La réunion commence à quatorze heures trente.
La commission spéciale poursuit l'examen du projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie.
Article 9 (suite) : Détermination de la date d'administration de la substance létale et droits de la personne
Amendements CS1778 de Mme Anne Bergantz et CS1242 de Mme Nicole Dubré-Chirat, amendements identiques CS196 de M. Philippe Juvin et CS588 de Mme Christine Loir (discussion commune)
Il a été décidé ce matin que l'alinéa 11 de l'article 8 serait retravaillé en vue de la séance, parce que le délai de trois mois qu'il introduit est problématique pour nombre d'entre nous. Je vous avais déjà interrogée à ce sujet, madame la ministre, lorsque nous vous avons auditionnée au mois d'avril.
Je rappelle qu'il faut, pour bénéficier de l'aide à mourir, être atteint d'une maladie grave et incurable, à un stade avancé ou terminal et endurer des souffrances insupportables. Une personne qui se trouve dans cette situation ne sait pas ce qui va lui arriver : elle peut seulement imaginer l'évolution de son état de santé, en fonction de sa pathologie. Elle souffre et a peur de souffrir encore plus. Une fois que sa demande a été acceptée, la certitude qu'elle pourra bénéficier d'une aide à mourir le moment venu, au moment où elle n'en pourra plus, peut contribuer à l'apaiser, sans qu'elle décide pour autant de passer immédiatement à l'acte. Le bon moment pour elle pourra être un mois, deux mois, quatre mois, cinq mois plus tard…
Formuler une demande d'aide à mourir n'est pas un acte anodin, ce n'est pas une chose facile. Devoir réitérer cette demande tous les trois mois ne le sera pas davantage. Et cela me paraît inutile, dans la mesure où la personne devra déjà réaffirmer sa volonté libre et éclairée au moment de l'acte. Je suis bien consciente que, dans l'immense majorité des cas, l'aide à mourir interviendra dans un délai assez court, inférieur à trois mois, mais je trouve cruel d'imposer aux personnes qui souhaitent avant tout être apaisées de faire revalider cette demande tous les trois mois.
J'avais déposé un amendement à l'article 8, prévoyant que l'ordonnance puisse être renouvelée pour trois mois par le médecin, au terme d'une consultation où le patient réaffirmerait sa volonté de façon libre et éclairée. Il a été jugé irrecevable. Je propose, avec celui-ci, de faire passer le délai prévu de trois à six mois, afin de donner davantage de visibilité au patient.
Alors que nos collègues proposent de faire passer le délai à un an ou six mois, nous proposons pour notre part par l'amendement CS196 de le ramener à un mois, car la personne peut évoluer durant cette période, tout comme le diagnostic médical, qui peut ouvrir de nouvelles perspectives.
Des spécialistes de cancérologie m'ont indiqué que, même pour des maladies graves et incurables, la thérapeutique peut évoluer, ainsi que la réaction du corps à celle-ci. Il faut que la loi puisse s'adapter aux progrès de la science, qui permettront peut-être de soulager certaines souffrances, voire de soigner des maladies que l'on considère actuellement comme incurables.
Avis défavorable.
Cette discussion est directement liée à celle de ce matin : or il a été décidé de réécrire l'alinéa 11 de l'article 8.
Nous avons déjà eu ce débat ce matin.
La commission adopte l'amendement CS1778.
En conséquence, les amendements CS1242, CS196 et CS588 tombent.
Amendement CS152 de Mme Marie-France Lorho
Je sais bien que le critère selon lequel le pronostic vital du malade doit être engagé a été supprimé, mais je ne vois pas comment le délai de douze mois, qui vient d'être voté, va s'articuler avec les dispositions prévues aux articles précédents, notamment avec l'alinéa 11 de l'article 8.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS880 de M. Julien Odoul
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS1174 de M. Thibault Bazin
Nous proposons de préciser que la préparation magistrale ne peut faire l'objet d'une fabrication à l'avance.
Par définition, une préparation magistrale est réalisée pour un patient déterminé et extemporanée.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1702 de M. Christophe Bentz
Il s'agit de préciser que l'euthanasie n'est jamais réalisée à domicile, afin de prévenir la survenue d'un trouble post-traumatique chez les parents, colocataires, cohabitants ou voisins de la personne euthanasiée.
Cet amendement contrevient à un droit important du patient, celui de mourir à son domicile. Plus de 90 % des personnes souhaitent mourir chez elles et il n'y a aucune raison de les en empêcher.
Avis très défavorable.
La commission rejette l'amendement.
L'amendement CS1523 de Mme Geneviève Darrieussecq est retiré.
Amendement CS677 de Mme Christine Pires Beaune
Nous souhaitons maintenir la possibilité pour la personne de faire réaliser l'acte soit à domicile, soit en établissement, mais la rédaction actuelle implique que l'aide à mourir a lieu par principe au domicile de la personne, sauf demande de sa part. Nous souhaitons inverser ce principe.
Je ne vois pas de raison de prévoir une administration en établissement si le patient n'y est pas hospitalisé. La possibilité de mourir à son domicile est un droit et une attente importante de nos concitoyens. Je ne suis donc pas favorable à ce que l'on donne la priorité à l'administration en établissement.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CS153 de Mme Marie-France Lorho et CS1567 de Mme Brigitte Liso (discussion commune)
Par l'amendement CS1567, nous proposons de compléter l'alinéa 3 par les mots «, sauf dans un lieu public ».
Le présent amendement vise à mieux encadrer les lieux dans lesquels les personnes peuvent procéder à l'administration de la substance létale, d'elles-mêmes ou avec l'aide d'un tiers.
Les mots « en dehors de son domicile » sont trop flous et ne permettent pas de définir strictement les structures qui sont adaptées et celles qui ne le sont pas. Dès lors, en précisant les lieux dans lesquels peuvent et doivent avoir lieu cette procédure, il proscrit des environnements inadéquats, voire dangereux. L'aide active à mourir est un acte hautement complexe, du point de vue médical et psychologique, et ne saurait pâtir de manquements altérant le bon déroulé de la procédure.
De telles dispositions sont trop restrictives. En pratique, elles empêcheraient par exemple que l'administration puisse avoir lieu dans un hôpital.
Avis défavorable.
J'ai du mal à comprendre cet amendement. On ne va pas faire cela dans la rue ou dans un jardin public...
Je me demandais si l'acte devait se faire sur le sol français et je n'ai pas trouvé de réponse à cette question dans le projet de loi. L'un des critères d'éligibilité est la nationalité française. Un Français qui serait suivi par un médecin français, en France, et qui remplirait toutes les conditions, mais dont le domicile serait en Allemagne pourrait-il demander que l'acte soit pratiqué dans son lieu de résidence ?
Je peux vous donner deux éléments de réponse. D'abord, il vaut mieux que cela se passe en France pour bénéficier de la prise en charge par la sécurité sociale. Ensuite, les recours en justice, dont il a beaucoup été question, seront plus difficiles à faire si cela n'a pas été fait sur le sol français. Je vais me pencher sur la question.
Le lieu sera décidé avec des professionnels de santé : il me paraît évident qu'ils ne feront pas cela dans la rue mais qu'ils choisiront un endroit adapté à leur activité et garantissant un moment d'intimité et de recueillement. La précision que vous voulez apporter me paraît assez étonnante.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS589 de Mme Christine Loir
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS1550 de M. Thomas Ménagé
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS1625 de Mme Annie Vidal
Dans le même esprit, je propose de compléter l'alinéa 3 par les mots : « à l'exception de la voie publique et aux établissements recevant du public définis à l'article R. 143-2 du code de la construction et de l'habitation ». Même si l'on peut effectivement imaginer que les soignants ne feront pas cela n'importe où, il me semble préférable d'apporter cette précision.
De telles dispositions sont trop restrictives. Les établissements de santé sont, par définition, des lieux recevant du public.
Avis défavorable.
Je rappelle que le lieu d'administration de la substance létale sera déterminé de manière concertée entre le patient et le médecin et j'ai, moi aussi, plutôt tendance à faire confiance au médecin.
Par ailleurs, c'est le médecin ou l'infirmer qui apporte la substance létale et veille au bon déroulement de la procédure. Le fait que tout cela se déroule sous le contrôle d'un professionnel de santé doit garantir que le lieu sera adéquat.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS881 de M. Julien Odoul.
Les amendements du Rassemblement National sont assez curieux. Imaginer que les patients ou les soignants pourraient vouloir faire cela au café du commerce me paraît totalement hallucinant. Mais je m'étonne aussi de l'amendement CS881, qui entend empêcher que l'acte puisse se faire dans des unités de soins palliatifs, des maisons d'accompagnement et des maisons de retraite médicalisées. Dites clairement que vous voulez que cela ne puisse se faire qu'au domicile des patients ! Ou dites plutôt que vous êtes contre l'aide à mourir, alors que près de 90 % de la population est pour ! Vous avez le droit de le penser mais, au lieu de le dire clairement, vous déposez des amendements complètement ridicules.
Tous les points de vue doivent être respectés, quel que soit le groupe qui les exprime, et rien n'est ridicule. Je ne peux pas vous laisser tenir de tels propos. Nous ne sommes pas dans une guerre de partis ; l'enjeu n'est pas d'opposer les uns aux autres en fonction de leurs valeurs politiques, mais que chacun exprime ses convictions.
Cet amendement pose une question importante, celle de la délimitation entre les soins palliatifs et l'aide à mourir. Pour notre part, nous contestons l'idée selon laquelle l'aide à mourir serait un prolongement des soins palliatifs. Il y a une différence de nature entre les deux démarches : les soins palliatifs consistent à accompagner la vie jusqu'à la mort, tandis que l'aide à mourir consiste à administrer une substance mortelle avant le terme naturel de la vie. Cette délimitation me paraît très importante.
Lorsque nous avons examiné l'article qui s'y rapportait, Mme la ministre nous a clairement dit qu'il serait possible, dans les maisons d'accompagnement, de délivrer une substance létale à une personne qui le demanderait. Or nous pensons que ce n'est pas l'objet de ces maisons.
Comme celle de la temporalité, la question du lieu mérite d'être posée. Le fait qu'une personne volontaire puisse accomplir l'acte n'est pas anodin et le mode d'administration aura lui aussi une incidence.
Mme Genevard vient d'expliquer que, dans les services de soins palliatifs, on ne pourra pas faire d'aide à mourir. Cela signifie que lorsqu'une personne demandera une aide à mourir et que le médecin lui dira qu'elle peut éventuellement choisir les soins palliatifs, il faudra qu'il ajoute qu'en soins palliatifs, elle ne bénéficiera pas de l'aide à mourir, même si elle la demande.
Imaginons qu'une personne dont la souffrance est insurmontable, insupportable et réfractaire se trouve dans une maison d'accompagnement ou un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) situé à 100 kilomètres de son domicile et qu'il n'y ait pas de place à l'hôpital. Est-ce que l'on va mettre en place toute une logistique pour la déplacer dans les derniers moments de sa vie, loin des personnes qui l'accompagnent, afin de lui administrer une substance létale ? Ce n'est pas sérieux, ce n'est pas raisonnable et ce n'est pas humain.
Le philosophe Frédéric Worms nous a invités à trouver une troisième voie entre les soins et l'aide à mourir. Il a évoqué la complexité et le tragique de la situation et parlé d'une possibilité circonscrite dans une contradiction. Cette troisième voie, ce n'est plus un soin, c'est une forme de secours.
À ce stade du débat, je crois important de rappeler que l'aide à mourir pourra être pratiquée en Ehpad, qui est considéré comme un domicile, ainsi que dans tous les services de l'hôpital, y compris ceux de soins palliatifs. Certaines personnes avaient proposé qu'il puisse y avoir une clause de conscience collective, ce qui aurait eu pour effet d'interdire cet acte dans l'ensemble d'un établissement ; or il n'y en aura pas.
Certains amendements visent à exclure des lieux, mais le texte prévoit que l'aide à mourir peut être pratiquée au domicile des personnes et dans les services hospitaliers, publics comme privés.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CS229 de M. Philippe Juvin, CS604 de Mme Sandrine Dogor-Such, CS678 de M. Jérôme Guedj et CS1527 de M. Hervé de Lépinau (discussion commune)
Je crois qu'en Ehpad, cela va poser beaucoup de questions. Des médecins coordonnateurs nous expliquent que de plus en plus de familles leur mettent la pression sur la programmation et que cela peut être compliqué.
L'amendement CS229 pose la question des centres pénitentiaires : faut-il permettre l'euthanasie et le suicide assisté dans les lieux de privation de liberté ? Cela nous inquiète, parce qu'il paraît difficile de s'assurer du consentement libre et éclairé des détenus et que des dérives sont à craindre.
J'aimerais revenir sur les propos qu'a tenus Mme Danielle Simonnet. Sur un sujet de société aussi important, et qui touche à l'intime, il importe de dépasser les étiquettes politiques et d'avoir un vrai débat. Nous avons tous beaucoup travaillé et continuons d'être bousculés par les questions qui se posent. Je remercie Mme Annie Vidal pour son intervention.
Par ailleurs, je regrette que, du fait d'un bruit de fond permanent, il soit si difficile de nous entendre.
Je ne peux que souscrire à vos propos, s'agissant du bruit comme du respect que nous nous devons tous. Nous avons eu de beaux débats depuis lundi ; les positions des uns et des autres doivent être entendues ; c'est la démocratie.
Vous avez expliqué, madame la ministre, que l'acte pourrait être réalisé dans un établissement de santé public ou privé, dans un établissement ou un service social ou médico-social ou au domicile de la personne. Par l'amendement CS678, nous proposons de l'écrire clairement dans le projet de loi, afin de clore ce débat.
Monsieur Bazin, vous avez parlé des Ehpad et de l'attitude que peut parfois avoir la famille. C'est précisément la raison pour laquelle il importe que la personne exprime sa volonté de manière libre et éclairée ; et c'est aussi pour cela que le rôle de la personne de confiance est très encadré. J'étais la semaine dernière dans une maison de retraite : le personnel était très inquiet à l'idée que l'on puisse refuser l'aide à mourir dans leur établissement. Ils souhaitent pouvoir accompagner jusqu'au bout les résidents dont ils s'occupent parfois depuis des années.
Vous proposez d'exclure les établissements pénitentiaires : le problème des listes est qu'elles ne sont jamais exhaustives. Surtout, je ne suis pas favorable à cette restriction.
Avis défavorable.
Les amendements qui nous sont soumis sont de deux types. Certains d'entre eux visent à exclure les établissements de santé, ce qui pose un problème pour les personnes qui sont hospitalisées. Vous disiez tout à l'heure, monsieur Bazin, qu'il fallait débattre de la question du lieu, mais cela revient à établir une clause d'exclusion pour des gens qui n'ont pas d'alternative.
Quant à l'amendement de nos collègues socialistes, en proposant une liste de tous les lieux où l'acte pourra être accompli, il en oublie certains, à commencer par les centres pénitentiaires.
Ce qui sous-tend ce débat, c'est le sens du métier de soignant. Dans les hôpitaux et les Ehpad, dans les lieux où prévaut le précepte Primum non nocere – « D'abord ne pas nuire » –, dans les lieux où l'on apprend la lenteur, la patience, l'attention et où opèrent des associations qui accompagnent les personnes âgées – même si j'entends bien que cette loi ne concerne pas qu'elles –, je crains qu'il n'y ait un choc entre deux logiques. Du reste, les soignants ont clairement dit que cette question fracturait leur communauté. Rendre possible l'aide à mourir, l'euthanasie ou le suicide assisté dans des lieux dédiés aux soins va inévitablement poser un problème aux soignants eux-mêmes.
À l'inverse, chère collègue, imaginez ce que peut ressentir une équipe médicale qui s'occupe d'un patient en soins palliatifs si, lorsqu'il demande à bénéficier de l'aide à mourir, on le renvoie chez lui ! Imaginez le traumatisme que cela peut représenter.
Monsieur Bazin, je ne sais pas comment vous pouvez écrire dans votre exposé sommaire que « les centres pénitentiaires devraient également être exclus des lieux où l'aide à mourir est pratiquée, pour ne pas laisser penser que l'aide à mourir pourrait être une alternative aux peines prononcées par les juges ».
Ce qui crée un traumatisme, ce n'est pas de savoir qui, dans le service, va invoquer la clause de conscience. Ce qui est traumatisant, c'est quand un de nos résidents part mourir à l'hôpital et que la famille revient chercher les meubles à l'Ehpad en nous disant que leur père ou leur mère est décédé avec des inconnus, et pas auprès de nous. Ce qui est traumatisant, c'est que nos résidents meurent à l'hôpital et pas à leur domicile, c'est-à-dire à l'Ehpad. Pour les soignants de l'Ehpad, c'est violent.
La clause de conscience permettra de faire la distinction entre les collègues qui veulent bien faire cet acte et ceux qui ne le veulent pas. Nous travaillons en équipe, nous partageons les tâches et personne ne juge les autres, en fonction de ce qu'ils acceptent ou non de faire. Alors laissez nos résidents mourir sur leur lieu de résidence, et pas ailleurs.
L'amendement CS678 me paraît trop restrictif. Il faut que le patient se trouve dans un environnement où il se sent bien. Ce pourrait d'ailleurs être au domicile d'un proche : il ne faut pas exclure cette possibilité. Le fait que cela doive se faire « dans des conditions convenues avec le médecin ou l'infirmier » sous-entend que des conditions de sécurité minimales seront respectées et que la voie publique sera, de fait, exclue.
Depuis le début des débats, deux logiques s'affrontent. Certains placent le patient au centre de leur raisonnement ; d'autres ont des considérations distinctes. M. Juvin et les membres du groupe Rassemblement National font partie des seconds. Imagine-t-on le ballet des ambulances qui emmèneraient des patients en phase terminale, ou souffrant profondément, mourir ailleurs que dans leur établissement de santé ?
Enfin, j'invite nos collègues à choisir avec attention leurs mots lorsqu'ils rédigent leurs amendements. M. de Lépinau rapproche les termes « suicide assisté » et « euthanasie » du verbe « exécuter » – c'est choquant.
Madame Fiat, comme vous, je suis une ancienne soignante ; je comprends ce que vous voulez dire. Mais je me mets aussi à la place des autres résidents de l'Ehpad, qui peuvent trouver compliqué de voir ainsi partir des personnes qu'ils côtoient depuis des années. Quand je travaillais en Ehpad, on envoyait le plus souvent les personnes concernées à l'hôpital.
Je comprends tout à fait qu'un patient veuille mourir dans l'Ehpad qui est devenu son domicile. Je m'interroge toutefois sur la faisabilité. Les établissements ne disposent pas toujours d'un médecin coordonnateur, ou celui-ci occupe 0,2 équivalent temps plein, ni d'une infirmière. Est-ce qu'il existera des équipes mobiles de soins palliatifs suffisantes pour effectuer les démarches ? Il n'est pas certain en effet que les équipes en place dans les Ehpad soient en mesure d'assumer ces nouvelles missions. D'un autre côté, il serait peut-être difficile de faire venir des professionnels de santé dans l'établissement à seule fin d'accompagner la fin de vie. Il est sans doute nécessaire d'en discuter encore avec les professionnels des Ehpad.
C'est la pathologie du patient qui doit guider notre réflexion. Dans quelque lieu qu'il se trouve, il est en fin de vie, et accompagné tout au long du parcours – la notion de temps prend ici tout son sens.
Le patient doit pouvoir choisir, en accord avec le médecin qui l'accompagne, l'endroit où il souhaite que le produit létal soit administré. L'alinéa 3 prévoit que ce peut être « en dehors de son domicile », afin qu'il puisse choisir un lieu où il ne réside pas habituellement. J'ajoute qu'une liste est forcément restrictive, puisqu'il est compliqué d'y inscrire toutes les éventualités.
Vous avez posé la question du milieu carcéral, mais le patient est en fin de vie. Il est donc soit dans une unité hospitalière spécialement aménagée, soit dans un service hospitalier. Le contexte est déjà médicalisé.
Pour ces raisons, j'émets un avis défavorable aux amendements en discussion commune.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle adopte l'amendement CS1938 de Mme Laurence Cristol.
Amendement CS1780 de M. Philippe Vigier
L'alinéa 4 prévoit que le demandeur peut être accompagné des personnes de son choix lors de l'administration de la substance létale. Le présent amendement tend à préciser que ces personnes doivent être volontaires.
Cet ajout est inutile. L'article 5 prévoit que les professionnels de santé qui administrent la substance sont volontaires ; l'article 16 détaille la clause de conscience dont ils bénéficient.
Avis défavorable.
Même avis.
L'aide à mourir est organisée au domicile de la personne où dans un autre lieu déterminé, en présence des personnes qu'elle aura choisies, que le texte n'entend pas contraindre. L'amendement est satisfait.
L'amendement est retiré.
Amendement CS1704 de M. Christophe Bentz
L'alinéa 4 est ainsi rédigé : « [La personne] peut être accompagnée par les personnes de son choix pendant l'administration de la substance létale. » Vous confirmez donc que c'est bien le demandeur qui donne l'autorisation ?
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1779 de M. Cyrille Isaac-Sibille
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 9 modifié.
Article 10 : Circuit de la substance létale
Amendements de suppression CS102 de M. Thibault Bazin et CS716 de Mme Annie Genevard
L'article 10 ne prévoit aucune clause de conscience pour les pharmaciens. Dans son avis, le Conseil d'État explique que cela se justifie parce que « les missions de réalisation de la préparation magistrale létale et de délivrance de la substance létale [...] ne concourent pas de manière suffisamment directe à l'aide à mourir pour risquer de porter atteinte à la liberté de conscience des pharmaciens ». L'analyse est sophistiquée. Le lien entre la préparation de la substance létale et le suicide assisté est certes indirect, toutefois ladite substance ne pourra servir qu'à cet usage : ne pas accorder de clause de conscience aux pharmaciens obligera certains à préparer des substances dont l'usage contredirait leur conscience. Une loi prétendument de liberté aboutirait ainsi à contraindre certains professionnels et à leur causer de la souffrance. Dès lors, le présent amendement tend à supprimer l'article.
Le projet de loi est fondé sur l'autodétermination. L'article 10 prévoit que la pharmacie ne remettra pas le produit létal à son destinataire. Nous demandons donc sa suppression. Nous avons souvent cité l'Oregon : là-bas, seule la personne concernée peut retirer le produit de l'officine.
Le Conseil d'État s'est prononcé contre l'octroi d'une clause de conscience aux personnes chargées de la préparation magistrale ; ils n'en disposent pas non plus pour la délivrance de la pilule abortive, par exemple. Par ailleurs, nous avons auditionné la présidente et la directrice générale du Conseil national de l'Ordre des pharmaciens, qui s'est prononcé contre la création d'une telle clause.
Avis défavorable.
Même avis. Ni le Conseil d'État, ni la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) n'y voient une rupture d'égalité ou une atteinte à la liberté de conscience, garantie par l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme et par l'article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. En effet, les missions de réalisation et de délivrance de la préparation magistrale létale interviennent après la prise de décision et avant l'administration : elles ne concourent pas assez directement à l'aide à mourir pour porter atteinte à la liberté de conscience des pharmaciens et des personnes qui travaillent auprès d'eux.
Si les pharmaciens disposaient d'une clause de conscience, ils pourraient refuser de préparer des médicaments spécifiques susceptibles, à haute dose, de provoquer la mort. De la même manière, on sait désormais que les substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées sont mortelles : ceux qui les préparent pourraient demander à bénéficier d'une clause de conscience, comme les personnes qui s'occupent des déchets nucléaires. L'existence d'une clause de conscience est essentielle pour ceux qui prescrivent la substance ou qui l'administrent, pour les autres la participation est indirecte : si on leur donne une clause de conscience, on arrête de travailler en France.
La distinction est éminemment justifiée, c'est pourquoi les juristes invoqués l'ont établie. D'abord, les pharmaciens n'interagissent pas directement avec les bénéficiaires. Dès lors, la clause de conscience n'est pas fondée. Ensuite, la faible concentration des pharmacies pose un problème. L'existence d'une telle clause entraverait, voire empêcherait, l'exercice du droit à l'aide à mourir, alors qu'il n'en va pas de même pour les praticiens de santé qui accompagnent les malades, car ils sont suffisamment nombreux.
Mme Genevard a affirmé que le produit devrait être délivré non au médecin ou au pharmacien, mais au patient lui-même, puisque tout repose sur sa volonté. On voit le subterfuge : l'objectif est d'interdire l'aide à mourir ou d'en restreindre l'accès, puisque les patients concernés, en fin de vie, seront incapables d'aller chercher eux-mêmes le médicament à la pharmacie. J'ajoute qu'il vaut bien mieux que des substances de cette nature soient remises à un professionnel de santé.
Les représentants des syndicats de pharmaciens que nous avons auditionnés nous ont fait un clin d'œil historique, expliquant que depuis l'ordonnance de Jean le Bon, en 1353, ils étaient les « gardiens des poisons ». Ils ont rappelé qu'ils n'avaient pas demandé de clause de conscience pour délivrer la pilule abortive. Selon eux, en introduire une dans ce texte risquerait de créer un précédent. Ils ont conclu en soulignant qu'ils avaient une obligation de résultat. Il faut cesser de s'interroger sur l'opportunité d'une clause que les professionnels eux-mêmes ne demandent pas.
J'ai travaillé trente-cinq ans dans une pharmacie. Le pharmacien délivre les ordonnances et soigne les patients ; il rencontre les familles. Surtout en zone rurale, les clients sont souvent les mêmes : le pharmacien connaît les enfants, puis les petits-enfants. Il lui est difficile de délivrer une dose létale à une personne qu'il a accompagnée pendant des années. Sans parler de la clause de conscience, il faut envisager l'aspect traumatisant de l'acte : il est là pour délivrer des médicaments qui soigneront. Je me mets à sa place.
Madame la ministre, que dit le Conseil national de l'Ordre des pharmaciens à ce sujet ?
Je travaille en pharmacie depuis tout aussi longtemps ; tous les pharmaciens sont proches de leurs clients. Il n'existe pas pour autant de clause de conscience, car le pharmacien ne peut pas juger du bien-fondé de la prescription. La situation peut être compliquée pour certains, mais c'est consubstantiel à notre exercice.
Vous avez tout dit, madame la présidente. La présidente du Conseil de l'Ordre des pharmaciens nous a expliqué que la clause de conscience n'était pas nécessaire parce que le pharmacien n'interviendra pas directement dans le dispositif, qu'il agira dans le cadre d'une prescription et que c'est son job de l'exécuter – pardonnez le terme.
Il ne faut pas ici faire de distinction entre les professions médicales : le fondement de la clause de conscience n'est pas professionnel, mais humain. Il faut entendre et respecter le choix de toute personne qui ne voudrait pas participer au processus de mort provoquée – de suicide assisté ou d'euthanasie. Pour cette raison notamment, nous voterons ces amendements.
Je confirme que la présidente de l'Ordre des pharmaciens a bien tenu les propos évoqués.
C'est la pharmacie à usage intérieur (PUI) qui préparera le produit létal. Dans certains cas, tout se passera dans le milieu hospitalier ou à l'Ehpad. Dans d'autres, lorsque le patient sera à son domicile, il faudra faire transiter la substance par une pharmacie d'officine. Le pharmacien la remettra au professionnel de santé qui assistera à l'administration. Nous le verrons par la suite, ce professionnel devra également récupérer le produit restant et son conditionnement pour les renvoyer à la PUI, au besoin en passant par une pharmacie.
La commission rejette les amendements.
Amendement CS2006 de Mme Laurence Cristol
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement CS1939 de Mme Laurence Cristol.
Amendement CS231 de M. Philippe Juvin
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS679 de Mme Marie-Noëlle Battistel
L'amendement tend à préciser que la pharmacie réalise la préparation magistrale « dans les meilleurs délais ». Il faudra faire face à des situations qui exigent d'agir rapidement.
L'article 10 prévoit que la date fixée par le médecin et le demandeur conditionne la réalisation de la substance létale. L'amendement est satisfait.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1177 de M. Thibault Bazin
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS329 de Mme Sandrine Dogor-Such, CS1525 de Mme Geneviève Darrieussecq et CS1706 de M. Christophe Bentz
Mon amendement vise à limiter la préparation de la substance létale aux pharmacies hospitalières, donc à exclure les pharmacies des Ehpad. L'euthanasie et le suicide assisté ne sont pas des actes médicaux, elles n'ont donc pas à délivrer la substance létale. Surtout, il s'agit de protéger les personnes hébergées en Ehpad.
Mon amendement est identique, pour des raisons différentes. Il serait plus sûr et plus efficace de limiter la préparation aux pharmacies hospitalières, qui disposent de plus de pharmaciens et seront mieux à même de la réaliser dans les délais.
Les Ehpad sont d'abord des lieux de vie. Mon amendement tend à exclure leurs PUI du dispositif. Imaginez les conséquences psychologiques pour les résidents de la possible présence de substances létales dans la pharmacie interne – ce serait ravageur.
L'argument de Mme Darrieussecq est pertinent. Plusieurs d'entre nous connaissent la situation des Ehpad, qui comptent en général cinquante ou soixante résidents. La pharmacie intérieure travaille souvent au fil de l'eau. Le personnel soignant exerce déjà de nombreuses missions. C'est compliqué. Je suis donc favorable à préciser que la substance létale sera préparée et distribuée par la pharmacie hospitalière.
Il n'y a pas une PUI dans chaque Ehpad, ceux qui en ont ne disposent pas forcément d'un pharmacien, et jamais à temps plein. Avis favorable.
Cette proposition est d'autant plus intéressante qu'elle est issue de la réalité du terrain – on a souvent demandé la fermeture de ces PUI.
Elle soulève une autre question. Les PUI des établissements hébergeant des personnes en situation de handicap emploient des pharmaciens des hôpitaux et s'organisent donc souvent en réseau. Le pharmacien n'est donc pas toujours présent, notamment pour délivrer les médicaments. En tant que maire, j'ai pu constater que la mort, naturelle, survient aussi dans les maisons d'accueil spécialisées. L'aide à mourir y sera-t-elle possible ?
Je suis favorable aux amendements identiques, pour des raisons différentes de celles de Mme Darrieussecq, quoique je n'ignore pas que beaucoup d'Ehpad n'ont pas de pharmacien. Je suis opposée à ce qu'on administre la mort, par euthanasie ou par suicide assisté, dans les Ehpad.
Pendant la crise liée au covid, nombre d'entre nous en avons visité. Dans ma commune, j'ai été frappée par le témoignage d'une soignante : elle ne supportait plus le bruit des fermetures éclair, qui lui évoquait celui des housses mortuaires. La mort des résidents a traumatisé le personnel des Ehpad. Les soignants ne seront certainement pas indifférents à ce qu'on va leur faire faire.
Ces amendements sont de bon sens. Rares sont les PUI d'Ehpad capables de gérer ce type de préparation ; mieux vaut en réserver la tâche aux structures hospitalières.
Les Ehpad n'ont-ils pas des contrats avec des pharmacies extérieures ? Là où je travaille, nous recevons des piluliers.
Je soutiens également les amendements. Pourriez-vous toutefois préciser si les cliniques privées seront concernées ? Elles ont également des PUI.
Si l'Ehpad dispose d'une pharmacie à usage interne et qu'il faut aller chercher le produit à 50 kilomètres, la mesure risque d'être dissuasive. Qui d'ailleurs va chercher la substance ? Cela pose encore la question du personnel des Ehpad.
La PUI, la pharmacie à usage intérieur, peut se trouver aussi bien dans une clinique privée que dans un hôpital public ; son existence dépend de la taille de l'établissement.
Madame Fiat, les contrats que vous évoquez existent bien. La pharmacie livre chaque jour les piluliers aux Ehpad, dont le personnel distribue les médicaments aux résidents.
Concrètement, le produit létal sera spécifiquement fabriqué dans une PUI, puis livré dans une pharmacie proche du patient. Le médecin ne fera pas 50 kilomètres : il ira chercher le produit dans cette même pharmacie, et fera réacheminer le reste et le conditionnement vers la PUI.
Le problème naît de l'absence de préparateur ou de pharmacien dans les PUI des Ehpad pour réaliser la préparation magistrale. Il faut donc que la PUI de l'hôpital le plus proche s'en charge.
La commission adopte les amendements.
Amendement CS1742 de M. Christophe Bentz
Le présent amendement tend à préciser que l'officine doit être volontaire, afin de revenir à la nécessité d'une clause de conscience. Je le répète, la question n'est pas professionnelle mais humaine.
Sur la clause de conscience, nos collègues ont été prompts à citer la présidente du Conseil national de l'Ordre des pharmaciens, mais ont montré moins d'allant à évoquer les conclusions des personnes auditionnées qui n'allaient pas dans leur sens, comme les représentants de l'Ordre des médecins et de celui des infirmiers. M. le rapporteur général par exemple n'a cité des interventions du premier que le passage qui le servait – l'honnêteté m'oblige à dire que j'aurais peut-être fait la même chose ! Certains pharmaciens se sont très clairement exprimés contre l'euthanasie, notamment dans des tribunes.
J'ai l'impression que certains estiment le débat inutile, parce que le pharmacien ne ferait que distribuer. Or, vous le savez bien, madame la présidente, l'article R. 4235-2 du code de la santé publique dispose qu'il exerce une mission d'information. Une telle obligation n'est pas anodine, en particulier lorsqu'on délivre une substance de cette nature. D'ailleurs, certains pays qui vous ont servi de modèle ont octroyé une clause de conscience aux pharmaciens, comme l'Espagne et la Belgique.
Je confirme que le pharmacien ne se contente pas d'exécuter les ordonnances : il conseille et explique – et joue bien d'autres rôles !
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS622 de Mme Sandrine Dogor-Such
Le présent amendement vise à empêcher que le médecin ou l'infirmier accompagnant le demandeur désigne l'officine de retrait à la place de ce dernier, qui peut avoir l'habitude de se rendre dans une autre pharmacie que la plus proche de son domicile.
Nous avons également beaucoup réfléchi à cette question, importante et débattue. J'ai déposé un amendement qui va dans le même sens mais qui est mieux disant : je vous propose de retirer le vôtre à son profit.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CS882 de M. Julien Odoul et CS334 de Mme Sandrine Dogor-Such (discussion commune)
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements.
Puis, suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CS590 de Mme Christine Loir.
Amendement CS2028 de Mme Laurence Cristol
L'amendement vise à préciser que le professionnel de santé désigne la pharmacie d'officine chargée de délivrer la substance létale en accord avec le patient, afin, le cas échéant, de respecter le souhait de confidentialité ou de discrétion de ce dernier. En effet, le pharmacien entretient parfois une relation privilégiée avec ses patients.
Avis de sagesse. La proximité peut conduire le patient à choisir une pharmacie plus éloignée, pour garder ses choix de fin de vie confidentiels.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS1787 de Mme Anne Bergantz
L'amendement fait suite à l'audition de pharmaciens qui ont appelé notre attention sur le fait que les substances létales pouvaient être très rapidement périmées. Nous ne savons pas aujourd'hui combien de PUI fabriqueront la substance létale dont la distribution fera l'objet d'un circuit dédié. Il est important que le choix de la Haute Autorité de santé (HAS) garantisse l'égalité territoriale d'accès aux substances létales – nous pensons à l'outre-mer mais à la métropole également.
Le dispositif permet d'assurer, dans des conditions de transport sécurisées, la répartition des substances produites par les PUI dans les pharmacies d'officines sur l'ensemble du territoire.
J'ai été interpellé sur certains produits de nutrition pour des maladies rares qui font également l'objet d'un circuit spécifique. J'imagine que le choix de la HAS s'en inspirera pour veiller à une répartition égale des substances létales.
Je partage évidemment votre souci. La procédure repose sur le maillage territorial des pharmacies d'officine pour assurer l'égal accès aux substances. Elles seront toutes en mesure de réceptionner les substances en provenance des PUI. La liste des PUI devra respecter l'égalité territoriale.
Je suis très favorable à l'amendement. Dans un territoire tel que la Polynésie française, il ne sera pas simple d'assurer l'accès aux substances.
Le bon maillage pour les PUI est à mes yeux départemental. Ne créons pas une nouvelle disparité alors que vingt départements souffrent déjà d'être privés d'unité de soins palliatifs. La proximité est une condition de l'appropriation de l'aide à mourir et du recours aux soins palliatifs que nous souhaitons développer.
J'ai compris que le texte prévoyait des modalités spécifiques d'approvisionnement pour l'outre-mer.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS917 de M. Philippe Juvin
Madame la ministre, vous avez souvent cité l'exemple de l'Oregon où le retrait est effectué par la personne elle-même. L'amendement s'en inspire.
Défavorable.
C'est le professionnel de santé qui retire le produit létal et repart avec le contenant et le reste du contenu éventuel. Dans la procédure prévue – c'est la grande différence avec l'Oregon –, le patient n'est jamais seul avec le produit, si vous me passez l'expression.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS914 de M. Philippe Juvin
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS1528 de Mme Geneviève Darrieussecq et CS1627 de Mme Annie Vidal
L'amendement vise à exiger une transcription sur un livre d'enregistrement ou un enregistrement par tout système approprié des préparations qui sont très particulières. Vous allez certainement me dire que les produits sont déjà très sécurisés, mais la traçabilité est indispensable.
Je rebondis sur l'amendement précédent, il me semble très dangereux de confier de tels produits à une personne qui n'est pas un soignant.
Il s'agit de renforcer la traçabilité. Vous allez me dire qu'il est satisfait. Dans cette hypothèse, je le retirerai.
Toute préparation magistrale doit être inscrite sur un ordonnancier, assortie d'un numéro.
N'oublions pas le système d'information prévu à l'article 13, qui offre une autre garantie de traçabilité.
Les amendements sont retirés.
Amendement CS280 de Mme Sandrine Dogor-Such
Il s'agit de préciser, comme cela a été proposé dans d'autres mandements, que le patient est en phase terminale.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 10 modifié.
Article 11 : Accompagnement de la personne pendant l'administration, modalités de cette administration et devenir de la substance létale non utilisée
Amendement de suppression CS103 de M. Thibault Bazin
Nous l'avons brièvement évoqué lors de l'examen de l'article 5, l'amendement concerne la notion de personne volontaire.
Si des proches de la personne en fin de vie venaient à être désignés, quel serait l'impact psychologique pour eux ? Leur discernement et leur liberté seraient-ils garantis ? N'y a-t-il pas un risque que le proche se sente contraint d'accepter et éprouve ensuite du remords ?
Selon une étude réalisée en Suisse, 13 % des personnes ayant assisté à un suicide assisté montraient des symptômes d'état de stress post-traumatique et 16 % souffraient de dépression. Ces chiffres doivent nous interpeller. L'impact sur la personne volontaire sera d'autant plus fort que l'acte est beaucoup plus engageant que dans le cas du suicide assisté.
Par ailleurs, la précaution consistant à s'assurer que la personne confirme qu'elle veut procéder à l'administration me semble un peu ambiguë, madame la ministre. Une personne affaiblie ou âgée pourrait avoir des difficultés à exprimer son refus.
Les vérifications auxquels on procède pour la personne demandeuse – en particulier le fait de savoir si elle confirme sa volonté de procéder à l'administration – s'appliquent-elles aussi à la personne volontaire ? Je mesure difficilement le poids que pourrait représenter pour la personne volontaire la responsabilité d'administrer la substance. Par cette innovation française, ne sommes-nous pas en train de créer des détresses futures ?
Je partage le souhait d'écarter les proches mais cela ne justifie en rien de supprimer complètement l'article. Nous pourrons déposer des amendements en ce sens.
J'ai beaucoup réfléchi à la possibilité de désigner un proche. Il me semble que cela relève de l'intimité de la relation entre deux personnes : il y a des cas dans lesquels le proche se sentira capable de le faire et d'autres dans lesquels il ne s'en sentira pas capable. Il ne me paraît pas souhaitable de l'exclure par principe.
Monsieur Bazin, les statistiques que vous avez données sur l'état de stress ou la dépression dont souffrent des personnes ayant assisté à des morts assistées pourraient valoir de manière générale pour les personnes endeuillées. Je crois qu'entre 10 et 20 % des personnes sont traumatisées ou en dépression après le deuil d'un proche. Il ne faut pas surestimer ou construire une démonstration à partir de telles statistiques.
Nous cherchons à juste titre à protéger les personnes mais nous devons aussi protéger les soignants.
J'avais déposé un amendement qui leur donnait accès à un soutien psychologique. Malheureusement il a été victime du fameux article 40 alors que ce n'était pas une énorme dépense supplémentaire. Ce que l'on appelle le stress post-traumatique peut potentiellement affecter tout le monde. Nous devons être attentifs à chaque personne qui intervient dans le processus.
Nous voterons évidemment les amendements de suppression. Nous défendons les soignants. Le rôle des médecins et des infirmiers, ce n'est pas d'administrer la mort, c'est au contraire de soigner et ce, jusqu'à la fin de la vie.
Je ne sais pas si vous avez bien conscience de ce que vous êtes en train de faire ici : l'intervention de la personne volontaire n'est assortie d'aucun garde-fou – on ne sait même pas si la personne doit être majeure !
Les médecins et les infirmiers, pour lesquels nous défendons la clause de conscience, ont malgré tout l'habitude d'être confrontés à la mort. Ce n'est pas nécessairement le cas des personnes volontaires qui pourraient être désignées. Imaginez, un instant, les conséquences psychologiques pour celui ou celle qui administrera la mort.
La question du volontaire désigné me semble essentielle. Or le proche aidant, qui peut être la personne volontaire, est exclu de l'ensemble de la procédure : il n'est ni informé, ni consulté, ni sollicité au motif que la décision du patient doit être personnelle – je le comprends. Néanmoins, on lui permet d'intervenir à la fin du processus. Ce n'est pas cohérent. Le proche aidant est présent tout au long du parcours d'un malade. En l'occurrence, le proche aidant va accompagner la personne atteinte d'une pathologie lourde pendant plusieurs années mais si le malade demande l'aide à mourir, le proche aidant ne sera pas associé au processus sauf au dernier moment. Ce n'est pas satisfaisant du tout.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS2007 de Mme Laurence Cristol
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS233 de M. Philippe Juvin
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS680 de Mme Christine Pires Beaune
Il s'agit d'un amendement rédactionnel visant à préciser que la procédure décrite à l'article 11 se déroule le jour de l'administration de la substance létale.
La commission adopte l'amendement.
Amendements CS335 de Mme Sandrine Dogor-Such et CS883 de M. Julien Odoul (discussion commune)
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements.
Puis, suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette successivement les amendements CS592 de Mme Christine Loir et CS281 de Mme Sandrine Dogor-Such.
Amendement CS943 de Mme Cécile Rilhac
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Puis, suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CS1707 de M. Christophe Bentz.
Amendement CS1529 de M. Hervé de Lépinau
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS234 de M. Philippe Juvin
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS502 de M. Nicolas Ray
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS235 de M. Philippe Juvin
Cet amendement permet de répondre à l'inquiétude exprimée par M. Le Gendre il y a quelques instants. Il vise ainsi à écarter les proches de la personne demandeuse.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS944 de Mme Cécile Rilhac
L'expression « qui a confirmé sa volonté » dans l'alinéa 5 me semble inutile puisque la volonté de la personne est déjà vérifiée à l'alinéa 2.
Cette disposition est nécessaire pour distinguer la situation de la personne qui demande le report de l'administration de la substance létale de celle qui y renonce. Dans le premier cas, la procédure est seulement suspendue tandis que dans le second, il y est mis fin.
J'émets un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS236 de M. Philippe Juvin et CS884 de M. Julien Odoul
Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette les amendements.
Amendements CS682 de Mme Christine Pires Beaune, CS681 de M. Jérôme Guedj, CS1372 de M. Gilles Le Gendre, CS1862 de M. Emmanuel Fernandes et CS1085 de Mme Sandrine Rousseau (discussion commune)
Depuis le début de l'examen du texte, revient très souvent – c'est bien légitime – la question du respect du choix du patient.
C'est la raison pour laquelle l'amendement CS682 vise à laisser au patient le libre choix de l'administration de la substance létale : « par elle-même, par une personne volontaire qu'elle désigne ou par le professionnel de santé présent ».
Quant à l'amendement CS681, tout en laissant le libre choix à la personne, il supprime le recours à la personne volontaire.
Mon amendement est presque identique. Je suis opposé à ce que le proche administre la substance létale et je suis favorable à ce que la personne ait le choix. Il est donc proposé de remplacer les deux alinéas par un seul en vertu duquel « selon le choix de la personne, l'administration de la substance est effectuée par elle-même ou par le professionnel de santé qui l'accompagne ».
Dans le même esprit, nous souhaitons par l'amendement CS1862 que la personne ait le choix jusqu'à la fin. La personne a déjà choisi de mettre fin à ses souffrances mais si au dernier moment, elle ne sent pas capable d'effectuer l'acte ou si elle veut être accompagnée par un proche ou par le médecin qui l'a suivie, elle doit conserver cette possibilité, même si elle est physiquement capable de s'administrer la substance.
Le projet de loi, je le répète une fois de plus, repose sur un équilibre. Il prévoit que la substance létale n'est administrée par un tiers que lorsque la personne n'est pas en mesure d'y procéder par elle-même.
Ce dispositif permet de respecter l'autonomie de la personne jusqu'à la fin du processus : c'est à elle qu'il appartient de recourir à l'aide à mourir, ce qui lui laisse aussi la faculté de renoncer jusqu'au dernier moment. Toutefois, conformément à ce que préconisait le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) dans son avis, la possibilité d'administration par un tiers est ouverte afin de ne pas exclure ceux qui ne sont physiquement plus aptes à un tel geste. Le fait de faire de l'administration par un tiers une exception constitue un point d'équilibre du texte sur lequel il ne faut pas revenir.
Avis défavorable.
Je partage ce qui vient d'être dit. L'aide à mourir, sur laquelle repose le projet de loi, vise effectivement à couvrir les situations dans lesquelles l'autonomie de la personne lui permet d'avoir le choix jusqu'au bout de réaliser l'acte seule ou dans l'intimité, ainsi que les situations requérant l'aide d'un professionnel ou d'une personne volontaire pour l'administration du produit.
Le texte concilie les principes d'autonomie et de solidarité : si la personne n'est pas capable de le faire, elle a la certitude que la personne qu'elle aura choisie peut l'aider. L'auto-administration est la règle, et l'administration demandée par un tiers reste l'exception.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à ces amendements.
Je suis défavorable également. Tout n'a pas été bien écrit dans ce projet de loi mais cet article l'est.
La personne donne son avis ; elle fait le geste ultime puisque c'est son choix mais en cas d'impossibilité, elle peut être aidée. Un très bon équilibre a été trouvé, il ne faut pas y toucher.
Madame la ministre et madame la rapporteure, vous avez évoqué l'exception. C'est le terme qu'a employé le Conseil d'État pour qualifier le suicide assisté et l'euthanasie.
Il est vrai que la portée de l'acte n'est pas la même selon qu'il est effectué par un tiers ou par soi-même. La loi a vocation à s'appliquer dans la durée mais on ne peut ignorer ce qui se passe ailleurs. Certains pays ont été assez créatifs puisqu'ils ont imaginé des solutions novatrices, lorsqu'il était physiquement impossible pour la personne de s'administrer la substance, notamment grâce à des ceintures. L'exception que constitue l'intervention d'un tiers pourrait donc devenir sans objet.
L'aide à mourir est déjà une procédure exceptionnelle. Elle le devient encore plus si une tierce personne est appelée à intervenir. Il me semble que le débat devrait se porter davantage sur la tierce personne, notamment sur le point de savoir si elle peut être un proche ou on.
Je regrette le manque de précision des amendements : je ne comprends pas très bien ce qu'il advient si le professionnel de santé présent ne souhaite pas accomplir le geste. Par ailleurs, ces amendements concernent certainement un nombre de cas très limités car la technique permet déjà à des personnes en grande difficulté physique de faire démarrer une perfusion au moyen d'un battement de paupières par exemple. Il est donc possible d'éviter l'intervention d'une tierce personne.
Il est question dans le projet de loi de la volonté du patient.
Toutes les législations consacrent le libre choix du patient – faire le geste soi-même ou le faire faire par un professionnel. Le professionnel est présent pour s'assurer que le processus se passe bien et que la personne puisse véritablement mette fin à ses jours. Il faut rappeler que les produits utilisés ne sont pas les mêmes selon qu'ils sont administrés par soi-même ou par un professionnel. Dans le cas de l'auto-administration, il faut notamment prendre des médicaments contre les vomissements avant et parfois une perfusion est nécessaire.
L'encadrement prévu par le projet de loi est de nature à rassurer les professionnels de santé – je pense notamment à la clause de conscience. En revanche, pour ce qui est de l'exercice de la liberté de choix du patient, le texte n'est pas borné de manière satisfaisante. Aux Pays-Bas, lorsqu'un professionnel pratique l'aide à mourir, le patient est sous perfusion et plongé dans le coma, un produit arrête son cœur, cela se fait sans douleur. Lorsqu'on s'administre la substance soi-même, c'est souvent plus long et il peut y avoir d'autres aléas. Le professionnel est présent pour éviter les souffrances.
Je ne reprends pas les arguments développés précédemment. J'invite ceux qui sont favorables aux amendements à préférer celui de M. Fernandes, car il précise que la personne volontaire est majeure.
Si nous votions ces amendements, nous romprions clairement l'équilibre. Ce ne serait plus du tout le même texte.
En vertu de l'alinéa 8 de l'article 7, le médecin qui reçoit la demande « explique à la personne les conditions d'accès à l'aide à mourir et sa mise en œuvre ». Autrement dit, dès la demande, le patient sait qu'il devra faire le geste. L'auto-ingestion est la règle, l'hétéro-ingestion, donc l'intervention d'un tiers, qu'il soit professionnel ou personne volontaire, doit rester l'exception. C'est l'équilibre sur lequel repose le texte.
Je rappelle aussi la ligne de crête que nous suivons : d'un côté, la liberté de choix de la personne ; de l'autre, la nécessité de convaincre un maximum de professionnels d'accompagner les patients jusqu'au bout. Or un grand nombre d'entre eux accepteront de le faire parce qu'ils savent qu'ils n'auront pas à effectuer le geste.
Je suis franchement défavorable à ces amendements.
Je me permets de prendre la parole puisque ces amendements sont directement liés à l'article 5 dont je suis la rapporteure.
J'alerte mes collègues : je comprends votre intention mais les amendements, s'ils étaient adoptés, seraient en contradiction avec ce que nous avons voté dans l'article 5. Vous avez pu constater que je ne suis pas fermée à toute évolution mais il s'agit là d'un point d'équilibre très important du texte. Nous devons faire preuve de cohérence.
J'entends ce que vous dites mais nous faisons preuve de constance dans nos positions. Nous défendons ici exactement ce que nous avons dit dans l'article 5. Je comprends la nécessité d'harmoniser les rédactions si les amendements devaient être adoptés. Mais nous ne pouvons pas renoncer à défendre la liberté de choix du patient puisque c'est ce que nous soutenons depuis le début de l'examen du texte.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS953 de Mme Cécile Rilhac
L'amendement a pour objet d'ajouter à l'alinéa 6 les mots : « si elle en fait le choix ». Il me paraît très important de le préciser car c'est bien la personne qui doit choisir entre une euthanasie et un suicide assisté. Le choix ne doit pas lui être dicté par la maladie ou une quelconque paralysie.
Même avis pour les mêmes raisons que celles évoquées à l'instant.
Je suis pour ma part très favorable à cet amendement, puisqu'il remet la décision du patient au cœur de la discussion.
Certaines substances mettent du temps à faire effet. Dans l'Oregon, cela peut aller jusqu'à une centaine d'heures. L'accompagnement se ferait-il sur cette durée ?
On pourrait imaginer une administration par le biais d'un pousse-seringue avec interrupteur, ce qui laisserait la possibilité de l'activation au patient, au proche ou au professionnel. Un couple qui voudrait appuyer ensemble sur le bouton le pourrait aussi, grâce à cet amendement. Un professionnel pourrait l'installer. Une telle souplesse est bienvenue.
La commission rejette l'amendement.
Puis, suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CS1180 de M. Thibault Bazin.
Amendement CS237 de M. Philippe Juvin.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS1781 de M. Philippe Vigier
Je n'étais pas du tout favorable à l'amendement CS953, qui modifiait l'équilibre auquel nous étions parvenus hier.
Nous souhaiterions que l'administration de la substance létale ne soit pas réalisée par une tierce personne mais à l'aide d'un mécanisme automatisé.
Votre proposition est intéressante. Néanmoins, je crois qu'il ne faut pas fixer par avance le mode d'administration de la substance létale car celui-ci doit correspondre aux caractéristiques du patient et être défini par le médecin.
Avis défavorable.
C'est à la HAS qu'il va revenir de déterminer les modalités possibles d'administration et d'élaborer des recommandations qui aideront le médecin à adapter au mieux sa prescription. Différentes techniques peuvent être utilisées. Aussi le référentiel de la HAS sera-t-il utile. C'est peut-être dans les décrets qu'il faudra être suffisamment souple pour suivre l'évolution des différentes techniques.
J'entends ce que vous dites, madame la ministre. Je proposerai une rédaction un peu moins directive pour la séance, qui s'adapte aux différentes situations. Il est important d'avoir un mécanisme automatisé, sur le modèle des pompes à insuline, par exemple. Cela serait moins traumatisant et permettrait de respecter l'équilibre auquel nous étions arrivés hier avec la rapporteure Mme Maillart-Méhaignerie.
L'amendement est retiré.
Amendement CS1715 de M. Christophe Bentz
Je vous remercie, madame la ministre, de participer à nos débats. En quoi l'administration d'une substance létale effectuée par la personne elle-même n'est-elle pas un suicide assisté ? Par ailleurs, lorsque la personne n'est pas en mesure d'y procéder physiquement, l'administration est effectuée par une personne volontaire qu'elle désigne. En quoi n'est-ce pas de l'euthanasie ?
Vous avez mélangé deux choses. L'aide à mourir concerne des personnes qui ont une maladie grave incurable, en phase avancée ou terminale. La possibilité d'administration par un tiers, lorsque la personne n'est pas en mesure d'y procéder elle-même, correspond à la nécessité de ne pas exclure de l'accès à l'aide à mourir les personnes dont l'état physique ne leur permettrait pas d'effectuer le geste. Elle vient répondre aux observations du CCNE qui avait relevé, dans son avis 139, que « laisser en dehors du champ de la loi ceux qui ne sont physiquement plus aptes à un tel geste soulèverait un problème d'égalité des citoyens qui constitue en lui-même une difficulté éthique majeure ». Je me répète, parce que l'on revient toujours aux mêmes sujets. De plus, comme je l'ai déjà dit, aucun professionnel de santé ne sera obligé de participer à l'aide à mourir, du fait de la clause de conscience prévue à l'article 16 du projet de loi.
Avis défavorable.
Avis défavorable.
Nous sommes sur un chemin, et l'article 6 a défini les conditions d'accès à l'aide à mourir. Quelqu'un qui souhaite mettre un terme à sa vie doit être dans un état pathologique validé par un examen médical, sans quoi il ne peut pas accéder au produit létal.
Madame la ministre, vous avez eu raison de saisir la HAS. Mais n'aurait-il pas fallu attendre son avis pour examiner ce texte ? S'agissant des décrets, l'article 11 n'en mentionne pas. Or cela a des incidences, car les voies d'ingestion, digestive ou par intraveineuse, n'impliquent pas les mêmes choses pour les personnes qui interviennent, notamment les professionnels. Il manque des panneaux indicateurs sur votre chemin pour ne pas faire fausse route !
Comme vous le savez, quatre lectures sont prévues, ce qui nous laisse un peu de temps avant la finalisation d'un texte qui n'est pas d'application immédiate. En l'état du droit, rien n'oblige à préciser que la loi a des décrets d'application.
Le néophyte que je suis est très surpris que, sur un tel sujet, nous n'ayons pas un état de l'art scientifique, alors que l'acte létal est administré dans un nombre considérable de pays. Je suis en contact avec le monde médical, qui m'a dit que l'ingestion est épouvantable et que c'est l'injection qu'il faut à tout prix privilégier, parce que c'est celle qui est la plus sûre et qui a le moins d'effets indésirables. J'apprécie l'idée que l'on aille requérir l'avis de la Haute Autorité, mais je suis surpris que l'on ne puisse pas trancher aujourd'hui une question qui est très documentée. Pourquoi ne disons-nous pas que l'administration doit se faire par injection, sachant que cela n'exclut en aucun cas l'auto-administration ?
J'entends nos débats concernant ce geste que les parlementaires veulent préciser de manière étrange. Laissons faire les professionnels, qui connaissent les choses ! Que le législateur reste à sa place et le médecin à la sienne et fasse son travail.
Monsieur Le Gendre, nous n'avons pas inscrit dans la loi les termes « ingestion » ou « injection », parce que c'est le médecin qui choisira et prescrira la substance létale la plus adaptée, en fonction de la pathologie du patient.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS238 de M. Philippe Juvin et CS1225 de Mme Sandrine Dogor-Such
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette les amendements.
La réunion est suspendue de seize heures quarante à seize heures cinquante.
Amendement CS977 de Mme Cécile Rilhac et sous-amendement CS2029 de M. Hadrien Clouet, amendements CS1792 de M. François Gernigon, CS1218 de Mme Monique Iborra et CS683 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)
Je suis peut-être un peu insistante voire têtue : le patient doit avoir le choix jusqu'au bout, qu'il s'agisse de l'auto-administration ou l'administration par un tiers, soignant ou proche.
L'amendement CS1781 de M. Vigier me semblait très intéressant, quand bien même il s'agit d'un sujet réglementaire. Savoir que l'on peut avoir accès à un produit létal administré prioritairement par injection semble, sur le terrain, faciliter les prises de choix.
Nous tenons à préciser que la personne volontaire pour accompagner l'administration de la substance est majeure.
En l'absence de précision réglementaire, il convient de laisser la porte ouverte aux différentes possibilités d'administration de la substance létale, afin que la plus adaptée soit choisie par la personne avec les soignants. Je comprends mal que vous demandiez que la personne fasse obligatoirement l'administration elle-même.
Avis défavorable.
C'est par exception que la personne peut être aidée dans cet acte. Quant au débat entre l'ingestion et l'injection, le mieux est de laisser la HAS définir la modalité adaptée.
L'amendement CS1792 est retiré.
La commission adopte le sous-amendement CS2029.
Puis elle adopte l'amendement CS977 sous-amendé.
En conséquence, les amendements CS1218 et CS683 tombent, ainsi que les amendements CS1025 de M. Thibault Bazin, CS591 de Mme Christine Loir, CS1481 de Mme Emeline K/Bidi, CS593 de Mme Christine Loir, CS822 de Mme Christelle Petex, CS1581 de Mme Chantal Bouloux, CS945 de Mme Cécile Rilhac, CS561 de Mme Annie Genevard, CS684 de M. Jérôme Guedj, CS797 de M. Laurent Panifous, CS1450 de Mme Delphine Lingemann, CS156 de Mme Marie-France Lorho, CS2002 de Mme Laurence Cristol, CS1086 de Mme Sandrine Rousseau, CS1786 de Mme Anne Bergantz, CS1863 de Mme Caroline Fiat, CS240 de M. Philippe Juvin, CS562 de Mme Annie Genevard, CS685 de Mme Christine Pires Beaune, CS1280 de Mme Bérangère Couillard, CS1530 de M. Hervé de Lépinau, CS239 de M. Philippe Juvin, CS975 de Mme Véronique Besse, CS946 de Mme Cécile Rilhac et CS1220 de M. Sébastien Peytavie.
Amendement CS1318 de M. Christophe Marion
Cet amendement vise à préciser que la personne volontaire pratiquant l'aide à mourir doit être majeure, apte à manifester sa volonté d'agir de façon libre et éclairée et qu'elle ne devra recevoir aucune contrepartie pour cet acte. J'ai conscience qu'il est satisfait par l'amendement CS1959 de Mme Maillart-Méhaignerie, mais il me semble plus opportun d'apporter une telle précision à l'article 11.
Contre l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
Amendement CS1730 de M. Nicolas Turquois
Cet amendement vise compléter à l'alinéa 7 par la phrase suivante : « Toute personne peut être considérée comme une personne volontaire, à l'exclusion des époux, des conjoints et de tout parent lié jusqu'au quatrième degré de la personne au sens de l'article 743 du code civil. » Plusieurs réserves conduisent à restreindre le champ des personnes susceptibles de procéder à l'administration de la substance létale.
Il m'a toujours semblé que l'administration par un tiers non soignant était une idée déraisonnable, pour plusieurs raisons.
Avis défavorable.
Après l'adoption des amendements CS977 de Mme Rilhac et CS1318 de M. Marion peut-on encore parler de l'euthanasie comme d'une exception ? Jusqu'où sommes-nous allés ?
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1316 de M. Christophe Marion
Cet amendement vise à informer la personne volontaire qui procède à l'administration de la substance létale de son droit à bénéficier d'un accompagnement psychologique, grâce au dispositif Mon soutien psy, selon la logique de la stratégie décennale, qui prévoit un tel accompagnement pour les aidants.
Une confusion demeure entre « personne volontaire », « aidant », « tierce personne », « soignant » ou « non soignant ». La précision est néanmoins bienvenue.
Avis favorable.
La possibilité de bénéficier d'un accompagnement psychologique est essentielle afin d'accompagner au mieux les personnes engagées dans la démarche. Il est prévu de renforcer le nombre de psychologues dans les services de soins infirmiers à domicile, ce qui permettra de proposer des heures d'accompagnement psychologique dont bénéficieront tous les acteurs concernés par la fin de vie. Le projet de loi prévoyant l'obligation pour le médecin recueillant la demande d'aide à mourir de proposer des soins palliatifs, les patients, les proches, les professionnels pourront bénéficier d'un accompagnement psychologique.
Votre amendement est donc satisfait. Demande de retrait.
Il me semble bien plus pertinent de passer par des psychologues qui seront dans les services et de développer un service public plutôt que par un dispositif dont les professionnels ne se sont pas saisis. L'argent mis dedans aurait permis de créer quelque 2 000 postes de psychologues dans le service public.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS1666 de Mme Anne Bergantz
Cet amendement prévoit que soit notifiée par écrit la demande de la personne de se voir administrer la substance létale par un tiers. Ce document aurait plusieurs vertus : renforcer la traçabilité de la demande, témoigner de l'engagement et de la volonté des tiers de participer à l'acte, protéger ces derniers contre d'éventuelles accusations postérieures.
Par définition, si la personne n'est pas en mesure de s'administrer elle-même la substance létale, elle ne sera pas en mesure d'acter par un écrit son choix. L'ensemble de la procédure fera l'objet d'une traçabilité dans le système d'information. Les garanties sont donc suffisantes.
Avis défavorable.
L'article 13 dispose déjà que ces actes font l'objet d'un enregistrement écrit. Avis défavorable.
L'alinéa 6 précise que « l'administration de la substance létale est effectuée par la personne elle‑même ». L'alinéa 7 définit une procédure d'exception, si la personne n'est pas en mesure d'y procéder physiquement. Est-ce que l'adoption des amendements CS977 et CS1318 remet en cause l'exception euthanasique prévue par le Gouvernement ?
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS834 de Mme Lisette Pollet
Nous souhaitons empêcher que la personne de confiance ait le moindre intérêt dans la demande d'euthanasie ou de suicide assisté afin d'éviter les pressions économiques et de limiter les conflits d'intérêt.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendements CS123 de Mme Lise Magnier, CS1782 de M. Philippe Vigier, CS799 de M. Charles de Courson, CS1317 de M. Christophe Marion, CS1570 de Mme Brigitte Liso, CS157 de Mme Marie-France Lorho, CS1864 de M. Hadrien Clouet, CS686 de M. Stéphane Delautrette et CS1371 de Mme Maud Petit (discussion commune)
Le texte prévoit que, lorsqu'il n'administre pas la substance létale, le professionnel de santé n'est pas obligatoirement présent aux côtés de la personne mais doit se situer « à une proximité suffisante pour pouvoir intervenir en cas de difficulté ». Je propose de préciser que la présence du professionnel de santé est obligatoire, sauf demande expresse du patient. Cela me semble plus rassurant.
La présence obligatoire d'un professionnel de santé dans la pièce où a lieu l'administration nous paraît plus pertinente. Les personnes auditionnées avaient par ailleurs insisté sur le fait qu'il était important que ce soit l'un des membres de l'équipe collégiale ayant validé la décision de l'aide active à mourir qui soit présent.
Que l'administration ait lieu dans un service ou à domicile, il apparaît important que le professionnel de santé puisse être là à tout moment pour s'assurer du bon déroulement de la procédure et intervenir si besoin, d'autant que l'alinéa 3 précise qu'il « assure la surveillance de l'administration de la substance létale ».
Quel que soit le mode d'administration, on n'a pas le droit à l'erreur. En cas d'échec, il faudrait peut-être même réanimer le malade, ce qui l'engagerait de nouveau dans des processus longs et difficiles. La présence d'un professionnel de santé au moment de l'acte est indispensable, comme le prévoit l'amendement CS1570.
Par l'amendement CS1864, nous souhaitons que l'injection de la préparation létale se fasse systématiquement avec un accompagnement médical pour que cette liberté nouvelle s'exerce dans un cadre serein et sûr. L'exercice de ce droit appelle également les mesures de vigilance qu'impliquent la préparation, la remise, l'usage et l'éventuel retour d'une préparation létale. Si de telles considérations sont bien présentes dans les dispositions du projet de loi, il n'en va pas de même au moment de l'auto-administration du produit. Il ne paraît pourtant pas envisageable de dispenser le professionnel de santé, qui est responsable du produit jusqu'au terme de la procédure, d'être physiquement présent au moment de l'auto-administration. Comment assurer une intervention rapide en cas d'incident ? Comment assurer la bonne administration du produit létal ? Nous pensons que la bonne proximité est la présence dans la pièce où la substance létale est administrée, afin d'assurer la traçabilité complète du produit, la sérénité de chacun et le nécessaire accompagnement par un professionnel.
Nous souhaitons également que le professionnel de santé soit aux côtés de la personne. Cela est nécessaire à plusieurs titres. C'est rassurant pour la personne qui sera amenée à administrer la substance. Par ailleurs, il est arrivé que des couples décident de partir ensemble. Nous n'avons pas le droit à l'erreur. La présence d'un professionnel de santé aux côtés de la personne nous prémunit contre l'éventualité où la substance pourrait être partagée par le ou la partenaire.
Nous sommes plusieurs à souhaiter que le professionnel de santé soit aux côtés de la personne qui va s'administrer la substance létale. Cela permettrait également d'être cohérent avec l'alinéa 3 qui précise que le professionnel de santé assure la surveillance de l'administration de la substance létale.
Les différents amendements proposés visent à imposer la présence du professionnel de santé aux côtés de la personne lors de l'administration de la substance létale, voire à rendre cette présence obligatoire dans la même pièce. La rédaction actuelle de l'article 11 est ambiguë, puisqu'il indique que la présence du professionnel de santé aux côtés de la personne n'est pas obligatoire mais qu'il doit se trouver à proximité pour pouvoir intervenir en cas de difficulté. Il ne me semble pas nécessaire d'imposer la présence du professionnel de santé dans la même pièce que le patient si cela n'est pas sa volonté et s'il souhaite avoir l'intimité nécessaire.
L'amendement CS848 de Mme Pouzyreff visant à préciser que le professionnel de santé doit se trouver « en vision directe » de la personne lors de l'administration me semble plus pertinent.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Toute la question est celle de l'équilibre entre sécurité et respect de l'intimité. L'intérêt de l'amendement CS848, c'est que l'expression « en vision directe » permet une proximité – dans le couloir, porte ouverte – sans être au chevet du patient, ce qui laisse un minimum d'intimité à celles et ceux qui sont autour de la personne qui absorbe le produit létal. Avis favorable à l'amendement CS848 et demande de retrait pour les autres.
Compte tenu des explications, je retire mon amendement, non sans vous dire que je ne suis pas complètement convaincue par la rédaction de l'amendement CS848. La porte ouverte, je ne suis pas certaine que cela garantisse l'intimité du moment... Expliquez-moi concrètement comment cela va se passer.
Je ne suis pas complètement convaincu non plus, même si je veux bien faire un effort et retirer mon amendement. Il faut trouver une nouvelle rédaction commune pour la séance. Il y a quelque chose d'un peu morbide dans cette « vision directe » ; et ce ne serait pas évident de vérifier que le patient est bien dans des conditions médicales sécurisées.
Je ne perçois pas clairement ce que recouvre la « vision directe ». Devra-t-on percer une trappe dans le plafond, installer une porte en verre non dépoli ou garder la porte ouverte ? Le grand nombre d'amendements déposés montre que cette idée n'est pas bonne. La sagesse incite à demander que le médecin ou l'infirmier soit présent. Je maintiens donc mon amendement.
Qu'en sera-t-il du respect de l'intimité si quelqu'un reste en vision directe, dans le couloir, la porte ouverte ? Une personne non désirée, autre que le professionnel de santé, pourrait voir le geste. Au contraire, l'alinéa 8 évoque le professionnel de santé qui a accompagné la personne dans tout le processus décisionnel de l'aide à mourir, nouant une relation particulière avec elle. C'est la raison pour laquelle je maintiens mon amendement, qui ménage les deux aspects.
Toute l'ambiguïté réside dans le rôle du professionnel de santé. Nous partons du principe que le patient souhaitant se donner la mort doit principalement s'administrer lui-même le produit. Si c'est par injection, il faut bien que quelqu'un lui pose une intraveineuse et, en cas d'agonie, mettre fin à ses souffrances ! La présence d'un professionnel de santé dans la pièce rassure ; elle est essentielle pour sécuriser le parcours et le recours à l'aide à mourir.
La commission rejette successivement les amendements CS799, CS1317, CS1570, CS157, CS1864, CS686 et CS1371, les amendements CS123 et CS1782 ayant été retirés.
Amendement CS800 de M. Laurent Panifous
Cet amendement vise à permettre qu'« un autre professionnel de santé » prenne le relais du premier, afin de garantir une certaine flexibilité organisationnelle. Dans les structures collectives, les professionnels ne peuvent pas rester en permanence auprès d'un patient. Ainsi, quoi qu'il arrive, un professionnel de santé sera toujours présent aux côtés de la personne.
Comme d'autres propositions qui ont été rejetées, cet amendement est plus intéressant que ceux qui évoquent une vision directe ou la coprésence au domicile. Parce qu'il est difficile de veiller à la bonne administration de la substance létale et de garantir sa traçabilité en vision directe, la présence d'un professionnel de santé dans la pièce vise à s'assurer de la manière dont le produit est absorbé et à qui il va. Une telle sécurité paraît indispensable.
L'amendement CS157 de Mme Lorho a été voté par cinq voix contre quatre – les vidéos pourront le prouver. Une telle erreur s'est produite plusieurs fois, parce que les votes vont vite.
Ne remettez pas les votes en cause : je dispose d'une vision directe que vous n'avez pas...
Cet amendement capital, qui vise la présence obligatoire d'un professionnel de santé lors de l'administration de la substance létale, a bien été adopté.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CS1783 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
Amendements CS848 de Mme Natalia Pouzyreff, CS942 de Mme Cécile Rilhac et CS885 de M. Julien Odoul (discussion commune)
Mon amendement de précision vise à ajouter les mots « en vision directe » après « une proximité suffisante ». Sans empiéter sur l'intimité du patient lorsqu'il s'administre la substance létale, le professionnel de santé doit en effet pouvoir intervenir en cas de difficulté, garantir la traçabilité du produit et établir un rapport sur le déroulé de la procédure.
Mon amendement a pour objet de préciser que le professionnel de santé se tiendra « dans le bâtiment » où se trouve le patient. En effet, l'expression « à une proximité suffisante pour pouvoir intervenir » pose problème. Selon les amendements que nous avons adoptés, l'aide à mourir pourra être administrée dans des lieux différents – à domicile, dans un Ehpad, ou encore à l'hôpital, où les services sont parfois éloignés les uns des autres. Lorsque le patient a choisi d'être accompagné par un proche, on peut entendre que le professionnel de santé ne soit pas présent dans la même pièce, au nom du respect de l'intimité. Quant à l'expression « vision directe », je ne sais pas ce qu'elle recouvre exactement. Quoi qu'il en soit, nous devons poursuivre ce débat.
Dans le même esprit, notre amendement CS885 vise à préciser cette « proximité suffisante » qui permet aux professionnels de santé d'intervenir en cas d'urgence.
Je donne un avis favorable à l'amendement CS848 de Mme Pouzyreff, qui semble le plus abouti, et un avis défavorable aux autres.
Au centre hospitalier universitaire de Rouen, les patients les plus fragiles sont installés en face de la salle de soins, qui est vitrée. Pour disposer d'une vision directe, les professionnels de santé laissent la porte de la chambre grande ouverte : la proximité est suffisante, la vision directe, mais il n'y a pas d'intimité.
Il est choquant que la recherche d'une vision directe conduise à de telles situations : un patient qui a souhaité activer l'aide à mourir ne peut être ainsi placé à la vue de tous.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS1027 de M. Thibault Bazin
Les amendements adoptés depuis ce matin conduisent à une évolution et à un assouplissement considérable du projet de loi, si bien que l'on ne peut plus vraiment parler d'exception d'euthanasie – dans le texte initial, le professionnel de santé ne pouvait intervenir que si la personne ne pouvait s'administrer elle-même la substance létale.
On peut en outre se demander si la recommandation de l'avis 139 émis par le CCNE est respectée. La portée du geste n'est pas la même ; les critères sont dépassés. Nous ne sommes plus dans le cadre défini par la commission spéciale au début de ses travaux.
Il est surprenant que le Gouvernement, qui se disait attaché à l'avis du CCNE, s'en affranchisse. Ce texte va très loin et les « garanties » sont de moins en moins nombreuses. Il faudra d'ailleurs modifier cette rédaction.
Le débat tourne en rond sur des questions certes importantes, mais qui ont été bien traitées dans le projet de loi. Je ne vois pas de quels changements vous parlez, monsieur Hetzel. Le texte prévoit toujours une auto-administration du produit ; en cas d'impossibilité, le geste sera réalisé par un professionnel de santé ou un proche – un ajout que je ne soutiens pas. Pour autant, cela ne change rien au geste lui-même. Arrêtons de dramatiser, et avançons. Assez parlé de « vision directe » et de « porte ouverte » : la « proximité » est le meilleur mot. Les professionnels de santé sont suffisamment responsables pour savoir où ils doivent se trouver.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS687 de Mme Christine Pires Beaune
Cet amendement vise à prévoir que la mort résultant d'une aide à mourir est inscrite comme une mort naturelle dans le certificat de décès. Les propositions de loi d'Olivier Falorni et de Marie-Pierre de La Gontrie l'avaient souligné, cette précision est indispensable compte tenu des conséquences qu'elle peut avoir dans l'exécution des contrats d'assurance après le décès.
Votre amendement est satisfait par les dispositions de l'article 20, qui permettent de neutraliser les risques liés au contrat d'assurance vie ou décès.
Avis défavorable.
Notre analyse est identique. Présumer la mort comme naturelle afin d'éviter l'application des dispositions du code des assurances relatives au suicide et des stipulations contractuelles d'exclusion de garantie peut apparaître comme une fiction juridique. Du reste, la « mort naturelle » n'est pas définie juridiquement : les contrats l'abordent de manière variée, dans des termes qui ne correspondent pas totalement à l'aide à mourir. C'est pourquoi le Gouvernement privilégie une solution plus lisible, plus sûre juridiquement et plus factuelle, qui permet aux contrats de continuer à s'appliquer : il s'agit d'examiner les situations contractuelles à l'article 20.
Avis défavorable.
Sans rouvrir le débat sémantique – nous en reparlerons dans l'hémicycle –, il est mensonger de faire croire que l'euthanasie et le suicide assisté, que vous appelez « aide à mourir », seraient une mort naturelle. C'est l'inverse.
Vous avez voté l'amendement CS977 de Mme Rilhac, qui parle bien d'euthanasie et de suicide assisté. Pourquoi avoir introduit ces termes, que vous réfutez depuis le début ?
Contrairement à l'amendement, les dispositions de l'article 20 sur les assurances ne semblent pas couvrir tous les cas. Bien que la personne recoure à l'aide à mourir, c'est la maladie qui la conduit de manière inéluctable à la mort. Nous souhaiterions que vous apportiez des précisions sur ce point d'ici à la séance.
Votre vision peut être contestée. Le code des assurances prévoit que les contrats d'assurance décès ne peuvent couvrir le cas où l'assuré se donne lui-même la mort la première année de la vie du contrat. Par conséquent, certains assurés pourraient craindre de ne pas bénéficier de la garantie de leur contrat et renoncer à recourir à l'aide à mourir. Les dispositions de l'article 20 lèvent cette ambiguïté en contraignant les compagnies d'assurances à maintenir leurs garanties.
Les personnes qui suivent nos débats ne doivent pas être influencées par de fausses informations : mon amendement CS977 n'inscrit pas dans le texte les mots « euthanasie » ou « suicide assisté », même si j'ai pu les utiliser, à titre personnel, en défendant mes amendements et dans certains exposés sommaires.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CS242 et CS241 de M. Philippe Juvin (discussion commune)
L'amendement CS242 vise à prévoir des mentions spéciales dans le certificat de décès, afin d'assurer un suivi statistique. Les demandes d'aide active à mourir sont bien enregistrées, mais le décès pourrait intervenir par voie naturelle avant même la réalisation de l'acte.
Le suivi statistique sera assuré par la commission de contrôle et d'évaluation prévue à l'article 17.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS886 de M. Julien Odoul
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS158 de Mme Marie-France Lorho
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement CS1940 de Mme Laurence Cristol.
Amendement CS801 de M. Charles de Courson
Cet amendement tend à préciser que les professionnels de santé impliqués dans une procédure d'aide à mourir doivent adresser leurs comptes rendus à la commission de contrôle et d'évaluation prévue à l'article 17 et les enregistrer dans le système d'information créé à l'article 13. Il s'agit de renforcer la traçabilité des procédures d'aide à mourir.
Les comptes rendus seront enregistrés dans le système d'information géré par la commission.
L'amendement est donc satisfait : avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS287 de M. Thibault Bazin
Cet amendement d'appel vise à préciser le cadre de responsabilité applicable une fois que le produit a été remis à la personne volontaire.
Contrairement à ce qui se passe dans l'Oregon, c'est le professionnel de santé, exerçant dans un certain cadre, qui récupère la substance létale dans la pharmacie hospitalière. Cependant, le texte ne prévoit pas de responsabiliser la personne volontaire après que le produit lui a été transféré. Selon les personnes auditionnées, tout peut arriver, notamment que le produit ne soit pas entièrement administré par voie intraveineuse ou digestive.
Vous souhaitez prévoir la responsabilité pénale de la personne volontaire en cas de perte ou de mauvaise utilisation de la substance létale. Celle-ci pourra déjà être tenue responsable pénalement dans les conditions de droit commun si elle en fait un mésusage. Une mention spécifique n'apparaît donc pas nécessaire, d'autant qu'elle ne renforce pas réellement la responsabilité pénale des personnes volontaires.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS802 de M. Laurent Panifous
Cet amendement vise à prévoir qu'un accompagnement psychologique est proposé à toute personne amenée à procéder à l'administration de la substance létale.
J'ai donné un avis favorable à l'amendement CS1316 de M. Christophe Marion, qui traite de cette question. Demande de retrait.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 11 modifié.
Après l'article 11
Amendement CS1183 de M. Thibault Bazin
Le code de la santé publique prévoit une interdiction de tuer pour les professionnels de santé. Or nous venons d'y introduire les dispositions du présent projet de loi – on peut d'ailleurs se demander si elles en relèvent réellement. Mon amendement vise donc à lever les contradictions désormais présentes dans ce code.
Vous souhaitez interdire aux infirmiers d'effectuer l'acte létal ou de participer à toute aide active à mourir. Je l'ai dit, ces professionnels disposent des compétences nécessaires pour accompagner les patients dans cette procédure. Ils seront en outre couverts par la clause de conscience prévue à l'article 16 et pourront refuser de pratiquer cet acte s'il heurte leurs convictions.
Avis défavorable, donc.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1865 de Mme Caroline Fiat
Nous proposons d'instaurer un congé spécifique pour la personne volontaire, désignée par le patient pour l'accompagner à la date qu'il a choisie. Ce congé doit pouvoir être imposé à l'employeur qui voudrait le refuser en raison d'une surcharge de travail ou de contraintes organisationnelles.
Dès lors que l'on confie cette mission à une personne volontaire qui n'est pas un professionnel de santé, celle-ci doit pouvoir la remplir dans de bonnes conditions. C'est aussi une garantie supplémentaire que le patient pourra choisir librement la date.
Avis favorable.
On peut imaginer que des négociations de branche se tiendront sur un tel sujet. L'amendement mérite d'être retravaillé d'ici à la séance. À ce stade, je m'en remets à la sagesse de la commission.
Certains congés sont de droit en cas de décès d'un conjoint, d'un partenaire de pacs, d'un concubin ou d'un enfant. Bien qu'elle se prépare à un deuil, une personne volontaire n'en bénéficie pas car elle n'accompagne pas un membre de sa famille. Il y a là une rupture d'égalité avec les personnes qui disposent d'un accompagnement émotionnel et d'un temps pour assumer la douleur du deuil. L'amendement vise à prévoir que le lien émotionnel, non le seul lien du sang, ouvre un droit à la peine.
L'amendement, qui tend à créer un congé spécial pour l'accompagnement de la fin de vie, pose un problème de confidentialité envers l'employeur et les collègues. C'est un petit peu gênant.
De nombreux amendements ont été déclarés irrecevables en vertu de l'article 40 de la Constitution.
Quand l'employeur est l'État ou une collectivité territoriale, il s'agit de fonds publics. Cette jurisprudence à géométrie variable s'agissant de l'application de l'article 40 est étonnante.
On peut aussi s'interroger sur un possible cumul entre ce congé spécifique et les congés de droit liés à la perte d'un proche déjà prévus par le code du travail.
Enfin, étant personnellement hostile à l'amendement visant à associer à la procédure des personnes qui ne sont ni médecins ni infirmiers, je ne suis pas favorable à l'amendement de Mme Fiat.
Je suis un peu surprise de l'avis favorable de la rapporteure ainsi que de la façon dont l'article 40 est appliqué. Les amendements prévoyant des consultations psychologiques pour les proches aidants ou, au titre Ier, la promotion de l'activité physique adaptée, qui apporte des bienfaits incontestables, ont été déclarés irrecevables. Cela n'est pas compréhensible eu égard à l'équilibre du texte.
Je suis, moi aussi, assez surprise. À l'article 1er, nous sommes plusieurs à nous être battus pour que les aidants soient mieux accompagnés et pour refuser l'intervention de structures à but lucratif. Or cet amendement visant à créer un congé spécifique me fait craindre qu'il y ait désormais un intérêt à accompagner une personne jusqu'à la mort. Je préfère donc voter contre et prendre le temps de la réflexion.
L'avis favorable de Mme la rapporteure me surprend. Les personnes volontaires ne sont pas nécessairement des proches, ni des membres de la famille. Le registre est différent si l'on veut associer des bénévoles à la procédure, comme en Suisse. En l'espèce, il est incroyable que l'on mette le feu aux poudres, en traitant différemment les acteurs.
Mme Fiat, habituellement très attachée à la fonction publique, n'a apparemment pas envisagé le coût de sa proposition pour l'employeur public.
Nous voterons contre l'amendement, qui ne tient pas sur le plan philosophique : c'est une fausse protection de la personne volontaire.
Mon amendement visant à prévoir un examen psychologique préalable pour la personne volontaire a été jugé irrecevable en vertu de l'article 40. Pourtant, une telle consultation est bien moins onéreuse que trois jours de congé pour une collectivité publique.
Un congé n'est pas nécessairement rémunéré : on ne peut donc pas opposer l'article 40 à cet amendement. Dans le secteur privé, si l'on envisage le maintien du salaire, l'indemnisation sera discutée dans le cadre d'une négociation collective, et à la charge de l'employeur. Sans une disposition garantissant aux personnes qui travaillent le droit à un congé, y compris non rémunéré, comment peut-on s'assurer qu'elles seront disponibles ?
S'agissant de la confidentialité, il en va de même que pour les membres de la famille qui accompagnent un proche dans cette procédure. On peut envisager de la garantir par voie réglementaire.
Je remercie donc la ministre pour son avis de sagesse et son engagement à retravailler l'amendement : ils sont une raison supplémentaire pour adopter ce dernier afin d'inscrire le droit à congé dans le texte.
Je suis assez sidéré. Nous sommes tous en relation avec des associations de bénévoles et j'ai une pensée particulière pour les aidants, car il a fallu combattre ici même pendant des années pour que l'on commence à leur accorder le début d'un statut. L'aide active à mourir est un geste très fort de fraternité, et donc un signe de générosité.
Madame la ministre, vous êtes également ministre du travail. Imaginez que, demain, tous les sapeurs-pompiers volontaires vous demandent trois jours de congé... Cet amendement est une arme de destruction massive contre les bénévoles et les personnes qui font preuve de générosité au sein du monde associatif.
Tout d'abord, j'ai dit que cette question relevait d'une négociation de branche.
Ensuite, j'ai indiqué que je souhaitais que l'on retravaille cet amendement d'ici à la séance.
Enfin, j'ai donné un avis de sagesse car il est question d'un congé.
Je n'ai pas pris d'autre engagement.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS421 de M. Patrick Hetzel
Cet amendement propose d'accroître la transparence de la procédure. Il prévoit que les ayants droit tels que définis à l'article 731 du code civil sont informés par le médecin de l'euthanasie ou du suicide assisté.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS253 de M. Philippe Juvin
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Article 12 : Fin des procédures
Amendements de suppression CS243 de M. Philippe Juvin et CS1178 de M. Thibault Bazin
Nous sommes hostiles à ce projet car nous pensons qu'il s'agit d'une rupture anthropologique majeure.
L'article 12 ne prend pas suffisamment en compte les facteurs susceptibles de faire revenir le patient sur sa décision. Je m'interroge d'autant plus que les conditions d'accès à l'aide à mourir ont été encore assouplies à l'occasion de l'examen du texte par notre commission.
Cet article fixe des garanties essentielles en prévoyant les cas dans lesquels il est mis fin à la procédure d'aide à mourir. Ces garanties permettent de protéger les patients contre le risque de dérive.
Avis défavorable.
Des aspects du texte ont certes été modifiés, mais cet article est extrêmement clair.
Il est mis fin à la procédure si la personne informe le médecin mentionné à l'article 7, ou le médecin ou l'infirmier chargé de l'accompagner, qu'elle renonce à l'aide à mourir. Cette rédaction est suffisamment large et la personne n'a pas à exposer ses raisons.
Il faut conserver cet esprit de liberté, tant pour accéder à l'aide à mourir que pour y renoncer. Tel est le sens de cet article.
La commission rejette les amendements.
Amendement CS2008 de Mme Laurence Cristol
La commission adopte l'amendement.
Amendements identiques CS282 de Mme Sandrine Dogor-Such et CS420 de M. Patrick Hetzel
J'insiste sur le fait qu'il convient d'employer les termes de « patient en phase terminale » plutôt que celui de « personne ». C'est d'autant plus nécessaire que la référence au pronostic vital a été supprimée.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette les amendements.
Amendements CS336 de Mme Sandrine Dogor-Such et CS887 de M. Julien Odoul (discussion commune)
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS159 de Mme Marie-France Lorho
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Puis, suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CS610 de Mme Christine Loir.
Amendements CS609 de Mme Christine Loir, CS1009 de M. Thibault Bazin, CS160 de Mme Marie-France Lorho, CS269 de Mme Sandrine Dogor-Such, CS419 de M. Patrick Hetzel, CS888 de M. Julien Odoul, CS1026 de M. Thibault Bazin et CS1717 de M. Christophe Bentz (discussion commune)
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS889 de M. Julien Odoul.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements CS1941 et CS1943 de Mme Laurence Cristol.
Amendements CS803 et CS804 de M. Laurent Panifous (discussion commune)
L'amendement CS803 prévoit que si le médecin prend connaissance, postérieurement à sa première décision, d'éléments d'information le conduisant à considérer que les conditions d'éligibilité n'étaient pas remplies ou cessent de l'être, il notifie alors sa décision motivée par écrit à la personne et, le cas échéant, à celle chargée de la mesure de protection.
L'amendement CS804 prévoit la même chose mais sans faire référence à la personne chargée de la mesure de protection.
Le texte ne prévoit pas de notification de la décision du médecin dans ce cas de figure, alors qu'il s'agit d'un droit important pour le patient. Cette clarification est donc bienvenue.
Avis favorable à l'amendement CS803, qui est plus complet. Demande de retrait de l'amendement CS804.
Je m'en remets à la sagesse de la commission sur l'amendement CS803 et demande le retrait de l'amendement CS804.
La commission adopte l'amendement CS803, l'amendement CS804 étant retiré.
Amendements CS563 et CS564 de Mme Annie Genevard
Par cohérence, l'amendement CS563 vise à ajouter aux cas susceptibles de mettre fin à la procédure l'absence de consultation de soins palliatifs préalable destinée à éclairer le patient. Les travaux d'évaluation du droit actuel et les auditions ont montré que la demande de mourir disparaît souvent quand de tels soins sont proposés.
L'amendement CS564 dispose que l'absence d'accord du collège multidisciplinaire prévu à l'article 8 constitue également un motif qui met fin à la procédure.
L'article 7 prévoit déjà que le médecin propose une orientation vers les soins palliatifs. Il ne peut, en revanche, forcer le patient à assister à une telle consultation. Avis défavorable, donc à l'amendement CS563.
S'agissant de l'amendement CS564, nous avons déjà débattu à plusieurs reprises de la collégialité. Avis défavorable également.
J'avais déposé un amendement de suppression de l'alinéa 3, qui a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution. L'amendement CS1943 de la rapporteure n'était pas anodin, puisque c'est précisément la référence à l'article 8 figurant dans le texte initial qui m'avait conduite à demander la suppression de cet alinéa. Ce qui m'avait choqué dans l'article 12 vient donc d'être corrigé grâce à la rapporteure.
Quels sont les motifs susceptibles de conduire un médecin à revenir sur sa décision autorisant une personne à accéder à l'aide à mourir, sachant que les délais prévus sont très courts ?
Le 2° de cet article répond à une demande du Conseil d'État. Il faut laisser au médecin la possibilité de revenir sur sa décision s'il a connaissance d'éléments nouveaux. C'est un élément de sécurité pour l'ensemble des intervenants.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS464 de M. Yannick Neuder
La commission rejette l'amendement.
Amendements CS245 de M. Philippe Juvin et CS466 de M. Yannick Neuder (discussion commune)
L'amendement CS245 prévoit que la procédure prend fin si la personne ne confirme pas explicitement sa volonté de mourir juste avant l'administration de la substance létale.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS1532 M. Hervé de Lépinau
L'amendement donne au mandataire, curateur ou tuteur du majeur protégé le pouvoir de s'opposer au suicide assisté ou à l'euthanasie de ce dernier jusqu'au stade de l'administration de la substance létale.
Cela reviendrait à donner un droit de veto à la personne chargée de la mesure de protection et nierait le droit à la liberté personnelle des majeurs protégés.
Avis défavorable.
Même avis. La décision de demander l'aide à mourir relève du patient.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS504 de M. Nicolas Ray
Cet amendement rappelle que le professionnel de santé chargé d'accompagner la personne dans une aide à mourir peut faire valoir sa clause de conscience.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS1533 M. Hervé de Lépinau
Cet amendement garantit au médecin le droit de refuser l'administration de la substance létale jusqu'au dernier moment s'il existe un doute sur l'intégrité du consentement de la personne.
L'amendement est satisfait, puisque l'article 11 prévoit que le professionnel de santé doit s'assurer de ce consentement avant l'administration de la substance létale.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS244 de M. Philippe Juvin
On peut douter de la volonté de la personne si elle ne se présente pas au rendez-vous prévu à l'article 9 pour l'administration de la substance létale. Dans ce cas, la procédure doit être reprise.
On peut imaginer que cette situation ne se produira pas en pratique. Quoi qu'il en soit, il appartient au professionnel de santé de déterminer avec la personne si cela signifie qu'elle veut reporter l'administration de la substance létale ou y renoncer.
Avis défavorable.
La notion de présentation à un rendez-vous s'accorde malheureusement mal avec l'état d'une personne en fin de vie. Si la personne renonce, la procédure s'arrête bien évidemment.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS890 de M. Julien Odoul
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS1719 de M. Christophe Bentz
Il faut réparer un oubli en prévoyant le cas où l'administration de la substance létale n'aboutit malheureusement pas au décès de la personne.
En septembre dernier en Belgique, l'euthanasie d'une femme atteinte d'un cancer a échoué et elle a finalement été étouffée avec un coussin. Cet exemple doit conduire à nous interroger sur les conséquences d'un échec à la suite de l'administration de la substance létale.
En premier lieu, les recommandations émises par la HAS permettront d'éviter ces situations.
En second lieu, il convient de ne pas laisser les personnes dans la souffrance si elles souhaitent avoir recours à l'aide à mourir.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS891 de M. Julien Odoul
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendements CS805 de M. Paul-André Colombani et CS806 de M. Charles de Courson
Ce sont deux amendements d'appel.
L'amendement CS805 propose que, quelle que soit la raison de la fin de la procédure, cette dernière soit consignée dans le dossier médical du patient.
Quant à l'amendement CS806, il précise que les décisions de fin de procédure sont transmises à la commission de contrôle et d'évaluation prévue à l'article 17 et enregistrées dans le système d'information mentionné à l'article 13.
Les amendements sont retirés.
Amendement CS1573 de Mme Brigitte Liso
Cet amendement prévoit que la demande d'aide à mourir peut être renouvelée une fois, dans les conditions prévues à l'article 7.
Encadrer le renouvellement des demandes d'une même personne permet à celle-ci de bénéficier de douze mois pour obtenir l'aide active à mourir. Cette période correspond à la fin du pronostic vital engagé à moyen terme tel que défini dans le projet initial.
Une telle possibilité introduit une forme de souplesse qui respecte l'esprit de l'aide active à mourir, afin de ne laisser personne au bord du chemin – en particulier dans le cas de certaines pathologies comme les maladies neurodégénératives, où l'état de santé de la personne se détériore progressivement.
Il n'est pas opportun de restreindre le nombre de renouvellements de la demande, car il n'y a pas de raison d'empêcher la personne de bénéficier de l'aide à mourir dès lors que les conditions sont remplies.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 12 modifié.
Article 13 : Création d'un système d'information dédié au suivi de la procédure
Amendement CS807 de M. Laurent Panifous
Il s'agit de préciser davantage le rôle et le fonctionnement du très important système d'information prévu par cet article.
Cet amendement n'est pas nécessaire puisque les précisions qui y sont mentionnées figurent déjà au sein des articles 13 et 17. L'article 13 a pour seul objet de définir les données enregistrées au cours de la procédure d'aide à mourir.
Avis défavorable.
J'ajoute que l'article 17 prévoit qu'un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), détermine les modalités exactes de mise en œuvre de ce système d'information.
Avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendement CS2009 de Mme Laurence Cristol
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS1136 de M. Sébastien Peytavie
L'amendement vise à s'assurer que les personnes en situation de handicap et les personnes ne parlant pas ou peu français puissent bénéficier d'une procédure de demande d'aide à mourir intégralement accessible et intelligible.
Il n'est pas nécessaire de le préciser dans la loi dans la mesure où, comme dans toute procédure médicale, le médecin doit s'assurer que la personne comprend bien les informations qui lui sont transmises concernant son état de santé et la procédure d'aide à mourir.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1141 de M. Sébastien Peytavie
Le rapport d'information sur les soins palliatifs, présenté par les sénatrices Christine Bonfanti-Dossat, Corinne Imbert et Michelle Meunier en septembre 2021, souligne que disposer de données médicales consolidées grâce à l'enregistrement systématique de la pratique de la sédation profonde et continue permettrait une meilleure connaissance des trajectoires de fin de vie et une plus grande transparence sur les pratiques actuelles en matière de soins palliatifs. C'est également nécessaire pour disposer d'une évaluation précise du nombre de patients en soins palliatifs et des besoins réels, comme le constate la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs.
L'Inspection générale des affaires sociales recommande ainsi que l'acte de sédation profonde et continue jusqu'au décès soit considéré comme un acte médical et fasse par conséquent l'objet d'un enregistrement dans le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI).
Vous proposez d'enregistrer les actes de sédation profonde et continue dans le système d'information. Il n'est pas souhaitable de mélanger deux procédures distinctes qui répondent à des situations très différentes. Le système d'information prévu par l'article 13 est dédié aux procédures d'aide à mourir, afin de garantir leur régularité et leur traçabilité.
Avis défavorable.
Les informations sur la sédation profonde peuvent être trouvées dans le PMSI et dans la classification commune des actes médicaux, qui concernent respectivement les hôpitaux et la médecine de ville.
Avis défavorable.
Le système d'information est-il déjà créé et en phase de déploiement ? Sera-t-il installé dans tous les établissements de santé publics et privés ainsi que chez tous les médecins de ville ?
Beaucoup de professionnels de santé vont être amenés à mentionner leurs actions dans ce système, sur lequel repose la traçabilité. Cela suppose un déploiement très rapide, pour que le système soit opérationnel au moment même où la loi entrera en vigueur.
Ce système n'est pas encore créé, puisque cela implique un décret en Conseil d'État qui ne pourra être publié qu'une fois la loi promulguée.
Cela n'empêche pas de commencer à travailler sur le sujet. Ce système d'information sera géré par la commission de contrôle et d'évaluation et il sera accessible à distance.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement CS1942 de Mme Laurence Cristol.
Amendement CS161 de Mme Marie-France Lorho
Les tâches administratives alourdissent la charge de travail des professionnels de santé alors même que ces derniers manquent dans beaucoup d'établissements. Aussi notre amendement prévoit-il d'affecter des personnels spécialement préposés à l'enregistrement des données dans le système d'information.
Je ne sais pas exactement ce que vous entendez par « personnels préposés », mais il ne me semble pas nécessaire de créer une catégorie de personnels chargés de cet enregistrement.
Je comprends votre souhait de limiter la charge de travail administratif pour les soignants. Toutefois, compte tenu du caractère très spécifique de cette procédure, je crois que l'on peut leur confier directement la responsabilité de l'enregistrement de ces actes. Cela devrait en outre concerner très peu de cas.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS892 de M. Julien Odoul
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendements CS688 et CS689 de M. Stéphane Delautrette
L'amendement CS688 précise que tout acte de la procédure d'aide à mourir est enregistré par le professionnel dans le système d'information dans un délai maximum de vingt-quatre heures. C'est en effet à partir de cet enregistrement que court le délai de quinze jours – déjà suffisamment long – dans lequel le médecin rend sa décision.
L'amendement CS689 prévoit quant à lui que tout acte de la procédure d'aide à mourir enregistré par le professionnel dans le système d'information est notifié à la personne demandant l'aide à mourir.
Ce délai de vingt-quatre heures est excessivement contraignant pour les professionnels de santé, sans apporter une réelle plus-value. En effet, la commission de contrôle n'exerce pas un contrôle immédiat des procédures mais un contrôle a posteriori. Il n'est donc pas nécessaire d'inscrire immédiatement les actes dans le système d'information. En outre, les professionnels de santé procéderont probablement à l'inscription de manière rapide, car il est clairement indiqué dans l'étude d'impact que tant qu'une étape n'a pas été renseignée, l'étape suivante ne pourra pas être réalisée. Avis défavorable, donc, à l'amendement CS688.
Même avis pour l'amendement CS689, car je ne vois pas quelle est l'utilité de la notification qu'il prévoit.
Les délais d'enregistrement des données seront fixés par décret en Conseil d'État, après avis de la Cnil. La transparence complète sur le déroulement de la procédure d'aide à mourir à l'égard de la personne concernée est bien garantie par les dispositions de ce texte.
Avis défavorable.
Il revient bien entendu à la Cnil de déterminer différents éléments, qui seront ensuite repris dans le décret.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS162 de Mme Marie-France Lorho
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendement CS1866 de M. René Pilato
Ce projet de loi instaure un droit nouveau et très délicat : l'aide à mourir. Il est très important de pouvoir suivre et évaluer son application pratique. C'est pourquoi il est essentiel que tous les actes renseignés dans un système d'information soient identifiables et traçables par la commission de contrôle.
Le système d'information a pour objet d'assurer le suivi, le contrôle et l'évaluation des procédures d'aide à mourir. L'enregistrement des différents actes, demandes, décisions et avis permettra de garantir leur suivi, leur bonne identification et leur traçabilité à des fins de contrôle a posteriori, tant au cas par cas qu'à des fins statistiques, conformément aux missions assignées à la commission de contrôle et d'évaluation.
Avis défavorable.
L'ensemble des avis prévus à l'article 8 sont-ils considérés comme des actes qui doivent être retracés dans ce système d'information ?
L'article 13 se réfère aux actes mentionnés au présent chapitre. Quid de ceux qui sont prévus au titre Ier, qui a priori ne sont pas concernés ?
L'enregistrement ne concerne que les actes réalisés dans le cadre de la procédure prévue au titre II, c'est-à-dire pour l'aide à mourir.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS958 de Mme Mireille Clapot
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Amendements CS1179 et CS1181 de M. Thibault Bazin (discussion commune)
Afin d'accroître la transparence de la procédure, l'amendement CS1179 prévoit que le certificat de décès est rédigé uniquement par le médecin qui a personnellement aidé au suicide assisté.
L'amendement CS1181 prévoit pour sa part que ce certificat doit être rédigé par le médecin qui a lui-même pratiqué l'euthanasie.
Que faut-il entendre par la notion d'acte ? En droit administratif, recouvre-t-elle seulement les décisions ? Qu'en est-il des avis ?
Vos amendements sont trop restrictifs, puisque les infirmiers sont désormais habilités à rédiger des certificats de décès.
Tous les avis seront bien recensés dans le système d'information.
Je confirme que les infirmiers peuvent eux aussi rédiger des certificats de décès.
Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS409 de M. Patrick Hetzel
Il convient de mettre en place un registre des euthanasies et suicides assistés réalisés dans chaque établissement de soins les pratiquant, afin de pouvoir procéder aux contrôles nécessaires.
Le système d'information permettra d'assurer la traçabilité des aides à mourir et de fournir des éléments statistiques.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1176 de M. Thibault Bazin
L'amendement prévoit qu'un rapport annuel sur la mise en œuvre des euthanasies et des suicides assistés est communiqué à chaque agence régionale de santé.
L'article 17 prévoit déjà que la commission de contrôle et d'évaluation remet chaque année un rapport sur les aides à mourir au Gouvernement et au Parlement. L'amendement est donc satisfait.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 13 modifié.
La réunion est suspendue de dix-huit heures quarante à dix-huit heures cinquante.
Article 14 : Recours devant le juge administratif
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement de suppression CS422 de M. Patrick Hetzel.
Amendement CS2010 de Mme Laurence Cristol
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS1628 de Mme Annie Vidal
Cet amendement vise à préciser que « la décision du médecin doit être notifiée au patient ».
L'amendement est retiré.
Amendement CS1665 de Mme Patricia Lemoine
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement
Amendement CS337 de Mme Sandrine Dogor-Such
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement
Amendements CS248 de M. Philippe Juvin, CS423 de M. Patrick Hetzel et CS106 de M. Thibault Bazin, amendements identiques CS105 de M. Thibault Bazin et CS247 de M. Philippe Juvin et amendement CS808 de M. Laurent Panifous (discussion commune)
Mon amendement propose d'élargir les modalités de recours, qui nous semblent trop restrictives.
Dans le cas où le médecin aurait accordé le suicide assisté ou l'euthanasie sans que la personne concernée ne respecte les critères fixés par la loi, aucun recours ne serait possible, puisque la personne concernée serait décédée. Aussi nos amendements CS106 et CS105 visent-ils à élargir les possibilités de recours.
L'amendement CS808 vise à s'assurer que la personne concernée peut également former un recours contre la décision du médecin de mettre fin à une procédure, tel que cela est prévu à l'article 12, lorsque le médecin prend connaissance d'informations le conduisant à considérer que les critères d'accès à l'aide à mourir n'étaient pas remplis ou cessent de l'être. Cette décision ayant les mêmes conséquences qu'une décision accédant à une demande d'aide à mourir, elle doit pouvoir faire l'objet des mêmes recours.
Le Conseil constitutionnel admet que le recours contre certaines décisions puisse être limité, sous réserve que ces limitations soient proportionnées à l'objectif poursuivi. Le Conseil d'État considère que le recours contre la décision du médecin peut valablement être restreint aux seules personnes dont émane la demande sans porter atteinte à ce droit ou au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et de protection du droit à la vie.
La configuration des litiges relatifs au dispositif prévu par le projet de loi est fondamentalement différente de celle des recours existants en matière d'arrêt de traitement, qui ne sont prévus que parce que le malade n'est pas en état d'exprimer sa volonté. L'article 14 permet précisément d'éviter que des proches de la personne remettent en cause sa volonté en judiciarisant la procédure.
En outre, nous avons choisi de confier les recours à la juridiction administrative car cette dernière dispose de procédures d'urgence permettant de statuer dans des délais appropriés. Il n'est donc pas nécessaire de préciser qu'un référé-liberté pourra être formé, puisque cela fait partie des conditions de droit commun. Du reste, la Cour de cassation a jugé que le droit à la vie n'entrait pas dans le champ de la liberté individuelle au sens de l'article 66 de la Constitution et ne constituait donc pas une matière réservée par nature à l'autorité judiciaire.
Pour toutes ces raisons, je donne un avis défavorable à tous ces amendements.
Les dispositions de l'article 14 s'appliquent-elles également aux personnes sous protection ?
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements CS614 de Mme Christine Loir, CS270 de Mme Sandrine Dogor-Such, CS424 de M. Patrick Hetzel et CS1721 de M. Christophe Bentz (discussion commune)
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques CS283 de Mme Sandrine Dogor-Such et CS425 de M. Patrick Hetzel
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette les amendements.
Amendement CS465 de M. Yannick Neuder
Cet amendement vise à octroyer au juge des contentieux de la protection la possibilité de contester la décision du médecin se prononçant sur la demande d'aide à mourir par une personne protégée juridiquement par une tutelle ou une curatelle. C'est une question de respect de la personne mise sous protection.
Je ne suis pas sûre qu'un juge puisse s'autosaisir pour introduire un recours devant un autre ordre juridictionnel. Je vous rappelle par ailleurs que le projet de loi prévoit déjà des garanties particulières pour les majeurs protégés.
Avis défavorable.
La compétence exclusive de la juridiction administrative vous semble-t-elle appropriée quand la décision est prise par un médecin libéral ou quand la personne concernée se trouve dans un établissement privé ?
Le Gouvernement a considéré que le dispositif d'examen des demandes d'aide à mourir était lui-même déjà protecteur, puisqu'il permet la vérification des conditions d'éligibilité à l'aide à mourir, en particulier de l'existence d'une volonté libre et éclairée.
Par ailleurs, le recours par un tiers contre une décision favorable d'aide à mourir n'est pas prévu dans le cas des majeurs non protégés. Il ne doit pas l'être non plus dans le cas des majeurs protégés car, dans de nombreux cas, la personne qui assure la mesure de protection est un membre de la famille. Il n'est donc pas exclu que la contestation porterait davantage sur le principe même du recours à l'aide à mourir que sur la capacité de la personne à exprimer une volonté libre et éclairée, ce qui entraînerait des situations conflictuelles à rebours de l'objectif recherché par la loi.
Enfin, le choix du juge des tutelles est contestable car son office consiste à apprécier, avant qu'un acte ne soit accompli, si celui-ci est conforme aux intérêts du majeur protégé et non à statuer sur la contestation d'un acte qui a déjà été accompli. Son intervention conduirait à complexifier la procédure en créant des recours distincts selon que la personne bénéficie d'une mesure de protection ou non, alors que la liberté représentée par le bénéfice de l'aide à mourir est la même.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1230 de M. Thierry Frappé, amendement CS1087 de Mme Sandrine Rousseau et sous-amendement CS2030 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)
L'article 14 ne prévoit pas le cas d'une perte de discernement du patient. Aussi notre amendement permet-il à une personne digne de confiance de contester la demande d'euthanasie ou de suicide assisté à condition d'avoir été préalablement et expressément désignée dans les directives anticipées du patient.
Notre amendement CS1087 prévoit qu'en cas d'altération du discernement survenu après la demande d'aide à mourir, la possibilité d'un recours sur la décision d'aide à mourir est ouverte à la personne de confiance si elle a été désignée.
Nous souscrivons à cette proposition de nos collègues écologistes mais souhaitons préciser, par notre sous-amendement, que ce recours n'est possible qu'en cas de rejet de la demande d'aide à mourir, puisque l'idée est de protéger la volonté de la personne qui l'a exprimée. Ne donnons pas à la personne de confiance la possibilité de contester une réponse favorable !
J'ai du mal à comprendre vos arguments. Il ne me semble pas justifié d'accorder un intérêt à agir spécifique à la personne de confiance dès lors que le patient est en état d'exprimer sa volonté tout au long de la procédure. Le rôle de la personne de confiance n'est pas de contester la volonté du patient ; c'est même exactement le contraire, puisqu'il lui revient d'exprimer la volonté de son proche.
Avis défavorable.
Permettez-moi, madame la ministre, de revenir à ma question précédente. Quel est le fondement juridique de la compétence exclusive du juge administratif ?
En l'absence de dispositions législatives particulières, les décisions prises par des médecins exerçant dans un établissement public relèveraient de la juridiction administrative alors que celles émanant de médecins libéraux ou exerçant dans un établissement sanitaire ou médico-social de droit privé relèveraient de la juridiction judiciaire.
Le Gouvernement a souhaité unifier le contentieux devant le juge administratif afin d'éviter toute divergence de jurisprudence entre les ordres de juridiction, dans un souci d'égalité de traitement pour ce contentieux inédit et très particulier. Ce choix est conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui a jugé que le législateur pouvait, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, unifier les règles de compétences juridictionnelles au sein de l'ordre juridictionnel principalement intéressé. Le faible nombre d'affaires susceptibles d'être portées à la connaissance d'un juge par des personnes contestant une décision d'accès à l'aide à mourir fait en effet peser un risque de divergence jurisprudentielle sur une durée qui pourrait poser problème.
Certes, s'il y a peu de demandes, il y aura peu de contentieux, mais l'article 14 limite la possibilité de recours à la personne ayant demandé l'aide à mourir. Or, après l'acte, elle ne sera plus là...
Pourquoi avoir choisi le juge administratif alors qu'il existe davantage de juridictions judiciaires sur le territoire ? Le choix du juge judiciaire aurait facilité l'accès au recours.
Notre choix a d'abord été guidé par la nature de l'acte jugé. Or la juridiction administrative a acquis une expertise en la matière en jugeant des contentieux relatifs aux arrêts de traitement. Du reste, l'aide à mourir ne relève pas des matières pour lesquelles le juge judiciaire est seul compétent, en vertu de l'article 66 de la Constitution, en tant que gardien de la liberté individuelle. Entendue au sens strict, cette notion concerne les seules mesures privatives de liberté.
Les procédures de droit commun du contentieux administratif, y compris d'urgence, sont d'ores et déjà adaptées à ce type de décision, à la différence de celles de l'ordre judiciaire. Compte tenu de la spécificité du contentieux et de la nécessité de disposer des pouvoirs d'injonction et de suspension, des dispositions procédurales nouvelles auraient dû être introduites dans le code civil et dans le code de procédure civile.
La commission rejette successivement l'amendement CS1230, le sous-amendement CS2030 et l'amendement CS1087.
Amendements CS104 de M. Thibault Bazin, CS724 de M. Charles de Courson et CS492, CS493 et CS494 de M. Yannick Neuder (discussion commune)
Je suis embêté par la rédaction actuelle de l'article 14, qui empêche tout recours par une personne autre que celle ayant formulé la demande. Or, après l'acte, elle ne sera plus là ! Dans ces conditions, personne ne pourra former de recours contre une décision favorable à la demande, même si cette dernière n'a pas respecté les critères légaux. Il y a là un risque de dérive, d'autant que je ne suis pas sûr que la commission de contrôle et d'évaluation vérifiera le respect de ces critères a posteriori, la personne concernée n'étant plus là.
L'amendement CS724 donne également aux membres de la famille la possibilité de contester la décision du médecin statuant sur une demande d'aide à mourir, car une personne malade en fin de vie, en phase terminale, n'a pas forcément la force de former un recours. Du reste, cette disposition paraît nécessaire pour s'assurer que la volonté libre et éclairée de la personne est bien respectée et que son discernement n'est pas altéré.
La limitation des recours est-elle constitutionnelle ? Le Conseil d'État rappelle à cet égard la jurisprudence du Conseil constitutionnel, selon laquelle les limitations ou restrictions doivent être proportionnées à l'objectif recherché, qui est, en l'occurrence, la protection de la personne malade en fin de vie. Il serait sage que le Conseil constitutionnel soit saisi de manière préventive, afin d'éviter que des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) soient posées dans le cadre d'éventuels contentieux.
Les amendements CS492, CS493 et CS494 formulent trois propositions différentes de personnes autorisées à former un recours.
Ce qui fonde ce texte, c'est quand même la volonté libre et éclairée de la personne malade. Le Conseil constitutionnel admet que le recours contre certaines décisions peut être limité, sous réserve que ces limitations soient proportionnelles à l'objectif visé. Quant au Conseil d'État, il considère que le recours contre la décision du médecin peut valablement être restreint aux seules personnes dont émane la demande, sans porter atteinte au droit d'accès à l'aide à mourir ou au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et de la protection du droit à la vie. La configuration de ces litiges est fondamentalement différente de celle des recours existants en matière d'arrêt de traitement, qui ne sont prévus que parce que la personne n'est pas en état d'exprimer sa volonté. L'article 14 vise précisément à éviter que des proches de la personne remettent en cause sa volonté en judiciarisant sa procédure.
Je souscris pleinement aux explications de Mme la rapporteure. Le recours juridictionnel contre la décision sur l'aide à mourir n'est ouvert qu'au demandeur, d'autant que cette demande est couverte par le secret médical. Le Conseil d'État a d'ailleurs précisé, dans son avis, que les dispositions du projet de loi ne font pas obstacle à ce qu'une personne intéressée saisisse le procureur d'une plainte si elle estime que des infractions ont été commises du fait d'erreurs ou de fraudes affectant la décision du médecin. L'autorité judiciaire compétente pourra alors prendre des mesures pour, le cas échéant, interrompre le processus. L'idée est de protéger la volonté libre et éclairée de la personne qui a fait ce choix et de s'assurer que cette volonté peut se réaliser jusqu'au bout.
Nous sommes en train de passer un cap. Nous devons accepter que la personne soit maîtresse d'elle-même jusqu'au bout et que sa volonté d'en finir soit respectée. La souffrance ne doit pas être prolongée parce qu'un conjoint ou un enfant veut garder avec lui une personne en phase terminale ou exprime des doutes sur le choix de cette dernière. Nous devons donner aux personnes le droit ultime de disposer de leur corps jusqu'à la dernière seconde sans judiciariser les choses.
Je rappelle que la CEDH a considéré, dans son arrêt Mortier contre Belgique, que le recours d'un enfant contre la décision d'euthanasie de sa mère était légitime. Le Conseil d'État s'est lui aussi prononcé et a repris certains éléments de l'arrêt Mortier. Comment conciliez-vous donc la rédaction de l'article 14 avec la jurisprudence existante ?
Ne parlons pas à la place du Conseil constitutionnel : il dira lui-même ce qu'il a à dire s'il est saisi de ce projet de loi, conformément au principe de séparation des pouvoirs.
Il faut respecter la demande ultime de la personne. Comment pourrions-nous laisser aux membres de son entourage la possibilité de contester l'avis du médecin ? Nous devons fermer la porte à tout risque de judiciarisation extrême. Nous connaissons tous des cas où les familles se déchirent...
L'arrêt Mortier n'a pas la portée que certains députés veulent lui donner. Le requérant se plaignait que les médecins ne l'avaient pas informé de la demande de sa mère à bénéficier d'une euthanasie. La Cour a écarté les allégations de violation du droit au respect de la vie privée et familiale : elle a estimé qu'il ne saurait être reproché à la loi belge d'obliger les médecins à respecter le souhait de cette personne que sa famille ne soit pas informée de sa démarche et, ce faisant, de leur imposer un devoir de confidentialité et de maintien du secret médical.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements CS165 de Mme Marie-France Lorho et CS603 de Mme Sandrine Dogor-Such (discussion commune)
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements.
Amendements CS164 et CS163 de Mme Marie-France Lorho
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS1833 de Mme Anne-Cécile Violland
La fin de vie est toujours un moment grave, mais elle peut s'accompagner de tensions dans la famille ou dans l'entourage de la personne au sujet de ses conditions de vie, particulièrement lorsqu'elle est gravement malade et en situation de forte dépendance et de vulnérabilité. De manière diffuse, le sentiment d'inutilité ou celui d'être un poids pour la famille et la société pourrait encourager la personne à demander à bénéficier de l'aide à mourir. Aussi souhaitons-nous indiquer clairement que toute pression de la part d'un tiers sur la personne, constatée par un professionnel de santé, relève de la provocation au suicide, punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende conformément à l'article 223-13 du code pénal.
De telles pressions sont déjà susceptibles de recevoir cette qualification pénale. Il est donc inutile de l'inscrire dans ce projet de loi.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1236 de M. Thierry Frappé
Dans un contexte de surcharge des juridictions, cet amendement propose que le requérant doive s'enquérir d'une procédure de conciliation, dont les modalités seront fixées par voie réglementaire, avant de saisir la justice.
L'introduction d'une procédure de conciliation conduirait à allonger excessivement la procédure pour des personnes qui ont besoin que le juge statue rapidement.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1785 de M. Cyrille Isaac-Sibille
Dans son avis du 4 avril dernier, le Conseil d'État a constaté que les mesures prévues par le projet de loi n'offraient pas de garanties suffisantes pour protéger une personne vulnérable. De fait, le texte ne prévoit aucune mesure contraignante. Il laisse à la personne protégée la liberté d'informer son médecin de la mesure de protection dont elle fait l'objet. Le cas échéant, le médecin est simplement tenu d'informer de sa décision la personne chargée de la protection et de tenir compte des observations que cette dernière formulerait.
Nous avons déjà eu cette discussion à plusieurs reprises. Le texte prévoit déjà des garanties spécifiques pour les majeurs protégés.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 14 modifié.
Après l'article 14
Amendement CS1250 de M. Joël Giraud
En l'état actuel du projet de loi, le malade qui remplit l'ensemble des critères pour accéder à l'aide à mourir peut voir la procédure s'arrêter si le médecin argue qu'il a perdu sa conscience ou sa faculté de discernement. Dans cette hypothèse, il n'existe aucune voie de recours permettant au patient, à ses médecins ou à ses proches de faire valoir le souhait qu'il avait consciemment et librement exprimé. Ce cas sera sans doute très rare, mais nous devons le prévoir et ouvrir des voies de recours. Notre responsabilité collective est de ne pas lester la loi d'incohérences et de failles dont pâtiraient des patients et des familles déjà en souffrance.
Je suis extrêmement défavorable à cet amendement.
Nous avons cherché à élaborer le texte le plus équilibré possible. L'aide à mourir ne doit pas être ouverte aux personnes ayant perdu leur discernement, encore moins à l'initiative d'un tiers. Le risque de dérive est trop grand – il est même inimaginable.
L'amendement revient sur l'un des éléments d'équilibre les plus importants du texte : l'alinéa 6 de l'article 6 dispose que la personne doit être « apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ».
Avis défavorable.
Je ne veux pas rouvrir le débat sur la place des directives anticipées dans le titre II relatif à l'aide à mourir, mais l'amendement soulève une vraie question : que faire lorsque, du fait de l'évolution de sa pathologie, le malade perd son discernement juste avant l'étape ultime alors qu'il a déjà validé, en conscience, toutes les étapes précédentes ? À ce stade, je ne voterai pas cet amendement, mais nous devrons trouver une solution en séance.
Nous ne sommes pas allés jusqu'au bout de la question des directives anticipées. Que faire dans le cas – réel – d'une personne en phase terminale de cancer atteinte d'un accident vasculaire cérébral trois jours avant la date prévue pour sa mort et qui, de ce fait, n'est plus en mesure d'exprimer son avis libre et éclairé au moment de l'administration de la substance létale ? Pourtant, cet avis a été réitéré, les étapes de la procédure ont été respectées et l'événement aggrave encore l'état de santé de la personne. Nous devons réfléchir à d'éventuelles exceptions.
Cet amendement pose en effet une question importante, mais il me gêne car, avant de prévoir la possibilité de contester devant l'autorité administrative une décision d'interruption de la procédure, nous devrions nous mettre d'accord, comme au titre Ier, sur le principe du respect des directives anticipées et de la nomination d'une personne de confiance. J'espère que nous pourrons le faire en séance.
Le Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, a considéré le 2 juin 2017 que les parents proches pouvaient former un recours contre une décision d'arrêt de traitement. Or le présent projet de loi ne le prévoit pas pour le suicide assisté ou l'euthanasie. C'est très troublant.
Mme la ministre a rappelé que ce texte était fondé sur la volonté libre et éclairée du malade demandant à bénéficier de l'aide à mourir. Or, à l'article 4, vous avez malheureusement adopté un amendement permettant qu'un patient ayant perdu sa conscience et sa capacité à exprimer sa volonté libre et éclairée puisse se voir administrer une substance légale en faisant prévaloir ses directives anticipées.
Non, madame Genevard, nous n'avons pas voté la disposition que vous venez d'évoquer – à moins que j'aie raté quelque chose...
La discussion de l'amendement CS1250 est l'occasion de reprendre des débats que nous avons déjà eus et qui alimentent ma propre réflexion. Il est vrai que certaines situations particulières ne sont pas prises en compte, mais je ne veux pas avoir à regretter, dans quelques années, d'être allé trop loin ou de ne pas avoir été assez vigilant. Je souhaite être associé à des avancées en matière d'aide à mourir, mais nous devons garantir que rien n'est fait contre la volonté libre et éclairée du patient. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Je comprends que certains collègues souhaitent ouvrir le débat sur le cas d'une personne ayant confirmé sa volonté à l'issue du délai de deux jours mais perdant sa conscience et sa faculté de discernement avant l'administration du produit. Toutefois, le recours devant l'autorité administrative n'est pas une solution.
La commission rejette l'amendement.
Article 15 : Mesures réglementaires d'application
Amendements de suppression CS249 de M. Philippe Juvin et CS426 de M. Patrick Hetzel
Il s'agit de supprimer l'article 15, qui nous inquiète.
Monsieur Turquois, je reconnais volontiers qu'il est parfois difficile de suivre tous nos travaux. J'ai relu l'amendement CS993 que vient d'évoquer notre collègue Annie Genevard. Il complète l'alinéa 1 de l'article 4 par la phrase suivante : « Dans le cadre des directives anticipées, la personne peut indiquer son choix individuel du type d'accompagnement pour une aide à mourir lorsque la situation ne permet pas une expression réitérée en pleine conscience. » Cette disposition n'exclut pas l'administration du produit à une personne inconsciente contre sa volonté.
L'article 15 renvoie à des mesures réglementaires d'application du projet de loi, ce qui n'a rien d'anormal.
Pour mémoire, le Conseil constitutionnel a jugé, s'agissant de la procédure d'arrêt des traitements et de la mise en œuvre d'une sédation profonde et continue jusqu'au décès, que le législateur n'avait pas méconnu l'étendue de sa compétence. Le présent projet de loi est particulièrement détaillé.
Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Amendement CS2011 de Mme Laurence Cristol
L'amendement vise à codifier l'article 15, en cohérence avec les amendements de codification précédemment adoptés.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CS1867 de René Pilato
Cet amendement tire la conséquence de certains de nos échanges. Par-delà les opinions philosophiques sur la fin de vie, la HAS a souvent été convoquée au cours de nos travaux. Qu'elle l'ait été par des personnes aux opinions différentes la place au centre du débat et lui confère une forte légitimité. Aussi proposons-nous que la plupart des dispositions relatives à l'application du chapitre II soient adoptées après avis de la HAS.
Le décret prévu à l'article 15 porte sur les modalités d'information de la personne qui demande l'aide à mourir, sur la forme et le contenu de la demande et de sa confirmation, ainsi que sur la procédure de vérification des conditions d'accès au dispositif. Ces dispositions n'appellent pas l'avis de la HAS, compte tenu de ses compétences.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis, suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette les amendements identiques CS284 de Mme Sandrine Dogor-Such et CS428 de M. Patrick Hetzel.
Amendements identiques CS1722 de M. Christophe Bentz et CS617 de Mme Christine Loir, amendements CS427 de M. Patrick Hetzel, CS1010 de M. Thibault Bazin, CS532 de Mme Marie-France Lorho, CS271 de Mme Sandrine Dogor-Such, CS894 de M. Julien Odoul, CS1028 de M. Thibault Bazin et CS1739 de M. Christophe Bentz (discussion commune)
Une clarification sémantique s'impose d'ici à l'examen du texte en séance publique. Les modifications adoptées précédemment, notamment aux articles 5 et 6, ont fait perdre à certaines dispositions leur cohérence.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS533 de Mme Marie-France Lorho
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 15 modifié.
Après l'article 15
Amendements CS110, CS111 et CS1713 de M. Thibault Bazin (discussion commune)
Madame la ministre, vous avez saisi la HAS, à raison me semble-t-il, dans la mesure où certains sujets sont toujours en débat. Par ailleurs, vous serez amenée à prendre des décrets d'application du texte. Tout cela prendra du temps.
Je propose d'adopter une date d'entrée en vigueur cohérente avec le temps nécessaire pour mener à bien ce travail. L'amendement CS110 vous laisse deux ans et demi. L'amendement CS111 vous laisse seulement un an et demi, ce qui est peut-être un peu court compte tenu de la navette parlementaire.
L'amendement CS1713 est très important à nos yeux. Il constitue un préalable éthique. Il vise à faire en sorte que les dispositions des articles 7 à 15 entrent en vigueur une fois l'accès effectif aux soins palliatifs garanti à chaque Français sur tout le territoire. Nous sommes plusieurs à y tenir. Les membres du CCNE nous ont alertés à ce sujet. Un choix entre deux possibilités dont l'une est nettement plus rapide et moins coûteuse que l'autre n'en est pas vraiment un.
L'effectivité de la loi a tout à gagner à une entrée en vigueur des lois votées dans les meilleurs délais. Le présent projet de loi est en gestation depuis longtemps. Le Gouvernement a mené un important travail de concertation en amont pour le construire. Le temps nécessaire a été pris pour bâtir un texte équilibré.
En outre, il n'est pas examiné en procédure accélérée et fera donc l'objet de plusieurs lectures par chaque chambre du Parlement, ce qui garantit que le temps nécessaire au débat est pris. Au terme de ce travail, qui prendra encore du temps, les citoyens attendent que les lois votées soient appliquées.
Avis défavorable.
On reproche souvent au Gouvernement de mettre du temps à rendre les textes effectifs et à publier les décrets d'application. Il est pour le moins surprenant de l'y inviter.
Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS254 de M. Philippe Juvin
L'amendement prévoit que les professionnels de santé disposés à participer à la mise en œuvre du chapitre III répondent aux obligations de validation d'une formation continue organisée et définie conjointement par la HAS et par les sociétés savantes de soins palliatifs.
Madame la ministre, je salue votre maîtrise de la joute oratoire. Vous ironisez sur le temps que je propose de vous laisser, mais vous en demandez pour déployer la stratégie décennale des soins d'accompagnement, d'autant qu'elle nous emmène bien après le présent quinquennat, dans lequel vous vous êtes engagée aux côtés du Président de la République. En faisant en sorte que le titre II ne soit pas appliqué si le titre Ier ne l'est pas, je m'assure de la cohérence d'ensemble de la démarche.
Cher collègue, soyez remercié de votre sollicitude ! Je partage votre volonté de former spécifiquement les soignants à la procédure. Toutefois, en faire dépendre leur participation est une démarche trop restrictive susceptible d'entraver de nombreux droits reconnus au patient, tel que celui de choisir le médecin auprès duquel il effectue sa demande.
Avis défavorable.
Même avis.
Le Gouvernement a manifesté sa volonté de commencer à travailler sur les soins palliatifs dès l'année 2024, avant même que le présent texte n'ait achevé son parcours législatif, en adoptant une approche budgétaire permettant d'avancer.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS472 de M. Yannick Neuder
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
La réunion s'achève à dix-neuf heures quarante.
Présences en réunion
Présents. – Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thibault Bazin, Mme Anne Bergantz, Mme Chantal Bouloux, M. Hadrien Clouet, M. Charles de Courson, Mme Laurence Cristol, Mme Geneviève Darrieussecq, M. Stéphane Delautrette, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Karen Erodi, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Emmanuel Fernandes, Mme Caroline Fiat, Mme Agnès Firmin Le Bodo, M. Thierry Frappé, Mme Annie Genevard, M. François Gernigon, M. Joël Giraud, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Emeline K/Bidi, Mme Julie Laernoes, M. Gilles Le Gendre, Mme Élise Leboucher, M. Hervé de Lépinau, Mme Christine Loir, Mme Lise Magnier, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Christophe Marion, M. Didier Martin, M. Yannick Neuder, M. Laurent Panifous, Mme Michèle Peyron, M. Sébastien Peytavie, M. René Pilato, Mme Lisette Pollet, Mme Natalia Pouzyreff, Mme Cécile Rilhac, M. Jean-François Rousset, Mme Danielle Simonnet, M. David Valence, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, M. Léo Walter
Excusée. – Mme Christine Pires Beaune