Séance en hémicycle du lundi 3 juin 2024 à 21h30

La séance

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

Suite de la discussion d'un projet de loi

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L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie (2462, 2634).

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Cet après-midi, les amendements de la discussion commune débutant par l'amendement n° 900 portant article additionnel avant l'article 4 quater ont été présentés par leurs auteurs. La rapporteure et la ministre ont émis un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.

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À la fin de la séance précédente, nous discutions de problèmes de sémantique, portant notamment sur cette question : l'aide active à mourir est-elle un suicide assisté ou une euthanasie ? J'ai questionné des médecins sur ce qu'était la sédation profonde. Comme on me l'a expliqué, cela consiste à plonger la personne dans le coma ; faute de nourriture et d'hydratation, son corps se transforme, et elle finit par mourir, les reins n'assurant plus leur fonction.

Certains parmi nous ont dit qu'il fallait donner du sens aux actes, les nommer, ou encore dire la vérité aux Français, ce qui m'a incité à me poser une question : si on plonge quelqu'un dans le coma, s'il n'est plus hydraté ni nourri, et finit par mourir d'une autre cause que sa maladie initiale, n'est-ce pas une forme d'euthanasie ? Je pense que non. Instituer l'aide active à mourir, c'est offrir un autre chemin aux personnes malades en fin de vie : plutôt que la sédation, qui les ferait partir à petit feu sous les yeux de leur entourage, elles pourront choisir, en famille, de recourir à l'aide à mourir.

M. Maxime Laisney applaudit.

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Je crois, comme d'autres, que ce que vous décrivez par des périphrases porte un nom. En vous écoutant, j'ai parfois le sentiment que vous racontez des histoires, mais surtout à vous-mêmes : en édulcorant les choses, vous mettez en place un mécanisme de protection, ce que je peux comprendre – certains des partisans de ce projet l'assument peut-être davantage que d'autres.

Jacques Ricot énonce cinq principes fondateurs du consensus national autour des lois en vigueur : le refus de l'obstination déraisonnable, le soulagement de toutes les souffrances, l'accompagnement de la personne selon les exigences de la fraternité, la liberté du patient correctement comprise, et l'interdiction de donner la mort intentionnellement. Cela s'est traduit par la loi Claeys-Leonetti, qui institue un dispositif puissant, mais très mal connu et insuffisamment mis en œuvre. Lorsque la loi est appliquée, les demandes de mort disparaissent dans la quasi-totalité des cas – nous sommes toutes et tous, à un moment de notre existence, traversés de pulsions négatives. Selon Georges Canguilhem, dans tout appel du malade, il y a une détresse à secourir.

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Le débat que nous avons alimenté suscite peut-être une angoisse supplémentaire dans notre pays, d'autant plus forte compte tenu de la crise sociale et sanitaire qui s'est elle-même trouvée accentuée par l'épreuve du covid.

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Le dispositif envisagé n'est pas minimaliste, il ne concerne pas seulement des cas exceptionnels. Nous avons vu, lors des débats en commission, que se profilait déjà un droit universel et opposable. J'appelle donc à nommer les choses par leur nom.

Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES. – M. Marc Le Fur applaudit également.

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Je souhaiterais que nous cessions de discuter de la loi Claeys-Leonetti : ce n'est pas le sujet du titre II. Nous ne sommes pas là pour revisiter la loi Claeys-Leonetti, mais pour débattre de ce projet de loi.

Monsieur le rapporteur général, si vous citez l'avis du Conseil d'État, il faut le citer en entier. Cet avis, qui mériterait d'inspirer davantage nos réflexions, énonce : « [Le projet de loi] a pour objet principal de créer une « aide à mourir » entendue comme la légalisation, sous certaines conditions, de l'assistance au suicide et, dans l'hypothèse où la personne n'est pas en mesure physiquement de s'administrer elle-même la substance létale, de l'euthanasie à la demande de cette personne. ». Il ajoute plus loin – c'est là que ça devient intéressant : « Le projet de loi emploie les termes d'« aide à mourir », une expression pouvant être comprise comme visant des pratiques autres que l'assistance au suicide ou l'euthanasie à la demande de la personne. »

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Le Conseil d'État appelle l'attention du Gouvernement sur la nécessité de « définir de manière suffisamment claire et précise les actes qui entrent dans le champ de l'aide à mourir ». On ne peut pas dire les choses plus clairement.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.

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En réalité, en refusant ces mots, vous ne cherchez qu'à garantir l'acceptabilité sociale du projet de loi ; vous espérez l'obtenir en taisant la réalité des actes que recouvrent les mots – c'est un mensonge par omission.

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Nous, députés du groupe Les Républicains – du moins la plupart de ceux qui sont présents ce soir –, avons un objectif : débattre, bien sûr, et instiller le doute dans l'esprit de nos concitoyens…

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…pour qu'ils ne jugent pas de ce texte de loi dans sa superficialité.

En refusant de nommer les choses, vous favorisez la mauvaise compréhension du texte. C'est véritablement l'intelligibilité de la loi qui est en cause.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Dominique Potier applaudit également.

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Je voudrais répondre aux questionnements sur la sédation profonde et continue. Ce n'est pas la sédation profonde et continue qui déclenche le décès, mais l'évolution naturelle de la maladie.

« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

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On parle souvent de mourir dans la dignité, mais est-ce qu'on s'attache à ce que les Français vivent dans la dignité ? Si vous légalisez l'euthanasie, cela n'obligera personne à y recourir, mais cela obligera à l'envisager. Par ailleurs, on ne peut pas parler de fraternité quand on répond à la souffrance par la mort. Enfin, en légalisant l'euthanasie ou le suicide assisté, je crains que l'on finance encore moins les soins palliatifs. Une personne se trouvant en situation précaire et une autre ayant les moyens n'ont pas la même fin de vie, je le crains. Dans le second cas, on peut être suivi rapidement par un grand professeur, on trouve facilement des médecins spécialistes et généralistes, et on peut se payer du matériel pour rendre la vie plus confortable. Quand on est précaire et qu'on n'a pas accès à tout ça, le sentiment d'être une charge peut amener à prendre une décision ultime.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Je voulais rassurer mes collègues en précisant que l'aide à mourir est un vocable qui a reçu l'assentiment du Comité consultatif national d'éthique (CCNE). Il correspond à l'attention très spécifique que nous voulons apporter aux quelques personnes qui, en France, éprouveraient des souffrances réfractaires. Nous cherchons bien à mettre en place un modèle d'exception, fondé sur des critères très restrictifs. C'est tout l'objet des débats que nous aurons sur l'article 5. Même si je peux comprendre que certains évoquent une rupture, je rappelle que la sédation profonde et continue peut mener jusqu'à la mort. Nous avons eu maintes fois cette discussion sémantique en commission spéciale. Votre insistance conduit à s'interroger sur ce que vous voulez : voir aboutir le texte ou y faire opposition.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

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Derrière ce prétendu débat sémantique – parler d'aide à mourir, de suicide assisté ou d'euthanasie –, les collègues du Rassemblement national et de LR sont en réalité opposés à l'aide à mourir.

Protestations sur plusieurs bancs du groupe RN.

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Vous êtes minoritaires dans le pays, puisque 90 % de la population y est favorable.

Protestations sur les bancs du groupe RN.

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Vous espérez, en utilisant d'autres termes, remettre en cause son acceptabilité sociale, qui est déjà acquise. Pas d'hypocrisie ! Oui, nous devons la vérité aux Françaises et aux Français. Combien de fins de vie clandestines y a-t-il dans ce pays ? Comment se passe la sédation profonde et continue jusqu'au décès ? De quoi meurt-on ? On meurt parce qu'on arrête de vous alimenter et de vous hydrater.

Protestations sur les bancs du groupe RN.

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La mort est-elle immédiate ? Non. Cela peut durer plusieurs jours, plusieurs semaines, et l'absence de souffrance n'est pas garantie. Madame Genevard, vous avez dit que tous les médecins aident à mourir. En effet, tous les médecins aident à mourir !

Si l'on peut permettre à la personne qui le souhaite de ne pas subir une lente agonie pleine de souffrance, accordons ce droit ! Une grande question nous est posée, à toutes et à tous, individuellement : à qui appartient notre vie, à qui appartient notre mort ? C'est une question très personnelle, à laquelle nous n'avons pas à répondre en tant que législateurs. En revanche, nous devons respecter les orientations spirituelles et religieuses de tout le monde – je tiens à signaler que 80 % des croyants sont favorables à l'aide à mourir.

Protestations sur les bancs du groupe RN.

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Si nous refusons d'accorder ce droit, cela signifie que nous tranchons à la place des citoyens et que nous imposons une seule réponse à la question de savoir si nos corps, nos vies, nos morts nous appartiennent. Or c'est une loi laïque : elle permettra de consacrer un nouveau droit, sans obliger personne à l'exercer.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Madame Genevard, vous disiez ne pas comprendre pourquoi on parlait de la loi Claeys-Leonetti et de la sédation profonde et continue jusqu'au décès. J'ai assisté aux débats comme vous, et vous m'accorderez que Les Républicains ont souvent invité le titre II dans le titre Ier . Je ne vous en fais pas le reproche, mais, puisque vous nous avez expliqué qu'il fallait être cohérent, je me permets de souligner ce qui constituait aussi une forme d'incohérence de votre part – vous le prenez avec le sourire, c'est bien pour un débat aussi important.

Par ailleurs, je voudrais dire au professeur Juvin,…

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…même s'il le sait très bien, que lorsqu'on administre des benzodiazépines dans le cadre d'une sédation profonde et continue, cela provoque souvent des arrêts respiratoires. C'est aussi une forme d'aide à mourir, vous ne pouvez pas dire le contraire.

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Nous avons une exigence supplémentaire : nous voulons respecter le choix du malade. Ce projet de loi permet, dans quelques circonstances, pour quelques cas limités, comme l'a très bien dit la ministre, d'offrir une voie alternative aux personnes pour lesquelles toutes les thérapeutiques se sont soldées par un échec – à condition qu'elles soient demandeuses. Je rappelle que nous n'allons pas tuer les patients ; ce sont les patients qui demandent que leur vie soit écourtée.

Il faut respecter le choix du malade, dont nous ne parlons jamais, alors qu'il devrait être au centre de notre réflexion et au cœur des décisions du personnel médical qui l'accompagne. Faire du choix des malades notre corpus permettra, lorsque ceux-ci l'auront choisi, de leur proposer une aide à mourir, sous la forme d'un suicide assisté.

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La parole est à Mme Astrid Panosyan-Bouvet, pour un rappel au règlement.

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C'est la première fois que je demande un rappel au règlement. Il se fonde sur l'article 100, concernant la bonne tenue de nos débats. La conférence des présidents a décidé qu'à partir de l'examen de l'article 5, plusieurs positions pourront être exprimées au sein d'un même groupe. Néanmoins, j'aimerais que cette possibilité soit ouverte dès maintenant. En effet, nous abordons des sujets fondamentaux et il est regrettable de limiter nos débats à une seule position, ce qui ne permet pas de refléter l'hétérogénéité ni l'ensemble des nuances de cette assemblée sur cette question importante.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – M. Benoit Mournet applaudit également.

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Très bien. Pour le groupe LR, quelqu'un souhaite-t-il exprimer une opinion différente de celle Mme Genevard ?

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D'accord. Pour le groupe Modem, quelqu'un veut-il exprimer une opinion différente de celle de M. Philippe Vigier ? Mme Darrieussecq ; j'en prends note. Même question pour le groupe La France insoumise.

« Non ! Ils n'ont pas le droit ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.

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Au sein du groupe Renaissance ? Mme Panosyan-Bouvet, c'est noté. Au Rassemblement national ? M. de Lépinau, c'est noté également. Pour le groupe Socialistes et apparentés ? M. Potier et M. Delautrette – sous réserve que ce dernier exprime une opinion différente de celle de M. Potier. Vous levez la main, madame Ménard, mais je suis perplexe : de qui avez-vous une opinion différente ?

Sourires.

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Très bien. Ainsi, le pluralisme au sein de chaque groupe sera respecté. J'accède à votre demande parce que nous entamons la discussion sur le titre II ; toutefois, je ne ferai pas cela pour chaque amendement, sinon, les débats n'avanceront pas.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – M. Gilles Le Gendre et Mme Astrid Panosyan-Bouvet applaudissent également.

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Depuis cet après-midi, j'entends parler de leurre, de supercherie, de mensonge, de dissimulation, de lecture non intelligible de la sémantique relative à l'euthanasie et au suicide assisté. Bien sûr, il s'agit d'une provocation systématique afin de troubler les Français.

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Mais pensez-vous réellement que les Français ne sont pas capables de comprendre ? Êtes-vous ici pour insulter leur intelligence ? Croyez-vous qu'ils ne soient pas capables de faire la différence entre euthanasie, suicide assisté et aide à mourir ?

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et LFI – NUPES. – M. Pierrick Berteloot applaudit également.

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Ne sont-ils pas capables de comprendre que l'aide à mourir est un accompagnement vers la mort, en évitant la souffrance ? Pour qui les prenez-vous ? Oui, les Français sont intelligents et peuvent comprendre – et ils n'ont pas besoin de votre agressivité permanente !

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et LFI – NUPES.

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Il est utile de bien nommer les choses, parce que nous votons la loi. Je vais rendre un petit service au Gouvernement,…

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Un député du groupe LFI – NUPES

Ce ne sera pas la première fois !

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…bien que ma position à son égard soit connue : n'oubliez pas qu'il est prévu, dans la suite du texte, ce qu'on appelle le fait justificatif,…

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…c'est-à-dire la possibilité de déroger au principe général …

Protestations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES

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Elle est pourtant importante, madame la présidente !

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Il existe autant de nuances, j'imagine, que de membres de votre groupe !

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Non, c'est chez les LR qu'il y a de nombreuses nuances !

Les protestations se poursuivent sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Vous devez exprimer des positions différentes au sein d'un même groupe pour bénéficier d'une deuxième prise de parole.

La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.

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Plusieurs députés du groupe RN

Alors, non ! Elle ne peut pas prendre la parole !

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J'ai été marquée par nos discussions de cet après-midi, à la fin de la séance : l'emploi de plusieurs termes m'a chamboulée. Certains ont affirmé que la protection des plus fragiles ne serait pas assurée, que des dérives sont possibles et qu'il faut instaurer des verrous. Toutefois, c'est bien à nous de le faire ! Nous devons collectivement assurer la protection des plus fragiles et mettre en place les verrous les plus solides possibles.

La loi Claeys-Leonetti a été adoptée afin d'accompagner et de soulager le malade, et non pas pour lui donner la mort – je suis d'accord avec vous, monsieur Juvin.

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L'idée était de prodiguer un soin. Or l'aide à mourir n'est pas un soin – c'est même là qu'il importe d'établir une différence.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR. – Mme Marie-France Lorho applaudit également.

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Le titre Ier et le titre II concernent des aspects totalement différents. C'est dans cet esprit que nous devons avancer, sans chercher à employer une sémantique indifférenciée sur ces deux titres.

MM. Éric Martineau et Benoit Mournet applaudissent.

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Permettez-moi de vous remercier, madame la présidente, d'avoir accédé à ma requête. J'aimerais poser une question à Mme la ministre, au rapporteur général et à Mme la rapporteure : de quoi avez-vous peur ? Pourquoi ne voulez-vous pas nommer les choses ? Consultez sur internet les intitulés des lois adoptées aux Pays-Bas, en Australie – vous y trouverez la traduction en anglais – ou encore en Suisse.

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Il y est question de suicide assisté et d'euthanasie : en Australie, on parle de physician-assisted suicide et de voluntary euthanasia.

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Pourquoi faudrait-il inventer des termes à la française pour qualifier la fin de vie ?

M. Benoit Mournet applaudit.

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Ces législations sont comparables à la nôtre, et génériques, même s'il existe des variantes. Je remercie d'ailleurs le Gouvernement d'avoir fait en sorte d'encadrer très strictement cette proposition d'aide à mourir. Il n'y a rien de honteux à vouloir défendre une telle position ; encore faudrait-il nommer réellement les choses. Alors, de quoi avez-vous peur ?

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – M. Benoit Mournet applaudit également.

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Quoi de plus simple et d'intelligible que de parler d'aide à mourir ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.

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Il est frappant de constater que celles et ceux qui argumentent, au nom de la sémantique et d'un mauvais emploi de la langue française, sont tous fermement opposés à ce nouveau droit. Voilà la réalité !

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Je voudrais également tordre le cou à une idée reçue : celle selon laquelle toutes les autres législations emploieraient les mots « euthanasie » et « suicide assisté ».

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C'est le même avis ! Elle n'exprime pas une position dissidente !

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Le même avis que qui ? Le groupe Écologistes n'a pas encore pris la parole. Mme Laernoes est la première oratrice de son groupe.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, GDR – NUPES et Écolo – NUPES, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe RE.

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J'imagine que les arguments du groupe Écologiste sont susceptibles de vous déplaire, a fortiori lorsqu'ils émanent d'une personne qui connaît un peu la législation dans d'autres pays, pour avoir elle-même deux pays ! Aux Pays-Bas, la loi s'appelle Levensbeëindiging Op Verzoek En Hulp Bij Zelfdoding, ce qui ne comprend ni le mot « euthanasie » ni le mot « suicide ».

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe RE.

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Dans l'Oregon, la loi s'appelle Death With Dignity Act – mort avec dignité.

Mme Natalia Pouzyreff applaudit.

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Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Exactement !

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En Australie, elle s'appelle Voluntary Dying Act – mourir de manière volontaire. Chaque pays a donc utilisé les mots qui lui étaient propres pour consacrer ce nouveau droit.

J'ajoute que Philippe Bataille, ancien membre de la commission chargée de mener une réflexion sur les mots de la fin de vie, pilotée par Erik Orsenna, a déclaré que les mots « aide à mourir » étaient les mots justes à employer dans ce texte.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.

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Je m'exprimerai à titre personnel. Après cette prise de parole d'une collègue et amie écologiste, permettez-moi de rappeler que, comme le greenwashing est l'ennemi de l'écologie, le métalangage est l'ennemi du langage – qui doit être l'ami de la démocratie.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR. – « Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

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Nous pouvons avoir des divergences philosophiques, métaphysiques ou politiques. En revanche, en démocratie, nous avons un devoir de clarté : celui d'utiliser les bons mots.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.

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En l'occurrence, permettez-moi, madame la ministre, de rendre hommage à vos prédécesseurs, deux ministres de la santé de gauche qui ont clairement pris position dans une tribune publiée dans le journal Libération – je veux parler de François Braun, qui était ministre encore récemment, et de Claude Évin. Au-delà des arguments de fond, ils rappellent à quel point il est important, dans une démocratie, de bien nommer les choses. C'est à ces ministres de gauche que je fais appel pour réaffirmer ce besoin de clarté, aujourd'hui mis de côté.

Mme Blandine Brocard et M. Benoit Mournet applaudissent.

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Alain Claeys, qui a été auditionné au titre du CCNE, a indiqué que cette instance avait elle-même choisi de ne pas utiliser les termes de suicide assisté et d'euthanasie.

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Permettez-moi de revenir sur certains arguments entendus sur ces bancs et de tordre le cou à cette idée reçue selon laquelle les personnes les plus précaires et les plus vulnérables seraient les plus nombreuses à recourir à une aide à mourir, faute de moyens. Je ne sais pas d'où vous tenez vos informations. Les données disponibles aux États-Unis, au Canada et dans plusieurs pays européens tendent à démontrer qu'il n'existe pas de surreprésentation des plus modestes parmi les patients qui recourent à une aide à mourir ; au contraire, certaines études suggèrent même qu'il y aurait une surreprésentation des catégories les plus aisées. Les arguments que vous utilisez pour nous convaincre de ne pas avancer sur ce sujet doivent être fondés : c'est pourquoi, si vous disposez d'éléments quantifiés et d'études de référence, je vous remercie de nous les communiquer, puisque ce ne sont pas celles dont nous disposons.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe RE.

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Sur les amendements n° 996 et 2483 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

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Je ne parle pas au nom des non-inscrits, puisque, comme vous le savez, chacun a son opinion. Permettez-moi néanmoins de rappeler quelques points, parce qu'il s'agit d'un débat important.

Le Président de la République lui-même a refusé d'utiliser le terme d'euthanasie, parce qu'il ne voulait pas hystériser le débat – ce sont ses propres mots. L'expression « aide à mourir » – honnêtement, il serait difficile de trouver une formulation plus vague – vise à ne pas effrayer les Français, afin de préserver cette pseudo-adhésion à un projet de loi dont la finalité est très peu connue et qui recouvre des réalités très différentes.

Les termes « euthanasie » et « suicide assisté », débarrassés des connotations historiques que vous leur donnez pour les disqualifier, sont, au contraire, très précis. C'est pourquoi je m'interroge : qu'est-ce qui vous effraie au point de vous empêcher de nommer clairement les choses ? Pourquoi la France serait-elle le seul pays à ne pas oser appeler les choses par leur nom ? Je le répète, nous devons la vérité aux Français et cesser de tergiverser, en appelant l'aide à mourir par son nom, à savoir le suicide assisté et l'euthanasie. C'est une question d'honnêteté envers les Français.

M. Philippe Juvin applaudit.

Les amendements n° 900 , 645 , 1738 , 1157 , 1924 et 2497 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Les amendements identiques n° 132 et 983 ne sont pas adoptés.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 151

Nombre de suffrages exprimés 144

Majorité absolue 73

Pour l'adoption 50

Contre 94

L'amendement n° 996 n'est pas adopté.

Les amendements identiques n° 1389 , 1502 et 1657 ne sont pas adoptés.

L'amendement n° 47 n'est pas adopté.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 153

Nombre de suffrages exprimés 147

Majorité absolue 74

Pour l'adoption 51

Contre 96

Les amendements identiques n° 713 et 2483 ne sont pas adoptés.

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La parole est à Mme Emeline K/Bidi, pour soutenir l'amendement n° 2921 .

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Il vise à introduire dans l'intitulé du titre II la notion de droit. Nous avons eu de longs débats en commission au sujet de la nature de l'aide à mourir. Au terme de ces débats, il m'a semblé que l'on ne pouvait pas qualifier l'aide à mourir de soin. Il ne s'agit pas non plus d'une liberté ni d'une obligation qui s'appliquerait à tous, bien évidemment. Il s'agit bien d'un droit, encadré, qui répond à des conditions précises et qu'il est important d'inscrire dans le texte. Tout comme certains sont attachés aux mots, je suis attachée aux notions juridiques. La notion de droit est celle qui convient le mieux pour décrire l'aide à mourir.

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La parole est à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure de la commission spéciale pour les articles 4 quater à 6, pour donner l'avis de la commission.

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Je comprends l'intention de votre amendement. Néanmoins, on ne peut pas vraiment dire que l'aide à mourir soit un droit opposable ou un droit inconditionnel. Il s'agit plutôt d'une nouvelle liberté offerte à nos concitoyens : celle de choisir leur mort. Je vous propose de conserver la rédaction actuelle du titre II. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

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La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités, pour donner l'avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

L'aide à mourir repose fondamentalement sur une demande du patient et une réponse apportée par un médecin volontaire – en vertu de la clause de conscience, les médecins ne peuvent être contraints à concourir à une procédure d'aide à mourir. Pour toutes ces raisons, j'émettrai un avis défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous écoute depuis tout à l'heure avec beaucoup d'humilité, d'une part parce que je ne suis pas issu du domaine médical, d'autre part parce que, étant complètement athée, je n'ai pas de raison religieuse de m'opposer à quoi que ce soit. J'ai vécu des choses douloureuses concernant ce droit ou pas à mourir – c'est certainement le cas de beaucoup d'entre vous, dans vos familles. Mme K/Bidi a parlé de droit à mourir.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Chers collègues de gauche comme de droite, les Français qui veulent avoir le choix – j'en ai rencontré – se moquent complètement de votre sémantique, tout comme moi. Je vous le dis comme je le pense, du plus profond de mon cœur. Je veux juste savoir si j'ai le droit de décider de ma mort et à quelles conditions. C'est tout.

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C'est la seule question qui vaille. Je respecte les opinions des uns et des autres : respectez aussi ceux, peu nombreux, qui ne veulent pas entrer dans les dialogues de sourds qui dominent nos débats depuis le début de la soirée : à gauche comme à droite, des collègues essaient d'imposer des choses. On veut simplement savoir si on aura le droit de décider de notre mort et à quelles conditions.

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Si ce droit nous est accordé, ce ne sera bien sûr pas une obligation : ce sera la décision de chacun, et non quelque chose d'imposé. Il faut tenir compte du corps médical et de la science. C'est un sujet trop important – à mon cœur, parce que je l'ai vécu dans ma chair, mais je ne suis évidemment pas le seul dans ce cas. Les Français n'attendent qu'une chose : connaître les conditions dans lesquelles ils pourront accéder à l'aide à mourir de leur propre gré, s'ils le souhaitent. C'est tout. Ils se moquent de la sémantique.

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Autant je rejoins le souci de précision de Mme K/Bidi, autant je conteste la notion de droit d'accéder à l'aide à mourir. La question de la définition est essentielle. Je rappelle que nous aborderons dans les prochains jours le fait justificatif, particularité de notre droit qui permet d'échapper à une qualification pénale lorsqu'un texte spécial autorise un acte en principe interdit par la loi. Si nous retenons le fait justificatif, deux infractions pénales échapperont à des poursuites : l'homicide, en cas d'euthanasie, et la provocation au suicide, en cas de suicide assisté. Madame la ministre, si vous n'inscrivez pas clairement les notions d'euthanasie et de suicide assisté dans le texte, vous aurez une difficulté pour définir le fait justificatif.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Le groupe La France insoumise soutiendra cet amendement. Je donnerai deux arguments pour répondre à ceux qui s'y opposent. Tout d'abord, je ne suis pas d'accord avec l'idée qu'il s'agirait d'un basculement anthropologique. Le droit à l'aide à mourir représente une légalisation encadrée de ce que font déjà de nombreux médecins, dont certains qui sont philosophiquement opposés au principe – et peut-être même à ce texte –, mais qui reconnaissent avoir été obligés, dans des situations spécifiques, d'aider des patients à mourir. Le législateur entérinera une évolution sociale, sortira de telles pratiques de l'illégalité, et donnera à chacun un droit nouveau à disposer de son corps. Ce débat me fait beaucoup penser à celui sur l'interruption volontaire de grossesse (IVG) qui, à l'époque, avait sans doute aussi été qualifié de basculement anthropologique. Les opposants à l'IVG parlaient alors d'euthanasie et ils le font encore aujourd'hui. Or, cinquante ans après, le législateur a décidé, vous le savez, d'inscrire l'IVG dans la Constitution.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

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Dans le droit existant, une seule option philosophique est reconnue. Pour respecter tout le monde, je la résumerai de la façon suivante : « Qui sommes-nous pour choisir d'éteindre la lumière ? » – je l'ai entendu dans la bouche de plusieurs d'entre vous. Mais nous n'agissons pas à la place des gens : le patient, qui est-il pour lui-même choisir d'éteindre la lumière ? Nous proposons de créer un droit à une option supplémentaire pour le patient : pouvoir choisir d'éteindre la lumière, dans des conditions précises – ce texte en prévoit de nombreuses. Je pense que si 90 % des Français sont favorables à ce texte, c'est précisément parce qu'ils sont pour le respect de toutes les options philosophiques, et non pour qu'une seule s'impose à tous.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

L'amendement n° 2921 n'est pas adopté.

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Sur les amendements n° 48 et 384 , je suis saisie par le groupe Les Républicains de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, n° 1309 , 2498 et 2924 .

La parole est à Mme Delphine Lingemann, pour soutenir l'amendement n° 1309 .

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Je précise tout d'abord que je ne suis absolument pas opposée à l'aide à mourir. Je pense au contraire que nous devons avancer ensemble et aboutir la concernant, mais nous devons être précis quand nous parlons de vie et de mort. Cet amendement vise à qualifier plus précisément l'aide à mourir en la nommant « aide active à mourir ». En effet, dans le processus d'aide à mourir, il y a obligatoirement un acte, du médecin ou de la personne elle-même. C'est pourquoi il convient de rajouter la notion d'acte, expression plus représentative de ce processus.

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L'amendement n° 2498 de M. Dominique Potier est défendu.

La parole est à Mme Soumya Bourouaha, pour soutenir l'amendement n° 2924 .

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Je continuerai à évoquer la sémantique et à appuyer sur le sens des mots, car ils ont leur importance. Cet amendement vise à insérer le mot « active » après le mot « aide ». Je persiste à souligner ce qui me semble être une nécessité. Un choix délibéré a été fait, celui de ne pas reprendre dans ce projet de loi l'expression consacrée « aide active à mourir » et de ne pas nommer ses composantes. Le suicide assisté et l'euthanasie sont pourtant déclinés à l'article 5, qui instaure une aide active à mourir.

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Pourquoi ne pas le dire clairement ? Les mots font peur – ils nous font peur. Je souhaite vraiment que les choses soient dites de façon claire, nette et précise, pour que tout le monde puisse voter en son âme et conscience. C'est la première fois que je prends la parole depuis le début de la discussion de ce texte et je souhaite dire qu'il me pose problème. Je m'interroge sur la société que nous voulons laisser à nos enfants et à nos petits-enfants, et j'ai du mal à imaginer un monde où l'on autoriserait l'aide à mourir : je n'arrive pas à le concevoir. Je préfère une société qui privilégie la solidarité, le soin et l'accompagnement ,…

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – MM. Dominique Potier, Thierry Benoit et Benoit Mournet applaudissent également

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…plutôt que cette aide active. Je souhaite que l'amendement précise qu'il s'agit d'une aide active à mourir.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Dominique Potier applaudit également.

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Défavorable. Même si, nous le savons, le Comité consultatif national d'éthique a repris l'expression « aide active à mourir », je n'y suis pas favorable parce que cela laisserait entendre en creux qu'il y aurait une aide passive à mourir, ce que le texte ne prévoit pas. Il est préférable pour la lisibilité du droit de conserver la notion d'aide à mourir. Ce terme simple et humain met en valeur la dimension fraternelle de ce texte, qui concilie l'autonomie de l'individu et la solidarité de la nation.

Debut de section - Permalien
Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Je serai également défavorable à l'amendement. L'aide à mourir ne présente aucun caractère actif. Je l'ai déjà souligné, la notion renvoie d'abord à un patient dans un contexte spécifique – nous déterminerons les conditions à l'article 6. Il y a, d'un côté, une demande volontaire réitérée d'un patient et, de l'autre, une réponse d'un médecin tout aussi volontaire. C'est la raison pour laquelle la notion d'aide à mourir correspond davantage à l'esprit de ce projet de loi.

Monsieur de Lépineau, concernant le fait justificatif, dans ce texte, c'est le fait de respecter les conditions et les procédures prévues par la loi qui permettra aux professionnels de santé de ne pas voir leur responsabilité pénale engagée.

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Pardon, mais je ne comprends plus rien ! L'expression « aide à mourir » ne veut rien dire.

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Marc Le Fur applaudit.

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Je le répète : tous les soignants aident à mourir, sans provoquer la mort.

Ensuite, je vous entends dire, madame la ministre, que l'aide à mourir n'est pas un acte,…

Debut de section - Permalien
Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Je n'ai pas dit que ce n'était pas un acte, j'ai dit qu'elle n'avait aucun caractère actif !

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…mais à l'alinéa 7 de l'article 5, vous écrivez que l'aide à mourir est un acte. Nous avons l'impression de jouer au « ni oui ni non » : alors que le texte prévoit la possibilité du suicide assisté et de l'euthanasie, il ne faut surtout pas prononcer ces mots. Tout le monde en parle,…

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…ils sont présents dans tous nos esprits, dans chacune de nos interventions, dans tous les attendus de l'étude d'impact, mais nous ne devons pas prononcer ces mots. Prononcez-les ! Vous pouvez être pour ou contre, mais faites-le, pour que nous ayons enfin un débat éclairé.

L'ajout du mot « actif » est un pis-aller. Il s'agit d'un amendement de repli, que nous soutiendrons – mais je le répète : aider à mourir, c'est ce que nous faisons tous les jours.

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Voilà des amendements qui relancent encore le débat sémantique. Ce sont en effet des amendements de repli, en faveur desquels nous allons voter. Ils visent à préciser qu'il s'agit d'une aide « active » à mourir, en référence aussi à l'opposition entre euthanasie active et euthanasie passive.

L'aide à mourir, dans le sens où vous l'entendez, est un oxymore : les deux mots sont incompatibles. Reprenons l'étymologie :…

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…« aide » vient du latin « porter secours ».

Au-delà des mots, il y a la réalité. Dans votre définition, l'administration d'une substance létale est-elle une aide ? Évidemment non. Est-elle un secours ? Évidemment non, à moins que ce ne soit du secourisme à l'envers.

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Évidemment non – ou alors un soulagement irréversible. Relève-t-elle d'un soin ? Évidemment non.

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Qu'est-ce donc que l'administration d'une substance létale, si ce n'est un suicide assisté, une euthanasie ? Il faut dire les mots, parce qu'il y a des réalités derrière.

Quant à Mme Simonnet, qui nous fait à chaque fois le coup du sondage sur l'aide à mourir, à notre sens, l'aide à mourir, c'est l'accompagnement de la personne jusqu'à la fin de sa vie ; cela a un nom : les soins palliatifs. Et nous les soutenons, comme 90 % des Français.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

Les amendements identiques n° 1309 , 2498 et 2924 ne sont pas adoptés.

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Je suis saisie de plusieurs amendements, n° 48 , 2923 , 384 et 440 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement n° 48 .

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C'est encore un amendement de clarification rédactionnelle, qui tend à bien nommer les choses.

Madame la ministre, vous nous avez dit que les mots que nous souhaitions utiliser ne correspondaient pas au contenu du texte. J'ai plutôt l'impression que vous revenez sans cesse à un texte qui n'existe plus : celui que vous aviez présenté et qui a été considérablement modifié par la commission spéciale.

Vous affirmez que l'euthanasie n'est envisagée que par exception, mais ce n'est plus le cas avec l'article 11 modifié.

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La mention figurant initialement à l'alinéa 7, « Lorsque [la personne] n'est pas en mesure d'y procéder physiquement… » a disparu. La personne peut demander l'intervention d'un tiers, quelles que soient les circonstances. Il ne s'agit donc plus d'une exception d'euthanasie.

Mesure-t-on vraiment l'implication du tiers volontaire ? Quels effets un tel acte aura-t-il sur lui ? Quelle en sera la charge psychologique ? Je ne suis pas sûr que nous disposions d'études sur ce point.

En commission spéciale, le critère du pronostic vital engagé à court terme a été supprimé ; la possibilité d'une mort provoquée a été étendue à une affection grave et incurable en phase avancée ou terminale, l'ouvrant à un nombre infini de situations, y compris lorsque la mort est lointaine. Il s'agit non plus d'une aide à mourir telle que vous l'envisagiez au départ, mais bien d'une légalisation du suicide assisté ou de l'euthanasie.

Aider à mourir n'implique pas la réalisation d'un geste aussi grave. Ne risque-t-on d'ailleurs pas de dénaturer le mot ? « Aider » ne signifie-t-il pas plutôt « prendre soin » ? « Aider », c'est secourir les plus fragiles, c'est protéger la vie. On peut aider à mourir, mais sans provoquer la mort. C'est une question de fraternité.

Plus grave encore, l'alinéa 12 de l'article 8 prévoit que le délai de réflexion d'au minimum deux jours peut être abrégé « si le médecin estime que cela est de nature à préserver la dignité de [la personne] telle que [celle-ci] la conçoit ». Comme si la dignité était altérable ! Chers collègues, que faisons-nous du principe constitutionnel de l'inviolabilité de la dignité humaine ? C'est très inquiétant.

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Cela revient à envisager le suicide assisté ou l'euthanasie y compris lorsque le pronostic vital n'est pas engagé. Je ne sais pas si l'on mesure bien la portée d'une telle disposition, mais il ne s'agit plus du tout de solidarité.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.

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La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement n° 2923 .

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Je ne veux pas alimenter indéfiniment cette discussion. Je noterai simplement que nous sommes loin de la clarté que le Président de la République nous avait promise… Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que je suis déçu par de telles promesses. Le Président de la République décide que, certains mots ne lui plaisant pas, on ne va pas les employer. Cela avait déjà été le cas à propos de la pénibilité au travail : il avait supprimé le terme, comme si l'on pouvait par la même occasion supprimer la réalité. Évidemment, cela ne fonctionne pas comme ça.

J'entends que, dans cette assemblée, certaines personnes qui ne partagent pas les opinions de M. Macron se reconnaissent néanmoins dans certains termes et que cela suscite un débat. Pour le reste, j'ai déjà dit ce que j'avais à dire sur le sujet.

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La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 384 .

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Je voudrais revenir sur la question des mots, car ce n'est pas qu'une question sémantique : cela va évidemment bien au-delà.

« Oh là là ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Monsieur le rapporteur général, vous nous avez dit que le mot « euthanasie » avait été sali par l'histoire. Je ne suis pas convaincue par votre explication : si tel était le cas, personne ne l'utiliserait jamais. Or nombre de pays l'ont utilisé et l'utilisent encore. Je sais bien qu'il y a une fin de vie « à la française » qui consisterait à ne pas dire les choses, mais enfin la plupart des pays emploient ce terme sans que cela porte autrement à conséquence.

Quant au mot « suicide », j'ai une hypothèse quant à votre refus de l'utiliser. Il est en effet assez compliqué, quand on a la charge de la santé, de devoir à la fois empêcher le suicide et le promouvoir – même si c'est dans des conditions différentes !

Protestations sur les bancs des commissions et du Gouvernement.

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Vous protestez, madame la ministre, mais j'avais déposé à l'article 4 un amendement concernant la prévention du suicide. Vous avez émis un avis défavorable.

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Pourtant, cela ne vous gêne pas de promouvoir l'activité physique et sportive. Que je sache, nous n'avons pas abandonné les politiques de prévention du suicide !

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Pourquoi donc le terme « suicide » vous dérange-t-il ? Nous ne lâcherons pas l'affaire, qui ne se réduit pas à une question de sémantique ; elle touche au fondement même de votre texte.

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La parole est à M. Yannick Neuder, pour soutenir l'amendement n° 440 .

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Les mots ont en effet un poids et l'expression « aide à mourir » mériterait d'être précisée. Je propose d'ajouter « suicide assisté » – je vais vous dire pourquoi.

Ce week-end, je suis allé rencontrer les membres du personnel de l'Ehpad Bellefontaine, à Péage-de-Roussillon, dans ma circonscription, pour savoir ce qu'ils pensaient de ce texte. Quand je leur ai demandé s'ils étaient favorables à l'aide à mourir, l'ensemble des personnes présentes – aides-soignantes, infirmières, médecins – ont répondu par l'affirmative. Je leur ai demandé à quoi exactement ils étaient favorables. Je leur ai expliqué que les personnels soignants qu'ils étaient pourraient être les personnes qui devraient aller chercher la substance létale préparée à la pharmacie à usage intérieur (PUI) – ils ne l'avaient pas compris. Je leur ai dit qu'ils pourraient et, si possible, devraient accompagner la procédure. Comment ?, m'ont-ils demandé. À « proximité » du patient, ai-je répondu – c'est un terme qui devrait d'ailleurs être précisé. Je leur ai aussi dit, parce que je crois que, quand on est parlementaire, on doit cette vérité aux personnes qui nous interrogent, que, par suite de la modification du texte par la commission spéciale, ils pourraient être le tiers qui administrerait la substance létale si le patient ne le pouvait ou ne le voulait pas. Puis je leur ai demandé s'ils étaient toujours favorables à l'aide à mourir. Ils ne l'étaient plus.

Il ne s'agit pas de polémiquer, mais nous avons intérêt à préciser les choses. Si vous demandez à des soignants s'ils sont favorables à l'aide à mourir, ils pensent à la souffrance et ils répondent qu'ils le sont ; mais si vous leur dites qu'ils vont participer à une forme de suicide assisté, ils ne le sont plus. Si nous voulons être entendus, il faut que nous soyons clairs.

M. Marc Le Fur applaudit.

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Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

Debut de section - Permalien
Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Même avis.

Il conviendrait aussi, monsieur Neuder, de préciser aux médecins et à l'ensemble des personnels paramédicaux qu'ils ne seront pas obligés de réaliser un tel acte, puisque l'article 16 prévoit une clause de conscience. Je crois que c'est un élément important.

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Madame la ministre, vous n'avez que le mot « liberté » à la bouche pour légitimer le choix de ne pas parler de suicide assisté ni d'euthanasie. J'abonde dans le sens de ma collègue Annie Genevard. En faisant croire que vous respectez l'ultime liberté de la personne, vous piétinez la politique de prévention du suicide.

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Il y a quand même un certain nombre de médecins dans l'hémicycle. Chers collègues, quand les pompiers ou le Samu arrivent sur une scène de défenestration, par exemple lorsqu'une personne s'est jetée du quatrième étage parce qu'elle voulait mourir, que font-ils ? Est-ce qu'ils regardent la personne, disent qu'il faut respecter sa liberté, qu'elle voulait se suicider, et repartent sans la réanimer ?

Vives exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe RE. – Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Chers collègues, préservons la dignité de nos débats. Que chacun fasse un effort, s'il vous plaît.

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Il ne me semble pas que ce soit à l'orateur de faire un effort…

On sait très bien que quand cette personne arrive à l'hôpital, tout est fait pour la sauver, alors que sa liberté est de mourir. Soyez donc cohérents !

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Votre projet de loi touche à la substantifique moelle de la mission du médecin, qui n'est pas de tuer, mais de sauver. En ne prononçant pas certains mots, vous essayez de faire une entourloupe, de passer à côté. Assumez ! Vous tous qui êtes ici, lorsque Badinter est mort, vous êtes allés pleurer sur sa tombe. Pourtant, n'est-ce pas lui qui a dit que, grâce à la suppression de la peine de mort, la justice ici ne tuerait plus ? En l'espèce, vous allez adopter une loi qui va tuer.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Je ne suis pas membre de la commission spéciale et j'étais très curieuse d'entendre les arguments des uns et des autres pour essayer de toucher au fond du sujet, dans le respect des sentiments et des convictions de chacun. Je pense néanmoins que les termes du débat ont été posés et l'intervention précédente montre que nous commençons à nous laisser aller à des diatribes qui n'y ont pas leur place.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.

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Les Françaises et les Français qui nous regardent attendent de nous non pas que nous passions des heures à parler sur des amendements qui sont presque identiques et à propos desquels nous avons déjà tranché, mais que nous discutions de manière sereine, attentive, constructive pour trouver les modalités les plus respectueuses et les plus précises possibles d'encadrement de ce droit.

Mme Stella Dupont applaudit.

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Une fois cette série d'amendements votée, de grâce, faisons notre travail ! Il y en aura encore beaucoup d'autres exactement du même type. Le débat est posé ; il sera tranché. Faisons ce que les Françaises et les Français attendent. Écrivons ce texte le plus précisément et le plus dignement possible, en prenant en considération leur volonté exprimée massivement.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

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J'espère moi aussi que l'on va abréger nos souffrances et cesser de répéter toujours la même chose sur certains bancs.

Exclamations sur les bancs du groupe RN.

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Quant à moi, je répondrai en répétant ce que j'ai déjà dit, la pédagogie étant l'art de la répétition.

« Alléger », « assister », « entraider », « faciliter », « soulager », « soutenir », « donner la main » : ce sont des synonymes du verbe « aider ».

Lorsqu'on veut aider à mourir, il s'agit, suivant la même logique d'accompagnement, de seconder – ce que vous ne voulez pas entendre. Par ailleurs, je n'ai pour ma part aucun problème à parler de suicide assisté et d'euthanasie, et nos concitoyens n'en ont pas davantage : dans un sondage Ifop de l'année dernière, les mots étaient bien utilisés. Sur ce point, il est à noter que les Français sont plus nombreux à être favorables à l'euthanasie qu'au suicide assisté – 90 contre 85 % –, et cela devrait vous faire réfléchir.

Dernier point, lors des débats en commission, j'ai utilisé dans mes amendements les mots « suicide assisté » et « euthanasie ». Lorsque l'un de ces amendements a été voté, la première chose que vous avez faite a été de nous sauter à la gorge, en disant : « vous avez écrit ''suicide assisté'', vous voulez tuer tout le monde ! »

C'étaient exactement ces propos-là, madame Lavalette, et nous ne voulons pas les entendre sur ces bancs.

Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LFI – NUPES, GDR – NUPES et Écolo – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC.

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En lançant ce débat sémantique, vous n'avez qu'un objectif : essayer d'être un peu moins minoritaires sur le sujet. Vous continuerez pourtant de l'être tout à fait, parce que cela fait des années que le peuple est prêt, qu'il souhaite que nous légiférions enfin pour accorder ce droit, cette ultime liberté.

Exclamations sur les bancs du groupe RN.

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Nous souhaitons tous, en conscience, qu'un tel droit soit aussi peu utilisé que possible. Nous avons toutes et tous des histoires personnelles difficiles, nous avons tous en mémoire des fins de vie qui se sont mal passées, avec de très longues agonies au terme desquelles on voit celle ou celui qu'on aime partir dans d'atroces souffrances. Telles sont les situations sur lesquelles nous légiférons aujourd'hui.

Madame Lavalette, vos propos sont immondes.

Exclamations sur les bancs du groupe RN.

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C'est une honte de faire croire que nous serions ici pour bâtir un service public du suicide, que nous banaliserions ainsi !

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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La raison d'être de toutes nos politiques publiques est de permettre aux femmes et aux hommes de vivre libres, émancipés ; mais quand on est au bout du chemin, que la médecine ne peut plus rien,…

Debut de section - Permalien
Un député du groupe RN

Il en pense quoi, le Hamas ?

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…quand vous estimez qu'il ne s'agit plus de vivre, mais de survivre, légiférer pour garantir ce droit, cette ultime liberté, devient pour le législateur un devoir d'humanité.

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Je voudrais soutenir ces amendements de clarification, parce qu'il me semble essentiel de bien nommer les choses pour bien les comprendre : non pour que nous les comprenions bien, mais pour que les Françaises et les Français les comprennent bien. D'une acception très large, l'expression « aide à mourir » recouvre bien des choses : en soins palliatifs, on aide aussi les patients à bien mourir de leur maladie, avec ou sans sédation profonde et continue.

J'ai animé la semaine dernière une réunion regroupant quelque 250 personnes sur les 6 000 habitants que compte la commune où elle s'est tenue. Lorsque j'ai évoqué l'aide à mourir, on m'a vraiment demandé s'il s'agissait de suicide assisté, d'un arrêt des traitements ou d'une euthanasie ; l'expression ne parle pas clairement aux Français.

Je me pose en outre une question essentielle. J'avais proposé un amendement créant un délit d'incitation à l'aide à mourir. Vous m'avez opposé un avis défavorable au motif que le code pénal réprime déjà la provocation au suicide. Or, s'il s'agit d'aide à mourir, comment cela tombe-t-il sous le coup du code pénal qui parle de suicide ?

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Si on n'appelle pas cet acte « suicide », la réponse invoquant le code pénal ne fonctionnera pas.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai une position singulière au sein de mon groupe : comme beaucoup de Français, je m'interroge. Je comptais, je compte sincèrement sur ce débat pour me faire une conviction. J'entends et j'écoute les arguments des uns et des autres. Je commence par dire à nos collègues d'extrême gauche que je ne m'aligne pas sur une statistique, je ne me fais pas une opinion sur un sondage. Ces éléments mathématiques sont hors de propos quand on cherche à convaincre du bien-fondé de voter une telle loi.

Je ne demande qu'à être convaincu, chers collègues. Mais quand je vois les procès d'intention auxquels vous vous livrez, quand j'entends dire qu'il y aurait d'un côté les bons, de l'autre les mauvais, cela ne donne pas envie de vous suivre : vous semblez mener un combat dont le fond ne vous intéresse pas – un combat politicien.

Ce qui m'intéresse, quant à moi, c'est de me faire une conviction. J'avoue trouver ce débat sémantique un peu hypocrite, un peu fatigant. Je me suis enquis, bien entendu, des demandes des associations : elles demandent un suicide assisté, un recours à l'euthanasie – je ne les juge pas. Pour en avoir rencontré certaines comme parlementaire, j'ai compris leur demande, extrêmement claire. Au contraire, ensevelir notre débat sous la sémantique me semble assez hypocrite. Emmanuel Macron affirmait que ce débat permettrait de « regarder la mort en face », mais encore faut-il pour cela employer le bon vocabulaire. Or, je vous le dis sincèrement, très chers collègues, ce ne sont pas les mots exacts, ce n'est pas le bon vocabulaire, – cela ne correspond tout simplement pas à ce que nous sommes en train de faire – que d'appeler ça une aide à mourir.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Mme Sandrine Rousseau proteste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis allée à la rencontre des équipes de soins palliatifs de l'hôpital de Chambéry, et j'espère que chacun d'entre nous en a fait de même dans sa circonscription. Telle était la première chose à faire, dans chaque département où cela est possible, avant d'entamer ce débat, car l'expérience est éclairante. Ceux qui ont qualifié d'immondes les propos de Mme Lavalette – que je ne suis pas en train de défendre – devraient également dire aux médecins des soins palliatifs de Chambéry que j'ai rencontrés qu'ils tiennent des propos immondes, car ils m'ont dit exactement la même chose : confrontés à un suicidé – que la tentative de suicide soit la première, la deuxième ou la troisième –, ils ont l'obligation de tenter de le réanimer. Telle est la réalité.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe RN

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous allez mettre l'hôpital dans une situation d'injonction paradoxale…

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

…incompréhensible. Ces problèmes nous sont exposés par les médecins et nous les exposons à notre tour dans l'hémicycle. Je ne crois donc pas que vous ayez le droit de qualifier de tels propos d'immondes. Nous soulevons tous les problèmes qui se posent très concrètement aux personnels soignants comme à ceux qui accueillent des personnes ayant fait des tentatives de suicide et qui devront mettre en œuvre les dispositions contenues dans ce projet de loi. Les injonctions paradoxales comme celles-là portent atteinte au sens que nos soignants donnent à leur engagement.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.

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Je suis allée visiter la seule unité de soins palliatifs (USP) du Puy-de-Dôme ; je n'ai pas attendu ce débat, je l'ai fait il y a bien longtemps.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et RE.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je le dis parce que c'est exact, c'est vérifiable. Je m'y suis notamment intéressée en 2016, quand nous avons examiné la loi Claeys-Leonetti. Nous avons depuis lors examiné d'autres propositions de loi, notamment celle de M. Falorni.

On pourrait avoir l'impression que ce sont les médecins et soignants des unités de soins palliatifs qui devront fournir l'aide à mourir aux patients qui la sollicitent. Or une clause de conscience figure dans le texte – heureusement !

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.

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Nombre de médecins et d'infirmiers sont blessés par les propos que vous tenez. Quand j'ai commencé les auditions à ce sujet, je n'avais pas d'opinion favorable ou défavorable touchant le suicide assisté. J'ai assisté aux auditions ; j'ai entendu le docteur Blot, le docteur Mesnage et le docteur Michèle Lévy-Soussan, responsable d'USP pendant vingt-cinq ans, qui nous a remerciés de ne pas utiliser les termes « suicide assisté » et « euthanasie », inutilement blessants pour les soignants.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC, RE, LFI – NUPES, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je crois qu'il faut faire attention aux mots que nous utilisons. Le mot « suicide », madame Lavalette, renvoie à quelque chose de très violent. Se suicider est une décision solitaire et violente. Il faut que vous sachiez qu'il y a des patients qui se suicident à l'hôpital. C'est un fait, il y en a.

J'ai une fille qui est infirmière en pratique avancée (IPA) en néphrologie. L'année dernière, quatre patients se sont suicidés dans son service de la façon dont vous avez parlé. Bien que la mort ait été annoncée et attendue, je peux vous dire que la femme d'un des suicidés et ses deux enfants mineurs ont vécu cela comme une violence extrême. Et je mettrais ma main à couper qu'ils auraient préféré que son conjoint pour l'une, leur papa pour les autres, reçoive une aide active à mourir plutôt que de se suicider en se jetant par-dessus une rambarde.

Nous parlons de deux choses très différentes : l'exemple que vous avez pris ne peut être comparé à l'aide active à mourir. Faites attention aux termes !

Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur plusieurs bancs des groupes RE, LFI – NUPES, SOC, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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La parole est à M. Olivier Falorni, rapporteur général de la commission spéciale.

L'orateur est tourné vers les bancs situés à la droite de l'hémicycle.

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C'est vous qui venez de l'expliquer : nous voulons éviter des comparaisons malencontreuses. Certains qualifieront la chose comme ils le voudront, mais assimiler suicide assisté et suicide, c'est exactement ce que nous ne voulons pas faire.

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J'ai du respect pour vous, madame Genevard, car, en dépit de vos convictions, vos interventions sont généralement marquées par un certain sens de la modération. Mais comment pouvez-vous laisser entendre que Mme la ministre ne serait pas prête à engager une politique de prévention du suicide ?

Protestations sur plusieurs bancs du groupe LR.

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Vous l'avez bel et bien laissé entendre, madame. Évitons de tels sous-entendus. Évitons de tout confondre. Le suicide assisté tel que vous l'entendez – ce que nous appelons l'aide à mourir – concerne une personne qui veut mourir parce qu'elle va mourir, qui veut mourir parce qu'on lui a dit qu'elle allait mourir – d'une maladie grave et incurable –, une personne dont le pronostic vital est plus qu'engagé et qui souffre horriblement.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem, RE, LFI – NUPES, SOC, GDR – NUPES et Écolo – NUPES.

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Ne confondons pas les choses et les mots. Nous sommes plus que jamais et autant que vous attachés à la prévention du suicide !

Ensuite, ne venez pas nous reprocher de ne pas vouloir du mot « euthanasie ». Nous ne voulons plus entendre des parallèles comme ceux qui ont été faits quand sont venus en discussion des amendements portant sur les personnes handicapées. J'ose espérer que nous n'entendrons pas de telles comparaisons dans les minutes, les heures et les jours qui viennent quand nous examinerons à nouveau la situation de personnes vulnérables, de personnes handicapées qui pourraient avoir la volonté de mourir.

Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.

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Si nous n'utilisons pas les mots d'euthanasie et de suicide assisté, c'est pour éviter des comparaisons particulièrement malsaines.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et RE.

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La parole est à Mme Annie Genevard, pour un rappel au règlement.

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Sur le fondement d'une mise en cause personnelle. Monsieur le rapporteur, je crois que nous avons tout intérêt à restituer honnêtement les propos les uns des autres. Ai-je jamais mis en cause la volonté d'un ministre de la santé, quel qu'il soit, de conduire des actions de prévention du suicide ? J'ai simplement que dit que, si vous vouliez éviter tout amalgame, il fallait voter mon amendement à l'article 4, en faveur de la prévention du suicide.

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Cet amendement n'a pas été voté. Le Comité consultatif national d'éthique fait lui-même la comparaison entre suicide assisté et suicide.

Exclamations sur divers bancs.

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Vous le voyez, il n'y a pas de débat interdit.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 179

Nombre de suffrages exprimés 169

Majorité absolue 85

Pour l'adoption 63

Contre 106

L'amendement n° 48 n'est pas adopté.

L'amendement n° 2923 n'est pas adopté.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 175

Nombre de suffrages exprimés 166

Majorité absolue 84

Pour l'adoption 66

Contre 100

L'amendement n° 384 n'est pas adopté.

L'amendement n° 440 n'est pas adopté.

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Nous avons débuté ce soir l'examen du titre II, consacré à l'aide à mourir. Ce débat fait appel à nos consciences, et le choix auquel procédera chacun d'entre nous l'engagera personnellement.

Pour que nous puissions nous forger une conviction, il importe que Mme la ministre précise l'objectif de ce titre II : quel est son périmètre ? Qui sont les patients concernés ? On voit bien que dans l'hémicycle, plusieurs visions coexistent : cette partie du texte fait l'objet d'interprétations concurrentes.

En ce qui me concerne, je suis tout à fait favorable à un geste compassionnel, réservé à des cas exceptionnels – en tant que soignant, je sais qu'il y a des cas où la science, malheureusement, ne nous permet pas de soulager le patient.

Ce périmètre de cas exceptionnels, inspirant la compassion, ne représente que quelques centaines de cas par an. Or, selon d'autres interprétations du texte, l'aide à mourir pourrait, comme dans les pays voisins, s'appliquer à 2, 3 voire 4 % d'une génération. Il y a environ 650 000 décès par an en France : la mesure ne concernerait plus seulement quelques centaines de cas, mais bien quelques dizaines de milliers.

Je sais, madame la ministre, que vous m'avez répondu en commission, mais il est souhaitable que le Gouvernement indique ici, dans l'hémicycle, sa vision en la matière, afin que nous soyons tous d'accord quant aux termes du débat. Est-ce bien une vision compassionnelle, réservée à des cas exceptionnels, dans lesquels la science ne permet pas de soulager les patients ? Je vous remercie de préciser le périmètre de votre projet de loi.

Mme Maud Gatel applaudit.

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Samedi et dimanche, nous avons eu un peu de liberté puisque le débat s'est momentanément interrompu. J'en ai profité pour me plonger dans un petit ouvrage tout à fait intéressant intitulé Euthanasie : un progrès social ?

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Il a été écrit par des gens qui se réclament très explicitement de la gauche – la préface a été signée par Marie-George Buffet : l'une, Isabelle Marin, est médecin ; l'autre, Sara Piazza, est psychologue. Elles travaillent toutes les deux en Seine-Saint-Denis et leur propos est très intéressant. Voilà ce qu'elles écrivent : « Travaillant depuis de nombreuses années à Saint-Denis dans une équipe mobile de soins palliatifs, côtoyant la précarité et la multiculturalité, nous sommes fort choquées de cette position prise par les divers partis de gauche. En effet, la fin de vie, comme l'accès à la santé, est marquée par de profondes inégalités sociales et les précaires que nous soignons, que nous côtoyons, seront les premières victimes de ce tournant législatif qui aura des effets pratiques considérables. »

Madame Bourouaha, chère collègue, j'ai bien écouté votre intervention tout à l'heure : votre vision est analogue à celle que je viens d'évoquer. Je le dis très solennellement à nos collègues de gauche : si nous votons un tel texte, il ne faudra pas venir nous parler de solidarité…

Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Vous devriez plutôt vous inspirer de celles et ceux qui, engagés à gauche, savent, par leur vécu, que les premières victimes de ces mesures seront les plus modestes et, plus encore, les plus solitaires. Ce sont eux, seuls face à la mort, sans famille pour les accompagner, dont le sort sera livré à la technique, et que la technique poussera au suicide assisté ou à l'euthanasie.

Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.

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Alors mes chers collègues, réfléchissez, s'il vous plaît !

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On vous rappellera ces propos lors de l'examen du PLF et du PLFSS !

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Sur les amendements n° 289 et identiques, je suis saisie par les groupes Les Républicains et Écologiste – NUPES de demandes de scrutin public.

Sur les amendements n° 49 et identique ainsi que sur l'amendement n° 294 , je suis saisie par le groupe Les Républicains d'autres demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je suis saisie de cinq amendements identiques, n° 289 , 1503 , 2331 , 2387 et 3334 , tendant à supprimer l'article 4 quater.

La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 289 .

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Il vise en effet à supprimer le présent article, qui ambitionne de faire entrer dans le code de la santé publique l'aide à mourir, c'est-à-dire l'euthanasie et le suicide assisté. De notre point de vue, de telles pratiques ne relèvent pas du code de la santé publique. Les auteurs de la loi doivent assumer leur choix d'une rupture profonde avec la logique du soin, définie par la citation latine Primum non nocere – « d'abord, ne pas nuire ».

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La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l'amendement n° 1503 .

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On l'a bien compris lors du débat précédent : curieusement, les mots vous effraient plus que les réalités. Vous tolérez certaines réalités, mais vous ne voulez pas des mots qui les qualifient – suicide assisté ou euthanasie.

En tout état de cause, cela n'a pas sa place dans le code de la santé publique. Ce n'est pas un soin ! Mettez-le ailleurs, si vous souhaitez absolument l'intégrer quelque part, mais la santé et le soin, ce à quoi se dévouent beaucoup de gens, ce n'est pas cela. Les médecins, les infirmiers, les aides-soignants, les pharmaciens et tous les personnels de la santé nous le disent très explicitement – vous qui invoquez souvent les statistiques, vous devriez les écouter car ils sont on ne peut plus clairs à ce sujet : ce n'est pas leur conception de la santé.

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La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l'amendement n° 2331 .

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Vous dites vouloir mettre le patient au cœur de l'aide à mourir : c'est le patient qui en fera la demande, et le médecin ne sera là que pour la recueillir. À mon sens, cela relève plus du code civil que du code de la santé publique !

Si nous voulons vraiment placer la personne au centre de la démarche – le médecin ne faisant qu'accompagner –, il faut que ce soit dans le code civil. C'est ce qui me gêne un peu dans le texte, mais nous aurons l'occasion d'en reparler à propos d'autres amendements : pourquoi écrire que c'est le patient qui fait la demande si c'est ensuite le médecin qui prend la décision ? C'est pourtant ainsi que le texte est rédigé.

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La parole est à Mme Lisette Pollet, pour soutenir l'amendement n° 2387 .

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L'euthanasie ne pouvant être considérée comme un soin, elle ne peut faire son entrée dans le code de la santé publique. Votre mesure est contraire aux dispositions de l'article L. 1110-5, qui définit les actes thérapeutiques ayant notamment trait à la prévention, à l'investigation, aux traitements et aux soins.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.

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La parole est à M. Hervé de Lépinau, pour soutenir l'amendement n° 3334 .

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C'est à nouveau dans un souci de clarification et de précision que nous nous interrogeons sur l'oxymore que vous voulez faire entrer dans le code de la santé publique. Vous l'avez compris, il s'agit d'adjoindre à l'« information des usagers du système de santé » et à l'« expression de leur volonté », dans l'un des intitulés du code, la « fin de vie », donc de l'ouvrir au suicide assisté et à l'euthanasie.

Pourtant, comme plusieurs d'entre nous l'ont exprimé, ces deux actes ne peuvent en aucune manière être assimilés à des soins. Il est donc paradoxal de vouloir intégrer dans une codification qui traite du soin ce qui n'en relève pas.

D'autre part, je voudrais évoquer l'effet cliquet d'un tel ajout. Le mérite de la commission spéciale, c'est d'être allée très vite en besogne. Certains l'ont rappelé : on a évacué en quinze jours ce que le législateur fait généralement en vingt ans – nous sommes par exemple allés jusqu'à inscrire le délit d'entrave dans le texte, alors qu'il n'apparaît habituellement qu'au bout de vingt ans de pratique de la loi.

Enfin, je suis obligé de vous rappeler à l'ordre, monsieur le rapporteur général, avec tout le respect que je vous dois. Vous ne pouvez pas brider nos débats ! C'est impossible. Vous êtes dans une enceinte où l'on décide de la loi : vous ne pouvez pas mettre la poussière sous le tapis, et vous ne pouvez pas non plus nous empêcher d'aller au fond des choses, même si cela en révèle des aspects qui vous déplaisent.

Je tiens en effet à rappeler, et ce n'est pas une vue de l'esprit, qu'il y a eu des amendements visant à autoriser l'euthanasie des enfants. C'est le fameux effet cliquet ! La nouvelle rédaction que vous proposez pour cet intitulé nous fait déjà anticiper les conséquences de votre loi, qui conduira à élargir le spectre de l'accès à la mort ;…

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…et cela, beaucoup de Français ne le veulent pas.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Pour la clarté de nos débats, je tiens à vous expliquer pourquoi nous avons choisi, en commission spéciale, de codifier certaines dispositions du texte dans le code de la santé publique. D'abord, le projet de loi déposé par le Gouvernement ne prévoyait pas de codification des articles 5 à 17 – définition, conditions d'accès, procédure, contrôle et évaluation de l'aide à mourir, clause de conscience –, et ce, malgré le caractère permanent de ces dispositions. Tout cela va bien au-delà du débat sémantique que vous cherchez à relancer à la faveur de ces amendements de suppression.

Comme l'a rappelé le Conseil d'État dans son avis du 4 avril, « le Conseil constitutionnel […] juge que la codification tend à faciliter l'accessibilité et l'intelligibilité des règles de droit » – auxquelles vous tenez beaucoup. Avec mes collègues rapporteurs, nous avons donc proposé, en commission, de suivre la recommandation du Conseil d'État mais aussi de professeurs de droit que nous avions auditionnés, afin de codifier les articles 5 à 17 du projet de loi.

Nous proposons donc de créer une nouvelle section dédiée à l'aide à mourir dans le code de la santé publique, au sein d'un chapitre qui serait désormais intitulé « Information des usagers du système de santé, expression de leur volonté et fin de vie » ; c'est le sens de l'article 4 quater . Ainsi, toutes les dispositions relatives à la fin de vie pourront être rassemblées au même endroit dans le code de la santé publique. Je donne un avis défavorable à ces amendements de suppression.

Debut de section - Permalien
Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Disons-nous les choses : il n'y a pas de poussière sous le tapis. Le débat est public, et il est très important que la représentation nationale puisse discuter de ce texte.

Madame Genevard, vous m'avez appelée à mener, en ma qualité de ministre chargée de la santé, une politique de prévention du suicide. Vous nous appelez dorénavant à prendre nos responsabilités. Je tiens à vous rassurer : comme vous, je prends mes responsabilités. Je suis présente dans cet hémicycle pour écouter, échanger et donner les avis du Gouvernement. Ensuite, la représentation nationale se prononcera. Telles sont les règles qui régissent notre démocratie. Chacun assume ses responsabilités, calmement, tranquillement ; il n'y a pas lieu de rappeler aux uns ou aux autres ce qu'ils ont à faire.

J'en viens au fond. Nous ne cachons absolument rien. Nous cherchons à apporter des réponses à des femmes et à des hommes qui sont atteints d'une affection grave et incurable et qui présentent une souffrance réfractaire aux traitements – autrement dit, que rien ne permet d'apaiser. C'est parce qu'ils souffrent et qu'il n'y a pas de réponse à leur souffrance que nous sommes amenés à travailler sur ce sujet ; gardons-le bien à l'esprit.

Peut-on dire que c'est leur nuire ? Je ne me permettrais jamais de le dire ; je n'ai pas de certitude à ce sujet. Tant mieux pour vous si vous pouvez répondre à cette question avec certitude. Pour ma part, j'ai l'humilité de dire que je ne sais pas.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Mmes Christine Pires Beaune et Claudia Rouaux applaudissent également.

Debut de section - Permalien
Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Les professionnels leur disent qu'ils ont fait tout ce qu'ils pouvaient faire, qu'ils n'ont pas, à ce stade, d'autre réponse.

Autre point important : le recours à l'aide à mourir est soumis à plusieurs critères cumulatifs, énoncés à l'article 6, et ne peut intervenir qu'après un avis médical, qui fait l'objet des articles 7 et 8. En d'autres termes, personne ne pourra absorber une substance létale s'il ne satisfait pas à ces conditions cumulatives et s'il n'est pas passé par les différentes étapes ; cela ne se fera pas du jour ou lendemain.

Monsieur Isaac-Sibille, il est très difficile de répondre à la question que vous m'avez posée à propos du périmètre. On peut estimer à 3 000 ou 4 000 le nombre de personnes qui se trouvent chaque année dans la situation décrite par le projet de loi. Il est probable que peu d'entre eux souhaiteront recourir à l'aide à mourir. Toutefois, faudrait-il s'interdire d'ouvrir le débat au motif qu'ils sont peu nombreux ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Mme la rapporteure applaudit également.

Debut de section - Permalien
Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Avec toutes les réserves qui s'imposent – comparaison n'est pas raison –, je vous donne quelques données relatives aux Français qui ont eu recours à l'aide à mourir dans des pays voisins. Je le fais à titre purement indicatif, sachant que les méthodes de comptabilisation peuvent être discutées. D'après les chiffres dont nous disposons, sur les 250 personnes de nationalité française qui ont eu recours à l'aide à mourir en Suisse en 2023, 50 n'étaient pas résidentes en Suisse ; en Belgique, la proportion est de 101 personnes sur 110.

L'aide à mourir est un acte qui implique, je l'ai dit, une évaluation médicale. C'est la raison pour laquelle elle relève du code de la santé publique. J'ajoute que le projet de loi prévoit que, dans tous les cas, un professionnel de santé sera présent aux côtés de la personne ou se trouvera à proximité.

Je suis défavorable aux amendements.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. François Gernigon applaudit également.

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Je suis très à l'écoute depuis le début des travaux de la commission spéciale et, plus encore, depuis le début de l'examen du texte dans l'hémicycle. Or, la semaine dernière, M. Didier Martin, rapporteur pour les articles 1er à 4 ter, a déclaré que l'aide à mourir n'était pas un soin. Nous en déduisons qu'elle ne devrait pas figurer dans le code de la santé publique.

Les soignants ont très peur que l'on ouvre l'accès à l'euthanasie et au suicide assisté. Cela entraînera une crise morale profonde dans la profession, car c'est synonyme d'un désengagement déontologique et médical, d'une dérive des pratiques vers une voie glaciale, notamment de l'involution des unités de soins palliatifs.

Lorsqu'une personne fait une tentative de suicide, le soignant qui arrive sur les lieux s'efforce de la réanimer. En l'espèce, le soignant mettra dans la main de la personne un comprimé pour qu'elle puisse se suicider. C'est le secourisme à l'envers !

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.

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Je salue tous les personnels qui travaillent pour le 3114, le numéro national dédié à la prévention du suicide. Ils écoutent jour et nuit des personnes qui ont des idées suicidaires ou leurs proches. Ils réalisent un travail de prévention considérable ,

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE

Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES

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à l'image de la psychiatrie dans son ensemble.

Il est parfaitement indigne de confondre la prévention du suicide et l'aide à mourir. Celle-ci a vocation à intervenir en fin de vie, lorsque le pronostic vital est engagé et que la souffrance est réfractaire aux traitements. L'inscrire dans le code de la santé publique, c'est acter le fait qu'il s'agit précisément d'une réponse à la souffrance réfractaire. Elle n'a rien à voir avec un acte suicidaire. C'est bel et bien une aide à mourir, parce que la vie est devenue trop difficile ! Y recourir relèvera du choix intime et personnel de l'intéressé !

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR.

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Nous abordons enfin l'examen du titre II, relatif à l'aide à mourir – mais vous pouvez l'appeler comme vous voulez. La question posée à notre assemblée est la suivante : allons-nous attribuer un nouveau droit aux personnes qui agonisent et souffrent l'enfer, puisque les traitements qu'elles reçoivent ne font plus effet ? Allons-nous leur éviter, le cas échéant, d'être vues en train d'agoniser par leurs enfants et leurs proches ? Allons-nous leur permettre, au contraire, de partir en paix, enfants et proches réunis autour d'elles ?

Nous pouvons parler de sémantique pendant des heures. Cela a été rappelé, l'aide à mourir concernera un minimum de personnes, dont la situation ne relève pas du titre Ier et qui ont besoin que l'on ouvre autre chose que ce qui existe.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

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La parole est à M. Philippe Juvin.

Je vous donnerai ensuite la parole, monsieur Neuder, si votre opinion diffère de celle de M. Juvin.

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L'inscription de l'aide à mourir dans le code de la santé publique dépend en réalité de la réponse que l'on donne à la question suivante : l'aide à mourir est-elle un soin ? Or, ici même, le 31 mai, M. le rapporteur Didier Martin a affirmé qu'elle n'était pas un soin.

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Dès lors, je ne comprends pas pourquoi il faudrait l'inscrire dans le code de la santé publique.

J'en viens à la question du suicide, qui a été abordée. S'il existe demain des suicides qu'il faut prévenir et d'autres qu'il faut accompagner, comment fera-t-on ?

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Vous avez fait combien d'années d'études, déjà ?

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Considérera-t-on que certains suicides sont raisonnables, qu'il y a de bons et de mauvais suicides ? C'est une question fondamentale qui se posera dans la vie quotidienne. Je le répète, comment fera-t-on ?

Aujourd'hui, la loi punit l'incitation au suicide. Demain, la loi punira celui qui s'oppose à l'organisation du suicide. Voilà ce qu'il nous est difficile de comprendre : que faudra-t-il prévenir ou ne pas prévenir ?

À ceux qui pensent qu'il faut absolument insérer l'aide à mourir dans le code de la santé publique, je rappelle que l'Autriche, la Belgique, les Pays-Bas, l'Espagne et le Luxembourg ont inscrit les dispositions relatives à l'euthanasie ou au suicide assisté non pas dans leur code de la santé, mais dans une législation autonome.

Nous ne voulons pas d'une inscription de l'aide à mourir dans le code de la santé publique.

Applaudissements sur les bancs du groupe LR.

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Je souhaite revenir sur le périmètre, madame la ministre. On a évoqué initialement une centaine de patients. Cependant, si l'on retient les chiffres évoqués par notre collègue Isaac-Sibille – 4 % de personnes qui recourent à l'aide active à mourir en Belgique ou aux Pays-Bas ; 660 000 décès par an en France –, l'aide à mourir pourrait concerner jusqu'à 20 000 à 30 000 personnes.

Plusieurs d'entre nous se prononceront sur le texte au regard des débats qui ont lieu dans l'hémicycle. Or on ne mesure pas bien que le fait d'offrir une telle possibilité aura un effet incitatif. Je reviens sur des expériences de terrain. Récemment, des aides-soignantes d'un Ehpad m'ont dit avoir été sollicitées par des familles qui demandaient une aide active à mourir pour leur parent. Les soignants ont ensuite évoqué le sujet avec les résidents de l'Ehpad, et il en est ressorti que la moitié d'entre eux n'étaient pas opposés à une aide active à mourir. Simplement, ils ne la demandaient pas pour eux-mêmes, mais surtout dans l'esprit de soulager leurs proches. Voilà un facteur que nous avons peu évoqué.

Autre exemple : j'ai participé à une prise en charge solidaire…

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Excusez-moi de vous interrompre, mon cher collègue, mais vous n'exprimez pas une opinion divergente de celle de M. Juvin sur les amendements en discussion.

Murmures sur divers bancs.

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Déjà qu'ils mentent sur les motions de censure…

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Il faut admettre que, dans la pratique médicale, il y a des soins, mais il y a aussi des actes. Je maintiens ce que j'ai dit : l'aide à mourir n'est pas un soin ; c'est un acte qui interviendra après le soin, une fois la médecine au bout de sa science et de son art. Néanmoins, comme l'a indiqué Mme la ministre, cet acte requerra des compétences médicales : diagnostic, évaluation du pronostic vital – nous y reviendrons –, sécurité de la prescription, délivrance du produit, proximité avec le patient jusqu'au moment où l'acte sera réalisé.

Je rappelle en outre que les Français résidant en France qui ont recours à l'aide à mourir en Belgique sont pris en charge par la sécurité sociale. M. Juvin ne semble guère intéressé par mon propos…

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Je veux vérifier ce qu'il y a dans le verre…

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Qui plus est, quand les intéressés ont une mutuelle, c'est la totalité de l'acte qui est pris en charge. Voilà une raison supplémentaire d'inscrire ces dispositions dans le code de la santé publique.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 176

Nombre de suffrages exprimés 169

Majorité absolue 85

Pour l'adoption 73

Contre 96

Les amendements identiques n° 289 , 1503 , 2331 , 2387 et 3334 ne sont pas adoptés.

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Je suis saisie de trois amendements, n° 49 , 1504 et 294 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements n° 49 et 1504 sont identiques.

La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement n° 49 .

Je vous invite à la concision, mon cher collègue, car nous avons déjà débattu d'amendements analogues.

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Rassurez-vous, madame la présidente, je vais évoquer des éléments nouveaux.

Vous souhaitez codifier les dispositions relatives à l'aide à mourir dans le code de la santé publique, en y insérant une nouvelle section – c'est l'objet de l'article 5 – et en modifiant l'intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de sa première partie – c'est l'objet du présent article 4 quater. Or la modification de cet intitulé consiste simplement à ajouter « fin de vie », ce qui semble un peu léger par rapport aux évolutions envisagées.

Vous dites, madame la rapporteure, que la codification a été recommandée par le Conseil d'État, mais il faut citer jusqu'au bout ! Le Conseil d'État a effectivement appelé « l'attention du Gouvernement sur l'opportunité de procéder à la codification des dispositions relatives aux conditions, à la procédure et au contrôle de l'aide à mourir. » Mais il a précisé n'avoir « toutefois pas été en mesure d'y procéder en raison du délai qui lui a été imparti pour examiner ce projet, particulièrement court au demeurant au regard des enjeux et des difficultés constitutionnelles ou conventionnelles qu'il soulève. »

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J'en viens à l'amendement. La façon d'intégrer ces dispositions dans le code de la santé publique est problématique. La nouvelle section 2 bis sera-t-elle conciliable avec d'autres articles, notamment l'article L 1110-5 ? Celui-ci dispose en effet : « Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir, sur l'ensemble du territoire, les traitements et les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire et le meilleur apaisement possible de la souffrance au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de traitements et de soins ne doivent pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. »

Pour lever ces contradictions, il faudrait modifier substantiellement le titre. Contrairement à ce que vous proposez…

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Votre temps de parole est écoulé, je vous remercie. Votre groupe a déjà longuement abordé ce sujet.

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La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l'amendement identique n° 1504 .

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Comme l'a dit mon collègue Bazin, introduire des dispositions relatives au suicide assisté et à l'euthanasie au sein d'un code consacré aux soins est contradictoire. Soigner, c'est guérir, atténuer les souffrances et les douleurs ; c'est offrir des perspectives et non un horizon final.

Mme Danielle Simonnet s'exclame.

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L'amendement n° 294 de Mme Annie Genevard est défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

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Vous profitez de l'article 4 quater pour revenir sur un débat sémantique que nous avons déjà eu. Avis défavorable.

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Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Pour les députés qui n'ont pas assisté à ces débats, je cite à nouveau le point 49 de l'avis du Conseil d'État que j'ai lu devant la commission spéciale : « la codification tend à faciliter l'accessibilité et l'intelligibilité des règles de droit […]. [Le Conseil] appelle en conséquence l'attention du Gouvernement sur l'opportunité de procéder à la codification des dispositions relatives aux conditions, à la procédure et au contrôle de l'aide à mourir. Il estime que la section 2 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique intitulée '' Expression de la volonté des malades refusant un traitement et des malades en fin de vie '' pourrait accueillir ces dispositions. »

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Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Vous l'avez fait. Nous sommes donc complémentaires. Le Conseil d'État dit qu'il n'a pas eu le temps d'y procéder ; il nous a invités à le faire, nous le faisons. Avis défavorable.

Applaudissements sur les bancs du groupe RE.

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En notre qualité de législateur, nous devons travailler de la manière la plus précise possible pour le plus grand nombre de Français afin que nul ne puisse dire : « Quand c'est flou, il y a un loup. »

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Oh là là…, et « Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur de ce monde », « La pédagogie, c'est l'art de la répétition »…

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Et « Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras » !

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Les soignants travaillant en soins palliatifs refuseront de pratiquer l'euthanasie car ils ont la volonté de soigner, de soulager la douleur et non de tuer. Si nous ne sommes pas suffisamment précis, nous ouvrirons la porte à des contentieux qui engorgeront les tribunaux. Ce sera Soleil vert !

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Ah, Soleil vert ! Celui-là, on ne l'avait pas encore eu !

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Mme la ministre affirme que les professionnels ne seront pas obligés de participer à ces actes. Je suis persuadée au contraire que certains d'entre eux, sous pression, le feront à contrecœur, pour pouvoir bénéficier d'un avancement de carrière, par exemple.

J'ai travaillé en hôpital. Il ne m'est jamais venu à l'idée de conseiller d'en finir à un patient angoissé qui m'appelait la nuit car il n'avait plus de traitement.

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Je lui passais le cadre de santé afin qu'il puisse obtenir le traitement adéquat pour soulager sa douleur.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.

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Et quand il n'y a plus de traitement adéquat, comment fait-on ?

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Le rôle du législateur est de modifier des codes. Pour être pleinement intelligible, ce texte doit être inscrit dans un code. En effet, les textes qui ne sont pas codifiés perdent en lisibilité.

Comme législateur, nous devons débattre des articles les uns après les autres. Certains des députés Les Républicains veulent faire le débat avant le débat et évoquent avant l'heure des dispositions qui ne sont pas encore en discussion. Recentrons-nous sur les articles examinés afin de gagner en intelligibilité ! Nous répondrons ainsi aux attentes de nos concitoyens.

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En Autriche, en Belgique, en Hollande, en Espagne, au Luxembourg et au Québec, ces questions sont traitées par des lois autonomes, qui ne sont pas intégrées au code de la santé.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 173

Nombre de suffrages exprimés 165

Majorité absolue 83

Pour l'adoption 63

Contre 102

Les amendements identiques n° 49 et 1504 ne sont pas adoptés.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 174

Nombre de suffrages exprimés 168

Majorité absolue 85

Pour l'adoption 64

Contre 104

L'amendement n° 294 n'est pas adopté.

L'article 4 quater est adopté.

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Sur cet article, la conférence des présidents a autorisé deux inscrits par groupe pour permettre à chaque groupe d'exprimer la diversité de ses opinions. Je prends donc deux inscriptions par groupe pour exprimer des opinions différentes.

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Diversité quand même !

La parole est à Mme Monique Iborra.

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Nous débutons l'examen du titre II, consacré à l'aide à mourir, par l'article 5, qui la définit. Les directives anticipées constituent aujourd'hui le seul document de référence par lequel la personne exprime ses volontés pour la fin de sa vie. En l'état du droit, « Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté […]. À tout moment et par tout moyen, elles sont révisables et révocables. »

Le projet de loi dont nous débattons inscrit l'aide à mourir – attendue et plébiscitée depuis de nombreuses années par la majorité de nos concitoyens – dans le code de la santé publique, juste après l'article L 1111-11, qui définit les directives anticipées.

Lors de nos débats sur l'article 5 et les suivants, nous examinerons les modalités de la demande d'aide à mourir et ses conditions d'accès. Lorsque la personne n'est plus en état de faire la demande d'aide à mourir ou de la réitérer du fait d'une aggravation de son état, la prise en compte des directives anticipées me semble centrale.

Si nous ne pouvons pas imaginer toutes les situations, je voudrais évoquer un cas de figure préoccupant. Dans l'éventualité où, après qu'une personne a vu sa demande d'aide à mourir acceptée par le médecin et l'équipe pluridisciplinaire conformément à la procédure, il serait décidé de ne pas en tenir compte au prétexte qu'elle n'est plus en état de la réitérer, ne créerions-nous pas une rupture d'égalité entre les citoyens et une incohérence de notre droit en matière de vie ? Cela ne serait-il pas de nature à créer une incompréhension totale chez eux ?

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.

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Nous examinons enfin l'article 5, qui constitue le cœur de ce projet de loi puisqu'il définit l'aide à mourir, c'est-à-dire l'euthanasie et le suicide assisté. Votre texte constitue à la fois une loi d'exception, une loi collective et une loi de rupture.

La quasi-totalité des médecins qui travaillent en soins palliatifs déclarent que la loi Claeys-Leonetti de 2016 répond à l'écrasante majorité des cas de figure. Nous ne pouvons pas légiférer de nouveau tant que tous les Français n'ont pas accès aux soins palliatifs, partout sur le territoire.

Si elle était votée, cette loi ne permettrait pas seulement de concrétiser des choix individuels, elle concernerait aussi les médecins, les infirmiers, les volontaires, elle impliquerait les familles, qui souvent se déchirent. En ce sens, elle questionne notre société et revêt un caractère collectif.

Enfin, cette loi rompt avec la grande tradition de soins de notre pays. Nous devrions écouter nos voisins européens qui ont déjà légiféré sur le sujet : en Belgique, l'euthanasie s'est faite au détriment des soins palliatifs ; aux Pays-Bas, Théo Bauer, l'ancien contrôleur des cas d'euthanasies, nous alerte sur les enjeux d'une telle loi et sur le risque que l'euthanasie et le suicide assisté remplacent et supplantent progressivement les soins palliatifs.

La voie des soins palliatifs est la seule que nous devons suivre.

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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À ce stade de nos débats, je voudrais porter la voix d'Aurélie, qui m'a écrit au mois de janvier. Âgée de 44 ans, elle souffre d'un cancer des ovaires depuis l'âge de 30 ans. Son cancer est rare, incurable et évolue lentement. Dans sa lettre, elle raconte sa longue errance médicale, les multiples interventions subies, les trente-cinq séances de radiothérapie et, en octobre 2021, son refus de reprendre un traitement de chimiothérapie. Elle témoigne aussi de sa reconnaissance pour l'écoute et la douceur manifestées vis-à-vis d'elle et de son mari par l'unité de soins palliatifs qui l'accompagne et le fera jusqu'au bout. « Le bout, c'est ma mort », écrit-elle.

Elle pourrait demander la sédation profonde et continue jusqu'au décès mais s'y refuse. « Je ne veux pas mourir à petit feu ». Elle évoque sa peur d'une agonie longue et incontrôlée. « Je préfère mourir le sourire aux lèvres, quitter définitivement mon mari à un instant choisi par nous deux, plutôt que de laisser un hasard morbide et mortel nous séparer. Je souhaite mourir main dans la main et yeux dans les yeux avec lui. Je souhaite que le moment de ma mort corresponde au plus près à ma personnalité, à ce que je suis, à ma philosophie de vie, en ma qualité de citoyenne libre dans un État de droit. »

Dans un autre courrier, Jean écrit : « Ma vie m'appartient. Comme les femmes ont obtenu il y a près de cinquante ans le droit de maîtriser leur propre corps en décidant, ou pas, de devenir mère, je veux décider moi-même des conditions de ma propre fin de vie. »

Aujourd'hui, le cadre d'accompagnement de la fin de vie n'est pas adapté pour Aurélie et Jean. Certes, la loi Claeys-Leonetti a marqué une avancée mais nous ne pouvons accepter que des citoyens restent sur le côté, parce que leur pronostic vital n'est pas engagé ou parce qu'ils refusent une longue agonie.

La lettre d'Aurélie nous rappelle aussi que l'accès aux soins palliatifs, que notre assemblée s'est engagée à renforcer, n'éteint pas forcément la demande d'aide à mourir.

Collègues, la loi que nous examinons est une loi de liberté : il ne s'agit pas d'imposer, mais de permettre à chacun de déterminer sa propre fin, au moment où le diagnostic vital est engagé au point qu'il s'agit de la dernière des dignités.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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L'article 5 définit ce que sera l'aide à mourir en droit français. Son examen – longtemps attendu – marque une étape importante car ce texte change un paradigme et met fin à une hypocrisie qui a cours en France. En ce sens, c'est aussi un geste de fraternité – un mot que j'ai entendu ici à plusieurs reprises, accompagné de différentes définitions.

Car aujourd'hui, parmi les personnes condamnées par la maladie, qui souffrent et désirent en finir, seules celles qui le peuvent financièrement se rendent en Suisse ou en Belgique. De fait, ce ne sont pas les plus fragiles qui sont les plus susceptibles de recourir à l'aide à mourir – ce qu'aucun rapport, nulle part, ne démontre ; en France, ce sont uniquement ceux qui en ont les moyens.

Il est nécessaire d'encadrer et de codifier ce droit – c'est notamment l'objet de cet article –, ce qui donnera lieu à des débats intéressants et importants. Le groupe Écologiste votera résolument en faveur de l'article 5.

Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – Mme Michèle Peyron applaudit également.

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L'article 5, qui définit l'aide à mourir, pose selon moi trois problèmes. Premièrement, il ne donne pas le nom de ce qu'il prétend définir. Or regarder la mort en face, comme l'appelait de ses vœux le Président de la République, ce n'est certainement pas refuser de nommer ce que l'on préconise d'instaurer.

Deuxièmement, la substance létale peut être administrée par une personne qui est désignée et qui se manifeste pour le faire. Or on ne peut à la fois être désigné et se manifester – c'est l'un ou l'autre. Il y a là un problème de cohérence.

La possibilité pour le patient de désigner un proche, un membre de sa famille constituerait une innovation sur le plan mondial. Dans aucune autre législation, un proche n'administre la substance létale, avec toute la charge psychologique et les conséquences que cela suppose pour le parent ou l'enfant qui, par amour, accepterait d'accomplir un tel acte.

Troisièmement, d'après l'alinéa 6, le suicide assisté apparaît comme la règle et l'euthanasie comme l'exception, si l'état physique de la personne y contraint. Or cela entre en contradiction avec l'alinéa 8 de l'article 11 qui, lui, laisse le choix. Je vous le dis : si nous maintenons la rédaction actuelle de l'article 11, qui prévoit le libre choix entre euthanasie et suicide assisté, l'euthanasie prendra le pas sur le suicide.

C'est ce que l'on observe au Canada, où l'on comptait, en 2021, 10 064 cas d'euthanasie contre moins de 7 suicides assistés. Au Québec, en 2023, le nombre de cas d'euthanasie s'élevait à 6 000 alors qu'on en avait prévu 60.

Pour toutes ces raisons, la plupart des députés du groupe Les Républicains voteront contre cet article.

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L'article 5 se présente sous la forme d'une définition de l'aide à mourir, comme un chapeau qui viendrait coiffer les différentes mesures. La rédaction, relativement claire, semble indiquer que le champ couvert par le texte est limité. Toutefois, le plus important, ce sont les dispositions que nous voterons aux articles suivants – les conditions retenues, les verrous prévus – pour s'assurer que seules les personnes atteintes de maladie très grave, dont le pronostic vital est engagé ou en fin de vie auront accès à cette possibilité, et non un public beaucoup plus large.

Une mesure, qui ne figure pas encore dans le texte, me tient particulièrement à cœur et j'aimerais qu'elle soit inscrite dès l'article 5. Il s'agit de préciser que le personnel soignant – médecins, infirmiers – qui pratique l'aide à mourir le fait sur la base du volontariat. Nous y reviendrons et je défendrai cette idée avec pugnacité. Cela permettrait en effet d'établir une véritable limite entre, d'un côté, le soin et, de l'autre, l'acte particulier que représente l'aide à mourir. Nous parviendrions ainsi à simplifier la procédure et à apaiser la communauté médicale. Les soignants se sentiraient plus protégés par une telle mesure que par une clause de conscience.

Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.

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Après un titre Ier au fond assez consensuel – car nous sommes tous favorables à un accès universel aux soins d'accompagnement et aux soins palliatifs –, nous abordons enfin l'article 5. Cette fois, évidemment, aucun consensus n'est possible. Cependant je me permets d'en appeler à des débats qui soient aussi respectueux sur la deuxième partie du texte qu'ils le furent, la semaine dernière, sur la première partie.

Vous le savez, je prône un texte qui respecte la volonté personnelle du patient, et ce à toutes les phases de la maladie, y compris lorsqu'il n'est plus en capacité de donner son avis mais qu'il l'a déjà exprimé à plusieurs reprises dans des directives anticipées et qu'il a désigné une personne de confiance pour les faire respecter.

J'ai le sentiment que les débats sur la fin de la vie laissent un peu à l'écart les patients, pourtant « les premiers concernés », comme le souligne le professeur Salas, de l'hôpital de la Timone, qui pose la question : « Pourquoi s'arroger le droit de parler et de penser à la place ? » Il a raison.

L'article 5 est l'un des plus importants du texte car il donne une définition de l'aide à mourir. Telle qu'elle est rédigée, madame la ministre, elle ne nous satisfait pas totalement car vous faites de l'auto-administration la règle et de l'administration par autrui l'exception,…

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Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Eh oui !

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…et ce, au nom d'une souffrance physique qui, évidemment, donnera lieu à différentes interprétations. Surtout, l'auto-administration sera vécue par beaucoup comme une punition. Aux patients qui veulent accéder à l'aide à mourir, vous semblez répondre : Très bien, faites-le vous-même !

Pourtant nombre de ceux qui seraient en capacité physique de recourir à l'auto-administration préféreraient faire appel à leur médecin traitant, à leur infirmier ou à leur personne de confiance. Or vous le leur interdisez. Que faites-vous de la volonté du patient ? Quelles raisons vous ont conduits à rédiger ainsi le texte ?

Dans les pays qui autorisent l'auto-administration et l'administration assistée, le recours au médecin est largement privilégié. Ainsi, au Canada, en 2022, sur 13 342 aides à mourir, seules 7 ont pris la forme d'une auto-administration ; de même, en 2023, en Belgique, où les deux modalités existent, on en compte seulement 6 sur 3 423 cas enregistrés.

Il faut laisser le choix au patient. J'espère que nous pourrons corriger l'article pour supprimer cette hiérarchie. Si nous y parvenons, nous ferons preuve de fraternité et d'humanité – je pense à Aurélie et à tous les autres.

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Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

Cela fait trois minutes !

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Vous l'aurez compris, le groupe Socialistes votera très majoritairement en faveur de l'article 5.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC. – Mme Michèle Peyron applaudit également.

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Nous en arrivons donc au point de bascule, après lequel nous ne saurons plus vraiment où nous arrêter. Nous en avons fait l'expérience en commission, où de nombreuses limites ont déjà été dynamitées.

Il existe aujourd'hui des soins et des lois de fraternité qui permettent de faire face aux difficultés liées à la fin de vie. Ne nous y trompons pas, cependant : notre débat ne porte pas essentiellement sur les ultimes moments de la vie. La loi initiale allait déjà bien plus loin et ne concernait pas uniquement celles et ceux qui vont mourir ou qui en expriment la volonté.

Le débat porte sur notre rapport collectif à la vie elle-même, à la souffrance et à la mort – pas uniquement à la sienne propre. C'est bien l'ensemble du corps social qui est ici convoqué.

Certains s'agacent de ce débat, parfois douloureux parce que nos angoisses y apparaissent à vif et nos émotions à nu, parce qu'il réveille des expériences et des drames. J'aimerais leur dire qu'il est indispensable d'accepter qu'un député partage ses interrogations – c'est d'ailleurs tout à son honneur – lorsqu'il estime que nous nous engageons dans une mauvaise voie.

Il ne s'agit pas simplement de traiter des requêtes individuelles en considérant que cela n'enlèverait rien aux autres. Chacun est concerné par la question posée, par le sort de l'autre. Sinon nous ne formerions plus, ensemble, une même humanité. Le choix que nous devons faire nous engage toutes et tous. Il est porteur de sens.

Norbert Elias disait : « Il n'est pas toujours très facile de montrer à des êtres qui sont en route vers la mort qu'ils n'ont pas perdu leur signification pour les autres. » Cependant, y renoncer, c'est donner la victoire à la solitude. Roland Gori écrit : « L'œuvre de sépulture se révèle constitutive de l'humanité dans l'homme. […] L'œuvre de sépulture se révèle comme une manière de s'y prendre avec la mort, mais la mort au cœur même de toute vie. Notre manière de mourir – autant que notre façon de nous y prendre pour accompagner les vivants en train de mourir – révèle le relief anthropologique d'une culture. »

Mmes Blandine Brocard, Astrid Panosyan-Bouvet et M. Xavier Breton applaudissent.

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L'article 5 constitue le point de bascule, celui qui nous fait passer d'une société qui a érigé en valeur fondamentale le principe millénaire « Tu ne tueras point » à une société où donner la mort serait vu comme un progrès.

Il définit en effet l'euthanasie et le suicide assisté mais sans les nommer. Cette rupture anthropologique et déontologique sera légitimée par la loi. Cet article bouleverse radicalement le rôle de la médecine et des soignants.

Une nouvelle exception à nos principes pourrait donc être votée aujourd'hui. Elle plonge ses racines dans un sentiment infiniment légitime et compréhensible, que nul ne peut juger et qui est au cœur de nos débats voire les dirige : la peur de la douleur. Il faut cependant aussi considérer la façon dont on accueille cette peur. En la matière, les soins palliatifs apportent une réponse. Ils trouvent leur origine dans l'idée que toutes les vies sont dignes, que notre honneur – à nous, bien portants – est de tout faire, j'insiste sur ce point, pour que ce soit la souffrance, et non la personne qui souffre, qui soit supprimée.

Vouloir le contraire pour nos malades et notre société, c'est manquer de courage, d'ambition mais aussi de cœur. C'est pourtant dans cette direction que nous entraîne l'article 5, qui fait du suicide assisté et de l'euthanasie des réponses acceptables, endossables par une société qui se refuse à sortir les grands moyens pour ériger les soins palliatifs en grande cause nationale, non pas dans les mots mais dans les actes. Car, définitivement, la main qui soigne ne peut être celle qui donne la mort.

MM. Xavier Breton et Patrick Hetzel applaudissent.

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Nous en arrivons au cœur du texte. Je suis particulièrement satisfait de pouvoir discuter de l'article 5, qui témoigne de l'humilité de celles et ceux qui ont rédigé le texte ou le soutiennent, de l'humilité de la science et de la médecine face aux limites auxquelles elles sont confrontées. Car, c'est vrai, nous ne savons pas soulager toutes les douleurs ni toutes les souffrances. Grâce à ce projet de loi, nous le reconnaissons, ce qui me semble très positif. Je soutiendrai bien sûr cet article.

J'aimerais évoquer cependant un point de désaccord : la possibilité de désigner une personne, si j'ose dire lambda, pour administrer la substance létale. Je ne pense pas qu'un proche, quel qu'il soit, puisse procéder à cet acte. L'auto-administration doit être la règle générale et l'on peut avoir recours, à titre très exceptionnel, à un professionnel, mais pas à un proche. Il me semble que nous irions trop loin et trop vite en adoptant une telle mesure ; elle ne me semble pas correspondre à l'évolution qui nous est proposée avec ce texte.

M. Bertrand Pancher applaudit.

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Ce projet de loi est particulièrement important puisque, pour la première fois dans notre pays, nous sommes appelés à voter pour, ou contre, une loi qui autorise à donner la mort, certes de façon très encadrée.

L'organisation des débats, telle que vous l'avez prévue, madame la présidente, avec le bureau de l'Assemblée nationale, est pertinente puisque vous donnez la parole, pour chaque groupe, à deux orateurs – l'un pour, l'autre contre.

Pour ma part, je me situe dans une troisième catégorie, celle des personnes qui s'interrogent, qui ont des doutes – et j'en ai beaucoup.

Tous les habitants de ma circonscription me disent qu'ils ont envie qu'on les aide à mourir s'ils souffrent, qu'il serait normal de le faire. La majorité de nos concitoyens partagent ce point de vue.

Quant aux professionnels de santé de mon centre de soins palliatifs, ils m'indiquent que, depuis environ quinze ans, ils suivent chaque année 200 personnes, parmi lesquelles une dizaine demandent réellement la mort. Cependant, quand ils mettent à leur disposition leur système de soins palliatifs, il n'en reste plus qu'une, et encore, pour formuler cette demande. Du point de vue de ces professionnels, l'important est de doubler, de multiplier les dispositifs de soins palliatifs.

J'ai donc des doutes. Quand je me suis installé à Bar-le-Duc, il y a une trentaine d'années, la propriétaire m'a dit qu'elle n'en avait plus que pour deux ou trois mois, qu'elle souffrait d'un cancer en phase terminale, que c'était fini… elle a vécu encore six ou sept ans.

Vraiment, j'ai des doutes : je crains qu'on ouvre la boîte de Pandore. J'attends de connaître le résultat de nos débats. J'appartiens à une catégorie particulière : celle, nombreuse peut-être – je l'espère –, de ceux qui, parmi nos concitoyens, s'interrogent.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.

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Nous nous apprêtons à poser l'un des actes les plus graves, sans doute, de notre mandat de parlementaires. Oui, il s'agit d'une transgression, comme l'a suggéré le Conseil d'État. Il m'a fallu du temps pour l'accepter. Je n'avais pas voté la proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie, dont Olivier Falorni était le rapporteur en 2021.

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Après trois ans de lectures, de rencontres, de réflexions, remettant en question mes convictions les plus intimes, je le dis avec émotion : j'y suis désormais prêt ! Mettre fin à des situations humainement inacceptables, même si elles sont très peu nombreuses : telle est la seule motivation qui me conduit à reconnaître la légitimité de cette transgression.

Mais notre travail ne peut s'arrêter là : le même souci d'humanité doit nous guider, autant qu'une indispensable prudence, dans l'instauration de l'aide à mourir. À cette fin, la rédaction future des cinq critères prévus aux articles 5 et, surtout, 6, devrait viser deux objectifs essentiels.

D'abord, ce texte doit être applicable. Il faut réintroduire la notion de pronostic vital engagé, sans la référence au moyen terme, qui a été unanimement récusée. Ensuite, il doit être juste, en traitant équitablement toutes les affections graves et incurables causant des souffrances réfractaires. Qu'est-ce qui justifierait qu'une personne répondant à ces critères ait droit à l'aide à mourir un mois avant de perdre son discernement, tandis qu'elle en serait privée un mois après ?

Madame la ministre, je vous remercie pour l'inlassable écoute dont vous avez fait preuve au cours de nos débats. Je respecte votre souci que rien ne remette en cause les équilibres de ce texte. Mais refuser tous les amendements importants aux articles 5 et, surtout, 6 stériliserait de facto notre travail parlementaire. Je suis certain que telle n'est pas votre intention, conformément au souhait exprimé par le Président de la République à maintes reprises – il l'a fait pour la dernière fois devant les membres de la Convention citoyenne sur la fin de vie, quand il évoquait les directives anticipées.

Des accords sont souhaitables. Démontrons ensemble, mes chers collègues, qu'ils sont possibles !

Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – M. René Pilato applaudit également.

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Permettez-moi de commencer par énoncer une vérité fondamentale : soit ce projet de loi constitue une solution à l'échec cuisant qu'a essuyé le Gouvernement en cherchant à appliquer la loi Claeys-Leonetti, soit le Gouvernement a choisi d'échouer pour réaliser ses rêves les plus profonds en libéralisant toujours davantage les fondements de notre société.

La souffrance en fin de vie est une réalité douloureuse, mais elle ne doit pas nous conduire à choisir la voie du renoncement en légalisant le suicide assisté et l'euthanasie. Au contraire, cette souffrance nous invite à redoubler d'efforts pour offrir à chacun, où qu'il se trouve, des soins palliatifs de qualité. C'est cela, la fraternité, et il est inacceptable que, dans un pays comme le nôtre, des personnes en fin de vie soient privées du soutien nécessaire à l'apaisement de leurs douleurs et de leurs angoisses.

Légaliser le suicide assisté et l'euthanasie, c'est aussi ouvrir la boîte de Pandore. Cela pourra donner lieu à des dérives semblables à celles que nous avons observées dans d'autres pays, car les balises, aussi strictes soient-elles, sont vouées à disparaître avec le temps. En autorisant le suicide assisté et l'euthanasie, nous créerons une brèche dans le socle éthique de notre société. Nous risquons de banaliser l'acte de donner la mort et de faire peser sur les patients et leurs familles une pression insidieuse, les conduisant à considérer la mort comme une solution acceptable à la souffrance et, au bout du compte, comme une solution économique.

Est-ce vraiment le message que nous voulons transmettre ? Non, mes chers collègues !

Applaudissements sur les bancs du groupe RN.

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Nous en arrivons à la deuxième partie du texte, relative à l'aide à mourir, qui se trouve au cœur d'une grande partie de nos débats. Plus précisément, nous en venons au moment où notre assemblée s'apprête à donner une définition à ce changement de la loi que, toutes et tous ensemble, nous engageons. En établissant cette définition, nous permettrons enfin à la conscience des soignants, des bénéficiaires, des malades et de leurs familles de n'être plus en décalage, si ce n'est en opposition, avec la loi. Nous nous attaquons à une grande tâche, la tâche historique du mouvement des Lumières : faire coïncider ce que veut l'individu et ce que la loi lui autorise, dès lors que cela correspond à l'intérêt général et ne nuit à aucun tiers !

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

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En l'occurrence, il ne s'agit pas vraiment d'instaurer l'aide à mourir : elle existe déjà, de manière clandestine, dissimulée et récurrente. Dans ce pays, plus de 1 000 personnes la reçoivent chaque année. Aucun chiffre officiel n'existe : il est impossible de mesurer la chose tant la situation est complexe et la frontière ténue entre l'aide à mourir rapidement et l'accélération du décès par absence de traitement. En tout état de cause, l'aide à mourir revêt un caractère massif en France.

Mais on meurt dans la clandestinité, alors qu'on pourrait le faire suivant des règles ; on meurt dans l'illégalité, alors qu'une loi pourrait l'organiser ; on meurt en exil, alors qu'on pourrait être entouré de ses proches, de celles et de ceux qui vous aiment, de soignantes et de soignants.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.

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Une fois abolie cette violence qui consiste à proscrire à un individu de choisir sa propre mort, l'obliger à souffrir au nom d'un principe d'intérêt public que personne ne peut justifier, une série de questions demeurera. Nous nous battrons en particulier pour que soit reconnu le droit de l'individu à choisir non seulement l'heure, le lieu et la date de son décès, mais aussi la personne qui lui tiendra la main jusqu'au dernier moment et accompagnera son geste ultime. Cette reconnaissance fera l'objet d'une série d'amendements que nous soutiendrons, car il n'est pas de liberté finale sans liberté de choisir la main qui nous accompagne.

Pour finir, collègues, je citerai le professeur Yvon Kenis : « Ne pas devoir se cacher comme un malfaiteur, pouvoir assumer la responsabilité de son acte et être prêt à en rendre compte devant ses pairs et devant la justice, constitue un soutien justifié pour celui qui a accepté de se mettre dans une situation pénible pour obéir à sa conscience. » En libérant la personne qui souffre, nous libérerons aussi la conscience de celui qui l'aide à ne plus souffrir.

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.

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Aline a écrit : « C'est une histoire parmi tant d'autres, une histoire de malade, de souffrance, mais surtout une histoire d'amour et de vie, une histoire de famille brisée par une longue, trop longue agonie. Des semaines, des mois d'un combat qu'on nous impose en nous disant que, de toute façon, il n'y a rien à faire. Alors pourquoi ? Pourquoi infliger tout ce qui suit pour un combat perdu d'avance ? J'ai passé les deux derniers jours de vie de mon père auprès de lui, à le voir lutter et se débattre à chaque inspiration, pendant que j'étais en apnée, incapable de reprendre mon souffle. Maintenant, nous devons tenter de vivre avec toutes ces images intolérables. Nous devons vivre avec cette culpabilité de ne pas avoir pu abréger ses souffrances, de ne pas avoir pu respecter sa volonté. Par amour, par respect pour la vie, quand allez-vous faire cesser cette longue agonie ? »

Pour certains, seule la position du corps médical est digne d'intérêt et ils oublient d'écouter et de lire les témoignages des personnes concernées, afin de comprendre comment elles ressentent leurs symptômes et ce qu'elles vivent. S'ils le faisaient, ils découvriraient que certaines souffrances ne peuvent être tolérées, apaisées ou soulagées par aucun moyen thérapeutique ou d'accompagnement.

La société a le devoir de les aider. Il y a deux moyens de le faire : la sédation profonde et continue et l'aide à mourir, avec la possibilité de choisir comment mourir, rapidement et sans souffrance, au moment voulu, afin de vivre sa fin de vie avec sérénité.

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Oui, je soutiens le droit à l'autonomie et la liberté de choix, considérant que chaque individu devrait pouvoir décider de sa propre mort. Nous devons ce respect à chacun. Le groupe Les Républicains votera très minoritairement en faveur de cet article.

Sourires et applaudissements sur quelques bancs du groupe LR. – Applaudissements sur plusieurs bancs RE et LFI – NUPES.

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Madame la ministre, je vous remercie pour votre écoute et pour avoir précisé l'objectif et le périmètre du texte du Gouvernement : il s'agit bien de quelques centaines de cas à traiter de manière exceptionnelle et compassionnelle.

Comme beaucoup de mes collègues, je nourris des doutes. C'est tout l'intérêt de ces débats que de les exprimer. Ma première interrogation est la suivante : alors que nous nous apprêtons à autoriser les gens à demander une aide à mourir, pourquoi faire peser sur le corps médical la lourde responsabilité de décider de l'accorder ? Nous savons que les médecins l'assument dans l'exercice quotidien de leurs fonctions.

Ma deuxième interrogation est la suivante : nous examinons une loi sociétale, relative à la manière dont notre société organise la fin de la vie de certains de nos concitoyens, dans certaines conditions. J'aurais préféré – j'ai déposé un amendement en ce sens – que nous fassions comme Simone Veil il y a cinquante ans s'agissant de l'avortement : dépénaliser, sans pour autant organiser l'aide à mourir. Je rappelle qu'aux termes du projet de loi, le patient fait la demande, puis le médecin se prononce. Cette décision est certes collégiale, mais il aurait été préférable de la laisser à un juge ou à un officier ministériel, le médecin ne rendant qu'un avis – je soutiendrai des amendements en ce sens. Comme la loi Veil, le texte pourrait, au lieu de l'alourdir, alléger la charge qui pèse sur les médecins.

Mme Geneviève Darrieussecq applaudit.

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Comme beaucoup ici, nous souhaitons une loi équilibrée. Une loi équilibrée, cela signifie qu'elle devra prendre en considération l'intérêt du patient et placer sa volonté, clairement exprimée, au cœur de toute décision médicale relative à la fin de sa vie.

Elle devra permettre aux professionnels de santé qui le souhaitent de ne pas participer à un geste qui irait à l'encontre de leur conscience.

Elle devra ouvrir un accès universel aux soins palliatifs – nous y avons travaillé la semaine passée.

Elle devra instaurer une aide à mourir pour ceux qui, en conscience, parce que leur vie est devenue intolérable en raison d'une affection grave et incurable, souhaiteront y avoir recours. À ce titre, il sera indispensable, pour n'exclure personne, de prendre en compte les directives anticipées.

Plutôt que de hiérarchiser les souffrances physiques ou psychologiques, elle devra les laisser à l'appréciation de la personne concernée.

Enfin, elle ne devra pas exclure ceux dont le pronostic vital n'est pas engagé mais qui connaissent déjà des souffrances intolérables.

Madame la ministre, si, à l'issue du vote de cette loi, nos concitoyens, pour ceux qui le peuvent, doivent se rendre en Belgique ou en Suisse, ou alléger leurs souffrances par leurs propres moyens, nous aurons échoué.

Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR – NUPES et Écolo – NUPES. – Mmes Anne-Laurence Petel et Frédérique Meunier applaudissent également.

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À l'issue de la discussion du titre I, je veux dire que mon groupe et moi-même demeurerons vigilants, attentifs et déterminés à ce que les moyens nécessaires pour garantir l'accès aux soins palliatifs et déployer les maisons d'accompagnement soient bien au rendez-vous. Nous y veillerons lors de l'examen des textes budgétaires à venir.

Nous en venons au titre II ; il y aura au sein de cet hémicycle, mais aussi à l'intérieur de mon groupe, des avis différents. Mais j'espère que nous aurons tous en tête, malgré nos divergences, celles et ceux pour lesquels nous sommes ici.

Nous pensons tous à des personnes déjà parties ou confrontées à la maladie, qui demandent que nous légiférions car elles réclament une aide à mourir qui leur permette la dignité dans la mort. J'espère véritablement qu'elles seront au cœur de nos débats.

Pour ma part, j'aimerais que nous ne parlions pas de personnes qui « veulent mourir », mais de personnes qui, comme nous toutes et tous, aspirent à la mort la plus sereine possible. Parfois cela ne se produit pas ainsi, mais nous ne souhaitons à personne de mourir dans les souffrances auxquelles sont confrontés aujourd'hui certains malades. L'aide à mourir, c'est alors un moindre mal… juste un moindre mal, dans une situation de grandes souffrances auxquelles, toutes et tous, nous voulons échapper.

Je dois dire que je suis particulièrement attachée à l'équilibre de ce texte : celui qui permet d'allier autonomie dans la liberté et solidarité. Devant les craintes que j'ai entendues sur le traitement des personnes les plus vulnérables qui seraient concernées par l'aide à mourir, je dis : agissons pour la solidarité dans notre pays. Ainsi, à ceux et celles qui veulent supprimer l'AME, l'aide médicale de l'État ,

Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Sébastien Peytavie applaudit également

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ou qui envisagent de retirer les allocs à des mères isolées dont les enfants sont dans la délinquance, je rappelle que ce sont ces personnes qui sont les plus touchées par les longues maladies. Oui, agissons sur la solidarité pour permettre à toutes et à tous la liberté !

Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.

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Le Gouvernement et la commission répondront demain, s'ils le souhaitent, aux orateurs qui se sont exprimés sur l'article.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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Prochaine séance, demain, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie.

La séance est levée.

La séance est levée à zéro heure.

Le directeur des comptes rendus

Serge Ezdra