La séance est ouverte à 22 heures 05.
Présidence de M. Sacha Houlié, président.
La Commission examine les articles du projet de loi organique, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire (n° 1345) (M. Didier Paris, rapporteur).
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Nous examinons le projet de loi organique, adopté par le Sénat, relatif à l'ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire.
Article 1er (art. 14, 15, 16, 17, 17-1, 18-1, 18-2, 19, 21-1, 22, 23, 24, 25, 25-1, 25-3, 25-4, 25-5 [nouveau], 26, 33, 40, 40-1, 40-8 à 40-13 [nouveaux], 41, 41-2, 41-3, 41-5, 41-9, 41-9-1 [nouveau], 41-12 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Réforme des voies d'accès au corps de la magistrature et de l'intégration provisoire à temps plein
Amendements identiques CL95 de M. Didier Paris, CL11 de Mme Cécile Untermaier, CL22 de Mme Elsa Faucillon, CL52 de M. Ugo Bernalicis et CL79 de Mme Caroline Abadie.
Mon amendement vise à supprimer une disposition adoptée par le Sénat, qui prévoit que le droit syndical des magistrats s'exerce dans le respect du principe d'impartialité. Il ne fait aucun doute que les magistrats doivent assumer les devoirs de leur charge, dont l'impartialité. La liberté syndicale leur est reconnue par un ensemble de textes. Si nous partons du principe que le magistrat a une obligation d'impartialité sur son devoir général, l'appliquer strictement au droit syndical vide celui-ci de son sens. C'est la raison pour laquelle il a semblé nécessaire de rectifier l'ajout du Sénat en la matière.
Je remercie M. le rapporteur d'avoir traité cette question de la sorte. Nous avons été inquiets, presque sidérés, devant l'amendement du Sénat. L'impartialité, liée à un syndicat, n'a aucun sens. Comme cela a été dit, elle vide de son sens l'action syndicale. En revanche, les magistrats s'imposent leur déontologie, même lorsqu'ils adhèrent à un syndicat. Si un comportement syndical y déroge et entraîne des sanctions disciplinaires, ce n'est pas au nom du principe d'impartialité.
La disposition adoptée par le Sénat est dangereuse pour l'avenir du syndicalisme et pour l'indépendance de la justice. Il convient de la supprimer.
Mon amendement vise à supprimer cette attaque à la liberté syndicale des magistrats, qui confond impartialité et neutralité. Je suis heureuse de voir que nous le voterons largement. Je souhaite qu'il soit non négociable dans le cadre d'une commission mixte paritaire (CMP).
L'amendement vient se glisser dans l'article 1er, qui paraît technique. Chacun s'accorde sur l'impartialité en matière de jugement, mais on pourrait oublier qu'elle se rattache au droit syndical. Je ne sais pas ce qui est passé par la tête des sénateurs. Il est bon que, dans cette commission, un large éventail politique rappelle qu'être critiqué ou être dans l'opposition a beau être pénible, c'est ce qui fait que nous sommes dans une démocratie.
Nous souhaitons aussi supprimer l'alinéa 2 qu'a introduit le Sénat. Un magistrat syndiqué a évidemment la liberté de s'exprimer.
Je suis favorable aux amendements. J'ai saisi le Conseil supérieur de la magistrature pour recevoir des éclaircissements. Il serait saugrenu de ne pas attendre ce qu'il ne manquera pas de dire sur ces questions.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL138 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL45 de M. Guillaume Gouffier Valente.
Il a pour objet de revenir sur la suppression du recrutement sur titres pour les docteurs en droit à l'École nationale de la magistrature (ENM). Alors que la politique de recrutement de magistrats se poursuit, il paraît important de diversifier les voies de recrutement. Il s'agit donc de dispenser les docteurs en droit candidats au troisième concours des épreuves d'admissibilité. Cette proposition, à laquelle le comité Sauvé s'était dit favorable, constitue une reconnaissance du doctorat en droit.
L'amendement contrevient au principe général du texte, qui vise à retirer certains modes d'intégration directe. L'amendement a pour objet de réserver le troisième concours aux seuls docteurs en droit et de les dispenser des épreuves d'admissibilité. L'ENM est une école d'application : on doit s'assurer que chaque candidat dispose non seulement d'une solide culture juridique mais aussi d'une expérience professionnelle. Je vois mal comment on pourrait dispenser certains candidats des épreuves d'admissibilité au seul motif qu'ils sont docteurs en droit. En outre, il est à craindre que cette exception ne s'étende à d'autres catégories de candidats, soit au concours, soit au nouveau dispositif de recrutement par jury que nous cherchons à instaurer.
Je vous suggère donc de retirer cet amendement qui ne paraît pas cohérent avec l'ensemble du dispositif. À défaut, j'y serai défavorable.
L'amendement porte atteinte au principe d'égalité des candidats devant le concours. Par ailleurs, le concours des titulaires d'un seul doctorat est similaire à celui des candidats au premier concours, si bien qu'une dérogation paraît inadaptée. Je vous suggère également de retirer l'amendement.
Je maintiens l'amendement car j'ai la conviction qu'il est légitime. La demande est forte du côté des docteurs en droit. Il faut les valoriser : leur expérience peut légitimement les dispenser des épreuves écrites.
J'ai déposé un amendement qui va dans le même sens car il rétablit le recrutement sur titres que nous avions introduit avec beaucoup de difficultés. En 2016, nous avions tenté d'ouvrir la magistrature et nous avions tenu compte de l'université. Elle est totalement absente de votre projet, ce qui n'est pas satisfaisant.
Le principe d'égalité ne se pose pas dès lors que les situations sont différentes. On ne distingue pas parmi les docteurs en droit : tous sont concernés. Vous le savez, l'université traverse une crise car elle ne bénéficie pas des crédits historiques que vous avez pu mobiliser pour la justice. La situation des doctorants est de plus en plus difficile : les postes de recherche ne leur sont pas ouverts. On peut imaginer que l'on n'oblige pas ceux qui ont acquis un doctorat et dix ans d'expérience professionnelle d'enseignement, à étudier trois ans à l'École nationale de la magistrature.
Je ne vous rejoins pas pour dire que l'université est en crise, compte tenu des moyens que nous lui avons alloués, notamment dans le cadre de la loi de programmation de la recherche. La reconnaissance que l'on doit au doctorat, pour promouvoir les étudiants qui font de la recherche, nécessite en revanche qu'on offre aux docteurs des débouchés professionnels.
Par ailleurs, l'admission fonctionne comme un filtre : si des candidats ne sont pas prêts à être magistrats, on peut légitimement penser qu'ils ne seront pas admis, même s'ils sont admissibles.
Enfin, cet amendement que j'ai cosigné a été recommandé par de nombreux universitaires des plus grandes universités de droit du pays. Cela peut être interprété comme un signe de corporatisme, mais j'y vois plutôt un signe d'attention particulière des présidents d'université aux débouchés professionnels de leurs étudiants et à leur professionnalisation. C'est pourquoi j'appuie l'adoption de l'amendement.
La commission adopte l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL69 de Mme Julie Lechanteux.
Amendement CL18 de Mme Emeline K/Bidi.
Il a pour objet de maintenir les plafonds en vigueur car ils assurent un équilibre entre les auditeurs de justice du concours « étudiant » et les professionnels recrutés sur concours ou hors concours.
La fixation d'un quota de places au titre du concours « étudiant » ou premier concours est du domaine réglementaire.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CL64 et CL63 de Mme Cécile Untermaier.
Ces amendements rejoignent la préoccupation de M. Gouffier Valente, qui a été satisfaite. J'ai bataillé pour mettre en place des juristes assistants et faire en sorte que les docteurs en droit, parfois en difficulté, puissent trouver un débouché dans la magistrature.
Il aurait été préférable que le recrutement sur titres ne soit pas réservé aux docteurs en droit. Un avocat avec dix ans de vie professionnelle doit pouvoir être recruté dans les mêmes conditions, avec une épreuve d'admission et un stage probatoire. On ne peut pas ignorer une expérience professionnelle de dix ans et des diplômes d'un niveau élevé dans le domaine juridique.
Vous voulez ouvrir la magistrature et recruter 1 500 magistrats. Allez les chercher dans les universités qui les forment et dans le monde de l'avocature, qui, lui aussi, a besoin de nous.
Par vos amendements, vous souhaitez restaurer l'intégration directe, prévue par l'article 18-1 de l'ordonnance, que le texte vise à supprimer au profit d'un concours et d'un jury professionnel. Cela est d'autant plus adapté que les avocats peuvent déjà faire ce que vous préconisez. Ils pourront toujours le faire, en passant directement le concours professionnel, qui leur permettra d'accéder au nouveau premier grade, avec cinq ans d'expérience, et au nouveau deuxième grade, avec dix ans d'expérience.
Enfin, la plupart des avocats passés par la voie de l'intégration sur titres n'y ont pas vu que des avantages : le recrutement est long et difficile à vivre pour un avocat, qui doit abandonner tout ou partie de son cabinet. Je comprends votre vision mais il semble préférable d'en rester à l'économie générale du texte, qui permettra de maintenir la possibilité pour les avocats d'intégrer le corps judiciaire, de façon plus satisfaisante, y compris pour des avocats qui ont dix ans d'expérience. Cette situation est toujours prévue expressément dans les textes.
À un moment où l'on recrute de nombreux contractuels, dans d'autres domaines du service public, il est étonnant que l'on ait pu, en première intention, oublier l'université.
De toutes les écoles de formation, l'université, première des maisons qui accueillent des étudiants, ne leur offre pas toujours des débouchés. Vous acceptez qu'elle forme les magistrats à travers un institut judiciaire, mais vous n'imaginez pas que l'on puisse cheminer avec des personnes restées à l'université. Nous avons eu cette approche en 2016, et je regrette que l'on puisse la transformer car elle avait créé un formidable appel.
Ce que nous avions proposé pour les avocats ne fonctionnait pas : ils devaient abandonner le cabinet et être suspendu deux ans sans contrepartie financière. Beaucoup d'entre eux, qui étaient de grande qualité et auraient rempli cet office avec efficacité, y ont renoncé car ils ont eu l'impression d'entrer dans un tunnel. Il fallait alléger le dispositif pour les meilleurs étudiants de nos universités.
Je retire mes amendements.
Le texte tend à regrouper toutes les voies d'accès, avec une formation commune. On est en train de le complexifier.
Il est question d'une voie d'accès pour des professionnels : pour être magistrat, être un grand professionnel du droit ou un grand enseignant est une condition indispensable mais pas suffisante. Les avocats connaissent la réalité des magistrats, et leur travail. Ce n'est pas le cas d'un professeur, fût-il professeur agrégé et grand enseignant. Ne vous méprenez pas sur mon propos : la qualité des personnes n'est pas en cause. L'avocat a mis les pieds dans une juridiction : il sait ce qu'est un tribunal, un réquisitoire, comment on échange des conclusions. C'est son cœur de métier.
D'ailleurs, lorsqu'il manque un magistrat dans une formation collégiale, on peut demander à l'avocat le plus ancien de le remplacer. J'ai ainsi été juge assesseur à quatre ou cinq reprises dans ma carrière d'avocat.
Je préfère restaurer le concours républicain et égalitaire – je ne comprends pas que nous nous en passions. Je regrette que la cohérence que nous avions introduite dans le texte soit mise à mal.
Les amendements sont successivement retirés.
Amendement CL10 de Mme Cécile Untermaier.
Dans les années précédentes, on a constaté qu'on n'ouvrait pas largement les portes aux avocats : on les confrontait à une série d'obstacles, pour être certain qu'ils ne viendraient pas gêner une corporation qui a l'habitude de travailler ensemble.
Leur formation probatoire ne devrait pas excéder six mois s'ils ont l'expérience requise et s'ils ont réussi l'épreuve à laquelle vous voulez les soumettre. Dans les juridictions administratives, la formation est également de six mois, me semble-t-il, et elle s'adresse à des personnes qui ne connaissent pas particulièrement les tribunaux.
Il s'agit toujours d'un passage devant un jury professionnel, et j'entends ce que vous dites. Dans ce texte, il faut osciller entre la clarté de principes d'intégration, plus simples que les onze que l'on connaissait auparavant, et une forme de souplesse, pour insérer chaque catégorie professionnelle. L'article 19 La nouvelle disposition de l'ordonnance relative aux stages juridictionnels prévoit justement, dans la rédaction issue de l'article 1er, que le régime des stages est adapté à la formation d'origine et à l'expérience professionnelle. Si un avocat dispose d'une grande expérience, le jury saura adapter la durée de stage en conséquence. Écrire dans la loi organique que le stage doit être de six mois restreindrait la marge de manœuvre du jury et atteindrait l'effet inverse de ce que l'on souhaite.
Je préconise davantage de souplesse, et suis défavorable à l'amendement, à moins que vous ne souhaitiez le retirer.
L'amendement est retiré.
Amendement CL36 de Mme Laurence Vichnievsky.
À l'exception des conditions d'âge et de diplôme des candidats, les conditions d'application du concours professionnel pour le recrutement des magistrats des deux premiers grades sont renvoyées à un décret en Conseil d'État. Il est proposé que le contrôle du Parlement s'exerce sur trois points : le caractère anonyme du concours, au niveau de l'admissibilité, conforme à la tradition républicaine de notre pays ; la vérification que les candidats possèdent les connaissances juridiques de base comme les capacités de synthèse dans la gestion des dossiers nécessaires à l'exercice quotidien de la profession de magistrat ; le professionnalisme et la neutralité politique du jury d'admission qui, pour la première fois depuis 1958, ne saurait être désigné sans contrôle par le ministre de la justice.
L'indépendance de la justice, de valeur constitutionnelle, doit être préservée. S'il faut se garder tout corporatisme judiciaire, le Parlement doit veiller à ne pas placer le recrutement des juges à la seule main du ministre.
Je comprends la préoccupation de Mme Vichnievsky, qui connaît très bien la matière. En revanche, je ne vois pas pourquoi une loi organique devrait préciser que les candidats doivent être traités à égalité lors des concours, comme s'il y avait un doute sur cette question. La précision va de soi : elle n'a pas sa place dans le texte à cet endroit. C'est pourquoi je vous propose de retirer l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
L'objectif et le contenu des épreuves du concours professionnel ou la composition du jury relèvent du niveau réglementaire. Aucune précision de ce type ne figure dans la loi organique. Pourtant, les concours qui permettent l'accès à la magistrature garantissent évidemment l'anonymat des candidats et l'indépendance du jury. Je suis défavorable à cet amendement.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CL97 de M. Didier Paris.
Il vise à supprimer une disposition du Sénat, qui ouvre le concours professionnel aux docteurs en droit enseignants, sans autre expérience professionnelle. Il faut conserver la nécessité d'une expérience qualifiante, de sept à dix ans selon les degrés ou les grades accessibles.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CL168 du Gouvernement
L'amendement a pour objet de supprimer la durée de formation des stagiaires issus du concours professionnel.
Pourquoi mentionnez-vous dans l'exposé sommaire une durée de formation de douze mois pour les stagiaires, dont dix mois à titre probatoire ?
La commission adopte l'amendement.
Amendements identiques CL98 de M. Didier Paris et CL80 de Mme Caroline Abadie, amendement CL72 de Mme Sandra Regol (discussion commune).
Le Sénat avait prévu que les magistrats constituent moins de la moitié du jury professionnel. Cela pose la question de la place qu'on leur donne dans les concours et de la forme d'indépendance qui leur est réservée. Dans ces conditions, j'ai préféré inverser la proportion et faire en sorte que le nombre de magistrats composant le jury professionnel représente « la moitié des membres au moins ».
Le projet de loi organique ouvre le corps judiciaire : il faut accompagner cette démarche. Pour garantir l'excellence des magistrats recrutés et que ceux-ci satisfassent à leurs droits et devoirs, il faut qu'ils obéissent aux exigences, très spécifiques, de la magistrature. Il semble donc nécessaire que le jury professionnel comprenne une majorité de magistrats.
Tout est affaire d'équilibre. Même s'il est important que le jury professionnel dispose d'un regard extérieur, cet équilibre se perd si les magistrats y sont en minorité.
Contrairement au Sénat, vous souhaitez que le jury soit majoritairement composé de magistrats. Il s'agit d'un jury d'aptitude, non de recrutement. La présence de magistrats en nombre suffisant est nécessaire.
Intégrer la composition du jury à la loi organique ne va toutefois pas dans le bon sens car cela rigidifie le système et empêche toute évolution ultérieure. J'aurais préféré que le champ du pouvoir réglementaire soit respecté et que l'on n'instaure pas ce type de limites.
Je m'en rapporte cependant à la sagesse de la commission.
La commission adopte les amendements CL98 et CL80. En conséquence, l'amendement CL72 tombe.
Elle adopte les amendements rédactionnels CL140, CL141, CL142 et CL143 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL75 de Mme Sandra Regol.
Inspiré par une recommandation du Conseil national des barreaux, il a pour objectif d'abaisser de quinze à dix le nombre d'années d'expérience professionnelle requis pour exercer les fonctions de magistrat en service extraordinaire. Cela étendra le vivier de candidats et rendra plus fluides ces recrutements temporaires.
Avis défavorable.
Les magistrats en service extraordinaire seront amenés à exercer des fonctions du nouveau deuxième grade en cour d'appel. Cela suppose un niveau d'expérience nettement supérieur à celui du nouveau premier grade. Les autres magistrats arrivent rarement à ces fonctions avant dix années de carrière. Prévoir seulement dix ans d'expérience en tant qu'avocat me paraît insuffisant.
L'amendement est retiré.
La commission adopte les amendements rédactionnels CL144 et CL145 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL74 de Mme Sandra Regol.
Cet amendement prévoit que la formation organisée pour les magistrats en service extraordinaire ne peut être inférieure à un an, afin de s'assurer de sa qualité.
Avis défavorable. Il faut conserver une certaine souplesse – d'autant qu'une expérience professionnelle de quinze ans est requise.
La durée de la formation relève du pouvoir réglementaire et, je l'ai déjà expliqué, je suis opposé à tout empiètement sur ce dernier – qu'il s'agisse des stagiaires du concours professionnel, des auditeurs de justice mais aussi des magistrats en service extraordinaire.
La mesure proposée par l'amendement est cohérente avec l'amendement CL75, qui proposait de ramener de dix à quinze ans le nombre d'années d'expérience professionnelle requis.
J'entends l'observation du ministre sur la nécessité de respecter le domaine réglementaire, mais des amendements comprenant des mesures qui relèvent de ce dernier ont déjà été votés.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL146 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL147 de M. Didier Paris.
Le texte adopté par le Sénat précise que les magistrats en service extraordinaire ne pourront être membres du jury d'aptitude des stagiaires. Comme ils ne sont pas magistrats de carrière, ils ne peuvent par définition pas en faire partie. Je propose donc de supprimer cette précision superfétatoire.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL148 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL100 de M. Didier Paris.
Le Sénat a souhaité porter à un vingtième le quota de personnes pouvant être en détachement judiciaire. Pour des raisons de souplesse, il convient de conserver la limite maximale d'un quinzième – qui en réalité n'est jamais atteinte.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL149 de M. Didier Paris, rapporteur.
La commission adopte l'article 1er modifié.
Article 2 (art. 12-1-1 de l'ordonnance statutaire [nouveau]) : Évaluation des chefs de cour d'appel et de tribunal
Amendement CL150 de M. Didier Paris.
Cet amendement apporte deux modifications aux modalités d'évaluation professionnelle des magistrats, que le projet change très sensiblement.
En premier lieu, il est précisé que l'évaluation des chefs de juridiction prévue à l'article 12-1 de l'ordonnance est conduite par les chefs de cour. Il s'agit de bien distinguer cette évaluation du travail juridictionnel de la nouvelle évaluation élargie prévue à l'article 2.
En deuxième lieu, les magistrats du troisième grade de la Cour de cassation se verront proposer un entretien professionnel plutôt qu'une évaluation complète, qui n'aurait pas grand sens s'agissant de magistrats qui ont accédé au plus haut niveau du corps judiciaire.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CL37 de Mme Laurence Vichnievsky et sous-amendement CL169 de M. Didier Paris, amendement CL76 de Mme Sandra Regol, amendements identiques CL102 de M. Didier Paris et CL81 de Mme Caroline Abadie, amendement CL12 de Mme Cécile Untermaier, amendement CL151 de M. Didier Paris, amendements identiques CL77 de Mme Sandra Regol et CL96 de M. Jérémie Iordanoff (discussion commune).
L'un des buts de la révision constitutionnelle de juillet 1993 avait été d'affermir l'indépendance de l'autorité judiciaire en étendant le pouvoir de nomination du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) aux présidents de tribunaux de grande instance (TGI) et en imposant un avis conforme de ce dernier pour toutes les autres nominations des magistrats du siège.
La philosophie du projet de loi organique est davantage marquée par l'intervention renforcée du ministre de la justice dans le processus de nomination. Elle contredit sinon la lettre, du moins l'esprit de la révision de 1993, qui avait fait l'objet d'un large consensus.
C'est la raison pour laquelle l'amendement CL37 propose que les magistrats soient majoritaires dans le collège d'évaluation, conformément aux standards européens. Ils ne devront pas être désignés par le garde des sceaux mais par les chefs de la Cour de cassation ou bien seront élus par leurs pairs. Deux des cinq personnalités qualifiées de ce collège seront désignées par les présidents des deux Assemblées, afin de renforcer les liens entre l'autorité judiciaire et le pouvoir législatif.
Seule l'indépendance des membres du collège d'évaluation, qui est déterminante, doit être mentionnée expressément dans la loi. Les ajouts du Sénat au sujet des qualités morales attendues des membres de ce collège n'ont pas leur place dans cet article.
Je comprends la volonté de préciser la composition du collège d'évaluation, même si elle conduit à entrer dans les détails.
Je suis favorable à l'amendement, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement. Il me semble incongru de prévoir que les chefs de la Cour de cassation soient membres du collège d'évaluation, puisqu'ils président par ailleurs le CSM.
L'amendement CL76 vise à restreindre la place occupée dans le collège d'évaluation par les personnalités ayant une compétence spécifique en matière de gestion budgétaire ou de ressources humaines.
La place grandissante accordée aux fonctions managériales dans certaines de nos administrations ne leur a pas toujours forcément bien réussi – pour le dire gentiment. Alors que l'on donne un peu plus de moyens à la justice, nous n'avons pas envie de la voir subir le même sort. Si des compétences de gestion sont nécessaires, elles ne peuvent pas prendre le pas sur le reste.
Nous sommes d'accord sur le fait qu'il convient de s'assurer que le collège est composé majoritairement de magistrats. Mais il me semble également enrichissant pour le corps judiciaire que ce collège comprenne un nombre suffisant de personnalités qualifiées. Or votre amendement n'en prévoit qu'une seule, soit une portion congrue qui ne me paraît pas du tout adaptée.
Contentons-nous de veiller à la présence d'une majorité de magistrats dans le collège d'évaluation, ce que prévoit mon amendement CL102.
Mon amendement est identique. Dans le prolongement de ce que nous avons prévu pour le jury de recrutement, il s'agit de préciser que les magistrats sont majoritaires dans le collège d'évaluation, afin qu'aucun décalage trop prononcé ne se manifeste avec les devoirs et obligations des magistrats.
Mon amendement vise à garantir que les magistrats seront majoritaires au sein du collège d'évaluation.
L'amendement CL151 précise que les magistrats membres du collège d'évaluation sont nommés par le garde des sceaux sur avis conforme du CSM. En accord avec mon groupe politique, il me semble important que cette autorité de régulation du corps judiciaire participe au processus de nomination du collège.
La rédaction de l'amendement CL12 de Mme Untermaier ne permet pas de garantir que les magistrats sont majoritaires dans le collège d'évaluation – objectif que nous partageons.
La rédaction du texte prévoit que les membres du collège d'évaluation sont nommés par le garde des sceaux sur avis de la formation plénière du CSM. Les amendements CL77 et CL96 proposent de confier ce pouvoir de nomination directement au CSM.
Je précise que si l'amendement CL37 et le sous-amendement CL169 sont adoptés, cela fera tomber tous les autres amendements en discussion commune.
Je suis favorable à l'amendement CL37, à condition que le sous-amendement CL169 soit adopté.
Je répète que la composition du collège d'évaluation relève du pouvoir réglementaire. Je ne dis pas cela parce que ce pouvoir serait intouchable, mais parce qu'il convient de ne pas figer les choses dans une loi organique – qui par définition est rarement modifiée. Il faut se réserver la possibilité d'évoluer. Il pourrait être envisagé que des magistrats honoraires soient membres du collège.
L'amendement CL37 prévoit que le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près la Cour de cassation sont membres du collège. Comme l'a relevé le rapporteur, cela pose un problème parce qu'ils président également le CSM, autorité de nomination. Cette difficulté est résolue par le sous-amendement CL169, qui apporte en outre plus de souplesse dans la composition du collège et prévoit que les magistrats non élus par leurs pairs seront nommés par le garde des sceaux sur avis conforme du CSM.
Même s'il ne m'a pas entièrement convaincu car il ne corrige pas toutes les imprécisions de l'amendement de Mme Vichnievsky, je suis favorable au sous-amendement du rapporteur, à condition qu'il soit retravaillé dans la perspective de la séance.
Avis défavorable à l'amendement CL76 de Mme Regol, qui ne prévoit qu'une seule personnalité qualifiée au sein du collège d'évaluation.
Je suis favorable aux amendements CL102 et CL81 du rapporteur et de Mme Abadie, qui indiquent que les personnalités qualifiées représenteront moins de la moitié des membres du collège.
Avis défavorable à l'amendement de Mme Untermaier, qui prévoit que les personnalités qualifiées représenteront au maximum le quart des membres du collège.
Enfin, je suis favorable à l'amendement CL151 du rapporteur et défavorable à l'amendement CL77.
Je précise que mon amendement CL76 limite seulement le nombre de personnalités qualifiées qui ont des compétences en gestion des ressources humaines. Il ne fait pas obstacle à la désignation d'autres catégories de personnalités qualifiées, mais vise à ce que l'on ne recrute pas seulement des directeurs des ressources humaines et que l'on se préoccupe avant tout de la fonction juridictionnelle.
Je reviens sur la question du champ respectif du pouvoir réglementaire et de la loi organique. Le projet dont nous discutons porte tout de même sur le statut des magistrats, qui a pour objectif d'apporter des garanties d'indépendance et de respecter de grands principes. On ne peut donc pas confier au pouvoir réglementaire le soin de statuer sur certains points comme on le ferait pour d'autres catégories de fonctionnaires.
Ma réflexion n'a pas encore complétement abouti s'agissant du nombre opportun de personnalités qualifiées qui siègent au collège d'évaluation. Mais je suis sensible à la proposition qui consiste à limiter le nombre de celles nommées en raison de leurs compétences en matière budgétaire ou de ressources humaines. Il est bien entendu nécessaire d'évaluer les capacités d'encadrement du chef de juridiction. Mais gérer des budgets ou des ressources humaines constitue un métier à part entière – celui des attachés d'administration, dont on manque par ailleurs – et cela ne doit pas être son rôle. Une certaine confusion résulte de la multiplication des autres fonctions qu'on attribue au chef de juridiction, mais cela n'est pas sur ces dernières qu'il devrait être évalué.
L'amendement CL12 est retiré.
La commission adopte successivement le sous-amendement CL169 et l'amendement CL37 sous-amendé.
En conséquence, les autres amendements tombent.
La commission adopte l'amendement rédactionnel CL152 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL38 de Mme Laurence Vichnievsky.
En premier lieu, l'exigence d'une « sollicitation de l'ensemble de l'environnement professionnel de l'intéressé » paraît déplacée dans le cadre d'une procédure d'évaluation qui ne doit pas s'apparenter à une enquête disciplinaire. Aucun cadre de la haute fonction publique ou des armées, aucun chef d'entreprise, aucun responsable du monde associatif ou syndical n'est soumis en France, sauf suspicion de faute, à une telle batterie d'investigations.
En second lieu, il est proposé de supprimer la référence aux « orientations de politiques publiques dont ils ont la charge et qui leur sont communiquées par les autorités compétentes ». La mission historique de la justice, rappelée par les états généraux, consiste à trancher les litiges conformément à la loi. De cette mission, la justice arrive de moins en moins bien à s'acquitter. L'absolue priorité est qu'elle y parvienne. L'autorité judiciaire, les cours, les tribunaux ne sont pas chargés de mettre en œuvre les politiques publiques décidées par les différents ministères. Ni aujourd'hui, ni demain
Votre amendement réécrit complètement l'alinéa relatif aux modalités d'évaluation. Je comprends que la référence aux politiques publiques suscite des interrogations.
Avis défavorable, car mon amendement CL103 qui suit supprime la mention discutable qui dispose que les orientations de politiques publiques sont « communiquées [aux magistrats] par les autorités compétentes ». Cette notion d'autorités compétentes a fait l'objet de critiques lors de nombreuses auditions, certains s'inquiétant par exemple d'une évaluation élargie par le préfet.
Je propose de simplifier la rédaction et je rappelle que l'évaluation élargie n'a rien à voir avec l'évaluation juridictionnelle. Les deux ne doivent en aucune manière être confondues.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement CL103 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL13 de Mme Cécile Untermaier.
Cet amendement de précision vise à garantir que l'évaluation élargie prévue par cet article demeure cantonnée à la dimension administrative, à l'exclusion de l'activité juridictionnelle.
Demande de retrait, car votre amendement est satisfait. La première phrase du nouvel article 12-1-1 écarte toute ambiguïté en précisant que l'évaluation de l'activité professionnelle se fait « à l'exclusion des aptitudes à l'exercice des fonctions juridictionnelles ».
L'amendement est retiré.
Amendement CL137 de M. Didier Paris.
Cet amendement propose d'inscrire les critères d'évaluation des chefs de cour dans l'ordonnance statutaire. Le Sénat souhaitait que la liste des compétences attendues des chefs de cour et des chefs de tribunal figure dans la loi organique sur le CSM. Il me semble que ce n'est pas sa place.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article 2 modifié.
Article 3 (art. 2, 3, 3-1, 3-1-1 [nouveau], 10-2, 26, 27-1, 28, 28-1, 28-2, 28-3, 28-4 [nouveau], 31, 34, 35, 36, 37, 37-1, 38, 38-1, 38-2, 38-3 [nouveau], 39, 39-1 [nouveau], 39-2 [nouveau], 40, 40-1, 40-5, 41-9, 71, 72, 72-1 [nouveau], 72-2, 72-3, 76-1-1, 76-2, 76-3, 76-4, 76-4 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature et art. 20-1 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) : Structure du corps judiciaire
Amendement CL162 de M. Didier Paris.
Le Sénat a prévu une durée minimale d'exercice d'une fonction ou d'affectation dans une juridiction, afin notamment d'empêcher les chefs de cour ou de juridiction d'obtenir une décharge de fonction immédiatement après leur nomination. Le Sénat a en outre fixé à dix ans la durée maximale d'affectation dans une juridiction.
Cet amendement supprime ces durées minimales et maximales d'exercice et d'affectation, mais il prévoit que les chefs de cour ou de juridiction ne pourront être déchargés à leur demande que trois ans après leur nomination. Cela permet de contrer l'effet d'aubaine qui consisterait à présenter sa candidature pour des fonctions de chef de cour ou de juridiction dans le seul but d'accéder au nouveau troisième grade.
Cet amendement apporte un équilibre bienvenu. Avis favorable.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CL153 de M. Didier Paris.
Il vise à préciser la situation de certains magistrats hors hiérarchie de la Cour de cassation.
Si les conseillers référendaires et les avocats généraux référendaires sont actuellement nécessairement au premier grade, avec ce projet ils pourront atteindre le troisième grade s'ils bénéficient d'un avancement en raison de leur valeur professionnelle exceptionnelle. Les modifications proposées par l'amendement permettent de tenir compte de cette éventualité.
L'amendement tire également les conséquences des évolutions en matière de grade en ce qui concerne la procédure d'évaluation de l'activité professionnelle de ces magistrats ou leur participation à certains organes collégiaux.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte les amendements rédactionnels CL154, CL155 et CL156 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL104 de M. Didier Paris.
Il est prévu que les emplois vacants de conseiller ou d'avocat général à la Cour de cassation doivent être pourvus à raison d'un pour six par des magistrats du deuxième grade ayant exercé pendant au moins huit ans les fonctions de conseiller référendaire ou d'avocat général référendaire.
Ce quota extrêmement rigide entraîne parfois des difficultés à pourvoir ces emplois. L'amendement propose donc d'introduire une certaine souplesse.
La commission adopte l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CL6 de Mme Emeline K/Bidi.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL157 et CL158 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL53 de M. Ugo Bernalicis.
Nous nous réjouissons qu'un congé parental soit enfin accordé aux magistrates et aux magistrats. Nous proposons de porter sa durée à un an au lieu de six mois.
Cette disposition, qui reconnaît le droit à une réaffectation dans le dernier emploi, constitue un progrès. Un congé parental de six mois est suffisamment long. Si on le faisait passer à un an, l'organisation des juridictions virerait au casse-tête. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CL106 de M. Didier Paris.
L'amendement vise à préciser la procédure de nomination du magistrat à l'issue d'un congé parental afin de favoriser son retour en juridiction.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CL159 de M. Didier Paris.
L'amendement a pour objet de proposer un choix entre deux dates concernant le départ à la retraite des magistrats ayant atteint la limite d'âge, afin d'introduire plus de souplesse dans la gestion de la juridiction.
La commission adopte l'amendement.
Amendements identiques CL19 de Mme Émeline K/Bidi et CL54 de M. Ugo Bernalicis.
Le maintien en fonctions jusqu'à 70 ans repose sur le volontariat et répond aux souhaits d'un certain nombre de magistrats.
Il est bien aussi de permettre aux jeunes d'obtenir un poste. Les magistrats partant à la retraite à 68 ans peuvent continuer à contribuer à la justice de bien des manières.
La commission rejette les amendements.
Elle adopte l'article 3 modifié.
Après l'article 3
Amendements CL14, CL16, CL15 et CL17 de Mme Cécile Untermaier.
L'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature prévoit que les magistrats et anciens magistrats ne peuvent exercer un certain nombre de professions – avocat, notaire, huissier de justice, commissaire-priseur judiciaire… – dans le ressort d'une juridiction où ils ont exercé leurs fonctions depuis moins de cinq ans. En revanche, la loi est muette pour ceux d'entre eux qui exercent au sein de juridictions à compétence nationale, tels le parquet national financier (PNF). Du fait de la nature particulière des dossiers traités par cette dernière juridiction, il nous semble nécessaire d'empêcher les magistrats concernés d'exercer certaines professions pendant trois ans à compter de la cessation de leurs fonctions, soit à l'échelle de l'ensemble du territoire – amendement CL14 – soit en limitant l'interdiction au champ de compétence de la juridiction en question – amendements CL16 et CL15.
L'amendement CL17 reprend une proposition du CSM. Actuellement, un magistrat démissionnaire qui se propose d'exercer une activité privée doit en informer préalablement le garde des sceaux, qui peut s'y opposer. Ces dispositions sont en décalage avec les règles applicables aux hauts fonctionnaires et aux magistrats administratifs et financiers. En effet, la loi du 6 août 2019 prévoit un contrôle systématique des mobilités entre le public et le privé par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), pour les emplois les plus exposés au risque déontologique, même en cas de démission. En outre, l'avis du CSM n'est pas prévu pour les magistrats démissionnaires. Pour remédier à cette situation, nous proposons une saisine préalable systématique de la formation compétente du CSM par le garde des sceaux lorsqu'un magistrat démissionnaire souhaite exercer toute activité privée lucrative.
C'est un vrai problème. L'activité d'un avocat ayant été, par le passé, magistrat au PNF peut en effet être source de difficultés déontologiques. Toutefois, j'écarterai d'emblée certaines de vos solutions, madame Untermaier, pour plusieurs raisons. D'abord, le PNF n'est pas la seule juridiction à compétence nationale. Ensuite, interdire à un ancien magistrat d'exercer quelque activité que ce soit dans toute la France serait une mesure d'une grande violence, qui tarirait les vocations pour le PNF. Enfin, il est à craindre que personne ne sache définir précisément le champ de compétence de la juridiction concernée.
Votre amendement CL17 est intéressant, mais que se passerait-il si le magistrat ne respectait pas l'avis du CSM ?
Je vous propose de retirer vos amendements afin que nous travaillions sur le sujet en vue de la séance.
Ces amendements font suite à une affaire qui a défrayé la chronique, à savoir l'installation comme avocat d'un ancien magistrat du PNF. Rappelons, tout d'abord, que la mauvaise foi ne se présume pas. Si le nouvel avocat utilise les informations dont il a eu connaissance au PNF, il y a matière à sanction, mais il n'y a pas de raison de postuler qu'il ne respectera pas les règles déontologiques. En l'occurrence, je ne crois pas que l'activité de cet avocat ait été sujette à reproches. Par ailleurs, on peut prendre des précautions, mais cela doit se faire dans le cadre du respect de la liberté constitutionnelle d'entreprendre. Il faut encore travailler sur ces dispositions afin de parvenir à une solution équilibrée.
Il s'agit en effet d'un sujet complexe. Les plus hautes autorités déontologiques reconnaissent que la loi est lacunaire. Si la bonne foi est présumée, la déontologie nous oblige à fixer des règles au cas par cas. Je retire mes amendements et je vous propose que l'on retravaille sur l'amendement CL17.
Les amendements sont retirés.
Article 4 (art 27-2 [nouveau]) : Priorité d'affectation
La commission adopte l'article 4 non modifié.
Article 5 (art. LO. 121-4, LO. 121-4-1, LO. 121-5, LO. 122-5, LO. 122-6, LO. 122-7, LO. 125-1, LO. 123-10-1, LO. 314-2, LO. 513-3, LO. 513-4, LO. 513-7, LO. 513-8, LO. 532-17, LO. 532-18, LO. 552-9-1 A, LO. 562-24-2 [nouveaux]) : Affectation temporaire de magistrats hors de leur juridiction de nomination
Amendements de suppression CL7 de Mme Emeline K/Bidi et CL47 de M. Ugo Bernalicis.
Nous nous opposons à tous les dispositifs qui visent à faciliter l'affectation des magistrats sur des postes temporaires. Si ces mesures répondent à une logique gestionnaire évidente, elles contredisent les principes d'inamovibilité, d'indépendance et d'impartialité. Puisque vous allez recruter 1 500 magistrats, je ne vois pas pourquoi on aurait besoin de plus de flexibilité.
Ce dispositif existe déjà pour les magistrats de cour d'appel appelés à renforcer une juridiction. Il s'agit, en l'occurrence, d'autoriser un mouvement en sens inverse. Cette mesure me semble nécessaire au bon fonctionnement de la justice, car des carences peuvent se manifester temporairement à un endroit à ou à un autre. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL170 de M. Didier Paris.
La commission adopte l'amendement et l'article 5 est ainsi rédigé.
En conséquence, l'amendement CL160 de M. Didier Paris tombe.
Article 6 (art. 10-1, 10-1-1 [nouveau], 27 et 32 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Dialogue social dans la magistrature
Amendement CL55 de Mme Andrée Taurinya.
Nous souhaitons que la commission d'avancement continue à publier un rapport d'activité annuel compte tenu de sa compétence pour l'établissement des tableaux d'avancement et l'examen des contestations de l'évaluation de l'activité professionnelle.
La commission d'avancement va perdre une grande partie de ses prérogatives puisqu'elle n'aura plus à connaître du recrutement, qui constituait le sujet essentiel de son rapport d'activité, et se concentrera désormais sur le dialogue social. Or, ce serait le seul cas, dans la fonction publique, où une instance chargée du dialogue social publie un rapport d'activité. Je n'en vois pas l'utilité.
Les magistrats ne sont pas des fonctionnaires comme les autres : ils obéissent à un statut particulier et bénéficient de garanties supplémentaires. En l'occurrence, la transparence vise à écarter tout doute quant aux conditions d'affectation et d'avancement.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL107 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL86 de M. Didier Paris.
Il s'agit de supprimer l'alinéa, introduit par le Sénat, prévoyant l'élection complémentaire d'un membre de la commission d'avancement par le collège électoral, ce dernier ayant été supprimé par l'article 6.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL108 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL82 de M. Emmanuel Pellerin et sous-amendement CL165 de M. Didier Paris.
L'amendement vise à instituer un vote électronique pour l'élection des membres de la commission d'avancement tant dans une logique environnementale que pour gagner en célérité et favoriser une meilleure participation.
Cet amendement est bienvenu ; il s'inscrit dans la continuité des efforts de numérisation déjà engagés. Toutefois, si le ministère n'était pas en mesure d'organiser un scrutin électronique lors des prochaines élections générales, qui auront lieu peu après l'adoption de la loi, on bloquerait complètement le système. Mon sous-amendement a donc pour objet de faire du vote électronique une simple possibilité. À défaut, il faudrait adopter une nouvelle loi organique pour modifier le texte.
Je n'approuve absolument pas l'extension du vote électronique. Celui-ci a été testé lors des élections professionnelles dans le secteur privé et la fonction publique, et a été à l'origine de contentieux. Au sein de la police, des investigations sont en cours, car des identifiants et des mots de passe ont été subtilisés. Je préfère que l'on ait la garantie qu'il n'y ait pas de trucage.
La commission adopte successivement le sous-amendement et l'amendement sous-amendé.
Amendement CL87 de M. Didier Paris.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL109 de M. Didier Paris, rapporteur.
La commission adopte l'article 6 modifié.
Article 7 (art. 41-10, 41-11,41-12, 41-13, 41-14, 41-25, 41-27, 41-31 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Magistrats à titre temporaire et magistrats honoraires
Amendement de suppression CL56 de Mme Andrée Taurinya.
Nous nous opposons au recrutement de magistrats à titre temporaire et de magistrats honoraires, d'autant plus que la limite d'âge, concernant ces derniers, est portée à 75 ans. Ces mesures sont inutiles compte tenu des recrutements qui vont intervenir.
Il ne me paraît pas choquant de recourir, en supplément des 1 500 nouvelles recrues, à des magistrats exerçant à titre temporaire et à des magistrats honoraires. Cela aurait été différent s'il n'y avait eu aucun recrutement pérenne et que l'on ait voulu boucher les trous. Je suis d'autant plus favorable à cette mesure que l'on améliore les conditions d'emploi des intéressés ; on permet notamment des recrutements sur des blocs de compétences.
La préoccupation gestionnaire ne doit pas être le critère de décision. La loi organique est censée conférer des garanties d'indépendance et d'impartialité. Cela doit être notre boussole. Par ailleurs, on peut se demander si ces magistrats exerçant à titre temporaire et ces magistrats honoraires compteront, au côté des contractuels, dans les 1 500 équivalents temps plein travaillés (ETPT) supplémentaires qui sont annoncés.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CL57 de Mme Andrée Taurinya.
Dans la même logique, nous nous opposons à ce que des magistrats à titre temporaire puissent occuper un poste de substitut près les tribunaux judiciaires. La gestion de la pénurie par la flexibilité ne garantit pas une bonne justice.
Nous n'entendons pas gérer une pénurie, mais favoriser un recrutement complémentaire de nature à enrichir grandement le corps. Avis défavorable.
Ce recrutement sera inscrit dans une loi organique qui s'appliquera jusqu'en 2027, et même au-delà. N'allons-nous plus recourir qu'à des magistrats à titre temporaire ? Cela ne peut être ni un objectif, ni une solution.
Je suis choqué de vous entendre dire que nous n'allons plus recourir qu'à des magistrats à titre temporaire jusqu'en 2027, alors que nous allons justement procéder au recrutement pérenne de 1 500 magistrats.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL110, CL111, CL88, CL112, CL113 et CL114 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL89 de M. Didier Paris.
Cet amendement de coordination fixe les modalités du possible renouvellement du mandat des magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CL58 de Mme Andrée Taurinya.
Vous souhaitez permettre aux magistrats honoraires, donc déjà à la retraite, d'exercer leurs fonctions jusqu'à l'âge de 75 ans. Pourquoi ne pas fixer cette limite à 80 ans, ou la remplacer par un simple test d'aptitude visant à vérifier que l'âge n'empêche pas la bonne compréhension des débats judiciaires ?
Il s'agit d'abord d'une mesure d'harmonisation : les magistrats honoraires peuvent déjà assumer des fonctions administratives jusqu'à 75 ans, et nous étendons ici cette possibilité aux fonctions juridictionnelles. Ces magistrats n'exerceront pas une activité pleine et entière : les missions qui leur seront confiées seront adaptées à leurs capacités.
Laissez-nous vivre ! Laissez-nous respirer ! À la prochaine élection présidentielle, l'un des candidats sera peut-être âgé de 75 ans – je parle de quelqu'un d'assez proche de vous, monsieur Bernalicis… Nous ne voulons rien imposer. Certains magistrats à la retraite ont encore envie de servir la justice de leur pays, parce qu'ils l'aiment, au lieu de rester chez eux ou d'aller pêcher le gardon dans la Seine. Ils ont envie d'être utiles, de vivre et de rencontrer des gens.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 7 modifié.
Article 8 (art. 6, 10-2, 10-3 [nouveau], 11, 29, 43, 44, 45, 50-3, 52, 63 et 64 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Amélioration du traitement des plaintes des justiciables, renforcement de la protection et de la responsabilité des magistrats
Amendement CL167 de M. Didier Paris.
Le Sénat a proposé une nouvelle rédaction du serment des magistrats, qui était jusqu'alors très léger, pour ne pas dire indigent. Cependant, les formules choisies ne me conviennent qu'à moitié. Ainsi, je ne sais pas trop ce que « porter attention à autrui » peut signifier pour un magistrat dans l'exercice de ses fonctions. Je préfère à cette expression la notion d'humanité, qui figure déjà dans le serment des avocats et que je propose d'ajouter à celle d'impartialité. Je ne vous lirai pas l'intégralité du serment, mais j'appelle votre attention sur ce texte, qui a suscité beaucoup de réflexions et qui est important pour la déontologie des magistrats.
Pour ne rien vous cacher, je trouve cela très beau. « Impartialité et humanité » : vous avez bien choisi les mots !
La commission adopte l'amendement.
Amendement CL26 de Mme Cécile Untermaier.
Les missions du collège de déontologie doivent être définies par la loi. Il est donc de la compétence du législateur de préciser si cette instance reçoit ou non les alertes émises par les magistrats de l'ordre judiciaire. Or l'alinéa 5 dispose que le collège « peut être désigné » pour recevoir et traiter ces alertes.
Par ailleurs, il convient de bien distinguer ce collège, chargé de délivrer des conseils et de prévenir les conflits d'intérêts, de l'organe disciplinaire. Le collège de déontologie a pour mission de conseiller, le cas échéant et à leur demande, les magistrats craignant de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts, mais il ne peut traiter cette question d'un point de vue disciplinaire, ni même être l'antichambre de l'organe disciplinaire, au risque de briser le lien de confiance avec les professionnels.
Par conséquent, je propose de rédiger ainsi l'alinéa 5 : « Il reçoit les alertes émises par les magistrats de l'ordre judiciaire et apporte aux magistrats intéressés tous conseils de nature à assurer le respect par ces derniers de leur déontologie. »
Je comprends l'esprit de votre amendement, même si des questions persistent dans mon esprit. Par exemple, quel traitement faudrait-il réserver aux saisines dont les auteurs ne sont pas des magistrats ? Je préfère cependant laisser Monsieur le garde de sceaux exprimer son avis.
Le collège de déontologie des magistrats trouve sa justification dans les particularités de ce corps soumis à des obligations déontologiques spécifiques.
Un magistrat peut émettre toutes sortes d'alertes, concernant d'autres magistrats ou non. Il peut être amené à décrire, par exemple, des faits impliquant uniquement des greffiers ; en pareille hypothèse, la spécificité du collège de déontologie ne justifiera pas qu'il intervienne. Il ne m'apparaît pas nécessaire de faire de ce collège l'instance chargée de recueillir toutes les alertes susceptibles d'être émises par des magistrats ; par conséquent, il me semble indispensable de maintenir la rédaction actuelle. Au surplus, votre amendement est incomplet dans la mesure où il n'évoque pas le traitement de ces alertes.
La seconde partie de votre amendement ne me paraît pas avoir sa place au sein d'un texte organique, les missions du collège de déontologie étant déjà définies.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j'y serai défavorable.
Je ne retirerai pas mon amendement car une loi organique doit exprimer les choses de manière très claire : il n'est donc pas possible d'y écrire « il peut être désigné pour recevoir ». Si vous considérez que le collège de déontologie ne doit recevoir et traiter que certaines alertes, alors il faut préciser lesquelles dans la loi organique.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CL78 de M. Guillaume Gouffier Valente.
Cet amendement s'inscrit dans la logique de la proposition de loi visant à renforcer l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique, adoptée en première lecture par le Sénat puis par l'Assemblée nationale, et qui sera discutée en commission mixte paritaire la semaine prochaine. Ce texte vise notamment à renforcer le dispositif de primo-nominations équilibrées, avec un objectif de 50 % pour chaque sexe, à soutenir les viviers et à décliner dans la fonction publique l'index de l'égalité professionnelle en vigueur dans le secteur privé depuis plusieurs années. Or nous nous sommes aperçus, durant nos travaux à l'Assemblée nationale, qu'un certain nombre d'acteurs publics n'étaient pas concernés par ces dispositifs : il en est ainsi de la magistrature. Il n'était pas possible d'intégrer cette dernière dans notre proposition de loi ; aussi proposons-nous de transposer les dispositions en question dans la loi organique relative au statut de la magistrature.
Nous partageons évidemment cet objectif, qui vient d'être longuement discuté au Parlement. Je voudrais néanmoins souligner quelques difficultés de nature pratique – et non de fond – posées par votre amendement.
Tout d'abord, quels sont « les hauts emplois de la magistrature » ? Faut-il considérer, par exemple, que le président d'un petit tribunal occupe l'un de ces emplois ? La définition des emplois concernés est sans doute possible, mais pas si simple qu'il n'y paraît au premier abord.
En outre, je crains que nous soyons confrontés à des difficultés d'application. Si l'on considère que cette obligation doit être déclinée dans chaque juridiction, il faut garder à l'esprit que certaines ne comptent que quelques magistrats et qu'il n'est pas toujours facile de les rejoindre. Il ne sera pas plus simple d'y appliquer la parité ! Faut-il qu'un président soit associé à une procureure, ou un procureur à une présidente ?
L'application de cette disposition ne sera pas moins difficile à l'échelon national, dans la mesure où elle posera de grandes difficultés dans la gestion du corps.
Votre excellent amendement prévoit aussi que le non-respect de cette obligation est sanctionné par une contribution forfaitaire – un principe cohérent, que l'on retrouve dans les autres textes visant à imposer la parité. Nous nous trouvons cependant, là encore, confrontés à une difficulté particulière : c'est le CSM qui procède aux nominations dans le corps judiciaire, mais ce n'est pas lui qui paiera la contribution forfaitaire. Autrement dit, le contributeur ne sera pas le décisionnaire, et le décisionnaire ne sera pas le contributeur.
Si l'on ne sait pas à quel niveau appliquer cette règle, soit les postes vacants le resteront, soit une sanction financière sans grande signification sera due, puisque l'État se versera une contribution à lui-même.
Je partage avec vous toutes ces inquiétudes. Je vous propose de continuer à travailler sur cette question afin de trouver un champ d'application adéquat, des modalités de mise en œuvre appropriées ainsi que quelques éléments de souplesse qui nous permettront d'atteindre cet objectif parfaitement légitime en tenant compte des spécificités du corps judiciaire.
Le rapporteur a bien fait de rappeler que les nominations relevaient du CSM, non de la Chancellerie.
Si je vous démontre qu'à terme, votre amendement aura pour effet de favoriser la carrière des hommes, déciderez-vous de le retirer ? Je pense que oui, car tel n'est pas le but que vous recherchez. Les femmes représentent aujourd'hui 70 % des effectifs du corps ; si votre amendement est adopté, elles ne pourront occuper que 50 % des plus hauts emplois de la magistrature. Pour dire les choses autrement, les hommes ne représentent que 30 % du corps mais se verront réserver 50 % des postes hiérarchiques. Ainsi, à terme, vous favoriserez la carrière des hommes. Je vous demande donc de retirer votre amendement.
J'entends bien les arguments de monsieur le rapporteur, qui diffèrent des explications habituelles selon lesquelles une telle disposition ne serait pas possible techniquement. Pour ma part, j'aurais plutôt tendance à voter l'amendement de monsieur Gouffier Valente et à réfléchir, d'ici à la séance, à un dispositif permettant de rendre cette obligation effective.
En revanche, monsieur le garde des sceaux, votre argument ne tient pas du tout : nous connaissons plein de secteurs où les femmes occupent tous les postes subalternes ou intermédiaires tandis que les fonctions de direction sont assumées par des hommes. D'ailleurs, dans presque tous les métiers dévalorisés et féminisés à 90 %, ce sont des hommes qui commandent ! Je pense aux supermarchés, où les femmes sont à la caisse et les hommes à la direction, ou encore aux hôpitaux. C'est aussi ce qui s'est passé pendant des années dans la vie politique : les femmes exerçaient de nombreux mandats locaux, elles étaient conseillères municipales ou départementales, mais avant que l'obligation paritaire s'applique aux élections législatives, elles n'étaient que 3 % dans l'hémicycle. Et ne parlons pas des postes de ministres !
Effectivement, la fonction publique est aujourd'hui globalement très féminisée, mais trois quarts des emplois de direction sont occupés par des hommes. Plus on monte dans la hiérarchie, plus les inégalités sont fortes. Il en est de même dans la magistrature.
J'entends les arguments de monsieur le rapporteur, qui a mis en lumière les faiblesses de mon amendement en termes d'opérationnalité. Quels seront les emplois concernés ? À quel niveau cette obligation sera-t-elle appliquée ? Comment sera-t-elle sanctionnée ? Quelles mesures d'accompagnement faudra-t-il prévoir ? Nous n'avons pas encore toutes les réponses à ces questions. Je retirerai donc mon amendement afin que nous puissions continuer de discuter de ce sujet et aboutir à une disposition véritablement opérationnelle.
L'amendement est retiré.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL115 et CL116 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendements identiques CL20 de Mme Emeline K/Bidi et CL59 de Mme Andrée Taurinya.
Je ne comprends pas l'objectif de cet allongement de la durée d'inscription des avertissements au dossier des magistrats. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'envoyer un tel signal. Il serait plus intéressant de se pencher sur les conditions de saisine du CSM par les justiciables et les magistrats.
Avis défavorable. L'avertissement n'est pas une sanction disciplinaire. Un magistrat peut commettre une erreur justifiant cette mesure, mais il faut aussi lui donner la possibilité de s'amender. La durée de cinq ans pendant laquelle l'avertissement sera inscrit à son dossier me paraît suffisamment longue sans l'être trop ; à l'inverse, son allongement à dix ans par exeemple revêtirait un caractère inutilement punitif.
La commission rejette les amendements.
Amendement CL164 de M. Didier Paris.
Il convient d'allonger le délai de traitement, par les formations disciplinaires du CSM, des demandes d'interdiction temporaire d'exercice. Je propose de porter ce délai de quinze jours à un mois, ce qui ne changera rien au fond mais facilitera la gestion pratique de ce genre de situation.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CL163 de M. Didier Paris.
Cet amendement opère quelques modifications dans l'échelle des sanctions. Il ramène notamment de dix à cinq ans la durée maximale pendant laquelle un magistrat peut être frappé d'une interdiction d'être nommé dans des formations à juge unique. La durée de dix ans proposée par le Sénat me paraît tout à fait excessive. Par ailleurs, un magistrat ne peut se voir retirer des fonctions différentes de celles dans le cadre desquelles une faute a été commise.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL118 et CL120 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL44 de Mme Pascale Bordes.
En l'état actuel du droit, la plainte qu'un justiciable souhaite déposer contre un magistrat « doit contenir l'indication détaillée des faits et griefs allégués ». Or le projet de loi organique supprime l'exigence d'une mention précise des griefs : la plainte ne doit plus contenir que l'indication des faits. Pourquoi prévoir cette modification au détriment des magistrats qui, dès lors, auront moins de droits que les justiciables lambda ? Sauf erreur de ma part, en matière civile, une assignation doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de mentions parmi lesquelles un exposé des moyens en fait et en droit. Pourquoi les magistrats ne bénéficieraient-ils pas de la même protection, plutôt que de devenir des sous-justiciables ?
Sur le fond, vous n'avez peut-être pas tort, mais dans la réalité, il faut tenir compte du fait que cette voie n'est ouverte qu'à des justiciables ordinaires. Leur demander d'articuler juridiquement l'énoncé des faits et l'indication des griefs me semble aller à l'encontre de notre objectif d'une plus grande responsabilité des magistrats. Nous ne devons pas être trop exigeants envers les justiciables qui se considèrent comme victimes d'une mauvaise décision de justice, mais au contraire leur donner les moyens de saisir la commission d'admission des requêtes (CAR) du CSM. Avis défavorable.
Sauf erreur de ma part, le justiciable peut être assisté d'un avocat qui, lui, sait parfaitement comment l'on remplit ce type de plainte.
Sur plus de 2 500 plaintes de justiciables, pas une n'a abouti. Vous êtes avocate de profession, et je l'ai été moi-même : nous savons donc tous les deux qu'il ne faut pas tenir compte des quérulents qui, parce qu'ils ont perdu leur procès, pensent que le juge est mauvais. Ils disent d'ailleurs la même chose de leur avocat… Ils n'ont pas eu de chance : le juge n'était pas bon, leur avocat non plus ! Cela arrive, monsieur Bernalicis : il y a de bons et de mauvais avocats, de bons et de mauvais parlementaires, de bons et de mauvais boulangers… Toutefois, personne ne me fera croire que, sur les 2 500 plaignants, il n'y en a pas un certain nombre qui n'ont pas été bien traités et à qui il faut rendre justice. Afin que la justice reste crédible, nous devons faire quelque chose pour ces gens-là.
Les faits et griefs insuffisamment détaillés représentaient, en 2019, 20 % des motifs d'irrecevabilité des plaintes. On peut effectivement déposer une plainte avec l'aide d'un avocat, mais on peut aussi le faire sur papier libre, sans y mettre les formes et sans décrire autre chose qu'un ressenti d'injustice. La justice suit alors son cours. Je n'ignore pas l'existence de quérulents – nous en avons tous eu parmi nos clients – mais, dans ma vie d'avocat, j'ai vu des choses qui ne m'ont pas plu, des traitements qui n'étaient pas magnifiques. L'impartialité et l'humanité sont décidément deux jolis mots…
La commission rejette l'amendement.
Amendement CL90 de M. Didier Paris.
Il s'agit de rétablir l'obligation de transmission au garde des sceaux des informations et observations remises à la CAR du CSM lors d'une plainte contre un magistrat.
Pour ma part, je n'y suis pas du tout favorable. La justice suit son cours, comme l'a dit monsieur le garde des sceaux. Autant je trouve opportun que le justiciable puisse déposer facilement sa plainte, que celle-ci soit réellement examinée et que la procédure aboutisse, autant je ne vois pas l'intérêt d'informer le garde des sceaux, sauf à penser que ce dernier voudrait lui-même déclencher certaines inspections en cas de faillite de la CAR. Cela me laisse songeur quand je repense à des faits précédents… Dans le cadre de la commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire, que j'ai présidée, j'ai d'ailleurs plaidé pour que le ministre de la justice soit dépossédé de certaines de ses prérogatives. J'assume cette position, qui amoindrirait cependant sa capacité d'agir directement.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL121 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL105 de M. Didier Paris.
Il vise à supprimer toute ambiguïté quant à la possibilité, pour le justiciable, d'être assisté par un avocat lors de son audition par la CAR.
La commission adopte l'amendement.
Amendements identiques CL21 de Mme Emeline K/Bidi, CL60 de Mme Andrée Taurinya et CL101 de M. Jérémie Iordanoff.
N'ayant toujours pas compris pourquoi les décisions d'irrecevabilité des plaintes devaient être communiquées au garde des sceaux, nous proposons, par l'amendement CL21, de supprimer cette disposition.
Le CSM lui-même considère que cette nouvelle disposition consistant à transmettre au garde des sceaux l'ensemble des plaintes, même irrecevables, change l'équilibre qui prévalait jusqu'ici. L'intérêt de cette mesure n'est pas clair et, surtout, elle représente une extension du pouvoir du garde des sceaux sur la carrière des magistrats, ce qui, dans une logique de séparation complète des pouvoirs, pose question. Nous demandons donc la suppression de ces deux alinéas.
Le ministre de la justice n'est pas le procureur général de la nation et peut engager, le cas échéant, des poursuites disciplinaires. On ne saurait l'empêcher d'avoir connaissance de décisions sur lesquelles il dispose de moyens d'action disciplinaires.
N'en déplaise à certains, l'heure n'est pas à l'autogestion et il existe encore un ministre de la justice, qui définit la politique pénale du Gouvernement et qui seul peut signer des circulaires. En un mot, j'ai encore un pouvoir disciplinaire et il est essentiel que je sois informé de ce qui se passe dans mon ministère. De fait, il m'est arrivé d'apprendre en lisant Le Canard enchaîné des faits graves qui étaient connus des chefs de juridiction, lesquels ne les avaient pas fait remonter.
Vous avez certes un pouvoir disciplinaire, mais la disposition dont nous débattons l'aggrave encore. Nous ne pouvons pas ignorer le dernier avis rendu par la commission de Venise ni les standards européens. Il est normal que les magistrats soient contrôlés et qu'il existe un pouvoir disciplinaire, mais ce pouvoir ne doit pas relever du ministère de la justice.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques CL91 de M. Didier Paris et CL83 de Mme Caroline Abadie.
L'amendement CL91 vise à supprimer l'obligation de motivation de la décision de rejet émise par le garde des sceaux à la demande de la commission d'admission des requêtes de solliciter qu'une enquête administrative soit menée par l'inspection générale de la justice. Cette disposition introduite par le Sénat est en effet très contestable, et même aberrante : nous ne pouvons accepter que silence du ministre vaille acceptation. Du reste, on ne saurait engager de procédure tant que le ministre n'a pas décidé de le faire ni indiqué le champ d'application de cette enquête.
Dans le curieux dispositif introduit par le Sénat, le silence du garde des sceaux vaudrait acceptation. Cela pourrait conduire à des situations ubuesques dans lesquelles l'Inspection générale de la justice (IGJ) enquêterait sans être saisie. Il faut revenir en arrière : pour nous, c'est le silence qui vaut rejet.
Cet exemple, dans lequel l'IGJ engagerait spontanément une enquête, me plaît bien ! Avis favorable.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL122 de M. Didier Paris, rapporteur.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL23 de Mme Emeline K/Bidi.
Elle adopte l'amendement de coordination CL93 de M. Didier Paris, rapporteur.
La commission adopte l'article 8 modifié.
Article 8 bis (art. 20-2 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) : Élaboration d'une charte de déontologie des magistrats
Amendement de suppression CL49 de Mme Andrée Taurinya.
La charte déontologique n'a rien d'anodin. Introduite par un amendement porté par plusieurs sénateurs de droite, elle s'inscrit dans un contexte d'attaques envers les magistrats, particulièrement sur le terrain du droit syndical, et dont il faut nous prémunir. Les magistrats sont capables de respecter le devoir de réserve et, d'une manière générale, ils le font naturellement. Si cet article était adopté, il serait perçu par eux comme un signe de défiance.
Le Gouvernement affirme qu'il cherche à susciter un plus grand engagement des jeunes, en particulier dans les fonctions de magistrat, mais je ne suis pas certaine que cette disposition leur donnera envie d'entrer dans cette carrière.
La justice est rendue au nom du peuple français et il est un peu choquant de penser que le fait que les magistrats agissent dans un contexte déontologique serait signe de défiance. En second lieu, qu'est-ce qu'une déontologie de droite ou de gauche pour un magistrat ? Quant au droit syndical, nous en avons déjà réglé le sort avec le premier amendement qui nous a tous réunis.
Les magistrats ne sont pas du tout opposés à ce qu'une référence soit définie, à condition qu'elle soit complète et actualisée, et qu'elle fasse intervenir le CSM – ce qui est parfaitement prévu. Les magistrats ne seraient pas les seuls à être soumis à une charte de déontologie – c'est du reste le cas de ceux des tribunaux administratifs. Il me semble au contraire qu'il s'agit là d'une avancée très positive et je ne comprends pas comment on peut s'y opposer. Avis défavorable.
Je vous rappelle que nous avons réécrit la déontologie des avocats et que nous ne sommes intéressés à celle des notaires et des commissaires de justice, ce qui est d'ailleurs bien normal. Il existe certes un Recueil des obligations déontologiques des magistrats, mais je préfère une charte, d'autant plus qu'elle a été coconstruite avec le CSM. Il n'est absolument pas question d'imposer je ne sais quelle règle qui viserait, comme vous le dites, madame Martin, à supprimer l'expression syndicale.
Il n'y a pas lieu d'accuser un « contexte ». C'est une évidence que chaque métier doit être assorti d'une responsabilité – les avocats peuvent ainsi, comme les notaires, engager leur responsabilité civile et disciplinaire. L'échevinage que j'ai exigé, c'est-à-dire la présence de magistrats parmi les avocats, vise à assurer cette apparence d'impartialité, de procès équitable. Les avocats étaient hostiles à cette mesure, mais il ne faut pas que, lorsqu'un client se plaint d'un avocat, il se trouve entouré uniquement d'avocats qui seraient des copains ou des connaissances de celui dont il se plaint. Nous avons beaucoup travaillé sur la déontologie des uns et des autres.
Loin d'attaquer la justice, ce dispositif la protège. La justice a tout à gagner à se montrer comme un corps soumis à une responsabilité quand il est défaillant. Contrairement à ce que vous pensez, de nombreux magistrats partagent notre position. Il est donc très utile d'encadrer cette mesure par des règles aussi précises que possible, sans oublier le Conseil supérieur de la magistrature, qu'on ne peut évidemment pas soupçonner de vouloir faire taire les magistrats ou réduire leur liberté syndicale.
Je vois qu'il est inutile d'insister. Nous nous trouvons dans un contexte qui a conduit la droite sénatoriale à déposer cet amendement. Chacun en tirera les conclusions qu'il veut, y compris les magistrats. Vous verrez bien.
Au contraire, une charte permettra aux justiciables d'avoir davantage confiance dans la magistrature et dans les décisions rendues, après certains épisodes malheureux qui ont amenuisé la confiance en la magistrature, comme l'affaire du « mur des cons ». Au nom de quoi les avocats ou les notaires seraient-ils soumis à une déontologie, mais pas les magistrats ? Comme le dit le ministre, c'est protéger la justice et les justiciables, et renforcer la confiance de ces derniers envers la justice rendue dans notre pays.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CL24 de Mme Cécile Untermaier, CL123 et CL94 de M. Didier Paris (discussion commune).
Bien que je sois d'accord sur le fond avec l'article 8 bis, j'ai été choquée par la formulation du Sénat. Il existe un Collège de déontologie des magistrats de l'ordre judiciaire, qui rend des avis et dont le très bon travail a notamment donné lieu à la publication d'un recueil.
Le projet de loi organique dispose que « le Conseil supérieur de la magistrature élabore et rend publique une charte de déontologie des magistrats, après consultation du directeur général de l'administration de la fonction publique, de la commission de déontologie de la fonction publique » – qui n'existe plus –, « du collège de déontologie des magistrats de l'ordre judiciaire, de l'inspection générale de la justice et des organisations syndicales représentatives. » Il ne me semble toutefois pas qu'il y ait lieu de soumettre le Conseil supérieur de la magistrature, organe constitutionnel, à des modalités de consultation, car il est capable de déterminer lui-même quelles consultations il doit mener.
Monsieur le ministre, nous vous avons souvent entendu dire : « Libérez-nous ! », par quoi il fallait entendre : « Fichez-nous un peu la paix ! » Il en va de même pour le Conseil supérieur de la magistrature. D'où mon amendement.
Il est en effet incohérent de demander au CSM d'assujettir sa décision aux règles de la fonction publique, notamment d'interroger un directeur général de l'administration de la fonction publique et la Commission de déontologie de la fonction publique – devenue entretemps la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), que nous connaissons bien.
Mon amendement vise à sortir de tout cela et à laisser le corps judiciaire en faire son affaire. Le premier amendement manque un peu d'élégance, pour des raisons de méthode. En effet, si on demande au CSM d'élaborer la charte de déontologie, il faut le laisser libre d'associer qui il veut à ses travaux, à l'exception de ce qui relève de la fonction publique.
Le rapporteur a dit ce qu'il fallait dire et il ne doit y avoir en la matière aucune ambiguïté : c'est le CSM qui fait la charte et on peut éviter des consultations inutiles. Je n'ai aucune intention d'ôter sa liberté au CSM.
La commission rejette l'amendement CL24 et adopte successivement les amendements CL23 et CL94.
Elle adopte l'article 8 bis modifié.
Article 9 (art. 10-1, 10-1-1 [nouveau], 27 et 32 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature) : Modification du mode de scrutin des élections au Conseil supérieur de la magistrature
La commission adopte successivement le sous-amendement CL166 de M. Didier Paris, rapporteur, et, suivant l'avis de ce dernier, l'amendement CL84 de M. Emmanuel Pellerin ainsi sous-amendé.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL124 et CL125 et l'amendement de coordination rédactionnelle CL129 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL132 de M. Didier Paris.
Pour diverses raisons techniques, il tend à rétablir à trois le nombre de noms devant figurer sur la liste de candidatures au CSM.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnels CL126 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL133 de M. Didier Paris.
Pour des raisons pragmatiques, il tend à rétablir à six mois le délai pour procéder à la désignation complémentaire d'un membre du CSM en cas de vacance définitive d'un siège.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL130 de M. Didier Paris, rapporteur.
Elle adopte l'article 9 modifié.
Article 10 (art. 7-2, 7-3, 9-1, 12-2, 32, et 37 de l'ordonnance n° 58‑1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, art 10-1-2 [nouveau] de loi organique n° 94‑100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature) : Disposition diverses relatives à la déontologie des magistrats et à la dématérialisation de la gestion de leur dossier administratif
Amendements CL131 de M. Didier Paris et CL85 de Mme Caroline Abadie (discussion commune).
Au fil des auditions, il nous a semblé malvenu, compte tenu de sa position hiérarchique et de son rôle, que le chef de l'Inspection générale de la justice ne soit soumis à aucune obligation de déclaration d'intérêts. L'amendement CL131, travaillé notamment avec Mme Caroline Abadie, tend donc à instaurer cette obligation.
Quant à savoir à qui cette déclaration devait être adressée, la solution la moins mauvaise était de désigner le Collège de déontologie, où elle ne sera pas particulièrement contrôlée, mais où elle sera disponible et contrôlable s'il y a lieu, ou pourra faire l'objet de vérifications complémentaires ultérieures. Je n'ai pas trouvé de meilleure solution – même le dépôt dans les mains du ministre ne me paraissait pas être plus adapté aux circonstances.
C'est le chef de l'Inspection générale de la justice lui-même qui nous a déclaré qu'il ne trouvait pas normal d'être, parmi les différentes administrations, le seul responsable qui n'était pas soumis à une telle obligation. C'est lui qui a trouvé cet équilibre, sur la base duquel monsieur le rapporteur et moi-même avons rédigé l'amendement désignant le Collège de déontologie.
Madame Abadie, je vous invite à retirer votre amendement au profit du mien, dont la rédaction a quelque peu évolué.
L'amendement CL85 est retiré.
Je m'en remets à la sagesse de la commission. Je suis évidemment favorable à ce que le chef de l'Inspection générale de la justice remette une déclaration d'intérêts, ce qui lui donnera un statut semblable à celui des autres chefs d'inspection.
En matière de déclaration d'intérêts, le Collège de déontologie est aujourd'hui simplement consulté par le supérieur hiérarchique et n'est destinataire d'aucune déclaration d'intérêts, sauf en cas de doute sur l'existence d'un conflit d'intérêts. Vous proposez, monsieur le rapporteur, de lui confier un nouveau rôle concernant un seul magistrat – le chef de l'Inspection générale de la justice –, l'entretien étant remplacé par d'éventuelles observations écrites.
Cette procédure fonctionnera-t-elle en l'absence de tiers dans la relation entre ce magistrat et le Collège de déontologie ? J'aurais préféré que la déclaration d'intérêts soit directement placée dans son dossier, sans intermédiaire.
La commission adopte l'amendement CL131.
Elle adopte l'article 10 modifié.
Article 11 : Expérimentation d'un concours spécial de recrutement pour l'auditorat
Amendement de suppression CL25 de M. Stéphane Rambaud.
L'article 11, qui vise à créer une double voie d'accès la magistrature en réservant un quota de 15 % aux élèves candidats issus des quartiers prioritaires de la ville, des zones de revitalisation urbaine rurale ou des collectivités d'outre-mer ayant suivi la formation Prépa Talents, rompt avec la tradition d'accès aux postes de la fonction publique. Ce système n'est pas très juste et fonctionne à double vitesse. Il crée une discrimination qui entraînera une rupture d'égalité entre les étudiants qui concourent. Il risque aussi de conduire à une baisse du niveau de recrutement du fait de critères trop inégaux. Il est donc nécessaire de supprimer cet article.
Ces critères inégaux correspondent à des inégalités sociales, territoriales et culturelles. De nombreuses écoles, notamment Sciences Po, ont engagé depuis longtemps un processus de cette nature. Il me semble sain et vertueux que l'École nationale de la magistrature (ENM) puisse s'engager elle aussi dans cette voie, qui existe du reste déjà, puisque la directrice de cette école nous a expliqué qu'il existait des classes de formation qui donnent un peu plus de chances à des jeunes qui n'en auraient pas autrement. Nous tenons à ce concours spécial qui puisera dans les classes talents, qui sont un marqueur. Ce concours n'aura toutefois aucun impact négatif sur la qualité des recrutements, le nombre de places étant limité au grand maximum à 15 % de l'effectif du concours étudiant. Nous ne lâcherons pas ce dispositif.
Madame Roullaud, je tiens à vous rassurer : il s'agit d'un concours, et cela dit tout. Votre crainte n'est pas fondée, car l'accès à ces classes préparatoires se fait sur sélection et les élèves doivent remplir les conditions – notamment de diplôme – requises des autres candidats pour se présenter au concours, lequel comporte des épreuves identiques à celles du premier concours.
En ouvrant un quota de places supplémentaires destinées aux élèves des classes Prépa Talents, le projet de loi poursuit un objectif d'intérêt général car il permet à la magistrature de mieux représenter la société dans sa diversité et de lutter contre les inégalités sociales et territoriales. Avis défavorable.
L'existence d'un quota montre bien que des places sont réservées. Si on avait procédé ainsi pour le concours de médecine, peut-être n'auriez-vous pas été d'accord. Il faut assurément aider les personnes de milieux défavorisés – si tant est qu'elles soient défavorisées, car elles sont peut-être plus intelligentes ou apprennent plus vite que les autres, ce qui pose la question de savoir où commence l'inégalité. Je suis favorable à ce qu'on leur donne des professeurs plus nombreux ou gratuits, mais pas à l'instauration d'un quota qui, par définition et de quelque manière que vous tourniez la chose, donne un avantage à ses bénéficiaires, même si ces derniers sont soumis à une condition de diplôme et – ce qui est mieux que rien – sont sélectionnés.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL127 et CL128 de M. Didier Paris, rapporteur.
Elle adopte l'article 11 modifié.
Article 12 : Entrée en vigueur et dispositions transitoires
Amendement CL39 de Mme Laurence Vichnievsky.
En l'état du droit, les postes de base du premier grade offerts aux candidats issus du concours complémentaire et de l'intégration directe ne peuvent dépasser 45 % des premières nominations à ce grade au cours de l'année civile précédente. Ce taux est de 20 % pour les postes de hiérarchie intermédiaire du deuxième grade offerts aux candidats issus de ces mêmes voies d'accès.
Le projet de loi organique porte ces plafonds respectivement à 50 % et à 25 %. Il est prévu cependant qu'aucune de ces limites ne s'appliquera durant les années 2025 à 2028, soit pendant quatre ans, afin de permettre le recrutement de 1 500 magistrats supplémentaires, en l'état de l'incapacité de l'ENM à les accueillir. Le Sénat a sagement réduit de quatre à trois ans la durée de l'exception aux quotas.
L'amendement tend à ce que, durant ces trois années, les quotas ne soient pas supprimés mais significativement assouplis.
Pour la première fois depuis 1958, le concours étudiant, fondé sur l'anonymat de l'écrit, le mérite et la compétence, ne sera plus la voie principale d'accès au corps judiciaire. On parle encore officiellement de concours, mais il s'agira principalement d'un recrutement sur titres assuré par un jury certes indépendant, mais désigné exclusivement par le ministre de la justice.
La qualité et la neutralité du corps judiciaire sont un impératif de valeur constitutionnelle, indispensable à une séparation effective des pouvoirs.
Je comprends votre préoccupation mais, en réalité, l'ENM devra absorber une grande masse de magistrats, avec 400 auditeurs de justice, ce qui est heureux, mais des quotas trop rigides pendant cette période d'absorption risquent de provoquer d'insurmontables problèmes matériels.
Je souhaite le maintien du moratoire prévu par l'article 12 et dont Mme Vichnievsky conviendra qu'il ne saurait déstructurer le corps judiciaire. Une fois l'intégration impérative réalisée, on en reviendra à la politique naturelle des quotas. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement de coordination CL161 de M. Didier Paris, rapporteur.
Amendement CL134 de M. Didier Paris.
Il tend à fixer des dispositions transitoires pour le renouvellement des magistrats à titre temporaire et des magistrats honoraires, en cohérence avec l'article 7.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements de correction d'erreur légistique CL135 et rédactionnel CL136 de M. Didier Paris, rapporteur.
Elle adopte l'article 12 modifié.
La commission adopte l'ensemble du projet de loi organique modifié.
La séance est levée à 00 heures 35.
Membres présents ou excusés
Présents. - Mme Caroline Abadie, M. Erwan Balanant, M. Ugo Bernalicis, Mme Pascale Bordes, M. Florent Boudié, Mme Clara Chassaniol, Mme Elsa Faucillon, M. Guillaume Gouffier Valente, M. Sacha Houlié, M. Jérémie Iordanoff, M. Andy Kerbrat, M. Gilles Le Gendre, Mme Marie Lebec, M. Emmanuel Mandon, Mme Élisa Martin, Mme Naïma Moutchou, M. Didier Paris, M. Philippe Pradal, M. Stéphane Rambaud, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Sandra Regol, Mme Béatrice Roullaud, M. Thomas Rudigoz, M. Philippe Schreck, Mme Sarah Tanzilli, Mme Andrée Taurinya, M. Jean Terlier, Mme Cécile Untermaier, Mme Caroline Yadan
Excusés. - M. Éric Ciotti, M. Philippe Dunoyer, Mme Marie Guévenoux, Mme Élodie Jacquier-Laforge, M. Mansour Kamardine, Mme Marietta Karamanli, Mme Emeline K/Bidi, M. Didier Lemaire, M. Davy Rimane