Si ce texte est examiné aujourd'hui, c'est aussi parce qu'il nous oblige tous. En France, les chiffres en matière de violences commises au sein de la famille contre les enfants, qu'ils en soient les victimes directes ou collatérales, sont vertigineux. Il est grand temps que la protection de l'enfant soit reconnue grande cause nationale.
Ne cessons jamais de le répéter : pas moins de 165 000 enfants subissent chaque année des violences sexuelles et 400 000 vivent dans un foyer où s'exercent des violences conjugales.
Dans 90 % des cas, l'agresseur est un homme ; un membre de la famille dans la moitié des cas. Les enfants en situation de handicap sont encore plus susceptibles d'être exposés à des violences sexuelles que les autres.
Toutes ces violences ont des répercussions très graves sur les enfants – sur leur développement, leur santé, leur construction, leur scolarité et leur vie sociale. Pour bien grandir, un enfant a besoin que l'on réponde à ses besoins fondamentaux – la sécurité physique et affective.
Dans toutes les situations où l'enfant est en danger, il est donc nécessaire de le mettre en sécurité le plus rapidement possible – en limitant les relations voire, dans les cas les plus graves, en rompant le lien entre l'enfant et le parent violent ou agresseur.
Ce texte s'attache à agir vite. Il introduit dans la loi une réactivité salvatrice, comme le réclament de nombreuses associations. Il fait le choix de faire primer l'intérêt supérieur de l'enfant – tout en respectant les droits des parents.
Il repose sur deux dispositifs principaux. L'article 1er prévoit la suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement, dès le stade des poursuites, lorsque le parent est mis en cause pour les infractions les plus graves – un crime sur la personne de l'autre parent, une agression sexuelle incestueuse ou un crime commis sur la personne de son enfant – ou en cas de condamnation pour violences conjugales.
L'article 2 renforce l'article 1er en prévoyant le retrait obligatoire de l'autorité parentale en cas de condamnation pour des faits de crime contre l'autre parent, d'agression sexuelle incestueuse ou de crime contre l'enfant – sauf décision contraire spécialement motivée du juge.
Alors que le Sénat avait largement affaibli ces deux dispositifs en excluant tout ce qui avait trait aux violences conjugales, le travail en commission a permis de revenir à l'essence du texte initial : nous sommes convaincus qu'il est indispensable de protéger l'enfant de toute scène de violence parentale, quelle que soit la forme qu'elle prenne.
Ce texte, proposé à l'occasion d'une niche parlementaire, n'avait pas la prétention de répondre à toutes les questions posées par les violences intrafamiliales. La rapporteure a donc choisi de modifier en priorité le traitement judiciaire de l'autorité parentale et de son exercice – il y avait urgence.
Il reste toutefois beaucoup à faire, notamment s'agissant de l'accompagnement psycho-social. Nous appelons le Gouvernement à mettre en place un grand plan pour aider les enfants victimes directes ou collatérales de violences intrafamiliales, incluant entre autres le remboursement des soins pédopsychiatriques.
Pas moins de 544 milliards : c'est ce que coûte chaque année aux systèmes de santé en Europe l'absence de protection des enfants. C'est un enjeu de santé publique : il est urgent d'en prendre conscience et de repérer les dégâts psychologiques induits par ces souffrances dès le plus jeune âge.