France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à seize heures.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à l'industrie verte (n° 1443 rectifié, 1512).
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. le ministre délégué chargé de l'industrie, Roland Lescure, et moi-même sommes très heureux de présenter aujourd'hui le projet de loi relatif à l'industrie verte. Le 4 septembre 1958, place de la République, à Paris, le général de Gaulle affirmait : « La nécessité de rénover […] l'industrie […] nous pousse à être […] dynamiques et expéditifs. » Voilà exactement ce que nous vous proposons avec ce texte : d'être dynamiques et expéditifs pour réindustrialiser la France et décarboner sans délai notre industrie nationale.
En 1958, le choix économique se posait en des termes simples : reconstruire ou périr. À l'époque, la France a fait le choix de la reconstruction. Elle a bâti, innové, électrifié, créé une filière nucléaire…
…et gagné la bataille économique. En 2023, je le reconnais, la situation est bien plus complexe, puisque nous devons reconstruire notre industrie sans périr : au défi de la réindustrialisation – un défi économique vital – s'est ajouté celui de la décarbonation de l'économie – un défi vital tout court. Pour les relever, deux options sont possibles, dont nous allons débattre tout au long de nos échanges : la décroissance de la production ou la décarbonation de la croissance.
Avec la majorité, nous faisons le choix clair et résolu de la décarbonation de la croissance, et nous refusons tout aussi résolument le choix de la décroissance, qui conduirait à l'appauvrissement des Français et de notre nation.
Le choix de la décarbonation de la croissance conjugue la lutte contre le réchauffement climatique et l'innovation, la protection du climat et la prospérité, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l'industrie. Nous faisons ce choix pour trois raisons, la première étant d'assurer l'avenir de notre nation. En effet, nous voulons que la nation française reste une nation de production,…
…qui conserve et développe une production manufacturière à haute valeur ajoutée au cours des prochaines décennies.
Inutile de nous attarder trop longtemps sur le suicide économique qu'a constitué la désindustrialisation…
…pendant les quatre dernières décennies :…
Exclamations sur les bancs du groupe GDR – NUPES
…il est le symbole d'une nation qui renonce à elle-même, qui se trahit,…
…et qui a détruit 2 millions d'emplois industriels, fermé 600 usines et bafoué sa culture ouvrière.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Triste bilan d'une triste politique, ou plutôt d'une absence de politique.
Avec les députés de la majorité, nous préférons insister sur le succès de la réindustrialisation que nous avons engagée avec le Président de la République depuis 2017, en nous affranchissant de certains tabous, tels que celui auquel était soumise la fiscalité du capital. Si nous avons abaissé celle-ci, c'est tout simplement parce qu'il ne saurait y avoir d'industrie sans capital, ni de développement industriel sans fiscalité favorable au capital.
Depuis 2017, nous avons créé près de 100 000 emplois industriels, ouvert 300 usines et développé des investissements industriels massifs à Crolles, à Dunkerque, à Douvrin et dans de nombreux autres territoires.
C'est le résultat de votre politique, mesdames et messieurs les députés de la majorité, et vous pouvez en être fiers !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous faisons le choix de la décarbonation de la croissance pour une deuxième raison : l'emploi. Nous voulons que la France crée des emplois qualifiés et bien rémunérés, c'est-à-dire des emplois industriels. L'industrie doit retrouver ses lettres de noblesse et l'ouvrier ses titres de gloire. Qu'ils travaillent dans l'électricité, la chimie, l'automobile, l'aéronautique, le luxe ou le médicament, les ouvriers et les ingénieurs doivent reprendre leur place dans notre économie, une place centrale qu'ils n'auraient jamais dû perdre.
C'est exactement ce que les communistes ont toujours dit ! C'est bien, vous avez relu nos tracts !
La troisième raison pour laquelle nous souhaitons engager la décarbonation de l'économie est naturellement le climat. Je veux combattre ici un raisonnement rapide et, comme le sont souvent les raisonnements rapides, faux. Pour certains, produire moins en France conduirait à polluer moins et donc à préserver la planète. C'est l'exact contraire qui est vrai ! Notre pays, je le rappelle, émet deux à cinq fois moins de CO
À chaque fois que nous produisons en France, nous décarbonons notre économie et la planète. Voilà la principale raison pour laquelle nous devons accélérer le développement de l'industrie verte en France !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.
Produire plus en France, c'est produire mieux. Tel est précisément le sens du projet de loi.
Exclamations sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Sourires.
Comment allons-nous faire ? Ce texte sur l'industrie verte a essentiellement deux objectifs. Le premier est de décarboner l'industrie existante.
On ne construira pas l'industrie de demain sur les ruines de l'industrie d'hier – c'est tout l'inverse. Les grands sites industriels de Fos-sur-Mer, de Dunkerque, de Crolles ou d'ailleurs ont besoin de se décarboner et il n'est pas question de les laisser tomber. Nous avons, au contraire, la volonté de les accompagner et de les soutenir dans ce processus.
Le deuxième objectif est d'investir dans cinq technologies clés, choisies et mesurées : l'hydrogène vert, les pompes à chaleur, les batteries électriques, l'éolien et les panneaux photovoltaïques.
Toutes ces technologies vertes d'aujourd'hui et de demain nous permettront d'être aux avant-postes de l'industrie du XXI
Je laisse à Roland Lescure le soin de présenter dans le détail les instruments proposés par le projet de loi. Je conclurai, quant à moi, en insistant sur trois principes nouveaux et fondamentaux entérinés par le texte, principes qui brisent plusieurs tabous et qui reviennent sur des habitudes ancrées dans une certaine paresse politique.
Premier principe : l'impôt n'est pas la solution.
Exclamations et sourires sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES. – Mme Sandrine Rousseau s'exclame également.
Ce n'est certainement pas en augmentant les impôts que nous accélérerons la décarbonation de l'économie et que nous favoriserons l'investissement industriel, bien au contraire !
Pour financer la transition écologique, nous devons inventer de nouveaux modes de financement en nous appuyant sur les normes, le signal prix et l'épargne
M. Maxime Minot s'exclame.
La norme « triple E » (Excellence environnementale européenne) que nous proposons permettra d'inciter les entreprises à la décarbonation. Quant au plan d'épargne avenir climat (PEAC), nouveau produit d'épargne vert que nous créons, il permettra de lever 5 milliards d'euros pour financer la transition climatique et l'industrie verte.
Rappelons que l'épargne financière des ménages français s'élève à 5 800 milliards. Une petite partie me semble pouvoir être redistribuée à bon escient vers la décarbonation de notre économie ,
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Sandrine Rousseau s'exclame également
sans qu'il soit besoin de créer un impôt de solidarité sur la fortune (ISF) vert ou je ne sais quel prélèvement supplémentaire.
Faut-il rappeler que la France détient le record des prélèvements obligatoires au sein des pays développés ?
Deuxième principe, la vitesse est un élément clé. On ne peut pas, d'un côté, souligner l'urgence climatique et, de l'autre, ralentir la réalisation de projets qui visent à décarboner l'industrie et à accélérer la transition climatique.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.
Nous proposons donc, avec ce projet de loi, d'accélérer les procédures.
Le troisième principe, auquel je tiens beaucoup, est celui de la préférence européenne. Là aussi, les choses sont simples : plus il y a de contenus européens dans un produit industriel, moins celui-ci contient de CO
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Je souhaite que cette évidence nationale devienne demain une évidence européenne !
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Telles sont les grandes lignes du projet de loi relatif à l'industrie verte dont nous entamons aujourd'hui l'examen. Je me réjouis que vous soyez nombreux cet après-midi dans l'hémicycle et je ne doute pas que vous le serez encore davantage au cours des prochaines heures. L'industrie française le mérite et la transition climatique encore plus !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Il y a deux mois, le Président de la République, Emmanuel Macron, a inauguré le sixième sommet Choose France à Versailles…
…et a annoncé vingt-huit implantations ou extensions de sites industriels par des dirigeants d'entreprise étrangers, soit un total de 13 milliards d'euros d'investissements et 8 000 créations d'emplois directs.
Lors de la réunion du Conseil national de l'industrie (CNI) qui s'est tenue le 23 juin dernier sous la présidence de la Première ministre, Élisabeth Borne, j'ai eu l'honneur de présenter la feuille de route de décarbonation des cinquante sites industriels français les plus émetteurs de gaz à effet de serre – à eux seuls, ils représentent 60 % des émissions industrielles nationales.
Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a récemment inauguré à Douvrin, dans le Pas-de-Calais, une gigafactory qui fournira plus de 25 % des batteries de véhicules électriques françaises.
Le Président de la République a par ailleurs annoncé le rapatriement en France de la production de vingt-cinq médicaments essentiels.
VivaTech (Viva Technology) est désormais le premier salon numérique au monde, devant le CES (Consumer electronics show) de Las Vegas.
Après quatre ans d'absence, le salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget, premier salon de ce secteur au niveau mondial, s'est tenu en juin dernier, plaçant la France et l'Europe sur la carte mondiale de la décarbonation de l'industrie aéronautique.
Il s'agit d'un enjeu majeur. Vous le savez, la France exporte 50 % des avions dans le monde. Ainsi, madame Rousseau, si la France parvient à décarboner son industrie aéronautique, 50 % des gaz à effet de serre émis par les avions au niveau mondial seront supprimés grâce à la France !
Il y a quelques jours, nous avons également inauguré le Verkor Innovation Centre en Isère…
…et annoncé les noms des 237 lauréats du concours d'innovation 2022-2023 lancé dans le cadre du plan France 2030. Ce concours est la preuve que les start-up ne se limitent plus à des logiciels inventés dans un garage par deux entrepreneurs visionnaires, mais qu'elles représentent bien l'avenir de l'industrie française !
Enfin, Bruno Le Maire, Carole Delga, présidente de la région Occitanie et moi-même, avons inauguré une nouvelle chaîne de production d'Airbus.
Bref, en deux mois, nous avons accompli beaucoup et prouvé que l'industrie était de retour. Ces résultats ne sont pas le fruit du hasard. Bruno Le Maire l'a dit, ils sont permis par la politique menée depuis six ans par la majorité,…
…politique que nous devons désormais amplifier.
Ce qui me frappe, sur le terrain, lorsque je rencontre les acteurs impliqués dans ces projets et dans d'autres, c'est que le soutien à l'industrie française et la nécessité de sa décarbonation font l'objet d'un large consensus. Depuis un an que j'occupe mes fonctions de ministre délégué chargé de l'industrie, j'ai effectué une centaine de déplacements et j'ai rencontré des élus de tous bords. S'ils sont d'accord sur peu de choses en ce qui concerne la politique nationale, qu'il s'agisse d'économie, d'immigration, de protection sociale ou de mesures sociétales, ils sont proches de l'union nationale en matière d'industrie – j'en suis convaincu, car je le constate tous les jours sur le terrain.
Nous sommes prêts à aligner les écosystèmes pour construire les industries, préparer la décarbonation de demain, accompagner les territoires en difficulté, sauver l'emploi industriel, et, bien entendu, créer la prospérité d'aujourd'hui et de demain. Plusieurs exemples le montrent. Le 28 avril, je me suis rendu au Havre, ville chère au député Lecoq, qui y était – il s'en souvient.
Le député Hubert Wulfranc n'était d'ailleurs pas très loin. La rapporteure, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback était également présente avec Mme Agnès Carel, ainsi que Mme Virginie Carolo-Lutrot, vice-présidente de la région Normandie, M. Alban Bruneau, maire communiste de Gonfreville-l'Orcher…
Vous n'étiez pas là, en effet, mais ce déplacement concernait les engrais, et non l'éolien – votre absence m'a déçu, mais vous m'aviez indiqué avoir d'autres engagements. Enfin, M. Édouard Philippe, maire du Havre et président de l'agglomération, était présent. Vous étiez ainsi tous rassemblés pour l'annonce de l'installation, au Havre et dans sa région, d'une zone industrielle bas-carbone, d'un plan de souveraineté et de décarbonation de l'engrais et du développement de la capture carbone – bref, de la décarbonation d'un des cinquante principaux sites émetteurs du pays.
L'union nationale est possible : grâce à ce projet de loi, le projet de décarbonation de la zone du Havre sera simplifié du fait de l'accélération des procédures d'installation prévue à l'article 2 et de la mutualisation des concertations préalables pour plusieurs projets envisagés dans une zone géographique donnée, telle qu'elle figure à l'article 3.
En Aveyron, un grand acteur industriel allemand, Bosch, a fait part de difficultés dans la diversification engagée avec les syndicats, qui avaient pourtant signé un accord avec la direction il y a deux ans pour préserver ce site cher à tous les élus locaux. Lors de mon déplacement à Rodez, j'ai rencontré les députés Laurent Alexandre, Jean-François Rousset et Stéphane Mazars, ainsi que M. Arnaud Viala, président Les Républicains du conseil départemental, et Mme Carole Delga : nous sommes tous rassemblés pour que cette industrie, qui fait face au défi majeur que représente la transition du moteur thermique vers le moteur électrique, puisse le relever tout en préservant l'emploi. Là encore, ce projet de loi jouera un rôle particulièrement important.
Ce texte doit ainsi nous permettre de faire dans l'hémicycle ce que nous sommes tous capables de faire ensemble sur le terrain : libérer notre industrie, libérer les procédures, libérer du foncier, libérer du financement,…
…tout en préservant la planète et en créant les conditions de la décarbonation de l'industrie, afin de faire de la France la première économie décarbonée du monde.
Je ne développerai pas l'intégralité des mesures prévues dans le projet de loi, mais permettez-moi d'en présenter quelques-unes, essentielles. Il s'agit, notamment, de mettre à disposition de l'industrie cinquante sites intégralement dépollués, représentant 2 000 hectares ;…
…de rehausser la créance environnementale au rang des créances privilégiées ; ou encore de diviser par deux les délais d'ouverture ou d'agrandissement d'une usine en France, qui passeront de dix-sept mois actuellement à neuf mois.
Évidemment, cette accélération n'entraînera aucun affaiblissement des études d'impact ou des consultations publiques ; au contraire, nous les renforçons.
Nous souhaitons aussi instaurer des projets d'intérêt national majeur, sans limiter la capacité des élus locaux à se prononcer sur leur pertinence – c'est l'objet de l'article 9. Dans un contexte budgétaire contraint, nous souhaitons également libérer le financement. Le ministre Bruno Le Maire l'a dit : près de 6 000 milliards d'euros sont disponibles dans l'épargne privée des ménages. Nous devons pouvoir en libérer 5 milliards pour accélérer la décarbonation.
Après avoir ainsi libéré, nous devrons aussi – on ne se refait pas – protéger, à travers la commande publique. Nous voulons opérer une révolution copernicienne, culturelle…
Tout ce qui est excessif est insignifiant, monsieur le ministre délégué.
…de notre manière de passer des commandes publiques, afin de privilégier les achats responsables et durables : c'est possible, grâce aux dispositions que nous allons adopter – avec vous, je l'espère – dans ce texte.
Enfin, vous le savez – cela nous a été largement reproché en commission spéciale –, nous n'avons pas traité directement dans ce texte des enjeux de formation, qui sont essentiels au développement de l'industrie française mais font l'objet d'autres dispositifs.
Ainsi, l'appel à manifestation d'intérêt « compétences et métiers d'avenir » du plan France 2030 est doté, pour sa première saison, de 780 millions d'euros, et de 700 millions pour la deuxième. Par ailleurs, la réforme du lycée professionnel et l'augmentation du nombre de places dans les écoles d'ingénieurs nous permettront de disposer de l'ensemble des forces vives nécessaires à la réalisation de cette ambition.
Au fond, ce projet de loi vise à unir les forces autour d'une cause commune. Nous l'avons vu au Sénat – en commission comme dans l'hémicycle –, mais aussi lors des débats en commission spéciale : nous sommes capables de nous rassembler. La commission spéciale a ainsi adopté 255 amendements, issus de l'ensemble des bancs.
Aussi, alors que vos votes révélaient la confiance des députés et la capacité de la plupart d'entre eux à se rassembler, j'ai été surpris d'apprendre, madame Chikirou, que vous aviez déposé une motion de rejet préalable sur ce texte.
J'espère qu'elle sera rejetée, tout simplement pour que nous puissions continuer à débattre et à enrichir ce texte – qui, j'en suis convaincu, peut nous rassembler. Il contribuera à réconcilier économie et écologie, fin du monde et fin du mois ,…
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES
…à réconcilier la France des territoires avec l'emploi et la prospérité pour toutes et tous, à restaurer durablement notre balance commerciale, à retrouver notre souveraineté,…
…à imposer nos normes sociales et environnementales quand d'autres ne les respectent pas – au fond, à rassembler la France autour d'un projet commun : le Fabriqué en France, durable et prospère !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
La parole est à M. Guillaume Kasbarian, rapporteur général de la commission spéciale.
L'industrie fait battre le cœur de nos territoires. Chacun d'entre nous a régulièrement l'occasion de visiter les usines et les sites de production qui maillent nos circonscriptions ou d'aller à la rencontre des salariés et des chefs d'entreprise qui y travaillent et font respirer le poumon industriel de notre pays. Chacun a l'occasion de voir la fierté de ces femmes et de ces hommes, qui travaillent sur des machines qui sont autant de concentrés de technologie et de savoir-faire acquis au fil du temps.
Ces déplacements et ces rencontres font naître en nous un sentiment de fierté et d'espérance vis-à-vis de notre industrie.
Alors qu'il a trop longtemps été délaissé et dénigré, nous nous devons de soutenir massivement le secteur industriel et de l'accompagner pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Le Gouvernement et la majorité présidentielle y travaillent sans discontinuer depuis 2017 ; car une industrie forte, c'est plus d'emplois dans nos territoires et l'assurance d'un maintien de nos savoir-faire. Une industrie forte, c'est également une contribution essentielle à l'économie nationale et à notre balance commerciale. C'est aussi une alliée indispensable à l'atteinte de nos objectifs climatiques.
Ce ne sont que des phrases prononcées par des députés communistes depuis des années !
L'industrie représente peut-être 20 % de nos émissions, mais elle apportera surtout 100 % des solutions.
Grâce à notre mix énergétique déjà très décarboné et à la relocalisation de certaines de nos productions, nous pouvons être l'un des premiers acteurs de la transition écologique. La France est le pays le plus attractif d'Europe en matière d'investissements étrangers et ouvre désormais plus d'usines qu'elle n'en ferme.
Cependant, il nous faut aller plus loin et répondre aux attentes du terrain. Qui n'a jamais entendu un dirigeant d'entreprise lui dire : « Je souhaite implanter ma nouvelle usine en France, mais c'est toujours plus compliqué et plus long chez nous que chez nos voisins » ?
Avec ce projet de loi, nous leur répondons en prévoyant que les procédures soient menées en parallèle, afin de diviser par deux les délais d'implantation des projets industriels.
Qui n'a jamais entendu un élu local lui dire : « J'ai une friche sur mon territoire, mais je ne peux pas la mettre à disposition d'un projet industriel, car le coût de dépollution est beaucoup trop élevé » ?
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Avec ce projet de loi, nous facilitons la dépollution et la réhabilitation des friches pour libérer davantage de foncier industriel.
Qui n'a jamais entendu un salarié lui dire : « Nous venons de perdre un appel d'offres car la collectivité – ou l'État – a préféré choisir un produit moins cher fabriqué à l'autre bout du monde » ? Avec ce projet de loi, nous améliorons la prise en compte des critères environnementaux dans la commande publique pour soutenir les entreprises les plus vertueuses et leurs salariés.
Enfin, qui n'a jamais entendu un Français lui dire : « J'aimerais soutenir davantage le Fabriqué en France et la transition écologique avec mon épargne, mais je ne sais pas comment faire » ?
Sourires et exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Avec ce projet de loi, nous proposons aux Français un nouveau plan d'épargne avenir climat pour financer les fonds propres de nos entreprises et répondre à leurs attentes.
Ceux qui viennent nous voir ont plutôt du mal à boucler les fins de mois !
C'est tout le sens de ce projet de loi : apporter des solutions concrètes à des problèmes concrets. Car oui, l'industrie permet de réconcilier économie et écologie.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Aux partisans de la décroissance, à ceux qui considèrent qu'il faudrait moins de production, donc moins d'usines et d'emplois industriels en France, je réponds que c'est au contraire par l'innovation, par l'investissement et par la production dans notre pays que nous réussirons à répondre à l'urgence climatique.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Notre modèle français doit être celui de la décarbonation, de l'indépendance et de la fierté industrielle. Je pense que nous sommes nombreux à partager cette ambition.
Pour conclure, je remercie l'ensemble des députés, des sénateurs, des dirigeants d'entreprise, des organisations professionnelles, des associations environnementales et des salariés pour le travail de coconstruction qui a été engagé depuis le mois de janvier par Bruno Le Maire et Roland Lescure. Nous pouvons nous réjouir collectivement d'avoir fait aboutir ce texte dans les meilleures conditions. C'est pourquoi je ne doute pas qu'il sera voté à une large majorité et que nous parviendrons, ensemble, à dérouler le tapis vert à l'industrie française.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à Mme Christine Decodts, rapporteure de la commission spéciale pour le chapitre II du titre Ier .
En ma qualité de députée de Dunkerque, je suis très honorée d'apporter ma modeste et humble contribution au projet de loi relatif à l'industrie verte, pour trois raisons.
Premièrement, parce que la fille de sidérurgiste licencié à 50 ans que je suis a connu la décroissance industrielle de son territoire et ses multiples conséquences économiques, sociales, familiales et humaines. Traverser une ville morte au milieu des années 1980 pour aller au lycée chaque jour, voir la fermeture des Ateliers et chantiers de France en 1988, malgré 325 navires lancés et un savoir-faire reconnu mondialement : voilà qui marque à jamais.
Je vous rappelle que c'étaient les politiques libérales de Thatcher, de Reagan et des autres !
Deuxièmement, parce que Dunkerque, territoire fort, endurant et résistant, à l'image de ses habitants, vit désormais un fabuleux renouveau industriel au cœur de l'industrie décarbonée, avec 20 000 emplois directs à la clé.
Troisièmement, parce que je porte haut et fort la volonté de donner aux femmes toute leur place dans l'industrie et que d'importants progrès ont été réalisés en la matière, en particulier à Dunkerque.
Je le vis chaque jour en tant que présidente de l'association Entreprendre ensemble : quel bonheur pour les conseillers des missions locales que de donner à des jeunes – notamment à des jeunes femmes – des perspectives positives et dynamiques en matière de formation et d'emploi ; ce n'était pas le cas il y a encore cinq ans. L'industrie est aussi un projet social : ne l'oublions jamais.
Notre responsabilité d'élus est d'encourager au maximum la réindustrialisation décarbonée de notre pays : faisons plus vite, tout en faisant mieux ! Réduisons les délais d'implantation de dix-sept à neuf mois, comme M. Laurent Guillot le préconisait dès janvier 2022 dans le rapport « Simplifier et accélérer les implantations d'activités économiques en France », dans lequel il soulignait le retard de la France par rapport à ses voisins européens. Pour ce faire, l'article 2 du projet de loi prévoit d'accélérer la procédure de délivrance de l'autorisation environnementale tout en modernisant la consultation du public.
Cet article prévoit un déroulement simultané des phases, actuellement distinctes et successives, d'examen du dossier de demande d'autorisation et de consultation du public. Surtout, l'article 2 crée une nouvelle procédure : le public sera désormais consulté dès le début de la phase d'examen et pendant une période de trois mois, contre un mois actuellement dans le cadre de l'enquête publique. En permettant au public de participer au processus décisionnel en matière d'environnement dès le début de la procédure – c'est-à-dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles –, cette nouvelle procédure garantit un meilleur respect de la Charte de l'environnement adoptée en 2004.
Je salue à cet égard les apports des sénateurs, qui ont permis d'améliorer et de préciser cette nouvelle procédure de consultation du public. Ainsi, afin de ne laisser aucun citoyen de côté, le Sénat a précisé que le public pourrait faire parvenir ses observations et ses propositions par voie postale, et pas seulement par courrier électronique. La chambre haute a également souhaité maintenir l'obligation, pour le commissaire enquêteur, de figurer sur une liste d'aptitude, ce qui est gage de compétence et d'impartialité. La commission spéciale a également permis de renforcer l'article 2. Je pense en particulier à la possibilité pour le juge de condamner à des dommages et intérêts les auteurs de recours abusifs contre des décisions d'autorisation environnementale.
J'en viens maintenant à l'article 3, qui concerne la phase amont de la procédure d'autorisation environnementale. Il s'inscrit dans le prolongement de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique, dite Asap, qui a ouvert la possibilité de mutualiser les procédures de participation du public dans le cadre des projets d'implantation de parcs éoliens en mer sur une même façade maritime. L'article 3 étend ce principe, sur demande de la personne publique, qu'il s'agisse du préfet ou d'une collectivité territoriale. L'organisation d'un débat global ou d'une concertation globale est en effet pertinente pour les projets envisagés au sein d'une même zone à forte activité industrielle, comme les zones industrialo-portuaires. Je précise néanmoins que cette mutualisation restera facultative.
L'article 3 a fait l'objet d'ajustements en commission spéciale, de manière à mieux prendre en compte l'accélération des impacts liés au dérèglement climatique et à offrir une plus grande cohérence avec l'arsenal législatif déjà existant.
Pour conclure, je réaffirmerai ma volonté de maintenir le rôle de la Commission nationale du débat public (CNDP), tout en vous invitant à la moderniser.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure de la commission spéciale pour les chapitres III et IV du titre Ier .
« Aux victoires et déboires du passé font suite de nombreuses et graves craintes mais aussi de grands et merveilleux espoirs. » Cette citation de Paul Bairoch pourrait résumer l'histoire industrielle et être le chapeau du projet de loi relatif à l'industrie verte.
Faire de la France un pays d'industries vertes, c'est plus qu'un débat sémantique : c'est travailler à réconcilier l'industrie et le développement durable, qui ont trop longtemps été opposés. En effet, lorsqu'une industrie s'éteint dans un territoire, c'est souvent la promesse de décennies de recherches pour y relancer l'économie. Je l'ai vécu en tant que maire de Fécamp, dont le moteur économique fut la grande pêche, secteur florissant jusqu'à la fin des années 1980, à laquelle la signature d'un accord international mit un terme brutal.
Nous devons tirer les leçons du passé et miser sur des secteurs d'avenir. Notre responsabilité est grande dans le choix de la trajectoire industrielle de la France, et c'est pour cette raison que nous sommes ici, devant vous. Il est nécessaire de simplifier les procédures, d'ouvrir les friches industrielles en favorisant la requalification de ces espaces souvent pollués et de financer les milliards d'investissements nécessaires pour produire plus et mieux en France.
Comme il se dit beaucoup, au café du commerce ou ailleurs, qu'ici, dans cette assemblée, nous serions parfois un peu déconnectés, je tiens à souligner que ce projet de loi a fait l'objet d'une très large concertation et que la méthode de son élaboration est exemplaire.
Merci à MM. les membres du Gouvernement de nous avoir permis de travailler de cette manière.
Je suis heureuse d'être rapporteure d'articles qui, demain, seront utiles pour nos industriels, donc pour l'emploi de nos concitoyens. Je souhaite également saluer la qualité des débats et le travail de la commission spéciale, qui aura permis d'approfondir et d'améliorer substantiellement le texte.
Le chapitre III du projet de loi prévoit des dispositions permettant d'encourager le développement de l'économie circulaire. L'ambition de ce texte, telle qu'elle ressort de l'article 4, est forte, puisque nous avons voulu adapter les dispositions du code de l'environnement pour permettre aux entreprises d'utiliser plus facilement des substances ou matériaux qui, au lieu de devenir des déchets, pourraient être utilement intégrés dans le processus de fabrication. De même, nous avons voulu encourager le recyclage de matériaux incorporés dans des produits qui ne prennent pas le statut de déchet. Renforcer ainsi le recyclage et la réutilisation permet de réduire le recours à de la matière première vierge et de diminuer les émissions de gaz à effet de serre.
L'article 4 porte plus précisément sur le statut de déchet. Il prévoit plusieurs mesures, parmi lesquelles la possibilité, au sein des plateformes industrielles, d'utiliser des résidus de production, qui sont présumés être des sous-produits et non des déchets ; la clarification du régime de sortie du statut de déchet ; la création d'un régime de sanctions administratives applicable aux transferts transfrontaliers illicites de déchets.
L'article 4 bis, introduit par la commission spéciale, vise à rendre plus dissuasives les sanctions pénales applicables en cas d'infraction à la législation sur les déchets, afin, notamment, de lutter contre le trafic illicite de déchets et les filières illégales.
Le chapitre IV concerne la réhabilitation des friches. Ces dernières peuvent permettre aux collectivités de construire sur un sol déjà artificialisé. Face à la raréfaction des réserves foncières disponibles et à l'obligation de limiter l'artificialisation des sols, nous avons ainsi un impératif : faciliter la réhabilitation des friches. Nous le savons tous, le parcours pour remobiliser ces dernières est trop complexe. Nous proposons donc plusieurs évolutions pour le simplifier.
L'article 6 réforme, quant à lui, le mécanisme des garanties financières obligatoires pour les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) les plus polluantes. En commission spéciale, nous avons supprimé un dispositif qui n'a démontré aucune efficacité depuis dix ans et ne permet pas aux pouvoirs publics de bénéficier des financements nécessaires à la mise en sécurité et à la réhabilitation des sites industriels concernés. En contrepartie – parce qu'il y en a – les sanctions administratives, notamment financières, ont été renforcées dans les cas d'exploitation sans autorisation ou illégale.
Enfin, l'article 7 est aussi ambitieux. Il vise à faciliter et à encourager la mise en œuvre d'opérations de restauration de la biodiversité et de renaturation des sites naturels, à des fins de compensation mais pas uniquement. Nous avons ainsi requalifié les sites naturels de compensation en sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation, nouvelle dénomination qui traduit bien leur double vocation : faciliter le respect des obligations de compensation et permettre l'engagement volontaire d'acteurs de la biodiversité.
Je souhaite enfin que nos débats soient, comme en commission spéciale, apaisés et productifs.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à Mme Anne-Laure Babault, rapporteure de la commission spéciale pour le titre II.
Quelque 110 milliards d'euros : c'est ce que représente la commande publique en France. C'est cette somme que nous proposons d'actionner, afin d'en faire un levier opérationnel pour verdir notre économie.
À la fin de la précédente législature, le Parlement a adopté la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, la loi « climat et résilience », qui a apporté des évolutions majeures dans le droit de la commande publique et renforcé sa dimension écologique. Nous sommes désormais quasiment à mi-chemin de l'entrée en vigueur de sa disposition la plus ambitieuse, prévue par l'article 35, selon laquelle, à l'été 2026, 100 % des marchés publics devront intégrer un critère environnemental.
D'ici là, il nous reste encore du travail à accomplir pour que les marchés publics deviennent un levier massif et incontournable en faveur de la transition écologique. C'est tout le sens du titre II, qui est consacré aux enjeux environnementaux de la commande publique.
L'article 12 habilite le Gouvernement à introduire, par ordonnance, un nouveau motif d'exclusion de la commande publique en cas de non-respect de l'obligation d'établir un rapport de durabilité. Cette obligation est prévue par la directive relative à la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises, dite directive CSRD. Il s'agit là d'un dispositif analogue à celui qui avait été introduit par la loi « climat et résilience » à propos du plan de vigilance des sociétés.
L'article 13, qui occupera – à juste titre – une place prédominante dans nos débats, comprend trois mesures principales. Tout d'abord, il poursuit le renforcement des Spaser, les schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables, dont l'importance est primordiale pour orienter l'évolution de la commande publique ; ensuite, il crée un nouveau motif d'exclusion des marchés publics, à savoir le non-respect de l'obligation d'établir un Beges – bilan d'émissions de gaz à effet de serre ; enfin, il précise la façon dont est déterminée l'offre la plus avantageuse économiquement, ce qui inclut notamment la prise en compte du critère environnemental, et cela dans l'attente de l'entrée en vigueur de l'article 35 de la loi « climat et résilience », qui pourra être anticipée pour certains marchés.
L'article 14 étend les dispositions de ce même article et du présent projet de loi dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
La discussion de ces articles au Sénat s'est révélée fructueuse. Je relève l'adoption de trois dispositions additionnelles, à l'initiative du Gouvernement, correspondant aux articles 12 bis, 12 ter et 12 quater . Ces derniers introduisent des exceptions au droit de la commande publique dans des cas très spécifiques, à savoir les activités d'opérateurs de réseaux. Il s'agit de prévenir les risques d'infructuosité des marchés, dans un contexte économique marqué par la rareté de l'offre par rapport à des besoins croissants. Il n'est pas question ici des marchés publics classiques auxquels accèdent, et doivent continuer d'accéder, les entreprises locales.
Le Sénat a également introduit un article 13 bis, visant à favoriser le rétrofit dans le renouvellement annuel des flottes de véhicules des acheteurs publics.
La discussion du projet de loi en commission spéciale s'est révélée, elle aussi, très utile. Nous avons tout d'abord enrichi le contenu des Spaser afin de mieux les orienter vers la prise en compte des critères environnementaux. J'ai également fait adopter quatre amendements pour renforcer l'obligation d'établir un Beges, pour l'heure trop peu appliquée. Ces amendements permettent d'utiliser des leviers incitatifs et contraignants, tout en développant le recours au Beges simplifié.
Enfin, à l'article 13 bis, relatif au rétrofit, il m'a paru préférable de préciser que les véhicules rétrofités étaient comptabilisés comme véhicules à faibles ou très faibles émissions, plutôt que d'imposer un seuil minimal de recours à ce type de véhicules – comme le souhaitait le Sénat, de manière prématurée et surtout inadaptée à certaines flottes de véhicules publics.
Je suis convaincue que le texte adopté en commission spéciale est ambitieux. Il constitue le juste équilibre entre les avancées nécessaires à la transition écologique et la capacité des acheteurs publics et des entreprises à absorber de nouvelles contraintes. De fait, je ne doute pas que, tout comme en commission, nos discussions, cette semaine, seront constructives et qu'elles permettront de tendre vers un seul objectif : le verdissement de la commande publique.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
La parole est à M. Damien Adam, rapporteur de la commission spéciale pour le titre III.
Sourires.
Pour mener à bien la transition écologique dans l'industrie et, plus globalement, dans toute notre économie, notre pays aura besoin de ressources supplémentaires. Le rapport de Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, diffusé il y a quelque temps, estimait ainsi que 66 milliards d'euros d'argent privé et public seront nécessaires, chaque année, en France, pour atteindre les objectifs climatiques que nous nous sommes fixés à l'échelle européenne pour 2030.
Face à ce véritable défi et pour répondre aux investissements massifs que nécessite la transition écologique, la France dispose de deux atouts : une épargne privée considérable et un secteur financier solide. En effet, les Français ont de l'épargne en quantité. Entre les produits réglementés et les produits de fonds propres, leur patrimoine financier a atteint 5 600 milliards d'euros au dernier trimestre 2022. Ce qui compte, c'est maintenant d'orienter cette épargne vers les investissements de la transition.
Sous la précédente législature, nous avons proposé de premières avancées avec, notamment, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte : accélération du déploiement des labels ; prise en compte obligatoire des enjeux environnementaux dans la gestion des sociétés ; renforcement de l'épargne de long terme grâce à l'assurance vie, le plan d'épargne en actions (PEA) et le nouveau plan d'épargne retraite (PER).
Nous devons aller plus loin et faire un saut quantitatif. C'est tout l'objet du titre III du projet de loi relatif à l'industrie verte. Certains préféreront toujours la simplicité des hausses d'impôts…
…ou de l'augmentation de la dette pour répondre à l'enjeu du financement de la transition écologique. Nous, nous pensons qu'un pays présentant le taux d'imposition le plus élevé du monde et une dette de 3 000 milliards d'euros n'a pas besoin de plus d'impôt ni de plus de dette, mais qu'il doit innover, avec des produits d'épargne adaptés.
C'est fort de ces constats qu'avec Michel Paulin, délégué général d'OVHcloud, j'ai piloté le chantier « Financer l'industrie verte française », dans le cadre de la consultation entamée le 5 janvier dernier, qui a permis de coconstruire ce projet de loi et que l'on retrouve traduite dans le titre III. Nous avons conduit, pendant plusieurs semaines, des dizaines d'auditions de toutes les parties prenantes du financement et du monde associatif en France, afin de réfléchir à des mesures concrètes, efficaces et surtout réalistes, pour réussir le financement de notre transition.
Les mesures qui vous seront soumises nous permettront de franchir de nouvelles étapes et d'atteindre deux objectifs : développer des champions français de l'industrie de la transition et accompagner toutes les entreprises françaises dans leur décarbonation.
Pour cela, nous continuons et accélérons la politique de labellisation pour laquelle nous sommes déjà une référence en Europe. Le label investissement socialement responsable (ISR) est le label répondant aux critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance (ESG) le plus populaire d'Europe. Son encours est de 777 milliards d'euros, soit six fois plus que le deuxième label de sa catégorie. À titre d'exemple, nous avons ainsi élargi en commission spéciale la prise en compte des préférences en matière de durabilité des souscripteurs des plans d'épargne retraite.
Nous créons également le plan d'épargne avenir climat – le PEAC –, qui offrira aux jeunes de notre pays un produit en adéquation avec leur engagement en faveur de la transition écologique. Alors que l'épargne des mineurs s'élève en France à 40 milliards d'euros, nous devons maintenant en orienter une plus grande part vers la transition. La commission spéciale a adopté des amendements clarifiant cette orientation du PEAC, pour lever tout doute sur le fait qu'il finance véritablement la transition écologique.
Nous favorisons également l'investissement dans les infrastructures, les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI), ce tissu qui nous est indispensable pour réussir notre décarbonation et la transition écologique.
En même temps, nous élargissons l'horizon d'investissement des épargnants français, en adaptant les règles applicables aux contrats d'assurance vie et aux plans d'épargne retraite. Les épargnants pourront ainsi, dans des conditions protectrices, accéder plus facilement à des placements dont le rapport entre le rendement et le risque sera attractif.
Sur ces points, la commission spéciale a adopté des amendements de clarification et de simplification visant à préserver la souplesse et à garantir le caractère opérationnel des dispositions prévues par le texte.
Enfin, avec ce projet de loi, nous adaptons notre droit afin d'à la fois renforcer l'attractivité de la place de Paris et nous préparer au déploiement des fonds européens d'investissement de longue durée – les fameux Eltif 2.0, que vous aimez particulièrement.
Sourires sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce véhicule souple doit nous permettre de lever, à l'horizon 2027, 100 milliards d'euros orientés vers un ensemble précis d'émetteurs, en l'occurrence les petites entreprises et les actifs réels, dont les contraintes de financement obèrent la décarbonation.
À cet égard, je me réjouis du fait que nous serons l'un des premiers pays européens à transposer les Eltif 2.0 dans notre droit national.
Pour conclure, j'indiquerai que si la transition écologique est une nécessité, son financement est indispensable. Grâce à ce projet de loi, la transition constituera également un atout d'attractivité et de croissance pour la France. Nous pouvons tous nous réjouir que l'industrie soit redevenue une priorité nationale et que nous soient soumises des dispositions destinées à réindustrialiser l'ensemble de nos territoires et à créer des usines et des emplois durables afin, demain, de bénéficier d'une économie prospère.
Applaudissements sur les bancs des commissions et sur quelques bancs du groupe RE.
Vous auriez pu dire que les communistes avaient raison depuis trente ans !
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, rapporteur pour observations de la commission des affaires européennes.
La commission des affaires européennes s'est saisie pour observations de ce projet de loi, considérant que l'industrie fait partie des sujets d'intérêt majeur pour affirmer la puissance de l'Union européenne.
Il convient de saluer l'ambition de ce texte, qui s'accorde avec la volonté de l'Europe d'être le leader mondial de la transition écologique, volonté fondée sur deux orientations : la sobriété et l'innovation. À cet égard, les Européens n'ont pas à rougir de leur bilan, notre continent se trouvant déjà à l'avant-garde de la transition écologique.
Le Green Future Index, classement établi par le prestigieux Massachusetts Institute of Technology – le MIT – mesure la capacité des pays à construire une économie soutenable et bas-carbone. Huit des dix pays les mieux classés sont européens, parmi lesquels six sont membres de l'Union européenne. La France se classe à la neuvième place, quand, notons-le, les États-Unis ne sont qu'au dix-neuvième rang et la Chine au vingt-septième.
C'est donc un fait reconnu : l'Europe a pris de l'avance dans le pivotement indispensable de nos économies vers des modèles plus respectueux de l'environnement. Le Pacte vert pour l'Europe, lancé en décembre 2019 par la Commission européenne, en est l'illustration ambitieuse.
Cette avance européenne, il faut la conserver et même la creuser. Si les États-Unis ont remporté de façon incontestable la révolution numérique de la fin du XX
Ce texte renouvelle aussi l'ambition de la majorité de réindustrialiser la France, après des décennies de sabordage de notre outil productif – cela a été rappelé par M. le ministre et M. le ministre délégué – et de renoncement devant le mirage d'une économie tout-services. Dans ce domaine également, soyons lucides : notre pays a encore du retard à rattraper. Alors que l'industrie représentait 24 % de la richesse de l'Union en 2022, elle ne représentait que 17 % de celle de la France, contre 30 % en Pologne, 27 % en Allemagne et 23 % en Italie. Si nous voulons réindustrialiser durablement notre pays, l'effort entamé en 2017 devra donc être poursuivi avec constance pendant encore longtemps.
Les décennies d'hémorragie de notre industrie, la majorité et le Président de la République peuvent être fiers de les avoir stoppées. Nous avons montré qu'il n'y a pas de fatalité à la désindustrialisation, dès lors qu'une politique économique favorable aux entrepreneurs est menée. Baisse de la fiscalité sur le capital, baisse des impôts de production, plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises, ordonnances travail : ces réformes ne sont pas étrangères au fait que, depuis 2017, la France recrée de l'emploi industriel et qu'il s'ouvre dans notre pays plus d'usines qu'il ne s'en ferme.
Sur un plan plus technique, j'ai déjà précisé certaines choses en commission spéciale et dans mon rapport d'information, mais je souhaite rappeler trois éléments.
Premièrement, je tiens à répéter que c'est avec satisfaction que nous constatons l'ambition de réduire les délais d'installation des sites industriels.
La France pêche sur ce point en Europe et en tant qu'élu d'une circonscription frontalière de l'Allemagne, je peux confirmer que nous ne sommes pas bons dans ce domaine. Quoi qu'il en soit, j'alerte MM. les membres du Gouvernement : les services déconcentrés de l'État devront suivre pour faciliter les procédures administratives, étant donné qu'il y a parfois un décalage entre ce qui est dit à Paris et ce qui est effectivement exécuté par les administrations départementales.
Deuxième élément : l'introduction de critères environnementaux dans les marchés publics est une bonne chose et nous devons renforcer la préférence européenne dans l'attribution des commandes. Celle-ci est déjà possible dans les domaines de la défense, de la sécurité ou des activités d'opérateurs de réseaux. Pourquoi ne pas l'étendre aux technologies vertes – sans parler de bâtir un jour le fameux Buy European Act, que nous continuons d'appeler de nos vœux ?
Enfin, troisième élément, je tiens à évoquer le crédit d'impôt « investissement industries vertes » – incitation fiscale simple qui s'appuie sur un dispositif de la Commission européenne que la France a aidé à concevoir. Nous serons les premiers à notifier le régime d'aide qui en découlera, et s'il faudra peut-être, dans quelques années – à l'horizon 2025 –, étendre le champ de ce crédit d'impôt, il s'agit d'un bon début dont nous pouvons nous féliciter.
En conclusion, ce projet de loi est utile à la France, à l'Europe et à la planète. C'est donc un bon texte qu'il faut soutenir.
Applaudissements sur les bancs des commissions, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.
J'ai reçu de Mme Mathilde Panot et des membres du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à Mme Sophia Chikirou.
En janvier 2023, vous nous aviez promis une grande loi pour engager la France dans la réindustrialisation et dans une nouvelle révolution : celle de l'industrie verte.
Or ce que nous avons aujourd'hui entre les mains n'est ni une grande loi, ni une stratégie de planification, et encore moins une politique de réindustrialisation écologique. En effet, ce que vous nous demandez de voter relève encore et toujours d'une même recette, inefficace depuis vingt ans, laquelle consiste à distribuer de l'argent public aux entreprises en espérant relancer la croissance, et ce sans contrepartie, sans contrôle, et sans obligation en matière de décarbonation – comme si l'État, depuis plus de vingt ans, n'avait pas gaspillé des milliards d'euros au nom de l'attractivité et de la compétitivité !
Quels sont les résultats ? Le déficit de la France s'est élevé à 163,6 milliards d'euros en 2022, dont 78,5 milliards pour les seuls produits manufacturés. La part de l'industrie manufacturière dans le PIB est d'ailleurs passée de 24 % à 9 % depuis 1980, aboutissant ainsi à la destruction de 2,5 millions d'emplois.
En réalité, avec ce projet de loi, vous faites un pari : vous êtes des parieurs accros au jeu du marché – sauf que vous misez avec l'argent des Français sur les vertus de la main invisible !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Cette main invisible est pourtant à l'origine du saccage de la planète et de la sixième extinction des espèces. Disons-le très clairement : oui, le changement climatique est la conséquence directe du productivisme et de la course folle à la croissance infinie. Déjà près de la moitié de l'humanité – 3,6 milliards de personnes – vivent dans des « contextes hautement vulnérables au changement climatique », pour reprendre les mots du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec).
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
La main invisible du marché, c'est la force à l'origine de l'explosion de la pauvreté et des inégalités dans le monde. Elle prend d'ailleurs beaucoup dans notre pays : 200 milliards d'euros chaque année en subventions, en crédits d'impôt, en suppressions de taxes et de cotisations sociales.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est une main invisible qui nous tue et qui fait couler le sang et les larmes des travailleurs et des chômeurs ; des gens trop fatigués, malades, mais que vous allez forcer à travailler jusqu'à 64 ans.
Vous vous présentez donc devant nous, messieurs les membres du Gouvernement, en formulant une promesse que vous ne tiendrez pas : nous le savons, tout comme vous.
Vous savez très bien que les grandes entreprises prendront l'argent, un maximum d'argent, et puis c'est tout !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous les avez vues faire plus d'une fois : elles encaissent l'argent public, puis ferment les usines en se sauvant avec les brevets et les machines, mettant ainsi au chômage des centaines de travailleurs.
Monsieur Le Maire, quand vous vous adressez à l'un des grands timoniers de l'industrie française, le sieur Guillaume Faury, en lui disant :
L'oratrice change le timbre de sa voix
« La seule chose que je vous demande […], [c'est] d'accorder une attention toute particulière à tout le tissu industriel de sous-traitants présents en Occitanie et partout ailleurs en France »,…
…vous savez bien, n'est-ce pas, qu'il ne fera rien et qu'il ne vous écoutera pas !
Vos suppliques aux patrons font pitié, monsieur Le Maire. Elles sont même gênantes : un ministre aussi puissant, en poste depuis 2017, qui en est ainsi réduit à supplier les patrons !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Voilà les premières raisons principales pour lesquelles nous défendons cette motion de rejet. Ce que nous voulons faire, monsieur le ministre, c'est vous donner du courage. Nous voulons vous aider à agir au lieu d'abdiquer devant l'ampleur de la tâche, car nous n'avons plus de temps à perdre.
Que s'est-il passé, monsieur Bruno Le Maire, depuis le 15 mars 2023 quand, dans une vidéo publiée sur YouTube et vue par 1 500 personnes – ce n'est pas mal
Sourires sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…vous promettiez une loi comportant des mesures relatives à la fiscalité, à la formation, à la commande publique, à la réglementation et au made in France ? Que s'est-il passé pour que nous nous retrouvions avec un pauvre texte de trois volets et une trentaine d'articles, qui ne prévoit rien sur la fiscalité, rien sur la formation,…
…et rien non plus sur le Fabriqué en France, pas même un label ?
Quant à ce qui est prévu s'agissant de la commande publique et de la réglementation, permettez-moi de vous dire que cela ne va pas dans le bon sens.
110 milliards d'euros, cela a été rappelé par la rapporteure Poussier-Winsback !
Vous savez mieux que moi combien la commande publique est importante et constitue un levier essentiel pour notre économie – elle a représenté 95 milliards d'euros en 2022. Or vous ne faites rien pour la réorienter, alors même qu'elle présente au moins deux limites.
La première est que seuls 30 % des marchés publics reviennent à des PME, entreprises qui sont pourtant ancrées dans les territoires : ce sont essentiellement les grandes entreprises qui profitent de la commande publique.
Or nous avons un problème avec ces sociétés : elles sont à l'origine des délocalisations que notre pays connaît depuis vingt ou trente ans.
Elles sont, par surcroît, très importatrices et peu exportatrices, étant donné qu'entre 2012 et 2022, la part de leurs exportations dans le PIB est passée de 4 % à 2 %.
La seconde limite de la commande publique concerne les clauses environnementales : en 2021, seuls 19 % des marchés publics en contenaient au moins une. Ainsi auriez-vous pu profiter de ce projet de loi pour introduire des critères géographiques, environnementaux et sociaux, afin de limiter les importations et de faire en sorte que l'argent du contribuable bénéficie à la production locale plutôt que de partir à l'étranger. Vous auriez également pu, comme nous le proposons, conditionner l'accès des entreprises de plus de 250 salariés aux marchés publics à la fourniture d'un plan quinquennal d'écoconception – mais vous avez refusé absolument tous nos amendements en ce sens.
L'oratrice marque une pause. – Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Un autre volet de ce texte a trait à la simplification de la réglementation. Là encore, messieurs les membres du Gouvernement, nous ne sommes pas dupes : la seule chose que vous prévoyez de réduire, ce sont les contrôles sur les impacts environnementaux et les consultations publiques, qui sont pourtant les seules garanties empêchant les parties concernées de faire n'importe quoi. Soyons sérieux : les dispositions proposées sont un cache-misère !
Si vous écoutez les investisseurs, ils vous diront qu'un des éléments principaux déterminant leurs choix d'installation est le coût de l'énergie. Mais alors que la France a considérablement perdu en attractivité avec l'explosion des prix de l'énergie, vous refusez de prendre la seule mesure qui nous procurerait un avantage concurrentiel majeur, à savoir le retour au tarif réglementé de l'électricité, que nous avons d'ailleurs approuvé ici même.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Voilà la seule vraie question !
Demeure enfin la question du financement de la grande transition écologique de l'industrie et, dans ce domaine aussi, que de renoncements, monsieur Le Maire ! Vous refusez de taxer les riches, alors qu'ils sont les premiers pollueurs. Un riche Européen pollue en effet six fois plus qu'un pauvre !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe Écolo – NUPES.
Vous promettez néanmoins un énième crédit d'impôt pour l'automne, lequel passera à coups de 49-3 antidémocratique.
Pour ce qui est du financement privé, vous aviez dans un premier temps envisagé de mobiliser les 140 milliards d'euros du livret de développement durable et solidaire (LDDS), mais vous y avez renoncé : vous ne voulez même pas toucher à cette source de financement ! Le même constat vaut pour l'assurance vie, dont l'encours atteint près de 1 900 milliards. Vous auriez pu conditionner le bénéfice des avantages fiscaux qui y sont associés à des investissements dans l'industrie verte ou dans les énergies renouvelables.
Hélas, rien de tout cela ! Vous avez préféré, car vous avez énormément d'ambition, créer un livret d'épargne pour les enfants de riches – le plan d'épargne avenir climat.
Vos députés défendent ce plan d'épargne pour mineurs en faisant valoir qu'il est important pour les parents et les grands-parents de pouvoir mettre de l'argent de côté pour leur descendance.
Les adultes qui n'ont pas d'enfant mais surtout les enfants dont les parents ne sont suffisamment fortunés pour se permettre de placer de l'argent sur un compte bloqué en seront exclus. C'est donc une mesure injuste et inégalitaire.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je suis prête à parier qu'elle n'a pour seul objectif que de favoriser l'optimisation fiscale et la défiscalisation. On ne peut pas s'en réjouir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La France insoumise publie aujourd'hui son contre-projet et nous tenons à vous démontrer que nous sommes capables de faire mieux que vous.
Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, vous avez eu l'amabilité de recevoir les députés insoumis. Être écouté par ce gouvernement est suffisamment rare pour que je le souligne.
Nous avons souhaité, disais-je, présenter un contre-projet qui, comme le vôtre, est assez court. Il comporte soixante-quinze mesures, soit deux fois plus que votre texte.
Vous refusez catégoriquement de définir ces termes dans votre projet de loi, alors qu'ils lui donnent son titre. Ce n'est qu'une de ses incongruités, qui amène de nombreuses personnes à se demander s'il ne s'agit pas de greenwashing. La réalité est que votre projet de loi permettra à des entreprises polluantes de bénéficier de certaines de ses dispositions sans qu'un contrôle de l'effectivité de leur politique de décarbonation soit prévu.
En outre, vous réduisez l'industrie verte à la décarbonation et à la compensation des émissions de carbone. Nous défendons une vision de l'industrie verte comme industrie de la sobriété qui, par l'écoconception, limite son impact sur la biodiversité, sur l'eau et sur les sols.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Il faut donc – c'est la base – limiter les émissions de carbone importées, en jouant sur la structure de la balance commerciale, et diminuer les émissions produites en France, en réduisant considérablement la quantité de déchets industriels grâce à la baisse de la surproduction ainsi qu'à la récupération et au recyclage de ces déchets.
Si vous ne voulez pas de plan, alors M. Bayrou occupe un emploi fictif !
Nous proposons d'étendre l'obligation d'établir des plans quinquennaux d'écoconception, qui existent déjà pour certaines filières, à toutes les entreprises de plus de 250 salariés.
L'industrie verte suppose une gestion durable du transport et doit donc être doublée d'une logistique verte. Nous proposons notamment de donner aux emballages logistiques le statut de déchet industriel.
La question de la planification écologique est une autre grande absente de votre texte. Les Insoumis s'y connaissent en la matière, puisque nous défendons cette idée depuis quinze ans : c'est nous qui l'avons promue dans le débat public avec Jean-Luc Mélenchon.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je ne m'arrêterai pas sur les railleries de votre camp, car vous avez désormais adopté notre sémantique.
Mais vous n'avez pas adopté notre programme de planification écologique, qui doit obéir à une organisation démocratique impliquant salariés et citoyens – deux sujets tabous dans ce projet de loi.
Les Insoumis sont de grands défenseurs des lycées professionnels. Nous souhaitons que le bac professionnel puisse se préparer en quatre ans et le certificat d'aptitude professionnelle (CAP) en trois ans ,
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES
et que ces diplômes forment à des métiers répondant aux besoins écologiques.
J'en viens à la question du financement. Compte tenu du temps qui m'est imparti, j'en parlerai rapidement, mais je ne peux passer sous silence le rapport de la Cour des comptes. MM. Le Maire et Lescure, vous aviez promis, en commission des affaires économiques, que les aides publiques aux entreprises seraient évaluées. La Cour des comptes vous le demande clairement et vous invite à limiter la durée des aides, à mieux évaluer les besoins des entreprises et la nécessité de la dépense et à systématiser les outils de contrôle a priori. Nous sommes entièrement d'accord avec ces recommandations.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous devez supprimer les niches fiscales brunes. Il y va de votre crédibilité !
J'arrive au terme de mon intervention
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.
Sur la question de la bifurcation écologique, nous prônons, contrairement à vous, une politique résolument proactive. Nous sommes convaincus que la France est capable de réduire sa dépendance aux réseaux d'approvisionnement internationaux, d'instaurer la conditionnalité sociale et environnementale des aides publiques
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
et d'instituer un protectionnisme solidaire, se traduisant par la protection contre le dumping et par l'élargissement du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF).
Je demande à tous mes collègues de rejeter ce projet de loi dit « industrie verte » car une autre politique est possible. Une motion de renvoi en commission aurait sans doute été préférable, car le texte mérite d'être considérablement retravaillé, mais vous avez supprimé cette procédure.
Si la motion de rejet n'est pas adoptée, je vous invite à voter le rétablissement des articles 1er bis A et 4 A, qui ont été supprimés. Le premier définissait une stratégie nationale pour l'industrie verte, ce qui devrait constituer la base d'un tel projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.
Le second permettait la planification locale, à l'échelle des bassins économiques, grâce à des projets territoriaux d'industrie circulaire. Ces deux articles, que vous avez fait supprimer en commission spéciale, sont les seuls à poser des bases solides pour l'avenir. Les autres ne changeront strictement rien !
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent pour applaudir. – Plusieurs députés des groupes SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES, demeurés assis, applaudissent.
Madame la députée Chikirou, je vois que ce projet de loi vous met en forme, ce dont je me réjouis.
Vous prétendez que notre recette industrielle est inefficace. Elle l'est peut-être, mais, depuis sept ans, elle donne des résultats tels que nous n'en avions pas obtenus depuis trois décennies :
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE
création de 100 000 emplois industriels, ouverture de 300 usines…
…investissements étrangers à hauteur de 13 milliards pour la seule année 2023. Nous refusons des investissements sur un site comme celui de Dunkerque, historiquement marqué par la désindustrialisation, qui y avait semé la pauvreté, la misère et le désarroi. Nous pouvons être fiers d'avoir réussi, par notre politique, à réindustrialiser des territoires entiers !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
La différence entre nos politiques est que la vôtre est un repoussoir pour les investisseurs alors que la nôtre les attire : vous faites peur, nous rassurons.
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous dénoncez l'effondrement de l'industrie, dont la part dans le PIB est passée de 24 % à 11 %. C'est vrai, mais cet effondrement est le résultat d'une politique menée pendant plusieurs décennies et singulièrement à partir de 1981. Cette politique d'augmentation des taxes et des impôts s'est traduite par une diminution des richesses, des emplois industriels et des usines. Telle est la réalité de la politique que nous avons combattue.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
En 2017, nous avons eu le courage, avec la majorité et avec le Président de la République, de baisser la fiscalité sur le capital, car il n'y a pas d'industrie sans capital, ni de renforcement de l'industrie sans l'attractivité permise par une fiscalité compétitive.
Je rappelle qu'avant que nous baissions les impôts de production, ils étaient sept fois plus élevés en France qu'en Allemagne.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Notre objectif est désormais de relever la part de l'industrie dans le PIB de 11 % à 15 % dans les prochaines années.
Vous vous êtes permis de vous en prendre au directeur général d'Airbus, M. Guillaume Faury.
Je ne suis pas là pour défendre quelque directeur général que ce soit, mais je rappelle qu'il a créé davantage d'emplois industriels avec une seule décision que vous n'en avez créés en cinquante déclarations.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous ne vous adressez pas à la bonne personne ! Vous me faites de la peine !
Soutenu par le gouvernement français, il a en effet signé le plus grand contrat de l'histoire de l'aéronautique avec la compagnie indienne IndiGo. Je vous reconnais une certaine cohérence, puisque vous nous avez reproché d'avoir reçu le Premier ministre indien. Nous l'avons reçu et nous avons signé ce contrat ! Nous rassurons, vous faites peur. Nous créons des richesses, vous les détruisez. C'est toute la différence entre nos politiques !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Dieu soit loué, vous n'êtes pas directrice générale d'Airbus, vous êtes députée de La France insoumise et vous l'êtes entièrement dans votre ton, dans votre raisonnement, dans vos propositions et dans vos envolées lyriques, qui fleurent bon la contrainte et le refus de toute liberté.
Nous restons attachés à la liberté : la liberté de l'économie, la liberté des entreprises, la liberté des citoyens et la liberté de la politique.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Votre contre-projet, comme toujours, cible les riches et les entreprises ; il propose, comme toujours, des taxes et des impôts ; il adopte, comme toujours, la même méthode, celle de la contrainte et de l'obligation ; il suit toujours le même modèle, celui du Gosplan.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Déposez donc un copyright pour protéger votre contre-projet ! Nul besoin de le reproduire, il est toujours le même. Cela représenterait une économie de papier, d'énergie et de temps, ce qui serait bon pour tous les députés ici présents et pour la planète !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à M. Bruno Millienne, président de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'industrie verte.
Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.
Non, pas du tout. J'admire certaines personnes, mais vous n'en faites pas partie.
La France insoumise a déposé une motion de rejet sur tous les textes dont nous avons débattu dans cet hémicycle,…
…ce qui, pour un parti qui se proclame comme étant le plus démocratique de l'Assemblée, est étrange. Vous refusez le débat !
Je trouve d'autant plus étrange que vous l'ayez fait pour ce texte que nos débats en commission spéciale, auxquels vous comme moi avons participé, nous ont permis de trouver quelques terrains d'entente.
Je suis inquiet car le projet de loi traite de l'industrie de demain. Si vous fréquentez beaucoup les syndicats, vous ne fréquentez pas beaucoup les chefs d'entreprise. C'est dommage car vous pourriez apprendre qu'ils ne vous ont pas attendus pour créer l'économie de demain, celle de la circularité et de la fonctionnalité. Informez-vous : les choses évoluent rapidement, au point que nous allons sans doute être amenés à revoir nos modèles en matière d'économie circulaire. L'industrie verte est en marche et les chefs d'entreprise nous demandent tous les jours de les soutenir.
Vous nous reprochez de ne pas avoir fait figurer de dispositions fiscales dans le texte, mais vous êtes députée depuis suffisamment longtemps pour savoir que de telles dispositions relèvent du projet de loi de finances.
Vous ne pouvez pas non plus déplorer que le projet de loi ne contienne aucune mesure sur la formation professionnelle, car cette question sera naturellement abordée lors de la discussion prochaine d'un texte qui lui sera consacré.
J'ai communiqué une note de cadrage à tous les présidents de groupe, y compris à Mme Mathilde Panot – ce qui prouve que je ne suis pas sectaire, contrairement à ce que certains pourraient croire – sur le label « triple E ». Je vous invite à l'étudier : vous verrez que cette note répond à une de vos questions sur la commande publique.
Le problème de la commande publique, comme de la commande privée, est que les acheteurs sont perdus face au foisonnement de normes environnementales, parmi lesquelles chaque industriel peut piocher celle qui lui convient le mieux.
Merci de m'interrompre ! Lisez donc la note de cadrage et vous verrez qu'elle répond point par point à vos questions concernant le fléchage vers une industrie 100 % verte.
Madame Chikirou, je vous remercie d'avoir déposé cette motion de rejet et je vous invite à adopter une attitude cohérente en retirant vos amendements, puisque vous ne voulez pas débattre.
Sur la motion de rejet préalable, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous en venons aux explications de vote.
La parole est à Mme Marie Lebec.
Alors que certains, sur les bancs du fond de l'hémicycle, préfèrent hurler au scandale, d'autres pérorer sur la défiscalisation en jouant les oiseaux de mauvais augure, nous agissons.
Depuis 2017, nous avons mis un terme à près de quarante ans de désindustrialisation. En six ans, nous avons implanté près de 300 usines et créé 90 000 emplois industriels. Ce texte est une brique supplémentaire de cette politique, que nous assumons fièrement.
Nous agissons pour simplifier les procédures, tout en préservant la consultation du public, pour que le foncier, particulièrement les friches, accueille de nouvelles usines ; pour mieux prendre en compte les critères environnementaux dans les commandes publiques ; pour orienter l'épargne privée vers la décarbonation de l'industrie. Nous voulons faire de la France une nation tout à la fois productive et à la pointe des enjeux de demain. Nous voterons donc contre cette motion de rejet préalable.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Nous l'avons bien compris, Mme Chikirou et ses collègues de La France insoumise, sans doute éreintés par leur présence dans les manifestations anti-flic et au chevet des voyous qui pendant plusieurs jours ont mis le feu au pays, sont pressés de partir en vacances.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Et où étiez-vous pendant la réforme des retraites ? On ne vous a pas vus !
Ils font valoir leur droit à la paresse. Dès lors qu'il s'agit de formuler des propositions concrètes pour redresser l'industrie et l'économie, il n'y a plus personne.
Dès lors qu'il faut parler de la France du travail, qu'il faut débattre et jouer le jeu de la démocratie, qu'il faut sortir de la démagogie et renoncer à promettre de raser gratis, il n'y a plus personne à La France insoumise.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Même si, au sein du groupe Rassemblement national, nous sommes conscients que ce texte est un filet d'eau tiède ,…
Les exclamations se poursuivent sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…une entité vaporeuse, nous voulons pouvoir défendre nos propositions, défendre la nécessité d'un grand plan de réindustrialisation,…
…défendre notre vision de l'industrie nationale, créatrice de richesse et d'emplois pour les Français.
Il fut un temps, lointain, où la gauche s'occupait encore des ouvriers et des employés de l'industrie. Il est révolu.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Nous voulons évoquer la souveraineté nationale, la préférence nationale dans l'attribution des marchés publics, les vertus économiques et écologiques de la relocalisation, la nécessité de rompre avec le libre-échange forcené que les macronistes vénèrent ; nous voulons évoquer le financement de l'industrie verte.
Mais pour cela, encore faut-il que la Macronie se soumette aux exigences démocratiques du débat parlementaire, qu'elle cesse tout abus de pouvoir et respecte ses oppositions, qu'elle cesse de déclarer massivement nos amendements irrecevables, comme elle vient de le faire !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.
Mais non ! Ce sont les fonctionnaires du service de la séance qui en décident !
Mesdames, messieurs de la minorité présidentielle, nous aurions pu voter contre cette motion de rejet préalable car nous voulons ce débat, mais en raison de cette énième dérive de votre part, nous nous abstiendrons.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Deux millions d'emplois détruits dans l'industrie : voilà le bilan de quarante ans de néolibéralisme – un synonyme du macronisme – que vous avez encore alourdi depuis l'élection de M. Macron à la présidence. Depuis 2017, la production industrielle a diminué de 4,5 % et sa part dans la valeur ajoutée a encore reculé.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
La part de l'emploi industriel dans l'emploi total n'a jamais été aussi restreinte que depuis que M. Macron s'occupe de l'économie du pays, c'est-à-dire depuis neuf ans.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous avez porté un coup majeur à notre souveraineté, à l'emploi, à notre capacité à nous confronter au défi écologique, et vous vous payez de mots,…
…évoquant « l'industrie verte » ou la « planification écologique ». Si nous, qui défendons ces idées depuis plus de quinze ans avec Jean-Luc Mélenchon, sommes satisfaits de cette victoire sémantique ,…
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe RE
…force est de constater que vous videz ces expressions de leur substance, comme vous l'avez fait avec le mot « république ».
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce projet de loi est une coquille vide. Vous ne prévoyez pas de planification nationale, même pour plaire à M. Bayrou – inutile d'aller chercher jusqu'en Union soviétique, monsieur Millienne !
Vous renoncez à fonder votre stratégie sur les besoins ; à la sobriété ; au protectionnisme ; au capital public ; à la participation des salariés, grands absents de votre texte. Vous proposez du macronisme vert, mais dans le macronisme, le problème, ce n'est pas la couleur.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.
Nous avons assez perdu du temps. Si vous voulez réindustrialiser, faire bifurquer notre modèle, il faut rompre avec votre logique économique – la politique de l'offre, le productivisme, le libre-échange, la toute-puissance des actionnaires, que vous représentez si bien, mais qui défendent si mal l'intérêt général et l'intérêt national.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il faut rejeter ce texte, si vous voulez l'union nationale – car celle-ci ne se fera jamais derrière les détenteurs du capital, qui exploitent la nature et l'homme.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Sébastien Jumel applaudit également.
Bien que ce texte ne traite que partiellement les enjeux liés à la réindustrialisation du pays, nous ne rejoignons en aucune façon la critique formulée par les députés du groupe LFI, qui manque cruellement, comme à l'accoutumée, de perspectives et de compréhension des enjeux industriels et écologiques.
Il serait temps que La France insoumise adopte une vision plus nuancée et équilibrée de l'industrie et de l'environnement, en renonçant aux postures et en reconnaissant que les deux ne sont pas antinomiques, mais tous deux indispensables à une France durable et prospère.
Si l'industrie émet 19 % des gaz à effet de serre, ses émissions ont baissé de 23 % entre 1990 et 2019. L'application de vos propositions caricaturales serait dangereuse et mènerait à la décroissance.
Elle risquerait de freiner le développement économique et technologique de la France, affectant ainsi les Français.
Dans votre vision du monde manichéenne, l'industrie et l'environnement sont des forces antagonistes.
Le groupe Les Républicains s'oppose à cette vision et croit, contrairement à vous, au progrès technologique, qui permettra d'éviter le déclassement et l'appauvrissement de la France.
Vous présentez les entreprises de manière caricaturale, comme si nous vivions dans Germinal, ou comme si elles étaient un ennemi déclaré de l'environnement. Je vous invite d'ailleurs à visiter des entreprises plus souvent.
Ne vous en déplaise, ce n'est qu'en reconnaissant le rôle crucial de l'industrialisation que nous pourrons bâtir une France à la fois écologiquement responsable et économiquement forte.
La France et les Français ont besoin d'une réindustrialisation massive, qui constituera un puissant moteur économique, permettra le progrès technologique et créera des emplois.
Notre groupe s'opposera donc à votre motion de rejet et vous invite à voter ses amendements visant à favoriser la souveraineté industrielle et la relocalisation de nos activités productives, afin de prendre en compte les émissions de carbone importées.
Nous comptons sur le débat pour améliorer ce texte – nous espérons qu'il sera plus apaisé qu'en commission spéciale, où vous avez tout fait pour attiser les tensions.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nous connaissons tous ici les difficultés causées par le manque d'usines en France. Nous les avons vécues, à la sortie de la crise du covid, et au début de la guerre en Ukraine, dans un contexte de manque de matières premières. Tous les secteurs – la santé, l'énergie, la mobilité, l'électronique – ont été affectés. Cela nous a tous convaincus de la nécessité de recouvrer notre souveraineté ; c'est précisément l'objet du présent texte.
Nous mesurons tous l'importance des entreprises dans les territoires. Nous les défendons d'ailleurs régulièrement lorsqu'elles rencontrent des difficultés. Nous sommes tous persuadés de la nécessité d'assurer leur pérennité, qui passe par le verdissement et la décarbonation de l'industrie. C'est également l'objet de ce texte. Mme Virginie Duby-Muller et moi-même sommes intervenus devant la commission des affaires économiques, au nom du groupe de suivi relatif à la préparation du projet relatif à l'industrie verte, pour souligner les forces et les faiblesses du présent texte.
Il est absolument nécessaire de rejeter cette motion de rejet préalable, car il nous faut examiner le texte, pour corriger ses faiblesses,…
On ne peut pas, justement, nos amendements sont déclarés irrecevables !
…pour renforcer la souveraineté, accélérer la décarbonation de notre industrie et rendre sa force à l'industrie de notre pays, ce qui nous permettra de faire face aux transitions nécessaires.
Le groupe Démocrate appelle donc à rejeter cette motion.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem ainsi que sur plusieurs bancs du groupe RE.
L'objectif affiché par le Gouvernement est d'accélérer la réindustrialisation grâce à des projets verts et innovants et de soutenir la décarbonation de l'industrie grâce au présent texte, « relatif à l'industrie verte ».
Pourtant, vous n'explicitez pas la notion d'industrie verte ; votre majorité a même rejeté les amendements visant à la définir ou à la préciser. Le texte, qui pourrait constituer un embryon de réponse au défi industriel, ne permet pas, en l'état, de dégager une vision pour une industrie décarbonée. Son titre est donc trompeur, ce qui pourrait justifier de voter en faveur de la motion de rejet préalable.
De plus, le Gouvernement et le camp macroniste ont totalement effacé les gains obtenus par les sénateurs socialistes, en supprimant huit articles, notamment l'article 1er bis A, relatif à la création d'une stratégie nationale et l'article 4 A, relatif aux plans territoriaux de l'industrie circulaire.
Dès le lancement des consultations menées au printemps par la majorité, nous nous interrogions vivement sur l'écart entre son objectif annoncé de développement de l'industrie verte et les dispositions prévues pour y parvenir.
Hier, le défaut de compétitivité était dû aux travailleurs français, réputés trop chers, trop protégés. Vous racontez désormais une nouvelle légende : la fuite des industries ne serait pas liée à la volonté des distributeurs de réduire les coûts, mais à la lourdeur administrative française. Il faudrait donc tout simplifier : pour satisfaire les besoins en matière de foncier, les sites seraient livrés clé en main, les procédures d'urbanisme et les consultations publiques accélérées.
Le Gouvernement propose un verdissement de l'industrie fondé sur une définition contestable et esquisse à peine son financement de l'industrie, vite avorté, puisque le PEAC n'est même pas populaire. Le texte gouvernemental manque de dispositions sur la formation, la fiscalité, le Fabriqué en France, la participation à la gouvernance des entreprises, la fixation de conditions à l'attribution des aides et les contrôles. Vous pourriez aller dans le bon sens, mais à force de renvoyer les décisions à des textes ultérieurs, vous privez celui-ci d'ambition.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – Mme Sandrine Rousseau applaudit également.
Nous savons que nos modes de production sont responsables du changement climatique et que nous avons très peu de temps pour agir.
Le présent texte vise à favoriser les industries dont les produits et les processus de fabrication limitent notre empreinte sur l'environnement. Il permettra de décarboner l'économie, priorité imposée par le défi climatique, en mobilisant les énergies renouvelables et le nucléaire, que deux textes précédents ont permis de promouvoir, pour sécuriser le prix de la ressource essentielle à l'installation de ces industries.
Le présent texte est vertueux, car il s'attache avant tout aux sols déjà artificialisés et aux friches. En outre, il vise à favoriser la relocalisation des industries, nous permettant de ramener la production sous notre regard et d'assumer les responsabilités qui nous incombent. Le groupe Horizons et apparentés votera donc contre cette motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Depuis fort longtemps, les membres du groupe Écologiste – NUPES sont convaincus qu'il faut réindustrialiser et transformer notre pays, et promeuvent la relocalisation – à l'époque, on riait de nos propos ; aujourd'hui, tout le monde s'accorde avec nous.
Comme souvent, vous abordez les choses dans le désordre. Le cabinet de Mme la Première ministre, notamment, travaille sur la planification idéologique, mais la présentation de ses propositions en la matière – que nous attendons avec impatience – est sans cesse reportée, si bien que l'examen du présent texte la précède. Un meilleur enchaînement, une meilleure articulation auraient été logiques.
En outre, en commission spéciale, presque tous les amendements sur ce texte ont été déclarés irrecevables ou repoussés, souvent pour des motifs politiques et non techniques.
Nous avons proposé la remise d'un rapport déterminant quelles filières industrielles sont compatibles avec le scénario d'un respect de l'objectif de limitation du réchauffement à 1,5 degré Celsius, exploré par le Giec.
Un tel amendement est parfaitement lié à l'enjeu industriel et votre décision de le rejeter est incompréhensible – je pourrais citer des dizaines de cas de cette nature.
Vous prétendez que de nombreux amendements ont été adoptés en commission, mais la plupart ont sauté, du fait de la suppression des articles qu'ils modifiaient, si bien qu'il n'en reste pas grand-chose. Vous avez refusé le débat sur nos propositions.
En outre, nous ne partageons pas votre approche de l'industrie verte. Votre acception de cette notion, que vous ne définissez d'ailleurs pas, ne tient pas compte des limites planétaires : vous faites comme si nous pouvions produire sans limite et vous ignorez les salariés qui devront travailler à l'usine dans une France où la température atteindra 50 degrés Celsius.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES
Il faut pourtant réfléchir à leur accorder de nouveaux droits.
Ce texte sur l'industrie verte ne précise pas à quelles conditions écologiques et sociales les financements seront attribués. Votre industrie verte n'est pas définie, parce qu'elle n'est pas verte.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.
Nous voterons pour cette motion de rejet préalable, parce que nous ne sommes pas d'accord avec votre copie et que nous espérions pouvoir débattre sur une autre.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES
Le groupe communiste est foncièrement attaché à la réindustrialisation de notre pays. Mais, pour cela, un État stratège doit commander – j'insiste sur ce terme – les trajectoires de l'appareil productif. Il doit réunir les conditions pour que le capital assure l'essentiel de l'investissement propre à changer de système technique. Il doit permettre à chaque jeune de se projeter dans un métier qualifié.
Un État stratège doit également organiser un véritable partage de la valeur en faveur du travail et du salaire. Il doit soustraire l'économie nationale au dumping social permis par la division internationale du travail.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Enfin, il doit faire de l'indispensable réponse à l'urgence climatique et démocratique la priorité de la politique industrielle.
À ce stade, votre texte ne présente aucune des garanties qui, en son temps, avait, malgré leur affrontement, permis de réunir les gaullistes et les communistes pour que chacun vive et travaille au pays. Nous vous demandons de revoir votre copie
Exclamations sur quelques bancs du groupe RE
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Ce premier jour de débat nous laisse imaginer que la semaine va être belle…
Le groupe LIOT ne votera pas la motion de rejet préalable. Le titre du projet de loi peut-il être considéré comme trompeur ? Oui, sans doute – nous aurons l'occasion d'y revenir. Le texte est-il lacunaire ? Oui, sans doute, mais nous aurons l'occasion d'y revenir.
Nous devons surtout nous interroger sur la place de l'industrie dans l'économie française, sa part dans le PIB et sa capacité à résister, voire à progresser. Malheureusement, le projet de loi omet beaucoup de sujets, comme la fiscalité ou l'emploi. La simplification des procédures administratives, même si elle n'est que le petit bout de la lorgnette, pourrait toutefois permettre de progresser : il faudra débattre ensemble des quelques axes d'amélioration que le texte pourrait laisser entrevoir.
Nous ne voterons donc pas cette motion de rejet préalable, afin que le débat sur le projet de loi puisse avoir lieu.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 147
Nombre de suffrages exprimés 129
Majorité absolue 65
Pour l'adoption 43
Contre 86
La motion de rejet préalable n'est pas adoptée.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures quarante.
La pandémie mondiale de covid et la guerre en Ukraine ont en commun d'avoir fait prendre conscience à notre pays de la nécessité d'être souverain. Souverain, car à l'heure de bouleversements géopolitiques et écologiques majeurs, la France ne peut plus dépendre d'États tiers pour la production des biens essentiels aux besoins quotidiens de nos concitoyens.
Le projet de loi dont nous entamons l'examen fait partie de la réponse – car il ne s'agit pas d'un texte isolé, mais bien de la nouvelle étape d'une ambitieuse politique française et européenne.
Saluons d'abord le rôle joué par le plan France relance pour accélérer les transformations écologique et industrielle de notre pays, en soutenant notamment la compétitivité de nos entreprises et la modernisation de notre industrie. Rappelons ensuite que le plan France 2030 et ses dix objectifs visent également à développer notre compétitivité industrielle, à décarboner notre industrie et à maîtriser les technologies du futur. Depuis 2017, les premiers résultats sont là : le solde d'ouvertures d'usines est positif et 90 000 emplois industriels ont été créés. Nous pouvons être fiers de cette réussite.
Mais il faut franchir une nouvelle étape, le développement industriel, clé de notre souveraineté, rencontrant encore trop d'obstacles – des obstacles que certains, se cachant derrière des idéologies politiques bancales et inopérantes, appellent « Europe », « libre-échange » ou que sais-je encore. Pardonnez-nous d'être plus pragmatiques. Avec ce texte, nous mettons en lumière les véritables obstacles rencontrés par les industriels : indisponibilité du foncier, délais d'instruction ou recours abusifs.
Le titre Ier permettra d'accélérer les délais d'implantation d'usines, actuellement beaucoup trop dissuasifs pour un porteur de projet. Le traitement en parallèle des autorisations, la réhabilitation des friches et certaines dispositions introduites en commission spéciale, comme l'encadrement des recours abusifs, permettront de diviser par deux les délais d'implantation et de nous aligner sur nos voisins européens.
Mais, avec ce texte, nous ne ciblons pas uniquement les nouvelles technologies vertes. Cela reviendrait à trahir notre industrie actuelle et à priver notre pays de ses richesses. Au contraire, nous accompagnons chaque industrie dans son verdissement, en accélérant le recyclage des résidus de production ou en facilitant la sortie du statut de déchet.
Ce verdissement de l'industrie sera également stimulé par le titre II, qui actionne le puissant levier de la commande publique pour inciter à des pratiques plus vertueuses en matière environnementale et énergétique. Enfin, le titre III prévoit les premières sources de financement, comme le nouveau plan d'épargne avenir climat. Les jeunes savent à quel point la décarbonation de notre économie est essentielle à leur avenir. Avec ce plan, nous leur offrons, ainsi qu'à leurs parents, la possibilité de s'engager concrètement dans la transition, en mettant leur épargne à son service.
Monsieur le ministre délégué, le groupe Renaissance soutiendra bien évidemment ce texte.
Face aux défis de notre temps, nous ne nous renfermerons pas dans nos frontières nationales et dans la logique du chacun pour soi. Nous ne céderons pas plus aux mirages de l'écologie décroissante qui poussent à l'immobilisme et contribuent à la peur de l'innovation. Nous continuerons de nous appuyer sur une dynamique européenne exceptionnelle, à croire en la transition par l'innovation et à faire confiance aux industriels français qui, chaque jour, s'engagent corps et âme pour faire de la France la nation souveraine et décarbonée que nous appelons de nos vœux.
Pour conclure, je salue le travail de tous ceux qui ont œuvré à ce beau projet de loi : les administrateurs de la commission spéciale, nos conseillers de groupe, la coresponsable du projet de loi pour le groupe RE, Mme Marie Lebec, ainsi que tous les députés impliqués et leurs collaborateurs.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.
Ce projet de loi relatif à l'industrie verte est un aveu : un aveu d'impuissance industrielle. L'industrie n'attend pas davantage de technocratie, mais une stratégie, et surtout une stratégie nationale. Pourtant, ce gouvernement présente un projet de loi bureaucratique et sans vision, qui se résume à un saupoudrage de mesurettes insuffisantes.
En réalité, ce texte démontre, monsieur le ministre délégué, l'incapacité de votre gouvernement à rompre avec quarante ans de désindustrialisation…
…qui ont conduit à délocaliser 2,5 millions d'emplois et à faire baisser la part de l'industrie à 9 % du PIB national.
Pour retrouver son indépendance, créer de l'emploi et innover, financer son modèle social et ses retraites, ou encore réduire son empreinte carbone, la France doit renouer avec une puissance nationale et industrielle.
Ce projet de loi est un grand gâchis : vous vous contentez de développer une poignée de technologies vertes ; vous ratez l'occasion de soutenir massivement la décarbonation de l'industrie existante ; surtout, vous ne cherchez pas à relocaliser un maximum d'activités industrielles, alors même que la moitié de l'empreinte carbone de la France est liée à nos importations.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Monsieur le ministre délégué, qui peut sérieusement croire que votre projet de loi permettra de réindustrialiser le pays ? Qui peut y croire, alors qu'il s'inscrit dans la même logique qui a présidé à quarante années de désindustrialisation ?
En refusant de bâtir une stratégie industrielle nationale, vous manifestez votre absence de vision et d'ambition pour l'industrie française. En refusant de mener une politique de protectionnisme économique, vous continuez à encourager la concurrence déloyale et les délocalisations, au détriment des filières et des savoir-faire français. En refusant d'appliquer la priorité nationale à la commande publique, vous persistez à subventionner les importations étrangères avec l'argent du contribuable, plutôt que de favoriser l'emploi en France. En refusant de nous libérer du marché européen de l'énergie, vous condamnez la compétitivité de nos entreprises, alors que l'électricité produite par la France est une des moins coûteuses d'Europe.
En refusant d'accélérer la relance du nucléaire, vous nous enfoncez dans la sobriété énergétique que vous aimez tant, mais qui rend impossible la réindustrialisation du pays. En refusant d'alléger certaines normes environnementales absurdes, vous vous obstinez à laisser les crapauds faire reculer les pelleteuses et des projets industriels entiers, quitte à sacrifier des centaines d'emplois.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
En refusant d'appliquer ces propositions de bon sens du Rassemblement national, vous choisissez de poursuivre la désindustrialisation et le déclin de la France.
Monsieur le ministre délégué, qui peut sérieusement croire en votre volonté de réindustrialiser le pays, quand vous continuez à vendre à la découpe nos fleurons stratégiques – Alstom, Alcatel, Technip, Lafarge, Latécoère, Souriau, Morpho, Exxelia, et tant d'autres ?
Les noms de ces pépites industrielles françaises, passées sous pavillon étranger avec l'accord de ce gouvernement, font entendre les grandes trahisons industrielles d'Emmanuel Macron
Applaudissements sur les bancs du groupe RN
et d'une élite mondialiste qui brade le génie et le travail de son peuple, quant à lui attaché à la puissance nationale.
L'industrie est le moteur de la puissance nationale. Or, tandis que nos concurrents, comme la Chine et les États-Unis, mènent une diplomatie économique offensive et un protectionnisme économique défensif, votre politique industrielle consiste à empêcher de favoriser les entreprises nationales, à leur imposer toujours plus de contraintes, et à ouvrir toujours davantage notre pays aux importations.
Pire, vous confiez une partie de notre souveraineté économique à une commission européenne technocratique, qui ne défend ni les intérêts nationaux, ni même ceux du continent européen.
Au long de son histoire, la France a su rester une puissance industrielle mondiale, en s'appuyant sur ses ressources, son génie et ses entreprises ; sur l'État stratège et sur une véritable politique de patriotisme économique ; sur le volontarisme politique d'hommes d'État visionnaires, à l'instar de Colbert ou de Gaulle.
Le 14 juin 1960, le général de Gaulle déclarait justement : « Étant le peuple français, il nous faut accéder au rang de grand État industriel, ou nous résigner au déclin. »
Le présent projet de loi montre que vous choisissez le déclin. Au Rassemblement national, nous choisissons la puissance industrielle.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Le greenwashing est une méthode de marketing qui consiste à utiliser l'argument écologique de manière trompeuse, pour améliorer son image. Le projet de loi relatif à l'industrie verte répond à cette définition.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est un texte vide, qui passe à côté des principaux enjeux de notre temps. Alors que nos territoires se sont vidés et continuent à se vider de leur industrie, avec votre complicité, nous importons des quatre coins du monde pour compenser ce que nous ne produisons plus. Par ailleurs, la bifurcation écologique ne peut plus être reportée. Nous devons donc redresser l'industrie du pays, tout en optant pour un modèle de production soutenable.
Le groupe La France insoumise préconise d'instaurer un protectionnisme écologique et social, ainsi que la planification par les besoins.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Que devons-nous produire et comment ? En réponse à cette question, les députés de la NUPES défendent des propositions. Demain, nous gouvernerons le pays, mais nous voulons améliorer tout de suite tout ce qui peut l'être.
Mêmes mouvements.
Écoutez-nous donc, pour que ce texte ne reste pas une occasion manquée.
Premièrement, il manque l'occasion d'engager un protectionnisme écologique et social. Nous proposons le retour de l'État stratège, qui protège nos savoir-faire.
Mêmes mouvements.
Nous ne voulons plus de l'État déserteur, qui a abandonné la SAM – Société aveyronnaise de métallurgie – et ses 333 salariés en août dernier !
Nos fonderies ferment tandis que Renault produit les mêmes pièces hors de France. Nous défendons au contraire des dispositifs à même de relocaliser les productions de secteurs stratégiques pour le pays, comme la santé, le transport, l'énergie et le textile. Les émissions de gaz à effet de serre des produits importés représentent 51 % de l'empreinte carbone des Français.
Nous proposons de les réduire en instaurant des droits de douane et une taxe kilométrique sur les produits importés, définis en fonction de critères écologiques et sociaux.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Deuxièmement, votre texte manque l'occasion de planifier par les besoins. Votre vision est étriquée, incohérente, voire fumeuse. Vous ne définissez ni méthode, ni objectifs. Vous imposez aux territoires des dispositifs complexes, par le haut, sans concertation.
Fixons plutôt des objectifs structurants ,
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES
en particulier ceux de réduire de moitié nos émissions d'ici à dix ans et d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Pour les atteindre, il faut une méthode, consistant à partir des besoins de la population, définis démocratiquement ; il faut une boussole, à savoir la règle verte, qui impose de ne pas prélever sur la nature davantage que ce qu'elle peut reconstituer ;…
Mêmes mouvements
… enfin, il faut un principe : équilibrer l'aménagement du territoire, grâce à un grand plan foncier conçu pour installer les nouvelles activités en priorité sur des friches industrielles délaissées.
Mêmes mouvements.
Pour mener à bien la planification écologique ainsi définie, nous nous appuierons sur les grands oubliés de votre texte, les salariés de l'industrie, qui connaissent mieux notre appareil productif que n'importe quel député.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous proposons de les associer à la définition des objectifs industriels de la nation ; de leur confier un vrai pouvoir de décision stratégique dans leur entreprise ; de leur offrir des formations adaptées ; de leur conférer un droit de reprise préférentiel lorsqu'une usine ferme.
Les TPE – très petites entreprises – et les PME aussi sont oubliées : pas un mot du texte ne les concerne. Avec votre gouvernement, elles paient même un taux d'impôt sur les sociétés plus élevé que les grands groupes.
Nous proposons de rétablir immédiatement les tarifs réglementés de l'énergie pour nos entreprises.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il y a urgence, si nous voulons sauver les 117 000 emplois que la crise de l'énergie menace.
Non contents de manquer des occasions, vous visez parfois carrément à côté. Votre dispositif phare, le plan d'épargne avenir climat, est largement insuffisant. Dans son rapport, Jean Pisani-Ferry estime que la transition écologique nécessite 66 milliards d'euros annuels.
Lui-même, pourtant un temps proche conseiller du Président, préconise de taxer les plus riches pour contribuer à la financer.
Mêmes mouvements.
Pourtant, vous écartez cette option. Au contraire, vous subventionnez ceux qui polluent, en abandonnant l'ISF et en supprimant des impôts et cotisations sans fixer de contreparties environnementales et sociales. Nous proposons de créer un impôt écologique sur la fortune pour taxer les patrimoines les plus polluants. Le coût de la bifurcation ne peut pas reposer toujours sur les mêmes : écologie doit rimer avec justice fiscale et sociale, non avec exclusion des plus pauvres et cadeaux fiscaux pour les riches.
Mêmes mouvements.
Vous visez encore à côté, en réduisant les délais d'implantation de sites industriels. Emmanuel Macron demande une « pause réglementaire » en matière de normes environnementales. Je vous suggère plutôt une pause réglementaire en matière de dispositifs dérogatoires. Vous détricotez le droit de l'environnement et la participation du public, pour finalement tout complexifier.
Au bout du compte, l'industrie verte, selon vous, c'est une usine à biogaz administrative ! Nous vous proposons plus simple : donnez aux services de l'État et des collectivités territoriales les moyens de mieux accompagner et d'instruire les dossiers.
M. le président coupe le micro de l'orateur, dont le temps de parole est écoulé.
Faites mieux : votez nos propositions, pour une nouvelle politique industrielle et écologique cohérente !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES, dont de nombreux députés se lèvent.
Nous commençons l'examen du projet de loi relatif à l'industrie verte, qui tend à favoriser la réindustrialisation décarbonée de la France. Il répond à trois exigences principales : faciliter, favoriser et financer.
Pour faciliter l'implantation et le développement de sites industriels, notamment d'usines de très grande taille, les gigafactories, le texte prévoit d'accélérer les délais d'implantation, de structurer une filière de recyclage et de simplifier les procédures d'autorisation environnementale. Il contient également des mesures à même de favoriser l'utilisation de matières premières recyclées dans l'industrie, et d'autres visant à sanctionner les exportations illicites de déchets.
Le financement de l'industrie verte reposera sur l'épargne privée.
Afin de favoriser les entreprises vertueuses, vous proposez de privilégier une commande publique responsable, en appliquant des critères environnementaux pour choisir les fournisseurs. Le texte prévoit également des mesures propres à encourager la réhabilitation de friches industrielles et à faciliter la consultation du public.
Le projet de loi relatif à l'industrie verte est donc supposément ambitieux et coconstruit. Il a en effet été préparé en concertation avec des parlementaires, des élus locaux et des chefs d'entreprise, dans le cadre de groupes de travail thématiques. À l'Assemblée nationale, j'ai coprésidé avec M. Philippe Bolo le groupe de suivi relatif à la préparation du texte ; il a permis de définir des leviers d'action, insuffisamment exploités ici. D'ailleurs, malgré l'ambition qu'affiche le Gouvernement, les rapporteurs du Sénat ont regretté que le texte soit principalement constitué de mesures techniques ; ils ont également souligné l'absence de moyens financiers, renvoyés au projet de loi de finances pour 2024, ce qui ampute le texte d'une dimension essentielle.
L'examen en commission spéciale a certes permis d'enrichir divers aspects relatifs notamment à la gestion des déchets, à la commande publique, à la transition écologique et à l'investissement responsable, mais nous sommes encore loin des objectifs affichés. Certaines questions essentielles restent en suspens, comme le problème du coût du travail, qui reste en France l'un des plus élevés d'Europe,…
…ou notre capacité à fournir aux industriels une énergie abordable – un enjeu pourtant structurel et prioritaire pour le secteur.
Or c'est notre souveraineté économique qui est en jeu. Les obstacles que rencontrent les industriels sont désormais clairement identifiés. Laurent Guillot, ancien directeur général adjoint de Saint-Gobain, a souligné dans son rapport « Simplifier et accélérer les implantations d'activités économiques en France » que : « Les entreprises se heurtent à deux écueils : les délais réels des procédures administratives [et] le foncier immédiatement disponible […], qui va se raréfier avec l'objectif de "zéro artificialisation nette" […] ». Une année d'attente est un délai bien trop long pour un industriel : durant ce laps de temps, son marché peut changer, sa capacité financière se réduire, ses concurrents prendre une avance décisive. Alors qu'il faut dix-sept à dix-neuf mois pour implanter une usine en France, seulement quatre à douze mois sont nécessaires en Allemagne et six à treize mois en Suède.
Ainsi, le premier volet du projet de loi tend à réduire de moitié les délais d'autorisation préalable à l'implantation de sites industriels, afin de passer de dix-sept à neuf mois. Il est impératif d'écourter ces délais bien trop longs, qui freinent la compétitivité française ; nous défendrons donc plusieurs amendements visant à protéger les demandes d'installations industrielles de l'inflation normative qui retarde la réalisation des projets et décourage les implantations industrielles en France.
Le second volet du projet de loi prévoit de réhabiliter des friches industrielles et de mettre des terrains à disposition de l'industrie, grâce à un investissement de 1 milliard d'euros consenti par la Banque des territoires. L'idée est louable, mais tous les territoires ne disposent pas de friches industrielles ; en outre, pour se développer, les projets industriels doivent surtout être exclus de l'objectif ZAN – zéro artificialisation nette. Nous défendrons également des amendements en ce sens.
Le troisième volet du projet de loi est consacré au financement. Le Gouvernement propose de créer pour les mineurs le plan d'épargne avenir climat, mais il s'agit en réalité d'une refonte du livret de développement durable et solidaire. Le Gouvernement souhaite également développer les montants de capital-investissement affectés à l'assurance vie et au plan d'épargne retraite, et orienter l'épargne privée vers des fonds labellisés par l'État. Il prévoit aussi de renforcer le soutien aux PME et aux ETI industrielles, notamment grâce aux fonds européens d'investissement à long terme.
Toutefois, le Gouvernement a choisi de limiter à quatre – batteries, éolien, solaire et pompes à chaleur – les secteurs concernés par le crédit d'impôt instauré pour les investissements dans les industries vertes. La crise liée au covid a mis en évidence l'importance de conserver une souveraineté alimentaire et médicale ; d'autre part, notre balance commerciale a atteint en 2022 un déficit record de 164 milliards d'euros : pourquoi ne pas prévoir également des dispositifs de soutien en faveur des industries médicale, lourde, agroalimentaire, et de tant d'autres ?
Aussi, monsieur le ministre délégué, ce texte va dans le bon sens. Nous partageons vos ambitions de réindustrialisation et de sobriété, mais il est essentiel d'aller plus loin, en incitant plus largement la relocalisation des activités productives en France pour rétablir notre souveraineté industrielle ; en promouvant l'emploi et la création de valeur ; en réduisant nos émissions de carbone.
Les députés du groupe Les Républicains sont pleinement investis dans le projet de réindustrialisation et espèrent donc que leurs propositions seront entendues ; c'est la condition nécessaire à leur soutien.
Raymond Barre, lui, avait dit qu'il fallait mettre un frein à l'immobilisme !
Cette phrase fait écho, à l'heure où les tensions n'ont jamais été aussi fortes entre notre aspiration à l'émancipation et son inscription dans les limites écologiques. En d'autres termes, nous ne cessons d'opposer la sécurité sociale et la sécurité environnementale. Pourtant, nous avons le devoir de réinventer l'idée de progrès social, non pas sur le socle de l'abondance matérielle comme cela était le cas dans le passé, mais à partir d'un nouveau partenariat avec la terre et le territoire, par des médiations techniques et industrielles.
À cet effet, il est nécessaire de créer un nouveau pacte, comme le vise ce texte, réunissant culture industrielle et culture écologique. La stratégie est claire : elle consiste tout d'abord à décarboner les industries existantes, qui représentent 18 % des émissions de CO
Produire propre et en France, tel est notre objectif commun, au service duquel ce texte opère comme une boîte à outils : tout d'abord pour libérer du foncier, parce que les industriels doivent disposer des terrains nécessaires à l'implantation de leurs projets ; ensuite, pour accélérer les procédures, qui sont quasiment deux fois plus longues que chez nos voisins allemands. Grâce à ce projet de loi, nous souhaitons diviser par deux les délais d'ouverture et d'agrandissement d'une usine, en les ramenant de dix-sept à neuf mois réels. Pour ce faire, nous passerons d'une procédure par étapes successives à une procédure par étapes parallèles. Aujourd'hui, après le dépôt d'un dossier, il faut attendre l'avis de l'autorité environnementale pour réaliser une enquête publique et attendre de recevoir le rapport du commissaire enquêteur pour en arriver enfin à la rédaction de l'arrêté d'autorisation ; désormais, ces différentes phases se dérouleront en même temps, ce qui permettra un gain de temps considérable. Cette concomitance constituera également une avancée pour les consultations publiques, qui pourront désormais se tenir pendant trois mois au lieu d'un seul.
L'État pourra également prendre la main pour accélérer les procédures de certains projets d'intérêt national majeur, évalués à la lumière de leur impact sur l'emploi, sur l'environnement et sur notre souveraineté nationale.
Il ne s'agit pas d'accélérer les projets allant contre le sens de l'histoire, mais de permettre aux investisseurs soutenant des projets vertueux de se projeter en France plus facilement.
Pour accélérer cette transition profonde, la commande publique est un levier essentiel. Nous saluons la création d'un motif d'exclusion des marchés publics pour les entreprises n'ayant pas réalisé leur Beges alors qu'elles y étaient contraintes. Toutefois, pour ne laisser personne sans solution, le groupe Démocrate proposera au Gouvernement de réfléchir à une nouvelle méthode d'établissement du Beges, plus accessible pour les entreprises, ou de mettre en avant des méthodes simplifiées déjà existantes.
L'investissement du groupe Démocrate dans ce projet est total, comme en témoignent celui du président de la commission spéciale, Bruno Millienne, et celui de la rapporteure Anne-Laure Babault, dont je salue le travail et l'engagement. Je tiens également à saluer l'engagement des autres commissaires du groupe, Philippe Bolo, Mohamed Laqhila et Delphine Lingemann. En commission, les députés du groupe Démocrate ont été force de proposition pour simplifier les procédures tout en préservant leurs exigences environnementales ; nous serons également au rendez-vous cette semaine. Soucieux et responsables de l'impact des activités industrielles, nous nous félicitons de l'adoption en commission de notre amendement visant à interdire l'exportation de vêtements de seconde main qui seraient considérés comme des déchets une fois arrivés dans le pays destinataire.
Enfin, le Comité du financement de la transition écologique (CFTE), nouvellement créé, a évalué le besoin de financement de la transition écologique : il est de 60 à 70 milliards par an. La mobilisation de l'épargne privée constitue une partie de la solution, tout comme la création d'un plan épargne avenir climat ; la nature plus complexe de ce produit nécessitera un vrai travail de promotion et d'accompagnement auprès des épargnants, afin de garantir son succès.
Plusieurs mesures visent à accélérer le développement du capital-investissement dans l'assurance vie et les PER. L'investissement dans les actifs non cotés présente la belle opportunité de résoudre une équation difficile : financer la transition écologique et l'économie réelle en participant au développement des PME et des ETI. Le devoir de conseil a été raffermi grâce notamment au travail des sénateurs : face à une classe d'actifs jugée plus risquée, il est essentiel que le client dispose de l'information la plus étendue possible, gage de sa protection.
Le groupe Démocrate soutiendra donc fermement ce texte. D'après les estimations de Réseau de transport d'électricité (RTE), nous pourrions éviter de produire 900 millions de tonnes de CO
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Dès le printemps, avec le camp présidentiel, vous avez lourdement communiqué sur la préparation de ce projet de loi.
Douze pilotes – six députés de la majorité, un maire et cinq chefs d'entreprise – ont été chargés de cinq chantiers thématiques. Le texte a également bénéficié de plus de 300 auditions, de 138 contributions écrites et de 27 propositions…
À l'arrivée, des questions liées à la formation, au financement de la décarbonation des industries, aux aides en faveur des constructeurs automobiles, initialement présentées en conseil des ministres, ont toutes disparu. Tout ça pour ça, pourrions-nous dire. De même, le chantier relatif à la fiscalité ne connaît aucune traduction dans votre projet de loi : vous restez accrochés à une vision libérale d'allégement des contributions, alors qu'il faudrait urgemment flécher le crédit d'impôt recherche (CIR) sur des TPE-PME et le conditionner.
Le rapport de la commission d'enquête du Sénat présidée par Sonia de La Provôté sur la pénurie de médicaments et les choix de l'industrie pharmaceutique française, rédigé par Laurence Cohen, ne dit pas autre chose : il met en lumière des pratiques relatives au CIR hautement contestables. Nous souhaitons tous maintenir et développer les emplois actuels dans l'industrie, en verdir les modes de production et réindustrialiser les territoires en développant une souveraineté industrielle dans de nombreux secteurs – nous l'avons écrit à de très nombreuses reprises. Cependant, ce texte ne contient pas de réelles ambitions nationales, mobilisatrices d'efforts collectifs pour une industrie que nous pourrions qualifier de verte.
Vous ne faites pas de distinction claire entre l'industrie verte et le verdissement de l'industrie ; au contraire, vous entretenez la confusion jusque dans vos propos introductifs. Nous proposerons donc de définir la notion d'industrie verte, qui doit s'inscrire dans une logique de décarbonation des activités, mais aussi de production de biens utiles dans le cadre de la transition écologique, en limitant la pression sur les ressources – eau, biodiversité et matériaux.
S'agissant des mesures d'urbanisme et d'aménagement, le projet de loi étend aux projets industriels les dispositions relatives aux projets logistiques dans les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet), et les renforce. Il ne prévoit cependant aucune procédure de modification ou de révision, même simplifiée, pour actualiser ces documents en conséquence, ce qui est problématique compte tenu de leur durée de vie – dix à quinze ans.
En outre, aucun objectif national ou territorialisé ne figure dans ce projet de loi. Il apparaîtrait également indispensable d'y réintégrer l'article 1er A relatif à la stratégie industrielle, déposé par les sénateurs socialistes et supprimé en commission spéciale…
…en développant les notions de formation, de gouvernance des entreprises et d'orientation des aides publiques.
Sans stratégie et sans construction avec et pour les territoires, comment comptez-vous protéger et orienter l'industrie et l'outil industriel territorial ? Nous sommes également inquiets de la suppression de l'article 4 A relatif aux projets industriels territoriaux, qui permettrait pourtant d'aborder le sujet de l'économie circulaire, en se basant sur la notion d'écologie industrielle territoriale développée par l'Agence de la transition écologique (Ademe) : il visait à inciter les entreprises, au moment de leur installation, à réfléchir à leur intégration dans un écosystème favorable en fonction de leurs besoins – partage d'énergie, réutilisation de matériaux ou de certains procédés, échange de procédés, fret, etc.
Nous vous alertons également sur la grande confusion, entretenue à l'article 7, entre les notions de renaturation, de restauration et de compensation. Vous mélangez des concepts extrêmement différents au détriment de la biodiversité qui réclame, plus que jamais, des actions d'envergure pour préserver les écosystèmes-clés.
La marchandisation de la nature par l'intermédiaire de titres de compensation, qui pourront par ailleurs être utilisés comme des crédits carbone, est un grave recul pour la préservation de l'environnement. Au contraire, il faut réaffirmer la séquence « éviter, réduire et compenser » (ERC) votée en 2016 dans le cadre de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, et instaurer des sites de compensation de haute qualité, dont l'agrément serait conditionné par des avis conformes du Comité national de la biodiversité (CNB) et de l'Office français de la biodiversité (OFB). Monsieur le rapporteur général, monsieur le président de la commission spéciale, nous vous invitons à prendre ce sujet très au sérieux.
Enfin, les mesures relatives aux commandes publiques consistant à exclure les soumissionnaires qui ne respectent pas leur obligation de reporting de leurs émissions de gaz à effet de serre ou de reporting au titre de la directive dite CSRD sont bienvenues, mais leur portée est trop limitée.
Il s'agira d'interroger le Gouvernement sur l'application des mesures votées dans la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables. Le chantier du financement de l'industrie verte connaît les mêmes limites : on renvoie la création d'un label industrie verte « triple E » à la création d'un plan d'épargne avenir climat placé en actifs productifs, et on assure le financement des entreprises non cotées engagées dans la transition grâce à l'épargne retraite et l'assurance vie. Cela ne ressemble guère à une mobilisation de l'épargne populaire.
Il manque également une vision globale de la transition énergétique du secteur et le développement de champions industriels ; il n'y a rien non plus sur le soutien aux filières ni sur la consommation d'énergie des industriels. En matière de financement et de fiscalité, de nombreuses dispositions attendues manquent. Quelles dispositions du rapport du groupe de pilotage seront intégrées au projet de loi de finances pour 2024 ? En conclusion, nous attendons la prise en considération de nos amendements afin de débattre de ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
« Notre nouvelle économie, plus verte, respectueuse de notre terre et de nos paysages, n'est pas un rêve, mais une réalité qui nous permet de créer des emplois et de tenir nos engagements pour le climat » : ce sont les mots prononcés par le Président de la République en avril dernier. Au sein du groupe Horizons et apparentés, nous en sommes convaincus : une économie plus verte et plus responsable n'est pas un rêve ; inverser un demi-siècle de désindustrialisation n'est pas un rêve ; faire de la France un pays industriellement, économiquement et écologiquement plus souverain n'est pas un rêve. Ce texte de loi nous permettra d'aller plus loin, de poursuivre les efforts engagés depuis 2017, de donner aux industries les moyens non seulement de se verdir, mais aussi de se redéployer sur l'ensemble de notre territoire.
Ce texte s'inscrit dans la continuité des cinq dernières années, durant lesquelles nous avons œuvré pour que les 2,5 millions d'emplois détruits par la désindustrialisation, les milliers d'usines fermées depuis cinquante ans et la perte de souveraineté industrielle ne soient plus une fatalité. Nous avons réussi à inverser la tendance, avec plus de 300 ouvertures d'usines, la création de 90 000 emplois industriels depuis 2017 et le doublement du nombre d'apprentis, notamment dans la filière industrielle, afin d'en faire une filière d'excellence.
Issu d'une consultation menée pendant plusieurs mois, ce projet de loi entend répondre à nos ambitions, non seulement en matière de souveraineté, mais également en matière de transition écologique : accompagner la relocalisation du tissu industriel et encourager la création d'emplois dans ce secteur tout en assistant l'appareil productif dans la réduction de son impact climatique global. Notre ambition consiste à faire de notre pays l'un des leaders des technologies vertes en Europe.
Précisément, ce projet de loi devra nous permettre de concrétiser nos ambitions grâce à différentes mesures : le développement industriel organisé par une planification régionale ; des procédures administratives accélérées, notamment pour les autorisations et les délivrances des permis, sans amoindrir les obligations et les ambitions environnementales ; la lutte contre la gestion illégale des déchets, qui doit être sévèrement punie – les députés du groupe Horizons et apparentés ont œuvré en ce sens en commission spéciale ; la réhabilitation des friches en vue d'un usage industriel facilité pour respecter les objectifs de non-artificialisation des sols ; le soutien, par la commande publique, des productions les plus vertueuses grâce à la prise en considération de leur dimension environnementale : une plus grande mobilisation des financements, notamment par le biais de l'épargne privée, afin de répondre aux besoins de développement des filières d'avenir.
Ces mesures complètent des textes précédents, que ce soit la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, qui encourage les consommations plus responsables, la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, ou encore la loi du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, qui favorise la prise en considération de l'écoconception et les filières de matériels reconditionnés, ainsi que leur usage, notamment dans le cadre de la commande publique.
Ce texte majeur vise des objectifs clairs : faciliter, favoriser et financer une industrie plus souveraine, plus verte et plus décarbonée. Après des décennies de désindustrialisation et de perte de savoir-faire, nous devons redonner à notre pays les moyens de retrouver une industrie compétitive, responsable et créatrice d'emplois. Une industrie verte décarbonée est notre meilleur espoir pour garantir un avenir durable et prospère. Ensemble, nous pouvons faire la différence et construire un monde où l'industrie et l'environnement coexistent harmonieusement. Dès aujourd'hui, engageons-nous à soutenir et à promouvoir l'industrie verte et décarbonée. Le temps presse, notre planète compte sur nous.
Au nom du groupe Horizons et apparentés, je salue le travail et l'engagement des rapporteurs, en particulier de notre collègue Marie-Agnès Poussier-Winsback, et je remercie le rapporteur général, le ministre délégué et l'ensemble de nos collègues pour le travail effectué en commission spéciale. Nous soutiendrons ce texte et nous œuvrerons pour l'enrichir.
Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et Dem.
« Nous sommes sur l'autoroute pour l'enfer climatique, avec le pied toujours sur l'accélérateur. » Tels sont les mots prononcés par António Guterres à la COP27. On nous dit qu'il faut accélérer les procédures, notre réindustrialisation, notre retour dans la compétition internationale, accélérer pour recouvrer notre souveraineté. Or, en réalité, ce sont tant le dérèglement climatique que le dépassement des limites planétaires – six limites planétaires sur neuf ont déjà été franchies – qui s'accélèrent très fortement. Il y va de notre prospérité.
Le projet de loi relatif à l'industrie verte est, comme je l'ai lu, davantage un projet de loi relatif au climat des affaires qu'un projet de loi relatif au climat.
Il vise à rassurer les investisseurs, en leur promettant, s'ils viennent en France, du foncier disponible ; l'allocation de moyens, coulant à flots, vers des projets de réindustrialisation ; l'assouplissement du code de l'environnement.
Pour les écologistes, si la question de la réindustrialisation est majeure, elle ne se réduit pas à celle de la décarbonation, mot qui remplace tous les autres, ou de la souveraineté – le texte ne traite pas de ces sujets de manière exhaustive. Une industrie réellement verte est une industrie qui prend en considération les limites planétaires, qui lutte contre les pollutions, qui se préoccupe des sols, de l'air, de l'eau, de la santé globale du vivant – humains comme non-humains –, de la qualité de vie dans les territoires. Or votre texte ne comporte pas ces éléments.
Tout à l'heure, vous avez évoqué ceux qui connaîtraient les entreprises et ceux qui ne les connaîtraient pas. En préparant l'examen de ce texte, j'ai eu l'occasion de visiter de nombreuses entreprises, de rencontrer des chefs de PME-PMI, des salariés, des sous-traitants, notamment des artisans, qui, du reste, ne se sentent pas très concernés par votre texte.
Comme vous nous l'avez conseillé, nous nous sommes rendus à Crolles auprès de l'entreprise STMicroelectronics, qui a consommé 4,5 millions de mètres cubes d'eau potable en 2022, ce qui représente 20 % de la ressource fournie par Grenoble Alpes Métropole. Demain, des progrès seront accomplis, puisqu'elle consommera autant d'eau tout en produisant davantage. Toutefois, ce n'est pas l'unique entreprise du territoire à consommer de l'eau : nous rencontrerons donc un problème de partage de cette ressource. Une industrie verte se préoccupe de cet enjeu.
Nous sommes allés visiter le site de l'entreprise Arkema, près de Lyon. Les eaux sont contaminées avec des substances polyfluoroalkylées – Pfas. Nous vous avons interrogé à plusieurs reprises à ce sujet, vous nous avez répondu qu'un député avait été nommé pour le traiter. Pourriez-vous gérer ce dossier plus rapidement ? Pourriez-vous immédiatement interdire la présence de ces substances dans les emballages alimentaires et dans tous les tissus ? La résolution rapide de ces questions est attendue.
L'industrie soulève également la question des pollutions incontrôlées et du manque d'eau, ainsi que des enjeux en matière d'énergie. Nous pouvons relocaliser, mais pas à n'importe quelles conditions. Nous ne rejetons pas le modèle de la gigafactory par principe,…
…mais nous estimons que des alternatives existent, qui doivent être étudiées.
L'égalité des territoires est possible. Nous pouvons réfléchir à la place des microentreprises, au rôle des PME-PMI et de l'artisanat industriel ; aucune disposition de votre texte ne les concerne. Nous devons produire autrement, en répondant strictement à nos besoins, car nous ne pouvons pas produire sans limite.
Pour y parvenir, notre industrie doit d'abord prendre conscience des limites planétaires. Ainsi, nous proposons d'instaurer des conseils de sobriété – ils ont été créés dans ma circonscription – pour traiter de la question de l'eau, de l'énergie et des matières premières. Nous vous proposons une industrie des besoins. Avons-nous besoin de la fast fashion ou du quick commerce ? La réponse est non. Comment mettre un terme à ces activités prédatrices pour notre avenir ? Nous avons besoin d'instaurer une planification descendante et ascendante. Comment associer les territoires, les riverains, et tous les acteurs de l'entreprise – notamment les sous-traitants et les fournisseurs – de manière démocratique ? Nous proposons de conclure des conventions citoyennes territorialisées pour penser cette réindustrialisation.
Il faut repenser nos outils de production et nos manières de produire, dans le cadre de l'économie circulaire, de l'écologie industrielle, de l'innovation low tech. De nombreuses voies existent. Nous avions proposé de les ouvrir en déposant un amendement ; vous n'avez pas saisi cette occasion.
La consommation se transforme. Nous devons sortir de l'obsolescence programmée et aller vers l'économie de la fonctionnalité, en prenant en considération les externalités négatives – nous devons accélérer sur cette question. Nous devons instaurer une industrie du collectif, de la coopération et de la modernité sociale. Ainsi, nous proposons d'ajouter aux missions dévolues au comité social et économique l'élaboration des stratégies de transition des entreprises et le droit de regard sur les financements publics attribués aux entreprises.
Enfin, nous proposons que l'industrie soit soutenue par des financements publics transparents, efficaces écologiquement et socialement. Nous direz-vous clairement quelles sont les contreparties aux 2,9 milliards accordés à STMicroelectronics et à GlobalFoundries, dans le cadre de la construction de l'usine à Grenoble ?
Nous disons mille fois oui à la réindustrialisation. Toutefois, le temps du productivisme est révolu et c'est celui d'une industrie résiliente qui doit advenir.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Maxime Laisney applaudit également.
D'abord, les cocos ne veulent pas recevoir de leçons. Nous connaissons les entreprises, nous n'avons pas besoin d'aller les visiter, nous vivons avec ; elles sont implantées sur nos territoires. Depuis toujours, nous sommes aux côtés des organisations syndicales et des salariés. Du reste, nous regrettons que vous n'ayez pas pris soin de vous nourrir de leur expertise, dans le cadre de l'élaboration de ce texte.
Nous n'avons pas attendu 2023 pour produire français. Dans les années 1970, dans les territoires où vous laminiez l'industrie, étaient collées des affiches indiquant la nécessité de recouvrer la souveraineté par le made in France. Les 2,2 millions d'emplois n'ont pas été perdus par l'opération du Saint-Esprit. Cette perte est le fruit de renoncements successifs ; les libéraux que vous êtes s'inscrivent dans cette continuité. Les traités de libre-échange, les accords de l'OMC (Organisation mondiale du commerce), les traités européens ont instauré une concurrence libre et non faussée, qui joue au détriment de notre tissu industriel.
M. Matthias Tavel applaudit.
La faillite du site de Florange et celle de certaines usines de Whirlpool, d'Ascoval, d'Arcelor, de Pechiney, ou la liquidation d'Alcatel : il y a des responsables. Les politiques ont laissé faire et les patrons en ont été complices. Ces mêmes patrons arboraient des badges, prétendant créer 1 million d'emplois grâce aux aides allouées.
J'ai imprimé un schéma des aides allouées aux entreprises. Entre 1979 et 2019, elles sont passées de 9,7 milliards à 156,88 milliards. Le schéma suit la même courbe s'agissant des dépenses de nature fiscale et budgétaire. Malheureusement, les saignées industrielles, qui s'accompagnent de drames humains, ont continué à laminer les territoires et leurs habitants. Tous ces événements sont survenus par idéologie. En effet, Thatcher est passée par là…
…et vous avez affaibli l'État. Vous avez toujours proposé les mêmes solutions : d'une part, les hauts taux au-dessus des totaux, d'autre part, l'efficacité supposée des exonérations.
Aujourd'hui, Emmanuel Macron déclare son amour à l'industrie. On devrait l'appeler Emmanuel Montebourg, et le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique devrait être appelé Bruno de Gaulle ! À entendre le Président de la République, il a réinventé son amour pour l'industrie. Mais, derrière les déclarations d'amour et les paroles, il faut passer aux actes,…
…et c'est un pas que vous peinez à franchir. D'abord, vous saucissonnez la politique de relance industrielle, en accélérant d'un côté les énergies renouvelables, de l'autre le nucléaire, et en faisant le choix politique de baisser les impôts de production.
Puis, vous renvoyez à l'examen du projet de loi de finances de nombreux sujets stratégiques qui auraient dû être au cœur de ce texte. Mais le pire est ailleurs. Par exemple, vous oubliez qu'avec les impôts, on peut financer des infrastructures ferroviaires nécessaires à la relance industrielle – Hubert Wulfranc en fera la démonstration dans le cadre de la commission d'enquête sur la libéralisation du fret ferroviaire et ses conséquences pour l'avenir – et des services publics efficaces, que les entreprises nous demandent lorsqu'elles font le choix de s'implanter sur un territoire. Bref, vous faites un choix idéologique en considérant que les impôts sont un obstacle à l'implantation d'industries, alors que c'est l'inverse.
Par ailleurs, votre texte brille par l'absence de dispositions relatives à la formation, à l'organisation des filières – inconnues au bataillon –, à la relance de la recherche et développement, au service du développement industriel. Ces lacunes ne sont pas accessoires, mais témoignent de l'approche feutrée des cabinets, qui ne mènent aucun combat dans les territoires et ne mobilisent ni les moyens ni les bras nécessaires.
Pis, force est de constater que ce texte ne permettra pas non plus de réaliser la transition écologique de l'industrie. Il rate l'essentiel. Il ne faut pas une industrie verte : il faut considérer qu'une industrie est verte une fois qu'elle est relocalisée. Il faut verdir l'ensemble des pans de notre industrie,…
…c'est-à-dire investir massivement dans la décarbonation, conditionner les aides des entreprises et soumettre la commande publique à l'objectif de transition écologique en responsabilisant les grands groupes envers leurs sous-traitants. Le texte est sourd et même muet, s'agissant de ces sujets. Comment envisager qu'on puisse atteindre l'objectif d'une souveraineté industrielle verte, alors que 40 % des intrants industriels sont extraits à l'étranger, dans des conditions souvent déplorables sur le plan écologique et social ? Sans régulation du marché, sans protectionnisme intelligent, sans haut niveau de formation, sans investissement massif, il n'est pas d'industrie verte.
Pour conclure, je reviens sur les propos du ministre, qui, pour étayer son discours, a cité le général de Gaulle.
Je préfère que ce soit lui, plutôt qu'eux !
Sous de Gaulle, EDF était forte, ce qui permettait de proposer des tarifs réglementés, au service de la souveraineté industrielle ; la SNCF était unifiée, ce qui garantissait le maillage du territoire, y compris au profit du fret ; un pacte social et fiscal avait été conclu avec des salariés sous statut, ce qui permettait d'envisager la reconstruction du pays.
Tels sont les grands sujets absents de la réflexion d'un État stratège qui fait défaut dans la conduite de votre politique. Voilà l'état d'esprit qui nous anime.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES. – Mme Sandrine Rousseau et M. Maxime Laisney applaudissent également.
Parce que nous aimons l'industrie, laquelle a façonné nos territoires, nous sommes attentifs et attachés à la question de la réindustrialisation et nous réjouissons qu'elle soit examinée. La part de l'industrie dans le PIB est stable, elle s'élève à 11 % après s'être effondrée – chacun l'a relevé.
La question, posée aujourd'hui, est de savoir si ce texte peut redonner à l'industrie française sa force et sa place. Nous passerons du temps sur cette question. D'autres leviers doivent être actionnés, notamment le levier fiscal – vous l'avez souvent actionné en baissant les impôts de production. Cette question n'est pas un tabou. En revanche, il faut mettre fin au saupoudrage. Si nous voulons aider l'industrie, il faut proposer des mesures efficaces, ciblant la CFE – cotisation foncière des entreprises – plutôt que la CVAE – cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.
Cela passe également par l'emploi. Il est nécessaire de renforcer l'attractivité des filières, de changer l'image des métiers, d'améliorer l'orientation de nos jeunes pour leur donner des perspectives d'avenir, notamment en prévoyant des parcours de réussite – d'autres orateurs l'ont dit avant moi.
Le dernier élément est la question des procédures administratives, que ce texte évoque largement, alors même qu'il ne traite pas des deux premiers points. Nous nous réjouissons que les délais d'instruction soient divisés par deux, ce qui nous permettra d'être au même niveau que nos concurrents européens. Cette mesure va dans le bon sens. Néanmoins, nous devons être vigilants à la place et au rôle des collectivités territoriales, qui sont toujours réduits.
Il faut également prêter attention à la concertation publique qui, si elle était mal organisée, conduirait irrémédiablement à une multiplication des contentieux – donc à un allongement des délais, que nous ne maîtrisons pas forcément – et nuirait à l'acceptabilité.
La libération du foncier en vue de fournir des sites clés en main, la facilitation du traitement des friches et le verdissement de la commande publique sont aussi, reconnaissons-le, des éléments qui vont dans le bon sens.
Mais revenons un instant sur l'expression « industrie verte » : force est d'admettre qu'il s'agit là d'un mirage sémantique propre à la communication politique. L'industrie verte n'existe pas ; elle n'est pas définie dans le texte et ne fait pas l'objet d'une stratégie partagée. Il s'agit, au mieux, d'un timide – j'ai bien dit : timide – verdissement de l'industrie.
S'il existait une volonté de construire l'industrie verte, l'ambition serait globale. Or le projet de loi traite, certes, l'aspect administratif de la question, mais on n'y trouve rien sur le financement – ou si peu ! –, alors qu'il nous avait été présenté comme une réponse à l'Inflation Reduction Act of 2022 (IRA), la loi grâce à laquelle, faut-il le rappeler, le gouvernement des États-Unis a mis sur la table 370 milliards de dollars.
Les crédits d'impôt bénéficieront facilement aux secteurs que l'on appelle les Big five, qui sont déjà en quelque sorte verts, sans présenter plus d'avantages, sauf quelques dispositifs que nous considérons comme inopérants, inefficaces et manquant leur cible ; je pense au plan d'épargne avenir climat.
Rien non plus sur l'emploi ou l'attractivité des métiers. Si la volonté existait de construire une industrie verte et décarbonée, nous prendrions le temps d'aborder ces questions, car nous savons que, dans la tête de nos jeunes, les perspectives d'avenir se construisent sur leur capacité à s'exhausser par leur carrière professionnelle. Or, à cet égard, l'industrie pèche encore par l'image qu'elle renvoie, malgré certaines initiatives.
Au fond, on veut réindustrialiser le pays – c'est une bonne chose – et tenter de verdir son industrie. Pourquoi pas ? Mais cela reste timide et flou. Il n'y a rien, dans le texte, sur une incitation globale à économiser la ressource et on ne s'interroge ni sur les incitations effectives à limiter les émissions de gaz à effet de serre ni sur un changement du modèle de production ; bref, manquent les éléments qui nous permettraient d'affirmer qu'au-delà de la décarbonation, la France veut une industrie verte capable de verdir nos pratiques.
Ce projet de loi, nous l'accompagnerons, sans mirage sémantique ni communication politique – nous vous les laissons –, car nous savons qu'il peut, dans le domaine administratif, aller dans le bon sens, mais il évite soigneusement, hélas ! un certain nombre de piliers indispensables à la réindustrialisation de la France.
« Faire de la France la championne de l'industrie verte en Europe » : tel est le vœu du Gouvernement. Pour cela, Bercy dit s'être retroussé les manches pour défendre une panoplie de mesures, très techniques, qui, quoique certaines d'entre elles soient intéressantes, ne sont malheureusement pas tout à fait à la hauteur des ambitions affichées. Car, ne vous en déplaise, il ne s'agit pas seulement de rattraper le temps perdu ; il faut aussi se préparer aux immenses chocs énergétiques à venir.
Bien loin d'une révolution verte, le projet de loi que nous examinons reste mutique sur les contraintes qui, déjà, pointent leur nez. Des contraintes que tout le monde connaît, mais dont personne n'ose parler. Je pense notamment à la production électrique non fossile, qui aura du mal à satisfaire une demande démultipliée, ou à la pénurie de courant « vert », qui est un risque à anticiper pour notre industrie, sans oublier la très forte concurrence entre produits électriques – les voitures, par exemple –, qui pourrait nous faire perdre la bataille face aux Chinois. Et ce ne sont pas les injonctions d'adopter le tout électrique dès 2035, sans aucune étude d'impact, qui vont nous rassurer.
Difficile également de mettre sous le tapis la question de l'approvisionnement en métaux rares nécessaires à la transition écologique, véritable nerf de la guerre. Or ce problème est déjà identifié comme critique par les spécialistes. Un problème qu'il serait coupable d'ignorer, car il va in fine nous pousser vers toujours plus de dépendance envers les pays exploitants de minerais rares, comme la Chine – toujours elle !
Loin du patriotisme économique, la transition écologique nous pousse, dès lors, dans les bras de nos concurrents – quand ils ne sont pas nos adversaires. Mais qu'importe, puisque la mode est au vert, autant ne pas lésiner !
La décarbonation de l'industrie existante et la production de nouvelles technologies permettant d'accélérer la décarbonation sont les deux nouvelles jambes sur lesquelles nous allons devoir apprendre à marcher, en nous appuyant au passage sur les Big five : éoliennes, panneaux photovoltaïques, batteries électriques, électrolyseurs pour fabriquer de l'hydrogène vert et pompes à chaleur.
L'apprentissage est périlleux, car semé d'embûches et constitué d'injonctions contradictoires. Si le Gouvernement présente ce texte comme « un véritable tournant pour notre économie » destiné à mettre fin à l'impardonnable travail de sape de notre industrie, en cours depuis plusieurs décennies, – il a tout de même entraîné la délocalisation de 2,5 millions d'emplois –, il est difficile de ne pas aborder le vrai sujet qui fâche : le foncier, qui est le bien le plus compliqué à trouver pour un industriel qui veut investir.
Si nous pouvons nous accorder sur la protection de notre environnement, à laquelle concourt l'objectif zéro artificialisation nette d'ici à 2050, et saluer la mise à disposition par l'État de cinquante sites représentant 2 000 hectares intégralement dépollués, il n'en reste pas moins que la limitation de la bétonnisation risque de mettre quelques bâtons dans les roues de notre industrie.
J'ai d'ailleurs déjà évoqué à plusieurs reprises la nécessité que des entreprises comme Genvia, à Béziers, puissent être considérées comme des projets industriels d'intérêt national visant notamment à favoriser la transition énergétique ou à assurer l'indépendance énergétique de la France et soient, à ce titre, retirées de l'objectif ZAN des collectivités. C'est tout à fait primordial !
Avant de conclure, je voudrais pointer du doigt quelques contradictions. Si le ministre de l'économie, Bruno Le Maire, se targue de soutenir des deux bras l'industrie verte en instaurant des crédits d'impôt qui seront intégrés à la loi de finances pour 2024, on ne peut passer sous silence la menace qu'il a laissé planer lors des rencontres économiques d'Aix-en-Provence, au début de ce mois : la dernière tranche de suppression de 4 milliards d'euros d'impôts de production promise dans le budget 2024 pourrait bien être reportée… Le « en même temps » a ses limites !
En guise de conclusion, rappelons que si notre salut doit passer par le vert, nos besoins en électricité seront exponentiels. À l'heure où le nucléaire souffre encore des affres de la gauche, si nous ne soutenons pas plus encore cette énergie, mal-aimée mais propre, il serait plus qu'étonnant que nous tenions la distance. Espérons au moins que les 23 milliards d'euros d'investissements et les 40 000 emplois directs promis par le Gouvernement comme conséquences immédiates de ce projet de loi ne soient pas un énième mirage !
Enfin, je ne peux que regretter que, dans le texte que vous présentez volontiers comme une « boîte à outils » ne soient, une fois encore, retenues que les propositions de la majorité. Plus des deux tiers de mes amendements ont en effet été déclarés irrecevables – en tant que cavaliers, pour la plupart.
Voyez avec le service de la séance !
Drôle de méthode, vous l'avouerez, pour un objectif qui se veut national !
M. Dino Cinieri applaudit.
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre délégué.
Je ne doute pas que les députés ici présents soient très impatients d'entamer l'examen des 1 208 amendements déposés sur le projet de loi. Je serai donc bref.
Monsieur Fournier, vous nous reprochez d'opposer le climat des affaires et le climat tout court. Mais, depuis 2017, nous avons montré que nous sommes capables de réconcilier l'un et l'autre :…
…le produit intérieur brut français a crû de 15 % tandis que les émissions de gaz à effet de serre françaises baissaient de 12 % – elles ont diminué dans les mêmes proportions dans l'industrie
M. Daniel Labaronne applaudit
–, soit une baisse de 50 millions de tonnes de CO
Bien entendu, monsieur Fournier, il ne faut pas freiner : il faut appuyer sur l'accélérateur,…
… pour que la France devienne un exemple en matière de croissance verte.
Il ne s'agit pas de favoriser la croissance à tout prix, vous le savez. Le projet de loi comporte un article très important, l'article 4, qui nous permettra d'avoir une industrie plus sobre, plus économe en ressources. Mais nous devons absolument montrer que la France est capable de produire, de créer de l'emploi industriel. Au demeurant – je corrige le chiffre que vous avez cité, monsieur Izard –, ce sont, non pas 80 000, mais 120 000 emplois industriels qui ont été créés depuis six ans, grâce à la majorité, et ce, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre.
On peut le faire, qui plus est, monsieur Loubet, monsieur Alexandre – vous qui, une fois de plus, convergez de manière improbable – sans recourir au protectionnisme, qu'il soit bête et méchant ou social et écologique.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Lorsque vous fermez une porte, on ne peut plus ni entrer ni sortir : si vous interdisez les importations en France, vous empêcherez aussi les champions français d'exporter. Essayons d'être raisonnables ! Il est évident – cela a été dit sur tous les bancs – qu'il faut intégrer des critères environnementaux dans la commande publique de manière que les champions français y soient plus présents, mais ne le faisons pas de manière aveugle.
L'industrie française est capable de conquérir le monde.
Elle l'a fait dans l'aéronautique ; elle le fera demain, j'en suis convaincu, dans l'hydrogène, les panneaux solaires, l'automobile… Donnons-lui-en les moyens.
Merci à MM. Izard, Thiébaut et Zgainski d'avoir bien décrit ce projet de loi : c'est le maillon…
…d'une chaîne que nous avons commencé à assembler il y a six ans et que nous continuerons à construire, de manière à développer l'industrie française. Le projet de loi est un tout qui fait lui-même partie d'une stratégie industrielle que certains d'entre vous nous ont reproché de présenter de manière insuffisamment globale et cohérente.
À ceux-là, j'indique que l'examen du fameux article 1er bis A, qui fait l'objet d'un bon petit lot d'amendements, nous permettra d'en discuter. Nous sommes d'ailleurs prêts à accepter un amendement déposé, me semble-t-il, par Mme Bonnivard, qui prévoit que se tiendra régulièrement une discussion approfondie sur la stratégie de la France en matière d'industrie et d'industrie verte. J'espère que cette mesure fera tomber un certain nombre de vos préventions et vous conduira à voter en faveur de ce projet de loi très important.
Je remercie Mme Duby-Muller et M. Bolo, corapporteurs du groupe de suivi de la commission des affaires économiques consacré à la préparation du projet de loi relatif à l'industrie verte. Nous sommes prêts à accepter un certain nombre de leurs recommandations. Ils regrettent, par exemple, que les élus locaux soient insuffisamment associés ; sur ce point, nous sommes prêts à avancer, à l'article 9, en permettant aux maires d'émettre, très tôt, un avis…
…afin que les projets d'intérêt national restent ancrés localement. Ils ont également fait des propositions très importantes concernant le recensement du foncier ; je ne crois pas que ces mesures soient de nature législative, mais nous avons déjà entamé des travaux en la matière – nous aurons l'occasion d'en reparler.
Monsieur Leseul, vous avez critiqué la méthode. Reconnaissez-le : Bruno Le Maire et moi vous avons reçu au ministère de l'économie,…
…comme nous avons reçu tous les groupes de cette assemblée. Nous vous avons écouté ; vous avez exprimé vos préoccupations.
Bien entendu, monsieur Fournier, nous ne sommes pas d'accord sur tout. Nous n'allons pas accepter tous vos amendements : vous proposez un projet alternatif. Présentez-le devant les Français ! En attendant, reconnaissez, toutes et tous, qu'au Sénat et en commission, nous avons accepté des amendements émanant de tous les groupes, et nous sommes prêts à en accepter d'autres lors des débats en séance publique.
Monsieur Jumel, « les cocos ne veulent pas de leçons », avez-vous dit. Mais je ne suis pas là pour vous donner des leçons ! Je suis même prêt à reconnaître que le parti communiste français a eu raison avant beaucoup d'autres au sujet des risques liés à la désindustrialisation. Nous sommes là où nous sommes, maintenant. Et je suis persuadé que nous sommes capables de mettre, ensemble, le réveil collectif au service d'une industrie française conquérante.
Au fond, j'adhère à peu près à tout ce que vous avez dit. C'est par le verdissement de toute l'industrie que nous réussirons à réindustrialiser la France, chez vous, en Normandie, et ailleurs. Les Alpine seront électriques ou ne seront pas. Si on ne capture pas le carbone, il n'y aura plus ni productions d'engrais, ni cimenteries, ni raffineries en Seine-Maritime. Nous sommes donc évidemment d'accord avec vous.
Il y a un point sur lequel nous sommes en désaccord : c'est le qualificatif « thatchérienne » que vous accolez à notre politique. Notre taux de prélèvements obligatoires est unique au monde : 45 %, c'est un record mondial.
M. Matthias Tavel s'exclame.
Personne ne fait mieux ! Alors, ne qualifiez pas, je vous prie, notre majorité de néolibérale,…
…comme si elle était contre l'impôt quoi qu'il arrive.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je vous le dis comme j'ai eu l'occasion de le dire au Sénat, monsieur Jumel : je ne fais pas partie de ceux qui considèrent que le mot « impôt » est un gros mot.
C'est très bien, l'impôt.
Il permet de financer des services publics, d'assurer la solidarité nationale et de redistribuer. Mais, voyez-vous, on fait déjà tout cela très bien, en France ! Nous estimons qu'il y a des limites à tout.
Lorsque le taux de prélèvements atteint 45 % de la richesse nationale,…
…la solidarité existe, les services publics sont présents, même si on peut toujours les améliorer, et la France, vous le savez, est le pays qui redistribue le mieux : les écarts de rémunération avant et après redistribution sont les plus faibles au monde.
Monsieur Saint-Huile, je vous remercie pour votre intervention. Vous avez donné le bon chiffre : l'industrie représente bien 11 % du produit intérieur brut, et non 9 % comme d'autres orateurs l'ont affirmé. Nous devons tout faire pour porter cette part à 15 %.
Vous êtes plusieurs à avoir mentionné les enjeux très importants que rencontrent les filières : elles doivent concevoir une stratégie de décarbonation. Vous le savez, dix-neuf comités stratégiques de filière signent de nouveaux contrats qui sont tous axés sur la décarbonation. Les comités stratégiques de filière et le Conseil national de l'industrie créé par Nicolas Sarkozy en 2010, ça marche !
Nous devons mobiliser l'ensemble des filières. Je rappelle à chacun que les organisations syndicales sont présentes dans tous les comités stratégiques de filière et au CNI. Ne nous reprochez donc pas de ne pas associer les organisations syndicales à ces stratégies, car elles sont déjà présentes à tous les niveaux.
Il ne suffit pas qu'elles soient présentes ; il faut qu'elles aient du pouvoir !
Je ne serai pas plus long. Je suis très heureux d'en venir à l'examen des amendements. Je ne doute pas qu'il nous permettra à tous de nous retrouver pour soutenir ce beau projet de loi et une industrie française verte et conquérante.
Applaudissements sur les bancs des commissions.
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Les amendements n° 991 et 15 de M. Jérôme Nury visent à intégrer la notion de simplification des procédures au titre Ier du projet de loi. La rédaction de l'amendement n° 991 fait écho à la rédaction de l'intitulé du chapitre V de ce même titre.
En effet, pour accélérer le développement de l'industrie verte, il est indispensable de le faciliter. Or nous constatons que notre pays croule sous les contraintes administratives : les procédures sont multiples, longues et coûteuses, ce qui entrave ce développement.
Vous l'avez dit, monsieur le ministre délégué, nous sommes l'un des pays développés où le taux de prélèvements obligatoires est le plus important, sinon celui où il est le plus élevé. C'est très bien de soutenir les entreprises dans leurs investissements, mais il faut aussi – le groupe Les Républicains a déposé de nombreux amendements en ce sens – protéger notre industrie au niveau européen d'une concurrence déloyale, tant sur le plan environnemental que sur le plan social.
Monsieur le ministre délégué, vous vous êtes rendu il y a quelques jours chez Ugitech, dont le siège social est situé dans ma circonscription, en Savoie. Je crois, pour avoir écouté attentivement, que c'est là le discours que vous ont tenu les responsables de cette belle entreprise.
L'amendement n° 991 relève certes de la sémantique, néanmoins il est important pour définir l'esprit du projet de loi relatif à l'industrie verte.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission spéciale, également rapporteur pour les chapitres Ier et V du titre Ier , pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
Il est vrai que les questions sémantiques sont importantes. Nous avons abordé ce point en commission. L'amendement n° 991 , par lequel vous proposez d'ajouter « faciliter » à « accélérer », fait sens, tandis que la formulation de l'amendement n° 15 est un peu trop restrictive. Monsieur Rolland, je vous propose donc de retirer l'amendement n° 15 au profit de l'amendement n° 991 , sur lequel j'émets un avis favorable.
En commission, nous avions indiqué que la simplification est une condition sine qua non de l'accélération. Nous avions alors retenu seulement « accélération » dans le titre Ier , mais pour montrer, dès le début de l'examen du texte, que le Gouvernement est extrêmement ouvert, …
Effectivement, nous avons débattu en commission d'un amendement similaire à l'amendement n° 15 et vous vous êtes engagés, monsieur le ministre délégué et monsieur le rapporteur général, à ce que nous retravaillions ensemble sur ces choix sémantiques. Sur cette base, et dès lors que l'amendement n° 991 a recueilli des avis favorables, je retire l'amendement n° 15 . Permettez-moi d'ajouter que c'est un bon départ !
L'amendement n° 15 est retiré.
Nous sommes toujours un peu méfiants à l'égard de l'expression d'une volonté de « faciliter » et d'« accélérer »,…
Vous, c'est en marche arrière que vous êtes à l'aise !
…car les dispositions prévues au titre Ier
À force de faire des règles d'exception et d'accélérer, on suscitera de l'incompréhension à l'égard des projets. Le groupe Écologiste – NUPES est donc défavorable à l'amendement n° 991 , comme il le sera malheureusement au contenu du titre Ier que nous examinerons ensuite.
L'amendement n° 991 est adopté.
La parole est à M. Emmanuel Blairy, pour soutenir l'amendement n° 996 .
Le chapitre Ier du projet de loi s'intitule « Planification industrielle ». Le consultant que vous avez engagé n'était pas très inspiré ce matin-là ! Cela manque d'ambition, en vérité.
Comme cela a été dit lors de l'examen des amendements précédents, les questions sémantiques sont importantes.
Vous le savez, la France est traditionnellement une terre d'industrie. Sous l'impulsion du Roi-Soleil, le ministre Colbert a créé les manufactures qui ont contribué au redressement de la balance commerciale de la France aux XVII
Aux XIX
Nous sommes fiers de notre histoire, mais aussi très conscients de l'influence perdue et du retard accumulé, en particulier dans les industries nouvelles. C'est précisément au service de ces industries nouvelles telles que les technologies de production d'énergie, les pompes à chaleur ou les batteries, que le Gouvernement nous propose de rassembler nos efforts pour porter haut les couleurs de l'industrie française. Nous devons donc réindustrialiser.
Les mots ont un sens. L'amendement n° 996 vise à renommer le chapitre Ier
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Le chapitre Ier relève vraiment d'une logique de planification, puisque l'article 1er vise à fixer des objectifs de développement industriel au niveau régional. Je vous demande donc de retirer l'amendement, sans quoi j'émettrai un avis défavorable.
Sur les amendements n° 996 et 514 , je suis saisi par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.
Sur l'amendement n° 1401 , je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés (membre de l'intergroupe NUPES) d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 996 ?
Même avis que celui du rapporteur général : défavorable.
Il y a des débats sémantiques, mais ce n'est pas tout. Je voudrais revenir sur ce qu'a déclaré M. le ministre délégué : le fait qu'il y ait prétendument trop de prélèvements obligatoires en France empêcherait toute politique ambitieuse en matière industrielle. Je tiens à expliquer en quoi cet argument est faux.
Dans les prélèvements obligatoires, on compte notamment les cotisations sociales, c'est-à-dire la manière dont les travailleurs s'organisent pour payer leur protection sociale.
Ne croyez pas qu'aux États-Unis ou dans les systèmes privés, il n'y ait pas de dépenses obligatoires, par exemple en matière de santé, même si elles ne relèvent pas des cotisations sociales.
Surtout, nous vous avions alerté, monsieur le ministre, notamment lors des dernières discussions sur le budget. Des sommes phénoménales manquent !
Actuellement, 100 milliards d'euros de recettes de la TVA partent directement dans les caisses de la sécurité sociale parce que vous avez consenti plusieurs centaines de milliards d'exonérations de cotisations sociales. L'argent de ces exonérations va droit dans les poches des entreprises du CAC40 au lieu d'abonder le budget de l'État. Ces 100 milliards auraient pu être utilisés pour la transition écologique ; cette somme formidable aurait pu être mobilisée…
Monsieur le député, merci de vous rapprocher de l'objet de l'amendement et de conclure.
Dès lors que nos débats ne prennent pas en considération le fait primordial que vous avez détourné 100 milliards d'euros du budget de l'État…
Exclamations sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
…vers d'autres caisses, nous constatons que vous ne comprenez pas nos ambitions en matière écologique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 98
Nombre de suffrages exprimés 98
Majorité absolue 50
Pour l'adoption 14
Contre 84
L'amendement n° 996 n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, n° 1401 , 514 , 801 , 5 , 364 , 1306 , 376 , 1003 , 454 et 372 , portant article additionnel avant l'article 1
Les amendements n° 5 et 364 sont identiques.
La parole est à M. Gérard Leseul, pour soutenir l'amendement n° 1401 .
Il vise à donner une définition de l'industrie verte sur laquelle nous pourrions nous accorder. En principe, ce n'est qu'une fois que cette notion sera précisée qu'il sera possible d'obtenir des simplifications de procédure ou des mesures fiscales. La situation actuelle est pour nous source d'embarras, car, malgré le flou qui entoure la notion d'industrie verte, il y aura des simplifications de procédures d'urbanisme ou des mesures fiscales dans le projet de loi de finances.
Nous proposons que relèvent de la notion d'industrie verte les activités, installations ou implantations industrielles de conception et de production de biens matériels dont les procédés de production permettent de satisfaire aux objectifs de réduction de la consommation énergétique, de décarbonation, de réduction de notre dépendance aux importations de matériaux stratégiques, de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de déchets, mais aussi de plus grande utilisation de matériaux recyclés ou biosourcés. Vous le voyez, nous proposons une définition complète.
En outre, seraient éligibles les activités et sites industriels dont la production concourt directement à l'atteinte de ces objectifs.
Nous avons déjà eu ce débat et je ne voudrais donc pas être trop long, toutefois cette question est fondamentale. Lors des débats en commission spéciale, il a été précisé que pour bénéficier de cette définition, il suffirait de satisfaire à l'un de ces critères. Ils couvrent l'ensemble du spectre de la transition écologique, notamment la sobriété, malheureusement trop souvent oubliée dans ce projet de loi, et la décarbonation, tout en intégrant la question de la souveraineté.
L'objet de l'amendement n° 1401 est donc de clarifier l'ensemble du projet de loi que vous soumettez à la discussion en commençant par une définition claire et exhaustive de l'industrie verte.
La parole est à M. Nicolas Meizonnet, pour soutenir l'amendement n° 514 .
Je commencerai par deux constats. Premièrement, la France est le pays d'Europe le plus désindustrialisé après Malte et le Luxembourg. Le secteur industriel français n'emploie plus que 2,7 millions de salariés. La part de l'industrie dans le PIB est environ de 10 % en France, alors qu'elle est de 24 % en Allemagne. Le groupe Rassemblement national soutient donc qu'une grande politique de réindustrialisation est nécessaire. La Macronie a fait le choix de limiter ce projet de loi à l'industrie verte. Autre écueil, vous ne l'avez pas définie, ce qui a valu à ce texte, lors de l'examen par la commission spéciale, d'être jugé « vaporeux », « mal défini », « flou », un « texte à trous », un « fourre-tout ». Et « quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup », selon l'expression d'une personne qui n'est pas mon amie…
Le groupe Rassemblement national propose une définition claire et large de l'industrie verte, en affirmant qu'elle concilie les enjeux économiques et environnementaux et qu'elle se tourne vers les technologies d'avenir afin de décarboner l'économie. Nous pouvons tous nous accorder sur cette définition, qui englobe le verdissement de l'industrie traditionnelle.
Cependant, développer une telle industrie suppose une rupture claire avec le modèle que vous défendez, avec le libre-échangisme. N'oublions pas que les échanges internationaux sont la cause de 50 % des émissions de gaz à effet de serre de la France.
L'industrie verte, c'est tout cela. Nous vous proposons donc d'adopter cette définition large où vous retrouverez les domaines que vous souhaitez couvrir.
Il vise à préciser que pour bénéficier de la qualification d'industrie verte, les activités industrielles ne doivent pas dénaturer le paysage, comme le font certains projets éoliens, notamment dans la forêt de Taillard, dans la Loire.
C'est un sous-amendement d'intérêt général !
Sourires.
Il vise lui aussi à élargir la définition de la notion d'industrie verte. Il ne s'agit pas d'un débat purement sémantique : l'industrie verte encourage la réindustrialisation tout en favorisant la production, sur le territoire français, de produits dont la conception à l'étranger et le transport vers le territoire national auraient davantage pollué.
La parole est à M. Nicolas Dragon, pour soutenir l'amendement identique n° 364 .
Il tend également à définir précisément ce qu'est l'industrie verte. En effet, alors qu'il s'agit de son intitulé, le projet de loi ne définit à aucun moment la nomenclature à respecter pour que l'industrie puisse être qualifiée de verte. Il paraît pourtant nécessaire et indispensable de connaître précisément la portée des termes soumis à notre examen, afin que les Français et nos industriels comprennent de quoi il s'agit. C'est pourquoi il convient de préciser dans le projet de loi «[qu']est considérée comme une industrie verte toute industrie dans laquelle la production et le développement industriel s'opèrent dans le respect de l'environnement ou participent à la transition écologique. L'industrie verte prend en compte les enjeux environnementaux, sociétaux et climatiques dans chacune de ses décisions. »
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Le sous-amendement n° 1655 vise à préciser que dans le cadre de l'industrie verte, il est important que la conception des produits elle-même respecte l'environnement. Par ailleurs, la conception étant une étape importante dans l'industrie, le sous-amendement n° 1654 tend à la mentionner spécifiquement dans la définition de l'industrie verte.
Comme cela a déjà été souligné, le projet de loi ne définit pas ce qu'est l'industrie verte. À nos yeux, il s'agit d'un manquement grave, puisque cette absence de définition ouvre la porte à toutes les interprétations possibles, y compris à des visions très étroites ou très exigeantes. Définir l'industrie verte, ce n'est pas classer les différents secteurs industriels selon qu'ils seraient verts ou non, mais bien donner un cap et des perspectives à l'ensemble de l'industrie.
Par cet amendement, nous proposons une définition intégrant de nombreux éléments pour fixer ce cap. Nous menons ce travail de définition depuis longtemps, et nous avons d'ailleurs présenté aujourd'hui un manifeste pour la réindustrialisation écologiste …
L'orateur montre un document
…qui détaille tous les éléments de définition que nous proposons, ainsi que soixante propositions très concrètes dont nous aimerions pouvoir débattre ici – au moins de certaines d'entre elles.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Définir l'industrie verte est un minimum pour ne pas reproduire les erreurs qui ont permis à certains de faire du greenwashing pendant des années. La décarbonation d'une industrie ne suffit pas à la rendre verte : il faut prendre en considération de nombreuses autres dimensions, comme la qualité de l'air et la santé des travailleurs et des riverains.
Aujourd'hui, à travers la définition de l'industrie verte, nous devons nous donner un cap : c'est l'objet de cet amendement.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Il tend à prévoir que l'objectif de verdissement est envisagé dès la phase de conception.
La parole est à Mme Clémence Guetté, pour soutenir l'amendement n° 1003 .
Étant donné que c'est l'intitulé que vous avez osé donner à ce projet de loi, la première – et la moindre – des choses est de définir l'industrie verte. Or vous vous y refusez absolument. Résultat : des amendements absurdes, notamment du côté droit de l'hémicycle, où le Rassemblement national, par exemple, propose que les sites miniers soient considérés comme une industrie verte.
Mais, s'il peut aller jusque-là, c'est parce qu'en l'absence de toute définition, le flou persiste – jusque dans votre argumentation, d'ailleurs. C'est aujourd'hui que devait se tenir le Conseil de planification écologique que vous nous annoncez depuis des mois : il n'a finalement pas eu lieu, et nous allons donc passer l'été dans le statu quo. Il faut absolument vous réveiller : les températures ont dépassé les 40 degrés dans certains départements français, on fait face à une crise de l'eau sans précédent – cinquante-six départements sont en alerte sécheresse, et Mayotte connaît des coupures d'eau quotidiennes –, des mégafeux se déclencheront vraisemblablement dans tout le pays cet été, comme ils le font partout dans le monde, et vous refusez pourtant de définir ce qu'est l'industrie verte, d'entendre parler de protectionnisme et de formation, et d'envisager d'imposer aux entreprises des contraintes sociales et environnementales.
La seule chose que vous faites, c'est défendre le libre marché envers et contre tout. Mais, messieurs les ministres, monsieur le rapporteur général, je vous rappelle que croissance du PIB et émissions de gaz à effet de serre sont liées !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il faut donc avant tout définir l'industrie verte, et sortir de l'hypocrisie dans laquelle vous voulez nous plonger toute la semaine : avec ce texte, nous ne parlons pas d'industrie verte, mais bien de permissions d'accélération tous azimuts pour les start-up du pays.
« Elle a raison ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Murmures sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES
du caractère intermittent de leur production, de leur incapacité à renforcer notre souveraineté énergétique et du coût de recyclage et de démontage des structures, il n'y a pas lieu de les considérer comme relevant de l'industrie verte.
Selon le syndicat des professionnels de l'éolien France Énergie Éolienne, la masse de béton coulée dans le sol pour chaque turbine varierait entre 600 et 800 tonnes : à titre de comparaison, c'est à peu près équivalent à la quantité de béton nécessaire pour construire quatre maisons de 70 mètres carrés en maçonnerie traditionnelle, soit environ trente-quatre camions-toupies.
M. Laurent Jacobelli applaudit.
Il a été déposé par ma collègue Émilie Bonnivard. Pour assurer aux Français les fonctions vitales que tout État se doit d'assurer à son peuple, l'État doit avoir une stratégie claire en matière de relocalisation industrielle, notamment s'agissant des cinq filières stratégiques pour la souveraineté nationale que sont l'agroalimentaire, l'énergie, la santé, la défense et le numérique.
Sourires.
Il s'agit cette fois d'un amendement de mon collègue Raphaël Schellenberger.
Le projet de loi vise à réindustrialiser le pays en veillant à limiter les impacts environnementaux de la réindustrialisation et en respectant nos objectifs de décarbonation. Compte tenu de l'intitulé du texte, il est nécessaire de définir la notion d'industrie verte. Cette définition doit être large. En effet, la relocalisation industrielle, qui implique une production soumise à des exigences réglementaires strictes et respectueuses de l'environnement, crée des emplois industriels en France et garantit la souveraineté industrielle de notre pays : elle est donc « verte » par essence.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements et sous-amendements en discussion commune ?
Ils tentent tous de définir ce qu'est l'industrie verte, sujet dont nous avons déjà largement débattu en commission et qui se heurte à deux écueils que nous essayons d'éviter.
Premièrement, il ne faut pas opposer les différents secteurs industriels et considérer que certains ont vocation à se décarboner – les secteurs qui auraient donc un avenir, et dans lesquels il faudrait investir –, et d'autres non. En effet, même des secteurs dont les émissions de gaz à effet de serre sont aujourd'hui élevées, à l'instar de l'industrie textile, de l'aéronautique ou de l'automobile, ont vocation à se décarboner, et ont donc un avenir.
Deuxièmement, évitons de graver dans le marbre de la loi une liste à la Prévert des secteurs que nous estimerions relever de l'industrie verte aujourd'hui, mais qui ne le seraient plus forcément dans quelques années, la rendant obsolète. Inversement, cette liste serait incomplète si nous omettions des secteurs qui, demain, se révéleraient importants pour la décarbonation de l'économie.
En raison de ces deux écueils, non seulement définir a priori l'industrie verte est difficile,…
…mais ce n'est pas nécessaire : en effet, tous les articles du texte concernent l'ensemble des secteurs industriels, à l'exception des articles 8 et 9, qui ne visent que les industries qui concourent à la transition écologique ou participent à la souveraineté nationale, ou celles réputées favorables au développement durable parce qu'elles respectent une liste de critères fixés par décret, ce qui nous offre de la flexibilité pour appréhender l'avenir.
Ne nous coinçons pas tous seuls en opposant les différents secteurs industriels ou en fixant une liste qui pourrait devenir obsolète, nous obligeant à légiférer à nouveau sur le sujet. Gardons-nous de la tentation de définir a priori l'industrie verte – que je comprends, d'ailleurs –, que nous avons déjà repoussée suite à nos longs débats en commission. Si le besoin s'en fait sentir, nous pourrons toujours apporter des précisions lors de l'examen des articles 8 et 9.
Pour ces raisons, j'émets un avis défavorable sur l'ensemble des amendements et sous-amendements.
Je souscris totalement aux propos, très clairs, du rapporteur général : ne nous enfermons pas dans une définition figée qui ne correspond ni à la réalité économique, ni à la réalité industrielle, ni à la réalité de la vie des entreprises.
Nous vous proposons de fixer un cadre général aux articles 8 et 9, qui prévoient respectivement que relèvent de l'industrie verte les entreprises « qui participent directement ou indirectement aux chaînes de valeur des activités dans les secteurs des technologies favorables au développement durable » ou « un projet industrie qui revêt […] une importance particulière pour la transition écologique ou la souveraineté nationale ». Vous aurez tout le loisir d'amender ces articles, mais préciser d'emblée ce qu'est l'industrie verte revient à figer un monde industriel qui, par définition, est vivant et évolutif.
Par ailleurs, comme pour tout crédit d'impôt, les entreprises qui bénéficieront d'un crédit d'impôt au titre de la qualification d'industrie verte seront définies dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024. Seront concernées les industries fabriquant les pompes à chaleur, les éoliennes, les batteries électriques et les panneaux photovoltaïques ; l'hydrogène vert, lui, bénéficiera des fonds du projet important d'intérêt européen commun (Piiec). Or ces industries vertes sont vouées à évoluer dans les années qui viennent, notamment en raison des avancées en matière de stockage de l'énergie et du carbone – grâce aux puits de carbone en particulier –, nous obligeant à nous adapter, peut-être même plus vite que nous le pensons.
De même, si l'on parle beaucoup des nouveaux réacteurs pressurisés européens (EPR) et des futures capacités de production, on ne parle que très peu du coût de raccordement au réseau électrique, qui implique pourtant un investissement beaucoup plus important en termes financiers.
Le jour où les champs d'éoliennes en mer ne seront plus à 12 kilomètres des côtes, mais à 50, 60, voire 80 km, le raccordement, qui ne représentait qu'un faible pourcentage de l'investissement, pourrait en représenter la moitié.
En outre, l'évolution des industries entraînera de nouveaux besoins en matière de transport d'électricité dans le territoire, donc autant de coûts considérables pour assurer le raccordement au réseau et sa transformation. Cela relèvera-t-il, ou non, de l'industrie verte ?
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
À mes yeux, oui, puisqu'il s'agit de raccorder au réseau une électricité décarbonée.
Comme vous le voyez, la définition doit être suffisamment ouverte pour s'adapter à l'évolution de l'outil productif.
Je propose donc de nous en tenir aux critères généraux définis aux articles 8 et 9 et, à l'image du rapporteur général, j'émets un avis défavorable sur l'ensemble des amendements et sous-amendements.
Suite à de nombreuses demandes, je vais donner la parole à un orateur par groupe.
La parole est à M. Sébastien Jumel.
Je voudrais faire une suggestion à Bruno de Gaulle et François Lenglet.
Rires sur divers bancs.
Celle-là, vous ne l'emporterez pas au paradis !
Sourires.
On voit bien que le texte souffre d'une malformation congénitale, ce qui conduit nos collègues à tenter de définir l'industrie verte.
L'industrie verte, c'est l'industrie qui n'est pas délocalisée, qui ne conduit pas à importer un produit manufacturé sans respect des normes sociales et environnementales. Vous auriez dû prévoir à l'article 1er un dispositif antidélocalisation, une sorte de version actualisée et durcie de la loi du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle, dite loi Florange ; à l'article 2, des mesures anti-dumping social et environnemental, visant à protéger notre territoire. Tout cela nous aurait fourni un éclairage concernant votre capacité à recouvrer une souveraineté industrielle made in France, voire made in Europe.
Telle est la suggestion que j'aurais faite aux deux éminents représentants du Gouvernement.
Je souscris totalement aux propos du collègue Jumel : le problème, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, c'est qu'à concevoir des textes législatifs essentiellement dans une perspective de communication, vous créez vous-mêmes le flou. Ce projet de loi vise à faire prendre des vessies pour des lanternes ! Nous essayons de vous faire prendre acte de ce qui vient d'être dit : produire en France est plus écologique que d'importer.
Voilà ce que nous vous proposons d'inscrire dans ce texte. La notion d'industrie verte est en quelque sorte indéfinissable ; or vous suscitez la nécessité de la définir en la faisant figurer dans l'intitulé du projet de loi…
…afin de pouvoir orner le ministère de belles affiches, de laisser croire à un équivalent de ce qu'est pour les États-Unis l'Inflation Reduction Act of 2022. Vous avez souhaité un grand texte, un titre tonitruant, derrière lesquels il n'y a rien ! De surcroît, ce projet de loi nous est soumis au moment où l'on débat au niveau européen d'un soutien financier aux industries qui se parent de cette couleur verte. Pourquoi la France ne prendrait-elle pas position en considérant qu'à son échelle, voire à celle de l'Union européenne, sont verts tous les biens produits sur le territoire, ce qui garantit de meilleures conditions environnementales ?
Ce serait rater ce texte que de refuser une telle définition, beaucoup plus ambitieuse que les mesurettes proposées !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR. – M. Sébastien Jumel applaudit également.
Avouez que la situation est surréaliste : dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à l'industrie verte, vous refusez de définir celle-ci ! Nous-mêmes entendrions par là le fait de développer les technologies vertes, de décarboner massivement l'industrie, de relocaliser le maximum d'activités en vue de réduire l'empreinte carbone de la France, dont la moitié est liée à nos importations ; mais vous pouvez constater que la conception de l'industrie verte n'est pas la même dans l'ensemble de l'hémicycle. Comment voter pour ou contre ce texte sans savoir de quoi il retourne ? J'ajouterai, monsieur le ministre, que lors d'un rendez-vous à Bercy, dans votre bureau, vous nous aviez affirmé vous engager à ce que le projet de loi ne facilite pas l'implantation d'éoliennes sur le territoire national.
« Ah ! » sur quelques bancs des groupes RN, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Selon vous, cette implantation – je ne parle pas de la production d'énergie éolienne – est-elle incluse dans l'industrie verte ? Enfin, pour répondre aux accusations de La France insoumise, nous considérons effectivement qu'il convient d'y intégrer les sites miniers.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
…extrait par fracturation hydraulique, méthode particulièrement violente,…
…et qu'acheminent des cargos très polluants. Pour l'environnement, c'est la double peine ! Or il existe des gisements de gaz en France, même en Moselle, dans ma circonscription.
M. le président coupe le micro de l'orateur, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La situation est assez étonnante. Nous avons déjà eu ce débat en commission : comme tout le monde se demandait ce qu'était l'industrie verte, le Gouvernement nous a répondu que c'était toute l'industrie. Néanmoins, le crédit d'impôt qui doit figurer dans le prochain projet de loi de finances initiale ne concernera que quatre secteurs, que vous nous avez énumérés, et peut-être un cinquième. L'erreur fondamentale consiste sans doute à parler d'industrie verte et non de verdissement de l'industrie !
Les deux vont de pair !
Ils ne veulent pas de cette distinction, cela les obligerait à conditionner les aides !
Voyez sur ce point mon amendement n° 413 , qui suivra immédiatement cette discussion commune. Pour vous citer un exemple, alors que je discutais avec un industriel de chez moi qui est dans le sucre, la betterave sucrière,…
Cristal Union ! Excellent !
…il m'a expliqué que son industrie ne pouvait être qualifiée de verte, mais comprenait des processus de production susceptibles d'être améliorés, voire transformés, dans le sens du verdissement. Ce qu'il faut, c'est encourager cette évolution. Le Gouvernement n'a pas tort de refuser de définir l'industrie verte, puisque toute l'industrie est concernée,…
…mais pour des processus plus ou moins importants selon le secteur ! C'est pourquoi l'amendement n° 413 vise à définir le verdissement de l'industrie, ce qui nous permettrait de nous trouver d'accord : l'industrie verte n'est pas une partie de l'industrie, mais l'ensemble des processus verts de production. Nous obtiendrions là une base solide à partir de laquelle poursuivre nos débats.
Je souhaiterais dire au rapporteur général qu'il n'y a pas deux écueils, mais un seul : la confusion – et mal nommer les choses, chacun sait que ce n'est jamais bon. Vous conviendrez d'ailleurs qu'il vaut mieux que le titre du texte soit élucidé à l'article 1er plutôt qu'à l'article 8 ou 9, puisque dès les premiers articles apparaîtront des dispositions discriminantes, des ciblages.
La définition que nous proposons n'est pas celle d'un idéal, mais d'un processus inclusif qui comprend le fait d'économiser l'énergie, celui de changer de source d'énergie, celui de tenir compte des limites planétaires, notamment des matières premières critiques ; bref, tout en concourant à notre souveraineté, elle a une vocation universelle. Les principes sur lesquels elle s'appuie ont trait à la fois à la planification écologique et à l'urgence de réindustrialiser notre pays. Elle est donc parfaitement équilibrée – et claire, car il en découlera des dispositions fiscales, d'autres en matière d'urbanisme, qui ne peuvent être livrées à tous les vents. Il existe des précédents : le crédit d'impôt recherche constitue un facteur de compétitivité, non une véritable aide à la recherche et développement. Ne commettons pas la même erreur au moment de définir l'industrie verte : soit nous réindustrialisons à tout va, soit nous ciblons un processus de réindustrialisation et pour notre pays, dans l'intérêt général, nous nous attelons à lui donner les moyens de s'accomplir.
Je suis assez d'accord avec Charles de Courson : l'enjeu consiste à transformer l'ensemble de notre industrie, aussi bien celle qui existe d'ores et déjà sur notre sol que celle que nous voudrions y voir revenir. Pour cela, il nous faut fixer un cap, déterminer clairement ce que serait ce verdissement, édicter les règles du jeu. Vous nous renvoyez pour cela aux articles 8 et 9, mais mentionner « la transition écologique » et « la souveraineté nationale » ne les définit pas non plus : nous avons besoin d'éléments précis ! C'est pourquoi nous vous soumettrons plus tard un amendement visant à reprendre des normes déjà existantes et à s'assurer du moins qu'elles soient respectées, ce qui n'est pas le cas de toutes. Encore une fois, j'approuve l'idée d'un verdissement de toute l'industrie ; il faut à nos industriels de la visibilité, l'assurance que leur activité ne sera pas une année reconnue comme verte et éligible au crédit d'impôt, l'année suivante exclue du dispositif. Le manque de clarté serait préjudiciable à tout le monde : si des investisseurs, des entreprises, des usines sont susceptibles de revenir en France, les règles du jeu, je le répète, doivent être intelligibles. Pour autant, relocaliser ne suffira pas : je suis en désaccord avec ceux de nos collègues qui estiment que la production locale est forcément plus verte.
Elle peut l'être, certes, mais à condition de tenir compte de la biodiversité, de l'eau, des matières premières, des conséquences sur la santé : c'est l'ensemble de ces dimensions qui fait le caractère vertueux d'une industrie. Nous n'avons pas le loisir de prendre le risque de nous tromper : l'avenir est en jeu !
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Notre discussion montre bien qu'il existe un besoin de définition ; ces amendements sont nécessaires, puisque leur examen a par exemple donné l'occasion à nos collègues du Rassemblement national de nous apprendre qu'ils étaient favorables à l'extraction de gaz de schiste en France et même qu'elle constituerait à leurs yeux une industrie verte. Preuve s'il en faut qu'il convient de préciser dans le texte ce qu'est l'industrie verte, sans quoi, demain, les dispositifs prévus par le Gouvernement pourraient se prêter à une telle incongruité ! Les amendements issus de la NUPES rendraient d'ailleurs vos craintes sans objet : ils ne visent pas à fixer une liste des industries ou des secteurs concernés, mais des critères ayant trait aux procédés de conception et de fabrication, au fait de consommer moins d'énergie ou de remplacer des énergies carbonées par des énergies décarbonées, notamment renouvelables, celles-ci étant les seules véritablement décarbonées. Sans cela, nous courrons le risque d'effets d'aubaine, puisque tout type d'activité industrielle sera éligible aux dispositifs figurant dans le projet de loi ; ils pourraient même entraîner l'éviction d'industries indispensables à la transition écologique ou ayant grand besoin de modifier leurs procédés.
Qui trop embrasse mal étreint, monsieur le ministre : nous avons besoin de dispositifs restreints, ciblant certaines filières. Les questions de biodiversité, d'eau, la rareté du foncier rendent nécessaire d'établir des priorités. Si nous voulons éviter aux entreprises la tentation d'une « fugue américaine », pour reprendre le titre de votre dernier roman, il nous faut mettre le paquet pour protéger certaines filières et non diluer l'action publique, les outils publics, l'argent public, ce qui a trop souvent été le cas jusqu'ici.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Gérard Leseul applaudit également.
Je le répète, fixons des priorités : c'est là toute la noblesse de la politique et du Parlement. Ne laissons pas le marché allouer les moyens : comme souvent, il le fera très mal !
« Excellent ! » et applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et SOC.
Définir précisément la notion d'industrie verte, et par conséquent en exclure certaines industries, n'aurait pas de sens. Premièrement, toutes les industries implantées sur notre sol ont vocation à devenir vertes à plus ou moins longue échéance ; deuxièmement, celles qui viendront s'y installer ou s'y réinstaller contribueront à diminuer nos émissions de CO
Le rapporteur général a raison : il convient de ne pas opposer les industries entre elles et de garder une vision large. Les objectifs de ce texte sont parfaitement clairs.
Mme Sandrine Rousseau s'exclame.
Je ne vous ai pas interrompue, madame Rousseau !
Par ailleurs, j'ai entendu un certain nombre d'inepties, dont la première consiste à affirmer que toute industrie située en France en devient mieux-disante du point de vue écologique. Factuellement, c'est faux !
Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.
Dans certaines activités, l'importation, le transport ne représentent qu'une part négligeable de l'empreinte carbone. On peut défendre notre souveraineté sans dire n'importe quoi !
…le bilan carbone des tomates cultivées sous serre en France est bien pire que celui des tomates importées d'Espagne après y avoir été cultivées en plein air. Cela peut paraître bête, mais c'est comme ça !
Exclamations sur quelques bancs des groupes RN et LFI – NUPES.
Pourquoi les tomates de plein air sont-elles produites en Espagne et pas en France ?
Une industrie locale n'est donc pas forcément plus vertueuse ! Il importe de ne pas élever de barrières absurdes, qui seraient d'ailleurs sans cesse remises en cause. Nous avons besoin de décarboner toute notre industrie !
Enfin, j'ai entendu une belle ineptie sur le gaz. Pourquoi importons-nous du gaz de schiste américain ? Nous ne le faisons pas parce que nous en avons envie, mais parce que nous en avons besoin pour structurer notre réseau et éviter une pénurie de gaz en France. Comme vous le savez, vos amis russes ayant envahi l'Ukraine, nous n'importons plus leur gaz.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Ne racontez pas n'importe quoi et cessez de faire croire que l'on peut trouver en France un mix énergétique décarboné.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 104
Majorité absolue 53
Pour l'adoption 40
Contre 64
L'amendement n° 1401 n'est pas adopté.
Le sous-amendement n° 1657 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 119
Nombre de suffrages exprimés 118
Majorité absolue 60
Pour l'adoption 18
Contre 100
L'amendement n° 514 n'est pas adopté.
L'amendement n° 801 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 122
Nombre de suffrages exprimés 119
Majorité absolue 60
Pour l'adoption 38
Contre 81
L'amendement n° 1306 n'est pas adopté.
Le sous-amendement n° 1656 n'est pas adopté.
L'amendement n° 376 n'est pas adopté.
Le sous-amendement n° 1661 n'est pas adopté.
L'amendement n° 1003 n'est pas adopté.
Ce projet de loi est présenté comme un texte visant à soutenir l'industrie verte. Pourtant, il ne prévoit qu'un nombre résiduel de mesures visant à la décarbonation des processus industriels et à une utilisation plus économe des ressources. Les rares mesures en ce sens concernent la commande publique ou la sortie du statut de déchets. Le reste du projet de loi se borne à faciliter la mobilisation du foncier pour l'ensemble des installations, quel que soit leur impact sur la transition écologique, ou à prévoir de nouvelles procédures d'autorisation pour certaines filières ou secteurs d'activité.
L'amendement que je vous soumets considère que le projet de loi aurait dû inciter à la transition écologique de l'ensemble des processus industriels. À cette fin, il propose d'inscrire dans le code de l'environnement une définition du verdissement de l'industrie, c'est-à-dire une approche par le processus de production, et non par les secteurs d'activité. En effet, comme nous l'a confirmé M. le ministre en commission, toutes les branches seront concernées, même si la transition promet d'être plus facile pour certaines que pour d'autres.
Voilà ce que je vous propose pour clarifier le débat que nous avons depuis tout à l'heure.
Mêmes arguments.
L'amendement n° 413 n'est pas adopté.
Nous avons proposé tout à l'heure une définition globale de l'industrie verte qui donnait un cap. Nous proposons ici de faire référence à des normes existantes pour considérer un projet industriel comme vert ou verdissant, pour reprendre les termes de l'amendement non adopté de notre collègue Courson.
L'amendement vise à inscrire dans la loi que ces projets doivent respecter la taxonomie européenne – même si nous la considérons comme imparfaite –, la stratégie nationale bas-carbone, la programmation pluriannuelle de l'énergie, la hiérarchie des modes de traitement des déchets et la loi relative au devoir de vigilance. Ce sont des normes qui existent ; cumulées, elles fixent un cadre pour l'industrie verte.
La parole est à Mme Alma Dufour, pour soutenir l'amendement n° 1002 , sur lequel je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'une des illustrations du caractère hors-sol de ce projet de loi, c'est que, quand je vais en parler aux riverains et aux ouvriers des usines de ma circonscription – je suis élue dans l'une des plus grosses zones industrielles de France –, le texte est tellement vide qu'il n'intéresse personne.
En outre, vous avez oublié d'y inclure un léger petit sujet, celui de la protection de la santé des travailleurs et des riverains. L'un des tributs les plus lourds que paient les travailleurs des classes populaires, notamment les ouvriers, à la société, est leur espérance de vie de six ans inférieure à celle des cadres. C'est pour cela que votre réforme des retraites a été si injuste. C'est aussi pour cela que ce projet de loi est complètement à côté de la plaque.
La Caisse nationale d'assurance maladie a révélé une augmentation de 18 % du nombre de cancers pédiatriques entre 2003 et 2019. L'augmentation du nombre de cancers chez les enfants prouve que l'argument d'un tabagisme et d'une alcoolémie supérieurs dans les zones industrielles ne suffit pas à expliquer pourquoi la mortalité y est plus élevée qu'à l'échelle nationale. Nous manquons d'études et de connaissances – c'est l'avis partagé des médecins et des scientifiques –, mais rien n'est fait pour y remédier dans le projet de loi, lequel ne prévoit pas de dépistage massif. Pire : l'ARS – agence régionale de santé – Normandie, face à un cluster de leucémies d'enfants à Igoville et Pont-de-l'Arche, a répondu que c'était la faute à pas de chance.
Les hommes vivant en Seine-Maritime sont 37 % plus touchés par des cancers du larynx et de la bouche. Le nombre de cancers du poumon, de la plèvre, de la vessie et de leucémies aiguës est significativement plus élevé chez les hommes vivant à proximité de l'étang de Berre, la seconde zone industrielle du pays : le risque d'être hospitalisé pour une leucémie y est 2,5 fois plus élevé. Durant ma campagne, je me suis rendue à l'étang de Berre, à Fos-sur-Mer, et j'y ai rencontré un ancien ouvrier qui travaillait dans une usine de cokéfaction : il m'a dit que, depuis son départ à la retraite en 2008, quatre-vingts de ses collègues étaient morts d'un cancer.
Nous avons déposé un amendement visant à imposer un dépistage obligatoire sur les sites classés Seveso, seuil haut. Il a été déclaré irrecevable, car représentant une charge pour l'État.
C'est un amendement sur la santé des ouvriers, monsieur le président, c'est important !
M. le président coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est écoulé.
Nous vous demandons d'adopter l'intégration de la dimension sanitaire dans la définition de l'industrie verte afin que démontrer que les ouvriers ne sont pas une charge.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
La parole est à Mme Clémence Guetté, pour soutenir l'amendement n° 1004 .
Ma collègue Alma Dufour était parfaitement dans le thème. Vous ne voulez pas parler de la formation des travailleurs, des droits des travailleurs ni de la santé des travailleurs ; il y a de nombreux sujets dont vous ne voulez pas parler, mais nous, nous avons déposé des amendements là-dessus !
Cet amendement est votre seconde chance après le rejet de l'amendement de notre collègue Charles de Courson, qui était très bien. Nous proposons à notre tour une définition un peu plus vague, mais toujours appuyée sur des critères, de l'industrie verte.
Comme cela a été dit lors de la discussion générale, les Big five, dont vous parlez beaucoup dans la presse, ne sont qu'une façade : en réalité, toutes les industries pourront profiter de ces dispositifs d'accélération, de simplification, de parallélisation des procédures de participation du public, etc.
Nous sommes d'accord pour dire qu'il faut un verdissement général de l'industrie. Nous aurions pu nous appuyer sur la taxonomie européenne, dont toutes les associations environnementales françaises disent qu'elle est déjà insuffisante. D'habitude, ce qui est fait au niveau de l'Union européenne vous plaît ; là, visiblement, c'est trop pour vous. Nous proposons donc une autre définition incluant des critères de réduction de la consommation des ressources naturelles, de coopération et de planification territoriale avec l'association des habitants et des habitantes, de respect des droits humains et des travailleurs. J'imagine que vous y serez sensibles.
Un simple bilan des émissions de gaz à effet de serre, dont plus de la moitié des entreprises s'exonèrent, n'est absolument pas suffisant pour définir une industrie verte. Vous avez ici l'occasion de vous rattraper.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Un autre sujet qui illustre à quel point le projet de loi rate une occasion historique, c'est la question de l'adaptation de l'industrie à l'impact du changement climatique. Je ne parle pas de la décarbonation, ni des industries de la transition écologique, mais bien de l'adaptation des sites industriels, existants et futurs, aux conséquences du changement climatique.
Un article du Monde, paru hier, explique ce que nous savons déjà, à savoir que la majorité des sites classés Seveso, y compris des sites classés Seveso seuil haut, se trouvent en zone inondable, d'après les projections concernant le réchauffement climatique. Nous avions déposé plusieurs amendements sur le sujet, lesquels, encore une fois, ont été déclarés irrecevables. Or le droit sur les ICPE – installations classées pour la protection de l'environnement –, qu'il s'agisse du contrôle des ICPE existantes ou des autorisations futures, n'est absolument pas adapté, puisque l'impact du changement climatique n'est même pas mentionné dans les autorisations.
Vous vous apprêtez à déclencher des accélérations et à accorder des subventions massives – il est question d'investir 2 milliards d'euros dans la décarbonation d'usines – à des établissements industriels dont on n'est pas sûr qu'ils pourront résister aux inondations. Chez moi, en Seine-Maritime, Borealis, l'une des usines les plus polluantes de France, qu'il faut décarboner, est aussi en zone inondable ; avant de s'engager dans un plan de décarbonation, j'aimerais bien que l'on vérifie que les travaux nécessaires pour adapter l'usine aux inondations ont été effectués.
Qu'est-ce qui vous permet d'affirmer que Borealis est en zone inondable ? Arrêtez de raconter des âneries !
Vous avez entendu parler du changement climatique, monsieur Schellenberger ?
C'est un exemple typique qui montre que le projet de loi ne sert absolument à rien. Pire, vous allez dépenser de l'argent public en vain.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Julie Laernoes applaudit également.
Avis défavorable.
Je vous remercie de me donner la parole, monsieur le président, d'autant que vous ne m'avez pas vu tout à l'heure, lorsque je souhaitais soutenir l'amendement de notre collègue Courson.
Des collègues siégeant sur divers bancs ont déposé des amendements de clarification visant à préciser ce que nous devons entendre par industrie verte. Nous allons aborder l'article 1er sans avoir aucunement défini ce que ce terme signifie ; ce n'est pas raisonnable. Nous l'avons dit en commission, nous l'avons dit lors de la discussion générale et nous le redisons à travers l'ensemble de ces amendements.
À défaut de clarification, nous n'aurons qu'un texte fourre-tout visant à dynamiser l'industrie. On peut être d'accord avec cette idée ; nous-mêmes, nous avons écrit, il y a déjà plusieurs mois, que nous souhaitions une réindustrialisation de la France et de nos territoires. C'est une évidence. Toutefois, vous avez fait le choix, monsieur le ministre, de parler d'industrie verte et non de réindustrialisation, ni de verdissement de l'industrie, comme le proposait tout à l'heure notre collègue Courson.
Pour toutes ces raisons, nous soutiendrons l'ensemble de ces amendements de précision. J'ai peur que vous ne les refusiez en nous renvoyant à l'article 8. Comme l'a dit notre collègue Potier, c'est trop loin : c'est en tête du texte qu'il nous faut définir l'objet premier de celui-ci, c'est-à-dire le verdissement de notre industrie. Pour cela, nous voterons l'ensemble de ces amendements, et j'ajoute que vous ne nous poussez pas à voter pour ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Je voudrais faire quelques remarques sur les amendements proposés, qui sont un peu fourre-tout.
Tout d'abord, vous voulez que la loi fasse référence à la taxonomie européenne. Je rappelle que cette taxonomie concerne l'énergie, et non l'industrie, laquelle n'en représente qu'une petite partie.
Ensuite, vous parlez de formation et de droits des travailleurs. Nous avons développé des outils de formation ; par ailleurs, si les entreprises ne respectent pas les droits des travailleurs, elles seront hors la loi.
Avec ces amendements, vous voulez donc inscrire dans la loi le fait que les entreprises doivent respecter la loi.
Cela fait plusieurs fois que je le dis : on ne peut pas écrire dans la loi qu'il faut respecter la loi ! Il faut arrêter les logorrhées.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 120
Majorité absolue 61
Pour l'adoption 37
Contre 83
L'amendement n° 1307 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 123
Nombre de suffrages exprimés 119
Majorité absolue 60
Pour l'adoption 35
Contre 84
L'amendement n° 1002 n'est pas adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.
La parole est à M. Matthias Tavel.
Puisqu'il n'y aura pas, dans ce texte, de définition de l'industrie verte, l'ensemble des activités industrielles, quels que soient leur bilan carbone, leur impact sur la biodiversité, leur emprise foncière, leur consommation d'eau, etc., seront concernées. C'est pourtant une erreur énorme que de ne pas avoir ciblé les dispositifs. Cela leur aurait donné plus de force.
Une véritable planification manque aussi, c'est l'autre grande absente du texte. Les documents régionaux contiennent certes des éléments mais, monsieur le ministre, vous-même avez évoqué la difficulté à élaborer une telle stratégie. Cela suppose une discussion avec l'ensemble des présidents de région, une répartition homogène – en tout cas équilibrée – sur le territoire des efforts de réindustrialisation. Si tout se fait à la fin à Dunkerque, ce sera très bien pour Dunkerque, mais des situations de dépendance vont ressurgir, qui ne seront pas soutenables sur le long terme, quand d'autres territoires – en Aveyron, autour de Rouen ou du côté de Saint-Nazaire – peuvent eux aussi concourir à la réindustrialisation et à la bifurcation de l'économie productive.
Cette stratégie de planification nationale doit partir des besoins du pays et intégrer tous les éléments, y compris la question de l'eau, y compris celle de l'artificialisation des terres – que vous semblez préparer après avoir mis un coup de canif à l'objectif de zéro artificialisation nette.
Voilà ce que nous vous proposons : une véritable planification nationale démocratique et écologique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Sandrine Rousseau applaudit également.
Nous sommes évidemment favorables à une planification. Nous considérons qu'elle doit être à la fois nationale et locale, pour éviter l'écueil d'un centralisme éloigné de la réalité des territoires, donc peu démocratique.
Il est intéressant d'intégrer des objectifs en matière de développement industriel dans les Sraddet, même si on a pu constater que ce n'est pas en intégrant des objectifs en matière de logistique qu'on a réglé tous les problèmes. Je mène une mission d'information sur le sujet et je peux vous dire que nous n'avons pas une approche très organisée : les conférences régionales de la logistique sont d'une qualité très variable…
Il s'agit de fixer une ambition de développement industriel mais, en l'absence de définition de l'industrie verte, nous butons sur une difficulté. Il faudrait que le développement d'une industrie réellement verte soit visé, avec des ambitions en matière d'usage de l'eau ou de dépollution des sols. La planification suppose des moyens : il faudrait que les régions recensent toutes les friches industrielles pour organiser leur dépollution et les mettre à disposition. Le Sraddet est une voie intéressante, mais n'y inscrire que des objectifs est, de notre point de vue, insuffisant.
Nous défendons pour notre part une planification nationale. Nous n'avons pas confiance dans une planification inscrite dans les Sraddet, lesquels ne sont rien d'autre qu'une de ces listes à la Prévert que vous dénonciez, monsieur le rapporteur : de vastes fourre-tout d'items mal coordonnés, auxquels on ne comprend pas grand-chose. Nous proposerons d'ailleurs une nouvelle rédaction de l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, qui définit les Sraddet.
Enfin, nous voudrions que cesse l'autosatisfaction gouvernementale. Permettez-nous de douter que ce texte soit, comme vous le prétendez, le projet du siècle pour la réindustrialisation de notre pays : le déficit commercial de la France a doublé ces trois dernières années, sous le macronisme, pour atteindre 78,5 milliards d'euros ; au deuxième trimestre, 13 266 entreprises se trouvaient en procédure de liquidation judiciaire ; loin d'être le pays le plus attractif, comme vous l'affirmez, pour les investissements étrangers, la France se place derrière l'Allemagne et le Royaume-Uni ; les 5 milliards d'emplois industriels dans les années 1970 sont moitié moins aujourd'hui ; 10 000 emplois sont délocalisés chaque année.
Monsieur Le Maire, vous avez passé plus de vingt ans à gouverner ce pays, comme ministre, directeur de cabinet ou parlementaire. Vous parlez de nouvelle lucidité au sujet d'un texte très technique, dont nous refusons de croire qu'il permettra de réindustrialiser la France. Faites plutôt preuve de modestie et, surtout, reconnaissez vos erreurs !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Au sein du groupe GDR, nous sommes attachés au principe d'un État stratège et à la planification. Ce n'est pas un gros mot, n'en déplaise à ceux que j'entendais, sur les bancs de la majorité, crier « Gosplan, Gosplan ! » ; il existe en France un haut-commissaire au plan, preuve s'il en est de l'utilité de la planification. Toutefois, je pense qu'on peut faire mieux en matière de renouveau industriel.
Une question me préoccupe, même si j'ai noté avec satisfaction que vous aviez adopté quelques-uns de mes amendements en commission : c'est celle des friches. Vous avez ciblé une cinquantaine de friches, soit 2 000 hectares, comme pouvant recevoir de grands projets industriels. Mais il reste 173 000 hectares de friches à se réapproprier.
Pour cela, les collectivités ont besoin d'outils, de moyens, d'ingénierie – d'où nos amendements visant à étendre la présence des établissements publics fonciers sur l'ensemble du territoire. Nous appelons à un abondement du fonds « friches » ainsi qu'à un accompagnement des petites communes qui n'ont ni l'ingénierie ni la surface financière nécessaires pour préempter une friche et favoriser l'implantation d'une entreprise. Par la politique des friches, qui devrait être au cœur de la planification, nous éviterons aussi la consommation inutile de foncier.
Sur l'amendement n° 686 , je suis saisi par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Alexandre Loubet, pour soutenir l'amendement de suppression n° 686.
L'article 1
Nous nous retrouvons avec une planification à l'échelon régional : il s'agit seulement d'inscrire des objectifs de développement industriel dans les Sraddet, qui ne sont que des documents administratifs gros de plusieurs tomes. Ce n'est pas sérieux !
C'est d'autant plus aberrant que vous passez votre temps, monsieur le ministre, à affirmer que la France est trop petite pour peser face à la Chine ou aux États-Unis dans la mondialisation et que nous avons besoin de l'Union européenne. Pourquoi donc passer à l'échelon régional ? Vous risquez de mettre les régions en concurrence et d'ôter toute cohésion à la planification de notre industrie. Vous prévoyez la création de 40 000 emplois d'ici 2030. C'est bien faible ! La réalité, c'est que vous n'avez aucune ambition pour l'industrie française ; c'est navrant.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Vous souhaitez supprimer l'article 1er , qui prévoit la fixation d'objectifs de développement industriel dans le Sraddet, au motif que la planification ne peut être que nationale. C'est déjà un premier désaccord de fond. Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à considérer que les régions ont un rôle à jouer dans la réindustrialisation du pays, dans l'organisation et l'aménagement du territoire. Un article qui associe les régions au développement industriel et à la réindustrialisation n'est pas inutile.
Votre modèle, c'est l'Allemagne ; ce que vous voulez, ce sont des Länder !
Du reste, cela n'est pas antinomique avec une stratégie nationale. Nous examinerons, à l'article 1er bis, un amendement de compromis, celui de Mme Bonnivard.
Nous sommes en désaccord philosophique profond, puisque vous ne souhaitez pas donner aux régions les compétences qui sont pourtant les leurs.
L'incohérence, c'est sur vos bancs qu'elle se trouve. Vous proposez de supprimer l'article et tout à l'heure, M. Tanguy défendra un amendement qui vise à vider de leur substance les Sraddet. Mais ensuite, d'autres députés de votre groupe proposeront d'alourdir les Sraddet – plus de parties prenantes, davantage de personnes à consulter et, en fin de compte, un document qui comptera plus de pages. Je vous suggère de profiter de la pause pour vous mettre d'accord : est-ce que vous souhaitez supprimer toute politique économique régionale ? Voulez-vous en finir avec les Sraddet ou préférez-vous alourdir la procédure qui leur est associée ? Avis défavorable.
Même avis. Je suis surpris que le Rassemblement national ne voie pas les régions jouer un rôle dans l'évolution des friches, ne croie pas à leur capacité de planifier une stratégie industrielle.
J'en profite pour répondre à M. Jumel. Une friche est un terrain qui n'est pas utilisé et qui nécessite des travaux pour l'être ; il y a donc, derrière ces 173 000 hectares, tout et n'importe quoi. Ce que l'on sait, c'est que les besoins de l'industrie représentent entre 5 % et 8 % de ces friches, soit 10 000 hectares.
Comme je l'ai dit en commission, la Banque des territoires est prête à engager 1 milliard d'euros pour redynamiser cinquante sites, soit une surface de 2 000 hectares.
Il s'agit de la Banque des territoires, monsieur le député. De son côté, le fonds Vert permettra, avec l'appui des collectivités territoriales, de redynamiser une autre partie de ces friches. On avance : de 20 % à 30 % des friches industrielles pourront être dépolluées, soit sur fonds publics, soit sur ceux de la Banque des territoires.
Introduire dans les Sraddet une forme de planification territoriale industrielle semble une évidence. Mais on ne peut dessaisir l'État d'une organisation nationale, ce qu'ont défendu les sénateurs en introduisant un article sur la stratégie nationale. Il faut simplement une bonne articulation entre ces deux échelons.
Monsieur le rapporteur général, messieurs les ministres, la réalité, c'est que vous vous appuyez sur une philosophie industrielle similaire à celle de l'Allemagne, or la France n'est pas l'Allemagne. Si l'on suit votre logique, il y aura treize planifications régionales différentes rien qu'à l'échelle de la France hexagonale. En dispersant autant l'effort national industriel, comment voulez-vous que notre pays puisse peser demain dans un environnement mondialisé de guerre économique, notamment face à l'usage que font les États-Unis de l'extraterritorialité de leur droit et aux offensives diplomatiques menées par la Chine ? Comment comptez-vous réindustrialiser notre pays en substituant au nécessaire volontarisme politique national de simples objectifs administratifs déclinés dans les Sraddet ? Ce n'est pas sérieux !
En outre, votre volonté de donner davantage de pouvoirs décisionnels aux régions n'est pas suivie d'effets : il n'y a rien dans ce projet de loi concernant la formation alors qu'il s'agit d'une compétence qui leur est dévolue.
Ce texte fourre-tout, simple saupoudrage de mesurettes, n'est pas à la hauteur des ambitions d'un pays comme le nôtre. Ce n'est pas ainsi que nous arrêterons de dégringoler dans le classement des grandes puissances internationales.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 106
Nombre de suffrages exprimés 105
Majorité absolue 53
Pour l'adoption 15
Contre 90
L'amendement n° 686 n'est pas adopté.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite du projet de loi relatif à l'industrie verte.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra