Intervention de Jean-Félix Acquaviva

Réunion du mercredi 22 mai 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Félix Acquaviva :

Ce texte aurait pu être déposé par les membres du groupe LIOT, qui partagent ses constats préliminaires : les travaux parlementaires ne laissent que peu de place au réflexe outre-mer et à la différenciation. C'est paradoxal, puisque nombre des textes que notre commission a examinés depuis le début de l'année sont relatifs aux collectivités et aux outre-mer, avec des propositions de loi sur la sécurité des élus locaux, le métier de secrétaire de mairie, le cumul des mandats, un projet de loi relatif à la Polynésie française et le projet de loi relatif à la Nouvelle-Calédonie.

Nous n'avons donc pas chômé. Pourtant, nous avons constaté à plusieurs reprises que, même en consacrant des heures de débat aux collectivités et à la pluralité des territoires, l'élaboration de la loi générale nous mène presque toujours à rédiger des normes uniformes, égalitaristes, qui vont à l'encontre d'une réelle égalité en droits dans les territoires concernés.

Rares sont les textes qui prévoient des marges de manœuvre au niveau local. Les projets de loi se terminent souvent par un titre « Dispositions diverses » qui prévoit une transposition uniforme des mesures dans les outre-mer, dont le caractère inadapté ne se révèle souvent qu' a posteriori.

Preuve que nous sommes tous conscients de ces difficultés, l'Assemblée s'est dotée en 2012 d'une délégation aux outre-mer et, en 2017 seulement, d'une délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Outre ces premiers pas vers les élus territoriaux, je salue les initiatives de la commission des lois, en particulier de son président, notamment pour la création d'une mission d'information sur la situation du département de Mayotte et, récemment, d'un groupe de travail sur l'évolution institutionnelle de la Corse, que j'aurai le plaisir de présider et dont Gilles Le Gendre sera le rapporteur – la Corse connaît des problèmes spécifiques, qui ne concurrencent évidemment pas ceux des outre-mer en général.

Il faut aller plus loin. Les délégations parlementaires présentent un intérêt certain, toutefois leurs moyens sont limités ; elles n'ont pas le temps de se saisir pour avis de tous les textes. La création d'une commission unique aux collectivités et aux outre-mer permettrait de consacrer plus de moyens à la mise en place d'une réelle différenciation territoriale et de l'appréhender au fond, loin des saillies et des poncifs, afin de comprendre ce que la République doit être aujourd'hui, avec ses différences. Douée d'une vision d'ensemble, elle contribuerait à renforcer la culture de la décentralisation politique et de la différenciation dans les travaux parlementaires. Les prochains textes qui, nous l'espérons, seront soumis à notre assemblée, notamment la réforme constitutionnelle relative à la Corse et le projet de loi « Mayotte » témoignent que le besoin d'adaptation, de différenciation, de prise en considération des réalités géographiques et historiques est plus que jamais d'actualité : il ne peut être ignoré.

Bien entendu, la création de cette commission ne constituerait qu'un premier pas vers un choc de décentralisation, lequel nécessitera certainement, au moment opportun, une réforme constitutionnelle plus vaste.

Sans surprise, nous voterons pour ce texte.

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