France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
En préambule, au nom de mon groupe, je souhaite rendre hommage au gendarme Jean-Christophe Bolloch, tué dans un accident cette nuit, alors qu'il effectuait une opération antidrogue. Nous pensons également aux autres gendarmes blessés.
Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent longuement. – Les membres du Gouvernement se lèvent également.
Monsieur le ministre de la santé et de la prévention, plus de 4 000 soignants en pédiatrie ont adressé samedi une lettre ouverte au Président de la République, alertant sur la situation de crise que connaissent les services pédiatriques, notamment à l'hôpital public.
Cela fait seulement deux semaines que les épidémies hivernales sont arrivées, et les services de réanimations pédiatriques sont à nouveau saturés. Des enfants ont été transférés en dehors de leur région, avec tous les risques que cela comporte : aggravation de l'état de santé, conséquences psychiques et somatiques à plus long terme. Les soins non urgents sont reportés. Les soignants sont contraints de prévoir des sorties prématurées d'hospitalisation ou de renvoyer des adolescents en détresse psychologique chez eux.
Le constat est sans appel : le manque de moyens et surtout le manque de personnel entraînent des conditions de travail dégradées pour les professionnels qui ne peuvent plus assurer correctement leur mission.
En réponse, le Gouvernement a annoncé dimanche dernier un plan d'action immédiat, qui comprend l'activation de plans blancs dans les territoires les plus touchés. Ces plans déclenchés tous les ans depuis 2020, ne peuvent plus être une solution pérenne.
Le plan d'action du Gouvernement comprend une aide de 150 millions d'euros pour les services hospitaliers sous tension. C'est insuffisant : la politique des pansements ne tient plus.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Comme nous le répétons, nous avons besoin d'investissements massifs pour redonner de l'attractivité et du sens aux métiers du soin, pour faire à nouveau primer la logique des besoins humains et sanitaires sur la logique comptable. Ce n'est pas ce qu'a permis le Ségur de la santé, et ce n'est pas non plus ce que prévoit votre projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023.
Alors, monsieur le ministre, comment comptez-vous répondre à cette situation d'urgence ? Quand allez-vous engager une réforme profonde et globale de notre système de soin ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.
Personne ici, je pense, ne peut prétendre que je ne connais pas les problèmes de l'hôpital, en particulier ceux de la pédiatrie. Pour preuve, s'il en fallait, dès ma prise de fonction, sous l'impulsion de la Première ministre, des mesures ont été prises afin de passer l'été, à un moment où la situation était déjà critique.
Au cours des quinze derniers jours, j'ai rencontré à plusieurs reprises les professionnels du monde de la pédiatrie qui font face à une épidémie de bronchiolite précoce alors que l'hôpital est déjà à bout de souffle. Comme je l'ai déjà dit, l'hôpital est à bout de souffle car, depuis des décennies et jusqu'en 2017, il a fait l'objet de politiques comptables qui l'ont progressivement étranglé sur le plan financier.
Exclamations sur les bancs des groupes RN et SOC.
Ces budgets ont d'ailleurs été adoptés ici même.
Mêmes mouvements.
Dans cette situation, il faut agir dans l'urgence et à plus long terme. En urgence, il faut libérer des initiatives afin d'aider les services en crise – malheureusement, cela ne se limite pas aux services de pédiatrie. À plus long terme, le Conseil national de la refondation (CNR) va nous permettre de réfléchir à l'échelle nationale et territoriale afin de refonder la filière de la pédiatrie et, plus globalement, la prise en charge de la santé de l'enfant.
En urgence, nous avons recours aux plans blancs, que vous avez évoqués. Ce n'est pas une mauvaise solution : elle fonctionne, même si elle reste de l'ordre du pansement. Nous avons aussi des conseils à donner aux parents qui, eux aussi, peuvent nous aider : ne pas oublier les gestes barrières pour éviter la contamination des enfants ; appeler le 15, numéro du Samu, plutôt que de se rendre systématiquement aux urgences.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et SOC. – M. Maxime Minot s'exclame également.
Quant aux transferts, ils servent à mieux prendre en charge les enfants, certainement pas à dégrader la qualité des soins. Nous avons aussi débloqué 150 millions d'euros afin de répondre aux difficultés immédiates et renforcer les services. Enfin, à plus long terme, des assises de la pédiatrie au printemps, comme je l'ai annoncé, permettront de réfléchir avec les professionnels à la manière de restructurer l'ensemble du secteur.
Monsieur le garde des sceaux, pas un jour ne se passe sans qu'une atrocité ne soit commise sur le territoire national, sans que les défaillances de votre politique ne soient pointées du doigt. Quoi que vous en disiez, l'insécurité est grandissante.
Dans mon département des Alpes-Maritimes, le procureur de la République de Nice a déclaré être très inquiet de l'évolution des violences et de leur particulière gravité. À Angers, il y a quelques jours, un violeur déjà condamné et libéré avant le terme de sa peine, a tenté à nouveau de violer une jeune femme. À Grenoble, un homme déjà condamné pour avoir tiré sur des policiers, a recommencé après un refus d'obtempérer. Je pense à Marin, tabassé et rendu handicapé à vie en 2016 par une racaille…
…qui voit son agresseur libéré bien avant le terme de sa peine initiale.
Ces faits confirment l'ensauvagement progressif de notre société, qui fait vivre des millions de Français dans la peur de sortir dans la rue, au risque de se voir molestés, violentés, violés ou tués.
Ils confirment aussi la réalité d'un laxisme judiciaire dangereux. Il convient de rappeler que le dogme selon lequel la fermeté des peines favoriserait la récidive, est une aberration. Concernant la justice de notre pays, tous les voyants sont au rouge. Surpopulation carcérale, laxisme judiciaire, surreprésentation des étrangers en prison : tous ces éléments prouvent que votre politique est inefficace.
Il y a quelques jours, vous avez déclaré que les élus du Rassemblement national étaient des extrémistes et que vous aviez des comptes à régler avec eux.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – MM. Arthur Delaporte et Benjamin Lucas applaudissent également.
Vous n'avez décidément honte de rien !
Contrairement à vous, monsieur le garde des sceaux, les membres de cette assemblée ont été élus démocratiquement par les Français. De ce fait, c'est vous qui avez des comptes à nous rendre, et pas l'inverse !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Monsieur le garde des sceaux, quand allez-vous cesser d'être aveuglé par votre dogmatisme dangereux et enfin donner les instructions nécessaires aux parquets pour en finir avec ce laxisme ?
Les députés du groupe Rassemblement national se lèvent et applaudissent.
Monsieur le député, vous tournez finalement toujours autour du même thème. Toujours !
En ce qui concerne le « laxisme » de la justice, je vais vous donner les chiffres puisque les mots ne vous conviennent pas. En quinze ans, la moyenne des peines prononcées en correctionnelle est passée de six à neuf mois de prison ferme et, en matière criminelle, de quatorze à seize ans – je rappelle que ce sont nos compatriotes qui rendent la justice aux assises. Voilà la réalité.
Mais vous ne voulez pas de la réalité. Comme sur certains plateaux de chaînes d'information en continu, vous avez une présentation « faits-diversière » de la justice. Vous ne voulez pas l'entendre, mais personne ne peut croire à la rémission des crimes. Elle n'adviendrait pas et, même si par malheur vous arriviez au pouvoir, je ne vous donnerais pas une semaine sans que vous ayez à connaître les crimes et les infractions qui sont consubstantielles à notre humanité. .
Exclamations sur les bancs du groupe RN
Cela ne signifie pas qu'il faille être fataliste. Je demande aux parquets d'être extrêmement sévères.
Mêmes mouvements.
Comme je l'ai déjà dit, vous avez la matraque magique. Vous répétez la même chose. Il flotte sur notre époque un parfum qui n'a pas le goût sucré des alizés, mesdames et messieurs les députés du Rassemblement national, mais l'odeur nauséabonde de 1938.
Vives protestations sur les bancs du groupe RN.
Voilà ce que vous nous faites.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes Dem et GDR – NUPES.
Je modifie ma question. Compte tenu de vos échecs, monsieur le garde des sceaux, quand comptez-vous enfin démissionner ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Comme notre collègue Jourdan, je vais me faire le relais de l'inquiétude de nos concitoyens, des professionnels de santé et des jeunes parents, alors que nos services de pédiatrie traversent une crise depuis quelques jours.
La situation est tendue, ce qui nous rappelle ce que nous avons vécu l'été dernier. Les seuils d'alerte épidémique de la bronchiolite chez les moins de 2 ans ont été dépassés précocement dans pratiquement toutes les régions. Le nombre d'enfants hospitalisés a bondi de 50 % en une semaine. La situation a atteint son paroxysme en Île-de-France où treize enfants ont dû être transférés hors de la région faute de lits disponibles, avec tout ce que cela implique pour les familles.
Dans une lettre ouverte adressée au Président de la République vendredi dernier, 4 000 professionnels de la pédiatrie nous ont alerté sur la situation de saturation et le débordement des services dans un hôpital public encore touché de plein fouet par la crise sanitaire liée à la covid-19. Comme nous le savons, des lits restent fermés faute de blouses blanches et, tous les ans, cette crise récurrente nous rappelle la particulière fragilité du secteur de la pédiatrie.
Le Gouvernement a aussitôt réagi pour répondre à l'urgence et traverser ce pic épidémique, mais aussi pour venir au secours de notre médecine pédiatrique sur le long terme.
Le groupe Horizons et apparentés salue cette réponse rapide. Les 150 millions d'euros débloqués vont permettre l'arrivée de personnels en renfort, afin de passer la période hivernale et de franchir ainsi une première étape nécessaire pour sortir de la crise. La médecine de ville sera également mobilisée et viendra prêter main-forte à l'hôpital, afin que tous les enfants puissent être pris en charge.
Notre groupe réaffirme sa volonté de garantir le modèle de l'hôpital public auquel les Français sont attachés et d'assurer à nos enfants des soins de qualité pour tous. À titre personnel, je me réjouis de l'ouverture prochaine d'un nouvel hôpital dans ma ville d'Ajaccio.
Madame la Première ministre, pourriez-vous nous informer sur l'évolution de l'épidémie et nous dire si d'autres transferts sont à prévoir ? Pourriez-vous nous apporter des précisions sur la manière dont sera répartie cette enveloppe de 150 millions d'euros, notamment en faveur des acteurs du secteur pédiatrique ?
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.
Comme vous l'avez souligné, l'épidémie de bronchiolite s'est déclarée plus tôt que d'habitude, et elle atteint des niveaux exceptionnels pour un mois d'octobre. Si la situation varie selon les régions, elle est particulièrement critique en Île-de-France.
Une fois de plus, cette épidémie met notre hôpital sous tension, et je veux me joindre à vous pour rendre hommage à nos soignants qui sont à nouveau très mobilisés pour prendre en charge les patients.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR, et sur plusieurs bancs des groupes Dem et SOC.
Je pense aussi aux familles inquiètes pour la prise en charge de leur enfant.
Monsieur le président Marcangeli, mon gouvernement a réagi et pris les mesures qui s'imposent. Depuis plusieurs semaines, François Braun, le ministre de la santé, rencontre les représentants de la pédiatrie. La semaine dernière encore, il a travaillé avec eux pour trouver des réponses à court terme.
Nous avons débloqué une enveloppe exceptionnelle de 150 millions d'euros pour aider et soutenir les services en tension, notamment les services pédiatriques. Cette enveloppe sera mobilisée en fonction des spécialités et des territoires. Elle doit permettre de débloquer des moyens afin de faire face aux surcharges, que ce soit en pédiatrie ou aux urgences.
Nous avons aussi prolongé l'essentiel des mesures du plan d'urgence de cet été. Nous voulons en particulier intensifier les coopérations entre l'hôpital et la médecine de ville, pour que les enfants puissent avoir accès plus facilement à un médecin généraliste ou à un pédiatre. À mon tour, j'invite les familles à appeler le 15 avant de se rendre aux urgences ; c'est l'assurance d'être bien conseillé et orienté. Enfin, nous avons lancé une campagne de prévention pour sensibiliser aux bons gestes permettant de limiter la propagation de l'épidémie de bronchiolite.
Au-delà des mesures d'urgence, mon gouvernement travaille pour répondre aux défis structurels que connaît la pédiatrie. C'est le sens des assises de la pédiatrie que nous voulons tenir au printemps prochain. Toutes les questions seront abordées collectivement pour penser l'avenir de la discipline, assurer l'attractivité des métiers et prendre les décisions qui s'imposent.
Cela étant, monsieur le président Marcangeli, votre question fait écho à une préoccupation légitime et plus générale de nos soignants concernant leurs conditions de travail et des Français concernant leur santé.
Nous leur devons des réponses, des actes et des résultats.
À l'heure où nous examinons un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui prévoit une hausse des moyens de 43 milliards d'euros par rapport à 2019, c'est-à-dire avant l'épidémie de covid, et dont l'adoption permettra d'améliorer l'attractivité des métiers et de financer les revalorisations salariales ainsi que les investissements prévus dans le cadre du Ségur de la santé ; à l'heure où des moyens exceptionnels sont proposés, le Gouvernement et – je n'en doute pas – la majorité sont prêts à la discussion. Alors agissons ensemble pour la santé des Français.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Ce week-end, plus de 6 500 soignants et des associations de patients ont adressé une tribune au Président de la République pour dénoncer l'abandon par le Gouvernement de l'hôpital public et de la médecine pédiatrique. Après deux semaines d'épidémies hivernales pourtant habituelles et prévisibles, les services de réanimation pédiatrique sont déjà saturés partout en France. Les soins dits non urgents sont reportés, des enfants dont la santé mentale est fragile sortent prématurément de l'hôpital, des enfants sont installés sur des brancards ou hospitalisés dans des services de réanimation pour adultes, voire transférés, faute de place, dans une autre région.
Trouvez-vous normal que des enfants malades soient séparés de plus de 100 kilomètres de leurs familles ? Pouvez-vous imaginer leur détresse ? Que dire de la perte de sens au travail dont souffrent les professionnels ? Face à cette situation de crise, vous proposez un plan blanc, des heures supplémentaires rémunérées ou encore des assises de la pédiatrie. Et ensuite, quoi ? Un numéro vert ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également.
Vous expliquez que la situation est liée à la survenue d'épidémies. Voilà un prétexte plutôt commode ! En réalité, la situation actuelle est le résultat de plus de vingt années de destruction méthodique et planifiée du service public de santé, auquel est alloué chaque année un budget inférieur aux besoins.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Selon l'OMS – Organisation mondiale de la santé –, la France, dont le système de santé était le meilleur du monde il y a vingt ans, ne figure désormais plus qu'à la quinzième place du classement.
Mme Ségolène Amiot applaudit.
La mortalité infantile augmente et l'espérance de vie en bonne santé y est inférieure à la moyenne européenne. Quant aux soignants, pourtant passionnés par leur métier, ils quittent les hôpitaux. Plus d'un tiers des Françaises et des Français ont déjà renoncé à se soigner en raison du coût de la santé, laquelle constitue pourtant un droit fondamental, conquis par le Conseil national de la Résistance, créateur de la sécurité sociale.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Je vous souffle quelques solutions : recruter 100 000 soignants, titulariser les contractuels, revaloriser les salaires, reconnaître la pénibilité du travail, sortir de la logique généralisée de tarification à l'acte ou encore reprendre la dette des hôpitaux.
Mêmes mouvements.
Quand comptez-vous prendre vos responsabilités et abandonner votre vision néolibérale, dangereuse et irresponsable ?
Mêmes mouvements.
Quelles actions comptez-vous prendre pour résoudre la situation d'urgence des services de pédiatrie et améliorer les conditions de travail à l'hôpital public, ainsi que les conditions d'accueil des patients ?
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent.
Je vous remercie de me rappeler quelles sont mes responsabilités… Voilà trente-cinq ans que je les exerce auprès de patients malades accueillis aux urgences et je ne compte pas changer de position maintenant.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Les difficultés du système de santé ont été rappelées. Je me réjouis de constater que vous partagez le diagnostic que le Gouvernement pose depuis plusieurs mois, voire depuis plusieurs années,…
…en particulier s'agissant de la perte de sens qu'éprouvent les professionnels de santé.
Comme vous savez, j'ai engagé depuis le début de l'été une refondation du système de santé ,
Sourires sur les bancs du groupe LFI – NUPES
en particulier à travers le lancement du Conseil national de la refondation,…
…dont j'ai d'ailleurs organisé la première réunion dans votre département, la Sarthe. Nous en attendons non seulement des réponses locales – car c'est là où sont les problèmes que sont les solutions –, mais également des réponses nationales à des difficultés plus structurelles, comme celles que nous allons traiter, cela a été dit, avec les assises de la pédiatrie.
J'entends vos critiques, mais permettez-moi d'apporter quelques corrections. D'abord, le numéro vert auquel vous faites référence existe déjà : il s'agit du 15, qui permet d'avoir un médecin du SAMU au téléphone en quelques minutes, où que l'on se trouve.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Pour ce qui est des transferts, que vous avez l'habitude de présenter comme une dégradation de la prise en charge, ils permettent au contraire de garantir un meilleur traitement aux enfants – comme d'ailleurs aux adultes – en les plaçant dans le service le mieux à même de les accueillir. Nous avons réalisé plus de 600 transferts pendant la crise du covid. L'état de santé de ces patients s'est révélé meilleur que celui de ceux qui sont restés dans des services saturés. Les transferts sont donc une réponse tout à fait pertinente pour faire face à des situations d'urgence.
Aux familles, je conseille une nouvelle fois d'appeler le 15 et de ne pas se précipiter vers les services d'urgence.
Nous prendrons évidemment en charge tous les patients.
Aux professionnels de la pédiatrie, que j'ai rencontrés et entendus, je tiens à dire que je partage leurs inquiétudes et que nous faisons tout pour refonder les filières.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le 17 octobre dernier se tenait la journée mondiale de lutte contre la douleur. Je tiens à rappeler ici qu'il est des maux invisibles et quotidiens qui détruisent des vies. Je veux porter la voix de ceux qui subissent les affres des douleurs chroniques et leur dire qu'ils ne sont pas seuls : leur combat est le nôtre.
Les causes de la douleur chronique sont multiples : suites d'une opération chirurgicale ou d'un traitement médical, effets d'une maladie. Il en résulte une souffrance quotidienne, parfois invalidante et souvent silencieuse. La douleur chronique concerne près de 12 millions de nos compatriotes, soit 20 % de la population. Elle peut toucher n'importe lequel d'entre nous, à tous les âges. Source de handicaps, d'isolement social et de souffrances psychologiques, mais aussi d'inactivité et d'absentéisme professionnels, elle constitue un phénomène sociétal en augmentation, qu'il faut prendre en considération.
La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé reconnaît la prise en charge et le soulagement de la douleur comme des droits fondamentaux du patient.
Ma question porte donc sur la pérennisation des structures d'étude et de traitement de la douleur chronique (SDC) qui prennent en charge les patients douloureux complexes sur le territoire métropolitain et ultramarin. Ce dispositif unique en Europe constitue un maillon essentiel du parcours de soins et participe de la diminution de l'errance diagnostique et thérapeutique. Après trois plans nationaux de lutte contre la douleur, néanmoins, le modèle s'essouffle : la couverture territoriale est hétérogène et fragile, de nombreux départs à la retraite ne sont pas remplacés et l'offre actuelle couvre seulement 1,4 % des patients, sans répondre aux besoins des patients douloureux les plus complexes.
Les sociétés savantes attendent la publication par la HAS – Haute Autorité de santé – des recommandations relatives au parcours de soins des patients douloureux. Elles réclament plusieurs mesures pour pérenniser et démultiplier ce modèle de prise en charge.
Quelle est la feuille de route du Gouvernement pour pérenniser ces structures et assurer aux patients douloureux un accès effectif à une prise en charge de qualité ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs du groupe RE. – MM. Laurent Marcangeli et Gabriel Amard applaudissent également.
Vous avez raison de souligner l'importance de ce phénomène. Nos concitoyens sont trop nombreux à souffrir de douleur chronique – les spécialistes estiment effectivement que 12 millions d'entre eux sont concernés – et ils bénéficient d'un traitement insuffisamment adapté. Trop peu sont suivis dans des centres de prise en charge de la douleur chronique, alors même que ces derniers sont actuellement au nombre de 242 sur le territoire national. Il y a là un enjeu de santé publique, ces douleurs entraînant des conséquences personnelles, familiales et professionnelles. Si un exemple illustre bien les difficultés causées tout au long de la vie par les douleurs chroniques, c'est bien celui de la drépanocytose – mais nous aurons, je le crois, l'occasion d'en reparler lorsque nous évoquerons les politiques de prévention.
La prise en charge de la douleur chronique ne doit pas se limiter aux centres de santé : elle doit s'inscrire dans un parcours de soins impliquant aussi les médecins généralistes traitants, qui restent le premier maillon de la chaîne, les centres de santé intervenant plutôt en second recours, à travers des prises en charge pluriprofessionnelles. Je tiens d'ailleurs à souligner l'engagement de ces professionnels et à saluer le lancement d'études très spécifiques sur des techniques non médicamenteuses mais particulièrement efficaces de prise en charge de la douleur, comme les techniques d'hypnose médicale.
Nous avons saisi la Haute Autorité de santé de la question du parcours de soins des patients douloureux chroniques en novembre 2020. Ses conclusions devraient être rendues en tout début d'année 2023. Parallèlement, nous relançons le processus triennal de labellisation des centres, avec la volonté d'intégrer davantage la médecine de ville et ses centres spécialisés. Je disposerai des chiffres relatifs à cette labellisation d'ici à la fin de cette année.
Comme vous l'avez dit, la France bénéficie d'un maillage exceptionnel en Europe : en plus des 242 centres déjà cités, elle compte trente permanences avancées qui permettent d'aller au plus près de nos concitoyens éloignés des villes. Deux mesures sont envisagées pour renforcer ce modèle : le lancement, déjà engagé, d'un appel à manifestation d'intérêt pour l'élaboration de protocoles de coopération entre infirmiers et médecins, sous supervision médicale ; et la création, à partir de 2023, de vingt postes d'assistants spécialistes de la douleur par an.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.
Le conseil des ministres franco-allemand normalement prévu demain vient d'être reporté sine die du fait d'importantes divergences entre nos deux pays. Les contentieux sont désormais nombreux : l'Allemagne bloque deux importants projets industriels en matière de défense – l'avion de combat et le char du futur ; elle verrouille le contrôle des exportations d'armement au niveau européen ; elle choisit un bouclier antimissile en tournant le dos à la France ; elle investit seule 200 milliards d'euros pour aider ses entreprises et ses ménages à faire face aux prix de l'énergie, nous expliquant que nous pourrions faire de même si notre gestion budgétaire avait été plus vertueuse. L'Allemagne refuse également de modifier le mode de calcul du prix de l'énergie à l'échelle européenne – une évolution qui serait pourtant si importante pour la France.
Madame la Première Ministre, vous vous contentez de parler de souveraineté, là où le chancelier Scholz l'exerce. Que comptez-vous faire pour défendre les intérêts de la France ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.
Lorsqu'il est question de souveraineté, on fait répondre les secrétaires d'État…
Nous avons décidé ensemble, non pas d'annuler, mais de reporter le conseil des ministres franco-allemand qui devait effectivement se tenir le 26 octobre ,…
« Ah ! » sur les bancs du groupe LR
…et ce pour plusieurs raisons.
La première est très simple : nous voulions tenir un conseil des ministres plénier. Or certains ministres allemands n'étaient pas disponibles à la date initialement prévue, notamment la ministre des affaires étrangères – ce qui, vous en conviendrez, dans la période de guerre que nous vivons, aurait été quelque peu gênant.
S'y ajoute une raison de fond. Comme vous l'avez souligné, plusieurs questions substantielles doivent être abordées : la défense, dont vous avez parlé, mais aussi l'énergie, dont vous n'avez pas parlé, ou encore l'économie. L'Allemagne a mis 200 milliards d'euros sur la table pour soutenir les consommateurs. Comme le ministre Bruno Le Maire l'a rappelé plusieurs fois, la France y a déjà consacré plus de 100 milliards. Il s'agit donc de coordonner nos efforts, y compris en matière industrielle, de défense et d'énergie. Nous nous attachons à la substance et non à la forme. Ces questions sont complexes, d'autant que le chancelier allemand doit composer avec une coalition tripartite et que – comme le montrent certains de nos débats à l'Assemblée nationale – négocier à trois parties n'est pas toujours facile.
Le couple franco-allemand n'est nullement affaibli. Il fonctionne très bien, au contraire. Je note d'ailleurs que quand il est trop fort, il inquiète et quand il est trop faible, il inquiète encore.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Votre réponse m'étonne beaucoup. À vous entendre, finalement, tout irait bien. En réalité, vous savez pertinemment que ce sont les Allemands qui n'ont pas donné suite à plusieurs de vos demandes, tout simplement parce que la position de la France est aujourd'hui affaiblie. M. Macron est arrivé au pouvoir en clamant : « vous allez voir ce que vous allez voir ». Cinq ans après, nous voyons : nous observons que la relation franco-allemande – c'est bien de cela qu'il s'agit, plutôt que d'un « couple », d'ailleurs – est désormais asymétrique, parce que les Allemands ont été vertueux et se sont montrés capables de conserver des marges de manœuvre budgétaires.
Chacun le constate : la faiblesse de la France est très grande. Nous vous le devons. La question fondamentale, désormais, est celle de l'énergie. Sur ce point, que répondez-vous à nos concitoyens et aux entreprises qui demandent de nouveaux mécanismes d'encadrement des tarifs ? Rien.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.
Avant d'interroger le ministre de l'intérieur et des outre-mer, je veux rendre hommage au gendarme qui a perdu la vie cette nuit dans l'Eure ainsi qu'à ses camarades blessés.
Applaudissements sur tous les bancs.
Des quartiers populaires de Poitiers aux territoires d'outre-mer comme la Guyane, où nous nous trouvions il y a quelques semaines, toute la France parle de sécurité. Le droit à la tranquillité est absolu. Il constitue un acquis que nous devons chèrement défendre.
Pourtant, beaucoup de nos concitoyens font part de leur sentiment de vivre dans une société plus violente. Les Français décrivent une menace protéiforme : agression physique dans la rue, trafic de drogue, vandalisme, harcèlement ou agression sexuelle.
Nous voulons être à la hauteur de leurs attentes et de leurs exigences.
Il y a deux ans, devant la commission des lois, vous avez établi la liste des sept péchés capitaux de la police. Vous avez listé ce qui ne marchait pas et les chantiers que nous devions entreprendre :…
…le manque de formation, le défaut d'encadrement, le manque de moyens humains et matériels, l'encadrement du recours à la vidéo, le renforcement de la confiance dans les inspections, le renouvellement de la confiance des citoyens dans leur police et l'amélioration de la relation entre police et justice.
Ma première question est donc la suivante : de quelle manière la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur tient-elle compte de ces enjeux ?
Vous avez commencé à déployer les 8 500 policiers et gendarmes supplémentaires qui s'ajoutent aux 10 000 agents recrutés et formés durant le quinquennat précédent. On compte 300 policiers supplémentaires à Marseille, 160 CRS et gendarmes de plus à Lille, autant à Montpellier et à Béziers, 70 à Nantes.
Mesurez-vous déjà les résultats de ce déploiement sur le reflux de la délinquance et sur le démantèlement des réseaux ? En matière de sécurité, nos concitoyens nous imposent une obligation de résultat.
Le projet examiné la semaine prochaine par l'Assemblée prévoit 15 milliards d'euros déployés sur les cinq prochaines années, dont la moitié consacrée à la cybercriminalité.
L'orateur du groupe socialiste au Sénat a déclaré que « la demande de sécurité exprimée par nos concitoyens » avait « convaincu [les sénateurs socialistes] de voter en faveur de ce texte et des moyens supplémentaires qui sont alloués à nos forces de l'ordre ».
Voici donc ma dernière question : comment convaincre nos collègues députés des groupes Les Républicains et Socialistes et apparentés de suivre le vote de leurs homologues au Sénat ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe Dem.
Permettez-moi tout d'abord de rendre hommage à mon tour au gendarme décédé dans l'Eure cette nuit et à ses camarades blessés – dont l'un, grièvement. Le défunt laisse une veuve avec quatre enfants. Elle les élèvera, je l'espère, en lien direct avec l'État qui sera au rendez-vous. J'irai présider la cérémonie lors des obsèques. Nous pensons bien sûr à tous les policiers et gendarmes qui, aujourd'hui, meurent en opération, en mission et en service.
Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent. – Les membres du Gouvernement se lèvent également.
Je vous remercie au nom de nos forces de l'ordre.
C'est justement en ayant à l'esprit que la mort peut malheureusement frapper les policiers et gendarmes lors d'interventions destinées à nous protéger que la Première ministre et le Président de la République ont arbitré en faveur d'une augmentation de 15 milliards des crédits du ministère de l'intérieur au cours des cinq prochaines années, avec une hausse des effectifs – 8 500 personnes supplémentaires – mais également des moyens hors du commun déployés pour lutter contre les nouvelles menaces.
Je pense à la cybercriminalité qui, ici et maintenant – et plus encore demain –, touche nos concitoyens, nos collectivités locales, nos hôpitaux ou encore nos entreprises mais aussi aux nouveaux désordres publics, très nombreux, comme on l'a vu ces derniers mois et ces dernières années. Il faut aussi poursuivre la lutte contre le terrorisme, et plus généralement contre tous les types de délinquance, celle-ci étant protéiforme et revêtant désormais une dimension souvent internationale et de plus en plus technologique.
Sur le modèle de la loi de programmation militaire, nous devons expliciter ce que nous voulons faire pendant cinq ans pour le ministère de l'intérieur, pour les femmes et les hommes qui le servent, afin de renforcer la sécurité de nos concitoyens, en lien bien sûr avec le ministère de la justice, qui connaîtra parallèlement une augmentation de ses crédits dans le cadre de la future loi de programmation.
Vous m'avez demandé comment nous avions fait pour qu'un texte du ministère de l'intérieur, qui prévoit la création de 200 brigades sur l'ensemble du territoire, des unités de force mobile supplémentaires ou une augmentation des effectifs dans les commissariats, soit voté à la quasi-unanimité par les groupes politiques au Sénat.
Pour traiter ces questions complexes, nous avons proposé une méthode simple : la discussion. Dans quelques jours, le Gouvernement abordera l'examen du texte ici même, en commission des lois, avec le même esprit de concorde et d'ouverture, quels que soient les groupes politiques avec lesquels nous discuterons. J'espère que nous parviendrons à trouver le même accord, lequel démontrera qu'il ne s'agit pas d'un sujet politicien mais de la volonté de soutenir les policiers et les gendarmes.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE et Dem.
Ma question, qui s'adresse à M. le ministre Le Maire, porte sur l'impact de la crise énergétique sur le secteur agricole et sur ses emplois. Nous sommes comptables de l'inaction du Gouvernement et nous interrogeons sur votre capacité à admettre le principe de réalité, au-delà de l'idéologie. À l'ignorance des métiers agricoles s'ajoute votre mépris du réel. Comme des enfants gâtés qui refusent de manger des endives, vous vous tenez là, passif, résolu à ignorer votre assiette.
Eh bien, je vais vous en servir, des endives.
Dans les Hauts-de-France, nos endiviers représentent plus de 4 000 emplois. Ces producteurs vont mettre la clé sous la porte si vous ne prenez pas immédiatement des mesures. Leurs factures d'électricité ont augmenté de 350 %. Ils sont l'avant-garde de tous les autres exploitants agricoles qui dépendent de la chaîne du froid. Ils symbolisent l'autonomie alimentaire de la nation.
Pour toute réaction, vous proposez en réalité l'écrêtement, le délestage partiel et l'effacement sélectif de la souveraineté nationale car vous placez l'intérêt des Français après celui de l'Europe.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Quand la souveraineté a été à ce point marchandée, conditionnée par autre chose que par le peuple, celui-ci demande finalement la protection qu'exige son autodétermination. C'est parce que nous sommes libres que nous sommes souverains. Liberté et souveraineté ne font qu'un.
Aujourd'hui le peuple vous annonce, ici, dans l'hémicycle, que si vous ne le protégez pas, vous porterez sur vos épaules tout le poids de la ruine de notre pays, et sa trahison. À défaut de vous être conduits en femmes et en hommes d'État, vous n'aurez plus qu'à vous reconvertir, en fonction de votre carnet d'adresses. Vous n'avez pas vraiment le luxe, au fond, de refuser la moindre poignée de main.
Des mesures de protection s'imposent. Mais qu'attendez-vous ? Nous avons sacrifié notre souveraineté énergétique en entrant dans le marché européen de l'énergie. À présent, celui-ci détruit notre souveraineté alimentaire. Où s'arrêtera la grande braderie nationale ?
Dès lors, je vous pose la question : allez-vous enfin protéger les Français et sortir du marché européen de l'énergie, comme le propose Marine Le Pen depuis longtemps ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Je regrette que vous ayez choisi d'agresser le ministre plutôt que de défendre les 3 500 producteurs d'endives.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Si je suis aujourd'hui ministre de l'économie et des finances, je vous rappelle que j'ai été ministre de l'agriculture pendant trois ans
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN
et que j'ai alors toujours défendu l'agriculture française et les paysans français.
Je vais vous faire une confidence, madame Menache : mes enfants et moi-même adorons les endives.
Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Nous nous ferons donc un plaisir de défendre les endiviers en prenant des mesures concrètes, immédiates et plus efficaces que celles que vous proposez.
Nous allons instaurer, à la demande de la Première ministre, une garantie électricité…
…qui permettra de mieux protéger l'ensemble des producteurs agricoles,…
…des PME et TPE, les petites et moyennes entreprises et les très petites entreprises, des boulangers – lesquels ne sont pas suffisamment protégés par les mesures en vigueur actuellement. Nous vous certifions que toutes les PME et TPE, endiviers comme boulangers, agriculteurs comme commerçants, seront protégés contre l'augmentation des prix de l'électricité grâce à la mise en place de la garantie énergie.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Nous avons également obtenu de la Commission européenne, après trois semaines de négociations, une simplification drastique s'agissant de l'accès au bouclier tarifaire sur le gaz et l'ouverture d'un guichet unique. Désormais, toute entreprise confrontée à une augmentation de 50 % de sa facture – et non plus à un doublement – pourra déposer une demande auprès de ce guichet, de même que toute entreprise confrontée à une forte augmentation de ses dépenses à la fin 2022.
Toute entreprise qui rencontre des difficultés pourra bénéficier d'aides dont le montant ne sera pas plafonné à 2, 25 ou 50 millions mais à 4, 50 ou 100 millions d'euros.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Nous avons travaillé pour assurer la protection des entreprises françaises, contre l'augmentation des prix du gaz et de l'électricité. Nous y consacrerons 10 milliards d'euros.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Nous préférerons toujours, aux grands discours du Rassemblement national,…
…les décisions concrètes prises par la majorité.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
« Nombre de nos compatriotes ont voté ce jour pour moi, non pour soutenir les idées que je porte mais pour faire barrage à celles de l'extrême droite ». Tels sont les mots prononcés par Emmanuel Macron au soir du second tour de l'élection présidentielle.
Quel barrage ? En réalité, il n'a jamais existé. Pire : il s'est transformé en marchepied, comme en témoigne cette tache brune que représentent les quatre-vingt-neuf députés du Rassemblement national que votre majorité a fait élire.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES. – Exclamations vives et prolongées sur les bancs du groupe RN.
Avec Jupiter, les prétendues digues se sont transformées en ponts. De la réhabilitation de Pétain à la loi sur le séparatisme en passant par votre chasse au prétendu islamo-gauchisme, vous n'avez cessé d'accumuler les gages à destination de l'extrême droite !
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES. – Protestations sur les bancs du groupe RE.
Un jeu dangereux, alors que les violences commises par l'ultradroite se multiplient, partout dans le pays. Quand on souffle sur des braises ardentes, les conséquences peuvent devenir dramatiques.
Exclamations continues sur les bancs du groupe RN.
Le 19 mars dernier, Federico Martín Aramburú, joueur de rugby, était assassiné en plein Paris par des militants d'extrême droite.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Vous avez été silencieux ! La semaine dernière, ce sont des royalistes d'Action française qui ont envahi la mairie de Stains et menacé son maire Azzédine Taïbi. Là encore, silence de votre part !
Mêmes mouvements.
Ce week-end, une nouvelle étape a été franchie. Des groupuscules néonazis issus de la dissolution de Génération identitaire – les amis de l'extrême droite – ont manifesté à Rennes, à Lyon et à Paris en poussant des cris racistes ! Silence de votre part, monsieur le ministre.
Mêmes mouvements.
Où était le soi-disant rempart Macron ? Ce rempart de pacotille n'a rien trouvé de mieux que de se vautrer, en Italie, pour saluer la dirigeante fasciste Giorgia Meloni !
Mêmes mouvements.
Monsieur le ministre, à quel moment allez-vous cesser d'être complaisant avec l'extrême droite ?
Protestations vives et prolongées sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
De nombreux députés des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES se lèvent et applaudissent. – De nombreux députés des groupes GDR – NUPES et quelques députés du groupe SOC applaudissent également. – Huées sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer, et à lui seul.
Je propose que, lorsqu'on dénonce l'extrême droite, par souci de cohérence, on n'accepte pas ses votes.
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Fabien Roussel applaudit également.
Je propose également, par souci de cohérence, que M. Mélenchon ne dise pas, urbi et orbi, qu'il était heureux que, à quelques voix issues de l'extrême droite près, vous ayez manqué de faire tomber le Gouvernement.
Mêmes mouvements. – Exclamations sur de nombreux bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
La vérité, c'est que vous vivez grâce à l'opposition que vous jouez avec l'extrême droite.
De nombreux députés des groupes RE, Dem et HOR se lèvent et applaudissent.
Nous qui nous sommes présentés aux élections législatives, nous avons tous bien vu qu'au second tour, vous n'avez pas appelé à faire barrage à l'extrême droite.
Applaudissements nourris sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
C'est nous qui avons dissous Génération identitaire. Je vous signale que, pour manger avec le diable, il faut prendre une grande cuillère.
Mêmes mouvements. – Plusieurs députés des groupes RE et Dem se lèvent.
Personne n'a oublié qu'Emmanuel Macron avait été élu avec les voix du Rassemblement national et par défaut.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes SOC et GDR – NUPES. – Exclamations et huées sur de nombreux bancs des groupes RE et Dem.
Monsieur le député, vous auriez pu vous engager à ce que jamais vos voix ne se mêlent à celles de l'extrême droite.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations vives et continues sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES, et sur plusieurs bancs du groupe SOC.
Mais vous avez préféré faire de la politique. La vérité, c'est que tout le monde voit que vous ne cherchez que le chaos, que vous ne souhaitez pas le bien-être des Français parce que vous vivez sur les problèmes des gens.
La vérité, c'est que, sur les marchés, vos militants et ceux du RN se retrouvent, avec la volonté de nous battre.
Heureusement, nous sommes là pour rappeler que c'est vous qui travaillez avec Mme Le Pen.
Les députés des groupes RE et DEM se lèvent et applaudissent.
La parole est à M. Stéphane Viry. Je compte sur vous, mesdames et messieurs les députés, pour écouter attentivement sa question.
J'aimerais interroger de façon sereine Mme la Première ministre à propos d'une préoccupation majeure des Français en cette rentrée. Notre pays sort laborieusement de la pénurie de carburants que les Français vivent depuis plusieurs semaines. Aujourd'hui encore, une station-service sur cinq reste touchée par les difficultés d'approvisionnement et – il faut le reconnaître – les Français subissent la lenteur de la réaction du Gouvernement face aux blocages des raffineries.
Une nouvelle difficulté se présente aujourd'hui, au moment de la sortie de la crise : la hausse des prix des carburants, qui atteignent parfois des niveaux exorbitants. Vous le savez, cela a déjà été dit, dans beaucoup de territoires en France, le recours à la voiture au quotidien est nécessaire et même indispensable pour des actes usuels de la vie : conduire ses enfants à l'école ou à leurs activités sportives et culturelles, aller voir des proches ou encore faire ses courses.
Il l'est tout autant lorsqu'on exerce certaines professions pour lesquelles la voiture est un outil de travail qui ne saurait être remplacé : les aides à domicile, les infirmiers, les travailleurs indépendants ou tout simplement les salariés.
Sans aide financière du Gouvernement, le carburant risque d'être inaccessible pour toutes ces personnes. Dès juillet, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2022, le travail constructif des députés Les Républicains avait permis d'obtenir une aide au carburant pour les Français.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Or cette aide va disparaître définitivement au 1er janvier 2023, comme l'a confirmé dimanche dernier Mme la ministre de la transition énergétique.
Nos compatriotes s'inquiètent de cette décision et de la hausse du prix des carburants alors que les prix de l'énergie atteignent déjà des niveaux inabordables.
Vous avez eu de nouvelles propositions des députés Les Républicains pour redonner du pouvoir d'achat dans le cadre notamment des débats budgétaires, mais l'activation du 49.3 ne nous a pas permis de faire valider ces mesures. L'une d'entre elles aurait permis de limiter la hausse du prix du carburant : la baisse de la taxe sur la TICPE – la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques. Il est dommage que vous ne l'ayez pas reprise. Dès lors, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour faire baisser durablement le prix des carburants ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je vous remercie, monsieur le député, de revenir à une préoccupation concrète des Français et de permettre ainsi de restaurer un peu de sérénité dans l'hémicycle. Vous évoquez une situation qui reste parfois difficile. Les engagements que j'ai pris ces derniers jours sous l'autorité de la Première ministre ont visé à permettre aux Français qui se déplacent souvent en voiture et, en cette période, à ceux qui ont la possibilité de partir en vacances, d'avoir des départs en congés les plus sereins possibles. La situation s'est très significativement améliorée au niveau national en fin de semaine dernière…
…du fait du rétablissement du dialogue social et de la fin, pour l'essentiel, des mouvements sociaux qui avaient désorganisé les approvisionnements. J'ai, avec la ministre de la transition énergétique, renforcé des mesures telles que l'approvisionnement prioritaire des routes les plus fréquentées et des autoroutes et la suppression des arrêtés de rationnement. Il est vrai qu'il reste un certain nombre de difficultés, localisées en Île-de-France, dans la région Bourgogne-Franche-Comté et dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, et nous cherchons à améliorer encore la situation pour que le retour à la normale puisse se faire le plus tôt possible.
Votre question rejoint plus largement celle du pouvoir d'achat des automobilistes. Le Gouvernement a pris à cet égard des mesures exceptionnelles, que le ministre de l'économie a eu l'occasion de rappeler à plusieurs reprises dans cet hémicycle et qui n'ont pas d'équivalent en Europe. Nous les assumons. Nous avons décalé de quinze jours la fin de la ristourne actuelle du fait des difficultés d'approvisionnement. Le dispositif, dont je souligne qu'il est extrêmement puissant, s'arrêtera complètement en fin d'année.
Ensuite, nous prendrons éventuellement des mesures en fonction des besoins, sachant qu'elles seront appliquées de manière nécessairement ciblée. Il ne s'agira pas d'un dispositif aussi généralisé qu'actuellement car nous devons aussi assumer la transition écologique ,
Exclamations sur de nombreux bancs du groupe LR
qui impose d'accompagner également ceux qui ont besoin de la voiture. Celle-ci assure, je le rappelle, 85 % des déplacements quotidiens. Et il n'y a pas de raison de considérer que la transition serait un piège pour les automobilistes et qu'on ne pourrait rien y faire. Il s'agit donc de démocratiser, même si cela prendra du temps, l'accès aux véhicules électriques…
…par des mesures que nous renforçons dans ce projet de loi de finances en augmentant le bonus pour les ménages les plus modestes et en passant à un système de leasing social qui sera mis en place à partir de l'an prochain. Il faut, en agissant en même temps sur les délais et le pouvoir d'achat, préparer tous ceux qui ont besoin de l'automobile au quotidien avec des dispositifs d'accompagnement de l'État.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Ma question s'adresse M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la transition des territoires.
L'heure est grave, monsieur le ministre. La France se réchauffe vite. Trop vite. D'après les dernières projections, nous pourrions atteindre 3,8 degrés de réchauffement climatique à l'horizon 2100. Et l'heure n'est pas seulement grave en France ; elle est dramatique pour certains pays de par le monde, je pense aux États insulaires et plus globalement aux États que leur faible dénivelé rend extrêmement vulnérables à la montée du niveau des océans. Les climatologues nous le disent, la vulnérabilité climatique possède de multiples facettes qui se superposent, et dont les effets se démultiplient à mesure que le réchauffement progresse et que la biodiversité s'érode.
Loin de moi l'envie de faire du sensationnalisme. Nul besoin d'en faire de toute façon : la crise sans précédent que nous vivons n'appelle nulle exagération. Son spectre nous menace, il se fait déjà tangible car, cet été, la France a brûlé, et la surmortalité liée aux canicules à répétition a dépassé des records ; il se fait palpable car, au sein des ménages comme dans les ministères, les conséquences budgétaires de cette crise sont préoccupantes.
Être à la hauteur de l'urgence écologique est un impératif vital pour l'État français, pour le Gouvernement et pour la représentation nationale. Nous devons montrer l'exemple et respecter nos engagements.
Monsieur le ministre, le Gouvernement s'est engagé à planifier la transition. Il s'en donne aujourd'hui les moyens opérationnels grâce au lancement du plan d'action France nation verte, et les moyens budgétaires en augmentant de 4,5 milliards d'euros les dépenses favorables à l'environnement dans le budget pour 2023. Ce plan d'action est-il à la hauteur pour transformer en profondeur l'économie française ? La France s'en donne-t-elle également les moyens en réduisant les dépenses défavorables à l'environnement ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Madame la députée, vous avez posé un constat que nous connaissons et qui, dézoomé à l'échelle mondiale, permet de mesurer à quel point le sommet de la COP27 à Charm el-Cheikh va être important puisque les émissions de gaz à effet de serre dans le monde non seulement ne diminuent pas, mais continuent de progresser. Un rapport de l'ONU a même révélé que les réserves d'énergies fossiles représentent des émissions de 3 500 milliards de tonnes, soit sept fois ce qu'il faudrait relâcher dans l'atmosphère pour ne pas dépasser les deux degrés de plus. La France fait partie des vingt pays qui ont amorcé une baisse de leurs émissions de gaz à effet de serre, mais celle-ci doit être intensifiée.
C'est pourquoi le 21 octobre dernier, à La Recyclerie, Élisabeth Borne a lancé, dans le cadre du volet climat et biodiversité du Conseil national de la refondation, les chantiers qui vont permettre de finaliser la feuille de route de la planification écologique. Devant plusieurs dizaines de parties prenantes, elle a ainsi annoncé le lancement de pas moins de vingt-deux chantiers avec les associations, les élus et les entreprises ; ces chantiers sont répartis en six grandes familles – se déplacer, se loger, se nourrir, produire, consommer et préserver la biodiversité – afin que nous puissions calculer et budgéter les sommes nécessaires pour tenir les engagements climatiques de la France. À ces vingt-deux chantiers s'ajoutent sept chantiers transversaux dont celui du financement et de la fiscalité, ainsi que celui de la transition juste et solidaire.
Une ambition : être la première nation à sortir des énergies fossiles ; une date : celle de notre planification écologique ; un moyen : une méthode avec un calendrier et les budgets adéquats. Le Gouvernement appelle à la mobilisation générale pour relever ce gigantesque défi.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe HOR.
Monsieur le garde des sceaux, il y a six jours, une magistrate est morte en pleine audience au tribunal de Nanterre, foudroyée par un malaise cardiaque. Une enquête est en cours afin de déterminer si le surmenage est la cause de ce décès. Néanmoins, permettez-moi déjà de rappeler que quand on meurt sur son lieu de travail, ce n'est jamais anodin ! Les collègues de cette magistrate la décrivent comme une professionnelle acharnée et très consciencieuse. C'est l'occasion ici pour moi de lui rendre hommage.
Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent longuement. – Les membres du Gouvernement se lèvent également.
Monsieur le ministre, votre administration ne pouvait ignorer les conditions de travail de cette magistrate. En effet, quelques mois avant son décès, les magistrats et les fonctionnaires du tribunal de Nanterre votaient une motion présentant une liste de 121 tâches impossibles à réaliser compte tenu du manque de moyens. Ce décès intervient dans un contexte de surmenage généralisé au sein de la profession qui souffre d'un manque d'effectifs criant : multiplication des arrêts de travail, burn-out… Un mal-être global qui a été jusqu'à pousser au suicide une magistrate du tribunal de Béthune en août 2021.
Mais vous ne faites rien, ou si peu.
Cet après-midi, nous examinerons en commission des lois le budget de la justice. Seuls 1 500 nouveaux postes de magistrats sont prévus sur la totalité du quinquennat, soit 300 par an en moyenne… alors que les présidents de tribunaux demandent au minimum 1 500 postes immédiatement. Vous savez que nous sommes un des plus mauvais élèves en Europe : selon la Commission européenne, la France compte moins de onze juges pour 100 000 habitants, contre vingt-quatre en Allemagne.
Ce nouveau décès a-t-il permis à votre gouvernement de prendre conscience de l'urgence de la situation et d'élaborer un plan de recrutement dans la magistrature ? Je ne vous parle pas ici d'un vaste job dating comme cela a été organisé pour recruter des professeurs dans l'éducation nationale, mais d'un véritable plan Marshall de la magistrature. Monsieur le ministre, combien de juges devront-ils encore mourir en poste …
« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe RE
…pour que vous preniez la mesure du manque criant de moyens humains dans la magistrature ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Ainsi donc, madame la députée, je serais responsable de la mort de cette femme de 44 ans… Vous avez le droit de dire ce que vous voulez, vous êtes libre…
S'agissant du suicide que vous avez évoqué, j'ai demandé un rapport à l'Inspection générale de la justice. Je ne l'ai pas rendu public parce que cette jeune femme avait des parents et que je ne souhaitais absolument pas qu'un certain nombre de choses soient dites publiquement. J'ai préféré la décence. Ce n'est pas votre cas.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE et Dem.
Qu'il me soit tout de même permis de vous dire que nous sommes tous bien sûr extrêmement attristés par ce drame, à commencer par la famille auprès de laquelle je me suis exprimé, mais également toute la communauté judiciaire, y compris évidemment le tribunal de Nanterre.
Libre à vous de faire un véritable raccourci entre la mort de cette femme et ce que vous appelez le manque de moyens, mais je voudrais vous confirmer, vous l'avez rappelé vous-même, que des enquêtes sont en cours, l'une pour établir les causes de la mort, la seconde menée par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Nous serons attentifs aux résultats. Mais ne nous donnez pas de leçons parce que sous la gauche, de 2012 à 2017, le budget de la justice augmentait d'à peine 14 % alors que depuis qu'Emmanuel Macron a été élu Président de la République, c'est plus de 44 %, voyez-vous.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE et Dem.
Et puis je précise, madame la députée, que le ministère avait prévu dès le mois de juin la localisation de cinq nouveaux postes de magistrats à Nanterre – sans compter les contractuels.
En outre, je rappelle qu'il reste bien sûr à tirer les conclusions des états généraux de la justice et à mettre en place les promesses et les engagements du Président de la République, promesses et engagements qui seront tenus.
Enfin, je vous indique que, cet après-midi, je présenterai le budget de la justice pour 2023 et que la question des moyens est bien sûr au cœur de ma réflexion comme au cœur de la réflexion de l'ensemble du Gouvernement.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.
Ma question s'adresse au ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, en deux ans, soixante-quatre personnes ont été arrêtées en Europe pour des motifs en lien avec le terrorisme d'extrême droite, dont près de la moitié rien qu'en France. C'est une préoccupation majeure de nos services de renseignement. Le terreau de leurs idées, nous le connaissons : ce sont celles propagées par des groupes identitaires ou néonazis.
Le 8 octobre, une quinzaine de militants de l'Action française se sont introduits par la force dans l'hôtel de ville de Stains, en Seine-Saint-Denis, faisant usage de fumigènes et vociférant des slogans racistes et xénophobes. Ce groupuscule est bien connu, en la personne d'un de ses fondateurs, Charles Maurras, qui qualifiait la République de « gueuse » et qui a préparé les consciences à la France de Vichy. C'est ce même groupuscule dont le manifeste appelle à l'abolition de la République, ce même groupuscule qui a déversé sa haine et son racisme à Stains. Ses idées sont aussi celles qui se sont exprimées dans les rues de Lyon en toute impunité, vendredi soir dernier, lors d'une manifestation non déclarée ayant pour seul objet la haine, surfant sur la récupération ignoble du meurtre d'une enfant, aux mots d'« immigrés assassins ».
Le maire de Lyon nous alerte, particulièrement depuis des semaines,…
…au sujet de la montée des violences et des pressions provenant de mouvements xénophobes et d'extrême droite dans sa ville – car notre ADN à nous, c'est bien celui du combat contre l'extrême droite. Tous nos concitoyens, peu importe leur couleur de peau, leur origine ou leur confession, ont le droit de vivre en paix et en sécurité dans notre pays.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Monsieur le ministre, je vous le demande devant la représentation nationale : quand le Gouvernement prendra-t-il les seules mesures qui s'imposent avec les groupes fascistes et antirépublicains, à savoir leur dissolution ?
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et SOC et sur quelques bancs du groupe RE.
Madame la députée, vous interpellez le Gouvernement sur l'association Action française et vous demandez sa dissolution administrative. Cette association s'est signalée à plusieurs reprises récemment. Ses membres ont tenté de s'introduire dans l'hémicycle du conseil régional d'Occitanie en mars dernier et les auteurs ont été identifiés. Ils feront l'objet, et c'est bien normal, de mesures pénales à titre individuel. Toute tentative de s'en prendre aux institutions de la République et de la démocratie est inacceptable et appelle une réponse immédiate. Le Gouvernement se montrera intraitable contre toute atteinte aux institutions. Un outil existe à cet effet dans notre droit depuis 1936 et vous l'avez évoqué : celui de la dissolution administrative.
Entre 2017 et ce jour, trente mesures de dissolution administrative ont été prises ; elles ont notamment visé des structures évoluant dans la mouvance djihadiste ou dans la sphère de l'ultradroite dont vous nous parlez aujourd'hui. Je veux vous rassurer sur ce dernier sujet : les actions des groupuscules d'ultradroite font l'objet d'une attention particulière et chaque nouvel élément donne lieu à un examen minutieux afin de vérifier s'il correspond ou non à l'un des motifs définis par la loi. La preuve en est qu'au début de l'année 2021 a été prononcée la dissolution du groupuscule Génération identitaire.
La loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a étendu les motifs de dissolution administrative aux associations qui portent atteinte aux principes républicains. Ces nouvelles dispositions ont permis la dissolution administrative d'une dizaine d'associations ou de groupements de fait.
Vous le voyez, madame la députée, la main du Gouvernement ne tremble pas lorsqu'il s'agit de faire échec à des mouvements qui sapent les fondements de l'ordre républicain et ce sera le cas concernant l'association que vous évoquez, comme pour toutes les autres.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je repose ma question : allez-vous, oui ou non, dissoudre l'association Action française ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Monsieur le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, j'irai droit au but : à quand une loi « grand âge » ? C'était une promesse du Président de la République qui annonçait en 2018 que cette loi serait « le marqueur social du quinquennat ». Depuis quatre ans, nous y avons cru, mais en août dernier, vous avez annoncé son abandon. Pourtant, l'espoir était grand, pour nos aînés, pour leur famille, mais aussi pour nos soignants – espoir renforcé par la création de la branche autonomie de la sécurité sociale.
Plus que jamais, il y a urgence, urgence de donner davantage de moyens à un secteur en grande souffrance, urgence de revaloriser des métiers qui peinent à recruter, urgence d'affronter le boom de la dépendance. La France est en effet confrontée à un choc démographique sans précédent. En 2050, la part des plus de 75 ans dans la population aura doublé, passant de 8 % à plus de 16 %.
Les quelques propositions émises dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale ne sont ni à la hauteur des enjeux, ni dignes de l'accompagnement que nous devons à nos anciens, ni adaptées aux attentes des familles et des personnels soignants. Qu'attendez-vous pour lancer un véritable plan Marshall d'attractivité des métiers du grand âge qui permettrait de recruter, dans les cinq prochaines années, 100 000 nouveaux professionnels, à domicile et en établissement, afin de faire face aux besoins ?
Faudra-t-il de nouveaux scandales dans nos Ehpad pour que le Gouvernement prenne le sujet du grand âge au sérieux ? Nos aînés et leur famille ont besoin de toute notre empathie. Le personnel soignant a besoin de toute notre reconnaissance. Au-delà des mots, ils veulent des actes, nous voulons des actes, car nous sommes tous concernés par ce sujet. Monsieur le ministre, à quand une loi « grand âge » ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées.
Madame Besse, je vous remercie pour votre question. Comme vous, je suis particulièrement préoccupé et attaché à la question de l'accompagnement des personnes âgées.
Mme Anne-Laure Blin s'exclame.
Moi aussi, je pense qu'il faut passer des mots aux actes. Je connais très bien cette question, j'ai acquis un certain nombre de convictions à l'occasion de mes précédentes fonctions à la Croix-Rouge française, nourries de remontées du terrain. Je sais que parmi vous, sur ces bancs, de nombreux députés ont aussi des constats et des propositions à formuler.
Aujourd'hui, tout est sur la table.
Cela étant, beaucoup a été fait et des mesures historiques ont été prises, notamment avec la création de la cinquième branche dont vous avez parlé. Le dynamisme de cette branche repose pour l'heure sur un transfert d'une fraction de CSG – contribution sociale généralisée –, qui représentera en 2024 plus de 2 milliards d'euros. En 2024, les dépenses de l'autonomie s'élèveront à environ 39 milliards d'euros, soit 6,5 milliards de plus qu'en 2021. C'est une dynamique forte qui traduit notre volonté de revaloriser les métiers du grand âge et d'investir dans la rénovation et la modernisation du parc des Ehpad de notre pays – ces investissements s'élèvent à 2,1 milliards d'euros.
Cette dynamique se poursuivra avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, qui est un PLFSS ambitieux ; avec le lancement de la trajectoire de recrutement de 50 000 professionnels dans les Ehpad, dont 3 000 dès l'année prochaine, qui font suite à 15 000 recrutements depuis 2017 ; avec des contrôles renforcés pour que l'affaire Orpea ne se reproduise pas demain ; avec, enfin, un investissement fort sur l'accompagnement à domicile, notamment sur les services de soins infirmiers à domicile. Sur tout cela, il faut que l'on continue à travailler, je vous l'ai dit. Nous continuerons à faire preuve d'une ambition forte dans le cadre du volet « bien vieillir » du CNR – Conseil national de la refondation.
Monsieur le ministre, vous n'avez pas répondu à ma question. Et la loi « grand âge » dans tout ça ? Vos réponses ne sont pas à la hauteur des attentes.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, je suis sûr que vous aimez votre boulanger, comme la plupart des Français…
…mais, cette fois, il faudra le démontrer. L'heure n'est plus aux belles paroles ; il s'agit désormais de venir en aide, très vite, à ces 30 000 artisans boulangers désespérés par la hausse folle des prix de l'énergie, après avoir subi celle des matières premières.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Aujourd'hui, plusieurs centaines de boulangers français ont baissé leur rideau pour dénoncer cette hausse, et beaucoup restent ouverts seulement parce qu'il est impensable de perdre une journée de travail quand on est déjà pendu. Ils ont connu jusqu'à 500 % d'augmentation, avec des factures qui peuvent peser plus de 40 % du chiffre d'affaires. Ces boulangers ne peuvent plus se verser leur salaire, ils licencient parfois leur personnel ou ils sont menacés de redressement judiciaire.
Les mesures que vous avez prises, sans les négliger, c'est trop peu, trop tard et trop compliqué. Les boulangers ont des besoins importants en matière d'énergie ce qui explique que beaucoup disposent de compteurs électriques d'une puissance supérieure à 36 kilovoltampères. En conséquence, 80 % d'entre eux se retrouvent exclus du bouclier tarifaire.
Nos boulangers sont sans solution. Ils ne peuvent pas reporter des coûts de production exorbitants sur le consommateur. Ils ne savent pas s'ils doivent signer le renouvellement de leurs contrats d'énergie car des messages contradictoires leur parviennent. L'une des plus grandes nations productrices d'électricité va-t-elle voir disparaître des artisans qui sont le symbole de la France et le fer de lance de son artisanat ?
L'urgence est là pour ces boulangers comme pour de nombreux artisans, commerçants, métiers de bouche, restaurateurs… Ils attendent des mesures rapides, simples à mettre en œuvre. Je vous demande de leur apporter des réponses claires et efficaces.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Merci pour cette question qui me permet de préciser quelles sont les mesures de protection que nous allons prendre en faveur des entreprises.
Tout d'abord, la protection apportée par le bouclier tarifaire est très large : 1,5 million de très petites entreprises sont concernées, et parmi elles, de nombreux boulangers.
Cependant, vous avez raison, certains boulangers doivent souscrire à une puissance électrique supérieure à 36 kilovoltampères. Ils ne sont en conséquence malheureusement pas éligibles au bouclier tarifaire. Pour ces entreprises, pour les PME, pour certaines autres entreprises, nous instituons une garantie électricité qui permettra de bénéficier d'un allégement direct sur la facture d'électricité.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Voilà le complément que nous apportons et la réponse que nous ferons aux boulangers.
Ensuite, pour les entreprises qui consomment plus d'énergie ou qui consomment du gaz, et qui donc ne peuvent pas bénéficier de cette garantie électricité, nous ouvrirons, à partir du 15 novembre, un guichet pour le gaz, qui sera extrêmement simplifié – je reconnais bien volontiers que le guichet précédent était trop complexe.
J'ai donné les règles qui s'appliqueront. Il suffira qu'une facture ait augmenté de 50 % au lieu d'avoir été multipliée par deux ; il suffira de justifier d'une augmentation à la fin de l'année 2022 avec un coût de l'énergie représentant 3 % du chiffre d'affaires fin 2022 – c'était auparavant à la fin de 2021. Tout cela donnera droit à des aides dont les montants extrêmement élevés – 4, 50 ou 100 millions d'euros – permettront de soutenir des entreprises qui consomment beaucoup d'énergie.
Enfin, concernant quelques cas très particuliers d'entreprises électro-intensives pour lesquelles la facture peut se chiffrer en millions d'euros, nous ferons du traitement au cas par cas pour n'abandonner aucune entreprise.
Notre protection sera la plus élevée que nous puissions apporter. Elle représente 10 milliards d'euros de charges supplémentaires pour l'État, mais mieux vaut dépenser ces 10 milliards d'euros que menacer soit des boulangers, soit notre tissu industriel.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Merci, monsieur le ministre, pour ces éléments. Je ne suis pas tout à fait convaincu que tous les boulangers trouveront une réponse dans ce que vous venez de dire, même si je le souhaite. J'insiste sur l'urgence de la situation : il est presque déjà trop tard.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, la loi de finances pour 2023 comportera une supercontribution pour les entreprises productrices d'énergie. Taxer et restituer aux Français ces rentes, qui doivent tout ou presque aux hasards de la crise, c'est une mesure d'efficacité et de justice.
C'est juste, parce que la crise appelle la solidarité de tous. Les citoyens, l'État, les collectivités locales font des efforts considérables. Les entreprises consommatrices d'énergie, qui règlent des factures très élevées, prennent toute leur part. Il était donc urgent que les entreprises productrices d'énergie prennent aussi la leur : grâce à notre majorité, ce sera chose faite.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
C'est aussi une mesure efficace : nous avons obtenu que la même mesure s'applique dans toute l'Union européenne, et nous éviterons ainsi que certaines entreprises contournent nos règles nationales en délocalisant leurs activités, réduisant ainsi les recettes de l'État.
Depuis cinq ans, depuis la taxe Gafa jusqu'à la réforme du marché de l'énergie en passant par la réforme fiscale à l'OCDE – Organisation de coopération et de développement économiques –, le Gouvernement s'est engagé pour mieux réguler la mondialisation, pour lutter contre ses excès et ses dérives, parce que c'est la justice. Il s'est engagé au niveau européen et au niveau international, parce que c'est l'efficacité.
On sent la question redoutable ! Je ne suis pas sûr que le Gouvernement parvienne à répondre.
Sourires.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer quelles seront les prochaines actions du Gouvernement pour continuer à faire mieux respecter les choix de la France dans la mondialisation ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Sourires.
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Monsieur Amiel, merci…
…de rappeler ce que j'ai assez peu entendu sur les bancs de l'hémicycle et que je crois profondément vrai : vous êtes la majorité de la justice fiscale.
Rires sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Vous êtes la majorité de la justice fiscale parce que vous avez été les premiers à instituer la taxation sur les géants du numérique pour laquelle nous nous sommes battus depuis cinq ans avec le soutien d'un certain nombre de pays européens, dont la Grande-Bretagne du nouveau chancelier Rishi Sunak.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Nous avons été parmi les premiers en Europe à défendre l'idée d'une taxation minimale à l'impôt sur les sociétés, idée qui s'est désormais imposée partout au sein de l'OCDE. Nous la traduirons dans les faits au niveau national en janvier prochain si nous n'arrivons pas à arracher l'accord de la Hongrie – les partenaires du Rassemblement national qui bloquent cette mesure de justice fiscale depuis maintenant plusieurs mois.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Vous avez été la première majorité à créer un prélèvement sur les rentes des énergéticiens, mesure autrement plus efficace et plus juste que la taxation sur les superprofits, et autrement plus rentable pour les comptes de l'État auquel elle va rapporter 26 milliards d'euros en 2023.
La différence entre vous et l'opposition, c'est que vous ne confondez pas justice fiscale et vengeance fiscale.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Vous avez parfaitement compris que dans un pays qui a déjà un taux de prélèvements obligatoires parmi les plus élevés, il était préférable et plus efficace – plutôt que de taxer pour cinq ans ou indéfiniment toutes les entreprises, pourtant déjà confrontées à des difficultés économiques majeures – de continuer à taxer les Gafa, d'instituer l'imposition minimale sur les sociétés…
…et d'opérer un prélèvement sur la rente des énergéticiens pour financer la protection des Français contre l'inflation.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Monsieur le ministre de l'intérieur et des outre-mer, je reviens vers vous car, il y a quelque temps, en commission des lois, je vous ai posé une question à laquelle vous n'avez pas répondu au sujet de la vague de suicides parmi les agents des forces de l'ordre.
Nombreux sont ceux qui attendent des réponses et surtout, au-delà de ces réponses, des actes car, derrière ces suicides, il y a des familles, notamment des enfants, des collègues et des amis.
Jour après jour, les membres des forces de l'ordre sont découragés par une justice inefficace qui les oblige à interpeller continuellement les mêmes individus tout en laissant à leur sort les victimes qui s'accumulent. Stigmatisés par les extrêmes-gauchistes qui multiplient chaque jour injures et propos haineux ,
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN
utilisés par le Gouvernement pour remplir des tableaux statistiques, victimes de pratiques managériales d'une haute hiérarchie plus politique que flic, ils sont à bout.
Ces vingt dernières années, pour la seule police nationale, plus de 1 200 policiers ont mis fin à leurs jours. Je me demande où sont les budgets qui devaient servir à proposer des solutions concrètes et efficaces pour endiguer le phénomène.
Ne me parlez pas du numéro d'appel ou de psychologues supplémentaires ! Vous qui aimez les statistiques et les chiffres, vous voyez que ces mesurettes n'ont aucun effet et que nous comptons toujours plus de morts. Il faut agir bien en amont pour être réellement dans la prévention avant le point de non-retour.
C'est d'ailleurs ce que j'ai défendu en commission des lois il y a quelques jours, mais, sans surprise, ma proposition de loi a été balayée d'un revers de la main par l'ensemble des députés appartenant aux autres groupes politiques que le Rassemblement national.
Lorsqu'un membre des forces de l'ordre actionne la queue de détente, il n'est pas le seul à poser son doigt dessus. Il y a des responsables. Mais où sont-ils ? Chez France Télécom, les responsables ont été traduits devant la justice. Monsieur le ministre, quand allez-vous enfin prendre des mesures concrètes pour endiguer la vague de suicides qui décime jour après jour les rangs de nos forces de l'ordre ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé de la citoyenneté.
Je veux d'abord rendre hommage à l'action de nos forces de l'ordre qui, chaque jour, protègent nos concitoyens avec toute l'énergie dont ils sont capables.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Je veux le répéter ici : le ministre de l'intérieur est extrêmement attentif et prend toujours la défense des policiers et des gendarmes sur le terrain.
Rappelez-vous tout le travail qui a été accompli sur le terrain ces cinq dernières années. Nous avons recruté 10 000 policiers et gendarmes supplémentaires sous le dernier quinquennat – admettez que ce n'est pas le fait des quinquennats précédents.
Toute l'ambition du ministre de l'intérieur se trouve concrétisée au travers du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), actuellement examiné. Ce texte, c'est 8 500 policiers et gendarmes en plus, c'est un investissement majeur en matière de cybersécurité,…
…c'est une hausse globale de 15 milliards d'euros des fonds engagés au service de nos policiers, c'est 200 nouvelles brigades, c'est 11 unités de force mobile !
Tout cela a été fait dans le but d'améliorer les conditions de travail de nos forces de sécurité.
Vives exclamations sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. Romain Baubry. Il vous reste deux secondes, mon cher collègue.
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Cette question, à laquelle j'associe ma collègue Estelle Youssouffa, s'adresse à M. le ministre délégué chargé des outre-mer.
À l'heure où je m'adresse à vous, plus de 40 000 foyers guadeloupéens sont privés d'eau ; beaucoup le sont depuis le passage de la tempête Fiona, en septembre dernier.
Monsieur le ministre délégué, ce chiffre appelle à se demander si le plan Orsec – organisation de la réponse de sécurité civile – « eau potable » a été appliqué avec une intensité suffisante.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
J'ai sollicité le déclenchement de ce dispositif au lendemain du passage de la tempête et après avoir été sensibilisé par le collectif Moun Gwadloup. Mais il reste insuffisant. Tous les jours, je suis interpellé par des Guadeloupéens, notamment par des personnes âgées isolées, qui n'ont pas d'eau. Alors que nous résidons à Chauffour aux Abymes, dans le périmètre du plan Orsec eau potable, mes voisins et moi-même sommes privés d'eau depuis cinq jours. L'instruction du plan Orsec prévoit la distribution de 3 litres d'eau potable par habitant et par jour. Mais, sur le terrain, nous n'en voyons pas la couleur tous les jours.
Autre point : les zones non prises en compte par le plan Orsec où l'eau est impropre à la consommation. Dans les stations d'épuration, les filtres à charbon, essentiels au filtrage du chlordécone, dysfonctionnent depuis le passage de la tempête. Cela inquiète au plus haut point.
Il faudrait donc commencer par intensifier le plan Orsec dédié à l'eau potable et l'étendre aux zones insuffisamment prises en compte.
En outre, j'appelle à des mesures d'urgence supplémentaires. Le prix du pack de six bouteilles d'eau de 1,5 litre doit être fixé à 1 euro. En Guadeloupe, 34,5 % de la population vit sous le seuil de pauvreté national ; le coût de la vie y est plus élevé que dans l'Hexagone et le pouvoir d'achat se détériore quotidiennement. Monsieur le ministre délégué, payer un pack d'eau plus de 5 euros, alors que ce liquide vital ne coule pas dans les robinets, relève de l'agression !
Mme Delphine Batho applaudit.
Enfin, j'appelle votre attention sur la situation à Mayotte. Sur l'île, un tiers de la population n'a pas accès à l'eau potable et 18 % des habitants sont raccordés à un réseau d'assainissement.
Qu'allez-vous faire pour les citoyens français de Mayotte et de Guadeloupe ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, RN, LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Monsieur le député, l'accès à l'eau en Guadeloupe est une question prioritaire. Nul ne peut en douter, elle mobilise fortement mon ministère et, au-delà, tout le Gouvernement. La sécurité civile, placée sous l'autorité directe de Gérald Darmanin, est particulièrement concernée. Vous le savez, le plan Orsec a été déclenché de manière exceptionnelle, après la tempête Fiona ; il n'est pas destiné à répondre aux problèmes structurels qui se posent en Guadeloupe. Ce plan vise à approvisionner en eau potable les lieux publics les plus sensibles, comme les hôpitaux, et les personnes fragiles isolées.
Après le passage de la tempête Fiona, nous avons constaté de nombreux dégâts sur les prises d'eau, notamment sur le feeder de Belle Eau Cadeau, qui approvisionne tout le sud de l'île de Grande-Terre, dont votre territoire, monsieur le député. Cette casse est majeure et mérite des travaux lourds.
Pour faire face à cette situation, la préfecture de Guadeloupe a activé le centre opérationnel départemental. Cela a permis l'installation d'un module de potabilisation à Fouillole ; quarante-cinq logisticiens sont spécialement venus de la métropole pour aider les zones du sud de l'île de Grande-Terre. Au 5 octobre, 1 300 palettes de bouteilles d'eau avaient été distribuées, soit 1 million de litres d'eau, et 500 000 litres en citerne. Une solution de réparation provisoire du feeder a été trouvée et sera appliquée d'ici mi-novembre ; une solution définitive sera trouvée pour Noël.
J'en viens aux problèmes structurels – ce sont les plus importants. Mon directeur de cabinet s'est rendu sur place la semaine du 10 octobre et une mission interministérielle a été lancée afin de parvenir à un accord sur les besoins et les modalités d'un accompagnement renforcé du SMGEAG – syndicat mixte de gestion de l'eau et de l'assainissement de Guadeloupe. Sur les neuf points concernés, une convention sera signée dans les deux prochaines semaines. Je suis très optimiste : nous résoudrons enfin les problèmes d'eau en Guadeloupe.
Pour ce qui est de Mayotte, question que vous abordez à la toute fin de votre question, un contrat de 400 millions d'euros a été signé…
Monsieur le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, ces dernières semaines, les projecteurs ont été braqués sur les aides à domicile, notamment en raison des pénuries d'essence. Je veux aujourd'hui les mettre à nouveau au centre de nos préoccupations, cette fois pour réitérer l'appel à une réforme urgente et profonde de la profession.
Les aides à domicile sont indispensables. Ce sont des hommes et des femmes qui, tous les jours, œuvrent dans des conditions parfois très difficiles auprès de personnes âgées et handicapées en perte d'autonomie, et ce pour leur permettre de rester chez elles le plus longtemps possible. Leur vocation : aider, soutenir, accompagner. Mais beaucoup sont épuisés, découragés, démotivés, et il en résulte une véritable crise du recrutement. Je le constate malheureusement tous les jours dans mon département de la Mayenne. Pourtant, leur rôle est plus que jamais essentiel.
La conjoncture, celle d'une société vieillissante, implique une réforme dont le contenu, loin d'être démesuré, apparaît légitime, rationnel et tout simplement humain. Voici ce que nous attendons : une prise en compte des temps de déplacement entre chaque patient, une revalorisation réelle des indemnités kilométriques, la définition d'un vrai statut, la mise en place d'une formation reconnue et une augmentation salariale.
Ma question est simple, monsieur le ministre : quand et comment allez-vous répondre concrètement aux attentes de ces femmes et de ces hommes, qui sont aussi nos héros du quotidien ?
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe GDR – NUPES.
La parole est à M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées.
Monsieur le député, vous avez raison, voilà plusieurs années que les professionnels de l'aide à domicile traversent une crise profonde. On observe une crise d'attractivité du métier, alors qu'augmentent les besoins de la population et que s'accumulent les contraintes pour ces femmes et ces hommes engagés, qui accompagnent au quotidien nos concitoyens âgés ou en situation de handicap. La crise du recrutement exacerbe les tensions déjà existantes. On déplore aussi une crise de la pratique professionnelle : l'exposition à un risque d'accident du travail et de maladie professionnelle – c'est ce que l'on appelle la sinistralité – est plus élevée chez les aides à domicile que parmi les professionnels du bâtiment.
Face à cela, il est urgent d'agir, de redonner du sens au métier et de soutenir ces professionnels dont nous avons tant besoin, pour réussir le virage domiciliaire qu'appelle de leurs vœux l'immense majorité des Français. À l'instar de ce qui s'est passé pour les Ehpad, nous avons pris des mesures fortes ces dernières années. Pour les aides à domicile, nous avons engagé des revalorisations historiques par la réforme de l'avenant 43 de la branche de l'aide, de l'accompagnement, des soins et des services à domicile. Je parle d'augmentations de plus de 15 %, pouvant aller jusqu'à 250 euros par mois, pour près de 210 000 professionnels.
Pas seulement, puisque ces revalorisations sont compensées à 50 % par l'État.
La « dotation qualité » pour les services d'aide à domicile permet à la fois de mieux couvrir les zones sous-denses et d'améliorer les conditions de travail des professionnels. Un tarif plancher pour les heures de travail effectuées a été établi. Il sera revalorisé dès cette année à 23 euros, avec là encore une compensation à 100 % par l'État. Dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, nous allons investir en faveur des soins infirmiers à domicile et augmenter de 20 % le nombre de places d'ici à 2030. Cela représente un investissement de 400 millions d'euros en année pleine. Nous entendons également réformer le financement de ces services, en prenant en mieux compte la situation des personnes concernées.
Madame la Première ministre, le 1er janvier 2023, le prix du gaz et de l'électricité augmentera de 15 % pour l'ensemble des Français, les très petites entreprises (TPE) et les petites collectivités, qui sont pourtant bénéficiaires du bouclier tarifaire. Une augmentation de 15 %, ce n'est plus un bouclier. C'est un matraquage tarifaire que vous préparez !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Pour un ménage, cela représente 300 euros de plus par an, somme qui, pour une bonne partie, ira dans les poches des actionnaires d'Engie ou de TotalEnergies.
Madame la Première ministre, vous préparez un autre mauvais coup, sur lequel vous êtes bien silencieuse. Le 1er juillet 2023, dans quelques mois à peine, votre gouvernement privera les Français du tarif réglementé du gaz en le supprimant purement et simplement. Vous vous soumettez ainsi au dogme européen de la concurrence et de la marchandisation de l'énergie. Or c'est grâce aux tarifs réglementés que vous pouvez décider des boucliers tarifaires. La réalité, c'est que votre bouclier tarifaire est un bouclier à obsolescence programmée !
Au lieu de jouer un mauvais épisode d'« Inspecteur Gadget » à Bruxelles chaque semaine, qu'attendez-vous pour bloquer les prix et renoncer à la hausse de 15 % des prix de l'électricité et du gaz au 1er janvier ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Qu'attendez-vous pour désobéir aux règles européennes et prolonger au-delà du 1er juillet les tarifs réglementés du gaz ?
Qu'attendez-vous pour permettre à tous les particuliers, à toutes les entreprises, à toutes les collectivités de revenir aux tarifs réglementés ? Enfin, qu'attendez-vous pour rompre avec la participation de la France au marché européen de l'énergie, dont les prix ont été jugés « délirants » par votre ministre de l'économie et des finances ? Allez-vous continuer à faire payer aux Français les diktats de Poutine, de la Commission européenne et de l'Allemagne ?
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Monsieur le député, vous avez oublié que la France est, de loin, le pays européen qui a le mieux protégé ses compatriotes contre l'augmentation des prix de l'électricité et du gaz !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Vous avez oublié que la France est le seul pays en Europe qui ait mis en place, dès le mois d'octobre 2021, au moment où les prix commençaient à flamber, un gel des prix du gaz et un plafonnement à 4 % des prix de l'électricité.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Vous avez oublié que, si nous n'étions pas intervenus, la facture des Français – ceux qui nous écoutent, ceux qui sont ici, dans les tribunes de cet hémicycle – aurait augmenté de 180 euros par mois pour l'électricité et de 200 euros par mois pour le gaz.
Oui, il y a un bouclier tarifaire ; oui, il protège ; oui, cette majorité est la seule en Europe à l'avoir appliqué avec autant d'efficacité !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Pour l'avenir, il est évident que nous sommes décidés à défendre les boucliers tarifaires, à défendre un tarif régulé de l'énergie. Ce dernier continue d'ailleurs d'exister. Comment serait-il possible aujourd'hui de protéger plus de 20 000 collectivités et plus de 1,5 million de petites entreprises si nous ne disposions pas de ce tarif régulé ? Nous l'avons toujours défendu et toujours maintenu en France et au niveau européen !
Monsieur le député, vous avez oublié encore une chose : le choc inflationniste, c'est 3 % du PIB. Certes, il pèse sur nos compatriotes et sur notre économie, mais il est absorbé à 55 % par l'État, à 40 % par les entreprises et à seulement 5 % par les ménages. Aucun autre État européen n'a autant protégé les ménages que le nôtre !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Monsieur le ministre de l'intérieur et des outre-mer, le mois d'août a été marqué en France par de tragiques incendies. Dans le Jura, où ils ont dévasté 1 200 hectares de forêt, nous avons frôlé le pire quand les flammes sont venues menacer les habitations jusqu'au cœur de plusieurs villages et hameaux. Si nous n'avons à déplorer aucune victime, aucun blessé, aucune habitation brûlée, nous le devons à l'engagement courageux et exemplaire des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires : des jours et des nuits durant, ils ont mené une lutte acharnée contre des murs de flammes et des tourbillons de feu imprévisibles, dans des conditions extrêmes et hostiles. Vous avez été constamment à notre écoute, monsieur le ministre, et vous nous avez envoyé des moyens aériens multiples et salvateurs : Canadair, avions Dash, hélicoptères. Avec ma collègue députée du Jura Marie-Christine Dalloz, je vous en remercie.
Les centres d'incendie et de secours ont pu compter sur l'aide déterminante des agriculteurs qui se sont mobilisés spontanément, jour et nuit. Armés de leurs tonnes à lisier, ils ont fait gagner un temps précieux aux pompiers, les ravitaillant en eau et allant, eux aussi, au front pour arroser les feux et les abords des villages afin de les protéger. Le Président de la République a salué l'immense élan de solidarité jurassien, l'engagement des maires, des élus, des pompiers, des gendarmes et des bénévoles, et l'aide apportée par les agriculteurs.
Alors que les agriculteurs ont engagé sans compter leurs forces, leur matériel, leurs moyens, délaissant les travaux de leur ferme, où en est le versement de l'indemnisation bien légitime qui leur a été promise ?
Mme Marina Ferrari applaudit.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales.
Comme vous l'avez dit, les feux du Jura cet été ont été particulièrement ravageurs, avec plus de 1 200 hectares brûlés, principalement sur deux communes, Cernon et Vescles. L'État, que vous avez salué, a été présent aux côtés des sapeurs-pompiers et des élus locaux : plus de 200 sapeurs-pompiers, 3 Canadair, un Dash et deux hélicoptères. D'autres acteurs se sont engagés au service de la lutte contre ces incendies : les agriculteurs, qui ont apporté de l'eau pour ravitailler des camions contre le feu et procéder au noyage des lisières.
Lors d'un contact téléphonique avec les élus locaux, le Président de la République s'est effectivement engagé à ce qu'une compensation soit versée aux agriculteurs qui ont œuvré lors de cette action collective de préservation du massif jurassien. La procédure d'indemnisation est globale, puisque sont désormais concernés les frais liés aux feux de la Gironde. Je veux donc vous rassurer : les procédures sont en cours. Nous attendons encore quelques éléments de facture pour obtenir les crédits et procéder rapidement aux indemnisations nécessaires.
Je veux évidemment saluer à mon tour cette solidarité sur le terrain qui fait honneur à notre pays.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Trop, c'est trop : alors que, chaque jour, les territoires ruraux luttent contre le départ des médecins de famille, contre la fermeture de classes et de commerces de proximité, et contre bien d'autres maux encore, voici qu'ils sont en train de mourir à petit feu sur l'autel de la pseudo-transition écologique. Les gouvernements successifs leur donnent le coup de grâce par l'implantation massive et anarchique d'éoliennes en dépit de la colère montante des riverains et des associations. Ces territoires sont devenus le laboratoire du sacro-saint dogmatisme écolo-idéologique…
…exploités par des promoteurs autoritaires et sans scrupule faisant pression sur les maires des petites communes sur fond de pauvreté et de misère sociale. L'implantation se fait à marche forcée à la demande du Président de la République ; les administrations régionales dressent même des cartes prospectives des zones propices au développement de futurs parcs, y compris dans des zones de nature.
À titre d'exemple, la troisième circonscription de la Charente, dont je suis l'élue, possède déjà une centaine d'éoliennes auxquelles il faut ajouter 100 éoliennes en cours de construction et 300 autres en instruction. Dans certaines communes, on atteint le ratio lamentable d'une éolienne pour six habitants. Ne voyez-vous pas les conséquences délétères de cette politique ? Baisse de l'attractivité des territoires, nuisances sonores permanentes, dévalorisation immobilière, saccage du paysage, défiguration du patrimoine, bouleversement de la faune et de la flore… Tout cela parfois à proximité directe de monuments historiques classés ou au cœur d'espaces protégés Natura 2000.
Monsieur le ministre, écoutez les riverains plongés dans le désarroi et tentés par la colère dont je me fais aujourd'hui l'écho. Combien de temps encore nos territoires continueront-ils à subir ces choix inconséquents et néfastes en matière énergétique ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Permettez-moi d'excuser la ministre de la transition énergétique, qui aurait été heureuse de vous répondre ; Agnès Pannier-Runacher est retenue par le conseil des ministres de l'énergie pour discuter de la situation actuelle et de la réforme du marché de l'électricité.
Nous n'avons sans doute jamais autant parlé de la situation énergétique ; sur celle-ci, il y a quelques balises, parmi lesquelles un consensus des experts de RTE – Réseau de transport d'électricité – sur le fait que, si nous voulons nous débarrasser des énergies fossiles qui sont responsables du réchauffement climatique
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN
et de la pollution atmosphérique, nous devons augmenter la part des énergies renouvelables, à savoir l'hydroélectricité, les éoliennes et le solaire. Les éoliennes produisent l'équivalent de la consommation de 8 millions de nos concitoyens ; elles représentent 8 % de notre mix énergétique et 22 000 emplois.
Vous avez raison de dire que leur répartition sur le territoire suscite des levées de boucliers, car elles ne sont pas implantées partout : dans certains secteurs, il y en a beaucoup ; dans d'autres, il y en a nettement moins.
Les arguments qui consistent à dire que cela ne marche pas sont à peu près aussi crédibles que ceux des climatosceptiques.
M. Erwan Balanant applaudit.
Dans ce contexte, le Président de la République s'est engagé à augmenter la part des énergies renouvelables pour tendre vers 33 %. Le projet de loi relatif aux énergies renouvelables qui vous sera soumis portera sur les deux types d'énergie sur lesquels nous voulons accélérer : le photovoltaïque et l'éolien en mer.
Pour les éoliennes terrestres, il y a un régime d'encadrement : la demande d'avis du maire, le rôle donné aux élus locaux qui définissent les zones sur lesquelles ces projets peuvent être concrétisés. Nous ne sommes pas convaincus par le tout-éolien ; nous sommes pour un mix entre le nucléaire, l'éolien offshore, le photovoltaïque et l'éolien terrestre.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, j'ai été interpellée par des dirigeants de TPE et PME de ma circonscription qui sont très inquiets de la situation actuelle. Leur inquiétude est partagée par les 6 millions d'indépendants et dirigeants de très petites, petites et moyennes entreprises (PME-TPE) qui ont peur du lendemain : avec l'explosion des prix de l'énergie, nos petites entreprises sont au bord de la faillite.
La France produit une électricité à 50 euros le mégawattheure grâce à son parc nucléaire unique en Europe mais les entreprises l'achètent au prix délirant de 600 à 700 euros. Les mécanismes de protection mis en place pour les entreprises par le Gouvernement sont largement insuffisants et les mesures européennes n'en finissent plus de tarder. On ne peut pas dire aux entreprises de ne rien signer, comme l'a dit il y a un mois le Président de la République, ni dénoncer des prix fous à longueur d'interview sans défendre concrètement nos entreprises.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Les mesures proposées actuellement sont insuffisantes. Les TPE sont exclues du dispositif ; seules certaines PME y sont éligibles, selon des critères au demeurant trop complexes. Nous ne pouvons plus attendre : il y va de la survie de nos entreprises et de notre compétitivité nationale. Nous demandons l'extension à toutes les PME et TPE du bénéfice du bouclier tarifaire, avec des critères simples et justes.
M. Olivier Marleix applaudit.
Par ailleurs, 700 000 TPE-PME ont eu recours au PGE – prêt garanti par l'État –, dispositif qui a pris fin le 30 juin 2022. Un indépendant devra consacrer en moyenne 564 euros par mois à son remboursement, soit plus de 6 % de son chiffre d'affaires pendant quatre ans ; à cela s'ajoute le remboursement des dettes sociales contractées auprès de l'Urssaf, soit au total des mensualités comprises entre 500 et 1 000 euros. La Cour des comptes évalue à 160 000 le nombre d'entreprises très fragilisées par cette situation.
Monsieur le ministre, il y a urgence : quel dispositif global d'aides comptez-vous mettre en place, et suivant quel calendrier, pour donner à nos entreprises les moyens d'affronter ces chocs successifs ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Je partage votre inquiétude concernant la situation des nombreuses PME confrontées à la hausse du prix de l'électricité et du gaz et dont les factures sont multipliées par deux, trois, cinq, parfois dix, dans des proportions qui sont totalement déraisonnables. Nous avons rassemblé les fournisseurs pour leur demander de proposer à toutes les entreprises des prix raisonnables dans des conditions raisonnables et nous veillons à ce que la charte des fournisseurs soit respectée : comme je l'ai indiqué, le nom de tous ceux qui ne la respecteraient pas – cela arrive encore – sera rendu public.
En deuxième lieu, nous veillerons à ce que toutes les TPE, soit 1,5 million d'entreprises, aient accès au tarif régulé de l'électricité. Pour les entreprises en situation particulière comme les boulangers, dont nous venons de parler, nous avons mis en place une garantie électricité qui sera précisée par la Première ministre dans les prochaines heures. Cette garantie électricité s'appliquera en 2023 et permettra un allégement direct de la facture d'énergie du fournisseur au client pour toutes les PME, toutes les TPE et tous les indépendants. Les entreprises de taille plus importante qui auraient besoin d'allégements plus significatifs auront droit à un traitement au cas par cas.
Les entreprises qui se fournissent en gaz – puisque la garantie ne porte que sur l'électricité – pourront se tourner vers le guichet spécifique, qui leur permettra de rembourser une partie de leur facture énergétique. J'ai parfaitement conscience que le guichet, dans sa première version, était infiniment trop compliqué et n'a pas fonctionné. Nous avons demandé un allégement et une simplification des critères à la Commission européenne ; nous les avons obtenus. Le guichet simplifié sera ouvert au 15 novembre avec les critères simplifiés pour protéger les entreprises.
Je partage vos inquiétudes ; notre réponse sera massive, puissante et efficace.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Ma question s'adresse à M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications. Elle porte sur les zones blanches persistantes du réseau de téléphonie mobile ainsi que du réseau fixe.
Pour assurer une couverture mobile sur tout le territoire et résorber la fracture numérique, le Gouvernement a, il y a quatre ans, engagé le New Deal mobile. Mais les opérateurs de téléphonie mobile n'ont pas toujours rempli leur part du contrat et de trop nombreuses communes sont encore aujourd'hui pénalisées par l'absence totale ou partielle du réseau. Entre couverture inexistante et coupures régulières, la situation de leurs habitants est insupportable ; tous nos concitoyens ont besoin de leur téléphone. Se pose également la question de la sécurité des habitants et des touristes : sachez qu'en Isère, dans le secteur du Royans-Vercors, même le réseau Saphir utilisé par les forces de gendarmerie est inaccessible dans certaines zones.
Aux difficultés des réseaux mobiles s'ajoutent des problèmes sur le réseau filaire, lequel n'est toujours pas rénové dans certains territoires. C'est la double peine pour les habitants qui n'ont ni réseau mobile stable ni réseau fixe fiable, et encore moins la fibre. Devant ces défaillances, j'ai personnellement sollicité Orange, l'opérateur historique, qui m'a répondu : « Il faudra bien vivre avec le réseau existant. »
Monsieur le ministre délégué, les citoyens et les élus, particulièrement ceux des zones rurales et de montagne, s'impatientent de ne pas voir leur situation s'améliorer. À l'heure où le télétravail s'est imposé, ces zones blanches pointent, pour beaucoup, les inégalités territoriales de notre pays et rendent ces régions moins attractives. Je connais votre engagement sur le sujet et je sais pouvoir compter sur votre implication.
Comment comptez-vous mettre les opérateurs face à leurs responsabilités ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.
Sourires.
La France ne tiendra son rang de grande nation du numérique que quand l'ensemble de nos concitoyens seront desservis par les réseaux de télécommunications fixes et mobiles, c'est-à-dire lorsque toutes les zones blanches auront été effacées. S'agissant des réseaux fixes, le plan France très haut débit, engagé il y a dix ans, se poursuit. La France est le pays le mieux couvert par la fibre en Europe, mais il faut veiller au rythme et à la qualité des déploiements – responsabilité qui relève de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep).
S'agissant du réseau mobile, je veux rendre hommage à Julien Denormandie, à Jacqueline Gourault et à Cédric O qui, constatant les difficultés des opérateurs à couvrir certaines zones peu denses, ont lancé le New Deal mobile, qui était un programme de réussite, de confiance et de coopération entre l'État, les opérateurs et les collectivités, puisque c'est au niveau départemental que sont identifiés les lieux d'implantation. Cela fonctionne : en quelques années, plusieurs milliers de zones blanches ont été effacées – 3 795 pour être exact, dont 49 dans votre département, madame la députée. Il faut évidemment aller plus loin, puisque l'objectif était de couvrir 5 000 sites en 2025. Notons que 600 seront couverts en 2023, dont 9 dans votre département. Dans votre circonscription, quatre communes – Choranche, Châtelus, Saint-Pierre-de-Chérennes et Presles – sont encore classées en zone blanche.
Elles ont été identifiées comme zones prioritaires et je peux d'ores et déjà vous annoncer que les implantations auront lieu d'ici dix-huit mois pour trois d'entre elles.
Comme vous le voyez, nous travaillons d'arrache-pied pour faire en sorte que, tant pour les réseaux fixe que mobile, l'ensemble du territoire national soit couvert, et que les zones blanches soient totalement effacées, avec une vigilance particulière pour les zones de montagne et les zones rurales.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Madame la Première ministre, la presse vosgienne se fait aujourd'hui le relais d'un courrier que vous auriez reçu du président du groupe Avec, propriétaire depuis 2011 des thermes de Plombières-les-Bains, au sein de ma circonscription vosgienne. Ce groupe comptant 12 000 salariés est un habitué des rachats d'entreprises en difficulté qui, d'ailleurs, ne respecte pas les engagements pris devant les tribunaux. Au-delà des thermes de Plombières, dont la réouverture a déjà été repoussée à quatre reprises, mettant ainsi les salariés, la commune, les acteurs économiques et tout le territoire en grande difficulté, se pose la question de la gestion globale de ce groupe.
Implanté dans le domaine de la santé, il est largement bénéficiaire de fonds publics et sa réputation sulfureuse interroge, que ce soit dans les Vosges avec les thermes de Plombières ou à Grenoble avec sa clinique. De plus, on retrouve dans son équipe dirigeante d'anciens ministres, d'anciens élus et même, dernièrement, un ancien directeur de la Banque des territoires. Son dirigeant laisse lui-même entendre qu'il dispose de forts soutiens politiques. Je n'oserais croire les rumeurs de protection et de copinage politique dont bénéficierait le président du groupe Avec. Madame la Première ministre, éclairez-nous et rassurez-nous sur ces manœuvres !
Enfin, à quand la convocation – demandée depuis plus de six mois – des représentants de cette société dans les bureaux de Bercy, afin de trouver non seulement une solution à la situation catastrophique de Plombières mais, plus globalement, de contrôler la façon dont ce groupe gère l'argent public ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.
La situation que vous décrivez dans votre circonscription est bien connue des équipes du ministère des solidarités et de la santé ainsi que de celles du ministère de l'économie. Nous avons affaire à un investisseur qui ne respecte ni ses engagements, ni les acteurs du territoire qui lui ont fait confiance, ni les salariés des thermes de Plombières. Nous connaissons ce type de pratiques et nous leur faisons la chasse. Nous savons qu'il faut être très attentif à la préservation des emplois, et je peux vous assurer que le ministère de l'économie et plus spécifiquement M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie, sont très mobilisés sur ce sujet.
Je vous le dis très clairement : nous ne laisserons pas des acteurs financiers opportunistes chercher des appuis publics sans jamais tenir leurs engagements. Nous serons très exigeants avec le groupe que vous évoquez, qui est un employeur important dans votre région. Il n'y a et il n'y aura aucune complaisance, aucune facilité, aucune naïveté des pouvoirs publics vis-à-vis de ce groupe, quels que soient les soutiens imaginaires qu'il invoque. Nous n'acceptons pas ces dérives et partout où cet acteur est implanté, j'ai demandé aux services de l'État d'être attentifs, exigeants et réactifs. Vous pouvez compter sur notre mobilisation.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Madame la Première ministre, un grand merci pour votre réponse car les sous-entendus de ce président jetaient l'opprobre sur tous les élus et sur le Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur quelques bancs du groupe Dem.
Comme tant d'autres en France, la terre des Deux-Sèvres est en danger immédiat du fait du changement climatique : cinquième vague de chaleur, deux alertes rouges canicule, record d'incendies de cultures, 1 000 kilomètres de rivières à sec, des pertes de récolte pour les agricultrices et les agriculteurs, et l'eau potable en situation de danger critique.
Il y a des années, face à la pénurie d'eau, nous avions fait le pari du dialogue, lequel avait débouché sur un protocole pour réduire l'irrigation et transformer obligatoirement les pratiques agricoles pour sortir des pesticides et des engrais, et replanter des haies. Ce protocole n'existe plus, car l'État l'a piétiné. Les associations et les élus qui ont cru au dialogue ont été roulés dans la farine. Pour l'État, ce protocole n'était qu'une devanture pour conduire, tambour battant, les travaux de construction de grandes réserves d'irrigation.
Madame la Première ministre, vous êtes face à vos responsabilités. Allez-vous prononcer l'arrêt des travaux ? Allez-vous organiser un référendum local pour que les habitantes et les habitants décident de la gestion de ce bien commun qu'est l'eau, ou bien allez-vous passer en force pour faire des Deux-Sèvres et du marais poitevin le laboratoire d'essai de la guerre de l'eau qui couve partout dans le pays ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur de nombreux bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
À l'heure où nous parlons, la moitié de nos départements sont encore confrontés à une insuffisante pluviométrie qui nous conduit à maintenir des arrêtés de crise ou des arrêtés de restriction, principalement dans trois de nos bassins.
Madame Batho, en posant cette question, vous rappelez que c'est un sujet dont tout le monde parle au mois d'août, et dont plus personne ne se préoccupe en septembre.
À la fin du mois de septembre, Bérangère Couillard, Agnès Firmin Le Bodo et moi-même avons engagé des travaux sur ce sujet. Avec la totalité du Comité national, avec tous les présidents de bassins et avec l'ensemble des élus locaux, nous avons lancé la mobilisation contre les fuites et contre le gaspillage de l'eau potable ; il s'agit aussi de multiplier les possibilités de réutilisation de l'eau. À ce moment-là, nous étions bien seuls, car de votre côté de l'hémicycle, il était davantage question du déballage des affaires de vie privée que du souci de s'occuper de l'état écologique de la planète.
Vives protestations sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Vous évoquez un sujet que vous connaissez mieux que moi, parce que le protocole dont vous parlez, vous l'avez signé en 2018. Il consiste à réaliser des bassines, et une étude scientifique de juillet dernier a conclu que ce serait bon pour les étiages et pour les débits. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'étude du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) de juillet 2022. Ce projet continue d'être soutenu par le président Alain Rousset et par la présidente du conseil départemental des Deux-Sèvres. Il a fait l'objet d'actions en justice qui ne se sont pas soldées par des annulations.
Permettez-moi de vous dire la chose suivante : oui, la priorité, ce sont les nappes phréatiques ; il faut diminuer les prélèvements et les usages.
Mme Clémence Guetté s'exclame.
Mais faisons attention parce que l'eau pour l'agriculture, c'est l'eau pour se nourrir ; ce n'est pas une privatisation de l'eau.
De plus, il y a eu des débordements à l'occasion de certaines manifestations. Faites attention à ne pas provoquer des violences. Il y a un an, des gendarmes ont été blessés. On ne peut pas se lever pour leur rendre hommage
Protestations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES
et pousser à la violence…
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Monsieur le ministre, je suis une opposante démocratique à ce projet. Je connais par cœur la vieille ficelle qui consiste à mettre en avant les agissements violents d'une minorité que nous condamnons pour ne pas entendre la voix d'une majorité forte et non violente, qui demande pacifiquement l'arrêt du projet.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Vous dites qu'il est légal, c'est ce qu'on disait de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes ; vous dites qu'il est légal, c'est ce qui a été dit du barrage de Sivens…
Mêmes mouvements.
Monsieur le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, cela tombe bien : ma question va dans le même sens que la précédente. Ce dimanche, en début de soirée, une tornade s'est abattue sur des communes du Pas-de-Calais et de la Somme. Des toits ont été arrachés et certaines maisons vont s'effondrer dans les prochaines heures. Aujourd'hui, 3 000 foyers sont privés d'électricité. « Je suis à trente-cinq ans de carrière, je n'ai jamais vu cela dans la Somme » a déclaré un lieutenant-colonel, évoquant une « scène de guerre ».
Deux mois à peine après les feux de forêt qui ont entraîné l'évacuation de dizaines de milliers de personnes, le changement climatique frappe donc de nouveau notre pays, et cela n'a rien d'étonnant. Un nouveau rapport de Météo-France et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) vient de paraître et, je dois le dire, il a réussi à me glacer le sang alors que je défends la cause du climat depuis des années. Les impacts du changement climatique en France sont 50 % plus sévères que ce qui était jusqu'ici estimé. Alors que nous devions limiter le réchauffement planétaire à 1,5 degré en 2100, nous avons déjà atteint en 2022 1,7 degré en France, et nous atteindrons très probablement les 3,8 degrés à la fin du siècle.
Avec mon collègue Sébastien Rome, nous sommes rapporteurs spéciaux sur l'adaptation au changement climatique et ce que nous avons découvert nous laisse sans voix. Les scénarios sur lesquels se basent nos politiques publiques d'adaptation étaient déjà trop optimistes avant ce rapport ; ils sont aujourd'hui complètement caducs. La stabilisation des effectifs dans les services de l'écologie ne peut être une réponse : nous avons déjà réduit de 20 % ces effectifs. C'est comme si notre maison était en feu et que nous annoncions fièrement arrêter de l'asperger d'essence. Il faudrait mobiliser au minimum 2 milliards de plus pour l'adaptation au changement climatique dès le projet de loi de finances pour 2023 ; or tous nos amendements en ce sens ont été rejetés en commission des finances.
Avec les projections énoncées, c'est l'économie française tout entière qui risque de s'effondrer comme les maisons de la Somme. Que seront les 3 % de déficit quand nous devrons nous rationner en eau et que les rayons des magasins seront à moitié vides ? Ma question est simple : le Gouvernement va-t-il revoir d'urgence le scénario d'adaptation au changement climatique en fonction des données catastrophiques produites par le CNRS et Météo-France ? De plus, êtes-vous prêts à adopter une augmentation immédiate de 2 milliards d'euros du fonds dédié à l'adaptation au changement climatique ?
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Les rapports que vous évoquez, qui font suite au rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) en avril et à celui du Haut Conseil pour le climat du mois de juin, renforcent la nécessité d'établir la feuille de route de la planification écologique dont la Première ministre a lancé les travaux le 21 octobre.
Je vous ai indiqué notre ambition de doubler le rythme de baisse des émissions de gaz à effet de serre, mais j'ai été un peu court : le volet « climat et biodiversité » du Conseil national de la refondation concerne évidemment l'atténuation des émissions, mais aussi l'adaptation et la biodiversité, qui ne doit pas être l'angle mort des politiques climatiques que nous conduisons, au motif que les indicateurs pour la préservation de la faune et de la flore sont parfois plus complexes que les questions liées aux émissions.
L'augmentation des crédits du ministère de l'écologie pour l'année qui arrive représente 4,5 milliards d'euros.
Cela comprend 2 milliards pour les collectivités locales qui pourront être fléchés sur ce type de crédits.
Madame la députée, entre ce que vous dites ici concernant la nécessité d'augmenter les crédits et la manière dont vous avez voté hier une motion de censure, je suis perdu ! Allez donc voir vos copains de censure de l'autre côté de l'hémicycle
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
qui, je crois, sont climatodéfaitistes et climatosceptiques.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
La vérité, c'est que vous appelez les choses de vos vœux et que, dans le même temps, vous ne faites pas preuve de cohérence.
L'action climatique, elle est de notre côté :
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI – NUPES
c'est le retrait du Traité sur la charte de l'énergie ; ce sont les crédits qui augmentent ; c'est le plan de relance du nucléaire ; c'est le plan de relance sur les énergies renouvelables. Les rendez-vous sont devant vous ; votez les crédits, rejoignez-nous dans ce combat au lieu de vous en tenir à des postures, à des totems et à des mots d'ordre !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Le Liban et Israël viennent de conclure un accord historique et inespéré sur le découpage de leur frontière maritime et la délimitation de leurs zones économiques exclusives respectives. Cet accord permettra l'exploitation et l'exploration des ressources gazières au large de leurs côtes et devrait ainsi contribuer à la prospérité des deux États, notamment de celle du Liban, qui connaît une crise sans précédent depuis l'explosion du port de Beyrouth. Une partie écrasante de la population libanaise s'est paupérisée au cours des dernières années : plus de 80 % des Libanais vivent actuellement sous le seuil de pauvreté. L'espoir suscité par les possibles retombées économiques de cet accord est donc immense.
Celui-ci est surtout exceptionnel eu égard au passif et aux tensions entre les deux pays, toujours officiellement en état de guerre. Il a fallu onze années de négociation pour aboutir à ce résultat, qui solde l'un des principaux conflits gaziers en Méditerranée orientale. Bien que l'on ne puisse pas parler encore de normalisation des relations entre le Liban et Israël, il s'agit incontestablement d'un pas important pour la paix dans la région.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Si le rôle des États-Unis dans la négociation est bien connu, rappelons que la France était également impliquée dans la recherche d'un compromis grâce à l'action diplomatique du Président de la République et de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Leur investissement a été salué par les deux États, ainsi d'ailleurs que par le président américain.
Madame la secrétaire d'État chargée de l'Europe, quel rôle notre pays a-t-il joué dans la conclusion de cet accord ? Selon vous, quelles perspectives celui-ci ouvre-t-il pour la stabilité régionale et la résolution de la crise sociale et politique au Liban ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Vous avez raison, cet accord est historique : pour la région, puisqu'il montre que deux pays depuis longtemps ennemis peuvent se mettre d'accord sur des questions essentielles ; pour le Liban, les responsables politiques libanais ayant réussi à prendre une décision commune.
La France peut en effet être fière du rôle qu'elle a joué dans la conclusion de cet accord, qui met à disposition du Liban un champ gazier important. Toutefois, on ne connaît pas encore les capacités de ce gisement. Quand bien même elles permettraient une production importante de gaz, son exploitation ne permettra pas de résoudre tous les problèmes du Liban.
Comme l'a rappelé la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, deux défis majeurs doivent, dans un premier temps, être relevés par le pays. D'une part, l'élection d'un président est urgente afin d'éviter la vacance du pouvoir. Les responsables politiques qui ont trouvé une position commune sur la frontière maritime avec Israël doivent aujourd'hui permettre l'élection d'un président pour leur pays. D'autre part, le Liban doit engager des réformes notamment dans les domaines du secret bancaire, de la restructuration des banques et du contrôle des capitaux – bref, dans tous les secteurs qui ont trait à l'activité financière.
Dans cette perspective, il est important que les dirigeants libanais nous aident à les aider !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Madame la Première ministre, vous avez déclaré le 6 juillet dernier, dans cet hémicycle, lors de votre déclaration de politique générale : « Les Français ont élu une assemblée sans majorité absolue. Ils nous invitent à des pratiques nouvelles [et] à la recherche active de compromis. » C'est dans cet état d'esprit, sans polémique et solennellement que je vous pose ma question.
Depuis plusieurs semaines, l'Unicef, la Fondation Abbé-Pierre, le collectif Associations unies, des enseignants, des parents d'élèves et de nombreux députés vous appellent à maintenir les 14 000 places d'hébergement d'urgence que vous envisagez de supprimer dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Chaque nuit, entre 1 700 et 2 000 enfants dorment dehors dans notre pays – sous un porche, dans une voiture ou sur un banc dans un parc. Comment, dans ces conditions, accepter la suppression de ces places d'hébergement d'urgence ?
Olivier Klein, le ministre chargé de la ville et du logement de votre gouvernement, a reçu les associations mobilisées sur le sujet la semaine dernière. Il a prononcé des paroles rassurantes et réitéré ses propos à deux reprises lors des questions au Gouvernement à l'Assemblée nationale. Malheureusement, à l'heure où nous parlons, le PLF pour 2023 prévoit toujours la suppression de 14 000 places d'hébergement d'urgence. Or les autres dispositifs sont déjà saturés. C'est d'ailleurs pour cette raison que des enfants dorment chaque nuit dans la rue.
Madame la Première ministre, malgré nos différences politiques, une vision humaniste de la France nous rassemble sans doute. Elle présume que l'hébergement est un droit inconditionnel. Comment comptez-vous le garantir avec de telles suppressions ? Prendrez-vous l'engagement de corriger les crédits de la mission "Cohésion des territoires" pour que les belles paroles de votre ministre se traduisent par des actes ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
La situation des familles qui vivent dans la rue avec leurs enfants est tout aussi insupportable pour nous que pour vous, je le redis. Vous l'avez rappelé, j'ai reçu la semaine dernière, avec Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance, les associations mobilisées sur le sujet, dont je salue l'action. Nous sommes convenus qu'il fallait trouver une solution pour chaque famille. Dès demain, une nouvelle réunion se tiendra avec des représentants des associations, de la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (Dihal) et des cabinets du secrétariat chargé de l'enfance et du ministère chargé de la ville et du logement. Dans chaque département, les préfets sont également mobilisés pour nous aider à trouver des solutions.
Nous sommes tous ici attachés aux valeurs humanistes. Aucun enfant ne devra dormir à la rue cet hiver et nous travaillerons sans relâche pour mettre un terme à cette situation inacceptable. Cette semaine, il y a encore 197 500 places d'hébergement d'urgence dans notre pays. Ce chiffre n'avait jamais été atteint avant la crise sanitaire et n'a pas diminué depuis. La situation est tendue dans certains territoires, c'est vrai, en particulier dans les grandes métropoles. C'est la raison pour laquelle nous travaillons, avec l'ensemble des préfets, à une politique globale à l'échelle du territoire national en matière d'hébergement d'urgence.
Sachez, par ailleurs, que le Gouvernement d'Élisabeth Borne a la volonté de favoriser le passage de l'hébergement d'urgence au plan Logement d'abord afin d'aider les personnes à la rue à trouver un véritable logement. Nous allons continuer de nous mobiliser en ce sens, notamment dans le cadre du deuxième plan Logement d'abord, inscrit dans le PLF pour 2023. Nous tiendrons les engagements que nous avons pris à son sujet !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.
Je vous remercie de votre réponse, mais à Rennes, Strasbourg, Lyon, en région parisienne, des parents d'élèves se mobilisent parce que les copains de leurs enfants dorment à la rue. Il ne pourra pas y avoir de solutions au cas par cas si 14 000 places d'hébergement d'urgence sont supprimées dans le PLF pour 2023. Il faut revenir sur cette mesure !
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures vingt.
Nous voici de nouveau réunis pour discuter du projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027, texte qui a été profondément amendé dans cet hémicycle. Il a en premier lieu fait l'objet de différents ajouts, motivés par un objectif de légère baisse des dépenses fiscales, par des engagements en matière de transition écologique ou par une volonté de rationalisation de l'action des opérateurs de l'État.
Plusieurs articles ont surtout été supprimés, et nous ne les regretterons pas. Il en est ainsi de l'article 11, qui concernait le plafond des autorisations d'emploi de l'État et de ses opérateurs et imposait une règle unique pour traiter des situations potentiellement très différentes ; de l'article 12, qui fixait pour trois ans les plafonds de crédits des missions du budget général de l'État sans s'appuyer sur une réelle réflexion quant au contenu des dépenses considérées et aux voies et moyens permettant de les réduire ou, à l'inverse, de les augmenter ; des articles 13, 16 et 23, qui prévoyaient la réduction des concours financiers de l'État aux collectivités locales et surtout intégraient ces dernières dans un système contraignant de baisse des dépenses, toujours en euros courants – système inadapté, contraire à l'esprit de la décentralisation et qui plus est inutile, dans la mesure où il n'est pas besoin de forcer des collectivités pour qu'elles prêtent attention à la limitation de leurs dépenses ; et enfin des articles 17, 18 et 19, qui fixaient des objectifs de dépenses des régimes de sécurité sociale, qui n'étaient de même pas forcément adaptés à la situation actuelle ni aux besoins existants, et qui anticipaient le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Malgré ces suppressions, le texte demeure insatisfaisant ; c'est notamment le cas de son article 1er , qui approuve un rapport annexé présentant les objectifs et la trajectoire prévus, et qui souffre de trois tares majeures. Tout d'abord, il s'agit encore d'un exercice d'autosatisfaction. Nous devrions pourtant y être habitués : vous êtes les plus beaux, les plus forts, les plus intelligents. Vous nous le dites régulièrement et quand vous ne le dites pas, vous le pensez tellement fort que c'est tout comme.
Sourires sur les bancs du groupe RN.
Eh bien voyez-vous, au risque de vous décevoir, nous n'arrivons pas à le croire !
Deuxièmement, vos perspectives s'appuient sur des prévisions de croissance et d'inflation que de nombreuses institutions considèrent comme très optimistes, pour ne pas dire irréalistes. En outre, vous citez à l'appui de vos chiffres un ensemble de réformes qui n'ont pas été votées par le Parlement et dont les contours ne lui ont même pas été présentés. De là à dire que vous faites fi de la représentation nationale, il n'y a qu'un pas que je franchirais volontiers si vous aviez eu recours au 49.3… Oh, mais en fait, vous l'avez utilisé deux fois !
Sourires sur les bancs du groupe RN.
Enfin, vous considérez comme nuls et non avenus les risques de crise économique induits par la hausse du coût de l'énergie et des matières premières. De tels risques pèsent tout particulièrement sur les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME), qui doivent parallèlement rembourser leur prêt garanti par l'État (PGE), et aussi sur le secteur-clé du bâtiment, spécialement fragilisé dans un contexte de recul important de la construction.
Vous voulez donner l'impression d'un ciel dégagé ; pour ma part, j'aurais tendance à paraphraser Clint Eastwood : quand je suis dans un tunnel et que je vois de la lumière au bout, je crains toujours, avec vous, que ce soit un train qui arrive en face.
Rires et applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Alors évidemment, même s'il est moins imparfait qu'au début, nous ne pourrons voter ce texte. Je le sais, vous allez jouer le chœur des vierges éplorées : « Comment ? Il n'y a pas de programmation, quelle horreur ! Qu'allons-nous devenir ? Et notre crédibilité ? »
Sur ce point, je voudrais dire deux choses. Tout d'abord, à court terme, mieux vaut peut-être pas de programmation qu'une programmation factice, dont le seul objet serait de complaire à l'Union européenne. Car n'oublions pas que c'est tout de même cela le but : présenter à la Commission un joli document, pour que M. Macron passe pour un bon élève auprès de sa chère Ursula von der Leyen. Il faudra d'ailleurs que l'on m'explique de quel droit celle-ci semble de plus en plus présider aux destinées de notre pays. En tout état de cause, l'existence d'un tel document est un symbole supplémentaire de notre perte de souveraineté au profit de l'Union européenne.
Enfin, comment nous satisfaire d'une programmation qui continue à nous ranger, pour les cinq années à venir, comme un pays recordman des prélèvements obligatoires, des déficits publics et de la dette ? Eh oui, outre qu'elle est irréaliste, votre programmation est insatisfaisante. Elle devrait tenir compte des défis auxquels nous faisons face, tout en réduisant le déficit public et le poids des prélèvements obligatoires en mettant fin à certaines gabegies liées à l'idéologie européiste, libre-échangiste et immigrationniste qui nous mène à la dérive.
De cela, nous aurions pu discuter, car vous saviez dès son passage en commission que le texte ne pourrait pas être adopté en l'état. Mais vous n'avez pas fait ce choix. Vous vous targuez de dialoguer, mais pour vous, le dialogue n'est en fait qu'une tragicomédie en cinq actes. Premier acte : vous expliquez d'un ton docte ce que vous avez décidé. Deuxième acte : vous écoutez d'un air condescendant vos contradicteurs. Troisième acte : vous leur expliquez qu'ils n'ont rien compris, parce que vous avez forcément raison. Quatrième acte : vous faites ce que vous voulez, quoi qu'on vous ait dit. Cinquième acte éventuel : si vous ne pouvez pas faire ce que vous voulez, vous recourez au 49.3 et criez à l'irresponsabilité de ceux qui osent ne pas être d'accord avec vous. Fin de la pièce.
Voilà votre vision du dialogue ! Mais, et ce texte le démontre, les ressorts sont désormais visibles, car la suffisance de vos discours ne saurait indéfiniment masquer l'insuffisance de vos résultats.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Nous sommes aujourd'hui appelés à nous prononcer sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour la période 2023-2027. Je ne vais pas faire durer le suspense longtemps. Le groupe LFI – NUPES combat ce texte depuis son premier passage en commission ; malgré nos amendements, malgré son rejet par la commission des finances et malgré la suppression de huit de ses vingt-six articles en séance, le Gouvernement persiste et ne change pas de cap. Eh bien nous aussi, nous persistons et signons en vous proposant, chers collègues, de rejeter ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Nous l'avons dit à maintes reprises, ce texte ne fait que programmer l'austérité pour les cinq années à venir, en prévoyant de contenir la croissance des dépenses publiques à 0,6 % par an, soit bien moins que la croissance tendancielle des dépenses publiques qui s'établit à 1,35 % par an. Le Gouvernement fait le choix de la dégradation continue de nos services publics déjà exsangues. Quelle irresponsabilité à l'heure où les immenses défis climatiques, géopolitiques et sociaux qui se dressent devant nous devraient nous conduire à des investissements publics d'ampleur dans l'intérêt du plus grand nombre !
La semaine dernière, vous avez amorcé un mauvais feuilleton antidémocratique : nous avons subi deux 49.3 en moins de quarante-huit heures. Je parle de feuilleton car ce sont les mots mêmes de la Première ministre – « 49.3, deuxième épisode » –, prononcés à l'entrée de l'Assemblée. Et on le sait, d'autres épisodes suivront, rapidement, à la chaîne, sur les textes budgétaires, comme un mauvais feuilleton dont la fin de chaque épisode est connue et mauvaise, parce que votre problème, c'est que vous ne maîtrisez pas le scénario. Le décor a changé, les actrices et les acteurs font de la rébellion, refusent d'être de simples figurants, réécrivent les dialogues, et ça, ça ne vous plaît pas !
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Alors on baisse le rideau : « 49.3, the end. »
Mais quel dommage pour vous : dans l'épisode « Loi de programmation des finances publiques », vous n'avez pas la main. Pas de 49.3 à gaspiller sur ce texte car celui-là, vous souhaitez le garder sous la main, prêt à être dégainé pour passer en force votre réforme des retraites dont personne ne veut.
Pas de 49.3, donc, sur ce projet de loi. Que ce soit en commission des finances ou en séance, nous avons eu la possibilité de dialoguer, d'amender, de rejeter une partie de votre copie. Nous le savons, vous le savez, vous n'avez pas de majorité pour faire voter ce texte. Vous n'avez pas de majorité pour corseter la politique budgétaire du pays pour les cinq ans à venir et imposer votre objectif dépassé de retour aux sacro-saints 3 % du PIB de déficit à l'horizon 2027. Parce que c'est bien de cela qu'il s'agit : d'un rejet sur le fond, d'un rejet de votre idéologie austéritaire, et non pas d'une posture, comme vous le laissez entendre.
Mais vous continuez dans le déni le plus complet. Vous avez justifié votre usage du 49.3 sur le projet de loi de finances pour 2023 par l'absence de majorité alternative à la vôtre. Pourtant, le rejet par l'Assemblée de huit des vingt-six articles du texte montre bien une chose : vous n'êtes pas majoritaires.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI – NUPES.
Quand nous refusons majoritairement, en séance, l'article 13 qui visait à plafonner les concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, nous, députés de la NUPES, disons non à l'austérité. Quand nous rejetons majoritairement l'article 23 qui prévoyait de contraindre ces mêmes collectivités à réduire leur budget de fonctionnement d'ici à 2027, nous, députés de la NUPES, disons non à l'austérité.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Quand nous rejetons l'article 11 qui contraignait fortement les possibilités de recrutement de nouveaux agents publics en cas de besoin, nous, députés de la NUPES, disons non à l'austérité.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI – NUPES.
Quand, enfin, nous supprimons majoritairement les articles 17, 18 et 19 par le biais desquels vous entendiez réaliser des économies sur les dépenses d'assurance maladie, nous disons non et encore non à votre austérité mortifère.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
À quoi sert dès lors votre projet de loi, maintenant que nous en avons rejeté la plupart des articles emblématiques ? À rien ou à pas grand-chose. Ce n'est plus qu'un texte bancal, détricoté, mais qui reste déprimant dans sa réclamation mécanique d'une austérité inconséquente et absurde. Ce projet est déjà caduc et il l'était même d'emblée car, rappelons-le, il s'appuie, pour les années à venir, sur des hypothèses macroéconomiques fantaisistes, tant en matière de croissance qu'en matière d'inflation.
Oui, une autre loi de programmation des finances publiques était possible. Si vous aviez écouté nos mises en garde, peut-être auriez-vous revu votre copie. Si vous nous aviez proposé un texte qui programmait les cinq années à venir en partant des besoins du peuple et en planifiant résolument la bifurcation écologique dont l'humanité a besoin, alors vous auriez pu trouver une majorité d'idées pour faire voter votre texte.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous vous avons proposé tant d'amendements pour sortir de l'austérité, pour réarmer nos services publics face aux défis collectifs qui nous attendent ou encore pour faire en sorte que le retour à l'équilibre budgétaire soit obtenu par un renforcement de la progressivité fiscale et non par des économies qui pénalisent les plus fragiles. Vous ne nous avez pas écoutés. Vous nous avez moqués, déconsidérés en nous présentant comme irresponsables.
Aujourd'hui, c'est vous les irresponsables qui, seuls, sans majorité, continuez à foncer droit dans le mur, à vous enfoncer dans l'inaction sociale et climatique avec un enthousiasme hautain et une orgueilleuse certitude.
C'est pourquoi nous voterons contre ce texte et nous vous invitons, chers collègues, à le rejeter avec nous.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe GDR – NUPES. – M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, applaudit également.
Le présent projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 était très attendu par tous ceux qui se préoccupent de l'état très alarmant des comptes publics – et cela d'autant plus que la précédente loi de programmation des finances publiques votée au début du quinquennat précédent n'a jamais été respectée par le Gouvernement et la majorité En marche, qui s'en sont écartés dans des proportions jamais connues jusqu'alors.
Or un tel texte a une importance considérable puisqu'il définit une trajectoire pour les finances publiques pour les cinq années à venir. Il fixe le cap à tenir et le chemin à suivre pour atteindre des objectifs préalablement définis.
Au vu de l'importance des enjeux, cette loi de programmation aurait donc dû avoir un impact déterminant et traduire une réelle volonté politique, celle consistant à s'attaquer enfin au redressement des finances publiques et d'en finir avec le désolant triptyque français des trois « d » : dette, déficit et dépense. La situation, vous ne l'ignorez pas, est des plus critiques puisque la France a le taux de dépenses publiques le plus élevé d'Europe et fait partie des cinq pays d'Europe dont la dette dépasse 100 % du PIB.
Mais, hélas, ce texte constitue une énième occasion manquée et se révèle pour le moins décevant tant il nous confirme que le Gouvernement n'a toujours pas pris conscience de l'impérieuse nécessité pour la France de se désendetter. Quand la charge de la dette explose à ce point et rend notre dette quasi insoutenable, la responsabilité impose de prendre enfin ce problème à bras-le-corps et d'en faire une priorité politique.
Or, monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, nous savons tous que le redressement des comptes publics exige du courage et impose beaucoup d'efforts. Dès lors, si, dès le début de la législature, vous ne montrez aucune ambition ou si peu de volonté, comment croire qu'en cinq ans, nous pourrons redresser la barre ?
Même le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) déplore une trajectoire « peu ambitieuse, notamment au regard des engagements européens de la France » et regrette un redressement des finances publiques insuffisant. Rendez-vous compte que la réduction du déficit est repoussée à 2027 – pas dans un an, pas dans deux ans, pas même dans trois mais dans seulement cinq ans, autant dire une éternité, alors que les taux d'intérêt remontent à vitesse grand V pour dépasser 2,5 %.
À titre indicatif, le déficit est prévu à 5 % du PIB en 2023, contre 1,5 % en Allemagne et 3 % en moyenne dans la zone euro.
Pire encore, la loi de programmation est bâtie sur des hypothèses que tous les instituts sérieux jugent complètement irréalistes.
Au-delà de leurs critiques et de leurs mises en garde, les députés du groupe Les Républicains ont été force de proposition, dans l'intérêt de la France et des Français.
Dans un esprit de responsabilité, et parce que le taux de dépenses publiques pour 2023 sera supérieur de plus de huit points à celui de l'Allemagne et de six points à la moyenne de celui de la zone euro, nous vous avons proposé par amendement de réaliser 20 milliards d'euros d'économies d'ici à 2025 dans le secteur administratif, le tout de manière indolore pour les Français.
Il s'agissait non pas de supprimer des services publics essentiels à nos concitoyens, mais de débureaucratiser le pays en votant un grand plan de sobriété bureaucratique. L'esprit de ce dernier, c'était : moins de Cerfa, plus de services. Il s'agissait de faire le tri parmi les opérateurs de l'État, en recherchant notamment ceux qui font doublon, comme le secrétariat général à la mer. Il s'agissait de réduire la masse salariale des administrations centrales pour en finir avec les lourdeurs administratives et la bureaucratie tatillonne,…
…quand Emmanuel Macron lui-même dénonçait en 2021 « un État bedonnant et malvoyant ».
Il s'agissait enfin d'enrayer l'inflation normative qui paralyse le pays et se chiffre en milliards d'euros, en étendant à toutes les nouvelles normes le principe « une règle entrante, une règle sortante ».
Selon l'OCDE, le coût des services publics en France est supérieur de 84 milliards d'euros au coût moyen des services publics dans les autres pays d'Europe.
Je terminerai par l'examen de la loi de programmation en séance publique. La majorité s'est offusquée de la suppression des articles 16 et 23 qui concernent la trajectoire des dépenses des collectivités territoriales. C'est un comble que le Gouvernement, qui refuse de réduire le train de vie de l'État, veuille imposer aux collectivités locales des contraintes qu'il ne s'applique pas à lui-même.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Non, monsieur le ministre délégué, quand les dépenses dérapent de près de 60 milliards d'euros en 2023 alors que la dépense courante a augmenté de près de 140 milliards d'euros au cours du précédent quinquennat,…
…il ne peut être donné de leçons aux communes, aux départements, aux régions qui présentent, année après année, des comptes à l'équilibre.
Pour toutes ces raisons, vous l'aurez compris, même si ce texte a été largement détricoté par l'Assemblée – avec la participation des députés du groupe Les Républicains –, cela ne suffit pas à modifier la trajectoire que vous avez choisie. Nous voterons donc contre le projet de loi. Mais, parce que nous sommes parfaitement raisonnables et constructifs et vu les contacts déjà pris, nous faisons totalement confiance au Sénat pour amender substantiellement le projet de loi afin de le rendre plus ambitieux et plus conforme à l'intérêt de la France et des Français.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je tiens avant tout à m'adresser à ceux qui doutent, à ceux qui auraient l'intention de rejeter le projet de loi. Arrêtons-nous sur les raisons avancées ici et là pour ne pas voter ce texte pourtant déterminant. Outre un prétendu manque d'ambition, certains opposants y lisent une absence de volonté de réduction du déficit structurel et, partant, de la dette publique. Permettez-moi de vous confondre par des arguments qui, je l'espère, vous feront changer d'avis et voter le texte.
Revenons un instant sur la période 2008-2014. En raison de la crise des dettes souveraines, la France avait procédé à un rééquilibrage budgétaire très important, notamment par de fortes hausses des prélèvements obligatoires pour les entreprises et surtout les ménages, tuant dans l'œuf la timide reprise de l'économie européenne, avec des conséquences désastreuses pour les finances publiques. Chers collègues, ne reproduisons pas les erreurs passées. Nous vous proposons une stratégie à long terme.
Autre grande leçon tirée de cette période : lors de la précédente crise, la forte hausse des dettes publiques de certains pays de l'Union européenne et l'absence d'un mécanisme budgétaire commun avaient conduit à la crise des dettes souveraines. Pour limiter ce risque, nous avons enfin décidé de nous doter d'une faculté budgétaire commune – le plan de relance européen, financé par un endettement commun.
Notez qu'un rejet du texte pourrait conduire à une remise en cause des versements attendus du plan national de relance et de résilience au titre des années 2022 et 2023.
Soulignons en outre que notre objectif de limitation de la hausse des dépenses publiques à 0,6 % en volume, soit quasiment deux fois moins que la croissance potentielle, est le plus ambitieux depuis l'institution des lois de programmation des finances publiques. J'en veux pour preuve les interventions régulières du président Coquerel pour en dénoncer la prétendue austérité.
D'autres, encore plus incohérents à mon sens, nous expliquent que l'objectif de baisse des dépenses n'est pas suffisant, ce que je peux tout à fait entendre, mais s'insurgent en même temps contre la participation des collectivités à l'effort de maîtrise des finances publiques. Vous considérez donc, chers collègues membres du groupe Les Républicains, que c'est à l'État seul de faire ce travail. Je crois pouvoir affirmer que la situation de l'État est en partie due au soutien sans faille que nous apportons aux collectivités – ce que montrent la garantie de recettes mise en place en 2020 et 2021, grâce à laquelle l'État a pris à sa charge les pertes de recettes des collectivités dues au covid, ou encore le filet de sécurité qui aidera en 2022 et en 2023 celles qui seront fragilisées par la hausse des prix de l'énergie. Les collectivités, au même titre que les autres administrations publiques, doivent contribuer à l'effort de redressement des finances publiques, et les modalités proposées dans ce projet de loi étaient, pour le groupe Démocrate, les bonnes.
Quant aux autres groupes – je m'adresse ici aux extrêmes –, vous qui avez voté hier, main dans la main, la motion de censure du Gouvernement…
…dites aux Français que, sous couvert de lutte contre l'austérité, c'est en réalité votre profonde europhobie qui vous anime. Retenez donc ce proverbe, chers collègues : c'est quand le ciel est bleu qu'on répare le toit.
Or, avec une dette dépassant 110 % du PIB, si nous voulons à l'avenir avoir des marges de manœuvre budgétaires pour répondre à d'éventuelles crises, nous devons maîtriser l'évolution des finances publiques. Ce texte comprend des dispositifs intéressants pour contenir l'évolution de la dépense et de la dette publiques : évaluations plus poussées ; limitation dans le temps des dépenses fiscales et des aides aux entreprises ; trajectoire claire de baisse des dépenses « brunes » pour mieux faire face à la dette climatique…
Pour toutes ces raisons, objectives, responsables et protectrices de l'avenir de nos concitoyens, les députés du groupe Démocrate voteront le texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.
En août dernier, dans ce même hémicycle, nous avons discuté du projet de programme de stabilité pour la période 2022-2027, qui nous était présenté par ce même gouvernement, et qui visait les mêmes objectifs que le présent projet de loi de programmation des finances publiques : rassurer les marchés, rassurer la Commission européenne, rassurer la Cour des comptes. Il s'agit donc de rassurer, rassurer et encore rassurer, mais à quel moment allons-nous justement rassurer les Françaises et les Français ?
MM. Hadrien Clouet, Benjamin Lucas et Marcellin Nadeau applaudissent.
Le groupe Socialistes et apparentés est navré de constater qu'à défaut d'aborder les questions d'urgence sociale qui concernent directement les Français, cette assemblée se trouve aujourd'hui mobilisée pour discuter d'un texte dont l'utilité n'est que très relative en droit interne.
Avec les annonces grandiloquentes qui ont accompagné l'installation du Conseil national de la refondation, nous pensions qu'une nouvelle ère de dialogue et d'écoute s'était ouverte entre le Gouvernement et les collectivités territoriales. C'est avec beaucoup de regrets que nous avons constaté l'inverse.
Nous en voulons pour preuve le contournement du CNEN – Conseil national d'évaluation des normes –, dont la consultation est pourtant prévue par la loi avant le dépôt de tout projet de loi affectant les finances des collectivités. Ce n'est pas nous qui le disons, mais le président même de cette institution, qui a dénoncé le « contournement consternant » des collectivités, après que le Gouvernement a décidé de ne pas saisir cette instance sur le texte sur lequel nous nous apprêtons à nous prononcer.
C'est sur ce fondement que, fait marquant et inédit au cours de la V
Le Gouvernement ne semble donc pas vouloir rompre avec cette tradition d'optimisme, au mieux volontariste, au pire insincère. Pour ne citer qu'un exemple, les hypothèses d'écart de production en 2022, de moins 1,1 point de PIB potentiel, et de croissance potentielle entre 2022 et 2027, de 1,35 % par an, sont qualifiées d'« optimistes » par le Haut Conseil.
Au-delà de son optimisme, il nous est permis de douter du sérieux même du Gouvernement. En effet, son hypothèse de croissance dépend d'effets épatants et immédiats des réformes du RSA, des retraites, de l'assurance chômage et de l'apprentissage. Nous ne connaissons ni leurs modalités, ni leur impact, ni même leur calendrier, mais ces réformes produisent donc déjà des effets miraculeux dans l'imaginaire du Gouvernement.
Pour en revenir au texte, nous déplorons l'absence totale de dispositions concrètes destinées à sérieusement lancer la planification de la transition écologique. Or, vous le savez, la crise énergétique que nous connaissons nous commande d'agir rapidement et efficacement. Nous nous devons d'être au rendez-vous, d'être à la hauteur des enjeux, ne serait-ce que pour garantir aux Français l'accès aux énergies dont ils ont besoin au quotidien.
De la même manière, nous déplorons que le projet de loi de programmation des finances publiques soit à ce point déconnecté de la réalité que vivent nos collectivités. Elles sont censées disposer de très grandes réserves, et vous estimez de manière descendante et sans aucune concertation avec elles que le moment est venu de limiter leurs dépenses de fonctionnement.
Je prendrai le cas des Antilles. Le saviez-vous ? La Guadeloupe, la Martinique, Saint-Martin ou encore Saint-Barthélemy font partie des îles les plus menacées par la submersion marine due au dérèglement climatique. Le saviez-vous également ? Selon un rapport du Giec, certaines de ces zones pourraient devenir inhabitables d'ici à 2040.
Vous le comprenez bien, en pareilles circonstances, imposer une baisse des dépenses de fonctionnement à ces collectivités revient à compromettre leur avenir et à les empêcher de se doter des moyens humains qualifiés afin de répondre à leurs préoccupations majeures.
Il est regrettable de le dire, mais il importe de le souligner : le projet de loi de programmation des finances publiques, telle qu'il nous est soumis, fait totalement fi du contexte économique que connaissent nos concitoyens…
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Le projet de loi de programmation des finances publiques a fait l'objet d'un examen attentif en séance publique – attentif, ou plutôt abrasif, puisque huit articles ont été supprimés. Le texte sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer dans quelques minutes a en effet été fortement dénaturé, même si des avancées sont à noter, telles que le meilleur bornage dans le temps des dépenses fiscales, la meilleure évaluation de ces dernières, le plafonnement des taxes affectées et l'établissement d'un état des lieux des missions et des emplois des opérateurs de l'État.
Plusieurs amendements adoptés permettront aussi une meilleure maîtrise et une meilleure évaluation de la dépense publique, notamment fiscale. La volonté de créer une loi de programmation pluriannuelle des financements de la transition écologique et celle d'engager les plus grandes collectivités territoriales à s'inscrire dans une démarche de budget vert vont également dans le bon sens.
Nous ne doutons pas que la navette permettra d'enrichir encore ce projet de loi et, surtout, de rétablir les dispositions supprimées, qui sont indispensables. Nous connaissons l'attachement de nos collègues sénateurs au sérieux budgétaire et à la bonne gestion des finances publiques.
Car si une loi de programmation des finances publiques n'a pas de portée contraignante sur les projets de loi de finances annuels, elle n'en demeure pas moins un texte d'une grande importance.
D'abord, elle nous permet – à nous parlementaires – de mener à bien notre rôle de contrôle et d'évaluation de l'action du Gouvernement et des politiques publiques. Elle fournit en effet des outils comparatifs indispensables au suivi de la politique économique et de la gestion de nos finances publiques.
Ensuite, ce texte fixe un cap, une boussole à suivre lors des cinq années à venir. Le rétablissement des finances publiques est bien une nécessité. Pour y parvenir, il est indispensable que les objectifs soient gravés dans le marbre de la loi. Et pour voir loin, il nous faut un cap clair et cohérent : c'est ce que proposait ce projet de loi de programmation dans sa rédaction initiale.
Enfin, de ce texte dépend notre crédibilité vis-à-vis de nos partenaires et des acteurs extérieurs. La France a pris des engagements au niveau européen qu'elle doit tenir. La parole de la France est quelque chose qui compte et elle ne saurait être bradée sur l'autel de la politique politicienne. Au-delà même de la parole donnée, la fixation d'une trajectoire constitue un gage de sérieux vis-à-vis de nos créanciers, des investisseurs, de tous les acteurs qui pensent – à raison – que la France est un pays fort, aux fondamentaux solides et doté d'une vision d'avenir.
Ne nous mentons pas : le redressement des finances publiques n'est pas un caprice de techno, ni une lubie dépassée, mais une absolue nécessité pour préserver notre souveraineté et ne pas hypothéquer l'avenir de nos enfants. Le mirage de l'argent magique s'est évanoui. La remontée des taux d'intérêt, qui frôlent les 3 %, nous rappelle que notre pays ne peut se permettre de vivre au-dessus de ses moyens.
Nous ne pouvons nous soustraire à la réalité. Nous ne devons pas être dans le déni. Nous ne pouvons pas être le seul pays à se passer d'une programmation sérieuse de ses finances publiques. Nous ne devons pas être le seul pays à laisser filer la dépense publique et à considérer comme normal de consacrer près de 60 milliards d'euros par an à la charge de la dette. Nous ne serons pas le seul pays pour lequel une dette publique de 3 000 milliards d'euros n'est pas un problème. Nous mettre des œillères en nous privant d'une loi de programmation des finances publiques n'aura pas d'effet, sinon celui de foncer vers le précipice avec le pied sur l'accélérateur.
Le groupe Horizons et apparentés votera donc ce projet de loi de programmation pour les années 2023 à 2027, et ce même s'il a été fortement amoindri, car nous sommes convaincus que la navette permettra d'aboutir à un texte cohérent et structuré.
Le plus dur et le plus important sont devant nous : appliquer la feuille de route que j'ai évoquée. Il nous faudra faire des choix courageux, mener des réformes ambitieuses et justes, et résister aux sirènes de la facilité. Notre groupe sera aux côtés du Gouvernement de façon responsable, car notre rôle est tout simplement d'assurer notre avenir et de préserver notre souveraineté.
Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et Dem, ainsi que sur quelques bancs du groupe RE.
Avant de donner la parole à Mme Christine Arrighi, j'informe que le scrutin public sur l'ensemble du projet de loi est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Chère collègue, vous avez la parole.
…intempestifs, vous avez raison, et qui témoignent à suffisance de l'incapacité ou de l'absence de volonté du Gouvernement de tenir compte du choix électoral des Françaises et des Français, nous voici à nouveau réunis pour nous exprimer sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
Le Gouvernement a répété à l'envi ses éléments de langage, espérant sans doute que par la répétition le mensonge devienne vérité. Le mensonge est celui d'une opposition qui serait sans propositions, qui ne serait que de blocage. Je rappelle d'ailleurs qu'il n'y a pas une opposition, mais des oppositions.
Et je profite de cette occasion pour revenir, au contraire, sur les nombreux amendements que la NUPES a défendus en commission et ici même en séance, afin d'améliorer ce texte de programmation des finances publiques.
Au total, les membres de notre intergroupe ont déposé soixante et un amendements, dont vingt et un pour le groupe Écologiste – NUPES. Ils visaient à dire non au pacte « de confiance », à maîtriser les dépenses de fonctionnement des collectivités de manière raisonnée, à accompagner l'investissement durable, à préciser les dépenses non pilotables des collectivités, à améliorer le ratio entre les dépenses considérées comme défavorables pour l'environnement et celles considérées comme favorables, ou encore à établir une programmation du financement de la transition écologique. Ces amendements contenaient des mesures raisonnables, soutenues par des élus responsables de tous bords.
M. Benjamin Lucas applaudit.
Telle est la vérité, mes chers collègues, preuves à l'appui.
Je rappelle qu'en démocratie, gouverner, c'est aussi écouter et surtout tenir compte des propositions faites dans l'intérêt du pays, particulièrement lorsqu'on se prévaut de suivre une nouvelle méthode de dialogue. Le rejet du projet de loi de programmation des finances publiques en commission des finances est donc la conséquence du refus de prendre en considération des propositions de coconstruction venant des autres groupes, alors qu'elles sont en phase avec les besoins des collectivités territoriales et des citoyens.
Face à la volonté du Gouvernement de réduire aveuglément les déficits publics, nous avons proposé l'octroi de moyens suffisants pour le financement des services publics, seuls à même, en ces temps de crises qui se succèdent et se percutent, de jouer le rôle d'amortisseur social pour les plus précaires.
Face au souhait de baisser les dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales de 0,5 % par an en volume, nous avons proposé de limiter cette baisse à 0,1 % par an, afin de permettre aux collectivités d'accélérer leurs investissements en faveur de la transition écologique et énergétique, en vue de limiter les dépenses énergétiques, de réduire la consommation d'énergies fossiles et d'atténuer les effets du dérèglement climatique.
Par opposition au pacte « de confiance » du Gouvernement, nous avons prôné la construction d'une relation de confiance digne de ce nom, qui repose sur la reconnaissance pleine et entière des collectivités comme racines de la République. Voilà pourquoi, en cette période difficile pour les finances publiques, nous nous sommes opposés à la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), mesure qui fait perdre 8 milliards d'euros aux collectivités territoriales.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Par ce choix, nous marquons également notre opposition à la politique fiscale de l'offre du Gouvernement, qui est toujours au profit des mêmes.
Chers collègues, veuillez vous installer dans le calme et écouter Mme Arrighi.
Monsieur Attal, après le « quoi qu'il en coûte », le « combien ça coûte ? » pour l'écologie n'est pas une question à se poser ,
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES
car cela revient à nier l'urgence sociale et écologique, qui pourrait conduire à l'effondrement des piliers de notre existence même. L'austérité budgétaire sera-t-elle donc votre seule obsession jusqu'à la fin du quinquennat ? Allez-vous brider les dépenses, alors même que les besoins sociaux, énergétiques et écologiques sont prégnants ?
Hier, à Toulouse, la température s'élevait à 29,6 degrés. La Garonne et l'Ariège sont à leur plus bas étiage depuis des dizaines d'années. Nous avons proposé des marges de manœuvre, telles que l'établissement d'une contribution de solidarité sur les superprofits ou d'un ISF – impôt de solidarité sur la fortune – climatique, la progressivité de la taxation des dividendes, ou encore la taxation des superdividendes – mesure d'ailleurs votée dans cet hémicycle.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Mais vous les avez toutes rejetées.
Contrairement à vous, nous souhaitons une maîtrise du déficit et de la dette publics qui tienne compte des difficultés rencontrées par notre pays, avec des investissements massifs pour éviter les crises à venir dans les secteurs des transports, du logement et des services publics. Mais, je le répète, vous avez tout rejeté !
Face à votre politique d'assurance des chocs, qui consiste, telles des rustines, à apporter des solutions ponctuelles à des difficultés structurelles, nous défendons une ambitieuse politique de prévention et de prospective, qui passe par la planification écologique, le développement des emplois verts, la sortie des énergies fossiles et la justice sociale.
« Gouverner, c'est prévoir » : vous gouvernez sans prévoir malgré les alertes qui se font de plus en plus pressantes. Comme en commission, nous voterons contre ce projet de loi de programmation des finances publiques.
Le 24 avril dernier, j'ai voté pour Emmanuel Macron au second tour de l'élection présidentielle.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Je ne l'ai pas fait pour son projet, pour la retraite à 65 ans, pour l'allégeance au marché libéralisé de l'énergie qui fait tant de mal ou pour frapper durement les personnes privées d'emploi quand certains se gavent, non, je l'ai fait tout simplement par amour de la République et par souci de faire vivre nos valeurs communes.
Protestations sur les bancs du groupe RN.
« Quand les blés sont sous la grêle, fou qui fait le délicat » disait le poète. En ces temps où la guerre est à nos portes et où les nationalismes s'exacerbent, poussant à la haine et à la division, il faut bien entendre, messieurs les ministres, que des millions de Français, comme moi et comme les députés de gauche, ont fait ce geste salutaire qui n'était pas un geste d'adhésion. Notre main n'a pas tremblé, car elle ne tremble jamais pour battre l'extrême droite, qui a encore donné libre cours à sa haine lors des questions au Gouvernement de cet après-midi.
Dès lors, le Président de la République n'a pas de majorité…
…favorable à son projet présidentiel et les Français ne s'y sont pas trompés, en ne lui accordant pas de majorité absolue, ici, à l'Assemblée nationale. Alors, toutes vos circonvolutions et vos rodomontades visant à expliquer que le projet présidentiel doit être déroulé coûte que coûte relèvent de l'incantation et risquent de se fracasser sur la colère et la mobilisation sociale. Au cours de tous les débats budgétaires, avec tous les collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES, rassemblant les députés communistes et des députés d'outre-mer, nous n'avons cessé de promouvoir un autre chemin pour notre pays, à même de répondre aux crises sociale, climatique et démocratique.
Alors que les 500 plus grandes fortunes ont vu leur patrimoine doubler en moins de trois ans…
…et que 10 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, il faut retrouver l'égalité, en déployant un impôt plus juste et plus progressif, un impôt qui s'attaque à la rente.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.
Les effets de l'inflation, la perte de pouvoir d'achat des couches modestes et moyennes et votre refus d'augmenter les salaires ne détruisent pas seulement des vies, ils pénalisent notre économie. L'égalité, c'est aussi redonner du souffle à nos services publics, à commencer par la santé si malmenée, avec un objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) qui subit une baisse nominale de 0,8 %.
Il faut retrouver le chemin de la liberté. Libérons-nous du carcan imposé par les traités européens de Maastricht et de Lisbonne ! Ce carcan pèse sur les peuples et représente un modèle profondément injuste qui nous conduit à lâcher notre souveraineté sur l'énergie…
…et qui place les citoyens, les PME et les collectivités territoriales devant un mur ; un modèle qui conduit à transférer toujours davantage de richesses produites vers la rémunération du capital.
Il faut retrouver le chemin de la fraternité, celui d'une France ouverte et généreuse, une France qui aura compris que les migrations, conséquences directes de guerres et de crises climatiques que le capitalisme financier engendre, nécessitent de l'humanité et non des barbelés.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Si la France s'aligne sur des gouvernements européens nationalistes et d'extrême droite, elle perdra non seulement son âme, elle coupera le fil de son histoire.
La précipitation à adouber de tels gouvernements est une erreur.
C'est en ayant en tête l'exigence de porter haut nos valeurs communes de la République, par des politiques publiques ambitieuses, généreuses, par des politiques qui combattent un système profondément inégalitaire, que nous avons défendu l'idée d'une loi de programmation des finances publiques différente. Personne ne peut accepter que l'on assèche les services publics comme votre projet de loi le propose : un seul exemple, l'enseignement scolaire, dont le budget augmentera en 2023 mais baissera en 2024 et en 2025 en tenant compte de l'inflation.
Personne ne peut accepter la maltraitance faite à l'assurance maladie, avec l'oubli du financement du grand âge et la destruction de la santé publique. Personne ne peut accepter le sort réservé aux collectivités territoriales : toutes les associations d'élus communaux ont dénoncé cette situation, mais vous continuez à serrer le garrot financier qui les asphyxie.
C'est pourquoi ce projet de loi de programmation des finances publiques, même famélique, doit être rejeté. Il est urgent d'abandonner cette voie de l'échec, dont l'issue pourrait ressembler à l'Italie : ne soyez pas les Mario Draghi de ce côté des Alpes ! Et c'est parce que nous sommes responsables, que nous proposons, avec tous les groupes de la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, un projet différent, juste, efficace et porteur de jours heureux, un projet qui associe l'égalité pour tous les territoires de la République, dans l'Hexagone comme outre-mer.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
« Ah ! » sur plusieurs bancs
le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT) a hésité entre voter pour ou voter contre ce projet de loi. Voter le texte présentait l'avantage de contraindre le Gouvernement à transmettre au Sénat un texte vidé de sa substance – et si le Sénat avait de l'humour, il l'aurait voté conforme pour faire respecter le vote de l'Assemblée nationale ; rejeter le texte avait le mérite de la clarté mais l'inconvénient de permettre au Gouvernement de faire examiner par le Sénat son texte initial. Je ne ferai pas durer le suspense très longtemps : par souci de clarté et pour maintenir la cohérence du vote de notre groupe en commission et lors des débats en séance publique, nous voterons contre le texte.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Les trois principales critiques que notre groupe a adressées au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 demeurent, même si, en commission comme en séance publique, les votes de l'opposition ont fortement atténué le caractère négatif de ce texte.
La première critique a trait aux collectivités locales. Messieurs les membres du Gouvernement, vous persistez dans la dérive jacobine : ce texte est, comme le projet de loi de finances, fondamentalement contraire aux principes fondateurs de la démocratie locale, en particulier de la décentralisation. En somme, vous êtes thatchériens quand nous sommes tocquevilliens. L'article 23 du projet de loi, abrogé en séance publique, est un nouvel avatar du pacte de Cahors, qui fut un échec. Pourquoi voulez-vous recréer une tutelle sur des collectivités locales qui dégagent globalement un excédent de fonctionnement leur permettant d'avoir un taux d'autofinancement élevé et de ne pas peser sur les déficits publics ? Pourquoi, alors que la dette publique locale décline – elle ne représente que 10 % du PIB – et que, contrairement à celle de l'État, elle est exclusivement affectée à l'investissement ?
Ce texte poursuit également le démantèlement de la fiscalité locale en ôtant, en deux ans, au bloc communal et aux départements la CVAE, composante majoritaire de la contribution économique territoriale (CET) qui s'était substituée à la taxe professionnelle : cette première réforme avait retiré aux collectivités locales le droit de fixer le taux de la CVAE mais avait maintenu la territorialisation de l'assiette, quand votre seconde réforme supprime la territorialisation et poursuit le démantèlement de la fiscalité locale. Il ne reste presque plus, pour les départements et les régions, d'impôts locaux dont les assemblées délibérantes peuvent fixer les taux ; pour le bloc communal, il reste le foncier bâti dont la pérennité est d'ailleurs menacée par le nouveau report de la réforme de l'assiette.
Deuxième critique : vous réduisez des impôts à crédit sans diminuer le taux de prélèvements obligatoires dans la durée et sans faire baisser le déficit public suffisamment rapidement. Est-il sérieux de supprimer, en deux ans, la CVAE, pour un coût brut de 8 milliards d'euros, la redevance audiovisuelle pour 3 milliards et la dernière tranche de la taxe d'habitation pour 2,8 milliards, alors que le déficit public est maintenu à 5 % du PIB en 2023 ? Le HCFP prévoit d'ailleurs un déficit public inférieur aux 5 % que vous annoncez en 2022 mais supérieur à 5 % en 2023, du fait d'hypothèses trop optimistes sur les taux d'intérêt à dix ans – 2,5 % à la fin de 2023 alors qu'ils se situaient à 2,7 % au début de ce mois ; ainsi que sur le taux de croissance – 1 % en volume alors que les prévisions se dégradent de mois en mois et oscillent actuellement entre 0 % et 0,6 % –, et sur le baril de pétrole – vous avez retenu un prix de 85 dollars alors qu'il a dépassé 90 dollars et s'achemine vers 100 dollars à cause de la position de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep).
Troisième critique : vous augmentez excessivement les dépenses publiques et vous n'avez pas le courage de faire des économies structurelles. Comme l'a affirmé le HCFP, votre affichage d'une baisse de 1,5 % en volume des dépenses publiques est une présentation fallacieuse qui dissimule une augmentation de 0,7 %, obtenue par l'utilisation de l'indice implicite des prix du PIB et non l'indice des prix à la consommation et par l'élimination des effets des mesures ponctuelles liées à la crise énergétique. Vous dépensez 45 milliards d'euros en 2023 pour limiter à 15 % la hausse des prix de l'électricité et du gaz et vous financez cet énorme coût par les reversements des contrats à prix garantis des énergies renouvelables pour 10 milliards d'euros et par les versements des entreprises énergétiques pour 20 milliards, ce qui laisse 15 milliards nets à financer dans le budget de l'État. Ces mesures sont des mesures générales qui font baisser l'indice des prix à la consommation de 3,2 %, mais le courage aurait consisté à concentrer les aides sur nos concitoyens les plus en difficulté, ce qui serait plus juste socialement et plus économe des deniers publics : nous avions d'ailleurs défendu cette approche dès le mois de juillet lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2022. Notre groupe votera donc, je le répète, contre ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.
Que n'a-t-on entendu sur ce projet de loi de programmation ! Rarement une trajectoire aura été autant combattue ! Mes chers collègues, je voudrais vous convaincre qu'en la refusant et en la vidant de sa substance économique, non seulement vous en videz le sens politique, mais surtout vous participez de notre affaiblissement collectif. De ce point de vue, au moins ce texte aura-t-il permis de clarifier la répartition des rôles avec, d'un côté, ceux qui refusent toute forme de maîtrise de nos dépenses publiques et, de l'autre, ceux qui considèrent que le sérieux budgétaire a une valeur parce que derrière chaque euro de dépense, il y a soit un euro de dette, soit un euro d'impôt.
Le camp de la responsabilité, d'un côté, et l'alliance des contraires au service de l'anomie budgétaire, de l'autre. J'observe que nous avons à la fois le « quoi qu'il en coûte » et le « quoi qu'il en soit », tous les prétextes étant bons pour battre la majorité du Président de la République,…
…fût-ce au mépris de la cohérence idéologique. Majorité de circonstance quand la droite et la gauche réunies rejettent, de concert, l'évolution la plus favorable de nos dépenses de santé depuis dix ans ; majorité de circonstance quand la droite et la gauche rejettent tous les outils qui nous permettent de maîtriser les dépenses de fonctionnement de nos collectivités ; majorité de circonstance quand la droite et la gauche rejettent l'idée même que nous puissions poursuivre des objectifs chiffrés de finances publiques, conformément à nos engagements européens et au service de la préservation de notre souveraineté financière.
Mes chers collègues, en proposant de rejeter cette loi de programmation, vous affaiblissez à la fois notre pays en Europe et votre propre rôle de parlementaires en matière d'évaluation et de contrôle de l'action du Gouvernement. Vous vous tirez une balle dans le pied. C'est d'ailleurs la première loi de programmation à s'inscrire dans un cadre rénové, d'initiative parlementaire, à l'issue de l'excellent travail mené par Éric Woerth et notre ancien collègue Laurent Saint-Martin, à qui nous devons rendre hommage.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Au fond, que les partis extrêmes rejettent ce texte parce qu'ils considèrent que la contrainte financière n'existe pas et que l'on peut s'endetter à l'infini est assez cohérent avec leur ligne politique. Quand on ne veut pas voir que l'on est malade, on ne prend pas sa température.
Mais j'en appelle aux partis de Gouvernement : si vous rejetez cette loi, vous cassez le thermomètre qui pourrait nous servir collectivement de corde de rappel. Ce n'est pas moi qui le dis, mais un ancien ministre socialiste, Pierre Moscovici.
En proposant de ne pas adopter cette loi, vous affaiblissez le Parlement et vous rejetez l'ensemble de ses prérogatives en matière de contrôle et d'évaluation de l'action du Gouvernement. La loi de programmation des finances publiques est avant tout une boîte à outils à votre service. Refuser la loi de programmation, c'est refuser d'admettre qu'il nous appartient d'évaluer l'action publique sur la base de revues annuelles thématiques des politiques publiques ; refuser la loi de programmation, c'est refuser de se donner de la visibilité, c'est refuser de prévoir, ce qui est, me semble-t-il, l'apanage du législateur, en particulier du législateur financier.
Ce n'est pas avec cette arrogance que vous y arriverez, monsieur Lefèvre !
De ce point de vue, comment allez-vous vérifier sans loi de programmation si le Gouvernement tient ses engagements en matière de verdissement des politiques publiques, de réduction des dépenses fiscales et sociales ou de taxes affectées ? Sur quelle base allez-vous vous fonder pour critiquer les hypothèses macroéconomiques du Gouvernement quand vous n'aurez plus aucun texte pour le faire ?
Plus grave encore : rejeter ce texte, c'est nous affaiblir collectivement et affaiblir le Président de la République en Europe.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Que l'on soit d'accord ou non avec lui, vous pouvez participer de son affaiblissement, mais vous ne nous entraînerez jamais dans votre chute. Il ne faut pas être grand clerc pour se rendre compte de la difficulté devant laquelle se trouverait notre pays s'il était le seul à ne pas disposer d'une trajectoire rendant crédible la réalisation de ses objectifs financiers. Pire encore, comme l'a rappelé le ministre, le bénéfice des aides européennes pourrait être ralenti du fait de ce rejet. J'en appelle donc à la responsabilité de tous les partis qui croient dans cette belle idée d'Europe et qui refusent d'affaiblir notre souveraineté financière.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je le dis à nos collègues socialistes, à vous qui avez transcrit le traité européen dans notre droit interne et qui avez présidé à la rénovation des lois de programmation : ne reniez pas l'esprit de responsabilité qui, fut un temps, vous animait encore.
Je m'adresse à ceux qui aspirent à gouverner notre pays un jour : vous pouvez être en désaccord total avec le projet de budget mais, en votant contre le projet de loi de programmation, vous faites sauter une borne de responsabilité. Un jour, si les Français vous en donnent mandat, vous aurez à présenter au peuple un nouveau projet de loi de programmation.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 557
Nombre de suffrages exprimés 552
Majorité absolue 277
Pour l'adoption 243
Contre 309
Le projet de loi n'est pas adopté.
Mesdames et messieurs les députés, nous avons eu de longs débats sur ce texte et je veux remercier l'ensemble des parlementaires qui se sont investis dans ces débats, en particulier le président et le rapporteur général de la commission des finances. Le rejet du projet de loi en séance publique était attendu, puisqu'il avait été rejeté en commission. Les oppositions ont montré une certaine cohérence : cela a d'ailleurs été souligné par plusieurs orateurs des oppositions qui ont dénoyauté ce texte en le vidant de l'intégralité de sa substance au cours des débats. Cette cohérence est celle de l'opposition systématique, quoi qu'il en coûte, aux textes présentés par le Gouvernement. C'est dommage, car ce projet de loi prévoyait des mesures importantes pour le Parlement en matière d'évaluation et de contrôle : évaluation renforcée ou encore souveraineté dans le choix de prolonger ou de déclarer caducs certains dispositifs. Avec ce vote, les oppositions ont inventé le vote d'autocensure, puisqu'elles se privent d'instruments essentiels pour évaluer l'action publique.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Le texte va poursuivre son cheminement au Sénat. J'ai toute confiance dans la capacité des sénateurs à adopter un texte responsable non seulement pour nos finances publiques, mais également pour le rôle des parlementaires dans l'évaluation de celles-ci.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs des groupes Dem et HOR.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq, sous la présidence de Mme Naïma Moutchou.
Nous abordons la quatrième partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives aux dépenses pour l'année 2023.
Je vous informe qu'à la demande du Gouvernement, en application de l'article 95, alinéa 4, du règlement, l'Assemblée examinera par priorité les articles 32 à 37, ainsi que les amendements portant article additionnel après ces articles.
Rappels au règlement
Madame la présidente, l'article de notre règlement que vous venez de citer permet en effet au Gouvernement de demander l'examen prioritaire de certains articles. Je regrette que nous n'ayons pas été prévenus plus tôt, ce qui nous aurait permis de bien nous préparer à cet examen prioritaire. D'autres articles seront-ils soumis à la même procédure ce soir, demain après-midi ou demain soir ?
L'article 100, alinéa 5 du règlement prévoit l'examen prioritaire des amendements présentés par le Gouvernement. Un amendement gouvernemental a été déposé après l'article 32. D'autres sont-ils prévus ? Quels amendements non gouvernementaux seront intégrés au texte du 49.3 ?
J'aimerais soulever une autre question, celle de l'irrecevabilité des amendements. Des amendements continuent de tomber. Or pour la bonne qualité de nos débats, il est important d'arrêter la liste des amendements en discussion.
Enfin, la feuille verte, qui organise nos débats, prévoit que nous débattrons du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) jusqu'à demain soir, soit une fin de séance cet après-midi, une séance ce soir et deux séances demain. Cela ne me semble pas être à la hauteur d'une quatrième partie de PLFSS.
J'appelle donc à une réorganisation de nos travaux cette semaine afin que nous puissions examiner l'ensemble de la quatrième partie.
Il se fonde également sur l'article 100 du règlement, notamment ses deuxième et troisième alinéas. Je reprends à mon compte les questions de M. Bazin sur l'organisation de nos travaux. Par ailleurs, alors que les précédentes parties de ce texte ont été adoptées par le biais de l'article 49, alinéa 3, en ira-t-il de même pour cette partie ? Quelle est la nature de nos discussions ?
Enfin, je vous interpelle sur le nombre d'amendements déclarés irrecevables. Hier soir, alors que je m'exprimais à la tribune sur le recours à l'article 49.3 pour la troisième partie de ce texte, j'étais notifié par courriel de l'irrecevabilité d'une bonne trentaine de mes amendements. Je suis surpris par cette manière de procéder et regrette cette réduction du champ de la discussion. Si nos amendements en sont ainsi exclus alors qu'ils entraient dans le cadre du PLFSS, quand traiterons-nous vraiment du handicap ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES. – Mme Marie-Charlotte Garin applaudit également.
Il se fonde sur l'article 121-1 du règlement. Le groupe Horizons et apparentés prend acte du changement d'ordre d'examen du texte, mais espère que, malgré les nombreux amendements à examiner, nous progresserons suffisamment pour débattre du système de santé, préoccupation majeure de nos concitoyens, pour laquelle nous avançons un grand nombre de propositions, concernant aussi bien l'accès aux soins que la politique du médicament. Ce point constitue toujours l'un des plus gros morceaux du budget de la sécurité sociale, sans minimiser l'importance des sujets que nous aborderons en priorité – l'autonomie et les prestations familiales.
Nous aimerions bien pouvoir traiter des accidents du travail, également !
Il faudrait véritablement débattre de ces questions de santé.
Enfin, monsieur Bazin, vous vous plaignez du trop petit nombre de séances restantes pour ce texte, mais ceux qui sont habitués à l'examen du PLFSS savent que c'est la troisième partie qui prend le plus de temps. Nous disposons cette année du temps habituel pour l'examen de la quatrième partie. Débattons !
La semaine dernière, les membres du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale ont bien travaillé, en défendant des amendements de revalorisation salariale et de pérennisation du financement de la sécurité sociale, pour en finir avec les suppressions de lits, mais le débat a été interrompu par le recours au 49.3 Pourtant, ce week-end, le ministre de la santé et de la prévention, dont je regrette l'absence aujourd'hui, a déclaré que « les débats dans l'hémicycle [n'étaient] pas à la hauteur des enjeux ».
Après avoir recouru au 49.3 et à la procédure d'examen par priorité pour les articles 32 et suivants, au détriment de l'article 16, quel culot vous avez de nous accuser ainsi ! Vous passez en force, car en réalité, je le répète, c'est vous, au Gouvernement, qui n'êtes pas à la hauteur – c'est d'ailleurs l'accusation que 4 000 soignants en pédiatrie ont portée contre vous ce week-end encore ; c'est vous qui prévoyez de nouvelles économies pour l'hôpital ; c'est vous qui utilisez tous les moyens pour esquiver les débats ! Dites-nous au moins si nous aurons le temps d'achever l'examen de ce texte ou si vous comptez de nouveau recourir au 49.3 !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également.
À travers l'article 32, le Gouvernement entend renforcer la transparence financière des établissements et services médico-sociaux. Alors que le scandale Orpea occupe encore tous les esprits, nous ne pouvons que soutenir une telle initiative, car nous avons besoin de davantage de contrôles, de transparence et de régulation. Monsieur le ministre, quelles démarches ont été entreprises par les ARS – agence régionale de santé – en matière de contrôle ? Combien de dérives ont été détectées ? Quelles actions ont été menées pour y mettre fin ?
Madame la rapporteure générale, l'article 32 va dans le bon sens en matière de régulation financière. Cela étant, il me semble insuffisant pour éviter les dérives dues à la financiarisation de certains établissements. Pour compléter le dispositif proposé, nous vous proposerons des amendements. En l'état, l'article 32 se limite aux abus des établissements d'hébergement. Pourtant, comme Mme la présidente de la commission des affaires sociales le sait bien, des abus, également liés à la financiarisation, ont aussi été constatés dans ce que l'on pourrait appeler les néocentres de santé. Enfin, des alertes nous sont parvenues concernant de sociétés de téléconsultation, où la qualification des professionnels de santé n'est pas garantie et où les données sont parfois transmises à l'étranger pour interprétation. Monsieur le ministre, il est urgent de s'atteler à ces questions.
Les présentes dispositions font suite à la révélation de la gestion scandaleuse des établissements de l'entreprise Orpea, qui a alimenté la chronique pendant de nombreuses semaines et a permis de braquer le projecteur sur des pratiques qui ne sont sans doute pas propres à l'entreprise en question. Celles-ci s'expliquent par le désir de dégager des profits lors de l'accompagnement de nos anciens, ce qui pose des questions lourdes sur l'organisation de notre système d'aide à l'autonomie, d'accompagnement, d'accueil et d'hébergement de ces personnes.
Les présentes dispositions sont minimales et soulèvent beaucoup de questions. Nos propositions n'ont pas toujours trouvé grâce aux yeux de ceux qui examinent la recevabilité, notamment financière, des amendements. Il faudrait pourtant discuter de la séparation entre les budgets soins et dépendance des établissements et de l'imputation de leurs dépenses de personnel.
Des contrôles supplémentaires pourraient être diligentés mais, au fond, comment pouvons-nous contrôler à la fois les groupes et les établissements ? Pour dire les choses avec douceur : voulons-nous continuer à laisser des organismes à but lucratif – c'est-à-dire ayant pour objet de dégager des profits – gérer aussi massivement les établissements qu'aujourd'hui ? Nous ne pouvons continuer ainsi : la faiblesse des services publics est à la source des problèmes. Il faut donc les développer et s'attaquer à l'idée qu'il est possible de dégager des profits sur le dos de nos anciens.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.
L'article 32 prévoit le renforcement du contrôle des établissements pour personnes âgées. Le scandale Orpea a mis en lumière la nécessité de compléter l'arsenal des outils à la disposition de l'État, notamment des agences régionales de santé. Très bien ! Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires y est favorable.
Comme j'ai pu le dire dans la discussion générale sur le PLFSS, les établissements sociaux et médico-sociaux n'ont pas à craindre les contrôles. Ceux-ci sont au contraire nécessaires et utiles pour améliorer leur pratique. Lorsque l'on dirige un établissement sanitaire et social, c'est au contraire l'entre-soi de l'entreprise, du groupe, de l'association qu'il faut dépasser : les contrôles y aident. Toutefois, ces contrôles restent souvent uniquement administratifs et se fondent seulement sur des critères chiffrés, les fameux indicateurs de qualité. C'est nécessaire, mais insuffisant. Pour rendre les contrôles plus efficaces et pertinents, les inspecteurs des ARS doivent bénéficier du temps nécessaire pour mener une analyse de fond. La baisse des effectifs de ces agences au cours des dernières années n'y aide pas, vous en conviendrez.
Plutôt que les contrôles, c'est le travail mené dans les établissements lui-même qui doit faire l'objet de toute notre attention. Nous aurons beau mener tous les contrôles possibles, le manque d'effectif dans les Ehpad rend inéluctables les scandales qui se succèdent dans notre pays. Je n'oppose pas les établissements en fonction de leur statut – public, privé ou associatif – mais de leur démarche, vertueuse ou non.
Oui, les groupes privés qui pratiquent une tarification élevée ont une responsabilité majeure lorsque des actes de maltraitance se multiplient dans leur structure, mais notre priorité, pour améliorer l'accompagnement de nos aînés, quels que soient les Ehpad, est d'assurer la présence d'un nombre suffisant d'aides-soignantes et d'infirmières auprès des résidents. Or les immenses difficultés de recrutement dans les Ehpad l'empêchent. Monsieur le ministre, vous avez proposé la création de 3 000 postes. C'est largement insuffisant. Le contrôle est indispensable, mais ne mettons pas la charrue avant les bœufs.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.
Dans le livre Les Fossoyeurs, publié cette année, Victor Castanet révélait la faiblesse du contrôle public des Ehpad du groupe Orpea et la maltraitance mal dissimulée derrière la façade luxueuse mais trompeuse de ces établissements qui rationnent la nourriture – les carences étant compensées par des prescriptions hyperprotéinées – et les protections hygiéniques, tout en bénéficiant de rétrocessions des fournisseurs sur leurs achats pour le soin et la dépendance, alors que ceux-ci sont financés par les fonds publics. La commission des affaires sociales s'est saisie du sujet, avec une mission flash. Elle a formulé des préconisations et a réfléchi au modèle d'Ehpad souhaitable pour l'avenir, en pensant aux personnels de ces établissements, eux aussi victimes d'un système qui vise le profit.
De son côté, le Gouvernement a diligenté une inspection de l'Igas – Inspection générale des affaires sociales – et a renforcé les contrôles – l'ouverture de 150 postes supplémentaires a ainsi été programmée. L'article 32 marque une nouvelle étape, avec des mesures fortes, pour renforcer la transparence financière et comptable des établissements et compléter l'arsenal juridique à la disposition des ARS. Le contrôle portera sur les Ehpad locaux et sur les instances gestionnaires centralisées où sont adoptées certaines décisions structurantes, hélas, au service prioritaire des intérêts financiers.
Le travail en commission a conduit à renforcer les sanctions. J'appelle également votre attention sur l'amendement de la rapporteure Caroline Janvier qui renforce le pouvoir de contrôle de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes sur ces établissements, afin de le rendre plus effectif.
Adoptons toutes les mesures nécessaires pour garantir un accompagnement digne et un environnement sain et bien traitant pour les résidents et les professionnels.
Au début de l'année, le scandale des maisons de retraite Orpea agitait la France et exposait dans les médias ce que tout le monde savait : les prestations des maisons de retraite sont onéreuses alors que la qualité n'est clairement pas au rendez-vous. Pire encore, un nombre important d'établissements pratique une politique de réduction des dépenses et de maximisation des profits. Si cette gestion augmente la rentabilité, elle transforme l'accueil des résidents en nuisant aux conditions de vie des personnes âgées et à la qualité des prestations fournies et des soins proposés.
Cette situation n'est pas nouvelle. Les personnes âgées, particulièrement celles qui n'ont pas de famille pour les défendre et les visiter, subissent parfois des conditions de résidence particulièrement pénibles. Le Gouvernement souhaite donc, à travers cet article, renforcer les conditions de contrôle des maisons de retraite. Nous regrettons qu'il n'ait pas diligenté une enquête plus tôt et qu'il ait attendu que le scandale explose pour réagir à une situation que personne n'ignorait.
Nous sommes d'accord pour accentuer le contrôle sur les entreprises et les sociétés n'étant pas gestionnaires des établissements de santé, en leur interdisant notamment les programmations financières visant à accroître la rentabilité des maisons de retraite au détriment des résidents. Cependant, les agences régionales de santé ne sont pas aptes à exercer un pouvoir de contrôle renforcé. Puisqu'elles agissent à un niveau trop décentralisé, elles affaiblissent la capacité de l'État à contrôler la gestion de ces établissements. Le contrôle doit être confié aux préfets de régions, qui peuvent encadrer les pratiques plus en amont, de manière plus cohérente, afin de mieux prévenir ces abus. Les députés du groupe Rassemblement national voteront donc contre cet article.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Nous ne pouvons que nous satisfaire de ces mesures visant à mieux contrôler les Ehpad privés, notamment, après tous les scandales évoqués plus tôt. Toutefois, demandons-nous aussi si le principe de lucrativité dans le secteur du soin et de l'accompagnement lui-même est acceptable. Pour nous, du côté gauche de l'hémicycle, la réponse est plutôt non.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.
Disons le lucidement, les établissements privés lucratifs, qu'ils appartiennent au champ sanitaire ou médico-social, déterminent actuellement l'offre en matière de soins et d'accompagnement, parce que nous les avons laissés faire. Comment, dès lors, recréer un service public dans ce domaine, en accompagnant la transformation nécessaire ? Pour nous, membres du groupe Écologiste – NUPES, cela passe au moins par l'interdiction de l'objectif de lucrativité dans ce secteur.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.
Je soutiens les propos de M. Laurent Panifous. En tant qu'ancien directeur d'établissement, je confirme l'importance de la question des contrôles. Depuis les fameuses évaluations externes, ils sont le plus souvent menés sur le fondement de pièces administratives. Or la seule manière de contrôler un établissement est de s'y rendre. Nous avons donc besoin d'inspecteurs des ARS pour visiter les établissements, vérifier l'accompagnement des résidents et les repas, écouter les salariés, s'imprégner de l'atmosphère et prendre finement la mesure du quotidien. J'insiste sur ce point : la seule manière d'effectuer de véritables contrôles est de se rendre sur place et d'aller au contact du personnel.
Nous passons à l'examen des amendements.
Je suis saisie de quatre amendements identiques, n° 486, 582, 866 et 1106.
La parole est à Mme Caroline Janvier, rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 486 de la commission des affaires sociales.
Je laisse à M. Bazin le soin de présenter l'amendement identique n° 582.
Je remercie Mme la rapporteure pour son élégance. Le présent amendement est issu d'un travail parlementaire, mené notamment par mon collègue Patrick Hetzel. Une des dérives que le scandale Orpea a mises au jour n'a pas été suffisamment prise en considération. Les besoins sont importants ; les financements sollicités sont parfois publics, parfois privés, de sorte que de petits épargnants financent les chambres d'établissements hébergeant des personnes en situation de dépendance. Or certains établissements ont instauré une pratique scandaleuse, qui consiste à transférer leur activité dans l'immédiat voisinage. Le transfert de l'autorisation d'exploitation dans un autre immeuble vide l'investissement initial de son sens et les petits épargnants se retrouvent spoliés.
Ces amendements identiques visent donc à permettre aux autorités compétentes de bloquer un transfert d'activité lorsqu'il porte préjudice aux petits épargnants. Il a été adopté lors de l'examen en commission des affaires sociales – j'en remercie la commission, madame la présidente. J'espère qu'il en ira de même en séance.
L'amendement identique n° 866 de M. Patrick Hetzel est défendu.
La parole est à M. Joël Aviragnet, pour soutenir l'amendement identique n° 1106.
Il vise à protéger les épargnants en luttant contre les transferts d'activités dans de nouveaux locaux. Nous soutenons cette mesure.
La commission des affaires sociales a adopté ces amendements identiques parce que leurs auteurs mettent le doigt sur un vrai problème. Nous sommes nombreux à avoir reçu les sollicitations de petits épargnants floués, alors qu'il s'agit d'un investissement que la puissance publique encourage, puisqu'il bénéficie d'un crédit d'impôt.
Néanmoins, à la lumière de différents échanges, il apparaît que ce dispositif n'est pas la bonne solution. D'abord, il confie aux ARS le soin d'empêcher que de telles situations ne se produisent. Or, si les ARS sont compétentes pour vérifier la qualité de l'accompagnement et le respect des normes de sécurité, elles ne le sont pas pour contrôler le modèle économique et éviter que des épargnants ne soient abusés. Deuxièmement, le crédit d'impôt qui vise à encourager ces investissements n'a pas vocation à être pérennisé – M. le ministre nous en dira plus à ce sujet. Ces situations malheureuses ne devraient donc plus se reproduire. Pour ces raisons, j'émets à titre personnel un avis défavorable sur ces amendements identiques.
La parole est à M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je répondrai d'abord aux interventions sur l'article. Je me réjouis d'être ici et d'avoir l'occasion de discuter avec vous des mesures que nous examinons,…
…car elles sont très importantes pour l'avenir du secteur ainsi que pour adapter la réponse aux besoins d'accompagnement des personnes âgées, notamment en matière d'autonomie. Je connais vos attentes – certains les ont d'ailleurs énoncées pendant les questions au Gouvernement. Nous allons donc prendre le temps d'évoquer ces questions.
Pas seulement de les évoquer, de légiférer ! Nous sommes législateurs !
Évidemment, nous n'épuiserons pas le sujet dans les prochains mois. Dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au bien vieillir, nous aurons l'occasion d'enrichir notre vision et notre politique en matière d'accompagnement des personnes âgées et en matière d'autonomie.
À mes yeux, l'article 32 est essentiel parce qu'il tend à renforcer le choc de transparence que nous préparons depuis le début de l'année, conformément au souhait de Brigitte Bourguignon, qui m'a précédé dans ces fonctions, afin de résoudre les problèmes soulevés par le scandale Orpea. Nous nous sommes engagés à contrôler les 7 500 Ehpad en deux ans et les contrôles ont commencé. Avant cette mission, un Ehpad était contrôlé en moyenne tous les vingt ou trente ans : désormais, chacun le sera tous les deux ans. Nous avons également renforcé les effectifs dans les ARS : 120 personnes viendront compléter des ressources déjà importantes, puisque 500 agents sont aujourd'hui mobilisés, sur 2 700 qui peuvent l'être, afin de procéder aux contrôles. C'est considérable. Ces mesures sont attendues – la priorité est d'assurer la qualité de service des Ehpad et la sécurité de leurs résidents.
L'article 32 permettra de renforcer et de sécuriser ces mesures, et d'aller plus loin. Près de 600 établissements ont déjà été contrôlés, contrôles qui ont donné lieu à quelque 1 000 recommandations, 642 prescriptions, 193 injonctions et 3 saisines du procureur. Le résultat est donc déjà probant. Vous vous interrogez sur le déroulement de ces contrôles. Ils commencent par un contrôle simple sur pièces. Si c'est nécessaire, une enquête complémentaire est menée sur place, dans les Ehpad. Si la situation qu'on y découvre n'est vraiment pas satisfaisante, que l'Ehpad a fait l'objet de multiples signalements, une inspection est diligentée. On estime que les inspections approfondies concerneront 10 % environ des Ehpad, afin de faire cesser certaines pratiques.
Comme vous le savez tous, les Ehpad sont connus dans les territoires : les élus, notamment les conseillers départementaux, ainsi que les agents des ARS, savent ce qui s'y passe, ce qui permet de constituer un faisceau d'indices afin d'adapter les contrôles. Évidemment, nous sommes également à l'écoute de la représentation nationale pour aiguiser notre vigilance et renforcer les contrôles.
Les amendements identiques que vous défendez visent à protéger les petits épargnants qui ont investi dans un Ehpad en cas de transfert d'activité dans de nouveaux locaux. Les autorités – agence régionale de santé et conseil départemental – valident le projet de déménagement sur le fondement des besoins sociaux et médico-sociaux, identifiés et priorisés dans le schéma régional de santé et dans le schéma d'organisation sociale et médico-sociale, ainsi qu'en fonction de l'offre présente dans le territoire. Les critères d'appréciation concernent en priorité la conformité aux normes en vigueur des lieux d'hébergement et de soins, ainsi que les attentes des personnes âgées et de leur famille. Les autorités ne sont d'ailleurs pas en mesure d'examiner les liens contractuels entre les gestionnaires des Ehpad ou la filière immobilière du groupe et les copropriétaires qui ont investi dans les chambres. L'appréciation vise vraiment à assurer l'adéquation du service avec les besoins exprimés, la sécurité et la qualité de la prestation.
S'agissant de la protection des droits des investisseurs dans le cadre des changements d'implantation, le code de la consommation a été modifié en 2016, afin de prévoir une obligation d'information sur les risques liés aux investissements locatifs. Ainsi, le non-respect des obligations renforcées de transparence qui s'appliquent à la commercialisation de biens immobiliers dans les Ehpad est sanctionné. Par ailleurs, le dispositif de réduction d'impôt dont bénéficient les personnes qui investissent dans les Ehpad prendra fin au 31 décembre 2022. Les investissements de cette nature seront donc moins attractifs à l'avenir.
En résumé, notre priorité est de laisser les autorités de contrôle et de tarification adapter l'offre aux besoins. D'autres lieux seront plus propices à la discussion sur la protection des petits épargnants, notamment par le renforcement du code de la consommation et leur information préalable. En conséquence, l'avis sur ces amendements identiques est défavorable.
Monsieur le ministre, il est très urticant de vous entendre commencer votre intervention en nous renvoyant au Conseil national de la refondation. Nous sommes ici pour délibérer et faire la loi.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES – M. Gérard Leseul applaudit également.
Vous nous renvoyez à des discussions qui ont cours à l'extérieur, alors que nous avons été élus pour légiférer. C'est un problème : je vous l'ai déjà dit, mais je le répète, parce que c'est agaçant.
Ensuite, ces amendements identiques soulignent que la financiarisation du secteur, ici dans le domaine immobilier, constitue un des éléments du problème. J'ai entendu plusieurs fois l'argument selon lequel la puissance publique n'est pas capable d'investir dans l'immobilier et qu'il faut laisser cet aspect au secteur privé, qui en a les compétences. On voit le résultat. D'abord, il y a de l'argent public en jeu, ensuite, cela pose des problèmes aux investisseurs, en particulier aux petits épargnants, ainsi qu'aux résidents, qui sont parfois déplacés d'un établissement à l'autre, parce qu'on a décidé de changer l'Ehpad de lieu, voire de localité.
Selon moi, il faut que l'autorisation d'exploitation soit attachée à un établissement spécifique et que l'autorité de tutelle soit en mesure d'autoriser ou de refuser les transformations. Sinon, cela pèse sur la vie des résidents. Les amendements identiques que nous examinons vont dans cette direction. Quant au dispositif que vous avez évoqué, il est insuffisant.
Enfin, j'élargis mon propos à la question de l'emploi de l'argent public. C'est en effet en grande partie de l'argent public qui finance le secteur. Des gens viennent pour faire des profits. Ils les réalisent au détriment de l'État, du Trésor public, des résidents, des salariés, mais au bénéfice des actionnaires. Ce système ne peut pas perdurer. Ces amendements visent à ériger un garde-fou : le groupe GDR – NUPES les soutiendra.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.
Je suis très déçu par le changement de position depuis l'examen en commission, puisque l'adoption de ces amendements identiques constituait à mon sens une avancée. Toutefois, j'entends vos arguments. La vérification attendue fait-elle partie des premières missions de l'ARS ? Non. Pouvons-nous pour autant détourner le regard de pratiques qui peuvent se révéler abusives et scandaleuses ? Non plus, car c'est la confiance dans notre système qui est en cause.
Vous arguez que le dispositif fiscal prendra fin au 31 décembre. Mais nous savons bien ici ce qu'il en est des niches : vous pourriez créer l'an prochain ou dans deux ans un autre dispositif visant à favoriser les investissements dans les Ehpad. L'article 32 tend à lutter contre les abus. Ce dispositif y a sa place. S'il est adopté, il permettra d'intervenir en cas de changement de lieu, peu importe l'évolution des lois fiscales. Derrière l'immobilier se cachent des montages qui demain prendront peut-être d'autres formes. Quand on transfère un site, on spolie ceux qui ont participé au financement, notamment l'assurance maladie, dont dépend la section soins.
Les Ehpad, même privés à but lucratif, reçoivent des financements de la puissance publique ; leur autorisation d'ouvrir relève de l'ARS – on peut fermer un Ehpad qui ne respecte pas les règles. D'une certaine façon, l'ARS a un droit de regard sur l'immobilier.
Pour certains épargnants, participer au financement de places d'hébergement avait peut-être un sens économique plutôt que financier : il pensait apporter sa pierre à la nation. Si on veut construire un modèle de sécurité sociale qui ait de la considération pour les acteurs respectueux des règles, les montages immobiliers donnant lieu à des fraudes, on doit lutter contre tous les abus, même ceux qui ne sont pas directement liés à l'assurance maladie.
Cet amendement vise à permettre à l'ARS de bloquer les transferts d'activités pour protéger les petits épargnants. S'il faut protéger ceux qui ont investi, toutefois, dans un grand nombre de cas, ces demandes de transfert sont motivées par des contraintes réelles : les chambres, dépourvues de salles de douches, font moins de dix mètres carrés et les bâtiments ne permettent pas une amélioration.
L'amendement vise à protéger les copropriétaires, mais ce faisant, il empêcherait l'amélioration des conditions de vie des résidents, qui est prioritaire : il leur faut des chambres de qualité et d'une taille suffisante, équipées de salles de bains – leur absence est le problème majeur rencontré dans ce type d'établissements. Nous ne pouvons donc bloquer les transferts d'activités.
Je rappelle que le dispositif actuel s'éteint à la fin de l'année. De plus, l'ARS a pour rôle de fournir une offre adaptée aux besoins et d'assurer la qualité de vie et la sécurité des résidents. La sécurité des petits épargnants relève de la DGCCRF – direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Le sujet, plus vaste, est celui des montages et des investissements immobiliers. Il appartient aux ARS de faire plus attention lorsqu'elles délivrent les autorisations.
Vous questionnez la place des acteurs privés commerciaux dans ce secteur : un équilibre est nécessaire pour offrir le choix aux Français. On ne peut pas se priver de l'investissement privé, mais il est nécessaire de l'encadrer : un choc de transparence doit avoir lieu, afin que les acteurs privés commerciaux ne détournent pas l'argent public. Quoi qu'il en soit, je le répète, nos concitoyens doivent avoir le choix : c'est pourquoi nous avons besoin de ces acteurs.
Vous avez également évoqué le CNR : la place des personnes âgées est un sujet de société qui ne doit plus être un débat d'experts. Les citoyens doivent s'en saisir, ce qui ne dépossédera pas l'Assemblée nationale. Je vous invite d'ailleurs à participer aux réflexions du Conseil national de la refondation et à vous emparer de ses conclusions.
Comme je l'ai dit, il n'y a ni tabou ni totem : s'il faut une loi, il y aura une loi.
Les amendements identiques n° 486, 582, 866 et 1106 ne sont pas adoptés.
Si nous saluons la création de l'accord préalable des autorités de tarification à la signature d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM) directement avec le groupe d'Ehpad, la rédaction actuelle de l'article 32 ne nous satisfait pas. Elle entend en effet que cet accord préalable ne se fasse qu'à la demande du groupe, ce qui ne nous semble pas pertinent. Nous proposons donc une rédaction différente, faisant disparaître la mention « à la demande » du groupe, afin de rendre la main aux autorités de tarification. Il s'agit d'un amendement de bon sens et de clarté concernant les procédures.
Le Gouvernement souhaite encadrer le recours aux CPOM de groupe, en permettant à l'ARS et au conseil départemental de s'y opposer. La règle serait alors la suivante : un CPOM pourrait être signé avec le groupe titulaire des autorisations des Ehpad concernés ; élargir pour le groupe le CPOM aux Ehpad sur lesquels il exerce un simple contrôle devient dérogatoire et les autorités de contrôle pourront s'y opposer. L'amendement vise donc à supprimer, dans la rédaction de l'article 32, la précision selon laquelle ces demandes sont à l'initiative d'un groupe : il ne modifie pas le sens de la disposition et maintient la capacité des autorités de tarification à s'opposer à ces CPOM. Avis favorable.
L'amendement n° 591 est adopté.
L'article 32 va dans le bon sens : il fait expressément référence aux dispositions de l'article L. 233-3 du code du commerce, c'est-à-dire aux seules personnes morales de droit privé commercial. Il présente toutefois un défaut : il pourrait exclure les groupements relevant d'autres formes juridiques – vous en avez connu, monsieur le ministre. Or des abus existent, notamment dans les néocentres de santé. Leur forme est en apparence non commerciale : ce sont des associations mais, derrière, existent différentes structures, comme des sociétés de conseil, et une importante financiarisation.
Il faut donc élargir le champ d'application de l'article 32 en précisant que toute forme de groupement est concernée, quel qu'en soit le statut juridique. Cela permettrait de se prémunir contre d'éventuels dysfonctionnements au-delà des seules personnes morales de droit privé commercial.
Cet amendement est satisfait par la rédaction de l'article. Vous craignez, monsieur le député, que les dispositifs de contrôle ne concernent que les Ehpad privés à but lucratif. Or les articles L. 313-12 et L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles sont expressément mentionnés dans l'article 32. Par conséquent, l'ensemble des structures, qu'elles soient privées à but lucratif, privées à but non lucratif – c'est-à-dire associatives – ou publiques, sont concernées par les dispositifs de contrôle prévus à l'article. Demande de retrait ou avis défavorable.
Certaines dispositions de l'article 32 visent l'ensemble des établissements sociaux et médico-sociaux, notamment celles concernant les reprises de résultats excessifs ou les astreintes de sanctions financières. S'agissant des groupes d'Ehpad commerciaux faisant l'objet de montages financiers complexes, l'affaire Orpea a montré qu'il est nécessaire de renforcer les obligations de transparence financière – ce que nous avons fait –, ainsi que le pouvoir des autorités de contrôle et de la CNSA – Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie – en matière de récupération d'indus.
Quant aux gestionnaires de droit privé à but non lucratif, leurs relations financières avec leurs sièges sociaux sont déjà encadrées par la loi et les dispositions réglementaires. Elles sont notamment contrôlées dans le cadre des négociations de frais de siège avec les agences régionales de santé. Avis défavorable.
J'ai hésité avant de demander la parole : peut-être devrais-je réserver mon intervention à je ne sais quel Conseil national de la refondation ? Finalement, j'ai décidé d'intervenir ici, monsieur le ministre, ne vous en déplaise.
Nous avons besoin de contrôle partout : dans les établissements privés à but lucratif, dans les établissements à but non lucratif et dans les Ehpad publics. La situation dans laquelle on a plongé l'ensemble de ces établissements par l'insuffisance des investissements depuis des années a créé partout des situations de souffrance des personnels, des directions parfois et des résidents.
Je maintiens toutefois qu'une distinction doit être faite entre les établissements publics et ceux à but non lucratif d'une part, et les établissements à but lucratif d'autre part : faire commerce de la vulnérabilité introduit des biais et pose des problèmes dont nous avons eu des illustrations dramatiques avec l'affaire Orpea.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.
Fort des avis motivés de la rapporteure et du ministre, je retire l'amendement. Tout le monde est contrôlé, tant mieux. J'appelle tout de même votre attention sur les mécanismes, de plus en plus innovants, et sur l'ingéniosité des montages : on constate une forme d'ubérisation. J'espère que nous aurons l'occasion de parler des néocentres de santé, qui ne figurent pas dans le PLFSS, mais qui sont un vrai sujet.
Sourires.
Non, c'est ici que nous nous exprimons, pas au CNR ! C'est devant la représentation nationale qu'il faut débattre des sujets.
S'agissant de la cavalcade financière, un point est important : en changeant d'établissement lorsque les charges d'un immeuble augmentent pour les résidents – au bout de douze ans –, on laisse la charge à d'autres. Ces montages de transferts successifs constituent donc une forme d'abus. Bien que cela ne relève pas de votre administration, monsieur le ministre, il faut cependant lutter contre ces abus.
L'amendement n° 566 est retiré.
Cet amendement de précision concerne l'alinéa 4 : il vise à permettre de négocier l'utilisation des éventuels reports à nouveau dans le cadre du nouveau CPOM.
Demande de retrait, sinon, avis défavorable : cet amendement est superfétatoire, puisque c'est exactement le sens de l'article 32,…
L'amendement n° 568 est retiré.
Lors de la signature du CPOM, les départements et les ARS sont libres de prendre en compte l'état des trésoreries des Ehpad – leurs reports et leurs réserves. Comme ce n'est pas une obligation, les CPOM ne sont pas toujours adaptés à l'état financier réel des Ehpad. Cet amendement vise à contraindre les départements et les ARS à prendre obligatoirement en compte ces éléments, afin de conclure des CPOM adaptés.
L'esprit du CPOM et du dialogue de gestion intervenant lors de sa contractualisation consiste précisément à permettre aux autorités de tarification et de contrôle d'une part, et aux organismes gestionnaires d'autre part, d'apprécier les besoins de financement et les actions qui seront lancées pendant la période couverte par le CPOM.
C'est donc essentiel. L'esprit de la loi du 2 janvier 2002 et des suivantes, qui ont développé le recours au CPOM, est d'offrir un espace de négociation et de discussion. Nous ne devons pas figer les échanges entre les autorités de tarification et de contrôle et les établissements, en rendant obligatoire la prise en compte des reports et des réserves. J'émets donc un avis défavorable.
Nous ne devons pas revenir sur le principe de libre affectation des résultats par le gestionnaire, quel que soit son statut. Vous l'avez dit, la libre affectation du résultat vise à responsabiliser les gestionnaires, dans le respect des modalités définies dans le CPOM. L'article 32 prévoit la possibilité pour les autorités de récupérer des excédents et des réserves excessifs lors du renouvellement du CPOM. Ainsi, l'objectif est atteint : je suis donc également défavorable à votre amendement.
L'amendement n° 594 n'est pas adopté.
L'amendement n° 3096, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je suis saisie de trois amendements identiques, n° 569, 1082 et 1590.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement n° 569.
Il vise à sécuriser le dispositif prévu à l'alinéa 4 par un décret d'application définissant, à l'issue d'une concertation, les critères d'appréciation, assortis d'indicateurs, des conditions d'exploitation qui justifieraient la reprise d'excédents.
L'amendement n° 1082 de M. Philippe Juvin est défendu.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 1590.
Il a été proposé par la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (Fehap). Il vise à prévoir qu'un décret en Conseil d'État sera pris afin de mieux encadrer le dispositif prévu à l'alinéa 4 de l'article 32. Il est indispensable de sécuriser ce dispositif par un décret d'application définissant, à l'issue d'une concertation, les critères d'appréciation, assortis d'indicateurs, des conditions d'exploitation qui justifieraient la reprise d'excédents.
J'émets un avis défavorable puisque, par ces amendements, vous proposez de préciser par décret les critères qui permettent d'apprécier l'opportunité de la reprise d'un excédent. Or la rédaction de l'article est très précise puisqu'elle prévoit qu'« il peut être tenu compte […] de la part des reports à nouveau ou des réserves figurant dans son budget et qui ne sont pas justifiés par ses conditions d'exploitation ».
Par ailleurs, le code de l'action sociale et des familles regorge d'articles qui précisent ce que sont les conditions d'exploitation, en se fondant sur le respect des droits des usagers, sur les conditions matérielles et sur les conditions de réalisation des missions. Je suis défavorable à une rédaction trop précise qui, je le répète, rigidifierait les échanges entre les autorités de tarification et les organismes gestionnaires.
Un tel décret n'est pas nécessaire. En effet, ces reprises interviendront à l'issue d'un diagnostic financier partagé avec le gestionnaire. Les Ehpad sont déjà protégés par la loi puisque les agences régionales de santé et les conseils départementaux ont l'obligation de justifier leur décision, conformément au code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, je m'engage à rédiger une instruction en ce sens à l'attention des autorités de tarification et de contrôle. Par conséquent, je suis défavorable à vos amendements.
Madame la rapporteure, je vous ai écoutée rappeler les principes, c'est très bien. Toutefois, dans nos circonscriptions, des établissements, qu'ils soient publics ou privés à but non lucratif, rencontrent une vraie difficulté – vous le savez, monsieur le ministre. Ils demandent la signature d'un CPOM, afin d'inscrire leur action dans une dynamique pluriannuelle s'accompagnant d'engagements réciproques. Or les autorités de tutelle – tant l'ARS que les conseils départementaux – tardent à les signer, alors que cette pratique vertueuse devrait être, au contraire, encouragée.
Je fonde beaucoup d'espoirs dans l'instruction que vous venez d'annoncer et que les acteurs de nos territoires vont attendre avec impatience. Ils se demandent comment ils finiront l'année, puisqu'ils ne peuvent anticiper le montant des crédits non renouvelables qui leur seront versés pour les aider à faire face à l'inflation, notamment à l'augmentation du coût des approvisionnements, et pour répondre aux besoins de recrutement pour remplacer les absences, notamment dues à la crise sanitaire. Les autorités de tarification doivent communiquer davantage, afin que les gestionnaires puissent prévoir. En effet, certains investissements peuvent être freinés en l'absence de visibilité pluriannuelle. L'instruction permettra également de clarifier les attentes à l'égard des autorités de tutelle. Je retire mon amendement.
L'amendement n° 569 est retiré.
Les amendements identiques n° 1082 et 1590 ne sont pas adoptés.
Sur les amendements identiques n° 2752, 2821 et 3128, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Sur l'amendement n° 2229, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement n° 567.
À la lecture de l'alinéa 4, on peut avoir l'impression que seuls les reports à nouveau excédentaires seront pris en compte pour fixer le tarif de l'établissement. Or quand on connaît les structures, on sait que les reports à nouveau sont plutôt déficitaires – tel est le cas de celles dans lesquelles je siège. Dès lors, il serait intéressant de préciser que le report à nouveau peut être déficitaire ou excédentaire, afin, lors du renouvellement du CPOM, de discuter du tarif, en prenant en considération la situation de l'établissement – qu'elle soit très bonne ou mauvaise. De nombreux établissements souscrivent à cette idée car, souvent, ils ont une histoire ou des besoins spécifiques qui peuvent être liés à leur patrimoine immobilier ou aux activités complémentaires demandées par les autorités de tutelle.
Avis défavorable. Vous avez raison de rappeler que beaucoup d'établissements réclament une visibilité pluriannuelle. La question ne se pose que lorsqu'un CPOM a été signé. Du reste, vos arguments se contredisent parce qu'à partir du moment où un CPOM est signé, la visibilité pluriannuelle – qui est nécessaire – est assurée.
Le corollaire de la réforme de la tarification, qui s'est accompagnée de l'instauration des états prévisionnels de recettes et de dépenses – EPRD –, est la responsabilisation des organismes gestionnaires. Dans le cadre du CPOM, signé pour une durée de cinq à sept ans, ils peuvent décider de reprendre leurs déficits d'une année sur l'autre. Il ne serait pas responsable de les autoriser, à l'expiration du CPOM, à reprendre des déficits qui n'auraient pas été gérés durant les cinq à sept années de celui-ci.
Je confirme que cet amendement va à l'encontre de la philosophie de la réforme tarifaire dont le corollaire est la responsabilisation des organismes gestionnaires – la rapporteure l'a rappelé. Or l'objet de la disposition n'est pas de revenir sur ce principe mais d'autoriser la reprise des excédents sans lien avec les projets et les besoins de la structure. Du reste, en cas de difficultés financières, le gestionnaire conserve la possibilité de signer un plan de retour à l'équilibre financier, qui sera annexé au CPOM renouvelé. Ce plan peut s'accompagner d'aides financières qui doivent être laissées à l'appréciation de l'autorité de tarification. Je suis donc défavorable à votre amendement.
Lorsque je me suis exprimé sur cet article, je vous ai dit que le groupe Les Républicains y était favorable. Il faut lutter contre les abus, mais la modification de la loi – on le constate d'ailleurs dans d'autres domaines que celui de la santé – peut, pour le coup, affecter des personnes qui ne commettent pas d'abus.
Les établissements devront s'adapter aux réalités du terrain, tant avant la conclusion d'un CPOM, lorsque le gestionnaire hérite de la situation financière d'un établissement, variable d'un établissement à l'autre, que durant son exécution ou à son échéance, puisque certaines situations peuvent entraîner des déficits. Je comprends le principe de responsabilité, mais on doit aussi se confronter à la réalité du terrain, en s'intéressant à ceux qui sont vertueux et à ceux qui sont confrontés à des imprévus. Les baisses d'activité résultant de la crise sanitaire n'avaient pas été anticipées et certains déficits, dus notamment à l'inflation, n'avaient pas été prévus dans les CPOM en cours d'exécution. Nous devons autoriser à prévoir ces cas, non pas pour les encourager, mais pour engager la discussion : il s'agit non pas de reprendre les déficits, mais d'avoir une discussion à ce sujet.
Vous avez invoqué la vraie vie. Je vous invite à avoir à l'esprit les événements de ces deux dernières années. Entre le moment où le CPOM est signé et celui où il arrive à échéance – soit cinq années –, le gestionnaire discute avec les autorités de tarification et de contrôle qui s'adaptent. Le but n'est pas de mettre en difficulté les opérateurs. De même, lors de la crise sanitaire, l'État a soutenu l'ensemble des opérateurs, en ne laissant personne au bord du chemin. Ce n'est pas cette précision qui améliorera la qualité du cadre de dialogue entre les gestionnaires et les autorités de tarification et de contrôle.
L'amendement n° 567 n'est pas adopté.
La parole est à M. Matthieu Marchio, pour soutenir l'amendement n° 2317.
Il vise à encadrer les contrôles des Ehpad réalisés par les ARS et les conseils départementaux. À l'instar de mes collègues du groupe Rassemblement national, j'adhère à la nécessité de renforcer les contrôles sur ces établissements.
Je suis élu dans un département, le Nord, dans lequel les coûts des Ehpad sont tout simplement prohibitifs pour nombre de familles. Dans ce contexte, il est inacceptable que certains établissements fassent en toute impunité du chiffre sur la misère humaine. Tel est le cas du groupe Orpea, déjà évoqué, qui s'est littéralement gavé avec les économies parfois bien maigres de personnes en fin de vie, alors même qu'il bénéficiait d'aides publiques. Je tiens également à souligner que d'autres Ehpad, notamment dans ma circonscription, offrent une prestation convenable et indispensable à nos aînés.
Dans ce contexte, mon amendement vise à assurer non seulement une meilleure efficacité des contrôles, mais aussi une plus grande transparence, en prévoyant qu'un décret en Conseil d'État précise clairement les conditions d'exploitation sur lesquels ils sont réalisés. Ce dispositif est en quelque sorte gagnant-gagnant. Les ARS et les conseils départementaux pourront s'appuyer sur des critères objectifs et tangibles pour contrôler et, si nécessaire, sanctionner. Les Ehpad auront une vision clarifiée de ce qui est attendu en matière de transparence et de gestion financière. Les établissements vertueux n'ont rien à craindre tandis que ceux s'écartant des règles ne pourront pas justifier d'un manque d'information en cas de rejet de leurs dépenses ou de sanctions – c'est là où le bât blesse.
Monsieur le ministre, vous pouvez constater que nous savons être constructifs quand vos propositions vont dans le bon sens, ce qui est assez rare. J'espère ainsi que vous donnerez une suite favorable à cet amendement.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Avis défavorable à votre amendement qui propose deux éléments. D'abord, vous proposez de définir a priori les critères justifiant la reprise des excédents dans le cadre de la négociation. Nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer ce sujet : la rédaction de l'article, qui mentionne les conditions d'exploitation, est suffisamment précise pour ne pas avoir besoin d'être complétée par un décret.
Vous proposez également que les autorités de tarification publient, a posteriori, un rapport détaillé, ce qui me semble superfétatoire. En effet, la négociation d'un CPOM dure plusieurs mois, avec beaucoup d'échanges et de transmission de documents : à l'issue de cette procédure, l'autorité de tarification a eu le loisir d'expliciter ses motifs quant à la prise en compte des reports ou des excédents.
Je vais vous décevoir, car la notion de « conditions d'exploitation » se réfère à des conditions minimales d'organisation et de fonctionnement des établissements, déjà définies par décret comme étant rapportées à la situation particulière d'un établissement, compte tenu de sa taille et de ses projets. Si les projets de l'établissement, validés par les autorités, impliquent la présence d'excédents, ceux-ci doivent lui être conservés. Je l'ai dit, l'ensemble des décisions des autorités de contrôle et de tarification doivent, de toute façon, être justifiées, à l'issue d'un diagnostic financier partagé entre l'autorité et le gestionnaire. À cet égard, je me suis engagé à produire une instruction, pour appeler l'attention des autorités de contrôle et de tarification sur ce sujet. Avis défavorable.
Cet amendement pose problème à double titre. Tout d'abord, cela vient d'être rappelé, la notion de « conditions d'exploitation » n'est en rien confuse, puisqu'il existe des éléments de définition. Ensuite, puisque nous parlons de confiance, il faut aussi évoquer la compétence, la qualification et l'expertise des autorités administratives chargées des contrôles : les conditions d'exploitation ne sont pas examinées uniquement au regard d'un plan comptable, d'un tableur Excel ou de je ne sais quelle nomenclature préfabriquée. Il convient également d'évaluer les choses dans leur contexte : le pouvoir d'appréciation de l'administration participe également de la qualité de la motivation de la décision administrative.
Cet amendement relève donc, au mieux, d'une méconnaissance de la façon dont les choses fonctionnent. Au pire, il donne l'impression qu'il faut sanctionner les autorités de tarification, mais pas trop, ce qui pose un vrai problème politique, surtout après le scandale Orpea et le trafic que génère l'or gris. Lorsque j'entends un député dire qu'il ne faut pas trop sanctionner les Ehpad, parce que, dans sa région – toutes les régions sont logées à la même enseigne –, on en a besoin, c'est se préparer à devenir les otages de futurs scandales et de futurs drames, sous prétexte que des groupes sont en proie à des appétits incontrôlables. Oui, il faut donner aux services les moyens de contrôler et à l'administration un pouvoir discrétionnaire en la matière. C'est pourquoi nous voterons contre cet amendement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 2317 n'est pas adopté.
Les années se suivent et ne se ressemblent pas. L'année dernière, j'avais défendu un amendement visant à taxer à 100 % les dividendes des Ehpad privés lucratifs. J'ai redéposé le même cette année, mais il a été déclaré irrecevable.
Vous aviez beaucoup ri du fait que les Insoumis veuillent taxer à 100 % les Ehpad privés lucratifs, arguant qu'ils voyaient toujours tout en noir : « Nous ne pouvons pas, madame Fiat, vous laisser dire que les Ehpad privés lucratifs maltraitent plus leurs résidents ! Mais voyons, madame Fiat, que vous passe-t-il par la tête ? ».
Quelques mois plus tard est sorti le livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet, et votre discours a changé : « Oh là là, les Ehpad privés lucratifs maltraitent plus que les autres ! » Mon groupe et moi-même vous le disions pourtant depuis cinq ans !
J'ai beaucoup d'humour, mais avec certaines limites :
Rires sur quelques bancs du groupe RN
c'est pourquoi j'espère que, peut-être, vous entendrez raison cette année. Cet amendement de repli vise à ce que les Ehpad qui font des bénéfices et qui n'augmentent pas les salaires ou n'embauchent pas de personnels supplémentaires reversent à la CNSA une partie de leurs profits – on ne leur prend pas tout. Si l'argent pris aux résidents ne sert pas à les nourrir, à les traiter dignement ou à recruter du personnel, qu'il soit au moins versé à une caisse commune, pour que tout le monde en bénéficie, notamment les établissements publics.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Avis défavorable. D'une part, le dispositif proposé s'appliquerait à l'ensemble des organismes, qu'ils soient publics, privés non lucratifs – donc associatifs – ou commerciaux. Prenons l'exemple d'une association ou d'un établissement public : en cas de difficulté à recruter et d'excédents dus à des crédits de dépenses de personnel non consommés, ils ne bénéficieraient plus des financements permettant l'embauche d'une art-thérapeute ou d'une animatrice.
D'autre part, en réalité, l'article 32 répond davantage à la problématique que vous soulevez et qui a été mise en lumière avec l'affaire Orpea : l'objectif est de mieux contrôler la façon dont les dépenses sont exécutées, avec différents outils, tels que la comptabilité analytique ou l'éventuelle reprise des excédents – cette possibilité existe déjà dans l'article. Elle est préférable à la fixation d'un seuil qui toucherait toutes les catégories d'établissements et reviendrait sur la souplesse de gestion actuelle, qui bénéficie beaucoup – j'ai travaillé dans le secteur associatif, je suis bien placée pour le savoir – aux associations, qui disposent de plus d'autonomie grâce aux CPOM et au principe de la libre affectation des résultats.
Je partage bien sûr votre volonté que les financements publics destinés au recrutement dans les Ehpad ne puissent plus être détournés, notamment par les groupes commerciaux, caractérisés par des montages juridiques et financiers complexes, qui échappaient jusqu'ici en partie au contrôle des autorités. Tel est l'objet de la mesure forte, qui, associée au décret d'avril dernier, crée un véritable choc de transparence financière et permet aux autorités de contrôler, outre les Ehpad, le groupe qui les dirige. De plus, puisqu'il n'est pas toujours possible d'isoler les sommes détournées au niveau d'un Ehpad, la CNSA pourra les récupérer directement auprès du groupe.
Par ailleurs, la rédaction envisagée ne semble pas atteindre le but recherché, puisque le dispositif s'appliquerait quel que soit le statut de l'Ehpad. Il serait également très complexe à mettre en œuvre : plusieurs seuils devraient être déterminés, en fonction de l'option tarifaire de l'établissement. En outre, la CNSA, si elle peut se substituer aux agences régionales de santé pour un groupe d'Ehpad, n'est pas l'interlocuteur budgétaire direct de ces établissements et n'est matériellement pas en capacité de récupérer les excédents. Enfin, une contractualisation sur des objectifs de recrutement et une éventuelle récupération lors du renouvellement du CPOM apparaissent plus adaptées qu'un système automatique, notamment pour tenir compte des difficultés de recrutement. Avis défavorable.
Alors que l'amendement vise les bénéfices excessifs, on nous répond sur le cas des associations non lucratives. Il me semble donc qu'existe un décalage très fort entre le sujet que nous évoquons et les réponses politiques qui nous sont apportées. Il ne date d'ailleurs pas d'aujourd'hui. J'ai regardé, afin d'étayer nos discussions, l'évolution de l'action Orpea depuis que nous examinons le texte en commission, c'est-à-dire depuis le 10 octobre dernier : de 10,01 euros, elle est passée à 14,74 euros.
M. Sylvain Maillard s'exclame.
Les Ehpad craignent la régulation que nous envisageons à un point tel que leur cours boursier a pris 50 % !
Bref, notre amendement souligne que la liberté tarifaire et les manœuvres financières afférentes sont une menace pour l'existence des personnes en Ehpad, tant pour celles qui y sont hébergées que pour celles qui y travaillent. Dès lors, la liberté tarifaire, que nous entendons contraindre et limiter, en attendant de la supprimer une bonne fois pour toutes, constitue une menace à triple titre : elle construit des fossoyeurs – l'ouvrage, dont c'est le titre, l'indique bien : enterrer des personnes permet de faire des profits, puisque ces enterrements découlent des économies réalisées auparavant. Cette liberté fait également des bourreaux, puisque ce sont les privations et la maltraitance qui sont à l'origine de la rentabilité. Enfin, le système créé des spéculateurs, dès lors que l'on a intérêt à investir de l'argent dans une maison de retraite, non pas pour prendre soin des personnes qui y sont abritées, mais uniquement et exclusivement pour en tirer un profit financier, ayant vocation à grossir dans un futur proche. La liberté tarifaire est une menace pour tous : il faut y mettre fin avant qu'elle ne nous dévore.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Je soutiens l'amendement de notre collègue Caroline Fiat, car le forfait soins ne doit servir qu'à une seule chose : financer des soins, donc du personnel pour les effectuer. Thésauriser l'équivalent budgétaire de ce forfait aura pour seul effet de mettre en difficulté les personnels et les personnes âgées de ces établissements. Le cas Orpea, souvent cité dans cet hémicycle, doit nous alerter : l'argent public doit servir uniquement aux fins auxquelles il est destiné – ni à faire des profits, ni à thésauriser, mais à soigner les personnes les plus âgées résidentes. Cet amendement est donc bienvenu et bien pensé, puisque l'argent sera reversé à la CNSA. Du point de vue éthique, il faut absolument voter pour cet amendement : je compte sur votre sens de la responsabilité à tous.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES et sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
L'amendement n° 1285 n'est pas adopté.
L'amendement n° 3098, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je suis saisie de trois amendements identiques, n° 2752, 2821 et 3128.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 2752.
Il vise à étendre à la Cour des comptes et aux chambres régionales et territoriales des comptes les pouvoirs de contrôle sur les Ehpad et leurs groupes gestionnaires. L'article 32 introduit en effet des dispositions nouvelles dans la manière dont les contrôles sont effectués et dans les documents concernés – nous l'avons peu évoqué, mais la comptabilité analytique permet un examen très fin de la façon dont sont utilisés les fonds, les dépenses de personnel, les investissements et les actions menées.
D'une part, la Cour des comptes et des chambres régionales et territoriales des comptes pourront examiner non seulement les établissements et les services sanitaires, sociaux et médico-sociaux, mais aussi les sièges sociaux et les services communs des personnes morales, sous l'égide desquelles la gestion desdits établissements est organisée ; d'autre part, elles contrôleront la globalité des produits et des charges d'un établissement ou d'un service, notamment – nous en avions beaucoup parlé au moment de l'affaire Orpea et dans le cadre de la mission flash sur la gestion financière des Ehpad – la section hébergement, qui échappait jusqu'à présent au contrôle.
Le groupe Horizons et apparentés propose cet amendement anti-scandale Orpea. Nous nous souvenons tous des révélations du livre Les Fossoyeurs et de l'émoi qu'il a suscité. Sous la précédente législature, la commission des affaires sociales avait organisé un cycle d'auditions sur cette affaire, mais les nombreux dirigeants d'Orpea que nous avions interrogés ne nous avaient guère apporté de réponses de qualité.
Nous voulons tirer les conséquences de ce scandale. Après l'audition en commission de Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, nous proposons d'étendre le périmètre d'intervention de la Cour des comptes, des chambres régionales des comptes, de l'Inspection générale des finances (IGF) et de l'Inspection générale des affaires sociales, afin de leur permettre de contrôler tous les établissements privés et d'éviter d'autres scandales Orpea.
La parole est à Mme Monique Iborra, pour soutenir l'amendement n° 3128.
Le groupe Renaissance propose lui aussi d'étendre les compétences de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes pour leur permettre de contrôler ces établissements. Il n'est pas question de stigmatiser tous les Ehpad, mais la confiance n'exclut pas le contrôle. Cette disposition permettra de rendre les contrôles plus efficaces, ce qui est plus que nécessaire.
Vous proposez de renforcer les compétences de contrôle de l'Igas, de l'IGF, de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes à l'égard des groupes gestionnaires d'Ehpad. À cette fin, vos amendements complètent la définition des structures et organismes soumis aux contrôles afin de mieux prendre en considération les montages juridiques intégrant plusieurs entités pouvant contribuer à la gestion des Ehpad.
Pour les juridictions financières, ils instaurent une compétence de contrôle verticale, permettant d'examiner non seulement les établissements mais également les sièges sociaux des groupes. Pour ces mêmes juridictions, ils instaurent une compétence de contrôle horizontale, portant sur la globalité des produits et des charges d'un établissement ou d'un service. Ce contrôle est également étendu aux prestations annexes – c'est important – et aux suppléments parfois facturés aux résidents, lesquels peuvent, en effet, représenter un risque d'augmentation significative, voire indue, des restes à charge.
Ces amendements sont parfaitement cohérents avec la politique que nous conduisons depuis le début de l'année dans le cadre du choc de transparence. À la marge, ils actualisent le code des juridictions financières pour tenir compte de la création de la branche autonomie. En conséquence, j'y suis favorable.
N'étant pas bégueules, nous soutenons ces amendements identiques qui vont dans la bonne direction. Au moment de la crise Orpea, Caroline Janvier, Jeanine Dubié et moi-même avions réalisé une mission flash relative à la gestion financière des Ehpad. Parmi les modifications que nous avions jugées nécessaires figuraient celles qui sont proposées ici. De mon point de vue, ces mesures vont donc, je le répète, dans le bon sens.
En revanche et contrairement à vous, je ne crois pas que ces contrôles supplémentaires suffiront à résoudre les problèmes soulevés par l'affaire Orpea. Sur ce point, nous sommes clairement en désaccord. Il faut faire davantage de contrôles, en essayant d'éviter les phénomènes de silos que nous avions constatés : certains contrôles étant effectués par l'Igas, d'autres par la direction générale des finances et d'autres par l'Inspection du travail, le contrôle global n'est pas toujours assez efficace. J'espère que les mesures proposées permettront de régler aussi ce problème de cloisonnement.
Comme vous, madame la rapporteure, j'insiste sur la nécessité d'un contrôle de la section hébergement. On considère que c'est du commerce alors qu'il s'agit de l'hébergement de personnes – qui devrait d'ailleurs être compris dans un forfait de prise en charge globale des personnes en fonction de leur situation d'autonomie. Dans le cadre de notre mission flash, nous avions bien constaté que le contrôle de l'hébergement était un peu resté dans l'ombre.
Tout en approuvant ces amendements, j'estime que les questions formulées sur ces bancs méritent d'être approfondies.
Nous faisons le même constat. Nous voterons évidemment pour ces amendements, tout en nous étonnant que ces mesures n'aient pas été intégrées dans le texte initial. Tant mieux si les parlementaires ont pu l'enrichir dans ce sens. En fait, ce sont des réponses pertinentes aux attentes révélées en creux par la mission de l'Igas et de l'IGF concernant Orpea, lesquelles entrent en résonance avec les réalités que nous connaissons bien, les uns et les autres.
Il reste pourtant une difficulté : la Cour des comptes, les chambres régionales des comptes, l'Igas et l'IGF ne pourront procéder qu'à des inspections et des contrôles assez ponctuels. Vous aviez prévu un plan de contrôle systématique de tous les Ehpad dans les deux ans, ce qui soulève la question des moyens. Pierre Dharréville vient de mentionner le cœur de la prérogative : la possibilité pour des autorités tarificatrices de contrôler la section hébergement dans des établissements pour lesquels ils ne procèdent pas à la tarification – d'où une petite contradiction. Actuellement, le contrôle s'effectue sous forme d'un suivi budgétaire. Celui-ci n'a peut-être pas la profondeur que l'on pourrait espérer – c'est un ancien président de conseil départemental qui vous le dit –, mais il a au moins le mérite d'exister pour les établissements habilités à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale. Le suivi régulier, même dans le cadre d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens conclu avec des établissements non habilités à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale, c'est-à-dire principalement des établissements privés commerciaux, ne peut pas porter sur la section hébergement.
Ces amendements ont beau être pertinents, ils n'éteignent pas le débat sur ce point. Comment la puissance publique peut-elle contrôler régulièrement – c'est-à-dire tous les ans, de la même manière que pour la tarification – la section hébergement de ces établissements, en les obligeant à ouvrir leurs comptes ? Cette question renvoie à un amendement, que je défendrai un peu plus tard. Il me semble que le meilleur des contrôles serait de plafonner les tarifs d'hébergement dans ces établissements.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Ces amendements m'inspirent trois questions pour M. le ministre. Premièrement, je veux bien que l'État veille à tout, mais quelle est la place des départements dans ce dispositif ? Deuxièmement, quel sera le coût, pour le budget de l'État, des renforts et moyens supplémentaires que le président de la Cour des comptes ne manquera pas de nous demander pour assumer cette nouvelle responsabilité ?
Troisièmement, va-t-on demander aux personnes âgées hébergées en Ehpad de supporter indirectement ces coûts et par quel biais ? J'aimerais savoir si nous ne sommes pas en train d'alourdir la facture des personnes âgées.
Les départements seront bien sûr associés à toutes ces missions de contrôle et à tous les échanges avec les inspections, la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes, puisqu'ils partagent la responsabilité de la gestion de ces établissements. S'agissant de la nécessité de renforts à la Cour des comptes, je n'ai pas les éléments pour vous répondre, mais je vais m'intéresser au sujet. Concernant le reste à charge pour les familles, nous visons le même objectif. Nous aurons l'occasion d'en débattre dans le cadre du Conseil national de la refondation – je n'ose le dire.
Quoi qu'il en soit, nous aurons à débattre du modèle économique et du reste à charge pour les familles. Notre objectif, en particulier depuis le début de la crise inflationniste, est de protéger les familles de l'augmentation des prix. Je le répète ici : je demande à tous les opérateurs et à tous les financeurs – départements et collectivités – de veiller à protéger le reste à charge des familles. Nous avons mis en place suffisamment de dispositifs pour que ce soit possible.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 185
Nombre de suffrages exprimés 139
Majorité absolue 70
Pour l'adoption 138
Contre 1
Les amendements identiques n° 2752, 2821 et 3128 sont adoptés.
Puisque tout le monde se réjouit de l'adoption de ces amendements, nous allons surveiller les Ehpad. Contrôler, contrôler, contrôler ! Il y a pourtant un couac, comme c'est d'ailleurs souvent le cas dans vos textes : vous voulez augmenter les contrôles et les moyens qui y sont consacrés, mais vous avez omis l'obligation de sanctionner. Il y aura des contrôles, mais les sanctions seront facultatives. Quitte à aller contrôler et à donner plus de moyens pour le faire, il faut sanctionner ! Les établissements doivent avoir peur des sanctions et, surtout quand ils trichent, ils doivent être sanctionnés.
Cet amendement rédactionnel propose donc de remplacer « peut enjoindre » par « enjoint », « peut prononcer » par « prononce » et « peut en outre être » par « est ». Je le répète : si sanction il doit y avoir, sanction doit être donnée. Il faut donner un coup d'arrêt à tous ces établissements qui profitent du flou des textes de loi concernant les sanctions. Pour notre part, nous proposons de sanctionner tout établissement qui ne jouera pas le jeu.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Autant je serai favorable aux amendements à venir qui visent à durcir les sanctions en matière de pourcentage de chiffre d'affaires et de montant des astreintes, autant je ne suis absolument pas favorable au principe de l'automaticité des sanctions et des peines de façon générale. Avis défavorable.
Même avis. L'automaticité n'est pas légale. La procédure doit s'inscrire dans un débat contradictoire et la sanction éventuelle est laissée à l'appréciation de l'autorité de contrôle et de tarification. Je suis favorable au renforcement des contrôles et des sanctions, mais non à l'automaticité de ces dernières qui doivent intervenir, je le répète, à l'issue d'un débat contradictoire.
Votre réponse est totalement incohérente. Vous prétendez être pour un renforcement des contrôles et un durcissement des sanctions, mais vous ne les infligerez pas. On parle là de maltraitance institutionnelle, de personnes âgées – qui sont des êtres humains
Exclamations sur les bancs du groupe RE
– à qui l'on rationne la nourriture ou qui se retrouvent avec des escarres parce qu'on leur met des protections à moindre coût. On parle de personnels en souffrance. Et vous, vous dites que ces établissements ne seront pas sanctionnés.
Voilà ce que vous écrivez dans un texte de loi. C'est inadmissible ! Où sont les personnes choquées par Les Fossoyeurs ? Où sont les personnes choquées par le rapport Fiat-Iborra ? Où sont les personnes qui disaient « plus jamais ça dans notre pays » ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Comment voulez-vous que l'on avance, si vous ne sanctionnez pas les établissements ? Les personnes âgées sont des êtres humains qui méritent que les propriétaires et gestionnaires de ces établissements aient peur d'une sanction. Ils doivent se dire : la France sanctionnera si je fais n'importe quoi. Cet amendement est un amendement de bon sens destiné à faire plier ceux qui trichent sur le dos des êtres humains.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe RN.
Quelques mots pour répondre à Mme Fiat. Où sont ceux qui ont été heurtés par les faits rapportés dans le livre Les Fossoyeurs, demandez-vous ? Je vous le dis : ils sont ici, devant et derrière moi, à droite comme à gauche !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Nous avons tous été heurtés à la lecture de ce livre : vous n'avez pas, chère collègue, le monopole de l'humanité.
Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI – NUPES.
Nous savons tous que ce sont bien évidemment des êtres humains. Il n'est pas acceptable que vous prétendiez nous le rappeler.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
…dans un autre cadre. Mme la rapporteure l'a précisé et nous y reviendrons ultérieurement. Il est question ici de contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens, qui ne sont pas le cadre pertinent pour appliquer les sanctions : elles le seront selon d'autres modalités.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 165
Nombre de suffrages exprimés 163
Majorité absolue 82
Pour l'adoption 60
Contre 103
L'amendement n° 2229 n'est pas adopté.
L'amendement n° 3101, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra