France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Suite de la discussion d'un projet de loi
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 112 à l'article 2.
Si nous avons bien compris la nécessité d'assurer un équilibre entre la sûreté et la liberté d'aller et venir, j'entends, à travers cet amendement, préciser les sanctions encourues en cas de non-respect de l'obligation d'information du procureur de la République prévue dans le futur article 60-3 du code des douanes. Je souhaite que la douane puisse agir efficacement et que le travail des douaniers soit simplifié. Je propose donc de prévoir que l'obligation d'information du procureur ne sera pas considérée au même titre qu'une obligation substantielle, dont le non-respect entraînerait la nullité de la procédure.
La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à laquelle la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire a délégué l'examen des articles 1er à 5, 8, 8 bis, 11, 11 bis, 11 ter et 11 quater, pour donner l'avis de la commission.
En excluant que le défaut d'information du procureur de la République puisse entraîner la nullité de la procédure, nous priverions au fond cette obligation de tout objet. J'émets donc un avis défavorable, pour cette raison et pour toutes celles que nous avons exposées avant la suspension de vingt heures et que vous connaissez, puisque vous étiez présent.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Au vu des débats précédents et du caractère sans doute perfectible de la rédaction proposée, je retire mon amendement, mais j'insiste tout de même sur le fait qu'il existe un risque que la nullité de certaines procédures soit invoquée devant les tribunaux correctionnels. J'espère que le projet de loi ne favorisera pas de telles décisions.
L'amendement n° 112 est retiré.
L'amendement n° 53 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jocelyn Dessigny, pour soutenir l'amendement n° 270 .
Quand nous avons commencé l'examen du texte, j'étais assez confiant, car j'y voyais la volonté de restaurer les droits des services des douanes. Mais plus nous avançons et plus vous m'inquiétez, monsieur le ministre délégué. Vous expliquez que nous sommes en train d'élaborer un cadre juridique, dont vous assurez qu'il sera plus souple que par le passé. Vous dites beaucoup de choses, mais, en fin de compte, plus les débats avancent et plus nous avons le sentiment que c'est un brouillon que vous présentez ! Je suis inquiet – à mesure que les choses progressent, je commence même à avoir peur.
Lorsque nous avons indiqué que les procédures prévues dans le texte allaient alourdir l'action des douaniers, vous avez répondu que tel ne serait pas le cas. Pour en venir à l'objet de l'amendement, il est prévu que les douaniers préviennent le procureur de la République à chaque intervention. Le problème, dont vous avez probablement conscience, monsieur le ministre délégué – je l'espère du moins –, c'est qu'ils interviennent parfois dans un périmètre couvrant plusieurs juridictions. Comment feront-ils alors ?
Devront-ils informer le procureur de la République de la juridiction A, dans laquelle ils interviennent ? Mais si le champ de l'intervention déborde sur les juridictions B ou C, qui devront-ils prévenir ? Les trois procureurs potentiellement concernés ? Un numéro vert est-il prévu pour les procureurs de la République ?
Murmures sur divers bancs.
Un simple coup de téléphone suffira-t-il pour prévenir tout ce petit monde ? Je ne le pense pas. Je propose donc que les douaniers puissent n'informer que le procureur de la juridiction dans laquelle ils sont établis.
Nous avons déjà évoqué cette question. Le ministre délégué y a d'ailleurs déjà répondu partiellement. Il est cependant toujours bon de répéter les choses plusieurs fois, afin de bien les clarifier si nécessaire. J'émettrai un avis défavorable – mais j'imagine que vous n'en serez pas surpris, car tel était déjà le cas en commission des lois –, car une telle disposition conduirait, selon nous, à rigidifier le dispositif. Bien évidemment, le procureur de la République compétent est, a priori, celui de la juridiction où a lieu le contrôle – cela semble assez naturel. Si plusieurs parquets sont concernés, il me semble que nous pouvons faire confiance aux parties prenantes. L'objectif n'est pas, en tout cas, de rigidifier les procédures, mais bien, au contraire, de rendre l'exercice le plus fluide possible.
L'amendement n° 270 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Caroline Janvier, pour soutenir l'amendement n° 313 .
L'amendement n° 313 est retiré.
La parole est à M. Alexandre Loubet, pour soutenir l'amendement n° 303 .
Après avoir réduit les capacités d'action des douaniers, vous vous apprêtez – involontairement, j'en suis sûr – à mettre certains d'entre eux en danger. Vous proposez qu'une personne ayant subi un contrôle ou une opération de visite, par exemple de ses marchandises ou de son véhicule, puisse exiger du service des douanes une copie du procès-verbal de l'opération subie. Or les procès-verbaux ne sont pas systématiquement anonymisés. Aussi cet amendement est-il un amendement d'appel : nous vous demandons, conformément au souhait de plusieurs douaniers que j'ai rencontrés récemment, d'anonymiser systématiquement les procès-verbaux qui seront remis aux personnes ayant subi des opérations de visite.
Soyons pragmatiques : concrètement, une personne particulièrement malveillante pourrait vouloir faire subir des représailles à un agent des douanes, notamment dans le cadre d'affaires relatives à un trafic de stupéfiants. Cet amendement de bon sens me semble donc mériter un avis favorable. Il devrait en tout cas vous inciter à faire évoluer la loi. Le nom de l'agent des douanes pourrait par exemple être remplacé par son numéro d'immatriculation administrative.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Du fait de sa rédaction, l'adoption de votre amendement conduirait à anonymiser la personne faisant l'objet de la visite, et non l'agent des douanes qui l'effectue. J'imagine que tel n'est pas votre objectif.
Sur le fond, je me permets de vous renvoyer à l'article 55 bis du code des douanes, qui fait d'ailleurs l'objet de l'amendement n° 127 de notre collègue Sabrina Agresti-Roubache, que nous examinerons ultérieurement. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Si j'étais taquin, je ferais remarquer que ceux-là mêmes qui qualifient le texte de brouillon ou qui nous accusent de mettre en danger les douaniers présentent des amendements qui sont eux-mêmes assez brouillons, et dont l'adoption mettrait les douaniers en danger – ou, à tout le moins, aiderait les trafiquants en leur permettant d'être anonymisés dans les procédures. Comme je ne le suis pas, je vous répondrai sur le fond, en rappelant que l'article 55 bis du code des douanes, qui s'applique à l'ensemble des procédures douanières, permet déjà l'anonymisation. Les représentants de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) présents à mes côtés me confirment d'ailleurs qu'en pratique, les procès-verbaux sont déjà anonymisés dans la grande majorité des cas.
Il n'est donc pas utile d'adopter cet amendement. Avis défavorable.
J'ai une question annexe : pourquoi avoir prévu la remise de procès-verbaux en cas de contrôle négatif ? Il me semble que si une personne estime qu'elle a été contrôlée à tort ou que la visite s'est mal déroulée, les douaniers sont déjà tenus de lui présenter un registre dans lequel elle pourra faire part à leur hiérarchie de son mécontentement vis-à-vis du contrôle subi. Je crois d'ailleurs savoir que la douane s'engage à répondre à ces demandes dans un délai d'une semaine. Pouvez-vous m'éclairer sur la raison de la présence de ce procès-verbal supplémentaire dans le projet de loi ?
Cette disposition fait partie des garanties supplémentaires prévues dans le texte en réponse à la décision du Conseil constitutionnel : nous devons être capables de démontrer que nous offrons des garanties nouvelles aux individus. Il se trouve que la possibilité de demander un procès-verbal à l'agent des douanes en cas de contrôle négatif – car c'est bien ce dont il est question, il ne s'agit pas de distribuer systématiquement un procès-verbal à chaque opération – existe déjà dans le code de procédure pénale, notamment pour les contrôles d'identité. Nous nous inspirons de cette garantie et l'étendons aux procédures douanières, pour montrer que nous fixons un cadre nouveau à cette action, afin de satisfaire aux exigences du Conseil constitutionnel.
L'amendement n° 303 est retiré.
Déposé par notre collègue Yannick Neuder, il vise à modifier l'alinéa 20 de l'article 2, en prévoyant que la durée maximale pour effectuer les opérations de contrôle n'est pas de douze heures, mais de vingt-quatre heures. Chacun comprend bien, en effet, que, pour lutter efficacement contre certains trafics, un délai de douze heures est trop restrictif, d'autant que l'alinéa 20 dispose également que les droits de visite « ne peuvent consister en un contrôle systématique des personnes ». Un délai de vingt-quatre heures serait sans doute plus pertinent sur le plan opérationnel pour permettre aux services de douane d'intervenir efficacement.
La parole est à M. Alexandre Sabatou, pour soutenir l'amendement n° 59 .
Nous considérons également que le délai de douze heures est excessivement limité, pour deux raisons. La première a trait au phénomène croissant des mules, ces personnes qui ingèrent des ovules de stupéfiants pour les importer sur notre territoire. Une durée de vingt-quatre heures semblerait plus adaptée, pour laisser le temps à ces personnes de rejeter ces ovules et ainsi permettre à la douane de faire son travail.
Par ailleurs, je m'interroge sur la gestion de situations de crise exceptionnelles, comme celle qui a fait suite au drame national que fut l'attentat du Bataclan et au cours de laquelle toutes les frontières, y compris celles internes à l'espace Schengen, étaient contrôlées. Dans un tel contexte, il semble logique que les douaniers puissent mener des opérations aux frontières pendant vingt-quatre heures.
Comme les précédents, il vise à permettre, pour certaines opérations exceptionnelles, de porter la durée maximale de mise en œuvre des droits de visite de douze heures à vingt-quatre heures. Je pense notamment aux inspections de poids lourds ou de semi-remorques transportant des cargaisons sans palettes ou des charges très lourdes, qui peuvent nécessiter de faire venir, parfois de loin, des ustensiles de levage pour effectuer les recherches. L'allongement du délai permettrait de répondre à ce type de cas exceptionnels.
La parole est à M. Michaël Taverne, pour soutenir l'amendement n° 126 .
Il a une visée purement opérationnelle et s'inspire de la réalité du terrain : lors de certaines visites, les agents des douanes sont confrontés à des procédures très lourdes, notamment lorsque des mules sont impliquées et qu'il faut procéder à des radiographies ou faire venir du matériel. De nombreux douaniers expliquent ainsi que douze heures ne suffisent pas toujours, certaines opérations nécessitant plutôt quinze, seize, dix-sept, dix-huit, voire vingt-quatre heures consécutives. Écoutons les professionnels et regardons comment les choses se déroulent sur le terrain. Une jauge de vingt-quatre heures me semble raisonnable. Ces amendements devraient donc être adoptés.
M. Jocelyn Dessigny applaudit.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 147 .
Élaboré en collaboration avec l'Union nationale des syndicats autonomes (Unsa) Douanes, il vise lui aussi à porter la durée maximale autorisée de douze à vingt-quatre heures. Comme d'autres l'ont dit avant moi, certains contrôles, très techniques ou impliquant de nombreuses manipulations – dont, parfois, la nécessité d'opérer des déplacements –, sont particulièrement chronophages.
Je prendrai à mon tour l'exemple d'un poids lourd articulé devant être entièrement vidé afin d'étudier l'intégralité du chargement et des remorques : cette opération de contrôle ne pouvant évidemment pas être réalisée au bord de la route, le véhicule devra être aiguillé vers une entreprise ayant signé une convention avec la DGDDI, afin d'effectuer ces manipulations dans de bonnes conditions de sécurité, sur un site disposant des infrastructures adéquates, et ce, avant même de démarrer toute opération de fouille – opérations qui, selon le véhicule concerné, peuvent elles-mêmes demander beaucoup de temps. Ces délais incompressibles doivent être pris en considération dans l'estimation du délai accordé au service pour les réaliser.
C'est un amendement de bon sens, pragmatique. On sait que les opérations de contrôle sont parfois très longues, notamment dans le cas, évoqué à l'instant, des poids lourds avec remorque, car il faut trouver un emplacement adéquat pour prendre le temps de procéder à une fouille du véhicule entier et de la remorque, ce qui nécessite plusieurs heures. Le délai de douze heures étant insuffisant – ce n'est pas nous qui l'affirmons mais les douaniers –, il faut l'étendre à vingt-quatre heures pour que les professionnels disposent de tout le temps nécessaire pour exercer leur métier dans les meilleures conditions possibles.
Comme cela a été dit, la limitation à douze heures consécutives des droits de visite des douanes pose plusieurs problèmes.
Elle entrave la souplesse opérationnelle des services douaniers, qui pourraient avoir besoin de plus de temps – au passage, ceux qui sont les plus à même de juger du temps dont ils ont réellement besoin, ce sont bien les douaniers eux-mêmes.
En outre, elle compromet l'efficacité des contrôles, créant des failles dans les périodes non surveillées, susceptibles d'être exploitées pour des activités illégales. De nombreux exemples ont déjà été donnés. Si, sur la base d'une information, on souhaite disposer de temps pour procéder à un contrôle dont on estime qu'il pourrait être positif, pourquoi devoir s'interrompre au bout de douze heures si l'on considère qu'il est nécessaire de poursuivre cette opération ?
Cela été dit tout à l'heure, ce projet de loi est censé répondre à des exigences du Conseil constitutionnel. Or celui-ci estime que les douanes ont trop de pouvoir et, si j'ose dire, trop de doigts. Cette durée de douze heures correspond-elle donc à une demande du Conseil constitutionnel ? Ou serait-il possible de laisser davantage de marge de manœuvre à nos douanes ?
Je me permettrai de prendre un peu de temps – mais ne soyez pas inquiet, monsieur Breton, je serai rapide, vous pouvez compter sur mon sens de la synthèse.
La question de la limite fixée à douze heures semble faire l'objet d'une confusion. Cette durée maximale ne concerne pas une visite donnée, mais un contrôle ou une série de contrôles dans une même zone. Par ailleurs je rappelle à ceux qui ont invoqué le caractère pragmatique de ces amendements que la limite de douze heures a une dimension pratique puisque, vous le savez, la durée d'une journée de travail des douaniers a été fixée à douze heures.
Vous dites que rien n'empêcherait un contrôle systématique et prolongé. C'est faux, puisque, précisément, nous devons encadrer le droit de visite.
Par ailleurs, le dispositif est solide puisqu'il est déjà mentionné dans le code des douanes – je sais que je vous ai déjà fait cette réponse et je m'en excuse mais, dans le débat qui nous occupe, la répétition est une vertu – et dans le code de procédure pénale, s'agissant des contrôles d'identité.
Enfin certains d'entre vous ont donné l'exemple des mules. Or vous savez que ces personnes passent forcément par un aéroport. Dès lors, la règle des douze heures ne s'applique pas.
Bref, le dispositif est encadré et équilibré, c'est pourquoi je demande le retrait de ces amendements et émettrai, à défaut, un avis défavorable.
La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Je souhaite prolonger le propos de la rapporteure.
Les lieux de contrôle mentionnés aux futurs articles 60-1 et 60-2 du code des douanes, par exemple les aéroports, ne sont pas concernés par la règle des douze heures. Or le contrôle des mules a bien lieu dans les aéroports – M. le ministre délégué et moi-même avons pu nous en rendre compte lors d'un déplacement en Guyane et en Martinique. Il en va de même pour un point de passage frontalier tel qu'Eurotunnel, qui traverse la Manche. En Guyane, et dans tous les endroits les plus touchés par le trafic de cocaïne, des contrôles quasi systématiques sont effectués sur les bagages, sur les personnes – au moyen d'un détecteur à ondes millimétriques – et sur l'ensemble des containers. Par conséquent, les situations qui justifieraient, selon vous, un allongement de la procédure de contrôle sont en réalité déjà couvertes par le dispositif.
La rapporteure vous a déjà répondu à propos des opérations quotidiennes. Dans le cas des opérations que l'on pourrait qualifier de spéciales – autrement dit lorsqu'un événement justifie le recours à des dispositions particulières –, je rappelle que la loi de 1955 prévoit la mise en place d'un état d'urgence sécuritaire. Elle a d'ailleurs été appliquée à plusieurs reprises, notamment à la suite d'attentats terroristes. Certaines de ses dispositions ont fait l'objet d'une transposition dans le droit commun, dans le cadre de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite loi Silt. Le champ des opérations spéciales est donc également couvert par la loi.
Dans sa décision, le Conseil constitutionnel nous a enjoint de ne pas prévoir de contrôle « systématique » et « généralisé ». Dès lors, nous devons mieux encadrer le dispositif.
Si nous avons prévu une durée maximale de douze heures, c'est parce qu'une telle limite existe déjà dans le code de procédure pénale, s'agissant des contrôles d'identité. Cela ne signifie pas qu'un contrôle se termine forcément au bout de douze heures et qu'il faudra ensuite attendre avant de procéder à un nouveau contrôle mais que, si une présence permanente est nécessaire, des cycles de douze heures seront mis en place – une durée qui correspond, comme l'a dit la rapporteure, au temps de travail journalier maximal des douaniers.
Le texte initial du Gouvernement prévoyait un cycle de douze heures dans tous les cas. Lors de l'examen au Sénat, nous avons procédé à plusieurs clarifications. Les sénateurs ont en effet proposé – et cela a été adopté – d'exclure de ce dispositif les lieux dans lesquels la douane est présente en permanence, par exemple les bureaux de douane, les aéroports, les gares et les ports. Ainsi, à l'aéroport de Cayenne – puisque vous avez évoqué le cas des mules de Guyane –, la présence de la douane restera permanente. Si l'on doit faire sortir de l'aéroport une personne soupçonnée d'être une mule afin qu'elle passe des examens médicaux, cela ne relève plus du régime du droit de visite mais de celui de la retenue douanière et l'on appliquera donc de tout autres règles que celle des douze heures qui nous occupe en ce moment.
En résumé, la règle des douze heures fixe un cadre nouveau qui s'inspire d'une disposition figurant dans le code de procédure pénale, mais nous avons exclu du dispositif les lieux – aéroports, gares ou ports – dans lesquels les douaniers sont présents en permanence.
Pour être totalement transparent avec vous, je précise que certains points n'ont pas encore été totalement éclaircis. D'une part, pour ce qui concerne le contrôle des frontières extérieures de l'Union européenne – c'est-à-dire, pour notre pays, la Suisse, Andorre et désormais le Royaume-Uni –, le code des douanes de l'Union européenne nous impose une présence permanente des douanes. Nous devrons donc procéder à des adaptations pour que les vacations de douze heures se succèdent sans interruption. D'autre part, on a appelé mon attention sur la situation des zones de montagne – je le dis notamment à l'intention de Mme Bonnivard et des autres élus de la montagne. Il arrive que des brigades de surveillance, qui doivent souvent se rendre assez loin de l'hôtel des douanes pour effectuer un contrôle à la frontière, en zone de montagne, restent sur place plus longtemps que douze heures, notamment en raison du temps de trajet. Une adaptation du rythme des vacations sera donc également nécessaire dans ce cas.
Cependant, globalement, la règle des douze heures – qui, encore une fois, existe déjà dans le code de procédure pénale – peut s'appliquer à l'activité des douanes.
Tout d'abord, je suis heureux, monsieur le ministre, que vous ayez cité des exemples tels qu'Andorre. Vous auriez aussi pu évoquer, s'agissant des frontières extérieures, Monaco ou, d'après les témoignages que nous avons recueillis, le Brésil.
Néanmoins il existe une situation qui n'est pas couverte par le dispositif. Malheureusement, au moment où cet exemple m'a été donné par des douaniers – que j'accompagnais lors de contrôles –, le délai de dépôt des amendements avait expiré. Je regrette de ne pas avoir pu en déposer un sur cette question.
Ces douaniers m'ont dit qu'ils étaient d'accord avec vous s'agissant de la règle des douze heures. Cependant, la situation qui justifie selon eux une exception, c'est lorsqu'ils commencent à procéder à un contrôle après avoir été présents sur place pendant onze heures quarante-cinq ou onze heures cinquante. S'ils veulent mener le contrôle à son terme, il faut malheureusement sortir du cadre des douze heures. Dans ce cas précis, la loi, telle qu'elle est rédigée, pose donc selon eux un problème.
Chacun le comprend, lorsqu'on arrête un véhicule sur le bord d'une autoroute qui ne fait pas partie des exceptions évoquées – zone frontalière ou aéroport par exemple –, on place un stop-stick sous la voiture pour crever les pneus si le conducteur essaie de s'enfuir, puis on procède au contrôle. Or celui-ci ne peut pas durer dix minutes. Le contrôle d'identité, que vous avez cité en exemple, est une opération qui demande moins de temps qu'un contrôle douanier, lequel suppose que l'on fasse sortir le conducteur, que l'on vérifie qu'il ne détient pas d'arme et que l'on fouille le véhicule, éventuellement en envoyant également un chien pour s'assurer qu'il n'y a pas de drogue à l'intérieur. Une telle opération nécessite plus de temps que les cinq minutes requises pour un contrôle d'identité.
Je vous soumets donc ce cas qui m'a été exposé. La décision est entre vos mains. Si vous jugez qu'il serait pertinent que nous rédigions ensemble, sur ce sujet, un amendement utile pour les douaniers, je vous propose de procéder à une rapide suspension de séance.
Je vais nous épargner, à tous, une suspension de séance. Néanmoins je suis ravi d'apprendre, monsieur Léaument, que vous avez été en immersion avec les douaniers. J'espère au passage que cette expérience vous incitera à retirer certains amendements qui, me semble-t-il, ne vont pas dans le sens de ce qu'ils attendent – nous aurons l'occasion d'en discuter lorsque nous les examinerons.
S'il n'est pas nécessaire de suspendre la séance ni de rédiger un amendement sur le sujet, c'est parce qu'il existe déjà un dispositif dit de prolongation du service pour contentieux, ce qui signifie que, lorsqu'un contrôle a commencé, il peut évidemment être poursuivi au-delà du délai de douze heures. Prenons l'exemple d'un agent à Roissy qui effectue une vacation de douze heures : s'il procède à un contrôle pendant son service, il le mène à son terme. Ce dispositif existera toujours avec la règle des douze heures.
Je me fonde sur l'article 70, alinéa 3, relatif à la mise en cause personnelle.
Madame la rapporteure, monsieur le ministre délégué, vous avez prétendu tout à l'heure que mon amendement, tel qu'il avait été rédigé – par erreur, bien sûr –, visait à anonymiser non le douanier mais la personne contrôlée. Or – j'ai pris le temps de le relire – il vise bien à insérer le mot « anonymisé » après « procès-verbal ». Je ne vois pas en quoi cela désignerait la personne contrôlée.
J'ajoute que j'ai consulté au moins deux sites internet de syndicats de policiers, qui emploient eux-mêmes les expressions « procès-verbaux anonymisés » pour l'un, « procès-verbaux anonymes » pour l'autre.
Il s'agit peut-être d'une simple bataille sémantique mais je voudrais vous voir reconnaître que l'amendement est correctement rédigé et qu'en aucun cas nous ne souhaitions anonymiser la personne contrôlée – c'est bien du douanier que nous parlons.
L'amendement n° 20 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 89
Nombre de suffrages exprimés 88
Majorité absolue 45
Pour l'adoption 27
Contre 61
L'amendement n° 334 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à supprimer les mots « à l'exclusion de toute fouille intégrale ». C'est évidemment un amendement d'appel : je m'interroge sur la volonté de supprimer cette pratique, qui continue d'avoir cours dans les aéroports, sur des personnes ciblées. Dans le cadre des contrôles de routine, elle est, selon les douaniers, extrêmement rare et on y a recours seulement après que des indices concordants ont été trouvés. La fouille au corps ne concerne pas une majorité de cas ; au contraire, c'est une exception, comme me l'ont confirmé les douaniers avec lesquels j'ai travaillé mes amendements. Dès lors, je ne comprends pas pourquoi on veut se priver de la possibilité d'y recourir dans des cas précis et ciblés, alors que cela peut être important pour les douaniers.
Il vise à élargir les pouvoirs donnés aux agents des douanes lors de l'exercice de la visite douanière en n'excluant pas la possibilité de pratiquer une fouille intégrale. Anticipant les critiques qui vont venir de la part de l'extrême gauche, je souligne que l'amendement définit et encadre de manière précise les circonstances dans lesquelles les agents des douanes peuvent procéder à une fouille intégrale dans l'exercice de leur mission : le recours à cette mesure n'est possible que si les autres moyens sont insuffisants ; par ailleurs, cette opération doit évidemment être exécutée dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne et à l'abri du regard du public. Serait ainsi assuré un équilibre entre l'objectif de lutte contre la fraude en matière douanière et le respect des droits fondamentaux.
Cet amendement n'a qu'un seul objectif : permettre aux agents des douanes d'assurer la protection des intérêts économiques et financiers nationaux le plus efficacement possible. Dans cette perspective, nous vous proposons des modifications de bon sens destinées à maintenir un haut niveau d'efficacité de l'action de la douane française.
Je tiens à rappeler que l'article 2 ne porte que sur le droit de visite, pas sur la retenue douanière que peuvent motiver des soupçons. Et l'arrêt de la Cour de cassation du 26 janvier 2022 exclut d'ores et déjà la possibilité d'une fouille intégrale dans le cadre du seul droit de visite. Il est donc impossible de donner un avis favorable puisque cela reviendrait à contredire cette jurisprudence.
Pour répondre à Mme Ménard, l'interdiction de la fouille intégrale est expressément interdite dans le cadre du droit de visite parce que c'est la jurisprudence constante de la Cour de cassation – la rapporteure n'a cité qu'un arrêt parmi beaucoup d'autres –, que nous codifions ici. Je précise que la fouille intégrale sera toujours possible dans le cadre de la retenue douanière. Si quelqu'un rentre de vacances et fait l'objet à l'aéroport d'un contrôle de routine de la part des douaniers, ils ne vont pas lui demander de se déshabiller intégralement, mais s'il y a soupçon d'infraction et que la retenue douanière est alors décidée, cette personne pourra faire l'objet d'une fouille intégrale. Cela se passe déjà ainsi aujourd'hui, dans les faits,…
…donc rien ne changera ; alors que vous, vous voulez autoriser cette pratique aussi dans le cadre du droit de visite, c'est-à-dire pour tout le monde.
J'ai bien précisé que la fouille intégrale pourrait être pratiquée dans le cadre des contrôles de routine selon l'appréciation des douaniers, mais ce sera de manière extrêmement rare et seulement si des indices concordants ont été trouvés. On offrirait dans ces cas la possibilité aux douaniers de pouvoir prendre une mesure qui resterait, je le répète, totalement exceptionnelle.
Seconde objection : vous me dites, monsieur le ministre délégué, qu'on ne fait que codifier la jurisprudence de la Cour de cassation. Mais je ne savais pas que c'était la jurisprudence qui faisait la loi en France ! Si le législateur estime que la jurisprudence n'est plus adaptée, il peut revenir sur ces décisions. C'est son rôle et c'est ce que je préconise dans le cas qui nous occupe. Et ce serait, je le répète, de façon très encadrée et exceptionnelle. Je ne suis pas une adepte de la fouille intégrale.
Mouvements divers.
Sourires.
Parfois, la fouille intégrale peut aider les douaniers à remplir leurs missions. Je ne dis rien de plus. J'ai beaucoup de respect pour la jurisprudence de la Cour de cassation, mais les législateurs que nous sommes peuvent tout à fait aller à l'encontre d'une règle de création jurisprudentielle et c'est même notre rôle le cas échéant.
La jurisprudence ne peut pas s'appliquer à un texte qui n'existe pas encore, en l'espèce à la disposition que je vous propose d'adopter, chers collègues. J'ajoute que cette mesure correspond aux standards nationaux et européens de protection des droits fondamentaux : le recours à la fouille intégrale n'est possible que si d'autres mesures d'intervention s'avèrent inefficaces. Une telle possibilité existe dans beaucoup d'autres États membres de l'Union européenne. Dans de nombreux pays du monde la fouille intégrale est d'ailleurs pratiquée sans le consentement de la personne, parce que l'infraction ne peut parfois être avérée que s'il y a fouille au corps.
Le Rassemblement national, c'est open bar quand il s'agit de l'irrespect des droits.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
C'est la possibilité de déshabiller complètement une personne. Expliquez-moi alors comment ce serait possible sur le bord d'une autoroute, sans retenue douanière ? Mettre des gens tout nus dans un lieu public…
Sourires.
…est constitutif d'une infraction parce que la nudité y est interdite. Si vous voulez être utiles au travail des douaniers, je vous rappelle qu'existe la retenue douanière, un cadre qui permet la fouille intégrale en cas de suspicion de la commission d'un délit. Et heureusement que cette procédure est encadrée parce que mettre des gens tout nus sur le bord de l'autoroute ne fait pas partie des actions respectueuses des droits. J'annonce d'ailleurs que nous avons déposé un amendement que va défendre mon collègue Thomas Portes…
…sur ce sujet et j'espère qu'il sera adopté. Mais, vraiment, soit vous n'avez pas conscience de la réalité,…
…soit cela devient bizarre : j'entends Mme Ménard dire qu'elle n'est pas adepte de la fouille intégrale, mais je commence à en douter !
Cet amendement de notre collègue Paul Molac apporte une précision concrète : la palpation, si elle est autorisée, ne pourra être effectuée que par un agent du même sexe que la personne concernée. Une précision analogue existe dans le code de la sécurité intérieure et il paraît souhaitable de prévoir la même garantie dans le code des douanes lors de l'exercice du droit de visite.
La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour soutenir le sous-amendement n° 407 .
Je partage la préoccupation exprimée par M. Castellani – il faut, dans la mesure du possible, que les palpations soient faites par une personne du même sexe –, mais j'y mets un bémol parce que, malheureusement, la mixité n'est pas parfaite dans l'administration des douanes : il n'y a que 38 % de femmes douanières. Il faut donc prévoir une dérogation à cette obligation en cas d'impossibilité – si l'équipe n'est pas mixte ou qu'un agent du même sexe que la personne concernée ne peut être présent. Ce sera donc un avis de sagesse sur l'amendement de M. Molac ainsi sous-amendé.
Je suis assez partagé, et je vais vous dire pourquoi. Prévoir que les fouilles ou la palpation soient effectuées par une personne du même sexe s'entend totalement et c'est déjà ce que les instructions prévoient et ce qui est appliqué.
Mais dans les brigades de surveillance, qui sont sur le terrain, nous ne sommes pas à la parité puisqu'elles comptent 36 % de femmes, et il se peut qu'il n'y ait que des hommes dans une brigade. Il arrive donc qu'un douanier homme réalise une palpation sur une femme. Ils ont tous suivi une formation initiale et continue dans ce domaine, cela se fait dans des conditions très encadrées, et à ma connaissance, de mémoire de douanier, il n'y a jamais eu de plainte à ce sujet.
Je crains que si on inscrit dans la loi qu'une femme ne peut être « palpée » que par une femme dans le cadre d'un contrôle douanier, on se retrouve avec des annulations de procédures pour non-respect d'une obligation légale, faute d'agente disponible. Ainsi, on attraperait une femme qui transporte de la drogue et qui serait palpée par un homme en l'absence de femme dans la brigade, ce qui déboucherait sur un recours en annulation. Certes, le sous-amendement de la rapporteure qui précise « sauf impossibilité liée aux circonstances », c'est déjà un mieux, mais il sera difficile aux douaniers de prouver qu'il était impossible de faire appel à une femme en raison des circonstances.
Et cette absence de mixité et de parité dans les douanes, ça ne vous choque pas ?
J'entends l'avis de sagesse de la rapporteure pour avis sur l'amendement ainsi sous-amendé – je suis favorable au sous-amendement – et je vais m'y rallier parce que nous travaillons en bonne intelligence, mais mon avis de sagesse sera très réservé. Je comprends les intentions de l'auteur de l'amendement et cette règle est déjà en principe appliquée par les douaniers, mais je regarde toujours ce qui va suivre et je ne veux pas risquer des annulations de procédures.
Voilà un cas qui renvoie à une question de principes, enjeu qui va revenir assez souvent dans le débat. Un principe a par définition une valeur absolue car si on prévoit aussi des exceptions au principe, ce n'en est plus un.
Ça s'appelle le respect de la loi ! Par exemple, on ne peut pas lancer des cailloux sur les forces de l'ordre.
On a eu par exemple, il y a quelques jours, un débat sur une proposition de loi visant à favoriser la parité dans la haute fonction publique. Mais, d'un côté, on en fixe le principe et, de l'autre, on prévoit des exceptions quand les administrations sont particulièrement éloignées de la parité, parce qu'elles ne seraient pas capables de l'atteindre assez vite. Nous sommes ici dans le même cas : l'amendement de M. Molac, et nous en sommes d'accord, propose que les palpations soient faites par une personne de même sexe, étant précisé que c'est la règle dans le code de la sécurité intérieure, mais le sous-amendement indique : « sauf impossibilité liée aux circonstances. » Il ne faut pas procéder ainsi, mais faire en sorte que les circonstances soient réunies pour que les principes que l'on a définis soient respectés.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Et donc, monsieur le ministre délégué, même si ce que je dis semble insupportable aux gens de droite, il faut créer des équipes paritaires dans la douane pour qu'il y ait toujours au moins une femme pour faire ces palpations de sécurité. Je pense par ailleurs que cela améliorera les équipes, ce que m'ont confirmé les nombreux échanges que j'ai eus avec les douaniers. En cas de situations de tension, notamment, les femmes font redescendre celle-ci de façon beaucoup plus efficace que leurs homologues masculins.
Le sous-amendement n° 407 est adopté.
L'amendement n° 5 , sous-amendé, n'est pas adopté.
Vous êtes incohérents ! Pourquoi sous-amender un amendement si vous refusez de l'adopter ?
L'alinéa 22 rend obligatoire, pour effectuer un dépistage, de recueillir le consentement écrit de la personne contrôlée pour usage ou détention de stupéfiant, ce qui ne peut que nuire à l'efficacité des enquêtes douanières. Le présent amendement de mon collègue Pierre Cordier vise par conséquent à permettre aux agents de pratiquer un dépistage de stupéfiants si cela s'avère nécessaire, même sans le consentement de la personne contrôlée.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 49 .
Je vous avoue que cette disposition me laisse un peu perplexe : il est précisé que « [l]a visite des personnes peut consister en la palpation ou en la fouille de leurs vêtements, de leurs bagages ainsi que de tous autres effets personnels, à l'exclusion de toute fouille intégrale. Elle peut également consister sur consentement écrit de la personne en la réalisation d'examens de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ».
Vous avez pris des substances illicites…
On dirait que c'est de nous qu'elle parle !
Sourires.
…et le douanier vous arrête pour mener un contrôle ; mais au préalable, il vous demande votre consentement par écrit. Pour ma part, si j'ai pris de la drogue et que je me fais contrôler par un douanier, je ne pense pas que je donnerai mon consentement par écrit
Je vais reprendre les arguments de Mme Ménard. L'amendement de Fabien Di Filippo vise à supprimer, à l'alinéa 22, les mots « sur consentement écrit de la personne ». Les agents des douanes doivent pouvoir pratiquer un dépistage de stupéfiants si cela s'avère nécessaire pour mener à bien leurs missions, même sans le consentement de la personne concernée. La préservation des libertés individuelles, que certains seraient susceptibles d'invoquer, ne doit pas nuire à l'efficacité des enquêtes douanières ni à la sauvegarde de droits et de principes qui sont, eux aussi, de valeur constitutionnelle.
Comme le disait Mme Ménard, lorsqu'une personne est sous l'emprise de stupéfiants, il est rare qu'elle consente à un dépistage par écrit, à moins qu'elle ne soit aussi sous l'emprise de l'alcool…
Sourires.
En tout cas, sachez que nous sommes fermement opposés à ce que ces mots figurent dans ce projet de loi.
La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour soutenir l'amendement n° 279 .
Mes collègues ont raison : cette disposition est d'une absurdité totale. Imaginez la situation des douaniers. C'est déjà une chance que le procureur les laisse faire leur travail : ils se rendent donc sur le lieu de visite pour y accomplir leur mission en temps limité et, contrainte supplémentaire, ils doivent procéder au dépistage d'une personne qui est visiblement sous l'emprise de la drogue. Faudra-t-il qu'ils lui demandent qu'elle les autorise à la dépister ? Et croyez-vous que, bingo, celle-ci va leur dire : « Je suis chargé comme une mule mais, s'il vous plaît, messieurs les douaniers, contrôlez-moi ! » ?
Je ne sais pas dans quel monde vous vivez : probablement dans un monde administratif et déconnecté, ce que nous savions déjà, et certainement pas dans le monde des douaniers ni dans celui du respect de l'ordre.
M. Pierre Cazeneuve s'exclame.
En toute logique, et pour ne pas être la risée de nos compatriotes, nous devons absolument supprimer les mots « sur le consentement écrit de la personne », qui n'ont absolument aucun sens !
C'est un amendement de repli, madame la présidente. En effet, il est complètement absurde d'imposer aux douaniers de demander à la personne qu'ils soumettent à ce test de dépistage de bien vouloir leur signer un accord écrit au préalable ! Les amendements précédents tendent à ce qu'il n'y ait plus aucune possibilité d'opposition, de sorte qu'on puisse contraindre l'individu à subir un dépistage. Le présent amendement vise plutôt à inverser la charge : les douaniers n'ont pas à demander à la personne concernée de se soumettre à un contrôle et, en cas d'opposition de sa part, il en est fait mention dans le procès-verbal. Ce que nous suggérons est comparable à un contrôle routier d'alcoolémie :…
…le gendarme ou le policier qui arrête un individu pour le faire souffler dans un éthylotest ne lui demande pas de bien vouloir remplir un formulaire pour donner son accord.
Si l'on procédait ainsi, personne ne se soumettrait au contrôle, c'est évident ! En clair, il ne s'agit pas de contraindre par la force une personne à subir un dépistage de stupéfiants. Nous voulons simplement éviter que les douaniers disent d'emblée aux personnes suspectées : « Ce contrôle est facultatif ; nous vous y soumettrons seulement si vous daignez remplir un bon ! »
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Soyons clairs : nous discutons seulement du droit de visite simple, qui s'exerce sans soupçon préalable. En ce cas, on doit prévoir une demande de consentement par écrit,…
…qu'une personne sous emprise de stupéfiants qui transporte de la drogue, ce n'est pas très malin !
Est-ce que je peux finir ma phrase, monsieur Jacobelli, si cela ne vous ennuie pas ? Vous pourrez intervenir juste après ! Nous sommes d'accord : ce genre de personne attirerait davantage l'attention sur elle.
Par ailleurs, je tiens à dire que le droit de visite dont nous débattons n'a aucun rapport avec les contrôles routiers et les investigations judiciaires, auxquels cas ce sont les officiers de police judiciaire (OPJ) et les agents de police judiciaire (APJ) qui interviennent. En revanche, si les agents douaniers disposent d'indices sérieux, ils peuvent mettre en œuvre l'article 60 bis : comme les situations visées sont différentes, des règles distinctes s'appliquent. Cet article, qui n'est pas modifié par le présent texte, permet de passer outre le refus du dépistage par décision judiciaire. Vous voyez bien que le dispositif est solide puisqu'on ne mélange pas ces cas avec le simple droit de visite : je le répète, c'est seulement lorsqu'il existe des indices sérieux que peut s'appliquer l'article 60 bis .
J'émets donc un avis défavorable.
Disons-le clairement : rien ne change par rapport à la pratique actuelle ! Vous êtes plusieurs à avoir fait référence à la technique des mules en Guyane. Je me suis d'ailleurs déplacé là-bas, ainsi qu'en Martinique, aux côtés de Sacha Houlié, de Gérald Darmanin et d'Éric Dupond-Moretti, pour examiner ce problème.
Que se passe-t-il en réalité aujourd'hui ? L'écrasante majorité, si ce n'est la quasi-totalité des personnes qui prennent l'avion à Cayenne acceptent de se soumettre aux tests urinaires. Si elles refusent, vous pensez bien qu'on ne leur dit pas : « Tant pis, prenez votre avion, au revoir ! » En cas de refus, on demande au procureur de la République l'autorisation de procéder à des examens médicaux plus poussés et plus invasifs : la personne contrôlée ne rentre pas chez elle, il n'est pas question qu'on la laisse partir. Au contraire, le fait qu'elle ait refusé de se soumettre à un test urinaire constitue un indice qui permet de la retenir un peu plus longtemps afin de procéder à des examens plus poussés.
Bref, nous ne vous proposons pas de changer le cadre actuel, contre lequel nous n'avons d'ailleurs pas reçu de plaintes de la part des douaniers. Encore une fois, je me suis rendu à l'aéroport de Cayenne, où j'ai eu l'occasion d'échanger longuement avec nos agents : j'ai conclu de cette visite qu'il n'était pas nécessaire de changer de cadre.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 98
Nombre de suffrages exprimés 94
Majorité absolue 48
Pour l'adoption 27
Contre 67
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 97
Nombre de suffrages exprimés 95
Majorité absolue 48
Pour l'adoption 25
Contre 70
L'amendement n° 351 n'est pas adopté.
Sur les amendements n° 6 et identiques, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Sur l'amendement n° 406 , je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Timothée Houssin, pour soutenir l'amendement n° 353 .
L'amendement n° 353 est retiré.
C'est un amendement de notre collègue Paul Molac. Les palpations et autres contrôles réalisés par les agents des douanes sur une personne doivent toujours être pratiqués à l'abri du regard du public : c'est la seule solution acceptable pour permettre le respect du principe de la dignité humaine. Or la rédaction actuelle de l'article 2 laisse entendre qu'il serait possible d'y déroger en fonction des circonstances, sans plus de précisions. Il est donc proposé de supprimer cette mention floue pour garantir la protection de la dignité humaine en toutes circonstances.
La parole est à Mme Charlotte Leduc, pour soutenir l'amendement n° 188 .
Par cet amendement identique, nous souhaitons réaffirmer que les dépistages réalisés sur les personnes contrôlées doivent absolument être pratiqués à l'abri du regard du public. L'article, tel qu'il est rédigé, précise que les opérations de dépistage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants « s'exécutent dans des conditions garantissant le respect de la dignité de la personne » et qu'elles sont « pratiquées à l'abri du regard du public, sauf impossibilité liée aux circonstances ». Nous estimons que cette exception n'a pas lieu d'être et que la dignité de la personne, à l'occasion de ces dépistages, doit être respectée quoi qu'il en coûte, en mettant les personnes contrôlées à l'abri du regard du public. Aussi les agents des douanes doivent-ils pouvoir organiser le dépistage dans les meilleures conditions possibles : j'insiste, c'est une question de dignité humaine !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La dérogation que vous souhaitez supprimer est extrêmement limitée : le principe général est que les dépistages doivent s'effectuer à l'abri des regards. Encore une fois, je me permets de faire un parallèle : depuis le début de cette discussion, nous nous référons à des dispositifs préexistants qui sont sécurisés par la pratique ; je vous renvoie donc à l'article R. 434-16 du code de la sécurité intérieure. En tout état de cause, au-dessus du dispositif, le respect de la dignité humaine est expressément mentionné – et, bien évidemment, ce principe ne souffre d'aucune dérogation. Pour l'ensemble de ces raisons, je sollicite le retrait de ces amendements ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Comme plusieurs de mes collègues, j'ai été sensible aux différents arguments qui ont été présentés. J'aimerais toutefois que vous apportiez une précision, car il y a comme un léger flou sur les tests salivaires pour la détection du cannabis, mais aussi sur les tests urinaires, qui sont particulièrement invasifs. Existe-t-il une dichotomie entre les gendarmes ou les policiers qui assurent des contrôles sur la voie publique et les douaniers ? Pourriez-vous éclairer la représentation nationale sur ce point ?
Chers collègues macronistes, c'est vous qui déciderez ici de faire basculer la majorité dans un sens ou dans l'autre, puisqu'il est évident que nos collègues du Rassemblement national voteront contre ces amendements identiques.
Permettez-moi de vous relire l'article, tel qu'il est rédigé : « Ces opérations 3 qui consistent à réaliser des examens de dépistage de stupéfiants
Je constate que certains d'entre vous trouvent cela très amusant. Avez-vous envie que, lors d'un contrôle douanier, votre dignité ne soit pas respectée, en raison d'une exception liée aux circonstances ? Si tel est le cas, vous ne garantissez pas les droits de manière absolue.
J'essaie de vous présenter les choses de manière à vous convaincre. Certains préfèrent en rire. J'espère néanmoins que d'autres auront écouté et seront convaincus. Lorsque l'on édicte des principes, il faut les faire respecter.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je ne veux pas laisser penser que nos douaniers ne respecteraient pas la dignité des personnes.
Ils agissent toujours dans le respect de celle-ci.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Yoann Gillet applaudit aussi.
Pourquoi écrit-on « sauf impossibilité liée aux circonstances » ? Imaginez que vous êtes douanier à Saint-Laurent-du-Maroni et que vous devez effectuer un contrôle urinaire. Vous ne disposez pas nécessairement d'une salle fermée. En raison de cette impossibilité liée aux circonstances, la personne contrôlée – qui recueille elle-même son urine – est simplement amenée à s'éloigner un peu. Voilà de quoi nous parlons.
La dignité de la personne est toujours respectée, conformément à ce qui figure dans la loi et dans les protocoles de la douane. Ne cherchez pas des problèmes là où il n'y en a pas ; cela ne sert à rien.
Monsieur Cazeneuve, le dépistage de stupéfiants par les douanes consiste en des contrôles urinaires. C'est notamment le cas lorsque les personnes sont suspectées d'être des mules, c'est-à-dire d'avoir ingéré des ovules de drogue en vue de les transporter. Il est difficile d'établir des comparaisons avec les contrôles salivaires que peuvent effectuer les forces de police ou de gendarmerie. Ce sont des cas très différents.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 99
Nombre de suffrages exprimés 98
Majorité absolue 50
Pour l'adoption 19
Contre 79
La parole est à M. Mickaël Bouloux, pour soutenir l'amendement n° 347 .
Ne vous emballez pas, je vais vous expliquer !
La norme devrait effectivement être que les opérations de contrôle, notamment la palpation, sont réalisées à l'abri du regard du public. Cela éviterait que les agents puissent décider d'eux-mêmes comment ils procèdent. Néanmoins, il existe selon moi des situations où le suspect peut être plus à l'aise si le contrôle est effectué en public. Le présent amendement vise donc à ce qu'il puisse le demander ; il s'agit d'accorder cette liberté.
Pour les raisons évoquées précédemment, monsieur Bouloux, je vous invite à retirer l'amendement. Je crois comprendre que vous êtes convaincu par mes arguments.
L'amendement n° 347 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement n° 406 .
Il s'agit d'un point important. En vertu d'une jurisprudence établie il y a plusieurs années par la Cour de cassation, les agents des douanes ne peuvent maintenir les personnes à leur disposition que le temps strictement nécessaire à la réalisation des opérations matérielles de visite. Dans le projet de loi, qui vise à encadrer le droit de visite, nous avons prévu qu'au-delà de quatre heures après le début des opérations de visite, les douaniers sont tenus d'informer le procureur de la République.
Dans le texte tel qu'il vous est soumis, cette obligation s'applique dans tous les cas. Par l'amendement n° 406 , nous proposons d'exclure du champ de l'obligation les visites réalisées dans les lieux qui correspondent à l'accomplissement de formalités économiques. Je pense notamment aux bureaux de douane et aux ports, gares et aéroports placés sous surveillance douanière, lorsque la personne contrôlée est non pas un particulier, mais un représentant en douane. Autrement dit, l'obligation d'informer le procureur de la République au-delà de quatre heures ne s'appliquerait pas lorsque le contrôle revêt un caractère essentiellement économique. Il ne s'agit pas alors de rechercher une infraction, et il n'y a pas d'enjeu en matière de droit des personnes.
Cet amendement reprend une disposition ajoutée par le Sénat. La précision me semble bienvenue, car elle conforte l'équilibre entre l'efficacité douanière et le respect des droits. J'émets donc un avis favorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 97
Nombre de suffrages exprimés 71
Majorité absolue 36
Pour l'adoption 70
Contre 1
La parole est à Mme Charlotte Leduc, pour soutenir l'amendement n° 196 .
Il vise à préciser une nouvelle fois que le droit de visite des agents des douanes n'est en aucun cas coercitif.
Aux termes de la disposition qui fait l'objet de l'amendement, les agents des douanes peuvent « ordonner le transfert des marchandises, des moyens de transport et des personnes vers un lieu approprié ». Le terme « ordonner » suppose un pouvoir coercitif. Si un magistrat peut contraindre à l'exécution d'une action, ce n'est pas du ressort des douaniers. C'est pourquoi nous proposons au moins de remplacer ce terme par « organiser ». Nous vous alertons : derrière l'emploi d'un simple vocable, c'est toute une pensée qui s'établit, celle qui consiste à attribuer des missions à des agents que ne sont pas formés pour les accomplir, ni dotés des garanties statutaires et d'indépendance suffisantes.
Le transfert dont il est question ici ne relève pas de la police judiciaire. Il s'agit simplement de déplacer la marchandise ou le véhicule dans un endroit approprié, par exemple pour chercher des caches. D'ailleurs, le transfert est déjà possible dans le cadre de la visite d'un navire : les agents des douanes peuvent ordonner le déroutement dudit navire.
Nous avons beaucoup parlé de flou. En l'espèce, la notion d'organisation du transfert est très floue : comment serait-il organisé ? Quelles en seraient les modalités ? Qui le mettrait en œuvre ?
Pour ces différentes raisons, j'émets un avis défavorable.
L'amendement n° 196 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le code des douanes est très stable : il est demeuré presque inchangé depuis 1965. Le présent projet de loi fait suite à la décision rendue le 22 septembre 2022 par le Conseil constitutionnel en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité.
Lorsque j'ai préparé l'examen de ce texte, je me suis intéressé à la manière dont la chambre criminelle de la Cour de cassation avait interprété, dans sa jurisprudence, les articles 60 et suivants du code des douanes. Nous l'avons évoqué il y a quelque temps dans nos débats, il est nécessaire que la loi soit précise, afin d'éviter des problèmes d'interprétation, les interprétations pouvant en outre évoluer.
Mon attention a été retenue en particulier par un arrêt de la chambre criminelle en date du 10 avril 2013. L'affaire est simple : une personne cherchait à passer de France en Belgique avec, sur elle, plus de 10 000 euros en espèces ; retenue et conduite dans les locaux de la douane pour ce motif, elle a été interrogée sur d'autres faits. La chambre criminelle a estimé que les agents des douanes ne pouvaient pas l'interroger sur des faits autres que ceux qui avaient motivé l'invitation à les suivre dans leurs locaux, et a annulé la procédure correspondante. Mon amendement vise à autoriser cette pratique. Il reviendrait donc sur la jurisprudence en question, qui va à l'encontre du bon fonctionnement de l'administration des douanes. Il s'agit de fluidifier le travail de celle-ci.
Vous l'avez dit, la disposition que vous proposez s'oppose, frontalement, à toute la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière, reprise par l'article 60-9 nouveau du code des douanes, figurant dans le projet de loi. Les agents des douanes ne disposent pas d'un pouvoir général d'audition. S'ils veulent interroger une personne, ils peuvent le faire soit en audition libre, soit dans le cadre d'une retenue douanière.
Qui plus est, la disposition que vous prévoyez laisse penser que l'on pourrait dévoyer la procédure de transfert aux fins de mener un interrogatoire. Or, je le rappelle, l'objectif du transfert est de permettre des investigations lorsque celles-ci ne peuvent pas être effectuées sur place. Il peut s'agir, par exemple, de déplacer un véhicule au moyen d'un semi-remorque ou de démonter un conteneur pour chercher des cachettes.
Mon avis est très défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n° 111 est retiré.
Sur les amendements n° 109 et identiques, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Sur l'article 2, je suis saisie par les groupes Renaissance et La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement n° 71 .
L'alinéa 28 de l'article 2 prévoit que, lors des visites, des contrôles ou des fouilles, les agents des douanes doivent obligatoirement être accompagnés d'un tiers réquisitionné pour les assister. Cela paraît en contradiction avec la force probante des procès-verbaux de douane, garantie par l'article 336 du code des douanes. Afin de ne pas porter atteinte à cette force probante, nous proposons, par cet amendement de notre collègue Marie-Christine Dalloz, que l'accompagnement par un tiers soit une faculté, et non plus une obligation.
L'article 60-8 nouveau du code des douanes, figurant dans le projet de loi, consacre le caractère contradictoire de la visite douanière, en prévoyant qu'elle se déroule en présence de la personne concernée, de son représentant ou, à défaut, d'un tiers requis à cet effet. À notre sens, il s'agit d'une garantie bienvenue. Il ne serait pas opportun de la rendre facultative, ce qui la viderait de toute substance. Cette garantie existe déjà pour la visite de navire prévue aux articles 62 et 63 du code des douanes, ainsi que pour l'accès aux locaux des prestataires de services postaux prévu à l'article 66 du même code. Pour toutes ces raisons, mon avis est défavorable.
Le caractère contradictoire des contrôles résulte d'une jurisprudence de la Cour de cassation. Le fait de la reprendre dans cette loi, qui vise à encadrer le droit de visite et à apporter de nouvelles garanties, ne compliquera pas l'action des douaniers et ne nuira en rien à son efficacité, puisque les douaniers l'appliquent déjà. C'est pourquoi nous souhaitons maintenir cette disposition. Si elle était supprimée, il s'agirait d'un recul dans l'encadrement du droit de visite, ce qui ne serait guère à même de satisfaire aux demandes du Conseil constitutionnel.
L'amendement n° 71 n'est pas adopté.
L'amendement n° 312 est retiré.
L'amendement n° 370 de M. Thomas Ménagé est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques ?
Il est nécessaire de prévoir que la visite des moyens de transport utilisés comme résidence ne peut être faite que dans les conditions prévues à l'article 64 du code des douanes, qui porte sur les visites domiciliaires. Il serait sans doute inconstitutionnel de ne pas le faire, sachant que la protection du domicile est constitutionnellement garantie. Je rappelle que c'est notamment en raison d'atteintes à l'inviolabilité du domicile que les articles relatifs au droit de visite des navires avaient été censurés par le Conseil constitutionnel en 2013. Mon avis est donc défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 91
Nombre de suffrages exprimés 90
Majorité absolue 46
Pour l'adoption 23
Contre 67
L'amendement n° 387 de M. Thomas Ménagé est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
L'amendement n° 387 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Caroline Janvier, pour soutenir l'amendement n° 314 .
Il vise à ajouter, à l'alinéa 30, la précision suivante : « La personne contrôlée doit être en mesure de prouver au moment de la visite, pièces à l'appui, que le moyen de transport est effectivement utilisé comme résidence. » L'idée est d'inverser la charge de la preuve. En effet, dans le cas des cabines de repos ou des camping-cars, on pourrait avancer l'argument que ces moyens de transport sont des lieux de résidence, ce qui compliquerait le travail des agents.
Le texte prévoit que les garanties domiciliaires s'appliquent si le véhicule est effectivement utilisé comme résidence au moment de la visite. Tel n'est pas le cas si le véhicule circule ou s'il stationne temporairement. En cela, je vous renvoie à l'étude d'impact du texte. À mon sens, il n'est pas utile d'exiger la preuve de cet usage : celui-ci est effectif en vertu de la loi.
En outre, l'amendement ne relève pas du niveau législatif, mais des modalités d'application de la loi. Il pourrait fragiliser la protection domiciliaire si trop d'obligations ou de pièces étaient exigées, alors qu'il s'agit bien du domicile de la personne en question. Ce que vous proposez n'est d'ailleurs pas prévu dans le dispositif voisin de l'article 78-2-2 pour les fouilles de véhicules par les forces de l'ordre.
Pour toutes ces raisons, demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Pourquoi préciser que la justification de l'utilisation du moyen de transport à usage d'habitation doit être faite par la personne contrôlée ? Le projet de loi reprend le cadre qui s'applique aujourd'hui. Pour le résumer de façon très pratique, si l'opération a lieu au moment où une caravane roule, celle-ci est considérée comme un véhicule et c'est le droit de visite qui s'applique ; si l'opération a lieu quand la caravane est à l'arrêt, y compris sur une aire d'autoroute, il s'agit d'une visite domiciliaire. Il n'est pas prévu de changer ce cadre en introduisant des formalités supplémentaires. Avis défavorable.
L'amendement n° 314 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 95
Nombre de suffrages exprimés 74
Majorité absolue 38
Pour l'adoption 74
Contre 0
L'article 2, amendé, est adopté.
L'article 3 est adopté.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement n° 10 .
C'est un amendement de précision déposé par notre collègue Paul Molac. Il vise à prévoir l'information immédiate du procureur de la République en cas d'interpellation, par un douanier, d'une personne ayant commis une infraction flagrante, pour sa remise à un officier de police judiciaire.
L'amendement est satisfait. L'immédiateté de l'avis donné au procureur de la République est déjà prévue à l'article 40 du code de procédure pénale ; elle est également prévue à l'article 67 ter -1 du code des douanes, introduit dans l'article. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 10 est retiré.
Il s'agit d'un amendement de notre collègue Yannick Neuder.
Il arrive parfois que les services de remise soient pris au dépourvu et ne puissent pas se déplacer facilement sur les lieux du contrôle. L'amendement propose d'introduire à l'article 4 un alinéa qui permettra de procéder à la remise effective des personnes appréhendées. Une telle disposition sécuriserait cette phase importante de la répression des infractions de droit commun constatées par les douaniers : sous le contrôle du procureur de la République, qui pourra utilement décider de la marche à suivre, les agents des douanes pourraient ainsi procéder au transfert des personnes interpellées, des moyens de transport appréhendés et des marchandises.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 148 .
Il vise à préciser que « les agents des douanes peuvent procéder au transfert des personnes interpellées, des moyens de transport ainsi que des marchandises aux seules fins de procéder à la remise effective de ceux-ci à un officier de police judiciaire ou, s'agissant des infractions pour lesquelles il est compétent, un agent des douanes […], sur instruction du procureur de la République dans le ressort duquel est constatée l'infraction. » Il s'agit de permettre aux douanes de lutter plus efficacement contre le phénomène des mules et les organisations criminelles qui les emploient, dans un souci d'efficacité.
La remise de la personne interpellée à l'OPJ ne signifie pas qu'il faille attendre l'arrivée de celui-ci ; en général, c'est la personne qui est conduite à l'OPJ, et non l'inverse. Je vous renvoie à l'article 73 du code de procédure pénale. L'amendement est donc satisfait.
Par ailleurs, l'article 4 ne porte pas sur la visite classique, laquelle concerne surtout les marchandises, mais sur l'interpellation d'un délinquant dans un cadre plus souple que celui jusque-là applicable à l'article 73 du code de procédure pénale. Comme il s'agit d'infractions de droit commun, et non d'infractions douanières, les marchandises et véhicules sont placés sous main de justice ; leur sort dépend donc de l'autorité judiciaire. Pour mémoire, l'article 60-7 du code des douanes, créé par le texte, permet le transfert des marchandises et véhicules dans le cadre du droit de visite. Avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
L'article 4 est adopté.
La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour soutenir l'amendement n° 282 , tendant à supprimer l'article.
« Les agents des douanes peuvent contrôler l'identité des personnes qui entrent dans le territoire douanier ou qui en sortent, ou qui circulent dans le rayon des douanes. » C'est ainsi qu'est rédigé l'article 67 du code des douanes. Vous proposez de supprimer la rédaction actuelle pour adopter celle du chapitre II du titre II du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil, lequel est bien plus restrictif s'agissant des droits de contrôle. Ce n'est pas au moment où les trafics en tout genre et, disons-le, les migrations clandestines se multiplient qu'il faut retirer aux douaniers le droit de contrôler l'identité de ceux qui circulent. Une fois encore, c'est un moyen de les empêcher de travailler. On a laissé les clefs des frontières à l'Union européenne ; on a vu ce que ça donnait. On ne peut pas commettre toujours la même erreur.
On nous a dit, tout à l'heure, que le Conseil constitutionnel nous imposait de changer la loi. La jurisprudence nous impose de changer la loi. L'Union européenne nous impose de changer la loi. Alors, à quoi servons-nous ? Eh bien, peut-être à protéger les Français. C'est pour cette raison qu'il faut supprimer l'article 5.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Pourquoi réécrire l'article 67 du code des douanes, comme le prévoit l'article 5 ? Car cet article permet aux douaniers de procéder à des contrôles d'identité sans que ceux-ci soient subordonnés à une finalité quelconque. Or, comme cela a déjà été dit, les contrôles d'identité sans finalité ne sont pas constitutionnels – je vous renvoie à la décision 93-323 DC du Conseil constitutionnel. Une instruction interne interdit aux douaniers d'appliquer l'article 67 pour cette raison. Ainsi, contrairement à la présentation que vous avez faite, la réécriture de l'article n'aura pas de conséquences, puisqu'il n'est pas appliqué en l'état ; c'est d'ailleurs pour cela qu'il est réécrit.
En revanche, supprimer l'article 5 reviendrait à supprimer une précision utile selon laquelle les douaniers procèdent aux vérifications prévues par le code frontières Schengen. En somme, l'amendement aboutirait à conserver une mesure qui n'est pas mise en œuvre et à se priver d'un outil de vérification utile. C'est pour cette raison que j'émettrai un avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n° 282 n'est pas adopté.
La parole est à M. Alexandre Loubet, pour soutenir l'amendement n° 307 .
À travers le présent projet de loi, vous voulez intégrer dans le droit français un règlement européen qui interdit à la France de contrôler ses frontières sans autorisation préalable de l'Union européenne. C'est une perte de souveraineté majeure.
Ce règlement européen que vous voulez transposer dans le droit français nous interdit de contrôler nos frontières sauf, je cite, « en cas de menace grave pour l'ordre public ou la sécurité intérieure d'un État membre ». Or ce même règlement précise : « la migration et le franchissement des frontières extérieures par un grand nombre de ressortissants de pays tiers » – c'est-à-dire l'immigration massive – « ne devraient pas être considérés, en soi, comme une menace pour l'ordre public ou la sécurité intérieure ». Autrement dit, vous voulez intégrer au droit français un règlement européen qui affirme qu'en cas de vague migratoire massive, nous n'aurons pas la souveraineté nécessaire pour contrôler les frontières nationales. En lisant entre les lignes, on se rend compte que vous êtes en train de nous lier les mains et d'empêcher la France de réagir en cas de vague migratoire massive.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Chers collègues, je vous appelle à la raison. La France doit maîtriser ses frontières ; elle doit être capable de réagir en cas de nouvelle submersion migratoire.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
En l'état actuel, l'article 67 du code des douanes présente un risque d'inconstitutionnalité qui nous expose à la répétition de ce qui s'est passé pour l'article 60. La nouvelle rédaction que nous proposons écarte le risque d'inconstitutionnalité tout en permettant aux douaniers de continuer à procéder à des contrôles d'identité. C'est vous, avec ce type d'amendement, qui faites peser un risque sur les douaniers et sur leur capacité à contrôler l'identité ; pas nous, qui proposons une rédaction qui sera désormais conforme à la Constitution.
Le problème, c'est qu'à travers cet article vous êtes en train de légaliser l'immigration massive.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE, LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je persiste et signe : vous n'avez qu'à lire le règlement européen.
S'il y a effectivement un problème de constitutionnalité, nous pouvons nous asseoir autour de la table pour réfléchir à une nouvelle formulation, sans pour autant intégrer au droit français ce règlement européen qui nous désarme en cas de nouvelle vague migratoire. Visiblement, vous refusez de le reconnaître ; peut-être la raison en est-elle que vous êtes favorable à une nouvelle vague migratoire sur notre territoire.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je crois, collègues, que vous confondez deux choses. Les douaniers ne sont pas là pour contrôler les vagues migratoires, mais les marchandises : c'est ça leur boulot !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ils ne veulent pas contrôler les personnes. Il ne faut pas leur demander de faire ce pour quoi ils ne sont pas faits !
L'amendement n° 307 n'est pas adopté.
À l'inverse de ce qu'ont proposé à l'instant nos collègues, nous proposons de préciser que les vérifications sont toujours réalisées pour des raisons objectives et individualisées. Nous souhaitons en effet nous prémunir contre les contrôles au faciès, malheureusement trop nombreux dans notre pays.
Selon une étude du Défenseur des droits publiée en 2017 et menée sur un échantillon de 5 000 personnes, 80 % des individus perçus comme de jeunes hommes noirs ou arabes déclaraient avoir été contrôlés au moins une fois au cours des cinq dernières années – soit une probabilité vingt fois plus élevée que pour les autres profils.
Cela démontre qu'il y a bien un souci avec les contrôles au faciès dans notre pays. Notre amendement a donc un double objectif : restaurer le lien de confiance entre les services de police et la population…
…et garantir aux douaniers la possibilité de faire leur travail. À mesure que nous avançons dans la discussion du texte, nous constatons que le Rassemblement national veut faire de la douane une police de contrôle des gens et des flux migratoires. Or ce n'est pas le rôle de la douane.
Elle doit servir à contrôler les marchandises, les trafics et la contrebande, et à lutter contre toutes les dérives du capitalisme financier, et non à contrôler les gens en fonction de leur couleur !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est une honte, vous devriez vous excuser de vos propos auprès des douaniers.
Nous avons déjà débattu de l'interdiction des discriminations en commission des lois. Vous savez que votre amendement est de ce point de vue déjà satisfait, dans la mesure où ces discriminations constituent une infraction au sens du code pénal. S'agissant de la limitation des vérifications à l'existence de soupçons, il me semble que vous vous méprenez quant au cadre actuel du code frontières Schengen : celui-ci prévoit des vérifications aux frontières dont les modalités dépendent du statut de la personne contrôlée, ressortissante ou non de l'Union européenne. Ces vérifications font partie des missions des garde-frontières, lesquelles sont dévolues aux douaniers. Vous et moi pouvons être soumis à de tels contrôles à l'aéroport, par exemple. La proposition que vous faites est contraire, au demeurant, aux dispositions du code frontières Schengen. Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
Les dispositions du code pénal, selon lesquelles les contrôles ne peuvent se faire de façon discriminatoire, s'appliquent aux douaniers de la même manière qu'elles s'appliquent aux autres : nul besoin d'en rajouter. Je m'érige – en tant que ministre des douaniers, c'est mon rôle – contre votre sous-entendu insidieux, selon lequel les douaniers seraient responsables de discriminations et auraient des pratiques non conformes. Ce n'est pas la réalité !
Encore une fois, je souhaite défendre les douaniers qui prennent des risques pour leur vie, sur le terrain, pour contrôler les marchandises et défendre les frontières. Je ne veux pas qu'il y ait de sous-entendu à ce sujet, et votre amendement me permet au moins de clarifier les choses.
Plusieurs d'entre vous, enfin, viennent d'affirmer – à tort – que les contrôles d'identité ne font pas partie des missions des douaniers, que ce n'est pas leur métier. Pourtant, si ! Cela fait vingt ans que des douaniers, en tant que garde-frontières, exercent cette mission et cette responsabilité, tout comme la police aux frontières et la gendarmerie.
Vos affirmations traduisent donc une méconnaissance du métier de douanier : 1 600 d'entre eux sont d'ores et déjà garde-frontières aujourd'hui.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et RN.
L'extrême gauche – NUPES vient de déclarer que les douaniers seraient adeptes du contrôle au faciès. Je tiens à rassurer les douaniers : ils ne sont pas les seuls à être mis dans ce sac-là ! Sur ces mêmes bancs en effet, on a entendu affirmer que les gendarmes et les policiers seraient racistes, voire qu'ils tueraient ! Sur ces mêmes bancs, lors de l'examen du projet de loi de programmation militaire, on a entendu que l'armée serait homophobe et raciste ! Pour vous, dès que l'on porte un uniforme et que l'on fait respecter l'ordre et la loi, on est raciste !
Nul besoin d'avoir un uniforme, il y a des gens en cravate qui le sont aussi !
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Croyez-moi, ces agents vous entendent, vous écoutent, et observent le triste jeu auquel vous jouez : toujours du côté des voyous, jamais du côté de l'ordre et de la justice !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il n'y a pas de méconnaissance de notre part des fonctions de la douane, mais un désaccord politique entre nous : nous considérons qu'elle ne doit pas être utilisée pour contrôler l'identité des gens.
Je répondrai par ailleurs au député du Rassemblement national que ce n'est pas parce que l'on porte un uniforme que l'on est forcément raciste !
Vous en avez la preuve sur vos bancs : l'un d'entre vous a été sanctionné pour racisme alors qu'il siège ici sans uniforme !
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Nous n'avons donc pas de leçons à recevoir de votre part. Les idéologues du racisme sont en face de nous, sur vos bancs !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 197 n'est pas adopté.
Il se fonde sur l'article 70, alinéa 3, de notre règlement. M. Thomas Portes vient de nous insulter une nouvelle fois, en nous traitant de racistes. Je demande que ses propos soient inscrits au procès-verbal. Cela suffit ! Ces accusations sont systématiques : la semaine dernière, elles venaient de Mme Garin, cette semaine de M. Portes.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous insultez les policiers, les militaires, les douaniers et les députés du Rassemblement national !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Vous ne faites qu'insulter tous ceux qui ne pensent pas comme vous ! Monsieur Portes, excusez-vous !
Ç'aurait été l'inverse, collègue Portes, vous auriez fait un scandale !
L'article 5 est adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 5.
La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l'amendement n° 198 .
Je ne doute pas qu'il recueillera un assentiment assez large puisqu'il vise à abroger l'article 67 quater du code des douanes, qui prévoit la participation des douaniers au contrôle des migrants et à Frontex (Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes). Cet article fait référence, collègues du RN, aux règlements européens que vous évoquiez tout à l'heure et plus précisément à Schengen. Nous estimons en effet que le rôle des douaniers n'est pas d'assurer la police aux frontières. Les douaniers eux-mêmes condamnent cette dérive que l'on observe depuis plusieurs années. Ils ne sont pas là pour contrôler les migrations, ce n'est pas leur métier ! Leur métier consiste à contrôler les marchandises, la contrebande et les trafics, et à arrêter des camions remplis de drogue ou d'armes – non pas à arrêter des individus !
Vous devriez, monsieur le ministre délégué, émettre un avis favorable sur cet amendement. Vous avez dit tout à l'heure, en effet, qu'en tant que « ministre des douaniers », vous refusiez que nous tenions des propos pouvant être interprétés comme une mise en cause de leur travail. C'est l'occasion de vous rappeler que ceux-ci sont rattachés précisément à votre ministère et non au ministère de l'intérieur et des outre-mer, pour une bonne raison : leur rôle consiste à contrôler les marchandises, les flux financiers, la contrebande et le trafic d'armes, mais certainement pas à contrôler les individus !
M. Maxime Minot s'exclame.
Les douaniers ne le souhaitent pas ! D'une certaine manière, notre amendement vise à ce qu'ils ne dépendent que de votre ministère, et à éviter que la douane ne devienne une extension du ministère de l'intérieur et des outre-mer : M. Darmanin a assez de monde sous ses ordres !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous souhaitez, monsieur Léaument, abroger l'article 67 quater du code des douanes, au motif que les douaniers ne seraient la police que des marchandises et non des personnes. Cet article permet aux douaniers de procéder à des contrôles d'identité et de titres aux frontières et dans les zones exposées à l'international – ports, aéroports et gares. Pourquoi ? Comme cela a déjà été dit, les douaniers sont des garde-frontières au sens européen, au même titre que les agents de la police de l'air et des frontières.
M. Antoine Léaument proteste.
Il en va de même pour les principes : ils souffrent d'exceptions, monsieur Léaument. Les douaniers participent à ce titre au contrôle des frontières et aux vérifications : je vous renvoie à cet égard au code frontières Schengen du 9 mars 2016.
Mme Christine Arrighi s'exclame.
Au-delà du seul article 67 quater, je rappelle que le droit de visite peut concerner les personnes, madame Arrighi. Je n'entends pas ce que vous dites puisque je parle en même temps. L'article 67-1 du code des douanes permet d'ores et déjà aux douaniers de relever l'identité des personnes, et la version de l'article 67 telle que réécrite par l'article 5 que nous venons d'adopter vise les contrôles aux frontières. Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
Même avis, madame la présidente.
Encore une fois, ce n'est parce que l'on assigne actuellement aux douaniers des missions qui ne relèvent pas de leur métier que cela doit perdurer ! Nous considérons pour notre part que le rôle des douaniers, c'est de contrôler les marchandises, la contrebande ou le trafic d'armes, et non de contrôler les migrants. Il y a aujourd'hui 17 000 agents des douanes – voire un peu moins, car ils sont de moins en moins nombreux –, dont 8 500 en uniforme sur le terrain. Ces derniers, que nous saluons, parviennent à réaliser 70 % des saisies de cannabis et 64 % des saisies de cocaïne. Ces 8 500 agents, chargés d'un rôle spécifique dans des lieux spécifiques, sont ainsi plus efficaces que le reste de l'appareil policier, rattaché au ministère de l'intérieur et des outre-mer, pour récupérer de la drogue. C'est normal : ils agissent là où circulent les grandes quantités de drogue, de tabac de contrebande et d'armes.
Ce que nous voulons, c'est renforcer non seulement leur action en augmentant leurs moyens – avec notamment un doublement du nombre d'agents des douanes –, mais aussi leurs missions en les précisant. Les douaniers ne sont pas là pour être des policiers aux frontières et contrôler les migrations : ce n'est pas leur rôle ! Nous proposons, avec le présent amendement, de recentrer leurs actions sur leur véritable mission. Les collègues du Rassemblement national nous disaient tout à l'heure qu'ils n'étaient pas favorables à l'introduction des règlements européens dans le droit français. Il s'agit en l'occurrence d'une règle européenne. Mais comme elle concerne les migrations, je ne doute pas qu'ils seront du côté du Gouvernement !
L'amendement n° 198 n'est pas adopté.
Ils ont tous deux été déposés par notre collègue Acquaviva. L'article 67 quater du code des douanes organise la possibilité, pour les douaniers, de procéder à des vérifications de certaines pièces auprès de personnes de nationalité étrangère. Or ces contrôles ne devraient avoir lieu qu'à l'intérieur de périmètres géographiques strictement définis. Il est donc nécessaire de supprimer la mention des abords des lieux concernés, ce terme étant juridiquement imprécis. C'est ce que propose l'amendement n° 7 . Quant à l'amendement de repli n° 8, il vise, dans la droite ligne du précédent, à préciser à tout le moins que les contrôles se font aux abords immédiats des lieux concernés, comme les gares.
Il vise à fixer un seuil minimal – 2 000 euros – en deçà duquel la retenue d'argent liquide n'est pas possible. Deux amendements de repli proposent des seuils à 1 500 et à 1 000 euros. Nous en avons déjà longuement débattu en commission : notre groupe considère qu'un seuil est nécessaire. À défaut, même une somme de quelques centaines d'euros pourrait être retenue.
M. Philippe Brun applaudit.
La parole est à Mme Charlotte Leduc, pour soutenir l'amendement n° 199 .
Il vise lui aussi à fixer un seuil minimal de 2 000 euros pour les retenues de sommes en liquide. Il s'agit d'éviter que les retenues ne soient détournées en mesures de rétorsion préventives contre des personnes innocentes. Ce texte ne doit être utilisé que dans l'esprit dans lequel il a été rédigé : la lutte contre les trafics, la criminalité et le banditisme. Il ne doit en aucun cas être détourné pour servir à la coercition de celles et ceux qui dépendent de leur argent liquide pour acheter de quoi s'habiller, se loger et se nourrir. Une somme de 2 000 euros nous paraît raisonnable dans ce cadre-là.
MM. Antoine Léaument et Thomas Portes applaudissent.
La parole est à M. Mickaël Bouloux, pour soutenir l'amendement n° 189 .
J'ai défendu avec l'amendement n° 190 mes deux amendements de repli n° 189 et 191.
M. Philippe Brun applaudit.
L'amendement n° 191 de M. Mickaël Bouloux est également défendu.
La parole est à Mme Nadia Hai, rapporteure de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Ces quatre amendements ont le même objectif – seul le montant du seuil diffère. Tout d'abord, je rappelle que cet article 6 est le pendant de l'article L. 152-4-1 du code monétaire et financier qui permet de retenir de l'argent liquide ayant traversé la frontière lorsqu'il existe des indices de lien entre ces sommes et une activité criminelle. J'insiste sur ce point car, madame Leduc, vous semblez dire que les douaniers pourront faire ces contrôles et retenues sur n'importe quel citoyen français. C'est totalement faux : les douaniers ciblent les sommes d'argent directement liées à une activité criminelle.
Vous proposez que les saisies ne puissent avoir lieu que lorsque les sommes dépasseraient différents montants. Si nous suivions votre raisonnement, nous raterions l'objectif : s'attaquer au financement des activités criminelles tout au long de la chaîne, du plus petit au plus grand. Laisser passer des sommes d'argent, aussi minimes soient-elles, risque de contribuer à financer des réseaux que nous souhaitons voir disparaître. Avis défavorable à ces quatre amendements.
Même avis pour les mêmes raisons.
Soyez un peu cohérents, chers collègues. Vous nous avez dit que la douane était non pas la police des personnes, mais celle des marchandises. En l'occurrence, lorsqu'il s'agit de contrôler l'origine d'une somme d'argent, on ne se préoccupe pas de la situation de la personne, quand bien même celle-ci se promènerait avec 2 000 euros en espèces pour ses frais quotidiens. Allez dire cela aux Français qui nous regardent et qui, à mon avis, ne vivent pas dans ce genre de réalité.
Comme la rapporteure vient de l'indiquer fort justement, c'est quand des indices sérieux font penser que l'argent transporté – que ce soit 2 000 euros, 10 000 euros ou davantage – pourrait avoir un lien avec une activité criminelle que la retenue est effectuée. Concrètement, si le chien des douanes détecte une odeur de stupéfiants sur un portefeuille ou dans une boîte à gants, si l'on découvre des billets dans le faux fond d'une valise, on peut présumer l'existence d'un lien avec une activité criminelle et justifier la retenue de l'argent liquide par les douanes.
Pour votre information, vous irez vous référer à l'étude d'impact. Dans le cadre de la réglementation actuelle, 555 retenues ont été effectuées en 2022 pour un montant total de 20 millions d'euros, ce qui fait en moyenne environ 36 000 euros par saisie. Nous pouvons en déduire que les douanes savent discerner les potentiels fraudeurs et criminels à identifier.
Nous proposons que les sommes retenues d'un montant supérieur à 10 000 euros puissent être conservées cinq mois au lieu de trois. En raison des lenteurs administratives et judiciaires, il me semble nécessaire de laisser aux magistrats deux mois supplémentaires pour qualifier les infractions. Ces sommes très importantes ne doivent pas revenir dans la main des trafiquants de drogue et autres.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement n° 105 .
Il va dans le même sens : nous proposons d'augmenter la durée maximale de retenue de l'argent liquide à quatre mois au lieu de trois, lorsque les sommes sont supérieures à 10 000 euros.
Comme je l'ai indiqué, ce dispositif est calqué sur un article du code monétaire et financier, dont je ne souhaite absolument pas m'éloigner. Par souci d'équilibre, il ne faut toucher ni au montant ni à la durée de la retenue douanière. Cette durée peut d'ailleurs être allongée de 90 jours, ce qui la porte à 180 jours, soit un bon compromis. Avis défavorable.
Même avis pour les mêmes raisons.
Nous avions déposé cet amendement car nous avons quelque peine à imaginer que des braves gens se promènent avec des sommes supérieures à 10 000 euros en espèces sur eux. C'est difficile à concevoir. Cependant, après les explications de la rapporteure, je le retire.
L'amendement n° 105 est retiré.
L'amendement n° 271 n'est pas adopté.
La parole est à M. Mickaël Bouloux, pour soutenir l'amendement n° 195 .
L'amendement n° 195 est retiré.
Il précise que la saisie s'inscrit dans le droit commun de la saisie douanière au sens de l'article 323 du code des douanes.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir le sous-amendement n° 397 .
C'est un sous-amendement de coordination. J'émets un avis favorable sur l'amendement s'il est ainsi modifié.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 75
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l'adoption 47
Contre 1
Le sous-amendement n° 397 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 76
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l'adoption 47
Contre 0
L'amendement n° 384 , sous-amendé, est adopté.
L'article 6, amendé, est adopté.
Il y a quelques mois, je me suis rendu aux États-Unis pour un déplacement dans le cadre des coopérations douanières que nous avons avec les Américains. J'ai rencontré mon homologue de la douane américaine, désormais rattachée au ministère de l'intérieur – ce ne sera évidemment pas le cas en France.
Mon homologue du département de la sécurité intérieure des États-Unis – United States Department of Homeland Security (DHS) – et les représentants des douanes m'ont tous alerté sur les ravages dramatiques du fentanyl qui a fait quelque 70 000 morts l'année dernière outre-Atlantique. Le président Biden en a d'ailleurs parlé dans son discours sur l'état de l'Union. Il faut, m'ont-ils dit, que vous preniez des dispositions pour empêcher que de tels ravages ne se produisent chez vous. Le fentanyl est un opioïde de synthèse, élaboré à partir de matières premières qui ne sont pas elles-mêmes interdites. Il peut, par exemple, contenir du liquide pour nettoyer les vitres de voiture. Depuis mon retour, mon obsession est de prendre toutes les mesures pour empêcher que ce fléau n'arrive sur notre sol, et je travaille en lien avec mes collègues qui sont évidemment très concernés.
Cet amendement prévoit de transposer une disposition existante dans le droit européen, qui permet de lutter contre les précurseurs chimiques non classifiés. Ces produits ne sont pas classifiés ou considérés comme dangereux quand ils sont pris isolément mais, s'ils sont mélangés à d'autres produits, ils peuvent créer des opioïdes de synthèse comme le fentanyl. Concrètement, cette disposition nous permettra de les saisir le temps de procéder à une analyse, ainsi que d'obliger les importateurs à faire une déclaration sur l'usage de ces substances. Je vous invite à voter pour cette importante disposition importante.
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais j'y suis favorable à titre personnel. Comment s'opposer à un amendement aussi opérationnel et qui répond à un besoin et même à une menace ? Mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement.
Compte tenu de sa longueur, cet amendement aurait dû nous être proposé plus tôt. Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je demande une suspension de séance pour que nous puissions le lire tranquillement.
Je regrette, cher collègue, mais vous n'avez pas la délégation de votre groupe.
La parole est à M. Antoine Léaument.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-trois heures trente, est reprise à vingt-trois heures trente-cinq.
Nous avons lu en détail l'amendement n° 408 : nous le jugeons intéressant. Toutefois, dès lors qu'il vise à insérer un article entier dans le texte, il est dommage que nous n'ayons pas pu l'examiner en commission, où nous aurions eu le temps d'en discuter. Nous le regrettons d'autant plus que vous nous avez dit, monsieur le ministre délégué, que vous étiez obsédé par cette question depuis quelque temps. Mais ce n'est pas grave.
Pour ce que l'on en comprend – puisque nous avons eu peu de temps pour l'étudier en détail –, il s'agit d'un outil assez puissant de lutte contre l'importation de précurseurs de drogues qui, actuellement, ne sont pas classés comme tels mais qui pourraient néanmoins, grâce à cet amendement, être saisis.
Sur ce point, nous vous suivrons, car nous estimons a priori que ces dispositions ne portent pas atteinte aux droits de la personne. La seule liberté qui pourrait être éventuellement menacée est celle du commerce. Or – et c'est pour nous une règle générale – nous préférerons toujours la préservation de la santé à la liberté du commerce.
Nous voterons donc pour cet amendement portant article additionnel, qui vise à insérer de nombreuses dispositions dans le texte, dispositions que nous avons étudiées aussi vite que possible.
Je souhaite répondre à Mme Arrighi et à M. Léaument, qui m'ont demandé des précisions sur l'amendement. Encore une fois, les produits visés ici sont des précurseurs qui permettent de produire des drogues synthétiques – méthylènedioxyméthamphétamine (MDMA), métamphétamines, cathinones, cannabinoïdes de synthèse, opioïdes, GHB – gamma-hydroxybutyrate – et le fentanyl, que j'évoquais tout à l'heure – et semi-synthétiques : cocaïne et héroïne.
Les produits visés sont ceux qui figurent dans les règlements européens n° 111/2005 et 273 /2004 ; il s'agit de molécules qui portent des noms scientifiques – vous pouvez vous reporter à ces règlements, qui en dressent la liste. Nous parlons ici, cela a été dit, de précurseurs non classifiés. Bien entendu, nous ne saisirons pas tous les produits importés ayant un lien avec ces molécules. La saisie interviendra lorsque nous aurons des indices qui laissent penser que ces produits peuvent servir à la production de drogues de synthèse.
Ces indices peuvent être issus du renseignement : je rappelle que les douanes comprennent un service de renseignement du premier cercle, la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED). Mais ils peuvent également être relevés par les services des douanes. Ce sera le cas, par exemple, si un distributeur n'importe jamais ce type de produits ou si ces derniers ne servent pas à son activité déclarée. En présence de tels indices concordants, nous saisirons les produits pour procéder à un examen approfondi.
L'enjeu est réel. L'an dernier, 350 laboratoires de drogues de synthèse ont été démantelés au niveau européen. En France, les démantèlements concernent pour l'instant des laboratoires plutôt artisanaux, des kitchen lab, comme on les nomme dans le jargon européen. On voit cependant émerger des laboratoires de format industriel, notamment aux Pays-Bas et en Espagne. Bien entendu, nous ne souhaitons pas que ce phénomène se développe chez nous. C'est pourquoi nous vous proposons de transposer ces règlements européens.
Cet amendement présente à l'évidence un intérêt, compte tenu des nouveaux dangers que vous venez d'évoquer, monsieur le ministre délégué. Et c'est tout à l'honneur du Gouvernement de tâcher de nous en prémunir.
Néanmoins, j'ai des regrets concernant la forme. En effet, cet amendement assez long et technique, vous en conviendrez, a été déposé à seize heures trente et n'a pu être étudié par nous-mêmes qu'à vingt et une heures quarante-sept. La commission des finances n'a donc pas pu l'examiner dans le cadre de l'article 88.
Vous nous avez indiqué que vous réfléchissiez à cette mesure depuis votre voyage aux États-Unis, mais peut-être n'êtes-vous rentré qu'il y a quelques jours…
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Mea culpa : j'aurais souhaité que cet amendement pût être déposé plus tôt. Mais il a nécessité de nombreuses itérations avec la Chancellerie et la Mission nationale de contrôle des précurseurs chimiques de drogues (MNCPC). Je crois cependant avoir détaillé l'objet et le contenu de l'amendement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 82
Nombre de suffrages exprimés 82
Majorité absolue 42
Pour l'adoption 82
Contre 0
L'amendement n° 408 est adopté.
Sur les amendements identiques n° 62 , 78 , 201 et 257 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Christophe Blanchet, premier orateur inscrit sur l'article 7.
L'article 7 a pour objet de créer la réserve opérationnelle des douanes, dont j'avais moi-même préconisé la création dans deux rapports : le premier était un rapport d'information sur les réserves rédigé avec Jean-François Parigi ; le second avait été présenté avec Pierre-Yves Bournazel dans le cadre d'une mission d'évaluation de la lutte contre la contrefaçon.
S'il est utile de créer une réserve des douanes, encore faut-il s'inspirer de celles qui donnent satisfaction. Je pense en particulier à la réserve de la gendarmerie qui, après quinze ans, est totalement efficace puisqu'elle compte près de 60 000 gendarmes réservistes qui contribuent au fonctionnement de nos gendarmeries.
Nous avons déposé divers amendements sur l'article 7. Plusieurs d'entre eux visent à accélérer la création de la réserve opérationnelle des douanes. Il s'agit d'éviter les erreurs qui ont pu être commises pour d'autres réserves, afin qu'elle soit immédiatement et parfaitement efficace.
D'autres tendent à améliorer la reconnaissance des réservistes des douanes, à l'instar de ce que nous avons fait dans le cadre de la loi de programmation militaire, dont un volet permet de sécuriser la situation des réservistes, notamment ceux d'entre eux qui sont salariés et ont besoin d'être protégés au sein de leur entreprise.
Nous avons également déposé des amendements relatifs à la réserve citoyenne, qui ne figure pas dans le projet de loi. Toutes les réserves existantes, notamment celles des armées et de la police, ont créé de telles réserves, qui ne coûtent pas un sou puisqu'elles reposent sur le bénévolat et l'engagement de citoyens qui veulent promouvoir les thèmes qu'ils maîtrisent auprès d'acteurs privés économiques ou d'étudiants.
Enfin, nous défendrons des amendements qui visent à valoriser la compétence des réservistes, notamment lorsqu'ils sont étudiants.
L'article 7 a pour objet de créer une réserve opérationnelle des douanes. S'il est évident que cette mesure est intéressante, notamment lorsqu'elle permettra de soutenir le travail de nos douaniers, elle contribue néanmoins, à l'instar de la plupart des réserves qui se sont multipliées dans de nombreux domaines au cours des dernières années, à combler le manque croissant d'effectifs dans nombre de nos services publics.
De fait, monsieur le ministre délégué, grâce à la création de cette réserve, vous souhaitez remédier à moindres frais au manque criant de douaniers, qui n'a fait que s'accentuer au fil des suppressions de poste intervenues au cours des dernières décennies, suppressions qui ne sont pas toutes dues à la disparition des douanes fixes aux frontières.
Une fois encore, ce sera aux Français, par leur engagement, leur sens civique et leur envie de défendre le bien commun, de compenser l'inconséquence des gouvernants qui se sont succédé et l'inconsistance des mesures proposées par le Gouvernement.
Alors, puisque nous refusons toujours la politique du pire et que cette réserve opérationnelle des douanes sera sans doute utile, et en espérant qu'elle suscite suffisamment de vocations chez nos concitoyens, nous soutiendrons cet article. Toutefois, nous défendrons des amendements visant à l'améliorer et nous continuerons d'affirmer que le plus important est, bien sûr, d'augmenter les effectifs.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Nous nous trouvons face au plus gros piège du texte : l'article qui crée une réserve opérationnelle pour faire face aux pics d'activité des douanes. Elle serait composée de retraités du métier, d'une part, et de volontaires ayant suivi une formation, de l'autre. Pour nous, il s'agit clairement de créer une douane au rabais qui serait composée d'agents plus ou moins bien formés et d'agents usés par le travail, avec les dangers que cela peut représenter sur le terrain. Il nous semble vraiment hypocrite, au passage, d'utiliser, encore une fois, des retraités,…
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Pour avoir entendu les douaniers sur le sujet, continuer à travailler en douane, sur le terrain, après 64 ans, paraît pour eux difficilement envisageable.
Les douanes étant, je le rappelle, une autorité civile, vous allez créer un dangereux précédent : pourquoi ne pas imaginer demain une réserve opérationnelle de l'éducation nationale, de l'inspection du travail ou de la magistrature ?
Pour en revenir aux douanes, elles souffrent d'un important sous-effectif. Nous avons, je l'ai déjà dit, quelque 17 000 agents en France contre 48 000 en Allemagne, soit, par habitant, 2,3 fois moins de douaniers qu'outre-Rhin, alors que nous comptons quatre fois plus de kilomètres de frontières terrestres et vingt-neuf fois plus si nous prenons en considération les frontières maritimes. Ce dont les douaniers ont besoin, ce sont des effectifs très largement renforcés et ce n'est pas une réserve opérationnelle qui pourra s'y substituer.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous nous opposerons donc fermement à l'article dont nous demandons d'ailleurs la suppression. Nous espérons que vous reviendrez à la raison.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Je ne peux pas vous laisser dire, madame Leduc, et je sais que vous allez le répéter en défendant vos amendements, que les réservistes auraient vocation à occuper des postes jusque-là tenus par des permanents ou des postes non pourvus. Nous vous l'avons répété en commission : les réservistes sont censés soutenir les agents douaniers dans leurs missions. En outre, des postes ne sont pas pourvus à cause du manque d'attractivité du métier.
Ce n'est pas en faisant revenir les anciens qu'on rendra le métier attractif !
Si vous me laissiez répondre, nous sortirions tous grandis de ce débat. Il y a une méconnaissance des métiers de la douane ; or la réserve permettra de les connaître, de faire la lumière sur les corps de sécurité intérieure. Cessez donc de voir le mal partout, je sais que c'est la nature de La France insoumise
« Oh ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES
mais il faudra bien, à un moment donné, en revenir à l'essence même du texte : créer une réserve à même de soutenir les agents douaniers, comme cela existe au sein de la police et de la gendarmerie.
M. Jean Terlier applaudit.
Cet article, on l'a dit, vise à créer la réserve opérationnelle des douanes en faisant d'abord appel aux douaniers retraités – et quand on dit « douaniers retraités » je ne suis pas sûr que ce soient ceux qui vont découvrir le métier, madame la rapporteure – mais aussi à tout volontaire, dans des conditions qui se rapprochent de celles prévues pour la police et la gendarmerie.
Ce qui nous chagrine, monsieur le ministre délégué, c'est qu'il s'agit du seul article du projet de loi grâce auquel nous pouvons aborder la question des effectifs. Or les missions des agents des douanes, comme chacun a pu le souligner ici, se sont accrues du fait de la multiplication des trafics et de la libéralisation des échanges. Pire : des missions supplémentaires, qu'à mon sens il faudrait revoir, leur sont confiées. Aussi le groupe de la Gauche démocrate et républicaine – NUPES aurait-il souhaité que l'engagement de créer plusieurs milliers de postes de fonctionnaires soit pris à l'occasion de l'examen de ce texte, ne serait-ce que pour compenser les 5 500 emplois supprimés ces trente dernières années.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Bien sûr, une annonce simple, qui trouverait sa traduction concrète dans le projet de loi de finances pour 2024, suffirait à nous rassurer.
La réserve opérationnelle de l'administration des douanes ne serait qu'un pis-aller. Vous avez d'ailleurs souligné les risques, monsieur le ministre délégué, pris par les douaniers dans l'exercice de leurs fonctions. Oui, ils prennent des risques pour leur vie et nous nous inquiétons à l'idée que, dans le cadre de la réserve opérationnelle, des volontaires dont ce n'est pas le métier, même après une courte formation, soient armés.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous risquerions de les mettre en danger.
Vous l'avez compris, le débat sur les effectifs ne peut être clos par le biais de l'article 7 et c'est pourquoi nous en proposons la suppression.
MM. Antoine Léaument et René Pilato applaudissent.
Mes arguments seront sensiblement les mêmes que ceux qui viennent d'être exposés. Nous craignons vraiment que les postes de volontaires de la réserve opérationnelle ne se substituent à des emplois pérennes.
Nous craignons qu'on oublie de traiter le problème des effectifs de la douane. L'administration des douanes a perdu des postes d'agents. Or, comme l'a excellemment dit notre collègue Sansu, nous aurions pu envisager la création de cette réserve si elle avait été combinée avec un vrai engagement, gravé dans le marbre, de créer des postes. Comme ce n'est pas le cas, nous demandons la suppression de l'article.
J'ajouterai que la réserve permet de contourner la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), puisque les réservistes ne seront pas comptabilisés dans le schéma et les plafonds d'emplois. Créer cette réserve est donc une manière de faire travailler des gens sans les comptabiliser.
En outre, j'ai déjà évoqué en commission la question du port d'arme. Nous voulons, pour notre part, le limiter strictement aux personnes qui ont eu affaire à des armes dans leur précédent poste. Nous pensons ainsi qu'il faut exclure les jeunes volontaires de la possibilité de porter une arme. Ce n'est en effet pas en deux ou trois semaines qu'ils seront formés. Ils risquent même d'être dangereux pour leurs collègues douaniers.
Mais précisément : les volontaires n'ont pas vocation à occuper des postes de titulaires !
Exclure les jeunes parce qu'ils seraient dangereux, c'est nouveau, ça, il fallait l'entendre !
L'intention est bonne mais il faut vraiment qu'on en revienne aux bases et qu'on augmente les effectifs.
La parole est à Mme Charlotte Leduc, pour soutenir l'amendement n° 201 .
Ces amendements visent, on l'a dit, à supprimer la réserve opérationnelle qui nous est vendue pour faire face aux pics d'activité des douanes. Or il existe déjà des équipes de douaniers organisées à cette fin : les agents du service Paris-Spécial, lesdits Paris-Spé. Avec la création de la réserve opérationnelle, on va remplacer ces agents formés, réactifs, par des réservistes peu expérimentés et dont on peut difficilement prévoir le comportement en situation de crise. Serait-ce pour faire des économies ? Les Paris-Spé sont en effet nourris, logés et blanchis, quand ils se déplacent, et coûtent donc beaucoup plus cher que des réservistes – mais ils sont pourvus d'une habileté, de compétences et d'une légitimité pour faire ce travail. Le vrai problème des douaniers, je le répète, est celui des effectifs.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
En France, seulement 1 conteneur sur 1 000 qui entrent et sortent du territoire est contrôlé, parce que les douaniers ont trop de missions qu'ils ne peuvent accomplir : ils ont donc besoin de renforts pour lutter massivement contre la contrebande, contre la circulation d'espèces animales menacées ou protégées, contre les divers trafics, sans oublier l'évasion fiscale.
Ces problèmes d'effectifs concernent en particulier les territoires d'outre-mer. Ce n'est donc pas avec une réserve bradée, dont les volontaires mettront en danger leurs collègues sur le terrain, que nous allons résoudre ce problème. Il faut regarder la situation avec honnêteté et embaucher massivement dans les douanes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à Mme Christine Arrighi, pour soutenir l'amendement n° 257 .
La douane française, on l'a souligné, dispose déjà d'un service voué à apporter un appui face à l'accroissement temporaire de la charge de travail d'une brigade, le service Paris-Spécial. Dès lors, la création d'une réserve opérationnelle ne se justifie pas.
Eh oui, madame la rapporteure, il s'agit bien de substituer les réservistes aux titulaires. L'étude d'impact indique que l'objectif de la réserve opérationnelle est de recruter et de fidéliser de jeunes adultes, soulignant ainsi le déficit d'attractivité de cette administration. Le choix de répondre à ce déficit d'attractivité par la création d'une réserve opérationnelle, qui s'apparente plus à une douane en miniature, avec une formation et une rémunération au rabais, n'est pas la bonne approche. Il faut au contraire rendre le métier attractif à travers des revalorisations et des recrutements pérennes et à travers une amélioration des conditions de travail.
En ce qui concerne le port d'arme, il m'a été indiqué en commission que tous les réservistes n'en bénéficieraient pas. Or l'étude d'impact précise : « La durée de formation initiale est fixée à quatre semaines, y compris la formation au tir et l'habilitation au port du pistolet semi-automatique […]. Les réservistes sont rémunérés durant la formation. […] Les agents réservistes seront dotés d'un équipement de base comprenant un vestiaire adapté ainsi que l'arme de service. » Donc, contrairement à ce qui a été affirmé en commission, les agents réservistes auront bien une arme de service après avoir reçu une formation de quatre semaines, y compris la formation au tir.
Ne pensez pas, madame Arrighi, que tout citoyen pourra intégrer n'importe quel service de la douane parce qu'il l'aurait demandé. On procédera à une sélection avant de délivrer une formation. Tous les réservistes n'auront donc pas droit au port d'arme.
« Oh ! » sur les bancs du groupe RN.
La formation au tir sera effective, monsieur Sansu. D'ailleurs, pourquoi autoriser les réservistes à porter une arme ? Il y a aussi des gendarmes, des policiers habilités à porter une arme et qui pourront également intégrer une réserve de l'administration des douanes. C'est pourquoi nous ne voulons pas interdire le port d'arme pour des missions de soutien des douaniers, qui sont des missions dangereuses, ce qui est précisé dans le texte : c'est seulement quand la personne encourt un danger qu'elle est autorisée à porter une arme.
Le dispositif Paris-Spécial est totalement différent : ce service est un peu une douane volante et il est composé de permanents et non de réservistes. Les Paris-Spé sont appelés pour remplir des missions d'appoint auprès d'autres permanents. On ne peut donc pas les comparer aux réservistes, auxquels on va confier des missions ponctuelles et qui ne seront habilités à travailler que quelques jours, voire quelques semaines par an. Voilà qui répond donc à l'ensemble de vos préoccupations,…
…à votre crainte que les réservistes ne soient amenés à remplacer des permanents, alors qu'ils ne seront pas habilités à travailler aussi longtemps qu'eux : leur activité est bien limitée dans le temps. Pourquoi, en outre, se priver d'expertise quand on sait les menaces auxquelles nous sommes confrontés, quand on sait que différents événements vont se tenir prochainement, comme les Jeux olympiques, qui entraîneront un surcroît d'activité pour les forces de sécurité intérieure ? Pourquoi se priver d'une main forte pour faire face au regain prévisible d'activité ? Ne voyez donc dans notre démarche aucun agenda caché, n'y voyez d'autre objectif que celui de soutenir les services de la douane – comme c'est déjà le cas pour la police, pour la gendarmerie, pour les forces armées.
Ne soyez donc pas réticents à la création d'un dispositif qui, je le répète, soutiendra les effectifs permanents et n'envoyez pas ce message négatif, voire de dénigrement des missions confiées aux douaniers permanents ,…
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…en les comparant à ce que pourront effectuer les réservistes qui, eux, auront une mission ciblée pour laquelle ils seront formés, encore une fois, dans un temps très court. Pour toutes ces raisons je donne un avis défavorable à cette série d'amendements.
Pourquoi voulons-nous créer une réserve opérationnelle des douanes ? En premier lieu, pour faire face – cela a été dit – à des pics d'activité nécessitant de déployer des renforts auprès de nos douaniers sur un temps court.
Je prendrai deux exemples. Le premier est celui des Jeux olympiques. Nous savons que les flux vont être très importants à nos frontières et qu'il sera pertinent de fournir un renfort à nos douaniers le temps de l'événement.
Le second concerne l'accostage de l'Ocean Viking sur notre territoire, qui a entraîné un pic d'activité imprévu. C'est en effet aux douaniers que nous avons confié le débarquement des passagers. Ils ont eu besoin d'un renfort localisé, pour lequel nous aurions donc pu mobiliser la réserve opérationnelle.
Deuxième finalité de la réserve opérationnelle des douanes : faire bénéficier ponctuellement à cette administration de compétences de pointe. À cet égard, je reprendrai l'exemple, que j'avais pris en commission, de la DNRED, dont le directeur, Florian Colas, est d'ailleurs présent ce soir. Pour avoir rencontré les équipes de cette direction, je puis vous dire qu'ils ont des besoins techniques de plus en plus pointus, notamment pour faire face au développement des cryptomonnaies.
Or dans le secteur de la tech et de la crypto, des personnes travaillant en entreprise souhaitent servir leur pays quelques heures par semaine ou par mois. Ces professionnels pourraient ainsi accompagner les agents de la DNRED, en leur fournissant des informations et des conseils sur l'usage des cryptomonnaies et plus largement sur les questions liées au cyber. À l'heure actuelle, il n'existe pas de cadre pour accueillir de tels renforts : la réserve y remédiera.
Enfin, troisième finalité, que j'assume pleinement : faire découvrir les métiers des douanes à des personnes qui pourraient ensuite avoir envie de candidater à cette administration. Il y a aussi un enjeu d'attractivité.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Cependant, jamais un douanier réserviste ne remplacera un douanier permanent. C'est proprement impossible, ne serait-ce que parce que le nombre de jours au cours desquels on peut être réserviste est limité à quatre-vingt-dix par an. Il est impossible de remplacer un permanent par un réserviste n'exerçant ses fonctions que quatre-vingt-dix jours par an. Il est en outre bien précisé que les réservistes seront toujours placés sous l'autorité d'un douanier permanent, et non en remplacement de l'un d'eux.
Quant au port d'arme, car la question a été soulevée, il est évident que tous les réservistes ne se le verront pas accordé et que l'encadrement de ceux qui seront autorisés à en détenir une sera très strict. Nous allons dupliquer les règles relatives aux réservistes de la police nationale, qui peuvent porter une arme, en prévoyant une formation très approfondie. Il y aura également des critères d'aptitude, comme celui évidemment prépondérant de porter une arme dans le cadre de son métier habituel.
Je trouve donc votre vision de la réserve opérationnelle des douanes bien curieuse, sachant qu'à vous écouter, elle ne concernera que des retraités. Sur ce point, souffrez que des gens aiment tellement leur métier qu'ils désirent continuer de l'exercer et de servir leur pays une fois à la retraite.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Vous semblez en effet étonnés que des douaniers veuillent continuer de consacrer un peu de leur temps auprès de leurs anciens collègues.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Pour ma part, cela me semble très bien.
J'ajoute que des personnes dans la fleur de l'âge feront aussi partie de la réserve opérationnelle.
Certains douaniers participent bien à la réserve de la police nationale : j'aimerais que l'inverse existe également. Ce serait en tous les cas très positif en matière de partage de culture et de compétences.
S'agissant enfin du dispositif Paris-Spécial, comme Mme la rapporteure l'a très bien expliqué, il n'a rien à voir avec notre projet de réserve opérationnelle. Paris-Spécial est effectivement une douane volante pouvant être mobilisée sur un temps plus long, comme ce fut le cas, entre autres, sur nos côtes de la Manche lors du Brexit.
Autre exemple : j'étais à Aix-en-Provence il y a quelques jours…
Sourires.
…pour rencontrer des agents de ce service procédant à des contrôles de sécurité alimentaire. Cette mission a été confiée aux douanes par la DGCCRF – direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – et nous avons d'abord mobilisé des agents de Paris-Spécial, car nous n'avions pas d'effectifs consacrés à cette question.
N'ayez donc aucune inquiétude. La création de la réserve opérationnelle des douanes ne sera que positive et je vous invite vivement à adopter cet article.
Mme Violette Spillebout applaudit.
Plusieurs personnes souhaitent prendre la parole sur ces amendements identiques. Je l'accorderai à un député pour et à un député contre, en commençant par M. Christophe Blanchet.
Les membres du groupe Démocrate (MODEM et indépendants) et moi-même repousserons ces amendements visant à supprimer l'article 7. Je reviendrai sur trois points.
Premièrement, vous craignez, chers collègues, que les réservistes ne se substituent à des emplois fixes. Il n'en sera rien. Rappelons-nous, les mêmes inquiétudes avaient été émises ici même lorsque nous avons voulu créer la réserve de la gendarmerie et celle de la police nationale. Des emplois fixes ont-ils été supprimés ? Non, 10 000 policiers et gendarmes ont été embauchés lors du dernier quinquennat – vous avez d'ailleurs voté contre ces recrutements.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et RE.
Votre deuxième crainte est celle du port d'arme. Or, la vérité est que, lorsque vous vous faites arrêter par un gendarme, vous ne pouvez pas savoir s'il est réserviste ou non, car il est confondu au sein de son corps et il porte une arme. Cette situation induit-elle un danger pour autant ? Non, car les gendarmes réservistes, tout comme les policiers réservistes et les militaires réservistes, se voient dispenser une formation et que celle-ci fait l'objet d'un suivi. J'insiste : peut-on douter de l'intégrité de toutes ces personnes en uniforme pouvant porter une arme et que vous méprisez ? Non !
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Un attentat dans un aéroport peut être déjoué par un militaire réserviste : voilà la réalité ! Si la formation est correctement dispensée et qu'elle fait l'objet d'un suivi, le port d'arme peut être pertinent et c'est justement ce que nous envisageons pour la réserve des douanes.
Enfin, l'une d'entre vous a dit qu'il ne manquerait plus, désormais, que nous créions la réserve de l'éducation nationale.
Mais elle existe déjà ! Nous comptons 6 600 personnes inscrites. Maîtrisez donc un peu vos sujets !
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.
Collègues, vous avez un problème avec les qualifications dans notre pays.
En effet, à force de déqualifier tous les métiers, vous disqualifiez la France sur la scène internationale.
Exclamations sur quelques bancs des groupes RE, LR et Dem.
Vous estimez qu'il faut quatre jours de job dating pour embaucher un prof, alors qu'ils sont normalement recrutés à bac + 5. De la même manière, vous estimez, madame la rapporteure, qu'il faut quatre semaines pour devenir douanier réserviste, alors qu'il s'agit du concours de catégorie B le plus difficile de la fonction publique.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est l'obsession du Président de la République, mais vous n'êtes pas obligés de le croire sur parole.
J'en viens aux retraités. Pour être allé sur le terrain lors de contrôles de douane, voyez-vous des retraités de 65 ans monter à l'échelle sur un conteneur ? Ils en sont incapables !
Il y a des retraités qui vont très bien ! Ils monteront s'ils le veulent !
À la fin de leur carrière, ils sont sur des chariots sous les camions en train de vérifier les longerons, et vous voulez les faire travailler jusqu'à 65 ans !
Votre projet de réserve des douanes est en accord avec votre vision de la retraite : permettez-nous d'être contre et de contester votre façon de voir les choses !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 79
Nombre de suffrages exprimés 78
Majorité absolue 40
Pour l'adoption 13
Contre 65
Prochaine séance, aujourd'hui, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Discussion en nouvelle lecture de la proposition de loi maintenant provisoirement un dispositif de plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs ;
Suite de la discussion du projet de loi visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces.
La séance est levée.
La séance est levée, le mardi 20 juin, à zéro heure dix.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra