Le service public mérite mieux que vos petites opérations de communication. Il mérite du respect, de l'investissement, il ne demande pas l'aumône !
Certes, notre service public, ce joyau de notre République, est parfois un peu pantelant. J'oserai même dire qu'il tire parfois la tronche. En manque chronique de financement depuis des décennies, maltraité et abusé par des discours tous plus réactionnaires et caricaturaux les uns que les autres, il est porté à bout de bras par des hommes et des femmes qui, eux, y croient : par ses médecins, à l'hôpital Max Fourestier de Nanterre ou à l'Hôpital Lozère ; ses accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) et ses professeurs, à l'école Jean-Jaurès de Drancy ou d'Estienne d'Orves de Suresnes ; ses travailleurs sociaux au sein des centres communaux d'action sociale (CCAS), ses psychologues au sein des centres médico-psychologiques (CMP) ou médico-psycho-pédagogiques (CMPP) ; et par ses machinistes et ses conducteurs dans les bus de la petite couronne. Ceux-là mêmes qui, durant le covid, ont tenu et travaillé dans des conditions sanitaires dramatiques.
Malheureusement, la liste de ces serviteurs de la France se raccourcit d'année en année, par la grâce de votre politique qui voit dans la concurrence et la privatisation le Graal de toute politique économique.
Épargnez-vous vos argumentaires usés, qui ont servi aux dix-sept 49.3 que vous avez déclenchés et qui tous proclament : « Nous n'avons pas le choix », « nous sommes responsables », « c'est la seule voie de la raison ». À la place, laissez-moi citer quelques chiffres susceptibles d'éclairer nos débats.
Vous vantez auprès des Français des opérations de privatisation « gagnant-gagnant » ; il s'agit plutôt de « perdant-perdant ». Lorsque les entreprises privées entrent au capital d'entreprises publiques, ce sont elles qui gagnent, et ce sont les Français qui perdent. Souvenons-nous des autoroutes dont les entreprises exploitantes, en augmentant les péages et en baissant les effectifs, ont généré un bénéfice record : près de 4 milliards d'euros de bénéfice net en 2021, soit – tenez-vous bien – 430 000 euros par kilomètre.
L'histoire est tout autre lorsque les Français se procurent des actions d'une entreprise publique mise sur le marché : Air France, c'est 14 euros l'action aujourd'hui, contre 200 lors de son introduction en Bourse ; EDF, 12 euros aujourd'hui contre près de 30 à l'époque.
Vous rétorquerez comme certains, lors de l'examen du texte au Sénat, qu'il n'y est pas question de privatisation et que celui-ci s'inscrit dans le cadre du service public. Enfin, chacun sait que l'ouverture à la concurrence, dans quelque cadre que ce soit, prépare la voie de la privatisation !