France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
L'ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 103 du règlement, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord relatif à la restructuration de la plateforme douanière de Saint-Louis – Bâle sur l'autoroute A35, en France, entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse (n° 175, 225).
Ce texte n'ayant fait l'objet d'aucun amendement, je le mets directement aux voix, en application de l'article 106 du règlement.
Le projet de loi est adopté.
L'ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 103 du règlement, de la proposition de loi, adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, visant à actualiser le régime de réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce (n° 288, 296).
Ce texte n'ayant fait l'objet d'aucun amendement, je le mets directement aux voix, en application de l'article 106 du règlement.
La proposition de loi est adoptée.
La parole est à M. François Jolivet, pour soutenir l'amendement n° 1696 .
L'objet de cet amendement est d'appeler l'attention du Gouvernement sur l'existence d'une niche fiscale ouverte au bénéfice des ressortissants de l'Espace économique européen (EEE), une notion juridique mal identifiée et évoluant avec le temps. La niche concerne ces ressortissants propriétaires d'un bien situé en France et leur permet de bénéficier, sans condition de durée de détention, d'une exonération de plus-value plafonnée à 150 000 euros.
Dans le document « Évaluation des voies et moyens », le Gouvernement évalue cette niche fiscale à 10 millions. Cette évaluation est faite euro pour euro et reste identique depuis onze ans, ce qui signifie sans doute qu'elle est approximative.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
J'ai bien compris qu'il s'agit d'un amendement d'appel. Il est en effet intéressant de connaître l'impact de cette mesure et je laisserai le ministre s'exprimer sur la question.
Cette exonération est encadrée et plafonnée. Elle est soumise à des conditions de résidence continue en France et ne s'applique plus au-delà d'un certain délai suivant le départ du bénéficiaire. Elle bénéficie aux expatriés afin qu'ils puissent maintenir le lien avec leur pays. J'en profite pour saluer les travaux d'Anne Genetet sur cette question.
Avis défavorable.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je voudrais remercier M. Jolivet, dont l'amendement me donne l'occasion d'apporter des précisions sur un dispositif fiscal, ce qui est toujours bienvenu.
Le législateur a jugé opportun et équitable de prévoir, sous conditions, une exonération de l'impôt sur le revenu au titre de la plus-value de cession d'un logement situé en France en faveur des contribuables d'un État membre de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'EEE, dans la limite de 150 000 euros de plus-value imposable. Rien ne paraît justifier la suppression de cette exonération, même si l'évaluation de celle-ci est insuffisante. En outre, sa suppression demande une analyse préalable de conformité avec le droit de l'Union européenne.
Je vous propose que nous nous reposions cette question, peut-être à l'occasion de la discussion du prochain projet de loi de finances, après une évaluation financière et juridique de cette mesure.
Avis défavorable.
Comme hier, je vous propose, dans la mesure du possible, de donner la parole à deux orateurs par amendement : l'un favorable, l'autre défavorable.
La parole est à M. Marc Le Fur.
Je soutiens l'amendement. Le dispositif en question permet aux résidents étrangers ayant vendu un bien immobilier qui n'est pas leur résidence principale d'éviter de payer l'impôt sur les plus-values. Cette logique est contraire à celle appliquée aux ressortissants de notre propre pays. C'est ce que je comprends, si je commets une erreur, dites-le moi. Je ne vois aucune raison pour pérenniser un tel dispositif. Notre groupe votera donc cet amendement.
Pardonnez-moi, monsieur le ministre, mais je maintiens mon amendement. Il ne s'agit pas d'être désagréable à votre endroit, mais tout simplement d'échapper à la règle de l'entonnoir qui m'empêcherait de le redéposer.
Je trouve injuste qu'un Français ne soit pas exonéré sur ses plus-values alors qu'un ressortissant de l'EEE l'est, d'autant que cette entité juridique méconnue s'étend jusqu'aux frontières de pays de l'Est non-membres de l'Union européenne.
Tout comme moi, vos services semblent ne pas comprendre le sens de cette mesure dont ils n'évaluent pas les conséquences depuis dix ans, se contentant de copier et coller, année après année, le même chiffre. Une niche fiscale évaluée à 10 millions peut paraître peu importante, mais il serait opportun de demander à vos services de réaliser une évaluation plus précise. On ne sait pas aujourd'hui si son impact est de 1 million ou de 200 millions d'euros.
L'amendement n° 1696 n'est pas adopté.
À titre personnel, je suis défavorable à cet amendement. Les collègues qui ont déposé les amendements suivants le défendront mieux que moi.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l'amendement n° 1552 .
Il vise à corriger un dispositif fiscal pénalisant l'aménagement foncier dans nos territoires ruraux. Il existe encore de nombreuses parcelles morcelées, en particulier dans les aires de production des appellations d'origine contrôlée (AOC). Le regroupement de parcelles doit être encouragé, surtout lors de l'installation de jeunes agriculteurs.
Les critères actuels d'exonération, assis sur les limites du canton, sont obsolètes et pénalisants, car le territoire des cantons a beaucoup changé. L'amendement propose donc de modifier le dispositif actuel d'exonération de taxe de publicité foncière et de droits d'enregistrement afin de favoriser les échanges fonciers dans les aires AOC.
La parole est à M. Nicolas Meizonnet, pour soutenir l'amendement n° 2960 .
Cet amendement, proposé par la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vin à appellations d'origine contrôlées (CNAOC), vise à étendre les régimes de faveur fiscale se rapportant aux échanges de biens ruraux aux territoires des AOC.
Les exploitants agricoles et viticoles sont incités à remembrer leurs exploitations en réalisant des échanges de parcelles dans le but de remédier aux difficultés pratiques et logistiques, aux coûts économiques et environnementaux d'une exploitation géographiquement morcelée. Cependant, la fiscalité peut être pénalisante. L'espace de production d'une AOC pouvant s'étendre sur des territoires non limitrophes dépassant la limite d'un canton, de nombreux échanges ne peuvent avoir lieu en raison de leur coût fiscal puisqu'ils se trouvent exclus du régime d'exonération. Il est donc proposé d'étendre les dispositifs d'exonération actuels aux territoires des AOC.
Il tend à favoriser le regroupement de parcelles d'exploitation agricole, qui permet des améliorations logistiques, économiques et écologiques.
Actuellement, les exonérations fiscales de taxe de publicité foncière et de droits d'enregistrement ne concernent que les parcelles situées sur le territoire d'un même canton. Or les aires de production des AOC ne se trouvent pas toujours sur le territoire d'un même canton. L'amendement vise donc à étendre le bénéfice de ces exonérations aux parcelles situées sur une aire de production d'une même AOC, même si elles ne sont pas situées sur le territoire d'un même canton.
Il ne s'agit pas ici de pénaliser quiconque fiscalement ; les amendements proposent au contraire d'étendre une exonération fiscale favorisant les échanges de parcelles situées dans des communes limitrophes en vue de leur regroupement. Toutefois, cette extension à des territoires de production des AOC, qui peuvent être très étendus, risque d'avoir un coût élevé. En outre, elle fragilise juridiquement la logique du dispositif et crée une rupture d'égalité entre les contribuables dont les parcelles sont situées dans un territoire AOC et les autres. Je réitère mon avis défavorable à titre personnel sur l'ensemble des amendements, y compris celui de la commission des finances.
Je vous remercie de mettre cette question sur la table. Je comprends les préoccupations, les constats et les objectifs exprimés par ces amendements. Toutefois, il existe un doute sur la constitutionnalité des exonérations proposées en raison de la rupture d'égalité qu'elles impliqueraient avec d'autres labels, comme l'indication géographique protégée (IGP).
Je vous propose donc de travailler sur cette question – Éric Girardin, qui s'est penché sur ce thème dans le cadre d'une mission, pourra participer à ces travaux – afin de proposer une mesure dans le cadre de la loi sur le foncier agricole prévue pour 2023. Cela me semble être le bon vecteur et la bonne temporalité.
Monsieur le rapporteur général, il ne s'agit pas simplement d'une exonération fiscale, mais d'une exonération de taxe de publicité foncière et de droits d'enregistrement. Ce sont des notions fiscales précises.
Monsieur le ministre délégué, vous pointez le risque d'inconstitutionnalité pour rupture d'égalité par rapport aux autres labels. Les amendements concernent certes l'AOC, mais un sous-amendement pourrait étendre le bénéfice à tous les autres labels du monde agricole.
La réforme de la limite des cantons introduite par le gouvernement Ayrault, sous François Hollande, a entraîné la modification de périmètres, mais cette modification n'a pas été prise en compte par la réglementation fiscale. C'est un argument de bon sens.
Ces amendements ne représentent pas un coût exorbitant et permettraient de simplifier et de fluidifier les procédures d'échange et de réorganisation des exploitations.
Les amendements sont intéressants du point de vue du remembrement foncier et de la simplification du travail dans les exploitations. Ils risquent toutefois de mener à des phénomènes de concentration, notamment dans le secteur viticole – le problème est attesté pour les échanges de terrain non inclus dans une AOC. Malgré cela, le groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES ne s'opposera pas à cette proposition.
Monsieur le ministre délégué, venons-en aux propos vous concernant tenus dans une matinale tout à l'heure. Hier, nous avons adopté un amendement avec 227 voix pour et 88 voix contre, mais il semblerait que le Gouvernement s'apprête à remettre en cause cette adoption en recourant au 49.3. Il serait dommageable que la représentation nationale ne soit pas respectée quand vous appliquerez cette procédure – puisque c'est désormais une affaire de « quand » plutôt que de « si ».
Cela vous a déjà été demandé hier : intégrerez-vous dans la version du projet de budget sur laquelle vous engagerez la responsabilité du Gouvernement les amendements adoptés par la représentation nationale ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
L'amendement n° 3124 n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements, n° 793 , 915 , 2609 , 657 , 2201 , 2203 , 2021 , 2637 , 2781 , 3175 , 1727 , 1876 , 2205 et 2207 pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 793 , 915 et 2609 , les amendements n° 2021 , 2637 et 2781 , ainsi que les amendements n° 3175 , 1727 , 1876 et 2205 sont identiques.
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l'amendement n° 793 .
Cet amendement de Stéphane Peu vise à soutenir la création de logements sociaux, en pérennisant l'exonération d'impôt sur les plus-values constatées par les personnes physiques lors des cessions d'immeubles, lorsque l'acquéreur s'engage à réaliser des logements sociaux.
La parole est à M. Charles de Courson – qui vient d'arriver –, pour soutenir l'amendement n° 915 .
Il vise à soutenir la création logements sociaux. Excusez-moi, je suis un peu essoufflé, j'ai dû courir,…
Applaudissements sur de nombreux bancs.
Monsieur le ministre délégué, nous attendons une réponse à la question posée par M. Sansu : intégrerez-vous les amendements adoptés en séance dans la version finale du projet de loi, ou sommes-nous en train de discuter pour rien ? Nous avons déjà posé la question hier.
L'amendement n° 2609 de M. Taché vise à soutenir la création de logements sociaux en pérennisant le dispositif d'exonération de la plus-value réalisée lors de la cession au profit d'organismes chargés du logement social ou de particuliers s'engageant à réaliser des logements sociaux dans les quatre ans.
Après avoir été instauré en 2005 pour une durée de deux ans, ce dispositif a été reconduit à sept reprises. Alors qu'il doit prendre fin le 31 décembre 2022, il est essentiel de le pérenniser, afin d'éviter le blocage des opérations au cours des six mois précédant la date prévue de son expiration, dans un contexte où plus de 2 millions de personnes demandent une place en logement social.
Par ailleurs, nous demandons l'extension du dispositif aux logements anciens, et la suppression de la référence au permis de construire. En effet, dans de nombreuses situations, si l'acquéreur peut s'engager sur une surface de logements sociaux, il n'est par hypothèse pas en mesure de présenter un permis de construire le jour de l'acquisition du terrain.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement n° 657 .
Dans le même esprit que les précédents, le présent amendement vise à proroger l'outil fiscal qui favorise les cessions de biens immobiliers utilisés comme logements sociaux. Alors que le dispositif doit expirer le 31 décembre 2022, il serait maintenu jusqu'au 31 décembre 2027.
La question du logement, déjà essentielle, deviendra cruciale dans les années qui viennent. Anticipons cette évolution au maximum, en accroissant l'offre de logements.
Cet amendement de repli ramène la date proposée d'expiration du dispositif de 2027 à 2025.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 2021 .
C'est très simple, comme tous nos collègues l'ont expliqué, il faut pérenniser ce crédit d'impôt pour soutenir la création de logements sociaux.
Cet amendement de repli ne prévoit pas de modification de la rédaction adoptée dans la loi de finances pour 2021, qui prévoit la présentation d'un permis de construire. Pourtant, dans le cadre de l'autorisation de travaux pour les logements acquis améliorés, cela pose un vrai problème, y compris aux bailleurs sociaux.
L'amendement vise à reporter à 2024 l'expiration de cette niche bénéficiant aux vendeurs de biens à des organismes HLM. J'observe simplement qu'alors que cette niche a le même coût – 10 millions d'euros – que l'exonération de plus-value sur la vente d'un bien immobilier dans notre pays par les ressortissants de l'espace économique européen dont nous discutions tout à l'heure, le Gouvernement n'avait pas prévu de la proroger.
Nous partageons tous le même objectif. Le dispositif discuté est bon ; son régime fiscal a d'ailleurs été clarifié dans la loi de finances pour 2022. Malheureusement, l'amendement de Mme Hai que je souhaitais privilégier et que j'avais sous-amendé, n'a pu être défendu car elle n'est pas là.
Je vous propose donc de voter pour l'amendement n° 3175 , adopté en commission, qui prévoit, comme celui de Mme Hai, la prorogation du dispositif. En effet, plutôt que de pérenniser les dispositifs, nous avons collectivement choisi pour doctrine de privilégier leur prorogation tous les deux ou trois ans, après évaluation.
L'amendement de Mme Hai était un peu plus complet que celui de la commission, car il prévoyait d'exonérer les plus-values réalisées lors de la cession non seulement directe de logements sociaux à des organismes HLM, mais également indirecte, c'est-à-dire par l'intermédiaire de collectivités locales. Nous pourrons compléter cela dans la navette. Avis défavorable sur les autres amendements.
Même avis, pour les mêmes raisons : favorable à l'amendement n° 3175 et aux identiques, défavorable aux autres.
La question du logement social est centrale. Rien que dans mon département, 120 000 demandes de logement social ne sont pas satisfaites et 10 000 personnes éligibles au Dalo – Droit au logement opposable – attendent en vain des propositions. Dans ma permanence, il y a quelques jours, une personne éligible au Dalo depuis quinze ans m'indiquait n'avoir reçu aucune offre ! Le logement social pose problème dans ce pays.
Même si nous sommes évidemment favorables à la prorogation de ce dispositif, il est d'autant plus insuffisant que les réformes menées par le Gouvernement sous la précédente législature, en affectant les bailleurs sociaux, ont tari la construction de logements sociaux. Il est urgent de faire mieux.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Une fois de plus, nous envisageons la prorogation d'une niche fiscale, d'une exonération dont on ne connaît pas l'efficacité réelle, alors que nous avions adopté une disposition prévoyant qu'avant leur éventuelle prorogation, tous ces dispositifs devaient être évalués, car ils sont très coûteux.
Comme un de nos collègues de l'opposition l'a indiqué hier, une multitude de mesures fiscales sont prévues dans le domaine du logement. Citons les dispositifs Pinel, Pinel outre-mer, Censi-Bouvard, Malraux et Denormandie, outre ceux pour la location des logements meublés non professionnels et le déficit foncier.
Alors que les dépenses de la France en la matière, rapportées au PIB, sont deux fois plus importantes que celles de ses partenaires européens, nous continuons de manquer de logements sociaux et de logements pour les salariés, comme cela a été rappelé à juste titre. Or, à aucun moment, on n'a songé à mettre à plat l'ensemble de ces dispositifs, non pas pour refaire des économies…
…mais pour faire en sorte que l'argent public mobilisé pour le logement résolve les nombreux problèmes que rencontrent nos concitoyens dans nos circonscriptions. J'en appelle au maintien d'un principe : évaluer, évaluer, toujours évaluer la dépense publique pour assurer son efficacité. Actuellement, tout le monde se perd dans les nombreux dispositifs, alors que nous gaspillons sans doute beaucoup d'argent.
Les forêts sont des alliées précieuses pour la séquestration du carbone et la régulation du climat. Or elles sont mises à rude épreuve par les incendies, ainsi que par l'artificialisation des sols, à commencer par les bois communaux. Pourtant, le régime fiscal incite les communes à céder leurs bois en vue de les urbaniser. Elles bénéficient ainsi de plus-values et récoltent ensuite des taxes d'aménagement. Une telle incitation financière à urbaniser une forêt communale est incompatible avec l'impératif écologique.
Le présent amendement propose donc de dissuader fiscalement de vendre des bois communaux, en soumettant le produit de la vente à un impôt sur les plus-values immobilières. Habituellement les ventes des communes sont exonérées de ce type d'impôts, mais la préservation des écosystèmes forestiers et de tous les services environnementaux qu'ils nous rendent justifie cette exception.
À la suite des discussions en commission, l'amendement précise qu'il ne sera pas fait application des abattements habituellement prévus dans le cadre des plus-values immobilières selon la durée de détention. En clair, chers collègues, nous vous proposons de protéger les bois communaux, en freinant la dynamique d'urbanisation à laquelle ils sont soumis.
Il n'y a pas de raison de ne pas faire confiance aux élus locaux. En tant que telle, la vente d'une forêt n'est en rien contraire à l'écologie. Il faut maintenir ce dispositif.
Votre préoccupation concerne avant tout le risque de changement de destination de la parcelle, or cela n'a rien à voir avec l'identité de son propriétaire. Les destinations dépendent du plan local d'urbanisme (PLU) et du plan local d'urbanisme intercommunal (Plui).
Avis défavorable.
L'impôt sur les sociétés s'applique aux régies. Ainsi, votre amendement est satisfait : si la commune recourt à une régie, un service public industriel et commercial (Spic) par exemple, celui-ci sera soumis à l'impôt sur les sociétés. Il n'est donc pas nécessaire de soumettre les communes, dans le cadre de leur activité forestière, à une nouvelle taxe.
En outre, le texte comporte des mesures de premier plan s'agissant des forêts. Plusieurs amendements vont en ce sens, en particulier un amendement de Mme Brulebois qui tend à élargir le Defi forêt, le dispositif d'encouragement fiscal à l'investissement en forêt. Des crédits supplémentaires seront ouverts pour aider les communes forestières à lutter contre les scolytes.
Nous partageons vos préoccupations mais le dispositif que votre amendement vise à instaurer n'est pas justifié. Avis défavorable.
Monsieur le ministre délégué, vous présentez le dispositif comme une taxe sur les forêts, alors que c'est précisément l'inverse : l'amendement tend à préserver les bois communaux, ce qui n'est pas contraire à l'intérêt général. Nous souhaitons seulement décourager leur vente, puisque nous avons tous intérêt à ce que les communes les conservent.
Je trouve dommage que vous ayez chaque fois recours à un argument différent pour toujours dire non.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 2246 n'est pas adopté.
Le présent amendement a pour objet de réformer le régime des plus-values de cessions immobilières.
Le régime actuel tend à lutter contre la spéculation en favorisant les détentions longues. Juridiquement, cela se traduit par l'application d'un taux d'imposition de 19 %, modéré par un abattement qui dépend de la durée de détention. Ce dispositif a eu son utilité et sa justification économique. Toutefois, on constate désormais qu'il favorise la rétention, donc la pénurie de terrains constructibles, notamment dans les zones où les besoins de logements sont importants. Dans un contexte de limitation de l'artificialisation des sols et de l'étalement urbain, il est nécessaire d'encourager la mobilisation des emprises foncières non bâties situées en zone à urbaniser.
Afin de dynamiser le rythme des transactions, le présent amendement vise donc premièrement à supprimer les abattements pour durée de détention, tout en prenant en compte l'érosion monétaire dans le calcul de la plus-value. Il s'agit de contribuer à la neutralité fiscale de la mesure, tout en respectant le principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques. Secondement, l'amendement vise à diminuer le taux réel d'imposition.
Dans le souci de ne pas pénaliser les propriétaires qui ont fait le choix de la détention longue, ces dispositions n'entreraient en vigueur que pour les cessions intervenant à compter du 1er janvier 2024. Les propriétaires de biens détenus de longue date pourraient ainsi les vendre avant la fin de l'année 2023 et l'inversion de la dynamique fiscale du système.
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l'amendement identique n° 2783 .
Mme Eva Sas a tout dit : l'amendement vise à accélérer autant que possible la vente des terrains urbanisables dans les zones qui en ont besoin. La construction est à l'arrêt, ce qui met en difficulté à la fois les demandeurs de logement et le secteur du bâtiment et des travaux publics.
Par ailleurs, monsieur le ministre délégué, je me permets de répéter ma question : l'excellent amendement de M. Jean-Paul Mattei, adopté par 227 voix contre 88, soit plus de 70 % des voix, sera-t-il intégré au projet de loi de finances pour lequel vous allez recourir au 49.3 ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
Ces amendements identiques tendent à la fois à moins taxer les plus-values en cas de revente dans les premières années après l'acquisition, et à les taxer davantage sur le temps long. Je ne connais pas le solde de l'opération, et ne sais donc pas si les recettes de l'État en seront affectées. Cette incertitude me met mal à l'aise.
Ensuite, je comprends votre objectif mais je me demande si le dispositif, tel qu'il est prévu dans vos amendements, ne provoquera pas l'effet inverse de celui que vous recherchez : il diminuera la fiscalité sur la spéculation des marchands de biens, dont l'activité d'achat et de vente s'exerce selon des cycles courts, au détriment des foyers, qui gardent majoritairement les biens longtemps, dans l'intention toute simple de constituer un patrimoine personnel et familial.
Ainsi, je trouve qu'une telle mesure est doublement risquée. Avis défavorable.
Avis défavorable.
Il s'agit d'amendements qui feraient perdre à l'État plusieurs centaines de millions d'euros de recettes, qui risquent de perturber profondément le marché immobilier et qui soulèvent une difficulté de cohérence. En effet, les plus-values sur les cessions immobilières sont soumises à la fois à l'impôt sur le revenu (IR) et aux prélèvements sociaux. Par cohérence, il faudra appliquer aux prélèvements sociaux le même dispositif que celui que vous prévoyez dans le cadre de l'IR, ce qui affectera le budget de la sécurité sociale.
Surtout, ce n'est absolument pas votre objectif, mais l'adoption de la mesure serait favorable à la spéculation immobilière.
La parole est à Mme Charlotte Leduc, pour soutenir l'amendement n° 2412 .
Il vise à augmenter l'imposition des terrains à bâtir, proportionnellement au nombre d'années de détention.
Il s'agit de décourager la rétention foncière des terrains à bâtir, qui constitue un frein important, identifié depuis de nombreuses années, à la libération du foncier à un prix abordable, pour y produire les logements nécessaires à la satisfaction des besoins. La réforme repose sur l'instauration d'une augmentation du montant imposé de la plus-value, de 4 % pour chaque année au-delà de la cinquième année de détention, de 8 % au-delà de la dix-septième, puis de 12 % au-delà de la vingt-quatrième année. Il s'agit donc d'augmenter, dans l'IR, l'impôt sur les plus-values immobilières, en particulier au terme de vingt-deux ans de détention.
Il est juste que la collectivité retrouve une partie de la plus-value qu'elle a elle-même produite en ouvrant un terrain à la construction et en investissant dans les réseaux urbains pour le desservir.
Parmi les auteurs des différents amendements consacrés à la fiscalité des plus-values, certains veulent diminuer celle-ci, d'autres l'augmenter. Selon moi, il faut maintenir l'équilibre existant.
Comme nous l'avons dit il y a un instant, si vous baissez l'imposition en cas de détention courte, vous facilitez la spéculation ; si vous l'augmentez sur les détentions longues, vous pénalisez les foyers français qui constituent un patrimoine tout au long de leur vie.
À ceux qui veulent baisser la fiscalité, je réponds que la forte augmentation que le foncier a connue ces dernières années implique une importante augmentation de la plus-value. D'un autre côté, alourdir la fiscalité avec le temps risque de favoriser l'artificialisation des sols, ce qui n'est pas votre objectif.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Nous défendons cet amendement parce que nous avons reçu de nombreux retours à ce sujet ; nous avons évoqué hier la crise à laquelle sont confrontés les professionnels pour bâtir.
La spéculation concerne l'immobilier bâti, mais également le foncier, en particulier le foncier urbanisable. Or, comme plusieurs députés l'ont souligné, nous devons aussi prendre en considération l'enjeu de la lutte contre l'artificialisation des sols. Il faut utiliser l'emprise foncière qui existe pour construire, plus particulièrement du logement abordable et social, quand c'est nécessaire. Il est donc important d'adopter ce dispositif.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 2412 n'est pas adopté.
Il a été adopté contre l'avis du rapporteur général. Je laisse M. de Courson défendre l'amendement identique.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 1879 .
Pourquoi supprimer l'abattement sur les plus-values réalisées au titre des cessions de biens immobiliers situés dans des communes soumises à une importante pression immobilière ? Tout simplement pour lutter contre les phénomènes de spéculation qui sévissent dans certains territoires, qui connaissent une tension particulière liée aux résidences secondaires. En effet, les abattements s'exercent dès la fin des cinq premières années de détention.
La commission des finances a soutenu cette proposition. M. le ministre délégué sera content, puisque la mesure lui rapportera un peu d'argent.
L'adoption de l'amendement aurait pour conséquence, une fois de plus, d'augmenter significativement les prélèvements obligatoires, donc les charges, qui pèsent sur les Français.
De plus, loin d'augmenter le nombre de transactions, ce dispositif risque de geler le marché immobilier dans les zones tendues. Une fois de plus, je comprends votre objectif, mais je crains que l'amendement ne permette pas de l'atteindre. La majorité des logements concernés appartiennent au patrimoine de foyers, résultat de l'investissement d'une vie. Alourdir la fiscalité de Français qui deviennent propriétaires et gardent leur bien n'enverrait pas un bon message.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Comme j'ai soutenu hier l'amendement n° 475 , également défendu par le groupe LIOT, je soutiens ces amendements. Le n° 3125 a été adopté par la commission des finances.
Tout ce qui peut être fait pour lutter contre la spéculation dans les zones où le nombre de résidences secondaires exerce une pression élevée est bénéfique. Ces résidences ne sont pas toujours celles de gens qui s'installent après une vie de travail : elles sont aussi des investissements spéculatifs pour des locations saisonnières. Dans ces zones, certains résidents ne peuvent plus se loger à cause du renchérissement des prix. Je l'avais dit par avance : j'appuie tous les amendements allant dans le sens de cette lutte, d'autant qu'ils représentent des économies pour l'État.
Je remercie M. de Courson de se préoccuper de mon bonheur : je suis toujours ravi d'enregistrer des recettes supplémentaires, mais je le suis moins lorsque c'est au prix d'une augmentation individuelle forte des impôts des Français, en l'occurrence de propriétaires, parfois détenteurs d'un bien familial. Pour ces raisons, je suis défavorable à ces amendements.
Mme Christine Pires Beaune applaudit.
D'une petite minorité ! Tous les Français ne spéculent pas avec leur résidence secondaire. Seules 10 % des familles en possèdent une ; celles qui spéculent avec constituent une minorité dans cette minorité et ne représentent pas les Français. La commission des finances a adopté cet amendement à une forte majorité en raison des problèmes dans les zones tendues dans lesquelles il s'appliquerait.
L'amendement ne cible pas les résidences secondaires, mais tous les biens immobiliers. Il se limite certes à un certain zonage, mais il ne vise pas exclusivement les résidences secondaires.
La réglementation fiscale ne différencie pas les résidences principales des résidences secondaires. Mais, monsieur le ministre délégué, vous connaissez la loi : les résidences principales bénéficient d'une exonération totale !
Le présent amendement est une petite pierre dans un arsenal qui permettrait de lutter contre la désertification médicale et l'engorgement des urgences, notamment en zone rurale. Il vise à exonérer d'impôt les revenus issus de l'exécution par les médecins de la mission de service public de permanence des soins dans les zones sous-dotées – c'est-à-dire les gardes. Actuellement, l'exonération des revenus de ces gardes est limitée à soixante jours par an. Certains médecins ne vont pas au-delà pour ne pas payer plus d'impôts, ce qui n'a pas d'intérêt pour eux. L'amendement vise à supprimer cette limitation.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Je partage votre objectif, mais l'élargissement sans limite de cette exonération fiscale aurait un coût. De plus, je ne suis pas certain que cette mesure soit déterminante. Nous en avons parlé à de nombreuses reprises : le nombre de médecins est hélas limité et je ne crois pas que votre proposition permettrait de l'augmenter, même dans les zones sous-dotées. Avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Je ne suis pas certain que les personnes qui n'arrivent pas à obtenir de rendez-vous médical et à se soigner ou qui ne sont pas prises en charge à temps – je le constate dans ma circonscription – ne coûtent finalement pas plus cher à la société et n'augmentent pas les dépenses publiques. Leur prise en charge précoce permettrait d'éviter des surcoûts à la société. Cet amendement produirait peut-être une petite dépense à court terme, mais une économie à long terme.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Nous ne soutiendrons pas cet amendement ; je me range à l'avis du rapporteur général. Le problème de l'installation des médecins en zones rurales et des déserts médicaux ne se résume pas à un enjeu financier. Je vous invite à demander à votre ARS (agence régionale de santé) la liste des mesures incitatives pour l'installation de médecins : elle est longue comme le bras.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
L'amendement n° 374 n'est pas adopté.
Il vise à maintenir le dispositif instauré pour protéger les petites entreprises. La hausse du coût des matières premières et des énergies est un obstacle au développement – voire à la survie – de certaines des plus petites entreprises, dont nous connaissons l'importance pour l'économie. Dans ma circonscription du Gard, de nombreuses petites structures, notamment agricoles et viticoles, sont mises à mal par la crise. Les aides de l'État aux PME sont bien souvent maigres. Les plus petites entreprises peuvent cependant compter sur une exonération des plus-values jusqu'à un certain plafond. Mais contrairement à de nombreuses subventions ou allocations, celui-ci est figé. En raison de l'inflation, il a tendance à s'abaisser de plus en plus au fil des mois.
L'amendement vise à réévaluer le plafond d'exonération des plus-values des petites entreprises le 1er janvier de chaque année, en fonction de l'indice mensuel des prix à la consommation, en l'arrondissant à l'euro le plus proche. Cette mesure de pragmatisme économique serait aussi une façon de montrer que la représentation nationale se tient aux côtés des petites entreprises.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 934 .
Les plafonds d'exonération des plus-values sont fixes et ne sont pas réévalués. Ce problème se pose dans de nombreux domaines fiscaux. L'objectif de l'amendement consiste à indexer les plafonds, surtout dans une période de forte inflation. Lorsque celle-ci était de 0,5 % ou 1 %, la fixité des plafonds n'était pas très grave, mais maintenant qu'elle atteint les 6 % ou 7 %, il faut les réévaluer. De cette manière, nous n'aurons pas à en discuter chaque année.
Il s'agit d'indexer le plafond d'exonération des plus-values des petites entreprises. Si l'on veut maintenir et favoriser ces dernières sur le territoire, il faut réévaluer ce plafond en application de l'indice mensuel des prix à la consommation. M. de Courson vient de le dire : quand l'inflation était faible, le mécanisme ne posait pas particulièrement problème, mais depuis le début de l'année 2022, c'est une autre histoire.
Par souci de transparence, je précise que l'amendement a été proposé par la CNAOC.
L'amendement n° 2897 de M. Benjamin Dirx est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Les amendements proposent de rehausser les plafonds de manière significative, en les indexant sur l'indice des prix à la consommation (IPC). J'y suis défavorable si une différence n'est pas faite entre la fiscalité s'appliquant au moment de la retraite, qui est très favorable puisqu'elle permet la constitution d'un capital-retraite – il est normal que nous fassions là un effort important – et la fiscalité s'appliquant lors d'une cession ordinaire. Il est primordial de conserver cette différenciation.
S'agissant de l'indexation, la dernière réévaluation date de 2016 : il y a certainement une petite érosion, mais votre proposition aurait un coût pour le budget de l'État. Enfin, l'IPC n'est pas toujours orienté à la hausse ; en raison du risque de ralentissement, voire de récession mondiale, au cours des deux prochaines années, il pourrait être orienté à la baisse. Je ne suis pas certain que c'est que vous souhaitez. Avis défavorable.
Dans le cadre du plan Indépendants et de la dernière loi de finances, nous avons pris une mesure très forte en doublant le plafond d'exonération des plus-values. S'agissant de l'indexation, je partage les arguments du rapporteur général. En des temps où les coûts et les prix augmentent, il peut sembler attractif d'indexer des plafonds à ces indices, mais dans l'hypothèse d'un retournement de conjoncture, nous risquons de le regretter, car l'indexation serait alors au détriment des entreprises concernées.
Nous ne sommes pas favorables à ces amendements, qui ne sont pas le bon outil pour aider les TPE (très petites entreprises) et les PME (petites et moyennes entreprises).
Par ailleurs, je me demande à quoi sert ce débat. Compte tenu du recours possible au 49.3, nous sommes un peu embêtés : nous siégeons, nous essayons de faire progresser les discussions, tout en se demandant quand il surviendra. Qu'allez-vous faire des amendements examinés, qu'ils aient été adoptés ou non ? Je referme cette parenthèse, qui n'est pas petite.
L'essentiel du sujet, ce sont les 150 milliards d'euros, identifiés par une étude, qui ont été donnés aux entreprises en 2019 par la Macronie – par le Gouvernement précédent, mais la logique n'a pas changé – et captées par les plus grandes d'entre elles. Le problème majeur, ce sont les aides, ciblées sur les grandes entreprises au détriment des plus petites, et une fiscalité qui reste profondément injuste.
Ce n'est pas avec un petit levier sur les plus-values que nous allons régler les problèmes des TPE et des PME, ni résoudre l'injustice absolue des politiques publiques, au service des grands groupes ayant le moins besoin d'aides et au détriment du tissu de TPE et de PME que nous devrions conforter et préserver. L'enjeu est réel, mais l'outil n'est pas le bon.
Puisque l'enjeu est réel, si nous le traitons sérieusement et que nous parvenons à dégager des majorités favorables aux TPE et aux PME, qu'en ferez-vous après le recours au 49.3 ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je tiens à préciser un point, pour conforter les propos du ministre délégué et du rapporteur général. Afin de ne pas laisser croire que nous ne faisons rien pour les TPE et les PME, je rappelle que lors de la précédente législature, nous avons adopté deux mesures. Premièrement, le rehaussement des seuils d'exonération des plus-values sur les cessions de fonds de commerce, de 300 000 à 500 000 euros pour les exonérations totales et de 500 000 à 1 million d'euros pour les exonérations partielles. Cette mesure, très utile, concerne des fonds de commerce de TPE : boulangeries, professions libérales, métiers d'artisanat, etc.
Deuxièmement, l'amortissement des fonds de commerce, qui aide concrètement à la reprise. Cette mesure, votée dans le cadre de la précédente loi de finances, incite à la reprise de fonds de commerce, qui peut être difficile dans certaines communes, notamment dans les villages. Je partage les avis du rapporteur général et du ministre délégué ; plusieurs mesures ont été prises et il est peut-être préférable d'attendre d'en évaluer les impacts.
Au-delà de notre soutien évident à ces amendements, je voudrais m'adresser à La France insoumise et à la NUPES : depuis le début de l'examen du projet de loi de finances, vous évoquez l'article 49.3 de la Constitution quasiment à chaque intervention. Pour des insoumis, vous êtes soumis au Gouvernement et à la chape de plomb que représente le recours au 49.3 !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Pouvons-nous débattre, pour les Français ? Oubliez le 49.3 : s'il survient, soit, mais au moins aurons-nous débattu et exposé nos idées.
Vous tournez en boucle sur ce sujet, vous êtes soumis à ce que le Gouvernement essaie de faire comme vous l'avez été lors de l'élection présidentielle, en appelant à voter pour Emmanuel Macron. Vous êtes complètement soumis au Gouvernement ! Est-ce qu'on peut débattre du fond et cesser de mettre le 49.3 sur la table ? Lorsque Mme Borne viendra le présenter, il sera temps d'en débattre. En attendant, débattons pour les Français.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je vous remercie de bien vouloir défendre les amendements au fond.
La parole est à M. Charles de Courson.
L'argument du rapporteur général consistant à dire qu'il ne faut pas indexer le seuil parce que si un jour l'inflation ralentit, les seuils de recettes baisseront, ne tient pas. Si l'inflation devient négative, les plus-values se contracteront car nous serons en crise.
Les amendements n° 1409 de M. Nicolas Forissier et 686 de Mme Isabelle Valentin, pouvant être soumis à une discussion commune, sont défendus.
Il vise à actualiser les seuils d'exonération des plus-values des entreprises agricoles, inchangés depuis bientôt vingt ans, afin de tenir compte de l'évolution de leur chiffre d'affaires qui a augmenté dans des proportions beaucoup plus importantes que le résultat moyen, qui n'a progressé que de 0,2 %. Il s'agit de remédier à une déconnexion entre la définition initiale de petite entreprise et la réalité de leur chiffre d'affaires. L'objet du dispositif d'exonération des plus-values était d'aider les petites entreprises. Or son efficacité diminue.
Il y a vingt ans, le législateur, dans sa sagesse, a souhaité exonérer d'impôt les plus-values des petites exploitations agricoles. Il a bien fallu fixer un seuil – 250 000 euros de chiffre d'affaires – au-dessous duquel une exploitation agricole était considérée comme une petite exploitation. Nous proposons d'actualiser ce seuil, fixé il y a vingt ans, et de l'augmenter à 350 000 euros. Comme l'a très bien dit notre collègue Vincent Descoeur, le souci est que le chiffre d'affaires de certaines exploitations a augmenté alors que leur revenu a stagné voire diminué. Notre proposition est de bon sens, elle ne vise pas à révolutionner le dispositif mais à l'actualiser.
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour soutenir l'amendement n° 765 .
Pour compléter les propos de mes collègues, l'actualisation des seuils d'exonération des plus-values pour les exploitations agricoles est essentielle. En effet, les exploitations ont tendance à se concentrer. Leur taille, et donc leur chiffre d'affaires, augmentent, alors que leurs résultats progressent très peu. Si l'on veut que la profession agricole reste attractive auprès des jeunes qui prendraient la relève, il faut prendre en considération cette situation.
Il faut également tenir compte de l'inflation qui touche le prix des intrants, des carburants et des machines qui concourent à la production. Si l'on veut que demain, la profession soit attractive et que les agriculteurs puissent investir dans les transitions écologique ou agronomique, il est nécessaire de revoir ces seuils qui ne sont plus du tout d'actualité.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 1052 .
Mes collègues ont tout dit. Les seuils n'ont pas été réévalués depuis presque vingt ans.
Vous allez avancer l'argument, que vous avez déjà opposé à l'occasion de l'examen d'un précédent amendement, selon lequel la loi de finances initiale pour 2022 a prévu la réévaluation de 66 % des seuils d'exonération des plus-values en cas de transmissions ou lors du départ à la retraite de l'exploitant. Réévaluons-les également pour les autres types de plus-values. L'absence de réévaluation de ces seuils depuis vingt ans n'est pas tenable.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 3272 .
J'imagine que M. le ministre délégué nous dira que la loi de finances initiale pour 2022 a prévu la réévaluation de 66 % des seuils d'exonération des plus-values. Mais cette disposition ne s'appliquait qu'aux transmissions ou aux ventes. Nous évoquons un autre sujet. Les seuils d'exonération proposés, s'appliquant à des plus-values qu'on pourrait qualifier de courantes, sont calibrés et raisonnables. Ce dispositif contribuerait à accompagner la transition énergétique de nos exploitations agricoles, qu'on doit encourager ; il convient donc de l'adopter.
Je suis désolé d'être prévisible mais, effectivement, l'année dernière, nous avons réévalué les seuils en cas de départ à la retraite, en prévoyant une exonération totale jusqu'à 500 000 euros et partielle jusqu'à 1 000 000 d'euros. Il est très important de distinguer la cession simple de celle pour départ à la retraite. En effet, le départ à la retraite constitue une forme de capitalisation, afin de constituer une épargne pour la retraite.
Même si je partage le souci de protéger nos agriculteurs et leurs exploitations, l'imposition des plus-values des agriculteurs serait différente de celle des petits commerçants. Dès lors, pourquoi ne pas étendre ce dispositif aux petits commerçants ? Je recommande donc de ne pas modifier ces seuils. Avis défavorable.
L'année dernière, deux dispositifs très importants ont été proposés par la majorité : l'exonération des plus-values lors du départ à la retraite et le doublement du seuil lorsqu'une entreprise est transmise. Telles sont les mesures fortes et ciblées qui ont été prises. Étendre ce dispositif à d'autres types de cession, tout en ne l'appliquant qu'à un secteur particulier, ne me semble pas approprié. Avis défavorable.
Je vous donne un exemple concret. Prenons une exploitation hors transmission. L'agriculteur possède un vieux tracteur dont la valeur comptable est de zéro puisqu'il a été amorti. S'il vend son vieux tracteur, il sera imposé sur la plus-value. Dès lors, il garde son vieux tracteur, alors qu'il aurait pu envisager d'en acheter un neuf qui consomme moins. Telles sont les conséquences absurdes de l'absence d'actualisation, c'est aussi simple que cela. Je vous appelle au bon sens.
S'agissant du dispositif existant, on ne dispose d'aucun renseignement sur le nombre de personnes, notamment d'agriculteurs, qui en bénéficient. Les services de Bercy sont incapables de dire combien de personnes ont profité de cette niche fiscale.
Cela prouve bien que lorsque nous créons une niche, il faut en évaluer l'efficacité. Nous devons connaître le nombre de bénéficiaires.
Nous devons savoir si le dispositif proposé permet de moderniser le parc de véhicules et les équipements des agriculteurs.
Je suis fils d'agriculteur, donc je connais bien la question. Si l'on parvient à nous démontrer que ce dispositif est efficace, il faudrait évidemment relever le seuil. Mais rien ne le prouve. Manifestement, on ne connaît ni l'efficacité de cette niche fiscale ni le nombre de bénéficiaires. On nous demande de relever le seuil alors que nous n'avons aucune visibilité sur le dispositif.
Quand le seuil a été relevé en 2002, il répondait à la situation, il n'est pas sorti du chapeau. Vingt ans après, il est légitime de se poser des questions. Si le dispositif est pertinent, il faut l'adapter.
Je réagis à vos propos, monsieur Labaronne. Il serait intéressant de connaître le nombre d'entreprises qui bénéficient de ce dispositif ainsi que son coût. Bercy dispose de ces éléments puisque chaque entreprise qui veut bénéficier de la mesure prévue à l'article 151 septies du code général des impôts coche une case sur l'imprimé fiscal. M. le ministre délégué, vos services pourraient-ils fournir à la représentation nationale les éléments que nous venons d'évoquer pour réfléchir et améliorer le dispositif, le cas échéant ? Vingt ans après,…
Je soutiens l'effort méthodologique entrepris par notre collègue Labaronne. Indépendamment de toute l'amitié et du soutien dont nous devons faire preuve à l'égard de nos agriculteurs, il faut systématiquement se poser cette question et éviter tous les amendements visant à pérenniser ou à augmenter les seuils sans connaître l'impact de ces dispositifs. C'est un sain précepte de gestion des finances publiques. Nous devrions, collectivement, faire preuve de discipline.
Je m'adresse également ce reproche à moi-même. Monsieur Le Fur, pour une entreprise agricole, le seuil d'exonération lors d'une cession est déjà fixé à 250 000 euros. Je ne sais pas combien coûte un tracteur en Bretagne, mais avec ce montant, dans le Gers, on peut s'en offrir plusieurs. Avis défavorable.
Madame Louwagie, je m'engage à ce que le ministère transmette toutes les informations dont nous disposons sur le sujet. Dans le cadre de la nouvelle méthode, symbolisée par les dialogues de Bercy, nous transmettons toutes les informations demandées par les parlementaires en amont et en aval de l'examen du projet de loi de finances. Ainsi, cette demande sera transmise.
L'amendement n° 2990 , qui a fait l'objet d'un avis de sagesse de la part de la commission et du Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Perrine Goulet, pour soutenir l'amendement n° 3480 .
À l'heure où nous cherchons tous des logements pour nos concitoyens, il est urgent de réformer le régime de l'abattement des plus-values. Actuellement, l'abattement est fonction de la durée de détention : cela contribue à figer le parc immobilier. Cet amendement vise à faire évoluer le régime des plus-values en supprimant l'abattement et en leur appliquant, en contrepartie, le prélèvement forfaitaire unique (PFU), dit flat tax. Ainsi, les vendeurs ne seraient plus incités à attendre vingt ans – parfois vingt-cinq ou trente ans – pour faire circuler le capital immobilier, mais pourraient le faire dès à présent, dans la mesure où la durée de détention n'aurait plus d'importance, le taux d'imposition étant connu dès le départ. Nous sommes convaincus que ce dispositif est le bon.
J'en profite pour répondre aux collègues qui ont évoqué l'hypothèse d'un recours à l'article 49.3 de la Constitution.
Il ne tient qu'à nous, mesdames et messieurs, que cela ne soit pas le cas. Si, ensemble, nous nous montrons capables d'élaborer un budget ,…
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR
…si nous sortons des postures consistant à nous prononcer contre le budget avant même d'en connaître le contenu, il n'y aura pas besoin d'y recourir. Si vous souhaitez que les amendements que nous avons défendus soient retenus, attendez la fin du débat pour adopter une position.
Mêmes mouvements.
Dans ce cas, excusez la lecture non exhaustive que j'en fais. Je constate qu'un certain nombre d'amendements du groupe Dem visent à aligner la fiscalité immobilière sur la fiscalité mobilière.
Nous en avons déjà discuté. D'une part, le régime immobilier actuel – un système de charges et de déductions – ne se caractérise pas par la simplicité en matière de cession. D'autre part, le but de la flat tax est de permettre à notre économie de bénéficier d'investissements supplémentaires : elle ne participe pas de la même logique que celle des plus-values immobilières. Je persiste à dire que les gens qui conservent leurs biens immobiliers ne sont pas des spéculateurs, mais souhaitent, pour la majorité d'entre eux, constituer un patrimoine : il ne faut pas les pénaliser. Avis défavorable.
Vous avez réagi vivement aux propos du rapporteur général qui remarquait que votre amendement visait les plus-values et les transmissions d'entreprises, en indiquant que tel n'était pas le cas. Or, c'est bien ce que propose l'amendement : son exposé des motifs indique qu'il concerne le régime applicable aux particuliers, mais l'analyse juridique du dispositif qu'il propose montre qu'il se réfère aux activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles. Peut-être est-il simplement mal rédigé.
Sur le fond, je partage l'avis du rapporteur général : les réformes de ces dernières années ont pour objectif d'encourager les investissements dans les entreprises et dans l'économie, grâce à une fiscalité avantageuse. Or vous proposez de diminuer la fiscalité immobilière de façon à l'aligner au même niveau, si bien qu'il n'y aurait plus d'effet incitatif, qui a pourtant montré son efficacité ces dernières années : l'activité économique de notre pays, enfin redéployée, en témoigne.
Merci pour vos réponses, monsieur le ministre délégué. L'amendement nécessite sans doute davantage d'expertise, mais son idée est simple : le marché n'est pas assez fluide. Prenons l'exemple d'une personne qui a acheté un bien immobilier à Paris, il y a vingt ou trente ans, pour 1 million d'euros, dont la valeur actuelle se situe entre 20 millions et 30 millions d'euros : le bien est revendu sans taxation de la plus-value. Dans les grandes villes, lorsque le marché est tendu, on constate que les biens immobiliers ne sont pas vendus, puisque l'exonération est fonction de la durée de détention – vingt-deux ans, voire trente ans. Afin de fluidifier le marché, tout en conservant des prix raisonnables, nous proposons de taxer les plus-values immobilières, quelle que soit la durée de détention du bien, sur le principe de la flat tax qui s'applique en matière mobilière. Les transactions seraient ainsi facilitées et l'on éviterait que des biens soient conservés trop longtemps. Cet amendement mérite que l'on en débatte, mais nous le retirons pour le moment.
L'amendement n° 3480 est retiré.
Il vise à vous permettre de faire des économies substantielles, monsieur le ministre délégué, tout en revalorisant le travail. Le système de double imposition est de moins en moins compréhensible pour nos concitoyens. Si l'on a coutume d'évoquer à cet égard la TVA, qui s'applique au montant de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), le présent amendement concerne l'imposition salariale. En effet, les Français paient l'impôt sur le revenu, non pas sur ce qu'ils touchent réellement à la fin du mois – le salaire net –, mais sur le net imposable ou fiscal. Le montant du salaire imposable comprend en effet une part de la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). L'amendement vise à sortir de ce système, de façon que l'imposition porte sur le salaire net, et non plus sur le net fiscal.
Le coût de cette mesure, non négligeable, s'élèverait à 2,7 milliards d'euros. En parallèle, il est proposé de surseoir au projet d'automatisation du RSA prévu par le Gouvernement – l'année prochaine ou après la phase d'expérimentation –, qui engendrerait un coût supplémentaire de 3 milliards d'euros. En suivant la stratégie que je vous propose, vous ferez, au final, 300 millions d'euros d'économies.
Si je reconnais votre habileté, monsieur le député, que personne ne se trompe sur la finalité de cet amendement, qui, s'il était adopté, reviendrait à un coût colossal – de l'ordre de 2 milliards d'euros – pour les finances publiques. Il y a une raison historique et une vraie logique à l'existence d'une part de CSG déductible et d'une part non déductible. Nous avons déjà eu cette discussion à de nombreuses reprises. La CSG déductible est venue en remplacement de cotisations qui étaient elles-mêmes déductibles, afin de ne pas pénaliser nos concitoyens. En revanche, l'idée initiale de Michel Rocard, lorsqu'il a instauré la CSG non déductible – passée du taux de 0,9 % au départ, à celui de 2,4 % –, était de toucher l'intégralité des revenus. Nous maintenons simplement l'esprit et le rendement de cette cotisation.
La double imposition, qui peut heurter,…
…est quant à elle présente partout. Ainsi, vous payez non seulement un impôt sur le revenu, mais aussi la TVA sur vos dépenses de consommation, ce qui est également, d'une certaine manière, une double taxation.
Avis défavorable, ne serait-ce que pour préserver les finances publiques.
Au-delà des arguments historiques et de principe du rapporteur général, le coût pour les finances publiques du dispositif proposé par M. Di Filippo est estimé à 5,3 milliards d'euros.
Nous estimons avec précision le coût des dispositifs de tous les amendements. Vous considérez que celui que vous proposez est gagé sur une réforme du RSA, alors que sa lecture indique qu'il l'est en réalité sur le prix du paquet de cigarettes, qui passerait ainsi à vingt-cinq ou à trente euros.
Vous le savez bien, je n'ai pas besoin de vous expliquer comment cela fonctionne !
Cela montre bien que la mesure que vous présentez n'est pas financée.
Je reviens sur vos propos, monsieur le rapporteur général, lorsque vous dites que le dispositif actuel est logique : non. Comment expliquer à un contribuable qu'il paye un impôt sur une base dont il ne dispose pas intégralement en trésorerie ?
Il n'y a aucune logique à cela. Cette discussion est importante, car il y va du consentement à l'impôt. Soyons clairs, si vous êtes défavorables au dispositif proposé – M. le ministre délégué l'a indiqué –, c'est parce qu'il a un coût. L'exemple que vous avez pris pour illustrer le fait qu'il existerait plusieurs impôts du même type est faux : la TVA n'est pas un impôt payé sur un revenu, mais sur un acte de consommation, ce qui est complètement différent. Dites-nous clairement que vous rejetez le dispositif en raison de son coût – 5,3 milliards d'euros –, actuellement à la charge des contribuables qui paient un impôt sur un revenu dont ils ne disposent pas !
L'amendement pose un autre problème : il ne traite que de la situation des salariés, dont l'assiette d'imposition serait modifiée. Or la CSG, y compris dans sa part non déductible, frappe d'autres revenus. Qu'en est-il de ces derniers ? Cette question n'est pas réglée. La disposition créerait donc une inégalité devant l'impôt, avec un risque d'inconstitutionnalité.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement n° 2808 .
Il tend à créer une contribution de solidarité nationale, qui serait due par nos concitoyens dont le domicile fiscal est situé hors de France. Elle serait assise sur la seule fraction du revenu dépassant quatre fois et demie le plafond de la sécurité sociale, soit deux fois le revenu moyen des Français de l'étranger. Elle concernerait donc les plus hauts revenus, avec un taux progressif de 10 % pour les revenus compris entre 4,75 et 5,5 fois le plafond annuel de la sécurité sociale, puis de 20 %, 30 % et 40 % pour les revenus les plus élevés. Seraient ainsi assujettis à la contribution ceux de nos concitoyens les plus aisés qui, du fait de leur expatriation, paient moins d'impôts que ceux dont ils devraient s'acquitter s'ils étaient domiciliés fiscalement en France. C'est une mesure de justice. Et puis, c'est un clin d'œil : en émettant un avis défavorable sur un amendement, le rapporteur général avait expliqué que les expatriés devaient garder un lien avec la France ; le présent amendement le permet totalement.
Vous le savez, notre système d'imposition est basé sur la résidence, et non pas sur la nationalité. Le dispositif que vous proposez reviendrait donc à changer radicalement notre doctrine fiscale et à faire en sorte que les résidents étrangers ne paient plus d'impôts en France. Il remettrait en cause un nombre considérable de conventions internationales. Avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Je dois, une fois de plus, monter au créneau pour défendre les Français de l'étranger, qui sont à nouveau caricaturés comme des personnes essayant avant tout d'échapper à l'impôt en France, alors que cela n'est absolument pas le cas. En s'établissant à l'étranger, ils participent au rayonnement de la France dans le monde et travaillent pour nos entreprises, en faveur de la balance commerciale française. Leurs biens immobiliers situés en France et mis en location sont taxés à hauteur de 47 % lorsqu'ils résident hors des frontières de l'Union européenne et au taux de 30 % s'ils sont établis en Europe. Les Français de l'étranger ne méritent donc pas d'être constamment disqualifiés dans cet hémicycle. J'espère que nous voterons tous contre cet amendement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Cet amendement propose d'imposer davantage ceux des Français de l'étranger qui disposent des plus gros revenus, pas tout le monde.
Nous avions, nous, proposé d'instaurer l'impôt universel : celles et ceux qui vivent à l'étranger paieraient au fisc français la différence avec ce qu'ils auraient payé s'ils étaient en France. C'est un système logique.
Vous avez dit, monsieur le rapporteur général, que ce serait un changement radical de notre doctrine fiscale. C'est vrai ! Mais les Françaises et les Français qui vivent à l'étranger jouissent de droits associés à leur nationalité : venir en France pour se faire soigner, par exemple ; et beaucoup ne s'en privent pas.
Si, c'est vrai. Il serait donc logique que les Français vivant à l'étranger contribuent par l'impôt au financement de notre système de sécurité sociale, notamment.
C'est une façon d'ajouter un peu de justice fiscale, ce n'est pas un truc de bolchevique : les États-Unis ont mis en place une forme d'impôt universel. Vous devriez être favorables à cette proposition, qui permet de faire rentrer de l'argent dans les caisses de l'État.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 2808 n'est pas adopté.
J'ai rappelé la règle en début de séance, mes chers collègues : un orateur pour l'amendement, un contre ; éventuellement davantage en fonction des sujets. Nous allons nous y tenir.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour un rappel au règlement.
Le parlementaire qui a défendu l'amendement doit pouvoir reprendre la parole. Il n'est pas compté parmi les deux orateurs pour et contre.
Exclamations sur les bancs des groupes RE et LR.
Il n'y a aucune obligation de redonner la parole au député qui a défendu l'amendement.
Dès lors que nous avons entendu un orateur pour l'amendement et un autre contre, je considère – suivant le règlement – que le débat a eu lieu. Et je fais preuve de souplesse quand les sujets l'imposent.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement n° 2563 .
Cet amendement de Thibault Bazin tend à revaloriser le seuil d'imputation du déficit foncier sur le revenu global ; fixé à 10 700 euros depuis 1995, il passerait à 16 280 euros.
Nous avons déjà débattu de cette question des seuils. Je me fais la porte-parole de Marc Le Fur, qui souhaitait répondre au rapporteur général sur les plus-values agricoles : la limite de 250 000 euros que nous évoquions est bien une limite de chiffre d'affaires, et non de prix du bien – je voulais corriger car il semble qu'il y ait une confusion entre le prix du tracteur et le chiffre d'affaires.
Avis défavorable. L'augmentation de 52 % que vous proposez me paraît excessive, alors que le régime est déjà doublement avantageux : d'une part, les déficits sont imputés sur le revenu global, et pas sur les seuls revenus fonciers ; d'autre part, le surplus éventuel de déficit foncier peut être imputé sur les revenus fonciers des dix années qui suivent.
L'amendement n° 2563 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Avec cet amendement, je vais essayer de vous aider à trouver des solutions à la crise énergétique et à la crise environnementale, et même à la crise économique vers laquelle vous nous conduisez, puisque votre politique risque de provoquer une récession.
Je propose de déplafonner le déficit foncier pour les bailleurs qui mèneraient des travaux de rénovation énergétique dans leurs logements. Aujourd'hui, ce plafond est fixé à 10 700 euros. Or toutes les études nous disent que ce ne sont pas les petits travaux qui ont un impact énergétique : il faut favoriser les rénovations qui touchent à la fois le sol, les murs, les fenêtres, le mode de chauffage… Déplafonner le déficit foncier serait un bon moyen d'aller en ce sens : nous favoriserions les économies d'énergie dans les logements, tout en soutenant l'activité des TPE et PME de nos territoires. C'est donc une mesure vertueuse à la fois sur le plan économique et sur le plan environnemental.
L'amendement n° 2562 de M. Thibault Bazin est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Nous avons déjà débattu de cette question ; il ne paraît pas opportun d'augmenter ces seuils, en raison du coût de cette mesure pour le Trésor public. D'autre part, nous avons changé de logique : au lieu de continuer à agrandir les niches fiscales, nous préférons un soutien actif, très ciblé, à la rénovation des logements, par le biais notamment de MaPrimeRénov'.
Avis défavorable. La part des dépenses au-dessus du plafond de 10 700 euros n'est pas perdue : elle peut être imputée sur les revenus des années suivantes. Le plafond vise à éviter que des contribuables soient amenés, parce qu'ils auraient effectué des travaux très coûteux, à effacer l'intégralité de leur impôt sur une année.
D'autre part, cet amendement n'inciterait pas à mener des rénovations d'ampleur, celles qui permettent de lutter contre les passoires thermiques et les gaz à effet de serre, puisqu'il donne le même avantage que vous passiez votre logement de la catégorie G à la catégorie A, ou simplement de la catégorie G à la catégorie E. Or l'intérêt d'une déduction fiscale est d'inciter à mener des rénovations qui ont un impact fort sur la réduction des consommations.
La majorité se gargarise de MaPrimeRénov' ! Mais venez sur le terrain, vous verrez que ça ne fonctionne pas : les artisans ne sont pas payés, les gens font des dossiers mais finissent par abandonner…
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.
Vous voulez faire de la rénovation des logements votre cheval de bataille, et à juste titre : c'est bien ce qui permet le mieux de diminuer l'empreinte carbone. Mais vous avez voulu un dispositif hypercentralisé, et il ne marche pas.
M. Di Filippo a parfaitement raison : changer seulement les volets ne sert à rien ; il faut soutenir les rénovations globales pour permettre vraiment aux ménages de consommer moins d'énergie, afin d'apporter un début de solution à la crise environnementale.
M. le ministre délégué l'a dit : le déficit est reportable en avant ; vous n'êtes pas limité à 10 000 euros. Ensuite, je souligne qu'il existe énormément de dispositifs qui permettent d'imputer des travaux – la location meublée non professionnelle, par exemple.
Nous sommes très conscients des difficultés rencontrées par nos artisans, comme l'a dit notre collègue du Rassemblement national…
Attention, je pourrais le prendre comme une insulte ! Renseignez-vous !
Ces difficultés ne sont pas dues à l'absence d'un dispositif fiscal ou à un plafond fiscal trop bas. Elles sont dues aux problèmes de matières premières, à l'inflation…
Évidemment, la situation est difficile, et nous essayons de lui apporter des réponses. Mais il ne faut pas tout mélanger.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 138
Nombre de suffrages exprimés 131
Majorité absolue 66
Pour l'adoption 57
Contre 74
L'amendement n° 761 n'est pas adopté.
L'amendement n° 2562 n'est pas adopté.
Cet amendement s'inscrit dans la droite ligne de ceux que nous avons déjà défendus, notamment hier soir : il s'agit de donner un véritable coup de pouce à notre jeunesse. Je sais à quel point il est difficile pour les jeunes, à peine sortis de leurs études, de se lancer dans la vie professionnelle avec un prêt étudiant sur le dos. C'est d'ailleurs bien souvent les Français issus des ménages modestes qui doivent recourir à ces prêts pour financer leurs études et les frais inhérents à celles-ci.
Nous avons tous bien remarqué la pudeur avec laquelle le Gouvernement et la majorité envisagent les dépenses fiscales. Nous avons tous bien remarqué la pudeur que vous éprouvez lorsqu'il s'agit d'aider la jeunesse de France. Il est fort dommage que vous soyez bien moins pudiques en matière d'immigration.
Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Je ne suis pas certain qu'il faille ramener absolument tous les débats à la question de l'immigration – on a compris votre message, on sait que vous pensez que lutter contre l'immigration réglerait tous les problèmes ; ce n'est pas notre position.
Je ne reprendrai pas ici tous les dispositifs fiscaux de soutien aux étudiants et aux jeunes. Je ne m'étendrai pas non plus sur le succès de l'apprentissage : le nombre d'apprentis est passé de 350 000 à 700 000 en deux ans, et nous visons 1 million pour l'année prochaine. Nous soutenons donc largement les jeunes et leur intégration sur le marché du travail.
L'amendement n° 371 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement de coordination de différents dispositifs concernant les plus-values. Il vise à encourager l'investissement et l'accompagnement de nos PME, tout en aidant les Français à se constituer une retraite personnelle.
La loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises, dite loi Pacte, a regroupé deux anciens dispositifs : le plan d'épargne retraite populaire (PERP) et le dispositif Madelin. Parallèlement, elle a créé le plan d'épargne retraite (PER) bancaire, qui vous permet d'investir en actions, mais sur des durées de vie très longues, puisque le PER bancaire est bloqué jusqu'à la retraite.
Nous proposons d'harmoniser ces différents dispositifs en autorisant le déblocage des fonds d'un PER après cinq ans. Dans un contexte fluctuant, il me semble important de pouvoir anticiper une sortie du PER, et donc de réaliser d'éventuelles plus-values exonérées d'impôt plus rapidement.
L'amendement n° 1042 de M. Charles de Courson est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Le plan d'épargne en actions (PEA), comme vous le savez, offre un avantage fiscal à la sortie ; le PER, c'est le contraire : l'avantage fiscal est à l'entrée. Si vous ajoutez au PER l'avantage à la sortie, vous le favorisez considérablement. Or ces deux dispositifs ont deux finalités différentes.
Au-delà du coût supplémentaire, que je ne connais pas mais qui serait certainement très important, je suis donc défavorable à ces amendements.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Cet amendement me donne l'occasion de rappeler que le PER a trois ans, et qu'il a séduit plus de 6 millions de titulaires, deux fois plus que nous ne l'avions envisagé. Les encours s'élèvent aujourd'hui à 70 milliards d'euros. C'est une très bonne nouvelle, puisque le PER a été conçu pour que notre épargne soutienne l'investissement productif.
Je veux également faire remarquer que la loi relative à la déshérence des contrats de retraite supplémentaire, dont je fus l'auteur lors de la précédente législature, a été promulguée et qu'elle est appliquée. Ainsi, en plus des deux informations traditionnelles relatives à la retraite de base et à la retraite complémentaire, le site www.info-retraite.fr en propose désormais une troisième, qui concerne donc les contrats de retraite supplémentaire.
Cette information est importante, car nous savons qu'il existe une déshérence de ce type de contrats de l'ordre de 10 milliards d'euros. En consultant leur compte retraite, les retraités et futurs retraités peuvent ainsi découvrir qu'ils sont bénéficiaires d'un de ces contrats, alors qu'ils l'ignoraient. J'insiste, ce sont jusqu'à 10 milliards d'euros que nous pouvons remettre dans la poche des retraités.
Grâce à ce troisième étage de la fusée, la France est le premier pays européen à offrir aux retraités un système d'information aussi performant s'agissant des contrats d'assurance retraite.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
La parole est à Mme Alma Dufour, pour soutenir l'amendement n° 1735 , sur lequel je suis saisie, par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Par cet amendement, nous proposons d'aller au-delà de ce qui a été adopté hier soir grâce au groupe Démocrate (MODEM et indépendants) et au président Mattei, en supprimant l'abattement fiscal de 40 % sur la taxe sur les dividendes. En effet, alors que la dette de l'État et la pauvreté sont au plus haut dans notre pays, les dividendes versés n'ont jamais été aussi élevés.
Ce n'est pas une coïncidence. Les entreprises du CAC40 ont largement bénéficié du « quoi qu'il en coûte » et ont versé 80 milliards d'euros de dividendes en 2021, alors qu'elles avaient enregistré une chute de moitié de leur résultat net en 2020. Cela signifie qu'elles ont utilisé l'argent de l'État, l'argent de la dette publique, pour rémunérer leurs actionnaires. Avec moitié moins de ces 80 milliards de dividendes, nous aurions pu augmenter les salaires de l'ensemble des Français de 10 %.
En 2022, nous demeurons dans ce système moyenâgeux : 44 milliards d'euros de dividendes ont ainsi été versés rien qu'au deuxième trimestre, alors que 60 % des Français se restreignent en matière de chauffage.
Chaque fois que nous soulevons cette injustice, vous nous répondez que les dividendes sont déjà taxés. C'est en partie faux : les CumEx Files nous ont appris qu'avec la complicité de la Société générale, de BNP Paribas, de Natixis et du Crédit agricole, les personnes ayant perçu des dividendes ont fraudé sur la taxe dont elles devaient s'acquitter à hauteur 33 milliards d'euros en France depuis vingt ans, soit 1,5 milliard d'euros par an. La France est le pays le plus fortement touché par cette fraude massive à la taxe sur les dividendes en raison, d'après Le Monde, de « l'importance de ses marchés financiers ».
Vous avez voulu nier le problème de la répartition des richesses dans la société et il vous revient aujourd'hui en pleine figure avec la pénurie de carburants. Comprenez-le bien, les pannes d'essence proviennent surtout de la panne de décence des actionnaires et des marchés financiers !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'adoption de cet amendement ne vous permettrait pas d'atteindre votre cible. En effet, la majorité des dividendes sont actuellement soumis à la flat tax. Les personnes qui recourent à l'abattement sur l'impôt sur le revenu sont les contribuables dont le revenu est le moins important parmi ceux ayant perçu des dividendes, étant donné qu'elles cherchent à avoir une imposition inférieure à la flat tax. Ce sont exclusivement les contribuables les moins fortunés qui peuvent bénéficier de l'abattement, contribuables qui subiraient une double fiscalisation s'il devait être supprimé. Je le répète, votre amendement ne répond pas à votre objectif. Je lui donne un avis défavorable.
C'est pour cela qu'il faut supprimer la flat tax, qui bénéfice aux riches !
Je rappelle que l'abattement de 40 % sur les dividendes ne s'applique pas lorsque ceux-ci sont soumis au prélèvement forfaitaire unique, dont le taux est de 12,8 % au titre de l'impôt sur le revenu, et qu'il a été maintenu en faveur des contribuables qui optent pour l'imposition de leurs revenus mobiliers suivant le barème progressif, qui n'est qu'une possibilité. L'abattement ne s'applique pas pour la détermination de l'assiette des prélèvements sociaux. Il s'agirait donc d'une mesure injustifiée, et qui ne doit donc pas être adoptée.
Je remercie M. le rapporteur général d'avoir reconnu que la flat tax est un abaissement fiscal qui profite aux riches.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce n'est pas faute de dire depuis plus de cinq ans que vous gouvernez pour les riches. Vous venez d'en faire l'aveu : nous attendions davantage de sincérité dans ce débat budgétaire, mais nous vous remercions au moins de cette reconnaissance.
Cela étant dit, le présent amendement est une mesure de justice fiscale, non pour opposer les personnes qui soumettent leurs dividendes à la flat tax à celles qui le font au barème général, mais pour demander – purement et simplement – que les dividendes, c'est-à-dire les revenus du capital, soient taxés de la même manière que ceux du travail.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous encouragez, soutenez, facilitez, défiscalisez les revenus du capital, mais quand il s'agit d'augmenter les revenus du travail, là vous laissez faire et n'intervenez pas ! Nous défendons le travail ; vous défendez le capital. J'insiste, vous êtes un gouvernement au service du capital et nous vous remercions d'en avoir fait l'aveu. Nous voterons cet amendement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Christine Arrighi et M. Nicolas Sansu applaudissent également.
Nous avons ces échanges régulièrement et, selon moi, vous vous trompez non seulement de cible – M. le rapporteur général l'a dit –, mais presque de combat. Pardonnez-moi de le rappeler : c'est le système monétaire qui veut cela. À titre personnel, je ne défendrai jamais la financiarisation de l'économie mondiale, qui a lieu depuis les accords de la Jamaïque de 1976, mais le fait est qu'aucun État membre du FMI – Fonds monétaire international – ne peut depuis se permettre de faire tourner la planche à billets. Le keynésianisme, tel qu'il a été pensé et largement pratiqué durant les Trente Glorieuses, n'est plus possible.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Cela envoie la France dans le mur – rappelez-vous ce qui s'est passé en 1981.
Pour financer notre économie, nous avons besoin d'attirer des capitaux privés et il est vrai que nous sommes prisonniers du système monétaire dans lequel nous sommes.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Le combat que vous menez, et qui est à mon avis parfaitement légitime, demanderait pratiquement d'adopter une réforme des statuts du FMI.
Pour revenir à Keynes qui, en 1944, proposait la constitution d'un panier de monnaies, cela ressemble à ce que défendent les Chinois aujourd'hui.
En attendant, pénaliser la rentabilité des capitaux sur le territoire national nous conduirait dans le mur. Aussi, ne dites pas que nous privilégions les capitaux et les riches :
« Si ! » sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES
nous tenons simplement compte, avec réalisme, du fait que nous dépendons de créditeurs internationaux pour payer nos fonctionnaires, et nous créons de la richesse pour financer notre modèle social. Arrêtez de dire que nous sommes contre les pauvres et pour les riches, car c'est complètement faux, caricatural et simpliste.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 189
Nombre de suffrages exprimés 189
Majorité absolue 95
Pour l'adoption 47
Contre 142
L'amendement n° 1735 n'est pas adopté.
Ils portent sur le dispositif des BSPCE – bons de souscription de parts de créateur d'entreprise –, qui encourage les salariés à entrer au capital de leur entreprise et leur permet de bénéficier de sa réussite financière après y avoir contribué. Les BSPCE sont très importants dans la guerre des talents française et mondiale à laquelle participent nos entreprises innovantes, nos entreprises du secteur des nouvelles technologies et, plus particulièrement, nos start-up de la French Tech.
L'amendement n° 3013 a trait à l'équité devant l'impôt, en ce qu'il vise à étendre le régime fiscal favorable des BSPCE – qui sont soumis au PFU – aux salariés ayant moins de trois ans d'ancienneté dans l'entreprise, afin que les jeunes soient mis au même plan que les moins jeunes, étant entendu que les nouvelles recrues sont souvent moins âgées que les personnels déjà en poste. Je vous propose donc d'enlever cette condition et de rendre l'impôt plus équitable.
S'agissant des amendements n° 3017 et 3016 , ils visent à corriger des seuils devenus obsolètes depuis la création des BSPCE.
Je commencerai par le n° 3016, qui tend à autoriser l'attribution de BSPCE au sein d'entreprises existant depuis plus de quinze ans, seuil actuellement en vigueur. Ce seuil était peut-être utile au moment de la création des BSPCE, mais maintenant que notre écosystème de start-up de la French Tech s'est développé et a gagné en maturité, beaucoup d'entre elles approchent de ce niveau d'ancienneté, certaines l'ayant même dépassé. Ces entreprises vont ainsi être exclues du dispositif, ce qui induit un certain nombre de difficultés. En conséquence, je vous propose de porter le seuil à trente ans d'existence.
Quant à l'amendement n° 3017 , il vise à revenir sur l'interdiction d'attribuer des BSPCE pour les start-up détenues à plus de 75 % par des fonds d'investissement. Nous le savons, au fur et à mesure du développement d'une entreprise, un nombre croissant d'investisseurs entrent au capital, au point de nécessairement dépasser ce seuil de 75 % de l'actionnariat. Je propose donc de le porter à 95 %, afin de permettre à nos start-up déjà développées et à nos licornes de continuer à utiliser le dispositif très utile des BSPCE.
Comme vous, nous voulons soutenir notre économie et nos start-up, mais ces amendements, du moins le n° 3013, me semblent contraires à l'objectif de fidélisation des salariés dans ce type d'entreprises, qui est sous-jacent à l'attribution de bons de souscription de parts de créateur d'entreprise. La plus-value de ce type de bons lors de leur cession est actuellement soumise à l'impôt sur le revenu au niveau du PFU, soit à 12,8 %, à la condition de les détenir depuis plus de trois ans. En cas de vente avant cette échéance, un taux de 30 % est appliqué, lequel n'a pas été modifié lorsque nous avons instauré le PFU. Étant défavorable à la réduction de la taxation lors des cessions de BSPCE intervenues avant trois ans de détention, je vous demande de bien vouloir retirer ces amendements.
Je vous remercie, monsieur Midy, de vous mobiliser sur la question du développement de nos start-up, notamment du secteur des nouvelles technologies, et de nous interroger sur la pertinence de nos dispositifs de partage de la valeur dans ce type d'entreprises. Il s'agit d'un vrai sujet et je vous propose que nous y travaillions ensemble, dans les mois qui viennent, afin de voir si une adaptation de nos dispositifs serait utile. Dans cette attente, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut de quoi mon avis sera défavorable.
Je remercie M. le rapporteur général et M. le ministre délégué pour leur réponse. Je retire l'amendement n° 3013 et laisse la parole à ma collègue Chandler qui, je crois, souhaite s'exprimer sur les deux autres.
L'amendement n° 3013 est retiré.
Ces amendements visent à adresser un signe à nos jeunes. En effet, la richesse d'un pays est sa jeunesse et c'est de la jeunesse que viendra l'innovation.
Pour moi comme pour beaucoup, la politique sert à aménager notre pays pour les générations futures. J'estime que ces amendements permettraient à nos jeunes de développer des projets fondamentaux pour l'économie de demain et libéreraient l'innovation des Français, de sorte que la France soit un acteur de son propre avenir.
La demande de retrait de ces amendements me semble justifiée. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que les BSPCE et les différentes modalités de répartition de la valeur sont très importants pour l'attractivité de nos start-up, mais nous savons aussi comment les choses se déroulent dans la réalité.
Quand vous montez une start-up, vous attribuez des bons de souscription en vendant à vos premiers employés le fait qu'ils détiendront ainsi une partie du capital et qu'ils seront associés au succès de l'entreprise, plus tard, lors de sa vente – du moins c'est ce qui est espéré. Cependant, dans la réalité, les BSPCE ne sont pas monétisables avant une très longue durée. Une entreprise met en effet du temps à atteindre sa maturité et l'entrée en bourse ou du moins le succès d'une start-up ne sont pas fréquents.
Donc, la plupart du temps, vous détenez des BSPCE et, si vous quittez l'entreprise au bout de trois ou quatre ans pour poursuivre votre carrière ailleurs, il vous faut acheter – à un coût très inférieur certes au coût en vigueur – vos actions, actions d'une entreprise qui n'a aucune liquidité et sur l'avenir de laquelle on n'a aucune certitude. Si bien qu'il est courant, dans ces conditions de ne pas exercer ses BSPCE et de sortir de l'actionnariat de l'entreprise.
Il me semble donc que nous devons revoir ce type d'outil et envisager peut-être une souscription d'actions gratuites ou un allongement des délais de portage. Quoi qu'il en soit, ces amendements ne me paraissent pas la meilleure option.
Les BSPCE sont d'autant plus essentiels qu'ils sont de plus en plus exercés, compte tenu de la croissance de notre écosystème de start-up…
Monsieur Midy, un orateur pour et un orateur contre se sont déjà exprimés. Je souhaitais juste savoir si vous retiriez vos amendements.
La parole est à M. Nicolas Meizonnet, pour soutenir l'amendement n° 587 .
Cet amendement porte également sur les BSPCE, qui sont un outil précieux pour le développement de nos PME, notamment les start-up. Ils encouragent les salariés à s'investir dans leur entreprise, ce qui permet à la fois de dynamiser l'entreprise et de lui procurer des financements supplémentaires. Il est bien souvent difficile pour une PME française de faire face aux nombreux obstacles fiscaux, administratifs ou juridiques, et le régime des BSPCE fait partie des bonnes mesures qui contribuent à rendre notre pays plus attractif et à créer de l'emploi.
Pour l'instant, ce régime concerne les entreprises dont les bénéfices sont inférieurs à 50 millions d'euros, avec une tolérance de trois ans lorsqu'elles dépassent ce montant. Nous proposons d'étendre cette durée à cinq ans pour les PME technologiques.
La question du financement est l'un des plus grands défis auxquels sont confrontées les start-up. En adoptant cette mesure, nous renforcerions un outil qui a montré son efficacité dans cette période difficile où, tandis que les grands groupes prospèrent, les plus petites structures sont à la peine. Cela témoignerait de notre détermination à créer un écosystème favorable à l'émergence de nouvelles entreprises.
Sur l'amendement n° 3127 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale et le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 587 ?
Je comprends l'objectif de cet amendement, mais ce dispositif fiscal très avantageux est réservé aux jeunes entreprises en phase de croissance. En faisant sauter ces deux conditions, vous élargissez considérablement la cible, ce qui aurait un coût considérable pour le Trésor public. Avis défavorable.
La tolérance légale actuelle, qui prévoit qu'une entreprise peut continuer à attribuer des BSPCE à ses salariés dans les trois ans qui suivent le franchissement du seuil de capitalisation boursière de 150 millions d'euros, vise, en cohérence avec l'objectif du dispositif, à ne pas priver les jeunes sociétés innovantes dont l'essor est rapide et important de la possibilité d'émettre des BSPCE.
La mesure que vous proposez reviendrait, en revanche, à autoriser une société immatriculée depuis plus de quinze ans et ne respectant, depuis plus de deux ans, ni la condition de définition par des personnes physiques ni celle du plafond de capitalisation boursière, à émettre des BSPCE, ce qui constituerait une véritable dénaturation du dispositif.
Je rappelle par ailleurs que le régime des BSPCE a, ces dernières années, fait l'objet de plusieurs assouplissements permettant notamment d'étendre son champ aux administrateurs. Il convient d'avoir pu évaluer les effets de cette réforme récente avant de modifier le dispositif. Avis défavorable.
L'amendement n° 587 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à onze heures vingt.
Il s'agit d'un amendement adopté par la commission des finances, contre l'avis du rapporteur général. Je laisse donc la parole à l'un des signataires pour le défendre.
Cet amendement déposé par notre collègue Fabrice Brun et adopté par la commission des finances vise à revenir sur la réforme du dispositif de l'exit tax, intervenue dans le cadre de la loi de finances pour 2019.
Le dispositif de l'exit tax, instauré sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy alors Président de la République, visait à empêcher une forme d'évasion fiscale qui consiste, pour un chef d'entreprise ou un actionnaire détenant un nombre important d'actions, à modifier sa domiciliation fiscale et à quitter le pays afin de ne pas payer la plus-value lors de la cession, ensuite, desdites actions. Sans remettre en cause la propriété de l'entrepreneur ou de l'actionnaire, ce dispositif avait pour objectif, je le répète, d'éviter l'évasion fiscale.
Le propriétaire des actions s'engageait à les conserver pendant un délai de quinze ans, au terme duquel – selon le dispositif Sarkozy – il obtenait un remboursement ou, s'il avait bénéficié d'un sursis de paiement sur autorisation du fisc, une non-imposition définitive. Ce délai a été rapporté en 2019 à deux ans, rendant le dispositif inefficace.
C'est pourquoi nous proposons, dans un souci de régulation – être libéral, c'est aussi savoir réguler – de revenir au délai de quinze ans, tel que prévu à l'époque de Nicolas Sarkozy.
L'amendement n° 1106 de M. Fabrice Brun est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Vous souhaitez rétablir l'exit tax telle qu'elle existait jusqu'en 2018. Le débat parlementaire de l'époque avait pourtant démontré son effet délétère sur l'image de la France et son attractivité en matière d'investissements, ainsi que le rendement très limité de ladite taxe. C'est pourquoi l'exit tax avait été recentrée, afin d'éviter les abus.
Le délai a effectivement été ramené à deux ans ou cinq ans selon les cas. Notre objectif est de lutter contre les abus, tout en faisant en sorte que la France reste attractive aux yeux des investisseurs, qui doivent pouvoir investir sans risquer, à leur départ, une fiscalisation trop importante. Avis défavorable.
C'est avec plaisir et conviction que je défends cet amendement de la commission des finances, en saluant l'initiative – comme souvent opportune – de M. Fabrice Brun et de ses collègues, notamment M. Nicolas Forissier.
Je pourrais reprendre quasiment l'exposé des motifs. Rappelons que le précédent quinquennat, notamment à ses débuts, a été marqué, au nom d'une politique du ruissellement, par un allègement considérable de la fiscalité appliquée aux Français les plus riches, notamment les détenteurs de gros capitaux : suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ou encore instauration de la flat tax. De ce fait, les 200 personnes les plus riches ont gagné au cours de l'année 2020 plus de 1,5 million d'euros, comme le mentionne l'exposé des motifs de M. Brun. Il y est également rappelé que 0,01 % des plus riches ont vu leurs contributions totales passer de 52 % en 2016 à 46,6 % en 2018.
L'effort national, alors que les moments à venir seront difficiles, nous le savons tous, doit être réparti. Parmi les mesures qui ont avantagé la fiscalité des plus riches, figure l'affaiblissement considérable du dispositif de l'exit tax, créé par Nicolas Sarkozy lors de son quinquennat.
Je suis un peu étonné, M. le rapporteur général, de vous entendre dire que cette évolution visait à renforcer l'attractivité de la place financière française. L'exit tax est un dispositif très ciblé. Il vise ceux de nos concitoyens qui partent à l'étranger pour, en réalité, faire de l'évasion fiscale…
Mais bien évidemment ! Nicolas Sarkozy l'avait d'ailleurs ciblé dans ce but : une partie de nos concitoyens agissent bien ainsi. Je vous vois réagir, monsieur Vojetta. Il est tout de même curieux qu'un député représentant les Français de l'étranger considère comme une attaque le fait de cibler une toute petite partie d'entre eux qui partent effectivement pour des raisons fiscales.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Comme si cela revenait à dire que tous les Français de l'étranger sont concernés ! Je ne le pense pas du tout. Je pense même qu'ils sont favorables à nos propositions, ne serait-ce que pour ne pas dénaturer les raisons de leur départ. Seule une toute petite partie de Français partent en effet pour réaliser des plus-values sur la cession de leur entreprise.
Le dispositif initial prévoyait un délai de quinze ans, car il permettait d'éviter ce type de spéculations. Le délai a ensuite été ramené à deux ans ce qui, franchement, ne veut plus rien dire ! C'est pourquoi nous proposons, cela me paraît logique, de revenir sur ce dispositif et de lui restituer sa valeur initiale, voulue par Nicolas Sarkozy. Cette disposition devrait faire l'objet d'un large consensus sur nos bancs.
Mme Lisa Belluco applaudit.
La politique fiscale et les choix que nous avons opérés ces dernières années doivent être appréhendés comme un tout. Ils ont pour objectif de renforcer l'attractivité de la France. C'est pourquoi nous avons engagé la baisse de l'impôt sur les sociétés, la baisse des impôts de production ou encore la réforme de l'exit tax.
Si cette politique n'avait pas obtenu de résultats, je comprendrais vos critiques. Or elle en obtient : depuis trois ans, la France est de nouveau le pays le plus attractif en Europe pour les investissements étrangers ; le nombre de concitoyens quittant le pays pour des raisons fiscales a considérablement diminué ; l'attractivité de notre pays s'est renforcée. Il y a donc bien un impact positif aux réformes engagées.
Vous avez évoqué les durées de détention des titres après le départ, ramenées à deux ou cinq ans. Cette modification a été décidée précisément afin que le dispositif soit plus efficace vis-à-vis des personnes qui quittent le pays manifestement pour des raisons fiscales.
J'insiste sur la cohérence de cette politique qui obtient des résultats : la France a attiré un nombre record d'entreprises dans le cadre du Brexit ainsi qu'un nombre record d'investissements ; des personnes, des talents étrangers, investissent dans notre pays et développent l'activité économique. Cela grâce à la modernisation de notre cadre fiscal.
Nous l'avons fait sans jamais rien céder à la lutte contre la fraude et l'optimisation fiscales. Je veux rappeler en la matière les résultats remarquables obtenus ces dernières années : je suis très fier que nos services fiscaux aient infligé encore il y a quelques mois une amende record de 1,3 milliard à une très grande multinationale pour des prix de transfert et de l'optimisation fiscale. L'an dernier, nous avons constaté un nombre record des droits liés à de la fraude fiscale notifiée : plus de 13 milliards d'euros. Les dossiers transmis par mon ministère à la justice sont, cette année, trois fois plus nombreux que les années précédentes, parce que nous sommes particulièrement efficaces.
Ne cassons pas une politique qui fonctionne et qui nous permet à la fois d'être attractifs et de ne rien céder à la lutte contre la fraude et l'optimisation fiscales. De grands chantiers sont en cours, avec les développements informatiques, les croisements de fichiers, les travaux sur l'érosion des bases fiscales menés par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la réforme du pilier 2 et l'imposition minimale. Là encore, ces dispositions constituent un tout afin de lutter contre l'optimisation et l'évasion fiscales.
Compte tenu du sujet et des réactions, je propose que chaque groupe qui le souhaite puisse s'exprimer.
La parole est à Mme Clémentine Autain.
Vous dites, monsieur le ministre délégué, que votre politique doit être considérée comme un tout. En effet, il y a bien un tout puisque, sous la précédente législature, vous avez allégé les impôts des plus riches, en supprimant l'ISF, en instaurant la flat tax ou, encore, en remettant en cause cette fameuse exit tax instaurée par Nicolas Sarkozy. Lorsqu'on fait le total, on observe que, sur la durée d'un mandat, vous avez enrichi les plus riches.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Votre politique a en effet eu un résultat : la France compte aujourd'hui 42 milliardaires – soit quatre fois plus qu'en 2008 –, qui ont gagné pendant la crise 15 milliards d'euros !
C'est l'un des arguments développés dans cet amendement, amendement qui relève tout simplement d'un enjeu de salubrité publique alors que nous traversons des crises multiples et que les Français tirent la langue en raison de l'inflation. Votre politique publique qui s'obstine, de façon obscène, à favoriser les plus riches suscite un sentiment d'indécence au regard des profits réalisés.
Cet amendement nous donne l'occasion de faire avancer une cause simple : les politiques publiques ne doivent plus servir les plus riches.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous avez l'occasion de le faire aujourd'hui.
Vous continuez à défendre une logique de ruissellement. Pourtant, les résultats sont là : les pauvres sont plus pauvres, et les riches sont plus riches. Pour en finir avec cette logique, il suffit d'actionner des leviers de justice fiscale. Pour commencer, il faut mettre fin à toutes les mesures que vous avez instaurées, ou qui existaient déjà, qui favorisent les revenus des hyper-riches – car c'est d'eux que nous parlons ici. Il est grand temps que nous ayons la décence de prendre des mesures de salubrité publique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES.
Comme ils l'ont fait en commission des finances, les députés du groupe Socialistes et apparentés (membre de l'intergroupe NUPES) voteront cet amendement. Nous devons revenir sur la mauvaise réforme de l'exit tax que la majorité UMP de l'époque a votée en 2018, et qui est entrée en vigueur en 2019. Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) avait estimé que l'exit tax rapporterait 800 millions d'euros, mais en réalité, elle produit moins de 100 millions d'euros chaque année. La réforme de 2019 a encore réduit son rendement. Pour rappel, il s'agit d'une taxation des plus-values latentes sur les actions détenues par des personnes qui quittent la France. La révision de 2019 avait fait passer de quinze ans à deux ans le délai durant lequel le détenteur des actions est soumis à l'exit tax après son départ. De fait, cette taxe ne frappe quasiment plus personne et produit un rendement très faible. Il faut y remédier. Nous voterons donc cet amendement, qui redonne tout son sens à l'exit tax et qui constitue un avantage, y compris symbolique, pour les finances publiques.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Jean-Victor Castor applaudit également.
Vous avez d'abord brossé un panorama des dispositifs fiscaux, monsieur le ministre délégué : impôt sur les sociétés, impôts de production… Nous souscrivons à certains de vos arguments, mais, comme l'a dit Nicolas Forissier, être libéral, c'est savoir réguler.
Vous avez ensuite fait dévier votre propos vers la fraude fiscale et l'optimisation fiscale, qui sont pourtant un tout autre problème. Le sujet qui nous occupe ici est la lutte contre l'évasion fiscale. Prenons un exemple simple : une personne qui envisage de céder ses actions et de vendre son entreprise quelques années plus tard – car ces opérations se préparent très en amont – peut décider de quitter le pays le 31 décembre 2022. Elle paiera l'impôt sur les plus-values latentes, vendra son entreprise trois ans après, et sera exonérée sur une grande partie de la plus-value. C'est bel et bien de l'évasion fiscale. Nous devons lutter tous ensemble contre ce phénomène.
Il n'est pas commun que je rejoigne les positions de M. Coquerel…
…mais le sujet est capital, et nous devons effectivement faire preuve de bon sens. Nos concitoyens ne comprennent pas la situation actuelle. Nous sommes certes libéraux, mais les députés de tous les bancs doivent joindre leurs forces pour lutter contre l'évasion fiscale.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Nous avons besoin de recettes fiscales, et, surtout, d'équité fiscale et d'égalité devant l'impôt. C'est pourquoi nous devons lutter contre l'évasion fiscale – Mme Louwagie l'a bien dit. L'enjeu est celui de la justice fiscale, condition du consentement à l'impôt. Le groupe Écologiste – NUPES soutiendra donc cet amendement de M. Brun et de la commission des finances, qui vise à rétablir l'exit tax dans sa version initiale. On ne peut pas, à la fois, dire que la France est à l'euro près et qu'elle a besoin de ressources pour financer les services publics, et s'abstenir d'imposer les plus-values de ceux qui s'installent à l'étranger, parfois pour échapper à l'impôt et à la solidarité nationale. Rétablissons l'exit tax, luttons contre l'évasion fiscale, faisons contribuer chacun – et peut-être, surtout, les plus riches – à l'effort national, et adoptons cet amendement.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES et SOC.
Ce sujet me tient à cœur, comme il tient à cœur à tous les députés des Français de l'étranger, mais aussi des Français de France. Chers collègues, les entrepreneurs ne sont pas des pigeons !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
La France compterait-elle vingt-cinq licornes si nous continuions à pénaliser les entrepreneurs français pour leurs succès ? Cet amendement, qui sort le spectre de François Hollande de son placard, propose de pénaliser à l'avance ceux qui oseraient réussir dans dix ou quinze ans.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et SOC.
Savez-vous seulement pourquoi les entrepreneurs français décident de quitter le pays, au-delà de l'épouvantail de Bernard Arnault que vous agitez régulièrement pour exciter les foules ? Il suffit de regarder la liste des destinations qu'ils choisissent : on n'y trouve ni Andorre, ni le Panama, ni Monaco, ni le Liechtenstein.
Les États-Unis arrivent en tête, suivis de l'Espagne – à 8 % – puis de l'Allemagne, du Royaume-Uni et de l'Italie. Parlons de l'Espagne, deuxième destination des entrepreneurs français qui s'expatrient : à la vente de leur entreprise, ils paieront 27 % d'imposition sur les plus-values. À Barcelone, ils seront soumis à un taux d'imposition sur le patrimoine – un ISF – de 3,5 % pour un capital supérieur à 10 millions d'euros, quand feu l'ISF était de 1,5 %. Ce ne sont pas des évadés fiscaux, mais des entrepreneurs qui choisissent de quitter la France pour participer à l'expansion internationale de leur société.
« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ils s'installent à Barcelone ou à Lisbonne, dans des villes où le marché de l'emploi leur donne accès à des salariés qui s'expriment dans des langues que vous ne parlerez jamais …
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…et qui offrent une qualité de vie que vous ne pourrez jamais imposer. Ne laissez pas vos fantasmes empêcher ces Français de vivre la vie qu'ils choisissent et de participer au rayonnement de la France à l'étranger ! Ne votez pas pour cet amendement !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Un chancelier de l'Échiquier disait qu'entre l'évasion fiscale et l'optimisation, il y a l'épaisseur d'un mur de prison. Quand d'aucuns font passer les entrepreneurs de l'évasion fiscale vers l'optimisation fiscale, nous souhaitons au contraire les faire repasser de l'autre côté du mur.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES et SOC.
Il s'agit simplement de procéder à une remise en ordre de l'exit tax, et non de voter quelque mesure incroyable. Stéphane Vojetta a évoqué le spectre de François Hollande, mais c'est plutôt celui de Nicolas Sarkozy que nous ressuscitons ici !
Alors que de nombreux Français traversent une période de souffrance, alors que l'OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) a annoncé que le pouvoir d'achat diminuerait en 2022 et 2023, ne devrions-nous pas faire montre d'égalité et de justice fiscale, en sorte que chacun contribue à la mesure de ses moyens ? Il faut voter cet amendement remarquable, qui est soutenu par tous les membres de la commission des finances, sauf ceux de la majorité minoritaire.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, Écolo – NUPES et SOC.
À titre personnel, je ne voterai pas cet amendement. Ce serait envoyer un mauvais signal aux entrepreneurs ,
« Ah ! » sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et SOC
alors que nous avons su attirer de nouveaux investisseurs ces cinq dernières années. Je suis d'ailleurs surpris que nos amis du groupe Les Républicains reviennent en arrière et contribuent à l'instabilité fiscale.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Un chef d'entreprise n'est pas un fraudeur. Il faut lutter contre la fraude fiscale – et nous le faisons.
Nous sommes tous d'accord pour lutter contre l'évasion fiscale, mais, de grâce, n'entretenons pas l'idée fausse selon laquelle tous les chefs d'entreprise seraient des fraudeurs.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Dem.
Le groupe Rassemblement national votera évidemment cet amendement. J'aimerais dresser le bilan du ruissellement, qui fut la philosophie principale de votre politique économique : il n'a pas fonctionné. Ce n'est pas le Rassemblement national qui l'affirme, mais France Stratégie – qui n'est pas, que je sache, une officine dirigée par le Rassemblement national. Dans un rapport de 2021, France Stratégie a analysé les conséquences de votre politique : flat tax, ISF, exit tax… Résultat : cela n'a pas fonctionné, il n'y a pas eu de ruissellement.
Il faut en tirer les conséquences et changer de politique. Cela passe notamment – mais pas seulement – par le vote de cet amendement.
Comme l'a fait M. Le Maire mardi, vous expliquez régulièrement, monsieur le ministre délégué, que nous serions les meilleurs pour attirer des investisseurs étrangers ; ils feraient des investissements spectaculaires, censés créer des emplois industriels comme jamais le pays n'en a connu. À vous entendre, nous sommes presque les meilleurs en Europe.
Pardon, mais cela m'ennuie de le laisser courir systématiquement.
Un rapport du cabinet Ernst & Young – qui n'est pas l'ami du Rassemblement national, mais plutôt le vôtre – indique que la France a créé 30 000 emplois industriels par le biais des investissements étrangers, alors qu'il s'en est créé 60 000 au Royaume-Uni, 45 000 en Allemagne et 48 000 en Espagne. En réalité, nous sommes les pires !
Cessez donc de répéter des contre-vérités : la réalité est dans ces chiffres, et non dans la légende que vous nous vendez jour après jour.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La politique est faite de mots, c'est bien normal ; mais au-delà des discours, nous serons jugés sur nos actes – telle est la conviction des députés du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires. Voter cet amendement, c'est nous mettre en cohérence avec ce que vivent les Français.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES, et sur quelques bancs du groupe RN.
Nous devons leur envoyer des signaux : montrons-leur que nous comprenons la situation, et que les plus aisés, dont le comportement déroge à la solidarité nationale, doivent être encadrés. Nous voterons donc cet amendement.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
J'espère qu'une partie de la majorité votera l'amendement de la commission des finances, comme certains l'ont fait hier pour l'amendement de M. Mattei.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Cher collègue Mohamed Laqhila, vous semblez croire que quand nous ciblons les individus qui vendent rapidement leurs actions à des fins de spéculation, nous attaquons les entrepreneurs en général. Or les entrepreneurs en général, notamment les responsables de PME, n'agissent pas de la sorte.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et SOC.
Ils essaient au contraire de développer leur outil de production. Je n'assimile donc pas les personnes ciblées par cet amendement aux entrepreneurs que vous défendez en général.
Monsieur Vojetta, vous avez souligné avec raison que, dans leur très grande majorité, les Français qui s'installent à l'étranger ne le font pas pour échapper à l'impôt. Paradoxalement, au nom des Français de l'étranger, vous défendez la petite minorité qui s'expatrie pour des raisons fiscales. C'est contradictoire.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Sophie Taillé-Polian applaudit également.
Cet amendement ne cible ni la très grande majorité des entrepreneurs, qui se battent tous les jours pour que leur entreprise s'en sorte, ni les Français de l'étranger qui, très majoritairement, n'ont pas quitté le pays pour des raisons fiscales. Il cible ceux qui s'expatrient pour pratiquer de l'évasion fiscale. Personne ne peut être solidaire de tels comportements.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Le rendement de l'impôt que vous appelez de vos vœux ne résoudra en aucune manière les problèmes d'injustice sociale. Ce n'est pas ainsi que vous atteindrez votre objectif.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Par ailleurs, cet amendement part du principe qu'un chef d'entreprise qui déménage est un fraudeur.
Vives protestations sur les bancs des groupes RN et LR et sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
C'est cela que signifie cet amendement !
Pourtant, si un chef d'entreprise déménage à des fins d'optimisation fiscale, il le fera sans tarder et sera donc imposé. Si au contraire il déménage pour des raisons personnelles, il ne sera pas imposé, dites-vous. Mais attention ! S'il part pour un paradis fiscal, pour un pays avec lequel la France n'a pas conclu de convention fiscale, le fisc français le suivra, prendra des garanties ! Il ne faut pas s'imaginer qu'il pourra échapper à l'impôt en rejoignant un paradis fiscal. Si en revanche il déménage dans un pays ami comme l'Espagne ou l'Angleterre, il pourra effectivement, en fonction du temps qu'il y passera, être fiscalement domicilié à l'étranger sous un régime assez proche du nôtre. Un chef d'entreprise a le droit de déménager, comme tout le monde.
Madame Le Pen, je suis ravi que vous preniez pour référence le cabinet Ernst & Young, car c'est précisément celui qui, depuis trois ans, considère la France comme le pays européen le plus attractif pour les investissements étrangers, grâce aux réformes menées par cette majorité !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Vous devriez donc être d'accord avec nous ! Sinon, vous citez des références qui contredisent les idées que vous défendez.
Mais je doute que ce soit réellement ce qui vous préoccupe. Nous avons le taux de chômage le plus bas depuis quinze ans ,
Protestations sur les bancs du groupe RN
le taux de chômage des jeunes le plus bas depuis quarante ans, et vous semblez considérer cela comme une mauvaise nouvelle ! C'est incroyable : certains orateurs paraissent regretter que la situation s'améliore !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Protestations sur les bancs du groupe RN.
Bien sûr, la situation n'est pas parfaite pour tout le monde. Mais tout de même, lorsque les choses vont mieux, reconnaissez-le, soutenez ces mesures ! Cela est bon pour le pays, pas uniquement pour la majorité ! Il ne s'agit pas de prétendre que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais les évolutions récentes sont positives et nous donnent des raisons d'espérer. Cela ne s'est pas fait par magie, ce n'est pas le fruit du hasard, mais d'une politique cohérente en faveur de l'attractivité de la France, qui ne concède rien à la fraude ni à l'évasion fiscales. Nous avons pris en 2021 des mesures très fermes contre les trusts, beaucoup plus efficaces qu'une exit tax bien trop lourde qui décourageait les Français de partir, même pour des raisons personnelles. Ce que nous recherchons, ce n'est pas l'incantation ni l'idéologie, mais l'efficacité !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 293
Nombre de suffrages exprimés 288
Majorité absolue 145
Pour l'adoption 155
Contre 133
Il concerne la taxation de la plus-value réalisée sur une cession de titres. La flat tax sur les dividendes, dont nous avons longuement débattu, est prélevée à la source au moment du versement des dividendes ; en revanche, en ce qui concerne la cession de titres, l'impôt est payé avec un décalage d'un an. Afin d'alimenter plus rapidement la trésorerie publique et de prévenir d'éventuels oublis lors de la déclaration de revenus, je crois donc pertinent de taxer la plus-value au moment de la cession des titres, ou avec un décalage d'un mois au plus. Cela serait bien plus sécurisant.
Je suis conscient que la mise en œuvre de cette mesure posera quelques problèmes techniques, mais nous avons su les résoudre lors de la mise en place du prélèvement à la source. Il me semble donc possible de la voter, ce qui permettra à l'État de percevoir bien plus rapidement son dû.
Monsieur Mattei, je pense qu'il convient d'approfondir et de préciser cette mesure, comme nous en avons discuté ensemble. Proposer une retenue à la source sans en préciser les tarifs ni les modalités de perception est contraire au principe de légalité de l'impôt défini dans l'article 34 de la Constitution. En outre, il faut relativiser cet enjeu : moins de 1,5 % des foyers fiscaux déclarent des gains de cession de valeurs mobilières, soit environ 400 000 foyers sur 36 millions. Je rappelle enfin que les plus-values mobilières ont été expressément exclues du champ de la retenue à la source en raison de leur caractère irrégulier et des modalités complexes de calcul de la plus-value taxable. Une telle proposition mérite donc qu'on y travaille davantage. Je vous propose de retirer l'amendement, à défaut de quoi mon avis sera défavorable.
Je comprends votre intention et vos arguments, monsieur Mattei. Ils visent à simplifier la taxation et à faciliter le recouvrement des taxes, ce que je souhaite également. Cependant, le dispositif du prélèvement à la source est encore récent, et nous ne souhaitons pas en modifier trop l'organisation avant d'en faire une évaluation approfondie. Les gains provenant de la cession de valeurs mobilières et biens assimilés avaient initialement été exclus du prélèvement à la source pour plusieurs motifs : le caractère exceptionnel de la réalisation de ces gains, l'impossibilité d'anticipation et la complexité du calcul de leur montant taxable.
Cela ne signifie pas qu'on doive s'interdire d'y revenir : la question est légitime. Néanmoins, la mesure mériterait d'être travaillée plus avant.
De plus, l'amendement sous sa forme actuelle aurait pour effet juridique de créer une imposition autonome s'ajoutant aux taxes déjà applicables, sans aucune précision concernant son assiette, son taux ou encore son caractère libératoire ou non de l'impôt sur le revenu. Je doute que cela soit intentionnel. Je vous propose donc de retirer votre amendement et de travailler ensemble à affiner cette proposition ; mes services et moi-même serons à votre disposition pour cela.
Je concède que l'amendement pourrait être mieux rédigé et je vais donc le retirer.
Cela dit, la taxation des plus-values immobilières nous a donné l'expérience de la temporalité du paiement. Il me semble donc qu'il convient d'accélérer sur ce sujet, par exemple en retravaillant l'amendement avec vos services, monsieur le ministre délégué, pour éviter la double imposition que vous mentionniez. Cela profiterait également aux contribuables, qui connaîtront ainsi immédiatement le montant de l'impôt et pourront s'en acquitter sans délai. L'expérience du prélèvement à la source nous a permis de constater les gains qu'apporterait une telle mesure, à commencer par de meilleures rentrées fiscales.
Je retire mon amendement ; étant donné qu'il est dysfonctionnel dans sa forme actuelle, il ne me paraît pas opportun de le reprendre.
Puisque l'amendement est repris, je le mets aux voix sans engager de discussion supplémentaire.
L'amendement n° 3482 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l'amendement n° 2460 .
On débat énormément du système de retraite, mais jamais de certains éléments pourtant constitutifs de son équilibre. C'est le cas de la productivité, déplorable en France par rapport à la moyenne des autres pays de l'OCDE, de l'emploi ou encore de la natalité, dont il est question dans cet amendement.
« La natalité », c'est devenu un gros mot. Depuis des années, les familles font l'objet d'attaques systématiques prenant la forme de réductions des aides familiales. On en voit aujourd'hui le résultat : nous vivons une véritable crise de la natalité, avec le taux de naissance le plus bas depuis 1945. Cette crise porte préjudice non seulement au dynamisme économique du pays, mais également à l'équilibre du système de retraite.
Par cet amendement, je propose d'accorder aux foyers une part fiscale pleine dès le deuxième enfant.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est évident qu'il faut tenir compte de la nouvelle donne que constitue le taux de natalité très faible en France, en prenant des mesures pour faciliter la vie des familles. On me dit que le deuxième enfant importe peu, que c'est le troisième qui compte ; permettez-moi de vous rappeler qu'avant de faire un troisième enfant, il faut tout de même en avoir fait un deuxième ! Cela pose des difficultés financières, surtout en pleine crise du pouvoir d'achat.
Nous avons effectué une simulation : notre proposition permettrait à une famille de classe moyenne avec deux enfants de bénéficier d'un gain de 560 euros par an. Cela est essentiel, fondamental. De manière transpartisane, nous devrions tous avoir à cœur d'améliorer la situation de la natalité en France.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je n'ai vu aucune attaque contre la politique familiale depuis cinq ans. Bien au contraire, j'ai vu de très nombreuses mesures de soutien, qu'il s'agisse d'aides à la garde d'enfants ou encore des allocations familiales.
M. David Valence applaudit.
Loin d'attaquer la politique familiale, notre majorité la soutient sans faillir.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Par ailleurs, votre amendement coûterait très cher – 2 milliards d'euros – et ne profiterait qu'aux familles les plus aisées, celles qui paient l'impôt sur le revenu. Il ne toucherait donc pas les classes moyennes, mais uniquement les classes moyennes supérieures. Mon avis est défavorable.
Je prolongerai les propos de M. le rapporteur général. Nous sommes très attachés à notre politique familiale, comme l'ont montré nos débats d'hier. Nous défendons des mesures telles que la revalorisation exceptionnelle des allocations familiales, les mesures d'aide aux familles monoparentales prévues dans le PLFSS (projet de loi de financement de la sécurité sociale) pour 2023, la réforme des services publics de la petite enfance.
L'amendement que vous proposez coûterait en réalité 2,9 milliards d'euros à l'État. Bien sûr, nous sommes tous favorables à la baisse des impôts ; mais nombre d'entre nous préfèrent s'abstenir de vendre du rêve aux Français,…
…de leur affirmer que nous allons diminuer un impôt sans savoir comment financer cette mesure – car cela se traduirait forcément par d'autres augmentations d'impôts ! Il n'est pas difficile de présenter des amendements promettant aux Français de baisser leurs impôts, mais soyons réalistes : lorsqu'on est incapable d'expliquer comment compenser les 3 ou 4 milliards d'euros de pertes qui en résulteront, cela revient uniquement à exposer les contribuables à des augmentations d'impôts, et à leur donner d'une main ce qu'on leur reprendra de l'autre.
Telle est la réalité, madame Le Pen ! Nous travaillons à l'intérieur d'un cadre budgétaire contraignant, qui nous impose de faire des choix. Il nous faut évaluer chaque proposition pour déterminer si elle est utile, efficace, juste et finançable. En l'occurrence, ce n'est pas le cas.
La natalité est en baisse constante depuis cinq ans. J'entends vos arguments, monsieur le ministre délégué : vous demandez comment financer cette mesure, vous criez à la catastrophe lorsque nous proposons de baisser les impôts. Mais quid de la suppression de l'ISF ? Que croyez-vous qu'elle ait entraîné ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Et la flat tax, qu'a-t-elle entraîné ? N'étaient-ce pas là des baisses d'impôts ? Croyez-vous qu'elles étaient véritablement justifiées ?
La politique consiste certes à faire des choix. Pour notre part, nous assumons nos choix, et nous faisons celui d'aider les classes moyennes à améliorer leur niveau de vie ,
« C'est faux ! » sur les bancs du groupe RE
tout en ayant autant d'enfants qu'il leur conviendra. Quant à vous, vous avez décidé d'aider ceux qui n'en avaient pas besoin. Nos choix sont différents des vôtres, c'est pourquoi nous faisons partie de l'opposition.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Nous sommes opposés à cet amendement. Comme l'a rappelé M. le rapporteur général, il profiterait uniquement aux familles assujetties à l'impôt sur le revenu, en oubliant comme d'habitude toutes les autres. J'ai donc une contre-proposition à vous faire : revoyons plutôt les allocations familiales à la hausse. Ces allocations que vous honnissez tant, nous les défendons.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Madame Le Pen, si le produit des impôts pesant sur nos entreprises a augmenté depuis que nous avons baissé ces impôts, c'est précisément parce que, ce faisant, nous avons favorisé le développement économique, donc un accroissement des recettes de l'État. C'est prouvé, c'est la réalité. C'est un fondement reconnu de l'économie.
Tel est le résultat de la politique menée au cours des cinq dernières années. Nous avons ramené le taux de l'impôt des sociétés de 33 % à 25 %, ce qui a suscité le développement de l'activité économique, si bien que le produit de cet impôt est aujourd'hui supérieur à ce qu'il était avant que le taux en soit diminué.
De même, la baisse de l'ISF sur les valeurs mobilières, qui financent l'activité économique, a rapproché notre pays du cadre en vigueur chez nos voisins et lui permet d'être plus attractif sur le plan économique. Cette mesure a un impact, elle fonctionne : la France attire de nouveau les investissements,…
…le taux de chômage n'a jamais été aussi bas depuis quinze ans et notre croissance a joué un rôle de locomotive en Europe l'an dernier.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je ne dis pas que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes – ne caricaturez pas mes propos. Je dis simplement que ces réformes ont un impact positif sur l'activité économique de notre pays. Hélas ! ce n'est pas ce qui vous préoccupe.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je ne peux pas vous laisser dire des contre-vérités, Gabriel Attal. La raison pour laquelle le volume de l'impôt sur les sociétés est plus important, c'est le rebond économique qui a suivi la crise du covid-19.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe RE.
Permettez, chers collègues, que je vous oppose un argument sans que vous vous époumoniez.
Exclamations sur les bancs des groupes RE et Dem.
S'il vous plaît, monsieur le président Coquerel, adressez-vous à l'Assemblée.
Je poursuis. Si vous aviez maintenu le taux de l'impôt des sociétés, compte tenu de ce regain de l'activité économique, les recettes auraient été encore plus importantes.
Mêmes mouvements.
Par ailleurs, si la croissance de la France est supérieure à celle de ses voisins, c'est parce que, pendant la crise du covid-19, l'activité y a baissé beaucoup plus que dans les autres pays européens. Le rebond est plus important, mais il ne signifie pas, hélas !, que la santé économique de notre pays est meilleure que celle de nos voisins dont la taille et l'économie sont comparables. C'est la vérité.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Je ne peux pas laisser dire des choses fausses. Oui, il y a eu un rebond de l'activité après la crise du covid-19, mais les recettes liées à l'activité économique sont bien supérieures à ce qu'elles étaient avant la crise.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Bien sûr que si ! C'est la base : lorsque vous taxez moins, le gâteau grossit et vous collectez donc davantage d'impôts que lorsque le gâteau rétrécit parce que vous le surtaxez. Nous l'avons prouvé ces dernières années !
Mêmes mouvements.
Je déplore votre incapacité à vous réjouir de ce qui fonctionne, des bonnes nouvelles. Encore une fois, il ne s'agit pas d'être béat et de considérer que tout va bien, mais, lorsque des choses vont dans le bon sens, autant le reconnaître. Ce n'est pas saluer le Gouvernement, c'est saluer les millions d'entrepreneurs qui font le développement de notre économie
Mêmes mouvements
et les millions de Français qui ont fait des efforts et repris un emploi. Ce sont eux que vous critiquez lorsque vous ne voulez pas reconnaître que des choses fonctionnent mieux dans notre pays.
Mêmes mouvements.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 214
Nombre de suffrages exprimés 202
Majorité absolue 102
Pour l'adoption 62
Contre 140
L'amendement n° 2460 n'est pas adopté.
Je vous propose, madame la présidente, de défendre également l'amendement n° 1333 .
Ces amendements ont pour objet de rétablir le bénéfice de la demi-part fiscale accordée aux personnes veuves ayant eu un enfant. Cet avantage, dont la suppression a été décidée en 2008 – suppression qui est devenue définitive en 2014 –, est désormais réservé aux veuves d'un ancien combattant. La question a fait l'objet d'un débat en juillet dernier.
Une série d'amendements vise à rétablir le bénéfice de cette demi-part fiscale pour l'ensemble des personnes veuves ayant eu un enfant. Quant à moi, je propose, notamment dans l'amendement n° 1333 , que le Gouvernement puisse limiter par décret la portée de ce rétablissement afin d'en réserver le bénéfice aux personnes veuves ayant de faibles ressources. En effet, depuis 2008, ce sont ces personnes-là qui nous sollicitent régulièrement dans nos circonscriptions.
J'ajoute qu'un rétablissement général du bénéfice de la demi-part fiscale aurait un coût compris entre 1 milliard et 1,5 milliard d'euros, selon le Gouvernement.
Plutôt 2 milliards !
D'accord, monsieur le ministre. En tout état de cause, la fixation d'un plafond de ressources limiterait ce coût.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.
En 2014, la suppression de la demi-part fiscale accordée aux personnes veuves ayant eu un enfant a fait basculer dans l'imposition 2 millions de personnes. Ainsi, beaucoup de veuves – puisqu'il s'agit la plupart du temps de femmes – percevant de petites pensions se trouvent dans une situation de grande précarité, en particulier dans les zones rurales.
En outre, les conséquences de l'inflation, de l'augmentation du coût de l'énergie, sont très sensibles sur ce type de budgets et provoquent des situations terribles : on voit des gens qui arbitrent entre les différents repas de la journée ou qui ne parviennent plus à se chauffer… Il est donc très important qu'on leur redonne un minimum d'oxygène et les moyens de s'en sortir.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 2358 .
Il est vrai que la suppression, en 2014, de la demi-part fiscale accordée aux veuves et aux veufs ayant eu un enfant a pénalisé de trop nombreuses personnes âgées aux revenus parfois très modestes qui, après le décès de leur conjoint, ont vu augmenter leur revenu fiscal de référence. Or, cette augmentation a des conséquences significatives puisqu'elle peut entraîner l'assujettissement des pensions de retraite à la CSG et à la CRDS.
Par ailleurs, comme l'a indiqué M. Benoit, dans nos circonscriptions, de nombreuses personnes réclament le rétablissement de la demi-part fiscale. Au reste, je retirerais volontiers mon amendement au profit du sien car, c'est vrai, ces demandes émanent essentiellement de personnes âgées dont le niveau de vie est assez faible.
Il s'agit d'une mesure de justice sociale et, puisqu'on affirme lutter pour le pouvoir d'achat des Français, en l'adoptant, nous enverrions un bon signal à ces personnes qui en ont particulièrement besoin.
La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l'amendement n° 2462 .
Faire et défaire, c'est toujours travailler. Mais, quand j'entends les députés LR plaider, avec beaucoup de conviction d'ailleurs, pour le rétablissement de la demi-part, je ne peux que rappeler qu'on ne les a pas beaucoup entendus lorsque sa suppression a été décidée – non plus que les socialistes, du reste, qui ont appliqué cette suppression.
Le fait est que nous avons tous été sollicités par des veufs et des veuves dont l'existence a été bousculée, voire a basculé, à la suite de cette mesure. Il faut donc rétablir le bénéfice de la demi-part fiscale accordée aux personnes veuves.
Et, si vous souhaitez fixer un seuil, n'excluez pas, je vous en supplie, les retraites moyennes. Car, dans notre pays, le nombre des gens qui sont trop pauvres pour être riches et trop riches pour être pauvres devient considérable. Tout est fait pour les personnes aux revenus modestes, et nous nous réjouissons qu'elles en profitent, mais plus rien n'est fait pour les revenus intermédiaires. On appauvrit ainsi massivement les classes moyennes, qu'il s'agisse de travailleurs ou de retraités, qui ne bénéficient jamais de la moindre aide, de la moindre incitation fiscale.
J'appelle votre attention sur le fait que cette situation crée un très vif sentiment d'injustice dans les classes moyennes, sur lesquelles pèse tout de même, je le rappelle, l'immense majorité des impôts perçus dans notre pays.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je comprends que les veuves et les veufs qui ont bénéficié jusqu'en 2009 – une sortie en sifflet ayant été prévue jusqu'en 2014 – de ce dispositif qui leur permettait de diminuer leurs impôts soient un peu nostalgiques et qu'ils préféreraient bénéficier de cette demi-part fiscale. Mais la suppression de celle-ci a été, depuis 2014, confirmée à plusieurs reprises par l'Assemblée nationale, qui rejette chaque année des amendements analogues – c'est un véritable marronnier. Au demeurant, elle existe toujours, cette demi-part des veuves, mais elle est recentrée sur 1,4 million de foyers composés de veuves ayant élevé seules un enfant pendant cinq ans.
Par ailleurs, ce que vous proposez, monsieur Benoit, est assez étonnant. Vous souhaitez en effet que la demi-part fiscale ne bénéficie qu'aux revenus les plus faibles. Mais ce n'est pas possible puisque, par définition, elle ne peut concerner que des personnes qui paient l'impôt sur le revenu. Or, je le rappelle, 45 % seulement des foyers sont assujettis à cet impôt. Vous ne pouvez pas réserver le bénéfice d'une demi-part fiscale à des personnes qui ne paient pas l'impôt sur le revenu !
Enfin, j'en appelle à la responsabilité de chacun. Cet amendement coûte au bas mot 2 milliards d'euros, sachant, comme je viens de l'expliquer, qu'on ne peut pas le cibler sur les personnes aux revenus modestes. Avons-nous 2 milliards d'euros disponibles ?
Non, nous n'avons pas cet argent. Nous ne pouvons donc pas être favorables à cet amendement.
Il est important de rappeler la manière dont cette réforme a été faite. Monsieur Di Filippo, vous avez indiqué que la décision avait été prise en 2014. Non, elle a été adoptée en 2009, sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy.
Certes, un échéancier avait été prévu sur plusieurs années, et François Hollande aurait pu renoncer à appliquer la dernière étape. Mais la réalité, c'est que la réforme a été adoptée en 2009.
Nous aimerions tous baisser les impôts en revenant sur un certain nombre de décisions prises par le passé, mais il faut faire des choix,…
…des choix de société, des choix budgétaires.
Encore une fois, si l'on propose des baisses d'impôt pour un montant compris entre 2 milliards et 2,6 milliards d'euros sans indiquer comment on les finance, on s'expose, au bout du compte, à des hausses d'impôt.
Quant aux retraités modestes, ils ont évidemment bénéficié de la diminution de 5 milliards d'euros de l'impôt sur le revenu pour les premières tranches, décidé sous le précédent quinquennat.
En tout état de cause, nous ne pouvons pas nous extraire de tout cadre budgétaire – ce n'est peut-être pas très populaire de le dire, mais c'est ma responsabilité de ministre du budget. Sinon, on exposerait les Français à des augmentations d'impôt, et on leur reprendrait d'une main ce qu'on leur a prétendument donné de l'autre.
Mme Caroline Abadie applaudit.
De nombreux députés ont demandé à prendre la parole. Je vous propose de permettre à chacun des groupes de s'exprimer.
La parole est à M. Charles de Courson.
Ayant le triste privilège de siéger dans cet hémicycle depuis trente ans, je voudrais rappeler ce qui s'est passé en 2009 – je m'étonne que personne ne l'ait fait avant moi.
Une décision du Conseil constitutionnel a établi alors qu'il y avait une rupture d'égalité entre les célibataires, selon qu'ils étaient veufs ou non. En effet, quand une personne mariée perd son conjoint, elle devient fiscalement un célibataire. Le Conseil constitutionnel a donc affirmé qu'il fallait généraliser l'octroi d'une demi-part fiscale à tous les célibataires ou la supprimer. Voilà l'origine de la disposition dont nous discutons, qui a fait l'objet d'une décision politique : en 2009, le Gouvernement, suite à la décision du Conseil constitutionnel, a décidé de supprimer la demi-part.
Le Conseil constitutionnel affirmait qu'à l'octroi de la demi-part ne correspondait aucune contrepartie d'intérêt général. Un parlementaire de l'époque – un certain Charles de Courson, si j'ai bonne mémoire
Sourires
– a déposé un amendement visant à maintenir cette demi-part pour les veufs ou les veuves ayant élevé seuls au moins un enfant pendant cinq ans. Ainsi, quelques centaines de milliers de veufs et de veuves qui ont élevé seuls au moins un enfant pendant cinq ans ont gardé la demi-part fiscale – car dans ce cas, il existe une contrepartie d'intérêt général.
J'attire donc votre attention sur le fait que, si on rétablit la demi-part fiscale pour les veufs, il faut la généraliser à tous les célibataires. C'est d'ailleurs ce que demandent certaines associations de célibataires.
Sourires.
Je remercie le ministre délégué d'avoir rappelé l'histoire de ce sujet que nous abordons chaque année. C'est dommage que nous n'ayons pas créé un groupe de travail sur ce sujet qui intéresse effectivement de nombreux contribuables.
L'exposé des motifs me paraît incomplet, car l'article 195 du code général des impôts ne concerne pas seulement les veuves ; il concerne notamment toutes les femmes seules qui ont élevé un enfant pendant plus de cinq ans. En réalité, ce n'est pas tant la situation au regard du veuvage ou du fait d'avoir élevé ses enfants qu'il faut prendre en compte, que le montant des revenus des retraités pour faire face au coût de la vie. Cela pose donc beaucoup plus largement la question du pouvoir de vivre.
À titre personnel, je ne peux pas voter cet amendement, d'autant moins qu'il donne le pouvoir au Gouvernement de fixer par décret des bornes. Nous ne savons donc pas réellement ce que nous allons voter.
Je ne voterai donc pas cet amendement. Je demande à M. le ministre délégué de s'engager à créer un groupe de travail sur ce seul sujet qui nous donne l'occasion tous les ans de nous écharper dans cet hémicycle.
Nous prenons nos responsabilités en votant pour ces amendements.
Ce débat est difficile : j'entends les réserves exprimées au sujet de ces amendements. Il faut rappeler que, par définition, le dispositif de la demi-part fiscale ne touchera pas les veuves les plus précaires qui ne sont pas assujetties à l'impôt, que mécaniquement il aide davantage les veuves dont la retraite est plus élevée. Il aidera donc plus les veuves des classes les plus aisées que celles des classes moyennes.
Toutefois, nous prenons nos responsabilités afin de corriger une injustice envers les veuves et les veufs des classes moyennes, et en particulier envers celles qui sont un peu paupérisées.
Il arrive parfois que l'on vote des amendements alors qu'on n'est pas d'accord sur la nature du dispositif. Pour traiter ce sujet sérieusement, il faudra examiner la situation des veuves qui sont femmes au foyer, qui n'ont pas de ressources, qui ne sont pas assujetties à l'impôt et qui sont extrêmement précaires : les classes populaires aussi sont affectées et doivent être aidées.
Monsieur le ministre délégué, ne vous cachez pas derrière des arguments financiers. Il s'agit d'une discussion politique dans laquelle chacun doit prendre ses responsabilités. Nous parlons de veufs et de veuves, c'est-à-dire de personnes qui ont perdu leur conjoint. Sur un tel sujet, on gagnerait à poser une position politique de fond au lieu de se cacher derrière un objectif budgétaire.
M. Bastien Lachaud applaudit.
J'étais ministre du budget en 2008, quand cette mesure a été votée. Le Gouvernement, la majorité de l'époque, le Sénat, l'Assemblée nationale, avaient soutenu cette mesure parce que la situation précédente était profondément injuste.
On peut raconter la messe, donner des explications, mais il faut dire la vérité. Cette disposition très ancienne avait été prise pour les veuves de guerre avant d'être totalement détournée vers toutes les personnes isolées pour des raisons très diverses : des célibataires, des divorcés, des veufs ont ainsi pu bénéficier d'une demi-part fiscale.
Deux personnes qui avaient élevé ensemble leurs enfants âgés de quarante ans et qui divorçaient tardivement bénéficiaient d'une demi-part fiscale et avaient, si on additionne leurs deux foyers fiscaux, trois parts, tandis que, s'ils ne divorçaient pas, ils n'avaient que deux parts fiscales. Cette situation était donc profondément injuste.
En ne parlant que des veufs et des veuves, on méconnaît la vraie nature de ce système, qui concernait toutes les personnes isolées qui n'ont plus d'enfant à charge.
Si la décision a été prise en 2009, elle a été progressivement mise en place jusqu'en 2014. Cette demi-part existe toujours pour les personnes qui pendant cinq ans ont élevé seules un enfant, ce qui est juste.
Si vous cherchez à rétablir cette demi-part pour les veufs, afin d'éviter une niche fiscale qui pousse au divorce pour des raisons fiscales – dispositif assez étonnant, vous en conviendrez –, ne cherchez plus : ce dispositif existe déjà, à travers le maintien de la demi-part pour les personnes qui ont élevé seules un enfant pendant cinq ans. Dans ce dernier cas, on prolonge un droit au-delà de la majorité de l'enfant, jusqu'à ce qu'il ne soit plus à charge. C'est absolument juste.
Cibler sur les veufs et les veuves, comme le proposent plusieurs amendements, serait totalement inconstitutionnel et profondément injuste pour toutes les personnes qui sont des parents isolés et qui ne sont pas veuves.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Je voudrais revenir sur une petite musique que j'entends depuis hier : à chaque fois qu'on propose une mesure qui pourrait être un avantage pour des foyers français qui payent des impôts, on nous dit : « Ah ! Mais non ! Ça cible les plus riches. » Comme si payer des impôts était une tare !
Cette petite musique vient des bancs de la gauche, mais aussi de chez vous, monsieur le rapporteur général et monsieur le ministre délégué.
Pour vous, les foyers qui payent des impôts sont des foyers riches qui n'ont pas besoin d'être aidés.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
En réalité, monsieur le ministre délégué, nombre de foyers fiscaux qui payent des impôts ne sont pas si riches que cela et ils se plaignent d'être pris pour des vaches à lait, toujours bons pour payer les mesures décidées par votre gouvernement.
Je vous alerte sur ce point : il faut arrêter de stigmatiser – pour employer un terme que vous affectionnez – les Français qui payent des impôts. Ce ne sont pas des Français riches : nombre d'entre eux perçoivent des revenus moyens.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Ensuite, vous renvoyez toujours à la figure des oppositions que nous ne proposons que des mesures coûteuses, sans nous soucier de rapporter des recettes à l'État. Toutefois, monsieur le ministre délégué et monsieur le rapporteur général, quand je vous ai suggéré hier de remettre à plat les aides directes et indirectes à la presse, ainsi que la niche fiscale des journalistes, vous l'avez refusé. Pourtant, cela représente 1,2 milliard d'euros. Vous avez retoqué cette mesure en disant « Circulez, il n'y a rien à voir. »
Arrêtez donc de prétendre que nous ne proposons que des mesures coûteuses, alors que, quand nous vous proposons des mesures pour remettre à flot les finances de l'État, vous les refusez en nous disant que ce ne serait pas responsable. J'aimerais qu'il n'y ait pas deux poids, deux mesures, et qu'on puisse examiner à la fois ce qui peut aider les foyers fiscaux français appartenant aux classes moyennes et ce qui peut remettre à flot les finances de l'État.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Les débats budgétaires sont intéressants parce qu'on y pose des choix de société.
Ainsi, nous vous reprochons régulièrement de ne pas prendre de mesure pérenne en matière de pouvoir d'achat.
Le rétablissement de la demi-part pour les veufs et les veuves est une mesure pérenne, et par conséquent elle est beaucoup plus intéressante qu'un chèque. Comme elle est durable, c'est une mesure solide.
Comme lorsqu'il s'agit de les inciter à faire des économies d'énergie, vous dites aux Français : « Je baisse, j'éteins, je décale » : vous baissez les retraites, vous éteignez la demi-part des veuves et vous décalez les mesures au débat budgétaire suivant.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Désolé, mais ce slogan ne peut pas fonctionner en matière fiscale.
D'abord, comme l'a dit Mme Ménard, ceux qui payent l'impôt sur le revenu ne sont pas pour autant aisés, et ceux qui payent l'impôt sur le revenu à la retraite y sont assujettis parce qu'ils ont travaillé toute leur vie. Il faudrait éviter de faire circuler l'idée que les Français qui payent l'impôt sur le revenu sont des salauds, sinon cela va probablement les encourager à tout faire pour ne plus le payer.
Mêmes mouvements.
Ensuite, ce dispositif était évidemment conçu pour les veufs et pour les veuves, afin d'éviter une hausse brutale de l'impôt sur le revenu lors du décès du conjoint. Il s'agit de compenser une situation non seulement difficile sur le plan affectif, mais aussi injuste sur le plan fiscal.
Il n'est donc pas nécessaire d'ouvrir ce dispositif aux célibataires.
Enfin, on dit que cette mesure coûterait entre 300 millions et 2 milliards d'euros. Nous contestons ce dernier chiffre, car nous ne pensons pas que son coût dépasse 1 milliard. Cela signifie d'abord qu'actuellement les retraités supportent ce coût-là : c'est de l'argent qui leur est pris. Comme d'habitude, nous vous proposons de rendre aux Français leur argent.
Applaudissements et « Bravo ! » sur les bancs du groupe RN.
À titre personnel, je voterai l'amendement n° 31 déposé par Pierre Cordier, comme j'ai voté les amendements similaires chaque fois que nous en avons débattu.
La meilleure preuve que la suppression de la demi-part était une erreur réside dans le fait que nous avons le même débat chaque année depuis dix ans. Cela signifie que c'est un sujet de préoccupation et que des erreurs ont été commises par le passé.
Il ne vous a pas échappé que ma famille politique a également entrepris son inventaire. En effet, il faut inventorier le passé, distinguer les bonnes mesures des erreurs ; la suppression de la demi-part fut une erreur, y compris de la part de M. Hollande.
Ensuite, le fait d'être assujetti à l'impôt sur le revenu a fait basculer la situation des veufs et des veuves à l'égard de bien d'autres systèmes d'aide et de dispositifs fiscaux, les pénalisant d'autant plus.
Enfin, les veufs et les veuves sont dans une situation très singulière par rapport aux autres parents isolés. D'abord, ils n'ont pas choisi cette situation. En outre, historiquement, la solidarité est née pour défendre la veuve et l'orphelin, il faut le rappeler.
M. Stéphane Rambaud applaudit.
Je ne nie pas que cette solidarité existe encore pour celles et ceux qui ont été veufs très tôt. Mais la perte d'un conjoint est un traumatisme dont les conséquences financières sont très lourdes pour de nombreuses personnes veuves.
Pour toutes ces raisons, je voterai ces amendements.
Le groupe Démocrate ne soutiendra pas ces amendements. Comme l'a dit le rapporteur général, il n'est pas vrai qu'ils promeuvent la justice fiscale, car ils favorisent les veufs ou les veuves qui perçoivent de hauts revenus. Du reste, comme le rappelait M. le rapporteur général, les veuves qui ont élevé seules un enfant bénéficient toujours de cette demi-part.
La mesure est donc juste, inutile d'aller au-delà. Ce sujet est effectivement un marronnier, et nous ne soutiendrons pas les amendements.
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je salue la décision du groupe Démocrate. La mesure dont nous parlons coûterait 2 milliards d'euros. Il me semble important que nous réfléchissions à quoi nous voulons dédier cet argent, pour que cette affectation soit efficace et juste.
M. de Courson a rappelé l'historique de la demi-part accordée aux veuves : instauré au lendemain de la seconde guerre mondiale au profit des veuves de guerre, le dispositif était alors juste et nécessaire. Puis il a été progressivement dévoyé, ce que beaucoup de groupes ont d'ailleurs dénoncé dans cette assemblée au cours des années et décennies passées – notamment du côté de la gauche, qui fustigeait à l'époque une prime fiscale à la séparation, puisque le bénéfice de la demi-part supplémentaire était conservé à vie en cas de séparation. Un avantage fiscal indu et injuste, une prime à la séparation : tels étaient vos mots. Drôle de retournement…
Comme l'a rappelé Éric Woerth, en 2008, nous n'avons pas supprimé la demi-part des veuves, mais nous avons recentré le dispositif sur une situation familiale spécifique : la demi-part supplémentaire est accordée à tous ceux qui ont eu à élever seuls un ou plusieurs enfants. C'est l'équilibre trouvé à l'époque, peut-être est-il contestable. On pourrait même aller plus loin et penser qu'il faudrait y renoncer, pour aider en priorité les personnes isolées – ce serait, il me semble, une mesure vraiment juste. Mais nous avons décidé du maintien de cette mesure qui coûte 600 millions d'euros et concerne 1 million de personnes.
Aujourd'hui, certains demandent le rétablissement de la demi-part des veuves. Or, ce n'est ni juste, ni efficace, ni nécessaire.
Est-ce juste ? Non. Je crois même que c'est profondément injuste. Vous allez dépenser 2 milliards d'euros pour une mesure qui ne profite qu'à ceux qui paient l'impôt sur le revenu, et dont les plus grands bénéficiaires seront les plus fortunés – je le dis notamment à l'adresse de la gauche, qui a en permanence l'expression « justice fiscale » à la bouche. Il sera intéressant de regarder ce que chacun a voté et de trouver la cohérence entre la justice fiscale que vous prétendez défendre et le rétablissement de la demi-part des veufs.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Est-ce nécessaire ? Non. J'entends dire que les personnes qui viennent de perdre un conjoint sont dans une situation difficile : évidemment ! Nous savons tous à quel point une telle situation est compliquée, notamment en raison des charges administratives et des tracas financiers. Il faut donc, bien entendu, aider fiscalement la personne qui perd son conjoint, mais il se trouve que nous le faisons déjà ! Personne n'a rappelé qu'il existe, dans notre loi fiscale, un dispositif transitoire qui prévoit qu'une personne ayant perdu son conjoint ou sa conjointe bénéficie de la part intégrale du conjoint pendant un an. Voilà une vraie mesure de justice fiscale ! Voilà ce qu'il faut défendre !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.
Je rappelle également qu'au-delà de ce dispositif, tous ceux qui élèvent un enfant vont continuer à bénéficier d'une demi-part supplémentaire, puisque nous vous proposons de maintenir cet avantage.
Mais, puisque je m'exprime avec mes convictions, je vais vous dire ce qui, à mon sens, serait juste : supprimer totalement le dispositif pour concentrer tous les moyens financiers – les 600 millions d'euros du dispositif actuel et les 2 milliards d'euros de la mesure que vous proposez – sur les femmes seules qui élèvent des enfants. Voilà la vraie justice fiscale !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI – NUPES.
Les hommes contre les femmes, les jeunes contre les vieux ! On est encore dans le sexisme : on part du principe que ce sont toujours les femmes qui élèvent les enfants.
Plutôt que d'adopter le rétablissement de la demi-part des veuves, une mesure qui, je le rappelle, n'est ni juste, ni nécessaire…
…et financièrement coûteuse, il serait plus intéressant de réfléchir à des dispositifs ciblant les personnes isolées ou les femmes seules qui élèvent leurs enfants : je suis prêt à en débattre.
Enfin, pour éclairer le plus possible le débat – un débat nécessaire –, je voudrais avancer un dernier argument. En Europe, les conditions de financement ont radicalement changé. Il y a encore six mois, la politique monétaire européenne était particulièrement accommodante, et nous pouvions nous permettre de protéger massivement les Français, de dépenser quelques milliards d'euros supplémentaires. Désormais, nous ne pouvons plus viser qu'un seul objectif stratégique : réduire l'inflation, combattre la vie chère.
Tous nos moyens doivent soutenir cet objectif. Si nous commençons à dépenser de l'argent à tort et à travers…
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
…cela se retournera contre nous, et je vais vous en donner deux exemples.
Le premier est connu de tous, puisqu'il a fait la une des journaux : la Grande-Bretagne. Nouvelle Première ministre, nouveau ministre des finances : on ouvre grand les vannes du budget. Immédiatement, les taux remontent de 3,4 % à 4,7 %, obligeant la Grande-Bretagne à faire marche arrière. Or, je ne veux pas que la France, à aucun moment, soit obligée de faire marche arrière : nous voulons aller de l'avant.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Le deuxième, plus révélateur encore, n'a, lui, pas fait la une. Il y a quelques jours, l'Allemagne a émis pour 4 milliards d'euros d'obligations du Trésor à maturité longue. Or, pour la première fois depuis de très nombreuses années, elles n'ont pas intégralement trouvé preneur.
C'est la preuve que les marchés financiers ne sont plus aussi accommodants et que nous devons faire attention à nos dépenses.
Mais comment en arrive-t-on à parler des marchés financiers en partant des veufs ?
Il faut que le budget que nous adopterons et les dépenses que nous engagerons soient utiles, nécessaires et efficaces. Ce n'est pas le cas du rétablissement de la demi-part des veuves.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
L'amendement n° 3205 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 260
Nombre de suffrages exprimés 245
Majorité absolue 123
Pour l'adoption 105
Contre 140
L'amendement n° 1333 n'est pas adopté.
Depuis la loi de finances pour 2016, une demi-part fiscale supplémentaire est octroyée aux anciens combattants. Dans la loi de finances pour 2017, l'âge minimum ouvrant droit à cette demi-part a été ramené de 75 ans à 74 ans. En outre, les veuves d'anciens combattants peuvent également bénéficier de cette demi-part, à condition d'être âgées de plus de 74 ans et que leur conjoint soit décédé après son 74
Sur les amendements identiques n° 3128 , 476 , 522 , 986 , 1266 et 2764 , je suis saisie par les groupes Rassemblement national et La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n° 679 et 835 ?
Il s'agit d'une proposition proche de celle que nous venons de rejeter. Pour pallier ce qui était vécu comme une injustice, nous avons modifié la loi en 2019 pour que la demi-part supplémentaire soit accordée à toutes les veuves dont le mari avait touché la retraite du combattant – un fait générateur était nécessaire pour permettre l'abattement –, ce qui correspond à un abaissement de l'âge plancher requis. Nous avons trouvé un équilibre : par conséquent, avis défavorable.
Outre le fait que la loi de finances pour 2020 prévoyait déjà un assouplissement des conditions d'âge, nous venons de débattre plus largement de l'octroi de demi-parts supplémentaires. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.
Après avoir attentivement écouté les débats et l'intervention de M. le ministre, j'ai été convaincue par les arguments avancés…
…et n'ai donc pas soutenu les amendements tendant à rétablir la demi-part des veuves.
Mais nous sommes là dans une situation totalement différente, puisque nous parlons de veuves d'anciens combattants, ces hommes et ces femmes qui se sont engagés pour la défense de notre pays et y ont parfois laissé la vie. S'engager, c'est consentir à des sacrifices très importants, en termes de sécurité, mais également de vie personnelle.
Il me semble donc tout à fait normal que davantage de veuves d'anciens combattants puissent bénéficier d'une demi-part supplémentaire.
Je pense que vous assistez tous, chers collègues, à des assemblées générales d'associations d'anciens combattants. Vous savez donc que les veuves d'anciens combattants bénéficient d'une demi-part supplémentaire si leur conjoint a bien voulu mourir après 74 ans – car, s'il meurt avant, elles n'y ont pas droit, au prétexte qu'ils n'avaient pas encore touché la retraite du combattant. C'est totalement absurde : comme si on ne pouvait pas toucher une pension de réversion au prétexte que son mari est mort avant de partir à la retraite ! Bien sûr, l'éligibilité à la pension de réversion est soumise à certaines conditions – par exemple, il faut que l'époux survivant ait au moins 55 ans.
J'appelle d'ailleurs votre attention, chers collègues, sur l'âge plancher de 74 ans : je pense qu'il s'agit d'un critère anticonstitutionnel, car il engendre une rupture d'égalité manifeste entre les veuves ayant perdu leur conjoint ancien combattant avant 74 ans, et les autres. Bien que se trouvant toutes dans la même situation, elles sont pourtant soumises à des traitements différents. J'avais d'ailleurs conseillé à certaines grandes associations d'anciens combattants de déposer une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) et il y avait à mon sens de bonnes chances pour que le caractère inconstitutionnel soit établi.
Élargissons le bénéfice de la demi-part supplémentaire à toutes les veuves d'anciens combattants, cela nous évitera de passer quinze à vingt minutes sur ce sujet à chaque assemblée générale !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Eva Sas applaudit également.
Dans la droite ligne du travail élaboré par l'ancien rapporteur du budget de la mission "Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation" , cet amendement vise à étendre le bénéfice de la demi-part fiscale supplémentaire à toutes les veuves d'anciens combattants, quel que soit l'âge auquel leur époux est décédé. Alors qu'est prévue en 2023 une baisse de 9,5 % du budget alloué aux anciens combattants, l'application d'une telle mesure se trouve à la fois possible et juste.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES. – Mme Eva Sas applaudit également.
La parole est à M. Sébastien Chenu, pour soutenir l'amendement n° 2764 .
Prendre cette mesure ne serait que justice, le ministre des finances l'a lui-même dit tout à l'heure ; je ne vois donc pas ce qui pourrait s'y opposer. Les perspectives qui se dessinent nous invitent d'ailleurs à voter en ce sens : si j'en crois certains, loin d'appartenir au passé, la qualité d'ancien combattant pourrait malheureusement devenir une réalité de plus en plus actuelle.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
C'est là ce que l'on appelle vulgairement un marronnier – un sujet qui, d'année en année, reparaît systématiquement.
En 2019, l'Assemblée, dans sa grande sagesse, a essayé de trouver un équilibre sur ce point et adopté à l'unanimité la solution en vigueur, c'est-à-dire que la veuve bénéficie d'une demi-part fiscale si son époux avait commencé à percevoir sa pension d'ancien combattant ; en d'autres termes, le versement de cette pension constitue le fait générateur que nécessite tout avantage fiscal. Il n'y a pas de raison de revenir en arrière. Avis défavorable.
Certains marronniers ont de bonnes raisons d'être des marronniers. Si cet amendement a été adopté à une large majorité par la commission des finances, les raisons en sont très claires : comme l'a fort bien exposé Charles de Courson, c'est une question d'égalité. Vu de près, le compromis trouvé en 2019 se révèle bizarroïde. Par conséquent, j'assume cet amendement et j'espère qu'il sera tout aussi largement adopté en séance.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Défavorable. Comme l'a rappelé le rapporteur général, les veuves d'anciens combattants bénéficient d'une demi-part fiscale supplémentaire à condition que leur conjoint en ait lui-même bénéficié avant son décès : c'est la règle de base. Afin de tenir compte de certaines fragilités financières, la loi de finances pour 2021 a étendu cet avantage aux veuves dont l'époux percevait une pension de retraite d'ancien combattant. Ces amendements identiques sont donc partiellement satisfaits, car dans certaines conditions, une telle pension peut être versée dès les 60 ans de l'intéressé. En revanche, un nouvel élargissement du dispositif serait peu compréhensible, puisqu'il reviendrait à accorder la demi-part à des veuves dont le conjoint n'était pas concerné. Par ailleurs, ces veuves ne sont pas seules : je souhaite – cela n'a pas encore été fait dans le cadre de nos débats – saluer pour son action exceptionnelle l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG), qui leur consacre la moitié des 25 millions d'euros dont il dispose.
J'ai bien entendu l'avis de M. le ministre délégué. Reste que je connais nombre de parlementaires qui, lors des célébrations patriotiques, versent une larme en racontant aux anciens combattants à quel point ils tiennent à eux, à quel point il importe de les aider. Vous avez l'occasion de faire un geste en ce sens – pas même un geste fiscal extraordinaire, mais une mesure d'équité. Si vous voulez réellement témoigner votre soutien au monde combattant, faites-le donc ! Ou bien il vous faudra expliquer aux intéressés pourquoi vous vous y serez refusé. Votez pour ces amendements, si vous n'êtes pas des hypocrites !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Avoir porté les armes pour la France, c'est les porter toute sa vie ; c'est rester marqué au fer rouge, que l'on ait ou non été blessé au combat. Considérer que, parce qu'un ancien combattant est décédé avant d'avoir touché sa pension, sa veuve ne peut bénéficier de la demi-part fiscale, revient à leur infliger une double peine ! Certes, en 2019, nous avons voté en faveur du compromis, mais pour la bonne raison que vous n'auriez jamais accepté davantage. Aujourd'hui, la composition de l'Assemblée a changé : en faveur de cette mesure d'égalité, nous pouvons nous trouver majoritaires !
Vous avez tous rencontré des veuves de guerre ; vous savez que la famille constitue pour les militaires quelque chose de tout à fait particulier et que, réciproquement, elle partage leur condition. La distinction que vous établissez n'a aucun sens ! D'année en année, le budget consacré aux anciens combattants diminue ; il s'élèvera cette fois à 150 millions. D'année en année, vous justifiez cette baisse par celle du nombre de personnes relevant de l'ONACVG. Si elles sont moins nombreuses, profitons-en pour améliorer la condition de celles qui subsistent ! C'est pourquoi nous soutiendrons ces amendements identiques.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe RN.
Monsieur le ministre délégué, votre réponse est effectivement surprenante. Si un ancien combattant n'a pas eu le temps de faire valoir ses droits à la retraite, sa veuve n'en reste pas moins une veuve d'ancien combattant ! J'ai beau ne pas être encline à la démagogie, l'injustice que suppose votre logique me dérange profondément. L'élargissement du dispositif est légitime, son coût modique : adoptons ensemble cette mesure de justice et de réparation ! Ces veuves n'ont pas choisi de survivre à leur mari ; je vous en prie, considérez que nous ne pouvons leur faire subir plus longtemps une double peine. Encore une fois, c'est profondément injuste !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN. – M. Bastien Lachaud applaudit également.
Non seulement le coût de cette mesure serait minime, mais il s'agit de garantir un revenu et donc en quelque sorte la vie. Faire appel à l'aide sociale, c'est devoir constituer des dossiers, remplir des papiers, alors même qu'a été supprimée il y a quelques années l'aide différentielle qui assurait à ces veuves, entre autres, un certain revenu ! Ce sont d'ailleurs généralement les associations d'anciens combattants qui se chargent des démarches et font remonter les dossiers à l'ONACVG. L'élargissement proposé est au contraire simple, juste, et permettrait de prendre en compte à la fois la souffrance de ceux qui ont combattu et celle des épouses qui leur survivent.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Tout d'abord, monsieur Chenu, je ne vous permets pas de remettre en cause la sincérité des parlementaires qui versent une larme, selon votre formule méprisante, lors des cérémonies aux côtés des anciens combattants !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Mme Béatrice Bellamy applaudit également. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Je peux vous dire que lorsque je verse une larme en commémorant l'armistice du 11 novembre ou celui du 8 mai, je pense à ma famille, à mes ancêtres qui se sont battus pour la France et sont morts à son service !
Ensuite, je le répète, l'attribution de la demi-part à la veuve ne dépend pas de l'âge auquel son conjoint est décédé, mais d'un fait générateur : le début du versement à celui-ci de sa pension de retraite d'ancien combattant. Il y a là une question de logique !
Mme Marie-Christine Dalloz et M. Marc Le Fur s'exclament.
Enfin, je suis surpris que nous en revenions indéfiniment aux mêmes sujets. Le système actuel n'est en vigueur que depuis 2021 ; comme d'habitude, vous ne prenez pas assez de recul pour l'évaluer avant de légiférer à nouveau. Or la mesure proposée a un coût : encore une fois, j'y suis donc défavorable !
Comme vient de le rappeler le rapporteur général, le dispositif a déjà été étendu dans le cadre de la loi de finances pour 2021. Or, monsieur Chenu, vous aviez à l'époque voté contre cette extension !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Pour paraphraser votre intervention, comment l'expliquez-vous aux anciens combattants que vous rencontrez lors des célébrations patriotiques ?
Suspension et reprise de la séance
La séance est suspendue à la demande de la Mme Aurore Bergé, pour une durée de deux minutes.
Protestations sur divers bancs.
Pour le rappel des troupes de vos anciens combattants !
La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à treize heures.
La séance est reprise.
La parole est à M. le président de la commission des finances. Nous sommes dans l'attente de M. le ministre délégué, qui ne devrait pas tarder.
Je suis ennuyé que le rapporteur général ne soit pas revenu, car je souhaitais lui répondre. Peut-être m'entend-il néanmoins.
M. le ministre délégué et M. le rapporteur général rejoignent leurs bancs. – « Ah ! » sur les bancs du groupe RN.
Peut-être, mais on m'a demandé de prendre la parole… C'est vous qui présidez, Ugo Bernalicis ?
Sourires.
Sourires.
Si ce sont les seules tensions, ça va !
Je voulais vous répondre sur deux points, monsieur le rapporteur général. D'abord, je n'ai pas bien compris pourquoi, au-delà de l'atteinte d'un certain âge par le mari, une veuve ne le serait plus ou, en tout cas, perdrait les droits que lui confère la demi-part. Deuxièmement, je vais reprendre votre expression favorite et me montrer un peu taquin. En 2021, c'est une disposition différente qui avait été votée car la configuration de l'Assemblée n'était pas la même. Mais aujourd'hui, j'ai envie de dire à nos collègues des groupes qui soutiennent le Gouvernement sur cet amendement : « Restez dans la majorité, et votez pour ! »
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous sommes parfois interpellés sur l'utilité des débats parlementaires. Je crois qu'ils peuvent éclairer l'ensemble de celles et ceux qui y participent et que, sur le sujet qui nous occupe, notre groupe peut faire œuvre utile en votant cet amendement.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, RN et LR, ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous démontrons ainsi notre capacité d'écoute, d'ouverture et de compromis
Exclamations sur divers bancs
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
J'ai demandé la parole en revenant dans l'hémicycle, mais Aurore Bergé m'a devancé.
« Ah ! » sur les bancs du groupe RN.
Il y a manifestement sur le sujet un débat, une volonté commune d'avancer que le Gouvernement entend. C'est la raison pour laquelle nous nous en remettons à la sagesse de cette assemblée
« Ah ! » sur de nombreux bancs des groupes RN et LFI – NUPES.
Dans la suite de nos débats, et dans la perspective des décisions que nous aurons à prendre sur ce sujet dans le présent texte ou dans des textes ultérieurs, il sera important de déterminer comment l'argent que nous dépensons peut être réellement utile aux veuves qui sont fragiles et modestes. Certaines ne payent pas l'impôt sur le revenu, mais ont néanmoins besoin d'être soutenues. Nous ne devons pas perdre cet objectif de vue lorsque nous dépensons l'argent public ou que nous privons les finances publiques d'une partie de leurs recettes. Il est important de veiller à la juste affectation des ressources et de cibler les mesures vers les personnes qui en ont le plus besoin – en l'occurrence celles qui, n'étant pas redevables de l'impôt sur le revenu, ne bénéficieront pas de cette mesure.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 243
Nombre de suffrages exprimés 242
Majorité absolue 122
Pour l'adoption 241
Contre 1
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2023.
La séance est levée.
La séance est levée à treize heures cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra