La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Suite de la discussion d'un projet de loi
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 3831 à l'article 3.
L'enseignement agricole doit être mieux connu, mieux identifié et mieux valorisé.
Il s'agit d'instaurer à l'échelon départemental un correspondant de l'enseignement agricole, sur le modèle du directeur académique des services de l'éducation nationale (Dasen). Cette mesure, issue du rapport d'information sur l'enseignement agricole des sénateurs Jean-Marc Boyer et Nathalie Delattre, permettrait de mieux coordonner les actions menées par les établissements, de promouvoir cette filière de formation et d'inciter ainsi les jeunes à devenir ces agriculteurs dont le pays a besoin.
La parole est à Mme Nicole Le Peih, rapporteure de la commission des affaires économiques pour les articles 1er à 4, pour donner l'avis de la commission.
Le correspondant que vous proposez d'instaurer assisterait notamment le Dasen dans l'orientation des élèves vers l'enseignement agricole. Cependant, l'article 3 a vocation à établir les grandes missions de l'enseignement agricole, non à fixer les modalités de son fonctionnement. De plus, les directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf) disposent déjà d'un rôle en la matière et je ne souhaite pas que nous revenions sur ce partage de compétences. Avis défavorable.
La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je partage votre objectif mais l'amendement paraît satisfait : votre assemblée a adopté l'amendement n° 4613 de Mme Anne-Laure Babault à l'article 2, qui prévoit qu'un représentant départemental de l'enseignement agricole – homologue du Dasen – sera nommé par voie réglementaire. Par ailleurs, le présent article 3, qui définit les missions de l'enseignement agricole, est davantage programmatique. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
C'est bien dommage, car nous avons besoin d'échelons de proximité. Grâce à ce correspondant, nous pourrions, dans chaque département, établir un lien entre le monde agricole et le monde de l'enseignement.
Réfléchissons bien avant de nous prononcer sur cet amendement très intéressant.
J'ai bien réfléchi, la mesure figure à l'article 2 ; nous examinons à présent les grandes missions programmatiques de l'éducation nationale. La pédagogie étant l'art de la répétition, je rappelle que c'est parce que l'amendement est satisfait que je propose à son auteur de le retirer.
L'amendement n° 847 est adopté.
Quelques applaudissements.
L'amendement n° 3231 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à supprimer les alinéas 15 à 18 de l'article 3, qui modifient – de façon non conforme au code de l'éducation – l'article L. 813-1 du code rural et de la pêche maritime pour permettre l'ouverture de formations d'enseignement supérieur dans les établissements privés.
La proposition est un peu surprenante : supprimer les alinéas 15 à 18, qui adaptent les modifications prévues à l'article 3 à l'enseignement agricole privé, ne permettra pas de rayer du paysage les établissements concernés – ce que, du reste, nous ne souhaitons pas. De plus, la rédaction actuelle permet plutôt de garantir la cohérence des missions de ces établissements privés, donc de leurs obligations, avec celles de l'enseignement agricole public. Il s'agit donc de les cadrer davantage, ce qui devrait vous satisfaire. Avis défavorable.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons : nous avons trouvé un bon équilibre entre le public et le privé.
L'amendement n° 2371 n'est pas adopté.
Il vise tout d'abord à réécrire partiellement l'article L. 811-1 du code rural et de la pêche maritime, afin de préciser que l'enseignement et la formation professionnelle constituent une composante du service public de l'éducation et de la formation.
Ensuite, il tend à préciser que l'enseignement et la formation professionnelle publics aux métiers de l'agriculture, de la forêt, de la nature et des territoires relèvent du ministre chargé de l'agriculture, en lien avec les ministres de l'enseignement supérieur, de l'éducation nationale et du travail.
Vous voudriez faire converger les responsabilités, mais il ne saurait être question de déroger à cette spécificité qui veut que, depuis des décennies, l'enseignement et la formation agricoles relèvent du ministère de l'agriculture.
L'amendement n° 3977 n'est pas adopté.
L'amendement n° 3557 de Mme Nicole Le Peih, rapporteure, est rédactionnel.
L'amendement n° 3557 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 2911 est retiré.
Mon amendement à l'alinéa 17, adopté en commission, nécessite un ajustement car sa formulation rendrait obligatoire la présence d'un atelier technologique ou d'une exploitation agricole dans les établissements privés. Il s'agit ici de préciser que ceux-ci « peuvent disposer » et non « disposent » de tels équipements.
L'amendement n° 4621 de M. Didier Padey est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Avis favorable : les établissements agricoles privés auront ainsi la faculté, et non l'obligation, de disposer d'un atelier ou d'une exploitation.
De l'utilité du travail en commission, et du travail en séance. Dès lors que les établissements publics ne sont pas soumis à une telle obligation, ceux du privé ne sauraient l'être. Avis favorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 48
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l'adoption 35
Contre 12
L'article R. 811-9 du code rural et de la pêche maritime définit les exploitations agricoles ainsi que les ateliers technologiques des établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles comme des « unités de production », ce qui crée une confusion entre deux objectifs distincts : d'un côté, un apprentissage pratique de bonne qualité ; de l'autre, un impératif de rentabilité.
Les ateliers et les exploitations jouent un rôle clé dans la formation des agriculteurs, en particulier pour l'acquisition de pratiques adaptées aux enjeux de la transition agroécologique. Aussi souhaitons-nous insister sur leur rôle prioritairement pédagogique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce rôle pédagogique est déjà mentionné dans le code rural. Défavorable.
Défavorable.
L'amendement n° 938 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 67
Nombre de suffrages exprimés 59
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 44
Contre 15
L'article 3, amendé, est adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 3.
La parole est à M. Charles Fournier, pour soutenir l'amendement n° 4382 .
Il vise à inclure les établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles à la liste des acteurs à l'initiative d'un projet alimentaire territorial (PAT). En vertu de leur rôle d'orientation, de formation et d'accompagnement vers les métiers de l'agriculture, et afin d'accélérer la transition écologique, ces établissements doivent, partout, participer à la gouvernance des PAT.
En effet, nous avons déjà eu ce débat. Nous partageons l'objectif, mais il est déjà inscrit dans le code rural. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 4382 n'est pas adopté.
L'amendement n° 4816 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 2407 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
M. Pascal Lavergne s'esclaffe.
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement n° 1385 .
Cet amendement de M. Pauget prévoit que les programmes « intègrent notamment l'enseignement des compétences socio-économiques, numériques et digitales au sein de la filière générale dispensée dans le cursus d'enseignement agricole ». Les nouvelles technologies étant désormais au cœur de la pratique de certains agriculteurs, leur enseignement a toute sa pertinence.
Les élèves de l'enseignement agricole choisissent trois enseignements de spécialité en se référant à des listes régionales. Pour être appliquée, cette disposition nécessiterait des moyens qui doivent être votés dans le cadre du projet de loi de finances (PLF). Par ailleurs, le contenu des enseignements agricoles étant défini à partir d'une liste nationale par arrêté du directeur régional, la matière de l'amendement est réglementaire. Avis défavorable.
L'amendement n° 1385 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 4379 .
Depuis 1950, 70 % des haies de nos campagnes ont disparu et, chaque année, 23 500 kilomètres de haies françaises sont abattus. Afin de préserver ces refuges formidables pour la biodiversité et de renforcer les pratiques d'agroforesterie, l'amendement vise à intégrer ces enjeux dans l'enseignement et la formation agricoles.
Nous débattrons des haies lors de l'examen de l'article 14. Avis défavorable.
L'Assemblée vient d'adopter l'amendement n° 2407 de Mme Chantal Jourdan. Celui-ci tend précisément à introduire, en un endroit plus propice du code rural et de la pêche maritime, l'enseignement à l'agroforesterie et aux enjeux des haies. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 4379 est retiré.
L'amendement n° 2412 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 936 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 4380 .
La transition vers l'agriculture biologique ne tient pas seulement aux orientations des politiques publiques fixées au niveau national ; les acteurs locaux ont également un rôle décisif à jouer, du fait de leur proximité avec les réalités du terrain.
Parmi eux, les établissements d'enseignement agricole sont les vecteurs des pratiques de demain, les courroies de transmission des connaissances et les accompagnateurs vers les métiers de l'agriculture. Leur politique interne a ainsi un effet déterminant sur le parcours scolaire des jeunes. C'est pourquoi l'amendement prévoit que le projet d'établissement décrit les actions menées pour promouvoir l'agriculture biologique.
Je salue votre constance, monsieur le député.
Vous saluerez aussi la mienne !
Nous avons mentionné l'agriculture biologique à plusieurs reprises dans le texte. Une fois de plus peut être une fois de trop.
Sourires.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 4380 n'est pas adopté.
L'amendement n° 2413 de Mme Chantal Jourdan est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
L'amendement n° 2413 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Par cet amendement, je souhaite appeler votre attention sur la nécessité de développer l'offre de formations à destination des aspirants apiculteurs et apicultrices. Les formations qualifiantes certifiées sont dispensées dans des centres de formation professionnelle et de promotion agricole (CFPPA). Après un an d'études, parfois moins, on obtient un brevet professionnel de responsable d'entreprise agricole (BPREA) orientation apiculture, une spécialisation d'initiative locale (SIL) « apiculteur » ou encore un certificat de spécialisation (CS). Par la suite, il est possible de devenir technicien sanitaire apicole. Alors, me direz-vous, où est le problème ?
Sans remettre en cause la qualité de ces formations, il convient de souligner leurs limites. La première tient à leur brièveté, puisqu'elles durent moins d'un an. La seconde tient à la durée de validité des certifications obtenues, limitée à cinq années – cinq ans après avoir obtenu une formation qualifiante, il faut la repasser ! La validité des autres diplômes – baccalauréat professionnel ou brevet de technicien supérieur (BTS) – n'est pas limitée, ils se conservent à vie. Ainsi, le baccalauréat professionnel « cultures marines » ouvre la possibilité de passer un BTS « aquaculture » en deux ans.
L'apiculture est une filière agricole complexe et technique, qui réclame les nombreuses connaissances nécessaires à la bonne gestion d'une exploitation agricole. Des spécialisations existent, par exemple dans la production d'essaims ou de reines, ou encore dans la transformation des produits de la ruche. C'est un métier qui requiert une grande polyvalence, l'apiculteur étant confronté à de nombreux défis, le changement climatique entraînant une recrudescence des attaques du frelon asiatique et la raréfaction des plantes mellifères. Je vous encourage à voter en faveur de cet amendement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous proposez d'ajouter, au sein de l'enseignement supérieur agricole, des formations aux productions apicoles et aux produits de la ruche. J'ignore si les compétences requises par ces productions relèvent bien de ce niveau. Quoi qu'il en soit, l'apiculture reste une partie de l'agriculture et il n'y a aucune raison de mettre un accent particulier sur cette activité plutôt qu'une autre. Avis défavorable.
Pour les mêmes raisons que Mme la rapporteure, avis défavorable.
L'amendement n° 998 n'est pas adopté.
Cet amendement de Philippe Naillet, soutenu par de nombreux députés ultramarins, vise à préciser à l'article L.811-1 du code rural et de la pêche maritime que les établissements d'enseignement et de formation agricoles situés dans les territoires d'outre-mer doivent se voir attribuer d'autres missions, prioritaires.
D'abord, ils doivent orienter la formation vers la diversification des cultures et l'autonomie alimentaire pour sortir enfin des monocultures – canne à sucre ou banane. Ensuite, ils doivent sensibiliser et contribuer aux pratiques d'adaptation au changement climatique et au développement d'une culture du risque face aux événements météorologiques extrêmes. Enfin, ils doivent participer à des actions de coopération internationale dans la zone de développement économique. Lors d'un déplacement en Guyane, j'ai constaté que cette coopération ne fonctionnait pas, sans doute par méconnaissance puisque les formations agricoles n'y font jamais référence.
Je rappelle que le projet de loi, en l'état, ne mentionne que rarement les territoires d'outre-mer. Or il est nécessaire de prévoir des dispositions adaptées à leurs spécificités.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.
Vous souhaitez ajouter des missions spécifiques aux établissements situés en outre-mer.
Sourires.
Or les missions, telles qu'elles sont définies pour l'ensemble de l'enseignement agricole, permettent déjà, par leur portée générale, de couvrir les enjeux propres à l'outre-mer. Je ne souhaite pas les détailler davantage ; leur formulation permettra à chaque territoire de les adapter aux réalités locales. Avis défavorable.
Je comprends l'intention de l'amendement. Toutefois, les spécificités de l'outre-mer ont déjà été intégrées – à juste titre – à l'article 1
Certes, nous avons, très tardivement, intégré la dimension ultramarine dans le texte.
Bien qu'il soit de portée générale, l'article 3 devrait, en cohérence avec ce qui a été ajouté aux articles précédents, intégrer la dimension ultramarine. C'est une mention à laquelle tiennent l'ensemble de nos collègues d'outre-mer.
L'amendement n° 3689 n'est pas adopté.
La parole est à M. Bertrand Sorre, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
L'article 4 fait partie des dispositions que la commission des affaires culturelles et de l'éducation, dont j'ai l'honneur d'être le corapporteur, avec Géraldine Bannier, devait examiner pour avis. Nous n'avons malheureusement pas eu le temps d'en discuter mais nous avons pu mener de nombreuses auditions et suivre avec attention les débats de la commission des affaires économiques.
Cet article comporte des avancées significatives en faveur de l'enseignement agricole. Il crée un nouvel outil juridique – le contrat territorial de consolidation ou de création de classes. Cette contractualisation pluriannuelle entre les différentes parties prenantes, pensée à l'échelle de l'établissement agricole, est instaurée en fonction des besoins constatés à l'échelon régional, à travers le contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles (CPRFOP). En tant que partie au contrat, l'État s'engage à offrir une visibilité financière aux établissements publics et privés sous contrat.
Il s'agit d'une pierre importante apportée à l'édifice de ce texte, en vue de bâtir un nouveau pacte pour l'enseignement agricole, en lien étroit avec les territoires. Ce contrat contribue à renforcer la dimension planificatrice des politiques publiques d'enseignement agricole, en ajustant l'analyse des besoins à l'échelle régionale, pour en tirer les conclusions dans le cadre des contrats d'établissement.
L'article 4 permettra ainsi de conforter 210 classes à effectifs faibles, et d'ouvrir 100 nouvelles classes, soit un effort combiné correspondant à 2 000 actifs agricoles supplémentaires formés chaque année d'ici à 2030. L'avancée importante que constitue cet article – que, je l'espère, nous voterons – devra se traduire lors des prochains engagements budgétaires de l'État. Il s'agit d'une disposition essentielle pour mieux soutenir l'enseignement agricole et former les agriculteurs et entrepreneurs du vivant de demain, dont notre pays a cruellement besoin.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Le contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles a déjà connu dix-huit versions depuis sa création en 2000 ; vous comptez en ajouter une avec l'article 4. Or il n'est pas nécessaire de recourir à la loi pour modifier l'article L. 214-13 du code de l'éducation, qui prévoit déjà que des formations professionnelles agricoles peuvent être concernées par le plan régional de formation. Nous comprenons la portée symbolique – et l'enjeu politique – de l'article 4, mais nous ne pouvons nous empêcher de penser que cet article relève d'un travers propre aux lois de circonstances : un article bavard dans un projet de loi bavard.
L'article 4 prévoit d'instaurer un « contrat territorial de consolidation ou de création de classes ». Les réserves précédemment formulées mises à part, l'objectif est louable, à condition que le Gouvernement y dédie des moyens importants et adaptés.
Par ailleurs, s'il est proposé de s'appuyer sur le contrat de plan régional, rien n'est précisé quant à la durée ou à l'évaluation de ce dernier. Enfin, l'article 4 n'indique pas quelle autorité procède à l'analyse des besoins, ni selon quelle procédure.
Incontestablement, ce texte affiche de belles ambitions en matière de formation mais il ne réglera pas en profondeur la question du renouvellement générationnel du monde agricole. Quitte à traiter ce qui relève du domaine réglementaire, allez jusqu'au bout et rendez votre dispositif opérationnel. Son pilotage et son évaluation doivent être précisés. Nous proposerons une série d'amendements en ce sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
L'article 4 contribue de manière essentielle à redynamiser l'enseignement agricole : si ce dernier est très performant, il n'en doit pas moins relever de nombreux défis.
L'article 4 prévoit le déploiement de contrats territoriaux, à l'échelle des établissements scolaires, dès lors que des besoins auront été identifiés au niveau régional, dans le cadre du contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles. C'est un outil clé, qui doit nous permettre d'être à la hauteur des enjeux du renouvellement des générations d'actifs, dans chaque territoire.
L'objectif est de consolider et de redynamiser les classes à faibles effectifs, qui accueillent en moyenne sept élèves. On estime que 210 classes sont concernées : elles pourraient, à moyens constants, accueillir jusqu'à vingt élèves, pour une perspective de 1 200 nouveaux diplômés par an.
Il s'agit aussi d'ouvrir 100 nouvelles classes en formation initiale scolaire dans les secteurs de la production agricole. Ces ouvertures offriraient 2 000 nouvelles places, permettant, chaque année, de délivrer des diplômes à 800 jeunes supplémentaires.
Cet effort combiné de consolidation et d'ouverture doit donc permettre de former 2 000 actifs supplémentaires d'ici à 2030 : ainsi l'article 4 concourt-il pleinement à l'objectif plus large d'augmentation de 30 % du nombre total de diplômés dans le secteur agricole, cœur du projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Cette dynamique insufflée au niveau des territoires a vocation à être soutenue par un effort financier de l'État, sujet que les personnes que nous avons entendues lors de nos auditions et de nos débats ont identifié comme particulièrement sensible. Il méritera une attention toute particulière dans le cadre de l'examen du prochain PLF. Je souhaite que nous puissions, en attendant, voter cet article 4.
L'article 4, comme vous avez été plusieurs à le souligner, est un article important. Il a été travaillé en étroite liaison avec Régions de France. Son objectif est bien d'accroître le nombre de personnes formées dans les secteurs de l'agriculture et de l'alimentation, soit en augmentant le nombre d'élèves accueillis dans une classe qui, aujourd'hui, n'attire pas assez, soit en prévoyant d'ouvrir de nouvelles classes en formation professionnelle.
On compte aujourd'hui, chaque année, 18 000 apprenants dans l'enseignement agricole pour les métiers de production, toutes voies de formation confondues. L'objectif est d'augmenter le nombre de diplômés de ces filières de 30 %, soit 2 000 élèves de plus par an en formation initiale. Nous avons déjà évoqué cet élément important lors de l'examen des articles précédents.
Permettez-moi de souligner également, à la suite de Mme Bannier – et de M. Chudeau d'ailleurs –, que nous devons faire preuve d'une vigilance particulière au sujet des formations à faibles effectifs. La politique constante du Gouvernement ainsi que du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a été de maintenir ces classes, même lorsqu'elles comptent très peu d'élèves. Il y a dans l'Allier un CAP (certificat d'aptitude professionnelle) avec huit élèves seulement, un autre, dans le Morbihan, qui n'en compte que cinq. Notre objectif est d'accroître les effectifs, au moyen de la promotion de ces formations, en partenariat avec les régions.
Nous voulons également que 100 nouvelles classes, d'environ vingt élèves, soient ouvertes dans des territoires en tension d'ici à 2030, afin de travailler à l'adéquation entre l'offre de formation et les besoins qui y sont identifiés : adéquation à laquelle, il faut le reconnaître, le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a toujours veillé, même s'il y a là des questions budgétaires qui ne relèvent pas de ce texte.
Tel est l'objet de l'article 4, rédigé dans un esprit de concertation avec les régions – je n'ai d'ailleurs eu connaissance d'aucun retour négatif de leur part. Il faut renforcer, par ces contrats, la capacité des régions et de l'État à répondre aux besoins des territoires.
Nous souhaitons rétablir la formulation proposée par l'avant-projet de loi du mois de janvier. Avec la rédaction actuelle, l'analyse des besoins pourrait conduire à une diminution du nombre de classes sur un territoire alors qu'elle doit viser à quantifier les besoins en formation supplémentaires. Nous proposons de préciser, à l'alinéa 2, que l'analyse des besoins est réalisée « afin de répondre à l'objectif d'accroître le nombre des personnes formées dans les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire. »
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 4386 .
Nous partageons tous, je l'espère, la volonté d'accroître le nombre de diplômés pour assurer le remplacement des agriculteurs et des agricultrices partant à la retraite et même d'aller plus loin, en revenant sur des années de diminution du nombre d'installations.
En commission, l'objectif d'une augmentation de 30 % du nombre d'agriculteurs à l'horizon 2030 a été inscrit dans le projet de loi. Ce n'est là que la transposition de ce que présentait l'étude d'impact. Nous proposons, par cet amendement, qu'il en soit tenu compte dans l'analyse des besoins de consolidation ou d'ouverture de sections de formation agricole dans les régions.
Je suis défavorable à l'amendement n° 963 : il mentionne un objectif de croissance qui n'est pas assorti d'une limite dans le temps alors qu'on ignore quels seront les besoins en compétences dans les dix, vingt ou trente prochaines années.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 4386 car tous les territoires n'ont pas les mêmes besoins : ce serait faire de la mauvaise gestion que de gonfler artificiellement les offres locales de formation.
Je suis défavorable à l'amendement n° 963 .
Il me semble, monsieur Raux, que l'amendement n° 4386 est satisfait par la seconde phrase du deuxième alinéa qui prévoit que la consolidation ou l'ouverture de formations répond à un objectif d'accroissement du nombre de personnes formées. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
L'article 4, en ce qu'il prévoit une analyse des besoins de consolidation et d'ouverture de formations professionnelles initiales sous statut scolaire, est très important. Or cette analyse ne peut se faire sans que les branches professionnelles concernées soient consultées.
Une telle concertation rend possible, d'une part, une adaptation régionale aux besoins de formation et, d'autre part, une attention à ce que les décisions politiques prises par les régions soient bien en adéquation avec la réalité professionnelle des territoires.
Si l'association des branches professionnelles à l'analyse des besoins semble aller de soi, l'alinéa 2 ne mentionne pas explicitement leur consultation. Elle doit pourtant figurer dans le texte, au risque que nous passions à côté de cette nécessaire concertation.
Ces amendements sont doublement satisfaits. L'alinéa 1er
Même avis. Ces amendements sont satisfaits, d'abord par les dispositions existantes, ensuite par les articles que nous venons d'examiner. Le principe de l'association des professionnels aux dispositifs de formation et d'orientation professionnelles est déjà établi.
Bien des notions qui figurent dans ce projet de loi sont déjà évoquées dans des dispositions législatives en vigueur. Mais vous voulez, monsieur le ministre, que ce texte soit une étape significative.
Le contrat de plan régional est, selon moi, capital, en ce qu'il fixe les critères de renforcement ou d'ouverture de sections.
Lorsque j'étais conseillère régionale, j'ai eu à plusieurs reprises l'occasion de me rendre compte que les orientations politiques étaient parfois totalement déconnectées de la réalité des branches professionnelles. C'est forte de cette expérience que j'ai tenu à ce que le lien avec les branches professionnelles figure dans cet article.
Car, une fois que le contrat de plan régional est conclu, c'est trop tard : les choses sont fixées, les assemblées ont délibéré et, si des erreurs ont été faites ou si des manques viennent à être identifiés, le contrat ne laissera pas de courir sur plusieurs années.
C'est faux : les choses ne sont pas décidées une fois pour toutes pour cinq ans !
C'est pourquoi, j'y insiste, il faut mentionner que les branches professionnelles sont associées à l'élaboration du contrat de plan régional de développement des formations.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 4385 .
Cette partie du projet de loi consacrée à l'enseignement a pour premier objectif d'augmenter significativement le nombre de personnes formées aux métiers de l'agriculture.
Nous avons déjà déploré, eu égard à cet objectif, les manquements de ce texte : aucun moyen financier, rien sur les personnels de l'enseignement agricole, rien pour les établissements publics locaux. L'objectif de 30 % d'apprenants et d'apprenantes supplémentaires d'ici à 2030 a toutefois été inséré par voie d'amendement.
La question n'est donc pas de savoir s'il faut ou non consolider et ouvrir de nouvelles sections de formation agricole, mais de savoir combien, et dans quelles filières.
L'existence de besoins n'est pas conditionnelle, elle est réelle. Le contrat de plan régional doit donc systématiquement fixer des objectifs d'augmentation du nombre de personnes formées.
Il est infondé de fixer un objectif d'accroissement permanent des personnes formées, sans prendre en compte la réalité des besoins territoriaux. Ce serait là un mauvais usage, pour les régions, de leurs moyens. Défavorable.
Je partage l'avis de Mme la rapporteure. Nous avons donné un avis favorable à l'objectif d'une augmentation du nombre d'apprenants. À plusieurs reprises, j'ai défendu en commission l'idée que le nombre de formateurs et de dispositifs devait être en adéquation avec le nombre d'apprenants, afin d'assurer les meilleures conditions de formation. L'enseignement agricole, reconnaissons-le, est exemplaire en ce domaine et il n'y a pas de raison que cela change.
Ce n'est pas à cette loi de décliner des objectifs nationaux au niveau régional. Ce serait inutile. Cela relève éventuellement du projet de loi de finances.
En quoi décliner l'objectif national d'augmentation de 30 % du nombre d'apprenants dans les régions poserait-il une difficulté ? Nous l'avons fait dans des tas de domaines ! Régions de France serait tout à fait capable d'en discuter. Cette ambition sera ainsi clairement affirmée, elle ne restera pas un vœu pieux inscrit dans la loi. Allons au bout du raisonnement !
L'amendement n° 4385 n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur l'amendement n° 641 par le groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES, sur l'amendement n° 960 par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale et sur l'amendement n° 2119 par le groupe Rassemblement national.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de quatre amendements, n° 641 , 982 , 2357 et 2356 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 641 , 982 et 2357 sont identiques.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement n° 641 .
Cette loi sera-t-elle effective ? Est-elle normative ? Nous donne-t-elle vraiment les moyens d'atteindre les objectifs qu'elle fixe ? Il y a débat, mais nous sommes d'accord sur un objectif politique : il faut stopper l'hémorragie des exploitations. Nous nous accordons également sur l'enjeu générationnel : il faut combler le trou démographique. Si l'on ne forme pas suffisamment de gens pour remplacer les départs en retraite et combler les besoins, notre souveraineté alimentaire ne sera pas assurée.
Vous avez refusé des amendements qui fixaient des objectifs chiffrés. Je vous propose de lire attentivement l'alinéa 2 : « Pour l'enseignement agricole, une analyse des besoins de consolidation ou d'ouverture de sections de formation professionnelle initiale sous statut scolaire dans l'enseignement agricole est réalisée. ». On fait donc un diagnostic des besoins. Mais la phrase suivante commence ainsi : « Si cette analyse révèle l'existence de tels besoins, […] ». Je propose de supprimer cette condition car tout le monde sait qu'il faut stopper l'hémorragie et que le besoin de formations est colossal. Autrement, ce serait se priver de toute ambition en matière de formation.
M. Jean-Paul Mattei s'exclame.
Cet amendement, de repli, vise à inscrire dans la loi cet objectif : former plus de mômes, et d'adultes, qui deviendront les agriculteurs de demain.
L'alinéa 2 comporte une condition qui tend à limiter l'objectif d'accroissement du nombre de personnes formées. Cette condition, absente de l'avant-projet de janvier, est totalement contradictoire avec les objectifs d'accroissement du nombre d'actifs et de renouvellement des générations.
Les résultats d'une analyse imprécise, dont la méthodologie n'est pas définie dans le texte, pourraient mener à une conclusion arbitraire, infondée ou mal fondée – nous commençons à nous y habituer. Nous plaidons donc pour la suppression de cette condition.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?
Que risque-t-on à apporter une telle précision ? L'analyse des besoins sera réalisée au niveau régional ; même si l'existence de ces besoins sera sans doute réelle dans bien des régions, leur nature et leur volume pourront fluctuer d'un territoire à l'autre. Prévoir par définition des besoins en augmentation serait excessif. La concertation aura lieu sous l'égide de la région et de l'État. Je ne doute pas que, si les besoins existent, ils seront exprimés dans les territoires. Avis défavorable.
Nous proposons uniquement de supprimer le début de la seconde phrase.
Monsieur le ministre, pouvez-vous citer une région de métropole ou d'outre-mer où le nombre de départs en retraite et le renouvellement des générations justifieraient une diminution des besoins de formation ? Citez-en seulement une à l'appui de votre avis !
On pourrait effectivement s'interroger sur l'intérêt de cette précision. Mais elle permet une prise directe avec les besoins.
M. Charles Fournier s'exclame.
Le ministre a rappelé la dimension régionale des contrats de plan. On peut se satisfaire de la rédaction proposée. Nous voterons contre ces amendements.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 167
Nombre de suffrages exprimés 167
Majorité absolue 84
Pour l'adoption 33
Contre 134
L'amendement n° 2356 n'est pas adopté.
L'amendement n° 4384 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 960 de M. Loïc Prud'homme est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Défavorable.
La droite et le RN sont venus au secours du Gouvernement pour refuser que les contrats de plan régionaux de développement des formations et de l'orientation professionnelles, négociés entre l'État et les régions, actent un accroissement des formations.
Mme Hélène Laporte s'exclame.
Ensuite, vous irez pleurer des larmes de crocodile dans vos circonscriptions !
Vous renoncez à défendre l'enjeu du renouvellement des générations dans l'agriculture.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 168
Nombre de suffrages exprimés 168
Majorité absolue 85
Pour l'adoption 32
Contre 136
L'amendement n° 960 n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement de nature plus technique que politique. L'alinéa 2 n'indique pas quelle autorité sera chargée de réaliser l'analyse des besoins préalable. Étant donné les enjeux qui s'attachent aux conclusions de cette analyse – ouverture de nouvelles sections, augmentation des effectifs dans les sections existantes –, il est indispensable de désigner l'autorité.
Selon nous, ce ne peut être que le préfet de région, représentant de l'État, dans la mesure où, aux termes de l'alinéa 6, « l'État pourvoit aux emplois de personnels d'enseignement et de documentation. » Il paraît de saine gestion que le payeur soit aussi le prescripteur. La composition de la commission régionale chargée de l'assister dans ce domaine serait arrêtée par décret.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Vous souhaitez que l'analyse régionale des besoins en consolidation ou ouverture de sections de formation soit faite par le préfet avec l'aide d'une commission ad hoc, chargée de l'analyse des besoins.
Il ne semble pas opportun de créer une procédure concurrente à celle que prévoit l'article L. 214-13 du code de l'éducation pour l'élaboration du contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles. C'est d'autant moins nécessaire que le préfet de région y est explicitement associé.
Le Comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Crefop) gère déjà ces questions. En outre, c'est le Draaf, le directeur régional de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt, qui est compétent et exerce l'autorité académique sur l'enseignement agricole.
Les préfets – que je défends en toute occasion – n'ont pas la compétence en matière d'enseignement agricole.
Monsieur Jumel, il nous arrive à tous de tomber dans la caricature. Vous savez que votre amendement aurait conduit à uniformiser le dispositif alors qu'en matière de formations professionnelles, il faut laisser travailler l'État et les régions.
Mon amendement ne visait qu'un membre de phrase, monsieur le ministre !
Je suis sûr que les parties identifieront des besoins, peut-être en baisse pour certaines filières, en augmentation dans d'autres – il n'est pas inutile d'y travailler collectivement.
J'en reviens à votre amendement, monsieur Chudeau. Vous aurez compris que mon avis est défavorable, tant pour des raisons structurelles, liées à l'organisation de l'enseignement agricole, que parce qu'il existe déjà une structure.
Nous avons à nouveau été attaqués par M. Jumel qui semble être obsédé par le Front national. Peut-être est-ce parce que vous vous êtes retrouvé contre un candidat du Rassemblement national au second tour des législatives ?
Nous nous sommes posé la question de voter pour votre amendement, mais il est si mal rédigé et rendrait le I tellement incohérent que nous avons refusé de cautionner ce grand n'importe quoi.
Nous aussi, nous aurions aimé que vous souteniez certains de nos amendements, ceux relatifs à la défense du secteur laitier par exemple. Mais comme les autres députés de votre groupe, vous étiez absent, monsieur Jumel ! Ce soir, vous êtes seul : les communistes ne sont pas au rendez-vous pour défendre les agriculteurs. Cessez vos accusations obsessionnelles et travaillons sur le fond de ce texte – ce sera plus intéressant !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il s'agit d'un rappel au règlement pour fait personnel. Quand vous en aurez fait autant pour le monde agricole que le groupe communiste et son président André Chassaigne – je vous renvoie aux lois Chassaigne I et II, visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles –, vous pourrez ramener votre fraise !
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Vous faites dans l'autocongratulation alors que les sondages vous donnent à 2 % !
Pour votre information, le candidat Rassemblement national ne s'est pas qualifié au second tour des élections législatives : je lui ai mis treize points dans la vue…
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
Madame la présidente, M. de Fournas a sous-entendu que l'amendement était mal écrit, alors qu'il vise seulement à supprimer le début de la seconde phrase de l'alinéa 2 – il suffit de savoir lire.
Contrairement à ce qui a été dit, l'amendement de M. Jumel était bien rédigé.
Par l'amendement n° 2119 , vous proposez de confier l'analyse des besoins de consolidation ou d'ouverture de sections de formation professionnelle initiale au préfet de région. Or, comme l'a rappelé le ministre, les régions procèdent déjà à ce type d'analyses par l'intermédiaire des Crefop.
Oui !
Cela fait plusieurs années que les contrats de plan régionaux de développement des formations et de l'orientation professionnelles sont élaborés en s'appuyant sur les analyses des professionnels. Il faut certes s'enquérir auprès des régions de la qualité de ces analyses, mais le sujet n'est pas tant l'analyse des besoins que les moyens qui en découlent – c'est là que le bât blesse car il y a souvent un décalage entre les deux. L'État doit jouer sa partition et allouer les moyens nécessaires. C'est pourquoi il faudrait fixer des objectifs plus précis de développement des formations agricoles.
Notre collègue Jumel a manifestement du mal à accepter que nous ayons rejeté son amendement. La rédaction de l'article revient bien à dire que l'on tiendra compte de l'analyse des besoins.
Reste à savoir à quel niveau, régional ou autre, l'action devra être menée – c'est sur ce point qu'il y a divergence.
L'État et les régions collaborent déjà. La rédaction de l'amendement de notre collègue Chudeau pose un problème : le préfet de région n'est pas le représentant de l'État auprès des collectivités territoriales, mais sur le territoire ! Les collectivités territoriales définissent leur politique en toute autonomie.
Je veux réagir aux propos de M. de Fournas. Vous avez sacrément du toupet !
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Il n'y avait qu'un ou deux députés RN – trois maximum – lorsque la commission des affaires économiques a examiné ce texte, et maintenant…
Mme la présidente coupe le micro de l'oratrice. – Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Madame Trouvé, votre intervention était sans rapport avec l'amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° 2119 .
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 153
Nombre de suffrages exprimés 152
Majorité absolue 77
Pour l'adoption 40
Contre 112
L'amendement n° 2119 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 4387 .
Monsieur le ministre, je reconnais votre constance ; vous me répondrez peut-être que la mienne tourne à l'obstination.
Ah non, jamais !
C'est possible, puisque je m'apprête à rouvrir une discussion que nous avons déjà eue à l'article 2. C'est pourtant plus l'incompréhension que l'obstination qui m'anime. Je comprends bien le rôle central de l'État et de la région en matière de formation, mais puisque les autres collectivités territoriales – communes et départements – peuvent être associées à l'élaboration des contrats territoriaux des établissements publics locaux, je ne comprends toujours pas pourquoi les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ne peuvent pas l'être. Je propose donc de nouveau que les EPCI qui le souhaitent puissent participer à l'effort commun pour atteindre les objectifs de formation dans le secteur agricole.
…j'ai donné un avis défavorable à l'amendement n° 4363 , dont le contenu était similaire. Par souci de cohérence, j'émets de nouveau un avis défavorable.
Ni vous ni moi ne sommes obsédés – nous sommes constants.
C'est la phase qui précède l'obsession. Nous avons déjà eu cette discussion, dont il ressort que les EPCI ne sont en effet pas des collectivités territoriales. Mais la rédaction n'empêche pas les communes de leur déléguer des compétences afin qu'ils soient associés aux contrats territoriaux. Votre proposition est donc inutile.
Avis défavorable – il serait incohérent de donner un avis autre que celui que j'ai émis vendredi matin.
Je m'oppose à cet amendement. Tout le monde veut s'occuper de tout – les communes, les EPCI, les départements –,…
C'est vrai !
…alors que c'est la région qui est compétente s'agissant de formation !
Eh oui !
Il faut voir clair dans le jeu subtil des jacobins, de ceux qui veulent réduire l'autorité de la seule collectivité qui peut vraiment concurrencer l'État en la matière !
La région a un rôle précis à jouer. Quand tout le monde s'occupe de tout, personne ne s'occupe de rien.
Je redirai au collègue du Rassemblement national ce qu'a expliqué le ministre : le pendant du recteur dans l'enseignement agricole n'est pas le préfet de région, mais le Draaf. Il faut identifier clairement les responsabilités de chacun, sans quoi les électeurs seront perdus.
Je rejoins ce qu'a dit le collègue Le Fur : soit on met tout le monde, soit on ne met personne ! À défaut d'évoquer les EPCI,…
…la rédaction serait beaucoup plus claire si elle ne mentionnait ni les communes ni les départements.
M. Jean-Claude Raux applaudit.
L'amendement n° 4387 n'est pas adopté.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : sur l'amendement n° 2120 par le groupe Rassemblement national et sur l'amendement n° 2873 par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, n° 109 , 544 , 668 , 834 , 1499 , 1882 , 2129 , 3046 et 3401 .
L'amendement n° 109 de Mme Anne-Laure Blin est défendu.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 544 .
L'article 4 apporte des éléments intéressants à cette loi de programmation agricole.
Il convient d'enrichir les contrats de plan régionaux d'un objectif de développement des formations agricoles, essentiel à une orientation professionnelle satisfaisante. Nous nous questionnons tous sur l'avenir de l'agriculture et sur la formation des jeunes agriculteurs. Cet amendement tend à préciser que tous les métiers du secteur agricole seront justement représentés parmi les intervenants. Il convient aussi d'associer ces professionnels à l'élaboration des programmes de formation. L'avenir de l'agriculture implique de leur faire une place dans les contrats territoriaux.
Par cet amendement, nous souhaitons que tous les métiers du secteur agricole doivent être représentés parmi les intervenants des formations agricoles.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement n° 1499 .
Je reviens à la charge, mais dans un esprit pacifique. Nous proposons d'assurer la représentation juste des métiers du secteur agricole parmi les intervenants professionnels. Je pense notamment aux métiers des travaux agricoles et forestiers, la Fédération nationale des entrepreneurs des territoires (FNEDT) ayant inspiré cet amendement.
La parole est à M. Antoine Vermorel-Marques, pour soutenir l'amendement n° 1882 .
Cet amendement de M. Julien Dive vise à améliorer la représentation des différentes professions dans nos territoires et dans l'enseignement agricole, le tout dans un esprit de compagnonnage. Nous estimons en effet qu'on n'est jamais mieux formé que par ses pairs.
Les établissements d'enseignement agricole – qu'ils soient publics ou privés, du lycée agricole d'Aubenas à la maison familiale et rurale (MFR) de Villeneuve-de-Berg – dispensent des formations très diverses. Les compétences que les jeunes y acquièrent sont variées et les métiers auxquels ils se destinent sont différents. Les établissements forment certes au métier d'agriculteur – c'est le renouvellement des générations et l'installation de jeunes agriculteurs qui se jouent là –, mais aussi à celui de salarié agricole, aux métiers du vivant et de la ruralité dans toutes ses dimensions économiques et sociales. Il faut donc graver dans le marbre de la loi cette diversité des métiers et l'obligation d'associer les professionnels à l'élaboration des programmes de formation.
Quel meilleur formateur pour un futur agriculteur qu'un agriculteur en exercice ? C'est aussi valable pour d'autres métiers : un responsable de coopérative d'utilisation de matériel agricole (Cuma), un entrepreneur en travaux agricoles ou quelqu'un qui s'investit dans la ruralité peuvent tous apporter quelque chose aux jeunes. Il s'agit aussi de ne pas laisser le champ libre à des gens dont les positions sont très militantes et qui, disons-le, poursuivent leurs propres objectifs. Laissons faire les professionnels !
L'amendement n° 3401 de M. Philippe Fait est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Vous voulez vous assurer de la juste représentation de l'ensemble des métiers du secteur agricole parmi les intervenants professionnels des formations agricoles.
Votre proposition serait difficile à mettre en œuvre tant le champ des métiers agricoles est large et diversifié.
Elle n'est pas adaptée à la réalité des établissements, lesquels ne forment pas tous à l'ensemble des métiers de l'agriculture et du secteur agroalimentaire français.
Nous avons déjà eu ce débat sur d'autres sujets. L'article 4 concerne le cœur de la formation. Le dispositif des experts associés dans l'enseignement agricole, sur lequel nous reviendrons lors de l'examen des articles suivants, a bien vocation à permettre aux agriculteurs de transmettre leurs connaissances.
Selon vous, nous avons besoin des professionnels partout, en tout temps et dans tous les secteurs. Ce n'est opportun ni pour l'enseignement agricole ni pour l'enseignement professionnel en général. Je pense que nous avons trouvé le bon équilibre : le dispositif des experts associés permet l'intervention de praticiens ou d'experts sur des thématiques spécifiques. L'enseignement agricole doit conserver un caractère assez généraliste : il ne peut pas être dispensé exclusivement par des professionnels – M. Le Fur l'a bien souligné. Outre les techniques agricoles, on y enseigne l'histoire, les mathématiques, la physique, la chimie…
Je ne crois pas que les professionnels du secteur agricole pourraient assurer ces enseignements – ils n'ont d'ailleurs pas vocation à le faire. En revanche, le dispositif des experts associés répond au besoin d'implication des professionnels dans les formations. Par ailleurs, lors de l'examen des articles précédents, nous avons souligné la nécessité d'associer ces derniers à la définition des grandes orientations et à la réflexion sur l'attractivité des métiers et les plans de formation. Demande de retrait ou avis défavorable.
S'il est prévu une augmentation du nombre d'élèves accueillis dans une section, ou une ouverture de nouvelles sections de formation professionnelle sous statut scolaire, l'alinéa 5 de l'article 4 prévoit que soit conclu un « contrat territorial » avec les établissements concernés. Or aucune disposition du texte ne fixe la durée de mise en œuvre de ce contrat pour lequel il n'est pas prévu de dispositif d'évaluation.
Il ne saurait pourtant y avoir de contrat entre l'État ou la région et un opérateur sans limites temporelles, sans objectifs, et sans évaluation terminale. Il convient de combler ces lacunes.
Vous allez me dire que je veux encore faire intervenir le préfet de région – vous me traiterez de jacobin, mais, rassurez-vous, à mes yeux, c'est un compliment. Il dispose de la hauteur de vue et de l'expertise nécessaires pour arbitrer ces questions. J'ai moins confiance dans les échelons locaux, voire dans certains services de l'État.
Vous souhaitez que le contrat territorial conclu avec un établissement public soit établi pour trois ans, à l'issue desquels il serait évalué par une commission présidée par le préfet de région.
Il n'est évidemment pas question de donner un chèque en blanc aux établissements. Les parties doivent pouvoir évaluer, dans des délais raisonnables, l'application du contrat territorial.
Tout d'abord, la définition des modalités d'évaluation relève plus d'une compétence réglementaire que législative. Ensuite, il est inutile de rigidifier ces modalités en les arrêtant précisément dans la loi – elles doivent pouvoir être adaptées au cas par cas. Enfin, créer une énième instance ne va pas dans le sens de l'allègement des procédures. Avis défavorable.
Je ne reviendrai pas sur le préfet de région, mais je vous trouve un peu dur avec les autres échelons – ce n'était peut-être pas votre intention.
Les autres services de l'État au niveau régional ont leurs prérogatives et leurs compétences – vous le savez aussi bien que moi, si ce n'est mieux –, et il convient de les respecter. Ensuite, vous voulez encadrer la durée des contrats. Faisons confiance aux échelons territoriaux, à l'État, et à l'échelon régional, comme l'ont suggéré vos collègues. Nous ne sommes pas obligés d'imposer à tous les territoires une même toise : plutôt que trois ans, certains peuvent souhaiter une durée un peu plus longue. Quand on est décentralisateur – vous l'êtes sans doute un peu, même si vous n'êtes pas complètement convaincu
M. Roger Chudeau sourit
–, il faut accepter de laisser respirer la vie démocratique dans les territoires en permettant à chacun de s'organiser comme il le souhaite. En cas de problème dans un territoire, je ne doute pas qu'une pression s'exercerait et que chacun se plierait aux délais impartis. Demande de retrait ou avis défavorable.
Dans l'enseignement public scolaire, il existe des contrats d'objectifs – c'est vieux comme Hérode. Leur durée est limitée dans le temps et ils sont évalués par une commission ad hoc sous l'autorité du recteur. Je ne comprends pas que l'on puisse envisager un contrat impliquant l'attribution de moyens supplémentaires sans l'encadrer davantage. Vous me direz qu'il s'agit d'une mesure de niveau réglementaire, mais tout est réglementaire dans votre texte. Indépendamment du caractère réglementaire ou législatif de cette disposition, nous ne pouvons pas rester dans le flou car, comme diraient certains, quand c'est flou, il y a un loup.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 169
Nombre de suffrages exprimés 164
Majorité absolue 83
Pour l'adoption 43
Contre 121
L'amendement n° 2120 n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur l'article 4 par le groupe Renaissance, sur l'amendement n° 2886 par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale et sur les amendements identiques n° 2890 et 4391 , par le groupe Écologiste – NUPES.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l'amendement n° 2873 .
Cet amendement vise à rappeler l'importance d'un l'enseignement agricole public accessible à toutes et à tous, tant géographiquement que financièrement. Nous devons en effet favoriser l'enseignement public dans la mesure où il offre une formation gratuite. Il constitue un levier pour accroître le nombre d'élèves formés, mais pour cela nous devons lui donner les moyens d'atteindre cet objectif.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous souhaitez supprimer la possibilité de conclure un contrat territorial avec un établissement agricole privé lorsque le contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles fixe des objectifs d'accroissement du nombre de personnes formées.
Je suis tout à fait opposée à cette exclusion. Tous les acteurs compétents doivent être mobilisés pour répondre à notre ambition d'accroître significativement le nombre de personnes formées dans les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire. L'enseignement agricole privé représente plus de la moitié du réseau d'établissements d'enseignement agricole – cela a été maintes fois souligné depuis le début de l'examen du texte en commission. Le représentant de l'État veillera à ce que les établissements concernés proposent une offre adaptée et de qualité. Avis défavorable.
Pourquoi tant de haine ?
Sourires sur divers bancs.
Vous revenez au vieux réflexe pavlovien : privé contre public.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, RN, LR, Dem et LIOT.
On sait que 60 % des élèves de l'enseignement agricole sont scolarisés dans des établissements privés. Vous êtes originaire d'une région où l'enseignement agricole privé occupe une place prééminente et où les distinctions sociales que vous décrivez n'existent pas. Pourquoi tant de haine ? Vous voulez priver des établissements qui scolarisent plus de la moitié des élèves de la capacité à contractualiser. Sortez un peu des dogmes et l'enseignement agricole continuera à très bien se porter grâce à l'équilibre entre le public et le privé.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, RN et LR.
Avis défavorable.
Les propos que nous avons entendus sont très choquants, mais je ne suis pas surprise : c'est une vieille lune des Insoumis, qui ont fait de l'enseignement privé, agricole ou non, …
Une cible !
Elle l'est tout d'abord parce que l'enseignement dispensé dans les établissements agricoles privés est de grande qualité ; ensuite, parce qu'ils scolarisent – notamment dans le milieu rural, que je connais mieux – des jeunes de toutes conditions – certains sont issus de milieux modestes.
Enfin, elle est irrationnelle sur le plan financier : dans votre esprit simplificateur, et encore, je suis gentille ,…
Sourires sur plusieurs bancs des groupes LR et RE
…vous pensez que l'argent que l'on ne consacrera pas à l'enseignement privé ira à l'enseignement public. Vous ignorez que le premier sollicite moins les deniers publics que le second.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN, LR, Dem, HOR et LIOT.
Vous allez augmenter la charge pour l'État et stigmatiser de façon totalement injuste, irrationnelle et, j'ose le dire, assez stupide, un enseignement de référence.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et LR.
Je lis les frais de scolarité de trois établissements privés : ceux de UniLaSalle à Beauvais s'élèvent à 8 500 euros l'année pour la première année de formation d'ingénieur ; ceux de Purpan, que je connais bien car j'ai été formée à l'école nationale supérieure agronomique de Toulouse (Ensat), établissement public situé à proximité, à 7 050 euros l'année ; ceux de l'école supérieure des agricultures (ESA) d'Angers, que je connais bien aussi – je salue au passage les collègues qui y travaillent –, à 7 000 euros l'année.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Mais si !
C'est une question d'égalité des chances – cela devrait être important pour vous. Pour ma part, je n'aurais jamais pu devenir ingénieure agronome si je n'avais pas eu accès à une formation publique, ou alors j'aurais dû travailler chez McDonald's pour financer mes études.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
J'espère que tous les enfants et adolescents en France pourront accéder à l'enseignement secondaire et à l'enseignement supérieur agricole public grâce au renforcement des postes et des moyens dans ce secteur.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Sandra Regol applaudit également.
Le débat a déjà eu lieu en commission : je crois que nous pouvons l'aborder de façon apaisée. J'ai passé de nombreuses années dans l'enseignement agricole public et je connais la contribution des maisons familiales rurales dans les territoires ruraux de Lorraine. Nous disposons de deux atouts importants en matière de formation dans le domaine de l'agriculture, de l'agronomie, des services et de l'animation rurale : les lycées d'enseignement agricole public et le secteur associatif non lucratif, en l'occurrence les maisons familiales rurales. Nous ne soutiendrons pas cet amendement car il est maladroit – il semble jeter l'opprobre sur certains.
Eh oui !
Je dénonce aussi la privatisation, en particulier de l'enseignement supérieur, qui crée une discrimination, mais mettre dans le même sac le maillage des maisons familiales rurales, avec leur pédagogie humaniste et leur ancrage territorial, c'est passer à côté du sujet. C'est bien grâce à cette tension positive entre le lycée d'enseignement professionnel public et les maisons familiales rurales que les jeunes des territoires ruraux ont la chance d'accéder au métier de paysan, et cette stimulation pédagogique est la bienvenue.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem. – M. Sébastien Jumel applaudit également.
Ce texte est assez faible si l'on considère les revendications des agriculteurs car il passe finalement à côté des sujets essentiels. Toutefois, il a au moins un mérite : il révèle, amendement après amendement, le sectarisme de l'extrême gauche.
Se saisir d'un projet de loi d'orientation agricole pour raviver la guerre entre enseignement public et enseignement privé, il fallait le faire !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
J'abonderai dans le même sens que ma collègue Annie Genevard. Les établissements privés comme les maisons familiales rurales jouent un rôle important en matière d'insertion professionnelle et de réussite des jeunes, qui sont parfois en difficulté. Ces structures, de statut associatif, qui accueillent les jeunes de la quatrième à la licence professionnelle, sont d'une grande utilité dans les territoires ruraux : elles mènent un travail exceptionnel grâce à l'implication de nombreux bénévoles – cela mérite d'être souligné.
Je croyais que la querelle entre enseignements privé et public était enterrée depuis longtemps.
Murmures sur divers bancs.
Je le croyais. En tout cas, tous ceux qui ont essayé de la rallumer ont échoué.
Notre jeune collègue, qui évoque les frais de scolarité de certaines écoles d'ingénieur agronome – leur liste n'est d'ailleurs pas interminable, nous l'avons reprise précédemment – devrait aussi donner les chiffres relatifs aux écoles de commerce. Voulez-vous aussi toutes les fermer, ma chère collègue ?
Et l'École nationale d'administration (ENA), savez-vous combien elle coûtait au contribuable ? Il faut savoir arrêter ce genre de débat. Attaquons-nous au seul et vrai problème, celui de l'éducation des jeunes.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LIOT et LR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 194
Nombre de suffrages exprimés 190
Majorité absolue 96
Pour l'adoption 25
Contre 165
L'amendement n° 2873 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 4388 .
Il faut ouvrir des places dans l'enseignement agricole, c'est une évidence : le défi du renouvellement des générations doit nous conduire à augmenter le nombre d'inscriptions dans les sections de formation agricole, publiques comme privées. Mais parce que l'enseignement agricole public est notre bien commun et fait partie intégrante de l'école de la République – ouverte à toutes et à tous sans distinction et sans la moindre barrière –, il doit constituer la priorité des politiques publiques. Nous proposons donc de conditionner le contrat territorial avec les établissements privés, prévu par l'article 4, à la conclusion d'un contrat territorial avec un établissement public.
Je vous rassure, chers collègues : il ne s'agit pas d'ouvrir une quelconque guerre scolaire, ni de mettre fin à l'enseignement privé, qui existe, joue son rôle et contribue à la formation agricole – nous avons d'ailleurs soutenu l'amendement en faveur des maisons familiales rurales –, mais simplement d'actionner un levier à la disposition de l'État, à savoir l'école publique gratuite et laïque. Renforcer l'enseignement agricole public nécessite une volonté politique et des moyens financiers. Le voulons-nous ? C'est la question que je pose au Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Vous proposez de conditionner la conclusion d'un contrat territorial avec un établissement privé à la conclusion préalable d'un contrat territorial avec un établissement public – du même territoire, j'imagine. J'y suis très défavorable. Cette conditionnalité ne tient pas compte de la structuration locale de l'offre publique et privée. De plus, elle ne fait que retarder artificiellement les contrats avec les établissements privés, car l'augmentation des besoins prévisibles est si forte qu'elle mobilisera tous les acteurs compétents.
Même avis.
Nous soutenons l'amendement du collègue Raux et abondons dans son sens. Je veux aussi répondre au collègue de Courson : nous sommes, comme lui, soucieux de l'éducation des jeunes, mais encore faut-il qu'ils puissent y accéder, ce qui n'est pas possible pour tous compte tenu des frais de scolarité dans l'enseignement privé – c'est bien le problème. Je suis peut-être encore jeune, sans doute moins jeune que vous ne le pensez, mais j'ai vingt ans d'expérience dans l'enseignement supérieur agronomique.
J'ai vu passer des milliers d'étudiants dans l'enseignement supérieur public agricole : beaucoup d'entre eux n'auraient jamais pu s'offrir l'enseignement supérieur privé agronomique. Je veux leur rendre hommage.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 4388 n'est pas adopté.
Il vise à assurer un contrôle de l'action du Gouvernement dans les contrats de plan régionaux, par une évaluation régulière du dispositif présentée par le ministre chargé de l'agriculture aux commissions compétentes du Parlement.
Vous proposez que tous les contrats territoriaux fassent l'objet d'un rapport d'évaluation présenté tous les deux ans aux commissions parlementaires compétentes.
S'il est important que les parties évaluent régulièrement le bilan des contrats territoriaux, il ne me semble pas pertinent de remonter des évaluations particulières au niveau parlementaire. Si le Parlement souhaite un bilan global du nouveau dispositif, il pourra utiliser ses pouvoirs de contrôle. Avis défavorable.
Il est curieux de vouloir évaluer les contrats de plan régionaux à l'échelon national. Convoquer le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire devant les commissions parlementaires pour en faire l'agrégation tous les deux ans nous ferait pencher, après le côté décentralisateur, du côté de l'extrême centralisation. En outre, nous finirions par passer notre temps en commission. Je ne doute pas que ce serait un grand plaisir, mais plutôt inefficace voire inutile. Avis défavorable.
Monsieur le ministre, ne dissimulez pas le plaisir que vous auriez à venir nous présenter l'évaluation en commission.
C'est vrai !
Nous avons déjà voté un amendement qui vous amènera à présenter une évaluation des objectifs énoncés à l'article 2. Nous pourrions faire d'une pierre deux coups, avec deux présentations successives, l'une relative à l'article 2, l'autre à l'article 4. L'amendement à l'article 2 a été voté par nos collègues du groupe Les Républicains, que j'invite à voter en faveur de ce nouvel amendement qui donne au Parlement le pouvoir de contrôler l'action du Gouvernement. C'est le parlementarisme, tout simplement.
L'amendement n° 2359 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 197
Nombre de suffrages exprimés 191
Majorité absolue 96
Pour l'adoption 171
Contre 20
L'article 4 est adopté.
Nous souhaitons que l'État lance une expérimentation d'une durée de trois ans dans trois régions, visant à la création d'un brevet de technicien supérieur agricole (BTSA) en agroforesterie – technique ancestrale qui associe les arbres à la production agricole et qui se pratique par la plantation de haies autour ou à l'intérieur de la parcelle. Cette pratique a d'indéniables bienfaits économiques, environnementaux et territoriaux. Pourtant, depuis 1950, 70 % des haies ont disparu des bocages français.
Il ne s'agit pas d'agroforesterie !
L'importance de la présence de haies et d'arbres est de plus en plus reconnue par le monde politique. En témoignent le lancement du plan national du développement pour l'agroforesterie en 2015, ainsi que le programme Plantons des haies ! dans le plan de relance de 2020, qui prévoyait d'ailleurs de replanter 7 000 kilomètres de haies dans la période 2021-2022. Cependant, ces différentes mesures se sont révélées insuffisantes. Une des causes de l'échec des politiques de protection des haies réside dans le manque de conseillers techniques spécialisés en agroforesterie au sein des chambres d'agriculture, qui s'explique par l'inexistence d'une formation spécifique à l'agroforesterie. Mon amendement vise à résoudre ce problème.
Je soutiens la proposition de ma collègue Anthoine qui vise à expérimenter un BTSA en agroforesterie. Je suis élu dans un département qui expérimente l'agroforesterie depuis trente-cinq ans. Pionnière, l'association Arbre et paysage 32 est une experte reconnue à l'échelle européenne, financée par la région Occitanie, le département du Gers et la fédération des chasseurs du Gers. Des haies sont plantées autour des parcelles, mais aussi au milieu des parcelles – c'est l'agroforesterie de plein champ.
Le retour d'expérience est intéressant, en matière de biodiversité, de qualité des sols et de rendement. Pour appuyer le pacte en faveur de la haie lancé par le Gouvernement en septembre dernier, doté de 110 millions d'euros et qui ambitionne de reconstituer 50 000 kilomètres de haies d'ici à 2030, il convient de disposer de techniciens qui accompagnent les territoires et les agriculteurs dans les plantations de haies. La création d'un BTSA en agroforesterie serait tout indiquée pour accompagner le déploiement des plantations de haies dont les financements sont prévus.
Vos amendements proposent d'expérimenter la mise en place de brevets de technicien supérieur agricole en agroforesterie dans trois régions. L'agroforesterie fait déjà partie des techniques agricoles durables promues par le ministère de l'agriculture. Le BTSA agronomie et cultures durables présente cette technique. L'association française de foresterie intervient dans les lycées agricoles et les écoles d'agronomie. Elle propose des formations de un à trois jours. Des guides sont publiés. Je ne crois pas, en revanche, qu'il soit nécessaire de créer des diplômes exclusivement consacrés à l'agroforesterie. Avis défavorable.
Mme Genevard a démontré tout à l'heure que l'agroforesterie et la question des haies ne sont pas des sujets identiques, s'agissant notamment des compétences et de la formation. Madame Anthoine, je partage votre point de vue sur l'importance de l'agroforesterie, mais je vous rappelle que des spécialités de BTSA permettent déjà l'acquisition de compétences dans ce domaine – Mme la rapporteure l'a rappelé. On peut citer le BTSA agronomie et cultures durables, le BTSA en gestion forestière et le BTSA ACS-Agri. La création de spécialités relève d'ailleurs du pouvoir réglementaire. Je partage donc votre souci d'accroître les compétences dans le domaine de l'agroforesterie, que je distingue – encore une fois – du sujet des haies. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Une fois n'est pas coutume, je soutiens un amendement d'une collègue du groupe Les Républicains, car il est excellent. Nous avons vraiment besoin d'une formation spécifique à l'agroforesterie. C'est dommage que cet amendement contredise certaines interventions d'autres collègues des Républicains ! Cet excellent amendement rejoint d'ailleurs l'excellent rapport d'information de ma collègue Manon Meunier qui a montré – avec d'autres, évidemment – que l'agroforesterie est particulièrement importante, notamment pour la biodiversité, mais aussi pour les fonctions agronomiques des exploitations agricoles.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je veux redire à quel point l'agroforesterie est une voie à explorer, pour plusieurs raisons. De nombreuses forêts sont touchées par des crises de scolyte, qui entraînent des coupes blanches. Au-delà du fait qu'elles sont très vilaines sur le plan paysager…
…il faut bien en faire quelque chose ? Replanter ou remettre en culture ?
L'agroforesterie est une piste intéressante pour mêler de la forêt et du pâturage, cependant, je dois vous dire, pour avoir suivi un dossier de conversion d'une coupe blanche en agroforesterie, que la démarche est terriblement compliquée sur le plan réglementaire, si bien que les agriculteurs ne savent pas comment se saisir du problème. Tout le monde convient que l'agroforesterie est une bonne chose, mais on ne sait pas comment faire.
Deuxième sujet relatif à l'agroforesterie : les aides de la Politique agricole commune (PAC). Un agriculteur qui veut promouvoir l'agroforesterie sur ses parcelles, croyant bien faire puisqu'elle est encouragée par les politiques publiques, se voit pénalisé en matière des aides de la PAC parce que tout ce qui relève de la forêt le fait sortir de ce dispositif. Cela donne lieu à des calculs d'apothicaire s'agissant par exemple des surfaces. Tout cela est très complexe.
On aborde des stratégies forestières qui vont bien au-delà de la question de la formation. C'est tout le problème de ce texte !
J'entends, monsieur le ministre, que des formations à l'agroforesterie existent déjà. Cependant, elles ne doivent pas être très efficaces parce qu'on n'y arrive pas sur le terrain. C'est pourquoi, comme le suggère l'amendement de ma collègue Emmanuelle Anthoine, la question de la formation doit être sérieusement approfondie.
Pour ma part, je suis un peu surpris que l'idée de l'agroforesterie, qui vient de l'extrême gauche – en ce sens, j'ai trouvé parfaitement cohérente l'intervention d'Aurélie Trouvé –, soit aujourd'hui défendue par le groupe Les Républicains.
Si on n'y arrive pas sur le terrain, madame Genevard, c'est parce que ce n'est pas faisable. L'agroforesterie ne consiste pas à mettre des haies autour des champs, mais à planter des rangées d'arbres au milieu des champs.
Je sais de quoi je parle, madame. Recherchez le terme « agroforesterie » sur Google : …
…vous verrez une petite moissonneuse entre deux rangées d'arbres, essayant péniblement de ramasser du blé qui ne peut pas pousser. Tous ceux qui connaissent un peu le monde agricole savent qu'un arbre au milieu d'un champ empêche les cultures de pousser autour de lui.
Il va falloir se réveiller, chers collègues ! Nous parlons de souveraineté alimentaire.
Sourires sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Les Ukrainiens que le Gouvernement veut faire entrer dans l'Union européenne, forts de leurs champs qui font des kilomètres de long et des milliers d'hectares, doivent bien se marrer en nous voyant nous tirer des balles dans le pied au nom de vieilles lunes de l'extrême gauche absolument incompatibles avec la souveraineté alimentaire !
M. Christophe Barthès s'exclame.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 5. La parole est à M. Bertrand Sorre, rapporteur pour avis.
L'article 5 vise un objectif très clair : faire émerger une formation de niveau bac + 3 pour répondre aux nouveaux besoins du monde agricole en matière de compétences et de professionnalisation. Compte tenu des aspirations et des besoins nouveaux des futurs agriculteurs, mais aussi de la société dans son ensemble, il est essentiel d'accompagner la montée en qualification du monde agricole.
Cette dynamique est d'ailleurs d'ores et déjà enclenchée. Si les agriculteurs restent moins diplômés que la moyenne de la population active, leur niveau moyen de diplôme a considérablement augmenté. Parmi les agriculteurs installés depuis 2010, 74 % ont suivi une formation de niveau baccalauréat et 44 % une formation supérieure ; pour les autres chefs d'exploitation, ces chiffres s'élèvent à 48 % et 22 %.
L'objectif de l'article 5 est donc d'accompagner et de soutenir ce mouvement de montée en compétence en généralisant la formation jusqu'au bac + 3. Celle-ci, en pratique, peut être assurée par la combinaison du BTS agricole et de la licence professionnelle agricole. Néanmoins, l'offre de licence professionnelle agricole paraît souffrir d'un manque de visibilité et de stabilité. Prenant acte de ce constat, l'article 5 vise à créer un nouveau diplôme national de niveau bac + 3. Cette formation repose sur le principe innovant de l'accréditation conjointe d'un établissement d'enseignement supérieur et d'un établissement technique, délivrée par le ministère de l'agriculture après avis conforme du ministre chargé de l'enseignement supérieur.
En commission des affaires culturelles et de l'éducation, nous avions affirmé notre soutien à l'article 5. Nous avions identifié quelques difficultés, mais nous nous réjouissons que les débats de la commission des affaires économiques aient permis d'y répondre. Ainsi, ma collègue corapporteure pour avis Géraldine Bannier et moi-même avions déposé en commission des affaires culturelles un amendement visant à étendre le dispositif de l'article 5 aux établissements d'enseignement supérieur agricole privés, dont le rôle et l'excellence sont reconnus dans les territoires. Je me félicite que la commission des affaires économiques ait adopté un amendement similaire. De même, nous nous étions interrogés sur le terme de « bachelor agro », qui pouvait susciter une certaine confusion ; là encore, le travail de la commission des affaires économiques a permis d'y remédier.
Je considère donc que l'article 5 est désormais totalement équilibré. Il répond à un besoin exprimé par les acteurs lors des auditions, et nous appelons donc à le voter en l'état.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
L'article 5 porte sur la création d'un diplôme national de premier cycle en sciences et techniques de l'agronomie ayant pour objectif l'insertion professionnelle dans les métiers de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Ce diplôme était initialement – et assez étrangement – intitulé « bachelor agro ».
Nous trouvons parfaitement légitime de vouloir rehausser le niveau académique des formations relatives aux métiers agricoles, pour adapter notre système de formation aux nouvelles problématiques du monde agricole. De ce point de vue, nous partageons les ambitions affichées par le Gouvernement. En revanche, nous sommes plus sceptiques quant à l'opportunité de créer un nouveau diplôme spécifique. Notre principale réserve réside dans le fait que la création d'un diplôme académique de référence de niveau bac + 3 risque de se faire au préjudice du BTSA, qui offre déjà une formation de qualité et qui a fait ses preuves pour ce qui est de former les jeunes aux métiers de l'agriculture.
Nous nous faisons ici l'écho des personnes auditionnées par la commission des affaires culturelles et de l'éducation. En effet, plusieurs représentants de syndicats agricoles nous ont alertés sur le fait que la création d'un nouveau diplôme ne résoudrait pas le problème de l'attractivité. Au contraire, cette formation risquerait de faire de l'ombre au BTSA, diplôme supérieur de référence dans la profession. Il ne nous paraît donc pas opportun de fragiliser ainsi l'enseignement supérieur agricole, alors que l'objectif est de le renforcer. C'est le sens des amendements que nous soutiendrons.
Avec l'article 5, nous baignons dans une atmosphère kafkaïenne. Depuis de nombreuses années, on demande à la communauté éducative de l'enseignement supérieur de se rapprocher des standards internationaux : licence, master, doctorat. Cela a conduit à réorganiser l'ensemble de l'enseignement supérieur pour coller à ce schéma. Or des licences professionnelles existent dans l'enseignement supérieur agricole : en 2023, on en comptait 176 en France. Il serait donc logique que le Gouvernement, s'il faisait preuve de bon sens, appelle à renforcer ces licences professionnelles. Pas du tout ! Il nous pond un « bachelor agro » !
Nous avons heureusement repoussé cette appellation en commission des affaires économiques, en nous appuyant sur l'avis du Conseil d'État. Pour ma part, en vingt ans d'enseignement supérieur agronomique, je n'avais jamais entendu parler d'un « bachelor agro » : il m'a fallu venir à l'Assemblée nationale pour le découvrir dans le cadre d'un projet de loi.
Bref, après cet épisode kafkaïen, nous avons abouti à un « diplôme national de premier cycle en sciences et techniques de l'agronomie », ce qui, de notre point de vue, frise le ridicule, d'autant qu'on ne sait même pas si ce diplôme conférera le grade de licence. Il nous semble beaucoup plus raisonnable de supprimer l'article et de diriger les moyens publics vers les licences professionnelles afin d'améliorer leur visibilité et leur financement – puisque c'est sur ces points qu'on les critique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Pardonnez cette entorse, mais je tiens à revenir sur un amendement que j'avais déposé après l'article 4 et qui, à mon grand regret, a été déclaré irrecevable. Il visait à créer, dans les lieux où cela est pertinent, un centre unique assurant à la fois la formation par apprentissage et la formation continue. Cette entité se serait caractérisée par une taille critique renforcée, par sa cohérence de pilotage et par sa gestion plus facile.
Revenons à l'article 5, qui tend à créer un « bachelor agro ». En prenant connaissance du projet de loi initial, je m'étais émue que les établissements privés ne soient pas pris en considération, chère collègue Trouvé. Je me réjouis donc que la commission des affaires économiques ait rétabli une forme d'égalité de traitement entre établissements publics et privés s'agissant des formations d'ingénieur, de paysagiste, de vétérinaire, de technicien supérieur ou encore d'agronome, et que la possibilité ait été donnée aux établissements publics de conclure une convention avec des établissements privés. Je pense que c'est une bonne chose.
Comme l'a dit mon corapporteur pour avis, Bertrand Sorre, l'article 5 constitue une évolution qu'il convient de saluer. Il doit permettre de promouvoir les formations de niveau bac + 3, car celles-ci ont vocation à devenir une référence en matière d'installation et de conseil.
La généralisation des formations bac + 3 sert l'objectif de montée en compétence des actifs agricoles, qui font face à des défis de plus en plus complexes nécessitant des compétences nouvelles, tant agronomiques que managériales, entrepreneuriales ou technologiques. L'acquisition de ces compétences constitue un enjeu central pour accompagner les transitions en cours du monde agricole, au premier rang desquelles la transition agroécologique.
Ce nouveau diplôme doit aussi permettre la diversification des profils des jeunes agriculteurs. Cela est essentiel pour répondre à l'évolution de la sociologie du monde agricole et pour attirer des publics nouveaux dans ces beaux métiers du vivant. La formation pourra ainsi accueillir des jeunes ayant suivi une formation bac + 2 autre que le BTS agricole. Cela n'empêchera évidemment pas le BTSA de rester au cœur du système de formation des actifs agricoles : il aura une place prépondérante dans le cadre du nouveau diplôme, ce dont nous nous félicitons.
Je souhaite saluer les évolutions issues des travaux de la commission des affaires économiques, qu'il s'agisse de l'élargissement du dispositif à l'enseignement supérieur privé ou de la clarification ayant conduit à supprimer le terme « bachelor ». En tant que députée de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, ce dernier point me tient à cœur ; on voit désormais fleurir des bachelors en tout genre, proposés notamment par l'enseignement supérieur privé à but lucratif – cela va faire plaisir à nos collègues de gauche –, sans qu'aucune garantie de qualité n'y soit attachée. Il est très important d'améliorer la visibilité des formations proposées aux jeunes étudiants, ce qui passe par une clarification des intitulés utilisés. C'est pourquoi nous devons écarter l'utilisation du terme « bachelor ».
Bien sûr, cela ne remet pas en cause la pertinence de la création de ce nouveau diplôme bac + 3, essentiel pour la montée en compétence et dont les référentiels devront être précisés par voie réglementaire. Je soutiens avec conviction l'article 5. Je remercie Mme Trouvé : elle a en quelque sorte invité tout le monde à relire Kafka pour chercher le rapport qu'il pourrait bien y avoir avec notre débat – pour ma part, je ne le vois pas !
L'article 5 permet de sanctionner l'atteinte du niveau bac + 3 par un diplôme. En effet, un jeune embrassant des études agricoles peut certes se tourner vers les licences professionnelles, mais celles-ci ne sont pas officiellement reconnues. Un jeune diplômé de l'enseignement supérieur agricole se voit attribuer soit le brevet de technicien supérieur, soit le diplôme d'ingénieur. Il me paraît bon que les jeunes souhaitant poursuivre leurs études après le BTS voient leur troisième année d'études sanctionnée par un diplôme – une licence – officiellement reconnu par l'État et par le ministère de l'agriculture.
Le groupe Horizons et apparentés a déposé un amendement visant à dénommer ce diplôme « licence professionnelle agricole ».
Par ailleurs, nous souhaitons que les établissements de proximité – je pense aux établissements publics ou privés, mais aussi aux maisons familiales rurales – puissent être accrédités pour délivrer cette licence. En effet, les études supérieures s'effectuent aujourd'hui quasi exclusivement dans les grandes métropoles, ce qui éloigne les jeunes des villes moyennes et des territoires ruraux – et cela rend leur rapatriement difficile. En accréditant les établissements de proximité situés dans les villes moyennes – lycées publics, lycées privés, maisons familiales rurales, établissements d'enseignement supérieur –, nous nous assurerons que les jeunes des territoires ruraux aient accès à ces formations.
Enfin, le débat opposant l'enseignement public et l'enseignement privé est une spécificité française. Je viens d'une région, la Bretagne, où l'enseignement privé est très présent.
M. Marc Le Fur s'exclame.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs des groupes RE, LR, Dem et LIOT.
Dans l'histoire de la V
Je me réjouis que le mot « bachelor », produit d'une novlangue décalée et absent du vocabulaire reconnu par l'éducation nationale, ait été retiré, le Conseil d'État ayant recommandé de se séparer de cette mauvaise référence. La commission a été sage de supprimer ce terme, d'autant qu'il ne correspond pas à la culture du monde agricole, où jamais personne ne parle de bachelor.
En revanche, nous partageons l'objectif politique affiché de monter en qualification, grâce à une licence professionnelle agricole –– je pense qu'il faudra conserver cette appellation et je souscris à l'amendement défendu par le groupe Horizons sur ce sujet.
Enfin, je suis député communiste et je suis donc par essence attaché à l'enseignement public. Cependant, je pense que, dans le monde agricole, réveiller la guerre de religion n'a pas de sens ; il faut prendre en compte la spécificité de ce monde. C'est comme si, dans le champ du handicap, on reprochait à l'Unapei – Union nationale des associations de parents de personnes handicapées mentales et de leurs amis – ou à l'Apajh – Association pour adultes et jeunes handicapés – d'avoir pallié la défaillance publique pour prendre en considération les enfants en situation de handicap.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Il faut savoir reconnaître cette spécificité de l'enseignement agricole, d'autant qu'il s'agit d'établissements conventionnés et donc contrôlés par la puissance publique. Permettre aux lycées privés d'offrir cette formation diplômante ne me semble pas poser un problème.
Je conclus brièvement : je partage aussi l'idée du maillage territorial de l'offre de formation en licence professionnelle à partir des villes moyennes, car cela permet aux mômes de chez nous de se former mieux.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
L'article 5 est important. D'abord, plusieurs d'entre vous l'ont dit, il répond à un besoin exprimé par des jeunes et par des établissements lors des concertations et énoncé dans le pacte d'orientation et d'avenir pour le renouvellement des générations en agriculture. MM. Benoit et Jumel l'ont dit, il y a une demande de reconnaissance de ce niveau de formation. Les établissements le demandaient, d'autant que les BTS et les BTSA perdent en attractivité : alors que les effectifs de l'enseignement agricole sont stables, ceux des BTS et des BTSA diminuent plutôt. En revanche, il y a une forte demande pour les formations délivrant un diplôme de niveau bac + 3, dont les effectifs augmentent. Il n'y a donc là rien de kafkaïen ni de compliqué : nous répondons simplement à cette demande. Le diplôme aura le grade de licence ; il est conforme au cahier des charges du ministère de l'enseignement supérieur.
Ensuite, comme l'ont aussi souligné plusieurs orateurs, des remarques sur la terminologie ont été faites par la commission. Monsieur Jumel, je ne suis pas sûr que cela relève de la novlangue, car de nombreuses personnes utilisent le terme de « bachelor ».
Ce n'est pas entièrement nouveau. Nous sommes de la même génération, vous devriez écouter autour de vous. Vous n'avez pas découvert le terme « bachelor » quand nous avons abordé ce sujet en commission.
Sourires.
Je comprends en revanche que vous ne soyez pas d'accord avec le choix de ce terme. J'ai pris acte de ce qui a été dit par la commission et de la nécessité de retenir une terminologie plus conforme à celle qui est adoptée dans d'autres formations. Néanmoins, certains instituts universitaires de technologie (IUT) portent le nom de bachelor universitaire de technologie (BUT). Ne racontons donc pas d'histoires, le terme « bachelor » existait déjà. Cependant, la nouvelle terminologie me paraît bonne.
Ensuite, ce diplôme vise à développer des compétences techniques d'excellence et des connaissances académiques. Je donnerai un avis favorable à l'amendement qui vise à préciser les domaines particuliers dans lesquels les jeunes seront formés.
Enfin, nous avons évoqué en commission l'intégration des établissements d'enseignement privé. C'est une bonne chose, car nous avons besoin de conforter le maillage territorial en nous appuyant sur les petites villes et les villes moyennes. Or une des grandes forces des établissements agricoles est leur présence dans des territoires dans lesquels il y a peu d'établissements d'enseignement. Il aurait été dommage de ne pas intégrer l'enseignement privé, ce qui a été fait par voie d'amendement en commission.
Il est rare que M. Jumel et moi soyons d'accord, mais je ne peux que le rejoindre lorsqu'il reconnaît le fait que, historiquement, un équilibre s'est constitué entre enseignement agricole public et privé. Nous n'avons nulle intention d'ouvrir des guerres qui n'ont jamais existé entre les deux, et d'ailleurs nous n'aurions aucun intérêt à le faire. Les agents qui travaillent dans l'enseignement agricole public et ceux qui travaillent dans l'enseignement privé ont également trouvé un équilibre ; nous, responsables politiques, ne sommes pas là pour réveiller des guerres qui n'existent pas entre eux. Il y a assez de difficultés entre d'autres secteurs pour que nous n'en créions pas là où il n'y en a pas. L'équilibre que nous avons trouvé en commission doit être préservé ; il permet à l'enseignement privé d'offrir ces formations sans dénaturer les choses.
L'article 5 complète le dispositif de formation et répare un trou dans la raquette des diplômes auxquels pouvaient accéder les jeunes. Monsieur Jumel l'a dit : la montée en compétence est nécessaire et contribue à l'attractivité des métiers agricoles.
La parole est à M. Loïc Prud'homme, pour soutenir l'amendement n° 2886 , tendant à supprimer l'article 5.
Oh, je fais des efforts, pourtant !
Personne ne nous avait demandé d'instaurer un bachelor. Vous avez vous-même plaidé notre cause : il existe déjà 176 licences professionnelles qui impliquent au moins un établissement d'enseignement technique agricole en partenariat avec un établissement public. La question de la reconnaissance posée par M. Benoit est pertinente. Il suffisait donc de reconnaître ces licences à leur niveau et la question était réglée, mais ce n'est pas là votre objectif.
Ensuite, dans le titre de ce projet de loi figure le « renouvellement des générations ». Or, en fait, hormis le premier diplôme agricole, la capacité professionnelle agricole (CPA), pour bénéficier d'une installation aidée, il faut avoir au moins un diplôme de niveau 4, c'est-à-dire un brevet de technicien agricole (BTA) ou un bac pro. Pour remplir l'objectif de renouvellement des générations et d'installation, il faudrait donc commencer par mettre le paquet sur ce niveau-là, toutefois vous avez refusé, lors des débats sur l'article 1er , de lui consacrer les moyens en enseignants nécessaires .
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
Vous refusez donc de pourvoir au premier niveau qui est pourtant important et qui fournit les cohortes des étudiants en licence professionnelle. Et alors qu'il suffirait de reconnaître les licences pro en leur faisant signer une convention pour qu'elles comblent le trou dans la raquette que vous avez dénoncé vous-même, vous ne le faites pas. Finalement, vous créez une usine à gaz.
En outre, l'étude d'impact du projet de loi soutient que les développements de ce diplôme « ne devraient […] pas induire de coût budgétaire significatif » car ils ont vocation à se réaliser sur le modèle de l'apprentissage ou, bien que ce ne soit pas clairement exposé, dans l'enseignement supérieur privé. Le coût des études est donc à la charge des étudiants et de leur famille et, dès lors qu'ils n'en ont pas les moyens, ils devront donc s'endetter pour être formés. Je rappelle, chers collègues, que le salaire médian en France est de 2 100 euros.
Je conclus très rapidement : les familles dont les revenus correspondent au salaire médian devraient s'endetter à hauteur de quatre mois de salaire pour inscrire leur enfant dans une école dont les frais d'inscription s'élèvent, comme le rappelait Aurélie Trouvé, à 8 000 ou 10 000 euros.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. Pascal Lavergne, rapporteur de la commission des affaires économiques pour les articles 5 à 7 bis et 13 à 20, pour donner l'avis de la commission.
Avant de donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 2886 , je voudrais d'abord saluer Mme la rapporteure Nicole Le Peih qui, depuis mercredi dernier, a tenu cette tranchée.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.
Nul ne peut douter de son intérêt pour l'agriculture, qui a été son métier. Merci, madame la rapporteure, pour le moment que nous avons passé ensemble.
Monsieur Prud'homme, je vais vous décevoir : l'avis de la commission sur cet amendement de suppression est évidemment défavorable. Nous souhaitons donner un peu plus de lisibilité aux formations agricoles. Nous sommes de bons observateurs de terrain et nous avons constaté l'existence d'une demande en ce sens. La consultation a également montré que les territoires et les centres de formation le demandent.
Je paraphraserai un film célèbre, La Traversée de Paris : où est-ce que vous allez chercher tout ça ? Votre camarade Lénine n'aurait pas dit mieux : « Les faits sont têtus. »
M. Benoit Mournet applaudit.
Nous essayons de répondre à des besoins exprimés par les établissements, les élèves, les territoires, en somme par tout le monde sauf par vous, dont acte.
Pour prétendre que cet article ouvre la voie à la privatisation de l'enseignement agricole et proposer de le supprimer, il faut vraiment aller chercher loin vos arguments.
Brouhaha.
Monsieur Prud'homme, ne cherchons pas de querelles là où il n'y en a pas. Où y a-t-il une volonté de privatiser l'enseignement agricole supérieur ?
Ce n'est pas du tout l'objet de cet article. Son objet est d'offrir un diplôme correspondant aux attentes des jeunes ainsi que des établissements et de rendre attractif l'enseignement agricole.
L'avis du Gouvernement est donc défavorable.
Je suis résolument opposé à ce qu'a soutenu M. Prud'homme, qui parle de « privatisation ». Il se trouve que je suis élu en Bretagne. Si celle-ci est la première région agricole de France et une des premières d'Europe, c'est largement dû à la formation des agricultrices et des agriculteurs. Or cette formation a majoritairement été assumée par l'enseignement privé catholique sous contrat, qui a donné totalement satisfaction. Les lycées La Ville Davy, Pommerit à La Roche-Jaudy, Le Nivot, La Touche ou Xavier-Grall, avec les MFR et avec d'autres établissements, concourent ainsi à la formation des agriculteurs.
Si nous assurons la formation et des perspectives de revenus correctes, des jeunes s'installeront. Pour avoir échangé avec eux, je peux vous dire que non seulement tous ces établissements sont disposés à délivrer un diplôme à bac + 3, dont le nom reste à définir, mais aussi qu'ils le feront très bien. Le corps enseignant et les cadres de ces établissements sont pleinement motivés. Saisissons donc cette chance.
C'est pourquoi je vous invite très clairement à rejeter l'amendement n° 2886 de M. Prud'homme sur la privatisation.
Je suis favorable à l'amendement de Loïc Prud'homme, qui tend à supprimer l'article 5. Créer un nouveau diplôme national de premier cycle en sciences et techniques de l'agronomie, pourquoi pas ? Nous n'y étions pas opposés, s'il s'agissait de participer à l'élévation du niveau de diplôme et de contribuer à la poursuite d'études. Cela ne semble pas être l'objectif.
Le projet de loi initial voulait donner le nom de bachelor à ce diplôme, preuve d'un certain confusionnisme – mélangeant diplômes nationaux reconnus par l'État et créations maison de l'enseignement supérieur privé. Nos alertes, dont l'écho a porté jusque dans les rangs de la majorité, ont permis de supprimer cette dénomination. L'intention cachée derrière un nom est désormais clairement énoncée : ce nouveau diplôme est le terreau du développement de l'enseignement supérieur agricole privé.
« Eh oui ! » sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Le mariage du Gouvernement avec la droite l'a conduit a accepté de déréguler les procédures de délivrance des diplômes au profit du privé : dérogations au droit commun, conventions de coopération entre établissements publics et établissements privés, au détriment des premiers évidemment. Vous avez choisi vos partenaires ; certains propos que vous avez tenus ce soir l'indiquent clairement ; dont acte.
Ce n'est pas là notre vision de l'enseignement supérieur – c'est valable pour l'agriculture comme dans les autres domaines. Nous défendons un enseignement supérieur public accessible et gratuit, partout sur le territoire. Notre position ne repose ni sur des caricatures ni sur des réflexes pavloviens, mais sur une ligne et des convictions politiques.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES.
Si je ne crois pas que l'article 5 soit l'occasion de raviver la guerre scolaire, même si certains veulent s'y livrer, nous aimerions, monsieur le ministre, que vous nous expliquiez à quoi il sert.
Pour l'instant, nous ne le comprenons pas bien. M. le rapporteur a soutenu qu'il répondait à une demande du terrain. Pour ma part, je n'ai pas entendu la même chose : j'ai entendu des agriculteurs se demander pourquoi ils devraient faire une année d'études supplémentaire si c'est pour gagner aussi peu qu'actuellement, dès lors que vous n'êtes pas capables de régler la question de la rémunération. En outre, s'il s'agit simplement d'améliorer la visibilité d'un diplôme qui existe déjà, je ne vois absolument pas l'intérêt de passer par un projet de loi.
Vous avez l'occasion de vous expliquer mais, à ce stade, nous pensons que vous êtes encore une fois dans une posture de communication : il vous fallait un article de plus dans un projet de loi qui reste désespérément vide.
Nous voterons contre l'amendement de suppression car nous voulons vous laisser le temps de nous apporter des réponses claires. Toutefois, il est hors de question que nous participions à ce qui s'apparente, je le répète, à une opération de communication pour essayer de présenter un bilan grâce à ce projet de loi. Décidément, cela ne fonctionnera pas.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 147
Nombre de suffrages exprimés 145
Majorité absolue 73
Pour l'adoption 27
Contre 118
L'amendement n° 2886 n'est pas adopté.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous retourner la question : mais où allez-vous chercher tout ça ?
M. René Pilato applaudit.
Avec mon cher collègue Lavergne, j'ai présidé le groupe de suivi relatif à la préparation de la loi d'orientation agricole. Les représentants d'établissements que nous avons reçus m'ont fait part de leur grand scepticisme à l'égard de ce « bachelor agricole ». Certes, j'avais déjà entendu parler du bachelor, mais c'était dans le cadre d'une émission de téléréalité, et non pas dans l'enseignement supérieur agricole public, ni quand j'enseignais à AgroSup Dijon ni quand c'était à l'Agro de Paris.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Cyrielle Chatelain applaudit également.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
J'en arrive à un sujet plus sérieux, la liberté de choix. Vous réclamez la liberté de choisir entre l'enseignement public et l'enseignement privé, mais il faut surtout la liberté d'accéder à l'enseignement. C'est bien là qu'est le problème. Comme le disait le collègue Prud'homme, pensez au salaire moyen ou médian d'un Français. Prenez un de mes étudiants de 18 à 20 ans, dont le papa ou la maman est au Smic. C'est le cas de 2 millions de Français qui gagnent donc 1 400 euros net par mois. C'est bien trop peu, évidemment, et c'est pourquoi la France insoumise demande une augmentation du Smic.
Mme Manon Meunier applaudit.
L'inscription à l'UniLaSalle de Beauvais coûte 8 500 euros. Combien faut-il de mois de salaire pour payer l'année d'inscription ? Sept à huit mois. Qui peut se le permettre ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Cyrielle Chatelain applaudit aussi.
Ce n'est pas une question de guerre ou de haine ; nous sommes animés par des idéaux et des convictions profondes de justice sociale. L'égalité des chances entre les enfants et entre les adolescents, cela devrait vous animer aussi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous demandons la suppression des alinéas 2 et 3 qui ont été introduits en commission afin de favoriser l'école privée, vous l'avez dit vous-mêmes en défendant cet amendement en commission.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 4391 .
Si la création de ce nouveau diplôme peut répondre à la demande et contribuer à la poursuite d'études en agriculture, même si de nombreuses licences professionnelles et agricoles existent déjà, elle ne doit pas constituer une porte ouverte au développement de l'enseignement supérieur agricole privé. Il convient de préserver la dispense du diplôme national de premier cycle en sciences et techniques de l'agronomie dans les établissements publics d'enseignement supérieur.
La position des écologistes est claire : non, nous ne voulons pas de l'enseignement supérieur privé comme modèle ; oui, nous défendons un enseignement supérieur agricole public de qualité, accessible sans distinctions ni barrières financières et assuré par des professionnels compétents. L'enseignement public peut assurer le renouvellement des générations si on lui donne les moyens de le faire, et, bien sûr, si on ne le sabote pas avec des conventions public-privé.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Si j'étais taquin, madame Trouvé, je dirais que vous regardez peut-être un peu trop la télévision privée qui diffuse l'émission « Bachelor ».
« Ah ! » sur quelques bancs des groupes RE et LR. – Mme Aurélie Trouvé sourit.
Le « bachelor agricole » n'apparaît plus dans le texte de loi, car nous avons trouvé un autre titre en commission.
Votre amendement maintient simplement en l'état le dispositif de l'article L. 812-4 du code rural qui autorise les conventions de coopération avec tous les établissements d'enseignement supérieur privés, quels qu'ils soient. Sans obtenir le résultat que vous souhaitez, nous perdrions donc le recentrage sur les établissements liés au ministère de l'agriculture et l'élargissement aux formations vétérinaires, dont nous manquons cruellement. Avis défavorable.
Pour vous répondre, ainsi qu'à votre collègue de Fournas, permettez-moi de répéter ce que j'ai dit tout à l'heure. À mon arrivée au ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, j'ai rencontré des directeurs d'école et des syndicats d'enseignants et j'ai participé à des auditions au Sénat ou à l'Assemblée nationale. Tous ces échanges ont montré la nécessité d'un diplôme de ce niveau.
Vous dites qu'il existe déjà 176 parcours, c'est vrai, mais il y a un problème car, depuis cinq ans, ces licences ont perdu en attractivité. De plus, selon les acteurs de la vie agroalimentaire, il est difficile de s'y retrouver parmi ce grand nombre de parcours : une offre plus uniforme et plus lisible est nécessaire. Nous répondons donc bien au besoin exprimé par les enseignants, les écoles, les élèves, les acteurs agricoles et agroalimentaires.
Vos amendements visent à supprimer les alinéas ajoutés en commission. Pourtant, nous avons trouvé le bon équilibre qui consiste à permettre aux établissements d'enseignement privé de délivrer ce diplôme dans les conditions que vous connaissez et qui ont été exposées en commission. Cet équilibre se situe dans la continuité de l'esprit de la loi dite Debré du 31 décembre 1959 et de la loi du 31 décembre 1984, dite loi Rocard. Avis défavorable.
Nous voyons bien qu'il s'agit d'un amendement de repli de notre collègue Trouvé, qui revient sempiternellement sur les querelles scolaires. On croirait entendre les discours d'Alain Savary dans les années 1980.
Mme Aurélie Trouvé sourit.
Vos arguments donnent l'impression d'assister à une réunion d'Attac. Je sais que vous y avez milité et que vous y avez eu des responsabilités…
…mais il faut sortir de cette posture. Ici, nous défendons la complémentarité entre le public et le privé qui a fait ses preuves dans nos territoires. Je crois en la liberté de choix et rappelle que la liberté de l'enseignement est constitutionnelle, elle est reconnue par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Laissez donc un peu respirer les droits fondamentaux et le choix de nos concitoyens !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Puisque vous me tendez la perche, permettez-moi de dire que je suis très fière d'avoir été la présidente d'Attac durant quinze ans.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
J'ai aussi été enseignante-chercheuse, durant vingt ans, au ministère de l'agriculture.
Exclamations sur les bancs des groupes LR, Dem et HOR.
Vous l'avez déjà dit !
Eh oui, je n'ai pas été élue toute ma vie. Comme beaucoup d'entre vous, j'ai eu une vie professionnelle avant.
« Nous aussi ! » et vives exclamations sur les bancs des groupes RE, Dem et LR.
Je suis aussi très fière d'être membre de l'Académie d'agriculture de France. Cette institution fait la différence entre le militantisme, d'une part, et la profession et le professionnalisme, d'autre part.
Venons-en aux détails. Monsieur le ministre, vous citez les syndicats de l'enseignement. Il se trouve que le Syndicat national de l'enseignement technique agricole public fait partie des inspirateurs de la suppression des alinéas 2 et 3. Les syndicats de l'enseignement agricole sont donc de notre côté.
Il s'agit d'un seul syndicat !
Ces alinéas ne figuraient pas dans la version initiale du texte. Ils ont été proposés par Les Républicains, dans le cadre de vos petits conciliabules destinés à faire voter votre projet de loi par ce groupe, comme nous le craignons.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Cyrielle Chatelain applaudit également.
Je m'étonne de ces réflexions sur le bachelor, ou plus généralement sur ce type de formation à bac + 3. Certes, ces formations viennent des pays anglo-saxons, mais elles sont aujourd'hui très répandues et développées par les chambres consulaires. Par exemple, il en existe à Sciences Po et à l'École des hautes études commerciales (HEC). Ces formations sont très demandées par les étudiants, parce qu'elles reposent sur un accompagnement fort, un grand nombre de stages et du travail de projet en petits groupes. Je ne comprends donc pas pourquoi ce dispositif est dénigré.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 149
Nombre de suffrages exprimés 148
Majorité absolue 75
Pour l'adoption 26
Contre 122
Quel que soit le nom final de ce diplôme – bachelor, bac + 3, brevet d'enseignement supérieur –, la profession agricole a besoin d'être reconnue par une formation. Madame Trouvé, vous nous demandez de penser à l'égalité des chances – quel grand slogan ! Mais l'égalité des territoires, qu'en faites-vous ?
En réalité, s'il n'y avait pas d'enseignement privé, si les MFR n'existaient pas, il n'y aurait aucun accès à la formation supérieure dans nos territoires.
« Elle a raison ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Il n'est pas suffisant de passer une convention et de donner la possibilité de conventionner à nos établissements privés : ils doivent avoir un accès direct à la formation supérieure que constitue le nouveau diplôme.
L'enseignement privé n'est pas un vilain mot. Il est complémentaire de l'enseignement public. Ne reprenons pas les débats de 1983, ils sont terminés depuis longtemps.
M. Marc Le Fur applaudit.
Aujourd'hui règne un apaisement certain ; il y a une complémentarité dans la formation. Laissons le libre choix à chaque acteur.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Henri Alfandari applaudit également.
La parole est à M. Benoit Mournet, pour soutenir l'amendement n° 1281 .
L'article 5 répond au besoin de compétences pour gérer des exploitations agricoles. Je souhaite que ce « bachelor agricole » soit renommé « licence agricole » et je soutiens l'amendement du groupe Horizons. Permettez-moi de saluer le travail formidable de nos lycées agricoles – je pense bien sûr au lycée de Vic-en-Bigorre. Ces établissements peuvent fournir une formation supérieure. Cette licence professionnelle doit donc être reconnue comme une licence universitaire. Ensuite, pourquoi limiter le diplôme à l'enseignement public ? Les chambres d'agriculture nous ont signalé cette limitation dans le texte initial. L'amendement vise donc à étendre la licence agricole à l'enseignement privé.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Madame Trouvé, en aucun cas, il ne faut opposer le public et le privé. Vous n'avez cessé de répéter que vous étiez enseignante, je le suis aussi, même si je ne le dis pas. Je vis les mêmes choses que vous.
Quel que soit son nom, ce diplôme doit pouvoir être validé dans un établissement public ou privé.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Sandra Marsaud applaudit également.
Ces amendements identiques autoriseraient seulement les établissements d'enseignement supérieur privés à passer une convention de coopération avec des établissements d'enseignement supérieur publics, afin de fournir des formations débouchant sur des diplômes de niveau bac + 2. Vos amendements n'apportent donc rien que les établissements privés ne puissent déjà faire sans passer une convention de coopération, qui n'a vocation qu'à organiser la collaboration entre public et privé. Avis défavorable, sinon demande de retrait.
Nous devons maintenir l'équilibre trouvé en commission des affaires économiques, conformément à la longue tradition d'équilibre entre les établissements d'enseignement agricole publics et privés. Après l'avis favorable du Gouvernement, la commission des affaires économiques a accepté l'idée que les écoles privées associatives puissent être accréditées pour délivrer ce diplôme. S'agissant d'un diplôme national, la commission a prévu des conditions particulières de contrôle des connaissances et des aptitudes. Il ne convient donc pas d'y revenir, à moins de déstabiliser l'édifice que nous nous sommes efforcés de construire. La demande d'intégration des écoles privées ayant été satisfaite, restons-en à ce qui a été voté en commission. Avis défavorable.
Pour terminer notre séance de ce soir sur une note humoristique, ou presque, sachez que je me suis enquise de l'étymologie du mot « bachelor » – et c'est très intéressant : alors que tout le monde y a vu un anglicisme, voire un américanisme, ce mot vient en réalité… du moyen breton, cher Marc Le Fur !
Sourires.
Ça, ce n'est pas de la novlangue !
…qui a donné son nom à notre baccalauréat, le terme « bacheler », lui-même emprunté à l'ancien français « bachelor », désignait un jeune gentilhomme, un aspirant chevalier.
Comme vous le constatez, ce terme est donc bien français. Peut-être serait-il donc opportun de réviser votre position, chère Géraldine Bannier, d'autant que notre objectif est d'attirer des jeunes, et qu'il se trouve que ce terme leur plaît.
Il faut dire que c'est un peu plus sexy que « diplôme national de premier cycle en sciences et techniques de l'agronomie » !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe RE.
Ce n'était pas un cours !
…je ne voudrais pas qu'on en oublie la volonté délibérée des macronistes, des Républicains et de l'extrême droite de développer des formations privées pour faire concurrence à l'enseignement agricole public – on a entendu le mot « complémentarité ».
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nos collègues du groupe LR prétendent soutenir le développement de l'enseignement privé au motif qu'il n'y a pas partout des établissements publics, mais on ne résout pas ce problème en développant partout l'enseignement privé : on y répond en développant des établissements publics partout !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous justifiez le développement de l'enseignement privé par la destruction du service public de l'enseignement que vous avez vous-mêmes commise, puisque ce sont les gouvernements de votre famille politique – je pense en particulier à l'époque de M. Sarkozy – qui l'ont particulièrement saccagé, dans toutes ses dimensions.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Dans l'agriculture comme dans les autres domaines, le développement de l'enseignement privé ne se fait qu'au prix d'une concurrence déloyale avec l'école publique, en particulier grâce au choix des élèves et aux frais de scolarité réclamés qui avoisinent 8 000 euros par an. Une école à 8 000 euros, ce n'est pas une école pour le peuple français, mais une école pour une minorité : vous défendez le séparatisme des riches, telle est la réalité !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Et si guerre scolaire il y a, ce n'est pas nous qui la menons, mais bien l'école privée contre l'école de la République !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Protestations sur les bancs du groupe Dem.
Prochaine séance, cet après-midi, à quatorze heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la discussion du projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture.
La séance est levée.
La séance est levée, le mercredi 22 mai, à zéro heure cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra