France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
On ne sait pas pour combien de temps ! Avec le remaniement, il va peut-être devoir interrompre son intervention !
Sourires.
Du 27 juin au 5 juillet, chacun s'en souvient, notre pays a été marqué par huit nuits de violences et de pillages inqualifiables, dont l'étendue des destructions surpasse de très loin le triste précédent des émeutes de 2005. Nous avons tous en mémoire la mort de Nahel, ce jeune homme de 17 ans dont le décès a constitué le fait déclencheur apparent des émeutes. La diversité des violences, des dégradations et des déprédations commises témoigne cependant d'un lien complexe avec cet événement initial – lien qui reste à établir. De toute évidence, il a servi de prétexte à tout autre chose.
Dans la continuité immédiate de ces événements, après que près de 500 communes ont été touchées à un titre ou à un autre, le Président de la République a reçu à l'Élysée les maires concernés et il a pris l'engagement que des mesures législatives permettent d'accélérer la reconstruction. Le présent projet de loi est l'occasion de tenir parole et de faire un geste de soutien unanime en faveur de nos élus, de nos services publics et des habitants frappés par les nuits d'émeutes et de violences urbaines. Les mesures de ce texte faciliteront la reconstruction matérielle des bâtiments dégradés ou détruits.
Le projet de loi a été adopté à l'unanimité avant-hier, mardi 18 juillet, au Sénat. Je ne doute pas que le sens de l'intérêt général que nous avons en partage, ainsi que la volonté de ne pas laisser le dernier mot aux émeutiers, conduiront votre assemblée à l'adopter également à l'unanimité – du moins, je l'espère. Ce projet de loi répond de manière concrète et limitée, non pas aux causes, mais aux conséquences des émeutes.
Au total, dans l'ensemble du territoire, ont été attaqués : 274 commissariats, brigades de gendarmerie et postes de police municipale, 105 mairies, 243 établissements scolaires, 47 établissements relevant du ministère de la justice, 3 centres hospitaliers, mais aussi des bus, des trams, des médiathèques, des maisons de quartier, une crèche, des gymnases, des maisons de la culture et même des locaux associatifs – autant d'équipements et de services essentiels, au service de nos concitoyens, pour lesquels nos collectivités et la collectivité nationale que nous formons ont beaucoup investi dans la durée, pour l'avenir de tous.
Et, bien sûr, il y a eu les attaques ignobles, inqualifiables, contre les forces de l'ordre, contre les pompiers appelés pour secourir et contenir les destructions, contre les élus et leurs familles. Ils sont tous l'incarnation de notre République et ont été ciblés comme tels.
Je n'oublie pas les 1 000 commerces vandalisés et pillés, les gérants de café, les employés et les propriétaires de commerces de proximité, les pharmaciens, bref toutes celles et ceux qui mènent une vie droite et honnête et qui pourtant, durant ces nuits, ont perdu le fruit de leur labeur : un emploi, un outil de travail, un véhicule, quand ce n'était pas les économies d'une vie.
Le projet de loi me donne l'occasion de dire que nous ne lâchons rien face à ceux que le spectacle de la destruction facile réjouit et que nous sommes aux côtés de tous ceux qui doivent rebâtir. Ce texte est une brique essentielle pour effacer les stigmates des émeutes et permettre à chacun de repartir rapidement de l'avant, mais, je le concède bien volontiers, il n'est qu'une partie de la réponse. S'agissant des causes des violences et des décisions nécessaires pour éviter que de tels événements ne se reproduisent à l'avenir, il nous faut évidemment en débattre, mais ce débat est renvoyé à la rentrée.
M. Maxime Minot s'exclame.
Le droit actuel fournit déjà une partie de l'arsenal dont nous avons besoin pour reconstruire…
…comme le montre la circulaire prise il y a deux semaines par la Première ministre, qui mobilise pleinement les outils existants pour la réalisation des opérations de reconstruction et de réfection des immeubles détruits ou endommagés. Il est cependant impératif d'aller plus loin pour faciliter la reconstruction. Tel est l'objet des trois articles du projet de loi, qui autorisent le Gouvernement à prendre, par voie d'ordonnances, les mesures nécessaires.
En ce qui concerne, tout d'abord, la reconstruction à l'identique, elle est juridiquement possible aujourd'hui à condition qu'aucune adaptation du bâtiment ne soit envisagée pour des raisons de sécurité ou d'exigence environnementale. Nous devons donc faire en sorte que les nouveaux impératifs de sécurité et les nouvelles normes environnementales soient pris en compte dans la loi pour toute reconstruction à l'identique.
De même, nous proposons d'autoriser le commencement des travaux préparatoires, tels que les démolitions, le terrassement ou l'installation du chantier, alors même que la délivrance d'autorisation est en cours d'instruction. Cela permettra de gagner un temps précieux. Il faut également accélérer les procédures d'autorisation administrative, ce qui ne revient pas à supprimer les instructions, mais à les donner dans un temps restreint – en somme, il faut préserver les équilibres tout en favorisant la reconstruction. L'objectif est par ailleurs de faciliter la reconstruction du bâti public, ce qui passe par la facilitation des marchés publics de travaux en dérogeant aux obligations de publicité préalable et en permettant un usage plus étendu des marchés de conception-réalisation.
En ce qui concerne le financement des travaux, nous proposons de rendre possible la mobilisation du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) pour les collectivités et leurs groupements dès l'année de son versement, mais aussi de déroger à la règle d'une participation minimum de 20 % des collectivités maîtres d'œuvre et de supprimer le plafond des fonds de concours versés par les intercommunalités afin de leur permettre d'accompagner les collectivités concernées.
Certains, sans doute, s'interrogeront sur l'étendue de ces dérogations.
Elles sont extrêmement limitées, puisqu'elles concernent uniquement les bâtiments et les équipements publics touchés entre le 27 juin et le 5 juillet. Pour ces derniers, le projet de loi a pour objectif de limiter les difficultés éventuelles dans le processus de reconstruction. Si, en outre, l'ambition du Gouvernement est que les mesures du projet de loi entrent en vigueur dès que possible, le Conseil d'État devra tout d'abord être saisi et les quelques trous qui subsistent dans la raquette devront être comblés en concertation avec les associations d'élus.
Quant à la question budgétaire, enfin, l'examen de ce texte ne doit pas préempter le futur débat sur le partage de l'effort de reconstruction,…
…et ce, pour deux raisons. D'une part, nous ne connaissons pas le montant consolidé des dégâts. Les collectivités ont jusqu'au 30 septembre pour transmettre la liste des dommages qu'elles ont subis. D'ici là, les préfets assumeront l'évaluation de leur montant. D'autre part, lorsque nous aurons connaissance du montant des dégâts, nous devrons commencer par défalquer les sommes dues par les assurances. Ce n'est qu'à ce moment-là que nous pourrons aborder la question de la participation des émeutiers ou de leurs parents au remboursement des dégâts.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, rapporteur de la commission des affaires économiques.
Si les violences urbaines qui se sont déroulées entre le 27 juin et le 5 juillet dernier nous conduisent à nous interroger sur diverses politiques publiques, elles nous imposent, dans l'urgence, de veiller à la continuité et à la stabilité de l'ordre et du service publics. Dès lors, il est impératif de réparer dans les plus brefs délais les équipements publics, les quelque 750 bâtiments publics et trois fois plus de bâtiments privés dégradés au cours de ces événements.
Si nous ne connaissons pas la répartition exacte de ces dégradations, ni leur ampleur et leur gravité, il est certain que de nombreux travaux devront être rapidement lancés pour permettre leur réfection ou leur reconstruction complète. C'est à cette tâche impérieuse et urgente que s'emploie le projet de loi, alors même que le Gouvernement a déjà mis en œuvre, grâce à deux circulaires de la Première ministre, de premières mesures d'accélération.
Le projet de loi se compose de trois articles d'habilitation, qui portent chacun sur une composante essentielle des travaux de reconstruction. En effet, bien que le temps presse, ces mesures dérogatoires nécessiteront un travail d'expertise approfondi, qui justifie le recours à des ordonnances, avec un délai limite de publication fixé à brève échéance. La rédaction des habilitations qui nous est présentée, sur laquelle nos collègues sénateurs, dont je salue le travail, se sont déjà prononcés, est précise et ciblée. Elle permettra des dérogations circonscrites et limitées.
L'article 1er habilite le Gouvernement à prendre, par voie d'ordonnance, les mesures propres à accélérer la reconstruction et la réfection des bâtiments dégradés lors des violences urbaines : d'abord, pour autoriser leur reconstruction à l'identique ou sous réserve de modifications limitées et d'améliorations justifiées, même si les règles d'urbanisme en vigueur s'y opposent ; ensuite, pour permettre l'engagement des travaux préliminaires avant la délivrance de l'autorisation d'urbanisme ou la décision de non-opposition à déclaration préalable ; enfin, pour accélérer – en passant, par exemple, de six mois à six semaines – le traitement des demandes d'autorisation d'urbanisme, y compris la consultation des différentes instances ou autorités impliquées dans leur délivrance.
L'article 2 habilite le Gouvernement à instaurer un régime dérogatoire à certaines règles de la commande publique pour les marchés de travaux. Ces dérogations permettraient aux acheteurs publics, premièrement, de passer des marchés publics sans publicité, mais avec mise en concurrence, pour des travaux dont le montant serait inférieur à un seuil défini dans l'ordonnance, qui serait nettement supérieur au droit commun de 100 000 euros. Deuxièmement, ces dérogations permettraient aux acheteurs publics de ne pas allotir leurs marchés. Dans certains cas, cette faculté pourrait permettre un gain de plusieurs mois.
L'article 3 habilite le Gouvernement à faciliter le financement par les collectivités territoriales des travaux de réparation et de reconstruction nécessaires. Il s'agira, tout d'abord, de déterminer les modalités particulières de versement des attributions destinées aux bénéficiaires du FCTVA au titre des dépenses éligibles à un financement et de permettre ainsi le versement contemporain du FCTVA en année n. Ensuite, l'article prévoit de déroger à l'exigence de participation minimale des collectivités territoriales maîtres d'ouvrage au financement de leurs projets d'investissement pour leur permettre de bénéficier de subventions représentant jusqu'à 100 % du coût des travaux.
Ces dispositifs permettront une véritable facilitation et une accélération du financement des travaux et contribueront à soulager les collectivités, confrontées à des tensions de trésorerie. Ils accompagnent donc utilement la mise en place du fonds de financement des travaux prévue par la circulaire de la Première ministre. J'estime que ces dispositions sont nécessaires et proportionnées, et je vous propose, comme la commission des affaires économiques, qui s'est réunie hier, d'adopter le projet de loi sans modification.
Bien sûr, vous l'avez dit monsieur le ministre, au-delà du travail de reconstruction, la restauration de nos quartiers doit faire l'objet d'un processus de long terme et nous devrons examiner plus largement les problématiques de ces territoires.
Reste que le projet de loi nous permet d'aborder utilement les problèmes les plus urgents.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Guillaume Kasbarian, président de la commission des affaires économiques, applaudit également.
Nous voici réunis ce matin en séance pour examiner le projet de loi permettant l'accélération de la reconstruction des bâtiments dégradés ou démolis au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023, adopté à l'unanimité par le Sénat avant-hier.
Monsieur le ministre délégué, vous avez retiré, à raison, un quatrième article, prévu initialement, qui aurait rendu le projet de loi inacceptable. Visant à faciliter les expropriations dans les copropriétés dégradées, cet article aurait porté une atteinte trop importante au droit de la propriété.
Merci d'y avoir renoncé afin de permettre une adoption conforme de ce projet de loi.
Les violences urbaines et émeutes survenues du 27 juin au 5 juillet nous ont profondément scandalisés. Les dégâts sont énormes. Leur ampleur est considérable : plus de 500 communes concernées, plus de 800 bâtiments dégradés. S'en prendre à des dépositaires de la force publique, à des proches d'élus est intolérable.
J'ai une pensée pour l'épouse et les enfants de M. Vincent Jeanbrun, maire de L'Haÿ-les-Roses.
S'en prendre à des commissariats, des brigades de gendarmerie, des mairies, des établissements scolaires, des bibliothèques, des maisons de quartier, des centres hospitaliers, des crèches, des cafés, des pharmacies est inadmissible.
Les auteurs doivent être poursuivis et sanctionnés ; et je le dis haut et fort devant la représentation nationale, ces auteurs devront aussi participer au financement des reconstructions par des amendes pénales. Ils devront également y contribuer par des travaux d'intérêt général (TIG), et, pour les mineurs, la responsabilité de leurs parents devra aussi être engagée quand cela sera justifié ; c'est une question de justice.
Cela étant dit, il nous faut rétablir dans les meilleurs délais la continuité des services publics sur l'ensemble de notre territoire. Cela passe par la reconstruction des bâtiments et équipements publics. Il y a urgence, notamment pour les écoles, au regard de l'échéance de la prochaine rentrée scolaire.
Pour construire, il faut obtenir des autorisations, passer des marchés et trouver les financements. Assurément, ce projet de loi répond à des besoins d'allègement des procédures, de réduction des délais, d'assouplissement des règles pour bénéficier de financements. Nous soutiendrons ces mesures. En effet, le droit actuel ne permettrait pas la reconstruction à l'identique de la totalité des biens dégradés ou détruits ni de sécuriser tous les donneurs d'ordre pour accélérer les marchés publics. Même si ce projet de loi ne prévoit pas de financement direct par l'État de ces reconstructions, la possibilité de bénéficier du remboursement anticipé du FCTVA dès cette année – qu'il faudrait d'ailleurs généraliser pour toutes les collectivités –,…
…, de bénéficier de 100 % de subventions ainsi que de déplafonner les fonds de concours des intercommunalités permettra aux acteurs publics locaux de trouver des solutions de financement.
Concernant les commerces et services tels les cafés ou pharmacies qui ont été vandalisés, il faudra peut-être aussi les accompagner s'ils ne sont pas couverts totalement par leur assurance. Il en va de même pour les communes qui n'ont pas souscrit d'assurance contre les émeutes.
Permettez-moi aussi d'évoquer les particuliers dont les biens ont été dégradés – notamment ceux qui ont vu leur voiture partir en fumée.
J'exhorte les assurances à trouver les solutions avec l'État pour les indemniser au mieux, au terme d'expertises rapides. Ces victimes ne doivent pas être abandonnées à leur sort.
Reste la question du financement par l'État de ses propres bâtiments dégradés. D'ici l'automne, un chiffrage devra être produit. Il faudra l'accompagner de mesures de sûreté pour mieux protéger ces bâtiments d'État tels que la trésorerie, sûrement par le déploiement de la vidéoprotection.
Alors que notre pays va connaître une très grave crise de la construction, et que d'autres espaces que ceux touchés par les émeutes du 27 juin au 5 juillet sont concernés par des besoins de reconstruction, il apparaît par ailleurs nécessaire que le Gouvernement engage à la sortie de l'été une réforme structurante de simplification de l'urbanisme et des marchés. En effet, après les énergies renouvelables, les installations nucléaires et l'industrie verte, il s'agit déjà du quatrième projet de loi illustrant la nécessité d'alléger nos contraintes urbanistiques en l'espace d'un an.
Ce besoin de légiférer pour permettre un traitement accéléré souligne la longueur des délais de droit commun ainsi que la lourdeur et la complexité des procédures de droit commun, ce qui freine le développement en France.
Les trois articles dans la version du projet que nous examinons ce matin consistent en des habilitations du Gouvernement à légiférer par ordonnances. Nous n'apprécions pas la méthode, mais elle tend à être justifiée, dans le contexte actuel, par l'ambition d'aller vite et bien sur des sujets techniques.
L'urgence est indéniable. Les lacunes dans le droit existant sont indéniables. Ce sont les raisons pour lesquelles notre groupe prendra ses responsabilités et soutiendra ces dispositions en espérant un vote conforme.
Cependant, le moment venu, nous invitons le Gouvernement à présenter ses ordonnances au Parlement pour les ratifier, car la pratique inverse est de plus en plus observée.
Nous invitons surtout le Gouvernement à les présenter au plus vite en Conseil des ministres, si possible avant la pause estivale pour l'article 2, afin de ne pas perdre le temps que les dispositions dérogatoires contenues dans cet article devraient nous permettre de gagner. Cela permettrait de passer les marchés publics le plus rapidement possible.
Enfin, ce projet de loi se borne à faciliter la reconstruction matérielle. Cela ne suffira pas à nous éviter de revivre de tels événements.
Il faudra s'atteler aux causes de ces violences commises contre les symboles de notre République afin que cela ne se reproduise plus.
Nous invitons donc également le Gouvernement à engager au plus vite une restauration de l'autorité à différents niveaux et à défendre une ambition d'intégration républicaine fondée sur le partage d'un destin commun animé par l'amour de la France.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur les bancs des commissions.
Le groupe Horizons, au nom duquel je m'exprime, soutiendra naturellement votre projet de loi…
…en espérant une adoption conforme, par souci de rapidité d'exécution et d'efficacité.
Ce texte, qui nous ramène à une actualité brûlante et déchirante, se passe de grands discours et de grands mots. C'est un texte de reconstruction, un texte de réparation matérielle…
…qui vise, dans la mesure du possible, à permettre à la vie de reprendre son cours dans les quartiers où des violences urbaines et des émeutes ont eu lieu. Un chiffre en particulier m'interpelle : 243 établissements scolaires ont été dégradés. À lui seul, il nous confronte à la grave réalité du niveau de tension auquel est soumis notre pays depuis de nombreux mois, voire de nombreuses années.
Il s'agit donc de réparer les écoles, les équipements culturels et sportifs, nombre de services – dont ceux de la petite enfance, comme les crèches –, mais aussi des bâtiments publics tels que les mairies, sans oublier l'arsenal de bâtiments privés, de particuliers et de commerces qui ont été dégradés.
Le texte nous donne les moyens d'intervenir sur les équipements, les bâtiments et les infrastructures. Nos débats porteront sur trois domaines. Le premier est le code de l'urbanisme, puisqu'il s'agit de reconstruire à l'identique – avec les règles qui prévalent en 2023 –, tout en saisissant, au passage, les occasions d'en améliorer les aspects liés à la transition énergétique, à la sécurité et à l'accessibilité.
Le deuxième domaine nous amènera à modifier le code des marchés publics ; si la publicité n'est pas obligatoire, nous pourrons faire entièrement confiance aux maires de nos communes pour mettre en concurrence les différents corps de métiers qui seront sollicités. Par ailleurs, ce texte nous offre l'occasion de faire œuvre de simplification en matière de délais d'instruction des permis de construire et d'urbanisme.
Le troisième domaine où nous allons intervenir est celui du financement, en gardant comme trajectoire et comme objectif le zéro reste à charge pour les communes. Nous devrons aussi réfléchir à l'adaptation à la réglementation européenne : vous pourrez revenir, monsieur le ministre délégué, sur le seuil maximal des marchés publics exonérés de publicité de 1,5 million d'euros que vous avez évoqué en commission. De même, si la règle commune fixe à 80 % le montant maximal de subventions que peuvent toucher les collectivités, il faudra cependant aller au-delà pour que le reste à charge soit effectivement égal à zéro. Enfin, nous devrons étudier la question du fonds de compensation de la TVA – que tous les élus connaissent – qui suppose de passer de la récupération en année n + 2 à une récupération immédiate de la TVA.
Une fois ce texte voté, il nous restera à identifier les responsabilités des auteurs de ces dégradations, et à les faire participer – ainsi que leurs parents – aux réparations, sous une forme ou une autre. Il nous faudra aussi évaluer le montant total des dégradations et vérifier quelle est la prise en charge réelle par les assurances.
Pour conclure, au-delà de la réparation matérielle, nous devons réfléchir à la réparation immatérielle et morale – je reprends les mots que j'ai utilisés en commission. La question qui se pose à la France, en 2023, c'est celle du vivre ensemble.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Puisque nous sommes députés de la nation et que j'ai la chance de siéger dans cet hémicycle depuis seize ans, je le dis humblement et modestement : nous avons chacun, en tant que représentants de la nation, une forme de responsabilité quant à l'image que nous donnons des relations humaines.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.
On ne peut pas passer son temps à chauffer à blanc une certaine partie des Français puis s'étonner que, dans nos quartiers,…
…quelles que soient nos origines, notre catégorie sociale, nos conditions de vie, nous soyons amenés à ne plus nous comprendre.
Nous devons donc nous parler raisonnablement et respectueusement, car c'est ainsi que nous nous comprendrons et que nous parviendrons à construire le vivre ensemble.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Un mort de plus, un mort de trop : le jeune Nahel a été tué le 27 juin dernier à Nanterre par un officier de police lors d'un contrôle routier, à la suite d'un refus d'obtempérer, et quelques mois après Alhoussein Camara, tué dans les mêmes circonstances en banlieue d'Angoulême. Comme en 2005, après la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, comme en 2007 à Villiers-le-Bel, comme en 2017 après la mutilation de Théo lors de son arrestation, la colère et l'émoi se sont cristallisés dans les violences.
Bien évidemment, nul d'entre nous n'approuvera ces violences, ces pillages, ces destructions d'édifices, notamment publics. Nous ne tolérerons pas non plus la violence contre les élus locaux, toujours en première ligne.
Cependant, votre réponse ne peut se réduire à la matraque pour les quartiers et au chéquier pour les dégâts. D'année en année, de violence en violence, les conséquences ont toujours été perçues à travers le prisme sécuritaire, tandis que les causes, elles, ont continué à mûrir et à produire au fil du temps des fractures de plus en plus béantes dans notre société.
On compte aujourd'hui 5 millions de nos concitoyens vivant dans l'un des 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville. Quelle est la vision pour ces quartiers ? Où en sont les promesses de justice sociale et d'égalité républicaine ? Dans ces quartiers, 40 % de la population est en situation de pauvreté et 45 % des jeunes sont au chômage ; il y a deux fois moins de professionnels de santé par habitant que sur l'ensemble du territoire national, moins de bureaux de poste, de maisons de justice ou encore de transports.
À cet abandon de la population s'ajoute un abandon des municipalités. De quand date le dernier budget ambitieux de soutien aux collectivités territoriales ?
Cette année encore, le projet de loi de finances qui semble se présager annonce fièrement une augmentation de 1 milliard pour la dotation globale de fonctionnement (DGF), carburant financier de l'État à destination des municipalités.
Mais ce milliard ne viendra même pas compenser la moitié de l'inflation et des baisses systématiques de la DGF.
C'est faux ; vous souvenez-vous de l'époque où vous étiez alliée au parti socialiste ?
En réalité, nous connaîtrons à nouveau une baisse cette année, qui se traduira concrètement dans nos villes et nos quartiers par des activités culturelles moins nombreuses, par l'arrêt des subventions municipales, par la fermeture d'équipements sportifs et par des réductions d'effectifs.
M. Erwan Balanant s'exclame.
La DGF, ce n'est pas n'importe quelle dotation : c'est celle qui donne les outils aux maires pour combler les lacunes de l'État, pour que chacun, qu'il habite le 15
Exclamations sur divers bancs.
Nos écoles, nos mairies, nos commissariats, nos commerces de proximité, nos centres sociaux doivent être opérationnels au plus vite, pour que les habitants puissent en bénéficier au plus tôt – car ces dégradations se sont déroulées dans les quartiers où les habitants en ont le plus besoin. C'est pour cette raison que le groupe Écologiste votera ce texte ; mais ne nous contentons pas d'un simple coup de ciment par-ci ou d'une simple brique par-là ; nous devons revoir les fondations mêmes de notre République au sein de nos quartiers et de nos banlieues.
J'y insiste : la solution ne réside pas uniquement dans le logement. Lancer, par exemple, un nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), bras armé de la politique de la ville, sans l'accord des habitants, parfois même contre eux, sans accompagnement social, sans refondation complète des politiques dans ces quartiers, ne recollera pas les morceaux.
Enfin, reconstruire offre une occasion de faire mieux. L'état énergétique du parc public comme privé ne répond pas aux normes environnementales et énergétiques les plus performantes. Dans des tours qui sont des fours en été et des congélateurs en hiver, il faut s'attaquer à la rénovation énergétique. Alors que les services publics sont inaccessibles, que les personnes en situation de handicap luttent parfois pour franchir le seuil d'un bureau de poste, il faut s'attaquer au chantier de l'accessibilité. Dans des quartiers où le bus ne passe qu'une fois par heure, il faut s'attaquer au chantier de la mobilité. Dans une France qui n'a jamais été aussi antagoniste, en proie aux chimères sécuritaires et discriminantes de l'extrême droite,…
…investissons massivement dans l'éducation, l'emploi, la culture, l'insertion. En somme, investissons dans l'émancipation,…
…afin d'éviter que le prochain mort ne mène à des drames plus tragiques encore.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Je vois que cela vous émeut – vous devriez effectivement chercher à comprendre ce qui s'est passé, car, en vérité, ce n'est pas anodin.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.
Votre comportement montre que vous n'avez rien compris à ce qui s'est passé ces dernières semaines.
Mêmes mouvements.
Vous feriez mieux d'écouter, de comprendre le message qui a été donné,…
…afin de réparer la société française et ne pas laisser la situation perdurer.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Les mesures présentées en urgence dans le cadre de ce projet de loi sur la reconstruction des bâtiments dégradés ou démolis du 27 juin au 5 juillet sont très attendues par les élus locaux et par l'ensemble des administrés concernés.
Le groupe GDR – NUPES considère ces dispositions comme strictement nécessaires. En outre, la reconstruction ouvre la possibilité d'améliorer les conditions d'accueil, la qualité environnementale et la sécurité des lieux qui abritent les services publics de proximité. L'accélération et la simplification des procédures permettront de réaliser les travaux le plus rapidement possible.
Des dispositions particulières autoriseront les collectivités territoriales à disposer de subventions dérogatoires aux règles en vigueur.
Ces mesures, qui sont strictement nécessaires et qui seront précisées avec sérieux dans les ordonnances qui suivront, sont-elles suffisantes ?
D'un point de vue strictement financier, rien ne garantit que les communes ne verront pas leur budget d'investissement largement amputé par les engagements auxquels elles devront faire face.
Le maire de la petite ville de Mont-Saint-Martin, en Meurthe-et-Moselle,…
…a invité le Président de la République à venir prendre la mesure des dégâts : sa ville, qui subit déjà les conséquences du recul de services publics, a déploré ces dernières semaines, comme bien d'autres communes, l'incendie d'une école, d'un centre pour autistes, de la maison médicale, des locaux du club de foot, ainsi que l'attaque du collège et d'une école maternelle. Le maire est atterré, mais il souhaite aller vite : il a déjà entamé la reconstruction, comme me le disait Jean-Paul Lecoq.
Nous avons une responsabilité à l'égard de l'ensemble de ces élus et de ces populations qui s'interrogent sur l'avenir immédiat et à long terme des services publics et de leur budget, tout simplement. Ils se demandent s'ils pourront satisfaire rapidement aux besoins quotidiens des habitants.
Or nous estimons que le projet de loi ne répond que très partiellement à ces interrogations.
Dans une séquence longue particulièrement délicate pour les collectivités locales, en particulier pour les communes populaires, la question des dotations, en particulier de la dotation globale de fonctionnement, est à nouveau légitimement posée. La proposition du groupe GDR – NUPES visant à indexer la DGF sur l'inflation, récemment défendue par Jean-Marc Tellier, n'en prend que plus de relief.
Plus fondamentalement, réparer les bâtiments qui hébergent les services publics de proximité mentionnés par les différents orateurs, ce n'est pas réparer le service public. Vous êtes très sévèrement attendus sur ce point, alors que, comme nous vous l'avons constamment rappelé, vous n'avez cessé d'aggraver la situation des services publics en adoptant à leur égard une logique de rigueur et d'attrition, budget après budget. Nous nous y opposerons de nouveau à la prochaine rentrée.
Nous déplorons l'absence dans ce projet de loi de toute mesure concernant le secteur assurantiel. À nos yeux, il est absolument nécessaire de mettre à contribution et de responsabiliser les compagnies d'assurances afin de garantir la réparation intégrale des dommages subis par les particuliers, par les associations et les organismes de logement notamment.
Actuellement, la loi pose pour principe, selon les termes de l'article L 121-8 du code des assurances, que « [l]'assureur ne répond pas […] des pertes et dommages occasionnés […] par des émeutes ou par des mouvements populaires ». Nous avions déposé un amendement visant à rendre obligatoire la couverture intégrale de ces risques et un autre tendant à instaurer une contribution exceptionnelle des compagnies d'assurances afin d'alimenter un fonds destiné à indemniser les particuliers et les associations victimes de dégradations. Nous regrettons profondément que ces amendements aient été déclarés irrecevables.
Comme je le disais, ce projet de loi est attendu par les élus locaux. Il devra être suivi très rapidement, en particulier lors des débats budgétaires de l'automne, d'autres dispositions financières. Nous aurons donc l'occasion de vous demander à nouveau des comptes sur votre politique.
Pour en revenir au projet de loi que nous examinons dans les derniers jours de la session extraordinaire, nous vous annonçons notre vote efficace et sobre en faveur de ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et LR.
La colère, si légitime et partagée soit-elle, ne pourra jamais justifier les violences aveugles et sourdes perpétrées partout sur le territoire national il y a quelques semaines.
L'émotion qui s'est emparée du pays après la mort d'un jeune homme prénommé Nahel à Nanterre est légitime. Elle soulève des interrogations ; le travail des enquêteurs et de la justice permettra de faire la lumière sur les conditions qui ont conduit à cette situation inacceptable.
Néanmoins, le temps n'est pas venu – fort heureusement – pour que reprenne le concours des petites phrases, des déclarations faciles, de la caricature. Nous savons, nous qui sommes en prise avec la réalité du quotidien – un certain nombre d'entre nous avons administré des communes –, quel choc c'est pour nos concitoyens de voir disparaître dans ces moments de violence, des lieux d'apprentissage, de culture, ces lieux qui manifestent la République, qui font sens et qui définissent le vivre ensemble.
Murmures sur les bancs du groupe RN.
Nous ne pouvons pas accepter une seule seconde que soit remise en cause la capacité qu'a chacun de s'appuyer sur un service public fort qui accompagne tous les citoyens de France, aussi bien les plus fragiles, les plus éloignés des services du quotidien, que ceux qui vivent à leur proximité. Nous avons été profondément marqués et meurtris par ces moments qui ont soustrait à nos populations ce bien que certains n'ont que trop peu, les manifestations concrètes de la capacité à vivre ensemble à travers les outils de la République, qu'ils soient portés par l'État lui-même ou par les collectivités. Notre pays devra s'interroger sur les réponses à apporter à cet épisode si violent.
Une fois encore, nous devons rappeler que dans un pays comme le nôtre, avec pour seules boussoles la République et l'intérêt général, il n'est plus acceptable de voir les forces de sécurité remises en cause de manière systémique, de voir les sapeurs-pompiers en intervention se faire caillasser dans certaines parcelles de la République.
En disant cela, nous n'affirmons pas que la seule réponse soit le renforcement de l'ordre.
Nous savons, nous qui sommes en prise avec les populations, qu'une réponse globale et complexe doit être construite. Elle doit répondre à une politique que certains considéreront comme trop sociale : nous devons accompagner ceux qui espèrent voir leurs enfants vivre mieux qu'ils ne vivent eux-mêmes, dans des quartiers où parfois la question de la discrimination n'est plus assez posée, où l'origine, la couleur de peau ou le prénom peuvent être un prétexte pour interroger la possibilité de vivre ensemble.
Le temps de construire cette réponse viendra. Je souhaite, sans nourrir toutefois trop d'espoir, que ce débat puisse se tenir sans verser dans la facilité ou la caricature.
Sourires sur les bancs du groupe LR.
En examinant ce projet de loi, nous tentons d'apporter une réponse immédiate à la question de la reconstruction, qui fait sens pour tout le monde et qui permet aux élus locaux de construire la République qui avance. Nous devons répondre vite et fort à ces émeutes inacceptables,…
…afin de permettre aux enfants d'ici et d'ailleurs d'être scolarisés dans de bonnes conditions, et à la culture de constituer un moyen d'émancipation et d'ouvrir des chemins pour la jeunesse.
Je l'affirme sincèrement, ce projet de loi est utile et nécessaire. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous l'avez dit : ce texte est la suite logique des discussions qui ont eu lieu entre les élus locaux, l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) et le Président de la République.
Certaines dispositions pourraient bien sûr être discutées et améliorées. Nous tenterons de le faire malgré le temps réduit dont nous disposons. Toutefois, le principe qui doit nous guider est la volonté de permettre une reconstruction rapide. Nous voterons les procédures d'urgence qu'autorise ce texte, tout en vérifiant ensemble que nous ne créons pas à travers elles un biais qui pourrait favoriser les grandes entreprises au détriment des très petites entreprises (TPE) ou des petites et moyennes entreprises (PME).
Ce sera l'un des rares sujets sur lesquels nous engagerons une discussion. Pour le reste, vous pouvez compter sur la solidarité du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires.
Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et Dem, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et HOR.
Au nom du groupe Renaissance, je commencerai par rendre hommage aux maires, aux élus locaux, mais aussi aux forces de police et de gendarmerie, aux pompiers, aux agents techniques des municipalités qui ont courageusement fait face aux nuits de violences fin juin, début juillet.
M. Emmanuel Lacresse applaudit.
Les maires, en particulier ceux des plus de 500 communes frappées par des déchaînements haineux, ont assisté médusés, attristés et souvent même en colère à la dégradation ou à la destruction de projets qu'ils avaient mis du temps à imaginer, à défendre, à financer et à construire. Ils ont assisté au pillage de commerces de proximité qui font l'âme des centres-villes. J'ai une pensée particulière pour les communes de la région Île-de-France, du département de l'Essonne et de ma circonscription, qui ont été douloureusement affectées.
Après ces émeutes traumatisantes, deux positions irréconciliables ont immédiatement émergé dans le débat public. D'une part, il y a ceux qui voudraient tout excuser, tout laisser passer ; d'autre part, il y a ceux qui voudraient tout laisser tomber. D'une part, ceux qui, au fond, auraient bien voulu que les émeutes continuent, même s'ils affirment ouvertement qu'ils préfèrent qu'on s'en prenne à des bijouteries plutôt qu'à des bibliothèques ; d'autre part, ceux qui auraient bien voulu que la réponse de l'État ne soit pas à la hauteur, afin de pouvoir faire leur beurre d'une impuissance supposée.
L'État a été au rendez-vous. Police, gendarmerie, justice : le volontarisme de l'État régalien a démontré son efficacité
Exclamations sur les bancs du groupe RN
pour mettre fin à un embrasement que rien ne pouvait justifier ni excuser.
Quelles que soient les émotions qui peuvent nous saisir dans l'actualité, elles ne peuvent justifier les intimidations et les exactions.
Nous voulons dire aux habitants des villes et des quartiers où des vitres sont brisées, des locaux de services publics brûlés, que personne ici ne les abandonnera. Nous avons résolument choisi notre camp : nous sommes aux côtés de ceux qui s'engagent, pas de ceux qui saccagent – et j'espère que ce sera le cas de tout le monde à l'issue de nos débats.
Le projet de loi que nous allons examiner apporte une réponse rapide aux élus de nos collectivités, désemparés face aux réinvestissements qui les attendent. La simplification que nous proposons doit être une invitation à ne pas baisser les bras. L'urgence, c'est de faire flotter à nouveau le drapeau tricolore partout dans nos centres-villes et dans nos quartiers, et de montrer sans délai que la République ne se laisse pas impressionner. Nous nous engageons pour dire que la République sera toujours plus forte que les attaques qui tentent de l'affaiblir.
Mes chers collègues, nous ne sommes pas ici pour rendre la justice, même si, comme tous les Français, nous sommes nombreux à espérer des sanctions effectives pour tous ceux qui ont été identifiés parmi les casseurs des nuits de juillet. Oui, ceux qui ont cassé doivent payer. Mais ceux qui n'ont rien demandé ont, eux aussi, le droit de ne pas être les oubliés de l'affaire.
Le ministre l'a rappelé hier lors de l'examen du texte en commission : nous donnerons à nos collectivités, à nos territoires, les moyens financiers de reconstruire. Nous ne sommes pas la majorité qui a baissé les dotations aux collectivités territoriales ; nous ne sommes pas non plus celle qui a réduit le périmètre des quartiers prioritaires de la politique de la ville, privant des centaines d'habitants de moyens, ni celle qui construit davantage encore dans des quartiers comptant déjà trop de logements sociaux. Nous sommes la majorité de l'équilibre des territoires.
Le temps de l'analyse des causes viendra, mais nous en connaissons au moins une :…
…nous savons qu'il faut que chacun se sente partie d'une nation. Nous devons trouver une nouvelle manière de nous réunir autour de tout ce qui fait l'identité française, car une nation, c'est un symbole et des idées qui nous font tenir ensemble et mener un projet commun.
Mettez fin à votre politique néolibérale, ça améliorera déjà la situation !
Mais ce projet commun, il commence tout en bas : la nation se construit d'abord autour des quatre murs d'une mairie, d'une école ou d'une maison des associations.
Nous sommes ici pour dire à la majorité silencieuse de nos concitoyens de ne pas désespérer : notre majorité ne se résignera jamais.
Rien ne justifie la violence – la culture de l'excuse n'est pas un programme –, mais rien ne justifie non plus de priver nos enfants de retrouver leur école à la rentrée, de priver nos policiers de locaux d'intervention,…
…de laisser des gens aux portes explosées d'un bureau de poste, d'empêcher les habitants de faire du sport ou de s'épanouir par la culture.
Dans le sage sillon tracé par le Sénat, nous espérons pouvoir adopter rapidement ce projet de loi, qui prévoit des habilitations qui permettront à M. le ministre d'agir rapidement et efficacement.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
À neuf heures cinquante, M. Sébastien Chenu remplace Mme Valérie Rabault au fauteuil de la présidence.
Il existe bien des références historiques aux 100 jours annoncés par Emmanuel Macron ; malheureusement, l'histoire ne retiendra des 100 jours de 2023 qu'une vaste supercherie, donnant lieu à une situation marquée par le chaos et l'embrasement. Huit jours d'émeutes seulement, et un bilan pourtant bien plus lourd que celui de 2005, où elles avaient duré trois semaines. J'ai une pensée pour nos policiers, nos gendarmes et nos sapeurs-pompiers, qui, au milieu des affrontements, ont su assurer leur mission. Pendant ce temps, nos commerçants assistaient, impuissants, au pillage et au saccage de leurs boutiques, les habitants des quartiers voyaient les flammes emporter leurs véhicules, et des passants étaient pris à partie sans raison par des meutes de sauvages. Qui était alors aux commandes ? Emmanuel Macron ? Certainement pas : il assistait à un concert ! Visiblement, quand le chat n'est pas là, les souris pataugent.
« Qu'est-ce qu'il raconte ? » sur les bancs du groupe RE.
Ces 100 jours d'abandon se seront soldés par huit jours de destruction : voilà ce que retiendront les Français.
Nous allons débattre d'un projet de loi relatif à l'accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet. Pourtant, à sa lecture, on ne constate que de timides références aux casseurs. Non, il ne s'agit pas d'une catastrophe naturelle dont les causes seraient exogènes : les responsables, nous les connaissons, ce sont principalement des jeunes issus des banlieues, rassemblés pour en découdre et casser – le tout avec la bénédiction des élus de la NUPES.
M. René Pilato incline son pouce vers le bas.
Oui, chers collègues, en refusant d'appeler au calme et en jetant constamment de l'huile sur le feu,…
…certainement aveuglés par votre éternel fantasme de voir nos institutions s'effondrer, vous avez une part de responsabilité dans ce chaos.
Pendant ce temps, notre gouvernement tremblait, incapable de rétablir l'ordre dans les rues : selon certains observateurs de terrain, c'est l'intervention des narcotrafiquants qui aurait permis un retour au calme.
M. Philippe Vigier s'exclame.
Heureusement, les Français ont compris – et ils l'expriment ouvertement – que seule Marine Le Pen ,…
« Ah ! » sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR
Sourires.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Sans surprise, votre texte, qui prévoit des hausses d'impôts et de cotisations d'assurance, prévoit finalement de faire payer la France qui travaille, celle qui ne fait pas de bruit et ne casse pas. Pour elle, ce sera la double peine. La racaille détruit et les Français payent. Dans ce projet de loi, vous traitez les effets sans jamais vous attaquer aux causes : effacer au plus vite les stigmates des émeutes et faire oublier aux Français votre incapacité à agir dans leur intérêt, voilà son véritable objectif !
Les responsables et les causes de ce que nous avons vécu ne peuvent être ignorés : ce sont ceux qui nous haïssent, galvanisés et nourris par un sentiment de toute-puissance et d'impunité, ceux qui habitent des zones de « non-France » et empruntent le chemin de la sécession. Mais ce sont aussi quarante années d'une politique migratoire anarchique, associée à des réponses pénales inadaptées, notamment une absence d'exécution des peines. La culture de l'excuse et la repentance permanente poussent notre pays à une inversion des valeurs : les coupables deviennent des victimes, les victimes des coupables.
Nous devons être impitoyables avec ceux qui cultivent la haine anti-France, attaquent nos symboles et profanent nos mémoriaux : c'est aux émeutiers d'assumer l'entière responsabilité de leurs actes, sur le plan pénal comme sur le plan civil.
Ils doivent rembourser l'intégralité des dommages qu'ils ont causés – à perpétuité s'il le faut.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
…les solutions existent, monsieur le ministre, il suffit de les appliquer : le principe du casseur-payeur doit devenir la règle, les émeutiers étrangers doivent être expulsés, les allocations familiales des familles de délinquants mineurs doivent être supprimées, la majorité pénale doit être abaissée à 16 ans.
Ce texte restera un pansement sur une jambe de bois. Une fois encore, les Français paieront quarante années de lâcheté politique, de clientélisme et d'aveuglement idéologique. Des élus Les Républicains …
Exclamations sur les bancs du groupe LR
…à ceux de la NUPES, en passant par ceux du centre, vous êtes tous complices de cette situation.
Monsieur le ministre, sachez que les députés du Rassemblement national n'auront jamais les mains qui tremblent face à la racaille. Nous le disons aux Français : lorsque nous serons au pouvoir, nous rétablirons l'ordre et nous rendrons la France à la France.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Dommage, vous avez oublié de conclure en citant le nom de Marine Le Pen !
Cette loi permettra-t-elle de reconstruire avant septembre l'école maternelle de La Verrière, dans les Yvelines ? Cette loi permettra-t-elle de reconstruire rapidement l'antenne de police de Bagnolet, chez moi, en Seine-Saint-Denis ?
Cette loi nous garantira-t-elle la reconstruction rapide – la reconstruction tout court, même – de tous les bâtiments destinés à un service public ? Non, et vous le savez bien.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Vives exclamations sur les bancs du groupe RN.
Mêmes mouvements
Le texte n'oblige pas les mairies à assurer leurs bâtiments. Bien que nous n'ayons pas de données précises sur ce sujet, votre ministère estime pourtant que presque la moitié des collectivités ne sont effectivement pas couvertes par une assurance.
Le texte permettra-t-il de débloquer de nouveaux crédits en urgence pour répondre aux besoins de reconstruction ? Non ! Une circulaire de la Première ministre du 7 juillet 2023 prévoit au contraire d'aller piocher dans les fonds existants, les obérant de 94 millions d'euros qui ne pourront donc financer les politiques publiques auxquelles ils devaient initialement être consacrés. Avec un budget limité et imprévisible, certaines collectivités devront faire un choix : faut-il privilégier la reconstruction de la cantine de l'école ou celle de la bibliothèque ? Ce dilemme n'est pas acceptable : votre rôle, c'est de garantir que tout sera reconstruit.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Sourires.
Pour avoir l'assurance que les travaux démarrent au plus vite, il faudrait un nouvel engagement financier dans l'exercice 2023. Vous devez vous engager à débloquer ces nouveaux fonds dans le cadre d'un projet de loi de finances rectificative qui serait présenté à l'automne – c'est le véhicule que vous avez choisi pour défendre le report de l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans, vous pouvez bien l'utiliser aussi pour assurer la reconstruction.
« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Et, par pitié, ne me dites pas que le paiement en avance du FCTVA ou la suppression de l'obligation de participation minimale des collectivités équivalent à un reste à charge nul pour ces collectivités : c'est faux. Les fonds du FCTVA appartenaient déjà aux mairies, et les débloquer par anticipation n'y changera rien ;…
…et, si les collectivités n'ont plus à apporter de concours financier, le problème reste entier : qui financera les 100 % restants ?
Le pire n'est pas que vous traitiez mal la question matérielle, mais que vous gériez mal la question immatérielle. Collègues, c'est la première fois que nous sommes réunis pour parler de la réplique à apporter à l'homicide volontaire qui a entraîné la mort de Nahel, le 27 juin.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le texte ne fait pas mention de cet événement, comme si vous vouliez l'effacer de nos mémoires.
« Hors sujet ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.
Le Président de la République lui-même ne s'est toujours pas exprimé.
Votre texte concerne effectivement les biens détruits ou dégradés à partir du 27 juin, jour de la mort de Nahel, mais en ne parlant que de la réponse à y apporter, vous omettez de traiter les problèmes mis au jour par l'homicide volontaire
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
« Et la justice ? » sur plusieurs bancs du groupe RN.
Je ne m'arroge pas le droit de préjuger de la culpabilité d'un homme – tout homme est présumé innocent –, mais il s'agit bien de la qualification juridique qui a été retenue par la justice.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il y aura un procès, le policier plaidera qu'il a utilisé son arme dans le cadre de la loi relative à la sécurité publique de 2017. Qu'attendez-vous pour abroger le 4
Mêmes mouvements.
Qu'il y ait davantage de morts ? Treize meurtres en 2022 ne suffisent-ils pas ? La mort de Nahel – son meurtre, pour reprendre la qualification retenue par la justice à ce stade – n'est-elle pas suffisante ?
« Arrêtez ! » et « Quelle honte ! » sur les bancs du groupe RN.
Quand traiterez-vous enfin la question du racisme dans la police ? Voilà ce qui construirait la paix, comme c'est notre rôle à tous.
Exclamations sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe LR.
N'entendez-vous donc pas la petite musique de la guerre civile ? Il faut répondre.
Mêmes mouvements.
Mes chers collègues, il est dix heures du matin, c'est encore trop tôt pour un tel brouhaha.
Pour encore quarante secondes, seule Mme Garrido a la parole : je vous prie de la laisser terminer son propos.
Je ne suis pas née en France : j'y suis arrivée à l'âge de 14 ans, et ne suis devenue Française qu'à l'âge de 25 ans.
Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.
Jamais je n'accepterai que vous opériez un tri entre les Français en fonction de leur ascendance ou de leur religion.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.
Exclamations continues sur les bancs du groupe RN
Vous ne vous débarrasserez ni de moi ni des autres ! Protégeons ce pays ,
« Notre pays ! » sur les bancs du groupe RN
protégeons la République, protégeons la justice et la paix : c'est notre devoir à tous.
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent.
Le 27 juin, un jeune garçon de Nanterre, Nahel Merzouk, était abattu par un policier à l'occasion d'un contrôle routier, nouvelle victime d'une terrible série qui pose la question des conditions de l'usage de leur arme par les forces de l'ordre et, plus largement, de notre doctrine de maintien de l'ordre et du rapport entre la police et la population. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, ce n'est pas l'objet de notre discussion aujourd'hui : la justice doit suivre son cours et le Parlement doit jouer son rôle de contrôle. À cet égard, le groupe Socialistes et apparentés a sollicité et obtenu une évaluation de la loi relative à la sécurité publique de 2017 ; mon collègue Roger Vicot en sera corapporteur au nom de l'opposition.
Ce qui nous rassemble ce matin, c'est l'enjeu de la reconstruction. En effet, entre le 27 juin et le 5 juillet, ce drame a donné lieu à une flambée de violences, initialement alimentée par une réponse judiciaire perçue comme complaisante envers les policiers, alors qu'une vidéo des faits contredisait les premiers éléments fournis par ces derniers. Ces violences, que nous condamnons une nouvelle fois sans réserve, ont pris une ampleur inédite depuis celles de 2005 consécutives à la mort de Zied Benna et Bouna Traoré. La dégradation voire la destruction de mairies, de commissariats, d'écoles, de crèches, de médiathèques a privé nos concitoyens d'accès à certains services publics, souvent dans des territoires où ceux-ci sont déjà peu présents ; des bureaux, des commerces, les locaux professionnels d'artisans ont également été touchés, ainsi que des véhicules privés, aux dépens de ceux qui se lèvent tôt pour se rendre au travail. Il est de notre responsabilité de leur apporter une réponse rapide : c'est pourquoi nous soutiendrons ce projet de loi bienvenu.
Je souhaite néanmoins, comme je l'ai fait en commission, commencer par évoquer ce qui ne figure pas dans le texte et qu'il importe de traiter urgemment. Il y a tout d'abord la question des assurances : alors que nous souhaitons reconstruire à la fois vite et, en ce qui nous concerne, bien, des mois et même des années risquent d'être perdus en expertises, contre-expertises et autres négociations en vue de protocoles transactionnels. Certaines collectivités ne pourront entamer les travaux avant d'avoir reçu une compensation, et elles n'entrent pas nécessairement dans le périmètre du texte. Il faudra, monsieur le ministre, que le Gouvernement amène rapidement les assureurs, dont nous gardons à l'esprit la mauvaise volonté initiale au début de la pandémie de covid-19, à prendre toute leur part. S'ajoute logiquement à ce sujet celui des moyens et aides financières : si le projet de loi vise à faciliter l'obtention de taux élevés de cofinancement, encore faut-il que les crédits existent et qu'ils soient vite mobilisés. En la matière, nous avons besoin d'une réelle visibilité : les moyens alloués à la reconstruction ne doivent pas se limiter au recyclage de crédits des dotations de soutien à l'investissement local (DSIL).
S'agissant des dispositions que le Gouvernement souhaite pouvoir prendre par voie d'ordonnance, nous vous inviterons par nos amendements, monsieur le ministre, à prendre au banc un certain nombre d'engagements visant à ce que des intentions partagées trouvent une traduction concrète. D'ores et déjà, vous avez apporté en commission des garanties, par exemple au sujet des bailleurs sociaux : je n'y reviendrai pas. Il est notamment essentiel pour notre groupe que les reconstructions à l'identique respectent les normes les plus récentes et les plus exigeantes concernant l'accessibilité, la sécurité, le statut thermique ; essentiel également de concilier, touchant la commande publique, volonté d'aller vite, préservation des deniers publics et prévention des risques de corruption. Nous défendrons par voie d'amendement une proposition simple qui permettrait un meilleur contrôle démocratique sans compromettre les objectifs visés. Je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous saurez nous rassurer et prendre les engagements nécessaires au cours du débat.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Sourires
Les images que nous avons tous pu voir entre le 27 juin et le 5 juillet sont dramatiques : durant des jours, elles ont montré une République fragilisée, déstabilisée. J'ai naturellement une pensée émue pour la famille de ce jeune qui est mort, mais aussi pour tous les agents des forces de l'ordre qui, jour et nuit, ont tenu bon afin que le calme et la paix reviennent, que nous puissions avancer.
Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.
Comme l'a dit le ministre, nous en sommes au moment de l'analyse des faits, des enquêtes judiciaires, de la politique de la ville – les députés Écologistes n'étant pas encore là, j'y reviendrai à la fin de mon propos, car, de même que Thierry Benoit, je suis là depuis quelques années. En la matière, il conviendra de savoir, monsieur le ministre, pourquoi les résultats ne sont pas à la hauteur des moyens que nous déployons depuis de longues années. Je n'oublie pas que 500 communes ont été touchées, 750 bâtiments publics ou privés abîmés, détruits ; je pense à tous ceux qui ont perdu leur outil de travail, au médecin généraliste dont le cabinet a brûlé, à l'infirmière sans voiture, aux enseignants sans école, à l'incendie du bus du cœur des femmes, où des soignants proposaient de dépister gratuitement diverses pathologies. Ces images sont celles d'une France défigurée, et c'est tout à votre honneur, monsieur le ministre, que vous nous présentiez dans l'urgence ce texte qui vise à essayer d'en effacer les stigmates.
S'agissant d'urbanisme, de logement, de construction, le rapporteur a d'ailleurs été judicieusement choisi : Jean-Paul Mattei est un orfèvre ès matières, et je suis persuadé que, dès la promulgation des ordonnances, il vous facilitera la tâche de toutes les façons. Ceux d'entre nous qui exercent des fonctions locales, qui ont été maires, savent qu'il faut d'ordinaire compter plusieurs mois pour réhabiliter un commerce, trois ans pour réaliser une école. Or nous sommes en train d'envoyer un signal au pays : en cas de crise, nous sommes capables de réagir rapidement, d'assouplir les règles, tout en garantissant que les bâtiments reconstruits seront bien plus performants du point de vue énergétique ! Hier, madame Garrido, vous vous êtes émue en commission de ce qu'il n'y avait « pas un seul centime de prévu pour financer la reconstruction » : je me permettrai de vous rappeler que récupérer immédiatement la TVA évite une ligne de trésorerie et deux ans d'attente. Ça, c'est déjà de l'argent public !
Quand vous aurez géré une collectivité, vous verrez comment se passent les choses.
M. René Pilato s'exclame.
En outre, la fongibilité des aides d'État, dispositif exceptionnel, profitera au monde rural comme au monde urbain : c'est pourquoi je me suis élevé en commission contre l'amendement n° CE60, qui visait à exclure des fonds mobilisables la fameuse dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Quant aux marchés publics, madame Garrido, nous ne foulerons pas aux pieds le contrôle de légalité, bien au contraire, en facilitant le fait d'y recourir jusqu'à 1,5 million d'euros – sans doute aborderez-vous ce point, monsieur le ministre. Ce sera là une réponse très forte. Il ne reste plus à l'Assemblée qu'à adopter le texte, dès la première lecture, dans les mêmes termes que le Sénat, afin que nous soyons immédiatement opérationnels ! J'imagine que le Gouvernement, de son côté, aura à cœur de promulguer les ordonnances le plus vite possible. Encore une fois, c'est une réponse que nous adressons à la France, à ces maires que nous vénérons tous, qui sont les piliers de la République, et qu'il faut conforter. Les Français nous regardent ! J'ai été indigné de constater le renoncement permanent du Rassemblement national :…
Exclamations sur les bancs du groupe RN
…ne pas voter pour un tel texte parce que vous souhaitiez voir qualifier autrement ces violences urbaines, il faut le faire ! La France saura que vous n'avez pas voulu reconstruire.
La reconstruction n'attendra pas quatre années : elle doit commencer maintenant !
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. le président de la commission des affaires économiques, applaudit également.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES
je regrette que Mme Chatelain ne soit pas là. J'étais déjà député à l'époque où un gouvernement de gauche a diminué de 13,5 milliards d'euros le montant des dotations aux collectivités locales ,
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem
tandis que les moyens alloués à la politique de la ville s'effondraient de 40 %. Quel culot vous avez ! Quelle honte !
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Quand on sait à quel point l'État se mobilise par l'intermédiaire du fonds Vert et des plans de relance, vous devriez au moins…
Jamais les collectivités n'ont été autant aidées. Alors, je le répète, avançons !
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
C'est au sein d'un hémicycle apaisé pour accueillir nos visiteurs dans les tribunes du public que je donne la parole à Mme Emmanuelle Ménard.
Monsieur Minot, ce n'est pas parce que c'est votre anniversaire que vous devez la ramener matin, midi et soir…
Sourires.
Chers collègues, 23 878 feux sur la voie publique, 12 031 véhicules incendiés, 2 508 bâtiments incendiés ou dégradés, dont 273 postes de police ; 105 mairies incendiées ou dégradées, 168 écoles attaquées, 17 élus menacés ou agressés ; enfin 3 505 personnes interpellées et – c'est heureux – plus d'un millier de condamnations. La stupéfaction suscitée par ce déchaînement de haine a vite laissé place à la peur, à la colère. Rien ne peut justifier les violences qui ont enflammé notre pays ! Elles sont insupportables, inacceptables, impardonnables. Tout y est prétexte et récupération. Elles ne visent en aucun cas à exprimer une émotion légitime, mais bien à fouler aux pieds nos institutions, à détruire tout ce qui les incarne. Disons-le franchement : les émeutiers se contrefoutent de la mort de Nahel !
« Elle a raison ! Bravo ! » sur quelques bancs du groupe RN.
À Béziers, une cinquantaine de voyous ont dévasté leur quartier, celui de La Devèze, où plus de 150 millions avaient été investis afin d'assurer le bien-être des 4 000 habitants. Ils ont gravement détérioré la mission locale pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes, c'est-à-dire une structure conçue pour eux, incendié la maison de quartier où leurs petits frères et sœurs étaient accueillis en vue de séjours en centres de loisirs, les privant de vacances cet été ; la mairie annexe a été saccagée, des véhicules brûlés. Dans un autre quartier, le bureau de poste et divers commerces ont subi des dégâts considérables. Sous les attaques et les jets de projectiles, les policiers nationaux et municipaux, les gendarmes, les pompiers ont fait preuve d'un sang-froid à toute épreuve. L'enveloppe nécessaire à la remise en état sera lourde : dans ma ville, la première estimation avoisine 1 million d'euros pour les seuls bâtiments publics. Qui va payer la note ? Les Français, bien sûr, d'une façon ou d'une autre, ce qui est terriblement injuste !
Afin de rassurer nos compatriotes, le chef de l'État a promis un texte d'urgence, celui-là même que nous étudions ce matin. Vous y prévoyez la possibilité d'un affranchissement partiel ou total des obligations en matière de participation financière qui pèsent sur une collectivité maître d'ouvrage lorsque d'autres personnes publiques contribuent au financement du projet : d'une part le fait que la participation du maître d'ouvrage doit représenter au moins 20 % du total de celle des personnes publiques, d'autre part les fonds de concours permettant à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et à ses communes membres de contribuer aux investissements les uns des autres. C'est là une bonne idée, même si vous n'ignorez pas qu'elle ne règle rien au fond : il reviendra à l'État, c'est-à-dire au contribuable, de mettre la main à la poche, subissant ainsi la double peine de payer la réparation d'équipements qu'il a déjà financés.
Parce que la reconstruction constitue une urgence, je voterai en faveur de ces dispositions.
« Ah ! » sur quelques bancs du groupe Dem.
Mais les casseurs dans tout ça ? Selon Sandrine Rousseau, malheureusement absente de l'hémicycle ce matin, s'ils pillent les magasins, c'est parce qu'ils sont pauvres, ce qui les met hors d'état de rembourser les dégâts qu'ils commettent – CQFD. À ce point, on ne peut même plus parler de naïveté ou de raisonnement absurde : il s'agit tout bonnement de complicité,…
…soit l'exact contraire de ce qu'attend la grande majorité des Français ! Nous devrons nous contenter du flyer par lequel le garde des sceaux entend expliquer « en termes simples », dit-il, leurs obligations aux parents qui les « auraient oubliées ». Êtes-vous sérieux ?
Il faut des actes forts : pour ces petits voyous, ces casseurs, ces pilleurs qui n'ont pas atteint leur majorité, cela signifie la responsabilisation financière des parents, la condamnation systématique à des TIG consistant à nettoyer et réparer les dégâts, la restauration de l'autorité à l'école, avec un recentrage des programmes sur le français et sur l'éducation civique et morale ; le développement des internats et des centres éducatifs fermés (CEF), la remise en cause de l'excuse de minorité, de nouvelles places de prison.
Nous n'en prenons pas le chemin. Une fois encore, une fois de trop, vous allez consciencieusement dissimuler la poussière sous le tapis. Pour combien de temps ? Regardons les choses en face : l'argent ne réglera pas tout ! Il convient surtout de s'interroger au sujet de la haine qui anime ces casseurs, ces voleurs – la haine de notre pays. Je dis bien « notre pays », car, à leurs yeux, ce n'est pas le leur : ils sont Français, mais seulement par leurs papiers.
« Quelle honte ! » sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Beaucoup parmi vous persistent à nier tout rapport entre ces émeutes et une immigration de masse, non choisie, non contrôlée :…
« Elle a raison ! » sur quelques bancs du groupe RN
…qu'ils continuent ainsi ! Nous nous retrouverons un jour ici pour déplorer encore plus de dégâts et peut-être, qui sait, non plus un, mais plusieurs morts.
Je serai bref, car je souhaite que nous puissions adopter rapidement ce texte d'urgence. Je voudrais simplement indiquer que nous répondrons, article par article, aux questions relatives au texte. S'agissant en revanche des causes des violences urbaines, qui ont donné lieu à plusieurs interpellations, je répète que ce sujet mérite mieux qu'un débat de quelques heures au mois de juillet. Il devra être traité les yeux ouverts, à la rentrée, sous une seule condition : que personne n'entre dans l'hémicycle en disant « Cela fait des années que je le dis, et j'ai raison ».
Parce que sinon, bizarrement, certains diront des choses absolument contraires à ce que diront d'autres ,
Mme Aurélie Trouvé s'exclame
selon une logique de prophétie autoréalisatrice qui ne correspond pas à ce que nous avons vécu.
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Sur l'amendement n° 49 , je suis saisi par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Nathalie Oziol.
Protestations sur quelques bancs du groupe RE
« Non ! » sur quelques bancs des groupes RN et LR.
De nombreux biens publics, logements et commerces du quotidien ont été dégradés ou détruits. Plus de 12 000 voitures et 2 508 bâtiments ont été incendiés ou dégradés et plus de 1 000 commerces vandalisés, ce dont les habitants des quartiers, les commerçants et les usagers des services publics sont les victimes à double titre : d'abord parce qu'ils n'ont plus accès à ces lieux, mais aussi et surtout parce que ce sont eux qui subissent les conséquences des choix politiques désastreux faits par Emmanuel Macron et ses prédécesseurs depuis des décennies. Je pense à la destruction des services publics et à l'attaque des allocations chômage, alors que près d'un quart des habitantes et des habitants des quartiers populaires, en moyenne, sont au chômage. Je pense aussi à l'attaque des locataires et en particulier à la dernière loi en date, la loi Kasbarian-Bergé, visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, contre laquelle nous avons déposé un recours au Conseil constitutionnel.
Allons ! En tant que président de commission, vous devriez avoir un comportement exemplaire, monsieur Kasbarian !
Qui a détruit ces quartiers ? Ce texte devrait être l'occasion de s'interroger sur la façon de réparer le lien entre l'État et les quartiers populaires. L'article 1er porte sur les dérogations qui permettront d'accélérer les délais. Il faut certes s'intéresser à ces aspects techniques, mais on ne répond ainsi qu'à des enjeux matériels et logistiques. La dimension politique, elle, est totalement occultée dans ce texte. L'État peut encadrer l'indemnisation des sinistres, qu'ils aient touché des acteurs privés ou publics. Particuliers, petites et moyennes entreprises, services publics, associations : tous doivent obtenir une réparation intégrale que l'État peut et doit garantir.
Pour les commerces n'ayant pu rouvrir, il faudrait envisager un fonds de solidarité. Ce sont ces aspects politiques qui intéressent le groupe La France insoumise.
M. Manuel Bompard applaudit.
Il vise à souligner la notion d'urgence : ce texte part du principe qu'il faut, de manière urgente, reconstruire ce qui a été détruit, tout en accordant un délai de trois mois au Gouvernement. Or, comme je l'indiquais précédemment, certains commerces ne pourront pas reprendre leur activité tant qu'ils n'auront pas été reconstruits. C'est le cas d'un bureau de tabac de ma circonscription, à Montpellier. Dans ce type de situation, la notion d'urgence doit être réellement prise en compte. Par ailleurs, un fonds de solidarité aiderait ces commerces à reprendre leur activité.
MM. Manuel Bompard et René Pilato applaudissent.
L'amendement n° 98 de Mme Raquel Garrido est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Je précise au préalable que je concentrerai mes réponses sur le texte, même si je n'ignore pas les sujets qui ont été abordés. S'agissant des deux amendements en discussion, je soulignerai qu'il est difficile d'établir une ordonnance en une dizaine de jours. Le délai de trois mois prévu à l'article 1er et le délai de deux mois prévu à l'article 2 me semblent raisonnables pour rédiger correctement les ordonnances. Avis défavorable.
Les délais proposés par ces amendements ne sont pas tenables. Dans l'hypothèse où le texte ferait l'objet d'un vote conforme, ce que je souhaite, nous n'aurions pas assez de temps entre le 20 et le 31 juillet – date suggérée par l'amendement n° 49 – pour saisir le Conseil d'État et le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN). Les délais prévus par le texte sont ceux que le Conseil d'État a conseillés au Gouvernement ; je vous invite à suivre cette ligne.
Si nous avons besoin de cet article 1er , c'est parce que le droit de l'urbanisme existant ne permet pas une reconstruction à l'identique dans tous les cas, que les propriétaires soient publics ou privés. Il faut donc pouvoir adapter les règles. Comme il s'agit de sujets techniques, les remontées du terrain sur les demandes d'autorisation seront nécessaires pour ajuster les dispositions. Même si l'ordonnance était présentée avant le 31 juillet, il ne serait d'ailleurs pas exclu qu'il faille la modifier pour tenir compte de cas particuliers, dans des secteurs sauvegardés ou en zone inondable par exemple. Des ordonnances prises trop rapidement risqueraient de laisser perdurer des trous dans la raquette ; ce serait profondément injuste pour les territoires ayant subi des émeutes et des violences urbaines. Je m'opposerai donc à ces amendements.
Sur un sujet aussi technique, il faut se donner quelques semaines pour pouvoir corriger le tir afin d'éviter qu'il y ait des oubliés parmi les victimes.
Il y a effectivement cet aspect technique à prendre en compte. Je voudrais néanmoins revenir sur l'exemple du bureau de tabac dégradé, qui ne peut pas rouvrir. Au-delà de la simple indemnisation des sinistres se pose aussi la question du manque à gagner. Je repose donc la question : qu'est-il prévu dans le cas où l'activité ne peut pas redémarrer rapidement et où la situation économique du commerce est affectée ? Comment le propriétaire de ce bureau de tabac fera-t-il pendant trois mois ? Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres ; nous savons très bien que d'autres commerces sont concernés. Mon groupe La France insoumise a déposé une proposition de loi visant à l'instauration d'un fonds d'indemnisation, qui prévoirait une péréquation entre les entreprises et, surtout, serait gagé par la création d'une taxe sur les superprofits.
« Ah ! » sur les bancs du groupe RN.
Comme vous le voyez, nous avons également réfléchi à l'aspect technique de la question. Ça, c'est une proposition politique !
Exclamations sur divers bancs.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 127
Nombre de suffrages exprimés 122
Majorité absolue 62
Pour l'adoption 10
Contre 112
L'amendement n° 49 n'est pas adopté.
L'amendement n° 98 n'est pas adopté.
L'amendement n° 120 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il concerne la période pendant laquelle des dérogations seront possibles. Ce projet de loi a été déposé en urgence, au motif – réel – qu'il y a urgence à agir. L'article 1er prévoit deux mesures principales. D'une part, il donne la possibilité aux propriétaires, publics ou privés, de commencer les travaux préliminaires avant l'acceptation officielle de la demande d'autorisation. D'autre part, il leur permet de s'affranchir des avis sollicités, par exemple ceux des architectes des bâtiments de France (ABF), si ceux-ci sont rendus au-delà d'un certain délai – qui n'est pas précisé dans le projet de loi, mais sera décidé par le Gouvernement.
Expliquez-moi : pourquoi la période durant laquelle ces procédures dérogatoires pourront être déclenchées devrait-elle durer longtemps ? En quoi serait-il légitime qu'un propriétaire qui se réveillerait dans un an et demi puisse commencer les travaux avant l'autorisation, ou en se passant de l'avis des ABF ? De deux choses l'une. Soit c'est un projet de loi d'urgence, auquel cas la période dérogatoire doit être courte et précisée dans le texte – nous proposons six mois au travers de l'amendement n° 50 , mais nous avons aussi des amendements de repli ; soit ce n'est pas un projet de loi d'urgence, et vous êtes en train de remettre en cause le principe même de la légitimité des règles du droit commun de l'urbanisme, empruntant ainsi une très mauvaise pente !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est donc à Mme Nathalie Oziol, pour soutenir l'amendement n° 51 .
Comme vient de l'exposer ma collègue Raquel Garrido, le groupe La France insoumise demande que soit précisée la période durant laquelle les dérogations au code de l'urbanisme seront possibles. Celles-ci ne doivent en effet pas être prises à la légère : si des réglementations existent, c'est pour une bonne raison. À ce stade – peut-être est-ce parce que ce projet de loi a été rédigé pour et dans l'urgence –, nous, parlementaires ne disposons d'aucune étude d'impact approfondie, notamment sur les dérogations envisagées et sur les autorisations délivrées en contradiction avec les plans locaux d'urbanisme (PLU) ou plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUI). En amont de l'examen de ce projet de loi, nous avons auditionné les associations d'élus. L'AMF, notamment, nous a mis en garde : à plusieurs reprises, ses représentants ont souhaité qu'il soit garanti que les dérogations n'iront pas à l'encontre des PLU ou PLUI. Mme Garrido et moi-même ne sommes pas les seules à les avoir entendus.
Nous comprenons le caractère d'urgence des reconstructions, mais que signifie la « durée limitée » mentionnée dans le texte ? Nous souhaitons qu'elle soit précisée et proposons, au travers de nos divers amendements, plusieurs durées possibles. L'adoption de l'un d'entre eux permettrait au Gouvernement d'expliquer quelle durée lui semble raisonnable dans le cadre de ce projet de loi.
M. Manuel Bompard applaudit.
Ce n'est pas de votre faute, monsieur le président, mais il est regrettable que nous présentions nos différents amendements – y compris de repli – successivement, sans qu'il puisse y avoir d'échange avec le rapporteur, le ministre et les autres groupes.
Cela s'appelle une discussion commune ! Depuis le temps, vous devriez le savoir…
Notre proposition initiale, celle de l'amendement n° 50 , consiste à fixer la période dérogatoire à six mois. Nous avons aussi une proposition de repli – sept mois – mais, avant que nous la défendions, il faudrait que l'on nous explique pourquoi six mois ne seraient pas suffisants ! De même, avant que nous défendions une période de huit mois, dites-nous pourquoi sept mois ne seraient pas suffisants ! Nous avons besoin de réponses sur le fond. En commission, une période de dix-huit mois a été évoquée. Rendez-vous compte, dix-huit mois ! Cela signifie que la communication qui est faite autour de l'urgence est en réalité mensongère ! D'autres dispositions du texte le montrent aussi.
L'article 1er s'applique aux propriétaires, publics comme privés. Ces derniers, qui ont l'intention de recourir à la disposition qui permet de commencer les travaux avant que l'autorisation ne soit délivrée, vont bien vite réaliser qu'ils ne pourront pas trouver d'assureur qui accepte de couvrir les aléas sur cette période préliminaire, car aucune compagnie ne voudra prendre le risque d'un refus éventuel d'autorisation.
Il sera impossible d'appliquer cet article à 75 % des bâtiments dégradés ou détruits dans la mesure où leurs propriétaires, privés, n'ont pas de garantie dommages-ouvrage. J'aimerais qu'on sorte de l'hypocrisie !
La parole est à Mme Nathalie Oziol, pour soutenir l'amendement n° 112 .
Ma collègue a raison de soulever ce point : il faut savoir dans quel délai ces reconstructions auront lieu, comment elles seront chiffrées et qui prendra en charge leur coût.
Il faut, notamment, prendre en compte le fait que la moitié des collectivités ne sont pas assurées. Cela signifie qu'il faudra exiger des garanties. Il faut mettre à profit ce délai de trois mois pour réfléchir aux pertes économiques, mais aussi à la participation des assureurs.
Lors des auditions, nous avons interrogé les différents cabinets sur les contraintes qui pèsent sur les assureurs. En réalité, on ne connaît pas bien le contenu des contrats et des clauses. Cela pose problème ! Les collectivités devront peut-être acquitter un reste à charge, voire financer l'ensemble des travaux. Au-delà des aspects logistiques ou techniques, il existe des contraintes matérielles. Les associations d'élus nous ont alertés sur ce point ; il convient de les examiner de manière approfondie et d'apporter des réponses.
La parole est à Mme Raquel Garrido, pour soutenir l'amendement n° 113 .
Il s'agit, là encore, d'un amendement de repli, qui vise à limiter à dix mois la période dérogatoire. Dix mois, c'est très long ! Si je prends l'exemple d'un centre commercial endommagé, dont la façade requiert des travaux, un certain nombre d'avis préalables sont nécessaires. Ils devront être donnés durant cette période, que nous proposons de limiter à dix mois. Pourquoi les propriétaires qui se réveilleront dans un an seulement ne se verraient-ils pas appliquer le droit commun ?
Pourquoi, en réalité, vous méfiez-vous des PLU et des PLUI ? Pourquoi la planification urbaine vous gêne-t-elle ? Pourquoi voulez-vous absolument creuser des trous de gruyère dans ces outils indispensables de politique publique ? Quel type d'intérêt particulier avez-vous l'intention de défendre en permettant à un propriétaire de geler la situation, sans que la collectivité puisse elle-même changer d'avis, par exemple sur la vocation d'une parcelle urbaine ?
Quand j'entends le ministre expliquer que la période dérogatoire, dans le cadre de cette loi urgentissime, peut dépasser dix mois, je me dis qu'il y a anguille sous roche.
Reprenons le texte : le Gouvernement est autorisé à prendre « toute mesure relevant du domaine de la loi destinée, pendant une durée limitée, à accélérer ou à faciliter les opérations de reconstruction ou de réfection des bâtiments affectés par les dégradations ou destructions liées aux troubles à l'ordre et à la sécurité publics survenus entre le 27 juin et le 5 juillet 2023 (…). » J'ai du mal à suivre certains de vos arguments, car ils ont trait à des sujets que cet alinéa n'aborde pas.
Vous proposez différentes durées ; le ministre précisera ce qui pourrait sembler un délai raisonnable. C'est une question matérielle : les élus locaux qui sont amenés à faire ces opérations savent bien qu'elles nécessitent des délibérations et que rien ne se règle en cinq minutes. Le texte donne un cadre suffisamment précis à ces opérations de reconstruction ou de réfection. Avis défavorable.
Lorsque, dans cet hémicycle, on m'interpelle sur des points techniques, j'y réponds de manière technique. Lorsqu'on présente les choses d'une certaine manière et qu'on se livre à des insinuations, j'use du même ton pour répondre. Vous m'invitez à sortir de l'hypocrisie, suggérant qu'il y a anguille sous roche ; on va se dire les choses, madame Garrido.
Quand je vous entends, j'ai l'impression que vous ne faites confiance ni aux élus ni aux propriétaires.
C'est à vous que nous ne faisons pas confiance – précisément parce que notre travail consiste à rendre des comptes !
Vous semblez dire que ces mesures ont été imaginées pour favoriser les promoteurs. Mais de quoi sommes-nous en train de parler ? De personnes dont les biens ont été détruits par des émeutiers ! De propriétaires privés, ou publics, qui ne demandaient rien à personne et qui, en l'espace d'une semaine, se retrouvent à devoir tout reconstruire !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Vous laissez entendre qu'il faut faire attention à de possibles effets d'aubaine. Mais de quelle aubaine parle-t-on ? Ne pas avoir à jongler avec les obligations administratives ? Vous proposez de limiter la durée, sans quoi des propriétaires seraient tentés… mais par quoi donc ? Vous aussi, sortez de l'hypocrisie ! Votre parti ne s'est pas distingué pendant la gestion des émeutes, distinguez-vous au moins pendant la période de reconstruction et faites preuve cette fois d'unité nationale !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem, HOR et LR.
Et vous, pourquoi ne voulez-vous pas discuter avec nous ? Nous sommes la représentation nationale !
Nous prévoyons seulement une faculté. Pendant la première phase, de trois mois, il faudra aller le plus vite possible dans les discussions avec les associations d'élus pour déterminer ces mesures ; à l'inverse, ces mesures devront s'appliquer pendant une durée raisonnable, qui laisse à chacun le temps nécessaire pour agir.
Quelle durée ? On vous a posé la question plusieurs fois, monsieur le ministre !
Le Gouvernement estime que cette durée doit être de dix-huit mois, au maximum. Je l'ai dit hier en commission, je le répète aujourd'hui et le texte sera maintenu en l'état.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Thibault Bazin applaudit également.
Monsieur le ministre, nous faisons confiance aux élus locaux, dans les quartiers populaires. Nous faisons confiance aux associations de quartier. Mais nous ne faisons pas du tout confiance au Gouvernement !
Il n'y a pas deux mois, en mai dernier, des maires de quartiers populaires ont fait paraître une tribune pour dénoncer la situation, expliquant que les banlieues, faute de moyens, étaient au bord de l'asphyxie. Ce que vous leur proposez, c'est la double peine ! À Noisy-le-Sec, à Bondy ou à Romainville, les mêmes quartiers qui ont subi les révoltes urbaines pâtissent d'un manque de moyens criant.
Aujourd'hui, vous refusez de faire voter un projet de loi de finances rectificative, qui consacrerait de l'argent public à la reconstruction. La réalité, c'est que vous refusez de mettre sur la table un seul euro d'argent public pour compenser ce qui vient de se passer ! C'est la double peine pour les quartiers populaires !
Voilà ce que vous nous proposez, monsieur le ministre Béchu !
En Seine-Saint-Denis, nous avons trois fois moins d'équipements sportifs que dans le reste de la France !
Les associations de quartier, qui étaient un lien indispensable avec les quartiers, sont en train de mourir, faute de financements !
Protestations sur les bancs des groupes LR et RN.
Voilà ce que vous faites aux quartiers populaires, par votre refus d'engager l'État financièrement !
Je vous avoue que je suis un peu déboussolé. Je me suis rendu en séance en pensant que, sur ce projet de loi – un texte sensé, comme tous ceux à l'initiative du Gouvernement, qui essaye de protéger les Français et de réparer les dommages qu'ils ont subis –, le groupe LFI aurait déposé une motion de rejet. Quelle n'a pas été ma surprise de constater qu'on abordait directement l'examen des articles ! La France insoumise avait pourtant l'occasion, en faisant adopter une motion de rejet, de maintenir pendant plusieurs mois les ruines fumantes, symboles du dessein politique de certains de ses membres – voir la France à feu et à sang.
Cependant, à peine avons-nous entamé l'examen de ce texte que tout s'éclaire, quand je constate que vos intentions n'ont pas changé : vous faites en sorte que le texte ne soit pas conforme à celui issu du Sénat, afin d'en freiner l'examen – malgré l'urgence.
Comme toujours, quand les Français ont besoin de vous, vous n'êtes pas là. Les Français qui habitent ces quartiers difficiles ne vous intéressent qu'en deux circonstances : quand ils peuvent voter pour vous ; quand ils pourraient rejoindre cette fameuse convergence des luttes, dont vous rêvez, mais qui jamais ne se matérialise. Arrêtez donc de tergiverser, laissez-nous avancer et répondre à l'urgence, comme le souhaitent tous les Français.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Sur le fondement de l'article 70, alinéa 3 du règlement, monsieur le président, pour mise en cause personnelle.
Protestations sur de nombreux bancs.
Il n'y a pas de mise en cause personnelle. Je mets aux voix les amendements.
Ceux d'entre vous qui ont évoqué les baisses de dotations de 13 milliards d'euros sous le gouvernement de François Hollande ont-ils demandé au ministre Olivier Dussopt, rapporteur de ces questions budgétaires à l'époque, s'il regrettait ces coupes ? Du reste, je n'imagine pas que ces mêmes personnes exigeront des collectivités territoriales un effort supplémentaire lorsque nous examinerons le projet de loi de finances pour 2024.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Avant d'en venir à l'amendement, je veux remercier le ministre d'avoir rappelé le fait à l'origine de ces émeutes : la mort d'un enfant. C'est un drame qu'aucun parent ne devrait avoir à connaître.
Vous l'avez dit, ce texte n'est pas une réponse aux causes, mais aux conséquences. J'espère que nous pourrons avoir un débat sérieux et serein sur les causes de ce drame.
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, je voudrais, par cet amendement, appeler votre attention sur un élément qui aurait dû figurer dans le texte : les délais imposés par les expertises et les contre-expertises. Pour bien me faire comprendre, je citerai l'exemple de l'école maternelle de ma commune, qui a brûlé en septembre 2018. Il a fallu attendre le mois de juin 2023 – plus de quatre ans ! – pour voir le protocole transactionnel signé.
Si vous n'obligez pas les experts, les contre-experts et les assureurs à délibérer et à transiger dans un délai raisonnable, les maires ne pourront pas reconstruire les bâtiments publics.
Je souhaite moi aussi un vote conforme, parce qu'il y a urgence. Pourriez-vous nous assurer que ces éléments seront bien pris en compte ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe GDR.
M. le ministre apportera sans doute des précisions, mais il me semble que prendre en compte ces contentieux pourrait allonger le délai, que nous souhaitons raisonnable. Je vous invite à retirer cet amendement.
Merci, madame la députée, d'avoir rappelé que le vote conforme était une nécessité pour répondre à la situation ; les sénateurs, de la gauche à la droite, ont d'ailleurs montré qu'ils adhéraient à ce principe en adoptant ce projet de loi à l'unanimité.
Je prends votre amendement d'appel pour ce qu'il est : il faut, selon vous, que les négociations avec les assureurs, pilotées par Bercy, aboutissent à des réponses. Cependant, les précisions que vous souhaitez ajouter portent sur des éléments orthogonaux au champ couvert par la puissance publique en tant que telle. De telles modifications ne nous permettraient donc pas de publier les ordonnances en temps voulu, compte tenu des délais qu'imposent les négociations sur certaines questions.
Je prends la liberté de dire que ce projet de loi renvoie aussi à des questions plus larges : d'une part, l'assurance des collectivités locales, car une partie d'entre elles ne sont pas assurées ; d'autre part, l'évolution des franchises – le Gouvernement a mis en place un numéro vert dédié aux propriétaires de véhicules incendiés, notamment pour prendre en compte la question du reste à charge.
Sachez que nous travaillons avec les assureurs à Bercy et qu'un bon nombre d'entre eux ont déjà pris position. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.
À notre collègue qui a attaqué Olivier Dussopt, je voudrais dire qu'il ne faut pas prendre les vessies pour des lanternes.
La vérité, c'est que le parti socialiste, lorsqu'il était au pouvoir entre 2012 et 2017, a diminué de 25 % les dotations aux collectivités territoriales – et les écologistes faisaient partie de la majorité à cette époque.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Ce n'est pas untel ou untel qui est responsable, mais le parti socialiste qui a fait de cette baisse une politique de fond à l'égard des collectivités territoriales. C'est elle qui a conduit à la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, la loi Notre, et au nouveau découpage des régions avec les résultats qu'on connaît.
Exclamations sur les bancs du groupe SOC.
Franchement, nous donner des leçons et attaquer le ministre est absolument irresponsable.
Nous aborderons à l'article 3 les dispositions concernant le FCTVA. Rappelons que la réforme de ce fonds conduite par notre majorité a permis d'effectuer les versements aux collectivités territoriales plus rapidement, grâce à une automatisation de sa gestion, et d'élargir les investissements éligibles. Nous, nous avons fait de gros efforts en faveur des collectivités territoriales.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Je vais le dire sur un ton beaucoup plus sobre, je n'ai attaqué personne, je me suis contentée de rappeler les faits. M. Dussopt est responsable de cette politique, il a convaincu une partie des membres du groupe Socialistes de voter la loi Notre, dont M. Véran. C'est la vérité, un point c'est tout.
M. le ministre a indiqué que les négociations avec les assureurs se déroulaient à Bercy, ce qui implique que Bercy a des arguments pour imposer des délais courts aux experts, aux contre-experts et aux assureurs. Je rappellerai que la commune dont j'ai cité le cas a dû attendre plus de quatre ans avant que soit trouvé un accord sur qui paie quoi, alors même qu'elle était assurée.
Cela dit, je retire mon amendement.
L'amendement n° 39 est retiré.
Il s'agit d'un amendement de clarification. Ce ne sont pas des troubles qui ont dévasté, dégradé et agressé. Ce ne sont pas des troubles qui ont incendié le centre social du quartier des Champs-Plaisants de ma ville de Sens, entraînant des dégâts chiffrés à 4,3 millions d'euros. Ce ne sont pas des troubles qui ont attaqué le commissariat de Sens. Ce ne sont pas des troubles qui ont incendié un car scolaire à Joigny. Il faut savoir nommer leurs auteurs.
Les troubles dont il est question ici sont plutôt des troubles oculaires qui vous empêchent de voir la réalité en face. Vous êtes dans la négation du réel.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Vous ne voulez surtout pas que l'on stigmatise les auteurs de ces dégradations et de ces dévastations. Les Français, eux, connaissent ces émeutiers depuis des années, car ce sont les mêmes qui pourrissent la vie des quartiers, qui dealent dans les tours, qui agressent les jeunes filles, qui font des rodéos sauvages. Tous ceux-là sont nommés quotidiennement. Un ancien ministre de l'intérieur parlait de « sauvageons », un autre de « racailles »,…
…vous, vous parlez de « troubles à l'ordre public ». Il faudrait désigner leurs auteurs et les traiter pour ce qu'ils sont, des délinquants, chose que fera Marine Le Pen lorsqu'elle sera au pouvoir.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Nous sommes dans un débat sémantique. Revenons au texte : mention y est faite de « troubles à l'ordre et à la sécurité publics » et non pas simplement de « troubles », monsieur Odoul. La rédaction du texte est suffisante.
Vous pouvez toujours faire des effets de manche, monsieur Odoul, nous n'avons pas de leçons à recevoir. Nous sommes aussi conscients que vous des questions de sécurité dans ces quartiers.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Je veux croire que M. Odoul n'était pas encore présent dans l'hémicycle lorsque j'ai pris la parole pour présenter ce projet de loi. J'ai employé les termes d'« émeutes » et de « violences urbaines ».
Je veux croire aussi que M. Odoul sait qu'il importe non seulement de nommer leurs auteurs, mais aussi de les traduire en justice. C'est l'occasion pour moi de saluer le travail de nos forces de l'ordre : elles ont procédé à 4 000 interpellations qui ont déjà donné lieu à 1 000 premières condamnations.
Nous ne fermons pas les yeux, bien au contraire. Je vous ai dit que nous aurons un débat sur les causes.
Notez bien que j'utilise un pluriel, car les choses sont parfois un peu plus complexes que la manière dont vous les présentez. Je le dis par anticipation à l'adresse de tous ceux qui proposeront des changements de titre ou de termes en ce sens : ce n'est pas l'objet du texte.
Il vise à apporter des réponses concrètes aux milliers de personnes ayant subi des dégradations appelant des réparations et ce n'est pas avec des modifications sémantiques que nous parviendrons à traiter ces conséquences.
Respectant la règle d'un orateur pour, un orateur contre, je donne la parole à M. Robin Reda.
Nous sommes réunis dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale pour habiliter le Gouvernement à prendre des ordonnances afin d'accélérer la reconstruction des bâtiments dégradés au cours des violences urbaines. Nous ne sommes pas dans une réunion du bureau politique du Rassemblement national en train de corriger un tract de Marine Le Pen.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Nous ne sommes pas obligés d'utiliser, à chaque ligne de ce texte, le lexique de l'extrême droite.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Il y a ceux qui jouent avec le feu, il y a ceux qui jouent avec les mots, mais il y a aussi ceux qui agissent. Comme l'a très bien dit M. le ministre, nous avons besoin d'un texte rapidement pour reconstruire.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
L'amendement n° 102 n'est pas adopté.
Cet amendement vous propose de désigner les événements du 27 juin et des jours suivants pour ce qu'ils sont vraiment, c'est-à-dire des émeutes. Le texte actuel évoque sobrement des « troubles à l'ordre et à la sécurité publics » comme s'il s'agissait d'un simple tapage nocturne. Le texte initial, macroniste, faisait même mention d'« événements » sur la voie publique, en déconnexion avec la réalité de ce qu'ont vécu les Français.
Nous vous proposons d'inscrire dans le projet de loi le terme d'« émeutes », qui désigne des soulèvements de personnes donnant lieu à des explosions de violence. Ce à quoi nous avons assisté, ce ne sont pas des « troubles », mais des attaques en règle de mairies, de commissariats, d'écoles, bâtiments qui symbolisent la France et, à travers eux, c'est elle qui a été attaquée.
Ces événements ont été organisés. Les comparutions immédiates qui ont eu lieu dans mon département ont bien montré que les jeunes se coordonnaient sur les réseaux sociaux, préméditaient leurs actions en ciblant ces bâtiments.
Ce projet de loi nous demande de « reconstruire », comme si une catastrophe naturelle s'était abattue sur notre pays – c'est même la comparaison que vous avez faite en commission, monsieur le ministre.
Je n'ai pas dit ça !
Comme s'il n'y avait pas de responsables à qui faire payer les conséquences et à dissuader de recommencer.
Concrètement, par les mots que vous utilisez, vous niez les faits. Vous ne voulez pas faire payer aux casseurs ce que nous paierons aujourd'hui par des charges financières et ce que nous paierons demain par des réitérations. Vous faites comme s'il s'agissait d'événements exceptionnels, isolés dans le temps, qui avaient peu de chances de se reproduire.
Nous vous proposons de clarifier les choses. Il s'agit bel et bien d'émeutes organisées par des délinquants identifiés. Les mesures d'urgence doivent servir, au-delà d'une reconstruction indispensable, à faire payer les casseurs ; sinon, nous risquons de devoir revenir dans quelques mois dans cet hémicycle pour financer, à nouveau sur le dos du contribuable, les réparations de dégâts provoqués par une minorité de voyous. Il faut, pour commencer, qualifier les faits pour ce qu'ils sont en employant le mot « émeutes ».
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. Grégoire de Fournas, pour soutenir l'amendement n° 20 .
Le dictionnaire définit « trouble » comme l'« altération de rapports entre les personnes ». Nous ne sommes pas confrontés à une altération de rapports entre les personnes, mais à des violences, à des émeutes. Vous parlez de débat sémantique, monsieur le rapporteur, mais la sémantique a son importance.
Attention à la sémantique, monsieur de Fournas ! La dernière fois, ça vous a coûté cher !
« Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde ». Vous faites preuve de complaisance dans la formulation choisie dans votre tract, monsieur Reda, ou du moins dans celui du Gouvernement. Nous proposons par cet amendement de repli de reprendre les termes qui figurent dans le titre du texte du projet de loi, celui de « violences urbaines ».
Protestations sur les bancs du groupe RN.
Madame Oziol, c'est moi qui préside cette séance. Vous n'avez pas à inviter vos collègues à s'asseoir.
Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?
Je n'ai pas forcément la même lecture que vous. Nous voyons bien que vous utilisez ces amendements pour évoquer des sujets qui, s'ils ont leur importance, ne correspondent pas à l'objet du projet de loi. Je ne m'étendrai pas plus : avis défavorable.
Ces deux amendements reprennent celui de M. Odoul, auquel j'ai déjà répondu. Avis défavorable.
Ces amendements visent à supprimer les termes « troubles à l'ordre public » de ce texte. C'est assez piquant de la part d'un collègue qui a justement été sanctionné pour « manifestation troublant l'ordre » après avoir dit à notre collègue Carlos Martens Bilongo « qu'il retourne en Afrique ».
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
La raison pour laquelle vous gesticulez autant autour de la définition des événements qui ont suivi le meurtre de Nahel, c'est que vous ne voulez pas que l'on parle du meurtre de Nahel. C'est précisément pour effacer le fait générateur que l'extrême droite en fait des tonnes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Protestations sur les bancs du groupe RN
dans la culture raciste qui prévaut dans certains syndicats de personnels relevant du ministère de l'intérieur ,
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
Mme Marine Le Pen s'exclame.
De la même façon qu'un policier qui vole est un ripou, un policier raciste est un ripou. Aucun d'entre nous ne peut tolérer que la police républicaine ait en son sein des ripoux.
La réalité, c'est que nous aurions dû, tous ensemble, traiter du 4
Nous finirons bien par le faire, sinon tous ces événements que vous déplorez recommenceront.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Monsieur le rapporteur, pardon, mais je n'ai pas compris votre réponse. Vous êtes en train de nous dire que nous n'avons pas assisté à des émeutes.
Vous avez bien dit que vous ne faisiez pas la même analyse que nous ! Je suis désolée de vous le dire, mais il y a eu des émeutes.
Tout le monde – même La France insoumise, c'est vous dire – admet qu'il y en a eu, mais le fait d'inscrire ce mot dans le texte vous pose problème. En fait, c'est la réalité elle-même qui vous pose problème. Je ne comprends pas pourquoi vous ne nommez pas les choses et pourquoi vous essayez en permanence d'invisibiliser ce qui s'est passé.
Quant à Mme Garrido, elle a fait une intervention qui n'a strictement rien à voir avec les amendements en discussion.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Elle s'en est servi comme prétexte, car La France insoumise saisit n'importe quelle occasion pour venir vomir sa haine de la police.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Vous utilisez n'importe quel prétexte pour venir justifier les émeutes.
Vous dites que nous n'avons pas parlé de la mort de ce jeune garçon. Bien sûr qu'on en parle !
Mais justifier les émeutes par ce décès est inadmissible ! Quelle que soit la raison, on ne brûle pas les commissariats, on n'attaque pas les forces de l'ordre, on ne brûle pas les véhicules des personnes qui travaillent, on ne s'attaque pas aux écoles, on ne brûle pas un bus de dépistage du cancer du sein.
Quand vous aurez intégré ces éléments, alors vous aurez retrouvé votre place dans la République !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 147
Nombre de suffrages exprimés 143
Majorité absolue 72
Pour l'adoption 38
Contre 105
L'amendement n° 81 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 146
Nombre de suffrages exprimés 142
Majorité absolue 72
Pour l'adoption 37
Contre 105
L'amendement n° 20 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Aurélie Trouvé, pour soutenir l'amendement n° 110 .
Il tend à garantir à nos concitoyens résidant dans les quartiers populaires que les services et équipements de base seront reconstruits en maintenant la capacité et la qualité d'accueil du public, et en apportant toutes les améliorations possibles.
Dans ma circonscription de la Seine-Saint-Denis,…
…les habitants, ainsi que des élus, craignent à juste titre que des services publics ou des commerces de proximité ne soient pas réhabilités, qu'ils ferment leurs agences et restreignent leurs services.
Par conséquent, vous engagez-vous, monsieur le ministre, à ce que, dans six mois, tout commerce essentiel et tout service public de base soient réhabilités ? Vous engagez-vous, par exemple, à ce que l'agence de La Poste de Noisy-le-Sec, à proximité du quartier du Londeau, soit rouverte d'ici à six mois ?
Vous engagez-vous à ce que, à Bondy Nord, le seul distributeur de billets disponible pour près de 30 000 habitants soit réinstallé ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous engagez-vous à ce que la supérette Lidl, qui est la seule dans ce quartier enclavé par vos politiques, soit rouverte ?
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Vous engagez-vous en ce sens, monsieur le ministre ? Nos concitoyens ont droit à cette réponse.
Votre amendement me semble satisfait : l'article 1er prévoit d'autoriser « la reconstruction ou la réfection, à l'identique ou avec des modifications limitées ou des améliorations justifiées », des bâtiments concernés.
Cela correspond à ce que vous souhaitez. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Vous évoquez deux catégories différentes de bâtiments : les services publics, pour lesquels l'engagement dépendra de la possibilité pour les élus locaux de se saisir d'un texte que vous aurez, j'espère, la décence de voter ; et ceux qui relèvent du secteur privé. Je ne prendrai certainement pas d'engagement pour Lidl ou Aldi, pour un commerçant, un pharmacien ou un bar-tabac.
En revanche, vous engagez-vous, madame Trouvé, dans l'éventualité de nouvelles émeutes, à appeler au calme, pour éviter que le bilan ne soit si lourd ?
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous engagez-vous à faire en sorte que les débordements cessent au bout d'une à deux nuits, pour éviter de vous faire ensuite la porte-parole de gens privés de services publics et de commerces parce que les troubles ont perduré, que les émeutiers ne se sont pas calmés et que les violences urbaines ne se sont pas arrêtées ? Si vous voulez rester dans l'outrance, allez jusqu'au bout !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous ne pouvez pas crier au scandale et déplorer que des gens aient tout perdu alors que, pendant les troubles, vous vous êtes contentés de dire qu'ils avaient raison de se révolter !
À un moment donné, il faut choisir. Assumez !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Ne venez pas jouer aux pompiers après avoir été les pyromanes ou leurs complices.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.
Ce n'est pas en jouant sur la division des populations ni en occultant les raisons de la colère que vous apaiserez.
Un maire NUPES de ma circonscription m'expliquait que le pyromane, c'est le Gouvernement…
…et tous les gouvernements précédents qui ont refusé, pendant des années, de donner les moyens nécessaires pour que les quartiers populaires disposent d'une véritable école publique garante de l'égalité des chances
Vives exclamations sur les bancs du groupe RN
et pour que les associations de quartiers jouent pleinement leur rôle !
Exclamations sur les bancs des groupes RE, RN, LR, Dem et HOR.
Chers collègues ! Un instant, madame la députée. J'appelle tous les groupes à se calmer immédiatement. Madame Trouvé, voulez-vous poursuivre ?
Je vous ai simplement interrompue pour appeler au calme et vous laisser reprendre dans le silence.
Je remarque, monsieur le président de séance, que vous appelez au calme les députés qui vous arrangent.
Protestations sur plusieurs bancs.
J'ai appelé l'assemblée au calme. Je vous remercie d'avoir repris la parole pour cette intervention et je considère que nous nous sommes tout dit.
La parole est à M. Julien Rancoule.
Il y a dix jours, je manifestais avec des élus locaux pour maintenir un service postal dans une commune de 1 500 habitants. En milieu rural, on ne brûle pas des voitures et on ne pille pas des commerces ; en revanche, on y crève dans un silence assourdissant !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Et nous ne bénéficions pas d'un projet de loi d'urgence visant à maintenir nos services publics. La France insoumise reste bien silencieuse à ce sujet !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 110 n'est pas adopté.
Sur l'amendement n° 8 , je suis saisi par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de trois amendements, n° 53 , 40 et 116 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. René Pilato, pour soutenir l'amendement n° 53 .
Permettez-moi d'abord d'apporter une petite précision : la moyenne d'âge de ceux qui se sont révoltés est de 17 ans. Ils ne regardent pas la télévision et ne sont pas sur les mêmes réseaux …
Protestations sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR
Ah bon ? Ils ne regardent pas la télévision ? Ils ne sont pas sur les réseaux sociaux ?
Laissez-moi finir. L'appel au calme auquel vous nous avez exhortés n'aurait donc eu aucun effet. Je ferme la parenthèse.
Vous avez raison, monsieur le ministre, la sémantique ne fait pas avancer les choses. En tant que ministre notamment de la transition écologique, vous devriez être sensible à cet amendement par lequel nous proposons de prévoir que lorsque des travaux relativement lourds devront être engagés, ils donnent lieu, au-delà d'une simple reconstruction à l'identique et de modifications limitées, à une amélioration de la performance environnementale, de la sécurité et des normes d'hygiène et d'accessibilité. Cette précision, non pas sémantique mais très concrète, permettra de réhabiliter les logements, en intégrant les enjeux de la transition écologique.
Enfin, la sémantique, c'est bien, mais les actes, c'est mieux. Sachez, collègues du Rassemblement national, que tant en milieu urbain qu'en milieu rural, vos votes sont désormais observés. La plupart des gens que je rencontre sur le terrain, en Charente, me disent : « Nous savons ce qu'ils votent : ils votent en faveur du capital mais jamais pour le partage des richesses. »
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – Rires et exclamations sur les bancs du groupe RN.
Comme je l'ai évoqué lors de la discussion générale, nous appelons le ministre à prendre des engagements sur la nécessaire amélioration des performances énergétiques et sur l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite, afin d'être mieux-disant en matière de reconstruction. Depuis la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine de 2003, dite loi Borloo, les programmes de rénovation urbaine successifs ont eu pour objet de réhabiliter les constructions bâties dans les années 1960 et 1970, c'est-à-dire des bâtiments low cost, érigés parfois dans la précipitation, souvent en préfabriqué, et considérés désormais comme des passoires thermiques. Ce n'est pas parce qu'il faut reconstruire vite qu'il ne faut pas bien le faire. C'est pourquoi nous devons nous engager à être mieux-disant dans la reconstruction des bâtiments publics ou privés. .
M. Aurélien Saintoul applaudit
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 116 .
La reconstruction des bâtiments affectés par les dégradations ne doit pas être dépourvue de toute ambition. Si elle est nécessaire et doit être effectuée rapidement, elle doit être menée en respectant les seuils les plus élevés de performance énergétique et environnementale. Reconstruire à l'identique serait une erreur, dans la mesure où l'emballement climatique nous oblige. Nous avons donc une responsabilité collective : celle d'un urbanisme durable et respectueux de l'environnement.
Même si ces précisions sont intéressantes, il est préférable d'en rester à la rédaction actuelle du projet de loi, qui prévoit déjà des « améliorations justifiées ». Un élu local qui engagera la reconstruction d'un bâtiment prendra évidemment en compte les exigences d'accessibilité et les données environnementales. Vos amendements risquant de fragiliser le texte, j'émets un avis défavorable.
Je rejoins pleinement les ambitions défendues dans vos amendements, mais je suis opposé à introduire trop de précisions dans l'article, dont la rédaction devrait alors être exhaustive. Or l'amendement présenté par M. Pilato n'est pas identique à ceux défendus par MM. Echaniz et Peytavie. Par exemple, la condition de la sécurisation du bâtiment, qui ne fait pas partie des exigences environnementales ou d'accessibilité, pourrait empêcher une reconstruction prévoyant des modifications légères ou des améliorations justifiées par ailleurs.
La philosophie du Gouvernement est, bien entendu, de respecter une certaine cohérence pour les quelques bâtiments concernés : leur reconstruction sera engagée en tenant compte des normes les plus élevées en matière environnementale et d'accessibilité – il n'y a même pas de débat sur ce point. Nous voulons toutefois garder de la souplesse dans la rédaction de l'article, compte tenu du fait que le texte s'appliquera à très peu de bâtiments et que les précisions proposées ne couvrent pas forcément tous les besoins que nous pourrions avoir. C'est pourquoi je vous invite à retirer vos amendements, dont l'esprit est déjà satisfait. À défaut, j'émets un avis défavorable.
Si nous insistons sur la prise en compte des normes énergétiques, environnementales, d'accessibilité et de sécurité, c'est que lors de l'examen du PLF pour 2023, nous avions fait voter un amendement visant à financer, à hauteur de 12 milliards d'euros supplémentaires, la rénovation thermique des bâtiments. Cet amendement, adopté par l'Assemblée nationale, a ensuite été écarté en raison de l'adoption du texte par la voie du 49.3.
Par conséquent, permettez-nous de demander quelques gages, notamment sur cette question qui nous tient particulièrement à cœur. Ce texte serait l'occasion d'écrire noir sur blanc notre volonté de progresser en la matière. Vous engagez-vous à reconstruire rapidement ce qui a été détruit et à le faire en respectant des normes environnementales et énergétiques qui amélioreront le bâti ? Notre demande n'est pas complètement loufoque, sachant que les quartiers populaires se caractérisent souvent par des bâtis anciens, qui sont de vraies passoires thermiques : lorsque l'été arrive, il y fait tellement chaud que tout le monde est dehors. Pourquoi ne pas envisager d'inscrire ces améliorations dans le PLF pour 2024, puisque l'Assemblée avait opéré ce choix lors de l'examen du PLF pour 2023 ?
Mme Raquel Garrido applaudit.
Permettez-moi de revenir sur le coût des nouvelles normes que vous souhaitez imposer à la reconstruction. Vous n'êtes pas sans savoir que les coûts de construction ont augmenté de 37 % depuis 2019, en raison de l'inflation qui pèse sur les matières premières. Au-delà de vos bonnes intentions, le coût financier des mesures que vous proposez est considérable et grèvera les centaines de millions d'euros qui devront être déboursés. À cela s'ajoutent des contraintes techniques et architecturales : imposer des normes thermiques aux bâtiments situés en centre-ville est parfois impossible, en raison des contraintes fixées par les ABF.
J'aimerais donc rappeler la NUPES à la raison. Notre groupe votera contre ces trois amendements.
Les notions de « modifications limitées » et d'« améliorations justifiées » sont bien trop floues. Elles permettront de modifier des bâtiments au bon vouloir du maître d'ouvrage, sous n'importe quel prétexte, à l'exception des cas d'illégalité manifeste. Ce dispositif est beaucoup trop large et risque d'entraîner d'importantes dérives ; c'est pourquoi il est nécessaire d'encadrer plus strictement la reconstruction, en empêchant notamment d'affecter un bâtiment à un autre usage que celui qui était le sien avant la dégradation.
Le texte précise que les modifications seront « limitées », ce qui implique que l'usage des bâtiments restera le même. Avis défavorable.
Le principe de la mesure consiste à faire confiance aux propriétaires.
Avis défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 142
Nombre de suffrages exprimés 137
Majorité absolue 69
Pour l'adoption 35
Contre 102
L'amendement n° 8 n'est pas adopté.
Il vise à préciser la rédaction de l'alinéa 2 dans le but de garantir qu'aucune modification du bâtiment ne conduira à diminuer la capacité d'accueil des services publics. En d'autres termes, il procède des mêmes préoccupations que l'amendement n° 110 , mais concerne spécifiquement la capacité d'accueil des bâtiments. Je pense par exemple à la crèche Maryse-Bastié à Romainville, fortement endommagée, dont les enfants ont dû être réorientés vers d'autres services en attendant l'été. Nous proposons d'assurer la continuité des services publics en maintenant au moins une capacité d'accueil identique.
Cela m'amène à vous reposer ma question, monsieur le ministre, car il me semble que vous n'y avez pas répondu : vous engagez-vous à ce que tout service public de base et tout commerce de proximité – éléments essentiels dans les quartiers populaires, à l'image de la crèche Maryse-Bastié – soient réhabilités en maintenant, au minimum, la même capacité d'accueil ? Vous engagez-vous à ce que l'État finance intégralement la reconstruction de tels services publics de base, en couvrant notamment les dépenses des collectivités locales ?
Mme Raquel Garrido applaudit.
L'adoption de votre amendement aurait pour conséquence concrète de faire obstacle aux objectifs que vous défendiez il y a cinq minutes.
Par exemple, des travaux d'isolation thermique nécessitant d'épaissir les murs d'un bâtiment pourraient diminuer sa surface, donc sa capacité d'accueil. Nous ne le souhaitons pas, mais il est impossible de prévoir chaque cas particulier.
L'esprit du texte consiste bien à rouvrir au plus vite les bâtiments endommagés, ce qui suppose de la souplesse ; en déposant des amendements trop précis, vous courez le risque d'entraver ce projet. Avis défavorable.
Mme Marina Ferrari et M. Bruno Millienne applaudissent.
Nos collègues de La France insoumise marchent-ils sur la tête ? Mme Trouvé insiste sur le fait que la reconstruction ne doit pas limiter la capacité d'accueil des services publics dans les communes touchées par la destruction de bâtiments publics, de crèches, de services d'accueil ou encore d'une médiathèque, comme à Rillieux-la-Pape, dont j'ai longtemps été maire. Chers collègues, vous n'avez pas le monopole des quartiers populaires : certaines des communes endommagées, comme Vaulx-en-Velin, Rillieux-la-Pape ou Bron, ont élu des maires de droite. Pensez-vous sincèrement que nous voulons réduire la capacité d'accueil des services publics ? C'est tout l'inverse ! Ce sont les incendies et les dégradations qui ont réduit la capacité d'accueil des crèches. Pensez-vous que c'est de gaieté de cœur que nous limitons temporairement l'accueil dans les bâtiments publics de nos communes ? Nous souhaitons continuer à investir dans ces quartiers et à les faire évoluer.
Une chose est sûre : les quartiers que vous gérez ne se transforment pas, car votre gestion équivaut à une assignation à résidence. Au contraire, les élus qui, comme nous, font partie de l'arc républicain investissent dans les quartiers qu'ils gèrent afin de changer le destin de leurs habitants !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR, RE, Dem et HOR.
Arrêtez de dire n'importe quoi ! Vous ne faites que reprendre des éléments de langage !
Je veux bien vous donner acte de votre volonté de reconstruire les bâtiments publics en ménageant des conditions d'accueil optimales et, si possible, en améliorant leur accessibilité et leur isolation thermique, afin qu'ils ne soient ni des passoires thermiques, ni des bouilloires thermiques – car les évolutions climatiques récentes soulèvent surtout la question de la chaleur.
Toutefois, j'illustrerai mon inquiétude par l'exemple concret de l'antenne de police de Bagnolet, incendiée le 27 juin, qui fait partie des premiers bâtiments touchés. Je pense qu'elle ne sera pas reconstruite, ni en urgence, ni même tout court, et qu'aucun ministre – ni M. Béchu, ni M. Darmanin – n'acceptera de s'engager à ce qu'elle rouvre. En effet, cette antenne de police n'était ouverte qu'entre dix heures et dix-huit heures et ne pouvait pas enregistrer les plaintes, car elle ne disposait d'aucun officier de police judiciaire (OPJ). Les élus se sont battus pendant des années pour améliorer le service et obtenir davantage de policiers.
Nous faisons face à un contexte général de dégradation de tous les services publics : ce n'est pas pour rien que Mme Trouvé insiste pour que la reconstruction ait bien lieu et pour qu'elle garantisse des conditions d'accueil au moins équivalentes.
Quant à l'argument selon lequel les travaux d'isolation thermique pourraient réduire la surface, il est à côté de la plaque.
Il n'est pas ici question de quelques mètres carrés perdus après l'épaississement d'un mur, mais bien de la nécessité d'assurer la continuité du lieu, du cadre, des personnels ou encore des meubles.
L'amendement n° 90 n'est pas adopté.
La disposition visant à permettre le démarrage de la construction des travaux avant l'octroi du permis est d'une grande imprudence, car les procédures administratives, même si leur lourdeur et leur complexité peuvent freiner la réalisation d'un projet, n'en restent pas moins le gage d'une certaine sécurité juridique et pratique.
Le risque juridique et financier est trop grave pour les collectivités ou les particuliers qui auraient la possibilité d'engager des travaux avant l'octroi du permis de construire. En cas de rejet ultérieur de la demande de permis de construire pour quelque motif que ce soit, l'existence de bâtiments dont la construction sera entachée d'illégalité a posteriori posera des difficultés majeures. Nous proposons donc de supprimer ce dispositif afin d'éviter la multiplication de litiges d'un nouveau genre liés à la reconstruction anticipée de bâtiments pour lesquels le permis de construire sera finalement refusé.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Supprimer l'alinéa 3 enlèverait à l'article 1er l'essentiel de sa portée, puisque son caractère novateur réside précisément dans la possibilité de commencer les travaux rapidement. Il s'agit certes de travaux préparatoires – de démolition ou de terrassement, par exemple, plutôt que de construction à proprement parler –, mais leur lancement anticipé permettra de gagner beaucoup de temps. Je suis donc très défavorable à l'amendement.
Nous n'obligeons pas les propriétaires à commencer les travaux avant l'octroi du permis de construire ; nous leur en offrons simplement la possibilité. Faites-leur confiance. Avis défavorable.
L'amendement n° 7 n'est pas adopté.
Il vise à compléter l'alinéa 3 en précisant que, si le porteur de projet peut être autorisé à démarrer les opérations et travaux préliminaires avant la délivrance des autorisations afférentes, il agit ainsi à ses propres frais et risques.
Nous en avons déjà débattu en commission. Étant donné que seul le demandeur peut assumer les frais liés aux travaux engagés, j'estime que l'amendement est parfaitement satisfait dans l'état actuel du texte. Demande de retrait ou avis défavorable.
Monsieur Echaniz, votre amendement a le mérite de rappeler explicitement le droit. Vous avez raison d'effectuer cette précision, mais l'amendement est satisfait. Demande de retrait.
L'amendement n° 41 est retiré.
Il vise à préciser la rédaction de l'alinéa 3, qui autorise l'engagement des opérations et travaux préliminaires dès le dépôt de la demande de permis de construire. En effet, si cette mesure répond effectivement à l'urgence du besoin de reconstruction, il est néanmoins nécessaire de définir un cadre adéquat pour les contrôles et les mises en conformité effectués après l'engagement des travaux. Par conséquent, nous proposons de préciser que tout refus d'autorisation advenant une fois les opérations engagées doit aboutir à la mise en conformité du projet, dont les modalités seraient définies par voie d'ordonnance.
Défavorable, car l'amendement est satisfait.
L'amendement n° 54 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Raquel Garrido, pour soutenir l'amendement n° 106 .
Il tend à supprimer l'alinéa 4, par lequel vous créez la possibilité de se passer des avis et des enquêtes de droit commun, qui ont pourtant une raison d'être. J'ai visité plusieurs services des unités départementales de l'architecture et du patrimoine (Udap) et me suis entretenue avec les ABF qui y travaillent. Nous avons également sollicité l'avis d'associations d'urbanistes et d'architectes et consulté des agents instructeurs des demandes d'autorisation de permis de construire. Ces différents acteurs estiment que le fait de prévoir que l'absence d'avis, passé un certain délai, équivaut à une acceptation automatique reviendrait à ouvrir la boîte de Pandore, et demandent un encadrement strict.
Comme me l'ont expliqué les ABF, c'est du jamais-vu : jamais, disent-ils, n'a-t-on inscrit dans une loi la possibilité de se passer de leur avis. La France accorde de la valeur à son patrimoine et aux règles qui le régissent, lesquelles diffèrent d'ailleurs selon qu'elles concernent un bâtiment classé ou un bâtiment situé aux abords d'un monument historique. L'intervention des ABF n'est en rien inutile.
Ce serait donc la moindre des choses que de définir strictement le délai au-delà duquel l'absence de réponse vaudra approbation tacite. Étant donné que le Gouvernement refuse de donner cette information au Parlement et compte procéder par ordonnance,…
…le législateur est privé de la possibilité de s'assurer que le respect des règles de droit commun sera garanti lorsque cela sera nécessaire. Dans ces conditions d'opacité, nous estimons préférable de supprimer cet alinéa.
L'objectif du texte consiste à réduire les délais de reconstruction en les faisant passer de plusieurs mois à six semaines. Je rappelle également que le silence vaut acceptation depuis longtemps dans plusieurs domaines du droit français. Nous souhaitons accélérer le processus de reconstruction – ce qui n'empêchera pas les autorités compétentes de donner leur avis,…
…évident dans certains cas et plus complexe dans d'autres –, dans un cadre précis et déterminé. Cette possibilité n'a pas vocation à être généralisée. Avis défavorable.
Si nous examinions un texte d'adaptation du droit de l'urbanisme, j'approuverais votre amendement sans réserve. Vous ne l'auriez d'ailleurs pas déposé dans ce cadre, car le Gouvernement n'aurait jamais proposé de se passer des avis et enquêtes. Cependant, il est question ici d'une situation particulière : celle de la reconstruction à l'identique des biens détruits par des émeutiers pendant une période de huit jours. Même dans ce contexte spécifique, nous ne proposons pas de supprimer les avis, mais simplement d'accélérer la procédure en considérant que le silence vaut approbation.
Si vous souhaitez que les reconstructions se fassent le plus rapidement possible, il faut maintenir l'alinéa 4. Si, au contraire, vous cherchez à vous y opposer par tous les moyens, libre à vous de continuer à déposer des amendements et à les défendre.
De l'aveu même du Gouvernement, ce texte est rendu nécessaire par la longueur des procédures de droit commun. Madame Garrido, venez donc à la campagne : vous verrez le temps que prennent de tels projets. Puisque nous faisons face à une situation d'urgence, la nécessité de raccourcir les délais de procédure va de soi, mais j'irai plus loin : il faut que ces dispositions perdurent et que les procédures s'en trouvent durablement simplifiées, afin de permettre aux projets de construction d'aboutir plus rapidement.
Certains parmi nous ont été maires avant d'être députés. Pour ma part, j'ai été pendant sept ans adjointe à l'urbanisme dans une commune. Je connais bien les procédures, notamment celle de consultation des ABF. Or ces derniers sont compétents dans leur domaine et sont à même de rendre un avis très rapidement. Je ne vois pas en quoi le leur demander retarderait les travaux.
C'est un point très important, car l'aménagement des procédures risque de créer un précédent. Je sais que de nombreux maires trouvent – sans le dire – que la procédure de consultation des ABF est très lourde. Dans certains cas, ils aimeraient bien s'en passer, pour aller plus vite. L'accélération des projets de construction s'impose en l'espèce, mais il ne faudrait pas que des maires en tirent prétexte pour réclamer l'accélération d'autres projets à l'avenir.
Je le répète, les ABF sont capables d'aller vite : ils peuvent donner leur avis en une semaine ou quinze jours, si on le leur demande. Ils sont très compétents dans leur domaine, et c'est très bien ainsi.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 106 n'est pas adopté.
Je suis saisi de demandes de scrutin public : sur l'amendement n° 55 par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, sur l'amendement n° 23 par le groupe Rassemblement national et sur l'article 1
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir l'amendement n° 42 .
Il vise à laisser aux personnes interrogées dans le cadre d'une procédure d'autorisation d'urbanisme ou relevant d'une autre législation un délai minimal d'un mois avant que leur silence ne vaille acceptation. Il s'agit de ne pas priver ces consultations d'effectivité.
Si certaines personnes publiques associées (PPA) disposent d'un délai important – le plus souvent trois mois – pour rendre leur avis et si elles jouent parfois, faute de moyens humains, sur la demande de pièces complémentaires pour bénéficier d'un délai plus long, une réduction excessive du délai risquerait de priver certaines de ces PPA, notamment les administrations déconcentrées de l'État, de la capacité effective à répondre aux sollicitations qui leur sont adressées, alors même que le projet pourrait justifier des évolutions ou des mises en conformité. À cet égard, un délai d'un mois constituerait une garantie minimale.
Si vous ne voulez pas retenir cet amendement, je vous appelle à prendre l'engagement de fixer un délai plancher dans l'ordonnance.
Je suis défavorable au principe d'un délai plancher applicable à toutes les procédures. Il n'est pas exclu que certains organismes ou autorités administratives aient besoin de davantage de temps – je pense notamment aux commissions de sécurité –, ni que, dans d'autres cas, les choses puissent aller plus vite. Ce qui me pose une difficulté, c'est l'instauration d'un délai « toise », si je puis dire. En revanche, nous apporterons bel et bien des précisions à ce sujet dans l'ordonnance. Avis défavorable.
L'amendement n° 42 n'est pas adopté.
Je trouve dommage que le Gouvernement ne saisisse pas l'occasion de la discussion de ces amendements pour nous donner, ne serait-ce que de manière orale, des indications sur les délais qu'il compte fixer dans l'ordonnance.
Les trois ordonnances seront prises assez rapidement – du moins l'espérons-nous, car sinon, toute cette discussion est un peu un cirque.
Le cirque ? Soit…
Vous devez donc bien avoir une idée. Vous pourriez nous en dire plus sur ces délais, qui ne seront d'ailleurs pas nécessairement les mêmes pour toutes les procédures d'avis ou enquêtes. Il serait bon que nous soyons éclairés, même si nous ne sommes pas directement saisis du fond et appelés à voter aujourd'hui sur ce point.
L'amendement n° 55 vise à ce que l'on tienne compte d'un paramètre décisif : la soutenabilité, pour les personnels, de la réduction des délais. En réalité, la capacité d'un service à instruire une demande et à rendre un avis dépend du nombre de personnes qui y travaillent. Nous voulons à la fois que le traitement des dossiers soit rapide, efficace et conforme aux règles applicables, et que le rythme envisagé soit soutenable pour les personnels ; il importe de respecter tous ces paramètres.
Les services souffrent objectivement d'une pénurie d'agents ; ils le signalent déjà depuis un certain temps. C'est donc le moment d'envisager la situation avec lucidité et de prendre un certain nombre d'engagements, notamment d'affirmer que la réduction des délais doit être soutenable pour les services instructeurs. C'est à cette condition que tous les dossiers pourront être traités, sachant que certains dossiers pendants seront laissés en souffrance du fait de la priorité accordée à d'autres. Par cet amendement, nous souhaitons mettre en avant la notion de soutenabilité pour les personnels des services concernés.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 136
Nombre de suffrages exprimés 131
Majorité absolue 66
Pour l'adoption 15
Contre 116
L'amendement n° 55 n'est pas adopté.
La parole est à M. Grégoire de Fournas, pour soutenir l'amendement n° 23 .
Il est fondamental. Nous avons d'ailleurs déposé des amendements analogues sur les deux autres articles du projet de loi, celui qui se rapporte à l'article 3 revêtant une importance particulière.
Il s'agit d'appliquer le principe du casseur-payeur, ce qui serait la moindre des choses. Dès lors que vous prévoyez des dispositions destinées à faciliter la vie des collectivités, notamment le financement du reste à charge après l'indemnisation par les assurances, il nous semble absolument nécessaire d'exiger que ces collectivités se portent partie civile contre les auteurs des dommages qu'elles ont subis et réclament non pas 1 euro symbolique, mais un dédommagement intégral.
Vous allez sans doute nous répondre, monsieur le rapporteur, que nous ne faisons pas confiance aux maires. Nous faisons confiance à l'immense majorité d'entre eux, mais il en restera probablement quelques-uns qui feront preuve de négligence ou, il faut bien le dire, d'un certain clientélisme,…
MM. Laurent Jacobelli et Frédéric Boccaletti désignent les bancs de la gauche de l'hémicycle.
…afin de ne pas se créer de problèmes avec une certaine population locale. Après tout, pourquoi s'ennuyer, puisque l'État va payer ?
Selon nous, en contrepartie des dispositifs prévus par ce texte, il faut que l'État soit exigeant avec les mairies. Nous ne voulons pas cautionner votre résignation, monsieur le ministre. Si vous ne voulez pas chercher les causes des émeutes, faites au moins appel au portefeuille des auteurs de ces dégradations !
Nous pensons que les casseurs doivent être ponctionnés, qu'ils doivent payer pour les dégâts qu'ils ont causés. S'ils sont insolvables au moment de la condamnation, ils doivent être poursuivis toute leur vie, comme le sont les personnes responsables d'un accident de la route qui ont omis d'assurer leur véhicule – bien évidemment, nous ne les défendons pas – et sont dès lors tenues de réparer les dommages causés à des tiers. Nous voulons que les casseurs soient poursuivis toute leur vie pour financer la réparation des écoles, des mairies ou des commissariats qu'ils ont dégradés.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Vous avez annoncé ma réponse dans votre argumentaire, monsieur de Fournas. Sur le fond, nous pouvons entendre ce que vous dites. Simplement, vous imposez aux élus locaux une contrainte qui ne correspond pas à l'esprit de ceux qui gèrent des collectivités et que je ne peux pas cautionner. Au demeurant, il est probable qu'assez peu de collectivités s'abstiendront d'engager des actions. Avis défavorable.
Défavorable.
Le Rassemblement national justifie ainsi l'amendement qu'il vient de présenter : « Afin d'éviter que ces dégradations volontaires soient financées par les contribuables français, il est indispensable de réclamer des réparations auprès des auteurs […]. Les collectivités doivent pour cela se constituer partie civile et [réclamer] une indemnisation à la hauteur des préjudices. »
« Oui ! » et « Tout à fait ! » sur les bancs du groupe RN.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Il faudrait ainsi que les mairies soient d'accord avec vous pour pouvoir demander des réparations. C'est hallucinant ! Cela veut-il dire que, si les mairies ne sont pas d'accord avec le tract de Marine Le Pen, le bureau de poste ne sera pas réparé ? L'école ne pourra pas fonctionner ? Les commerces ne rouvriront pas, et tant pis pour les habitants ?
Par ailleurs, monsieur de Fournas, vous affirmez que les casseurs, comme vous les appelez ,
Vives exclamations sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe HOR
« Oui ! » et exclamations sur les bancs du groupe RN.
Laissez Mme Oziol achever son propos, s'il vous plaît ! Un orateur de votre groupe aura ensuite la parole.
Je vous remercie, monsieur le président. Nous pourrions exiger, de la même manière, que vous payiez à vie pour l'offense que vous avez faite non seulement à notre collègue Carlos Martens Bilongo ,…
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN
…mais aussi à des millions de Français et à des millions de personnes à travers le monde, puisque vous êtes ceux qui caractérisent les gens d'après la couleur de leur peau. Tout cela n'a aucun sens ! Nous espérons que cet amendement sera rejeté.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
J'ai vraiment un regret : celui de ne pas avoir déposé d'amendement prévoyant que, pour financer les réparations, l'on mette à contribution les indemnités des députés de La France insoumise !
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe RN.
C'est votre indemnité à vous qui a été mise à contribution, puisque c'est vous qui avez été blâmé !
Monsieur le rapporteur, votre réponse relevait du « en même temps » macroniste. Vous admettez le principe, mais vous refusez de l'inscrire dans la loi. Une telle conditionnalité ne serait pas une nouveauté – tous les dispositifs de l'État sont conditionnés au respect de certaines exigences par les collectivités. Vous actez ainsi votre résignation, qui sera jugée très sévèrement par les Français.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 148
Nombre de suffrages exprimés 146
Majorité absolue 74
Pour l'adoption 46
Contre 100
L'amendement n° 23 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Aurélie Trouvé, pour soutenir l'amendement n° 107 .
Il faut saisir l'occasion offerte par ces travaux pour introduire, aussi fréquemment que possible, les normes les plus exigeantes en matière d'accueil des publics en situation de handicap ou à mobilité réduite.
Ma collègue Sabrina Sebaihi l'a souligné hier en commission, c'est l'occasion d'engager un chantier crucial. Les bâtiments en question ne feront probablement pas l'objet d'autres travaux avant des années. Nous souhaitons que, dans nos quartiers populaires,…
…soient entrepris à cette occasion des travaux de rénovation thermique – c'était l'objet d'un amendement qui a été rejeté – et des travaux d'accessibilité pour les handicapés. Il ne faudrait pas que nous attendions encore pendant des années l'atteinte des objectifs fixés en la matière ; il s'agit de droits fondamentaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également.
L'amendement est satisfait. Avis défavorable.
À quoi avons-nous assisté au cours de l'examen des amendements à l'article 1er ? La France insoumise et le Rassemblement national ont fait preuve d'une profonde méconnaissance de la réalité vécue par les élus locaux, en particulier les maires.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
…alors qu'ils ont été mobilisés pendant la période des émeutes urbaines, qu'ils ont passé des nuits blanches successives, aux côtés de leur police municipale et de leurs services techniques, à essayer de protéger leur commune et à ramasser les bris de verre, ce n'est vraiment pas leur faire honneur !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
De même, penser que les maires, les commerçants et tous ceux ont la charge de bâtiments ouverts au public, notamment dans nos quartiers populaires, ne vont pas se préoccuper de leur accessibilité, c'est jeter l'opprobre sur ceux qui sont présents au quotidien dans les communes !
Chers collègues de La France insoumise, si vous mettiez autant d'énergie et de rigueur à défendre le code pénal que vous en mettez à défendre le code de l'urbanisme, vous seriez peut-être un peu plus républicains !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – M. Jean-Chalres Larsonneur applaudit également.
Dans ma circonscription, quelle est la première préoccupation des maires, notamment des villes qui comprennent plusieurs quartiers populaires ? C'est que l'État assure le financement de la reconstruction de tout ce qui a été endommagé.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
…nous vous posons de nouveau la question : acceptez-vous d'ouvrir la discussion d'un projet de loi de finances rectificative, afin que l'État y consacre les moyens nécessaires et que le reste à charge soit nul pour ces collectivités ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Quelle somme d'argent public l'État mettra-t-il sur la table ? Pour l'instant, il n'y a pas 1 euro !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également.
L'amendement n° 107 n'est pas adopté.
Une circulaire prise immédiatement après les révoltes urbaines permet, grosso modo, de construire des installations provisoires n'importe où, n'importe comment et sans contrainte. Il est clair que l'urgence est réelle ; toutefois, ces installations, bien que temporaires, ne sauraient déroger aux réglementations en matière d'accessibilité, de sécurité et d'accueil du public au motif de la précipitation. Surtout, il nous semble que le provisoire ne doit pas devenir permanent. L'amendement vise à apporter des garanties en ce sens.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également.
Ce texte ne vise pas les bâtiments provisoires, lesquels sont réglementés par le code de l'urbanisme et ne peuvent être maintenus en place que pour une durée transitoire d'un an. Avis défavorable.
Avis défavorable.
La rapidité, pour ne pas dire la précipitation, avec laquelle nous allons voter ce texte ne doit pas faire oublier complètement les exigences de sécurité et les normes en matière d'accueil du public. Nous sommes, il est vrai, dans une situation d'urgence, une situation exceptionnelle, mais on ne peut pas faire tout et n'importe quoi et sacrifier toutes les procédures normales à l'impératif de reconstruire vite. Nous soutiendrons donc cet amendement.
L'amendement n° 91 n'est pas adopté.
Il vise à compléter l'article 1er en excluant du champ des ordonnances toute dérogation aux dispositions relatives à la protection du patrimoine. Ce n'est pas parce que nous vivons dans des communes et des quartiers populaires qu'aucun élément de valeur sur le plan architectural, patrimonial ou historique n'y est situé. Il est vrai que, souvent, l'attention portée à la qualité des matériaux, à l'esthétique, à la mise en valeur des richesses culturelles ou historiques multiples qu'ils recèlent est malheureusement assez faible dans ces quartiers, en partie faute de moyens des collectivités territoriales. C'est bien dommage, car l'attention à la protection du patrimoine n'y est pas moins justifiée. Par cet amendement, nous demandons que ces préoccupations architecturales soient bien prises en compte, même dans des délais resserrés.
M. Benjamin Lucas applaudit.
L'amendement n° 97 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 174
Nombre de suffrages exprimés 158
Majorité absolue 80
Pour l'adoption 158
Contre 0
L'article 1er est adopté.
J'appelle l'attention de la représentation nationale sur cet article, et plus particulièrement sur son alinéa 3. Depuis ce matin, nous partageons tous le constat qu'il faut reconstruire vite. Toutefois, l'alinéa 3 traite d'un sujet qui, me semble-t-il, n'est pas négligeable, puisqu'il prévoit de déroger au principe d'allotissement et de recourir aux marchés globaux. Cela signifie que vous excluez, de fait, les TPE et les PME de la reconstruction. J'ai eu l'occasion de le dire en commission – d'autres collègues ont depuis déposé des amendements similaires, ce qui indique, je crois, que mon argument a été entendu – et je le répète avec force : je comprends bien l'absolue nécessité d'aller vite et j'aurais rêvé de pouvoir voter le texte en des termes identiques à ceux retenus par le Sénat, mais l'alinéa 3 me semble dommageable pour l'économie locale, déjà fragilisée.
Je vous proposerai donc d'avancer sur la question au moyen d'un amendement. Dans cette situation très particulière, ce serait une erreur que de confier systématiquement les travaux aux majors et aux grosses entreprises. Nous savons que, très régulièrement, ce sont les artisans locaux qui répondent aux marchés publics. Nous avons ici la possibilité de leur confier un certain nombre de travaux. Il serait dommage de les en empêcher par cette règle.
Les règles de publicité et de concurrence dans la commande publique n'existent pas pour rien. L'association Anticor – laquelle, en passant, attend toujours son nouvel agrément pour pouvoir se constituer partie civile dans les cas où des décideurs publics manqueraient d'éthique –,…
…explique que l'absence de règles suffisamment précises est criminogène.
Bien sûr, devant l'urgence, on comprend le principe d'une dérogation rendue nécessaire par des motifs impérieux. Mais fallait-il absolument procéder par ordonnance ? Faut-il prendre cette ordonnance tardivement ? Notre collègue Bazin proposait, dans un amendement qu'il avait déposé initialement, que l'ordonnance soit prise dans un délai d'un mois, plutôt que deux. Nous avons déposé un amendement identique. Il nous semble que l'article est assez simple et qu'il doit être appliqué rapidement si nous voulons qu'il soit efficace.
En outre, nous pensons que supprimer complètement l'exigence de publicité n'est pas une bonne chose. Notre proposition est raisonnable : une semaine de publicité suffirait pour que les artisans d'un territoire soient informés qu'un marché existe, plutôt que de permettre aux collectivités de solliciter différents devis de gré à gré.
En parlant des artisans, nous sommes tout à fait d'accord avec notre collègue Saint-Huile : déroger au principe d'allotissement peut sembler utile mais aboutira, en réalité, à cibler la commande publique vers les entreprises tous corps d'état, qui disposent de toutes les spécialités et des capacités de coordination nécessaires, au détriment des entrepreneurs qui n'ont qu'une seule spécialité. Est-ce ce que nous voulons ? Est-ce la finalité de cette règle dérogatoire ? Je crois que non.
M. le président coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est écoulé.
Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut des règles en matière de marchés publics. Nous reconnaissons également que, pour aller vite, il faut adapter notre droit. Vous proposez de le faire par ordonnance ; il est donc légitime que vous précisiez certains détails. Comptez-vous, par exemple, dispenser de publicité certains marchés nécessaires à la reconstruction des bâtiments dégradés à la suite des violences – et si oui, quel sera le seuil retenu ? Envisagez-vous des dispositifs d'affranchissement du principe d'allotissement ? Je crois que oui. Dans quelles conditions ? Le pourcentage retenu pour les lots s'appliquera-t-il au marché global ou aux valeurs estimées ? Il est important que vous nous précisiez les éléments que vous entendez inclure dans ces ordonnances.
Nous voterons pour cet article.
Je voulais, à cette étape de notre discussion, prendre la parole pour lancer un appel au calme.
« Ah ! » sur les bancs des groupes RE et RN.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN
et son ministre de l'éducation nationale, quel qu'il soit à l'issue de cette journée.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est ce que je fais, monsieur le président. Ce quartier, comme des centaines d'autres, cumule les inégalités et les injustices. Vous allez fermer six classes d'école à la rentrée de septembre. Assez de cette violence contre les enfants des quartiers populaires ,
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
Nous parlons ce matin de reconstruire ; encore faudrait-il que vous ne détruisiez pas.
Vous semblez n'avoir rien compris aux urgences des quartiers populaires et aux grands défis qui se posent pour l'avenir de la République.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Sandra Regol applaudit également.
Nous comprenons qu'il faille aller vite, au vu de l'urgence actuelle. Cependant, aller vite ne veut pas dire faire n'importe quoi.
Monsieur le rapporteur, vous allez probablement répéter que nous ne faisons pas confiance aux maires, argument infaillible et sacré qui ne laisse pas place à la discussion. Si, nous faisons confiance à l'immense majorité des maires, mais il y a des brebis galeuses. C'est d'ailleurs pour cela que les marchés publics sont encadrés ; sinon, suivant votre logique, il faudrait supprimer tout le droit commun des marchés publics. Nous serons donc constructifs sur cet article, comme nous le sommes sur tous les autres, en proposant de cadrer les exceptions aux règles des marchés publics que vous souhaitez permettre.
Nous défendrons également l'association des petites entreprises du bâtiment, qui galèrent dans la période actuelle, aux réparations consécutives aux émeutes.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Monsieur de Fournas, j'ai été maire pendant seize ans. Je sais de quoi je parle.
Je considère que, quand on est aux manettes, on essaie de bien faire les choses, on réfléchit. L'article 2 aborde des questions que les maires se posent souvent à propos des marchés publics. Il n'est pas question de remettre en cause le code des marchés publics ; le texte fixe un cadre exceptionnel, celui des reconstructions.
L'article contient deux dispositions. La première concerne la mise en concurrence – M. le ministre évoquera peut-être la question du seuil.
La seconde, qu'a évoquée M. Saint-Huile, porte sur les marchés globaux. Elle s'appliquera dans un contexte bien particulier et l'enveloppe des travaux de reconstruction concernés restera raisonnable. La possibilité de passer un marché global est une solution facilitatrice qui pourra aussi concerner les petites entreprises, et pas seulement les grands groupes. Je vous assure que, ceux qui ont eu la chance et l'honneur d'être maires pendant de nombreuses années, sont très soucieux du respect des procédures. La mise en concurrence sera faite avec précision et dans un souci d'équilibre.
Le texte facilite les opérations ; il ne faut pas lui donner plus de portée. Nous ne sommes pas en train de remettre en cause la réglementation des marchés publics, bien au contraire : le texte est ciblé pour s'appliquer à un contexte exceptionnel. Je ne dis pas cela pour balayer le débat d'un revers de main, mais, s'agissant d'un texte d'exception nécessaire et utile, nous avons tout intérêt à aller vers un vote conforme à celui du Sénat.
Je le répète, il n'y a pas de dessein caché. La seule question est de savoir comment reconstruire ce qui a été démoli ou attaqué entre le 27 juin et le 5 juillet. Il ne s'agit pas de modifier le code de la commande publique ni de remettre en cause les principes qui s'appliquent de manière générale, comme le principe de publicité ou le principe d'allotissement.
En revanche, les associations représentatives comme France urbaine et l'AMF, avec lesquelles nous avons discuté pour chercher les freins potentiels à cette reconstruction, ont identifié deux leviers permettant d'aller plus vite : premièrement, supprimer ou rendre optionnelle la phase de publicité, tout en maintenant l'obligation de mise en concurrence ; deuxièmement, donner aux collectivités territoriales une plus grande capacité à discuter avec des entreprises, sans passer nécessairement par l'allotissement.
Je vous dois deux précisions. La première répond à la question posée par Mme Louwagie. En effet, tel qu'il est rédigé, le texte pourrait potentiellement permettre au Gouvernement de fixer le seuil en deçà duquel un marché peut être conclu sans publicité à 5,3 millions d'euros – le seuil européen. Je vous renvoie à l'avis du Conseil d'État, qui considère que nous devons rester très significativement en dessous, et je vous annonce que nous prévoyons de ne pas dépasser 1,5 million d'euros. Cela fait suite à nos échanges au Sénat : nous étions entrés dans l'hémicycle en imaginant plutôt fixer le seuil à 1 million d'euros, mais les sénateurs, de manière unanime et quels que soient les bancs dont ils sont issus – cela vaut pour les écologistes, pour les socialistes, pour les centristes et pour la droite –, ont considéré qu'il fallait laisser plus de souplesse. Ils ont donc souhaité que nous allions un peu plus loin.
Un tel seuil – 1,5 million – exclut-il les PME ? Je vous demande de bien m'écouter sur ce point, parce que nous l'évoquerons de nouveau. La réponse est claire : bien sûr que non ! Les majors ne prendront pas en charge de manière exclusive des projets à 700 000 ou 800 000 euros. Le dispositif ne sera d'ailleurs nullement obligatoire : les maires pourront continuer, s'ils le souhaitent, à allotir. Nous discutons bien ici d'un seuil maximal, d'un plafond, bien inférieur au niveau susceptible de causer une évaporation de la concurrence du fait du nombre d'entreprises susceptibles de candidater. C'est donc bien le choix du seuil qui garantira le fait que les TPE et les PME ne seront pas écartées du marché.
Il vise à réduire les délais d'habilitation. Le Gouvernement a fait le choix, dans le projet de loi, de recourir à des habilitations à légiférer par ordonnance pour lever des contraintes réglementaires. Un autre choix politique aurait pu être fait, en laissant au Parlement le soin de légiférer. Par ailleurs, le délai choisi, qui est de trois mois, nous paraît contradictoire avec la volonté d'agir dans l'urgence. Nous proposons donc de le réduire en fixant la limite au 31 juillet 2023, pour que les opérations de reconstruction aient lieu le plus rapidement possible.
Par exemple, dans ma circonscription, le bureau de poste du quartier de La Paillade a été brûlé : désormais, les habitantes et les habitants sont obligés de se déplacer dans les bureaux de poste des quartiers voisins. Notons déjà, au passage, qu'un quartier comptant quasiment 25 000 habitants ne comprenait qu'un seul bureau de poste. Quand nous vous disons que les services publics ont été petit à petit retirés de ces quartiers, c'en est un exemple : un bureau de poste pour 25 000 habitants, ce n'est quand même pas la panacée ! Et voilà qu'ils doivent en outre se déplacer dans les bureaux de poste voisins. Le directeur de La Poste explique que l'évaluation préalable aux réparations se fait au mieux, en lien avec les services de l'État et les services municipaux, mais il semblerait que cette évaluation soit encore loin d'être précise, tant s'agissant des coûts que des délais de reconstruction. Pour que le bureau de poste que j'évoquais, par exemple, soit réhabilité et remis en service dans les plus brefs délais, il nous semble donc qu'il faudrait agir d'ici la fin du mois de juillet.
Si nous sommes dans une situation d'urgence, il faut prendre l'ordonnance urgemment : l'amendement, identique à celui qu'avait initialement déposé le collègue Bazin, vise à réduire le délai de l'ordonnance à un mois, au lieu de deux. Ce qu'il aurait aussi été urgent de faire – malheureusement, ça n'a pas été le cas –, c'est de prendre en compte le fait que 55 % des sinistres déclarés concernent des biens professionnels, pour un coût provisoire de 330 millions d'euros. Rien, dans le texte, ne concerne ces sinistres-là ! Rien n'est fait pour couvrir les pertes d'exploitation ; rien n'est fait pour faciliter l'accès au dispositif du chômage partiel.
M. Le Maire – le ministre de l'économie, pas le maire – a évoqué d'hypothétiques annulations de cotisations sociales et fiscales au cas par cas. Vous savez que ce n'est pas notre tasse de thé, puisqu'à chaque fois que l'on retire 1 euro de cotisations, cela vous permet de justifier l'allongement de la durée de cotisation des retraites, en arguant qu'il n'y a pas assez d'argent dans les caisses. Nous nous y refusons donc : c'est bien à l'État d'assurer, en dernier ressort, l'accès de toutes les personnes sinistrées à un fonds d'urgence spécial qui leur garantira un reste à charge nul. Tout cela doit être inscrit noir sur blanc dans un projet de loi de finances rectificative, à l'automne 2023.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Défavorable.
Ayant été cité, je vais m'exprimer pour le dire clairement : je ne partage pas du tout l'optique de La France insoumise sur ce texte. La présentation de l'amendement n° 56 a pu prêter à confusion : contrairement à ce qu'a dit notre collègue, le délai d'habilitation prévu à l'article 2, qui tient compte de la spécificité des marchés publics, est bien de deux mois ;…
Oui !
…c'est aux articles 1er et 3 qu'il est de trois mois. Deux objectifs doivent présider au projet de loi : aller plus vite, pour permettre la reconstruction la plus rapide possible ; et sécuriser les donneurs d'ordre. Pour le premier, il y avait comme une forme de contradiction apparente entre le fait de vouloir gagner quatre semaines, notamment grâce aux dérogations au principe de publicité – ce qui ne signifie pas qu'il n'y aura pas de mise en concurrence, car il y en aura –, et les deux mois donnés au Gouvernement pour prendre ses ordonnances. Mais c'est un délai maximal ! Vous l'aviez dit, d'ailleurs : vous ferez au mieux.
L'amendement en question, qui fixe une limite au 31 juillet, comporte par ailleurs un danger : puisqu'il s'agit d'ordonnances, elles doivent être précédées de consultations obligatoires.
Exactement !
Je pense notamment à celle du CNEN, dont ma collègue Louwagie est membre. Il n'est donc pas impossible que la publication des ordonnances prenne quelques jours ou quelques semaines de plus. L'objectif étant de sécuriser les donneurs d'ordre de ces marchés publics, il vaut mieux prendre le temps nécessaire, donc conserver le délai de deux mois, qui est sécurisant. Mais engagez-vous, monsieur le ministre, devant la représentation nationale, à fournir tous les efforts possibles pour présenter l'ordonnance devant le conseil des ministres au plus vite, sans attendre deux mois.
Nous en avons discuté hier en commission et j'ai eu l'occasion, comme le rapporteur, d'apporter des réponses à plusieurs amendements sur le sujet. Je remercie M. Bazin car j'observe que ces réponses, ainsi que l'engagement formel que j'ai pris en la matière, l'ont conduit à retirer son amendement. Il s'agit ainsi de joindre le geste à la parole en se limitant à des amendements qui, compte tenu de l'urgence, apportent quelque chose de nouveau par rapport aux débats qui ont déjà eu lieu en commission. Je remercie donc M. Bazin de s'inscrire dans cette logique, tout en déplorant que certains déposent de nouveau en séance des amendements qui ont déjà été longuement examinés hier.
Comprenez que derrière cette idée d'urgence que nous mettons en avant, il y a des gens et des besoins essentiels. Prenons le cas de la crèche Maryse-Bastié de Romainville, dont j'ai déjà parlé et qui a été fortement dégradée : des parents attendent que leurs enfants puissent retourner à la crèche, tout simplement ! Notre demande vise donc vraiment à répondre à des besoins pressants et urgents, car les habitants de nos quartiers doivent pouvoir accéder à ces services de base.
J'en profite pour ajouter qu'il ne faudrait pas que les habitants des quartiers populaires subissent la double peine, c'est-à-dire que les dégradations ne soient pas prises en charge assez rapidement, alors qu'ils vivent dans des endroits où les services de base sont déjà bien inférieurs à la moyenne nationale.
Eh si ! Dans les quartiers populaires, le nombre de places en crèche est six fois moindre que la moyenne nationale. Voilà la réalité de nos quartiers populaires !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
J'entends dire, sur les bancs d'en face, que c'est faux. Je vais donc vous donner quelques chiffres ! Vous dites depuis le début que ces quartiers sont privilégiés, mais sachez qu'en Seine-Saint-Denis, le nombre de bibliothèques est de 36 % inférieur à la moyenne nationale ; le nombre de médecins y est de 37 % inférieur à la moyenne nationale ; et le nombre de spécialistes médicaux est de 50 % inférieur à la moyenne nationale !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Voilà la réalité de la Seine-Saint-Denis ! Voilà la réalité des quartiers populaires !
L'amendement n° 121 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Comme pour l'article 1er , il vise à définir précisément la durée de la dérogation prévue. Ce n'est pas un sujet mineur ! Cela a été dit : l'article prévoit que l'ordonnance soit prise dans un délai de deux mois, qui correspond à la période durant laquelle les différentes consultations pourront être effectuées. Au passage, je souligne qu'il n'est pas normal que le ministre Fesneau se soit passé de consulter ma collègue Aurélie Trouvé
Mme Sarah Legrain applaudit
…en décidant que seuls certains membres de l'opposition seraient consultés, et pas ceux de La France insoumise.
Exclamations sur les bancs du groupe RN et sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je clos cette parenthèse : soit on consulte tout le monde, soit on ne consulte pas. Il n'y a pas de sous-députés.
Je précise qu'il ne s'agit pas de vous, monsieur Béchu, mais de M. Fesneau.
Je reviens donc à la durée de dérogation. Soit on est dans l'urgence, soit on n'est pas dans l'urgence.
Se passer de publicité, ce n'est pas rien : il faut donc circonscrire la période. Nous proposons qu'elle soit limitée aux six mois suivant la publication des ordonnances. Si vous pensez qu'il faut davantage, justifiez-le, plaidez-le ! Précisez aussi le dispositif. Certains collègues ont évoqué la question des seuils ; il nous a été dit, en commission, qu'ils tourneraient autour de 1,5 million d'euros. Avons-nous la garantie qu'ils ne seront pas plus élevés ? Nous défendrons des amendements…
M. le président coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est écoulé.
L'article 2 prévoit, comme le précédent, d'introduire des dérogations aux règles préexistantes. De la même façon que tout à l'heure, nous demandons que ces dérogations soient encadrées dans le temps et limitées aux circonstances exceptionnelles qui les justifient.
Par ailleurs, nous avons déjà souligné que votre projet de loi oublie certaines catégories, notamment les professionnels sinistrés, et ne précise pas comment ces derniers, mais aussi les particuliers, seront – ou pas – indemnisés. Or 55 % des sinistres déclarés concernent des biens professionnels, et leur coût provisoire est évalué à 330 millions d'euros. Rien n'est fait pour couvrir les pertes d'exploitation subies par les petits commerçants, alors même que, nous l'avons dit, la moitié d'entre eux ne sont pas assurés.
Cela pose également la question de l'accès au dispositif de chômage partiel, qui n'est pas garanti pour les sinistrés. Bruno Le Maire a évoqué d'hypothétiques annulations de cotisations sociales et fiscales au cas par cas pour les commerces, mais ce n'est pas à la sécurité sociale de payer les conséquences des révoltes urbaines !
Plusieurs éléments doivent donc être fixés : d'abord le cadre dans lequel les dérogations pourront être appliquées, et ensuite ce que nous allons faire pour toutes les personnes et tous les commerces qui ne rentrent pas dans le périmètre de votre projet de loi.
C'est un amendement de repli, qui prévoit de limiter la durée des dérogations à huit mois ; les deux suivants proposeront respectivement des délais de neuf et de dix mois. Comme pour l'article 1er , nous faisons des propositions concrètes.
Il est ici question d'autoriser le Gouvernement à prendre une ordonnance. Dans ce cadre, le pouvoir législatif n'est pas directement saisi. Nous aurions cependant pu légiférer sur ces sujets, car il n'est pas compliqué d'énoncer une norme claire en la matière. Pourtant, comme souvent, le Gouvernement veut que l'exécutif exerce le pouvoir législatif. Vous m'opposerez l'article 38 de la Constitution, mais je vous répondrai que certains articles de cette loi fondamentale – en particulier les 40 et 49.3 – sont fort discutables et discutés. Pour notre part, nous devons veiller à exercer notre pouvoir législatif, d'abord en matière budgétaire : comme l'a rappelé ma collègue Oziol, les budgets ont été adoptés par recours au 49.3 à l'automne dernier.
Nous ne pouvons pas toujours tout donner à l'exécutif. Tant qu'à déroger, donnez-nous au moins des éléments précis sur les délais d'autorisation. Hier en commission, notre collègue Di Filippo a d'ailleurs défendu l'idée que ces dérogations devaient être pérennes.
Dans un amendement, il demande un rapport sur les effets d'une éventuelle pérennisation de ces dispositifs d'assouplissement des règles de la commande publique.
Faisons attention ! Une telle évolution n'est pas seulement grave au regard des règles européennes, elle l'est en elle-même car les deniers publics doivent être utilisés de façon vertueuse.
Nous en avons déjà débattu lors de l'examen de l'article 1er . Avis défavorable pour tous ces amendements.
L'amendement n° 115 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
S'il est urgent de reconstruire les bâtiments publics affectés par les dégradations, on ne peut pas bâtir comme avant en ignorant qu'il existe aussi une urgence climatique : il faut anticiper, investir dans des bâtiments prévus pour le pire et capables de protéger leurs utilisateurs. Par cet amendement, nous vous invitons à vous intéresser à ce qui a brûlé mais aussi à ce qui brûle au quotidien, à savoir notre planète, en raison de notre inaction. Nous proposons d'investir aujourd'hui pour économiser demain et mieux protéger, ce qui semble aller de soi.
N'ayant pas encore eu la joie de répondre à Sandra Regol, je le fais à cette occasion pour lui dire que nous avons déjà évoqué cette question lors de l'examen de l'article 1er . J'ai loué l'intention mais jugé inopportun de l'écrire de manière spécifique : un tel ajout serait forcément limitatif car nous ne pourrions dresser la liste exhaustive de tout ce qui doit être pris en compte. Avis défavorable.
J'entends votre explication, monsieur le ministre, mais j'ai du mal à comprendre en quoi investir dans l'avenir pourrait être limitatif. Tout l'intérêt de la réponse que nous allons apporter à la situation que vient de traverser la France, c'est précisément de ne pas reproduire les erreurs du passé. Nous voulons inscrire cette volonté dans le marbre, en quelques mots.
L'amendement n° 118 n'est pas adopté.
Pour clarifier les choses, il vise à désigner, voire à stigmatiser les auteurs de ces violences et dévastations. C'est nécessaire car, dans cet hémicycle, nous assistons à un duel entre La France insoumise et Renaissance pour savoir qui dissimulera le mieux l'identité des auteurs de ces émeutes. Le condescendant M. Reda ose ainsi nous dire que le terme « délinquant » est d'extrême droite. Quand on connaît votre passé politique et votre ancienne proximité avec Nicolas Sarkozy, monsieur Reda, c'est assez cocasse.
Quant à La France insoumise, elle n'ose même pas parler de casseurs. Ayant une vision totalement romantique et obscène de ces émeutes et dévastations, elle nous parle de révolte comme si l'on était sur les barricades avec Gavroche. Dans certains quartiers, chers collègues, on était plus proche de l'intifada que des Misérables, il faut bien le dire.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Cet amendement est pour moi l'occasion de révéler – même si on le sait bien – qu'il y a un lien entre La France insoumise et Renaissance : refuser de voir le réel, notamment la responsabilité écrasante et évidente des politiques migratoires et de l'immigration massive dans ces émeutes. Le ministre Darmanin a beau expliquer que les responsables étaient pour la plupart des Français et que seulement 10 % étaient des étrangers, nous maintenons que ces émeutiers, ces délinquants étaient étrangers et sont étrangers à nos valeurs, à notre mode de vie et même à la France.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Défavorable.
L'extrême droite fait semblant de s'intéresser à la délinquance, laissez-moi rire !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Si vous voulez lutter contre la délinquance, vous pouvez, par exemple, vous battre pour qu'il y ait des règles de commande publique qui assurent la vertu des élus.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Battez-vous avec nous pour que les hommes et les femmes politiques agissent de façon responsable et acceptez, par exemple, qu'ils soient révocables entre les élections pour qu'ils puissent rendre compte de leur action, à l'inverse de ce qui se fait dans cette V
Exclamations sur les bancs du groupe RN
…– la V
C'est cette culture de l'impunité politique qui crée l'impunité en droit pénal.
Exclamations continuelles sur les bancs du groupe RN.
Pourquoi ces anciens présidents se retrouvent-ils devant les tribunaux ?
C'est votre modèle ! Luttons contre toutes les formes de délinquance, notamment la délinquance en col blanc. Le rapport de Challenges, la commission d'enquête sur les Uber Files, dont la rapporteure est notre collègue Danielle Simonnet, vous en parlez ?
Exclamations sur les bancs du groupe RN et sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem. – Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
En fait, vous vous fichez complètement des délinquants et des victimes de la délinquance que sont tous les Français lorsque des milliards d'euros font défaut en raison de l'évasion fiscale. Dans ces cas-là, vous ne dites jamais rien. Vous êtes toujours du côté des puissants en faisant semblant de défendre le peuple.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Quant à nous, nous défendons le peuple, la paix, la justice et la responsabilité. C'est la raison pour laquelle nous avons des choses à dire sur ce projet de loi, contrairement à vous.
Exclamations sur les bancs du groupe RN. – Mme Andrée Taurinya applaudit.
Chers collègues, il ne sert strictement à rien de hurler : après l'intervention de Mme Garrido, qui était contre l'amendement, un membre de votre groupe aura la parole pour le défendre.
J'interviens sur le fondement de l'article 70, alinéa 3, du règlement, relatif aux mises en cause personnelles. À l'époque où M. Odoul était adhérent du parti socialiste, il a dû apprendre que lorsqu'on est un tant soit peu républicain, on ne fait pas obstacle à un texte qui permet la reconstruction des services publics et leur présence dans les territoires. Ceux qui ont le sens des réalités sont ceux qui veulent avancer vite et non pas ceux qui font de l'obstruction.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Madame Garrido, vos propos sont indécents pour les Français qui ont subi ces violences, pour les Français des quartiers populaires qui vivent dans cette violence au quotidien, pour les Français issus de l'immigration…
Moi, j'y vis dans l'un de ces quartiers, contrairement à vous ! Mes enfants vont à l'école publique !
Madame Garrido, vous avez eu la parole pendant deux minutes, alors cessez les cris et les gestes. Chacun s'exprime à son tour. Poursuivez, monsieur Odoul.
Chers collègues de La France insoumise, vous avez jeté de l'huile sur le feu lors de ces émeutes.
Vous avez refusé les appels au calme. Vous avez encouragé ces violences, des manifestations honteuses où nos policiers se faisaient insulter et cracher dessus. Chers collègues de la France insoumise, les premières victimes de la délinquance, de la vraie délinquance, des agressions, des agressions sexuelles, du trafic de drogue et du racket, ce sont les Français des quartiers populaires.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Ce sont eux que nous voulons protéger. Depuis trente ans, vous avez accepté que des citoyens français vivent sous d'autres lois que celles de la République : celles des gangs, des islamistes, des racailles.
Nous, nous voulons que ces Français vivent sous la loi de la République et soient protégés par la République. Vous les trahissez, vous ne les défendez pas. Nous le faisons !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 163
Nombre de suffrages exprimés 160
Majorité absolue 81
Pour l'adoption 43
Contre 117
L'amendement n° 103 n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs demandes de scrutin public : sur les amendements n° 28 et 10 par le groupe Rassemblement national ; sur les amendements n° 18 , 93 , 43 et 61 par le groupe Renaissance ; et sur les amendements identiques n° 2 , 17 , 100 et 119 par les groupes Renaissance, Rassemblement national et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de deux amendements, n° 60 et 28 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Raquel Garrido, pour soutenir l'amendement n° 60 .
Les lois qui régissent la commande publique n'imposent pas systématiquement la publicité et ne fixent pas un délai uniforme pour tous les types de marché. Cependant, le responsable de la direction chargée de ce dossier, que nous avons auditionné avant-hier avec M. le rapporteur Mattei, expliquait que la suppression de la phase de publicité ferait gagner au mieux un mois pour démarrer des travaux.
Nous faisons une proposition qui nous semble équilibrée : prévoir dans l'ordonnance une semaine de publicité préalable. Ce n'est pas beaucoup et, en réalité, cela ne retarde pas les travaux puisqu'il faut du temps pour que les collectivités définissent le marché et que les entreprises fassent leurs devis. Nous avons bien compris que vous voulez refuser tous les amendements pour parvenir à l'adoption d'un texte conforme à celui du Sénat, qui vous permettra de partir en vacances.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE et LR.
Néanmoins, nous sommes encore législateurs et nous devons faire notre travail jusqu'au bout, quitte à adopter des amendements qui nous donneront une demi-journée de travail de plus. Acceptez l'idée qu'une semaine de publicité donnera aux entreprises, notamment aux artisans locaux, la possibilité de concourir à ces marchés. Ce serait une bonne chose pour réparer le matériel mais aussi l'immatériel, ce vivre ensemble dont nous parlons tous tant depuis ce matin.
Mme Nathalie Oziol applaudit.
L'amendement n° 28 de M. Grégoire de Fournas est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Ce texte a été adopté à l'unanimité par le Sénat, une assemblée de sages.
Sourires.
Ça peut aider : la patine de la vie est parfois utile. Ce texte est bien cadré car il définit les opérations et prévoit le seuil évoqué par M. le ministre, sans revenir sur la mise en concurrence – notre débat porte sur la publicité. Je vous demande de vous en tenir à ce texte qui me semble assez bien calibré. Avis défavorable sur ces deux amendements.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je partage l'avis du rapporteur.
L'amendement n° 60 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 156
Nombre de suffrages exprimés 151
Majorité absolue 76
Pour l'adoption 43
Contre 108
L'amendement n° 28 n'est pas adopté.
La parole est à M. Benjamin Saint-Huile, pour soutenir l'amendement n° 18 .
Nous avions déjà discuté de cette question en commission : la possibilité de déroger à l'obligation de publicité doit-elle être réservée aux marchés dont le montant est inférieur à un certain seuil ? Ce dernier pourrait être fixé par ordonnance, mais, pour notre part, nous estimons utile et nécessaire de le faire dans la loi. Après avoir entendu les arguments du ministre Béchu en commission, le groupe LIOT, dans sa grande sagesse, propose de réserver la dérogation aux marchés dont le montant est inférieur à un seuil de 1,5 million d'euros.
Même avis.
L'amendement n° 18 est retiré.
Sur l'amendement n° 44 rectifié , je suis saisi par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de deux amendements, n° 93 et 43 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Raquel Garrido, pour soutenir l'amendement n° 93 .
Je reviens à la question du seuil. Hier, en commission, notre collègue Echaniz avait déposé un amendement tendant à ce qu'il soit fixé à 215 000 euros, ce qui correspond au seuil légal pour certains types de marché. L'amendement n° 43 , en discussion commune avec le mien, prévoit d'autre part un seuil à 750 000 euros.
Quoi qu'il en soit, il est important de faire preuve de clarté. On ne peut rester dans le flou car une ordonnance mal calibrée créerait une insécurité juridique qui, en ouvrant la voie à des contentieux, pourrait finalement remettre en cause l'accélération de la reconstruction – pourtant l'objectif initial de ce projet de loi. L'expression « le mieux est l'ennemi du bien » se vérifie ici parfaitement.
Il nous faut définir un seuil…
L'oratrice s'interrompt après avoir vu M. Jimmy Pahun prendre en photo les députés du groupe Horizons.
Tout va bien, les députés se prennent en photo ! C'est la fête du slip !
Murmures.
Monsieur Pahun, je vous demande d'être attentif à nos débats. Madame Garrido, vous pouvez poursuivre votre propos.
Exclamations
– qu'il fallait être précis, de préférence dans le texte, mais au moins au banc du Gouvernement.
En effet, il nous a été clairement indiqué que, s'il existe bien un seuil prescrit par la réglementation européenne – fixé à un peu plus de 5 millions d'euros –, il faut aussi prendre en considération le fait que certains marchés présentent un intérêt transfrontalier certain. Dans un tel cas, des entreprises qui ne sont pas françaises pourraient se porter candidates à des marchés publics d'un montant supérieur à 1 million d'euros. Si l'on fixe, comme vous l'avez proposé, un seuil à 1,5 million, on entre dans une zone grise et dangereuse car cela ferait peser un sérieux risque d'aléa juridique pour toutes les personnes assujetties aux règles des commandes publiques.
Il porte également sur la question du seuil. Il est nécessaire de fixer un cadre car on sait que des dérives existent en la matière – j'y reviendrai lors de la défense de l'amendement n° 44 rectifié . Nous ne devons pas perdre de vue notre objectif qui est de limiter les possibles dérives.
Nous avons déjà débattu des seuils. Au moment de la présentation du texte, j'ai évoqué le seuil de droit commun applicable aux marchés publics de travaux fixé à 100 000 euros – celui prévu par vos amendements est un peu plus élevé.
Lorsqu'on a l'habitude de gérer des communes, on sait que la réfection d'une classe coûte 350 000 à 400 000 euros. L'addition monte très vite. Nous avons fixé un cadre qui me semble conforme à la loi, ce qui évite de courir un risque juridique. Le ministre Béchu l'a d'ailleurs expliqué au banc. Tenons-nous en là. Ne soyons pas trop précis dans le texte. Par ailleurs, vous le savez très bien, les déclarations faites au banc comptent – on s'en aperçoit notamment lorsqu'on analyse la doctrine juridique.
L'avis est défavorable. Certes, vous posez une vraie question. Cependant, un seuil trop bas pourrait se révéler contraignant. Par expérience, je peux vous dire que les coûts montent très vite.
Défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 174
Nombre de suffrages exprimés 138
Majorité absolue 70
Pour l'adoption 33
Contre 105
L'amendement n° 93 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 157
Nombre de suffrages exprimés 152
Majorité absolue 77
Pour l'adoption 59
Contre 93
L'amendement n° 43 n'est pas adopté.
Pour limiter le contournement du dispositif et les manœuvres visant à réaliser des travaux importants en dehors des procédures de marchés publics habituelles, le législateur doit encadrer davantage les dérogations qui seront accordées en limitant le montant des travaux susceptibles de faire l'objet de ces dérogations.
La limite doit donc être fixée en fonction du coût de construction initial du bâtiment et en prenant en considération l'inflation. Cet encadrement fixé par la loi permettra d'éviter le lancement de chantiers pharaoniques sous le prétexte de la reconstruction et aux dépens de l'État.
Même avis.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 154
Nombre de suffrages exprimés 152
Majorité absolue 77
Pour l'adoption 47
Contre 105
L'amendement n° 10 n'est pas adopté.
La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir l'amendement n° 44 rectifié .
Nous avons bien compris que nous n'arriverions pas à vous convaincre de fixer un seuil précis. Vous avez évoqué seulement un seuil de 1,5 million, un montant très élevé, bien supérieur au budget de bon nombre de communes.
C'est pourquoi nous devons garantir un contrôle démocratique plus poussé en ayant recours à un outil déjà existant. Si vous adoptez cet amendement, vous pourrez inscrire notre proposition dans l'ordonnance, si bien que vous n'aurez pas besoin de modifier le texte du projet de loi. Nous pourrons ainsi aboutir à une adoption conforme, comme nous le souhaitons collectivement.
En intégrant dans l'ordonnance la phrase que nous suggérons, un maximum de transparence serait garanti. J'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous rassuriez sur ce point.
Puisque vous interpellez le ministre, je considère qu'il s'agit d'un amendement d'appel. Il serait difficile de l'appliquer, mais je laisse le ministre vous répondre. Avis défavorable.
Je comprends votre demande. Cependant, si nous voulons gagner du temps, nous ne pouvons avoir recours à une procédure formalisée classique, qui impliquerait la constitution d'une commission d'appel d'offres. En adoptant votre amendement, nous renoncerions à toute possibilité de passer des marchés de gré à gré. Je ne peux satisfaire à la fois votre demande et celle qui a été formulée unanimement par les sénateurs.
Si je comprends votre point de vue, je vous demande d'entendre que ce projet de loi porte uniquement sur les bâtiments démolis pendant les huit jours de troubles.
Monsieur le ministre, même si le texte ne concerne qu'un nombre limité de biens affectés par des événements qui se sont produits pendant une période circonscrite, la rapidité n'empêche pas l'exigence de transparence à propos des procédures mises en place à l'instant T.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 177
Nombre de suffrages exprimés 176
Majorité absolue 89
Pour l'adoption 80
Contre 96
L'amendement n° 44 rectifié n'est pas adopté.
Nous en arrivons à un moment important de l'examen de cet article puisque l'alinéa 3 prévoit des dérogations au principe d'allotissement, ce qui écarterait des marchés publics plusieurs petites entreprises qui ne sont pas en mesure de se porter candidates à un marché global.
Certes, nous étudions un texte d'urgence. Cependant, nous n'avons pas encore compris en quoi la suppression de la procédure d'allotissement accélérerait l'instruction des marchés publics.
Il nous semble donc important de faire en sorte que les petites entreprises ne soient pas écartées des marchés publics – je me réjouis que plusieurs groupes d'opposition partagent ce point de vue.
La parole est à M. Benjamin Saint-Huile, pour soutenir l'amendement n° 17 .
J'ai eu l'occasion d'évoquer cette question dans mon intervention sur l'article 2. Cette mesure est sans doute celle qui pose le plus de questions – de bonne foi. En dérogeant à la règle de l'allotissement, on crée les conditions d'une situation assez évidente : une partie des acteurs économiques, c'est-à-dire certaines TPE-PME, se retrouveraient de fait écartées car elles ne seraient pas en mesure de répondre à la demande. En privilégiant les marchés globaux de conception-réalisation, vous faites confiance aux majors, aux plus gros acteurs, tandis que les artisans auront plus de difficulté à apporter une réponse adaptée.
Nous avons déjà évoqué ce sujet en commission. Bien sûr, on me répondra que la décision de recourir ou non à un marché global sera laissée à la libre appréciation des collectivités. Cependant, cette disposition crée un biais.
La seule exigence prise en compte semble être celle du temps. Or je ne suis pas certain que le recours aux marchés globaux de conception-réalisation nous en fasse réellement gagner. Ceux qui, parmi nous, ont exercé des responsabilités locales savent bien que lorsqu'un architecte fait son travail et coordonne les corps de métier, cela ne pose pas de grosse difficulté. Il ne faudrait pas laisser penser que le marché global est synonyme d'efficacité, là où l'allotissement supposerait une perte de temps.
Je vous encourage à faire preuve de prudence en la matière. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons, par cet amendement – comme nous l'avions déjà fait en commission – de supprimer l'alinéa 3 car la mesure qu'il prévoit comporte un biais en défaveur des acteurs économiques locaux.
La parole est à Mme Nathalie Oziol, pour soutenir l'amendement n° 100 .
Nous ne sommes pas favorables à la possibilité de déroger au principe d'allotissement. Certes, il convient d'aller vite pour reconstruire. Cependant, nous ne devons pas perdre de vue l'essentiel. Si des obligations légales sont prévues dans le cadre des marchés, c'est pour de bonnes raisons. Le principe d'allotissement permet de sectoriser les chantiers, donc de mettre en valeur les compétences et les savoir-faire spécifiques de chaque entreprise qui prend en charge des chantiers.
Nous voulons surtout vous alerter sur le fait que le principe d'allotissement permet aux TPE, aux PME, aux artisans et aux entreprises locales qui constituent le poumon économique du pays de participer aux marchés publics en prenant en charge les chantiers à leur échelle, ce qui leur évite d'être cantonnés à un rôle d'éternels sous-traitants de grandes entreprises – lesquelles se gavent sur leur dos.
Je tiens à rappeler que, ces derniers temps, les TPE et les PME ont subi des augmentations successives et les conséquences de l'inflation – par exemple une hausse de 10 % des prix de l'électricité il y a encore quelques jours. Par conséquent, il ne faut pas charger la barque.
Le grand chantier de la reconstruction est l'affaire de tous, y compris des entreprises locales et des PME, et pas seulement des grands groupes. Nous appelons à l'adoption de ces amendements pour que les entreprises à taille humaine puissent prendre leur juste part et pour que les entreprises locales soient en mesure de répondre aux appels à projet qui seront lancés.
Comme mes collègues qui viennent de s'exprimer, les écologistes ont à cœur de défendre les petites entreprises, principales forces motrices en matière de création et de conservation de l'emploi local, mais aussi l'artisanat, qui représente, avec les PME, un des principaux employeurs en France.
L'alinéa 3 présente un danger, celui d'exclure ces acteurs économiques des commandes publiques. Je sais bien que la dérogation n'est qu'une possibilité et je suppose que le ministre nous expliquera que le recours aux marchés globaux ne sera pas systématique. Cependant, pour nous prémunir de ce risque, nous estimons – de manière transpartisane, comme vous pouvez le constater – que la suppression de cette dérogation apporterait de la sérénité. Une telle décision montrerait à nos petites et moyennes entreprises ainsi qu'à nos artisans que le Parlement est là pour eux.
Les élus locaux se posent toutes les questions que vous soulevez : ils ne sont pas complètement déconnectés des réalités et partagent votre attachement aux petites entreprises. Le texte permet de recourir aux marchés globaux, sans l'imposer d'aucune façon. Ne privez pas les élus locaux qui devront mener des opérations de reconstruction ou de réhabilitation de cet outil, par ailleurs circonscrit à un délai et à un cadre bien précis – il ne s'agit pas d'ouvrir grand les vannes. Les marchés globaux pourront d'ailleurs faire intervenir nombre de petites ou moyennes entreprises.
Avis défavorable sur l'ensemble des amendements.
Le Gouvernement n'a pas décidé seul, un matin, de supprimer l'allotissement des marchés. Vous avez mis en avant le caractère transpartisan de vos amendements, mais ce qui l'est vraiment, c'est la demande de l'AMF, qui représente toutes les sensibilités politiques et qui estime que la mesure que nous proposons permettra de gagner du temps en dispensant les maires de passer par un marché de maîtrise d'œuvre de droit commun. Vous avez commencé à répondre à ma place en reconnaissant que la procédure ici proposée n'est qu'une possibilité. Sachez que 200 000 marchés publics par an sont régis par la règle de l'allotissement et que seuls 0,1 % à 0,2 % d'entre eux seront concernés par la nouvelle règle, qui est directement liée aux émeutes et qui est de surcroît créée à la demande de cette association transpartisane, avec le soutien transpartisan du Sénat, des communistes à la droite en passant par les socialistes et les centristes – outre les sénateurs de la majorité.
N'allons pas remettre en cause une demande de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité soutenue à l'unanimité par la chambre haute. J'entends vos arguments, mais je vous demande de bien mesurer qu'au final, ce sont les maires qu'on pénaliserait, ainsi que les usagers des bâtiments qui ont été dégradés.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.
Conformément à la règle consistant à donner la parole à deux orateurs d'avis contraire, je donnerai d'abord la parole à Mme Anne-Laure Blin, puis M. Benjamin Saint-Huile
Je ne partage pas complètement la philosophie de ces amendements. J'ai toutefois eu l'occasion de vous interpeller sur le dispositif en commission, monsieur le ministre, parce que s'il s'agit certes d'un texte d'exception justifié par l'urgence, il n'est tout de même pas fréquent, dans cette enceinte, de toucher aux règles des marchés publics qui relèvent éminemment du domaine réglementaire, et parce qu'il y a là matière à favoriser les TPE et les PME françaises. Vous m'avez alors répondu que les favoriser serait contraire au droit européen. Or ce qu'interdit le droit européen, c'est d'exclure les entreprises étrangères des marchés publics. Ce n'est pas tout à fait pareil.
Il me semble important, dans un souci de protectionnisme, de permettre à nos TPE-PME de candidater aux marchés publics. À l'heure actuelle, certaines d'entre elles, découragées par les procédures en vigueur et par les lourdeurs administratives, ne se positionnent même pas. Quant aux critères d'éligibilité, c'est encore autre chose. Quoi qu'il en soit, la question de l'accessibilité des marchés publics à nos artisans, à nos TPE et à nos PME est fondamentale pour promouvoir les entreprises françaises sur le sol national.
Monsieur le ministre, je comprends la philosophie du dispositif et je sais bien que l'objectif n'est pas de l'alourdir, mais ce que vous proposez est cumulatif : non seulement vous créez une exception au principe d'allotissement, ce que chacun comprend bien dans ce cas précis, mais vous décidez de ne pas encadrer cette dérogation d'un point de vue financier. Quand il s'agit de déroger aux règles de la publicité préalable en matière de commande publique, vous indiquez que le seuil sera fixé autour de 1,5 million et précisé par ordonnance, mais pour ce qui est de l'allotissement, vous ne précisez rien de tel.
J'aurais pu entendre qu'au-delà d'un certain montant, pour de grands chantiers, le maître d'ouvrage pourra s'exonérer de l'allotissement pour des raisons de rapidité, la conception et la réalisation étant alors effectuées dans le cadre d'un marché global. Néanmoins, la grande majorité des marchés porteront sur des montants plus modestes – et c'est tant mieux – et seront donc confrontés à un vide juridique. Je ne remets pas en cause la bonne foi du Gouvernement et du rapporteur, mais je note un écueil que nous aurions pu éviter.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 166
Nombre de suffrages exprimés 162
Majorité absolue 82
Pour l'adoption 65
Contre 97
Sur l'article 2, je suis saisi par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l'amendement n° 61 .
Notre débat me semble de plus en plus clair : il ne s'agit pas d'être pour ou contre la reconstruction, mais de savoir qui sera habilité à y procéder. En l'occurrence, je voudrais revenir sur le fond du sujet pour éclairer celles et ceux qui nous écoutent ou qui nous liront. Le principe de l'allotissement est une conquête historique du petit commerce et de l'artisanat contre les grands monopoles ,
Mme Raquel Garrido applaudit
une conquête aujourd'hui mise en péril par l'alinéa 3.
Ainsi, une crèche ou une école qui ont été dégradées, voire détruites, ne vont plus être restaurées par plusieurs intervenants – un sur le toit, un autre sur l'électricité et un troisième sur la peinture –, mais par une seule et unique entreprise. Cela aura des conséquences très dangereuses, notamment sur le maintien des qualifications et de l'emploi local : l'artisan, l'intervenant qui habite dans le quartier risque d'être évincé au profit d'une major, d'un grand monopole, d'un de ces groupes qui captent déjà la majorité des marchés publics ; les premiers étant, dans le meilleur des cas, relégués au rang de sous-traitants des seconds. Même ceux qui ont contribué à la construction initiale, les mieux placés en termes d'expertise, pourraient être alors évincés de la reconstruction.
J'entends bien qu'il ne s'agit selon vous, monsieur le ministre, que d'une possibilité. Il est vrai que le texte n'impose pas de contourner la règle de l'allotissement des marchés. Le fait que cette possibilité existe ouvre néanmoins la voie au rapport de force : des majors feront pression sur les élus locaux pour obtenir un monopole sur l'ensemble des marchés passés sur un territoire concerné, ce qui les mettra sur les rails pour obtenir les marchés suivants.
Pour toutes ces raisons, ce que vous proposez est extrêmement dangereux. Il faut défendre le principe de l'allotissement. J'espère avoir contribué au débat et – qui sait ? – obtenir une réponse différente de votre part, monsieur le ministre.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Défavorable.
Il est tout de même dommage que les amendements identiques précédents n'aient pas été adoptés. Ils auraient pu l'être si la NUPES avait été capable de se mettre d'accord au moment du vote. On a vu, une nouvelle fois, que vous n'étiez pas d'accord entre vous, les écolos et les communistes ayant préféré s'abstenir. Même Mme Garrido, qui fait la leçon à la majorité qui veut partir en vacances, n'a pas été capable de convaincre ses camarades de ne pas aller déjeuner avant la fin de la séance !
Un tel comportement est insupportable pour nos artisans qui seront pénalisés parce que ces amendements ne sont pas passés à cause de vous !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'alinéa 3 de l'article 2 va défavoriser – des nombreux orateurs l'ont longuement expliqué – les petites entreprises de nos territoires qui souhaiteraient participer à dans la reconstruction. Elles subiront une forme de double peine : non seulement elles seront défavorisées dans ce cadre, mais beaucoup des petits commerçants et des petites entreprises ayant subi des dégradations ne seront pas entièrement compensées, faute d'entrer dans le périmètre du projet de loi. J'ai discuté avec un boulanger des Lilas ou encore avec des patrons de cafés et des restaurateurs à Romainville et à Noisy-le-Sec. Tous ont subi des dégradations. Ils ont plusieurs questions à vous poser, monsieur le ministre : qu'en est-il de tous les petits commerçants qui ne sont pas assurés, soit 5 % à 10 % d'entre eux ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Qu'en est-il des pertes d'exploitation, sachant que 50 % des commerçants ne sont pas assurés à ce titre ? Qu'en est-il du chômage partiel, sachant que la perte de rémunération n'est pas prise en charge par les assurances ?
La France insoumise a déposé une proposition de loi pour que l'ensemble des commerçants et des particuliers sinistrés ne subissent aucun reste à charge et soient intégralement couverts.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Non à la double peine pour les petites entreprises instaurée à l'alinéa 3 !
Mêmes mouvements.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 174
Nombre de suffrages exprimés 169
Majorité absolue 85
Pour l'adoption 62
Contre 107
L'amendement n° 61 n'est pas adopté.
Les amendements n° 24 de M. Grégoire de Fournas et 111 de Mme Aurélie Trouvé sont défendus.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 181
Nombre de suffrages exprimés 115
Majorité absolue 58
Pour l'adoption 115
Contre 0
L'article 2 est adopté.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023 ;
Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'industrie verte.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra