Je suis très heureux de vous retrouver pour la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour l'année 2023. L'aboutissement de ce texte est le fruit – vous l'avez dit – d'un intense travail et d'une confiance nourrie entre la majorité et les oppositions. Nous sommes parvenus à un accord, parce que nous avons su dialoguer et chercher des compromis – je m'en félicite.
Cette réussite est aussi le fruit du travail du rapporteur général, cher Jean-René Cazeneuve : vous avez mené, à chaque étape, un travail de concertation et de dialogue, qui a rendu cet accord possible.
Le présent texte financier – comme cela avait été indiqué en première lecture – se borne à réaffecter des crédits votés dans la loi de finances initiale pour 2023, et à tirer les conséquences budgétaires des aléas intervenus au cours de l'année. Il confirme les prévisions, s'agissant de notre croissance et de notre déficit, contenues dans la loi de finances initiale. Face à la crise, les entreprises ont tenu ; elles ont maintenu leur production et poursuivi leur développement, permettant d'atteindre un taux de croissance de 1 % en 2023. Ce taux est supérieur à la moyenne européenne et à celui de plusieurs de nos voisins aujourd'hui entrés – hélas – en récession.
Notre stratégie de lutte contre l'inflation et de protection des entreprises et des ménages face à l'augmentation du coût de l'énergie a fonctionné. Certes, l'inflation sera supérieure à nos prévisions initiales, mais elle baissera de 0,3 point par rapport à 2022 et s'établira à 4,9 % en 2023. En octobre dernier, l'inflation est retombée à 4 %. Sa baisse devrait se poursuivre de façon marquée en 2024, en s'établissant à 2,6 %.
Notre stratégie a également permis de contenir le déficit public, qui atteindra 4,9 % du PIB, soit un niveau inférieur à ce que prévoyait la loi de finances initiale pour 2023. C'est une bonne nouvelle pour nos finances publiques. Avec la hausse des taux d'intérêt, chaque euro de dette supplémentaire nous coûte cher – ainsi devons-nous ouvrir 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires pour absorber la hausse de la charge de la dette.
Nous allons poursuivre avec détermination dans cette voie de réduction progressive du déficit public. La semaine passée, la Première ministre a lancé, avec l'ensemble des ministres, une première revue de dépenses pour 2024 et 2025.
Le présent texte ne permet pas seulement d'adapter notre budget aux événements survenus au cours de l'année : il donne surtout l'occasion à la France de respecter ses engagements envers ses partenaires, et vis-à-vis des Français.
Nous augmentons les crédits de la mission "Défense" , en consacrant 2,1 milliards d'euros au soutien militaire à l'Ukraine et à la modernisation des armées. Plus de la moitié de ces crédits supplémentaires anticipent ceux prévus par la loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030, largement adoptée par cette assemblée. Dans le contexte instable que nous connaissons, la France doit se doter d'une armée forte, prête à affronter les crises. Il y va de notre indépendance et de notre autonomie stratégique.
À cet égard, vous avez souhaité aller plus loin. Un amendement soutenu par les groupes Renaissance, Démocrate, Horizons, mais également Les Républicains, Socialistes et Écologiste, a conduit à abonder le fonds spécial créé en 2022 pour soutenir l'Ukraine, d'un montant supplémentaire de 200 millions d'euros.
Ce texte permet également de renforcer le soutien au monde agricole, frappé par les crises ces dernières années : c'est un enjeu central pour les territoires ruraux, mais aussi pour notre souveraineté, essentielle dans le contexte instable que nous connaissons. Nous devons préserver notre agriculture et soutenir, partout et toujours, notre ruralité.
L'épidémie de grippe aviaire a touché de nombreuses exploitations ces deux dernières années. C'est pourquoi le présent projet de loi prévoit une augmentation des crédits du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de 800 millions d'euros, afin de dédommager les exploitants touchés.
Vous avez également souhaité aller plus loin dans ce domaine. Un amendement du rapporteur général prévoit ainsi l'ouverture de 20 millions d'euros de crédits pour soutenir la filière vitivinicole, durement frappée par le mildiou. D'autre part, un amendement du groupe Écologiste – soutenu par le Gouvernement et la majorité – prévoit de dédier 5 millions d'euros supplémentaires à l'agriculture biologique, durement touchée par l'inflation.
Nous avons proposé d'affecter 400 millions d'euros supplémentaires au financement des exonérations de cotisations patronales en outre-mer. Si le chômage a largement baissé dans ces territoires, il y reste plus élevé qu'en métropole : nous devons poursuivre notre politique de réduction du coût du travail.
Les amendements adoptés par l'Assemblée nationale ont permis d'enrichir les dispositions destinées à soutenir les territoires. Ainsi, face aux difficultés que traversent la Martinique, la Guadeloupe et Saint-Martin, les fonds alloués au plan Sargasses 2 ont été accrus sous l'impulsion des groupes Socialistes et Écologiste, quand les groupes Horizons et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires ont souhaité reconduire la dotation de solidarité territoriale pour la collectivité de Corse.
Ce projet de loi a également permis d'ouvrir des crédits à destination des plus fragiles. Le Gouvernement a augmenté le budget du ministère des solidarités et des familles afin de tenir compte de l'augmentation du nombre de bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés et de la prime d'activité.
Dans ce domaine, l'Assemblée nationale a enrichi le texte de plusieurs dispositions. Le Gouvernement et la majorité ont soutenu un amendement du groupe Socialistes visant à augmenter la prime de Noël pour les familles monoparentales les plus précaires. Les groupes Les Républicains et Socialistes ont également proposé une aide supplémentaire de 20 millions d'euros pour soutenir les associations d'aide alimentaire face à la crise.
Les conclusions de la CMP ne sont revenues sur aucune de ces avancées majeures, et le travail mené au Sénat a également contribué à l'enrichissement du texte.
Concernant l'aménagement du territoire, la commission mixte paritaire a alloué 50 millions d'euros supplémentaires à l'entretien des réseaux d'eau, afin de limiter les fuites. C'est un enjeu fondamental pour la transition écologique – je soutiens totalement cette mesure. La navette a également contribué à proposer des crédits supplémentaires pour l'entretien des réseaux routiers et des ponts. C'était attendu par les collectivités territoriales, et c'est un enjeu de sécurité publique. Un amendement a aussi été adopté afin d'accroître le financement de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN).
Le texte issu de la commission mixte paritaire propose d'aller plus loin concernant l'aide alimentaire : 20 millions d'euros supplémentaires sont ainsi prévus. Enfin, nous avons appuyé l'initiative visant à soutenir l'Arménie et le Haut-Karabakh.
En définitive, les crédits supplémentaires ouverts par ce texte ne dégradent pas notre trajectoire en matière de déficit : il est maintenu à 4,9 % du PIB. C'est donc un bon compromis. L'exécution prudente et sérieuse du budget issu de la loi de finances initiale pour 2023 a rendu cela possible. Ainsi, les dépenses supplémentaires sont compensées par des annulations de crédits dans les budgets des ministères : 5,2 milliards d'euros d'annulations s'ajoutent aux 5 milliards déjà annulés par décret en septembre 2023.
S'agissant de la masse salariale des ministères, le principe de gestion prudente a également prévalu, puisque les mesures de revalorisations salariales annoncées en juin 2023 ont été mises en œuvre sans augmenter les dépenses de personnel.
Le présent texte est le fruit d'un dialogue entre le Gouvernement, la majorité et les oppositions. Il a été enrichi par un travail parlementaire dense dont il faut se féliciter. Il permet de répondre aux engagements auxquels, je le sais, vous êtes attachés. C'est pourquoi je souhaite que vous adoptiez les conclusions de la commission mixte paritaire.