Je suis très heureuse d'être parmi vous cet après-midi pour vous présenter les crédits du ministère de l'intérieur et des outre-mer pour 2024, s'agissant des missions Sécurités et Administration générale et territoriale de l'État. Je vous prie de bien vouloir excuser le ministre de l'intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, qui ne peut malheureusement pas être présent maintenant, mais qui le sera juste après la pause de vingt heures. Chacun d'entre vous connaît son implication pour défendre les crédits de son ministère.
Dans le contexte actuel, mon intervention revêt un caractère singulier. Jamais les Français n'ont autant eu besoin de sécurité, et jamais l'État n'a investi autant de moyens au service de leur sécurité. Ainsi, derrière les données budgétaires, il y a des femmes et des hommes qui concourent à maintenir, dans des conditions parfois difficiles, l'ordre et la sécurité publique. Je voudrais leur adresser toute ma reconnaissance, toute notre reconnaissance.
Grâce à vous, l'année 2023 a été marquée par l'adoption de la Lopmi, qui consacre près de 15 milliards d'euros sur cinq ans à la sécurité des Français. Je le répète devant vous : ces crédits doivent être exécutés conformément à la trajectoire budgétaire que vous avez votée. Si l'inflation et l'adoption – sous plafond – des mesures de revalorisation du point d'indice, que beaucoup d'entre vous ont évoquée – elles représentent un montant total de près de 500 millions d'euros en année pleine pour ce qui est du ministère de l'intérieur – conduisent à des arbitrages internes, nos priorités demeurent inchangées. Elles sont au nombre de quatre : renforcer la présence des FSI sur la voie publique, lutter contre le terrorisme, affermir l'administration territoriale et préparer les Jeux olympiques et paralympiques.
Face aux menaces diverses et multiples auxquelles nous faisons face, nous menons un effort sans précédent pour renforcer la présence des forces de sécurité intérieure sur la voie publique, partout sur le territoire. Nous avons doublé cette présence, notamment en mettant fin aux gardes statiques et en substituant aux personnels actifs des personnels administratifs. Pas moins de 2 850 nouvelles FSI ont été déployées en 2023, et 7 400 le seront sur cinq ans ; cela représente près de 90 % des ETP créés dans le cadre de la Lopmi. À cela s'ajoutent, onze créations d'escadrons de gendarmerie mobile et unités de CRS, et le financement de 1 266 ETP dédiés à renforcer les CSP prioritaires en matière de police nationale au cours des deux premières années.
Ce renforcement de notre présence passe aussi par un affermissement de l'ancrage territorial, en concertation avec les élus, qui sera garanti par la création de 239 brigades territoriales de gendarmerie sur cinq ans, dont 80 sur les annuités de 2023 et de 2024, pour un total de 690 ETP – 312 en 2023 et 278 en 2024. Permettez-moi de souligner que les brigades mobiles ont pour objectif de rapprocher les services de gendarmerie de la population et de parcourir le « dernier kilomètre » ; certaines devront d'ailleurs se concentrer sur une thématique spécifique. Il s'agit d'une action totalement inédite depuis la création de la gendarmerie nationale.
Ensuite, un effort particulier est également prévu pour nos outre-mer. Un tel effort est nécessaire afin de répondre aux enjeux de sécurité dans ces territoires : il s'agit de renforcer les moyens de lutte contre la délinquance et le trafic de stupéfiants en Guyane, contre l'immigration clandestine à Mayotte et contre les trafics illicites en Martinique. Entre 2017 et aujourd'hui, au total, 1 400 policiers et gendarmes supplémentaires ont été affectés dans les territoires d'outre-mer. À Mayotte, en particulier, les effectifs ont été doublés pour atteindre un total de 1 150 FSI, hors EGM ; en Guyane, ils ont augmenté de 30 % pour atteindre un total de 1 525 FSI, hors escadrons de gendarmerie mobile. Des plans particuliers ont été mis en œuvre pour répondre aux enjeux locaux spécifiques à ces deux territoires : Shikandra à Mayotte et Harpie en Guyane.
Cette augmentation des effectifs territoriaux se double par ailleurs du renforcement permanent de vingt et un escadrons de gendarmerie mobile, soit 20 % des EGM nationaux, répartis à hauteur des enjeux sécuritaires locaux – six en Guyane, cinq à Mayotte, quatre en Nouvelle-Calédonie, quatre en Guadeloupe et dans les îles du Nord, un en Martinique, un à La Réunion et un en Polynésie française.
Cette dynamique de renforcement se poursuivra avec la création prochaine de vingt-deux nouvelles brigades de gendarmerie, dont huit entre 2023 et 2024. En plus de la présence sur le terrain, les équipements des FSI ont été renforcés afin de les soutenir dans leurs missions. Ainsi, 4 800 véhicules légers ont été acquis pour la police nationale et la gendarmerie nationale en 2023, après l'achat de 13 310 autres véhicules depuis deux ans.
Depuis l'entrée en fonction de Gérald Darmanin, plus de la moitié du parc automobile a été renouvelée ; en 2024, le ministère fera l'acquisition de 3 600 nouveaux véhicules dont 58 véhicules Centaure, pour un coût total de 130 millions d'euros. En complément, nous avons également finalisé le plan relatif au déploiement des caméras-piétons : 35 000 caméras de ce type ont été installées.
Toujours en matière d'équipements, dans la continuité des annonces du Président de la République, le Gouvernement va déposer un amendement concernant le renforcement des moyens dédiés à la sécurité civile, notamment pour lutter contre les feux de forêt, à hauteur de 140 millions d'euros en crédits de paiement, dont 45 millions seront consacrés à la création de la quatrième unité d'instruction et d'intervention de la sécurité civile (UIISC), qui s'installera, comme vous le savez, à Libourne dès 2024 – 163 ETP seront créés. Par ailleurs, 39 millions d'euros sont dédiés aux pactes capacitaires, 32 millions aux Canadair et 23 millions à la location de moyens aériens, avions et hélicoptères bombardiers d'eau.
Parallèlement, l'année 2023 a vu l'achat de près de quarante nouveaux hélicoptères – ils sont en cours d'acquisition – pour la sécurité civile et la gendarmerie nationale, ce qui correspond à un engagement de plus de 500 millions d'euros. C'est un effort important, rendu nécessaire par la recrudescence des incendies, dans un contexte de changement climatique et d'aggravation de la menace.
Enfin, des ressources supplémentaires sont requises pour mieux répondre à la cybercriminalité, nouvelle frontière de la délinquance : 1 500 cyberpatrouilleurs ont été recrutés, ce qui représente une augmentation de 50 % par rapport à l'existant, et un appel d'urgence numérique, le 17 cyber, a été ouvert.
En outre, dans le cadre du plan France ruralités, nous prévoyons des actions de sensibilisation auprès des communes et de leurs maires, car elles sont parmi les premières victimes de ces nouvelles menaces.
Des investissements importants sont par ailleurs prévus pour moderniser les services numériques accessibles aux citoyens. Après les succès de Pharos, la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements, et de Thesee, la plateforme de traitement harmonisé des enquêtes et signalements pour les e-escroqueries, nous mettrons en place la visioplainte et le portail « Ma sécurité », afin d'accomplir, là encore, le dernier kilomètre des politiques publiques en matière de sécurité.
S'agissant du cas précis du renseignement, là aussi, notre main n'a pas tremblé pour renforcer les moyens de ses services face aux menaces nouvelles. Il y a dix ans, à sa création, la DGSI comptait un peu plus de 3 200 agents. Grâce aux divers plans mis en œuvre par le Gouvernement depuis 2017, elle en comptera 5 000 à la fin de l'année 2023. Elle réunira 5 500 personnes lorsqu'elle emménagera dans son futur site unique de Saint-Ouen, en 2028, dans le cadre d'un projet qui coûte 1,2 milliard d'euros.
Le budget de la DGSI a plus que doublé en dix ans, et il a dépassé cette année la barre symbolique des 100 millions d'euros. Cet objectif budgétaire, inscrit dans la Lopmi, renvoie aux menaces diverses auxquelles nous faisons face – terrorisme, ingérence d'États étrangers et hostiles, menaces cyber, manipulation d'informations.
Vous l'avez compris, le ministère soutient une volonté de réarmement continu de l'administration générale et territoriale de l'État. Conformément à la Lopmi, en 2024, trois grandes priorités seront développées.
Premièrement, nous voulons renforcer nos capacités numériques et cyber en développant le réseau radio du futur, adossé à l'Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours, l'Acmoss, et en dématérialisant de bout en bout les processus métier ainsi que l'Anef – administration numérique pour les étrangers en France –, ce qui permettra à l'ensemble des personnes physiques de bénéficier d'une authentification numérique régalienne de niveau élevée grâce à France Identité numérique.
Globalement, le poids du numérique consolidé au sein du ministère, notamment dans le cadre du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur et de ceux liés aux métiers, est significatif en 2024, conformément à la trajectoire établie par la Lopmi. Il atteint 634 millions d'euros en autorisations d'engagement et 176 millions en crédits de paiement. Nous recruterons d'ailleurs soixante-quinze ETP dédiés au numérique en 2024.
Deuxièmement, nous nous attachons à réarmer l'État territorial, en créant 350 emplois sur la période couverte par la Lopmi. Cent dix créations d'emploi sont prévues en 2024 pour continuer à soutenir durablement les missions préfectorales les plus en tension.
Nous accentuons aussi les actions de prévention de la délinquance et de la radicalisation, en renforçant notamment la vidéoprotection. Leur budget s'élèvera à 25 millions d'euros en 2024, contre 22 millions en 2023.
Troisièmement, nous souhaitons accroître la proximité, la transparence et l'exemplarité, en finalisant la création de nouvelles sous-préfectures, pour 8 millions d'euros, et en labellisant les sous-préfectures en « espaces France Services », mais aussi en relocalisant des services de l'administration centrale dans des villes moyennes et dans des territoires ruraux.