Séance en hémicycle du lundi 13 novembre 2023 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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La séance est ouverte.

La séance est ouverte à seize heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'ordre du jour appelle la discussion, en lecture définitive, du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 (T.A. n° 168).

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Mme la Première ministre m'a chargé de vous lire la lettre suivante.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

« Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, étant actuellement en déplacement en Irlande, j'ai demandé au ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, M. Franck Riester, de vous lire cette lettre.

« Il y a plus d'un an, l'examen de ce projet de loi de programmation des finances publiques a commencé. De longs débats ont eu lieu. Le texte a été enrichi, amélioré, et vous l'avez adopté en commission en septembre dernier. Cependant, en première lecture, ce texte a été rejeté et nous ne pouvons pas prendre ce risque à nouveau. En effet, le projet de loi de programmation des finances publiques est un texte nécessaire. Il nous donne une trajectoire budgétaire crédible pour atteindre notre cible de 2,7 % de déficit public d'ici 2027 – une trajectoire nécessaire pour assurer notre souveraineté.

« Il offre des garanties aux Français pour la tenue de nos engagements, notamment le premier : pas de hausses d'impôt. Il permet à notre pays de relever les grands défis à venir, notamment par des objectifs sans précédent en faveur de la transition écologique. Il assure notre crédibilité vis-à-vis de nos partenaires européens et nous assurera de toucher 18 milliards d'euros du plan de relance européen.

Debut de section - Permalien
Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

« Aussi, par la présente lettre, sur le fondement de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, j'engage la responsabilité de mon gouvernement sur le vote en lecture définitive du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, dans sa version considérée comme adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture le 30 septembre 2023, modifiée par quatre amendements adoptés au Sénat. »

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

Très bien !

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L'Assemblée nationale prend acte de l'engagement de la responsabilité du Gouvernement conformément aux dispositions de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. Le texte sur lequel la Première ministre engage la responsabilité du Gouvernement est inséré en annexe au compte rendu de la présente séance. En application de l'article 155, alinéa 1er , du règlement, le débat sur ce texte est immédiatement suspendu.

Le texte sera considéré comme adopté sauf si une motion de censure est déposée avant demain, seize heures quatre, et votée dans les conditions prévues à l'article 49 de la Constitution. Dans l'hypothèse où une motion de censure serait déposée, la conférence des présidents fixera la date et les modalités de sa discussion.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures dix, sous la présidence de M. Sébastien Chenu.

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L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques (1347, 1837).

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

« Aucune société n'abandonne ses morts sans précaution rituelle » : tel est le constat du sociologue Patrick Baudry. Chaque culture, chaque religion, chaque société a sa manière de vivre la mort, mais toutes se retrouvent dans la nécessité d'un rite funéraire. Quel qu'en soit le cérémonial, ce rite permet de faire face à la brutalité et au non-sens attachés à la disparition en aménageant une nouvelle place au défunt et en donnant vie à son souvenir. La proposition de loi qui est soumise à votre vote aujourd'hui a donc une portée particulière, à la fois intime et collective, philosophique et historique. Rares sont les textes qui, comme celui-ci, renvoient à des questions que l'être humain se pose depuis toujours face à la mort. Cette proposition de loi incarne, en vérité, la valeur universelle de la dignité rendue aux morts.

L'apparition des pratiques funéraires est associée à l'émergence de la conscience et de l'humanité. Les premières sépultures remontent à 130 000 ans. Vous vous souvenez peut-être de l'exposition « La mort n'en saura rien » organisée au musée national des arts d'Afrique et d'Océanie en l'an 2000. En prenant pour titre le beau vers d'Apollinaire, elle révélait la diversité des pratiques ancestrales de conservation des reliques humaines de l'Europe chrétienne, de l'Océanie et de l'Asie du Sud-Est et soulignait autant leurs spécificités que leurs similarités.

Qu'il s'agisse de les enterrer, de les embaumer ou de les brûler, le soin apporté aux morts est un marqueur essentiel de l'humanité. Empêcher ces rites, c'est ajouter à l'impossibilité du deuil l'intranquillité des esprits. C'est ce que nous enseigne Antigone. Au péril de sa propre vie, elle défie Créon pour donner une sépulture à son frère Polynice : « Ceux qu'on n'enterre pas errent éternellement sans jamais trouver de repos. […] Il a droit au repos », écrit Jean Anouilh.

Sur les bancs de nos universités de droit, le mythe d'Antigone est enseigné pour illustrer ce qu'est un droit naturel : le droit à la sépulture est un droit que toute personne possède en vertu de sa nature. De ce droit naturel découlent des dispositions légales visant à protéger la dignité du corps après la mort. Pourtant, de nombreux établissements publics conservent des « restes humains » au nom d'un « intérêt public du point de vue de l'histoire, de l'art, de l'archéologie, de la science ou de la technique », comme le dispose l'article L. 2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

Appliquée à des restes humains, la notion « d'intérêt public » peut surprendre, mais elle a un sens. Pour reprendre les mots du muséologue Michel Van Praët, « certains de ces restes humains ont participé à des avancées majeures de la médecine et de son enseignement. Ils sont des éléments fondateurs de l'archéologie, de la paléontologie humaine, de l'anthropologie physique et culturelle. » Pour lui, les restes humains permettent d'approfondir la connaissance des migrations, des maladies et des adaptations de l'humanité à son environnement et « présentent un incontestable intérêt pour l'histoire biologique et culturelle de l'humanité. »

Reste que ces vestiges sont parfois entrés dans nos collections après avoir été acquis de manière illégitime, voire violente. Que l'intention, à l'époque, ait été de recueillir des trophées ou de constituer des collections dont on croyait qu'elles disaient quelque chose des différences entre les hommes, le résultat est le même. Par ces actes, l'humanité a été blessée et des peuples ont été lésés. Il est légitime de les entendre.

Je prendrai comme exemple le cas du squelette du fils du chef amérindien Liempichun, dont la restitution est demandée par l'Argentine, avec qui nous travaillons depuis plusieurs années sur ce dossier, au nom de la communauté Mapuche-Tehuelche. La sépulture a été pillée par l'équipage du comte Henry de La Vaulx, qui, pendant plus de seize mois, entre 1896 et 1897, a parcouru la Patagonie, collectant aussi bien les spécimens naturels, les artefacts des cultures locales que ce sinistre « butin », comme lui-même désignait les restes rapportés de Patagonie. Passons sur le récit de l'exhumation, du dépeçage du corps et de « la cuisine macabre » qu'Henry de La Vaulx décrit complaisamment dans son ouvrage Voyage en Patagonie, paru en 1901. Je citerai ce seul passage : « Un moment je me fais horreur. […] J'ai pour moi une excuse, que diable ! Car je rapporterai en France un beau spécimen de la race Indienne. Qu'importe après tout que ce Tehuelche dorme en Patagonie dans un trou ou au Muséum sous une vitrine. »

La présente proposition de loi n'a pas vocation à faire le procès du passé, mais à apaiser l'avenir. Lorsque la conservation de restes humains dans un musée heurte les principes de la dignité humaine ou la mémoire d'un peuple, nous devons interroger la légitimité de leur présence dans les collections publiques. En 2010, le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) soulignait d'ailleurs en conclusion de son avis 111 sur les problèmes éthiques posés par l'utilisation des cadavres à des fins de conservation ou d'exposition muséale : « Sans être dépourvu de légitimité, l'argument historique – la nécessité de préserver des traces et des vestiges d'un passé révolu – vaut d'être mis en balance avec d'autres valeurs telles que le respect de chaque civilisation et l'amitié entre les peuples. »

Le respect de chaque civilisation : tel est précisément l'objet de la proposition de loi. La force d'une société repose sur sa capacité à réinterroger ses pratiques au fil du temps en fonction de l'évolution des époques et de la transformation des consciences.

Si, en 2023, notre société n'est plus celle de 1896, si nos sensibilités ont évolué, si notre rapport à l'existence humaine a connu des progrès, si l'idée même de dignité s'est réalisée, alors il faut que nos lois le reconnaissent, qu'elles s'en fassent l'écho et qu'elles s'adaptent. Il ne s'agit pas de renier le principe général d'inaliénabilité de nos collections.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Il s'agit de construire, dans la transparence, un dialogue dépassionné pouvant aboutir à un processus de restitution.

Nous souhaitons collectivement avancer sur le chemin des restitutions. La présente proposition de loi-cadre, soutenue de manière transpartisane par les sénateurs Catherine Morin-Desailly, Max Brisson et Pierre Ouzoulias, dont je salue la rigueur et la détermination, nous permet de le faire. Si elle est adoptée, elle facilitera le traitement et le règlement des dossiers de restitution de restes humains. Je tiens plus particulièrement à rendre hommage à Catherine Morin-Desailly pour son engagement personnel à ce sujet, qui remonte à plus de dix ans. Nous lui devons la restitution des têtes maories à la Nouvelle-Zélande, qui a ouvert la voie en la matière.

En vertu du principe d'inaliénabilité des collections publiques, vous le savez, les restes humains ne peuvent être restitués sans une loi. À ce jour, seules deux lois d'exception ont permis d'aller au bout d'une démarche de restitution, à l'Afrique du Sud et à la Nouvelle-Zélande. Lesdites lois d'espèce concernaient uniquement ces cas particuliers et n'ont pas permis de dégager des principes généraux. Le sens de la présente proposition de loi est de combler ce manque : elle pose un cadre pleinement applicable aux demandes adressées à la France par des États étrangers ; elle permettra de conduire, de manière méthodique, rigoureuse et raisonnée, avec toute la rigueur scientifique requise, un processus de restitution conjoint et serein, sans pour autant porter atteinte à l'intégrité des collections publiques.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

En instituant le recours, chaque fois que nécessaire, à un comité scientifique bilatéral chargé de travailler à l'identification des restes humains demandés – un tel comité a été créé avec l'Algérie ; un autre l'a été cette année avec l'Australie ; un autre encore le sera bientôt avec Madagascar –, ce texte offre une méthode sûre pour sécuriser, du point de vue scientifique, le processus de sortie des collections publiques.

Les auteurs de la proposition de loi ont trouvé, me semble-t-il, le bon point d'équilibre entre le respect du principe protecteur de l'inaliénabilité des collections, auquel nous restons tous très attachés, et une juste réponse aux demandes légitimes de populations dont la sensibilité et la mémoire sont heurtées par la conservation, dans une collection, des restes humains de leurs aïeux, ce qui les empêche d'accomplir leurs coutumes funéraires.

Un certain nombre de préoccupations sont apparues au cours du débat parlementaire. Monsieur le rapporteur, cher Christophe Marion, je tiens à saluer votre travail approfondi, qui a permis d'enrichir et de préciser le texte.

J'en viens au sort des restes humains ultramarins, qui demeure pour moi une préoccupation centrale. Je suis très sensible à la demande des descendants des Guyanais qui ont été honteusement exhibés dans un de ces « zoos humains », organisé en 1892 au Jardin d'acclimatation, mais de tels cas ne relèvent pas des relations internationales et leur traitement ne peut donc pas être intégré dans cette proposition de loi.

Mon équipe a engagé un dialogue constructif avec l'association Moliko Alet + Po, qui demande, en lien avec les autorités coutumières et la collectivité territoriale de Guyane, la restitution des restes de ces amérindiens Kali'na. Un mémorial est en construction, avec le soutien de la collectivité territoriale de Guyane et du Grand Conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenges. Il sera livré à l'été 2024 et présentera les conditions de conservation recevables pour un transfert des restes en territoire guyanais, afin que les rites appropriés puissent être conduits. Il s'agit d'une solution d'attente jusqu'au moment où nous aurons trouvé le véhicule législatif adapté. Je m'engage à revenir vers vous, une fois ce travail accompli en lien avec mon collègue Philippe Vigier, ministre délégué chargé des outre-mer.

Mesdames, messieurs les députés, le vote auquel vous allez procéder prend place dans un contexte particulier, celui de trois lois-cadres relatives aux restitutions. Après l'adoption à l'unanimité, en juillet dernier, de la loi relative à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 et avant l'examen, l'année prochaine, d'un projet de loi relatif aux biens culturels ayant pu être usurpés, l'Assemblée nationale a une fois encore l'occasion de se retrouver autour d'un texte qui permet d'apaiser et de réconcilier les mémoires.

En offrant la possibilité aux nations qui le demandent d'honorer la mémoire de l'un des leurs et de lui donner une sépulture, cette proposition de loi va dans le sens d'une plus grande justice et d'une plus grande dignité, en somme d'une plus grande humanité. Plus qu'un texte utile, c'est donc un texte nécessaire, que le Gouvernement soutient pleinement.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Mmes Béatrice Descamps et Sophie Taillé-Polian applaudissent aussi.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La parole est à M. Christophe Marion, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.

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Après l'adoption à l'unanimité, en juillet dernier, de la loi relative à la restitution des biens culturels juifs spoliés, la présente proposition de loi ouvre un nouveau chapitre de la restitution des biens culturels, portant cette fois sur la question des restes humains détenus dans nos collections. Le Sénat l'a adoptée en première lecture le 13 juin dernier, à l'unanimité. Je tiens à saluer ici la ténacité de Mme Catherine Morin-Desailly, sénatrice, qui a fait de ces enjeux de restitution l'un des grands combats de son engagement politique.

Cette proposition de loi répond à une attente réelle exprimée par plusieurs États étrangers, qui ont présenté, il y a de nombreuses années parfois, des demandes de restitution de restes humains appartenant à nos collections publiques. Je salue à cet égard la présence de Mme l'ambassadrice d'Australie dans les tribunes. Il s'agit donc de satisfaire ces demandes et de renforcer des partenariats culturels et scientifiques déjà engagés. Il s'agit aussi, tout en prenant garde aux anathèmes rétrospectifs, à l'anachronisme et à l'ethnocentrisme, de procéder à un acte de réconciliation, un acte mémoriel qui reconnaît non seulement le droit des peuples à construire leur souveraineté, mais aussi une histoire scientifique ou coloniale qui fut marquée par des formes de violence, réelle ou symbolique.

Selon le conservateur du patrimoine Michel Van Praët, plusieurs centaines de milliers de restes humains figurent à l'inventaire de musées, d'universités ou d'établissements publics. Parmi ces restes, quelques milliers seraient d'origine étrangère, la plupart ayant été collectés au cours d'expéditions ou de conquêtes coloniales. La documentation scientifique qui s'y rapporte souffre de lacunes et, quelquefois, d'erreurs. Qui plus est, ces restes ont parfois fait l'objet de déplacements erratiques entre différents lieux de conservation, ce qui a bien souvent brouillé les pistes quant à leur origine.

La présence de ces restes dans nos collections publiques soulève depuis plusieurs années et de façon croissante la question du respect de la dignité humaine des individus dont ils proviennent et du soin apporté à leur conservation. Si les conditions de conservation se sont améliorées, elles ont longtemps été déplorables, comme l'a relevé, dès 2007, l'historienne Laure Cadot. Pourtant, ces restes sont dépositaires d'un fragment de l'espèce humaine et sont des témoins de son histoire. En cela, ils sont le patrimoine de notre humanité et méritent le plus grand respect.

Plus largement, nous devons nous interroger sur le statut de ce que la recherche archéologique nomme les « vestiges anthropo-biologiques », comme cela m'est apparu lors des auditions menées. À ce stade éclaté entre plusieurs codes – code civil, code du patrimoine, législation funéraire –, le statut des restes humains mériterait d'être unifié et clarifié. Cela faciliterait le travail des professionnels qui les manipulent et les protégerait contre toute immixtion, notamment de la sphère religieuse. Cela autoriserait en outre les descendants des personnes à qui ils ont appartenu autrefois d'y avoir un certain accès, de façon encadrée.

La proposition de loi se compose de deux articles. Le premier établit une procédure permettant de déroger à l'inaliénabilité des biens appartenant aux collections publiques afin de pouvoir répondre aux demandes étrangères de restitution. La proposition de loi se concentre en effet sur les demandes émanant d'États étrangers, lesquels pourront agir au nom d'un groupe humain présent sur leur territoire et dont la culture ou les traditions sont toujours actives.

Le texte issu du Sénat autorisait la sortie de restes humains des collections publiques « à des fins funéraires », en vue de l'accomplissement d'un hommage ou d'un culte rendu aux morts par les communautés d'origine. Je tiens à insister sur le sens très large que recouvre la notion de « fins funéraires » : il s'agit non seulement d'une perspective d'inhumation ou de crémation, mais aussi de toute cérémonie visant à célébrer les personnes dont sont issus les restes ou à perpétuer le lien entre les vivants et les morts.

Afin de s'assurer du plein respect, dans toutes leurs manifestations, des cultures des peuples concernés – sans préjuger du résultat des débats qui peuvent animer les communautés elles-mêmes, par exemple en Oklahoma, à Hawaï ou au Congo, quant au sort à réserver aux restes de leurs ancêtres – et pour tenir compte de l'observation de Klara Boyer-Rossol, historienne de l'Afrique, selon laquelle « les communautés devraient avoir le droit de choisir » dès lors que « les usages funéraires, cultuels et sociaux sont infinis », les commissaires aux affaires culturelles ont souhaité adjoindre, à ces fins funéraires, des fins « mémorielles ». Nous sommes sûrs de couvrir ainsi tous les cas de figure, par exemple les monstrations de reliques, étant entendu que les usages contraires au respect de la dignité humaine demeureront proscrits. Nous intégrons pleinement les deux arguments majeurs en faveur de la restitution, à savoir ses vertus thérapeutiques et ses visées réparatrices.

Dans ce texte, les restitutions sont encadrées par plusieurs conditions cumulatives. D'une part, elles doivent concerner des restes humains d'individus morts après l'an 1500, l'expérience étrangère ayant montré que les restitutions concernent rarement des cas remontant à plus de 300 ans, même lorsque la limite inscrite dans les textes est supérieure, ce qui est notamment le cas au Royaume-Uni. D'autre part, la collecte des restes doit avoir porté atteinte au principe de dignité humaine ou leur conservation contrevenir au respect de la culture du groupe d'origine auquel les restes humains peuvent être reliés.

L'article 1er ne se borne pas à énoncer les conditions dans lesquelles une restitution est possible : il prévoit également une procédure visant à identifier les restes humains ou leur lien avec le groupe humain demandeur. Arrêtons-nous un instant sur l'idée d'identification : il ne saurait être question de parvenir à déterminer l'identité exacte ou nominative de l'individu dont proviennent les restes ; la notion d'identification est ici entendue de manière bien plus large, comme un lien suffisamment probant avec un groupe humain défini.

La proposition de loi prévoit qu'un travail scientifique sera mené pour établir cette identité. Il devra être conduit par un comité d'experts composé de façon concertée avec l'État demandeur, en vue d'établir une filiation entre les restes humains et le groupe humain dont il est présumé provenir. Ce travail conjoint sera le fondement de la décision de restitution, qui sera rendue par le Premier ministre par un décret en Conseil d'État.

Le caractère très solennel de cette décision ainsi que la scientificité des bases qui l'auront motivée suffiront, je le pense, à assurer que l'inaliénabilité des collections publiques ne soit surmontée qu'avec les plus hautes garanties. En effet, ce principe est fondamental pour la conservation de nos collections. Il s'agit ici non pas de renier son caractère essentiel, mais de lui apporter une exception, limitée par l'exigence du respect de la dignité humaine. Il s'agit simplement de « faire respirer les collections », pour reprendre l'expression de Jacques Rigaud.

La transparence entourant la procédure sera assurée par la remise d'un rapport annuel du Gouvernement au Parlement, faisant l'état des lieux des restitutions demandées et opérées.

La question de la restitution des restes ultramarins mérite à elle seule un second texte législatif. C'est pourquoi l'article 2 de la proposition de loi prévoit que le Gouvernement présente, dans un délai d'un an, des solutions spécifiques et adaptées. Je partage l'opinion selon laquelle une proposition de loi créant une procédure interétatique ne saurait être le cadre de résolution adéquat pour un sujet touchant notre communauté nationale. Cela ne signifie pas, j'y insiste, que celui-ci soit de moindre importance, mais précisément qu'il justifie que lui soit accordée toute l'attention qu'il mérite.

La restitution des restes ultramarins aux groupes humains d'origine doit avoir lieu. Que cela passe par un véhicule législatif ou par d'autres moyens, c'est une question de reconnaissance importante pour la cohésion nationale, qui participe d'un indispensable travail de mémoire commun. Je connais l'engagement de la ministre de la culture et du ministre délégué chargé des outre-mer à ce sujet, ainsi que leur volonté d'avancer. L'article 2 ne constitue qu'un premier pas nécessaire, qui devra mener à une résolution propre – j'y serai personnellement très attentif.

Je rappelle la lente évolution des mentalités sur ces questions et le chemin parcouru depuis la restitution à l'Afrique du Sud, en 2002, des restes de Saartjie Baartman. Si la recherche scientifique est indispensable, elle doit nécessairement aller de pair avec le respect de la dignité humaine. Dès lors qu'il est accompagné des moyens nécessaires à de réelles recherches de provenance, ce texte contribuera, j'en suis convaincu, à faire un pas de plus en direction d'une conservation plus conforme à l'éthique de nos collections publiques. Appliqué dans un esprit d'ouverture, il permettra, à la faveur d'une négociation entre intérêt scientifique, revendication politique et souci éthique, de parvenir à un équilibre savant entre le ressenti de la mémoire et le recul de l'histoire – entre science et conscience, aurait dit Rabelais.

Derrière les restes humains dont nous parlons se cachent des individus, des hommes et des femmes qui ont souvent connu des destins tragiques : certains sont morts loin de leur terre et de leur communauté ; d'autres ont été profanés par le scalpel des anatomistes ou exhumés par les explorateurs. Je propose que, l'espace d'un instant, nous nous identifiions à eux : vibrons des mêmes sentiments moraux qui les assaillirent, du même désespoir, de la même humiliation parfois ; souffrons avec eux et leur communauté. Ce faisant, d'une certaine manière, mesurons l'importance de cette loi : nous rendons leur dignité à des femmes et à des hommes ; nous les rendons à leur terre ; nous les rendons aux leurs. Et même, pour certaines cultures, grâce aux rites ancestraux qui n'ont pu être accomplis jusqu'à présent, nous leur redonnerons vie.

« Excellent ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme Sophie Taillé-Polian applaudit aussi.

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Dans la discussion générale, la parole est à Mme Annie Genevard.

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Cette proposition de loi d'origine sénatoriale portant sur la restitution des restes humains faisant partie des collections publiques et provenant d'un État étranger a fait l'objet d'une procédure accélérée, lancée par le Gouvernement en juin 2023.

La proposition de loi a pour objectif d'introduire, par une loi-cadre appliquée aux restes humains, une dérogation globale à l'un des principes fondamentaux qui protègent le caractère inaliénable des biens culturels publics suivant lequel ce n'est qu'à titre exceptionnel et par une loi que l'État français se dessaisit de certaines pièces ou objets qui appartiennent à la nation. Le ministre de la culture est le garant du respect de ce principe, envié dans le monde entier.

La proposition de loi vient substituer à la décision du législateur une procédure administrative générale en confiant au Premier ministre, par la voie d'un décret en Conseil d'État, la décision de sortie des collections publiques, sur la base d'un rapport établi par le ministre de la culture et d'un rapport scientifique.

Les restes humains ne sont, à l'évidence, pas des biens comme les autres. Certains ont une valeur particulière – religieuse, culturelle, voire cultuelle – qui motive une demande de restitution pouvant être parfaitement légitime, mais dont il convient à chaque fois de questionner la pertinence. Ce questionnement, vous avez décidé d'en priver le Parlement au seul motif de la nécessité de la rapidité de la procédure. Quand on songe à l'ancienneté de certains restes humains – je rappelle que la borne a été fixée à l'an 1500 –, et quand on constate la rapidité avec laquelle on peut examiner une proposition de loi – ce texte en est l'illustration –, cet argument ne tient pas. D'ailleurs, on voit bien que la loi-cadre est inadaptée aux biens ultramarins. Cela plaide en faveur de la loi d'espèce.

C'est donc ailleurs qu'il faut chercher la cause de la procédure retenue. Je crois, madame la ministre, que vous en avez fait votre combat personnel. J'en veux pour preuve l'enthousiasme que vous avez exprimé en commission à la perspective de la présentation d'une troisième loi-cadre, laquelle ne sera pas d'initiative sénatoriale, mais de votre propre chef. Restituer les biens spoliés aux juifs pendant la seconde guerre mondiale est juste ; redonner aux restes humains la dignité dont on a privé une personne de son vivant est juste. Il n'y a aucune ambiguïté de ma part en la matière. Mais votre intervention a porté presque exclusivement sur les biens – vous avez même convoqué Antigone pour ce faire – et non sur la procédure retenue, qui fait l'objet de mon propos. C'est habile, mais insatisfaisant. Pourquoi changer aussi radicalement les règles qui protègent le principe d'inaliénabilité ? Vous passerez, madame la ministre, comme nous tous, mais les principes fondateurs doivent demeurer.

Le caractère inaliénable des collections existe depuis l'Ancien Régime, époque de la première prise de conscience d'une propriété collective des biens par les citoyens, qui en deviennent les gardiens. Cette idée est consubstantielle à l'idée de patrimoine. Y déroger ne peut passer que par une loi au cas par cas, c'est-à-dire par le législateur. Le problème est que cette loi-cadre tue la loi et lui substitue un décret au motif discutable de la simplification, dont je rappelle qu'elle a fait disparaître la Commission nationale scientifique des collections, dans laquelle le Parlement était représenté. La dérogation administrative pourrait devenir la règle : c'est un véritable renversement de doctrine. C'est cela que nous refusons. C'est la raison pour laquelle j'avais souhaité présenter, au nom de mon groupe, deux amendements restaurant le Parlement dans ses droits, amendements hélas déclarés irrecevables, et un troisième pour revenir à la finalité funéraire de la restitution des restes humains, laquelle ne doit être ni diplomatique, ni politique, ni réparatrice des politiques du passé.

Madame la ministre, votre responsabilité est grande si un mésusage est fait un jour de ces lois-cadres dont vous avez fait une priorité de votre action. Mes chers collègues, votre responsabilité l'est tout autant, si vous consentez à cette réduction de votre pouvoir de législateur. Certains parmi vous conspuent régulièrement l'usage du 49.3 ou des ordonnances mais ne voient pas de problème en l'espèce, car la défense du patrimoine leur semble politiquement moins importante.

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Si le législateur n'est pas, sous une forme ou sous une autre, réintégré dans la procédure, nous nous abstiendrons pour ce seul motif.

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Il est des débats en cette chambre qui interrogent profondément et philosophiquement l'histoire passée et les pratiques qui ont été ou sont les nôtres. Le débat sur la proposition de loi-cadre relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques en fait partie.

Le groupe Démocrate est très heureux de cette proposition issue du travail important et suivi de Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture de 2014 à 2020 au Sénat. Elle a permis de faire évoluer remarquablement la législation et l'action des pouvoirs publics à la suite du travail de notre collègue du MODEM, Nicolas About, en 2002.

Nous avons rappelé en commission l'histoire initiale et, à ce titre, exemplaire, de Saartjie Baartman, à l'origine de la première loi de restitution intervenue en 2002. On la surnommait la « Vénus hottentote ». Cette jeune femme d'Afrique du Sud fut vendue, montrée en France, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas puis, après sa mort prématurée, à 27 ans, disséquée, formolisée, reconstituée et exhibée à nouveau jusqu'en 1974, date à laquelle ses restes furent enfin mis en réserve. Des décennies et une loi plus tard, elle retrouva enfin son sol natal, le jour de la fête nationale consacrée aux femmes, le 9 août 2002, soit 186 ans après son décès. C'est aussi par une loi, votée en 2010 grâce au travail de Catherine Morin-Desailly, qu'aboutit la restitution à la Nouvelle-Zélande de vingt têtes humaines tatouées et momifiées, dites têtes maories, dont l'une était conservée au Muséum d'histoire naturelle de Rouen depuis 1875.

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Aussi profond que soit notre respect pour le principe d'inaliénabilité du domaine public, il n'était plus possible d'avoir recours à une loi à chaque demande. Ce principe protecteur, théorisé par le grand législateur Michel de l'Hospital et qui régit notre droit depuis l'édit de Moulins promulgué par Charles IX, en l'an 1566, reste bien évidemment essentiel pour nos collections. Toutefois, une dérogation à ce principe sera désormais rendue possible par décret en Conseil d'État après une analyse rigoureuse, scientifique et, au besoin, historique, dans le strict respect de critères précis.

Ce cadre a d'ailleurs des contours mieux définis après les travaux du Sénat et de la commission de notre assemblée. Les restitutions sont en lien avec la demande effective d'un État tiers, au nom d'un groupe humain à la culture et aux traditions actives, pour des fins funéraires ou mémorielles. Pour définir la période des restitutions possibles, un curseur placé à l'an 1500 a été privilégié à la borne mobile des 500 dernières années. Les restitutions sont possibles quand les conditions de collecte se sont avérées problématiques au regard du principe de dignité de la personne humaine ou du respect de la culture et des traditions du groupe humain considéré. Il est enfin rappelé que les recherches génétiques sur des restes humains sont possibles uniquement en concertation avec le pays tiers.

Voici donc une proposition de loi-cadre qui, en proposant de s'affranchir de la loi, ouvre la voie à de nouvelles restitutions pour des restes humains qui n'auraient jamais dû entrer dans nos collections publiques. En effet, certains de ces restes humains ont été collectés à une époque où les considérations sur l'infériorité de certaines races avaient cours. Ils résultent de « pillages, trafics illicites, vols, fouilles et excavations sauvages, confiscations, échanges inéquitables […], mutilations volontaires des cadavres massacrés, recueil d'individus exposés », pour reprendre les mots du chercheur Laurent Berger. Nous gagnerons nous-mêmes en dignité en répondant aux demandes de restitution de ces restes par des États tiers, en opérant cette « décision de justice différée pour les populations opprimées par le passé ».

Pour les restes humains ultramarins, nous nous satisfaisons de voir que le travail de réflexion entamé au Sénat se poursuivra avec la remise d'un rapport. Nous n'oublions pas que nos compatriotes ont, eux aussi, pu être les victimes, sur le sol hexagonal, de zoos humains.

Pour terminer, je voudrais vous confier une réflexion. Il y a quelques jours, je regardais un documentaire d'Arte sur un chantier de fouilles en Italie. Les os d'une femme étrusque étaient minutieusement récupérés, classés, prélevés. Derrière l'intérêt scientifique évident de ces fouilles et la nécessité de faire progresser nos connaissances pour les transmettre à la postérité se pose la question essentielle du respect dû à une tombe. La sagesse et cette proposition de loi nous invitent à faire clairement la différence entre la nécessaire mise en valeur et en lumière de civilisations anciennes et ce qui relève manifestement du recel, de l'exhibition malveillante et raciste. Il est indispensable que les communautés d'origine puissent honorer la mémoire de ceux qui, parmi elles, furent les victimes de ces actions indignes.

C'est ce que permettra ce texte, dont la portée est d'autant plus forte que nous venons d'honorer nos morts, le 2 novembre, et nos anciens combattants ce week-end. C'est aussi le rappel d'une histoire qu'il faut toujours interroger, regarder de face et réparer, pour que les cicatrices d'hier n'engendrent pas les désaccords et les conflits de demain. En un mot, c'est un geste de paix qu'accomplit cette belle proposition. Nous la voterons avec enthousiasme.

Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La proposition de loi relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques, que nous examinons aujourd'hui, pose les bases d'une meilleure gestion de la restitution de ces biens à des États étrangers.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En effet, cette loi-cadre vise à instaurer une procédure spécifique qui permettra d'arrêter de produire des lois de circonstance lorsqu'un État étranger fait une demande de restitution. Actuellement, les restitutions de restes humains sont extrêmement limitées. La procédure est difficile à mettre en œuvre et il est nécessaire de recourir à des lois au cas par cas qui ne sont pas satisfaisantes. Le Parlement s'est prononcé antérieurement sur deux lois d'espèce en faveur de restitutions. La première a été votée en 2002 et concernait la restitution à l'Afrique du Sud de la dépouille de Saartjie Baartman, dite « Vénus hottentote ». Quant à la seconde, elle a été adoptée en 2010 pour restituer vingt têtes maories à la Nouvelle-Zélande.

La proposition de loi a pour objectif de faire cesser le recours à des lois de circonstance et d'offrir un cadre juridique clair à ces demandes. Je tiens à souligner qu'afin de contrôler l'action du Gouvernement, le texte prévoit que le Parlement sera destinataire, tous les ans, d'un rapport relatif à l'application de cette procédure dans lequel seront recensées les demandes de restitution, les décisions de sortie du domaine public et les restitutions de restes humains intervenues. Il est à préciser que les restes humains des collections publiques ont bien souvent été acquis de manière illégitime, voire violente. Ces biens sont arrivés dans des conditions suspectes ; des peuples ont été fortement lésés. La loi n'est donc pas seulement technique, car elle prend en compte ces spoliations.

Ces collections sont particulièrement sensibles car elles se composent de corps humains, ou d'éléments de corps humains, auxquels il est nécessaire d'offrir un traitement respectueux, digne et décent. Les restes humains, de ce fait, ont un statut juridique particulier. Actuellement, le principe d'inaliénabilité des collections fait obstacle à leur restitution. Aussi, afin de préserver la dignité humaine, le texte ne permet-il les restitutions qu'à des fins funéraires et mémorielles, en créant une procédure spécifique qui offrira aux États demandeurs un cadre juridique strict. La rédaction actuelle permet de déroger au principe d'inaliénabilité des restes humains, tout en préservant un traitement respectueux et digne de ces biens. À ce jour, l'Australie, Madagascar et l'Argentine ont formulé des demandes de restitution. La majorité de ces demandes sont à des fins funéraires. Le texte correspond donc pleinement à la réalité. Si la proposition de loi venait à être adoptée, comme nous le souhaitons, elle pourrait d'ailleurs profiter à ces trois demandes.

Le texte permettra également une meilleure reconnaissance de la nature particulière de ces biens et une reconnaissance de leur valeur culturelle et cultuelle. Le retour de ces restes humains permettra de maintenir la cohésion dans certaines communautés. Les groupes d'humains issus des États demandeurs pourront enfin rendre hommage à leurs défunts et réaliser des cérémonies ou des cultes dans le respect de leurs croyances et de leur culture d'origine. La restitution des restes humains s'impose comme un dialogue plus poussé et plus respectueux entre les cultures.

La France possède actuellement de nombreux restes humains. Ces vestiges permettent à la communauté scientifique d'effectuer des études. Une proportion significative des ossements pourrait d'ailleurs faire l'objet de demandes de restitution. Cette nouvelle procédure permettra à la France d'ouvrir de nouvelles coopérations culturelles et scientifiques, puisqu'un comité scientifique paritaire représentant les deux États sera mis en place pour travailler sur les biens concernés. Elle permettra également d'apporter une transparence indispensable sur le travail scientifique effectué, puisque le rapport produit par le comité scientifique pourra être rendu public, si c'est le souhait des deux États. Cette loi-cadre pourra aussi ouvrir de nouvelles relations diplomatiques entre la France et les pays demandeurs, avec pour finalité la réparation des peuples lésés à travers la restitution de ces biens.

Enfin, le cas des outre-mer ne peut pas être traité dans ce texte mais la majorité a bien entendu les demandes de restitution émises par nos collègues ultramarins. Les dispositions proposées en commission ne peuvent pas être adoptées dans le cadre de la présente proposition de loi car il s'agit d'un texte interétatique – Mme la ministre et M. le rapporteur l'ont souligné plusieurs fois en commission.

Néanmoins, la réflexion ayant trait aux territoires ultramarins, notamment la Guyane et la Polynésie française, doit se poursuivre rapidement, en concertation avec le Gouvernement, afin d'instaurer une procédure spécifique les concernant. C'est l'objectif de l'article 2 du texte, qui prévoit la remise d'un rapport par le Gouvernement au Parlement afin d'identifier les solutions possibles à ces demandes de restitution et, bien sûr, de les appliquer dans un délai qui soit le plus court possible.

Pour conclure, le groupe Renaissance votera bien entendu en faveur de ce texte ; nous espérons qu'il sera adopté à l'unanimité, comme au Sénat.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.

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Le 29 juin dernier, nous avons accompli un travail essentiel pour apaiser les mémoires et pour réparer, autant que possible, les errements du passé, en adoptant la première loi-cadre mémorielle dédiée aux biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945.

La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui ouvre un nouveau chapitre en matière de restitutions ; elle a cette fois pour objet les restes humains détenus dans nos collections. Je tiens, en cette occasion, à saluer l'engagement de la sénatrice Catherine Morin-Desailly, qui a fait de ces questions relatives à la restitution des biens culturels une priorité de son travail parlementaire.

Depuis plusieurs années, la présence de milliers de restes humains au sein de nos collections publiques, fruits de butins de guerre amassés au cours d'expéditions ou de conquêtes coloniales, ou encore d'exhumations illégales effectuées à l'étranger à des fins de recherche scientifique, nous pose un problème croissant qui tient au respect de la dignité humaine. Plusieurs centaines de ces restes humains ont été collectés à l'étranger, de manière parfois illégitime et parfois violente. Ils sont les témoins silencieux de notre histoire et de valeurs d'un autre temps ; ils sont l'héritage d'une domination coloniale que nous devons reconnaître. Ces restitutions sont donc en premier lieu un devoir moral, dont nous devons nous acquitter par respect de la dignité humaine, par reconnaissance de l'humanité blessée et des destins parfois tragiques de ceux dont les restes sont conservés dans nos collections publiques.

Elles sont également un devoir politique : nous les devons à de nombreux États étrangers qui, pour certains, réclament depuis plusieurs années des restes humains issus de nos collections publiques. Des nations, des peuples ont été lésés voire humiliés par cette pratique. Je pense en particulier aux restes de Saartjie Baartman – les premiers à avoir été restitués, en 2002 à l'Afrique du Sud –, dont l'histoire illustre ce que nous avons pu faire de pire en matière d'exploitation des corps. Surnommée la « Vénus hottentote », cette femme fut exhibée durant toute sa vie comme un monstre de foire, du fait de ses particularités physiques ; à sa mort, son corps fut disséqué et moulé, avant d'être exposé jusqu'en 1974 au musée de l'Homme. Son histoire terrible nous rappelle le pire d'une époque où, pour reprendre les mots de l'historien François-Xavier Fauvelle, « il existait une alliance entre le chapiteau et le musée parce que les gens de spectacle avaient besoin de la caution scientifique pour que le public soit sûr que les monstres sont vrais. »

Au-delà de cet exemple que l'on pourrait qualifier d'extrême, nous devons nous acquitter de ces restitutions par respect des coutumes funéraires et mémorielles, par considération à l'égard des cultures et de la souveraineté des peuples concernés, et enfin pour nous donner les moyens de construire avec eux des relations plus solides et apaisées.

Or, jusqu'à présent, il n'était pas possible de restituer des restes humains sans passer par la loi, compte tenu de l'inaliénabilité des collections publiques. Si ce principe, hérité du domaine royal, est essentiel pour garantir la préservation de notre patrimoine national, il a notablement freiné le travail de restitution. En effet, la France n'a accédé à ce jour qu'à cinq demandes de ce type – et encore, seules les restitutions des restes de Saartjie Baartman à l'Afrique du Sud et de vingt têtes maories momifiées à la Nouvelle-Zélande ont donné lieu à une loi d'exception, tandis que la restitution de crânes algériens, en 2020, a seulement fait l'objet d'une convention de dépôt.

Plusieurs pays – l'Australie, l'Argentine et Madagascar – ont fait des demandes de restitutions et attendent encore, parfois depuis longtemps. Pour eux et pour ceux qui suivront, probablement nombreux à l'heure où l'enjeu des restitutions monte en puissance sur la scène internationale, nous devons désormais mettre en place des principes généraux, définir un cadre qui établisse un processus scientifique et rigoureux et nous donner les moyens de restituer plus rapidement.

C'est pourquoi les députés du groupe Horizons saluent cette proposition de loi, qui crée une dérogation générale au principe d'inaliénabilité du domaine public, exclusivement réservée à la restitution à un État étranger. Elle autorise dans ce but la sortie du domaine public de restes humains, y compris ceux entrés dans les collections des musées de France par don ou legs, tout en définissant plusieurs critères d'ordre matériel, juridique, de filiation, éthique et temporel. Ainsi, nous pourrons enfin garantir une procédure claire, scientifique et transparente, qui permettra d'accéder aux demandes légitimes des États concernés tout en protégeant notre principe d'inaliénabilité.

Je me réjouis enfin que ce cadre général permette non seulement de faciliter les restitutions de restes humains et d'inciter les établissements publics à engager un travail d'identification des restes potentiellement sensibles dans leurs collections, mais aussi de développer des coopérations culturelles et scientifiques avec les États demandeurs, grâce au travail qui pourra être amorcé au sein du comité scientifique mixte.

Je veux aussi saluer l'intention d'avancer en matière de restitution des restes ultramarins, comme l'a rappelé M. Sorre. Enfin, je me réjouis de l'évolution des mentalités sur ces questions, et je tiens à souligner que ces restitutions représentent une nouvelle étape fondamentale, un tournant pour nos musées. Pour conclure et pour toutes ces raisons, le groupe Horizons approuve cette proposition de loi et la votera.

Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et Dem.

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Nous avons besoin de faire face à notre passé pour mieux construire l'avenir de notre nation, et cela doit passer par des actes forts. La restitution des biens juifs spoliés pendant la seconde guerre mondiale était un premier pas ; celle des restes humains appartenant aux collections publiques en est un second. Il en restera d'autres à accomplir pour avancer vers la connaissance et la reconnaissance de notre histoire.

Plusieurs centaines d'établissements publics comptent des restes humains dans leurs collections ; une partie d'entre eux est d'origine étrangère, et certains sont directement issus d'anciennes colonies. Il est temps de reconnaître que le musée n'est pas un espace neutre qui n'aurait qu'une dimension esthétique : nos collections publiques sont le résultat d'une histoire parfois violente, faite de dominations et marquée par la colonisation. Il est important de le reconnaître aujourd'hui, en adoptant ce texte ayant trait aux restes humains, mais aussi demain, en soutenant un autre texte relatif à la restitution d'œuvres indûment acquises.

En effet, la création de nos musées et la collecte de ce dont ils regorgent ont souvent reposé sur une politique de saisie et de pillage des biens mais aussi des corps colonisés, qui est incompatible avec le principe de respect de la dignité humaine. C'est le cas des restes humains issus des exhibitions coloniales parisiennes, comme les zoos humains, et nous nous devons de dénoncer aujourd'hui ce qui était considéré hier comme une richesse, dans un contexte colonial : nous ne sommes pas les gardiens légitimes de ce que nos aïeux considéraient comme des trophées exotiques. Je pense ici à Saartjie Baartman, exhibée en Europe de 1810 à sa mort, en 1815, à Paris, puis disséquée et exhibée par les zoologues pour illustrer fallacieusement l'inégalité des races. Son corps n'a été restitué à l'Afrique du Sud qu'en 2002.

Nous ne devons pas craindre de regarder en face notre passé, car il est nécessaire de le faire. Cette partie de notre histoire reste une plaie au cœur de notre République, une plaie ouverte pour ses enfants descendants de colonisés, et une plaie enfouie pour ses enfants descendants de colonisateurs. Nous ne pouvons plus nous contenter de grandes déclarations d'intention : il nous faut prendre des actes forts et concrets, en organisant la restitution par une loi-cadre. Une telle loi est nécessaire, parce que la restitution de restes humains et d'objets spoliés est un principe aussi fort que l'inaliénabilité.

Nous devons aussi organiser la restitution des restes issus des territoires ultramarins français, et assurer la décolonisation de nos collections publiques. Nous devons en outre créer un musée national de l'histoire de la colonisation, idée que j'ai défendue lors des débats budgétaires, car il faut travailler à la décolonisation des imaginaires et de l'histoire officielle. Il est essentiel que la France se dote d'un lieu de pédagogie, d'histoire, de culture, de transmission et de débat en la matière. Cette partie de notre histoire reste en effet un sujet tabou dans notre République, et la création d'un tel musée contribuerait à une meilleure connaissance et à une meilleure compréhension de notre passé. Il est capital que nous nous livrions à cet exercice mémoriel, pour comprendre comment la France s'est construite et pour analyser la relation entre ce contexte historique et le racisme toujours bien présent dans notre pays.

Rappelons-nous qu'il ne peut y avoir de vivre ensemble sans un débat apaisé et sans lieux mis au service de la vérité, qui s'affranchissent d'un récit national systématiquement réécrit par les vainqueurs en étouffant la parole des victimes. Remettons cette mémoire au cœur de notre histoire commune, pour tisser et retisser les liens entre générations. Faisons-le également pour redonner toute sa vigueur au principe d'universalisme, qui a été dévoyé pour justifier la colonisation : si nous voulons l'employer à nouveau, nous devons reconnaître notre erreur à ce sujet.

Le groupe Écologiste appelle donc à voter pour la présente proposition de loi, dans un esprit similaire à celui qui avait prévalu lors de l'examen du texte relatif aux biens spoliés aux juifs pendant la seconde guerre mondiale. Il apparaît nécessaire – et je sais, madame la ministre, que vous vous y êtes engagée – que se tienne par la suite un débat ayant trait à l'ensemble des collections issues de la période coloniale française, assorti d'une loi-cadre permettant des restitutions fondées sur un avis scientifique, qui éclaire les décideurs et le débat public.

Mme Eva Sas applaudit.

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Je salue l'engagement du Gouvernement sur la question des restitutions, qu'il était indispensable de traiter. Je rends également hommage aux modifications apportées par M. le rapporteur suite à la discussion du texte en commission. En revanche, je regrette que notre travail ne soit pas allé plus loin, car le texte constitue selon moi une occasion manquée d'aborder le sujet in extenso, en particulier pour permettre la guérison des maux de la période coloniale.

Comme exposé dans le cadre des auditions et des débats qui ont eu lieu en commission, la réflexion doit se poursuivre quant au statut juridique des restes humains en droit français. Que penser du statut des objets funéraires entreposés près des défunts ou sur eux, et des moules parfois réalisés sur les corps ? D'autres exemples spécifiques se présenteront dans le futur, ce qui justifie un travail plus poussé pour définir ces termes.

Le texte issu du Sénat prévoyait un délai maximum de 500 ans au-delà duquel toute restitution serait rejetée. M. le rapporteur a entendu nos craintes et remplacé ce délai par une date butoir : l'an 1500. Je propose de la conserver mais en prévoyant une exception, si l'origine des restes peut être identifiée avec certitude.

J'émets une réserve concernant la notion d'appartenance « à un groupe humain demeurant présent sur [un] territoire et dont la culture et les traditions restent actives », et propose de la supprimer du texte. Quel est l'apport d'une telle formulation, alors même que la date butoir de l'an 1500 est établie ? Il me paraît délicat de la conserver, car elle est empreinte de subjectivité.

La création du diplôme universitaire Recherche de provenance des œuvres à l'université de Nanterre, en février 2022, est louable. Cependant, cette formation doit être élargie à la question des restes humains ; elle pourrait être à l'origine de travaux qui étudieraient leur statut en droit français et pourrait prendre la forme de cours, d'ateliers, de mémoires de fin de formation ou de recherches académiques plus longues.

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Ma plus grande réserve concernant ce texte est la non-inclusion des collectivités dites d'outre-mer. Comme c'est le cas pour bien d'autres sujets, il propose la remise sous un an d'un énième rapport. A-t-on besoin d'un an pour cela ? Pourquoi tant de réticences ? Le Gouvernement a souhaité cette loi pour ne plus avoir recours à des lois d'espèce, mais c'est exactement le sort que l'on veut réserver aux demandes ultramarines ! Qu'attendons-nous ?

En effet, le texte vise à permettre la sortie de restes humains du domaine public français, afin qu'ils soient restitués à des communautés étrangères. Or il existe des restes qui pourraient sortir du domaine public afin d'être restitués à des communautés françaises ultramarines. L'idée n'est pas ici de les faire passer d'un musée de l'Hexagone à un musée étranger ou ultramarin, mais bien de les restituer à une communauté étrangère ou française ultramarine. On voit donc qu'en l'espèce, l'obstacle n'est pas juridique : il est politique.

Prenons l'exemple très douloureux du peuple Kali'na. Ces personnes ont été arrachées de chez elles par la force ou la tromperie, exhibées comme des curiosités, et sont décédées en France métropolitaine, loin des leurs.

Le territoire kali'na s'étend des deux côtés du fleuve Maroni, source de vie qui le scinde en deux et qui fut désigné comme frontière coloniale entre le Suriname et la Guyane au XVIIe siècle. Si le texte que nous étudions venait à s'appliquer, seuls les Kali'na du Suriname pourraient légitimement formuler une demande de restitution à la France, par le biais de leur État. Ne serait-ce pas curieux ?

Autre exemple : cette année, l'université de Strasbourg a voulu engager la restitution d'une trentaine de crânes à la Namibie et à la Tanzanie. Les demandes ayant été formulées respectivement par une fondation et par une province, plutôt que par les États eux-mêmes, la restitution n'entre pas dans le cadre de la présente proposition de loi. Les communautés ou les peuples autochtones, qui sont le plus souvent des minorités, doivent pouvoir demander une restitution sans forcément passer par un État.

En Polynésie, l'association Te Tupuna, Te Tura – « le respect de nos ancêtres » – a déjà procédé au rapatriement de 350 kilogrammes d'ivi, ou ossements, parfois accompagnés d'objets funéraires. Les restes étaient conservés dans des musées étrangers. Le Muséum d'histoire naturelle de Stockholm a restitué des restes humains des îles Marquises, en prenant en charge le coût du transport des restes jusqu'à destination ainsi que l'assurance. Le directeur régional des douanes de Polynésie, à la demande de l'association et avec l'accord du gouvernement polynésien, a accepté d'exonérer de taxes les restes rapatriés. Qui prendra en charge ces frais dans le cadre de la présente proposition de loi ?

Enfin, le texte prévoit la création d'un comité dont le rôle essentiel doit être élargi pour englober à la fois le récolement et la recherche de provenance. Au vu de son rôle fondamental dans la recherche de vérité et dans la guérison des blessures du passé, cette instance ne doit pas se réunir uniquement en cas de doute sur l'identification de restes humains, mais avoir une activité pérenne, impliquant la participation d'experts et d'universitaires.

Pour toutes ces raisons, le groupe GDR – NUPES réserve son vote et se prononcera en fonction de la teneur des débats à venir.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES. – M. le rapporteur applaudit également.

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Paul Valéry a écrit : « C'est la vie et non point la mort qui sépare l'âme du corps. » Le code civil dispose de façon à peine moins poétique que « le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort ». La question posée aujourd'hui dans cet hémicycle est sensible et douloureuse ; elle touche à la dignité des morts et à la reconnaissance des vivants.

Les collections publiques françaises comptent plusieurs dizaines de milliers de restes humains non fossiles, des petits fragments d'os retrouvés lors des fouilles archéologiques aux restes issus de notre passé colonial et résultant parfois de captations patrimoniales, de vols, de pillages, de profanations de sépultures ou d'exécutions. Dans ces conditions, il semble légitime d'entendre la volonté de certains pays de rapatrier les restes humains identifiés comme les leurs et auxquels ils souhaitent apporter la dignité et le respect à travers des rites funéraires conformes à leurs cultures et à leurs traditions. Le principe de dignité du corps humain ne peut que nous mettre d'accord et nous conduire à saluer la volonté d'instaurer un cadre général pour la restitution des restes humains conservés dans les collections publiques. Je salue d'ailleurs à mon tour cette initiative transpartisane de nos collègues sénateurs et particulièrement l'engagement de longue date de Catherine Morin-Desailly.

Ces biens ne peuvent pas être considérés, perçus, ni traités comme de simples objets au prétexte qu'ils font partie de collections publiques : ce sont des corps humains, qui ont vécu et ont parfois fait l'objet d'un trafic sordide et macabre. Un véritable effort doit être fait pour identifier la provenance des restes humains conservés dans nos musées, en déployant les moyens financiers et humains nécessaires pour y parvenir. C'est la condition sine qua non d'une application réelle et efficace du texte soumis à notre examen, qui nécessite aussi de mieux former les étudiants et les professionnels à l'activité de chercheur de provenances et d'accompagner les établissements culturels dans leur rôle de médiation.

Je le répète, ce texte touche à la dignité des morts et à la reconnaissance des vivants. Le fait de reconnaître aux morts leur humanité relève d'un indispensable travail de mémoire, de justice et de respect. Il permettra aussi aux États étrangers, qui sont nos interlocuteurs en la matière, de recouvrer eux aussi une forme de dignité et de reconnaissance, tout en construisant des relations internationales fondées sur la confiance et le respect.

Le groupe LIOT se satisfait de ce texte équilibré. Une question, que nous avons déjà posée en commission, demeure toutefois : rien ne semble prévu en cas de refus d'une restitution. Que se passera-t-il le cas échéant ? Un recours sera-t-il possible ? Nous proposerons que soit au moins rendue systématique la publication des rapports et avis du comité scientifique sur les demandes de restitution, pour que la procédure soit totalement transparente.

Nous resterons aussi très vigilants concernant les restes humains des collections publiques n'émanant pas de l'étranger, mais de territoires français : 5 % des restes humains conservés dans les musées français proviennent des territoires d'outre-mer. Si nous les évoquons aujourd'hui, c'est parce qu'ils présentent souvent des profils et des parcours très similaires à ceux concernés par la présente proposition de loi. Bien sûr, nous comprenons que la procédure, dès lors qu'elle serait franco-française, doive être différente. Bien évidemment, des questions se posent : à qui restituer les restes, puisqu'il ne s'agit pas de nations étrangères ? Selon quelles modalités ? Comment définir les contours de cette procédure à inventer ? Toutefois, quels que soient les difficultés techniques rencontrées et le temps nécessaire pour les résoudre, cette question doit impérativement trouver une solution et les restes humains concernés doivent faire l'objet d'une inhumation dans les territoires ultramarins auxquels ils appartiennent. Nous serons attentifs sur ce point et sur la réflexion à mener, même si je sais que vous partagez notre volonté, madame la ministre – vous l'avez d'ailleurs réaffirmé.

Notre groupe votera en faveur de ce texte.

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Tout d'abord, veuillez me pardonner de ne pas avoir assisté au début de la discussion générale : j'ai été quelque peu prise de court par l'application rapide du 49.3.

Sourires sur quelques bancs.

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Merci à M. Bertrand Sorre d'avoir accepté d'inverser l'ordre de nos interventions.

L'Assemblée est appelée à examiner cet après-midi une proposition de loi relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques. Pourquoi sommes-nous amenés à légiférer sur cette question qui pourrait nous sembler étrangère ? Parce que, comme tous les biens appartenant aux collections publiques, les restes humains sont inaliénables : ils ne peuvent pas être restitués sans avoir été préalablement sortis du domaine public, ce qui implique l'autorisation du Parlement, donc une procédure longue et fastidieuse.

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À ce jour, la France n'a fait droit qu'à très peu de demandes de restitution – cinq en tout. Ainsi, cette proposition de loi s'inscrit dans une série de textes récemment adoptés pour faciliter, accélérer et augmenter le nombre de restitutions.

Pour autant, nous ne discutons pas ici de collections comme les autres : ce ne sont pas d'œuvres dont il est question, mais bien de restes humains, qu'il s'agisse de momies d'Égypte antique ou d'Amérique précolombienne, de crânes de combattants s'étant opposés à la colonisation de leur territoire par la France ou bien encore de squelettes de personnes étudiées par les praticiens de l'anthropologie naissante. Rappelons que le code civil dispose que « le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort ».

Un grand nombre de restes humains n'ont pas leur place dans les collections des musées. Bien souvent, ils ont été acquis dans des conditions non compatibles avec les valeurs qui sont désormais celles de notre démocratie. Pensons aux trophées de guerre ou à certains commerces barbares, comme celui des têtes maories, ces dernières ayant été il y a une quinzaine d'années au centre d'une affaire impliquant le Muséum de Rouen.

La proposition de loi permettra de faciliter la restitution de ces restes humains à des États étrangers. Examinée et adoptée par le Sénat, elle introduit une dérogation générale au principe d'inaliénabilité, rendant possible, sous certaines conditions, la sortie du domaine public de restes humains, sans qu'il soit nécessaire de délivrer au cas par cas une autorisation de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Par la création, à l'article 1er , d'un comité scientifique composé de représentants des deux États concernés ainsi que des institutions détenant les restes en question, le texte permet une approche collaborative, pluridisciplinaire et impartiale. Ensemble, ces experts évalueront de manière précise les demandes de déclassement et de restitution en tenant compte des aspects humains, éthiques et scientifiques, dans le respect des individus dont les restes sont en jeu.

Je salue les ajouts de la commission, qui ont permis de prendre en compte l'aspect mémoriel en incluant les restitutions visant à permettre l'accomplissement de rites ancestraux ou de cérémonies n'ayant pas nécessairement ou uniquement une nature funéraire, et de prévoir la publicité des rapports du comité. L'instauration de ce dispositif-cadre offre une solution globale et transparente en vue de la restitution des restes humains, dans le respect de la dignité de la personne, des cultures et de la mémoire, ainsi que du principe de justice.

Je tiens à avoir un mot pour mes collègues ultramarins en soulignant que ce texte ne constitue qu'une première étape, car il ne règle pas la question des restitutions de restes humains d'origine française : il faudra trouver une solution pérenne pour les restes ultramarins conservés dans les collections publiques. Tel est l'objet de l'article 2.

Enfin, rappelons que l'identité, l'origine et la trajectoire de la plupart des restes humains conservés dans les collections nationales restent inconnues, ce qui empêche évidemment les pays tiers de formuler des demandes de restitution. Cette identification imposera aux équipes des musées concernés de fournir un travail supplémentaire et minutieux. Les établissements les plus modestes craignent de ne pas disposer de moyens suffisants. Pouvez-vous nous éclairer, madame la ministre, sur les moyens financiers et matériels que votre ministère envisage de mobiliser pour accompagner les musées dans ces tâches ?

Mes chers collègues, ce texte vise à réparer des situations injustes – c'est aussi le rôle du législateur. Le groupe Socialistes et apparentés votera bien sûr en faveur de cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.

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Cette proposition de loi est une juste réponse de la France à la nécessité de garantir à tout être humain le respect qui lui est dû. Elle constitue également une forme de réparation. Les restes humains ont un statut flou, étant tour à tour qualifiés de biens culturels ou de sujets humains. L'avancée prévue dans le texte tire les leçons d'une juste réflexion éthique sur le statut des corps humains post mortem et sur le respect de leur dignité : les restes humains ne sont pas des biens culturels comme les autres et il était indispensable de leur réserver un traitement particulier.

Jusqu'alors, la décision de procéder à des restitutions était prise au cas par cas. C'était parfois – souvent – le fait du prince qui prévalait. La procédure envisagée, qui implique la création d'un comité compétent et d'analyses scientifiques adaptées lorsqu'un doute demeure sur l'identification d'un reste humain, est plus qu'indispensable : elle est primordiale. Mais comment la réaliser concrètement ? Chacun se souvient en effet de l'affaire désastreuse de la restitution à l'Algérie, à l'initiative d'Emmanuel Macron, de crânes de résistants algériens dont certains n'avaient pas été correctement identifiés. Ce nouvel épisode est venu contrarier l'idylle franco-algérienne voulue par le Président de la République, qui aurait souhaité en tirer un avantage diplomatique. Où en est, d'ailleurs, le règlement de cette affaire humiliante pour la France ?

Les élus du groupe Rassemblement national soutiendront cette proposition de loi, mais nous attirons votre attention sur les questions qui restent à régler. Selon les termes de cette proposition de loi-cadre, la sortie du domaine public des restes humains serait exclusivement réservée à leur restitution à un État étranger, à des fins funéraires. Quelles garanties aura-t-on que ces conditions seront respectées ? Quel contrôle sera possible ?

L'ancienneté des restes potentiellement concernés par le texte pose aussi question. N'a-t-elle pas été fixée de façon arbitraire ? Le Rassemblement national, à cet égard, rejoint plutôt l'approche britannique, qui est différente.

Par ailleurs, peu d'États réclament à la France ce type de restitutions. Que conclure lorsque la communauté bénéficiaire ne veut pas récupérer les corps de ses ancêtres, comme c'est le cas dans le Wamba, en République démocratique du Congo, où la communauté refuse le rapatriement de ces « fantômes » qui menacent sa stabilité spirituelle et émotionnelle et ne partage pas notre discours sur la restitution des restes humains ? Les enjeux scientifiques, culturels et éthiques sont complexes : on commettrait une nouvelle erreur en leur appliquant systématiquement nos grilles de lecture et schémas de pensée occidentaux.

Nous réclamons donc l'instauration d'une information régulière et concrète du Parlement, sous la forme d'un rapport annuel présentant les demandes de restitution pendantes, les décisions de sortie des collections prises au cours de l'année écoulée et les travaux préparatoires associés, ainsi que les restitutions effectivement entreprises et les conditions dans lesquelles elles sont intervenues.

Enfin – dernier point qui nous paraît important –, parmi les conditions requises, les demandes de restitution doivent émaner d'un État, ce qui exclut celles qui proviennent des outre-mer. Il n'existe donc pas de cadre spécifique dédié à la question des restes humains ultramarins. C'est une anomalie de taille. Le texte exclut par exemple, de fait, la demande guyanaise concernant le peuple kali'na.

Si j'ai bien compris ce que vous avez dit en commission, monsieur le rapporteur et madame la ministre, rien n'est encore définitif à ce stade. J'ai justement déposé un amendement permettant de corriger ce manque. Nous comprenons en effet l'émoi de nos compatriotes ultramarins, exclus du dispositif. Il faut corriger cette injustice.

Nous porterons une attention particulière aux réponses apportées.

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Plusieurs centaines d'établissements publics en France – musées, monuments, services d'archéologie ou universités – comptent dans leurs collections des restes humains qui, en majorité, émanent de France mais dont une partie sont d'origine étrangère – une minorité d'entre eux viennent d'anciennes colonies.

Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. Pourtant, l'histoire nous a apporté de trop nombreux exemples d'actes indignes et de profanations. La tête du grand chef Ataï, héros de la grande révolte kanak de 1878, se trouvait au musée de l'Homme, dans un bocal. Celui-ci avait été perdu avant d'être opportunément retrouvé huit ans plus tard.

La dépouille de la malheureuse Saartjie Baartman, dite Vénus hottentote, fut restituée à l'Afrique du Sud en 2002. Son cadavre – ou son moulage – avait été exposé, nu, des années durant, au centre d'une salle du même musée. Il s'agissait de montrer l'angle droit de ses fesses par rapport à la ligne du dos. Elle était présentée en tant que modèle en raison de son fessier. Qu'est-ce qui destinait une jeune fille, née en Afrique du Sud, à voir son corps disséqué après sa mort puis reproduit à l'identique par un moulage de plâtre et enfin exhibé, certains de ses organes ayant été conservés dans des bocaux de formol ? Aucune absurdité écœurante n'est impossible dès lors qu'on entre dans la névrose raciste.

À la fin du XIXe siècle, des scientifiques prétendirent aussi avoir découvert un grand marqueur de l'identité humaine : l'angle facial. On le mesure à partir du croisement entre la ligne verticale passant par le nez et le front et la ligne horizontale, au niveau du crâne. Pierre Camper établissait un lien entre le niveau d'intelligence et le degré de cet angle. La différence entre les angles faciaux démontrait la différence entre les races. Ignoble et faux.

En janvier 2012, la France a rendu plusieurs têtes tatouées au musée maori Te Papa Tongawera en Nouvelle-Zélande.

Il y a un an, le 2 novembre 2022, je déposais une proposition de loi sur la restitution des crânes algériens. Je tiens à redire ici, comme je l'ai affirmé alors, que ces crânes, issus des pires heures du colonialisme de l'État français, ont intégré les collections publiques dans des conditions qui relèvent exclusivement de l'infamie et d'une célébration morbide. Une partie d'entre eux avaient déjà été restitués en 2020 sans passer par le Parlement, faisant l'objet d'une convention de dépôt pour cinq ans. Le 5 novembre 2022, je me suis rendu en Algérie, au cimetière El Alia, où j'ai constaté que les vingt-quatre crânes algériens avaient trouvé une sépulture définitive alors que le Parlement français doit statuer pour toutes les restitutions en adoptant une loi au Sénat puis à l'Assemblée nationale.

Cette nouvelle loi est salutaire. Elle permet de simplifier la procédure visant à restaurer les liens mémoriels. Or honorer la dignité des personnes décédées est un impératif moral.

J'exprime cependant des réserves. Nous devons tout d'abord nous assurer que les ressources matérielles et humaines correspondent à l'ambition du texte. J'ai la conviction que la mobilisation d'experts supplémentaires est nécessaire tant la documentation lors des entrées et sorties dans les collections est parfois insuffisante. Une enquête du New York Times a décrit le processus relatif aux crânes algériens comme un retour défectueux qui a révélé un problème plus large que le caractère secret et confus des restitutions. Il existe en effet des interrogations sur l'origine de certains crânes déposés.

Si l'intervention d'une expertise scientifique, menée conjointement et échelonnée à travers plusieurs niveaux de vérification, est à saluer, nous souhaitons nous assurer du caractère public des rapports prévus par ce dispositif. Cela permettra notamment de garantir un contrôle citoyen et une transparence des procédures de restitution, du point de vue administratif et culturel. Je rappelle que, lors de mes travaux législatifs, c'est l'interpellation d'une association franco-algérienne, le Grand Maghreb, qui m'a permis d'obtenir les éléments dont j'avais besoin.

La simplification des procédures de restitution est nécessaire – il n'y a pas de débat sur ce point – mais nous ne pouvons accepter que le Parlement soit totalement dessaisi en la matière. La représentation nationale doit pouvoir se prononcer, au même titre que les collectivités territoriales. Au Sénat, il a été noté : « La commission est consciente que ce texte ne constitue qu'une première étape sur la voie des restitutions de restes humains appartenant aux collections publiques. »

Par ailleurs, notre amendement visant à demander un rapport sur les formations, déclaré recevable en commission, a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 en séance. Le Muséum national d'histoire naturelle abrite pourtant 30 000 crânes qui nécessiteraient bien une identification par un personnel formé.

Au vu de ces différents éléments, le groupe La France insoumise s'abstiendra, comme le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Avant l'examen des amendements, je souhaite remercier les députés pour leurs interventions et leur répondre sur quelques points.

Tout d'abord, certains s'interrogent – et c'est le cas depuis quelque temps – sur le choix d'une loi-cadre. Tout d'abord, sur un plan symbolique, une loi-cadre a une portée plus importante dans la mesure où elle définit des principes. Nous affirmons ainsi de façon plus solennelle et claire la valeur universelle de la dignité rendue aux morts, à laquelle nous tenons tous, en gravant ce principe dans le marbre de la loi.

D'autre part, une loi-cadre, comme son nom l'indique, permet de cadrer. Par ce texte, nous proposons une procédure claire pour les demandeurs : nous ne restituerons des restes que si c'est un État qui le demande, s'il le fait à des fins funéraires ou mémorielles – puisque vous avez souhaité apporter ce complément dans le texte –, en respectant les bornes temporelles que vous avez fixées et en réunissant des commissions bilatérales selon les modalités que vous avez définies. Un tel cadre permet d'établir un schéma clair et de fixer certaines conditions, ce qui évite d'être confronté à des demandes tous azimuts.

Pour ces différentes raisons, d'ordre à la fois symbolique et pragmatique, parce qu'il nous faut être transparents vis-à-vis des demandeurs et clarifier nos attentes ainsi que la procédure elle-même, une loi-cadre me semblait nécessaire.

Je réaffirme – même si nous y reviendrons certainement dans la discussion – notre volonté absolue de transparence. Nous n'avons rien à cacher au Parlement, le rapport annuel que nous vous remettrons contiendra toutes les informations dont nous disposerons.

En revanche, de mon point de vue, ni les députés, ni les sénateurs, ni un ministre quel qu'il soit n'ont leur place au sein des commissions bilatérales. Celles-ci seront en effet composées d'experts scientifiques auxquels nous ferons confiance pour analyser et identifier les restes humains avant de décider s'il faut, ou non, demander leur restitution.

Selon les cas, les pays ou les contextes, pourront ainsi être mobilisés des anthropologues, des juristes, des historiens, des conservateurs de musée ou encore des membres de communautés présentes dans certains États mais qui ne seraient pas directement représentées par ces États.

Il est très important pour moi que ces experts travaillent de manière indépendante, sans aucune pression. Ces commissions doivent être scientifiques, rigoureuses et indépendantes. C'est même pour cette raison que les agents du ministère de la culture qui siègent dans ces commissions – puisque certaines réunions ont déjà eu lieu – y assistent uniquement en qualité d'observateurs sans droit de vote.

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Nous aurions pu également être présents à ce titre !

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J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

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J'aimerais revenir sur l'idée, entendue au cours de la discussion générale, selon laquelle cette loi-cadre éviterait d'être soumis au fait du prince. Selon moi, c'est exactement l'inverse. C'est une loi d'espèce qui permettrait de l'éviter puisque, dans ce cas, le Parlement a un droit de regard et exerce son contrôle sur l'action de l'exécutif. Si vous laissez au – ou à la – ministre de la culture et au Premier ministre le soin de prendre la décision de la restitution, cela signifie que l'exécutif, et non le Parlement, a la main. Dès lors, je ne comprends absolument pas un tel argument.

D'autre part, puisque les commissions scientifiques accueillent des agents du ministère de la culture en qualité d'observateurs, des membres du Parlement pourraient tout à fait y être admis dans les mêmes conditions.

J'étais favorable au maintien de la Commission scientifique nationale des collections, une instance malheureusement supprimée dans le cadre de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique, dite Asap. Elle permettait en effet au Parlement d'exercer son devoir de contrôle sur les collections publiques. J'ai donc demandé au rapporteur s'il envisageait que le Parlement puisse tout de même être associé à la procédure, à un moment ou à un autre. Car, si le texte est voté en l'état, nous serons de simples spectateurs et n'aurons, à aucun moment, notre mot à dire.

À vous entendre, les demandes de restitution risqueraient de se compter par milliers, ce qui donnerait lieu à la rédaction de milliers de propositions de loi. Ce n'est pas vrai. Nous savons bien que nous sommes confrontés à seulement quelques cas particuliers.

J'aimerais revenir sur celle qu'on a appelée la Vénus hottentote – une histoire déchirante. Évidemment, la restitution des restes humains de cette femme qui a vécu une vie de douleur et de misère n'est que justice. Mais croyez-vous vraiment que l'écho d'une telle nouvelle aurait été aussi fort si cette mesure avait été prise au moyen d'une loi-cadre, dans le secret d'un comité scientifique et d'une décision de l'exécutif, plutôt qu'en passant par une de ces lois d'espèce qui informent l'ensemble du Parlement ? Évidemment non.

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L'article 1er constitue le cœur de cette proposition de loi que soutient le Rassemblement national, comme je l'ai dit dans la discussion générale.

Oui, nous devons œuvrer collectivement pour aboutir à un respect véritable des restes humains. Il y va aussi de la dignité des êtres humains.

Cependant il convient d'apporter des améliorations de fond, s'agissant de la réflexion sur le degré d'ancienneté des restes humains, de la réponse à apporter à la revendication légitime des collectivités ultramarines qui souhaitent procéder elles aussi à de telles demandes ou encore des formalités à appliquer lors de la restitution.

Nous espérons que le Gouvernement adoptera une attitude constructive, loin de toute forme de sectarisme, et ne s'enfermera pas dans un rejet bête et systématique de tous nos amendements. Sur un sujet grave et aussi consensuel que celui-ci, nous devons essayer d'avancer ensemble.

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Ce texte aborde des enjeux éthiques et diplomatiques forts puisqu'il vise à faciliter les restitutions de restes humains détenus dans les collections publiques françaises, essentiellement dans des musées, des services d'archéologie ou encore des universités. Le code civil prévoit que le respect du corps humain ne cesse pas avec la mort et exige donc un traitement respectueux, digne et décent de ces restes.

Malgré des visées évidemment louables, les modalités prévues par la présente proposition de loi interrogent puisque le Parlement serait amené à se dessaisir de la question au profit de l'exécutif.

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Ainsi, alors que nous venons de subir un dix-septième 49.3, il me semble dangereux que le Parlement abandonne encore un peu plus le droit de débattre et de voter. En effet, il ne jouerait plus aucun rôle dans les restitutions si le texte était adopté tel quel.

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Il ne serait que le destinataire d'un rapport que le Gouvernement serait censé lui remettre annuellement. Le Parlement ne pourrait pas réellement contrôler l'action du Gouvernement puisqu'il s'agirait d'une simple information, donnée a posteriori.

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De ce point de vue, le parallèle avec les collectivités territoriales est frappant. L'organe délibérant d'une collectivité doit en effet approuver, ou non, la restitution s'il s'agit de ses collections – par exemple un conseil municipal à propos de collections municipales. En revanche, lorsque la restitution porte sur des collections nationales, le Parlement ne serait pas saisi. Une telle mesure semble incohérente et serait prise au détriment du Parlement.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

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Le texte a été rédigé de façon précipitée. L'article 2 en témoigne puisque la question des outre-mer y est à peine ébauchée.

Nous devons avoir une discussion éthique s'agissant des restitutions des restes humains ; elles ne peuvent être décidées dans un bureau par un ministre qui n'aura jamais à rendre de comptes à ce sujet. Nous devons aussi établir une méthode qui permette les justes et nécessaires restitutions tout en respectant le principe de l'inviolabilité des collections publiques et sans remettre en question le rôle du Parlement. Or ce n'est pas le cas avec cette proposition de loi. Le débat sur les restitutions devrait donc avoir lieu devant le Parlement, publiquement, et être suivi d'un vote.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Autant dire que vous ne voulez pas de loi.

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Je suis saisi de plusieurs amendements, n° 18 , 1 , 16 et 9 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Sur l'amendement n° 18 , je suis saisi par les groupes La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale et Gauche démocrate et républicaine – NUPES d'une demande de scrutin public, ainsi que sur les amendements n° 1 et 16 respectivement par le groupe Renaissance et par le groupe Rassemblement national.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Mereana Reid Arbelot, pour soutenir l'amendement n° 18 .

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L'amendement vise à étendre le champ d'application du texte aux collectivités ultramarines. En effet, comme je l'ai dit dans la discussion générale, on compte leur imposer encore d'attendre l'élaboration d'un énième rapport alors que la démarche est bien de restituer des restes humains soustraits à des communautés. Dans l'état actuel du texte, une fois le reste humain sorti du domaine public français, les communautés étrangères reçoivent plus d'égards que les communautés françaises ultramarines. Et ce n'est pas dû à un obstacle juridique, mais à une décision politique. J'espère que les collègues ici présents sont sensibles au sort réservé aux communautés d'outre-mer, jusque dans la restitution des corps de leurs ancêtres. Vous enverrez à nos communautés un message de considération en votant cet amendement.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES. – Mme Clémence Guetté applaudit également.

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La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement n° 1 .

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Cet amendement de mon collègue Lenormand, cosigné par l'ensemble du groupe LIOT, vise à étendre la procédure ici proposée de restitution des restes humains aux collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'à la Nouvelle-Calédonie. Il précise en outre que le décret en Conseil d'État destiné à fixer les conditions d'application puisse prévoir des modalités différentes selon que la demande émane d'un État étranger ou desdites collectivités.

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La parole est à Mme Caroline Parmentier, pour soutenir l'amendement n° 16 .

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Cet amendement propose d'étendre le périmètre couvert par ce texte aux collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu'à la Nouvelle Calédonie. Le groupe Rassemblement national est favorable à l'esprit de ce texte issu des débats en commission mais nous nous demandons pourquoi il ne permet la restitution de restes humains qu'à des États et non pas aux collectivités ultramarines. L'exclusion des demandes en provenance des outre-mer est une anomalie de taille. Nous comprenons l'émoi de nos compatriotes ultramarins et c'est une injustice qu'il faut corriger.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.

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La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l'amendement n° 9 .

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Nous l'avons déposé en soutien à l'amendement de ma collègue Reid Arbelot cosigné par l'ensemble de son groupe GDR. Nous considérons en effet que ce texte ne répond pas en l'état à l'ensemble des enjeux que représente la restitution des restes humains puisque l'on n'a pas encore trouvé de solution satisfaisante pour les territoires ultramarins. Pourtant, il faudrait que ce type de restitution puisse avoir lieu le plus facilement possible après, bien entendu, un travail approfondi mené par une commission scientifique dans lesdits territoires. Et il est vrai qu'à cet égard le texte, absolument utile et même indispensable au regard des relations avec d'autres États, laisse vraiment un goût d'inachevé. Il demeure imparfait pour les territoires ultramarins. Madame la ministre, nous avons besoin de vous entendre sur ce sujet car il serait incompréhensible que cette situation ne soit pas résolue dans les plus brefs délais.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous sommes tous conscients qu'il est important de trouver une solution rapide pour les territoires ultramarins. Cela étant, je rappelle que nous débattons d'un texte qui vise uniquement à permettre la négociation entre États. Dès lors qu'il s'agirait d'une négociation interne à la République, en l'espèce entre l'État et une collectivité d'outre-mer, voire une communauté, le processus serait évidemment plus complexe : qui représenterait les demandeurs des restitutions ? Serait-ce une association constituée à cet effet ou la collectivité territoriale concernée – sachant qu'à ce jour, aucune n'a rien demandé et que cela m'ennuierait de leur confier une nouvelle compétence sans même en avoir discuté avec elles auparavant – ou, pour la Guyane, le Grand Conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenges ? Ou bien alors serait-ce les descendants supposément identifiés et, en ce cas, devraient-ils tous être d'accord avec la restitution ? Et comment faire en cas de contestation d'une demande effectuée par une communauté ? Voilà beaucoup de questions, mais qui ne se posent pas dès lors qu'il s'agit d'une négociation d'État à État comme dans ce texte. Certes, nous devons nous les poser si on décide de régler aussi la question à l'échelle de la communauté, mais on ne peut y répondre par le biais d'amendements à ce texte.

Prenons le cas des tribus indiennes d'Amérique du Nord : certaines ont été chassées par les colons et par l'armée des États-Unis, d'autres ont été territorialement reconnues par le gouvernement fédéral, qu'elles aient ou non dû quitter leur terre d'origine, dans le cadre du statut des réserves indiennes, et, aujourd'hui, des communautés des deux types formulent des réclamations en restitution de restes humains. Vous voyez, mes chers collègues, que la situation est très complexe aux États-Unis, et peut-être aurons-nous ce type de sujet à régler dans des territoires ultramarins. D'où l'intérêt de prendre le temps de la réflexion – mais un an, c'est une durée tout de même très brève – pour aboutir à une solution. La ministre de la culture et le ministre délégué chargé des outre-mer se sont engagés à proposer au Parlement dans le délai d'un an des solutions possibles, et je serai très attentif au suivi de ce dossier.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Même avis. Ce texte n'est pas adapté pour traiter le sujet abordé par ces amendements mais, sur le fond, je suis évidemment favorable à avancer au plus vite, parce que le principe de restitutions outre-mer me semble totalement légitime. J'ai proposé de commencer par procéder à un transfert de restes humains dans le mémorial qui est en train d'être construit en Guyane et qui permettra de leur rendre hommage et, parallèlement, de rechercher le meilleur véhicule législatif : loi-cadre ou loi d'espèce ? Pour le moment, la seule demande de restitution émane de Guyane, ce qui justifierait une loi d'espèce le plus rapidement possible en fonction de l'agenda parlementaire, mais d'autres vont sans doute arriver, ce qui pourrait justifier une loi-cadre permettant de déroger au principe de l'inaliénabilité des collections, là encore à des fins funéraires ou mémorielles, mais sans qu'il s'agisse de restitution à un autre État, sachant qu'une telle loi impliquerait nombre de consultations et d'échanges avec des experts et les élus.

Quoi qu'il en soit, je m'engage à poursuivre dans cette voie et je tiens à vous assurer de ma totale détermination à aller au bout du chemin. Mais je pense qu'il faut préserver la cohérence de ce texte, à savoir une loi à portée internationale pour cadrer les demandes qui nous viennent d'autres pays. On ne peut pas confondre dans une proposition de loi comme celle-ci la demande tout à fait légitime des territoires ultramarins avec celle de certains États, mais nous y répondrons à coup sûr.

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Je tiens à rappeler, après les interventions du rapporteur et de la ministre, qu'il n'y a pas dans cet hémicycle un seul député qui soit défavorable à ce que nous traitions aussi le sujet des territoires ultramarins. Pour autant, comme je l'ai dit moi aussi lors de la discussion générale, le texte que nous examinons aujourd'hui ne s'y prête pas. Nous avons tous pris note de l'engagement de Mme la ministre, qui a dit que le travail était déjà en cours et que, dans le délai très bref d'une année, nous disposerons de suffisamment d'éléments concrets pour inscrire dans une loi d'espèce ou dans une loi-cadre l'extension du champ des restitutions aux outre-mer. Le groupe Renaissance votera donc contre ces amendements, pas par refus de telles restitutions, mais parce qu'il convient de mettre en place un cadre adapté pour pouvoir répondre favorablement aux éventuelles demandes en la matière.

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Il est tout de même étrange que dès qu'il s'agit des territoires ultramarins, c'est toujours remis à plus tard, jamais maintenant, et ce dans tous les domaines.

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On l'a encore vu lors des débats budgétaires. Mais pourquoi ne pas avoir travaillé la question des collectivités d'outre-mer dès la conception de ce texte ? C'est parce que vous avez fait le choix de ne pas traiter la question ultramarine.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

C'est le texte de la sénatrice Morin-Desailly, pas celui du Gouvernement !

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Nous avons déjà dit, mon collègue Bilongo et moi-même, ce que notre groupe pense de ce texte, à savoir qu'il demeure inabouti, notamment faute de traiter de cette question. Nous ne voterons donc pas le texte en l'état, mais nous voterons ces amendements parce qu'ils sont justes !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Vous parlez de ce texte comme s'il était celui du Gouvernement alors qu'il est d'initiative sénatoriale. Il a été proposé de manière transpartisane par Mme Morin-Desailly, M. Max Brisson et M. Pierre Ouzoulias, des sénateurs ultramarins les ayant rejoints, et le débat a eu lieu au Sénat. Tout le monde a travaillé avec le plus grand sérieux.

Encore une fois, le texte tel qu'il a été proposé par Mme Morin-Desailly, après dix ans d'engagement sur ces questions, concerne le sujet international de la restitution d'État à État. Et vous voyez bien que c'est déjà suffisamment complexe au vu des débats qui ont suivi, aboutissant à un enrichissement du texte, et au vu des amendements déposés. Dans le texte soumis à votre assemblée, chaque mot a été pesé, et heureusement car nous touchons à des aspects si éthiques, si philosophiques, tout à la fois intimes et collectifs, qu'il était nécessaire de faire un travail particulièrement rigoureux.

Par conséquent, s'il vous plaît, n'instrumentalisez ni mes propos ni la réalité : j'ai évoqué le délai qui permettra d'avoir le temps de travailler et de mener des consultations, et rappeler que nous n'avons à ce jour été saisis que d'une seule demande de restitutions émanant des outre-mer, en l'occurrence d'une association guyanaise. Et il ne s'agit pas d'une demande vieille de dix ans, oubliée sur une étagère, pas du tout. Cela fait un moment que mes équipes échangent avec l'association à ce sujet, et je demeure complètement mobilisée là-dessus. Il s'agit maintenant de trouver un cadre législatif adapté à la situation des restes humains ultramarins qui font l'objet d'une demande de restitution, et mon ministère ne dédaigne pas ce sujet, loin de là. C'est même tellement important que cela mérite un texte spécifique.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme Estelle Folest applaudit également.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 110

Nombre de suffrages exprimés 110

Majorité absolue 56

Pour l'adoption 50

Contre 60

L'amendement n° 18 n'est pas adopté.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 98

Nombre de suffrages exprimés 98

Majorité absolue 50

Pour l'adoption 40

Contre 58

L'amendement n° 1 n'est pas adopté.

Il est procédé au scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 90

Nombre de suffrages exprimés 88

Majorité absolue 45

Pour l'adoption 28

Contre 60

L'amendement n° 16 n'est pas adopté.

L'amendement n° 9 n'est pas adopté.

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Je suis saisi de plusieurs amendements, n° 13 , 15 et 27 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements n° 13 et 15 sont identiques.

Sur ces trois amendements, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutins publics.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 13 .

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Dans sa version initiale, le texte du Sénat visait à la restitution de restes humains uniquement à des fins funéraires. Je pense que le terme « funéraire », pris dans son acception habituelle, est relatif à un ensemble de gestes, de rites ou de paroles accompagnant la mort d'une personne humaine, et ainsi me semble-t-il couvrir tous les rites qui peuvent entourer la restitution de restes humains.

Vous avez lors de votre intervention dans la discussion générale, chère collègue Taillé-Polian, souligné la fonction réparatrice des restitutions après la colonisation,…

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…et on voit bien que la finalité en est mémorielle, mais dans une acception tout de même assez étroite : celle de la reconnaissance et même de la repentance de la colonisation.

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Nous n'en finissons pas de nous repentir de la colonisation.

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

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Il faudra un jour travailler à la réparation et peut-être pourrons-nous enfin refaire nation au lieu de continuer à s'abîmer dans des débats incessants.

La colonisation est un fait historique dont nous avons tiré tous les enseignements.

Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Il est temps de refermer certaines plaies, mais vous considérez qu'elles doivent rester ouvertes.

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Pour ma part, je crois que le Sénat a eu la sagesse de conclure à l'utilisation du seul adjectif « funéraire ». Je regrette que le rapporteur de notre commission ait ouvert ce débat. C'est la raison pour laquelle mon amendement tend à supprimer les mots « ou mémorielles ».

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La parole est à Mme Caroline Parmentier, pour soutenir l'amendement n° 15 .

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Nous proposons d'autoriser à sortir du domaine public des restes humains pour les restituer à un État, exclusivement à des fins funéraires. L'ajout en commission des termes « ou mémorielles » à l'article 1er change le sens originel de cette proposition de loi : l'adjectif « mémoriel » est trop large et ouvre des possibilités de détournement qui nous paraissent risquées. Le texte serait plus équilibré et intelligible si nous retenions la seule expression « à des fins funéraires ».

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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C'est un débat intéressant. Selon les auteurs de ces amendements, l'adjectif « mémorielles » serait trop polysémique. Mais on peut en dire autant de l'adjectif « funéraire » :…

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…comme je l'ai rappelé tout à l'heure, on peut l'entendre dans un sens très vaste, mais également dans un sens très étroit, comme ce qui a trait aux funérailles.

Prenons quelques exemples, à commencer par celui des souverains Sakalava de Madagascar, qui a introduit une demande de restitution de restes humains auprès de la France. Le pouvoir des souverains Sakalava est représenté et légitimé par la mise en scène rituelle de reliques de leurs ancêtres. Ce culte dynastique et populaire est marqué par le bain des reliques royales, lesquelles assurent la présence des anciens rois – qui sont devenus des ancêtres – tout en conférant la puissance sacrée nécessaire à la prospérité du souverain actuel du royaume et à la fertilité de la terre.

Ces reliques, une fois exposées, ont une efficacité tout à la fois symbolique, religieuse et politique. Ce rite permet au souverain de légitimer son pouvoir et de conforter l'organisation de la société. Pour les ethnologues et les spécialistes – je pense en particulier à Thomas Mouzard, qui assiste à nos débats aujourd'hui –, c'est plus qu'un simple rituel funéraire : c'est un rituel à la fois religieux et politique. C'est une des raisons pour lesquelles l'adjectif « mémorielles » me semble convenir.

Mme Caroline Parmentier proteste.

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Je vous rappelle qu'en février 2023, pour la première fois depuis le Moyen Âge, on a sorti à Bordeaux la relique du crâne de Saint Thomas d'Aquin pour l'exposer.

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Je ne le pense pas : c'était un rite cultuel, qu'il ne conviendrait pas de désigner comme « funéraire ».

En outre, respectons le fait que les membres d'une même communauté ne partagent pas toujours la même vision de ce qu'il doit advenir des restes humains. Par exemple, les Amérindiens de l'Oklahoma se déchirent sur le traitement qu'il y a lieu de réserver aux restes humains de leur communauté, certains voulant les retirer de la vue des profanes et les réinhumer, d'autres souhaitant les préserver pour assurer l'éducation des générations futures. À quel titre devrions-nous choisir à la place de ces communautés ?

Au fond, les restitutions reposent sur deux arguments majeurs. Elles ont tout d'abord des vertus thérapeutiques : il s'agit du respect des morts – nous en convenons tous – et d'honneur rendu aux ancêtres, mais aussi d'une négociation de paix entre les vivants et les morts, entre les descendants et les aïeux. Ensuite, les restitutions ont une visée réparatrice ; elles sont un acte symbolique de reconnaissance collective d'une injustice passée.

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Restituer un corps est un processus menant au pardon et à l'oubli du traumatisme subi par les communautés. Parler simplement de « rites funéraires » revient, d'une certaine manière, à gommer, voire à nier cet acte symbolique ; c'est empêcher qu'une histoire commune se construise sur des bases plus égalitaires.

En conséquence, j'émets un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Je n'ai rien à ajouter à ce magnifique argumentaire du rapporteur, qui a le mérite d'être très approfondi et précis – tout a été dit !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

J'émets également un avis défavorable.

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Madame Genevard, avons-nous réellement tiré les enseignements de la colonisation ? Je ne le crois pas. En témoigne le racisme qui est si présent dans notre société …

Exclamations sur les bancs du groupe RN

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…et dont les représentations sont issues de la colonisation.

Mme Caroline Parmentier et M. Jean-Philippe Tanguy protestent.

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Quand on évoque des restes humains, on parle notamment des restes de personnes qui ont été exhibées dans les zoos humains, ceux-là mêmes qui visaient à montrer aux yeux du bon peuple à quel point les peuples colonisés étaient inférieurs, combien le racisme était normal et juste. Les restes de cette histoire sont encore visibles dans notre société, madame Genevard.

En outre, pardon de vous le dire, mais votre volonté d'expliquer aux peuples ce qu'ils doivent faire des corps qui leur sont restitués est la marque d'une forme de condescendance coloniale. Qui sommes-nous pour dire à ces peuples ce qu'il faut faire de ces restes humains ?

Mme Caroline Parmentier s'exclame.

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Pour ma part, je ne le souhaite pas ! Il faut bien sûr leur demander de respecter la dignité humaine, qui demeure une exigence essentielle. Mais encore une fois, qui sommes-nous pour leur dire comment on doit montrer ce passé sans exhiber ces restes ?

Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES. – M. Jean-Paul Lecoq applaudit également.

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Il ne s'agit pas de dire ce qu'il convient de faire de ces restes humains restitués.

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Non, absolument pas ; chaque peuple, chaque tradition en décidera.

Lors de l'examen de ce texte en commission, Mme la ministre a indiqué que le dépôt des vingt-quatre crânes algériens inhumés dans les conditions que nous connaissons – je n'y reviendrai pas – avait posé un problème de « narratif » – selon votre propre terme –, les Algériens voyant dans ces crânes le témoignage des martyrs de la colonisation. Nous voyons bien qu'il n'était pas ici question de redonner à ces restes humains une dignité, mais d'en faire un usage politique.

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Je voudrais vous faire part d'une expérience qui m'a beaucoup frappée. Un jour, à la télévision, j'ai vu un jeune Français d'origine algérienne, âgé d'une quinzaine d'années à peine, dire au président François Hollande : « Vous nous avez torturés en Algérie ». Cet échange illustre parfaitement ce que vous évoquiez tout à l'heure : ce jeune Français, qui avait été éduqué en France, envisageait ses origines uniquement sous l'angle de ce que ses ancêtres avaient vécu pendant la colonisation.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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C'est la raison pour laquelle – je referme cette parenthèse et reviens à notre texte – il me semblerait plus sage qu'on limite la restitution des restes humains à une dimension funéraire.

Mme Sophie Taillé-Polian s'exclame.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 100

Nombre de suffrages exprimés 98

Majorité absolue 50

Pour l'adoption 29

Contre 69

Les amendements identiques n° 13 et 15 ne sont pas adoptés.

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La parole est à Mme Caroline Parmentier, pour soutenir l'amendement n° 27 .

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Le fait de restreindre la restitution de restes humains à des fins dites funéraires pose problème ; le rapporteur n'a d'ailleurs pas manqué de le rappeler en commission. En effet, un certain nombre de rituels traditionnels pourraient dépasser la seule catégorie des rites funéraires, dès lors qu'ils sortent du cadre des funérailles : au sens large, ils pourraient s'entendre comme une cérémonie accompagnant le dernier voyage du défunt. Dans certaines cultures, d'autres types de rituels traditionnels relèvent de l'hommage, de la vénération ou de la transmission.

Nous comprenons votre volonté d'étendre le champ de la restitution. Néanmoins, l'adjectif « mémorielles » semble trop large et pourrait donner lieu à des détournements ; on risque ainsi de s'éloigner de l'objectif de cette proposition de loi. C'est pourquoi nous proposons, comme solution alternative, de préciser que les restitutions sont réalisées « à des fins funéraires ou d'hommage aux morts ».

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.

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J'ai déjà dit un certain nombre de choses sur ce sujet. Il me semble compliqué, aujourd'hui, de décider à la place des communautés,…

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…sachant que ce texte concerne seulement la restitution des restes humains. Il s'agit d'une question de transfert de propriété, si j'ose dire, et non pas du rapatriement des restes humains. D'ailleurs, vous avez cité la communauté de Wamba, en République démocratique du Congo,…

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…à qui l'université de Genève doit restituer des restes humains. Mais la communauté n'étant toujours par prête, les restes vont demeurer à Genève.

Que devrait-on répondre à une communauté qui souhaiterait récupérer la propriété de restes humains sans forcément vouloir les rapatrier, soit parce qu'elle n'est pas prête, soit parce que ces restes sont encore exposés dans les musées occidentaux comme des éléments de connaissance de ces cultures ? Faut-il lui dire que nous restons propriétaires de ces restes avant de les restituer, le temps que les membres de la communauté s'accordent sur le sort qu'il convient de leur réserver ? Je ne crois pas qu'il faille aller dans ce sens et je persiste à penser que l'adjectif « mémorielles » permettrait de traiter ces différents cas de manière plus large. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

J'avoue être un peu perdue dans ce débat sémantique. Au fond, ces différentes formulations disent la même chose :…

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

…qu'on utilise « hommage aux morts » ou « fins mémorielles », on vise dans tous les cas des rites qui honorent la mémoire des morts. Je suivrai donc l'avis du rapporteur, son argumentation me paraissant cohérente. Avis défavorable.

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Je souhaitais intervenir sur cet amendement – qui devait faire l'objet d'une discussion commune avec les amendements précédents –, notamment pour réagir aux propos qu'a tenus Mme Genevard tout à l'heure. Je vous citerai ces mots d'Aimé Césaire, extraits du Discours sur le colonialisme, qui me semblent utiles à l'ensemble de notre assemblée : « Il faudrait d'abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l'abrutir au sens propre du mot, à le dégrader,…

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…à le réveiller aux instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral, et montrer que, chaque fois qu'il y a au Vietnam une tête coupée et un œil crevé et qu'en France on accepte, une fille violée et qu'en France on accepte, un Malgache supplicié et qu'en France on accepte, il y a un acquis de la civilisation qui pèse de son poids mort,…

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…une régression universelle qui s'opère, une gangrène qui s'installe, un foyer d'infection qui s'étend et qu'au bout de tous ces traités violés, de tous ces mensonges propagés, de toutes ces expéditions punitives tolérées,…

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…de tous ces prisonniers ficelés et « interrogés », de tous ces patriotes torturés, au bout de cet orgueil racial encouragé, de cette jactance étalée, il y a le poison instillé dans les veines de l'Europe, et le progrès lent, mais sûr, de l'ensauvagement du continent. »

La colonisation, madame, c'est notre ensauvagement à nous, les Européens ; c'est ce que nous avons fait, nous, dans ces pays-là. Vous dites qu'il faudrait sortir de la repentance. Je crois au contraire que nous, Européens, avons un travail de mémoire à faire,…

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…qui doit être un travail de respect extrêmement profond. Lorsqu'on voit que le plafond de la salle des pas perdus de notre assemblée exhibe encore une représentation de la colonisation de l'Algérie, je me dis qu'il y a encore beaucoup à faire pour corriger les erreurs que nous avons commises par le passé.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Il avait échappé à ma sagacité que l'amendement n° 27 faisait l'objet d'une discussion commune avec les amendements identiques précédents, ce qui explique que nous avons légèrement allongé les débats.

Je mets aux voix l'amendement n° 27 .

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 90

Nombre de suffrages exprimés 90

Majorité absolue 46

Pour l'adoption 28

Contre 62

L'amendement n° 27 n'est pas adopté.

L'amendement n° 25 est retiré.

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La parole est à Mme Mereana Reid Arbelot, pour soutenir l'amendement n° 19 .

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L'amendement tend à supprimer, à la fin de l'alinéa 10, les termes « agissant le cas échéant au nom d'un groupe humain demeurant présent sur son territoire et dont la culture et les traditions restent actives ».

Sans définition claire et précise des mots utilisés dans cette disposition, il sera délicat de l'appliquer avec objectivité. Qui sera légitime à déterminer les cultures et les traditions encore actives d'un groupe d'individus et selon quels critères ?

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Avis défavorable. Vous avez déclaré tout à l'heure que les communautés devaient être nos interlocuteurs pour organiser les restitutions. À présent, vous voudriez effacer le concept de communauté vivante et présente dans le territoire. Cela me semble incohérent. Si ces communautés existent, il faut pouvoir se tourner vers elles.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Même avis.

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Je voulais simplement insister sur le manque de précision du texte. Le travail n'a pas été assez approfondi et les dispositions mériteraient d'être clarifiées.

L'amendement n° 19 n'est pas adopté.

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Sur les amendements n° 14 et 17 , je suis saisi par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Caroline Parmentier, pour soutenir l'amendement n° 14 .

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L'amendement tend à proposer la restitution des restes humains de personnes mortes après l'an 1000. Il semble souhaitable d'allonger le délai, car des demandes de restitution auront probablement lieu au-delà de cinq cents ans d'ancienneté. Lorsque des éléments objectifs permettront d'identifier les restes humains, il sera ainsi possible d'accepter la demande de restitution au-delà de l'an 1500 – cela ne le sera pas si les restes humains n'ont pu être identifiés. Le modèle britannique témoigne qu'il est encore possible d'identifier avec rigueur des restes humains dans un tel délai.

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Le Royaume-Uni a, en effet, fixé la limite à mille ans dans la loi adoptée au début des années 2000. Or les Britanniques se sont rendu compte qu'il n'y a eu quasiment aucune restitution de restes humains d'une ancienneté supérieure à trois cents ans et pas une seule de plus de cinq cents ans. C'est pourquoi il a été décidé de tirer les leçons de l'expérience britannique et de fixer la borne après l'an 1500 plutôt que de s'aligner sur des dispositions qui se révèlent aujourd'hui dénuées de sens. Surtout, rien n'interdirait de voter une loi d'espèce si nous devions un jour restituer des restes humains au-delà de cinq cents ans. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Même avis. Le délai de cinq cents ans, proposé par la sénatrice Catherine Morin-Desailly, est le fruit d'un travail engagé avec des scientifiques et des généalogistes. Il serait particulièrement difficile d'identifier des restes humains au-delà de cinq cents ans. La loi britannique, le Human Tissue Act, date de 2004. Il nous aura fallu vingt ans de plus pour nous doter d'une loi-cadre en la matière. Dès 2005, les Britanniques avaient fixé des lignes directrices pour organiser les restitutions. Avec le pragmatisme qui les caractérise, ils avaient ainsi prévu qu'il serait peu probable que des demandes de restitution soient satisfaites pour tout vestige de plus de trois cents ans. Ils avaient en effet rapidement pris conscience qu'il serait difficile de remplir les conditions scientifiques de telles demandes.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 88

Nombre de suffrages exprimés 87

Majorité absolue 44

Pour l'adoption 27

Contre 60

L'amendement n° 14 n'est pas adopté.

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Je suis saisi de deux amendements, n° 17 et 20 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Caroline Parmentier, pour soutenir l'amendement n° 17 .

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L'amendement, qui s'inspire de la législation britannique, tend à ce que la restitution du reste humain antérieur à l'an 1500 soit possible lorsqu'il est identifié avec certitude et présente un lien géographique, religieux, spirituel et culturel étroit et continu avec le groupe humain.

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La parole est à Mme Mereana Reid Arbelot, pour soutenir l'amendement n° 20 .

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Il s'agit de compléter l'alinéa 11 par les termes « sauf si l'origine des restes peut être identifiée avec certitude ». En effet, dans ce cas, pourquoi priver la communauté concernée d'une restitution et d'une réparation ?

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Après avoir proposé de repousser la borne à mille ans, vous voulez à présent la faire sauter ! Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Même avis.

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J'interviens en ma qualité de Guyanais. Vous avez évoqué l'association Moliko Alet + Po. Malgré sa petite taille, cette association, composée en partie de quelques membres d'une même famille, a abattu un travail considérable et multiplié les allers-retours entre le village de Guyane et les musées d'ici pour mener seule ses recherches. Mais, jusqu'à l'année dernière, elle ne savait pas que vous aviez conservé des corps. Ce fut un choc en Guyane pour la communauté kali'na, mais aussi pour toute la communauté guyanaise. Nous n'aurions jamais imaginé qu'il soit possible d'en arriver là !

Si les demandes de restitution sont récentes, comme vous le dites, c'est parce qu'il faut déjà le savoir, que vous avez gardé des corps ! On ne peut pas demander ce qu'on ne sait pas ! Quand en ferez-vous l'inventaire, en toute transparence ?

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Quant au climat de défiance, nos collègues ont raison : nous n'existons dans aucun de vos textes de loi, seulement dans les décrets et les ordonnances. Même pour un sujet aussi sensible que celui-ci, qui touche à l'étroite relation que nous entretenons avec nos morts et à notre travail de deuil, vous avez oublié les territoires dits d'outre-mer.

Commencez par être transparents : combien de corps détenez-vous ? À quelles communautés appartiennent-ils ? Une fois que ces informations seront diffusées, vous verrez qu'il y aura pléthore de demandes !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Il me semble que nous sommes précisément dans l'exception que vous avez mentionnée précédemment, monsieur le rapporteur. Peut-être serait-il sage d'adopter ces amendements afin de ne pas avoir à légiférer plus tard pour des cas d'espèce.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 89

Nombre de suffrages exprimés 86

Majorité absolue 44

Pour l'adoption 30

Contre 56

L'amendement n° 17 n'est pas adopté.

L'amendement n° 20 n'est pas adopté.

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L'amendement n° 31 de la commission des affaires culturelles et de l'éducation est rédactionnel.

L'amendement n° 31 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

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La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 12 .

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L'amendement tend à associer les parlementaires au comité conjoint et paritaire que le texte prévoit de créer. Ce serait une manière habile d'associer le Parlement à la procédure de restitution, sans modifier les contours de la loi-cadre.

Par ailleurs, je vous invite à lire un article très intéressant paru dans La Revue de l'art en 2019, intitulé De l'inaliénabilité à l'aliénation. Il expose parfaitement le cadre historique et juridique qui devrait inspirer ce texte, que je continue à trouver inadapté et dangereux en ce qu'il remet en cause le caractère inaliénable de nos collections publiques, pilier de la protection de notre patrimoine dont il serait imprudent de se défaire, fût-ce pour la restitution de restes humains, dont je ne conteste pas la légitimité de la demande.

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Le comité devra mobiliser, pour identifier les restes humains, des scientifiques de diverses disciplines – histoire, anthropologie, biologie moléculaire pour procéder à des recherches par l'ADN avec l'accord des communautés concernées. Les parlementaires ne me semblent pas avoir leur place au sein de ce comité, qui est d'abord technique et ne se prononcera pas sur la recevabilité de la demande. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Même avis. Le comité devra être indépendant et faire preuve de la plus grande rigueur scientifique qui soit. La présence de parlementaires français appellerait la présence de parlementaires du pays demandeur. Le rôle de ce comité en serait transformé en ce qu'il se politiserait. En revanche, nous nous sommes engagés à ce qu'un rapport très documenté soit remis chaque année et, en tant que parlementaires, vous pouvez auditionner aussi souvent que vous le souhaitez les ministres concernés et les experts ; vous pouvez également prendre connaissance des travaux des commissions scientifiques bilatérales.

Vous jouez un rôle important dans l'élaboration de ce texte, puisque vous en fixez le cadre, mais le comité doit rester technique et indépendant pour ne subir aucune pression politique de notre Parlement ou de celui de l'État demandeur.

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Je suis saisi de plusieurs demandes de scrutin public : sur l'amendement n° 21 par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine – NUPES ; sur l'amendement n° 26 par les groupes Renaissance et La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale ; sur l'article 1er par le groupe Renaissance.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Bastien Lachaud.

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Manifestement, le Gouvernement souhaite que le Parlement n'ait plus rien à dire au sujet des restitutions. Vous nous renvoyez à un rapport d'information qui ne sera publié qu'a posteriori. Cela n'a pas de sens !

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Et les auditions !

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L'amendement de Mme Genevard, même s'il était de repli, était de bon sens car il permettait au moins que les parlementaires soient informés en temps réel de l'évolution de la situation. Votre attitude renforce nos craintes de voir le Parlement mis totalement de côté.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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L'argument selon lequel les parlementaires n'auraient pas leur place dans un comité scientifique, au prétexte qu'il ne devrait être composé que de scientifiques, ne tient pas. En effet, vous le savez, madame la ministre, une représentation parlementaire est assurée au sein de nombreux organismes. En notre qualité de représentants de la nation, nous sommes nommés dans beaucoup d'organismes, alors que nous n'avons pas nécessairement les compétences ad hoc.

Je ne vous en citerai qu'un : l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques – Opecst –,…

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…composé de dix-huit députés et de dix-huit sénateurs. Il a pour mission d'informer le Parlement des conséquences des choix scientifiques et technologiques qui sont faits. Je ne vois pas en quoi le fait que des représentants du Parlement français et du pays demandeur siègent dans ce comité nuirait à sa qualité du point de vue scientifique. Qui plus est, seule une portion congrue de la représentation parlementaire y participerait dans le cadre du processus prévu par la loi-cadre.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Je souhaite répondre à M. Lachaud. Autant je reconnais que la position de Mme Genevard est constante et cohérente, autant j'ai du mal à comprendre celle des députés de La France insoumise. En commission, votre collègue, le député François Piquemal, avait soutenu le principe d'une loi-cadre, expliquant que le texte allait « dans le bon sens, puisqu'il simplifie la procédure […] », alors que vous venez de vous y opposer.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Vous souhaiteriez qu'on adopte une loi d'espèce pour répondre à chaque demande de restitution – étant donné que cinq demandes nous ont été adressées, le Parlement devrait en adopter cinq dans les cinq prochains mois, afin d'y répondre.

Je rappelle, monsieur Victor, qu'il s'agit non pas d'un projet de loi du Gouvernement, mais d'une proposition de loi sénatoriale. Ces questions ont déjà été largement débattues, et un juste équilibre a été trouvé afin que le Parlement puisse disposer d'une information transparente, complète et précise, notamment en auditionnant, à tout moment, toute personne qu'il souhaiterait entendre – comme c'est déjà le cas.

Lorsqu'ils identifient un crâne datant de plusieurs dizaines d'années, il importe de laisser les experts scientifiques faire leur travail en toute indépendance vis-à-vis du politique et des ministères, quels qu'ils soient.

L'amendement n° 12 n'est pas adopté.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Pour moi, il l'était.

La parole est à Mme Mereana Reid Arbelot, pour soutenir l'amendement n° 21 .

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Il vise à préciser que le comité scientifique créé par ce texte devra mener un travail à la fois scientifique – nous venons d'en parler – et historique. En effet, son rôle ne doit pas se limiter à un travail scientifique de recherche de provenance et de datation. Il doit également mener un travail historique relatif aux conditions d'octroi de ces restes, à leur transfert sur le territoire français et à leur circulation jusqu'aux collections publiques.

Une occasion précieuse nous est donnée de reconnaître le fait colonial et d'en panser les plaies, afin d'envisager l'avenir sereinement. Ce texte ne doit pas se limiter à la question des restitutions, qui ne sont pas de simples colis postaux.

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Vous venez de vous mettre à dos l'ensemble de la communauté des historiens français, qui considèrent, à juste titre, qu'ils sont des scientifiques. Si les sciences humaines et sociales ne relèvent pas de la catégorie des sciences dures, les historiens, les anthropologues, les géographes n'en sont pas moins des scientifiques. Je vous invite donc à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable. Le mot « scientifique » inclut les historiens. Nous avons pris soin de le vérifier en en consultant certains.

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Étant donné que nous examinons une loi-cadre, il s'agit de cadrer. Le travail du comité scientifique est d'identifier des restes humains et de rendre des conclusions relatives à cette identification. Cet amendement propose de ne pas réduire leur mission à l'identification, que la proposition de loi prévoit déjà, mais de l'étendre à l'analyse du cheminement historique, afin de déterminer comment nous en sommes arrivés à cette situation. Il ne s'agit pas d'inclure ou non des historiens au comité. Ainsi, cet amendement ne contredit pas le texte, pas plus qu'il ne remet en cause tel ou tel scientifique.

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Cet amendement est satisfait, car travailler sur l'identification des restes humains consiste non seulement à effectuer une analyse ADN afin de retracer les origines, mais aussi à accomplir un travail archivistique, visant à déterminer, notamment au moyen de carnets de voyage d'explorateurs, la manière dont ces restes humains sont arrivés dans nos collections et par qui ils ont été exhumés. Ce travail historique sera mené par le comité scientifique.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 81

Nombre de suffrages exprimés 68

Majorité absolue 35

Pour l'adoption 26

Contre 42

L'amendement n° 21 n'est pas adopté.

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La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement n° 2 .

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Il vise à renforcer la transparence de la procédure de restitution des restes humains, en garantissant la publication systématique des rapports sur le fondement desquels les restitutions ont lieu.

L'article 1er prévoit la création d'un comité scientifique chargé de vérifier l'identification des restes humains en cas de doute sur celle-ci. Ce comité doit rédiger un rapport « détaillant les travaux conduits et fixant la liste des restes humains dont l'origine a pu être établie ». Un amendement, adopté en commission, vise à rendre public ce rapport, mais uniquement « sous réserve de l'approbation de l'État demandeur ».

Cet amendement vise à supprimer cette condition, en rendant systématique la publication des rapports du comité scientifique, afin de garantir une totale transparence. À titre d'exemple, les avis de la Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation – CIVS –, relatifs à la restitution des biens culturels spoliés lors des persécutions antisémites, sont rendus publics.

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La proposition de loi initiale ne prévoyait pas la publicité du rapport, à laquelle je suis favorable. Les débats en commission ont permis d'avancer sur cette question. Étant donné que le rapport sera corédigé avec l'État demandeur, il est nécessaire de lui demander l'autorisation de le publier, afin de le considérer comme un véritable partenaire. Je maintiens que le rapport sera publié « sous réserve de l'approbation de l'État demandeur ». Avis défavorable.

L'amendement n° 2 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

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La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l'amendement n° 26 .

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Madame la ministre, je vais pouvoir vous expliquer notre position. Il n'y a pas un mot à retirer aux propos tenus par François Piquemal en commission : nous sommes favorables au principe de la loi-cadre, à condition que le Parlement soit impliqué. Nous vous demandons non pas de voter une loi pour répondre à chaque demande, mais d'organiser un vote du Parlement à la suite d'un débat ,

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

ce qui n'est pas un long processus.

Si vous ne pouvez accepter l'idée que le Parlement puisse débattre et voter sur les restitutions, c'est qu'il y a un problème. Une nouvelle fois, vous voulez que l'exécutif s'approprie la compétence du Parlement.

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Vous avez évoqué cinq demandes de restitution. Or un débat au Parlement dure deux heures au maximum. Nous pouvons donc consacrer dix heures à la question hautement éthique et diplomatique de la restitution des restes humains.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Votre refus démontrerait, une fois encore, votre volonté de réduire à néant les pouvoirs du Parlement.

Mêmes mouvements.

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La loi-cadre vise à accélérer les réponses aux demandes de restitution. Les Malgaches, les aborigènes australiens et d'Argentine ont fait les leurs depuis longtemps et ils attendent. Ce week-end, j'ai eu un échange avec Marie-Sophie de Clippele, qui vient de publier Restes humains et patrimoine culturel : de quels droits ? Dans cet ouvrage très juridique, elle évoque la situation aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne, en Suisse, aux Pays-Bas.

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Monsieur le rapporteur, il est d'usage que vous vous adressiez au député qui a soutenu l'amendement.

M. le rapporteur se lève et se tourne vers M. Bastien Lachaud. – « Ah ! » et sourires sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.

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C'est mieux, n'est-ce pas ? En lisant cet ouvrage, j'ai pris conscience que la France était très en retard sur la question relative à la restitution des restes humains aux communautés qui les demandent, que ce soit par rapport aux États-Unis, au Royaume-Uni, à l'Allemagne, à la Suisse ou aux Pays-Bas. Nous n'avons pas avancé sur ce sujet depuis des dizaines d'années.

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La loi-cadre, qui permet d'éviter de répondre à chaque demande de restitution en adoptant une loi d'espèce, vise à simplifier et à accélérer la procédure de restitution. Alors même que nous voulons accélérer la machine, par cet amendement, vous nous demandez de la ralentir.

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Ralentir de deux heures, je pense qu'on peut le supporter !

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Nous rendons une forme de dignité aux peuples, qui, depuis de très nombreuses années, nous demandent de restituer les restes humains à des fins funéraires ou mémorielles. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Je le répète, votre amendement reviendrait à prévoir, de nouveau, l'adoption de lois d'espèce. Un sénateur du groupe Les Républicains et un sénateur du groupe communiste ont travaillé sur cette proposition de loi, déposée par une sénatrice. Dans leur esprit, il n'était pas question de retirer du pouvoir aux parlementaires, mais de leur permettre, en leur qualité de législateur, de fixer un cadre relatif aux restitutions des restes humains. Il s'agit de faire confiance à des experts scientifiques, qui seraient désignés par les deux pays pour siéger au sein du comité et que vous pourrez auditionner. Vous pourrez organiser toutes les auditions que vous voulez, nous vous remettrons tous les rapports que vous souhaitez. Du reste, dès la semaine prochaine, avec mon équipe, nous pourrons vous recevoir afin de vous donner des précisions sur les cinq demandes de restitution et celles à venir.

Très honnêtement, nous ne soutenons pas cette proposition de loi – qui, du reste, n'est pas un projet de loi proposé par le Gouvernement – parce que nous avons des choses à cacher, mais parce qu'il nous semble opportun de rattraper un retard de vingt ans sur le sujet, grâce au travail réalisé par les parlementaires – je pense notamment à l'adoption de l'amendement relatif à la publication du rapport du comité.

Nous respectons le Parlement et les législateurs que vous êtes, mais nous faisons confiance à des scientifiques. Avec ce texte historique, si vous le votez, la France prend enfin la mesure de l'enjeu. En effet, elle inscrit dans la loi que la dignité du corps humain après la mort a une valeur universelle, et répond aux demandes des États formulées dans le cadre d'une procédure que vous êtes en train de définir et qui sera respectée, notamment par les ministres de la culture qui me succéderont. Auparavant, il n'y avait pas de mode d'emploi. Vous écrivez une véritable page d'histoire, qui a beaucoup plus de valeur symbolique et de portée politique et philosophique qu'une succession de lois d'espèce. Vous connaissez le calendrier parlementaire, et savez donc le temps que prendra l'adoption des cinq lois d'espèces visant à répondre aux demandes de restitution des pays qui attendent.

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Ce n'est pas la question, madame la ministre !

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La question de la dépossession des prérogatives du Parlement se pose. Je suis favorable au principe de la loi-cadre. Néanmoins, mes collègues Annie Genevard et Bastien Lachaud ont raison de soulever la question de la ratification des réponses aux demandes de restitution par le Parlement.

En ma qualité de membre de la commission des affaires étrangères, je sais en quoi consiste la ratification des traités. Ceux-ci ne sont pas débattus ni amendés : ils sont signés par le Président de la République. Ils doivent néanmoins être ratifiés par le Parlement, ce qui autorise des interventions dans l'hémicycle.

Ne pourrions-nous pas suivre la même procédure de ratification dans le cas d'espèce, y compris sous sa forme simplifiée lorsque le sujet s'y prête ? Nous gagnerions deux heures – mais si un groupe le demandait, nous pourrions tout de même discuter de l'application de la loi-cadre. Une telle procédure, parce qu'elle préserve le pouvoir du Parlement, aurait du sens.

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Comme vous, madame la ministre, je crois que nous vivons un moment historique. Raison de plus pour débattre de manière approfondie, comme nous le faisons en ce moment. Une loi-cadre qui instaurerait pour chaque restitution, quelle qu'elle soit, l'avis d'un comité scientifique, me paraît pleinement justifiée. Je souscris à l'excellente intervention de M. Lecoq au sujet de la procédure de ratification des traités internationaux par le Parlement. Le parallèle est intéressant et mériterait d'être creusé en commission mixte paritaire (CMP).

Nous nous accordons sur la nature des biens à restituer et sur la légitimité de la démarche, ne nous faites pas dire le contraire ! C'est la procédure parlementaire que vous proposez pour régir l'aliénation d'éléments des collections publiques que nous jugeons inacceptable, car elle dépossède le Parlement.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 106

Nombre de suffrages exprimés 103

Majorité absolue 52

Pour l'adoption 26

Contre 77

L'amendement n° 26 n'est pas adopté.

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La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement n° 7 .

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Nous demandons que les règles de composition des comités scientifiques soient fixées par décret en Conseil d'État et prévoient la présence de parlementaires en leur sein.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Défavorable.

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Je rejoins M. Lecoq et Mme Genevard : tout le monde est d'accord sur les restitutions. Nous discutons à présent de la place du Parlement dans le processus. Madame la ministre, ne faites pas semblant de ne pas comprendre : nous n'envisageons pas une loi d'espèce, mais un vote simple du Parlement, que vous lui refusez au prétexte de gagner du temps, tout en l'autorisant au niveau des collectivités locales – alors même que vous pourriez l'inscrire quand bon vous semble à l'ordre du jour de notre assemblée.

Jusqu'à preuve du contraire, le Gouvernement n'a pas encore la maîtrise de l'ordre du jour des collectivités locales – ça ne saurait tarder. L'urgence de répondre aux demandes de restitution ne concerne-t-elle pas les collectivités locales ? Pourquoi les laissez-vous voter, tout en refusant que le Parlement en fasse de même ? Parce que, intrinsèquement, vous le craignez ! Vous ne lui faites pas confiance, parce que vous y êtes minoritaires !

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

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Je me réjouis que nous ayons ce débat, qui porte sur un point essentiel sur lequel j'appelle votre attention, madame la ministre et monsieur le rapporteur. Cinq groupes au total, par la voix de leurs orateurs, demandent que soit réexaminée la place du Parlement dans le processus de restitution. Je vous incite à aborder ce sujet en CMP, car nous serions tous heureux de voter cette loi.

Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 110

Nombre de suffrages exprimés 109

Majorité absolue 55

Pour l'adoption 53

Contre 56

L'amendement n° 7 n'est pas adopté.

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La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement n° 3 .

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Nous souhaitons que les demandes de restitution qui n'ont pas abouti fassent l'objet d'un rapport remis chaque année au Parlement.

L'amendement n° 3 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 112

Nombre de suffrages exprimés 82

Majorité absolue 42

Pour l'adoption 82

Contre 0

L'article 1er , amendé, est adopté.

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La parole est à M. Jean-Victor Castor, premier orateur inscrit sur l'article.

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Vous avez cité la Guyane, madame la ministre. J'en profite pour saluer le courage et la détermination de Mme Corinne Devilliers, la présidente de l'association Moliko Alet + Po, qui exerce, de fait, une mission qui devrait être celle des pouvoirs publics. Sa détermination a notamment permis de découvrir, au bout de trois ans, des corps conservés au musée de l'Homme, à Paris. Vous évoquiez dans votre introduction les Guyanais déportés et exhibés en 1892 au Jardin d'acclimatation, mais vous ignoriez peut-être que certains le furent dès 1882. Au total, quarante-sept personnes furent déportées : quatorze en 1882 et trente-trois en 1892. C'est bien le travail de l'association, effectué de concert avec les responsables du musée, qui a permis d'identifier ces restes humains – ce n'est pas normal.

Moliko Alet + Po a également beaucoup travaillé avec la collectivité territoriale et les députés de Guyane, M. Rimane et moi-même, ainsi que d'autres parlementaires, afin que ce sujet soit mis à l'ordre du jour. Nous avons pu discuter avec votre ministère, mais ne nous leurrons pas : la décision transitoire de faire arriver les corps – qui ne seront pas la propriété de la collectivité ni de la communauté – ne doit pas empêcher le processus d'aller à son terme. Or la mention d'un rapport, dans cet article 2, pourrait le laisser craindre.

Je tiens donc ici à répéter avec force que ce ne sont pas seulement l'association Moliko Alet + Po et la communauté kali'na qui sont déterminées à privilégier la loi, mais bien l'ensemble de la communauté et de la représentation guyanaises.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Les collectivités d'outre-mer ne seront pas autorisées à demander la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques, bien que rien n'y fasse obstacle, ni sur la forme ni sur le fond. Nous devrons donc nous contenter du rapport prévu par cet article. Nous déplorons l'attitude du Gouvernement. Le sujet fait pourtant consensus. Nos concitoyens ultramarins sont décidément maltraités et nous sommes une fois de plus en première ligne pour les défendre. Ils le savent bien, puisqu'ils ont placé Marine Le Pen largement en tête de la dernière élection présidentielle.

Exclamations sur les bancs du groupe RE.

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Je suis saisi de deux demandes de scrutin public : sur l'article 2 par le groupe Renaissance et sur l'amendement n° 22 par le groupe Rassemblement national.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 29 rectifié .

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Nous voulons compléter l'article 2 et répondre en partie à la question que vous posiez au sujet du rapport, en précisant que celui-ci « émet des recommandations sur les moyens budgétaires et humains nécessaires à l'identification des restes humains » ultramarins présents dans les collections publiques. Nous pourrions ainsi profiter, dans un an, de la vision la plus précise possible de la situation.

Je salue à mon tour le travail de l'association Moliko Alet + Po ainsi que celui des universitaires et des scientifiques, notamment celui de Thomas Mouzard sur la Guyane et celui de Klara Boyer-Rossol sur les communautés malgaches. En tant qu'éditeur, j'ai moi-même, voici quelques années, soutenu la publication d'un dictionnaire analogique wayana-français – comme vous le voyez, le sujet m'importe. Quant à la communauté scientifique, elle n'a pas attendu nos débats pour s'intéresser aux territoires d'outre-mer.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Je rejoins l'avis du rapporteur. Monsieur le député Castor, j'ai la réponse à ce que vous me demandiez tout à l'heure : au Muséum national d'histoire naturelle, le nombre de restes humains présumés venant des outre-mer s'élève à environ 650 – dont des restes osseux et des cheveux –, étant précisé que nous ne connaissons pas avec exactitude leur territoire d'origine. Nous savions que des restes humains ultramarins étaient conservés dans les collections du Muséum. Ce n'est pas une découverte. En revanche, les demandes de « retour » – plutôt que de « restitution », puisque ces territoires appartiennent à la République française – sont quant à elles assez récentes.

Vous avez été reçu par mes services avec l'association Moliko Alet + Po et, depuis, nous nous efforçons d'élaborer un projet de loi spécifique. Rien n'y fait obstacle, mais nous venons à peine de nous pencher sur le sujet au sein du ministère – je ne prétends pas que c'est normal – et nous avançons le plus vite possible avec les données scientifiques dont nous disposons et en fonction des demandes que nous recevons : une seule, à ce jour. Le rapport visé par cet article 2, qui sera remis dans un an, constitue une balise précieuse pour avancer rapidement et nous aider à choisir le bon véhicule législatif – je m'y engage.

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Monsieur le rapporteur, j'apprécie votre connaissance du sujet et votre compétence : j'ai pris beaucoup du plaisir et appris bien des choses au cours de ce débat.

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Je souhaitais cependant souligner une contradiction – je ne peux tout de même pas me contenter de faire un compliment,…

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Cela aurait été étonnant !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Depuis le début de l'examen de ce texte, vous prétendez ne pas pouvoir intégrer des amendements au sujet des outre-mer au motif qu'il s'agit d'une loi-cadre, d'État à État. Vous proposez pourtant avec cet article 2 de remettre un rapport à ce sujet : c'est bien la preuve que la question vous embarrassait, et c'est ce qui explique que vous l'ayez réintroduite par ce biais.

Si vous aviez accepté un ou deux amendements permettant d'intégrer la dimension ultramarine dans l'esprit de la loi…

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…ou si vous aviez modifié le vôtre en précisant qu'à l'issue du rapport, un texte serait soumis au Parlement dans un délai n'excédant pas douze mois – au lieu de n'en mentionner aucun, de sorte qu'un tel texte pourrait parfaitement n'être présenté que dans dix ans ! –, vous auriez envoyé un signal politique fort à nos compatriotes d'outre-mer.

M. Jean-Victor Castor applaudit.

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Je souhaite verser à nos débats un témoignage ultramarin. Originaire de Nouvelle-Calédonie, j'aimerais rapporter un fait qui contredit le bruit de fond, souvent désagréable, de la maltraitance des territoires d'outre-mer.

Il y a neuf ans, en 2014, le Muséum national d'histoire naturelle a procédé à la restitution des crânes de guerriers kanaks, parmi lesquels celui d'Ataï, qui avait mené l'insurrection de 1878. Cette demande avait été formulée, non pas par la collectivité de Nouvelle-Calédonie, mais par des descendants de ces guerriers et des représentants de la communauté kanake. Je tenais à intervenir car je crois, comme le rapporteur, que ces questions ne peuvent pas être traitées uniquement sous l'angle des demandes émanant de collectivités.

Chacun de ceux d'entre nous qui sont élus d'un territoire ultramarin a probablement en tête une situation qui explique que nous ayons un besoin urgent du rapport de l'article 2 ; certaines demandes sont sans doute pendantes depuis très longtemps. Je soutiendrai donc l'amendement de M. le rapporteur, car des moyens budgétaires sont nécessaires pour identifier de manière plus exhaustive les restes humains pouvant faire l'objet d'une demande de restitution.

Néanmoins, le cadre interétatique dans lequel s'inscrit la proposition de loi n'est pas adapté aux demandes émanant de territoires d'outre-mer, qui portent sur des restes ayant une origine et une destination différentes. En revanche, le rapport permettra, je le crois, de définir, dans un an, un cadre législatif adéquat qui permettra de répondre à ces demandes dans un délai moindre que les sept à huit ans qu'il a fallu tout de même attendre pour que le Muséum national d'histoire naturelle restitue les crânes des guerriers kanaks.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe Dem.

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La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.

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Lorsque le rapport prévu à l'article 2 aura été remis au Parlement, j'enjoindrai au bureau de la commission de demander la création d'une mission d'information, de manière à élaborer, si possible et si nécessaire, une proposition de loi transpartisane qui permettra de satisfaire les demandes dont il est question. Cet amendement relatif aux territoires ultramarins ne pouvait pas être déposé à l'article 1er , qui modifie le code du patrimoine ; d'où l'article 2.

Mais sachez, chers collègues qui n'êtes pas membres de la commission des affaires culturelles mais qui avez suivi ces débats avec intérêt, que notre commission tient beaucoup à ce que l'on puisse apporter très rapidement une réponse la plus juste possible aux territoires ultramarins.

L'amendement n° 29 rectifié est adopté.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 114

Nombre de suffrages exprimés 109

Majorité absolue 55

Pour l'adoption 109

Contre 0

L'article 2, amendé, est adopté.

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Nous en venons à deux amendements portant article additionnel après l'article 2.

La parole est à Mme Mereana Reid Arbelot, pour soutenir l'amendement n° 22 .

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Par cet amendement d'appel, nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'installation d'une commission de vérité et de réconciliation. Nous souhaitons en effet utiliser le cadre des lois relatives aux restitutions afin de contribuer de façon plus générale à la guérison des blessures du passé colonial de la France.

La justice restaurative est de plus en plus utilisée en tant qu'outil politique afin de guérir les maux du passé et d'œuvrer dans un esprit de réconciliation nationale. Or l'un des outils de cette justice restaurative est la création de commissions de vérité et de réconciliation, qui offrent la possibilité d'expliquer le passé et de formuler des recommandations s'agissant de la réparation et des dédommagements.

Ces dernières années, plus de trente commissions de ce type ont été créées, notamment au Canada au sujet des pensionnats autochtones. Un travail similaire pourrait être effectué en France sur le passé colonial afin d'apporter une aide morale aux populations encore affectées par les conséquences néfastes de la colonisation.

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Sur le vote de l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisi par les groupes Renaissance et Les Républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis de la commission ?

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Il ne s'agit pas de nier l'important travail de mémoire qui reste à faire concernant la colonisation française, mais il me semble que l'amendement s'éloigne du cœur du texte qui consiste à autoriser, par une procédure dérogatoire, la sortie du domaine public de certains éléments de collections publiques. Avis défavorable, donc.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Même avis que le rapporteur. Sur le fond, la question est très large et excède, du reste, le champ du ministère de la culture. Mais, depuis mon arrivée à la tête de ce ministère, nous y réfléchissons régulièrement avec les musées et les institutions culturelles dans toute leur diversité. Des expositions ont été organisées, des recherches menées, et nous favorisons la recherche de la provenance des œuvres.

Que ce soit sur le plan scientifique, sur le plan pédagogique ou sur celui de la reconnaissance de tous les pans de notre histoire, qu'il faut regarder en face,…

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

…nous sommes totalement engagés, qu'il s'agisse des territoires ultramarins ou d'autres pays.

Je ne voudrais donc pas que vous interprétiez notre avis défavorable, motivé par le fait que l'amendement n'a pas sa place dans ce texte-ci, comme un refus de réfléchir avec les territoires ultramarins, comme avec d'autres pays, à l'enjeu qu'est l'apaisement des mémoires.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Chère collègue Reid Arbelot, le groupe RN s'opposera à votre amendement. Si nous sommes tout à fait favorables à la restitution de restes humains aux collectivités ultramarines – j'ai déposé, comme vous, un amendement en ce sens –, un rapport sur la création d'une commission de vérité et de réconciliation nous semble s'éloigner tant de l'esprit que de l'objet du texte, lequel se borne aux questions strictement funéraires et ne porte donc pas sur celle des dédommagements et de la réparation mentionnée dans votre exposé sommaire. Ce sujet important mériterait sans doute un débat au Parlement, mais pas dans ce cadre.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Au cœur du texte se trouve, certes, la restitution des restes humains. Mais leur présence dans nos collections publiques s'explique, en grande partie, par la colonisation et par la volonté « scientifique » de démontrer l'infériorité supposée de certains peuples, notamment en menant des recherches approfondies sur le corps de personnes déportées et amenées en France pour être exhibées. On ne peut donc pas dire que les deux questions n'ont rien à voir l'une avec l'autre.

Or les occasions sont rares d'aborder ces questions dans l'hémicycle. La création d'une commission de vérité et de réconciliation est une nécessité, quel que soit le véhicule qui la permettra. Nous soutenons donc cette proposition, car nous devons affronter collectivement ce passé qui nous empêche de faire totalement et sereinement nation.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 117

Nombre de suffrages exprimés 117

Majorité absolue 59

Pour l'adoption 36

Contre 81

L'amendement n° 22 n'est pas adopté.

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La parole est à Mme Mereana Reid Arbelot, pour soutenir l'amendement n° 24 .

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Il s'agit de demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport définissant le statut juridique des restes humains en droit français.

Les auditions et les discussions suscitées par la proposition de loi ont mis en lumière le besoin d'une définition plus précise du statut juridique des restes humains en droit français. En effet, alors que le corps humain est en principe insusceptible d'appropriation selon le code civil, les corps deviennent des biens culturels une fois acquis et intégrés dans les collections publiques. Cette ambiguïté mériterait d'être dissipée.

L'idée exprimée par M. le rapporteur à l'alinéa 14 est intéressante. Il y est en effet précisé que le comité scientifique peut se prononcer sur la qualité de restes humains lorsque celle-ci fait débat. Or, si ce comité est composé de scientifiques et ne se réunit qu'en cas de doute sur la provenance des restes humains, l'idée n'aura pas les effets escomptés.

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Je précise en effet dans mon rapport que la problématique des restes humains – ou de ce que l'on appelle, en archéologie, les vestiges anthropo-biologiques – reste entière. De fait, ils relèvent de divers codes : code funéraire, code civil, code du patrimoine… J'appelle donc de mes vœux une unification ou une clarification de ces différents aspects.

Sur le principe, je suis d'accord avec vous et suis prêt à mener avec vous une réflexion sur le sujet dans le cadre d'une commission parlementaire. Nous nous éloignons donc de l'idée d'un rapport gouvernemental : c'est une question dont nous, parlementaires, pouvons nous emparer.

Mme Annie Genevard applaudit.

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Franchement, monsieur le rapporteur, ça ne vous coûtait rien d'accepter cette demande de rapport…

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Avis défavorable. L'amendement dépasse le cadre de la proposition de loi. Néanmoins, j'entends vos arguments sur la nécessité de s'interroger sur ce qu'est un reste humain. Au demeurant, je précise que la majorité des restes que nous évoquons dépendent de musées ou d'universités qui ne relèvent pas du ministère de la culture. Celui-ci est compétent dans la mesure où ces restes ont été intégrés dans les collections publiques, car son intervention est nécessaire pour déroger au principe d'inaliénabilité de ces collections.

Nous devons travailler sur le statut juridique des restes humains avec des scientifiques, des chercheurs, des directeurs d'université et des musées qui dépendent de l'enseignement supérieur et de la recherche. Le débat, du reste, est scientifique avant d'être juridique. Il s'agit de déterminer la frontière entre les vestiges qui doivent faire partie des collections des musées, ceux qui peuvent faire l'objet de recherches scientifiques sans être exposés dans des musées et ceux qui n'appartiennent à aucune des deux catégories, qu'ils appartiennent ou non à un pays étranger, et devraient être inhumés.

Le débat est absolument passionnant. Je ne suis pas certaine que la question puisse être traitée dans le cadre du rapport proposé au cours de la discussion parlementaire. Peut-être faut-il en effet créer une commission ad hoc. Je solliciterai ceux de mes collègues qui sont encore plus concernés que moi par la question.

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Monsieur le rapporteur, soit vous êtes taquin, soit vous avez eu une révélation concernant le rôle du Parlement depuis l'examen de mon amendement n° 25 à l'article 1er . En effet, vous ne pouvez pas nous dire qu'il faut renforcer le rôle du Parlement quand vous êtes le rapporteur d'un texte qui le prive de tout pouvoir.

J'entends ce que vous nous dites et j'espère que, comme vous l'a suggéré notre excellente collègue Genevard, lors de la réunion de la commission mixte paritaire, vous réintroduirez le Parlement dans ce dispositif. Quoi qu'il en soit, un rapport gouvernemental ne peut que nous éclairer sur la question.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

L'amendement n° 24 n'est pas adopté.

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Au terme de ce débat, nous avons progressé sur plusieurs points.

Tout d'abord, la légitimité de la restitution de restes humains est unanimement reconnue. Cela doit être souligné comme un moment fondateur.

Mon deuxième motif de satisfaction est d'avoir, avec mes collègues, soulevé la question de la place du Parlement dans le processus de restitution des biens. Il s'agit, en l'espèce, de restes humains, mais d'autres types d'œuvres appartenant aux collections publiques seront peut-être concernés à l'avenir.

Le Parlement, je le crois et je l'affirme, dispose de toute la légitimité nécessaire pour se prononcer en la matière. Certains d'entre vous ont considéré que cette loi-cadre empêcherait le fait du prince. À mon avis, c'est tout le contraire : si nous voulons empêcher la mainmise de l'exécutif sur la décision de restitution, il nous faut restaurer la place du Parlement dans le processus.

J'appelle de mes vœux, madame la ministre, monsieur le rapporteur, l'ouverture d'une discussion sur ce point, avant et pendant la CMP – car, je le répète, nous aimerions voter cette loi.

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Nous voterons ce texte, qui marque une avancée majeure. Il n'a qu'un seul but : faciliter la restitution de restes humains à des pays tiers, lorsque ces restitutions apparaissent légitimes compte tenu des conditions de recueil et de dépôt de ces restes dans nos collections publiques.

Cette dérogation-cadre au principe d'inaliénabilité se fera selon des critères précis et soigneusement définis. Nous faisons pleine confiance aux scientifiques, dont le travail rigoureux sera primordial en vue d'éventuelles restitutions.

Faire entrer des femmes ou des hommes politiques dans le processus de décision, c'est risquer d'y faire pénétrer l'intérêt politique et diplomatique qui sera, au moment d'analyser le cheminement et l'histoire des restes humains, probablement biaisé en faveur des enjeux du moment.

Il n'y aurait rien de pire que de soumettre la restitution de ces restes – leur retour à leur juste place – à la couleur politique majoritaire du jour. Les historiens ne peuvent être tout à fait libérés des contingences du présent ; ils le sont néanmoins davantage que le personnel politique.

S'agissant des restes originaires de collectivités d'outre-mer, nous avons pu constater au sein de cet hémicycle – en dépit de certains collègues enclins à la polémique – un consensus en faveur de leur restitution aux collectivités ultramarines. Le véhicule juridique adapté sera trouvé en temps utile, après une réflexion conduite à ce sujet – car l'outre-mer n'entre effectivement pas dans la catégorie des États tiers.

Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.

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Nous sommes très favorables à l'entrée dans le processus de restitution – encadré, mais juste – des restes humains. Ils sont, pour la plupart d'entre eux, issus des violences de la colonisation, et doivent pouvoir retrouver leur lieu d'origine, dans le respect et la dignité dus à la personne humaine, y compris lorsqu'elle est décédée.

Néanmoins, je regrette que l'amendement n° 2 de Mme Béatrice Descamps, qui visait une plus grande transparence de la procédure de restitution par la publication systématique de rapports, n'ait pas été adopté. M. le rapporteur a objecté qu'il fallait que les États tiers soient favorables à cette publication. Or cette loi-cadre était précisément l'occasion de fixer nos conditions et d'exiger la plus grande transparence des débats scientifiques, afin de pouvoir assumer ces restitutions de la meilleure façon possible.

Nous avons beaucoup discuté de la nature de cette loi-cadre et de la place qu'elle réserve aux parlementaires. L'ambiance actuelle particulièrement tendue, marquée par l'usage répété de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, ne fait que renforcer le moment historique que connaît notre pays, et dont il est difficile de s'extraire : nous ne légiférons quasiment plus, et l'exécutif prend toute la place au détriment du Parlement. Aussi, je comprends les interrogations fortes de mes collègues.

Toutefois, l'origine parlementaire de cette loi me rassure, et je ne voudrais pas que, si nous devions – et je le souhaite ardemment – examiner une loi plus large concernant la restitution des biens spoliés durant la colonisation, l'obligation de demander systématiquement l'avis du Parlement conduise à ralentir la mise en œuvre de notre obligation de faire en sorte de décoloniser nos musées…

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…et de rendre les biens, que nous avons volés au moment de la colonisation, aux pays originaires qui le souhaiteraient.

Je ne voudrais pas que la nécessité d'un vote du Parlement pour chaque restitution entrave finalement ces retours indispensables et justes.

Nous voterons d'autant plus facilement cette loi qu'il me semble avoir entendu sur les bancs du Gouvernement, ainsi que sur ceux de la présidente de la commission et du rapporteur, un engagement – et nous serons très attentifs à ce qu'il soit respecté – en faveur du règlement de la question guyanaise – qui comporte des restes humains particuliers. L'engagement a également été pris de donner tous les moyens aux équipes scientifiques de nos musées, afin d'identifier les restes humains en provenance des outre-mer et de permettre leur restitution le plus rapidement possible. Il s'agit en effet d'un problème majeur, que ne résout pas cette loi, laissant un goût d'inachevé.

Ces engagements sont très importants ; nous serons attentifs à ce qu'ils puissent aboutir au plus vite. Nous voterons cette loi, malgré ces interrogations et ces inquiétudes ; quant aux lois à venir, nous espérons qu'elles permettront la restitution de tous les biens culturels spoliés.

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Je voudrais d'abord saluer la qualité des débats que nous avons eus, d'abord en commission – des débats longs mais instructifs –, puis en séance publique, où l'expertise du rapporteur Christophe Marion a permis à chacun d'entre nous de mieux s'approprier le problème majeur que nous traitons.

Nous faisons, ce soir, un pas de géant, en rattrapant sans doute un long retard pris par notre pays en matière de restitution des restes humains. La qualité de nos débats permettra probablement de répondre favorablement à plusieurs demandes.

Je voudrais souligner l'engagement de Mme la ministre – pris en commission et réitéré dans cet hémicycle – à produire un rapport dans un délai d'un an. Nous, députés du groupe Renaissance, pouvons également prendre l'engagement, envers nos collègues ultramarins, de faire en sorte que leurs demandes soient prises en compte – je salue à ce titre le travail de Mme Reid Arbelot, qui a apporté des éléments probants. Nous nous engageons aussi à demeurer très vigilants à ce que le rapport susmentionné soit produit, à ce que son contenu soit publié, et à ce qu'il aboutisse à une loi – qui sera probablement une loi d'exception.

Nous voterons donc cette loi-cadre, nécessaire et aboutie, et j'espère que nous pourrons tous nous retrouver sur un vote unanime.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.

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Au nom du Rassemblement national, je salue ce débat aussi passionnant en séance publique qu'il le fut en commission. Nous voterons ce texte, qui constitue une avancée. Cependant, je déplore que les outre-mer demeurent malmenés et que l'on ne dispose d'aucune garantie sur leur accès au dispositif, ni sur le délai dans lequel il pourra y être remédié. Nous serons attentifs à ce que cette question trouve une réponse. Je regrette également que le rôle du Parlement ait été marginalisé, mais nous voterons bien évidemment ce texte.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. le rapporteur applaudit également.

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C'est un beau débat que nous avons eu aujourd'hui, sur un sujet sérieux et important, mêlant diplomatie, éthique, histoire et responsabilité – et aussi, un peu, démocratie.

Malheureusement, alors que nous aurions souhaité pouvoir voter ce texte, qui constitue un pas important pour notre République, nous ne le pourrons pas, compte tenu de la position du Gouvernement.

Ce texte, en l'état, dépossède totalement les parlementaires de leurs pouvoirs sur nos collections nationales, et cela pourrait constituer un précédent regrettable.

C'est pourquoi nous vous demandons, madame la ministre, d'intégrer nos amendements lors de la CMP, et d'écouter le Parlement. Je sais combien tout cela – écouter le Parlement, y débattre et le faire voter – est difficile pour votre gouvernement.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Vous essayez de l'éviter chaque fois que vous le pouvez, à coup de 49.3, encore et encore – un dix-septième a été mis en œuvre tout à l'heure, alors que Mme la Première ministre ne se trouvait même pas en France, nous déléguant le ministre chargé des relations avec le Parlement !

Madame la ministre, vous n'avez rien fait d'autre, pendant ce débat, que de faire semblant de ne pas comprendre ce que nous vous disions – pas seulement nous, La France insoumise, mais également les collègues des groupes GDR, LIOT, ainsi que Mme Genevard du groupe Les Républicains.

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Vous, vous avez voté contre nos amendements !

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Nous ne souhaitons pas ralentir le processus de restitution, nous souhaitons que le Parlement puisse voter. C'est également un signe de respect vis-à-vis des États demandeurs. Si notre Parlement ne se prononce pas, nous aurons l'impression que cela est fait, sinon en catimini, du moins sans la solennité requise. Nous avons besoin de ce vote, tant pour assumer notre responsabilité historique qu'en raison des aspects démocratiques sous-jacents.

En aucun cas faire voter le Parlement ne retarderait la restitution. Vous n'avez pas cette pudeur quand vous faites voter les collectivités territoriales ! Nous ne pouvons pas accepter qu'il y ait ainsi deux poids, deux mesures : faire voter les collectivités territoriales selon leur propre calendrier, et écraser une nouvelle fois le Parlement.

En l'état du texte, et à contrecœur, nous nous abstiendrons, en espérant pouvoir voter en CMP une version améliorée, respectueuse du Parlement.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Le groupe GDR votera ce texte, avec des réserves. Sur la forme, nous apprécions que M. le rapporteur et Mme la ministre n'aient pas cherché à polémiquer – c'est rare dans cette assemblée, où nous avons l'habitude de ministres et d'une Première ministre toujours enclins à la polémique et ne répondant pas aux questions. La forme, certes, ne suffit pas, mais on voit bien que grâce à elle, le débat est plus apaisé – c'est une bonne chose.

S'agissant des aspects techniques et des engagements pris, je souhaite rappeler que ce sont des civilisations qui sont en jeu.

Nous sommes un peu piégés, nous autres représentants des collectivités d'outre-mer, parce que ce texte ne concerne finalement que les accords entre États. Quoi qu'il en soit, il s'agit d'un problème mondial et, comme plusieurs collègues l'ont relevé, lié à la colonisation.

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Ce problème tient au fait que certaines personnes ont considéré que d'autres étaient des sous-hommes. On s'amusait à utiliser des équerres et autres instruments pour mesurer le nez, le front, et déterminer ainsi des catégories d'êtres humains, en les classant de façon hiérarchisée, afin d'établir la notion de « races » humaines, entraînant les conséquences que l'on sait dans l'histoire de l'humanité.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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C'est en vertu de ce principe que l'on s'est approprié des êtres humains de différents territoires, que l'on s'est permis de les exhiber dans le froid, de les monnayer et de les déporter de pays en pays – en effet, les exhibitions n'ont pas eu lieu qu'en France et, en ce qui concerne les Kali'nas, les exhibitions de Paris précédaient le transport en Allemagne et en Belgique.

Le rapport à la mort, qui est en jeu dans la restitution des restes humains, ne doit pas donner lieu à un calcul diplomatique – d'où l'inquiétude de certains collègues, qui aimeraient que ce débat soit maintenu au sein du Parlement.

La proposition avancée par Jean-Paul Lecoq de faire ratifier les décisions de restitution devrait être retenue et introduite à l'occasion de la CMP. S'il faut accélérer, en évitant de légiférer pour chaque cas particulier, le faible nombre de demandes que vous recensez – cinq – devrait permettre une ratification rapide par le Parlement.

Le fait de priver le Parlement de ce débat est une faute, et il faudra y remédier. J'ai d'ailleurs constaté que, lorsque mon collègue Jean-Paul Lecoq s'est exprimé, M. le rapporteur a acquiescé, ainsi que Mme la ministre – quoique plus timidement. Ainsi, vous vous rendez bien compte que le Parlement a une responsabilité et que cette affaire ne doit pas être confiée uniquement à l'exécutif.

Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES. – M. le rapporteur applaudit également.

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À mon tour, je tiens à saluer la qualité des débats et à remercier M. le rapporteur, qui y a grandement contribué. Notre groupe votera ce texte.

Je vous remercie d'ailleurs doublement, monsieur le rapporteur, ainsi que madame la présidente de la commission, pour votre engagement s'agissant des territoires ultramarins. Madame la ministre, vous avez également notre confiance : nous travaillerons ensemble sur cette question.

Enfin, à l'instar de Mme Genevard, les députés du groupe LIOT espèrent que nous reviendrons sur la place dévolue aux parlementaires au sein des comités scientifiques qui seront constitués.

Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. – Mme Anne-Cécile Violland applaudit également.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 126

Nombre de suffrages exprimés 97

Majorité absolue 49

Pour l'adoption 97

Contre 0

La proposition de loi est adoptée.

M. le rapporteur applaudit.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Mesdames et messieurs les députés, je tenais à vous remercier pour ce débat passionnant sur cette question à la fois intime et collective que vous avez su aborder avec beaucoup de dignité et de précision. Je salue particulièrement le travail de Christophe Marion : jamais je n'ai vu un tel investissement de la part d'un rapporteur et une connaissance aussi approfondie de l'objet d'un texte.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR, ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Chaque fois que j'avais rendez-vous avec lui, il y avait encore plus de livres sur son bureau ! Il est entré dans le détail de chaque élément. Je vous remercie donc vivement, cher Christophe Marion, pour cet engagement absolument unique.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

En présentation du texte, je citais quelques phrases glaçantes d'Henry de La Vaulx qui, dans son ouvrage Voyage en Patagonie, disait : « Qu'importe après tout que ce Tehuelche dorme en Patagonie dans un trou ou au Muséum sous une vitrine. » Eh bien, cela importe ! En ce jour historique, vous l'avez prouvé, tout comme vous avez montré que nous pouvons changer le cours de l'histoire. Il s'agit non de réparer les fautes et les horreurs du passé, car nous ne le pourrons jamais complètement, mais à tout le moins d'apaiser l'avenir et d'ouvrir un chemin de reconnaissance et de réconciliation des mémoires ; je vous en remercie.

Je rappelle par ailleurs que l'inaliénabilité des collections est l'apanage de la France et de quelques pays. La plupart des États n'ont pas cette règle, si bien qu'ils n'ont pas à tenir ce type de débats. En Allemagne, au Bundestag, les députés n'ont pas à discuter des restitutions pendant plusieurs heures : il n'y a même aucun débat parlementaire sur cette question. Ainsi, non seulement nous avons eu un beau débat parlementaire – je remercie également les sénateurs pour leur travail –, mais nous disposerons d'une loi-cadre que vous aurez définie : c'est bien le législateur qui a posé le cadre, énoncé les conditions et élaboré la méthode de travail pour avancer sur le chemin des restitutions. En l'occurrence, vous affirmez faire confiance à la communauté scientifique et aux chercheurs, ce dont je vous remercie.

Concernant les collectivités, que vous avez évoquées à plusieurs reprises, en aucune façon il n'y a deux poids, deux mesures. Il est évident qu'elles ne sont pas sous la tutelle du Parlement. Elles devront délibérer, et je souhaite à cet égard que la majeure partie d'entre elles élaborent des lois-cadres pour ne pas avoir à revenir sur une délibération lors de chaque nouveau cas – mais ce choix leur appartiendra.

Enfin, je réaffirme mon engagement à travailler sur la question des restes humains originaires des outre-mer – je crois avoir été claire sur ce point aussi bien en commission qu'en séance. Le cas des restes humains originaires de la Guyane est le plus avancé, mais nous travaillerons aussi avec les autres territoires d'outre-mer, notamment en collectant toutes les données importantes en vue de la remise du rapport que le Gouvernement remettra au Parlement dans un délai d'un an.

Avec ce texte, je crois que nous avons prouvé notre attachement à la dignité humaine et notre esprit de justice. Je réitère mes remerciements.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.

Suspension et reprise de la séance

La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à dix-neuf heures trente.

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J'informe l'Assemblée qu'à à dix-sept heures quatorze, la présidente de l'Assemblée nationale a pris acte du dépôt par M. André Chassaigne, Mme Mathilde Panot, Mme Cyrielle Châtelain et 110 députés, d'une motion de censure en application de l'alinéa 3 de l'article 49 de la Constitution, la Première ministre ayant engagé la responsabilité du Gouvernement sur l'adoption en lecture définitive du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

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L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales (1001, 1697).

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La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'enfance.

Debut de section - Permalien
Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance

Qui peut encore minimiser l'ampleur des violences commises sur les enfants ? Qui peut encore nier leur impact sur leur vie, leur développement et sur leur future vie d'adulte ? Qui peut, en conséquence, minimiser l'impérieuse nécessité d'agir ensemble ?

Debut de section - Permalien
Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance

Quelques chiffres, que je continuerai à marteler tant qu'ils n'auront pas diminué, pour mesurer l'importance du phénomène : chaque année, 160 000 enfants subissent des violences sexuelles ; toutes les trois minutes, un enfant est victime d'inceste, de viol ou d'agression sexuelle ; au moins 143 000 enfants vivent dans un foyer où une femme a déclaré être victime de violences d'un conjoint ou ex-conjoint ; enfin, un enfant meurt tous les cinq jours sous les coups de ses parents, un drame qui constitue l'aboutissement de violences intrafamiliales préalables.

Face à ces chiffres et à cette réalité inacceptables, le Président de la République a fait de l'enfance et de sa protection l'un des sujets prioritaires du quinquennat. La protection des droits des enfants commence par la garantie de leur intégrité et de leur sécurité physiques : mieux lutter contre les violences faites à nos enfants doit être le cœur de l'engagement de chacun d'entre nous.

La Première ministre a structuré l'action résolue du Gouvernement en fixant une feuille de route très claire, suivie par un comité interministériel à l'enfance, qui coordonne l'action de tous les ministres impliqués.

Lundi 20 novembre prochain, elle réunira le troisième comité interministériel à l'enfance, nouvelle étape dans notre mobilisation contre ce fléau. Nous présenterons un second plan de lutte contre ces violences, notamment issu des recommandations très utiles de la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise).

Depuis plus d'un an, dans la continuité des actions menées au cours du précédent quinquennat, l'ensemble du Gouvernement travaille intensément afin de mieux protéger les enfants victimes de violences : création d'un office central de la police judiciaire dédié à la lutte contre les violences faites aux enfants, déploiement d'unités d'accueil pédiatrique des enfants en danger (Uaped), renforcement de la formation des professionnels, mise en place d'une plateforme de soutien pour ces derniers, etc.

C'est pourquoi, à quelques jours de la Journée internationale des droits de l'enfant, je me réjouis de l'examen en deuxième lecture devant votre assemblée de la proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales, défendue avec conviction par Mme Isabelle Santiago.

Ce texte, madame la rapporteure, renforcera les outils de la justice pour lutter plus efficacement contre ces violences et assurer une protection complète aux enfants victimes. En effet, votre proposition de loi vise à renforcer les dispositifs juridiques existants en suspendant l'autorité parentale du parent poursuivi pour agression – de même que ses attributs –, et en la lui retirant de manière systématique en cas de condamnation, sauf décision contraire spécialement motivée.

Soulignons les contributions décisives des députés de la majorité, au premier rang desquelles celles de la présidente de la délégation aux droits des enfants, Perrine Goulet, des députés Éric Poulliat, Nicole Dubré-Chirat, Erwan Balanant et Marie-Agnès Poussier-Winsback.

Ce texte soutenu par le Gouvernement, fruit d'un travail important avec la Chancellerie – je salue l'engagement fort d'Éric Dupond-Moretti –, et enrichi par la navette parlementaire, approche désormais de la maturité, comme en témoigne le peu d'amendements soumis à votre vote.

Quels sont les principales mesures et les équilibres qui les sous-tendent ? L'article 1er étend aux faits d'agressions sexuelles ou de crimes commis sur son enfant, les principes et les modalités de suspension de l'autorité parentale et de ses attributs en cas de poursuite par le ministère public, de mise en examen par le juge d'instruction ou de condamnation, même non définitive.

Avec cet article, la suspension de plein droit de l'autorité parentale et de ses attributs court jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales – qui peut être saisi par le parent poursuivi – ou jusqu'à la décision de non-lieu, jusqu'au jugement ou à l'arrêt pénal.

Cet article prévoit également la suspension de l'autorité parentale en cas de condamnation, même non définitive, pour des violences sur l'autre parent ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, lorsque l'enfant a assisté aux faits.

En vertu d'un décret pris par le garde des sceaux fin 2021, cette condition est déjà appréciée assez largement par les autorités de poursuite, qui procèdent quasi systématiquement aux auditions des enfants en cas de violences conjugales afin d'évaluer l'impact de ces violences sur les mineurs, en particulier lorsqu'ils en ont été témoins.

Une fois la proposition de loi votée, une circulaire d'application du garde des sceaux à l'attention des procureurs permettra de s'assurer que la nouvelle condition est évaluée de manière systématique et large. En outre, la suspension courra jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales, qui devra être saisi par l'un des parents dans un délai de six mois à compter de la condamnation. À défaut de saisine dans ce délai, les droits du parent condamné seront rétablis. Je me félicite que votre commission ait restauré le dispositif dans sa version votée par l'Assemblée nationale en première lecture.

L'article 2 de la proposition de loi élargit les modalités de retrait de l'autorité parentale ou de ses attributs. Si votre commission a décidé de préserver pour partie la version du Sénat, des ajouts viennent parfaire le dispositif.

La rédaction votée par le Sénat en première lecture modifiait le mécanisme de retrait de l'autorité parentale ou de son exercice : lorsque le parent avait été condamné comme auteur, coauteur ou complice d'une agression sexuelle incestueuse commise sur son enfant ou d'un crime commis sur son enfant ou sur l'autre parent, le juge pénal avait l'obligation de se prononcer sur le retrait total de l'autorité parentale, et la décision de ne pas ordonner un tel retrait devait être spécialement motivée ; lorsque le parent avait été condamné comme auteur, coauteur ou complice d'un délit commis sur l'enfant autre qu'une agression sexuelle incestueuse, le juge pénal avait l'obligation de se prononcer sur le retrait total ou partiel de l'autorité parentale ou sur le retrait de son exercice ; enfin, lorsque le parent avait été condamné comme auteur, coauteur ou complice d'un délit commis sur l'autre parent, ou comme coauteur ou complice d'un crime ou d'un délit commis par son enfant, le juge pénal avait la possibilité d'ordonner le retrait total ou partiel de l'autorité parentale ou de son exercice.

Votre commission a fait en sorte de renforcer le dispositif : désormais, lorsque le parent a été condamné comme auteur, coauteur ou complice d'une agression sexuelle incestueuse commise sur son enfant ou d'un crime commis sur son enfant ou sur l'autre parent, le juge pénal a l'obligation, non plus seulement de se prononcer, mais d'ordonner le retrait total ou partiel de l'exercice de l'autorité parentale, sauf décision contraire spécialement motivée. Il n'a donc plus une obligation de statuer sur ce retrait, mais de l'ordonner, sauf décision contraire spécialement motivée.

L'article 3 vise à coordonner le code pénal avec les modifications introduites dans le code civil. La méthode adoptée par les deux chambres est différente. La version soumise à vos débats est issue de l'adoption des amendements de Mme la rapporteure et de M. Poulliat en commission, qui visent principalement à rétablir l'article 3 dans sa rédaction adoptée en première lecture par votre assemblée.

Deux amendements, d'initiative commune, vont être soumis à votre assemblée, afin que le code pénal comporte un article unique regroupant toutes les dispositions relatives au retrait de l'autorité parentale, et que ces dispositions soient identiques à celles du code civil. Clarté, lisibilité et impact, tels sont nos objectifs.

J'espère ardemment que vous adopterez ce texte, car nous devons envoyer un signal clair et rappeler aux parents que donner la vie à un enfant, c'est certes exercer une autorité pour l'élever, mais c'est aussi, et avant tout, une responsabilité. Quand on a été irresponsable, la justice doit intervenir pour protéger l'enfant et limiter les droits de ses parents. En autorisant un parent, mis en cause ou, a fortiori, condamné, à continuer à prendre des décisions dans la vie quotidienne d'un enfant qu'il l'a violenté ou violé, on fait perdurer la violence et l'emprise.

Mesdames et messieurs les députés, avec vous, nous avons à cœur d'aboutir à une protection renforcée de nos enfants. Il y a quelques semaines, nous avons lancé une campagne choc pour réveiller notre société sur le fléau des violences sexuelles subies par les enfants. L'élan créé doit s'accompagner de nouveaux outils pour combattre ce fléau : je suis certaine que ce texte y contribuera fortement.

La justice n'est jamais aussi grande que lorsqu'elle s'occupe des tout petits : le proclamer une nouvelle fois haut et fort, tel est l'enjeu de nos débats. Nous avons besoin de la mobilisation de tous et toutes ; c'est pourquoi je vous remercie pour votre engagement et votre mobilisation afin d'améliorer et de renforcer la protection de nos enfants.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.

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La parole est à Mme Isabelle Santiago, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

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Je suis ravie de vous retrouver pour l'examen en deuxième lecture de cette proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales, que j'avais déposée dès le début de la nouvelle législature. Ce texte a été adopté à l'unanimité en première lecture à l'Assemblée nationale, le 9 février dernier, lors de la niche du groupe Socialistes et apparentés.

La proposition de loi revient en deuxième lecture dans le cadre de la navette parlementaire. Elle a fait l'objet d'un travail transpartisan, qui explique jusqu'à présent l'unanimité. J'espère qu'il en sera de même ce soir. C'est l'intérêt général, celui des plus vulnérables et des enfants victimes.

Il est nécessaire de mieux protéger les enfants des violences qu'ils subissent au sein de leur famille, qu'ils en soient les victimes directes ou les covictimes. Pour mémoire, 400 000 enfants vivent dans un foyer dans lequel s'exercent des violences conjugales et, chaque année, 160 000 subissent des violences sexuelles en France.

La mise en sécurité rapide de l'enfant et un accompagnement médico-social adapté sont indispensables pour limiter les effets négatifs de ces expériences traumatiques – l'Organisation mondiale de la santé (OMS), notamment, l'a mis en évidence.

Il faut garantir la sécurité physique et psychique des enfants : il est vain de soigner un enfant qui côtoie toujours son agresseur et rien n'est plus créateur d'inégalités dans sa construction que l'insécurité dans la maison pour un enfant. La proposition de loi s'attache donc à agir vite lorsque l'enfant est en danger, pour limiter les relations voire, dans les cas les plus graves, rompre le lien entre l'enfant et le parent violent ou agresseur.

En première lecture, le Sénat a largement modifié la proposition de loi. Il est revenu sur les principales avancées prévues à l'article 1er .

Je regrette qu'il n'ait jusqu'ici pas été possible d'aboutir à une version commune du texte. J'espère que lorsque les sénateurs l'examineront à nouveau, ils l'adopteront avec le moins de modifications possible. Je mettrai toute ma détermination à ce que la navette parlementaire aboutisse : il y a urgence à adopter cette proposition. Il s'agit d'un texte attendu, élaboré à partir des préconisations de la Ciivise et fruit d'un travail de longue haleine. Il est désormais temps de l'adopter définitivement.

Le mois dernier, la commission des lois a approuvé à l'unanimité une rédaction conforme à l'esprit de la première lecture de la proposition de loi à l'Assemblée au mois de février. Elle l'a améliorée sur certains points – nous avons recherché l'équilibre en reprenant les apports des sénateurs, dont plusieurs articles très intéressants, tout en rétablissant l'article 1er , essentiel à nos yeux. J'espère que cette proposition de loi sera donc adoptée à l'unanimité tout à l'heure, comme elle l'a été en première lecture.

L'article 1er prévoit la suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement. Elle intervient dès le stade des poursuites, lorsque le parent est mis en cause pour les infractions les plus graves – un crime sur la personne de l'autre parent, une agression sexuelle incestueuse ou un crime commis sur la personne de son enfant. Dans ce cas, la suspension court jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales, la décision de non-lieu du juge d'instruction ou la décision du juge pénal.

La suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement s'applique aussi en cas de condamnation pour des violences conjugales ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de huit jours, lorsque l'enfant a assisté aux faits.

Cette dernière précision a fait débat et beaucoup s'en sont émus. Je veux donc, comme cela a été fait en commission des lois, rappeler ce qui constitue le cadre légal, tel qu'il a été défini par la loi du 3 août 2018 – nous ne sommes actuellement pas très nombreux en séance, mais je m'adresse aussi à ceux qui nous écoutent. Le droit entend ici « présence » dans une acception large. Assister aux faits ne se limite pas à être témoin oculaire. L'enfant peut être considéré comme témoin des violences sans les voir ni les entendre, ni même être dans la pièce au moment où les faits sont commis. Il suffit qu'il soit témoin des conséquences directes de ces violences, même après qu'elles ont été commises.

Les juridictions se sont rapidement approprié ces dispositions : la circonstance aggravante constituée par la présence de l'enfant a été invoquée dans 43 condamnations en 2018, dans 8 765 en 2022. Les juridictions comprennent donc bien l'enjeu. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette augmentation marquée qui témoigne de la prise en compte des évolutions législatives, même s'il faut aller plus loin.

La suspension des droits de visite et d'hébergement est strictement nécessaire. Il faut envoyer un message clair aux victimes de ces violences pour leur dire que nous les croyons – la raison l'impose. Toute autre attitude y est contraire. Nous ne risquons pas d'inventer des victimes, mais de passer à côté d'enfants qui sont en danger et qu'il faut protéger. Continuer à rencontrer son parent mis en cause, y compris lors de visites médiatisées, engendre chez l'enfant un sentiment d'insécurité tant physique que psychique. Il faut faire passer la sécurité de l'enfant avant tout.

Mme Béatrice Roullaud hoche la tête pour approuver.

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La sécurité affective relève de ses besoins fondamentaux – elle est nécessaire à son développement. Pour se reconstruire, l'enfant doit être placé au centre d'un cercle de sécurité.

L'article 2 prévoit le retrait total et obligatoire de l'autorité parentale en cas de condamnation pour des faits de crime contre l'autre parent, d'agression sexuelle incestueuse ou de crime contre l'enfant, sauf décision contraire spécialement motivée du juge.

Plusieurs articles ont été ajoutés au cours de la navette parlementaire. L'article 2 bis crée un nouveau cas de délégation forcée de l'autorité parentale en cas de crime ou d'agression sexuelle incestueuse commis par un parent seul titulaire de l'autorité parentale – car il fallait envisager tous les cas de figure.

L'article 2 ter A procède à une coordination rédactionnelle.

L'article 2 ter prévoit qu'un parent ayant fait l'objet d'un retrait de l'exercice de l'autorité parentale ne peut pas en demander la restitution avant l'expiration d'un délai de six mois.

L'article 2 quater prévoit l'exonération, pour le parent bénéficiant d'une ordonnance de protection et d'une autorisation de dissimuler son domicile, de toute obligation d'informer préalablement l'autre parent d'un changement de résidence. Cette question de la sécurisation du domicile de l'enfant a été abordée par toutes les associations que j'ai eu l'occasion de rencontrer au cours des nombreuses années que j'ai consacrées à la lutte contre les violences faites aux enfants et aux femmes, en particulier intrafamiliales et conjugales.

Ces différents articles assurent l'équilibre du texte, qui ne néglige aucun angle. L'article 4, proposé par la délégation aux droits de l'enfant, demande la remise d'un rapport sur le suivi psychologique des enfants. Dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), j'ai déposé un amendement pour que les enfants puissent bénéficier d'un accompagnement médico-social. J'espère qu'il sera repris par le Gouvernement à la suite du 49.3, car il faut accompagner les familles.

Nous devons faire passer la protection des enfants au premier plan, ainsi que le préconise la Ciivise. Madame la secrétaire d'État, nous aurons demain l'occasion de parler de la feuille de route et de la nécessaire continuation des missions de la Ciivise.

Avec elle, nous disposons d'une richesse collective : sa parole apaisée et claire a posé des mots sur l'indicible. Elle nous parle des enfants et nous atteint tous, jusque dans notre cœur – c'est une chose précieuse et rare. Pour les enfants, je vous invite à poursuivre sur le chemin qu'elle a tracé.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, HOR, Écolo-NUpes et GDR – NUPES. – M. Jean Terlier applaudit également.

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Dans la discussion générale, la parole est à Mme Claudia Rouaux.

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Je tiens d'abord à souligner l'engagement et la persévérance de ma collègue socialiste Isabelle Santiago, qui est à l'origine de cette proposition de loi ; à ses yeux, le combat en faveur des enfants a toujours été une priorité.

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Si ce texte est examiné aujourd'hui, c'est aussi parce qu'il nous oblige tous. En France, les chiffres en matière de violences commises au sein de la famille contre les enfants, qu'ils en soient les victimes directes ou collatérales, sont vertigineux. Il est grand temps que la protection de l'enfant soit reconnue grande cause nationale.

Ne cessons jamais de le répéter : pas moins de 165 000 enfants subissent chaque année des violences sexuelles et 400 000 vivent dans un foyer où s'exercent des violences conjugales.

Dans 90 % des cas, l'agresseur est un homme ; un membre de la famille dans la moitié des cas. Les enfants en situation de handicap sont encore plus susceptibles d'être exposés à des violences sexuelles que les autres.

Toutes ces violences ont des répercussions très graves sur les enfants – sur leur développement, leur santé, leur construction, leur scolarité et leur vie sociale. Pour bien grandir, un enfant a besoin que l'on réponde à ses besoins fondamentaux – la sécurité physique et affective.

Dans toutes les situations où l'enfant est en danger, il est donc nécessaire de le mettre en sécurité le plus rapidement possible – en limitant les relations voire, dans les cas les plus graves, en rompant le lien entre l'enfant et le parent violent ou agresseur.

Ce texte s'attache à agir vite. Il introduit dans la loi une réactivité salvatrice, comme le réclament de nombreuses associations. Il fait le choix de faire primer l'intérêt supérieur de l'enfant – tout en respectant les droits des parents.

Il repose sur deux dispositifs principaux. L'article 1er prévoit la suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement, dès le stade des poursuites, lorsque le parent est mis en cause pour les infractions les plus graves – un crime sur la personne de l'autre parent, une agression sexuelle incestueuse ou un crime commis sur la personne de son enfant – ou en cas de condamnation pour violences conjugales.

L'article 2 renforce l'article 1er en prévoyant le retrait obligatoire de l'autorité parentale en cas de condamnation pour des faits de crime contre l'autre parent, d'agression sexuelle incestueuse ou de crime contre l'enfant – sauf décision contraire spécialement motivée du juge.

Alors que le Sénat avait largement affaibli ces deux dispositifs en excluant tout ce qui avait trait aux violences conjugales, le travail en commission a permis de revenir à l'essence du texte initial : nous sommes convaincus qu'il est indispensable de protéger l'enfant de toute scène de violence parentale, quelle que soit la forme qu'elle prenne.

Ce texte, proposé à l'occasion d'une niche parlementaire, n'avait pas la prétention de répondre à toutes les questions posées par les violences intrafamiliales. La rapporteure a donc choisi de modifier en priorité le traitement judiciaire de l'autorité parentale et de son exercice – il y avait urgence.

Il reste toutefois beaucoup à faire, notamment s'agissant de l'accompagnement psycho-social. Nous appelons le Gouvernement à mettre en place un grand plan pour aider les enfants victimes directes ou collatérales de violences intrafamiliales, incluant entre autres le remboursement des soins pédopsychiatriques.

Pas moins de 544 milliards : c'est ce que coûte chaque année aux systèmes de santé en Europe l'absence de protection des enfants. C'est un enjeu de santé publique : il est urgent d'en prendre conscience et de repérer les dégâts psychologiques induits par ces souffrances dès le plus jeune âge.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Victor Hugo écrivait que « toutes les violences ont un lendemain » : il avait raison.

On estime à 160 000 le nombre d'enfants victimes d'inceste chaque année, et 400 000 enfants vivent dans un foyer marqué par les violences conjugales. Dans 98 % des cas, les enfants sont témoins de ces violences et en sont donc eux-mêmes victimes. Les violences vécues dans l'enfance créent des souffrances physiques et psychologiques durables : elles marquent à jamais les adultes que ces enfants deviennent. Pour toutes ces raisons, le temps est venu d'aller plus loin – il faut rendre notre arsenal juridique beaucoup plus protecteur des enfants victimes.

Fort heureusement, notre assemblée n'a pas attendu 2023 pour s'emparer de cette question. Depuis 2005, de nombreuses lois sont intervenues en faveur des victimes. Elles ont permis la création de nouveaux outils juridiques et pratiques mis à disposition des associations et des personnels judiciaires pour protéger les enfants, et souvent les femmes. Notre arsenal législatif a été considérablement renforcé – c'était nécessaire. Il permet notamment de suspendre de plein droit l'exercice de l'autorité parentale lorsqu'un des parents est poursuivi pour un crime commis sur l'autre parent.

Le juge pénal peut également prononcer le retrait total ou partiel de l'autorité parentale en cas de condamnation pénale pour un crime ou un délit commis sur l'enfant ou l'autre parent. En cas d'inceste ou d'atteinte volontaire à la vie de l'autre parent, le juge est obligé de se prononcer sur la question de l'autorité parentale. Mais force est de constater que ces dispositions restent encore insuffisantes.

Je sais l'engagement du Gouvernement et la mobilisation de Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de la protection de l'enfance, dans la lutte contre les violences faites aux enfants, qu'ils en soient les victimes directes ou indirectes. Je vous en remercie très chaleureusement, madame la secrétaire d'État.

Cette proposition de loi vise à faire un pas supplémentaire vers une protection efficace des enfants. Permettez-moi de saluer l'engagement de la rapporteure, Isabelle Santiago, ainsi que le travail transpartisan accompli sur ce texte, qui a été adopté à l'unanimité en commission des lois : oui, des consensus peuvent advenir dans cette assemblée ! L'urgence à protéger les enfants en fait partie ; c'est une cause juste, pour laquelle il est urgent d'agir.

Le travail effectué à l'Assemblée nationale a été enrichi par les sénateurs, avec notamment l'ajout d'une disposition permettant d'exonérer le parent bénéficiaire d'une ordonnance de protection de la communication de tout changement de résidence à l'autre parent. Trop de femmes – il s'agit de femmes, dans la plupart des cas – sont contraintes d'informer leur ex-conjoint violent d'un changement de résidence, alors même que celui-ci ne doit pas pouvoir s'y rendre ni entrer en contact avec elle.

En commission, nous avons soutenu les amendements rétablissant les articles 1er , 2 et 3 tels qu'adoptés par l'Assemblée en première lecture. Nous pensons en effet qu'il faut élargir les motifs de suspension de plein droit de l'autorité parentale dans le cas de poursuites pour agressions sexuelles incestueuses et pour crime commis contre la personne de l'enfant, ou dans le cas de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de huit jours, avec la circonstance aggravante que l'enfant a assisté aux faits.

L'intérêt de l'enfant doit perpétuellement guider notre action. La création de garde-fous supplémentaires semblait absolument nécessaire pour éviter toute forme d'instrumentalisation de ces procédures, que l'on constate malheureusement parfois lors de séparations conflictuelles.

Le groupe Horizons et apparentés sera toujours déterminé à accompagner les évolutions favorables à l'intérêt de l'enfant et à sa protection. C'est pourquoi ses membres voteront ce texte avec conviction.

Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.

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La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales ;

Discussion de la proposition de loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt heures.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra