La commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'industrie verte a poursuivi l'examen du projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'industrie verte (n° 1443 rect.) (M. Guillaume Kasbarian, rapporteur général, et M. Damien Adam, Mme Anne-Laure Babault, Mme Christine Decodts et Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteurs).
Nous reprenons l'examen des amendements sur le projet de loi relatif à l'industrie verte. Nous en sommes à l'article 4 et un débat important nous attend ce matin sur le chapitre IV du titre Ier, qui porte sur la réhabilitation des friches pour un usage industriel.
Je rappelle que j'ai décidé de réserver l'examen du chapitre V du même titre, dans l'hypothèse optimiste où nous atteindrions en fin de matinée les articles 8 et suivants. Notre collègue Guillaume Kasbarian, rapporteur général du texte et rapporteur de ce chapitre, est en effet retenu ce matin au Sénat par la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à renforcer l'accompagnement des élus locaux dans la mise en œuvre de la lutte contre l'artificialisation des sols.
Nous avons examiné 362 amendements et il en reste 684. Il nous reste donc les deux tiers du chemin à parcourir.
Article 4 (suite) : Statut de déchet et transferts transfrontaliers de déchets
Amendements identiques CS83 de M. Vincent Descoeur et CS329 de Mme Danielle Brulebois.
Cet amendement de précision porte sur les déchets dangereux et notamment sur leur traitement thermique. Il prévoit que « pour les résidus contenant des substances ou présentant des propriétés qui, si le résidu est qualifié de déchet, rendent celui-ci dangereux, leur usage combustible ne peut être autorisé que dans des installations respectant des valeurs limites d'émissions équivalentes à celles de l'incinération de déchets dangereux et mettant en œuvre les meilleures techniques disponibles associées. »
Je vais retirer cet amendement déposé un peu vite, car, après investigations, je constate que les plateformes industrielles équipées d'installations de combustion sont très surveillées par les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement. Ces installations sont régulièrement examinées par les conseils départementaux de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques. Celles que je connais sont obligées de s'équiper de filtres, en particulier sur les cheminées. Leur activité est suffisamment encadrée.
La disposition proposée est contraire à la définition légale des déchets et des sous-produits.
Les résidus de production qu'une plateforme industrielle considère être des sous-produits ne peuvent être qualifiés de déchets. Ils ne pourront donc pas être assimilés à des déchets dangereux.
Par ailleurs, les sous-produits qui présentent les caractéristiques d'un produit dangereux, notamment du fait de la présence de polluants organiques persistants, devront respecter toutes les règles prévues par les deux règlements européens applicables. Avis défavorable.
Votre amendement est satisfait par la nouvelle rédaction de l'alinéa 5 adoptée hier soir, laquelle prévoit que l'utilisation des résidus ne doit pas avoir d'effet sur la santé humaine et l'environnement. Demande de retrait.
Les amendements sont retirés.
Amendements identiques CS843 de M. Stéphane Delautrette et CS952 de M. Rémy Rebeyrotte.
Il s'agit de compléter l'alinéa 5 par un alinéa concernant les déchets qui nécessitent un prétraitement spécifique, qui vise à garantir que les opérations de traitement des déchets soient réalisées en respectant les principes applicables aux installations classées. Le code de l'environnement impose notamment que la substance ou l'objet soient utilisés directement, sans traitement supplémentaire autre que les pratiques industrielles courantes. Il s'agit de garantir le respect des exigences environnementales ; la doctrine étant évolutive, il est essentiel de lui apporter une valeur législative forte.
Cet amendement a été travaillé avec la Fédération professionnelle des entreprises du recyclage (Federec).
L'alinéa que nous proposons d'ajouter est le suivant : « Si un prétraitement spécifique aux déchets est nécessaire sur site pour entrer dans le processus de production, celui-ci doit être classé […] au titre des rubriques traitement de déchets […] adaptées. » Il s'agit de garantir que les opérations de traitement sur les déchets sont réalisées en respectant les prescriptions applicables à des installations classées, qui garantissent la préservation de la santé humaine et l'environnement.
Permettez-moi de rappeler de nouveau que les résidus de production dont il est question ne constitueront pas des déchets. Je ne comprends donc pas très bien votre proposition.
Par ailleurs, les précisions éventuelles relatives au type d'installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) et à la nomenclature relèvent du domaine réglementaire. Avis défavorable.
Un sous-produit n'est pas un déchet et il n'a pas à être traité comme tel. Demande de retrait.
Je retire mon amendement. Je suis sensible à votre argument sur le fait que cela relève du pouvoir réglementaire.
L'amendement CS952 est retiré.
La commission rejette l'amendement CS843.
Amendement CS336 de Mme Danielle Brulebois, amendements identiques CS271 de Mme Christelle Petex-Levet, CS580 de M. Thibault Bazin, CS842 de M. Stéphane Delautrette et CS1101 de Mme Anne-Laure Babault, et amendement CS678 de M. Vincent Seitlinger (discussion commune).
Mon amendement prévoit que les quantités de résidus de production générées ainsi que les quantités échangées entre les entreprises au sein d'une même plateforme industrielle font l'objet d'une déclaration annuelle auprès de l'autorité administrative compétente.
Mon amendement de précision a pour objectif de lutter contre les transferts de résidus de production hors d'une plateforme industrielle, sans traçabilité ni respect de la réglementation applicable aux déchets. Il est vraiment nécessaire de garantir la bonne gestion des résidus de production en permettant le contrôle par l'administration.
Mon amendement a le même objet. La différence avec l'amendement CS336 est purement rédactionnelle.
Plus on organisera l'économie circulaire – notamment sur des plateformes industrielles au sein de la même entreprise ou entre diverses entreprises –, plus il faudra s'assurer de la traçabilité des quantités pour des raisons de sécurité.
Je comprends qu'il soit jugé important de mesurer l'utilisation du nouveau régime que nous instaurons pour renforcer l'économie circulaire au sein des plateformes industrielles. Mais, les entreprises concernées étant toutes des installations classées, elles sont déjà tenues de fournir un certain nombre d'informations à l'autorité administrative – en l'occurrence, la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) et le préfet. De plus, les inspecteurs chargés de ces installations peuvent demander des informations à tout moment. Il sera donc possible de connaître les quantités de résidus de production fabriquées et échangées. Avis de sagesse.
Monsieur Potier, la traçabilité existe déjà au niveau de chaque installation. Ces amendements légèrement différents prévoient un suivi complémentaire à l'échelle de la plateforme – et donc, il faut l'avouer, une charge administrative supplémentaire. Je comprends que l'Assemblée souhaite disposer de données agrégées sur les quantités de résidus utilisées comme matière première, pour pouvoir évaluer l'application de la loi dans deux ou trois ans.
J'étais un peu réservé, mais devant l'ampleur du soutien à ces amendements, je me rallie à l'avis de sagesse de la rapporteure – avec une petite préférence pour les amendements CS271 et identiques, largement soutenus, bien que le CS678 soit plus simple.
Notre groupe soutiendra ces amendements, car la traçabilité est essentielle pour l'avenir. Il est également nécessaire de disposer d'un registre national, qui nous sera vraiment utile lorsqu'arrivera le moment d'examiner la grande loi sur l'économie circulaire dont nous rêvons tous.
Je profite de ces amendements pour interroger de manière solennelle le ministre au sujet des substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées (Pfas).
À chaque amendement qui aborde la question des produits dangereux, on nous explique que tout est sous contrôle. Pourtant, des députés ont récemment fait analyser leurs cheveux : dans mon cas, les résultats montrent une concentration de Pfas dix fois supérieure à la normale, alors que je suis issu d'un territoire qui a été industriel dans le passé mais qui ne l'est plus guère. Ces contaminations extrêmement préjudiciables pour la santé trouvent probablement leur origine dans le passé industriel. Au moment où nous relançons l'activité industrielle, il est plus qu'important d'avoir des réponses précises sur ce sujet.
Monsieur le ministre, comment entendez-vous supprimer ce risque dans notre industrie – sachant que les industriels ont en permanence transformé des molécules interdites ? Il existe plus de 12 000 types de Pfas. Les analyses en ont testé douze, et ont montré leur présence dans les cheveux de quatorze des députés testés.
Pour la population, le suivi et la traçabilité sont absolument nécessaires – on peut s'en rendre compte aussi en travaillant sur la question des déchets des centrales nucléaires. Je me réjouis donc de l'avis de la rapporteure et du ministre délégué sur ce sujet essentiel.
Si la rapporteure exprime la même préférence que le ministre délégué, dans un souci de clarté, je propose le retrait des amendements en discussion commune au profit des amendements CS271 et identiques.
Je souhaite rassurer Mme Chikirou : que l'on adopte ou non ces amendements, les données sont disponibles au niveau de chaque installation industrielle. Les amendements proposent d'ajouter un étage – et donc une petite charge administrative supplémentaire –, ce qui se conçoit pour évaluer la loi.
Le débat public sur le Pfas a pris une importance politique depuis quelques mois. On connaît plus de 10 000 Pfas et un travail de fond a été engagé pour déterminer ceux qui sont dangereux. J'ai conscience que cela prend du temps, mais si vous interdisez tous les Pfas utilisés dans l'industrie européenne, des pans entiers de celle-ci vont sans doute disparaître. Il est donc nécessaire de poursuivre de manière urgente et rigoureuse les études menées en France et au sein de l'Union européenne (UE), puisque cinq États membres ont demandé l'interdiction d'un certain nombre de Pfas. Mais ce débat n'a rien à voir avec l'article dont nous discutons. D'autres amendements portent sur ce sujet et nous aurons l'occasion d'y revenir.
Les amendements CS336 et CS678 sont retirés.
La commission adopte les amendements CS271 et identiques.
Amendement CS1365 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback.
Le Sénat a adopté un amendement qui opère une clarification quant au statut des résidus de production qui sont similaires à une substance ou à un matériau qui aurait été produit sans avoir recours à des déchets. Toutefois, en créant un article spécifique pour traiter cette situation, il semble créer une « troisième voie ». C'est pourquoi il paraît nécessaire de rapprocher cette disposition de celle qui porte sur la sortie du statut de déchet, et donc de l'insérer à l'article L. 541-4-3 du code de l'environnement afin que soient couvertes des situations non prévues par le droit en vigueur.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, les amendements CS14 et identiques et l'amendement CS896, portant sur les alinéas 15 et 16, tombent.
Amendements identiques CS39 de M. Xavier Roseren, CS767 de M. Gérard Leseul et CS973 de M. Lionel Vuibert.
Le droit français ne reconnaît pas un statut de produit aux objets, substances ou mélanges ayant fait l'objet d'une sortie de statut de déchet dans un autre État membre de l'UE. Cela pénalise notre tissu industriel et profite aux sites industriels d'autres pays, vers lesquels sont orientés de tels produits issus de déchets.
Mon amendement vise à permettre aux industries françaises d'incorporer dans leurs processus de production des matériaux secondaires élaborés dans un autre pays de l'Union, en garantissant bien évidemment le respect de nombreuses conditions.
Cet amendement proposé par la société Michelin autorise les sites industriels à incorporer dans leurs processus de production des matériaux secondaires élaborés dans d'autres pays de l'UE, sous certaines conditions qui méritent d'être rappelées. Ces matériaux doivent notamment être conformes aux critères français de sortie du statut de déchet – lorsqu'ils existent – et respecter les dispositions de la directive-cadre européenne sur les déchets de 2008.
Incorporer des matériaux secondaires issus d'autres pays de l'Union peut être extrêmement intéressant et favoriserait des modes de production plus vertueux.
Je comprends l'idée de renforcer l'économie circulaire au sein de l'Union européenne. Mais des règlements européens prévoient des procédures et des critères harmonisés pour que certains matériaux ou certaines substances ne soient pas considérés comme des déchets.
Pour les autres cas, votre proposition n'est pas sans risque, car il n'existe pas de procédure obligeant un producteur d'un État membre à prouver à l'échelle européenne qu'il a respecté les conditions pour la sortie de déchet sur le territoire de son État. Nous aurions du mal à le contrôler.
Enfin, il ne revient pas à la loi française de déterminer les règles de transfert de déchets entre États.
C'est une excellente idée, mais elle risque de favoriser une concurrence déloyale pour nos producteurs nationaux de déchets. Comme l'a très bien dit la rapporteure, les critères et les contraintes ne sont pas forcément les mêmes ailleurs et nous risquons d'importer des matières premières qui, en France, ne pourraient pas sortir du statut de déchet.
La Commission européenne a entamé un travail d'harmonisation des règles à l'échelle européenne, mais cela va être long. Cela a déjà été réalisé pour certains déchets métalliques, mais il faut le faire de manière systématique.
L'amendement que vous avez voté et cet article permettent déjà de simplifier les choses, puisque l'on instaure un régime de sortie implicite du statut de déchet. Importer des déchets et les utiliser comme matériau de base dans le processus de production sera donc déjà beaucoup plus simple qu'actuellement. Demande de retrait.
Je soutiens ces amendements. L'idée sous-jacente est de lutter contre les filières illégales. On ne peut pas ignorer qu'il existe des trafics en la matière au sein même de l'UE. Il s'agit donc de s'en prendre à ces filières, qui constituent le principal danger de concurrence déloyale pour l'industrie française.
J'entends vos arguments, mais cet amendement propose exactement l'inverse : il relâche, certes à la marge, les contraintes sur l'importation de déchets en France ; il augmente donc plutôt le risque que vous évoquez. Je comprends l'objectif de simplifier la circulation des bons déchets au sein de l'Union pour pouvoir les utiliser comme sous-produits, mais le dispositif proposé est contre-productif. Nous pourrons en reparler d'ici à la séance publique.
Je retire mon amendement, mais gardons à l'esprit qu'il ne faut pas pénaliser notre industrie. Elle doit bénéficier des mêmes conditions que ses concurrents en Europe.
Je maintiens mon amendement, mais je suis disposé à discuter avec la rapporteure d'une amélioration rédactionnelle d'ici à la séance.
Cela étant, je ne comprends pas complètement votre argumentation sur le risque de baisse de qualité des produits importés, monsieur le ministre. Il doit être possible de vérifier leur conformité.
Le risque est de ne pas pouvoir vérifier que les règles sont effectivement respectées. On déléguerait à d'autres pays le soin de réaliser des contrôles, en appliquant des règles qui ne sont pas tout à fait les nôtres.
Je le répète monsieur Roseren, la sortie implicite du statut de déchet facilitera beaucoup les choses, y compris pour les déchets importés.
Je vais bien sûr faire confiance au ministre et retirer mon amendement. Mais il s'agit quand même d'un véritable sujet pour la compétitivité de certaines entreprises françaises, qui doit être regardé de très près.
Les amendements CS39 et CS973 sont retirés.
La commission rejette l'amendement CS767.
Amendement CS117 de Mme Pascale Boyer, amendements identiques CS270 de Mme Christelle Petex-Levet et CS1016 de M. Rémy Rebeyrotte (discussion commune).
Une opération de sortie de statut de déchet effectuée par une installation de production peut être similaire à celle réalisée dans une installation de traitement de déchet. L'amendement CS117 vise à garantir le respect des mêmes exigences environnementales, quelle que soit l'installation concernée. Il propose pour cela de compléter l'article par souci de cohérence avec la nomenclature ICPE actuelle.
Les exploitants des installations de production ont désormais la possibilité de réaliser une sortie de statut de déchet, sous leur responsabilité et sans cadre fixé par l'administration. En l'absence de cadre réglementaire spécifique, la définition des installations de production proposée par mon amendement a pour objet de garantir des exigences minimales de traçabilité et de préservation de la santé humaine. Les entreprises voulant remettre sur le marché leurs déchets sous le statut de produit seraient obligées d'être classées ICPE et seraient ainsi contrôlées par les Dreal.
Il s'agit en effet de préciser la notion d'installation de production afin de garantir des contrôles par les Dreal.
Vous souhaitez revenir à l'état du droit antérieur. Or, nous souhaitons élargir à toutes les installations la possibilité de réaliser une sortie du statut de déchet, même s'il ne s'agit pas d'ICPE. C'est ce qui avait été prévu par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (loi Agec) en matière de sortie explicite de statut de déchet, avec la modification du I de l'article L. 541-4-3 du code de l'environnement. Par ailleurs, les installations qui ne sont pas des ICPE doivent respecter l'ensemble des réglementations sur les produits et peuvent faire l'objet de contrôles.
C'est en élargissant les possibilités que nous favoriserons l'économie circulaire.
La nouvelle rédaction de l'alinéa 5 qui résulte de l'adoption de l'amendement CS1353 de la rapporteure prévoit que l'utilisation des résidus ne doit pas avoir d'effet sur la santé humaine et l'environnement. Les amendements sont donc satisfaits. Leur rédaction est par ailleurs beaucoup trop restrictive et va à l'encontre de la loi Agec, car elle interdirait aux entreprises qui ne sont pas des ICPE d'utiliser des déchets.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques CS517 de Mme Pascale Boyer, CS600 de Mme Huguette Tiegna et CS656 de Mme Astrid Panosyan-Bouvet, et amendement CS1137 de Mme Sophia Chikirou (discussion commune).
L'augmentation du coût des matières premières conduit à une augmentation des vols dans les déchetteries, notamment en vue de l'exportation. Ces pratiques sont de plus en plus le fait de filières organisées. En France, plus de 250 000 tonnes d'équipements électroniques usagés transitent par des filières illégales, soit un quart du gisement total. L'article 4 du projet permet au ministre chargé de l'environnement d'instaurer des sanctions administratives en cas de transfert illicite de déchets en dehors du territoire national.
Par esprit de cohérence, mon amendement vise à s'assurer que les sanctions puissent bien s'appliquer et que les équipements collectés soient considérés comme des produits usagés ou des déchets.
En raison de l'exportation parfois sauvage de la matière première, les filières de recyclage voient se tarir complètement leurs ressources. C'est notamment le cas dans le domaine du recyclage de l'électroménager, qui est assuré la plupart du temps par des entreprises d'insertion.
L'amendement CS656 propose d'agir davantage contre les transferts illicites par le biais d'amendes administratives, afin de préserver un peu la matière première de nos filières nationales de recyclage. C'est une manière de moins polluer et de conserver une activité importante de recyclage en France.
Tout a été dit. Lorsque l'on auditionne les acteurs des filières de réemploi, de reconditionnement et de recyclage, ils soulignent les difficultés qu'ils rencontrent pour accéder aux gisements. C'est un immense enjeu, qui n'est pas bien pris en compte dans notre pays – même si nous n'en sommes peut-être qu'au début. Il faut élaborer des plans pour mieux s'organiser. Le gisement, c'est un vrai business : on pourra créer des centaines de milliers d'emplois si on arrive à récupérer les produits usagers qui ne sont pas des déchets.
Ajouter dans le texte la petite précision proposée par les amendements permet de préparer la suite et de mieux soutenir les éco-organismes et les structures de l'économie sociale et solidaire (ESS) qui se développent dans ce secteur. Tous les groupes insistent sur l'importance de cette modification.
Il est important que les sanctions restent réservées aux déchets. L'article est bien situé dans le chapitre du code de l'environnement consacré à la prévention et à la gestion des déchets. Mais, de fait, ces amendements sont satisfaits dans la mesure où des produits usagés abandonnés répondent à la définition de ce qu'est un déchet.
Tout ce que vous dites est vrai, madame Chikirou, mais votre amendement est satisfait – et heureusement. Si vous laissez sur la voie publique une machine à laver flambant neuve, elle devient un déchet !
On sait qu'en France nous recyclons moins qu'ailleurs et qu'il faut trier davantage pour développer les filières de réutilisation. Mais cet amendement ne permettra pas de le faire. Pour cela, il faut des campagnes de mobilisation et sans doute évaluer les outils qui figurent dans la loi Agec.
En outre, les rédactions proposées se substituent à l'alinéa 14 du texte. Ce n'est pas souhaitable, car cela conduit à supprimer la disposition qui permet d'articuler les sanctions relatives au trafic transfrontalier avec les autres amendes qui existent en matière de gestion des déchets.
Demande de retrait. Nous pouvons en reparler d'ici à la séance.
Nous sommes confrontés à la réalité des vols de matériaux – laissés sans surveillance parfois pendant des mois – commis sur les sites des éco-organismes. Il convient de renforcer les sanctions prévues pour ce type de trafic, en réprimant non seulement les vols de déchets mais aussi ceux de produits usagés.
Nous allons maintenir l'amendement mais nous sommes d'accord pour réfléchir à son amélioration d'ici à la séance.
Les sanctions s'appliquent aux objets abandonnés sur la voie publique, comme la machine à laver dont je parlais, qui sont considérés comme des déchets. Sont-elles suffisantes ? C'est un autre débat que vous pourrez ouvrir en séance.
Les amendements sont satisfaits, et ne permettent de surcroît pas d'apporter une réponse au problème majeur qu'ils soulèvent.
Les amendements n'auront pas été inutiles si, d'ici à la séance, nous parvenons à nous accorder sur un outil pour améliorer l'effectivité des sanctions.
La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire (CDDAT) doit se saisir de la question des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP). Le secteur de l'économie sociale et solidaire a le sentiment d'être dépossédé par les industriels qui obéissent à des logiques d'optimisation financière. Cette tendance pénalise le recyclage et nuit à sa qualité. Il convient à la fois de renforcer les contrôles et de moraliser le secteur des éco-organismes.
Vous avez raison, monsieur Potier. La CDDAT doit s'emparer de ces sujets. Saisissons le président Jean-Marc Zulesi et travaillons de manière transpartisane. Ce travail sera aussi l'occasion de répondre au questionnement fort légitime de M. Fournier sur les Pfas.
Une réorganisation complète s'impose dès lors que le modèle économique des entreprises repose désormais sur la mainmise sur le gisement. Auparavant, les entreprises refusaient de prendre en charge leurs déchets, raison pour laquelle les filières REP ont été créées. Aujourd'hui, elles souhaitent se les réapproprier pour s'inscrire dans une démarche de développement durable. Tant mieux, mais nous devons tout repenser en protégeant l'économie sociale et solidaire, qui pourrait sinon être la grande perdante. Cela ne peut pas être traité dans le présent projet de loi.
L'examen de l'amendement CS820 de Vincent Thiébaut sera l'occasion d'un débat sur les sanctions que demande Mme Chikirou. Je vous invite à retirer les amendements.
Dans mon territoire, une machine à laver neuve abandonnée sur le trottoir n'y reste jamais longtemps !
Les maires, ou les intercommunalités si la compétence en matière de déchets leur a été transférée, sont dotés d'un pouvoir de police. Mais ils sont confrontés à la difficulté à l'exercer et à faire appliquer les sanctions, notamment faute des moyens nécessaires. Il n'est pas facile d'identifier la personne qui a déposé l'objet sur la voie publique.
J'entends l'exemple de la machine à laver, mais la vraie question concerne les filières de vol organisé : comment les démanteler ?
L'économie circulaire est à la fois une composante de la décarbonation de l'industrie et un moyen d'économiser les matières premières.
Le groupe d'études « Gestion des déchets, économie circulaire, économie verte », que je préside, se tient à la disposition de la CDDAT pour travailler, avec le groupe d'étude « Économie sociale et solidaire et responsabilité sociétale des entreprises », à des solutions, ainsi que nous y a invités le président Millienne.
Les deux groupes d'études qu'a cités Mme Tiegna organisent prochainement une réunion avec les principaux acteurs du recyclage et de l'économie circulaire.
Ce n'est pas la machine à laver abandonnée sur le bord de la route que visent ces amendements, mais les filières illégales vouées à l'exportation qui privent nos entreprises d'un gisement. Je maintiens donc le mien.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques CS118 de Mme Pascale Boyer, CS183 de Mme Émilie Bonnivard, CS330 de Mme Danielle Brulebois et CS1103 de Mme Anne-Laure Babault.
Afin de développer l'économie circulaire, le nouvel article L. 541-4-5 du code de l'environnement ne confère pas le statut de déchet à un résidu de production lorsque celui-ci est similaire à une substance ou un matériau qui aurait été produit sans avoir recours à des déchets.
Cette disposition va dans le bon sens. Toutefois, afin de garantir tant la protection de l'environnement que la conformité au droit européen, l'amendement vise à exclure les déchets dangereux du champ d'application du nouvel article.
En vertu de votre amendement, les résidus de production, qui pourraient constituer des déchets dangereux, ne pourraient pas échapper au statut de déchet.
Or le résidu de production ne peut pas constituer un déchet dès lors qu'il doit respecter les conditions posées au I de l'article L. 541-4-3 du code de l'environnement, aux termes duquel il « remplit les exigences techniques aux fins spécifiques et respecte la législation et les normes applicables aux produits ». Les résidus de production pourraient être similaires à des produits dangereux mais pas à des déchets dangereux.
Nous avons évoqué ce point hier et nous avons convenu de retravailler l'alinéa 5 pour intégrer les déchets dangereux. Je vous invite donc à retirer les amendements.
Les amendements CS183, CS330 et CS1103 ayant été retirés, la commission rejette l'amendement CS118.
Amendements identiques CS768 de M. Gérard Leseul et CS1174 de M. Philippe Bolo.
Il s'agit d'assimiler au transfert illicite de déchets l'exportation de produits textiles d'habillement contenant des fibres plastiques et devenant des déchets dans le pays destinataire. Autrement dit, ces exportations seraient interdites vers des pays qui ne disposent pas de filière de retraitement des plastiques. On sait que ces textiles sont l'une des sources de la pollution plastique. Le textile est la deuxième ou troisième industrie la plus polluante, d'abord en raison des pesticides – presque un quart des pesticides mondiaux sont utilisés pour le coton – mais aussi des fibres plastiques, qui se comptent en millions de tonnes. Ces amendements sont donc précieux.
Un grand pays soucieux des droits humains et environnementaux doit en effet s'interroger, car ce qui peut sembler de prime abord une bonne idée – exporter nos vêtements pour une seconde vie – s'avère en être une mauvaise.
Les quantités exportées sont très importantes, faute d'un tri suffisant. Sur place, nombre de vêtements n'ont ni valeur, ni utilité : ils finissent dans la nature, par manque d'infrastructures locales pour les traiter, participant ainsi à la pollution de l'eau et des sols. Ces vêtements souvent issus de la fast fashion sont, du fait de la présence de fibres synthétiques, responsables de pollution plastique.
Cet amendement d'appel, qui avait également été déposé par la sénatrice Angèle Préville, souligne l'urgence de remédier au problème. Au lieu de les envoyer dans des pays qui n'ont pas les moyens de les gérer, soyons responsables des déchets que nous produisons.
S'il est important de limiter l'exportation de produits textiles contenant du plastique, celle-ci ne peut constituer un transfert illicite de déchets puisque lesdits produits ne sont pas des déchets.
Le sujet est essentiel et il ne sera pas traité par ces amendements. Aujourd'hui, une marque que je ne citerai pas change de collection tous les jours ! C'est un modèle auquel personne ici n'adhère. Il faut aussi prendre en considération la dimension sociale : d'une part, certaines personnes, notamment les jeunes, en profitent en termes de pouvoir d'achat ; d'autre part, on connaît les conditions dans lesquelles ces produits sont fabriqués.
Votre rédaction interdit les exportations de produits textiles neufs qui pourraient devenir des déchets ailleurs. En vertu de la loi Agec, il est interdit de jeter des collections non vendues. Or, on peut imaginer que celles-ci soient exportées et deviennent, dans certains cas, des déchets, et dans d'autres non. Je vous invite donc à retirer l'amendement.
S'agissant de la fast fashion, mon collègue Bruno Le Maire a annoncé avoir saisi la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes aux fins d'enquête sur ces pratiques abusives. La réglementation de telles activités n'est pas simple – l'affichage environnemental peut être une piste intéressante, selon les acteurs de la « slow fashion » que j'ai consultés. Les commissions de l'Assemblée nationale ont un rôle à jouer dans l'indispensable travail au long cours qui doit être mené sur le sujet.
Je ne suis pas sûr de pouvoir défendre un amendement à venir sur l'exportation des déchets plastiques hors de l'Union européenne.
Le traitement de ces déchets constitue une ressource à terme pour les pays européens. En outre, certains armateurs tels que CMA-CGM refusent déjà de transporter ce genre de déchets hors de l'Union. Nous devons continuer dans la voie tracée par la loi Agec lorsque nous avons interdit la destruction des invendus de la fast fashion.
Pour une fois, monsieur le ministre délégué, adoptons les amendements ! Je m'engage à accepter vos modifications en séance. Le sujet est suffisamment important pour que le Parlement marque sa volonté.
La commission adopte les amendements.
À la demande de la rapporteure, l'amendement rédactionnel CS652 de Mme Delphine Lingemann est retiré.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CS1239 et CS1236 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Amendement CS769 de M. Gérard Leseul.
L'amendement vise à supprimer le délai maximal de trois ans après le constat de l'infraction au-delà duquel le ministre chargé de l'environnement ne peut plus infliger d'amende en cas de transfert illicite transfrontalier de déchets.
Cela reviendrait à rendre le prononcé d'une sanction administrative imprescriptible. Avis défavorable.
Défavorable. La suppression du délai de prescription est contraire à un principe général du droit français.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'amendement rédactionnel CS1237 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Amendement CS770 de M. Gérard Leseul.
J'entends l'argument sur l'imprescriptibilité : je vous propose donc de porter le délai de trois à cinq ans.
Un tel délai irait à l'encontre du règlement européen sur les douanes, lequel impose de conserver les documents de notification d'un transfert pendant trois ans.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS286 de Mme Géraldine Grangier.
Il s'agit d'instaurer des peines plancher ! Elles sont inconstitutionnelles.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS771 de M. Gérard Leseul.
Il est proposé de porter le plafond de l'amende encourue en cas de transfert illicite de cinq à dix fois le coût de traitement des déchets concernés.
Compte tenu de l'intensité capitalistique de l'industrie et du secteur des déchets, il n'est pas incohérent d'augmenter le montant de l'amende.
Le Sénat a déjà porté ce montant de trois fois, comme prévu initialement, à cinq fois le coût de traitement. Cela me semble raisonnable.
Il y a un risque de disproportion des amendes. Le Sénat a déjà augmenté le montant. C'est suffisant.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CS1238 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Amendement CS772 de Mme Anna Pic.
L'amendement tend à porter, en cas de récidive, à 5 % du chiffre d'affaires mondial le montant de l'amende pour transfert illicite transfrontalier de déchets.
Il est préférable d'infliger dès la première infraction, et non en cas de récidive, une amende dissuasive, calculée selon le coût de traitement des déchets si ces derniers n'avaient pas été transférés.
Nous soutenons l'amendement. Le montant des amendes en cas de concurrence déloyale est de 5 % du chiffre d'affaires. S'agissant d'infractions dont l'impact économique, sur l'environnement, la santé et la compétitivité des entreprises est autrement plus fort, il serait souhaitable que des sanctions au moins identiques s'appliquent. Ce serait aussi le signe de notre cohérence et de l'importance que les Européens attachent à ce sujet.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 4 modifié.
Après l'article 4
Amendement CS573 de M. Sébastien Jumel.
Il s'agit d'autoriser les chambres de commerce et d'industrie (CCI) à accompagner les entreprises industrielles dans la décarbonation de leur activité, en favorisant notamment le développement de l'économie circulaire.
Votre amendement me paraît satisfait, puisque la transition écologique et énergétique fait partie des domaines dans lesquels les CCI peuvent fournir des conseils et sur lesquels elles se sont engagées dans le contrat d'objectifs et de moyens.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS847 de Mme Marie-Noëlle Battistel et CS1157 de M. Philippe Bolo.
Afin de favoriser le verdissement des travaux de voirie, l'amendement a pour objet d'inciter dans les règlements de voirie à favoriser le réemploi des terres excavées, et d'éviter ainsi des transports de terres inutiles.
L'amendement a été travaillé avec Enedis. Il a pour but de changer de logique s'agissant de l'usage des terres excavées à l'occasion de travaux publics.
Vous rattachez votre amendement sur les règlements de voirie à la disposition du code de l'énergie qui autorise les concessionnaires du réseau d'électricité à procéder à tous les travaux nécessaires à l'établissement et à l'entretien des ouvrages sur la voie publique.
Il existe une réglementation spécifique sur les terres excavées lors de travaux publics qui peuvent être réutilisées par la personne en charge des travaux sur le même site dans un rayon de trente kilomètres sans devenir des déchets. La disposition s'applique pour tout type de travaux, donc également aux concessionnaires du réseau de transport et de distribution d'électricité. Si les terres excavées sont sorties du site, elles deviennent des déchets. Depuis avril 2021, il est possible de soustraire au statut de déchet ces terres si elles sont réutilisées pour des travaux d'aménagement et dans des opérations de génie civil.
Ainsi, il y aurait un risque qu'un règlement de voirie prévoie d'autres dispositions pour ces terres et entre en contradiction avec la réglementation actuelle.
Les terres pour faire des terrassements sont très recherchées. Je ne sais pas ce que vous a dit Enedis, mais aucune entreprise n'a aujourd'hui intérêt à aller chercher des terres à l'autre bout de la France – le transport coûte très cher, le réemploi sur place est facile.
Le code de l'environnement intègre déjà le principe européen de gestion de proximité de déchets. Le réemploi local des terres excavées s'impose, sachant que dans certains cas, il peut s'avérer impossible. Les amendements risquent d'introduire de la confusion en instaurant dans les règlements de voirie des obligations légèrement différentes de la réglementation générale. Je vous incite donc à les retirer.
Les amendements sont retirés.
Amendement CS1156 de M. Philippe Bolo.
L'amendement est retiré.
L'amendement CS980 de M. Lionel Vuibert est retiré.
Amendement CS125 de Mme Pascale Boyer.
Il s'agit de soutenir les projets destinés à valoriser les combustibles solides de récupération (CSR) pour produire de l'électricité et de la chaleur. Les CSR, considérés comme des déchets, ne sont pas suffisamment exploités. On enfouit encore trop de déchets qui pourraient être transformés en énergie. C'est inacceptable.
Depuis un décret publié en mars 2023, ces déchets particuliers peuvent alimenter des installations classées pour la protection de l'environnement – des installations de production d'énergie telles que des centrales thermiques et de production d'électricité. Votre amendement est donc satisfait. Je vous demande de le retirer.
Je le retire, mais j'appelle votre attention sur la nécessité de soutenir la filière des CSR. L'accompagnement n'étant pas suffisant actuellement, les collectivités préfèrent continuer à enfouir.
L'amendement est retiré.
Amendement CS1173 de M. Jimmy Pahun.
C'est l'amendement dont je parlais tout à l'heure, qui vise à interdire à partir de 2025 l'exportation des déchets plastiques hors de l'Union européenne.
Malgré le durcissement régulier de la réglementation, nous sommes incapables de garantir que nos déchets plastiques exportés sont traités par des filières de recyclage efficaces, sans risques pour la santé et l'environnement. Le choix de l'export nuit en outre au développement de filières nationales de recyclage et plus généralement à l'économie circulaire.
Par cet amendement, nous tenons un engagement fort de la majorité présidentielle : la réduction massive des exportations de déchets à l'étranger.
La mesure n'est évidemment pas d'application immédiate, afin de laisser le temps à l'écosystème de s'y préparer.
Nous partageons votre souhait de limiter la circulation de déchets plastiques à l'échelle mondiale et d'adopter des mesures contraignantes en ce sens. Toutefois, la loi française ne peut pas modifier un règlement européen, ni statuer pour les autres États membres en ce qui concerne leurs échanges avec les pays tiers. Demande de retrait, ou avis défavorable.
Votre amendement est satisfait puisque le règlement, à de très rares exceptions près que je vous communiquerai, interdit les exportations de déchets plastiques en dehors de l'Union européenne depuis le 1er janvier 2021. Cela n'enlève rien aux interrogations sur l'effectivité des contrôles que plusieurs d'entre vous ont relayées. Je vous remercie d'avoir remis sur le devant de la scène le sujet majeur de la pollution plastique.
Je peux témoigner de l'importance du sujet, après quatre ans de travaux à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) et trois rapports coécrits avec la sénatrice Angèle Préville. Tous les scientifiques s'accordent sur le rôle des exportations de déchets dans la pollution mondiale.
Il y a un mois, la France accueillait à l'Unesco 165 pays pour lancer le deuxième cycle de négociations en vue d'un traité international sur la pollution plastique. La France doit être à l'avant-garde de ce combat.
Nous soutenons cet amendement de bon sens. Les quelques exceptions mentionnées par le ministre sont quelques exceptions de trop.
Pour alimenter le gisement de recyclage des plastiques et s'assurer du traitement approprié des déchets, en évitant qu'ils se répandent un peu partout, et dans la mer au premier chef, il est nécessaire de marquer un refus très ferme des exportations hors de l'Union européenne des déchets plastiques.
Il est important d'éviter le transport des déchets dans des pays extérieurs à l'Union européenne qui, bien souvent, ne disposent pas de structures permettant de les traiter. Le simple tri effectué en vue de leur transformation n'est pas optimal : c'est pourquoi l'on retrouve des déchets plastiques un peu partout, notamment dans des rivières.
Dans le cadre de notre coopération avec des pays amis, il conviendrait sans doute d'y favoriser la création de structures permettant la transformation sur place des déchets plastiques en matières premières.
De nombreux travaux ont été réalisés dans le cadre de l'Opecst, qui est une structure bicamérale, par notre collègue Philippe Bolo et la sénatrice Angèle Préville. Je soutiens cet amendement qui, en dépit de quelques problèmes rédactionnels, pose une excellente question à laquelle nous devons tenter de répondre. Cela fait longtemps que nous travaillons sur ce sujet. Si nous voulons vraiment limiter le commerce international de déchets plastiques, alors nous devons prendre des mesures.
Par ailleurs, nous tournons depuis tout à l'heure autour du sujet du contrôle de l'efficacité des mesures adoptées. Il faudra aussi que la France prenne des initiatives en la matière.
Une très large majorité des parlementaires ici présents me semblent convaincus que ce genre de sujet doit être traité au niveau européen. Tel est bien le cas : c'est donc le règlement européen qu'il convient de modifier. Au pire, votre amendement introduira de la confusion ; au mieux, il sera inefficace car les opérateurs passeront dans le trou de souris des exemptions pour exporter leurs déchets en Italie et, à partir de là, en dehors de l'Union européenne.
Je comprends l'objectif et je conviens du besoin de renforcer les moyens de contrôle. Là encore, la question n'est pas simple du fait de la libre circulation des biens au niveau européen, à laquelle je suis favorable.
On me dit qu'une discussion est en cours, au niveau européen, pour définir des conditions plus restrictives. Je découvre cette information en même temps que vous : je serai peut-être en mesure de vous en dire davantage en séance publique. En attendant, je vous demande une nouvelle fois de bien vouloir retirer cet amendement inopérant, contraire au règlement européen, qui traite d'un bon sujet mais d'une mauvaise manière.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS820 de M. Vincent Thiébaut.
La délinquance autour de la gestion des déchets industriels implique à la fois de simples citoyens et des groupes très organisés désireux de réaliser un commerce très lucratif. Je propose donc le doublement des sanctions pénales encourues en cas de gestion illégale de déchets industriels. Ces peines concernent non seulement l'usage à l'étranger d'un déchet de façon non conforme, mais également la création de sites illégaux de gestion de déchets et l'exportation illégale et non déclarée de déchets. Le but est de décourager ces pratiques plus que nocives pour l'environnement et allant à l'encontre de nos valeurs.
Vous souhaitez porter les peines encourues à quatre ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende. Il me semble important que les sanctions soient dissuasives : je donne donc à votre amendement un avis favorable.
Comme cela a été dit, le vrai sujet n'est pas le dépôt de machines à laver au bord des routes !
Dans la mesure où il ne modifie que le I de l'article L. 541-46 du code de l'environnement, votre amendement concerne les seules infractions commises par des individus. Afin de nous assurer que le durcissement des sanctions s'applique aussi aux infractions commises en bande organisée, il conviendra de modifier également le VII du même article. Plutôt que de proposer un sous-amendement un peu complexe, je vous suggère d'adopter l'amendement tel quel dès aujourd'hui : nous opérerons en séance les modifications nécessaires.
Le sujet est effectivement très important. La déchetterie de Saint-Chamas, dans ma région, est devenue illégale après avoir constitué un stock de déchets supérieur au volume autorisé ; comme par hasard, un grave incendie s'y est déclaré, qui a posé d'importants problèmes en termes de santé publique. La déchetterie a été en partie carbonisée, et il reste 14 000 tonnes de déchets que plus personne ne gère : l'État refuse de prendre la main, considérant qu'il s'agit de déchets industriels non dangereux, tandis que la commune n'a pas les moyens d'agir. Je vous invite donc à adopter cet amendement.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS608 de M. Alexandre Loubet.
Vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre délégué, la France est l'un des pays qui recyclent le moins. Aussi demandons-nous au Gouvernement un rapport présentant une stratégie nationale dans ce domaine, à savoir « les voies et moyens afin de renforcer la filière française de gestion, notamment le ramassage, le traitement, le recyclage et la valorisation des déchets ».
Si près de 90 % des déchets des entreprises sont orientés vers des filières de valorisation, dont deux tiers vers le recyclage, seuls 47 % des déchets ménagers sont valorisés. Il existe un consensus pour améliorer cette filière dans notre pays. Malheureusement, elle relève essentiellement de la compétence des régions et manque donc cruellement d'organisation et de cohérence à l'échelle nationale.
Je vous rassure, nous disposons déjà de nombreuses informations à ce sujet. En outre, diverses règles européennes s'opposent à ce que nous imposions une préférence nationale s'agissant du territoire sur lequel les déchets doivent être traités et valorisés. Avis défavorable.
Le Parlement est en train d'évaluer la loi « Agec », trois ans après sa promulgation. Par ailleurs, le présent projet de loi modifie des dispositions relatives à la gestion des déchets. De tels rapports ne me paraissent donc pas nécessaires. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
La réunion est suspendue de dix heures trente à dix heures quarante.
CHAPITRE IV Réhabiliter les friches pour un usage industriel
Article 5 : Faciliter les procédures existantes de cessation d'activité des installations classées pour la protection de l'environnement
Amendement CS566 de M. Sébastien Jumel.
Nous souhaitons que soient préservées toutes les garanties relatives à la remise en état et à la remise en sécurité écologique des sites en cessation d'activité. Aussi notre amendement CS566 vise-t-il à supprimer la procédure « défaut d'accord », qui permettrait paradoxalement aux exploitants d'installations classées de surseoir partiellement à leurs obligations de mise en sécurité environnementale d'un site.
Je défends par la même occasion l'amendement CS567, lequel vise à supprimer les procédures alternatives qui, de la même manière, permettraient aux exploitants d'ignorer les prescriptions supplémentaires formulées par le préfet. Par l'amendement CS568, qui est un amendement de repli, nous proposons l'adoption de dispositions plus contraignantes en matière de remise en état des lieux. Quant à l'amendement CS565, il prévoit plus globalement un véritable plan de reconversion écologique, économique et industrielle des sites en cessation d'activité. Nous flirtons peut-être là avec la loi visant à reconquérir l'économie réelle, dite loi Florange ; il n'en reste pas moins que la reprise de friches dans d'excellentes conditions, fluides, est un enjeu majeur nécessitant de réunir des garanties à la fois écologiques, industrielles et, plus largement, économiques.
L'objectif du projet de loi, qui me semble partagé, est de faciliter le développement de nos industries tout en assurant la réhabilitation des friches.
Du point de vue juridique, en supprimant le deuxième aliéna de l'article L. 512-6-1 du code de l'environnement, votre amendement CS566 entraînerait une différence de traitement entre les ICPE autorisées avant et après le 1er février 2004 en cas de désaccord entre les acteurs. Il créerait un vide juridique s'agissant des obligations de l'exploitant d'une ICPE autorisée avant le 1er février 2004 en termes d'objectifs de réhabilitation. Avis défavorable.
La France compte aujourd'hui 170 000 hectares de friches disponibles, et nous aurons besoin, dans les années qui viennent, de quelque 15 000 hectares de sites industriels supplémentaires. Les friches ne sont évidemment pas toutes au bon endroit au bon moment. Cependant, si nous voulons concilier nos objectifs de limitation de l'artificialisation des sols – un sujet dont les députés et sénateurs sont en train de débattre dans une autre instance – et de réindustrialisation, la réhabilitation des friches doit être notre priorité. Aussi l'article 5 vise-t-il à privilégier l'installation de nouvelles activités sur les friches industrielles. Pour ce faire, nous accélérons les procédures de cessation d'activité, afin de libérer du foncier industriel, et nous enrichissons les acquis de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (loi « Asap »). Notre objectif est clair : nous souhaitons avoir très vite 2 000 hectares de friches disponibles pour des projets industriels.
L'article 5 prévoit d'étendre les dispositions de la loi Asap aux cessations d'activité notifiées avant juin 2022, afin de gérer le stock et non le seul flux. Il permet à un tiers demandeur de se substituer plus facilement à l'exploitant pour réaliser la mise en sécurité du site. Il étend les pouvoirs du préfet pour permettre des cessations partielles d'activité. En somme, nous enlevons des petits cailloux dans les chaussures pour fluidifier et faire circuler le foncier.
Je donne un avis défavorable à l'amendement CS566 mais serai favorable à l'amendement CS567.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure, elle adopte l'amendement CS567 de M. Sébastien Jumel.
En conséquence, les amendements CS568 de M. Sébastien Jumel et CS1095 de Mme Cyrielle Chatelain tombent.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CS1349 et CS1350 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CS565 de M. Sébastien Jumel.
Amendement CS1096 de Mme Cyrielle Chatelain.
Je rejoins totalement le ministre délégué s'agissant de l'importance du traitement de ces friches. Élue d'une circonscription qui a une plateforme chimique, je vois tout l'intérêt de ces industries pour la vie du territoire, mais aussi l'impact qu'elles peuvent avoir sur la pollution des sols et sur la santé des habitants. Avec notre collègue Charles Fournier, j'ai rencontré il y a quelques jours les représentants d'Arkema, qui nous ont décrit tout le travail réalisé par les industriels pour assurer la sécurité des sites. Il n'empêche que les pollutions passées se sont accumulées et qu'il continue d'y avoir des rejets.
Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 512-6-1 du code de l'environnement, l'exploitant est tenu de faire attester, par une entreprise certifiée dans le domaine des sites et sols pollués, de la qualité de ses propositions et de la manière dont elles sont mises en œuvre. C'est une bonne chose. Cependant, je constate que les collectivités n'ont pas forcément la capacité de faire de même et d'établir une relation équilibrée avec l'exploitant ; or la sécurité est garantie par les contre-expertises. Aussi proposons-nous de donner aux collectivités la possibilité de demander, elles aussi, à une entreprise certifiée, dans les trois ans suivant la publication des résultats des analyses réalisées par l'exploitant, de se prononcer sur le caractère adapté des mesures mises en œuvre. Cette contre-expertise serait à la charge de l'exploitant, en vertu du principe pollueur-payeur. Pour résumer, cet amendement vise à mieux armer nos collectivités pour qu'elles puissent s'assurer que les sites sont rendus dans un état conforme à leur future utilisation.
Cette mesure présente un risque d'insécurité juridique pratique pour les exploitants. Des outils existent déjà. Par ailleurs, c'est le préfet qui assure la police dans ce domaine. Les collectivités peuvent demander des expertises, mais en les finançant. Avis défavorable, donc, d'autant que cet amendement accentuerait les inquiétudes des industriels.
Je suis circonspect. Une telle mesure risquerait paradoxalement de déresponsabiliser les industriels : « si c'est l'État qui paie, laissons-le agir ! » Du reste, ce contrôle est déjà prévu par la loi Asap. Avis défavorable.
C'est consternant. Il existe des cas où la dépollution a été confiée à des opérateurs ayant pignon sur rue, qui ont fait n'importe quoi et ont tout de même été défendus, y compris par des députés de la majorité, au cours de la législature précédente. L'entreprise Valgo, qui a essayé de dépolluer une friche pétrolière dans ma circonscription, a même enterré de l'amiante et des flaques d'hydrocarbures remontent à la surface dès qu'il fait un peu chaud. Cela fait trois ans que nous sommes empêtrés dans cette histoire ! La dépollution est un travail très long et très complexe : une double expertise n'est donc vraiment pas de trop. Or les collectivités n'ont pas les moyens de l'assurer. Je vous invite à adopter cet amendement de bon sens.
J'entends que vous vouliez sécuriser les industriels. Pour ma part, je souhaite sécuriser les citoyens – nous avons déjà eu le même débat hier. Il convient donc d'instaurer un droit de contre-expertise financé par les exploitants eux-mêmes, en vertu du principe pollueur payeur.
Je suis confrontée, dans ma circonscription, à une situation semblable à celle décrite hier par notre collègue Clémence Guetté : certaines analyses prouvent que les œufs et les légumes cultivés dans la terre ne doivent pas être consommés. Les personnes qui cultivent et mangent leurs légumes depuis des années sont inquiètes. Si nous voulons les rassurer et si nous voulons assurer l'acceptabilité des projets industriels, nous devons garantir à la collectivité qui représente les habitants une possibilité de contre-expertise. C'est ainsi que nous pourrons assurer la dépollution des sites et la sécurité sanitaire des habitants, en collaboration avec les industriels.
De nombreuses petites collectivités locales accueillent des sites industriels, souvent pour leur plus grand bonheur, du fait des retombées en termes d'emploi local, mais aussi parfois avec un peu d'inquiétude, notamment lorsqu'est envisagée la fermeture de ces sites. Il nous semble donc indispensable d'aider ces collectivités à mener une contre-expertise relative à la dépollution des sols. Il ne serait pas logique qu'elles doivent en supporter le coût, d'autant que la plupart d'entre elles sont déjà étranglées et n'ont pas les moyens de financer ces dépenses. Nous soutenons donc cet amendement, en précisant bien que les analyses seront à la charge de l'exploitant, et non de l'État comme M. le ministre délégué a pu le penser tout à l'heure.
Je m'oppose à cet amendement. En prévoyant des avis contradictoires, vous ne ferez qu'allonger les délais – les expertises de dépollution sont très longues – et alourdir les procédures. Les services de l'État, en particulier les Dreal, sont censés avoir des capacités d'analyse et d'expertise, d'autant que leurs moyens ont été considérablement renforcés dans mon territoire. Les contraintes supplémentaires que vous voulez instaurer ne garantiront pas nécessairement un avis éclairé.
J'ai bien entendu vos exemples spécifiques. Ne pourrait-on pas s'organiser pour porter une attention particulière à certaines situations particulières ? Je ne pense pas que tous les cas aient la même complexité et nécessitent un double avis ou une expertise contradictoire. Est-il envisageable de limiter cette procédure plus lourde aux situations qui en valent la peine ?
Je ne nie pas que certains opérateurs ont « fait n'importe quoi », pour reprendre l'expression de Mme Dufour. Je ne les citerai pas, puisque des procédures judiciaires sont en cours, mais il y a clairement eu des comportements inacceptables. C'est la raison pour laquelle la représentation nationale a voté, dans le cadre de la loi Asap – que vous êtes sans doute en train d'évaluer puisqu'elle a été promulguée il y a trois ans –, les dispositions dont nous parlons aujourd'hui, qui obligent l'entreprise à payer un bureau d'études pour montrer que le travail de dépollution a été fait. Les exemples cités datent d'avant le vote de ces dispositions ; de telles situations ne sont plus envisageables à l'avenir.
Je rejoins les arguments de Mme Bonnivard. Je vous invite à ne pas voter cet amendement et à vous contenter, si je puis dire, du droit existant, qui est déjà beaucoup plus contraignant qu'il ne l'était auparavant. Demande de retrait ; à défaut, je maintiendrai mon avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS151 de Mme Christelle Petex-Levet, CS181 de Mme Pascale Boyer et CS976 de M. Lionel Vuibert.
Le 3° de l'article 5 confie au préfet un pouvoir supplémentaire, dont l'impact sur les conditions d'exercice des missions des exploitants d'ICPE est tel qu'un décret en Conseil d'État devrait en préciser les modalités d'application. Il convient notamment de prévoir les conditions de la concertation préalable entre le préfet et l'exploitant s'agissant de la cessation d'activité partielle. La restriction du droit de propriété doit être limitée à ce seul objectif et encadrée par le Conseil d'État.
Alors que nous avons souvent du mal à trouver des terrains industriels et que nous risquons de rencontrer bien des difficultés dans la mise en œuvre du principe de zéro artificialisation nette, une telle mesure permettrait effectivement d'accélérer un certain nombre de dossiers. Ces amendements apportent une vraie solution en matière de foncier et d'environnement ; ils éviteront que des sites industriels partent à la dérive.
Nous sommes tous motivés par la même volonté d'accélérer la réhabilitation des friches.
Ces amendements ont trois objets.
Le premier est de limiter la procédure proposée à l'implantation d'activités industrielles. A priori, cela semble une très bonne idée, car nous souhaitons tous favoriser l'industrie. Du point de vue juridique, cependant, ces amendements empêcheraient le préfet de faire usage de son pouvoir de mise en demeure dans un autre but que de faciliter l'implantation d'activités industrielles. Or il peut également être utile, notamment dans des zones d'activités mixtes, de libérer des terrains industriels pour étendre une surface commerciale ou des installations de services, par exemple.
Ces amendements prévoient en outre un encadrement accru de cette nouvelle possibilité via la concertation avec l'exploitant. Cette mesure pourrait aller à l'encontre de notre logique de réhabilitation des espaces artificialisés.
Enfin, le recours à un décret en Conseil d'État ne me semble pas nécessaire puisqu'il n'est pas porté atteinte au droit de propriété. Il s'agit non de saisir le terrain ou d'obliger le propriétaire à vendre, mais simplement de s'assurer qu'un industriel ne laisse pas dormir une partie d'un site dans le seul but d'échapper à ses obligations de remise en état. Avis défavorable.
Le préfet n'impose pas la mise à l'arrêt d'un site : je ne souhaite pas qu'il prenne une telle responsabilité opérationnelle, qui relève de l'exploitant. Il ne fait que constater, en droit, la cessation d'activité lorsque le site est déjà fermé dans les faits, et il permet ainsi la réhabilitation de ce dernier. Vos amendements risquent de fragiliser ces procédures essentielles. Ils prévoient en outre un décret d'application qui n'est pas nécessaire.
Le ministre de l'industrie rêverait que chaque friche redevienne industrielle ou qu'elle le reste. Toutefois, en forçant les choses dans le droit, vous risquez de limiter très fortement les réhabilitations de sites. Vous empêcherez, par exemple, la transformation d'une partie de site en dépôt logistique ; or on sait bien que la logistique n'est jamais très loin de l'industrie.
Je demande donc le retrait de ces amendements. Nous sommes évidemment favorables à l'accélération des procédures – c'est d'ailleurs ce que fait le présent projet de loi, notamment son article 5 – mais vos propositions vont un peu trop loin.
Les amendements sont retirés.
Amendements identiques CS1393 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, CS724 de M. Hadrien Ghomi et CS1171 de M. Frédéric Zgainski.
Tels qu'ils sont rédigés, les alinéas 13, 14 et 15 relatifs au tiers demandeur introduisent une imprécision s'agissant tant de l'enchaînement des étapes que des responsabilités des acteurs.
Seul l'exploitant peut prendre l'initiative de la mise à l'arrêt de son installation, qui ne peut en aucun cas être anticipée de manière unilatérale par un tiers. Par ailleurs, le dépôt d'un dossier de demande de substitution avant même que la procédure de cessation ait été engagée par l'exploitant conduirait l'administration à instruire un dossier reposant sur une mise à l'arrêt hypothétique, avec un doute quant aux intentions réelles de l'exploitant.
Si rien n'empêche un exploitant et un tiers demandeur d'échanger de manière informelle avec l'administration dans le cadre de leurs réflexions sur un éventuel projet de fin de vie industrielle d'un site, il est préférable de faire coïncider l'engagement de la procédure officielle de demande de constitution en tant que tiers demandeur avec une étape bien identifiée de la vie du site, en cohérence avec les intentions exprimées par l'exploitant.
Afin d'accélérer la procédure de réhabilitation et de mettre le site en sécurité le plus rapidement possible après l'arrêt définitif de l'installation, le tiers demandeur devrait être impliqué dès la notification par l'exploitant de la cessation d'activité à venir, sans attendre la mise en œuvre concrète de cette cessation d'activité, comme le prévoit le droit actuel.
Il est donc proposé de modifier l'article L. 512-21 du code de l'environnement afin de permettre au tiers demandeur de solliciter auprès du préfet sa substitution à l'exploitant dès la notification de cessation d'activité. Cette notification intervient au moins trois mois avant la mise à l'arrêt définitive pour les installations soumises à autorisation ou à enregistrement, mais rien n'empêche un exploitant de procéder à cette démarche bien en amont s'il est contacté par un tiers demandeur souhaitant anticiper les travaux à réaliser.
La commission adopte les amendements.
Amendement CS121 de Mme Pascale Boyer.
Il convient de revenir sur la suppression de la responsabilité qui incombe au dernier exploitant d'une ICPE de réaliser les travaux de réhabilitation en cas de défaillance du tiers demandeur et d'impossibilité de mise en œuvre des garanties financières.
Votre amendement me paraît contraire à notre souhait d'accélération. J'y suis donc défavorable.
Dans l'esprit de l'article 5, le tiers demandeur, dès lors qu'il a pris la responsabilité du terrain, assume tout ce qui va avec. Or vous souhaitez qu'en cas de défaillance, la responsabilité revienne à l'exploitant initial. Autrement dit, vous voulez maintenir le droit actuel, qui empêche l'exploitant de tout remettre entre les mains d'un tiers demandeur volontaire. Demande de retrait.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'amendement rédactionnel CS1351 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Elle adopte l'article 5 modifié.
Après l'article 5
Amendement CS124 de Mme Pascale Boyer et sous-amendement CS1428 du Gouvernement.
Afin de renforcer le suivi des travaux de réhabilitation des anciens sites d'ICPE, nous proposons d'élargir à l'ensemble de ces derniers le dispositif d'instruction des demandes de permis de construire et d'aménager prévu à l'article L. 556-1 du code de l'environnement.
Il convient de reporter à mi-2024 l'entrée en vigueur de cette extension du dispositif d'attestation d'ancienne ICPE insuffisamment réhabilitée. Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement, je donne un avis favorable à l'amendement présenté par Mme Brulebois.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte successivement le sous-amendement et l'amendement sous-amendé.
Amendement CS777 de Mme Anna Pic.
Il vise à compléter l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme afin de favoriser la réhabilitation des friches, notamment pour un usage industriel. Nous proposons d'imposer aux collectivités territoriales compétentes en matière de documents d'urbanisme de répertorier, en annexe de ces derniers, les friches potentiellement mobilisables. Cette mesure s'ajoute au nécessaire inventaire des surfaces susceptibles d'être transformées sur les sols déjà artificialisés. Nous pourrons ainsi réduire le rythme d'artificialisation des sols et atteindre notre objectif de zéro artificialisation nette à l'horizon 2050.
Les évolutions législatives récentes ont permis une prise en compte accrue des friches dans les documents d'urbanisme. La loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a introduit dans les plans locaux d'urbanisme (PLU) et les cartes communales la fixation d'objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain. J'ajoute que les observatoires locaux de l'habitat et du foncier doivent recenser les friches constructibles.
Par ailleurs, à l'échelon régional, un décret du 29 avril 2022 intègre dans les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires le potentiel de réhabilitation des friches, dans le cadre de la territorialisation des objectifs de réduction de l'artificialisation du territoire.
Avec l'article 5 ter adopté au Sénat, les friches vont désormais être prises en compte dans les schémas de cohérence territoriale.
Votre amendement est donc satisfait.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS778 de M. Dominique Potier.
Nous reprenons une disposition de la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, visant à ce que les entreprises publiques et les sociétés de plus de 250 salariés transmettent aux établissements publics compétents un état des lieux des réserves foncières dont elles disposent, notamment en termes de friches. Nombre de sociétés en possèdent, depuis la révolution industrielle, et cela représente un important potentiel de développement pour les énergies renouvelables mais aussi pour l'industrie verte, dans une logique d'optimisation du foncier et d'inventaire stratégique indispensable à la planification écologique.
L'article 4 de la loi « énergies renouvelables » dispose que les entreprises publiques et les sociétés établissent un plan de valorisation de leur foncier en vue de produire des énergies renouvelables. L'amendement que vous proposez créerait un nouveau dispositif assez voisin, que je ne juge pas nécessaire. Surtout, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) sont déjà obligés de produire un inventaire des friches dans les observatoires locaux de l'habitat et du foncier adossés aux programmes locaux de l'habitat. Avis défavorable.
Avec Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, nous avons confié une mission au préfet Rollon Mouchel-Blaisot visant à remettre un inventaire exhaustif de ces friches, dont les élus pourront disposer. Votre amendement crée une obligation administrative supplémentaire pour les entreprises et me semble superfétatoire.
Nous sommes d'accord sur l'objectif, mais nous considérons qu'une telle charge s'impose tant à la puissance publique qu'au secteur privé. Il suffit d'étendre le dispositif prévu pour le déploiement des énergies renouvelables aux opérations de réindustrialisation. Nous sommes prêts, si besoin est, à travailler à une nouvelle rédaction en vue de la séance publique.
Nous sommes en effet tous d'accord sur l'objectif, mais l'amendement risque d'imposer ces inventaires y compris aux entreprises qui ne disposent pas de friches. Il favoriserait peut-être une plus grande exhaustivité mais au prix d'une charge administrative trop importante pour tous.
Toutes les associations reçoivent des déclarations d'impôt et nombre d'entre elles signalent simplement qu'elles n'ont pas de chiffre d'affaires et qu'elles n'ont rien à déclarer. Il pourrait en être de même. Si on aide les entreprises à s'installer, on peut leur demander – sans amende et sans contrôle – de contribuer à l'information sur les sites de friches.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS382 de Mme Florence Goulet.
Bien souvent, les communes rurales n'ont pas les moyens financiers pour valoriser les friches industrielles que les grands groupes ont laissées derrière eux. Pourtant, de tels sites constituent un atout pour ces communes et pour la décarbonation de l'industrie, s'ils sont suffisamment bien réhabilités pour pouvoir accueillir un nouveau projet. Dans la perspective du prochain projet de loi de finances, il conviendrait donc d'étudier la possibilité d'aider ces communes ayant engagé une dynamique vertueuse de réhabilitation et d'attractivité pour de nouvelles installations.
Nous partageons votre volonté de réhabiliter les friches industrielles, notamment en milieu rural. Toutefois je suis défavorable à votre amendement, qui me semble satisfait par la composante « recyclage » du fonds vert – l'ancien fonds Friches, lequel avait vocation à financer des opérations de recyclage de friches ou de fonciers déjà artificialisés et devait permettre de construire de nouveaux logements et locaux d'activité, sans faire progresser l'artificialisation nette.
Doté de 300 millions d'euros en 2021, le fonds a vu son enveloppe abondée à deux reprises : une première fois de 350 millions d'euros, dans la loi de finances de 2022, et une seconde fois de 100 millions d'euros. En 2023, le fonds friches a été pérennisé avec le volet recyclage foncier du Fonds vert, qui est doté de 2 milliards d'euros, dont 300 millions d'euros pour les friches. Nos communes rurales sont éligibles à ce fonds et peuvent donc financer ainsi les opérations de réhabilitation.
Plutôt que de voter des demandes de rapport et des dispositions législatives qui accroissent la charge administrative, je vous invite à auditionner les ministres. La question que vous évoquez est essentielle mais nous avons une stratégie bien définie, que Mme la rapporteure vient de détailler. Auditionnez donc les ministres pour vous assurer que cette partie du fonds vert est bien destinée à la restauration des friches industrielles et, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances, assurez-vous que les Dreal aient les moyens d'assurer leurs missions !
Je serai défavorable à toutes les demandes de rapport, tout comme je proposerai la suppression de l'article 5 bis A.
Le fonds friches est bien insuffisant face aux besoins. Parmi les communes éligibles, peu en bénéficient. Cet amendement d'appel vise à l'abonder.
J'ajoute que cet outil exceptionnel qu'est la Banque des territoires consacre 1 milliard d'euros aux friches. Elle connaît les élus, elle travaille avec eux et les élus savent qu'elle peut devenir propriétaire de terrains pour les réhabiliter et les louer à des industriels. N'hésitez pas à auditionner ses responsables pour qu'ils vous expliquent leurs actions !
Par ailleurs, la question que vous soulevez relève de la discussion du projet de loi de finances, où je vous invite à la poser à nouveau.
L'amendement est retiré.
Amendement CS443 de Mme Alma Dufour.
Vous savez que, les parlementaires étant malheureusement très contraints dans leurs amendements, ils en sont réduits à formuler des demandes de rapport.
Celui que nous vous proposons vise précisément à disposer d'informations avant la discussion du prochain projet de loi de finances sur l'adéquation entre les moyens du fonds et ses objectifs. L'abondement du fonds friches est certes important, mais il est insuffisant pour respecter l'objectif zéro artificialisation nette, sachant que, selon les acteurs industriels et commerciaux, l'installation sur une friche coûte 30 % de plus que sur un terrain vierge.
Je comprends qu'une demande de rapport permet d'ouvrir le débat, mais encore une fois, je vous invite plutôt à auditionner les ministres concernés et à poursuivre votre travail de contrôle. De surcroît, le rapport en question serait remis après le projet de loi de finances.
Votre réponse n'est pas satisfaisante. Voulons-nous une vraie politique publique ambitieuse pour requalifier nos 150 000 hectares de friches et 8 300 sites ? Ce n'est pas en auditionnant les ministres que les collectivités disposeront d'une information claire, si grande soit la motivation du Gouvernement.
La vallée de la Maurienne, qui a connu la désindustrialisation, ne dispose pas de foncier. Si, depuis trente ans, nous avions pu requalifier les friches, nous l'aurions fait ; si nous pouvions le faire aujourd'hui avec le fonds friches, nous le ferions. Un seul site industriel de la vallée a pu en bénéficier, alors que dans ma circonscription, cinq communes disposent de friches importantes ! Bien sûr, il faudra toujours des arbitrages, mais quoi qu'il en soit, les aides de ce fonds sont insuffisantes dès lors que les communes doivent apporter le complément.
Pour les petites communes aux moyens modestes, la Banque des territoires propose des montages d'une complexité décourageante. Si le Gouvernement ne propose pas un dispositif opérationnel clé en main, cela ne marchera pas. L'établissement public foncier local de la Savoie est très efficace, mais les procédures sont si complexes et les coûts si élevés que, faute d'un tel outil, il ne sera pas possible d'avancer.
Je m'opposerai par conséquent à l'amendement de suppression de l'article 5 bis A déposé par le Gouvernement.
Les 2 milliards d'euros du Fonds vert bénéficient surtout aux petites collectivités locales et s'ajoutent au fonds friches. Ils représentent un effort important de la part de l'État.
Le fonds Friches a été intégré dans le Fonds vert, mais la somme totale est bien de 2 milliards d'euros, en effet. La consommation industrielle de ces crédits est effectivement insuffisante, mais faute de demandes. Les procédures pour en bénéficier sont pourtant très simples, à la différence de celles de la Banque des territoires. Il y a des ingénieurs pour conseiller les petites communes dans le montage des dossiers de financement. La Banque des territoires, quant à elle, achète des terrains ou propose des solutions de financement structuré, et peut, elle aussi, aider les communes à monter les dossiers.
Nous disposons donc des outils adéquats, même s'ils restent peut-être méconnus et mal compris. D'où l'intérêt, je me répète, d'auditionner les ministres !
La commission rejette l'amendement.
Article 5 bis A : Rapport sur les moyens nécessaires à la requalification des friches de plus de dix ans
Amendements de suppression CS675 du Gouvernement et CS742 de M. Henri Alfandari.
J'ai déjà dit pourquoi nous souhaitons supprimer cet article et Mme Bonnivard a déjà expliqué pourquoi elle y était défavorable…
J'ajoute que l'article 5 bis précise que l'expropriation pour état d'abandon manifeste peut avoir une visée industrielle. Ne compliquons pas les choses en demandant des rapports ! Nous faciliterons la réalisation des projets en limitant l'immobilisation des capitaux : plus la visibilité est accrue, plus les coûts diminuent et plus la requalification des friches sera effective.
La suppression de cet article entraînera la chute de mon amendement CS779, qui aurait pu, me semble-t-il, susciter le consensus. Il vise à étendre la logique de l'inventaire et de la mobilisation des friches aux réserves foncières de Voies navigables de France (VNF). Cette mesure avait d'ailleurs été adoptée à l'unanimité dans le projet de loi relatif aux énergies renouvelables, mais le Conseil constitutionnel l'a censurée, considérant qu'il s'agissait d'un cavalier législatif.
Cela permettrait de mobiliser les 6 700 kilomètres de voies fluviales et les 40 000 hectares de domaine public de VNF pour réaliser un maximum d'énergies renouvelables « eau, air, soleil » dans une logique de réseau. Ce grand projet est inspiré de l'aventure de la Compagnie nationale du Rhône, qui a fait ses preuves en associant écologie et production agricole, industrielle et énergétique. Il s'agirait d'une formidable ressource pour notre industrie de l'éolien, du photovoltaïque et de l'hydraulique, où la France est pionnière et dispose d'actifs stratégiques importants. De plus, cette production d'énergie en réseau peut alimenter à moindre coût une industrie plus compétitive. Le groupe socialiste tient énormément à cette proposition.
Vous voulez supprimer un article prévoyant la remise d'un rapport du Gouvernement dans un délai de six mois concernant l'identification des moyens nécessaires à la requalification des friches de plus de dix ans. Le Sénat l'a souhaité pour nous protéger et nous donner les moyens de nos ambitions. La gestion des friches est d'une grande complexité. Si nous voulons atteindre notre objectif commun, nous devons être certains du caractère opératoire de nos décisions. Car entre ce que nous arrêtons ici et le terrain, je vous assure qu'il y a un monde !
Ce rapport nous aurait obligés à être très exigeants dans les six mois à venir s'agissant des informations délivrées aux territoires, aux préfets et aux collectivités ainsi que de nos efforts de lisibilité et de simplification, afin de déclencher un sursaut au sein des territoires pour mener de véritables politiques départementales et régionales de requalification des friches. Il est vraiment dommage de se priver d'un tel vecteur alors que, collectivement, nous devons garantir l'atteinte de nos objectifs.
Notre objectif, très opérationnel, vise à ce que la Banque des territoires puisse libérer cinquante sites et 2 000 hectares dans les années à venir. Je préfère que nous agissions plutôt que de rédiger des rapports – ce sont les mêmes personnes qui font le boulot ! Je souhaite que, dans les mois à venir, nous nous concentrions sur l'identification et la libération de ces friches.
Les outils existent, même s'ils sont parfois complexes. Auditionnez les ministres et assurez-vous qu'ils répondent à toutes vos questions ! Cela sera plus efficace qu'un rapport.
Monsieur Potier, un travail s'impose en effet à propos de VNF. La disposition que vous aviez fait adopter dans le projet de loi « énergies renouvelables » a été censurée pour des raisons essentiellement légistiques. Je vous invite à réfléchir d'ici à la séance publique à la meilleure façon de l'intégrer au présent texte. Sur le principe, le Gouvernement y est favorable et je m'engage à ce que votre amendement soit examiné avec les yeux de Chimène.
Avec tout ce qui a été renvoyé à la séance, les prochains jours vont être chargés !
Le rapport permettrait d'avoir la visibilité qui s'impose sur les moyens nécessaires à la requalification des friches de plus de dix ans. Ce n'est pas un inventaire, c'est un travail complémentaire et nécessaire, qui sera aussi une forme d'évaluation de notre passé industriel, au moment où nous travaillons à la réindustrialisation. Nous avons besoin d'une nomenclature de ces friches identifiant leur nature et ce que nous pourrions en faire.
Je vais mettre aux voix ces amendements, avec un double avis défavorable. Qui est pour ? Qui est contre ? … C'est l'inverse, je recommence !
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l'article 5 bis A est supprimé et les autres amendements tombent.
Monsieur le président, cette façon de faire n'est pas correcte ! Vous venez de procéder à un deuxième vote, ce qui n'est pas dans vos attributions, alors que les amendements avaient été d'abord rejetés. C'est irrégulier. Hier, plusieurs groupes ont demandé de revoter l'article 1er bis A, le vote ayant été organisé dans des conditions expéditives, et vous n'avez pas donné suite. Je constate qu'il y a deux poids, deux mesures !
Cela n'a rien à voir ! Vous êtes de mauvaise foi. Pour le vote qui vient d'avoir lieu, je me suis trompé à propos des avis. Je m'en suis rendu compte avant de donner le résultat du vote et j'ai procédé à une nouvelle mise aux voix.
Hier, à tous ceux qui m'avaient demandé si je suspendrais pour que les députés puissent aller voter en séance, j'avais répondu que je suspendrais à la fin de la discussion de l'article 1er bis A. Tous ceux qui m'ont posé la question étaient au courant. Des députés sont allés voter en séance, ce qui est leur droit le plus strict, et un grand nombre, y compris de votre groupe, sont restés. Il n'y a eu aucune irrégularité.
Article 5 bis : Visée industrielle de l'expropriation pour état d'abandon manifeste
La commission adopte l'article 5 bis sans modification.
Article 5 ter : Prise en compte des friches dans les orientations du SCoT
La commission adopte l'article 5 ter sans modification.
Après l'article 5 ter
Amendement CS711 de Mme Lisa Belluco.
Nous considérons tous les friches comme une manne pour un ensemble de projets : renaturation, installation d'énergies vertes, recyclage urbain, industrie… Néanmoins, toutes ne sont pas identiques. Certaines d'entre elles, par exemple, ont un rôle écosystémique très important. Nous proposons donc qu'un décret en Conseil d'État fixe une nomenclature des friches, ce qui favorisera un aménagement plus rationnel et efficace de ces espaces.
Les friches sont en effet très diverses. Toutefois, l'établissement d'une nomenclature distinguant les friches pouvant faire l'objet d'un recyclage foncier et celles pouvant être renaturées n'est pas adéquate. Une telle qualification serait trop rigide, alors que les friches ne sont pas des espaces figés dans le temps. Enfin, les communes et les EPCI sont tenus d'évaluer tous les trois ans la trajectoire de sobriété foncière sur leur territoire. Avis défavorable.
La nomenclature ne vise pas à déterminer la destination future mais à connaître l'état des différentes friches, justement afin de définir au mieux leur destination. Nous en faisons un paquet indifférencié pour l'instant. Des choix pertinents supposent qu'il soit possible d'y voir plus clair.
Les friches sont répertoriées par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), mais nous ne disposons pas d'un état exact de leur degré de pollution. Peut-être pourrait-on au moins agir dans ce sens-là.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS660 de Mme Huguette Tiegna.
Il précise que les PLU peuvent prévoir que les terrains ayant accueilli une activité relevant de la législation des installations classées sont prioritairement réhabilités pour un usage futur compatible avec l'installation sur la zone d'une activité de gestion des déchets. L'objectif est double : encourager le maintien d'une activité industrielle sur ces terrains et développer en particulier l'activité de gestion de déchets.
Par ailleurs, il prévoit que cet usage des sites peut « prioritairement », et non exclusivement, être orienté vers les activités relevant de la gestion des déchets. Ainsi, en cas d'impossibilité d'installer une telle activité, ces sites pourraient être affectés à toute autre activité industrielle, voire à tout autre usage.
Je partage votre souci de réinstaller prioritairement des industries dans les zones industrielles, en tirant parti des obligations de dépollution différenciée selon les usages. Néanmoins, quid du terrain si aucune usine de gestion de déchets ne vient s'installer ? Comme vous le savez, il faut du temps pour modifier un PLU. D'autres moyens existent pour soutenir les activités de gestion de déchets. Demande de retrait ou avis défavorable
L'objectif est louable mais en promouvant une « taille unique » pour l'ensemble des friches, le risque est grand de contraindre exagérément des projets qui pourraient être adaptés à d'autres activités.
J'ai bien précisé qu'en cas d'impossibilité d'installer une activité de gestion des déchets, il sera possible d'affecter le site à d'autres usages industriels.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1007 de M. Charles Fournier.
Le Cerema doit définir les typologies des friches et élaborer des recommandations. Elles seront utiles aux petites communes, qui n'ont pas accès à tout ce qui est nécessaire en termes d'ingénierie, contrairement à ce que vous avez dit.
Votre amendement propose la rédaction d'un rapport par le Cerema, non un accompagnement des collectivités.
Le rapport que s'apprête à remettre le préfet Rollon Mouchel-Blaisot nous donnera de nombreux éléments à ce propos. Avis défavorable.
Le rapport que nous remettra le préfet éclairera beaucoup de choses. Demande de retrait.
La commission rejette l'amendement.
Article 6 : Sécuriser les financements relatifs à la mise en sécurité des sites en cas d'exploitation illégale et de liquidation judiciaire
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CS1284 et CS1285 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Amendements identiques CS671 du Gouvernement, CS322 de Mme Danielle Brulebois, CS1196 de Mme Laurence Heydel Grillere et CS1307 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback.
Depuis dix ans, les entreprises paient une prime d'assurance qui, en théorie, doit permettre de garantir la réhabilitation des terrains. Elles ont dépensé 20 millions d'euros chaque année, pour 400 000 euros recouvrés au total. La différence est dans les comptes de résultat des assurances.
Nous proposons de supprimer ce dispositif de garanties financières complètement inefficace et de le remplacer par une séniorisation de la créance environnementale. Pour simplifier, nous plaçons l'écologie avant les impôts : lorsqu'une entreprise quittera un site, les dépenses de réhabilitation viendront juste après les dépenses prioritaires telles que les salaires. Seraient concernés 1 193 sites, pour un montant total potentiel de recouvrement de près de 900 millions d'euros. Toutes les entreprises ne seront pas capables d'honorer cette créance, mais nous estimons qu'au moins 25 % des sommes devraient être recouvrées, donc un peu plus de 200 millions d'euros contre les 400 000 euros actuels.
Le Sénat a adopté le système de la créance environnementale, mais en préservant le dispositif de garanties financières. Je propose de supprimer ce dernier, qui ne sert à guère autre chose qu'à un transfert du secteur industriel au secteur assurantiel,
L'article 6 propose en effet des mesures plus efficaces pour sécuriser le financement de la remise en état du site. Les garanties financières des installations classées pour la protection de l'environnement paraissent insuffisantes pour assurer la dépollution des sols, parfois indispensable. Il s'agit là d'une préoccupation importante pour les petites collectivités.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, les amendements identiques CS152 de Mme Christelle Petex-Levet, CS189 de M. Pierre Cordier et CS402 de M. Xavier Roseren, portant article additionnel après l'article 6, tombent.
Amendement CS821 de Mme Yaël Menache.
Cet amendement vise à maintenir l'obligation de garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent. Lorsque l'industriel est propriétaire du terrain, il n'y a aucune difficulté puisqu'il est responsable, mais dans le cas des promoteurs éoliens, l'industriel n'est quasiment jamais propriétaire. Il loue les terrains afin d'y installer des aérogénérateurs industriels, et leur démontage, en l'absence de garanties financières, est à la charge du propriétaire du terrain – bien souvent, un agriculteur.
Il convient donc de ne pas exonérer les promoteurs éoliens de l'obligation du dépôt de garanties financières, quand bien même son montant est inférieur au coût réel du démontage, surtout lorsque l'on sait que les 1 000 mètres cubes de béton restent en place.
L'amendement est satisfait par le droit existant : l'article L. 151-46 du code de l'environnement dispose que les promoteurs des parcs éoliens constituent des réserves financières en vue de leur démantèlement et de la remise en état des sites, dès le début de la production. Je vous demande donc de retirer l'amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements de coordination juridique CS1286 et CS1287 et l'amendement rédactionnel CS1283 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
La commission adopte l'article 6 modifié.
Après l'article 6
Amendement CS729 de Mme Lisa Belluco.
Cet amendement vise à rendre publiques les données relatives aux sanctions en matière d'installations industrielles. L'objet de l'article 6 est de renforcer les sanctions en cas de non-respect du droit. Pour vérifier la bonne application de ces mesures, il est indispensable d'avoir des données.
Jusqu'en 2014, nous disposions d'informations sur le nombre de mises en demeure et de sanctions en matière de police de l'environnement. Les chiffres montraient que les autorités administratives indépendantes étaient bien plus sévères que les administrations classiques. Ces données ne sont plus publiées. Nous en avons besoin pour élaborer les dispositions les plus pertinentes pour faire respecter le droit de l'environnement.
Les informations relatives aux procédures de mise en demeure et aux sanctions des installations classées sont d'ores et déjà publiques : elles figurent sur le site des services préfectoraux, et des agrégats nationaux sont régulièrement communiqués. D'après le dernier bilan, publié en 2022, plus de 3 500 arrêtés préfectoraux ont été signés, dont environ 3 000 mises en demeure et 600 sanctions administratives à l'encontre d'ICPE ne respectant pas leurs obligations environnementales. L'avis est défavorable.
Même avis. L'amendement est plus que satisfait. Les inspections des ICPE débouchent sur de nombreuses mises en demeure – l'administration fait son travail, ce qui est très bien. Les mises en demeure sont systématiquement rendues publiques, et les sanctions peuvent l'être. Il y a une gradation : en plus de la sanction en elle-même, il est possible de la rendre publique, dans une optique de « name and shame » (nommer et couvrir de honte).
Pourriez-vous nous apporter quelques précisions sur le pourcentage de sanctions rendues publiques ? Il me semblerait a priori utile qu'elles le soient toutes.
Je ne connais pas les chiffres, mais la publication est une sanction en soi, qui participe de la gradation des peines. Dans le cas d'une erreur commise de bonne foi entraînant une sanction, je ne suis pas certain qu'il faille chercher à affecter la réputation de l'entreprise. La publicité est décidée par le juge lorsqu'il l'estime utile.
Je vais maintenir l'amendement mais retirer le suivant, le CS727, qui était de repli. Nous allons retravailler notre proposition pour la séance publique, à la lumière des éléments que vous nous avez donnés.
La commission rejette l'amendement.
L'amendement CS727 de Mme Lisa Belluco est retiré.
Amendement CS630 de M. Nicolas Thierry.
Il demande au Gouvernement un rapport proposant une trajectoire de dépollution des eaux et des sols contaminés par les substances perfluoroalkylées (Pfas), ces polluants persistants générés par l'activité industrielle. Le rapport devra également inclure une estimation des coûts de dépollution et proposer un système de contribution exceptionnelle des entreprises responsables, en application du principe du pollueur-payeur.
Aux États-Unis, le très grand groupe chimique 3M vient de faire un chèque de 12,5 milliards de dollars pour solder des litiges ; en juin, trois entreprises chimiques ont dû payer 1 milliard de dollars pour éviter des procès. La pollution des Pfas est d'une ampleur inédite. Elle est directement liée à l'activité industrielle, et elle touche également notre pays. La gravité de la contamination par les Pfas rend essentielle l'inclusion de la dépollution dans le projet de loi relatif à l'industrie verte.
Nous avons déposé de nombreux amendements sur les Pfas, qui ont presque tous été déclarés irrecevables. Cela est regrettable, et incompréhensible compte tenu de l'actualité. C'est à cause de cette irrecevabilité généralisée que nous avons dû recourir à un amendement de demande de rapport. Son adoption montrerait que le législateur ne passe pas à côté d'un sujet majeur pour l'industrie, aujourd'hui et dans les prochaines années.
Je rejoins vos préoccupations concernant les risques écologiques et sanitaires des polluants dits éternels émis par les industries. Toutefois, je ne crois pas qu'un rapport supplémentaire apporte la moindre solution au problème, d'autant que des travaux sont déjà engagés sur la question.
Le sujet a déjà été évoqué tout à l'heure. Des travaux européens ont été lancés suite à la demande de cinq États membres d'interdire définitivement les Pfas. Il y a lieu de se pencher sérieusement sur les 10 000 Pfas recensés, afin d'opérer un tri. Un plan d'action interministériel, piloté par mon collègue Christophe Béchu, a été élaboré.
Mais nous entendons vos arguments. Ainsi, la Première ministre a chargé hier le député Cyrille Isaac-Sibille d'une mission temporaire sur les Pfas. Un parlementaire en mission va donc bénéficier des moyens de toute l'administration pour élaborer un rapport, lequel sera rendu public. Les commissions parlementaires compétentes pourront auditionner ce député. Votre amendement est donc satisfait depuis hier.
Certes, il y a des milliers de Pfas – plutôt douze mille que dix mille, d'ailleurs. Mais certains pays européens, que la France a soutenus, défendent l'interdiction par famille, justement pour ne pas entrer dans l'examen substance par substance, option suivie par les États-Unis, voulue par les industriels et dont le résultat est l'enlisement du débat. Attention aussi à l'argument selon lequel nous ne pourrions rien faire car tout se jouerait à l'échelle européenne. Il existe des marges de manœuvre nationales : le Danemark a ainsi interdit dès 2020 les polluants éternels dans les emballages alimentaires.
Je regrette d'examiner un texte relatif à l'industrie verte qui n'aborde pas les Pfas, sujet industriel et sanitaire majeur. La demande de rapport n'est effectivement pas satisfaisante, mais c'est le seul moyen que nous ayons d'intégrer les Pfas dans notre discussion, à cause de l'irrecevabilité de tous les amendements portant sur cette question.
La position que défendra la France dans les instances européennes est en cours de finalisation. Il y a trois options : examen des dix mille Pfas pour déterminer lesquels doivent être interdits ; interdiction généralisée – idée qui peut se révéler dangereuse ; et interdiction des Pfas dangereux, qui restent à qualifier. Un travail doit être réalisé, et un parlementaire a été désigné pour le faire. J'imagine qu'il sera totalement disponible pour répondre aux questions de l'Assemblée. Votre amendement ne vous satisfait peut-être pas, mais il est satisfait, donc je vous engage à le retirer.
Nous reviendrons souvent sur ce sujet, d'autant que vos réponses ne sont pas suffisantes. Le député auquel a été confiée la mission a déjà dit qu'il fallait examiner les Pfas un par un pour évaluer leur dangerosité – et pourtant, il est médecin ! Quand obtiendrons-nous une réponse, s'il faut étudier douze mille substances ? Il y a urgence à appliquer le principe de précaution.
De nombreuses études ont établi la dangerosité de ces substances, et pendant que nous parlons, de nouvelles molécules sont peut-être en cours d'apparition. Penser le futur industriel sans intégrer ces éléments est une erreur profonde, pour laquelle nous porterons une responsabilité collective. Nous avons demandé un rapport parce que nos amendements ont été déclarés irrecevables. Pourtant, il s'agit d'un sujet industriel, et essentiel pour penser l'avenir.
Je souscris totalement aux propos de mes collègues Fournier et Thierry, et je regrette que la pollution et les impacts de l'industrie carbonée ne trouvent aucune place dans un texte sur l'industrie verte. C'est incompréhensible.
On ne peut pas étudier tous les Pfas pour déterminer la dangerosité de chacun d'entre eux avant, éventuellement, d'en interdire. La moindre des choses serait de suspendre la possibilité d'y recourir tant que l'analyse n'est pas achevée. Le principe de précaution doit s'imposer.
D'autre part, la mission qui vient d'être confiée à l'un de nos collègues porte-t-elle bien sur l'ensemble des éléments devant figurer dans le rapport demandé par l'amendement, à savoir l'interdiction des Pfas, la dépollution des sites, les coûts de la dépollution et la désignation de ceux qui les assumeront ? Nous espérons qu'elle ne se limite pas à la question de savoir quels sont les Pfas dangereux.
Si nous interdisions tous les Pfas, nous ne pourrions plus produire de batteries en France, nous ne ferions plus d'électro-hydrogène et nous devrions importer des véhicules électriques produits selon des standards moins exigeants. Bref, il faut y travailler. Nous vous transmettrons la lettre de mission de votre collègue, mais il faut débattre et prendre le temps nécessaire à l'élaboration de mesures raisonnables.
Un arrêté, publié le 27 juin, impose la réalisation d'une campagne d'analyse des Pfas au sein des rejets aqueux des secteurs industriels pouvant produire, utiliser ou traiter ces substances. Vous conviendrez que cette première étape sera extrêmement utile. Nous avançons et nous continuerons de le faire.
C'est un sujet primordial, dont nous reparlerons. Je vous incite à vous rapprocher de notre collègue Cyrille Isaac-Sibille, qui travaille sur ces questions depuis longtemps, notamment avec notre collègue Jimmy Pahun. Ils seront ravis de bénéficier de vos connaissances et de vos contributions, et de collaborer avec vous.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS523 de M. Emmanuel Blairy.
L'objectif de cet amendement est de recenser le foncier disponible et d'évaluer les moyens à déployer pour le mobiliser – fermeture d'exploitation, dépollution, terrassement, désenclavement, etc. À l'aide de l'outil Cartofriches, du Cerema, les établissements publics de coopération intercommunale pourront répertorier les sites mobilisables situés dans leur territoire et mener une politique de revitalisation à l'échelle communale ou intercommunale.
Il s'agit de donner une deuxième vie à des espaces industriels délaissés en ancrant les projets d'industrie verte dans les territoires, afin de contribuer à un redéveloppement industriel responsable. Les EPCI pourront évaluer les potentiels d'implantation industrielle des friches disponibles.
Comme vous le soulignez, des outils comme Cartofriches, développé par le Cerema, existent déjà : plus de 8 000 sites y sont recensés et les données sont libres d'accès. Le préfet Mouchel-Blaisot doit remettre un rapport en juillet sur la mobilisation du foncier industriel, ce qui correspond précisément à votre demande. Il n'y a pas d'intérêt à demander un rapport de plus, donc je vous demande de retirer l'amendement – à défaut, l'avis sera défavorable.
Cet amendement nous paraît superfétatoire, mais le précédent ne l'était pas. Monsieur le ministre délégué, je ne remets absolument pas en cause votre bonne foi, que vous avez démontrée à plusieurs reprises au cours de ce débat, mais il ne faudrait pas mal interpréter l'amendement : il ne demandait pas un rapport sur l'interdiction des Pfas mais sur la définition d'une trajectoire de dépollution. Il faut prendre ce sujet à bras-le-corps, au-delà d'une simple mission parlementaire.
C'est exactement le sujet de la mission de M. Cyrille Isaac-Sibille – nous vous transmettrons la lettre de mission. Je vous engage à travailler avec lui, vous serez les bienvenus. Vous demandez un rapport, on vous donne une mission de six mois : c'est tout de même mieux ! Nous souhaitons tous avancer sur le sujet.
La commission rejette l'amendement.
Article 6 bis
Amendement CS731 de Mme Lisa Belluco.
Il s'agit de rétablir une disposition – proposée par la gauche et soutenue par la droite – votée en commission mais rejetée en séance publique au Sénat. L'idée est d'intégrer, dans l'étude d'impact réalisée à l'occasion de la demande d'autorisation environnementale, une analyse des solutions envisagées pour réduire la consommation d'espace au sol. Le Gouvernement l'a repoussée en affirmant que l'article L. 122-3 du code de l'environnement le prévoyait déjà. Or cet article dispose que l'étude d'impact comprend, entre autres, une « description des solutions de substitution raisonnables qui ont été examinées par le maître d'ouvrage », ce qui est très différent d'une réduction de la consommation d'espace au sol. Nous souhaitons rétablir la disposition adoptée fort opportunément en commission au Sénat.
Je suis un peu ennuyée – et ce n'est pas une question de gauche ou de droite. L'article 6 bis a été introduit en commission au Sénat, mais supprimé en séance car il était satisfait. L'article L. 122-3 du code de l'environnement précise le contenu de l'étude d'impact.
J'ai le même avis qu'en séance au Sénat. Nous pouvons comparer, d'ici à la séance publique, nos compréhensions respectives de cet article du code de l'environnement ; en attendant, je demande le retrait de l'amendement, qui est, de mon point de vue, satisfait.
Il faut vérifier la partie ayant trait à l'analyse des solutions envisagées pour réduire la consommation d'espace au sol.
C'est en effet cet aspect qu'il faut étudier. La rédaction actuelle du code de l'environnement ne satisfait pas notre demande, qui nous semble importante. Je maintiens donc l'amendement, mais je suis tout à fait disposé à confronter les interprétations de l'article L. 122-3 d'ici à la séance publique, afin d'aboutir à une réponse qui nous agrée.
Vous avez cité le d) de l'article, monsieur le député, mais le f) dispose bien que l'étude d'impact comprend « toute information supplémentaire, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et des éléments de l'environnement sur lesquels une incidence pourrait se produire, notamment sur l'artificialisation des sols et la consommation d'espaces agricoles, naturels et forestiers résultant du projet lui-même et des mesures mentionnées au c) »
Comme vous le savez, nous ne sommes pas majoritaires au Sénat : la disposition, votée en commission, a été supprimée en séance publique, car la lecture du code de l'environnement a convaincu les sénateurs qu'elle était satisfaite.
La commission rejette l'amendement.
La commission maintient la suppression de l'article 6 bis.
Article 7 : Remplacement des sites naturels de compensation par des sites naturels de restauration et de renaturation
Amendements de suppression CS629 de M. Nicolas Thierry et CS841 de M. Gérard Leseul.
Nous souhaitons supprimer l'article 7, qui prévoit la possibilité de réaliser des opérations de restauration et de développement de la biodiversité dans des zones appelées « sites naturels de restauration et de renaturation » (SNRR) et agréées par l'autorité administrative. Ces opérations donneraient lieu à l'attribution d'unités de restauration ou de renaturation, qui pourraient être vendues à des personnes soumises à une obligation de compensation.
Ce mécanisme pose plusieurs problèmes. Le principal est qu'il se fonde sur un gain écologique attendu, sans garantie de résultat équivalent à la perte compensée en termes d'habitats, d'espèces et de fonctionnalités écologiques. La vente anticipée d'unités de compensation, sans identification claire ni constatation effective du gain écologique, n'est pas satisfaisante. Faciliter le déploiement de projets ne doit pas se faire au mépris du vivant. Afin de préserver la biodiversité et d'éviter les potentielles conséquences néfastes de ce mécanisme, nous proposons la suppression de l'article.
Pour les mêmes raisons, nous appelons à la plus grande vigilance sur cet article. Nous ne sommes pas opposés à rediscuter du sujet, mais nous avons besoin d'un cadre clair. Il faut appliquer la séquence « éviter, réduire et compenser (ERC) » : la compensation ne peut intervenir que lorsque toutes les solutions d'évitement et de réduction ont été épuisées. En matière de biodiversité, toute compensation doit être matériellement vérifiable par un gain écologique réalisé dans le cadre d'un site de compensation, de restauration ou de renaturation. La vente de titres de compensation ne doit intervenir que si ces deux conditions sont respectées.
Nous proposons de revoir la création de sites naturels de compensation (SNC) de haute qualité en lien avec les différents établissements publics fonciers. Dans un premier temps, nous souhaitons donc supprimer l'article 7 pour modifier le dispositif du Gouvernement.
Je considère au contraire que cet article est tout à fait pertinent. Nos obligations légales de compensation d'atteinte à la biodiversité, fixées à l'article L. 163-1 du code de l'environnement, sont trop rarement remplies, faute notamment d'une offre constituée de compensation.
Le dispositif des SNC, introduit par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, n'a hélas pas fonctionné : seul un site a été agréé, dans les Bouches-du-Rhône, alors qu'il en faudrait des centaines dans l'ensemble du territoire pour répondre aux besoins de compensation.
L'article 7 vise à donner un nouvel élan à ce dispositif en facilitant son implantation et en l'ouvrant, au-delà des obligations de compensation, sur la base du volontariat.
Même avis. Mme la rapporteure a très bien présenté la philosophie de cet article, qui vise à être plus efficace pour restaurer la biodiversité et préserver les espèces protégées, tout en permettant aux industriels de développer leurs activités. Certains d'entre eux souhaitent fortement s'inscrire dans cette démarche de compensation. L'article a pour but d'anticiper le déploiement de mesures de renaturation avant le début des travaux. La Dreal surveillera le projet, en assurant un suivi qualitatif de l'impact réel des mesures sur la biodiversité. Nous souhaitons conserver cet article, qui nous semble très important et qui remplacerait une procédure qui ne fonctionne pas.
Le site dont a parlé Mme la rapporteure, c'est 700 hectares dans les Bouches-du-Rhône, où a été réintroduite l'outarde canepetière – mais on la trouve également dans le centre-ouest du pays ; et encore a-t-il fallu suivre une procédure extrêmement lourde. Nous souhaitons la simplifier. L'objectif est d'être plus efficaces pour respecter la biodiversité tout en accompagnant les industriels qui souhaitent s'inscrire dans cette démarche.
Car les industriels d'aujourd'hui ne sont pas ceux d'hier : ils sont pères et mères de famille, extrêmement sensibles aux enjeux environnementaux – et quand ils ne le sont pas, leurs actionnaires et leurs clients le sont. S'ils veulent recruter des jeunes, ce n'est pas en supprimant les espèces protégées qu'ils y parviendront ! La responsabilité sociale et environnementale des entreprises est vraiment en train de changer. Il faut donner aux industriels les moyens d'agir dans ce domaine. Je demande donc à la commission de ne pas supprimer cet article.
Cet article est excellent, car il ménage l'équilibre qui est nécessaire. Dans la vallée de la Maurienne, il n'y a quasiment plus de zones de compensation. Nous sommes en train de nous battre pour essayer d'en trouver pour aménager une véloroute, donc pour décarboner les déplacements !
Ces amendements de suppression mettent en relief nos différences de vision. L'objectif de l'article 7 est de restaurer et renaturer des espaces, sur une planète finie. Dans mon territoire de montagne par exemple, nous voulons démonter certaines remontées mécaniques pour développer différemment les stations de ski. Ces opérations de renaturation sont une obligation éminente pour nous, pour réaliser des aménagements plus vertueux, mais dans le cadre d'une stratégie de développement économique et non de décroissance. Cet article est salutaire et vertueux.
Les industriels d'autrefois étaient également pères de famille, monsieur le ministre délégué, cela ne change rien à l'affaire !
La loi sur la séquence ERC est très claire, mais dans les faits, on aboutit au CRE – compenser, réduire, éviter. Un projet est décidé sans être jamais débattu sous l'angle environnemental : ses promoteurs tentent d'abord de le compenser, s'ils n'y parviennent pas, ils tentent de le réduire, et c'est seulement en dernier recours qu'ils se résolvent à l'éviter. La loi a donc été complètement dévoyée.
Le mécanisme que vous proposez repose sur un gain écologique attendu. Mais pensez à la construction de l'autoroute A65 entre Bordeaux et Pau : elle a causé des dégâts considérables aux écosystèmes, et un rapport du Sénat a montré que la compensation avait échoué, tout simplement parce que l'on ne peut pas démonter des écosystèmes qui ont mis des milliers d'années à se former pour les reproduire un peu plus loin ! L'article ne cherche même pas à avoir une garantie de résultat en termes de fonctionnalités écologiques.
L'autorisation environnementale continuera de privilégier l'ordre de la séquence ERC. Actuellement, la taille moyenne des zones de compensation n'est que de 0,4 hectare : elles sont nombreuses, petites et dispersées, donc elles ne sont pas contrôlées. Nous proposons d'agrandir les zones et de les aménager dans la montagne plutôt que le long de la véloroute, pour reprendre l'exemple de la députée Bonnivard, afin de faciliter les contrôles.
L'article ne vise en aucun cas à dégrader la biodiversité : il responsabilise les industriels dans ce domaine, tout en simplifiant les procédures afin de trouver des solutions pragmatiques et efficaces pour l'économie et l'écologie. C'est vraiment un article important.
La commission rejette les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CS1313 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Amendement CS712 de M. Hadrien Ghomi.
C'est un amendement important, qui vise à réintroduire la compensation dans le nom des SNRR : il est plus que rédactionnel, il est opportun. Avis favorable.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS840 de M. Gérard Leseul.
Faute d'avoir pu supprimer l'article 7 pour le retravailler, nous vous proposons, dans une série d'amendements, d'améliorer son dispositif. Le premier d'entre eux vise à faire émerger des SNC de haute qualité, bénéficiant d'un label décerné par l'Office français de la biodiversité.
La création de SNC de haute qualité pourra se faire en lien avec les établissements publics fonciers, afin d'assurer le portage foncier dans un temps long. Les collectivités territoriales pourront également participer en intégrant les engagements volontaires des entreprises privées.
Votre amendement aurait pour effet de contraindre davantage le dispositif alors que la philosophie du texte est de l'assouplir. En outre, sa rédaction supprime, sans le mentionner, la nouvelle qualification des sites, ce qui rend caducs les éléments qui suivent. Avis défavorable.
Je n'ai pas compris pourquoi l'adoption de l'amendement rendrait caduc quoi que ce soit, mais, je le répète, notre proposition vise à simplifier le dispositif. Comme l'a très bien dit M. Thierry, la décarbonation, ce n'est pas la même chose que la biodiversité. Nous voulons simplement améliorer la rédaction de l'article et je ne vois vraiment pas en quoi cet amendement n'est pas pertinent.
Le texte prévoit que les sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation fassent l'objet d'un agrément préalable de l'autorité administrative compétente, en prenant notamment en compte le gain écologique attendu et la capacité du porteur à atteindre les objectifs. Cet agrément témoigne de la reconnaissance de la pertinence et du sérieux du dispositif. Dans le cadre de la délivrance de l'agrément, plusieurs services et autorités sont sollicités, dont l'Office français de la biodiversité. Votre proposition n'apporte rien au texte. Surtout, elle pourrait faire doublon avec la procédure d'agrément, ce qui ajouterait de la confusion. Je vous invite à le retirer.
La commission rejette l'amendement.
L'amendement CS1429 de M. Hadrien Ghomi est retiré.
La commission adopte l'amendement rédactionnel CS1341 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
En conséquence, les amendements CS839 de M. Gérard Leseul, CS668 de M. Nicolas Thierry et CS278 de Mme Christine Engrand tombent.
La commission adopte l'amendement rédactionnel CS1407 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette successivement les amendements CS838 de M. Gérard Leseul et CS390 et CS391 de M. Jorys Bovet.
L'amendement CS1430 de M. Hadrien Ghomi est retiré.
Amendement CS389 de M. Jorys Bovet.
Cet amendement tend à ce que les terres agricoles ne puissent pas être considérées comme des sites naturels de restauration et de renaturation. L'enjeu est de taille. La biodiversité a des effets bénéfiques incontestables sur l'activité agricole grâce aux services écosystémiques rendus par la nature. Cependant, nous ne pouvons pas soumettre les terres agricoles à des obligations de compensation. Du reste, le texte ne prévoit pas de compensation financière pour les agriculteurs qui engageraient des opérations de compensation. La politique agricole commune accorde déjà des aides aux agriculteurs lorsqu'ils créent ou entretiennent des surfaces d'intérêt écologique. En sera-t-il de même lorsqu'il s'agira de sites de renaturation ? Nous sommes d'accord pour limiter les conséquences de la réindustrialisation sur la biodiversité, mais pas au détriment de ce qui fait la fierté de la France rurale : ses terres et son agriculture, qui ont suffisamment souffert.
Je ne comprends pas pourquoi vous opposez l'agriculture et la biodiversité. Au contraire, la biodiversité est le support d'une agriculture respectueuse de son environnement. L'implantation de SNRR dans des zones agricoles offrirait de nombreux atouts à la production agricole. C'est aussi une opportunité économique pour les agriculteurs. Près de la moitié du territoire français est composé de surfaces agricoles. Les écarter limiterait excessivement le potentiel d'implantation des sites en question.
Cette mesure est surtout très avantageuse pour les agriculteurs ! Nous évoquions précisément la zone de protection spéciale qui avait permis de réintroduire l'outarde canepetière en France. Le sud de la France compte plusieurs zones dédiées à l'agropastoralisme : les éleveurs associés à ce travail sont non seulement très heureux de voir revenir les outardes, mais ils ont été rémunérés pour cela ! Ce dispositif permet d'accroître la rémunération des agriculteurs sans mettre en danger leur production. Grâce à lui, nous parvenons à réconcilier l'industrie, l'écologie et l'agriculture. Je ne comprends vraiment pas le sens de l'amendement et je vous invite à le retirer. Sinon, avis extrêmement défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette successivement les amendements CS311 et CS277 de Mme Christine Engrand
Amendement CS837 de M. Gérard Leseul.
L'amendement tend à supprimer l'attribution de crédits carbone dans le cadre des SNRR. Cette disposition rendait le texte confus, alors que vous vouliez au contraire des dispositions claires et bien délimitées. Notre groupe a récemment dénoncé dans la presse le mécanisme de la compensation carbone, qui pourrait s'apparenter à de nouvelles indulgences. Les ressources de notre planète sont finies et votre mesure risque d'entraîner une double comptabilisation, au titre de l'évitement d'émissions de carbone d'une part, de la restauration de la biodiversité d'autre part. Vous vouliez une loi claire ? Supprimez l'alinéa 10. Si vous ne le faites pas, c'est un discrédit carbone que nous aurons !
Je ne comprends pas pourquoi vous voulez opposer bas-carbone et biodiversité. Avis défavorable.
Cette disposition issue du Sénat est pleine d'intérêt. Il n'y aura pas de double compte, mais des « co-bénéfices » : cela servira à la fois à préserver la biodiversité et à réduire les émissions de carbone, puisqu'un terrain sera réservé aux activités qui n'émettent pas de carbone, voire en stockent. Nous n'y avions pas pensé initialement mais le Sénat a eu là une excellente idée. Surtout, je ne vois pas en quoi cet alinéa vous pose problème.
Je ne suis pas convaincu, moi non plus, que cette disposition donne lieu à une double comptabilité. En revanche, le porteur d'un projet de SNRR doit avoir pour objectif de renaturer une zone en restaurant la biodiversité. Ce faisant, il évitera l'émission de carbone, ce qui lui permettra de recevoir une première compensation. Prévoir d'accorder, en plus, un crédit carbone, peut poser question.
Le risque d'une double comptabilisation est bien réel ! Tout le travail mené pour la directive européenne sur le reporting extra-financier, dite CSRD, ou pour la réforme des crédits carbone souverains ou volontaires, vise à éviter la double comptabilité. Par principe, il faut compenser toute atteinte portée à la biodiversité par des actions destinées à la restaurer. Or on compense toujours mal, et pas assez. Si en plus, on prévoit d'accorder des crédits carbone, la confusion sera complète. Le crédit carbone est un droit commun qui méritera d'être mieux régulé demain, mais il n'a rien à voir avec la compensation biodiversité. Si cette mesure n'ajoute rien parce qu'elle est déjà prévue dans le droit commun, abstenons-nous de la voter, et épargnons-nous une controverse inutile.
N'oublions pas que si nous sommes conduits à prévoir des opérations de renaturation, c'est bien parce que la nature a été détruite. Ce serait le comble d'en être récompensé ! La compensation doit être une obligation. En accordant des crédits carbone, vous encourageriez presque les industriels à en émettre !
Il est obligatoire de compenser les atteintes portées à la biodiversité, pas les émissions de carbone. En revanche, si le terrain que vous acquérez pour préserver la biodiversité permet de capter du carbone, c'est un co-bénéfice qui ne doit être comptabilisé qu'une fois, mais qui doit l'être. Il n'y a pas de raison de ne pas le prendre en compte dans les émissions de l'entreprise, laquelle émettra peut-être du carbone par ailleurs, ou pas. Un amendement de la rapporteure, auquel je serai favorable, précise les modalités du dispositif. En attendant, je ne comprends pas que vous vous opposiez à cette mesure qui ne présente que des avantages.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CS1316 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Amendement CS1328 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback.
L'amendement tend à préciser que les crédits carbone au titre du Label bas-carbone ne peuvent être attribués que si le site naturel de restauration et de renaturation respecte l'une des méthodes sectorielles de ce label, approuvées par le ministre chargé de l'environnement.
À défaut de cohérence politique, je vous invite à faire preuve de cohérence intellectuelle, monsieur le ministre. Depuis le début de l'examen de ce texte, vous ne cessez de répéter que les dispositions de droit commun n'ont pas leur place dans ce projet de loi, que son périmètre est bien délimité, que nous devions être clairs, concis et efficaces. Or vous créez de la confusion en prévoyant l'octroi de crédits carbone dans le cadre d'un SNRR. Non seulement il y aura une double comptabilisation mais vous jetterez le discrédit sur ce qui aurait pu être un vrai marché du carbone et les mesures prises pour compenser les atteintes à la biodiversité. Vous ouvrez la porte à toutes les dérives. D'ailleurs, vous reconnaissez vous-même que vous n'aviez pas pensé à cette mesure : c'est bien le signe qu'elle n'est pas une évidence. En voulant recycler l'idée des sénateurs, vous allez droit dans le mur et vous nous perdez.
Je peux vous assurer qu'il n'y aura pas de double comptabilisation, mais j'ai bien compris qu'il faudra vous le prouver. Lorsque vous en serez convaincu, vous n'aurez plus de raison de vous y opposer. Ou alors le carbone capté dans les Bouches-du-Rhône ne vaudrait pas celui émis en Isère ? Prenez deux usines dans deux départements différents. L'une émet du carbone, l'autre en capte : dans ce cas, vous acceptez que le bilan carbone soit neutralisé pour l'émetteur. En revanche, sous prétexte que le site sur lequel le carbone pourrait être capté est un champ dans lequel les outardes s'épanchent et les brebis broutent, vous n'êtes plus d'accord ? C'est à n'y rien comprendre.
C'est d'un projet de loi relatif à l'industrie verte que nous discutons. Pourquoi, parce qu'un porteur de projet parviendrait d'une part à favoriser la biodiversité et d'autre part à capter le carbone, n'aurait-il pas droit aux avantages de l'un et de l'autre ?
Nous en débattrons à nouveau dans l'hémicycle. D'ici là, le ministre délégué devra vous convaincre qu'il n'y aura pas de double comptabilité.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS836 de M. Gérard Leseul.
Nous n'en sommes pas encore à l'industrie verte, malheureusement ! Pour l'heure, il ne s'agit que de revitaliser notre industrie, avec une touche de verdissement.
La possibilité prévue à l'article 7 d'acquérir par anticipation des unités de restauration ou de renaturation, n'apporte aucune garantie d'un gain écologique, ce qui contreviendrait au principe de compensation. Pour réussir la reconquête de la biodiversité, toute opération de compensation doit aboutir à un gain écologique, sinon les efforts sont vains. Nous vous proposons, par conséquent, de supprimer les termes « de manière anticipée ».
Je pense que votre amendement repose sur un malentendu juridique. D'une part, l'acquisition est anticipée par rapport aux atteintes à la biodiversité et non par rapport au gain écologique. D'autre part, le fait de pouvoir acquérir des unités par anticipation n'enlève rien à l'obligation de compenser selon les principes définis par le code de l'environnement, à savoir le respect d'une équivalence écologique entre les gains et les atteintes, et une obligation de résultat. Demande de retrait ou avis défavorable.
C'est très important, monsieur Leseul : non seulement nous conservons les mêmes procédures de contrôle, nous les suivons sur le temps long et nous nous assurons que la compensation est effective, mais nous permettons que cette dernière commence avant même la construction de l'usine ! Le gain est clair, et il se chiffre en années de compensation supplémentaires. Et si la compensation n'est pas exacte, ce qui sera facile à établir car les contrôles s'exerceront dans la durée, des mesures correctives seront prises.
La commission rejette l'amendement.
La commission adopte l'amendement rédactionnel CS1317 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure.
Amendement CS1411 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback.
Il s'agit de faciliter l'application des obligations de compensation, prévues à l'article 163-1 du code de l'environnement, notamment dans les cas où celles-ci ne peuvent être engagées à proximité du site endommagé.
Conformément au droit européen, l'amendement remet au premier rang l'obligation de respecter un principe de proximité fonctionnelle entre le site endommagé et celui où la compensation est réalisée. La proximité fonctionnelle impose, en particulier, de tenir compte des capacités de déplacement des espèces touchées, et plus généralement des habitats et des fonctions écologiques, afin de les restaurer de façon équivalente et pérenne.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS1029 de M. Henri Alfandari et sous-amendement CS1438 du Gouvernement.
Je salue la création des unités de restauration et de renaturation – et de compensation. Ces surfaces, dont la plupart n'atteignent pas 0,4 hectare, sont cruciales. Outre les sites déjà artificialisés, qui n'auront pas vocation à accueillir de nouvelles activités et devront être renaturés, nous devrons en identifier au sein des villes, dont il convient de réduire l'artificialisation. Or nos communes n'ont pas les moyens de financer de tels projets. Il faudra pourtant les lancer, et à grande échelle. Nous vous proposons par conséquent de créer une plateforme en ligne qui permette de répertorier, par territoire, les unités de compensation, et de fournir une estimation de l'évitement carbone qu'elles représentent.
C'est une bonne idée mais le délai d'un an que vous proposez pour créer la plateforme me semble très court. Sagesse ou retrait.
L'initiative est intéressante. En effet, très peu de sites sont identifiés. Je suis prêt à donner un avis favorable, à condition que soit adopté un sous-amendement qui porte à deux ans le délai de création de cette plateforme.
La commission adopte successivement le sous-amendement et l'amendement sous - amendé.
La commission adopte l'article 7 modifié.
Après l'article 7
Amendements CS783 de Mme Anna Pic et CS631 de M. Nicolas Thierry (discussion commune).
Mon amendement vise à inclure la prise en compte de la biodiversité comme critère d'éligibilité des industries françaises qui bénéficieront des dispositifs prévus dans la stratégie et la loi pour l'industrie verte. Notre groupe souhaite appliquer un principe général de conditionnalité des aides publiques, dans un contexte de raréfaction de l'argent public.
Mon amendement vise à instaurer le même critère d'éligibilité. La réduction des retombées environnementales de l'économie ne doit pas se limiter à la décarbonation : elle doit aussi intégrer les enjeux de biodiversité. Les entreprises sont profondément dépendantes des services écosystémiques. Nous devons les encourager à voir dans la préservation de la biodiversité un atout et non une contrainte. Les entreprises bénéficiant des dispositifs prévus par ce texte ou dans la stratégie de réindustrialisation verte du pays, doivent rendre publics leurs engagements et actions concourant à la réduction de l'impact de leur entreprise sur la biodiversité.
C'est un dispositif intéressant : il est incitatif pour les entreprises concernées et permettra d'améliorer le suivi de la loi ainsi que son application. Sagesse.
Je serai plus réservé. C'est une charge supplémentaire pour les entreprises. Or des obligations similaires sont en cours d'élaboration. La directive CSRD s'appliquera aux entreprises de plus de 250 salariés dès 2026. Les dispositifs de transparence relatifs à la biodiversité sont déjà applicables dans la déclaration de performance extra-financière pour les entreprises de plus de 500 salariés. Finalement, votre amendement ne concernerait que les PME et les entreprises de taille intermédiaire, qui n'ont pas besoin de contraintes supplémentaires. Avis défavorable.
La lutte contre les atteintes à la biodiversité est essentielle et elle ne saurait être découplée de la lutte contre le changement climatique. En France, les principales atteintes portées à la biodiversité sont d'origine agricole : l'agriculture prend des terres sur les espaces naturels, et a recours aux pesticides – c'est le chercheur de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement qui vous parle. C'est l'ensemble de la société qui doit tenir compte des enjeux liés à la biodiversité à chaque fois qu'un nouveau procédé industriel est lancé.
Bien sûr, cette disposition aura des effets sur les entreprises, mais uniquement sur celles qui bénéficieront des aides publiques citées. Il ne me semble pas anormal que ces dernières fournissent quelques justifications.
Nous voterons contre ces amendements. Ce projet de loi m'inspire le même sentiment que celui relatif à la relance « bidon » du nucléaire : nous revivons, article après article, amendement après amendement, le même enfer bureaucratique, nous entendons les mêmes gens qui n'ont jamais vu une entreprise de leur vie expliquer leurs intentions pour achever d'accabler les entreprises ! On est bien partis pour atteindre les 5 % d'industrie dans le PIB ! Entre l'absence totale de planification structurelle sur les matières premières, la formation, l'innovation, l'absence totale de protectionnisme et l'accumulation de normes bureaucratiques, nous n'aurons même pas fini de lire cette loi que les Chinois nous aurons encore piqué des marchés ! C'est insupportable. Tout pouvoir est donné à la bureaucratie, rien pour les entrepreneurs, aucune liberté d'initiative. Heureusement que nous sommes censés avoir élu des ultralibéraux !
Quand M. Tanguy s'exprime, chers collègues, j'aimerais que vous essayiez de le calmer plutôt que de l'invectiver. Et, monsieur Tanguy, s'il vous plaît, les micros fonctionnent très bien, il n'y a aucun besoin de hurler dans notre cénacle.
Je voterai contre ces amendements, qui sont inspirés par la Ligue pour la protection des oiseaux. Les associations devraient s'en tenir à leur mission et les législateurs, ne pas oublier qu'ils ont été élus pour ménager des équilibres. J'ai été très choquée que vous disiez que l'agriculture française prend des terrains à la biodiversité. Nous avons la chance d'avoir encore une agriculture familiale, non intensive, contrairement à ce que vous pensez, et respectueuse d'un modèle que nous souhaitons préserver. Or nous sommes désormais obligés d'importer plusieurs denrées agricoles, ce qui n'était pas le cas dans le passé. Attention à ce que nous disons : nous avons tout de même un peu besoin des terres agricoles pour nourrir les Français à des prix corrects !
Beaucoup d'amendements sont travaillés avec divers acteurs. Ce n'est pas la peine de recourir au name and shame dès qu'une ONG est citée.
D'autre part, beaucoup appellent au respect des règles du pacte républicain et à l'existence de contreparties à la moindre aide accordée. S'il est bien un sujet qui devrait échapper à toute controverse, c'est celui des contreparties aux aides publiques accordées aux entreprises. Si nous voulons que les règles soient respectées, elles doivent être parfaitement claires. L'enjeu de la biodiversité doit être inscrit dans les contreparties des aides attribuées aux entreprises. Ce n'est pas de la bureaucratie ! M. Tanguy repousse les limites du libéralisme beaucoup trop loin.
Pour en finir avec le recours au name and shame dès que la source d'un amendement est indiquée, rappelons que M. Waserman, lorsqu'il était vice-président de l'Assemblée nationale, avait demandé que les amendements soient sourcés.
J'invite M. Tanguy à dresser la liste de toutes les dispositions du texte susceptibles de contraindre davantage les entreprises. Je serai curieux de la lire car il me semble qu'au contraire, nous simplifions la vie des entrepreneurs – en créant des sites clé en main, en facilitant l'investissement dans les friches, en proposant des modalités de financement et j'en passe. Nous n'avons sans doute pas lu le même texte, mais cela ne m'étonnerait pas car nous ne vous avons pas beaucoup vu ce matin, monsieur Tanguy. Ne vous en déplaise, ce texte de simplification prouve que l'on peut réconcilier l'économie et l'écologie et faire de la préservation de l'environnement un outil de compétitivité pour les industries.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS1030 de M. Henri Alfandari.
Il s'agit d'encourager les élus locaux à faire émerger des projets sur leur territoire. Le projet d'aménagement stratégique des schémas de cohérence territoriale pourrait être utilisé pour identifier les actions de compensation des atteintes à la biodiversité et les unités de restauration et de renaturation pouvant être créées dans le territoire.
Je vous invite à retirer l'amendement. Ce n'est pas tout à fait le rôle des projets d'aménagement stratégique, qui définissent des objectifs à un horizon de vingt ans.
Dans les schémas de cohérence territoriale, il y a aussi un document d'orientation et d'objectifs, qui prévoit déjà cette possibilité. Je vous invite donc à retirer l'amendement car il est satisfait.
L'amendement est retiré.
Membres présents ou excusés
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'industrie verte
Réunion du jeudi 6 juillet 2023 à 9 h 05
Présents. – M. Damien Adam, M. Henri Alfandari, Mme Anne-Laure Babault, M. Emmanuel Blairy, M. Philippe Bolo, Mme Émilie Bonnivard, M. Philippe Brun, Mme Cyrielle Chatelain, Mme Sophia Chikirou, M. Hendrik Davi, Mme Christine Decodts, Mme Alma Dufour, M. Philippe Fait, M. Charles Fournier, M. Hadrien Ghomi, Mme Olga Givernet, Mme Clémence Guetté, M. Timothée Houssin, M. Alexis Izard, M. Sébastien Jumel, Mme Nicole Le Peih, Mme Marie Lebec, M. Mathieu Lefèvre, M. Gérard Leseul, Mme Delphine Lingemann, M. Alexandre Loubet, M. Nicolas Meizonnet, Mme Yaël Menache, Mme Lysiane Métayer, M. Pierre Meurin, M. Bruno Millienne, M. Jérôme Nury, Mme Astrid Panosyan-Bouvet, Mme Christelle Petex-Levet, Mme Anna Pic, M. Dominique Potier, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Véronique Riotton, M. Xavier Roseren, M. Aurélien Saintoul, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Jean-Philippe Tanguy, M. Matthias Tavel, M. Jean-Marc Tellier, M. Vincent Thiébaut, M. Nicolas Thierry, Mme Huguette Tiegna, M. Lionel Vuibert, M. Hubert Wulfranc, M. Frédéric Zgainski
Assistaient également à la réunion. – M. Thibault Bazin, Mme Danielle Brulebois, M. Pascal Lecamp, M. Jimmy Pahun