Séance en hémicycle du jeudi 30 mai 2024 à 9h00

La séance

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La séance est ouverte à neuf heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle la discussion, en application de l'article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution de M. Marcellin Nadeau et plusieurs de ses collègues visant à adapter et mutualiser nos politiques publiques au changement climatique, notamment à destination des villes côtières et insulaires (1942).

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Madame la présidente, monsieur le ministre chargé du commerce extérieur, chers collègues, en ouverture de la niche du groupe Gauche démocrate et républicaine, le groupe GDR, c'est avec gravité que je vous soumets, avec ma collègue Mereana Reid Arbelot, la proposition de résolution visant à mutualiser et adapter nos politiques publiques au changement climatique, notamment à destination des villes côtières et insulaires. Avec gravité, en effet, car au moment où je vous parle, des atolls de Polynésie sont en grand danger de submersion et leur population est inquiète de devoir migrer. Avec gravité, aussi, parce que la commune du Prêcheur, dont j'ai eu l'honneur d'être le maire, prise en étau entre les flancs du volcan de la montagne Pelée et la mer des Caraïbes, au nord de la Martinique, voit ses habitations submergées par la montée des eaux, qui a entraîné, en moins de cinquante ans, un recul du trait de côte de 100 mètres, obligeant les habitantes et les habitants à se relocaliser en amont, sur les mornes.

On serait tenté de penser que les phénomènes liés au dérèglement climatique concernent au premier chef les territoires d'outre-mer qui sont quasiment tous des îles, à l'exception de la Guyane – le changement climatique y a cependant des effets préoccupants, notamment dans la commune d'Awala-Yalimapo. Toutefois, comme le savent nos amis de l'Association nationale des élus du littoral (Anel), qui partagent nos inquiétudes et dont certains sont présents aujourd'hui, le dérèglement climatique est aussi une réalité pour les villes côtières de la France hexagonale. Ainsi, la tempête Xynthia a fait plusieurs morts en submergeant l'île Oléron en 2016. Le sujet y est prégnant, comme en Seine-Maritime, sur le littoral normand, en Bretagne et aux Sables-d'Olonne.

La question est donc globale et de première importance : elle appelle, de notre point de vue, une réponse politique déterminée. Nous ne disons pas que l'État ne s'engage pas face au dérèglement climatique majeur auquel nous sommes confrontés. Les territoires régionaux, communaux et littoraux se mobilisent également dans le cadre du troisième plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc), s'agissant notamment des enjeux relatifs au recul du trait de côte. Néanmoins, on constate que la question ne fait pas l'objet d'un programme dédié au sein du budget de l'État, et il faut reconnaître la grande dilution des structures et des financements mobilisés.

La proposition de résolution demande, en conséquence, au Gouvernement de mieux planifier, sur le long terme, des réponses adaptées aux différents contextes locaux et d'inscrire le plan national d'adaptation au changement climatique dans un chapitre spécifique de la prochaine loi de programmation pluriannuelle sur l'énergie et le climat. Elle demande surtout une meilleure prise en compte de l'adaptation au changement climatique dans le processus d'évaluation environnementale des projets, dans les plans et les programmes, ainsi que dans les documents d'urbanisme. Enfin, le texte demande que les impératifs sociaux soient placés au cœur des politiques d'adaptation.

Penser l'adaptation au dérèglement climatique suppose, en effet, de penser en même temps et globalement le « ménagement du territoire » – j'insiste sur ce terme –, la souveraineté et l'autonomie alimentaire et énergétique. Dans la commune du Prêcheur, confrontée depuis des décennies à des risques majeurs, y compris aux lahars – « coulées de boue », en indonésien –, nous avons développé une certaine capacité de résilience : coupés du monde à plusieurs reprises, nous avons appris à ne compter que sur nous-mêmes pour subsister, aussi bien sur le plan agroalimentaire que sur le plan énergétique. Notre expérience peut servir de laboratoire pour la gestion des risques naturels et technologiques – les deux sont désormais liés –, laquelle doit être revisitée à partir des savoirs des populations locales et de nouveaux travaux de recherche permettant de consolider le socle des connaissances scientifiques qui éclairent les politiques publiques.

Les élus communaux que nous sommes, ou que, pour beaucoup, nous avons été, le savent : nous sommes souvent livrés à nous-mêmes, sans moyens, sans financements, sans capacité d'agir, alors même que nous sommes en première ligne. Il nous semble donc important d'asseoir un modèle financier adapté aux villes côtières et insulaires, grâce, en particulier, à la création d'un fonds d'érosion côtière. De même, il est nécessaire d'élaborer une stratégie nationale relative aux déplacements de populations victimes des effets du changement climatique, parmi lesquels la montée des eaux et la perte de la biodiversité, et de décliner cette stratégie avec les communes littorales.

La proposition de résolution a l'ambition de promouvoir le rôle pionnier de la France dans ce domaine en s'appuyant sur les collectivités territoriales. Il s'agit, face à l'urgence du dérèglement climatique, de définir un nouveau paradigme d'intervention publique. Pourquoi, demanderez-vous ? Car vous pensez peut-être que quelques enrochements, digues ou ouvrages de protection côtière suffisent. En réalité, face à l'ampleur des phénomènes actuels, de tels dispositifs ont, hélas, montré leurs limites.

Le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) le constate également : ces installations quelles qu'elles soient sont des « solutions de court terme inadaptées », qui créent un sentiment trompeur et dangereux de sécurité. Élus des littoraux ou insulaires, nous savons que la nature reprend toujours ses droits et que le changement climatique a des conséquences insoupçonnées.

Déjà, des îles polynésiennes contractent des accords internationaux avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande en vue de l'hébergement de leurs populations – Je pense à Tuvalu. De même, certaines îles des Tuamotu ont demandé aux Marquises d'accueillir leurs habitants, mais ces dernières ne pourront pas constituer un refuge pour les milliers de personnes qui vivent dans la centaine d'îles du Pacifique en danger. En Martinique, nous savons que notre territoire aura perdu 10 % de sa superficie dans vingt ans, en particulier dans la plaine du Lamentin, la plus habitée, la plus industrielle et la plus commerciale.

Il faut donc réagir. Or le rapport que nous avons rédigé en novembre 2023, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2024, au nom de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée, en nous rendant sur le terrain, grâce au soutien de la commission et de son président, rapport dont est directement issu le texte que nous vous soumettons, fait un constat : si le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le monde universitaire, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris), Météo-France, le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), entre autres, mènent tous, dans leur domaine, d'excellentes expériences, celles-ci restent sectorielles et peu partagées, elles ne font pas l'objet de synergies, ce qui rend les plans Orsec – organisation de la réponse de sécurité civile – obsolètes, notamment en cas de risques concomitants, ce qui est bien souvent le cas.

De fait, l'adaptation aux effets du changement climatique concerne de multiples secteurs, qui doivent tous être impliqués et dont les actions doivent systématiquement être coordonnées et déclinées à tous les niveaux, y compris au niveau communal. Planifier les politiques d'adaptation, favoriser la transdisciplinarité, inscrire dans le code de l'environnement un volet spécifique sur l'adaptation au changement climatique, placer les impératifs sociaux au cœur des politiques d'adaptation – les premières victimes sont souvent les plus précaires et les plus pauvres –, développer de nouvelles façons de produire et de consommer, construire un modèle financier solidaire et adapté aux villes côtières et insulaires par la création d'un fonds d'érosion côtière : voilà l'ambition de la proposition de résolution, qui, je l'espère, saura nous rassembler. Son but ultime, face à la folie des phénomènes engendrés par le dérèglement climatique, est de garder raison et de retrouver notre énergie vitale et solidaire.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, RE, Dem, HOR et LIOT.

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Tout le monde s'inquiète, à juste titre, des effets du dérèglement climatique sur les villes côtières et insulaires, particulièrement exposées aux aléas. Cette proposition de résolution est donc la bienvenue. En tant qu'élue de La Réunion, je tiens, pour commencer, à rappeler l'impact dramatique du dérèglement climatique dans les outre-mer.

Selon la note de l'Agence française de développement (AFD) intitulée « Vulnérabilités au changement climatique des outre-mer et des petits États insulaires », les territoires insulaires d'outre-mer sont à l'avant-poste du dérèglement climatique. Cette vulnérabilité résulte de leur aménagement, concentré sur les littoraux, ainsi que de la fragilité de leurs écosystèmes, qui concentrent 80 % de la biodiversité française sur seulement 22 % du territoire national. Ils sont donc particulièrement exposés à la montée du niveau de la mer et à l'intensification des événements extrêmes, tels que les chocs pluviométriques et les cyclones, plus intenses et plus fréquents.

Les risques liés à l'élévation du niveau de la mer sont particulièrement élevés à Saint-Martin, en Polynésie, à Wallis-et-Futuna et à Saint-Pierre-et-Miquelon, mais aussi en Guadeloupe, où les zones urbaines sont principalement situées sur le littoral. De même, les risques liés à l'instabilité des températures sont plus substantiels dans les territoires d'outre-mer, en particulier en Guadeloupe, où ils sont croissants, et à La Réunion, terre cyclonique.

Si seulement les gouvernements qui se succèdent tenaient compte des rapports produits sur le sujet, tels que celui de l'Observation national sur les effets du réchauffement climatique (Onerc) intitulé « Les outre-mer face au défi du changement climatique », remis en 2012 au Premier ministre et au Parlement par son président de l'époque, Paul Vergès. Ce travail soulignait que commencer par réduire la vulnérabilité des territoires constitue une voie concrète pour réduire leur vulnérabilité à long terme et s'adapter au changement climatique. L'enjeu est donc d'intégrer la perspective du long terme dans des actions immédiates.

Pourtant, les politiques publiques actuelles en matière d'adaptation ne sont pas à la hauteur de l'enjeu et s'inscrivent davantage dans la réaction que dans la prévention. Cette logique de court terme a un coût important sur les finances publiques. En cas de crise, il n'y a qu'une réaction aujourd'hui : des mécanismes assurantiels sont actionnés et des aides sont engagées. Si la facture est lourde, cette façon de procéder revient souvent à poser un pansement sur une jambe de bois, la situation n'étant pas réglée sur le fond.

À défaut de prendre les mesures de prévention supplémentaires tellement nécessaires, dans un contexte d'intensification des impacts du changement climatique, nous risquons de devoir accroître continûment les dépenses et les interventions pour réparer ce que l'on n'aura pas anticipé.

À l'instar du groupe Gauche démocrate et républicaine, nous estimons, au groupe LIOT, qu'il est légitime d'envisager de nouveaux instruments financiers à l'attention des villes côtières, en créant un fonds ad hoc ou en renforçant un fonds existant. Toutefois, il est également urgent que les responsables politiques, comme la société civile, le secteur privé, les citoyens, prennent toute leur part à la politique d'anticipation que nous réclamons. Tous les projets d'aménagements doivent prendre en considération les risques liés au dérèglement climatique.

L'élaboration de stratégies territoriales et locales d'adaptation devrait être encouragée pour rompre avec la multiplication d'interventions ponctuelles guidées par l'urgence, donc souvent dépourvues de vision à long terme. Nous attendons toujours le troisième plan national d'adaptation au changement climatique, dont la présentation ne cesse d'être repoussée ; nous espérons qu'il portera une véritable attention aux outre-mer.

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À plus long terme, nous considérons qu'il est légitime de préparer une stratégie nationale pour les déplacements de populations victimes des effets des changements climatiques, dont la montée des eaux et la perte de biodiversité.

Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutiendra la proposition de résolution, car mieux vaut prévenir que guérir.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR, SOC, HOR, GDR – NUPES. – M. Matthieu Marchio applaudit également.

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Nous sommes le 30 mai 2024 : c'est le vingt-huitième mois d'affilée qui présente des températures au-dessus des normes. En trente ans, les températures à l'échelle du continent européen ont augmenté deux fois plus vite que la moyenne mondiale. Et pourtant, alors que des élections sont organisées sur ce même continent dans dix jours, notre capacité à vivre, travailler, avoir accès aux soins, voyager, vieillir dans une Europe où le réchauffement atteindra 4 degrés est totalement éclipsée du débat public !

« Le contraste entre le calme avec lequel nous continuons à vivre tranquillement et ce qui nous arrive est vertigineux. », disait Bruno Latour. Je ne cesserai pas de vous alerter à ce sujet. Je souhaite donc remercier nos collègues de la Gauche démocrate et républicaine de soumettre aux débats une résolution sur l'adaptation de nos politiques publiques aux changements climatiques.

Les conséquences de ces changements sont désormais tangibles pour nos concitoyens : recul du trait de côte, déplacements de populations, logements invivables, maisons qui se fissurent, morts au travail, montée des eaux, jusqu'à la crise agricole, qui a fait rugir les tracteurs sur toutes les routes de France au début du printemps – ils sont, depuis, redevenus silencieux. C'est l'ensemble de notre monde, tout ce que l'on connaît, qui est en jeu.

Face à la catastrophe, cela fait cinquante ans que certains donnent l'alertent. Je voudrais profiter de l'examen de la présente résolution pour rendre hommage à René Dumont qui, en 1974, en direct à la télévision, vêtu de son pull rouge, buvait « un verre d'eau précieuse », si précieuse qu'elle suscite aujourd'hui des tensions immenses sur nos territoires, qu'elle provoque des crues et des inondations aux quatre coins du pays, tandis que Barcelone se fait approvisionner par cargo et que les vignerons pyrénéens arrachent leurs vignes.

Depuis cinquante ans, les écologistes mettent en garde contre ces dangers et tentent de réduire les risques en proposant des politiques adaptées de sobriété et d'adaptation qui, si elles avaient été suivies, nous auraient fait gagner des milliards d'euros. Nous défendions l'eau comme bien commun, quand vous n'écoutiez pas. Nous défendions la protection des terres contre la bétonisation, quand vous n'écoutiez pas. Nous défendions la végétalisation des villes, la rénovation des logements, ou la gestion durable des forêts, quand vous n'écoutiez pas.

Encore aujourd'hui, nous sommes souvent confrontés au climatoscepticisme, aux discours antiscience, et vous vous montrez frileux, vous reculez, pour gagner quelques points dans les sondages, au risque d'y laisser quelques millions de vies. Si nombreux sont ceux qui ont compris les erreurs du passé, d'autres persistent.

Pendant ce temps, le Haut Conseil pour le climat (HCC) appelle à un « sursaut pour le climat en France ». Pendant ce temps, la Cour des comptes envisage de publier un rapport annuel sur la transition écologique, en amont du projet de loi de finances, pour inciter l'État à investir considérablement en la matière. Pendant ce temps, nous attendons toujours la loi de programmation sur l'énergie et le climat, qui devait être présentée au Parlement avant juillet 2023, ainsi que le futur plan national d'adaptation au changement climatique, qui devait être publié en avril, puis mi-mai, puis fin mai. Quand il s'agit d'écologie, le Gouvernement repousse toujours à plus tard.

Pire, il recule, puisque l'écologie est sacrifiée sur l'autel de l'austérité, alors que la Cour des comptes appelle à préserver les investissements dans la transition. L'écologie a fait l'objet d'une annulation de crédits de 1,3 milliard d'euros au cours de l'exécution du budget de 2023, puis de 2 milliards en février dernier, et elle devrait encore perdre entre 1 et 1,4 milliard supplémentaire selon les dernières annonces du ministre de l'économie.

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Notre monde brûle et le Gouvernement préfère toujours gaspiller des milliards d'euros d'argent public pour sponsoriser les déplacements en avion ou des technosolutions qui nous enferment dans la maladaptation.

Alors, en tant qu'écologistes, nous soutiendrons la présente résolution. Nous soutiendrons à vos côtés, chers collègues du groupe GDR, une trajectoire pluriannuelle pour financer le plan national d'adaptation au changement climatique, ainsi que l'augmentation des fonds qui y sont dédiés, comme tous les économistes sérieux y invitent. Nous soutiendrons le renforcement de la recherche scientifique transdisciplinaire, à l'heure où les scientifiques ne savent plus comment vous mettre en garde contre le mur à venir. Nous soutiendrons une transition climatique au service de la justice sociale. Nous soutiendrons la mise en place d'un fonds pour l'érosion côtière – un système solidaire de financement pour accompagner les territoires et les villes côtières. Nous soutiendrons l'intégration d'un volet sur l'adaptation au changement climatique dans les processus d'évaluation environnementale des projets. Enfin, nous soutiendrons, résolument, la demande que vous adressez au Gouvernement pour qu'il mette en place une stratégie nationale sur les déplacements de populations victimes des effets du changement climatique.

Rappelons-nous l'image du ministre des affaires étrangères des îles Tuvalu, de l'eau jusqu'aux genoux, prononçant son discours à la presse lors de la COP26. En France, 864 communes sont identifiées comme vulnérables aux submersions marines. L'une d'entre elles, le village de Miquelon dans l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon, s'apprête à être le premier de France à se délocaliser. Rappelons-nous des mots du PDG d'Axa, Henri de Castries : « En effet, une augmentation de 2 degrés de la température moyenne dans le monde peut encore être assurable, mais ce qui est certain, c'est qu'une hausse de 4 degrés ne l'est pas. »

Nous fonçons droit dans le mur. Parce qu'après cinquante ans, nous ne nous y résignons toujours pas, le groupe Écologiste votera bien évidemment en faveur de cette résolution, et nous invitons le gouvernement à s'en saisir dans les plus brefs délais.

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES. – M. Perceval Gaillard applaudit également.

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Hier encore, Ouest-France consacrait un long article aux bâtiments menacés par la mer en Loire-Atlantique et en Vendée. D'après la chambre régionale des comptes, 821 d'entre eux sont appelés à disparaître d'ici à cent ans. Alors, pourrons-nous encore vivre le long de nos littoraux dans quelques années ? Question ô combien d'actualité. Je dis littoraux, et pas littoral, car les côtes sont diverses : Bretagne, Martinique – où vous êtes élu, monsieur Nadeau –, Vendée, Nouvelle Aquitaine, Guyane, Pays basque, Normandie, ou encore Polynésie… Autant de destinations souvent plébiscitées pour les vacances, qui sont aussi des territoires menacés par le dérèglement climatique.

Le dérèglement climatique a une conséquence très concrète : le recul du trait de côte, c'est-à-dire, pour les non initiés, le grignotage régulier des terres par la mer. Ce phénomène est mondial. En France, on estime que 20 % de nos littoraux sont en recul, recul qui équivaut à la perte d'un terrain de football par semaine. En cinquante ans, ce sont 4 200 terrains qui ont disparu ! Parmi nos 1 200 communes littorales, où vivent 8 millions de nos compatriotes, 500 sont concernées par l'érosion, quand les autres sont, malheureusement, exposées à d'autres phénomènes climatiques : la submersion, les inondations ou encore les feux de forêt. Comme l'érosion d'aujourd'hui est la submersion de demain, conjuguée à des évènements tempétueux plus importants et plus fréquents, les territoires littoraux et, a fortiori, les territoires insulaires doivent s'adapter.

Monsieur Nadeau, je connais votre engagement, votre expérience et votre expertise sur le sujet. J'ai pu les mesurer, en septembre 2019, dans la commune dont vous étiez alors le maire, Le Prêcheur en Martinique, dans le cadre de la mission qui m'avait été confiée sur l'adaptation de nos littoraux face au changement climatique. Comme vous l'avez rappelé, en soixante ans, la côte y a reculé de près de 200 mètres à certains endroits : 300 personnes ont dû être relogées après la destruction de leur habitation. La montée des eaux n'est donc ni une vue de l'esprit, ni de la science-fiction, mais, malheureusement, une triste réalité. Le sujet est pris très au sérieux, au niveau national comme par les différentes collectivités.

Depuis que l'homme urbanise les littoraux, il a cru qu'il dompterait la nature, la mer en l'occurrence. Il en a résulté une logique de la gestion du risque, de la lutte contre, plutôt que de l'aménagement de l'espace. Les littoraux se sont ainsi fortifiés et consolidés, à coups d'enrochements et de digues – des ouvrages extrêmement coûteux à construire comme à entretenir.

Votre proposition de résolution invite le Gouvernement à mettre en œuvre des actions prioritaires, dans le cadre de la définition d'une politique globale dédiée aux villes côtières et insulaires. Je vous rappelle cependant ce que le Gouvernement et la majorité ont déjà réalisé depuis 2017. Nous avons agi, pleinement conscients de l'accélération du bouleversement climatique et de ses conséquences sur les littoraux, qu'il s'agisse en particulier de la sécurité des personnes et des biens ou de la pérennité des activités.

La loi « littoral » de 1986 avait certes permis de protéger nos côtes, mais il fallait aller plus loin. C'est fait grâce à la loi « climat et résilience » de 2021 qui améliore la connaissance et le partage de l'information en la matière, permet de mieux gérer les biens immobiliers situés dans les zones exposées, limite l'exposition des nouveaux biens au recul du trait de côte, met à disposition des collectivités des outils pour la recomposition spatiale et la relocalisation des biens menacés, et adapte les dispositions relatives aux cinquante pas géométriques en outre-mer. Autant de mesures utiles, nécessaires, que vous appelez de vos vœux dans votre résolution et qui sont, pour beaucoup, déjà satisfaites. Bien sûr, il nous faut accélérer collectivement.

J'aurais pu aussi vous parler des travaux réalisés par les autres acteurs que vous avez déjà évoqués, mobilisés depuis de longues années sur le sujet, tels que le réseau national des observatoires du trait de côte, le groupement d'intérêt public (GIP) Littoral en Nouvelle-Aquitaine, le Cerema, l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), ou encore l'Anel, mais le temps m'est compté.

Je termine donc en abordant la question centrale du volet financier. Dès 2019, dans le rapport sur l'érosion côtière que j'ai remis à Élisabeth Borne, je plaidais pour la création d'un fonds dédié et pérenne, le Fonds d'aménagement littoral. Il nous revient aujourd'hui de le concrétiser et de le faire vivre dans le temps, en en déterminant les contours, le périmètre, et les sources de financement. Ce sera l'objet de la prochaine réunion du Comité national du trait de côte.

Vous le voyez, nous sommes au travail, et nous poussons à ce que les financements nécessaires soient prochainement votés, car ils sont la pierre angulaire d'une politique de résilience efficiente.

Parce que votre proposition de résolution est utile aux travaux que nous menons, et nous encourage à poursuivre ceux que nous avons engagés, nous la soutiendrons.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.

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La France peut s'enorgueillir d'avoir le deuxième domaine maritime mondial, grâce à ses outre-mer. C'est une fierté, mais également un défi majeur face au réchauffement climatique. Dans ma région des Hauts-de-France, où les falaises s'érodent et où les plages reculent, les conséquences de ce changement climatique sont bien visibles. L'intérêt de la proposition de résolution soumise par le groupe GDR est de nous alerter, à raison, sur les enjeux spécifiques liés aux outre-mer.

Nos outre-mer sont les plus exposés aux risques climatiques. Ces territoires, divers par leurs géographies et leurs cultures, partagent une vulnérabilité accrue face aux impacts climatiques. Ils représentent 70 % de notre littoral et 80 % des écosystèmes fragiles.

La première étape consiste à reconnaître l'urgence de la situation. Les outre-mer sont déjà confrontés à des phénomènes météorologiques extrêmes : cyclones plus fréquents et intenses, élévation du niveau de la mer, sécheresses prolongées et inondations dévastatrices. L'un des problèmes les plus pressants est l'érosion du littoral : elle menace les écosystèmes côtiers, réduit les terres disponibles pour les habitants et compromet les infrastructures essentielles. Les plages, qui sont non seulement des atouts économiques, grâce au tourisme, mais aussi des barrières naturelles contre les tempêtes, sont en train de disparaître.

Nous devons donc adapter nos politiques publiques – en intégrant systématiquement la résilience climatique dans les stratégies de développement –, repenser nos infrastructures, renforcer nos systèmes de gestion des risques, et promouvoir des pratiques durables dans tous les secteurs, de l'agriculture à l'urbanisme. Il est par exemple essentiel d'investir dans des infrastructures résistantes aux catastrophes naturelles, telles que des bâtiments à même de résister aux ouragans, ou des systèmes de drainage efficaces pour prévenir les inondations. Nous devons également mettre en place des mesures spécifiques contre l'érosion côtière. Je pense par exemple à la restauration des mangroves et des récifs coralliens, qui constituent des défenses naturelles contre les vagues et les tempêtes.

Les outre-mer peuvent être des viviers de solutions innovantes, qui pourront ensuite être appliquées ailleurs et, bien sûr, en métropole où ces phénomènes causeront des dégâts irrémédiables sur la côte méditerranéenne ou atlantique. Il est temps d'élaborer des politiques cohérentes et intégrées qui tiennent compte des spécificités locales, en impliquant les collectivités, l'État, les entreprises et la société civile.

Enfin, nous pourrons nous appuyer sur la science et l'innovation. Les avancées technologiques offrent, en effet, des opportunités inédites pour mieux comprendre et anticiper les impacts climatiques. En investissant dans la recherche et en favorisant l'innovation, nous pourrons développer des solutions adaptées aux réalités locales des outre-mer. L'utilisation de technologies de surveillance environnementale et de modélisation climatique peut ainsi aider à prévoir et à atténuer les effets des phénomènes extrêmes. Des solutions innovantes, telles que les barrières sous-marines, doivent être explorées et déployées. Ces mesures de défense sont particulièrement importantes pour permettre aux populations locales de continuer à vivre chez elles, en sécurité.

Nous devons également anticiper les éventuels déplacements de populations qui seront nécessaires lorsqu'il n'y aura, hélas, plus d'autres solutions.

Pour concrétiser ces initiatives, il est possible de trouver des financements solides et diversifiés. Il faudrait : renforcer les fonds nationaux dédiés à la lutte contre le changement climatique et à la protection de l'environnement, en veillant à ce que les outre-mer reçoivent une part équitable des ressources ; encourager le développement économique local, en soutenant les entreprises sur place et en créant des emplois dans le secteur de l'environnement ; utiliser les ressources de la Banque publique d'investissement (BPIFrance), afin de financer des projets d'infrastructures résilientes et durables dans les territoires ultramarins ; encourager, enfin, la participation des citoyens, à travers des initiatives de financement participatif et des partenariats public-privé pour financer des projets locaux.

Adapter et mutualiser nos politiques publiques face au changement climatique est une nécessité impérieuse. Ce n'est pas une sobriété de façade qui nous condamne à la régression, mais bien l'inaction.

Pour toutes ces raisons, le groupe Rassemblement national votera en faveur de la proposition de résolution.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Permettez-moi de saluer, pour commencer, l'initiative de nos camarades du groupe GDR et de notre ami Marcellin Nadeau, qui sait parfaitement ce qu'est l'érosion côtière, en tant qu'ancien maire de la commune du Prêcheur, symbole de la montée des eaux qui ronge le littoral martiniquais.

Mme Clémence Guetté applaudit.

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Permettez-moi également d'avoir une pensée pour les habitants du quartier de l'Étang du Gol à Saint-Louis, premiers réfugiés climatiques de La Réunion, qui voient les lieux où ils résident régulièrement submergés par la houle dans l'indifférence la plus totale.

Pire, lors de sa venue en missouk – en douce –, dans notre île, le président de la commission d'enquête sur les risques naturels – celle-là même qui a été volée à notre excellent camarade Jean-Philippe Nilor – les a volontairement ignorés, préférant jeter de l'huile sur le feu sur un tout autre sujet. L'histoire jugera celles et ceux qui jouent à ce petit jeu et qui servent les intérêts du Gouvernement plutôt que ceux de la population ! Vous n'êtes absolument pas à la hauteur des enjeux.

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Puisque l'occasion m'en est donnée, permettez-moi encore cette mise au point : à celles et ceux qui se permettent de jeter de l'huile sur le feu dans des problèmes internes réunionnais afin de mieux masquer leurs propres échecs sur leur territoire, je dis qu'ils nous trouveront face à eux !

De la même manière, vous nous trouverez face à vous, monsieur le ministre, pour dénoncer le manque de moyens dédiés à l'écologie, notamment en faveur de l'adaptation.

Mme Clémence Guetté applaudit.

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Le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires est celui qui a consenti le plus gros sacrifice : 2,2 milliards d'euros de crédits ont été annulés en février 2024, à l'annonce des 10 milliards d'euros d'économies sur le budget de l'État. Comme si cela ne suffisait pas, il lui a de nouveau été demandé de trouver, en mai, 1,4 milliard d'économies !

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Sur l'autel de l'austérité, c'est l'écologie, en général, et les politiques d'adaptation, en particulier, qui sont sacrifiées en premier. Une fois encore, l'histoire jugera ce Président de la République, qui n'est pas du tout à la hauteur des enjeux !

Mme Clémence Guetté applaudit.

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Le fonds Vert, destiné à accompagner les collectivités dans la bifurcation écologique, passe de 2,5 milliards à 2,1 milliards. Il s'agit d'une nouvelle coupe budgétaire pour les collectivités, après la stagnation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Au-delà des besoins techniques et humains, les collectivités territoriales, notamment insulaires et côtières, manquent de moyens financiers.

D'après un rapport du Haut Conseil pour le climat publié en juin 2023, la France doit passer d'une politique d'adaptation réactive à une politique d'adaptation transformatrice. Cette instance écrit ainsi que « l'adaptation doit passer du mode réactif prévalent aujourd'hui pour changer d'échelle et devenir transformatrice, en anticipant les changements futurs à plusieurs échelles temporelles : années, saisons et les événements extrêmes plus brefs ». Selon Oxfam, « jusqu'à présent, les deux premiers plans nationaux d'adaptation au changement climatique présentés par le Gouvernement ont été un ensemble de mesures parcellaires, peu ambitieuses et pas toujours cohérentes ».

Cette adaptation réactive, qui se traduit par des coupes budgétaires, est d'autant plus incompréhensible, monsieur le ministre, que nous connaissons toutes et tous l'urgence de la situation.

En France, l'érosion côtière concerne 20 % des côtes, soit l'équivalent d'un linéaire côtier d'environ 900 kilomètres. Les principaux départements touchés sont la Guadeloupe, la Corse, la Manche, la Vendée, La Réunion et une grande partie du bassin méditerranéen ; environ 500 communes ont été identifiées comme étant à risque. Le Cerema prévoit qu'à l'horizon de 2028 un millier de bâtiments pourraient être menacés, dont 300 immeubles résidentiels et 190 commerciaux. À l'horizon de 2050, 5 200 bâtiments, dont 2 000 résidences secondaires et 1 400 locaux d'activité, pourraient être affectés. Enfin, à l'horizon de 2100, près de 450 000 logements seraient condamnés, représentant une valeur de 86 milliards d'euros. Le précédent rapport du Cerema prévoyait, au pire, 50 000 logements menacés. Les nouvelles estimations sont donc dix fois supérieures. Sont aussi menacés, à cette échéance de 2100, plus de 50 000 locaux d'activité, 10 000 écoles, mairies et gymnases, plus de 1 700 kilomètres de routes et près de 240 kilomètres de voies ferrées. Les chiffres parlent d'eux-mêmes.

Cette proposition de résolution invite donc le Gouvernement, dans le cadre de la définition d'une politique publique globale sur les villes côtières et insulaires confrontées au changement climatique et à l'élévation du niveau de la mer, à engager plusieurs priorités d'action, déjà déclinées par mes camarades. Monsieur le ministre, l'histoire vous jugera – non pas vous en tant que personne, mais le Gouvernement auquel vous appartenez – …

Mme Clémence Guetté applaudit

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Arrêtez de nous juger tout le temps ! Qui êtes-vous pour agir ainsi ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…à l'aune de ce que vous n'avez pas fait et de ce que vous ferez, ou non, avant la fin du quinquennat du président Macron.

En ce qui nous concerne, lorsque nous serons au pouvoir, nous lancerons une réelle planification écologique ambitieuse, qui fera de la France le phare mondial de l'adaptation aux changements climatiques.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ainsi pourrons-nous dire, en écho à l'un des premiers dirigeants à avoir compris et dénoncé les ravages du changement climatique, M. Fidel Castro : L'histoire nous absoudra !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La présente proposition de résolution, qui porte sur nos modalités d'adaptation au changement climatique, traite en réalité principalement de la prise en charge des risques naturels en outre-mer et du recul du trait de côte. En effet, ces deux phénomènes sont les manifestations les plus visibles du changement climatique, en premier lieu dans les territoires ultramarins.

La mer gagne du terrain : 30 kilomètres carrés de terres ont été ainsi perdus en cinquante ans, soit un terrain de football tous les quatre jours, et 50 000 logements pourraient être menacés d'ici à 2100, ce qui représente une perte de valeur de 8 milliards d'euros.

Vous avez raison, chers collègues, il nous semble essentiel que le Gouvernement se prononce et agisse rapidement sur ces sujets. Face à une telle situation, il est impossible, et surtout injuste, de laisser les collectivités concernées assumer seules les coûts faramineux induits, sans instaurer une véritable solidarité nationale. Le rôle de la métropole est également essentiel pour les outre-mer, ce qui devrait tempérer certains désirs d'indépendance.

Les seules aides accordées jusqu'à présent au titre du fonds Vert ne sont pas du tout à la hauteur des besoins. Elles sont octroyées au fil de l'eau, sans stratégie de long terme.

Dans son rapport public annuel, la Cour des comptes suggère ainsi de créer un fonds pour soutenir les collectivités face à l'érosion côtière, afin de prendre en charge les coûts de déplacement des populations et des activités économiques. Si le groupe Les Républicains est bien sûr favorable à l'instauration d'un tel fonds, encore faudrait-il savoir comment il sera financé et par qui. Selon nous, un champ trop étroit, restreint aux seuls propriétaires concernés, ne suffirait pas à couvrir l'importance des besoins ; c'est pourquoi il convient d'élargir la cible.

S'agissant des ressources nécessaires pour financer un tel fonds, différentes propositions ont émergé, telles qu'une taxe additionnelle sur les droits de mutation, le déplafonnement de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi), l'instauration d'une taxe sur les locations Airbnb ou encore une ponction sur les produits de la taxe sur l'éolien en mer.

Pour nous, une chose est claire : il est hors de question de créer un nouvel impôt. Il est préférable de recourir à un prélèvement existant, en réorientant une partie de ses recettes vers la prise en charge des nouveaux risques. Citons, à ce titre, l'excellent rapport d'information de notre collègue sénatrice Christine Lavarde, qui propose de financer les dommages dus au recul du trait de côte par le système assurantiel, notamment, ou par le fonds Barnier, ce qui permettrait de faire pleinement jouer son rôle à la solidarité nationale.

En ce qui concerne le reste de la proposition de résolution, l'invitation à inscrire le plan national d'adaptation au changement climatique dans la loi de programmation énergie-climat est un message destiné au Gouvernement. En effet, vous avez préféré, monsieur le ministre, faire passer la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) par décret, alors que le Parlement aurait voulu en débattre. Néanmoins, peut-être déciderez-vous de reprendre l'excellente proposition de loi de notre collègue sénateur Daniel Gremillet, portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l'énergie, adoptée hier en commission au Sénat ?

La proposition de résolution appelle également à une trajectoire pluriannuelle des finances publiques pour la transition écologique, idée qui avait été soutenue par certains députés de la majorité. Nous verrons si le Gouvernement la reprend à son compte.

Enfin, je souhaite appeler votre attention sur les enjeux de la relocalisation, qui ne me semblent pas suffisamment abordés dans ce texte. La loi que nous avions votée l'an dernier pour faciliter l'application de l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN) prend en considération certaines spécificités des communes littorales, touchées par ces phénomènes écologiques. Toutefois, nous devrons aller plus loin et desserrer davantage les contraintes liées au ZAN, afin de faciliter la relocalisation de certaines populations déplacées.

Pour toutes ces raisons, chers collègues, notamment du groupe GDR, nous voterons la proposition de résolution, en espérant que le Gouvernement l'appliquera rapidement.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe RN.

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La mer monte, la dune recule, la plage disparaît, comme bientôt des territoires entiers, en raison du changement climatique et des activités humaines. À défaut de pouvoir stopper le changement climatique, nous devons l'atténuer et nous préparer à ses conséquences, telles que la montée des eaux et l'accentuation des événements climatiques majeurs, en particulier en outre-mer.

Il s'agit d'un enjeu fondamental pour la survie de nos sociétés et je remercie M. Nadeau de l'avoir mis à l'ordre du jour de nos débats. Ce sujet est pris à bras-le-corps, je le sais, par le ministre de la transition écologique Christophe Béchu, qui a pour ambition de préparer la France à tous les scénarios possibles, y compris, malheureusement, les pires.

La proposition de résolution se veut une réponse aux menaces qui pèsent sur les territoires ultramarins, en particulier la Polynésie française et les Antilles. Permettez-moi, en tant que député d'une circonscription à la fois littorale et insulaire, d'appeler l'attention sur les communes insulaires métropolitaines qui partagent, dans une certaine mesure, ces mêmes défis – je pense notamment à l'île d'Hoëdic, petit caillou plat dont la surface pourrait être réduite de moitié.

Ce texte insiste sur le besoin de financement et de planification sur le long terme. Il appelle notamment à la création d'un chapitre dédié à cette thématique dans une prochaine loi de programmation énergie-climat. Et c'est là, mes amis, que je vous demande de m'écouter !

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La question du financement est fondamentale. Je vous invite, monsieur le ministre, à saisir l'occasion qui vous est donnée pour plaider en faveur d'une nouvelle réforme – j'en parle régulièrement avec Sébastien Jumel – de la taxe sur les éoliennes maritimes situées au-delà des 12 milles nautiques, c'est-à-dire en zone économique exclusive (ZEE).

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En deçà de cette distance, le produit de la taxe est affecté aux comités des pêches maritimes et des élevages marins et aux communes concernées par des critères de covisibilité. J'en ai deux dans ma circonscription : Belle-Île-en-Mer et l'île de Groix, mais cette dernière est trop loin pour pouvoir bénéficier du produit de la taxe. Les communes du Palais et de Locmaria ne sont pas en covisibilité. En définitive, deux communes se partageront 4,6 millions d'euros par an. Une petite partie du produit de la taxe sur les éoliennes maritimes situées en deça de la ZEE est également affectée à l'Office français de la biodiversité (OFB) et à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM). Au-delà des 12 miles nautiques, la taxe revient au budget général.

Comme le préconise un rapport des inspections générales, il serait nécessaire d'utiliser le produit de la taxe spéciale ZEE pour abonder un fonds permettant de financer des actions liées au maritime, y compris l'adaptation des communes littorales au changement climatique. Cela aurait en outre l'avantage de convaincre les parties prenantes d'éloigner au maximum les éoliennes en mer.

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La question du financement m'encourage également à appeler votre attention, monsieur le ministre, sur un sujet très précis : celui des sentiers côtiers. J'estime nécessaire de revoir notre stratégie en la matière, afin de mieux tenir compte des effets du changement climatique et des exigences de la biodiversité. Pourquoi dépenser de l'argent public pour construire des ouvrages, creuser des chemins à la durée de vie très incertaine, sous la menace latente de la montée des eaux et celle constante d'un événement climatique majeur ?

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La bonne compréhension de ces phénomènes est essentielle. La planification doit se nourrir des travaux scientifiques. Je ne peux ici m'empêcher de faire le lien avec les travaux du groupe d'études arctique, antarctique, terres australes et antarctiques françaises et grands fonds océaniques, que je copréside avec Clémence Guetté, que je salue – elle est malheureusement sortie. La recherche polaire bénéficiera d'un réinvestissement massif, comme l'a annoncé le Président de la République au One Planet Summit de novembre 2023.

En améliorant notre connaissance des écosystèmes littoraux, nous anticiperons mieux les conséquences du changement climatique, telles que la montée des eaux. Le groupe Démocrate, MODEM et indépendants, votera évidemment pour la proposition de résolution.

Comme il me reste du temps de parole, j'en profite pour insister sur le financement. Le produit de la taxe sur les éoliennes maritimes situées dans les ZEE est aujourd'hui reversé au budget général de l'État. Cette taxe constituerait pour le secrétariat d'État chargé de la mer et de la biodiversité une source appropriée de financement afin de répondre au recul du trait de côte ainsi qu'à l'évolution de la pêche et des métiers du monde marin.

Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, HOR et GDR – NUPES. – M. Christian Baptiste applaudit également.

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Le changement climatique est là. L'année 2023 a été la plus chaude jamais enregistrée dans le monde : la température moyenne a dépassé de près de 1,5 degré celle de l'ère préindustrielle. En France, l'été 2022 a été emblématique des conséquences du changement climatique, telles que l'augmentation de la fréquence et de l'intensité des extrêmes chauds et des sécheresses – qui sont à l'origine d'effets composites propices aux incendies –, et, en montagne, le recul de l'enneigement et des glaciers ainsi que le dégel des sols gelés. Le mois de juillet a été le plus sec du point de vue de l'humidité des sols. Les cours d'eau ont connu une situation de crise, affectant les réserves pour la production d'hydroélectricité.

Moins visible instantanément, l'élévation du niveau des mers et des océans n'en est en pas moins préoccupante. Le réchauffement de l'eau des océans entraîne leur dilatation thermique, ce qui provoque une hausse de leur niveau pendant des siècles, voire des millénaires. La fonte des calottes glaciaires terrestres contribue à cette dynamique, qui pourrait entraîner une augmentation de quelques mètres du niveau des mers d'ici à la fin du siècle. Dans l'hypothèse d'une fonte de l'intégralité des glaciers, son élévation pourrait atteindre plus de 75 mètres à une échéance bien plus lointaine.

Ainsi, au-delà des efforts d'atténuation des effets du changement climatique, il nous faut impérativement planifier l'adaptation des modes de vie et de l'aménagement du territoire. Dans cette perspective, la présente proposition de résolution invite le Gouvernement à adapter et à mutualiser les politiques publiques relatives au changement climatique, notamment celles à destination des villes côtières et insulaires. Elle identifie plusieurs priorités d'action en matière de planification et de recherche pour face aux conséquences du changement climatique et à l'élévation du niveau des mers.

Elle prévoit que la considération pour l'adaptation infuse l'ensemble des politiques publiques, en mobilisant une approche pluridisciplinaire transversale, qui tienne compte en particulier des enjeux sociaux. Cette politique publique globale en direction des villes côtières et insulaires confrontées au changement climatique et à l'élévation du niveau de la mer vise à planifier sur le long terme l'action publique des collectivités territoriales et de l'État, en s'appuyant sur des mesures adaptées aux contextes locaux.

Le texte invite ainsi le Gouvernement à inscrire le plan national d'adaptation au changement climatique dans un chapitre dédié du prochain projet de loi de programmation sur l'énergie et le climat, et à y inclure une trajectoire pluriannuelle des finances publiques pour la transition écologique.

Vous le savez, le Gouvernement est pleinement mobilisé sur cette question. Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu, présentera avant l'été le troisième Pnacc, qui comprendra une cinquantaine de mesures articulées autour de quatre axes : protéger les Français ; adapter les territoires et assurer la continuité des infrastructures et des services essentiels ; assurer la résilience de l'économie ; préserver les milieux naturels et le patrimoine culturel.

Nous soutenons le travail engagé par le ministère et nous partageons le souhait d'intégrer encore mieux l'adaptation au changement climatique dans nos politiques publiques. Le groupe Horizons et apparentés votera donc en faveur de la présente proposition de résolution.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR – NUPES. – M. Benoît applaudit également.

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Je salue l'initiative du groupe GDR – NUPES – et plus particulièrement de Marcellin Nadeau. Elle se rapporte à une problématique que nous connaissons très bien – j'ai d'ailleurs eu l'occasion de le recevoir dans ma mairie quand j'étais maire de Sainte-Anne. En outre, une expérimentation a été menée par le consortium pluridisciplinaire changement climatique et conséquences sur les Antilles Françaises (C3AF), qui réunit notamment des chercheurs de l'Université des Antilles, de l'université Paul Valéry Montpellier 3 et du BRGM. J'en profite pour féliciter et remercier Narcisse Zahibo, professeur à l'Université des Antilles.

Nous faisons face à une réalité alarmante et incontournable : les villes côtières et insulaires, dont celles de la Guadeloupe, sont en première ligne face aux effets dévastateurs du changement climatique. La proposition de résolution vise à répondre à ces défis avec la détermination et la rigueur nécessaires. Le rapport d'étude relatif à la projection du trait de côte publié le 5 avril par le Cerema ne laisse aucun doute quant à l'urgence de la situation.

Je rappellerai les chiffres que notre collègue Perceval Gaillard a cités tout à l'heure : en 2028, environ un millier de bâtiments, représentant une valeur de 240 millions d'euros, pourraient être touchés par le recul du trait de côte. À l'horizon 2050, 5 200 logements et 1 400 locaux d'activité pourraient être affectés, pour un coût total de 1,2 milliard d'euros. Et à l'horizon de 2100, les chiffres sont terrifiants : 450 000 logements et plus de 50 000 locaux d'activité seraient menacés, pour un coût estimé à 86 milliards d'euros. Ces projections jouent le rôle d'une véritable alarme. Elles montrent clairement que l'inaction n'est plus une option. Nous devons agir maintenant pour éviter ces scénarios catastrophiques.

La Guadeloupe, comme d'autres territoires insulaires, est particulièrement vulnérable. Ses côtes, ses infrastructures et ses habitants sont directement menacés par l'érosion et la montée des eaux. Nous voyons déjà les effets du changement climatique dans nos territoires : des routes sont endommagées, des plages érodées et des maisons en danger. L'urgence, qui est donc palpable, appelle à une action immédiate.

La Cour des comptes, dans la partie de son rapport public annuel consacrée à « la gestion du trait de côte en période de changement climatique », a pointé plusieurs lacunes des politiques actuelles : la connaissance imparfaite du phénomène, le recensement incomplet des biens menacés, l'application insuffisante des dispositifs de la loi « climat et résilience ». Nous ne pouvons pas continuer à naviguer à vue face à un tel danger. Des études plus fines sont absolument nécessaires pour appréhender le phénomène et ses conséquences.

La proposition de résolution, que nous soutenons, appelle ainsi à une action forte et coordonnée. Elle propose tout d'abord de planifier sur le long terme des réponses adaptées aux réalités locales, en inscrivant le Pnacc dans un chapitre dédié du projet de loi de programmation sur l'énergie et climat. Elle suggère ensuite de favoriser la transdisciplinarité dans la recherche et les politiques publiques visant à répondre aux défis climatiques ; de placer les impératifs sociaux au cœur des politiques d'adaptation afin de protéger les populations les plus vulnérables, et de développer de nouvelles méthodes de production et de partage des connaissances, incluant les savoirs locaux. Enfin, elle recommande d'appréhender et d'anticiper les conséquences juridiques du recul du trait de côte sur les cinquante pas géométriques dans les territoires ultramarins ; de créer un modèle financier solidaire, notamment par la création d'un fonds érosion côtière, et d'instaurer une stratégie nationale pour les déplacements de populations victimes des effets du changement climatique.

Vous l'aurez compris, face à de tels scénarios catastrophiques, nous ne pouvons plus nous permettre d'attendre. Le temps des discours est révolu ; le temps de l'action est venu. Nous devons prendre des mesures audacieuses et concertées pour protéger les territoires et assurer l'avenir de nos concitoyens.

Pour la Guadeloupe, ainsi que pour les autres territoires insulaires, cela signifie que des actions concrètes doivent être menées pour renforcer les infrastructures côtières, protéger les habitations et garantir la sécurité des citoyens face aux risques climatiques. Cela suppose également d'écouter les besoins et les savoirs des populations locales, qui sont en première ligne face à ces défis.

Par conséquent, le groupe Socialistes et apparentés votera pour cette proposition de résolution, afin d'affirmer son engagement à agir face à l'urgence climatique. Nous ne resterons pas les bras croisés pendant que notre littoral s'effrite et que les populations sont mises en danger.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR – NUPES.

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Je vous informe que sur le vote de la proposition de résolution, je suis saisie par les groupes Renaissance et Gauche démocrate et républicaine – NUPES d'une demande de scrutin public. Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Je remercie tout d'abord les députés communistes d'avoir inscrit à l'ordre du jour cette proposition de résolution.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Les députés du groupe GDR – vous avez raison de le préciser.

Le Gouvernement donnera un avis de sagesse à ce texte qui se rapporte à un sujet majeur de l'année 2024 : l'adaptation au changement climatique. Vous le savez, la transition écologique est au cœur des priorités du Gouvernement. La moitié des investissements du programme France 2030 est ainsi consacrée à la décarbonation de notre économie, et le Gouvernement a présenté en 2022 un projet ambitieux pour réussir la transition écologique : France nation verte.

Comme le Président de la République s'y était engagé lors de sa dernière campagne, le Premier ministre est chargé de la planification écologique – à l'instant où je vous parle, une partie du Gouvernement est réunie dans le cadre d'un séminaire gouvernemental de travail sur l'écologie. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu, n'a pas pu venir s'exprimer devant vous ce matin.

Les Français sont très attachés à leurs littoraux et ils sont fiers de la beauté de leurs paysages et de la biodiversité qu'ils abritent. Ces territoires concentrent de nombreux enjeux – qu'il s'agisse, parmi bien d'autres, de l'attractivité, de la dynamique démographique, du tourisme –, mais ils ont aussi leurs fragilités. Le recul du trait de côte, défi considérable, touche tous les littoraux français, notamment ceux d'outre-mer, qui représentent près de 14 500 kilomètres de côtes sur 20 000 au total.

Monsieur Nadeau, je sais que vous connaissez bien cette question – comme les autres députés ultramarins et ceux issus des littoraux français. Face à un phénomène à la cinétique lente mais certaine, l'enjeu est d'anticiper et de s'adapter en tenant compte des spécificités des territoires – telle est la stratégie du Gouvernement. Le Gouvernement prend donc à bras-le-corps l'enjeu du recul du trait de côte, qui touche notamment votre commune du Prêcheur. Il présentera d'ici à quelques semaines un plan global : le plan national d'adaptation au changement climatique, dont les mesures visent en particulier à protéger les Français des conséquences du recul du trait de côte en repensant l'aménagement des territoires exposés.

Je tiens donc à souligner positivement la cohérence entre le calendrier de cette proposition de résolution et celui des chantiers structurants conduits par le Gouvernement. Aujourd'hui, un cinquième des 20 000 kilomètres du littoral français est concerné par l'érosion côtière, et plusieurs millions de citoyens vivent ou possèdent des biens sur le littoral. En cinquante ans, pas moins de 30 kilomètres carrés ont déjà disparu. Le changement climatique et la montée des eaux accéléreront globalement le recul du trait de côte – aucune région côtière ne sera épargnée. Ce phénomène est progressif, inéluctable et irréversible. Nous devons l'anticiper et nous y préparer dès maintenant.

Ce phénomène présente plusieurs particularités. Sa temporalité longue, sur plusieurs décennies, engendre des incertitudes scientifiques sur l'ampleur du recul à moyen et long terme. De plus, chaque contexte local est spécifique.

Murmures.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Le Gouvernement a engagé des travaux structurants destinés à documenter ces enjeux. Une mission conjointe de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd) et de l'inspection générale de l'administration (IGA) a dressé, avec l'appui du Cerema, un inventaire des biens existants assorti de projections à 2050 et 2100. Les rapports ont été publiés le 5 avril 2024 et les cartes d'exposition aux risques, mises en ligne, sont à la disposition de tous. D'ici à 2100, 450 000 logements, d'une valeur estimée à 86 milliards d'euros, seraient menacés en l'absence d'actions correctives, autrement dit en l'absence d'ouvrages de protection, lesquels trouvent souvent leurs limites à moyen ou long terme, comme beaucoup d'entre vous l'ont souligné. Il faut donc interroger nos stratégies d'aménagement, nous adapter à ces évolutions en privilégiant le rétro-littoral et mettre l'accent sur des solutions fondées sur la nature, pour accompagner le phénomène, tout en prenant compte les réalités sociales.

Un inventaire similaire sera lancé dans les prochaines semaines pour les outre-mer de manière à mieux objectiver et quantifier le phénomène sur chacun des territoires et proposer des solutions adaptées.

Face à cet enjeu majeur, le Gouvernement, en lien avec les collectivités locales, a déjà commencé à agir. Il va continuer à le faire à la fois pour éviter les constructions sur des surfaces exposées et pour anticiper les réponses à apporter pour les biens progressivement menacés.

La loi « climat et résilience » a placé la question de l'érosion du trait de côte au plus haut niveau de l'agenda politique. Cette évolution du cadre légal fournit à l'État comme aux élus de nouveaux outils pour accompagner la recomposition spatiale des territoires littoraux exposés et favoriser un aménagement opérationnel.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Ils renforcent la capacité d'intervention des pouvoirs publics, avec l'interdiction de construire et la servitude de démolition. Ils incitent à anticiper plus largement, grâce à la mise en place de cartographies locales d'exposition au recul du trait de côte et à une liste de communes appelées à adapter leur politique d'aménagement établie par décret. Ils facilitent l'aménagement des zones concernées et du rétro-littoral à travers un droit de préemption spécifique. Ils instaurent un bail réel d'adaptation à l'érosion côtière pour permettre d'habiter et de vivre autrement sur ces territoires pendant leur durée de vie résiduelle.

D'ores et déjà, 242 communes bénéficient de ce dispositif, après avoir demandé leur inscription au décret-liste.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

En application de la loi « climat et résilience », plusieurs décrets seront publiés en juin, notamment au sujet du droit de préemption pour l'adaptation des territoires au recul du trait de côte, et le décret-liste sera révisé avec l'adjonction de soixante-dix communes.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Le Gouvernement a commencé à déployer des moyens supplémentaires pour répondre aux besoins de court terme des communes littorales. Je pense au financement à 80 % des cartographies nécessaires à l'identification des enjeux au plus près du territoire. Je pense aussi à la mise en place d'une première enveloppe de 4 millions d'euros sur trois ans, au sein du plan Destination France, destinée à financer les diagnostics des campings exposés à l'érosion marine.

Dans le même temps, le Gouvernement soutient les premières opérations expérimentales à travers les projets partenariaux d'aménagement (PPA) comme à Gouville-sur-Mer, Lacanau, Sète ou Biscarosse,…

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

…grâce à une enveloppe de 10 millions d'euros déployée entre 2021 et 2023, dans le cadre du plan France relance. Depuis 2023, une enveloppe du fonds Vert vient compléter ce dispositif. Elle est notamment mobilisable pour les cartes locales de projection du recul du trait de côte, pour les projets partenariaux d'aménagement et pour les diagnostics concernant les campings, dans la continuité des mesures du plan Destination France. Au total, plus de 20 millions d'euros auront été mobilisés en 2023.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Le Gouvernement travaille également à définir un modèle de financement de moyen et long terme à la hauteur des enjeux. La concertation est menée depuis 2023 au sein du Comité national du trait de côte, comité technique du Conseil national de la mer et des littoraux (CNML). Présidé par Sophie Panonacle, il constitue l'instance de dialogue et de concertation entre les parties prenantes sur tout sujet relatif à la gestion intégrée du trait de côte. Les différents collèges qui le composent se sont réunis plusieurs fois depuis avril 2023 et le comité sera à nouveau convoqué en juin 2024 afin de proposer au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires des options de financement, en vue notamment du projet de loi de finances pour 2025.

Enfin, comme je l'ai déjà souligné, cette proposition de résolution est examinée à quelques semaines de la sortie de la troisième version du nouveau plan national d'adaptation au changement climatique.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

L'objectif du Gouvernement est non pas de lutter à tout prix contre le phénomène du recul du trait de côte mais de privilégier les solutions d'aménagement du rétro-littoral. Concrètement, ce nouveau plan consiste en un accompagnement renforcé de l'État pour sept PPA, précurseurs ou pionniers, engagés et signés depuis 2021, dont trois serviront de démonstrateurs. Ils seront également suivis par le CNTC afin de contribuer à l'élaboration d'une doctrine « littoral à + 4 degrés ». Sur la base du retour d'expérience de ces projets partenariaux nationaux et des recommandations des inspections générales, le CNTC proposera prochainement ses pistes de financement pour les territoires.

La situation spécifique des outre-mer sera étudiée avec attention grâce à une mission complémentaire de l'Igedd relative au financement des conséquences du recul du trait de côte dans les territoires ultramarins.

Ce sujet mérite que nous prenions le temps de la concertation et de la réflexion collective. C'est la méthode de travail que privilégie le Gouvernement. Nous partageons plusieurs objectifs et la volonté de trouver des solutions concrètes et équilibrées pour lesquelles chacun assume sa part de responsabilité.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Les recommandations de votre proposition de résolution sont en partie satisfaites ou en passe de l'être. L'État accompagne financièrement l'ingénierie locale avec la mission Adaptation et les aides du fonds Vert. S'agissant du volet relatif à la précision des connaissances et à la recherche, le Gouvernement a décidé de rendre publics les travaux du Cerema sur les projections du recul historique du trait de côte sur le littoral français dans cinq ans, en 2050 et en 2100 ; il les complétera avec les données ultramarines.

Cela permettra, dans les départements et régions d'outre-mer, d'améliorer la connaissance des biens et personnes exposés, de proposer des dérogations législatives ou réglementaires ainsi que d'identifier les besoins et les sources de financement mobilisables. Dans les collectivités d'outre-mer, il s'agira de dresser un inventaire des biens menacés par l'érosion littorale à moyen et long terme et de proposer des recommandations génériques sur la gestion du recul du trait de côte. La mission rendra ses conclusions en novembre 2024.

Soulignons que l'enjeu social est présent de manière transversale dans le nouveau Pnacc. La nécessité de développer des connaissances opérationnelles et de poursuivre les travaux de recherche sur les impacts du changement climatique sur les territoires littoraux et les solutions est prise en compte. C'est une brique majeure du nouveau plan d'adaptation.

Votre demande concernant l'évaluation environnementale des projets est également satisfaite. L'adaptation au changement climatique est déjà comprise dans ce processus : l'étude d'impact doit détailler les « incidences du projet sur le climat et la vulnérabilité du projet au changement climatique ». Le Gouvernement communiquera au deuxième semestre 2024 un guide méthodologique pour améliorer cette prise en compte. Il prévoit un autre guide méthodologique portant sur l'intégration du volet « adaptation au changement climatique » dans les plans-programmes d'ici à 2025.

Enfin, les outils de financement de la lutte contre le recul du trait de côte, y compris dans le domaine fiscal, et la bonne gouvernance de la recomposition spatiale nécessaire à l'adaptation, laquelle peut dépasser les limites administratives d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale, seront mis en regard du coût de l'inaction, ce qui nous invite à nous adapter au plus tôt. Le temps est donc à l'action.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.

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Cette proposition de résolution est une excellente initiative ,

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES

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ce dont il ne faut pas s'étonner puisqu'elle émane de mon éminent collègue Marcellin Nadeau, compatriote martiniquais et frère de combat dont je suis très fier. C'est une excellente initiative car elle répond à des enjeux et des défis contemporains majeurs auxquels sont confrontés la France entière mais aussi, plus spécifiquement, l'outre-mer, particulièrement exposé au réchauffement climatique dont les effets sur notre environnement, nos modes de vie, notre économie sont indéniables.

Même les climatosceptiques les plus radicaux ne peuvent, en toute objectivité, réfuter le constat dramatique qu'imposent l'intensification et la multiplication des phénomènes climatiques – sécheresse, incendies, vagues de chaleur, inondations, érosion, montée de la mer et recul du trait de côte. Notre planète est incontestablement en danger et ce, de manière irréversible, si rien n'est fait.

À l'horizon 2100, près de 450 000 logements, représentant une valeur de 86 milliards d'euros, seraient condamnés dans les villes côtières par le repli du trait de côte, selon les cartes prospectives publiées par le Cerema en avril 2024. Et le pire est à venir. En Martinique, nous risquons de perdre 5 % de superficie à l'horizon 2090 et pas moins de 15 000 personnes devront se déplacer dans les trente-cinq prochaines années. Ne nous contentons pas de ce constat et agissons en engageant sans délai une adaptation non plus réactive mais transformatrice, anticipant les changements à venir !

Cette proposition de résolution répond au besoin impérieux de réponses adaptées aux contextes locaux mais aussi et surtout à la nécessité d'inscrire un plan national d'adaptation au changement climatique dans le marbre de la prochaine loi de programmation sur l'énergie et le climat. Dépassant la simple collecte d'éléments épars de recherche, elle ouvre enfin la voie à une salutaire mutualisation des connaissances et des données scientifiques, gage d'une plus grande efficacité des politiques publiques. Elle vient, en outre, combler une carence législative en posant les jalons du cadre juridique de l'adaptation dans lequel devront désormais s'ancrer les politiques publiques.

Elle vise à garantir des moyens financiers élevés, à la hauteur des actions pertinentes et efficaces qui s'imposent, par la création d'un fonds dédié à l'érosion côtière. En tout état de cause, dans un contexte de coupes budgétaires brutales dans les moyens dédiés à l'écologie – rappelons l'amputation de 400 millions subie par le fonds Vert destiné à accompagner les collectivités –, cette double ambition d'adaptation et de mutualisation ne saurait se satisfaire d'une coquille financièrement vide, si l'on veut véritablement remédier aux problèmes d'inégalité de traitement entre les territoires. Les collectivités les plus exposées se trouvent souvent démunies, faute de moyens financiers, humains et techniques suffisants, alors qu'elles devraient être systématiquement accompagnées par l'État.

Ces collectivités et ces peuples menacés par le réchauffement climatique et l'érosion côtière vivent d'autant plus douloureusement cette réalité qu'ils sont de plus en plus conscients du fait que les causes profondes de ces dérèglements résident dans les politiques irresponsables des grandes puissances industrialisées de ce monde. Un cadre juridique et des moyens financiers sont nécessaires pour apporter sur le long terme des réponses adaptées à l'impact dévastateur du recul du trait de côte.

En définitive, cette proposition de résolution ambitionne de construire un modèle solidaire à destination et à partir des villes côtières, qui, dans les territoires dits d'outre-mer, peuvent être des terres d'innovation, des terres d'excellence, des références en matière écologique comme la commune du Prêcheur en Martinique. C'est avec force, fierté, conviction et détermination que le groupe LFI – NUPES votera ce texte.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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Je mets aux voix l'article unique de la proposition de résolution.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 167

Nombre de suffrages exprimés 167

Majorité absolue 84

Pour l'adoption 167

Contre 0

L'article unique est adopté, ainsi que l'ensemble de la proposition de résolution.

Mêmes mouvements.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à dix heures quinze, est reprise à dix heures vingt.

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L'ordre du jour appelle la discussion, en application de l'article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution portant sur la procédure de ratification de l'accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne (2598).

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Dans la discussion générale, la parole est à M. André Chassaigne.

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Le 6 mai 2009 commencent les négociations au sommet de Prague autour de l'accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne – connu sous l'acronyme de Ceta. Le 30 octobre 2016, après des années de négociations dans la plus totale opacité, sans consultation ni information des parlements nationaux et de la société civile, ce traité de libre-échange est signé à Bruxelles. Le 21 septembre 2017, le volet commercial de cet accord entre en application provisoire, sans consultation ni ratification par les parlements nationaux. Le 23 juillet 2019, l'accord est enfin soumis au vote des députés français. Il est ratifié de justesse, mais le projet de loi de ratification ne poursuit pas son parcours parlementaire et disparaît étrangement des radars pour tenter de se faire oublier – « Bizarre, vous avez dit bizarre, comme c'est bizarre. »

Sourires.

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Comme le dit la chanson, « j'étais tranquille, j'étais peinard ». C'était sans compter sur la colère de nos éleveurs qui, avec constance, ont remis le sujet des traités de libre-échange sur le devant de la scène ; sans compter non plus sur l'adoption par le Parlement européen d'une résolution priant instamment dix pays, dont la France, de ratifier rapidement cet accord.

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Les années passent et le projet de loi de ratification n'est toujours pas inscrit à l'ordre du jour du Sénat, tant le Gouvernement redoute son rejet. Son analyse est juste : ni les Français ni les représentants du peuple ne veulent du Ceta. Le 21 mars 2024, le Ceta est enfin soumis au vote des sénateurs, cinq ans après l'interruption du processus démocratique qui a pu reprendre son cours grâce au groupe communiste du Sénat qui a décidé d'y consacrer sa niche parlementaire. Sans surprise, le texte est rejeté : drôle de drame…

Panique à bord du vaisseau amiral. « Ce qui était pierre devient flot », écrivait Victor Hugo : « c'est la rouge aurore de la catastrophe ». Et pour cause : une simple confirmation de notre assemblée et le Ceta tombe à l'eau ! Le Gouvernement comprend très vite que le groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES veut inscrire le texte à l'ordre du jour de l'Assemblée. Rapidement, vous avez fait savoir, monsieur le ministre délégué, que le projet de loi sera transmis, le moment venu, mais pas avant les élections européennes, car ce sujet nécessite un temps de débat apaisé.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Eh oui !

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Le texte n'est donc pas transmis : du jamais vu dans les annales parlementaires ! En cinq ans, à vous croire, il n'aurait pas été possible de trouver un temps de débat apaisé !

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Pour reprendre une expression chère au Dieppois Sébastien Jumel, vous endormiriez un chat sur une caisse de poissons.

Rires et applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.

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Mais le trouverez-vous un jour, ce temps apaisé ? Pas sûr, car pour vous, « apaisé » signifie « ratifié ».

Près de vingt ans après le référendum rejetant le traité constitutionnel européen, qui a laissé une plaie encore béante entre le peuple trahi et ses représentants, le Gouvernement récidive donc dans une entreprise de déni démocratique. Comme Jean-Claude Juncker, ancien président de la Commission européenne, il considère qu'« il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens » – un principe qui a conduit la candidate Renaissance aux élections européennes, Valérie Hayer, à affirmer que le traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada continuerait à fonctionner, même si l'Assemblée le rejetait à la suite du Sénat. Ce 30 mai 2024, après la dérobade du Gouvernement pour empêcher le rejet du Ceta par notre Assemblée, nous avons nous-mêmes dû utiliser un subterfuge pour qu'une discussion soit possible sur le fond et qu'un espace s'ouvre afin que chacun des groupes de cet hémicycle puisse se prononcer sur ce traité.

Venons-en donc au fond. Vous continuez aujourd'hui, contre toute évidence, à chanter les louanges du Ceta en prenant pour exemple qu'au cours des six premières années de son application provisoire, dans le secteur des services, les exportations de l'Union vers le Canada ont augmenté de 54 % et les importations en provenance du Canada, de 74 %. À y regarder de plus près, nous sommes loin toutefois des promesses affichées par la Commission européenne qui promettait de vastes débouchés pour l'Europe et un puissant effet de levier sur l'emploi. Les institutions européennes admettent elles-mêmes que seuls quelques secteurs tirent leur épingle du jeu. L'accord tant vanté s'est transformé en miroir aux alouettes.

Bien évidemment, le Gouvernement couvre d'un voile pudique les incidences négatives, pourtant très concrètes, de ce traité. Il y a d'abord l'augmentation préoccupante des importations européennes de combustibles fossiles issus de schistes bitumineux, dont l'exploitation est trois à quatre fois plus polluante que le pétrole conventionnel et représente un véritable désastre environnemental.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.

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Il y a ensuite les pressions exercées par le Canada afin de remettre en cause la légitimité des règles européennes visant à garantir que les denrées alimentaires respectent un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l'environnement.

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Ces pressions se sont récemment matérialisées dans la demande adressée par le Canada à l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) pour que ses carcasses de viande à destination de l'Union européenne puissent être décontaminées à l'acide péroxyacétique ; ou encore dans le dépôt à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) d'une préoccupation commerciale spécifique contre le règlement de l'Union européenne sur les traces de néonicotinoïdes dans les produits importés, adopté postérieurement à l'accord. Ces recours sont d'autant plus dangereux que l'accord ne contient pas de clause miroir pouvant bloquer ces exigences. Négocié au prix d'assouplissements des règles sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) ou sur la décontamination des carcasses, l'accord ne crée pas d'incitation pour que le Canada respecte les règles actuelles en vigueur dans l'Union.

Mêmes mouvements.

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C'est le cas notamment des traitements aux hormones ou aux antibiotiques.

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Un audit mené par la Commission européenne en 2022 a mis en évidence des lacunes dans la supervision de la filière du bœuf sans hormones, réactivant le doute sur le sérieux des contrôles vétérinaires canadiens.

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À l'heure où notre agriculture traverse une crise majeure, nous ne pouvons passer sous silence les effets délétères de l'intensification de la concurrence qu'implique la réduction des droits de douane couplée aux mesures de facilitation des échanges. Depuis la signature de l'accord, le Canada a augmenté ses exportations de colza vers l'Union européenne et la France. Ce colza OGM sert notamment aux usines de production d'agrocarburants. Les producteurs français de colza pâtissent donc directement de cette concurrence déloyale en matière de prix comme de conditions de production. Autre exemple : désormais, en France, une lentille sur cinq provient du Canada, premier producteur au monde, où il est possible d'appliquer du glyphosate juste avant la récolte – pratique proscrite en France.

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Plus largement, cette concurrence déloyale empêche l'essor des filières françaises de légumineuses.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR – NUPES.

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En matière d'élevage enfin, le contingent de 67 950 tonnes de viande de bœuf prévu par l'accord est une véritable épée de Damoclès sur nos élevages majoritairement herbagers. À l'image des autres traités de libre-échange, le Ceta est à l'évidence un instrument de démantèlement des outils de protection et de régulation économique qui, seuls, peuvent garantir des revenus décents à nos agriculteurs. Il fragilise la transition agroécologique de notre modèle agricole en accentuant la course folle aux volumes, sans retour concret pour nos productrices et producteurs.

Mêmes mouvements.

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Le Ceta est enfin, comme les autres traités de libre-échange promus par l'Union européenne, un contresens écologique et climatique. Comment peut-on croire que nous lutterons efficacement contre le réchauffement climatique en intensifiant les flux internationaux de marchandises avec des pays situés à l'autre bout de la planète ?

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S'agissant d'un texte porteur d'autant de risques et de questions quant à son impact sur nos concitoyens et sur l'environnement, le Gouvernement ne peut continuer à s'affranchir du débat démocratique. C'est le sens de la proposition de résolution que nous soumettons au vote aujourd'hui. Elle vous invite, chers collègues, à reconnaître la nécessité de poursuivre le débat parlementaire. Tout comme l'ont fait lundi dernier plus de quarante organisations dans une lettre ouverte adressée au Président de la République, elle invite instamment le Gouvernement à poursuivre la procédure de ratification. Les 90 % de ce traité qui s'appliquent de manière provisoire depuis maintenant sept ans ne peuvent continuer à le faire sans que les parlementaires soient consultés.

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Le rejet prévisible de ce traité ouvrirait une nouvelle ère, faisant droit à l'indispensable remise à plat de la politique commerciale européenne – une nouvelle ère qui remettrait en cause la longue liste des traités de libre-échange qui matérialisent et intensifient une globalisation néolibérale synonyme de dérégulation du commerce des biens et des services, qui introduisent des distorsions de concurrence au détriment des paysans européens et fragilisent la souveraineté alimentaire et agricole de notre pays.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.

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J'aimerais revenir sur deux points.

Le premier nous occupe directement ce matin : il s'agit de la franche opposition du Gouvernement à la poursuite de la navette parlementaire.

Le Ceta a été signé fin 2016 et 90 % de ses dispositions sont entrées en vigueur au cours de l'année 2017. Adopté en 2019 par l'Assemblée nationale, le projet de loi de ratification a été transmis au Sénat sans être inscrit à son ordre du jour. Il a fallu attendre la niche parlementaire du groupe communiste pour qu'il soit examiné en séance au Sénat, ce qui s'est conclu par le rejet massif de la ratification de la partie commerciale du Ceta. Le texte doit désormais être examiné en nouvelle lecture par notre assemblée. Cependant, le Gouvernement a publiquement exprimé son intention de ne pas le transmettre à la représentation nationale avant les élections européennes. Je tiens à remercier nos collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine d'avoir inscrit à l'ordre du jour de leur niche cette proposition de résolution qui nous permet d'en débattre, alors que le Gouvernement voudrait bâillonner la représentation nationale. La mise en œuvre anticipée, l'absence de date limite pour faire ratifier l'accord et la stratégie actuelle du Gouvernement permet in fine à l'exécutif de contourner la procédure de ratification nationale.

Le second point concerne le contenu du Ceta, qui entraîne la suppression de la quasi-totalité des droits de douane, la protection de la propriété intellectuelle et le contrôle des investissements et des aides publiques.

Ce traité, négocié par mandat par la Commission européenne, ne tient aucun compte des pays et territoires d'outre-mer (Ptom), notamment de Saint-Pierre-et-Miquelon, pourtant situé à 30 kilomètres des côtes canadiennes. Les relations entre mon archipel et le Canada ont toujours été complexes, notamment depuis le contentieux relatif à la pêche, qui a abouti en 1992 à la réduction drastique de notre zone économique exclusive (ZEE). Alors que la France pouvait faire de cette collectivité d'outre-mer une base avancée en Amérique du Nord, aucune spécificité la concernant n'est prévue dans le Ceta, et Saint-Pierre-et-Miquelon ne bénéficiera nullement des retombées économiques de l'accord. Il s'agit donc d'un accord de capitales entre le Canada et le continent européen. Comme trop souvent, les territoires d'outre-mer ont été oubliés.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR – NUPES.

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En outre, l'augmentation globale des échanges cache d'importantes disparités entre les filières. Si les vins, les spiritueux et les fromages en sortent gagnants,…

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…les éleveurs sont fermement opposés à la suppression des droits de douane à l'importation pour un contingent de 50 000 tonnes de viande bovine par an.

Par ailleurs, si l'Union européenne est clairement gagnante depuis cinq ans, l'excédent commercial de la France envers le Canada reste limité.

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Notre déficit commercial global est de 100 milliards !

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Certes, les exportations de viande bovine ont été six fois supérieures aux importations en provenance du Canada, selon le rapport publié en mars 2024 par le comité de suivi des filières agricoles dans les accords de commerce. Toutefois, cette situation est temporaire, puisqu'elle s'explique en grande partie par l'absence de filière canadienne d'exportation vers l'Union européenne répondant à ses normes de mise sur le marché.

Enfin, vous connaissez, pour les avoir déjà maintes fois entendues, nos préoccupations environnementales et sanitaires au sujet des échanges agricoles. Le Ceta porte en lui un risque de nivellement par le bas de la transition écologique et de la protection de la biodiversité.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Comment peut-on dire une chose pareille ?

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Voter cette résolution n'est nullement un signe de défiance envers le Canada, qui est un pays allié et ami. C'est un vote de méfiance envers le Gouvernement, qui entend se passer de l'avis du Parlement malgré l'importance du sujet.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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À l'époque, nous manifestions à Bruxelles ou à Strasbourg, nous, jeunes venus de toute l'Europe, avec des baleines dessinées sur nos pancartes. On devait être en 2014 ou en 2015. Pourquoi des baleines ? Parce que nous disions : « c'est assez ». On en rigolait, de nos jeux de mots ; on se disait qu'on était si nombreux que l'alliance des écologistes et des agriculteurs et agricultrices de tout le continent ferait entendre raison aux grands décideurs de ce monde.

Voilà dix ans que nous demandons que cesse ce hold-up démocratique. Manifestations, questions écrites, résolutions, interpellations… Au vu de votre mutisme et de votre refus d'inscrire à l'ordre du jour un débat parlementaire sur le sujet, on serait à deux doigts de penser que votre gouvernement, monsieur le ministre délégué, a peur du Parlement !

Pour commencer, et parce que la jeune militante écologiste que j'étais en 2014 n'aurait jamais imaginé se tenir là, devant vous, à vous raconter mes pancartes avec des baleines dessus qui disent « c'est assez », je voudrais remercier le groupe Gauche démocrate et républicaine d'avoir inscrit cette proposition de résolution sur la procédure de ratification du Ceta à l'ordre du jour de leur journée d'initiative parlementaire.

Elle nous permet de rappeler que depuis 2016, ce traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada est déjà appliqué à 90 % à titre provisoire, alors même que dix pays de l'Union européenne, parmi lesquels la France, ne l'ont pas ratifié.

Elle nous permet de rappeler aussi que votre gouvernement a tout bonnement refusé, contrairement à l'usage et à tout principe démocratique, de transmettre au bureau de l'Assemblée nationale le projet de loi adopté par le Sénat sur proposition du groupe communiste. Un tel mépris du Parlement est inacceptable, surtout s'agissant d'un sujet aussi crucial. De quoi avez-vous peur, monsieur le ministre délégué ?

Enfin, elle nous permet de rappeler qu'en facilitant les importations en provenance du Canada par la suppression des droits de douane pour plus de 98 % des produits, le Ceta remet en cause de nombreuses normes environnementales et sanitaires, mettant ainsi en danger le principe de précaution inscrit dans la Charte de l'environnement, un texte qui a pourtant valeur constitutionnelle – mais étant donné votre tendance à le malmener, personne ne sera surpris. L'environnement, parlons-en : le Ceta permet la hausse des importations d'engrais, mais aussi l'augmentation de 50 % des importations de pétrole issu de schistes bitumineux, qui est trois à quatre fois plus polluant que le pétrole classique et dont l'extraction laisse derrière elle des paysages faits de forêts rasées, de lacs et de cours d'eau pollués. Je dis « parlons-en », mais ce n'est qu'une formule, car le Ceta n'est pas assujetti aux engagements pris dans le cadre de l'accord de Paris. Il ne propose aucun dispositif contraignant qui permettrait de limiter la hausse des températures mondiales à 1,5 degré Celsius.

Dans un monde parallèle, celui que dessinent les promesses d'Emmanuel Macron, il en serait autrement : en 2020, devant la Convention citoyenne pour le climat (CCC), le Président de la République s'est dit prêt à abandonner le Ceta si celui-ci ne respectait pas l'accord de Paris. Dans le même monde parallèle, vous seriez les premiers alliés des agriculteurs, comme vous aimez à le dire. Je suis au regret de vous annoncer que dans le monde réel, les promesses doivent être tenues ; ou bien on risque de fâcher du monde.

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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Or, comme tous les traités de libre-échange – je pense aux accords avec le Marché commun du Sud (Mercosur), la Nouvelle-Zélande ou encore le Chili –, le Ceta est aussi catastrophique pour les agriculteurs des deux côtés de l'Atlantique. Il les expose toujours plus à la pression d'une concurrence déloyale résultant de la libéralisation outrancière de notre système agricole et alimentaire. Faute de clauses miroirs, les accords de libre-échange permettent systématiquement l'importation en France de produits qui ne respectent pas nos normes. Là-bas comme ici, le Ceta provoque les mêmes dérives.

Nous parlons de maïs ou de soja génétiquement modifiés. Nous parlons de près de 68 000 tonnes d'équivalent carcasse de bovins qui peuvent être nourris aux farines animales, pratique interdite en France, et qui représentent une menace pour l'élevage bovin viande français. Nous parlons de lentilles provenant du Canada – c'est le cas d'une lentille sur cinq consommée en France –, où il est possible d'appliquer du glyphosate juste avant la récolte,…

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…ce qui est interdit en France, et qui mettent en péril l'émergence d'une réelle filière de légumineuses dans notre pays.

M. André Chassaigne applaudit.

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Nous parlons de résidus de pesticides en quantité bien supérieure aux seuils autorisés sur notre continent, ce qui représente une baisse des standards de production dangereuse pour la viabilité des petites exploitations agricoles.

Dans le monde parallèle de vos promesses, vous venez d'adopter un texte consacrant la souveraineté alimentaire. Dans la réalité, la seule chose que vous consacrez, jour après jour et décision après décision, c'est la sacro-sainte compétitivité sur les marchés internationaux. Tant pis si 1, 2, 3, 100 000 agriculteurs tombent du camion en dix ans !

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Pour les écologistes, au contraire, la souveraineté alimentaire implique de laisser aux peuples la possibilité de déterminer les politiques agricoles pour et par eux-mêmes, pour peu qu'elles ne puissent porter atteinte aux populations d'autres pays. Comme nous le répétons depuis des années, il est temps de passer du libre-échange au juste échange et de protéger nos acquis sociaux et écologiques.

Cette proposition de résolution est la bienvenue, car elle permet de rappeler bien des vérités, non dans un monde parallèle où il suffit d'aligner des mots les uns derrière les autres pour considérer l'objectif atteint, mais dans le monde réel où nous légiférons et où nos décisions ont des conséquences sur la vraie vie des gens. Peut-être est-ce de cela que vous avez peur, monsieur le ministre délégué.

Le groupe Écologiste – NUPES votera bien évidemment le texte et appelle solennellement le Gouvernement à inscrire, dans les plus brefs délais, le projet de loi de ratification du Ceta à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Parce que je crois que le Ceta, c'est assez !

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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Savez-vous que nos amis canadiens francophones ne parlent jamais du Ceta, mais de l'AECG, l'Accord économique et commercial global ? Ils trouvent particulièrement cocasse que les Français utilisent l'acronyme anglais pour parler du traité dont nous débattons. J'ai choisi de mentionner cette anecdote car, au-delà des anathèmes jetés par le groupe communiste sur le commerce international, nous parlons en réalité d'un accord politique majeur conclu avec notre meilleur allié au monde en dehors de l'Union européenne ; un allié qui partage avec nous notre langue, des défis communs et des valeurs démocratiques aujourd'hui remises en cause par les puissances illibérales, démocratiques ou autoritaires.

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Cet accord, dont la négociation a commencé sous le gouvernement Fillon et qui a été amélioré sous le gouvernement Ayrault par la regrettée Nicole Bricq, tient compte des exceptions culturelles, des appellations d'origine contrôlée (AOC) et comporte de nombreuses clauses qui en font un modèle d'accord commercial. Il a été ratifié par l'Assemblée nationale il y a cinq ans après qu'ont été obtenues de nouvelles garanties minutieuses quant à son application provisoire.

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Il a encore été ratifié par le Parlement européen le 15 janvier 2017. Le procès en illégitimité de son cheminement démocratique me paraît donc pour le moins hasardeux.

Par cette proposition de résolution, vous demandez au Gouvernement de soumettre à l'Assemblée nationale le projet de loi de ratification modifié par le Sénat en mars, afin de poursuivre la discussion parlementaire et la procédure de ratification du Ceta. Bien entendu, le groupe Renaissance ne s'opposera pas à cette demande : nous sommes prêts à débattre encore une fois de cet accord que nous avons adopté il y a cinq ans et qui s'est révélé bénéfique pour la France au-delà de nos espérances.

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Toutefois, bien que nous ne repoussions pas votre proposition de résolution par respect élémentaire de nos principes démocratiques, nous ne voterons pas non plus en faveur de son adoption, et cela pour les mêmes raisons démocratiques. En effet, respecter la démocratie, ce n'est pas mentir éhontément aux Français en propageant à longueur de journée des fake news – des « infox » – sur les effets du traité.

M. Benjamin Lucas-Lundy s'exclame.

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Ce n'est pas faire croire aux Français que le Ceta nous inonde de bœuf aux hormones : depuis sept ans qu'il est appliqué, la proportion du bœuf canadien dans la consommation de viande bovine en France s'élève à 0,0034 %, soit 1 gramme par personne et par an. Pas non plus de porc aux antibiotiques ni de poulet élevé aux farines animales. Quant aux lentilles, monsieur Chassaigne, leur importation n'est pas régie par le Ceta, mais par un autre traité. Les garanties de conformité avec les normes européennes, plus contraignantes, empêchent l'importation de tous les produits qui peuplent vos fantasmes et que vous tentez cyniquement d'utiliser pour effrayer les Français.

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Respecter la démocratie, ce n'est pas non plus faire croire aux Français que l'accord avec le Mercosur et le Ceta sont les mêmes traités et produisent les mêmes effets.

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C'est précisément parce que nous sommes résolument contre le Mercosur que nous sommes pour le Ceta.

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…c'est dire la vérité à nos compatriotes en rappelant au contraire en quoi l'application de ce traité depuis sept ans est bénéfique pour nos agriculteurs, pour nos entreprises et pour les consommateurs. C'est rappeler que les règles de droit général sont largement moins avantageuses pour les Français.

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Vous procédez à un sabotage en règle que les parlementaires canadiens regardent avec sidération, tant l'application de l'accord nous est favorable. Vous prétendez que le Ceta a des conséquences négatives sur notre agriculture, alors même qu'il a permis aux viticulteurs de Bordeaux ou du Languedoc d'augmenter de 55 % leurs exportations vers le Canada.

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Vous prétendez tout cela, alors même que les États-Unis risquent d'imposer, comme ils l'ont fait il y a cinq ans sous l'administration Trump, de nouveaux droits de douane absolument dévastateurs pour les exportations de vin français. Le traité que vous fustigez dans cette résolution au motif qu'il « introduit des distorsions de concurrence au détriment des paysans européens » est celui qui a permis à nos fromagers d'augmenter de plus de 65 % leurs exportations vers le Canada entre 2016 et 2023, soit un gain supplémentaire de plus de 55 millions.

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Mais aux dépens des fromagers canadiens ! On ne peut pas s'en satisfaire.

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Monsieur Chassaigne, vous qui êtes, j'en suis sûr, un amateur de Saint-Nectaire,…

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…sachez que dénoncer cet accord implique de revenir sur la reconnaissance par le Canada de vingt-huit fromages AOP, parmi lesquels le Saint-Nectaire.

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Sans l'AECG, le Canada pourrait produire du Saint-Nectaire industriel dans les usines d'Alberta ou du Saskatchewan. Vous pourrez le dire aux agriculteurs de votre circonscription !

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Non, c'est la vérité. Cet accord protège les territoires et le savoir-faire français, et le dénoncer comme vous le faites, c'est précisément revenir à la dérégulation que vous fustigez.

Au fond, cette proposition de résolution doit être ramenée à ce qu'elle est : une tribune, à dix jours des élections européennes, pour rappeler votre manque d'ambition quant à l'avenir de la France au sein de l'Union européenne. Là où vous voyez la souveraineté nationale comme un instrument pour nous isoler du reste du monde, nous croyons au contraire que la France doit utiliser sa puissance dans l'Union européenne pour renforcer son modèle, le plus avancé au monde en matière de normes environnementales et sociales.

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Nous aurons l'occasion de débattre sur le fond de cet accord et de sa mise en œuvre et, preuves à l'appui, nous continuerons de démontrer qu'il est bénéfique pour la France. En attendant, nous nous abstiendrons sur le vote de ce texte.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme Élodie Jacquier-Laforge applaudit également.

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Nos paysans vivent une crise sans précédent et multiplient les mobilisations pour sonner l'alarme quant à la situation de l'agriculture française. Nous venons d'étudier une loi d'orientation agricole, supposée répondre à cette crise mais qui ne règle en rien le problème de la concurrence déloyale que font à nos agriculteurs les pays tiers, à cause des traités de libre-échange, et nos voisins européens, à cause des surtranspositions. Les Français rejettent massivement les nouveaux traités de libre-échange et demandent plus de protectionnisme. Malgré tout cela, le Gouvernement continue à promouvoir la mise en place de traités de libre-échange tels que le Ceta, comme si ces accords ne soulevaient aucune question et ne souffraient aucune contestation !

Combien de nos concitoyens savent que le Ceta s'applique de manière anticipée depuis 2017 sans que la Macronie – en sept ans ! – n'ait jugé utile de le faire ratifier par le Parlement ? Si le Sénat ne s'était pas saisi de la question, la Macronie aurait continué à appliquer cet accord sans consulter la représentation nationale, car elle sait pertinemment que ni les professionnels, ni les Français, ni leurs élus n'en veulent.

Pour comprendre pourquoi, rappelons ce qui se cache derrière ce traité de libre-échange avec le Canada qui permet d'importer d'un autre continent ce que nous n'avons pas le droit de produire chez nous. Le Ceta vise à ouvrir en grand les portes du marché européen aux produits canadiens, dont les normes diffèrent profondément des nôtres, sans que des clauses miroirs ne leur imposent de les respecter. Grâce au Ceta, le bœuf canadien nourri aux farines animales peut entrer dans l'Union européenne, alors que nous interdisons ces farines depuis la crise de la vache folle.

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Le Ceta, ce sont des animaux potentiellement élevés avec des hormones de croissance pourtant interdites en Europe depuis 2006, comme le sont plusieurs dizaines de molécules chimiques utilisées par les agriculteurs canadiens.

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Le Ceta, c'est la concurrence entre nos fermes familiales et les fermes-usines canadiennes,…

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…dont 60 % comptent plus de 10 000 bêtes élevées sans traçabilité, ce qui amène à décontaminer les carcasses au chlore.

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Le Ceta, c'est aussi l'affaiblissement de la souveraineté des États face aux intérêts des multinationales. En effet, ce traité permet aux entreprises d'attaquer en justice les États si elles considèrent que leur législation a un impact négatif sur leurs profits actuels ou futurs, ce qui revient à empêcher que la loi nationale puisse imposer ses propres normes.

Avec tous ces compromis, tous ces sacrifices, notamment pour nos éleveurs, nous pourrions espérer que la France bénéficie dans quelques domaines de cet accord, comme a tenté de nous en persuader la semaine dernière Gabriel Attal. Toutefois, depuis sept ans que le Ceta s'applique contre notre avis, la balance commerciale entre la France et le Canada est devenue déficitaire alors qu'elle ne l'était pas.

Ce sont les services du Premier ministre, et plus précisément le Centre d'études prospectives et d'informations internationales, le Cepii, qui donnent les chiffres les plus parlants. D'après les études qu'il a réalisées, à l'horizon 2035, le Ceta rapportera annuellement 4 dollars par habitant aux Européens et 313 dollars aux Canadiens, soit quatre-vingts fois plus. Le Cepii prévoit que nos importations du Canada augmenteront trois fois plus vite que nos exportations.

Ratifier le Ceta reflète un état d'esprit, une conception de la politique, qui est ultralibérale, une vision du monde, qui ne connaît aucune limite raisonnable, où le marché fait la loi au détriment du bien commun, de la souveraineté et de la santé publique. C'est la vision d'une agriculture ultra-intensive au détriment de nos exploitations familiales et de nos agriculteurs. Ratifier le Ceta, c'est se soumettre au même modèle que celui du Mercosur, que l'Union européenne continue de négocier contre l'avis des peuples.

La Macronie nous impose enfin un sacré paradoxe écologique. D'un côté, elle impose l'écologie punitive pour les Français et brime les agriculteurs pourtant parmi les plus propres du monde, d'autre part, elle n'hésite pas à promouvoir une production agricole canadienne à faibles normes environnementales et l'importation de produits parcourant 7 000 kilomètres pour venir jusqu'à nous alors que nous sommes capables de les produire. Quelle hypocrisie à l'heure où les importations représentent 50 % de nos émissions de CO2 !

Fin mars, 82 % des sénateurs ont voté contre la ratification de cet accord de libre-échange avec le Canada, laissant la Macronie bien seule à soutenir un modèle d'échanges d'un autre âge. Aujourd'hui, c'est l'Assemblée nationale, que vous ne vouliez pas consulter, qui, à l'initiative de l'opposition, a l'occasion à son tour de dire symboliquement non au Ceta, comme le feront les députés du Rassemblement national. Enfin, le 9 juin, les électeurs pourront rejeter votre vision éculée d'un libre-échange outrancier et synonyme de dumping social, fiscal et environnemental, en choisissant le juste échange promu par Jordan Bardella et ses colistiers.

Nous voterons donc pour cette résolution, pour une véritable consultation démocratique sur le Ceta, pour que le Gouvernement retourne à Bruxelles, contraint par le peuple et ses représentants d'expliquer à la Commission européenne que la France refuse de ratifier ce traité.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Négocié sous Nicolas Sarkozy, signé sous François Hollande, imposé par Emmanuel Macron : voici l'itinéraire du Ceta, accord de libre-échange entre l'Europe et le Canada, devenu l'emblème des accords dits de libre-échange.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas-Lundy applaudit également.

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C'est un exemple parmi d'autres du trait d'union qui relie Les Républicains à la Macronie en passant par le Parti socialiste européen, car ils votent ensemble tous les accords de libre-échange ,

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Cyrielle Chatelain et M. Benjamin Lucas-Lundy applaudissent également

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quand les députés de La France insoumise n'ont jamais donné une seule voix à ces accords au Parlement européen.

Il faut en finir avec le dogme du libre-échange, qui détruit notre industrie, notre agriculture et le climat, et fait de l'Union européenne l'idiote utile de la mondialisation et du commerce mondial.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Le Ceta, comme tous les accords de libre-échange, est un crime à rebours de tous les défis de notre époque. L'affirmer n'est pas faire offense à nos amis canadiens – nous nous souvenons de leur sacrifice le 6 juin 1944 –, ni évidemment à nos frères québécois, amoureux comme nous de leur liberté.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

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Le Ceta est un crime écologique, un « climaticide », comme le disait même un ancien ministre de M. Macron, puisqu'il implique davantage de transports de marchandises, sur plus de 6 000 kilomètres, ce qui comprend l'importation massive d'énergies fossiles issues de schistes bitumineux. Emmanuel Macron lui-même pointait des incohérences avec l'accord de Paris sur le climat – mais c'était pendant la campagne électorale. Tant pis pour le climat !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Le Ceta est un crime sanitaire : les perturbateurs endocriniens, les pesticides, les antibiotiques, les farines animales, les saumons génétiquement modifiés peuvent faire leur entrée en Europe, puisque cet accord ne prévoit, contrairement à ce que vous dites, aucune clause miroir et de non-régression. Tant pis pour la santé et l'environnement !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas-Lundy applaudit également.

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Le Ceta est un crime agricole et social, car il supprime les droits de douanes sur 98 % des produits, entraînant une concurrence déloyale et donc une pression à la baisse des prix, au détriment, comme toujours, des plus petites exploitations, broyées par la course au productivisme.

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Il crée des pénuries, comme celle de la moutarde il y a quelques mois, puisque deux tiers de la production française a été délocalisée au Canada. Tant pis pour l'agriculture et les emplois !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Le Ceta est aussi un crime politique. C'est un nouvel acte d'allégeance aux multinationales qui étend toujours plus le dumping social, réglementaire et écologique. Pleinement en vigueur, s'il devait être ratifié définitivement, il offrirait aux multinationales des privilèges juridiques absolument inacceptables, leur permettant d'attaquer les États devant des tribunaux d'arbitrage spéciaux, pour contester les lois sanitaires et environnementales défavorables à leurs intérêts.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – MM. André Chassaigne et Benjamin Lucas-Lundy applaudissent également.

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Tant pis pour la souveraineté du peuple et l'intérêt général !

Mais le Ceta est avant tout un crime démocratique, monsieur le ministre.

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Après avoir été négocié en secret, il s'applique en France de manière provisoire depuis 2017, sans avoir jamais été ratifié par le Parlement.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Après avoir fait voter sa ratification de justesse par l'Assemblée au cours de la législature précédente, avec seulement neuf voix d'écart, la Macronie a préféré ne pas le soumettre au Sénat ; mais il s'applique en attendant.

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Nous remercions les sénateurs communistes qui ont permis de confirmer l'imposture : le Gouvernement n'a pas de majorité pour faire adopter ce traité. Une fois de plus, vous en êtes réduits aux basses manœuvres pour bafouer le Parlement. Monsieur le ministre délégué chargé du commerce extérieur, monsieur Riester, vous annoncez reporter après les élections européennes la poursuite de la navette parlementaire de ratification du traité, qui s'impose pourtant à vous, nous obligeant à débattre d'une résolution et non du traité lui-même. La tête de liste macroniste aux élections européennes, Mme Hayer, assure que même si le Parlement rejetait le traité, le pouvoir ne le notifierait pas au Conseil européen, pour que le Ceta continue de s'appliquer par effraction. C'est un coup de force, une forfaiture, un 49.3 déguisé que vous pratiquez là.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Vous remplacez les parlementaires par les marchands, la souveraineté du peuple par le bon plaisir du monarque et des multinationales. Comme sur les retraites ou le budget, vous brutalisez le Parlement, car vous avez peur du peuple et même de ses représentants.

Mêmes mouvements.

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Vous avez décidément un problème avec la démocratie. Je paraphraserai Mme Borne : avec ces méthodes, vous vous placez hors du champ républicain.

Mêmes mouvements.

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Vingt ans après la leçon de 2005 et le « non » des Français au référendum sur le traité établissant une Constitution pour l'Europe, vous n'avez toujours pas admis que non, c'est non. Chaque fois qu'il s'agit d'un traité européen, vous faites, en quelque sorte, les forceurs, alimentant l'extrême droite en carburant électoral.

Aux Français qui s'opposent à la mise en concurrence déloyale par le libre-échange, je veux dire à cette tribune qu'il existe une voix qui défend un protectionnisme écologique et social pour relocaliser la production au plus près des besoins de la population. Cette voix, c'est la nôtre, celle d'une France insoumise en Europe.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Cyrielle Chatelain et M. Benjamin Lucas-Lundy applaudissent.

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Nous exigeons un examen immédiat du projet de loi de ratification à l'Assemblée nationale ou sa soumission à référendum. Combattre le Ceta, s'opposer au libre-échange et exiger la VIe République, c'est une seule et même cause.

Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.

Sourires.

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La proposition de résolution soumise à notre assemblée dépasse le cadre de la ratification de l'accord économique et commercial entre l'Union européenne et le Canada. Il s'agit en réalité ici de sanctionner la pratique antidémocratique et antiparlementaire du Gouvernement, qui interprète selon son bon vouloir les textes fondamentaux de notre République, ouvre des brèches dans le granit des institutions et élargit le fossé de la défiance entre les Français et leurs représentants.

Nos concitoyens ne vous ont pas accordé de majorité absolue ? Vous dégainez vingt-trois 49.3 en dix-huit mois. Le dérapage des comptes publics nécessite 20 milliards d'euros d'économies dès cette année ? Vous refusez de présenter un budget rectificatif au Parlement. L'Assemblée nationale risque de rejeter certains de vos textes ? Le Président de la République exige de légiférer par décret. Le Sénat s'oppose à la ratification du Ceta ? Vous bloquez la navette parlementaire en refusant de transmettre à l'Assemblée le texte pour permettre une deuxième lecture.

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Quand bien même notre assemblée serait un jour saisie d'une nouvelle lecture sur le Ceta, votre candidate aux élections européennes, Mme Hayer, a déjà annoncé que rien n'obligeait le Gouvernement à transmettre à la Commission européenne le résultat du vote, à savoir le probable rejet du Ceta par les représentants du peuple français, afin de ne pas avoir à entériner ce résultat. Mais de quelle République bananière croyez-vous, mesdames et messieurs les membres du Gouvernement, avoir la charge ?

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Vous qui sciemment faites monter l'extrême droite en France, vous qui en faites votre partenaire exclusif de débat télévisé, vous qui, en sept années, êtes passés de rempart à marchepied de Mme Le Pen, vous jouez avec le feu et incendiez la démocratie.

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Vous offrez, monsieur le ministre délégué, aux adversaires de notre République siégeant aux deux extrêmes de notre hémicycle, le petit guide illustré du contournement du Parlement, alors qu'il ne restera du macronisme en 2027 que les ruines fumantes d'un nouveau monde synonyme de fracturation de la société, d'abandon de la méritocratie républicaine, de disparition des services publics de proximité, d'injustice sociale et de mise sous tutelle de notre pays par ses créanciers.

Arrêtez, monsieur le ministre délégué, de mépriser le Parlement, de penser avoir raison seul contre tous ! Cessez votre dérive illibérale et antidémocratique ! Ce dont nous débattons aujourd'hui dépasse le devenir d'un accord commercial avec un allié proche : c'est le rapport du Gouvernement avec les représentants du peuple, mais aussi son rapport à la vérité.

En affirmant que les sénateurs Les Républicains instrumentalisent le Ceta, vous mentez par délation en oubliant qu'en juillet 2019, les députés LR avaient déjà, dans leur quasi-unanimité, rejeté cet accord.

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En déclarant que le Ceta bénéficie à la France, vous mentez par omission. En effet, non seulement les exportations de la France vers le Canada ont augmenté, depuis 2017, deux fois moins vite que celles de l'Union européenne et moins que les exportations ailleurs dans le monde, mais nous sommes de surcroît passés d'une balance commerciale bénéficiaire avec le Canada, de 653 millions d'euros en 2019, à un déficit dans nos échanges avec ce pays de 23 millions en 2023, dans un contexte où les importations de produits canadiens en Europe ont baissé de 15 % l'année dernière.

En soutenant enfin que nous n'importons pas ce que nous ne permettons pas à nos agriculteurs de produire, vous mentez par cynisme, puisque le Ceta autorise l'entrée de bœuf canadien nourri aux farines animales interdites en Europe, mais aussi l'importation de produits agricoles traités avec quarante-deux pesticides bannis de nos champs, le tout en divisant par deux les contrôles physiques des produits aux frontières, ce qui rend impossible de garantir que du bœuf aux hormones n'arrive pas sur nos étals.

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Quelques heures après l'adoption d'une loi d'orientation agricole qui ne résoudra rien des difficultés exprimées par les agriculteurs lors de grandes manifestations, vous leur faites un nouveau bras d'honneur en tenant le Ceta pour un totem indépassable, alors même que cet accord fragilise plus encore des filières françaises d'excellence, telles que l'élevage bovin ou le sucre dont vous saccagez méthodiquement la filière depuis votre arrivée au pouvoir.

La politique n'est pas affaire de chiffres, mais de principes. En démocratie, on ne contourne pas le Parlement. On ne ment ni à ses représentants ni aux Français. On ne joue pas à la roulette canadienne avec l'alimentation de nos enfants. Pour sanctionner votre pratique détestable du contournement du débat parlementaire, votre choix de paver la route aux populistes et vos mensonges sur le Ceta, nous, députés Les Républicains, voterons en faveur de cette proposition de résolution.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR – NUPES.

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Nous savons que le président Chassaigne est un habile homme, et que ses amis le sont aussi. Nous en trouvons ce matin une parfaite illustration.

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M. Chassaigne et ses amis n'aiment pas la mondialisation. C'est leur droit, même si l'on est fondé à leur demander s'ils ont bien mesuré le formidable recul de la misère planétaire qui a été permis, ces cinquante dernières années, par l'ouverture des frontières et l'intensification des échanges internationaux.

Le président Chassaigne sait qu'il a peu de chances de nous convaincre des méfaits de la mondialisation en prenant pour cible l'accord passé entre le Canada et l'Union européenne. Il le sait pour deux raisons très puissantes. La première raison, c'est que le Canada est un grand pays démocratique, ami de l'État de droit, notre allié de toujours.

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Or la qualité des échanges internationaux est aujourd'hui mise en cause par des États qui ne respectent pas les règles du jeu. Ce n'est assurément pas le cas du Canada, si proche de nous à tant d'égards. Un accord bilatéral avec le Canada, c'est mieux, bien mieux, que la loi de la jungle du commerce de droit commun.

« Bravo » et applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR. – M. Christopher Weissberg applaudit également.

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La seconde raison, qui ne peut qu'inquiéter les adversaires de l'accord, c'est le franc succès de ses premiers pas dans la vie réelle. Pour la France, le Ceta, quoi que vous en disiez c'est carton plein.

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Pour quel type de produits et pour quels producteurs ! Soyez concrets ! Arrêtez avec les abstractions !

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La litanie des exemples déjà énoncés est tout à fait convaincante.

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Les importations de viande bovine, sources de toutes nos angoisses comme l'a dit M. Weissberg, ne représentent que 0,004 % de la consommation française. Face à un tel bilan, nos collègues du groupe GDR ont prudemment choisi de botter en touche.

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Ne votons pas sur le fond, disent-ils, mais sur la procédure.

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Avant de boucler la procédure, le Gouvernement demande du temps pour répondre aux inquiétudes et apaiser le monde agricole en émoi. Les auteurs de cette proposition de résolution refusent cette démarche. Pour eux c'est la ratification, ou plutôt la non-ratification, subito !

Monsieur le président Chassaigne, vous argumentez votre demande par les propos suivants, que nous contestons : l'inachèvement de la procédure de ratification serait en elle-même constitutive d'un déni de démocratie et d'une atteinte à la souveraineté de notre pays.

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Selon vous – vous me pardonnerez l'expression –, les travaux n'interrompraient pas le spectacle et 90 % des dispositions du Ceta s'appliqueraient dès à présent, en l'absence d'une ratification en bonne et due forme de notre Parlement. Je n'ai pas vérifié ce chiffre que vous avancez.

La vérité, est bien différente : nous avons affaire à un accord mixte, qui comprend à la fois des dispositions de politique commerciale qui relèvent de la compétence exclusive de l'Union européenne, et des dispositions qui relèvent de la compétence partagée entre l'Union et les États membres.

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Les dispositions commerciales – soit les 90 % de mesures que vous citez – sont, en toute logique et de manière tout à fait légitime, soumises à la procédure de ratification du seul Parlement européen, élu au suffrage universel dans des conditions parfaitement démocratiques.

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Les autres dispositions, parce qu'elles demeurent de la compétence des États membres, ne sont applicables qu'au terme d'une procédure très lourde, qui passe par la ratification du texte par environ trente-cinq assemblées parlementaires, nos amis Belges n'en comptant pas moins de cinq à eux seuls.

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Il est donc injustifié de faire prendre en otage, comme vous prétendez le faire, les dispositions relevant de la politique commerciale commune par des procédures prévues pour ratifier des dispositions relevant des compétences partagées.

M. Arnaud Le Gall et M. Matthias Tavel s'exclament.

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Ce n'est pas servir l'État de droit et la démocratie d'utiliser les accords mixtes comme des fusils à tirer dans les coins pour remettre en cause les compétences communautaires fixées par des traités signés et ratifiés par la France.

Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE. – M. Benoît Mournet se lève pour applaudir.

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Si cette proposition de résolution avait une réelle portée juridique, nous la combattrions, car elle nous paraît mal inspirée sur le fond et lourde d'effets pervers si l'on s'en tient aux questions de procédure. Mais, rassurez-vous, comme elle n'a aucune conséquence juridique, nous nous contenterons de ne pas l'approuver.

Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.

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Les paysans vont mal et ce n'est pas nouveau. Il est cependant facile de tout mettre sur le dos de l'Union Européenne et des accords internationaux. Le Ceta concerne en partie l'agriculture ; dans le contexte électoral actuel, on comprend donc qu'il soit tentant de l'instrumentaliser à des fins politiques.

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Depuis plusieurs mois, le Ceta a été l'occasion de vifs débats au sein de nos deux assemblées. Au-delà des caricatures et des mensonges, qu'est-ce donc que ce traité, négocié sous Nicolas Sarkozy et signé sous François Hollande ? Il permettra à Alstom d'équiper le Grand Toronto en trains de banlieue, pour une somme de 118 millions de dollars ; il a déjà permis à cette même entreprise de rénover le métro de Montréal ; il permettra aussi l'exportation de fromages et de vins français, produits à haute valeur ajoutée ; et l'importation en Europe de minerais stratégiques dont sa souveraineté dépend, réduisant ainsi notre dépendance aux régimes autoritaires.

L'Accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada est un accord de nouvelle génération : il ne s'agit pas simplement d'alléger des droits de douane, mais d'encadrer les échanges par des règles, et d'en faciliter l'accès à toutes nos entreprises, en particulier les plus petites. Quant à l'impact du Ceta sur l'environnement, l'accord prévoit suffisamment de garanties. Ainsi, avec ses partenaires européens et canadiens, la France s'est engagée en faveur d'un veto climatique à l'encontre de toute plainte d'acteurs publics ou privés visant des mesures répondant à des objectifs légitimes de politique publique, en particulier dans le domaine de la lutte contre le changement climatique.

Certains affirment que l'application provisoire de cet accord altère notre souveraineté – c'est ce qu'on lit dans les considérants de la proposition de résolution. En fait, seules sont appliquées les dispositions de l'accord relevant de la compétence exclusive de l'Union européenne. Celles relatives aux tribunaux d'arbitrage et aux investissements de portefeuille, qui relèvent des compétences partagées entre l'Union et ses États membres, n'entreront en vigueur qu'une fois l'accord ratifié par l'ensemble des parlements nationaux. Où est le problème ?

Dans cet hémicycle et en dehors de nos murs, d'autres instrumentalisent la peur du grand remplacement du bœuf français par le b?uf canadien.

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Arrêtez de reprendre les termes de l'extrême droite !

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Disons-le très clairement : l'arrivée du bœuf aux hormones sur le territoire européen est une fiction, une légende urbaine, car l'Union Européenne a construit toute sa filière de manière à contrôler le moindre gramme de viande importée. Les filières bovines canadiennes, qui n'arriveront jamais à s'adapter, préfèrent exporter en Asie.

De manière astucieuse – pernicieuse, peut-être – Les Républicains et le Parti communiste se sont coalisés pour associer le Ceta à l'accord avec le Mercosur. Le Canada ne fait pas partie du Mercosur, et c'est faire preuve de démagogie que d'insinuer le contraire. Quand nous parlons des Canadiens, nous parlons de partenaires ; nous ne pouvons nier la réalité et nous replier sur nous-mêmes, quand il s'agit de renforcer nos liens avec un pays ami, dans un contexte géopolitique plus incertain que jamais.

Nous devons assumer de rester ouverts sur le monde et de continuer à commercer avec des partenaires de longue date, d'autant plus que le Ceta est un bon accord, et pas seulement du point de vue agroalimentaire.

Pour conclure, attachons-nous plutôt aux vraies limites des clauses miroirs. C'est un mirage de se fonder sur la réciprocité des normes, car chaque pays est attaché aux siennes, certain d'avoir raison. L'Union européenne fixe des limites maximales de résidus (LMR) ; c'est la mention de ces LMR dans nos normes qui rendra les clauses miroirs applicables et efficaces.

Ne jouez pas la carte de l'émotionnel et l'opportunisme électoral contre ce traité, qui est probablement l'exemple de ce que nous devons faire en matière de libre-échange et de réciprocité.

En tout été de cause, le groupe Horizons ne peut pas voter contre l'article unique de cette résolution. Nous sommes persuadés qu'à terme, le débat parlementaire parviendra à clarifier les choses et à dépasser les postures des uns et des autres sur la question des accords de libre-échange. Nous reconnaissons donc bien volontiers, comme indiqué dans la proposition de résolution, « la nécessité de poursuivre la discussion parlementaire sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord ». Il appartiendra au Gouvernement de poursuivre la procédure de ratification du texte issu du Sénat, comme le prévoient la Constitution et notre règlement.

En raison des excès que l'on peut lire dans ses considérants, le groupe Horizons et apparentés s'abstiendra sur cette proposition de résolution.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À dix jours des élections européennes, je remercie le groupe GDR de nous donner l'occasion de débattre de la place de la France et de l'Europe dans le monde. L'Europe est confrontée à deux périls : un péril interne, la tentation de l'autoritarisme ; et un péril externe, la montée de régimes totalitaires qui menacent son intégrité et remettent en cause ses fondements mêmes.

Dans cette confrontation hybride, qui touche nos démocraties en leur sein, mais aussi sur le plan géopolitique, nous devons avoir en tête la réalité des chiffres : au moment de la déclaration Schuman du 9 mai 1950, nous représentions un cinquième de l'humanité ; en 2050, nous ne serons plus que 5 % de la population mondiale.

Abordons le débat sur le Ceta dans un esprit de responsabilité, car l'Europe peut jouer un rôle dans le monde. Personne, ici, ne souhaite affaiblir l'Union en se fondant sur les besoins d'une filière, d'une localité ou d'une région particulières. Nous n'imaginons pas non plus une puissance européenne qui mépriserait la souveraineté populaire des nations. Dans ce cadre, au-delà du Ceta, les Socialistes appellent à réviser notre doctrine et nos façons de faire démocratiques et institutionnelles.

Inspirons-nous du modèle allemand : outre-Rhin, le Bundestag peut donner des mandats de négociation pour les traités commerciaux. Lorsqu'un ministre de l'agriculture négocie la PAC, il le fait avec un mandat clair. En France, une carence démocratique entoure les prises de décisions européennes et extra-européennes. Nous devons donc réinventer une façon démocratique de nous saisir des sujets par le bas, dans la transparence, en garantissant une capacité de réforme permanente de ces traités, afin de bien les comprendre, d'éviter les périls, voire de les compenser et de les réparer.

Ensuite, les décisions européennes ne peuvent pas être seulement le fruit d'un rapport de force. Elles doivent s'inscrire dans ce que Jean-Jacques Rousseau appelait le droit naturel, c'est-à-dire quelque chose qui nous précède et qui nous dépasse, qui relèverait d'une forme de Constitution européenne et qui nous rassemblerait par exemple autour des principes des accords de Paris et de l'urgence de nourrir 10 milliards d'habitants en 2050. Cela suppose que toutes les terres du monde soient valorisées et que nous passions d'une logique de compétition à une logique de coopération, car nous aurons besoin de tous les paysans du monde.

Cela concerne aussi les droits humains, qui ont connu une sorte de printemps – je pense à la directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (CS3D) et à la directive dite CSRD sur le reporting extrafinancier, qui indiquent la voie d'une nouvelle économie européenne. Si nous n'y prenons pas garde, ces droits seront menacés demain.

Par le haut, cette fois, par une sorte de Constitution qui nous interdit de bâtir des traités climaticides ou attentatoires aux droits des peuples, des citoyens, des paysans d'ici et d'ailleurs, il y a là des règles commerciales qui nous dépassent et nous éclairent.

De façon plus pratique, nous devons traiter les alertes du rapport de la commission d'évaluation de l'impact du Ceta, dit rapport Schubert, commandé par le Premier ministre en 2017. Ces alertes, restées lettre morte, nous mettaient en garde contre l'absence de continuité des contrôles en matière sanitaire, climatique et de biodiversité, et nous signalaient les failles de l'accord commercial. Rien n'a été corrigé.

Après avoir demandé et obtenu la création d'une commission d'enquête sur les pesticides et leur maîtrise, le groupe Socialistes a effectué un travail précis sur les concurrences déloyales.

Au nom du groupe, pour alimenter notre débat, je propose que les questions posées par le rapport Schubert fassent l'objet d'un nouvel examen par la Commission européenne et par le Parlement européen, en vue d'un autre accord avec le Canada, mais aussi avec d'autres régions du monde. Afin de garantir l'effectivité du respect des principes de réciprocité et des standards européens dans le monde, nous avons formulé cinq propositions qui comportent – au-delà de celles relatives aux limites résiduelles zéro en matière de pesticides ou à la fin de l'exportation des produits phytopharmaceutiques interdits dans l'Union vers les pays tiers – un élément innovant : l'inversion de la charge de la preuve, afin que les mesures miroirs ne soient pas des miroirs aux alouettes. La certification, donnée par un organisme extérieur, nous donnerait la garantie que tous les produits importés respectent bien les standards européens. C'est la seule méthode qui nous semble valable.

Grâce au dialogue avec les peuples souverains et à l'établissement d'une Constitution européenne qui nous élèverait en consacrant l'universalisme de l'Union, nous pourrions bâtir une nouvelle économie dans le monde, fondée sur cette logique de juste échange, et, comme nous y engageait Mireille Delmas-Marty, contribuer à l'émergence d'un nouvel universalisme fondé non sur des souverainetés solitaires, fussent-elles européennes, mais sur une souveraineté solidaire.

« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.

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Le groupe communiste nous propose ce matin d'adopter une résolution tendant à exiger un débat parlementaire sur l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada – le fameux Ceta –, car, comme vous le savez, en matière de ratification de traité, les parlementaires ne peuvent pas déposer de proposition de loi. Dès lors, vous l'admettrez, nous sommes un peu piégés : comment refuser que le Ceta fasse l'objet d'un vote des députés ?

Soyons clairs : tous les accords ne se valent pas, et je ne mets évidemment pas sur le même plan le Ceta et le Mercosur, car, contrairement à ce que beaucoup redoutaient, le bœuf canadien n'a pas envahi nos supermarchés.

Sourires.

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Bien que le Ceta ait fait décoller nos exportations, en hausse de 33 % entre 2017 et 2023 – une augmentation qui atteint 24 % pour les seuls vins, si importants pour ma région –,…

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…on ne peut passer sous silence les risques qu'il fait peser sur notre agriculture en général, particulièrement en cette période de grande détresse pour le monde agricole. Il existe, par exemple, des différences fondamentales entre les modèles d'élevage canadien et français –– en matière de bien-être animal, d'alimentation des animaux, ou encore d'usage d'antibiotiques comme activateurs de croissance –, qui aboutiront inévitablement à une différence de compétitivité au détriment de nos éleveurs.

Jusqu'à présent, les contingents de viande bovine canadienne importée sont restés faibles, et pour cause : 50 % de la production canadienne est exportée sur les marchés américain et asiatique. Jusqu'ici, tout va bien, mais si ces marchés venaient à se retourner, l'Union européenne deviendrait de facto le marché de repli pour le Canada. Sommes-nous réellement prêts à prendre ce risque, sachant que certaines de nos filières sortent incontestablement gagnantes de cet accord ?

La filière fromage et le secteur vitivinicole, si important pour ma région d'Occitanie, ont su tirer des bénéfices de cet accord tant décrié, et de nombreuses entreprises exportatrices ont gagné des parts de marché, comme le prouve la progression des exportations des vins et spiritueux vers le Canada, malgré un léger recul en 2023.

Dans ces conditions, un arrêt de l'application du Ceta pourrait conduire à un recul encore plus important des vins et spiritueux français sur le marché canadien. Or, les parts de marché sont difficiles à gagner puis à conserver, et le secteur vitivinicole se trouve déjà dans une situation difficile : nous devrons prendre tout cela en considération dans nos débats.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Par ailleurs, le Canada – pays ami, faut-il le rappeler –, aux côtés d'une quinzaine d'autres États – dont le Brésil –, dénonce, au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), des normes européennes jugées trop strictes ; et tente évidemment de les contourner. Une fois le Ceta ratifié, il pourra saisir le tribunal d'arbitrage pour faire valoir ses intérêts et demander des normes moins contraignantes.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au sein du Comité mixte de gestion des mesures sanitaires et phytosanitaires de l'AECG, il exerce aussi des pressions visant à remettre en cause la légitimité des règles européennes tendant à garantir que les denrées alimentaires, les animaux et les produits d'origine animale mis sur le marché de l'Union européenne respectent l'obligation d'assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale, et de l'environnement.

Pourtant, un audit mené en 2022 par la Commission européenne a souligné la persistance des failles dans le système de contrôle et de traçabilité, déjà constatées du côté canadien lors d'un premier audit, trois ans plus tôt. Il ne me semble pas opportun pour notre démocratie d'attendre que le Gouvernement veuille bien lancer une mission parlementaire sur la réciprocité des normes de production, puis d'attendre encore que la Commission européenne réalise une évaluation globale des conséquences économiques, sociales et environnementales du Ceta, ce qui ne devrait pas être fait avant 2025, voire 2026.

Ne soyons pas naïfs : un accord ne se fait jamais à sens unique : on ne peut pas s'attendre à être 100 % gagnants dans cette histoire, et chacun devra prendre ses responsabilités lorsque le traité sera soumis au vote des parlementaires – encore faudrait-il qu'il le soit ! Et pour que la ratification de cet accord soit effectivement soumise au débat parlementaire et que nous puissions nous prononcer au nom du peuple français, il est nécessaire que la navette parlementaire se poursuive. Pour toutes ces raisons, je voterai bien évidemment en faveur de cette proposition de résolution.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La discussion générale est close.

Je vous informe que, sur le vote de la proposition de résolution, je suis saisie par le groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Au mois de mars, j'avais déjà assisté, au Sénat, à un spectacle désolant :

« Oh ! » sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

le spectacle de ceux qui mentent, manipulent les chiffres,…

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

…jouent avec les angoisses de nos concitoyens et surfent sur les difficultés de nos agriculteurs en raison des crises mondiales.

Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'il vous plaît, mes chers collègues, seul M. le ministre a la parole.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur Jumel, j'entends que vous n'êtes pas d'accord, mais pour l'instant, c'est M. le ministre qui a la parole.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Et je dois dire que je suis affligé …

Vives exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

…de voir à nouveau avec quelle indécence le rose, le vert, le bleu et le bleu marine ont choisi de former une alliance de circonstance, une alliance contre nature faisant passer de prétendus intérêts électoraux avant l'intérêt général.

Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Mais, en dépit de tout ce que j'ai entendu, je veux réaffirmer haut et fort devant cette assemblée, qui s'est prononcée en faveur de sa ratification le 23 juillet 2019 …

Les exclamations se poursuivent

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'entends que vous n'êtes pas d'accord, chers collègues, mais seul le ministre a la parole !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Je veux réaffirmer que l'accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada est un bon accord.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

C'est un bon accord pour l'économie française. C'est un bon accord…

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

…pour les PME de tous nos territoires, qui exportent davantage grâce au cadre et aux facilités qu'il procure. C'est un bon accord pour tous les salariés des entreprises qui bénéficient directement ou indirectement des exportations vers le Canada.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

C'est un bon accord parce qu'il permet de consolider notre relation avec le Canada, grande démocratie francophone alliée et amie de la France. C'est un bon accord pour nos agriculteurs – en particulier nos viticulteurs, producteurs de lait et producteurs de fromage –,…

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

…qui peuvent ainsi exporter davantage.

Je voudrais avant tout répondre au procès en déni de démocratie que vous faites au Gouvernement. À aucun moment il n'a cherché à fuir le débat sur le Ceta.

Vives exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

À aucun moment il n'a eu peur de dire la vérité aux Français sur un accord qui leur est largement bénéfique. À aucun moment il n'a cherché à contourner le Parlement.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Je vous rappelle que le projet de loi autorisant la ratification du Ceta a donné lieu à un débat puis un vote dans chacune des assemblées. Comment osez-vous parler de déni de démocratie, alors que l'Assemblée nationale, puis le Sénat il y a quelques semaines à peine, se sont déjà exprimés ?

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Comment osez-vous prétendre que le Gouvernement serait réticent à poursuivre le processus démocratique, alors que j'ai réaffirmé ici même, il y a peu, que l'Assemblée serait bien évidemment amenée à se prononcer à nouveau ?

« Mais quand ? » sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe Écolo – NUPES.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Comment osez-vous qualifier cette proposition de cocasse, alors que seule l'est votre propension à agiter tous les épouvantails possibles à des fins purement électoralistes ?

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Je vous l'ai déjà dit, mais il est apparemment nécessaire de le répéter : oui, le projet de loi autorisant la ratification du Ceta sera bien inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée

« Mais quand ? » sur les bancs du groupe GDR – NUPES

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

–…

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

…mais pas sans qu'un débat apaisé se soit tenu au préalable, avec l'ensemble de ceux que l'accord concerne au premier chef.

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Parce que nous n'avons pas été assez sages ?

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Mesdames et messieurs les députés communistes, le deuxième vote de l'Assemblée nationale n'aura pas lieu ici et maintenant parce que vous le décideriez ou parce que votre stratégie pour les élections européennes vous imposerait de prendre la lumière.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les représentants du peuple doivent pouvoir se prononcer !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Ce vote aura bien lieu, mais seulement une fois que certaines actions engagées seront parvenues à leur terme.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Le Premier ministre a ainsi confié au député Benoît Mournet et au sénateur Daniel Fargeot une mission portant sur l'application et le contrôle de la réciprocité des normes de production – les fameuses mesures miroirs. Nous suivons également attentivement les effets de l'accord pour les filières sensibles : la représentation nationale sera bien entendu informée des conclusions de cette analyse. Nous attendrons également la conclusion des échanges avec le vice-président Valdis Dombrovskis, que nous avons sollicité avec mon collègue Marc Fesneau, et celles de l'évaluation des conséquences économiques, sociales et environnementales actuellement menée par la Commission européenne, qui devraient être rendues à la fin de l'année ou en tout début d'année prochaine.

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Vous prétendez donc que c'est un bon accord sans l'avoir évalué ! Alors, c'est un mensonge !

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Quand nous aurons les conclusions de l'ensemble de ces actions et que les filières les plus concernées auront fait entendre leur voix, alors seulement le texte autorisant la ratification vous sera à nouveau soumis.

MM. Pierre Cazeneuve et Christopher Weissberg applaudissent.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Pendant ce temps, mesdames et messieurs les députés communistes, vous semblez préférer, d'une certaine façon, polluer le débat parlementaire ,

Exclamations sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

dans le seul but d'ajouter du chaos au chaos et dans l'espoir de glaner quelques voix lors du scrutin de la semaine prochaine. Personne n'est dupe de votre manœuvre et de votre tentative de prendre, d'une certaine façon, en otage le débat des élections européennes à dix jours du scrutin.

Vives exclamations sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Un peu de calme, mes chers collègues, seul le ministre a la parole !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Mais le plus consternant, c'est que vous faites mine de ne pas avoir entendu les engagements pris par le Gouvernement s'agissant de l'inscription du texte à l'ordre du jour de l'Assemblée, et qu'au prétexte de défendre le processus démocratique, vous faites perdre à nos institutions, et en particulier à l'Assemblée nationale, un temps précieux.

Mêmes mouvements.

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C'est une journée de niche ! Vos propos sont scandaleux !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Vous vous prétendez garants de notre Constitution, mais vous ne faites que menacer les PME et ETI – entreprises de taille intermédiaire – qui, partout dans le territoire, peuvent exporter davantage et créer des emplois grâce au Ceta.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Comme vos amis de la NUPES – notamment les Insoumis – et vos opposants de l'extrême droite, auxquels vous tendez la main aujourd'hui, vous n'êtes en réalité partisans que du repli sur soi et du recroquevillement.

Exclamations sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Le président de la commission des affaires étrangères l'a rappelé, votre vieille rengaine idéologique ne vise qu'à détourner le regard des électeurs des immenses progrès fait par l'Europe ces dernières années en matière de souveraineté, particulièrement de politique commerciale, sous l'impulsion du Président de la République.

Exclamations sur les bancs du groupe RN.

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Mesdames, et messieurs les députés de la droite républicaine et de la gauche socialiste, qui voterez avec les extrêmes des deux bords dans quelques instants ,

Exclamations sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes RN et LFI – NUPES

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

permettez-moi de vous dire qu'en défendant des positions opposées à celles qui étaient les vôtres lorsque vous étiez aux responsabilités, vous portez un très mauvais coup à vos convictions et votre héritage politique.

M. Michel Lauzzana applaudit. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR – NUPES.

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Au moins, nous, nous avons des convictions !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

N'êtes-vous pas ceux qui ont négocié et signé ce texte, sous les présidences de Nicolas Sarkozy puis de François Hollande ?

L'orateur regarde vers la droite de l'hémicycle.

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Ne vous êtes-vous pas sentis gênés lorsque Jean-Pierre Raffarin, interrogé il y a quelques semaines, a souligné à quel point cet accord était un bon accord ?

Sourires.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Ne vous êtes-vous pas sentis démasqués, mesdames et messieurs les députés socialistes, lorsque Stéphane Le Foll a salué, à juste titre, un accord innovant et qu'il a constaté qu'au Sénat, il y a deux mois, les opposants à la ratification du Ceta n'avaient fait que céder à un opportunisme lié au climat politique ?

M. Jean-René Cazeneuve applaudit.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Ne feriez-vous pas mieux de renouer avec l'époque où vous teniez votre boussole bien en main et assumiez vos convictions ? De grâce, cessez de penser que c'est en rognant vos valeurs et votre histoire que vous récupérerez quelques voix.

Venons-en aux faits. Vous voulez utiliser cette proposition de résolution pour parler du Ceta ? Eh bien, parlons-en !

« Ah ! Enfin ! » sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Je n'ignore pas les doutes de nos concitoyens ni les appréhensions de certaines filières à l'égard du Ceta et des accords commerciaux en général.

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Je les ai écoutés avec beaucoup d'attention. J'entends les inquiétudes qu'il y a derrière ces doutes : inquiétudes concernant l'avenir de notre agriculture, la place de la France dans le monde, la capacité de l'Union européenne à protéger les économies de ses États membres dans un monde où d'autres acteurs s'affranchissent des règles commerciales les plus élémentaires. C'est précisément pour lever ces inquiétudes que je souhaite que nous prenions le temps du débat.

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Cela fait longtemps que nous le demandons, monsieur le ministre.

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Nous devons donner la parole à celles et ceux, nombreux dans notre pays, qui vivent des accords commerciaux et qui, grâce à eux, créent des emplois et dégagent de la croissance. Leurs propos démontreront qu'un accord commercial, lorsqu'il est bien négocié, n'est pas un gros mot, mais qu'il est un outil au service de la compétitivité de nos entreprises, un cadre protecteur de nos intérêts.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Je voudrais que vous examiniez les chiffres et que vous constatiez que le Ceta nous a permis d'engranger de bons résultats depuis son application provisoire en 2017, c'est-à-dire depuis bientôt sept ans. Les faits sont là : le Ceta est un très bon accord. Les exportations françaises vers le Canada ont bondi de 33 % en six ans, tous secteurs confondus, et de bien plus encore dans quelques secteurs stratégiques : les produits chimiques et cosmétiques, les produits sidérurgiques, les textiles ou encore les services.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Surtout, regardons l'excédent du secteur agricole et agroalimentaire, ce secteur qui revient si souvent dans vos propos lorsque vous exprimez vos peurs les plus injustifiées : cet excédent, mesdames et messieurs les députés, a été multiplié par trois. Il est aujourd'hui de 600 millions d'euros.

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Les exportations de vins ont augmenté de 24 % ; celles de fromage ont augmenté elles aussi, et dans des proportions inouïes – plus 60 % ! –, cela grâce à l'exemption des droits de douane très élevés précédemment en vigueur et grâce à la protection de nos appellations d'origine protégée (AOP).

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Vous n'aimez pas le Saint-Nectaire, monsieur Chassaigne ?

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Parmi les 173 indications géographiques européennes protégées par cet accord, 42, soit près du quart, sont françaises – parmi lesquelles : le Saint-Nectaire, la fourme d'Ambert, le bleu d'Auvergne, chers à M. le président Chassaigne ,

Sourires

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Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

à Mme Pires Beaune et à Mme Maximi ; le chabichou du Poitou, cher à Mme Batho ; le pont-l'évêque, cher à M. Houssin ; le morbier, cher à Mme Grangier ; le brie de Meaux, cher à Mme Roullaud ; le reblochon de Savoie, cher à M. Coulomme ; la lentille du Puy, chère à Mme Valentin et à M. Jean-Pierre Vigier ; les pruneaux d'Agen, chers à Mme Cousin et à Mme Laporte.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Ces AOP, monsieur le président Chassaigne, permettent non seulement de protéger efficacement nos produits et nos savoir-faire mais aussi de défendre et de promouvoir une partie de notre identité – je l'ai constaté sur le terrain, au Canada.

J'ai en effet accompagné le Premier ministre lors de sa visite officielle au Canada et au Québec le mois dernier, en compagnie du député Christopher Weissberg – que je salue – et de certains de nos producteurs qui bénéficient de cet accord.

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Et pas un mot sur la qualité des importations ! Mensonge par omission !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Les Canadiens se réjouissent d'avoir accès à ces produits d'exception, reconnus dans le monde entier, que sont les vins et fromages français. Je les ai vus, ces produits d'exception, en nombre sur les étalages du marché Saint-Lawrence de Toronto.

Mesdames et messieurs les députés qui souhaitez vous opposer au texte de ratification du Ceta, ayez une pensée pour tous ces agriculteurs, toutes ces entreprises qui, grâce à lui, dégagent de la croissance et créent de l'emploi, et dont le dynamisme économique bénéficie à vos territoires.

Surtout, cessez d'agiter l'épouvantail de l'invasion de nos marchés par les viandes canadiennes. Je le dis clairement : nous n'avons pas été envahis par la viande canadienne et nous ne le serons pas.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Je tiens à rétablir la vérité sur ce sujet. Les importations de viande canadienne représentent 0,01 % de la consommation annuelle française de volaille et de porc et 0,034 % de celle de bœuf : on est loin de l'invasion !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

D'ailleurs, même si les flux sont dérisoires, nous exportons cinq fois plus de viande vers le Canada que nous n'en importons. Et si nous ne serons pas envahis, c'est grâce aux règles sanitaires européennes, qui sont très exigeantes, grâce à ces fameuses mesures miroirs dont on parle tant et qui font qu'aucune viande nourrie aux farines animales, faisant peser un risque au consommateur, traitée aux hormones ou pour laquelle des antibiotiques ont été utilisés comme facteur de croissance ne peut entrer sur le sol français.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il n'y a pas assez de services publics pour faire les contrôles !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Contrairement à ce que beaucoup disent, des mesures miroir existent et empêchent les Canadiens d'exporter une viande de bœuf dont nous ne voudrions pas.

L'autre raison pour laquelle cet accord est un bon accord, c'est qu'il nous lie au Canada. Le président de la commission des affaires étrangères l'a dit : vu l'état du monde et les temps instables que nous vivons, nous ne devons pas négliger l'importance d'un accord avec cette grande démocratie, ce pays historiquement ami, ce pays francophone qu'est le Canada.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Nous partageons avec lui non seulement une langue mais aussi des valeurs fondamentales : une même conception de l'État de droit, de la démocratie, de la gouvernance mondiale ; des combats pour les droits humains, pour les droits sociaux, pour les droits pour l'environnement.

Exclamations sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Avec le Canada, nous défendons avec force l'accord de Paris.

Nous aurons d'ailleurs l'occasion de mettre en valeur notre relation dans quelques jours, lors de la cérémonie du quatre-vingtième anniversaire du débarquement et de la bataille de Normandie.

Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quel rapport avec le sujet ? Il faut qu'il s'arrête !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Idem dans quelques mois, avec le sommet de l'Organisation internationale de la francophonie, que la France accueillera et auquel le Canada participera.

Manifestations d'impatience sur les bancs des groupes LFI – NUPES, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Tout cela, je l'ai dit au Sénat et je le répète bien volontiers ici. Avec le palais du Luxembourg, la Chambre des communes et le Sénat canadien, votre assemblée participe d'ailleurs depuis près de soixante ans à l'association interparlementaire France-Canada. Et je dois dire, monsieur Lenormand, monsieur le président du groupe d'amitié France-Québec, que j'ai été particulièrement étonné – c'est un euphémisme – par vos propos. Ai-je besoin de rappeler à tous ceux qui se soucient de la transition énergétique et de la réduction de notre dépendance aux hydrocarbures que les sols canadiens sont riches en métaux critiques ?

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Quinze des trente métaux dont nous avons besoin pour notre transition énergétique y sont présents. Le Canada est le premier producteur mondial de potasse, le deuxième d'uranium, le quatrième de titane.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Voilà un secteur où il nous faudrait davantage coopérer avec le Canada, avec qui nous partageons les mêmes normes sociales et environnementales.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans le cadre d'une niche, cela ne se fait pas, monsieur le ministre.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Ces coopérations, le Ceta va les favoriser.

J'ai beaucoup entendu dire que le Canada profitait plus que nous de cet accord. Certes, le Canada exporte des produits vers la France. La belle affaire ! Mais vous savez-vous ce que nous importons du Canada ? Nous importons l'uranium dont nous avons besoin pour produire notre énergie. Le Canada est devenu le premier fournisseur de la France en uranium et il devrait nous en livrer 4 800 tonnes en 2024…

« Oh, c'est bon là ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – « C'est de l'obstruction gouvernementale ! » sur divers bancs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

S'il vous plaît, chers collègues, chaque groupe a pu s'exprimer sur cette proposition de résolution ; je vous invite donc à faire silence et à écouter M. le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous aurez l'occasion de prendre la parole par la suite si vous le souhaitez.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Dans le secteur de la santé, par exemple, Sanofi est présent au Canada. Depuis 110 ans, cette société fournit en vaccins et en médicaments plus de soixante pays dans le monde

Mme Élisa Martin désigne sa montre.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Dans le secteur des transports, dont vous ne parlez pas, Alstom est présent au Canada, avec 4 600 employés, onze sites…

Mme Alma Dufour s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame Dufour, s'il vous plaît ! Votre groupe a eu la parole tout à l'heure, il a dit ce qu'il voulait, maintenant c'est au tour du ministre de l'avoir et il dit ce qu'il veut, pendant le temps qu'il veut. Son temps de parole n'est pas limité. C'est le règlement de l'Assemblée nationale qui l'indique et j'invite chacune et chacun à le respecter.

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C'est contraire aux engagements gouvernementaux concernant les niches !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

À travers Alstom, c'est l'expertise française, mondialement reconnue dans ces domaines, qui rayonne en Amérique du Nord.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Mesdames et messieurs les députés, nous savons bien, vous et moi, que le Ceta est en réalité l'arbre qui cache la forêt. Cette question recouvre celle, bien plus vaste, de l'Europe que nous voulons. Je mets au défi ceux qui, des deux côtés de l'hémicycle, vont voter ensemble pour la proposition de résolution de trouver un seul sujet sur lequel ils ont une opinion commune – hormis la volonté de s'opposer au Gouvernement. La majorité de circonstance qui se construit aujourd'hui ne nous empêche pas de voir que chacun des projets que vous proposez pour la France et pour l'Europe nous mènerait tout droit dans une impasse : la régression économique, la dépendance envers d'autres pays – ceux avec lesquels certains d'entre vous ont tissé des contrats moraux –, le retour d'une guerre commerciale sans limite avec nos principaux partenaires,…

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

…le rétrécissement des opportunités pour nos entreprises et pour nos concitoyens, la fin du marché unique, ce marché qui apporte depuis sept décennies la paix et la prospérité à notre continent.

Vous prétendez défendre les agriculteurs, mais vous voulez les priver d'une Europe qui leur permet d'exporter et leur offre des revenus. Vous prétendez défendre l'intérêt du pays, mais vous voulez le priver de partenariats essentiels pour son avenir.

La vérité, c'est que les extrêmes jouent sur les peurs et proposent des politiques qui n'entraîneraient qu'une seule chose : le déclin du pays. La vérité, mesdames et messieurs les députés des groupes Socialistes et LR, c'est que vous défendez à Paris des positions différentes de celles de vos groupes parlementaires à Bruxelles.

« Eh oui ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Soyez donc plus honnêtes envers vous-même et envers les Français. Quelle Europe voulez-vous vraiment ? Celle que nous, majorité présidentielle, nous défendons, à Paris comme à Bruxelles, est une Europe qui continue à commercer avec le monde entier, mais pas n'importe quand, pas n'importe comment et pas à n'importe quel prix ; une Europe qui permet à 450 millions de consommateurs européens d'accéder dans les meilleures conditions aux produits que nous devons importer ; une Europe qui permet aux entreprises des Vingt-Sept d'exporter leurs produits et leurs savoir-faire vers tous les continents. Oui, l'Europe s'est ouverte par le passé sans être suffisamment sur ses gardes, mais nous avons pris la mesure de cette erreur et, depuis cinq ans, grâce à l'impulsion déterminante du Président de la République, nous avons entrepris la transformation de la politique commerciale de l'Union européenne.

M. Jean-Philippe Tanguy s'esclaffe.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Celle-ci défend désormais ses intérêts sans états d'âme. Elle s'est dotée d'outils puissants. Nous savons qu'il faut poursuivre et accélérer ces efforts.

M. Sébastien Jumel s'exclame.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

La vision que nous défendons est celle d'une Europe qui sait qu'elle a besoin de commercer avec le monde et qui le fait sans être lésée, d'une Europe qui défend les bons accords, ceux dont elle a besoin, et qui refuse les mauvais, comme celui avec le Mercosur, le Marché commun du Sud. Elle conclut non pas des accords qui renient nos normes sociales, sanitaires ou environnementales, mais des accords qui les protègent.

L'Europe que nous défendons sécurise ses approvisionnements sans tomber dans la dépendance. Elle sait qu'à vingt-sept, on pèse plus lourd dans les négociations que si chaque État joue sa partition individuelle.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Nous avons musclé nos outils de manière à assurer la réciprocité sur les marchés publics et à lutter contre les subventions étrangères qui faussent le marché intérieur. Disons-le clairement : nous fermerons nos marchés publics aux pays qui ferment les leurs à nos entreprises. Nous avons également créé un instrument de lutte contre la coercition économique et nous mettons progressivement en œuvre des mesures de rétention applicables à ceux qui souhaiteraient nous affaiblir.

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Vous faites de l'obstruction, monsieur le ministre !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Nous avons encore beaucoup de chantiers à mener pour renforcer les intérêts de l'Union mais nous les mènerons avec conviction et pragmatisme, comme nous l'avons fait ces dernières années – je pense par exemple au renforcement de nos capacités de contrôle, nécessaires pour veiller au respect de nos normes.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Nous avons fait sortir l'Europe de sa naïveté – et nous ne vous avons pas attendus pour le faire.

Mesdames et messieurs les députés, nous avons besoin d'Europe, d'une Europe puissante, prête à affronter le monde turbulent qui se dessine.

« Oui ! », « Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Très bien ! Nous sommes d'accord ! C'est terminé !

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité, de la francophonie et des Français de l'étranger

Si j'en crois ce que j'ai entendu aujourd'hui, seule la majorité présidentielle est à même de faire avancer l'Europe – croyez bien que je le déplore. À dix jours d'un scrutin fondamental pour l'avenir de notre pays et de notre continent, il me semblait judicieux de rappeler le vrai débat.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – «Enfin ! » sur les bancs des groupes LFI – NUPES, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans les explications de vote, la parole est à M. Paul Molac.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On nous fait donc un procès en opportunisme : les élections approchant, nous serions contre le Ceta. En ce qui me concerne, j'ai toujours été contre ! J'avais voté contre lors du précédent scrutin et je continuerai à faire de même.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

On nous dit que le Parlement européen s'est déjà prononcé en sa faveur. Certes, mais l'Europe n'est pas encore un État fédéral et nous devons donc nous aussi voter, cher Jean-Louis Bourlanges.

On nous fait remarquer que l'accord est déjà appliqué depuis cinq ans, dans une proportion de 80 %. Le Gouvernement soutient qu'il avait l'intention de nous faire voter – mais quand ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si j'ai bien compris, ce sera après les élections européennes. Visiblement, cela a l'air de tracasser un certain nombre d'entre vous ! Il n'est quand même pas très démocratique de ne pas nous permettre de voter.

Monsieur le ministre, vous vous plaignez que tout le monde soit contre. Pour ce qui me concerne, quand je crois avoir une bonne idée et que tout le monde est contre, je me pose des questions et me demande si, finalement, je n'aurais pas tort.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au fond, s'il est vrai que les Canadiens ne sont pas en mesure d'exporter vers l'Europe leur viande massivement, parce qu'ils n'ont pas les filières de bovins sans OGM, sans antibiotiques, ni hormones, mais, le jour où ce sera le cas, ne vous inquiétez pas, ils pourront nous envahir facilement. Ce que craignent nos éleveurs de bovins viande, c'est que les quartiers arrières canadiens, mal valorisés en Amérique du Nord, mangent le pauvre revenu qu'ils tirent de ces morceaux. Tel est bien le problème.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quant au lait, parlons-en ! J'habite une région bien arrosée toute l'année, où l'herbe pousse naturellement en toute saison. Nous perdons pourtant régulièrement des bovins lait, et, dans une dizaine d'années, la France sera importatrice de lait. Attention !

Cet accord est évidemment contraire à l'idée que je me fais de la souveraineté alimentaire. Je ne comprends pas pourquoi nous allons chercher de l'autre côté de l'Atlantique ce que nous sommes capables de produire chez nous – il s'agit sans doute d'une démarche estampillée développement durable et cela ne pose apparemment plus aucun problème d'émettre de grandes quantités de CO2 dans l'atmosphère. Je ne le comprends pas, et les éleveurs nous disent qu'ils ne le comprennent pas davantage.

Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, RN, LFI – NUPES, LR, SOC, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

À écouter tout ce qu'ont dit les collègues au sujet du bœuf aux hormones, j'ai cru qu'un troisième bras risquait de me pousser. J'aurais préféré être sourd qu'entendre tous les mensonges…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…que vous avez proférés en une heure de débat.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et plusieurs bancs du groupe HOR. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, GDR – NUPES, LIOT, Écolo – NUPES, et sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Une fois de plus, nous essaierons de vous convaincre que ce traité – M. le ministre l'a rappelé à juste titre –, en application depuis sept ans déjà, est favorable à tout le monde, comme nous espérions pouvoir en convaincre les sénateurs en leur en montrant les effets. Votre conception de l'Europe est toujours défensive : vous croyez qu'on va vous attaquer. Nos producteurs, au contraire, sont favorables à ce traité, qui leur permet d'exporter – voilà ce qui compte.

Nous continuerons d'essayer de vous le prouver au cours de prochains débats dans l'hémicycle. Je me réjouis que certains collègues procèdent une fois de plus à l'évaluation des effets de ce traité. En attendant, nous nous abstiendrons – nous ne sommes pas contre la démocratie, mais quelle tristesse pour la démocratie, d'entendre raconter n'importe quoi, intervention après intervention !

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs des groupes RN, LFI – NUPES, LR, SOC, GDR – NUPES, LIOT et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre, vous évoquez une tactique électoraliste, permettez-moi de vous corriger : c'est vous, en tant que membre du Gouvernement, qui adoptez une tactique contraire à l'accord passé entre les différents groupes politiques au sein de cette assemblée et censé mettre fin à l'obstruction gouvernementale pendant les journées de niche. Car ce que vous venez de faire, c'est de l'obstruction !

Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RN, LFI – NUPES, SOC, GDR – NUPES, LIOT et Écolo – NUPES. – Mme Ménard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Les groupes parlementaires disposent d'une journée par an pour inscrire ce qu'ils désirent à l'ordre du jour. Vous ne pouvez pas, monsieur le ministre, manger ainsi le temps de parole – qu'il soit aux hormones ou non.

Même mouvement.

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Vous parlez de tactique électoraliste : dès 2019, les Républicains avaient voté contre le Ceta, à une écrasante majorité. Le vote de nos collègues sénateurs n'a rien de surprenant. La seule surprise vient peut-être du fait que vous pensiez pouvoir les amadouer, mais nous, nous avons des convictions contrairement à nombre d'entre vous, qui avez changé d'écurie entre-temps.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

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Vous dites ne pas pouvoir inscrire la ratification en deuxième lecture du Ceta à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, parce que vous n'avez pas encore les chiffres des missions que vous avez lancées. Pourquoi alors aviez-vous inscrit ce texte à l'ordre du jour il y a cinq ans ? Vous ne disposez plus des chiffres que vous aviez il y a cinq ans ?

Exclamations sur les bancs du groupe RE.

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En fait, en 2019, vous aviez demandé à l'Assemblée nationale de ratifier le Ceta, parce que vous aviez une majorité absolue. La vérité, c'est qu'aujourd'hui vous avez perdu cette majorité : les Français ont refusé de vous la donner.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR, LFI – NUPES, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Puisque vous le souhaitez, parlons des chiffres. Le Ceta bénéficie, il est vrai, à certaines filières – celles du fromage ou des vins et spiritueux –, mais il faut avoir une vue d'ensemble : la balance commerciale française est déficitaire depuis l'application du traité. Entre 2017 et 2023, les exportations françaises vers le Canada ont certes augmenté de 32 %, mais celles de l'Union européenne vers le même pays ont augmenté de 60 %, soit le double. Quant aux importations,…

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…du Canada vers la France, elles augmentent de façon constante depuis 2018, tandis qu'elles baissent vers le reste de l'Union, de 15 % depuis 2022. Les exportations françaises vers le Canada ont augmenté de 33 % sur la période d'application de traité, mais les exportations françaises vers le reste du monde, ont augmenté de 42 % – sans accord de libre-échange.

Examinons pour finir la balance commerciale française avec le Canada : en 2018, au tout début de l'application du Ceta, celle-ci affichait un excédent de 343 millions d'euros. Après avoir atteint 653 millions en 2019 – je laisse de côté l'année du covid –, cet excédent n'était plus que de 180 millions d'euros en 2022. En 2023, notre balance commerciale avec le Canada est déficitaire pour la première fois, de 23 millions d'euros. Le traité fait donc plus de perdants que de gagnants. Voilà pourquoi Les Républicains s'opposent à sa ratification et voteront la résolution proposée par nos collègues communistes.

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Pour commencer, je souhaite rappeler une chose : si nous n'avons pas la majorité absolue dans cet hémicycle, pris un à un, les groupes d'opposition ont tous la minorité absolue.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et RE.

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Je rappellerai ensuite ce qu'a dit le président Bourlanges et que vous n'avez pas entendu : les dispositions du Ceta qui sont déjà appliquées – neuf dixièmes du traité – ne dépendent pas de notre accord de parlementaires nationaux, mais de celui de ceux que vous avez envoyés à Bruxelles, parmi lesquels les Socialistes et les Républicains ont voté pour le Ceta – tout en se disant contre aujourd'hui !

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Ils ont d'ailleurs négocié cet accord sous Sarkozy et sous Hollande. Un tel retournement de veste confine à l'électoralisme – je le dis comme je le pense.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et RE. – Exclamations sur les bancs des groupes LR et SOC.

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En troisième lieu, j'entends M. Chassaigne et je respecte le choix du groupe communiste,…

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…qui a déposé cette proposition de résolution par conviction : vous au moins, vous êtes sur vos rails ! Vous n'en faites pas un prétexte électoraliste, contrairement à beaucoup d'autres.

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Quelque 10 % des dispositions du traité sont à ratifier. Souffrez que des études soient menées en Europe pour qu'on puisse déterminer objectivement si l'accord est bon ou mauvais. Au moment où nous parlons, il est plutôt en faveur de la France, de nos agriculteurs en particulier.

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Un rapport sera rendu avant la fin de l'année. Nous aurons alors le débat, monsieur Chassaigne. Nous voulons, nous aussi, qu'il ait lieu,…

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…parce qu'après le vote du Sénat – totalement opportuniste au demeurant, non de la part de vos sénateurs, mais des leurs

L'orateur désigne les bancs du groupe LR

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– , il est important que le Parlement discute ces sujets.

Un dernier point, dont personne n'a parlé : cet accord bilatéral est une horreur pour vous tous, mais faute d'un tel accord, quelles règles régiraient le commerce ? Les règles de l'OMC, nettement plus défavorables à nos agriculteurs, alors cessez de raconter n'importe quoi aux Français !

Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.

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Je mets aux voix l'article unique de la proposition de résolution.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 220

Nombre de suffrages exprimés 155

Majorité absolue 78

Pour l'adoption 151

Contre 4

La proposition de résolution est adoptée.

Les députés du groupe GDR – NUPES se lèvent et applaudissent.

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L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes de l'insuffisance, de la non-décence et de l'insalubrité du logement social dans les départements et régions d'outre-mer (2456, 2640).

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La parole est à Mme Karine Lebon, rapporteure de la commission des affaires économiques.

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Les travaux de la semaine dernière en commission des affaires économiques ont démontré que vous êtes nombreuses et nombreux à être sensibles à cette crise du logement social que traversent nos territoires ultramarins – un peu moins nombreux aujourd'hui puisque je vous vois quitter l'hémicycle.

Pour la semaine dernière, je vous remercie ; pour cette semaine, je le regrette. La présente proposition de résolution a été adoptée à l'unanimité en commission, malgré quelques abstentions. Pour tenter de vous convaincre une dernière fois, j'aimerais aujourd'hui donner la parole, en toute humilité, à toutes ces femmes, à tous ces enfants, qui font les frais des graves manquements de la politique du logement social dans nos territoires ultramarins. J'espère que ces témoignages vous feront mesurer l'urgence de la situation et de la création de cette commission d'enquête.

« Madame la députée, Je me permets de me tourner vers vous, car j'ai frappé à toutes les portes et je n'ai aucune nouvelle. Cela fait un an que je suis retournée à La Réunion avec mon fils de six ans. Je me suis séparée de son père, suite à des violences psychologiques de sa part. On est retourné chez ma mère, sauf que nous sommes à sept dans la maison et, dernièrement, je commence à recevoir des avances du mari de ma mère et cela me fait très peur. Je n'ai pas d'autre endroit où aller. J'ai l'impression que je n'arrive plus à sortir de ce trou noir. Je n'y arrive plus. »

« Madame la députée, Je suis dans un logement qui va s'effondrer à cause du cyclone Belal. L'eau est entrée à l'intérieur, ce qui nous met, ma fille et moi, en danger. Je crains le passage du prochain cyclone. Jusqu'à ce jour je demande un relogement par le bailleur, mais ma demande est refusée, car je n'ai pas de contrat de travail. Comment peut-on, au XXIe siècle, laisser une famille dans des conditions déplorables, en mettant en danger la vie des habitants ? »

« Bonjour madame la députée, Je me permets de revenir vers vous car ma situation a empiré. Cela faisait dix ans que j'attendais du bailleur un logement décent pour moi et mes deux enfants. Le 19 décembre j'ai pu avoir un autre logement, mais celui-ci se trouve être pire que celui que j'avais auparavant : infiltrations d'eau dans le couloir et les chambres, fissures au plafond, pas d'eau chaude, canalisations défectueuses. Tout ceci ne fait que renforcer les problèmes de santé de mon fils de cinq ans. Ma demande de rapprochement familial n'a pas été prise en compte, ils m'ont laissée dans les hauts avec toujours plus de problèmes d'humidité. Je ne sais plus vers qui me tourner pour être aidée. Je m'inquiète surtout pour la santé de mon fils. Je vous en prie, aidez-moi. C'est le cri d'une mère désespérée. »

« Madame la députée, Je me permets de vous solliciter car la situation devient de plus en plus difficile. Je vis actuellement dans une maison du parc privé avec un loyer trop élevé, à 850 euros. Mes ressources actuelles ne me permettent plus d'assumer un loyer dans un tel type de logement, pour ma famille composée de trois enfants, à ma charge. Je suis sans emploi depuis le 31 janvier 2024, un de mes enfants a dû quitter le domicile, car il est asthmatique et la maison est trop humide. Vous ne pouvez pas imaginer ce sentiment d'une maman qui ne peut pas avoir son enfant avec elle… Mon enfant vit actuellement chez ma maman, je souhaiterais avoir un logement décent, qui pourrait accueillir mon fils. »

« Bonsoir madame Lebon, Je suis une maman avec quatre enfants. J'habite dans la maison de ma défunte grand-mère, mais il n'y a qu'une seule chambre. Ma sœur m'a frappée, j'ai des bleus sur le corps. Je souffre énormément. Aidez-moi, s'il vous plaît. »

« Madame la députée, Je suis dans une situation très compliquée en ce moment. Je vis dans ma voiture avec mes enfants, de trois ans et un an et demi. J'ai fait une demande de logement, qui date aujourd'hui de trois ans et quatre mois, et n'ai toujours aucune proposition depuis. Je ne fais qu'appeler tous les numéros mais aucune réponse. Je vais voir les bailleurs, le guichet unique, mais rien non plus, on me dit toujours d'attendre. La situation est vraiment lourde. Ce n'est vraiment pas la vie que je souhaite donner à mes enfants. Ils ont besoin d'un toit et d'une vie plus saine. J'espère que mon message sera entendu. »

« Bonjour madame Lebon, Je suis mère de deux enfants et séparée de leur père depuis la mi-janvier pour cause de violences intrafamiliales. J'ai été contrainte de quitter mon foyer avec mes filles, car même après avoir porté plainte, après la garde à vue de mon ex-conjoint, il est retourné dans la maison où nous vivions. Il faut savoir que c'était un logement social et que le bail a été fait à nos deux noms. À ce jour, je suis sans domicile, j'ai été dans des locations saisonnières financées en partie par Action logement mais, comme j'ai atteint le montant maximum de l'aide, je suis sans domicile depuis aujourd'hui. Mon ex-conjoint, lui, l'agresseur, a un endroit où se loger, tandis que moi, je dormirai sans doute dans ma voiture ce soir. Je crois que j'ai frappé à toutes les portes. Je suis toujours en attente de logement. Je trouve, en tant que victime de violences conjugales et ayant encore deux enfants mineurs, que c'est sidérant de voir qu'il est impossible de trouver un logement d'urgence pour les personnes comme nous. Je vous écris aujourd'hui car je ne sais plus vers qui me tourner. J'espère que vous apporterez une attention particulière à mon mail, car je suis vraiment désespérée. »

Mes chers collègues, il y a plus de témoignages que vous ne pouvez l'imaginer. Ne perdons pas de vue notre objectif premier : tout faire pour protéger nos concitoyens et leur assurer des conditions de vie dignes. Entendons toutes ces voix, tous ces cris du cœur, car derrière les chiffres, il y a la réalité des vies. Cette question du mal-logement est multifactorielle et met en exergue bien d'autres drames, qu'il s'agisse de la maladie, du pouvoir de vivre ou encore des violences intrafamiliales.

En permettant l'adoption de ce texte, comme vous l'avez fait la semaine dernière en commission, vous engageriez la longue marche vers la dignité des personnes les plus démunies. La création d'une commission d'enquête sur l'insuffisance, la non-décence et l'insalubrité du logement social dans les outre-mer est une étape essentielle à la résorption de toutes ces irrégularités. Nous devons dès aujourd'hui tout faire pour déterminer les responsabilités de chacun et établir une liste de recommandations visant à mettre fin à cette crise.

Prenons les choses en main. Derrière chaque demande de logement social, c'est une famille qui souffre. Vous l'avez entendu, les plus affectées par cette crise sont les femmes, les mères. Le logement social n'est pas qu'une simple affaire de chiffres ; c'est une question d'humanité. Toutes ces femmes sont confrontées à une multitude de difficultés et de menaces, qu'elles doivent articuler avec leur propre vie et celles de leurs enfants.

Prenons les choses en main. Cette proposition a été nourrie par une demande forte, émanant de nos concitoyens mais aussi des différents acteurs de la politique du logement social. La situation est en effet alarmante et mérite notre attention la plus aiguë. Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur les réalités du terrain : plus de 80 % des ménages ultramarins sont éligibles au logement social – et près de 70 % au logement très social ; pourtant, seuls 15 % d'entre eux résident effectivement dans le parc social. Ce taux très faible dissimule d'importantes disparités entre les différents territoires dits d'outre-mer : alors qu'il y a plus de 10 000 demandes de logement social en attente en Guadeloupe et plus de 12 000 en Guyane, il y en a près de 45 000 à La Réunion ! Ces retards chroniques dans la délivrance des logements sociaux sont inacceptables ; ils appellent des mesures fortes et immédiates.

Malheureusement, pour différentes raisons, les projets des bailleurs sociaux correspondent de moins en moins aux besoins réels de la population. Près de 70 % des habitants des outre-mer sont éligibles au logement très social – je le disais à l'instant –, mais cette catégorie de logement est loin d'être la priorité des bailleurs, qui préfèrent investir dans des habitations plus rentables, qu'un nombre toujours plus réduit de personnes est capable de s'offrir. Le niveau de vie des ultramarins est en effet structurellement inférieur à celui des populations vivant dans l'Hexagone, comme l'a démontré le rapport de la commission d'enquête sur le coût de la vie dans les départements et régions d'outre-mer (Drom).

La question de la non-décence des logements recouvre des enjeux d'insalubrité et de dangerosité du bâti. C'est une situation humainement intolérable : nombre d'ultramarins, ne trouvant plus de solutions d'hébergement durable, sont contraints de vivre dans la rue ou de s'accommoder d'une qualité de vie médiocre et dangereuse pour leur santé mentale et physique.

La commission d'enquête sera ainsi l'occasion d'analyser les données statistiques relatives à la non-décence du logement social, qui apparaissent fréquemment sous-évaluées, de déterminer les causes des défaillances observées dans la chaîne de livraison des logements sociaux en outre-mer, et, enfin, de s'enquérir de l'existence de malfaçons, susceptibles de mettre en lumière le manque de contrôle dont fait l'objet la construction des logements sociaux, avant qu'elle ait lieu mais aussi a posteriori.

Je tiens à insister sur l'importance de cette démarche. Les différentes réunions de travail que nous avons organisées avec les principaux acteurs concernés ont témoigné d'un large consensus concernant la création de cette commission d'enquête. L'ensemble des acteurs locaux ont souligné la nécessité de mener des actions concrètes pour remédier à cette situation alarmante.

Les causes de cette crise sont multiples et les responsabilités partagées ; reste encore à les déterminer. Dès lors, chers collègues, il est de notre devoir de répondre à cet appel. Nous ne pouvons plus ignorer les souffrances de nos concitoyens ultramarins ; nous ne pouvons plus tolérer que des familles vivent dans des conditions indignes, dans des logements insalubres et dangereux. Il est grand temps de prendre des mesures concrètes et efficaces pour améliorer la situation du logement social dans nos territoires ultramarins.

Le droit au logement est un droit humain. « La maladie la plus constante et la plus mortelle, mais aussi la plus méconnue de toute société, est l'indifférence », disait l'abbé Pierre. Aujourd'hui, soyons dignes ; soyons humains. I fo soley i lèv pou nout tout – le soleil doit se lever pour nous tous !

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES. – MM. Stéphane Travert, président de la commission des affaires économiques, et Frédéric Petit ainsi que Mme Michèle Peyron applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Disposer d'un logement est devenu, depuis la loi du 5 mars 2007, un droit opposable. Un logement est un droit mais aussi une chance, une chance pour bien grandir et pour bien vivre. En effet, vous avez entendu les différents témoignages lus par Karine Lebon : on ne peut pas étudier quand on n'a pas d'endroit où dormir ; on ne peut pas trouver un emploi quand on vit dans sa voiture ; on ne peut pas échapper aux violences conjugales quand on n'a nulle part d'autre où aller ; on ne peut pas être en bonne santé quand les murs de sa chambre sont recouverts de moisi.

En outre-mer, des dizaines de milliers d'enfants, de femmes et d'hommes sont privés de cette chance. Ils ne connaissent que l'absence de logement ou le mal-logement, où l'on s'entasse et où plusieurs générations cohabitent dans la promiscuité. Ils ne connaissent que l'indécence et l'insalubrité d'une habitation où l'eau coule du toit et où les murs s'effritent.

Mais pourquoi 15 % seulement des ménages d'outre-mer ont-ils accès à un logement social, alors que 80 % d'entre eux y sont éligibles ? Pourquoi le nombre de logements sociaux continue de baisser, alors que le nombre de demandeurs ne cesse d'augmenter ?

Alors qu'en 2019, 3 482 logements sociaux avaient été livrés en outre-mer, 2 400 seulement l'ont été en 2022. À La Réunion, le nombre de logements livrés a chuté en dix ans : il n'y en a eu que 1 613 en 2023, contre 3 386 en 2014. C'est un chiffre historiquement bas, d'autant que le nombre de demandeurs progresse en moyenne de 9 % chaque année. Au début de l'année 2024 – Karine Lebon vous l'a rappelé –, La Réunion comptait ainsi plus de 45 000 demandeurs de logement social. En Guadeloupe, la tendance est la même : le nombre de demandeurs a augmenté de 16 % entre 2022 et 2023. En Guyane, seules 16 % des demandes d'attribution sont satisfaites.

Alors pourquoi les livraisons de logements continuent-elles de prendre du retard ? Entre le financement et la livraison d'un programme, il fallait attendre deux ans et demi en 2015 ; en 2020, on a attendu quatre ans, et les délais continuent de s'allonger. En outre, pourquoi les prix des logements sociaux sont-ils plus chers en outre-mer que dans l'Hexagone, alors que la population y est plus pauvre ?

Même lorsqu'ils sont livrés, les logements sociaux sont souvent inabordables pour les populations ultramarines – je vous rappelle que le taux de pauvreté monétaire est de 2 à 4 % plus élevé en outre-mer qu'en France hexagonale. Le prix de la location au mètre carré s'élève en moyenne à 6,44 euros par mois en Guyane, contre une moyenne nationale de 6,05 euros, alors que 50 % des Guyanais vivent en dessous du seuil de pauvreté. Il atteint même 8,76 euros à Mayotte, où 77 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Enfin, il n'y a que trois départements français où le loyer moyen des logements sociaux est plus élevé qu'en Guadeloupe, alors que 34 % des Guadeloupéens vivent en dessous du seuil de pauvreté.

Alors pourquoi tant de logements neufs ou réhabilités peinent à être livrés ? Pourquoi tant sont-ils indécents ou insalubres ? Pourquoi l'État exerce-t-il si peu de contrôle sur un secteur pourtant abondamment subventionné ? « Où passe l'argent public ? » « Quand aurai-je un logement ? » « Pourrai-je avoir droit à un logement avec suffisamment de chambres pour mes enfants ? » « Quand l'organisme HLM viendra-t-il réparer les fuites ? » Voilà les questions auxquelles nous sommes confrontés, tous les jours ! Il faut y répondre : nous devons rapidement trouver des solutions à la pénurie de logements sociaux et à leur indécence.

La France, septième puissance mondiale, ne peut se satisfaire de cette situation. Elle ne peut fermer les yeux sur une situation qui affecte la vie de milliers de Françaises et de Français en outre-mer. Elle ne peut pas rester impuissante quand la pénurie de logements affecte l'éducation, la sécurité, la santé, le travail et la vie de tant de personnes en outre-mer.

Ensemble, mes chers collègues, je vous invite donc à voter pour cette proposition de résolution, pour la création d'une commission d'enquête chargée d'étudier et d'évaluer les causes du déficit de construction et de livraison de logements sociaux, mais aussi de la non-décence et de l'insalubrité du logement social neuf et réhabilité en outre-mer. C'est ensemble que nous devons chercher les réponses à ces différentes questions. La population d'outre-mer nous regarde ; elle compte sur nous, elle a besoin de nous.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES. – MM. Philippe Naillet et Jean-Claude Raux applaudissent également.

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Depuis quelques années, la France connaît une crise du logement. Partout sur le territoire, nos concitoyens peinent à trouver un logement et lorsqu'ils en trouvent un, ils se retrouvent parfois dans des logements vétustes ou trop chers. Cette réalité, d'ores et déjà sensible dans l'Hexagone, est pire – bien pire – dans les outre-mer. Dire cela, ce n'est pas être excessivement alarmiste ; c'est au contraire regarder en face la réalité que vivent une grande partie de nos concitoyens ultramarins.

Sur une population de 2,2 millions d'habitants, 600 000 sont mal logés, subissant des conditions de logement indignes. Leur quotidien est celui de logements suroccupés, où des familles s'entassent dans des appartements trop petits ; ce sont aussi les fuites d'eau, les moisissures, les installations électriques défectueuses. Plus d'un quart des ultramarins vivent ainsi dans l'inconfort et risquent de s'exposer à des problèmes de santé, voire à la ségrégation sociale.

Le logement social devrait jouer un rôle correctif et protecteur ; il n'en est rien. Comme l'a affirmé le Conseil national de l'habitat (CNH), dans ce domaine, « les outre-mer ont trente ans de retard sur l'Hexagone ». Seuls 15 % des ménages ultramarins résident dans des logements sociaux, alors que 80 % d'entre eux y sont éligibles. En conséquence, plus de 10 000 demandes sont en attente en Guadeloupe, 12 000 en Guyane et 44 000 à La Réunion.

En outre, les loyers des logements sociaux y sont plus élevés que dans le reste du territoire – là aussi, les chiffres sont éloquents. Cette situation n'est malheureusement pas nouvelle, mais ni les rapports, ni les alertes, ni les plans Logement outre-mer successifs, Plom 1 puis Plom 2,…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…n'ont permis de redresser la barre de manière tangible. Il faudrait entre 16 000 et 17 000 logements neufs par an ; or, depuis 2017, la construction annuelle de logements – publics comme privés – demeure en deçà de 13 000, et le nombre de logements sociaux financés n'a jamais dépassé 5 700.

L'État a une responsabilité dans la situation : la ligne budgétaire unique, destinée notamment au locatif social et à la résorption de l'habitat insalubre (RHI) dans les outre-mer, au lieu d'augmenter proportionnellement aux objectifs, est restée stable au cours des dernières années, même si elle a connu une augmentation en 2023.

La création d'une commission d'enquête permettra d'étudier les autres causes du déficit de construction et de livraison, et – qui sait ? – peut-être parviendra-t-elle à y trouver des remèdes. Nous y voyons également une excellente occasion de se pencher sur la dégradation de la qualité du bâti des logements sociaux, sujet mentionné par ma collègue Karine Lebon.

Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire, mais nous sommes dans le cadre d'une niche. L'essentiel, c'est que le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutiendra cette proposition de résolution.

Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et GDR – NUPES.

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Tout d'abord, je tiens à remercier la rapporteure, Karine Lebon, ainsi que l'ensemble du groupe GDR, pour le dépôt de cette proposition de résolution. Le groupe Écologiste la soutiendra pleinement, car la création d'une commission d'enquête sur le logement social en outre-mer est indispensable.

Commençons par évoquer la question de la qualité du logement. Un logement, ce n'est pas seulement un toit ; c'est aussi l'endroit où l'on veut se sentir à l'aise, où l'on voit grandir ses enfants, où l'on souhaite pouvoir inviter ses amis. Or comment le faire quand ce lieu est dégradé par l'eau, les moisissures, quand on n'est même pas certain que ses enfants grandissent en bonne santé ?

Un chiffre devrait nous alerter : la moitié des logements sociaux insalubres dans les outre-mer sont des logements neufs. Comment expliquer à nos concitoyens que le logement qu'ils ont fini par obtenir, généralement après de longs mois ou de longues années d'attente, et dans lequel ils pensent pouvoir se poser, deviendra inhabitable en quelques mois ?

Ce constat n'a malheureusement rien de nouveau. En 2008, il y a plus de quinze ans, le sénateur Henri Torre nous alertait déjà, dans un rapport d'information, sur le fait qu'outre-mer, certaines familles vivaient dans les logements sociaux insalubres, ce qui n'était pas digne de la République. Depuis, la situation s'est encore dégradée, malgré les alertes répétées des habitants, des associations, des collectivités, des élus. De trop nombreuses personnes, bien souvent des mères seules avec leurs enfants, se retrouvent dans des situations d'insalubrité qui, parfois, mettent leur vie en danger. C'est inadmissible.

Nous ne pouvons que constater une forme d'échec dans la politique de construction et d'entretien du parc de logement social dans les outre-mer. Nous craignons qu'à défaut d'une action forte, la situation ne s'aggrave encore. En effet, les territoires d'outre-mer font partie des territoires français les plus exposés aux conséquences du réchauffement climatique : cyclones, inondations, submersions marines, vagues de chaleur. Dès lors, la fragilité du parc de logements aggravera la vulnérabilité des populations les plus exposées.

Venons-en à la production de logements. Parmi les ménages des territoires d'outre-mer, 80 % sont éligibles au logement social, et 70 % au logement très social. Dans les faits, seulement 15 % de ces ménages résident dans le parc social. En effet, outre le problème de qualité, il y a un problème de quantité : il n'y a pas assez de logements pour garantir le droit d'accès à un logement digne. Si un logement n'est pas seulement un toit, comme je l'ai dit, c'est d'abord un toit. L'enjeu est donc double : améliorer la qualité du logement social et augmenter le nombre de logements sociaux.

Le logement social est un outil indispensable pour garantir à toutes et tous le droit au logement. Nous ne relèverons pas le défi d'un logement accessible et digne pour tous si nous n'attribuons pas les moyens nécessaires au logement social et aux bailleurs sociaux. Ce ne sera possible que si le Gouvernement finance, enfin, le logement social à la hauteur des besoins, non seulement outre-mer mais aussi dans l'Hexagone.

Le financement du logement social est en baisse depuis des années. Les engagements budgétaires de l'État sont en total décalage avec les objectifs de construction, ce qui doit alarmer les élus que nous sommes. À cet égard, je salue l'adoption, en commission, d'un amendement de la rapporteure qui a étendu le périmètre de la commission d'enquête : celle-ci portera non seulement sur la qualité des logements sociaux dans les outre-mer, mais aussi sur leur production ; autrement dit, elle abordera tant l'aspect quantitatif que l'aspect qualitatif.

De nombreux collègues nous disent : « Encore une commission d'enquête ! ». Premièrement, ce sujet mérite une commission d'enquête. Toutes les personnes citées par Mme la rapporteure, qui ignorent quand elles obtiendront un logement et dans quel état il sera, qui en sont réduites à attendre, méritent que l'on s'intéresse à elles et aux raisons de tels dysfonctionnements. Deuxièmement, nous devons marcher sur nos deux jambes : notre rôle de parlementaires consiste non seulement à faire la loi, mais aussi à contrôler l'action de l'État. Face à l'échec et aux coupes brutales opérées dans la politique du logement, il revient à cette assemblée de créer une commission transpartisane pour porter un regard objectif sur la politique du logement social dans les outre-mer.

Dans les territoires d'outre-mer, le Gouvernement a failli à son devoir de garantir à chacun et à chacune des conditions de vie dignes. Il convient d'apporter des solutions à la crise du logement social dans les outre-mer, et cette commission d'enquête sera, nous l'espérons, une première étape dans cette direction. C'est pourquoi le groupe Écologiste soutiendra fortement sa création.

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.

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Je souhaite d'abord dire un mot sur la forme et sur la méthode. Si le logement outre-mer, notamment la question de sa vétusté, est évidemment un enjeu fondamental – j'y reviendrai dans la suite de mon propos –, le procédé consistant à présenter une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête pour outrepasser le droit de tirage prévu en la matière et contourner ainsi les règles de notre assemblée peut susciter des interrogations.

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Sur les quatre propositions de résolution de cette nature qui nous ont été soumises depuis le début de la législature, trois ont concerné les outre-mer. C'est une bonne chose, mais je relève qu'aucun groupe politique, à l'exception du groupe GDR – qui fait en cela preuve de constance –, n'a utilisé son droit de tirage pour créer une commission d'enquête relative aux outre-mer. Nous devons nous interroger aussi sur ce point.

Un vote instituant une commission d'enquête revêt évidemment une force symbolique supérieure à une simple demande en ce sens au sein du bureau de l'Assemblée – la création est alors de droit. Néanmoins, je nous invite collectivement à repenser aux règles qui régissent notre assemblée et à nous y tenir autant que possible.

J'en viens au fond. L'insalubrité du logement outre-mer est un fléau ; nous le savons. Dans votre rapport sur la proposition de résolution, madame la rapporteure, vous estimez à 16 % environ la proportion de logements visés par cette commission d'enquête. Notre collègue Guillaume Vuilletet, à qui le Premier ministre Édouard Philippe avait confié une mission à ce sujet au cours de la précédente législature, l'estimait même à 20 %. Cette situation est inacceptable, et nous devons tout mettre en œuvre pour y remédier.

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Vous n'avez rien fait depuis Édouard Philippe !

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L'insalubrité prend des formes très différentes, car elle tient à des problèmes divers : logement spontané, indivision successorale, squat, suroccupation, marchands de sommeil. Le logement social n'est pas épargné. Dans les outre-mer, les difficultés s'ajoutent les unes aux autres : l'indisponibilité foncière et le caractère parfois inadapté des normes de construction font peser des contraintes supplémentaires, qui entraînent de telles logiques de suroccupation ou de surexploitation des logements par des marchands de sommeil souvent dénués de tout scrupule. En matière de logement, les outre-mer concentrent toutes les difficultés possibles.

Nous connaissons les solutions : construire massivement du logement neuf ; mener un programme très ambitieux de rénovation. Il faut également que nous nous interrogions sur la cherté du logement dans les outre-mer. À Saint-Denis de La Réunion, les loyers atteignent le même niveau qu'à Lyon, alors que les niveaux de vie ne sont en rien comparables.

J'ai écouté attentivement votre intervention en commission, madame la rapporteure. Je l'ai trouvée très claire et j'ai beaucoup apprécié que vous n'attribuiez pas toute la responsabilité à l'État. Cette commission d'enquête doit être l'occasion de souligner que nous devons collectivement – État, collectivités, élus locaux, acteurs privés de la construction, monde associatif – nous saisir du sujet et avancer pour résoudre les problèmes.

J'ai exprimé un petit regret à propos de la méthode, mais le sujet est tellement important et prégnant pour nos concitoyens d'outre-mer que le groupe Renaissance s'abstiendra. Sachant pertinemment que la proposition de résolution sera adoptée, nous nous mobiliserons et nous impliquerons très fortement dans les travaux de la commission d'enquête.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme la rapporteure et M. Jiovanny William applaudissent aussi.

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Nous examinons une proposition de résolution qui pointe une nouvelle fois l'un des grands échecs d'Emmanuel Macron : la politique du logement en France. Cet échec n'épargne aucun de nos territoires, mais les départements d'outre-mer sont sans doute parmi les plus exposés à cette situation explosive. Ils concentrent les difficultés économiques et affichent un coût de la vie sans commune mesure avec ce que nous ressentons en métropole. À cette situation s'ajoutent de graves problèmes migratoires sur fond de violence, qui déstabilisent certaines sociétés ultramarines. La Guyane et, surtout, Mayotte en sont la triste illustration.

À cet égard, je souligne le lien d'affection très fort qui lie la présidente de notre groupe, Marine Le Pen, et les Français d'outre-mer, qui l'ont d'ailleurs largement plébiscitée en 2022, lors de la dernière élection présidentielle. Le Rassemblement national souhaite que les départements d'outre-mer retrouvent l'estime et la considération qui leur reviennent. Il entend les placer au cœur d'une politique de développement à la hauteur des enjeux du XXIe siècle, y restaurer l'ordre et mettre fin aux vagues migratoires qui les menacent.

La proposition de résolution tend à créer une commission d'enquête sur l'indécence du logement social dans nos départements d'outre-mer. Il est vrai que la dégradation accélérée du parc social neuf soulève des questions. Elle met notamment en lumière le manque de sérieux ou de professionnalisme de promoteurs immobiliers qui veulent à tout prix construire des logements sociaux vite et à moindre coût, alors même que ces projets sont financés par des fonds publics. Sur ce point, nous vous suivons parfaitement : il est inacceptable que l'argent public soit mal investi dans de tels projets de logements sociaux neufs. La commission d'enquête dont vous proposez la création devrait permettre de clarifier la responsabilité des acteurs du logement social, qu'il s'agisse des bailleurs sociaux, de l'État ou des maîtres d'ouvrage.

Cependant, nous souhaitons émettre une réserve sur la notion de décence, dès lors que la loi « climat et résilience » associe désormais la performance énergétique à sa définition. Le Rassemblement national alerte sur la fiabilité des nouvelles méthodes avec lesquelles sont réalisés les diagnostics de performance énergétique (DPE) ; les critères sont uniformes en métropole et dans nos départements d'outre-mer, où le climat est pourtant bien différent. Pour notre part, nous souhaitons revenir à la définition juridique initiale de la décence, en retenant en premier lieu des critères tels que le confort et les prestations réelles du logement.

D'autre part, le bien-être dans le logement social ne peut se limiter, selon nous, au seul critère de décence. L'insécurité qui mine le parc social – compte tenu de la prévalence d'un trafic de drogue devenu endémique et de l'explosion de la délinquance – et l'immigration sont les deux tabous occultés par les bailleurs sociaux. Nos compatriotes d'outre-mer qui vivent dans ces quartiers sont excédés par la passivité du Gouvernement, qui refuse de s'y attaquer.

Depuis des années, le Rassemblement national dénonce le laxisme face à l'explosion des incivilités, de la délinquance et du trafic de drogue pratiqué à la vue de tous, qui gangrènent le parc social et pourrissent la vie des habitants de ces quartiers, notamment dans nos outre-mer. Depuis des années, Marine Le Pen demande que les bailleurs sociaux fassent appliquer strictement le règlement intérieur dans chaque résidence et expulsent systématiquement tout locataire qui refuse de s'y soumettre. Les expulsions médiatisées de quelques délinquants restent l'exception. Les Français doivent savoir que les rares délinquants expulsés continuent malheureusement à bénéficier du droit au logement opposable (Dalo) et qu'ils sont systématiquement relogés dans les mêmes territoires par les préfets. Il serait temps de mettre fin à cette aberration.

Jordan Bardella l'a rappelé, nous revendiquons l'application de la priorité nationale, plébiscitée par 70 % des Français, dans l'attribution des logements sociaux partout en France. Cela concernerait bien évidemment les départements d'outre-mer. Selon le rapport du préfet Michel Aubouin, 35 % des immigrés vivent dans un logement social, contre seulement 11 % des Français non immigrés. En l'état actuel, les critères d'attribution sont très favorables aux immigrés entrants, compte tenu de leurs faibles revenus et de leur structure familiale,…

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…alors que 2,5 millions de Français sont en attente d'un logement social. Chers collègues de la NUPES et de la minorité présidentielle, pourquoi donc la priorité nationale ? Tout simplement parce que ce sont les Français qui ont financé par leurs efforts, leurs impôts et leurs cotisations, la construction d'un parc social…

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Ce sont les locataires qui financent le logement social !

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…dont ils sont aujourd'hui injustement écartés. Tout étranger qui arrive en France doit être en mesure de s'assumer financièrement ; en aucun cas, il ne doit être une charge pour notre système social.

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Essayez donc, chers collègues de la NUPES, d'obtenir un visa permanent pour les États-Unis sous administration Biden, pour le Canada de Trudeau ou pour l'Australie sous gouvernement travailliste ! Vous constaterez que le critère de solvabilité est la première exigence que doivent satisfaire les candidats à l'immigration. En outre, ces États n'hésitent pas à raccompagner systématiquement à la frontière tout étranger dès le moindre écart de conduite.

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Ces États ne sont nullement xénophobes ; ce sont simplement de grandes démocraties habitées par le bon sens. Le très laxiste gouvernement Attal ferait bien de s'en inspirer. La France, hier grande nation, aujourd'hui engagée dans la voie du déclin après quarante ans d'une politique irresponsable, n'a plus les moyens d'être un guichet social universel.

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En réalité, vous vous en fichez du logement !

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En métropole et outre-mer, le parc social doit offrir des conditions de logement dignes, tant du point de vue du confort que de celui de la tranquillité – deux aspirations selon nous indissociables. Malgré tout, nous voterons pour la proposition de résolution.

M. Christophe Barthès applaudit.

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Avoir un logement est une question de dignité. En outre-mer, les problèmes dans ce domaine – nombre insuffisant des logements, leur caractère indécent voire insalubre, foncier rare ou encore coûts de construction de plus en plus élevés – sont anciens. Les chiffres sont connus, mais les répéter, selon la méthode Coué, aidera peut-être les membres du Gouvernement à saisir la gravité de la situation.

La Fondation Abbé Pierre estimait début 2023 le nombre de personnes mal logées dans les outre-mer à 600 000 sur 2,2 millions d'habitants, soit plus d'un habitant sur quatre. Selon la Fondation, l'habitat indigne représente 600 000 logements en France ; un quart d'entre eux, soit 150 000, sont situés dans les outre-mer où les populations sont soumises à des conditions de vie très difficiles et dangereuses pour leur santé et leur sécurité. Pour l'année 2020, le Haut Comité pour le droit au logement (HCDL) a comptabilisé 67 820 demandes de logement social dont 49 % uniquement à La Réunion. Encore ce chiffre n'inclut-il pas Mayotte ; il est d'ailleurs anormal que nous ne disposions pas de données pour ce département. .

Mme Clémence Guetté applaudit

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Plus de 10 000 demandes de logement social seraient en attente de traitement en Guadeloupe, 12 000 en Guyane et 44 000 à La Réunion.

L'éloignement des fournisseurs de matières premières, situés pour la plupart en Europe, renchérit les coûts de la production de logements. L'acheminement des produits vers les différents territoires dépend en effet du fret maritime et du contexte géopolitique.

Oui, une commission d'enquête est tout à fait justifiée pour s'informer en profondeur sur les différents paramètres qui empêchent les ultramarins de disposer d'un toit décent au-dessus de leur tête. Comme l'a souligné ma collègue Karine Lebon, rapporteure de cette proposition de résolution : « Avec les pouvoirs exorbitants de cette commission d'enquête, nous serons enfin en mesure d'établir les responsabilités des acteurs de la politique du logement social dans nos territoires. »

À La Réunion, depuis début 2024, pas moins de 900 emplois ont été supprimés selon l'intersyndicale du bâtiment et travaux publics (BTP) de l'île. Du jamais vu ! Des dizaines d'entreprises sont en redressement judiciaire. Le BTP est à l'agonie, entraînant le désespoir chez les chefs d'entreprise – abandonnés à leur sort et étranglés par les charges –, les salariés mais aussi, et surtout, les demandeurs de logements, obligés de rester dans des logements indécents et surpeuplés.

La commission d'enquête va permettre de dégager des pistes de travail et des propositions d'action pour un « mieux logement » en outre-mer. Je rappelle que la proposition de résolution tendant à sa création a été adoptée à l'unanimité en commission des affaires économiques le 22 mai dernier ; je salue l'élargissement de son champ d'intervention aux raisons de l'insuffisance des logements en outre-mer. Les thèmes des normes de construction, de l'approvisionnement en matières premières dans nos bassins régionaux respectifs ainsi que des positions de monopole devront être abordés. Aucun sujet ne doit être tabou.

S'il ne s'agit pas d'une commission d'enquête à charge, elle devra identifier, avec tous les acteurs du logement, les freins qui empêchent d'offrir un toit à tous nos citoyens. Ma collègue Karine Lebon et les parlementaires signataires de cette proposition de résolution ne montent pas une opération politique. Dans nos permanences, nous sommes tous confrontés à la réalité : nous avons peu de réponses à apporter aux citoyens qui viennent nous demander de les aider à trouver un logement. Que répondre à ces désespoirs ? Que répondre à ces détresses ? Que répondre à ces personnes qui se retrouvent sans toit ou qui sont contraintes de dormir dans leur voiture ?

Nous ne pouvons pas rester insensibles et nous avons perdu trop de temps. Si rien n'est fait rapidement, les gens continueront à s'entasser dans des logements indécents voire insalubres, la promiscuité engendrant au surplus tensions et violences intrafamiliales. La scolarité des enfants sera compromise, des entreprises mettront la clé sous la porte, des centaines d'emplois seront supprimés, ajoutant de la pauvreté à la pauvreté, sans même évoquer les impacts négatifs sur nos économies.

Le groupe LFI – NUPES et moi-même adhérons entièrement à cette proposition de création d'une commission d'enquête.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

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J'espère que l'unanimité obtenue en commission des affaires économiques va également se manifester dans cet hémicycle car il s'agit, je le répète, de la dignité de nos concitoyens. Aret totoche anou – arrêtez de nous bousculer ! Aucune voix ne devrait manquer. Nou tiembo, nou larg pa – nous tenons bon, nous ne lâchons pas !

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.

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Si les députés Les Républicains reconnaissent l'intention louable de la proposition de résolution présentée par le groupe GDR – NUPES, cette initiative suscite toutefois des inquiétudes. Les groupes politiques issus de la NUPES multiplient les demandes de commissions d'enquête à un rythme effréné. Nous ne pouvons nous en accommoder. Cette prolifération sature les ressources humaines de l'Assemblée nationale.

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Il est temps de nous interroger sur la pertinence et l'efficacité de ces multiples commissions.

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C'est tout ce que vous avez à dire que le sujet ?

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En effet, en dispersant ainsi nos efforts, nous risquons de perdre de vue les priorités constitutionnelles et législatives essentielles. La création d'une commission d'enquête nécessite des ressources considérables ; elle mobilise le temps et l'énergie des services de l'Assemblée et des députés. .

Mme Clémence Guetté proteste

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Dès qu'on n'est pas d'accord avec vous, vous hurlez et invectivez. Ce n'est pas le foutoir ici !

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Comme je le disais, la création d'une commission d'enquête mobilise des ressources considérables. Ne multiplions pas sans discernement ces procédures au détriment de la qualité de nos travaux !

En outre, pour le groupe LR, focaliser cette commission d'enquête sur les départements et régions d'outre-mer relève d'une approche trop restrictive. En effet, l'indécence du logement social n'est pas un problème réservé à ces seuls territoires. Il s'agit, au contraire, d'un fléau d'ampleur nationale qui touche de nombreuses régions de notre pays. Limiter le champ de l'enquête aux outre-mer revient à ignorer la réalité vécue par de nombreux citoyens en métropole qui souffrent également de conditions de logement indignes. L'indécence du logement social frappe de nombreuses familles à travers notre pays et il est impératif de traiter cette question de manière globale. Il faut s'attaquer à ses causes structurelles à l'échelle nationale : problèmes de financement et de mauvaise gestion, vétusté et manque d'isolation des bâtiments, urbanisation inadéquate mais aussi absence de rotation et difficultés d'attribution. Ces problèmes se retrouvent partout et appellent des solutions cohérentes et globales. Une approche nationale permettra non seulement de mieux comprendre les racines de ces problèmes mais aussi de proposer des solutions opérationnelles et bénéfiques à l'ensemble de nos concitoyens. C'est la seule voie pour espérer améliorer réellement les conditions de vie des habitants de logements sociaux.

La création d'une nouvelle commission d'enquête sur le logement ne paraît pas constituer la solution la plus appropriée et la plus efficace, d'autant que nous disposons déjà de propositions concrètes et pertinentes en la matière. J'en veux pour illustration la proposition de loi de notre collègue Thibault Bazin, examinée lors de notre dernière niche parlementaire : pragmatiques et complète, elle apporte des solutions adaptées aux besoins de nos concitoyens et répond à l'urgence en matière de logement. Elle articule des mesures visant à augmenter l'offre de logements sociaux, à améliorer leur qualité et à assurer une gestion plus transparente et plus efficace des ressources allouées. Elle inclut des réformes structurelles et des investissements ciblés.

En conclusion, nous devons privilégier une approche cohérente et efficace en concentrant nos efforts sur des actions pertinentes et bénéfiques. Plutôt que de nous disperser dans une multitude de commissions, travaillons ensemble pour élaborer et mettre en œuvre des solutions législatives concrètes qui amélioreront réellement la vie de tous nos concitoyens tant en outre-mer qu'en métropole !

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La situation du logement social dans les régions d'outre-mer est alarmante et requiert une attention toute particulière. Nous remercions la rapporteure d'avoir mis en lumière ce sujet important. L'indécence des logements sociaux affecte la dignité de nos concitoyens ultramarins.

Les territoires ultramarins présentent des défis uniques en matière de logement social. Leur statut insulaire et archipélagique limite considérablement la disponibilité du foncier, compliquant ainsi la construction de nouveaux logements. De plus, la topographie complexe et les risques naturels importants auxquels ils sont exposés majorent les coûts de construction tout en restreignant les zones constructibles. Cette combinaison de facteurs appelle un effort continu de construction, de réhabilitation et d'adaptation du parc immobilier pour répondre aux besoins de la population.

La crise du logement social dans les régions d'outre-mer est exacerbée par la prévalence élevée de logements indignes, principalement dus à l'habitat informel, sans autorisation ni titres de propriété. Les retards fréquents dans la livraison des logements sociaux, liés aux contraintes géographiques et aux pénuries de matériaux, aggravent la situation. Le contrôle de qualité insuffisant contribue aux malfaçons et compromet la durabilité des logements. Les évolutions démographiques renforcent le besoin de logements sociaux mais seule une fraction des ménages éligibles en bénéficie actuellement.

À titre d'exemple, certains territoires, comme Saint-Barthélemy dans la circonscription de mon collègue Frantz Gumbs, souffrent d'une crise du logement sévère. Cette situation affecte principalement les fonctionnaires ; elle a des répercussions sur d'autres services publics tels que l'éducation, la poste et le secteur de la santé, où le manque de personnel est criant.

L'État a cependant mis en place des initiatives pour faire face à cette crise. Le Gouvernement a accordé la priorité à l'amélioration des conditions de logement en accélérant la construction et la réhabilitation des logements privés et sociaux. Les plans logement outre-mer, par exemple, visent à construire et à réhabiliter des logements en tenant compte des spécificités locales. Le premier plan, couvrant la période de 2015 à 2019, avait pour objectif la construction de 10 000 logements par an. Le second plan, de 2019 à 2022, s'est concentré sur des objectifs spécifiques, y compris des expérimentations en Guyane et à Mayotte pour lutter contre l'habitat indigne et informel, en accordant une attention particulière aux populations vulnérables. Soulignons l'augmentation de 32 % des crédits alloués à cette ligne budgétaire depuis 2020, augmentation qui les porte en 2024 à 291 millions d'euros.

Plusieurs initiatives ont été lancées par les acteurs du logement pour opérer plus efficacement en outre-mer. En janvier 2019, le groupe Action logement a ainsi mobilisé un plan d'investissement volontaire de 1,5 milliard d'euros destiné à l'amélioration de 17 000 logements et à l'aide à l'accession sociale de 25 000 autres. L'Union sociale pour l'habitat outre-mer (Ushom) a également contribué à des projets de rénovation urbaine, de construction de logements sociaux et de réhabilitation de l'habitat existant.

Des mesures spécifiques ont été mises en place pour améliorer la qualité et la durabilité des constructions, notamment à travers le programme d'action pour la qualité de la construction et la transition énergétique (Pacte) en outre-mer, favorisant la formation des professionnels et l'utilisation de matériaux adaptés.

Le Gouvernement a appuyé la construction de logements sociaux en outre-mer avec 780 millions d'euros de prêts d'Action logement pour 2023-2027, étendus à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon. De plus, le crédit d'impôt versé pour les opérations de rénovation et de réhabilitation des logements sociaux en outre-mer a été élargi à leur rénovation, hors quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), facilitant la modernisation des infrastructures résidentielles ultramarines.

S'il reste beaucoup à faire pour améliorer la situation, le sujet a déjà fait l'objet d'un rapport sénatorial en 2021 et d'un rapport de la Cour des comptes en 2020. Ainsi, bien que nous reconnaissions son importance, nous ne pouvons soutenir la création d'une nouvelle commission d'enquête à l'heure où les services de l'Assemblée sont débordés, étant observé que le groupe GDR – NUPES a déjà utilisé, le 12 mars 2024, son droit de tirage pour demander la création d'une commission d'enquête sur la politique française d'expérimentation nucléaire.

Nous espérons que les avancées législatives nécessaires pourront être intégrées dans le projet de loi récemment présenté sur le logement social. Ensemble, nous devons continuer à œuvrer pour améliorer les conditions de vie de nos concitoyens ultramarins et garantir à chacun un logement décent et durable. Nous privilégions une réponse à la crise du logement social plutôt qu'une commission d'enquête dont nous connaissons déjà les conclusions. C'est pourquoi la grande majorité du groupe Démocrate (MODEM et indépendants) s'abstiendra sur ce texte.

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Je tiens tout d'abord à saluer le travail sérieux de Mme Lebon, rapporteure de cette proposition de résolution, qui a permis des débats brefs et constructifs en commission des affaires économiques, laquelle a adopté ce texte le 22 mai dernier.

Nous le savons, les inégalités de vie entre l'Hexagone et les territoires ultramarins sont importantes, parfois sous-estimées et souvent oubliées. Si elles concernent de nombreux domaines tels que l'éducation, la santé ou l'accès aux services publics, elles sont particulièrement fortes en matière de logement. En effet, alors que 80 % de la population ultramarine est éligible au logement social, la part des ménages hébergés dans les logements sociaux est de 15 %.

Nous comptons plus de 10 000 demandes de logement social en attente en Guadeloupe, 12 000 en Guyane, et plus de 44 000 à La Réunion. Quand ils sont livrés, ces logements sont offerts à des prix souvent plus élevés que dans l'Hexagone, en dépit d'un niveau de vie pourtant inférieur, et trop souvent inconfortables, insalubres voire dangereux, les autorités étant parfois contraintes de prendre des arrêtés de péril sur ces logements neufs. Au-delà des problèmes logistiques, quantitatifs ou qualitatifs, on fait également face à l'enjeu des dégradations liées à des conditions climatiques difficiles et à une intensification des catastrophes naturelles.

Un nouveau plan Logement outre-mer, dans la continuité du précédent, est ainsi en préparation afin de répondre aux nombreux défis de la politique du logement. Il devra servir quatre grands objectifs : accélérer la production du logement locatif social et le rendre plus accessible, dans le respect de la mixité sociale ; intervenir de façon volontaire sur l'habitat privé, de manière à augmenter et à améliorer le parc destiné aux ménages modestes et très modestes ; améliorer la résilience des territoires face au changement climatique ; accompagner chaque territoire dans l'application de ses mesures phares.

La commission d'enquête ici demandée aurait pour objectif d'étudier et d'évaluer les causes du déficit de construction et de livraison du logement social neuf et réhabilité dans les territoires ultramarins, ainsi que les causes de l'indécence et de l'insalubrité d'un trop grand nombre de ces logements. Le groupe Horizons et apparentés regrette la multiplication des commissions d'enquête, le groupe Gauche démocrate et républicaine ayant déjà fait usage de son droit de tirage en la matière. Cependant, nous comprenons l'intérêt d'une telle proposition de résolution et saluons l'extension de son champ au volet de la production du logement social en outre-mer, votée en commission des affaires économiques. Si notre groupe fait pleinement confiance à l'expertise des services de l'État et à leur mobilisation, aux côtés des collectivités ultramarines et en lien avec elles, pour établir un plan ambitieux et à la hauteur des enjeux, il nous semble également pertinent de prévoir la possibilité d'étudier et d'identifier les meilleures mesures à prendre afin d'améliorer la situation dans les territoires ultramarins.

Le groupe Horizons et apparentés votera donc en faveur de cette proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête.

Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.

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Sur l'article unique de la proposition de résolution, je suis saisie par le groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Philippe Naillet.

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Je tiens tout d'abord à remercier ma collègue Karine Lebon et le groupe GDR pour cette proposition de résolution de commission d'enquête sur le logement outre-mer.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.

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La situation actuelle est terrible pour les populations ultramarines. Nous subissons la double peine parce que non seulement il n'y a plus de logement disponible – j'y reviendrai – mais lorsqu'on en trouve un, le risque est qu'il soit insalubre, délabré voire indécent. Les familles de nos territoires subissent les conséquences de la crise, qui est réelle : je rappelle que 70 % des ménages sont éligibles à un logement très social. En outre-mer, comme cela a déjà été dit, 600 000 personnes – soit près d'un tiers puisqu'on compte 2,2 millions d'habitants dans ces territoires – sont mal logées selon la Fondation Abbé Pierre.

Je l'ai dit, l'obtention d'un logement relève du miracle. Je citerai uniquement le cas de La Réunion où 1 613 logements ont été livrés en 2023 pour plus de 45 000 demandes. Plus personne ne parle de parcours résidentiel – devenu une chimère chez nous.

M. Perceval Gaillard applaudit.

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Pour ajouter aux difficultés de nos familles – cela a déjà été dit mais il faut le répéter à nos collègues de l'Hexagone, notamment ceux de la majorité –, les loyers constatés sont comparables à ceux des grandes métropoles régionales de l'Hexagone comme Lyon, Lille ou Montpellier alors que nous savons tous que les indicateurs socio-économiques en outre-mer sont fortement dégradés.

Les plans Logement outre-mer 1 et 2 n'ont pas tenu leurs objectifs, ni en matière de construction ni en matière de réhabilitation. Au cours de ces dernières années, de nombreux rapports et amendements ont été adoptés pour faciliter la production de logements sociaux ou traiter de l'habitat indigne. Malgré tout, la situation a empiré.

La crise du logement a aussi des conséquences économiques puisqu'elle touche les entreprises du bâtiment et des travaux publics qui traversent, en ce moment même, une période de grandes turbulences. Ainsi, toujours à La Réunion, plus de 1 000 emplois ont été supprimés dans ce secteur depuis le début de l'année seulement.

Je reviens aux familles – car c'est bien d'elles qu'il s'agit. Lorsqu'elles n'ont pas de logement ou habitent un logement indécent ou suroccupé, elles sont incapables de se projeter. On assiste alors aussi, souvent, à des cas de déscolarisation précoce mais aussi parfois – voire souvent – à des situations de violences intrafamiliales. À ces conséquences sur le plan social s'ajoutent des effets sur la santé physique – je pense au saturnisme ou à l'asthme – et mentale.

Cette commission d'enquête doit nous permettre de faire le bon diagnostic, c'est-à-dire d'identifier les vraies causes des blocages qui nous ont menés à cette situation, mais surtout de trouver les pistes pour agir maintenant – je dis bien maintenant – avec des objectifs quantitatifs mais aussi qualitatifs. Comment adapter les logements au vieillissement de nos populations sachant qu'en outre-mer on choisit de maintenir nos seniors à domicile ?

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Comment construire différemment en milieu tropical – en utilisant par exemple le bambou, les galettes de chanvre, le bois de goyavier ou de cryptomeria ? Il faut aussi structurer les filières. Nos populations ne veulent pas seulement être logées, c'est-à-dire trouver un toit de façon temporaire, mais habiter, c'est-à-dire vivre bien au milieu des autres. Nous devons donc contribuer à assurer une mixité sociale dans un environnement serein. Voilà quel est l'enjeu pour nous, progressistes.

Au moment où le Plom 3 est en cours de finalisation, je profite de cette tribune pour rappeler qu'il n'est pas normal que les acteurs ultramarins ne soient toujours pas représentés dans des instances nationales telles que l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) ou l'Agence nationale de l'habitat (Anah).

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Alors que nous n'avons pas traité le mal-logement ni réduit les disparités, j'aimerais profiter de l'occasion que m'offre l'examen de ce texte pour évoquer une autre grande injustice subie par nos populations : les prix de l'immobilier ont plus que doublé, ce qui n'est pas le cas des revenus, si bien qu'il est de plus en plus difficile pour un ultramarin de devenir propriétaire.

À l'origine, cette proposition d'enquête parlementaire se limitait à la question du logement insalubre et non décent dans l'ancien comme dans le neuf – car, oui, nous sommes confrontés à de nombreux problèmes d'insalubrité et de malfaçons sur le logement neuf, comme cela a été évoqué. Notre groupe soutient pleinement la proposition de nos collègues et nous prendrons toute notre part dans les travaux de la commission d'enquête.

Je conclurai en soulignant que nous avons été heurtés par les propos tenus par les Républicains au sujet de l'opportunité de cette commission d'enquête eu égard à la charge de travail de notre assemblée. Comme l'a très bien dit notre collègue Thierry Benoit en commission, le travail de contrôle et d'évaluation que permettent les commissions d'enquête est fondamental. En luttant contre le mal-logement, on s'attaque, tout simplement, au creusement des inégalités.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, GDR – NUPES et Écolo – NUPES. – Plusieurs députés du groupe SOC se lèvent pour applaudir.

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Je tiens tout d'abord à remercier chaleureusement les ministres délégués Guillaume Kasbarian et Marie Guévenoux qui sont absents ce matin !

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

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Ils affichent ainsi toute leur considération pour la situation du logement dans les outre-mer. Plus sérieusement, croyez bien que je regrette sincèrement leur absence.

Je souhaite à présent adresser de vrais remerciements à l'administratrice, Mme Cusan, qui a travaillé sur cette proposition de résolution et nous a beaucoup soutenus

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES

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ainsi qu'à l'ensemble de la commission des affaires économiques mais aussi à mon collaborateur pour la gestion de ce dossier.

Par ailleurs, je veux répondre au collègue LR qui expliquait que l'Assemblée faisait face à un problème en matière de ressources humaines. Il a raison et c'est vrai que nos commissions d'enquête mobilisent des personnels mais ce n'est pas à la population, ni à nous, parlementaires, de faire les frais du manque d'effectifs. Au passage, je sais que l'Assemblée recrute actuellement des fonctionnaires – je salue cette très bonne nouvelle.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et SOC.

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Je précise qu'il est absolument crucial de limiter le champ d'action de cette commission d'enquête car, comme vient de le dire mon collègue Philippe Naillet, il existe des spécificités dans ces territoires, ce qui conduit à poser certaines questions. Comment construire en milieu tropical ? Quels matériaux doit-on utiliser ? Nous devons également nous demander pourquoi le logement social vieillit beaucoup plus vite dans les outre-mer que dans l'Hexagone. Nous disposons d'ailleurs d'outils de financement spécifiques comme la ligne budgétaire unique (LBU). Cette commission d'enquête s'attachera donc à étudier les particularités de l'outre-mer, comme l'éloignement ou le coût du fret, un facteur qui explique pourquoi les constructions y sont beaucoup plus chères que dans l'Hexagone. Il est très important que nous puissions analyser ces enjeux en profondeur.

Au passage, il est un peu contradictoire d'estimer, d'un côté, que nous ne devons pas lancer de commission d'enquête faute de moyens suffisants et, de l'autre, que si nous en instaurons une, elle doit porter sur l'ensemble du territoire national, aussi bien l'Hexagone que les outre-mer. Il serait bon de faire preuve de cohérence.

Je veux aussi répondre à notre collègue du groupe Démocrate que nous ne connaissons pas à l'avance les conclusions de la commission d'enquête – sinon il ne serait pas nécessaire d'enquêter. En outre, les rapports que vous avez cités datent d'il y a deux ou trois ans. Or la situation a beaucoup évolué depuis.

Pour conclure, et après avoir remercié le groupe GDR d'avoir inscrit ce texte à l'ordre du jour, je veux préciser que si j'ai tenu à citer autant de témoignages, peut-être un peu pénibles à entendre, c'est parce que j'ai voulu faire mentir l'abbé Pierre – encore lui – qui disait : « Les hommes politiques ne connaissent la misère que par les statistiques. On ne pleure pas devant les chiffres. » Un toit, c'est tout.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.

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Je me permets d'apporter une précision concernant l'organisation des séances. S'agissant de l'examen d'un texte qui tend à créer une commission d'enquête, il est d'usage qu'aucun ministre ne soit présent pendant les débats car c'est une question interne à l'Assemblée nationale.

Rappel au règlement

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La parole est à M. Pierre Cazeneuve, pour un rappel au règlement.

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Il se fonde sur l'article 56, alinéa 1. Je voulais simplement préciser que les ministres n'avaient pas le droit d'être présents lors de l'examen d'un texte tendant à créer une commission d'enquête.

« C'est un usage ! » sur les bancs du groupe GDR – NUPES.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 93

Nombre de suffrages exprimés 81

Majorité absolue 41

Pour l'adoption 81

Contre 0

L'article unique est adopté à l'unanimité, ainsi que l'ensemble de la proposition de résolution.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo-Nupes.

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Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Discussion de la proposition de loi constitutionnelle visant à constitutionnaliser la sécurité sociale ;

Discussion de la proposition de loi visant à assurer une meilleure réussite scolaire des jeunes ultramarins grâce à l'apprentissage des langues régionales ;

Discussion de la proposition de loi visant à garantir la prise en charge intégrale des soins liés au traitement du cancer du sein par l'assurance maladie ;

Discussion de la proposition de loi constitutionnelle tendant à la création d'une commission permanente aux collectivités territoriales et aux outre-mer :

Discussion de la proposition de loi visant à réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 heures.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra