La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a examiné la proposition de loi visant à protéger la population des risques liés aux substances per- et polyfluoroalkylées (n° 2229) .
(M. Nicolas Thierry, rapporteur)
Nous examinons ce matin la proposition de loi visant à protéger la population des risques liés aux substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) qui sera discutée en séance publique le jeudi 4 avril, dans le cadre de la journée de niche du groupe écologiste.
Je suis heureux de vous soumettre une proposition de loi sur les PFAS, ces substances que vous connaissez peut-être mieux sous le nom de polluants éternels. Commençons avec un constat éloquent : il y a un peu plus de cinquante ans, cette réunion n'aurait pas eu de sens. Les substances dont nous allons discuter, ces molécules constituées de carbone et de fluor, sont le produit, extrêmement récent à l'échelle de l'humanité, de la créativité de quelques industriels du XXe siècle. Nos parents ou nos grands-parents ne risquaient pas, dans leur jeunesse, de trouver dans le commerce une poêle, un imperméable ou un rouge à lèvres garnis de PFAS. Ils avaient pourtant toutes et tous le loisir de cuisiner des omelettes, de marcher sous la pluie ou de se maquiller. Garder ce constat à l'esprit nous permettra d'aborder sereinement nos débats et d'examiner avec un regard plus aiguisé les dispositions que j'ai l'honneur de soumettre à votre sagacité.
Le terme de PFAS désigne un ensemble de familles de substances chimiques qui regroupent chacune plusieurs combinaisons d'atomes que l'on ne trouve pas à l'état naturel. Il existe aujourd'hui environ 12 000 de ces polluants éternels. Ils ont en commun une chaîne d'atomes de carbone et de fluor qui leur confère des propriétés très recherchées dans l'industrie. Les PFAS sont stables sous de très fortes chaleurs, imperméables, repoussent les graisses et ont des propriétés antitaches et antiadhésives – chacun pensera à certaines poêles de cuisson, mais il y a des centaines d'autres exemples.
Le revers de ces qualités, c'est que ces composés ne se dégradent pas, ou très peu, dans l'environnement. Ils s'infiltrent dans les sols, dans l'eau, dans l'air et dans les tissus organiques – ceux des hommes, des animaux et des plantes. Les PFAS sont donc à l'origine d'une pollution systémique, dans certains cas éternelle. Il est donc impossible, pour nous comme pour tous les êtres vivants, d'échapper à une exposition croissante à ces substances : plus on en produit, plus on est exposé. Ces polluants éternels ont même été retrouvés dans le sang d'ours polaires, ce qui témoigne de leur mobilité. Aucun territoire sur la planète n'est épargné. Or, une fois dans l'organisme, il est difficile de s'en débarrasser : leurs propriétés chimiques les mettent hors de portée de l'action des enzymes qui devraient les dégrader et favoriser leur élimination.
Cette exposition subie, massive, est extrêmement grave car ces substances présentent un risque sérieux pour la santé. Les risques pathologiques les plus importants, documentés par de nombreuses études scientifiques, sont une altération de la fertilité, des maladies thyroïdiennes, des taux élevés de cholestérol, des lésions au foie, des cancers du rein et des testicules, une réponse réduite aux vaccins ou de faibles poids à la naissance. Nous faisons donc face à un problème sanitaire d'une gravité inédite. La portée de ce scandale, et je mesure l'ampleur de la comparaison, est de l'ordre du désastre du chlordécone et des ravages de l'amiante.
Sans anticiper sur les débats que nous aurons ce matin, et au vu de ce constat, je crois que nous pourrons nous accorder pour dire que le texte que je vous propose est mesuré et raisonnable. Ses dispositions s'inscrivent dans la continuité de travaux entrepris par plusieurs de nos collègues : dans le cadre de notre commission, d'abord, avec la table ronde sur les PFAS organisée par le président Zulesi en début d'année dernière, mais aussi avec la proposition de loi de David Taupiac, qui constitue, à ma connaissance, le premier texte soumis à la représentation nationale sur les polluants éternels – nous n'avons pu, malheureusement, en achever l'examen en séance publique. Je relève enfin, hors de notre commission, le rapport sur le sujet que le député Cyrille Isaac-Sibille a remis au Gouvernement il y a quelques semaines.
La première mesure que je vous propose d'adopter vise à limiter à la source la pollution aux PFAS, en décidant de restrictions à leur utilisation échelonnées dans le temps, selon la disponibilité des alternatives. Je proposerai par amendement d'agir dès 2026 sur les usages pour lesquels ces alternatives existent : les produits destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires, les cosmétiques, le fart et les textiles. Et je proposerai de poser pour 2027 le principe de l'interdiction des PFAS, sauf pour les cas où leur usage serait essentiel.
Certains me rappelleront qu'un projet de restriction des PFAS est en cours au niveau européen. Si ce projet est nécessaire, il n'est pas suffisant. Je le soutiens pleinement, mais je ne m'en contente pas. La procédure sera longue. Lorsque l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) aura terminé son travail, en 2026 ou en 2027, la proposition de restriction sera soumise aux États membres : qui peut prédire quelle sera alors la position de chacun de nos partenaires européens ? Je vous propose donc, tout comme le député Isaac-Sibille dans les recommandations 10 et 11 de son rapport, de prendre des mesures anticipées, au niveau national, pour protéger la santé de nos concitoyens.
Sur les premières restrictions, j'ai la volonté de trouver un compromis, compte tenu des auditions que nous avons eues et des positions exprimées par les différents groupes politiques. Même si je reste pleinement convaincu qu'il faut agir vite et largement pour couper le robinet de la pollution, j'ai déposé un amendement de compromis que nous examinerons au début de la discussion, qui vise à ne cibler que les produits identifiés dans le rapport de Cyrille Isaac-Sibille. J'espère que nous pourrons nous rejoindre sur cette rédaction.
Deuxième mesure, je propose que dès la promulgation de la loi, les PFAS soient pris en compte dans le contrôle sanitaire de la qualité de l'eau potable. Cette disposition va au-devant de la réglementation actuelle et de la directive européenne relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. Elle permet de ne pas attendre le 1er janvier 2026 et rend obligatoire la recherche de l'ensemble des PFAS détectables. La mesure pourrait également inciter les laboratoires d'analyse à approfondir les techniques permettant de détecter de nouveaux PFAS – je vous rappelle que le droit européen ne nous obligera à rechercher qu'une vingtaine d'entre eux. La liste européenne, incomplète, n'inclut pas par exemple le TFA (acide trifluoroacétique) pourtant retrouvé massivement autour de Salindres, dans le Gard.
Le deuxième article introduit une redevance assise sur les rejets de PFAS dans l'eau, afin que les industriels à l'origine de la pollution contribuent financièrement à la dépollution, en vertu du principe pollueur-payeur. J'insiste sur le coût que va représenter la pollution aux PFAS pour nos collectivités. Dès l'entrée en vigueur du contrôle de la présence des PFAS dans l'eau, nombre de nos communes connaîtront des dépassements de la norme réglementaire. Nos collectivités devront alors consentir des investissements massifs pour traiter l'eau. La redevance que je vous propose est un premier levier pour anticiper ce mur d'investissement. J'espère que nous serons nombreux à nous retrouver sur cette disposition, déjà suggérée dans l'excellent rapport d'information de nos collègues Yannick Haury et Vincent Descœur sur l'adaptation de la politique de l'eau au défi climatique.
Nous avons l'occasion d'engager aujourd'hui une avancée dans la lutte contre les toxiques qui empoisonnent nos vies. Je sais que nous sommes observés, que certains attendent beaucoup de cette proposition de loi et j'espère que nous saurons être à la hauteur. Sur ces sujets, chaque année de perdue se compte, hélas, en vies humaines.
Nous accueillons plutôt favorablement cette proposition de loi et souhaitons mettre en avant le travail effectué par Cyrille Isaac-Sibille pour la mission gouvernementale commandée par Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Nous souhaitons que ces polluants dits éternels soient bien mieux pris en charge. Le Gouvernement a lancé à cet effet un travail de cartographie des émissions autour des installations classées pour la protection de l'environnement. Nous souhaitons que ce travail permette une meilleure maîtrise des rejets, et saluons l'idée d'aller vers un système de redevance. Il restera à voir s'il s'agit de la meilleure solution : nous en discuterons, tant aujourd'hui que dans l'hémicycle. Nous souhaitons enfin que les discussions en trilogue au niveau de l'Union européenne – en particulier sur le règlement sur les emballages –soient stimulées par cette proposition de loi, à laquelle nous proposerons des aménagements.
Les efforts humains se sont portés au siècle dernier sur la santé ainsi que sur l'assainissement : c'est par ces deux moyens que nous avons gagné en espérance de vie. Le Rassemblement national accueille la présente proposition de loi avec beaucoup d'intérêt. Sur ce sujet majeur et délicat, nous proposerons des amendements, en espérant que nous pourrons trouver un consensus pour la séance publique. Lutter contre les PFAS, c'est augmenter notre espérance de vie et assainir notre eau. J'insiste : Londres a connu au siècle dernier un problème d'assainissement des eaux, et on a vu l'espérance de vie y diminuer en dix ans.
Nous faisons face à une pollution généralisée et persistante : les PFAS sont présents dans tous les milieux et se répandent sans discontinuer depuis les années 1940, où ils ont commencé à être produits à grande échelle. On les retrouve dans l'eau, dans l'air, dans l'ensemble des organismes, et donc dans nos corps. Toute la population française est contaminée, comme l'a rapporté Santé publique France en 2019. Cette contamination n'est pas anodine. Elle augmente directement le risque de souffrir de cancers du rein, du sein, des testicules, mais aussi de maladies thyroïdiennes et de lésions hépatiques. Il est donc urgent de mettre un terme à ce désastre écologique et sanitaire dont nous commençons à peine à prendre la mesure. La France insoumise soutient cette proposition de loi visant à interdire la fabrication, l'importation et la mise sur le marché de tout produit contenant ces polluants éternels. Le temps presse, chaque jour compte pour sauver des vies.
L'ennui avec les rapports, c'est que, un jour ou l'autre, les gens finissent par les lire. Dans celui qu'il nous a présenté le 6 février, notre collègue de la majorité, Cyrille Isaac-Sibille, écrivait dans ses recommandations 10 et 10 bis qu'il serait opportun d'arrêter la production et l'utilisation des PFAS en soutenant l'initiative européenne de restriction et que, si celle-ci n'allait pas assez vite, il faudrait la devancer en proposant la restriction de certains usages de ces substances, par exemple pour le fart, les cosmétiques, les textiles et les emballages alimentaires. Nous verrons si ces engagements, que la présente proposition de loi retranscrit dans son article 1er, restent valides.
Notre ligne est restée la même depuis la proposition de loi de David Taupiac : la proposition de restriction dont cinq États européens ont pris l'initiative nous semble le moyen le plus sûr d'aboutir à une régulation rapide des PFAS les plus nocifs. Mais ne soyons pas hypocrites : le contexte économique, avec la hausse du coût de l'énergie, n'est pas idéal pour soumettre le secteur de la chimie à de nouvelles contraintes. Derrière la diversion amusante du fart qui s'utilise sur les skis, ce sont jusqu'à 1, voire 3 milliards d'euros en investissements et dix ans de recherche qui sont parfois nécessaires, à l'échelle européenne, pour développer des substituts, notamment pour les emballages alimentaires et les équipements médicaux, alors même que l'État est aux abonnés absents pour ce qui est du soutien financier.
Il existe également un risque que ces restrictions ne s'appliquent qu'à nos produits et que nous continuions à importer ceux dont la production sera interdite sur notre sol. Une initiative solitaire de la France serait donc une surtransposition, condamnant nos entreprises à subir une distorsion de concurrence et nous privant de biens aux applications variées. Notre objectif est donc d'aboutir à une régulation ciblée, mesurée et différenciée des PFAS, alignée sur le calendrier européen, et dans des délais raisonnables.
Ayant toujours été favorables au levier de l'incitation, nous soutiendrons l'article 2, qui élargit l'assiette de la redevance sur l'eau aux PFAS afin d'aider les collectivités et les petites communes rurales à financer les travaux de mise à niveau des installations de traitement de l'eau, en vertu du principe pollueur-payeur. Cette idée figurait d'ailleurs dans un autre rapport sur la politique de l'eau présenté par notre collègue du groupe Les Républicains, Vincent Descœur, et M. Yannick Haury.
Je tiens à vous remercier, ainsi que votre groupe, monsieur le rapporteur, de mettre à l'ordre du jour le sujet si sensible des PFAS. Du fait de leur structure moléculaire extrêmement stable et non dégradable, ils sont qualifiés de polluants éternels : ils présentent donc, dans le grand cortège des substances toxiques, une dangerosité inédite. Le consensus scientifique est implacable. Ils attaquent la santé humaine dès le stade fœtal, durant la croissance et tout au long de la vie. Ils dérèglent le système immunitaire et provoquent de nombreux cancers.
Ce problème est au cœur des préoccupations de notre famille politique, comme le démontrent les alertes de Jimmy Pahun et le rapport complet et essentiel de Cyrille Isaac-Sibille. Face à la pollution généralisée provoquée par cette famille de substances toxiques, riche de plus de 3 000 molécules, il est urgent d'agir. Toutes les industries sont concernées : chimie, électronique, alimentation, construction, énergie, secteur de la santé, secteur militaire, biotechnologies, etc. La situation nous impose de développer les alternatives, connues et identifiées par toute une série de rapports.
Les premières recommandations du rapport Isaac-Sibille, portant sur l'information du public et sur l'amélioration des mesures dans l'eau, malheureusement largement contaminée, se retrouvent en partie dans votre texte. Ce problème touche l'ensemble du continent. Le frontalier que je suis souhaite ardemment que l'Union européenne se saisisse au plus vite du problème, comme elle a commencé à le faire avec des interdictions concernant les jouets ou les emballages alimentaires.
C'est en ce sens que nous avons soutenu, monsieur le rapporteur, votre proposition de résolution sur la réforme du règlement Reach (enregistrement, évaluation, autorisation des substances chimiques et restrictions applicables à ces substances), que nous attendons de pied ferme. Quelles que soient nos différences d'approche, nous voulons avancer à vos côtés. Sur un sujet aussi grave, les citoyens attendent que nos volontés convergent pour résoudre le problème.
En dépit de leur toxicité, les PFAS sont encore peu connus du grand public. On retrouve ces substances chimiques dans de nombreux objets du quotidien – textiles, jouets, dispositifs médicaux, etc. –, dans l'environnement et dans les organismes exposés. Certains experts les considèrent comme la plus grande menace chimique du XXIe siècle. Le dernier rapport de l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd) fait état d'une situation critique et recommande à l'État d'engager sans tarder les actions de maîtrise des risques les plus urgentes.
Ces substances sont associées à des risques de cancer, de dérèglements endocriniens et thyroïdiens. L'Autorité européenne de sécurité des aliments alerte également quant à leurs effets sur le système immunitaire, qui ne sont pas encore parfaitement connus et dont le suivi, comme l'a rappelé Cyrille Isaac-Sibille dans son rapport, est encore mal assuré. La recommandation 10 bis de ce même rapport précise qu'en l'absence d'avancée européenne, la France peut proposer la restriction de certains usages : fart, cosmétiques, textiles destinés à l'habillement, emballages alimentaires, papier carton. Pour prévoir des dérogations, ce projet de restriction s'appuie notamment sur la distinction entre les usages essentiels et ceux qui ne le sont pas, ainsi que sur l'existence ou non d'alternatives.
C'est pourquoi la présente proposition de loi prévoit d'interdire la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché des produits contenant des PFAS à l'horizon 2025 pour les produits pour lesquels un substitut peut facilement être trouvé, et 2027 pour les autres. L'article 2 s'inscrit dans la logique pollueur-payeur, en instaurant une redevance due par les acteurs rejetant des PFAS dans l'environnement.
Les socialistes remercient le rapporteur de placer cette question au cœur du débat public et soutiendront bien entendu ce texte indispensable.
Nous avons déjà discuté à plusieurs reprises des PFAS, dont les propriétés mêmes pour lesquelles ils ont été largement développés causent pollution et toxicité – à ce propos, j'ai une pensée particulière pour la commune haut-savoyarde de Rumilly. Les questions de réglementation, d'adaptation, voire d'interdiction se posent plus que jamais. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de l'opportunité que vous nous offrez de débattre à nouveau de ce sujet essentiel, et des échanges transpartisans que nous avons pu avoir.
Les PFAS s'accumulent dans le corps et se potentialisent avec le temps. Est-il encore nécessaire de développer davantage les dangers de ces polluants éternels ? Leur utilisation dans des domaines variés, combinée à leur caractère très persistant, entraîne une contamination de tous les milieux : l'eau, l'air, les sols ou encore les sédiments. Certains contaminent les êtres vivants et se retrouvent dans la chaîne alimentaire, tandis que d'autres, plus mobiles, sont transportés sur de très longues distances par l'eau ou l'air et se retrouvent jusque dans les océans arctiques et antarctiques. Leurs effets sur la santé humaine et animale ainsi que sur les écosystèmes en sont d'autant plus préoccupants.
Cette proposition de loi a donc pour objectif de réduire l'exposition de la population à ces substances. Partageant cette préoccupation, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires Christophe Béchu a présenté un plan d'action ministériel sur les PFAS pour la période 2023-2027, qui vise à réduire les risques à la source, à poursuivre la surveillance des milieux, à accélérer la production des connaissances scientifiques et à faciliter l'accès à l'information pour les citoyens. Il est également important de rappeler le cadre réglementaire européen. Je tiens saluer le travail de mes collègues Jimmy Pahun, Cyrille Isaac-Sibille et David Taupiac sur ces sujets.
Le groupe Horizons et apparentés, favorable à cette proposition de loi, défendra toutefois des amendements visant à en préciser certaines dispositions, notamment afin de renvoyer les producteurs à leurs responsabilités.
Il y a quelques mois encore, personne ne parlait des PFAS. Le sujet est pourtant déjà connu aux États-Unis depuis 1998 – le film Dark Waters raconte cette catastrophe déjà vieille de plus de vingt-cinq ans. Cela ne fait qu'un an ou deux que nous nous sommes, ici, sérieusement emparés du sujet et je remercie le rapporteur de le mettre au cœur du débat public.
J'ai pu constater à titre personnel l'ampleur de cette pollution aux PFAS : je fais partie des quatorze députés qui se sont fait tester et, tandis que les ours polaires en ont beaucoup dans leur estomac, j'en ai moi-même beaucoup dans les cheveux. J'en ai même dix fois plus que les autres, alors que ma ville de Tours n'est pas marquée par une forte actualité industrielle : il s'agit donc peut-être de son héritage industriel, d'une pollution généralisée de l'eau, de l'air et des sols. Car nous sommes face à un océan de PFAS, qui pénètrent partout et touchent 100 % de la population. On parle de 4 000 à 12 000 PFAS différents. Certains auraient voulu que nous les étudiions molécules par molécules, mais non : c'est sans aucun doute la famille entière des PFAS qu'il faut interdire, il n'y a pas d'alternative.
Il faut agir maintenant. Le sujet est sur la table depuis vingt-cinq ans et il n'est plus temps de renvoyer à une future réglementation européenne dont rien ne nous garantit qu'elle sera suffisamment ambitieuse. Des pays ont déjà décidé d'agir : le Danemark, par exemple, a interdit les PFAS dans les emballages alimentaires. La France doit jouer un rôle moteur au cœur de l'Europe, en adoptant la proposition de loi de Nicolas Thierry. Le texte propose l'interdiction immédiate de la production de PFAS – sujet central –, des tests systématiques de l'eau, qui n'existent pas aujourd'hui, et la mise en œuvre, très importante à nos yeux, du principe pollueur-payeur. Nous voterons évidemment cette proposition de loi, en espérant que tous feront de même.
Nous allons laisser aux générations futures un étrange legs : les milliers de tonnes de PFAS accumulées dans l'environnement. Les molécules de cette famille présentent la caractéristique d'être à la fois antiadhésives, imperméabilisantes et résistantes aux fortes chaleurs. Ces mêmes vertus qui font leur attrait font aussi d'elles des substances dangereuses. Elles s'accumulent sans se détériorer, au risque de nuire à notre santé et à la biodiversité. Les scientifiques redoutent une bombe sanitaire à retardement. La question ne devrait plus être de savoir si nous allons interdire les PFAS, mais quand. L'Union européenne s'attelle au sujet, mais les négociations, dont l'issue est incertaine, ne pourront pas aboutir avant 2027.
C'est pourquoi nous étions favorables à la première rédaction de la proposition de loi, qui posait une interdiction radicale à compter du 1er juillet 2027. Mais, comme le rapporteur, nous sommes prêts au compromis, pour qu'enfin aboutisse un texte sur le sujet. Serait donc interdite, dès 2025, l'utilisation des PFAS dans la fabrication des ustensiles de cuisine, des produits cosmétiques, du fart et du textile d'habillement. Pour ces produits avec lesquels nous sommes en contact direct, des alternatives existent : c'est donc un minimum.
Par ailleurs, qui va payer la facture du nettoyage des PFAS ? Les technologies de dépollution ont un coût élevé qu'il ne revient pas au consommateur d'assumer. Le texte propose donc d'assujettir les activités entraînant des rejets de PFAS au paiement de la redevance pour pollution de l'eau.
Nous soutenons donc cette proposition de loi, en espérant qu'elle ne connaisse pas le même sort que la mienne il y a un peu moins d'un an.
Nous faisons face à un important enjeu de santé publique. Une certaine avancée s'est produite récemment au niveau européen – l'interdiction des PFAS pour les emballages alimentaires en contact avec les denrées en 2026, et bientôt pour les jouets – mais nous avons tout à gagner à allonger rapidement la liste de ces interdictions. Vous avez donc vu juste, monsieur le rapporteur, tout comme David Taupiac, en voulant que nous avancions rapidement au niveau national sans nous contenter du plan d'action sur les PFAS 2023-2027 du ministère de la transition écologique, qui est loin d'être à la hauteur de l'urgence. Votre texte est d'autant plus intéressant qu'il est équilibré, en ce qu'il prévoit une liste de dérogations strictement proportionnées au caractère essentiel de certains usages et qu'il affiche un calendrier réaliste prenant appui sur les alternatives déjà existantes.
Pensez-vous que les industriels seront prêts à prendre des mesures sans contrainte, sous la pression de l'opinion publique ? Quels sont d'après vous les usages dont le caractère est essentiel ?
Je suis évidemment favorable au principe pollueur-payeur, mais quelle technique précise va-t-on utiliser pour la dépollution ? Le charbon actif semble peu efficace. Des recherches sont en cours, par exemple dans les universités de Tours et d'Orléans, sur la manière dont on peut détruire ces molécules dont les liaisons sont très solides. Connaissez-vous d'autres techniques de dépollution ? C'est une question clé.
Nous avons pleinement conscience des difficultés posées par les PFAS et la commune de Salindres, dont on parle beaucoup, se trouve dans ma circonscription. Nous accueillons avec bienveillance cette proposition de loi dont l'objet est aussi d'exempter d'interdiction les industries qui n'ont pas encore pu s'adapter et innover pour limiter l'usage des PFAS : je pense en particulier aux ustensiles soumis à de fortes chaleurs et à des frottements, comme les ustensiles de cuisson. Comment envisagez-vous d'accompagner ces industries ? Une interdiction pure et simple, juste dans son principe, viendrait se heurter à la réalité économique et risquerait d'abîmer notre industrie.
Je remercie Nicolas Thierry pour la présentation de cette proposition de loi qui, je l'espère, sera adoptée, et sera le début d'une longue lutte pour nous désintoxiquer des PFAS. C'est une urgence de santé publique. Il faut interdire les rejets de PFAS et mieux connaître leur complexité chimique et toxicologique ainsi que la manière dont ils se diffusent. Il faut en restreindre les usages futiles pour lesquels il existe des substituts.
La France enverra ainsi un signal à l'Europe, en amont de l'avis que l'ECHA rendra dans les prochains mois. Le Gouvernement a déjà présenté un plan PFAS, a rejoint l'initiative des cinq États membres demandant une interdiction sur l'ensemble des PFAS, et a permis l'adoption, dans le cadre du trilogue, d'une restriction sur les emballages alimentaires.
On estime à 15 milliards d'euros par an le coût de la dépollution de l'eau du robinet. Avez-vous une estimation du coût de dépollution imputable aux PFAS ?
Je vais répondre aux questions principales, une grande partie des points évoqués devant être abordés lors de la discussion des amendements. Cela me permettra de poser quelques éléments de cadrage.
La question de la toxicité est revenue plusieurs fois. Certaines substances PFAS seraient-elles toxiques et d'autres non ? Quand j'ai commencé à travailler sur ce sujet, j'ai dû m'acculturer à cette question assez technique en rencontrant des chercheurs, y compris hors de nos frontières. Ce qu'il faut comprendre, c'est que si plusieurs dizaines de ces molécules sont extrêmement persistantes dès leur conception, et par nature très difficiles à gérer, toutes les autres, une fois larguées dans l'environnement, finissent par avoir le même effet : le processus de dégradation fait que même elles se fragmentent et finissent par prendre une forme qui les rend comparables à celles qui sont persistantes dès l'origine. Bref, tous les PFAS sont préoccupants, qu'ils soient toxiques et persistants dès leur conception ou qu'ils le deviennent après dégradation ; aucun n'y échappe. C'est à cause de cette caractéristique commune que toutes les agences européennes et tous les scientifiques, comme l'indique d'ailleurs le rapport Isaac-Sibille, préconisent une approche par famille de cet enjeu sanitaire, et non substance par substance.
Concernant les usages, nous avons été très attentifs à n'inclure dans le périmètre de l'interdiction que ceux pour lesquels des alternatives sont ou seront disponibles à court terme, les autres interdictions étant échelonnées dans le temps sur la base du travail de l'Agence européenne. Nous avons donc ciblé les cosmétiques, les textiles, les emballages alimentaires et le fart de ski. Concernant les cosmétiques, les professionnels de la filière rencontrés lors des auditions nous ont dit avoir entamé ce travail de sortie des PFAS et soutenir une réglementation, dont l'entrée en vigueur à partir de 2026 ne leur poserait aucun problème. C'est le sens de l'amendement de compromis que nous avons proposé. Concernant les textiles, les auditions ont montré qu'il y avait des difficultés de substitution pour d'autres produits que les habits de sécurité auxquels nous avions pensé, s'agissant des arts de la table notamment. Les industriels nous ont cependant confirmé que l'on pouvait avancer en matière de textile d'habillement. Notre amendement de compromis précise donc ce point.
Quant au fart de ski, voilà un usage sur lequel ne subsiste aucun doute. Dans les compétitions internationales, les PFAS sont déjà interdits : ils ne restent permis qu'aux skieurs du dimanche qui descendent, comme vous et moi, leur piste verte ou noire. D'après le directeur technique national de la Fédération française de ski, le plus tôt sera généralisée l'interdiction, mieux cela vaudra. C'est en effet une pollution qu'on peut éviter tout de suite : les skieurs répandent des PFAS en descendant les pistes, la neige fond, et les substances passent dans les cours d'eau. Par ailleurs, les salariés des magasins spécialisés qui fartent les skis sont exposés aux poussières, alors que cet usage est devenu parfaitement inutile. La substitution présentait certaines difficultés pour le ski de fond, mais qui ont été aplanies.
J'en viens à une question intéressante, méritant d'être traitée tout de suite : les effets éventuels d'une réglementation sur l'industrie française. On pourrait croire que nous risquons de gêner nos industriels en leur imposant des contraintes que les autres ne subiront pas. Concernant les PFAS, la réalité est différente. Charles Fournier a rappelé qu'il y a un quart de siècle, un scandale sanitaire retentissant a explosé aux Etats-Unis, qui occupe beaucoup l'espace public. Or la pression juridique et citoyenne a poussé les industriels à s'adapter : ils ont fait de la sortie des PFAS un élément de différenciation commerciale et de compétitivité, bref, un argument de vente. En Europe et en France, le débat a émergé tout récemment, mais le sujet prend très vite et devient une préoccupation des consommateurs. Si nous attendons le processus européen, nous nous retrouverons avec des consommateurs qui cherchent des produits sans PFAS et des industriels en retard pour leur en fournir, alors que d'autres pourront leur en offrir, notamment les Américains. Une chaîne de restauration rapide américaine incontournable a, par exemple, entamé sa sortie des PFAS en 2006. Pousser les industriels à se tourner vers les substituts leur donnera demain un avantage comparatif parce que cela correspondra à un critère de choix des consommateurs.
Le projet de restriction européen vise 10 000 substances, au titre du règlement Reach, la demande ayant été présentée par les autorités danoises, allemandes, néerlandaises, norvégiennes et suédoises et enregistrée par l'ECHA en 2023. Il faut comprendre que ce processus sera long : après avoir demandé aux industriels et aux États moteurs d'envoyer des informations concernant la fabrication et la mise sur le marché de PFAS, l'Agence a reçu des milliers de contributions – c'est un des sujets qui en ont suscité le plus – que ses comités scientifiques doivent maintenant analyser et évaluer pour formuler des avis, eux-mêmes soumis à la Commission européenne, au Parlement européen et aux États membres. Même en imaginant que tous les États tombent d'accord – ce qui, entre nous, ne sera pas le cas –, une décision n'interviendrait qu'en 2027. Puis, pour les substances concernées par la restriction, dix-huit mois seraient laissés aux entreprises européennes pour s'adapter, de sorte que même dans le meilleur des scénarios, la procédure entière n'aboutirait pas avant 2029 ou 2030.
Or notre proposition de loi permet de restreindre certains usages tout de suite, évitant ainsi aux gens d'être exposés pendant tout ce temps. Au vu des enjeux de santé publique que vous avez tous reconnus, six ans sont une durée considérable. Nous vous proposons donc un texte qui établit un échéancier raisonnable et cible les secteurs disposant de solutions de remplacement à court terme, tout en fixant un horizon à plus long terme.
Un dernier mot sur la dépollution : deux techniques de filtration existent à ce jour, le charbon actif et l'osmose inversée. D'après les scientifiques, le charbon actif fonctionne pour certains PFAS, mais d'autres malheureusement y résistent. Plus efficace, l'osmose inversée est hélas assez coûteuse et énergivore et donc très difficile à déployer, notamment pour de toutes petites collectivités, confrontées à un mur d'investissements. D'où l'intérêt de couper à la source la pollution, pour restreindre autant que possible l'obligation de dépollution.
Avant l'article 1er
Amendements CD18 de M. Gabriel Amard et CD19 de Mme Anne Stambach-Terrenoir (discussion commune)
L'amendement CD18 vise à conforter notre légitimité à délibérer de cette proposition de loi. Étant moi-même rapporteur sur ce sujet pour la commission des affaires européennes, j'appelle votre attention sur l'article 129 du règlement Reach actuel, qui nous permet, au nom de la protection de nos concitoyens, de légiférer sans attendre les conclusions des travaux européens – dont M. le rapporteur a rappelé le calendrier et l'incertitude – pour interdire la production, l'utilisation et la commercialisation des PFAS.
Cela devrait aussi rassurer les collègues qui nous renvoient souvent à une future révision du règlement Reach : nous pouvons parfaitement délibérer dès maintenant et protéger nos concitoyens de cette source de pollution tout en nous inscrivant dans le règlement existant. L'adoption de cet amendement serait donc de nature à élargir le consensus autour de la proposition de loi.
L'amendement CD19 est un amendement de repli, demandant un rapport au Gouvernement sur la possibilité au moins de recourir à l'article 129 du règlement Reach. Aux termes de ce dernier, « un État membre est fondé à estimer qu'une action d'urgence est indispensable pour protéger la santé humaine ou l'environnement en ce qui concerne une substance […] bien qu'elle satisfasse aux prescriptions du […] règlement », auquel cas cet État « peut prendre des mesures provisoires appropriées ». Or la pollution aux PFAS constitue un cas évident de situation d'urgence. En février 2023, Le Monde publiait une étude qui recensait déjà 900 sites pollués en France, dont 108 considérés comme des hotspots, c'est-à-dire des zones où la contamination est dangereuse pour la santé. Encore ces estimations sont-elles largement en dessous de la réalité. M. Labadie, directeur de recherche au CNRS, parle de « petit bout de l'iceberg » à propos de l'état actuel des connaissances portant sur cette pollution. On l'a vu en février dernier dans la commune de Salindres, où l'on a relevé des taux records d'acide trifluoroacétique (TFA) – les plus petits PFAS connus –, cette commune recelant malheureusement aussi un cluster de glioblastomes, des tumeurs cancéreuses affectant le cerveau.
Nous sommes manifestement dans une situation d'urgence dont nous ignorons encore l'ampleur. Attendre serait une folie et un crime : ces polluants éternels s'accumulent dans nos organismes et chaque jour qui passe aggrave la situation. Une disposition nous permet d'agir vite. Il faut nous en saisir.
Je suis favorable à l'amendement CD18. Établis dans la littérature scientifique, les dangers des PFAS pour la santé humaine justifient l'invocation de l'article 129 du règlement Reach de l'Union européenne (UE), permettant de faire statuer la Commission européenne sur leur interdiction.
Quant au CD19, je demande son retrait, puisque nous pourrons grâce à l'amendement de M. Amard activer l'article 129 sans attendre un rapport dont nous connaissons déjà les conclusions.
Je voudrais soutenir l'amendement de Gabriel Amard. Il faut utiliser toutes les voies que permet l'UE. L'article 129 nous donne une sorte de procédure d'urgence pour agir rapidement. Beaucoup ici ont dit qu'il fallait s'en remettre à l'Union, et telle est bien la proposition qui vous est faite. J'ai également beaucoup entendu qu'il fallait veiller à ce que les industriels puissent s'adapter ; or les auditions ont montré que nombre d'entre eux avaient déjà des solutions de remplacement. Notre responsabilité est donc d'agir vite, et voilà une voie pour produire une règle rapidement.
Je suis évidemment plus favorable à l'amendement CD18 mais, au cas où il ne serait pas voté, je maintiens le CD19.
La commission rejette successivement les amendements.
Article 1er : Interdiction des substances per- et polyfluoroalkylées
Amendement CD85 du rapporteur et sous-amendements CD94 de M. Pierre Vatin, CD92 et CD91 de M. Pierre Meurin, CD95 de M. Pierre Vatin, CD93 et CD90 de M. Pierre Meurin ; amendements identiques CD67 de M. Cyrille Isaac-Sibille et CD76 de Mme Anne-Cécile Violland et sous-amendements CD87 et CD88 de M. Charles Fournier ; amendement CD74 de Mme Claire Colomb-Pitollat et amendement CD59 de M. Pierre Vatin (discussion commune)
L'amendement CD85 vise à trouver un compromis sur la rédaction de l'article 1er au regard des positions exprimées par les différents groupes. Ma propre conviction, je le répète, est qu'il faut aboutir, à brève échéance, à une interdiction large des PFAS, et je rappelle les incertitudes entourant l'initiative européenne de restriction, qui prendra du temps. Toutefois, au regard de ce que proposent nos collègues de la majorité, je souhaite préserver la possibilité d'une rédaction aussi ambitieuse que possible. Je vous propose donc de décaler de six mois l'entrée en vigueur des interdictions prévues pour certains produits, de façon à laisser un délai raisonnable aux entreprises qui doivent s'organiser pour se passer de PFAS et trouver des solutions de substitution, comme le proposaient les amendements des groupes Horizons et Démocrate.
Les emballages alimentaires, intégrés à un règlement européen très prochainement adopté, sont exclus de cet amendement. Restent visés les ustensiles de cuisine, source importante d'exposition de la population et de contamination. L'interdiction visant les textiles ne devenant générale qu'à partir de 2030, seuls les textiles d'habillement seront concernés à partir de 2026, les industriels du secteur s'y disant d'ailleurs prêts et favorables. Je vous propose enfin de retirer la disposition sur l'interdiction de tout produit contenant des PFAS avant 2027, dans la perspective d'un aboutissement du processus européen qui permette une harmonisation.
La rédaction proposée par cet amendement, moins ambitieuse que la version initiale, ne reflète pas ma propre position mais ma volonté de compromis, pour que nous puissions avancer.
Je remercie le rapporteur pour cette réécriture. Toutefois, des réglementations sectorielles en cours d'adoption vont venir encadrer l'utilisation des PFAS pour les quatre usages ciblés par les alinéas 7 à 11 de la proposition de loi. L'ECHA a remis en mars son avis sur l'utilisation des PFAS dans le fart et les cosmétique, et le fera en septembre pour les emballages alimentaires et les textiles. Il est donc proposé de poser comme condition à l'entrée en vigueur des interdictions prévues par l'amendement du rapporteur leur conformité aux réglementations et avis européens existants.
Le sous-amendement d'appel CD92 est fondé sur l'idée que si l'on interdit la fabrication et la commercialisation des PFAS, on en interdit évidemment l'importation. Quand la France crée des normes, si justes soient-elles, cela a systématiquement pour effet de créer une concurrence déloyale avec les acteurs étrangers. Comment contrôlerons-nous l'absence de PFAS dans les produits que nous importerons ? L'interdiction risque de créer un coût de revient plus important pour les produits français, aggravant le problème de la concurrence déloyale sans régler le problème sanitaire.
Le sous-amendement CD91, pour des considérations pratiques issues des auditions, propose d'exclure de la rédaction du rapporteur les ustensiles soumis à de fortes chaleurs ou à des frottements, puisque là encore, les industriels ne sont pas prêts.
Le sous-amendement CD95 propose d'introduire les mots : « ajoutées intentionnellement et dont le profil toxicologique préoccupant pour la santé est avéré ». Il s'agit de nous aligner sur la réglementation européenne, dont les dispositions ciblées, proportionnées et différenciées en fonction de la dangerosité des PFAS ne visent que les substances ajoutées intentionnellement au cours du processus de production, indépendamment de la pollution historique.
Le sous-amendement CD93 permet d'élargir les dérogations dont doivent bénéficier les vêtements de protection des professionnels de la sécurité et de la sécurité civile à d'autres professions, définies par décret. En effet, des vêtements de protection contenant des PFAS sont également utilisés dans l'industrie ou le BTP, pour lesquels il n'existe pas forcément de produits de substitution.
Le sous-amendement CD90 prévoit que des possibilités de dérogation à l'article sont fixées par décret.
Monsieur le rapporteur, nous pouvons trouver un accord sur le fart et les cosmétiques, ainsi que sur les textiles d'habillement, même si l'on sait que les vêtements livrés depuis l'étranger seront difficilement contrôlables. Restent les produits en contact avec les aliments. Pour les emballages alimentaires, l'amendement CD67 vous propose de reprendre l'accord adopté par l'Europe et qui n'est pas encore publié, par souci de cohérence. Concernant les ustensiles, il faut entrer dans la complexité chimique. Il existe en effet deux familles de PFAS, les monomères, qui sont toxiques, car tensioactifs, et les polymères, qui sont inertes. Il convient de pousser la recherche sur la possible dégradation des polymères avant de les interdire.
Mon amendement rejoint donc le vôtre concernant le fart, les cosmétiques, les textiles et les emballages alimentaires, mais non les ustensiles de cuisine. Je rappelle que l'adoption de l'un de ces deux amendements en ferait tomber beaucoup d'autres.
Par ailleurs, votre rédaction n'aborde malheureusement pas la question de la présence non intentionnelle de PFAS dans un produit, manque qui a pourtant été déploré au cours des auditions. On sait que les PFAS sont partout : même s'ils n'en utilisent pas délibérément, il est donc difficile pour les industriels de garantir que leurs produits n'en contiennent pas.
Voici en tout cas un amendement sur lequel nous pourrions trouver un accord.
Le groupe Horizons souhaite vraiment une harmonisation à l'échelle européenne, même s'il peut arriver que nous soyons mieux-disants. Nous appelons à la prudence concernant le calendrier : à trop vouloir accélérer, on risque d'aboutir à des conséquences plus graves que ce qu'on voulait éliminer au départ. Il faut penser les actions dans une temporalité raisonnée. L'amendement CD76, identique à celui de Cyrille Isaac-Sibille, vise donc un alignement sur les règlements européens s'agissant des emballages en contact avec les denrées alimentaires. Il s'agit de tenir compte de l'existence ou non de solutions de rechange : quand il n'en existe pas, il faut prendre le temps de penser les choses. Pour les cosmétiques et le fart, l'interdiction interviendrait au 1er janvier 2026, laissant aux filières un temps d'adaptation. Pour les textiles, vu la loi votée il y a quinze jours, tenir compte de leurs composants est une nécessité absolue, mais il faut une fois encore laisser à la filière le temps de s'adapter aux nouvelles dispositions.
Il est bon d'être prudent, mais pas plus prudent que les industriels eux-mêmes, dont beaucoup sont favorables à ce que nous agissions dès maintenant. Peut-être aurait-il fallu procéder à des auditions collectives pour que tout le monde l'entende. Le rapport Isaac-Sibille, qui fait référence sur le sujet, affirme que même pour les ustensiles de cuisine, les PFAS ne sont pas essentiels, et que des alternatives existent. Pour ne parler que des poêles, nous en avons tous chez nous qui n'ont pas de revêtement contenant des PFAS – ou alors je vous invite à aller en acheter rapidement ! Le sous-amendement CD87 soumet donc les ustensiles de cuisine au même régime d'interdiction que les cosmétiques et le fart.
Le sous-amendement CD88 fait de même pour la filière textile. En effet, les industriels nous disent être prêts. La seule exception concerne les vêtements de protection destinés aux professionnels de la sécurité et de la sécurité civile, pour lesquels il n'existe pas à ce jour de substitut efficace. L'excès de prudence de mes collègues risque de repousser l'interdiction dans un avenir trop éloigné. La population attend que nous agissions. Il y a eu suffisamment de scandales dans l'histoire. Il faut quatre-vingt-dix jours pour créer une nouvelle molécule et parfois vingt ans pour l'interdire ! Il est urgent d'agir et nécessaire d'intégrer textiles et ustensiles de cuisine au périmètre de l'interdiction. Je voudrais saluer l'esprit d'ouverture du rapporteur dont l'amendement propose un compromis tout à fait acceptable.
L'amendement CD74 participe de la volonté d'harmoniser la réglementation à l'échelon européen et se cale donc sur les révisions en cours du droit communautaire. Nous saluons cependant le compromis présenté par Cyrille Isaac-Sibille, qui tient compte des nouvelles propositions du rapporteur, et nous serons favorables à son amendement.
L'amendement CD59 procède de la même idée : harmoniser et homogénéiser la réglementation au niveau européen afin de protéger notre santé tout en évitant la distorsion de concurrence qui surviendrait si l'on devait importer des substances interdites en France, mais autorisées ailleurs.
Pour les raisons que je vous ai exposées et contrairement à ce que propose le sous-amendement CD94, je ne veux pas conditionner l'interdiction à des actes ou avis de l'UE, d'autant que les seconds n'ont pas de portée normative : une agence comme l'ECHA en formule également, sans effet normatif. Inversement, les règlements européens s'appliquent de plein droit, sans qu'il soit besoin de le préciser dans la loi. Avis défavorable.
Le sous-amendement CD92 veut supprimer l'interdiction d'importation des produits énumérés, faute de moyens pour les contrôler. Mais il faut faire confiance aux administrations de l'État. Elles ont les moyens de contrôler les marchandises, même importées, comme elles le font d'ailleurs pour d'autres types de produits retirés du marché français : le bisphénol A, certains colorants comme l'E171 – que nous avons interdit avant l'Europe – ou encore la viande contenant des hormones de croissance – interdite encore une fois en France sans attendre l'Europe. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) fait un travail formidable. Ses équipes ont toujours su protéger les consommateurs français, ce dont témoigne son compte rendu d'activité, que j'invite chacun à consulter. J'ai pleinement confiance en leur capacité à contrôler les produits. Avis défavorable.
Le sous-amendement CD91 propose d'exclure les dispositifs chauffants et les éléments soumis à des frottements de l'interdiction mentionnée à l'alinéa 8. Il me paraît important de ne pas les exclure afin d'encourager les professionnels à trouver le plus rapidement possible des substituts aux PFAS utilisés dans ces appareils. Il ne s'agit que d'accélérer une évolution en cours chez les industriels, qui permettra, sans poser de problèmes fondamentaux, de protéger un peu plus vite la santé publique.
Le sous-amendement CD95 propose de réserver l'interdiction aux PFAS dont la toxicité pour la santé a été démontrée. Cela va à l'encontre de la littérature scientifique, qui établit que l'ensemble de la famille des PFAS représente un danger, compte tenu des processus de dégradation que j'évoquais tout à l'heure. Tous présentent un caractère de persistance dans l'environnement qui conduit les scientifiques à les considérer comme des substances préoccupantes. Avis défavorable.
Le sous-amendement CD93 vise à élargir la liste des dérogations à certaines professions définies par décret. Mon avis est défavorable car la dérogation à l'interdiction doit rester limitée et surtout être liée aux produits eux-mêmes.
Le sous-amendement CD90 laisse trop d'incertitude quant au périmètre des dérogations qui pourraient être définies par décret. Mon amendement CD85 ne prévoit pas de dérogation à caractère général, la seule exception concernant les textiles d'habillement.
Les amendements identiques CD67 et CD76 manquent d'ambition en reportant à 2030 l'interdiction des PFAS dans tous les produits textiles, en dépit des alternatives existantes et de la volonté des industriels de limiter, voire de supprimer la présence de PFAS s'agissant des vêtements. Il serait pour le moins étrange d'être moins exigeant que la filière, qui est prête à sortir des PFAS dès 2026. Rappelons que le secteur textile est une source importante de contamination de l'environnement par les PFAS.
En outre, ces amendements visent à aligner l'interdiction de la présence de PFAS dans les emballages alimentaires sur le règlement européen en cours de discussion, sans préciser les contours de cette interdiction. Nous tenons au contraire à ce que des efforts soient réalisés dans différents secteurs dès maintenant, indépendamment des discussions européennes, qui seront très longues. Par ailleurs, si un règlement européen exclut la présence de PFAS dans les emballages, il serait absolument inutile de le mentionner aussi dans la loi.
Mon avis sur ces amendements est donc défavorable. En revanche, je suis favorable aux sous-amendements CD87 et CD88 du groupe Écologiste visant à ajouter les ustensiles de cuisine et les textiles d'habillement à la liste des produits dans lesquels la présence de PFAS est interdite dès 2026.
Quant à l'amendement CD74, j'y suis opposé pour au moins deux raisons. Il ne me semble pas utile de reprendre dans la loi les dispositions du règlement européen sur les emballages qui va être adopté. En outre, aucune interdiction n'est proposée dès 2025, à rebours de l'objet même de la proposition de loi et d'ailleurs des préconisations du rapport Isaac-Sibille.
Enfin, l'amendement CD59 limite lui aussi l'interdiction aux PFAS dont la toxicité est démontrée. Encore une fois, cela va à l'encontre de la littérature scientifique qui considère que l'ensemble des PFAS représentent un danger en raison de leur persistance. Avis défavorable.
Je soutiens l'amendement de compromis présenté par le rapporteur. Au sujet de la fast fashion, nous avons démontré notre capacité à trouver un consensus sur un texte, même s'il est moins ambitieux que ce que nous aurions souhaité. Il en va de même pour la présente proposition de loi : le rapporteur a revu son ambition pour parvenir à un compromis. La réécriture qu'il propose est équilibrée et réaliste puisqu'elle tient compte du point de vue des industriels et de ce qu'il est possible de faire aujourd'hui.
J'invite tous ceux qui cherchent à circonscrire les PFAS visés par l'interdiction à lire le rapport de l'Autorité européenne de sécurité des aliments, dans lequel sont établis les liens entre PFAS et cholestérol, diminution du poids à la naissance, perturbation du fonctionnement du foie et moindre réponse aux vaccins pour les enfants. Méditons bien cela avant de nous prononcer.
Le groupe de La France insoumise votera votre amendement, monsieur le rapporteur, car il faut avancer. Nous aurions évidemment préféré conserver la rédaction initiale, qui répond mieux à notre exigence d'agir vite et bien. La commission des affaires européennes aura l'occasion d'y revenir puisque le règlement Reach nous permet de légiférer maintenant, de sorte que le calendrier que vous préconisiez, avec des interdictions dès 2025 et 2027, soit tenu. Nous regrettons également que la mention de « tout produit destiné à entrer en contact avec les denrées alimentaires » ait disparu dans la nouvelle rédaction.
À vouloir ainsi anticiper la réglementation européenne, n'y a-t-il pas un risque de sutransposition, contre lequel nous nous évertuons à lutter par ailleurs ?
Nombre d'intervenants se réfèrent à mon rapport.
J'insiste sur la distinction entre monomères et polymères. Les premiers, tensioactifs, sont dangereux pour la santé ; les études sont moins affirmatives sur les seconds. Des travaux complémentaires sont nécessaires pour comprendre de quelle manière ils se dégradent. Je rappelle que tous les tuyaux, les joints, les vannes, etc. soumis à des contraintes de pression ou de chaleur sont fabriqués avec des polymères.
Nous sommes d'accord sur l'interdiction des monomères, que ce soit dans les farts, les cosmétiques, les textiles ou les emballages alimentaires. Les ustensiles de cuisine, eux, sont composés de polymères dont on ignore le devenir exact. Je n'ai jamais écrit dans mon rapport qu'il existait des substituts à ces polymères. Leur interdiction pourrait donc avoir des conséquences industrielles.
Je veux dire mon étonnement devant des amendements qui fixent des seuils de concentration au-dessous desquels les PFAS restent autorisés. Je pourrais le comprendre pour des molécules dégradables, mais comment serait-ce envisageable pour des molécules persistantes, qui, de surcroît, s'accumulent ?
Je remercie le rapporteur pour l'esprit d'ouverture dont il fait preuve en proposant une réécriture.
Nous sommes tous d'accord pour accélérer. D'autres points font consensus, et nous pouvons nous en féliciter : l'interdiction au 1er janvier 2026 pour les produits cosmétiques et de fart ; l'interdiction au 1er janvier 2030 pour les produits textiles ; la conformité au règlement Reach pour les emballages.
Il reste des points de divergence. J'aurais préféré que la discussion ait lieu en amont de la commission. L'amendement de réécriture nous est parvenu tardivement hier – ce n'est pas un reproche, je connais les contraintes de la fabrication de la loi, mais nous aurions pu travailler à un amendement commun.
Je fais confiance néanmoins à l'excellent professeur Isaac-Sibille pour savoir, sur l'interdiction des PFAS, placer le curseur au bon endroit. Les amendements CD67 et CD76 me paraissent proposer le meilleur équilibre possible sur le sujet, mais nous pouvons encore discuter d'ici à la séance.
Autant les monomères sont dangereux pour la santé, autant nous avons besoin des polymères fluorés, notamment dans la fabrication des matériels médicaux et des semi-conducteurs. Prenons garde à ne pas nous tirer une balle dans le pied.
Il ne peut y avoir surtransposition dès lors qu'il n'existe pas encore de texte européen. La proposition de loi doit être ambitieuse pour servir d'aiguillon pour la future réglementation européenne.
Certains affirment que l'utilisation des polymères ne pose pas de problème. On sait, en revanche, que leur dégradation en pose – il peut en résulter une production incontrôlée de PFAS. Pour vous en persuader, je vous recommande les travaux de Ian Cousins, spécialiste européen des PFAS. En outre, l'Agence européenne des produits chimiques rappelle dans sa proposition les risques liés aux polymères et à leur dégradation en monomères. L'OCDE, qui a établi une définition des PFAS, est sur la même ligne.
L'excellent rapport de M. Isaac-Sibille conclut à la nécessité d'une réglementation qui a pour but de restreindre la famille des PFAS plutôt que de travailler substance par substance. Il invite également à s'appuyer sur la définition des PFAS proposée par l'OCDE, qui inclut toutes les substances comprenant des polymères fluorés. En bon élève, je n'ai fait que reprendre ces recommandations.
La commission rejette successivement les sous-amendements portant sur l'amendement CD85, qu'elle adopte.
En conséquence, tous les amendements se rapportant aux alinéas 1er à 13 tombent.
Amendement CD62 de M. Pierre Vatin
Cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement sur les contrôles qu'il compte instaurer pour faire respecter l'interdiction d'importation de produits contenant des PFAS. Cette question, d'autant plus pertinente si nos voisins européens n'appliquent pas l'interdiction, est l'un des angles morts de la proposition de loi.
Ma position sera constante sur les demandes de rapport, qu'il ne me semble pas utile de multiplier : avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD44 de M. Pierre Meurin
Je suis bien sûr opposé à la suppression du II de de l'article 1er, qui a pour objet de généraliser la surveillance de la présence de PFAS dans l'eau potable dès la promulgation de la loi. Ce contrôle devrait être obligatoire en 2026, mais cela signifie qu'un temps précieux sera perdu pour faire des mesures et quantifier ces substances.
Face à l'inquiétude croissante dans tous les territoires, nourrie notamment par les révélations de plusieurs enquêtes journalistiques, nous devons la transparence à nos concitoyens. Pour un territoire touché par une pollution, rester dans le doute jusqu'en 2026, c'est une éternité. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD78 du rapporteur.
Amendement CD25 de M. Jorys Bovet
Il s'agit d'un amendement rédactionnel visant à substituer au terme « potables » ceux de « destinées à la consommation humaine ».
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD79 du rapporteur.
Amendement CD69 de M. Cyrille Isaac-Sibille
L'amendement a pour objet de ne pas limiter les substances recherchées dans l'eau aux vingt PFAS listés dans la directive relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine.
Vous voulez fixer par décret la liste des PFAS contrôlés. Or l'objectif est de pouvoir contrôler tous les PFAS et de laisser aux autorités sanitaires des territoires la capacité de rechercher des polluants éternels spécifiques en fonction de l'histoire économique et industrielle locale – nous avons déjà évoqué la pollution liée au TFA à Salindres dans le Gard. Mon avis est défavorable.
L'histoire industrielle des territoires est importante. Dans mon cas personnel, on ne trouve pas forcément de lien entre mon taux de contamination aux PFAS, dix fois plus élevé que celui de certains collègues, et mon territoire. On sait cependant que celui-ci a connu, il y a trente ans, un accident industriel majeur qui a nécessité une utilisation massive de mousses anti-incendie, et que l'eau potable a été coupée pendant huit jours pour 200 000 habitants. C'est une hypothèse parmi d'autres qui peut expliquer ma contamination.
Il est indispensable de pouvoir explorer de manière très large la présence des PFAS.
Il est souhaitable de ne pas se limiter aux vingt PFAS reconnus par la directive, pour tenir compte certes de l'histoire des territoires, mais aussi du processus de dégradation. Je suis presque plus ambitieux que vous !
Monsieur le rapporteur, je ne suis pas sûr de comprendre les raisons de votre opposition à l'amendement, qui me semble plutôt aller dans le bon sens. Pouvez-vous préciser ?
J'ai l'impression qu'avec ses arguments, M. Isaac-Sibille défend plutôt ma rédaction ! Je propose de laisser aux autorités de contrôle régionales la liberté d'investiguer et de contrôler la présence d'un maximum de polluants éternels. La liste dont il demande l'établissement par décret sera nécessairement plus restrictive. Nous partageons le même objectif : trouver le plus grand nombre de PFAS, certains étant circonscrits à des zones particulières. Je ne comprends pas bien l'objet de notre discussion car il me semble que nous sommes d'accord, auquel cas il ne faut pas toucher à notre rédaction.
Ma rédaction ne retire rien, elle ajoute. Vous voulez restreindre, libre à vous de donner un avis défavorable.
La commission adopte l'amendement.
Amendements CD11 de Mme Chantal Jourdan et CD33 de M. Jorys Bovet (discussion commune)
Mon amendement vise à cartographier les principaux sites et communes concernés par une pollution aux PFAS.
En Europe, on recense 17 000 sites contaminés – au-delà de 10 nanogrammes par litre –, dont 2 100 à des niveaux dangereux pour la santé. Il s'agit d'affiner ce travail pour le territoire national.
Cet amendement est inspiré de la recommandation 8 du rapport de l'Igedd concernant l'analyse des risques de présence de PFAS dans l'environnement, ainsi que du rapport de M. Isaac-Sibille.
La cartographie sera mise à jour annuellement.
Créer une cartographie des sites ayant pu émettre des PFAS me semble une idée très pertinente afin de mesurer les risques qu'encourt la population. Cela permettrait également au Gouvernement de définir une liste des communes les plus exposées. Avis favorable à l'amendement CD11, le CD33 étant moins précis.
Cette demande n'est-elle pas déjà satisfaite par la classification et le régime applicables aux sites susceptibles de rejeter des polluants éternels ? Je pense notamment aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE).
Je soutiens l'amendement CD11. Les PFAS évoluent dans le temps. Il en existe entre 4 000 et 12 000 et la réglementation évoquée ne couvre pas forcément tous les usages.
J'en profite pour saluer le travail de cartographie exceptionnel mené par un consortium de journalistes, parmi lesquels Stéphane Horel, du journal Le Monde. Les quelques erreurs que ce travail comporte s'expliquent par le fait que les données fournies par l'État n'étaient pas toujours exactes. Il faut donc un travail approfondi, et cette cartographie me paraît plus que nécessaire. Je vous invite à aller regarder ce qui existe déjà pour savoir ce qu'il en est pour votre territoire : les sites de concentration de PFAS apparaissent en rouge. Sur la carte européenne, il y a du rouge partout ! Cela montre le caractère généralisé de cette pollution.
La cartographie doit permettre de répertorier les sites de production, mais également de diffusion des PFAS. Grâce à la généralisation des tests prévue dans l'article 2, nous aurons également une meilleure connaissance de la présence de PFAS dans les territoires.
Pour répondre à M. Cazeneuve, il n'est pas proposé de cartographier que les sites, mais également les communes les plus exposées. Or certaines n'ont pas proprement d'ICPE sur leur territoire.
La commission adopte l'amendement CD11.
En conséquence, l'amendement CD33 tombe.
Amendement CD22 de M. Gabriel Amard
Nous souhaitons que le contrôle de la qualité de l'air prenne lui aussi en considération la présence de PFAS.
Les PFAS sont partout, y compris dans les aliments. On peut imaginer que la pollution de l'air par les PFAS soit tout aussi néfaste que la contamination de l'eau. À cet égard, nous prônons la tolérance zéro pour les émissions de PFAS, qu'il s'agisse des cheminées de sites de production ou des incinérateurs de déchets ménagers – pollution effective dès lors que la température est inférieure à 1 400 degrés. Nous avons déposé des amendements en ce sens.
La présence de PFAS dans l'air n'est pas contrôlée aujourd'hui, faute de méthodologie. Leur persistance ainsi que la sensibilité de la population à ces polluants dans l'air sont des phénomènes mal connus.
L'Atmo Auvergne Rhône-Alpes, qui est l'observatoire de la qualité de l'air de la région, développe actuellement une méthodologie qui devrait ensuite être déployée dans les autres régions.
J'émets un avis favorable car il me semble très utile, pour mieux connaître l'exposition de la population, de pouvoir contrôler la présence de PFAS dans l'air et de les quantifier, à l'instar de ce qui va être fait pour l'eau potable.
Soyons prudents. Laissons le temps aux Atmo de développer des outils. Il est préférable de demander au Gouvernement de traiter le sujet dans le cadre du plan d'action PFAS en renforçant le rôle des Atmo.
Les structures de surveillance de la qualité de l'air sont régionales. Leurs outils s'adaptent aux pollutions de leur territoire. L'Atmo Auvergne Rhône-Alpes a commencé un travail sur le sujet, laissons les structures développer leur expertise avec le soutien de l'État.
L'amendement, qui tend à rendre le contrôle obligatoire, me semble prématuré.
Il s'agit seulement de contrôler l'air pour connaître les émanations de PFAS. Ce n'est pas contradictoire avec le travail mené au plan régional.
Nous sommes aujourd'hui freinés par la métrologie : les technologies pour détecter et mesurer ces substances dans l'air ne sont pas encore au point. L'Atmo Auvergne Rhône-Alpes mène un travail sur le sujet. Faisons confiance à nos scientifiques. Une fois que la méthodologie sera mise au point, elle pourra être déployée dans les autres régions puis intégrée dans les plans de protection de l'atmosphère, voire dans le Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (Prepa).
L'amendement est donc prématuré pour des raisons scientifiques. Il ne faut pas y voir une position politique : si l'on veut être responsable, il faut laisser l'Atmo Auvergne Rhône-Alpes poursuivre son travail. Une fois que l'outil sera prêt, nous pourrons militer auprès du ministère pour son déploiement au niveau national.
Il y a toujours une raison technique pour ne pas faire ! Sur ces sujets, le pied est plus souvent sur le frein que sur l'accélérateur.
Si vous considérez que c'est important, proposez un sous-amendement fixant un délai de mise en œuvre, plutôt que de vous en remettre à une hypothétique solution. Travaillons d'ici à la séance publique pour préciser les conditions dans lesquelles cette ambition peut se réaliser, au lieu de renoncer devant l'incertitude. La santé humaine est en jeu. Nous devons trouver une solution.
Tout le monde est d'accord pour mesurer les PFAS dans la pollution de l'air. M. Fugit a raison : il n'y a aucun intérêt à voter une mesure qui n'a aucune chance de s'appliquer. Je vous invite à vous rapprocher du rapporteur pour trouver un délai raisonnable d'ici à la séance publique.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD12 de Mme Chantal Jourdan
Cet amendement vise à prévenir les risqués liés aux PFAS grâce à une campagne nationale de sensibilisation. Les scientifiques, et notamment l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), nous alertent sur les risques que les PFAS représentent pour la santé. Ces substances, qui sont utilisées dans de nombreux produits de la vie courante, peuvent favoriser le développement de cancers et l'infertilité, avoir des effets sur le développement du fœtus, ou encore entraîner des problèmes endocriniens ou immunitaires. Leur effet le plus dangereux, aux yeux de l'Autorité européenne de sécurité des aliments, est la diminution de la réponse du système immunitaire à la vaccination. Cette mesure est issue d'une recommandation de l'Igedd.
Vous demandez un rapport sur la mise en œuvre d'une campagne nationale de sensibilisation aux PFAS. S'il est important d'informer la population, il faut veiller à ne pas multiplier les demandes de rapport. En outre, cet amendement supprimerait la seule demande de rapport contenue dans la proposition de loi, sur un sujet lié au contrôle sanitaire de l'eau potable. Avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendements CD15 et CD14 de M. Emmanuel Blairy
Après le temps de l'interdiction viendra celui de la dépollution, qui est complexe et très coûteuse, comme on le voit notamment aux États-Unis et en Chine. L'amendement CD15 vise à intégrer dans le rapport prévu à l'alinéa 16 une étude sur la dépollution.
Le CD14 a pour objet d'étendre le champ du rapport aux émissions de PFAS dans l'atmosphère, qu'il convient de surveiller et de limiter afin de réduire leur impact sur l'environnement et la santé humaine.
Le rapport pourrait certes aborder de nombreux sujets, mais je souhaite qu'il conserve son objet initial, qui est de déterminer les nouvelles valeurs de référence pour le contrôle sanitaire ou, du moins, d'indiquer comment les agences sanitaires peuvent mettre à jour les valeurs de référence et en déterminer de nouvelles. Avis défavorable sur les deux amendements.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD45 de M. Pierre Meurin
Le groupe Solvay, qui a une usine à Salindres, a lancé un plan pluriannuel d'investissements de 20 millions d'euros sur cinq ans pour le traitement des déchets et l'amélioration des canalisations et des systèmes de traitement des effluents. Ces mesures limiteront la pollution future aux PFAS, mais la pollution existante demeurera, à l'image de la montagne de déchets de Salindres. Le Gouvernement doit donc définir une stratégie et établir une feuille de route en matière de dépollution, et non pas seulement soumettre les industriels à des mesures d'interdiction.
Comme je l'ai indiqué, je souhaite que la demande de rapport garde son objet initial. Défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette successivement l'amendement CD46 de M. Pierre Meurin et les amendements CD2 et CD3 de Mme Christelle Petex.
La commission adopte l'article 1er modifié.
Présidence de M. Jean-Marc Zulesi
Article 1er bis (nouveau) : Rejets de substances per- et polyfluoroalkylées par les installations classées pour la protection de l'environnement
Amendements CD70 de M. Cyrille Isaac-Sibille et CD10 de M. David Taupiac (discussion commune)
L'urgence, à mes yeux, consiste à interdire les rejets et à traiter l'eau que boivent nos concitoyens. On connaîtra bientôt les résultats du plan gouvernemental de surveillance des rejets aqueux de 5 000 ICPE. La question est de savoir si l'on continue à admettre les rejets de PFAS alors qu'il existe des moyens de les éviter. Dans le Rhône, deux usines ont rejeté massivement des PFAS pendant des décennies jusqu'à ce qu'un arrêté préfectoral soit pris, à la suite des révélations de mai 2022, imposant à ces installations chimiques une restriction de leurs rejets par paliers, suivant un certain calendrier. De la même façon, un arrêté ministériel pourrait être pris pour réduire progressivement ces rejets à l'échelle nationale, jusqu'à leur suppression.
Le plan d'action de 2023 a établi une feuille de route visant à déterminer le niveau des rejets des sites classés ICPE. À cette fin, un arrêté de juin 2023 a imposé aux industriels de réaliser des analyses et de déclarer les PFAS qu'ils utilisent. L'amendement CD10, que j'avais déjà présenté l'année dernière, vise à ce que les rejets aqueux et les effluents gazeux respectent des valeurs limites à partir du 1er janvier 2025, soit un an et demi après l'entrée en vigueur de l'arrêté – on avait alors estimé qu'il faudrait environ un an pour collecter ces données. L'objectif est de tendre vers zéro en attendant l'interdiction totale de production des PFAS.
Monsieur Isaac-Sibille, votre amendement vise à interdire les rejets aqueux d'un certain nombre d'ICPE selon un calendrier fixé par décret. Le principe est louable, mais je ne suis pas favorable à la rédaction de votre amendement, pour deux raisons. D'abord, vous renvoyez au décret la définition des paliers de réduction, ce qui n'offre aucune garantie quant à l'ambition de la mesure. Ensuite, vous ne vous appuyez pas sur une stratégie visant à faire cesser, à terme, les émissions de PFAS par les ICPE. Pour ces raisons, votre amendement paraît quelque peu incantatoire. On ne peut que souhaiter la disparition des rejets dans un avenir proche, mais une stratégie d'ensemble et d'autres mesures législatives sont nécessaires. Avis défavorable.
Monsieur Taupiac, vous aviez déjà fait cette proposition l'année dernière, avant même que le ministère de la transition écologique ne commence sa campagne de mesure ponctuelle des rejets des ICPE. Il serait en effet intéressant que ce processus conduise à fixer des limites de rejets de PFAS. Sagesse.
Monsieur le rapporteur, je ne vous suis absolument pas. Allez-vous rencontrer les gens qui vivent aux alentours d'une ICPE ? Ce qu'ils demandent, avant toute chose, c'est l'arrêt des rejets. Je ne comprends pas que le député écologiste que vous êtes accepte que les industriels continuent à rejeter des PFAS. Vous souhaitez taxer les industriels sur la base de leurs rejets. Moi, j'entends que l'urgence, pour nos concitoyens, est de les faire cesser, ce à quoi nous sommes parvenus dans le Rhône. C'est pour cela que mon amendement n'est pas incantatoire : si on l'a fait dans le Rhône, pourquoi pas à l'échelle du pays ? Pourquoi une telle réserve ? Je me pose vraiment des questions sur votre avis défavorable.
Monsieur le rapporteur, j'ai le sentiment que la disposition proposée par M. Isaac-Sibille compléterait vos travaux sur la redevance. Certes, un décret prendra un peu de temps, et nous n'avons pas de visibilité sur les interdictions qui seront prononcées. Votre redevance sera d'application plus rapide, mais elle conduira à faire payer les industriels pour leurs rejets, pas à interdire ces derniers. Avec les deux dispositifs, on aurait une double sécurité.
Plutôt que de l'adosser aux rejets, il faudrait faire reposer la redevance sur les quantités d'eau prélevées par les industriels sur les réseaux d'eau potable ou en milieu naturel. En effet, grâce à la proposition de loi, il y aura de moins en moins de rejets polluants, alors que nous aurons besoin de fonds substantiels pour financer les actions de dépollution que mèneront les autorités organisatrices pendant des décennies. J'appelle donc à ce que nous travaillions de manière transpartisane, d'ici à la séance publique, pour modifier en ce sens l'assiette de la redevance.
L'amendement de M. Isaac-Sibille est ambitieux et opérationnel. J'ai pris acte de vos réserves, monsieur le rapporteur, et respecte votre expertise sur le sujet, mais je propose, comme vous le faites d'ailleurs souvent, que nous adoptions l'amendement en l'état et que nous revoyions collectivement sa rédaction d'ici à la séance publique pour opérer les modifications qui s'imposeraient. Nous partageons en effet une même volonté, et il semble que cet amendement compléterait utilement votre texte. Les trois groupes de la majorité seront à votre écoute pour rendre le dispositif le plus efficace possible.
La rédaction de l'amendement soulève une autre difficulté : elle ne précise pas si toutes les ICPE sont concernées, ou seulement les installations correspondant aux rubriques de la nomenclature citées dans le texte.
Monsieur Isaac-Sibille, on peut relever une contradiction assez notable dans vos prises de position – plus forte, en tout cas, que celle que vous croyez discerner dans mes propos. En effet, vous demandez aux industriels de ne plus rejeter de PFAS, mais en les autorisant dans le même temps à continuer à en produire, puisque vous refusez d'interdire les PFAS dès 2027 et d'anticiper l'application en France de la réglementation européenne ! Or le meilleur moyen d'éviter les rejets de PFAS est bien d'arrêter d'en produire.
Je suis prêt à travailler sur votre amendement d'ici à la séance publique, mais ne me faites pas endosser une position qui est à l'opposé de mes convictions.
Ne doutez pas une seconde que je souhaite que les industriels cessent de polluer et de rejeter les PFAS. Ce serait un mauvais procès, et peu crédible. Mon avis est défavorable en raison de la rédaction de votre amendement qui, je le répète, est incantatoire, faute de garanties quant à l'ambition de la mesure et de stratégie pour sortir des PFAS. Puisque nous sommes d'accord sur le principe, essayons de trouver une rédaction satisfaisante d'ici à la séance.
La commission adopte l'amendement CD70.
En conséquence, l'amendement CD10 tombe.
Après l'article 1er
Amendement CD23 de Mme Anne Stambach-Terrenoir
Nous proposons que les exploitants des ICPE utilisant, produisant, traitant ou rejetant des PFAS dressent une liste publique des substances concernées et réalisent une campagne d'identification et d'analyse des PFAS sur chaque point de rejet dans l'air. Nous entendons ainsi répondre à une recommandation de l'Igedd qui appelle à une identification nationale des sites potentiellement émetteurs de ces substances. L'Inspection relève que la réglementation nationale des émissions industrielles encadre beaucoup trop peu les rejets de PFAS et que le dispositif de surveillance est largement lacunaire, notamment parce qu'on ne tient aucun compte de la présence des PFAS dans l'air.
Nous sommes, ni plus ni moins, en présence d'un scandale sanitaire. Le plan PFAS présenté par le Gouvernement en janvier 2023 proposait que l'on commence à surveiller les rejets en 2026 – comme si on avait le temps, alors que ces substances s'accumulent dans nos organismes, puisqu'elles ne se détruisent pas naturellement, et provoquent cancers et baisse de l'immunité ! De surcroît, elles s'agglomèrent dans tous les milieux, y compris dans l'air. Actuellement, rien n'est fait, ne serait-ce que pour nous permettre de prendre la mesure de la situation.
Il est important que l'on connaisse précisément les PFAS utilisés et que les listes soient mises à jour régulièrement. Il semble tout aussi nécessaire de mesurer les rejets des installations dans l'atmosphère, ce qui permettrait de les limiter ou, à tout le moins, améliorerait notre information sur cette forme de pollution. Avis favorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD13 de M. Stéphane Delautrette
Cet amendement vise à créer une filière REP (responsabilité élargie des producteurs) spécifique aux produits contenant des PFAS afin d'assurer la dépollution des sites concernés. Cette proposition émane de la recommandation 17 du rapport de Cyrille Isaac-Sibille.
Il me semble qu'il serait difficile de mettre sur pied une telle filière au vu de la diversité des produits contenant des PFAS, dont certains, de surcroît, font déjà l'objet d'une prise en charge lorsqu'ils deviennent des déchets. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD21 de Mme Anne Stambach-Terrenoir
Par cet amendement, nous demandons un moratoire de dix ans sur la construction ou l'extension de toute entreprise utilisant, produisant ou rejetant des PFAS. Ce ne serait évidemment qu'une étape avant l'interdiction de ces substances, mais qui permettrait d'arrêter de créer de nouvelles sources de production. Il y a urgence. Les scientifiques estiment à au moins 4 700 le nombre de composés chimiques concernés, voire à 12 000, pour certains. Les industriels jouent un rôle majeur dans l'émission de ces substances. Le Monde, en février 2023, répertoriait 108 hotspots – des lieux où la contamination est si élevée qu'elle est dangereuse pour la santé humaine. Ce sont tous des sites industriels ou de retraitement des déchets. À Pierre-Bénite, les rejets d'Arkema et de Daikin entraînent des taux de pollution cinq à dix fois supérieurs aux normes ; or Daikin a obtenu en janvier une autorisation d'extension. Nous sommes face à une inaction véritablement criminelle. Le plan PFAS du Gouvernement n'impose aucune contrainte aux industriels.
Il est important d'éviter que les capacités de production des PFAS s'accroissent alors que nous visons leur disparition progressive. L'actualité récente a montré que deux grandes entreprises productrices de PFAS ont été autorisées à étendre leurs activités. Il me semble très pertinent de prendre le problème à la source. Avis favorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 2 : Introduction d'une redevance assise sur les rejets de PFAS dans l'eau
Amendement CD63 de M. Vincent Descoeur
L'article 2 de la proposition de loi reprend la proposition n° 78 du rapport d'information sur la politique de l'eau déposé le mois dernier par Yannick Haury et Vincent Descoeur, laquelle préconise d'élargir l'assiette de la redevance pour pollutions diffuses de l'eau aux PFAS. Le groupe Les Républicains est en accord avec l'esprit de cet article, mais propose d'y apporter deux modifications : l'élargir à la redevance sur la pollution à la fois domestique et non domestique, et préciser que ces taxes ne s'appliquent qu'aux rejets nets engendrés par les sites et non à la pollution historique indépendante de l'activité du producteur.
Nous avons souhaité intégrer les PFAS à la liste des substances prises en compte au titre des redevances sur la pollution de l'eau par l'ajout d'un alinéa plutôt que d'une ligne au tableau prévu par l'article L. 213-10-2 du code de l'environnement. Nous avons fait ce choix pour une raison simple : les substances mentionnées dans le tableau donnent lieu à la perception d'une redevance dont seuls le seuil de perception et le tarif maximum sont fixés par la loi. Le taux effectif de la redevance est quant à lui déterminé par chaque agence de l'eau. Nous proposons de fixer un tarif unique, qui sera appliqué par toutes les agences à l'échelle nationale. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD80 du rapporteur.
Amendement CD52 de M. Jean-Luc Fugit
Dans le département du Rhône, des entreprises, des collectivités et l'État ont entrepris un travail d'analyse et de concertation pour diminuer la quantité de PFAS rejetés dans l'eau. Arkema les a par exemple réduits de 80 % : c'est un premier pas intéressant, mais il faudra atteindre dès que possible les 100 %.
Cet amendement vise à appliquer le principe pollueur-payeur à toutes les personnes morales de droit public et de droit privé qui rejettent des PFAS dans l'environnement, à l'exclusion de celles qui ont engagé des investissements dans un système de traitement des rejets. La proportionnalité et l'applicabilité de la mesure impliquent de considérer les personnes morales de droit public ou de droit privé ; elle ne saurait donc s'appliquer à la seule industrie. Cet amendement vise à exclure du champ de la redevance les pollutions historiques, dont l'origine n'est pas toujours identifiable et qu'il est donc difficile d'imputer à un acteur en particulier. La redevance doit conserver un caractère incitatif et ne porter que sur les rejets dont la personne morale a, d'une manière ou d'une autre, la maîtrise.
Votre amendement ne permet pas de comprendre comment sera fixé le taux de la redevance maximale applicable par les agences de l'eau. Par ailleurs, vous souhaitez exclure du champ de la redevance les industries « qui ont annoncé des investissements dans un système de traitement des rejets ». Beaucoup d'entreprises pourraient ainsi échapper à la redevance en se contentant d'annoncer des investissements.
Les rejets effectifs doivent entraîner une prise en charge des coûts de la dépollution, qui ne repose pas seulement sur la collectivité publique mais aussi sur les personnes qui émettent ces substances. Cette disposition, si elle était adoptée, fragiliserait le dispositif de la redevance. Je suis donc très défavorable à cet amendement.
J'y suis également défavorable car il suffirait d'annoncer des investissements pour échapper à la redevance.
De manière générale, je voudrais dire qu'aucune des positions exprimées dans notre débat ne doit être caricaturée. Monsieur Isaac-Sibille, lorsque vous vous opposez à l'application du texte aux ustensiles de cuisine, je n'en déduis pas que vous ne souhaitez pas vous battre contre les PFAS – le rapport de qualité que vous avez écrit sur le sujet démontre le contraire. De la même façon, lorsque le rapporteur est en désaccord avec la rédaction d'un amendement, je trouve regrettable que l'on n'essaie pas de trouver ensemble une formulation satisfaisante en vue de la séance publique et que l'on se lance des accusations. Travaillons ensemble pour faire avancer cette cause.
Vous êtes un certain nombre à considérer que le principe pollueur-payeur ne doit pas s'appliquer aux pollutions passées. Pour ma part, j'estime que les autorités organisatrices, autrement dit les collectivités, doivent chiffrer l'ensemble des moyens à engager pour dépolluer – ce sera des millions, voire des milliards d'euros – et que nous devrons bâtir, à l'échelle des agences de l'eau, un système de redevance permettant de financer une programmation pluriannuelle d'investissement aussi longtemps qu'il le faudra. La redevance devra s'appliquer à l'ensemble des industriels ayant produit des PFAS par le passé, et non à ceux qui les ont utilisés. Si on n'appliquait pas cette règle, les particuliers subiraient une double peine : on reporterait sur la facture d'eau de ceux qui subissent la pollution, au point parfois d'en tomber malade, le montant de la redevance versée afin de financer les travaux indispensables. Ce n'est pas sérieux : il va bien falloir se confronter aux enjeux du financement de la dépollution. Ce n'est pas aux familles de Pierre-Bénite de payer, mais aux industriels.
Je suis assez d'accord avec M. Amard. L'urgence consiste à déterminer comment aider les collectivités à financer des travaux pour que nos concitoyens boivent une eau saine. Il faudrait prévoir un dispositif plus global, auquel on peut réfléchir d'ici à la séance publique.
Tel qu'il est rédigé, l'amendement conduirait à réduire considérablement la portée de la redevance. Comme je l'ai dit, il suffirait qu'une personne morale de droit public ou de droit privé annonce des investissements pour s'y soustraire : toutes les entreprises quasiment pourraient y échapper. Par ailleurs, l'amendement ne fixe pas le taux de la redevance, ce qui fragiliserait substantiellement, voire empêcherait l'application du principe pollueur-payeur.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD71 de M. Cyrille Isaac-Sibille
L'alinéa 5 de l'article évoque la « redevance due par une personne dont les activités entraînent des rejets ». Or tout le monde est à l'origine de rejets. C'est pourquoi je propose de préciser que la disposition s'applique à l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement soumise à autorisation. Je ne crois pas qu'il soit dans votre intention, monsieur le rapporteur, d'assujettir les services départementaux d'incendie et de secours au paiement de cette redevance, à l'instar de beaucoup d'autres acteurs qui émettent des PFAS.
Votre amendement vise à circonscrire le champ d'application de la redevance aux ICPE. Dans la mesure où l'on n'est pas certain que d'autres sites ne rejettent pas de PFAS en quantité significative, il me paraît préférable de viser un périmètre plus large. Par ailleurs, les sites qui ne rejettent que peu de PFAS ne seront pas redevables de la redevance, puisqu'ils resteront en deçà du seuil de perception.
Le champ des PFAS est si vaste qu'il faut préciser de quels rejets il s'agit, sous peine d'assujettir à la redevance les pompiers et de nombreux autres utilisateurs. Je ne suis pas sûr que ce soit votre souhait.
Il semble que votre rédaction aille à l'encontre des dispositions du code de l'environnement qui prévoient qu'une redevance s'applique à toute personne.
Soyons audacieux ! Des jurisprudences permettent d'ores et déjà d'appliquer une tarification différenciée de l'eau potable selon que l'usager est un particulier ou un professionnel. Il nous faut travailler, d'ici à la séance publique, à une rédaction commune sur la redevance applicable à des professionnels qui, de surcroît, ont engendré de la pollution, directement ou indirectement.
Je propose que l'on cherche une rédaction robuste en vue de la séance publique. Le fond n'est pas en cause : c'est une question purement juridique.
Non, ce qui est en question, c'est l'étendue du champ d'application de la mesure. Compte tenu de la rédaction actuelle, toute personne utilisant des PFAS et en rejetant serait soumise à la redevance, quels que soient son statut et son activité : cela concernerait non seulement les pompiers, mais aussi les agriculteurs et de nombreux autres acteurs, puisque les PFAS sont partout. Encore une fois, je souhaite interdire les rejets, vous préférez les autoriser et les taxer. Le problème ne tient pas à la rédaction, mais au périmètre que vous souhaitez établir.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD64 de M. Pierre Vatin
Nous proposons que le calcul de la redevance repose exclusivement sur l'ajout de PFAS dans les milieux et non sur l'ensemble des rejets. En effet, certaines installations peuvent rejeter des PFAS alors qu'elles n'en sont pas à l'origine. Nous privilégions une approche fondée sur la responsabilité, conformément à la philosophie de la proposition de loi.
Votre intention est satisfaite par l'article L. 213-10-2 du code de l'environnement, qui s'appliquera à la redevance créée par l'article 2 de la proposition de loi. En effet, l'industriel pourra demander que le suivi des rejets servant à calculer l'assiette de la redevance ait « pour objet de mesurer la pollution annuelle ajoutée par l'activité ». Cela implique de pouvoir isoler l'apport de PFAS issus du processus de fabrication de l'entreprise et des produits fabriqués par rapport à une quantité plus globale de ces substances mesurée dans les rejets. Il s'agit, me semble-t-il, de l'idée que vous défendez.
L'insertion de l'adjectif « nets » permettrait d'exprimer plus clairement l'objectif de la proposition de loi.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CD49 de M. Pierre Meurin.
Amendements CD29 et CD30 de M. Jorys Bovet, et CD48 de M. Pierre Meurin
Ces amendements visent à ce que seuls les rejets nets, autrement dit intentionnellement ou effectivement ajoutés au milieu naturel, soient soumis à la redevance. Lorsqu'un industriel utilise de l'eau par exemple, il conviendrait de mesurer la quantité de PFAS à l'entrée et à la sortie de l'usine pour connaître précisément l'ampleur des rejets.
Concernant l'amendement CD29, comme je l'ai dit précédemment, le code de l'environnement fait déjà référence à la notion de « pollution annuelle ajoutée par l'activité ».
Le CD30, quant à lui, risquerait de réduire considérablement les cas dans lesquels la redevance serait due, avec l'ajout du critère d'intentionnalité. Je peux comprendre que l'on souhaite calculer une pollution nette, ce qui implique qu'une entreprise puisse isoler l'apport de PFAS antérieur à son activité et mesurer les rejets issus de son activité propre. En revanche, je ne crois pas qu'il faille considérer le caractère intentionnel ou non de l'usage des PFAS, car cela désinciterait les personnes soumises à la redevance à réduire la présence de PFAS. In fine, l'environnement sera de toute façon touché par la pollution. Notre objectif étant de permettre un meilleur financement de la dépollution, nous ne souhaitons pas fragiliser le dispositif.
S'agissant, enfin, de l'amendement CD48, j'émets l'hypothèse que le terme « effectivement » rejoint la notion de rejet net ou d'ajout intentionnel de PFAS par une entreprise.
Avis défavorable sur les trois amendements.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD66 de M. Pierre Vatin
Nous proposons d'asseoir la redevance sur les PFAS introduits, et non pas rejetés, par l'entreprise.
Je ne vois vraiment pas la nuance sémantique entre « introduits » et « rejetés » dans l'environnement.
Il s'agit de cibler la redevance sur les PFAS dont l'entreprise est à l'origine, qu'elle introduit, par opposition aux PFAS rejetés, qui peuvent avoir une origine antérieure.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CD83 du rapporteur, CD47 de M. Pierre Meurin et CD20 de M. Gabriel Amard (discussion commune)
Mon amendement vise à abaisser le seuil de perception de la redevance et à adapter le barème. En effet, le seuil prévu, d'un kilogramme de rejets par an, est relativement élevé. De nombreuses entreprises peuvent rejeter des quantités moins importantes mais de manière continue, ce qui fait courir un risque tout aussi grand de contamination à l'environnement. Afin de rendre effective la participation des entreprises à la prise en charge du coût de la dépollution de l'eau, il est proposé que la redevance soit due dès le rejet de 100 grammes de PFAS. En conséquence, le barème est modifié, avec un montant de 100 euros par tranche de 100 grammes. Cette modification résulte d'une préconisation que nous a faite le ministère de la transition écologique lors de son audition, sur la base des modélisations auxquelles il a procédé.
La rédaction de l'amendement du rapporteur étant meilleure que la nôtre, nous retirons l'amendement CD20.
L'amendement CD47 a pour objet de renvoyer la fixation du taux de la redevance à un décret. Pourquoi refuser d'inscrire directement ce taux dans la loi, au risque de devoir attendre, plus ou moins longtemps, la publication du décret ? Nous disposons des informations nécessaires à la fixation d'un taux juste. Il est de notre responsabilité de prendre une décision dès aujourd'hui. Avis défavorable.
L'amendement CD20 est retiré.
La commission adopte l'amendement CD83. En conséquence, l'amendement CD47 tombe.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CD57 de M. Antoine Villedieu.
Elle adopte l'article 2 modifié.
Après l'article 2
Amendement CD24 de M. Gabriel Amard
Selon une synthèse bibliographique réalisée en décembre 2023 par l'Ineris (Institut national de l'environnement industriel et des risques), une température très élevée, supérieure à 1 300 degrés, voire 1 400, garantit la destruction des PFAS et de leurs sous-produits. Or les incinérateurs de déchets ménagers fonctionnent à une température comprise entre 750 degrés et 1 100 degrés, et ceux des boues d'épuration entre 850 degrés et 900 degrés : les mâchefers qui en sortent, qui sont recyclés et réutilisés par exemple dans les infrastructures publiques, les chaussées ou les voies ferrées, contiennent donc des PFAS qui se répandent ensuite dans l'environnement. Nous n'avons par ailleurs aucune garantie, en l'état actuel de la réglementation, que des PFAS ne ressortent pas de ces incinérateurs par les cheminées, puisqu'on ne mesure pas leur présence dans l'air – vous l'avez en quelque sorte refusé en rejetant tout à l'heure mon amendement CD22.
Ces travaux de l'Ineris nous donnent donc l'occasion de fixer, par la loi, un seuil de 1 400 degrés pour l'incinération de tout produit contenant des PFAS, de manière à éviter qu'on n'en retrouve dans l'air ou dans les mâchefers.
Je ne peux pas donner un avis favorable à cet amendement, du fait de son caractère trop général et de ses possibles conséquences. Il n'existe quasiment aucune ICPE d'incinération montant à une température de 1 400 degrés : d'après la fédération des entreprises spécialistes de la dépollution, les incinérateurs les plus performants atteignent 1 250 degrés. Les passer tous à 1 400 degrés serait très énergivore, et prendrait du temps. Étant donné le très grand nombre de produits contenant des PFAS, on courrait alors le risque de ne simplement plus pouvoir incinérer de très nombreux déchets, par ailleurs potentiellement dangereux, et de voir exploser le recours à l'enfouissement. Avis défavorable pour cette raison technique.
Je suis ouvert à une autre rédaction. J'ai été, pendant plusieurs années, vice-président d'un syndicat de collecte et de traitement des déchets : ce ne serait pas la première fois que le législateur demanderait, avec un calendrier et des aides publiques à l'investissement, de faire progresser les techniques d'incinération afin de supprimer des rejets que les filtres ne peuvent pas capter. Pourquoi ne pas fixer encore une fois un objectif et définir un calendrier, ainsi qu'un mode opératoire, permettant de l'atteindre ? C'est un exemple de ce qu'il faut financer dans la durée, avec une programmation pluriannuelle d'investissement qui prenne au sérieux l'ensemble de la pollution, passée et à venir. Les PFAS ne vont pas disparaître de tous les domaines : il va bien falloir les détruire, plutôt que de fermer les yeux et de les laisser se répandre dans l'environnement. Cet objectif de 1 400 degrés est de nature à nous protéger, nous et les générations futures.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CD50 de M. Pierre Meurin.
Amendements CD17 de M. David Taupiac et CD38 de M. Jorys Bovet (discussion commune)
Depuis 2023, la recherche de polluants éternels est obligatoire pour certaines ICPE. Mon amendement demande un rapport sur l'accès à ces données par les collectivités locales, afin que celles-ci puissent prendre les mesures nécessaires, notamment de traitement de l'eau.
Malgré l'intérêt de l'amendement présenté par M. Taupiac, je redis qu'il ne me paraît pas utile de multiplier les rapports. Avis défavorable.
Même argument pour le CD38, d'autant que des études sont déjà menées.
La commission rejette successivement les amendements.
Article 2 bis (nouveau) : Mission des agences régionales de santé
Amendement CD16 de M. David Taupiac
Cet amendement prévoit que dans chacune des agences régionales de santé, la commission de coordination dans les domaines de la prévention, de la santé scolaire, de la santé au travail et de la protection maternelle et infantile présente, à partir de données chiffrées disponibles ou à construire, le niveau d'exposition de la population de leur ressort aux PFAS.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 2
Amendement CD37 de M. Jorys Bovet
On estime que les PFAS pourraient recouvrir plus de 10 000 substances : dès lors, les laboratoires ne peuvent les détecter toutes et les autorités sanitaires ne peuvent pas connaître les impacts réels sur la santé des populations de chacune de ces substances. Cette demande de rapport vise à examiner quelles sont les substances qui risquent le plus de contaminer les populations, et quelles sont les populations pour lesquelles les risques sont les plus grands.
Toujours le même argument : il n'est pas utile de multiplier les rapports. De plus, sur ce point, des études scientifiques et épistémologiques sont déjà menées.
La commission rejette l'amendement.
Article 3 : Compensation des charges pour l'État
Amendements identiques CD32 de M. Jorys Bovet, CD54 de Mme Claire Colomb-Pitollat, CD65 de M. Pierre Vatin, CD72 de M. Cyrille Isaac-Sibille et CD77 de Mme Anne-Cécile Violland
Nous proposons de supprimer l'alinéa 2. Cet article de gage propose en effet la création d'une taxe additionnelle sur les bénéfices des entreprises émettrices de PFAS, mais sans prendre en considération le niveau de rejet de ces substances. Cela ne nous semble pas conforme au principe pollueur-payeur.
La proposition du rapporteur d'une taxe de 1 % me paraît en effet difficilement applicable. Nous devons réfléchir aux moyens d'alimenter un fonds PFAS, dont je préconise également la création dans mon rapport. Il ne serait pas normal de faire payer les consommateurs d'eau. Quant aux agences de l'eau, elles sont déjà chargées de missions nombreuses. Je ferai des propositions en vue de la séance publique.
La loi doit être juste et proportionnée, ce qui n'est pas le cas ici. Cette taxe toucherait en effet toutes les entreprises, y compris celles qui ont déjà investi pour faire diminuer leurs rejets de PFAS. La piste de la responsabilité élargie des producteurs dès la conception de la substance paraît plus prometteuse.
Mon objectif, vous le comprenez, est d'adapter la fiscalité et de renforcer l'application du principe pollueur-payeur afin que les plus grandes entreprises qui rejettent des PFAS prennent en charge une partie des externalités négatives pour la société, pour l'environnement et pour la santé publique. Avis défavorable.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l'amendement CD31 tombe.
La commission adopte l'article 3 modifié.
Après l'article 3
Amendement CD35 de M. Jorys Bovet
L'usage domestique de certains appareils peut participer à la pollution par des PFAS. C'est notamment le cas des machines à laver, qui rejettent des eaux usées contaminées quand les vêtements contiennent eux-mêmes des PFAS. Cet amendement demande un rapport sur cette question, en particulier sur les filtres qui pourraient être posés sur les appareils lorsque cela serait jugé nécessaire. Cette proposition est calquée sur la disposition de la loi dite « Agec » (loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire) qui impose la mise en place de filtres à microplastiques sur les machines à laver à compter de 2025.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD36 de M. Jorys Bovet
Il s'agit d'évaluer, dans un rapport, les coûts de dépollution des espaces contaminés. Certaines techniques sont connues – charbon actif, osmose inverse – mais leur utilisation peut être difficile et coûteuse. Il faut anticiper pour éviter que les coûts de dépollution ne soient répercutés sur les factures des usagers, et donc des ménages.
La commission rejette l'amendement.
La commission adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
Merci à toutes et à tous pour la qualité des échanges et l'esprit constructif qui a prévalu depuis plusieurs semaines, malgré nos divergences. Il y a un an, nous en étions très loin. Je suis heureux que nous ayons pu avancer ensemble.
La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a examiné, en application de l'article 88 du Règlement, les amendements restant en discussion sur la proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile (n° 2307) .
(Mme Anne-Cécile Violland, rapporteure)
La commission a repoussé les amendements figurant dans le tableau ci-après :
N° Amdt | Place | Auteur | Groupe |
8 | PREMIER | M. MILLIENNE Bruno | Dem |
9 | PREMIER | M. MILLIENNE Bruno | Dem |
10 | PREMIER | M. MILLIENNE Bruno | Dem |
11 | PREMIER | M. MILLIENNE Bruno | Dem |
Informations relatives à la commission
La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a désigné Mme Sandrine Le Feur, rapporteure pour avis sur le projet de loi d'orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture (sous réserve de son dépôt).
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mercredi 27 mars 2024 à 9 h 30
Présents. - M. Damien Abad, M. Damien Adam, M. Henri Alfandari, M. Gabriel Amard, M. Christophe Barthès, M. José Beaurain, M. Olivier Becht, M. Emmanuel Blairy, M. Jean-Yves Bony, M. Jorys Bovet, M. Guy Bricout, M. Anthony Brosse, M. Aymeric Caron, M. Pierre Cazeneuve, Mme Claire Colomb-Pitollat, Mme Bérangère Couillard, Mme Annick Cousin, Mme Catherine Couturier, M. Vincent Descoeur, M. Nicolas Dragon, Mme Sylvie Ferrer, M. Charles Fournier, M. Jean-Luc Fugit, Mme Olga Givernet, M. Johnny Hajjar, M. Yannick Haury, Mme Chantal Jourdan, Mme Florence Lasserre, Mme Sandrine Le Feur, M. Gérard Leseul, Mme Delphine Lingemann, M. Jean-François Lovisolo, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Emmanuel Maquet, M. Matthieu Marchio, M. William Martinet, Mme Alexandra Masson, Mme Manon Meunier, M. Pierre Meurin, M. Bruno Millienne, M. Hubert Ott, M. Didier Padey, Mme Sophie Panonacle, Mme Christelle Petex, M. Bertrand Petit, M. René Pilato, Mme Marie Pochon, M. Loïc Prud'homme, M. Nicolas Ray, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Jean-Pierre Taite, M. David Taupiac, M. Vincent Thiébaut, M. Nicolas Thierry, Mme Huguette Tiegna, M. David Valence, M. Pierre Vatin, M. Antoine Vermorel-Marques, Mme Juliette Vilgrain, M. Antoine Villedieu, Mme Anne-Cécile Violland, M. Jean-Marc Zulesi
Excusés. - Mme Nathalie Bassire, M. Édouard Bénard, M. Jean-Victor Castor, M. Marcellin Nadeau, Mme Véronique Riotton
Assistaient également à la réunion. - Mme Delphine Batho, M. Cyrille Isaac-Sibille, M. Benjamin Saint-Huile, M. Philippe Vigier