La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mercredi 29 mai, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'article 1er
L'article 1er ter résulte d'un amendement adopté par la commission spéciale à mon initiative et cherche à résoudre une difficulté sur laquelle nous butons. En effet, deux véhicules différents traitent des soins d'accompagnement : le titre Ier , tout d'abord, porte une stratégie volontariste dans ce domaine, mais ne dit rien des moyens qui y seront affectés ;…
…la stratégie décennale des soins d'accompagnement, ensuite, précise ces moyens, mais ne présente aucun caractère contraignant quant à leur mise en œuvre.
L'article jette donc un pont entre ces deux objets en intégrant, dans le projet de loi, la trajectoire budgétaire sur dix ans de la stratégie décennale.
Nous avons été nombreux, mercredi soir, à considérer que l'enjeu des soins d'accompagnement justifierait une loi de programmation en bonne et due forme.
L'article 1er
Je veux rassurer ceux qui proposent de supprimer cet article parce qu'ils estiment que les projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) sont seuls fondés à arrêter les crédits budgétaires affectés aux soins d'accompagnement.
Ce sera naturellement le cas, mais dans la limite de l'annualité budgétaire, qui, contrairement aux lois de programmation, proscrit tout engagement dans la durée. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle mon amendement, contrairement à beaucoup d'autres, avait échappé à la rigueur de l'article 40 de la Constitution, comme l'a souligné, pendant les travaux de la commission spéciale, sa présidente Agnès Firmin Le Bodo. Je fais le pari que, cet automne, l'article 1er ter servira de boussole, certes symbolique, mais utile, quand il s'agira de traduire en actes les orientations dont nous débattons depuis quatre jours.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et SOC.
Gilles Le Gendre vient de le souligner : l'article 1er ter est bienvenu car il met fin à une incohérence. En consacrant deux textes aux soins d'accompagnement, le Gouvernement cherchait à éviter que nous en débattions, ceux qui, comme moi, sont favorables à une évolution de la loi, mais craignent que l'aide à mourir se substitue aux soins palliatifs, et ceux qui y sont opposés, s'inquiétant que l'instauration d'une aide active à mourir se fasse sans véritable développement des soins palliatifs.
Comme vous, monsieur Le Gendre, nous demandons une loi de programmation. Nous la demandons d'autant plus que nous sommes dans l'opposition et que nous n'avons pas confiance dans le Gouvernement. Nous souhaiterions aussi débattre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, mais, nous le savons tous, ce texte fera l'objet d'un 49.3, ce qui nous privera de tout moyen d'action.
Sur le sujet des soins palliatifs, nous avons cependant avancé, madame la ministre du travail, de la santé et des solidarités. Vous m'avez apporté des réponses pour la région Centre-Val de Loire, ce dont je vous ai remercié, et vous avez annoncé l'ouverture d'unités de soins palliatifs (USP) dans le Cher en 2024 et dans l'Indre et l'Eure-et-Loir en 2025. Nous restons toutefois au milieu du gué. Nous avons besoin de précisions supplémentaires.
Le plan 2015-2018 pour le développement des soins palliatifs et l'accompagnement de fin de vie prévoyait un ratio d'un lit pour 100 000 habitants. Vous nous avez donné des chiffres et des dates pour les différents départements, mais j'aimerais savoir combien de lits seront disponibles dans chaque USP. Pouvez-vous nous préciser votre objectif s'agissant du nombre de lits pour 100 000 habitants ? Nous espérons que cette fois il sera tenu, ce qui n'a pas été le cas de celui fixé par le plan 2015-2018, notamment dans la région Centre-Val de Loire. Il est temps de faire de l'accès aux soins palliatifs un droit effectif dans notre pays.
L'article 1er
Madame la ministre, mercredi, vous avez souligné l'obstacle auquel nous nous heurtons du fait de l'incompatibilité entre les lois de financement de la sécurité sociale et les lois de programmation. Pourquoi ne pas faire en sorte de lever cet obstacle en faisant évoluer le cadre organique des lois de financement de la sécurité sociale pour nous permettre d'être à la hauteur des enjeux et de graver dans le marbre les engagements du Gouvernement ? Si nous sommes capables de le faire pour les soins palliatifs, nous le serons aussi, demain, pour le grand âge et la petite enfance.
De nombreux sujets appellent un cadre programmatique et pluriannuel, qui engage le Gouvernement, donne de la lisibilité aux politiques et crée un effet d'entraînement dans le pays. Nous en avons besoin ! Attelons-nous à cette tâche, faute de quoi nous risquons de ne pas être au rendez-vous.
Avec Gilles Le Gendre, dont j'ai soutenu l'amendement, nous partageons la volonté de légiférer sur l'aide à mourir – nous aborderons bientôt le titre II. Quand nous insistons sur la nécessité de rendre opérationnelle la stratégie décennale du Gouvernement visant à instaurer des soins palliatifs partout et pour tous, une stratégie que nous soutenons tous, nous le faisons en recherchant un équilibre entre l'aide à mourir et les soins palliatifs – équilibre que vous appelez aussi de vos vœux, madame la ministre. Il n'y a donc pas d'ambiguïté dans notre soutien à l'article 1er
Il est d'ailleurs intéressant que j'intervienne après Thibault Bazin, car je pense, comme lui, que des outils juridiques sont nécessaires pour permettre au Parlement d'être le garant de l'équilibre que nous construisons entre l'aide à mourir et les soins palliatifs. Première bonne nouvelle, nous avons introduit dans le projet de loi le principe de la stratégie décennale. Deuxième bonne nouvelle, malgré votre désaccord, nous y avons introduit le principe d'une loi de programmation – je vous vois sourire, madame la ministre !
Mais oui !
Thibault Bazin a raison quand il nous dit que, tôt ou tard, nous devrons réfléchir à des outils juridiques pour améliorer le cadre des lois de financement de la sécurité sociale. Nous aurions pu en débattre, hier, lors de l'examen de la proposition de loi constitutionnelle de Pierre Dharréville visant à constitutionnaliser la sécurité sociale.
L'article 1er
Comme je l'ai indiqué en commission spéciale, j'ai cependant des doutes sur cette stratégie décennale, madame la ministre. Tout d'abord, par définition, l'effort que vous prévoyez portera concrètement ses fruits dans dix ans : je sais bien qu'on ne peut pas recruter les personnels en un claquement de doigts, mais je ne crois pas que cet effort soit suffisant, ni extraordinaire. Entre 2017 et 2021, la dépense publique en matière de soins palliatifs a augmenté de 6,25 % par an. Le Gouvernement propose, pour les dix prochaines années, une augmentation de 6,6 % par an. Les crédits alloués à la stratégie décennale n'ont donc rien d'exceptionnel et ne permettront pas de répondre à la situation critique dans laquelle nous nous trouvons : non seulement, aujourd'hui, une personne sur deux n'a pas accès aux soins palliatifs, mais, demain, en raison du vieillissement de la population, le nombre de celles qui en auront besoin va augmenter. La stratégie proposée n'est pas à la hauteur des besoins et des enjeux. Contrairement à ce qui nous a été dit, elle ne réglera pas tous les problèmes !
Le groupe La France insoumise se félicite de l'inscription, noir sur blanc, de la trajectoire budgétaire de la stratégie décennale à l'article 1er
Enfin, pour un député de La France insoumise, ce sera aussi l'occasion de voter une mesure budgétaire, ce que nous avons rarement la possibilité de faire, 49.3 oblige !
La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Pour répondre à ces différentes interventions, je commencerai par donner quelques chiffres. Nous comptons en moyenne 12 à 15 lits par unité de soins palliatifs. La France compte actuellement 166 USP, qui seront, comme je l'ai déjà dit, complétées par 20 unités supplémentaires. Les équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP) sont au nombre de 412, et deux tiers des 7 500 Ehpad ont signé une convention avec l'une d'elles.
Quant aux lits de soins palliatifs à l'hôpital, en 2023, la France en comptait 11 pour 100 000 habitants. La même année, le nombre d'hospitalisations à domicile (HAD) en soins palliatifs s'élevait à 70 000.
Je comprends votre volonté, mesdames et messieurs les députés, de voir ces éléments inscrits dans la loi. Je veux tout de même m'assurer que nous nous accordons sur un point important : le tableau figurant dans le texte fait état de dépenses cumulatives d'année en année. Ainsi, lorsque nous prévoyons de consacrer aux mesures nouvelles 89 millions d'euros en 2024 et 106 millions en 2025, cela signifie que nous dépenserons 89 millions en 2024 et 195 millions en 2025 – rassurez-vous, je ne ferai pas le même calcul pour les dix années ! Chacun doit avoir cette réalité en tête. On peut toujours considérer que ces montants sont insuffisants, mais ils demeurent importants relativement aux masses budgétaires allouées, et je ne dirai en aucun cas qu'il est inutile de les prévoir.
Cependant, comme vous le savez tous en tant que législateurs, ce tableau, inséré dans la loi, ne constituera pas pour les puristes son élément le plus normatif !
Hier matin, j'animais la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS). Nous avons échangé avec l'ensemble des partenaires. Il ressort de ces échanges que, si le PLFSS est perçu comme un document économique et financier, il sert avant tout à fixer nos objectifs et nos priorités. Il est très important, j'y insiste, d'en débattre, au sein de vos commissions comme avec l'ensemble des professionnels.
Je comprends en tout cas que ce genre d'ajout à la loi ne mette pas très à l'aise ceux qui sont attachés à la pureté législative.
Nous en venons aux amendements à l'article.
La parole est à Mme Lise Magnier, pour soutenir l'amendement n° 673 .
Il s'agit d'un amendement de suppression du présent article, qui a été introduit à lors des travaux de la commission spéciale. Vous avez devancé mes propos, madame la ministre : inscrire dans une loi ordinaire une trajectoire de crédits, alors que nous sommes tous conscients que notre rôle de parlementaires est de nous assurer qu'ils seront votés lors de l'examen du PLFSS,…
…me met en effet un peu mal à l'aise, pour le dire gentiment.
Je formulerai également deux remarques de forme. Premièrement, la trajectoire que propose l'article commencerait en 2024, alors que nous savons tous pertinemment que ce texte ne sera pas appliqué si tôt, compte tenu de la navette parlementaire qu'il devra emprunter et du temps que nous voulons tous prendre pour le faire aboutir. Deuxièmement, quand on lit le tableau proposé, on a le sentiment que l'effort budgétaire envisagé serait reporté à 2031. Je trouve cela quelque peu indélicat.
Un élément de fond me pousse encore à défendre cet amendement de suppression. Je vous rappelle que nous avons adopté mercredi soir deux lois de programmation, respectivement proposées par Thibault Bazin et Jérôme Guedj.
« Trois ! » sur quelques bancs du groupe RE.
Trois ? Pardon, j'en ai oublié une !
Prévoir une loi de programmation constituait un exercice intéressant, mais ne nous contraignons pas d'ores et déjà par cet article. Laissons-nous plutôt le temps d'écrire cette future loi de programmation et supprimons donc cet article.
La parole est à M. Didier Martin, rapporteur de la commission spéciale pour les articles 1
M. le député Gilles Le Gendre a présenté en commission spéciale l'amendement créant le présent article comme un amendement d'appel, et il vient de développer, dans son propos introductif, une argumentation suivant laquelle il s'agit d'une boussole, d'un symbole. On commence à prendre l'habitude, ici, de multiplier les propositions de loi de programmation. Et je crois que nous n'en avons pas fini : s'agissant en particulier des politiques publiques de prévention, on aura tout loisir de programmer, programmer et surprogrammer !
Sourires.
La commission spéciale a adopté l'amendement de M. Le Gendre, d'où l'ajout du présent article au projet. Pour ma part, j'y étais défavorable. Il se trouve que vous avez très honnêtement souligné que l'article 40 de la Constitution n'avait pas été appliqué à cet amendement, ce qui veut bien dire qu'il n'est pas applicable en l'état, sans quoi il aurait été déclaré irrecevable.
Madame la ministre a rappelé des éléments quantitatifs et relatifs à la diffusion d'une culture palliative. À titre personnel, je reste défavorable à cet article et favorable à l'amendement de suppression.
Pour toutes les raisons que j'ai indiquées précédemment, il est favorable.
Je m'en tiendrai pour l'instant à un orateur en faveur de l'amendement et à un orateur contre.
La parole est à M. Gilles Le Gendre.
Je remercie d'abord les collègues qui ont exprimé leur soutien et leur accord avec cet article. Je formulerai un dernier argument. Les acteurs des soins palliatifs sont divisés au sujet de cette loi.
Mais ils sont nombreux à émettre d'importants doutes concernant la stratégie décennale et les ambitions qu'elle tend à réaliser. Je m'empresse dire que je ne partage pas ces doutes et crois à la sincérité des engagements pris par le Gouvernement.
Nous aurions pu rejeter la création de cet article en commission. Mais le supprimer aujourd'hui, ce serait envoyer au monde des soins palliatifs un signal terrible !
Mme Sandrine Rousseau applaudit.
Ce serait lui dire que nous ne sommes pas capables de nous engager en faveur de la trajectoire définie !
Je vous en conjure donc, mes chers collègues : laissons le débat se poursuivre. Il faut certainement apporter à cet article des aménagements, mais ne le supprimons pas : nous enverrions un message épouvantable au monde des soins palliatifs.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et LR – M. Joël Giraud applaudit également.
On peut dire tout et son contraire ; je peux donc aussi affirmer que le maintien de cet article montre que l'on ne se fie pas vraiment pas à tout le travail accompli en vue d'augmenter les budgets.
Je m'inscris en faux contre l'avis de la plupart d'entre vous, car je suis profondément opposée aux lois de programmation relatives au financement du système social.
Vous n'êtes pas d'accord entre vous au sein du groupe Renaissance : ça se complique !
Je suis favorable à la pluriannualité, favorable aux stratégies décennales, parce qu'elles engagent un gouvernement et tracent une vision. Mais inscrire des prévisions à l'euro près dans une loi de programmation touchant à la santé est source d'une grande rigidité. Sans souplesse, comment aurions-nous fait face au covid ? Comment ferions-nous pour nous adapter, chaque année, aux situations épidémiques ou à l'évolution de la démographie ?
Oui à la pluriannualité, oui aux stratégies décennales, mais non à l'inscription dans ce texte, à l'euro près, des dépenses que nous consacrerons dans dix ans aux soins palliatifs. On peut se faire plaisir, mais ces prévisions ne seront pas respectées.
Comme l'a indiqué Mme la ministre, le PLFSS fait l'objet chaque année d'une concertation avec les partenaires sociaux. De telles lois de programmation, de tels tableaux inscrits dans la loi, lui ôtent son sens. Je suis donc favorable à cet amendement de suppression.
L'amendement n° 673 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 1257 .
Il s'agit d'un amendement d'appel, qui répond à une crainte maintes fois énoncée par les professionnels des soins palliatifs. Il vise à obliger le Gouvernement à faire face à ses responsabilités en matière de développement des soins palliatifs. Parler d'une stratégie décennale, alors même que le quinquennat de M. Macron s'achève dans trois ans,…
…est perçu par certains comme une façon habile de ne pas avoir à assumer les résultats que ladite stratégie ne devrait produire qu'en 2034 – c'est d'ailleurs pour cette raison qu'il était important de voter une loi de programmation.
Je propose, par cet amendement de préférer, à une stratégie décennale, une stratégie triennale. Une telle stratégie permettrait de surcroît de se saisir plus rapidement de l'immense travail qui reste à accomplir pour rendre les soins palliatifs accessibles à tous, sur tout le territoire.
Par ailleurs, je ferai remarquer que le budget alloué ne s'élève qu'à 1 milliard d'euros, soit 1,50 euro par Français et par an, sur dix ans.
Non : ce sont des crédits supplémentaires !
Nous pouvons tous nous accorder sur le fait que la santé des personnes en fin de vie mérite un peu plus que le prix d'une baguette de pain parisienne.
Oh !
Dès lors, il serait préférable de prévoir que les crédits de paiement envisagés se répartissent sur trois ans et non sur dix ans.
Il est également défavorable. Clarifions les choses : il s'agit de crédits supplémentaires. Le sujet n'est donc pas la baguette de pain.
Nous voterons contre cet amendement car il est totalement inapplicable. Nous en avons parlé avant-hier : trois ans ne suffiraient pas pour publier un appel à projets puis pour répondre aux candidatures.
L'inscription de la stratégie décennale dans cet article a pour but de nous rassurer – et peut-être, avec nous, les acteurs du monde des soins palliatifs – quant à notre volonté de prendre les mesures prévues.
Mais il faut aussi faire preuve d'un peu de confiance ! Certaines stratégies se déploient jusqu'au bout. La stratégie nationale pour l'autisme a été exécutée à l'euro près !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
En revanche, si les lois de programmation engageant le budget général de la nation ont été intégralement appliquées par cette majorité – c'est le cas par exemple des lois de programmation militaire –, il me semble que, par le passé, de telles lois, bien qu'elles aient été votées, n'ont pas été appliquées.
Ne nous perdons pas en débats inutiles et inscrivons dans la loi cette stratégie décennale pour rassurer les acteurs des soins palliatifs. Je suis défavorable à l'amendement de Mme Ménard.
Cet amendement de notre collègue Emmanuelle Ménard est intéressant, car une période de trois ans pourrait constituer l'horizon d'application de ce texte, et il est important que nous sachions quand nous donner rendez-vous. Il n'existe d'ailleurs aucune loi de programmation décennale : la plupart sont quinquennales. La question de la temporalité se pose donc.
Vous évoquez, madame Darrieussecq, une stratégie qui a été exécutée, mais certaines ne l'ont pas été, et nous en avons bien des exemples ! En matière de soins palliatifs, ce sont déjà trois plans qui n'ont pas été suivis ! C'est tout le problème des soins palliatifs : dans l'inconscient des décideurs, par opposition aux soins curatifs, ils demeurent optionnels.
Vous cherchez à nous rassurer, madame la ministre, en nous indiquant que les crédits prévus sont des crédits supplémentaires. Vous avez également rappelé que nous disposions de 166 unités de soins palliatifs, comprenant dix à quinze lits. Mais, dans certaines de ces unités, des lits sont gelés, parfois en grand nombre !
Oui, faute de personnel !
Nous avons fait le choix, contraints parfois par les nécessités propres à l'allocation des moyens, de ne pas consacrer de ressources humaines à ces UPS. Au sein de ces dernières, combien de lits sont-ils gelés ? Avez-vous prévu les crédits nécessaires à l'ouverture de ces lits ? En prévoir pour des unités qui n'existent pas et sans en prévoir pour celles qui existent déjà et qui en manquent suscite de vraies questions.
L'amendement n° 1257 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement n° 2916 .
Notre collègue Gilles Le Gendre a raison de dire que la stratégie décennale qui est proposée suscite des appréciations diverses – et c'est un euphémisme – parmi les premiers concernés, et qu'il y a véritablement besoin de préciser les choses. C'est ce qu'il essaye de faire et je souscris à cet objectif, mais il faudrait aller au-delà de la feuille de route initiale.
Il s'agit en l'occurrence de préciser le champ d'application de la stratégie décennale, puisque l'effort financier annoncé par le Gouvernement est censé renforcer l'accès aux soins palliatifs alors que l'article, dans sa rédaction actuelle, concerne un périmètre beaucoup plus large, à savoir ce que vous nommez, monsieur Le Gendre, les « soins d'accompagnement ».
Comment dès lors faire la part des choses ? Quelle va être la réelle augmentation des crédits en faveur des soins palliatifs ? Dans la mesure où ces derniers ont besoin d'un plan de rattrapage massif – je ne rappellerai pas tout ce qui a été dit à ce sujet, sinon que l'augmentation des besoins estimés pourrait atteindre 23 % d'ici 2046 –, notre amendement vise à rendre la rédaction de l'article 1er ter conforme aux annonces gouvernementales, en réduisant strictement son champ d'application aux seuls soins palliatifs, pour que cette stratégie soit véritablement destinée à augmenter les crédits qui leur seront alloués.
Je comprends bien votre proposition astucieuse pour gonfler l'enveloppe puisque vous voulez que ce qui est annoncé soit consacré uniquement aux soins palliatifs, quitte à prévoir encore davantage de crédits pour les autres soins d'accompagnement mentionnés dans la stratégie décennale. Ce sera un avis défavorable.
Défavorable.
Faut-il faire confiance au Gouvernement s'agissant des crédits ? Je rappelle que nous sommes actuellement dans une séquence de réduction des crédits – des crédits qui ont été discutés dans cet hémicycle et adoptés par un 49.3 – qui ne passe pas par le Parlement, ce qui n'est guère rassurant quant au respect des engagements que prend le Gouvernement.
C'est pourquoi cette loi de programmation est importante, et il est nécessaire qu'elle figure dans ce texte pour les raisons que M. Le Gendre a explicitées : il faut en effet rassurer les personnels et les patients concernés par les soins palliatifs. Par ailleurs, le détail du calendrier et de la répartition des crédits est indispensable au Parlement, pour qu'il puisse évaluer le véritable déploiement de ces soins, partout sur le territoire, ainsi que va le commander la loi.
Je comprends bien le sens de l'amendement de notre collègue Dharréville, mais il m'accordera que cet article est le fruit du travail du Parlement.
Le texte initial mentionnait les soins d'accompagnement, et on y a ajouté les soins palliatifs… Et maintenant, il veut supprimer les mots « des soins d'accompagnement ». Pour ma part, je respecte le travail du Parlement.
Il me semble d'ailleurs qu'hier soir un texte présenté par votre groupe, mon cher collègue, et qui a été voté, accordait une place importante aux soins d'accompagnement, en supprimant le reste à charge pour les femmes atteintes d'un cancer du sein. Je vous trouve en contradiction…
…avec ce qui a été décidé à l'initiative de votre groupe, il y a quelques heures, dans ce même hémicycle, d'autant qu'il s'agit ici d'élargir la prise en charge en prévoyant que la loi s'appliquera non seulement aux soins palliatifs mais aussi aux soins d'accompagnement. Et il a bien été affirmé à plusieurs reprises que ces derniers incluaient les soins palliatifs. Arrêtons donc ce débat sémantique. On a tous ensemble pris acte du texte ici proposé, mais la loi se construit au fil du temps, il y aura une navette avec le Sénat, et le texte reviendra ici. Et puis, soyons de bonne foi et reconnaissons l'évolution des soins palliatifs dans notre pays depuis vingt ans et l'effort particulièrement important qui a été accompli.
Vous avez, cela étant, soulevé un point important sur lequel on se retrouve : l'important n'est pas d'afficher une somme ni même une stratégie – bien qu'elle engage –, mais d'être au rendez-vous financier, année après année, en fonction de l'évaluation des besoins. Savons-nous ce qu'ils seront en 2030 ou en 2032 ? Certainement pas. De même, Jérôme Guedj, qui connaît très bien les Ehpad, sait, comme moi, que les moyens mis sur la table aujourd'hui ne seront pas suffisants en 2036.
Il ne s'agit pas ici uniquement de prendre un engagement moral, mais de le tenir au fil du temps, en réactualisant les moyens alloués, en fonction des vrais besoins. Nous aurons alors accompli un travail concret et pas seulement de l'affichage.
L'amendement n° 2916 n'est pas adopté.
Cet amendement a un objectif qui n'est pas que sémantique puisque, si l'article 1er ter mentionne « l'accompagnement de la fin de vie », nous souhaitons qu'il n'y ait pas la moindre ambiguïté et que le périmètre des crédits proposés pour mener à bien cette stratégie décennale – que nombre d'entre nous auraient préféré triennale – soit bien précisé. Est-ce que, dans les sommes indiquées, figure également le financement de la mort administrée ? Si c'est le cas, pourrions-nous avoir des précisions sur ce que cela représenterait, puisque les moyens qui lui seraient alloués seraient évidemment à défalquer de ceux alloués aux soins palliatifs ?
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement n° 1479 .
Cet amendement de notre collègue Marc Le Fur revient sur une question sémantique. Les articles du titre Ier mentionnent les soins d'accompagnement, lesquels engloberaient, selon le Gouvernement et M. le rapporteur, les soins palliatifs. Une question se pose dès lors au sujet du pilotage de nos politiques publiques en la matière : n'y a-t-il pas un risque, en changeant de thermomètre, d'oublier, dans le suivi du déploiement des soins d'accompagnement, l'évaluation des soins palliatifs en tant que tels, sachant que les premiers ne recoupent pas nécessairement les seconds ?
Je trouve à cet égard très intéressant que cet article issu de l'amendement de Gilles Le Gendre renvoie au financement de structures qui dispensent des soins palliatifs. Vous avez annoncé, madame la ministre, la création de maisons d'accompagnement, mais seront-elles financées par des crédits s'ajoutant à ceux alloués à la stratégie décennale ?
Mais c'est une vraie question éthique, monsieur Vigier, puisque nous disposons de moyens limités sur le plan humain comme financier et qu'il faut donc faire des choix pour mieux les concentrer. A-t-on l'assurance que le thermomètre va rester le même pour nous permettre de suivre le déploiement des soins palliatifs ?
La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq, pour soutenir l'amendement n° 3291 .
J'essaye non seulement d'être concrète et factuelle mais cohérente, comme il faut l'être dans l'écriture de la loi. Et il s'agit vraiment d'un amendement de cohérence, puisqu'il vise à insérer à l'alinéa 1
Nous avons passé beaucoup de temps, dans les jours précédents, à essayer de nous mettre d'accord, sans toutefois y parvenir, sur une définition précise des frontières qui traversent ou séparent les différents types de soins abordés dans le titre Ier . Je crois qu'il ne faut pas reprendre cette discussion, et j'émets un avis défavorable sur l'ensemble des amendements en discussion commune.
Permettez-moi de revenir sur deux points.
Premièrement, l'activité des lits ouverts en unités de soins palliatifs sera évidemment financée, et les mesures de la stratégie décennale relatives à la formation des professionnels de santé ont pour objectif de rendre ces ouvertures réalisables, sachant que nous avons besoin d'avoir plus de personnels aptes à s'engager dans ce secteur.
Deuxièmement, le titre Ier , que nous sommes en train d'examiner, est pour le Gouvernement l'occasion de réaffirmer tout l'intérêt qu'il porte aux soins palliatifs : tous les financements prévus dans les articles qui le composent sont strictement destinés aux soins palliatifs, de même que l'article 1er ter que vous avez introduit, mesdames et messieurs les députés, ne concerne que les soins palliatifs.
Ceci étant dit, je suis défavorable à l'ensemble de ces amendements.
…d'autant plus que l'amendement suivant, présenté comme rédactionnel par notre estimé rapporteur, propose tout de même de supprimer les mots « pour le renforcement des soins palliatifs, de la prise en charge de la douleur et de l'accompagnement de la fin de vie ». Il me semble donc que la référence aux soins palliatifs est ici importante pour mieux définir ce que nous souhaitons en termes de stratégie budgétaire.
Nous sommes défavorables aux amendements défendus par MM. Hetzel et Bazin, dans la mesure où nous avons adopté hier le principe d'un droit opposable aux soins palliatifs. Il est inutile de nous faire du cinéma à ce sujet, tout au long des articles à venir : ce droit est dorénavant garanti. En revanche, nous voterons pour l'amendement Darrieussecq, et j'espère, monsieur le président, que vous ne m'en voudrez pas de cet avis favorable, bien que vous m'ayez donné la parole pour contrer les amendements. Disons que c'est deux contre un…
Sourires.
L'amendement n° 3291 est adopté.
La parole est à M. Didier Martin, rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 2893 .
C'est uniquement une simplification rédactionnelle, qui ne remet aucunement en cause les éléments ainsi supprimés puisque ceux-ci sont clairement inclus dans cet article et qu'ils font d'ailleurs l'objet d'autres mentions dans le projet de loi.
Favorable.
Ce n'est pas un amendement rédactionnel, monsieur le rapporteur ! Je suis même assez choqué que vous le prétendiez. Supprimer les termes « renforcement des soins palliatifs », « prise en charge de la douleur » et, pour clore le tout, « accompagnement de la fin de vie », n'a rien d'une modification rédactionnelle ; c'est extrêmement grave !
Mais il ne s'agit pas des crédits !
Sur de tels sujets, il faut tout de même, à un moment donné, en revenir à un minimum de raison ! Je trouve surprenant que, d'un côté, on nous dise qu'il s'agit de donner des garanties aux professionnels en soins palliatifs et que, de l'autre, des coups de canif viennent chaque fois démontrer l'inverse. Faites preuve d'un minimum de mesure si vous voulez rassurer les professionnels !
Vous êtes caricatural !
Avec ce type d'amendement, à 180 degrés de ce que vous dites par ailleurs, c'est exactement l'inverse, et votre crédibilité, comme celle de la ministre, qui a émis un avis favorable, est sérieusement remise en cause. Il y a là deux poids, deux mesures. C'est inacceptable !
Mme Emmanuelle Ménard applaudit.
Il n'est pas facile, monsieur Hetzel, d'écrire une phrase, quand elle a été découpée en petits morceaux au fur et à mesure des amendements qui s'enchaînent. Mon amendement, qui vient d'être adopté, rédige ainsi le début premier alinéa : « Les crédits de paiement supplémentaires de la stratégie décennale des soins palliatifs et d'accompagnement… » Si nous ne votons pas l'amendement du rapporteur, il se poursuivra ainsi : « …pour le renforcement des soins palliatifs, de la prise en charge de la douleur et de l'accompagnement de la fin de vie… », soit un méli-mélo qui n'a plus de sens.
Je pense donc que l'amendement du rapporteur est cohérent avec celui que nous venons d'adopter.
Je remercie Mme Darrieussecq pour son intervention. M. Hetzel cherche à faire croire que nous gommerions ce que nous avons choisi comme sous-titre pour la stratégie nationale, qu'en fin lecteur des textes, il a certainement étudiée avec beaucoup de précision. C'est faux. Je maintiens que mon amendement est bel et bien de nature rédactionnelle et que tout est écrit ailleurs.
L'amendement n° 2893 est adopté.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement n° 2979 .
L'article 1er ter prévoit pour dix ans les crédits de paiement destinés à financer les soins d'accompagnement. Ce tableau de crédits a l'avantage d'inscrire dans la loi une trajectoire financière mais il a l'inconvénient, ainsi que Mme la ministre l'a souligné tout à l'heure, de la présenter comme figée.
Or le financement des soins d'accompagnement – et particulièrement des soins palliatifs – nécessite un rattrapage colossal. De surcroît, les besoins vont augmenter dans les années à venir en raison du vieillissement de la population et de l'augmentation des maladies chroniques.
Je signale au passage que le débat que nous avons eu, au moment de l'examen de l'article 1er , sur la distinction, ou l'indistinction, entre soins palliatifs et soins d'accompagnement se retrouve concrètement posé dans l'article dont nous discutons. Il s'agit en effet de savoir ce qui va effectivement servir à financer l'augmentation des coûts de soins palliatifs. Je referme cette parenthèse.
Dans le contexte que j'ai décrit, la trajectoire annoncée risque fort de devoir être révisée. L'article 1er bis du projet de loi prévoit d'ailleurs une révision de la stratégie décennale au bout de cinq ans. Cette évaluation devra notamment s'assurer que l'accès aux soins d'accompagnement est équitable sur l'ensemble du territoire et effectif pour tous les malades, ainsi que le prévoit l'article 1er .
C'est donc en cohérence avec les articles 1er et 1er bis que notre amendement propose d'ajouter dans l'article 1er ter que les crédits présentés puissent évoluer pour être conformes aux principes de mise en œuvre des soins d'accompagnement. Cela n'enlève rien à la force indicative de l'article introduit dans le texte par le biais de l'amendement de notre collègue Gilles Le Gendre.
À l'intention de M. Vigier, je souligne que le travail parlementaire continue et que nous sommes donc encore autorisés à proposer des amendements, comme je suis en train de le faire.
…comme celui que nous accomplissons collectivement. Vous expliquez vous-même que vous rajoutez ce qui est figure déjà à l'article 1er . Votre amendement est donc satisfait, d'où un avis défavorable.
Défavorable.
Je soutiens cet amendement qui vient compléter ce que nous avons voté au début de la discussion de ce texte, en précisant que la trajectoire minimale que nous avons adoptée peut être révisée en fonction des besoins.
Notre collègue Philippe Vigier assure qu'on ne peut pas prévoir ce que seront les besoins en 2032. Il devrait le dire à la Cour des comptes, dont le dernier rapport sur les soins palliatifs, celui de juillet 2023, estime qu'en 2032 les besoins en la matière auront augmenté d'au moins 10 %. Nous avons donc des trajectoires indicatives sur une durée non négligeable. Car une des choses facilement prévisibles d'une année à l'autre est l'âge des gens : on sait que, dans un an, ils auront un an de plus, deux dans deux ans, et ainsi de suite – je pense que vous avez compris la logique.
Cet amendement est un point d'appui pour aller plus loin et faire mieux sur le plan budgétaire. Il permettra des aménagements qui seront plus favorables.
Selon Mme la ministre, les amendements de ce type montrent que nous manquerions de confiance vis-à-vis du Gouvernement. Évidemment que nous manquons de confiance envers le Gouvernement ! Nous n'avons pas confiance parce que nous savons qu'une fois sur deux vous baissez les budgets par rapport à vos engagements, qu'une fois sur deux, vous oubliez vos engagements et que, toujours une fois sur deux – car le cumul n'est pas exclu –, vous prenez en douce des décrets d'annulation pour revenir sur ce qui a été voté. Pour toutes ces raisons, il faut adopter cet amendement.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
M. Clouet a été bien bavard pour défendre cet amendement qui, s'il était adopté, rendrait également la loi bavarde. L'article 1er ter se suffit largement à lui-même, tel qu'il a été rédigé par notre collègue Gilles Le Gendre. Geneviève Darrieussecq a bien expliqué qu'à force de rajouts la loi va devenir illisible et inapplicable. Ce n'est pas ce que nous voulons et c'est pourquoi je voterai contre cet amendement.
L'amendement n° 2979 est adopté.
La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l'amendement n° 1162 .
Il s'agit d'un amendement d'appel qui me permet de renouveler la question posée tout à l'heure par notre collègue Hetzel à Mme Vautrin. La ministre a garanti que la somme dont nous parlons serait réservée au financement des soins palliatifs. M. Hetzel a demandé si les inévitables frais liés à la mise en œuvre de la mort assistée seraient ou non inclus dans cette enveloppe.
Au Canada, les 6 400 décès attribuables au suicide assisté ont coûté 22 millions de dollars. Nous voudrions, d'une part, savoir si une estimation du coût annuel du suicide assisté a été faite en France et, si oui, en connaître le montant pour les dépenses publiques. D'autre part, cette somme est-elle incluse dans le plan de financement ou s'agira-t-il d'une autre enveloppe ?
Avis défavorable sur l'amendement qui visait à ramener à une durée de six ans la stratégie décennale. Nous avons déjà eu cette discussion.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je m'attendais, monsieur le député, à ce que vous présentiez votre amendement mais vous posez une tout autre question à propos de laquelle on me glisse à l'oreille qu'une réponse précise a déjà été apportée. Je ne vais que répéter ce que vous aurait dit la ministre.
L'étanchéité des financements est complète. Nous en sommes au titre Ier , où l'on parle de la stratégie décennale pour les soins palliatifs et non d'autre chose. Le reste relève d'un autre sujet.
Agitation sur les bancs du groupe LR.
Sur l'amendement, qui n'a pas été présenté, je donne un avis défavorable.
J'ai bien lu l'amendement, qui demande que ce qui était prévu sur dix ans soit ramené à six ans. Monsieur le ministre, avez-vous une évaluation précise des besoins nécessaires ? Sur ce point, j'ai écouté Pierre Dharréville, qui m'a convaincu. Je vis de bonne soupe et non de beau langage, comme écrivait Molière. Ne jetons donc pas des mots en pâture. Face à la stratégie décennale proposée, je préférerais qu'on fasse preuve d'un peu d'humilité car, aujourd'hui, seuls la moitié des Français qui en auraient besoin bénéficient de soins palliatifs. Qu'est-ce qui n'a pas été fait depuis 1999 pour qu'on en soit là ? Cette question me semble nécessiter un peu de réflexion. Entre 2012 et 2017, tout n'a pas été parfait – ce n'est pas Dominique Potier qui dira le contraire.
Maintenant qu'un effort est fourni, comment se projette-t-on ? Les chiffres ont la tête dure mais ils sont là, dans cet hémicycle où, en vingt ans de présence, je n'ai jamais vu qu'on consacre autant de temps aux soins palliatifs. C'est très bien qu'on le fasse enfin.
Plutôt qu'avoir un débat sémantique où tout le monde s'envoie tout à la figure, je préférerais qu'au moment de l'examen du PLFSS, on se demande, année après année, quels sont les besoins et combien on met sur la table. Il est tellement facile de ne pas parler de chiffres précis. Au moins a-t-on des chiffres indicatifs. Ainsi que je l'ai dit à Pierre Dharréville, avec beaucoup d'honnêteté intellectuelle, je sais que, dans trois ou quatre ans, le compte n'y sera pas, comme c'est le cas pour les Ehpad.
Je vous invite à écouter le formidable éditorial diffusé par une grande radio ce matin sur le besoin de places en Ehpad en France d'ici à dix ans. Il pourrait nourrir les réflexions des uns et des autres.
Monsieur Juvin, lorsque vos amis étaient au pouvoir, ils n'ont pas mis cela en place. J'en ai été le témoin, alors que vous n'étiez pas là.
Je prends la parole au moment où, monsieur Valletoux, vous prenez, pour quelques heures peut-être, la place de Mme Vautrin au banc des ministres. Je le fais délibérément parce que je connais votre préférence, exprimée publiquement, pour la solution qui aurait consisté à avoir deux textes distincts, l'un consacré au plan décennal sur les soins d'accompagnement, l'autre à l'aide à mourir.
La question de notre collègue Juvin est très intéressante. Il nous faut une réponse. Vous devez une réponse à la représentation nationale. Vous ne pouvez pas nous dire qu'il y a une étanchéité – je reprends le mot que vous avez utilisé à l'instant – entre le financement du titre Ier et celui du titre II. Pas vous.
Avec la position singulière qui est la vôtre, dire cela est paradoxal. Vous savez que les deux titres sont interdépendants. Même si vous ne l'avouerez pas, le titre Ier est un faire-valoir du titre II. Nous le répétons depuis le début de nos travaux. Pas pour faire de l'obstruction…
…ou pour faire perdre du temps mais parce que c'est la vérité. Au fond de vous-même, vous le savez. Je vous prie une dernière fois de bien vouloir répondre à la question précise et importante de notre collègue Juvin.
L'amendement n° 1162 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement n° 2917 .
La hausse des financements à accorder aux soins palliatifs doit répondre, d'une part, au retard à combler, puisque plus d'un patient sur deux n'y a pas accès aujourd'hui, et, d'autre part, aux nouveaux besoins issus du vieillissement de la population et de l'augmentation des maladies chroniques.
Dans son rapport de juillet 2023, la Cour des comptes a estimé que « bien que la dépense publique de soins palliatifs ait augmenté depuis 2017, l'offre demeure largement insuffisante pour couvrir les besoins puisque seulement 48 % d'entre eux sont pourvus ». Selon ses chiffres, la dépense publique a crû de près de 6,25 % par an. La stratégie décennale prévoit une hausse annuelle de 6,6 %. L'effort annoncé par le Gouvernement revient donc en réalité à demeurer quasiment à budget constant sur les dix prochaines années. Dans ce contexte, il nous semble utile de corriger ces crédits en prévoyant au minimum leur doublement. C'est le sens de cet amendement.
Cela n'étonnera personne que la proposition du groupe de M. Dharréville soit mieux-disante en termes de dépenses. Je rappelle à tous que, dans cet article 1er ter, nous parlons d'une sorte de tableau d'amortissement, de prévision, dont le titre est « Crédits de paiement et plafonds des taxes allouées aux mesures nouvelles prévues par la stratégie décennale ». Cette stratégie décennale, document officiel qui a été publié et auquel vous pouvez tous vous référer, porte sur les soins d'accompagnement et non sur l'aide à mourir, qui n'est pas un soin.
« Ah ! Ah ! Ça progresse ! », sur les bancs du groupe LR.
Je ferai écho au rapporteur. Vous souhaitez doubler ce qui a été annoncé dans la stratégie décennale. Celle-ci a le mérite d'être très claire dans ses prévisions budgétaires comme dans ses prévisions d'accompagnement de la population.
Je rappelle que les soins palliatifs représentent une dépense de 1,6 milliard d'euros et que la cible à dix ans est de 2,7 milliards. Ces chiffres ont déjà été cités, ils sont issus des travaux du rapport Chauvin, qui explique en outre que la montée en puissance des soins palliatifs accompagnera les évolutions démographiques. Les mesures annoncées ont été évaluées au vu des besoins projetés, à savoir une augmentation de 66 % de la dépense actuelle pour une augmentation de 16 % des besoins sur la même période.
Avis défavorable.
Cet article, que nous avons introduit à l'initiative de notre collègue Gilles Le Gendre, pose la question des moyens nécessaires pour atteindre les objectifs fixés. Ces objectifs, je crois que tout le monde ici les partage ; le problème est de savoir si l'on dispose de moyens en regard.
Il faut que nous soyons clairs tant sur les objectifs que sur les moyens. Or on voit bien qu'on a des difficultés pour chiffrer tout cela. Combien ça coûte ? Il a été dit que les soins d'accompagnement pouvaient comprendre des soins palliatifs. Vous avez annoncé des crédits pour les soins palliatifs dans le cadre de la stratégie décennale. Vous avez précisé qu'il y avait une étanchéité avec le financement des maisons d'accompagnement, qui pourraient administrer des produits létaux mais aussi faire des soins palliatifs. Pourrions-nous donc savoir quels crédits seront affectés, hors stratégie décennale, aux soins palliatifs dans les maisons d'accompagnement, de sorte que nous puissions vérifier – c'est le rôle du Parlement – que les moyens correspondent bien aux objectifs ?
Tout à l'heure, notre collègue Philippe Vigier anticipait sur la discussion à venir du PLFSS – probablement répétait-il son futur rôle.
Sourires.
Or, lors de la discussion du précédent PLFSS, j'avais déposé des amendements visant à augmenter les crédits destinés aux soins palliatifs et à modifier, conformément aux préconisations, leur mode de financement ; aucun n'a été repris par le Gouvernement. Permettez-nous donc, au vu d'une certaine continuité dans sa composition, d'émettre quelques doutes concernant la volonté véritable du Gouvernement.
Monsieur Valletoux, vous étiez, avant votre entrée au Gouvernement, très engagé, comme plusieurs d'entre nous, sur la question des soins palliatifs. Pouvez-vous nous préciser ce qu'il en est du coût des maisons d'accompagnement, des crédits qui leur seront affectés, de la part dédiée à l'administration de produits létaux et de l'étanchéité de leur financement par rapport à la stratégie décennale ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.
Nous soutiendrons cet amendement.
Analysons les chiffres. Entre 2017 et 2021, la dépense publique pour les soins palliatifs a augmenté de 6,5 % par an ; le plan décennal annoncé prévoit une augmentation, certes supérieure, mais de seulement 6,6 % par an. On passera donc de 6,5 % par an à 6,6 % par an… Or près de la moitié des personnes qui ont besoin de soins palliatifs n'y ont aujourd'hui pas accès. Il faudrait donc être plus ambitieux et augmenter dans une proportion bien plus importante les moyens investis dans les soins d'accompagnement et dans les soins palliatifs. L'amendement vise à corriger le tir en prévoyant le doublement au minimum des crédits. Adoptons-le !
Quant au débat sur le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, il serait bon, chers collègues, que vous mettiez un terme à votre surenchère libérale ! Chaque fois, vous proposez des exonérations de cotisations sociales, ce qui revient à appauvrir la sécurité sociale, alors qu'il faudrait au contraire améliorer son financement, au bénéfice de toutes et tous. Cela, c'est du concret ! Nous exigeons pour notre part des moyens.
Nous examinerons ultérieurement un amendement qui tend à prévoir l'adoption d'une loi de programmation pour les soins palliatifs. Il s'agit d'une disposition essentielle. Il convient qu'en matière de soins palliatifs et de soins d'accompagnement, la politique de l'État soit à la hauteur. Consacrons-y toute notre énergie !
Chers collègues, j'ai bien noté vos demandes de parole mais je m'en tiendrai à un pour et un contre afin que nous puissions avancer.
Je mets donc l'amendement aux voix.
Nous n'avons toujours pas eu de réponses à nos questions, monsieur le président !
L'amendement n° 2917 est adopté.
L'amendement n° 2861 de M. Didier Martin, rapporteur, est rédactionnel.
L'amendement n° 2861 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L'article 1er
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir le sous-amendement n° 3460 .
Comme il s'agit de ma première prise de parole ce matin, je voudrais, avant de le présenter, dire ceci.
Claire Fourcade déplore que 400 Français meurent chaque jour sans avoir eu accès aux soins palliatifs ; mes collègues du RN et de LR évoquent le chiffre de 500 personnes. J'ai relu hier soir le rapport de la Cour des comptes qui avait été présenté à la commission des affaires sociales en juillet 2023. Il y est écrit que « la méthode d'estimation des besoins [en soins palliatifs] doit […] faire l'objet de précautions méthodologiques. […] Une estimation fondée sur les causes de décès ne répond que partiellement à l'enjeu d'anticipation des prises en charge. » Et, plus loin : « Aux difficultés d'évaluation des besoins de soins palliatifs s'ajoutent les lacunes dans les méthodes d'évaluation de l'offre effectivement disponible, en ville comme à l'hôpital. Depuis 2015, la mesure de l'écart entre les patients susceptibles de recevoir des soins palliatifs et les prises en charge effectives reste lacunaire. » Ce n'est pas moi qui le dis, c'est la Cour des comptes !
Concernant les soins palliatifs à domicile, l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) ne dit pas autre chose ; elle ne se prononce d'ailleurs pas sur le pourcentage de personnes qui en bénéficient réellement.
Il est donc urgent, monsieur le ministre, de mieux évaluer les besoins et les ressources en soins palliatifs.
M. Gilles Le Gendre applaudit.
Nous avons besoin d'indicateurs. Y travaillez-vous ?
Quant au sous-amendement, il vise à ajouter les maisons d'accompagnement dans le périmètre du très bon article adopté à l'initiative de mon collègue Le Gendre.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement et l'amendement ?
Vous avez parfaitement raison, madame Pires Beaune, de reprendre les termes du rapport de la Cour des comptes.
Nous avons eu l'occasion, en commission spéciale, de revenir sur la question des enfants et des soins palliatifs pédiatriques. Les unités dédiées sont actuellement peu nombreuses, voire absentes ; en tout cas, elles n'ont pas d'existence formelle. Nous en créerons. La question sera également traitée à travers le développement de la recherche et d'une organisation territoriale, à l'échelon du département et de la région. Avis favorable sur l'amendement.
Même avis sur le sous-amendement, qui souligne l'innovation que représentent les maisons d'accompagnement. Il s'agit d'une réponse intermédiaire entre les soins palliatifs qui nécessitent une hospitalisation et ceux qui n'en nécessitent pas – la Cour des comptes l'évoque dans son rapport. Les maisons d'accompagnement offriront une nouvelle solution aux personnes en fin de vie dont l'état ne permet pas de rester à domicile sans pour autant nécessiter une hospitalisation spécialisée.
Avis favorable au sous-amendement et à l'amendement.
Ce débat est très important, car il permet de clarifier les choses – ce que nous souhaitons tous ici, je crois. Nous pouvons avoir des conceptions philosophiques différentes, mais nous avons tous intérêt à chercher la clarté : cela permet d'élever le débat public.
Or les prises de parole successives soulèvent des questions intéressantes. Ainsi, à travers l'ajout des maisons d'accompagnement dans l'article, se pose de nouveau la question du périmètre de ce que nous appelons les soins palliatifs et d'accompagnement, puisque ces maisons sont des lieux où l'on pourra délivrer une aide à mourir, une euthanasie, un suicide assisté.
D'autre part, j'abonderai dans le sens de Christine Pires Beaune : les méthodes actuelles d'évaluation sont insuffisamment documentées. Cela doit nous conduire à dire, dans un souci d'honnêteté intellectuelle, que les déclarations de Claire Fourcade et de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap) qu'elle préside ne peuvent être ni infirmées ni confirmées. Le nombre de personnes concernées est peut-être supérieur ou inférieur, on n'en sait rien – et c'est bien là le problème.
J'appelle dès à présent votre attention sur l'article 13. Il y est inscrit que l'indicateur prendra la forme d'une déclaration enregistrée dans un système d'information. Or il existe des registres dont les données ne sont pas consolidées de façon électronique à l'échelon national et dont les informations ne sont pas probantes. Il sera donc nécessaire de préciser à l'article 13 que lorsque l'on aura recours à l'euthanasie ou au suicide assisté, les informations seront documentées, qualifiées et consolidées à l'échelle nationale, afin que l'on puisse disposer d'une évaluation précise du phénomène. Il en va de même pour les cas de sédation profonde, sur lesquels nous manquons de données.
Si nous voulons pouvoir évaluer demain les politiques publiques, nous avons besoin d'indicateurs, de données et de périmètres bien définis ; à défaut, nous serions dans le mensonge – dont le refus pourrait nous réunir aujourd'hui.
Le sous-amendement n° 3460 est adopté.
L'amendement n° 1447 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à Mme Marine Hamelet, pour soutenir l'amendement n° 2294 .
Il s'agit par cet amendement d'étendre le périmètre budgétaire de la stratégie décennale aux équipes mobiles de soins palliatifs. Je veux mettre l'accent sur celles-ci, parce qu'elles jouent un rôle très important, en particulier dans les départements dans lesquels il n'existe pas d'unité de soins palliatifs, comme le mien, le Tarn-et-Garonne. Elles seules peuvent se rendre au plus près des personnes qui en ont besoin.
Cela me permet aussi de souligner la fracture qui existe entre les départements ruraux et les départements urbains.
Dans un département comme le mien, seules les équipes mobiles peuvent faire ce travail. À Paris, on compte dix-sept lits de soins palliatifs pour 100 000 habitants ; dans le Tarn-et-Garonne, la proportion est de sept pour 260 000 !
Je vous laisse donc juger de l'importance de cette mission.
Vous avez raison de souligner l'importance de la prise en charge à domicile, qui sera assurée par divers moyens. La mobilisation en faveur du maintien à domicile correspond à la mesure 14 de la stratégie décennale, qui comprend la revalorisation des actes réalisés à domicile, la multiplication des interventions et l'intervention de psychologues – il s'agit d'une nouveauté.
Néanmoins, l'amendement est satisfait par l'alinéa 12 de l'article, qui cite les équipes mobiles de soins palliatifs. Avis défavorable.
L'amendement est en effet satisfait par l'alinéa 12. Vous avez raison d'insister sur ce point mais il est déjà dans le texte.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Certes, l'amendement est satisfait, mais il était important d'évoquer le sujet et je veux apporter mon témoignage, car je viens d'un département où il n'y a que des équipes mobiles. On n'en parle jamais. Au moins, ce que viennent de dire le ministre et le rapporteur pourra être lu et entendu. Merci aux équipes mobiles pour le boulot formidable qu'elles font.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
L'amendement n° 2294 n'est pas adopté.
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement n° 1695 .
Cet amendement vise à préciser le recours aux équipes mobiles de soins palliatifs, non pas à l'alinéa 8 mais à l'alinéa 9.
D'autre part, monsieur le ministre, pardon d'y revenir, mais nous sommes plusieurs à avoir interrogé Mme Vautrin, dont nous nous réjouissons que vous veniez de prendre la relève. Nous souhaitons disposer du chiffrage du financement de la mort administrée.
Il y a quelques instants, M. Martin disait que celle-ci ne faisait pas partie du dispositif prévu par l'article 1er
J'émettrai un avis défavorable, pour les raisons que j'ai évoquées à propos de l'amendement précédent.
L'amendement étant satisfait, j'en demande le retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je ne comprends pas que vous persistiez à essayer de semer la confusion là où il n'y en a pas. Au sujet du financement de l'aide à mourir, je vous renvoie au titre II et aux articles qui viendront en discussion : les choses sont cloisonnées,…
…les choses sont cloisonnées. Parlons des soins d'accompagnement ; je réponds à vos questions les concernant. Si je suis encore là…
…lorsque nous examinerons l'article 18, je me ferai un plaisir de vous répondre. Il reviendra sans doute à ma collègue Catherine Vautrin de le faire, avec sa clarté habituelle.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur les bancs du groupe LR.
Je n'écoute pas les vociférations derrière moi ; je vous regarde, monsieur le député : c'est à vous que je parle.
Les choses sont très claires. Pourquoi chercher sans cesse à semer la confusion ?
Nous voterons contre l'amendement de M. Hetzel : l'explication du rapporteur et du ministre nous satisfait, l'alinéa 12 mentionnant déjà les équipes mobiles de soins palliatifs.
Comme le disait notre collègue, ces équipes sont extrêmement importantes dans les départements dépourvus d'USP. Mais elle le sont aussi dans les autres départements, qui n'ont en moyenne que dix lits de soins palliatifs – nombre très insuffisant pour satisfaire tous les besoins en la matière. Les équipes mobiles font un travail essentiel dans chacun des départements, même ceux qui sont dotés. Il est important de les soutenir. Nous voterons tout de même contre cet amendement, satisfait dans le texte. À force d'y ajouter ce qui s'y trouve déjà, nous finirions par le rendre incompréhensible.
Je suis surpris que M. le ministre ne réponde pas à une question simple, successivement posée par nos collègues Hetzel, Juvin et Bazin – une question, somme toute, « grand public » : à combien évaluez-vous le coût de la mort administrée ? J'entends bien que vous ne disposez pas du nombre de personnes,…
…mais le coût à l'unité doit pouvoir être calculé, ce que vous ne faites pas.
Si nous posons la question dès ce stade, c'est qu'il n'y a qu'un seul texte, artificiellement découpé en deux titres. Vous aviez souhaité, monsieur le ministre, dans une tribune publiée en novembre dernier, qu'il y en ait deux – et je m'en étais réjoui, à l'époque. S'il n'y a qu'un seul texte, la confusion menace – tout le monde en conviendra–,…
…qu'entretien notamment le mot « accompagnement ». S'il n'était question que de soins palliatifs, il n'y aurait pas de problème, mais le mot « accompagnement » crée une confusion – tout comme la mention de maisons d'accompagnement, où l'on prodiguerait peut-être des soins palliatifs, mais où l'on pratiquerait surtout la mort administrée, l'euthanasie, le suicide assisté.
Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Parvenus à ce stade, nous posons une question simple, audible de tous nos compatriotes : quel est le coût de la mort administrée ? Cessez de nous cacher des choses !
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.
L'amendement n° 1695 n'est pas adopté.
L'amendement n° 2864 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Caroline Colombier, pour soutenir l'amendement n° 1008 .
Mme la ministre a annoncé la création d'unités de soins palliatifs. Notre niveau de notre confiance en ce gouvernement étant proche de zéro, pour ne pas dire nulle,…
…cet amendement de mon collègue Julien Odoul vise à garantir la création des unités de soin dans les départements qui n'en sont pas dotés. Vous me direz que l'amendement est satisfait. Mais il faut nous souvenir, que même dans les départements dotés, les USP existantes sont en sous-effectif : quel que soit leur dévouement, les équipes sont exténuées. Alors, pour une fois, faites vraiment ce que vous dites !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La rédaction de l'amendement est impropre : il ne s'agit pas de construire des USP, mais d'en créer au sein d'établissements de soins, avec tous les moyens afférents.
Ce que vous réclamez est contenu dans la stratégie nationale, j'aurai donc un avis défavorable.
Défavorable.
L'amendement n° 1008 n'est pas adopté.
Sur l'article 1er
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l'amendement n° 1794 .
Il s'agit d'ajouter à l'article 1er ter l'objectif de structuration de la filière universitaire consacrée aux soins palliatifs et d'accompagnement ainsi que la création d'un diplôme sanctionnant des études spécialisées (DES). Cet objectif faisait partie des engagements du Gouvernement figurant dans la stratégie décennale – nous y reviendrons lors de l'examen de l'article 1er
Cela vient de l'organisation du texte : une telle structuration relevant de l'article 1er
Même avis.
L'amendement n° 1794 est retiré.
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement n° 1696 .
Monsieur le rapporteur, vous nous disiez tout à l'heure que la mort administrée était exclue du dispositif. Selon votre méthode, je propose, à des fins de clarté, un amendement rédactionnel, qui précise que les substances létales ne sont pas incluses dans le périmètre. Une telle précision aurait le mérite d'écarter le risque de confusion.
Nous aurons cette discussion lors de l'étude des amendements de ma collègue Laurence Christol, qui vous entretiendra du procédé. Avis défavorable.
Ma réponse sera analogue à celle que j'ai donnée tout à l'heure : l'article 19 du titre II, abordant ce sujet, sera examiné la semaine prochaine. Évoquons les sujets quand ils viennent en discussion. Alors que vous prêchez la clarté dans le débat, vos amendements favorisent la plus grande confusion !
Avis défavorable.
Que le sujet soit abordé à l'article 19, nous pouvons en convenir. Pour la clarté du débat et pour des raisons de clarté démocratique, je tiens cependant à dire encore fois qu'il s'agit d'une question fondamentale.
Sur le fond, l'expérience des pays étrangers montre que là où existe une mort administrée, l'offre de soins palliatifs tend à se réduire dans le service public et leur qualité à décroître.
Il est donc extrêmement important, si toutefois nous adoptions l'article 5, de disposer d'une évaluation dans la durée, d'un périmètre précis – notamment pour les maisons d'accompagnement – et d'indicateurs distinguant la sédation profonde, le suicide assisté et l'euthanasie, pour pouvoir mesurer le rapport éventuel entre les cas de mort administrée et l'évolution de l'offre de soins palliatifs.
M. le ministre s'étonnait tout à l'heure des positions des députés Les Républicains et de leurs amendements. Il n'y a pas lieu de s'étonner : ils sont contre les soins palliatifs, ou plutôt cela ne les intéresse pas. Ils saisissent toutes les occasions pour semer le doute, pour s'opposer et tendre le débat, ,
Exclamations sur les bancs du groupe LR
au lieu de se concentrer sur le développement des soins palliatifs. Ils emploient des arguments irrecevables et profondément malsains, ce que je tenais à dénoncer une fois de plus.
L'amendement n° 1696 n'est pas adopté.
L'article 1er ter dresse un tableau des crédits consacrés aux soins d'accompagnement, dont les soins palliatifs, sur une durée de dix ans. La dernière loi de financement de la sécurité sociale a prévu un objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) de 257,4 milliards d'euros, soit une progression de 3,2 % hors crise covid. Pour les années suivantes – 2025, 2026 et 2027 –, le rythme de croissance de l'Ondam serait en baisse constante, de 3 %, puis de 2,9 %. De tels objectifs de dépenses sont largement insuffisants pour répondre aux besoins de santé.
Le 15 avril dernier, le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie a d'ailleurs appelé à une « vigilance renforcée sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie, de soins de ville comme [celles] liées aux établissements de santé ». Il précise que « le "point de fuite" du déficit des établissements publics de santé, qui s'élargit, est une préoccupation majeure ». Le ministre de l'économie a déjà fait connaître sa volonté de réduire encore les dépenses de santé.
L'article 1er
Mon avis sera défavorable. Il appartient en effet au Parlement d'ajuster les moyens aux besoins qui apparaissent, parfois soudainement, comme nous en avons, hélas, fait l'expérience lors de la crise sanitaire – qui a entraîné une hausse très significative des dépenses, donc de l'Ondam.
Avis défavorable également. Cela reviendrait à empiéter sur le domaine de la loi de financement de la sécurité sociale qui, chaque année, fixe les niveaux de financement des politiques concernant les soins d'accompagnement.
Je suis évidemment favorable à cet amendement. Puisque nous finissons l'examen d'un article qui a trait aux questions de financement, je voudrais profiter de la présence de M. le ministre. Il y a trois jours, j'ai posé une question à Mme Vautrin à propos de l'accessibilité financière des soins palliatifs. Nous n'attendons pas que vous nous répondiez tout de suite – je le dis à l'attention des collaborateurs présents – mais il serait utile que vous le fassiez au cours de l'examen du texte, car la réponse éclairerait la suite de nos débats.
J'avais indiqué que 20 % des lits identifiés de soins palliatifs (Lisp) et 30 % des unités de soins palliatifs sont opérés par des acteurs privés à but lucratif, et demandé si, dans ces services, on pouvait garantir qu'il n'y avait pas de dépassements d'honoraires. Nous avions parlé des soins à domicile, pour lesquels la quasi-totalité des frais sont pris en charge par l'assurance maladie, même si certains, par exemple l'intervention d'un ergothérapeute ou l'adaptation du logement, ne le sont pas. J'aimerais donc avoir la certitude que c'est également le cas s'agissant des soins palliatifs.
La ministre nous avait dit que les soins palliatifs sont pris en charge à 100 % – j'anticipe sur nos discussions futures, puisque nous évoquerons tout à l'heure le reste à charge dans les maisons d'accompagnement. Cependant, l'ampleur des dépassements d'honoraires dans l'ensemble de notre système de santé est telle – 6,5 milliards d'euros – qu'il serait utile de savoir s'ils s'appliquent à ce secteur, où l'on peut légitimement penser qu'il ne devrait pas y en avoir.
M. Dominique Potier applaudit.
Nous nous opposerons à cet amendement qui comporte à nouveau le mot « accompagnement », plein d'ambiguïtés – chacun a compris notre point de vue sur la question. Je reviens un instant sur l'amendement précédent, que vous avez rejeté : de quoi s'agit-il, monsieur le ministre ? Il s'agit de définir le périmètre budgétaire qui sera consacré aux soins palliatifs. La question posée par notre collègue Hetzel est donc très légitime : la dépense liée aux substances létales est-elle incluse dans ce périmètre, oui ou non ?
Vous ne répondez pas à la question : j'en conclus que c'est inclus dans le périmètre ! Si c'est le cas, les choses sont claires : puisqu'il s'agit d'un seul et même périmètre, cela signifie que l'introduction de cette dépense aboutira à la réduction des autres dépenses. Elle conduira donc à réduire la durée des séjours en unités de soins palliatifs ou le nombre de journées d'hospitalisation à domicile. C'est inquiétant ! Ce n'est pas qu'une question de clarté : si, dans ce périmètre, vous incluez le coût de la mort administrée – de l'euthanasie –, il y aura autant d'argent en moins pour d'autres dépenses qui, elles, sont explicitement prévues dans le périmètre – et dont certaines sont liées aux soins palliatifs.
Votre réponse est donc inquiétante. Il est de votre devoir, monsieur le ministre, et je suis convaincu que vous êtes tout à fait en mesure de le faire – je n'ai aucun a priori contre vous –, de mettre un peu de clarté dans le débat : dites-nous clairement si cette dépense est incluse – ce qui correspondrait à la philosophie de certaines personnes, mais pas à la nôtre – ou si elle ne l'est pas.
Je n'évoquerai pas l'amendement, puisque nos débats nous en éloignent,…
…mais je voudrais répondre à Jérôme Guedj. Sa question est pertinente, et un élément de réponse a été apporté hier soir lors de l'examen d'une proposition de loi du groupe communiste, qui vise la prise en charge intégrale des soins liés au traitement du cancer du sein par l'assurance maladie. Une mission d'information de la commission des affaires sociales se penchera sur la question des dépassements d'honoraires ; les soins palliatifs et les soins d'accompagnement pourront être pris en compte.
Pour le reste, pardon, monsieur Le Fur, mais je ne sais plus comment vous le dire. On me dit que la même réponse vous est apportée depuis plusieurs jours ; quant à moi, je suis là depuis dix minutes et je vous l'ai déjà dit trois fois : oui, il y a une séparation…
…et non, cette dépense n'est pas incluse dans le périmètre budgétaire en question. Je ne sais plus comment vous le dire ! Vous allez continuer à me poser la question, mais je vous le dis pour la dernière fois : non, il n'y a pas de confusion.
L'amendement n° 2918 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 77
Nombre de suffrages exprimés 77
Majorité absolue 39
Pour l'adoption 65
Contre 12
L'article 1er ter, amendé, est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix heures trente-cinq, est reprise à dix heures quarante-cinq.
L'article 1er quater revêt une très grande importance à mes yeux. Il est issu des travaux de la commission spéciale, qui a souhaité mentionner dans la loi non seulement la formation de l'ensemble des professionnels de santé aux soins palliatifs et aux soins d'accompagnement, mais aussi la formation de spécialistes dans ce domaine. Une disposition introduite par un amendement que j'ai présenté prévoit ainsi la création d'un diplôme d'études spécialisées de médecine palliative et de soins d'accompagnement.
À la faveur des auditions que nous avons menées, nous avons tous pu constater qu'il y avait, dans les professions médicales et paramédicales, un manque cruel de culture palliative et de formation aux soins palliatifs et d'accompagnement. Dès lors, dans ce projet de loi, il est apparu nécessaire de résoudre deux grands problèmes : d'une part, l'implantation d'USP partout sur le territoire national ; d'autre part, la diffusion progressive de la culture palliative au sein du corps médical et paramédical. Il faut absolument que tous ces professionnels suivent une formation à la fois initiale et continue en la matière.
Or le Gouvernement s'apprête à défendre un amendement visant à supprimer les alinéas 1 à 4 de l'article 1er quater, relatifs à cette formation initiale et au DES que j'ai évoqué. J'en suis très surpris, pour ne pas dire que les bras m'en tombent ! Si nous votons cet amendement, cela sous-entend que la formation n'est pas importante, alors même qu'elle est, à l'évidence, essentielle. Surtout, cela veut dire que les soins palliatifs n'ont pas vocation à relever d'une spécialité médicale. Or, depuis deux ans, j'entends en permanence qu'il y a un manque de structuration et de reconnaissance de la filière hospitalière de soins palliatifs, et qu'il est indispensable de créer une spécialité. Les soins palliatifs et d'accompagnement ne sont-ils pas assez importants pour justifier l'existence d'une spécialité, au même titre que la dermatologie, la cardiologie ou les urgences ?
Par mon amendement n° 1268 , je proposerai néanmoins que nous nous donnions dix ans pour créer ce DES.
À propos d'un amendement de notre collègue Odoul à l'article 1er ter, monsieur le rapporteur, vous nous avez appelés à davantage de « précision sémantique ». Venant de vous, une telle remarque n'a pu que me faire sourire.
J'y insiste : entre le titre Ier du projet de loi, relatif aux soins d'accompagnement, et le titre II, qui crée une aide à mourir, il existe une porosité totale.
Nous la constatons à tous les articles du titre Ier , à l'exception de l'article 1er bis, que nous avons imposé contre une partie de la majorité présidentielle. C'est le cas ici, à l'article 1er quater . Aussi allons-nous vous poser la même question pendant des heures, sinon des jours.
Pas du tout ! La représentation nationale pose des questions et le Gouvernement doit y répondre ; c'est le minimum. C'est conforme à notre rôle : non seulement nous sommes des législateurs, mais nous contrôlons l'action du pouvoir exécutif.
Je vous pose donc cette question, que je serai sans doute amené à répéter : au sein de la filière des soins palliatifs et d'accompagnement – puisque vous avez étendu le domaine à l'accompagnement –, les médecins recevront-ils une formation visant à euthanasier ?
Une fois de plus, le Rassemblement national est totalement à côté de la plaque. Il oppose sans arrêt l'aide à mourir et les soins palliatifs et d'accompagnement. Qui plus est, il ne s'élève pas à la hauteur de la bataille que nous devons mener à propos de la formation à ces soins, qui fait l'objet de l'article 1er quater .
Ne parlez pas des partis politiques : il y a une liberté de vote ! Comme d'habitude, vous n'avez rien compris !
L'article 1er quater prévoit que les professionnels de santé et du secteur médico-social recevront, au cours de leur formation initiale et continue, une formation spécifique relative aux soins palliatifs et d'accompagnement. C'est évidemment très important, mais l'enjeu est double : non seulement l'acculturation de tous les professionnels de santé aux soins palliatifs, mais aussi la spécialisation. Il faut un DES de médecine palliative et de soins d'accompagnement !
J'ai rencontré l'unité mobile de soins palliatifs de l'hôpital Tenon, au sein de laquelle travaille l'une des quatre maîtres de conférences en soins palliatifs de France. Vous m'avez bien entendue : à ce jour, il n'y a dans ce domaine que quatre maîtres de conférences ! Manifestement, le Gouvernement n'a consulté aucun d'entre eux. Autrement dit, il n'y a pas eu de coconstruction avec les premiers concernés. Une telle absence de méthode, c'est dingue !
À leurs yeux, la spécialisation est essentielle. Or un amendement du Gouvernement vise à supprimer toute mention du DES dans le texte, au motif que sa création relève non pas de la loi, mais du règlement. Dans l'exposé sommaire de cet amendement, on lit : « la création d'un diplôme d'études spécialisées apparaît aujourd'hui prématurée ». Le Gouvernement veut donc l'abandonner. C'est hors de question ! Outre l'acculturation, il faut une spécialisation !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Bien évidemment, pour que les choses fonctionnent, il ne faut pas dissuader les professionnels de santé qui n'auront pas ce DES de travailler dans une USP. Mais engageons-nous, dès à présent, dans la création de ce DES ! Sinon, on n'y arrivera jamais.
Mêmes mouvements.
Sur deux amendements distincts, le n° 3370 et le n° 2168, je suis saisi par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires de demandes de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.
Je soutiens la position exprimée par notre collègue Panifous. C'est à son initiative que la commission spéciale a introduit dans le texte la disposition qui prévoit la création du DES de médecine palliative et de soins d'accompagnement. L'article 1er quater prévoit en outre une formation en la matière au cours des études médicales – disposition issue d'un amendement de notre collègue Faucillon – ainsi qu'une formation spécifique dispensée à l'ensemble des professionnels de la santé et du secteur médico-social qui portera, entre autres, sur l'évolution des soins d'accompagnement, la prise en charge de la douleur et l'accompagnement de la fin de vie.
La grande majorité des professionnels auditionnés par la commission spéciale – nombre d'entre nous ont participé à ces auditions – considèrent ne pas avoir reçu de formation spécifique aux soins palliatifs et d'accompagnement. Nous avons tous entendu qu'il fallait absolument que tous les soignants puissent s'approprier la culture palliative, quel que soit le service dans lequel ils travaillent. Nous ne comprenons donc pas que le Gouvernement veuille supprimer les alinéas 1 à 4, alors même qu'ils concrétiseraient la création de ce DES, annoncée par le Gouvernement lui-même dans sa stratégie décennale des soins d'accompagnement. Nous souhaitons le maintien de ces alinéas et voterons donc contre l'amendement de suppression.
Mme Danielle Simonnet applaudit.
Je vous fais part à mon tour de mon étonnement. Dans le document qui nous a été présenté il y a quelques semaines, il était question de la « création d'un diplôme d'études spécialisées de médecine palliative et de soins d'accompagnement ». Or j'ai découvert aujourd'hui sur le site du ministère de la santé que la mesure 27 de la stratégie décennale des soins d'accompagnement était ainsi libellée : « D'ici dix ans, il est nécessaire d'estimer la pertinence et les modalités de la création d'un diplôme d'études spécialisées (DES) et de son déploiement dans les facultés. » Il va vous falloir déployer beaucoup de pédagogie pour nous expliquer ce changement de position. J'en suis d'autant plus étonnée que la profession réclame la création de ce DES.
Mme Maud Gatel et M. Laurent Panifous applaudissent.
Tous les professionnels auditionnés ont exprimé un besoin de formation aux soins palliatifs et d'accompagnement. Nous déplorons, sur tous les bancs, le manque de culture palliative. Le meilleur moyen d'y remédier est d'instituer en la matière une formation initiale et continue, et de créer un DES.
Dans la mesure où les médecins généralistes pourront prescrire une substance létale dans le cadre de l'aide active à mourir, il est essentiel que tous les soignants reçoivent une véritable formation, initiale et continue, aux soins palliatifs et d'accompagnement. Nous accusons un important retard en la matière, notamment dans l'accompagnement des publics les plus vulnérables, que ces formations devront impérativement prendre en considération.
Nous ne comprenons pas que le Gouvernement ait déposé un amendement qui tend à supprimer les alinéas 1 à 4. Nous nous y opposerons.
Le sujet est très complexe. Nous sommes évidemment tentés de demander la création d'un DES, comme le souhaitent les spécialistes des soins palliatifs. Cela présenterait l'avantage de structurer la filière, de créer les conditions de l'enseignement universitaire et de la recherche.
Toutefois, former uniquement à la médecine palliative de jeunes médecins de 25 ans qui n'auraient pas fait autre chose ne poserait-il pas un problème ? Je me pose la question et, pour être franc, je ne sais pas y répondre. Je vous fais part de mes interrogations ; j'attends des débats qu'ils m'éclairent.
En tout cas, il faut que la médecine palliative soit incluse dans la formation initiale de tous les médecins, ce qui n'est pas le cas actuellement. En outre, il faut absolument que la reconversion soit organisée, ce qui n'est pas le cas non plus – je pense aux médecins qui ont déjà une spécialité et une carrière, qui ont mûri, gagné une épaisseur professionnelle et humaine, et souhaitent devenir médecins de soins palliatifs. Enfin, nous avons besoin d'infirmiers en pratique avancée (IPA) dans ce domaine. C'est un sujet majeur, déjà abordé par le texte, puisqu'il évoque la formation des « professionnels de santé ».
Pour résumer, il faut une formation initiale pour tous, de la recherche en soins palliatifs – ce qui implique qu'il y ait des spécialistes du sujet –, de la formation continue, de la spécialisation a posteriori et des IPA. Le débat sur la création d'un DES est ouvert, quand bien même ce serait le pire des systèmes à l'exception de tous les autres. Peut-être n'y a-t-il pas d'autre solution pour structurer la filière.
Ce sujet, effectivement complexe, mérite une explication détaillée. Il est tout à fait légitime de l'aborder. Je vais notamment revenir sur certaines questions déterminantes soulevées par Philippe Juvin.
Le présent amendement vise à supprimer les alinéas 1 à 4, qui tendent à introduire dans le code de l'éducation une disposition relative à la création d'un DES de médecine palliative et de soins d'accompagnement. En effet, la création d'un tel DES relève non pas de la loi, mais du règlement. Les quarante-quatre DES existants ont tous été créés par voie réglementaire. Ce n'est pas neutre, et il faut l'avoir en tête.
Sur le fond, cette création serait prématurée car la filière universitaire n'en est qu'aux premiers stades de son organisation. En raison du faible nombre d'enseignants titulaires – ils ne sont que douze à l'échelle nationale –, les conditions de formations attendues par les étudiants de troisième cycle en voie de spécialisation ne seraient pas réunies.
En outre, comme l'a justement souligné M. Juvin – le professeur Juvin –, l'ouverture à court terme d'un DES pourrait décourager les médecins non titulaires d'un tel diplôme à développer leur culture relative à la médecine palliative, à l'inverse de ce que nous souhaitons. Il faut au contraire faire émerger une culture palliative partagée par les praticiens de toutes spécialités, car ils peuvent tous être confrontés à des situations de fin de vie.
L'hyperspécialisation, même pendant les études, fait débat dans la communauté des enseignants en médecine ; Philippe Juvin l'a évoqué. Il faut le garder à l'esprit au moment où nous débattons de cette question.
La priorité du Gouvernement est double. Augmenter le nombre d'enseignants titulaires, d'abord : quelques postes ont déjà été créés depuis la structuration de la filière universitaire de médecine palliative dans le cadre du précédent plan, mais la stratégie décennale amplifiera nettement cet effort : 100 postes de titulaires hospitalo-universitaires et 100 postes de chef de clinique seront ouverts.
Deuxième priorité : les leviers actuels de formation. Pour ce qui est de la formation initiale, l'objectif est l'acquisition par le plus grand nombre de compétences transversales liées aux soins palliatifs et d'accompagnement.
En ce qui concerne les formations complémentaires, deux formations spécialisées transversales – l'une de médecine palliative et l'autre sur la douleur – ont été créées à l'occasion de la réforme du troisième cycle des études de médecine. Elles permettent l'acquisition par les étudiants de toutes spécialités médicales de connaissances et de compétences transversales en médecine palliative. Le nombre d'étudiants choisissant de les suivre est en augmentation constante. Les médecins hospitaliers et libéraux en exercice peuvent en bénéficier. En 2024, plus de 150 places seront proposées.
Enfin, s'agissant de la formation tout au long de la vie, les universités proposent des formations de type diplôme interuniversitaire ou master de recherche en médecine palliative formant près de 1 600 professionnels par an. Les orientations pluriannuelles prioritaires de développement professionnel continu (DPC) relatives à l'accompagnement et à la fin de vie ont également été définies.
Ainsi, il nous faut d'abord renforcer le vivier enseignant et la culture palliative de l'ensemble des médecins ; ce n'est que dans un second temps, lorsque les professionnels formés auront atteint un nombre suffisant, que nous pourrons créer un DES.
Pour rendre efficace et crédible une filière souhaitée par tous, les choses ne peuvent se construire que dans le temps. C'est aussi une question de méthode. Combien d'années a-t-il fallu pour créer la filière de l'urgence alors que la spécialité existe depuis de nombreuses années ?
Voilà.
L'amendement du Gouvernement supprime les quatre premiers alinéas de l'article, qui ont été ajoutés en commission spéciale et visent à compléter le code de l'éducation. Le mien est différent : il ne vise qu'à supprimer les alinéas 2 et 3, c'est-à-dire la création du diplôme de spécialité – je ne reviens pas sur l'argumentaire exposé par M. Juvin avec qui, pour une fois, je suis d'accord, ni celui du ministre. sur ce point avec l'argumentaire de M. Juvin et de M. le ministre.
Si j'en suis arrivée à proposer cette solution qui peut sembler surprenante, alors que je suis très attachée aux questions de formation, c'est parce que j'ai interrogé le personnel de l'unité de soins palliatifs d'Argenteuil, dans mon département. Le ministre a établi un parallèle intéressant avec la médecine d'urgence : dans le Val-d'Oise, des services d'urgences ferment, notamment la nuit et le week-end, faute de spécialistes.
Je crains donc qu'en créant un nouveau diplôme, nous n'allions paradoxalement à l'encontre du développement des unités de soins palliatifs, que nous souhaitons au contraire accélérer.
En revanche, comme Mme Battistel et MM. Panifous et Peytavie, il me semble fondamental d'inscrire dans la loi – c'est l'alinéa 4 – que tous les médecins bénéficient, dès le début de leur formation initiale, d'une formation aux soins palliatifs et aux soins d'accompagnement.
C'est là qu'est mon point de divergence avec le Gouvernement : je suis convaincue que nous devons inscrire dans le code de l'éducation la nécessité d'une formation aux soins palliatifs et aux soins d'accompagnement, non dans le cadre d'une spécialité pour quelques médecins, mais pour tous les médecins : généralistes, oncologues, dermatologues, et ainsi de suite. Voilà la différence entre mon amendement et celui du Gouvernement.
Nous constatons tous la nécessité de former à la fois les personnels soignants en poste – qui ont été très peu sensibilisés aux soins palliatifs et encore moins aux soins à l'accompagnement dès l'annonce d'une maladie grave ou dont le pronostic peut être fixé – mais aussi les étudiants médecins ou infirmiers.
Nous nous sommes tous ici rendus dans des unités de soins palliatifs et nous avons constaté que les médecins présents n'étaient pas spécialistes de cette matière mais venus de la médecine générale ou de telle ou telle spécialité. J'ai aussi rencontré une jeune médecin qui, à la sortie de l'internat, avait décidé d'exercer directement en unité de soins palliatifs : il peut s'agir d'une vocation.
Le ministre a eu raison de rappeler que tous les DES ont été créés par voie réglementaire. Passer par la loi n'est donc pas requis. Je comprends le souhait d'instituer une culture scientifique des soins palliatifs, mais l'enseignement et la recherche y contribueront.
J'aurai donc un avis de sagesse sur l'amendement du Gouvernement et un avis favorable à l'amendement de Mme Rilhac.
Je demande lui demande de le retirer au profit de celui du Gouvernement car il est satisfait : les précisions qu'elle souhaite maintenir figurent déjà aux alinéas 5 et 6, aux termes desquels tous les professionnels de santé – pas uniquement les médecins – « reçoivent une formation spécifique » aux soins d'accompagnement.
La création d'un DES suscite des interrogations légitimes. Il faut toutefois envoyer un signal. Une fois n'est pas coutume, je rejoins Mme Rilhac : il ne faut pas créer pour les soins palliatifs une situation identique à celle que nous connaissons aux urgences. Il faudra néanmoins envisager la création d'un DES.
Taquinerie mise à part, monsieur le ministre, l'argument selon lequel la création de diplômes relève du pouvoir réglementaire ne convainc guère. L'usage est certes la voie réglementaire mais, il y a huit jours, ici, au banc du Gouvernement, le ministre de l'agriculture a donné un avis favorable à la création, par voie législative, d'un diplôme agricole – le fameux bachelor.
Cela reste donc une prérogative du législateur ; votre argument peut dès lors s'utiliser dans les deux sens.
C'est pourquoi je souhaite que soit maintenu l'article 1er quater ; je suis donc défavorable à l'amendement du Gouvernement.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et RN.
Oui. L'alinéa 4 concerne le code de l'éducation ; les alinéas 5 et 6, le code de la santé publique. C'est très différent. Les alinéas 5 et 6 sont tout aussi fondamentaux car il s'agit de former le corps médical mais également les accompagnants et, grâce à un amendement de notre collègue Christophe Marion, les personnels du secteur médico-social. Mais l'alinéa 4 n'a pas la même portée. Je maintiens donc mon amendement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 81
Nombre de suffrages exprimés 76
Majorité absolue 39
Pour l'adoption 11
Contre 65
L'amendement n° 3370 n'est pas adopté.
L'amendement n° 597 est adopté.
Lors des auditions, le manque de formation a souvent été pointé du doigt, notamment en ce qui concerne l'administration de la sédation profonde et continue. L'objectif de cet amendement est de préciser de quelle formation il est question à l'alinéa 4.
L'approche palliative est finalement mal connue et peu maîtrisée ; cela a été dit, elle nécessite des compétences multiples, dans le champ de l'antalgie, de la gestion des symptômes et souffrances et elle doit aussi prendre en compte la souffrance psychique, sociale et spirituelle.
Pour toutes ces raisons, il me semble nécessaire de préciser à l'alinéa 4 qu'il convient de créer un « diplôme d'études spécialisées complémentaires en vue de valider la spécialisation en soins palliatifs ».
La liberté de conscience est une liberté fondamentale, garantie à tous les citoyens par l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Cette liberté est régulièrement défendue par le Conseil constitutionnel ; votre projet de loi la garantit aux médecins auxquels il accorde une clause de conscience ; elle ne saurait être restreinte pour les autres citoyens.
Puisque votre définition de l'accompagnement de fin de vie inclut « l'aide à mourir », c'est-à-dire le suicide assisté et l'euthanasie,…
…je propose cet amendement pour protéger la liberté de conscience des étudiants des secteurs médico-social et de la santé qui seront amenés à accompagner des personnes en fin de vie pendant leur formation. Ils ne doivent pas être contraints de réaliser un acte contraire à leur conscience professionnelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement n° 1697 .
Pour que l'alinéa 4 soit aussi précis que possible, je propose de mentionner une formation non pas à l'« accompagnement de la fin de vie et à l'approche palliative » mais « théorique et pratique aux soins palliatifs ». On évitera ainsi toute confusion. Le terme de soins palliatifs est d'ailleurs utilisé dans le code de la santé publique.
Avis défavorable à l'amendement de Mme Ménard pour les raisons qui ont été exposées.
Avis très défavorable à l'amendement de M. Bovet : protéger la liberté de conscience, cela va de soi, mais la formation doit couvrir l'ensemble de l'enseignement médical et paramédical. Par exemple, même si des médecins peuvent refuser de pratiquer directement l'interruption volontaire de grossesse – acte assorti d'une clause de conscience –, il est nécessaire qu'ils aient été formés, dans le cadre de leur formation initiale et continue, sur cette question. Votre amendement me semble donc parfaitement inutile.
Enfin, l'amendement de M. Hetzel ne me paraît pas indispensable. Un enseignement comprend toujours une partie théorique et une partie pratique.
Défavorable sur les trois amendements.
J'ai relu les conclusions de la mission d'évaluation présidée par Olivier Falorni, avec pour rapporteurs Caroline Fiat et Didier Martin, à laquelle j'avais participé. Le constat est clair : en matière de formation, le plan national 2015-2018 pour le développement des soins palliatifs et l'accompagnement en fin de vie a échoué. Je rappelle en effet qu'il existait auparavant un diplôme d'études spécialisées en médecine palliative mais que, depuis 2016, il a été remplacé. L'amendement de notre collègue Ménard est très intéressant parce qu'il revient sur ce sujet.
Monsieur le ministre, vous avez tout d'abord demandé la suppression des premiers alinéas de l'article en expliquant que la création d'un diplôme relevait du domaine réglementaire. Dans ce cas, dites-nous quelles mesures vous allez prendre en la matière.
J'ajoute que votre stratégie décennale mentionnait la proposition formulée dans l'amendement de Mme Ménard – il s'agit de la mesure 27, évoquée tout à l'heure par Anne Bergantz. Or elle n'apparaît plus dans votre projet. Avez-vous évolué sur d'autres points évoqués dans la stratégie décennale ? On peut se poser la question.
Par ailleurs, il ne faut pas opposer formation initiale et formation continue – les deux sont nécessaires. De même, nous ne devons pas opposer l'idée d'un diplôme d'études spécialisées avec celle d'un module consacré aux soins palliatifs qui soit destiné à tous.
Enfin, il me semble très important d'employer les bons termes, des mots intelligibles, pour permettre une bonne application des mesures prévues dans le titre Ier du projet de loi. Or la notion de « soins palliatifs » est très claire ; elle est reconnue par la littérature scientifique et par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) par exemple. C'est ce que prévoit l'excellent amendement de notre collègue Patrick Hetzel.
La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l'amendement n° 1228 .
Il vise à préciser que la formation dispensée aux étudiants en médecine en matière d'accompagnement de la fin de vie comprend également une formation à la prise en charge de la douleur et aux soins palliatifs et d'accompagnement.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Je rappelle qu'il existe une Société française d'études et de traitement de la douleur (SFETD). Il ne me paraît pas nécessaire d'inscrire une telle mesure dans la loi.
Défavorable.
Je maintiens mon amendement. Par ailleurs, à la suite de l'adoption de l'amendement n° 597 il y a quelques instants, je précise qu'un amendement à venir, portant article additionnel après l'article 1er quater, prévoit la création d'un diplôme d'études spécialisées en 2035, soit dans plus de dix ans, afin de nous donner du temps.
L'amendement n° 1228 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 1262 .
Il s'agit d'un amendement de précision qui vise, une fois encore, à remédier au manque de formation des professionnels de santé. Il convient de porter une attention particulière à la qualité de cette formation pour le bien-être des patients en premier lieu mais aussi des professionnels de santé. Si ces derniers sont mieux formés, ils seront bien sûr plus à même de soutenir et d'accompagner les personnes en fin de vie.
Défavorable. L'adjectif « approfondi » que vous proposez est trop vague. Les maquettes de formation apporteront des précisions en la matière.
L'amendement n° 1262 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 1010 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq, pour soutenir l'amendement n° 3292 .
Par souci de cohérence rédactionnelle – comme ce fut le cas pour d'autres amendements que j'ai présentés précédemment –, je propose de remplacer, à l'alinéa 6, les « soins d'accompagnement » par les « soins palliatifs et d'accompagnement ».
L'amendement n° 3292 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Pierrick Berteloot, pour soutenir l'amendement n° 2080 .
Par cet amendement, je souhaite appeler votre attention et celle du Gouvernement sur l'importance cruciale de la formation de nos professionnels de santé et du secteur médico-social.
Il est certes primordial de les former de façon optimale à l'évolution des soins d'accompagnement et à la prise en charge de la douleur physique. Cependant, l'expérience et le terrain nous démontrent que la prise en charge psychologique est elle aussi essentielle et nécessaire pour le bien-être des patients.
Lors des formations aux soins d'accompagnement et à l'aide aux personnes en fin de vie, les étudiants en santé et du secteur médico-social doivent apprendre à appréhender la santé psychologique du patient. En effet, en raison de sa douleur et du contexte, celui-ci peut aussi ressentir une souffrance mentale. Si les soins palliatifs et l'ensemble du corps médical sont une main tendue, ils doivent aussi être une épaule afin que le patient soit compris et soutenu. Si vous êtes favorables à un corps médical et médico-social empathique et à l'écoute, je vous invite à voter cet amendement.
Défavorable. Nous avons déjà longuement parlé des questions de douleur et de souffrance – je pense notamment aux interventions de Mme Rilhac. Lorsque le texte mentionne « la prise en charge de la douleur », il couvre tous les types de douleur.
Même avis, l'amendement est satisfait.
L'amendement n° 2080 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierrick Berteloot, pour soutenir l'amendement n° 2085 .
Par cet amendement, je souhaite une nouvelle fois insister sur la capacité des professionnels de santé et du secteur médico-social à reconnaître et à déceler les cas où un patient n'exprime pas sa volonté de façon libre et éclairée.
Les conséquences de certains choix du patient ne doivent pas être prises à la légère. Pour sa sécurité, et par respect pour lui, le corps médical doit pouvoir déterminer si une volonté n'est pas réellement celle du patient.
Or cette aptitude sociale n'est pas forcément innée. Il est nécessaire de prendre en considération certains signes et contextes pour l'acquérir. Bref, elle s'apprend. Dès lors, il est primordial que nos professionnels de santé soient formés à reconnaître la volonté sans équivoque du patient. Cela permettrait d'éviter bien des situations délicates. Je vous invite donc à voter cet amendement visant à former notre corps médical de manière optimale.
Défavorable. L'appréciation du discernement est bien sûr un préalable indispensable pour s'assurer que la volonté est parfaitement libre et éclairée – ce qui suppose entre autres que le patient ait été bien informé. L'expression « sans équivoque » que vous proposez me semble impropre, il est donc inutile de l'ajouter à l'alinéa.
L'amendement n° 2085 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement n° 2680 .
Par cet amendement, nous souhaitons appeler votre attention sur l'accueil des mineurs en soins palliatifs qui, selon nous, exige une formation spécifique, notamment en matière d'accompagnement psychologique et de suivi des parents. Nous souhaitons donc qu'une mention de ce public soit ajoutée à la fin de l'alinéa 6. Cet amendement a été rédigé en lien avec la Mutuelle générale de l'éducation nationale (MGEN).
Il semble en effet délicat d'exclure les mineurs de cette disposition. Cependant, à mon sens, ils sont inclus dans la formulation choisie. Par conséquent, je me contenterai d'émettre un avis de sagesse.
Même avis.
L'amendement n° 2680 est adopté.
L'amendement n° 2744 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 3366 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 1er quater, amendé, est adopté.
L'amendement n° 880 de M. Laurent Panifous, portant article additionnel après l'article 1er quater, est défendu.
L'amendement n° 880 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Alors que la structuration de la filière universitaire est encore assez fragile, il existe un réel besoin d'encadrement des services de soins palliatifs. Dès lors, il convient de faciliter les changements d'orientation des médecins et du personnel médical en cours de carrière, notamment vers le secteur sous-doté des soins palliatifs. Tel est l'objet de l'amendement n° 541 .
Cet amendement et le suivant permettront également de répondre aux difficultés de recrutement de personnel puisque, à ce jour, les effectifs réels en soins palliatifs sont inférieurs de 30 % à l'encadrement en équivalents temps plein (ETP) théorique – ce qui représente un décalage significatif –, comme le révèle l'Atlas des soins palliatifs et de la fin de vie en France.
Je vous rappelle qu'il existe déjà des offres de formation spécialisée transversale en médecine palliative tandis que les universités proposent des diplômes interuniversitaires en soins palliatifs. L'objectif que vous fixez pourrait être envisagé comme une boussole mais il n'est pas souhaitable de le rendre juridiquement contraignant.
Même avis.
L'amendement de Mme Ménard a selon moi le mérite de rappeler quelle est la situation et d'affirmer que, dans les cursus généralistes de soins – aussi bien pour les médecins que pour le secteur paramédical –, une formation aux soins palliatifs est obligatoire.
Contrairement à ce qui a été dit par le rapporteur, je trouverais tout à fait normal que cet objectif soit juridiquement contraignant. S'il ne l'est pas, ça ne changera jamais.
En écho aux amendements de notre collègue Emmanuelle Ménard, relatifs à la formation des professionnels de santé, dont nous venons de discuter, j'évoque, dans cet amendement, la question de la formation des dirigeants des établissements de santé.
J'ai assisté à la présentation des conclusions, à chaud, de l'évaluation d'un Ehpad selon le dispositif que préconise la Haute Autorité de santé (HAS) – ce qui me permet au passage de saluer le formidable travail des professionnels qui exercent dans ces établissements. Cette évaluation comporte un volet consacré aux droits des malades et à l'éthique. Sur ces questions, il apparaît que la gouvernance de l'établissement a une responsabilité assez importante s'agissant des procédures et de la prise en considération des directives anticipées.
Or la formation des directeurs comporte un défaut. Après analyse des masters, il s'avère qu'il existe un master 2 très intéressant en droit, santé, éthique qui comprend six crédits sur l'éthique et le droit des malades. Mais cela ne fait pas partie du socle général. Tous les élèves de l'École des hautes études en santé publique (EHESP) n'en bénéficient donc pas, notamment ceux qui suivent seulement un master 1, ou ceux qui poursuivent un autre master 2 que celui qui propose ces cours.
Pourtant, tous les responsables d'établissement devraient bénéficier d'un enseignement sur l'éthique et sur la fin de vie car ces sujets ne concernent pas uniquement les professionnels de santé.
Vous évoquez un aspect important de la formation des non-soignants dans les établissements, mais une telle précision est de niveau réglementaire. Avis défavorable.
Même avis. En outre, l'EHESP prodigue déjà ce type d'enseignement dans le cadre du master droit, santé, éthique. Certains diplômés de ce master occuperont ensuite des fonctions de directeur d'établissement.
Est-ce du ressort de la loi d'organiser les formations diplômantes dans les écoles ? Je ne le pense pas.
Je suis d'accord, cela relève du domaine réglementaire. Mais j'en suis venu à déposer cet amendement suite aux auditions que nous avons menées : il en ressort que les formations ne répondent que partiellement à l'enjeu.
Vous avez mentionné le master 2 : certes, je l'ai également évoqué, mais il ne concerne que trente à quarante diplômés et la formation ne fait pas partie du socle – en master 1.
C'est simple : la formation relative à l'éthique et au droit des malades doit-elle concerner tous les responsables d'établissement ? Doit-elle faire partie de ce que j'appelle le socle ? S'agit-il d'un module structurant, ou doit-elle rester une option ? L'éthique est-elle une option ? Je ne le crois pas.
Bien sûr, il s'agit d'un amendement d'appel mais, monsieur le ministre, à votre niveau, allez-vous faire bouger les choses ? En tant que ministre de tutelle de cette école, vous pouvez contribuer à une telle évolution. On ne peut demander aux professionnels d'avancer, et d'appréhender ces questions, si les responsables des établissements ne sont pas eux-mêmes formés.
L'amendement n° 25 n'est pas adopté.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 1907 .
Les professeurs Régis Aubry et Donatien Mallet préconisent le développement de plusieurs compétences pour l'intégralité des équipes soignantes confrontées à la mort : des compétences scientifiques tout d'abord, qui doivent être mises en pratique au chevet du patient, en ayant conscience des limites de ces connaissances face à l'approche de la mort ; des compétences relationnelles ensuite, non seulement envers le patient, mais également envers son entourage ; enfin, des compétences éthiques, essentielles pour s'adapter à l'évolution que connaîtra le droit relatif à la fin de vie avec ce texte.
« Science sans conscience n'est que ruine de l'âme » – et, en l'occurrence, ruine de la pratique médicale, vous avez raison. Mais, encore une fois, cela relève du domaine réglementaire. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 1907 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Paul-André Colombani, pour soutenir l'amendement n° 1112 .
Il s'agit de développer une filière universitaire dédiée aux soins palliatifs et d'accompagnement, en concrétisant l'annonce que le Gouvernement a faite dans sa stratégie décennale de créer un diplôme d'études spécialisées de médecine palliative et de soins d'accompagnement.
L'amendement fixe cet objectif dans dix ans – au 1er
Il reprend un amendement de notre collègue Panifous, adopté en commission à l'article 1er
Je me rangerai aux explications du ministre et émets un avis défavorable. Il est louable de se fixer un objectif à dix ans pour créer cette nouvelle spécialité médicale, mais il n'est pas nécessaire de l'inscrire dans la loi, une telle démarche relevant du pouvoir réglementaire. Nous verrons comment l'insérer dans le code de l'éducation.
Même si l'amendement de suppression des premiers alinéas de l'article 1er
Le travail de concertation avec les acteurs de la formation va s'engager dans le cadre de la stratégie décennale. Nous serons peut-être prêts en 2034, peut-être en 2036.
Nous verrons comment les acteurs adhèrent à cette dynamique. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Si je puis me permettre, monsieur le ministre, ce qui est incohérent, c'est d'inscrire clairement cet objectif dans la stratégie décennale, puis de la modifier il y a trois jours, comme j'ai pu le constater.
Lors de nos débats sur votre amendement de suppression, nos collègues l'ont répété, la création d'un diplôme d'études spécialisées est une bonne chose. Elle est très attendue pour structurer cette filière et renforcer les soins palliatifs et d'accompagnement. Il me semble que c'est aussi l'objet du projet de loi.
J'entends que la création d'un tel diplôme est complexe. Mais l'objectif à dix ans vise à se donner un peu de temps, tout en se calant sur la durée de la stratégie décennale – enfin, celle d'il y a trois jours…
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 74
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 30
Contre 33
L'amendement n° 1112 n'est pas adopté.
Ces amendements visent à répondre à une préoccupation exprimée par l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) dans son rapport d'évaluation de l'application de la loi du 2 février 2016 sur la fin de vie, publié en avril 2018. Le développement des soins palliatifs passe par celui de la formation continue des médecins en soins palliatifs. Or celle-ci est nettement insuffisante.
L'amendement n° 122 vise le même objectif, en insérant une formation aux soins palliatifs dans les stages pratiques en unités de soins palliatifs et en équipes mobiles de soins palliatifs.
Je ne suis ni médecin, ni soignant et j'espère ne pas être malade, mais j'ai croisé des médecins assez jeunes qui m'ont confirmé n'avoir jamais eu l'occasion d'aller dans des établissements de soins palliatifs au cours de leurs études.
Mon amendement vise à combler ce manque, en prévoyant un stage pratique. Il y a la formation, nécessaire, dont nous avons déjà débattu, mais ces stages pratiques sont indispensables à tout médecin, généraliste comme spécialiste, même s'il ne se destine pas à cette spécialité.
Les médecins doivent pouvoir appréhender les soins palliatifs de manière concrète. En effet, beaucoup de médecins généralistes sont devenus des médecins du grand âge, la majorité de leur patientèle étant âgée. Même s'ils ne pratiquent pas les soins palliatifs, il faut qu'ils puissent évoquer le sujet avec leurs patients qui, demain, en auront peut-être besoin.
Monsieur le ministre, un geste de bonne volonté de votre part serait le bienvenu !
L'amendement n° 121 dispose que l'État « peut ». Je vous confirme que l'État pourra, à titre expérimental, insérer des programmes intégrés de soins palliatifs dans la formation continue des médecins. Est-il nécessaire de le préciser dans la loi ? Je n'en suis pas convaincu.
Mes arguments seront similaires pour l'amendement n° 122 : oui, cela pourra se dérouler en unités de soins palliatifs ou au sein d'équipes mobiles de soins palliatifs.
Monsieur Le Fur, les stages pratiques existent déjà. Certains sont obligatoires, d'autres au choix. En outre, on pratique les soins palliatifs dans différents services, en médecine comme en chirurgie, ou dans des unités spécialisées. Lors de leurs premiers stages hospitaliers, dès leur troisième et quatrième année de médecine, les étudiants rencontrent des malades, et parmi ces derniers, certains ont atteint un stade avancé, voire terminal, de leur maladie. C'est également le cas lorsque les stages se déroulent en gérontologie ou en médecine générale, y compris à domicile. Avis défavorable.
Défavorable.
Je regrette qu'un tel stage pratique obligatoire, même s'il est relativement bref, ne figure pas dans le texte. Monsieur le ministre, combien de médecins finissent leurs études sans avoir été dans un service spécialisé de soins palliatifs – je ne parle pas des stages dans les différents services, où – vous avez raison, monsieur le rapporteur – ils croisent des cas de mortalité ? Beaucoup de médecins de ma circosncription, avec lesquels j'ai échangé, n'ont jamais eu l'occasion d'aller dans un service de soins palliatifs.
Je salue le retour de madame la ministre dans l'hémicycle. Avec deux ministres au banc, j'ai peut-être une chance que l'un des deux me réponde !
Combien de médecins ont pratiqué ce type de stage ? Combien ne l'ont pas fait ? Soyons précis car, sur ce sujet majeur, il faut sortir des généralités, documenter et argumenter. Même si ce n'est pas dans l'instant, je souhaiterais obtenir des réponses précises à mes questions.
L'amendement n° 121 n'est pas adopté.
L'article 1er quinquies prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur l'offre de soins palliatifs et sur le nombre de sédations profondes et continues dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi. La loi Claeys-Leonetti précise que la sédation profonde doit être accessible à tous, y compris à domicile. En pratique, le recours à la sédation profonde varie selon le lieu de prise en charge.
Dans le rapport du Sénat sur la fin de vie paru le 28 juin 2023, on peut lire que la Ligue contre le cancer estime que « dans le domaine de la cancérologie, les exceptions qui échapperaient à la loi Claeys-Leonetti pourraient correspondre à des personnes atteintes de cancer de très mauvais pronostic à un stade avancé (pancréas, glioblastome, etc). , dont les perspectives thérapeutiques sont nulles […]. Dans ce cas, la sédation profonde et continue ne serait pas toujours applicable ». Les rapporteurs indiquent toutefois que « l'association signale que les équipes soignantes se trouvaient a priori en situation d'apporter des réponses dans le cadre de la loi ». C'est pourquoi nous sommes favorables à la remise d'un rapport faisant le bilan de la loi existante.
Lors de la mission d'évaluation de la loi Claeys-Leonetti, nous avons tous été surpris par le faible nombre connu de sédations profondes et continues et, plus généralement, par le manque de données. Quand la Cour des comptes a procédé à une première évaluation de la loi peu de temps après son entrée en vigueur en 2016 – deux ans après, me signale le rapporteur général –, il était normal que les données fassent défaut. Mais en 2024, sept ans plus tard, nous ne sommes pas beaucoup plus avancés. Or on nous dit que cette loi est méconnue du grand public et de certains professionnels. La notion de sédation profonde et continue et ses modalités n'ont pas été suffisamment diffusées. Les obstacles à l'hospitalisation à domicile freinent l'accès à la sédation, qu'elle soit continue ou non.
La question de la souffrance et des moyens permettant de la soulager se pose. Madame la ministre, vous avez lancé un plan pour développer les soins palliatifs. Il serait intéressant de connaître le nombre de sédations profondes et continues – c'est l'objet de cet article. Si la présente loi est adoptée, en particulier le titre II, la loi Claeys-Leonetti continuera-t-elle à être appliquée ? Si l'on propose un accès aux produits létaux sans que le pronostic vital soit engagé à court terme, existera-t-il encore une demande pour les sédations profondes et continues quand le pronostic vital est engagé à court terme ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet applaudit.
La parole est à Mme Élise Leboucher, pour soutenir l'amendement n° 1814 .
La commission a remplacé la création d'indicateurs par un service statistique public par une demande de rapport ; il s'agit à notre sens d'une erreur, que cet amendement permet de rectifier. Tous les professionnels de santé et les membres de la Convention citoyenne auditionnés ont pointé du doigt l'absence d'indicateurs. Ils permettraient en effet d'évaluer les besoins sur l'ensemble du territoire et de les réajuster en se fondant sur des données concrètes relatives à l'offre de soins d'accompagnement et de soins palliatifs, au recours à la sédation profonde et continue, ainsi qu'aux attentes des patients et de leurs proches en matière de fin de vie. Nos débats en seraient éclairés et nous éviterions les suppositions, les hypothèses voire les fantasmes.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
J'émets un avis défavorable sur cet amendement car je lui préfère l'amendement n° 1815 qui suit.
L'amendement n° 1814 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l'amendement n° 1815 , qui fait l'objet d'un sous-amendement.
C'est un amendement de repli par lequel nous demandons la remise d'un rapport qui sera utile à la tenue de nos débats, mais aussi à l'évaluation des résultats de notre activité législative. Il devra contenir trois éléments. Nous demandons d'abord un recensement de l'ensemble des soins d'accompagnement, y compris des soins palliatifs, disponibles à un moment donné, pour pouvoir ajuster leur déploiement et ainsi assurer la couverture de tout le territoire. Nous partageons tous un constat : le manque de moyens est criant. Or pour savoir où investir, il nous faut disposer de chiffres fiables.
Nous demandons également un recensement des sédations profondes et continues. C'est une information cruciale, qui a été au cœur de nombreux débats. Il faut que nous sachions dans quelle mesure cet outil et cette logique de soins sont appropriés et si des inégalités territoriales existent.
Enfin, ce rapport devra formuler des propositions transversales et consensuelles.
Nous proposons donc de remédier au manque criant d'informations qui a pesé sur nos débats, pour qu'une telle situation ne se reproduise pas.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir le sous-amendement n° 3452 .
Pour répondre aux besoins de la population, nous proposons de compléter le rapport demandé sur le déploiement des soins d'accompagnement en France en y incluant un état des lieux de la formation initiale et continue des professionnels de santé et des besoins.
Bien qu'obligatoire depuis 2019, la formation continue des médecins en soins palliatifs peine à se généraliser. Seuls 2 % des médecins qui avaient suivi l'obligation de formation en 2021 – c'est le cas d'un tiers d'entre eux – avaient choisi la spécialité des soins palliatifs. La Cour des comptes constate « qu'à ce rythme, il faudrait plus d'un siècle pour que la totalité des médecins généralistes installés aient reçu une formation continue en soins palliatifs ». Un état des lieux s'impose.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, j'émettrai un avis favorable sur cet amendement et ce sous-amendement. Nous nous retrouvons en particulier sur le constat du manque de données en matière de sédations profondes et continues. Le rapport que j'ai cosigné avec Mme Fiat soulignait ce manque d'informations qualitatives et quantitatives.
Vous proposez d'informer le Parlement et de procéder à une simplification – on ne peut qu'être d'accord avec vous. Avis favorable sur l'amendement et avis de sagesse sur le sous-amendement.
La loi Claeys-Leonetti prévoyait qu'un rapport sur les soins palliatifs serait remis par le Gouvernement chaque année. Or aucun rapport n'a été remis depuis 2016.
La mission d'évaluation de la loi a recommandé un rythme bisannuel – dont acte. Je préfère la rédaction de l'article 1er quinquies dans le texte de la commission à celle proposée par cet amendement, qui sème la confusion. Elle propose en effet d'évaluer à la fois les soins d'accompagnement et les soins palliatifs. Or les soins d'accompagnement englobent les maisons d'accompagnement que vous nous avez décrites, madame la ministre, comme peu médicalisées. Mais la sédation profonde et continue nécessite des soignants formés en la matière. Entre les soins d'accompagnement et les soins palliatifs, la sédation profonde et continue et les maisons d'accompagnement telles qu'elles sont présentées, la confusion règne. Vous avez dit que le financement des maisons d'accompagnement serait léger – autour de 200 euros par jour et par personne. Cela suffira-t-il à financer l'embauche des professionnels nécessaires à une sédation profonde et continue ? Il faut être cohérent, sans quoi nous créons de la confusion.
Le sous-amendement n° 3452 est adopté.
Cet article prévoit que le Gouvernement remettra chaque année au Parlement un rapport évaluant le déploiement des soins d'accompagnement sur le territoire national. Permettez-moi d'émettre de fortes réserves quant à la capacité du Gouvernement à assurer l'accès de tous à ces soins d'accompagnement, tant il a failli sur les soins palliatifs. Pour rappel, vingt départements sont encore dépourvus d'unité de soins palliatifs et un patient adulte concerné sur deux n'y a pas accès.
Vous avez pour objectif d'ouvrir une vingtaine de maisons d'accompagnement d'ici à 2026, réparties sur l'ensemble du territoire. Ouvrir des maisons d'accompagnement est une chose, assurer leur bon fonctionnement en leur fournissant les moyens humains nécessaires en est une autre. Le titre I
Dès lors, qui exercera dans ces maisons d'accompagnement ? Les personnels soignants seront-ils contraints de choisir entre les unités de soins palliatifs et les maisons d'accompagnement ? Pas moins de 30 % des postes de soignants en unité de soins palliatifs restent vacants. Les maisons d'accompagnement seront-elles ouvertes aux dépens des unités de soins palliatifs ? Les soins d'accompagnement ne doivent ni se substituer aux soins palliatifs, ni ouvrir une voie supplémentaire vers l'euthanasie – il faut donc des réponses claires et précises sur les moyens humains et financiers qui leur seront alloués. Avant de créer de nouveaux dispositifs, vous devez garantir à tous les Français l'accès aux soins palliatifs.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Sur l'amendement n° 1817 , je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Marc Le Fur.
Je ne faisais pas partie de la commission spéciale qui a préparé nos travaux ; je découvre donc avec surprise qu'aucun rapport sur l'application de la loi Claeys-Leonetti n'a été remis depuis 2016, contrairement à ce que prévoyait la loi.
Cela démontre plusieurs choses, en particulier le mépris qu'éprouve l'exécutif pour le Parlement. Mais pire : sans rapport, pas d'information. Or chacun sait que la loi Claeys-Leonetti n'a pas été appliquée correctement, mais qu'on ne s'est pas donné les moyens pour le constater. C'est la réalité.
Si cette loi avait été appliquée correctement, nous n'aurions pas eu à nous réunir.
Si nous nous étions donné les moyens humains, matériels, immobiliers d'appliquer correctement la loi Claeys-Leonetti, la question de l'euthanasie et de votre projet de loi ne se serait pas posée ! C'est donc très grave. Il ne s'agit pas seulement d'une absence de documentation, mais d'une volonté délibérée…
…et sans doute préparée par certains depuis 2017.
Des propositions de loi avaient été déposées sur ce sujet, monsieur le rapporteur général, que nous avions combattues – dans le respect dû à chacun, naturellement. Quoi qu'il en soit, la preuve est faite qu'on ne s'est pas donné les moyens d'appliquer la loi Claeys-Leonetti. Ce faisant, on prépare quelque chose de bien plus redoutable : la fin de vie par l'euthanasie et le suicide assisté.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RE
Il est vrai, monsieur Le Fur, qu'il est problématique que le Parlement ne reçoive pas l'information prévue par la loi. C'est la raison pour laquelle je ne peux que me réjouir de cet article, car il est important que nous disposions systématiquement d'un rapport à propos de la mise en œuvre de ce projet de loi. Il est indispensable que le Parlement puisse, chaque année, juger de la réalisation de la stratégie décennale, dans laquelle est inscrite une orientation budgétaire très ambitieuse, dans la lignée de ce qui a été fait depuis 2017 – le budget alloué aux soins palliatifs augmente de 24 %, par exemple. Certes, ce n'est pas suffisant mais c'est un premier pas dans cette stratégie décennale.
J'avais déposé un amendement tendant à ce que le rapport nous soit remis en amont du PLFSS. Il a été jugé irrecevable. Or il est indispensable, lorsque nous débattons du budget de la sécurité sociale, qu'on puisse mesurer les besoins et évaluer les évolutions nécessaires, résultant de l'augmentation des maladies chroniques et du vieillissement de la population. J'invite donc le Gouvernement à faire en sorte que ce rapport nous soit remis avant les débats du PLFSS.
M. Gilles Le Gendre applaudit.
Le ne partage ni les arguments ni le ton de notre collègue Marc Le Fur : je ne crois pas à un complot, mais à une forme d'incurie publique…
…dans laquelle tous les gouvernements, même bien avant la loi Claeys-Leonetti, ont une part de responsabilité – le reconnaître est une question d'honnêteté, et je le dis puisque M. Philippe Vigier m'a interpellé à ce sujet. Toutes les majorités sont coresponsables.
Cet article est très important. Le rapport qu'il prévoit, au-delà d'une évaluation quinquennale ou décennale, permettrait, par une évaluation annuelle, d'éviter deux risques majeurs. Premièrement, il pourrait y avoir un décalage – une rupture républicaine, même – entre le temps nécessaire au déploiement d'un accès aux soins palliatifs pour tous et partout et l'immédiateté de la mise en œuvre de la mort administrée. Deuxièmement, les évaluations conduites dans d'autres pays révèlent que la création d'un droit à mourir – euthanasie et suicide assisté – conduit à un affaiblissement des soins palliatifs. Le Parlement doit donc non seulement pouvoir mesurer cette rupture républicaine et son impact, mais aussi rectifier les politiques publiques dont nous avons la responsabilité.
Monsieur Le Fur, nous avons depuis plusieurs années des divergences et je suis à nouveau en profond désaccord avec vous : la loi Claeys-Leonetti a donné lieu à une mission d'évaluation.
Certaines de ses conclusions nourrissent les dispositions que nous adoptons aujourd'hui ; je m'en réjouis profondément. Cette mission d'évaluation a également indiqué que certaines situations n'étaient pas prévues par la loi Claeys-Leonetti.
C'est aussi ce qu'affirme dans son avis n° 139 le Comité consultatif national d'éthique, le CCNE, qui indiquait en outre que cette loi avait permis des avancées dans l'accompagnement des malades en fin de vie – j'en suis d'accord – et que la sédation profonde et continue, déjà pratiquée auparavant, mais nouvellement inscrite dans la loi et désormais sécurisée, constituait une solution.
Je partage néanmoins les propos de M. Thibault Bazin sur la traçabilité. Il est parfaitement anormal de ne pas connaître le nombre de sédations profondes et continues pratiquées dans le pays.
Ce problème avait été identifié par les rapporteurs Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin dans les conclusions de la mission d'évaluation.
En revanche, tous les professionnels de soins palliatifs s'accordent sur un point : le nombre de sédations profondes et continues est très faible.
Ils le disent ! La Société française d'accompagnement et de soins palliatifs, la Sfap, reconnaît qu'il y a peu de sédations profondes et continues. Parce qu'elles ne sont pas nécessaires, diront certains…
…et que les sédations proportionnées sont plus adaptées, d'autres diront que c'est un dispositif insécurisant pour un certain nombre de soignants qui ne veulent pas l'appliquer.
Quoi qu'il en soit, l'avis n° 139 du CCNE fait état de malades dont les situations ne sont pas ou insuffisamment prévues par la loi Claeys-Leonetti. Or l'un des coauteurs de cet avis n'est autre qu'Alain Claeys.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Le présent article résulte d'un amendement adopté à l'initiative de mon groupe. Un rapport annuel sur l'état du déploiement des soins palliatifs est du plus haut intérêt, puisque nous constatons qu'au cours des vingt-cinq dernières années, ce déploiement n'a pas été ce qu'il aurait dû être – nul ne peut nier cet état de fait. Cet outil de mesure me semble donc tout à fait approprié et je m'étonne qu'il soit remis en cause.
M. Le Fur affirmait que nous n'en serions pas là si la loi Claeys-Leonetti avait été appliquée. Nous pouvons en débattre ; je doute en effet que le débat sociétal autour de la fin de vie aurait pris la même ampleur si nous avions déjà suffisamment répondu aux attentes des patients grâce aux soins palliatifs.
Certains facteurs structurants expliquent aussi cette situation, notamment le covid, qui a été un traumatisme, ne l'oublions pas, mais je considère – indépendamment de l'avis qu'on peut avoir sur le fond – que le premier de ces facteurs demeure la non-application de la loi, qui explique l'état de l'opinion publique.
C'est pourquoi le rapport présente un intérêt très concret ; il faut le maintenir dans le texte.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement n° 1817 , tendant à supprimer l'article 1er
Je ne pensais pas qu'il serait nécessaire de défendre cet amendement, mais les intervenants sur l'article m'ont convaincu du contraire. Nous proposons de supprimer cet article, car le rapport qu'il prévoit a déjà été créé par l'adoption de l'article 1er
Avis favorable. Madame Fiat, vous avez bien expliqué qu'il s'agit d'une fusion rédactionnelle et que l'article 1er
Vous êtes trop aimable.
Monsieur Le Fur, vous affirmez que si la loi Claeys-Leonetti avait été appliquée, nous n'aurions pas besoin d'envisager une loi sur l'aide à mourir. Je ne suis pas d'accord. Nous avons auditionné MM. Alain Claeys et Jean Leonetti, et ce dernier nous a indiqué que sa loi de 2016 ne prévoit pas d'aide à mourir – pour la simple et bonne raison que les conditions requises pour bénéficier d'une sédation profonde, continue et maintenue jusqu'au décès, clairement inscrites dans la loi Claeys-Leonetti, diffèrent de celles prévues par l'article 6 du présent projet de loi. Il n'y a donc pas de contradiction, au contraire, entre prévoir une loi sur l'aide à mourir et vouloir appliquer la loi Claeys-Leonetti de façon transparente et mesurable.
Les USP ont beaucoup de mal à répondre à nos interrogations sur les modalités de mise en œuvre de ce nouveau droit, dont l'application peut être demandée par les patients eux-mêmes, quand ils sont conscients, ou par une personne de confiance, lorsqu'ils ne le sont pas, ou par une décision collégiale de l'équipe soignante. Il est vrai que nous n'avons pas obtenu la transparence sur ces situations, notamment parce que les rapports que le Gouvernement devait nous remettre ne l'ont pas été, mais je répète que les conditions d'accès ne sont pas du tout les mêmes.
La remise d'un rapport est prévue par l'article 1er quinquies tel que vous l'avez voté. L'article 1er sexies étant satisfait, j'émets un avis favorable à l'amendement de suppression pour éviter la multiplication de rapports redondants.
Nous soutenons cet amendement de suppression, parce que nous avons déjà fait œuvre utile en adoptant l'amendement n° 1815 , dont la rédaction était identique : «[…] le Gouvernement remet au Parlement un rapport permettant une évaluation du déploiement des soins d'accompagnement […] ». Il va même plus loin puisqu'il prévoit que le rapport en question détaille le nombre de sédations profondes et continues. C'est aussi ce que vous demandez, chers collègues du groupe Les Républicains ! Vous devriez donc, comme nous, être favorables à la suppression de l'article.
Par ailleurs, le rapporteur a évoqué l'audition d'Alain Claeys et de Jean Leonetti, citant les propos de ce dernier. Je vais à mon tour m'y référer, Alain Claeys ayant très clairement indiqué que la loi de 2016, même bien appliquée, n'était pas suffisante.
Je m'oppose à l'adoption de cet amendement, qui ferait tomber tous les amendements à l'article ; la discussion particulièrement riche qui suit n'aurait donc pas lieu.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.
Pardonnez-moi de ne pas partager votre avis, je suis vraiment confus d'exprimer un avis contraire ! Malheureusement, vous n'y pouvez rien, je suis député comme vous !
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
M. Falorni a abordé la question fondamentale de notre méconnaissance du nombre exact de sédations profondes effectuées. Cependant, il est faux de dire que nous n'en avons aucune idée ! Une étude de 2022 montre que la prévalence des sédations profondes jusqu'au décès est estimée à 2,7 % sur un échantillon – considérable – de 5 714 patients. Il est donc faux de dire que nous ne savons rien.
La difficulté consiste à déterminer si ce pourcentage de 2,7 % est trop faible ou trop élevé, puisqu'on ne connaît pas la population « cible » ; ce n'est qu'une donnée brute.
J'entends l'argument selon lequel nous ne disposons pas des bonnes connaissances ; nous devrions être capables de mesurer le nombre de sédations profondes. Toutefois, dire que nous ne savons rien, c'est aussi une manière, pas très honnête scientifiquement, d'affirmer que nous partons d'une page blanche. Précisément, ce projet de loi nous est présenté comme si tout était à faire. Or tel n'est pas cas : des médecins prennent des mesures et des universitaires produisent des travaux.
Enfin, monsieur le rapporteur, il me semble particulièrement inélégant d'utiliser le témoignage de Jean Leonetti comme plaidoyer en faveur de votre projet de loi…
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN. – Mmes Emmanuelle Ménard et Nathalie Bassire applaudissent également.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 77
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 47
Contre 15
L'amendement n° 1817 est adopté ; en conséquence, l'article 1er
Les réserves exprimées dans l'avis n° 139 du CCNE précisaient que toute évolution législative ne pourrait être discutée qu'à la condition sine qua non de l'effectivité de certains prérequis, parmi lesquels « la connaissance, l'application et l'évaluation des nombreux dispositifs législatifs existants. » Or, comme il est rappelé dans le rapport d'information sur l'évaluation de la loi Claeys-Leonetti de nos collègues Caroline Fiat et Didier Martin : « En l'absence de données robustes, la mission n'a pas été en mesure d'évaluer précisément l'écart entre l'offre et les besoins en soins palliatifs. »
Tout le monde y va de son témoignage. Moi aussi, je suis allé à la rencontre des équipes médicales concernées, qui disent en effet que le nombre de demandes de sédation profonde et continue est faible, une fois installés les soins palliatifs – et l'ensemble des autres soins attendus par le patient. C'est très intéressant : cela signifie que si les soins palliatifs ne sont pas accessibles, d'autres demandes peuvent émerger. Mais la société doit répondre aux demandes des patients qui ont besoin de soins palliatifs. Madame la ministre, vous semblez en désaccord sur ce point.
Cet amendement a pour objectif la publication annuelle, par les agences régionales de santé (ARS), d'indicateurs mesurant l'adéquation de l'offre de soins aux besoins en soins palliatifs, dans les conditions définies par le ministère de la santé, après consultation de la Haute Autorité de santé. Pour évaluer et piloter les politiques, nous avons besoin de ces éléments ; une fois des objectifs fixés en matière de soins palliatifs, il devient possible de les partager. Pour ce faire, les moyens doivent être au rendez-vous et les dynamiques démographiques prises en considération.
Nous partageons votre constat et le Gouvernement s'est emparé de cette demande. Comme je l'ai déjà indiqué, une instance de gouvernance, de pilotage et d'évaluation sera créée et produira de tels indicateurs. Cette demande de rapport est donc sans objet.
J'en profite pour répondre à M. Juvin : nous ne sommes pas dans un concours d'élégance.
Je rapporte les propos tels qu'ils ont été tenus. J'ai cité Jean Leonetti parce qu'il est coauteur d'une loi qui propose un équilibre.
M. Leonetti, je le maintiens, a choisi d'affirmer que la loi de 2016 n'était pas une loi sur l'aide à mourir.
L'amendement n° 28 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous avons auditionné M. Leonetti à plusieurs reprises. Mais quand vous le citez, il faut le citer en entier ; et quand vous le prenez à partie, il faut tout prendre !
En particulier, il ne faut pas omettre ce qu'il dit sur l'éthique de la vulnérabilité, compte tenu de la question posée.
Le présent amendement vise à développer des indicateurs qualitatifs dans les USP. Nous avons beaucoup évoqué les indicateurs quantitatifs, mais les auditions et les missions d'évaluation consacrées à ce sujet ont montré qu'une approche qualitative était nécessaire. Au reste, elle nous aiderait si on ne réformait pas uniquement le financement des maisons d'accompagnement, mais aussi celui de toutes les activités relatives aux soins palliatifs dans les structures existantes : dans les USP comme dans les équipes de soins mobiles – qui parfois ne sont mobiles qu'au sein d'un même établissement, faute de moyens. Disposer d'indicateurs qualitatifs pourrait nous aider à élaborer une réforme du financement des soins palliatifs et ce faisant, à améliorer le pilotage.
Même avis.
Au cours de la mission d'évaluation de l'application de la loi Claeys-Leonetti, nous n'avons pas obtenu de réponse lorsque nous avons demandé combien d'admissions en soins palliatifs concernaient des séjours de répit, des sédations temporaires ou des sédations profondes et continues jusqu'au décès.
Il serait également utile de connaître le temps moyen de la sédation profonde et continue jusqu'au décès, pour en informer le public et répondre aux appréhensions quant à cette durée. Je soutiens donc cet amendement parce que nous avons besoin de disposer de données plus qualitatives sur les soins palliatifs et les sédations profondes.
M. Marc Le Fur applaudit.
L'amendement n° 27 n'est pas adopté.
Il va dans le même sens que les amendements défendus à l'instant par Thibault Bazin. Il s'agit également de demander que la Haute Autorité de santé se préoccupe d'indicateurs qualitatifs, en particulier concernant les équipes mobiles de soins palliatifs. Il s'agit de disposer d'une évaluation à la fois quantitative et qualitative en matière de soins palliatifs. Ce sujet est crucial et relève pleinement des missions de la Haute Autorité de santé.
La Haute Autorité de santé publie effectivement des guides de bonnes pratiques ; les équipes mobiles que vous évoquez peuvent déjà rendre compte de leurs activités. Nous en avons rencontré plusieurs, notamment dans l'Essonne, où elles effectuent un recensement méthodique et précis du travail effectué à domicile comme dans les établissements où elles peuvent être amenées à fournir conseils et avis. Je ne vois donc pas l'intérêt d'ajouter cela aux missions de la HAS. Avis défavorable.
Le plan que nous avons proposé prévoit une instance de gouvernance, dont le rôle est précisément d'utiliser des indicateurs pour anticiper ce qui n'avait pas été prévu, pour disposer d'une traçabilité et de données précises. Avis défavorable sur l'amendement qui est satisfait par la création de l'instance de gouvernance et de ses indicateurs.
Je suis un peu embarrassé par cet amendement. J'en comprends le sens, mais il me semble que la multiplication d'indicateurs et la protocolisation outrancière des pratiques, ainsi que les obligations qui en découlent – telles que le remplissage constant de tableaux – posent problème. Je suis favorable au développement d'évaluations qualitatives, mais je suis gêné par la manière dont cela s'organise, dans la société en général et dans ces débats en particulier. En réalité, je suis modérément favorable – pour ne pas dire défavorable – à l'ajout de ces indicateurs dans la loi.
Il a été question tout à l'heure de la sédation profonde et continue. Le rapporteur général a commencé à distiller des éléments ce sujet, qui mérite une véritable discussion ; nous l'aurons en temps utile. Jusqu'ici, j'ai considéré que la sédation profonde et continue ne figurait pas dans le champ des débats que nous avons eus jusqu'ici, mais elle mérite d'être examinée. La proportion des recours à cette pratique – peut-être insuffisante – est susceptible de donner une indication sur le nombre de cas potentiellement concernés.
Enfin, plusieurs offensives ont tenté de discréditer la loi Claeys-Leonetti et son avancée que constitue la sédation profonde et continue. On a tort de la discréditer, tant cette avancée est utile et nécessaire.
Pourquoi vous opposez-vous à l'amendement de notre collègue Hetzel ? Il vise à développer des indicateurs qualitatifs dans les équipes mobiles de soins palliatifs et que je sache, madame la ministre, vous ne niez pas l'intérêt d'une telle information, d'autant que la HAS en disposera.
Avec un recul de quelques années, nous déplorons le manque d'informations relatives à l'application de la loi Claeys-Leonetti et je tiens à éviter de tirer le même bilan au sujet du projet de loi dont nous discutons, si tant est qu'il soit voté.
L'amendement n° 124 n'est pas adopté.
Alors que nous regrettons tous un manque d'informations, les tentatives d'en obtenir de plus précises échouent !
Mon amendement tend à confier à la Haute Autorité de santé une mission d'évaluation de la gestion de la douleur chez les patients en phase terminale et dont le pronostic vital est engagé à court terme. Cet outil contribuerait non seulement à la diffusion des soins palliatifs, mais également à la prise en charge de la douleur, qui est d'ailleurs appréciée par la HAS lorsqu'elle certifie des établissements de santé.
L'information que je réclame à travers cet amendement, nous n'en disposons pas. Cela n'arrête pourtant pas le Gouvernement, qui inscrit à l'ordre du jour de nos travaux la discussion d'un projet instituant l'aide à mourir, alors même qu'il ne peut pas apprécier l'état de la prise en charge de la douleur des malades, pour laquelle il n'a d'ailleurs pas fait le maximum. Comme moi, ne voyez-vous pas là un paradoxe ? Chacun d'entre nous devrait prêter attention à cette question, raison pour laquelle je défends cet amendement.
Le défaut d'information que nous constatons au sujet de l'application de la loi Claeys-Leonetti pose un problème politique de fond, puisqu'il a été utilisé pour militer en faveur de la préparation d'un nouveau texte. Réglons ce problème en exigeant les informations qui nous manquent et faisons confiance à la Haute Autorité de santé – nous lui enverrions ainsi un signal apprécié.
Vos interventions se sont légèrement éloignées de l'amendement lui-même, dont le sujet – la douleur, sa prise en compte, sa connaissance, son étude et son traitement – est pourtant important. Comme je l'ai encore rappelé hier, je le redis aujourd'hui : la professeure Valéria Martinez de l'hôpital Raymond-Poincaré a, lors de son audition par la commission spéciale, attesté l'existence de douleurs réfractaires insoutenables, irréductibles malgré les avancées de la neurostimulation et de la science des médicaments. Elle nous l'a dit : certaines douleurs – d'afférence ou nociceptives – sont réfractaires, insupportables ; elles provoquent la destruction de la relation entre le médecin et le patient, justifient parfois des demandes d'aide à mourir et peuvent conduire au suicide dans la solitude et dans les conditions que nous connaissons. Mon avis est donc défavorable sur ces deux amendements.
L'information, celle des parlementaires, mais aussi celle de la société, est très importante. Notre projet de loi vise justement à créer une instance de gouvernance et de concertation, et par là même à compenser l'un des défauts formels de la loi Claeys-Leonetti. Accepter les avancées concrètes et pragmatiques qu'offre ce projet en matière d'information me paraît donc utile.
Tel qu'il vous est présenté et tel qu'il est structuré, notre projet ne remet pas du tout en cause la loi Claeys-Leonetti. Toutes les dispositions relatives à la sédation profonde et continue subsisteront : je crois qu'il est important de le rappeler, ne serait-ce que pour celles et ceux qui suivent nos travaux. Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à ces deux amendements.
Monsieur Hetzel, la mission que vous entendez confier à la HAS devrait plutôt revenir à un établissement de recherche : n'allons pas demander à la Haute Autorité de santé, dont ce n'est pas le rôle, de dresser l'état des lieux des avancées obtenues dans le traitement de douleurs réfractaires.
Certes, l'étude des douleurs réfractaires pourrait être précisée, mais nous comprenons bien la manœuvre : votre demande vise à empêcher le titre II du projet de loi, qui vise pourtant à répondre aux demandes des patients endurant des douleurs réfractaires reconnues comme telles.
Les auditions de médecins spécialistes, auxquelles vous avez assisté, ont démontré leur existence, tandis que Mme la ministre a rappelé en ouverture de la discussion générale que ces douleurs concernaient 2 000 à 6 000 personnes chaque année – nul n'envisage d'étendre les dispositions du projet de loi à un plus grand nombre de personnes.
Si votre intention est réellement de faire progresser la recherche, ce n'est pas à la Haute Autorité de santé qu'il faut confier de nouvelles missions, mais bien aux instituts de recherche. De surcroît, il faut leur attribuer plus de moyens.
Avant de constater des douleurs réfractaires, les équipes médicales devraient vérifier que leur patient a bien eu accès à un protocole de soins. On connaît en effet les difficultés que rencontrent les malades à en bénéficier et on sait également que les douleurs réfractaires, si intenses qu'elles soient, ne peuvent être constatées qu'après l'administration d'un traitement antalgique.
Depuis la loi Claeys-Leonetti de 2016, un patient peut bénéficier d'une sédation partielle la nuit, lorsqu'à la douleur s'ajoutent l'angoisse et le stress. Un patient peut également demander sa sédation profonde et continue avant d'être aidé à mourir.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 73
Nombre de suffrages exprimés 72
Majorité absolue 37
Pour l'adoption 28
Contre 44
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 540 .
Dans une logique de décentralisation, il vise à demander aux ARS la publication annuelle d'un rapport public, qui permettra au Gouvernement, aux députés et aux administrés d'évaluer la situation des soins palliatifs dans chaque région. Un état des lieux précis permettra d'accentuer le soutien à cette offre de soins là où elle manque de la manière la plus criante.
Défavorable également.
Je ne comprends pas ces avis. Depuis le début de nos échanges, nous évoquons l'inégal accès des citoyens aux soins palliatifs, selon leur territoire de résidence. Un rapport précisant l'état des soins palliatifs dans chaque région permettrait de suivre partout l'application de la stratégie décennale des soins d'accompagnement.
Madame la ministre, pour nous rassurer, vous vous défendez de changer quoi que ce soit à la loi Claeys-Leonetti. Celle-ci prévoit que le Gouvernement remet chaque année un rapport décrivant son application, mais depuis son adoption en 2016, ce document ne nous a jamais été remis. Faut-il alors qu'à vous entendre nous cessions d'espérer la production de ce rapport et toute avancée en matière de soins palliatifs, car en ce sens, rien ne changera ? Au contraire, puisque la loi ne change pas, vous engagez-vous à nous remettre ce rapport dès 2024 ? Et en 2025 ?
L'amendement n° 540 n'est pas adopté.
La conférence des présidents a décidé de limiter le nombre d'inscrits sur cet article à deux par groupe.
La parole est à M. Sébastien Peytavie.
Le groupe Écologiste salue la création des maisons d'accompagnement, qui existent déjà au Danemark, en Italie ou encore au Royaume-Uni. Préconisée par le rapport Chauvin, l'ouverture de ces structures non hospitalières permettra la prise en charge d'environ 20 % des patients éligibles à des soins palliatifs précoces, mais aussi et surtout le répit des aidants. Rappelons que nous en dénombrons 11 millions, parfois amenés à intervenir auprès de malades en grande difficulté, du fait de l'inadaptation de leur domicile.
Nous entamerons l'examen de l'article 2 par des amendements tendant à sa suppression. Comme en commission, leurs défenseurs s'opposent à la création des maisons d'accompagnement, pourtant bien nécessaires, au motif qu'y serait pratiquée l'aide active à mourir.
L'amendement n° 3003 de M. le rapporteur nous pose également problème, car il tend à permettre l'ouverture de maisons d'accompagnement à but lucratif. Nous redoutons l'« orpéisation » de la fin de vie et nous nous opposerons fermement à la financiarisation de l'aide à mourir.
Cet article propose la création d'une maison d'accompagnement par département, ce dispositif étant pensé comme complémentaire et distinct des unités de soins palliatifs. Comptant douze à quinze lits, ces maisons accueilleront les personnes en fin de vie – et leurs proches – ne nécessitant pas une hospitalisation en lit ou unité de soins palliatifs, mais ne pouvant pas rester à leur domicile pour des raisons familiales ou sociales, ou même en raison de la qualité de leur logement. Les personnes malades y auront accès à des soins dispensés par des professionnels libéraux, des équipes de soins palliatifs ou des aides à domicile.
Ces structures, décrites dans le rapport Chauvin et dans le rapport de la Cour des comptes sur l'organisation des soins palliatifs et la fin de la vie, s'inspirent de pratiques constatées au Danemark, en Italie ou au Royaume-Uni. Leur création a également été demandée par la Convention citoyenne sur la fin de vie.
Des bénévoles pourront intervenir et les aidants trouver du répit dans ces maisons d'accompagnement, conçues comme des lieux d'accueil, d'accompagnement et de soins physiques et psychologiques. Elles offriront une solution innovante et complémentaire, à même de répondre aux besoins des malades et de leurs familles.
L'attractivité de ces maisons, la formation de leur personnel, les effectifs requis pour les faire fonctionner, leur financement – certes abordé par l'article 1er ter – et le rôle qu'y joueront les bénévoles restent encore à préciser.
Nous examinons un texte grave, sérieux. Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il marquera profondément la législature. Sur ce sujet si délicat, les convictions personnelles de chacun doivent être respectées.
Nous avons la chance que le français soit une langue précise et complète. C'est pour cette raison qu'il est encore une langue diplomatique ; sa complexité permet la concision et garantit l'exactitude des propos que l'on tient. Or, par votre volonté de ne pas nommer les choses, vous créez un flou sémantique dans ce texte qui porte atteinte à la sincérité des débats.
Madame la ministre, vous nous avez expliqué, avec la plus grande difficulté, que les soins d'accompagnement sont uniquement des soins palliatifs. Or les maisons d'accompagnement que crée cet article seront à la fois des maisons de soins palliatifs et des centres de suicide assisté et d'euthanasie.
Peut-on, au sein d'une même maison, dispenser des soins et donner la mort ? On constate les limites du « en même temps » qui guide votre logique de gouvernement.
On ne peut à la fois s'inscrire dans une logique de soins, en favorisant les soins palliatifs, et dans une logique de mort provoquée. Les soins palliatifs sont une aide à mourir dans la dignité et sans douleur. Les structures que vous souhaitez créer sont des centres de suicide assisté et d'euthanasie. Dans un souci de clarté et de rigueur, le groupe Rassemblement national demande que les maisons de soins palliatifs ne puissent dispenser que des soins palliatifs. Il ne peut y avoir de continuum entre d'une part, les soins, d'autre part, le suicide assisté et l'euthanasie.
Par ailleurs, nous avons déposé un amendement sur l'article 2 visant à élever au rang de droit fondamental l'accès aux soins palliatifs en maisons de soins palliatifs.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Nous débutons l'examen d'un des articles les plus importants et les plus attendus du projet de loi. Alors que 60 % des Françaises et des Français déclarent souhaiter mourir chez eux, la réalité est tout autre, puisque 53 % des décès ont lieu à l'hôpital.
La France manque de solutions d'accueil intermédiaire entre l'hôpital et le domicile ; la Convention citoyenne sur la fin de vie le déplorait également. La création des maisons d'accompagnement vise à remédier à ce manque. Les personnes en fin de vie, dont l'état médical serait stabilisé et ne nécessiterait pas de prise en charge particulière, mais qui ne pourraient rester ou retourner à leur domicile, pourraient enfin bénéficier d'un accueil et d'un accompagnement hors des murs de l'hôpital, quel que soit leur âge.
Pour répondre à cette demande, nous devrons mener plusieurs batailles lors de l'examen de cet article. D'abord, nous devrons lutter pour garantir les moyens nécessaires au déploiement des maisons d'accompagnement. Nous devons fixer des objectifs clairs pour garantir tant un accès équitable aux maisons d'accompagnement sur l'ensemble du territoire que leur proximité. Nous proposons ainsi d'inscrire dans la loi l'objectif de création d'une maison d'accompagnement par département à l'horizon de 2034.
Puis, nous devrons mener une bataille pour garantir un nombre suffisant de personnels qualifiés dans ces maisons, afin de répondre aux besoins uniques des personnes en fin de vie et de leurs proches.
Enfin, nous lutterons contre l'appétit toujours plus vorace des néolibéraux et des capitalistes. En commission spéciale, nous avons obtenu une grande victoire, en interdisant le caractère lucratif des maisons d'accompagnement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Sandrine Rousseau applaudit également.
Nous refusons que la fin de vie soit soumise aux logiques comptables, aux économies de bouts de chandelle commandées par les fonds d'investissement. Nos concitoyennes et concitoyens ont déjà trop souffert de la marchandisation des plus vulnérables, que ce soit celle des plus petits, qui subissent le rationnement des couches dans les crèches privées, ou celle de nos aînés, privés d'accès aux soins d'hygiène les plus élémentaires.
Mais voilà que la Macronie, par un amendement du rapporteur Didier Martin, souhaite réintroduire le caractère lucratif des maisons d'accompagnement. Avec La France insoumise, nous lutterons contre cet amendement car nous refusons qu'il y ait un Orpea de la fin de vie.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'augmentation du nombre de structures est toujours un motif de réjouissance. Nous connaissons le manque de prise en charge, de lits d'aval dans les hôpitaux, et les difficultés pour maintenir à domicile les personnes dans de très nombreux cas. Les structures d'accompagnement répondront à des besoins de notre système de santé et apporteront un soutien aux familles et aux malades – il faut vraiment les envisager ainsi.
Étant donné la sociologie et les problèmes des personnes en fin de vie, qui peuvent se retrouver seules et isolées car leur famille est éclatée sur le territoire, je m'insurge contre les positions indécentes – j'y insiste – du Rassemblement national. Il est totalement indécent – je ne trouve pas d'autres mots – de considérer que le Gouvernement ourdirait une sorte de complot.
M. Jocelyn Dessigny s'exclame.
Quoi qu'il en soit, nous serons favorables à cet article, tout en étant vigilants sur quelques points. Nous voterons contre certains amendements et en faveur d'autres. Je vous félicite pour cette initiative.
Nous examinons enfin l'article 2 ; il crée une nouvelle catégorie d'établissements, les maisons d'accompagnement, initiative que salue le groupe Socialistes et apparentés.
Lors de votre audition en commission spéciale, vous avez indiqué, madame la ministre, que les maisons d'accompagnement « ont vocation à accueillir les personnes en fin de vie qui ne relèvent plus d'un service hospitalier mais ne peuvent ou ne veulent rentrer à leur domicile ». Cette « novation » est une recommandation du rapport Chauvin. Vous avez également précisé que « plusieurs expérimentations étaient en cours ». Pourriez-vous nous en dire plus ?
Les maisons d'accompagnement ne concurrencent absolument pas les services de soins palliatifs, contrairement à ce que certains voudraient faire croire. Du reste, j'espère que ceux qui, dès lundi, ont parlé de « bidouillage » à propos des soins d'accompagnement auront la décence de ne pas réclamer l'installation de maisons d'accompagnement dans leur circonscription.
Ces maisons pourront accueillir des personnes ayant une espérance de vie plus longue que les patients soignés au sein des unités de soins palliatifs ; les trois quarts d'entre eux sont des personnes atteintes de cancer, selon l'Atlas des soins palliatifs et de la fin de vie en France. Aussi, les soignants des maisons d'accompagnement devront avoir des compétences adaptées à ces patients.
Quant au statut de ces maisons, le scandale Orpea devrait nous servir de leçon. On ne devrait pas pouvoir faire de profits sur les maisons d'accompagnement, comme on en fait sur certaines unités de soins palliatifs.
L'article crée de nouveaux établissements sociaux et médico-sociaux, les maisons d'accompagnement et de soins palliatifs. Ces structures de petite taille, issues d'une proposition du professeur Chauvin, accueilleront des malades en fin de vie, auxquels elles pourront dispenser des soins palliatifs et d'accompagnement, et leur entourage. À ce titre, l'étude d'impact précise que l'enjeu est « de réduire le recours inapproprié à une hospitalisation pour les personnes en fin de vie », qui peut concerner de nombreuses personnes. Lorsqu'elles n'ont pas besoin de soins importants, elles peuvent avoir du mal à trouver des établissements adaptés, notamment en raison de leur isolement. Les débats en commission spéciale ont également mis en lumière la nécessité de proposer une alternative au domicile autre que l'hôpital.
Par conséquent, la création de maisons d'accompagnement peut être une bonne idée, malgré les difficultés qui résultent du contexte. Le retard pris en matière d'accès aux soins palliatifs, la crise de l'hôpital public, la désertification médicale peuvent légitimement faire craindre que ces maisons ne constitueront finalement qu'une solution de secours dégradée lorsque la prise en charge médicale fait défaut.
De fait, ces maisons viennent s'ajouter aux unités de soins palliatifs, aux équipes mobiles de soins palliatifs et aux Ehpad qui sont tous chroniquement sous-financés, sans que l'articulation entre ces différents lieux soit clairement définie ni que l'engagement financier de l'État ne réponde aux besoins.
Vous aurez bien compris l'intérêt que je porte à cette proposition, mais il est nécessaire de répondre à ces questions pour qu'elle puisse être pleinement efficace. Nous nous opposons farouchement au but lucratif de ces établissements ; nous devons conserver la rédaction du texte issue des travaux de la commission spéciale.
L'article 2 créé dans le code de l'action sociale et des familles une nouvelle catégorie d'établissements médico-sociaux, dénommée maisons d'accompagnement, pour accueillir et accompagner les personnes en fin de vie et leur entourage. C'est une sorte de structure intermédiaire entre le domicile et l'hôpital, composée de petites unités de vie, qui proposera une prise en charge globale et pluridisciplinaire aux personnes en fin de vie et à leurs proches.
Concrètement, y seraient admises les personnes dont on pense qu'elles pourraient éviter une hospitalisation en établissement de santé. A priori, l'idée est tout à fait séduisante. Mais voilà : d'une part, cet article n'apporte que peu de précisions ; il sous-entend qu'elles seront prises par décret, évinçant, au passage, une nouvelle fois le Parlement dans le cadre de sa mission de contrôle. Or sur un tel sujet, cela ne me paraît pas souhaitable.
D'autre part, en commission spéciale, vous nous avez dit, madame la ministre, que l'euthanasie et le suicide assisté pourront être pratiqués dans les maisons d'accompagnement.
Il s'agit d'une confusion des genres regrettable tant elle brouille la mission en matière de soins palliatifs que ces maisons prétendront exercer.
En outre, les crédits de paiement prévus à l'article 1
Applaudissements sur les bancs des groupes RN et LR.
Le groupe LR considère que cet article est très inquiétant. Derrière le mot accompagnement, qui peut d'abord sembler sympathique, nous craignons que ne se dissimulent en fait des « maisons de la mort », où se pratiqueraient le suicide assisté et l'euthanasie.
« Oh ! » sur les bancs du groupe RE. – M. Jocelyn Dessigny applaudit.
J'espère, madame la ministre, que vous parviendrez à nous rassurer mais je ne vois pas comment vous y parviendrez.
Mes chers collègues, n'imaginez pas que l'on puisse y dispenser des soins palliatifs.
Mais non ! Consultez la page 47 de l'étude d'impact du projet de loi : s'agissant des médecins, il est prévu de recruter 0,2 ETP dans ces maisons. Cela signifie qu'il n'y aura même pas un médecin présent un jour par semaine. Il n'est donc pas question de dispenser des soins palliatifs.
N'imaginez pas que les maisons d'accompagnement résoudront le problème de la défaillance du système de soins palliatifs ; elles auront pour finalité de délivrer une mort administrée. C'est pourquoi nous défendrons des amendements visant à supprimer cet article.
« Oh ! » sur les bancs du groupe RE.
Depuis le début de l'examen du texte, on nous trompe. On nous a dit – et on continue de nous dire – que nous devions attendre l'examen du titre II pour aborder la question de l'aide à mourir. Ce n'est pas vrai, puisque nous sommes en train d'examiner le titre Ier qui crée des structures où se pratiqueront les actes que nous dénonçons, le suicide assisté et l'euthanasie. Nous le refusons.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.
Je vous indique que la présidente de l'Assemblée nationale a reçu aujourd'hui, vendredi 31 mai 2024, deux motions de censure, en application de l'article 49, alinéa 2 de la Constitution : l'une, déposée à huit heures quarante-trois par Mme Mathilde Panot, M. André Chassaigne et 104 membres de l'Assemblée nationale ; l'autre, déposée à onze heures cinquante-quatre par Mme Marine Le Pen et 87 membres de l'Assemblée nationale.
En application de l'article 153, alinéa 4 de notre règlement, il est pris acte de ces dépôts. Les motions de censure seront notifiées au Gouvernement et affichées. La date et l'heure de la discussion et du vote de ces motions seront fixées par la conférence des présidents.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie.
La séance est levée.
La séance est levée à treize heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra