La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Ces derniers jours, un grand nombre d'entre nous ont vu avec inquiétude, sur les réseaux sociaux, les tags antisémites se multiplier partout en France. Ces inscriptions nous rappellent avec horreur les temps de la peur que nous croyions disparus. Cette peur est ressentie par de nombreuses familles de confession juive du fait de la multiplication des actes antisémites depuis le 7 octobre dernier.
En 2015, nous déplorions 808 actes antisémites. Au cours des trois dernières semaines, 850 actes de ce type ont été commis en France et plus de 6 000 messages diffusés sur les réseaux sociaux ont fait l'objet d'un signalement sur Pharos, la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements. En réponse, 430 personnes ont été interpellées et 234 enquêtes ouvertes. La réaction de l'État est forte et nous la saluons.
Toutefois, au-delà de la réponse pénale,…
…les députés du groupe Démocrate s'alarment de ce que cette recrudescence de l'antisémitisme dit de notre société.
Car l'antisémitisme agit comme un canari dans la mine. La rabbin Delphine Horvilleur nous rappelle que la frénésie antisémite révèle les failles de notre nation. Dans l'esprit malade des antisémites, les Français de confession juive ne sont, et ne seront jamais, que des Juifs, non des citoyens. Ainsi, la passion antisémite s'attaque aux fondements mêmes de la nation. L'antisémitisme est une insulte à notre histoire, à nos principes républicains et à la cohésion nationale. S'en prendre à un Juif, c'est offenser la République, c'est attaquer la France.
Applaudissements sur tous les bancs.
Tout acte qui vise à condamner l'autre, à l'agresser pour ce qu'il est, pour sa religion ou pour son origine, est insupportable dans un pays tel que le nôtre.
Madame la Première ministre, face à ce fléau, quelle réponse pouvons-nous apporter, non pas en tant qu'État, mais en tant que nation ?
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RN, LFI – NUPES, LR, SOC, Écolo – NUPES, GDR – NUPES, LIOT et des députés non inscrits.
Des slogans haineux sur des banderoles, des commentaires odieux sur les réseaux sociaux, des menaces, des insultes et parfois des coups : l'antisémitisme a de multiples visages, tous aussi insupportables. Depuis les attaques terroristes du 7 octobre contre Israël, les manifestations de haine se sont intensifiées : plus de 850 incidents ont eu lieu et près de 6 000 signalements en ligne ont été effectués. Ces derniers jours, à Saint-Ouen-sur-Seine, à Paris et au Petit-Quevilly, les habitants ont découvert des tags antisémites sur les murs de leur ville, des étoiles de David ou des croix gammées, comme une évocation glaçante du passé. Au nom du Gouvernement, je condamne avec une fermeté absolue ces agissements ignobles.
Applaudissements sur tous les bancs.
L'antisémitisme, c'est la lâcheté, la haine de l'autre, et tous ceux qui s'en rendent coupable doivent être interpellés et condamnés.
La France s'est construite depuis plus de deux cents ans comme une terre de liberté, d'ouverture et de tolérance. S'en prendre à quelqu'un parce qu'il est juif, c'est s'en prendre à nos valeurs les plus fortes, à ce qui nous rassemble, à l'âme même de la République. Rien de tel ne peut être toléré, justifié ou excusé.
Depuis le 7 octobre, nous avons redoublé d'efforts. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer a immédiatement transmis des consignes de vigilance aux préfets et aux forces de l'ordre. La sécurisation des lieux sensibles, les écoles et les lieux de culte, a été renforcée. Les enquêtes avancent et la justice est ferme – vous l'avez dit, monsieur Mattei. Plus de 430 interpellations ont d'ores et déjà eu lieu et plus de 230 enquêtes sont en cours. Nous ne laisserons rien passer.
Depuis ce 7 octobre, les Juifs de France…
…connaissent le poids de l'angoisse.
Je leur adresse aujourd'hui ce message : avec mon gouvernement et, je n'en doute pas, avec tous les députés, nous sommes à vos côtés et nous le resterons. Rien ne justifie la haine et la violence : notre pays a le devoir de les combattre, notre République a le devoir de protéger tous les Juifs de France.
Vous pouvez compter sur mon engagement sans faille !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR et sur plusieurs bancs des groupes RN, LR, SOC et Écolo – NUPES.
Ma question s'adresse à Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangère.
La France, en tant qu'État tiers au conflit israélo-palestinien, doit avoir une position claire et renouer avec son rôle historique consistant à défendre le droit international – tout le droit international, rien que le droit international !
Celui-ci exige la libération sans condition de tous les otages civils, la protection de toutes les personnes civiles, l'ouverture urgente d'un corridor humanitaire permettant d'acheminer les produits de première nécessité, dont les médicaments, la levée complète du blocus de la bande de Gaza et l'accès de la presse à ce territoire pour informer sans entrave sur ce qui s'y passe et témoigner.
Lors de l'Assemblée générale des Nations unies de vendredi dernier, la France a voté en faveur d'une résolution,…
…largement adoptée, visant à demander « une trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue, menant à la cessation des hostilités ».
La communauté internationale et la France ont renoncé depuis plusieurs années à faire appliquer le droit international, laissant la région se gangréner et le cycle de la violence s'amplifier. Aujourd'hui, nous devons agir en responsabilité.
Madame la ministre, alors que l'armée israélienne attaque en ce moment même Gaza par voie terrestre, tuant la population civile – déjà 3 195 enfants morts – et mettant en danger les otages détenus par le Hamas,…
…comment la France envisage-t-elle de faire pression afin de mettre un terme à cet enfer ?
Pouvez-vous affirmer, devant l'Assemblée nationale, qu'à l'instar d'Antonio Guterres la France appelle à un cessez-le-feu humanitaire ?
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Je vous prie d'excuser l'absence de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères : elle est à Turin où elle participe au Comité de coopération transfrontalière (CCT) du traité du Quirinal.
Vous avez raison, la France doit agir en responsabilité : c'est précisément ce que fait notre diplomatie.
C'est en responsabilité que la France agit au plan politique, puisque, vous l'avez rappelé, notre pays a voté en faveur du texte jordanien présenté à l'Assemblée générale des Nations unies, …
…qui appelle à une trêve humanitaire et à la cessation des hostilités. Cette position est celle de la France depuis les premiers jours du conflit. Elle est aussi la position commune des Européens, exprimée la semaine dernière.
C'est également en responsabilité que la France agit au plan humanitaire. Aux 20 millions d'euros débloqués pour les agences internationales et les ONG s'ajoute notre soutien au Croissant-Rouge égyptien et à l'hôpital jordanien de Gaza. Il est impératif que l'aide soit acheminée en quantité suffisante et de manière durable.
C'est en responsabilité aussi que nous recherchons, avec nos partenaires de la région et les autres, un chemin pour éviter l'embrasement régional et tracer une perspective de paix. Le déplacement du Président de la République, les deux voyages de Catherine Colonna au Proche-Orient et notre action au Conseil de sécurité des Nations unies, en vue de l'adoption d'une résolution, avaient aussi cet objectif.
C'est en responsabilité, enfin, que nous condamnons le terrorisme du Hamas et les crimes abjects qu'il a commis et que nous rappelons des principes simples : le droit d'Israël à la sécurité et son devoir d'agir dans le cadre du droit international ; l'impérieuse nécessité d'un horizon politique pour que les Palestiniens et les Israéliens vivent dans deux États côte à côte et en paix.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem et sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.
Je salue la présence dans les tribunes des familles des otages français détenus par le Hamas. Je veux leur dire, au nom de la représentation nationale, que nous sommes à leurs côtés !
Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent très longuement en se tournant vers les tribunes du public.
Depuis l'attaque terroriste du 7 octobre dernier, nous déplorons la mort de 35 de nos compatriotes. Depuis cette date, c'est-à-dire depuis 25 jours, 9 Français sont retenus en otage. Je ne doute pas que le Gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour obtenir, dans les meilleurs délais, leur libération.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, le groupe LIOT se félicite du maintien des prix agricoles, qui, désormais, rémunèrent mieux les agriculteurs. Toutefois, certains problèmes demeurent. Je pense tout d'abord aux retards de paiement de la politique agricole commune (PAC) qui touchent certains agriculteurs – près de 500 dossiers dans le Gers.
Je pense ensuite aux craintes des acteurs de certaines filières face aux importations de pays tiers tels que l'Australie. Je veux également évoquer les difficultés des agriculteurs qui se sont engagés dans la transition écologique, en particulier les agriculteurs bio, qui souffrent d'une contraction du marché…
…et de la nécessité de faire appliquer la loi sur la restauration collective, la loi Egalim – loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
Le cœur de ma question concerne cependant les mesures agroenvironnementales et climatiques, plus communément appelées Maec, qui constituent un outil majeur de la transition agroécologique : elles incitent au changement de pratiques et de système en rémunérant les surcoûts et la prise de risque. À l'initiative de ma collègue d'Ille-et-Vilaine Claudia Rouaux, nous sommes 35 parlementaires bretons à vous avoir interpelé à leur sujet, car les financements de l'État sont insuffisants pour honorer ces contrats. Selon l'association Régions de France, il manquerait entre 250 et 300 millions d'euros. Abandonner les exploitants agricoles engagés dans des mesures d'adaptation agroécologique alors que l'objectif est de baisser la consommation de produits phytosanitaires de 50 % est pour le moins contradictoire…
Au moment où l'Assemblée examine la seconde partie du projet de loi de finances pour 2024 et les crédits de la mission "Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales" , les acteurs du monde agricole qui agissent en faveur de la transition écologique vous écoutent. L'État sera-t-il au rendez-vous pour aider les agriculteurs vertueux ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et SOC.
La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
S'agissant des paiements de la PAC, nous entrons dans une nouvelle période de programmation. Alors qu'en 2015, nous nous étions trouvés dans une impasse – je vois à votre réaction que vous vous en souvenez parfaitement –, nous avons pu, cette fois, assurer les paiements dès le 16 octobre. Il y a bien des dossiers en attente dans plusieurs départements, mais nous avons d'ores et déjà procédé à près de 90 % des paiements : ne généralisons pas la situation à partir de ces exceptions, qui nous ennuient autant que vous.
Alors que la PAC n'est plus celle que nous connaissions dans la période complémentaire, le syndicalisme et les services de l'État – en particulier ceux des chambres d'agriculture –, que je salue, ont été au rendez-vous. Nous pouvons nous en féliciter.
Par ailleurs, la PAC prévoit plusieurs dispositifs pour soutenir la transition écologique : la conversion à l'agriculture biologique, le dispositif d'écorégime et les Maec, que vous avez citées. Bien qu'elle soit désormais gérée par l'État, et non plus par la région, l'enveloppe dédiée aux Maec est en légère augmentation par rapport à la précédente programmation, preuve que l'État est au rendez-vous.
Mme Clémence Guetté s'exclame.
Or, il existe en Bretagne une difficulté : le coût des Maec excède les enveloppes qui avaient été définies, notamment avec les régions. Je rappelle que le financement de ces mesures ne procède pas d'une logique de guichet, mais bien d'une sélection, dans le cadre d'une enveloppe. Alors que devons-nous faire ?
La période de préprogrammation dans laquelle nous sommes doit nous permettre de nous assurer que tous les financements ont été mobilisés pour couvrir les besoins – je pense en particulier aux financements des agences de l'eau, qui ont besoin de 70 millions d'euros supplémentaires par an pour financer les mesures agroenvironnementales.
Depuis le début, l'État est au rendez-vous. Sur ces sujets mais aussi plus largement, vous pouvez compter sur moi pour continuer à répondre aux attentes des agriculteurs.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.
La bête immonde de l'antisémitisme existe toujours. Elle exhale à nouveau un souffle nauséabond et ignoble, celui de la haine des Juifs. Si elle semble désormais porter des habits neufs – des faux-nez –, comme cet antisionisme, de plus en plus répandu dans les rues de notre pays, sur les réseaux sociaux, dans les universités, et peut-être même au sein de partis politiques représentés dans cet hémicycle ,
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. –M. Meyer Habib applaudit également. – « Hélas ! » sur plusieurs bancs du groupe LR
elle n'en reste pas moins toujours la même haine, alimentée par l'islamisme, la haine d'Israël et le complotisme.
Depuis le 7 octobre, 840 actes antisémites ont été recensés dans notre pays et 430 personnes ont été interpellées, soit bien plus en seulement trois semaines que durant toute l'année écoulée. Nous assistons à une véritable flambée de l'antisémitisme : insultes, injures, menaces de mort, tags, dégradations de bâtiments, agressions physiques, tentatives d'incendie contre les portes d'appartements et cyberharcèlement rythment le quotidien de trop nombreux compatriotes de confession juive. Ils se sentent menacés par un antisémitisme grandissant et désinhibé, qui nous fait peur et nous fait honte : le combattre doit être l'affaire de tous les républicains, pas seulement celle de nos compatriotes juifs.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, RN, LR, Dem, SOC, HOR, Écolo – NUPES et LIOT.
C'est notre affaire à tous, car cet antisémitisme n'est pas la France, mais la négation de la République française ; c'est une attaque contre nos valeurs.
Monsieur le ministre de l'intérieur et des outre-mer, pouvez-vous indiquer à la représentation nationale et à tous les Français quelles mesures précises vous avez prises pour protéger et assurer la sécurité des Français juifs et de tous les Juifs en France ?
Comment entendez-vous renforcer notre mobilisation collective contre ce poison qu'est l'antisémitisme ?
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem, sur plusieurs bancs des groupes RN et LR, et sur quelques bancs des groupes SOC, Écolo – NUPES et LIOT.
Comme la Première ministre l'a rappelé, le Président de la République nous a demandé dès le 7 octobre – date de l'ignoble attentat islamiste contre les populations israéliennes – de renforcer considérablement la sécurité de tous les lieux cultuels, éducatifs, culturels et communautaires fréquentés assidûment par les Français de confession juive. Afin de lutter contre leur peur, bien légitime, pas moins de 950 sites sont ainsi protégés, partout en France, par 10 000 policiers, gendarmes et militaires de l'opération Sentinelle. La République est là pour protéger absolument nos compatriotes, jour et nuit, contre ces actes antisémites.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe LR.
Ce n'est malheureusement pas une légende : 857 actes antisémites ont été commis depuis le 7 octobre, soit autant en trois semaines que durant toute l'année écoulée. La présence de policiers, gendarmes et militaires de l'opération Sentinelle devant les lieux communautaires que j'ai évoqués a permis de procéder à 425 interpellations. Je tiens à insister ici sur notre fermeté, en particulier celle du ministère de l'intérieur, qui procède systématiquement au retrait de leur titre de séjour et à l'éloignement des étrangers qui sont interpellés. Vingt-sept personnes ont ainsi été placées en centre de rétention administrative depuis une semaine.
Nous luttons également contre la haine sur internet : les 5 916 signalements déposés sur Pharos, la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements, ont permis aux services du ministère de la justice d'identifier 296 coupables. Il n'y aura aucune impunité, j'en veux pour preuve ces deux exemples : un étranger, qui avait été interpellé après avoir crié « Mort aux Juifs ! Mort à Israël ! » a été renvoyé dans son pays le 9 octobre dernier ,
Exclamations sur quelques bancs du groupe RN
et un autre, qui a appelé à la haine et menacé de mort le rabbin de Levallois le 28 octobre sur TikTok a été mis en garde à vue, puis déféré.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe Dem.
Madame la ministre de la transition énergétique, la semaine dernière, vous nous avez présenté triomphalement une réforme du marché de l'électricité. Une fois n'est pas coutume, la position de la France aurait prévalu sur celle de l'Allemagne : il faut s'en réjouir. Cette victoire est avant tout celle des Républicains ,
Rires et exclamations sur quelques bancs du groupe RE
qui ont réclamé de longue date, avec constance, et parfois contre les collègues de la majorité, que les prix de l'électricité soient moins dépendants de ceux du gaz, et que le parc nucléaire historique soit soutenu face aux défis qui l'attendent.
Mieux vaut tard que jamais ! Vous rattrapez ainsi les dégâts du premier mandat présidentiel, placé sous le signe de l'idéologie antinucléaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Mais les Français, à qui l'hiver dernier a montré les limites du système, ont appris à se méfier des effets d'annonce : ils savent que toute hausse des prix a des répercussions immédiates sur leur pouvoir d'achat, mais qu'à l'inverse, il faut attendre très longtemps pour voir les factures diminuer en cas de baisse.
Pour que cet accord bénéficie vraiment aux Français, aux artisans et commerçants dont la situation est difficile, comme nos boulangers, et à notre compétitivité industrielle, il faut un engagement clair. Les contrats bidirectionnels permettront à l'État de soutenir EDF lorsque les prix sont bas, et à EDF de reverser à l'État l'excédent lorsque les prix sont hauts. Ma question est donc simple : dans cette seconde hypothèse, les recettes seront-elles immédiatement et intégralement reversées aux ménages, artisans et industriels ?
Concrètement, les Français bénéficieront-ils enfin des prix bas qu'ils méritent au regard des investissements massifs dans le nucléaire auxquels ils consentent depuis cinquante ans ?
Enfin, que prévoyez-vous pour nos petites et moyennes entreprises, ces boulangers, restaurateurs et artisans…
…exclus des tarifs réglementés alors que certains de nos partenaires européens les protègent ?
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Avec le Président de la République, nous avons fait une promesse aux Français : celle de reprendre le contrôle des prix de l'électricité et de reprendre en main l'avenir énergétique de la France.
Inutile de nous parler des éoliennes, vous allez déjà brasser du vent !
Je vous réponds à la place de Mme Agnès Pannier-Runacher, qui est absente, mais je le fais avec plaisir. Vous nous reconnaissez un point positif, que je vous accorde en retour : nous partagions effectivement la conviction que c'est à l'échelle européenne que nous gagnerions ce combat, nous opposant ainsi à l'extrême droite et à l'extrême gauche…
…qui considéraient que le marché européen empêchait toute solution, allant jusqu'à faire de sa sortie un argument souverainiste de plus.
Inutile de polémiquer ! Il ne peut pas s'empêcher de faire son speech !
Le Président de la République a tenu sa promesse : nous avons obtenu de nos voisins allemands et de la Commission européenne la possibilité de découpler les prix de l'électricité et du gaz, afin de reprendre le contrôle des prix de l'électricité.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Cet accord désormais négocié, nous nous tournons vers l'avenir : la loi de production énergétique marquera une étape clé dans la définition de notre politique énergétique nationale. Entre reconnaissance du nucléaire et développement des énergies renouvelables, ce texte, qui nous projettera dans un mix énergétique décarboné, visera également à assurer la sobriété énergétique et sécuriser notre approvisionnement.
Mme Clémence Guetté s'exclame.
Il portera en outre sur la régulation après 2025.
Notre objectif partagé est bien que les Français…
…bénéficient le plus vite possible d'un prix le plus proche possible des coûts de production : les mécanismes pour y parvenir sont en cours d'élaboration.
La stratégie française pour l'énergie et le climat, qui s'inspire très largement des travaux du député Armand, que je salue, mais aussi de ceux de l'ensemble des groupes politiques du Parlement, qui y travaillent depuis des mois avec les élus locaux, sera soumise à une consultation dans les prochains jours et servira de base au projet de loi de production énergétique.
Dimanche, des artistes s'étaient donné rendez-vous sur le marché de Port-de-Bouc afin de produire une œuvre collective pour la paix à destination de l'ONU. Dans notre peuple comme dans beaucoup d'autres peuples du monde, l'aspiration à la paix est forte, quoique mâtinée d'inquiétude et de révolte : alors que l'humanité est traversée par les conflits – nous n'oublions pas l'Ukraine et l'Arménie –, il est salutaire qu'elle puisse se manifester.
Désolation, bombes, fuite, morts : les attaques criminelles, meurtrières et aveugles du Hamas ont alimenté un engrenage de guerre et de violence qui semble sans limites. L'offensive militaire qui s'intensifie à Gaza est insupportable : tous les crimes de guerre doivent être condamnés.
C'est la légitime défense d'un pays agressé, comme nous y avons eu recours en 1944 et 1945 !
Exclamations sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Les Nations unies décrivent la déshumanisation d'une population tout entière, qui ressemble à une vengeance aveugle, à une terrible punition collective. Alors que le risque d'un embrasement n'est pas écarté, une trêve humanitaire d'urgence et la libération des otages sont évidemment nécessaires.
Mais il y a en toile de fond ce conflit qui dure depuis des décennies, et qui ne se réglera pas d'un claquement de doigts : la persistance de l'occupation et du blocus…
Tais-toi ! Y en a marre ! Pourquoi lui a-t-il le droit de dire tout ce qu'il veut ?
…comme le développement de la colonisation privent une part de l'humanité de ses droits élémentaires. Dans le fracas et le drame, ces événements viennent nous rappeler à quel point nos organisations internationales ont été affaiblies à force d'être contournées, le droit international fragilisé à force d'être bafoué. Les nationalismes et les intégrismes, qui se nourrissent du conflit, installent une polarisation mortifère qui ferme les issues et alimente les haines. Or, il ne peut y avoir de paix durable que dans la justice et le respect du droit des peuples. Il existe des interlocuteurs possibles – …
…je pense à Marwan Barghouti. Parce que nous n'avons rien d'autre en tête que le sort des femmes et des hommes d'Israël et de Palestine, nous souhaitons que la France parle haut : cessez-le-feu !
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.
Le 7 octobre, des milliers de terroristes du Hamas, épaulés par d'autres groupes terroristes – dont le Djihad islamique et la branche armée du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) –, ont abattu plus de 1 400 personnes en Israël. Comme moi, vous avez vu les images, la sauvagerie, la barbarie à l'encontre de ces femmes et bébés mutilés, de ces Israéliens assassinés, dont les corps sans vie étaient profanés uniquement parce qu'ils étaient juifs. Comme l'a dit le Président de la République, la barbarie qui s'est abattue sur Israël est aussi une catastrophe pour les Palestiniens, que nous n'associons en aucune manière au Hamas qui fait régner la terreur à Gaza.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, Dem et GDR – NUPES.
Le terrorisme est un fléau pour le Moyen-Orient, mais pour nous aussi : trente-cinq de nos compatriotes ont été sauvagement assassinés par le groupe terroriste du Hamas, qui en détient certainement plusieurs autres en otage,…
…dont nous sommes toujours sans nouvelle. Nous le disons : Israël doit pouvoir se défendre,…
…dans le respect du droit international. La France est aujourd'hui du côté du droit, comme elle l'a toujours été.
Au-delà de l'urgence humanitaire, il faut répondre mieux aux aspirations légitimes des Palestiniens, qui veulent vivre dans la dignité, loin des atrocités des terroristes du Hamas. Ils veulent vivre en paix avec les Israéliens, non pas face à face, mais côte à côte.
Il est de notre responsabilité collective de redessiner l'horizon politique en vue de répondre à cette aspiration. La position de la France, que nous réaffirmons avec force, demeure constante :…
…la sécurité pour Israël, un État pour les Palestiniens, ces deux objectifs étant indissociables.
Mme Colonna s'est exprimée en ce sens au sommet du Caire pour la paix.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Depuis le 24 juin 2022, madame la Première ministre, l'accès à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) n'est plus garanti par le droit fédéral américain. L'atteinte portée à ce droit fondamental, mais juridiquement fragile, par l'une des plus grandes démocraties du monde confirme la réversibilité des droits des femmes et l'impérieuse nécessité, face aux assauts de forces réactionnaires, de faire entrer dans la Constitution le droit à l'IVG. C'est pourquoi la majorité présidentielle avait déposé dès le 30 juin 2022 une proposition de loi en ce sens ; par la suite, députés puis sénateurs, dans une démarche transpartisane ,
Rires et exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
ont adopté tour à tour deux textes ayant le même objet.
Face à la mobilisation de nombreux parlementaires et des associations féministes, le Président de la République a annoncé qu'il transmettrait au Conseil d'État un projet de loi constitutionnelle. Il ouvre ainsi la voie à une réforme constitutionnelle inédite dans le monde, afin de garantir pleinement, en France, la liberté de recourir à l'IVG. La vulnérabilité des droits des femmes constituant une réalité implacable, l'intérêt de cette constitutionnalisation est double : d'une part, conférer à la liberté d'avorter une plus grande sécurité juridique et la rendre irréversible pour les générations futures ; d'autre part, manifester avec force l'attachement de la France à ce droit fondamental des femmes.
Disposer librement de son corps est un droit premier pour disposer librement de sa vie. La décision pionnière du Président de la République rappelle combien ce droit, loin d'être une affaire de femmes, se situe au cœur de la vie démocratique du pays des Lumières, des droits de l'homme et assurément de ceux des femmes. Madame la Première ministre, quand le droit à l'IVG sera-t-il pérennisé et inscrit dans notre Constitution ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Il est une chose que les femmes ne savent que trop bien : leurs droits sont fragiles. Simone de Beauvoir disait vrai lorsqu'elle affirmait qu'ils seraient toujours les premiers remis en question. Au cœur de ces droits, il y a celui de disposer de son corps ,
M. Pierre Cordier s'exclame
autrement dit la garantie de pouvoir librement recourir à l'IVG.
Ce droit est le fruit d'une lutte, du manifeste des 343, du procès de Bobigny, du courage de Simone Veil à la tribune de cette assemblée.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
S'il est aujourd'hui défendu sur la quasi-totalité des bancs de l'hémicycle, nous n'en avons pas moins un devoir de vigilance : la décision rendue l'année dernière par la Cour suprême des États-Unis
« On est en France ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et LR
nous rappelle qu'il peut être menacé même dans une grande démocratie.
Sur notre continent, plusieurs partis d'extrême droite
Exclamations sur les bancs du groupe RN
entendent remettre en cause cette liberté fondamentale des femmes.
Ce devoir de vigilance est à l'origine de la proposition de loi constitutionnelle adoptée ici à une très large majorité, puis votée par le Sénat. Nous l'exerçons également : le 8 mars, lors de l'hommage de la nation à Gisèle Halimi, le Président de la République s'est engagé à graver le droit à l'avortement dans le marbre de la Constitution. Dimanche dernier, après concertation avec les groupes parlementaires, il a annoncé qu'un projet de loi en ce sens serait transmis dès cette semaine au Conseil d'État et présenté en Conseil des ministres avant la fin de l'année. Ce texte permettra de consacrer plus encore la liberté des femmes de recourir à l'IVG en l'inscrivant dans la Constitution. Mesdames et messieurs les députés, certains affirment qu'il n'y a pas urgence : je crois au contraire qu'il y a toujours urgence à se battre, à veiller aux libertés des femmes.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Telle est ma conviction, celle du Gouvernement, la vôtre ; elle rassemble nombre d'entre nous. C'est pourquoi, pour toutes les femmes, avec le Président de la République, nous souhaitons voir ce droit inscrit en 2024 dans la Constitution.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Madame la Première ministre, la directrice exécutive de l'Unicef a affirmé lundi devant le Conseil de sécurité de l'ONU que « plus de 420 enfants sont tués ou blessés chaque jour à Gaza ».
Jean François Corty, vice-président de Médecins du monde, explique dans Libération qu'« on passe peu à peu d'une prison à ciel ouvert à un charnier à ciel ouvert ». Madame la Première ministre, vous et votre gouvernement avez fait le choix de soutenir inconditionnellement le gouvernement de M. Netanyahou. Or la démocratie, c'est le droit pour d'autres – ils sont nombreux – de penser et de dire que le carnage doit s'arrêter tout de suite, qu'il faut un cessez-le-feu immédiat.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Dans une démocratie, on ne participe pas à des manifestations interdites !
Dans le monde entier, notamment en Europe, par exemple à Londres, des manifestations très puissantes ont lieu en ce sens. En France, elles sont interdites, comme celle de samedi dernier à Paris.
Madame la Première ministre, pourquoi ? Pourquoi cette position intenable et incompréhensible ?
Approbation sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Un climat dangereux est en train de s'installer – dangereux pour le pays, pour la démocratie, pour l'ensemble des libertés publiques.
Mmes Caroline Yadan et Karen Erodi s'interpellent.
Au Rassemblement national comme dans votre majorité, certains ont cru bon de s'en prendre à la liberté de la presse, en réclamant que l'Agence France-Presse (AFP) soit privée de ses subventions publiques.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Un autre député de la majorité, a déclaré à la radio que « Jean-Luc Mélenchon est un danger pour la société »
« Oui ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et LR
et qu'« il devrait être fiché S », ajoutant aux menaces dont celui-ci fait l'objet. Madame la Première ministre, vous désolidarisez-vous nettement de ces propos irresponsables ?
La première victime d'une guerre est la vérité : cet adage se vérifie particulièrement à Gaza pilonnée, réduite au silence.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
À ce jour, vingt-huit journalistes, dont vingt-deux palestiniens, y ont été tués. Deux tribunes récemment publiées demandent aux autorités françaises et aux instances internationales d'appeler à la protection des journalistes qui tentent, dans l'enclave, de faire leur métier : informer.
La France insoumise en championne de la liberté de la presse : on aura tout vu !
Reprenez-vous cet appel à votre compte ? Autant de questions reliées à cette exigence que nous clamons depuis le début et que nous ne tairons jamais : un cessez-le-feu immédiat !
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent.
Monsieur Habib, s'il vous plaît ! La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'Europe.
Peut-être vais-je me répéter : dans sa réponse légitime aux attaques dont il a été victime, Israël doit protéger, en application du droit humanitaire, les populations civiles,…
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
…lesquelles n'ont pas à payer les crimes commis par les terroristes du Hamas.
Il faut être clair, et je crois que le Gouvernement l'a été : ces terroristes ne représentent pas le peuple palestinien, ni la cause palestinienne.
À plusieurs reprises, Mme Caroline Yadan apostrophe des membres du groupe LFI – NUPES, suscitant les protestations de ces derniers.
Nous devons le dire plus nettement encore étant donné la volatilité du contexte actuel, où certains acteurs tentent de créer la confusion. Le rejet le plus ferme des actions du Hamas constitue le moyen le plus sûr de faire entendre la voix des Palestiniens : la France condamne les agissements du Hamas…
…et soutient les droits des Palestiniens. Peut-être convient-il également de rappeler que face à la crise humanitaire qui frappe la population civile de Gaza, et que vous avez évoquée, la France a annoncé une aide de 20 millions d'euros supplémentaires, qui transiteront par les agences des Nations unies, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et les ONG ; nous sommes prêts, si nécessaire, à accroître encore cet effort. Afin de faire parvenir d'urgence cette aide aux populations et aux déplacés, nous avons demandé l'ouverture de corridors, ainsi qu'une pause humanitaire. Sa distribution aux civils, à commencer par les plus vulnérables, nécessite en effet une trêve humanitaire, qui pourrait elle-même amener un cessez-le-feu. Par ailleurs, les personnes qui souhaitent sortir de Gaza doivent pouvoir le faire : nous avons demandé que nos agents, nos ressortissants et leurs familles n'en soient pas empêchés. Enfin, il faudra une solution politique qui permette aux deux peuples de vivre côte à côte.
Des députés du groupe LFI – NUPES interpellent Mme la présidente en lui désignant Mme Caroline Yadan.
Madame la ministre de la culture, « trois semaines après le début de la guerre entre Israël et le mouvement palestinien Hamas, Gaza est coupée du monde » : l'auteur de cette phrase extraite d'une dépêche du 27 octobre de l'Agence France-Presse (AFP) n'a fait qu'appliquer les consignes données par sa direction. Une note interne l'a informé qu'il convenait d'évoquer les combattants du Hamas, non les islamistes du Hamas, et de proscrire à leur sujet le terme « terroriste », dont le directeur de l'information explique qu'il a tout bonnement « perdu son sens ».
Pourtant, il n'y a pas si longtemps, l'AFP employait ce mot pour relater les exactions d'Al-Qaïda, de Daech, de Boko Haram, ou l'attentat contre Charlie Hebdo.
Que s'est-il passé depuis ? Décapiter des bébés, éventrer des femmes enceintes, kidnapper, violer, brûler, n'est-ce pas du terrorisme ?
Des trois grandes agences de presse mondiale, l'AFP est la seule européenne, avec pour abonnés les médias français et étrangers, les entreprises, les institutions. Son influence est donc énorme, considérable. J'ai été journaliste durant près de quarante ans : l'AFP est longtemps restée la bible de l'information, mais ce temps est révolu. Or, madame la ministre, l'État s'apprête à lui verser 141 millions d'euros – un budget en hausse de 5 % – au titre, écoutez bien, de sa mission d'intérêt général.
Comment comptez-vous réagir, alors que le site de votre ministère présente l'AFP comme la seule agence de presse mondiale qui produise une information originale,…
Applaudissements sur les bancs du groupe RN, ainsi que sur quelques bancs du groupe LR. – M. Meyer Habib se lève pour applaudir.
Tout d'abord, ainsi que Laurence Boone vient de l'évoquer, la France et l'Union européenne, de même qu'un très grand nombre d'États tiers, ont clairement désigné le Hamas comme un groupe terroriste.
« Et l'AFP ? » sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Meyer Habib s'exclame.
Ça suffit, chers collègues ! Monsieur Habib, je vais être obligée de vous rappeler à l'ordre !
Autre rappel important : bien que partiellement financée par le ministère de la culture, l'AFP n'est pas une agence gouvernementale ,
M. Michel Herbillon s'exclame
mais une agence de presse indépendante qui a expliqué avoir décidé il y a plus de vingt ans, à l'instar de Reuters ou Associated Press, de ne plus utiliser le mot « terrorisme » et de s'en tenir aux faits.
La barbarie des agissements du Hamas est suffisamment évidente pour que tout le monde comprenne qu'il s'agit là d'actes terroristes.
Les médias dont les articles sont rédigés à partir des dépêches de l'AFP y introduisent d'ailleurs très fréquemment le mot « terrorisme ».
Pourriez-vous nous redonner la définition de ce terme ?
Excusez-moi, mais pourriez-vous m'écouter jusqu'au bout ?
Compte tenu des événements graves que nous vivons, et je le dis avec d'autant plus d'émotion que des familles d'otages sont présentes,…
…alors que, le 7 octobre, le Hamas a franchi toutes les lignes rouges imaginables, fait preuve d'une inqualifiable cruauté, je comprends que le choix de ne pas utiliser à son sujet le qualificatif « terroriste » suscite des remous, de l'incompréhension, voire de l'indignation. Seulement, le Gouvernement ne rédige pas les dépêches de l'AFP : dans notre pays, monsieur Ballard, la presse est indépendante !
Exclamations sur quelques bancs des groupes RN et LR. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Ce qui m'a choquée, puisque vous réclamez mon avis, c'est que l'un des communiqués par lesquels l'agence expliquait son choix citait l'exemple de Nelson Mandela, que l'on ne peut laisser mettre sur le même plan que le Hamas.
Pour le coup, j'aurais aimé que l'AFP mesure les implications d'un tel rapprochement !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Huées sur les bancs du groupe LR.
Madame la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, l'attaque du car du club de football de l'Olympique lyonnais ce dimanche soir est le symbole d'un profond abêtissement, un exemple désastreux pour la jeunesse, mais c'est plus que cela, c'est une insulte lancée à la face des sportifs, de tous ceux qui pratiquent, qui aiment et qui encadrent le sport en France. C'est aussi pour eux, pour ces millions de Français que je vous pose cette question, car le sport, c'est avant tout de très belles histoires, des valeurs, du lien social, de l'émancipation, le dépassement de soi et le respect des règles.
Tous les jours et sur tous les terrains, les 180 000 clubs qui maillent notre territoire permettent d'élever les corps et les esprits, d'offrir un cadre et des certitudes. Nous sommes nombreux à être convaincus que le sport porte une partie des remèdes aux maux que connaissent notre société et notre jeunesse en particulier.
Je salue les milliers d'animateurs, d'éducateurs et d'entraîneurs qui œuvrent dans tous les territoires de la République. Nous leur sommes reconnaissants pour le travail social qu'ils accomplissent.
La pratique du sport sera la grande cause nationale pour 2024. Dans cet esprit, le Président de la République a annoncé une nouvelle impulsion en faveur de l'inclusion par le sport, notamment par la création d'une Alliance pour copiloter cette politique publique essentielle. Un acte fondateur a d'ores et déjà été posé. Ce comité de l'Alliance a été confirmé au cours du récent Comité interministériel des villes.
Madame la Ministre, pouvez-vous réaffirmer devant nous l'engagement du Gouvernement de faire du sport un pilier majeur du pacte républicain ? Pouvez-vous nous préciser les éléments concrets soutenant l'inclusion dans nos territoires et dans les clubs sportifs ? .
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR
La parole est à Mme la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques.
Vous mentionnez l'attaque abjecte dont ont fait l'objet à Marseille les bus de l'Olympique lyonnais, et je ne veux pas oublier les gestes antisémites, les cris racistes et les chants homophobes qui ont été à déplorer dans les tribunes dimanche soir. Je veux le redire, avec la fermeté que ces comportements appellent : jamais nous ne céderons face à ceux qui cassent, détruisent ou salissent le sport. Les auteurs de ces faits seront retrouvés, poursuivis et condamnés à des sanctions que je souhaite les plus sévères possibles. .
Applaudissements sur les bancs du groupe RE
Leurs agissements sont la négation même du sport et de ses valeurs. Vous l'avez dit, le sport a autre chose à apporter, en particulier à notre jeunesse, parfois en perte de repères. Pour elle, le sport a le pouvoir de redonner un cadre et du sens.
C'est la raison pour laquelle, sous l'impulsion du Président de la République et de la Première ministre, mon ministère porte une ambition et engage des moyens inédits pour l'inclusion par le sport, avec un nouvel investissement de 300 millions d'euros dans les équipements sportifs aux côtés des collectivités, notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), avec un réseau de 10 000 clubs sportifs engagés à travers les territoires partout en France, avec le recrutement de 1 000 éducateurs socio-sportifs, la mobilisation de 50 millions d'euros pour ces missions d'animation, d'intervention et de médiation. Ces mesures seront suivies et animées par une nouvelle Alliance pour l'inclusion par le sport transpartisane, composée d'élus, de services de l'État, de représentants de la société civile et d'acteurs associatifs dont l'action nous permettra de faire passer de 20 000 à 100 000 le nombre de bénéficiaires des actions d'insertion par le sport, en capitalisant sur les dispositifs créés depuis 2017.
Cette Alliance nous permettra aussi de piloter l'été olympique et paralympique que nous préparons avec les clubs sportifs et avec les ministres de l'Éducation nationale, de la culture et de la ville pour que l'élan des jeux bénéficie aussi à la jeunesse des quartiers populaires lors de l'été 2024 et que le sport contribue à cimenter le pacte républicain . .
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE
Madame la Première ministre, votre gouvernement, dont la plupart des membres sont atteints d'une telle immodestie qu'ils déclarent à longueur de discours qu'aucun gouvernement n'a jamais fait mieux, devrait au moins respecter ses engagements. En effet, le temps semble loin où vous vous engagiez et où vous promettiez de gouverner autrement, dans le dialogue et la coconstruction.
Dans nos débats parfois vifs, parfois houleux, parfois consensuels, de nombreux amendements ont été adoptés pour corriger et améliorer vos projets de budget. Or vous les menacez régulièrement par le 49.3. C'est notamment le cas d'un amendement important pour améliorer les dispositifs d'accompagnement social des zones à faibles émission (ZFE). C'est aussi le cas de plusieurs amendements de rallonge budgétaire relatifs à l'insertion par l'activité économique ou encore à l'expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée lancée en 2016, mise en œuvre dès 2017,
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC
et qui est une belle réussite dans nos territoires, comme le montre l'entreprise à but d'emploi La Source à Port-Jérôme-sur-Seine.
Hélas, le projet de loi de finances pour 2024 ne prévoit que 69 millions d'euros pour cette expérimentation ce qui contraindra l'association à renoncer aux vingt-cinq nouvelles expérimentations prévues l'an prochain.
Or cinquante-huit territoires se sont déjà engagés et plus de 5 000 personnes ont retrouvé du travail grâce à cette association. Cette expérimentation est même saluée à Bruxelles qui souhaite mobiliser le Fonds européen d'innovation sociale.
Lors de la séance de questions au gouvernement de la semaine dernière, le ministre du travail a été interrogé sur ce sujet et a répondu par de trop nombreuses contrevérités.
Dans ces conditions, hier soir, la réaction collective de nombreux parlementaires de plusieurs groupes politiques a permis en commission des finances l'adoption de deux amendements, le premier portant sur 31 millions d'euros supplémentaires et le second sur 20 millions.
Mêmes mouvements.
« Ecoute, action et résultats », affirmiez-vous en juillet 2022 ! Allez-vous enfin écouter le Parlement et retenir ses propositions ?
Mêmes mouvements.
La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Vous évoquez l'expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée qui a été lancée dans dix territoires par une loi de 2016 et que le gouvernement suivant a étendue à soixante territoires. Vous affirmez que le Gouvernement ne tient pas ses engagements. Mais, alors que 5 millions d'euros seulement avaient été consommés sur les 15 millions inscrits au budget en 2017, en 2023, 44,9 millions ont été inscrits et nous finançons effectivement des expérimentations dans cinquante-huit territoires qui ont été labellisés après agrément du comité de sélection et signature par moi-même des arrêtés d'agrément.
Pour 2024, ce sont 69 millions d'euros qui sont prévus, soit une augmentation de 53 % par rapport à 2023. Vous conviendrez que passer en six ans de 15 à 69 millions, ce n'est pas tout à fait commun pour une expérimentation.
Où en sommes-nous ? Cinquante-huit territoires sont donc agréés et l'association nous a fait savoir que de nouveaux pourraient être proposés. Mes services lui ont indiqué que nous sommes prêts à présenter des décrets en Conseil d'État, comme la loi le prévoit, pour agréer jusqu'à vingt-cinq territoires de plus. J'ai également rappelé à l'association qu'au cours des dernières années, le taux moyen de sous-consommation des budgets était supérieur à 30 %.
Je l'ai informée que nous pourrions nous engager à ce que 10 millions d'euros supplémentaires soient apportés au cours de l'exercice 2024 si la totalité des crédits était consommée, à condition que les projections de création d'emplois soient partagées, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Je rencontre ce jeudi M. Gallois, président du Fonds d'expérimentation, et nous en discuterons. Soyez à même d'entendre que lorsqu'on passe en un an d'un peu moins de 45 millions à 69 millions d'euros, ce n'est pas une baisse de budget : le Gouvernement est bien au rendez-vous. .
Applaudissements sur les bancs du groupe RE
Lundi dernier, interrogé sur l'annonce du Syndicat mixte de gestion de l'eau et de l'assainissement de Guadeloupe qui déconseillait à la population de consommer l'eau du robinet, le ministre délégué chargé des outre-mer, M. Vigier, a répondu : « Voyez, vous avez la chance d'avoir un ministre qui est également biologiste, qui va vous donner les bons conseils. Eh bien vous faites couler l'eau, vous la faites chauffer et après vous la mettez au frigo ».
Mais bien sûr ! Pourquoi les Guadeloupéens et Guadeloupéennes n'y avaient-ils pas pensé avant ?
Peut-être parce qu'ils savent que le problème est structurel et ne se réglera pas par des « bons conseils » de biologiste, tout ministre qu'il soit.
En Guadeloupe, comme dans plusieurs autres départements dits d'outre-mer, depuis des années, de nombreux dysfonctionnements dans la gestion des usines de production d'eau potable, du réseau de distribution et de la gestion des eaux usées entraînent une situation catastrophique. .
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
Un quart de la population de Guadeloupe n'a pas accès tous les jours à l'eau, du fait des coupures. À Mayotte, 31 % de la population n'a pas accès à l'eau courante dans son logement. Entre 15 et 20 % de la population de Guyane n'a pas accès à l'eau alors que cette région dispose de la troisième réserve d'eau du monde. Un habitant et une habitante sur deux de La Réunion ne peuvent pas boire l'eau du robinet car elle est impropre à la consommation.
Mais tout cela, vous le savez car depuis des années, habitants, habitantes et élus de ces territoires et de la nation tout entière alertent sur cette situation. .
Mêmes mouvements
Le 2 juin 2023, un rapport du Comité de l'ONU sur les droits de l'enfant a même demandé à l'État français de garantir les droits à l'eau et à l'assainissement en outre-mer, et singulièrement en Guadeloupe. À ce jour, en plus d'être condescendantes, les réponses de votre gouvernement sont dramatiquement insuffisantes.
Mêmes mouvements.
Heureusement, la représentation nationale s'est saisie du problème. Mardi dernier, en commission des finances, la proposition de notre groupe d'un plan d'urgence de 100 millions d'euros sur le budget 2024 pour rendre effectif le droit d'accès à l'eau dans les outre-mer a été votée. Madame la Première ministre, conserverez-vous ce financement, ainsi que tous ceux adoptés en commission en faveur des outre-mer, après le funeste 49.3 que vous prévoyez sur la deuxième partie du budget ?
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent.
Où est le mépris, madame Obono, lorsque la semaine dernière, vingt-quatre heures après le passage de l'ouragan Tammy, je suis allé sur place à la rencontre des populations dont les habitations étaient dévastées ou qui avaient perdu leur outil de travail et demandaient que l'on soit à leurs côtés ? J'étais à leurs côtés.
Où est le mépris, madame Obono, quand le ministre de l'intérieur, M. Gérald Darmanin, a décidé d'enclencher la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle après le passage de l'ouragan Tammy à la Guadeloupe ?
Où est le mépris, madame Obono, lorsque, comme beaucoup de Guadeloupéens et Guadeloupéennes, j'ai constaté que l'eau était de couleur marron lors des grandes inondations ?
La raison en est simple, c'est que les usines de traitement d'eau ne fonctionnent presque plus.
Vous venez de parler des investissements financiers. Où est le mépris, lorsque nous signons la semaine dernière avec la région Guadeloupe – je remercie le président Ary Chalus – et le département – je remercie le président Guy Losbar – le déblocage d'un crédit de 320 millions d'euros pour qu'on puisse enfin régler ces problèmes ? Je repars ce soir à Mayotte, où je devais me rendre avec Gérald Darmanin qui doit finalement rester sur le territoire hexagonal. Nous avons lancé un plan de 400 millions.
Nous ne sommes pas dans le mépris, mais dans la considération pour les femmes et les hommes des territoires ultramarins qui méritent que l'on prenne enfin à-bras-le-corps les problèmes de l'eau. Venez avec moi ce soir, madame Obono…
…et vous verrez que sur place, nous faisons des progrès chaque jour.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem. – Protestations et exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ia Ora Na !
Ma question s'adresse à M. le ministre des armées.
Le 21 janvier 2021, le Traité sur l'interdiction des armes nucléaires est entré en vigueur. Il comporte des dispositions humanitaires ayant trait à l'assistance aux victimes et à la remise en état de l'environnement. La France refuse de le ratifier.
Or, le 27 octobre 2023, Kiribati et le Kazakhstan ont présenté une résolution inédite aux Nations Unies. Elle concerne le lourd héritage des armes nucléaires, mettant l'accent à la fois sur les dommages physiques et moraux aux victimes, mais également sur la remise en état de l'environnement dans les États touchés par l'emploi ou la mise à l'essai des armes nucléaires. 171 États ont voté pour ce texte. Les quatre puissances nucléaires, dont la France, ont voté contre.
Dès le dépôt du projet de résolution, des associations telles que ICAN (International campaign to abolish nuclear weapons soit campagne internationale pour abolir les armes nucléaires) France ont dénoncé l'attitude de rejet de la France, perçue comme un affront envers toutes les victimes de ses essais, y compris ses propres enfants.
Le même jour, en réponse à une affaire concernant le stockage en couche géologique profonde des déchets radioactifs, le Conseil Constitutionnel a rendu une décision inédite en estimant que le législateur, lorsqu'il adopte des mesures susceptibles de porter une atteinte grave et durable à l'environnement, doit veiller à ce que les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne compromettent pas la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins. Les juges de la juridiction suprême ont donc, eux, compris les dangers du stockage des déchets nucléaires et leurs effets nocifs sur l'environnement et la santé humaine.
En Polynésie, les déchets nucléaires sont enfouis dans deux puits d'un kilomètre de profondeur dans une zone géologiquement instable, car fragilisée par plus de 140 essais nucléaires souterrains, et qui menace de s'effondrer à tout moment. Le ministère se félicite du suivi géomécanique et radiologique de l'atoll de Mururoa avec le dispositif Telsite 2.
La présidente coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est épuisé.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire.
Veuillez excuser l'absence du ministre des armées, Sébastien Lecornu, occupé par l'actualité internationale complexe que vous connaissez.
Nous n'avons pas attendu un traité pour travailler. Sous la conduite du Président de la République, nous avons rendu accessibles les archives relatives aux essais nucléaires en Polynésie – plus de 600 cartons – permettant ainsi aux historiens, aux enseignants et aux chercheurs de se rendre compte de ces événements. Nous sommes héritiers de cette histoire…
…et faisons toute la lumière sur elle. Le ministère des armées est conscient de ses responsabilités particulières en matière d'essais nucléaires et prend en charge l'exigence de transparence défendue par le Président de la République.
La surveillance des atolls se poursuit selon un plan rigoureux et complet. Le ministère des armées a rénové le système de télésurveillance Telsite. La récente publication du bilan de la surveillance des atolls pour l'année 2022 confirme que les objectifs de surveillance ont été remplis en ce qui concerne tant l'alerte que le suivi de l'évolution géomécanique. Les mouvements de la couronne corallienne sont désormais minimes et le détachement d'un fragment important susceptible de créer une vague est devenu très improbable.
Nous maintenons naturellement la surveillance de l'atoll de Moruroa ; les mesures effectuées permettent d'en classer l'évolution au niveau 0 de l'échelle des risques. Quant à l'atoll de Fangataufa, les campagnes d'observation périodiques menées depuis 2001 confirment également sa stabilité.
Le mois prochain, comme chaque année, une commission d'information rendra compte des résultats de la surveillance. Je vous rappelle que les résultats des mesures radiologiques présentés en 2022 ont établi que les traces radioactives présentes dans l'eau, dans les végétaux et dans les poissons sont très faibles et identiques à celles des années précédentes.
M. Jean Terlier applaudit.
En ce 31 octobre, je tiens à saluer les associations et les bénévoles qui, partout en France, ont organisé des opérations dans le cadre du mouvement Octobre rose.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Ce mouvement est né et vit grâce à leur engagement. Je tiens également à vous remercier, madame la présidente, d'avoir illuminé la façade de l'Assemblée nationale aux couleurs d'Octobre rose.
L'ensemble de ces actions permettent de véhiculer deux messages essentiels. D'une part, elles témoignent de notre soutien aux femmes et aux hommes touchés par un cancer du sein ainsi qu'à leurs proches. D'autre part, elles ont pour effet de sensibiliser la population à l'importance du dépistage.
En effet, un cancer du sein, s'il est détecté tôt, se soigne dans 90 % des cas. La démarche est simple : dès 25 ans, il est préconisé de procéder régulièrement à un examen clinique ainsi qu'à des autopalpations ; ensuite, entre 50 et 74 ans, il est recommandé d'effectuer un dépistage gratuit tous les deux ans. Pourtant, en 2022, seules 47 % des femmes éligibles à ce dépistage y ont participé. Ce nombre est insuffisant ; en outre, il est en baisse depuis la crise sanitaire. C'est pourquoi je salue, monsieur le ministre de la santé et de la prévention, votre volonté d'aller vers les personnes les plus éloignées, notamment grâce au rendez-vous préventif prévu à trois âges clés voté par le Parlement en 2023 et ajusté au moyen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024.
Cependant, nous devons aller plus loin. La stratégie décennale de lutte contre les cancers vise à réaliser 1 million de dépistages supplémentaires entre 2021 et 2025 ; cela inclut les dépistages du cancer du sein, qui demeure le cancer le plus mortel chez les femmes. Ainsi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous exposer les mesures que vous mettrez en œuvre pour atteindre les objectifs fixés dans la stratégie décennale et pour améliorer le taux de participation au dépistage du cancer du sein ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Merci beaucoup pour cette question. En effet, la santé des femmes constitue l'un des axes prioritaires de la troisième partie du PLFSS pour 2024, que nous avons examinée hier. Je précise que la façade du ministère de la santé, bien qu'elle soit moins prestigieuse que celle du Palais-Bourbon, est aussi habillée de rose pour affirmer la nécessité absolue de se mobiliser en faveur du dépistage du cancer du sein.
Vous l'avez rappelé, 47 % des femmes participent au dépistage organisé, et 10 % environ s'y rendent de leur propre initiative. Nous devons aller plus loin, car ce nombre a reculé durant la pandémie de covid-19. En France, une femme sur huit développe un cancer du sein au cours de sa vie et 12 000 femmes en meurent chaque année. Une part conséquente de ces décès aurait pu être évitée si le cancer avait été dépisté plus tôt.
Vous m'interrogez quant à la stratégie que nous mettons en œuvre. La première mesure consiste à modifier les modalités du dépistage organisé. Ainsi, les centres régionaux de coordination des dépistages des cancers (CRCDC) seront profondément remaniés et des opérations d'« aller vers » seront conduites par l'assurance maladie et par les agences régionales de santé (ARS), en prenant appui sur les dispositifs déployés lors de la crise sanitaire. Par ailleurs, les CRCDC orienteront les recherches épidémiologiques. Nous espérons ainsi atteindre 1 million de dépistages supplémentaires par an.
Deuxièmement, nous nous mobilisons pour la rénovation du parc de mammographes, à laquelle nous consacrerons 10 millions d'euros. La troisième mesure réside dans les dotations accordées à la recherche et à l'innovation destinées à permettre l'interception du cancer ; il s'agit là d'un progrès immense dont nous devons nous saisir. Il n'en reste pas moins que vous avez raison, monsieur Lauzzana : la première étape est le dépistage.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Monsieur le ministre de l'intérieur, au titre de la mission "Immigration, asile et intégration " du budget de l'État, l'accueil et l'hébergement des migrants, dans toute la diversité de leurs situations, sont à la charge de votre ministère. C'est principalement à cette fin que vous avez versé, en 2022, plus de 980 millions d'euros de subventions aux associations.
Ce chiffre qui a scandalisé de nombreux Français est pourtant largement sous-estimé. En effet, comme l'indique en détail le jaune budgétaire Effort financier de l'État en faveur des associations, de très nombreuses subventions leur ont été versées par la Dihal, la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement. Pour information, les crédits de la Dihal, qui, depuis 2019, augmentent chaque année de 10 % en moyenne, sont affectés sur le budget du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires au titre du programme 177.
Il serait sans doute plus exact de parler de pot aux roses 177, car ce programme n'est rien d'autre qu'un budget discret pour l'immigration. En effet, pendant la seule année 2022, la Dihal a versé près de 1,8 milliard d'euros de subventions aux demandeurs d'asile, soit 60 % d'un budget initialement créé pour aider les personnes sans abri ou mal logées. Je rappelle que 624 sans-abri sont décédés en 2022.
Depuis 2019, la Dihal a ainsi versé 6 milliards d'euros de subventions pour l'accueil et l'hébergement des demandeurs d'asile, dont les deux tiers, d'ailleurs, ne devraient pas être en France. Ma question est donc simple, monsieur le ministre de l'intérieur : une partie du budget du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires finance-t-elle discrètement, par milliards, une immigration dont 61 % des Français ne veulent pas et contre laquelle vous affirmez vouloir lutter ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la ville.
Vous nous interrogez quant aux financements accordés par le ministère de l'intérieur et des outre-mer aux associations au titre de la politique d'immigration. Comme j'ai eu l'occasion de le rappeler à la commission des lois à l'occasion de l'examen des crédits de la mission "Immigration, asile et intégration" , l'État encadre scrupuleusement les missions qu'il délègue aux associations et les fonds qu'il leur accorde,….
…qui représentent, en l'occurrence, près de la moitié des crédits de la mission. Les associations ainsi financées assurent pour le compte de l'État l'hébergement des demandeurs d'asile, assistent les demandeurs dans leurs démarches et accompagnent les réfugiés vers l'emploi, par exemple dans le cadre du programme d'accompagnement global et individualisé des réfugiés (Agir).
Les associations participent donc activement, en tant qu'opérateurs de l'État, à l'intégration des étrangers en France. Elles jouent leur rôle en fournissant un accompagnement administratif et juridique aux étrangers qui souhaitent utiliser les voies de recours juridictionnel prévues par la loi. Elles endossent également une responsabilité lorsqu'elles décident de défendre publiquement un individu ayant fait l'objet d'une décision de justice.
Toutefois, il revient au Parlement d'écrire la loi. Il s'acquittera prochainement de cette tâche en examinant le projet de loi sur l'immigration, qui contient une réforme majeure visant à simplifier les procédures et à réduire de douze à quatre les catégories de recours. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer a également exprimé le souhait d'entamer un dialogue sérieux avec les associations, démarche à laquelle je souscris pleinement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Les habitants de Calais et du Calaisis sont inquiets, car une bombe industrielle et environnementale se trouve en plein cœur de ville, à proximité immédiate des habitations et d'un canal.
Le 31 mai dernier, l'usine chimique Synthexim, classée Seveso seuil haut, propriété du groupe Axyntis, a été placée en liquidation judiciaire, ses 120 employés licenciés emportant avec eux leur connaissance du site. Depuis, la direction d'Axyntis refuse non seulement de se plier à la loi en remettant en état ce site de 24 hectares, mais se montre également incapable de donner la liste des produits chimiques stockés dans des fûts en plein air. Cet été déjà, deux incidents furent constatés, sous la forme d'émanations suspectes de fumées.
Sur le site se trouvent désormais 1 900 tonnes de déchets dont la plupart ne sont pas encore identifiés. Nous connaissons néanmoins quelques-uns des produits les plus dangereux entreposés au grand air : 15 tonnes d'amphétamines, 350 kilogrammes de brome et 69 tonnes de cyanure. Si les amphétamines ont été évacuées lors des dernières semaines, le reste des composés chimiques présents sur site font craindre une catastrophe industrielle et environnementale qui répéterait les accidents des usines AZF ou Lubrizol, en plein cœur de ma circonscription.
Madame la Première ministre, nous ne pouvons pas vivre dans la peur d'une telle catastrophe. Si les représentants locaux de l'État ont pris le dossier à bras-le-corps, il est urgent que votre gouvernement agisse pour protéger les habitants.
Mes questions sont simples. Tout d'abord, quelles mesures comptez-vous prendre pour identifier, puis évacuer, les 1 900 tonnes de déchets encore présents sur le site, dont certains sont extrêmement dangereux ? Dans quels délais ?
Ensuite, comment comptez-vous financer ces évacuations de déchets puis la remise en état du site, alors que le dirigeant d'Axyntis, la maison mère de Synthexim, n'a rempli ni ses obligations légales ni ses obligations financières lors de la liquidation de l'entreprise ? Ce n'est pas au contribuable de mettre la main à la poche pour pallier l'incurie du chef d'entreprise.
Enfin, réclamerez-vous qu'on vous rende les millions d'euros de subventions publiques accordées au patron voyou d'Axyntis, qu'elles l'aient été pour le site de Calais ou pour ses autres sites en France ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Je vous remercie pour votre question et pour votre vigilance. Vous avez rappelé le problème dans ses grandes lignes, à commencer par la liquidation judiciaire, le 31 mai, d'un site classé Seveso seuil haut. Dès le début du mois de juin, les inspecteurs de l'installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) ont constaté que les obligations de mise en sécurité n'avaient pas été remplies. Le préfet a immédiatement pris des arrêtés. Malheureusement, la société mère s'étant débrouillée pour ne pas être joignable et pour ne pas laisser les fonds nécessaires à la mise en sécurité du site, j'ai demandé, en accord avec le préfet, à ce que l'Ademe, l'Agence de la transition écologique, intervienne au titre de l'urgence impérieuse pour le sécuriser et pour commencer à évacuer les déchets dangereux.
Les 15 tonnes d'amphétamines ont été évacuées. En ce qui concerne les 386 kilogrammes de brome et les 69 tonnes de cyanure, les opérations de déstockage interviendront à compter de la mi-novembre. Le caractère particulier de ces déchets nécessitait en effet l'instauration de protocoles qui viennent d'être validés, ce qui explique le délai d'intervention.
Cela laisse les 1 900 tonnes de déchets, qui représentent un volume très important. Elles feront l'objet d'un conditionnement et d'une sécurisation par la suite.
Abordons ensuite le financement. Le préfet a d'ores et déjà fait le nécessaire pour que l'État récupère 805 000 euros dans le cadre des garanties financières ; cette somme sera directement fléchée vers l'Ademe. Par ailleurs, j'ai demandé aux services de l'État – régionaux comme nationaux – d'activer l'article L. 512-17 du code de l'environnement, qui permet, comme vous le suggérez, de rechercher la responsabilité de la maison mère, Axyntis. Il est inacceptable qu'elle profite des résultats de l'usine tant qu'elle fonctionne, pour ensuite, au premier problème, s'en séparer en laissant derrière elle des tonnes de déchets dont le traitement est abandonné à l'État.
Le code de l'environnement nous donne la possibilité de mettre la maison mère face à ses responsabilités : c'est justement la voie qu'ont choisie les services gouvernementaux et locaux de l'État dans votre circonscription. Vous êtes entendu, monsieur Dumont. Je me tiens à votre disposition pour vous donner davantage d'explications.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Dans la nuit de vendredi à samedi, un incendie s'est déclaré au centre hospitalier universitaire (CHU) de Limoges et a fait deux morts et deux blessés. Grâce à la réactivité du service de sécurité, des pompiers du service départemental d'incendie et de secours de la Haute-Vienne, le Sdis 87, des policiers et de l'ensemble des personnels de l'hôpital, le pire a pu être évité et je tiens à exprimer à nouveau ma gratitude à chacun d'entre eux.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs des groupes RE et LFI – NUPES. – M. Laurent Jacobelli applaudit également.
Monsieur le ministre de la santé et de la prévention, je tiens à vous remercier d'être venu à Limoges. Samedi, l'heure était bien évidemment au recueillement mais, aujourd'hui, je veux vous alerter sur la situation dramatique dans laquelle se trouvent les hôpitaux de Haute-Vienne. Ce drame survient dans un contexte plus que dégradé : la semaine dernière, les urgences du CHU ont accueilli jusqu'à 80 patients pour seulement quinze boxes ! L'engorgement est avant tout structurel mais la fermeture répétée des urgences de Saint-Junien, à trente minutes de Limoges, contribue indéniablement à ce phénomène. Autrement dit, nous voyons bien comment d'un hôpital en difficulté, on aboutit à deux hôpitaux en crise.
L'hôpital de Saint-Junien, parlons-en ! Depuis juillet, ses urgences ont subi plusieurs semaines de fermeture, son service de soins de suite et de réadaptation est menacé de fermeture et ses personnels sont à bout de forces. Je pourrais évoquer l'hôpital de Saint-Yrieix-la-Perche et bien d'autres établissements ruraux encore. Chers collègues, lequel parmi nous ne connaît pas pareille situation sur son territoire ?
Monsieur le ministre, notre hôpital est dans une situation d'urgence vitale, particulièrement nos hôpitaux ruraux. Soignants et patients sont confrontés à une souffrance absolue. Les raisons, vous les connaissez : manque de personnel, tarification à l'acte, gouvernance inadaptée et progression des déserts médicaux. Ni le Ségur de la santé, ni les mesures proposées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024 ne donnent d'espoir à nos hôpitaux de proximité.
Nous attendons donc de vous des décisions fortes : à quand un moratoire sur la fermeture des services ruraux de proximité ? À quand la grande réforme de l'hôpital public dont nous avons tant besoin ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES et LIOT.
Monsieur le député, je souhaite tout d'abord m'associer à l'hommage que vous avez rendu aux personnels du CHU de Limoges. Dans la nuit de vendredi à samedi, ils ont eu une réaction exceptionnelle de courage, d'abnégation et d'efficacité, alors que nous sommes passés tout près d'un drame.
Les membres du service de sécurité incendie de l'hôpital sont montés dans les étages sans protection respiratoire pour transférer, en un quart d'heure, avec l'aide des policiers et des pompiers du Sdis 87, tous les patients du service de chirurgie viscérale. Le bilan est lourd, malgré tout, puisque nous avons eu la douleur d'apprendre la mort de deux personnes. Avec vous, monsieur le ministre, j'ai pu rencontrer les équipes et constater qu'elles étaient de nouveau au travail dès le samedi.
On renvoie souvent les soignants à l'héroïsme mais ce n'est pas ce à quoi ils aspirent. Ils demandent avant tout à pouvoir faire leur métier, qui est de dispenser chaque jour des soins. Le tableau que vous dressez, monsieur Delautrette, est en partie juste. Beaucoup d'hôpitaux souffrent mais les mesures prises depuis plusieurs années commencent à porter leurs fruits.
Nous avons lancé, y compris au CHU de Limoges, hôpital pivot de l'ex-région Limousin, des campagnes de recrutement de plus grande ampleur. La revalorisation de 25 % de la rémunération du travail de nuit, annoncée par Mme la Première ministre, contribuera à fidéliser les personnels. Enfin, le PLFSS contient une réforme qui permettra aux hôpitaux ne parvenant pas à tenir avec la seule tarification à l'acte de sortir de la situation dans laquelle ils se trouvent.
Je ne dis pas que tout est rose, loin de là, …
…mais il y a des chances qui s'offrent à nous. Les soignants attendent aussi cette sérénité que nous pouvons leur donner.
Madame la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, la Coupe du monde de rugby s'est achevée samedi lors d'un match de finale à l'issue duquel l'Afrique du Sud a conservé son titre.
Si nous aurions tous souhaité sur ces bancs voir nos Bleus aller plus loin, nous ne pouvons qu'être fiers de notre équipe nationale et nous féliciter du formidable engouement qu'elle a suscité depuis le match d'ouverture.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et sur quelques bancs du groupe LR.
Depuis sa désignation en tant que pays hôte en 2017 jusqu'au match final, la France n'a pas failli à sa réputation, qu'il s'agisse de l'esprit dans lequel elle a accueilli des centaines de milliers de supporters venus du monde entier – depuis la fraternisation d'avant, pendant et après match jusqu'à la diffusion mondiale de notre magnifique hymne de l'Aviron bayonnais – ou de la gestion logistique de l'événement.
Applaudissements et sourires sur les bancs du groupe Dem.
Nos infrastructures de transport aérien et ferroviaire, de transports en commun et nos structures d'hébergement ont démontré leur capacité à absorber un flux important de visiteurs. Nos forces de sécurité ont permis à la compétition de se dérouler dans les meilleures conditions. Je crois que nous pouvons les féliciter et les remercier.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et RE.
Les retombées pour notre pays sont d'ores et déjà positives, aussi bien en termes économiques qu'en termes d'image, ce qui est de bon augure.
Madame la ministre, avec les Jeux olympiques et paralympiques de l'été prochain, d'autres échéances d'une ampleur plus grande encore s'annoncent. Quel bilan dressez-vous de la Coupe du monde de rugby ? Quels points vous semblent devoir retenir notre attention si nous voulons faire en sorte que l'organisation de ces jeux soit à l'image de cette coupe du monde ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
La parole est à Mme la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques.
Par-delà le déchirement provoqué par l'élimination du XV de France face aux futurs vainqueurs, cette coupe du monde aura été un formidable succès. Beaucoup de records de fréquentation ont été battus : il y a eu 2,4 millions de spectateurs dans les différents stades, 1,6 million de personnes dans les Villages rugby et nous avons enregistré la meilleure audience télévisuelle de l'année, tous programmes confondus, avec le match France-Afrique du Sud.
Nous avons accueilli 600 000 visiteurs venus du monde entier et, une fois la phase de rodage passée, nous avons pu, grâce à une organisation fluide, efficace et parfaitement coordonnée entre toutes les parties prenantes, leur offrir une expérience à la hauteur de l'événement.
Cette Coupe du monde a reposé sur des standards particulièrement élevés en matière écologique et sociale, notamment du point de vue de l'inclusion. Elle a eu un impact positif sur le plan économique pour nos territoires, et son héritage se ressent déjà pour la pratique sportive et les métiers du sport.
Cet événement est aussi riche d'enseignements pour la suite : en matière de sécurité, car le dispositif piloté par Gérald Darmanin a fait la preuve de sa robustesse en dépit d'un contexte particulièrement exigeant ; en matière de transports, car nous avons su nous adapter, sous le pilotage de Clément Beaune, grâce à des renforts de capacités et d'effectifs, en pleine coordination avec les opérateurs de transport que je salue. J'ajoute que pour ce qui concerne l'engagement populaire, nous avons su, avec les collectivités, mettre en place un bon modèle de fanzones dont nous nous inspirerons pour les Jeux olympiques.
Par ailleurs, le travail se poursuit pour améliorer l'accessibilité de nos infrastructures, la gestion opérationnelle des flux de spectateurs et le guidage des visiteurs étrangers – point sur lequel nous avons le plus progressé en cours d'événement –, ainsi que pour affiner l'information délivrée aux voyageurs et optimiser le positionnement des volontaires sur les parcours à des fins d'orientation. Cette agilité collective, qui s'est aiguisée au fil des matchs, est un acquis utile en vue de l'organisation des Jeux olympiques.
Avec cette coupe du monde, nous avons fait rayonner notre pays et nous allons continuer à faire émerger une nouvelle référence d'événements sportifs plus sobres, plus responsables et plus solidaires.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.
Madame la Première ministre, l'hiver approchant, permettez-moi d'appeler votre attention sur un sujet du quotidien pour nos concitoyens qui habitent en zone de montagne, celui de la sécurité routière et des déplacements sur nos routes enneigées.
En décembre 2016, le législateur pensait avoir répondu à ces préoccupations avec l'acte II de la loi « montagne » ! Elle a en effet créé l'obligation d'équiper tout véhicule se déplaçant depuis, vers ou entre des communes de montagne de pneus neige ou quatre saisons, ou au moins de détenir dans son coffre des chaînes ou des chaussettes à neige permettant d'affronter les conditions climatiques avec un niveau de sécurité et de motricité renforcées.
En 2020, dans le rapport d'information sur l'évaluation de la loi « montagne » de 2016, Marie-Noëlle Battistel et moi-même avions alerté le Gouvernement sur la non-application de cette disposition. Il nous avait alors été répondu que le décret d'application serait publié de manière imminente. Or, trois ans plus tard, à la veille de l'ouverture de la saison hivernale, le 1er novembre, il n'a toujours pas été pris !
Je ne vous cache pas qu'il règne une certaine confusion autour de cette obligation. Madame la Première ministre, pouvez-vous nous éclairer sur la suite donnée à ce dossier et clarifier la position des assureurs en cas d'accident impliquant des véhicules ne possédant pas les équipements requis pour évoluer sur nos routes de montagne ?
L'économie du tourisme est essentielle en zone de montagne mais encore faut-il que le quotidien de celles et ceux qui y vivent et qui y travaillent soit respecté.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
En l'absence du ministre délégué aux transports, Clément Beaune, j'ai la joie de vous répondre, monsieur Rolland, sur un sujet que vous maîtrisez parfaitement compte tenu de la circonscription dont vous êtes l'élu et des travaux que vous avez menés par le passé.
À partir du 1er novembre et jusqu'au 31 mars, trente-quatre départements seront concernés, pour au moins l'une de leurs communes, par des arrêtés préfectoraux portant sur l'obligation d'équipement qui s'applique dans dix-huit des vingt-sept pays membres de l'Union européenne.
L'objectif premier de cette réglementation, avant celui de la répression, est bien d'assurer la sécurité des usagers. Tous ceux qui ont soutenu ces dispositions le savent, il s'agit avant tout d'éviter une cause d'accident majeure – même si elles auront des conséquences économiques qui ont provoqué les blocages que vous évoquiez – afin que les femmes et les hommes qui circulent dans ces véhicules ne soient pas blessés.
À la minute où nous parlons, le décret d'application permettant de créer une sanction dans le code de la route pour le non-respect de cette obligation n'a pas été publié.
Dans une visée pédagogique, nous avons choisi de procéder d'abord à des contrôles. Nous avons laissé deux années pleines aux usagers pour qu'ils s'habituent à cette nouvelle obligation. Toutefois, pendant la saison hivernale, qui débute demain, nous nous tiendrons prêts à dégainer ce décret si les contrôles montraient que le taux d'équipement des automobilistes est insuffisant. Les services du ministre délégué aux transports et les miens se tiennent à votre disposition.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
En fonction de quel taux d'équipement déciderez-vous de publier ce décret ?
Ma question s'adresse au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Sur le grave problème de la baisse du pouvoir d'achat qui frappe très durement les Français depuis trop longtemps, on ne vous lâchera pas. On ne vous lâchera pas car les Français vous hurlent leur désarroi et leurs inquiétudes, mais vous ne les écoutez pas.
Les députés du Rassemblement national sont là pour vous le rappeler, chaque jour si besoin. Les Français souffrent. Ils sont malheureusement de plus en plus nombreux à souffrir dans un contexte de crise économique sévère et de crise inflationniste inédite. Les Français veulent des actions concrètes, des mesures fortes, exceptionnelles pour certaines, durables pour les autres, en tout cas efficaces et surtout appliquées au plus vite : pour se nourrir, pour se soigner, pour se chauffer, pour se déplacer, bref, pour vivre une vie digne en France au XXI
Depuis des mois, nous réclamons des mesures simples. Alimentation, énergie, soins et transport, voilà les priorités sur lesquelles Marine Le Pen a fait de nombreuses propositions concrètes aux effets immédiats lors de l'élection présidentielle.
Pour le moment, vous exercez encore le pouvoir. Faut-il que les Français attendent 2027 pour que nous mettions, nous, enfin en place les mesures de bon sens qui amélioreront leur quotidien et leur rendront la vie plus simple et plus douce ?
Je vous en prie, ne nous répondez pas, comme d'habitude, que tout va bien, que vous avez raison, que vous faites tout bien, que vous êtes les meilleurs. Les Français méritent mieux que de la communication gouvernementale, ils ne vous demandent qu'une seule chose : agissez avec rapidité et efficacité !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme.
Vous m'autoriserez à vous paraphraser : nous non plus, nous ne lâcherons rien ! Nous ne lâcherons pas ce que nous avons enclenché depuis six ans au service des Français et que vous ne voulez pas entendre.
Nous ne lâcherons pas le retour de l'emploi,…
…avec plus d'1,5 million d'emplois créés depuis 2017. Nous ne lâcherons pas la réindustrialisation de la France, qui s'est traduite par l'installation de 300 usines.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Je sais que cela vous énerve, monsieur Tanguy, mais c'est la vérité ! 300 usines ont rouvert leurs portes depuis 2017 et pas moins de 90 000 emplois industriels ont été créés.
Nous ne lâcherons pas le partage de la valeur, que les députés de la majorité ont défendu avec force : cela vous paraît peut-être peu, mais cela représente presque 5 milliards d'euros, qui ont permis à 4,5 millions de salariés de percevoir 800 euros de plus cette année.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Nous ne lâcherons pas la croissance qui, au troisième trimestre, dans un contexte très difficile, est encore au rendez-vous.
Nous ne lâcherons pas ce que nous faisons…
…pour accompagner les Français, du bouclier tarifaire à l'indemnité accordée à ceux qui ont des difficultés à se déplacer en voiture, en raison du prix des carburants. Avec Bruno Le Maire, nous ne lâcherons pas notre combat contre l'inflation sur les produits alimentaires, dont vous avez omis de souligner qu'elle est passée depuis ce matin sous la barre des 8 %, comme vous avez oublié de préciser que l'inflation glissante est à 4 %. Nous ne lâcherons pas l'investissement des entreprises, qui a connu une hausse de 1,5 %.
Je sais, ces résultats ne font pas vos affaires, mais telle est la réalité du tableau économique de la France.
Nous ne lâcherons pas non plus la consommation des ménages qui résiste.
Cela vous ennuie, mais elle tient : + 0,7 %.
La question n'est ni d'être les meilleurs ni d'avoir raison, mais bien de regarder le tableau économique de la France tel qu'il est. Ce qui vous dérange, c'est que nous n'entretenons pas le désespoir mais bel et bien l'optimisme, contrairement à d'autres.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs des groupes RE et HOR.
Le 27 juin dernier, les quartiers populaires se révoltaient après la mort, à Nanterre, du jeune Nahel, tué par un policier. Cet événement s'inscrit dans un contexte de multiplication des violences survenues pour refus d'obtempérer, favorisée par l'adoption de la loi Cazeneuve. Depuis 2017, les tirs mortels sur des véhicules ont été multipliés par cinq ! En 2022, treize personnes ont été tuées !
Dès lors, comme en 2005, le soulèvement des quartiers populaires traduit une révolte politique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Pourtant, jeudi dernier, à la Sorbonne, vous annonciez en grande pompe des réponses 100 % répressives : sanctions à l'encontre des parents, création de centres d'encadrement par des militaires ou encore nouveaux pouvoirs accordés à la police municipale.
En misant sur le tout sécuritaire, plutôt que sur l'abrogation de la loi Cazeneuve, vous refusez d'entendre les revendications exprimées.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Plutôt que de pénaliser les parents et de réprimer les enfants, renforcez les services publics !
Mêmes mouvements.
Trois d'entre eux sont toujours menacés d'effondrement : l'éducation, alors qu'il est anormal que, dans ma circonscription, des enfants de moins de 16 ans soient, chaque année, sans affectation scolaire, livrés à eux-mêmes ;
Mêmes mouvements
la santé, à l'heure où les hôpitaux tombent en ruine et où les quartiers deviennent peu à peu des déserts médicaux ; la sécurité, enfin, alors que le lien de confiance entre la police et la population est désormais rompu.
Madame la Première ministre, quand élaborerez-vous enfin avec les acteurs de terrain et les élus de proximité un pacte social ambitieux pour les quartiers populaires ?
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique,…
Madame la députée, il y aurait beaucoup de choses à dire sur le constat que vous dressez et que je ne partage pas,…
…notamment s'agissant de l'origine politique des émeutes urbaines que la France a connues. Vous comparez ce contexte à 2005 : je ne suis pas d'accord. S'il y a bien eu un drame initial, moins de 10 % des émeutiers ont cité la mort du jeune Nahel comme motivation de leurs actes – les enquêtes de police et de justice l'ont montré.
Ne mélangeons donc pas tout. Il ne faut pas forcément voir dans les mouvements survenus dans certaines villes et quartiers populaires une révolte politique. En tout cas, ce n'est pas mon analyse.
Néanmoins, après avoir, dans un premier temps, démontré que nous étions capables de rétablir l'ordre,…
…d'arrêter les fauteurs de troubles et de punir,…
…la question s'est posée de savoir quelle était notre action, dans la durée, en faveur des quartiers populaires : pour éviter, d'abord, de nouvelles émeutes urbaines et pour développer, ensuite, une politique à destination des quartiers prioritaires, dans le cadre des actions du comité interministériel des villes (CIV).
Vous dites que la réponse est répressive à 100 %.
Je veux bien que certains, ici, publient des vidéos sur les réseaux sociaux, mais nous devons être capables de nous parler.
Qu'y a-t-il de répressif dans le fait d'ouvrir les collèges de huit heures à dix-huit heures dans les quartiers prioritaires ? En quoi la politique de testing annoncée par la Première ministre, afin de lutter contre les discriminations à l'embauche ou à l'accès aux prêts immobiliers, serait-elle répressive ?
Ce n'est pas nouveau ! C'était déjà le cas avant. Vous faites du ripolinage !
Qu'y a-t-il de répressif à lancer un programme Entrepreneuriat quartiers 2030, afin d'aider les jeunes qui ont du talent dans les quartiers à investir et à entreprendre ?
C'était déjà dans les tuyaux ! Vous n'y connaissez rien ! Donnez-lui des fiches !
Sortons des purs slogans ! Ceux qui vous écoutent ont l'impression que nous ne faisons rien pour eux, alors qu'en réalité nous agissons et que nous pourrions nous retrouver sur ces actions.
Je suis élu d'une circonscription que vous connaissez bien, madame la députée, puisqu'elle est gérée par un élu membre de La France insoumise : Grenoble. Voulez-vous que nous parlions du bilan grenoblois, depuis que ce mouvement est au pouvoir ?
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il n'y a plus de rénovation urbaine, plus de programme ANRU – programme national de renouvellement urbain. On laisse les pauvres s'entasser dans les quartiers et on ne met même plus d'eau sur les places des marchés des quartiers pauvres ! Regardez plutôt ce que vous faites là où vous gagnez, avant de nous donner des leçons !
M. le ministre délégué opine.
Or, ce que je constate sur le terrain ne correspond pas du tout à ce que vous décrivez. Je vous invite, monsieur le ministre délégué, à venir dans les quartiers populaires de ma circonscription. Chiche ! Donnons-nous rendez-vous et allons-y ensemble !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Monsieur le ministre de l'intérieur, la Coupe du monde de rugby vient de s'achever par une finale de titans entre la Nouvelle-Zélande et l'Afrique du Sud. Si, comme moi, de nombreux Français auraient aimé voir notre XV national aller plus loin dans la compétition, l'engouement du public s'est confirmé avec plus de 3,4 millions de spectateurs qui remplissaient notamment huit stades différents, répartis dans tout le territoire – voire davantage encore, si l'on tient compte des fanzones. Nous vous félicitons, monsieur le ministre, ainsi que tous ceux qui ont contribué à ce très beau succès, tant sur le plan de l'organisation que de la sécurité.
Malheureusement, les incidents de dimanche, qui ont conduit à l'annulation du match de football qui devait opposer les équipes de l'Olympique de Marseille (OM) et de l'Olympique lyonnais (OL), démontrent que rien n'est acquis.
Fort du succès obtenu à l'occasion de la Coupe du monde de rugby, pouvez-vous faire un point, monsieur le ministre, sur les moyens qui seront déployés pour assurer la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je vous remercie d'avoir salué les policiers, les gendarmes, les militaires de l'opération Sentinelle et les agents de sécurité privée qui ont garanti, comme l'a souligné la ministre des sports, une très belle Coupe du monde de rugby. Il y avait l'équipe des bleus sur le terrain, que nous avons soutenue, et les bleus en dehors du terrain, si j'ose dire, qui ont gagné la coupe du monde de la sécurité, puisque la France a accueilli 2 millions de visiteurs partout dans le territoire national .
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE
Ce succès, nous le devons à des opérations « zéro délinquance » – au nombre de 4 900. Il y a eu malgré tout plus de 800 interpellations et 500 alertes à la bombe, qui avaient pour but de désorganiser la Coupe du monde. Ajoutons que, dans le même temps, nous avons accueilli le Pape à Marseille, le roi et la reine d'Angleterre, dans un contexte de menace terroriste que nous connaissons tous. Merci, donc, aux policiers, aux gendarmes, aux préfets et aux militaires : c'est, d'abord, la réussite du système de sécurité français.
En ce qui concerne les Jeux olympiques et paralympiques, il nous faut encore travailler, notamment en matière de sécurité privée. En l'espèce, nous n'avons déploré que 3 % de défaillances parmi les agents de sécurité privée : ils ont été au rendez-vous, que ce soit dans les stades ou au-dehors.
Certes, un travail important reste à mener, sous l'autorité de la Première ministre, contre les cyberattaques – les Jeux de Tokyo en avaient subi 4 milliards, malgré la période de covid-19 – et contre les drones malveillants – plus d'une vingtaine d'entre eux ont été neutralisés pendant la coupe du monde de rugby, grâce à la loi que vous avez votée, monsieur le député. Ces drones se multiplieront évidemment pendant les Jeux olympiques et paralympiques.
Enfin, il nous faut lutter contre la délinquance : cela implique une mobilisation sans précédent des policiers et des gendarmes. Du mois de juin, qui verra la commémoration du débarquement de Normandie, à celui de septembre, qui marquera la fin des Jeux paralympiques, les forces de l'ordre consentiront un effort sans précédent de présence, en reportant notamment leurs congés. Cette présence sera massive puisque, grâce à la loi que vous avez votée, 8 000 policiers et gendarmes supplémentaires garantiront la sécurité des Jeux.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Permettez-moi de remercier également les forces de police, de gendarmerie et les pompiers. Je leur rends régulièrement visite dans ma circonscription ; je sais qu'ils se préparent.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Le Gouvernement a entrepris de réformer et de fusionner les différents zonages dans un dispositif appelé désormais France ruralité revitalisation (FRR), qui doit entrer en application en juillet 2024. Le nouveau dispositif, qui modifie certains critères, affectera de nombreuses communes partout en France.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : nous passerions de 17 000 communes actuellement bénéficiaires à 14 000, soit une exclusion de 20 % d'entre elles.
Dans ma circonscription, en Ariège, les élus et les entreprises installées sur ces zones sont inquiets.
Comment rassurer les communes qui sortiront du dispositif, compte tenu des critères de revenu médian par habitant et de densité démographique ? Dans un contexte d'aggravation de la fracture territoriale, vous envoyez un très mauvais message aux départements les plus ruraux.
Aujourd'hui, ce dispositif et son zonage constituent un élément d'attractivité indéniable, sur lequel s'appuient largement les communes du département de l'Ariège. Les élus sont donc fortement attachés à cet outil de soutien au développement des territoires ruraux, conçu comme un dispositif symbole d'équité territoriale.
Au-delà de cette réforme ponctuelle, il devient urgent de réfléchir collectivement pour définir les axes essentiels d'une politique d'aménagement du territoire efficace, au service du bien commun.
Mes questions sont donc simples : comment comptez-vous rassurer les communes qui sortiront du dispositif actuel de zones de revitalisation rurale (ZRR) et quelles mesures d'accompagnement entendez-vous prendre pour éviter à ces territoires d'être fragilisés encore davantage par ce désengagement de l'État ? Plus largement, ne pourrait-on pas réintégrer certaines communes qui doivent sortir du dispositif en prenant en considération la particularité géographique des territoires, notamment les handicaps naturels ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. – MM. Pierre Cordier et Fabien Di Filippo applaudissent également.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Dominique Faure, qui est chargée du projet France ruralité revitalisation, étant retenue en audition, j'ai la joie de vous répondre. Partons du commencement : le dispositif des ZRR était censé s'éteindre le 31 décembre 2021 ; il a été prolongé à deux reprises, dans le cadre des lois de finances initiales. La Première ministre Élisabeth Borne a pris, en novembre dernier, devant l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité, l'engagement solennel de conserver un zonage.
L'objectif est même de créer un zonage spécifique – il s'agissait jusqu'à présent d'un zonage unique –, avec l'idée d'aller plus loin que ce que permettaient les zones de revitalisation rurale et d'instaurer une sorte de dispositif ZRR +, ou FRR + pour reprendre le nouveau sigle.
La disposition que vous évoquez figure à l'article 7 du projet de loi de finances pour l'année 2024, dans sa version initiale, avant que le texte soit examiné par cette assemblée, puis par le Sénat, et nous savons les attentes des parlementaires sur le sujet. Que trouve-t-on, pour l'instant, dans cet article ? Six départements sont intégralement zonés.
Le Cantal, l'Indre, la Creuse, la Haute-Marne, la Meuse et la Nièvre. Je sais que la Lozère ou l'Ariège – au hasard – considèrent qu'ils devraient faire partie de ce groupe. Nous avons retenu un critère de déprise démographique supérieure à 4 % sur une période de dix ans. À cela s'ajoutent des communes, avec le maintien d'une maille intercommunale, sachant que les préfets ont désormais la possibilité d'inclure à cette maille des communes appartenant à des intercommunalités que leur richesse ou leur densité exclut du dispositif. Nous faisons confiance au dialogue avec les parlementaires pour déterminer si ce dispositif est parfaitement adapté ou s'il doit être légèrement recalibré.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du logement. « Gouverner, c'est d'abord loger son peuple » : cette citation de l'abbé Pierre a beau avoir plus d'un demi-siècle, elle résonne toujours avec force – elle rappelle votre échec. Les locataires sont assommés par les hausses de loyer que vous avez décidées : 3,5 % l'année dernière, et 3,5 % cette année.
Depuis que le président Macron a été réélu, il faut payer l'équivalent d'un treizième mois de loyer. C'est une honte !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Les augmentations de charges sont astronomiques, jusqu'à 200 % ou 300 %. Votre bouclier tarifaire ne protège pas les gens, il protège les superprofits des multinationales de l'énergie. C'est une honte !
Des milliers d'étudiants dorment au camping ou à l'auberge de jeunesse, ou doivent encore renoncer à leurs études. Votre refus de construire des logements relevant des Crous – les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires – les a empêchés de choisir leur vie. C'est une honte !
Les habitants du littoral voient leurs logements confisqués par Airbnb et par les résidences secondaires. Les enfants du pays restent à la rue, pendant que les multipropriétaires dictent leur loi. C'est une honte !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe SOC.
Tout cela, c'est votre bilan. La Macronie a mené une politique d'austérité qui a tout détruit – c'est une saignée historique. L'effort public pour le logement n'a jamais été aussi faible depuis les années 1970. En 2017, vous promettiez un choc de l'offre, mais le seul choc qui a eu lieu, c'est celui de la misère.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.
En cette rentrée, 2 800 enfants dorment à la rue – deux fois plus que l'année dernière –, mais vous ne comptez rien faire, pas même ouvrir les 10 000 places d'hébergement d'urgence demandées par les associations.
Pour sortir de la crise du logement, il faut d'abord sortir de la logique libérale et de la financiarisation. Il y a une solution, le retour de l'État :
Mêmes mouvements
un État qui investisse pour construire les logements sociaux dont nous avons besoin, un État qui finance la rénovation des logements pour tenir nos engagements écologiques, un État qui régule les loyers et le foncier pour garantir un logement abordable.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Gouverner, c'est d'abord loger son peuple. Si vous ne vous en sentez pas capable, monsieur le ministre délégué, laissez-nous faire !
Les députés du groupe LFI – NUPES et M. Inaki Echaniz se lèvent et applaudissent. – Plusieurs députés des groupes Écolo – NUPES et GDR applaudissent également.
L'accord que nous avons passé avec le mouvement HLM à Nantes témoigne de l'engagement du Gouvernement en faveur du logement social. J'en rappellerai les grands chiffres : 1,2 milliard d'euros pour accompagner la rénovation énergétique des logements locatifs sociaux dans les trois prochaines années, et 8 milliards de prêts bonifiés de la Caisse des dépôts, équivalant à 650 millions de charges. Si le mouvement HLM a signé cet accord, c'est parce qu'il est substantiel et qu'il permet de tenir deux engagements majeurs : d'une part, la rénovation énergétique des logements sociaux, indispensable pour le confort et le pouvoir d'achat des locataires, et d'autre part, la production de logements sociaux.
Vous évoquez les loyers : nous avons plafonné leur augmentation à 3,5 %,…
…sans quoi elle aurait atteint 6 %. Les aides personnalisées au logement (APL) ont été alignées sur ce même taux de 3,5 %.
Cela permet aux locataires qui bénéficient des APL d'effacer la hausse des loyers.
Allons plus loin : il est intéressant de mesurer le taux d'effort de nos concitoyens dans le logement social, en comparaison avec le logement privé. Pour le premier décile, c'est-à-dire pour nos concitoyens les plus pauvres, le taux d'effort équivaut à 29 % dans le logement locatif social, alors qu'il atteint 52 % dans le parc privé.
C'est effectivement pour cela, monsieur le député, qu'il est indispensable de protéger le logement locatif social, comme nous le faisons, mais aussi d'accompagner les locataires du parc privé.
Vous m'interrogez enfin sur l'hébergement d'urgence : en la matière, aucun gouvernement n'a autant agi que le nôtre. Le plan « logement d'abord » est reconnu par toutes les associations, et le nombre de places en hébergement d'urgence est passé de 93 000 à 203 000.
Jamais aucun gouvernement n'avait réalisé un tel effort.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention. Selon l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), plus de 3 700 ruptures ou risques de rupture de médicaments ont été recensés en France en 2022, contre moins de 200 en 2012. Cette année, avant même l'arrivée des pathologies hivernales, plusieurs régions souffrent d'une pénurie d'antibiotiques, comme l'amoxicilline – c'est particulièrement vrai dans les Hauts-de-France et le Sud-Est.
Les causes de ces pénuries sont multiples et conjoncturelles : à la guerre en Ukraine et à l'explosion de la consommation de médicaments en Chine s'ajoute une extrême concentration de la production. Certains médicaments sont en effet fabriqués par une seule entreprise, ce qui fragilise la chaîne de distribution.
Quant au vaccin contre la bronchiolite des bébés, il est déjà en rupture de stock, et la commande de 200 000 doses ne répondra probablement pas à la forte demande.
Le Gouvernement vient d'annoncer une relocalisation des entreprises qui fabriquent certains médicaments. Il entend également rendre obligatoire la vente à l'unité de certains antibiotiques, pour réduire le gaspillage. Au mois de juillet dernier, une commission d'enquête du Sénat a esquissé des pistes pour remédier à cette situation, comme la production en Europe des médicaments essentiels.
Quelles mesures comptez-vous prendre rapidement, monsieur le ministre, pour répondre à cette pénurie de médicaments ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Nous avons effectivement subi une pénurie de médicaments extrêmement forte l'année dernière, et nous connaissons à nouveau des tensions cette année pour certains produits.
Pour répondre très directement à votre question, j'ai mandaté l'ANSM, qui suit 450 médicaments prioritaires – parmi lesquels l'amoxicilline –, et dont les pouvoirs de police sanitaire ont été renforcés : en cas de blocage dans le circuit de distribution, elle doit en particulier s'assurer que les médicaments arrivent dans toutes les pharmacies. Puisque nous disposons de stocks au niveau global, l'enjeu est de suivre chaque étape, depuis les industriels jusqu'aux grossistes-répartiteurs, aux pharmaciens et aux patients, pour savoir où se situent les blocages.
Tous les pays d'Europe connaissent de telles difficultés – vous avez raison de le souligner, monsieur le député. Pour autant, nous ne restons pas les bras croisés. Concernant l'amoxicilline, nous avons proposé aux industriels une augmentation des prix – sans effet sur le coût supporté par le patient –, en échange d'une garantie de livraison par les industriels. Comme vous l'avez souligné, cette industrie est très concentrée. Je le répète, les stocks sont satisfaisants sur le plan global, mais certaines régions rencontrent des difficultés – vous les avez citées. Je réunirai la semaine prochaine tous les industriels, les grossistes-répartiteurs et les représentants des pharmacies pour comprendre les blocages et déployer tous les moyens nécessaires pour les lever.
Par ailleurs, nous voulons relocaliser la production de vingt-cinq médicaments essentiels ; le Président de la République s'y est engagé lors d'un déplacement en Ardèche. Je m'assure auprès des industriels qu'ils tiendront leurs engagements – c'est essentiel. Pour ce qui est du Beyfortus, nous nous efforçons quotidiennement, avec l'aide de la Première ministre, de compléter la commande de 200 000 doses qu'a passée la France. Notez qu'il s'agit de la plus importante livraison prévue pour un pays européen.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention. Il n'est pas un sujet face auquel le Gouvernement ne fasse l'autruche, niant au Parlement son rôle de contrôle, privant les Français d'un débat équitable par un détournement systématique de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. Ce gouvernement, nous le savons désormais, a en horreur le dialogue et la sincérité.
Le 13 juin dernier, j'interrogeais votre ministère sur la politique inavouée de fermeture de maternités. Vos équipes m'ont répondu qu'elles ne suivaient pas les préconisations de l'Académie nationale de médecine, et qu'elles n'avaient « pas de politique volontariste de fermeture des établissements de santé ».
Depuis 2000, le taux de fécondité des Françaises est inchangé. Pourtant, vous voulez fermer pas moins de 111 maternités ; le Syndicat des gynécologues et obstétriciens de France dénonce cette catastrophe, dont vous niez la responsabilité. La maternité de Péronne est déjà close, et la prochaine sera celle d'Ancenis, pour ne citer qu'elles.
Vous ne pouvez pas nier que vous conduisez une politique de fermeture de maternités, prenant pour prétexte le risque d'un service mal calibré – risque que vous transposez et accentuez pourtant en saturant des centres hospitaliers universitaires (CHU). Ceux-ci sont engorgés par des mamans qui doivent faire près d'une heure de route pour mettre au monde leur enfant. Votre argument idiot n'est que paradoxe et contradiction avec le réel, comme d'habitude.
Monsieur le ministre, entendez-vous poursuivre cette transformation des services publics en organismes prestataires de services où seuls vos bureaucrates sont en compétition pour plaire à votre régime, où ils promeuvent leurs carrières par le même déni, les mêmes trahisons et les mêmes feintes, niant le bon sens par la caricature du raisonnement ? Si tel est le cas, on ne baigne plus seulement dans le cynisme, on patauge dans l'imbécillité !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Merci, madame la députée, pour cette question tout en nuances.
Sourires sur les bancs du groupe RE.
La maternité de Péronne a réalisé quatre-vingt-seize accouchements cette année, avant de devoir suspendre son activité début octobre, faute d'un anesthésiste réanimateur qui permette d'assurer la continuité des soins.
Permettez-moi de vous dire, au risque d'être technocratique ou imbécile – ou un autre des qualificatifs que vous avez employés –, que la médecine est un art dans lequel il faut savoir faire les gestes qui sauvent.
Ces gestes, on sait les faire parce qu'on les pratique plusieurs fois au cours de la journée ou de la semaine. Jamais nous n'avons cherché à fermer la maternité de Péronne. Songez que ces quatre-vingt-seize accouchements représentent un accouchement tous les trois jours – et il faudrait s'assurer que le gynécologue est capable d'intervenir assez vite en cas d'éclampsie. Entre votre vague promesse d'une égalité formelle de l'offre de soins sur le territoire, et l'assurance qu'une parturiente sera prise en charge, qu'elle ne mourra pas en couches et que son bébé survivra, la différence est grande.
Dans votre monde, aller accoucher à Saint-Quentin ou à Amiens plutôt qu'à Péronne est un déchirement – je le comprends.
Mon déchirement serait qu'avec vos arguments politiciens, la variable d'ajustement soit la santé et la sécurité des soins – je ne m'y résoudrai jamais. Je ne me résoudrai jamais à fermer un service pour des questions financières. J'ignore à quoi vous faites référence quand vous dites que nous voudrions fermer 111 maternités. En revanche, je ne me résoudrai jamais à maintenir ouvert un service dans lequel je ne conseillerais à personne d'accoucher. Nous suivons un principe : la santé et la sécurité des soins. Telle est la promesse républicaine avant tout.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Très bien !
Si je comprends bien, votre seule réponse au manque de personnel soignant est la fermeture des maternités et des hôpitaux. Alors, je n'ai qu'une seule chose à dire : vivement 2027, que Marine Le Pen soit élue !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE et LFI – NUPES.
Je souhaite aborder avec vous, monsieur le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, la mise en œuvre de la politique agricole commune (PAC) dans la période 2023-2027, et plus particulièrement la question des mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec). Jusqu'en 2022, les régions étaient les autorités gestionnaires de ces fonds européens. Combinés avec des crédits publics de l'État, des régions et des agences de l'eau, ces subsides permettaient aux agriculteurs qui s'engageaient dans des pratiques vertueuses – notamment dans l'élevage en Bretagne – de faire entrer leur profession dans la transition écologique.
Pour ce qui est du programme 2023-2027, l'État a provisionné environ 90 millions d'euros. La direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf) de Bretagne prévoit pour sa part 150 millions. Pour la seule région Bretagne, l'écart avec la situation précédente est donc de 60 millions d'euros. Régions de France estime que pour le territoire national, le manque équivaudra à 250 ou 300 millions.
Les mesures agroenvironnementales et climatiques sont un contrat entre les agriculteurs et la puissance publique pour embarquer l'agriculture dans la transition écologique. En la matière, nous n'avons donc pas droit à l'erreur. Lorsque les régions pilotaient ce dispositif, il fonctionnait bien. Nous vous alertons sur ce problème depuis septembre, monsieur le ministre ; la commission des affaires économiques en a amplement débattu, et des parlementaires vous ont adressé des courriers. Vous devez vous saisir de cette question à tout prix. C'est sous votre autorité que l'ensemble des partenaires doivent se mobiliser pour accorder des financements. Rien ne serait pire que de démontrer que lorsque l'État gère les crédits européens, il échoue. Cela nourrirait aussi, malheureusement, une détestation de la politique agricole commune alors que pour l'agriculture, en particulier en Bretagne…
Merci, monsieur le député, votre temps de parole est écoulé.
La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Merci de votre question, qui me permettra de compléter la réponse que j'ai faite à M. Paul Molac et de saluer la mobilisation de tous les députés de Bretagne sur le pilier important de la PAC que constituent les mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec).
Comme je l'ai dit précédemment, l'ensemble des dispositions de la politique agricole commune pour la période allant de 2023 à 2027 illustrent la volonté de faciliter, d'accélérer et de renforcer la transition, à travers l'écorégime, la conversion en agriculture biologique et les Maec.
Vous savez, monsieur le député, que je suis un élu régional, un territorial, et vous me pardonnerez de le dire comme cela : la question n'est pas de savoir qui gère. Lors de la précédente loi de programmation, 255 millions d'euros de crédits étaient prévus pour les Maec et nous avons provisionné 260 millions d'euros. J'en appelle à la responsabilité de chacun : il n'est pas recevable de prétendre que 500 millions d'euros sont nécessaires. En effet, la politique des Maec n'est pas une politique de guichet.
Nous avons besoin de trouver un chemin qui tienne compte des exigences qui avaient été posées et du cadre budgétaire que tout le monde connaissait, qui était de 255 millions d'euros, afin – vous avez raison – d'encourager les agriculteurs qui veulent s'engager dans les pratiques favorisées par les Maec.
La région Bretagne a beaucoup mobilisé les Maec : c'est une bonne chose car cela permet de faire évoluer les systèmes, aussi bien en ce qui concerne le bilan carbone que la biodiversité ou l'eau. Nous savons que c'est important et nous serons au rendez-vous, comme nous l'avons été sur toutes les politiques.
J'ai évoqué deux pistes dans ma réponse à M. Molac. La première consiste à vérifier que, conformément aux engagements pris, les agences de l'eau mobilisent les crédits supplémentaires prévus au niveau national, qui s'élèvent à 70 millions d'euros par an. La seconde consiste à établir quels sont les reliquats des crédits de la politique agricole ; toutefois, monsieur Benoit, vous savez qu'on ne connaît les reliquats qu'en fin d'année. Néanmoins, j'essaie de faire des prévisions. Nous sommes mobilisés, vous le savez, mais je ne peux pas inventer des dispositifs tant que les reliquats des dispositions de la PAC ne sont pas connus.
L'État s'est mobilisé pour les régions ; je suis sûr que les régions se mobiliseront à leur tour, la région Bretagne en particulier, afin de trouver des solutions budgétaires, pour ne pas toujours tout demander à l'État.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Dem.
En 2014, Robert Badinter écrivait : « Soixante-dix ans se sont écoulés depuis la nuit de l'Occupation, les crimes des nazis et de leurs complices de Vichy. Le temps de l'Histoire a succédé au temps de la Mémoire. Les derniers témoins vont disparaître à leur tour. Et l'antisémitisme est toujours vivant. »
Oui, l'antisémitisme est toujours vivant. La recrudescence des actes antisémites en France nous le rappelle cruellement : 819 actes antisémites ont été recensés ces trois dernières semaines. C'est deux fois plus que pour la totalité de l'année 2022.
À Paris, dans les Hauts-de-Seine et en Seine-Saint-Denis, des dizaines et des dizaines d'étoiles de David ont été taguées sur les murs des immeubles. À Villeurbanne, une synagogue a été menacée d'incendie. À Paris, une mézouzah fixée à la porte d'un appartement a été brûlée.
Ces actes intolérables s'attaquent à notre pacte républicain. Ces actes antisémites décomplexés et nauséabonds contreviennent à l'article 1er de la Constitution : « La France […] assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. »
Madame la Première ministre, le 10 octobre dernier, vous avez déclaré dans cet hémicycle ne tolérer aucun acte, aucun propos antisémite. Dans cette lutte, vous avez le plein et entier soutien des écologistes.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et SOC, ainsi que sur quelques bancs du groupe RE. – MM. Louis Boyard et William Martinet applaudissent également.
Nous devons traiter le mal à la racine. Ce qui caractérise l'antisémitisme, c'est la permanence de la stigmatisation, or nous avons baissé les bras. Les actes que nous dénonçons sont les conséquences d'une longue banalisation de la parole antisémite et raciste : le négationnisme de Jean-Marie Le Pen, le révisionnisme d'Éric Zemmour, l'antisémitisme complotiste de Dieudonné et de Soral.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Madame la Première ministre, je conclurai avec les mots et la question de Robert Badinter : « Il en va de l'antisémitisme comme du racisme. Ce sont des poisons de la République. À une certaine dose, elle en meurt. »
Alors, « Comment éradiquer cette violence [et] dissiper [l']ignorance » ?
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
Je le redis très clairement : rien ne justifie l'antisémitisme ; rien ne l'excuse. Jamais. Je sais que vous partagez ces propos, madame la présidente Chatelain.
Je peux vous assurer que le Gouvernement est déterminé à mener une lutte implacable contre l'antisémitisme. Vous l'avez rappelé, depuis les attaques terroristes du 7 octobre contre Israël, nos concitoyens juifs vivent dans l'angoisse. Depuis le 7 octobre, comme je l'ai dit, plus de 850 faits antisémites ont été recensés et près de 6 000 signalements ont été faits en ligne.
Nous ne laisserons rien passer, madame la présidente Chatelain, ni la haine sur la voie publique ni la haine sur les réseaux sociaux, ni non plus celle qui se dissimule derrière l'antisionisme.
C'est pourquoi des consignes de vigilance ont, dès le 7 octobre, été passées aux préfets et aux forces de l'ordre. C'est aussi pourquoi les préfets ont dans certains cas pris des arrêtés d'interdiction de manifestation afin de prévenir tout dérapage ou trouble à l'ordre public.
La situation au Proche-Orient ne doit être le prétexte à aucune tentative de récupération, à aucune volonté d'attiser les haines ou de souffler sur les braises. L'antisémitisme est un poison. Nous savons tous où il peut mener.
Alors, ensemble, nous devons le combattre avec la plus grande force et la plus grande détermination.
Je sais pouvoir compter sur vous, madame la présidente Chatelain, comme je sais pouvoir compter sur l'ensemble des députés qui partagent les valeurs républicaines. Plus encore, face aux tensions internationales, nous avons chacun un rôle à jouer pour apaiser et faire nation.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem, SOC, Écolo – NUPES, GDR – NUPES.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures quinze, sous la présidence de Mme Valérie Rabault.
Nous abordons l'examen des crédits relatifs à l'administration générale et territoriale de l'État (n° 1745, annexe 2 ; n° 1778, tome I), aux sécurités (n° 1745, annexes 42 et 43 ; n° 1778, tomes VII et VIII ; n° 1808, tome VIII) et au compte d'affectation spéciale "Contrôle de la circulation et du stationnement routiers" (n° 1745, annexe 42).
La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Madame la présidente, madame la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, chers collègues, la mission "Administration générale et territoriale de l'État" traite essentiellement des moyens et des emplois du réseau des préfectures, ainsi que de ceux de l'administration centrale du ministère de l'intérieur – hors police, gendarmerie et sécurité civile. Le projet de loi de finances (PLF) prévoit une hausse de près de 2 % de ses crédits de paiement (CP), qui atteindront 4,7 milliards d'euros en 2024. La principale augmentation concerne le programme 232 Vie politique, en lien avec l'organisation des élections européennes, qui se dérouleront le 9 juin 2024 et qui nécessiteront l'ouverture de 138 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2023, année marquée par l'absence de scrutin d'envergure nationale au suffrage direct. Au total, l'organisation de ces élections devrait coûter 180 millions d'euros en 2024, soit 3,37 euros par électeur inscrit, contre 112 millions d'euros, soit 2,78 euros par électeur inscrit, en 2019.
Les crédits du programme 354 Administration territoriale de l'État devraient quant à eux être reconduits quasiment à l'identique par rapport à la dernière loi de finances – reconduction synonyme de consolidation, dans la mesure où le dernier projet de loi de finances entérinait une hausse inédite de 7 %, afin de réarmer les préfectures. Ce renforcement de l'administration territoriale de l'État devrait également se traduire par un schéma d'emplois positif à hauteur de 232 équivalents temps plein (ETP) soit une augmentation de 0,5 %.
Je reviendrai dans quelques instants sur la question des effectifs, à laquelle j'ai consacré une partie importante de mes travaux de rapporteur spécial cette année. Avant cela, je termine la présentation du budget de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" pour 2024 en relevant la hausse considérable des autorisations d'engagement (AE) du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur : cette augmentation atteint 748 millions d'euros, soit 38,3 %, par rapport à 2023. Elle résulte essentiellement de l'engagement d'importantes dépenses au titre de la construction du nouveau site de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) à Saint-Ouen. Voilà pour l'analyse de grandes lignes des crédits de la mission au titre de l'année 2024. Je précise que la commission des finances les a votés après avoir adopté six amendements, dont deux de crédits.
J'en viens à deux sujets qui me semblent importants pour la mission "Administration générale et territoriale de l'État" et plus particulièrement pour le programme 354 Administration territoriale de l'État, qui concentre plus de la moitié de ses crédits.
Le premier, qui concerne la performance, a trait aux délais de délivrance des cartes d'identité et des passeports. Souvenons-nous que lorsque la crise a commencé, au printemps 2022, le ministère de l'intérieur expliquait qu'elle n'était que la conséquence d'un effet de rattrapage post-covid. Ayant, dans le cadre du Printemps de l'évaluation, consacré mes travaux à cette question, je suis arrivé à la conclusion que l'accroissement considérable des délais d'obtention était le résultat d'une mauvaise conception de la chaîne de délivrance elle-même, laquelle repose sur le volontariat de communes ayant souhaité accueillir un dispositif de recueil des demandes. Les retards observés concernaient en effet l'obtention d'un premier rendez-vous plutôt que l'instruction du dossier ou la production du titre.
Un an et demi plus tard, où en sommes-nous ? Au printemps dernier, nous avons à nouveau connu des délais considérables : en mars, il fallait en moyenne patienter deux mois et demi pour pouvoir faire enregistrer sa demande. En comptant la phase d'instruction, trois mois étaient donc nécessaires pour renouveler sa carte d'identité ou son passeport. Difficile, à l'approche de l'été 2023, d'évoquer encore un rattrapage post-covid. Je continue de penser qu'il faut mieux indemniser les communes qui disposent d'un dispositif de recueil et mieux encadrer leur offre de rendez-vous.
Le second thème saillant de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" concerne ses effectifs. Au cours des quinze dernières années, l'administration préfectorale a connu trois réformes : la réforme de l'administration territoriale de l'État (Reate) en 2010, la fusion des régions en 2016 et le plan Préfectures nouvelle génération, dit PPNG, en 2017. Elles ont conduit à une baisse d'au moins 15 % des effectifs rémunérés par le programme examiné en l'espace d'une décennie. Au cours de cette période, chaque projet de loi de finances annonçait un schéma d'emplois négatif, à hauteur de 433 ETP en moyenne, soit une baisse de 1,5 % chaque année. À partir de 2021, le schéma est devenu neutre pour la première fois, avant d'être positif à compter de 2023.
Partant de ce constat, j'ai voulu savoir si cette trajectoire était propre aux seuls services déconcentrés et quelles missions elle avait concerné. Comme je l'imaginais, il apparaît que les emplois en administration centrale, rémunérés par la mission "Administration générale et territoriale de l'État," ont augmenté dans le même temps d'environ 1 000 ETP :…
…ce sont les missions liées à l'instruction des titres, à l'organisation des élections, au contrôle de légalité ou à la représentation de l'État qui ont perdu le plus d'emplois. Le renforcement des préfectures ne saurait toutefois se limiter à la seule question des schémas d'emplois : d'une part, ces structures souffrent d'un déficit d'attractivité important, qui peut se trouver aggravé dans les départements à la démographie déclinante ; d'autre part, il semble nécessaire de mieux allouer les ressources humaines entre territoires.
J'ai compris, au cours de mes déplacements, que le dialogue de gestion entre l'administration centrale et le niveau départemental est en réalité quasi inexistant.
En conclusion, je vous invite à voter, comme l'a fait la commission des finances, pour l'adoption de ces crédits qui assurent le fonctionnement de l'État dans les territoires.
Mme Christine Pires Beaune applaudit.
La parole est à Mme Nadia Hai, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Je tiens, à titre liminaire, à rappeler le contexte dans lequel l'Assemblée s'apprête à examiner les crédits de la mission "Sécurités" . Les policiers et les gendarmes n'ont jamais été aussi mobilisés que ces derniers mois. Ils sont sur tous les fronts, luttant contre le grand banditisme et les trafics de stupéfiants, assurant la sécurité du quotidien et combattant la menace terroriste. Je souhaite rendre un hommage appuyé et solennel à toutes les forces de sécurité intérieure (FSI), qui œuvrent au quotidien pour la sécurité de tous les Français, au péril de leur vie de famille, de leur intégrité physique et parfois même de leur vie.
Aussi, je tiens à remercier le ministre Gérald Darmanin de soumettre à notre assemblée un budget à la hauteur des enjeux. Le projet de loi finances prévoit ainsi une hausse de 1,2 milliard d'euros en autorisations d'engagement et de près de 1,1 milliard en crédits de paiement, augmentation qui profitera dans des proportions équivalentes à la police et à la gendarmerie nationale. Cette trajectoire, globalement conforme à celle qui figure en annexe de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi) du 24 janvier 2023, permettra progressivement le doublement de la présence des policiers et des gendarmes sur la voie publique d'ici à dix ans. Cette mesure phare, annoncée par le Président de la République en conclusion du Beauvau de la sécurité, passe par un renforcement des effectifs, déjà engagé en 2023 et qui se poursuivra en 2024, grâce à un schéma d'emplois positif à hauteur de 2 184 ETP.
Une priorité est également donnée au financement d'équipements numériques permettant de travailler de façon mobile. Cette mission sera notamment confiée à la nouvelle Agence du numérique des forces de sécurité intérieure (ANFSI) créée le 1er
Sur le plan humain, au-delà de l'accroissement des effectifs, le déploiement des protocoles sociaux prévus par la Lopmi se poursuivra en 2024. Les mesures catégorielles représenteront 195 millions d'euros pour la police nationale et 155 millions d'euros pour la gendarmerie. Elles témoignent d'une véritable reconnaissance envers les forces de l'ordre.
J'ai trois remarques à formuler sur la mission "Sécurités" dans son ensemble. La première est d'ordre structurel : l'enveloppe allouée à l'action sociale du ministère me semble trop faible, alors même qu'il s'agit là d'un enjeu majeur d'attractivité des métiers concernés. Pour la police nationale, seuls 10 millions d'euros sur les 44 millions disponibles seront ainsi consacrés à l'articulation entre vie professionnelle et vie familiale. L'enveloppe allouée à la gendarmerie se limite quant à elle à 2,4 millions d'euros, consacrés principalement à l'accompagnement des blessés et des invalides. Pour augmenter cette enveloppe sans créer de dépenses supplémentaires – j'insiste sur ce point –, je propose de réviser la contribution au fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). Cette contribution, de l'ordre de 30 millions d'euros par an, ne fait pas l'objet d'une budgétisation en loi de finances initiale. Contrairement aux autres professions dont l'exercice suppose la maîtrise de prérequis physiques et psychologiques, la police nationale est en effet tenue d'employer 6 % de travailleurs handicapés parmi ses personnels actifs. Pour qu'elle satisfasse à cette obligation, il faudrait que plus de 50 % des personnels administratifs disposent d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), ce qui est impossible.
La deuxième remarque est d'ordre conjoncturel : l'année 2024 sera marquée par une mobilisation exceptionnelle et inédite des effectifs en vue de la sécurisation des Jeux olympiques. Dans ce cadre, j'ai déposé en première partie du projet de loi de finances un amendement visant à exonérer d'impôts les heures supplémentaires réalisées durant cette période. Je regrette que l'Assemblée n'ait pas adopté cette mesure de justice ciblée et temporaire et que le Gouvernement ne l'ait pas retenue après avoir eu recours à l'article 49.3. Je compte sur la navette parlementaire pour permettre de voter cette compensation, qui me semble constituer une simple mesure de justice.
La troisième remarque concerne la nécessité d'amplifier l'effort de rénovation des bâtiments affectés au logement des gendarmes et de leur famille. Certaines casernes sont en effet dans un état indigne. Nous aurons l'occasion d'y revenir au cours de nos débats.
En conclusion, je donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission "Sécurités" , qui n'incluent pas le programme Sécurité civile. Le budget proposé me semble en effet répondre aux enjeux auxquels nous faisons face en matière de sécurité.
M. Thomas Rudigoz applaudit.
La parole est à M. Florian Chauche, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Il me revient de vous présenter les crédits proposés par le Gouvernement pour le programme 161 consacré à la sécurité civile. Pour l'année 2024, le montant des autorisations d'engagement s'élève à 686,5 millions d'euros et celui des crédits de paiement à 734,6 millions. Les autorisations d'engagement diminuent de 53,36 %, du fait de la contractualisation, en 2023, d'importants marchés de renouvellement des moyens opérationnels du ministère : 150 millions d'euros au titre des pactes capacitaires, 471,6 millions d'euros pour l'acquisition de trente-six hélicoptères et 240 millions d'euros pour le renouvellement et l'extension de la flotte de Canadair.
Les crédits de paiement augmenteront de 2,87 % par rapport à 2023. Une fois retranchée l'inflation de 2,6 % prévue en 2024, la hausse réelle sera ainsi de 0,27 % – autant dire que le budget stagne.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Alors que nos forces de sécurité civile font face à des défis majeurs, le budget qui leur est alloué est celui qui progresse le moins de toute la mission "Sécurités" . Les crédits de la police nationale augmentent de 4,5 %, ceux de la gendarmerie nationale de 4,8 % et ceux de la sécurité et l'éducation routière de 46,4 %. Pour moi, le compte n'y est pas.
Du côté des moyens nationaux, je me réjouis que l'État poursuive son effort financier en faveur de la prise en charge des menaces NRBCE – nucléaires, radiologiques, biologiques, chimiques et explosives –, de l'annonce de la création d'une quatrième unité de Formisc, les formations militaires de la sécurité civile, ainsi que du renouvellement de la flotte des hélicoptères de la sécurité civile.
Je suis en revanche plus inquiet s'agissant de la flotte d'aéronefs bombardiers d'eau de la sécurité civile. Le Président a annoncé le renouvellement et l'extension de la flotte de Canadair mais des doutes importants pèsent sur la capacité du constructeur canadien à tenir les délais. Nos Canadair ont déjà plus de vingt-cinq ans d'âge et les nouveaux appareils n'arriveront pas avant 2028 – au plus tôt.
Aujourd'hui l'État et les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) ont recours à la location pour renforcer nos capacités d'intervention mais ce n'est pas satisfaisant. Je rappelle d'ailleurs que les moyens aériens sont normalement une prérogative de l'État, c'est pourquoi je considère qu'aujourd'hui celui-ci manque à ses obligations.
Je plaide donc pour que l'État procède à l'achat d'hélicoptères lourds bombardiers d'eau – je défendrai des amendements en ce sens. Nous en avons besoin, ils sont disponibles immédiatement et l'acquisition présente de nombreux avantages par rapport à la location. Dès lors, achetons ces hélicoptères !
En matière de soutien aux acteurs de la sécurité civile, je tiens à appeler l'attention de notre assemblée sur la situation de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), et des associations agréées de sécurité civile.
La BSPP, tout d'abord, a fait part d'un besoin de crédits s'élevant à 20 millions d'euros supplémentaires. Son financement étant partagé, l'État doit augmenter sa participation de 5 millions d'euros – il en manque actuellement 3 millions. Je défendrai des amendements visant à attribuer à la BSPP le budget qu'elle demande. L'enjeu est de taille car elle est déjà en situation de sous-effectifs.
Si l'État ne consent pas à un effort budgétaire, la seule variable d'ajustement dont disposera la brigade sera la masse salariale. La question qui se pose à nous est de savoir si nous souhaitons vraiment que la BSPP soit en situation de sous-effectifs à la veille des Jeux olympiques de 2024.
Un autre acteur majeur de la sécurité est en grande difficulté : nos associations agréées de sécurité civile et leurs 250 000 bénévoles que je tiens ici à remercier pour leur engagement.
M. Damien Maudet applaudit.
Le modèle de financement de ces associations étant aujourd'hui à bout de souffle, j'appelle le Gouvernement à prendre des mesures de toute urgence. Il y va de la survie de nombre de nos associations agréées de sécurité civile. J'ajoute qu'elles doivent bénéficier de pactes capacitaires sur le modèle de ce qui a été prévu pour nos Sdis – c'est le sens de mon amendement n° 819 .
Je regrette aussi fortement que les budgets alloués aux actions de prévention, d'anticipation et de gestion de crise demeurent inchangés. Chaque euro investi dans la prévention et la préparation permettra demain d'économiser des sommes bien plus importantes. Je plaide donc pour une augmentation des subventions allouées aux actions de prévention des feux de forêts dont le montant n'a pas évolué depuis 2017.
Je défendrai ainsi des amendements en faveur de Météo-France qui permet à nos forces de sécurité civile d'évaluer au mieux le risque et de prépositionner nos forces de sécurité civile en conséquence. Il faut également soutenir l'Entente de Valabre, cet établissement public qui bénéficie d'une expertise dans le domaine de la sécurité civile reconnue internationalement ; nombre de délégations étrangères viennent s'y former, elles ne s'y trompent pas.
Demain, dans la nuit, la tempête Ciaran frappera le Nord-Ouest de la France. En raison du changement climatique, les événements météorologiques extrêmes seront à la fois plus intenses et plus fréquents. L'histoire de la sécurité civile en France est ponctuée de réaction à des crises. Le bataillon des sapeurs-pompiers de Paris a ainsi été créé après que Napoléon Bonaparte eut réchappé à l'incendie de l'ambassade d'Autriche.
N'attendons pas de constater une rupture capacitaire pour agir. Il nous faut aujourd'hui prendre des mesures fortes pour nous permettre de répondre aux crises qui s'annoncent. Au-delà des investissements de l'État, il faut revoir le modèle de financement des Sdis car les départements ne peuvent assumer seuls les défis à venir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, applaudit également.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Rapporteur pour avis de la commission des lois pour la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , je donnerai tout d'abord quelques chiffres. L'augmentation des crédits du programme 354 Administration territoriale de l'État est de 0,19 %, un chiffre certes conforme à ce qui est prévu par la Lopmi mais qui devrait sans doute déjà appeler votre attention.
Les crédits du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur diminuent de 2,88 %, ce qui devrait vous interpeller car il s'agit d'un trou dans la raquette de 200 millions d'euros par rapport à la Lopmi. Même s'il est sans doute dû à un retard dans la mise en œuvre de grands projets, notamment numériques, il convient de le signaler.
Le programme 232 Vie politique est en augmentation, en raison bien sûr des élections européennes à venir, qui coûtent un tantinet plus cher que les élections sénatoriales.
On ne va pas rappeler les résultats des sénatoriales, ça risque de faire mal !
Néanmoins, on peut déjà remarquer qu'aucune dépense n'est prévue pour lutter contre l'abstention alors que, comme chacun sait, le fait de favoriser la participation citoyenne constitue un enjeu majeur, notamment pour ce scrutin, particulièrement boudé par les Français.
M. Damien Maudet applaudit.
J'en viens à la question centrale qui m'a intéressé lorsque j'ai mené des investigations dans le cadre du rapport pour avis : l'accès des Français aux droits, notamment à ceux qui sont associés à des dossiers gérés par les préfectures. Je pense à la délivrance de titres – les cartes nationales d'identité ou les titres de séjour – et, plus largement, à l'ensemble des politiques publiques menées par les préfectures et les sous-préfectures.
On note dans ce budget pour 2024, la création de 232 ETP. On pourra considérer que c'est mieux que lorsque cet indicateur était négatif – et on aura raison. Cependant, il faut surtout se demander si ce chiffre est suffisant au regard des besoins.
Constatons tout d'abord que certains des 670 emplois vacants mentionnés dans le programme 354 portent sur des missions très importantes. Si l'on en juge par les mesures prioritaires des préfectures – MPP pour les intimes, c'est le dernier sigle à la mode –, on souhaite en effet renforcer les effectifs pour au moins quatre grandes missions : le contrôle de légalité, l'accueil des étrangers, la gestion de crise et le conseil en collectivités. Il existe d'ailleurs une cinquième mission mais passons. Si vous divisez le nombre d'ETP prévus par le nombre de missions puis par le nombre de préfectures, vous obtiendrez un bout de bras d'agent supplémentaire par préfecture.
Je me demande si ce sera suffisant – ou plutôt, nous savons bien que ce n'est pas à la hauteur des enjeux.
M. Damien Maudet applaudit.
Ce n'est pas tout. Pour pallier les manques et faire face aux besoins, les préfets ont recours à des contrats courts, c'est-à-dire à des vacataires qui effectuent des CDD divers et variés. Cette année, on compte déjà 3 400 contrats courts, un chiffre très élevé alors même que la Cour des comptes avait pointé du doigt, en 2022, le recours aux contrats infra-annuels, lesquels – tenez-vous bien – coûtent plus cher que si les emplois à temps plein étaient occupés par des fonctionnaires.
M. Damien Maudet applaudit.
Ainsi, après avoir tout ratiboisé, en expliquant que, grâce à la dématérialisation, la qualité du service rendu aux Français serait au rendez-vous, on se rend compte qu'un tel système coûte plus cher et fonctionne moins bien.
Nous avons affaire là aux ravages de la dématérialisation contrainte – je dis bien « contrainte », les mots ont un sens. Personne ici – en tout cas je l'espère – n'est hostile par principe à la dématérialisation. Lorsque cela fonctionne, nous sommes tous bien contents de pouvoir effectuer une démarche par téléphone plutôt que de devoir nous déplacer et patienter dans une file d'attente. En revanche, il n'est pas acceptable que la dématérialisation représente une contrainte, comme c'est le cas pour plus de 20 % de la population qui n'ont pas accès à leurs droits. C'est pourquoi il faut toujours garantir une voie d'accès physique afin que le taux d'accès aux droits atteigne 100 %
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également.
Pour ce qui est de l'accès des Français à leurs droits, nous ne pouvons pas nous permettre d'avoir un taux inférieur à 100 %.
D'ailleurs, la Cour des comptes, examinant la situation au sein de l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) et des centres d'expertise et de ressources titres (Cert), a remarqué une étrange corrélation : plus les fonctionnaires sont nombreux dans les Cert, plus ces centres sont efficaces, plus ils sont rapides et plus la qualité du service est bonne. Tiens donc ! Peut-être faudrait-il davantage de fonctionnaires titulaires dans ces administrations. Le message est passé.
Pour conclure – cinq minutes, c'est bien trop court ! –, nous estimons qu'il faut gouverner à partir des besoins.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Car c'est ainsi que l'on se rend compte des manques auxquels on est confrontés. La nouvelle gestion publique, ou new public management, ne doit pas constituer l'alpha et l'oméga de nos politiques car, je le répète, 100 % des Français – pas moins – doivent avoir accès à leurs droits.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. le président de la commission des finances applaudit également.
La parole est à M. Thomas Rudigoz, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Nous allons examiner, notamment, les crédits de la mission "Sécurités" . En tant que rapporteur pour avis de la commission des lois, j'aborderai les crédits des programmes Police nationale, Gendarmerie nationale et Éducation et sécurité routières dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024.
Le budget présenté par le ministre de l'intérieur s'inscrit dans une trajectoire en hausse constante depuis 2017 et qui s'amplifie depuis la précédente législature. Comme l'a rappelé Mme la rapporteure spéciale, les crédits de paiement affectés à la police nationale augmentent de plus de 4,5 %, s'élevant à 12,9 milliards d'euros, et ceux de la gendarmerie progressent de la même façon, atteignant près de 10,4 milliards d'euros. Si l'ordre de grandeur n'est pas comparable, le programme Éducation et sécurité routières bénéficie également d'une forte revalorisation, à hauteur de 109 millions d'euros pour 2024, soit une hausse de plus de 46 %.
Au total, les budgets de la police et de la gendarmerie présentent donc une hausse cumulée de plus de 1 milliard d'euros par rapport à 2023. Cette évolution témoigne de l'engagement du Gouvernement et de notre majorité à renforcer puissamment et durablement les moyens nécessaires pour assurer la sécurité de nos compatriotes de métropole et d'outre-mer.
La Lopmi du 24 janvier 2023, défendue par le ministère de l'intérieur et approuvée à une très large majorité par l'Assemblée nationale et le Sénat, s'inscrit pleinement dans cette perspective. Ce sont plus de 2 000 policiers et gendarmes qui s'ajouteront l'année prochaine aux effectifs actuels. J'ai déjà eu l'occasion de le dire en commission des lois il y a deux semaines : la présence accrue des « bleus » sur le terrain n'est ni un slogan ni un vœu pieux mais, dorénavant, une réalité.
C'est surtout un impératif qui doit guider l'action publique après la réussite de l'organisation de la Coupe du monde de rugby, qui s'est achevée il y a quelques jours, et à la veille des Jeux olympiques et paralympiques qui auront lieu dans moins de 300 jours.
La menace terroriste qui pèse sur nous demeure également à un niveau très élevé. L'assassinat du professeur Dominique Bernard à Arras le 13 octobre dernier nous rappelle, hélas, à quel point ce fléau reste d'actualité, ce qui souligne bien sûr la nécessité de développer les moyens humains et matériels pour l'ensemble des forces de sécurité intérieure.
Outre l'analyse de l'évolution des crédits de la mission "Sécurités" , j'ai choisi de consacrer cette année la partie thématique de mon rapport pour avis aux missions de la police scientifique exercées tant par les agents de la police nationale que par les militaires – mais aussi les civils – de la gendarmerie nationale.
La police scientifique a pour objectif d'aider à l'identification des auteurs d'infractions délictuelles et criminelles grâce à des techniques de recueil et d'analyse de traces et d'indices. Elle intervient aussi dans d'autres domaines, par exemple l'identification des victimes de catastrophes. Il s'agit d'une mission décisive permettant d'élucider un nombre toujours plus important d'affaires. Concrètement, son activité représente chaque année la réalisation d'une intervention toutes les deux minutes et la production de plus d'un million d'analyses. Les experts de la gendarmerie et de la police se déploient sur de multiples terrains : la balistique, la biologie ou encore le numérique. Ils constituent donc un élément clef d'une police et d'une gendarmerie plus modernes et efficaces.
Si les progrès de la technologie peuvent offrir de nouvelles opportunités pour les délinquants et les criminels, ils représentent aussi un atout précieux afin de faciliter les investigations judiciaires et de résoudre des affaires de plus en plus complexes. Il est donc essentiel que nos équipes de police scientifique – autant dans la police que dans la gendarmerie nationales – soient notamment dotées des meilleurs ingénieurs et informaticiens afin d'appréhender les mutations des phénomènes de délinquance et de criminalité aujourd'hui à l'œuvre. Je pense aux réseaux d'escroquerie et de piratage cyber qui peuvent paralyser nombre de nos administrations et de nos entreprises.
J'appelle donc l'attention du Gouvernement sur la nécessité de faciliter le recrutement de profils très spécialisés, plus particulièrement dans le domaine informatique. Il me paraît crucial de consacrer un effort budgétaire supplémentaire à la réduction de l'écart de rémunération qui existe entre le secteur privé et les administrations, en utilisant par exemple le volet indemnitaire, ce qui permettra – j'en suis sûr – d'attirer puis de fidéliser de jeunes ingénieurs à leur sortie d'école.
Je me suis déplacé à Pontoise à l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) et à Écully, près de Lyon, au Service national de police scientifique (SNPS). J'ai pu mesurer la compétence, le professionnalisme et le dévouement de tous les personnels, civils comme militaires, qui composent ces structures. Je tiens à saluer l'excellence de ces agents qui agissent souvent dans l'ombre. À l'occasion de ce débat, nous pouvons aujourd'hui les mettre dans la lumière.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
La parole est à M. Jean-Pierre Cubertafon, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées.
À compter de la fin de cette année, les premières des 239 nouvelles brigades de gendarmerie annoncées par le Président de la République seront installées. Globalement, le rapporteur pour avis des crédits de la gendarmerie que je suis est plutôt satisfait au vu des crédits budgétaires affectés cette année au programme 152 de la mission "Sécurités" … Mais je ne suis pas non plus un rapporteur pour avis béat, et j'aurai l'occasion de revenir sur les points sur lesquels j'estime que nous devons nous montrer vigilants.
Un rapporteur pour avis satisfait, disais-je. En 2024, les crédits de la gendarmerie nationale seront en effet en hausse de 500 millions d'euros en autorisations d'engagement par rapport à la loi de finances initiale pour 2023. Ces crédits permettront notamment de financer le schéma d'emplois de 1 045 ETP supplémentaires ainsi que la montée en puissance de la réserve opérationnelle. De même, les moyens mobiles de la gendarmerie continueront d'être modernisés et renouvelés grâce à l'arrivée en 2024 des dernières livraisons des véhicules blindés polyvalents Centaure, soit cinquante-huit des quatre-vingt-dix véhicules prévus par le PLF pour 2022. De plus, la gendarmerie densifiera son maillage territorial, dans le cadre d'un passage d'une logique de guichet vers une logique de pas-de-porte, afin d'aller plus encore vers la population. En outre, le parcours victime sera rénové afin de proposer un accueil adapté aux besoins de la victime et un suivi dans la durée. Par ailleurs, la gendarmerie poursuivra son effort de transformation et de modernisation de ses outils de travail du quotidien et elle consolidera en 2024 sa présence dans l'ensemble des nouveaux champs de la délinquance, s'agissant notamment de la violence contre les élus.
Reste que, je l'ai dit, ce tableau en apparence réjouissant ne doit pas masquer le fait que tous les indicateurs ne sont pas au beau fixe, et plusieurs points appellent à la vigilance dans ce projet de budget pour 2024. Ainsi, les mesures interministérielles générales dites Guérini représenteront un surcoût non budgété en Lopmi de 120 millions d'euros en année pleine, mesures qui s'ajoutent aux 170 millions d'euros de surcoût liés aux mesures transversales interministérielles de l'an dernier : cumulé sur deux ans, le budget de la gendarmerie doit donc financer un surcoût de près de 290 millions d'euros au titre de mesures transversales interministérielles. Je note qu'à ce surcoût s'ajoutent environ 100 millions d'euros causés par l'inflation, ce qui représente in fine un manque non budgété en Lopmi de près de 400 millions d'euros dans le budget hors titre 2 de la gendarmerie nationale. Et sachant que les dépenses de fonctionnement de la gendarmerie sont fortement contraintes et marquées par le poids des loyers et de l'énergie, l'investissement subira les frais de ce trou d'air : le budget d'équipement sera également en baisse – le renouvellement de la flotte de véhicules légers sera limité à 500 véhicules environ – et, surtout, la politique immobilière de la gendarmerie sera pénalisée. Face à ces points de vigilance, j'ai déposé un amendement visant à renforcer significativement le budget d'investissement de la gendarmerie nationale.
Je souhaite conclure par la partie thématique de mon rapport consacré à la gendarmerie en Guyane, plus précisément aux moyens matériels et humains qu'elle consacre à la lutte contre l'orpaillage illégal. Dans une région aux frontières poreuses avec le Brésil et le Suriname, les orpailleurs illégaux essaiment : on les estime à près de 7 000 actuellement actifs dans la forêt guyanaise. La traque des orpailleurs, le démantèlement des sites ainsi que les saisies reposent sur une coordination exemplaire entre les forces armées de Guyane, les FAG, et la gendarmerie nationale. Au total, chaque jour, près de 300 militaires sont déployés en forêt : environ 240 militaires des FAG et 60 militaires de la gendarmerie.
Ils se heurtent à une violence croissante en forêt, sous l'effet des bandes armées brésiliennes qui prennent peu à peu le contrôle des sites illégaux. Je tiens ici à rendre hommage au major Arnaud Blanc, militaire du GIGN, le Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale, décédé le 25 mars dernier dans l'exercice de ses fonctions
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE et LR, sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES, ainsi que sur les bancs des commissions
sur le site de Dorlin, pris sous le feu d'une bande armée brésilienne. La mission Harpie produit des résultats tangibles et permet de porter un réel préjudice à l'orpaillage illégal. Dans mon rapport, je fais plusieurs propositions afin de renforcer les moyens matériels et humains consacrés à cette mission et plus largement à la gendarmerie de Guyane ; j'en appelle notamment au retour pérenne d'un septième escadron de gendarmes mobiles et à la sanctuarisation des effectifs.
Un dernier mot pour remercier l'ensemble des personnels de la gendarmerie rencontrés lors de mon déplacement en Guyane ainsi que les personnels de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) que j'ai auditionnés à mon retour.
La parole est à M. Éric Pauget, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Pour la seconde année consécutive, j'ai l'honneur de rapporter, au nom de la commission des lois, les crédits du programme consacré à la sécurité civile. Ce programme, l'un des quatre que compte la mission "Sécurités" , est doté de crédits s'élevant à 734,6 millions d'euros, soit une hausse de près de 3 % par rapport au précédent exercice et de 0,3 % une fois prises en compte les perspectives d'inflation pour 2024. Il s'agit d'une augmentation modérée, après une très forte hausse l'an dernier décidée au cours de l'examen du projet de loi de finances pour 2023. Ces crédits s'inscrivent donc dans une tendance haussière, conforme aux prévisions de la Lopmi, et nous ne pouvons que nous en réjouir même si les besoins de financement demeurent très importants, tant à l'échelle nationale que dans nos territoires.
Je relève avec intérêt que le ministre de l'intérieur a annoncé au cours de son audition courant octobre en commission des lois le dépôt d'un amendement visant à renforcer les moyens de la sécurité civile. Cet amendement a finalement été déposé hier soir et prévoit 215 millions d'euros supplémentaires en autorisations d'engagement et 146 millions d'euros supplémentaires en crédits de paiement pour lutter contre les feux de forêt. Je ne peux que m'en réjouir, tout comme l'ensemble de cet hémicycle ; de nombreux parlementaires avaient d'ailleurs souhaité, en commission des lois, amender le PLF pour abonder les crédits consacrés à notre modèle de sécurité civile. Mais puisque le diable se cache dans les détails, je resterai vigilant quant à sa déclinaison effective au regard de notre modèle de sécurité civile, afin d'éviter un simple effet d'annonce sans résultat concret sur le terrain.
Il est important de rappeler que le programme Sécurité civile ne représente qu'une petite portion d'un budget total qui atteignait environ 7,3 milliards d'euros en 2021 puisque la majeure partie de ce budget est assumée par les collectivités territoriales, notamment par les départements, qui sont les principaux financeurs des services d'incendie et de secours. Permettez-moi de rendre, au nom de la représentation nationale, un hommage appuyé à ces services ainsi qu'à l'ensemble de nos pompiers, qui font un travail d'une grande qualité malgré un nombre croissant de sollicitations, parfois même en dehors de leur périmètre d'activité. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : en 2021, le nombre d'interventions des Sdis s'élevait à 4,7 millions ; il a atteint près de 5 millions en 2022, dont les trois quarts pour du secours à victime. Cette montée constante du nombre d'interventions exerce une pression considérable sur nos effectifs de sapeurs-pompiers, et par ricochet sur les financeurs des Sdis et donc sur nos collectivités territoriales, déjà en difficulté financière. C'est ainsi un défi de taille qui attend notre pays car, d'ici à 2027 : la France devra pouvoir compter sur 220 000 sapeurs-pompiers volontaires et sur 50 000 professionnels tout en investissant massivement pour moderniser leurs équipements.
Il est donc impératif de réfléchir à de nouvelles sources de financement pour notre modèle de sécurité civile. C'est pour cette raison que, dans le cadre de mes travaux de rapporteur pour avis, j'ai souhaité aborder une notion innovante et encore prospective : la valeur du sauvé. Ce concept, étudié par le milieu académique depuis plusieurs années, vise à quantifier les avantages économiques découlant des interventions des Sdis en mesurant la différence entre les dommages constatés lors d'incidents et la valeur totale des vies, des biens et de l'environnement préservés grâce à l'action des sapeurs-pompiers : vingt-sept Sdis se sont déjà penchés sur ce calcul, et je salue les représentants des Sdis des Bouches-du-Rhône, de l'Hérault et du Loiret que j'ai auditionnés et qui m'ont fait partager leur méthodologie. La création récente d'un groupe de travail par la direction générale de la sécurité civile témoigne de l'importance de cette démarche qui doit guider nos pas dans la recherche d'une meilleure structure de financement des services départementaux d'incendie et de secours. Je souhaite vivement que ce groupe de travail établisse des indicateurs uniformes et implique davantage d'acteurs, notamment les assureurs, dans ses réflexions. Je renvoie tous ceux qui le souhaitent à la lecture du rapport que j'ai écrit dans le cadre de l'examen des crédits consacrés à la sécurité civile et dans lequel je formule sept recommandations allant dans le sens d'une meilleure prise en compte de la valeur du sauvé dans nos décisions budgétaires.
Permettez-moi pour conclure, madame la ministre déléguée, deux dernières observations. La première est empreinte d'un peu d'optimisme : je tiens à souligner ma satisfaction quant au choix de raison du Gouvernement de ne pas supprimer les exonérations du malus écologique et de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour l'ensemble des véhicules des Sdis. Le PLF initialement déposé sur le bureau de l'Assemblée proposait cette suppression ;…
Certes !
Merci.
Ces exonérations avaient en effet été votées largement dans notre hémicycle il y a à peine quelques mois et figurent dans la loi du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie, dont j'étais l'un des corapporteurs.
J'en viens donc à ma seconde observation : vous savez bien, madame la ministre déléguée, qu'une loi ne peut être efficace si ses décrets d'application ne sont pas pris rapidement. Or ceux de la loi du 10 juillet 2023 semblent encore dans les tuyaux administratifs… Ne m'en voulez donc pas de clore cette intervention par un souhait : celui de voir ces décrets publiés dans les prochaines semaines. Nous le devons à nos sapeurs-pompiers.
M. Olivier Marleix applaudit.
Vous avez bien raison.
Nous en venons à l'expression des orateurs des groupes.
La parole est à M. Jordan Guitton.
Les missions Administration générale et territoriale de l'État, Sécurités et Contrôle de la circulation et du stationnement routiers sont fondamentales pour le bon fonctionnement de l'État mais également pour assurer la sécurité, première des libertés de nos compatriotes. Ces missions regroupent un ensemble d'actions censé être cohérent… Le constat est sans appel : vos crédits ne le sont pas ! Ainsi, les crédits alloués à l'administration générale et territoriale sont en principe essentiels, notamment pour assurer les services de proximité, mais ces derniers ont été en grande partie supprimés dans les territoires ruraux, et déshumanisés par une dématérialisation rapide qui met de côté une part importante de nos compatriotes.
De plus, les budgets ne sont pas au rendez-vous pour permettre d'écourter les délais d'obtention des titres d'identité, délais qui demeurent un problème local important.
Autre point d'inquiétude : les crédits de l'action 2, qui traite notamment des demandes d'asile et des reconduites à la frontière, baissent de plus de 82 millions d'euros par rapport au budget de 2022. Où passe l'argent de nos impôts, vous qui êtes les champions du monde de la fiscalité ? Je vous le demande.
Quant à la mission "Contrôle de la circulation et du stationnement routiers" , la hausse des prix du carburant cumulée à la taxe prélevée par les radars entame considérablement le pouvoir d'achat des Français, d'autant que les habitants des zones rurales sont déjà affectés par les ZFE, ces zones à faibles émissions qui sont plutôt vos zones à fortes exclusions, qui limitent l'accès aux services publics des grandes villes, notamment à ceux de la santé.
En plus d'être les champions des prélèvements sociaux, vous multipliez les investissements dans des radars toujours plus modernes, toujours plus injustes… Sans parler du phénomène de radars privés qui asphyxient le budget de nos compatriotes. Vous cherchez comme toujours à vous faire de l'argent sur le dos des automobilistes… pour rembourser vos dettes. Je vous rappelle que la voiture à moteur thermique est une nécessité économique pour ceux qui bossent, qui élèvent leurs enfants et qui vivent en dehors des grandes villes. Vous et les vôtres les avez oubliés depuis 2017. Et c'est bien pourquoi Marine Le Pen est arrivée en tête dans plus de 20 000 communes l'année dernière lors de la présidentielle.
De plus en plus de Français comprennent que nous sommes les seuls à défendre leurs intérêts face à un gouvernement qui taxe et qui endette notre pays, ce dont on ne voit jamais le retour sur investissement dans nos services publics et dans notre vie quotidienne.
Ce budget ne répond pas non plus au problème posé par les Jeux olympiques : vous allez aspirer à Paris des milliers de pompiers, de gendarmes, de policiers, de soignants et de personnels de justice pour l'été 2024, en menaçant ainsi la sécurité et la continuité réelle des services publics dans nos territoires. Tous les acteurs des territoires sont inquiets et nous le font remonter chaque jour. Croyez-vous que les cambriolages, les feux de forêts ou de champs, les questions médicales ou d'insécurité vont cesser comme par magie durant ces Jeux olympiques ? La réponse est non ! Paris sera en juillet 2024 l'arbre qui cache la réalité de notre pays. Et c'est encore une fois nos concitoyens dans les zones rurales qui payeront la facture.
Votre seule boussole, c'est votre image ; notre seule boussole, au Rassemblement national, ce sont les Français. C'est ce qui fait la différence entre vous et nous.
Quant à la mission "Sécurités" , le Gouvernement ne pourra plus dire que nous ne votons pas ses textes puisque nous en avons voté les crédits dans le cadre de la Lopmi, même si nous ne vous faisons pas confiance. À quoi bon avoir des crédits et des forces de l'ordre si la justice n'est pas plus rapide et plus ferme ? M. le ministre de l'intérieur et ce gouvernement essayent de parler comme le Rassemblement national par opportunisme politique,…
…mais ils agissent à chaque fois comme La France insoumise – qui les a d'ailleurs portés au pouvoir.
Vous semblez fermes dans vos propos sur les migrants de Lampedusa, mais quelques jours après, on les retrouve dans Paris ! Vous semblez fermes dans vos propos sur l'idéologie islamiste, mais vous n'interdisez pas les Frères musulmans en France, alors même que certains pays arabes le font déjà. Vous semblez fermes dans vos paroles vis-à-vis de l'immigration mais, avec votre projet de loi que nous étudierons en décembre prochain, vous voulez régulariser des clandestins qui violent déjà nos lois. À chaque fois, vos paroles ne sont jamais suivies des actes. Vous incarnez le néant, vous n'avez pas de volonté politique ni de programme politique clairs ; vous incarnez une forme d'extrême centrisme.
Qu'attendent les Français du ministre de l'insécurité et des fiascos qu'est M. Darmanin ? Rien ! Qu'attendent les Français d'un ministre de la justice qui se fait applaudir dans les prisons ? Rien ! Qu'attendent les Français du ministre de l'économie, champion de l'endettement ? Rien ! Qu'attendent les Français d'une Première ministre qui sera bientôt Ballon d'or du 49.3 ? Rien !
Qu'attendent les Français des autres ministres ? Ils ne les connaissent même pas ! Comme les Français, nous n'attendons plus rien de vous et votre budget n'y changera rien. Finalement, la seule chose à laquelle nous nous préparons, c'est le futur 49.3 de Mme Borne. Mais la seule chose que les Français attendent, c'est Marine Le Pen à l'Élysée !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Jean-François Coulomme s'exclame.
Nous commençons l'examen des budgets dédiés aux sécurités et à l'administration générale et territoriale de l'État, examen qui sera durement mais habituellement censuré par un énième 49.3. Pour autant, il nous faut lever un certain nombre de mensonges et revenir sur certains effets d'annonce.
Évoquons la sécurité, tout d'abord. Le ministre de l'intérieur, qui à notre grand dam n'est pas présent au banc du Gouvernement,…
…dit vouloir s'attaquer à la délinquance du quotidien en multipliant par deux la présence policière dans l'espace public. Mais à quoi cela sert-il sans enquêteurs – dont on doit d'ailleurs garantir l'indépendance ? Sans locaux adéquats, à quoi cela sert-il sinon à mettre la pression sur les mairies pour qu'elles payent leurs agents locaux alors même qu'elles n'ont jamais été autant en difficulté pour exercer leurs propres compétences ? Sans école de police en nombre suffisant, sans un temps de formation pour apprendre ce métier si difficile et sans formation continue suffisante, à quoi cela sert-il ? Quand en matière de violences sexistes et sexuelles, de désescalade et de gestion des conflits le compte n'y est pas, à quoi cela sert-il ?
Bref, à quoi tout cela sert si votre budget ne permet pas d'arrêter l'hémorragie que connaissent nos services de police d'une façon générale ? On a déploré 10 000 départs de policiers en 2022, selon les chiffres de la Cour des comptes, et 15 000 départs de gendarmes.
À quoi la multiplication par deux de la présence du bleu dans la rue va-t-elle mener ? Est-ce du laxisme, de la démagogie ? À quelles conséquences doit-on s'attendre quand on sait que 2,7 millions de procédures sont en souffrance dans nos commissariats ? Des échecs assumés et de la souffrance au travail, encore et toujours : voilà la réponse !
Il nous faut aussi en finir avec la mise en danger de la population, consécutive à l'incurie du Gouvernement. Le budget dédié à la sécurité civile n'augmente que de 2,87 %, alors que le dérèglement climatique est à l'origine de catastrophes majeures. Cette semaine, l'ouest de la France va connaître une tempête sans doute équivalente à celle de 1999. Alors, quels moyens déployer en faveur de la sécurité civile ? Je pense aux matériels, aux pompiers de Paris, entre autres brigades, et aux Sdis, mais aussi, bien que les crédits en question relèvent d'une autre discussion budgétaire, à Météo France – et on se souvient en cette période à quel point elle joue un rôle indispensable.
Évoquons en quelques mots la sécurité routière. Bien que le M. le Président de la République dise : « la bagnole, […] moi je l'adore »…
…– ce qui n'est pas mon cas –, je rappelle que les accidents de la route ont causé l'année dernière la mort de 3 260 personnes. Que de vies parties en fumée ! Bien sûr, il faut davantage soutenir les associations de prévention, mais il faut aussi adopter un grand plan de remise en état des routes qui, faute d'entretien, sont à l'origine d'un certain nombre d'accidents.
J'en viens à l'administration territoriale de l'État. Il nous faut remédier à l'éloignement entre les services de l'État et la population, éloignement qu'illustre notamment le délai pour disposer de documents officiels. Soixante-six jours sont nécessaires pour obtenir une carte nationale d'identité – et soyons honnêtes, ce délai s'étend parfois jusqu'à six mois. D'ailleurs, les étrangers n'y échappent pas puisqu'il leur faut souvent des mois d'attente pour obtenir le premier rendez-vous. J'ai tout simplement envie de dire que c'est vous qui créez les sans-papiers.
Oh !
Je vois ici un lien évident avec la logique de dématérialisation, qui fabrique tout simplement du non-recours au droit – ce n'est pas nous qui le disons, mais Mme la Défenseure des droits. Il faut garantir à tous une procédure physique, qui doit être de plus accompagnée dans les cas où cela se révèle nécessaire.
Les préfectures, c'est aussi le lien aux collectivités. J'en donnerai deux exemples, à commencer par le contrôle de légalité, qui ne peut plus fonctionner normalement à l'heure actuelle, y compris en termes de conseil aux élus, faute de moyens. Deuxième exemple : la coopération avec les collectivités, notamment grâce au fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), dont il serait grand temps de mesurer l'efficacité. Mais n'oublions pas non plus de mesurer la façon dont la parole des élus locaux est prise en compte, car lorsque ceux-ci souhaitent développer la prévention ou la présence humaine, on leur répond « caméras », dans un chantage absolument odieux à l'implantation d'effectifs de police.
Que doit-on mettre en œuvre selon nous ? Voici ce que nous ferions, ou plutôt ce que nous ferons lorsque nous serons au Gouvernement :
Rires sur les bancs du groupe RN. – M. Jean-François Coulomme s'exclame
nous veillerons à gouverner en fonction des besoins, sans avoir à respecter une forme d'orthodoxie austéritaire.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
La sécurité est un pouvoir régalien et un sujet central pour les Français en cette période d'accroissement de l'insécurité et de retour du terrorisme. Le législateur se doit donc de voter un budget suffisant pour nos forces de l'ordre – le groupe Les Républicains protégera toujours ceux qui nous ont protégés.
Le budget dédié à la sécurité que vous nous proposez aujourd'hui augmente : je ne peux que m'en réjouir. Cette augmentation est le résultat du vote de la Lopmi dont l'examen a permis à notre groupe d'obtenir de nombreuses avancées en faveur de l'amélioration des conditions d'exercice de nos forces de sécurité. L'année 2024 sera la deuxième année d'application de cette loi, qui prévoit 15 milliards d'euros supplémentaires sur cinq ans et 8 500 créations de postes au sein du ministère durant le quinquennat
Pour autant, la France reste un pays où la délinquance et la criminalité sont plus élevées que dans la moyenne des pays européens. Voici les chiffres pour 2022 : plus 8 % d'homicides, plus 15 % de coups et blessures volontaires, plus 11 % de violences sexuelles, plus 32 % d'agressions contre des élus, essentiellement des maires. La faute tient en partie à une réponse judiciaire encourageant la récidive et à un manque criant de places de prisons. En matière de sécurité, le « en même temps » n'est pas de mise !
Il est donc plus que nécessaire de donner davantage de moyens à nos forces de l'ordre car, au-delà des statistiques, la situation de notre pays en matière de sécurité est mauvaise. L'augmentation de la présence des forces de l'ordre sur la voie publique devrait doubler en dix ans. De plus, il est proposé que les effectifs de police et de gendarmerie bénéficient d'un schéma d'emplois de 2 184 équivalents temps plein supplémentaires en 2024. La poursuite des protocoles sociaux liés à la mise en œuvre de la Lopmi et la revalorisation des grilles indiciaires et des primes d'indemnité viennent améliorer les conditions de vie et de travail de nos forces de l'ordre.
Des moyens supplémentaires seront alloués pour répondre à des enjeux sécuritaires nouveaux ; la filière cyber sera notamment renforcée par l'augmentation des effectifs patrouillant sur le net. Les violences intrafamiliales ne sont pas oubliées avec la création de quatre-vingt-dix-neuf maisons de protection des familles (MPF). Comment ne pas être également favorables à la densification des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (Psig) et au renouvellement de l'équipement de la police nationale et des moyens mobiles ?
Enfin, ce budget en augmentation est marqué par le défi que représente l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques à Paris. La densification des équipements permettra de mieux assurer la sécurisation du plus grand évènement sportif mondial.
J'en viens aux questions que notre groupe souhaite vous poser, madame la ministre déléguée. Ce sont les difficultés de recrutement des forces de l'ordre qui nous préoccupent en premier lieu. Ce budget pour 2024 souffre toujours de la sous-consommation chronique des crédits budgétaires de personnels pour la mission "Sécurités" . En avril dernier, la Cour des comptes a d'ailleurs relevé une sous-consommation des crédits de personnels due aux difficultés de recrutement et de fidélisation. Vous affichez 2 100 nouveaux postes de gendarmes pour le quinquennat, mais certaines sources internes à votre ministère évoquent le chiffre de 3 000 départs non prévus en 2023.
Ces difficultés à fidéliser les agents se conjuguent aux difficultés de recrutement auprès des jeunes, du fait de la dégradation des conditions de travail. Les seules revalorisations indemnitaires ne suffisent plus à fidéliser les effectifs. Aussi, quelles mesures le Gouvernement entend-il déployer pour répondre à ce défi, à l'heure où nos forces de l'ordre sont de plus en plus sollicitées en raison des enjeux sécuritaires ?
Parlons également de la menace terroriste. Quelques jours après l'attentat du lycée Gambetta d'Arras, pouvez-vous nous éclairer sur les conditions qui ont permis à un ressortissant étranger fiché S, et qui aurait dû être expulsé, de se maintenir en France et de commettre ce terrible assassinat, trois ans après la mort de Samuel Paty ? Votre projet de loi relatif à l'immigration, qui doit être prochainement débattu, n'aurait rien changé : il n'aurait pas plus permis l'expulsion du terroriste que les vingt-trois textes sur l'immigration qui l'ont précédé. En effet, votre texte ne propose que des modifications timides du régime de protection des étrangers, y compris lorsqu'ils représentent une menace grave.
Je connais la mobilisation de nos services de renseignement et de nos forces de l'ordre pour protéger nos compatriotes contre ces barbares, mais l'intensification de la menace terroriste mérite une plus grande fermeté : l'enfermement de tous ceux qui représentent une menace terroriste, ou leur expulsion s'ils sont étrangers. Voilà ce que les Français réclament !
Aussi, quelles mesures comptez-vous prendre pour mieux combattre la menace terroriste ? Comment comptez-vous convaincre de cette impérieuse nécessité de fermeté ceux qui au sein de votre majorité, y compris Mme la Première ministre, vous ont contraints à décaler ce projet de loi de plusieurs mois ? L'heure n'est plus à la procrastination coupable ou à l'angélisme, mais à la fermeté : les Français nous le demandent. L'adoption de la révision constitutionnelle proposée par Les Républicains nous permettrait d'expulser ces individus représentant une menace pour la France et pour les Français.
Évoquer ensemble les missions Administration générale et territoriale de l'État et Sécurités, c'est avant tout affirmer le renforcement de la présence de l'État au plus près du terrain, à la fois dans ses missions régaliennes et dans l'accompagnement des collectivités locales. Tous crédits confondus, plus de 20 milliards d'euros y seront consacrés. Fidèle aux engagements inscrits dans la Lopmi, le Gouvernement poursuit ses efforts pour mettre en face des différentes menaces des moyens adaptés pour les combattre. En même temps, nous constatons une présence plus forte et efficace des forces de sécurité intérieure, obtenue en augmentant de façon significative les effectifs à la fois dans la police et dans la gendarmerie et en créant ou en modernisant des brigades, des casernes et des commissariats. La modernisation des méthodes est tout aussi profitable, comme l'a rappelé Thomas Rudigoz.
En matière de sécurité civile, vous avez pris la mesure des défis posés par le changement climatique. Dans la droite ligne de la récente loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie, les moyens budgétaires sont, là aussi, considérablement renforcés.
Mais nous savons que rien ne serait possible sans l'implication et le dévouement de tous nos agents publics, serviteurs de l'État.
S'agissant du maillage territorial des préfectures et sous-préfectures, qui assure une présence de proximité de l'État, nous nous réjouissons de l'inscription de moyens supplémentaires, avec des postes nouveaux. Nous savons d'expérience que le conseil et l'accompagnement des collectivités territoriales – en premier lieu nos communes – demeure un enjeu primordial. L'implication des élus joue en effet un grand rôle non seulement dans l'animation des territoires, mais aussi dans la mise en œuvre et la réussite de nombreuses politiques publiques. Il est donc très important que les services de l'État puissent se placer à leurs côtés ; c'est une action du quotidien. Nous souhaitons d'ailleurs que ces services puissent développer leur capacité d'expertise et soutenir les projets locaux.
Cela suppose évidemment une action au quotidien, et pas seulement dans les situations de crise. En tout cas, lors des émeutes du début de l'été, je peux en témoigner, la préfecture de mon département a assisté très efficacement les élus des communes concernées.
Je partage une conviction avec le Gouvernement : pour prendre en compte les besoins et les attentes des habitants, l'arrondissement est, après la commune, un échelon administratif essentiel. Il importe donc de renforcer la capacité des services publics à atteindre l'usager, du premier au dernier kilomètre. Les orientations de la mission "Administration générale et territoriale de l'État " vont dans ce sens.
Néanmoins, l'augmentation des crédits est imputable, pour une large part, à l'organisation des élections européennes. À ce propos, il est fondamental d'encourager la participation électorale, objectif partagé par tous, mais je me permets de mentionner un point d'alerte : face à la montée inexorable de l'abstention, de nombreuses questions demeurent en suspens. Nous pensons notamment à la demande adressée au ministère de l'intérieur d'approfondir la réflexion sur les modalités alternatives au vote à l'urne – exception faite des machines à voter, qui ont largement dépassé le stade de l'obsolescence programmée !
Je salue tout particulièrement la forte augmentation des crédits du programme Sécurité et éducation routières, dédié notamment à la lutte contre la conduite après usage de stupéfiants, en particulier chez les jeunes, pour qui il s'agit de la première cause de décès. Je suggère d'associer étroitement à cette lutte les comités locaux de la prévention routière.
En ce vingtième anniversaire de la mise en service des radars automatiques – qui procurent une recette non négligeable –, je ne peux conclure sans évoquer la fin, le 1er janvier 2024, du retrait de un point pour les petits dépassements de limitation, inférieurs à 5 kilomètres à l'heure ; c'était une mesure attendue. Bien d'autres sujets liés à la sécurité routière devront faire l'objet d'un débat au Parlement, notamment à la faveur de la création, je l'espère, du délit d'homicide routier.
Pour toutes les raisons que j'ai évoquées, le groupe Démocrate votera les crédits des missions et du compte d'affectation spéciale que nous examinons.
Aborder le budget de la sécurité et celui de l'administration générale et territoriale de l'État, c'est traiter de plusieurs fonctions essentielles de l'État, inscrites dans le texte fondamental qu'est la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Celle-ci évoque, dans son article 2, le droit à la sûreté et, dans son article 12, l'existence d'une force publique « instituée pour l'avantage de tous ». Elle reconnaît, dans son article 13, la nécessité de bien financer cette force publique ainsi que l'administration.
Dans les périodes de doute et de crise que nous traversons, il est bon, nous semble-t-il, de revenir à ces fondamentaux et de nous demander si nos débats satisfont à ces impératifs qui doivent guider le travail parlementaire. En l'espèce, notre action garantit-elle à nos concitoyens leur droit à la sécurité ? L'administration de l'État agit-elle bien au service de l'intérêt général ?
S'agissant de la mission "Sécurités" , nos débats se déroulent à l'ombre de la Lopmi, adoptée à la fin de l'année 2022. On nous avait alors promis beaucoup, non seulement des moyens techniques accrus, mais aussi un grand nombre d'embauches dans la police nationale. Nous nous étions félicités de cet aspect de la Lopmi, mais nous avions pointé, au cours des débats, l'importance qui s'attache à la formation des policiers. En la matière, incontestablement, le compte n'y est pas ! Certes, 1 139 ETP seront créés au ministère de l'intérieur, mais, comme toujours – les textes budgétaires ne font pas exception –, le diable se cache dans les détails.
On comprend pourquoi il est indiqué que le nombre d'heures de formation sera « en hausse », sans plus de précision, puisque le tableau présentant les éléments de synthèse du programme concerné prévoit le chiffre zéro dans la colonne « dépenses de personnel », aussi bien en crédits de paiement qu'en autorisations d'engagement. Dans ce que vous présentez aux parlementaires, il y a une contradiction fondamentale entre l'objectif affiché de mieux former les policiers – dont le nombre est en hausse – et la réalité de l'investissement dans la formation – qui se résume à rien.
C'est pourquoi nous proposerons un amendement visant à abonder de 100 millions d'euros les crédits affectés à la formation des policiers. Il s'agit d'investir enfin de manière décente dans cette formation. Si vous ne le faites pas, vous risquez de provoquer des dégâts irréparables dans l'institution chargée d'assurer la sécurité des Françaises et des Français. Nous sommes fondamentalement attachés à la fonction publique et à l'instruction publique. En l'occurrence, les deux sujets se rejoignent.
S'agissant de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , il n'est pas inutile de porter un regard sur l'évolution des crédits qui lui ont été consacrés au cours des dernières années. Dans le document budgétaire annexé au PLF pour 2021, le Gouvernement s'accordait un satisfecit concernant la réforme de l'organisation territoriale de l'État, la création de nouveaux services déconcentrés interministériels et la lisibilité accrue des politiques gouvernementales grâce aux mutualisations et aux économies rendues possibles. Dans les documents budgétaires annexés aux PLF pour 2022, pour 2023 et pour 2024, on retrouve une même formulation, à quelques nuances près dans l'usage des adverbes et des virgules : « la nouvelle organisation territoriale renforce l'action de l'État grâce à la volonté présidentielle de mettre fin à plus de vingt ans de réduction systématique des effectifs départementaux ». Vos services manient à la perfection l'art du copier-coller !
On annonce, pour 2024, la création de 232 ETP dans le réseau territorial des services de l'État. Cela a été dit à plusieurs reprises, ce chiffre est notoirement insuffisant. Rappelons que, depuis l'époque de la révision générale des politiques publiques (RGPP), 14 % des effectifs de l'État ont été supprimés, soit près de 12 000 ETP. Pendant ce temps, les problèmes d'accès aux préfectures se sont aggravés. Ainsi, aucune préfecture n'est en mesure de respecter le délai raisonnable de trente jours pour le renouvellement des titres de séjour. Le bleu budgétaire maintient cette cible à trente jours, mais prévoit que le délai réel sera de soixante jours ; il s'agit clairement d'une régression.
La dématérialisation des procédures s'est révélée efficace dans certains cas, mais elle a surtout laissé de côté les très nombreuses personnes pour qui la fracture numérique est une réalité quotidienne. Nous avons donc déposé des amendements visant à améliorer les capacités d'accueil, notoirement insuffisantes, des services de l'État.
Nous examinons les crédits des missions Administration générale et territoriale de l'État et Sécurités ainsi que ceux du compte d'affectation spéciale "Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers" .
La mission Administration générale et territoriale de l'État comporte les crédits consacrés à la présence et à la continuité de l'État sur l'ensemble des territoires de la République ainsi qu'au financement de la vie politique ; il s'agit d'un budget essentiel au bon fonctionnement de l'État et de notre démocratie. Avec cette mission budgétaire, le ministère de l'intérieur et des outre-mer met en œuvre trois de ses responsabilités fondamentales : garantir aux citoyens l'exercice des libertés publiques, notamment par le suffrage universel ; assurer la présence et la continuité de l'État sur l'ensemble du territoire de la République ; décliner localement les politiques publiques nationales.
Parce qu'elle finance ces trois objectifs, cette mission doit être au cœur du budget de l'État. C'est pourquoi le groupe Horizons et apparentés se réjouit de la hausse des autorisations d'engagement – de 5,6 milliards d'euros – et des crédits de paiement – de 4,65 milliards – par rapport à l'an dernier. Ces augmentations significatives permettront de créer 110 emplois dans les préfectures, d'intensifier la transformation numérique du ministère – notamment grâce à la création de plus de 310 emplois dédiés et au développement du réseau radio du futur (RRF) – et de financer les élections européennes et les élections provinciales à venir en Nouvelle-Calédonie.
Ce budget est donc à la hauteur des enjeux de simplification des rapports de nos concitoyens avec l'administration, mais aussi d'amélioration du quotidien des agents du ministère. Il met fin à plus de vingt ans de réduction des effectifs départementaux.
La mission Sécurités s'inscrit dans la lignée de la Lopmi, en poursuivant les efforts engagés. En 2024, les autorisations d'engagement et les crédits de paiement atteindront respectivement 25 milliards et 24 milliards d'euros. Ce budget permettra de renforcer la présence des forces de sécurité sur le terrain, d'améliorer leurs conditions de travail, de préparer la sécurité civile aux défis de demain et de lutter contre l'insécurité routière pour sauver des vies.
Dans cette mission, le programme Sécurité civile finance l'ensemble des politiques du ministère de l'intérieur consacrées à la protection des populations et à la gestion des crises. Je me félicite que le Gouvernement ait retenu, en première partie du PLF, l'amendement que j'avais déposé à l'article 12, au nom du groupe Horizons et apparentés. Ainsi, non seulement les véhicules des Sdis de notre pays seront exonérés des taxes sur les carburants, mais ils ne seront pas soumis au malus écologique, conformément à ce qui était prévu dans la loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie, adoptée cet été à la quasi-unanimité.
Compte tenu des crises nombreuses et variées à venir, il est indispensable d'apporter tout le soutien nécessaire à nos forces de secours. Notre modèle de sécurité civile repose sur un ensemble de professionnels et de volontaires. En tension perpétuelle depuis plusieurs années, il s'essouffle. Il me semble donc important d'insister sur le nécessaire accompagnement des communes et de la population en matière de prévention des risques, qu'ils soient d'origine naturelle, humaine, terroriste, technologique ou sanitaire. C'est pourquoi je me réjouis des mesures prises dernièrement, notamment le déploiement du système FR-Alert sur l'ensemble du territoire, la création d'un numéro unique d'appel et l'instauration de la journée annuelle Tous résilients face aux risques. J'espère sincèrement que nous poursuivrons les efforts en ce sens.
Le groupe Horizons et apparentés votera les crédits de ces missions.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe RE. – M. Jean-Pierre Cubertafon, rapporteur pour avis, applaudit aussi.
Il est compliqué de poursuivre cette discussion tout en sachant qu'elle sera intégralement balayée, dans quelques jours, par un recours au 49.3 ; de faire semblant que cela a encore une utilité, alors même que nous n'avons jamais été consultés – tel n'est pas nécessairement le cas de tous les groupes politiques – sur les mesures qui pourraient demeurer in fine dans ce projet de loi de finances. Il en est allé de même pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous sommes dans une configuration bien théâtrale !
Néanmoins, madame la ministre déléguée, mes collègues et moi continuons à jouer le jeu, à faire comme si nous menions un véritable dialogue, comme s'il y avait effectivement une démocratie, comme si les rangs de la gauche et des écologistes étaient respectés. Il serait bon que le Gouvernement joue lui aussi le jeu.
Les budgets que nous examinons sont globalement en hausse, et c'est une bonne nouvelle. Toutefois, comme souvent, le diable se cache dans les détails – Éric Pauget, rapporteur pour avis, l'a relevé.
L'augmentation des crédits de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" masque une réalité plus inquiétante, que j'ai évoquée il y a quelques jours : un recul des moyens de l'administration territoriale de l'État, qui semble traduire un recul de l'engagement et de la présence de l'État dans les territoires. Nous connaissons toutes et tous la situation des préfectures : sous-dotées, elles ne parviennent pas à faire face aux demandes de carte d'identité, de passeport et de permis ; les personnels sont sous pression, car ils n'ont pas les moyens de traiter ces demandes comme ils devraient le faire.
De leur côté, les usagers n'obtiennent jamais de réponse dans un délai normal. Il en résulte une montée des tensions et de la violence. Nous pourrions lutter contre tout cela, mais ce n'est pas fait. Le sous-effectif dans les Cert est au cœur de la question. Mes collègues ont déposé des amendements à ce sujet. De manière générale, il est urgent de remettre de l'humain au cœur des services publics. Alors que la dématérialisation s'accompagnait d'une promesse d'accélération, elle éloigne de plus en plus nos concitoyens de ces services.
Mme Cyrielle Chatelain et M. Damien Maudet applaudissent.
Le budget de la mission "Sécurités" est lui aussi globalement en hausse, mais, une fois encore, le diable se cache dans les détails. Les crédits alloués au fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (FIPDR) augmenteront de 3 ou 4 % à peine, à un moment où nous devrions y consacrer tous les moyens nécessaires, car il vaut mieux essayer de prévenir que de réagir lorsqu'il est trop tard. Nous constatons que l'essentiel des crédits est consacré à la vidéosurveillance algorithmique ; on finance à coups de millions ce fameux Big Brother que l'on promet de déployer partout.
La baisse des moyens de l'action numérique constitue une vraie surprise – la Lopmi promettait, au contraire, une accélération en ce domaine –, de même que celle des dépenses de formation pour la police nationale. Il faudrait plutôt renforcer la formation des agents, notamment en matière de tir, pour répondre à une demande récurrente de leur part. Il est également important de consacrer davantage de moyens à l'action sociale.
Pour ce qui concerne plus spécifiquement la police, il est un sujet dont on a beaucoup parlé mais, puisque la pédagogie passe par la répétition, je répète qu'avec plus de 1 000 suicides depuis vingt ans, il est temps d'agir. On peut répéter ad nauseam que les suicides ne sont jamais liés à une seule chose et que le travail n'est qu'un facteur parmi d'autres. Il n'en demeure pas moins que lorsque des policiers, dont la mission est d'assurer la sécurité, se retrouvent en situation de dépression, toutes les études cliniques et toute la littérature scientifique indiquent que celle-ci mène à l'irritabilité, à la violence et à des réactions disproportionnées. Chaque fois que l'on renonce à lutter contre ces suicides, chaque fois que l'on ne consacre pas de moyens à l'aide psychologique des agents, qui en font la demande, c'est la démocratie que l'on abîme, c'est tout notre système que l'on empêche de fonctionner correctement.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Voilà pourquoi cette question est au cœur de nos revendications. La période tendue, les attentats, les blessés à Marseille nous rappellent que cette profession souffre.
Je conclus en disant que si le budget de la sécurité civile a augmenté – et je remercie le Gouvernement d'avoir déposé in extremis un amendement en ce sens –, il a encore cinq ou dix ans de retard, car il n'anticipe pas le réchauffement climatique, dure réalité quotidienne qui fait des morts parmi les pompières et les pompiers. Tel n'est pas l'objet de cette discussion, mais nous devons travailler sérieusement sur le mode de financement des Sdis.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.
Mon intervention portera plus spécifiquement sur les crédits de la mission "Sécurités" , laquelle regroupe les crédits de la police et de la gendarmerie nationale ainsi que ceux de la sécurité civile.
Concernant les budgets de la police et de la gendarmerie, nous notons avec satisfaction une hausse des crédits qui se traduira, l'an prochain, par la création de 2 184 postes supplémentaires. Nous avons cependant tous en tête la note thématique publiée en juillet dernier par la Cour des comptes. La Cour y souligne que la forte progression des crédits prévue dans le cadre de la loi de programmation « ne règle pas les difficultés structurelles des forces de sécurité intérieure ». D'une part, en effet, les forces de sécurité rencontrent des difficultés croissantes de recrutement, notamment du fait de la nette augmentation des départs, et des démissions en école. À cet égard, la Cour suggère au Gouvernement de prendre de nouvelles mesures d'attractivité par l'amélioration matérielle des conditions de travail, l'accès au logement, la formation continue et la définition de nouveaux parcours de carrière. D'autre part, la Cour des comptes met en évidence que les fortes ambitions affichées sur l'équipement et l'investissement ne trouvent pas de traduction suffisante dans la programmation. Vous objecterez sans doute que les dépenses d'investissement progressent, notamment pour ce qui concerne la rénovation du parc immobilier de la police nationale. Mais est-ce suffisant ?
Nombreux sont les collègues qui, en commission, ont souligné les lacunes persistantes en matière de formation initiale et continue – cela a déjà été souligné –, en matière de prévention de la délinquance et de modernisation de l'équipement.
Ce qui nous préoccupe le plus, c'est la persistance d'une grande souffrance au travail, laquelle nous presse non seulement d'améliorer significativement les conditions de travail des policiers et gendarmes, mais aussi de leur permettre de retrouver le sens de leur mission.
De ce point de vue, nous regrettons la priorité continue accordée aux opérations de maintien de l'ordre avec la création de sept nouveaux escadrons de gendarmerie mobile (EGM), la livraison de 90 Centaures et 1 035 véhicules de maintien de l'ordre. Le document budgétaire justifie ces crédits qui ont été alloués « afin de pouvoir assumer la haute intensité », mais nous nous inquiétons de la militarisation de l'équipement des policiers. Nous avons le sentiment que le Gouvernement veut tirer prétexte de l'organisation prochaine des Jeux olympiques et paralympiques pour éloigner toujours plus la gendarmerie nationale du modèle qu'elle incarnait : celui d'une police de proximité du monde rural capable d'utiliser toutes les palettes de l'action, de la médiation à la force, en garantissant aux agents une certaine autonomie.
Pour ce qui concerne la sécurité civile dont le programme représente, nous le savons, une faible proportion de l'ensemble des crédits effectivement consacrés à la sécurité civile, je voudrais dire un mot du financement des Sdis. Les incendies de l'an dernier ont mis en évidence le manque structurel d'effectifs des sapeurs-pompiers. Malgré un budget total qui a atteint 5,39 milliards d'euros en 2021, selon un rapport de l'IGA – inspection générale de l'administration – paru en début d'année, les sapeurs-pompiers et les présidents de départements n'ont plus les moyens de faire face à la progression du nombre total d'interventions.
Nous remercions le rapporteur des crédits du programme Sécurité civile d'avoir consacré son rapport thématique à cette question. Plusieurs pistes sont sur la table : l'augmentation de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance, la TSCA, à laquelle le Gouvernement se refuse, afin, une fois encore, de ne pas contrarier le secteur des assurances ; l'actualisation de l'assiette de cette taxe ; enfin, la prise en compte de la valeur du sauvé, c'est-à-dire la valeur de ce que nos sapeurs-pompiers sauvent de la destruction. La reconnaissance de cette valeur du sauvé est un enjeu capital dans un contexte où l'aggravation du risque incendie concerne désormais l'ensemble des territoires de France continentale et d'outre-mer.
C'est peu dire que nous ne partageons pas l'autosatisfaction du Gouvernement et de sa majorité, une autosatisfaction qui vous conduit à balayer d'un revers de main toute critique et toute objection, y compris lorsqu'elles viennent des premiers intéressés. Nous voterions contre les crédits de cette mission, si le vote nous était permis ; toutefois, puisque la Première ministre risque de recourir très rapidement au 49.3, nous n'en aurons peut-être même pas la possibilité. Je répète que, malgré leur augmentation, ces crédits sont insuffisants.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Faire en sorte que l'État retourne sur le terrain, qu'il revienne dans les territoires et qu'il recrée le lien avec les citoyens, tel est l'objectif ambitieux que se fixe le ministère de l'intérieur avec les deux missions Administration générale et territoriale de l'État et Sécurités. Ce rapprochement passe par le retour des préfectures, le déploiement des nouvelles brigades de gendarmerie et le renforcement des maisons France Services.
Les attentes des citoyens sont grandes après des années de sous-investissement et d'éloignement. C'est particulièrement vrai en zone rurale et dans les outre-mer. Les crédits sont là, avec 24 milliards d'euros pour la mission "Sécurités " et 4,6 milliards pour la mission "Administration générale et territoriale de l'État" . C'est aussi le rôle d'un groupe d'opposition de saluer les moyens déployés et notre groupe relève le respect la trajectoire fixée dans la Lopmi. Cependant, une enveloppe budgétaire ne clôt pas à elle seule tout le débat et nous avons plusieurs points d'alerte.
Sur la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , comme chaque année, l'un des enjeux reste l'instruction de la délivrance des titres. Les délais sont toujours excessifs pour l'obtention des cartes d'identité : le délai total d'obtention était de 65 jours en avril dernier, contre 65,6 jours en avril 2022, au plus fort du plan d'urgence censé nous sortir de la crise de délivrance des titres. Les résultats ne sont pas encore là. En outre, les fractures territoriales sont toujours fortes, puisque le délai d'obtention va de 16 jours dans le Cantal à 118 jours dans les Côtes-d'Armor.
Le ministère met en avant les délais d'instruction dans les Cert ; c'est oublier qu'il faut se placer du côté de l'usager. Entre la date de demande d'un rendez-vous et l'obtention du titre, le délai est long, très long. Une des difficultés reste le manque d'accompagnement et de moyens alloués aux communes pour leur permettre de proposer suffisamment de créneaux.
Par ailleurs, je tiens à vous alerter sur un point qui touche plus particulièrement ma circonscription. Depuis quelques années, pour rentrer à Saint-Pierre-et-Miquelon en transitant par Canada, il faut obtenir une autorisation de voyage électronique (AVE), même si l'on n'y reste que quelques heures, le temps de changer d'avion. Je rappelle que Saint-Pierre-et-Miquelon ne dispose de vols directs au départ de Paris que deux mois dans l'année ; en temps normal, on transite donc par Montréal, Halifax ou encore Saint-Jean de Terre-Neuve. C'est une situation complexe : des ressortissants français doivent obtenir le consentement d'un pays voisin pour retourner chez eux. Le problème se pose aussi pour les entreprises qui ont des besoins en main-d'œuvre, dont les demandes d'AVE sont parfois bloquées, notamment lorsque les travailleurs n'ont pas un passeport européen. Cela conduit à des blocages et à des situations humaines difficiles.
C'est une question de souveraineté nationale qui dépasse le cadre de notre discussion, mais les choses doivent évoluer. C'est un dossier sensible à mener en bonne intelligence avec nos amis canadiens.
J'en viens à la mission "Sécurités" . Le groupe Horizons et apparentés tient à saluer l'engagement toujours plus important des policiers et des gendarmes qui, chaque jour, sur l'ensemble de notre territoire, contribuent à la sécurité de nos citoyens. Cet engagement joue un rôle crucial dans le contexte actuel. L'année 2024 sera en effet marquée par de lourds défis pour les forces de sécurité, à commencer par l'organisation des Jeux olympiques. Je voudrais insister sur trois points.
Premièrement, le métier de policier peine à attirer. Il nous faut travailler à tous les aspects de son attractivité. Dans cet esprit, notre groupe appelle à renforcer les mesures destinées aux familles du personnel. L'action sociale du ministère est délaissée et n'évolue pas : à quand un vrai plan « famille » pour les policiers, à l'image de celui qui existe pour les militaires ?
Deuxièmement, la sécurité incendie pose un problème particulier, notamment dans les territoires d'outre-mer en raison d'un manque de moyens et du blocage créé par l'insularité. C'est le cas à Saint-Pierre et Miquelon, qui abrite la seule forêt boréale française ; aujourd'hui asséchée, celle-ci est vulnérable au risque incendie. Vous n'êtes pas sans savoir que des feux importants ont touché Halifax cet été. Il est nécessaire de lancer un plan d'urgence, avant de n'avoir plus que nos yeux pour pleurer.
Enfin, je tiens à alerter le ministère de l'intérieur sur un sujet qui touche mon territoire, avec des conséquences désastreuses. Il s'agit de la modification subite de la réglementation de l'importation des armes et des munitions à Saint-Pierre-et-Miquelon. Elle suscite des incompréhensions, tant auprès des armuriers et de la fédération de chasse que des clubs sportifs.
En effet, jusqu'à présent, le préfet avait autorité pour délivrer les autorisations d'acquérir des armes ou des munitions de catégorie B dans notre archipel ; subitement, il a été décidé de faire appliquer une norme qui date de 1914, imposée par la Commission internationale permanente, laquelle n'avait jamais été appliquée à Saint-Pierre et Miquelon. C'est un non-sens sur lequel j'aimerais que le ministère se penche.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. – M. Charles de Courson, rapporteur spécial, applaudit également.
Toutefois, s'il y a deux missions auxquelles les Français sont particulièrement attachés, parce qu'elles touchent au cœur de nos territoires et de notre vie quotidienne, ce sont bien ces deux missions. Il n'y a pas une journée sans que nos concitoyens ne rencontrent des policiers, des gendarmes, des pompiers ou des agents du service public. Sans glorifier la majorité et le Gouvernement, qui ont considérablement renforcé les crédits de ces missions, je tiens à rappeler quelques chiffres importants, derrière lesquels se cachent des hommes et des femmes qui donnent beaucoup de leur temps et de leur engagement.
Concernant les crédits de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , le projet de loi de finances pour 2023 avait été particulièrement significatif. Du jamais-vu : réouverture de sous-préfectures – on ne l'avait jamais fait –, création des maisons France Services – il n'y a pas un député sur ces bancs pour considérer que c'est une mauvaise chose –, que nous inaugurons encore.
Ces annonces avaient conduit à une importante augmentation de 13,3 % des autorisations d'engagement. Nous avons mis fin à plus de vingt ans de réduction systématique des effectifs départementaux de l'administration territoriale de l'État, administration placée sous l'autorité des préfets que je salue.
Nous maintenons cette ambition pour l'année 2024 et la trajectoire restera dynamique. Pour assurer la présence et la continuité de l'État sur le territoire et coordonner les administrations déconcentrées, maillon essentiel de nos politiques publiques, le budget du programme 354 est en hausse de 0,2 %.
La baisse du budget de l'action 02 Réglementation générale, garantie de l'identité et de la nationalité et délivrance des titres fait suite à d'importants efforts consentis pour obtenir l'abaissement des délais d'instruction des passeports – c'était un enjeu essentiel –, de remise des cartes d'identité et de traitement des demandes de titre et de renouvellement de séjour. Les chiffres témoignent d'une amélioration ; il faut évidemment continuer mais je voudrais saluer les efforts consentis en la matière.
Nous augmentons encore significativement le budget de l'action 03 Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales, qui est très important, ainsi que celui de l'action 04 Pilotage territorial des politiques gouvernementales, pour laquelle plus de 230 équivalents temps plein sont créés dans le réseau d'ingénierie territoriale de l'État, qui est essentiel pour assister et soutenir nos collectivités.
Enfin, s'agissant du financement des fonctions support du ministère de l'intérieur, quelques économies sont réalisées – cela a été souligné ; elles montrent que ce ministère contribue aussi à la trajectoire budgétaire qui a été fixée. En somme, nous réarmons l'État territorial, nous recréons du service de proximité et nous modernisons le fonctionnement des services, tout en respectant le cadre budgétaire qui nous est imposé.
Concernant la mission "Sécurités" , 2024 sera la deuxième année d'application de la Lopmi, dont je rappelle qu'elle octroie 10 milliards d'euros de crédits supplémentaires au ministère de l'intérieur – 15 milliards sont prévus d'ici à la fin du quinquennat. Il faut évidemment saluer, comme l'ont fait des députés sur tous les bancs, la création de plus de 200 brigades de gendarmerie, à Paris comme en province, alors que ces trente dernières années, 500 brigades avaient été fermées. En plus de ces nouvelles brigades, 4 000 postes d'assistant d'enquête sont créés, ainsi que plus de 1 500 cyberpatrouilleurs, et les effectifs dédiés à la lutte contre les violences intrafamiliales et sexuelles sont doublés.
J'ajoute que le programme 176 Police nationale doit poursuivre la réorganisation territoriale sous commandement unique, pour plus d'efficacité. Le recrutement de 1 139 policiers supplémentaires et la poursuite de la modernisation des équipements, qui est essentielle, sont prévus. Quant au budget du programme 152 Gendarmerie nationale, il doit augmenter d'environ 4,8 % et atteindre près de 11 milliards d'euros. Il prévoit la création des 238 brigades que j'ai évoquées, la hausse des moyens de lutte contre la cybercriminalité et contre les atteintes à l'environnement, ainsi que la croissance de la réserve et des politiques de prévention.
Enfin, le programme 161 Sécurité civile poursuit sa montée en puissance. Il prévoit l'achat d'aéronefs bombardiers d'eau et un soutien aux Sdis pour faire face aux incendies, suite à la loi du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie.
Le budget 2024 sera par ailleurs le troisième depuis l'adoption de la loi visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, dite loi Matras, qui a permis un recul heureux des carences observées sur le terrain.
La mission Sécurités, qui est essentielle, s'inscrit dans la continuité des propositions que nous avons défendues lors de l'examen de la Lopmi, propositions que notre assemblée a adoptées. Elles sont fortes et même vitales si nous voulons protéger les Français ces prochaines années en nous adaptant aux changements de notre société. Cette politique répond aux enjeux du futur et concourt à l'atteinte des objectifs fixés par le Président de la République. Pour ces raisons, le groupe Renaissance votera bien évidemment ces crédits.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
La parole est maintenant à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Je suis très heureuse d'être parmi vous cet après-midi pour vous présenter les crédits du ministère de l'intérieur et des outre-mer pour 2024, s'agissant des missions Sécurités et Administration générale et territoriale de l'État. Je vous prie de bien vouloir excuser le ministre de l'intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, qui ne peut malheureusement pas être présent maintenant, mais qui le sera juste après la pause de vingt heures. Chacun d'entre vous connaît son implication pour défendre les crédits de son ministère.
Dans le contexte actuel, mon intervention revêt un caractère singulier. Jamais les Français n'ont autant eu besoin de sécurité, et jamais l'État n'a investi autant de moyens au service de leur sécurité. Ainsi, derrière les données budgétaires, il y a des femmes et des hommes qui concourent à maintenir, dans des conditions parfois difficiles, l'ordre et la sécurité publique. Je voudrais leur adresser toute ma reconnaissance, toute notre reconnaissance.
Grâce à vous, l'année 2023 a été marquée par l'adoption de la Lopmi, qui consacre près de 15 milliards d'euros sur cinq ans à la sécurité des Français. Je le répète devant vous : ces crédits doivent être exécutés conformément à la trajectoire budgétaire que vous avez votée. Si l'inflation et l'adoption – sous plafond – des mesures de revalorisation du point d'indice, que beaucoup d'entre vous ont évoquée – elles représentent un montant total de près de 500 millions d'euros en année pleine pour ce qui est du ministère de l'intérieur – conduisent à des arbitrages internes, nos priorités demeurent inchangées. Elles sont au nombre de quatre : renforcer la présence des FSI sur la voie publique, lutter contre le terrorisme, affermir l'administration territoriale et préparer les Jeux olympiques et paralympiques.
Face aux menaces diverses et multiples auxquelles nous faisons face, nous menons un effort sans précédent pour renforcer la présence des forces de sécurité intérieure sur la voie publique, partout sur le territoire. Nous avons doublé cette présence, notamment en mettant fin aux gardes statiques et en substituant aux personnels actifs des personnels administratifs. Pas moins de 2 850 nouvelles FSI ont été déployées en 2023, et 7 400 le seront sur cinq ans ; cela représente près de 90 % des ETP créés dans le cadre de la Lopmi. À cela s'ajoutent, onze créations d'escadrons de gendarmerie mobile et unités de CRS, et le financement de 1 266 ETP dédiés à renforcer les CSP prioritaires en matière de police nationale au cours des deux premières années.
Ce renforcement de notre présence passe aussi par un affermissement de l'ancrage territorial, en concertation avec les élus, qui sera garanti par la création de 239 brigades territoriales de gendarmerie sur cinq ans, dont 80 sur les annuités de 2023 et de 2024, pour un total de 690 ETP – 312 en 2023 et 278 en 2024. Permettez-moi de souligner que les brigades mobiles ont pour objectif de rapprocher les services de gendarmerie de la population et de parcourir le « dernier kilomètre » ; certaines devront d'ailleurs se concentrer sur une thématique spécifique. Il s'agit d'une action totalement inédite depuis la création de la gendarmerie nationale.
Ensuite, un effort particulier est également prévu pour nos outre-mer. Un tel effort est nécessaire afin de répondre aux enjeux de sécurité dans ces territoires : il s'agit de renforcer les moyens de lutte contre la délinquance et le trafic de stupéfiants en Guyane, contre l'immigration clandestine à Mayotte et contre les trafics illicites en Martinique. Entre 2017 et aujourd'hui, au total, 1 400 policiers et gendarmes supplémentaires ont été affectés dans les territoires d'outre-mer. À Mayotte, en particulier, les effectifs ont été doublés pour atteindre un total de 1 150 FSI, hors EGM ; en Guyane, ils ont augmenté de 30 % pour atteindre un total de 1 525 FSI, hors escadrons de gendarmerie mobile. Des plans particuliers ont été mis en œuvre pour répondre aux enjeux locaux spécifiques à ces deux territoires : Shikandra à Mayotte et Harpie en Guyane.
Cette augmentation des effectifs territoriaux se double par ailleurs du renforcement permanent de vingt et un escadrons de gendarmerie mobile, soit 20 % des EGM nationaux, répartis à hauteur des enjeux sécuritaires locaux – six en Guyane, cinq à Mayotte, quatre en Nouvelle-Calédonie, quatre en Guadeloupe et dans les îles du Nord, un en Martinique, un à La Réunion et un en Polynésie française.
Cette dynamique de renforcement se poursuivra avec la création prochaine de vingt-deux nouvelles brigades de gendarmerie, dont huit entre 2023 et 2024. En plus de la présence sur le terrain, les équipements des FSI ont été renforcés afin de les soutenir dans leurs missions. Ainsi, 4 800 véhicules légers ont été acquis pour la police nationale et la gendarmerie nationale en 2023, après l'achat de 13 310 autres véhicules depuis deux ans.
Depuis l'entrée en fonction de Gérald Darmanin, plus de la moitié du parc automobile a été renouvelée ; en 2024, le ministère fera l'acquisition de 3 600 nouveaux véhicules dont 58 véhicules Centaure, pour un coût total de 130 millions d'euros. En complément, nous avons également finalisé le plan relatif au déploiement des caméras-piétons : 35 000 caméras de ce type ont été installées.
Toujours en matière d'équipements, dans la continuité des annonces du Président de la République, le Gouvernement va déposer un amendement concernant le renforcement des moyens dédiés à la sécurité civile, notamment pour lutter contre les feux de forêt, à hauteur de 140 millions d'euros en crédits de paiement, dont 45 millions seront consacrés à la création de la quatrième unité d'instruction et d'intervention de la sécurité civile (UIISC), qui s'installera, comme vous le savez, à Libourne dès 2024 – 163 ETP seront créés. Par ailleurs, 39 millions d'euros sont dédiés aux pactes capacitaires, 32 millions aux Canadair et 23 millions à la location de moyens aériens, avions et hélicoptères bombardiers d'eau.
Parallèlement, l'année 2023 a vu l'achat de près de quarante nouveaux hélicoptères – ils sont en cours d'acquisition – pour la sécurité civile et la gendarmerie nationale, ce qui correspond à un engagement de plus de 500 millions d'euros. C'est un effort important, rendu nécessaire par la recrudescence des incendies, dans un contexte de changement climatique et d'aggravation de la menace.
Enfin, des ressources supplémentaires sont requises pour mieux répondre à la cybercriminalité, nouvelle frontière de la délinquance : 1 500 cyberpatrouilleurs ont été recrutés, ce qui représente une augmentation de 50 % par rapport à l'existant, et un appel d'urgence numérique, le 17 cyber, a été ouvert.
En outre, dans le cadre du plan France ruralités, nous prévoyons des actions de sensibilisation auprès des communes et de leurs maires, car elles sont parmi les premières victimes de ces nouvelles menaces.
Des investissements importants sont par ailleurs prévus pour moderniser les services numériques accessibles aux citoyens. Après les succès de Pharos, la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements, et de Thesee, la plateforme de traitement harmonisé des enquêtes et signalements pour les e-escroqueries, nous mettrons en place la visioplainte et le portail « Ma sécurité », afin d'accomplir, là encore, le dernier kilomètre des politiques publiques en matière de sécurité.
S'agissant du cas précis du renseignement, là aussi, notre main n'a pas tremblé pour renforcer les moyens de ses services face aux menaces nouvelles. Il y a dix ans, à sa création, la DGSI comptait un peu plus de 3 200 agents. Grâce aux divers plans mis en œuvre par le Gouvernement depuis 2017, elle en comptera 5 000 à la fin de l'année 2023. Elle réunira 5 500 personnes lorsqu'elle emménagera dans son futur site unique de Saint-Ouen, en 2028, dans le cadre d'un projet qui coûte 1,2 milliard d'euros.
Le budget de la DGSI a plus que doublé en dix ans, et il a dépassé cette année la barre symbolique des 100 millions d'euros. Cet objectif budgétaire, inscrit dans la Lopmi, renvoie aux menaces diverses auxquelles nous faisons face – terrorisme, ingérence d'États étrangers et hostiles, menaces cyber, manipulation d'informations.
Vous l'avez compris, le ministère soutient une volonté de réarmement continu de l'administration générale et territoriale de l'État. Conformément à la Lopmi, en 2024, trois grandes priorités seront développées.
Premièrement, nous voulons renforcer nos capacités numériques et cyber en développant le réseau radio du futur, adossé à l'Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours, l'Acmoss, et en dématérialisant de bout en bout les processus métier ainsi que l'Anef – administration numérique pour les étrangers en France –, ce qui permettra à l'ensemble des personnes physiques de bénéficier d'une authentification numérique régalienne de niveau élevée grâce à France Identité numérique.
Globalement, le poids du numérique consolidé au sein du ministère, notamment dans le cadre du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur et de ceux liés aux métiers, est significatif en 2024, conformément à la trajectoire établie par la Lopmi. Il atteint 634 millions d'euros en autorisations d'engagement et 176 millions en crédits de paiement. Nous recruterons d'ailleurs soixante-quinze ETP dédiés au numérique en 2024.
Deuxièmement, nous nous attachons à réarmer l'État territorial, en créant 350 emplois sur la période couverte par la Lopmi. Cent dix créations d'emploi sont prévues en 2024 pour continuer à soutenir durablement les missions préfectorales les plus en tension.
Nous accentuons aussi les actions de prévention de la délinquance et de la radicalisation, en renforçant notamment la vidéoprotection. Leur budget s'élèvera à 25 millions d'euros en 2024, contre 22 millions en 2023.
Troisièmement, nous souhaitons accroître la proximité, la transparence et l'exemplarité, en finalisant la création de nouvelles sous-préfectures, pour 8 millions d'euros, et en labellisant les sous-préfectures en « espaces France Services », mais aussi en relocalisant des services de l'administration centrale dans des villes moyennes et dans des territoires ruraux.
Pardonnez-moi, madame la présidente, je pensais que mon temps de parole était illimité !
En fait, madame la ministre déléguée, lors de l'examen des crédits budgétaires, le temps de parole du Gouvernement est limité, à la différence des autres séances.
Puisque vous me le permettez, je vais essayer de conclure rapidement. Je voulais simplement vous dire que grâce à des moyens humains, financiers et techniques renforcés, au réarmement de notre administration territoriale, au soutien à la délivrance des titres sécurisés – que j'aurais eu plaisir à développer, mais ce n'est pas grave – et à l'attention spécifique portée aux territoires ultramarins et à l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques 2024, notre ministère est particulièrement mobilisé et prêt à répondre aux besoins des Français.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Nous en venons aux questions. Je vous rappelle que leur durée, comme celle des réponses, est fixée à deux minutes.
La parole est à M. Jean Terlier.
Dans le contexte singulier actuel, la lutte contre le radicalisme religieux et le séparatisme appelle toute notre attention et notre fermeté.
Comme cela a été évoqué, 110 emplois seront ainsi créés en 2024, au titre de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , dans les missions préfectorales les plus en tension, qui compteront 349 emplois supplémentaires à l'horizon 2027 grâce au schéma d'emplois adopté avec la Lopmi. Comment cette augmentation des effectifs préfectoraux pour lutter contre le radicalisme se traduira-t-elle concrètement ?
Quels effets attendez-vous de ces recrutements qui paraissent salutaires ?
Par ailleurs, alors que les conséquences du réchauffement climatique deviennent de plus en plus tangibles, les feux de forêt estivaux sont malheureusement appelés à devenir de plus en plus réguliers et destructeurs, notamment dans des départements jusqu'alors épargnés, comme le Tarn. Comme nous l'avons tristement constaté, l'été 2022 a été dramatique pour notre pays : 72 000 hectares sont partis en fumée. Face à l'immensité du défi des prochaines années, certains Sdis sont en souffrance, notamment par manque d'équipement. Au-delà des dispositions prévues dans les crédits de la mission "Sécurités" que nous examinons, comment comptez-vous soutenir les pompiers qui se battent contre les feux de forêt ?
Mme Nadia Hai applaudit.
Pour ce qui est de la lutte contre le radicalisme et le séparatisme, les ETP qui seront créés au cours des deux prochaines années dans les préfectures s'ajouteront à ceux déjà créés en 2022 dans les dix départements les plus touchés. En outre, comme je l'ai rappelé dans mon intervention liminaire, la DGSI, qui comptait un peu plus de 3 200 personnels à sa création, il y a dix ans, en comptera 5 500 lorsqu'elle emménagera sur le site de Saint-Ouen. Quant aux moyens du FIPD, qui passeront de 84 millions d'euros en 2023 à 119 millions en 2027, ils sont en constante augmentation.
Par ailleurs, le Président de la République a annoncé le renforcement des moyens de la sécurité civile pour lutter contre les feux de forêt. Cet engagement se traduira par le renouvellement de la flotte aérienne, la revalorisation du remboursement des colonnes de renfort des Sdis, le renforcement de leurs moyens capacitaires et la création d'une quatrième unité d'intervention et d'instruction de sécurité civile, qui accueillera 565 sapeurs-sauveteurs.
Enfin, l'amendement que je présenterai tout à l'heure ne modifiera pas le plafond de financement de ces mesures, limité à 140 millions d'euros en crédits de paiement hors compte d'affectation spéciale pour 2024. En effet, l'achèvement de la programmation immobilière, début octobre, a permis de fixer les besoins à hauteur de 150 millions d'euros en autorisations d'engagement, dans le cadre d'un marché public global pour ce projet.
Dans mon département de l'Eure, les délais de délivrance de passeports et cartes d'identité ont doublé en l'espace d'un an, passant de vingt-trois jours en moyenne en 2021 à quarante-huit en 2022. Au niveau national, les délais ont été multipliés par six, passant de onze jours en 2021 à soixante-six début 2023 – dans certains départements, on dépasse même les cent jours. En avril dernier, la Première ministre s'était engagée à ce que ce délai soit réduit à vingt jours à l'automne, c'est-à-dire aujourd'hui. Pouvez-vous nous indiquer quel est le délai moyen actuel et nous préciser le délai encore nécessaire dans les secteurs géographiques les moins favorisés ?
Afin de réduire ces délais, une enveloppe de 100 millions d'euros a été débloquée pour soutenir les collectivités locales et leur permettre d'ouvrir davantage de créneaux de rendez-vous. Pouvez-vous nous préciser si elle a été intégralement consommée et nous indiquer sa ventilation par type de collectivité et de dépenses, ainsi que les résultats obtenus ?
Enfin, j'appellerai votre attention sur le phénomène des rendez-vous non honorés. Particulièrement problématique dans le cadre médical, il concerne également l'administration publique. À titre d'exemple, 20 % à 50 % des rendez-vous ne sont pas honorés dans la ville de Besançon, qui a pourtant engagé des dépenses pour ouvrir davantage de créneaux et ainsi réduire le délai de cinquante-huit jours qui étaient encore nécessaire, au début de l'année, pour obtenir un titre d'identité. Ce taux très élevé de rendez-vous inutilement bloqués rallonge les délais de traitement, coûte aux contribuables, et lèse les personnes en attente d'un rendez-vous. Disposez-vous de statistiques nationales à ce sujet et quelles mesures entendez-vous prendre, en lien avec les collectivités, pour lutter contre ce phénomène ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Les délais de délivrance des titres sécurisés ont pu aller jusqu'à soixante-dix-sept jours ; aujourd'hui, il ne faut plus en moyenne que dix-huit jours pour obtenir un rendez-vous. Plus largement, le délai total pour obtenir un titre, qui inclut le dépôt de la demande, son instruction par les Cert, et la fabrication du titre par une imprimerie nationale, est ainsi passé de trente-cinq jours et demi à vingt-six jours. Lorsqu'elle a annoncé que seraient débloqués 100 millions d'euros en faveur de la dotation pour les titres sécurisés (DTS), la Première ministre s'est fixé comme objectif un délai de délivrance de trente jours. Atteint début juillet, cet objectif a depuis été dépassé, puisqu'il n'est plus, je le répète, que de dix-huit jours. J'en profite pour saluer les collectivités locales et les services déconcentrés – avec lesquels j'ai organisé des visioconférences tous les mois, voire tous les quinze jours –, qui ont travaillé ensemble pour permettre cette réussite.
Durant les cinq nuits d'émeutes que nous avons connues l'été dernier, de nombreuses communes ont découvert – ou redécouvert – que, dans certains commissariats de France, les effectifs présents la nuit ne permettaient pas d'assurer la sécurité dans nos rues. Ce fut le cas à Béziers, une ville de 80 000 habitants, où seuls quatre policiers nationaux étaient présents la première nuit de violence. Heureusement, nous avons une police municipale, dont les effectifs seront encore augmentés en 2024 pour atteindre 120 policiers, contre seulement 30 en 2014. À cet égard, je tiens à saluer l'annonce du Gouvernement concernant l'extension des prérogatives judiciaires dont ils pourront bientôt bénéficier : c'est une bonne nouvelle. Heureusement encore, dès la seconde nuit d'émeutes, des renforts ont été envoyés à Béziers par le représentant de l'État – le préfet de l'Hérault –, que je remercie – même si, comme chaque fois, c'est l'occasion de se rendre compte que ce sont des effectifs qui manquent au quotidien.
Le commissariat de police nationale de Béziers compte actuellement 218 effectifs actifs, soit seulement deux de plus qu'au 31 août 2021, alors que 65 effectifs supplémentaires ont été envoyés à Montpellier depuis 2020 – comme quoi, il vaut mieux être socialiste, dans la vie !
M. Charles Sitzenstuhl sourit.
Certes, il faut ajouter à ces 218 policiers les personnels administratifs et les policiers adjoints, mais les premiers ne vont pas sur le terrain et les seconds ne sont pas totalement opérationnels.
Notre police municipale abat un gros travail, et, par conséquent, en donne à ses collègues de la police nationale, singulièrement à ses services d'investigation. À l'image de notre voisine montpelliéraine, allons-nous rapidement bénéficier d'effectifs supplémentaires ?
Nos chiffres concordent, madame Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard sourit.
Les effectifs du corps d'encadrement et d'application de la police nationale à Béziers sont bien passés de 188 à 190 entre 2016 et 2023. Conformément aux engagements pris par le Gouvernement dans la Lopmi, cette augmentation, restée légère jusqu'à présent, se poursuivra dans les prochaines années. Les effectifs des polices municipales sont également voués à augmenter, à Béziers mais aussi dans d'autres collectivités où la délinquance est importante. Vous pouvez compter sur nous pour continuer à renforcer le continuum de sécurité entre polices municipales et police nationale.
J'appelle maintenant les crédits de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , inscrits à l'état B.
La parole est à Mme la ministre déléguée, pour soutenir l'amendement n° 2898 .
Il procède à la minoration des crédits de l'action 05 du programme 354 Administration territoriale de l'État de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , correspondant à la compensation de la part de l'État aux régions, au titre du transfert, depuis le 1er janvier 2023, de certaines compétences de l'autorité administrative en matière de gestion des sites Natura 2000 exclusivement terrestres.
Cet amendement, dont j'avais simplement été informé, vient juste d'être déposé : la commission n'a donc pas pu l'examiner, ni, a fortiori, émettre un avis. Sur le fond, la somme de 300 000 euros concernée…
…pour compenser le transfert aux régions de la gestion des zones Natura 2000 est très faible et ne me semble pas poser de problème : j'émettrai donc un avis personnel favorable. Mais sur la forme, je trouve la procédure quelque peu curieuse.
J'abonde dans le sens du rapporteur : tout cela est étrange. Les crédits de cette mission, transférée au 1er janvier 2023, ont été discutés en 2022. Or, vous semblez découvrir seulement maintenant, alors que nous débattons du budget pour 2024, que des transferts de crédits auraient dû être réalisés l'an passé.
Je ne cherche pas à tout prix à remettre en cause la sincérité du budget, mais reconnaissez que ça commence mal.
L'amendement n° 2898 est adopté.
Sur l'amendement n° 1530 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, pour le soutenir.
Cet amendement d'appel vise à appeler l'attention de la représentation nationale et du Gouvernement sur la somme de 1,2 milliard d'euros de crédits attribués au projet de site unique de la DGSI. Anticipant les critiques de mauvaise foi, je précise qu'il ne s'agit évidemment pas de remettre en cause la construction de ce site ou de refuser d'accorder à la DGSI les moyens matériels qui lui sont nécessaires, mais la France ayant connu par le passé plusieurs mauvaises expériences à la suite de mauvais montages financiers concernant les investissements immobiliers de l'État, nous souhaitons obtenir davantage d'informations sur cette dépense dont le montant nous paraît exorbitant.
Voici les éléments que j'ai pu réunir sur cet investissement considérable de 1 milliard d'euros visant à regrouper l'ensemble de la DGSI sur un site unique à Saint-Ouen. La démolition des bâtiments qui se trouvaient sur le terrain, acheté en janvier 2020, est désormais achevée. La construction du site de la DGSI sera lancée au deuxième trimestre 2024, ce qui explique l'importance du dynamisme de l'action 05 Affaires immobilières du programme 216, qui augmente de 345 % en AE. Au total, ce chantier aura coûté 1,3 milliard d'euros, dont 1 milliard financés par la mission "Administration générale et territoriale de l'État" à travers, donc, le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur.
Comme je vous l'ai dit la semaine dernière en commission, c'est un chantier très important auquel je consacrerai l'année prochaine une partie de mes travaux de contrôle en tant que rapporteur spécial. Au vu de ces informations, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
La concrétisation du projet d'un site unique de la DGSI, qui permettra de réunir les personnels des services centraux, représente un coût total de 1,29 milliard d'euros et a débuté en janvier 2020, comme vient de le dire M. le rapporteur spécial, avec l'acquisition, sur le territoire de la commune de Saint-Ouen-sur-Seine, du terrain nécessaire, puis la destruction des bâtiments qui s'y trouvaient. Au second trimestre de 2024 doit être engagé le marché de construction, à l'issue de la consultation de marché public global sectoriel (MPGS). Compte tenu du caractère sensible de l'opération, couverte par le secret, la communication d'informations complémentaires ne pourra avoir lieu que par l'intermédiaire de la délégation parlementaire au renseignement. Avis défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 47
Nombre de suffrages exprimés 46
Majorité absolue 24
Pour l'adoption 18
Contre 28
L'amendement n° 1530 n'est pas adopté.
Il est dû à notre collègue Michel Guiniot. L'examen minutieux des documents budgétaires, en particulier du jaune concernant les subventions accordées par l'État aux associations dans le cadre du PLF pour 2024, révèle que 26 500 euros sont octroyés à la Communauté musulmane de Poitiers au titre du programme 216, Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur, et de la prévention de la radicalisation. Or cette association est présidée par l'imam de la grande mosquée de Poitiers, financée à hauteur de 400 000 euros par Qatar Charity, une fondation promouvant une vision conservatrice de l'islam. Il revendique en outre l'affiliation de cette mosquée à l'association Musulmans de France, ex-Union des organisations islamiques de France (UOIF), elle-même liée aux Frères musulmans. Il dirige par ailleurs une autre entité proche des Frères musulmans, l'Institut européen des sciences humaines (IESH), chargé de la formation des imams.
Eu égard à ces rapports troubles du président de l'association Communauté musulmane de Poitiers avec divers promoteurs d'une vision conservatrice de l'islam, il n'est pas justifiable qu'une subvention lui soit attribuée en vue de prévenir la radicalisation. Vous tenez parfois des propos très durs à l'encontre de l'idéologie islamiste : je vous invite donc à adopter cet amendement, afin de mettre vos actes en conformité avec vos paroles.
La commission n'a pas examiné cet amendement ; à titre personnel, je demanderai à notre collègue de le retirer, à défaut de quoi mon avis sera défavorable. Concernant la forme, la baisse de 26 500 euros des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance, géré au niveau national par un comité interministériel, serait inopérante puisque les subventions aux associations sont attribuées de façon déconcentrée par les préfectures.
Concernant le fond, je vous ai dit en commission, la semaine dernière, que je consacrerais une partie de mes travaux à l'utilisation des crédits du FIPD –…
…déradicalisation, vidéosurveillance etc. ; je vous renvoie donc à mon prochain rapport.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons que M. le rapporteur spécial. Les crédits du FIPDR sont pour l'essentiel déconcentrés, l'attribution des subventions relevant du préfet. Si une association ne respecte pas le contrat d'engagement républicain qu'elle a souscrit, les services de l'État procéderont naturellement au retrait de la subvention. Enfin, je me dois de souligner à quel point le Gouvernement est engagé dans la lutte contre la radicalisation et toutes les formes de séparatisme.
Au-delà de ces explications techniques et formalistes, madame la ministre déléguée, j'aurais aimé que vous vous engagiez, pour les raisons que je viens d'évoquer, à ne plus subventionner cette association. Je veux bien retirer l'amendement à cette condition : ainsi, nous serons d'accord et nous aurons tous deux contribué à la lutte contre un islam qui n'est pas modéré.
Il a été précisé que les fonds du FIPD sont attribués par les préfets de département : vous pouvez compter sur le préfet de la Vienne, lequel se montre intransigeant s'agissant du respect des contrats d'engagement républicain. Des procédures en cours au tribunal administratif l'opposent d'ailleurs à ce sujet à des associations.
Il s'agit de faire appliquer la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République – loi « séparatisme » pour laquelle votre groupe, monsieur Guitton, n'a pas voté.
Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.
Par ailleurs, nous avons besoin des crédits du FIPD pour installer des caméras de vidéoprotection,…
…notamment à Poitiers, lorsque cette collectivité territoriale nous en donnera enfin l'autorisation administrative – le financement de ces dispositifs, nous l'avons déjà dit à de nombreuses reprises, étant assuré par l'État.
L'amendement n° 991 n'est pas adopté.
L'amendement n° 1656 de M. Jérémie Patrier-Leitus n'étant pas défendu,…
…la parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement n° 841 .
Il vise à récréer 2 000 ETP au sein du programme 354, Administration territoriale de l'État. Je n'ai pas eu le loisir de le dire tout à l'heure, mais la Cour des comptes signale dans ce périmètre une réduction des effectifs de plus de 4 000 ETP en dix ans, réduction prétendument compensée par une dématérialisation censée maintenir la qualité du service rendu. Force est de constater que le compte n'y est absolument pas. Nous souhaitons donc préserver l'existence d'une procédure matérialisée, d'un accueil physique, afin que la dématérialisation ne soit jamais contrainte. Lorsqu'on voit que 680 postes sont vacants et que l'on interroge l'administration centrale, celle-ci répond qu'il s'agit d'un constat empirique à l'instant T et non d'une analyse en fonction des besoins ; lorsqu'on demande l'estimation des besoins, notamment pour appliquer la décision du 3 juin 2022 du Conseil d'État exigeant des préfectures la possibilité d'un accueil physique pour les étrangers qui peinent à effectuer des démarches, personne ne parvient à nous la fournir. Je vous propose donc, à tout le moins, de budgétiser le rétablissement de la moitié des ETP supprimés ; peut-être ce budget ne sera-t-il pas exécuté, mais nous aurons fixé l'objectif. Gouverner par les besoins est essentiel, surtout en matière d'accès aux droits.
Nos collègues demandent que 671 millions d'euros soient consacrés à la création de 2 000 ETP en vue d'un accueil physique en préfecture, afin d'une part de rétablir les services dans leur état antérieur au plan Préfectures nouvelle génération, et afin d'autre part de permettre aux préfets de se conformer à l'injonction du Conseil d'État de prévoir, pour les démarches liées au titre de séjour, un substitut aux demandes dématérialisées sur le portail de l'Anef.
Or le décret du 22 mars 2023 a créé une telle solution : conformément à la nouvelle rédaction de l'article R. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda), cette « solution de substitution, prenant la forme d'un accueil physique permettant l'enregistrement de la demande, est mise en place pour l'étranger qui, ayant accompli toutes les diligences qui lui incombent, notamment en ayant fait appel au dispositif d'accueil et d'accompagnement prévu à l'alinéa précédent, se trouve dans l'impossibilité constatée d'utiliser le téléservice pour des raisons tenant à la conception ou au mode de fonctionnement de celui-ci ». Des déplacements que j'ai effectués lors de mes contrôles, il ressort que ce dispositif, ne concernant finalement qu'un nombre assez restreint de personnes, a été instauré sans problème particulier.
En outre, l'augmentation de plus de 670 millions d'euros des crédits du programme serait particulièrement disproportionnée. D'ailleurs, ainsi que je l'indique dans mon rapport, le réarmement des préfectures ne doit pas s'entendre uniquement comme un renforcement numérique des effectifs. Alors qu'elles rencontrent des problèmes de recrutement, il conviendrait de se pencher sur l'attractivité des postes, sur l'allocation des ressources humaines entre missions et entre territoires : la principale difficulté des préfets consiste à trouver des fonctionnaires qui en acceptent les contraintes. Avis défavorable.
Même avis que M. le rapporteur spécial. Le réseau des préfectures et sous-préfectures a bénéficié d'une stabilisation de ses effectifs pour la période 2023-2027, ainsi que de la création de 350 emplois, l'accueil figurant parmi les priorités en la matière. Le soutien numérique de proximité instauré à la suite de la décision du Conseil d'État du 3 juin 2022, l'accueil des usagers au sein d'espaces France Services dans les sous-préfectures, contribuent à cette dynamique. Les capacités d'accueil de l'Agence nationale des titres sécurisés ont également été renforcées. Enfin, le programme 216 prévoit des effectifs de soutien aux préfectures.
J'estime à 2 000 ETP les besoins nécessaires à l'accomplissement de la mission fixée par le décret du 22 mars 2023 puisque l'administration centrale, encore une fois, n'a pas su me répondre lorsque je lui demandais d'évaluer ces besoins – et pour cause : vous l'avez dit, monsieur le rapporteur spécial, c'est à l'étranger de prouver qu'il ne peut effectuer sa démarche par voie numérique. Il n'a d'ailleurs aucun interlocuteur pour le signaler, aucune voie d'accès à la procédure physique, maelström administratif qui contribue sans doute largement à ce que cette dernière ne soit presque jamais utilisée…
Le réseau France Services est quant à lui de plus en plus sollicité : tant mieux, puisqu'il rend service, mais, du 1er janvier au 1er septembre 2023, la Défenseure des droits enregistre une explosion des demandes concernant notamment l'obtention de titres de séjour, alors même qu'était déployé le téléservice de l'Anef. Celui-ci rencontre d'ailleurs des problèmes relayés par l'ANTS, dont j'ai été visiter les locaux à Charleville-Mézières, et qui ne peut faire son travail parce que personne n'a inscrit dans un décret qu'elle aurait accès à l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (Agdref). C'est lunaire, c'est dingue !
Alors, à la fin de la chaîne, il faut bien des êtres humains. Savez-vous que le nombre de personnes nécessaire à la plateforme téléphonique de l'ANTS, tous titres confondus, avait initialement été estimé à soixante ? Cette plateforme représente désormais 450 emplois, externalisés parce qu'il a fallu les créer à la va-vite et qu'on ne savait pas faire autrement. Cette instabilité réelle, concrète, met en difficulté l'ANTS, perdue dans ses marchés, ses prix, le renouvellement des agents. La Défenseure des droits a procédé à un test fort intéressant en faisant appeler au téléphone France Services, l'Anef, l'ANTS et autres.
Je conclus, madame la présidente.
Eh bien, dans 50 % des cas, l'appelant était renvoyé à internet.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Un amendement à 670 millions d'euros, cela fait cher de l'ETP ! C'est le type même de ce que nous avons entendu pendant une semaine en commission des finances : La France insoumise est très généreuse avec l'argent des Français.
Nous avons ainsi examiné des centaines d'amendements à 1 milliard et davantage.
Mon Dieu ! Mais où étiez-vous donc quand vos amis ont voté contre celui-ci ?
Ce n'est pas raisonnable, cela ne fera pas un budget pour le pays ! Non seulement cet amendement constitue une erreur mais, je le répète, il annonce tous ceux que vous nous soumettrez des heures et des jours durant, et qui ne viseront qu'à des centaines de milliards de dépenses supplémentaires.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
L'amendement n° 841 n'est pas adopté.
Cet amendement dû à Marie-France Lorho vise simplement à attribuer à l'administration territoriale de l'État 100 millions d'euros supplémentaires, avec deux priorités. La première consisterait à améliorer l'efficacité des pouvoirs publics en matière de délivrance des titres d'identité car les inégalités territoriales perdurent dans ce domaine. J'en profite d'ailleurs pour revenir, madame la ministre déléguée, à la question que je vous posais tout à l'heure, et à laquelle vous n'avez pas répondu : un certain nombre de rendez-vous visant à l'obtention de ces titres n'étant pas honorés, ce qui coûte une fortune au contribuable et désorganise le système, j'aimerais savoir ce que vous comptez faire pour y remédier.
La seconde priorité concernerait les reconduites à la frontière. En 2021, seules 15 % des mesures d'expulsion ont été suivies d'effet ; or l'action 02, Réglementation générale, garantie de l'identité et de la nationalité et délivrance des titres, du programme 354, action à laquelle seraient affectés ces 100 millions d'euros et qui concerne également le traitement des demandes d'asile ou de séjour ainsi que les reconduites à la frontière, a vu ses crédits diminués de 82 millions d'euros entre 2022 et 2023, ce qui n'est pas opportun. Le ministre de l'intérieur demande aux préfets d'exercer une véritable police du séjour : encore faut-il leur en donner les moyens.
La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j'y suis défavorable pour les raisons suivantes. Vous souhaitez augmenter l'efficacité de la délivrance des passeports et des cartes d'identité. Or, comme je l'explique dans mon rapport, le problème ne vient pas des préfectures, mais des communes. Quant à votre objectif de favoriser l'exécution des reconduites à la frontière, il ne relève pas de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , mais du programme 303 Immigration et asile de la mission "Immigration, asile et intégration" . C'est pourquoi je donne un avis personnel défavorable.
Je compléterai ce que j'ai déjà dit à deux reprises au moins. En 2021 et 2022, le réseau des préfectures et des sous-préfectures a bénéficié d'une stabilisation de ses effectifs après dix années de baisse du nombre d'emplois, estimée à 14 % par la Cour des comptes, soit 4700 emplois. Avec la Lopmi, le programme 354 bénéficie d'un schéma d'emplois de 350 ETP supplémentaires, dont 270 sur les années 2023-2025. Une partie de ces créations d'emplois est orientée vers les services des étrangers – près d'un tiers – et vers les Cert. En complément, des renforts sont mobilisés chaque année pour soutenir des services qui font face à une activité soutenue : 570 ETP sur la période 2022-2024 pour les services des étrangers, près de 350 ETP en 2022-2023 pour les Cert afin augmenter la capacité d'instruction des 14 millions de demandes de titres d'identité et de voyages. Avis défavorable.
L'amendement n° 165 n'est pas adopté.
On parle beaucoup en ce moment du projet de loi « immigration », en oubliant qu'on a transformé nos préfectures en machines à fabriquer des sans-papiers. Les étrangers en situation régulière doivent faire renouveler leur titre de séjour mais faute d'obtenir un rendez-vous, ils peuvent devenir sans-papiers et basculer dans la précarité. Il n'est pas rare que des titres de douze mois soient délivrés au bout de quatorze mois. Ces situations génèrent une angoisse terrible chez les étrangers en situation régulière, qui sont installés en France, ont des enfants et paient des impôts.
Cette situation est absolument kafkaïenne. Les avocats et les associations vont devant la justice pour obtenir la prise de rendez-vous et quand ils obtiennent gain de cause, il faut parfois retourner devant la justice pour faire exécuter la décision. Un rapport du Sénat expliquait ainsi que des préfectures supprimaient parfois des semaines de rendez-vous pour les dédier à l'exécution des décisions de justice. Ces contentieux représentent 47 % de l'activité du tribunal administratif de Paris – qui n'est pas une petite instance – et plus de la moitié des contentieux à la cour administrative d'appel de Paris. L'enjeu est donc, en augmentant les moyens en préfecture, de faciliter le renouvellement des titres pour les personnes en situation régulière, de permettre aux étrangers de vivre sereinement sur le territoire mais aussi d'augmenter la santé et le moral des agents de préfecture.
Les auteurs de l'amendement soulèvent un vrai problème, celui du délai d'obtention d'un rendez-vous, qui est à l'origine d'un très grand nombre de contentieux portés devant les juridictions administratives, embouteillant celles-ci. Lors de mes contrôles, j'ai pu constater que ce délai pouvait aller jusqu'à sept semaines, même dans un petit département comme la Meuse. Un certain nombre d'étrangers se retrouvent donc en situation irrégulière alors que le renouvellement de leur titre de séjour ne pose pas en lui-même de problème particulier.
Toutefois, la solution que vous préconisez se heurte au problème que j'ai déjà évoqué. Il ressort en effet de mes déplacements que les préfets ont beaucoup de mal à saturer leur enveloppe en raison des vacances de postes. Peut-être faudrait-il songer à faire évoluer le régime indemnitaire et les règles de temps de travail des agents avant d'en recruter davantage. Avis défavorable.
Même si je partage le constat que des personnes sont en difficulté, les chiffres sont là : 80 % des procédures sont désormais dématérialisées. Les usagers n'ont plus besoin d'obtenir un rendez-vous pour déposer des demandes. Lorsqu'ils ont des difficultés pour réaliser leur démarche en ligne, ils peuvent être accompagnés au sein des points d'accueil numérique présents dans toutes les préfectures et sous-préfectures, et dont la mission est d'aider les usagers à réaliser leurs démarches administratives avec l'outil informatique. En plus des capacités d'accueil de l'ANTS, les centres de contact ont également été renforcés – ce point n'est pas suffisamment connu – pour répondre à l'arrêt du Conseil d'État en matière de téléservices et d'accueil des usagers.
Enfin, le programme 216, qui assure le soutien de l'administration centrale du ministère de l'intérieur mais aussi de certains services déconcentrés, ne saurait supporter une minoration de ses crédits à hauteur du montant proposé par l'amendement. Avis défavorable.
Je viens en renfort de notre collègue M. Bayou qui a mille fois raison. On va parler de l'Anef, madame la ministre déléguée. Vous dites que 80 % des procédures sont dématérialisées, il faudrait plutôt dire que 80 % des procédures réussissent. Les 20 % restants sont dans la nature, on ne sait où, puisqu'aucune voie alternative à celle de l'Anef n'existait en théorie jusqu'à l'arrêt du Conseil d'État. Désormais, les gens doivent justifier de difficultés pour avoir accès à une autre voie, dont la procédure, en fait, n'existe pas. C'est lunaire !
On m'avait vendu du rêve avec l'Anef, l'an dernier, lorsque j'étais rapporteur pour avis. J'avais auditionné des représentants de la préfecture de Seine-Saint-Denis qui était concernée par l'expérimentation. On m'avait dit : « Ne vous inquiétez pas, monsieur le député, on ne va pas faire comme d'habitude, cette dématérialisation va parfaitement fonctionner, ça va être génial ! » Et patatras ! Le site n'est même pas optimisé pour smartphone, il faut aller sur un ordinateur. Première contrainte : un peu dommage, en 2023, de réaliser un site qui ne soit pas optimisé pour smartphone…
Deuxième point : le site n'est qu'en français ou en anglais, il n'est même pas traduit en d'autres langues. J'ai cru que c'était une blague. J'ai demandé aux agents de l'ANTS chargés du service après-vente au téléphone pour les usagers qui rencontrent des problèmes avec le site internet, voire pour les agents des préfectures eux-mêmes qui rencontrent les mêmes problèmes. Ils ont interrogé la Direction générale des étrangers en France (DGEF) qui leur a répondu qu'un étranger qui veut venir en France n'a qu'à savoir parler français ou au moins anglais. Je leur ai demandé s'ils étaient sérieux.
Imaginons un professeur étranger qui vient donner une conférence en France.
Il disposera d'un traducteur, on n'exigera pas de lui qu'il parle français, mais seulement qu'il exerce sa compétence. S'il demande un visa sur le site de l'Anef, va-t-il s'entendre dire qu'il doit parler français ?
Mais on se fiche du monde ! À ce moment-là, pourquoi mettez-vous en place des protocoles pour enseigner le français aux étrangers qui arrivent en France ?
M. Jean-François Coulomme applaudit.
L'amendement n° 953 n'est pas adopté.
Ils n'aiment pas les étrangers en France. Ils pensent que l'Anef, c'est dans l'église…
La parole est à M. Timothée Houssin, pour soutenir l'amendement n° 434 .
Il s'agit d'un amendement de repli. On constate une baisse de près de 5 % du budget alloué à l'action 02 Réglementation générale, garantie de l'identité et de la nationalité et délivrance des titres, alors même que nous vivons une période d'inflation assez forte. Or ces budgets influent sur les délais de délivrance des titres, à la fois pour les personnes de nationalité française qui en ont besoin, et pour les étrangers qui en font la demande, qu'on leur délivre un titre ou non. Il ne nous semble pas opportun de baisser ces budgets. L'objectif de cet amendement est donc d'allouer 50 millions d'euros supplémentaires à ces missions.
La commission a examiné cet amendement et a donné un avis défavorable. Tout d'abord, il n'y a pas de baisse des crédits, il s'agit simplement d'un changement de l'imputation comptable de certaines dépenses des préfectures qui ont visuellement diminué d'environ 23 millions d'euros les crédits destinés aux Cert et aux services chargés des étrangers alors que, dans le même temps, les crédits de l'action 05 Fonctionnement courant de l'administration territoriale augmentent pratiquement du même montant.
Par ailleurs, j'ajouterai que le nombre de leurs emplois est en augmentation d'une centaine d'ETP.
Sur le fond de votre amendement, un renforcement des moyens de ces services ne changerait rien à la lutte contre l'immigration clandestine et aux retards pour les renouvellements des cartes d'identité et des passeports, pour les raisons que j'ai développées lors de la discussion des amendements précédents.
Avis défavorable.
L'amendement n° 434 n'est pas adopté.
L'amendement n° 787 de M. Hervé Saulignac est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Avis défavorable.
Je souhaite défendre cet amendement de nos collègues socialistes car il me semble utile. Il s'agit d'augmenter les moyens des préfectures qui souffrent d'embouteillages dans plusieurs domaines, notamment dans la délivrance des titres de séjour. Nous sommes le pays des droits de l'homme et du citoyen ; or les droits nécessitent des garanties matérielles. Si vous accordez des droits aux gens sans les garantir matériellement, alors vous ne respectez pas les lois que nous votons à l'Assemblée nationale. C'est exactement ce qui se passe dans les préfectures en raison du manque de moyens. C'est pourquoi on – enfin, la NUPES
Sourires sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…vous propose d'adopter cet amendement pour augmenter les moyens des préfectures de 50 millions d'euros. Cela devrait recueillir l'assentiment de l'Assemblée – nous le vérifierons avec le scrutin public.
MM. Ugo Bernalicis et Damien Maudet applaudissent.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 64
Nombre de suffrages exprimés 44
Majorité absolue 23
Pour l'adoption 12
Contre 32
L'amendement n° 787 n'est pas adopté.
Pourquoi le groupe Renaissance a-t-il demandé un scrutin public si c'est pour voter contre ?
Cet amendement vise à augmenter l'enveloppe à destination des services chargés de la délivrance des titres, notamment d'identité. Le ministère de l'intérieur le reconnaît lui-même : le délai moyen d'obtention d'un rendez-vous en mairie était de cinquante jours à la fin de 2022. Il est regrettable que dans un pays comme le nôtre, une si longue attente pénalise autant les Français qui se trouvent privés de papiers d'identité dans leurs démarches. Nous souhaitons par conséquent accroître le financement du réseau des préfectures pour accélérer la délivrance des titres, dont les délais sont à la fois très fluctuants et très longs. Il n'est pas normal de devoir attendre quatre mois pour obtenir une carte d'identité.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
La commission n'a pas examiné cet amendement mais à titre personnel je donnerai un avis défavorable. Comme je l'ai déjà expliqué, il n'y a pas de baisse de 5 % des crédits, mais simplement un changement d'imputation comptable.
Sur le fond, le problème d'allongement du délai de délivrance des cartes d'identité et des passeports ne se pose pas dans les préfectures, mais dans les mairies équipées de dispositifs de recueil.
Votre amendement me surprend, monsieur le député. En effet, comme je l'ai indiqué, le délai de délivrance des titres sécurisés est actuellement de dix-huit jours. Les dispositifs de recueil sont situés dans les collectivités locales, et ils fonctionnent. La dotation pour les titres sécurisés (DTS) a en outre été portée à 100 millions d'euros. Avis défavorable.
L'amendement n° 1499 n'est pas adopté.
Sur les amendements n° 88 et 597 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutins publics.
Sur l'ensemble des crédits de la mission "Administration générale et territoriale de l'État" , je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Stella Dupont, pour soutenir l'amendement n° 1533 .
Il fait suite à celui qu'a défendu Julien Bayou concernant les moyens des préfectures en matière d'instruction des demandes de titres de séjour. En tant que rapporteurs spéciaux de la commission des finances pour la mission "Immigration, asile et intégration" , Jean-Noël Barrot et moi-même avons produit, sous la précédente législature, un rapport sur les moyens des préfectures. Nous avons constaté que celles-ci étaient insuffisamment dotées pour instruire les demandes qui leur parvenaient. L'amendement que je vous soumets est plus mesuré que celui de M. Bayou puisqu'il vise à augmenter non pas de 100 millions, mais de 4 millions d'euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement du programme 354, Administration générale et territoriale de l'État – montant qui n'est évidemment pas neutre pour les finances publiques.
Il porte sur 100 ETP et prévoit une nouvelle augmentation l'année prochaine. En effet, comme l'a indiqué M. le rapporteur spécial, il est difficile de trouver les compétences nécessaires et de pourvoir les postes. Rien ne sert donc d'ouvrir trop d'ETP si l'on ne dispose pas du personnel correspondant.
L'allongement des délais de traitement et les difficultés à obtenir des rendez-vous sont des problèmes récurrents, que nous rencontrons tous dans les préfectures dont dépendent nos circonscriptions. Les contentieux qui en résultent se multiplient et coûtent cher à l'État – bien davantage que les 4 millions d'euros supplémentaires que je propose d'affecter à ces services. Je vous invite donc à voter mon amendement qui fait suite à un travail de fond. Je crois toutefois avoir commis une légère erreur dans l'exposé sommaire : il convient de lire que les crédits seront destinés à l'action 02 Réglementation générale, garantie de l'identité et de la nationalité et délivrance des titres, et non à l'action 05 Fonctionnement courant de l'administration territoriale. Un sous-amendement pourra le corriger.
La commission n'a pas examiné cet amendement ; j'y suis défavorable à titre personnel, pour les raisons que j'ai déjà exposées : l'existence de systèmes de dématérialisation n'empêche pas de devoir se présenter une ou deux fois au guichet, ne serait-ce que pour le prélèvement des empreintes et le retrait du titre. En la matière, nous nous heurtons à un problème de recrutement.
C'est pour cela que je propose d'étaler l'effort sur plusieurs années !
Si les fonctionnaires territoriaux de l'État ne souhaitent pas être affectés à ces missions, c'est parce qu'elles ne sont guère valorisées, notamment sur le plan indemnitaire. Tant que nous n'aurons pas amélioré cette situation, nous aurons beau créer tous les emplois possibles, nous peinerons à les pourvoir.
Au risque de me répéter, nous avons certes besoin d'effectifs, mais la réalité est la suivante : les moyens dédiés aux services des étrangers augmentent grâce à la Lopmi, à raison d'un tiers des schémas d'emplois et de plus de 350 ETP. Par ailleurs, le plan de renfort de 570 ETP en trois ans, annoncé à l'été 2022, se poursuivra jusqu'en 2024 et au-delà. Nous disposons donc des postes nécessaires – c'est inédit. Nous avons proposé un renforcement des postes en préfecture, et vous l'avez voté avec la Lopmi. Comme l'a expliqué M. le rapporteur spécial, l'enjeu est de pourvoir le plus rapidement possible ces postes vacants.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Je soutiens cet amendement. Nous aurons ce débat à plusieurs reprises au cours de la discussion budgétaire. Nous constatons tous qu'un service ne fonctionne pas – aucun député ne pourra prétendre l'inverse. Dans toutes nos circonscriptions, au-delà des services liés aux personnes étrangères, des administrés se retrouvent dans une situation illégale en raison du délai de traitement de leurs demandes. Cela s'explique manifestement par un manque de personnel : la dématérialisation n'empêche pas que des agents doivent traiter les dossiers. C'est ma première critique.
Vous nous répondez que le problème ne tient pas à un manque d'effectifs, puisque nous disposons des budgets pour recruter – la difficulté étant de pourvoir les postes. J'en conclus que les agents ne sont pas assez payés – c'est ma deuxième critique.
Tôt ou tard, nous devrons résoudre cette question. Rien n'est proposé pour augmenter les indemnités de ces agents, alors qu'ils subissent une baisse de pouvoir d'achat et une stagnation du point d'indice depuis des années. Nous tournons en rond, et il faut bien commencer quelque part. Nous souffrons indéniablement d'un manque de personnel, que les créations de postes déjà prévues – et que nous n'arrivons pas à pourvoir – ne suffiront pas à combler. C'est le résultat d'une politique qui a consisté, des années durant, à supprimer la moitié des postes dont les titulaires partaient à la retraite. Partout, des services manquent d'effectifs.
À cela s'ajoutent des difficultés de recrutement pour des postes insuffisamment rémunérés. De futurs amendements y répondront. Votons celui-ci, et nous voterons les suivants en temps utile.
Les députés du groupe Renaissance voteront contre cet amendement pour deux raisons. Sur le fond, tout d'abord, le budget pour 2024 prévoit une augmentation significative des effectifs dans les préfectures, à hauteur de 110 ETP – Mme la ministre déléguée l'a rappelé. L'amendement est donc satisfait.
Sur la forme, ensuite, l'amendement vise l'action 05 Fonctionnement courant de l'administration territoriale, du programme 354 Administration générale et territoriale de l'État, alors qu'il devrait viser le programme 02 pour produire l'effet escompté.
Me voilà fort surprise. Même quand les amendements proviennent de votre cœur, quand ils se fondent sur un rapport et sur des éléments objectifs, et quand ils prévoient une planification – puisqu'ils projettent les embauches sur plusieurs années –, même avec ces conditions formidables, vous vous y opposez. C'est extraordinaire !
Tous les intervenants ont mis en lumière un manque de moyens en dépit de la Lopmi. Les emplois prévus ne résoudront pas toutes les difficultés, y compris celles qui placent nos concitoyens dans l'illégalité.
Quant aux désaffections que nous constatons dans l'ensemble des grands services publics, elles s'expliquent évidemment par une rémunération insuffisante, mais aussi par un problème de sens au travail, qu'il faut traiter. Que disent les fonctionnaires et les contractuels embauchés à tour de bras dans les services des étrangers ? « Nous faisons de l'abattage, et cela ne nous plaît pas. »
Parce qu'il y a toujours plus de titres de séjour à délivrer et parce que l'immigration atteint des niveaux records, il faudrait recruter pour gérer tous ces dossiers. Il existe une solution plus simple : coupons le robinet ; n'acceptons plus cette immigration massive. Alors que nous avons atteint un nombre record de titres de séjour en 2022, vous voudriez que les Français paient encore davantage pour traiter les demandes ! Soyons raisonnables ; mettons fin à l'immigration massive et incontrôlée ; arrêtons de dire à la Terre entière qu'elle peut venir en France. Contrôlons à nouveau nos frontières, et limitons le nombre de titres de séjour : voilà une bonne mesure, qui coûterait moins cher aux Français et qui les protégerait.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'amendement n° 1533 n'est pas adopté.
« L'argent de l'État est à la disposition des maires de France » : ces propos ont été tenus par le ministre de l'intérieur et des outre-mer. Le ministre parle vite, parfois trop vite ; il s'emmêle les pinceaux, ou alors il ment. Le même osait dire il y a quelques mois, devant les caméras, que l'État accompagnait très largement les collectivités territoriales pour installer des dispositifs de vidéosurveillance. Il précisait même que l'État finançait systématiquement au moins 50 % de leur coût.
La réalité est tout autre : les moyens alloués à ces dispositifs sont insuffisants. J'ai eu l'occasion d'exposer deux exemples très précis au ministre, celui de la ville de Nîmes, qui reçoit une subvention de seulement 16 % pour la vidéosurveillance, et celui de la ville de Beaucaire, dont la subvention n'atteint que 16 % pour un dossier et dépasse à peine 23 % pour un second. On est loin des 50 % affichés. La raison de cette faible prise en charge est simple : les fonds ne sont pas suffisants. Comment accepter que 84 % de la facture soit payée par les collectivités ? Bien que la sécurité soit une fonction régalienne, les maires réalisent une grosse partie du travail pour l'État. Sans eux, l'État serait aveugle dans bien des territoires.
Si, pour 2024, le ministère a décidé de scinder le FIPD en deux parties, et d'augmenter quelque peu les crédits qui lui sont alloués, les montants prévus restent très largement insuffisants pour tenir la promesse du ministre. Par pitié, ne me répondez pas par un gros mensonge, comme l'a fait le ministre en commission ! Ne me dites pas que 17 millions d'euros sont encore disponibles cette année mais que les maires ne les réclament pas : c'est faux. En toute connaissance de cause, le ministre s'est amusé à mélanger les fonds de droit commun dédiés à la vidéosurveillance avec le fonds spécifique débloqué pour réparer les dégradations après les émeutes. Ce sont pourtant deux choses différentes.
L'amendement que je vous soumets aurait le mérite, s'il était adopté, de ne pas faire mentir le ministre. Il prévoit 100 millions d'euros supplémentaires pour accompagner les collectivités territoriales dans leurs efforts sécuritaires et pour les aider à mener davantage d'actions de prévention de la délinquance et de la radicalisation.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La commission n'a pas examiné cet amendement ; c'est donc à titre personnel que je donnerai un avis défavorable. Le FIPD a été doté de 62,43 millions d'euros, montant comparable à celui de l'année précédente si l'on tient compte des 25 millions d'euros destinés aux équipements de vidéoprotection et de surveillance électronique du ministère, des collectivités et des acteurs privés, dont les crédits sont regroupés dans la nouvelle action 11 du programme. Rappelons que le FIPD est destiné à financer les actions conduites par les collectivités territoriales et leurs établissements publics en cohérence avec les plans de prévention de la délinquance arrêtés par les préfets au niveau départemental. Depuis la loi de finances pour 2016, il apporte aussi son concours aux actions de prévention de la radicalisation. Rappelons également que les maires, voire les présidents d'intercommunalité quand la compétence a été déléguée, détiennent une compétence en matière de sécurité publique. Ils peuvent ainsi employer des policiers municipaux.
Il est vrai que le FIPD a été présenté sous un jour négatif à l'occasion de la polémique relative au fonds Marianne, qui a entaché un de ses appels à projets. Cette affaire souligne toutefois la nécessité de lutter contre la radicalisation et le besoin des communes en matière de prévention de la délinquance. J'en ferai l'un des thèmes de mes travaux de contrôle l'année prochaine.
Avouez enfin qu'augmenter de 100 millions un fonds de 62 millions d'euros est pour le moins déraisonnable.
Le Gouvernement partage votre préoccupation
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN
de renforcer les moyens alloués à la prévention de la délinquance et de la radicalisation. C'est la raison pour laquelle il a augmenté les crédits consacrés à la vidéoprotection. La Lopmi prévoit une hausse des crédits du FIPD sur la période 2023-2027. Pour 2024, il ne bénéficiera que de 3 millions d'euros supplémentaires mais
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN
notre but est de faire passer ses crédits totaux à 119 millions en 2027 contre 87,2 millions en 2023.
En outre, le ministre de l'intérieur a ouvert une ligne de 20 millions d'euros de crédits supplémentaires pour remplacer les caméras de vidéoprotection détruites pendant les émeutes.
Avis défavorable.
Vous savez, lorsqu'il est question de statistiques de la délinquance, les chiffres prennent souvent l'allure de cours de la Bourse. Autrement dit, on ne voit que ce qu'on regarde. Il nous semble que pour traiter ces sujets avec sérieux, et telle est notre volonté, il faudrait mener des enquêtes de victimation, de nature plus qualitative, afin de déterminer où et comment se manifeste tel ou tel phénomène et calibrer les politiques publiques en conséquence. Ah ,
Plusieurs députés du groupe RN imitent le « Ah » prononcé par Mme Élisa Martin et rient
c'est sûr que c'est plus exigeant et plus compliqué que de coller ici et là des caméras qui ne servent à rien.
M. Coulomme parle de Gremlins, j'espère, collègues du Rassemblement national, qu'on ne va pas vous donner à manger après minuit sinon une enquête de victimation ne suffira pas.
Si nous voulons traiter de ces sujets avec sérieux, il faut se doter d'outils différents et aller plus loin que ces fameuses statistiques de la délinquance qui ne veulent rien dire.
Je formulerai deux réponses. La première s'adresse à ma collègue d'extrême gauche :…
…effectivement, se contenter d'installer des caméras de vidéosurveillance ne sert à rien. Je vous invite, chère collègue, à vous rendre dans les villes tenues par le Rassemblement national.
Exclamations sur les bancs des groupes RE, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
… ces caméras ont toute leur efficacité si elles sont associées à une présence policière sur le terrain. Venez donc à Beaucaire où les résultats sont impressionnants.
Ma deuxième réponse s'adresse à Mme la ministre déléguée. Si je demande une telle augmentation des crédits, c'est tout simplement pour que M. le ministre de l'intérieur puisse pour une fois dire la vérité. Il a menti en affirmant que l'État financerait au minimum 50 % des frais liés à l'installation de chaque caméra de vidéosurveillance. C'est faux ! Les subventions vont de 15 % à 20 % ou 25 %, grand maximum !
Vous devez bien cet argent aux maires. Si les communes ont des compétences propres, c'est à l'État qu'il revient de garantir la sécurité. Sans nos maires, vous ne seriez rien.
Dans ma circonscription comme dans bien d'autres, il y a beaucoup de territoires où la présence policière ne serait pas assurée en l'absence de police municipale.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 60
Majorité absolue 31
Pour l'adoption 22
Contre 38
L'amendement n° 88 n'est pas adopté.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2024 : examens des crédits relatifs aux missions Administration générale et territoriale de l'État et Sécurités et au compte d'affection spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routiers.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra