France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Suite de la discussion d'un projet de loi
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (n° 1033, 1234 rectifié).
Je serai bref car nous avons déjà débattu de cette question. Cet amendement rédactionnel vise à supprimer l'adjectif possessif « nos », placé devant « outre-mer ».
L'amendement n° 1667 de M. Aurélien Saintoul est défendu.
La parole est à M. Jean-Michel Jacques, rapporteur de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements identiques.
Ils visent à supprimer l'adjectif possessif « nos », qui, selon vous, serait empreint de paternalisme. Or je vous appelle « mon cher collègue » de manière très respectueuse et affectueuse.
Il en va de même lorsque je parle de nos territoires d'outre-mer et de nos régions. Avis défavorable.
La parole est à M. le ministre des armées, pour donner l'avis du Gouvernement.
Cette question dépend de la personne qui s'exprime et de la manière dont elle le dit. En outre-mer, j'ai souvent entendu les personnes y vivant parler de « nos outre-mer », je le dis sous votre contrôle, monsieur le député, comme on évoque souvent « nos régions », « nos campagnes », « nos territoires ». Il importe surtout de remplacer toutes les occurrences du mot « métropole » par le mot « Hexagone ». Cette correction est importante. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
J'entends bien vos arguments. Malheureusement, monsieur le rapporteur, vous et moi, issus de la France métropolitaine hexagonale, n'avons pas la même histoire que les habitants d'anciennes colonies, devenues des territoires ultramarins. Nous maintenons donc l'amendement.
Je suis saisie de cinq amendements, n° 263 , 56 , 845 , 1654 rectifié et 311 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 56 , 845 et 1654 rectifié sont identiques.
Sur l'amendement n° 263 , je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Louis Thiériot, pour le soutenir.
Cet amendement de ma collègue Christelle D'Intorni vise à souligner que se greffe bien entendu à l'enjeu des outre-mer celui des zones économiques exclusives – ZEE –, qui sont un des éléments majeurs de la puissance française. En effet, grâce aux ZEE, nous sommes la deuxième puissance maritime du monde.
Par conséquent, après le mot « outre-mer », nous suggérons d'insérer les mots « , particulièrement nos zones économiques exclusives (ZEE) ». Cet amendement tend à souligner à quel point les ZEE sont un élément important des ambitions maritimes françaises et justifient les moyens que nous allouons à notre marine outre-mer.
La parole est à Mme Caroline Colombier, pour soutenir l'amendement n° 56 .
Notre zone économique exclusive a été l'un des angles morts des débats en commission. Elle est pourtant un élément essentiel de notre politique de protection du territoire national. La ZEE de la France est la deuxième plus importante du monde, après celle des États-Unis, puisqu'elle s'étend sur une superficie de plus de 11 millions de kilomètres carrés. Il faut donc tenir compte de la tyrannie des distances et défendre nos eaux territoriales, les zones de pêche et les ressources minérales. À ce titre, la ZEE, qui constitue un point stratégique de notre politique de défense et de sécurité nationale, est, en réalité, un outil phare de projection et de rayonnement de nos armées. Ce territoire est essentiel pour notre activité économique, en raison de ses ressources naturelles énergétiques et halieutiques.
Ainsi, cet amendement vise à inscrire dans la loi que la protection du territoire national ne doit pas faire l'impasse sur notre ZEE, tout particulièrement dans le contexte de la montée en puissance de la Chine et de la Russie. Nous proposons, après le mot « outre-mer », d'insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) ».
La parole est à Mme Gisèle Lelouis, pour soutenir l'amendement identique n° 845 .
Il vise également à insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) », après le mot « outre-mer » dans le rapport annexé. Vous remarquerez que, sur ce sujet, les amendements du groupe RN, de la manière dont ils sont rédigés, s'intègrent plus facilement dans le rapport annexé que l'amendement du groupe LR – du reste, Mme D'Intorni brille par son absence.
Nous sommes plusieurs à insister sur cette question ; tant mieux ! La France est grande : elle possède la deuxième plus importante ZEE du monde – près de 11 millions de kilomètres carrés –, après celle des États-Unis. Il est nécessaire, dans ce texte, d'en rappeler l'importance, fortement liée à nos territoires ultramarins. En effet, la France n'est pas une nation européenne fermée sur ce continent, mais une nation mondiale avec de nombreux territoires maritimes. Nos ZEE font la grandeur de notre pays et la puissance de nos ambitions. Leur contrôle est un enjeu majeur de souveraineté, en particulier quand nos ressources, notamment halieutiques, sont exploitées par vous savez qui au large de Saint-Pierre-et-Miquelon, en violation du droit international. Nous devons préserver nos droits souverains en matière d'exploitation, d'exploration, de conservation et de gestion des ressources naturelles biologiques – ou non – de nos fonds marins, y compris de leur sous-sol, et de recherche et de préservation de notre milieu marin.
Que ferez-vous pour l'île de Clipperton, dans l'océan Pacifique, qui nous rapporte tant mais dont la souveraineté est constamment violée, au même titre que la ZEE qui l'entoure, par des pêcheurs étrangers, qui n'ont pas le droit d'exercer leur activité, ou des trafiquants en tout genre ? Sa zone économique exclusive s'étend sur 450 000 kilomètres carrés. Son potentiel halieutique, mal connu, est regardé avec attention par d'autres, tout comme les nodules polymétalliques contenant les terres rares – le nouvel or noir. L'État sera-t-il au rendez-vous géostratégique de l'histoire, en étant favorable à mon amendement ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir l'amendement n° 1654 rectifié .
Il vise également à insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) », après les mots « ensuite, il s'agit d'améliorer notre contribution à la protection du territoire national, singulièrement de nos territoires d'outre-mer ».
Les problèmes relatifs à la pêche et au développement durable ont été évoqués. Je souhaite insister sur la question des hydrocarbures, qui, demain, pourraient être source de conflits, notamment dans les îles Éparses. Leurs fonds regorgent de l'équivalent de 15 milliards de barils de pétrole et de 5 milliards d'euros de réserves de gaz naturel, ce qui représente 2 000 milliards d'euros potentiels. Demain, ces fonds pourraient susciter des convoitises, si nous ne montrons pas que nous les protégeons véritablement et que nous ne laisserons personne polluer ces territoires, porter atteinte à l'environnement ou entacher notre souveraineté, en récoltant le fruit de ces gisements. Voilà pourquoi nous devons mentionner les ZEE dans le rapport annexé.
La parole est à Mme Laurence Robert-Dehault, pour soutenir l'amendement n° 311 .
Les zones économiques exclusives françaises revêtent un caractère stratégique en raison des atouts que représentent leurs ressources disponibles, mais également leur environnement et leur biodiversité marine. Certains de ces territoires sont menacés par des revendications territoriales ou se situent dans des zones marquées par une résurgence des tensions géopolitiques.
Ces questions sont loin d'être théoriques, puisque les ZEE françaises de l'Indo-Pacifique sont régulièrement violées par d'autres États. Depuis 2012, au mépris le plus total de la souveraineté française, le président comorien délivre des permis d'exploration d'hydrocarbures dans le périmètre de la ZEE de Mayotte et des pêcheurs malgaches violent régulièrement les ZEE françaises autour des îles Éparses. En Guyane et aux Antilles françaises, il est également du devoir de la France d'assurer l'intégrité des ZEE et la sécurité de millions de nos compatriotes français, confrontés aux narcotrafiquants et aux pirates qui sévissent dans cette zone.
L'insuffisante protection de nos ZEE a été soulignée dans un rapport sénatorial sur la stratégie maritime nationale, publié en 2022, qui relève le sous-dimensionnement de la flotte française chargée de la protection des zones maritimes. En effet, la souveraineté n'existe réellement que si la France est en mesure de contrôler et d'intervenir en permanence, afin de dissuader les éventuelles revendications territoriales ou les pilleurs de ressources. La question des moyens affectés à ces missions est plus que jamais un enjeu stratégique.
L'objet de cet amendement est donc d'inscrire explicitement, au sein du rapport annexé, l'objectif de renforcement de la protection de nos ZEE. Ainsi, à la première phrase de l'alinéa 8, après le mot « outre-mer », nous proposons d'insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) ».
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
J'émets un avis favorable sur l'ensemble de ces amendements, sauf sur celui de Mme D'Intorni, qui vise à insérer les mots « plus particulièrement » devant « ZEE ». De mon point de vue, cette mention ne se justifie pas car il s'agit de préserver tout autant les territoires d'outre-mer.
S'agissant de la méthode retenue dans le cadre de nos débats, je rendrai des avis plus succincts. Cette nuit, nous avons démontré que nous prenions le temps de débattre de sujets graves et importants, tels que la dissuasion nucléaire. Nous allons enchaîner l'examen d'amendements qui, s'ils donneront lieu à des débats légitimes, auront un effet limité sur le fond du projet de loi.
Sur le fond, je suis favorable à tous ces amendements visant à mentionner les ZEE. M. Blanchet a rectifié la rédaction de son amendement, qui soulevait une question d'accord au singulier ou au pluriel. En tout état de cause, il importe que cet alinéa fasse référence aux ZEE, d'autant que cela valorisera le travail accompli par la marine nationale.
Si la rédaction de l'amendement de Mme D'Intorni pose problème, je propose de la rectifier, puisque nous en avons la possibilité, en supprimant le mot « plus particulièrement ».
Le principe de l'ajout de la mention relative aux ZEE ne pose pas de problème. Toutefois, il ne faut pas qu'on donne l'impression que les territoires dits d'outre-mer ne représenteraient, pour la France, qu'un bénéfice en termes de ZEE.
En effet, lorsqu'on écoute la majorité d'entre vous, il n'y a que cela qui importe.
Or, je rappelle que, comme certains, ici, ont pu le dire, ces territoires souffrent d'un sous-développement chronique, d'une importante pauvreté et d'une très grande faiblesse économique. Il est bien beau d'évoquer les ZEE, mais qu'en est-il des moyens de développement ? Les territoires d'outre-mer ne peuvent pas être uniquement les béquilles vertes ou bleues de la France hexagonale.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES. – M. Bastien Lachaud applaudit également.
L'amendement n° 263 , tel qu'il vient d'être rectifié par M. Thiériot, étant désormais identiques aux autres amendements, les n° 56, 845 et 1654 rectifié, je mets aux voix les quatre amendements.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 91
Nombre de suffrages exprimés 84
Majorité absolue 43
Pour l'adoption 84
Contre 0
Les amendements identiques n° 263 rectifié , 56 , 845 et 1654 rectifié sont adoptés. En conséquence, l'amendement n° 311 tombe.
Il s'agit, ici, de mentionner les missions de contrôle de zone, ce dernier terme étant entendu au sens militaire. Je pense en particulier à la zone indo-pacifique, comme on dit maintenant. Dès lors qu'elle pourrait être le théâtre d'un conflit majeur entre les États-Unis et la Chine, nous devons y être présents d'une manière ou d'une autre.
Mais ce n'est pas tout d'affirmer des principes ; encore faut-il se donner les moyens de les appliquer et de protéger nos zones, lesquelles abritent notamment des ressources halieutiques, que des pêcheurs qui n'auraient pas de droit à pêcher pourraient venir piller,…
…ou d'autres ressources naturelles que nous pourrions, comme l'expliquait à l'instant notre collègue Blanchet, exploiter demain, car il ne s'agit pas de les laisser en friche. Pour cela, il nous faut des navires. Si j'ai bien compris, le projet de loi de programmation militaire (LPM) prévoit trois patrouilleurs outre-mer. Sera-ce suffisant, monsieur le ministre ? Certes, ces navires ne sont pas les seuls à pouvoir intervenir, mais ceux-ci sont les mieux adaptés à ce type de mission.
Au-delà de la pétition de principe, qui peut nous réunir, je souhaiterais savoir si nous disposerons des moyens adéquats pour contrôler ces territoires gigantesques. Plusieurs l'ont déjà dit, notre zone économique exclusive est la deuxième du monde, derrière celle des États-Unis.
Vous évoquez la surveillance de la zone indo-pacifique et, de façon générale, de notre espace maritime, le deuxième du monde, vous l'avez rappelé. Toutefois, il serait trop réducteur de ne mentionner qu'elle : si l'on en cite une, il faut les citer toutes.
Quant à la surveillance de l'ensemble des zones, elle s'exerce, grâce à notre modèle d'armée, qui est complet, dans l'espace maritime et l'espace aérien, à l'aide de différents matériels, qui ne se limitent pas aux patrouilleurs maritimes. Avis défavorable.
Nous aurons un long débat sur l'outre-mer ultérieurement ; nous devons prendre le temps nécessaire pour en discuter. Ce sera le cas, non pas, hélas ! lors de l'examen des tableaux relatifs aux contrats opérationnels – le nombre d'amendements déposés sur cette partie du rapport annexé n'est pas assez important –, mais lors de l'examen des tableaux capacitaires.
Dans votre amendement, monsieur Le Fur, vous désignez une des missions que peuvent remplir les armées : le contrôle de zone, lequel peut être maritime ou aérien. En réalité, il ne suffit plus. C'est pourquoi les manœuvres de renseignement – dont nous traiterons plutôt lors de la discussion de la partie normative du projet de loi – sont importantes.
De fait, nous devons réfléchir à ce que seront ces contrôles, demain. Ont été évoquées avec raison la tyrannie des distances et l'immensité des zones concernées. De fait, l'ensemble des dispositifs que nous vous proposons dans le domaine spatial auront, on le voit bien, un rôle majeur à jouer dans le contrôle de la zone économique exclusive de la Polynésie française ou dans la lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane, par exemple – autant d'enjeux qui doivent être pris en compte.
Pourquoi mentionner uniquement le contrôle de zone, et non pas le contrôle du ciel, les manœuvres de renseignement ou les manœuvres spatiales ? La rédaction de l'amendement est trop précise. Nous entrons là – je pense d'ailleurs à un autre de vos amendements portant sur la défense opérationnelle du territoire (DOT) – dans le concret opérationnel des armées. En la matière, il faut que nous prévoyions, à chaque fois, les moyens capacitaires correspondants : en l'espèce, des patrouilleurs – vous l'avez dit –, mais aussi des drones. Nous devons en effet, je crois, déployer les nouvelles technologies d'abord dans les territoires d'outre-mer, alors que ceux-ci ont longtemps été les derniers servis. C'est une question clé.
Nous devons également développer, lorsqu'elle est possible – il arrive qu'elle ne soit absolument pas recommandée –, la coopération avec certains pays voisins. Nous aurons l'occasion d'y revenir.
En conclusion, compte tenu notamment de l'emplacement de l'amendement, demande de retrait ou avis défavorable.
Je vois que vous n'avez pas perdu vos réflexes de vice-président, mon cher collègue !
Sourires.
Quoi qu'il en soit, il ne pourra pas la prendre car je vais retirer l'amendement, compte tenu des réponses qui m'ont été données, même si celles-ci ne sont que partiellement satisfaisantes. Pourquoi ? J'ai évoqué l'exemple de la zone indo-pacifique, mais celle-ci ne figure pas dans le texte de mon amendement, qui porte sur l'ensemble des zones.
De surcroît, j'ai bien écrit « notamment », de manière à insister sur un point sans exclure les autres – c'est le sens de cet adverbe.
J'aurais souhaité que cet amendement soit adopté, car il convient de veiller à ce que, au-delà des pétitions de principe qui nous rassemblent, nous ayons les moyens adéquats pour exercer ces missions. Mais nous aurons ce débat ultérieurement. Je retire donc l'amendement, en m'excusant auprès de mon excellent collègue de nos outre-mer.
Sourires.
L'amendement n° 228 est retiré.
La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l'amendement n° 1036 .
Il s'agit de faire évoluer le système des missions de courte durée (MCD) des forces terrestres déployées dans les territoires ultramarins, en portant leur durée, qui est actuellement de quelques semaines, à trois ans. Nous manifesterions en effet notre volonté d'assurer la continuité territoriale de notre défense en privilégiant les affectations en famille et en renforçant l'ancrage territorial de nos militaires.
Demande de retrait ou avis défavorable. Je comprends votre démarche, mais les missions de courte durée correspondent à des besoins opérationnels précis.
Je comprends votre intention, mais il s'agit d'une fausse bonne idée. Au fond, ce n'est pas tant la durée du séjour qui compte que les besoins opérationnels dans les différents territoires. Des forces de souveraineté y sont prépositionnées en permanence, auxquelles s'ajoutent, selon les besoins, des renforts en provenance de l'Hexagone. C'est notamment le cas lorsqu'il faut durcir un contrôle de zone, dans le cadre de l'opération Harpie, par exemple.
Pour le dire de manière directe, sans langue de bois, il faut avoir de cette question une approche en termes non pas de ressources humaines mais de sécurité des territoires d'outre-mer : c'est l'opérationnel qui doit déterminer le format des forces – dont j'ai indiqué qu'elles seraient en augmentation, à bien des égards. Il y aura donc toujours un mix entre longs et courts séjours. Demande de retrait.
L'amendement n° 1036 n'est pas adopté.
La parole est à M. Tematai Le Gayic, pour soutenir l'amendement n° 1050 .
Nous souhaitons insister sur l'importance de coordonner l'ensemble des stratégies, notamment la stratégie indo-pacifique, avec les collectivités locales et les députés de l'ensemble des territoires d'outre-mer. En effet, ces stratégies ne doivent pas être élaborées sans ces territoires. Nous ne voulons pas être uniquement des porte-avions ou des ponts pour la France hexagonale ; nous voulons que ces stratégies servent d'abord le rayonnement des outre-mer, puis, par ruissellement, la France hexagonale. Mauruuru !
Nous aimons trop nos territoires d'outre-mer pour que je vous laisse dire que la France les considère uniquement comme des porte-avions.
Sourires.
Puisque nous aborderons cette question ultérieurement, et nous serons alors très heureux d'en débattre, je vous demande de bien vouloir retirer l'amendement. Mauruuru !
J'aimerais, monsieur le ministre, que vous me donniez les raisons pour lesquelles votre avis est défavorable. J'ai compris que nous discuterions des outre-mer plus tard. Ce n'est pas moi qui ai choisi que mon amendement soit examiné à ce moment-là…
Si, c'est vous qui avez choisi de le déposer à cet endroit-là du texte !
Vous avez tout de même choisi de le déposer sur cette partie du rapport annexé.
Cependant, je veux bien faire l'effort de le retirer si, plus tard, monsieur le ministre, vous acceptez d'évoquer les outre-mer.
L'amendement n° 1050 est retiré.
La parole est à M. Mickaël Bouloux, pour soutenir l'amendement n° 1334 .
La France est une grande puissance, mais elle a besoin d'alliés pour exercer son influence sur tous les océans. Aussi nouer des partenariats avec les pays voisins de nos territoires ultramarins est-il nécessaire pour défendre nos intérêts vitaux. La LPM doit donc être l'occasion de clarifier la stratégie de présence militaire menée en partenariat, je pense aux pays de l'Association of Southeast Asian Nations, l'Asean, dont la France se rapproche diplomatiquement. En témoigne son entrée en tant que membre observateur à la réunion énergie des ministres de la défense.
Ces partenariats devront s'accompagner d'une stratégie globale, y compris commerciale avec les pays limitrophes, afin d'assurer autant que possible une interopérabilité entre leurs équipements et les nôtres.
Cet amendement répond en quelque sorte à celui qu'a défendu tout à l'heure M. Le Fur. Il est vrai que, concernant ces zones à surveiller, le partenariat est un appui très important. Toutefois, il en sera question plus tard dans le rapport annexé et, en outre, votre amendement est satisfait. C'est donc un avis défavorable ou une demande de retrait.
L'amendement étant en effet satisfait, c'est également une demande de retrait ou un avis défavorable. J'ajouterai que le mot « interopérabilité » correspond à une réalité militaire particulière, et que ce n'est pas le terme que j'emploierais ici.
Même en s'entendant bien avec certains pays, nous ne pouvons pas pratiquer l'interopérabilité avec n'importe qui, et cet amendement nous paraît donc curieux.
L'amendement n° 1334 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l'amendement n° 1440 rectifié .
À une époque où les frontières entre acteurs étatiques et non étatiques dans les conflits deviennent de plus en plus floues, il est impératif de répondre au défi posé par la prolifération des mercenaires et des sociétés militaires privées. Nous en avons débattu récemment et condamné les exactions de la milice Wagner.
Ces entités, agissant souvent en dehors des cadres légaux, posent de sérieuses questions de responsabilité, d'éthique et de sécurité. L'histoire a maintes fois prouvé les dangers d'une telle prolifération, et l'utilisation de ces acteurs par certains États ou entités peut mener à une dissolution de la responsabilité, à une augmentation de la violence et à une déstabilisation à large échelle. Les sociétés militaires privées agissent avec impunité, suscitant des conflits au lieu de les résoudre et alimentant l'instabilité au lieu de la réguler.
Il est de notre responsabilité, en tant que législateur, de protéger nos nations et nos citoyens contre ces risques. C'est là que réside l'importance de cet amendement proposé par le groupe Écologiste. Il ne s'agit pas seulement d'une question de sécurité, mais aussi d'une question de principe et de valeurs. Si nous ne prenons pas les mesures nécessaires pour réguler ces acteurs, nous abandonnons notre engagement en faveur de la justice et de la paix.
Nous exprimons notre volonté d'entamer la négociation de traités spécifiques, dans le cadre d'une démarche proactive, visant à prévenir l'exploitation de ces acteurs des théâtres d'opérations par des entités malveillantes et à limiter les dégâts potentiels qu'ils peuvent causer. Nous ne pouvons pas attendre que les problèmes se posent pour agir. Il est temps de prendre des mesures préventives pour protéger nos sociétés et maintenir la paix.
La question des milices paramilitaires, comme Wagner, est d'autant plus importante qu'elles sont présentes non seulement en Ukraine mais aussi, très largement, au Sahel et en Afrique. Cela étant, nous luttons déjà contre ces mercenaires, qui participent de ce que l'on nomme la guerre hybride ; en outre, votre demande n'a pas à figurer dans le rapport annexé mais relève, en vertu de l'article 52 de la Constitution, du Président de la République. J'émettrai donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
Bien évidemment, le Parlement a, lui aussi, tenu à se faire entendre, avec la résolution récente que vous avez adoptée.
Approbations sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
C'était un signal on ne peut plus clair et, pour le coup, vous m'accorderez que la France joue un rôle moteur dans ce domaine.
Nous pourrons en reparler en commission des affaires étrangères ou en commission de la défense mais, en toute rigueur, le rapport annexé a pour objet de définir le format des armées françaises, dont ne font évidemment pas partie les milices ou les mercenaires. Dans la mesure, par ailleurs, où nos orientations internationales et diplomatiques sont connues, ce sera également une demande de retrait ou un avis défavorable, même si je partage votre amendement sur le fond.
Sur l'amendement n° 453 , je suis par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Sur les amendements identiques n° 1178 et 1179 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Bastien Lachaud.
Le groupe Renaissance a, avec d'autres, jugé utile et nécessaire de faire adopter par cette assemblée une résolution demandant au Gouvernement d'inscrire l'organisation Wagner sur la liste des organisations dites terroristes, résolution qui a recueilli notre unanimité. L'amendement du groupe Écologiste s'inscrit dans la même veine, puisqu'il invite le Gouvernement à agir en créant un traité international interdisant ces organisations.
Hier soir, nous avons tous, hormis le Rassemblement national, adopté un amendement rappelant nos engagements dans le cadre du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP)…
Parce que nous sommes une puissance dotée ! C'est cela qui fait le lien avec nos armées.
En effet, monsieur le ministre, mais l'interdiction des milices privées dans le droit international est un réel enjeu pour nos forces armées, dans la mesure où cela influera sur la manière dont elles auront à se comporter face à d'éventuels compétiteurs ou agresseurs. Si Wagner était condamnée par le droit international, les choses se passeraient autrement en Afrique, et le modèle d'armée que nous y déployons serait donc différent.
Cet amendement a logiquement toute sa place dans ce texte, et il serait totalement incompréhensible que notre assemblée rejette l'idée d'un traité international pour interdire le mercenariat, quinze jours après avoir condamné la milice Wagner. J'avoue donc, monsieur le ministre ne pas comprendre le raisonnement qui vous pousse à rejeter cet amendement, qui appelle au respect du droit international et réitère les engagements de la France en la matière. Il n'y a absolument aucune raison de voter contre.
L'amendement n° 1440 n'est pas adopté.
La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l'amendement n° 453 .
Monsieur le ministre, à la lecture du projet de LPM, on voit que vous n'avez pas oublié vos premières amours, les outre-mer : vous leur dédiez 13 milliards d'euros, 800 millions d'euros pour la modernisation des infrastructures, et 800 militaires supplémentaires – merci pour ces moyens.
L'objet de cet amendement est de préciser davantage la stratégie de la nation concernant les outre-mer. On parle souvent de les protéger, de garantir leur souveraineté ou de les défendre contre la pêche illicite, mais ces territoires peuvent également être utiles à la France, notamment en servant de relais à la politique nationale. Ils lui permettent d'asseoir sa diplomatie et ses positions militaires dans les régions où ils sont situés. C'est la raison pour laquelle l'amendement stipule que la politique militaire de la nation s'appuie sur les outre-mer, dont la seule vocation n'est pas d'être des territoires protégés, mais qui servent pleinement la nation.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Nous soutiendrons sans problème cet amendement. Je souhaite simplement ajouter que, lorsqu'il y a des échanges diplomatiques avec des pays voisins de nos territoires, nos élus, parlementaires ou élus locaux, ne font pas partie des délégations, ce qui est très dommage. On est donc loin aujourd'hui de s'appuyer sur les outre-mer comme le demande M. Metzdorf.
Nous n'avons pas non plus de problème de principe avec cet amendement, d'autant que les territoires d'outre-mer sont partie intégrante de la République – j'ai d'ailleurs été choqué par l'emploi qu'a fait tout à l'heure du verbe « enraciner » l'un de nos collègues du groupe LIOT, qui semblait perdre de vue, en les distinguant, que les outre-mer, c'est la République, et que la République, ce sont les outre-mer.
Cela me gêne ; me gêne encore plus le fait que l'amendement laisse penser qu'il s'agirait de s'appuyer exclusivement sur les territoires d'outre-mer. Il aurait suffi d'ajouter l'adverbe « notamment » pour corriger cet amendement, en l'état extrêmement mal rédigé malgré ses intentions louables.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 111
Nombre de suffrages exprimés 80
Majorité absolue 41
Pour l'adoption 79
Contre 1
L'amendement n° 453 est adopté.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour soutenir l'amendement n° 312 .
Je vais attendre, pour le présenter, que tout le monde se calme, car c'est un peu compliqué autrement.
M. Laurent Jacobelli semble gêné par le léger brouhaha qui suit le scrutin public.
Je vous trouve assez injuste, monsieur Jacobelli, car l'ambiance est extrêmement calme, cet après-midi !
Si vous le dites… Notre base industrielle et technologique de défense (BITD) doit être protégée des malveillances extérieures, on le sait aujourd'hui. Les attaques cyber, en particulier, peuvent être très nuisibles – on l'a notamment vue avec la frégate britannique intentionnellement endommagée fin 2022, alors qu'elle était en chantier. Notre BITD n'est pas à l'abri de telles attaques et constitue, on le sait, une cible pour certains États étrangers mais aussi pour des organisations non gouvernementales, des militants ou, tout simplement, des concurrents. Cela pourrait avoir de graves conséquences en termes de retard ou de défaillance dans les livraisons de matériel.
Pour nous prémunir contre ces actes, nous proposons donc d'ajouter à la fin de l'alinéa 8 que « La protection des capacités de production de recherche et de développement d'exportation de notre BITD fera l'objet d'une attention particulière ».
Cet amendement est déjà satisfait du fait, notamment, du travail de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) et de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), qui protègent notre BITD. D'ailleurs, il ne faut pas hésiter, comme j'ai déjà eu l'occasion de le faire, à aller, sur le terrain, rencontrer les personnels de la DRSD et de la DGSI. Cela permet ensuite de faire le lien avec les entreprises, et c'est important.
C'est donc une demande de retrait.
Cet amendement traite d'une question que nous avons eu récemment l'occasion d'évoquer avec la délégation parlementaire au renseignement (DPR). J'ignore s'il s'agit d'un amendement d'appel, il permet en tout cas d'aborder le sujet devant vous. Cela dit, vous connaissez mon avis sur le fait d'alourdir le rapport annexé avec ce que Marc Le Fur qualifiait tout à l'heure de vœux ou de pétitions.
Quoi qu'il en soit, il est clair que, avec l'accroissement de la compétition entre les États, on est passé d'un espionnage économique « classique », qui méritait déjà, en tant que tel, des réponses ad hoc, à des manœuvres relevant plus de l'ingérence, voire du sabotage ou de la destruction. C'est un enjeu d'autant plus essentiel que notre BITD est étroitement imbriquée dans notre modèle d'armée.
Il existe à cela plusieurs types de réponse, la première étant évidemment très régalienne et renvoyant, comme l'a dit le rapporteur, à la DRSD. Nous traiterons plus tard des questions de renseignement, mais disons d'ores et déjà qu'il était temps de renforcer les moyens de la DRSD. Un travail important a été entrepris par le général Bucquet, puis par le général Susnjara pour la faire monter en puissance, à quoi s'ajoute le doublement de son budget – cela a été largement documenté en DPR et je n'en dis pas plus.
Il faut ensuite réfléchir – et j'ai missionné sur cette question la direction générale de l'armement (DGA) – à la manière dont les industriels doivent s'organiser face à cette menace. Je pense ici aux mécanismes de redondance : si une machine unique est sabotée, c'est l'ensemble de la chaîne de production qui s'effondre. Or avec la fin de la guerre froide, le recours à la redondance est un réflexe qui s'est perdu. C'est pourquoi Emmanuel Chiva, le délégué général pour l'armement, s'emploie actuellement à développer un plan qui concerne toutes les entreprises du secteur : celles-ci, comme l'État qui les protège, ont des obligations. L'industrie de l'armement n'est pas une industrie comme les autres et doit, en conséquence, faire preuve de diligence ; pour le dire vite, on constate un progrès général, avec une acculturation plus ou moins rapide selon les entreprises.
Je demande donc le retrait de l'amendement, à défaut de quoi l'avis sera défavorable. Vous pointez du doigt un élément important, mais si je donnais un avis favorable à tous les amendements de ce genre, nous aboutirions, à l'issue de l'examen du texte, à un rapport annexé de 600 pages, ce qui le rendrait parfaitement illisible. Revenons-en à ce qui est l'essence d'un rapport annexé : un document sur le format de nos armées.
Pour avoir traité de ces sujets pendant de nombreuses années au sein de la DPR, je puis vous confirmer que la pression sur notre BITD ainsi que les volontés de pillage ou de sabotage sont très importantes. Cela étant, je ne suis pas convaincu que l'ajout d'une phrase au rapport annexé y changerait quelque chose.
Toujours en ma qualité d'ancien membre de la DPR, mais aussi de la commission de vérification des fonds spéciaux (CVFS) de l'Assemblée nationale – je salue d'ailleurs notre collègue Colombier, qui m'y a succédé –, j'ajoute que nous pouvons faire confiance à nos services, particulièrement à la DRSD et à la DGSI, lesquels sont très actifs sur ces questions, et ce, j'insiste, alors qu'ils font face à une pression et à une adversité très importantes.
Monsieur le ministre, au moins nous confirmez-vous les propos que tenait mon collègue Saintoul hier sur l'existence d'une guerre économique larvée qui menace nos entreprises et nos industries, c'est-à-dire notre BITD.
En effet, il ne s'écoule pas un mois sans que l'un de nos fleurons passe sous contrôle étranger.
De la même manière, il ne passe pas quelques mois, ou quelques années, sans que soit révélé un scandale d'espionnage concernant nos entreprises et impliquant des pays que nous considérons comme nos alliés. Le scandale Alstom est à cet égard dans les mémoires de tous, et nous savons le rôle joué par certains services de renseignement dans cette affaire.
Malheureusement, le présent amendement est insuffisamment contraignant pour être utile, d'ailleurs le groupe LFI – NUPES s'abstiendra, mais il n'en demeure moins impératif d'établir un dispositif strict afin d'empêcher les prises de contrôle et de préserver les compétences et les savoir-faire français.
L'amendement n° 312 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l'amendement n° 1335 .
Il vise à compléter l'alinéa 8, afin de consolider notre lutte contre les ingérences. En effet, la multiplication des conflits et des compétitions mondiales induit un renforcement de ces compétitions et des ingérences, aussi bien dans l'Hexagone qu'outre-mer, vis-à-vis de notre ZEE – nous avons eu l'occasion d'en débattre lors de l'examen d'amendements précédents.
L'ouverture de nouvelles voies dans l'Arctique en raison du réchauffement climatique crée de nouvelles possibilités économiques et fait de l'océan Atlantique le théâtre d'influences elles aussi nouvelles. Près de nos côtes, comme au large de la mer d'Iroise, il n'est ainsi pas rare d'observer des démonstrations de force de la part de certains de nos compétiteurs. Nous avons d'ailleurs eu à ce sujet des échanges nourris au sein de la commission de la défense nationale et des forces armées.
Dès lors, afin de permettre à la marine nationale de se consacrer pleinement à ses missions en haute mer, il apparaît nécessaire de renforcer notre surveillance côtière et de proximité, en lien avec nos collectivités territoriales et les acteurs locaux.
L'établissement d'un lien entre nos armées et les collectivités territoriales est bien entendu nécessaire dans les communes côtières pour les motifs que vous évoquez, mais il l'est en réalité partout en France. La défense de notre pays appartient à tous : c'est pourquoi je ne crois pas utile d'ajouter au rapport annexé la précision que vous nous proposez. L'avis est donc défavorable.
Nous avons en effet eu un long débat en commission sur cette question. Avis défavorable.
L'amendement n° 1335 n'est pas adopté.
Sur l'amendement n° 538 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de trois amendements, n° 1178 , 1179 et 538 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 1178 et 1179 sont identiques.
La parole est à M. Christophe Bex, pour soutenir l'amendement n° 1178 .
Il porte sur les données sensibles, leur utilisation et leur gestion étant un sujet majeur qui mérite toute notre attention.
En effet, eu égard à l'actualité et à ce que l'on appelle la guerre hybride, la vulnérabilité des câbles sous-marins qui transportent ces données nous amène à nous interroger. Pas moins de 80 % de nos données sont hébergées dans des centres situés aux États-Unis. La communication entre notre territoire et ces centres n'est possible que grâce à ces câbles, lesquels sont de plus en plus vulnérables à des attaques de la part de puissances étrangères hostiles. Les espaces maritimes par lesquels ces données transitent, piliers de la mondialisation contemporaine, représentent donc un enjeu géopolitique significatif.
Or la surveillance de ces câbles est impossible, alors même qu'une défaillance majeure pourrait paralyser un pays, voire un continent entier. Sommes-nous seulement capables d'assurer une communication internet et GPS dans les territoires français en cas de coupure entre le continent américain et le nôtre ? Nous sommes infiniment dépendants de la connectivité moderne, tous nos modes de fonctionnement sociaux étant imbriqués avec la technologie. Cette situation devrait nous inciter à rapatrier nos données, du moins nos données critiques, afin d'assurer notre souveraineté et notre indépendance. C'est d'ailleurs ce qu'a suggéré le ministre des armées lors de l'examen du projet de loi en commission.
La parole est à M. Arnaud Le Gall, pour soutenir l'amendement n° 1179 .
Identique au précédent, il vise à augmenter la résilience des réseaux et à protéger les données qui s'y trouvent, en élaborant un programme de relocalisation des données sur le territoire national, dans des serveurs relevant du droit français. Étant bien sûr conscients qu'une telle entreprise ne pourrait avoir lieu en un jour, précisons que nous donnerions la priorité aux données sensibles, même si, comme vient de le dire Christophe Bex, la question concerne un très grand nombre d'activités qui ne relèvent pas du projet de loi de programmation militaire stricto sensu.
Pourquoi vous soumettons-nous ces amendements ? Parce qu'il convient de réagir à deux grandes sources de vulnérabilité.
La première est juridique. Pour dire les choses rapidement, nous avons un problème de normes et nous savons bien que l'Europe et les États-Unis sont en concurrence en matière de gestion des données. Il s'agit d'un vrai sujet, qui m'a d'ailleurs conduit à déplorer que les paiements en ligne avec le futur euro numérique aient été confiés à Amazon – l'ancien directeur de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) a d'ailleurs également considéré que ce choix était un scandale.
Quant à la seconde source de vulnérabilité, elle est technique. Si les câbles sont coupés, nous perdons 80 % de nos données. Mais le pire, le plus insidieux, est bien l'espionnage. Ne nous voilons d'ailleurs pas la face : certains pays européens sont des plateformes d'espionnage, y compris pour le compte de certains de nos alliés. En 2021, il a en effet été révélé que le Danemark avait été, en Europe, le principal point d'entrée des activités de la NSA – Agence nationale de sécurité des États-Unis – pour écouter des dirigeants et de nombreuses entreprises. Et comment cet espionnage a-t-il été possible ? Grâce aux câbles sous-marins transatlantiques qui arrivent au Danemark.
Il convient donc de réduire notre vulnérabilité, de ne pas nous montrer naïfs et d'engager un plan de rapatriement de l'ensemble de nos données, en commençant par les plus critiques et sensibles.
La parole est à Mme Caroline Colombier, pour soutenir l'amendement n° 538 .
Conformément aux discussions que nous avons eues en commission et aux recommandations du ministre, nous devons affirmer la nécessité de relocaliser nos données sensibles sur le territoire national. Il s'agit évidemment d'un élément central du renforcement de la protection de nos territoires face aux menaces actuelles et futures, protection qui passe obligatoirement par la maîtrise des fonds marins. La lutte informationnelle, les ingérences et la multiplication des conflictualités hybrides rendent cette relocalisation urgente – d'autant qu'elle permettrait également de créer des emplois directs en France.
Il convient effectivement d'avancer au sujet de la relocalisation des données, mais notre action doit avoir lieu dans le cadre européen. C'est pourquoi je donne un avis défavorable à ces amendements.
S'agissant de nos armées, je tiens tout de même à souligner que la LPM prévoit 8 milliards d'euros de crédits pour conforter la résilience de nos systèmes numériques et 4 milliards pour le cyber, ce qui montre combien nous tenons compte de cet enjeu.
Il est vrai que nous avons eu un débat intéressant en commission sur ce sujet, au cours duquel plusieurs principes ont été énoncés. Cependant, je vous avoue que la rédaction de ces amendements ne me convient toujours pas. J'avais initialement prévu de déposer un sous-amendement, mais nous avons finalement estimé, avec Jean-Noël Barrot, qu'il valait mieux renvoyer cette question aux dispositions sur le cyber.
Voici l'alinéa que nous souhaitons insérer dans un article du titre II, relatif aux dispositions normatives intéressant la défense nationale : « Les données sensibles du ministère des armées sont stockées en interne ou sur le territoire national dans des serveurs relevant du droit français. »
Une telle disposition permettrait en outre de traiter le cas particulier des serveurs hébergeant les données de nos bases militaires à l'étranger.
Je demande donc le retrait de ces amendements, à défaut de quoi l'avis sera défavorable.
Ces amendements sont très importants, et nos collègues ont bien résumé la situation.
S'agissant des territoires d'outre-mer, du moins de la Guyane – mais je parlais de ce sujet avec mon collègue Le Gayic, élu de Polynésie –, le câble nous connectant à internet vient des États-Unis. S'il est coupé, nous ne perdrons donc pas 80 %, mais bien 100 % de nos données. Il n'y aura plus rien !
Comble de l'ironie : alors que la Guyane accueille le premier lanceur européen envoyant des satellites en orbite dans le monde entier, il n'est pas couvert par les satellites de télécommunications.
Dans le même ordre d'idée, les renforts militaires envoyés en Guyane pour appréhender les assassins du maréchal des logis-chef Arnaud Blanc ont dû déployer des moyens supplémentaires venus de l'Hexagone pour être en mesure de communiquer au sein de la forêt guyanaise et de mener leurs opérations.
Le groupe GDR – NUPES votera donc ces amendements avec les deux mains, car il est très important pour les territoires ultramarins que notre souveraineté en matière de télécommunications soit assurée.
L'amendement proposé par Mme Colombier est de bon sens. Vous avez expliqué, monsieur le ministre, que l'armée française allait relocaliser ses données en France, mais ce ne sont pas les seules à être sensibles. Nos prestataires, nos sous-traitants, les OIV – opérateurs d'importance vitale – ou encore les OSE – opérateurs de services essentiels – devraient également héberger leurs données en France, ou du moins au sein de l'Union européenne, et nulle part ailleurs. Or nous en sommes loin.
J'insiste, tous les acteurs que je viens d'énumérer traitent de données sensibles, et nous ne pouvons pas faire confiance à des entreprises étrangères comme AWS – Amazon Web Services – ou Microsoft, qui propose l'application Azure, pour les héberger, étant donné que le pays dont elles sont issues a le pouvoir légal d'y accéder. Or nous devons nous protéger contre toute tentative d'ingérence étrangère, à plus forte raison dans un domaine aussi sensible que la sécurité nationale et alors que nous avons les moyens d'héberger nos données en France. Des entreprises françaises souveraines telles que Docaposte, avec sa solution NumSpot, ou Scaleway peuvent nous aider en ce sens.
Les données sont précieuses : elles sont l'or noir du XXI
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 142
Nombre de suffrages exprimés 142
Majorité absolue 72
Pour l'adoption 52
Contre 90
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 121
Nombre de suffrages exprimés 121
Majorité absolue 61
Pour l'adoption 32
Contre 89
L'amendement n° 538 n'est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 863 et 864 , sur lesquels le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale a demandé un scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l'amendement n° 863 .
Il est important, car il traite d'un sujet – les pôles et les Terres australes et antarctiques françaises (Taaf) – qui n'a pas encore trouvé sa place dans le rapport annexé alors qu'il devrait y figurer. Ces territoires ont une importance fondamentale dans la lutte contre le réchauffement climatique. L'océan Austral, en effet, capte, à lui seul, 70 % de l'augmentation d'origine anthropique des températures. Par ailleurs, les Terres australes, inhabitées, ont conservé un territoire vierge et donc utile à l'étude du climat.
Il est donc essentiel de les préserver. La marine nationale, l'armée de l'air et de l'espace et, d'une certaine manière, l'armée de terre ont un rôle à jouer dans la défense et la protection de ces espaces. La France compte parmi les rares nations antarctiques et il est indispensable qu'elle en tire les conséquences.
La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l'amendement n° 864 .
En complément des propos de mon collègue Lachaud, je voudrais citer un poète célèbre : « À quoi sert une banquise trop fragile pour les pas d'un ours ? » La France doit être une puissance motrice dans la préservation des pôles afin d'en faire un bien commun de l'humanité. En proposant d'inscrire cette intention dans le rapport annexé, cet amendement nous donne l'occasion d'intégrer cette question dans nos débats.
La question a été évoquée en commission. Elle doit, comme vous l'avez souligné, être intégrée à nos travaux. Toutefois, pour des raisons de forme, je vous propose d'alléger le long dispositif que vous proposez, afin de recentrer l'effort de préservation sur le périmètre du ministère des armées.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 122
Majorité absolue 62
Pour l'adoption 122
Contre 0
Il s'inscrit dans la même logique que l'amendement précédent. Le réchauffement climatique, nous le savons, est malheureusement à l'œuvre et son action contribue à l'ouverture d'un passage maritime passant par le nord de la Russie et permettant de circuler entre l'océan Pacifique et l'océan Atlantique. Il est donc nécessaire que des accords internationaux régissent la navigation par ce passage. L'amendement propose d'affirmer la nécessité de défendre les intérêts de la défense française lors de leur négociation.
L'amendement n° 1070 de M. Aurélien Saintoul est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Le Gouvernement défendra toujours les intérêts de la France. Avis défavorable.
Il prévoit la rédaction d'un rapport sur le rôle stratégique des zones polaires et des Terres australes et antarctiques françaises. J'imagine que vous direz « non » à cette demande de rapport, mais j'espère que ce sera pour mieux dire « oui » aux demandes suivantes.
La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l'amendement n° 1067 .
Le dérèglement climatique provoque le réchauffement des pôles qui, à son tour, conduit à l'ouverture de nouvelles voies maritimes. Ce phénomène ne va pas simplement favoriser la découverte d'épaves de bateau prisonnières de la banquise depuis des siècles : il va entraîner la mise en concurrence de différentes puissances. La France doit être en pointe sur le sujet. Un rapport rédigé par l'Observatoire défense et climat sur le rôle stratégique de ces zones y contribuerait. Il faut également défendre l'intérêt de la France lors de la négociation internationale d'accords commerciaux sur la navigation dans ces zones.
Le rôle stratégique des pôles face au changement climatique est déjà traité dans un document sur la stratégie polaire de la France publié en avril 2022. Ces amendements me semblent donc inutiles. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La stratégie concernant les pôles doit être coordonnée, mais aussi différenciée, car les deux pôles n'obéissent pas tout à fait aux mêmes logiques physiques, géographiques et de gouvernance. Le rôle des États n'y est pas le même, c'est le moins que l'on puisse dire.
M. Piquemal l'a rappelé : le réchauffement climatique induit de nouvelles opportunités, qui sont d'ailleurs plutôt des risques. L'ouverture de nouvelles voies maritimes mérite d'être regardée de près, notamment parce que ces voies pourront permettre la jonction de marines de guerre.
Une fois de plus, j'émettrai une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable à cette demande de rapport. Néanmoins, j'ai demandé à la DGRIS – direction générale des relations internationales et de la stratégie – de formaliser une feuille de route pour les mois à venir. Certes, il ne s'agit pas d'un rapport, puisque la teneur de ce document interne est opérationnelle, mais la DGRIS pourra, si cela vous intéresse, le présenter devant la commission de la défense.
Le rôle stratégique des zones polaires touche à des questions importantes : marine ; équilibre géostratégique ; lignes maritimes commerciales par lesquelles transitent, entre autres, les matières premières ; biodiversité et Taaf. Ce sujet a un intérêt majeur et il doit être documenté au fur et à mesure, au-delà même de l'exécution de la loi de programmation militaire.
Je considère que l'amendement est satisfait par la feuille de route dont a parlé M. le ministre, qui est quasiment l'équivalent d'un rapport. Nous serons attentifs à son rendu et je suis sûr que M. le président Gassilloud organisera un débat sur ce document au sein de la commission.
Il vise à supprimer la mention au service national universel dans le rapport annexé. Le SNU est en effet un dispositif mal conçu et inutile. Alors que la précarité étudiante ronge les universités et que les files d'attente devant les banques alimentaires s'allongent, le Gouvernement propose à la jeunesse un dispositif coûteux, visant à la discipliner, qui ne remplit aucun objectif de défense, d'éducation ou de cohésion sociale.
Le repas à 1 euro pour tous dans les Crous, les centres régionaux des ?uvres universitaires et scolaires, coûterait 60 millions par an alors que le SNU, s'il était généralisé, coûterait au total, selon un rapport d'information du Sénat publié en mars 2023, plus de 2 milliards par an. Le SNU ne bénéficie pas, c'est le moins qu'on puisse dire, d'une image favorable : propos racistes, punitions collectives – comme à Strasbourg –, sorties en montagne dangereuses et mal encadrées…
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE et RN.
Lisez la presse, qui a rapporté ces faits en divers endroits du territoire.
Il existe de meilleures manières de faire vivre les valeurs et les principes républicains et de développer une culture de l'engagement. Nous soutenons le projet d'une conscription citoyenne qui permettrait de rémunérer au Smic une classe d'âge pendant neuf mois. Cette mobilisation de jeunes adultes, sans casernement, dans des activités militaires ou civiles d'utilité sociale et écologique, pour faire face notamment au bouleversement climatique, nous semble préférable.
Cette conscription permettrait de remédier à l'exclusion du peuple de la gestion des questions de sécurité et de défense…
…et d'agir contre la précarisation généralisée de la jeunesse. Loin du gadget folklorique du SNU…
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur, dont le temps de parole est épuisé. – Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l'amendement n° 866 .
Pour le SNU, vous naviguez à vue, en faisant chaque mois une annonce différente. Il n'est pas question ici de mettre en cause les personnes qui y participent ou l'encadrent avec bonne volonté. Toutefois, nous sentons bien, quand nous discutons avec celles-ci, que le bateau tangue. Qu'adviendra-t-il du SNU ? Prévoyez-vous une nouvelle annonce ?
Madame la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel, je ne sais pas si, comme M. le ministre, vous avez lu le superbe fascicule consacré par La France insoumise à la loi de programmation militaire.
M. François Piquemal agite un document.
Merci, cher collègue, de ne pas utiliser de documents à l'appui de votre propos.
Outre que nous aimerions savoir que sera le SNU « dans votre projet », pour reprendre une expression célèbre, nous aimerions débattre avec vous de la conscription volontaire que nous proposons.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Précisons tout d'abord que le SNU n'est pas l'objet de la LPM. Même si je comprends que vous profitiez de ces débats pour l'évoquer, comme c'est bien légitime, j'espère que la question ne prendra donc pas une place disproportionnée.
Sur le fond, c'est avec plaisir que je participerai à un débat sur le SNU, quand il sera à l'ordre du jour, et que je vous donne mon avis sur ces amendements. En tant que député de terrain, j'ai suivi de très près l'expérimentation du SNU, dont le Morbihan a été un département pilote. J'ai observé la construction des séquences pédagogiques, écouté les témoignages des jeunes participants et ce que j'ai vu est extraordinaire. Tout doucement, une cohésion impressionnante est apparue grâce à la vie collective. Les jeunes ont beaucoup appris concernant le secourisme, la sécurité routière ou nos institutions ; ils étaient ravis de leur séjour. Le SNU est une belle expérience et j'espère qu'elle sera développée.
En revanche, je suis très réservé quant à votre proposition d'obliger tous les jeunes de France à effectuer un service militaire de neuf mois, car elle leur fermera des occasions d'étudier, de travailler et ainsi de suite. C'est une usine à gaz, dont vous ne chiffrez d'ailleurs pas le coût – le livret que vous agitiez gentiment n'en contient aucun.
C'est un tract sans valeur, qui n'exprime rien de sérieux. Avis défavorable.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je suis ravie de vous retrouver cet après-midi pour revenir sur un projet qui nous tient à cœur, celui du service national universel, dont 50 000 jeunes volontaires ont bénéficié depuis 2019. Le SNU a lieu dans des territoires qui sont accompagnés, au sein de centres qui sont le plus souvent gérés par des collectivités ou d'éducation populaire, au cours de séjours permettant la mixité sociale et territoriale ainsi qu'un renouveau des mobilités entre les outre-mer et la métropole. Le service national universel est un service civil, un temps et une expérience uniques.
Quant à votre proposition, j'y suis défavorable, puisque le SNU doit continuer à être expérimenté. Cependant, je suis tout à fait ouverte à un débat, qui devra avoir lieu à un moment ou à un autre. Le président de la commission de la défense en a d'ailleurs déjà organisé un, de très grande qualité.
Je me tiens évidemment à la disposition de l'ensemble des groupes et des commissions pour apporter un éclairage plus complet. Surtout, j'invite les parlementaires qui s'intéressent à la question à visiter un centre lors des séjours de cohésion.
C'est encore la meilleure manière d'éviter les caricatures malheureuses et les critiques trop rapides.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.
En tant que député du Cher, département où le SNU est expérimenté depuis sa création, j'ai accompagné des séjours et même accueilli des jeunes participants pendant vingt-quatre heures – ou un peu moins, justement, parce que lors du SNU, les règles sont respectées.
Je ne comprends pas la mauvaise image dont celui-ci souffre. Quelque 75 % des Français y sont favorables. En réalité, dans ma circonscription, les demandes de participation des jeunes sont trop nombreuses au regard des places disponibles.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe HOR.
Répétons-le, le SNU est une chance pour les jeunes, pour notre nation, pour la culture de l'engagement. C'est enfin une formidable chance pour les territoires.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR et Dem ainsi que sur quelques bancs des groupes RN et LR.
Le nombre de prises de parole est restreint à une pour, une contre l'amendement.
La parole est à Mme Michèle Martinez, pour soutenir l'amendement n° 214 .
Le renforcement du lien entre la nation et l'armée est important pour notre pays. Il importe donc de mentionner dans le rapport annexé le service militaire volontaire (SMV) et le service militaire adapté (SMA), qui sont salutaires pour de nombreux concitoyens et jouent un rôle de tremplin vers la vie professionnelle. Ainsi, au terme du SMA, plus de 76 % des volontaires trouvent un emploi ou s'engagent dans une formation qualifiante.
Ces services permettent également de faire découvrir le monde de la défense et font naître l'envie de s'engager dans l'armée – dans les forces d'active ou en tant que réserviste. Ils méritent donc la même promotion que le service national universel qui, lui, n'entre pas dans le champ de la LPM et n'a pas de vocation militaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Sagesse. Même si l'alinéa du rapport indexé choisi pour cette précision n'est pas forcément le plus pertinent, celle-ci montrera l'efficacité et l'utilité des dispositifs visés.
Six régions de France bénéficient du service militaire volontaire, qui, comme l'ont montré de multiples auditions, constitue une opportunité pour bon nombre d'entre elles et pour bon nombre de jeunes. Il faut dès lors favoriser l'implantation du SMV dans chaque région, pour donner la même chance à tous les jeunes du territoire national.
L'amendement n° 214 est adopté.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Il vise à supprimer toute mention du service national universel du projet de loi de programmation militaire. En effet, ce service n'est ni national, ni universel ; sa finalité est obscure, ses objectifs ne sont pas clairement définis et il n'est en rien militaire. Il ne correspond à aucun besoin et aucune demande de l'institution militaire, contrairement au SMA et au SMV.
Cela a été dit, le SNU est mal conçu et inutile. Alors que la précarité étudiante ronge les universités, que des classes sont fermées dans les écoles et que des centaines de professeurs attendent d'être remplacés, vous promouvez un dispositif coûteux, qui ne vise aucun objectif légitime en matière de défense, d'éducation, d'insertion, de cohésion sociale, de résilience ou de solidarité. Discipliner la jeunesse n'est pas un projet politique.
Si nous refusons le SNU, nous soutenons le projet d'une conscription citoyenne des jeunes adultes, bien différente du service national de ma prime jeunesse. Celle-ci permettrait de rémunérer au Smic une classe d'âge pendant neuf mois, sans encasernement. Les jeunes adultes concernés seraient mobilisés dans des activités civiles, éventuellement militaires, d'utilité sociale et écologique, notamment face au bouleversement climatique.
Une telle conscription serait un tremplin pour beaucoup, un moyen d'insertion et un dispositif égalitaire au service de l'intérêt général – contrairement à l'encasernement des mineurs que vous prévoyez, qui les soumettra à des simulacres d'activités militaires. Elle permettrait en outre à toutes les classes d'âge et à toutes les classes sociales de se retrouver, pour construire demain une société beaucoup plus solidaire.
La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l'amendement n° 675 .
Monsieur le rapporteur, vous êtes injuste. Vous n'avez pas lu le livret de La France insoumise sur la loi de programmation militaire, qui évoque le SNU à la page 48…
Très bien ! Ouvrez-le, il contient de nombreuses informations intéressantes.
C'est faux.
Vous nous avez fait part de votre amour pour le Casimir de « L'Île aux enfants ». Eh bien, le SNU est un gloubi-boulga digne de l'inspecteur Gadget. On ne sait trop où il va, à l'image d'un gouvernement dont les projets manquent de sens sur les plans moral et politique – en matière d'éducation, par exemple.
Au contraire, notre proposition de conscription citoyenne – qui permettra de tourner la jeunesse vers l'action, en la rémunérant – est cohérente avec la planification écologique et avec les positions que nous avons défendues tout à l'heure sur la préservation des pôles ou l'importance de penser l'armée du futur – celle de l'après-pétrole, des défis et des catastrophes liés au dérèglement climatique ; nous proposons ainsi la création de casques bleus climatiques à l'ONU.
Nous proposons ainsi un projet politique global, qui a un sens, celui de la planification écologique, contrairement à vous, qui vous reposez sur des concepts fourre-tout – celui de « mixité sociale » veut tout et rien dire, par exemple, et personne ne sait plus ce qu'il recouvre en l'occurrence ; je serai curieux de savoir ce que vous y mettez.
De même, au niveau budgétaire, le SNU coûtera-t-il vraiment 2 milliards d'euros ?
Non !
Donnez-nous donc son coût. Nous voudrions en outre savoir s'il sera financé sur le budget alloué à la LPM.
Non !
Très bien ! Expliquez donc à la représentation nationale sur les budgets de quels ministères les sommes seront prélevées.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Comme les précédents, il vise à supprimer la référence au SNU, puisque celui-ci ne nous semble pas être à même de remplir le rôle qui lui est assigné, du moins dans les formes proposées ces derniers mois, toutes à cheval entre l'éducation nationale et les armées. Le SNU fait l'objet de nombreux débats et suscite le rejet de nombreux enseignants et de nombreux jeunes, notamment dans les syndicats lycéens ; les échos dans son encadrement sont également très mauvais.
La dernière mouture du SNU, dévoilée dans Politis, ne tient même plus compte de l'enjeu de mixité sociale, pourtant mis en avant dans un premier temps. Ce service n'est pas universel, il ne valorise pas l'engagement et ne rapproche pas l'armée et la défense nationale de la jeunesse. Il fait entrer dans l'éducation nationale une symbolique simplificatrice de la discipline militaire, ce qui a pour effet de dévaloriser tant l'armée que l'éducation nationale.
Si nous ne sommes évidemment pas opposés à des projets permettant à toute la jeunesse de s'engager et de vivre des moments collectifs, la participation à ceux-ci doit reposer sur un principe de volontariat, d'engagement choisi et d'émancipation.
Sans surprise, mon avis sera défavorable. En outre, je m'interroge sur votre projet de conscription citoyenne de neuf mois que vous voulez imposer aux jeunes, alors que certains seront en cours d'études et que d'autres commenceront leur vie professionnelle. Enfin, le contenu des activités envisagées n'a aucun sens.
Vous m'avez posé des questions claires, auxquelles je vais tenter de répondre. Quel est le budget du SNU et est-il intégré au projet de LPM ? Non, le budget du service national universel a toujours été inscrit au sein du programme 163 Jeunesse et vie associative. Je n'opposerai jamais l'accompagnement et les besoins liés à la précarité des jeunes aux sujets liés à l'engagement. Cette année, le budget s'élève à 140 millions d'euros, en augmentation par rapport aux 110 millions d'euros de l'an dernier. De même, le budget de l'éducation nationale est en hausse. Enfin, vous débattez d'un projet de LPM afin de doter nos armées face aux nouvelles menaces et, je le répète, le budget du SNU n'est pris ni sur celui de l'éducation nationale ni sur celui de nos armées.
Il s'appuie sur les acteurs qui accompagnent, comme ceux de l'éducation populaire qui l'encadrent. Ils viennent de la Ligue de l'enseignement, des Francas, de la fédération Léo Lagrange.
Ils accueillent ces jeunes dans leurs centres. Y a-t-il du casernement, pour reprendre votre terme ? Non. Ces jeunes vivent-ils en internat ? Oui.
Le SNU est un temps civil, organisé en trois grands moments : un séjour de cohésion qui dure treize jours, une mission d'intérêt général où l'on découvre l'engagement sur son propre territoire, qui dure quatre-vingt-quatre heures ou douze jours, et un engagement volontaire qui dure de trois mois à un an, qui peut être un service civique, un engagement au sein de nos réserves ou une mission de coopération internationale. Le SNU peut être effectué à partir de 16 ans.
Je ne vois pas en quoi notre projet de service national universel serait en contradiction ou en opposition avec votre proposition, qui commence à 18 ans. Votre seul but semble être de supprimer cette opportunité pour les jeunes,…
…alors qu'ils ont le droit de participer volontairement à un projet patriotique et d'engagement, sans qu'on méprise la forme de leur engagement. Les 50 000 jeunes qui ont participé au SNU sont particulièrement heureux de l'avoir fait, neuf jeunes sur dix se déclarant très satisfaits.
Le SNU fait grandir notre jeunesse et lui permet de découvrir d'autres départements et des formes d'engagement qui prennent parfaitement leur place dans leur parcours de citoyenneté. Avis défavorable.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Nicolas Forissier applaudit également.
J'ai sept demandes de prise de parole. Il convient de les équilibrer. Je vous propose donc de prendre deux orateurs pour et deux orateurs contre les amendements. Cela vous convient-il ? J'ouvre le débat car je l'estime nécessaire.
La parole est à M. Jean-Louis Thiériot.
Je reconnais que le SNU pose un problème : beaucoup de jeunes voudraient le faire et ne le peuvent pas !
C'est vrai.
Quelle est mon expérience du SNU ? C'est une fierté retrouvée pour ceux qui y participent. Ainsi, j'étais à l'Arc de Triomphe avec des jeunes, participant au SNU, qui venaient de banlieue en uniforme et rendaient hommage au soldat inconnu. C'est la belle jeunesse de France !
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RE, Dem et HOR.
J'ai vu des jeunes participant au SNU dans mon département de Seine-et-Marne, de toutes les origines, et qui, grâce au dispositif, découvraient une mixité qu'ils n'auraient jamais connue autrement. Enfin, j'ai constaté l'efficacité du dispositif : parmi les jeunes en SNU à Montereau, dans ma circonscription, qui ne connaissaient donc pas la marine nationale, trois sont désormais réservistes de la marine. Madame la secrétaire d'État, merci de soutenir un tel dispositif !
En outre, et c'est heureux, le SNU n'est pas financé sur les crédits prévus par le projet de LPM.
Si tel avait été le cas, je m'y serais opposé. Je suis donc fermement contre ces amendements.
Enfin, soyons sérieux : vous proposez une conscription payée au Smic à une cohorte de 700 000 jeunes. L'argent des Français, celui des contribuables, ce n'est visiblement pas votre souci, messieurs de La France insoumise !
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RE, Dem et HOR. – M. Pierrick Berteloot applaudit également.
Chers collègues, vous estimez que le SNU est inutile ? Quel message envoyez-vous aux 50 000 jeunes qui y ont participé et aux 64 000 qui sont inscrits pour le faire cette année ? Vous leur dites qu'ils sont inutiles ? C'est insupportable !
Écoutez ces jeunes ! Depuis 2019, j'ai la chance de me rendre régulièrement dans les centres qui les accueillent pour voir comment se déroule leur SNU. Écoutez-les, aller les voir plutôt que de lire des journaux ! Vous verrez, ils sont enthousiastes, ils se sentent utiles et reconnus. Ils apprennent, ce qui complète le projet de l'éducation nationale.
Dans votre programme, vous parlez d'engagement. Mais le SNU est un engagement, dans sa phase de cohésion, puis au cours des quatre-vingt-quatre heures de mission d'intérêt général et enfin avec la possibilité de s'engager dans un service civique.
Soyez cohérents : nous avons doublé le nombre de missions de service civique sous la précédente législature, mais vous n'avez pas voté la disposition. Vous évoquez un « coût », quand nous parlons d'un investissement pour la jeunesse, laquelle n'a pas de prix. L'objectif du SNU, c'est d'investir pour elle, avec les jeunes.
Enfin, vous évoquez la discipline militaire. Mais de quelle discipline parle-t-on ? Est-ce le fait de demander aux jeunes d'avoir une tenue correcte quand ils chantent La Marseillaise devant le drapeau ? Cela relève non de la discipline militaire, mais de l'évidence et cela devrait aller de soi pour chaque citoyen patriote. Est-ce le fait de chanter La Marseillaise tous les matins ? Pour vous, peut-être est-ce un problème. Pour nous, ça ne l'est pas !
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE, HOR et LR.
En réalité, quelle est la différence entre notre programme et le vôtre ? Vous voulez payer les Français pour qu'ils chantent La Marseillaise quand nous considérons que cela doit naturellement faire partie de leur éducation.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE, HOR et LR.
Nous partageons tous l'objectif de développer le sens civique et les valeurs de nos jeunesses, tout comme l'attachement à la nation. Le problème n'est pas là. Quel est-il ? Les jeunesses ont déjà un sens des valeurs. Elles savent ce qu'est la France et ce qu'est le civisme. Elles le montrent tous les jours, quand elles se mobilisent pour le climat, pour l'antiracisme, pour nos retraites.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Elles le montrent constamment : elles sont capables de penser les conséquences de nos actes.
En revanche, certains n'ont jamais réfléchi aux conséquences de leurs actes. Peut-être est-ce pour eux qu'il faudrait un SNU.
Mme Karine Lebon applaudit.
Peut-être MM. Le Graët, Ghosn ou Pouyanné auraient-ils pu tirer profit du SNU pour comprendre les conséquences de leurs actes pour la France, pour notre planète et pour notre économie ?
Madame la secrétaire d'État, le problème, c'est que la jeunesse voit bien plus loin que le SNU – elle l'a déjà dépassé. C'est pourquoi tout cela est inutile et, parce que nous sommes pragmatiques, nous vous conseillons de retirer cette référence au SNU du texte.
Mmes Karine Lebon et Anna Pic applaudissent.
Madame la secrétaire d'État, pour que les choses soient claires, notre amendement ne vise pas à nous opposer à toute participation des jeunes, bien au contraire. Nous estimons simplement que le SNU n'a pas sa place dans un projet de LPM.
Certains d'entre vous sont partis dans de grandes envolées lyriques, mais ne nous faites pas dire ce que nous n'avons pas dit ! Nous n'avons par exemple jamais dit qu'il ne fallait pas que les jeunes se regroupent ou se rassemblent par civisme, ou pour le pays.
Seuls le SMA et le service militaire volontaire sont réellement des dispositifs militaires. Le SNU n'a donc pas sa place dans ce texte. Enfin, nous ne saisissons pas son objectif final.
Mmes Karine Lebon et Anna Pic applaudissent.
Évidemment, et encore heureux, que les jeunes qui ont participé au SNU sont contents : ils étaient volontaires !
Votre dialectique est faiblarde !
Ce n'est pas parce qu'on est volontaire que cela se passe bien !
Si vous voulez, oui, c'est folklorique, mais si cela leur fait plaisir, c'est le problème…
Ce n'est pas ce que vous avez dit tout à l'heure. Essayez d'être cohérent !
Vous voulez investir pour la jeunesse ? Dans mon département, les élèves n'ont pas de professeurs et ceux qui sont absents ne sont pas remplacés. D'ailleurs, les familles sont obligées de poursuivre l'État en justice pour obtenir des compensations. Certains élèves attendent un professeur pendant plus de huit semaines et, d'autres, depuis le début de l'année.…
M. Blanchet plaidait pour qu'on investisse pour la jeunesse. Je veux bien ! Investissez les 3 milliards du SNU dans l'éducation nationale toute de suite, et tous les ans !
Invoquer le SNU, c'est très bien, mais préoccupez-vous déjà de ce qui est obligatoire : l'éducation nationale ! Vous n'êtes même pas capables de mettre un enseignant devant chaque élève !
Réglez ce problème avant de penser au SNU !
Enfin, si rien n'est militaire dans le SNU, pourquoi figure-t-il dans le projet de LPM ?
Il n'est pas dans la LPM, mais dans le rapport annexé !
Il n'y a aucune logique à le faire figurer dans un texte sur les armées et sur les modèles d'armées, comme le ministre l'a rappelé. Soit le SNU possède un lien avec le monde militaire, et nous pouvons en discuter, soit il n'est pas militaire, et n'a pas sa place dans ce texte.
Quant à notre projet de conscription, relisez précisément notre contre-projet de LPM ! Vous constaterez que c'est un dispositif, militaire ou civil, obligatoire, qui interviendra entre 18 et 25 ans, et n'interrompra donc pas les études. Vous constaterez aussi qu'il sera financé par le SMIC. D'ailleurs, quelqu'un payé au SMIC cotise – ce qui permettrait de régler le problème des cotisations retraite. Si nous avions adopté notre dispositif, …
…peut-être n'auriez-vous pas voté la retraite à 64 ans – vous n'en auriez pas eu besoin…
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur.
La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l'amendement n° 1068 .
Nous constatons que ce débat suscite un certain nombre de postures. Ainsi, concernant La Marseillaise, nous l'avons chantée davantage que vous dans cet hémicycle, chers collègues !
Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem, HOR, LR et RN.
S'agissant des valeurs de la République, et plus particulièrement de la laïcité, pourtant protégée par les articles L. 141-1 et suivants du code de l'éducation, elle a été récemment écornée par la volonté de fichage d'élèves absents le jour de l'Aïd-el-Fitr. Nous n'avons donc pas, non plus, de leçon de République à recevoir de vous !
M. Christophe Bex proteste vivement.
Certainement pas. M. Thiériot s'enthousiasme car, pendant le SNU, les jeunes chantent la Marseillaise devant le drapeau.
C'est bien, mais quel est le sens du SNU ? Je n'ai toujours pas entendu Mme la secrétaire d'État nous l'expliquer. Notre conscription poursuit, elle, un objectif clair : la planification écologique.
MM. Christophe Bex et Cormier-Bouligeon s'interpellent.
Messieurs Bex et Cormier-Bouligeon, merci de bien vouloir écouter l'orateur qui, seul, à la parole.
Vous parlez de mixité sociale mais, monsieur Thiériot, si seul le SNU y participe et permet de rencontrer des gens d'un autre milieu social, c'est grave !
Les responsables de la faillite de la mixité en France sont celles et ceux qui, dans certaines communes, enfreignent la loi SRU, relative à la solidarité et au renouvellement urbains, en ne respectant pas le quota de logements sociaux prévu pour que tout le monde puisse vivre équitablement ; ce sont celles et ceux qui ont participé au détricotage de la carte scolaire.
Protestations sur les bancs des groupes RE et RN.
Oh c'est bon ! Vous n'allez pas nous sortir votre programme marxiste révolutionnaire !
Monsieur Piquemal, La Marseillaise est sacrée, il ne faut pas en détourner l'usage : vous ne devriez pas vous gargariser de l'avoir chantée dans les circonstances auxquelles vous faites allusion.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs des groupes HOR et LR.
…mais vous voulez faire de ce débat une tribune. Depuis tout à l'heure, je vous écoute attentivement. Il n'y a pas de budget pour le projet que vous présentez. Qui va payer ? Ce sont nos jeunes ! En effet, vous leur imposerez neuf mois de je ne sais quoi – car vous annoncez tout et son contraire – et vous gâcherez leurs études et leur premier emploi.
La parole est à M. le président de la commission de la défense nationale et des forces armées.
Nous examinons le projet de loi de programmation militaire, qui ne prévoit ni l'organisation ni le financement du SNU. Nous avons encore 1 400 amendements à discuter, qui touchent à des questions majeures pour la défense, dans un contexte international très tendu : ne nous trompons pas de débat, poursuivons l'examen du texte.
Le rapport annexé mentionne le SNU. Celui-ci prévoit des missions d'intérêt général qui permettent notamment aux jeunes de choisir entre différentes formes d'engagement. C'est l'objet de la deuxième étape.
La mixité est territoriale autant que sociale. À quelle occasion un jeune de Guéret rencontre-t-il un jeune de Nantes et un jeune de Paris ? Jamais ! Ce programme implique-t-il que l'école n'a pas besoin de favoriser la mixité territoriale et sociale ? Non, évidemment ! Le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a d'ailleurs présenté un plan visant à améliorer la mixité sociale à l'école.
Je constate que les questions posées nous éloignent largement du projet de loi de programmation militaire.
Le SNU est un parcours de citoyenneté qui a vocation à insuffler une force morale dans la jeunesse.
Mme Anna Pic s'exclame.
Les jeunes concernés font le choix, volontaire, de s'engager ; ils sont très fiers de participer à un projet patriotique.
Dans un second temps, ils intègrent les cadets de la gendarmerie, la SPA – Société protectrice des animaux –, les Restos du cœur, la Fédération française des banques alimentaires, par exemple.
Mme Christelle Petex-Levet applaudit.
Peu importe la forme d'engagement qu'ils choisissent ; nous souhaitons seulement leur faire découvrir le champ des possibles. Aucune hiérarchie n'est à privilégier, madame Regol : les outils que nous donnons aux jeunes peuvent concerner l'environnement, le droit ou la mobilité, ils constitueront toujours une chance, surtout si les jeunes les choisissent par eux-mêmes.
Cela n'étonnera personne : l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il est fondé sur l'article 100, relatif à la bonne tenue des débats. Nous vous remercions de donner la parole à un ou deux orateurs pour et à un ou deux orateurs contre les amendements examinés, de tenter d'accélérer les débats et d'avoir plusieurs fois évoqué la diversité des opinions, néanmoins il ne faudrait pas que cette démarche aboutisse à ne jamais donner la parole au groupe Rassemblement national. Sur le SNU, nous l'avons systématiquement demandée mais nous ne l'avons jamais eue, or il est essentiel que tous les groupes, au rang desquels le premier groupe d'opposition, puissent s'exprimer à ce sujet. Il faut donc tourner, que le débat n'oppose pas toujours l'extrême gauche au Gouvernement, afin que parfois la voix de la raison se fasse entendre.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Oh, ça va ! Il arrive tout le temps que des groupes ne s'expriment pas, et ça ne vous gêne pas !
Cher collègue, notre organisation veut que les députés lèvent la main et que je donne la parole au fur et à mesure des demandes.
D'autres amendements sont relatifs au SNU, vous pouvez tout à fait vous inscrire pour participer à la discussion. Je choisis un orateur pour et un contre, en élargissant le nombre des intervenants quand les amendements sont nombreux.
Nullement. Je demande une suspension de séance, qui est de droit, madame la présidente.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à seize heures cinquante-cinq.
Sur l'amendement n° 1045 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Aurélien Saintoul.
Je l'ai déjà dit en commission : le SNU, pour le Gouvernement, c'est le sparadrap qui colle au doigt du capitaine Haddock. À la suite d'un caprice du Président de la République, il est sorti pendant la campagne présidentielle de 2017 comme un lapin d'un chapeau.
Mme Josy Poueyto s'exclame.
Depuis, vous ne savez pas comment vous en défaire.
Ce projet n'a aucun sens sur le plan de la défense, ni sur celui de l'engagement, ni sur celui de la mixité sociale. Dans tous ces domaines, des programmes existent, qui relèvent de la responsabilité de ministères plus compétents et plus expérimentés.
Puisque vous ne pouvez pas désavouer le chef de l'État, qui est aussi votre chef, vous allez devoir vous dépatouiller de cette politique publique hybride qu'est le SNU. Nous vous prédisons des tas de problèmes, madame la secrétaire d'État. Pour obliger des mineurs à quitter le domicile familial, vous devrez affronter l'autorité parentale : nous vous souhaitons bien du plaisir, car les Français s'y opposeront. Vous serez également confrontés à un problème de coût. Le SNU figure au rapport annexé. Or vous avez déjà failli à respecter l'engagement du Président de la République : petit à petit, le SNU grève le budget des armées et mobilise des capacités. Si vous le généralisez, il portera in fine préjudice à leur fonctionnement. Enfin, il soulève une difficulté logique : la défense n'a rien à gagner à envoyer des jeunes de 16 ans saluer le drapeau, chanter La Marseillaise et pratiquer des activités physiques.
Mme Anne Le Hénanff et M. Frédéric Cabrolier s'exclament.
Vous n'aurez pas la mauvaise foi de nous intenter un procès d'intention – dans le cas contraire, je vous arrête d'office –, en nous accusant de refuser que les jeunes s'engagent. Au contraire, nous saluons leur bonne volonté ; nous savons que les ressources morales de notre peuple, de sa jeunesse en particulier, sont infinies.
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur
Ce débat est intéressant, mais comme toujours avec la NUPES en général et avec LFI en particulier, il tourne vite à la caricature et devient un enjeu politicien.
Pour vous, l'engagement citoyen ne peut prendre qu'une forme revendicative ou militante. Mais souffrez que certains jeunes aiment notre drapeau ; souffrez qu'ils aiment les valeurs de la République et soient heureux de s'engager pour défendre fermement nos couleurs ; souffrez qu'ils acceptent de participer à un service militaire adapté ou au SNU ; souffrez cette diversité et acceptez que la jeunesse ne soit pas politique, mais qu'elle aime les valeurs de la République, tout simplement !
Dans votre fascicule – qui n'a rien de la présentation d'une vision, soit dit en passant –, vous prévoyez une conscription citoyenne assortie d'une allocation d'autonomie équivalente au SMIC. Comme le rapporteur, je vous demande combien cela coûte et qui paiera, même si l'on sait que pour vous, la solution consiste à taxer les riches !
Cette conscription citoyenne comprendra une formation militaire initiale au maniement des armes et aux manœuvres, ainsi que des formations ponctuelles dans d'autres secteurs régaliens. Vous prévoyez aussi que cette conscription se rapprochera des lieux de vie, en limitant le casernement. Expliquez-moi comment former au maniement des armes autrement que par le casernement ? Il semble que le casernement soit pour vous un problème philosophique !
En revanche, l'embrigadement militant, ça vous connaît : vous le défendez du matin au soir.
La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l'amendement n° 1338 .
Il est tout à fait légitime de parler du SNU dans ce débat, puisque ce terme figure dans le rapport annexé. Nous nous posons des questions sur sa généralisation, qui a été annoncée, puis suspendue. Nos collègues sénateurs ont étudié l'impact financier d'un SNU généralisé, qu'ils ont évalué à plus de 3 milliards. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous communiquer des éléments chiffrés ou des estimations confirmées de la généralisation du SNU ? Où en est-on ?
Ces derniers jours, nous avons également découvert des informations dans la presse : le journal L'Étudiant évoque une option SNU au bac, ainsi qu'une prime pour les enseignants volontaires, par le biais de classes d'engagement. Nous souhaiterions avoir des compléments d'information concernant ces annonces, puisqu'en tant que commissaires à la défense, nous ne les avons pas reçus de façon officielle.
Plus généralement, nous nous posons la question de savoir si la jeunesse a besoin d'un encadrement militaire dans un cadre scolaire, d'autant que ce dispositif n'est pas une réponse crédible au besoin urgent de mixité sociale.
Les armées n'ont pas non plus envie du SNU, qui représente pour elles une charge supplémentaire particulièrement élevée si l'on se projette dans le scénario d'une cohorte de 800 000 jeunes à encadrer chaque année. Les infrastructures d'accueil nous semblent être un enjeu central.
Nous sommes favorables au développement de l'engagement citoyen pluriel, sur la base du volontariat ; mes collègues l'ont évoqué tout à l'heure. Je vous propose donc, par cet amendement, d'affirmer que le SNU s'inscrit dans le cadre du volontariat. Il importe de le préciser, parce que le projet n'est plus le même dès lors que vous laissez planer l'ambiguïté.
Nous l'avons dit : le SNU ne fait pas partie du projet de loi de programmation militaire. Je laisserai donc Mme la secrétaire d'État répondre précisément à vos questions. Néanmoins, madame Thomin, je sais que vous arpentez votre territoire. Un SNU sera organisé cet été à Camaret. Je vous invite à vous rendre sur place. Pour l'avoir vécue moi-même à Vannes, je vous assure que l'expérience est intéressante. Peut-être l'image que vous avez du SNU s'en trouvera-t-elle changée ?
Aujourd'hui, le SNU repose sur le volontariat. Compte tenu du nombre d'amendements déposés sur ce sujet et du débat qui en résulte, la question de savoir si le SNU doit devenir obligatoire ou continuer à être choisi fera nécessairement l'objet d'un débat parlementaire.
Sur ces amendements, mon avis est défavorable pour plusieurs raisons. Tout d'abord, parce que ce débat n'a pas encore eu lieu. Ensuite, parce que les consultations, sur lesquelles vous me demandez un éclairage, sont en cours. Si des articles sont parus sur les classes ou les établissements 100 % engagés, c'est en raison de l'indélicatesse de certaines organisations syndicales, qui n'ont pas attendu que toutes les organisations syndicales aient été consultées, avant la tenue d'une réunion multilatérale avec le ministre de l'éducation nationale. J'ajoute que nous ne sommes qu'au tout début des consultations visant à envisager, pour ceux qui le souhaitent, un travail disciplinaire plus intense et permettre la participation éventuelle des classes ou des établissements qui le souhaitent, à des journées de cohésion pendant le temps scolaire. Cette participation – j'insiste – reposerait également sur le volontariat.
La question qui se pose aujourd'hui est la suivante : le SNU apporte-t-il quelque chose ? Foncièrement, il permet à notre jeunesse de disposer d'outils nouveaux en matière de mixité sociale et territoriale. Madame la députée, je réitère l'invitation que je vous avais faite en commission et que vous aviez déjà acceptée : venez participer à ces séjours ou aux formations des encadrants. J'ai l'intime conviction que votre regard sur ce dispositif évoluera.
Certes, le SNU n'est pas financé par la LPM ; il est pourtant évoqué dans le rapport annexé. Puisque nous avons eu un débat intéressant hier soir sur la dissuasion, le moment est peut-être venu de tenir un débat sur le SNU et de rappeler notre position à ce sujet. Nous sommes attachés à tout ce qui peut fortifier et nourrir le lien réciproque entre l'armée et la nation, en particulier lorsqu'il concerne la jeunesse. Nous soutiendrons toutes les initiatives et les structures qui permettront de développer le goût de la France, l'amour de la patrie et certaines valeurs et, pourquoi pas, de favoriser les carrières militaires – puisque le recrutement et la fidélisation dans les armées sont des enjeux –, voire la réserve.
Loin des outrances et de la radicalité de l'extrême gauche, nous nous posons des questions sur le SNU. Faisant œuvre de pédagogie, le ministre des armées a pris beaucoup de temps hier soir pour apporter les explications nécessaires, mais des zones floues demeurent : le SNU est-il obligatoire ou non ? Doit-il être effectué en caserne ou non ? Pendant les périodes scolaires ou non ? Comment répondre à la demande de cette jeunesse qui souhaite s'engager, partager des moments où l'on chante La Marseillaise et où l'on apprend des valeurs qui nous sont chères ?
Nous devons débattre, savoir ce que dit la presse et être éclairés sur ce projet, car même sur les bancs de la majorité, circulent des informations contradictoires.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Madame la secrétaire d'État, vous dites que le débat sur la généralisation du SNU n'a pas eu lieu : il est en cours !
Je parlais d'un débat sur son caractère facultatif ou obligatoire.
Par ailleurs, ce n'est un secret pour personne : si le SNU a en partie été retiré du projet de LPM, c'est précisément parce que vous saviez qu'il la torpillerait. Personne ne veut de votre SNU généralisé !
Ne soyez pas méprisant, monsieur le député !
C'est l'un des raisons pour lesquelles le projet de loi risquait fort de ne pas être adopté. Soit vous ne savez pas financer la généralisation du SNU, soit vous allez grever le budget des armées ; autant dire que le projet n'est pas abouti.
Vous dites que les travaux ne font que commencer, mais qui peut vous croire, madame la secrétaire d'État ? Cela fait cinq ans que le sujet est sur la table, cinq ans qu'un secrétariat d'État est chargé de son développement ! Peut-être allez-vous nous expliquer que la copie est reprise à zéro ? Tant mieux pour vous, cela vous donne peut-être matière à travailler et cela vous offre un secrétariat d'État. Mais cela fait cinq ans qu'on travaille sur le SNU : soit vous ne savez pas ce que vous faites et c'est inquiétant, soit vous le savez et vous le dissimulez.
Quoi qu'il arrive, vous serez confrontée aux vices inhérents au SNU, notamment au problème de la minorité des jeunes qui seront enrôlés. De même, l'idée selon laquelle le SNU serait un bonus dans l'enseignement secondaire constitue une rupture d'égalité qui posera problème. Je viens donc en appui de l'amendement de nos collègues socialistes : il faut au minimum sécuriser le caractère volontaire du SNU, s'il continue à exister.
Pour ce qui est de son financement, vous avez dit en commission que le dispositif des colonies apprenantes coûte deux fois moins cher que le SNU. Autrement dit, le SNU coûte deux fois plus cher, pour environ deux fois moins de bénéficiaires. Si vous vouliez vraiment œuvrer en faveur de la mixité sociale, vous défendriez, plutôt que le SNU, le droit aux vacances pour tous.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 1338 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 846 .
Cet amendement d'appel s'inscrit dans la droite ligne de ce dont nous avons discuté hier. Il y a vingt-cinq ans, Jacques Chirac a supprimé le service militaire obligatoire, afin de justifier la professionnalisation de l'armée. Les résultats sont là : l'armée est effectivement professionnelle et spécialisée, mais sa taille est limitée – c'est le revers de la médaille, si j'ose dire : le chiffre de 170 000 militaires, en comptant les réservistes, a été communiqué hier.
Si je n'ai pas de nostalgie mal placée pour le service militaire obligatoire, il faut bien reconnaître qu'il présentait de sacrées qualités. C'était un outil d'intégration et de mixité sociale absolument formidable, qui nous manque aujourd'hui.
Je ne remets pas du tout en cause l'utilité du service national universel, ni même certains de ses bienfaits. Cependant, dès lors qu'il concerne 32 000 jeunes en 2022, il n'apportera pas une solution suffisante pour remédier au manque d'effectifs des armées. Nous avons déjà eu cette discussion hier, mais il me semble qu'on ne peut pas faire l'impasse sur la nécessité d'augmenter et de fidéliser les effectifs de l'armée française.
En effet, le sujet a été évoqué hier. Restaurer le service national serait coûteux et pas nécessairement accepté par tous. Cela dit, il existe d'autres formes d'engagement, comme la réserve, qui est prise en considération dans la loi de programmation militaire ; c'est une autre façon de s'engager.
Bien que, le temps passant, on ne retienne que les meilleurs souvenirs – la nature est ainsi faite –, la conscription, que les Insoumis veulent rendre obligatoire, n'a pas toujours été bien vécue par tous. Avis défavorable.
Nous avons entamé hier un débat sur le format des armées et les missions qu'on en attend, mais j'irai un peu plus loin aujourd'hui, en réponse à cet amendement. Je vous remercie d'ailleurs de l'avoir déposé, parce que de nombreux Français, lorsqu'ils se retrouvent en famille ou entre amis, disent que le service militaire avait du bon et qu'il faudrait peut-être le restaurer. Dès lors, il serait peut-être incongru de ne pas en débattre dans cet hémicycle, même quelques instants, à l'occasion de l'examen du projet de LPM.
Premièrement, je suis frappé de constater que les défenseurs de la professionnalisation se font rares. Cela s'explique sans doute par le fait que celle-ci ne fait plus débat, car chacun la considère comme bienvenue. D'ailleurs, la plupart des thèmes que nous avons abordés en examinant ce projet de loi, comme celui de l'hybridité, nous conduisent à parler de professionnalisation. D'autres amendements nous fourniront l'occasion d'évoquer plus avant les enjeux de professionnalisation, de fidélisation, de gestion des carrières et de pyramidage des grades, mais il s'agit là d'un sujet distinct.
Deuxièmement, les nostalgiques du service militaire citent généralement ses vertus sociales, comme la mixité sociale, mais rarement ses vertus militaires. Il est paradoxal qu'il soit si difficile de démontrer les vertus militaires du service militaire, dont c'est pourtant l'objet premier.
Troisièmement, je rappelle que la mobilisation de masse de soldats conscrits faisait partie de l'édifice conventionnel qui soutenait la voûte nucléaire pendant la guerre froide. Cela passait par la concentration de millions de jeunes gens aux frontières orientales de l'Otan ou de centaines de milliers d'entre eux aux frontières orientales de la France. Je me rappelle la carte des régiments et des bases aériennes de l'est de la France qui les accueillaient ; j'ai d'ailleurs eu l'occasion d'évoquer le sujet lorsque j'ai récemment rendu visite à plusieurs régiments.
M. le rapporteur l'a indiqué, l'appel à la réserve constitue désormais la voie privilégiée du durcissement. En effet, les réservistes sont recrutés sur la base du volontariat. En outre, il s'agit d'une forme de professionnalisation : un militaire de réserve, contrairement à un conscrit, suit régulièrement des formations et acquiert des qualifications, y compris médicales dans le cas du service de santé des armées. Le durcissement du modèle d'armée par la réserve que nous proposons dans la loi de programmation militaire est la première étape, essentielle, de notre changement de doctrine militaire.
Enfin, vous avez débuté votre intervention en affirmant que Jacques Chirac a supprimé le service militaire obligatoire. Pour la complète information de la représentation nationale, je précise que le président Chirac ne l'a pas supprimé en droit, mais a préféré le suspendre, pour des raisons de prudence. Le Parlement lui avait permis de réécrire le dispositif afin qu'il soit possible de le rétablir très vite en cas de besoin, même si je peine à imaginer quelles circonstances rendraient nécessaire une telle décision. Le recensement militaire en mairie n'a jamais cessé et continue à être supervisé par le ministère des armées. Le retour du service militaire reste très hypothétique, mais sa base juridique et administrative demeure.
Je vous propose de retirer votre amendement. Le cas échéant, nous pourrons poursuivre ce débat ultérieurement, lorsque nous évoquerons le format des armées ; en tout cas, il était certainement utile d'évoquer le service militaire, car beaucoup de Français en parlent.
Je vais laisser M. Blanchet s'exprimer, puisqu'il le souhaite. Je réserve ma réponse.
Nous touchons ici à la question essentielle du lien entre l'armée et la nation. Comment créer un lien qui donne aux jeunes l'envie de s'engager ? Les douze jours de cohésion du SNU comprennent deux journées essentielles qui concernent les militaires. D'une part, le forum de l'engagement permet aux jeunes de rencontrer, pendant une demi-journée, des structures leur présentant des engagements possibles, qu'ils soient associatifs – dans le cadre des Restos du cœur ou de la Croix rouge, par exemple – ou militaires. D'autre part, la journée défense et citoyenneté (JDC), qui occupe désormais la place du service militaire suspendu par le président Chirac, donne aux jeunes l'occasion d'assister au déroulement d'une cérémonie patriotique comme celle du 8 mai. Chers collègues, chacune de vos circonscriptions compte au moins une mairie où un jeune est venu assister à une telle cérémonie en tenue de SNU, sans y être obligé, mais pénétré du sens de cet acte. C'est une des fonctions du SNU que d'inciter les jeunes à valoriser leur sentiment patriotique.
Lors de la JDC, les jeunes écoutent également le témoignage de militaires ou d'anciens combattants. Ainsi, il y a deux ans, ils ont recueilli le témoignage de Léon Gautier, ancien combattant désormais âgé de cent ans ayant débarqué le 6 juin 1944 à sept heures vingt-trois sur la plage de Colleville-Montgomery.
Il est le dernier survivant parmi les 177 Français ayant participé au débarquement de Normandie.
Léon Gautier a rencontré dans ma circonscription, à Merville-Franceville-Plage, les jeunes du SNU, qui lui ont posé une question : « Pourquoi, à l'âge de 17 ans, en 1940, avez-vous décidé de traverser la Manche pour revenir un jour libérer la France ? » Il a répondu qu'il avait fait tout cela car il avait été éduqué à aimer la France. C'est cela, le SNU, chers collègues !
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR et sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.
Je m'associe bien sûr à l'hommage rendu au héros Léon Gautier.
Madame Ménard, nous n'avons pas les mêmes nostalgies. S'inspirer des grands succès des époques passées ne signifie pas reproduire à l'identique les mêmes choses, mais retrouver l'esprit qui les a animées pour l'insuffler dans d'autres choses, en d'autres temps. C'est ce à quoi nous sommes invités.
Élu dans un territoire où l'aviation militaire et l'armée de terre sont présentes, je suis partenaire de nombreuses initiatives ayant permis aux adolescents de les rencontrer, dont les résultats ne cessent de m'enthousiasmer. Je suis donc un ferme partisan du développement du lien entre l'armée et la nation, grâce à ces grands témoignages qui édifient la jeunesse et lui font connaître des figures de la Résistance : des gens qui, à 16 ou à 17 ans, ont donné leur vie pour notre pays. Cela est essentiel.
Collègues du groupe LFI – NUPES, chacun connaît à la fois notre amitié et nos différences politiques. Il se trouve qu'à l'époque où Patrick Kanner était ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, j'ai été déposé un amendement visant à instaurer un service civique obligatoire de neuf mois, dont trois de classe républicaine et six d'engagement dans le cadre d'une mission d'intérêt général. La droite l'avait voté. Pendant un an, Patrick Kanner, qui ne parvenait pas à se défaire de cet amendement, m'en a beaucoup voulu. Cette idée rejoint en quelque sorte l'intuition de MM. Lachaud et Saintoul, qui viennent de proposer la création d'une conscription citoyenne.
Autrement dit, nous sommes à la recherche d'un moyen de cultiver le sens civique de la jeunesse. Il convient de nous écouter mutuellement. Il serait dommage de promouvoir un patriotisme par trop éthéré. En effet, la guerre en Ukraine nous a fait retrouver le tragique de l'histoire et nous sommes conscients des dangers du terrorisme et des systèmes totalitaires, mais il faut ajouter à cela le danger de rester captifs d'un monde en train de finir.
La semaine dernière, j'étais invité comme grand témoin au congrès national des foyers ruraux, où j'ai pu exprimer mes attentes en matière d'éducation populaire et d'éducation civique. J'aimerais que M. le ministre des armées et Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse en tiennent compte, plutôt que de promouvoir un patriotisme parfois désuet.
Les enjeux de l'éducation civique et populaire sont multiples. Premièrement, elle doit apprendre aux jeunes à débattre démocratiquement et à respecter nos institutions, pour être en mesure de partager des ressources finies. Deuxièmement, elle doit absolument constituer un laboratoire d'ingénieurs, pour inventer les solutions de la transition sociale et écologique. Troisièmement…
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur, dont le temps de parole est écoulé.
L'amendement n° 846 est retiré.
Alors que l'objectif de masse souhaité par le chef d'état-major des armées passe, entre autres, par le recrutement de réservistes, les crédits budgétaires alloués à la réserve opérationnelle militaire ces dernières années n'ont pas permis d'atteindre la cible fixée par les précédentes lois de programmation militaire en matière de recrutement et d'emploi. Comme le souligne un récent rapport parlementaire, la hausse du budget des réserves à partir de 2016 s'est d'abord traduite par une augmentation du nombre de jours d'activité, faute d'avoir atteint les objectifs de recrutement fixés par le Gouvernement et inscrites dans la LPM. Pour tenter de les atteindre, les gestionnaires ont ensuite été contraints de réduire l'activité, ce qui a produit des effets négatifs non seulement sur le moral des réservistes, mais surtout sur leur fidélisation. Et qui pourrait en blâmer les réservistes ?
Comme le rappelait récemment Philippe Ribatto, président de l'Union nationale des officiers de réserve (Unor), les réservistes constituent une force cruciale en temps de paix comme en temps de guerre. Dans le cadre des précédentes LPM, l'obligation de respecter scrupuleusement les crédits alloués à la réserve s'est révélée particulièrement contraignante, car ce budget permettait tout juste de recruter de nouveaux réservistes. Il est impératif d'en tirer des leçons et de considérer la nécessité de maintenir un taux d'activité acceptable. C'est pourquoi nous encourageons bien entendu l'augmentation des réserves, tout en proposant que leur doctrine d'emploi n'engendre pas de réduction du taux d'activité individuel au regard des indicateurs de l'année précédente.
Votre amendement vise deux objectifs. Le premier, consistant à augmenter les effectifs de réserve, est satisfait par l'alinéa 32 du rapport annexé, enrichi lors des travaux en commission. Le second, qui concerne l'activité du réserviste, sera également pris en considération dans la LPM. Je considère en cela votre amendement comme un amendement d'appel, et vous faites bien d'évoquer le sujet. Votre souhait d'employer un réserviste pour deux militaires d'active traduit bien la volonté de favoriser une relation d'accompagnement et de compagnonnage entre le premier et les seconds, renforçant ainsi l'intégration des réservistes au sein des armées. M. le ministre, lui-même réserviste, pourra certainement vous éclairer à ce sujet. Je vous propose de retirer l'amendement.
En tant que gendarme réserviste, j'étais payé sur les crédits du ministère de l'intérieur, ce qui m'évite des difficultés dans la réponse que je vais vous faire.
M. Christophe Blanchet sourit.
Je vous remercie d'évoquer ce sujet important. Je considère également votre amendement comme un amendement d'appel en raison de sa rédaction. Sur le fond, vous avez mille fois raison quant au fait que nous avons trop fragilisé les réserves, ce qui s'explique par plusieurs phénomènes.
Le premier d'entre eux est la gestion budgétaire annuelle. D'abord, comme la fourmi de la fable, les gestionnaires se montrent économes des journées de réserve. Désireux de ne pas épuiser les journées avant la fin de l'année et conscients de la nécessité de les allouer selon les besoins des régiments, ils en viennent à refuser des missions intéressantes à des réservistes pourtant disponibles pour les accomplir. Parvenus au mois d'octobre, ils s'aperçoivent que de nombreuses journées sont encore disponibles ; par conséquent, ils en autorisent l'utilisation, parfois sans parvenir à les épuiser, et parfois, il faut l'admettre, en les utilisant à mauvais escient. Il s'agit certes d'un problème de gestion, qui ne relève nullement de la loi, mais vous avez raison d'identifier ce phénomène connu.
La deuxième difficulté des réserves réside dans le fait que leur fonctionnement est déconcentré, décentralisé et repose sur des principes généraux de commandement. L'emploi des réservistes varie considérablement d'une unité à l'autre, en fonction de la personnalité du chef de corps ou du commandant de base aérienne, voire de celle du commandant de compagnie. Il diffère du point de vue quantitatif, qu'il s'agisse du nombre de signatures d'ESR – engagements à servir dans la réserve – ou du nombre de journées activées, et du point de vue qualitatif, par la nature des missions confiées aux réservistes. Je suis très attaché au fait que les réservistes, quand bien même ils ne seraient présents que pour suppléer aux actifs, soient intégrés à la mission globale ; mais certains commandants ont souvent été tentés, pour ainsi dire, d'interpréter autrement la notion de suppléance. Il s'agit selon moi d'une question de commandement. Si nous constations les mêmes problèmes en ce qui concerne l'armée d'active, vous me demanderiez ce que font les chefs d'état-major des armées ou leurs majors généraux.
Pour être clair, cela fait partie des objectifs que je compte assigner à l'état-major, conformément à mes prérogatives de ministre des armées : j'insisterai sur la nécessité d'une gestion des réserves plus transparente et bien mieux calibrée. Cela implique en premier lieu des moyens suffisants et une gestion budgétaire responsable, qui donne sur le budget annuel une visibilité suffisante pour éviter le dilemme de la cigale et de la fourmi. Cet objectif est reflété dans le volet budgétaire du projet de LPM : les 10 milliards d'euros que j'évoquais comprennent des mesures relatives aux réserves. D'ailleurs, cela nécessite peu d'argent : les lignes de crédit correspondant à l'emploi des réservistes ne sont pas exorbitantes. Je précise qu'il ne faut pas seulement considérer l'emploi des réservistes, mais également leur équipement et leur formation, qui sont primordiaux : là encore, pour les réserves comme pour l'armée d'active, nous privilégions une logique de cohérence plutôt que de masse.
Quant à l'amendement, je vous propose de le retirer. En effet, vous préconisez l'« augmentation des réserves et [la] modification de leur doctrine d'emploi sans réduction du taux d'activité individuel au regard des indicateurs de l'année n – 1 ». Or vous savez aussi bien que moi que les indicateurs de l'année précédente dépendent fortement du contexte opérationnel. Ce qu'il convient de faire, c'est de constituer un socle solide ; nous examinerons plus tard d'autres amendements déposés par divers groupes, dont je vous suggère de prendre connaissance dans l'optique de déposer d'éventuels sous-amendements. S'il faut retenir un élément saillant de ce débat, c'est la nécessité de durcir le modèle de réserve et plus généralement l'activité globale. Dans le détail, les commissaires à la défense auront toute liberté d'examiner la situation armée par armée, voire, parfois, unité par unité. J'encourage les parlementaires à s'emparer de ce sujet, car il s'agit d'un travail global et transversal.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 122
Nombre de suffrages exprimés 108
Majorité absolue 55
Pour l'adoption 40
Contre 68
L'amendement n° 1045 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Philippe Ardouin, pour soutenir l'amendement n° 980 .
Il vise à inscrire dans le rapport annexé l'ambition de renouveler le lien entre les armées et la nation en impliquant les établissements scolaires. La mission d'information flash sur le monde associatif combattant, dont j'étais corapporteur avec M. Yannick Favennec-Bécot, a mis en exergue le recul, année après année, de la participation des établissements scolaires aux cérémonies mémorielles importantes du calendrier. Selon de très nombreuses associations, l'explication réside notamment dans l'absence de sensibilisation des chefs d'établissements et des professeurs aux enjeux de défense et de mémoire. La réitération de cet objectif dans le rapport annexé à la LPM a vocation à réaffirmer ce retour de l'esprit de défense et de la mémoire parmi les jeunes générations.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire, pour donner l'avis du Gouvernement.
Les armées et les directions, ainsi que les établissements directement concernés, comme la direction de la mémoire, de la culture et des archives (DMCA), l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) et la direction du service national et de la jeunesse (DSNJ), souhaitent approfondir leur partenariat avec le ministère de l'éducation nationale et le ministère de l'agriculture pour renforcer le lien entre l'armée et la nation en impliquant les établissements scolaires. Cela se traduit par des actions très concrètes, telles que la participation aux cérémonies, que vous avez évoquée, le soutien aux projets pédagogiques dédiés, les classes de défense, l'enseignement de la défense et la sensibilisation des enseignants.
Pour soutenir ces initiatives, je donne un avis favorable à l'amendement.
L'amendement n° 980 est adopté.
La parole est à Mme Nathalie Serre, pour soutenir l'amendement n° 769 .
Il vise à mettre en valeur les acteurs importants du lien entre l'armée et la nation que sont les correspondants défense et l'association du Souvenir français.
Nombre d'entre nous font partie de l'amicale parlementaire du Souvenir français. Celui-ci entretient les tombes, conserve le souvenir des événements locaux et transmet à tous, en particulier à la jeunesse, la mémoire combattante.
En outre, dans toutes les communes de France, il y a un correspondant défense qui, en particulier dans les petites communes, est souvent oublié. L'amendement vise à rappeler à tous l'existence des correspondants défense, qui peuvent coopérer avec l'association du Souvenir français pour renforcer le lien entre l'armée et la nation.
Je comprends que vous souhaitiez mettre en valeur le monde combattant. Toutes les cérémonies, dans toutes les communes de France, sont assurées par le monde combattant qui se mobilise souvent avec des comités d'entente.
Le Souvenir français, que vous évoquez, n'a pas d'antennes partout, même si c'est une association solide et bien implantée en France. Les comités d'entente s'articulent autour des correspondants défense, dont vous avez raison de souligner l'importance, et des maires, bien sûr. Toute cette communauté fait vivre le monde mémoriel.
Je comprends donc bien l'esprit dans lequel vous avez rédigé l'amendement, néanmoins je vous demande de le retirer, sans quoi j'émettrai un avis défavorable.
Je donnerai en même temps l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 128 de M. Pierre Cordier, dont la substance me paraît identique.
Le Souvenir français, que je connais bien, est un acteur important du monde combattant, mais il n'a pas le monopole de la mémoire.
Nous sommes d'accord. Dans chaque commune, comme l'a dit M. le rapporteur, il y a un correspondant défense. En outre, chaque conseil municipal peut faire le choix de telle ou telle association. Il serait malvenu que je prescrive ou qu'on inscrive dans la loi le choix d'une seule association pour les 36 000 communes de France. Je ne suis donc pas favorable à votre proposition. Je suis d'ailleurs certaine que le président du Souvenir français, qui fait un travail extraordinaire et qui a été directeur de cabinet de trois secrétaires d'État aux anciens combattants et à la mémoire, comprendra que j'émette un avis défavorable sur les amendements n° 769 et 128 .
D'autres anciens combattants ne comprennent pas votre absence à leur assemblée générale !
L'amendement n° 769 n'est pas adopté.
L'amendement de M. Pierre Cordier ressemble à l'amendement n° 769 , mais il n'est pas identique. Il tend à permettre la désignation d'un correspondant du Souvenir français dans chaque commune de France. En effet, il faut préserver les monuments, et surtout s'occuper, en lien avec Le Souvenir français, des tombes des morts pour la France dans les cimetières, qui sont souvent en déshérence. Ce correspondant ne doit pas forcément être le même que le correspondant défense, qui a une autre mission.
Pour les raisons qui viennent d'être évoquées, je vous demande de retirer l'amendement, sans quoi la commission émettra un avis défavorable.
Avis défavorable pour les raisons que j'ai développées précédemment.
Nous voterons pour l'amendement n° 128 . C'est l'occasion pour le groupe Rassemblement national de saluer le travail qu'accomplit Le Souvenir français pour renforcer le lien entre l'armée et la nation. Je le vois chez moi, en Moselle, Le Souvenir français est l'incarnation de ce lien : ses membres sont présents aux cérémonies ; ils entretiennent les tombes et les monuments. Ils sont également présents dans les écoles pour transmettre le flambeau aux plus jeunes, parler de ce qu'ils ont vécu et initier les jeunes à l'esprit patriotique. Certes, vous l'avez souligné, madame la secrétaire d'État, ils ne sont pas les seuls, mais leur rôle est essentiel. Le reconnaître dans le cadre de cette LPM serait une juste reconnaissance de l'abnégation avec laquelle ils agissent et du temps dont ils font don à la nation.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je prends à nouveau la parole afin de préciser mon propos. J'ai donné un avis défavorable à ces amendements, en soulignant le fait que vous demandez aux maires et aux conseils municipaux des 36 000 communes de France de voter pour que Le Souvenir français soit présent à toutes les cérémonies. D'abord, je ne suis pas sûre qu'on trouvera 36 000 membres du Souvenir français pour venir à chaque commémoration. Ensuite – M. Le Fur a fait allusion à une assemblée générale à laquelle je n'ai pas pu me rendre –, je tiens à souligner qu'il faut que toutes les associations du monde combattant soient représentées. C'est la raison pour laquelle je maintiens que, même si l'amendement n° 128 est le fruit d'une bonne intention, je ne peux pas l'accepter.
Je comprends votre envie de soutenir Le Souvenir français : vous avez raison, c'est une très belle association. Cependant, elle n'est pas présente partout sur notre territoire, comme l'a rappelé Mme la secrétaire d'État. En revanche, chaque commune désigne un correspondant défense. À mon avis, il vaut mieux valoriser l'action de coordination qu'accomplit le correspondant défense sous l'autorité du maire. L'articulation avec les associations dépendra de celles qui sont présentes dans la commune. Voilà le format le plus efficace.
La question constitutionnelle est importante pour nombre d'entre nous en ce moment, or cet amendement pose problème. En effet, quoi qu'on pense du Souvenir français, que faites-vous de la libre administration des communes ? Qui sommes-nous pour imposer aux maires d'instaurer un élu référent ? Laissons les maires décider eux-mêmes. Nous ne sommes pas là pour imposer aux communes ce qu'elles doivent faire.
Dès lors qu'il contrevient à la libre administration des communes, l'amendement n° 128 n'a pas de sens, il n'a pas lieu d'être et il est peut-être même anticonstitutionnel.
L'amendement n° 128 n'est pas adopté.
Visiblement, la porte est bien fermée à l'égard du monde combattant – je le regrette.
M. le rapporteur s'exclame.
J'espère qu'il n'en sera pas de même pour l'organisation d'actions mémorielles. Celles-ci sont nécessaires ; elles sont souhaitables.
J'ai été témoin – je ne dois pas être le seul – d'actions remarquables organisées par vos services, par l'ONACVG. Or celui-ci ne dispose plus de crédits. Mon souhait n'est pas d'octroyer des crédits : ce n'est pas le lieu ; nous aurons l'occasion d'en discuter lors de l'examen de la loi de finances. L'amendement n° 229 tend à réaffirmer la nécessité d'encourager l'organisation d'actions mémorielles par l'ONACVG – en régie, en quelque sorte – plutôt que d'obliger ce dernier, car c'est ce qui se passe, à passer par des agences de communication. Je sais que la mode est aux agences de communication, mais je suis assez peu sensible à ce genre de mode. Je souhaiterais que, d'une manière ou d'une autre, nous réaffirmions la nécessité de laisser l'ONACVG organiser ces manifestations : il a les moyens humains de le faire, car il y a des gens très motivés et compétents dans cette administration présente sur l'ensemble du territoire. Il faut donner à ces interlocuteurs légitimes du monde combattant la possibilité d'organiser des actions mémorielles.
Monsieur Le Fur, vous avez commencé la présentation de votre amendement en déclarant que « la porte est bien fermée à l'égard du monde combattant ». Vous vous adressez au ministre des armées…
Ne me coupez pas la parole, je vous prie.
Je reprends : vous avez adressé cette phrase au ministre des armées, à la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire, et à moi-même, qui suis ancien combattant. Je vous demanderai donc de mesurer vos propos.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Comme nous sommes plusieurs à l'avoir déjà expliqué, il n'est pas possible de favoriser une association par rapport à une autre. Le monde mémoriel est organisé, vous devez respecter les équilibres existants : vous ne pouvez pas imposer quoi que ce soit.
M. Marc Le Fur s'exclame.
À l'activité mémorielle, très bien organisée par les maires – que je salue –…
…et les correspondants défense présents dans toutes les communes de France,…
…s'ajoutent les activités assurées par l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre.
Et je peux vous assurer que tous font très bien leur travail – vous le savez aussi bien que moi, vous qui êtes également élu de Bretagne et participez souvent aux cérémonies.
Votre propos, qui sous-entendait que nous maltraitons le monde combattant, est donc inadmissible à mes yeux d'ancien combattant, mais aussi tout à fait irrespectueux de tous ceux qui s'engagent dans le monde mémoriel. Avis défavorable. .
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – M. Marc Le Fur s'exclame
Comme vous le savez, monsieur Le Fur, je suis secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire : vous ne devez pas douter de mon plein engagement en faveur des anciens combattants, d'autant que celui-ci remonte à loin puisque, comme vous le savez, mon arrière-grand-père, mon grand-père et mon père ont eux-mêmes été combattants,…
Très bien, mais écoutez-moi, vous comprendrez où je veux en venir.
Votre amendement met en lumière un enjeu majeur du développement du lien entre l'armée et la nation, c'est pourquoi j'émettrai un avis favorable. Mais il n'est pas tolérable d'entendre dans ce débat que nous sommes contre les anciens combattants. Ils sont notre mémoire, ils sont tout ce que nous sommes aujourd'hui, dans l'hémicycle ,
M. Erwan Balanant applaudit
et tant que je serai à ce poste, je me battrai jusqu'au bout pour eux, mais aussi pour la jeunesse, dont ils sont le repère : il est important que les anciens combattants lui parlent.
Par ailleurs, vous avez évoqué les crédits de l'ONACVG : pouvez-vous m'indiquer auxquels vous faites référence ?
Les seuls dont j'aie connaissance s'élèvent à 200 millions d'euros, et ils n'ont pas vocation à couvrir les activités mémorielles – c'est le rôle de la DMCA. Je tiens à rappeler, pour que ne subsiste pas le moindre doute, que nous appuyons évidemment tous les projets mémoriels menés par l'ONACVG.
Votre amendement soulève un sujet important : je ne garderai de votre présentation que l'essentiel, et émettrai donc un avis favorable.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Désolée, monsieur le rapporteur.
Eu égard au fond de l'amendement, je vais finalement moi aussi émettre un avis favorable. Sur la forme, j'espère que nous avons été entendus, monsieur Le Fur.
Sourires sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Juste une précision sur les crédits auxquels M. Le Fur fait référence : je pense qu'il s'agit en réalité des crédits du Bleuet de France. Pour des raisons de transparence, les dons faits au Bleuet de France ne sont plus directement perçus par l'ONACVG – même s'ils lui reviendront in fine –, mais abondent un fonds de dotation spécifique récemment créé, dont la vice-présidente est d'ailleurs la directrice générale de l'ONACVG.
L'amendement n° 229 est adopté.
La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l'amendement n° 85 .
Il vise à renforcer l'engagement du ministère des armées en faveur du lien entre l'armée et la nation. Pour ce faire, il tend à redonner du sens à la mission budgétaire Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation – son budget a diminué de 50 millions d'euros en 2022 pour des raisons démographiques –, en renforçant son volet relatif à la cohésion nationale grâce à un soutien financier du ministère aux collectivités, associations et établissements d'enseignement qui participent à des projets de défense ou à des projets mémoriels au plus proche des citoyens.
Je comprends le sens de votre amendement, mais il est satisfait par l'alinéa 9 du rapport annexé. Par conséquent, je vous demande de bien vouloir le retirer.
En effet, cet ajout serait redondant. Avis défavorable.
L'amendement n° 85 est retiré.
Merci !
En matière de renforcement du lien entre l'armée et la nation, les classes de défense et le service militaire volontaire sont particulièrement efficaces. L'amendement de ma collègue Valérie Bazin-Malgras vise à souligner les excellents résultats donnés par ces outils.
La parole est à Mme Michèle Martinez, pour soutenir le sous-amendement n° 1797 .
Comme je l'ai déjà dit, le service militaire adapté est un très bon moyen de renforcer le lien entre la nation et l'armée. En effet, la tyrannie des distances représente un enjeu stratégique, et avant tout humain. À cet égard, le SMA est un dispositif à portée humaine très forte, qui permet de renforcer l'accès de nos compatriotes ultramarins à nos forces armées. À l'instar d'autres vecteurs de cohésion, cet outil précieux doit donc être valorisé, et mentionné à l'alinéa 4 du rapport annexé.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement et le sous-amendement ?
La commission a émis un avis favorable sur l'amendement. S'agissant du sous-amendement, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
Sur le fond, je suis favorable à l'amendement et au sous-amendement. Seulement, je ne quitte jamais le texte des yeux car ce qui doit importer au législateur comme au Gouvernement, c'est de rédiger un texte qui ressemble à quelque chose. Or nous avons déjà ajouté plusieurs mentions à l'alinéa 4 : l'amendement et le sous-amendement risquent d'alourdir la phrase un peu plus encore. Si on la relit, ça commence à être…
Comme je ne veux pas m'opposer sur le fond, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée, sur l'amendement et le sous-amendement.
Sourires.
Le sous-amendement n° 1797 est adopté.
L'amendement n° 456 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à Mme Stéphanie Galzy, pour soutenir l'amendement n° 437 .
Il s'agit d'un amendement d'appel visant à soutenir l'engagement de la jeunesse au sein des forces armées. Il y a quelques mois, j'ai été contactée par un jeune homme en alternance désireux de s'engager au sein des armées. Celui-ci souhaitait obtenir deux jours d'autorisation d'absence auprès de son entreprise afin de passer des tests d'aptitude et d'évaluation en vue d'intégrer nos forces.
Or la législation actuelle ne permet pas aux employeurs de délivrer de telles autorisations à leurs employés en alternance depuis moins d'un an. Ce jeune homme a donc dû utiliser ses jours de congé annuels pour passer ses examens d'entrée dans l'armée.
Alors que nos armées manquent d'hommes et peinent à fidéliser, permettre aux employeurs de délivrer des autorisations d'absence aux jeunes salariés afin qu'ils puissent passer les tests d'aptitude et d'évaluation pour intégrer nos armées semble être une mesure de bon sens. C'est l'objet de cet amendement.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Si j'en comprends l'intention, une telle mesure ne relève pas du domaine législatif : nous n'allons pas commencer à organiser la vie interne des entreprises.
En revanche, il soulève un point intéressant : il faut que les plages horaires d'ouverture des centres médicaux des armées soient adaptées aux horaires du monde de l'entreprise.
C'est une mesure de bon sens, mais qui n'a pas sa place dans le rapport annexé. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.
Je parle sous le contrôle des parlementaires ayant participé au groupe de travail sur l'avenir de la réserve militaire : la question de la relation avec les employeurs y a été traitée – bien qu'indirectement, puisqu'il s'agit ici, pour les apprentis, de s'engager dans l'armée et non dans la réserve. C'est tout un pan des travaux que le groupe de travail a menés.
Le besoin a été clairement identifié, et je pense qu'il faut désormais ouvrir des négociations pour y répondre. En effet, certains apprentis travaillent pour des grandes entreprises, mais d'autres sont embauchés par des entreprises plus petites, comme les commerces. Il faudra donc regarder de plus près comment la mesure peut s'appliquer. Par ailleurs, elle ne me semble pas avoir sa place dans le rapport annexé, à la fois parce qu'elle concerne un nombre limité de personnes et parce que le rapport annexé n'a aucune portée juridique : il s'agirait alors d'un simple vœu.
Je vous demande donc de retirer cet amendement d'appel, même s'il faudra que nous travaillions sur le sujet.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 104
Nombre de suffrages exprimés 104
Majorité absolue 53
Pour l'adoption 39
Contre 65
L'amendement n° 437 n'est pas adopté.
La parole est à M. Julien Rancoule, pour soutenir l'amendement n° 967 .
Il vise à promouvoir la réserve citoyenne de défense et de sécurité, dont le rapport annexé ne fait jamais mention alors que ses membres remplissent bénévolement des missions d'intérêt général au service de l'armée, en particulier de son lien avec la nation : information et accompagnement du public aux côtés des forces armées, information concernant les possibilités d'insertion professionnelle offertes par les armées, animation auprès des jeunes de sessions de sensibilisation aux questions de défense et de sécurité, promotion des principes de la citoyenneté et du civisme.
D'après le site d'État www.service-public.fr, ces réservistes peuvent par exemple organiser dans les départements le concours national de la résistance et de la déportation, sensibiliser des élèves du primaire au devoir de mémoire ou encore donner des cours de cybersécurité. La réserve citoyenne aura un rôle important à jouer dans les années à venir : il serait donc pertinent d'intégrer son apport au paragraphe du rapport annexé consacré à « un lien nation-armée rénové et plus visible ».
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Lorsqu'il est question de réserve, on commence souvent par penser à la réserve opérationnelle dans les armées ; en réalité, il en existe bien d'autres, jusqu'à la réserve communale de sécurité civile.
S'agissant du fond, la réserve citoyenne de défense constitue un outil intéressant ; à la suite des conclusions du groupe de travail, j'ai d'ailleurs demandé aux forces armées de réfléchir à son employabilité. Comme je le disais tout à l'heure au député Giletti, beaucoup dépend des personnalités et des usages locaux.
Pour être transparent envers la représentation nationale, j'ai également réclamé que l'on soit plus attentif à l'octroi des grades au sein de cette réserve : il y a en la matière une légère inflation, et je ne souhaite pas entretenir le flou par rapport aux grades de l'active ou de la réserve opérationnelle. Ces derniers constituent un tout : le grade d'un membre de la réserve opérationnelle, lorsqu'il est convoqué, signifie la même chose que celui d'un militaire d'active. En revanche, au sein de la réserve citoyenne, le grade vise à distinguer honorablement une personnalité civile à laquelle les forces armées peuvent demander quelque chose. Or, même dans mon département, j'ai parfois constaté des dérives ;…
…il faudra remettre les choses au clair. S'agissant de la forme, dès lors que nous avons commencé à tout citer dans le texte, il n'y a pas de raison d'en exclure cette réserve : avis de sagesse.
Sur l'amendement n° 1173 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Christophe Blanchet.
Avec les réserves opérationnelles de premier niveau (RO1) et de deuxième niveau (RO2), les réserves citoyennes font pleinement partie du socle. Il en existe plusieurs : armée de terre, marine nationale, armée de l'air et de l'espace, gendarmerie nationale, cyberdéfense, police nationale, éducation nationale, elles-mêmes intégrées à l'éventail des quarante-sept réserves françaises. Nous avons là des occasions à saisir, notamment dans le domaine de la cyberdéfense, qui constitue un enjeu de la formation militaire. Même si leur apport tombait sous le sens, je suis donc favorable à ce qu'elles soient mentionnées – comme l'a dit le ministre, pourquoi pas ?
En revanche, attention au problème rencontré lors de nos travaux et signalé par le rapport d'information que Jean-François Parigi et moi-même avons remis en 2021 au sujet des réserves : l'attribution des grades. Je me permets d'insister sur ce point que vous avez rappelé, monsieur le ministre. Le fait que les membres d'une réserve citoyenne soient d'office colonels suscite beaucoup d'incompréhension et de malaise :…
…il conviendrait de trouver un autre modèle où leur engagement, dont je tiens à souligner le caractère bénévole, soit reconnu à sa juste valeur. Lorsque nous voudrons augmenter le nombre des réservistes, le fait de n'être, par comparaison, que lieutenant-colonel, capitaine ou commandant risque de constituer un point de blocage des engagements volontaires dans la réserve opérationnelle.
L'amendement n° 967 est adopté.
« Bravo ! » et applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Bien que l'un des principaux enjeux liés aux réserves soit celui de la fidélisation, les actifs qui souhaitent s'engager dans la réserve opérationnelle – engagement plus que souhaitable étant donné les compétences, la technicité, la diversité de ce vivier – doivent pouvoir dégager assez de temps pour prendre part à ses activités. En effet, la solde d'un réserviste dépend de son grade et n'équivaut pas toujours à son revenu habituel : pour ceux qui, tout en désirant servir leur pays, y perdraient financièrement, cela demande réflexion. Une différence trop importante pourrait même rendre légitimement réfractaire ; plus généralement, il est regrettable que le premier obstacle à l'engagement de réservistes réside souvent dans leurs contraintes professionnelles.
C'est pourquoi cet amendement, inspiré des conclusions du groupe de travail consacré aux réserves, créé par le ministère des armées, vise à instaurer, à l'intention des actifs engagés dans la réserve opérationnelle, un dispositif de compensation financière en fonction du revenu professionnel, quitte à ce qu'un plafond de revenu soit déterminé par le Gouvernement et fixé par décret.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Votre amendement vise à revaloriser la solde des réservistes en fonction de ce qu'ils gagnent dans le civil, sujet effectivement abordé, en amont de ce projet de loi, au sein du groupe de travail. Nombre d'entreprises ont signé une convention avec le secrétariat général de la garde nationale ; peut-être faudrait-il maintenir des groupes de travail consacrés à la réserve. Le sujet est sur la table, il est trop tôt pour imposer quoi que ce soit, laissons les choses se réguler et suivons de près les effets de ces mesures. Je demande le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
Puisque cet amendement modifierait le rapport annexé, qui ne produit pas de droit, il n'imposerait rien.
Du reste, dans le cas contraire, il aurait été déclaré irrecevable en vertu de l'article 40 de la Constitution. Cela dit, mon argumentaire rejoint à bien des égards celui du rapporteur. Il y a là un vrai chantier. Au-delà des dispositifs de compensation financière prévus par l'amendement, ce qui nous préoccupe, c'est la perte de revenu du salarié ou fonctionnaire réserviste : certains pays la compensent à l'euro près, sans plafonnement ou du moins jusqu'à des montants importants, d'autres prévoient des forfaits, d'autres encore revalorisent la solde. Je vous rappelle, car ce fut l'objet d'un combat par le passé,…
…que celle-ci est nette d'impôt, défiscalisée ; en d'autres termes, l'indemnité journalière n'entre pas dans la déclaration de revenus, ni dans le calcul de l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP).
Quant au reste, par quel bout prendre la question ? Est-il seulement nécessaire de légiférer ? S'il s'agissait d'augmenter l'intéressement ou l'indemnité journalière, nous pourrions le faire dans le cadre de la gestion courante.
Enfin, le débat concernant la fidélisation des militaires d'active n'est pas sans intéresser la réserve – à supposer que nous considérions celle-ci de manière globale, sans distinguer entre ses diverses missions. Aujourd'hui, c'est le grade qui fait l'indemnité ; officiers, sous-officiers, hommes et femmes du rang ont leur grille. Demain, sera-t-elle plus modulable pour le commandement, pour les combattants cyber, par exemple ? Vous savez faire quelque chose qui vous rend utile à l'armée quinze jours par an : prendrez-vous ces quinze jours sur vos congés, sur votre temps de travail ? Nous aurons l'occasion d'en reparler lorsque nous en arriverons aux amendements du député Blanchet portant sur la partie normative du texte.
Je suis intimement convaincu que nous n'en sommes pas à la fin de l'histoire. Néanmoins, lors de l'examen en commission de vos amendements d'appel concernant l'attribution de logements, les étudiants et ainsi de suite, nous nous étions bien dit qu'il importait de ne pas créer d'effets d'aubaine. Ce qui compte n'est pas tant de souscrire un ESR que d'être activé au service des armées. L'enfer est pavé de bonnes intentions : il faut que nous arrivions à tracer et à daller un autre chemin. Le travail d'écriture nécessaire sera exigeant ; nous devrons nous détacher du global et passer par le particulier. Étant donné le scrutin public, je ne doute pas que vous maintiendrez cet amendement, mais au-delà de celui-ci, si vous avez des idées précises, je serai heureux qu'elles nourrissent le débat.
Monsieur Giletti, M. le ministre vous demande de retirer votre amendement, à défaut de quoi son avis sera défavorable : le maintenez-vous ?
Il y a consensus, monsieur le ministre, concernant la nécessité de travailler ce sujet ; et puisque nous n'en sommes qu'au début de l'histoire, autant écrire la première phrase de ce beau roman dans le rapport annexé.
M. Bastien Lachaud avait demandé la parole, mais c'est visiblement M. Frédéric Mathieu qui le remplace.
Sourires.
Je suis étonné de la teneur de l'amendement : les indemnités sont en effet nettes d'impôt, et il serait par ailleurs quelque peu curieux que la décision de servir ou non l'intérêt général dans le cadre de la réserve tienne au coût plus ou moins élevé de cet engagement. Le montant du revenu de substitution ne doit certes pas constituer un frein, mais, je le répète, ce tropisme est étrange. Plus étrange encore, et rendant la proposition politiquement bancale, le fait qu'elle entraînerait des distorsions de solde…
C'est vrai ! C'est l'un des enjeux du travail à faire !
…que rien ne justifierait, pas même la qualité du service militaire rendu. Un sous-officier smicard dans le civil le resterait au sein de l'armée, tandis qu'un autre du même grade, ayant la même ancienneté dans la même arme, exerçant les mêmes fonctions, toucherait 3 000 euros de solde, son salaire de cadre moyen ? Il y a là un problème dans la conception que vous avez de l'armée, dans cette mythologie qui va mal à votre famille politique, celle de l'armée creuset de la nation, unissant le peuple en vue de la défendre – celle de la bataille de Valmy. En fait de creuset, vous en viendriez à perpétuer sous l'uniforme les distinctions civiles. Je suis désolé, mais vous êtes complètement à côté de la plaque !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Sandra Regol applaudit également.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 117
Nombre de suffrages exprimés 117
Majorité absolue 59
Pour l'adoption 39
Contre 78
L'amendement n° 1173 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l'amendement n° 1337 .
Lors des auditions de la commission, les personnels civils de la défense ont témoigné de leur besoin de reconnaissance.
Le présent amendement vise à insérer une phrase dans le rapport annexé. Nous, députés du groupe Socialistes et apparentés, réaffirmons que nous sommes favorables à la valorisation des parcours dans la réserve. La montée en puissance de la réserve, mais aussi de la garde nationale, pourrait être appuyée par la définition d'une défense civile qui serait à même d'assurer des missions de défense du territoire, en complément des forces de sécurité intérieure et en lien avec la BITD ou le service de santé des armées (SSA). Notre amendement vise aussi à valoriser les civils de la défense, qui sont des relais privilégiés. Nous sommes attachés à la consolidation du lien entre l'armée et la nation, dont la réserve est pour nous le premier vecteur. Le soutien qu'elle apporte doit être polyvalent, réactif et complémentaire au rôle des militaires d'active.
Il existe plusieurs types de réserves : la réserve sanitaire, la protection civile, les sapeurs-pompiers, la réserve communale de sécurité civile ou encore la Croix-Rouge. Il existe donc différentes formes d'engagement permettant de participer à la protection civile, que vous proposez de rassembler. Je pense quant à moi, fort de mon expérience de maire notamment, que la multiplication des canaux de recrutement ne peut être que favorable. Lorsque j'ai instauré une réserve communale de sécurité civile – au moment d'une tempête, événement fréquent en Bretagne –, je suis parvenu à enrôler dans la protection collective des personnes qui n'auraient jamais rejoint un autre type de réserve. D'autres exemples, différents, montrent de la même façon que la multiplication des canaux de recrutement est nécessaire. Quoi qu'il en soit, lorsqu'un événement survient, les interventions sont organisées et coordonnés au travers de plans, sous l'autorité du préfet, du sous-préfet ou du maire. Si je comprends votre intention tout à fait louable, madame la députée, je ne pense pas que la proposition soit applicable sur le plan opérationnel. J'émets donc un avis défavorable, d'autant plus que votre amendement concerne davantage la sécurité intérieure que la défense.
L'amendement n° 1337 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Philippe Ardouin, pour soutenir l'amendement n° 981 .
Il vise à inclure plus amplement les associations mémorielles et les associations d'anciens combattants dans la participation des armées à l'enseignement de la défense. Ces associations sont demandeuses d'une plus grande inclusion dans ce travail de sensibilisation qui leur facilite l'accès à un public jeune et intéressé par les questions de défense.
Je comprends très bien votre proposition, mais s'agissant d'un amendement d'appel, je vous invite à le retirer. À défaut, avis défavorable.
Je vous remercie pour votre amendement, monsieur Ardouin. J'ai laissé tout à l'heure la secrétaire d'État Mirallès répondre au député Le Fur, qui proposait un amendement similaire. La rédaction que vous proposez me semble préférable puisqu'elle évoque les associations au pluriel. Il me semble en effet que la loi de la République ne doit pas mentionner une association en particulier. Je suis un peu gêné de le dire, étant moi-même adhérent au Souvenir français depuis plus de dix ans ,
Sourires
mais en tant que ministre chargé de ces questions, je crois, comme la secrétaire d'État, que la rédaction du texte doit englober les diverses associations et les particularités locales qu'elles représentent. Il existe par exemple des associations d'anciens combattants spécifiques aux territoires d'outre-mer. La rédaction proposée par le présent amendement, que je qualifierais d'englobante, me semble consensuelle. Avis favorable.
J'appelle votre attention sur le fait que le mot « défense » apparaît deux fois dans l'alinéa, qui prévoit que « [l]es armées participeront pleinement à l'enseignement de la défense », puis que « [l]e ministère des armées créera un module de sensibilisation aux enjeux et à l'esprit de défense ». C'est après la seconde occurrence qu'il me semble préférable d'insérer les termes « en intégrant les associations mémorielles et d'anciens combattants », que l'amendement propose d'ajouter.
L'esprit de défense dont il est question à cet endroit du texte rejoint en effet le devoir de mémoire, mais il est fort différent de l'enseignement de la défense. Je ne suis pas persuadé qu'il soit adéquat de faire l'insertion après la première occurrence du mot « défense », comme le propose l'amendement. Vous disiez tout à l'heure souhaiter un texte le plus propre possible et porteur de sens, monsieur le ministre. Je comprends le souhait de nos collègues de mentionner les associations ; je fais moi-même partie de ceux qui sont souvent présents auprès d'elles, notamment lors des manifestations patriotiques. Cependant, je ne crois pas pertinent de les mentionner en de trop nombreux endroits du texte.
Le député Di Filippo a raison de venir à mon secours et d'appuyer ce que je dis depuis hier soir. Nous n'en sommes qu'à la moitié de la page 62 du rapport annexé, dont les articles pourraient être qualifiés de principiels. Certes, ils sont intéressants politiquement et traduisent la volonté de la représentation nationale et du Gouvernement. Cependant, le texte issu des travaux de la commission puis de la séance devient lourd et verbeux – sans que ce terme ne doive être compris dans son acception péjorative. Il se trouve que, pas plus que le service de la séance, je ne choisis l'endroit où il est proposé d'amender le texte – contrairement à ce qui a été indiqué tout à l'heure. Il me semble que vos collègues du groupe Les Républicains, monsieur Di Filippo, ont émis tout à l'heure le souhait que soient mentionnées les associations patriotiques, qui ne figuraient pas dans le texte. Je réitère mon avis favorable à l'amendement et propose, le cas échéant, que les sénateurs revoient la rédaction du texte. Je m'efforce ainsi de faire la synthèse des bonnes volontés exprimées dans les différents groupes.
C'est le moins que l'on puisse dire !
Nous ne pouvons pas modifier l'amendement à ce stade, et sommes contraints de conserver sa rédaction actuelle.
L'amendement n° 981 est adopté.
Il vise simplement à permettre aux armées de se concentrer sur leurs missions. Vous prévoyez dans le rapport annexé, monsieur le ministre, la création par le ministère des armées d'un module de sensibilisation aux enjeux de défense, qui sera intégré aux formations délivrées par les chambres de commerce et d'industrie (CCI) et les chambres de métiers et de l'artisanat (CMA). Notre groupe ne s'oppose ni à la formation de la population ni à la démocratisation des enjeux de défense. Celles-ci figurent même dans notre contre-projet ; elles passent notamment par la conscription citoyenne, que nous vous proposons par voie d'amendement. Mais le rapport annexé ne précise pas qui sera chargé de délivrer ces formations : ce rôle reviendra-t-il aux militaires ou bien à d'autres formateurs ? Si votre objectif est d'étendre la journée de défense et de citoyenneté à toute la population, en commençant par les CCI et des CMA, nous ne le comprenons pas. Nous vous proposons donc de supprimer la quatrième phrase de l'alinéa 9, floue et imprécise, et de réfléchir plus largement aux modalités de formation de la population et de démocratisation des enjeux de défense.
Il faut bien sûr former les entrepreneurs, notamment en ce qui concerne le risque cyber, les technologies quantiques et la protection des données sensibles. Mais un module de sensibilisation et une formation délivrée par les militaires dans les CCI et les CMA permettraient-ils d'atteindre cet objectif ? Nous n'en sommes pas certains. Encore une fois, nous vous invitons à vous fonder d'abord sur les besoins de la population et des armées pour développer ensuite des objectifs. En réalité, nous avons souvent l'impression que vous faites l'inverse. Quels sont les objectifs que vous comptez atteindre en développant ce type de module, monsieur le ministre ? À quels besoins spécifiques voulez-vous répondre ? Et comment comptez-vous mettre ce module en place concrètement ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 1071 de M. Aurélien Saintoul est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Mon territoire, comme bien d'autres, possède un milieu économique riche et varié. Nombre de nos entreprises travaillent pour le secteur de la défense, dont le budget irrigue nos territoires en retombées économiques et en emplois. Or les chambres de commerce et d'industrie sont au cœur du dispositif économique. Il est donc bénéfique de favoriser le lien entre les CCI et nos armées, car nombre d'entreprises ne savent pas comment se positionner sur les marchés qu'offre la défense. Les CCI peuvent aussi sensibiliser les entreprises au risque d'ingérence, déjà évoqué, ou de la protection cyber. Elles sont au carrefour de nombreux sujets. Le fait de les faire intervenir sur l'esprit de défense, et de favoriser le lien entre les armées et les entreprises, ne peut être que bénéfique pour notre pays. J'émets donc un avis défavorable à ces amendements.
Je souhaiterais évoquer un sujet qui me tient à cœur. Le département des Côtes-d'Armor représente un centième de la France mais il ne compte pas une seule unité militaire. Il s'y pose donc un problème de représentation des armées, qu'il me semble nécessaire de prendre à bras-le-corps. Je n'ai pas la chance d'avoir comme vous dans le Morbihan, monsieur le rapporteur, de prestigieuses unités comme celles de Coëtquidan ou des commandos marine. L'Ille-et-Vilaine en accueille également, de même que le Finistère où la présence militaire est très importante. Dans les départements qui en sont dépourvus, il faut compenser cette absence.
Je me permettrai d'insister à cet égard sur le rôle que peuvent jouer les délégués militaires départementaux vis-à-vis des CCI ou d'autres structures économiques. On les néglige trop souvent, alors qu'ils connaissent parfaitement la vie militaire et que nombre d'entre eux sont très investis. Une équipe renforcée dans les départements où ils constituent la seule présence militaire permettrait de donner une plus grande visibilité à l'armée. La présence en alternance d'escadrons, de compagnies ou de régiments voisins serait également précieuse.
À l'occasion de cérémonies par exemple.
Je ne fais que suggérer des idées, sans prétendre qu'elles sont les plus pertinentes. Cela ne concerne pas des départements comme la Moselle ou le Finistère, bien sûr, mais dans une partie de nos territoires, il n'y a plus de présence militaire à l'exception de celle des gendarmes. Nous apprécions beaucoup ces derniers mais, en dépit de leur statut militaire, ils relèvent de l'autorité du ministère de l'intérieur et non de la vôtre, monsieur le ministre. Je suggère donc quelques solutions pour remédier à cette situation. Je ne sais pas si les amendements de nos collègues sont pertinents mais ils rejoignent la préoccupation que j'exprime.
Je n'ai pas compris, monsieur Le Fur, si vous étiez favorable ou non à l'amendement.
Rires sur divers bancs.
Ah, d'accord ! Je vous remercie de votre participation, monsieur Le Fur.
La parole est à M. Frédéric Mathieu.
Vous venez d'éprouver, madame la présidente, la sagesse bretonne ! En tant que député d'Ille-et-Vilaine, je ne peux qu'abonder dans votre sens, cher collègue Le Fur, notamment s'agissant des délégations militaires départementales dont les équipes sont souvent trop petites. Nous avons abordé ce sujet de loin hier, lorsque nous avons parlé des externalisations – vous vous êtes exprimé sur ce point, monsieur le ministre. De trop nombreux emplois civils et militaires ont été perdus au cours des quinze dernières années, au nom de la concentration sur le cœur de métier – une chimère qui, comme le cœur d'un oignon, n'existe pas : vous avez beau ôter les couches, vous ne le trouvez jamais ! On propose aujourd'hui à des militaires d'assurer des séances pédagogiques dans des CCI ou des CMA. Comme nous l'avons indiqué dans l'exposé sommaire de l'amendement, nous ne sommes pas opposés à l'intégration de ce type de modules, mais nous estimons que ce n'est pas aux agents du ministère, qu'ils soient civils ou militaires, qu'il revient de dispenser ce type de formation.
Nous avions la faiblesse de croire qu'un amendement de ce type appellerait un peu plus d'explications. Les vôtres restent floues, monsieur le rapporteur ; vous êtes allé jusqu'à évoquer la possibilité, pour des civils ou des militaires, de se rendre dans les CCI ou les CMA pour parler de la façon d'obtenir des marchés, ce qui est très limite au regard de l'égalité de traitement devant la commande publique.
Votre réponse nous conforte dans l'idée qu'il faut supprimer ce passage, quitte à le retravailler pour l'avenir. Notre amendement a le mérite de pointer quelque chose de très flou en ce qui concerne l'intervention des effectifs du ministère des armées au sein de ces structures privées.
Je vais répondre à mes collègues bretons, en commençant par M. Mathieu. Je suis désolé, mais vous ne connaissez pas le sujet – peut-être parce que vous venez d'être élu.
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Sachez que les entreprises de votre circonscription sont nombreuses, notamment autour de Rennes, à travailler avec la défense. Du côté du ministère, les civils et les militaires peuvent très bien connaître les entreprises et les marchés. C'est donc une nécessité que de connecter les entreprises et le milieu militaire, au travers des CCI par exemple.
Vous n'avez pas compris ce que j'ai dit, sans doute parce que vous êtes élu depuis trop longtemps !
Monsieur Le Fur, je n'ai pas bien saisi le sens de votre intervention mais j'ai compris que vous décerniez une mention honorable, ce dont je vous remercie. Même si les armées ne sont pas présentes dans votre circonscription…
…, les entreprises peuvent travailler pour elles ou être sensibilisées aux questions militaires grâce à la CCI, au délégué militaire départemental (DMD) ou au correspondant défense. Les canaux de communication entre les entreprises et le ministère des armées sont nombreux. Connaissant votre intérêt pour les entreprises et votre ancienneté dans la vie politique, je m'étonne que vous n'ayez pas encore exploré cette voie.
Sur le fondement de l'article 70, alinéa 3, madame la présidente. Le rapporteur s'est livré à une mise en cause personnelle de M. Mathieu, rappelant qu'il siégeait depuis peu dans cet hémicycle.
Je rappelle respectueusement au rapporteur qu'il n'y a ni jeunes ni vieux députés…
…, qu'« aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années » et que le ministre de la défense, malgré ses 36 ans, maîtrise bien le sujet. Enfin, Frédéric Mathieu n'est pas novice en la matière, puisqu'il a servi pour le ministère des armées pendant dix-huit ans.
La parole est à M. le président de la commission de la défense nationale et des forces armées.
Depuis le début de l'examen, lundi après-midi, nous n'avons traité que 185 amendements…
Nos débats sont certes très intéressants et je ne doute pas que nous ayons fait œuvre utile, hier, en discutant de la dissuasion. Mais nous n'en sommes qu'à l'alinéa 9 du rapport annexé – nous n'avons même pas terminé la première page. Je rappelle que celui-ci n'a aucune valeur normative. À ce rythme-là, il nous faudra plus de 70 heures pour compléter l'examen du texte ; je crains que nous n'ayons pas le temps de traiter correctement les 35 articles qui, eux, ont un impact concret sur la vie quotidienne des soldats et sur la défense nationale.
Je vous appelle à faire preuve de concision et j'invite les députés que la matière intéresse à rejoindre notre belle commission !
La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l'amendement n° 1341 .
Il s'agit, pour consolider le lien armée-nation, d'utiliser l'angle du consentement à l'impôt et de s'adresser au citoyen en tant que contribuable. Dans une logique de transparence, nous proposons que des actions de sensibilisation permettent à la population de mieux connaître, et ainsi comprendre, le budget des armées.
Même si certaines de nos discussions sont couvertes par le secret-défense et que nous nous réunissions parfois à huis clos, les orientations de défense doivent occuper une plus grande place dans le débat public – c'est le cas de la dissuasion nucléaire, dont nous avons longuement débattu hier. Les 413 milliards d'euros de budget ne sont pas anodins pour nos concitoyens ; le débat public doit s'emparer de ces questions stratégiques. À l'heure où l'on souhaite faire preuve de pédagogie sur les impôts et leur utilisation, cet amendement répond à un impératif démocratique.
On ne peut être que d'accord sur le fond, mais l'amendement est-il utile en tant que tel ? Je l'ignore. Sagesse.
L'amendement n° 1341 est adopté.
La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir l'amendement n° 1594 .
Conformément à une préconisation du rapport d'information que j'ai publié avec Jean-François Parigi en mai 2021, le rapport indexé pourrait préciser que le Conseil supérieur des réserves militaires (CSRM), organe de consultation des réservistes, dont la mission majeure est de contribuer à l'évolution du rôle des réserves militaires, doit être redynamisé dans l'objectif d'accompagner le doublement du nombre de réservistes.
La parole est à Mme Delphine Lingemann, pour soutenir le sous-amendement n° 1788 .
Le fonctionnement du CSRM ne relève pas du domaine de la loi. Il s'agit d'inciter aux bonnes pratiques plutôt que de les rendre obligatoires. Ce sous-amendement propose donc de supprimer les mots « , en veillant à l'organisation de réunions régulières et en augmentant la part des représentants d'employeurs et de salariés au sein des groupes de travail permettant de formuler des recommandations. »
Le sous-amendement n° 1788 est adopté.
L'amendement n° 1594 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir l'amendement n° 103 .
Nous venons de discuter de la sensibilisation, via les CCI et les chambres de métiers, des chefs d'entreprise aux enjeux de défense mais nous n'avons pas évoqué les réserves. Il faut que les employeurs soient convaincus que le recrutement de réservistes est bénéfique pour leur entreprise. En effet, ce que réclament les réservistes auditionnés par la mission d'information, c'est d'abord la reconnaissance. Beaucoup d'entre eux restent invisibles : ils ne se déclarent pas comme réservistes par crainte de perdre une promotion et préfèrent effectuer leur période de réserve durant leurs congés.
Par ailleurs, les centres de gestion de la fonction publique territoriale (CGFPT) sont à la peine pour recruter des personnels dans les mairies. J'ai constaté, en rencontrant les agents d'un centre dans ma circonscription, qu'ils connaissaient mal les dispositifs de réserve. Pourtant, si les mairies disaient à leurs employés qu'ils peuvent se déclarer réservistes et si elles les accompagnaient davantage, cela pousserait d'autres réservistes à faire, à leur tour, acte de candidature. Je propose par cet amendement que les CGFPT soient tenus informés de l'évolution des dispositifs de réserve présents sur les territoires des communes qui leur sont affiliées.
Je comprends votre intention mais une CCI et un CGFPT ne sont pas tout à fait comparables. Puisque nous parlons de l'emploi, je tiens à saluer l'action de Défense mobilité, service ministériel qui permet aux militaires, lorsqu'ils quittent le service, de trouver un poste. Je pense qu'un partenariat entre le CGFPT de votre circonscription et Défense mobilité ferait le bonheur de bien des collectivités locales et celui, bien entendu, des militaires en reconversion. Je vous suggère de retirer votre amendement.
Même avis. Dans un cas, on parle de l'emploi, de l'autre, de coordination des réserves en tant que telle.
L'amendement n° 103 est retiré.
Les amendements identiques n° 1007 de M. Bastien Lachaud et 1069 de M. Aurélien Saintoul sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour soutenir l'amendement n° 313 .
Dans un souci de clarté, nous proposons, à l'avant-dernière phrase de l'alinéa 9, de supprimer les mots « , sanitaires ou climatiques ». Il nous semble en effet contraire à l'esprit du texte et dangereux de limiter l'intervention des réserves territoriales aux seules crises de type sanitaire ou climatique. Cet amendement vise à corriger ce qui est sans doute une erreur de rédaction.
Il aurait peut-être mieux valu ajouter « notamment » avant « sanitaires ou climatiques », mots qui sont mentionnés à titre d'illustration.
J'émettrai un avis défavorable au nom de la commission ; à titre personnel, je m'en remets à la sagesse de notre assemblée.
Le rapport annexé n'a rien de normatif. Avançons au lieu de nous en tenir à des détails !
Je forme aussi le vœu que nos débats avancent. Je pense avoir démontré ma disponibilité pour échanger sur le fond en commission comme dans l'hémicycle. Je note que certains amendements défendus ici par des membres de la commission de la défense sont strictement identiques à ceux qu'ils avaient déposés en commission. Sur certains sujets, comme la dissuasion nucléaire dont nous avons débattu hier soir, prendre du temps peut être précieux ; sur d'autres, un peu moins.
Je ne suis pas favorable à l'amendement qui tend à supprimer ces deux mots. Il se trouve que c'est précisément lors de crises sanitaires ou climatiques, que le besoin s'est fait sentir récemment de recourir aux réserves territoriales. Le rapport annexé définit des principes politiques et ces mentions illustrent bien nos préoccupations. En aucun cas, les forces armées ne seraient contraintes d'intervenir uniquement dans ce cadre. Elles seraient mobilisées si des crises d'un autre type devaient survenir. Avis défavorable.
Chers collègues, nous débattons du rapport annexé qui n'a pas de valeur normative. Nous avons eu hier des débats extrêmement intéressants, notamment sur la dissuasion nucléaire que nous avons abordée de manière approfondie. D'autres sujets sont devant nous, sur lesquels nous avons tous à cœur d'avoir des débats tout aussi approfondis. En nous focalisant sur quelques expressions, quelques mots, quelques virgules de ce rapport, je crains que nous ne nous privions d'un temps précieux pour discuter d'enjeux majeurs quand viendront en discussion d'autres parties du projet de loi qui, elles, sont de nature normative.
Je vous invite donc à défendre plus rapidement ces amendements, même si je comprends que vous y attachiez de l'importance. Nous avons déjà eu ces débats en commission. Avançons, s'il vous plaît, pour en arriver aux sujets essentiels de ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.
Chère collègue, j'entends bien ce que vous dites mais qui peut décider qu'un amendement convient ou pas ? En commission, les propositions visant à ajouter certains éléments ont été rejetées au motif qu'il ne fallait pas commencer à établir des listes qui seraient de toute façon non exhaustives. En l'occurrence, la phrase sur laquelle porte mon amendement comporte une liste non exhaustive. La doctrine semble donc inversée.
Excusez-nous mais nous continuerons à défendre nos amendements. Nous, au moins, nous ne les avons pas déposés en double.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
L'amendement n° 313 n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur l'amendement n° 1746 , par le groupe Rassemblement national ; sur les amendements n° 578 et identique, n° 579 et identique, n° 1031 et identique ainsi que l'amendement n° 580 et identique, par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Thibaut François, pour soutenir l'amendement n° 250 .
Le lien entre l'armée et la nation passe par la sensibilisation au monde militaire et à la citoyenneté non seulement des jeunes générations mais aussi des générations plus âgées. Le fait de compter parmi leurs effectifs un réserviste opérationnel est encore trop souvent perçu par les employeurs comme une contrainte plutôt que comme atout. Pourtant, abnégation, goût de l'effort, dévouement : l'engagement militaire aide à développer d'innombrables qualités en parfaite adéquation avec les exigences du monde professionnel.
Par cet amendement, nous souhaitons valoriser l'engagement des réservistes afin d'ancrer leur importance dans la société civile. Nous entendons ainsi faciliter leur mise à disposition pour leur permettre de s'entraîner et donc d'être opérationnels.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'amendement n° 250 n'est pas adopté.
Parmi les 22 000 réservistes opérationnels, combien sont à jour pour leur visite médicale, leur carnet de tir et leur aptitude au combat rapproché ? Vous savez très bien qu'entre les chiffres que vous nous donnez et la réalité, il y a une différence, puisque pour être comptabilisé parmi les effectifs, il suffit de s'être rendu une seule fois au régiment pour récupérer son paquetage.
Cet amendement vise à poser certaines obligations pour les officiers adjoints de réserve (OAR) : avoir dirigé une compagnie de réserve ou avoir suivi une formation d'encadrement. Actuellement, nous nous retrouvons face à des OAR sans expérience, non compétents, qui conduisent tout simplement à la destruction des régiments, transformés en coquille vide. Je pourrais vous citer l'exemple de la 8
Vous pouvez aussi m'écouter, monsieur le ministre : ce que je dis est intéressant !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.
Cette compagnie a été vidée de ses éléments car des OAR ont poussé les réservistes à la démission. Ils ne viennent plus. Vous voulez monter le nombre de réservistes à 100 000. Fort bien. Mais quand on ambitionne de massifier la réserve de l'armée de terre, on n'a pas le droit de tricher sur les effectifs, sur leurs capacités opérationnelles, sur leur préparation ni sur la régularité de leur entraînement. C'est trahir l'avenir de notre stratégie de défense en cas de conflit majeur !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Madame la députée, vous sous-entendez qu'il se cache des choses derrière l'encadrement de nos réservistes. De surcroît, vous avez fini en disant : « C'est trahir ». Je trouve cela déplacé et injustifié. Je m'oppose à cette contre-vérité. Je suis au contraire persuadé que les officiers qui ont le commandement d'unités de réservistes font très bien leur travail et je tiens à leur rendre hommage. Avis défavorable.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Madame la députée, nous sommes contents de vous découvrir dans ce débat. Quant à la question que vous avez posée, nous sommes revenus à de nombreuses reprises en commission et en séance, depuis lundi, sur l'équipement et la formation des réservistes ou sur la cohérence de notre politique en ce domaine. Si c'était pour avoir une capsule vidéo, eh bien, c'est chose faite.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – M. Vincent Bru applaudit également.
Mon intervention est motivée non par le besoin de faire une vidéo mais par une inquiétude réelle, et vous le savez très bien, monsieur le ministre. Je vous repose la question : sur les 22 000 réservistes, combien sont à jour en matière de visite médicale et de carnet de tir ? Vous ne le savez même pas. Pour être opérationnel, un réserviste doit être à jour. Vous voulez augmenter le nombre de réservistes, très bien, mais pour cela, il faut prévoir des contrôles.
Je ne dis pas que les OAR sont incompétents, monsieur le rapporteur. Vous me prêtez des propos que je n'ai pas tenus. J'ai souligné autre chose : le fait que certains d'entre eux n'aient pas les compétences ni la formation requises a pu avoir des conséquences graves pour certains régiments. Voilà tout !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 110
Nombre de suffrages exprimés 109
Majorité absolue 55
Pour l'adoption 28
Contre 81
L'amendement n° 1746 n'est pas adopté.
Le renforcement de la lutte antidrones constitue un enjeu majeur pour nos armées. Dans quelques mois, en France, aura lieu la Coupe du monde de rugby, rassemblement qui, on peut le dire, fera office de laboratoire pour les Jeux olympiques et paralympiques organisés l'année prochaine. Le général Mille, chef d'état-major de l'armée de l'air et de l'espace, situe d'ailleurs cet événement dans le haut du spectre. En effet, si la sécurité demeure la tâche des forces de l'ordre, la lutte antidrones sera quant à elle placée sous l'autorité de l'armée de l'air et de l'espace.
À cette fin, disposera-t-elle du système dit Parade – protection déployable modulaire antidrones –, programme d'importance stratégique mis au point par Thales et CS Group dont les premiers exemplaires seront déployés à l'occasion de la Coupe du monde de rugby cet été, si toutefois aucun retard n'est constaté ?
En assurant une protection permanente à 360 degrés, les systèmes Parade permettront de détecter et d'identifier des engins volants allant de quelques grammes à 25 kilogrammes et de neutraliser des microdrones et des minidrones sur la route, la mer ou dans les airs, en se déplaçant d'un site à l'autre, de façon à étendre leur périmètre et leur rapidité d'action.
Quand on se souvient du fiasco du match de finale au Stade de France, le 28 mai 2022, on ne peut que souhaiter et encourager le recours à de tels moyens. C'est la raison pour laquelle nous appelons le ministère des armées à s'en tenir au strict respect du calendrier retenu pour la livraison des systèmes Parade en vue des Jeux olympiques et paralympiques prévus pour l'année 2024. Nous ne pouvons nous permettre, vous en conviendrez tous, d'être une nouvelle fois la risée du monde lors de l'organisation d'événements sportifs.
Dès lors, monsieur le ministre, pouvez-vous nous garantir qu'aucun retard ne sera à déplorer dans la livraison des systèmes Parade attendus pour les Jeux olympiques et paralympiques ?
Merci, monsieur le député, pour le sérieux de votre question. Au moment où je vous parle, aucun retard n'est à déplorer. Thales a obtenu le contrat pour le déploiement des systèmes Parade et nous exerçons la pression nécessaire pour qu'ils soient prêts à temps. Les délais sont tenus.
Il faudra tirer des conclusions de l'expérience que constituera leur utilisation pendant les Jeux olympiques car cela ouvre pour Thales des perspectives à l'exportation. Nous sommes à la jonction de deux budgets et ce projet mobilise des crédits de paiements et des autorisations d'engagement relevant de cette année et de l'année prochaine. Tous les moyens sont sur la table et la DGA pilote le programme. Le groupe industriel nous dit qu'il n'y a pas de retards. S'il devait y en avoir, j'en informerais la représentation nationale.
Demande de retrait car je pense qu'il s'agit d'un amendement d'appel, par lequel vous avez cherché à parler de Parade.
Compte tenu de la sagesse dont a fait preuve le Gouvernement cet après-midi, je vais le retirer.
L'amendement n° 1200 est retiré.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 841 .
Depuis le début de nos débats en séance publique, l'accent est mis sur l'accroissement des capacités de l'armée de réserve. Cet amendement a pour objectif de faciliter le recours aux réservistes lors des Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Pour cela, il faudrait modifier l'article L.644-1 du code général de la fonction publique, en portant, pendant la durée de cet événement, de trente à quarante jours, voire à quarante-cinq, le droit à congé avec traitement octroyé aux fonctionnaires souhaitant accomplir une activité dans la réserve opérationnelle. Cela serait de nature à faciliter l'organisation de ce grand événement qui aura lieu à Paris.
Aucune des personnes que nous avons auditionnées n'a évoqué cette possibilité. Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer cet amendement.
Cette modification est du ressort du ministère de la fonction publique et non pas du ministère des armées. Avis défavorable ou retrait.
L'amendement n° 841 n'est pas adopté.
Exclamations et rires sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem, HOR et RN. – Applaudissements sur plusieurs bancs.
Si nous continuons à ce rythme, il nous faudra près de cent heures pour discuter des quelque 1 350 amendements restants.
Je suis saisie de plusieurs amendements, n° 578 , 676 , 579 , 677 , 1031 , 1066 , 251 , 1340 – lequel fait l'objet d'un sous-amendement n° 1792 –, 580 et 678, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 578 et 676 sont identiques. Il en est de même des amendements n° 579 et 677 , des amendements n° 1031 et 1066 et des amendements n° 580 et 678 .
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l'amendement n° 578 .
Cette discussion commune porte sur un sujet important : l'opération Sentinelle, qui pose de nombreux problèmes. Depuis le début de l'examen du projet de loi de programmation militaire, nous évoquons la question de la fidélisation des soldats. Or l'opération Sentinelle entraîne le départ de soldats, qui ne se sont pas engagés dans l'armée pour cela. En effet, le rôle des militaires n'est pas d'assurer la sécurité intérieure du pays.
Si l'urgence créée par les attentats de 2015 a pu justifier, à l'époque, le déploiement des militaires sur le territoire, qu'en est-il aujourd'hui ? Si nous avons toujours besoin des militaires pour assurer la sécurité dans le territoire, cela signifie que nous n'avons peut-être pas assez investi dans les services du renseignement, de la police et de la gendarmerie. En revanche, si les effectifs et les moyens de ces services ont été accrus, alors le dispositif Sentinelle n'a plus de raison d'être et il est temps d'en finir.
Faisons en sorte que les armées retournent dans leurs casernes pour effectuer leurs missions et que la police, la gendarmerie et les services du renseignement luttent contre le terrorisme afin de protéger nos concitoyens.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Comme vient de l'indiquer mon collègue Bastien Lachaud, nous souhaitons mettre un terme à l'opération Sentinelle dès la fin des Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Cette opération a été lancée dans l'urgence en janvier 2015, ce qui se comprenait à l'époque, mais il est temps de la remettre en cause. Elle coûte plus de 1 million d'euros par jour ; elle use inutilement les soldats et les expose. Si elle sert avant tout à rassurer la population, nous savons qu'elle n'est pas efficace, au contraire : les militaires ont été à plusieurs reprises la cible des terroristes.
L'opération Sentinelle repose sur l'idée d'un quadrillage de l'ensemble du territoire, censé permettre aux soldats d'intervenir en cas de nécessité : un tel objectif est toutefois illusoire, car la lutte contre les attentats ne saurait être une affaire de prise en flagrant délit !
Bien sûr, notre propos n'est pas de dire qu'il faut cesser toute sécurisation. D'ailleurs, les agents de sécurité des aéroports et autres lieux, publics comme privés, gagneraient sans doute à être mieux formés. Cependant, nous considérons que les missions des militaires de l'opération Sentinelle devraient être transférées aux forces de police et de gendarmerie. Les soldats sont en effet lassés et usés par ces missions de patrouille, leurs formations s'en trouvent amoindries et ils n'exercent pas le métier pour lequel ils se sont engagés. Ils seraient bien plus utiles ailleurs. Nous pensons que la lutte contre le terrorisme passe par d'autres mesures, en lien avec l'éducation, la coopération internationale ou encore la formation des douaniers, des policiers, des agents de sécurité et du renseignement. Puisqu'elle n'apporte ni dissuasion, ni protection, ni satisfaction, cette opération doit cesser.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous proposons de mettre fin à l'opération Sentinelle, coûteuse et inefficace, qui militarise inutilement les actions de la police.
Vous avez le même exposé que votre collègue, ce n'est donc pas la peine de le lire !
Les militaires ne s'engagent pas pour remplacer les policiers et les gendarmes et ne sont pas formés au maintien de l'ordre. Qui peut imaginer l'usage de fusil d'assaut dans l'espace public ?
L'opération Sentinelle a démarré dans un contexte d'état d'urgence, il y a déjà huit ans. Depuis, l'idée folle de quadriller l'ensemble du territoire réduit la prévention contre les attentats à une affaire de prise en flagrant délit.
Il faut stopper l'instrumentalisation des militaires qui, comme l'a rappelé mon camarade Christophe Bex, use inutilement les troupes et va à l'encontre de l'esprit d'engagement et des efforts de fidélisation des soldats.
Son lancement a réduit le temps d'entraînement des nouvelles recrues en casernes, alors que les véritables missions des armées sont vitales. Le Gouvernement a d'abord inscrit l'état d'urgence dans le droit ordinaire. Puis, il a inventé l'idée d'un continuum sécurité-défense, qui justifie la militarisation des actions de police et la restriction des libertés publiques. Vous cherchez maintenant à inscrire l'opération Sentinelle dans la durée.
Vous qui êtes tant effrayés par le poids de la dette, commencez par supprimer cette mission intérieure ! Stopper l'opération Sentinelle, c'est refuser que le recours aux soldats soit la seule réponse à chaque problème.
Le Gouvernement déguise les militaires en policiers, en fait des formateurs pour jeunes dits décrocheurs ou des encadrants du SNU ; bientôt, ils seront également chargés de la sécurité des Jeux olympiques.
Nous proposons donc de supprimer l'opération Sentinelle : favoriser la fidélisation des troupes, en particulier des soldats de l'armée de terre, passe en premier lieu par l'arrêt de ce dispositif.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il vise à préciser le devenir de l'opération Sentinelle. L'évolution de la menace terroriste en France nous force à repenser la lutte en la matière. Le coût de l'opération Sentinelle, estimé approximativement à 3 milliards d'euros, ainsi que l'inadaptation des moyens de la force militaire à une telle mission sur le territoire national, imposent un transfert de son pilotage pour faire des économies et pour améliorer que l'entraînement opérationnel. Dans le contexte d'une préparation à un conflit de haute intensité, l'opération Sentinelle est une mission chronophage qui s'opère au détriment de l'entraînement des troupes, alors même que les soldats utilisent des matériels de plus en plus techniques nécessitant des savoir-faire, de l'expertise et des formations appropriées.
Par cet amendement, nous souhaitons que le commandement de l'opération soit transmis progressivement aux forces de sécurité intérieure, conformément aux recommandations de la Cour des comptes, en tenant compte bien sûr du calendrier sécuritaire lié aux Jeux olympiques de 2024, afin de libérer des crédits et du temps pour que les soldats aient la possibilité de s'entraîner.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Nous souhaitons que la mission Sentinelle fasse l'objet d'une communication annuelle auprès du Parlement. On évaluera ainsi la nécessité ou non de la renforcer. Le débat sur l'utilité de cette opération qui n'avait pas vocation à perdurer n'est pas nouveau. Elle joue un rôle important de réassurance du public, notamment dans les espaces urbains, mais ce ne devrait pas être celui des armées. Bien sûr, elle ne pourra pas être arrêtée du jour au lendemain. Néanmoins, il faut réfléchir à ses missions et les évaluer, afin de savoir s'il est nécessaire de les renforcer en cas de besoin ou, au contraire, de réduire les effectifs.
La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour soutenir le sous-amendement n° 1792 .
L'amendement qui vient d'être présenté sollicite un bilan annuel afin d'évaluer la nécessité ou non de renforcer l'opération Sentinelle. Or « renforcer » le dispositif n'est pas la seule option. C'est pourquoi nous proposons un sous-amendement visant à substituer à ce terme les mots : « alléger, renforcer, maintenir en l'état ou mettre un terme ». Nous adoptons une vision plus progressive et pragmatique.
Certes, il n'appartient pas à l'armée de jouer le rôle de la sécurité intérieure. Toutefois, les propos que nous avons entendus selon lesquels l'opération Sentinelle est inutile et inefficace sont insultants vis-à-vis de tous les militaires…
…qui ont donné de leur temps face au terrorisme, ont protégé les Français et qui méritent notre respect ,
Applaudissements sur les bancs du groupe RN
au lieu de ce mépris permanent et récurrent qui nous vient des bancs de l'extrême gauche, dont les argumentaires sont redondants et ennuyeux.
En revanche, il ne faut pas s'habituer à un tel dispositif. Les militaires doivent retourner accomplir leurs missions propres et la sécurité publique doit être de nouveau assurée par le ministère de l'intérieur et les forces de police. C'est pourquoi, avant de prendre toute décision, un rapport annuel est nécessaire : c'était d'ailleurs l'une des préconisations du rapport d'information sur le bilan de la loi de programmation militaire 2019-2025.
Il s'agit d'un amendement de repli vous proposant de réfléchir, après les Jeux olympiques, à l'utilité de l'opération Sentinelle. J'ai entendu beaucoup de choses. J'ai, pour ma part, un avantage que je n'aurais jamais souhaité avoir en réalité : je suis la maman d'un soldat réformé, parce que blessé psychologiquement ; mon cœur de maman défend l'honneur de nos soldats.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je vous remercie donc d'arrêter d'insulter nos bancs ; tout le monde n'a pas donné autant !
Tout le monde n'a pas donné autant, j'insiste. L'avantage d'avoir eu un enfant soldat, c'est que je sais que les compagnons d'armes de mon fils ne redoutaient qu'une seule chose : devenir des membres de la mission Sentinelle. Vous vous demandez pour quelles raisons les militaires quittent les rangs et pourquoi l'armée ne donne plus envie. Interrogez ces gamins qui étaient pourtant motivés et souhaitaient honorer le drapeau français. Ils vous répondront qu'ils ne s'étaient pas engagés pour être dans l'opération Sentinelle ! Discutez avec eux et vous comprendrez les réalités du terrain. Adoptez l'amendement, il y aura peut-être moins de défections parmi les militaires.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
La parole est à M. Aurélien Saintoul, pour soutenir l'amendement n° 678 .
Cette série d'amendements vise à remettre en question la pertinence de l'opération Sentinelle. La présidente Caroline Fiat a évoqué à l'instant l'enjeu d'attrition au sein des troupes de militaires : l'usure morale, psychologique, physique. Plusieurs d'entre nous ont souligné en outre que cette opération n'était pas efficace – c'est une réalité. Nous tombons, encore une fois, dans le domaine des raisonnements contrefactuels ; vous allez nous dire : « Que se serait-il passé en l'absence de l'opération Sentinelle ? » et nous tournons en rond.
Par cet amendement, nous demandons donc un rapport, c'est-à-dire une argumentation factuelle et objective, démontrant que la présence de soldats de la mission Sentinelle est davantage de nature à garantir la sécurité qu'un dispositif composé de fonctionnaires de police et de forces de sécurité intérieure en général.
Nous avons écouté attentivement ce que vous aviez expliqué en commission, notamment s'agissant des besoins importants à l'occasion des Jeux olympiques. Vous saviez néanmoins que ceux-ci se dérouleraient en 2024 et je note, à cet égard, que vous n'avez pas formé de personnels ni créé de dispositifs adéquats, vous contentant de l'opération Sentinelle – vous avez été bien imprévoyants. Nous pouvons, à la rigueur, entendre cet argument. Toutefois, après les Jeux olympiques et paralympiques, faites l'effort de présenter une argumentation objective et de nous prouver qu'il n'y a pas de solution alternative au recours à l'opération Sentinelle qui, encore une fois, n'est pas adaptée. Le rôle de l'armée n'est pas d'assumer les missions de sécurité, qui coûtent très cher en termes de fatigue humaine et de ressources financières.
Présentez-nous au moins un rapport démontrant l'utilité de l'opération Sentinelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Sur l'amendement n° 251 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Frank Giletti, pour un rappel au règlement. Sur quel fondement ?
Il se fonde sur l'article 100, alinéa 5 de notre règlement : « Lorsque plusieurs membres d'un même groupe présentent des amendements identiques, la parole est donnée à un seul orateur de ce groupe…
…désigné par son président ou son délégué. Il est procédé à un seul vote sur l'ensemble des amendements identiques. »
Pour éviter la rafale d'amendements des camarades Lachaud et Saintoul, il serait bon de faire respecter le règlement ; cela répondrait à la demande de l'hémicycle d'augmenter le rythme d'examen des amendements.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'un des amendements s'enquérait du bilan de l'opération Sentinelle : il figure dans le rapport annuel qui recense les opérations extérieures et intérieures. Par ailleurs, il m'a été clairement signifié, lors des auditions, que la menace terroriste était toujours présente. Nous devons également prendre en considération le contexte des Jeux olympiques, quoique cet événement soit a priori indépendant de la loi de programmation militaire. Dans tous les cas, l'opération Sentinelle doit être revue progressivement, de façon justifiée, au vu des menaces – qui, je le répète, sont bien présentes. Avis défavorable.
Ce sujet a été longuement débattu en commission. Quels que soient les arguments que nous développerons, je ne suis pas certain que nous parviendrons à vous convaincre : sur ce sujet, vous semblez adopter une position plus idéologique que d'habitude.
C'est vous qui avez une position idéologique : vous n'avancez aucun argument !
À quoi sert un militaire ? À protéger les Français. Que font les militaires de l'opération Sentinelle ? Ils protègent la France et les Français. C'est un honneur que de les avoir à notre service.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe RN. – M. Christophe Blanchet applaudit également.
Qui, parmi nous, en tant qu'ancien maire ou en tant que parent d'élève, n'a jamais eu envie de les remercier ? Nous les remercions de protéger depuis tant d'années les écoles, les églises, les synagogues et les mosquées.
Il est tout à l'honneur des soldats d'être au contact des Français et à leur service. Les députés du groupe Renaissance ne laisseront jamais dire que les soldats de l'opération Sentinelle ne servent à rien, ou qu'ils exercent une mission de second ordre.
Nous sommes heureux de les voir au plus près de nos concitoyens, et leur mission doit perdurer. Nous devons certes évaluer régulièrement leur travail – c'est déjà le cas, et nous continuerons de le faire. Les députés du groupe Renaissance leur renouvellent leurs remerciements – Benjamin Haddad, député de Paris, sait tout particulièrement combien leur rôle est important, au plus proche des habitants. Remercions-les collectivement. Les propos que nous avons entendus tout à l'heure sont indignes.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, RN, LR et Dem.
Par ces propos, vous ne rendez pas plus hommage aux soldats que vous n'enrichissez le débat.
Les propos tenus sur les bancs de la NUPES ne rendent certainement pas hommage aux soldats !
Je ne doute pas que l'ensemble des députés remercient les soldats de l'opération Sentinelle pour leur abnégation, et parfois leur sacrifice.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.
Souffrez que nous parlions de l'honneur de nos militaires !
Notre position n'est pas idéologique, mais pratique : les soldats de l'opération Sentinelle sont les premiers à dire que ce n'est pas pour cela qu'ils se sont engagés. À quoi servons-nous, se demandent-ils ? Sur 18 400 opérations, seules six les ont fait intervenir contre des terroristes. Nous saluons naturellement ces soldats et les remercions pour leur action, et parfois même pour leur sacrifice. Notez toutefois qu'au cours de ces six opérations, ils ont parfois été pris pour cibles précisément en tant que membres de l'opération Sentinelle. Cette mission les expose. Échangez avec eux : ils vous diront que le plus souvent, ils indiquent l'emplacement des toilettes aux touristes dans les aéroports !
Murmures sur les bancs du groupe RE.
Ce n'est pas pour cela qu'on s'engage dans l'armée. Je ne parle même pas de leurs conditions d'hébergement et de leur propre accès à des toilettes : leur situation est indigne.
Vous vous payez de mots au sujet des militaires, mais leur rendre hommage, c'est aussi redonner leurs lettres de noblesse à leur engagement et à leur mission.
Mme Anne Stambach-Terrenoir applaudit.
Il faut en finir avec l'opération Sentinelle, ce qui ne signifie pas qu'il faut en finir avec la protection du pays : elle doit être transférée vers les policiers du ministère de l'intérieur et des outre-mer, pour lesquels nous demandons d'importants renforts.
Applaudissements plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. le président de la commission de la défense nationale et des forces armées.
Sans rouvrir le débat sur le fond, je rappelle que le rapport annexé n'a pas pour rôle de définir les missions de l'armée française.
Qui peut affirmer que dans six mois ou un an, nous n'aurons pas besoin de l'opération Sentinelle ? La force du modèle français réside dans sa réactivité et dans sa capacité à engager et à désengager rapidement des hommes – la Constitution le prévoit d'ailleurs. Je reconnais néanmoins qu'il est important d'évaluer l'ensemble des missions, qu'elles s'exercent sur le territoire national ou à l'extérieur. M. le rapporteur a rappelé qu'un rapport annuel y était consacré. À cette occasion, la commission pourrait procéder à l'évaluation des missions des armées.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 138
Nombre de suffrages exprimés 138
Majorité absolue 70
Pour l'adoption 20
Contre 118
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 139
Nombre de suffrages exprimés 139
Majorité absolue 70
Pour l'adoption 19
Contre 120
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 140
Nombre de suffrages exprimés 140
Majorité absolue 71
Pour l'adoption 19
Contre 121
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 122
Nombre de suffrages exprimés 120
Majorité absolue 61
Pour l'adoption 39
Contre 81
L'amendement n° 251 n'est pas adopté.
Le sous-amendement n° 1792 n'est pas adopté.
L'amendement n° 1340 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 139
Nombre de suffrages exprimés 139
Majorité absolue 70
Pour l'adoption 21
Contre 118
Il insiste sur le rôle des armées dans la bifurcation écologique. Notre écosystème global est en état d'urgence écologique – nous ne cessons de vous le répéter. Tous les rapports, notamment la dernière publication du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), tirent la sonnette d'alarme et évoquent des scénarios catastrophes de réchauffement climatique. D'ici à 2100, la température pourrait augmenter de 3 degrés dans le monde et de 4 degrés en France. Il en résultera une multiplication des feux de forêt, un appauvrissement des ressources naturelles, d'importantes migrations climatiques ainsi que la submersion de certains territoires – et j'en passe.
Il est urgent d'agir collectivement. Le Gouvernement se plaît à invoquer la responsabilité individuelle ; il appelle à appliquer des mesurettes au quotidien pour enrayer le réchauffement climatique – c'est le fameux « je baisse, j'éteins, je décale ». Cela ne suffira pas à enrayer le réchauffement climatique : il faut engager de toute urgence la bifurcation écologique de l'économie. Nous devons transformer notre façon de produire, de consommer et d'échanger pour nous mettre en harmonie avec la nature, tout en garantissant des conditions de vie dignes pour chacun. Cette bifurcation doit faire l'objet d'une planification, à laquelle tous les secteurs sont appelés à participer, y compris la défense. Nous vous proposons de l'inscrire dans le rapport. Les députés du groupe La France insoumise défendront de nombreux amendements en ce sens, notamment pour préciser le rôle des armées dans la bifurcation écologique, dans le traitement des catastrophes naturelles et dans la protection des populations.
Le projet de loi de programmation a beau s'étendre sur sept ans, il ne mentionne pas le désastre écologique : il n'évoque ni les territoires submergés, ni les feux de forêt, ni les flux migratoires. Nous vous invitons à un travail de programmation qui prenne en considération le contexte écologique, dans un souci de sincérité et de précision.
L'amendement n° 868 de M. Aurélien Saintoul est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Grâce à un amendement de M. Bayou, la commission a modifié l'alinéa 10 du rapport annexé ; cette nouvelle rédaction me semble satisfaisante. Avis défavorable.
La commission a effectivement trouvé un juste équilibre. Avis défavorable.
La Guyane est confrontée à des enjeux environnementaux et sécuritaires spécifiques. Malgré l'opération Harpie, l'orpaillage illégal demeure un fléau qui pille le territoire guyanais de ses ressources, pollue ses sols et ses fleuves, empoisonne son peuple et tue les forces armées françaises engagées dans une lutte quotidienne contre ce phénomène – en témoignent les récents décès de l'adjudant-chef Guy Barcarel, chef coutumier teko, et du major Arnaud Blanc, dont nous saluons à nouveau la mémoire. Ce sont deux décès de trop. Par cet amendement, nous vous alertons sur la nécessité de changer de logique : il ne s'agit plus de contenir ce fléau, mais de l'éradiquer. Il est temps de déployer les moyens nécessaires pour débarrasser le territoire guyanais – qui est français, jusqu'à preuve du contraire – de ceux qui le ruinent et le dépouillent, et qui tuent sans broncher les soldats qui le défendent.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES. – M. Julien Bayou applaudit également.
Le sujet est d'importance ; je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
À mon tour, je rends hommage aux soldats qui se sont engagés de longue date dans les opérations Harpie 1 et Harpie 2. Celles-ci illustrent le rôle des armées dans la protection de l'environnement, dans la sécurité sanitaire – cette dimension pourrait être ajoutée à l'amendement –, dans la préservation de notre souveraineté et, plus généralement, dans l'application de grands principes d'humanité, le tout sur le territoire national. C'est aussi la preuve que nous devons éviter tout propos définitif concernant l'emploi des forces armées sur notre territoire.
L'amendement est équilibré. J'ai une pensée pour tous les soldats qui ont été blessés ou qui ont perdu la vie en Guyane – vous avez cité Arnaud Blanc, chef de groupe de l'antenne du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) à Cayenne, et l'adjudant-chef Guy Barcarel, aux obsèques duquel nous avons tous deux assisté, monsieur Rimane. Ce fut un moment particulièrement difficile ; il a ému l'ensemble des Amérindiens concitoyens français de Camopi, qui entouraient leur chef coutumier et sous-officier de la légion étrangère. Votre amendement leur rend hommage.
Avis favorable.
L'amendement n° 974 est adopté.
Il est regrettable que la promesse de rendre le service national universel progressivement obligatoire n'ait pas été tenue – Alexandra Martin, auteur de cet amendement, est fortement investie dans ce sujet et a participé au groupe de travail qui lui est consacré. Nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport qui explore des solutions alternatives à la généralisation du SNU et qui évalue la mise en œuvre d'un parcours citoyen universel.
Le SNU ne figure pas dans la loi de programmation militaire, mais rien n'empêche la commission d'organiser des auditions à ce sujet. Certaines se sont déjà tenues, auxquelles Mme Martin a participé, me semble-t-il.
Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Il s'agit d'un amendement de rappel plutôt que d'appel : le débat a eu lieu tout à l'heure avec Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel. Avis défavorable.
N'étant pas l'auteur de l'amendement, je ne me permettrai pas de le retirer. Quoi qu'il en soit, Mme Martin entendra votre message.
L'amendement n° 36 n'est pas adopté.
La parole est à M. Michaël Taverne, pour soutenir l'amendement n° 130 .
Le rapport évoque légitimement le dérèglement climatique et ses conséquences, qui constituent un défi pour nos armées, notamment dans le cadre de missions de gestion de crise. Ces catastrophes climatiques, qui sont, selon le rapport, « une source de danger et de déstabilisation majeurs pour les populations », doivent être anticipées à l'échelle mondiale, ainsi que nationale.
Ce sont les territoires insulaires, notamment la Polynésie française où près d'un tiers des îles sont menacées de disparition du fait de la submersion permanente, qui en subiront les conséquences les plus dramatiques. Tel est principalement le cas de l'archipel des Tuamotu, dont les atolls, culminant à 2 ou 3 mètres seulement au-dessus du niveau de la mer, pourraient être engloutis, menaçant de fait les milliers de nos compatriotes qui y vivent.
Ainsi, le présent amendement vise à souligner plus clairement cet enjeu pour les territoires insulaires, principalement ultramarins. Nous le savons, notre marine nationale aura un rôle central à jouer.
S'agissant de la question du changement climatique en outre-mer, un amendement de Julien Bayou a été adopté en commission, ajoutant au rapport annexé un alinéa relatif à la prise en considération de la question du dérèglement climatique. Votre amendement est satisfait, eu égard au champ général couvert par l'alinéa. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je souhaite expliquer les avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements portant sur l'alinéa 10. La rédaction du texte issue des travaux en commission a atteint un équilibre ; tout y est. Le texte présente une approche globale et complète. Il souligne l'impact potentiel du réchauffement climatique sur les forces armées et invite le ministère des armées à donner l'exemple et à participer à la lutte contre ce phénomène. Le débat a déjà eu lieu. Je vous propose de ne pas modifier la rédaction de cet alinéa car nous risquons de l'alourdir sans forcément apporter d'éléments nouveaux.
Si nous voulons être précis, nous ne devons pas limiter l'analyse aux seuls territoires insulaires. La Guyane connaît des difficultés, ainsi que la Bretagne, en raison de l'érosion du trait de côte. Nos infrastructures et nos bases navales commencent également à en subir les effets. À force de préciser les dispositions, on finit par déséquilibrer la rédaction et porter atteinte à sa qualité. J'émettrai donc un avis défavorable sur l'ensemble des amendements. Ne m'en voulez pas mais, à un moment donné, il faut bien atterrir.
L'amendement n° 130 n'est pas adopté.
Il est vrai que nous avons trouvé un point d'atterrissage intéressant en commission. Par le présent amendement, nous souhaitons souligner que le dérèglement climatique est une question de sécurité nationale – le ministre l'a évoqué –, voire internationale. En effet, il amplifie les perturbations du monde, en provoquant des inondations, des sécheresses et des famines. Face à cette réalité, désormais tangible, l'amendement vise à mentionner dans la loi de programmation militaire que « [l]a France agira pour renforcer la coopération en matière de prévention et de résolution non-violente des conflits, et pour prévenir l'insécurité et les conflits [internationaux] liés au changement climatique ».
La prévention des conflits climatiques relève d'une politique interministérielle, alors que nous débattons de la loi de programmation militaire. Je comprends votre appel mais je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 1439 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour soutenir l'amendement n° 314 .
Le dérèglement climatique et les crises environnementales que nous subirons peut-être imposent que nos armées et notre stratégie de défense prennent en considération ce phénomène. En revanche, la troisième phrase de l'alinéa 10 pourrait être mal comprise : « […] la défense nationale est appelée à engager une profonde réflexion pour intégrer le changement climatique à ses missions, ses stratégies et ses plans opérationnels et tactiques. » Par cet amendement, nous proposons de la préciser.
Nous sommes d'accord que nous devons nous préparer à intervenir, pour lutter contre le dérèglement climatique ou pour faire face à une crise qui survient. Mais si, à chaque fois que nous devons prendre une décision stratégique, nous devons nous demander quelles émissions de CO
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Elle sera au cœur des réflexions lors de l'élaboration de chaque programme ou de la définition des modalités d'emploi des équipements. Il est donc inutile de le préciser. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
J'invite Laurent Jacobelli à se mettre d'accord avec son collègue Michaël Taverne qui, à l'instant, nous expliquait que le dérèglement climatique représentait un risque majeur pour les territoires insulaires.
Le fait que vous ayez dit que la lutte contre le dérèglement climatique ne devait pas se faire au détriment de notre défense nationale montre à quel point vous n'avez pas compris.
Le ministre vient d'évoquer le recul des traits de côte. D'ici 2050, Dunkerque deviendra une presqu'île. Nous pouvons également parler des problèmes d'eau. Le climat est une question de sécurité nationale ; en opposant bêtement le dérèglement climatique à la défense nationale, vous montrez que vous n'avez pas compris. Donc, bien entendu, nous voterons contre votre amendement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 314 n'est pas adopté.
La parole est à M. Erwan Balanant, pour soutenir l'amendement n° 1585 .
Il est toujours un peu incongru d'évoquer le climat lorsqu'on parle de guerre – il suffit de constater les dégâts que peut provoquer un conflit sur l'environnement. Cela a été dit durant les débats, notamment en commission, les bouleversements climatiques sont des enjeux de souveraineté et stratégiques. Nous avons parlé des traits de côte et des conflits à venir. La question des infrastructures est également importante. Nos infrastructures sont parfois situées sur la côte, elles doivent donc être adaptées. Elles doivent également être isolées car si un militaire a trop chaud ou trop froid lorsqu'il travaille, il sera moins efficace.
L'amendement vise à préciser l'alinéa 10, en ajoutant que le plan d'action global devra comporter des mesures concrètes. Il va dans le sens de la stratégie ministérielle « Climat & défense », qui a été présentée au mois d'avril 2022 par la ministre des armées de l'époque. Par ailleurs, monsieur le ministre, je souhaitais vous demander la date de publication du plan d'action global.
L'amendement d'Erwan Balanant est également relatif à la question climatique, à laquelle j'ai déjà répondu, et rejoint celui de Julien Bayou. Je vous invite, monsieur Balanant, à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Pour toutes les raisons indiquées par le rapporteur, je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable. Du reste, l'amendement alourdirait l'alinéa 10.
La stratégie ministérielle a été publiée et pourra, au besoin, être transmise de nouveau à l'ensemble de la représentation nationale. L'idée est d'organiser une revoyure annuelle ou bisannuelle.
La principale difficulté est que le ministère, grand propriétaire foncier, n'est pas du tout exemplaire – gestion de l'eau et des déchets, épaves thermiques. En énumérant ces problèmes, on définit l'axe d'effort. Le volet thermique des bâtiments est une préoccupation majeure. Dans certaines bases aériennes ou certains régiments, on trouve à la fois des bâtiments basse consommation dernier cri, absolument remarquables, et les plus belles épaves thermiques qui puissent encore exister. Le temps que prendra la réalisation de ces réparations, étant donné l'étendue du parc foncier du ministère des armées, excédera la durée de cette LPM. En outre-mer, la même question se pose pour la climatisation.
Ainsi, l'enjeu est de taille. Un jour, nous remettrons ce plan d'action global, en montrant les efforts accomplis – monsieur le député, vous participerez à ce débat – et les montants investis dans les infrastructures, dans le cadre de la LPM.
Compte tenu de ces éléments, je retire l'amendement. Nous devons être très vigilants sur les questions climatiques, en allant dans le sens des propositions et des annonces du ministre Christophe Béchu, répondant au scénario de réchauffement climatique de 4 degrés. L'armée doit également réfléchir à ce scénario, afin d'être capable de se projeter dans des milieux qui ne seront plus ceux que nous connaissons aujourd'hui.
L'amendement n° 1585 est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Cubertafon, pour soutenir l'amendement n° 24 .
Le 13 février 2019, une mission d'information parlementaire portant sur les dérèglements climatiques et les conflits, a été créée. Dans le cadre de ses travaux, elle propose plusieurs recommandations, afin d'accélérer l'adaptation des armées, perçue comme insuffisante. S'il faut saluer le fait que, ces dernières années, le ministère a intégré cette dimension – je pense notamment à la stratégie ministérielle « Climat & défense » –, de nombreux efforts restent encore à fournir. La question climatique doit être considérée comme une véritable stratégie.
Le présent amendement vise à préciser, dans le rapport annexé, que l'actualisation du texte, qui aura lieu d'ici à 2027, donnera une dimension particulière aux enjeux climatiques.
Je vous remercie pour cet amendement, qui renforce les propos tenus tout à l'heure. Je vous invite néanmoins à le retirer ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 24 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
Je serai bref, après les propos tenus par le ministre et le rapporteur. Lorsqu'on demande à l'armée de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, c'est avant tout une question d'autonomie stratégique – je ne voudrais pas qu'on se méprenne. Par exemple, la question de l'autonomie des camions se pose. En effet, l'armée est une très grande consommatrice d'énergies fossiles et d'hydrocarbures. Ainsi, en incitant à respecter les objectifs de 2030, à innover et à développer la recherche, on participe à la lutte contre le dérèglement climatique mais on contribue également à garantir une autonomie de nos moyens, aussi bien stratégique qu'opérationnelle.
Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable. Je rappelle qu'un rapport sur les enjeux de la transition écologique pour le ministère des armées avait été présenté par nos collègues Jean-Marie Fiévet et Isabelle Santiago, au mois de mai 2021.
L'amendement n° 1436 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La crise écologique crée des tensions à toutes les échelles. La raréfaction des ressources stratégiques fait naître et fera croître des conflits de voisinage pour l'utilisation et l'appropriation de ressources comme l'eau, le pétrole, les métaux et les terres rares, et ainsi de suite. C'est tout l'environnement stratégique qui est bouleversé par l'incertitude écologique.
Outre la raréfaction des ressources et l'effondrement de la biodiversité qu'il suscite, le changement climatique modifie l'ordre des événements naturels auquel nous nous sommes adaptés depuis des millénaires. La pandémie a montré l'absurdité du système qui l'a provoquée puisque les zoonoses sont devenues plus fréquentes, en raison de la destruction des milieux d'habitat naturel des animaux et des élevages intensifs. Sans transformation des modes de production, d'échange et de consommation, les conflits pour l'accès à l'eau, à l'alimentation, à l'énergie iront croissant. On peut anticiper qu'il en ira de même s'agissant des conflits liés aux déplacements forcés de population. Songez que l'ONU prévoit 250 millions de personnes déplacées à cause de phénomènes climatiques extrêmes d'ici 2050.
Par ailleurs, la fonte des glaces ouvre de nouvelles routes, comme celle du pôle Nord, concurrentes des routes actuelles. Ces nouveaux passages sont source de tensions et notre réflexion doit répondre à ces questions inédites, liées au changement climatique.
Pour le groupe LFI – NUPES, alors que nos armées et notre stratégie doivent s'adapter à ces inéluctables évolutions, ni cette LPM ni la revue nationale stratégique ne remédient suffisamment à ces problèmes fondamentaux. Le présent amendement vise donc à mettre l'accent sur les tensions provoquées par la crise écologique, aussi bien locales qu'internationales.
La parole est à Mme Pascale Martin, pour soutenir l'amendement n° 870 .
Protestations sur les bancs du groupe RN.
La parole est à M. Frank Giletti, pour un rappel au règlement.
Sur le fondement de quel article, monsieur Giletti ?
Le même que tout à l'heure, madame la présidente : l'article 100, alinéa 5, qui dispose que lorsque plusieurs orateurs d'un même groupe présentent des amendements identiques, la parole est donnée à un seul orateur de ce groupe.
Je ne fais que citer le règlement. Tout à l'heure, on s'est plaint du nombre moyen d'amendements examinés par heure. L'application de cette disposition serait un bon moyen d'accélérer le rythme de notre discussion.
Je vous renvoie à l'article 100 du règlement, où figure, à la fin de l'alinéa 5, un renvoi à la note de bas de page suivante : « Le président de séance, qui doit veiller au respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire, ne saurait recourir à cette limitation que pour prévenir les usages abusifs, par les députés d'un même groupe ,…
Exclamations sur les bancs du groupe RN
…des prises de parole sur les amendements identiques dont ils sont les auteurs. » En l'espèce il s'agit de deux amendements identiques ; nous avons examiné des séries beaucoup plus longues
Protestations sur les bancs du groupe RN
– laissez-moi terminer, mes chers collègues. En tout état de cause, l'application de cette règle est laissée à l'appréciation de la présidence.
La parole est à Mme Pascale Martin, pour soutenir l'amendement n° 870 .
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Par cet amendement, nous souhaitons souligner les tensions provoquées par la crise écologique à l'échelle internationale et locale. La situation nous incite à reconsidérer les enjeux sur le terrain lors de nos opérations extérieures. En effet, le dérèglement et l'état d'urgence climatiques ainsi que le développement des crises sont une réalité. Par exemple, l'utilisation de l'eau et des énergies fossiles ou l'appropriation de routes commerciales et de terres cultivables peuvent avoir des conséquences locales et internationales désastreuses que nous devons reconsidérer dans notre approche des enjeux de défense.
Nous tenons à souligner l'importance de la crise à venir et la nécessité d'examiner ses conséquences à tous les niveaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il s'agit, là encore, du rôle de nos armées dans la bifurcation écologique. Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas prétendre programmer sur sept ans les dépenses militaires, les besoins de nos armées et les objectifs qui sont assignés à ces dernières sans évoquer le climat et les catastrophes naturelles puisque, nous le savons, les feux de forêt et les inondations notamment vont se multiplier.
Nos armées ont un rôle à jouer et la France est terriblement en retard dans ce domaine. Vous qui aimez tant faire des comparaisons avec les autres pays, en voici deux. Aux États-Unis, l'état-major a élaboré, après l'ouragan Katrina, une stratégie claire de déploiement des armées en cas d'événement climatique extrême. Quant au gouvernement espagnol, il a conçu une stratégie qui consiste à mobiliser des unités militaires d'urgence en cas de catastrophe naturelle.
Nous ne voulons pas être contraints d'agir dans l'urgence. Nous refusons d'être désemparés pour avoir agi trop tard, car nous savons déjà ce qui va se passer.
On ne parle pas, ici, d'événements qui surviennent par surprise : on peut les prédire avec précision. On connaît les conséquences du réchauffement climatique. Il convient donc de réfléchir dès maintenant au rôle de nos armées dans la protection de la planète et de la population.
Si vous avez besoin de solutions, nous vous en proposons quelques-unes. Nous pourrions, par exemple, réaliser un audit pour identifier les infrastructures fragiles et susceptibles d'être touchées par de futures catastrophes naturelles, et les renforcer ; mener un travail de chiffrage et d'évaluation pour savoir quelles activités émettent le plus de gaz à effet de serre, lesquelles peuvent évoluer et à quelle échéance ; mettre aux normes les infrastructures et les équipements ; respecter les traités internationaux et les normes énergétiques ; anticiper les conséquences du changement climatique, les inscrire dans le rapport annexé et financer la participation de nos armées à la bifurcation écologique.
Cet amendement est une variation sur le thème de la crise écologique, mais nous utilisons ici un argument particulier. Nous estimons en effet que si la France se mettait au niveau dans le domaine de l'atténuation des effets du réchauffement climatique – en réalité, de la crise écologique globale –, elle disposerait d'un instrument d'influence très puissant.
Je crois, monsieur le ministre, que votre collègue ministre des affaires étrangères serait intéressée par cet aspect. Si nous sommes en mesure de devenir chef de file de coopérations internationales, que ce soit à l'échelon de l'ONU ou à l'échelle du bassin méditerranéen, par exemple, si nous sommes capables d'apporter une aide efficace, d'encadrer des missions d'évaluation ou de lutte contre les incendies, les inondations ou les submersions, alors nous disposerons réellement d'un moyen de faire prévaloir l'intérêt général humain dans le monde.
Nous occuperons une position singulière qui nous sortira des logiques de puissance, de confrontation. Pour ces raisons-là également, cela vaut la peine d'investir.
Je tiens à rappeler que le ministère de la défense a entamé sa transition écologique et énergétique dès 2007. Mais c'est sous l'impulsion de Mme Florence Parly, que je salue, en juillet 2017, que cette transition a fait un bond en avant, en matière de réduction de la production de gaz à effet de serre et de préservation de la faune et de la flore. Le ministère de la défense est toujours en avance. Il suffit pour s'en convaincre de comparer la France à certains pays amis.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Nos armées s'adaptent – d'ailleurs très vite, et de manière remarquable – au défi écologique. Mais je tiens à rappeler que nous examinons un projet de loi de programmation militaire et non un projet de loi de programmation écologique, car, on le voit bien, nos collègues sont en train de nous faire le coup de la rénovation des infrastructures, etc. Chers collègues, vous empêchez les propriétaires français de louer leur appartement s'il ne respecte pas certaines normes écologiques, vous empêchez les automobilistes de rouler à cause de normes écologiques ; demain, vous empêcherez nos armées de nous défendre à cause de normes écologiques. Laissez-nous parler de défense, gardez vos lubies pour vous et arrêtez de monopoliser la parole !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Sourires sur les bancs du groupe RN
…« l'écologie c'est mal », « sauvons la bagnole », tout ça… Cela ne nous apporte pas grand-chose.
« Vous non plus ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.
Vous savez bien, cher collègue, que les armées vont faire face, comme l'ensemble de la société, aux bouleversements climatiques et qu'elles seront même en première ligne pour porter secours aux victimes, car c'est aussi, dans bien des cas, leur mission.
J'ai défendu un amendement qui vise à accroître le rayonnement de la France, son influence,…
…mais vous n'en avez cure, car la politique de grandeur, cela vous passe au-dessus de la tête. Cela ne nous étonne pas, c'est la tradition dans laquelle s'inscrit votre parti : dès que l'adversité apparaît, vous baissez pavillon.
En revanche, monsieur le ministre, je suis un peu déçu que vous n'ayez pas souhaité répondre à cet argument spécifique, nouveau dans la discussion, qui aurait mérité que vous y réagissiez.
Les amendements identiques n° 1009 de M. Bastien Lachaud et 1072 de M. Aurélien Saintoul sont défendus.
Sur les amendements n° 1010 et identique, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 1011 et 1074 .
La parole est à Mme Martine Etienne, pour soutenir l'amendement n° 1011 .
Il s'agit de préciser que le ministère des armées s'engage à mettre aux normes écologiques les infrastructures et les équipements utilisés par nos armées, à respecter les traités internationaux sur la réduction de l'empreinte écologique et à veiller au respect des normes énergétiques par les entreprises privées partenaires.
Cela ne semble pas nouveau, dit comme cela, mais il faut manifestement encore et toujours le rappeler. Car nous, nous n'oublions pas que l'État a été rappelé à l'ordre par le Conseil d'État pour non-respect des engagements de la France en matière de réduction des gaz à effet de serre.
Peut-être serait-il bon de s'appuyer sur cette loi de programmation pour tenter de respecter nos engagements et permettre au secteur de la défense de s'engager dans une bifurcation écologique d'ampleur, en commençant par mettre aux normes ses infrastructures : bâtiments, logements, bureaux, points de restauration… Comme vous l'avez dit vous-même lors de l'examen du projet de loi de finances, monsieur le ministre, c'est un sujet qui mérite d'être traité avec sérieux. Pourtant, le rapport annexé reste encore beaucoup trop vague sur cette question.
Lorsqu'on parle de mise aux normes et de respect des traités, on pense aussi aux équipements et aux grosses infrastructures indispensables au bon fonctionnement de nos armées. Il est temps de réfléchir à l'armée de l'après-pétrole, d'adapter nos activités les plus émettrices et de mettre en œuvre la bifurcation dans le fonctionnement même de nos armées.
Enfin, les entreprises privées avec lesquelles le ministère des armées contractualise doivent respecter les traités internationaux sur la réduction de l'empreinte écologique. Il est de votre responsabilité de vous en assurer, monsieur le ministre.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Cet amendement est, en définitive, assez proche de celui de M. Balanant puisqu'il s'agit de préciser que le ministère des armées s'engage à réaliser un audit pour identifier les infrastructures fragiles et susceptibles d'être touchées par de futures catastrophes naturelles – inondations, tremblements de terre, submersions – dans l'Hexagone – Brest, Toulon –, en outre-mer et sur nos bases à l'étranger. Ces infrastructures seront renforcées, adaptées et repensées.
Il est évident que de telles considérations ont toute leur place dans une LPM. M. Jacobelli, qui est hilare,…
…comprend bien qu'il est question de défense puisqu'il s'agit, grâce à des investissements massifs, de réaliser les travaux qui permettront de protéger les emprises militaires françaises contre les effets des bouleversements climatiques, voire des catastrophes naturelles.
J'appelle votre attention sur le fait qu'il n'est pas exclu qu'en Guyane, à l'horizon 2040-2050, la température soit tellement élevée qu'il ne soit même plus possible d'y vivre – je dis bien : d'y vivre ! Des menaces très graves pèsent donc et sur la population et sur les infrastructures.
Il me semble que la représentation nationale mérite d'avoir une vision globale et précise des investissements qui seront nécessaires en la matière. Lorsqu'il faut, par exemple, rehausser un quai parce que le niveau des mers s'élève, les sommes en jeu ne sont pas modiques. Si l'on n'envisage pas ces investissements dès maintenant, demain il sera trop tard.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 94
Nombre de suffrages exprimés 94
Majorité absolue 48
Pour l'adoption 15
Contre 79
Il traite de la dépendance au pétrole ; le sujet ayant déjà été abordé, je serai bref. Monsieur le président Gassilloud, vous ne pouvez pas dire qu'il ne s'agit pas d'un sujet majeur. Si vous imaginez que, lorsqu'il s'agira d'utiliser la dernière goutte du dernier litre de pétrole, elle sera réservée aux armées, vous faites preuve d'une naïveté inquiétante !
Non, ce n'est pas un petit sujet ; oui, la représentation nationale mérite d'être informée des investissements et des moyens qui vont être déployés pour s'assurer que nous ne soyons plus dépendants du pétrole le jour où il sera peut-être question de faire la guerre. Ce n'est pas un petit sujet si, dans vingt-cinq ou trente ans, nous n'avons plus de pétrole. Que comptez-vous faire ? Rester les bras ballants ? Soyez sérieux et ne traitez pas ces hypothèses par-dessus la jambe !
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra