, plus complexe à mettre en œuvre, risque de fragiliser son essor dans certaines entreprises cotées. C'est pourquoi il faudrait le réserver aux entreprises non cotées.

Il est nécessaire d'assurer une meilleure lisibilité de ces dispositifs de partage de la valeur ainsi qu'une certaine stabilité tant sur le plan législatif que sociofiscal.

D'autre part, le développement de ces outils ne doit pas se faire au détriment de l'augmentation des salaires qui reste la meilleure façon de partager la valeur. Dans le cadre des négociations obligatoires prévues par le code du travail, il faudra imposer des négociations séparées, comme l'ont demandé les organisations syndicales. En effet, selon le CNRS, le Centre national de la recherche scientifique, la participation et l'intéressement représentent 6 % de la masse salariale dans les entreprises où ils ont été mis en place ; pour un tiers de ces 6 %, soit 2 %, on a observé un impact négatif sur les augmentations de salaires.

Aussi, parallèlement au développement de tels outils, le Rassemblement national permettra-t-il aux entreprises qui le souhaitent d'augmenter les salaires de 10 %, et jusqu'à trois fois le Smic, en les exonérant des charges patronales afférentes.

Enfin, les chiffres du partage de la valeur sont faussés par la pratique de la fraude fiscale, évaluée à environ 40 milliards, soit 1,6 % du PIB. Compte tenu des distorsions de politiques fiscales entre pays, on estime que 2 à 5 % de la valeur ajoutée des entreprises françaises sont déplacés à l'étranger, ce qui grève bien entendu la participation des salariés. Ce projet de loi ne comporte aucune disposition qui permettrait de lutter contre les transferts de profits même si la CMP a retenu le principe d'un nouveau calcul du montant de la participation en cas de rectification du résultat d'une entreprise par l'administration ou par le juge de l'impôt.

Ainsi, même si ce texte comporte des manques – et je précise que nous suivrons attentivement la suite du processus, le Gouvernement s'étant engagé à procéder par voie réglementaire pour certains articles adoptés par l'Assemblée nationale –, nous voterons ce projet de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Partage de la valeur… Cinq ans après les gilets jaunes et six mois après le plus grand mouvement social relatif au droit à la retraite, ces mots sonnent faux dans votre bouche, monsieur le ministre.

Ce projet de loi n'est pas un texte de partage. Il vise à donner aux salariés quelques miettes pendant que les actionnaires gardent le pain et surtout le contrôle et la propriété de la boulangerie.

Ce texte n'est pour vous qu'un mauvais alibi : un alibi de pouvoir d'achat alors que votre gouvernement ne fait rien pour augmenter les salaires et un alibi de dialogue social – une expression que nous avons beaucoup entendue – alors que vous avez piétiné les Français au printemps à propos des retraites.

C'est surtout un texte anti-salaires. Il ne repose que sur des exonérations de cotisations sociales ou d'impôts au profit de primes, de l'intéressement et de la participation. L'Insee estime pourtant que 30 % de ces primes remplacent des hausses de salaire. Or, le banquier ou le propriétaire n'ont rien à faire des primes lorsque vous souhaitez louer un appartement ou emprunter pour acheter une voiture ; ils demandent des salaires.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est un texte anti-sécurité sociale. En multipliant les exonérations de cotisations, vous creusez le trou de la sécu.

C'est un texte anti-service public. En multipliant les exonérations d'impôt sur le revenu pour les primes, vous appauvrissez l'État.

Non, vous ne permettez pas aux salariés de gagner plus. Vous leur promettez seulement d'avoir moins demain : moins de services publics, moins de remboursements de médicaments, moins de droit à la retraite, moins d'accès aux soins. Voilà l'objectif de ce projet de loi.

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce texte offre aussi l'occasion d'assister à un mariage entre macronistes et lepénistes, sur le dos des salariés. Main dans la main, vote après vote, vous avez défendu la même arnaque sociale.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe RN

C'est vous qui avez voté Macron !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ensemble, macronistes et lepénistes, vous avez voté contre l'augmentation du Smic ; ensemble, macronistes et lepénistes, vous avez voté contre l'indexation des salaires sur l'inflation ;

Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE, RN et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

ensemble, macronistes et lepénistes, vous avez refusé le rétablissement de l'impôt sur la fortune ;…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ne dites pas ça, monsieur Tavel ! Vous êtes gonflé !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…ensemble, macronistes et lepénistes, vous voulez appauvrir encore la sécurité sociale et les retraites en les privant de cotisations ;…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…ensemble, macronistes et lepénistes, vous fragilisez les salariés en voulant les transformer, en quelque sorte, en autoentrepreneurs dont la rémunération dépendrait du bon vouloir du patron ou du dividende de l'actionnaire.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les Français doivent savoir que Mme Le Pen partage avec M. Macron la préférence actionnariale quand nous défendons la préférence salariale.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les Français doivent prendre garde quand ils croient voir passer un carrosse lepéniste. Car ce texte montre qu'à la fin ils ne se retrouveront qu'avec une citrouille macroniste.

Pourtant, les solutions existent. Si vous voulez vraiment partager les richesses, alors garantissez l'égalité salariale entre les hommes et les femmes alors que les femmes travaillent gratuitement depuis le 6 novembre ;

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

augmentez le Smic en le faisant passer à 1 600 euros net ; supprimez les exonérations de cotisations dans les branches qui gardent des minima inférieurs au Smic ;…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…indexez les salaires sur l'inflation comme nous vous proposerons de le voter ici même le 30 novembre prochain, et comme macronistes et lepénistes l'ont refusé, encore ce matin, en commission.

Si vous voulez partager la valeur dans les entreprises, alors limitez les écarts de salaires en autorisant au maximum un rapport de 1 à 20 afin que M. Carlos Tavares, PDG de Stellantis, ne puisse plus gagner 1 200 fois le salaire moyen de son entreprise : conditionnez la hausse des dividendes à celle des salaires alors que les dividendes ont augmenté deux fois et demie plus vite que les salaires au cours des dix dernières années.

Si vous voulez lutter contre un salariat à plusieurs vitesses, alors protégez les sous-traitants au lieu de laisser les grands groupes donneurs d'ordres se gaver sur le dos des PME, de leurs salariés et même, bien souvent, des petits patrons.

Non, monsieur le ministre, nous ne partageons pas les mêmes valeurs que vous, M. Macron ou Mme Le Pen.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nos valeurs sont le travail et le juste partage des richesses. Bien sûr, nous comprenons que des salariés prennent le peu qu'on leur donne. Cependant, nous combattons aujourd'hui, comme nous le ferons demain, ce système qui permet que les actionnaires puissent prendre autant et laisser si peu.

La hausse des salaires est indispensable. C'est une mesure de justice sociale mais aussi écologique si nous voulons que tout le monde puisse manger bio, acheter local et soutenir le « fabriqué en France ».

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En quelques mots, les salariés doivent dire aux actionnaires : rendez l'argent !

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je tiens tout d'abord à saluer le travail des partenaires sociaux qui, en février 2023, ont conclu l'accord national interprofessionnel visant à mieux associer les salariés à la performance économique des entreprises. Les organisations – patronales et salariales – ont pleinement rempli leur mission : défendre les travailleurs et contribuer à la construction d'un avenir fondé sur des réalités.

Le dialogue social a toujours été soutenu par notre groupe parlementaire et par la droite républicaine car il est vital pour la cohésion sociale de notre pays. Alors que le processus législatif visant à transposer dans la loi cet accord touche à sa fin, je me réjouis, monsieur le ministre, de cet atterrissage législatif.

À partir de l'accord conclu par les partenaires sociaux, les parlementaires doivent à présent se prononcer sur une loi utile et concrète pour de nombreux Français. Nous la voterons.

Nous avons abouti à une loi de cohérence, infligeant une défaite à ceux qui souhaitent faire renaître la lutte des classes et diviser notre nation. Cette loi permet de faire converger le capital et le travail puisqu'elle porte sur un thème qui nous est cher depuis toujours, notamment depuis le général de Gaulle : la participation et l'intéressement des salariés à la vie de l'entreprise. Nous continuerons de défendre ces dispositifs qui permettent au plus grand nombre de salariés de bénéficier de primes d'intéressement et de participation aux résultats de leur entreprise.

L'accord conclu permet la généralisation des outils de partage de la valeur dans les entreprises de 11 à 49 salariés réalisant des bénéfices. Toutefois, je regrette – j'ai déjà eu l'occasion de le dire – que ce seuil n'ait pas été supprimé pour permettre à l'ensemble des entreprises, notamment celles de moins de 11 salariés, de disposer de cette même faculté.

La commission mixte paritaire qui s'est réunie la semaine dernière a par ailleurs clarifié l'obligation d'engager une négociation en cas d'augmentation exceptionnelle des bénéfices dans les entreprises de plus de 50 salariés ; l'augmentation sera calculée d'une année sur l'autre. Cela représente une plus-value par rapport au texte initial.

Un autre changement avait été apporté, concernant la date d'application de ces dispositions. Initialement prévue pour 2025 par les partenaires sociaux, leur entrée en vigueur avait été avancée d'un an par l'Assemblée nationale. Cependant, au terme d'un accord avec le Sénat, elle a finalement été ramenée à 2025 pour respecter la rédaction initiale de l'accord par les partenaires sociaux.

Si ce texte est utile pour l'ensemble des entreprises de plus de 11 salariés de notre territoire, je regrette cependant qu'il n'ait pas été plus ambitieux s'agissant de la question de l'actionnariat salarié. Ce dispositif, sous-utilisé et sous-estimé à mes yeux, permet d'associer financièrement les salariés aux réussites de l'entreprise ; il est incitatif et participatif. Il permet aux salariés d'être de véritables acteurs de leur entreprise, partie prenante des outils de production.

C'est pourquoi je regrette que le texte soumis à notre vote traite seulement des attributions gratuites d'actions. Un tel développement de l'actionnariat salarié est insuffisant pour atteindre l'objectif fixé par le ministre de l'économie. Celui-ci a déclaré en effet qu'il souhaitait que 10 % des actions des grandes entreprises soient détenues par leurs collaborateurs.

Cette cible, qu'on espère, notamment la Fédération française des associations d'actionnaires salariés, atteindre d'ici 2030, souligne la volonté politique de renforcer l'implication des salariés dans l'actionnariat des grandes sociétés, mais cela ne lèvera pas les principaux freins qui demeurent. En effet, monsieur le ministre, l'actionnariat salarié concerne encore et toujours les grandes entreprises, mais beaucoup moins les entreprises de taille plus modeste puisqu'il y a toujours des difficultés à le déployer dans les TPE et dans les PME. Je le déplore.

Nous nous réjouissons en tout cas du retour à un respect du dialogue social de la part de votre gouvernement et à plus de considération des partenaires sociaux. Cette évolution reste toutefois à confirmer dans le temps et nous veillerons à ce que le Gouvernement maintienne le cap qu'il s'est donné. Cela contribue à la démocratie sociale et nous y sommes très sensibles, mais je mets en garde contre une méthode qui pourrait tenter le Gouvernement si elle lui paraissait utile : celle consistant à se débarrasser des questions complexes ou des sujets sensibles en les renvoyant aux partenaires sociaux. Tournant le dos au volontarisme attendu d'un gouvernement, il leur demanderait alors, au travers d'une feuille de route, de traiter le sujet qui nous réunit aujourd'hui, et advienne que pourra. D'une manière générale, je ne voudrais pas que le Gouvernement se planque derrière les partenaires sociaux pour éviter d'affronter les vrais sujets : je pense notamment à la question de l'emploi des seniors.

Oui à la démocratie sociale, oui au paritarisme à l'évidence, oui au dialogue social, et nous nous en réjouissons, mais à la condition que ce ne soit pas une façon pour le Gouvernement d'échapper à ses propres responsabilités. Au vu des débats de cette année, les députés du groupe LR voteront ce texte sans état d'âme.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite commencer mon propos par des remerciements à notre rapporteur Louis Margueritte, qui n'a pas ménagé ses efforts pour que ce texte puisse arriver à son terme en respectant au plus près l'accord négocié. Je pense en effet que ce projet de loi illustre parfaitement les vertus du dialogue tel qu'il devrait être pratiqué plus souvent dans notre société. Ce dialogue a débuté à la fin de l'année dernière, par des négociations constructives – et parfois âpres –, à l'issue desquelles l'intégralité des partenaires sociaux – à une exception près – a trouvé un accord le 10 février. Il est basé sur une certitude : le partage de la valeur est un facteur essentiel de compétitivité pour les entreprises mais aussi un facteur essentiel de valorisation et de cohésion sociale. Cet accord poursuit un but précis : la distribution plus juste des richesses produites par les entreprises. Voilà des notions essentielles au principe de justice sociale que vous savez chère aux Démocrates, monsieur le ministre, mes chers collègues, et que plusieurs lois visant à simplifier et à renforcer les dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises ont conforté ces dernières années.

La Première ministre s'était engagée à donner une assise législative à cette avancée significative et à « la transcription fidèle et totale de cet accord dans la loi ». Le projet de loi s'articule donc autour de quatre objectifs relevant du domaine législatif dans l'accord initial, à savoir renforcer le dialogue social sur les classifications, faciliter la généralisation des dispositifs de partage de la valeur, simplifier la mise en place desdits dispositifs et développer l'actionnariat salarié.

Ici même, nous pouvons nous féliciter des vertus du dialogue qui a été pratiqué à son tour entre les groupes à l'Assemblée comme au Sénat, puis entre les représentants des deux chambres dans cette commission mixte paritaire dont les membres ont eu à cœur de respecter le texte d'origine, de respecter ceux qui l'ont négocié et surtout de respecter ceux qui en seront bénéficiaires. Le texte n'a en effet connu que des modifications à la marge afin d'assurer cohérence et fidélité aux mesures convenues dans l'ANI. Nous nous réjouissons de voir, à l'issue de la CMP, le rétablissement de l'obligation pour les branches professionnelles d'établir un bilan de leur action en faveur de la promotion et de l'amélioration de la mixité des emplois, ainsi que l'ajout des rachats d'actions comme critère à prendre en compte pour la définition d'une augmentation exceptionnelle du bénéfice net fiscal de l'entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet accord, ainsi approuvé par l'ensemble de l'arc républicain, représente un véritable compromis entre les besoins des salariés et les défis auxquels sont constamment confrontés les employeurs. Et j'aimerais souligner ici que si la CGT n'a pas signé l'accord, elle n'en a jamais remis en question le bien-fondé puisqu'elle n'a pas appelé à voter contre ce projet de loi. Il est donc à déplorer que malgré des avis quasi unanimes de tous les bords, certaines oppositions se soient arc-boutées dans une posture idéologique qui a primé sur une analyse approfondie et objective des mesures contenues dans l'ANI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Chers collègues Insoumis, à l'occasion de l'examen en commission de votre proposition de loi visant à augmenter le pouvoir d'achat des Français, vous avez encore fustigé ce matin le fait que le Gouvernement se contente de mesurettes. Vous estimez donc que les 18,6 milliards d'euros qui ont été reversés par le biais de dispositifs de partage de la valeur, soit 2 440 euros en moyenne par salarié, tiennent de la mesurette ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous estimez que la mise en place de la prime de partage de la valeur, qui a bénéficié à 5,5 millions de salariés en 2022, pour un montant total de près de 4,4 milliards d'euros, tient de la mesurette ?

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous considérez peut-être aussi que le renforcement du dialogue social sur les évolutions de parcours et de salaires tient de la mesurette ?

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je ne comprends vraiment pas cette opposition systématique,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…qui, motion après motion, devient de plus en plus stérile et délétère, non seulement pour votre image, mais aussi pour celle du Parlement dans son ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans l'imaginaire collectif – et malheureusement trop souvent dans les faits –, le dialogue social ne va pas de soi. Ce projet de loi nous en apporte la preuve contraire. À nous de faire en sorte que cette démarche soit à l'avenir plus fréquente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le groupe Démocrate se félicite de cette transposition fidèle, et apporte tout son soutien à ce texte.

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur de nombreux bancs des groupes RE et HOR. – M. le rapporteur et Mme la vice-présidente de la commission mixte paritaire applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur le projet de loi tel qu'il est issu de la commission mixte paritaire, je suis saisie par le groupe Renaissance et par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale de demandes de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jérôme Guedj.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour débuter mon propos, je voudrais faire résonner dans cet hémicycle les paroles du grand Léon Blum : « La démocratie politique ne sera pas viable si elle ne s'épanouit pas en démocratie sociale ; la démocratie sociale ne serait ni réelle ni stable, si elle ne se fondait sur une démocratie politique », proclame-t-il dans À l'échelle humaine. Pourquoi ai-je voulu commencer par cette évidence, par ce rappel de l'articulation entre démocratie sociale, démocratie politique et démocratie parlementaire ? C'est que, monsieur le ministre, nous avons, hélas, le sentiment qu'avec ce texte, vous les avez quelque peu malmenées.

Car il y a quelque chose de paradoxal à débattre du partage de la valeur avec vous qui avez bousculé souvent le dialogue social et enterré régulièrement la démocratie politique. Ce texte de transposition de l'accord national interprofessionnel conclu en février dernier a été verrouillé, cadenassé dès le premier jour par un gouvernement qui n'a visiblement pas tiré de réels enseignements de son passage en force sur la réforme des retraites – votre réforme, monsieur le ministre. Comme souvent avec vous, il y a ce que vous dites d'un côté, et ce que vous faites de l'autre : vous parlez de nouvelles méthodes de gouvernement… mais vous multipliez les 49.3 ; vous parlez de réel partage de la valeur, mais excluez d'emblée la question des salaires, pourtant au cœur du sujet ; vous parlez de démocratie, mais muselez la représentation nationale par la méthode de la transposition que vous avez choisie ; vous parlez de réellement soutenir les Français, mais vous les étouffez de mesures structurelles sous couvert de l'ANI.

Certes, il y a bien des mesures solides, importantes – nous continuerons d'ailleurs à nous tenir, comme nous l'avons toujours fait, aux côtés des partenaires sociaux, que je tiens à saluer ici pour leur engagement sans faille en faveur des travailleurs. Je reconnais qu'il y a bien à cet égard une leçon que vous semblez avoir tirée de la séquence des retraites : c'est celle de la peur. Manifestement, vous avez pris peur de l'unité contre vous dont ont fait preuve la démocratie parlementaire et la démocratie sociale lors des mobilisations historiques du début de l'année ; vous avez donc décidé ici d'opposer une légitimité à l'autre. Car c'est bien cela dont il s'agit quand vous prétendez transposer tout l'ANI et rien que l'ANI en conditionnant le soutien à nos amendements à la seule approbation de l'ensemble des partenaires sociaux. Ce parti pris regrettable renvoie la fabrique de la loi à une commission ad hoc, sans existence juridique ni mécanisme de transparence, et nie donc considérablement la portée du débat parlementaire. Monsieur le ministre, votre gouvernement a ainsi privé la représentation nationale de son rôle fondamental, pour lequel nous avons toutes et tous été élus : celui de faire la loi et de contrôler l'action du Gouvernement. Vous vous gargarisez d'avoir obtenu un accord que vous qualifiez d'historique… Mais vous avez décidé de réduire, avant même le début des négociations, la question du partage de la valeur au seul champ de l'ANI dont vous aviez, en plus, préalablement limité le périmètre d'intervention dans le document d'orientation !

Votre gouvernement, qui se refuse depuis des années à aborder la question de la redistribution, s'est donc prêté au jeu de la manipulation légistique afin d'éviter un retour par la fenêtre d'un débat sur les inégalités économiques dans notre pays, lui claquant ainsi la porte au nez. La faute majeure que vous avez commise avant même le processus législatif a été d'exclure la question des salaires du champ du partage de la valeur. Vous prétendez améliorer durablement le pouvoir d'achat de nos concitoyens, mais sans vous intéresser une seule seconde au premier de poste de revenu de l'immense majorité des salariés de ce pays. Ce serait à mourir de rire si ce n'était pas si grave. Car derrière ces chiffres, derrière nos discussions sur vos primes, derrière nos débats parlementaires, nous avons en tant que responsables politiques un vrai devoir : celui de tenir compte de la crise du pouvoir d'achat et des difficultés liées à la précarité. Et pourtant, comme à beaucoup de reprises depuis le début de cette législature, le constat est amer.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les socialistes ont fabriqué plus de chômage que de pouvoir d'achat !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous le redisons : l'élargissement des primes et des mesures d'intéressement est un moyen structurellement insuffisant pour délester les salariés, et cette décision paraît bien faible au regard du contexte économique et social ! Et alors que nous avons des propositions pour mieux partager les immenses richesses, propositions que nous nous évertuons depuis plus d'un an à vous répéter : revaloriser les salaires, augmenter le Smic, encadrer les écarts de salaires, conditionner les exonérations de charges sociales au respect de critères relatifs au partage de la valeur, et j'en passe. Mais vous avez volontairement étouffé dans l'œuf toute discussion. Nous le regrettons fortement !

Dans ce contexte, nous regrettons la suppression des maigres améliorations apportées à ce texte au fil de la navette parlementaire. De l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes à la disposition sur les sociétés anonymes à participation ouvrière ou à la prise en compte des critères de responsabilité sociale des entreprises dans les accords d'intéressement, tout a disparu ! Voici maintenant un texte qui répond « prime Macron et actionnariat salarié » quand on lui dit « augmentation des salaires et de pouvoir d'achat ».

Néanmoins, et vous le savez, nous voterons ce texte par respect pour les partenaires sociaux et pour le dialogue social, mais en vous demandant à l'avenir d'y ajouter la nécessaire démocratie parlementaire !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenuu du texte de la commission mixte paritaire.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 205

Nombre de suffrages exprimés 194

Majorité absolue 98

Pour l'adoption 158

Contre 36

Le projet de loi est adopté.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs des groupes Dem et HOR.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à seize heures vingt-cinq, est reprise à seize heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 (1901).

Rappel au règlement

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Caroline Fiat, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je me fonde sur l'article 95, alinéa 3, du règlement.

Hier, lors de l'examen de la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France, Mme Aurore Bergé, ministre des solidarités et des familles – je pense, monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, que vous êtes en contact –, m'a promis que le rapport qui devait être remis au Parlement à la suite de l'adoption, en novembre 2022, d'un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023, rapport qui est en rédaction depuis avril 2023 – cela fait donc un moment ! –, me serait remis aujourd'hui. Il est seize heures trente et je n'en dispose toujours pas. Je n'irai pas jusqu'à y voir de la mauvaise foi, mais sachant que la loi sur le grand âge et l'autonomie avait été promise en 2018, puis en 2019, puis en 2020 – la Première ministre nous la promet désormais pour 2024 – et n'ayant toujours pas entre mes mains le rapport qui, hier soir, m'a été promis pour aujourd'hui, je commence à avoir de méchants doutes. Pourrais-je l'obtenir ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la présidente, des collègues attendent le rapport et insistent que je le leur fournisse.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est noté, l'Assemblée a pris connaissance de votre demande.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Chers collègues, n'ayant pas le rapport, je ne puis vous le donner.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur de la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais partager avec vous cinq convictions relatives à ce texte.

Premièrement, nous avons tenu nos engagements : ce que nous avions prévu en début d'année s'est réalisé – croissance du PIB à 1 %, déficit à 4,9 % du PIB, dette à 109,7 % du PIB. Nous y sommes parvenus en dépit d'un contexte international difficile : la crise en Ukraine qui se prolonge, la crise au Moyen-Orient, l'inflation toujours importante qui entraîne des taux élevés. On le doit essentiellement à la résilience de l'économie française, d'autant plus remarquable qu'en Europe, cette année, une dizaine de pays sont en récession.

Deuxième élément : malgré ce contexte difficile, nous avons réussi à dégager des marges de manœuvre à hauteur de plus de 5 milliards d'euros pour faire face aux imprévus que nous avons rencontrés cette année dans des domaines aussi variés que l'agriculture, la défense, la solidarité, les outre-mer ou les collectivités territoriales. Nous avons ainsi pu apporter 800 millions d'euros de soutien aux agriculteurs qui ont subi les aléas climatiques et la crise de l'influenza aviaire, soutenir le secteur de la défense, qui a subi une hausse des coûts opérationnels et des dépenses liées à l'aide à l'Ukraine, et affecter des budgets plus importants que prévu à l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et à la prime d'activité. L'emploi se portant mieux qu'anticipé dans les territoires ultramarins, nous avons été en mesure d'augmenter le budget dédié aux exonérations de cotisations. Enfin, nous avons aidé les communes qui ont subi, il y a six mois, des violences urbaines.

Le troisième message que je veux faire passer, c'est que ces ouvertures de crédits ont été possibles grâce à la fermeture d'autres, d'un montant équivalent – un peu plus de 5 milliards –, c'est-à-dire grâce à la bonne gestion de nos finances publiques. Certains crédits étaient en réserve ; ils ont été naturellement annulés. Le reste vient de la sous-consommation des crédits de plusieurs programmes, due à des projets qui n'ont pas pu être lancés dans les temps ou à des recrutements réalisés en retard. Les aides aux entreprises ont également été revues à la baisse, la décrue des prix de l'énergie permettant de faire des économies ; c'est une bonne nouvelle pour tout le monde. Résultat : jamais nous n'avons remis en cause nos politiques publiques.

En quatrième point, je salue l'état d'esprit qui a régné dans l'hémicycle, permettant des accords avec différents groupes : Les Républicains, Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, Écologiste – NUPES et Socialistes et apparentés. Nos collègues du Sénat nous ont également permis de voter collectivement une série de crédits supplémentaires qui ont fait consensus. Nous avons ainsi augmenté l'aide alimentaire de 40 millions d'euros, affecté 113 millions à Mayotte et 200 millions supplémentaires à l'aide à l'Ukraine, soutenu la Corse et créé un fonds d'urgence pour aider les agriculteurs face à la crise du mildiou, qui, en début d'année, ne pouvait être anticipée. On peut également évoquer le soutien exceptionnel aux collectivités territoriales, grâce aux crédits dédiés à la réfection des ponts et des routes.

Pour terminer, permettez-moi de formuler un vœu. En élaborant ce texte, nous avons réussi à créer un consensus : nos discussions nous ont permis de dégager de nouveaux crédits au bénéfice de nos concitoyens, répondant à leurs préoccupations. Certes, tout cet argent sera bien utilisé, mais cette démarche a un coût ; pour résumer, texte enrichi, caisses appauvries. Dans un contexte de déficit important et de taux élevés, où la dette pèse de façon croissante sur les comptes publics, j'en appelle à la responsabilité collective. Je voudrais que nous fassions preuve de la même énergie et de la même capacité de consensus pour travailler ensemble en vue de maîtriser nos dépenses publiques.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Éric Coquerel, vice-président de la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Double scoop : pas de 49.3 sur un texte budgétaire ; celui-ci sera donc soumis au vote. L'adoption en première lecture du projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) prouve que, lorsque le Gouvernement souhaite être constructif et qu'il cherche un compromis avec les oppositions, il est possible de débattre…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et même, éventuellement, aller jusqu'à l'adoption d'un texte. C'est au moins la preuve que ça se tente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour cela, il faut faire preuve d'humilité et faire de vraies concessions à tout ou partie des oppositions. Ce constat vaut félicitations à vous, monsieur le ministre délégué,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…puisque vous avez fait des compromis suffisants pour que certaines oppositions s'en satisfassent. C'est loin d'être le cas pour les autres textes financiers ! Certains membres du Gouvernement s'en sont d'ailleurs agacés, paraît-il : j'ai lu dans les journaux que, pour obtenir les voix de telle ou telle opposition, vous vous seriez montré trop dépensier. Pour ma part, je m'en réjouis car le texte est meilleur à l'arrivée qu'il n'était au départ. Grâce aux modifications apportées tant au Sénat qu'à l'Assemblée, validées hier en commission mixte paritaire (CMP), il répond mieux aux besoins des Français.

Grâce au travail des différents collègues, une allocation exceptionnelle sera versée à Noël aux parents qui élèvent seuls des enfants ; les associations habilitées à l'aide alimentaire verront leurs moyens augmenter ; les soignants des Ehpad qui relèvent de la branche de l'aide à domicile bénéficieront de revalorisations qui leur étaient refusées jusqu'à présent, tout comme les soignants des centres municipaux de santé, pour la deuxième année consécutive. En effet, l'amendement que j'ai réussi à faire adopter contre l'avis du Gouvernement a finalement reçu l'aval de ce dernier – reconnaissance, peut-être, du caractère utile de cette mesure pour ces centres et les mairies dont ils dépendent. Une aide exceptionnelle sera versée aux exploitations biologiques ; le périmètre des bénéficiaires du chèque carburant sera élargi ; les moyens alloués à la prévention de l'endométriose seront renforcés ; l'entretien des réseaux d'eau, des routes et des ponts bénéficiera de crédits supplémentaires. Enfin, un soutien financier sera apporté à Mayotte. J'en oublie peut-être, mais bravo aux contributeurs, notamment aux oppositions, pour avoir enrichi le texte, et à la majorité et au Gouvernement pour avoir accepté ces dispositions.

Ce satisfecit accordé, mes critiques de fond restent d'actualité.

D'abord, monsieur le ministre délégué, je ne comprends pas et je me refuse à comprendre comment on peut prélever autant d'argent sur un budget aussi important que celui du ministère de la transition écologique.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'entends bien qu'il s'agit de fonds qui n'avaient pas été utilisés, mais c'est précisément le problème. À un moment où il faudrait y affecter bien davantage, comment accepter que plus de 1 milliard de crédits économisés proviennent du ministère chargé de l'écologie ? C'est également vrai de l'aide au logement : maintenant que ce ne sont plus uniquement les locataires qui n'arrivent pas à se loger, plus uniquement les propriétaires qui n'arrivent pas à vendre, mais aussi les promoteurs qui sont en train de couler, certaines déclarations de la Première ministre laissent à penser que l'État songe à allouer au logement des crédits supplémentaires. J'ai du mal à comprendre comment on peut l'envisager tout en annulant des budgets déjà prévus pour le secteur. J'ai aussi dit mon désaccord avec la ponction prévue sur l'Unedic à hauteur de 2 milliards.

Ensuite, ce budget rectificatif qui, grâce aux apports des oppositions, répond un peu mieux aux attentes des Français, reste trop peu ambitieux. Vu l'étude de l'Insee sur la pauvreté qui continue d'augmenter, le chômage qui repart à la hausse et la construction de logements qui est à l'arrêt – indicateurs très inquiétants –, il aurait été nécessaire de mettre davantage le paquet sur ces secteurs, à défaut de l'avoir fait dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2024, trop avare en dépenses publiques dans ces domaines.

Vous avez dit, monsieur le rapporteur, que toutes ces mesures de soutien avaient un coût ; je regrette néanmoins que ce principe n'ait pas été mobilisé dans le cadre du PLF pour 2024, comme il l'est dans le texte examiné aujourd'hui. Les oppositions avaient en effet proposé beaucoup de recettes, et une partie de la majorité également – je regarde Jean-François Mattei…

« Jean-Paul Mattei ! » sur les bancs du groupe Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Toutes mes excuses, Jean-Paul ! La taxation des superdividendes et des rachats d'actions, qui ont explosé, aurait permis de rapporter à l'État quelque 15 milliards.

La revue de dépenses annoncée par la Première ministre devrait être l'occasion d'une baisse des dépenses fiscales – celles en faveur des plus riches –, plutôt que de celles destinées à couvrir les besoins de nos concitoyens. Cela aurait dû être intégré au projet de loi de finances pour 2024.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Je suis très heureux de vous retrouver pour la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour l'année 2023. L'aboutissement de ce texte est le fruit – vous l'avez dit – d'un intense travail et d'une confiance nourrie entre la majorité et les oppositions. Nous sommes parvenus à un accord, parce que nous avons su dialoguer et chercher des compromis – je m'en félicite.

Cette réussite est aussi le fruit du travail du rapporteur général, cher Jean-René Cazeneuve : vous avez mené, à chaque étape, un travail de concertation et de dialogue, qui a rendu cet accord possible.

Le présent texte financier – comme cela avait été indiqué en première lecture – se borne à réaffecter des crédits votés dans la loi de finances initiale pour 2023, et à tirer les conséquences budgétaires des aléas intervenus au cours de l'année. Il confirme les prévisions, s'agissant de notre croissance et de notre déficit, contenues dans la loi de finances initiale. Face à la crise, les entreprises ont tenu ; elles ont maintenu leur production et poursuivi leur développement, permettant d'atteindre un taux de croissance de 1 % en 2023. Ce taux est supérieur à la moyenne européenne et à celui de plusieurs de nos voisins aujourd'hui entrés – hélas – en récession.

Notre stratégie de lutte contre l'inflation et de protection des entreprises et des ménages face à l'augmentation du coût de l'énergie a fonctionné. Certes, l'inflation sera supérieure à nos prévisions initiales, mais elle baissera de 0,3 point par rapport à 2022 et s'établira à 4,9 % en 2023. En octobre dernier, l'inflation est retombée à 4 %. Sa baisse devrait se poursuivre de façon marquée en 2024, en s'établissant à 2,6 %.

Notre stratégie a également permis de contenir le déficit public, qui atteindra 4,9 % du PIB, soit un niveau inférieur à ce que prévoyait la loi de finances initiale pour 2023. C'est une bonne nouvelle pour nos finances publiques. Avec la hausse des taux d'intérêt, chaque euro de dette supplémentaire nous coûte cher – ainsi devons-nous ouvrir 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires pour absorber la hausse de la charge de la dette.

Nous allons poursuivre avec détermination dans cette voie de réduction progressive du déficit public. La semaine passée, la Première ministre a lancé, avec l'ensemble des ministres, une première revue de dépenses pour 2024 et 2025.

Le présent texte ne permet pas seulement d'adapter notre budget aux événements survenus au cours de l'année : il donne surtout l'occasion à la France de respecter ses engagements envers ses partenaires, et vis-à-vis des Français.

Nous augmentons les crédits de la mission "Défense" , en consacrant 2,1 milliards d'euros au soutien militaire à l'Ukraine et à la modernisation des armées. Plus de la moitié de ces crédits supplémentaires anticipent ceux prévus par la loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030, largement adoptée par cette assemblée. Dans le contexte instable que nous connaissons, la France doit se doter d'une armée forte, prête à affronter les crises. Il y va de notre indépendance et de notre autonomie stratégique.

À cet égard, vous avez souhaité aller plus loin. Un amendement soutenu par les groupes Renaissance, Démocrate, Horizons, mais également Les Républicains, Socialistes et Écologiste, a conduit à abonder le fonds spécial créé en 2022 pour soutenir l'Ukraine, d'un montant supplémentaire de 200 millions d'euros.

Ce texte permet également de renforcer le soutien au monde agricole, frappé par les crises ces dernières années : c'est un enjeu central pour les territoires ruraux, mais aussi pour notre souveraineté, essentielle dans le contexte instable que nous connaissons. Nous devons préserver notre agriculture et soutenir, partout et toujours, notre ruralité.

L'épidémie de grippe aviaire a touché de nombreuses exploitations ces deux dernières années. C'est pourquoi le présent projet de loi prévoit une augmentation des crédits du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de 800 millions d'euros, afin de dédommager les exploitants touchés.

Vous avez également souhaité aller plus loin dans ce domaine. Un amendement du rapporteur général prévoit ainsi l'ouverture de 20 millions d'euros de crédits pour soutenir la filière vitivinicole, durement frappée par le mildiou. D'autre part, un amendement du groupe Écologiste – soutenu par le Gouvernement et la majorité – prévoit de dédier 5 millions d'euros supplémentaires à l'agriculture biologique, durement touchée par l'inflation.

Nous avons proposé d'affecter 400 millions d'euros supplémentaires au financement des exonérations de cotisations patronales en outre-mer. Si le chômage a largement baissé dans ces territoires, il y reste plus élevé qu'en métropole : nous devons poursuivre notre politique de réduction du coût du travail.

Les amendements adoptés par l'Assemblée nationale ont permis d'enrichir les dispositions destinées à soutenir les territoires. Ainsi, face aux difficultés que traversent la Martinique, la Guadeloupe et Saint-Martin, les fonds alloués au plan Sargasses 2 ont été accrus sous l'impulsion des groupes Socialistes et Écologiste, quand les groupes Horizons et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires ont souhaité reconduire la dotation de solidarité territoriale pour la collectivité de Corse.

Ce projet de loi a également permis d'ouvrir des crédits à destination des plus fragiles. Le Gouvernement a augmenté le budget du ministère des solidarités et des familles afin de tenir compte de l'augmentation du nombre de bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés et de la prime d'activité.

Dans ce domaine, l'Assemblée nationale a enrichi le texte de plusieurs dispositions. Le Gouvernement et la majorité ont soutenu un amendement du groupe Socialistes visant à augmenter la prime de Noël pour les familles monoparentales les plus précaires. Les groupes Les Républicains et Socialistes ont également proposé une aide supplémentaire de 20 millions d'euros pour soutenir les associations d'aide alimentaire face à la crise.

Les conclusions de la CMP ne sont revenues sur aucune de ces avancées majeures, et le travail mené au Sénat a également contribué à l'enrichissement du texte.

Concernant l'aménagement du territoire, la commission mixte paritaire a alloué 50 millions d'euros supplémentaires à l'entretien des réseaux d'eau, afin de limiter les fuites. C'est un enjeu fondamental pour la transition écologique – je soutiens totalement cette mesure. La navette a également contribué à proposer des crédits supplémentaires pour l'entretien des réseaux routiers et des ponts. C'était attendu par les collectivités territoriales, et c'est un enjeu de sécurité publique. Un amendement a aussi été adopté afin d'accroître le financement de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN).

Le texte issu de la commission mixte paritaire propose d'aller plus loin concernant l'aide alimentaire : 20 millions d'euros supplémentaires sont ainsi prévus. Enfin, nous avons appuyé l'initiative visant à soutenir l'Arménie et le Haut-Karabakh.

En définitive, les crédits supplémentaires ouverts par ce texte ne dégradent pas notre trajectoire en matière de déficit : il est maintenu à 4,9 % du PIB. C'est donc un bon compromis. L'exécution prudente et sérieuse du budget issu de la loi de finances initiale pour 2023 a rendu cela possible. Ainsi, les dépenses supplémentaires sont compensées par des annulations de crédits dans les budgets des ministères : 5,2 milliards d'euros d'annulations s'ajoutent aux 5 milliards déjà annulés par décret en septembre 2023.

S'agissant de la masse salariale des ministères, le principe de gestion prudente a également prévalu, puisque les mesures de revalorisations salariales annoncées en juin 2023 ont été mises en œuvre sans augmenter les dépenses de personnel.

Le présent texte est le fruit d'un dialogue entre le Gouvernement, la majorité et les oppositions. Il a été enrichi par un travail parlementaire dense dont il faut se féliciter. Il permet de répondre aux engagements auxquels, je le sais, vous êtes attachés. C'est pourquoi je souhaite que vous adoptiez les conclusions de la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans la discussion générale, la parole est à M. Kévin Mauvieux.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voici réunis, après une commission mixte paritaire conclusive, afin d'adopter le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023. Enfin, pas tout à fait : ce projet de loi de finances est plutôt celui de la fin des haricots !

Ce texte, qui vise à clore l'exercice budgétaire de 2023, souligne le dérapage et la mauvaise tenue de nos finances publiques : le Gouvernement n'est pas un spécialiste de la finance, mais un spécialiste de l'errance.

Commençons par l'élément le plus flagrant : l'endettement de notre pays. Le dérapage des finances publiques en 2023, s'agissant du coût de la dette, atteindra près de 4 milliards d'euros. L'inflation, évidemment, est en cause, mais les taux d'intérêt de la dette également : ils atteindront 3,9 % en cette fin d'année, loin des 2,1 % initialement prévus par le Gouvernement.

Nous devons rompre cette spirale de l'endettement dans laquelle nous a entraînés le Président de la République : depuis 2020, Emmanuel Macron nous endette 2,3 fois plus vite qu'entre 2012 et 2019. Nous devons aussi cantonner le taux d'intérêt à sa fonction originelle de rémunération du risque, et mettre un coup d'arrêt à l'émission de dette indexée sur l'inflation. Avec Marine Le Pen à la tête de notre pays, ces deux mesures de bon sens auraient été appliquées depuis longtemps et nous n'aurions probablement pas connu ce dérapage, ni ce niveau d'endettement et de charge de la dette.

J'ai déjà eu l'occasion de le dire, mais les Français doivent l'entendre et le comprendre : quand vous – le Gouvernement et la majorité – nous donnez, matin, midi et soir, des leçons sur nos propositions prétendument coûteuses, qui menaceraient la France de faillite, vous omettez de préciser que vous-mêmes laissez des sommes identiques s'échapper de façon incontrôlée, au lieu de retourner dans la poche des Français ou d'avoir des retombées sur l'économie réelle. Le coût de la dette n'enrichit que la finance, au détriment de ceux qui ont vraiment besoin de cet argent : les ménages et les entreprises.

Un deuxième élément est à souligner : le produit de la contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité – présentée comme une taxe sur les surprofits – est inférieur de près de 10 milliards d'euros aux prévisions. Cela prouve, à nouveau, que nous avions raison : le prix de l'électricité doit correspondre au coût moyen de production en France, et permettre aux Français de ne pas payer la facture d'électricité d'autres pays ; et les surprofits des énergéticiens doivent être taxés indépendamment du niveau des prix.

C'est tout le problème des contrefaçons : cela ressemble fort à ce qu'on veut acheter, mais cela ne fonctionne jamais aussi bien ! Vous avez voulu faire semblant d'appliquer nos propositions, et vous avez échoué.

Un dernier élément mérite d'être relevé, concernant les recettes de la taxe sur les transactions financières : elles sont inférieures de 600 millions d'euros aux prévisions du Gouvernement. Réitérons donc la proposition du Rassemblement national : étendre l'assiette de cette taxe aux transactions infrajournalières. Ce mécanisme, qui rapporterait jusqu'à 2 milliards d'euros par an, avait été voté au Parlement en 2016 ; il n'a jamais été appliqué. De quoi avez-vous peur ?

Une chose est sûre, à la lumière de ce projet de loi de finances de fin de gestion : vous n'avez pas peur de taper sur les Français, à travers la TVA. N'ayez donc pas peur de taxer réellement la finance, là où l'argent ne sert à rien d'autre qu'à jouer, alors qu'il pourrait nourrir les Français, l'investissement des entreprises et les projets des collectivités.

Ce bilan est bien négatif. Pourtant, les Français vous sauvent la mise grâce aux 1,9 milliard d'euros de TVA récoltés au-delà des prévisions ; voilà ce qui atténue l'aspect catastrophique de vos résultats. Les entreprises vous sauvent également la mise, avec 6 milliards d'euros supplémentaires prélevés au titre de l'impôt sur les sociétés. L'année 2023 restera une nouvelle et triste année record en matière de taxes et d'impôts, asphyxiant les Français et les entreprises afin d'alimenter votre budget en déficit structurel.

Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) vous a d'ailleurs mis en garde quant à la possibilité de voir la Commission européenne envisager contre la France, dès le mois de mars 2024, des mesures de correction budgétaire pour déficit excessif en 2023.

Puisque vous créez des numéros verts à chaque crise, pensant ainsi tout résoudre, les élus du Rassemblement national sont prêts, pour le bien de la France et des Français, à créer un numéro bleu Marine, pour être à votre écoute, vous aider et vous conseiller, afin de remettre nos finances à flot, dans un esprit de justice sociale et fiscale.

Sourires et applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À l'issue de la CMP, le texte prévoit bien quelques ajustements : 60 millions d'euros supplémentaires pour aider les collectivités à entretenir leur réseau routier ; 20 millions pour la rénovation de leurs ponts ; 50 millions pour la réfection des réseaux d'eau. C'est nécessaire, mais cela n'est – pardonnez le jeu de mots – qu'une goutte d'eau.

Face à ce bilan affligeant, il nous est impossible de voter ce texte. Cependant, parce qu'il prévoit quelques crédits supplémentaires pour les collectivités territoriales, pour les viticulteurs frappés notamment par le mildiou, pour la filière pêche et pour les armées, nous ne pouvons décemment nous y opposer. Dès lors, le Rassemblement national s'abstiendra.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À quatorze reprises, vous avez recouru au 49.3 sur les textes budgétaires, qui sont pourtant au cœur de notre contrôle du pouvoir exécutif. Mon discours pourrait s'arrêter là, tant les faits sont accablants pour vous ; je poursuivrai néanmoins, car nous voilà enfin libres de discuter d'un texte financier, en l'occurrence le projet de loi de finances de fin de gestion, ce qui en dit long sur votre conception de la démocratie. À l'école, les enfants apprennent que les parlementaires discutent et élaborent la loi. La réalité est un peu plus cruelle que cela : le Président de la République nous prive de notre temps de parole et tout juste pouvons-nous être associés, gentiment, timidement, à la gestion des catastrophes engendrées par vos choix politiques.

Monsieur le ministre délégué, vous avez parlé de bonne gestion et de maîtrise des dépenses publiques. Pourquoi pas, mais il y a tout de même un éléphant dans la pièce ! Des crédits pourtant essentiels sont annulés dans les domaines de l'écologie, de l'enseignement supérieur et, de manière plus choquante, ou du moins plus visible, de l'aide à l'accès au logement. En effet, 70 millions d'euros disparaissent alors que 300 000 personnes sont à la rue.

Vous coupez donc fin s'agissant des urgences sociales, mais vous ouvrez 12 milliards d'euros de crédits supplémentaires sur la mission "Remboursements et dégrèvements" . Dit autrement, vous prévoyez 12 milliards pour le non-recouvrement par l'État de certaines créances et la restitution d'impôts aux contribuables. Mais de quel argent s'agit-il ? Ne serait-ce pas celui des niches fiscales des plus riches, par hasard ? Cette somme mériterait d'être discutée, car nous n'avons pas beaucoup d'informations à son sujet. Votre posture paraît un peu étrange : dans le domaine social, vous asséchez, quand, en matière de niches fiscales, vous arrosez ! Peut-être y a-t-il une autre explication mais, dans cette attente, l'idée selon laquelle Emmanuel Macron est toujours le président des riches persiste dans notre esprit.

Certes, le Sénat et les groupes d'opposition ont obtenu quelques avancées. Quelques fonds supplémentaires ont par exemple été débloqués à la demande du Sénat pour entretenir les routes et pour rénover les ponts, ce qui est une bonne chose. Mais crier partout que les collectivités locales vont bien n'en demeure pas moins audacieux. Cela se voit, d'ailleurs, le Président de la République ayant annoncé son intention de bouder le congrès de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), nouvelle preuve, s'il en fallait une, du manque de respect à l'égard des élus locaux. En revanche, il les invitera à un cocktail ! En Macronie, les élus sont davantage autorisés à picoler qu'à protester. Il est vrai qu'on a plus de mal à s'indigner quand on a un bout de gâteau dans le gosier !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Autre élément incroyable de ce projet de loi : les 2 milliards d'euros pris à l'Unedic. Cet argent est issu des cotisations des travailleurs français ; de ceux qui bossent ! Comme l'État en a pris la sale manie depuis quelques dizaines d'années, une réforme injuste a été imposée aux travailleurs, celle de l'assurance chômage, qui pénalise les plus précaires. Celle-ci a permis de réaliser 2 milliards d'euros d'économies sur le dos de ceux qui bossent, de ceux qui sont dans la galère. Or au lieu de les rendre aux travailleurs, ces fonds partent dans la poche de l'État, ce que nous n'acceptons pas. Cela s'appelle un vol de l'argent des travailleurs ; il n'y a pas d'autre définition, et c'est profondément choquant. La règle voudrait que l'argent des travailleurs revienne aux travailleurs, voire que ces derniers l'administrent directement. Démocratiquement, les choses seraient ainsi un peu plus intéressantes que le spectacle d'un État qui impose une réforme antisociale après l'autre – réformes auxquelles seule la rue peut répondre, avec des conflits de plus en plus durs. J'insiste : en laissant aux travailleurs la gestion de leur argent, nous aurions un gouvernement qui tient compte des questions sociales et de la voix des travailleurs.

Au lieu de quoi, les cadeaux fiscaux se multiplient dans le domaine de la sécurité sociale. Mais comment sont-ils financés ? Par un transfert depuis le produit de la TVA. Nous ne cesserons de le dire, 60 milliards d'euros de TVA, cela représente beaucoup d'argent des classes moyennes et populaires pour financer les niches fiscales.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Une fois de plus, nous refuserons un projet de loi par lequel l'argent des travailleurs et des Français atterrit dans les poches des plus riches.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous nous retrouvons pour l'adoption définitive du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023, texte qui consiste en un jeu d'ouvertures et d'annulations de crédits en fin d'exercice budgétaire.

Cependant, même si le nom de ce texte change par rapport aux années précédentes, la situation des comptes publics, elle, ne varie pas. Alors que le Gouvernement prône une amélioration des finances publiques, un déficit de 4,9 % du PIB est officialisé, soit – rappelons-le – le quatrième plus élevé d'Europe. Même si ce chiffre diminue relativement au PIB, il augmente de 6 milliards d'euros en valeur par rapport à la prévision initiale de 164,9 milliards. Nous achevons ainsi l'année avec un déficit de 171,4 milliards d'euros, soit 20 milliards de plus qu'en 2022. Nos dépenses publiques continuent donc d'augmenter, le Gouvernement n'ayant pas encore engagé la revue des dépenses et ne cessant de repousser le nécessaire désendettement du pays.

La très forte augmentation de la charge de la dette, de 3,8 milliards d'euros par rapport à ce que prévoyait la loi de finances initiale pour 2023, témoigne du fardeau que représente la trajectoire des intérêts de la dette. Cette charge est même appelée à exploser, les intérêts annuels devant s'élever à 84 milliards d'euros en 2027.

Hier, la Commission européenne a mis en garde la France, expliquant que notre pays, à l'instar de la Belgique, de la Croatie et de la Finlande, risquait l'an prochain de ne pas être en ligne avec les recommandations budgétaires de l'Union européenne en raison d'une croissance des dépenses publiques jugée excessive. Ce statut de mauvais élève résulte de la politique conduite ces dernières années par les gouvernements successifs. Il est grand temps, monsieur le ministre délégué, d'engager un processus de diminution aussi bien des prélèvements obligatoires que des dépenses publiques et du déficit, afin de sortir de l'endettement catastrophique dans lequel nous sommes.

Bien sûr, nous pouvons nous réjouir que la commission mixte paritaire qui s'est tenue hier ait été conclusive. Nous restons néanmoins perplexes et regrettons le niveau très élevé des crédits inutilisés. Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur général, que c'est le résultat d'une bonne gestion. Je ne suis néanmoins pas certaine que l'annulation de 1,1 milliard d'euros dans le domaine de la transition énergétique s'inscrive dans cette logique ; une telle sous-exécution suscite en tout cas des interrogations. En effet, cette annulation de crédits concerne pour 300 millions d'euros le dispositif MaPrimeRénov', à l'heure où la rénovation énergétique constitue un enjeu majeur. Je vous remercie pour les explications que vous avez apportées, monsieur le ministre délégué. Les raisons de cette situation semblent effectivement multifactorielles, liées à la fois à la réglementation, à l'inflation et à la modification de procédures pour lutter contre la fraude. Les résultats n'en demeurent pas moins surprenants, eu égard aux attentes de nos concitoyens.

Je reste d'ailleurs préoccupée par le niveau des crédits affectés à la transition énergétique pour 2024. Pour rappel, le 12 octobre, le Gouvernement annonçait « un effort historique […] pour financer la rénovation énergétique des logements, portant à 5 milliards d'euros le budget total qui y sera consacré l'année prochaine ». En réalité, les crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2024 ne s'établissent qu'à environ 3,2 milliards pour les programmes 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat et 174 Énergie, climat et après-mines. J'entends que des crédits seraient également affectés à l'Agence nationale de l'habitat (Anah), mais je souhaiterais un éclairage, monsieur le ministre délégué, sur ce décalage entre les annonces et la réalité des chiffres – décalage que j'ai déjà soulevé à deux reprises. Car si un manque de 1,8 milliard d'euros venait s'ajouter en 2024 à 1,1 milliard d'annulations cette année, ce seraient au total 3 milliards d'euros qui ne seraient finalement pas consacrés à la rénovation thermique des bâtiments.

Cela étant, ce texte étant plus technique que politique, nous pouvons nous réjouir de l'adoption de plusieurs amendements défendus par le groupe Les Républicains. Grâce à eux, 200 millions d'euros supplémentaires seront consacrés au soutien des Ukrainiens, 20 millions d'euros seront affectés aux associations d'aide alimentaire, et 1 million d'euros viendra renforcer la prévention de l'endométriose. Je me félicite d'ailleurs que ce dernier amendement puisse aider bon nombre de femmes dans leur combat quotidien.

Nous approuvons par ailleurs l'ouverture de crédits additionnels pour la défense, les agriculteurs, l'allocation aux adultes handicapés, l'accueil de réfugiés ukrainiens et l'exonération de cotisations sociales patronales dans les outre-mer.

Ainsi, dans la continuité de la première lecture et parce que ce texte ne comporte pas de mesures politiques, les députés du groupe Les Républicains s'abstiendront.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Hier soir, un accord a été trouvé lors de la commission mixte paritaire sur ce projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023. Avant toute chose, je tiens à saluer l'esprit de responsabilité qui a permis d'aboutir à un compromis entre députés et sénateurs sur un texte budgétaire. C'est devenu si rare, qu'il faut le souligner.

Nous nous retrouvons donc, chers collègues, pour nous prononcer sur le résultat de ce compromis. Comme tout texte budgétaire, celui-ci se fonde d'abord sur un scénario macroéconomique, qui nous permet d'établir un premier bilan de notre économie pour l'année en cours. Dans un contexte économique très dégradé, notre pays a fait preuve d'une grande résilience et devrait afficher un taux de croissance de 1 % malgré un taux d'inflation élevé, mais largement contenu grâce aux mesures prises par le Gouvernement ces derniers mois.

Ce texte permettra de financer des dépenses imprévues et nécessaires, afin d'aborder la fin de l'année avec sérénité.

Cela se traduit d'abord et avant tout par l'ouverture de 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires au titre de la charge de la dette de l'État, montant dû, je le répète, au contexte économique fortement dégradé que nous connaissons. Comme en première lecture, le groupe Démocrate tient à rappeler que l'obligation de consacrer une telle somme à la charge de la dette est très préoccupante. Des mesures courageuses en matière de maîtrise de la dépense et des déficits publics s'imposent, monsieur le ministre délégué, si nous ne voulons pas que les projets de loi de finances de fin de gestion deviennent des projets de loi de financement de la dette.

Par ailleurs, l'examen du texte en première lecture a permis d'enrichir le projet de loi d'une multitude d'ouvertures de crédits supplémentaires dans différents programmes, creusant ainsi notre déficit, en dépit des discours de certains – suivez mon regard. À cet égard, nous saluons le travail accompli en commission mixte paritaire – particulièrement par M. le rapporteur général – pour réduire le montant de ces nouveaux crédits.

Le groupe Démocrate votera en faveur de ce texte qui, je le répète, prévoit des ouvertures de crédits nécessaires. Nous formons toutefois le vœu qu'à l'avenir, le projet de loi de finances de fin de gestion soit un allié encore plus fidèle et rigoureux pour l'indispensable maîtrise des finances publiques,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…condition essentielle pour que notre niveau d'endettement ne paralyse pas durablement l'action publique.

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem, ainsi que sur quelques bancs du groupe RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 est le premier texte de ce type examiné par notre assemblée depuis la réforme de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) intervenue mi-2021. Il ne comprend pas de mesures fiscales, mais uniquement des mesures budgétaires d'ajustement. Cela limite donc drastiquement les possibilités d'amendement. Ce ne serait pas un problème si les autres lois budgétaires étaient examinées jusqu'au bout. Mais, en l'espèce, seul ce texte, d'une logique purement comptable, suit son chemin sans 49.3.

Alors que les lois de finances ne sont plus adoptées que par une succession de 49.3, il serait temps que le Gouvernement et les partis présidentiels s'interrogent sur leur responsabilité dans le délitement de nos institutions : quelle démocratie saine peut passer cinq ans sans que son Parlement ne s'exprime sur l'utilisation des impôts prélevés sur son peuple ?

Les députés Socialistes et apparentés ont choisi la voie du dialogue pour répondre à des situations d'urgence, alors que la pauvreté explose dans notre pays. Notre groupe ne manquera jamais à l'appel au moment d'améliorer un texte, en particulier pour les Français les plus modestes. Les chiffres de la pauvreté sont dramatiques : il y a une semaine, l'Insee constatait que la France sortait de l'épisode du covid de 2021 avec un taux de pauvreté supérieur à celui précédant cet épisode. Au cours des vingt-cinq dernières années, jamais autant de personnes résidant en logement ordinaire n'ont vécu sous le seuil de pauvreté : 9,1 millions en 2021, soit 545 000 de plus qu'en 2017 et 1,5 million de plus que vingt ans plus tôt.

À Rennes, dans ma circonscription, cinquante enfants dorment dans la rue, sans aucune perspective d'amélioration et sans que l'État n'ait prévu de plan Hiver, et ils sont plus de 2 800 dans toute la France – bien loin des promesses de la campagne présidentielle de 2022. Dans ce PLFG, il aura fallu que nos collègues Écologistes insistent pour que soient adoptés, à titre exceptionnel, 6,7 millions d'euros de crédits pour soutenir les acteurs de l'hébergement d'urgence.

Face à ce désastre social, nous, députés Socialistes et apparentés, avons, conjointement avec le groupe Les Républicains, obtenu l'adoption de 20 millions d'aide supplémentaire pour les banques alimentaires – 20 millions ont par ailleurs été obtenus grâce au Sénat. On peut s'en féliciter. Si nous avons répondu à l'urgence, le Gouvernement doit maintenant comprendre qu'il importe de trouver des solutions pérennes car les bénéficiaires des banques alimentaires sont plus de 2,4 millions – leur nombre a bondi de 34 % entre 2020 et 2023.

Parmi ceux qui font appel aux banques alimentaires, on trouve en particulier des familles monoparentales – pour l'écrasante majorité, des mères isolées. Pour ces familles, le président Boris Vallaud et mon collègue Philippe Brun ont proposé et obtenu le vote de 70 millions d'euros, correspondant à une revalorisation de 115 à 200 euros de la prime de Noël. Il était crucial d'agir. Sans cet amendement d'initiative socialiste, le Gouvernement aurait-il levé le petit doigt ? N'est-ce pas le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, Bruno Le Maire, qui a estimé que cette aide aux familles monoparentales était « de l'argent dépensé pour rien » ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Non, monsieur Le Maire ! C'est peu, certes, mais c'est essentiel pour ces familles. Heureusement, monsieur Cazenave, vous avez été à l'écoute, contre votre ministre de tutelle ; votre indépendance d'esprit vous honore. Mais nous restons mobilisés pour connaître les modalités d'application de cette mesure, conformément aux prérogatives que nous confère la Constitution, et nous comptons sur vous pour que cette promesse soit intégralement respectée.

Les députés Socialistes et apparentés sont malgré tout partagés sur ce PLFG : nous saluons les concessions que je viens d'évoquer, mais elles ne valent que pour cette fin d'année 2023. En outre, nous restons fermement opposés à la ponction de 2 milliards d'euros sur les réserves de l'Unedic. Nous sommes également perplexes devant un curieux miracle : la hausse des recettes fiscales est inférieure à celle des remboursements et dégrèvements, c'est-à-dire des crédits et réductions d'impôts !

Enfin, nous demeurons interrogatifs sur l'annulation de certains crédits, particulièrement ceux relatifs à la mission "Écologie, développement et mobilité durables" , qui devraient être une priorité. En conséquence, le groupe Socialistes et apparentés ne votera pas ce texte…

Sourires.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes satisfaits qu'hier soir, sénateurs et députés aient trouvé un accord en commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023. C'est la preuve que ce texte est nécessaire pour procéder aux ajustements de fin de gestion, sans modifier la structure de la loi de finances initiale pour 2023 ; c'est également la preuve qu'un compromis est possible avec les oppositions constructives, afin d'enrichir un projet de loi dans l'intérêt de nos concitoyens.

Car ce texte, s'il apporte des corrections techniques inhérentes à la fin de gestion, permet également de financer des politiques très concrètes. Je pense notamment aux 800 millions d'euros ouverts pour répondre aux difficultés des agriculteurs, comme les crises de l'influenza aviaire, de la viticulture ou de l'agriculture biologique.

Je pense également aux 500 millions d'euros supplémentaires pour tenir compte de la hausse du nombre de personnes bénéficiant de la prime d'activité et de l'allocation aux adultes handicapés, déconjugalisée depuis le 1er octobre dernier. Enfin, plus de 1,5 milliard d'euros seront ouverts dans la mission "Défense" , afin d'anticiper les engagements prévus par la loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030, renforcer les capacités de nos armées et poursuivre le soutien à l'Ukraine. Le groupe Horizons et apparentés a d'ailleurs fait adopter un amendement afin de flécher 200 millions d'euros vers le fonds spécial de soutien à l'Ukraine.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il faut prolonger et faire évoluer ce fonds, déjà doté de 200 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2022. Il prend tout son sens pour réaffirmer notre soutien à l'Ukraine et au peuple ukrainien, alors que le conflit dure, malheureusement.

Notre groupe est également très satisfait de voir figurer dans le texte de la CMP l'amendement du président Marcangeli visant à reconduire une dotation budgétaire exceptionnelle de 40 millions d'euros au profit de la collectivité de Corse, afin de contribuer au financement des délégations de service public (DSP) maritime et aérienne – nous vous en remercions, monsieur le ministre délégué.

Enfin, je salue les apports de nombreux collègues de divers groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui viennent enrichir le texte. Je ne les citerai pas tous – d'autres l'ont déjà fait –, mais il s'agit de véritables avancées, notamment en faveur de la recherche sur l'endométriose, des associations habilitées à distribuer l'aide alimentaire, des viticulteurs touchés par l'épisode de mildiou, des exploitations en agriculture biologique ou de la filière pêche.

Ces mesures complémentaires compléteront les ouvertures de crédits nécessaires en fin de gestion, sans dégrader la prévision de déficit public pour 2023, qui reste estimée à 4,9 % du PIB. Combinée à une croissance qui résiste, c'est la preuve que notre économie tient bon et que la trajectoire de rétablissement des finances publiques est enclenchée. Le groupe Horizons et apparentés votera donc en faveur de ce projet de loi.

Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et Dem et sur quelques bancs du groupe RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voici donc au terme de l'examen du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023, qui ajuste les crédits budgétaires à la consommation effective de cette fin d'année. Venant transférer des crédits vers les postes visiblement sous-évalués en loi de finances, le PLFG est aussi le constat des échecs du Gouvernement.

Nous en retiendrons deux : d'abord, une sous-estimation du coût de la dette de 3,8 milliards d'euros. Cette dernière atteint 54,7 milliards d'euros, au lieu des 50,8 initialement prévus, en raison d'une remontée des taux supérieure aux estimations et d'une sous-estimation de l'inflation dans le budget. Nous nous étonnons malgré tout de l'ampleur de l'écart entre la prévision et le réalisé, et de la difficulté du ministère à prévoir le coût de la dette, alors qu'il est souvent prompt à la condescendance vis-à-vis des parlementaires, notamment quand ils sont de l'opposition.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Oh !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ensuite, nous notons une sous-exécution de 1,3 milliard des crédits de l'écologie, dont 300 millions d'euros pour MaPrimeRénov'. Vous avez apporté des explications à cette sous-exécution – augmentation du coût des rénovations énergétiques, hausse des taux des crédits immobiliers, fin du financement des chaudières au gaz et du bonus de 1 000 euros pour les principaux systèmes de chauffage, renforcement des contrôles ralentissant sensiblement le rythme d'engagement des dossiers –, mais vous avez oublié les problèmes structurels de MaPrimeRénov', sur lesquels les députés Écologistes vous ont pourtant alertés à plusieurs reprises : lourdeurs administratives, manque d'accompagnement des ménages, recul du nombre d'entreprises reconnues garantes de l'environnement (RGE) et, surtout, reste à charge beaucoup trop élevé pour les ménages modestes et très modestes, encore plus difficile à absorber en cette période d'inflation et de recul du pouvoir d'achat.

Vous visez 200 000 rénovations performantes en 2024 alors que vous en aviez prévu 90 000 en 2023. Monsieur le ministre délégué, combien de rénovations globales performantes seront véritablement réalisées en 2023 ? Quelles mesures structurelles vous permettront d'atteindre votre objectif en 2024 ? Il est urgent d'adapter les dispositifs si nous voulons tenir nos engagements climatiques, et protéger les Français de l'augmentation des coûts de l'énergie.

Au-delà de ces écarts d'exécution, nous retiendrons néanmoins de l'examen de ce projet de loi de finances de fin de gestion que vous avez – pour une fois – un peu écouté les Écologistes, en abondant notamment les crédits de fin d'année pour l'hébergement d'urgence et pour l'agriculture biologique. Nous nous en réjouissons, mais cela ne rend pas moins nécessaire une action structurelle pour lutter contre le sans-abrisme. La rue est le réceptacle de l'échec de nombreuses politiques publiques, à commencer par celle du logement. Elle est aussi celui de l'échec des sorties de détention. Le sans-abrisme s'explique également par le manque de prise en charge psychiatrique, le défaut d'accueil des migrants et l'abandon des jeunes relevant de l'aide sociale à l'enfance une fois la majorité atteinte.

Les crédits de l'hébergement d'urgence ne sont qu'une réponse partielle, et nous devons réfléchir ensemble à la mise en œuvre volontariste du principe du logement d'abord, et d'une politique globale de lutte contre la grande précarité.

De même, le soutien temporaire aux agriculteurs bio était urgent et nécessaire, mais une action structurelle est indispensable pour changer de modèle agricole et passer, enfin, de l'agro-industrie à une agriculture paysanne et résiliente.

Nous nous félicitons de l'adoption de notre amendement abondant les crédits du plan Sargasses 2, luttant contre un véritable fléau de l'arc antillais, et de l'augmentation des crédits destinés à l'accueil des réfugiés ukrainiens, ainsi que du vote de crédits pour l'entretien des réseaux d'eau dont bénéficieront les agences de l'eau, grâce à un amendement adopté au Sénat.

Compte tenu de ces observations et de votre écoute sur des thèmes majeurs comme le soutien à l'agriculture biologique ou l'hébergement d'urgence, les députés du groupe Écologiste s'abstiendront sur ce texte technique, mais nous réitérons notre disponibilité à travailler sur des mesures plus structurelles pour les secteurs essentiels à la transition écologique et sociale.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À l'issue d'une commission mixte paritaire conclusive qui s'est tenue hier soir, après que le texte a été adopté au Sénat lundi, nous discutons des conclusions de cette CMP alors qu'à midi, le texte n'était toujours pas publié. Rappelons aussi que le projet de loi avait initialement été présenté un mercredi, pour un examen en commission un samedi. De tels délais sont incompatibles avec un travail sérieux d'analyse des évolutions du texte.

Sûrement marqués par les débats intéressants, mais assez houleux, qui avaient eu lieu lors de l'examen du dernier projet de loi de finances rectificatif de la précédente législature, c'est à l'occasion de la révision de la loi organique relative aux lois de finances, en 2021, que la majorité de l'époque et le Gouvernement ont fait le choix de dépolitiser le PLFG en y excluant toute mesure fiscale.

Le calendrier que je viens de rappeler parachève votre œuvre, en supprimant toute possibilité de débat.

Ce projet de loi contient pourtant des mesures très politiques – et qui nous semblent particulièrement problématiques. C'est notamment le cas de l'article 2 : la réduction de la compensation des exonérations de contributions patronales d'assurance chômage vous permet d'opérer une ponction de 2 milliards sur les comptes de l'Unedic. Vous prétendez qu'elle se justifie par les excédents importants dégagés par la structure. Mais nous l'avons souligné à plusieurs reprises : ce surplus s'est constitué sur le dos des chômeurs, au gré des lois réduisant l'assurance chômage. L'objectif de la réforme de l'assurance chômage était donc purement budgétaire – cette ponction en est la preuve. Il s'agissait de faire économiser à l'État quelques milliards d'euros.

Au même moment, vous avez fait le choix, lors du PLF 2023, de supprimer la moitié de ce qui subsistait de la CVAE, faisant un cadeau de près de 4 milliards aux entreprises.

La conjonction de ces deux mesures prises en 2023 est l'un des meilleurs symboles de votre politique : vous faites des cadeaux onéreux aux plus riches et aux entreprises, tout en ponctionnant les personnes les plus modestes et en détériorant peu à peu notre système de protection sociale.

S'agissant des ouvertures et des annulations de crédits, certaines mesures vont dans le bon sens, notamment celles en faveur de l'accompagnement des réfugiés et du soutien aux agriculteurs. Nous saluons aussi l'amendement de nos collègues socialistes, qui permettra à 500 000 familles monoparentales de percevoir au moment de Noël une aide de 100 ou 200 euros, bienvenue en ces temps de forte inflation.

Pour autant, nous déplorons l'annulation de certains crédits. Dans la mission "Écologie" , développement et mobilité durables, une enveloppe de près de 1,3 milliard d'euros a été supprimée. Or, de l'avis de tous les scientifiques, les investissements nécessaires à la transition écologique sont insuffisants dans notre pays.

De même, vous avez fait le choix d'annuler près de 70 millions d'aide au logement. À l'heure où les places en hébergement d'urgence font cruellement défaut, cette contribution, certes modeste, n'aurait-elle pas permis d'améliorer quelque peu la situation ?

Compte tenu de notre vote en première lecture et des avancées très limitées introduites dans le texte, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera contre ce projet de loi de fin de gestion.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES – M. Éric Coquerel, président de la commission, applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les finances publiques de notre pays continuent à se dégrader. Si le solde effectif s'améliore de 0,1 point de PIB par rapport à la prévision de la loi de finances initiale pour 2023, le déficit structurel – l'indicateur le plus significatif – atteint 4,1 % du PIB, soit une dégradation de 0,1 point de PIB entre 2022 et 2023.

De même, si le ratio d'endettement – le montant de la dette publique ramené au produit intérieur brut – diminue de près de 2 points entre 2022 et 2023, la valeur en euros de la dette publique continue d'augmenter, comme les crédits dédiés au paiement des intérêts, ce qui nécessite l'ouverture de 3,8 milliards dans le texte que nous examinons, soit les trois quarts des ouvertures.

Cette réduction apparente du poids de la dette ne résulte nullement d'un effort structurel de la part du Gouvernement, mais d'une conjoncture marquée par une inflation plus forte que prévu. Le déficit du budget de l'État se creuse en 2023 de plus de 6 milliards par rapport à la loi de finances initiale – 171 milliards au lieu de 165 – et, pire, de 20 milliards par rapport à l'exécution de 2022 – 171 milliards contre 151.

Par ailleurs, certains mouvements de crédits ne nous satisfont pas, notamment les 800 millions d'annulation de MaPrimeRénov' ou les 2 milliards de ponction sur les excédents de l'Unedic, alors que cette structure est endettée à hauteur de 50 milliards.

Cependant, malgré ces critiques, le groupe LIOT demeure un groupe d'opposition constructif. Nous avions annoncé en amont du débat que nous pourrions faire évoluer notre vote défavorable vers une abstention, à deux conditions.

La première, c'était que le Gouvernement renonce à la ponction de 1 milliard sur l'Agirc-Arrco. J'aimerais, monsieur le ministre délégué, que vous nous fassiez part de l'avancée des négociations avec les partenaires sociaux et que vous renouveliez ici l'engagement que vous avez pris de ne pas réintroduire de ponction obligatoire sur les réserves de cette caisse de retraite complémentaire. Un accord doit être trouvé. Si le message n'était pas assez clair, je vous rappelle, comme j'ai déjà eu l'occasion de le faire, que la réintroduction de cette disposition dans le PLFSS pour 2024 constituerait pour notre groupe une ligne rouge.

Seconde condition : l'extension de l'indemnité carburant en 2024 dans le budget de l'État pour 2024. Le texte considéré comme adopté en vertu de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution prévoit 160 millions supplémentaires pour ouvrir le bénéfice de cette aide aux six premiers déciles de l'échelle des revenus, contre cinq auparavant. Je profite de cette tribune pour appeler nos concitoyens à se saisir de cette possibilité : le non-recours semble avoir été important en 2023.

Enfin, nos collègues députés corses du groupe LIOT se sont battus cette année pour que l'État tienne compte des difficultés insulaires. Nous sommes satisfaits de l'abondement de 40 millions de la dotation de continuité territoriale. C'est une victoire, mais nous restons très vigilants : cette dotation est gelée depuis 2009, et nous ne pouvons renouveler ce petit jeu chaque année, comme ce fut le cas en 2023, pour un abondement de 30 millions.

La CMP a conservé ces acquis, ainsi que quelques ajouts bienvenus du Sénat. Je salue les 50 millions destinés à lutter contre les fuites du réseau d'eau. Mais il y a quand même quelque ironie, monsieur le ministre délégué, à ponctionner le budget des agences de l'eau pour ensuite leur redonner 50 millions pour lutter contre les fuites. Tous nos collègues savent qu'elles financent désormais les canalisations – c'est le cas par exemple de l'agence de l'eau Seine-Normandie.

Je salue également les 20 millions dédiés à la rénovation des ponts et des ouvrages d'art, ainsi que les 60 millions pour les routes relevant de la compétence des collectivités locales.

Un mot également pour Mayotte, qui bénéficiera d'une rallonge de 63 millions pour la distribution d'eau potable – c'était nécessaire compte tenu de la situation extrêmement grave sur place. Le département bénéficiera de 50 millions pour les services soumis à des contraintes importantes : aide sociale à l'enfance (ASE), protection maternelle et infantile (PMI) et transport scolaire.

Enfin, le soutien aux associations habilitées à l'aide alimentaire constitue une bonne nouvelle : ce sont 20 millions supplémentaires en première lecture à l'Assemblée nationale et 20 millions supplémentaires au Sénat, soit 40 millions en tout, qui devraient permettre de faire face tant bien que mal à la montée des difficultés alimentaires chez les plus modestes de nos concitoyens. Étant donné l'urgence, confirmée par l'ensemble des acteurs, nous espérons que les décaissements seront rapides.

Pour toutes ces raisons, le groupe LIOT s'abstiendra sur le projet de loi de fin de gestion.

Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au nom du groupe Renaissance, je me réjouis qu'un compromis ait pu être trouvé sur ce collectif de fin d'année. Il revêt un format inédit, fruit d'un travail parlementaire de grande qualité lancé par Éric Woerth et Laurent Saint-Martin, et qui a permis de pérenniser la saine pratique des collectifs budgétaires de fin d'année retenue par le Gouvernement.

Il prouve, s'il en était besoin, qu'un compromis est possible au sein de notre assemblée, y compris sur un texte budgétaire. J'en salue les artisans – le rapporteur général du budget et le ministre délégué Thomas Cazenave, sous l'autorité de la Première ministre –, sans qui il n'aurait pas pu être trouvé.

L'esprit de compromis devait prévaloir sur un texte qui permet à notre pays de faire face à des aléas par définition imprévisibles. Je pense ici aux catastrophes agricoles, causées par le dérèglement climatique, mais aussi à l'aide que nous apportons à nos amis ukrainiens dans leur combat contre l'oppresseur russe. Nous nous réjouissons de l'amendement transpartisan de nos collègues, parmi lesquels Anne Genetet et Benjamin Haddad, qui a permis de renforcer notre soutien dans ce combat pour la liberté.

S'agissant d'un texte qui finance les mesures salariales décidées en cours d'année sans dégrader notre masse salariale, seul l'esprit de compromis devait prévaloir. S'agissant d'un texte qui débloque les crédits nécessaires au financement des dépenses de solidarité, notamment la prime d'activité et l'AAH, seul l'esprit de compromis devait prévaloir.

Ce texte s'inscrit bien dans la continuité de la politique économique et budgétaire menée par le Gouvernement, et soutenue par la majorité en sortie de crise. C'est peut-être là que s'arrête cet esprit de compromis. Vous conviendrez néanmoins que sans sérieux budgétaire, sans désendettement et sans maîtrise des dépenses publiques, personne ne pourrait en responsabilité faire face aux aléas auxquels toute démocratie est confrontée.

Je citerai l'amendement du rapporteur général en faveur des agriculteurs, celui de notre collègue Liliana Tanguy en faveur des pêcheurs, l'apport de notre collègue Élie Califer pour lutter contre les sargasses, mais aussi celui de notre collègue Véronique Louwagie au profit des associations habilitées à l'aide alimentaire – au moment où s'ouvre la campagne d'hiver des Restos du cœur, auxquels je veux rendre hommage.

Bien d'autres amendements ont été adoptés, ce qui témoigne de la vitalité des assemblées pour continuer à répondre aux défis qui sont les nôtres jusqu'à la fin de l'année. Je me réjouis de l'aide que le Sénat a décidé d'apporter à nos compatriotes mahorais, mais également à nos amis arméniens.

Nous aurons encore besoin de cette bonne volonté, notamment pour accompagner le Gouvernement l'année prochaine dans l'ambitieux exercice de revue de dépenses qu'il s'est fixé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour être efficaces et durables, ces revues doivent s'inscrire dans une réflexion globale sur les missions de l'État, sur le périmètre de l'action publique et sur nos choix fondamentaux de politique sociale. Autour du rapporteur général, et avec la majorité, nous y contribuerons pleinement – car un pays dont les comptes sont en désordre est un pays qui s'abandonne. C'est notre rôle de parlementaire : contrôler l'action du Gouvernement et évaluer les politiques publiques. Il faut enfin sortir de ce dogme selon lequel une bonne dépense est une dépense qui augmente !

Cet impératif n'est en rien incompatible avec la recherche d'une croissance durable car, sur le long terme, notre premier défi reste celui de la productivité. Le Président de la République a eu raison d'appeler hier au réveil français : la productivité européenne est en berne et la croissance européenne, en recul, est deux fois plus faible que la croissance américaine – c'est inacceptable. Il va nous falloir investir – dans la formation, dans les qualifications, dans les nouvelles technologies et dans l'intelligence artificielle. Mais nous n'y arriverons pas avec des comptes publics en désordre. C'est pourquoi nous soutenons pleinement cet exercice de revue de dépenses et que nous y prendrons toute notre part.

Pour toutes ces raisons, le groupe Renaissance votera évidemment le texte issu de la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, et sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La discussion générale est close.

Sur l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire.

Conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d'abord appeler l'Assemblée à statuer sur les amendements dont je suis saisie.

La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir les amendements n° 1 , 2 , 4 et 3 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Ces amendements permettent de relever le plafond des autorisations de dépense en rétablissant les crédits à hauteur de 189 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 150 millions en crédits de paiement.

Ils tirent les conséquences de plusieurs ouvertures de crédits gagées, intervenues en première lecture au Sénat, puis en commission mixte paritaire, afin de financer diverses mesures : le soutien aux collectivités territoriales en vue de la réalisation de travaux routiers pour 60 millions ; l'accélération de la rénovation des réseaux d'eau potable à hauteur de 50 millions ; la conduite de travaux sur les ponts routiers pour les collectivités territoriales à hauteur de 20 millions ; le financement de la convention relative à la desserte transitoire sur le Nancy-Lyon pour 35 millions ; la majoration de la subvention pour charges de service public pour l'hygiène à hauteur de 4 millions ; le renforcement des moyens accordés à l'aide alimentaire pour 20 millions.

Ces ouvertures avaient été gagées par des minorations de crédit sur les programmes 174, 205, 119 et 124. Le Gouvernement a choisi de rétablir ces crédits, afin d'assurer la soutenabilité des programmes concernés et de rendre les amendements parlementaires pleinement opérants.

Enfin, nous ne modifions pas l'article liminaire, ce qui signifie que le déficit public pour 2023 demeure égal à 4,9 % du PIB.

Debut de section - Permalien
Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

Nous sommes donc parvenus à un accord sans dégrader notre objectif politique prioritaire, à savoir le redressement des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par définition, ces amendements n'ont pas été examinés par la commission, mais ils traduisent très fidèlement ce qui a été voté hier en CMP. Avis favorable sur les quatre amendements.

L'amendement n° 1 , modifiant l'article 4, et les amendements n° 2 , 4 et 3 , modifiant l'article 5 et l'état B, sont successivement adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par les amendements adoptés par l'Assemblée.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 192

Nombre de suffrages exprimés 123

Majorité absolue 62

Pour l'adoption 99

Contre 24

L'ensemble du projet de loi est adopté.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi relative à l'ouverture à la concurrence du réseau de bus francilien de la RATP (1788, 1838).

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Bruno Millienne, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes réunis cet après-midi pour examiner une proposition de loi du Sénat, adoptée en commission le 7 novembre dernier, relative à l'ouverture à la concurrence du réseau de bus francilien de la RATP. Cette ouverture à la concurrence a été actée et engagée par la loi du 8 décembre 2009, votée dans cette enceinte en application du règlement européen n° 1370/2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, également appelé règlement relatif aux obligations de service public (OSP).

Ce règlement n'imposait pas d'ouvrir les réseaux de bus à la concurrence, mais ouvrait deux possibilités : passer par un opérateur interne émanant de l'autorité organisatrice des mobilités (AOM), ou attribuer des contrats de service public après une mise en concurrence. Nous avons donc fait un choix souverain et démocratique en retenant la seconde proposition, qui permet à la RATP d'exporter son savoir-faire partout en Europe et qui demain, nous offrira un réseau de transport encore plus performant et efficace.

Ce texte ne revient pas sur ce principe : contrairement à ce que la lecture de certains amendements pourrait laisser croire –, il n'est aucunement question de rouvrir ce débat. Bien que certains s'enferment dans une forme de déni à ce sujet, le processus est amplement entamé puisque, dès février 2022, Île-de-France Mobilités (IDFM) a décidé l'allotissement du réseau de bus en treize lots à Paris et en première couronne ; les premiers avis de concession ont été publiés dans la foulée.

La proposition de loi vise non à décaler dans le temps le processus d'ouverture à la concurrence, mais à échelonner son calendrier d'ouverture effective sur une durée maximale de deux ans, comme cela avait été décidé en commission lors de l'examen, au printemps dernier, du texte de M. Stéphane Peu. Je regrette d'ailleurs que ce texte n'ait pas été présenté en séance publique dans le cadre de la niche du groupe GDR.

Le calendrier initialement envisagé dans la loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoyait un grand soir le 31 décembre 2024, ce qui n'est ni réaliste ni souhaitable. De plus, cela aurait conduit à informer 19 000 agents de leur éventuel changement d'employeur au beau milieu des Jeux olympiques et paralympiques (JOP), à la réussite desquels ils seront pleinement engagés.

Mme Farida Amrani s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tout le monde en conviendra : il n'est pas souhaitable de faire coïncider cette période si particulière avec une phase durant laquelle ils pourraient être préoccupés par un changement d'affectation.

L'ouverture à la concurrence peut légitimement générer de l'anxiété chez les salariés. Pour répondre à cette inquiétude, IDFM a mandaté en février dernier MM. Jean-Paul Bailly et Jean Grosset, qui ont émis des préconisations relatives à l'évolution du cadre social.

M. Thomas Portes s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le texte les retranscrit législativement, afin de garantir à tous les salariés un cadre social optimal et mieux-disant que celui initialement prévu dans la LOM.

Il vise deux principaux objectifs : garantir la meilleure qualité de service pendant et après la période de transition vers l'ouverture, tout en préservant un cadre social exigeant pour les salariés concernés ; veiller à l'équité concurrentielle. Son examen en commission a complété les travaux du Sénat, qui avaient permis d'aboutir à un texte déjà amplement salué par les parties prenantes.

L'article 1er a fait l'objet d'une modification visant à rétablir la période de référence pour le calcul des équivalents temps plein (ETP) à transférer, telle qu'elle était fixée dans le texte initial – de la fin de l'année 2021 au début de l'année 2023. Cette rédaction répond à un double impératif : disposer d'une photographie qui soit à la fois assez proche du moment de bascule, tout en étant connue dès le lancement de la procédure.

Cet article rétablit juridiquement les hypothèses de recours à l'attribution directe, en régie ou en quasi-régie, par IDFM. Il établit par ailleurs le principe selon lequel le transfert des agents ne s'opérera plus ligne par ligne, mais par centre de bus. À cette règle de principe s'ajoute un mécanisme d'appel à volontariat…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…confié à IDFM, pour ajuster d'éventuels déséquilibres d'effectif entre centres de bus. Cet article permet aussi l'extension du bénéfice des garanties sociales à tous les salariés transférés, pour combler les angles morts laissés dans la LOM, notamment concernant les salariés transférés en régie ou quasi-régie à IDFM.

En lien avec ces dispositions, l'article 6, qui n'a pas été modifié sur le fond en commission, vise à proroger le mandat des représentants du personnel de la RATP jusqu'à la fin de la période d'ouverture progressive à la concurrence du réseau de bus, afin d'assurer un dialogue social continu pendant la transition.

Déjà largement évoqué, l'article 4 permet à IDFM d'échelonner le calendrier d'ouverture effective à la concurrence pendant une durée maximale de deux ans à compter de la date initialement fixée par le législateur, à savoir entre le 31 décembre 2024 et le 31 décembre 2026.

De même, l'article 5 prévoit le report, pendant une période transitoire de quinze mois, de l'application pleine et entière du cadre social territorialisé – CST. Il s'agit ainsi de laisser le temps aux opérateurs de recruter les 500 à 700 agents nécessaires à l'application du CST, qui prévoit une amplitude horaire journalière maximale de onze heures pour les services en deux fois, alors qu'elle est actuellement de treize heures à la RATP.

Les articles 2 et 8 sont relatifs à Île-de-France Mobilités. L'article 2, modifié en commission afin de supprimer un doublon introduit en séance publique au Sénat, permet d'élargir les possibilités de recrutement à des salariés de droit privé, afin de mieux répondre à la diversification et à la complexification des missions d'IDFM. L'article 8 autorise la représentation, au sein du conseil d'administration d'IDFM, des organisations représentatives des employeurs, lesquels sont les premiers financeurs du réseau de transport public dans la région.

Finalement, la principale modification apportée par la commission au texte du Sénat consiste en l'adoption de deux amendements de M. Vatin aux articles 1er et 3. Ils visent à retirer la compétence conférée par la LOM à l'Autorité de régulation des transports en matière de règlement des éventuels litiges qui pourraient naître entre IDFM et la RATP s'agissant du calcul du nombre de salariés transférés. Ce retrait se justifie pour deux raisons. La première, c'est que l'ART n'est pas compétente en matière de transport public routier de personnes en région Île-de-France – à savoir, les bus de la RATP. Elle ne se juge donc pas légitime, par rapport au juge de droit commun, pour arbitrer ce type de conflit. La seconde, c'est qu'elle estime ne pas disposer des ressources et des compétences suffisantes pour jouer efficacement ce rôle sans mettre en péril l'accomplissement de ses autres missions. Consciente de ces difficultés, dans sa grande sagesse, la commission a donc choisi de revenir sur les dispositions de la LOM, adoptées en 2019, afin de ne pas saper la crédibilité de l'ART, alors même que son expertise est reconnue par tous, y compris en dehors de nos frontières.

Avec cette proposition de loi, le législateur est au rendez-vous d'une ouverture à la concurrence réussie du réseau de bus de la RATP. En toute franchise, j'attends que tous les acteurs concernés, en particulier de l'autorité organisatrice, Île-de-France Mobilités, fassent preuve du même niveau de responsabilité et d'engagement pour que celle-ci soit une réussite pleine et entière.

Je veux être très clair – du reste, j'en profite pour m'exprimer sur certains amendements déposés en séance : l'État n'a pas vocation à se substituer à IDFM. En votant la LOM et cette proposition de loi, – dans quelques heures j'espère –, nous jouons notre rôle. Je sais, monsieur le ministre délégué, que vos services sont aussi pleinement mobilisés afin que les décrets soient publiés en temps et en heure. Un cadre législatif et réglementaire stable et protecteur sera donc fixé dans les prochaines semaines. À ce stade, la responsabilité de la réussite de cette ouverture à la concurrence reposera donc sur les épaules de l'autorité organisatrice – les nombreux adeptes de la décentralisation qui siègent ici ne me contrediront pas.

Je l'ai rappelé, la loi relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports, dite loi ORTF, a été votée il y a quatorze ans. Depuis huit ans, la région Île-de-France est dirigée par une majorité très favorable à l'ouverture à la concurrence Or, malgré cela, des incertitudes subsistent sur sa mise en œuvre opérationnelle. Il est temps de les lever au plus vite. Désormais, les discours devront laisser place aux actes.

Je veux, par exemple, parler du Centre de régulation et d'information voyageur – Criv – dont l'avenir est encore très incertain. Or sa mission – maintenir la continuité du service public et garantir la sécurité des agents et du public –, qu'il accomplit de manière particulièrement efficace depuis dix ans, est essentielle. Elle sera d'autant plus précieuse dans le cadre de la coordination des nouveaux opérateurs auxquels des lots seront attribués. Il est donc indispensable que l'autorité organisatrice anticipe, de manière forte et volontaire, la prise en charge de cet outil. Du reste, elle doit conserver une compétence étendue sur celui-ci plutôt que de diluer, entre une multitude d'acteurs, la responsabilité de prendre des décisions complexes et urgentes.

L'exemple de l'ouverture à la concurrence d'Optile – Organisation professionnelle des transports d'Île-de-France –, qui, sans être la catastrophe que certains s'amusent à décrire, n'a pas été sans heurt, doit nous éclairer pour la suite. L'État répond présent, il est aux côtés d'IDFM afin de réussir la nouvelle phase d'ouverture à la concurrence. J'invite l'autorité organisatrice à rapidement lever les doutes qui subsistent pour rassurer tous les acteurs concernés, à commencer par les usagers.

Avant de conclure, je remercie nos collègues du Sénat, à commencer par l'auteur de la proposition de loi, Vincent Capo-Canellas, et le rapporteur Franck Dhersin. Je remercie également les administratrices et les administrateurs, ainsi que les commissaires de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire pour la qualité des débats que nous avons eus en commission, notamment sur ce texte. Je peux au moins vous reconnaître une constance louable sur la question. À n'en pas douter, nous y reviendrons.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d'avoir rappelé, à la suite de vos collègues du Sénat, ce que ce n'est pas ce texte.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

D'abord, ce texte ne revient pas sur la répartition des compétences en matière de transport entre l'État et autorité organisatrice de transport francilien, Île-de-France Mobilités. Puis, n'en déplaise à certains, ce texte ne remet pas non plus en cause un long processus, qui a été amplement discuté et voté. Du reste, je rappelle qu'il n'a jamais été remis en cause par les majorités successives depuis 2009 – monsieur le rapporteur, vous avez rappelé à juste titre l'historique.

Il est plus simple de revenir brièvement sur les étapes qui ont jalonné la préparation du texte, lequel adapte et améliore – j'en suis profondément convaincu – le processus entamé il y a près de quinze ans. Celui-ci s'inscrit dans un cadre européen, qui offre plusieurs options aux États membres pour organiser leur service de transport public.

Sous l'autorité du Premier ministre Jean-Marc Ayrault – je m'en souviens car je travaillais à ses côtés –,…

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

… le processus d'ouverture progressive à la concurrence des transports franciliens a été négocié par la majorité d'alors avec la Commission européenne, conduisant à la conclusion d'un accord en 2013. Je ne me souviens pas qu'à l'époque, il ait fait l'objet de vives contestations de part et d'autre de l'hémicycle ni qu'il n'ait depuis été remis en cause par les autorités municipales, régionales, ou nationales. Dans un souci de cohérence, ce rappel historique est important.

Soyons honnêtes, ce processus, qui consiste non pas à privatiser le réseau de bus francilien – en aucun cas, mais j'attends les réactions –, mais à…

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

…ouvrir progressivement à la concurrence, sous la responsabilité d'une autorité organisatrice de transports publique à 100 %, à savoir la région et Île-de-France Mobilités, n'est pas très original. Il s'agit de permettre à une autorité organisatrice de la mobilité de choisir, à échéance régulière, un ou plusieurs prestataires,…

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Privé ? Cela reste à démontrer car c'est totalement faux.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Ces prestataires se verront confier l'organisation du réseau de bus, sous le strict contrôle de l'autorité. L'immense majorité des métropoles de France ont déjà recours à ce mode d'organisation du service public, qui s'appelle la délégation de service public, contrat créé il y a 150 ans environ. En Île-de-France, le réseau de bus est actuellement exploité exclusivement en délégation de service public, sous le contrôle du conseil régional.

Ce texte ne remet pas en cause ce processus – j'y insiste –, mais l'adapte et l'améliore, ce qui est bienvenu. Je suis le premier ministre chargé des transports à avoir dit publiquement avec certains d'entre vous, au sein de la majorité comme de l'opposition – en premier lieu, M. Peu –, que nous devions apporter deux types d'amélioration à ce processus. D'abord, il convient de renforcer les garanties sociales des salariés et des agents publics, afin de donner de la visibilité et de mieux les protéger, ainsi que le prévoit le texte adopté par le Sénat. À cet égard, je me réjouis qu'à la suite des discussions constructives que l'État a eues avec l'opérateur historique – la RATP –, la région Île-de-France et Île-de-France Mobilités, la présidente de la région et d'IDFM, Valérie Pécresse, ait confié à deux autorités reconnues en matière de dialogue social, MM. Jean-Paul Bailly et Jean Grosset, une large consultation, une mission approfondie en vue de définir les garanties sociales supplémentaires à apporter dans le cadre de ce processus.

Vous les avez mentionnées en détail, monsieur le rapporteur. Aussi serai-je bref, en me contentant de rappeler que ce texte garantit que la mobilité géographique des chauffeurs de bus se fera sur la base du volontariat ; elle ne sera donc pas contrainte. Cette garantie n'est pas prévue par le droit en vigueur, il est donc nécessaire de modifier la loi. Cette disposition du texte, qui a fait l'objet d'une grande discussion avec notamment les organisations syndicales, est une des recommandations centrales du rapport de MM. Bailly et Grosset remis à la région Île-de-France.

La deuxième adaptation essentielle, qui constitue également une amélioration, est relative au calendrier. Dès le mois de janvier, j'avais indiqué que le calendrier prévu, même s'il est le fruit du long processus que j'ai brièvement rappelé, n'est pas raisonnable. En effet, il ne garantit pas la qualité du service public ni ne protège les agents qui, de manière légitime, se posent des questions sur leur avenir, notamment s'agissant des garanties à apporter aux droits acquis. La proposition de loi issue du Sénat prévoit précisément de décaler…

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

…de deux ans l'ouverture à la concurrence des services réguliers de transport public de voyageurs. Je salue le travail de M. Peu, qui avait déposé une proposition de loi visant à surseoir de quatre ans à l'ouverture à la concurrence du réseau de bus de la Régie autonome des transports parisiens. Du reste, elle obéissait à la même logique que la présente proposition de loi, déposée par M. Capo-Canellas, et rapportée par M. Dhersin au Sénat et M. Millienne à l'Assemblée nationale : il s'agissait non pas de privatiser le réseau de bus, mais de l'ouvrir à la concurrence, en suivant un calendrier adapté et protecteur à la fois des agents et des usagers.

L'équilibre trouvé est bon et nécessaire ; il protège les intérêts des salariés, ainsi que des agents et des usagers du service public.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Ce texte ne doit pas être caricaturé, cela ne rend service à personne.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Ceux qui se découvrent soudain une volonté de protéger les agents, que n'ont-ils essayé de faire aboutir les textes précédents ? Ils se sont efforcés de les faire capoter. Pourquoi n'ont-ils pas proposé, depuis 2009, des solutions adaptées ? Ce débat n'a jamais eu lieu, il aura fallu attendre l'examen de ce texte qui renforce les garanties des salariés et des usagers du service public.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Nous devons absolument faire preuve d'honnêteté en rappelant ce qu'est ce texte…

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

…et ce qu'il n'est pas. Comme j'ai eu l'occasion de le dire au Sénat, compte tenu des garanties sociales supplémentaires et du calendrier adapté que propose ce texte, le Gouvernement y est favorable. Il est donc indispensable de voter cette proposition de loi, afin de protéger tant les salariés que les usagers. Son rejet ne remettrait en aucun cas en cause le processus d'ouverture à la concurrence. Quels que soient les points de vue des uns et des autres, il ne permettrait pas de revenir sur les quinze dernières années d'histoire, mais priverait les usagers et les agents du service de transport public francilien de protections bienvenues et nécessaires. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de les avoir rappelées, précisées, et renforcées au cours des travaux en commission.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai reçu de Mme Cyrielle Chatelain et des membres du groupe Écologiste – NUPES une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à Mme Sabrina Sebaihi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Qu'a donc fait le service public pour que vous le détestiez autant ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

France Télécom, Le Crédit lyonnais, Thomson, Gaz de France, les autoroutes, Aéroports de Paris, l'aéroport de Nice-Côte d'Azur, l'aéroport de Lyon-Saint-Exupéry, l'aéroport de Toulouse-Blagnac, Sanofi, La Française des jeux, la SNCF, Engie, et, demain, la RATP. Quand arrêterez-vous le massacre ?

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quand cesserez-vous de vendre par morceaux nos industries, nos entreprises, nos institutions ? Il faut être un lapin pris dans les phares d'une voiture pour s'étonner de ce texte, dans le sillage de votre politique néolibérale, écrit de concert avec Valérie Pécresse, peu connue pour son amour des services publics.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est vrai qu'en banlieue, le réseau n'est pas satisfaisant, que parfois les attentes de bus sont longues, trop longues, et les rares bus qui circulent bondés, trop bondés. La faute à qui, chers collègues ?

À ceux qui ont refusé, après le covid, un plan de transport prévoyant le retour à 100 % de l'offre de transport, pas au service public. À ceux qui ont refusé d'augmenter les salaires des machinistes, pas au service public.

M. Benjamin Lucas applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À ceux qui ont laissé la situation sociale pourrir au sein de la RATP, fermant volontairement les yeux sur la crise de recrutement de chauffeurs de bus, pas au service public.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui, les défaillances de ce service sont de votre faute. Aussi, nous ne voulons pas d'un débat supplémentaire sur la mise en concurrence. Nous ne voulons pas nous laisser enfermer dans les solutions binaires que vous imposez.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si on vous écoute, c'est « la privatisation ou le chaos ». Nous ne voulons pas d'une fin programmée et méthodique du service public. Nous défendons un autre modèle de société. Pas celui qui ne voit les services publics que comme une manne d'argent public à offrir à vos amis du privé. Pas celui qui démantèle chacune des entreprises qui sont nos fleurons nationaux. Notre modèle de société est celui du service public égalitaire partout, hérité du Conseil national de la Résistance, de Blum et de Croizat. Le vôtre, chers collègues, c'est celui de Thatcher.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On nous dira que « nous n'avons pas le choix », « qu'il faut s'aligner avec l'Europe », que c'est le sens de l'histoire. Mais l'Europe offrait une solution alternative : la régie publique, comme celle qui gère les crèches, les services des eaux ou la collecte des déchets.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pourquoi ne pas avoir choisi ce mode de gestion ? Ouvrir le service public des transports à la concurrence, c'est mettre le doigt dans un engrenage dangereux, où la rentabilité l'emportera sur l'accessibilité, où les tarifs seront encore moins maîtrisés, où les salariés seront encore plus maltraités. Qu'a donc fait le service public pour que vous lui en vouliez à ce point ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

N'est-il pas celui qui nous soigne à l'hôpital, celui qui éduque nos enfants à l'école, celui qui prend soin de nos aînés, qui aide à retrouver du travail ou qui nous soutient lorsque surviennent des coups durs dans la vie ? Où sont passées les envolées lyriques du Président de la République, louant il y a trois ans le service public qui a tenu face au covid, celui des « métiers essentiels » méritant revalorisations et investissements ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le service public mérite mieux que vos petites opérations de communication. Il mérite du respect, de l'investissement, il ne demande pas l'aumône !

Certes, notre service public, ce joyau de notre République, est parfois un peu pantelant. J'oserai même dire qu'il tire parfois la tronche. En manque chronique de financement depuis des décennies, maltraité et abusé par des discours tous plus réactionnaires et caricaturaux les uns que les autres, il est porté à bout de bras par des hommes et des femmes qui, eux, y croient : par ses médecins, à l'hôpital Max Fourestier de Nanterre ou à l'Hôpital Lozère ; ses accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) et ses professeurs, à l'école Jean-Jaurès de Drancy ou d'Estienne d'Orves de Suresnes ; ses travailleurs sociaux au sein des centres communaux d'action sociale (CCAS), ses psychologues au sein des centres médico-psychologiques (CMP) ou médico-psycho-pédagogiques (CMPP) ; et par ses machinistes et ses conducteurs dans les bus de la petite couronne. Ceux-là mêmes qui, durant le covid, ont tenu et travaillé dans des conditions sanitaires dramatiques.

Malheureusement, la liste de ces serviteurs de la France se raccourcit d'année en année, par la grâce de votre politique qui voit dans la concurrence et la privatisation le Graal de toute politique économique.

Épargnez-vous vos argumentaires usés, qui ont servi aux dix-sept 49.3 que vous avez déclenchés et qui tous proclament : « Nous n'avons pas le choix », « nous sommes responsables », « c'est la seule voie de la raison ». À la place, laissez-moi citer quelques chiffres susceptibles d'éclairer nos débats.

Vous vantez auprès des Français des opérations de privatisation « gagnant-gagnant » ; il s'agit plutôt de « perdant-perdant ». Lorsque les entreprises privées entrent au capital d'entreprises publiques, ce sont elles qui gagnent, et ce sont les Français qui perdent. Souvenons-nous des autoroutes dont les entreprises exploitantes, en augmentant les péages et en baissant les effectifs, ont généré un bénéfice record : près de 4 milliards d'euros de bénéfice net en 2021, soit – tenez-vous bien – 430 000 euros par kilomètre.

L'histoire est tout autre lorsque les Français se procurent des actions d'une entreprise publique mise sur le marché : Air France, c'est 14 euros l'action aujourd'hui, contre 200 lors de son introduction en Bourse ; EDF, 12 euros aujourd'hui contre près de 30 à l'époque.

Vous rétorquerez comme certains, lors de l'examen du texte au Sénat, qu'il n'y est pas question de privatisation et que celui-ci s'inscrit dans le cadre du service public. Enfin, chacun sait que l'ouverture à la concurrence, dans quelque cadre que ce soit, prépare la voie de la privatisation !

Mme Nathalie Oziol applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La perspective d'une mise en concurrence, d'ici à 2040, de l'ensemble des réseaux de transports franciliens est, a fortiori, celle de leur privatisation. Pratique : vous n'aurez qu'à gratter la crédence des métros actuels pour retrouver les compagnies privées d'antan, la Société du chemin de fer électrique souterrain Nord-Sud de Paris et la Compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris ! Nous économiserons quelques euros.

Qu'ont donc fait les fonctionnaires pour vous agacer à ce point ? La privatisation, ou la mise en concurrence, ou le démantèlement par petits bouts du service public – rayer la mention inutile –, on connaît. Peu importe qu'elle soit réalisée avant ou après les Jeux olympiques, avant ou après les élections municipales, des milliers d'agents verront leurs conditions de travail se dégrader.

Appelez cela comme vous voulez : un sac à dos, une besace ou une sacoche sociale –…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…comme il est indiqué dans le texte –, nous savons d'expérience que sans le matelas de l'État, les droits des salariés seront mis à mal, sacrifiés sur l'autel du tout-profit.

Au vu du faible nombre de garanties durables contenues dans le texte, nous ne pouvons que nous inquiéter pour les salariés déjà éprouvés par votre politique : d'ores et déjà contraints d'effectuer deux années de travail supplémentaires, du fait de votre réforme injuste des retraites, ils voient vos lois réduire leurs allocations chômage.

Pourtant, ils se lèvent tôt le matin, comptent parmi les premiers de corvée, travaillent de jour, de nuit, en semaine, le week-end et les jours fériés, ne rechignent pas au travail et conduisent, enfilant les kilomètres tous les jours afin d'accompagner le milliard de voyageurs qui emprunte chaque année le réseau de bus francilien de la RATP. Karim, que je connais, prend son service aux aurores et traverse Paris d'est en ouest pour se rendre à son dépôt. Qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, il tient son poste, comme ses 19 000 collègues.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au lieu d'examiner un texte en toute hâte, en préparation de grands événements ou d'élections, nous aurions préféré discuter davantage des salariés, notamment de retraite et de pénibilité, du statut de conducteur de bus,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…nous aurions aimé prendre le temps de débattre à nouveau du régime spécial de la RATP, que vous avez supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous aurions aimé discuter des salaires – un conducteur de bus débute avec 1 300 euros net par mois –, de la gouvernance, de la place des organisations syndicales, du transfert des contrats. Mais pas de panique ! Par la magie de la concurrence, les usagers ne connaîtront plus la galère. Et votre coup de baguette magique ne s'arrête pas là : finis, aussi, les problèmes de recrutement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Est-ce bien sérieux, monsieur le ministre délégué ?

Au cours des débats précédents, monsieur le ministre délégué, vous et votre majorité proposiez de mettre la mise en concurrence du réseau de bus francilien en miroir de celle d'autres métropoles et territoires. Mais comment pouvons-nous comparer Rennes ou Nantes à l'Île-de-France, où habite un Français sur dix ? Écoutons les premiers concernés, salariés et usagers : ils vous ont adressé un message clair, au moyen de la pétition « Stop Galère », qui a recueilli plusieurs dizaines de milliers de signatures. Hélas, elle connaîtra le même sort que les cahiers de doléances. Nous savons pertinemment où vous rangez la voix du peuple : dans un tiroir, où elle prendra la poussière.

Nous ne participerons pas à votre débat opposant les usagers aux salariés, qui vous conduit, lors de chaque grève, à déverser sur les plateaux de télévision votre mépris des travailleurs essentiels : « Les grévistes prennent en otage les usagers », « La galère c'est à cause de la CGT », « Les grévistes sont des fainéants payés à ne rien faire ».

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Je n'ai jamais dit ça.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Des conditions de travail dégradées pour les salariés, ce sont des conditions de transport dégradées pour les usagers. Et cette loi n'arrangera rien. Elle ne démontre d'ailleurs qu'une seule chose : votre peur de la grève, et votre peur de l'image donnée par la France. Enjamber les Jeux olympiques et paralympiques en modifiant le calendrier initial n'est pas anodin et cela traduit votre mépris des salariés. Nous ne sommes pas dupes, chers collègues : la perspective d'une grève à l'été 2024 vous paralyse.

Sans avoir besoin d'une grève supplémentaire, à eux seuls, les incidents de la ligne 8, les RER B saturés, les RER A bondés…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et les cent minutes d'attente pour un bus se chargeront très bien d'écorner l'image de la France.

Remarquons également – si nous sommes un peu taquins –, qu'il n'est sans doute pas anodin que cette mise en concurrence débute juste avant les élections municipales, en particulier dans les territoires les plus pauvres : Seine-Saint-Denis, Val-d'Oise, Nanterre, Val-de-Marne. Les élus locaux apprécieront.

Ainsi invitons-nous, vous vous en doutez, à voter cette motion de rejet préalable ; et ce pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, nous ne souhaitons pas prendre le risque de voir le service se dégrader davantage. Même dans un cadre de service public, la mise en concurrence entraînera indubitablement une course à la réduction des coûts et à la compétitivité. À terme, ce sera la privatisation ; elle toque d'ores et déjà à la porte.

Ensuite, nous refusons de fragmenter davantage le réseau de bus de la RATP. Nous sommes partisans d'une centralisation des réseaux de transport, particulièrement dans une région aussi interconnectée que la nôtre, l'Île-de-France. Ce texte nous en éloigne dangereusement.

En outre, nous refusons d'accroître les inégalités territoriales, déjà criantes dans la région. Bien que la métropole francilienne soit, en moyenne, l'une des mieux connectée, les disparités entre les plus pauvres et les plus riches y sont grandes. Trois quarts des Franciliens sont prêts à postuler à un emploi moins bien rémunéré mais plus proche de leur domicile. C'est dire le besoin impérieux d'une gestion centralisée des transports dans la région.

Nous refusons également d'augmenter les coûts administratifs liés à la mise en concurrence. De telles dépenses serviraient davantage à l'adaptation de la politique sociale de la RATP.

Nous sommes tout autant opposés à la précarisation des conditions de travail qu'engendrera l'ouverture à la concurrence, véritable porte ouverte à la privatisation.

Nous sommes attachés au service public. C'est là qui nous oppose, chers collègues.

Au bout du compte, ce texte se situe aux antipodes de ce que réclament les Franciliens. Ils demandent des transports de qualité, à un coût accessible, et le désenclavement des territoires où les transports publics sont les moins nombreux et où seule la voiture permet d'aller travailler. Ils demandent même la démission de Valérie Pécresse en recensant leurs galères quotidiennes sur les réseaux sociaux sous le hashtag #PecresseDemission. Mais ils ne demandent pas la mise en concurrence ni la privatisation. Ils demandent, nous demandons tout simplement un service public fort. Car, au fond, il reste le seul bien de ceux qui n'ont rien.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour les explications de vote, la parole est à M. Thomas Portes.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La proposition de loi met en lumière une réalité indéniable : même les fervents idéologues du marché admettent désormais que la privatisation de la RATP constituera une catastrophe au quotidien pour les 12 millions d'usagers et risquera de faire échouer les prochains Jeux olympiques.

Forts de ce constat, nous aurions pu attendre une décision sage de votre part : stopper l'ouverture à la concurrence. Il n'en est rien. Vous offrez simplement à IDFM la possibilité de la mettre en œuvre sur une période de deux ans, tout en continuant à sacrifier les droits des travailleurs.

Au moins, les choses sont claires : ni les conditions de travail des salariés ni le quotidien des usagers ne vous intéressent, monsieur le ministre délégué. Votre seule préoccupation est de préserver les Jeux olympiques. Votre seul objectif, assumé, est d'éviter tout conflit social durant cette période. Après viendra la débâcle.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les travailleurs et les usagers en feront les frais. Le Gouvernement dicte, le Parlement exécute, la stratégie est bien rodée : procédure accélérée, texte à l'initiative d'un parlementaire dépourvu d'étude d'impact et d'évaluation des conséquences de la loi. Vous nous demandez de légiférer à l'aveugle. Je veux exprimer ici ma solidarité envers les salariés de la RATP qui vivent l'ouverture à la concurrence avec la boule au ventre.

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En tant qu'ancien cheminot de la SNCF, j'ai vécu l'angoisse qu'elle génère chez les travailleurs attachés au service public, contrairement à vous. Des femmes et des hommes qui travaillent en trois-huit, dimanches et jours fériés, méritent mieux que d'être la variable d'ajustement de votre projet mortifère de casse du service public.

Eau, énergie, transport, santé : partout en Europe, l'ouverture à la concurrence conduit toujours aux mêmes résultats. Le triptyque ne varie pas : casse des conditions de travail, destruction du service rendu aux usagers et hausse des tarifs. Pour commettre cette nouvelle forfaiture, vous retrouvez votre meilleur allié, le Rassemblement national. Dans la rue, en commission, en séance, l'arc réactionnaire s'affiche et marche main dans la main.

Exclamations sur les bancs des groupes RE et RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'examen du texte en commission en a fourni la preuve : vous avez tout détruit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ensemble vous organisez la casse du service public de la RATP. Fidèle à son attachement à ce dernier, la France insoumise soutiendra la motion de rejet et votera contre le texte.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le groupe Les Républicains votera bien entendu contre la motion de rejet.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La proposition de loi a pour objet d'aménager, pour les personnels comme pour les usagers, une ouverture à la concurrence progressive du réseau de bus parisien à compter de 2024, afin qu'elle se déroule dans de bonnes conditions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre délégué, vous nous avez dit qu'il ne s'agissait pas de cela !

Sourires sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame Sebaihi, vous avez parlé d'une privatisation.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Or, lorsqu'il y a privatisation – je ne vais pas vous l'apprendre, mais je vais tout de même le rappeler –,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui, faites donc de la pédagogie : cela nous manquait !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…l'État perd le contrôle direct d'une société au profit du secteur privé. En l'espèce, Île-de-France Mobilités garde la main. Il s'agit d'une délégation de service public et non d'une privatisation, comme vous voulez le faire accroire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par ailleurs, vous amalgamez tout, si bien qu'au bout de dix ou douze minutes, on est obligé de constater que nous n'avons pas – fort heureusement ! – les mêmes idées…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et que nous ne partageons pas le même modèle de société.

Puisque vous avez évoqué la situation des salariés,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les salariés ne veulent pas de la privatisation et de l'ouverture à la concurrence !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…je rappelle que la proposition de loi a précisément pour objet d'apaiser leurs légitimes inquiétudes en leur apportant de solides garanties quant à un éventuel transfert.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur Portes, vous avez eu la parole. Daignez écouter notre collègue, s'il vous plaît.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci, madame la présidente.

En résumé, l'ouverture à la concurrence se fera de manière progressive, en prenant soin des salariés et dans le cadre, non pas d'une privatisation, mais d'une délégation de service public attribuée par Île-de-France Mobilités. C'est pourquoi le groupe Démocrate votera contre la motion de rejet préalable.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur le vote de la motion de rejet préalable, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Vincent Thiébaut.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaiterais apporter un certain nombre de rectifications.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Tout d'abord, il a été dit que c'était la fin du service public. Non : l'autorité organisatrice de la mobilité demeure la région Île-de-France. Il s'agit donc bien toujours d'un service public. En l'espèce, il s'agit de permettre le choix d'opérateurs.

Ensuite, depuis quand les salariés de la RATP sont-ils, comme vous le dites, des fonctionnaires ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Leur statut est le même depuis 1948 et ce n'est pas celui de fonctionnaire !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Enfin, il ne s'agit pas d'une privatisation : l'autorité organisatrice de la mobilité choisit son opérateur dans un souci d'efficacité du service public. La RATP n'est qu'un opérateur. Au demeurant, rien ne dit qu'elle ne le sera plus ; il se peut très bien qu'elle remporte l'appel d'offres.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n'est pas un appel d'offres. C'est une délégation de service public !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ne tirez pas sur l'ambulance avant qu'elle soit partie !

Dans votre motion de rejet, vous vous opposez à l'ouverture à la concurrence. Or, celle-ci est déjà actée : c'est le choix qu'a fait la région Île-de-France. Nous sommes là pour fixer les conditions dans lesquelles elle sera aménagée.

Du fait de ces différentes incohérences et parce que La France insoumise a un métro de retard,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

De nombreuses raisons m'incitent à voter pour la motion de rejet, mais je m'en tiendrai à trois arguments.

Premièrement, le rapporteur et le ministre délégué l'ont rappelé, la proposition de loi s'appuie sur la loi de 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires, qui s'inscrit elle-même dans le cadre fixé par un règlement européen. Toutefois, cette loi laisse aux autorités organisatrices de la mobilité la possibilité de choisir entre une ouverture à la concurrence ou une régie publique régionale. Or l'hypothèse d'une telle régie n'a jamais été sérieusement étudiée – ni même étudiée tout court – s'agissant de la région Île-de-France. C'est tout de même bien dommage !

Deuxièmement, l'ouverture à la concurrence a débuté dès 2019 pour une partie du réseau, le réseau Optile – Organisation professionnelle des transports d'Île-de-France. Il aurait donc été bon, avant d'aller plus loin, d'évaluer les résultats de cette ouverture à la concurrence, dont on sait qu'elle a, pour une part, créé beaucoup de dysfonctionnements et provoqué de nombreuses catastrophes.

Enfin, se pose un problème démocratique. Du point de vue de la démocratie sociale, d'abord, tous les syndicats, y compris ceux qui avaient émis un avis plutôt favorable, sont aujourd'hui opposés à l'ouverture à la concurrence du réseau de bus.

Du point de vue de la démocratie tout court, ensuite, je rappelle, d'une part, que cette affaire, qui concernera le quotidien de millions de Franciliens, n'a jamais fait l'objet d'un débat public et, d'autre part, que, lors des dernières élections régionales, la candidate qui a été élue présidente de la région n'a pas évoqué cette question pendant la campagne et ne l'avait pas inscrite dans son programme.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le fait que Mme Pécresse n'ait ainsi pas de mandat pour réaliser cette mise en concurrence soulève un problème démocratique majeur. Au moment où notre pays traverse une crise démocratique, ce n'est pas raisonnable. J'avais donc proposé de renvoyer la question à 2028, c'est-à-dire après les prochaines élections régionales, afin que nous puissions au moins en discuter avec nos concitoyens.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le principe de l'ouverture à la concurrence de l'exploitation des lignes de bus a été décidé en 2009 dans la loi dite ORTF. Le débat, légitime, a donc eu lieu et la question a été tranchée. Il s'agit, non plus de savoir s'il faut ou non ouvrir ce réseau à la concurrence, mais de s'assurer que cette ouverture se fera dans de bonnes conditions.

Vous comprendrez donc que nous ne puissions pas voter la motion de rejet préalable. Celle-ci ne porte pas sur l'objet du texte ; elle vise à dévoyer le débat vers un autre enjeu. Nous estimons, pour notre part, non seulement que la proposition de loi est nécessaire pour garantir le bon déroulement des Jeux olympiques, mais aussi, et surtout, qu'elle contribuera à garantir de meilleures conditions aux salariés concernés par la mise en concurrence. Dès lors, nous souhaitons, en partisans d'une approche pragmatique, que le débat se poursuive.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur la forme, on a beaucoup entendu les mots « démocratie », « discussion » et « débat ». Or vous avez défendu une motion de rejet préalable, qui porte très bien son nom : rejeter, c'est tout ce que vous savez faire…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…qui plus est préalablement à la discussion, qui permettrait pourtant de prendre acte de nos désaccords.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par ailleurs, cette motion de rejet préalable vise à remettre en cause – c'est assez grave – une initiative parlementaire qui avait pris, dans un premier temps, la forme d'une proposition de loi du parti communiste – elle avait été déposée par Stéphane Peu – et qui nous revient à présent sous la forme d'une proposition de loi du Sénat. Vouloir rejeter préalablement un tel texte, c'est dire le peu de considération que vous avez pour la chambre haute.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sur le fond, je ne reviendrai pas sur toutes les incohérences que nous avons entendues lors de la présentation de la motion. Comme le ministre délégué et le rapporteur se sont efforcés de vous l'expliquer, ce texte ne porte pas sur l'ouverture à la concurrence, puisque celle-ci a déjà été actée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'en veux pour preuve que si la motion de rejet préalable était adoptée, l'ouverture à la concurrence interviendrait le 31 décembre 2024 dans des conditions qui ne seraient satisfaisantes ni pour les salariés de la RATP, ni pour le pays. Je vous invite donc, chers collègues de gauche, à ne pas voter pour la motion de rejet préalable !

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le rejet de la proposition de loi imposerait l'ouverture à la concurrence du réseau de bus francilien de la RATP dès le 31 décembre 2024. Or c'est impossible, comme l'indiquent Jean-Paul Bailly et Jean Grosset dans le rapport qu'ils ont remis en juin dernier. Il s'agit ici non pas de refaire le débat sur l'ouverture à la concurrence, mais de reporter celle-ci.

Le Rassemblement national s'est toujours opposé à l'ouverture à la concurrence des bus franciliens de la RATP en raison de la complexité du réseau. Nous considérons néanmoins que cette proposition de loi peut être adoptée, car elle tend à reporter l'échéance. Notre groupe prendra ses responsabilités sur ce texte. En attendant, nous voterons contre la motion de rejet préalable.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, vous n'avez pas un train de retard, vous avez un monde de retard !

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Car enfin, la mythologie de la concurrence libre et non faussée nous évoque Madelin, Thatcher…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Elle date des années 1980, et des années 1990 peut-être. En tout cas, cela fait bien longtemps que les Français ont compris qu'elle ne menait nulle part. Sur cette question comme sur bien d'autres, monsieur le ministre, vous êtes d'une ringardise absolue !

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES et GDR – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mme Luquet le disait tout à l'heure, nous ne sommes, en définitive, d'accord sur rien. C'est vrai ! Nous, nous aimons les services publics, nous les adorons, nous les chérissons …

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…parce qu'ils sont le patrimoine de ceux qui n'ont rien, parce qu'ils incarnent la devise républicaine Liberté, Égalité, Fraternité dans le quotidien de nos concitoyennes et de nos concitoyens, et parce qu'ils sont un instrument puissant pour relever les grands défis de l'avenir, notamment celui du transport.

Comment le marché privé, la loi de la concurrence et du profit à court terme pourraient-ils nous sauver du péril climatique ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce sont les services publics, la démocratie, la participation citoyenne qui nous en préserveront !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je veux dire, à cette occasion, notre attachement à ceux qui font vivre le service public : à ces agents maltraités, à ces agents exploités !

Protestations sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ils sont, chaque jour, bien plus dignes du service public que Mme Pécresse ou vous-mêmes ,

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

qui l'abîmez, notamment en le privant des investissements nécessaires à son bon fonctionnement.

Vous, vous bradez tout. Nous, nous voulons défendre le service public et nous assumons, dans ce domaine comme dans d'autres, une véritable divergence d'analyse avec vous. Vous êtes le monde d'hier ; nous sommes, nous, le monde de demain !

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES. – Exclamations et sourires sur les bancs des groupes RE, RN, LR et Dem.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, vous voir, avec ce texte, voler à la rescousse de l'échec de la révolution des transports défendue par Valérie Pécresse est quelque peu affligeant. En effet, les Franciliens – nous le sommes tous, ici, quelques jours par semaine – peuvent mesurer le fiasco qu'est l'organisation des transports en Île-de-France, qu'ils soient ferrés ou routiers. Or ce fiasco procède de choix politiques faits par Valérie Pécresse.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Et la gauche n'a aucune responsabilité, bien entendu !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Stéphane Peu a rappelé, à juste titre, que rien n'obligeait à s'engager dans la voie de l'ouverture à la concurrence. Vous invoquerez, comme à chaque fois, la réglementation européenne. En l'espèce, elle ne l'imposait en aucun cas. La régie publique régionale aurait permis de faire le contraire de ce à quoi nous assistons actuellement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ouverture à la concurrence de la RATP sera problématique : l'expérience nous l'apprend. Ainsi, en grande couronne, l'ouverture à la concurrence du réseau de bus est intervenue dès 2021. Or demandez ce qu'il en est aux habitants de Massy et Palaiseau, et à tous ceux qui fréquentent le pôle d'excellence de la recherche situé sur le plateau de Saclay. Ils vous diront à quel point la logique d'allotissement qui a été privilégiée est désastreuse : elle est à l'origine de problèmes de coordination, de maintenance et de continuité de service.

Vous tentez de gagner du temps pour conforter le deal politique que vous avez conclu avec Valérie Pécresse…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et remédier financièrement aux difficultés qu'elle a, d'une certaine manière, elle-même organisées dans Île-de-France Mobilités.

Mme Sophia Chikirou s'exclame. – Protestations sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous étions en droit d'attendre que vous demandiez, au contraire, une remise à plat, au nom du service public qu'a défendu avec brio Benjamin Lucas. Car les transports publics,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…comme la santé et l'éducation, doivent être un bien commun !

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Monsieur Guedj, j'aurais été bouleversé par votre plaidoyer s'il n'avait pas été aussi contraire à tout ce que vous avez fait ces dernières années. C'est surréaliste !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pardonnez-moi, monsieur le ministre délégué : j'ai commis une erreur. Vous ne pouvez pas vous exprimer pendant les explications de vote. Vous prendrez la parole plus tard.

Sourires.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 177

Nombre de suffrages exprimés 177

Majorité absolue 89

Pour l'adoption 41

Contre 136

La motion de rejet préalable n'est pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous pouvez maintenant vous exprimer si vous le souhaitez, monsieur le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Je me réserve pour plus tard.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Farida Amrani.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Deux cent cinquante élus franciliens ont signé en janvier dernier un appel pour dénoncer la privatisation de notre service public de transports, la RATP. Pourtant, aujourd'hui, nous y sommes. Sans aucune consultation, ni des usagers, ni des élus, ni des salariés,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…Mme Pécresse, présidente d'Île-de-France Mobilités, a entériné l'ouverture à la concurrence des lignes de bus aujourd'hui exploitées par la RATP. Et tout cela avec le soutien du Gouvernement qui a décidé, par facilité, de se reposer sur une initiative parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui, ce projet de loi, déguisé en proposition de loi, est bel et bien téléguidé par Île-de-France Mobilités.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Collègues, vous vous apprêtez tout simplement à démanteler un réseau historique pour le servir sur un plateau d'argent au secteur privé. C'est l'histoire de la région parisienne, le service public, notre bien commun que vous continuez à détruire.

Ce texte étant examiné en procédure accélérée, sans étude d'impact, sans avis du Conseil d'État, vous passez de nouveau en force.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'absence de données et d'analyses vous arrange bien, alors que nous nous dirigeons droit vers une précarisation salariale.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pourtant, contrairement à ce que vous dites, les conséquences pour les zones déjà concernées sont documentées pour la grande couronne.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Elles montrent la dégradation des conditions de travail des salariés et la baisse de la qualité de l'offre pour les usagers.

Le règlement européen n'oblige pas la privatisation et propose plusieurs solutions alternatives, notamment celle de la régie publique.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Certaines villes, comme Marseille, ont fait le choix du public – comme quoi un autre modèle est possible.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ben voyons, ça marche vachement bien, à Marseille, demandez aux habitants des 2e et 3e arrondissements !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En décidant le report de l'ouverture à la concurrence, vous vous contentez de différer le problème sans le régler. Nous ne sommes pas dupes : le duo Pécresse-Macron souhaite protéger son image durant les JO et veut s'éviter un énième conflit social, voilà la vérité !

Mais il y a aussi un autre petit calcul politique. L'agenda des élections à venir ne peut pas être une boussole pour démanteler les services publics.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'intérêt de quelques-uns ne peut pas primer l'intérêt général. Regardez donc le résultat de vos politiques libérales : le choix de la concurrence va dégrader les conditions de travail de tous les agents, avec un lourd impact social. J'en veux pour preuve que le maintien des salaires des agents n'est pas garanti ;…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…leurs contrats de travail vont basculer vers le droit privé et, en cas de refus, ils pourront être licenciés pour motif économique.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Alors que la profession rencontre des difficultés pour embaucher, l'ouverture à la concurrence laisse craindre le pire. Les offres les moins-disantes socialement seront favorisées, les primes seront supprimées, les amplitudes horaires seront élargies, et le nombre de jours de repos diminuera.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les organisations syndicales sont unanimes : c'est la logique comptable qui a tout détruit.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Huit heures d'affilée de travail sans pause, l'équivalent d'un Paris-Marseille, des cadences infernales, des contrôles accrus ont fait fuir les conducteurs même les plus anciens et les plus aguerris. Cette pénurie a donc été organisée par le politique et répond aux logiques d'un marché malade.

M. Louis Boyard applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'offre de services, réduite pendant la crise sanitaire, n'a jamais été rétablie alors que le prix de l'abonnement, lui, ne cesse d'augmenter. Plus cher, plus de galères, plus de discriminations territoriales : c'est ça, monsieur le ministre délégué, la recette que vous avez décidé de servir aux usagers. Bonjour l'indigestion !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avec ce texte, les droits sociaux des salariés seront sacrifiés sur l'autel de la rentabilité. La matrice libérale a fait de l'usager un client…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et de l'intérêt général un mot vain. L'urgence climatique et l'urgence sociale nécessitent plus de services publics et moins d'intérêts privés. Il existe une autre voie qui vous est inconnue, monsieur le ministre délégué, chers collègues, celle du renforcement des services publics.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans un peu moins d'un an, la France et Paris accueilleront les Jeux olympiques et paralympiques, au cours desquels la fréquentation dans les transports publics bondira de 20 % en plein mois d'août, au moment où les conducteurs de bus prennent leurs congés. Le défi pour la Régie autonome des transports parisiens est considérable pour améliorer la qualité et la continuité du service.

Dans ce contexte, basculer en une seule fois l'ensemble des treize lots du réseau de bus parisiens, de ses 19 000 agents, 308 lignes et 4 500 véhicules vers un marché concurrentiel, alors que les salariés auraient pris connaissance des conditions de leur transfert pendant les JO, était un pari osé, exposant à des risques sérieux pour la continuité du service.

C'est pourquoi nous nous félicitons de cette proposition de loi sénatoriale de notre ami Vincent Capo-Canellas, qui permettra d'échelonner sur deux ans le calendrier d'ouverture à la concurrence des bus de la RATP, laissant à Île-de-France Mobilités le soin d'ajuster le rythme d'attribution des lots d'ici au 31 décembre 2026, dans des délais conformes à la réglementation européenne. Le présent texte reprend d'ailleurs les préconisations de la mission menée par Jean-Paul Bailly et Jean Grosset, qui visaient à sécuriser et à élargir le bénéfice social de cette évolution à tous les salariés, comblant ainsi certains angles morts de la loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Se pose dès lors la question suivante : comment les futurs opérateurs réussiront-ils à faire mieux que la RATP s'ils doivent hériter des mêmes contraintes salariales, sans pour autant bénéficier du confort du monopole ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On le voit bien avec ce texte : la principale inquiétude qui taraude le Gouvernement et l'autorité organisatrice, c'est la pénurie de personnel et les difficultés historiques de recrutement et d'attractivité du métier de conducteur depuis la sortie du covid. Sinon, pourquoi le texte proposerait-il de rattacher les personnels par centre bus et non plus ligne par ligne, sans quoi 3 000 à 4 000 salariés auraient à changer de lieu de prise de poste, ce qui pourrait les amener à démissionner ? Sinon, pourquoi le texte inventerait-il une procédure de volontariat permettant de verser les salariés d'un centre à un autre afin de pallier des sous-effectifs éventuels, alors que le problème de fond, c'est tout simplement le manque d'effectifs ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sinon, pourquoi le texte prévoirait-il une limitation de l'ampleur de travail journalière à onze heures au lieu de treize, limitation sans laquelle un besoin immédiat de conducteurs supplémentaires pour la seule RATP serait apparu ?

Ce sont autant d'apports bienvenus, qui ne doivent toutefois pas masquer le défi immense d'attractivité auquel est confronté le secteur des transports collectifs. Ce souci avait d'ailleurs conduit le texte initial à accorder un délai supplémentaire à l'Autorité de régulation des transports pour trancher les différends qui naîtront entre la RATP et IDFM concernant le transfert de personnels. L'ART ne se considérant pas assez armée en moyens ni en compétences techniques, cette attribution lui a finalement été retirée grâce à un amendement du groupe Les Républicains, adopté avec le soutien bienveillant de M. le rapporteur que je remercie ici.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes donc bien au-delà d'un simple problème de grève pendant les Jeux olympiques. Ces difficultés de recrutement traduisent les difficultés croissantes d'accès au logement des salariés, en particulier dans le centre-ville de Paris. Plus globalement, cela en dit long sur l'état du travail dans le pays, qu'il s'agisse du pouvoir d'achat pour les bas salaires, du déficit de formation dans les métiers techniques, et de l'attractivité insuffisante du travail par rapport à l'inactivité.

Monsieur le ministre délégué, monsieur le rapporteur, les dispositions que nous allons examiner sont sans doute utiles, mais aideront-elles à faire oublier le retard des travaux du Grand Paris Express qui ne seront pas terminés lors des JO ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Soulageront-elles le budget de l'autorité organisatrice qui, malgré l'accord trouvé récemment avec le Gouvernement sur le versement mobilité, devra supporter le transfert de milliers de kilomètres de lignes nouvelles dans un contexte général d'assèchement de ses recettes ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On constate qu'on a affaire à un spécialiste de la question !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour finir, ces dispositions facilitant la mise en concurrence des lignes de bus mettront-elles un terme à la multiplication des incidents, sachant le matériel de la RATP en souffrance et les axes nord-sud du métro et du RER déjà en grande fragilité ? Là résident les véritables menaces pour le bon déroulement des Jeux olympiques, car si rien n'évolue, ce sont des millions de visiteurs du monde entier qui vivront ce que subissent tous les jours les malheureux usagers des transports parisiens.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On sent bien là quelqu'un qui prend les transports en commun !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous l'avez compris, de nombreuses questions de continuité du service public restent en suspens, mais ce texte facilitera la transition vers la concurrence des lignes de bus de la RATP ; c'est pourquoi le groupe Les Républicains le votera.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes en 1662, le 18 mars, porte Saint-Antoine, à Paris.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quelques voyageurs impatients attendent un carrosse qui doit les transporter jusqu'au jardin du Luxembourg. C'est le premier des sept véhicules qui se succéderont à intervalles réguliers, de six heures à vingt heures, sur cette toute première ligne de carrosse public. Cinq routes seront progressivement ouvertes pour sillonner la capitale vers ses lieux les plus emblématiques, donnant naissance au premier réseau d'omnibus parisiens. Cet ancêtre du réseau d'autobus, nous le devons à l'esprit visionnaire de Blaise Pascal, qui inventa les premiers transports en commun urbains au monde, prémisses de ceux d'aujourd'hui.

Trois cent soixante ans plus tard, nous avons…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…changé d'échelle : le réseau francilien compte plus de 300 lignes de bus, 19 000 salariés, et plusieurs millions de voyageurs transportés chaque jour. Par sa taille et par la place centrale qu'il occupe dans la mobilité de nos concitoyens, c'est peu de dire que l'ouverture à la concurrence de ce réseau de bus est un véritable défi, aux enjeux non négligeables. Alors que l'ambition initiale était que les premières attributions soient réalisées dès le mois de juin 2024, année des Jeux olympiques et paralympiques, cette proposition de loi doit nous permettre d'allonger raisonnablement les délais afin de mieux encadrer et de préparer cette transition.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au groupe Démocrate, nous saluons cette volonté d'adaptation qui, compte tenu du contexte, nous apparaît la plus rationnelle. Nous sommes également convaincus que cette ouverture à la concurrence est nécessaire pour apporter une meilleure qualité de service. Il faut cependant qu'elle s'opère dans le respect des usagers mais aussi, et surtout, dans le respect des salariés concernés qui s'investissent au quotidien bien souvent avec dévouement et passion dans leur tâche.

Nous avons entendu leurs inquiétudes légitimes ; c'est bien l'ambition de cette proposition de loi que d'y répondre en apportant de solides garanties. Si plusieurs mesures protectrices ont déjà été rappelées, il est bon d'insister à nouveau sur trois d'entre elles. Tout d'abord, le transfert de l'ensemble des contrats de travail des salariés se fera dorénavant au niveau des centres bus et non plus des lignes, véritable avancée qui sécurise géographiquement chaque agent. Ensuite, le bénéfice du maintien des garanties sociales sera étendu à tous les salariés transférés, et le délai d'annonce du transfert sera allongé – ce sera un gage de sécurité. Enfin, l'ouverture à la concurrence du réseau sera échelonnée sur deux ans, jusqu'au 31 décembre 2026, ce qui donne une souplesse bienvenue pour assurer la continuité du service.

Plus largement, je tiens à réaffirmer de manière claire qu'il ne s'agit pas d'une privatisation pure et simple mais d'une délégation de service public, puisque la région Île-de-France, en sa qualité d'autorité organisatrice, conserve la main avec Île-de-France Mobilités. C'est une précision importante.

N'écartons pas non plus trop vite la RATP, qui a déjà un savoir-faire précieux dans les appels d'offres à travers sa filiale RATP Dev, présente dans seize pays, sur quatre continents. Si nous nous réjouissons d'exporter notre savoir-faire, acceptons également d'être défiés sur nos propres offres de mobilité quand il s'agit d'offrir de meilleures conditions de déplacement à nos compatriotes. L'ouverture à la concurrence doit être l'occasion de vivifier l'offre en favorisant l'innovation au service des voyageurs franciliens. C'est avec un esprit pragmatique et de responsabilité que le groupe Démocrate soutient cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. le rapporteur applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'espère que tout le monde se souvient que la décision a été prise en 2013, sous la présidence de François Hollande.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En octobre 2015, pendant les élections régionales, le document de campagne de Valérie Pécresse pour remporter la présidence de la région Île-de-France, qu'on identifiait avec le hashtag #JaiChoisiValerie, avait pour slogan accrocheur : « J'engagerai la révolution des transports ».

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mme Pécresse a été élue, puis même réélue, et huit ans sont passés. Pourtant, la révolution des transports se fait toujours attendre. Qu'observe-t-on aujourd'hui ? Pas une révolution, mais une course à la privatisation. Cela a commencé par la privatisation du réseau de bus de la grande couronne, le réseau Optile. En 2021, les 1 500 lignes de bus qui desservaient 90 % des villes de la grande couronne ont été privatisées. Le résultat est clair : incidents d'exploitation, plaintes des usagers et dégradations des conditions de travail des conducteurs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Comme on pouvait s'y attendre, la privatisation du réseau n'est pas une solution magique pour résoudre les difficultés rencontrées par le service public. Pour rappel, et c'est important de le souligner, rien n'obligeait la droite régionale à privatiser le réseau de transports en commun francilien.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pour répondre à la demande de l'Union européenne, deux choix se présentaient : soit la mise en place d'une régie publique régionale, soit l'ouverture à la concurrence en vue d'une privatisation des réseaux.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sans débat public, la présidente du conseil régional s'est ruée sur la deuxième option, « pour améliorer le service », selon ses propres mots. Alors que nous avons sous les yeux l'exemple de la grande couronne, qui est loin d'être probant, il est encore temps de faire marche arrière. Ne privatisons pas le reste du réseau !

Les difficultés actuelles ne seront pas résolues par la privatisation. Les fortes disparités sur le réseau de bus sont directement liées au manque de conducteurs, dû à la faible attractivité du métier. Pensez-vous sérieusement que le basculement de ces conducteurs vers des entreprises privées – ce qui leur fera sans aucun doute perdre au moins une partie des avancées sociales obtenues jusque-là – améliorera la situation ? Au contraire. Il revient à la force publique de prendre les choses en main ; il revient à la région et à l'État de mettre en place une réelle politique publique d'amélioration du réseau ,

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

en investissant massivement dans les lignes et les infrastructures, et en assurant une meilleure attractivité des métiers.

Nous discutions déjà de cette thématique il y a six mois, lors de l'examen de la proposition de loi de notre collègue Stéphane Peu, qui s'avérait bien plus ambitieuse que celle que nous examinons aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est faux, elle ne prévoyait pas tous les accompagnements !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Son objectif était clair : surseoir à l'ouverture à la concurrence d'ici à 2026. À l'époque, nous vous exhortions à attendre, à prendre le temps de la réflexion pour mesurer ce que nous étions en train de faire.

La présente proposition de loi, déposée le 29 septembre dernier, bénéficie du soutien du Gouvernement et constitue aussi une réponse téléguidée de la présidente d'IDFM, Valérie Pécresse,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…après le retrait de la proposition de loi communiste de Stéphane Peu.

M. Christophe Marion s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'approche politique du présent texte est finalement simple : étaler l'ouverture à la concurrence entre le 31 décembre 2024 et le 31 décembre 2026. Cela montre l'impréparation de la région Île-de-France pour mener à bien cette opération. L'objectif clairement affiché est d'enjamber les Jeux olympiques et paralympiques pour éviter un mouvement social d'ampleur durant cette période.

Le groupe Socialistes et apparentés a déposé un certain nombre d'amendements visant à protéger au maximum les salariés de la RATP et leur sac à dos social. En l'état, le texte semble surtout chercher à vider ce sac ,

M. Pierre Cazeneuve proteste

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

alors que la route s'annonce longue et semée d'embûches pour les salariés, qui seront transférés vers de nouveaux opérateurs et de nouveaux entrepôts. Bref, le texte ne va pas dans le bon sens.

Nous sommes opposés à cette ouverture à la concurrence et c'est pourquoi nous voterons contre la proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le principe d'ouverture à la concurrence des services publics de transport de voyageurs a été acté en 2007 par un règlement européen…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n'est pas une mise en concurrence, c'est un partage du gâteau !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…transcrit par la France en 2009 avec la loi ORTF. La LOM avait d'ailleurs précisé les modalités pratiques de transfert des salariés et les garanties sociales afférentes.

C'est dans cette lignée que nous examinons le présent texte qui, je le rappelle, n'a pas vocation à définir si l'ouverture à la concurrence doit être effectuée ou non – cette décision est du ressort de l'autorité organisatrice des mobilités d'Île-de-France, dont nous devrons respecter le choix au nom de l'autonomie des collectivités territoriales. Le texte ne vise pas non plus à mettre fin à un service public, puisque la RATP intervient toujours comme opérateur, et que le service reste à la charge de la région Île-de-France. Cette dernière a fait le choix d'ouvrir le réseau de bus à la concurrence et de challenger la RATP dans ses opérations de transport. Je rappellerai que l'ouverture à la concurrence a permis à la RATP d'être présente dans seize pays répartis sur quatre continents. Elle a aussi permis aussi à EDF d'ouvrir ses activités hors de notre pays et à Orange de se développer à l'international.

L'ouverture à la concurrence est un défi technique et social auquel entend répondre cette proposition de loi. Elle concerne 18 000 salariés, 308 lignes et plus de 4 500 bus, qui seront potentiellement transférés. Il s'agit aussi de lancer un challenge à la RATP, qui a toutes les capacités pour répondre favorablement à cette ouverture à la concurrence.

Alors même que l'échéance est actuellement fixée au 1er janvier 2025, les conditions matérielles, économiques et sociales ne sont toujours pas réunies pour assurer une ouverture à la concurrence réussie. En premier lieu, aucun des douze lots n'a été attribué, et plusieurs enjeux majeurs restent en suspens, tels que la coordination de l'offre, la gestion des incidents, l'information des voyageurs ou encore la billettique.

En second lieu, les modalités de transfert des personnels de la RATP sont toujours incertaines, suscitant l'inquiétude des syndicats et du personnel lui-même. La présente proposition de loi entend donc opérer une ouverture à la concurrence qui sécurise à la fois les salariés et le service public, en plus de garantir une qualité d'information et de réalisation.

Avec ses huit articles, le texte permettra de fluidifier l'ouverture effective à la concurrence, choix de l'autorité organisatrice, IDFM. Il prévoit des mesures nécessaires au bon déroulement de cette opération, en apportant des garanties concernant la continuité et la qualité du service offert aux usagers du réseau ; il veille également à l'acceptabilité du projet, en préservant les garanties sociales des travailleurs du réseau de bus francilien.

L'article 1er répond aux inquiétudes quant à une mobilité géographique obligatoire des salariés : le transfert s'opérera par centre de bus, et les conducteurs pourront recourir à un dispositif de volontariat. Par ailleurs, l'article 4 donne à l'autorité organisatrice des mobilités d'Île-de-France la possibilité d'aménager le calendrier d'ouverture à la concurrence sur une durée maximale de deux ans. Cet échelonnement paraît indispensable, d'une part parce qu'il permettra de fluidifier le processus d'attribution des lots, afin d'éviter une désorganisation des services de transport public, d'autre part parce qu'il répondra au défi inédit que constituent les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 en matière de transports.

Nous soutiendrons donc cette proposition de loi,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…comme nous l'avons défendue en commission, pour garantir la continuité du service public, assurer aux salariés un transfert sécurisé, réalisé dans de bonnes conditions, et veiller à l'équité concurrentielle. Voilà les objectifs de ce texte important, que les députés du groupe Horizons et apparentés soutiendront avec force.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – M. le rapporteur applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Une fois n'est pas coutume, je serai extrêmement bref, étant donné que ma collègue Sabrina Sebaihi, lorsqu'elle a défendu la motion de rejet préalable, a exposé au nom du groupe Écologiste – NUPES toutes les bonnes raisons qui nous conduisent à nous opposer à ce texte.

Pour ma part, je ne remontrai pas jusqu'au XVIIe siècle, comme l'a fait Mme Luquet.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je pense à la France de 2023, et non plus à celle de 2013, monsieur Millienne !

Monsieur le ministre délégué, en cette année 2023, et singulièrement depuis la crise du covid, nous mesurons l'importance des services publics et la nécessité de les défendre envers et contre tous les dogmes qui consistent à forcer sans cesse l'ouverture à la concurrence et la privatisation.

J'entends certains collègues nous expliquer que ce texte n'anticipe aucune privatisation. Puisqu'on nous invite à remonter au XVIIe siècle, regardons l'histoire : les ouvertures à la concurrence, pour l'essentiel, si ce n'est dans leur quasi-totalité, sont un préalable à la privatisation ; elles permettent au marché vorace de venir s'emparer des services publics qui, je le rappelle, sont le bien de tous nos concitoyens, le patrimoine commun de la République – le patrimoine de celles et ceux qui n'ont rien d'autre pour vivre au quotidien.

La mise en concurrence et la privatisation des transports fonctionnent-elles, notamment chez nos voisins européens ? Vous qui avez été chargé des affaires européennes sous le précédent quinquennat, monsieur le ministre délégué, vous possédez une fine connaissance des sujets communautaires. Vous savez donc que la mise en concurrence ne garantit pas que les trains arrivent plus tôt, ni même à l'heure, et n'assure pas aux agents d'être bien traités. Elle n'offre pas un confort particulier ni n'améliore la qualité du service ; elle ne garantit même pas des conditions de sécurité satisfaisantes, alors qu'il s'agit d'un des éléments les plus importants.

Voilà pourquoi je vous invite une fois de plus à entrer dans le nouveau monde, monsieur le ministre délégué. Ne restez pas figé dans l'ancien monde : vous n'êtes pas Alain Madelin ,

M. le ministre délégué sourit

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

et vous venez de la gauche ! Ne soyez pas une incarnation de ces fantômes du passé – M. Madelin, Mme Thatcher ou d'autres – qui étaient obsédés par l'ouverture à la concurrence et la privatisation. Choisissez avec nous le monde de demain, celui des services publics, qui seront notre meilleure arme pour répondre aux urgences du quotidien de nos concitoyens.

L'urgence pour les transports franciliens, c'est de baisser le prix excessif du passe Navigo, qui pèse lourdement sur les ménages les plus précaires, sur cette fameuse France du travail dont vous exaltez tant la valeur. Aidez donc les travailleurs et les travailleuses franciliens à prendre les transports dans de bonnes conditions ! L'urgence nous impose également de réfléchir aux conditions de confort des transports du quotidien et à leur régularité, ce qui nécessite des investissements.

Les transports et le service public qui y est attaché seront l'instrument à même de répondre à la crise écologique qui se profile. Encore une fois, sur ce sujet, je préfère m'en remettre à la planification écologique…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…et à l'intelligence démocratique du Parlement et des citoyens, plutôt qu'à la loi du marché, qui ne vise qu'à faire des profits à court terme – et c'est bien sa vocation. Quand on doit répondre à des actionnaires plutôt qu'à des usagers, on privilégie forcément le profit plutôt que l'intérêt général. Si nous siégeons ici, c'est bien en tant que défenseurs de l'intérêt général – et j'aimerais bien que vous en fassiez autant –, et non comme défenseurs du profit de quelques-uns.

Tout à l'heure, j'entendais notre collègue Pierre Cazeneuve dire que nous étions opposés à ce texte par principe. Oui, c'est bien par principe que nous nous opposons à l'ouverture à la concurrence et à la privatisation !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est beau d'avoir des principes, chers collègues – et je sais que vous en avez aussi, monsieur Cazeneuve ! Notre principe, c'est de défendre les services publics, qui sont la condition d'application de notre devise républicaine Liberté, Égalité, Fraternité.

Je ne reviens pas sur l'ensemble des arguments qui ont été évoqués avant moi ; j'espère seulement que vous entendrez raison et que vous renoncerez à vos projets funestes. Je ne crois pas que vous ayez pour vocation de satisfaire les désirs de Mme Pécresse, dont le score à l'élection présidentielle témoigne d'ailleurs de l'importance qu'elle a dans le pays.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je peux effectivement en parler, des mauvais scores à l'élection présidentielle – je suis même expert en la matière, ce qui me donne la modestie suffisante pour tenir ce genre de propos !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je crois que vous gagneriez à revenir à la raison. Aussi, je vous invite à épouser la volonté des Franciliennes et des Franciliens, celle de défendre le service public des transports et les agents de la RATP, auxquels je veux rendre hommage. Car bien qu'ils accomplissent un travail remarquable, ils seront extrêmement malmenés par cette ouverture à la concurrence et par ce découpage absurde en douze lots, qui n'est absolument pas pragmatique et qu'il faut revoir.

Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il y a quelques mois, j'avais présenté au nom de mon groupe une proposition de loi qui visait à surseoir à l'ouverture à la concurrence du réseau de bus de la RATP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Bien que nous soyons fermement opposés à cette ouverture à la concurrence, nous avions alors cherché un compromis avec la majorité pour reporter l'échéance au-delà de 2028.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous avions proposé ce report de quatre ans en raison du calendrier électoral car il nous semblait qu'une question aussi sensible, qui concerne le quotidien de millions de Franciliens, ne pouvait être tranchée par la seule présidente de la région, qui n'a reçu aucun mandat en ce sens, et échapper ainsi au débat démocratique. Nous avions dès lors proposé que le délai de quatre ans serve à étudier une autre possibilité offerte par la loi : le maintien d'un monopole exploité par la régie publique régionale.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Hélas, notre texte ayant été vidé de sa substance en commission, nous l'avons retiré. Et voici que la droite sénatoriale nous propose, forte de l'appui du Gouvernement, un texte rédigé sur mesure pour la présidente de région, Mme Pécresse. Il prévoit d'échelonner le calendrier d'ouverture à la concurrence du réseau de bus jusqu'à la fin de 2026, l'objectif étant de contourner l'obstacle des Jeux olympiques et paralympiques pour reporter de quelques mois le désordre que l'ouverture à la concurrence ne manquera pas d'engendrer, tout en fermant la porte au débat démocratique.

Face à cette fuite en avant, il est essentiel de débattre. Prenons l'exemple du réseau de bus qui circulent en grande couronne, le réseau Optile. Depuis son ouverture à la concurrence, on ne compte plus les dysfonctionnements qui contribuent à dégrader la qualité du service de transports collectifs dans de nombreux territoires : réduction de l'offre, retards, incidents d'exploitation, manque de régularité, augmentation du coût, grèves etc. Les usagers en sont les premières victimes. Nous avions proposé en commission de dresser le bilan de cette ouverture à la concurrence mais vous l'avez refusé. Pourtant, cette étude aurait mis en évidence la logique de moins-disant social qui gouverne le processus, l'insoutenabilité financière du modèle contractuel proposé par Île-de-France Mobilités, le coût faramineux de l'ouverture à la concurrence pour les finances de l'autorité organisatrice.

Vous ne voulez pas de ces études car vous craignez que n'apparaisse aux yeux de tous combien l'obstination de la présidente de région est déraisonnable et dangereuse. Tout montre que nous allons au fiasco, et que les premières victimes en seront les usagers et les agents de la RATP.

Dans Paris intra-muros et en petite couronne, le réseau de la RATP est un système multimodal où tout est interconnecté. On prend le bus, le métro, le tramway, éventuellement le RER, mais l'opérateur reste le même. Si certains éléments de ce système complexe sont ouverts à la concurrence, c'est tout le réseau qui perdra sa cohérence, au risque de dégrader encore davantage la qualité du service et d'imposer des tarifs inadaptés. D'autre part, nous le savons, 80 % des coûts d'une activité de service publique sont des coûts de personnel. Les éventuelles économies liées à l'ouverture à la concurrence ne pouvant être réalisées que sur ce poste, ce sont les agents qui paieront la note. Le sac à dos social promis risque fort de n'être qu'un modeste baluchon.

L'absence de garanties formelles en matière de droits sociaux, déjà manifeste dans les décrets publiés…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…pourrait se traduire par une aggravation du malaise social, une chute de l'attractivité de la profession, la multiplication des démissions et la dégradation du service.

Rien ne justifie l'ouverture à la concurrence de la RATP. Si la proposition de la droite sénatoriale ne nous surprend guère, nous comprenons moins que nul ne songe à interrompre ce processus délétère alors que d'autres solutions existent, en particulier la gestion intégrée du réseau en régie publique régionale. Nous déposerons des amendements mais, en l'état, nous voterons contre le texte.

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES et SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous examinons la proposition de loi relative à l'ouverture à la concurrence du réseau de bus franciliens de la RATP. Elle aura fait couler beaucoup d'encre, à la hauteur des enjeux qu'elle représente tant pour la région Île-de-France que pour l'image de notre pays lors des Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Bien que les députés du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires puissent paraître éloignés de ces préoccupations très franciliennes, il n'en demeure pas moins qu'au bout du compte, la qualité des transports franciliens à l'été 2024 concernera, au-delà des Franciliens, tous les visiteurs nationaux et internationaux que Paris accueillera.

Si certains ont saisi l'occasion de cette proposition de loi pour rouvrir le débat sur le bien-fondé, ou non, de l'ouverture à la concurrence, il nous semble plus raisonnable de considérer qu'il est désormais tranché et qu'il nous faut nous concentrer sur la manière de réaliser cette ouverture dans les meilleures conditions.

Or le contexte n'est pas des plus apaisés. Le réseau de transports franciliens subit encore les contrecoups de la crise sanitaire. Le nombre de voyageurs ne cesse de se réduire, les effectifs fondent, les difficultés financières s'accumulent. Les désagréments pour les usagers s'en trouvent multipliés : retards, pannes, annulations. Et il est de plus en plus compliqué de recruter.

L'ouverture à la concurrence sera donc délicate, d'autant plus qu'elle charrie avec elle son lot d'inquiétudes, en particulier pour ce qui est du sac à dos social : absence de garanties en cas de reprise en régie ou quasi-régie, exclusion de certains des salariés des centres-bus etc.

Les conditions ne nous semblent donc pas réunies pour que l'organisation des transports soit optimale lorsque les Jeux olympiques ouvriront. Or ils sont la promesse de 10 millions de voyageurs supplémentaires ! Il sera donc indispensable de renforcer les effectifs, d'assurer des conditions de sécurité maximales pour que les Franciliens ne soient pas pénalisés et puissent encore emprunter les transports en commun, ne serait-ce que pour aller travailler !

N'imaginons pas que tous les Parisiens fuiront Paris à l'été prochain ! Autant dire que l'heure ne sera pas aux incidents, aux quais bondés, aux mouvements sociaux, sous peine de créer un désordre particulièrement dangereux pour l'ensemble des usagers ! Dès lors, il semble évident que l'ouverture à la concurrence et l'ouverture des Jeux olympiques ne devraient pas être concomitantes.

C'est chose faite, grâce à cette proposition de loi, et nous nous en félicitons. Il est en effet opportun de laisser à Île-de-France Mobilités toute la latitude nécessaire pour échelonner le calendrier d'ouverture effective à la concurrence pendant une durée maximale de deux ans après la date initialement fixée par le législateur. Néanmoins, des efforts restent à faire pour renforcer les garanties sociales des agents, assurer la qualité du service pour les usagers et redonner de l'attractivité à un métier pour lequel on peine à recruter. C'est d'autant plus important qu'il faudra renforcer les effectifs à la veille des JO.

Le texte répond à certaines préoccupations en élargissant le socle des bénéficiaires du sac à dos social. Nous sommes également satisfaits que l'article 1er prévoie de maintenir l'affectation des salariés au sein de leur centre-bus actuel, ce qui évite de leur imposer de nouvelles contraintes géographiques qui auraient pu les pénaliser.

Néanmoins, d'autres sujets importants restent une source de préoccupation pour les salariés de la RATP, en particulier le maintien de leur salaire net, leurs jours de repos ou la réorganisation en un seul lot des bus de nuit.

Nous appelons donc à ce que toutes les garanties nécessaires leur soient apportées dans les meilleurs délais afin que l'ouverture à la concurrence se réalise avec le plus de concertation et le plus sereinement possible. La fluidité et la sécurité de nos transports à l'été 2024 en dépendent mais aussi, ne l'oublions pas, leur qualité au-delà de 2024, pour tous les Parisiens et les Franciliens !

Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaite rendre hommage, à mon tour, à tous les agents de la RATP et, plus généralement, à tous ceux qui travaillent pour des opérateurs de transport.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ils exercent un métier difficile mais je crois que Benjamin Lucas, sans doute inconsciemment, a employé un terme inapproprié, celui d'« exploitation ». Les employés de la RATP, les conducteurs de bus, les machinistes ne sont pas exploités. Ce terme a été galvaudé et ce n'est pas rendre hommage à ces salariés que de parler d'eux en ces termes.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il devient par ailleurs agaçant de vous entendre dresser notre procès en désamour du service public. Vous n'avez pas le monopole de l'amour du service public, chers collègues.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est bien évident que nous le défendons, nous aussi, et sans faire de discrimination ! Nous aimons tous les services publics : la justice, la police…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Revenons au texte. Ce n'est pas lui qui prévoit d'ouvrir la RATP à la concurrence puisque cette ouverture a été maintes fois admise depuis 2009.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Sans aucun mandat des électeurs – le seul qui compte !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Surtout, ce texte prévoit de décaler cette ouverture. S'il n'est pas adopté, l'ouverture à la concurrence aura lieu le 31 décembre de l'année prochaine. Il ne s'agit donc pas d'ouvrir la RATP à la concurrence, puisque cette ouverture a déjà été prévue, mais de la décaler pour qu'elle se réalise dans les meilleures conditions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n'est pas davantage un texte de Valérie Pécresse puisqu'elle y était opposée ! Elle ne voulait pas entendre parler de ce décalage. Vous devriez vous en souvenir, monsieur Peu, car nous en avons suffisamment discuté lors de l'examen de votre proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pas du tout ! Ce texte est le fruit d'un compromis trouvé par la majorité. Vous étiez presque d'accord et nous aurions pu avancer ensemble. Valérie Pécresse ne voulait pas entendre parler de ce texte parce que, d'une certaine manière, il met en évidence sa part de responsabilité et celle d'Île-de-France Mobilités dans l'impossibilité d'ouvrir la RATP à la concurrence le 31 décembre 2024.

Ne nions pas, cependant, l'enjeu des Jeux olympiques. Vous le savez mieux que personne, monsieur Peu, puisque vous avez vous-même justifié, dans votre rapport, le report de l'ouverture par la nécessité d'assurer un niveau de service optimal durant les Jeux olympiques – ce que notre collègue Belkhir a soutenu – et non pour éviter des grèves !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par ailleurs, la mise en concurrence sera une opération extraordinairement complexe qui modifiera en profondeur la gestion des transports. Il serait donc très imprudent de l'engager au moment où nous aurons besoin, plus que jamais, de tous les agents de la RATP pour œuvrer à la réussite des JOP.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Et la réussite de la vie des usagers, cela vous intéresse ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n'est pas, en tout cas, à la hauteur des débats mais vous reprendrez la parole tout à l'heure et j'aurai grand plaisir à vous répondre.

Je soulèverai un dernier point. C'est la semaine du Salon des maires et des collectivités locales, et les accusations fusent, surtout depuis vos rangs, contre une majorité centralisatrice qui mépriserait les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les maires et les conseillers régionaux sont heureux d'exercer la compétence des transports. C'est une avancée des lois de décentralisation et du pacte de responsabilité signé avec les collectivités territoriales. Malheureusement, vous n'avez d'autre objectif, au travers des amendements que vous avez déposés, que de remettre en cause la décentralisation et cette compétence des régions.

Pour toutes ces raisons, le groupe Renaissance votera la proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La fin du monopole de la RATP, prévue pour le 31 décembre 2024, a été planifiée depuis longtemps en raison d'obligations légales négociées avec la Commission européenne. Cependant, malgré une préparation de près de quinze ans, il est évident que toutes les conditions requises pour cette transition ne sont pas encore remplies.

On peut être en désaccord avec l'ouverture à la concurrence des bus de la RATP, mais la responsabilité de cette ouverture ne dépend que de la décision de la région Île-de-France. En tant que législateurs, notre responsabilité est de l'accompagner au mieux.

Des inquiétudes se font jour concernant d'éventuelles perturbations des services de transport en Île-de-France en raison de mouvements sociaux pendant les Jeux olympiques. Le transfert de gestion des treize lots en une seule fois au 31 décembre 2024 paraît complètement irréaliste ; il semble inévitable que l'opération ait des répercussions sur les voyageurs.

Des problèmes non résolus sont liés à la coordination de l'offre, à la gestion des incidents, à l'information des voyageurs, à la billetterie, sans oublier l'incertitude entourant tant la reprise de l'ensemble des employés par les opérateurs privés que la garantie du maintien de leurs salaires.

De plus, l'organisme Île-de-France Mobilités ne semble pas disposer des ressources humaines et financières nécessaires pour gérer ce projet sans précédent, estimé à 4,9 milliards d'euros et qui survient dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre, de difficultés à fidéliser le personnel et de détérioration des conditions de travail.

Bien que le rapporteur ait précisé que les difficultés actuelles n'étaient plus les mêmes que celles rencontrées lors de la période de sortie de l'épidémie de covid-19, les usagers des transports en Île-de-France sont confrontés à d'importantes difficultés, et cela en dépit d'une augmentation significative du coût des titres de transport, récemment encore. À la RATP comme dans beaucoup d'autres domaines, plus le service se dégrade, plus les tarifs augmentent ! Bien que Mme Pécresse annonce un retour à la normale tous les quatre matins, il semble que ses prévisions ne se concrétisent jamais. Le taux de ponctualité continue de décliner, et ce sont souvent les plus précaires qui subissent les conséquences des dysfonctionnements du réseau francilien.

Au sujet du report de 2024 à 2026 de l'ouverture à la concurrence des lignes de la RATP, les opinions divergent. Certains soutiennent ce report, tandis que d'autres accusent les syndicats de faire pression, arguant qu'un tel report n'empêcherait pas un conflit social ultérieur au détriment des voyageurs, alors que ceux-ci auraient pu bénéficier de tarifs plus bas et de nouveaux services de qualité.

Le rapport Bailly-Grosset, rédigé par l'ancien dirigeant de la RATP, estime qu'un tel calendrier serait « viable mais tendu ». En tant que législateurs, il nous incombe de veiller à ce qu'il offre des garanties aux employés de la RATP qui seront transférés à un nouvel opérateur. Il est impératif d'engager un véritable dialogue social sur les conditions du transfert du personnel afin de garantir la continuité et la qualité du service. Par conséquent, nous soutiendrons ce report, tout en restant vigilants quant au dialogue social : celui-ci doit offrir les meilleures garanties aux employés de la RATP susceptibles d'être transférés à un nouvel opérateur.

La garantie de la continuité du service et de sa qualité sera primordiale pour que les Franciliens continuent à utiliser les transports en commun.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Ce débat est essentiel, et je pense qu'il vaut mieux discuter dans l'hémicycle du texte lui-même, plutôt que de gloser sur des interprétations ou d'en parler sans l'avoir lu.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Ce texte s'inscrit dans l'histoire récente, si l'on peut dire, du processus d'ouverture à la concurrence. On peut être pour ou contre lui – c'est vous qui en déciderez – mais on ne peut pas dire n'importe quoi. Il convient donc de rétablir les faits et la vérité.

D'abord, il a été dit que lorsqu'un service public des transports n'était pas organisé en régie, on n'avait pas affaire à des agents du service public. Quel manque de respect pour les élus et les chauffeurs de bus de Châteauroux, Montpellier, Besançon ou Poitiers ! D'ailleurs, cela a été signalé par les responsables socialistes et écologistes : dans l'immense majorité des municipalités gérées par vos partis politiques, le service public des transports est assuré au quotidien par une délégation de service public.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Reconnaissez-le ! Aucun des programmes municipaux n'a remis en cause la logique de délégation de service public, que ce soit à Paris, en Île-de-France ou ailleurs. Arrêtons de défendre, avec des trémolos dans la voix, le service public, en opposant ceux qui sont pour et ceux qui seraient contre. Il s'agit ni d'une privatisation…

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

…ni d'une remise en cause de la qualité d'agents du service public des personnes qui conduisent des millions de Français chaque jour. Respectez les élus et les agents des villes de France qui ont organisé leurs transports publics au moyen d'une délégation de service public et lisez le texte !

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

On ne peut pas dire n'importe quoi. Retournons à la réalité.

Cela a été dit : la question du calendrier est essentielle. Vous aviez d'ailleurs, monsieur Peu, proposé de décaler la date d'ouverture à la concurrence, en conservant donc cette logique ; vous aviez présenté cette mesure comme un compromis, ce dont je vous remercie, et nous en avions longuement discuté en commission parce que je pensais qu'il s'agissait d'une logique bénéfique. Ce qui vous est proposé aujourd'hui est un report de deux ans. Ne pas voter ce texte reviendrait à ne pas offrir de protection supplémentaire aux salariés et à refuser d'adapter le calendrier. Ceux qui affirment vouloir protéger les salariés, les agents du service public, concrètement, les priveraient de garanties supplémentaires. Voilà la réalité !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il n'y a pas de garanties supplémentaires dans le texte !

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Vous voulez remettre en cause tout le processus – mais, sans revenir au XVIIe siècle, reprenons l'histoire récente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Oui : parlons des salariés qui sont en grève depuis des semaines !

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Madame Chikirou, soyons sérieux : vous avez soutenu M. Sarkozy en 2007.

M. le président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire applaudit. – Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Moi, je n'ai pas changé d'avis, ni de convictions.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Depuis 2022, avez-vous déposé une proposition de loi visant à remettre en cause ce processus ? Je ne le crois pas. Ce dernier a-t-il été contesté depuis 2012 ?

Mme Chikirou continue de s'exclamer.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame Chikirou, laissez le ministre terminer son propos, s'il vous plaît.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Madame Chikirou, vous ne vous êtes jamais préoccupée de cette question avant ce soir !

Soyons plus précis encore : en 2013, l'accord relatif au calendrier d'ouverture à la concurrence a été conclu par la majorité de l'époque et par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault – je travaillais pour lui et j'en suis très fier. Vous avez raison, on a fait alors un choix ; il existait d'autres options. On peut en discuter à l'infini, mais ce n'est pas l'objet de ce texte et la position que vous défendez aujourd'hui n'est pas celle qui avait été défendue à l'époque de ce côté-ci de l'hémicycle.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

M. Guedj, qui a dû nous quitter, était alors député : il a frondé sur certains sujets, mais pas sur celui-là. Il faut donc être cohérent, et honnête avec le présent texte.

Vous évoquez les galères des usagers. Je les respecte infiniment et, l'automne dernier, je me suis engagé pour qu'on augmente les salaires et qu'on accélère les recrutements à la RATP – mais cela n'a aucun rapport avec le processus décrit ici, qui, par définition, n'a pas commencé. Admettez que les galères peuvent très bien s'accommoder de l'organisation actuelle !

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Je suis parfaitement d'accord qu'il ne suffit pas d'ouvrir à la concurrence pour améliorer le service public ; il faut aussi recruter et améliorer les conditions de travail – mais ne mélangeons pas tout et restons honnêtes. Tenons-nous en au texte et à la réalité de la situation.

S'agissant des Jeux olympiques et paralympiques, je crois que tout le monde a envie qu'ils se passent bien. Là encore, un peu de respect pour les salariés et pour leurs organisations syndicales ! Vous pouvez être contre le texte, mais s'il recelait, comme vous le prétendez, une entourloupe,…

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

…la ficelle serait un peu trop grosse pour que les organisations syndicales et les agents ne la voient pas !

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Croyez-vous que cela les empêchera de s'exprimer et de se mobiliser ? Personnellement, je crois dans le dialogue social. Croyez-vous que M. Grosset et M. Bailly, grands acteurs du service public et dont vous connaissez le parcours au sein du monde syndical ou de La Poste, soient des apôtres de Margaret Thatcher ? Croyez-vous qu'ils n'aient pas consulté les organisations syndicales au cours de leurs travaux ?

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Alors, ne convoquons pas Mme Thatcher – qui n'est d'ailleurs plus de ce monde – et examinons plutôt ce qu'ont dit ici même M. Bartolone, Mme Hidalgo ou M. Huchon : aucun n'a remis en cause le processus.

Vous avez changé d'avis : c'est votre droit. Vous vous sentez coupables et vous avez peut-être beaucoup à vous faire pardonner : c'est votre droit. Mais ne soulagez pas votre conscience en racontant n'importe quoi au cours du débat !

Ce texte ne mérite pas tant d'indignation. Il doit être considéré pour ce qu'il est ; il accorde des garanties sociales supplémentaires et prévoit un étalement du processus. Et je me réjouis que la présidente de région se soit ralliée à ce pragmatisme pour défendre nos services publics. J'ai été, je crois, le premier à dire, avec la majorité présidentielle, il y a près d'un an, que nous avions besoin de plus de temps pour réussir l'ouverture à la concurrence. Il ne s'agit pas d'une privatisation, ne vous en déplaise ; ce serait peut-être plus facile, plus manichéen, plus confortable, mais ce n'est pas la réalité. Il ne s'agit pas non plus de la relance d'un processus que vous avez, dans votre immense majorité, soutenu. Il s'agit d'accorder une protection pragmatique supplémentaire aux agents et aux usagers – car, pour ma part, je me refuse à opposer les uns aux autres. Je pense que ce texte protège les uns et les autres, et je le soutiens parce que je respecte les agents et que je ne cherche pas à faire un commerce électoral sur leur dos.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. le rapporteur applaudit aussi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisie de trois amendements, n° 26 , 1 et 15 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements n° 1 et 15 sont identiques.

Sur l'amendement n° 26 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.

Sur les amendements n° 1 et 15 , je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Thomas Portes, pour soutenir l'amendement n° 26 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaitais m'exprimer sur l'article, madame la présidente !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est trop tard, monsieur Vannier. Il fallait vous inscrire avant.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il s'agit de s'assurer que les salariés qui seront transférés dans le cadre des appels d'offres disposeront de véritables garanties sociales. Ce que nous demandons, c'est que les droits qui accompagnent les contrats de travail actuels des salariés de la RATP soient conservés chez les opérateurs auxquels vous allez livrer le service public.

Plutôt qu'un sac à dos, nous souhaitons un bouclier social. Votre sac à dos, monsieur le ministre délégué, est troué, puisqu'il ne prend pas en compte le treizième mois, qui résulte d'un accord entre les salariés et la RATP, et non d'un accord de branche ; comme tel, il risque donc de disparaître.

« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Idem pour le droit à la formation, pour le déroulement de carrière ou pour la médecine ; par exemple, les soins internes sont garantis pour le seul premier appel d'offres et l'accès aux œuvres sociales disparaîtra au bout de douze mois. Je le répète : votre sac à dos social est percé. On va sacrifier les droits des salariés.

Si vous êtes réellement attaché aux salariés de la RATP, ce que vous avez tenté de démontrer, prévoyez des garanties en conséquence, et inscrivez dans la loi que le statut actuel et que les droits qui y sont attachés seront transférés aux nouveaux opérateurs. Un collègue a dit que les salariés n'étaient pas des fonctionnaires ; c'est vrai, mais ils ont un statut.

« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et SOC.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est peut-être un gros mot pour vous, mais c'est une garantie de sécurité, de formation et de service public de haut niveau. Voilà pourquoi la première chose que font toutes les entreprises privées, c'est de s'attaquer au statut, de le détruire, pour ouvrir la voie à la privatisation.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à Mme Fatiha Keloua Hachi, pour soutenir l'amendement n° 1 .

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre délégué, vous dites vous soucier des agents des transports en Île-de-France, notamment de ceux de la RATP. Or nous n'avons pas la même lecture de la situation. J'ai mené des auditions avant de vous présenter cet amendement. Les syndicats sont unanimes : la mise en concurrence à venir les inquiète profondément, de même que les agents ; ils ont mille et une questions à vous poser. Il faut absolument renforcer le sac à dos social. En l'état, rien ne garantit le maintien de l'ensemble des droits des agents lorsque les contrats de travail seront transférés.

Je relaie auprès de vous deux questions que se posent les agents et les syndicats : lors du transfert, le nombre de jours de repos, qui s'établit actuellement à 121, sera-t-il réduit ? Quid de la prime d'intéressement, qui s'élève à 1 000 euros par an ? Compte tenu de ce qu'est le sac à dos social à ce stade, nous n'avons pas de réponse.

Par cet amendement, nous demandons de compléter le premier alinéa de l'article L. 3111-16-1 du code des transports afin qu'il ne soit pas possible de remettre en cause les droits des agents dont le contrat de travail est transféré.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l'amendement n° 15 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par cet amendement, nous essayons de garantir le maintien au plus haut niveau des droits et avantages sociaux acquis par les agents dont le contrat de travail sera transféré dans le cadre de l'ouverture à la concurrence. Chat échaudé craint l'eau froide : le premier volet de la mise en concurrence, qui a porté sur le réseau Optile, s'est soldé par une forte dégradation des conditions de travail et de rémunération.

Les organisations syndicales reconnaissent bien volontiers que le texte corrige quelques aberrations. Par contre, ils demeurent très inquiets sur de nombreux points : le nombre de jours de repos – notre collègue vient de le signaler –, le maintien du salaire net et des avantages existants, les modalités de calcul des droits à la retraite. La question des conditions de travail, notamment l'affectation des chauffeurs aux services de bus de nuit, n'est pas non plus traitée à ce stade.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vais néanmoins vous répondre. Les garanties sociales dont il est question dans le texte sont celles qui ont été obtenues à ce jour. Il ne vous a pas échappé – puisque vous avez interrogé les syndicats, vous ne me direz pas le contraire – que les négociations continuent et que les syndicats demandent plus. Après tout, c'est leur rôle, et le dialogue social doit continuer.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si vous ne votez pas cette proposition de loi, ce sera un retour un arrière : les garanties sociales seront bien moins importantes que celles qui sont prévues par le texte. Je récapitule ces dispositions : la proposition de loi étend le bénéfice des garanties sociales à un plus grand nombre de salariés, ce qui n'était pas prévu dans la LOM. Ceux qui ont étudié le texte – je fais confiance à M. Peu, qui le connaît par cœur – ne pourront pas dire le contraire.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En effet, vous n'étiez pas là à l'époque.

La proposition de loi assure la portabilité d'un certain nombre de garanties statutaires de la RATP. En commission, on m'a interrogé à propos du treizième mois. Celui-ci est intégré…

« Non ! » et « C'est faux ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si, il l'est, dans la rémunération annuelle. Vous pouvez dire tous les mensonges du monde, cela n'en fera pas une vérité !

Debut de section - Permalien
Une députée du groupe LFI – NUPES

C'est vous le menteur !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vérifiez : le treizième mois est inclus dans la rémunération annuelle. Je pense que M. le ministre délégué le confirmera.

La garantie de l'emploi et le régime spécial de retraite – on m'a aussi interrogé sur ces points en commission – seront maintenus pour ceux qui sont au statut de la RATP.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'il vous plaît, monsieur le rapporteur, veuillez revenir à votre avis sur les amendements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous êtes incapables d'écouter jusqu'au bout un orateur qui n'est pas de votre groupe. Parfois même, vous vous interrompez les uns les autres. C'est tout de même une maladie…

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vais m'adresser à M. Coquerel qui semble intéressé et n'interrompt personne. Le système de retraite des salariés qui sont au statut de la RATP…

M. Louis Boyard s'exclame.

Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Allez, on a compris votre jeu, passons au vote !

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'il vous plaît, monsieur le rapporteur, veuillez donner votre avis sur les amendements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si je fournis cette explication maintenant, c'est parce que de très nombreux amendements portent sur ces questions. Cela m'évitera d'y revenir ultérieurement. Ceux qui sont au statut de la RATP ne perdront pas le bénéfice de leur régime de retraite.

S'agissant du treizième mois, je vous l'ai dit, le dispositif de garantie de rémunération qui figure dans le code des transports prévoit l'inclusion la plus large possible de tous les éléments de la rémunération actuellement versée aux salariés de la RATP. Le treizième mois entrant dans la rémunération actuelle, je vous confirme qu'il sera maintenu lors du transfert des contrats de travail des salariés. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur tous ces amendements.

« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Les garanties sociales suscitant quelques polémiques, je souhaite revenir sur la liste de ce qui est précisément et absolument garanti par ce qu'on appelle de manière peu élégante « le sac à dos social ». Il s'agit tout d'abord de la rémunération. Contrairement à ce que vous avez dit, monsieur Portes, le treizième mois est intégralement garanti en cas de transfert. Tous les éléments qui concourent à la rémunération antérieure au transfert sont garantis. Le cas échéant, une indemnité différentielle sera versée à tous les salariés concernés.

L'accès au réseau des centres de santé de la RATP – point important aux yeux des organisations syndicales –, le bénéfice des activités sociales et culturelles relevant du comité social et économique (CSE) de la RATP et le maintien des conventions et des accords collectifs de la RATP sont eux aussi entièrement garantis ; ils font partie du sac à dos social. Pour les agents statutaires, la garantie d'emploi est maintenue et la portabilité du régime spécial de retraite est intégralement garantie.

Vous savez que le treizième mois est intégralement garanti, monsieur Portes. Cessez de faire peur à ce sujet ! C'est un point très important, et vous avez dit un mensonge ou commis une erreur.

Le reste relève ce qu'on appelle « le cadre social territorialisé ». Celui-ci garantit aux conducteurs de bus qui relèvent des périmètres historiques l'application de règles spécifiques en matière de temps de travail et de temps de repos.

Il est nécessaire de prévoir des garanties sociales très fortes, je partage ce point de vue. Tous les éléments que vous avez évoqués en présentant vos amendements sont garantis par le sac à dos social en cas de transfert. Nous avons ainsi atteint un point d'équilibre essentiel en matière de protection.

J'ajoute qu'après le transfert, il y aura bien évidemment un dialogue social. Les organisations syndicales défendront alors, chez les opérateurs concernés – la RATP ou d'autres –, des protections et des acquis supplémentaires. Laissons cette marge de manœuvre, sachant que nous avons prévu un socle de garanties tout à fait massif.

Vous évoquez une attribution des lots à des opérateurs privés. J'ignore qui répondra aux appels d'offres lors de l'ouverture à la concurrence, d'autant que je n'en suis pas chargé, mais il importe de rappeler que, pour les délégations de service public existantes ou nouvelles, en particulier dans les communes et les métropoles que j'ai citées, trois opérateurs sont actifs en France.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Outre la RATP et ses filiales, il s'agit de Transdev et Keolis, qui sont l'un et l'autre publics.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Cessons d'affirmer que c'est le grand marché libéral qui capte les délégations de service public ! Ce sont en général ces entreprises qui sont candidates dans le cadre des appels à projets. Or elles ont des garanties et des conventions collectives très protectrices.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avez-vous vu ce qu'a fait Transdev à Melun ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'il vous plaît, ma chère collègue, seul M. le ministre a la parole ! Vous pourrez vous exprimer ultérieurement.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Vous ne pouvez pas dire que ce sont des opérateurs privés : ce sont des filiales soit du groupe SNCF, soit de la Caisse des dépôts (CDC).

Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Qu'il s'agisse des opérateurs concernés ou des garanties, il faut tout de même rappeler de quoi on parle ! Contrairement à ce qui a été dit, le maintien du treizième mois est garanti, par le sac à dos social et le cadre social territorialisé.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Peut-on avoir un peu d'ordre dans cet hémicycle ? C'est n'importe quoi !

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

C'est la raison pour laquelle je suis défavorable aux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'il vous plaît, mes chers collègues, pouvez-vous vous écouter les uns les autres ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre délégué, l'article 1er est votre alibi. Il prévoit un sac à dos social, mais celui-ci est vide, comme l'a relevé mon collègue Thomas Portes. Par exemple, il ne comprend ni le supplément familial versé à la naissance d'un enfant, ni l'intéressement, ni l'indemnité de déplacement géographique, ni la prime de parcours intégré. Autrement dit, il n'y a pas de garanties ; il s'agit, au contraire, de la destruction des droits des salariés de la RATP.

Par ailleurs, ce sac à dos social ne dure qu'un temps, celui du premier contrat, soit quatre à huit ans. À l'issue du premier contrat, il n'y a plus de sac à dos social pour personne.

Enfin et surtout, il n'y a personne pour garantir ce sac à dos social. Dans la grande couronne, l'ouverture à la concurrence est intervenue en 2021. Les salariés dont le contrat de travail a été transféré à Keolis ou à Transdev peuvent vous expliquer par le menu combien de droits censément garantis par le sac à dos social ont été supprimés depuis lors.

Par exemple, le dépôt de bus de Montesson, dans les Yvelines, dont les bus desservent ma circonscription, est passé chez Keolis en 2021. Deux ans plus tard, c'est-à-dire cette année, Keolis a supprimé la prime annuelle d'intéressement, qui était d'environ 1 000 euros. Les salariés ont fait grève pendant un mois, mais l'employeur ne les a pas entendus. J'ai interpellé à ce sujet la présidente d'IDFM, pour lui demander de faire respecter le fameux sac à dos social. Or elle n'a jamais répondu à mon courrier ; elle a laissé détruire cet acquis des travailleurs.

On trouve de tels exemples dans toute l'Île-de-France. En Seine-et-Marne, au dépôt de Chelles, ce sont la prime de nuit et la prime repas qui ont été supprimées. Autrement dit, il n'y a pas de sac à dos social, monsieur le ministre délégué.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous privatisez et vous détruisez les droits des salariés.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 100

Nombre de suffrages exprimés 100

Majorité absolue 51

Pour l'adoption 38

Contre 62

L'amendement n° 26 n'est pas adopté.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 99

Nombre de suffrages exprimés 99

Majorité absolue 50

Pour l'adoption 37

Contre 62

Les amendements identiques n° 1 et 15 ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 17 et 30 .

La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l'amendement n° 17 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les amendements précédents portaient sur la garantie des droits sociaux ; celui-ci a trait à la garantie de la qualité de service.

Observons là encore ce qui s'est passé lors du premier volet de mise en concurrence, qui a concerné le réseau Optile. Parfois, les lignes jugées les moins rentables ont été supprimées. Sinon, la fréquence des bus a été limitée ou certains arrêts n'ont plus été desservis sur ces lignes.

Par cet amendement, nous souhaitons fixer un cadre qui garantisse le maintien de la qualité de service à un niveau équivalent en cas de transfert à un autre opérateur. IDFM est déjà chargée de veiller à la qualité de service, mais cela n'interdit pas que nous lui fixions un cadre légal, qui confirmerait au demeurant l'importance des enjeux de développement de l'offre de services publics. Je l'ai dit précédemment, 80 % des coûts sont des frais de personnel. Dès lors, la tentation est toujours de faire peser la rentabilisation du réseau sur le personnel ou sur l'amplitude horaire et la fréquence, ce qui dégrade la qualité de service.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Thomas Portes, pour soutenir l'amendement n° 30 .

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il s'agit d'un amendement similaire à celui de M. Peu, visant à garantir au moins la continuité du service. La qualité du transport en grande couronne s'est dégradée avec l'arrivée d'opérateurs privés. Dans l'ensemble des services publics ouverts à la concurrence, où ils ont gagné des parts de marché, une dégradation du service a été constatée. À la SNCF – j'en parle en connaissance de cause –, des appels d'offres ayant été passés par les régions et remportés par des entreprises privées, des lignes jugées non rentables vont fermer. Regardez le nombre de lignes concernées, par exemple en Provence-Alpes-Côte-d'Azur (Paca).

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous vous demandons, par expérience, et parce que vous le devez aux usagers, de garantir un trafic minimum pour leur permettre de se déplacer décemment.

Pour revenir sur l'amendement précédent : je répète que le treizième mois repose sur un accord d'entreprise, pas de branche, généralement dénoncé ensuite par celui qui remporte l'appel d'offres. La loi le permet. Les opérateurs privés qui ne voudront pas filer le treizième mois aux salariés le dénonceront.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'entends vos préoccupations sur le maintien de la qualité du service, mais je vois mal comment, dans un texte de loi, nous pouvons assurer partout ce maintien, compte tenu, par exemple, des événements extérieurs qui peuvent dégrader ponctuellement le service. Nous ne pouvons pas le garantir !

La LOM a, de son côté, décentralisé la gestion des transports en commun aux régions.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

C'est un acte de décentralisation fort. L'État n'a pas à se substituer à Île-de-France Mobilités. Lors de la discussion générale, j'ai émis quelques warnings, notamment à propos du Criv…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…quelques alarmes pour Île-de-France Mobilités. Effectivement, il y a encore du travail pour garantir la qualité du service. Dans ce texte, à travers les propositions du sénateur Capo-Canellas, que nous avons quelque peu amendées, nous essayons, autant que possible, d'assurer le transfert des garanties sociales et la qualité du service. Le rôle de l'État s'arrête là. Ce que vous proposez me paraît difficilement réalisable. Mon avis est donc défavorable pour les deux amendements.

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

J'aurai le même avis. La question, soulevée par M. Peu, de la qualité de service, la garantie de son exécution et du nombre de lignes, est néanmoins essentielle et nous interroge – M. le rapporteur l'a soulevé – sur la définition de cette qualité, qui ne repose pas nécessairement sur la quantité de lignes existantes. Certains endroits, moins peuplés, ont légèrement moins de lignes, ce qui permet de repositionner les bus, ou les chauffeurs, dans d'autres bassins de population, mal desservis aujourd'hui ou plus dynamiques demain. Cette flexibilité est essentielle, et la définition d'un socle minimal de service est très difficile, bien que j'en partage l'objectif.

L'autre élément, important, concerne la décentralisation. L'objet de ce texte n'est pas de revenir sur la répartition des compétences entre l'État et les autorités organisatrices des mobilités, y compris pour la région capitale et Île-de-France Mobilités. Il est sain que les autorités organisatrices des mobilités, en Île-de-France comme ailleurs, définissent, par leurs élus, le niveau, la qualité et la répartition géographique du service. Les divergences se règlent lors d'élections municipales ou régionales – selon l'autorité organisatrice. À défaut, nous remettrions en cause par ce texte – et ce n'est ni son objet, ni le désir partagé – la répartition des compétences de transport en France.

J'ajoute qu'il n'y a pas d'obligation aujourd'hui, ni pour Île-de-France Mobilités ni pour une autorité organisatrice quelconque, d'avoir un cadre fixé par l'État ou le législateur, au-delà des garanties fixées par la LOM. Ce n'est pas à l'État de définir le nombre de lignes en Île-de-France, dans la métropole d'Aix-Marseille, ou ailleurs. Il faut conserver cet acte de décentralisation, de confiance et de flexibilité, sous le contrôle du service public.

Enfin, n'en déplaise à M. Portes, il s'agit non d'opérateurs privés, mais d'opérateurs à capitaux publics dans l'immense majorité des métropoles de France, sous le contrôle strict d'une autorité organisatrice des mobilités.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il y a des capitaux privés chez les deux principaux opérateurs, qui ne sont pas publics à 100 % !

Debut de section - Permalien
Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

Disons la vérité pour avoir un débat serein. Je n'ai jamais prétendu que l'ouverture à la concurrence faisait la qualité de service – ou son entièreté. Je ne pense pas que ce texte doive revenir sur un acte de décentralisation majeur, en forçant les autorités organisatrices – ce qui n'est aujourd'hui proposé ni par vous, ni par ce texte – à définir le nombre de lignes de bus, de tramways et de métros.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Comment pouvez-vous penser que nous allons être rassurés par vos propos, et vous croire lorsque vous prétendez que la qualité du service sera maintenue ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les salariés de Transdev, à Coubron en Seine-Saint-Denis et à Chelles en Seine-et-Marne, sont en grève depuis lundi dernier. Tous les agents n'ont pas de vestiaire, ils n'ont pas accès aux sanitaires : ce sont des conditions de travail inacceptables et indignes.

Concernant la qualité du service pour les usagers, les bus mis en circulation le sont – pour beaucoup – depuis plus de douze ans, parfois jusqu'à quinze ou dix-sept ans.

Rires de M. Laurent Jacobelli

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Certains véhicules ont parcouru 840 000 kilomètres et sont mis en circulation alors que les voyants du système antiblocage des roues (ABS) et moteurs sont rouges. Les conséquences sur les usagers sont redoutables. Je ne vous donne ici que quelques exemples sur la liste malheureusement interminable des méfaits de l'ouverture à la concurrence. Ce texte va immédiatement aggraver cette situation qui nuit d'abord aux salariés et aux usagers confrontés, notamment dans ma circonscription, à des conditions de transport désastreuses.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Les amendements identiques n° 17 et 30 ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la proposition de loi relative à la concurrence du réseau de bus francilien de la RATP.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt heures dix.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra