La commission des affaires économiques a examiné, la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires (n° 958) (M. Bastien Marchive, rapporteur).
Dans notre pays, entre 20 000 et 30 000 hectares sont artificialisés chaque année. La loi « Climat et résilience » a fixé un objectif de réduction de moitié de l'artificialisation nouvelle entre 2021 et 2031 par rapport à la période 2011-2021, et l'atteinte d'une artificialisation nette de 0 % à l'horizon 2050. Très vite après leur publication, les décrets d'application de la loi ont suscité tant d'interrogations de la part des collectivités territoriales que les parlementaires se sont saisis des sujets soulevés : une proposition de loi du groupe Renaissance visant à renforcer l'accompagnement des élus locaux dans la mise en œuvre de la lutte contre l'artificialisation des sols, pour l'Assemblée nationale, et une mission conjointe de contrôle sur la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » (ZAN), pour le Sénat, dont les travaux ont débouché sur la proposition de loi dont nous commençons l'examen ce matin et qui est inscrite à l'ordre du jour de notre assemblée le mercredi 21 juin en soirée et le jeudi 22 juin.
La commission des affaires économiques a sollicité l'avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire sur les articles 3, 6, 8, 10 et 13. Les amendements portant sur les articles ainsi délégués au fond ou qui avaient pour objet de créer des articles additionnels en lien avec ces articles devaient obligatoirement être déposés auprès de cette dernière. Soixante-quatre amendements déposés à tort auprès de notre commission ont donc dû être déclarés irrecevables à ce titre.
Selon l'usage, la procédure de la délégation au fond nous impose d'accepter les décisions prises par la commission du développement durable sur les articles qui lui ont été délégués. Non seulement nous ne pouvons pas les amender, mais nous nous sommes engagés à voter les vingt-quatre amendements que cette commission a adoptés. Je les mettrai aux voix au tout début de l'examen des articles.
Sur les articles non délégués, cinquante-cinq amendements m'ont été présentés comme susceptibles de constituer des cavaliers législatifs au titre de l'article 45 de la Constitution. Considérant, comme toujours dans le cadre de cet examen, que le doute doit bénéficier à l'auteur de l'amendement, j'ai choisi d'en repêcher seize.
Je précise que, pour statuer sur la recevabilité des amendements, je me suis appuyé sur la position suivie par la présidente de la commission spéciale du Sénat saisie de ce texte, Mme Valérie Létard, qui a délibérément choisi d'écarter les dispositions de nature financière et fiscale. Dès lors, aucun article de la proposition de loi ne contient de telles dispositions. Comme vous le savez tous, ce sont les articles d'un texte qui servent de référence pour définir l'existence d'un lien, et non son intitulé.
En conclusion, ont donc été déclarés irrecevables trente-neuf amendements au titre de l'article 45 et seize amendements au titre de l'article 40. Nous aurons à nous prononcer sur 331 amendements.
En adoptant la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « Climat et résilience », le Parlement a fait preuve de courage et d'ambition pour préserver nos espaces naturels agricoles et forestiers en luttant contre l'artificialisation des sols.
Pouvait-il faire autrement ? La France est de loin le plus mauvais élève en matière de sobriété foncière en Europe, avec pas moins de 3,5 millions d'hectares urbanisés, dont une part significative ces cinquante dernières années, et une surface artificialisée moyenne de plus de 450 mètres carrés par habitant. Nous sommes très loin devant nos voisins européens : c'est 15 % de plus qu'en Allemagne, qui est bien plus peuplée que la France, et 57 % de plus qu'au Royaume-Uni, dont la population est semblable. Il devenait donc urgent d'agir.
L'artificialisation des sols n'est pas sans conséquence pour notre environnement. Nos sols sont les garants de la préservation de la biodiversité, du respect du cycle de l'eau, de notre souveraineté alimentaire ou du stockage du CO2. L'artificialisation à outrance fragilise tout cet écosystème. En fixant le cap d'une division par deux du rythme de l'artificialisation entre 2021 et 2031 par rapport à la décennie précédente, jusqu'à zéro artificialisation nette en 2050, la loi « Climat et résilience » est à la hauteur de l'enjeu. Restait donc à décliner ces objectifs au sein des territoires, dans leurs différents documents d'urbanisme : schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet), plan local d'urbanisme (PLU), plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi), schéma de cohérence territoriale (SCoT) et carte communale.
Diverses préoccupations ont été exprimées, à juste titre : la crainte de ne plus pouvoir se développer pour répondre aux besoins en matière de logement, de développement économique ou de déploiement des services publics ; la crainte que les communes rurales soient les grandes oubliées et ne puissent plus rien construire ; un mécanisme qui sanctionnerait les bons élèves ayant peu consommé de foncier ces dernières années, en comparaison de ceux qui ont beaucoup consommé et qui auraient un droit à construire supérieur ; des complexités, des coûts, des besoins d'ingénierie auxquels ont du mal à faire face les communes les plus rurales.
Ces inquiétudes ont été entendues. Je tiens à saluer la décision de M. le ministre Christophe Béchu de suspendre les décrets d'application de la loi « Climat et résilience ». Sa présence aujourd'hui en commission est l'illustration de la mobilisation totale dont il fait preuve sur ce sujet depuis maintenant plusieurs mois. La suspension des décrets a permis d'ouvrir une période de réflexion et de concertation avec l'ensemble des acteurs concernés : associations d'élus, associations environnementales, agriculteurs, promoteurs, acteurs du logement et du monde économique et, plus globalement, tous ceux qui sont directement affectés par ces objectifs ambitieux.
Si le jargon que nous allons utiliser peut paraître technique, il n'en est pas moins fondamental pour dessiner les contours de l'aménagement de la France de demain. À nous maintenant de mettre à profit le temps qui nous est accordé pour aboutir à un meilleur accompagnement des élus locaux, sans pour autant renier nos ambitions environnementales.
Je veux partager avec vous les grandes orientations de cette proposition de loi. Tout d'abord, il me semble primordial que les engagements environnementaux que nous avons pris dans la loi « Climat et résilience » soient tenus, car ils traduisent de grandes ambitions. Il est de notre responsabilité collective de les tenir pour relever le grand défi de la transition environnementale. Je serai donc défavorable à tous les amendements qui les remettraient en cause.
Ensuite, il convient de s'assurer que cela n'entrave pas l'accomplissement d'autres politiques publiques non moins ambitieuses telles que la construction de logements, la réindustrialisation, la transition énergétique ou encore la réalisation des grandes infrastructures de demain. Enfin, ce texte doit être l'occasion de renforcer l'accompagnement des élus locaux et les outils à leur disposition pour décliner ces objectifs et les territorialiser au mieux. C'est la raison d'être première de ce texte, avec le soutien à l'accompagnement de l'État, en leur faisant confiance, toujours, mais jamais en faisant à leur place ni en reniant leurs libertés et leurs compétences en matière d'aménagement territorial.
Telles sont donc les trois grandes orientations qui m'ont guidé dans l'appréhension de ce texte. Il me semble important d'appeler votre attention sur les grands mécanismes qui vous seront proposés pour y parvenir. L'article 4 a pour objet de définir et de mutualiser à l'échelle du pays les projets d'envergure nationale ou européenne, l'objectif étant de garantir leur réalisation, sans pour autant renier le droit à construire global, en particulier pour les communes qui accueilleront ces projets. Il faut en effet éviter qu'elles refusent un projet, pourtant vecteur de dynamisme local, parce que cela affecterait de manière trop importante le droit à construire qu'elles souhaitent consacrer à d'autres projets. À l'article 7, nous aurons à traiter de la question de l'équilibre territorial de l'urbanisation, avec en particulier l'idée d'une garantie rurale dont il nous faudra préciser les contours et les conditions d'éligibilité. L'article 12 a vocation à donner une boîte à outils opérationnelle aux communes pour décliner ces objectifs.
Au vu de certains amendements, je me dois de vous préciser ce que cette proposition de loi n'est pas. Le foncier non bâti disponible à la construction va mécaniquement se raréfier, entraînant des phénomènes de spéculation et de rétention qui peuvent avoir des conséquences désastreuses sur la libération des terrains et leur constructibilité. Même si nous souhaitons tous débattre de ce sujet, le présent texte ne me semble pas être le cadre idoine pour en traiter. Le texte n'a pas non plus vocation à s'écarter de sa raison d'être, à savoir la mise en œuvre de l'objectif de moins 50 % sur la période 2021-2031. Il faudra naturellement s'interroger sur la période suivante, de 2031 à 2050, mais là encore cette question n'est pas à l'ordre du jour. Le législateur devra le faire en son temps, à l'aune des données chiffrées dont il disposera. Une clause de revoyure vous sera proposée, qui permettra, à mi-chemin de l'échéance de 2031, de faire le bilan de l'avancement de ces objectifs.
Sauvegarde de nos objectifs environnementaux, meilleur accompagnement des élus locaux et prise en compte des défis économiques et sociaux qui se posent à nous, tels sont les trois piliers de ce texte. J'espère que nos débats seront riches et qu'ils nous permettront de parvenir au consensus nécessaire à la bonne déclinaison de ces objectifs.
La lutte contre l'artificialisation des terres regroupe toutes les grandes luttes environnementales et climatiques. Une terre non artificialisée stocke du carbone, permet au cycle de l'eau de s'accomplir de manière normale, préserve la biodiversité, constitue un îlot de fraîcheur là où son artificialisation provoque un îlot de chaleur… Lutter contre l'étalement urbain et les centres commerciaux qui s'allongent aux portes de nos villes permet, en outre, de préserver et notre souveraineté agricole et la beauté de nos paysages et de nos forêts.
Nous avons plus artificialisé en cinquante ans qu'en cinq cents ans. Il y a quelques siècles, on faisait grossir le bourg en construisant une maison contre le mur de la précédente, tant pour limiter l'impact en matériaux que pour préserver les espaces permettant de se nourrir. Il faut revenir à une forme de bon sens. Cela ne signifie pas qu'il faut arrêter de construire mais que nous devons retrouver un rythme d'artificialisation compatible avec nos ressources.
Si l'on divise par deux le rythme de ces dix dernières années, cela laisse encore la possibilité d'artificialiser 125 000 hectares, sans compter les friches existantes qui représentent 170 000 hectares – et c'est une estimation basse. Le principe de l'intensification de la lutte contre l'étalement urbain a été adopté dans la loi « Climat et résilience », mais le mode d'emploi doit encore être précisé. Des inquiétudes se sont manifestées depuis le vote de ce texte, les plus petites communes redoutant d'être la variable d'ajustement du renforcement des métropoles, dans lequel les territoires les plus grands pourraient construire le plus.
Par ailleurs, nous avons besoin d'espaces pour rapatrier les activités qui ont été délocalisées. À quoi servirait, en effet, de diminuer les émissions de gaz à effet de serre chez nous si nous importons des produits fabriqués à l'autre bout du monde, dans des usines utilisant le charbon, et nécessitant du kérosène pour leur transport ? La transition écologique passe par la réindustrialisation de notre pays.
Le Gouvernement, sans rien lâcher de ses ambitions écologiques, souhaite que ce texte soit applicable début juillet, avant l'interruption des travaux au Sénat, mi-juillet, en raison des élections sénatoriales. Adoptée à une écrasante majorité par les sénateurs, cette proposition de loi transpartisane répond aux inquiétudes et aux attentes de l'AMF et de l'Association des maires ruraux de France (AMRF). Ainsi, elle ne conteste pas la nécessité de lutter contre l'étalement urbain – cela a d'ailleurs déjà commencé puisque nous sommes passés de 60 000 hectares urbanisés dans les années 1980 à 40 000 dans les années 1990, 30 000 au début des années 2000 et 20 000 en moyenne ces dix dernières années.
Il nous faut trouver le chemin de crête permettant d'aboutir dans un temps législatif contraint. Nous vous proposons donc une méthode qui a recueilli l'assentiment tant de l'AMF que du Sénat, consistant à traiter la moitié du texte par voie réglementaire et l'autre moitié par voie législative. Dans un souci de transparence, nous avons publié hier matin le texte des projets de décret : vous pourrez ainsi vérifier que les articles de la proposition de loi dont nous demandons la suppression y figurent bien. Si nous ne procédions pas de la sorte, nous ne serions pas en mesure de terminer l'examen au Parlement en juillet et la loi ne serait pas applicable avant la fin de l'année.
La commission du développement durable a été saisie sur cinq articles. Elle a voté en faveur de la suppression de l'article 6, relatif à la prise en compte des efforts passés, et de l'article 8, qui permet la constitution d'une réserve territoriale, car ils seront entièrement repris dans les futurs décrets, qui ont été travaillés par le Gouvernement en concertation avec le Sénat, l'Assemblée nationale et les associations d'élus. Ces dernières en avaient manifesté le souhait, lors des auditions, afin d'assurer une certaine souplesse et de s'adapter à l'évolution prévisible du ZAN.
Les trois autres articles ont été modifiés par la commission. L'article 3 concerne la conférence régionale, dont la composition a été renforcée. L'article 10 vise à mieux prendre en compte le recul du trait de côte dans les communes littorales. Il est proposé de travailler essentiellement avec les communes ayant une stratégie locale, c'est-à-dire qui sont identifiées dans la stratégie nationale votée dans la loi « Climat et résilience ». Enfin, l'article 13 porte sur la renaturation. Prévue dans la loi « Climat et résilience » à partir de 2031, il est proposé de la mettre en œuvre entre 2021 et 2031 pour que les élus locaux s'engagent dès à présent sur cet objectif. C'est un premier pas, dont nous aurons l'occasion de débattre en séance.
Les enjeux environnementaux et de protection de la biodiversité ont été pleinement pris à bras-le-corps par le groupe Renaissance et l'ensemble de la majorité présidentielle. Ces enjeux, par leur transversalité, touchent tous les secteurs des politiques publiques. En tant qu'ancien maire d'une commune rurale et vice-président d'une communauté de communes, chargé de l'urbanisme, j'ai pu mesurer toute la passion qui entoure les sujets de construction, car c'est évidemment l'avenir des territoires qui se joue. J'ai pu également constater que l'on admettait trop facilement que développer un territoire revenait à grignoter des terres agricoles, souvent celles qui ont la plus grande valeur économique, au profit d'un désir de maison individuelle ou d'un jardin de 2 500 mètres carrés, enfermant les populations dans des contraintes pendulaires souvent non anticipées.
Entre 2011 et 2021, plus de 250 000 hectares ont été consommés, soit plus de l'équivalent du département des Yvelines. Le foncier renvoie à des enjeux multiples au cœur des politiques d'aménagement du territoire : la répartition équilibrée des hommes et des activités, les enjeux agricoles et la souveraineté alimentaire, la production énergétique verte ou encore le développement d'infrastructures de transport, de services ou industriels. La loi « Climat et résilience » a formulé un double objectif : réduire de moitié le rythme d'artificialisation nouvelle entre 2021 et 2031 par rapport à la décennie précédente et atteindre le ZAN d'ici à 2050.
Tout cela va dans le bon sens. Les objectifs de ce texte sont clairs : favoriser le dialogue territorial au sein d'une conférence régionale qui renforce la gouvernance décentralisée et l'action locale ; accompagner les projets structurants de demain, la comptabilisation des projets nationaux et régionaux permettant à chacun de prendre ses responsabilités et d'être en phase avec son besoin de développement sans obérer celui du territoire supra ou infra ; mieux prendre en compte les spécificités des territoires avec la garantie rurale qui accordera un minimum de surface urbanisable pour respecter chaque commune, celui-ci devant dépendre, à mon sens, de critères tels que la disponibilité en eau ou la présence de services publics plutôt que du nombre d'habitants – mais faisons confiance aux territoires pour coopérer et trouver de bonnes solutions à partir des projets construits collectivement ; prévoir les outils de transition vers le ZAN.
Le texte issu du Sénat permet un meilleur équilibre entre les projets nationaux, régionaux et locaux. Sur ces sujets, la tentation électoraliste pourrait être forte, mais c'est l'intérêt national de ce dispositif qui doit être apprécié.
Le ZAN ne condamne pas une forme de construction, il impose une trajectoire de sobriété. J'entends dire que le ZAN, c'est la fin du pavillon ou de la maison individuelle : c'est faux. La moitié de l'artificialisation en France depuis dix ans est consacrée à des lotissements avec huit logements par hectare, c'est-à-dire des jardins de 1 200 mètres carrés. Il suffirait que la moyenne passe à 600 mètres carrés pour que l'on tienne la trajectoire de sobriété foncière. Ayons un débat vrai, mais en regardant la réalité.
Dès le départ, les objectifs prévus par la loi « Climat et résilience » en matière de réduction de la consommation de surfaces auront été une gageure à définir, à expliquer et à appliquer. De ces objectifs les plus drastiques d'Europe, la plupart des maires ne retiennent que l'injustice qui en découle. Les communes qui ont le plus artificialisé ces dernières années peuvent toujours le faire, tandis que les communes rurales ou peu peuplées, qui n'artificialisent que très peu, sont d'ores et déjà condamnées, pour 9 811 d'entre elles, à une consommation d'espaces inférieure à la moitié d'un hectare jusqu'en 2031. C'est à ce décalage que tente de répondre le texte assouplissant l'application des objectifs du ZAN, sans pour autant le remettre en cause radicalement.
Si nous nous accordons tous sur la pertinence de la maîtrise foncière pour protéger les terres, qu'elles soient naturelles, agricoles ou forestières, il faut toutefois affirmer sans détour que le ZAN ne peut être l'alpha et l'oméga de l'urbanisation de demain. Sans autre principe directeur que l'attrition, le ZAN menace gravement le développement des services essentiels – infrastructures sportives, centres de soins, services publics – dans nombre de communes qui ont toujours artificialisé avec parcimonie.
Pour ces raisons, nous plaiderons en faveur d'un ZAN raisonnable et cohérent, qui s'attache à faire peser les contraintes sur les mauvais élèves et à récompenser ou, tout au moins, à ne pas handicaper inutilement les nombreuses communes exemplaires qui n'ont pas attendu le législateur pour faire preuve de sobriété foncière.
Vous évoquez les dispositions législatives « les plus drastiques » d'Europe. Or la France est le plus mauvais élève européen, car nous consommons beaucoup plus que nos voisins européens. Il aurait été souhaitable de construire de façon responsable, comme cela a été fait pendant des siècles, en évitant de trop consommer. Ces cinquante dernières années, on a oublié ce principe. Il est donc fondamental d'adopter un texte encadrant ces constructions.
Vous évoquez également les communes rurales. C'est évidemment une des principales préoccupations. Nous aborderons ce sujet fondamental, non seulement à travers la garantie rurale, mais aussi de l'éventualité de projets d'intérêt intercommunal et, plus globalement, de mécanismes de péréquation et d'équilibrage territorial du droit à construire.
Nous devons aborder cette discussion avec gravité. Stopper l'artificialisation des sols est une condition pour préserver le seul écosystème compatible avec la vie humaine. Cela implique de mettre un terme à une course folle : nous artificialisons chaque jour l'équivalent d'une centaine de terrains de football pour mettre en œuvre un modèle de développement d'un autre âge – autoroutes, supermarchés, parkings et lotissements pavillonnaires en plein champ. Un sol artificialisé n'est plus capable de remplir ses fonctions écologiques, à savoir contribuer au cycle de l'eau et du carbone. Pire, l'artificialisation décuple les conséquences des catastrophes climatiques que sont les canicules et les inondations. La pleine terre est une ressource non renouvelable que l'humanité doit apprendre à préserver.
Ce propos liminaire me permet de justifier ce qui sera la ligne directrice de mon groupe parlementaire lors de cette discussion : à aucun moment nous n'accepterons la remise en cause, l'affaiblissement ou le recul de l'objectif « zéro artificialisation nette ». On ne négocie pas avec les limites de la biosphère. Il ne s'agit pas de nier les difficultés de mise en œuvre du ZAN, qui étaient d'ailleurs prévisibles. Il a été demandé aux collectivités d'opérer une véritable révolution écologique et urbanistique sans être accompagnées et soutenues par l'État. Je ne citerai qu'un seul exemple : où est le plan Marshall pour la réhabilitation des logements vacants dans les centres-villes des communes rurales, demandé par l'AMRF ? L'État regarde ailleurs ou plutôt il préfère soutenir de grands projets inutiles, consommateurs de pleine terre tels que le projet d'autoroute Toulouse-Castres, qui menace 400 hectares de terres naturelles, ou la ligne 17 du Grand Paris Express, qui artificialise des terres parmi les plus fertiles d'Europe sur le plateau de Saclay. Le présent texte n'apporte aucune solution à ces problèmes, au contraire : en affaiblissant le ZAN sans remédier aux problèmes qu'il soulève, il constitue une double peine.
Nous ne sommes pas plus convaincus par la position gouvernementale. La méthode consistant à substituer aux articles de loi des projets de décret sur un sujet aussi important nous paraît cavalière. C'est d'autant plus problématique si l'objectif est d'exonérer du ZAN les gigafactories d'Elon Musk, comme le souhaite le ministre de l'économie Bruno Le Maire. Sur ce point, monsieur le ministre, vous nous direz si vous avez remporté l'arbitrage.
En résumé, notre priorité sera de défendre le ZAN, c'est-à-dire de défendre un monde vivable.
L'enjeu est de ne pas remettre en cause l'objectif et de préserver les sols, ce qui impose de tenir la trajectoire de sobriété foncière. Toute une partie du texte concerne la répartition des 125 000 hectares. Savoir s'il faut en donner plus aux communes rurales ou tenir compte du rythme de construction, sont, par exemple, des questions sur lesquelles des consensus pourront être trouvés.
J'assume pleinement la méthode que nous avons choisie, qui est la seule à même d'aboutir rapidement. Son caractère « cavalier » est compensé par la transparence que nous faisons sur l'exercice. Nous aurons un débat sur l'article 4 et sur les grands projets d'envergure nationale. La position du Gouvernement est que l'on ne peut pas ne pas compter des projets qui artificialisent ; nous défendons le forfait parce qu'il nous faut un mécanisme simple.
En revanche, il faut se simplifier la vie pour les projets qui permettent de décarboner. La question est de savoir qui détermine si un projet est utile ou inutile. Vous avez cité quelques projets, que vous rangez dans cette dernière catégorie. Pour ma part, je crois aux déclarations d'utilité publique, je crois aux juges. De ce point de vue, nous avons sans doute quelques divergences, mais elles sont la preuve que le débat politique est possible entre nous.
L'utilisation plus vertueuse des terres est une ambition partagée. Nous pouvons toujours nous améliorer, mais, de grâce, veillons à ne pas tomber dans l'incantatoire en adoptant des lois hors-sol et en écartant un principe aussi fondamental que celui de réalité, sans quoi la suite de nos débats conduirait à de nombreuses frustrations et déceptions. Nos collègues sénateurs l'ont bien compris en présentant cette proposition de loi, fruit d'un travail transpartisan, des LR aux communistes, et qui est une réponse aux injonctions irréalistes, conduisant à une logique de décroissance, votées sous la législature précédente. Notre groupe entend s'inscrire dans le même état d'esprit pour examiner ce texte.
Dans les territoires ruraux, l'inquiétude ne cesse de croître concernant l'application du ZAN. Les risques sont multiples, dont celui de stopper net le développement économique de ces territoires au profit des pôles urbains et, surtout, d'entraver la construction d'habitats permanents au moment même où les Français n'arrivent plus à se loger. C'est mécanique : la trajectoire vers le zéro artificialisation nette en 2050 par tranches de moins 50 % tous les dix ans va raréfier le foncier et les prix ne vont cesser d'augmenter.
Le défi est de répartir l'effort territorialement sans que nos petites communes en pâtissent et de préserver l'équilibre entre le développement rural et l'urbain. Des communes du littoral en passant par les plus rurales, sans oublier celles de montagne, auxquelles vous savez mon attachement, il convient de tenir compte de leurs spécificités afin de préserver leur attrait économique et touristique.
Nous abordons ce texte avec bienveillance, sous réserve que nous puissions procéder par coconstruction sur certains points qui appellent notre vigilance – je pense notamment à l'enveloppe nationale, la garantie ruralité et la non-prescriptibilité du Sraddet.
Le Sraddet, la garantie rurale et les grands projets d'envergure nationale sont en effet les trois murs porteurs du texte. De la manière dont on va traiter ces questions dépendront la possibilité de concilier cohérence et souplesse et, en définitive, l'approche globale adoptée. Je comprends votre vigilance et suis pressé que nous en arrivions à l'examen de ces articles.
S'il fait désormais consensus que l'érosion de la biodiversité à l'échelle mondiale est due pour partie à l'étalement urbain et à l'artificialisation des sols, il est également admis que nous devons trouver le juste équilibre pour à la fois atteindre les objectifs de non-artificialisation fixés par la loi « Climat et résilience » et assurer, de manière pragmatique, la bonne application de ses dispositions. En effet, nous avons tous été interpellés à plusieurs reprises par les élus locaux sur les objectifs du ZAN, en particulier par les élus de la ruralité, du littoral et de la montagne. Après la publication des décrets d'application, le constat est unanime : les consignes sont trop contraignantes, voire rendent inapplicables certaines dispositions. On estime par exemple qu'environ 15 % de l'enveloppe d'artificialisation prévue d'ici à 2031 pourrait être consommée par les grands projets d'État, dont les liaisons ferroviaires à grande vitesse ; pour compenser leur impact, certaines collectivités seraient tenues de réduire non pas de 50 %, mais de 85 % le rythme d'artificialisation à l'horizon 2031 ! Cela constitue une entrave importante à la liberté des maires en matière d'aménagement du territoire et d'urbanisme. Nombre de territoires risquent de se voir privés de toute possibilité de produire de l'habitat, en ces temps de crise du logement.
Pourtant, le ZAN, dont notre groupe partage la philosophie, pourrait être un outil efficace d'aménagement du territoire, si les élus locaux se l'appropriaient. Il serait un levier intéressant pour rénover les 170 000 hectares de friches – soit plus que l'enveloppe totale du ZAN – que compte la France. Les friches, considérées comme des terrains artificialisés, constituent une réserve foncière importante, qu'il convient de mobiliser en priorité.
Nous devons agir rapidement compte tenu des enjeux et du temps législatif qui nous est imparti. Notre groupe salue l'esprit de responsabilité qui a prévalu lors des discussions entre les députés, les sénateurs, les représentants des collectivités locales et le Gouvernement. Les amendements de suppression déposés par la majorité sont ainsi le fruit d'un travail collectif. Le groupe Démocrate, par la voix de notre collègue Mickaël Cosson, proposera de donner plus de souplesse aux territoires dans l'application du ZAN, sans revenir pour autant sur ses objectifs, par exemple à travers la possibilité de mutualiser les surfaces de développement communal. Par ailleurs, ce qui a été fait par voie réglementaire doit pouvoir être modifié par la même voie, afin d'assurer une mise en application rapide. Les décrets qui ont déjà été portés à la connaissance du public sont d'ailleurs conformes à l'esprit du texte sénatorial.
Enfin, nous tenons à saluer le travail des sénateurs, qui répond à la fois aux attentes des élus locaux et aux objectifs de la non-artificialisation.
Merci de rappeler le cap fixé. Il convient en effet de concilier le maintien des ambitions environnementales, la poursuite du développement du pays, notamment à travers les grandes infrastructures, et la nécessaire réponse aux préoccupations des élus. Je vous informe d'emblée que je réserverai un bon accueil à votre proposition de mutualiser le droit à construire des communes, en particulier rurales. Si l'on veut privilégier une approche aussi territoriale et cohérente que possible, il faut laisser la main aux élus locaux. Faisons-leur confiance et accompagnons-les, sans pour autant bloquer leurs initiatives quand elles sont vertueuses.
Je tiens à remercier le rapporteur pour l'état d'esprit constructif dans lequel il a mené ses travaux et pour nos échanges en amont de l'examen du texte. J'espère que les constats partagés permettront d'aboutir à des solutions de compromis, mon groupe souhaitant contribuer à l'adoption de dispositions instaurant un objectif de zéro artificialisation nette à l'horizon 2050.
Eu égard à la réduction importante de la biodiversité, aux enjeux de la préservation de la ressource en eau et à l'adaptation au changement climatique, nous ne pouvons plus artificialiser 20 000 à 30 000 hectares par an. Pour atteindre les objectifs du ZAN, à commencer par celui d'une réduction de moitié du rythme d'artificialisation au cours de la prochaine décennie, il nous faut cependant rendre ces dispositions opérationnelles, en levant tant les difficultés techniques liées aux délais et aux procédures que les doutes d'un nombre croissant d'élus locaux, pour qui la mise en œuvre indiscriminée du ZAN est une négation de la diversité des réalités locales et efface tout potentiel de développement des communes les plus rurales. Équilibrer la transition écologique et la vitalité des territoires, créer des emplois et des logements tout en réduisant notre empreinte sur les espaces naturels, tels sont les enjeux auxquels nous sommes confrontés.
Le Sénat a utilement remis sur le métier les dispositions encadrant le ZAN, mais les solutions proposées ne sont pas toujours adaptées aux enjeux. Il en va ainsi de la garantie rurale, qui apparaît comme une concession nécessaire pour que le dispositif soit un succès, mais qui, pour fonctionner, suppose une certaine souplesse et une adaptabilité à la grande diversité de nos territoires. Nous formulerons à cet égard une proposition équilibrée et différenciante, visant à autoriser les mutualisations tout en conservant l'esprit du dispositif conçu par les sénateurs.
Pour limiter l'extension urbaine, nous devons en outre disposer d'outils permettant de transformer le foncier déjà artificialisé : friches, dents creuses, habitats dégradés ou à l'abandon. Le Sénat a proposé, avec un droit de préemption et un mécanisme de sursis à statuer, des solutions pertinentes, que nous contribuerons à améliorer. Cependant, et ce sera l'un des enjeux de la prochaine loi de finances, nous devrons aussi disposer d'outils et de financements publics afin que les communes puissent transformer ces espaces pour construire, densifier ou renaturer. Des outils fiscaux seront également nécessaires pour éviter que la raréfaction du foncier induite par le ZAN ne provoque une spéculation foncière incontrôlée. Je regrette à ce titre qu'un de nos amendements sur le sujet, qui se contentait d'appliquer la règle, ait été déclaré cavalier. On voit bien que certains articles de notre Constitution ne sont plus adaptés à notre époque.
Nous n'épuiserons pas la question de la transition fiscale en quelques minutes de discussion générale. Il s'agit assurément de l'angle mort de ce texte, dont l'objet est d'apporter des correctifs à la loi « Climat et résilience », laquelle ne comporte pas de dispositions fiscales. Quel instrument fiscal pouvons-nous utiliser pour accompagner la lutte contre l'artificialisation ? Si l'on ne renchérit pas le coût de l'artificialisation et qu'on n'alimente pas ce qui permettrait de financer la dépollution, on se heurtera à une difficulté. Rendez-vous à la discussion budgétaire !
Nul besoin de rappeler les conséquences d'une artificialisation massive sur l'environnement, la biodiversité et les risques de ruissellement, comme en témoignent les inondations du week-end dernier. Ce constat posé, nous avons fait le choix de définir une trajectoire, qui ne peut pas se faire en un jour. Nous souhaitons réduire de 50 % notre consommation de terres d'ici à 2031, puis cesser toute nouvelle consommation à partir de 2050. Si cet objectif avait fait l'objet d'un consensus au sein de la commission mixte paritaire, il se heurte à des difficultés de mise en œuvre sur le terrain.
Certaines régions ont fait le choix d'être très vertueuses en fixant dans leur Sraddet des objectifs supérieurs à ceux prescrits par la loi, faisant ainsi peser sur les communes une pression supplémentaire. Justifier, expliquer et convaincre de cette nécessité implique un travail pédagogique de leur part.
La déclinaison de la trajectoire de sauvegarde des sols soulève d'autres enjeux que la proposition de loi tend à prendre en considération. Je pense notamment au soutien des politiques de renaturation ou de réhabilitation des friches, à la création d'espaces végétalisés et au changement de la nature des sols, de manière à leur redonner leur fonction de sol nu, à la désimperméabilisation, au développement des entreprises et à la fourniture de logements. Aux côtés de la majorité, le groupe Horizons soutiendra ce texte tout en proposant deux amendements, l'un sur la définition des projets d'envergure nationale ou européenne, l'autre sur le statut des hectares qui s'y rapportent.
Il existe en effet un principe général du droit selon lequel les collectivités territoriales peuvent être plus prescriptives ou plus ambitieuses que ce qui est prévu par la loi. La loi « Climat et résilience » ayant déjà fixé des objectifs très ambitieux, si une collectivité territoriale décide d'aller plus loin, elle le fait de manière tout à fait légitime : c'est conforme au principe de libre administration des collectivités. La question est de savoir quels outils on met à la disposition des élus locaux pour concrétiser ces ambitions et faire face aux difficultés rencontrées.
Après avoir exposé hier les conséquences environnementales de l'artificialisation, je veux insister aujourd'hui sur les effets de ce phénomène sur l'agriculture. Je pense qu'aucun ni aucune d'entre nous ne peut s'ériger en défenseur de notre souveraineté alimentaire et des agriculteurs s'il ne défend pas d'abord leur terre. D'un point de vue quantitatif, cette terre est menacée : chaque année, 25 000 hectares sont enfouis sous le béton. D'un point de vue qualitatif, l'artificialisation concerne dans une proportion de 45 % des terres à fort potentiel agricole ; les tristes exemples des terres de Gonesse et du plateau de Saclay sont révélateurs.
Plus largement, artificialiser, c'est altérer durablement les fonctions écologiques d'un sol, en particulier ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que son potentiel agronomique, par son occupation ou par son usage. En empêchant l'eau de s'infiltrer dans les nappes phréatiques, en accélérant l'érosion des sols, en contribuant activement au déclin de la biodiversité, l'artificialisation prive les agriculteurs de ressources en eau, dégrade les sols et amoindrit leur résilience face aux ravageurs et aux pathogènes. Au quotidien, elle conduit à la fragmentation des terres agricoles par l'habitat ou par les infrastructures de transport et multiplie les zones de contact entre l'agriculture et les territoires artificialisés, ce qui provoque gênes et nuisances réciproques et peut perturber l'activité agricole.
Enfin, c'est parce qu'ils sont mal rémunérés que les paysans sont incités à céder leurs terres. Il ne peut y avoir de souveraineté alimentaire, pas plus que de politiques favorables à l'agriculture, sans une lutte contre l'artificialisation des sols. Pourtant, l'idée paradoxale que le développement rural ne pourrait passer que par la destruction des terres agricoles reste présente. Il convient de la déconstruire. Il n'y a aucune corrélation, aucun lien de cause à effet entre l'artificialisation et le dynamisme économique ou démographique. C'est logique : ce que recherchent nos concitoyens, c'est la proximité de leur famille, d'un travail ou de services publics, éventuellement de l'aménité, ce n'est pas la présence de lotissements pavillonnaires ou de plateformes Amazon. C'est en remettant les services publics dans les bourgs, en revitalisant les petites lignes, en développant les emplois locaux dans l'artisanat ou dans la production alimentaire que nous garantirons un développement rural sain.
Nous défendrons prioritairement la suppression des dispositions qui marquent un fort recul des ambitions de la loi « Climat et résilience ». Nous proposerons de les rehausser, par exemple en matière de renaturation. Nous défendrons l'idée d'une véritable planification de l'artificialisation, afin de garantir aux élus locaux la possibilité de construire ensemble des projets sobres et utiles pour leur territoire.
L'enjeu agricole est indéniable. La priorité est de préserver des terres pour l'agriculture. Il faut ensuite faire évoluer les pratiques de manière à améliorer la cohabitation. Que l'on soit préoccupé par la biodiversité, attaché à la souveraineté de notre pays ou partisan de l'adaptation au changement climatique, nous devrions avoir la volonté commune de concrétiser la trajectoire de sobriété et d'en assurer la cohérence.
Cette PPL arrive à point nommé. Même si nous partageons les objectifs ambitieux de préservation des terres agricoles, des espaces naturels et forestiers, de la biodiversité et de l'eau, il faut rappeler que la loi « Climat et résilience » a été imposée d'en haut, sans concertation et en faisant l'impasse sur les enjeux d'aménagement du territoire, notamment de différenciation territoriale. C'est une loi qui, comme on dit chez nous, arrose là où c'est mouillé.
Monsieur le ministre, j'ai pris bonne note de votre amour subit pour les territoires ruraux. Dites à vos collègues que, s'ils partagent cet amour, il faut qu'ils cessent de fermer les services publics, notamment les écoles, dans ces territoires. Depuis le covid, un désir de campagne s'exprime. Il convient d'assurer le développement et l'aménagement de ces territoires, et nous pensons que cette PPL peut y contribuer. La garantie rurale et la mise à l'écart des projets nationaux nous semblent de bonnes choses. Attention cependant au pilotage des Sraddet par la région : il serait nécessaire que l'État garde la main sur la question. Dans ma région, les relations avec le président du conseil régional sont compliquées. Il importe qu'un encadrement minimal assure l'aménagement équilibré des territoires.
Pour qu'il y ait développement durable, il faut qu'il y ait développement – sinon c'est du sous-développement qui dure. La politique en matière d'artificialisation est une ligne de crête.
Vous avez évoqué 170 000 hectares de friches. Comment aide-t-on les communes à s'approprier les dents creuses et les friches industrielles ? Les petites communes, en particulier, n'ont pas toujours, en dépit de l'existence d'établissements publics fonciers (EPF), ni les ronds pour préempter ni l'ingénierie nécessaire. De même, passer du règlement national d'urbanisme (RNU) à la carte communale, afin d'être éligible au 1 hectare de droit à construire, coûte environ 14 000 euros. Et je ne vous parle pas du coût prohibitif du plan local d'urbanisme ! Comment comptez-vous accompagner les communes dans une logique de développement du territoire plus pertinent ? Pour le recul du trait de côte, je le dis en passant, il faut abonder le fonds Robien.
Enfin, s'agissant des projets d'envergure nationale, je vous signale que pour la centrale nucléaire de Penly, si l'on additionne les parkings, les logements et les infrastructures, on a besoin de 175 hectares. Il faudra faire attention à la manière dont on comptabilise les besoins fonciers…
Il est un peu facile d'affirmer que nous découvrons la ruralité… Je vous invite à suivre demain avec attention la présentation de France ruralité par la Première ministre – que Dominique Faure, secrétaire d'État chargée de la ruralité, et moi accompagnerons. Cela vous permettra de mesurer la cohérence entre les annonces, la garantie rurale et une partie de ce qui a d'ores et déjà été décidé.
Ce que vous évoquez en matière de projets d'ampleur nationale, monsieur Jumel, est crucial. Plus largement, cela soulève la question de la transition écologique : certaines des solutions envisageables supposent du terrain – je pense à la décarbonation des infrastructures de transport et au changement des modes de production. Ces défis seront au cœur de l'article 4 de la proposition de loi.
Des comparaisons ont été faites avec l'Allemagne et le Royaume-Uni, mais la France, contrairement à ces derniers, reste un pays de ruraux ; c'est une de ses spécificités.
Quand je vous écoute, je ressens parfois comme une culpabilité, et je redoute l'effet de balancier – que nous avons connu, par exemple, avec le remembrement : alors qu'il y avait des parcelles de moins de 1 hectare, on en trouve aujourd'hui de 24 hectares sur lesquelles il ne reste plus que trois arbres ; évidemment, on ne s'est soucié ni de l'hydrologie ni de l'érosion des sols. Je ne voudrais pas que la même chose se produise avec le ZAN. Il existe des dents creuses, dans lesquelles on sait très bien qu'on ne verra jamais aucun tracteur, mais on ne peut pas y construire. J'ai parfois l'impression qu'on veut en faire trop dans l'autre sens.
Cette proposition de loi sénatoriale vient mettre de l'huile dans les rouages. Il y a eu la loi « Climat et résilience », ensuite les décrets, qui l'ont durcie, ensuite encore l'application par les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) – et je peux vous dire que ça a toussé. Dans ma région, on compte 20 000 habitants de plus par an : il faut bien qu'on les mette quelque part – sinon, il faut leur dire de rester chez eux, mais je ne suis pas sûr qu'ils apprécient. On va aussi avoir besoin de terrains pour décarboner l'industrie. Tout cela est délicat.
On a évoqué l'histoire. Il y eut une époque, les élus locaux avaient la main. Sont-ils aujourd'hui conscients de la nécessité d'économiser la terre ? La plupart, oui ; ils ne remettent pas en cause la nécessité de consommer deux fois moins de terres agricoles. Cependant, il importe de mettre un peu d'huile dans les rouages.
Épargnez-nous certains discours sur les métropoles où il faudrait concentrer tout le monde. Les métropoles ont des externalités extrêmement négatives et coûtent cher. Elles bénéficient d'ailleurs de dotations bien plus élevées que les milieux ruraux, ce qui pose la question de l'égalité des Français par rapport à celles-ci.
Comme on dit en Bretagne, il ne faut pas être plus mouillé que l'humidité !
Une commune sur deux en Europe est française. Non seulement nous ne le nions pas, mais cela fait notre fierté : c'est de là aussi que la France tire son originalité, et peut-être est-ce pourquoi elle est le pays le plus visité au monde.
Il ne s'agit pas non plus d'opposer développement de la ruralité et zéro artificialisation nette. Mieux construire ne veut pas dire moins construire. L'enjeu est de réévaluer les modes de construction à l'aune des grands défis environnementaux.
Enfin, la garantie rurale a précisément pour objet d'assurer un équilibre territorial et d'éviter le phénomène d'hypermétropolisation des populations.
Comment accompagne-t-on les élus locaux ? Tel est, précisément, l'enjeu du texte.
Ce texte arrive à point nommé. Il permettra de mieux associer les collectivités territoriales et de tenir compte des réalités locales – grâce, notamment, à la garantie rurale. Mais pour les territoires ruraux et, surtout, pour les territoires de montagne, ce n'est pas suffisant. Ces territoires ont été exemplaires en matière de sobriété foncière, notamment avec la loi « montagne » et l'interdiction de construire en discontinuité. Alors que ce sont de bons élèves, ils seront les premiers pénalisés. N'oubliez donc pas les territoires de montagne, monsieur le ministre. Tenez compte de leurs spécificités et permettez-leur de se développer et de vivre.
Il est difficile de décorréler l'objectif de ZAN du code de l'urbanisme, et les réformes successives en matière de gestion du foncier ne jouent que sur le bâton, jamais sur la carotte. Dès lors que vous restreignez le foncier constructible, certaines communes ne pourront plus répondre aux exigences de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), qui impose la construction de logements sociaux. Elles devront payer des pénalités sans possibilité de se dégager de leurs obligations. Comment vont-elles faire ?
Certains territoires perdent des habitants, d'autres sont en forte croissance. Des traitements différenciés seraient-ils concevables ?
Il faudra en effet, monsieur le ministre, prévoir des mesures fiscales. Airbnb gèle du foncier dans les territoires littoraux et touristiques ; la pression sur l'offre de logement est préoccupante. Les besoins de financement des EPF doivent être, à mon avis, comblés en jouant sur l'assiette de la taxe d'aménagement. Bref, sans leviers fiscaux, pas de politique efficace d'aménagement du territoire ni d'artificialisation équilibrée des sols. J'entends que ce n'est pas l'objet du texte, mais prendrez-vous au banc des engagements fermes en la matière ?
Cette PPL nous donne l'espoir qu'on pourra desserrer l'étau qui pèse sur les communes rurales et sur leur développement économique depuis l'instauration du ZAN. La mesure fixant un plancher de 1 hectare par commune prévue à l'article 7 a l'intérêt d'être claire, mais l'inconvénient d'être uniforme. Or c'est bien l'uniformité que nous souhaiterions éviter. Cette garantie ne prend pas en considération la superficie variable des communes, ni les efforts ou les dérapages constatés. Ne faudrait-il pas opter pour un plancher variable, qui tienne compte de la superficie totale et des surfaces déjà artificialisées ?
Veillons, en outre, à mener une politique de réhabilitation des friches, ce qui permettrait de donner des marges de manœuvre aux communes rurales.
Monsieur le rapporteur, vous avez dit : « Mieux construire ne veut pas dire moins construire ». Je voudrais vous rappeler que l'objectif de zéro artificialisation nette se décline de la manière suivante : éviter, réduire, compenser. Éviter et réduire, voilà les priorités. L'objectif en matière d'artificialisation des sols est la sobriété – dans un esprit de justice et d'égalité territoriale, bien évidemment. J'avais déposé à ce sujet un certain nombre d'amendements qui, malheureusement, ont été déclarés irrecevables.
Qu'en est-il des outils à la disposition des communes rurales, notamment en matière de rénovation thermique du bâti ancien et de régulation des maisons secondaires et des plateformes de location touristique ? Il s'agit de leviers majeurs pour libérer du bâti pour celles et ceux qui veulent habiter durablement dans les territoires ruraux.
Confirmez-vous que les outre-mer ne sont pas concernés par ce texte ? À aucun moment, on ne mentionne les schémas d'aménagement régionaux (SAR). Quand serons-nous concernés par la politique menée en matière d'artificialisation ?
Monsieur Vigier, la montagne est évidemment au cœur de nos préoccupations. C'est si ce texte n'est pas adopté que nous restons dans la situation où l'on n'en tient pas compte. Il est fait explicitement mention des territoires de montagne dans les décrets et dans une partie des articles de la proposition de loi. L'article 6 précise que l'on doit tenir compte des dynamiques passées. C'est la meilleure des garanties : compte tenu de la sobriété de ces territoires, l'effort qu'on leur demandera sera nécessairement moindre, en pourcentage.
Monsieur de Lépinau, il n'est pas exact que le ZAN empêchera de construire des logements sociaux. D'abord, 86 % des logements sociaux construits sont de type collectif – contre 44 % pour l'ensemble des logements. Les logements sociaux ont toujours été les plus économes en foncier, ne serait-ce que parce qu'ils sont bien plus souvent construits dans les villes que dans la ruralité.
J'ajoute que le parc social ne se développe pas seulement par la construction de logements neufs. Les bailleurs achètent aussi des logements dans le parc existant – 10 % du parc social proviennent de ces acquisitions, sur les dix dernières années.
Le ZAN n'interdit pas de construire. La densité moyenne doit augmenter, ce qui n'interdit pas le maintien de maisons individuelles : si on divise tout par deux, la taille moyenne du jardin dans la moitié des constructions pavillonnaires sera de 600 mètres carrés plutôt que de 1 200 mètres carrés.
Le ZAN n'empêche pas non plus de respecter le SRU. J'ajouterai même que des milliers de communes sont déjà conformes au ZAN, simplement parce qu'elles n'ont plus un seul mètre carré pour construire !
J'en viens aux évolutions démographiques. Le Parlement a choisi, lorsqu'il a voté la loi « Climat et résilience », de respecter la philosophie de la Convention citoyenne, c'est-à-dire de définir une règle nationale. Les parlementaires ont tout de même estimé qu'on ne pouvait pas imposer à tout le monde une division par deux : on aurait permis beaucoup à des gens qui ont beaucoup artificialisé, et presque rien à des gens qui ont été sobres. Vous avez donc décidé que la répartition serait opérée au niveau des régions. Mais aucune différence n'a été faite entre les régions selon qu'elles gagnent ou perdent des habitants : on a considéré que les trajectoires seraient divisées par deux. Par ailleurs, les pertes démographiques ne sont pas définitives, il y a des dynamiques qui peuvent s'inverser, grâce aux projets de réindustrialisation par exemple. La perspective, c'est donc bien celle d'une division par deux, reflétée par les enveloppes régionales. L'application dépendra de la pression démographique, qui n'est pas la même partout.
En ce qui concerne la fiscalité, je souligne le succès du fonds « friches » – il va falloir compléter les crédits. Je crois au principe pollueur-payeur, donc au principe artificialisateur-désartificialisateur : il faudrait imposer une sorte de surtaxe au moment de l'artificialisation pour abonder un fonds. S'il y a une privatisation de la rente et une nationalisation de la dépollution, on ne s'en sortira pas ! La fiscalité doit accompagner nos actions, c'est très clair.
Les friches ne doivent pas seulement être dépolluées, mais répertoriées : nous devons établir une stratégie. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie, et moi-même avons confié une mission en ce sens à M. Rollon Mouchel-Blaisot, père du plan Action Cœur de ville. Les friches devront être prioritaires pour des projets de réindustrialisation : il y a des routes, de l'électricité, des réseaux, donc tout peut aller très vite.
Monsieur Ray, sur la question de la garantie rurale, vous me demandez s'il est juste de donner la même chose à tout le monde. Je vais vous faire une confidence : c'est la ligne que j'ai tenue au Sénat avant d'être mis en minorité de telle façon que j'ai compris que le « 1 % » avait moins de chance de prospérer que le « 1 hectare ». Je ne défends plus le 1 %, car j'ai compris que les territoires ruraux voulaient savoir tout de suite à quoi ils avaient droit. Le calcul en pourcentage revient à la même chose – 1 % de l'artificialisation totale du pays, cela fait 35 000 hectares, or nous avons 35 500 communes –, mais avec des disparités extrêmes, car on donne alors très peu à certaines communes rurales, par exemple des communes de montagne qui ont des obligations de continuité fortes, et beaucoup à d'autres, qui ont pourtant parfois beaucoup artificialisé. Le 1 % n'est pas forcément une récompense de la vertu. J'assume donc qu'il serait souhaitable d'aller vers le 1 hectare.
Madame Pochon, nous ne traiterons pas tous les problèmes en un seul texte ! Le président Kasbarian défendra à l'automne, avec Mme Le Meur notamment, un texte qui portera en particulier sur les locations saisonnières.
En ce qui concerne la rénovation, Olivier Klein, Agnès Pannier-Runacher et moi-même avons déjà fait quelques annonces. Nous annoncerons plus tard les crédits budgétaires attribués à cette politique : il n'y a pas que les maisons individuelles ; il faut aussi traiter de l'accompagnement du logement social – même si le parc moyen est de meilleure qualité – et du bâti public – 1 milliard de mètres carrés tertiaires sont concernés.
S'agissant enfin des outre-mer, nous vous proposerons une modulation des règles, rendue nécessaire tant par l'évolution démographique que par la réalité des documents d'urbanisme.
Nous en venons à l'examen des articles 3, 6, 8, 10 et 13, qui ont été délégués à la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Je vous rappelle que nous reprenons la totalité des amendements adoptés par cette commission, comme nous nous y sommes engagés.
Chapitre Ier Favoriser le dialogue territorial et renforcer la gouvernance décentralisée
Article 3 (examen délégué) : Conférences régionales de gouvernance de la politique de réduction de l'artificialisation des sols
La commission adopte successivement les amendements CE465, CE467, CE468, CE469, CE470, CE471, CE472, CE473, CE474, CE475, CE476, CE477, CE478, CE479, CE480, CE481, CE482 et CE483 de la commission du développement durable.
Elle adopte l'article 3 modifié.
Nous n'avons pas pu nous exprimer sur cette série d'amendements ! Notre groupe voulait défendre ses positions. Nous aurions dû pouvoir le faire. Le petit jeu de votes à toute vitesse est un peu ridicule et n'est pas à la hauteur des enjeux.
Monsieur Martinet, ce qui n'est pas à la hauteur, c'est de mépriser la procédure de délégation sur le fond. Quand notre commission délègue des articles à une autre commission, nous nous engageons à respecter les votes de cette commission. Nos votes sont donc formels : nous tenons simplement notre parole. Manifestement, cela ne vous amuse pas. Mais c'est une procédure tout à fait classique, utilisée par toutes les commissions : nous reprenons les votes de la commission à laquelle nous avons délégué des articles, sans discussion – même le rapporteur pour avis de la commission du développement durable ne s'est pas exprimé. Sinon, cela ne marche plus !
Vous pourrez vous exprimer dans l'hémicycle, modifier, ajouter, casser, amender, rejeter sur tous les articles.
Je sais que vous aimez les polémiques, mais tous ceux ici qui ont un peu de bouteille le savent parfaitement : c'est une procédure connue et que nous respectons à la lettre.
Chapitre II Mieux prendre en compte les spécificités des territoires
Article 6 (examen délégué) : Renforcement de la prise en compte des efforts passés de sobriété foncière
La commission adopte l'amendement de suppression CE489 de la commission du développement durable.
En conséquence, l'article 6 est supprimé.
Article 8 (examen délégué) : Instauration d'une part réservée au développement territorial
La commission adopte l'amendement de suppression CE490 de la commission du développement durable.
En conséquence, l'article 8 est supprimé.
Article 10 (examen délégué) : Prise en compte des spécificités des communes littorales soumises à l'érosion côtière, des zones de montagne et des communes ultramarines dans les documents d'urbanisme
La commission adopte successivement les amendements CE484 et CE485 de la commission du développement durable.
Elle adopte l'article 10 modifié.
Chapitre IV Prévoir les outils pour faciliter la transition vers le « ZAN »
Article 13 (examen délégué) : Prise en compte des efforts de renaturation avant 2031 et non-comptabilisation des espaces temporairement artificialisés
La commission adopte successivement les amendements CE487 et CE488 de la commission du développement durable.
Elle adopte l'article 13 modifié.
Chapitre Ier Favoriser le dialogue territorial et renforcer la gouvernance décentralisée
Avant l'article 1er
Amendements identiques CE59 de M. Jean-Yves Bony, CE126 de M. Vincent Descoeur, CE141 de M. Thibault Bazin et CE201 de M. Philippe Lottiaux.
Cette proposition de loi entend lever les difficultés rencontrées pour appliquer la loi « Climat et résilience ». Nous proposons de rédiger l'article 191 de cette dernière en écrivant « afin de tendre vers l'objectif national d'absence de toute artificialisation nette des sols en 2050 » plutôt que « afin d'atteindre ».
L'objectif de la loi doit rester incitatif, programmatique, a fortiori eu égard au caractère lointain de l'année 2050.
On peut se fixer des objectifs à très long terme – l'année 2050 entre dans cette catégorie. L'intérêt des lois de programmation est de fixer des objectifs à cinq ans. Il faut distinguer les deux. Dans le premier cas, il est préférable d'écrire que l'on « tend » vers un objectif ; dans le second, je comprends que le législateur soit plus prescriptif.
Derrière cet amendement, il y a une question juridique. Les contentieux se développent ; je pense notamment à « l'affaire du siècle » : l'État a été assigné en justice pour inaction. Or il paraît difficile de mener des actions en fonction d'objectifs aussi lointains. Cet amendement sécuriserait notre dispositif.
Nous n'allons pas refaire la loi « Climat et résilience » ! Vous proposez de revenir sur des objectifs que nous nous sommes fixés il y a deux ans, alors qu'ils le sont pour trente ans et que nous avons à peine commencé à les décliner. Ce n'est pas à la hauteur des discussions que nous avons eues en amont sur les enjeux environnementaux de ce texte. Avis très défavorable.
Avis défavorable. Même la majorité sénatoriale n'est pas allée jusque-là, or j'aimerais que les deux chambres s'accordent sur un texte. J'entends votre argument sur la sécurité juridique, monsieur Bazin, mais voter cet amendement serait perçu comme une volonté de retour en arrière. Cet amendement inutilement déclaratif ne répond pas au besoin de souplesse et ne nous permettra pas d'avancer.
Monsieur le ministre, vous voulez établir des règles par décret par souci d'efficacité. Nous trouvons le texte plutôt bien, donc nous ne protestons pas trop fort, mais ne prenez pas la mauvaise habitude de priver le Parlement de sa capacité à légiférer !
Reconnaissez qu'un décret n'a pas force de loi, et ne peut pas remettre en cause la loi « Climat et résilience ». Les objectifs de ZAN dans les Sraddet y ont valeur prescriptive. Vous pouvez difficilement, pour rassurer les sénateurs avant les élections sénatoriales, prétendre que vous allez pouvoir les assouplir par décret !
Remplacer la loi par des décrets n'est pas une méthode générale, je vous l'accorde ! Les décrets ne proposent que des précisions. Mais cela nous permet, par exemple, d'écarter les cibles chiffrées, vécues comme une tutelle des régions sur les communes.
Notre amendement ne remet pas en cause l'objectif ! Nous proposons d'écrire que l'on « tend vers » l'objectif. On ne peut pas mentir : nous allons agir pour tendre vers l'objectif.
Vous voulez un accord avec le Sénat. Mais le texte des sénateurs est déjà un compromis, pas le texte idéal qu'aurait voulu la majorité sénatoriale. Ils auraient voulu assouplir bien davantage !
La commission rejette les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CE184 de M. Philippe Lottiaux.
Amendement CE23 de M. Guy Bricout.
Cet amendement vise à préciser que les objectifs de réduction de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) et d'artificialisation ne concernent pas les parties actuellement urbanisées.
L'amendement est en partie satisfait. Je vous rassure, on parle bien d'artificialisations nouvelles.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CE99 de M. Paul Molac et CE368 de M. André Chassaigne (discussion commune).
Je m'inquiète des dynamiques démographiques. Certaines régions sont très attractives ; la Bretagne accueille ainsi 20 000 nouveaux habitants par an, même si on leur dit bien qu'il pleut tout le temps ! Cela crée déjà une pression sur le foncier. Une explosion des prix aurait des conséquences sociales et économiques délétères. Or la politique de réduction de l'artificialisation entraînera une raréfaction du foncier, ce qui ne peut que faire augmenter les prix.
Il est juste de mener une politique différenciée et territorialisée en matière de ZAN, mais il faut aussi promouvoir un aménagement équilibré du territoire. C'est ce que vise à préciser l'amendement du président Chassaigne.
Nous partageons vos préoccupations : les objectifs de la loi « Climat et résilience » doivent être déclinés au plus près des territoires. Il ne s'agit pas d'appliquer de façon uniforme une formule mathématique !
Vos amendements sont en grande partie satisfaits par l'article 191 de cette même loi, qui prévoit que « ces objectifs sont appliqués de manière différenciée et territorialisée ». Cela relève des régions et des intercommunalités, qui établissent les documents d'urbanisme. Notre approche, c'est de faire confiance aux élus, qui sont les plus à même de savoir comment répartir au mieux les droits à construire au sein de leur territoire : ils connaissent les enjeux en matière de développement ou de logement notamment.
Nous voulons, nous aussi, un aménagement équilibré, monsieur Jumel. Nous nous efforçons de le promouvoir notamment grâce à la garantie rurale.
Monsieur Molac, je le dis sans malice, la région Bretagne nous a dit vouloir réussir le ZAN dès 2040. Elle subit en effet une pression démographique importante. Loin de moi l'idée de me faire l'avocat du diable, mais si l'on attribue davantage de foncier pour accueillir des habitants, alors nous en aurons moins pour préserver nos espaces naturels et agricoles ; or ceux-ci font partie du charme de nos régions, et ils ont besoin du ZAN. Nous avons fait le choix de considérer que les dynamiques démographiques peuvent changer : il n'y a pas de certitude du déclin des territoires de l'Est ou du Nord. Nous voudrions sortir de la prédestination tout en préservant nos espaces naturels.
Ce qui est rare est cher, et la raréfaction du foncier va accroître les prix des logements. Or nombre de nos concitoyens ont déjà du mal à se loger.
Lorsqu'on construit, il serait peut-être utile de donner la priorité au logement destiné à l'habitation permanente, avant l'hébergement touristique – sans interdire ce dernier, car les communes ont besoin de vivre.
J'appelle votre attention sur les tensions qui se font jour sur certains territoires, en Corse, en Bretagne ou ailleurs. Certains citoyens locaux se sentent dépossédés de la possibilité de s'y loger. Gouverner, c'est prévoir, mais en matière de logement je vois que l'on tarde. Je crains une explosion sociale, et je voudrais absolument l'éviter.
Vous dites que l'objectif d'aménagement équilibré du territoire est inscrit dans la loi. J'ai fait des Sraddet, j'ai fait des PLU, j'ai participé à l'élaboration des SCoT – bref, j'ai eu la chance d'occuper tous ces mandats et cela me permet de savoir de quoi je cause. Avec la loi NOTRe – la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République –, nous avons été confrontés à une métropolisation, à un véritable déménagement du territoire : vouloir rééquilibrer l'aménagement du territoire, même lorsqu'il s'agit d'appliquer la loi « Climat et résilience », ne me paraît pas déconnecté de la réalité ! Si nous l'écrivons dans la loi, les préfets devront y veiller.
Nous traiterons de la question des meublés touristiques et des équilibres lors de l'examen de la proposition de loi portée par Mme Le Meur.
Monsieur Molac, s'agissant de la spéculation, nous aborderons tout à l'heure les dispositions relatives au droit de préemption renforcé et sur le sursis à statuer ZAN.
Nous attribuons des hectares, et non des habitants : le fait qu'il y ait bientôt 400 000 habitants de plus en Bretagne pose surtout la question des formes urbaines.
Monsieur Jumel, d'autres que vous ont été confrontés à ces documents d'urbanisme. Écrire en début de texte que l'aménagement est équilibré me paraît moins utile que d'installer des garde-fous qui éviteront des interprétations préfectorales divergentes : c'est la garantie rurale que nous examinerons tout à l'heure.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CE370 de M. Davy Rimane.
M. Rimane demande que la Guyane n'ait pas à atteindre les objectifs de réduction de l'artificialisation des sols. Le territoire de la Guyane, qui est à plus de 90 % la propriété de l'État, fait en effet face à une dynamique démographique et des enjeux de développement manifestement incompatibles avec une réduction significative de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers.
L'amendement est satisfait. Les outre-mer doivent évidemment être traités de manière particulière, et ils ne sont pas soumis à l'objectif de réduction de moitié à l'horizon 2031. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Cibler la Guyane, qui abrite une partie de l'Amazonie, me semble une mauvaise idée. Je préfère que la loi prévoie un traitement différencié pour tous les territoires ultramarins.
L'amendement est retiré.
Amendement CE32 de M. Guy Bricout.
La loi « Climat et résilience » fixe des objectifs chiffrés globaux : l'artificialisation d'une parcelle cultivée en périphérie de village ou d'une prairie au cœur d'un corridor écologique sera comptabilisée de la même manière que le comblement d'une dent creuse sans enjeu agricole ou un cœur d'îlot en centre urbain.
Cette vision réductrice de la gestion de l'espace éloigne les élus des véritables enjeux auxquels doivent répondre les documents d'urbanisme : protéger la ressource en eau, pérenniser l'activité agricole, soutenir la transition énergétique, répondre aux besoins en logements.
Pour atteindre l'équilibre défini dans les principes généraux du code de l'urbanisme, une approche qualitative et pas seulement quantitative permettrait de mieux tenir compte de la valeur écologique et agronomique des sols.
Les dents creuses et les cœurs d'îlot ne sont pas considérés comme des espaces naturels, agricoles et forestiers ; ils ne sont pas concernés jusqu'en 2031.
Je salue votre volonté de préserver la valeur agricole des sols. La loi « Climat et résilience », comme les décrets relatifs à la nomenclature, prennent cet aspect en considération.
L'amendement étant en grande partie satisfait, j'en demande le retrait ; à défaut, avis défavorable.
S'agissant des dents creuses, tout dépend de l'interprétation de la direction départementale des territoires et de la mer. Certaines DDTM veulent limiter les constructions à la campagne et encadrent fortement la définition : pour qu'ils acceptent qu'une parcelle est une dent creuse, il faut qu'elle soit à l'intérieur d'un village et entièrement entourée par des maisons. J'ai vu des situations curieuses, où l'on a une maison à droite, une maison à gauche, mais où la parcelle du milieu n'est pas considérée comme une dent creuse. Pourtant, je sais bien qu'on n'y verra jamais de tracteur, surtout s'il y a un bois derrière ! Il faudrait revoir les définitions. Les parcelles simplement à l'abandon entre deux maisons sont nombreuses, et il me paraît étrange qu'on n'arrive pas à les urbaniser.
Vous avez raison, il faut clarifier techniquement ce point dans les instructions, car il ne s'agit pas d'artificialisation dans un cœur de bourg. Urbaniser une dent creuse plutôt qu'un espace autour de la commune répond au plus élémentaire bon sens.
La commission rejette l'amendement.
Article 1er : Allongement des délais d'intégration des objectifs de réduction de l'artificialisation dans les documents de planification et d'urbanisme, et simplification de l'évolution du Sraddet
Amendement de suppression CE304 de Mme Lisa Belluco.
L'article 1er constitue une régression à plusieurs niveaux du droit de l'environnement, notamment des acquis et des objectifs de la loi « Climat et résilience », puisqu'il reporte à nouveau l'adaptation des Sraddet, des SCoT et des PLUi aux objectifs de sobriété foncière. Il réduit le délai d'approbation par le préfet du Sraddet, ce qui empêchera un examen minutieux du document, et il prévoit une consultation simultanée des personnes publiques associées et du public, alors que celle des premières est supposée se tenir avant celle du second pour l'éclairer.
Je sais, monsieur le rapporteur, que vous partagez certains de ces arguments, donc je vous propose que nous supprimions ensemble cet article.
Il ne faut en effet pas reporter pour reporter et il n'est pas nécessaire de reporter à nouveau les délais pour les SCoT, les PLU et les PLUi : chaque collectivité territoriale sait depuis 2021 qu'elle devra modifier ses documents d'ici à 2026 ou 2027, horizon suffisamment éloigné pour mener cette tâche à bien. Plus on se rapproche de 2031, échéance à laquelle l'objectif de réduction de 50 % du rythme d'artificialisation doit être atteint, plus il est difficile d'intégrer cette cible dans les documents d'urbanisme.
Néanmoins, en souhaitant supprimer l'intégralité de l'article, vous proposez de supprimer aussi les délais accordés pour les Sraddet. Il est vrai qu'ils ont déjà été revus, mais la proposition de loi cherche à avoir un effet sur les outils à décliner et comporte, pour ce faire, un volet important sur la territorialisation. Il me semble préférable d'accorder un léger délai aux Sraddet, que nous aurons l'occasion d'évoquer plus tard. Je vous demande donc de retirer l'amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Je ne souhaite pas que l'article soit supprimé. On a besoin d'un temps de discussion pour les Sraddet. Il ne doit certes pas être infini – ma ligne rouge est celle des échéances de 2031 et de 2050 –, mais il est souhaitable de se laisser quelques mois de plus pour avancer, compte tenu, entre autres, des amendements que vous avez fait adopter hier, madame Belluco, qui visent à élargir la conférence du ZAN à des personnalités extérieures qui renseigneront les trajectoires.
Combien de temps durera cette prolongation ? Six mois ? Neuf mois ? Les positions sont diverses, mais je suis en tout cas opposé au refus de donner un peu de temps aux régions pour discuter avec les communes, du moment que l'on ne touche pas à l'échéance de 2031.
Depuis les dernières lois sur l'environnement, des événements imprévus se sont produits ; certains d'entre eux ont compliqué les rencontres et les échanges – la crise sanitaire a même empêché les premières pendant un temps –, et l'installation des conseils municipaux et intercommunaux a été retardée. L'inflation a engendré des défis pour les collectivités territoriales et a mobilisé leur attention.
La concertation requiert du temps et des moyens – elle n'est pas gratuite –, et les élus locaux ont dû faire face à des changements de périmètre de différentes structures. Les retours du terrain nous enjoignent de donner du temps supplémentaire pour construire des stratégies partagées. Je souhaite que l'on maintienne le report et je voterai donc contre l'adoption de cet amendement de suppression.
Il ne faudrait pas non plus mettre en difficulté les collectivités territoriales en leur laissant trop de temps. Plus on en prend pour élaborer les objectifs, les trajectoires et les documents, plus on se rapproche de l'échéance de 2031 et plus on risque de voir une collectivité territoriale approuver son document, par exemple en 2028, et se rendre compte que son enveloppe d'artificialisation est vide jusqu'à 2031.
Les régions ont bien avancé sur les Sraddet – je sais, en tout cas, que la Nouvelle-Aquitaine est allée loin dans la définition de la trajectoire de réduction de l'artificialisation d'ici à 2031 –, mais j'entends qu'un petit délai supplémentaire puisse leur être accordé.
Je fais confiance au rapporteur et je retire l'amendement.
L'amendement est retiré ainsi que l'amendement CE305 de Mme Lisa Belluco.
Amendements CE211 de M. Stéphane Delautrette, CE164 de Mme Mathilde Hignet, amendements identiques CE14 de M. Guy Bricout, CE212 de M. Stéphane Delautrette et CE421 de Mme Lisa Belluco, amendements identiques CE272 de M. Julien Dive et CE318 de M. Vincent Rolland, et amendement CE188 de M. Vincent Descoeur (discussion commune).
Mon amendement devrait recueillir l'assentiment du rapporteur puisqu'il vise à reporter l'entrée en vigueur des Sraddet modifiés pour intégrer les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et de réduction de la consommation d'Enaf. Toutefois, le délai supplémentaire, si nécessaire qu'il soit, doit être contenu et nous proposons de le réduire de quarante-deux mois à trois ans après la promulgation de la loi « Climat et résilience ».
Nous ne souhaitons pas que les SCoT, les PLU et les documents d'urbanisme des communes bénéficient d'un même report, car les délais qui ont été accordés pour leur élaboration sont suffisants. En outre, il faut tenir compte du calendrier électoral que les prochains élus doivent avoir le temps de déployer.
Nous souhaitons supprimer le report d'un an de l'entrée en vigueur des documents régionaux de planification modifiés en vue d'intégrer les objectifs et les trajectoires relatifs à la lutte contre l'artificialisation des sols.
Ce report constituerait un énième recul pour ces documents régionaux de planification, dont le délai d'élaboration sera ainsi passé de deux ans à trente mois, puis à quarante-deux mois. Ces reculs envoient un signal négatif alors qu'il est urgent de restaurer les milieux humides et de limiter au maximum l'artificialisation des sols. Je comprends que la concertation nécessite un peu de temps, mais il faut maintenant agir.
Cet amendement identique vise à donner plus de temps à la concertation pour ne pas tomber dans la précipitation ; il faudra également revoir certaines échéances fixées dans d'autres textes.
Il vise à reporter d'un an supplémentaire le délai d'entrée en vigueur des objectifs de réduction d'artificialisation fixés par les documents d'urbanisme locaux pour le porter à cinquante-quatre mois. Le but est d'éviter les contentieux liés aux consultations des personnes publiques ainsi que la réduction du temps de consultation.
Je suis favorable à un report du délai pour les Sraddet puisque le texte aura une incidence importante – du moins, je l'espère – sur la territorialisation, au travers notamment de l'introduction de projets d'intérêt régionaux, que nous aborderons tout à l'heure. Il serait déraisonnable de maintenir l'échéance de février 2024 pour l'adoption des Sraddet : nous sommes en juin 2023, une commission mixte paritaire (CMP) se prononcera sur le texte, une fois celui-ci promulgué, il faudra prendre des décrets, puis les acteurs locaux devront s'en saisir et lancer les consultations ; pour avoir été conseiller régional, je ne vois pas comment tout pourrait être accompli avec sérieux avant février 2024.
Je soutiens un report de six mois pour les Sraddet, jusqu'à août 2024 : ce délai me semble raisonnable, d'autant que les régions ont déjà commencé leur réflexion. Sur la façon de décliner les objectifs, elles ont déjà dû avancer ; en revanche, elles devront se pencher sur l'intégration des projets d'intérêt régionaux et sur le degré de territorialisation. Il me semble possible de traiter ces questions d'ici à août 2024.
J'ai déjà dit que je ne suis pas favorable à un report des SCoT et des PLUi.
Sur le fond, je suis favorable à l'amendement CE211 de M. Delautrette, qui traduit cette double position. Les amendements de repli CE14 et identiques et CE449, qui n'a pas encore été présenté, découplent le délai du Sraddet et celui des SCoT et des PLUi : sur le fond, mon avis ne change évidemment pas, mais je tiens à vous alerter sur le fait que l'adoption du CE211 ferait tomber plusieurs amendements dont l'un porte sur les outre-mer. Ce serait dommage, donc je vous demande, monsieur Delautrette, de retirer votre amendement pour que nous puissions débattre de l'ensemble des sujets, au profit des amendements CE14 et identiques.
Dès lors que l'on décide d'allonger le délai, je m'en remets à la sagesse de la commission pour déterminer le report idoine.
J'aimerais que M. Delautrette retire l'amendement CE211 pour que nous puissions examiner les amendements suivants, qui traitent également des SCoT et des Plui, mais aussi des outre-mer – ces territoires sont importants.
Je suis surpris de cette demande : si un amendement reçoit un avis favorable, on le vote. Cela ne doit pas pour autant priver les collègues de s'exprimer sur les sujets qu'ils jugent opportuns, notamment en séance publique. Je ne retire pas mon amendement.
Dans ce cas, je serai défavorable à son adoption, car celle-ci conduirait à traiter les outre-mer comme le reste de la métropole. Or des engagements précis ont été pris en faveur de ces territoires, dans le cadre du compromis que nous sommes en train de bâtir.
Le groupe GDR accorde une attention très particulière aux outre-mer, donc j'entends votre argument, monsieur le rapporteur. Pourquoi ne pas sous-amender l'amendement de M. Delautrette ?
Une fois la discussion d'un amendement engagée, on ne peut plus amender celui-ci en commission. En revanche, si l'amendement de M. Delautrette était maintenu et adopté, il ferait tomber de nombreux amendements ; libre à vous ensuite d'amender sa rédaction en vue de la séance publique.
Nous sommes évidemment attachés à la prise en compte des outre-mer. Monsieur le président, je vous demande de suspendre la réunion quelques instants afin de trouver une solution.
La réunion est suspendue quelques minutes.
Je ne suis pas convaincu par la méthode, mais je retire l'amendement, car nous sommes très attachés aux territoires ultramarins.
L'amendement CE211 est retiré.
Successivement, la commission rejette l'amendement CE164 et adopte les amendements identiques CE14, CE212 et CE421.
En conséquence, les amendements CE272, CE318 et CE188 tombent.
Amendement CE132 de M. Thibault Bazin.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec différents textes de loi, notamment avec le projet de loi relatif à l'industrie verte. Il convient d'intégrer dans ce texte des objectifs de développement industriel – le Président de la République a fait des annonces à ce sujet. Pour produire à nouveau en France, il faudra déployer des politiques d'accompagnement. Je suis sûr que vous serez sensible à cet amendement, monsieur le président.
Nous sommes évidemment sensibles au développement industriel du pays, qui constitue l'une de nos priorités. Toutefois, si un besoin de coordination se faisait jour, le moment opportun pour y procéder serait l'examen du projet de loi relatif à l'industrie verte. Au reste, bien que nos intentions soient claires, les débats sur le projet de loi relative à l'industrie verte n'ayant pas commencé, il ne faut pas préjuger de son contenu. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je retire de mon expérience de la précédente législature que nous avons parfois voté des textes qui n'étaient pas forcément cohérents entre eux. En particulier, les dispositions sur le logement de la loi « Climat et résilience » ne correspondaient pas à celles de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan).
Nous fixons souvent des objectifs sans prévoir les moyens de les atteindre, une erreur qu'il ne faudrait pas commettre dans la loi relative à l'industrie verte, dont un des enjeux sera foncier. Il n'est pas évident de reconstruire des sites d'industrie chimique à des endroits qui n'en accueillaient pas auparavant.
Si nous n'assurons pas la coordination entre les textes, le développement pourrait s'en trouver menacé. Je maintiens mon amendement, car le projet de loi relatif à l'industrie verte a déjà été déposé ; il est donc possible d'assurer une coordination avec cette proposition de loi, et la navette parlementaire en serait l'occasion.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE395 de M. Paul Molac.
Cet amendement, dont je crains qu'il soit celui qui a empêché l'adoption du CE211 de M. Delautrette, vise à fixer une trajectoire d'artificialisation des sols pour les territoires d'outre-mer, en adaptant la loi « Climat et résilience ».
La commission adopte l'amendement.
Amendements identiques CE432 de M. Bastien Marchive, CE165 de Mme Catherine Couturier et CE449 de Mme Lisa Belluco.
Il vise à ne pas reporter les délais pour les SCoT et les PLUi – je ne reviens pas davantage sur le sujet.
Il faut avancer, et je regrette à ce titre le retrait de l'amendement CE211 de M. Delautrette. Des discussions sont déjà engagées pour l'intégration des objectifs d'artificialisation des sols dans les Sraddet. J'ai entendu la préoccupation du ministre de donner aux régions le temps de consulter tous les partenaires pour élaborer ces documents, mais le délai actuellement prévu me paraît suffisant, d'autant que les capacités d'ingénierie techniques sont disponibles.
L'amendement vise à ne pas reporter l'élaboration des SCoT et des PLUi : certains territoires n'ont pas élaboré ces documents, et il aurait été bon de maintenir le même délai pour l'ensemble des objectifs.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l'amendement CE451 de M. Vincent Descoeur tombe.
Amendement CE92 de M. Jean-Félix Acquaviva.
En Corse, on considère que l'absence de SCoT est palliée par le plan d'aménagement et de développement durable de Corse (Padduc), qui est un Sraddet renforcé sur le plan réglementaire puisqu'il permet de créer des espaces stratégiques avec lesquels les documents d'urbanisme doivent être compatibles. Il n'y a qu'un SCoT approuvé à ce jour en Corse, deux autres étant en gestation ; la situation est très spécifique puisque 58 % des communes sont soumises au règlement national d'urbanisme.
Le contentieux relatif à l'interprétation du Padduc étant important, il semble nécessaire de préciser clairement que le Padduc s'applique là où il n'y a pas de SCoT.
Vous considérez que le Padduc peut se soustraire aux documents d'urbanisme d'un rang plus élevé lorsque ceux-ci n'ont pas été adoptés. C'est en fait déjà le cas, donc l'amendement est satisfait. J'entends le besoin de clarification que vous exprimez, mais la loi ne laisse pas place au doute sur ce point. Nous pouvons regarder, d'ici à la séance publique, si quelques précisions sont nécessaires, mais votre requête est déjà satisfaite. Demande de retrait ; sinon, avis défavorable.
J'insiste parce que le contentieux est important, preuve que les choses ne sont pas si claires. Si cela va sans dire, écrivons-le ! Cette clarté aidera le tribunal administratif. Les enjeux de spéculation foncière et immobilière sont énormes, donc je souhaiterais que l'on insère une telle précision dans le texte.
Je vous propose que nous regardions la question avec le ministère compétent en la matière d'ici à la séance publique.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE15 de M. Guy Bricout.
Il vise à ce qu'un délai supplémentaire soit accordé pour l'élaboration des PLU, dont le calendrier actuel devrait être maintenu, en cas de procédure de PLUi prescrite à compter de la promulgation de la loi « Climat et résilience ». L'objectif est d'inciter les communes encore non couvertes à se doter de ce document pour réduire le nombre de communes régies par le RNU. Les territoires entrant dans cette démarche bénéficieraient d'un délai supplémentaire de deux ans pour élaborer leur PLU.
Je partage votre volonté d'encourager l'ensemble des communes à se doter de documents d'urbanisme : elles se rendraient ainsi service, en particulier à l'aune des enjeux que nous évoquons aujourd'hui. Néanmoins, le délai que vous proposez me semble excessif : la décennie actuelle prend fin en 2031, donc une échéance fixée à 2029 me paraît trop tardive pour intégrer les objectifs de la loi « Climat et résilience ». Cela engendrerait une forme de gel du développement et de la capacité à construire de la commune dans les deux dernières années de la période. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE93 de M. Jean-Félix Acquaviva.
Cet amendement est crucial. Il vise à ce que les objectifs de réduction de la consommation d'espaces soient définis en Corse dans le Padduc et s'appliquent au RNU, ce que ne prévoit pas la loi générale.
Dans notre île, 58 % des communes sont soumises au RNU : les exclure reviendrait à donner une prime à celles qui n'ont pas adopté de document d'urbanisme. Dans un contexte de spéculation foncière et immobilière, de nombreuses communes littorales, qui concentrent 80 % des transactions immobilières en Corse, sont régies par le RNU et ont bénéficié d'une permissivité assez déconcertante de la part des services de l'État durant de nombreuses années. L'ampleur de l'artificialisation des sols donne le vertige, puisque sa croissance a atteint 39 % dans certaines communes en dix ans. Le parc de logements neufs croît, à l'inverse de la situation hexagonale, et il est principalement constitué de résidences secondaires.
Certaines communes restent au RNU car leur petite taille ne leur offre pas l'ingénierie suffisante, d'autres parce qu'elles sont la proie de l'appétit financier de la voyoucratie – les maires renoncent à se prononcer sur la constructibilité d'un terrain dans un document d'urbanisme.
Il faut donc que le Padduc comporte une clause stipulant que ses objectifs s'appliquent également aux communes soumises au RNU : il s'agit d'un enjeu sociétal crucial pour l'île.
Vous soulevez beaucoup de sujets importants. Une commune au RNU est soumise à des règles plus dures puisqu'elle doit recevoir l'accord de la préfecture pour chaque projet. L'État veille à la déclinaison des objectifs en la matière. Quelque part, votre amendement est satisfait, et le cadre actuel est même plus protecteur que votre proposition.
En outre, nous évoquerons tout à l'heure la garantie rurale, notamment son conditionnement à l'engagement d'élaborer un document d'urbanisme permettant de sortir des difficultés que vous évoquez.
Derrière votre question, il y a aussi celle de l'accompagnement en matière d'ingénierie. Cet aspect n'entre pas dans le champ de la proposition de loi, même si nous aborderons tout à l'heure la mise à disposition des données, mais il s'agit d'un élément central pour que les communes élaborent des documents d'urbanisme propres à dissiper les doutes. Reste que les textes sont clairs : une commune au RNU doit prendre en compte certaines orientations dans le cadre de ses projets, et la préfecture y veille.
J'insiste, car la situation crée des tensions très importantes. J'ai parlé de voyoucratie.
Je répète les chiffres que le ministère de l'intérieur connaît : 80 % des transactions immobilières concernent trente-cinq communes, la plupart situées sur le littoral et soumises au RNU ; l'artificialisation des sols des communes a augmenté de 39 % en dix ans, soit 4 437 mètres carrés artificialisés par habitant gagné, 85 % des habitations étant des résidences secondaires, le tout avec l'autorisation préfectorale. La dérogation est devenue la règle.
Pour mettre un terme à cette dérive qui ne dit pas son nom, le juge de paix démocratique est le Padduc, qui doit s'appliquer aux communes régies par le RNU.
Toutes les mentions figurent dans l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme. Si vous introduisez une disposition spécifique sur la Corse, on en déduit a contrario qu'elle ne vaut pas pour l'Hexagone. Le régime national s'applique.
Je vous propose néanmoins que nous évoquions ensemble, avant la séance, les dysfonctionnements sur lesquels vous avez alerté par le biais de plusieurs amendements, en dépit de la clarté apparente de la loi.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CE91 de M. Jean-Félix Acquaviva.
Il s'agit d'affirmer la déclinaison territoriale du Padduc, à l'instar de ce qui existe pour les Sraddet. On nous dit que par déduction, elle s'applique déjà, mais nous serions rassurés s'il était mentionné dans l'article consacré au Padduc – article L. 4424-9 du code général des collectivités territoriales (CGCT) : « Cet objectif est décliné entre les différentes parties du territoire de la Corse. »
Comme pour l'amendement précédent, les dispositions nationales s'appliquent à la Corse. Votre demande est donc déjà satisfaite.
Je suis de l'avis du rapporteur. Je me tiens néanmoins à la disposition de M. Acquaviva.
J'ai été très sensible à l'argumentation de M. Acquaviva pour défendre l'amendement CE93 en vertu duquel les objectifs contraignants en matière d'artificialisation s'appliqueraient aux communes soumises au RNU en Corse. Il faut mettre fin à la spéculation et aux dérives que peut connaître aussi le littoral breton.
Monsieur le ministre, vous devez prendre l'engagement de vous assurer que la loi répond bien à la demande formulée dans l'amendement et d'en discuter avec les élus corses. Le sujet mérite d'être pris très au sérieux.
Je remercie M. Benoit pour son soutien. Nous ne pouvons en effet pas en rester là.
Si je suis votre raisonnement, il faut supprimer toutes les dispositions du CGCT relatives au Padduc. Pourquoi introduire le principe de la déclinaison territoriale pour les Sraddet et pas pour le Padduc ? L'argument de l'uniformité nationale a ses limites puisqu'on a jugé utile de créer le Padduc, lequel permet, à la différence du Sraddet, de définir des espaces stratégiques. Les documents d'urbanisme doivent être compatibles avec le Padduc, ce qui confirme sa spécificité réglementaire. En refusant de reconnaître la déclinaison territoriale du Padduc, vous prenez le risque d'ouvrir des contentieux dans un domaine spéculatif. Nous voulons clarifier les règles. Qui peut le plus peut le moins.
Nous avons quelques jours avant la séance pour nous assurer de la validité de notre raisonnement. Je fais droit à la demande de M. Benoit de vérifier que les objectifs d'artificialisation s'appliquent au Padduc. Nous voulons, comme vous, freiner la spéculation.
J'ai le sentiment que le problème porte davantage sur l'effectivité de la mise en œuvre de la loi au plan local que sur son contenu.
Il y a quelques jours, des discussions ont eu lieu sur les nouvelles souplesses institutionnelles qui pourraient être données à la Corse. Monsieur Acquaviva, je prends l'engagement de vérifier les divers points, et si nécessaire, de vous voir afin que des réponses claires soient apportées à votre questionnement légitime.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CE433 de M. Bastien Marchive, CE334 de M. Pascal Lavergne et CE361 de Mme Lisa Belluco.
Le Sénat a décidé de réduire à un mois le délai de consultation des personnes publiques associées sur les Sraddet. Compte tenu du nombre de collectivités qui soumettront pour avis, probablement de manière concomitante, des documents souvent volumineux, il semble déraisonnable de raccourcir des délais qui sont déjà brefs.
L'amendement vise donc à revenir au délai de droit commun de trois mois pour approuver le Sraddet.
Les régions auront des difficultés pour délibérer dans un délai d'un mois. Je suis favorable à l'accélération des procédures mais le délai de trois mois me semble raisonnable pour faire un travail de qualité dans le respect des règles démocratiques.
La commission adopte les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CE434 de M. Bastien Marchive, rapporteur.
La commission adopte l'article 1er modifié.
Article 2 : Rapport de prise en compte entre les règles du Sraddet concernant la lutte contre l'artificialisation des sols et les documents d'urbanisme locaux et justification des choix retenus en matière de territorialisation régionale
Amendements de suppression CE435 de M. Bastien Marchive, CE328 du Gouvernement, CE166 de M. Perceval Gaillard, CE335 de M. Pascal Lavergne et CE362 de Mme Lisa Belluco.
L'article 2 concerne le lien juridique entre les Sraddet et les documents infrarégionaux en matière d'artificialisation des sols.
La loi « Climat et résilience » et les décrets d'application consacrent la compatibilité, laquelle présente le double avantage d'éviter toute contrariété du document inférieur au document supérieur et de laisser la marge nécessaire à la territorialisation des objectifs du Sraddet.
Le Sénat a affaibli ce lien en exigeant une simple prise en compte des objectifs régionaux en matière d'artificialisation des sols. Je vous propose donc de supprimer l'article.
À la demande de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) et dans le souci de souplesse manifesté par le Sénat, nous supprimons le caractère prescriptif du Sraddet afin d'éviter une tutelle des régions sur les communes et les intercommunalités. Cela ne correspond ni à l'esprit de la loi ni à celui de la CMP et un recours a été engagé contre le décret qui impose le caractère prescriptif.
Il est proposé de renvoyer à un décret, négocié et approuvé par l'AMF, la définition d'un lien de compatibilité entre l'échelon régional, qui doit conserver un rôle d'orientation, et les communes. Il s'agit d'affirmer la trajectoire de sobriété foncière en laissant davantage de souplesse dans la mise en œuvre au niveau communal.
En vertu de l'article 2, les documents d'urbanisme doivent seulement prendre en compte et non plus être compatibles avec les dispositions relatives au ZAN contenues dans les Sraddet et les schémas d'aménagement régional (SAR). Il s'agit d'un recul majeur.
Nous veillerons à ce que le décret évoqué par M. le ministre ne reprenne pas des éléments de l'article dont nous demandons la suppression.
Très attaché au principe de libre administration des collectivités territoriales, je supporte mal la tutelle d'une collectivité sur une autre.
Peut-être ai-je mal compris, mais je ne suis pas totalement rassuré par les explications du ministre.
Vous prétendez supprimer le caractère prescriptif du Sraddet, mais le décret ne modifie pas les objectifs qui sont assignés au schéma par la loi « Climat et résilience » et qui, eux, s'imposent. En outre, dans le même décret, la déclinaison territoriale du Sraddet devient une faculté pour la région. Toutefois, si celle-ci choisit de l'exercer, le schéma redevient prescriptif.
Nous savons que le texte a vocation à rassurer les maires à la veille des élections sénatoriales. J'aimerais que des garanties sérieuses leur soient données.
Il s'agit pour nous d'un point dur. Nous sommes favorables à la suppression mais nous serons très vigilants sur la rédaction du décret – il n'est pas rare que les décrets disent de manière subtile l'inverse de ce que le législateur souhaitait.
L'intention de l'exécutif est-elle de conserver un lien de compatibilité dans le cas du Padduc ? Les élus y tiennent absolument. Si vous ouvrez la boîte de Pandore, ce sera la catastrophe. Compte de la situation particulière de la Corse, une clarification est nécessaire.
Nous soutenons la suppression de l'article. Sans compatibilité, nous n'avons plus d'assurance que les objectifs ZAN seront suffisamment pris en compte dans les plans locaux d'urbanisme (PLU) et les schémas de cohérence territoriale (SCoT). Nous prenons le risque de revenir sur l'un des seuls acquis forts de la loi « Climat et résilience ».
Nous tenons à alerter sur la suppression, dans le décret, du caractère prescriptif du Sraddet. Vous avez précisé que les régions devront fixer des règles de répartition pour atteindre l'objectif de réduction de 50 % de l'artificialisation en 2031 ; que le préfet aura recours au contrôle de légalité pour s'assurer du respect de la trajectoire dans les différents documents d'urbanisme ; et que la société civile pourra attaquer devant la juridiction administrative les documents d'urbanisme non conformes à la trajectoire. Un point nous inquiète néanmoins : la norme sera-t-elle suffisamment impérative pour que le contrôle puisse s'exercer ?
Nous soutenons la suppression de l'article qui remet en cause le caractère prescriptif des objectifs ZAN.
Je note toutefois que les attentes des groupes politiques favorables à la suppression de l'article sont bien différentes. C'est la difficulté de l'exercice. Le décret, en reprenant une partie du contenu de l'article, contribue à affaiblir les objectifs ZAN. Cela fait mon insatisfaction et la satisfaction des collègues sur les bancs de la droite. La méthode consistant à supprimer l'article pour confier la plume au Gouvernement nous prive d'un débat démocratique.
Le groupe Démocrate soutient la suppression de l'article puisque le décret comportera les éléments nécessaires. En outre, nous faisons confiance à la préfecture pour exercer le contrôle de légalité. Si tel n'était pas le cas, les associations ne manquent pas dans notre pays pour empêcher les projets de voir le jour. Je ne suis pas inquiet, l'objectif de 50 % sera atteint.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, l'article 2 est supprimé et les amendements CE167 de M. William Martinet et CE51 de M. Sébastien Jumel tombent.
Chapitre II Accompagner les projets structurants de demain
Article 4 : Exclusion du décompte de l'artificialisation pour les projets d'ampleur nationale ou européenne présentant un intérêt général majeur
Amendement de suppression CE359 de Mme Lisa Belluco.
Nous demandons la suppression de l'article pour trois raisons.
D'abord, le périmètre des projets d'intérêts nationaux ou européens, qui seront décomptés du ZAN, n'est pas clair. Il est à craindre que, d'une façon ou d'une autre, tous les projets soient retranchés. Ensuite, en admettant que ce ne soit pas le cas, la surface restante susceptible d'être artificialisée sera limitée, ce qui affectera nécessairement la capacité des communes à mener des projets. Enfin, et plus généralement, nous contestons le bien-fondé des grands projets souvent inutiles. Nous refusons que les consultations, les avis critiques et la coconstruction citoyenne soient contournés pour imposer aux territoires des projets incompatibles avec la transition écologique.
Je vous rejoins sur un point : l'article mérite d'être précisé. C'est l'objet des amendements qui vont suivre. Il convient notamment de clarifier la définition des grands projets et les modalités de leur décompte de l'objectif national de 50 %. Avis défavorable.
C'est un article clé. Conformément à l'engagement pris par la Première ministre, il répond aux demandes de Régions de France et des associations des maires, et il satisfait le Sénat.
Quelle est la philosophie ? Aujourd'hui, le poids de certains projets publics est tel que la part qui resterait aux collectivités pour mener leurs projets serait presque réduite à néant. Le meilleur exemple, c'est la région des Hauts-de-France : sur les 10 000 hectares qui sont autorisés dans le cadre de la trajectoire ZAN, 6 000 concernent des grands projets – le canal Seine-Nord Europe représente la plus grande part de l'artificialisation.
Carole Delga, la présidente de Régions de France, fait valoir que les territoires ayant bénéficié de grands projets par le passé auront le droit d'artificialiser sur une surface équivalente à la moitié, tandis que ceux n'ayant pas eu cette chance seront privés non seulement du bonus mais aussi de la capacité à accueillir des habitants. Personne ne peut se satisfaire de ce que les grands projets viennent ôter aux élus toute marge de manœuvre. C'est un angle mort de la territorialisation.
Forts de ce constat, nous avons choisi de compter à part les grands projets, considérant aussi qu'une région n'a pas à supporter seule l'artificialisation liée à un projet qui profitera à tout le territoire. Dans le cas de Seine-Nord Europe, la Normandie, l'Île-de-France et nous tous bénéficierons de l'amélioration du transport fluvial et de la diminution du nombre de camions. De la même manière – le sujet est plus clivant –, nous aurons besoin d'espace pour construire des centrales nucléaires dont toute la France profitera grâce à l'interconnexion du réseau électrique.
Ensuite, nous ne sommes pas favorables à l'idée défendue par certains d'ajouter les grands projets au volume d'artificialisation défini par la trajectoire. Nous proposons donc la solution suivante : on liste les grands projets publics et les grands projets privés liés à la réindustrialisation du pays et on définit une enveloppe forfaitaire, ce qui permet d'indiquer immédiatement aux régions les droits à construire dont elles disposent. Sans forfait, il faudrait, chaque année, réviser les trajectoires autorisées pour prendre en considération les évolutions – une éventuelle flambée positive de projets utiles pour la transition écologique du pays. Le forfait a le mérite de donner les règles du jeu à tout le monde dès le début et de ne pas faire fi de l'artificialisation.
J'entrerai plus dans le détail par la suite, mais voilà la philosophie du dispositif pour les grands projets que toutes les associations d'élus, sans exception, et le Sénat appellent de leurs vœux.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CE447 de M. Bastien Marchive, CE406 du Gouvernement, CE416 de M. Pascal Lavergne, CE427 de Mme Marina Ferrari et CE429 de M. Luc Lamirault, et sous-amendements CE501 de Mme Lisa Belluco, CE458 de M. Stéphane Delautrette, CE494 de Mme Lisa Belluco, CE459 de M. Stéphane Delautrette, CE498 de Mme Annaïg Le Meur, CE456, CE463, CE457 de M. Sébastien Jumel et CE495 de Mme Lisa Belluco.
L'amendement vise à établir une liste des « projets d'envergure nationale ou européenne ». Ici, il s'agit de préciser les critères définissant les projets, lesquels feront l'objet d'un arrêté du ministre en charge de l'urbanisme.
Un autre amendement indiquera comment ces projets seront pris en compte dans l'enveloppe nationale des droits à construire.
Le sous-amendement CE501 tend à supprimer l'alinéa 4 aux termes duquel les travaux ou les opérations déclarés d'utilité publique font partie des projets d'envergure. Cela conduit à prendre en compte des projets routiers totalement incompatibles avec nos objectifs de préservation de l'environnement et de lutte contre le changement climatique.
Ces projets menacent également nos engagements en matière de lutte contre la pollution de l'air, sujet sur lequel la France a pourtant déjà été plusieurs fois condamnée, faute de respect des normes. Ils accélèrent l'effondrement de la biodiversité : selon l'Institut français de l'environnement (Ifen), les infrastructures font obstacle au déplacement des animaux à la recherche des conditions favorables à leur reproduction et à la survie des jeunes. Une enquête du média Reporterre a révélé que l'ensemble des projets routiers contestés en France artificialiseraient au moins 4 488 hectares.
Enfin, l'incompatibilité avec la lutte contre l'artificialisation est évidente. Cette disposition encourage les élus locaux à poursuivre la politique de bétonnage des espaces naturels, agricoles et forestiers.
Nous souscrivons à la philosophie exposée par le ministre. Toutefois, la rédaction de l'amendement nous semble encore un peu floue.
Le sous-amendement CE458 vise donc à restreindre le champ des projets d'envergure nationale ou européenne aux seuls projets déclarés d'utilité publique. Compte tenu de la raréfaction du foncier qu'implique le ZAN, il est essentiel que les projets bénéficiant de surfaces réservées soient bien d'utilité publique.
Le sous-amendement CE494 a pour objet d'alerter sur le risque que les projets liés à la relocalisation de l'industrie contribuent à artificialiser davantage. Nous lançons un appel au ministre afin qu'il s'assure que les porteurs de projet seront fortement incités à s'installer sur les friches et les zones déjà artificialisées.
Le sous-amendement CE459 a pour objet de préciser la nature des projets industriels éligibles. Il doit s'agir de « projets industriels d'intérêt national majeur pour l'indépendance énergétique, technologique et en matière de santé publique ».
Nous ne souhaitons évidemment pas faire barrage à la relocalisation : les projets qui contribuent à la stratégie de souveraineté bénéficieront du statut de projet d'envergure tandis que les autres entreront dans le décompte des zones artificialisées.
Le sous-amendement CE498 vise à ajouter aux projets industriels mentionnés « ceux qui participent directement aux chaînes de valeur des activités dans les secteurs des technologies favorables au développement durable ».
Dans mon territoire de Normandie, l'aménagement du territoire doit composer avec de nombreuses contraintes : loi littoral, zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (Znieff), plan de prévention des risques d'inondation (PPRI), retrait du trait de côte. C'est un casse-tête chinois pour les élus et si vous y ajoutez un projet d'envergure nationale tel qu'une paire d'EPR…
Le sous-amendement CE456 vise à reconnaître aux EPR le statut de projet d'envergure nationale.
Le projet d'EPR à Penly, à proximité de la centrale nucléaire de Paluel, ainsi que les futurs carénages impliquent l'accueil de près de 10 000 salariés – donc la construction de parkings, de logements provisoires et définitifs mais aussi d'infrastructures ferroviaires, routières et portuaires – ainsi que des entreprises qui participent à ces grands chantiers. Cela nécessite au total 150 hectares, dont 12,5 réversibles.
Il est indispensable d'anticiper et de tenir compte des besoins de foncier connexes induits par les projets pour garantir leur exemplarité environnementale et sociale ainsi que leur acceptabilité. C'est l'objet de mes sous-amendements qui se veulent pragmatiques.
Avec le sous-amendement CE495, il s'agit de supprimer la possibilité de modifier l'arrêté pour ajouter un nouveau projet. Cette faculté risque de rendre plus difficile encore l'atteinte des objectifs.
Ne nous tirons pas une balle dans le pied en dénaturant l'amendement. L'enjeu est de dresser une liste de projets répondant aux besoins et correspondant aux opportunités, notamment économiques, et d'en garantir la réalisation. Plus on limite la définition d'un projet d'intérêt national, plus on s'empêche – c'est bien l'intention de certains – d'y intégrer des éléments structurants pour l'avenir du point de vue des politiques publiques. Cela ne veut pas nécessairement dire que les projets ne se feront pas ; mais, s'ils se font, ils prendront sur le droit à construire des territoires qui les accueillent, par exemple des régions s'ils sont considérés comme des projets d'intérêt régional : paradoxalement, l'effort ne sera pas national alors même que ces projets peuvent être jugés d'envergure nationale, voire européenne.
Je suis donc défavorable à tous les sous-amendements qui tendent à restreindre la définition du projet d'envergure nationale ou européenne.
Monsieur Jumel, on doit évidemment se soucier des constructions impliquées par l'accueil de tels projets dans les territoires – une usine d'industrie verte qui emploie 10 000 personnes crée un besoin de logements, de services publics et d'infrastructures –, mais doit-on considérer ces équipements comme d'intérêt national ? Ne sont-ils pas d'intérêt régional ou intercommunal, dès lors que les retombées en seront territoriales ? C'est notre approche.
Il est très difficile d'estimer le nombre de constructions rendues nécessaires par ce type de projet, donc la quantité à artificialiser. Pour 10 000 emplois créés, combien de logements ? Cela dépend du taux de chômage local, du lieu d'origine des travailleurs, de la surface nécessaire, donc de la typologie de leurs familles. Comment comptabiliser cette quantité dans un forfait ? Or il faut bien le faire pour pouvoir répartir le droit à construire à l'échelle nationale. C'est tout l'enjeu de l'amendement à venir sur le mode de calcul, et c'est un prérequis pour rester dans les limites du décompte national de 125 000 hectares. Si on lâche à ce sujet, on ne tient plus le cap fixé par la loi « Climat et résilience » d'une réduction de 50 %.
Je serai donc défavorable à vos propositions en ce sens.
En revanche, je serai favorable au sous-amendement CE498 de Mme Le Meur, qui précise le contenu de la liste et étend celle-ci pour y intégrer des projets revêtant un intérêt du point de vue du développement durable.
Quant à votre sous-amendement CE463, monsieur Jumel, la rédaction actuelle intègre déjà les projets de construction d'un réacteur nucléaire. Je n'y suis pas défavorable pour autant ; j'émettrai un avis de sagesse.
Avis défavorable à tous les autres sous-amendements.
Avis également favorable au CE498, qui répond aux questions soulevées par M. Delautrette et par Mme Pochon en précisant une partie du dispositif.
Le CE463 est satisfait : le nucléaire est intégré à la liste des grands projets d'envergure nationale, car il fait partie de ce dont nous avons besoin pour réussir la transition écologique.
Comme au rapporteur, tout ce qui restreint la liste me pose une difficulté, car cela risque de nous faire manquer des opportunités. Mais il ne faut pas l'allonger trop non plus. Essayons de rester sur ce chemin de crête.
Il faut que nous construisions moins de routes, cela ne veut pas dire que nous ne devons plus en construire. Les routes concernées ne sont pas faites par les élus locaux, mais relèvent du niveau national. Le gouvernement allemand, qui compte des écologistes à son bord, vient d'autoriser 144 projets routiers. De même que la dimension sociale, l'objectif de désenclavement doit nous préoccuper autant que l'enjeu climatique dans certaines situations.
Le sous-amendement le plus problématique à mes yeux est le CE456 de M. Jumel. Dès lors qu'un territoire accueille un réacteur nucléaire, l'installation de tous les équipements afférents doit-elle être accompagnée de la même façon ? Je ne peux l'accepter, car nous raisonnons selon le foncier, non selon le nombre de personnes concernées. Accorder tous les hectares, c'est s'interdire les calculs de densité et s'épargner la sobriété. Où s'arrêterait-on ? Aux sous-traitants indispensables à une partie de l'activité ? Aux magasins d'alimentation qui nourrissent ceux qui travaillent ? C'est un engrenage.
La totalité de ce qui est prévu par le programme de relance du nucléaire n'aura pas abouti en 2031. Nous aurons largement le temps de nous revoir d'ici là pour vérifier que nous ne sommes pas en train de créer des blocages. La clause de revoyure prévoit un premier rendez-vous en 2026.
Avis défavorable aux autres sous-amendements.
L'objet du sous-amendement CE463 de M. Jumel a été abondamment débattu lors de l'examen du projet de loi sur le nucléaire. Il importe d'intégrer les éléments auxquels il fait référence. Une telle démarche répond à une vraie difficulté pour les territoires concernés, et elle est pleinement conforme à la volonté présidentielle de tendre à la neutralité carbone d'ici à 2050 – ce qui implique de s'adapter dans certains domaines. L'inscrire dans la loi représenterait un message important.
Quant aux deux autres sous-amendements, je m'en tiendrai à l'avis du rapporteur, mais ils sont marqués au coin du bon sens. Lors du chantier de Flamanville 3, les besoins de logements, mais aussi de voies d'accès et de parkings, n'avaient pas été suffisamment anticipés : des milliers de personnes allaient travailler chaque jour sans que les parkings nécessaires aient été construits, ce qui a créé d'énormes goulets d'étranglement à l'entrée des sites et considérablement allongé le temps de trajet des salariés.
Je remercie le rapporteur de son avis de sagesse sur le premier de mes sous-amendements, et Maud Bregeon de son intervention. Mes calculs n'ont pas été faits sur un coin de table au bistrot : voilà dix-huit mois qu'avec le préfet, les élus du territoire et l'opérateur, pour anticiper et sans préjuger de la décision finale, nous travaillons à évaluer le foncier dont nous aurons besoin. Indépendamment de la question de savoir d'où viendront les salariés, et même en tenant compte d'une politique, pour laquelle je milite, de développement de transports urbains très intégrés, associée à des parkings de dissuasion, nous avons besoin de 13 hectares de parkings. Ce n'est pas une invention : ils sont ciblés, localisés, le préfet les a identifiés. De même pour les logements : sur 9 000 salariés requis, sans compter les carénages de Penly et de Paluel, la moitié doit venir du cru, mais l'autre moitié de l'extérieur ; cela correspond aux calculs faits à Flamanville et à l'objectif politique que tout le monde se fixe. Il faut donc des logements provisoires, sur 10 hectares.
Le rapporteur parle de rabattre ces projets d'équipement vers les intercommunalités, mais l'agrandissement de la RD925 ou la construction d'une voie ferroviaire sont liés au port de colis lourds, lui-même inhérent au projet d'EPR. Les hectares nécessaires doivent donc être connectés à celui-ci.
L'enveloppe nationale s'entend dans le cas d'une LGV ou d'une prison, pour lesquelles la commune n'a pas à supporter l'impact de l'artificialisation induite par un projet national. Mais cela ne vaut pas des projets routiers, qui ne sont pas d'intérêt national. En disant aux communes – de tels projets sont toujours soutenus par les élus locaux – « faites des routes, cela ne comptera pas dans votre enveloppe », on les y encourage alors que c'est totalement incompatible avec nos objectifs. Il faut exclure les routes du périmètre national. Cela ne veut pas dire qu'il n'y en aura plus : il y en aura toujours, mais elles compteront dans l'artificialisation dépendant des communes, qui y réfléchiront donc à deux fois.
Quant au désenclavement de nos territoires ruraux, ce n'est pas le tout-voiture qui le permettra, mais le développement d'autres mobilités que la voiture individuelle, qui coûte cher à l'achat, à l'entretien et en carburant, ce qui empêche les ruraux de se déplacer. Des milliers de nos concitoyens renoncent ainsi à des déplacements. Selon une étude récente, un Français sur deux vit avec moins de 200 euros à partir du 10 du mois !
Nous sommes d'accord avec l'idée qu'il faut une méthode permettant d'intégrer au ZAN les grands projets d'intérêt national, afin d'éviter un gros problème d'aménagement du territoire. Mais il ne faut pas que cela conduise à dépasser l'enveloppe d'artificialisation possible avant 2031 – sur ce point, nous tomberons d'accord –, ni que la liste des projets d'intérêt national inclue des projets écocides – c'est un point à propos duquel nous divergeons. Le cas des autoroutes est significatif : il est contradictoire de demander aux communes des efforts considérables pour limiter l'artificialisation pendant que l'État conduit de grands projets très consommateurs de pleine terre.
Monsieur le ministre, les points de désaccord entre vous et Bruno Le Maire ne nous ont pas échappé. Je suis donc surpris du soutien que vous apportez au CE498 : ce sous-amendement Le Meur pourrait presque être rebaptisé sous-amendement Le Maire, tant il reprend les dispositions souhaitées par le ministre de l'économie.
Notre sous-amendement CE458 propose une mesure raisonnable, qui comporte une définition claire. Je ne comprends pas que la définition des projets soit si ouverte alors que l'on affiche la volonté de respecter le ZAN : les mots « en raison de leur nature ou de leur importance » sont flous et ouvrent la porte à beaucoup de choses.
Nous voterons pour le sous-amendement CE463 de M. Jumel. Respectons l'ordre chronologique : on a voulu une loi sur le nucléaire, il faut prendre en considération ce qu'elle contient et le transposer dans le ZAN. L'enjeu est majeur pour la décarbonation de notre pays. Nous pourrons y revenir dans les textes futurs sur la réindustrialisation verte.
Nous préférons, pour notre part, la rédaction du Sénat. Dans les amendements en discussion, la liste des secteurs éligibles me semble trop limitée.
Quant à la méthode, l'exposé sommaire de votre amendement, monsieur le ministre, mentionne l'avis des collectivités, mais le dispositif lui-même ne prévoit que l'avis des conseils régionaux et de la conférence régionale. Autrement dit, vous avez supprimé de la rédaction du Sénat l'avis des communes et intercommunalités concernées par les projets – il n'était prévu que de les consulter, mais ce n'est même plus le cas ici. C'est préjudiciable : les grands projets doivent être acceptés à l'échelon territorial. Par ailleurs, qui choisit, le ministre ou la région ?
Quelles qu'en soient les modalités, la comptabilisation se fonde sur des prévisions, qui impliquent elles-mêmes certaines formes urbaines. Treize hectares de parkings n'occupent pas la même surface selon qu'ils sont étagés ou non. Il est donc difficile de faire des estimations précises, compte tenu de la nécessité d'une réflexion sur les nouvelles formes urbaines. Le ZAN n'empêche pas de construire, il implique de construire différemment.
En outre, plus on étend la liste de ce qui doit faire partie des projets d'envergure nationale, plus on prend sur l'enveloppe de droits à construire répartie à l'échelle du territoire pour répondre aux besoins plus généraux de logements et de services publics.
Ce n'est pas parce que la presse s'est fait l'écho d'une différence éventuelle d'appréciation entre Bruno Le Maire et moi-même quant à la manière de calculer le compté à part que nous divergeons au sujet de la liste. Sur ce dernier point, le sous-amendement CE498 correspond exactement à la vision commune au ministère de la transition écologique et au ministère de l'économie et des finances.
C'est si on avait intégré à cette liste n'importe quel projet industriel que l'on aurait ouvert la porte à tout. Par rapport à la rédaction actuelle, qui se contente de mentionner les grands projets industriels, la liste a le mérite de préciser et de fixer un cadre législatif, qui pourra évoluer si besoin.
La conférence du ZAN, dont la création est une innovation du Sénat, permet d'associer les collectivités à la démarche. Comment consulter sans ralentir des projets industriels et d'infrastructures que l'on considère comme urgents pour le pays ? C'est le point d'équilibre que nous avons trouvé, même si les discussions se poursuivront.
Enfin, il serait problématique d'intégrer à la liste la construction de tous les logements liés au nucléaire si les équipements liés à des gigafactories, par exemple, n'y figurent pas. La question des chantiers a été traitée hier en commission du développement durable : un chantier temporaire n'est pas considéré comme un espace d'artificialisation, puisque le terrain retrouve ensuite une autre vocation. Une voie ferroviaire qui dessert un site relève des grands projets : elle n'est pas comptabilisée. Au bout du compte, il reste le besoin de logements, dont la comptabilisation dans l'enveloppe nationale pose problème si elle existe dans un domaine et non dans les autres.
Puisque l'essentiel se jouera, comme je l'ai dit, après 2031, tenons-nous en à une liste qui permet d'affirmer l'importance du nucléaire au sein des grands projets d'envergure nationale, sans aller si loin que cela pourrait se retourner contre ces projets. On a largement les 25 hectares nécessaires, qui seront à répartir.
Monsieur le ministre, votre avis défavorable à tous les autres sous-amendements que le CE498 concerne-t-il le CE463 de M. Jumel, qui fait l'objet d'un avis de sagesse du rapporteur ?
Il est satisfait, je n'émets donc pas un avis favorable. On peut considérer cela comme un avis de sagesse.
Successivement, la commission rejette les sous-amendements CE501, CE458, CE494 et CE459, adopte le sous-amendement CE498, rejette le sous-amendement CE456, adopte le sous-amendement CE463 et rejette les sous-amendements CE457 et CE495.
Elle adopte les amendements sous-amendés.
En conséquence, les amendements suivants, jusqu'à l'amendement CE90, tombent.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 14 juin 2023 à 9 h 30
Présents. – M. Jean-Félix Acquaviva, M. Laurent Alexandre, M. Antoine Armand, Mme Anne-Laure Babault, Mme Anne-Laure Blin, M. Jean-Luc Bourgeaux, M. Bertrand Bouyx, Mme Maud Bregeon, Mme Françoise Buffet, M. Mickaël Cosson, M. Romain Daubié, M. Stéphane Delautrette, M. Frédéric Descrozaille, M. Julien Dive, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Christine Engrand, Mme Marina Ferrari, M. Grégoire de Fournas, M. Perceval Gaillard, Mme Charlotte Goetschy-Bolognese, Mme Florence Goulet, Mme Géraldine Grangier, Mme Mathilde Hignet, M. Alexis Izard, M. Sébastien Jumel, M. Guillaume Kasbarian, Mme Julie Laernoes, M. Maxime Laisney, M. Luc Lamirault, M. Pascal Lavergne, Mme Annaïg Le Meur, M. Hervé de Lépinau, M. Gérard Leseul, M. Bastien Marchive, M. William Martinet, M. Nicolas Meizonnet, Mme Graziella Melchior, M. Paul Molac, M. Yannick Monnet, Mme Louise Morel, M. Jérôme Nury, M. Patrice Perrot, Mme Anne-Laurence Petel, M. René Pilato, Mme Marie Pochon, M. Charles Rodwell, M. Vincent Rolland, Mme Anaïs Sabatini, Mme Danielle Simonnet, M. Matthias Tavel, M. Lionel Tivoli, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, M. Jean-Pierre Vigier, M. André Villiers, Mme Anne-Cécile Violland, M. Stéphane Vojetta
Excusés. – Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Lisa Belluco, M. Thierry Benoit, Mme Sophia Chikirou, Mme Hélène Laporte, Mme Nicole Le Peih, M. Aurélien Lopez-Liguori, Mme Sandra Marsaud, Mme Yaël Menache, M. Paul Midy, M. Philippe Naillet, M. Jiovanny William
Assistaient également à la réunion. – Mme Nathalie Bassire, M. Thibault Bazin, Mme Émilie Bonnivard, M. Guy Bricout, Mme Danielle Brulebois, M. Lionel Causse, Mme Josiane Corneloup, Mme Catherine Couturier, M. Pierre Dharréville, Mme Chantal Jourdan, M. Jean-François Lovisolo, Mme Frédérique Meunier, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Maxime Minot, M. Dominique Potier, M. Nicolas Ray, Mme Isabelle Valentin