La réunion

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La séance est ouverte à 9 heures 05.

Présidence de M. Sacha Houlié, président.

La Commission examine la proposition de loi constitutionnelle visant à constitutionnaliser la sécurité sociale (n° 2472) (M. Pierre Dharréville, rapporteur).

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Nous commençons par l'examen de la proposition de loi constitutionnelle visant à constitutionnaliser la sécurité sociale. Il s'agit du quatrième texte inscrit à l'ordre du jour de la niche parlementaire du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR), qui aura lieu le 30 mai 2024.

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« Rien ne pourra se faire sans vous », s'exclamait Ambroise Croizat le 12 mai 1946. « La sécurité sociale n'est pas qu'une affaire de lois et de décrets. Elle implique une action concrète sur le terrain, dans la cité, dans l'entreprise. Elle réclame vos mains… » Nous voici d'emblée vaccinés contre l'idée d'une institution froide, d'une institution de papier, d'une notion qui se contenterait d'une existence juridique.

Soixante-dix-neuf ans plus tard, nous sommes réunis pour faire entrer la sécurité sociale à sa juste place dans la Constitution. Nul ne pense que cela réglera tous les problèmes et garantira une protection définitive et parfaite, mais nous sommes toutes et tous convaincus que la Constitution a la plus grande portée normative – c'est pourquoi nous y avons fait récemment entrer un droit essentiel, le droit à l'avortement.

Nous proposons d'y faire figurer une institution fondamentale de la République en tant que telle, en rappelant son principe fondateur : « Chacun y a droit selon ses besoins et y contribue selon ses moyens ». Actuellement, la sécurité sociale n'est évoquée que dans un dispositif budgétaire technique, par nécessité, de manière incidente, au fin fond du texte constitutionnel. Elle n'y a sa place que pour définir la compétence du législateur dans le cadre des lois de financement. Elle n'y a sa place que par et pour ce qu'elle coûte – ce qui n'est pas le moindre des problèmes. Elle n'y a sa place que comme une charge financière à maîtriser sans que son rôle ni son ambition ne soient énoncés.

Nous proposons de l'inscrire après l'article 1er, qui proclame la République sociale. Bien qu'il ait intégré le préambule de la Constitution du 27 octobre1946 au bloc de constitutionnalité en 1971, le Conseil constitutionnel, dans ses interprétations et ses décisions, privilégie souvent les droits individuels par rapport aux droits sociaux collectifs et tend à faire primer la liberté d'entreprendre et la liberté contractuelle. Il limite la portée des dixième et onzième alinéas du préambule à l'obligation de mettre en œuvre une politique de solidarité en faveur des plus défavorisés, sans jamais exercer de contrôle sur son contenu.

Pourtant, les droits de 1946 s'inscrivent dans la continuité de ceux de 1789, dont ils sont la définition collective, et la Constitution de 1793 mentionnait déjà le principe de la solidarité nationale, comme celle de 1848. Dès lors, il apparaît nécessaire de donner à l'affirmation de la République sociale une plus grande consistance dans la Constitution elle-même.

La sécurité sociale est l'une des incarnations les plus puissantes de la République sociale et du modèle social français. Le programme du Conseil national de la Résistance (CNR) annonçait, le 15 mars 1944, « un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d'existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l'État ». Cette ambition était d'autant plus nécessaire qu'il fallait réparer un pays marqué par l'Occupation et la collaboration, et ne laisser aucune chance aux entreprises fascistes en portant un espoir social réparateur pour le respect de la dignité humaine.

Dans un pays mis au défi de se reconstruire, l'ordonnance du 19 octobre 1945 a été établi que « les assurances sociales couvrent les risques de maladie, d'invalidité, de vieillesse et de décès, ainsi que des charges de maternité » et celle du 4 octobre 1945 a institué « une organisation de la sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature ». Pour Ambroise Croizat, « la sécurité sociale, née de la terrible épreuve que nous venons de traverser, appartient et doit appartenir à tous les Français et à toutes les Françaises, sans considération politique, philosophique ou religieuse. Ce qu'elle donne aux Français ne résulte pas de la compassion ou de la charité, elle est un droit profond de la personne humaine. » Pour le général de Gaulle, la France devait être « une démocratie sociale […] garantissant la dignité et la sécurité de tous, dans un système économique tracé en vue de la mise en valeur des ressources nationales et non point au profit d'intérêts particuliers […], où la direction et le contrôle de l'État s'exerceront avec le concours régulier de ceux qui travaillent et de ceux qui entreprennent ».

Avons-nous si peu de considération pour la sécurité sociale qu'elle ne nous apparaît pas comme un fondement de la République sociale, et même de la République tout court ? Je ne le crois pas : tout le monde n'a que des fleurs à la bouche pour parler de ce modèle social décrété « le plus protecteur » au monde. La question n'est donc pas de savoir pourquoi constitutionnaliser la sécurité sociale, mais pourquoi ne pas le faire ! Pourquoi ne pas mettre à jour la Constitution sur ce point qui rassemble les citoyennes et les citoyens de notre pays, dont l'attachement à la sécurité sociale ne se dément pas depuis 1995 – pour prendre une date au hasard ?

Le monde instable dans lequel nous vivons, et la crise de la République elle-même, appellent des gestes de cohésion et de consolidation. La sécurité sociale d'aujourd'hui, si elle n'est peut-être pas tout à fait ce qu'elle devrait être, n'est plus exactement celle qu'elle était. Le monde a changé, les besoins ont évolué et la sécurité sociale, faisant preuve de sa capacité d'adaptation et d'innovation, a été un atout majeur de notre pays face aux crises. C'est pourquoi mon propos n'a rien de nostalgique : sans méconnaître le passé, il se tourne vers l'avenir.

Si nous voulons que la sécurité sociale connaisse un nouvel élan, il faut des réformes ambitieuses. Son enchâssement de plus en plus fort au sein de l'État, qui a marqué un nouvel affaiblissement de la démocratie sociale, est un vrai problème. La mise en cause persistante de la cotisation, c'est-à-dire de sa philosophie même, lui fait courir des risques majeurs. Le fait qu'elle n'assure pas pleinement la protection sociale nécessaire – par exemple en matière d'autonomie –, l'ampleur du reste à charge et la transformation des besoins sociaux appellent des choix forts.

Des inquiétudes politiques et juridiques justifient de la faire monter, avec son principe fondateur, dans l'échelle de la hiérarchie des normes. Cette modification amènera le juge constitutionnel à équilibrer autrement ses décisions. Elle assurera une protection supplémentaire et éclairera les débats sur les évolutions à venir. Enfin, elle donnera à cette institution une existence qui ne dépendra pas, en droit, du bon vouloir du Parlement.

Alors que certaines puissances financières sont, comme on dit chez moi, à l'agachon, nous vous proposons donc d'ajouter un article faisant de la sécurité sociale une institution de rang constitutionnel : ce geste symbolique aura une portée à la fois politique et normative. L'article fait également référence aux principes que la sécurité sociale met en œuvre et garantit, édictés dans le préambule de la Constitution de 1946, et au principe de la solidarité nationale avec son corollaire, la contribution à hauteur des moyens et le bénéfice en fonction des besoins. Cela ne change pas le droit existant, puisque ce principe est inscrit au premier alinéa de l'article 1er du code de la sécurité sociale ; mais il mérite d'être élevé au rang constitutionnel. Les principes du service public sont également mentionnés, comme garanties de son bon fonctionnement.

Nous vous proposons une rédaction simple, économe et lisible, qui préserve les prérogatives du législateur et la marge d'interprétation du juge tout en les orientant plus précisément, qui protège les principes fondateurs de la sécurité sociale pour l'avenir sans empêcher son adaptation aux défis futurs, qui la sort d'une vision purement financière et bureaucratique et qui permettra de la faire valoir comme partie intégrante de ce que l'on nomme l'identité constitutionnelle de la France, si des remises en cause se font jour.

Le groupe GDR a fait le choix d'inscrire cette proposition de loi constitutionnelle à l'ordre du jour parce qu'elle lui semble pouvoir rassembler largement notre assemblée, et notre peuple si elle doit prospérer jusqu'au référendum. Cela me donne l'occasion de rappeler qu'elle doit rester une œuvre collective, et de rendre hommage aux militantes et aux militants qui l'ont tant rêvée qu'ils sont parvenus à la construire. La sécurité sociale est notre bien commun : nous devons engager dans le pays un mouvement de réappropriation sociale et citoyenne.

Le groupe GDR a fait le choix de déposer cette proposition de loi constitutionnelle parce qu'il nous semble qu'elle ouvre un débat nécessaire. Oui, nous pensons qu'il faut mieux reconnaître la sécurité sociale et mieux la protéger en droit, qu'il faut réparer l'anomalie qui lui donne une place aussi modeste dans la Constitution alors qu'elle est essentielle à la réalisation de la promesse républicaine, qu'il faut renouer avec les principes de la démocratie économique et sociale.

Ce que je vous propose en somme, au moment où nous célébrons le quatre-vingtième anniversaire de la Libération, c'est de reconnaître, avec le recul, le caractère fondamental de la sécurité sociale dans la construction de notre nation et de notre République, de le proclamer, donc de le protéger. Ce que je vous propose, c'est de nous donner les moyens d'une célébration consistante des 80 ans de la sécurité sociale, en nous mettant en position d'achever ce processus constitutionnel l'année prochaine. Ce que je vous propose, c'est de lancer un appel à continuer d'inventer la sécurité sociale dont nous avons besoin. Cela ne mettra pas fin à tous les débats, mais ce sera un geste utile et historique pour l'avenir. Faisons-le ensemble !

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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La France est l'un des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui prélèvent le plus de cotisations sociales. Et pourtant, la France de Macron affiche un bilan affligeant : un tiers de ses citoyens ont déjà renoncé à se soigner, faute de moyens ; 30 % de la population vit dans un désert médical ; 30 000 lits d'hôpital ont été fermés depuis la fin de l'année 2016 ; 80 % des Français se disent inquiets pour l'avenir du système de santé et 90 % préoccupés par l'avenir de l'hôpital public ; un Français sur deux déclare avoir un accès compliqué, long ou partiel aux services de soin ; 4 900 médicaments étaient en rupture de stock ou près de l'être l'année dernière et près de 30 % des Français estiment avoir été confrontés à une pénurie de médicaments ; près de 1 200 pharmacies ont fermé entre 2017 et 2022 et plus de 23 % des Français disent rencontrer des difficultés pour accéder à un médecin généraliste à moins de trente minutes de transport.

La présente proposition de loi, qui vise à constitutionnaliser la sécurité sociale, présente au mieux de nombreuses carences et au pire des imprécisions dangereuses. Si le groupe Rassemblement national peut s'associer à certains constats faits par le groupe GDR, il ne peut que s'émouvoir d'une rédaction floue et juridiquement fragile, qui aurait des conséquences dramatiques pour notre modèle social.

Vous proposez que le bénéfice de la sécurité sociale soit assuré « à chaque membre de la société ». J'appelle votre attention sur le danger que cela représente, à l'heure où de nombreuses cartes Vitale circulent indûment dans notre pays. Vous ouvrez par ailleurs la porte à toutes les personnes présentes sur notre sol, y compris les 600 000 à 900 000 qui sont en situation irrégulière. Sur ce point, le groupe Socialistes a au moins le mérite de l'honnêteté, puisqu'il a déposé un amendement visant à donner un caractère universel à la sécurité sociale, avec l'objectif affiché de protéger l'aide médicale de l'État (AME), qui coûte chaque année plus de 1 milliard d'euros aux Français. C'est montrer combien ses membres sont déconnectés des attentes des Français, dont plus des deux tiers souhaitent restreindre le bénéfice de l'aide médicale de l'État aux seuls étrangers nécessitant des soins d'urgence en créant une aide médicale d'urgence, traitant ainsi rapidement un des symptômes de la préférence étrangère en vigueur.

Pour notre part, nous proposons une rédaction plus solide et confions à la loi le soin de fixer les conditions pour bénéficier de la sécurité sociale. Nous proposons de conditionner l'accès aux prestations sociales par la nationalité française, l'exercice d'un travail en France ou une résidence régulière. Ces amendements font écho au projet présidentiel de Marine Le Pen, qui défendait le principe de priorité nationale afin de réserver un certain nombre de prestations françaises sociales aux seuls Français. Il faudra avoir travaillé durant cinq années en France pour pouvoir prétendre au bénéfice de ces prestations. Les allocations familiales, qui relèvent exclusivement de la solidarité nationale, seront réservées aux Français ou aux familles dont au moins l'un des parents est Français.

La présence des étrangers sur le territoire ne doit plus constituer une charge déraisonnable pour les finances publiques et le système de protection sociale. Par ailleurs, il importe que le Gouvernement prête attention à l'immensité de la fraude sociale. C'est la raison pour laquelle nous lui proposons de croiser les fichiers, d'augmenter les contrôles, de réaliser un audit sur les centaines de personnes qui auraient plus de 100 ans et de remplacer la carte Vitale par la carte Vitale biométrique.

En l'état actuel des choses, sauf si vous acceptez nos amendements, nous voterons contre votre proposition de loi.

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Vous proposez de créer un nouvel article dans la Constitution, faisant de la sécurité sociale une institution fondamentale de la République, qui assure à chaque membre de la société une protection contre les risques et les aléas de l'existence. Vous l'avez indiqué, l'acquisition de la sécurité sociale remonte à l'ordonnance du 4 octobre 1945. Dès 1946, le préambule de la Constitution disposait que la nation garantit à tous « la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs » et que « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler, a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ».

Ces principes, qui ont été repris dans la Constitution du 4 octobre 1958, obligent l'État et la collectivité à veiller à la protection de la santé ainsi qu'au respect de l'équilibre financier de la sécurité sociale. La valeur constitutionnelle de la protection de la santé pour tous les citoyens est donc pleinement assurée. Par ailleurs, le terme « institution » que vous employez n'a pas la même valeur que les termes « droit », « liberté » ou « principe ». De même, les mots « chaque membre de la société » ne correspondent à aucune réalité juridique.

Enfin, la jurisprudence constitutionnelle est constante sur un point fondamental : c'est au législateur qu'il appartient de mener des politiques publiques garantissant la protection de la santé. Le Gouvernement et le Parlement ont mené, depuis 2017, des politiques volontaristes pour renforcer notre système de santé, avec le 100 % santé, la création de la cinquième branche et la loi de financement de la sécurité sociale, qui est votée chaque année et dont vous connaissez, monsieur le rapporteur, le fonctionnement et les limites, imposées par la nécessité de contrôler la dépense publique.

Parce que cette proposition a un caractère superfétatoire et pour toutes les raisons que je viens d'indiquer, le groupe Démocrate ne votera pas ce texte.

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Le groupe GDR nous propose de constitutionnaliser la sécurité sociale pour la protéger contre les menaces de démantèlement et les attaques dont elle a pu faire l'objet au cours des derniers mois ou des dernières années. Face au déremboursement de certains médicaments ou soins et aux attaques menées contre la politique familiale, on peut effectivement s'interroger sur la solidité de notre système de protection sociale.

La sécurité sociale est intégrée au bloc de constitutionnalité parce qu'elle est évoquée dans le préambule de la Constitution de 1946, mais elle n'est pas directement protégée par la Constitution. Le préambule reconnaît le droit de tous à « la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs », ainsi que le droit d'obtenir de la collectivité des « moyens convenables d'existence ». Le Conseil constitutionnel a déduit de ces dispositions l'exigence constitutionnelle de mettre en œuvre une politique de solidarité nationale, en laissant au législateur le soin d'en choisir les modalités concrètes.

Notre système de sécurité sociale est un héritage du programme du Conseil national de la Résistance et du gaullisme. C'est une institution, un socle auquel nos compatriotes sont profondément attachés et qu'il faut préserver. La question de la constitutionnaliser peut donc se poser ; encore faut-il voir selon quelles modalités. N'oublions pas que l'inscription de la sécurité sociale dans nos institutions a fait l'objet d'un consensus et qu'il faut continuer à avancer ensemble.

Le travail réalisé au lendemain de la guerre a été poursuivi par le général de Gaulle sous la Ve République, avec la création de l'Unedic en 1958, puis celle d'un régime d'assurance maladie pour les exploitants agricoles en 1961 puis pour les professions indépendantes – artisans, commerçants et professions libérales – en 1966. Ainsi, si 53 % des Français étaient couverts à la sortie de la guerre, 98 % l'étaient en 1969 : cette institution ne s'est pas faite d'un coup, ce qui montre qu'elle peut évoluer.

Cela dit, la formulation proposée par notre collègue, volontairement ambiguë, poserait des problèmes d'application. Il vise ainsi « chaque membre de la société ». Or, si la protection sociale est universelle en France, il convient de rappeler qu'il faut remplir des conditions précises pour en bénéficier, comme une résidence stable et régulière sur le territoire national ou l'exercice d'une activité professionnelle. Il paraît important de s'en tenir au principe de la cotisation des travailleurs et des entreprises plutôt que d'aller vers un système qui ne connaîtrait aucune limite : c'est une question de réalisme aussi bien social que financier.

Nous nous prononcerons sur ce texte à la fin de son examen, en fonction du sort qui aura été réservé à nos amendements.

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Je commencerai moi aussi, évidemment, avec Ambroise Croizat : « Jamais nous ne tolérerons que soit renié un seul des avantages de la sécurité sociale. Nous défendrons à en mourir et avec la dernière énergie, cette loi humaine et de progrès… » C'est de cela qu'il est question, de la défense et aussi de la promotion du modèle social à la française, qui est directement issu du Conseil national de la Résistance et qui fait partie de notre patrimoine républicain commun.

Il faut saluer la proposition de Pierre Dharréville, qui veut corriger un paradoxe : la sécurité sociale, institution essentielle de notre pacte républicain, est à peine évoquée dans notre Constitution, au détour d'un article où elle est abordée sous l'angle financier. Pour nombre de nos concitoyens, elle est la matérialisation quotidienne de notre devise nationale Liberté, Égalité, Fraternité. Même si elle n'est pas explicitement nommée, c'est bien la sécurité sociale qui est mentionnée aux dixième et onzième alinéas du préambule de la Constitution de 1946, et donc intégrée au bloc de constitutionnalité.

Selon le baromètre 2020 « Les Français et la Sécu », 85 % des Français sont fiers de notre système et en ont une bonne image, et 88 % y sont fortement attachés. Le Rassemblement national nous explique que la constitutionnalisation de la sécurité sociale représenterait un grave danger : quel décalage entre son discours et les aspirations de nos concitoyens !

La sécurité sociale est effectivement l'une des institutions essentielles de la République, au même titre que les collectivités territoriales, qui figurent dans la Constitution. Constitutionnaliser la sécurité sociale, c'est la faire figurer dans le pacte républicain avec les institutions de la République, comme le Gouvernement, le Parlement ou le Conseil économique, social et environnemental, et les collectivités territoriales. Je plaide même pour que la notion de service public, qui figure d'ailleurs dans la proposition de loi de Pierre Dharréville, soit érigée en principe à valeur constitutionnelle.

Le but est d'avoir un point d'appui pour la défense et la promotion de la sécurité sociale. Il faut la défendre contre un mouvement sourd, diffus, parfois même caché, de remise en question de ses principes, et aussi contre un mouvement financier, car Bercy a toujours louché sur cette masse financière qui échappe à la fois à l'État et, fort heureusement, au marché. Et il faut la promouvoir parce que les frontières de la sécurité sociale ne sont pas figées et que le combat historique pour son universalité, qui a commencé en 1945, doit se poursuivre.

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Le groupe Horizons et apparentés tient à rappeler son attachement profond au système de solidarité unique et exceptionnel qui caractérise notre pays. Avec un budget équivalent à une fois et demie celui de l'État, soit près d'un quart du produit intérieur brut, la sécurité sociale fait partie intégrante du patrimoine des Français.

Depuis 1945, ce système de sécurité sociale, où chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins, a considérablement évolué pour tenir compte de l'apparition de nouveaux risques et de l'évolution démographique. C'est parce que la sécurité sociale, qui assure la solidarité entre les citoyens face aux risques et aux aléas de la vie, est si structurante dans la vie de notre pays et pour notre cohésion sociale que son principe est déjà inscrit dans la Constitution.

Le préambule de la Constitution de 1946, qui fait partie intégrante du bloc de constitutionnalité, garantit de manière explicite l'existence d'un système de protection sociale. Ses dixième et onzième alinéas se réfèrent directement à l'obligation faite à la nation d'assurer à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement et de garantir à tous, notamment l'enfant, la mère et le travailleur âgé, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos. Est très précisément inscrite dans notre Constitution l'obligation faite à la nation d'offrir à toute personne dans l'incapacité de travailler le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. Autrement dit, toutes les obligations de solidarité – assurance chômage, retraite, allocations familiales, réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles – ont une valeur constitutionnelle, de sorte que toute disposition législative qui conduirait à réduire considérablement leur portée ou à les supprimer serait censurée.

Ainsi, même si cette proposition de loi a un objectif louable, elle ne nous semble pas constituer une réelle plus-value : elle ne protégera pas mieux notre système de sécurité sociale que les dispositions constitutionnelles actuelles et l'interprétation qu'en fait le Conseil constitutionnel. Elle nous paraît même ambiguë sur certains points. Ainsi, en présentant la sécurité sociale comme une « institution fondamentale », elle pourrait viser davantage son organisation que son contenu, lequel est déjà garanti, je l'ai dit, par la Constitution et importe davantage que sa forme, qui doit évoluer en fonction des besoins de la population. Par ailleurs, la formule « chacun y a droit selon ses besoins » introduit une incertitude autour de la définition des besoins et de ce que cela implique.

Il ne faut toucher à la Constitution que d'une main tremblante. Si nous comprenons l'intention politique qui vous incite à inscrire cette proposition de loi à l'ordre du jour de votre niche parlementaire, vous comprendrez aussi qu'il ne nous semble pas pertinent de modifier notre norme suprême dans ces conditions.

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Notre modèle de sécurité sociale est un précieux acquis, ou plutôt un conquis, du Conseil national de la Résistance. Comme l'a dit Pierre Dharréville, la question est moins de se demander pourquoi il faudrait inscrire la sécurité sociale dans notre Constitution que pourquoi elle n'y est pas encore inscrite.

Depuis bientôt quatre-vingts ans, avec l'unification en 1945 des caisses de secours mutuels, la sécurité sociale est devenue un véritable pilier de notre société et elle structure nos rapports sociaux. Largement connue à travers le monde, elle est une incarnation de la République sociale. La faire entrer dans la Constitution, c'est à la fois lui reconnaître sa profondeur historique et lui offrir toute la vivacité de notre promesse républicaine, qui peut se résumer ainsi : assurer à tous les citoyens des moyens d'existence, dans tous les cas.

Dans cette optique, la sécurité sociale est conçue pour être financée par le salaire socialisé, ce qui permet une gestion directe et majoritaire par les salariés. Il est important de rappeler que ce sont les salariés qui financent la protection sociale, car ce sont eux qui produisent les richesses de notre pays. Cependant, passées l'après-guerre et la reconstruction du pays, dès le début de la guerre froide, le patronat choisit de se saisir de toutes les occasions pour détricoter les conquis du CNR. Dès 1947, les mouvements sociaux sont durement réprimés. En 1967, les salariés perdent leur majorité des trois quarts parmi les administrateurs des caisses de sécurité sociale et les élections sont purement et simplement supprimées. En 1991, la contribution sociale généralisée (CSG) remet en cause le financement par la cotisation et, depuis trente ans, les politiques d'allégement des cotisations sociales se succèdent. Dès sa création en 1998, le Medef veut en finir avec le compromis issu de 1945. Un ancien numéro deux de ce syndicat patronal déclare dans la presse, au lendemain de la victoire de Nicolas Sarkozy en 2007, qu'il faut « sortir de 1945 ».

Avec ce texte, nous voulons réaffirmer notre attachement et surtout celui des Françaises et des Français à la belle et grande sécurité sociale. Cet attachement, qui n'a rien à voir avec la nostalgie, mais plutôt avec l'espérance commune, suppose de protéger la sécurité sociale des marchés, qui profitent de ses démantèlements successifs pour spéculer et se développer sur le dos de notre modèle collectif de protection sociale. Les attaques contre ce modèle ont pour conséquence directe d'affaiblir la protection de nos concitoyens contre des risques sociaux pourtant assez bien identifiés. Aucune branche n'est épargnée : report de l'âge de la retraite, baisse des remboursements des soins et des médicaments, etc.

La Constitution a vocation à garantir des droits, mais les jurisprudences successives ne garantissent pas pleinement les principes inscrits dans le préambule de 1946, qui dispose que « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ». C'est bien là le but de la sécurité sociale, mais celle-ci n'a pas de véritable assise constitutionnelle en tant qu'institution. Encore une fois, pourquoi ? Mettons fin à ce paradoxe.

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Je crois me faire le porte-parole de nombreux Français en disant : « Touche pas à ma sécu ! ». En dépit de ses 80 ans, de nombreux pays nous l'envient. C'est dans les moments difficiles que nous prenons conscience de la chance que nous avons de disposer d'un système de sécurité sociale fort et de droits protecteurs. Pendant la pandémie de covid-19, c'est grâce à son principe de solidarité que beaucoup de citoyens ont tenu bon. Ce n'est pas pour rien que 88 % des Français expriment un attachement fort à la Sécu et qu'ils y voient un véritable atout du pays, à l'heure où les services publics sont critiqués.

Notre groupe réaffirme son attachement à ce régime issu du programme du Conseil national de la Résistance, qui traduit, aujourd'hui encore, en dépit des attaques qu'il subit, le principe de fraternité dans notre quotidien. Ce système, je tiens à le rappeler, est le résultat d'une lutte sociale et n'est pas à l'abri des reculs. Il nous oblige et il est de notre devoir de préserver ce bien commun pour les générations actuelles et futures.

Or j'ai parfois l'impression que le Gouvernement voudrait réduire nos droits sociaux. Toutes les raisons sont bonnes pour taper sur les pauvres et faire des économies. L'État prétexte une baisse des comptes publics pour masquer son incapacité à équilibrer son propre budget. En dépit du manque de moyens et des tensions que subissent les professionnels concernés, notamment dans le secteur de la santé, le Gouvernement multiplie les attaques contre notre modèle social. On peut citer le cas emblématique de la réforme des retraites ou de l'assurance chômage, qui, elle, est à l'équilibre, grâce à la bonne gestion des partenaires sociaux – ce qui n'est pas le cas du budget de l'État.

Notre groupe partage le constat des auteurs de ce texte : la protection constitutionnelle qui découle du préambule de la Constitution de 1946 paraît insuffisante et laisse une marge de manœuvre presque totale au législateur. Ce niveau de protection n'est pas à la hauteur, car des droits sociaux essentiels sont en jeu. La consécration explicite de la sécurité sociale et de ses principes fondamentaux dans la Constitution devrait être une évidence. Cette inscription dans la norme suprême n'est pas que symbolique : elle assurerait une meilleure protection de chacun et obligerait le législateur à préserver le principe de la solidarité nationale et d'une contribution selon ses moyens. Elle le forcerait également à prévoir une protection analogue dans tous les territoires de la République, y compris les territoires ultramarins, trop souvent délaissés.

Notre groupe votera évidemment pour ce texte.

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L'inscription de ce texte à l'ordre du jour fait honneur à notre assemblée. Beaucoup de Français sont très attachés à la sécurité sociale. Ce trésor donne à notre devise républicaine sa traduction la plus concrète et prouve que Liberté, Égalité, Fraternité ne sont pas que des mots inscrits au fronton des édifices publics. La sécurité sociale, véritable fierté nationale, nous est enviée dans le monde entier.

Être patriote, c'est défendre la sécurité sociale, la promouvoir et combattre pour la renforcer. Il est d'ailleurs surprenant, compte tenu de ce qu'elle représente pour notre nation, qu'elle ne soit pas encore inscrite dans la Constitution. Avant d'être un budget, c'est une profession de foi, une part conséquente de notre identité républicaine, qu'il nous appartient désormais de graver dans le marbre constitutionnel. Face à l'importance des inégalités et des injustices, elle est un impératif pour relever les grands défis de l'avenir.

Bien qu'elles n'aient pas grand-chose à voir avec cette belle et noble discussion, le Rassemblement national nous a servi à nouveau ses obsessions à l'égard des étrangers – nous en avons l'habitude. Il est vrai que le Rassemblement national et l'extrême droite française n'aiment pas l'histoire républicaine et sociale de la France. On comprend leur gêne : la sécurité sociale a été conquise quand leurs prédécesseurs ont été chassés du pouvoir à la Libération.

Les propos de la collègue du Rassemblement national, qui évoque d'abord le coût de la protection sociale, montrent bien qu'en cas d'accession de l'extrême droite française au pouvoir, la sécurité sociale sera sacrifiée. Le programme illibéral qui sévit à travers le monde fait les poches aux citoyens les plus modestes. En évoquant d'abord la sécurité sociale comme un budget plus que comme un talisman précieux pour la République, le Rassemblement national montre bien quel est son penchant économique et social.

Enfin, chers collègues de la majorité, je vous sens un peu frileux dans vos déclarations d'amour à la sécurité sociale. Il existe en effet un doute raisonnable sur votre attachement aux conquêtes sociales. Mon intuition première tout autant que ma conviction politique, c'est que votre objectif est de casser la sécurité sociale – il suffit d'entendre vos slogans verbeux sur le fait de lever les tabous et de libérer les énergies. Il vous suffit d'un vote pour l'inscription de la sécurité sociale dans la Constitution, où elle a toute sa place, et vous dissiperiez ce doute !

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Le texte que nous examinons vise à inscrire après l'article 1er de la Constitution un nouvel article consacré spécifiquement à la sécurité sociale, sous prétexte que l'institution fondamentale de notre république sociale ne serait pas suffisamment préservée. Or notre modèle de sécurité sociale est d'ores et déjà protégé de façon extrêmement robuste, puisqu'il appartient au bloc de constitutionnalité.

En effet, notre modèle de solidarité nationale est consacré par le préambule de la Constitution de 1946, qui précise que la nation garantit à tous « la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs » et proclame « le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ». Enfin, les principes fondamentaux du droit du travail et de la sécurité sociale sont déterminés par la loi, comme le souligne l'article 34 de la Constitution, ce même article faisant aussi référence aux lois de financement de la sécurité sociale, expressément mentionnées.

L'objet même de cette proposition de loi constitutionnelle est donc satisfait. Dès lors, on peut s'interroger sur son intérêt réel. Il peut apparaître que, loin de vouloir protéger notre modèle social, votre volonté soit plutôt de figer totalement notre système. En cela, et alors même que notre attachement collectif à notre modèle de sécurité sociale est total, les visions que nous avons de notre société, de ses évolutions et des dispositifs de solidarité à mettre en œuvre divergent fortement.

Notre système d'assurance maladie en 2024 est bien éloigné de celui qui existait au lendemain de la seconde guerre mondiale, et pour cause : notre société a profondément évolué – tertiarisation de l'économie, évolutions sociales et sociétales, modes de vie, vieillissement de la population, entrée plus tardive dans la vie professionnelle. De la prise en considération des accidents du travail à la généralisation du tiers payant, du revenu minimum d'insertion au revenu de solidarité active, de la carte Vitale à Mon espace santé, sans compter le système de solidarité à la source auquel nous travaillons, on aura vu pire, cher Benjamin Lucas, comme projet de casse sociale ! Il nous faut continuer de moderniser notre modèle social, de l'adapter, de lui permettre de prendre en charge de nouveaux risques sociaux comme le grand âge. Pour cela, il faut sortir de la caricature et du déni budgétaire.

Ayant lu attentivement l'exposé des motifs de votre proposition de loi, je trouve par ailleurs que vous manquez d'esprit critique concernant certaines inégalités ou injustices qui demeurent, notamment à l'égard des femmes et des personnes connaissant des carrières hachées, dans un système pensé au lendemain de la seconde guerre mondiale par les hommes et pour les hommes.

Enfin, se poser la question du financement de notre modèle, ce n'est pas être ultra-libéral : c'est servir l'intérêt général, regarder la réalité de notre époque et tout mettre en œuvre pour pérenniser ce modèle. C'est ce que nous nous évertuons à faire depuis 2017 et ce malgré les crises que nous avons dû affronter, auxquelles nous avons choisi d'apporter une réponse reposant non pas sur le libre marché, comme vous le laissez entendre, mais sur la solidarité nationale.

Au-delà de ce débat de fond, passionnant, je vous rappelle la position de principe du groupe Renaissance concernant les révisions de la Constitution : nous ne souhaitons pas toucher à notre texte fondamental par petits bouts. Certes, il nous faut sans cesse actualiser notre contrat social – nous l'avons fait pour l'IVG – ou répondre à certains enjeux d'organisation territoriale – nous nous apprêtons à le faire pour la Nouvelle-Calédonie et la Corse – mais pour le reste, il nous faut une révision constitutionnelle d'ampleur, sur le modèle de celle que nous avions entreprise en 2018. On ne révise pas la Constitution sans un travail de concertation de longue haleine. C'est pourquoi nous voterons contre cette proposition de loi.

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« La nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. » « Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. » Si je devais lire aux Français que je croise dans la rue ces alinéas du préambule de la Constitution de 1946, je ferais face à un océan d'incrédulité. Qui se souvient qu'en 1946, le constituant avait conféré à ces droits une valeur constitutionnelle ?

Cette proposition de loi constitutionnelle arrive à point nommé pour combler une béance. La sécurité sociale, institution essentielle à notre histoire républicaine et à la réalisation de la devise républicaine, est en effet menacée de toutes parts. Elle l'est tout d'abord par le pouvoir législatif – nous ! Le modèle français de sécurité sociale, dans la mesure où il est assis sur les cotisations et donc sur la socialisation du salaire, échappe par nature au tout-pouvoir législatif en matière budgétaire.

La cotisation, ce n'est pas la même chose que l'impôt. Quand un député d'extrême droite prétend, dans un récent tweet, qu'un jeune chômeur vit aux frais du contribuable, il commet une erreur fondamentale : aucun chômeur ne vit aux frais du contribuable. Lorsqu'une personne privée d'emploi perçoit une indemnité – rappelons que ce n'est pas le cas dans 50 % des cas –, c'est parce qu'elle a cotisé. Cette cotisation est sienne ; elle est mise dans un pot commun par solidarité entre travailleurs.

La sécurité sociale est menacée également par le principe même de la loi de financement de la sécurité sociale, qui semble nous conférer des pouvoirs trop importants en la matière – d'autant plus quand elle est frauduleusement détournée de son objet, comme ce fut le cas pour la réforme qui a réduit les droits à la retraite de nos compatriotes, repeinte en projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif par l'exécutif.

Elle est menacée enfin par une certaine culture de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Ce droit n'est pas assez protégé par la Constitution, alors que d'autres droits, comme les droits civils, le sont.

Merci au groupe GDR de nous permettre de remettre les pendules à l'heure.

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Nous en venons aux interventions des autres députés.

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Cette proposition de loi vise à inscrire la sécurité sociale dans la Constitution française. Pourquoi diable n'y avions-nous pas pensé avant ? L'intention est évidemment louable – protéger notre système de sécurité sociale et garantir constitutionnellement l'accès à la sécurité sociale pour tous – mais elle soulève quelques questions de taille, notamment celle de sa stabilité et de sa viabilité financière. Il faut rappeler que la sécurité sociale représente 470 milliards d'euros de prestations, soit plus que le budget de l'État : on ne peut donc pas traiter de cette question à la légère.

Le système de santé français a été classé par l'Organisation mondiale de la santé le meilleur au monde en 2000 mais la France a depuis lors été largement déclassée. C'est tout notre système de santé qui est désormais en crise : déserts médicaux, essoufflement du système sanitaire, crise des vocations médicales, sans parler du secteur privé qui se prépare à une grève d'ampleur inédite le 3 juin prochain, au risque de saturer les hôpitaux publics.

Le onzième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 consacre le droit de tous à la santé comme un objectif à valeur constitutionnelle. Pour ma part, il me semble plus réaliste et surtout plus important d'apporter des réponses concrètes à l'état d'urgence de la santé en France, plutôt que d'inscrire un droit élargi dans la Constitution, au risque de fragiliser celui-ci un peu plus sur le plan financier.

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Ce n'est pas un petit sujet que celui que vous nous proposez. Nous faisons le même constat d'une avancée majeure de notre pays, en 1945, lorsqu'il affirme la valeur centrale de la solidarité entre tous ; le même constat qu'il faut préserver et promouvoir ce pilier de notre république sociale, qui revêt une importance aussi fondamentale que les collectivités locales, qui ont été mentionnées ; le même constat de dégradation de la santé en France, suscitant une très forte inquiétude chez nos concitoyens, avec le développement des déserts médicaux, la crise de l'hôpital et l'accueil cher et insatisfaisant des personnes en perte d'autonomie.

Le même sentiment d'inquiétude et d'incomplétude prévaut à l'égard du préambule de la Constitution de 1946, élément essentiel du patrimoine qui, même s'il appartient au bloc de constitutionnalité, ne répond plus, en 2024, à nos attentes. Votre texte mentionne la solidarité et la mission de service public, deux termes essentiels qui correspondent aux exigences que nous avons vis-à-vis de la sécurité sociale.

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J'espère pouvoir vous convaincre de la nécessité de concrétiser notre attachement commun à la sécurité sociale au fil de la discussion.

J'ai entendu beaucoup d'horreurs venant du Rassemblement national. Votre premier argument, madame Diaz, pour justifier votre opposition à la constitutionnalisation de la sécurité sociale est, en gros, qu'elle coûte cher. Il est vrai que c'est cohérent avec les propositions de définancement défendues par votre parti à chaque occasion.

La deuxième raison que vous invoquez tient au fait que certains étrangers, qui y contribuent par ailleurs, en bénéficient, et vous y mêlez la question de l'aide médicale de l'État, qui n'est pas incluse dans la sécurité sociale puisqu'elle est financée par le budget de l'État. L'AME est à la fois un geste d'humanité élémentaire et une action de santé publique. Comment être surpris de voir ressurgir, à l'occasion de ce débat, vos obsessions sinistres ? Quoi qu'il en soit, pour cette raison, vous ne constitutionnalisez la sécurité sociale pour personne, et vous ne protégez pas les assurés sociaux.

Enfin, je ne crois pas que la constitutionnalisation empêche le législateur d'adapter le système de sécurité sociale aux évolutions économiques. C'est une analyse qui me semble complètement erronée. À la préférence nationale, je préfère la solidarité nationale et au chacun pour soi, la sécurité sociale pour tous. La sécurité sociale est un grand geste de solidarité mutuelle face aux aléas de la vie et, pour ma part, j'en suis fier. Elle fait partie de la grande histoire du peuple français.

Je dirai quelques mots également à nos collègues de la majorité, qui ont exprimé leurs doutes. Pour ma part, je pense qu'il est nécessaire d'inclure la sécurité sociale dans la Constitution. Madame Poussier-Winsback, je serais intéressé de savoir quelles ambiguïtés vous avez décelées dans la rédaction. Je n'ai pas cherché à produire une réforme cachée de la sécurité sociale, et je ne crois pas d'ailleurs que cette rédaction y conduise : elle nous permet d'évaluer notre niveau d'exigence à l'égard de la sécurité sociale mais elle ne remet pas en cause l'édifice existant.

Monsieur Breton, notre état d'esprit est d'essayer de traduire le consensus que nous espérons autour de la sécurité sociale dans notre loi fondamentale. Nous souhaitons confier au législateur le soin de détailler les conditions d'accès et de définir son périmètre, précisions qui ne nous semblent pas être de nature constitutionnelle.

Monsieur Gouffier Valente, c'est bien la première fois qu'on me reproche de manquer d'esprit critique face à des inégalités ! Je me suis abstenu de souligner toutes les inégalités qui me sautent aux yeux chaque jour pour ne pas vous braquer – vous auriez pensé que je dressais un procès à l'action politique de votre majorité – mais je peux y venir si vous le souhaitez !

Il faut se garder d'idéaliser la sécurité sociale, celle de 1945 comme celle que nous connaissons aujourd'hui. Il faut préserver la dynamique d'invention sociale dans laquelle elle s'inscrit depuis le début, même si je considère que cela n'a pas toujours pris la bonne direction.

Votre groupe et l'ensemble de la majorité posent en principe de ne pas toucher à la Constitution par petits bouts. Si vous en déduisez qu'il faut changer la Constitution de manière plus large, je signe des deux mains : nous sommes plusieurs ici à souhaiter une VIe République ! Ce n'est toutefois pas l'objectif que nous poursuivons avec cette modification.

Mais, si je calcule bien, la majorité prévoit de réunir le Congrès à quatre reprises dans l'année pour modifier la Constitution sur des points qui lui semblent importants. Pourquoi l'opposition ne pourrait-elle pas faire quelques suggestions de ce type ? Quatre réunions du Congrès, pour l'interruption volontaire de grossesse, la Nouvelle-Calédonie, la Corse et peut-être Mayotte, ce n'est pas si mal pour des gens qui ne veulent pas discuter de la Constitution par petits bouts !

Notre intention est de produire un geste commun : dans la période que nous vivons, nous avons besoin de nous rassembler pour honorer la promesse républicaine. Conforter la sécurité sociale n'est pas un luxe, car elle est menacée par des puissances financières qui ne s'en cachent pas ; nous avons donc tout intérêt à mieux la protéger. Je suis bien conscient que le texte que je vous propose pour donner à la sécurité sociale sa juste place dans la Constitution ne sera peut-être pas adopté, mais je vous invite à une véritable discussion sur ce sujet.

Amendement CL14 de Mme Edwige Diaz

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Mon amendement a pour objet de corriger la dangereuse imprécision de l'article unique, manifeste dans son alinéa 2. La précision que la sécurité sociale bénéficie à « chaque membre de la société » n'est pas juridique car on ignore quelles catégories de personnes sont visées : les Français, toutes les personnes vivant sur le sol français, avec ou sans les étrangers en situation irrégulière ? Nous préférons reprendre une rédaction existant dans le code de la sécurité sociale afin de circonscrire la population visée par cette solidarité. Ainsi, nous proposons un renvoi à « des conditions définies par la loi, relatives notamment à la nationalité française, à l'exercice d'un travail en France ou à une résidence régulière et stable en France des bénéficiaires ».

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Il revient au législateur de détailler ce que signifie être « membre de la société ». Il n'est pas nécessaire de rappeler noir sur blanc la compétence du législateur car elle découle de l'article 34 de la Constitution. Il en est ainsi dans le reste de la Constitution : l'article 1er traite de l'égal accès des hommes et des femmes aux fonctions électives, sans détailler qui est éligible ou non. Il faut respecter un parallélisme des formes en la matière.

Cette belle expression de « membres de la société », qui ne saurait commencer à mes yeux par une logique d'exclusion, est par ailleurs présente dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Son article 4 indique ainsi que « l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits ». Dès son introduction d'ailleurs, la Déclaration précise qu'elle s'adresse à « tous les membres du corps social ». Je n'ai donc pas inventé cette notion juridique, qui existe déjà dans notre bloc de constitutionnalité.

J'ajoute qu'un critère lié à la contribution au financement de la sécurité sociale serait très imprécis. Toute personne résidant en France, même de façon irrégulière, participe à son financement, ne serait-ce que par la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui est affectée au budget de la sécurité sociale à hauteur de près de 30 %. Avis défavorable.

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Nous sommes ici face à un cas d'école de la façon dont l'extrême droite, par ses idées xénophobes, attaque tout le corps social et tous les travailleurs. Pour exclure les étrangers de l'accès à la sécurité sociale alors qu'ils cotisent, l'extrême droite leur dénie la qualité de cotisants – ce qui, de ce fait, vaut pour tout le monde, tous les travailleurs ! Voilà comment l'extrême droite défend les droits sociaux !

Vous en aurez maintes fois la preuve ce matin : pour s'attaquer aux étrangers, l'extrême droite cherche à organiser un régime juridique qui nuit aux travailleurs et à leurs organisations syndicales ; elle désarme la société face à la prédation et à l'injustice. Quand le porte-parole du Medef annonce qu'il soutient le gouvernement Macron dans son entreprise de réforme de l'indemnisation chômage qui revient à voler le fruit des cotisations des travailleurs, qui vient au soutien de cette thèse ? Le Rassemblement national et l'extrême droite ! C'est un moment très éclairant pour la vie politique de notre pays. Si vous pensez que ces gens-là sont du côté des travailleurs, ne venez pas vous plaindre lorsqu'ils vous auront dépouillés !

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL20 de M. Jérôme Guedj

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Face aux propos que nous entendons ce matin, il nous paraît essentiel de nous rassembler. Nous vous proposons d'ajouter le principe d'universalité de la sécurité sociale au nombre de ceux qui doivent être constitutionnalisés. À l'heure où l'aide médicale de l'État et le droit du sol à Mayotte sont remis en cause, il est absolument fondamental d'affirmer le droit de tous à la sécurité sociale et de préciser sur quels principes républicains cette constitutionnalisation doit reposer.

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La sécurité sociale n'a pas toujours eu vocation à couvrir les risques de manière universelle. Des frictions étaient apparues entre universalisation et mutualisation, ces deux logiques n'étant pas forcément compatibles. Je veux juste signaler que la dimension universelle est déjà présente dans le texte avec le terme « chaque membre de la société », et découle également du principe « De chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins ». Cela étant, je ne peux que souscrire à votre objectif. J'émets donc un avis favorable.

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Les belles âmes de gauche de la NUPES proposent d'associer à notre système de sécurité sociale le terme d'universalité afin de prévenir toute remise en question de l'aide médicale de l'État. Ces mêmes humanistes autoproclamés oublient peut-être que, selon un récent sondage, 66 % des Français sont favorables à la réduction de l'accès à l'AME, destinée aux étrangers en situation irrégulière, pour la limiter aux seuls soins d'urgence. Le Rassemblement national est à nouveau le seul groupe parlementaire à défendre les réelles attentes des Français en matière migratoire.

Une proposition de loi visant à transformer l'AME en aide médicale d'urgence a été déposée par Marine Le Pen. Personne n'a oublié la promesse formulée par Mme Borne, alors Première ministre, d'une révision de l'AME au premier trimestre 2024 dont nous attendons toujours la concrétisation. Permettez-moi de vous rappeler le montant abyssal de l'AME : en 2015, 316 000 clandestins en bénéficiaient ; en 2023, ils étaient 466 000, pour un budget de plus de 1 milliard d'euros. Seules deux prestations ne sont pas prises en charge par l'AME : la GPA et les cures thermales.

Nous considérons que la France n'a pas à être un guichet social pour tous les pays du monde alors même que nombre de nos concitoyens ne parviennent pas à se soigner sur leur propre sol.

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Lorsqu'on invoque de grands principes comme l'universalité, il faut veiller, sous peine de se contredire, à ne pas en faire une application à géométrie variable. C'est sous le quinquennat de François Hollande que l'universalité des allocations familiales a été remise en cause, alors que la branche famille est l'un des piliers de notre système de sécurité sociale. Cette attaque contre la politique familiale, qui a été poursuivie depuis, s'est traduite, comme nous l'avions annoncé, par une chute de la natalité.

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Je rappelle que l'AME ne relève pas de la sécurité sociale. Simplement, madame Diaz, vous vous faites une image des aspirations du peuple français quelque peu dégradante.

Monsieur Breton, cet amendement ouvre la discussion sur l'application du principe d'universalité par la loi. Notre groupe, pour sa part, a toujours été favorable à l'universalité, y compris pour les allocations familiales.

La commission rejette l'amendement.

Amendements CL15 et CL16 de Mme Edwige Diaz

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L'objet de l'amendement CL15 est encore une fois de sécuriser une rédaction très vague, en renvoyant à la formulation consacrée par le code de la sécurité sociale. Nous proposons de supprimer la mention des besoins de chacun, qui ne sont pas universels et qui relèvent de situations spécifiques. La rédaction actuelle n'est assortie d'aucune limite et est susceptible de couvrir tout et n'importe quoi. S'autoriser de telles largesses serait complètement irresponsable alors que, selon la Cour des comptes, la fraude à la sécurité sociale représente près de 4 milliards, en hausse de quasiment 40 % par rapport à 2021.

L'amendement CL16 a pour objet de substituer au terme « moyens » celui de « ressources », par parallélisme avec la rédaction de l'article L. 111-2-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale. En effet, les ressources sont exclusivement financières tandis que les moyens recouvrent un champ plus large, trop imprécis pour être pertinent. La mention des moyens ouvrirait un boulevard encore plus large aux fraudeurs, alors que la lutte contre leurs agissements n'est pas assez vigoureuse. Selon les bilans annuels de Bercy, le montant des sommes réclamées aux fraudeurs par le fisc baisse année après année : 13 milliards en 2017, 12,5 milliards en 2018, 12 milliards en 2019 et 8,2 milliards en 2020. En outre, seuls 50 à 60 % de ces montants sont finalement recouvrés. Nous devons éviter de transformer la France en guichet social généralisé.

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Vous discutez les deux termes du principe fondamental qui a présidé à la mise en œuvre de la sécurité sociale : de chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins. Ni les moyens ni les besoins ne trouvent grâce à vos yeux, ce qui montre que vous ne partagez pas le principe même de la sécurité sociale. Une fois de plus, vous ne la considérez que sous l'angle du coût. Pour ma part, j'estime que nous devons affirmer dans la Constitution les grands principes qui la guident.

Il revient au législateur de fixer le périmètre des besoins, ce que nous faisons – de manière certes assez lapidaire – lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il n'est pas question de mettre en cause cette prérogative.

Par ailleurs, le onzième alinéa du préambule de 1946 dispose que tout être humain « a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. » Cette formule a, à nos yeux, une large portée car, à ressources équivalentes, les moyens peuvent différer selon le lieu de résidence ou la composition du foyer ou du patrimoine par exemple. Le législateur doit avoir toute latitude pour évaluer la capacité de chacun et chacune à participer au financement de la sécurité sociale. Enfin, parler de moyens, c'est sous-entendre que la participation n'est pas nécessairement limitée à une contribution financière, ce qui est philosophiquement intéressant.

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Le budget de la sécurité sociale s'élève à 640 milliards, pour 65 millions d'assurés. Le premier élément de fragilisation du budget de la sécurité sociale est constitué par les exonérations, qui représentent 80 milliards et créent des trappes à bas salaire. Mais, pour l'extrême droite, le principal problème vient des 350 000 personnes qui « dépensent », pour reprendre ses termes, 70 millions en AME !

Les droits de 65 millions d'assurés sont systématiquement mis en cause par le patronat et les gouvernements successifs, on casse l'hôpital, on réduit les allocations familiales, mais l'extrême droite n'y trouve rien à redire ; les 70 millions d'euros de l'AME, si. Cette position est non seulement raciste et xénophobe, mais elle est totalement contraire à l'intérêt de la grande masse des assurés sociaux.

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Étant à la peine, comme on le voit dans les sondages, l'extrême gauche essaie de faire diversion en caricaturant et en insultant les défenseurs de la France, les élus du Rassemblement national et, à travers eux, les 13 millions d'électeurs de Marine Le Pen à la présidentielle. Elle fait mine de ne pas comprendre nos amendements et répand des fake news.

Si vous êtes à la peine, c'est que vous avez abandonné les travailleurs, les personnes en situation de précarité. Par cette proposition de loi, vous faites une fois de plus la démonstration que vous appliquez la préférence étrangère. Pour notre part, nous défendons la priorité nationale, qui est le seul moyen pour que les Français continuent à bénéficier de la sécurité sociale.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL18 de M. Jérôme Guedj

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Cet amendement vise à enfoncer le clou en affirmant le principe de la progressivité du financement de la sécurité sociale, conformément à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, comme pendant à l'universalisation de la sécurité sociale. À l'heure actuelle, les cotisations sociales sont peu progressives et la CSG est strictement proportionnelle. Le Rassemblement national fait semblant de ne pas comprendre que, lorsqu'on parle d'universalisation, on désigne la généralisation de la sécurité sociale – à savoir la déconnexion de son bénéfice de la seule activité professionnelle et la prise en compte de la résidence sur le sol français – qui a commencé en 1975 par les allocations familiales, puis s'est appliquée à l'assurance vieillesse – avec le minimum vieillesse – et à l'assurance maladie – avec la CMU (couverture maladie universelle) puis la Puma (protection universelle maladie). La généralisation de la sécurité sociale justifie pour partie un financement au-delà des seules cotisations : c'est peut-être un de nos points de désaccord avec nos camarades du groupe GDR.

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L'universalisation signifie que les salariés ne sont plus les seuls, comme c'était le cas à l'origine de la sécurité sociale, à pouvoir en bénéficier et à contribuer à son financement. En défendant la sécurité sociale, j'entends mettre en avant une certaine idée de la France. Le Rassemblement national fait abstraction de tout ce qui a fait la grandeur de notre pays depuis la Révolution française et qui a permis de promouvoir les grandes idées de liberté, d'égalité et de fraternité et de défendre des droits humains universels. C'est une relecture de l'histoire très problématique. En défendant la sécurité sociale, je défends un apport considérable de notre pays à la construction de l'humanité.

Monsieur Guedj, je vous demande de retirer votre amendement car la notion de progressivité entre la contribution et le bénéfice est déjà présente dans la rédaction. En revanche, cette expression pourrait ouvrir un débat sur la place respective de l'impôt et de la cotisation. La redistribution est, à mon sens, davantage assurée par l'impôt que par la cotisation. En introduisant ce concept, on risquerait de devoir revenir sur l'ensemble du financement de la sécurité sociale – les cotisations, la CSG et la TVA n'étant pas progressives – ce qui n'était pas mon intention initiale.

L'amendement est retiré.

Amendement CL31 de M. Pierre Dharréville

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Les auditions, en particulier celles des organisations syndicales, m'ont conforté dans l'idée qu'il fallait affirmer l'importance de la participation des assurés eux-mêmes à la gestion de la sécurité sociale, les modalités de cette participation devant être définies par le législateur. Aussi je propose de compléter l'alinéa 3 par les mots « et peut participer à sa gestion ». C'est une dimension fondamentale de la sécurité sociale, qui n'est ni une administration, ni l'État mais une institution à caractère paritaire.

La commission rejette l'amendement.

Elle rejette l'article unique.

Après l'article unique

Amendement CL2 de M. Guillaume Gouffier Valente

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Je vais retirer tous les amendements que j'ai déposés après l'article unique, sauf le premier, que je voudrais défendre compte tenu des attaques répétées du groupe Rassemblement national envers notre République et notre modèle de sécurité sociale. Cet amendement CL2 vise à supprimer le mot « race » de l'article 1er de la Constitution. Défendre le passage à un système de préférence nationale, c'est attaquer frontalement les valeurs de la République et vouloir mettre à terre notre système de sécurité sociale tel qu'il a été pensé et construit depuis 1945. Tout en s'opposant à la proposition de loi constitutionnelle en raison de différences de conception des révisions constitutionnelles, le groupe Renaissance défend fermement notre système de sécurité sociale et combat celles et ceux qui s'y attaquent au quotidien.

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Je suis sensible à cet amendement, en partie parce que Michel Vaxès, l'un de mes prédécesseurs, avait défendu une proposition de loi demandant la suppression du mot « race » de l'ensemble de la législation. Cela étant, je regrette qu'aucun des amendements que vous avez déposés ne porte sur le texte lui-même, alors que le temps qui nous est réservé, dans le cadre d'une niche parlementaire, est très contraint. L'article unique venant d'être rejeté, la proposition de loi risque de se réduire à ce seul amendement, ce qui me conduit à demander son retrait ou, à défaut, à donner un avis de sagesse.

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Compte tenu des propos que l'on a entendus ce matin, je maintiens cet amendement, qui a été plusieurs fois débattu et adopté en commission des lois. Je redéposerai les autres en séance car ils portent sur des sujets qui sont chers au groupe Renaissance. Nous continuons de plaider pour une révision d'ampleur de notre Constitution.

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Ôter le mot « race » de la Constitution procède d'une intention louable à laquelle nous pouvons souscrire. Je souligne néanmoins que le groupe macroniste a déposé treize amendements visant à modifier la Constitution, ce qui montre bien que l'heure est venue de le faire. Nous aurions pu pour notre part présenter à nouveau un amendement de suppression du 49.3, mais nous savons combien le temps est limité dans le cadre d'une niche parlementaire. Mais puisque vous affirmez, chers collègues macronistes, qu'il va de soi que vous considérez la sécurité sociale comme une institution fondamentale, je vous invite, par cohérence, à voter cette proposition de loi.

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Notre débat montre que, tout au moins sur ce sujet, il existe deux grandes familles politiques dans notre pays : l'une, le Rassemblement national, est raciste ; les autres, au-delà de leurs différences, sont humanistes. À cet égard, le vote sur l'amendement sera très révélateur. Pour le reste, à mon sens, la sécurité sociale est d'ores et déjà inscrite dans la Constitution, comme en témoignent les dixième, onzième et douzième alinéas du préambule de 1946 de même que l'article 1er de la Constitution elle-même, selon lequel « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. »

La commission adopte l'amendement.

Amendement CL23 de M. Jérôme Guedj

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Cet amendement d'appel, qui sert aussi de coup de gueule, vise à ce que, tous les cinq ans, le Parlement examine une loi de programmation sur chacune des branches de la sécurité sociale, ce qui permettrait de débattre de la prévention ainsi que de la couverture des besoins et des risques. Le 8 avril, nous avons voté à l'unanimité un article de la loi « bien vieillir » qui fait obligation au Gouvernement de soumettre au Parlement avant la fin de l'année une loi de programmation sur le grand âge. Or le Gouvernement fait comme si cet article n'existait pas. Hier encore, Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités, lors de l'inauguration de Santexpo, a dit qu'elle allait lancer à nouveau une concertation avec le Conseil économique, social et environnemental. Voilà cinq ans que l'on engage des concertations au sujet d'une loi sur le grand âge !

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Je partage votre colère, mais nous avons fait le choix de ne pas retoucher les lois de financement car elles relèvent d'un autre débat même si elles mériteraient sans doute une redéfinition. Quoi qu'il en soit, afin de conserver l'ambition initiale du texte, je vous demande de retirer votre amendement.

L'amendement est retiré.

Amendement CL24 de M. Jérôme Guedj

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Cet amendement vise à ce que l'article 49.3 s'applique aux textes financiers dans les limites prévues pour les autres projets de loi, à savoir une fois par session. Ce serait une mesure intéressante pour rééquilibrer les pouvoirs entre l'exécutif et le législatif. Toutefois, dans la mesure où elle n'entre pas dans le périmètre de la proposition de loi, je donnerai un avis de sagesse.

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Chacun a dit l'importance de la sécurité sociale, a rappelé à quel point les Français y sont attachés et combien il est nécessaire de la défendre. Or, à la fin de cet examen en commission, on se retrouve avec un texte vidé de son sens par la coalition présidentielle. C'est son droit, en démocratie, mais elle a également décidé de le remplacer par des dispositions qui n'ont aucun intérêt pour la protection et la cohésion sociale de nos compatriotes. Jouer avec ce sujet quand, pour une fois, il est à l'ordre du jour, c'est scandaleux. Un groupe n'a qu'une journée d'initiative parlementaire par an ! Lorsqu'on a le pouvoir, on a des devoirs, on a la responsabilité de ne pas jouer avec les lois. Se prêter à cela dans le but de se faire passer pour des antiracistes, c'est absolument minable.

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Je regrette que M. Guedj ait retiré l'amendement précédent CL23, car nous l'aurions voté. Il avait engagé une démarche transpartisane sur le sujet, à laquelle nous nous étions associés, et nous demeurons dans l'attente de cette loi de programmation pluriannuelle.

La commission rejette l'amendement.

Elle rejette l'ensemble de la proposition de loi constitutionnelle.

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Je regrette cette décision mais je voudrais vous convaincre que nous pouvons encore accomplir un grand geste politique et républicain en séance en adoptant ce texte. J'espère que la discussion vous a donné l'envie d'en faire quelque chose d'utile, car les arguments qui ont été avancés pour justifier son rejet me paraissent insuffisants. En votant ce texte, nous accomplirions un acte réparateur, mais aussi porteur d'avenir.

Puis, la Commission examine la proposition de loi constitutionnelle tendant à la création d'une commission permanente aux collectivités territoriales et aux outre-mer (n° 2471) (M. Davy Rimane, rapporteur).

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M. Davy Rimane et plusieurs membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ont déposé, le 11 avril, la proposition de loi constitutionnelle tendant à la création d'une commission permanente aux collectivités territoriales et aux outre-mer. Ce texte est inscrit en septième position de la journée du 30 mai, consacrée à la niche du groupe GDR.

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Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine a choisi d'inscrire une deuxième proposition de loi constitutionnelle à son ordre du jour car il nous faut être ambitieux et essayer de suivre le rythme imposé par le Président de la République en matière de révisions constitutionnelles cette année. Je vous invite donc à créer une commission permanente aux collectivités territoriales et aux outre-mer, à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Pourquoi une commission permanente en lieu et place des deux délégations aux outre-mer et aux collectivités territoriales ? La réponse est simple : les délégations parlementaires sont des organes souples créés par des décisions internes, qui n'ont pas de pouvoir législatif. Cela signifie qu'une délégation ne peut pas examiner un texte de loi, que ce soit sur le fond ou pour avis, et qu'elle ne peut pas voter d'amendements. Le rôle des délégations se limite à l'information du Parlement et au contrôle du Gouvernement sur les sujets qui relèvent de leur domaine de compétence. Elles exercent cette mission par la tenue d'auditions, la publication de rapports d'information et la constitution de groupes de travail.

Elles utilisent les moyens à leur disposition pour participer à la réflexion autour de l'élaboration des textes de loi : elles publient des rapports d'information et peuvent faire des recommandations. Ces dernières peuvent être à l'origine d'amendements déposés ou cosignés par un ou plusieurs membres de la délégation, mais ils ne sont pas présentés au nom de la délégation.

La distinction entre commission permanente et délégation, garantie par la jurisprudence constitutionnelle, découle des dispositions de la Constitution, qui confie aux commissions permanentes la mission de préparer le travail législatif en séance publique. Leur rôle a été nettement revalorisé par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui a prévu que la discussion en séance publique a lieu, sauf exceptions, sur le texte adopté par la commission. Cette révision a porté le nombre de commissions de six à huit, le constituant ayant fait le constat qu'une plus grande spécialisation des débats et des parlementaires était nécessaire.

La création d'une commission permanente supplémentaire permet une spécialisation et une expertise dans un domaine donné, lesquelles sont absentes de notre assemblée s'agissant des collectivités territoriales et des outre-mer. Pourtant, on nous annonce une nouvelle grande réforme territoriale, un nouvel acte de décentralisation, et on mesure sur le terrain les attentes de nos élus locaux.

Sur le volet ultramarin, nous faisons face aujourd'hui à l'échec cuisant du fameux réflexe outre-mer au sein du Parlement. Les débats ultramarins, suscités bien souvent par des amendements déposés par des Ultramarins, n'intéressent en général qu'eux – vous autres, ils vous glissent dessus. Surtout, les textes que nous adoptons ne prennent quasiment jamais en compte les réalités ultramarines ou renvoient à des ordonnances ou à des décrets par pure fainéantise intellectuelle, si bien que le Parlement n'en débat même pas.

Il est temps de prendre en compte ces réalités territoriales. Les crises des banlieues à répétition, le mouvement insurrectionnel en Nouvelle-Calédonie, le surplace de la Corse doivent nous pousser à prendre des décisions adaptées, à être à l'écoute du terrain. Je l'atteste en tant que président de la délégation aux outre-mer, les délégations peinent à exister et à avoir un réel impact sur les travaux menés par notre assemblée. Comme Jean-Éric Gicquel l'écrit avec clarté dans un récent ouvrage de droit parlementaire, si certaines délégations ont prospéré, la plupart ont végété avant de disparaître officiellement. C'est dû notamment au fait qu'elles peinent à trouver leur place à côté des commissions permanentes.

L'intérêt et l'assiduité des parlementaires souffrent du caractère consultatif des travaux effectués et de leur double appartenance, à une commission permanente et à une délégation. Les moyens humains et financiers sont réduits à l'Assemblée nationale et seuls deux fonctionnaires sont affectés à chaque délégation. Je sais que certains d'entre vous seraient tentés par l'option intermédiaire, celle de transformer les délégations aux collectivités territoriales et aux outre-mer en une commission non permanente, sur le modèle de la commission aux affaires européennes. Disons-le tout de suite, c'est une fausse bonne idée. Une telle commission n'aurait toujours pas de pouvoir législatif. Le format de la commission des affaires européennes répond à une problématique très spécifique liée au principe de subsidiarité et à la nécessaire participation des parlements nationaux aux travaux européens. Par nature, cette commission ne peut pas se saisir au fond d'un texte, y compris tendant à la ratification d'un traité européen ou à la transposition d'une directive. Elle a bien un pouvoir : celui d'adopter des propositions de résolution, mais sans véritable effet concret.

Pour toutes ces raisons, l'article unique de la présente proposition de loi constitutionnelle consacre, à l'article 43 de la Constitution, l'existence d'une commission permanente aux collectivités territoriales et aux outre-mer au sein de chaque assemblée parlementaire. En conséquence, ce même article 43 est aussi modifié pour porter le nombre maximal de commissions permanentes dans chaque assemblée de huit à neuf. L'Assemblée nationale ayant déjà atteint le nombre maximal de commissions permanentes autorisé par la Constitution, cela lui évitera d'avoir à fusionner deux commissions existantes pour créer la nouvelle commission permanente.

La nouvelle commission aux collectivités territoriales et aux outre-mer reprendrait la compétence de fond liée à l'organisation territoriale française aujourd'hui attribuée à la commission des lois, mais serait aussi saisie au fond de tous les textes qui intéressent à titre principal les collectivités territoriales ou les outre-mer. Elle pourrait se saisir pour avis ou se voir déléguer des articles lorsque les textes examinés par les autres commissions permanentes intéressent les collectivités territoriales ou les outre-mer. Cette saisine permettrait au Parlement de s'acculturer enfin au droit des outre-mer, alors que nos lois passent systématiquement sous silence 3 millions de Français qui vivent à des milliers de kilomètres. En tant que commission permanente, elle bénéficierait de moyens humains et matériels à la hauteur des enjeux actuels de décentralisation, de différenciation et d'adaptation du droit.

Les chances pour une proposition de loi constitutionnelle d'aboutir sont en général assez minces. Cela ne doit pas nous faire passer à côté d'un débat qui devra être mené tôt ou tard. Il n'est plus possible de continuer comme nous le faisons, sous peine de voir se succéder les crises.

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A l'instar de mes prédécesseurs à la tête de la commission des lois, je considère que votre proposition, pour intéressante qu'elle soit, aurait pour effet d'affaiblir notre commission en lui retirant des prérogatives essentielles, tout comme la réforme de 2008 a affaibli la commission des affaires économiques en créant la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. Etant coupées en deux à l'Assemblée nationale, les commissions de la défense et des affaires étrangères manquent de puissance dans le contrôle et l'évaluation des politiques publiques du Gouvernement. Nous priver de certaines prérogatives créerait enfin un écart supplémentaire avec le Sénat, qui est par nature la chambre des territoires.

Il ne faut pas négliger le pouvoir de contrôle et d'évaluation des politiques publiques accordé aux délégations. Votre délégation dispose d'un budget annuel de 70 000 euros, quand celui de la commission des lois n'était que de 60 000 euros avant que je ne demande sa réévaluation à 75 000 euros.

Vous regrettez le manque de spécialisation de l'Assemblée. Cependant, je rappelle la mobilisation systématique du président de la commission des lois sur les sujets ultramarins et sur celui des collectivités en général, notamment sur la question corse – nous venons de créer une mission pour préparer la réforme institutionnelle –, sur Mayotte, sujet sur lequel ma position est singulière au sein de la majorité, ainsi que sur la Nouvelle-Calédonie, où je me suis rendu à plusieurs reprises.

Voici quelques éléments de modération et de justification de mon opposition, qui n'est pas seulement liée à un réflexe corporatiste, mais aussi à des éléments de fond.

Nous en venons aux orateurs des groupes.

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La présente proposition de loi constitutionnelle a le mérite d'ouvrir le débat sur la manière dont le Parlement aborde les questions relatives aux collectivités territoriales et aux outre-mer, qui sont très transversales. Une partie de leur matière, directement juridique, est abordée en commission des lois, mais il peut aussi s'agir de nombreux textes étudiés en commission du développement durable ou des affaires sociales par exemple. Force est de constater que, depuis le début de la Ve République et à plus forte raison depuis les grandes lois de décentralisation, l'approche sous l'angle des collectivités territoriales et la prise en compte des effets induits par les décisions du législateur n'est pas assez systématique. À cet égard, le débat sur la manière dont nous embrassons la spécificité de l'action des collectivités territoriales, en tant que partie de l'État, est salutaire.

Néanmoins, nous nourrissons de forts doutes sur la méthode choisie. La liste des commissions permanentes des deux chambres ne figure nullement dans notre Constitution. Cela permet de préserver la souplesse de leur organisation, à laquelle il ne paraît pas souhaitable de renoncer. C'est d'ailleurs une proposition de résolution invitant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale qui a été le point de départ de la commission du développement durable en 2009. Enfin, l'article 89, alinéa 2 de la Constitution dispose qu'une proposition de loi constitutionnelle ne peut être adoptée que par référendum.

Nous avons également des doutes sur le fond. Les collectivités territoriales sont une partie de l'État, entendu comme la puissance publique, et il serait très difficile d'opérer une distinction stricte en cette matière. Créer une commission permanente risquerait de déséquilibrer les travaux des autres commissions permanentes, en particulier ceux de la commission des lois.

Le groupe Renaissance formulera une proposition d'ouverture : la création d'une commission non permanente, sur le modèle de la commission des affaires européennes. Cela permettrait de faire croître significativement les moyens humains alloués aux délégations – qui manquent plus que le budget lui-même, monsieur le président – et de tenir un rythme de travail plus soutenu. La commission des affaires européennes est d'ailleurs née d'une initiative parlementaire, puisque le règlement de l'Assemblée nationale avait été modifié en ce sens en 1994. Sans cet amendement, le groupe Renaissance n'adoptera pas la proposition de loi.

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Nous voyons cette proposition de loi plutôt d'un bon œil. La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l'Assemblée nationale a été créée en 2009, comme celle du Sénat, et a permis de réduire la distance entre les députés et les territoires qui allait naître de la suppression du cumul des mandats. Néanmoins, elle ne dispose pas d'une base légale, ce qui a entraîné un déficit de reconnaissance institutionnelle alors même que le travail fourni par ses membres est tout à fait sérieux. On peut d'ailleurs se demander pourquoi le Président de la République, dans sa réflexion sur un nouvel acte de la décentralisation, a fait le choix de missionner un député, M. Woerth, plutôt que de s'adresser à cette délégation.

L'institution d'une commission permanente aux collectivités territoriales et aux outre-mer serait pertinente. Elle permettrait un travail législatif de haute qualité sur les questions propres aux collectivités et aux outre-mer, selon une approche plus fine des spécificités locales.

Son titre toutefois, « commission permanente aux collectivités territoriales et aux outre-mer », nous pose un petit problème. Nous avons déposé un amendement sur le « et » qui sépare les collectivités territoriales et les outre-mer, laissant penser que les collectivités ultramarines ne seraient pas des collectivités territoriales de la République française. C'est faux et cela crée le malaise en ouvrant le champ d'une différenciation, voire d'une séparation qui n'a pas lieu d'être.

Au vu de l'actualité dramatique qui sévit en France ultramarine, il serait malvenu de faire entrer ici des considérations politiciennes. Je rappellerai simplement les propos du général de Gaulle à Nouméa en 1966 : « vous avez un rôle français à jouer dans cette partie du monde, vous êtes un morceau de la France, vous êtes la France australe. » C'est en ce sens que nous proposons de consacrer la commission permanente aux collectivités territoriales « dont » les outre-mer, en insistant sur l'importance d'inclure ces derniers dans son titre.

Nous voterons en faveur de cette proposition de loi.

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En cette période de troubles, je tiens à exprimer, au nom du groupe de La France insoumise, notre pleine solidarité avec l'ensemble des citoyens de Nouvelle-Calédonie. Le Gouvernement doit se montrer exemplaire et retirer d'urgence son projet de loi constitutionnelle, pour favoriser le retour au calme le plus rapide et laisser le temps à la négociation. Nous appelons à un accord global entre les parties et un État impartial, quelle qu'en soit la forme. Le processus d'émancipation de la Nouvelle Calédonie est irréversible. Pour des raisons historiques et géographiques, tous les territoires d'outre-mer ont des particularités qu'il nous faut prendre en compte dans la rédaction et l'application des lois. Or, actuellement, ces collectivités sont reléguées, oubliées dans la constitution des lois, ce qui est inacceptable.

Je tiens à saluer la volonté du rapporteur, Davy Rimane, de pointer les limites des compétences des commissions permanentes de l'Assemblée nationale. Trop souvent, ce sont les mêmes qui sont sollicitées sur le fond ; trop souvent, le travail est concentré dans les mains de quelques députés ; trop souvent, l'économie l'emporte sur la protection du vivant et les droits des populations. Mais la création d'une commission permanente aux outre-mer et aux collectivités ne nous semble pas être la bonne solution. Elle risquerait de centraliser tous les députés ultramarins, ce qui priverait les commissions thématiques de leur expertise. Comment alors aborder les problèmes sociaux, environnementaux ou culturels dans ces territoires, la déforestation en Guyane, la pollution au chlordécone dans les Antilles, le taux de chômage à Mayotte, le manque d'enseignants devant chaque classe ?

L'exposé des motifs du texte se concentre sur le besoin d'adaptation locale, en faisant les louanges de la différenciation territoriale défendue par l'exécutif actuel. Notre groupe y est fermement opposé. Si l'on peut reconnaître des spécificités locales, la législation française doit être garante de l'égalité de tous les citoyens devant la loi, peu importe où ils se trouvent sur le territoire, c'est-à-dire assurer à tous un égal accès aux services publics. C'est dans ce sens qu'il faut comprendre l'unité et l'indivisibilité de la République, garanties par la Constitution.

À l'inverse, la différenciation ouvre la voie à une rupture d'égalité entre les citoyens et à une mise en concurrence des collectivités entre elles. C'est aussi le libre cours laissé au désengagement de l'État de ses missions régaliennes, notamment en matière de desserte en services publics. Finalement, la différenciation ne fait que renforcer l'incohérence de l'organisation territoriale, déjà illisible pour bon nombre de nos concitoyens. La priorité, pour une meilleure décentralisation, devrait être de permettre à toutes les collectivités d'exercer correctement leurs compétences. Face à la différenciation, nous appelons plutôt à la déconcentration de l'État, pour renforcer une politique au plus proche des enjeux des territoires, plus adaptée à leurs spécificités. Pour toutes ces raisons, notre groupe ne soutiendra pas cette proposition de loi en l'état.

J'appelle votre attention sur le fait qu'il n'est nulle part fait référence aux deux délégations qui existent, l'une relative aux outre-mer, l'autre aux collectivités territoriales, dont je suis membre. Leur fonctionnement est pourtant très contestable : aucun examen sur le fond, très peu d'examens pour avis et des groupes de travail sans pouvoirs. Comme pour la mission confiée à Éric Woerth, les décisions viennent toujours de l'exécutif. Le fonctionnement de ces délégations aurait besoin d'un renouveau. C'est pourquoi notre groupe soutient la création d'un groupe de travail sur l'organisation et le rôle des délégations aux outre-mer et aux collectivités territoriales.

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À notre tour de partager les constats dressés par le président de la délégation aux outre-mer. Notre délégation a parfois du mal à fonctionner, non par absence de motivation mais en raison du coût des déplacements outre-mer. Nous faisons beaucoup de visioconférences et d'interventions à Paris mais, plus que pour d'autres sujets, il faut aussi se déplacer. Nous avons clairement un problème de moyens financiers, et avons également besoin de davantage d'administrateurs. Les deux nôtres, pour compétents et diligents qu'ils soient, ploient sous la charge de travail.

Cette proposition de loi constitutionnelle pose malgré tout quelques difficultés. D'abord, il n'y a pas eu de concertation préalable. Or la ligne de partage avec la commission des lois constitutionnelles, de la législation et, rappelons-le, de l'administration générale de la République, pourrait être compliquée à définir. Je ne peux pas envisager que la commission des lois ne connaisse pas des questions juridiques d'organisation ultramarine, ni des questions de décentralisation et de déconcentration. C'est un pan entier de nos compétences qui disparaîtrait et il y aurait peut-être même des conflits de compétences.

J'ajoute qu'une commission permanente ne pourrait plus accueillir, comme la délégation actuelle, les vingt-sept députés ultramarins auxquels s'ajoutent vingt-sept députés hexagonaux : la répartition de ses membres se ferait à la proportionnelle. Ainsi, sur les dix députés GDR de la délégation, il n'en resterait que deux ou trois, ce qui irait à rebours du but recherché. La formule que vous proposez ne permettrait pas d'assurer la présence de tous les députés ultramarins et l'acculturation des députés hexagonaux, présents à parité. Sans doute faut-il aller vers une transformation, mais selon le modèle de la commission des affaires européennes. La commission permanente serait du reste la première à être nommée dans la Constitution, ce qui figerait les choses. Par ailleurs, une proposition de loi constitutionnelle implique un référendum.

Disons que c'est un beau produit d'appel, que nous soutenons en tant que tel, mais qu'il faut absolument avancer en accordant des moyens supplémentaires, humains et financiers, et en mettant en avant les travaux de la délégation, qui le mérite amplement.

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Le contexte nous le rappelle, nos collectivités outre-mer sont toutes différentes, chacune ayant des particularités et étant un des joyaux de notre territoire. Nous devons les préserver. Cette volonté s'est illustrée par les mesures de décentralisation successives qui ont permis de prendre en considération les besoins des nombreuses collectivités – les communes, les départements, les régions, dans l'Hexagone comme outre-mer.

Sous les IIIe et IVe Républiques, il y avait deux fois plus de commissions qu'aujourd'hui, leur périmètre étant quasiment calqué sur celui des ministères. Les présidents de commission ayant eu tendance à concurrencer les ministres, les réformes successives ont réduit le nombre de commissions à huit. Nous estimons, au groupe Démocrate, que cette évolution est pertinente et nous ne souhaitons pas revenir dessus.

En effet, les collectivités territoriales et les outre-mer sont des sujets transversaux qui doivent être abordés dans l'ensemble des commissions. La répartition thématique des projets et des propositions de loi opérée par la présidence de l'Assemblée nous semble, du fait de sa souplesse, la plus adaptée.

L'Assemblée nationale compte cinq délégations dont la dernière, la délégation aux droits des enfants, a été créée en 2022. La loi du 28 février 2017 a consacré la délégation aux outre-mer. Le président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation vient d'intervenir devant nous, illustrant l'étroitesse des liens entre commissions et délégations. Ces dernières mènent des auditions et publient de nombreux rapports d'information. Même si elles sont dépourvues de pouvoir législatif, elles travaillent en amont des commissions, de manière tout à fait complémentaire. Certains de leurs membres déposent d'ailleurs des amendements qui enrichissent grandement les travaux de notre commission.

Si nous souscrivons bien évidemment aux objectifs recherchés, l'équilibre actuel nous semble satisfaisant. Nous ne sommes donc pas favorables à la création d'une nouvelle commission permanente.

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Je voudrais saluer l'intention évidemment louable de faire une plus grande place aux outre-mer et aux collectivités territoriales au sein du Parlement et de mieux intégrer leurs problématiques, souvent transversales, dans la fabrique de la loi – autant de préoccupations que naturellement nous avons en commun. Nous partageons très largement votre constat, monsieur le rapporteur, concernant par exemple l'intégration souvent tardive, pour ne pas dire en catastrophe, des modalités spécifiques d'application aux outre-mer des textes que nous discutons. Une meilleure compréhension par les parlementaires de ce qui se passe aujourd'hui en Nouvelle-Calédonie aurait probablement produit un autre vote sur le projet de loi constitutionnelle à contretemps qui a été examiné. Vous nous trouverez toujours à vos côtés, monsieur le rapporteur, pour œuvrer dans cette direction. Ces dernières années, mon groupe en a fait la démonstration en travaillant sur le coût de la vie en outre-mer ou le chlordécone.

Cependant, nous pensons que cette proposition de loi n'atteindra pas l'objectif que vous visez. La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et la délégation aux outre-mer jouent un rôle non négligeable, pour ne pas dire parfois majeur, dans la préparation des travaux législatifs et disposent de moyens réels, quasiment identiques à ceux de la commission des lois, ce qui peut pousser à s'interroger. Moins contraintes par le calendrier législatif, ces délégations mènent un travail le plus souvent transpartisan et au long cours favorisant la collaboration entre les groupes et l'émergence de propositions le plus souvent consensuelles. Je salue notamment le travail intense de la délégation aux collectivités et de son président, David Valence, sur le statut de l'élu ou sur une possible réforme de la décentralisation.

Nous ne voyons pas la plus-value que leur transformation en commission permanente apporterait. On peut même légitimement penser que l'esprit qui anime aujourd'hui les travaux des deux délégations s'effriterait en quelque sorte au contact du fait majoritaire qui s'impose dans les commissions permanentes. Philippe Gosselin l'a rappelé, la transformation affaiblirait la représentation des parlementaires ultramarins : aujourd'hui, tous les députés ultramarins sont membres de droit de la délégation aux outre-mer, qui est présidée par un député de l'opposition et dont le bureau est majoritairement composé de députés d'opposition, mais une commission permanente serait nécessairement composée à la proportionnelle des groupes. Si demain mon groupe, qui compte quatre députés ultramarins, n'avait plus que deux places au sein d'une telle commission, comment choisir ? En outre, une commission permanente cantonnerait inévitablement ces élus ultramarins à leur territoire alors qu'ils peuvent aujourd'hui s'impliquer dans toutes les commissions.

Enfin, la création d'une neuvième commission permanente affaiblirait tous les petits groupes, en réduisant mécaniquement le nombre de leurs membres dans chaque commission. C'est pourquoi nous croyons qu'il serait plus utile de renforcer les instances qui existent, par exemple en présentant une résolution tendant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale afin de renforcer les moyens des délégations.

Vous l'aurez compris, nous ne pourrons pas voter un texte qui affaiblirait à plusieurs égards la représentation des Ultramarins, ainsi que notre organisation actuelle.

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Au nom du groupe Horizons et apparentés, je tiens à saluer l'initiative du groupe GDR qui met en lumière le caractère incontournable des collectivités territoriales métropolitaines comme ultramarines dans l'élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques au service de nos concitoyens. Si un certain nombre d'entre nous avons souhaité rester des élus locaux, c'est précisément pour cette raison. Les différentes étapes de la décentralisation ont, comme le rappelle l'exposé des motifs, permis de faire émerger, au sein de notre République une et indivisible, une organisation décentralisée renforçant l'autonomie locale et permettant une différenciation en fonction des spécificités géographiques, démographiques, économiques ou sociales.

Notre assemblée a perçu l'importance de créer des lieux d'échange et de contrôle de l'action gouvernementale concernant cet enjeu essentiel : en témoigne l'existence de la délégation aux collectivités territoriales et de celle dédiée aux outre-mer. Elles organisent de nombreuses missions d'information et auditionnent un nombre important d'acteurs afin d'éclairer les députés dans l'exercice de leur mission. Sans nier le caractère central des collectivités territoriales et des outre-mer dans l'élaboration de la loi, il ne nous semble pas pertinent de créer une commission permanente consacrée. Pour la bonne organisation des travaux des assemblées et pour la lisibilité du travail parlementaire, le caractère thématique et non géographique des commissions permanentes nous paraît plus approprié.

Concrètement, la création d'une telle commission conduirait aussi à une saisine quasi automatique au fond ou pour avis sur l'ensemble des projets et propositions de loi. Ils contiennent en effet tous des implications pour les collectivités territoriales et pour les outre-mer. N'allons pas nous tirer une nouvelle balle dans le pied ! Ne faisons pas comme s'il fallait une commission ad hoc pour faire examiner ces questions par des spécialistes parce que les autres députés en seraient incapables.

C'est l'essence même du rôle des députés que de tenir compte de l'ensemble des implications que peuvent avoir les lois qu'ils élaborent sur l'ensemble du territoire français, hexagonal comme ultramarin. Nous pouvons mener des auditions et avoir accès à toutes les informations. Lors de l'examen de n'importe quel projet de loi, les rapporteurs élus par leurs pairs dans chacune des commissions sont attentifs, dans leurs auditions comme dans leurs avis, à l'impact et aux conséquences qu'il pourrait avoir sur les collectivités territoriales et tiennent également compte des spécificités de chaque territoire de la République.

En revanche – et par goût de la provocation –, peut-être le rétablissement du cumul des mandats serait-il de nature à responsabiliser les députés dans leur prise en compte des conséquences des lois qu'ils votent pour les collectivités territoriales. Un député sachant qu'il sera en première ligne pour mettre en œuvre les décisions prises au Palais Bourbon en sa qualité d'adjoint au maire ou de vice-président de département sera nécessairement plus à même de tenir compte des implications concrètes pour la collectivité !

Vous l'aurez compris, le groupe Horizons et apparentés votera contre cette proposition de loi.

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Le groupe Gauche démocrate et républicaine est composé pour moitié de députés ultramarins. Ce n'est pas leur seule qualité : ils sont également progressistes. Nos travaux communs m'ont appris combien les réalités ultramarines sont riches. Or, dans les textes, elles sont souvent réduites à un ou deux articles chapeautés d'un « Dispositions relatives aux outre-mer ». Je peux partager l'argument de l'unicité de la République, mais bien souvent il sert à mettre un couvercle sur les spécificités des outre-mer.

Le texte vise à mettre en lumière ce manque de considération, parfois de respect, à l'égard de nos compatriotes ultramarins et des réalités spécifiques de leurs territoires. Certains sont inscrits sur la liste des territoires non autonomes, soit à décoloniser, de l'ONU, ou en sont sortis il y a peu. Leurs habitants ont vécu la colonisation et les atrocités qu'elle a pu entraîner ; ce mépris résonne tout particulièrement pour eux.

Le travail qu'accomplit au quotidien Davy Rimane, président de la délégation aux outre-mer, a montré la nécessité de prendre en compte les réalités locales, qu'il faut appréhender dans leur diversité et leur singularité. Adopter ce texte donnerait des moyens humains et financiers pour y travailler au sein du Parlement, avec la mise à disposition de salles de réunion, d'une équipe de fonctionnaires, de crédits pour payer les frais de mission ou d'étude ; cela offrirait également davantage de moyens légistiques.

Beaucoup ont objecté des difficultés, mais peu de ceux qui admettent qu'il faudrait accorder plus d'attention aux outre-mer proposent d'autres solutions. Nous sommes ouverts aux propositions visant à juguler le mépris et à disposer de moyens supplémentaires.

Par ailleurs, une commission permanente permettrait à la représentation nationale de légiférer de manière plus éclairée. Je rejoins M. Saulignac : si elle existait, nous n'aurions peut-être pas entendu tant de contrevérités lors de l'examen du projet de loi constitutionnelle sur le dégel du corps électoral de Nouvelle-Calédonie. Les adaptations nécessaires aux spécificités ultramarines sont quasi systématiquement omises dans les textes, qu'ils soient d'initiative parlementaire ou gouvernementale ; elles sont parfois renvoyées à des ordonnances, comme récemment dans le projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie.

Cette manière de légiférer a été largement documentée et dénoncée, notamment par des parlementaires. Je pense au rapport d'information sénatorial « Différenciation territoriale outre-mer : quel cadre pour le sur-mesure ? », publié en 2020. Elle provoque une rupture d'égalité entre les citoyens ultramarins et métropolitains.

La question concerne moins la part des députés ultramarins d'une commission ou d'une délégation que la part des députés français, d'Hexagone ou d'outre-mer, qui s'imprègnent des réalités ultramarines, s'y intéressent, et travaillent dessus.

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Ce texte aurait pu être déposé par les membres du groupe LIOT, qui partagent ses constats préliminaires : les travaux parlementaires ne laissent que peu de place au réflexe outre-mer et à la différenciation. C'est paradoxal, puisque nombre des textes que notre commission a examinés depuis le début de l'année sont relatifs aux collectivités et aux outre-mer, avec des propositions de loi sur la sécurité des élus locaux, le métier de secrétaire de mairie, le cumul des mandats, un projet de loi relatif à la Polynésie française et le projet de loi relatif à la Nouvelle-Calédonie.

Nous n'avons donc pas chômé. Pourtant, nous avons constaté à plusieurs reprises que, même en consacrant des heures de débat aux collectivités et à la pluralité des territoires, l'élaboration de la loi générale nous mène presque toujours à rédiger des normes uniformes, égalitaristes, qui vont à l'encontre d'une réelle égalité en droits dans les territoires concernés.

Rares sont les textes qui prévoient des marges de manœuvre au niveau local. Les projets de loi se terminent souvent par un titre « Dispositions diverses » qui prévoit une transposition uniforme des mesures dans les outre-mer, dont le caractère inadapté ne se révèle souvent qu' a posteriori.

Preuve que nous sommes tous conscients de ces difficultés, l'Assemblée s'est dotée en 2012 d'une délégation aux outre-mer et, en 2017 seulement, d'une délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Outre ces premiers pas vers les élus territoriaux, je salue les initiatives de la commission des lois, en particulier de son président, notamment pour la création d'une mission d'information sur la situation du département de Mayotte et, récemment, d'un groupe de travail sur l'évolution institutionnelle de la Corse, que j'aurai le plaisir de présider et dont Gilles Le Gendre sera le rapporteur – la Corse connaît des problèmes spécifiques, qui ne concurrencent évidemment pas ceux des outre-mer en général.

Il faut aller plus loin. Les délégations parlementaires présentent un intérêt certain, toutefois leurs moyens sont limités ; elles n'ont pas le temps de se saisir pour avis de tous les textes. La création d'une commission unique aux collectivités et aux outre-mer permettrait de consacrer plus de moyens à la mise en place d'une réelle différenciation territoriale et de l'appréhender au fond, loin des saillies et des poncifs, afin de comprendre ce que la République doit être aujourd'hui, avec ses différences. Douée d'une vision d'ensemble, elle contribuerait à renforcer la culture de la décentralisation politique et de la différenciation dans les travaux parlementaires. Les prochains textes qui, nous l'espérons, seront soumis à notre assemblée, notamment la réforme constitutionnelle relative à la Corse et le projet de loi « Mayotte » témoignent que le besoin d'adaptation, de différenciation, de prise en considération des réalités géographiques et historiques est plus que jamais d'actualité : il ne peut être ignoré.

Bien entendu, la création de cette commission ne constituerait qu'un premier pas vers un choc de décentralisation, lequel nécessitera certainement, au moment opportun, une réforme constitutionnelle plus vaste.

Sans surprise, nous voterons pour ce texte.

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Les Écologistes sont favorables à la création de cette commission permanente. Cela constituerait une nouvelle étape du processus de décentralisation que nous soutenons depuis longtemps, car c'est à l'échelle locale que les solutions existent et que les politiques de transformation écologique sont les plus pertinentes. Le travail parlementaire doit donc prendre davantage en considération les particularités des territoires et des besoins de leur population.

Une commission dédiée, à l'Assemblée nationale et au Sénat, garantirait que l'angle ultramarin soit systématiquement pris en compte. Elle pourrait se saisir pour avis des textes pour évaluer leur incidence en outre-mer, alors que les adaptations nécessaires aux spécificités locales manquent souvent. Le Parlement rendrait ainsi visible la pleine considération qu'il accorde à ces territoires, avec leurs spécificités. La commission serait chargée de mieux informer la représentation nationale sur toute question relative aux outre-mer et d'évaluer les politiques publiques qui y sont menées. Répartition des richesses très inégales, indicateurs socio-économiques alarmants, pollution environnementale, difficultés d'accès aux services publics, vie chère, décolonisation et politique mémorielle : les problèmes ne manquent pas, qui méritent que notre assemblée s'y penche plus sérieusement.

Cette nouvelle commission nous offrirait aussi l'occasion de retisser du lien, de recréer un espace de dialogue entre le Parlement et les territoires ultramarins. Les motifs de tension, voire de défiance, entre la France hexagonale et eux se sont multipliés depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron au pouvoir. La situation en Nouvelle-Calédonie comme les conflits récents en Guyane et en Guadeloupe en témoignent. Pour maintenir sa cohésion, la France doit s'interroger d'urgence sur les rapports qu'elle entretient avec les territoires ultramarins. Les Écologistes comptent sur cette nouvelle commission pour y contribuer.

Pour ces raisons, nous voterons le texte.

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Nous en venons aux questions des autres députés.

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Je soutiens la proposition de David Valence. Il serait intéressant dans un premier temps de passer d'une délégation à une commission non permanente chargée des collectivités territoriales, y compris dans leur composante ultramarine. Je suis favorable à aller plus loin, mais je comprends les arguments objectés. Pour vous livrer une confidence, à la fin de la précédente législature, la majorité avait débattu de l'opportunité de créer, dans un élan de décentralisation et de déconcentration, une commission spécifique dédiée aux collectivités territoriales et aux pouvoirs locaux – nous n'avions qu'effleuré la question des outre-mer. Nous avions envisagé d'en rester toutefois à huit commissions, par exemple en regroupant, comme au Sénat, les affaires étrangères et la défense. Les choses en sont restées là.

S'agissant des budgets, ils révèlent le peu de place que le Parlement occupe dans notre pays. Celui de la commission des lois est légèrement inférieur à celui, chez moi, des Amis de la pétanque ; il est vrai qu'ils ont une buvette ! Bref, au regard de nos missions, nos crédits sont très limités.

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Vous faites peu de cas de l'augmentation de 20 % que j'ai obtenue l'an dernier !

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J'entends vos arguments mais, de façon générale, s'il était vrai qu'il existe déjà des instances qui fonctionnent bien, la situation de nos territoires serait bien différente. Il faut prendre conscience que 3 millions de Français vivent à des milliers de kilomètres de l'Hexagone, et que leur voix n'est pas entendue dans l'élaboration de la loi. Renvoyer par un article en fin de texte à des décrets ou à une ordonnance, c'est un manque de respect. Il n'y a aucune considération pour les réalités, comme on l'a vu lors de l'examen des dispositions relatives à la création d'un objectif zéro artificialisation nette (ZAN) de la loi « climat et résilience » : il s'agit d'un problème majeur dans les outre-mer comme dans l'Hexagone, mais le texte s'applique sans distinction.

La notion de droit à la différenciation peut s'entendre largement. Nous demandons que les réalités de tous les territoires soient prises en considération, y compris dans l'Hexagone, car il existe des différences entre le Nord et le Sud de la métropole comme entre les territoires du Pacifique, de l'océan Indien et de l'Atlantique.

Je n'ai nullement l'intention, cher président, de déshabiller Pierre pour habiller Paul. On voit bien toutefois que le travail des délégations ne pèse rien face à celui des commissions. Ainsi, pour préparer l'examen des crédits consacrés aux outre-mer du projet de loi de finances, notre délégation a voulu auditionner certains membres du Gouvernement : nous n'avons tout simplement eu aucune réponse. Je peux compter sur les doigts le nombre des députés hexagonaux qui assistent à nos discussions. La fameuse idée d'acculturation ne fonctionne pas, le « réflexe outre-mer » n'est qu'un concept.

Lorsqu'on évoque les moyens nécessaires au développement des outre-mer, ce qu'on entend en boucle dans la bouche des députés hexagonaux, c'est que ces territoires coûtent cher à la République. Je le dis sans ambages : dans ce cas, des décisions s'imposent. Nous ne pouvons entendre inlassablement que ce qu'on nous donne est déjà bien, que nous devons cesser de jouer les enfants gâtés – des mots qui sont prononcés sur les bancs de l'hémicycle, pas forcément à l'extérieur. Ne hochez pas la tête : on entend vraiment ces phrases. Même pendant les débats, on nous fait comprendre que nous demandons trop.

« Unité » et « égalité » ne signifient pas « uniformité ». La loi doit s'adapter aux réalités variées qui composent la nation France, or nous n'en avons pas le réflexe. Créer une commission spécifique tendrait à prendre en considération les particularités dès l'élaboration de la loi.

Pourtant, une majorité s'est exprimée contre l'adoption du texte. Mme Couturier a évoqué les problèmes que pourrait entraîner la différenciation territoriale. Mais, humainement, nous sommes intrinsèquement différents les uns des autres ; chacun s'affirme en sa singularité, nul n'a besoin de toujours ressembler aux autres. Dans la même logique, il est normal que les territoires appellent à la différenciation, selon leurs réalités propres. La décentralisation et la déconcentration ne s'opposent donc pas à la différenciation, tout dépend de ce qu'on y met. La différenciation n'est pas mauvaise par essence : elle nous offre une chance de faire évoluer notre conception de l'élaboration de la loi.

L'examen du texte, quelle qu'en soit l'issue, ouvre le débat. Qu'on le veuille ou non, les lignes devront bouger, la loi devra mieux prendre en compte nos réalités. Le statu quo serait mortifère et provoquerait des crises majeures dans les semaines ou les mois à venir.

- Article unique (art. 43 de la Constitution) : Création d'une commission permanente aux collectivités territoriales et aux outre-mer

Amendements CL2 de M. David Valence et CL6 de M. Jocelyn Dessigny (discussion commune)

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Je vais retirer l'amendement CL2, ainsi que les trois autres que j'ai déposés après l'article unique.

Je tends la main à Davy Rimane, mon homologue président de délégation, pour poursuivre le débat sous une forme plus appropriée : une proposition de résolution visant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale pour créer une commission non permanente consacrée aux collectivités territoriales et aux outre-mer, sur le modèle de la commission des affaires européennes. Une proposition de loi constitutionnelle ne me semble pas être la bonne formule mais, même s'il a adopté un angle exclusivement ultramarin alors que la réflexion doit concerner les collectivités territoriales dans leur ensemble, M. Rimane a eu raison d'ouvrir le débat.

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Nous en avons déjà parlé ; je suis ouvert d'esprit. Nos territoires et les collectivités territoriales en général sont deux sujets intrinsèquement liés, qu'il est tout à fait pertinent de rassembler. Sans les institutions que sont les collectivités territoriales, notre quotidien serait très difficile. J'aurai plaisir à poursuivre la discussion avec vous, monsieur le président Valence.

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L'amendement CL6 vise à inscrire la création de la commission permanente dans l'article 72 du titre XII de la Constitution plutôt que dans l'article 43.

La commission chargée des affaires européennes est instituée par l'article 88-4 du titre XV, « De l'Union européenne », consacré aux modalités de dépôt, d'examen et de transposition en droit interne des textes normatifs européens. Le titre XII, « Des collectivités territoriales », définit les collectivités et leur place au sein de l'organisation politique de l'État. La commission ainsi créée serait plus logiquement inscrite au sein des dispositions constitutionnelles afférentes.

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Nous avons envisagé cette éventualité, notamment avec des universitaires, et il sera possible d'en rediscuter au cours de la navette. À ce stade, il est plus clair d'inscrire la commission à l'article 43, afin de ne pas risquer de créer une confusion avec la proposition de David Valence. Je vous demande donc de retirer cet amendement.

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Le cadre est peut-être inopportun pour faire aboutir le projet, qui nécessite une réflexion collective, mais il est pertinent et utile pour ouvrir le débat sur la scène nationale. Je vous remercie donc de défendre ce texte, cher collègue, car vous avez raison, dans les outre-mer, la France n'est pas à la hauteur des promesses de la République. Ce manquement met chaque jour en cause l'unité et l'indivisibilité : on proclame les grands principes, on parle d'égalité devant la loi et d'égalité d'accès aux droits, mais on laisse nos compatriotes ultramarins dépourvus d'eau ou de certains services publics comme une école qui tienne ses promesses.

Je suis d'accord, « les lignes devront bouger ». L'égalité républicaine se définit devant la loi. C'est parce que nous sommes égaux pour faire la loi – une personne, une voix – que nous avons le même devoir de la respecter. Mais il faut que l'État lui-même soit capable de la faire appliquer, de garantir les droits, faute de quoi l'égalité républicaine disparaît et certains en viennent à considérer que le cadre n'est plus légitime. Je suis pour que la France soit à la hauteur des promesses de la République, pour que nous réfléchissions à l'idée de république et à l'opportunité de la faire évoluer, en particulier eu égard aux situations dans les outre-mer.

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La question relève davantage du règlement de l'Assemblée nationale et de celui du Sénat que de la Constitution. Or le texte nous enferme dans le champ constitutionnel. En outre, pour aboutir, une proposition de loi constitutionnelle doit être adoptée par les deux chambres puis approuvée par référendum, ce qui ne s'est jamais produit depuis 1958.

Enfin, passer d'une délégation à une commission non permanente ne suffirait pas à parfaire la représentation des ultramarins : la proportionnelle s'appliquant, certains députés ultramarins en seraient exclus, ce que les membres du groupe Socialistes ne souhaitent pas.

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Cette proposition de loi constitutionnelle met le doigt où ça fait mal. C'est vrai, la France doit être à la hauteur de la République. Trop souvent, les projets de loi, voire nos propositions de loi, ne sont pas calibrés dès le départ pour s'appliquer aux outre-mer, et un dernier article renvoie vaguement à une ordonnance pour y pourvoir. Ce n'est ni sérieux, ni respectueux de nos concitoyens ultramarins. Pour « une et indivisible » qu'elle soit, la République, c'est aussi « l'unité dans la diversité ». Or, les articles 72 à 74 de la Constitution l'attestent, cette diversité est grande – et je ne parle même pas de Wallis-et-Futuna, où la République salarie trois rois et leurs Premiers ministres : c'est dire si l'on sait adapter les dispositifs et trouver de la souplesse quand on le veut !

On s'intéresse trop peu aux outre-mer comme un ensemble. Si une modification constitutionnelle ne semble pas la forme la plus adaptée, et si la représentation proportionnelle priverait une partie des députés ultramarins de siéger dans la nouvelle commission, l'examen de ce texte doit tout de même être l'occasion de s'engager dans de nouvelles pratiques afin de dégager des moyens budgétaires, humains et matériels et de remplacer la délégation par une commission – car l'intitulé n'est pas neutre : ministériels comme préfectoraux, les accords et les attentes pour l'une ou pour l'autre diffèrent.

L'amendement CL2 est retiré.

La commission rejette l'amendement CL6.

Présidence de Mme Caroline Abadie, vice-présidente de la commission

Amendement CL7 de M. Jocelyn Dessigny

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Ia s'agit de modifier l'intitulé de la nouvelle commission, qui serait dédiée aux collectivités territoriales « dont » les outre-mer plutôt qu'aux collectivités territoriales « et » aux outre-mer. En application de l'article 72 de la Constitution, les outre-mer font en effet partie des collectivités territoriales de la République. Il convient de ne pas les en dissocier.

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Il ne s'agit pas de distinguer entre collectivités territoriales de l'Hexagone et collectivités territoriales d'outre-mer, mais entre les collectivités territoriales, sujet institutionnel, et les outre-mer, territoires géographiques. C'est ce principe même qui a conduit à créer deux délégations, une aux collectivités territoriales et une aux outre-mer. Pour le reste, les termes « collectivités territoriales » dans la Constitution recouvrent effectivement toutes les collectivités, y compris celles des outre-mer.

Demande de retrait ou avis défavorable.

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Nous sommes d'accord sur le fond : il n'y a pas de différence à instituer entre les collectivités territoriales et les outre-mer. L'intitulé de la commission pouvait laisser planer un doute, que nous avons souhaité éclaircir.

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L'amendement est contre-productif : il conduit à invisibiliser les questions relatives aux outre-mer, quand la proposition de loi constitutionnelle a justement pour objet d'y sensibiliser les députés. Mais il n'est pas étonnant que l'invisibilisation des outre-mer fasse partie des propositions du Rassemblement national.

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L'intitulé proposé aurait en outre pour effet pervers de n'attribuer comme compétences à ladite commission que celles liées aux collectivités territoriales. Ce serait très restrictif par rapport aux compétences des outre-mer, en particulier économiques et sociales, qu'envisageait Davy Rimane. L'amendement va donc à l'encontre de l'objectif poursuivi.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CL8 de M. Jocelyn Dessigny

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Cet amendement d'appel vise, en cas d'adoption du texte, à supprimer les délégations aux collectivités territoriales et aux outre-mer, puisqu'elles n'auront plus lieu d'exister.

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Cela ne relève pas de la Constitution : si nous adoptons le texte, elles seront supprimées par la loi, pour la délégation aux outre-mer, et par une décision de la conférence des présidents pour la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Demande de retrait.

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Puisque nous sommes d'accord sur le fait qu'elles deviendront inutiles en cas d'adoption du texte, je retire mon amendement.

L'amendement CL7 est retiré.

La commission rejette l'article unique.

Après l'article unique

Amendement CL9 de Mme Sandrine Rousseau

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Cet amendement qui porte sur la réforme du corps électoral en Nouvelle-Calédonie vise à montrer comment une commission permanente aux outre-mer aurait pu élaborer un autre discours que la position monolithique prise par l'Assemblée, évoquant les spécificités et les demandes d'indépendance de chaque territoire ultramarin et forgeant une vision globale totalement différente. Je le retire.

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Après s'être rendue en Nouvelle-Calédonie-Kanaky en mars, la délégation aux outre-mer a publié une communication nourrie d'un travail important des députés. Malheureusement, compte tenu de son faible poids dans les institutions, ce travail n'a pas été pris en compte dans l'analyse de la situation. Il en aurait été différemment avec une commission permanente, vers laquelle j'espère que nous nous dirigeons.

L'amendement est retiré.

L'ensemble de la proposition de loi est ainsi rejeté.

La séance est levée à 12 heures 05.

Informations relatives à la Commission

La Commission a créé :

– une mission flash sur les transfèrements et extractions ;

(Mme Caroline Abadie et Mme Émilie Bonivard, rapporteures)

– un groupe de travail sur l'évolution institutionnelle de la Corse, composé de M. Jean-Félix Acquaviva, président, M. Gilles Le Gendre, rapporteur, Mme Caroline Abadie, MM. Erwan Balanant, Ugo Bernalicis, Philippe Gosselin, Sacha Houlié, Jérémie Iordanoff, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, M. Stéphane Rambaud, Mme Cécile Untermaier, membres.

La Commission a désigné :

Mme Nathalie Bassire, rapporteure sur la proposition de loi portant actualisation de la loi n° 46-451 du 19 mars 1946 tendant au classement comme départements français de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Réunion et de la Guyane française (n° 2542)

M. Guy Bricout, rapporteur sur la proposition de loi visant à faire du 16 mai une journée nationale en hommage aux victimes de la route (n° 1116).

Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Caroline Abadie, M. Jean-Félix Acquaviva, M. Erwan Balanant, M. Romain Baubry, M. Clément Beaune, M. Ugo Bernalicis, Mme Émilie Bonnivard, Mme Pascale Bordes, M. Ian Boucard, M. Florent Boudié, M. Xavier Breton, Mme Émilie Chandler, M. Éric Ciotti, Mme Catherine Couturier, M. Pierre Dharréville, Mme Edwige Diaz, Mme Elsa Faucillon, Mme Raquel Garrido, M. Yoann Gillet, M. Philippe Gosselin, M. Guillaume Gouffier Valente, M. Jérôme Guedj, M. Jordan Guitton, M. Sacha Houlié, M. Timothée Houssin, M. Jérémie Iordanoff, Mme Élodie Jacquier-Laforge, M. Philippe Latombe, M. Gilles Le Gendre, M. Antoine Léaument, Mme Marie-France Lorho, M. Benjamin Lucas-Lundy, Mme Aude Luquet, Mme Sandra Marsaud, M. Thomas Ménagé, Mme Emmanuelle Ménard, M. Ludovic Mendes, Mme Laure Miller, Mme Danièle Obono, M. Didier Paris, M. Éric Pauget, Mme Anna Pic, M. Jean-Pierre Pont, M. Thomas Portes, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, M. Stéphane Rambaud, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Sandra Regol, M. Davy Rimane, Mme Béatrice Roullaud, M. Thomas Rudigoz, M. Hervé Saulignac, M. Philippe Schreck, M. Jean Terlier, Mme Cécile Untermaier, M. David Valence, Mme Caroline Yadan

Excusés. - M. Guy Bricout, M. Philippe Dunoyer, M. Sylvain Maillard, M. Laurent Marcangeli, Mme Naïma Moutchou, M. Philippe Pradal, M. Aurélien Pradié

Assistaient également à la réunion. - M. Christophe Bex, M. Jocelyn Dessigny, M. Didier Lemaire, M. Paul Molac, Mme Sandrine Rousseau, Mme Andrée Taurinya, M. Roger Vicot