La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quatorze heures.
Être une femme aujourd'hui en France, c'est, grâce à la détermination de générations de féministes, voir enfin la liberté de disposer de son corps inscrite dans la Constitution !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Et ce, malgré votre opposition initiale, malgré l'appel présidentiel au réarmement démographique !
Mais c'est aussi voir ce droit entravé : suppression de centres réalisant des interruptions volontaires de grossesse (IVG), pénurie de pilules abortives, inutile deuxième clause de conscience.
Être une femme aujourd'hui en France, c'est porter plainte pour viol et affronter des violences supplémentaires – fuites policières et médiatiques – et, dans 80 % des cas, un classement sans suite.
Être une femme aujourd'hui en France, c'est voir la France s'allier à Victor Orban pour bloquer une directive européenne contre le viol.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Être une femme aujourd'hui en France, c'est dire avec Judith Godrèche : « Je parle, mais je ne vous entends pas ». Pire, c'est entendre Macron encenser Depardieu, après avoir blanchi Darmanin. .
Exclamation sur les bancs du groupe RE
Être une femme aujourd'hui en France, c'est vous entendre, Aurore Bergé, lancer une mission pour c« omprendre les mécanismes à l'œuvre » dans les violences sexuelles, pendant que vous attaquez les associations qui luttent depuis des années contre ces violences. Elles réclament des milliards ? Vous rabotez de 10 % le budget égalité femmes-hommes et vous vous amusez à menacer leurs subventions pour faire plaisir aux soutiens inconditionnels d'Israël.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Être une femme aujourd'hui en France, c'est accueillir seule son enfant – faute de congé paternité égalitaire –, arrêter de travailler– faute de place en crèche – et vous entendre présenter comme des progrès : un congé parental au rabais, un service public fantôme, un groupe de travail sur les mères isolées alors que vous passez votre temps à les stigmatiser.
Être une femme aujourd'hui en France, c'est être infirmière, caissière, professeure, assistante maternelle, aide à domicile, accompagnante d'élèves en situation de handicap (AESH) et vous entendre rabâcher votre index égalité au lieu de revaloriser les métiers féminisés ! C'est occuper 60 % des emplois rémunérés au salaire minimum de croissance (SMIC) et des contrats à durée déterminée (CDD), 78 % des emplois à temps partiels et vous voir reculer la retraite, geler les salaires, démanteler le code du travail, saccager la protection sociale ! Ce vendredi 8 mars, les femmes se lèvent et…
Mme la Présidente coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est épuisé.– Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.
Vous mélangez à peu près tous les sujets : il va être difficicile de vous répondre sur chacun d'entre eux.
Être une femme en France en 2024, c'est plus simple que cela ne l'était en 2017.
Être une femme aujourd'hui en France, c'est permettre, en cas de plainte pour viol, qu'il y ait 30 % de condamnations de plus qu'en 2017 et c'est faire en sorte qu'elles débouchent dans 98 % des cas sur une peine de prison ferme avec, en moyenne, onze ans de réclusion criminelle.
Être une femme en 2024, c'est avoir une égalité professionnelle qui progresse, et c'est tant mieux !
Être une femme en 2024, c'est voir ses droits, notamment en matière de santé, être de plus en plus, et de mieux en mieux, respectés, notamment en matière de santé.
Être une femme en 2024, c'est entendre les femmes ayant signé le manifeste des 343, nous dire récemment : « Vous avez dépassé nos rêves. Jamais nous n'aurions imaginé que l'IVG serait inscrite dans la Constitution » !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Et si ce rêve a été rendu possible, c'est qu'elles parce qu'elles ont été là au premier jour et parce que nous avons été là collectivement.
La grande différence entre vous et nous, c'est que nous, nous n'avons jamais essayé de mettre notre nom sur une proposition de loi.
Vives protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.– Mme Ségolène Amiot mime un nez qui s'allonge.
Nous avons considéré que toutes celles qui y avaient contribué avaient permis cette victoire collective, qu'ils ou elles soient sénateurs ou députés, membres du Gouvernement ou qu'il s'agisse du Président de la République car c'est lui, madame la députée, qui a convoqué le Congrès.
Être une femme en 2024, c'est considérer, malheureusement, qu'un groupe politique devrait faire son examen de conscience sur le sujet.
Être une femme en 2024, c'est constater avec regret que lorsqu'un député condamné pour violences conjugales a réintégré vos rangs, vous vous êtes levés, comme une seule femme et comme un seul homme, pour l'applaudir. .
Même mouvement
Moi je considère qu'on n'applaudit pas un homme coupable de violences conjugales,…
…on l'exclut de son groupe politique et on évite de donner des leçons de morale à tous les autres !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Gaza meurt de faim. Des dizaines d'enfants sont déjà morts de faim dans la bande de Gaza. Des milliers d'autres sont en situation de famine extrême. Ramasser la nourriture à même le sol est devenu pour eux le dernier espoir de survie. À Gaza donc, la déshumanisation organisée par Israël ne laisse aux Palestiniens qu'un seul choix : se nourrir de détritus ou mourir de faim.
C'est dans ce contexte de famine généralisée que, le 29 février dernier, l'armée israélienne a tiré sur des civils lors d'une distribution d'aide humanitaire et a fait plus de cent morts. À Gaza, on meurt de faim…et on meurt aussi, parce qu'on a faim, dans l'indifférence la plus totale.
Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, nous voyons les horreurs et la bestialité de l'armée israélienne au quotidien, qu'il s'agisse de soldats se photographiant au milieu de sous-vêtements de femmes palestiniennes ou de l'incendie de denrées alimentaires en direct sur les réseaux sociaux.
Nous entendons les déclarations des ministres israéliens exprimant clairement leur objectif de colonisation de la bande de Gaza, quand ils ne se réjouissent pas de la perspective d'une épuration ethnique du peuple palestinien.
Quelles actions concrètes la France entreprend-elle pour arrêter le génocide à Gaza ? En qualité de membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, la France déposera-t-elle une résolution pour exiger un cessez-le-feu immédiat ? La France va-t-elle saisir la Cour pénale internationale ? La France prévoit-elle des sanctions diplomatiques et économiques à l'encontre du gouvernement israélien ?
Pourquoi avons-nous abandonné les Palestiniens ? Les droits humains n'ont ni religion, ni couleur de peau et, si nous n'agissons pas, la France aussi aura le sang des Palestiniens sur ses mains.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Stéphane Séjourné, ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
La guerre que le Hamas a déclenchée le 7 octobre dernier contre Israël, se rendant ainsi coupable du plus grand massacre antisémite du XXI
À quelques jours du 8 mars, l'ONU vient de confirmer l'ampleur des atteintes à caractère sexuel commises envers les femmes israëliennes.
La France est, après Israël, le pays qui compte le plus de victimes des attaques du 7 octobre. Trois Français sont toujours retenus comme otages à Gaza ; ils doivent être libérés.
Après cinq mois de guerre, vous l'avez dit, la situation humanitaire à Gaza est catastrophique. Nous l'affirmons depuis le premier jour, et nous le répétons avec davantage de force aujourd'hui, les Palestiniens n'ont pas à être les victimes des crimes du Hamas. La population civile manque de tout, notamment de nourrriture. Cette situation est injustifiable. Il appartient à Israël de faire en sorte que l'aide humanitaire parvienne en quantité suffisante à la population civile ; c'est son obligation au titre du droit international.
La France agit concrètement : nous avons été les premiers à larguer directement de l'aide humanitaire sur la bande de Gaza en lien avec nos partenaires jordaniens. Nous acheminons d'importantes quantités de frêt humanitaire : des tentes, des protections hygiéniques, de la nourriture, en lien avec nos partenaires régionaux, en particulier le Qatar, les Émirats arabes unis et l'Égypte. Nous soutenons le système de santé égyptien, qui se trouve en première ligne pour la prise en charge des blessés. Nous accueillons des enfants palestiniens au sein des hôpitaux français.
Mais surtout, et c'est sans doute le plus important, nous exigeons un arrêt immédiat des combats, un cessez-le-feu durable afin de permettre la libération des otages et l'allègement de la souffrance des civils palestiniens.
Loin des polémiques, la France agit pour la paix et pour la protection des civils.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Au delà des mots, nous attendons des actes. Je vous ai posé des questions très précises auxquelles vous n'avez pas répondu.
Le largage de l'aide alimentaire est un aveu d'échec, celui de votre incapacité à faire ouvrir un couloir humanitaire destiné à assurer l'acheminement de cette aide aux Palestiniens. Je réitère ma question : qu'avez-vous prévu de faire concrètement pour mettre fin au génocide des Palestiniens ?
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES et GDR – NUPES. – Madame Fatiha Keloua Hachi applaudit également.
Ce 8 mars se tient la journée internationale des droits des femmes, droits qui doivent être défendus et martelés, au premier rang desquels figure celui d'être protégées contre les violences.
Des progrès ont été faits, en matière aussi bien de réponse pénale que de dispositifs de signalement, de protection et de prise en charge. Dernièrement, une aide financière a été mise en place afin que les victimes de violences puissent s'extraire au plus vite du foyer au sein duquel leur intégrité physique et psychologique sont menacées.
Je tiens également à mettre en avant notre travail législatif et, notamment, le vote, hier soir, de la proposition de loi visant à créer l'ordonnance provisoire de protection immédiate.
Mais s'il faut saluer les actions menées, seul compte le recul tangible des violences faites aux femmes. Or celles-ci subsistent. « Gigi », tuée par son conjoint à Cagnes-sur-Mer fin février, est déjà la trente-et-unième victime depuis le début de l'année. Et nous pourrions évoquer l'histoire très récente de cette fillette de huit ans qui a su trouver le courage d'alerter les services de police de Bondy, sauvant ainsi sa mère.
Pour ma part, j'ai récemment alerté un maire d'une situation qui avait été portée à ma connaissance ; je me suis entendue répondre qu'il s'agissait d'une « affaire privée »…
Le blocage sans doute le plus complexe à lever est celui de la libération de la parole : celle des victimes mais également celle des témoins. Nous devons tout faire pour mieux informer et convaincre les victimes qu'une issue est à leur portée. Nous devons éradiquer dans l'esprit des témoins de violences l'idée que ces faits ne les concernent pas et les convaincre d'avoir le courage de cette petite fille !
Trente-et-une fois déjà cette année, des victimes n'ont pas réussi à quitter l'enfer dans lequel elles étaient retenues. Il est temps que cela cesse. Dans cette perspective, pourriez-vous, Madame la ministre, nous livrer un premier point d'étape sur le mécanisme d'aide ouvert en décembre dernier et, surtout, nous exposer les pistes destinées à mieux le faire connaître ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.
Nous étions ensemble chez vous à Melun pour échanger avec les forces de l'ordre, les gendarmes, l'ensemble des associations, qui tous forment cette chaîne de solidarité et d'écoute qui s'installe autour des femmes pour les aider à sortir de la spirale de la violence que vous avez décrite. Vous avez raison, la parole des victimes s'est libérée, de même que celle des témoins qui doivent pouvoir alerter et signaler. Il y a surtout une libération de l'écoute.
Les femmes ont toujours parlé, décrit ce qu'elles subissaient mais aujourd'hui nous les écoutons et nous les croyons. Souvent, pour les extraire du cycle de la violence, elles sont bloquées par l'absence d'autonomie financière. Lorsque vous n'avez plus de compte bancaire, de métier, lorsque vous n'avez pas la capacité de payer un billet de train ou une nuit d'hôtel, vous ne pouvez pas vous échapper. Pour y remédier, une initative parlementaire a permis la création d'une aide universelle d'urgence.
En moins de trois mois, l'aide universelle d'urgence a été accordée à 12 228 personnes – des femmes dans la quasi-totalité. Celles-ci ont pu obtenir ce soutien financier auprès de leur CAF, leur caisse d'allocations familiales, en moins de trois jours.
Ce dispositif fonctionne, de nombreuses personnes y ont recours. On peut bien sûr considérer que, d'une certaine manière, c'est malheureux mais on peut aussi se réjouir car cela signifie que des femmes qui étaient prisonnières de leur condition et qui subissaient des violences peuvent quitter le domicile grâce à cette aide.
N'oubliez pas qu'une femme victime de violences fait en moyenne sept allers-retours : elle part de son domicile et y revient à sept reprises. Je vous laisse imaginer ce que représente un tel parcours. C'est en tout cas ce que vivent les femmes aujourd'hui encore. Ce dispositif a été conçu pour elles : il est direct, rapide et universel.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Ma question s'adresse au Premier ministre. Supprimer purement et simplement 79 millions de crédits au budget des outre-mer, est-ce là toute votre ambition pour nos territoires ultramarins ? Cela représente plus de 8 % du budget dédié au logement, aux collectivités locales, au secteur sanitaire et social, à la jeunesse et à la continuité territoriale, si essentielle à nos compatriotes ultramarins – sans compter les annulations de crédits sur les autres budgets puisque vous annulez en tout 10 milliards d'euros, et cela sans concertation, sans même que les élus de la nation en aient été informés.
Recours au 49.3, annulation de crédits, insincérité budgétaire, est-ce là la nouvelle méthode tant prônée par le Président de la République ? J'y vois, moi, toujours le même mépris pour les outre-mer et pour les élus.
La réalité est que vous accentuez le sous-financement chronique face à une situation économique et sociale sans appel : vie chère ; taux de chômage trois fois supérieur à celui de l'Hexagone ; manque de logements sociaux puisque seuls 15 % des foyers ultramarins y ont accès quand 80 % sont éligibles ; un tiers de la population sous le seuil de pauvreté en Guadeloupe, les trois quarts à Mayotte ; des retards structurels trop nombreux à énumérer.
Nous ne quémandons rien, nous demandons l'égalité. Vous cherchez des recettes et coupez dans les budgets des plus vulnérables. Commencez donc par instaurer la taxe européenne sur les transactions financières.
Monsieur le Premier ministre, comment comptez-vous rattraper les retards structurels,…
…dynamiser les économies, faire face aux changements climatiques et assurer la souveraineté alimentaire et l'autonomie énergétique dans nos territoires ultramarins tout en supprimant leurs crédits ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.
J'aurais préféré que, dans le cadre de votre question, vous notiez la hausse budgétaire sans précédent du ministère des outre-mer : elle s'élève à 380 millions, portant ce budget à 3,1 milliards pour l'année 2023, malgré les annulations de crédits évoquées.
Par ailleurs, j'aimerais vous rassurer. Les priorités du Ciom, le comité interministériel des outre-mer, seront préservées, tout comme l'équilibre des discussions parlementaires qui avaient permis l'adoption, par des députés issus de tous les groupes, de 280 millions d'euros de crédits.
Je me suis fixé deux priorités s'agissant du budget des outre-mer. La première est le logement, dont le budget de 291 millions – soit une hausse de 50 millions par rapport à l'année 2023 – est sanctuarisé. Cela permettra de construire et de réhabiliter des logements pour les ultramarins.
La deuxième est la continuité territoriale, dont les crédits augmentent de 22 millions. L'annulation de 2 millions d'euros est une conséquence du débat parlementaire au cours duquel il avait été demandé de procéder à une baisse afin d'aider l'installation des porteurs de projets en outre-mer. C'est la seule conséquence que nous avons tirée, les autres mesures relatives à cette question sont totalement préservées. D'ailleurs, le seuil de ressources sera fortement revalorisé, ce qui permettra à 80 % des ultramarins de bénéficier de la continuité territoriale.
Malgré les annulations, le budget est donc en forte hausse puisque celle-ci atteint 14 %, ce qui témoigne du soutien du Gouvernement aux territoires d'outre-mer.
M. Philippe Emmanuel applaudit.
Le budget que nous avions préparé et duquel nous avions discuté prévoyait la prise en considération des retards structurels observés dans les outre-mer. Or vous supprimez une grande partie de ce budget. Nous continuerons de nous battre et nous vous invitons à vous battre avec nous.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.
Monsieur le Premier ministre, les portes du Salon de l'agriculture viennent à peine de se refermer et déjà vous trahissez vos engagements, trahissez les agriculteurs, trahissez la ferme France.
« Pas d'interdiction sans solution » : telle était votre devise sur les barrages d'agriculteurs ou dans les allées du salon. Pourtant, vous vous apprêtez à sacrifier les filières endives et chicorée, représentant 7 000 emplois, en particulier dans les Hauts-de-France, et près de 300 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Ces deux filières emblématiques de notre patrimoine vont subir l'interdiction au niveau européen de la benfluraline, seule molécule efficace pour lutter contre les chénopodes, rendant le désherbage impossible autrement que par une explosion des coûts de main-d'œuvre et privant ainsi ces deux filières de toute compétitivité.
Ne nous y trompons pas : si l'Union européenne a interdit cette molécule utilisée depuis environ un demi-siècle, c'est bien parce que la France ne s'y est pas opposée lors du Comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et de l'alimentation animale, le Scopaff, pour Standing committee on plants, animals, food and feed, de décembre 2022, préférant une honteuse abstention à la préservation de notre souveraineté alimentaire.
Si nos voisins belges et néerlandais pourront continuer à produire, c'est parce qu'ils ont demandé, et obtenu, une dérogation d'utilisation de cette molécule – ce que la France, c'est-à-dire votre gouvernement, se refuse à demander à son tour, créant ainsi les conditions d'une concurrence déloyale.
Les filières endive et chicorée ne survivront pas à cette interdiction. Vous préparez un plan social de 7 000 personnes, touchant les producteurs, les sécheurs, les torréfacteurs et leurs familles, mais aussi les collectivités locales rurales où sont implantées les usines. En refusant d'agir, vous incitez à importer des produits étrangers ne respectant pas nos normes, par exemple des cossettes de chicorée issues d'Inde.
Ma question est donc simple : allez-vous, à l'instar des autres pays producteurs européens, demander une dérogation d'utilisation de la benfluraline…
…en attendant de trouver, comme vous vous y étiez engagé, une solution alternative à la molécule, solution qui devra être accompagnée par la création d'un fonds de soutien financier ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Oui, les producteurs d'endives et de chicorées sont confrontés à une potentielle impasse technique pour le désherbage à la suite du retrait de la benfluraline au niveau européen.
Vous le savez, le Gouvernement soutient pleinement les endiviers. Il est à l'œuvre pour leur apporter des solutions concrètes, d'abord parce que la filière est une fierté française : 95 % de la production vient des Hauts-de-France, nous sommes le leader mondial dans ce secteur. Je suis aux côtés des endiviers de cette région – vous le savez car nous avons en commun ce territoire.
En revanche, personne n'ignore, malheureusement, que les résultats des analyses sur les risques écotoxicologiques de cette molécule sont très clairs : il existe une forte suspicion de caractère cancérigène et toxique pour la reproduction. Il nous faut donc travailler à des solutions alternatives.
D'abord, nous avons sécurisé la campagne de 2024 sur la base des autorisations existantes – vous le savez, il serait donc honnête de le rappeler. C'est bien le Gouvernement qui a mené ce travail.
Se pose à présent la question de la production de 2025.
Mon ministère est pleinement mobilisé pour permettre que des herbicides adaptés, ou d'autres technologies, soient disponibles. Nous soutenons ainsi des tests sur deux substances d'intérêt qui pourraient se substituer au Bonalan. Nous soutiendrons tous les projets de l'Association des producteurs d'endives de France, qu'il s'agisse de désherbage mécanique automatisé ou de pulvérisation intelligente ultralocalisée.
Ces solutions ne sont pas encore arrivées à maturité mais elles existent, sont testées et nous y travaillons. J'ai rendez-vous cette semaine avec l'Anses, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, l'Inrae, l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement et les organisations professionnelles. Nous travaillons afin que des solutions soient trouvées pour chaque interdiction de molécule, nous ne braillons pas.
M. Thomas Rudigoz applaudit.
Il est tout de même dommage que votre parachutage dans le Pas-de-Calais soit déjà marqué par un mensonge aux agriculteurs et aux producteurs de chicorées et d'endives.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Cette question s'adresse à Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention, Les données de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale indiquent qu'en France un adulte sur quatre souffre d'un trouble de l'audition, ce qui représente près de 12 millions de nos concitoyens ; 7 millions d'entre eux sont affectés par divers degrés de surdité.
Cet enjeu de santé publique ne se limite pas à nos aînés. En effet, nos jeunes, de plus en plus exposés, risquent de devenir les prochaines grandes victimes de troubles auditifs, souvent à cause de l'usage intensif de casques audio et d'écouteurs, à des niveaux sonores nocifs.
La perte auditive, au-delà de la barrière de communication qu'elle instaure, est source d'isolement social, de stress, de dépression et peut accélérer la survenue de démence chez les personnes âgées. Tous ces effets démontrent qu'il est urgent et important d'agir.
Des progrès ont été réalisés, notamment avec le dispositif 100 % santé, mais il est impératif d'aller plus loin pour prévenir une future société de malentendants. Selon l'OMS, l'Organisation mondiale de la santé, plus de 60 % des cas de déficience auditive chez les jeunes pourraient être évités grâce à des mesures préventives adéquates.
L'inaction a un coût non seulement humain mais aussi économique. Le rapport mondial sur l'audition de l'OMS de 2020 montre clairement que les investissements dans les soins auditifs sont bénéfiques et rentables pour nos sociétés.
Alors que, le 14 mars prochain, se tiendra la Journée nationale de l'audition, je vous interpelle, face à ce constat, sur la nécessité d'une stratégie ambitieuse de prévention et de prise en charge des troubles auditifs. Quelle sera notre feuille de route pour intégrer pleinement la prévention et le soin des troubles auditifs dans notre politique de santé, un sujet qui concerne toutes les générations ?
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
Je veux tout d'abord saluer votre question relative aux troubles de l'audition, un sujet sur lequel vous faites preuve d'une vigilance extrême. Vous avez raison de rappeler régulièrement l'importance de fléau.
Comme vous l'avez dit, il s'agit d'un enjeu de prévention majeur puisque ce mal, contrairement à certaines idées reçues, touche toutes les générations. Il faut donc agir tout au long de la vie et le plus tôt possible : dépistage systématique dès la naissance puis au cours de l'enfance et jusqu'à l'âge de 18 ans, à l'occasion de tous les examens médicaux obligatoires.
Comme l'ensemble des parlementaires le savent, la dernière loi de financement de la sécurité sociale prévoit l'instauration de rendez-vous de prévention afin de procéder à des dépistages aux tranches d'âge clés – 45-50 ans, 60-65 ans et 70-75 ans –, autant de rendez-vous qui permettront de détecter les troubles de l'audition.
Vous avez également raison d'évoquer le nombre élevé – 12 millions – de Français affectés par les troubles de l'audition, qui montre l'ampleur du phénomène.
Au-delà du dépistage, pour agir contre la surdité, il faut aussi, vous l'avez mentionné, agir contre l'isolement social, notamment des personnes âgées. C'est pourquoi, dès 2018, la majorité s'est engagée en créant le dispositif 100 % santé qui permet l'accès à des prothèses auditives de qualité pour tous, sans reste à charge. Un tel gain de pouvoir d'achat, doublé d'un progrès en matière d'accès aux soins, est inédit.
Le plein déploiement de ces mesures permettra, j'en suis sûr, une amélioration importante de la détection et de la prise en charge de ce handicap invisible. Des efforts restent néanmoins à engager, nous continuerons donc à mener une politique de long terme, à partir des acquis que j'ai cités, pour lutter ensemble contre ce fléau.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe HOR.
Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités. Emmanuel Macron et son gouvernement avaient promis une revalorisation de 100 euros pour les plus petites retraites. Or, dans un rapport publié la semaine dernière par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques – la Drees – qui dépend de votre ministère, nous apprenons que cette hausse sera en moyenne de 30 euros et que seuls 185 000 nouveaux retraités bénéficieront de celle qui a été promise.
Cela fait un mensonge de plus – un mensonge qui représente 70 euros par mois, soit 840 euros par an –, afin de tenter de mettre sous le tapis les dégâts d'une réforme inutile, passée en force à coups de 49.3. Lorsque le Gouvernement promettait une retraite minimale à 1 200 euros pour tous, c'était aussi un coup de communication. Aujourd'hui, c'est encore un rendez-vous manqué avec la justice sociale.
Pourtant, lors de la séance de questions au Gouvernement du 14 février 2023, mon collègue Thomas Ménagé avait déjà révélé la supercherie de la retraite minimale à 1 200 euros pour tous et avait demandé des précisions…
Ce n'était pas lui, vous confondez ! C'était Jérôme Guedj, l'inspecteur Guedget !
…mais il y a un an, déjà, le Gouvernement se cachait dans ses fiches et ne répondait pas.
…est donc bien lointain, et le cauchemar de la précarité, des restrictions alimentaires et des renoncements aux soins, lui, se poursuit.
Dans un tel contexte, que comptez-vous faire pour concrétiser cette revalorisation de 100 euros afin de traduire enfin vos paroles en actes ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Il est intéressant que vous parliez de joindre la parole aux actes quand c'est précisément ce que vous ne faites pas
Protestations sur plusieurs bancs du groupe RN
puisque, pendant toute la réforme des retraites, vous et vos collègues avez passé votre temps à vous battre contre cette réforme, que bien sûr vous n'avez pas votée, et, aujourd'hui, vous vous érigez comme la grande défenseure de celles et ceux qui auraient pu en bénéficier.
Protestations sur les bancs du groupe RN.
Comme quoi, de temps en temps, il y a une petite différence entre ce que l'on a fait hier et ce que l'on revendique aujourd'hui.
Mêmes mouvements.
Mais regardons la situation telle qu'elle est très concrètement. Je rappelle tout d'abord que l'indexation des retraites sur l'inflation est appliquée depuis le début du quinquennat.
Ainsi, dès le mois de juillet 2022, la revalorisation a été anticipée de 4 % pour répondre à la situation économique, et en janvier 2024, les pensions du régime général de retraite ont été revalorisées de 5,3 % pour protéger le pouvoir d'achat des retraités. Tout cela s'est évidemment fait sans vous.
S'agissant de la revalorisation, vous avez juste raté le rendez-vous. Je rappelle que c'est bien cette majorité qui, lors de la réforme, a annoncé cette revalorisation…
…et que, dès 2024, 185 000 nouveaux retraités vont bénéficier d'une pension de retraite supplémentaire ,
Exclamations sur les bancs du groupe RN
soit un nouveau retraité sur quatre.
M. Rémy Rebeyrotte et Mme Danielle Brulebois applaudissent.
Voilà une mesure de plus que vous n'avez pas votée.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Enfin, la réforme a prévu dès le mois d'octobre une hausse de 50 euros par mois pour 550 000 petites pensions – vous n'étiez pas non plus là pour la voter. Quant aux petites pensions liquidées avant 2012, elles vont être versées en mars, une fois encore sans vous !
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Donner des leçons, c'est un peu compliqué pour celles et ceux qui n'ont rien fait !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Les Français ne sont pas dupes. Vos mensonges ne passent plus. Et vous et votre gouvernement serez sanctionnés le 9 juin prochain.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Madame la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en 2019, suite à un rapport parlementaire, le Premier ministre Édouard Philippe a engagé le plan gouvernemental : « Un État plus fort en Seine-Saint-Denis ». Vous étiez à l'époque ministre de la justice et aviez su contribuer positivement à ce plan. Nous vous en sommes reconnaissants.
Mais si des effets positifs ont été constatés dans bien des secteurs, à l'inverse, dans l'éducation nationale, tout s'est dégradé. Dans ce département, le plus jeune et le plus pauvre de France hexagonale, l'école ne se contente pas de reproduire les inégalités de naissance : elle les creuse, ce constat est révoltant. Beaucoup de parents ont le sentiment que l'école de la République ne tend pas la main aux enfants, mais leur met un pied sur la tête pour les enfoncer. Il y a urgence à agir.
Le 26 février dernier, en séance publique, vous avez convenu que « les singularités auxquelles vous êtes confrontés [en Seine-Saint-Denis] nécessitent des réponses qui soient également singulières ».
Depuis dix jours, un mouvement social d'ampleur, largement soutenu, demande un plan d'urgence pour l'éducation dans ce département,…
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur de nombreux bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.
Déjà, il y a quelques semaines, dans notre rapport parlementaire, ma collègue Christine Decodts et moi-même proposions que le ministère rassemble tous les protagonistes de l'éducation pour bâtir un plan : « Pour une école plus forte en Seine-Saint-Denis ».
Madame la ministre, vous ne pouvez pas priver d'espérance sociale et républicaine les familles populaires de ce département. Êtes-vous disposée à engager le travail nécessaire en traitant à la fois de l'urgence des moyens et des innovations souhaitables, un travail qui fasse de la singularité de la Seine-Saint-Denis une force pour nos enfants et pour la nation tout entière ?
Mêmes mouvements.
La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Oui, je suis favorable à une école plus forte en Seine-Saint-Denis mais aussi à une école plus forte dans toute la France. Et c'est bien la tâche à laquelle je m'attelle et à laquelle se sont également attelés mes prédécesseurs.
La singularité de la Seine-Saint-Denis, je la connais, vous l'avez rappelé, et c'est bien parce que je sais que ce département concentre tout à la fois de nombreux atouts et de vraies difficultés que le ministère y apporte une attention particulière et que des dispositifs spécifiques y sont déployés.
Vous avez eu raison de rappeler que les travaux menés à l'initiative du Premier ministre Édouard Philippe en 2019 avaient mis en exergue les différents moyens apportés par tous les départements ministériels pour un État plus fort en Seine-Saint-Denis. S'agissant de l'éducation nationale, le Premier ministre d'alors s'était concentré sur deux axes : d'une part, une prime de fidélisation pour les enseignants, qui a été effectivement versée, soit 12 000 euros au bout de cinq ans, dont le mécanisme a été ensuite amélioré et qui, grâce aux observations que vous avez faites dans votre rapport d'information rédigé avec Mme Decodts, a été étendue aux assistants d'éducation et aux AESH, les accompagnants des élèves en situation de handicap, d'autre part, des financements plus importants à la fois en matière immobilière et en aide à la préprofessionnalisation pour les étudiants qui se destinaient aux carrières d'enseignant. Tout cela a été fait et cette démarche a ensuite été poursuivie avec des mesures particulières pour le dédoublement des classes, vous le savez parfaitement.
Je suis très attentive au mouvement social actuel que vous évoquez. Une délégation a été reçue par la Dasen, la directrice académique des services de l'éducation nationale, et Mme la rectrice de l'académie s'est également déclarée disponible pour la recevoir. Pour ma part, je suis prête à évoquer avec vous les conditions dans lesquelles nous pourrions entamer une telle réflexion.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
La loi sur le port des signes religieux à l'école a vingt ans. Merci à la commission Stasi, au Président Chirac et au législateur de 2004. « Les écoles doivent rester, disait Jean Zay, l'asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas », ce lieu d'émancipation et de construction du libre arbitre fondé sur la raison, la science et l'esprit des Lumières. Et je tiens à dire notre soutien indéfectible aux équipes parfois menacées dans leurs missions : elles doivent demeurer accompagnées, jamais isolées ; et je pense en cet instant à Samuel Paty et à Dominique Bernard.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe RE. – M. Olivier Falorni applaudit également.
La bataille culturelle est bien là. Aujourd'hui, une majorité de jeunes pensent que la laïcité est une loi d'interdiction et pas une loi de liberté, ce qu'elle est pourtant. Il faut dire qu'elle a des adversaires, entre autres de faux amis qui l'instrumentalisent pour stigmatiser une seule religion, uniquement l'Islam, au nom de leur combat civilisationnel.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.
Elle a aussi évidemment des adversaires avérés, aussi farouches et qui, au nom de leurs revendications religieuses, la combattent : l'islamisme radical, à coups d'influenceurs et de réseaux sociaux, cible l'école car c'est la première ligne de la République.
Face à la tentation du « pas de vagues » et du multiculturalisme différentialiste, l'universalisme républicain a besoin de combattants outillés, à commencer par des élus exemplaires : on n'organise pas de prière pour hanouka à l'Élysée ni de bénédiction de crèches dans les mairies ,
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – Mme Christine Arrighi applaudit également
on ne fait pas de discours pour le ramadan dans les mosquées. Surtout, la promotion de la laïcité a besoin d'actes : la formation des enseignants à la pédagogie de la laïcité et les moyens pour la mettre en œuvre. On a besoin aussi de la mixité sociale à l'école et, au-delà même de l'école, d'une lutte effective contre les discriminations et du soutien au tissu associatif, bref d'une politique volontariste de la laïcité, monsieur le Premier ministre. De ce côté-ci de l'hémicycle, il y a bien des volontés pour créer un défenseur de la laïcité sur le modèle du Défenseur des droits pour en consacrer le principe.
Êtes-vous prêt, monsieur le Premier ministre, à nous accompagner dans cette démarche ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Sébastien Peytavie applaudit également.
La laïcité est inscrite sur le fronton de nos mairies, de nos écoles et de nos préfectures parce qu'elle se retrouve dans la devise républicaine.
La laïcité, c'est la liberté de croire ou de ne pas croire, c'est l'égalité devant la loi et aussi la fraternité parce que c'est ce qui nous permet de vivre ensemble en tolérance.
Vous l'avez dit : vingt ans ont passé depuis la loi de 2004 et je veux saluer le Président Chirac qui, à l'époque, l'a permise.
M. Olivier Marleix applaudit.
Cette loi a permis de rendre effective l'application de la laïcité à l'école. Mais ce qui transparaît dans votre question et vous avez raison, c'est que la laïcité reste un combat permanent. Elle a ses défenseurs. Je suis à la tête d'un gouvernement de trente-quatre défenseurs de la laïcité, et nos préfets, nos recteurs, nos directeurs, nos responsables d'administrations sont chaque jour défenseurs de la laïcité.
Vous avez évoqué celles et ceux qui sont en première ligne dans ce combat : je pense notamment aux chefs d'établissement et aux professeurs à qui je veux rendre hommage.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupe RE, SOC, Dem et HOR, ainsi que sur quelques bancs des groupes RN et LR.
Je serai lundi à Arras où je présiderai la cérémonie nationale d'hommage aux victimes du terrorisme parce que c'est là que Dominique Bernard, professeur à la cité scolaire Gambetta, a été tué. La laïcité a ses défenseurs partout en France, et vous en faites partie, monsieur le député, tout comme votre groupe, je le crois profondément.
Mais la laïcité a aussi ses fossoyeurs, dont certains sont représentés dans cet hémicycle…
À propos de soutiens aux équipes pédagogiques et aux proviseurs, j'ai vu qu'il y a quelques jours un proviseur a fait l'objet de menaces de mort parce qu'il a cherché à faire appliquer la loi de 2004 dans son établissement en demandant à une élève de retirer son voile, et qu'une députée de La France insoumise a relayé les théories propagées sur les réseaux sociaux contre lui.
« Eh oui ! » sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem. – Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Eh oui, c'est une réalité. Je remarque que quand j'ai pris la décision en tant que ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse d'interdire le port de l'abaya et du qamis à l'école, ce sont, encore une fois, les députés de La France insoumise qui se sont dressés sur mon chemin pour chercher à m'empêcher d'appliquer cette règle.
« Eh oui ! » sur les bancs des groupes RE et Dem.
Je remarque aussi que lundi dernier, au Congrès, quand la présidente Panot s'est exprimée pour citer des exemples de pays qui remettent en cause les droits des femmes, elle a cité à raison la Pologne, la Hongrie et les États-Unis, et l'Italie probablement à raison… mais qu'elle n'a pas cité l'Iran, l'Afghanistan ni aucun des autres pays qui, en s'appuyant sur un islamisme dévoyé, utilisent la religion pour faire reculer les droits des femmes.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe Dem. – Mme Cécile Untermaier applaudit également.
Il ne peut pas y avoir de laïcité à la carte ! De même qu'il n'y a qu'une seule république, il n'y a qu'une seule laïcité ! Et nous devons toutes et tous, au quotidien, en être les défenseurs ! Je sais que vous l'êtes, monsieur Guedj, mais je regrette de constater que cette cohérence n'est pas partagée au sein de la NUPES, loin de là, notamment avec la France insoumise.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs des groupes Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Madame la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, jeudi dernier, à moins de 150 jours de l'ouverture des Jeux olympiques, vous avez, aux côtés du Président de la République, participé à un jalon majeur dans la préparation de cet événement international : la remise des clés du Village olympique par la Solideo – la société de livraison des ouvrages olympiques – au comité d'organisation de Paris 2024. Cet événement n'est pas seulement une étape cruciale dans la préparation des Jeux ; il illustre également, de manière éclatante, la capacité de la France à réaliser d'importants projets dans un cadre temporel restreint, budgétairement maîtrisé et environnementalement ambitieux.
Le Village olympique, livré en temps et en heure, sans aucune dérive budgétaire, démontre l'engagement de notre pays envers l'innovation, la durabilité et l'héritage. Construit sur plus de 50 hectares, il accueillera plus de 14 000 athlètes pendant les Jeux et plus de 9 000 pendant les Jeux paralympiques, avant de se transformer en un véritable village vivant, permettant d'accueillir entre autres 6 000 habitants et 6 000 salariés.
Cependant, alors que nous nous approchons de l'ouverture des Jeux, des questions demeurent : quels sont les défis restants dans l'aboutissement de ce grand projet ? Et surtout, au-delà de ce village, quel héritage les Jeux laisseront-ils sur le moyen et le long terme aux Françaises et aux Français ? Notre ambition doit aller au-delà de l'organisation d'un événement sportif international : nous devons saisir cette occasion pour réaffirmer les valeurs de notre république, encourager la pratique sportive, promouvoir l'inclusion sociale, stimuler l'innovation environnementale et économique, et renforcer notre position sur la scène internationale.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
La parole est à Mme la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques.
Merci d'avoir rappelé l'exploit que représente la livraison, par la Solideo, du village des athlètes. Cette construction, réalisée dans le respect du calendrier et des budgets, selon les plus hauts standards en matière sociale et environnementale,…
…vient rappeler que notre pays est une grande nation de bâtisseurs. Nous allons poursuivre l'effort. Il nous reste un ensemble de travaux à conduire pour que ces Jeux olympiques et paralympiques soient un grand succès, le succès que notre pays mérite.
Ces Jeux laisseront un héritage utile et durable, en particulier en Seine-Saint-Denis.
D'abord, sur le plan matériel, le village des athlètes va se transformer en un parc de 3 000 logements, dont 40 % de logements sociaux, en deux groupes scolaires, en 100 000 mètres carrés de bureaux, en espaces de commerces et de partage. Il en ira de même pour le village des médias, que nous allons inaugurer prochainement.
Avec les équipements sportifs, dont vingt bassins de natation et le centre aquatique olympique, les Jeux transformeront le cadre de vie du département. Les nouvelles infrastructures urbaines de transport – l'extension supplémentaire de la ligne 14, la gare de Saint-Denis-Pleyel – représenteront autant de franchissements qui recoudront ce territoire.
Mme Caroline Parmentier s'exclame.
Les progrès en matière d'accessibilité représentent un autre versant de l'héritage. Avec mes collègues, nous avons créé un fonds pour aménager l'accessibilité des hôtels, des cafés et des restaurants à proximité des sites de Jeux. Nous ouvrons 3 000 clubs sportifs formés à l'accueil des personnes en situation de handicap. Avec les opérateurs de transport, nous développons les services pour les personnes présentant des déficiences visuelles et auditives.
Les Jeux nous permettent d'accélérer toutes ces transformations, en même temps qu'ils nous aident à bâtir une nation sportive ,
« Oh là là ! » sur les bancs du groupe RN
à renforcer l'insertion par le sport et à augmenter la densité des équipements sportifs et des maisons sport-santé dans les territoires. En 2024, la promotion de l'activité physique et sportive devient pour la première fois la grande cause nationale.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à quatorze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Naïma Moutchou.
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Mathieu Lefèvre et plusieurs de ses collègues visant à renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste, antisémite ou discriminatoire (n° 1727, 2246).
La parole est à M. Mathieu Lefèvre, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Vendredi dernier, dans le 20
Ainsi, entre 2016 et 2023, les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux ont augmenté de plus de 56 %. L'année 2023 a été particulière avec une hausse de plus de 31 % de ces atteintes et 1 676 actes antisémites contre 436 en 2022. Cette explosion du nombre d'actes antisémites, qui a débuté dès le lendemain des attentats terroristes barbares du Hamas contre Israël et contre laquelle le garde des sceaux a pris des circulaires constituant une réponse implacable, nous oblige vis-à-vis de nos compatriotes juifs et, plus largement, vis-à-vis de tous nos compatriotes victimes de discrimination.
Face aux auteurs de ces atteintes, la société tout entière doit être mobilisée. Nos forces de l'ordre et nos magistrats, à qui je rends un hommage appuyé, sont chaque jour en première ligne pour établir, juger et condamner ces agissements qui portent atteinte à la cohésion de la nation. Disons-le sans ambiguïté : ce texte ne jette nullement le doute sur l'efficacité de la réponse pénale face à ces actes odieux. Pour tous les parquets de France, réprimer ces comportements est une priorité et, chaque jour, nos magistrats font un travail remarquable face à ce poison.
Au début de 2023, la Première ministre, Élisabeth Borne, a présenté un nouveau plan national de lutte contre le racisme, les discriminations et l'antisémitisme. Les ministres de l'intérieur et de la justice s'emploient quotidiennement à assurer une réponse implacable de l'État. C'est maintenant au législateur de prendre sa part de l'effort en consolidant notre riposte. Cette proposition de loi, écrite avec ma collègue Caroline Yadan, dont je salue l'engagement et le travail, est née d'une approche concrète et pragmatique. Elle vise à pallier ce que nous considérons comme des lacunes ou des insuffisances de notre droit.
Ainsi, des prédicateurs de haine multirécidivistes peuvent actuellement échapper à la justice qui les a pourtant condamnés car aucun mandat d'arrêt ne peut être délivré par un tribunal correctionnel si la personne est reconnue coupable d'un délit de presse. Nous avons tous en mémoire que c'est la raison pour laquelle le parquet a dû interjeter appel, en avril 2019, du jugement de la 13
Dépourvu de fondement juridique, ce mandat d'arrêt était évidemment illégal.
Caroline Yadan, les députés Renaissance et moi-même préférons qu'Alain Soral dorme en prison plutôt que tranquillement chez lui, après avoir commis de tels actes. L'article 1er de la proposition de loi vise ainsi à mettre fin à ce qu'on pourrait qualifier de dévoiement des principes de la liberté d'expression. Il s'agit de permettre aux tribunaux correctionnels de délivrer un mandat d'arrêt ou de dépôt contre les prévenus condamnés à une peine d'emprisonnement pour apologie ou contestation de crimes contre l'humanité. En commission, cette faculté a été élargie à d'autres graves délits de presse grâce à nos collègues Caroline Yadan et Jérémie Patrier-Leitus, que je remercie.
Il y a quinze ans encore, l'extrême droite jugeait « liberticides » et « scélérates » les lois Gayssot et Pléven.
Face à la banalisation et à l'explosion du mal qu'elles combattent, le temps est venu de les renforcer, avec le soutien des républicains de tous bords.
Notre société fait face à une désinhibition croissante des auteurs de provocations à la haine, de diffamations ou d'injures. Les réseaux sociaux portent une très lourde responsabilité dans cet état de fait, puisqu'ils sont venus ajouter une forme de facilité à l'ignominie. Si les propos ou les écrits publics délictueux semblent suffisamment réprimés, la sanction prévue pour leurs équivalents non publics paraît sous-dimensionnée, en raison de l'inflation de leur nombre par rapport à celui des infractions publiques, de la conception assez large qu'a la jurisprudence de l'infraction non publique – conception que nous ne souhaitons pas remettre en cause – et des moyens nouveaux que se donnent les provocateurs pour éviter la caractérisation de leurs infractions comme publiques.
Aussi l'article 2 de la proposition de loi transforme-t-il les provocations, diffamations et injures non publiques à caractère raciste ou discriminatoire en délits afin de pouvoir condamner leurs auteurs à une amende pouvant aller jusqu'à 3 750 euros. Je salue, là aussi, le travail de la commission des lois, qui a permis d'accompagner cette délictualisation d'un volet plus pédagogique, en ajoutant des peines complémentaires, parmi lesquelles le travail d'intérêt général (TIG) ou le stage de citoyenneté,…
Très bien !
…et en prévoyant, à l'initiative de Cécile Untermaier, que soit systématiquement proposée une mesure de justice restaurative aux auteurs et aux victimes. La correctionnalisation de ces délits permet également d'introduire une circonstance aggravante si l'une de ces infractions est commise par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public.
Fort de cette exigence de fermeté absolue, singulièrement dans le service public, je récuse avec la même fermeté l'idée selon laquelle il existerait un racisme systémique, voire un racisme d'État. En matière d'exemplarité, il y aura aujourd'hui ceux qui agissent et ceux qui ajoutent le soupçon à la division, ceux qui condamnent fermement les fautifs et ceux qui stigmatisent aveuglément les forces de l'ordre.
Toujours à l'initiative de Caroline Yadan et de Jérémie Patrier-Leitus, le travail en commission a permis de compléter substantiellement le texte, en comblant un autre vide juridique par la création de deux nouveaux délits. S'il est aujourd'hui interdit de faire l'apologie ou de contester l'existence d'un crime contre l'humanité en public, il est possible de le faire dans un cadre non public. Je dis bien « non public » ; je ne dis pas « confidentiel » – on reviendra peut-être sur la nuance lors de la discussion des amendements.
Aujourd'hui, dans une entreprise ou une salle de spectacle, il est possible de nier la Shoah ou de minimiser le génocide arménien.
Vous le voyez, chers collègues, le cheminement pragmatique qui a abouti au texte que nous vous présentons ne remet pas en cause les équilibres anciens du droit de la presse ou de la liberté d'expression. Notre proposition se compose d'adaptations nécessaires et proportionnées à l'objectif poursuivi.
Je remercie le garde des sceaux pour son ouverture d'esprit. Il est le garant d'un équilibre qui dépasse nos querelles actuelles.
Tout le monde, sur ces bancs comme dans la société, est susceptible de subir le racisme, l'antisémitisme ou toute autre forme de discrimination. Je pense aux discriminations en raison de l'identité de genre ou de l'orientation sexuelle, que concerneront les amendements de Raphaël Gérard.
Tant de ceux qui ont fait la France ont eu à subir la haine et la rengaine déchirante de la discrimination, parce qu'ils étaient nés sous statut étranger, parce qu'ils étaient binationaux, parce qu'ils étaient noirs, parce qu'ils étaient descendants d'immigrés, parce qu'ils étaient juifs. Aujourd'hui, rendre hommage à ces figures de notre histoire nous paraît évident, chers collègues. De même, nous sommes révulsés de savoir qu'on a pu les injurier en raison de leur origine, qu'on ait pu prendre le risque de les détourner de la France et de notre destin collectif.
Sans doute y a-t-il dans cet hémicycle des parlementaires qui voudraient effacer les prénoms ou jeter un voile sur les passés. Sans doute, d'autres voudraient catégoriser, enfermer les Français dans leurs origines ou chercher à les instrumentaliser. À eux et à ceux qui les ont en modèle je veux dire que ces aïeux qui ont fait la France en sont le visage. En République, peu importe d'où l'on vient. Seuls comptent ce que nous faisons et notre projet commun qui se résume en un mot : la nation.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet et M. Jérémie Patrier-Leitus applaudissent.
Ce texte apporte de premières réponses. Je sais qu'il ne mettra pas un terme au racisme, aux discriminations ou à l'antisémitisme dans notre pays, comme René Pleven le savait lorsqu'on examinait la loi qui porte son nom. La lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations est une affaire de pédagogie, d'éducation, de rencontres, peut-être d'autorité de l'histoire, laquelle est parfois minimisée, sinon bafouée. Responsable public, acteur du débat public, citoyen, enseignant, policier, chacun a un rôle dans la lutte contre les discriminations. Aujourd'hui, mes chers collègues, je vous propose de jouer le nôtre.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – MM. Jérémie Patrier-Leitus et Éric Martineau applaudissent également.
« N'ayez d'intolérance que vis-à-vis de l'intolérance », écrivait le philosophe Hippolyte Taine. Aujourd'hui, j'exprime à nouveau, avec force, mon intolérance la plus ferme envers tous les comportements et discours racistes, antisémites ou discriminatoires, qui sont des parasites nuisibles de notre pacte social, de notre République. Le racisme et l'antisémitisme sont des fléaux anciens, enracinés depuis des siècles. C'est pourquoi le combat contre toutes les formes de haine de l'autre, et notamment contre le racisme, est un combat permanent.
Il est de notre devoir de faire preuve de courage et de ne laisser aucune place à la résignation. Le repli communautaire ou religieux qui frappe notre société va de pair avec l'augmentation des injures, des diffamations et des provocations haineuses, racistes ou antisémites. Ennemis de nos valeurs d'égalité et de fraternité, de tels comportements ne sauraient être justifiés ou excusés au nom d'une autre valeur républicaine, la liberté d'expression. Car le racisme et l'antisémitisme ne sont pas des opinions mais des infractions.
Fondés sur des idéologies mortifères, les paroles discriminantes et les discours de haine font également le lit de passages à l'acte violent. En effet, après les mots, il y a les coups.
Il y a quelques jours, un homme de 60 ans a été roué de coups aux cris de « sale juif », preuve que la bête immonde est toujours présente. Je veux avoir une pensée pour cet homme. J'ai vu les reportages, bouleversants, qui lui ont été consacrés. Il a même exprimé l'idée que l'humiliation qu'il a reçue des mots proférés à son encontre lui a fait plus de mal que les coups et les violences exercées scandaleusement contre lui.
Je vous informe, si vous ne le savez pas, qu'un suspect a été interpellé ce matin. Naturellement, je ne peux pas en dire davantage, le garde des sceaux ne pouvant pas intervenir dans les affaires en cours.
Soyez assurés de ma totale mobilisation et de l'engagement de mon ministère pour lutter fermement contre les auteurs de telles infractions abjectes. La répression de leurs auteurs doit être certaine et implacable.
Souvent, ces actes commencent sur les réseaux sociaux. C'est pourquoi la circulaire du 24 novembre 2020, que j'ai signée, a créé le pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH), près le parquet de Paris, compétent pour centraliser le traitement des affaires significatives de cyberharcèlement et de haine en ligne.
La Chancellerie n'a jamais baissé la garde dans le combat contre l'intolérance et les manifestations de haine de l'autre. Notre lutte repose sur l'appréhension la plus large possible de la discrimination, afin que puissent être poursuivis et condamnés les auteurs de tout comportement haineux, qu'il soit commis en raison de la religion, de l'origine, du sexe, de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre, vraies ou supposées, des victimes.
Notre arsenal législatif a été étoffé par la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, texte que j'avais défendu avec mon collègue Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Cette loi a consacré une nouvelle circonstance aggravante applicable à plusieurs délits prévus par la loi du 29 juillet 1881 : délit de provocation publique à la discrimination, à la haine ou à la violence ; délit de négationnisme ; délit d'injure à caractère raciste. Ainsi, ces faits sont désormais punis de trois ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende lorsqu'ils sont commis par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission.
Cette loi a aussi permis de recourir aux procédures accélérées de jugement, notamment à la comparution immédiate, contre les auteurs de provocation à la commission d'infractions graves – apologie de crimes, provocation à la haine discriminatoire, contestation de crimes contre l'humanité, injure raciale. Dans ces hypothèses, le tribunal correctionnel peut donc décerner un mandat de dépôt à l'égard de la personne condamnée à l'issue de la procédure de comparution immédiate.
Nous avons en outre allongé la durée de la prescription de l'action publique pour certains délits de presse, haineux. De telles dispositions ont d'ailleurs permis de répondre avec fermeté aux actes antisémites qui ont blessé et outragé notre République au lendemain des attentats terroristes perpétrés par le Hamas en Israël le 7 octobre dernier.
Dès le 10 octobre 2023, par circulaire, j'ai rappelé aux procureurs de la République que toute atteinte physique à caractère antisémite exigeait une réponse pénale ferme, rapide et systématique, privilégiant la comparution immédiate. Je les ai également invités à poursuivre les auteurs de propos tendant à porter un jugement favorable sur les crimes du Hamas, sous la qualification adaptée d'apologie du terrorisme – car il s'agit bien de cela : de terrorisme.
M. le rapporteur, Mme Astrid Panosyan-Bouvet et M. Meyer Habib applaudissent.
Je leur ai précisé que des incriminations spécifiques, telle la provocation publique à la haine ou à la violence, devaient être impérativement retenues à l'encontre des délinquants. J'ai demandé une réponse implacable et, je le dis, l'engagement de l'institution judiciaire a été sans faille.
Au 19 janvier 2024, 623 enquêtes judiciaires portant sur des faits à caractère antisémite ont été ouvertes après l'attaque du Hamas contre Israël ; 80 % de ces enquêtes ont donné lieu à des jugements de culpabilité, dont près de 60 % par la voie de la comparution immédiate ; 99 % de ces procédures ont été jugées en moins de trente jours et une grande partie d'entre elles ont abouti à une condamnation à une peine d'emprisonnement ferme.
Nous pouvons donc, je le crois, nous féliciter d'avoir engagé de grandes avancées, mais il nous faut encore renforcer notre arsenal législatif pour exprimer avec vigueur, sans faille, notre intolérance à l'égard de toutes les formes de haine. C'est pourquoi je soutiens avec force la présente proposition de loi, en prenant un instant pour saluer l'engagement du rapporteur Mathieu Lefèvre et celui de votre collègue Caroline Yadan.
L'article 1er de la proposition de loi répond à un besoin exprimé par les magistrats, les avocats et les victimes. Il importe en effet d'élargir la possibilité pour les tribunaux de décerner un mandat de dépôt ou d'arrêt contre les auteurs de délits d'apologie et de contestation de certains crimes. La commission des lois de votre assemblée a ainsi opportunément étendu la possibilité pour le tribunal correctionnel de décerner un mandat de dépôt pour les délits suivants : provocation et apologie publique de crimes et délits ; contestation publique de crimes contre l'humanité ; diffamation et injure publique à caractère discriminatoire.
L'article 2 vise à ériger en délit les contraventions de provocations, diffamations et injures non publiques à caractère discriminatoire, en les réprimant de 3 750 euros d'amende. Ce dispositif, équilibré, répond à une évolution souhaitée par notre société.
Je veux insister ici sur la nécessité de réprimer plus sévèrement les abus non publics de la liberté d'expression. Les propos adressés dans un lieu ou une réunion non publics à des personnes qui sont liées à l'auteur par une communauté d'intérêt ne présentent pas un caractère de publicité. Pourtant, il ne fait aucun doute que les injures, diffamations et provocations discriminatoires tenues entre des personnes liées par une communauté d'intérêt, par exemple dans le cadre professionnel ou encore dans les établissements scolaires, créent par elles-mêmes, intrinsèquement, un trouble à l'ordre public, portent atteinte à la dignité des victimes et encouragent, bien évidemment, la commission d'infractions. Au demeurant, il s'agit d'un texte équilibré puisque toute application de ces dispositions est exclue pour les propos émis à titre confidentiel.
L'article 3 vise à créer un nouveau délit d'apologie ou de contestation non publique de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. Les rédactions reprennent à l'identique celles qui répriment les mêmes faits lorsqu'ils sont commis publiquement. Cette disposition est nécessaire. Elle permet de sanctionner des propos qui ne sont pas proférés dans des lieux publics ou lors de réunions publiques. Dorénavant, de tels propos, dès lors qu'ils sont tenus dans des conditions exclusives de tout caractère secret ou confidentiel, même s'ils ne sont pas publics, pourront être réprimés.
La présente proposition de loi est salutaire. Elle s'inscrit d'ailleurs dans le prolongement du plan national, interministériel, de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations liées à l'origine, voulu et mis en place par Élisabeth Borne. Le texte que vous examinez cet après-midi répond aux exigences de notre époque, qui voit subsister un racisme et un antisémitisme qu'il faut combattre sans relâche. Chaque crime, chaque délit commis en raison de l'origine, de la religion, du sexe ou de l'appartenance à une nation mérite d'être décortiqué. Il s'agit, bien sûr, de gagner en expérience, celle-ci nous montrant que la fréquence de tels actes risque de conduire notre société à les banaliser.
Il ne doit y avoir aucune place pour la lâcheté et la résignation,…
…aucune place pour la banalisation du mal. Je vois dans cette proposition de loi un message de détermination et, surtout, d'espoir – l'espoir que les générations futures ne tombent pas dans la xénophobie, le racisme, l'antisémitisme et la haine de l'autre, qu'elles soient, au contraire, fières des valeurs de la République et que les jeunes soient les fers de lance de notre lutte contre ces bas instincts. En attendant que cet espoir devienne réalité, il est indispensable, impérieux, que la loi pénale rappelle avec force à tous que la haine est non pas une opinion, mais un délit. C'est pourquoi je vous appelle à adopter cette proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Meyer Habib applaudit aussi.
« Ne composez jamais avec l'extrémisme, le racisme, l'antisémitisme ou le rejet de l'autre. » Dix-sept ans ont passé depuis que le président Jacques Chirac a lancé cet avertissement. Plus que jamais, l'actualité nous rappelle combien ses inquiétudes d'hier sont devenues nos préoccupations d'aujourd'hui.
Alors que l'on ne comptait qu'une dizaine d'actes de cette nature par an dans les années 1990, le nombre d'atteintes antisémites commises en France a été multiplié par quatre pendant l'année 2023, pour atteindre 1 673 faits recensés. Pis, ils ont augmenté de 1 000 % depuis les attaques terroristes du 7 octobre dernier.
Cette tendance est plus terrifiante encore : désormais, selon un rapport du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), 60 % de ces faits concernent des atteintes aux personnes.
Le nombre d'actes racistes enregistrés par la police et la gendarmerie ne cesse d'augmenter en France. D'après le ministère de l'intérieur, les plus graves d'entre eux, à savoir les crimes et délits racistes, ont même connu une hausse de 29 % entre 2017 et 2022. Par ailleurs, il est à craindre que la prolifération des discours racistes, antisémites ou xénophobes tenus sur les réseaux sociaux ne banalise et, partant, ne légitime le passage à l'acte raciste. Si ces tendances se poursuivaient, il s'agirait d'un profond recul pour la société française.
Bien que le dernier bilan du ministère de la justice sur le traitement des infractions à caractère raciste démontre une volonté de répondre fermement à celles-ci, leur multiplication doit malheureusement nous pousser à nous interroger sur l'évidente nécessité de renforcer notre droit pénal pour lutter plus efficacement contre ce fléau qui gangrène notre pays.
Tel est le but de la proposition de loi visant à renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste ou antisémite que nous allons examiner. En améliorant l'efficacité des sanctions envers les auteurs de ces actes abjects dont le nombre ne cesse de s'accroître, notamment sur les réseaux sociaux et internet, elle ciblera plus particulièrement les idéologues multirécidivistes qui tentent d'échapper à leur condamnation.
L'article 1er du texte permet au tribunal correctionnel d'émettre un mandat de dépôt ou un mandat d'arrêt en cas de condamnation pour contestation de crimes ou apologie de crimes de guerre ou contre l'humanité. L'article 2 délictualise les infractions de provocation à la discrimination, d'injure et de diffamation non publiques à caractère raciste et antisémite.
Durant les travaux en commission, nous avons adopté plusieurs amendements qui ont enrichi le texte. Ils créent notamment les délits d'apologie et de contestation non publiques de crimes contre l'humanité et des régimes de peines complémentaires envers les auteurs de discriminations non publiques. Si ces avancées vont dans le bon sens, elles semblent cependant insuffisantes pour répondre aux exigences du rapporteur, qui appelle, comme chacun de nous, à une impunité zéro pour les prédicateurs de haine.
C'est pourquoi les députés Les Républicains ont déposé plusieurs amendements en vue de réprimer plus fermement ces actes odieux. Certains visent à créer des délits de provocation non publique à la négation ou à la destruction d'un État, ou à rendre inéligibles les dépositaires de l'autorité publique qui se rendraient coupables de racisme ou d'antisémitisme.
D'autres, inspirés des droits allemand et danois, proposeront d'interdire la délivrance de titres de séjour ou la naturalisation des étrangers condamnés pour avoir commis des infractions antisémites,…
…racistes ou xénophobes, ou de les expulser, car ces actes sont totalement incompatibles avec les valeurs de la République française.
M. Meyer Habib applaudit.
Cette volonté commune de renforcer les sanctions s'inscrit dans la continuité d'un droit qui combat fermement les dérives racistes, antisémites et leurs mutations depuis plus de cinquante ans. Des délits spécifiques sur la violence raciale, votés sous le président Pompidou, à la loi Gayssot réprimant le racisme, l'antisémitisme ou la xénophobie, nous avons toujours su nous adapter à l'évolution des faits pour que la justice puisse apporter une réponse efficace et dissuasive à ces actes inadmissibles.
Dans un contexte alarmant de flambée inquiétante des actes et des propos antisémites, les députés Les Républicains estiment que le renforcement des peines proposé est le bienvenu. Néanmoins, nous sommes aussi convaincus qu'il faut faire preuve d'audace et de courage pour protéger nos valeurs constitutionnelles de discours haineux et de comportements discriminatoires qui n'ont pas leur place au sein de la République française.
« Le vrai combat de la France, le beau combat de la France, c'est celui de l'unité, c'est celui de la cohésion, car oui, nos valeurs ont un sens », comme le disait le président Chirac. Faisons-les respecter pour que cette opportunité législative ne se transforme pas en rendez-vous manqué. En ce qui le concerne, le groupe Les Républicains sera au rendez-vous et soutiendra la proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. le rapporteur et Mme Astrid Panosyan-Bouvet applaudissent également.
Depuis le 7 octobre dernier, la France a dénombré pas moins de 1 247 actes d'antisémitisme. Dans notre République laïque et indivisible, ce décompte est insupportable. Oui, face à l'insupportable résurgence de l'antisémitisme, garantir l'unité de la nation est une nécessité impérieuse. Le Président de la République soulignait à raison, il y a peu, qu'il ne peut y avoir de tolérance pour l'intolérable. Rappelons que, dans notre histoire, l'antisémitisme a toujours été un prélude à d'autres haines comme le racisme. C'est pourquoi le combat qu'il nous faut mener face à l'antisémitisme ne doit pas et ne peut pas exclure la lutte contre d'autres formes de racisme et de discrimination, bien au contraire. C'est d'autant plus vrai que la haine dont se nourrit la violence sait se réinventer : telle un caméléon, elle est redoutable et sait parfaitement s'adapter, en particulier sur les réseaux sociaux, y trouvant un terrain propice pour mettre à mal notre cohésion nationale.
Face à cela, notre démocratie ne doit pas trembler. Le combat contre le racisme, quelle qu'en soit la forme, doit être un combat prioritaire mené par tous et exercé sans relâche, partout et toujours. C'est pourquoi notre groupe tient à saluer la poursuite par le Gouvernement du plan national de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations, en cohérence avec les travaux présentés dès 2018. Plus encore, nous saluons la politique menée par le ministère de la justice et les circulaires prises par le garde des sceaux pour que l'antisémitisme et son apologie ne demeurent pas impunis.
La présente proposition de loi est un énième pas dans cette lutte sans faille qu'il nous appartient de mener face au racisme et à l'antisémitisme. Désormais, et c'est heureux, le tribunal correctionnel pourra délivrer un mandat d'arrêt ou de dépôt en cas d'apologie de crimes et de contestation de crimes contre l'humanité. L'élargissement de cette possibilité à d'autres délits visés par la loi de 1881, adopté en commission des lois, nous paraît relever du bon sens. En outre, le renforcement de la répression des provocations, diffamations et injures non publiques présentant un caractère raciste, discriminatoire ou homophobe est une véritable avancée.
Notre groupe salue les évolutions apportées par la commission. Elles permettront d'offrir davantage de garanties aux victimes en permettant d'appréhender l'orientation sexuelle ou l'identité de genre à laquelle s'identifie la victime, mais aussi celle qui peut être perçue par un tiers. Plus encore, il est salutaire que l'efficacité du dispositif ait été renforcée en permettant qu'il s'accompagne d'un processus de justice restaurative. Enfin, et ce volet ne saurait souffrir d'aucune tolérance, la commission des lois a su rappeler son attachement à l'exemplarité sans faille attendue d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public.
Pour toutes ces raisons, le groupe Démocrate soutiendra cette proposition de loi qui nous permettra de nous doter d'un cadre normatif solide et de nous prémunir contre les forgerons de la haine. Toutefois, soyons vigilants : l'augmentation du quantum des peines est un levier, mais pas une fin en soi. Attachons-nous également aux autres leviers que sont l'éducation et la prévention. Nous ne pouvons que saluer les acteurs institutionnels ou associatifs qui œuvrent en ce sens. En tout état de cause, si la justice incarcère, elle doit aussi réparer et contribuer à renouer le dialogue. Il y va de la concorde et de la cohésion nationales.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe HOR. – M. le rapporteur applaudit également.
« Soixante-dix ans se sont écoulés depuis la nuit de l'Occupation. […] Et l'antisémitisme est toujours vivant. […] La tâche est immense et l'enjeu considérable. Car il en va de l'antisémitisme comme du racisme. Ce sont des poisons de la République. À une certaine dose, elle en meurt. » Tels étaient les mots de Robert Badinter, au soir de sa vie, sur ce fléau contre lequel il a lutté sa vie durant.
Il n'est pas besoin d'appartenir à une communauté pour en défendre les droits. Les principes humanistes et républicains prévalent.
Les crispations identitaires se développent ; le racisme et l'antisémitisme s'expriment à découvert. La France est menacée par ces comportements séparatistes. Renouveler l'universalisme, au-delà des religions ou des origines, doit se faire dans notre République, dans la fraternité qui signifie l'accueil et l'ouverture, et non le repli.
Nous sommes tous préoccupés par la hausse importante des actes antisémites et racistes : 14 930 plaintes ont été déposées pour ces actes en 2023, soit une augmentation de 18 % par rapport à 2022 ; 129 condamnations ont été prononcées pour menaces et 112 pour atteintes aux biens en 2023. Depuis le 7 octobre dernier, 281 affaires ont été signalées à la cour d'appel de Paris. L'éducation nationale enregistre une explosion de ces faits dans les collèges et lycées : il est nécessaire d'agir sur ce front, comme je l'ai signalé en commission des lois.
Le texte entend combler des vides juridiques qui empêchent une répression plus dissuasive des infractions à caractère raciste ou antisémite, plus particulièrement s'agissant des injures non publiques. S'il ne pose pas de difficulté et si nous soutenons toute mesure permettant de combler les trous dans la raquette, selon l'expression consacrée, nous nous interrogeons toutefois sur la capacité du dispositif à répondre efficacement à ce phénomène ; c'est notre travail de législateur.
L'article 1er , dont le champ a été élargi en commission et qui donne au tribunal correctionnel la possibilité de délivrer un mandat d'arrêt ou de dépôt contre un prévenu condamné à une peine d'emprisonnement pour contestation ou apologie de crimes contre l'humanité, risque d'avoir une application limitée, selon ce que j'ai cru comprendre en audition. Ce dispositif impliquera l'émission d'un mandat d'arrêt international, les auteurs de telles injures se trouvant majoritairement à l'étranger. Les États tiers pourront refuser de le délivrer, les délits d'opinion étant exclus des mandats d'arrêt internationaux. La qualification des injures publiques en délit d'opinion dépendra de chaque État. Par ailleurs, les juristes spécialistes craignent un potentiel usage dévoyé de cette disposition. Malgré ces réserves, l'article me semble répondre ponctuellement à une situation intolérable qui appelle une action de cette nature.
L'article 2, qui transforme en délits les contraventions d'injures racistes ou discriminatoires non publiques, aurait un effet dissuasif plus important. Nous savons, hélas, que les aggravations de peine n'ont pas cet effet. Si les injures et provocations non publiques sont intolérables, les injures publiques sont plus préoccupantes encore. C'est un phénomène de masse qui abîme notre système démocratique. À titre personnel, je considère que la hiérarchie établie entre la contravention, pour la sphère privée, et le délit, pour la sphère publique, était utile au fond, comme pour les procédures à mettre en œuvre ; cependant, la justice restaurative, introduite par les rapporteurs, donne un sens à ce passage au délit.
Nous savons qu'il faut responsabiliser davantage les hébergeurs de sites et les réseaux sociaux, qui ont une responsabilité énorme dans la diffusion des injures, en renforçant la veille opérée par Pharos, la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements. Le plan national de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations propose ainsi de créer un guichet unique pour faciliter le traitement des signalements. Nous ne pourrons avancer qu'avec le concours de l'exécutif sur ce point.
Enfin, dans la continuité de l'adoption en commission de notre amendement prévoyant la proposition systématique de la justice restaurative aux deux parties dans les cas d'injures non publiques, nous avons proposé un dispositif similaire pour les injures publiques, lequel constitue un premier pas, même s'il a été écarté pour irrecevabilité. Nous devons parvenir à la mise en cohérence d'un dispositif global de justice restaurative pour combler le fossé intellectuel immense constitué par le racisme et l'antisémitisme.
« Le ventre est encore fécond d'où a surgi la bête immonde. » Les derniers mots de la farce tragique de Bertolt Brecht résonnent avec d'autant plus de force que notre pays, comme de nombreux pays d'Europe et du monde, fait face à une augmentation préoccupante et inacceptable des actes antisémites. On oublie souvent la phrase qui précède cette formule finale de Bertolt Brecht : « Vous, apprenez à voir, plutôt que de rester les yeux ronds. » Comme nous y invite le dramaturge allemand, nous devons continuer de regarder droit dans les yeux l'augmentation des actes antisémites et racistes et y apporter des réponses fortes et concrètes.
Nous devons affronter la crudité et la brutalité des chiffres. Les Français de confession juive représentent moins de 1 % de la population et subissent à eux seuls plus de la moitié des actes et injures discriminatoires recensés. Au pays des Lumières et de Zola, les enfants de confession juive vont à l'école sous protection policière et les lieux de culte font l'objet d'une surveillance continue. Depuis les attaques barbares perpétrées par les terroristes du Hamas, le 7 octobre dernier, les actes antisémites ont même explosé ; la parole antisémite s'est libérée. Sous couvert d'un antisionisme revendiqué, les antisémites, les prédicateurs de haine s'en donnent à cœur joie et répandent leur fiel et leur idéologie mortifère.
Plus de 1 500 actes antisémites ont ainsi été commis en France rien qu'entre le 7 octobre et le 15 novembre 2023, contre 436 actes de ce type recensés sur l'ensemble de l'année 2022. Vendredi dernier – vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur –, un sexagénaire s'est fait rouer de coups à la sortie d'une synagogue à Paris, parce qu'il portait une kippa, parce qu'il était juif. Bref, les digues sont rompues ; la bête est revenue.
Est-elle jamais vraiment partie ?
Après la Shoah, on pensait que la bête avait été gavée de sang ; et pourtant, elle renaît – Robert Badinter nous avait mis en garde au soir de sa vie. « Heureux comme un juif en France », disait le dicton. Est-ce toujours le cas ? Je ne veux pas ici noircir le tableau ou jouer les Cassandre : la France protège et continuera de protéger les Français de confession juive et je connais, monsieur le garde des sceaux, votre détermination et celle du Gouvernement comme des gouvernements précédents. Les plans nationaux de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations se succèdent.
Néanmoins, force est de constater que, malgré les mesures que nous avons prises, malgré l'engagement et la détermination de nos policiers, gendarmes et magistrats, nous avons encore du chemin à faire pour lutter contre les discours de haine et les actes de violence. Par conséquent, je veux saluer la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui et vous remercier, monsieur le rapporteur, pour le travail que vous avez mené avec notre collègue Caroline Yadan.
Cette proposition de loi n'est pas la réponse miracle ou absolue qui mettrait fin à l'histoire pluriséculaire de l'antisémitisme et du racisme, mais elle apporte une pierre sur ce long chemin. Dans ce combat, nous devons laisser de côté les positions partisanes, les clivages politiciens et les postures ineptes. Dans ce combat, la représentation nationale doit se retrouver dans toute son unité et dans toute sa force.
En effet, à côté des actes antisémites et racistes publics, il en existe des plus pernicieux, des plus insidieux, des plus lâches ; des actes qui ne sont pas publics, qui sont tapis dans un courrier, dans une lettre. Face aux discours de haine, nous devons apporter une réponse pénale ferme et implacable. Comment accepter que les courriers antisémites odieux adressés à la présidente de notre assemblée ne fassent l'objet que d'une contravention de quelques dizaines d'euros ?
Les discours de haine, qu'ils soient tenus en public ou en privé, constituent toujours une première étape dans la brutalisation de la vie publique. Ils tendent à banaliser une violence qui pourra ensuite s'exprimer par un passage à l'acte, dans le cadre de délits plus graves ou de crimes. Ils sont désormais tellement répandus que l'on ne peut plus attendre que se produisent des atteintes graves à la personne pour prendre de véritables sanctions.
Je le dis solennellement : nous devons mettre fin à tout sentiment d'impunité en la matière. C'est indispensable pour enrayer ce phénomène très inquiétant. Or l'état du droit – certains l'ont rappelé – n'est plus adapté pour faire face à ces formes de violence verbale ou écrite de plus en plus prégnantes dans la société, qui mettent à mal le pacte républicain.
Notre droit doit assumer une fermeté sans faille en la matière : même dans un cadre non public, de tels propos sont inacceptables. Nous ne pouvons accepter cette violence et en tolérer la banalisation. Je me réjouis des dispositions adoptées en commission des lois et, plus encore, du fait que le travail mené par nombre de députés ait permis, par exemple, de délictualiser la contestation et l'apologie non publiques de crimes contre l'humanité.
Enfin, comme vous le savez, mon groupe est très attaché à la justice restaurative. C'est d'ailleurs à l'initiative de ma collègue Naïma Moutchou que nous avions adopté une disposition en ce sens, lors de l'examen de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (LOPJ). Je salue également l'adoption en commission de la disposition défendue par notre collègue Untermaier.
Si la réponse pénale n'est pas le seul moyen de lutte contre le racisme et l'antisémitisme, il en est un instrument essentiel et nécessaire. Vous l'aurez compris, le Groupe Horizons et apparentés soutiendra donc cette proposition de loi avec conviction et détermination.
Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et Dem. – M. Meyer Habib applaudit également.
La haine de « l'autre », cette altérité fantasmée, est un poison violent et profond, qui abîme notre contrat républicain et sape les valeurs de notre démocratie. Cette haine est multiple : elle prend la forme des racismes, de l'antisémitisme ou des LGBTphobies, et trace les contours d'une norme, elle aussi fantasmée, que certains voudraient imposer ; en d'autres termes, elle constitue un dangereux projet politique.
En effet, ce contre quoi nous luttons et ce à quoi voudrait s'opposer votre texte, c'est une vision politique. Et par chance, vous avez les moyens d'agir : à défaut de disposer d'une majorité au Parlement, vous êtes représentants du parti présidentiel, ce qui vous donne des moyens que nous, oppositions, n'avons pas. Or, et c'est bien dommage, ce texte se contente de sanctionner davantage sans construire pour prévenir de tels actes, sans réparer ce qui nous conduit à une telle situation.
Face aux divisions et à leur instrumentalisation, en premier lieu par l'extrême droite,…
…vous vous contentez de durcir les peines qui existent déjà. Certes, Emmanuel Macron disait qu'il ne peut y avoir « de tolérance pour l'intolérable » ; malgré tout, la réalité, c'est que la tolérance à l'intolérable atteint aujourd'hui un niveau dangereux. Souvenez-vous, il y a quelques années, on regardait avec étonnement et incrédulité le Tea Party, aux États-Unis, construire son audience dans les médias, puis prendre la main sur des médias entiers et conquérir ainsi l'opinion jusqu'à l'élection de Donald Trump. Aujourd'hui, c'est en France que l'empire médiatique de Bolloré défraye la chronique, en reprenant les mêmes recettes.
Des mots et expressions antisémites – souvenez-vous des fameux « Qui ? » – aux propos racistes décomplexés, jusqu'aux récentes attaques sur le droit des femmes à disposer de leur corps, tout y passe, exactement comme aux États-Unis. Alors oui, il est temps d'agir, dans la sphère publique comme privée, n'en déplaise à mes voisins de droite.
Vous avez choisi de considérer un champ large de discriminations, et je vous dis merci. Si vous me permettez de le reformuler ainsi, je dirai même que vous êtes, par votre travail, entrés dans le champ qui définit l'aspect systémique de ces haines. Je sais que vous n'aimez pas trop cette expression de racisme systémique, parce que vous pensez qu'elle est accusatoire pour nos institutions ou pour nos concitoyens. Sachez-le : vraiment, il n'en est rien. Mais comme je préfère le fond à la forme, le sens aux mots, je me contente de constater qu'à défaut de nous rejoindre sur le vocabulaire, nous nous rejoignons donc, et c'est suffisamment rare pour être noté, sur le fait qu'aucune démocratie mature ne saurait accepter une haine qui fait système.
Si je parle de système, c'est qu'historiquement, la haine de l'altérité est une construction culturelle. Racisme et antisémitisme sont historiquement construits, armés par les mêmes idéologies, les mêmes qui organisent le rejet des droits des personnes LGBT ou des femmes. Et le ton poli ou l'habit choisi ne changeront jamais la réalité d'un projet politique : la haine nie la fraternité, lui substituant le rejet systématique ; elle nie l'égalité, lui substituant une hiérarchie inventée ; elle nie enfin, logiquement, la liberté, l'asservissant au respect d'une norme encore une fois fantasmée. Vous le voyez donc, cette haine est intrinsèquement l'ennemie de la République, de la démocratie et de tout ce qui fait la France.
Vous renforcez les peines encourues ; ce n'est pas vraiment l'angle d'attaque que nous privilégions, mais nous ne nous y opposons pas. Toutefois, monsieur le rapporteur, quels moyens mettez-vous à la disposition de la justice, de la police, de la réparation des victimes ?
Ceux que vous n'avez pas voulu voter !
À ce jour, rien, ou quasi rien : j'en veux pour preuve – et je vais vous répondre, monsieur le ministre, même si vous aimez beaucoup m'interrompre –…
Je vous écoute !
…les nombreux amendements que nous avons défendus, depuis bientôt deux ans, visant à renforcer la formation sur ces sujets, à développer des campagnes de sensibilisation auprès des plus jeunes
Mme Nadège Abomangoli applaudit
ou encore à travailler ensemble à changer le regard sur l'autre et à s'accepter collectivement, pour ne citer que quelques exemples.
Avec quels moyens ?
À défaut d'une loi d'ampleur, donc, permettant de lutter ensemble contre la haine, et à défaut de renforcer encore plus la liberté, l'égalité et la fraternité, nous soutiendrons les amendements proposant le recours à une justice restaurative – il en a déjà été question – ou encore ceux visant à permettre aux associations d'ester en justice.
C'est lunaire !
Cependant, monsieur le rapporteur, plusieurs amendements menacent de dévoyer l'outil même que vous proposez. Si nous soutenons votre démarche, il m'est difficile, avant de connaître leur sort, d'appeler à voter ou non votre texte. Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vous qui êtes si volubiles en cet instant, la balle est dans votre camp.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est-à-dire ?
On va préparer une deuxième LOPJ !
Nous sommes réunis pour examiner le texte visant à renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste et antisémite. Cher collègue Lefèvre, je tiens à saluer cette proposition de loi, qui va dans le bon sens puisqu'elle contribue à lutter contre toutes sortes de dérives racistes, antisémites ou xénophobes dans notre pays ; nous en avons besoin.
Toutefois, nous mettons un bémol à cette approbation, car votre proposition se concentre surtout sur le volet pénal de la réponse ; en effet, elle s'emploie à renforcer, à durcir les peines prévues pour les personnes coupables d'infractions de ce type. Nous l'avons dit en commission : pour nous, le « tout-prison » ne peut pas être la réponse à un tel problème de société. C'est un mal qui est profond, ancré dans la société française ; pour lutter contre lui, comme certains collègues l'ont déjà dit, nous sommes certes d'accord pour utiliser efficacement la voie pénale, mais nous devons surtout œuvrer dans le domaine de la prévention.
Qu'est-ce qui pousse certaines personnes vers de telles radicalités ? Nous n'avons pas la réponse !
Un peu, si !
Nous pouvons seulement formuler des hypothèses. Je peux vous dire que même si la proposition de loi est votée aujourd'hui, elle ne suffira pas à arrêter ce qui est enclenché depuis des années. Je me fais ici le porte-voix de celles et ceux que l'on n'entend pas, que l'on ne voit pas et qui pourtant, chaque jour, subissent des actes racistes ; tous ces hommes et ces femmes qui n'ont pas accès au travail ou au logement, à cause de leur couleur de peau ou de leur orientation sexuelle, voire religieuse. C'est inadmissible dans un pays comme la France ; et pourtant, c'est une réalité du quotidien.
Les chiffres ont été rappelés : des millions de personnes refusent de porter ces affaires devant la justice, parce qu'elles pensent que cela ne servira à rien. La tâche qui nous incombe est donc essentielle, car le problème est profond, et c'est pour cette raison que le groupe GDR s'abstiendra : nous ne voterons pas contre le texte, parce qu'il part d'une bonne intention, mais nous ne voterons pas non plus pour lui, parce que les réponses qu'il apporte ne sont, à notre sens, pas suffisantes. Nous avions une position similaire concernant la LOPJ : nous n'étions pas d'accord pour ouvrir davantage de places de prison, parce que cela remplirait les prisons sans empêcher les gens de commettre des larcins. Deux visions, donc, s'opposent,…
…mais elles ne sont pas nécessairement contradictoires et je pense que nous pouvons parvenir à un compromis. Mais pour cela, nous devons travailler ensemble et débattre sur le sujet.
Je terminerai en rappelant que nous vivons des heures dangereuses. Critiquer un gouvernement, quel qu'il soit, peut désormais faire de nous un antifrançais ou un antisémite ; de tels amalgames, assumés par différentes sphères du pouvoir, se font jour depuis quelque temps et empêchent de parvenir à des solutions. La critique : oui ! L'insulte : non ! L'infraction : non ! Nous vivons des heures troubles, je l'ai dit, notamment en ce qui concerne le conflit entre Israël et la Palestine, et je tiens à apporter un soutien indéfectible à mon collègue Jean-Paul Lecoq, qui subit des injures et des menaces répétées, au quotidien, parce qu'il a adopté une position politique en critiquant un gouvernement et non un peuple.
Tout de même, collègue Lefèvre, avez-vous déjà entendu Jean-Paul Lecoq tenir des propos antisémites, envers le peuple juif ? Ce n'est pas vrai ! C'est un amalgame.
Monsieur Meyer Habib, ne commencez pas, s'il vous plaît ! Je vous remercie. Je disais donc que nous vivons des moments très compliqués et dangereux. Il importe que nous ramenions une certaine sérénité au sein de la nation France ; c'est ainsi que nous pourrons sortir grandis, collectivement, de cette situation.
On se rend compte, aussi, que le « deux poids, deux mesures » règne bien souvent, à situation égale. En fin d'année dernière, un officier de la police nationale, membre de la BAC – brigade anticriminalité –, à Cayenne en Guyane française, a tenu des propos racistes envers des concitoyens français. Il n'a pas été suspendu et continue à exercer dans les rues de Cayenne ; sa hiérarchie l'a couvert. Les mêmes propos, s'ils avaient été tenus par un policier en fonction dans l'Hexagone, auraient provoqué la suspension de leur auteur.
Une telle différence de traitement est très grave ! J'ai écrit au ministère de l'intérieur pour l'interpeller à ce propos, et aucune réponse ne m'a été apportée à ce jour. Si nous voulons vraiment lutter contre toutes ces formes de racisme, d'antisémitisme et de xénophobie, il faut vraiment que les personnes – notamment celles qui relèvent du régalien – qui ont commis des infractions caractérisées et démontrées soient mises sur le côté très rapidement.
Néanmoins, j'ai envie de croire à la volonté de créer un peuple harmonieux, sans haine, pour un avenir meilleur ; cela passera obligatoirement par un travail collectif.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet applaudit également.
Nous sommes amenés à examiner une proposition de loi qui vise à renforcer les sanctions pénales contre les infractions à caractère raciste ou antisémite. À mon sens, concevoir des textes dont le seul objet est d'aggraver les peines en matière pénale est déjà un échec, dont nous sommes toutes et tous collectivement responsables : nous ne sommes pas en mesure, en effet, dans notre société, de prévenir ce genre d'acte abject à l'encontre des personnes. L'avenir nous dira si le durcissement des peines contre des actes de nature raciste, antisémite, négationniste, le cas échéant commis par des personnes dépositaires de l'autorité publique, aura permis d'en réduire le nombre et d'apaiser la société.
Toutefois, je considère qu'il est nécessaire d'envoyer des signaux très clairs à la population : une insulte à caractère raciste, antisémite, visant l'origine ou la race, ne saurait en aucun cas être tolérée, y compris lorsque ces propos sont tenus sur internet ou sur des boucles d'échanges de messages écrits comme WhatsApp. Nous avons d'ailleurs tous pu constater que des groupes d'extrême droite ou des pays tiers, en général dirigés par un président autoritaire, avaient utilisé ces canaux pour tenter de déstabiliser notre pays en répandant un discours de haine qui se nourrissait de la situation en Ukraine ou en Palestine.
C'est en ce sens que notre groupe accueille très favorablement la proposition de loi. Nous devons être clairs. Les peines prévues par le législateur doivent être exécutées et le sentiment d'impunité ne doit plus être de mise pour les actes racistes et antisémites qui fracturent notre société.
En 2022, 6 600 crimes et délits à caractère discriminatoire ont été enregistrés par les policiers et les gendarmes, soit 5 % de plus en un an.
Nous réfutons cependant les discours qui laisseraient entendre que l'autorité judiciaire ne serait pas à la hauteur. La justice n'a pas eu la main tremblante : chaque année, près de 3 700 affaires relatives aux discriminations ou injures racistes sont traitées par les parquets et près de 90 % des personnes poursuivies sont condamnées.
Exactement.
Cependant, certains réussissent à échapper à une juste sanction, bien souvent parce qu'ils se trouvent à l'étranger. Notre groupe soutient donc le choix d'élargir les mandats d'arrêt et de dépôt à l'apologie des crimes contre l'humanité ou au négationnisme. C'est l'une des mesures du volet pénal du plan national contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations liées à l'origine.
Toutefois, je le disais, si nous saluons cette proposition de loi, nous n'en faisons pas l'alpha et l'oméga de la lutte contre les insultes visant les origines des individus. Comme c'est trop souvent le cas en matière pénale, face à une répression qui n'a pas tous les résultats escomptés, augmenter le quantum des peines apparaît comme la solution réflexe. C'est systémique. Or c'est dans l'éducation et l'ouverture à l'autre que nous trouverons les ressources nécessaires pour éviter que soient commis des actes aussi inqualifiables.
Nous entendons les remarques du rapporteur qui entend délictualiser les infractions d'injure, de diffamation ou de provocation « non publiques » afin d'aligner la répression sur les mêmes infractions « publiques ». Il est vrai qu'à l'ère du numérique, la frontière entre ce qui est public et ce qui est privé s'amincit et peut conduire à une certaine confusion.
Exactement.
Sans nous y opposer, il nous semble peu probable que cette aggravation ait un effet dissuasif face à des individus qui agissent souvent en meute ou sous couvert d'anonymat.
Nous sommes cependant favorables à la création d'une circonstance aggravante pour les dépositaires de l'autorité publique ou les chargés de mission de service public ; l'État ne peut pas donner des leçons sans balayer devant sa porte. Le comportement de ses agents doit traduire son exemplarité.
Enfin, notre groupe tient à saluer l'introduction en commission d'une dose de justice restaurative. L'idée de permettre un dialogue, dans un espace sécurisé, entre la victime et l'auteur de l'infraction prend tout son sens quand il s'agit de discrimination. L'objectif de la justice, en plus de punir, doit être de faire comprendre au condamné la gravité de ses actes et ainsi d'éviter la récidive.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. – M. Éric Martineau applaudit également.
« Le racisme et la haine ne sont pas inscrits dans les péchés capitaux, ce sont pourtant les pires », nous rappelait Jacques Prévert. Les pires parce que la pensée et l'expression de la haine de l'autre autorisent la violence, les agressions et ensuite les assassinats. Les pires parce que la violence verbale ouvre la voie et offre une excuse à la violence physique.
Tous les ans, 1,2 million de personnes en France subissent au moins une atteinte à caractère raciste, antisémite ou xénophobe. Aujourd'hui plus que jamais, la France fait face à une montée de la haine raciale et de l'antisémitisme. Les actes et propos antisémites explosent. Ils ont augmenté de plus de 1 000 % en 2023, en lien direct avec l'attaque terroriste islamiste du Hamas du 7 octobre dernier en Israël. La dernière agression antisémite a été commise il y a seulement quatre jours contre un homme qui sortait de la synagogue et qui s'est fait rouer de coups, au nom de Gaza.
La haine de l'autre s'exprime désormais partout, sur les murs de nos rues, dans nos universités, sur les réseaux sociaux, mais aussi dans la sphère privée, au travail ou encore à l'école. Cette haine est souvent attisée par certains irresponsables politiques, toujours au nom de la morale et parfois au nom du progressisme.
Les faits sont là. Ils humilient et portent atteinte à la dignité de la personne. La réponse pénale doit être renforcée.
Le 15 avril 2019, la 13ème chambre du tribunal correctionnel de Paris condamnait l'essayiste d'extrême droite Alain Soral à un an de détention, assorti d'un mandat d'arrêt, pour contestation de crime contre l'humanité. La décision aurait dû mettre un terme à l'impunité de ce triste personnage sanctionné à de multiples reprises pour des faits similaires. Pourtant, le parquet a interjeté appel du mandat d'arrêt, l'estimant dépourvu de fondement juridique.
En effet, en l'état, le code de procédure pénale prévoit la possibilité de décerner un mandat d'arrêt uniquement s'il s'agit d'un délit de droit commun ou d'un délit d'ordre militaire et si la peine prononcée est d'au moins d'une année d'emprisonnement.
En l'espèce, le prévenu avait été condamné pour une infraction, non de droit commun, mais prévue et réprimée par l'article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ce qui rendait l'exécution de ce mandat d'arrêt contraire à la loi.
Ce vide juridique profite à de nombreux auteurs d'infractions graves à caractère raciste ou antisémite. Il nous appartient de mieux lutter contre le fléau de ce racisme, de cet antisémitisme, afin de préserver notre pacte républicain et de protéger l'ensemble de nos concitoyens.
Concrètement, l'enjeu de cette proposition de loi est de pouvoir sanctionner les prédicateurs de haine qui sévissent notamment sur internet, ces multirécidivistes qui sont rarement présents à leurs audiences et vivent à l'étranger pour échapper à leurs condamnations.
C'est toute la logique, ainsi que les stratégies des prédicateurs de haine en ligne qu'il faut enrayer. Aucune main ne doit trembler quand la haine de l'autre s'immisce dans notre société. Le groupe Renaissance proposera plusieurs amendements pour préciser le champ d'application du texte et votera résolument en faveur de cette proposition de loi, que j'ai l'immense honneur de soutenir aux côtés de notre collègue Mathieu Lefevre dont je salue le travail de grande qualité.
Applaudissement sur les bancs des groupes RE, Dem et LIOT.
Vendredi 1er mars, Marco, 62 ans, a été violemment agressé au sortir de sa synagogue du 20
L'année dernière, 1 676 actes antisémites ont été recensés en France, ce qui représente une augmentation de 1 000 % depuis le 7 octobre. Un record effroyable !
Depuis le 7 octobre et les massacres commandités par les terroristes du Hamas en Israël, la haine du juif a explosé dans notre pays et en Europe. Il faut le dire, depuis le 7 octobre, nos compatriotes de confession juive sont les proies de la dérive antisémite des partisans de Jean-Luc Mélenchon.
Depuis le 7 octobre, guidés par leur haine pathologique d'Israël et motivés par leur clientélisme électoral abject, les porte-parole de La France insoumise reprennent à la lettre les éléments de langage du Hamas. Ce sont eux qui fournissent le carburant de la haine antisémite.
Ce ne sont pas les nazis qui ont fondé La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale !
Ce sont eux qui encouragent les passages à l'acte, les intimidations, les insultes, les profanations et les coups.
J'accuse Jean-Luc Mélenchon d'avoir mis une cible dans le dos de la journaliste Ruth Elkrief et d'avoir affirmé que la présidente de l'Assemblée nationale était allée camper à Tel Aviv pour encourager le massacre.
J'accuse Mathilde Panot qui refuse de qualifier le Hamas de groupe terroriste. J'accuse Danielle Obono d'avoir déclaré que le Hamas était un mouvement de résistance.
J'accuse Thomas Portes d'appeler au boycott du groupe Carrefour en Israël, comme le régime nazi appelait au boycott des commerces juifs dans les années 1930.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.– M. Meyer Habib applaudit également.
J'accuse Le Pen d'être antisémite et d'aller danser avec les fascistes anti-européens !
J'accuse Ersilia Soudais d'avoir déclaré le 7 octobre, quelques heures après les pogroms, que la haine attisait la haine.
J'accuse David Guiraud, qui ironisait sur les abominations en Israël en disant : « Le bébé dans le four, ça a été fait par Israël, la maman éventrée, ça a été fait par Israël ».
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ils multiplient les attaques ad hominem, comment voulez-vous qu'on reste calmes ?
Mais derrière le régiment des islamo-gauchistes, on retrouve la cohorte de ceux qui font semblant, de ceux qui laissent faire, de ceux qui trahissent.
Alors que la Macronie présente aujourd'hui cette proposition de loi, alors que M. Darmanin annonce vouloir renforcer la protection de la communauté juive en France, le 21 février dernier, les députés macronistes au Parlement européen ont voté contre la condamnation de la montée de l'antisémitisme dans le monde !
Vives exclamations sur les bancs du groupe RE.
N'importe quoi !
Ce vote de la honte vous déshonore et révèle au grand jour votre duplicité. Mais peut-être que ce vote infamant a été inspiré par Yacine Belattar, visiteur du soir d'Emmanuel Macron, connu pour ses accointances avec les islamistes ? Ou alors le rappeur antisémite Médine, qui avait reçu le soutien de Valérie Hayer, tête de liste Renaissance aux élections européennes du 9 juin ? Ou serait-ce l'une des contreparties du chèque du Qatar de 10 milliards d'euros, pays qui accueille et soutient les dirigeants du groupe terroriste du Hamas ?
La ecture de l'exposé des motifs de la proposition de loi prouve votre volonté délibérée de masquer l'origine et la nature de l'immense majorité des infractions à caractère antisémite.
Vous n'avez pas honte ?
Vous tentez de faire oublier votre responsabilité. Or l'antisémitisme ne tombe pas du ciel mais il peut arriver par avion et par bateau. Les folles politiques migratoires de ces trente dernières années ont favorisé l'implantation et le développement des idéologies islamistes et par conséquent de la haine des juifs.
À l'évidence, ce texte n'apporte aucune solution à l'explosion du nombre d'actes antisémites et, tout aussi grave, passe sous silence la montée du racisme anti-français. Le groupe Rassemblement national votera contre cette proposition de loi qui est une piteuse escroquerie intellectuelle et politique.
C'est une longue tradition, chez votre groupe ; mais de toute manière, on ne veut pas de vos voix.
Quelle honte ! L'antisémitisme vient aussi de chez vous.
À seize heures quinze, Mme Caroline Fiat remplace Mme Naïma Moutchou au fauteuil de la présidence.
J'ai l'honneur de m'exprimer après un raciste négationniste et antisémite.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. le garde des sceaux applaudit également. – Protestations sur les bancs du groupe RN.
Je citerai un certain nombre des messages que je reçois. Ils sont directement inspirés par ces gens-là : « Nadège Abougnouli, on va juste te renvoyer chez toi en Afrique avec l'ensemble de ta tribu !» ; « Ferme ta gueule Kirikou » ; « Retourne au Congo » ; « Ok Rachel Keke ». Voici les propos que reçoit régulièrement une députée noire en 2024, partie visible d'un iceberg dans le flot quotidien des propos racistes et, surtout, des discriminations subies par des millions de nos concitoyennes et concitoyens.
Ce constat appelle une réponse législative d'ensemble. La vôtre, monsieur le rapporteur, n'est malheureusement pas à la hauteur de l'enjeu. Votre loi, qui prétend lutter contre le racisme et l'antisémitisme, est en réalité une supercherie.
Penser que le renforcement des peines constitue une politique antiraciste conséquente, personne n'y croit, pas même les juristes auditionnés pour préparer la proposition de loi. Celle-ci élude complètement les causes profondes du racisme dans le pays.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Elle refuse de voir dans l'explosion des propos et des actes racistes de ces dernières années l'expression d'un racisme systémique et d'examiner les raisons qui ont conduit à une telle banalisation de la parole raciste et antisémite, notamment par l'entremise…
…du projet de loi « immigration », que vous avez adopté main dans la main avec le Rassemblement national.
La proposition de loi est donc un texte d'affichage pour se donner bonne conscience à peu de frais. Elle refuse d'apporter une réponse politique au climat que je viens de décrire. Au bout du compte, elle fait porter la responsabilité aux victimes : à charge pour elles d'engager des poursuites.
Ainsi votre texte préfère-t-il l'inflation pénale, la responsabilité individuelle et la justice sans moyens.
La transformation de contraventions en délits va en effet déborder les tribunaux et rallonger des procédures auxquelles personne ne croit. On ne se posera pas la question du « chiffre noir » – ces millions d'actes qui passent sous le radar – alors que seulement 5 % des victimes potentielles portent plainte.
J'entends ça tous les jours : il fallait voter les budgets, madame !
On ne se demandera pas pourquoi les victimes estiment que justice n'est pas rendue, ni pourquoi nombre d'entre elles, lors des dépôts de plainte, savent que les faits sont trop souvent minimisés – et leur caractère raciste ou antisémite nié.
Finalement, à quoi sert ce texte ?
La persistance du racisme et de l'antisémitisme appelle une réflexion globale sur la société, l'éducation, la justice, le travail, les médias – de concert avec les associations d'éducation populaire, entre autres, évidemment.
Or vous avez transformé ce problème global en débat pénal. Ce faisant, vous anesthésiez la lutte contre le racisme ordinaire.
Le racisme ordinaire, c'est quand 80 % des personnes contrôlées sont des jeunes racisés, c'est-à-dire renvoyés à une altérité essentialisante ; quand les personnes disposant d'un nom à consonance arabe ou africaine ont 30 % de chances en moins d'obtenir un premier rendez-vous pour visiter un appartement.
L'antisémitisme ordinaire, c'est quand, en entreprise – je l'ai vécu –, certains salariés goguenards parlent de « Cohen n° 1 » et de « Cohen n° 2 » pour évoquer leurs collègues juifs.
Le racisme ordinaire, c'est quand les personnes racisées subissent des discriminations à l'embauche « significatives et robustes », pour reprendre les termes d'une étude du ministère du travail.
Il fallait voter la proposition de loi de M. Ferracci visant à lutter contre les discriminations, madame Abomangoli !
Va-t-on condamner en justice M. Darmanin parlant de la « mollesse » de Mme Le Pen, qui fonde son idéologie sur la préférence nationale ? Va-t-on condamner la remise en cause du droit du sol – ce droit qui fait de la France une nation civique et non ethnique ?
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Bien sûr que non ! On ne fait pas le procès du racisme systémique et de la désignation des étrangers en boucs émissaires.
Traiter les injures racistes et antisémites passe par la condamnation collective des conditions de la libération de la parole raciste. C'est en se conformant à cet impératif que les victimes se libéreront et iront jusqu'à porter plainte, voire jusqu'à mener des actions de groupe – que nous devons faciliter.
Pendant ce temps, la Défenseure des droits s'alarme de l'absence de politique publique d'ampleur consacrée à la discrimination raciste. Voilà ce qui est en jeu. Pourtant, alors que le phénomène est systémique, le plan national de lutte contre les discriminations de 2023 se résume à une addition de mesurettes sans ambition.
Soyons à la hauteur du phénomène et mettons un terme, pour commencer, au déni des causes historiques et structurelles du racisme et de l'antisémitisme.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Sandra Regol applaudit également.
Cessez, par exemple, de caricaturer les antiracistes en wokistes ou en racialistes. Regardez en face le rôle joué par certaines politiques publiques qui entretiennent encore un traitement différencié des individus.
Le groupe La France insoumise appelle à la réalisation de l'idéal républicain : réellement universaliste et donc réellement antiraciste. Nous voulons accompagner sérieusement les victimes, et demandons en conséquence des moyens pour la Défenseure des droits, un Commissariat à l'égalité et un code de la discrimination. Un plan ambitieux doit impliquer l'ensemble des institutions et des services de l'État. Des millions de citoyens, enfermés dans leur vie par un racisme structurel, attendent qu'on leur apporte enfin une voix et du soutien.
Plusieurs députés du groupe LFI – NUPES se lèvent pour applaudir.
Naïvement, j'ai cru que nous pourrions mener un débat apaisé ; que l'Assemblée nationale, rassemblée, pourrait proposer une solution au problème du racisme et de l'antisémitisme, même si nous n'apportons pas une réponse d'ampleur à cette question – vous avez raison, M. Rimane – ni exhaustive.
Après avoir écouté les prises de position des uns et des autres, et singulièrement celle de M. Odoul, je suis toutefois rassuré. Vous voterez contre le texte, avez-vous annoncé : tant mieux ! Les républicains que nous sommes ne veulent pas de vos voix.
Protestations sur les bancs du groupe RN.
Tiens ? Je croyais que les députés du RN étaient avec vous, dans l'arc républicain ?
Ils ne veulent pas des voix de ceux qui ont parlé de « point de détail de l'histoire » et qui parodient aujourd'hui Zola alors qu'ils étaient anti-dreyfusards hier.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Ils ne veulent pas non plus des voix de ceux qui qualifient les lois Pleven et Gayssot de 1972 et 1990 de scélérates, comme Marine Le Pen dans Rivarol en 2007.
Vous me direz peut-être, au cours de ce débat, que vous ne les considérez plus comme telles, monsieur Odoul, mais c'était l'avis de Marine Le Pen en 2007 – un élément du socle idéologique du Front national – dans Rivarol, une lecture qui vous est familière.
Concernant l'efficacité de l'article 1er , vous avez raison, madame Untermaier, le dispositif concernera un faible nombre de cas. Il me semble toutefois que si une seule personne devait faire l'objet d'un mandat d'arrêt, le législateur ferait œuvre utile. Je pense que notre Parlement a aussi vocation à rappeler les valeurs de la République dont nous sommes les garants ; tel est également le sens de l'article 1er .
La hiérarchie des peines entre infractions publiques et non publiques est maintenue : la peine prononcée en matière d'infraction publique sera supérieure.
S'agissant des moyens donnés à la justice, pardonnez-moi, madame Regol, mais vous n'avez pas voté les moyens supplémentaires donnés à la justice de notre pays par le Président de la République et le garde des sceaux depuis 2017.
Quand le Président de la République a été élu en 2017, il a trouvé un budget de la justice s'élevant à 6 milliards d'euros. Celui-ci est aujourd'hui de 11 milliards et nous allons recruter 10 000 personnels supplémentaires pour rendre mieux, et plus vite, la justice. Vous avez voté contre. Vous ne pouvez pas demander de faire un effort pour augmenter des moyens que vous avez vous-même refusés.
Monsieur Rimane, vous avez parlé du tout-prison et vous avez raison : la réponse pénale n'épuise pas le sujet. Il s'agit également de faire de la pédagogie. Or des réponses non pénales sont effectivement prévues par le texte : les mesures de justice restaurative proposées par Mme Untermaier ; les peines complémentaires ; les stages de citoyenneté introduits par M. Patrier-Leitus ; les travaux d'intérêt général. Le plan de lutte contre le racisme et l'antisémitisme de 2023 est absolument exhaustif et ne s'en tient pas à la seule réponse pénale.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.
Ce que nous démontrent une fois encore les débats qui viennent de commencer, c'est que les extrêmes se rejoignent.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
M. Odoul a raison de rappeler ce que l'extrême gauche énonce depuis de nombreux mois :…
… quand elle dit que Yaël Braun-Pivet, dont la famille a été déportée, est allée camper –…
… camper ! – à Tel Aviv pour encourager les massacres.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Pourquoi croyez-vous que la famille de Robert Badinter n'a pas voulu de vous lors de ses funérailles ?
Laissez-moi aller jusqu'au bout, s'il vous plaît. Vous invitez Corbyn ;…
…vous traitez le patron du Crif de membre de l'extrême droite ;…
…vous invitez Médine ; vous rappelez, à propos d'Élisabeth Borne, qu'elle est une rescapée. Vous êtes honteux !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et HOR. – M. Meyer Habib applaudit également. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Tout ça pour complaire à votre électorat islamiste.
Disant cela, je ne dis cependant pas tout.
M. le ministre se tourne vers les bancs du RN. – « Ah ! » sur les bancs du RN.
M. Bardella est incapable aujourd'hui de dire si Jean-Marie Le Pen est antisémite…
…alors qu'il a été condamné – il était tout de même président d'honneur du parti quand il a été viré.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Les mots ont un sens : il a d'ailleurs été condamné près de vingt fois, pour des propos haineux mais aussi pour des violences exercées sur une élue socialiste, sans compter ses propos homophobes.
M. Bardella, lorsqu'il se rend à Florence avec ses homologues européens et qu'il entend des propos antisémites – tels qu'ils n'ont pas été tenus depuis cinquante ans en Europe – répond au journaliste qui l'interroge : « J'ai pas bien compris, j'comprends pas la langue… »
Quant à vous, monsieur Odoul, lorsqu'on vous interroge au sujet des 3 000 migrants massés à la frontière polonaise, vous répondez qu'ils peuvent crever de froid !
Comment ça, quelle fake news ? Je vous ai entendu, à la télévision ! Dites que je suis un menteur…
Vous l'avez dit, monsieur Odoul ! Vous en avez honte aujourd'hui ! Vous donnez des leçons en matière d'antisémitisme mais oubliez de rappeler que celui-ci vient aussi de votre parti, fondé par un Waffen SS.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et HOR. – Exclamations prolongées sur les bancs du groupe RN.
Ce n'est pas fini ! Souffrez que je vous réponde !
La dédiabolisation – cette vaste plaisanterie : on parle davantage des chats de Mme Le Pen que de ses amis. Parmi eux, M. Chatillon gère, à travers une filiale, une société qui s'appelle Edda : le prénom de la fille de Mussolini !
C'est un gudard, un violent, un néonazi ! Il a d'ailleurs fait un procès et il a perdu. Voilà qui sont vos amis !
Applaudissements sur les bancs des commissions et du groupe RE.
Je n'ai pas fini ! Il ne suffit pas de défiler lors d'une marche contre l'antisémitisme pour être exonéré de tout,…
…et en particulier de votre scandaleux passé !
Mme Julie Lechanteux s'exclame. – Brouhaha.
Dois-je vous rappeler qu'en 2017, Mme Marine Le Pen demandait aux franco-israéliens de choisir leur nationalité ? Elle ajoutait d'ailleurs que ceux qui choisiraient la nationalité israélienne pourraient, malgré tout, rester en France.
Dois-je parler de votre ami Loustau…
…qui faisait une soupe avec du porc pour empêcher les juifs et les musulmans d'en boire ? Vous en voulez encore ? J'en ai encore !
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe RN.
J'aurai grand plaisir à vous rappeler tout ça : la campagne des européennes va commencer et vous serez obligés d'examiner les propos que vous avez tenus par le passé.
Applaudissements sur les bancs des commissions et des groupes RE et HOR.
Je ne vais pas donner d'ordres – surtout pas –, mais tâchons de nous écouter, s'il vous plaît.
Rappels au règlement
La parole est à M. Julien Odoul, pour un rappel au règlement.
Sur quel fondement, s'il vous plaît ?
Sur le fondement de l'article 70, alinéa 3, pour une mise en cause personnelle.
Monsieur le ministre, vous nous avez abreuvés d'outrances, d'insultes, d'injures. Si vous voulez faire de l'histoire, et même de la préhistoire, allons-y :…
Oui, oui !
…évoquons quelques-uns de vos amis idéologiques. Aux heures sombres de la Mitterrandie, l'ancien Président de la République accueillait à sa table l'antisémite René Bousquet,…
Ce ne sont pas mes amis !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Quel est le rapport avec votre antisémitisme ? Mitterrand et Bousquet n'étaient pas mes amis !
Monsieur Odoul, je veux bien que vous fassiez un rappel au règlement sur le fondement de l'article 70, alinéa 3, puisque vous avez été cité, mais je vous prie de vous en tenir aux faits que vous reprochez au garde des sceaux.
J'ai en effet été cité. M. le ministre s'est livré à une manipulation grossière ; il aime à tronquer, à déformer. Mais c'est la marque de fabrique de la Macronie.
« Oh ! » sur les bancs du groupe RE.
S'agissant de l'extrait que vous avez cité, monsieur le ministre, il faut écouter les questions des journalistes mais aussi les réponses.
J'ai écouté !
Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, ceux qui menacent nos compatriotes de confession juive, c'est LFI …
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
C'est ridicule !
…votre refus de condamner l'islamisme et de vous attaquer à la menace que celui-ci fait peser sur eux !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Depuis des années, vous jetez nos compatriotes de confession juive dans les bras…
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.– Mme la présidente coupe le micro de l'orateur.
Il y a quelques semaines, vous avez tous quitté l'hémicycle en faisant mine d'être offusqués, outragés, parce que je vous avais dit : « Avant de donner des leçons, faites le ménage ! »
Vos amis, vous ne vous souvenez même plus de leur nom : Chatillon, Loustau, Péninque, Soral, Dieudonné…
Ce ne sont pas mes amis ! Et « Durafour crématoire » ? Eh oui !
Je n'ai pas tout à fait terminé. Mme Le Pen me promet la foudre : une plainte ! Elle ne sait même pas que les propos tenus dans cette enceinte ne peuvent pas faire l'objet d'une plainte…
…– mais ne parlons pas de sa compétence. Voulez-vous la liste de vos amis antisémites, nazillons, gudards ? La voulez-vous ?
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Un dernier mot – ensuite, vous ne m'entendrez plus. Monsieur Odoul, pensez-vous que M. Le Pen était antisémite ? Répondez à la question !
M. Damien Odoul s'esclaffe. – Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR. – M. Bertrand Pancher applaudit également.
La parole est à Mme Sandra Regol, pour un rappel au règlement.
Sur quel fondement, s'il vous plaît ?
Sur le fondement de l'article 100, relatif à la bonne tenue des débats.
Depuis tout à l'heure, les mises en cause personnelles se succèdent, les unes appelant les autres – je ne citerai personne. Or nous ne pouvons pas débattre d'une question aussi importante que celle de la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et toute forme de discrimination, avec des gens qui se livrent à des invectives personnelles à tout bout de champ.
Je vous demande donc, madame la présidente, de trouver le moyen de nous permettre de mener à bien ce débat, lequel, je le rappelle, avait bien débuté. Nous avons, pour une grande partie d'entre nous, fait le choix de prendre de la hauteur, d'éviter les attaques ad hominem, et nous avons, à présent, le sentiment d'être dans un poulailler : tout le monde s'invective.
Ce n'est pas à la hauteur du débat et ce n'est pas digne de l'Assemblée nationale !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.
Je vous propose que nous évitions de nous interpeller – je ne peux pas faire plus.
Sourires.
Sur le vote de l'amendement n° 18 et de l'article 1er , je suis saisie par le groupe Renaissance de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Nadège Abomangoli, inscrite sur l'article.
La diffusion de la haine en ligne est un élément crucial de la propagation en France des idées racistes et antisémites. Sur les réseaux sociaux notamment, les propos abjects pullulent. Cette question est, du reste, l'une de celles qui avaient animé notre débat sur le Digital Services Act européen, la législation sur les services numériques – le problème n'est donc pas propre à la France.
Le droit de la presse a toujours recherché un équilibre précieux entre les impératifs que sont la liberté d'expression et la lutte contre la haine en ligne. Nous estimons que l'extension, adoptée par la commission, du dispositif de l'article 1er à la diffamation à caractère raciste et à l'injure est une voie problématique concernant les délits de presse. L'inflation pénale qui nous est ainsi proposée ne nous semble pas de nature à garantir la clarté juridique de cette matière – elle accroît plutôt le flou.
Se pose également la question de l'effectivité de la mesure proposée. Comment pourrait fonctionner ce dispositif en cas de diffamation ou d'injure ? La gravité des propos tenus ne doit pas nous faire perdre de vue la nécessité de garantir par ailleurs les droits et libertés des accusés. C'est pourquoi nous sommes opposés à l'article 1er .
La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l'amendement de suppression n° 18.
Puisque ma camarade Nadège Abomangoli a bien expliqué les enjeux liés à l'article 1er , je vais me permettre de réagir à certains des propos qui ont été tenus.
Si vous croyez vraiment au durcissement de la répression pénale des propos racistes ou antisémites que vous proposez, il faut, dès lors que vous nous accusez en même temps de tenir des propos à caractère antisémite – vous ne nous avez pas encore accusés de tenir des propos racistes –, il faut, disais-je, porter plainte.
Madame Abomangoli, vous avez évoqué la clarté. Il me semble qu'avec cet amendement de suppression, les choses sont claires : vous voulez protéger les prédicateurs de haine, notamment ceux qui se cachent à l'étranger, dans des pays où l'on ne peut pas les interpeller faute de pouvoir émettre contre eux un mandat d'arrêt ou un mandat de dépôt.
De quoi s'agit-il, en effet ? De la possibilité de décerner un mandat d'arrêt ou de dépôt contre des personnes coupables d'avoir commis les délits de contestation de crime contre l'humanité ou d'apologie de crime contre l'humanité, ou des infractions publiques par voie de presse, passibles d'une peine pouvant aller jusqu'à cinq ans d'emprisonnement. Vous jugez, quant à vous, normal qu'une personne condamnée pour un délit passible de cinq ans d'emprisonnement puisse ne pas être recherchée par la force publique et emprisonnée. C'est là toute la différence entre vous et nous.
Vous dénoncez une inflation pénale, mais l'amendement adopté par la commission des lois vise tout simplement à mettre en cohérence le texte initial de la proposition de loi avec le régime des délits de presse passibles d'une peine d'emprisonnement prévus dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
J'observe avec regret que se noue, sur l'article 1er , une alliance de circonstance entre ceux qui mettent en avant la liberté d'expression – qui n'est pas la liberté de tout dire – et ceux qui jugent que les personnes qui contestent la Shoah, estiment que le génocide arménien n'était pas si grave que cela ou se livrent publiquement à des provocations à la haine doivent être protégés et ne méritent pas d'aller en prison.
Pour nous, madame Abomangoli, la place de M. Soral…
Votre ami !
M. le garde des sceaux s'adresse aux députés du groupe RN.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Il est exactement le même que celui du rapporteur.
Nous voyons là la vérité toute nue, celle de l'alliance entre les deux extrêmes :…
…l'extrême gauche, qui propose la suppression d'un article dont l'objet est de lutter contre le racisme et l'antisémitisme, et l'extrême droite. Du reste, il suffit de consulter des journaux néonazis tels que Rivarol ou le site Égalité et Réconciliation d'Alain Soral…
La quenelle, c'est chez vous !
M. le garde des sceaux s'adresse aux députés du groupe RN et joint le geste à la parole.
…pour constater que leur ligne éditoriale porte aux nues Jean-Luc Mélenchon et Mathilde Panot.
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Andy Kerbrat rit.
C'est cette jonction des extrêmes que nous devons dénoncer et que nous continuerons à dénoncer. En tout état de cause, cet amendement de suppression vous déshonore à jamais !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Mme Yadan parle beaucoup plus de Jean-Luc Mélenchon que le site Égalité et Réconciliation ou que Rivarol, mais c'est un autre problème.
Monsieur le rapporteur, c'est l'effectivité et l'utilité de votre mesure que nous mettons en question. Puisque vous affirmez que les propos haineux pourront désormais être poursuivis à l'étranger, prenons l'exemple de Boris Le Lay, ce cyberharceleur breton, émigré au Japon, qui passe sa vie à déverser des torrents de haine complotiste, négationniste, antisémite, raciste, négrophobe. Il n'a pas été interpellé, et votre loi n'y changera rien.
Encore moins s'il n'y a pas de mandat d'arrêt !
Vous gesticulez pour donner le sentiment que vous agissez, mais vous n'arrêterez pas Boris Le Lay avec une telle mesure. Elle ne sert à rien ! Ce n'est pas avec ce type de méthodes que vous réussirez.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est certain que si l'article 1er n'est pas adopté, nous n'y arriverons pas car on ne pourra pas décerner de mandats d'arrêt ou de dépôt.
Par ailleurs, peut-être ai-je été imprécis, mais cette mesure concerne également des personnes qui se trouvent en France et qui ne se présentent pas à l'audience ou que l'on n'est pas capable de trouver.
Enfin, vous avez évoqué des pays avec lesquels nous n'avons pas de convention d'extradition. Pardon, mais si la France s'est dotée de lois aussi importantes que les lois Pleven et Gayssot, c'est aussi parce qu'en la matière nous sommes à l'avant-garde. Nous, nous ne considérons pas que la minimisation d'un crime contre l'humanité relève de la liberté d'expression. Nous assumons notre différence par rapport au monde entier. Je regrette le temps où Jean-Claude Gayssot, député communiste, siégeait sur ces bancs : c'est un temps où la gauche savait faire l'union sur ces questions.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
La parole est à M. Julien Odoul, pour un rappel au règlement.
Sur quel fondement, s'il vous plaît ?
Sur celui de l'article 100, relatif à la bonne tenue de nos débats.
M. Le ministre vient de faire une quenelle antisémite.
M. le garde des sceaux s'esclaffe. – Sourires sur plusieurs bancs du groupe RE.
Ce geste, je le rappelle, a été assimilé au salut nazi. Nous demandons donc qu'il présente des excuses, qu'il soit rappelé à l'ordre, madame la présidente, et nous demandons également une suspension de séance.
La suspension de séance est de droit.
Monsieur Odoul, êtes-vous d'accord pour que M. le ministre vous réponde avant que je suspende la séance ?
Je ne sais pas à quoi je dois répondre. Quoi qu'il en soit, j'ai dit – et vous auriez pu m'entendre, car j'ai parlé assez fort – que M. Soral, puisqu'il était question de lui, était allé faire la quenelle – la quenelle, c'est cela, voyez-vous …
L'orateur joint le geste à la parole. – Vives protestations sur les bancs du groupe RN
Pardon, mais c'est vous qui l'avez inventée !
Les protestations redoublent. – Mme Caroline Parmentier se lève et invective l'orateur.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à seize heures cinquante-cinq.
Rappel au règlement
M. le garde des sceaux rit
…je tenais à rappeler que notre collègue Rebeyrotte avait été sanctionné pour avoir fait un salut nazi dans l'hémicycle.
La moindre des choses serait que M. Dupond-Moretti présente ses excuses,…
…pas seulement au groupe Rassemblement national, à qui il a adressé cette quenelle, mais à tous nos compatriotes qui souffrent de cette banalisation de l'antisémitisme et de ces gestes inqualifiables.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
J'ajoute que M. Dupond-Moretti est un multirécidiviste : quand ce ne sont pas des bras d'honneur, ce sont des quenelles.
Protestations sur quelques bancs du groupe RE.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 115
Nombre de suffrages exprimés 109
Majorité absolue 55
Pour l'adoption 34
Contre 75
L'amendement n° 18 n'est pas adopté.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Je souscris entièrement à l'objectif de l'article 1er , qui est de mettre fin au sentiment d'impunité des entrepreneurs de haine tels que Soral ou Dieudonné, qui cherchent parfois à échapper aux poursuites en se rendant à l'étranger. La possibilité d'émettre un mandat d'arrêt en cas de condamnation pour les infractions racistes et antisémites les plus graves se justifie pleinement.
Néanmoins, je propose, compte tenu du champ d'application de la proposition de loi, qui porte sur les infractions à caractère discriminatoire, de limiter cette possibilité – dans le cas d'injures ou de diffamation publiques – aux faits réprimés par les deuxième et troisième alinéas de l'article 32 de la loi du 29 juillet 1881, ainsi qu'à ceux réprimés par les troisième et quatrième alinéas de l'article 33 de cette même loi.
Je suis favorable à cet amendement de précision bienvenu, même si le mandat d'arrêt n'est possible que lorsque le fait reproché est puni d'une peine d'emprisonnement.
L'amendement n° 1 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 119
Nombre de suffrages exprimés 116
Majorité absolue 59
Pour l'adoption 77
Contre 39
L'article 1er , amendé, est adopté.
La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l'amendement de suppression n° 20.
Cette proposition de loi entend renforcer la répression pénale des actes à caractère raciste ou antisémite. Lutter contre le racisme et l'antisémitisme est un objectif commun à une large partie de l'Assemblée nationale – même si se trouvent, en face de nous, des gens qui ne le partagent pas forcément, et qui maintiennent dans leur programme, par exemple, la suppression du droit du sol, qui fait pourtant le caractère républicain de notre patrie.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Cependant, que provoque le renforcement de la répression pénale ? Rien. Chaque fois, il reste sans effet sur la commission des actes visés. Or notre objectif est bien de lutter contre les actes eux-mêmes, et d'empêcher la commission d'actes à caractère raciste ou antisémite. Dès lors, ce qu'il faut faire, c'est lutter contre le caractère systémique du racisme et de l'antisémitisme ; c'est lutter contre les préjugés qui les sous-tendent ; c'est faire de la formation, dans tous les domaines de la société.
En revanche, renforcer la réponse pénale, c'est passer à côté du problème. Ne serait-ce que parce que les gens ne vont pas porter plainte, comme cela a été dit. D'un côté, on estime à 1,2 million le nombre d'actes à caractère raciste et antisémite commis chaque année – en augmentation depuis le 7 octobre 2023, comme on l'a rappelé ; de l'autre, seules 12 000 plaintes sont déposées en ce sens. C'est là que se situe le problème ! Il faut aider les gens à porter plainte et, pour cela, changer par exemple les méthodes d'accueil. Renforcer la répression pénale, je le répète, ne changera rien à la commission de ces actes.
Je ne partage pas du tout l'analyse qui prête un caractère systémique au racisme, car j'ai foi en l'individu, et je pense que les systèmes n'existent pas.
« Mais non ! » et exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
En revanche, monsieur Léaument, vous qui déplorez à longueur d'année un racisme d'État et une police qui serait raciste, le texte prévoit l'introduction d'une circonstance aggravante pour les personnes dépositaires de l'autorité publique.
En proposant la suppression de cet article, vous considérez qu'un policier, que vous jugez raciste par définition, devrait être condamné de la même manière qu'une personne non dépositaire de l'autorité publique. Or cet article, en correctionnalisant les infractions à caractère raciste ou antisémite, permet l'introduction de cette circonstance aggravante que vous appelez de vos vœux.
Je vous engage donc à faire preuve d'un peu de cohérence
M. Aurélien Saintoul s'exclame
et à voter cet article. Ce faisant, vous reconnaîtriez que quand on est dépositaire de l'autorité publique, on est investi d'une charge symbolique et de valeurs beaucoup importante que quand on ne l'est pas. Je souhaite vraiment – peut-être en retirant cet amendement – que vous mettiez votre vote en cohérence avec ce que vous pensez.
Nous le savons, l'exemplarité n'est pas une règle d'airain.
Il y a en effet des gens qui commettent une infraction en ayant la certitude qu'ils ne se feront pas prendre. Et comme Robert Badinter l'a merveilleusement illustré, l'auteur d'une infraction ne la commet pas avec le code pénal sous le bras. Cela étant, il arrive qu'une disposition pénale dissuade.
Je le répète, l'exemplarité n'est pas une règle simple. Certaines personnes sont condamnées dix-huit ou dix-neuf fois pour incitation à la haine raciale et, pour autant, ne s'arrêtent jamais de commettre cette infraction : je ne citerai pas d'exemple, mais nous les avons tous en tête.
Je suis donc totalement défavorable à cet amendement, même si, je le redis, il ne suffit pas d'augmenter une peine pour que tout soit arrangé. Si c'était le cas, cela ferait des siècles que nous le ferions.
Nous sommes d'accord, mais vous êtes en désaccord avec l'amendement ? Vous êtes d'une mauvaise foi incroyable !
Il n'empêche que le renforcement des peines peut dissuader certains personnages de tenir des propos racistes ou antisémites et rien que pour cela, ce n'est pas inutile de le faire.
Depuis tout à l'heure, les députés du groupe La France insoumise – NUPES nous expliquent que la réponse pénale ne fait pas tout, qu'il faut faire de l'éducation et agir à la racine. Le garde des sceaux l'a dit, et nous partageons cet avis : en effet, la réponse pénale ne fait pas tout. Toutefois, chers collègues, vous ne pouvez pas balayer d'un revers de main le caractère dissuasif du renforcement des peines,…
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
À vous qui nous parlez d'exemplarité, d'éducation… mettons de côté la réponse pénale, monsieur Léaument : montrez l'exemple. Avant-hier, lors d'une conférence, Judith Butler a soutenu que ce qui s'était passé le 7 octobre était un « soulèvement », une « résistance armée », et cela sous les applaudissements de trois parlementaires de La France insoumise. Montrez l'exemple si vous voulez lutter contre l'antisémitisme !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR, RE et Dem. – Mme Katiana Levavasseur applaudit également.
…tout comme je suis en désaccord avec la réponse apportée par M. le rapporteur.
Nous sommes régulièrement amenés à renforcer le caractère dissuasif du dispositif pénal. Par exemple, nous avons défendu ensemble des amendements visant à instaurer des sanctions plus importantes en matière de délinquance financière, considérant qu'il fallait davantage et mieux punir.
Ainsi, la réponse pénale a parfois une utilité. Il me semble donc que vous jetez le bébé avec l'eau de bain en soutenant qu'il faut plutôt mener une politique d'accès au droit, de sensibilisation et d'information. Faisons les deux ! Certes, ce n'est pas grâce à ce texte que nous pourrons le faire, mais j'estime que nous avons besoin d'une politique pénale de lutte contre les discriminations, le racisme et l'antisémitisme.
Cela étant, il ne faut pas avoir peur, monsieur le rapporteur, de constater qu'il peut y avoir des effets systémiques. La Défenseure des droits nous explique en effet que certaines modalités d'organisation, relatives notamment aux contrôles de police – et sans que je considère que les policiers sont consubstantiellement racistes –, peuvent entraîner une pratique discriminatoire en ciblant spécifiquement des personnes en raison de leur origine étrangère réelle ou supposée.
Je suis donc contre cet amendement et pour que nous renforcions non seulement le dispositif législatif pour sanctionner le racisme et l'antisémitisme, mais aussi, monsieur le garde des sceaux, la politique relative aux personnes devant faciliter les dépôts de plainte, l'accompagnement et le conseil juridique. L'un et l'autre ne sont pas exclusifs.
Mes chers collègues, lors de la discussion d'un amendement, le règlement prévoit l'intervention d'un orateur pour et d'un orateur contre, les présidents de séance s'efforçant de donner la parole à des députés de tous les groupes au cours de la séance. Cette opération est nécessairement subjective et il arrive que donner la parole à un membre de la majorité et à un membre de l'opposition aboutisse à l'expression de deux avis favorables ou de deux avis défavorables sur un même amendement.
Dans la mesure où je ne doute pas que vous souhaitez achever l'examen de ce texte – examen qui, comme vous le savez, ne pourra se prolonger au-delà de vingt heures – je ne donnerai pas la parole à davantage de députés sur le présent amendement.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Éric Pauget applaudit également.
Je vous prie donc de m'excuser pour avoir mal anticipé les avis des uns et des autres, et je mets l'amendement n° 20 aux voix.
L'amendement n° 20 n'est pas adopté.
Cet amendement, tout comme les deux qui suivront, sont des amendements de bon sens.
…c'est-à-dire de deux grandes démocraties européennes, et posent, mes chers collègues, la question suivante : trouvez-vous normal qu'une personne de nationalité étrangère, définitivement condamnée pour un acte raciste ou antisémite, donc s'étant placée hors des valeurs de la République et de nos valeurs constitutionnelles, puisse être naturalisée ou réintégrée dans la nationalité française ?
À l'instar des deux suivants, le présent amendement, répondant par la négative, vise à intégrer dans le code civil et le code pénal – touchant ainsi à la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse – l'impossibilité d'accorder la naturalisation à une personne condamnée définitivement pour une telle infraction. Je précise, monsieur le rapporteur, que le présent amendement tient compte des remarques que vous avez formulées en commission la semaine dernière.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Si vous me le permettez, madame la présidente, je répondrai de manière globale aux trois amendements successifs de M. Pauget relatifs à la naturalisation.
Comme vous le savez, il existe déjà une disposition balai selon laquelle la naturalisation est impossible dès lors que la personne concernée a été condamnée à six mois d'emprisonnement,…
…une peine qui, grâce à la circonstance aggravante que nous introduisons les concernant, s'appliquera aux personnes dépositaires de l'autorité publique ayant commis un acte à caractère raciste ou antisémite.
J'ajoute, monsieur Pauget, que vos amendements présentent un problème de proportionnalité et d'échelle des peines. Vous avez partiellement modifié le présent amendement n° 46 depuis l'examen de la proposition de loi en commission, ce dont je vous sais gré, mais une naturalisation demeurerait possible pour quelqu'un coupable d'outrage sexiste ou sexuel, ou de faits de proxénétisme. En conséquence, j'estime qu'il est préférable de nous en tenir à la disposition balai, à moins de fragiliser les cas pouvant aboutir à un refus de naturalisation.
Notons enfin que l'autorité publique peut toujours refuser une naturalisation – naturalisation qui nécessite d'être assimilé à la communauté de France.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Je partage l'esprit de vos amendements, monsieur Pauget : être assimilé à la communauté de France, c'est ne pas être antisémite, c'est ne pas être raciste. Il y a donc fort à parier que l'autorité publique refuserait la naturalisation d'une personne condamnée pour un acte raciste ou antisémite.
Pour l'ensemble de ces raisons, j'émets un avis défavorable sur cet amendement et sur les deux suivants.
Même position, pour les raisons que M. le rapporteur a parfaitement exposées.
Puisque nous continuons de débattre du durcissement des peines, je souhaite apporter quelques précisions.
Je soutiens qu'il ne sert à rien de renforcer les peines pour les rendre dissuasives. Cela ne fonctionne pas : l'ensemble des enquêtes internationales menées sur cette question le prouvent. Cela étant, je n'ai jamais dit qu'une répression pénale des actes à caractère raciste ou antisémite était une mauvaise chose ; bien au contraire.
Votez le texte alors !
C'est une bonne chose et il est bon que ces infractions donnent lieu à des procès.
Au fond, j'affirme que ce que vous êtes en train de faire ne répond aucunement à l'objectif de lutter efficacement contre la commission d'actes racistes ou antisémites et que c'est ce dernier objectif que doivent poursuivre tous les républicains de notre pays.
En effet, si vous traitez cette question en bout de course, vous n'empêcherez pas, par exemple, les coups et blessures que peuvent subir certains de nos compatriotes en raison de leur religion.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
J'y insiste : ce que nous voulons éviter, c'est que certains de nos compatriotes se fassent frapper, insulter, mépriser en raison de leur religion ou de leur couleur de peau. S'agit-il bien, oui ou non, de notre objectif commun, ici à l'Assemblée nationale ? Je l'espère et c'est en tout cas le nôtre, de ce côté de l'hémicycle, même si vous ne cessez de nous insulter.
Et voici que nous est soumis un amendement visant à établir des droits différents suivant que l'on est une personne étrangère ou une personne de nationalité française !
Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.
Mais un Français raciste condamné ne perd pas sa nationalité, lui. Vous tendez donc à créer une inégalité entre les uns et les autres, alors que vous vous réclamez de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui dispose que « les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit ».
Je le répète, il faut lutter contre le caractère systémique et structurel du racisme. Si une personne est raciste, c'est parce qu'il y a du racisme dans la société.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je n'évoquerai pas les éléments de langage de l'extrême gauche, qui sont toujours les mêmes et sur lesquels nous aurons l'occasion de revenir.
Monsieur Pauget, je suis parfaitement d'accord avec vous : on ne peut pas s'intégrer en France ni acquérir la nationalité française si on n'adhère pas aux valeurs de la République.
M. Charles Rodwell applaudit.
Cela étant, en tant que législateurs, nous devons nous attacher au droit positif. À cet égard, la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité a instauré de nouvelles exigences en matière de naturalisation et d'acquisition de la nationalité française. Ces exigences portent non seulement sur l'assimilation de la langue française, mais aussi sur la connaissance de l'histoire, de la culture et de la société françaises. Je vous invite à le vérifier, cette loi exige également une adhésion aux principes et aux valeurs essentiels de la République. C'est pourquoi j'estime que vos amendements sont pleinement satisfaits.
Vous demandez la parole, monsieur Pauget, mais deux orateurs se sont déjà exprimés. Je vous prie donc de m'excuser, mais il vous reste deux amendements à présenter sur cette même question.
L'amendement n° 46 n'est pas adopté.
Sur les amendements n° 55 , 56 et 57 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutins publics.
Sur l'amendement n° 62 , je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une autre demande de scrutin public.
Les quatre scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l'amendement n° 43 .
Je vous invite à relire, monsieur le rapporteur, madame Yadan, l'alinéa 12 de l'article 13 de la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, qui dispose que le préfet, c'est-à-dire l'autorité publique, « peut ne pas » – et non « ne doit pas » – renouveler le titre de séjour d'un étranger n'ayant pas respecté le contrat d'engagement au respect des principes de la République.
Dit autrement, la signature du contrat d'engagement n'engage que celui qui le signe et le préfet peut autoriser ou refuser la naturalisation, ce dernier disposant donc d'un pouvoir d'appréciation.
Pour ma part, je propose d'interdire toute naturalisation d'une personne étrangère ayant commis un acte raciste ou antisémite. J'insiste, comme l'ont fait l'Allemagne et le Danemark, qui ont eu plus de courage que nous :…
…nous devons inscrire dans la loi qu'un étranger définitivement condamné par la justice pour un acte antisémite ou raciste – je ne parle pas de tous les étrangers – ne doit pas devenir Français, car il se trouve en opposition avec les valeurs de la République et avec nos valeurs constitutionnelles. Voilà la grande différence entre nos propositions.
Par ailleurs, nous avons tenu compte de la notion de proportionnalité, monsieur le rapporteur. En effet, des peines de six mois de prison sont prévues par le code pénal pour certaines infractions, telles que l'outrage public de l'hymne national ou du drapeau, ou encore la menace de commettre un délit. La proportionnalité du dispositif que nous proposons étant assurée, vos arguments tombent. C'est une question de courage politique.
Mon avis est toujours défavorable. Monsieur Pauget, vous faites une erreur d'interprétation. Si nous adoptions votre amendement, l'interdiction de naturalisation serait certes applicable après ce type d'infraction, mais elle risquerait d'être fragilisée pour d'autres infractions, dont certaines beaucoup plus graves.
Vous évoquez la peine de six mois de prison encourue notamment pour outrage public de l'hymne national ou du drapeau mais, en l'état du droit, une personne condamnée à six mois d'emprisonnement ne peut déjà pas acquérir la nationalité française ou y être réintégrée. Une telle disposition s'appliquera également si une personne dépositaire de l'autorité publique est concernée.
En outre, vous admettez qu'il existe un problème de proportionnalité dans la mesure où vous n'avez pas redéposé vos amendements examinés en commission sur la déchéance de nationalité. Franchement, l'atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation doit-elle n'être passible que de 3 750 euros d'amende ? Il faut veiller à préserver l'échelle des peines et laisser au juge la faculté d'empêcher ou non cette naturalisation.
Défavorable.
Je remercie le rapporteur pour sa clarification, en particulier sur la situation pénale actuelle. Je me suis déjà exprimé sur ces amendements en commission et j'avoue ne pas comprendre votre insistance, monsieur Pauget.
Le débat vise à durcir, ou non, la réponse pénale en cas d'infraction à caractère raciste, antisémite ou xénophobe. Que viennent faire les étrangers dans nos discussions ? La loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration est récente. Voulez-vous déjà un acte II ?
En outre, faite attention à vos propos, collègue. Sous-entendez-vous que, si les actes sont ceux d'une personne de nationalité française, ils sont moins graves ?
Protestations sur les bancs du groupe RN.
Restons-en au débat initial et arrêtons de stigmatiser les étrangers, s'il vous plaît ! Nos discussions seront ainsi plus sereines.
Nous voterons cet amendement de bon sens de notre collègue Pauget parce qu'il est tout simplement ancré dans le réel. Que constate-t-on dans notre pays ? L'explosion des actes antisémites et racistes, ainsi que celle de l'insécurité, n'est pas uniquement le fait des étrangers, bien évidemment, mais elle est alimentée par l'immigration.
Mme Ségolène Amiot s'exclame.
Nous le constatons depuis une vingtaine d'années. L'explosion des actes antisémites est liée à l'implantation et au développement de l'islamisme.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il arrive sur notre territoire parce que les politiques migratoires ont favorisé la venue de gens qui ne partagent aucune de nos valeurs.
M. le rapporteur proteste.
Nous n'avons donc pas à intégrer à la communauté nationale des racistes, des antisémites ou des gens qui ont la misogynie dans le sang.
Protestations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Je le répète, nous n'avons pas à les intégrer ! C'est pourquoi nous voterons cet amendement de bon sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Éric Pauget applaudit également.
L'amendement n° 43 n'est pas adopté.
Mon dernier amendement ne vise plus la nationalité ou la naturalisation mais l'octroi des titres de séjour. Mon raisonnement reste le même : il s'agit de modifier le code pénal, le code civil et la loi du 29 juillet 1881 afin qu'un préfet ne puisse pas accorder un titre de séjour à une personne de nationalité étrangère définitivement condamnée pour actes antisémites ou racistes. C'est une évidence ; c'est même le bon sens.
M. Davy Rimane rit.
L'article 412-8 introduit dans le Ceseda par la loi du 26 janvier 2024 précitée dispose qu'un titre de séjour ne peut pas être délivré à une personne qui ne respecte pas les valeurs de la République.
Par conséquent, votre amendement étant satisfait, je donne un avis défavorable.
Même avis.
La mesure que vous proposez est déjà inscrite dans le droit positif, cher collègue, elle figure dans le Ceseda, comme vient de le rappeler Mathieu Lefèvre, à l'issue de l'adoption du projet de loi pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration. C'est d'ailleurs sur la base de ces dispositions, et de celles de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, que l'imam Mahjoubi a pu être expulsé : on lui a retiré son titre de séjour parce qu'il n'adhérait pas aux valeurs de la République.
Nous sommes d'accord avec vous : il faut respecter ces valeurs. Mais le droit le prévoit déjà.
Il s'agit de débattre sur la base de faits. Vous vous targuez d'être dans le réel ; je vais donc vous rappeler les chiffres, ceux de la science, et de celles et ceux qui travaillent sur le sujet…
…et des institutions gouvernementales : en 2019-2020, 17 % de la population de 18 à 59 ans vivant en France hexagonale déclare avoir subi des traitements inégalitaires ou des discriminations. Cette proportion est plus élevée chez les immigrés – 24 % – et leurs descendants et descendantes, ainsi que chez les natifs d'outre-mer et leurs descendants et descendantes.
C'est important de le rappeler, notamment à nos collègues de droite qui stigmatisent, retournant les termes du débat, et pointent du doigt les personnes victimes de racisme. C'est particulièrement indécent.
C'est également vrai en matière d'emploi, où 57 % des personnes immigrées et 21 % de leurs descendants subissent des traitements inégalitaires. C'est aussi le cas en matière de logement, où les immigrés et les natifs d'outre-mer subissent un peu plus souvent des discriminations, à l'école ou dans d'autres situations du quotidien.
Ceux-là mêmes que plusieurs collègues passent leur temps à pointer du doigt et à stigmatiser sont les victimes du racisme et des discriminations. Tout cela fait système, collègues, et si vous ne nous croyez pas, relisez le rapport de 2018 du Défenseur des droits.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il explique comment le racisme conduit à subir des discriminations dans tous les domaines de la vie en société – logement, éducation, santé, rapports avec la police.
Mêmes mouvements.
C'est écrit noir sur blanc dans les rapports du Défenseur des droits et, en 2018, il s'agissait de M. Toubon.
Voilà la réalité et voilà pourquoi, je le répète, ce débat est indécent.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Anne Le Hénanff proteste.
L'amendement n° 49 n'est pas adopté.
Mme Sandra Regol s'exclame.
L'identité de genre est une expression militante, une expression de la déconstruction, une expression d'extrême gauche bien évidemment. Et elle ne doit pas alourdir la loi du 29 juillet 1881. Le genre ne peut être « supposé » puisqu'il figure sur un acte civil officiel. Ce n'est donc pas un ressenti subjectif.
L'alinéa visé par mon amendement présente en outre un risque pour la liberté d'expression : il pourrait museler ceux qui refusent l'utilisation du terme « identité de genre » ou veulent simplement en débattre.
Je ne sais pas si c'est un amendement anti-wokistes, mais c'est clairement un amendement anti-personnes LGBT.
C'est d'ailleurs le seul amendement que vous avez déposé sur cette proposition de loi.
Avec votre amendement, si l'on insulte une personne en la traitant d'homosexuelle parce qu'on pense qu'elle l'est, mais qu'elle est hétérosexuelle, elle ne pourra pas déposer plainte.
En effet !
« Ah ! » sur quelques bancs du groupe RN
et votre participation au grand mouvement de recul des droits des personnes LGBT – avec vos amis hongrois notamment.
Cet amendement est extrêmement grave.
Mme Katiana Levavasseur proteste.
Vous ne l'avez pas déposé pour la prétendue race, l'ethnie ou la nation, mais uniquement contre les droits des personnes LGBT.
« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.
De deux choses l'une, soit vous n'avez pas bien compris le sens de l'excellent amendement de notre collègue Raphaël Gérard, dont je salue le travail…
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Votre père fondateur, on s'en souvient, avait en son temps dit « J'vais te faire courir, moi, tu vas voir, le rouquin, là-bas. Hein ? Pédé ! » et s'était avancé vers lui pour exercer des violences. Souvenirs, souvenirs…
Mme Katiana Levavasseur s'exclame.
Le Conseil constitutionnel, monsieur Odoul, va être ravi d'être qualifié de wokiste car, dans une décision du 26 janvier 2017, il a validé la notion d'identité de genre.
Vous êtes là où on vous attend ; il y a peu de surprises.
Le rapporteur a rappelé vos amitiés européennes, hongroises, polonaises – enfin, avec l'ancien régime, si j'ose dire. Je n'ai rien à ajouter, si ce n'est que je suis totalement défavorable à votre amendement.
Protestations sur les bancs du groupe RN.
Oui, souvenons-nous de l'agression d'Annette Peulvast-Bergeal, maire de la commune voisine de Mantes-la-Ville, par Jean-Marie Le Pen, et des mots de ce dernier !
Je pense aux personnes qui nous regardent : entre les quenelles, les « pédés » et le reste, ils doivent être ravis…
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Vous avez oublié que ce sont les mots de Jean-Marie Le Pen ! Ce sont vos mots !
L'image que vous donnez du Parlement, de nos institutions, de la politique et de la démocratie est à votre image – outrancière.
J'ai bien écouté la réponse du rapporteur. Mais avez-vous demandé à vos amis du Qatar ce qu'ils pensaient de l'identité de genre et des personnes LGBT ?
Dans les 10 milliards d'euros que le Qatar compte investir en France, y a-t-il une clause visant la promotion des personnes LGBT au Qatar. Nous en avons assez des leçons de morale. Vu votre passif, vos amis et vos accointances, stop !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Nous venons d'assister à une véritable leçon de transphobie. S'il fallait écrire le manuel de la transphobie pour les nuls, l'exposé sommaire de votre amendement pourrait servir de préface.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous mélangez tout ! Nous avons bien compris que vous avez mis votre antisémitisme congénital entre parenthèses depuis quelques mois parce que c'est vendeur .
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES
Il vous faut donc trouver d'autres boucs émissaires et vous choisissez les personnes trans. Mais vous ne comprenez rien à ce que vous écrivez. Vous confondez identité de genre et sexe.
Mme Sandra Regol s'exclame.
C'est le sexe qui figure sur les cartes d'identité, pas l'identité de genre.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Quant à la notion d'identité de genre « réelle ou supposé », vous faites la démonstration qu'on peut parler d'une chose sans en connaître ni les tenants, ni les aboutissants.
M. Antoine Léaument applaudit.
Mme Caroline Parmentier balaie d'un geste de la main en direction de M. Raphaël Gérard.
Vous ou vos collaborateurs, allez sur Wikipédia, c'est gratuit ! Vos exposés sommaires s'en trouveront un peu plus argumentés.
Vous êtes transphobe, c'est un fait. Nous le savions, vous le confirmez avec cette kyrielle d'amendements. Pour notre part, nous ne faisons que mettre en conformité notre droit avec le droit international.
M. Bruno Studer applaudit.
… vous auriez également pu déposer des amendements visant à supprimer la notion de prétendue race, qui participe aussi d'un mouvement international sous l'égide de l'ONU.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES, GDR – NUPES et LIOT. – Quelques députés applaudissent debout.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 110
Nombre de suffrages exprimés 110
Majorité absolue 56
Pour l'adoption 30
Contre 80
L'amendement n° 55 n'est pas adopté.
La provocation à la haine, à la négation, à la détestation ou à la destruction d'Israël est la principale source de l'antisémitisme en France – c'est un fait incontestable.
La haine et la violence qui ont déferlé sur les Français juifs depuis le 7 octobre en sont, s'il en fallait, des preuves supplémentaires : le ministère de l'intérieur a recensé 563 actes antisémites en octobre 2023 contre 43 en septembre, et 1 676 actes antisémites depuis le 7 octobre – vous avez rappelé l'agression de Marco, ce sexagénaire massacré parce que juif.
L'antisionisme – la haine d'Israël – est la nouvelle matrice de l'antisémitisme. Elle n'a pas attendu le 7 octobre pour déverser ses rivières de sang sur nos compatriotes juifs. L'antisionisme est le premier carburant de la colère antisémite : les terroristes des attentats de Toulouse et de l'Hyper Cacher ont justifié leurs crimes par la détestation de l'État juif. L'auteur du dernier attentat en France, celui du pont Bir-Hakeim, voulait venger les enfants de Gaza.
Avant-hier, lundi, le jour du Congrès, j'étais à la cérémonie d'hommage à Samuel Sandler, qui a perdu son fils et ses deux petits-enfants dans l'attentat de l'école Otzar Hatorah en 2012. Il disait qu'il était le premier Sandler né en France et qu'il serait le dernier à y vivre. Le seul État juif du monde est le réceptacle de la haine de tous les antisémites de la planète – c'est sans doute plus politiquement correct, cela passe mieux.
Pour les antisionistes qui attaquent des citoyens français portant une kippa dans la rue ou des clients qui, lors d'une livraison, portent un nom à consonance juive ou ont apposé une mezouza dans l'encadrement de leur porte d'entrée, juif est synonyme d'Israël – donc s'en prendre à un juif, c'est s'en prendre à Israël, et inversement.
Voilà, madame la présidente, la triste réalité de notre pays. C'est pourquoi je demande aujourd'hui solennellement aux députés présents, quelle que soit leur appartenance politique, de pénaliser la provocation, même non publique, à la haine, à la négation, à la violence et à la destruction de tout État – en particulier de l'État d'Israël.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Elle l'est déjà !
Monsieur Habib, je serai très clair : l'antisionisme est un antisémitisme. Il nourrit la haine à l'encontre de nos compatriotes juifs, en particulier depuis le 7 octobre.
Les discours incendiaires qui assimilent l'État d'Israël à un État pratiquant l'apartheid ou le génocide contribuent à l'antisémitisme.
Comme l'expliquait Vladimir Jankélévitch, l'antisionisme permet d'être démocratiquement antisémite.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Cette idée compte tant à nos yeux que le Président de la République a été l'un des premiers dirigeants occidentaux à la défendre, en 2019, et que le président Maillard a fait adopter une résolution en ce sens en 2020, avec beaucoup de courage.
En revanche, il me semble que ce que vous proposez est parfaitement satisfait : l'alinéa 7 de l'article 24 de la loi de 1881 réprime la provocation à la haine quand elle vise une « nation ».
Par ailleurs, le texte que vous vous apprêtez peut-être à voter, monsieur Habib, fait de la provocation à la haine non publique à l'égard d'une nation une infraction.
Pour toutes ces raisons, je souhaite que vous retiriez votre amendement. Je suis à votre disposition pour travailler au renforcement des sanctions pénales contre l'antisémitisme, mais il me semble que ce texte n'est pas le bon vecteur et que votre demande, j'y insiste, est satisfaite.
Monsieur Habib, votre implication et votre émotion sont palpables.
Le code pénal appréhende déjà la provocation non publique à la haine, à la négation, à la violence ou à la destruction d'un État. En plus des dispositions déjà présentes dans le code pénal, il faut prendre en considération celles qui les compléteront si ce texte est voté. Nous pouvons bien sûr continuer à travailler sur ce sujet, à propos duquel je partage votre avis.
Je rappellerai d'ailleurs qu'une proposition de résolution visait à considérer Israël comme un régime d'apartheid. J'avais dit, à l'époque, lors des questions au Gouvernement, ce que je pensais de ce texte.
Quoi qu'il en soit, nous sommes d'accord avec vous : nous pouvons encore améliorer les choses.
Je vous demande cependant de retirer votre amendement, non en signe de renonciation mais parce qu'il est déjà satisfait.
J'entends bien ce que disent le ministre et le rapporteur, dont je connais les positions et dont je salue à longueur d'année l'engagement sur cette question.
Mais, aujourd'hui, il faut prendre vos responsabilités : il y a eu la loi tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe – la loi Gayssot –, la loi visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe – la loi Lellouche. Rien n'y a fait. Je vous montrerai tout à l'heure ce qu'un député de la République – je communique très peu sur ce sujet – a reçu comme menaces de mort en un mois – un mois, et six plaintes ! Croyez-moi, aujourd'hui la loi n'apporte pas de réponses à ces questions.
C'est pourquoi je vous demande de bien réfléchir, en votre âme et conscience, et de voter mon amendement, pour l'honneur de la France et pour la lutte contre l'antisémitisme – cet amendement ne concerne pas seulement la négation de l'État d'Israël, mais celle de tout pays.
Pour toutes ces raisons, je ne retirerai pas mon amendement.
L'amendement de M. Habib concerne un problème très réel : celui de l'État en trop qui a remplacé le peuple en trop, celui de l'État paria qui a remplacé le peuple paria.
Il concerne aussi ceux qui attisent la haine du Juif au nom de la haine d'Israël. Elle est illustrée par une nouvelle que nous venons d'apprendre : Rima Hassan est candidate aux élections européennes sur la liste de La France insoumise.
Cette personne a affirmé très clairement que le Hamas a mené une action légitime – le Hamas, qui a violé, qui a brûlé, qui a décapité est assimilé par cette femme à un mouvement de résistance.
Elle prône par ailleurs un État palestinien « de la rivière à la mer », ce qui revient tout simplement à effacer l'État d'Israël – que votre présidente n'est même pas capable de situer sur une carte !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, Dem et LR et applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Cette réalité, c'est la vôtre – celle de ceux qui s'allient aux islamistes, de ceux qui offrent une excuse victimaire à tous les agresseurs de Juifs en France.
Et ceux qui soutiennent le génocide en cours ? On compte déjà 30 000 morts palestiniens !
C'est votre responsabilité – il est temps d'en prendre conscience et de faire le travail qui s'impose dans vos rangs !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, RN, LR et Dem.
Notre débat, qui porte sur la lutte contre l'antisémitisme et le racisme, est un débat sérieux. Je déplore qu'il soit instrumentalisé dans cet hémicycle pour se livrer à des attaques personnelles : les contre-vérités que j'entends aujourd'hui ne sont pas à la hauteur des enjeux.
L'amalgame honteux entre antisionisme et antisémitisme est absolument scandaleux. Vous êtes aujourd'hui les seuls à parler de religion, quand nous parlons de conflits et de résolutions politiques. Ceux qui dressent des parallèles dangereux sont ceux qui instrumentalisent la lutte contre l'antisémitisme.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je vais quand même répondre aux accusations : pour vous, les vies palestiniennes ne valent rien.
Elles sont piétinées depuis des semaines – pas moins de 30 000 personnes ont été assassinées !
Monsieur le rapporteur, toutes les associations de défense des droits humains dans le monde reconnaissent qu'il y a aujourd'hui un régime d'apartheid en Israël – c'est une réalité !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Anne-Laurence Petel s'exclame.
Vous pouvez nous insulter, nous calomnier, mais il est quand même curieux d'essayer de lutter contre l'antisémitisme avec des gens qui ont siégé au côté d'antisémites, dans un parti fondé par des SS, qui s'est construit dans la nuit de la collaboration !
Protestations sur les bancs du groupe RN.
…et vous voulez lutter avec eux contre l'antisémitisme – ce sera sans nous !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante.
La séance est reprise.
Je mets aux voix l'amendement n° 62 , qui a reçu un double avis défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 96
Nombre de suffrages exprimés 89
Majorité absolue 45
Pour l'adoption 44
Contre 45
L'amendement n° 62 n'est pas adopté.
L'amendement n° 52 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je tiens à rappeler des faits commis par certains de nos collègues, qui ont refusé de qualifier le Hamas de groupe terroriste, préférant en parler comme d'une organisation de résistance palestinienne …
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…qui renversent la charge de l'accusation s'agissant des crimes contre l'humanité commis le 7 octobre en Israël. Lorsqu'on se rend coupable de provocation non publique à la haine, lorsqu'on fait l'apologie du terrorisme, lorsqu'on nie les crimes contre l'humanité, on doit être frappé d'inéligibilité.
La nation dans son ensemble est touchée par ce genre de déclaration. Si un amendement tel que celui que je défends avait été adopté en 1940, de nombreux parlementaires qui ont voté les pleins pouvoirs au maréchal Pétain n'auraient peut-être pas pu le faire.
La République n'est pas un terrain vague où les antisémites et les racistes de France peuvent venir planter leur tente pour professer leur discours de haine ; la République se mérite. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement.
Cet amendement vise à créer une peine complémentaire de perte des droits civiques. Celle-ci n'est manifestement pas constitutionnelle, puisqu'elle n'est ni complémentaire ni facultative ; le Conseil constitutionnel ne manquerait donc pas de la censurer.
Par ailleurs, les seules infractions concernées par une telle déchéance des droits civiques sont sans commune mesure avec les infractions évoquées : il s'agit de traite d'être humains, de proxénétisme et d'autres infractions du même type. Avis défavorable.
Même avis.
Heureusement que votre amendement ne sera pas adopté, monsieur Meyer Habib, parce que vous pourriez en être le premier concerné.
Hier, lors des questions d'actualité au Gouvernement, nous avons été nombreuses et nombreux à applaudir – ce qui n'est pas fréquent – l'intervention de Mme Chrysoula Zacharopoulou. La secrétaire d'État chargée du développement et des partenariats internationaux a eu des paroles très claires et a exprimé une critique très forte, conforme à la tradition de la France de respect du droit international et à sa volonté de reconnaître l'existence de deux États. La secrétaire d'État a critiqué la politique du gouvernement israélien d'extrême droite de Netanyahou et a exigé l'application d'un cessez-le-feu.
Si cet amendement était adopté, elle pourrait être attaquée pour cela !
Vous ne cessez d'appeler à la haine et d'attaquer le peuple palestinien, victime aujourd'hui d'un véritable génocide.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je souhaite revenir sur l'intervention de notre collègue Simonnet : exprimer une opinion sur la politique menée par un État et souhaiter la destruction de ce dernier sont deux choses complètement différentes.
Dans notre pays, une nouvelle réalité concerne les dépositaires de l'autorité publique – les élus politiques. Dans les rangs de l'extrême gauche – de La France insoumise –, s'exprime une volonté électoraliste d'aller chercher les voix, en la flattant, d'une catégorie de la population…
…qui est profondément antisémite, nourrie par un discours de haine. Il ne s'agit pas de l'opposition d'idées politiques, dans le cadre d'un débat parfaitement noble, mais bel et bien d'un discours de haine contre des individus pour ce qu'ils sont.
Cette volonté a été clairement exprimée par la présidente de votre groupe, lorsqu'elle a refusé de localiser l'État d'Israël.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce faisant, elle envoie un message d'encouragement à tous ceux qui rejettent l'existence de cet État,…
…en particulier ceux qui figurent sur votre liste aux élections européennes et qui prônent le slogan « de la rivière à la mer ».
Vous, élus de La France insoumise, faites de la politique sur la négation de l'existence de la communauté juive de France.
Voilà ce qu'il faut sanctionner : en cela, l'amendement de notre collègue Meyer Habib est parfaitement justifié, puisque vous alimentez l'antisémitisme.
On croirait entendre un militant d'extrême droite s'adressant à Pierre Mendes France ! C'est un scandale !
L'amendement n° 63 n'est pas adopté.
Il se fonde sur l'article 70, alinéa 3, relatif aux mises en cause personnelles. Jamais, nulle part, nous n'essayons d'obtenir le vote des antisémites ! Notre objectif est de les combattre ! Nous avons même réalisé une affiche indiquant : « Les racistes – ce qui inclut les antisémites – votent, et vous ? » ,
Protestations sur les bancs du groupe RN
Notre ADN politique est la lutte contre le racisme et l'antisémitisme parce que nous ne faisons aucune différence au sein de l'humanité !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
L'orateur s'adresse aux députés du groupe RN
à l'inverse, vous établissez des distinctions entre les Français et les autres.
Nous ne le faisons pas, parce que nous reconnaissons l'unité du genre humain et nous considérons que chacun doit pouvoir exercer sa religion comme il l'entend, comme le garantissent la Constitution et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Mon rappel au règlement se fonde également sur l'article 70. Puisque j'entends l'extrême gauche…
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
je souhaite rappeler quelques faits : l'adoption de la rhétorique et de la propagande du Hamas…
Madame Yadan, j'aimerais que nous évitions les rappels au règlement qui en provoqueront d'autres.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Avant de vous rendre la parole, madame Yadan, permettez-moi de rappeler que l'examen de ce texte, quoi qu'il arrive, prendra fin à vingt heures.
Les amendements restants seront examinés sans difficulté, mais je ne peux laisser tenir certains propos.
Vous, députés du groupe LFI – NUPES, portez une lourde responsabilité dans la haine des Juifs en France ,…
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…en raison de vos propos, de vos prises de position et de votre entourage,…
Ce n'est pas un rappel au règlement !
…comme en témoigne votre participation à la marche contre l'islamophobie, organisée par le CCIF, le Collectif contre l'islamophobie en France, qui a par la suite été dissous.
Alors il faudrait lutter contre l'antisémitisme mais pas contre l'islamophobie ! Ça commence à bien faire !
La présidente coupe le micro de l'oratrice.
Je suis désolée de vous couper, madame Yadan, mais ce n'est pas un rappel au règlement. Mes chers collègues, tout le monde a pu réagir aux différentes interpellations. Je vous invite désormais à les éviter – ce n'est pas une obligation
Sourires
–, ce qui serait préférable si vous souhaitez poursuivre ces débats dans une ambiance moins tendue.
La parole est à M. Julien Odoul, pour soutenir l'amendement n° 56 en montrant l'exemple.
Sourires.
Nous devrions demander à vos collègues de La France insoumise de montrer l'exemple, puisqu'ils représentent la vertu incarnée !
Sourires.
Cet amendement vise à clarifier l'alinéa 11 de l'article 2. L'identité de genre n'est pas supposée, les genres sont clairement établis. Permettez-moi de revenir sur les propos, les outrances et les insultes d'un de nos collègues concernant notre prétendue transphobie.
Il y a quelques années, une personne transgenre avait été maltraitée et molestée…
…place de la République à Paris, par des manifestants algériens. À cette occasion, je n'ai pas entendu les gauchistes, La France insoumise ni la Macronie venir à son secours, la soutenir.
M. Antoine Léaument s'exclame.
En revanche, j'ai entendu les élus du Rassemblement national et Marine Le Pen lui apporter leur soutien.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je vais finir par croire que certains ont intérêt à gagner du temps pour ne pas avoir à se prononcer sur cette proposition de loi. Monsieur Odoul, je vous ferai calmement remarquer que l'adoption de votre amendement empêcherait une personne hétérosexuelle de déposer plainte après avoir été traitée de « sale homosexuel ».
Je viens de vous présenter factuellement les conséquences de votre amendement : libre à vous de le retirer ou non.
Il est également défavorable.
« Ah ! » sur les bancs du groupe RN.
d'illustrer si efficacement la nécessité de disposer d'outils permettant de condamner les personnes tenant des propos LGBTphobes, racistes ou antisémites.
Vous démontrez votre acharnement sur les personnes qui veulent que soit reconnu ou non leur genre et nous obligez ainsi à préparer et à débattre de textes comme celui que nous examinons en ce moment. Une fois encore, il faut absolument voter contre votre amendement et je note au passage que vous n'avez vraiment pas envie que cette proposition de loi puisse être soumise au vote, vu le temps que vous nous faites perdre.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 103
Nombre de suffrages exprimés 102
Majorité absolue 52
Pour l'adoption 30
Contre 72
L'amendement n° 56 n'est pas adopté.
L'amendement n° 53 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 65 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
À un moment, il pourrait se contenter de déclarer « défendu », c'est déjà son troisième amendement.
Madame Regol, vous nous avez tenu un beau discours, mais je me rappelle qu'en novembre 2019, vous avez marché aux côtés des islamistes, à l'appel du CCIF, une association dissoute par décret du Président de la République, sur le rapport du ministre de l'intérieur, car défendant des valeurs contraires à celles de la République.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN – protestations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Continuez, perdez donc encore plus de temps pour ne pas avoir à voter ce texte !
Vous avez ainsi pu manifester aux côtés d'imams qui font la promotion du viol conjugal, d'imams qui considèrent les homosexuels comme des sous-hommes : vous avez marché aux côtés de ces gens-là ! Madame Regol, faites un examen de conscience, exercez votre droit d'inventaire et arrêtez de parler !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Mes chers collègues, je vais devoir me faire arbitre : vous ne pouvez pas clamer, quand un autre député a la parole, que son intervention n'a rien à voir avec l'amendement appelé dans la discussion, pour prêter le flanc à la même critique quelques minutes plus tard. Je rappelle donc à chacun qu'il doit présenter l'amendement pour lequel la parole lui a été donnée : on va suivre les règles !
La parole est à Mme Sandra Regol, pour un rappel au règlement. Sur quel fondement, chère collègue ?
Mon intervention se fonde sur l'article 70, madame la présidente.
« Garde ta salive ! », « Tais-toi ! »… Dois-je énumérer toutes les insultes que j'ai reçues des bancs d'en face, madame la présidente ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC, et GDR – NUPES.
Est-il tolérable de légiférer dans ces conditions ? Nous essayons de prendre un peu de hauteur ,…
Sourires sur les bancs du groupe RN
…nous essayons de travailler, mais nous subissons des manœuvres dilatoires et, en plus, des insultes !
Madame la présidente, je ne sais pas quoi faire pour qu'enfin nous soyons respectés. Nous examinons un texte visant à condamner, entre autres, les oppressions de genre et la misogynie, mais nous devons supporter les gens qui les incarnent au quotidien. Ce n'est pas possible !
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC, et GDR – NUPES.
Bruit.
La parole est à M. le rapporteur pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 57 et cela dans un calme olympien ?
Même avis.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 101
Nombre de suffrages exprimés 100
Majorité absolue 51
Pour l'adoption 31
Contre 69
L'amendement n° 57 n'est pas adopté.
Sur l'amendement n° 72 , je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Sur l'amendement n° 34 , je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Meyer Habib, pour soutenir l'amendement n° 72 .
Tout à l'heure, l'Assemblée a manqué d'une voix un vote historique. Le présent amendement vise à pénaliser la négation de l'existence d'Israël en tant qu'État. La négation de l'existence du seul État juif, c'est ça l'antisémitisme.
C'est ce qu'a dit le Président de la République et vous l'avez rappelé tout à l'heure, monsieur le garde des sceaux : l'invisibilisation, le déni, l'effacement, la négation de l'État d'Israël a, hélas, des conséquences funestes sur les Français et en particulier les Français juifs.
J'ai rappelé tout à l'heure la dignité de Samuel Sandler, lequel a tout perdu en quelques minutes. Vous le savez, monsieur le garde des sceaux, vous qui connaissez bien cette affaire. Jusqu'à sa mort, il a d'ailleurs refusé de prononcer le nom de l'assassin de son fils et de ses petits-enfants et je ne le prononcerai moi-même pas.
Mme Sarah Halimi, dont la mort a fait l'objet d'une commission d'enquête parlementaire que j'ai présidée, a été assassinée, massacrée parce qu'elle était juive – sur fond de détestation d'Israël.
Les attentats antisémites ne cessent de se multiplier parce qu'on dénie à un seul et minuscule État le droit de vivre et d'exister. Hélas, des manifestations de haine sont organisées en France et l'extrême gauche y participe avec délectation en réclamant « la Palestine de la mer au Jourdain », alors que certains de ses représentants ne savent même pas sur quelle rive de ce fleuve se trouvent les territoires palestiniens. C'est la triste réalité, ce mot d'ordre n'est qu'un slogan électoraliste.
Brouhaha.
Voilà pourquoi nous devons nous doter d'un arsenal juridique permettant de punir ces outrances et la négation de l'État d'Israël. Seul État juif du monde, il est la cible de la haine de tous les antisémites du monde, leur passe-droit moral. Ainsi, je vous demande de marquer l'histoire en votant pour cet amendement.
M. Pierre-Henri Dumont applaudit.
Mes arguments sont les mêmes que ceux développés tout à l'heure. Je ne voudrais pas que ce débat fasse accroire que nos magistrats ne poursuivent pas ceux qui incitent à la haine en raison de l'appartenance à une nation ou ceux qui, pire encore, incitent à la destruction d'une nation. Au contraire, ils font un travail formidable pour sanctionner ces infractions car notre droit le permet déjà. Je donne donc un avis défavorable.
Défavorable, par cohérence avec la position que nous avons exprimée il y a de ça quelques minutes.
Cet amendement ne me semble pas très bien rédigé et je préfère m'en tenir aux mesures déjà prises. En effet, l'antisémitisme prend des formes différentes et ce n'est pas nouveau – je sais bien que le Front national cherche à faire accepter l'amalgame entre musulman et antisémite, mais les islamistes sont contre tout le monde : les juifs, les chrétiens, les yézidis, les druzes et toutes les minorités religieuses.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce sont des fous, c'est comme ça : ils sont contre tout le monde de toute façon.
Par contre, il existe un antisémitisme bien français, qui remonte au XIX
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Ne confondons pas tout : nous avons à lutter contre l'antisémitisme, équivalent du racisme, totalement inacceptable ; mais je crains que votre amendement, monsieur Habib, ne soit pas le plus juste.
Ainsi, je préfère suivre la position du garde des sceaux et du rapporteur.
Je soutiens l'amendement de notre collègue Meyer Habib, pour une raison simple : on ne peut pas écouter de grandes déclarations dans cet hémicycle, voter et reconnaître que l'antisionisme est un antisémitisme – position officielle de l'Assemblée nationale et du Président de la République –, mais se contenter d'inciter les magistrats à poursuivre les auteurs d'appels à la destruction d'Israël, sans rendre ces poursuites systématiques.
Nous savons bien – cela a été dit et est partagé par la majorité de ces bancs – que lorsque les nouveaux antisémites veulent se cacher, ils disent qu'il faut détruire l'État d'Israël ou que celui-ci ne devrait pas exister sous sa forme actuelle, que son régime est celui de l'apartheid ou que certains de ses produits devraient être boycottés. Nous ne devons plus tergiverser : cet amendement a le mérite de la clarté et, pour cela, j'invite nos collègues convaincus que l'antisionisme est un antisémitisme, à le voter et à renforcer ainsi, dans notre droit, la lutte contre cette opinion.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 116
Nombre de suffrages exprimés 115
Majorité absolue 58
Pour l'adoption 41
Contre 74
L'amendement n° 72 n'est pas adopté.
Mme Andrée Taurinya applaudit.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement n° 34 rectifié .
Je pense qu'on va changer de registre et, je l'espère, de ton, pour faire venir l'intelligence comme remède au racisme et à l'antisémitisme.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je rappelle ainsi la proposition que nous avons faite avec Caroline Yadan et le rapporteur Mathieu Lefèvre, sur la justice restaurative et la nécessité de la proposer automatiquement à la victime et à l'auteur du préjudice.
Nous considérons en effet que le racisme et l'antisémitisme sont un terreau intellectuel nauséabond sur lequel nous devons travailler avec les auteurs d'infractions. Nous devons aussi réparer les dommages subis, en confrontant ceux-ci à leurs victimes, si elles l'acceptent, ou à d'autres groupes de parole.
Sur tous les bancs, certains d'entre nous considèrent qu'il est nécessaire de modifier la manière dont la justice est rendue et de s'interroger, une fois la condamnation prononcée, sur la question de la récidive.
Non, il n'est pas rédactionnel – il a été considéré à tort comme tel –, car il vise à étendre les mesures de justice restaurative à l'ensemble des infractions de la section 3 ter . Au Canada, j'y insiste, la justice restaurative a fait des miracles dans tous les domaines, y compris en matière de violences intrafamiliales, dont nous avons parlé hier. Néanmoins, elle ne peut pas être menée sans une impulsion très forte des services de l'État, comme c'est le cas au Canada.
Il est donc essentiel que nous apportions tous notre soutien à la justice restaurative, qui, je le précise, n'exclut pas la peine, mais nourrit la réflexion. Or, sans réflexion, le racisme et l'antisémitisme continueront d'exister.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES et Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe RE.
Je suis favorable à cet amendement, qui constitue un apport essentiel puisqu'il vise à introduire des dispositifs de justice restaurative. Je remercie Mme Untermaier de démontrer ainsi que la proposition de loi n'est pas que pénale et répressive ; elle permet la confrontation des idées.
Je vous remercie également, madame Untermaier, pour cet amendement particulièrement bienvenu. Avis favorable.
Nous soutiendrons également cet amendement. Tout à l'heure, je vous ai dit que l'aggravation de la peine n'avait aucun effet sur les comportements – tel n'est pas le cas de la répression pénale, qui peut en avoir un. Pour ceux qui ne connaissent pas la justice restaurative – tout le monde n'est pas au fait de cette question, qui devrait pourtant faire l'unanimité –, rappelons que c'est un outil qui met en contact des victimes et des personnes qui ont commis des actes répréhensibles, en l'occurrence des actes à caractère raciste ou antisémite. La justice restaurative permet, de manière bien plus efficace que ne le ferait une simple amende, de faire prendre conscience à la personne qui a commis de tels actes qu'ils revêtent précisément ce caractère.
La justice restaurative peut s'appliquer à de nombreux domaines, notamment aux violences et aux vols. C'est d'ailleurs le sujet du film Je verrai toujours vos visages, que je recommande à tout le monde. La justice restaurative permet de lutter efficacement contre le racisme et l'antisémitisme. Nous y sommes donc favorables.
Sur l'article 2, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jérémie Patrier-Leitus.
Le groupe Horizons et apparentés est attaché à la justice restaurative, comme en témoigne le travail accompli par notre collègue Naïma Moutchou, et donc favorable à cet amendement. La réponse pénale ne fait pas tout ; il faut également renforcer la justice restaurative. Madame Untermaier, je vous remercie d'avoir déposé cet amendement, que nous soutiendrons.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 122
Nombre de suffrages exprimés 122
Majorité absolue 62
Pour l'adoption 95
Contre 27
L'amendement n° 34 rectifié est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES, et sur plusieurs bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 119
Nombre de suffrages exprimés 117
Majorité absolue 59
Pour l'adoption 71
Contre 46
L'article 2, amendé, est adopté.
Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés, déposé à l'initiative de notre collègue Cécile Untermaier, vise à créer une peine complémentaire à l'article 131-5-1 du code pénal, qui dresse la liste des stages pouvant être prononcés par la juridiction lorsqu'un délit est puni d'une peine d'emprisonnement. Il s'agit d'instaurer un stage dédié à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations, ainsi que l'ont suggéré les magistrats auditionnés dans le cadre de l'examen de la proposition de loi.
Les infractions de nature raciste et antisémite sont nombreuses et en hausse : 14 930 plaintes ont été déposées pour des infractions de nature raciste et antisémite en 2023, soit une augmentation de 18 % par rapport à 2022. Ce constat inquiétant justifie d'apporter cette nouvelle réponse, qui nous semble efficace pour lutter contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations.
Les députés du groupe RN s'opposent à ce stage. C'est incompréhensible !
Chers collègues, pour information, à ce rythme, l'examen du texte s'achèvera dans trois heures et trente minutes. Or il ne nous reste qu'une heure et trente minutes de débat.
L'amendement n° 77 de Mme Caroline Yadan est défendu.
L'amendement n° 77 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Les amendements identiques n° 7 de M. Raphaël Gérard et 76 de Mme Caroline Yadan sont défendus.
L'article 2-1 du code de procédure pénale prévoit que « toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant par ses statuts de combattre le racisme ou d'assister les victimes de discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse, peut exercer les droits reconnus à la partie civile » en ce qui concerne certaines infractions, notamment les discriminations ou les atteintes aux personnes et aux biens commises au préjudice d'une personne à raison de son origine nationale, de son appartenance à une ethnie ou à une religion, etc.
En vertu des articles 2-1 et 2-24 dudit code et selon la jurisprudence, une vingtaine d'associations, telles les associations de lutte contre les violences sexuelles ou les discriminations fondées sur le sexe, les mœurs, l'orientation sexuelle ou l'identité de genre, peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile.
Bien que les prétoires soient ouverts ponctuellement à un nombre croissant d'associations, des carences perdurent, ainsi que l'illustre une récente affaire. Au mois d'octobre 2018, le siège de l'association SOS Méditerranée et ses sept salariés ont été attaqués par un groupuscule d'extrême droite, Génération identitaire, en raison des actions humanitaires menées par l'association. Les vingt-deux agresseurs de Génération identitaire ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel. Or la Fédération nationale des maisons des potes, l'association antiraciste qui souhaitait se constituer partie civile, n'a pas pu le faire, la juridiction ayant considéré que cette demande était irrecevable car elle n'était pas prévue par le droit en vigueur.
Par cet amendement, nous proposons de permettre aux associations de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et toutes les formes de discriminations d'exercer les droits reconnus à la partie civile devant les juridictions pénales, afin de défendre des personnes physiques ou morales faisant l'objet d'atteintes physiques ou matérielles en raison de leur engagement pour la défense des droits des victimes de racisme et de discriminations. Nous ferions ainsi œuvre utile.
Cet amendement est satisfait par les amendements que nous venons d'adopter. Par ailleurs, je relève une petite coquille rédactionnelle dans son texte puisqu'il ne vise que les violations de sépulture et les dégradations de monument. Je vous invite à le retirer ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Avis défavorable.
Nous souhaitons lever les obstacles qui ont empêché certaines associations, comme la Fédération nationale des maisons des potes, de se constituer partie civile lors du procès de Génération identitaire à la suite de l'attaque de SOS Méditerranée. Ce même mouvement avait attaqué le siège du Parti socialiste au mois de juin 2013 pour manifester son opposition à la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. Dans les deux cas, en raison de la faille relevée par Mme Obono, l'association et le parti politique ne pouvaient ester en justice.
Qui peut le plus peut le moins. Pourriez-vous nous garantir, monsieur le rapporteur, que, dans le cadre de la navette, ce trou dans la raquette sera comblé ?
Nous devons sécuriser et consolider le dispositif. C'est pourquoi nous voterons pour cet amendement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 112
Nombre de suffrages exprimés 111
Majorité absolue 56
Pour l'adoption 27
Contre 84
L'amendement n° 16 n'est pas adopté.
L'amendement n° 78 est retiré.
La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l'amendement n° 12 .
Cet amendement vise à inscrire, de manière expérimentale, une mention « infraction à caractère raciste » et une mention « infraction à caractère discriminatoire » sur les documents de dépôts de plainte, de manière à disposer de statistiques utiles sur le sujet. Nous manquons en effet de données. Nous avions proposé plusieurs rapports pour les collecter, mais nous n'avons même pas pu en débattre, ce que nous déplorons. L'une des manières de comprendre les phénomènes et les actes à caractère raciste ou antisémite est de disposer de données à leur sujet. Tel est le sens de cet amendement à caractère expérimental, qui propose une mesure utile pour notre patrie.
Ce que propose M. Léaument n'existe pour aucun type de plainte. Il prétend s'attaquer au phénomène de la sous-déclaration – il existe en effet une sorte d'autocensure chez les victimes –, mais, au stade du dépôt de plainte, il est impossible d'agir sur les causes du phénomène. Il va de soi, en outre, qu'une plainte qui porte sur une discrimination fait état du caractère discriminatoire de l'infraction. C'est donc un avis défavorable.
Défavorable.
De manière constante ou expérimentale, La France insoumise profite de chacun de ses amendements pour cracher sur la police.
C'est une honte ! Vous accusez implicitement les policiers de minimiser les infractions à caractère raciste, voire de s'en rendre complices.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
…et une insulte au travail fourni quotidiennement par les gardiens de la paix et par les forces de l'ordre qui assurent la sécurité des Français, première des libertés.
C'est également une insulte envers les policiers nationaux et municipaux, aux côtés desquels nous manifestions hier. Nous étions d'ailleurs les seuls : nous n'avons pas vu de députés La France insoumise lors de cette manifestation !
Applaudissements sur quelques bancs du RN.
Vous préférez la compagnie des islamistes du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) !
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Enfin, c'est une insulte envers les policiers d'origine étrangère, maghrébine ou africaine,…
…qui font leur travail admirablement, qui aiment la France et qui jamais ne minimisent les infractions à caractère raciste.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'extrême droite nous a habitués au négationnisme ; maintenant, c'est le tour du mensonge ! Vous persistez dans l'idéologie qui vous caractérise. Notre collègue Léaument ne propose pas de stigmatiser les policiers, mais de leur donner un outil pour caractériser la nature des infractions dont ils sont saisis en cas de plainte.
Lorsque l'on se rend au commissariat pour porter plainte, la première question qui nous est posée concerne le motif de cette plainte : vol, crime, disparition. Ces catégories existent dans les formulaires remplis par les policiers. Pourquoi instrumentaliser la possibilité de disposer de catégories supplémentaires pour caractériser les infractions en amont ? Elle nous permettrait de prévoir des dispositifs de formation, d'information, voire de rééducation, pour utiliser votre terminologie.
Ce que nous proposons n'est absolument pas une mesure anti-flics.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Au contraire, elle doit aider les policiers à remplir les bonnes cases de manière à disposer de statistiques utiles. Mais vous ne voulez pas voir la réalité de la délinquance dans notre pays. Ce qui vous arrange, c'est qu'elle existe ! Vous la stigmatisez de façon exagérée pour faire peur à vos électeurs, parce que c'est votre fonds de commerce.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Je ne veux pas allonger les débats, mais il y a des mots que je ne peux laisser passer. Parler de rééducation des forces de l'ordre, ce n'est pas possible !
Non, la rééducation des auteurs d'infraction ! Vous m'avez mal écouté !
Les forces de l'ordre font un travail remarquable au quotidien. Vous proposez de les infantiliser avec cet amendement. Avis résolument défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 116
Nombre de suffrages exprimés 116
Majorité absolue 59
Pour l'adoption 25
Contre 91
L'amendement n° 12 n'est pas adopté.
Au lendemain du 7 octobre, certains élus de l'extrême gauche – pas tous – ont glorifié les crimes du Hamas.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Ils ont glorifié le fait que des femmes ont été violées. Au moment où je vous parle, des bébés et trois de nos compatriotes sont encore otages. L'apologie des crimes contre l'humanité est un délit grave. Les élus doivent par nature montrer l'exemple. Ne rien faire face aux pogroms, face à la boule au ventre des juifs français qui ont le courage de rester dans un pays où ils sont menacés, c'est se condamner au bégaiement de l'histoire.
La France, le pays des droits de l'homme, le pays qui a constitutionnalisé il y a deux jours le droit à l'avortement, est incapable de protéger sa plus ancienne minorité, présente sur son sol depuis le Moyen Âge, du déchaînement antisémite de l'extrême gauche antisioniste !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Le pacte social républicain est en danger de mort car il ne sait plus protéger – hélas !– tous ses enfants. J'en suis attristé. L'islamisme est l'allié des islamo-gauchistes.
Exclamations prolongées sur les mêmes bancs.
Plus que jamais, nous devons protéger les Français en général et les Juifs de France en particulier.
Les gens ne le savent pas, mais l'État d'Israël est un minuscule territoire, dont la superficie – 24 000 kilomètres carrés – représente deux départements français. Ce que l'on appelle « les territoires contestés », c'est 5 000 kilomètres carrés : la bande de Gaza est invisible sur une carte.
« C'est une honte ! » et vives protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Huées sur les mêmes bancs
mais il existe un apartheid dans les territoires palestiniens, où un Juif qui se perd est massacré.
On a le droit de critiquer le gouvernement israélien, on a le droit de critiquer tous les gouvernements de tous les États, mais on n'a pas le droit de refuser au seul État juif à côté de cinquante et un États musulmans le droit d'exister. Voilà la triste réalité !
On ne peut nier l'existence des Palestiniens ! Cent mille personnes massacrées, ça ne vous suffit pas !
Très vives protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous cherchez des manifestations d'antisémitisme ? Vous pouvez regarder là !
L'orateur désigne les bancs du groupe LFI – NUPES.
Avis défavorable.
Monsieur Meyer Habib, vous avez dit que certaines personnes de l'extrême gauche avaient glorifié les crimes du Hamas. Pas chez nous ! Personne chez nous n'a fait cela.
Protestations sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.
Vous devriez réécouter ce que nous avons dit : nous avons été les premiers à qualifier les actes du 7 octobre de crimes de guerre et de potentiels crimes contre l'humanité.
M. Meyer Habib s'exclame.
Vous parlez d'islamisme et d'islamo-gauchisme comme jadis l'extrême droite parlait de judéo-bolchévisme au sujet des militants de gauche qui défendaient les juifs contre l'antisémitisme. Aujourd'hui, nous sommes traités d'islamo-gauchistes parce que nous défendons nos compatriotes musulmans contre l'islamophobie dont ils font l'objet.
Monsieur Habib, l'islamisme est notre adversaire au même titre que l'extrême droite.
Protestations sur les bancs du groupe RN.
Car l'islamisme et l'extrême droite sont les deux faces d'une même pièce qui divise le peuple sur la base de la religion.
De votre côté, vous avez dit au sujet des bombardements à Gaza : ce n'est pas fini, cela va continuer ! Et vous avez incité le gouvernement d'Israël à continuer les bombardements. Vous devriez avoir honte de votre comportement et de ce que vous faites à l'Assemblée nationale !
La guerre ne sera pas finie jusqu'à l'élimination du Hamas. Le gouvernement d'Israël est démocratiquement élu !
Ça suffit d'inventer des antisémites qui n'en sont pas et de traiter d'islamo-gauchistes…
…ceux qui défendent le droit de nos concitoyens à exercer librement leur religion dans le pays qui en garantit la possibilité dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Applaudissements sur les bancs LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs des groupes RE et LR. – Protestations sur les bancs du groupe RN.
Nous sommes des humanistes qui défendons le droit de chacun à pouvoir exercer librement sa religion et à ne pas se faire traiter en fonction de sa couleur de peau ou de sa religion. Vous devriez suivre notre exemple, monsieur Habib !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il se fonde à la fois sur l'article 70 relatif aux mises en cause personnelles et sur l'article 100 qui concerne la bonne tenue de nos débats.
Nous demandons que l'interpellation de M. Meyer Habib, « C'est la cheffe du Hamas qui parle ! », soit notée au compte rendu et qu'une sanction soit prise.
En ce qui concerne la bonne tenue des débats, je rappelle que nous discutons d'un texte sur la lutte contre les infractions racistes et antisémites. Il est donc intolérable d'entendre nier l'existence d'un peuple, c'est-à-dire précisément ce contre quoi vous prétendez agir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il se fonde sur l'article 100 relatif à la bonne tenue de nos débats.
Je veux rappeler que depuis le 7 octobre et à peine quelques secondes après avoir appris les massacres, les pogroms et les abominations du Hamas, toutes vos prises de parole politiques ont tendu à minimiser et à édulcorer ce qui s'est passé.
Vives protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous n'avez jamais pris fait et cause pour le peuple israélien. Vous n'avez jamais dénoncé les massacres.
Huées sur les mêmes bancs. – Exclamations sur les bancs du groupe RN. – Tumulte.
S'il vous plaît, un peu de calme ! Est-il possible de s'écouter les uns les autres dans cet hémicycle ? Que l'on soit d'accord ou non, on s'écoute !
Mme Obono souhaite que certains de nos collègues soient sanctionnés parce qu'ils ont dit qu'il existe des liens entre le Hamas et La France insoumise, mais c'est pure vérité !
Vives protestations sur les bancs LFI – NUPES.
Je demande que l'on évite les interpellations personnelles dans cet hémicycle. Elles sont interdites !
Exclamations prolongées.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.
Nous en venons au vote de l'amendement n° 67 , qui a reçu un double avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
L'amendement n° 67 n'est pas adopté.
Sur l'article 3, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 81 de Mme Caroline Yadan est défendu.
L'amendement n° 81 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 41 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 68 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 83 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 91
Nombre de suffrages exprimés 91
Majorité absolue 46
Pour l'adoption 58
Contre 33
L'article 3, amendé, est adopté.
La différence entre le caractère public et le caractère non public d'un discours, en cas d'infraction commise au moyen d'applications de messagerie privée telles que WhatsApp ou Telegram, est extrêmement ténue compte tenu de l'audience des groupes de discussion. Dès lors, au vu du continuum des discours de haine, il ne semble pas pertinent d'introduire de distinction en matière de régime procédural selon que les faits sont publics ou non s'agissant du délit d'apologie ou de contestation de crime contre l'humanité.
La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse prévoit que « toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans se proposant, par ses statuts, de lutter contre l'esclavage ou de défendre la mémoire des esclaves et l'honneur de leurs descendants », ainsi que « toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits qui se propose, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l'honneur de la résistance ou des déportés, d'assister les victimes de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité, de défendre leur mémoire ou de lutter contre les discriminations », peuvent « exercer les droits reconnus à la partie civile » pour les infractions réprimées par l'article 24 bis de la même loi.
Eu égard à l'expertise des associations sur certains dossiers et compte tenu du rôle croissant que joue l'application Telegram dans la diffusion des discours de haine, je crois nécessaire de permettre aux associations d'ester en justice pour les infractions d'apologie ou de contestation non publique de crime contre l'humanité, et ce afin d'assurer une meilleure efficacité de la réponse pénale.
M. Antoine Léaument applaudit.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement n° 88 et donner l'avis de la commission sur l'amendement.
Mon sous-amendement est rédactionnel. Avis favorable sur l'amendement sous réserve de l'adoption du sous-amendement.
Même position.
Le sous-amendement n° 88 est adopté.
L'amendement n° 31 , sous-amendé, est adopté.
Vous n'avez vraiment pas envie de ce texte !
…qui ont conduit à ajouter la notion d'« identité de genre supposée » dans le texte. Contrairement à ce qu'on dit certains, il ne s'agit pas d'orientation sexuelle, de choix intime, mais d'une construction, ou plutôt d'une déconstruction, qui nous vient principalement du wokisme et qui vise à faire table rase de tout ce que nous sommes, des fondamentaux que sont le genre, notre histoire et notre culture. On cherche à ce que cette notion s'immisce dans nos lois pour transformer la société, mais l'« identité de genre supposée » n'existe pas et n'a pas à entrer dans un texte de loi.
Il faut bien évidemment respecter les personnes pour ce qu'elles sont au regard de leur choix individuel intime et de leur orientation sexuelle, mais pas se soumettre à des déconstructions wokistes qui n'ont qu'un seul but : satisfaire à toutes les revendications, lesquelles deviennent sans fin – ce que montre l'expérience américaine du wokisme –, sachant qu'à partir du moment où vous céderez sur l'une, vous céderez sur toutes.
Je tenais à apporter cette clarification. L'« identité de genre supposée » n'existant pas, protégeons nos fondamentaux.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
J'ai dit tout à l'heure que les islamistes et l'extrême droite étaient les deux faces d'une même pièce. Nous allons examiner dans quelques instants un amendement qu'auraient tout à fait pu signer des islamistes ,
Protestations sur plusieurs bancs du groupe RN
…puisqu'ils sont, eux aussi, contre la question du genre. Les amendements que vous avez déposés sur la proposition de loi concernent uniquement le genre et absolument pas la lutte contre le racisme et l'antisémitisme. C'est bien la preuve que vous n'en avez absolument rien à faire.
Je crois, en outre, que vous n'avez pas bien compris ce qu'est « l'identité de genre supposée » : il s'agit de l'assignation d'un individu à un genre en fonction du regard porté sur lui.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
De même que vous êtes supposé avoir telle ou telle religion en raison de votre nom, de votre couleur de peau ou d'autres signes extérieurs. Cela relève précisément du racisme ou de l'antisémitisme.
L'article 4 constitue l'un des rares volets de cette proposition de loi avec lesquels nous sommes en accord. Il s'agit de faire en sorte que l'identité de genre, réelle ou supposée, ne puisse pas être un objet de discrimination. Or, à votre manière de vous exprimer sur le sujet, nous voyons combien il est nécessaire de protéger les personnes transgenres de gens comme vous, monsieur Odoul !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vives exclamations sur de nombreux bancs du groupe LFI – NUPES
…ceux dont vous sollicitez les voix et avec qui vous marchez, ceux que vous encensez et que vous invitez à vos colloques, ceux que vous mettez sur votre liste aux élections européennes ,
« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RN
à peine seraient-ils aux responsabilités que c'est la charia qui s'appliquerait et qu'on ne parlerait plus d'identité de genre ! Il n'y aurait plus supposition de quoi que ce soit, monsieur Léaument !
Vous nous faites un petit numéro de claquettes, certes assez amusant,…
…mais la réalité, c'est que cette idéologie est un cancer et que vous sollicitez les voix de ses partisans en permanence.
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
La réalité, c'est que vous la nourrissez car vous avez compris depuis des années, à l'instar de M. Mélenchon, que pour avoir les voix des islamistes, il fallait être antisémite !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous avez compris que pour avoir leurs voix, il fallait céder à leurs revendications sur le port de l'abaya à l'école, sur le port du voile, sur le port du burkini, sur les interdits alimentaires, sur toutes les restrictions qui sont contraires à nos valeurs, à nos principes, à nos lois, à notre culture ! Vous avez tout lâcher parce que vous avez besoin du grand capital électoral islamiste !
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je n'ai pas entendu parler de l'amendement, mais j'y suis défavorable.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et LFI – NUPES.
La parole est à M. Antoine Léaument. Votre intervention porte sur l'amendement, cher collègue ?
Ce n'est pas possible ! Vous voulez pourrir le texte ! C'est pourtant un bon texte !
Je rappelle qu'un attentat islamiste au colis piégé a été commis en 2019. Qu'a dit son auteur ? Que son objectif était de faire monter le vote du Rassemblement national avant les élections !
Applaudissements sur plusieurs les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe RN
qui cherchent à diviser les Français sur la base de la religion et à assigner nos compatriotes musulmans à l'islamisme. Les islamistes ont exactement le même objectif que vous !
Nous, au contraire, nous disons en permanence à nos compatriotes musulmans, visés par des gens comme vous et par les islamistes, que dans la République des droits de l'homme et du citoyen, ils ont le droit, comme tous les habitants de notre pays, de pratiquer librement leur religion.
Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Coupez-lui le micro ! Il veut pourrir le débat !
Vous étiez antisémites et vous l'êtes toujours, mais vous y avez ajouté une couche : l'islamophobie !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Vous n'avez lu le texte ni à l'extrême droite, ni à l'extrême gauche, c'est la réalité !
Sur le fondement de l'article 100 relatif à la discussion des amendements, j'interviens au sujet de la bonne tenue des débats, madame la présidente.
Chers collègues, il reste moins de vingt amendements à examiner. J'appelle votre attention sur le fait que cette proposition de loi est un beau texte, un texte utile. Si vous continuez comme ça, il ne pourra pas être voté. C'est peut-être ce que certains veulent, mais pas nous !
Nous cherchons à combattre le racisme et l'antisémitisme par des peines plus sévères. S'il vous plaît, faites un effort et limitez vos prises de parole à la défense des amendements, pour que nous puissions tous les examiner.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe HOR. – Exclamations.
Oui, madame la présidente, sur la base de l'article 70, alinéa 3.
M. Léaument vient de nous traiter d'antisémites. Je demande que cela soit noté au compte rendu de la séance et je demande que des mesures soient prises en conséquence. Nous ne pouvons pas accepter de nous faire insulter à longueur de journée !
Exclamations sur de nombreux bancs du groupe LFI – NUPES. – Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je mets aux voix l'amendement n° 58 , qui a reçu un double avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
L'amendement n° 58 n'est pas adopté.
Sur la base l'article 70, alinéa 3.
Madame la présidente, nous venions de voter lorsque j'ai entendu de l'autre côté de l'hémicycle : « Les racistes ! » C'était Mme Regol, je crois.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
S'il vous plaît, mes chers collègues, essayons d'avancer dans l'examen du texte.
Bruit.
Ce n'est pas tolérable ! Nous ne pouvons pas accepter de nous faire insulter en permanence, madame la présidente !
Sourires et exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…avec des collègues qui sont dans l'insulte permanente. Ils ont besoin d'extérioriser, les pauvres, et d'oublier leurs péchés, mais c'est assez navrant.
J'en viens à l'amendement
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES
« Oh ! » sur les mêmes bancs
concernant l'identité de genre et l'orientation sexuelle. Je rappelle que l'imam Iquioussen, qui avait un CV long comme le bras – aussi long qu'une quenelle, monsieur le ministre
Exclamations sur divers bancs du groupe RE
C'est vous qui l'avez inventée !
Madame la présidente, s'il vous plaît ! Vous ne voulez donc pas que nous votions le texte ?
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur.
Selon l'article 54, alinéa 6, du règlement, « l'orateur ne doit pas s'écarter de la question, sinon le président l'y rappelle. S'il ne défère pas à ce rappel […] le président peut lui couper la parole ». J'appliquerai dorénavant strictement cette disposition.
Je vous redonne la parole, monsieur Odoul, à condition que vous reveniez à l'amendement.
Il concerne l'identité de genre, sujet sur lequel j'ai déjà exprimé notre position, ce qui nous a valu les critiques de plusieurs groupes, dont La France insoumise.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Je rappelais simplement que l'imam Iquioussen, antisémite, islamiste et homophobe, a été soutenu par M. David Guiraud, député de Roubaix.
Madame la présidente, ça fait cinq minutes !
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur.
L'amendement n° 59 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je vais le défendre, mais brièvement, parce que je sais qu'il faut aller au bout de l'examen de cette proposition de loi pour la voter, même si elle n'est pas parfaite.
Je ne vous lirai pas les courriers d'insultes que j'ai reçus depuis un mois en tant que député de la République et qui ont justifié le dépôt d'une trentaine de plaintes. Lorsqu'on entend un ancien ministre des affaires étrangères, déifié au Quai d'Orsay, parler d'empoisonnement des puits par les Juifs, on comprend que l'antisémitisme est encore très vivant encore dans notre pays. Sur la liste de La France insoumise aux élections européennes se trouve toujours le nom d'une femme qui pense que les attentats du 7 octobre étaient légitimes. Il faut aller au bout de l'examen de ce texte et il faut le voter.
On n'y arrivera pas !
L'amendement n° 69 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 42 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement renvoie à un débat, qui, je le sais, agace et énerve, mais qui est d'actualité : au-delà de l'alourdissement du texte par l'ajout des mots « vraie ou supposée », ce sont des fondamentaux que l'on met en péril. Nous assistons aujourd'hui à une offensive wokiste de grande ampleur, qui vise à déconstruire tous les pans de la société – la société actuelle, passée et future ! Cela mérite d'être dit.
Nous sommes d'ailleurs les seuls à dénoncer cette tendance et à avoir lancé une association antiwokiste pour rappeler ce que nous sommes, quelle est notre société, quelles sont nos valeurs et notre civilisation.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Petit pas après petit pas, nous voyons la gauche, l'extrême gauche et les macronistes – tous ceux qu'on appelle les bien-pensants – lancer des offensives pour nier les réalités biologiques. Je rappelle qu'il n'existe pas d'« identités supposées ».
Il n'y a ni femmes supposées ni hommes supposés, mais des femmes et des hommes qui ont des orientations sexuelles diverses, toutes également respectables. Ces choix intimes doivent être protégés – et ce n'est pas ce que font vos amis islamistes, qui les menacent au contraire.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Mais oui, chers collègues, dans les pays qui appliquent la charia, il n'y a pas de militants LGBT et les homosexuels sont défenestrés. Je tiens à le dire : il n'y a pas de Gay Pride à Gaza !
Brouhaha. – Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Les deux minutes sont dépassées !
Merci, monsieur le député ! Je vous redemande, à toutes et à tous, d'arrêter les mises en cause personnelles.
Quel est l'avis de la commission ?
Défavorable, en rappelant qu'en Russie non plus, il n'y a pas de Gay Pride.
Avec les amendements de M. Odoul, on touche le cœur du sujet : la libération de la parole réactionnaire.
M. Laurent Jacobelli rit.
Cette parole homophobe et transphobe a des effets, que je souhaite rappeler. Six attaques contre le centre LGBT de Tours en 2023, dont une au cocktail Molotov ; même chose à Arras, à Nantes, à Nancy et partout ailleurs en France. Avec les propos qu'il tient, M. Odoul met une cible sur le dos des personnes trans.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Maël, étudiant de Besançon, a subi trois agressions en trois ans, à cause de sa transidentité.
Ce n'est pas possible ! Ils n'ont pas envie de voter ce texte, ni à l'extrême gauche ni à l'extrême droite ! C'est un bon texte pourtant, mais on ne va pas arriver à le voter.
La dernière date de 2019, mais en octobre 2018, déjà, il avait témoigné d'une double agression intervenue dans le même parking. En réalité, c'est tous les jours qu'à force d'entendre vos propos, on agresse des personnes dont vous niez l'existence et les souffrances. C'est pourquoi nous nous opposons à tous vos amendements réactionnaires et transphobes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il y en a marre !
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est insupportable. Vous faites tout pour ne pas voter le texte. Bas les masques !
Pour la bonne tenue de nos débats, je tiens à rappeler, après l'intervention de Mme Abomangoli, que la première responsable politique française à avoir dit, en 2010, que dans certains quartiers il ne faisait pas bon être Juif, femme ou homosexuel, c'était Marine Le Pen, et non Jean-Luc Mélenchon !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Vives protestations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur.
Je suis désolée, monsieur Odoul, mais ce n'est pas un rappel au règlement.
Je tiens à préciser que le gouvernement Macron a vendu pour 150 millions d'euros d'armes à la Russie ; alors qu'il garde ses leçons !
Je mets aux voix l'amendement n° 60 , qui a reçu un double avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
L'amendement n° 60 n'est pas adopté.
Sur l'article 4, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 4 de M. Raphaël Gérard est défendu.
L'amendement n° 4 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
« Défendu ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
M. le ministre, en voulant nous attaquer – l'attaque est leur seul argument –, a dit qu'il n'y avait pas de Gay Pride en Russie.
Je lui demande donc pourquoi, jusqu'en 2020, le gouvernement d'Emmanuel Macron a vendu à la Russie pour 150 000 euros d'armes – hélicoptères, avions et chars.
Je ne veux pas entrer dans la polémique ,
« Ah ! » sur les bancs du groupe RN
même si vous avez quelques accointances avec la Russie. Nous sommes normalement réunis pour adopter un texte contre l'antisémitisme, mais vous n'en voulez manifestement pas, ni à la droite ni à la gauche de cet hémicycle.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
C'est reparti pour deux heures de débat stérile…
Monsieur le ministre, vous avez raison : du racisme et de l'antisémitisme, nous ne voulons pas, et nous cherchons les moyens de les combattre efficacement.
Alors votez le texte !
Nous sommes en désaccord avec la méthode proposée dans cette proposition de loi, mais nous défendons notre point de vue et nous irons…
Monsieur Léaument, je viens de le dire : si vous ne restez pas sur le sujet de l'amendement, je vous retire la parole. Parlez de l'amendement, je vous prie.
Allez, on vote !
L'amendement fait partie de la longue litanie des propositions de M. Odoul sur le texte. Il a affirmé tout à l'heure que Mme Le Pen avait été la première à dire que dans certains quartiers, on subissait…
Vives exclamations sur les bancs des groupes RE et RN.
Je suis désolé, mais je parle bien de l'amendement puisque celui-ci concerne la question du genre !
Dans certains quartiers, dites-vous, les gens sont victimes de violences en raison de leur genre ou de leur orientation sexuelle. Monsieur Odoul, le racisme et l'antisémitisme, la discrimination liée au genre ou à la sexualité, ne se rencontrent pas seulement dans certains quartiers, mais dans toute la société.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Jérôme Guedj applaudit également.
Voilà pourquoi nous disons que c'est un problème systémique, que le patriarcat est un système de domination, tout comme le racisme. Vos propos en fournissent une excellente illustration !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 61 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 110
Nombre de suffrages exprimés 109
Majorité absolue 55
Pour l'adoption 82
Contre 27
L'article 4, amendé, est adopté.
La parole est à M. Meyer Habib, pour soutenir l'amendement n° 64 , portant article additionnel après l'article 4.
Des collègues m'ayant posé la question, je voudrais que chacun comprenne ce qu'est le quotidien d'un député juif qui représente les Français d'Israël. Je vais vous lire quatre parmi les dizaines de menaces que je reçois.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.
« Je t'ai dit : si je te vois, je te tue d'une balle entre les deux yeux de sang-froid, fils de pute sioniste de mes couilles. »
Rumeurs sur divers bancs.
« Personne n'a encore décidé de te foutre une balle dans la tête ? Ta grosse pute de mère sioniste, fils de pute. »
« J'espère que tu crèves d'une maladie incurable, et qu'on viole ta femme et tes enfants devant tes yeux sionistes. »
Les rumeurs s'intensifient.
« Meyer, j'espère de tout cœur un jour te croiser pour te défigurer. Et tu ne seras pas mon premier ni mon dernier fils de pute que je déforme. Continue à défendre ces fils de pute sionistes. Comme prévu, je suis en France pour vous enculer un par un. Personne n'est prêt, vous n'êtes pas prêts. Vive la Palestine ! »
Les rumeurs continuent.
J'en ai deux pages comme ça. Je n'en parle jamais, mais ça suffit ! C'est pourquoi il faut aller au bout et voter cette proposition de loi.
M. Meyer Habib s'approche du ministre et lui remet un document. – Brouhaha.
M. Meyer Habib est raccompagné à sa place par les huissiers.
Chers collègues, il y a des gens qui nous regardent. On débat d'un sujet important, le racisme et l'antisémitisme, et nous sommes tous, ici, les élus de la nation. Essayons de donner une meilleure image de nous-mêmes !
Monsieur Habib, ces menaces, ces insultes sont évidemment insupportables, et nous vous apportons tout notre soutien, mais ceux qui veulent lutter efficacement contre le racisme et l'antisémitisme doivent voter ce texte, pour qu'il entre en vigueur.
Je ne veux pas donner de leçons de morale – je ne suis pas l'arbitre des élégances –, mais si nous sommes sensibles à ces insultes, comme nous devrions tous l'être, alors votons le texte, accélérons le débat, sans nous empêtrer dans des histoires stériles. On n'est pas là pour freiner le débat, comme le font l'un et l'autre bord de l'hémicycle ;
M. le ministre se tourne successivement vers les travées situées à chaque extrémité de l'hémicycle
on est là pour lutter contre l'antisémitisme !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Sinon, en matière d'antisémitisme, il y en aurait des choses à rappeler sur les « détails de l'histoire » !
Vives protestations sur les bancs du groupe RN. – M. Laurent Jacobelli brandit le règlement de l'Assemblée nationale. – Brouhaha.
Vous traitez bien des députés de racailles !
Monsieur le garde des sceaux, j'ai la parole pour un rappel au règlement sur le fondement de l'article 70, alinéa 2 ; souffrez donc que je m'exprime et écoutez-moi un instant.
Le sujet est suffisamment sérieux pour ne pas recevoir de leçons de lutte contre l'antisémitisme de la part de quelqu'un qui, dans sa vie, a défendu Mohammed Merah. Je n'ai pas attendu le débat de ce soir pour défiler en soutien à Israël et pour combattre l'antisémitisme. Voilà vingt-cinq ans que je le fais et ce n'est pas vous qui allez, ce soir, nous donner des leçons, surtout avec votre passé professionnel.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs des groupes RE et Écolo – NUPES.
Par vos gestes provocateurs, déplacés et racistes, vous cherchez à créer un tumulte dans notre assemblée, monsieur le garde des sceaux, et si le texte ne peut pas être voté, c'est vous qui en serez responsable.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Une mauvaise foi crasse !
Je souhaite faire un rappel au règlement sur le fondement de l'article 100, relatif à la bonne tenue de nos débats.
En matière de lutte contre l'antisémitisme, personne n'a de leçons à recevoir de la part du Rassemblement national.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, RE, Dem et HOR.
Jamais, jamais, jamais ! Quelques jours après l'hommage national que le pays a rendu à Robert Badinter, mettre en cause un avocat pour les clients qu'il a défendus, quels qu'ils soient, c'est porter atteinte à l'État de droit, c'est abîmer la haute conception de la République que nous avons tous.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, RE, LFI – NUPES, Dem, HOR, Écolo – NUPES et GDR – NUPES. – Protestations sur les bancs du groupe RN.
Un avocat défend la justice, quelle que soit la crapule qu'il puisse assister. Ce que vous venez de dire est ignoble.
Robert Badinter, qui a aboli la peine de mort, a aussi défendu les criminels les plus odieux, car il avait une haute idée de la justice.
Les applaudissements se poursuivent. – Certains députés des groupes SOC, RE et Écolo – NUPES applaudissent debout.
Il en est de même pour Éric Dupond-Moretti. Quels que soient les désaccords qu'on peut avoir avec lui, s'en prendre à un avocat pour les clients qu'il a défendus, c'est non seulement piétiner la mémoire de Robert Badinter, c'est faire honte à notre conception de la République – surtout quand ces attaques viennent du Rassemblement national, dont on connaît le passé de complicité et de connivence avec l'antisémitisme.
Mêmes mouvements. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Vous êtes démasqués ce soir !
Je me fonde également sur l'article 100 du règlement.
Tous ceux qui auront regardé ce débat seront, je crois, atterrés
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
de voir un socialiste mitterrandiste – François Mitterrand avait reçu la francisque des mains du maréchal Pétain, et les socialistes ont voté pour accorder à celui-ci les pleins pouvoirs – donner des leçons.
Protestations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Vous êtes indigne de la cause que vous voulez défendre, monsieur Guedj. Vous êtes l'héritier de cet homme, l'héritier d'un collaborationniste ; alors vos leçons, vous vous les gardez !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Mettre en cause en avocat parce qu'il défend tel ou tel client est honteux !
Elle sera belle avec vous, la justice !
Les mises en cause comme les rappels au règlement vont s'arrêter maintenant.
Vous avez déjà eu les deux suspensions auxquelles vous aviez droit sur la séance pour le groupe Rassemblement national, monsieur Odoul.
Je mets aux voix l'amendement n° 64 , qui a reçu un double avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
L'amendement n° 64 n'est pas adopté.
Vives protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je profite de la discussion de cet article, qui prévoit l'application du texte à plusieurs territoires d'outre-mer, pour interpeller sur un sujet qui nous intéresse, nous, députés de la nation, humanistes
M. Laurent Jacobelli s'esclaffe
et, pour certains d'entre nous, directement concernés par le racisme et les discriminations. Quand nous sommes injuriés, nous avons les moyens de porter plainte et de faire condamner les auteurs des propos racistes, mais nous savons qu'avoir accès à la justice n'est pas donné à tout le monde ,
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES
pour des raisons financières, mais aussi parce que le droit de la non-discrimination n'est pas assez connu, pas assez utilisé. C'est en tout cas le constat de certains juristes.
Exclamations.
Allez, allez, ça n'a rien à voir !
Je vois que certains utilisent ce moment pour faire des effets de tribune, mais s'ils avaient travaillé sur le sujet ou s'ils étaient concernés, ils aborderaient plus sérieusement le sujet du droit de la non-discrimination.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
J'aimerais consacrer les quelques secondes qui me restent à un point qui – je crois – devrait vous intéresser. Depuis une vingtaine d'années, sous l'impulsion de l'Union européenne, il y a eu des avancées, mais, aujourd'hui, des juristes, des magistrats et des avocats constatent un manque de lisibilité du droit de la non-discrimination.
La présidente coupe le micro de l'oratrice, qui proteste.
Sur les amendements n° 9 , 11 , 13 , 8 , 10 et 17 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 3 et 35 .
L'amendement n° 3 de M. Raphaël Gérard est défendu.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement n° 35 .
Il vise à poursuivre le travail entrepris en commission afin d'assurer l'applicabilité de cette excellente proposition de loi en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna. La commission ayant introduit une nouvelle disposition relative à la liberté de la presse, il nous faut assurer son égale application dans ces trois territoires.
Favorable.
Volonté scandaleuse de ne pas voter le texte !
Ça vous gêne de débattre à l'Assemblée, monsieur le ministre ? Alors il ne faut pas rester…
J'attends que M. le ministre se calme. Il devrait peut-être prendre une camomille…
Protestations sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je profite de l'amendement de notre collègue pour souligner que nos compatriotes d'outre-mer sont particulièrement concernés par les discriminations, voire comptent parmi leurs premières victimes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est en pensant à eux que nous disons que le texte ne va pas assez loin, car il ne prend pas les problèmes à leur racine systémique. Le droit de la non-discrimination a besoin d'un code pour avoir de la visibilité, pour que les justiciables, particulièrement ceux d'outre-mer, sachent qu'il existe, dans notre arsenal juridique, des moyens de se défendre. N'en déplaise à monsieur le ministre qui pense que tout va bien dans le monde de la justice !
Écoutez les magistrats, écoutez les juristes, écoutez les avocats ! Je sais que vous n'avez que mépris pour les professionnels du droit.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe RE.
Celles et ceux qui s'impliquent pour accompagner les justiciables le disent : vous n'êtes pas à la hauteur de la tâche immense qui devrait être menée. L'accomplir est dans nos engagements et nous ferons bien mieux que ce que vous prétendez faire aujourd'hui.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Pour une fois, je partage la position de Mme Obono. Nos compatriotes ultramarins sont régulièrement victimes de racisme, et je veux d'abord parler de nos compatriotes de Mayotte, qui subissent une forme de racisme dont personne ne parle ici : le racisme anti-français. Ils aiment passionnément la France et veulent rester des Français en France.
Nous avons bien compris que la gauche, le Gouvernement et la majorité n'avaient pas vraiment envie de leur laisser ce droit et de les protéger de la submersion comorienne. Nous avons bien compris aussi que, pour La France insoumise, qui n'a que la lutte contre les discriminations à la bouche, des Français de couleur noire et de confession musulmane qui revendiquent passionnément leur appartenance nationale ne méritent pas d'être défendus. C'est honteux !
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Oui, nos compatriotes ultramarins doivent être défendus, et les Mahorais particulièrement ! C'est l'honneur de la représentation nationale que de leur dire qu'ils sont des Français et que nous sommes à leurs côtés.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'article 5, amendé, est adopté.
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l'article 5. La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l'amendement n° 9 .
Il s'agit d'une demande de rapport sur la formation de la police et je précise tout de suite qu'il ne s'agit aucunement d'une mise en cause des policiers
Exclamations sur les bancs du groupe RN
– j'aborderai la question du racisme structurel lors des explications de vote. Policiers et gendarmes eux-mêmes demandent une formation de meilleur niveau. Nous sommes en mesure de satisfaire ce besoin à condition de disposer d'un rapport permettant d'étudier en détail le sujet.
Je mets aux voix l'amendement n° 9 , qui a reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 125
Majorité absolue 63
Pour l'adoption 28
Contre 97
L'amendement n° 9 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 127
Nombre de suffrages exprimés 125
Majorité absolue 63
Pour l'adoption 28
Contre 97
L'amendement n° 11 n'est pas adopté.
Dans son rapport annuel de 2022, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) s'interrogeait à nouveau sur le nombre de magistrats et magistrates réellement formés à la thématique du contentieux antiraciste. Elle regrettait qu'aucune formation obligatoire n'ait été prévue pour les magistrats et les magistrates spécialisés. La Défenseure des droits recommande également de former de manière obligatoire des magistrats et des magistrates référents à la thématique des discriminations et aux spécificités de leur contentieux. Par ailleurs, elle regrette le bilan très mitigé des pôles antidiscriminations et constate la persistance du manque de dynamisme et de démarche proactive des parquets. Malgré l'existence de ces pôles, peu d'affaires sont instruites et encore moins font l'objet de poursuites.
Nous demandons donc un rapport pour inventorier l'ensemble des formations dispensées auprès des magistrats et magistrates sur les thématiques du racisme et de la non-discrimination et qui pourrait constituer un bilan utile afin de généraliser les bonnes pratiques et de combattre les mauvaises. Comme la CNCDH, nous pensons qu'il est nécessaire de mettre en place des formations plus approfondies sur ces infractions, pour que les magistrats soient en mesure de s'en saisir dans tous leurs aspects, de créer une jurisprudence et de rendre ce contentieux plus visible, afin que les citoyens puissent faire appel à la justice et voient leur préjudice reconnu et réparé.
Je mets aux voix l'amendement n° 13 , qui a reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 124
Nombre de suffrages exprimés 119
Majorité absolue 60
Pour l'adoption 48
Contre 71
L'amendement n° 13 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 123
Nombre de suffrages exprimés 120
Majorité absolue 61
Pour l'adoption 49
Contre 71
L'amendement n° 8 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Nadège Abomangoli, pour soutenir l'amendement n° 10 .
Il propose d'envisager l'ouverture des actions de groupe aux infractions à caractère raciste ou discriminatoire. La CNCDH estime que 1,2 million de personnes sont victimes d'actes à caractère raciste alors que le ministère de l'intérieur ne relève que 13 000 infractions. L'année dernière, la Défenseure des droits indiquait que le levier du signalement et du recours individuel avait de fortes limites car il fait peser sur la victime un risque de représailles et la difficulté à faire la preuve de la discrimination subie.
Il s'agit d'un point crucial, car il ne faut pas voir le racisme ou l'antisémitisme comme la somme de propos ou d'actes individuels. Nous l'avons rappelé à plusieurs reprises lors de ce débat : le racisme est systémique
Applaudissements sur quelques les bancs du groupe LFI – NUPES
et les discriminations imprègnent notre société. Dès lors, l'action de groupe permet de combattre collectivement les pratiques discriminatoires et donne de la force aux victimes.
La Défenseure des droits n'a cependant eu connaissance que d'un nombre très limité d'actions de groupe entreprises en la matière. Nous estimons qu'il serait utile de mettre en place un registre national des actions de groupe en cours pour faciliter le recours à ce dispositif et lui donner de la visibilité et de la force. Nous souhaitons un élargissement de ce dispositif, qui nous semble optimal pour lutter contre le racisme et l'antisémitisme vécus par nombre de nos concitoyennes et de nos concitoyens – même si, je le sais, cela n'a pas intéressé grand monde aujourd'hui.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je mets aux voix l'amendement n° 10 , qui a reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 134
Nombre de suffrages exprimés 131
Majorité absolue 66
Pour l'adoption 28
Contre 103
L'amendement n° 10 n'est pas adopté.
Il s'agit ici, avec un rapport, d'interpeller le Gouvernement et la représentation nationale sur ce que la CNCDH appelle le « chiffre noir du racisme ». Les données officielles sur les infractions à caractère raciste ne sont pas représentatives de la réalité vécue par des millions de personnes. Un nombre important de ces infractions échappent à la justice, ce qui empêche d'établir un constat crédible de l'état du racisme en France. Les statistiques présentées chaque année se fondent exclusivement sur les signalements effectués. Or, comme cela a été dit, de nombreuses victimes s'empêchent, par méconnaissance ou par défiance, de signaler aux forces de sécurité ou à la justice des infractions commises à leur encontre.
Les plaintes adressées directement au procureur de la République ne sont pas comptabilisées par le ministère de l'intérieur et des outre-mer, tandis que les mains courantes enregistrées par les services de sécurité ne sont pas portées à la connaissance des procureurs et ne peuvent faire l'objet d'enquête ou de poursuites. Il n'y a donc pas de données consolidées.
Il nous semble donc qu'un rapport serait utile pour appréhender le phénomène qualitativement et quantitativement, mettre en lumière les carences existantes et proposer des recommandations. Pour pouvoir lutter efficacement contre toutes les formes de racisme, il faut prendre les problèmes à la racine et tenir compte de leur nature systémique. Il faut donc faire de la recherche et allouer des moyens. Ce rapport permettrait de déterminer les moyens qu'il conviendrait de déployer si nous voulons réellement nous attaquer au phénomène et prévenir la commission des infractions.
M. Antoine Léaument applaudit.
Défavorable.
Il faut le dire, cet amendement repose sur un mensonge. La gauche et l'extrême gauche mettent toujours en avant un racisme prétendument systémique, des millions de Français imaginaires qui souffriraient dans leur quotidien du racisme, des discriminations, etc.
Exclamations prolongées sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Madame Obono, la France n'est pas raciste. J'en veux pour preuve que, chaque année, nous accueillons sur notre sol plus de 400 000 personnes. Elles font le choix de venir en France, car elles considèrent que notre pays est attractif, qu'il est un eldorado, en tout cas qu'il n'est pas raciste.
Je sais que vous avez besoin de cet argumentaire…
Vous avez besoin de rendre notre pays odieux, sale, dégradé. C'est votre politique, votre stratégie.
Nous le disons, la France n'est pas raciste. Elle est accueillante pour tous ceux qui respectent notre pays, notre culture, nos lois, notre histoire. Elle a toujours assimilé tous les étrangers qui font le choix de cœur, de passion, de devenir Français et de faire partie de notre magnifique communauté nationale.
Exclamations sur les bancs des groupes RE, LFI – NUPES et Écolo – NUPES. – Plusieurs députés du groupe LFI – NUPES font mine de congédier l'orateur de la main.
Vous n'aimez pas la France. Vous n'aimez pas les Français. Vous ne voyez que des racistes. Pour notre part, nous voyons un beau pays…
La présidente coupe le micro de l'orateur. – Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 138
Nombre de suffrages exprimés 132
Majorité absolue 67
Pour l'adoption 30
Contre 102
L'amendement n° 17 n'est pas adopté.
Nous avons achevé l'examen des articles de la proposition de loi.
Sur l'ensemble de celle-ci, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Vous proposez de durcir la répression pénale des infractions à caractère raciste ou antisémite. Nous vous l'avons dit, cette proposition de loi est inutile. Globalement, il ne sert à rien d'augmenter la répression pénale : ce sera sans effet sur les actes individuels. Néanmoins, nous ne contestons pas qu'il faut punir pénalement les actes et les propos à caractère raciste ou antisémite.
Votre loi sera contre-productive parce qu'elle interviendra en bout de course, à un moment où le propos raciste a déjà été tenu, où l'acte raciste a déjà été commis. Elle ne réglera pas le problème de la période intermédiaire, celle du dépôt de plainte. Il aurait fallu travailler sur la prise en compte du dépôt de plainte.
Or vous n'avez rien fait à ce sujet. Comment voulez-vous que les gens pensent utile de déposer plainte, dès lors qu'existe ce fameux « chiffre noir » du racisme ? Sur une année, le nombre d'actes racistes ou antisémites est estimé à 1,2 million, mais il y a seulement 12 000 plaintes.
Pour répondre à cette question, il aurait fallu, comme nous vous l'avons proposé, considérer le racisme comme un problème systémique.
Je sais que cela vous fait hurler quand nous parlons de racisme systémique,…
…de la même manière que cela vous faisait hurler lorsque, avant le mouvement #MeToo, nous parlions de sexisme systémique, du patriarcat…
Ce n'est pas si loin de vous ! Vous êtes même champions en la matière !
…et du caractère permanent, dans la société, des systèmes de domination.
C'est cela dont il faut prendre conscience : le racisme est, comme le sexisme et le patriarcat, un système de domination. Il est difficile d'admettre ce caractère systémique,…
Ce n'est pas parce que c'est systémique chez LFI que c'est systémique en France !
…car cela signifie que les dominants doivent prendre conscience du fait qu'ils sont dans une position de domination et qu'ils doivent se remettre en question. De toute évidence, un certain nombre de personnes ici n'ont pas envie de se remettre en question.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
« L'expression permet de pointer la façon dont le racisme s'actualise de manière diffuse dans les relations sociales, sans pour autant que cela soit orchestré par un État qui adhérerait à une idéologie raciste et sans s'en tenir aux seuls actes ou propos violents commis par des personnes activement racistes. » Voilà la manière dont Éléonore Lépinard, sociologue à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS), définit le racisme systémique.
Votre proposition de loi ne répond pas à la question, car elle ne traite qu'une partie du problème, c'est-à-dire les propos et les actes commis par les personnes activement racistes. Que faites-vous de l'autre partie du sujet, à savoir le caractère systémique du racisme dans la société ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est ce qui fait qu'une personne aura un moindre accès au logement, à l'emploi, aux soins, aux études ,
« Ça suffit ! et autres exclamations sur les bancs du groupe RE
qu'elle manquera de confiance en elle ou, ce qui est plus dangereux pour la République, qu'elle doutera de sa propre appartenance à la nation.
Je prends un exemple très concret : les jeunes de notre pays qui sont perçus comme Noirs ou Arabes ont vingt fois plus de chances de faire l'objet d'un contrôle d'identité. Qu'est-ce que cela provoque chez eux ? Une personne en uniforme portant sur l'épaule le drapeau tricolore de la République leur renvoie l'image qu'ils ne font pas pleinement partie de notre nation.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations prolongées sur les bancs des groupes LR et RN.
Il faut résoudre ce problème de fond.
En disant cela, je ne pointe pas du doigt les policiers comme individus, ni même la police comme organisation ; je pointe le caractère systémique du racisme et de l'antisémitisme. D'ailleurs, les gendarmes et les policiers sont eux-mêmes favorables au fait de recevoir une meilleure formation sur le sujet. Pourquoi n'agissez-vous pas ?
À la tribune de l'Assemblée nationale, dans le temple laïque de la République, je dis à nos compatriotes qui n'ont pas ma couleur de peau ou qui sont victimes de discriminations en raison de leur religion, de leur genre ou de leur orientation sexuelle : quand on vous moque, ce n'est pas la France ; quand on vous rabaisse, ce n'est pas la France ; quand on vous insulte, ce n'est pas la France ; quand on vous menace, on vous frappe ou on vous tue, ce n'est pas la France !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur divers bancs.
La France, c'est la République. La République, c'est la liberté, l'égalité et la fraternité :…
…la liberté d'exercer sa religion comme on l'entend ; l'égalité qui se définit dans le rapport à la loi, chacun pouvant contribuer à la faire et chacun devant la respecter ; la fraternité qui est le meilleur remède au poison du racisme et de l'antisémitisme.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est la raison pour laquelle nous vous disons, avec Frantz Fanon : « Quand vous entendez dire du mal des Juifs, dressez l'oreille : on parle de vous. »
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES, dont plusieurs députés se lèvent. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Nous avons indiqué dans notre propos introductif que nous étions plutôt intéressés par votre texte, mais circonspects : nous attendions de savoir quelles mesures seraient adoptées. Je ne pensais pas alors, je vous l'avoue, que je serais convaincue par la virulence du Rassemblement national, son obsession à empêcher le texte d'être adopté
« Oh ! » sur les bancs du groupe RN
et la multiplication d'expressions ou d'insultes qui ont vocation à être condamnées par ce texte.
C'est donc assez tranquillement que le groupe Écologiste votera pour un texte qui met tellement hors d'eux les collègues qui siègent sur les bancs d'en face.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES et RE.
Tous les groupes qui souhaitaient expliquer leur vote ont pu le faire. Nous allons procéder au scrutin sur l'ensemble de la proposition de loi.
Brouhaha.
J'ai déjà lancé le scrutin, car il n'y avait pas d'autre orateur inscrit. Je suis sincèrement désolée.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 148
Nombre de suffrages exprimés 107
Majorité absolue 54
Pour l'adoption 107
Contre 0
La proposition de loi est adoptée.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – MM. Jérémie Patrier-Leitus et Victor Habert-Dassault applaudissent également.
Prochaine séance, ce soir, à vingt-deux heures :
Discussion de la proposition de loi portant réparation des personnes condamnées pour homosexualité entre 1945 et 1982 ;
Discussion de la proposition de loi visant à faciliter la transformation des bureaux en logements ;
Discussion de la proposition de loi visant à professionnaliser l'enseignement de la danse en tenant compte de la diversité des pratiques.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra