La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Suite de la discussion d'un projet de loi
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 39 à l'article 4.
Je vous indique que 2 628 amendements restent à examiner sur les 3 154 qui avaient été déposés. Nous avançons à un bon rythme. Je vous propose d'achever ce soir l'examen du titre Ier – 222 amendements –, de manière à aborder le titre II dès lundi prochain.
Assentiment.
Nous en revenons au sujet dont nous parlions en fin d'après-midi. Cet amendement de M. Bazin vise à supprimer les alinéas 5 à 7, car le recours au suicide assisté ou à l'euthanasie prévu par ce projet de loi est réservé aux personnes ayant un discernement plein et entier jusqu'au moment de la réalisation de l'acte. Il semble donc contradictoire de prévoir la rédaction de directives anticipées à cet effet dans le cas où une personne perdrait conscience.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission spéciale, pour donner l'avis de la commission.
Je vous propose de retirer l'amendement au profit des amendements identiques n° 2489 et suivants, qui tendent à supprimer l'alinéa 7. À défaut, avis défavorable.
La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis.
L'amendement n° 39 n'est pas adopté.
Il vise à supprimer l'alinéa 7, comme nous l'avions résolu à la fin de la séance de l'après-midi. Nous sommes opposés à ce que les directives anticipées soient considérées comme valides lorsqu'une personne a perdu conscience. Si elles pouvaient être appliquées alors que la personne n'est plus lucide, nous sortirions tout à fait du cadre prévu dans le titre II.
Nous en arrivons à une série de seize amendements identiques.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l'amendement n° 2489 du Gouvernement.
Plusieurs d'entre vous proposent de supprimer la possibilité d'exprimer dans les directives anticipées un choix individuel en matière d'aide à mourir dans l'hypothèse d'une perte de conscience irréversible. Comme je l'ai dit en commission, le Gouvernement y est également opposé, car l'un des piliers du texte réside dans la capacité du patient à exprimer sa volonté de manière libre et éclairée non seulement au moment où il demande l'aide à mourir, mais aussi tout au long de la procédure, jusqu'au moment où, le cas échéant, il y recourt.
De plus, nous examinons actuellement le titre Ier , qui concerne le développement des soins palliatifs et d'accompagnement. Le Gouvernement souhaite maintenir une étanchéité totale entre le titre Ier et le titre II. C'est pourquoi, par cet amendement, je propose de supprimer l'alinéa 7 qui fait référence à l'aide à mourir.
La parole est à Mme Nathalie Serre, pour soutenir l'amendement n° 245 .
Cet amendement déposé par Mme Genevard vise à supprimer l'alinéa 7, pour les raisons que vient de présenter Mme la ministre. La simple connaissance de la mention de l'aide à mourir dans les directives anticipées ne peut suffire à fonder la décision du médecin responsable de la procédure.
Avant la levée de la séance de l'après-midi, Mme la ministre a dit vouloir revenir à la rédaction initiale de l'article. C'est dans cet esprit que nous avons déposé ces amendements tendant à supprimer l'alinéa 7, considérant qu'il introduit un énorme décalage avec le texte initial et qu'il conduit à franchir une ligne rouge.
Nous en venons enfin à l'alinéa 7 de l'article 4, qui nous semble en contradiction avec la volonté de s'assurer du consentement libre et éclairé du patient à tout moment de la procédure.
Vous avez exprimé l'intention de ne pas évoquer dans l'article 4 la question des directives anticipées en matière d'aide à mourir et, compte tenu du nombre de signataires, j'ai tout lieu de croire que ces amendements seront adoptés. Je m'inquiète toutefois de la possibilité que ces dispositions soient réintroduites dans le titre II, ce qui soulèverait à nouveau la question éthique fondamentale du consentement libre et éclairé. J'ai cru comprendre que certains signataires de l'amendement n° 3391 l'ont retiré tout à l'heure dans l'espoir qu'un amendement similaire soit examiné dans le cadre de l'article 6. Cela poserait quasi directement la difficulté que j'évoque.
D'ailleurs, l'alinéa 7 n'est pas le seul élément de l'article 4 qui pose un problème. L'alinéa 17, par exemple, indique qu'une tierce personne pourrait accéder à l'espace numérique de santé d'un patient et y effectuer des modifications. Nous assurez-vous qu'il sera impossible de modifier les directives anticipées sans intervention directe du patient ?
La parole est à M. Denis Bernaert, pour soutenir l'amendement n° 1960 .
Il vise à revenir au texte initial en supprimant l'alinéa 7. Pour que le choix du patient reste libre et informé, il importe d'exclure de l'aide à mourir les personnes ayant subi une perte de conscience irréversible, même si elles avaient antérieurement formulé dans leurs directives anticipées la volonté d'y recourir. En effet, personne ne peut préjuger des choix que ferait le patient s'il était conscient et accédait à des soins palliatifs. J'estime donc que la suppression de l'alinéa 7 permettrait de rééquilibrer le texte.
L'alinéa 7 prévoit que dans le cadre des directives anticipées, la personne peut indiquer son choix individuel en matière d'aide à mourir dans l'hypothèse où elle perdrait conscience de manière irréversible. Par cet amendement, nous entendons supprimer cette possibilité.
Sur ces amendements identiques n° 2489 et suivants, je suis saisie par les groupes Les Républicains, Horizons et apparentés et Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Lisette Pollet, pour soutenir l'amendement n° 2388 .
Il vise à revenir sur l'inscription de la demande d'euthanasie dans les directives anticipées. Il est contradictoire de considérer que le choix individuel fait office de demande lorsque le patient perd conscience de manière irréversible, puisqu'il est obligatoire de s'assurer de son discernement plein et entier jusqu'à la réalisation de l'acte. La volonté de recourir à l'euthanasie ou au suicide assisté peut évoluer entre la rédaction des directives anticipées et la perte de conscience. Le patient doit pouvoir réitérer cette demande juste avant le geste létal. La notion de discernement du patient ne saurait être remise en cause.
La parole est à Mme Astrid Panosyan-Bouvet, pour soutenir l'amendement n° 2428 .
Il vise à supprimer l'alinéa 7. Il convient par ailleurs de rester vigilant, car cette disposition pourrait être réintroduite dans le titre II. Je me félicite que nous puissions la supprimer dans le titre Ier , car elle déséquilibre profondément l'intention du législateur, et j'appelle notre assemblée à faire preuve de vigilance quand nous en viendrons à l'examen du titre II.
La parole est à M. Didier Martin, rapporteur de la commission spéciale pour les articles 1er à 4, pour soutenir l'amendement n° 2827 .
Il est prévu que l'aide à mourir requière l'expression répétée de la volonté du patient, jusqu'au dernier moment. Par conséquent, il convient de supprimer l'alinéa 7.
Il tend également à supprimer l'alinéa 7. Il importe au plus haut point de rappeler que, même si chacun est libre de ses convictions, personne n'a de certitudes quand il s'agit d'aider un malade à mourir. Il faut donc s'interdire d'inscrire dans les directives anticipées la possibilité d'avoir recours à l'aide à mourir. Elle ne le sera vraisemblablement pas dans le titre Ier , et j'espère qu'elle ne le sera pas non plus dans le titre II, car un tel geste nécessite le consentement libre et éclairé du patient à chaque étape de la procédure.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet applaudit.
Mme la ministre et plusieurs députés ont déjà parfaitement défendu des amendements identiques. Je souhaite simplement exprimer, comme M. Bazin et Mme Panosyan-Bouvet, mon inquiétude quant à la possibilité que ces dispositions soient réintroduites dans le titre II.
La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l'amendement n° 3139 .
Comme les nombreux amendements identiques de la même série, parmi lesquels on trouve même un amendement du Gouvernement – tout arrive ! –, il vise à supprimer l'alinéa 7. Je ne surprendrai personne en soulignant que, même si vous voulez le supprimer, cet alinéa prouve une nouvelle fois la porosité intrinsèque entre le titre Ier et le titre II. À chaque article du titre Ier , on trouve une référence au titre II qui porte sur l'aide à mourir.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Les amendements n° 3278 de Mme Stéphanie Rist, 3373 de M. Jérémie Patrier-Leitus et 3401 de M. Nicolas Turquois sont défendus.
Nous avons achevé la présentation de la série d'amendements en discussion commune. Je rappelle que les avis de la commission et du Gouvernement sont présumés favorables, puisque M. le rapporteur et Mme la ministre ont chacun défendu un amendement en ce sens. Avant de passer au vote, je laisserai un orateur de chaque groupe s'exprimer.
La parole est à M. Stéphane Delautrette.
Pour ma part, je suis opposé à la suppression de l'alinéa 7, car il y a un manque de cohérence à envisager d'introduire de telles dispositions dans le titre II sans les avoir inscrites d'abord à l'article 4.
Ce n'est pas Mme la ministre que j'accuse d'incohérence : elle a clairement exposé la position du Gouvernement, lequel ne souhaite pas que la volonté de recourir à l'aide à mourir puisse être inscrite dans les directives anticipées. Il est donc bien normal que le Gouvernement ne le propose ni dans le titre Ier ni dans le titre II ; en cela, il respecte sa ligne, que je ne partage pas.
L'article 4 définit dans le projet de loi ce que sont les directives anticipées et ce qu'elles permettent de faire. Son alinéa 7 inscrit dans le code de la santé publique que les directives anticipées peuvent permettre d'exprimer le souhait de recourir à l'aide à mourir. Il ne dit rien de plus. Je comprends bien que les modalités du recours éventuel aux directives anticipées pour l'aide à mourir seront discutées dans les articles 6 et 7 du titre II. Néanmoins, comment pourrions-nous raccrocher ces débats et avancer sur ces sujets dans le titre II si nous n'avons pas ouvert dès l'article 4 la possibilité, dans les directives anticipées, d'aborder le sujet de l'aide à mourir ? Madame la ministre, je vous pose la question : si cet alinéa est supprimé, comment pourrons-nous dans le titre II aborder la question de l'aide à mourir et des directives anticipées ?
Je tiens à dire que je ne m'exprime pas au nom de l'ensemble du groupe La France insoumise, car nous avons une liberté de vote ; une partie des députés du groupe soutient la même position que moi, tandis que d'autres soutiennent des positions différentes.
Lors des travaux en commission, nous avons adopté l'amendement CS993 de Frédérique Meunier et le sous-amendement CS1990 d'Élise Leboucher, qui aboutissent à la rédaction actuelle de l'alinéa 7. Les directives anticipées sont une déclaration écrite qu'une personne rédige pour préciser ses souhaits liés à la fin de vie. Leur principe est d'exprimer sa volonté pour le cas où elle ne pourrait plus la manifester. La personne peut y indiquer si elle souhaite l'arrêt de l'acharnement thérapeutique ou si elle souhaite avoir recours, au cas où la situation deviendrait insupportable, à la sédation profonde et continue jusqu'au décès. J'estime donc qu'il est important que, par parallélisme, l'article 4 dispose que les directives anticipées, qui désignent la personne de confiance qui exprime la volonté du malade tout au long de cette démarche, prennent en considération l'accès à l'aide à mourir.
Nous en parlerons en examinant plusieurs autres parties du texte. Nous sommes en désaccord avec la position du Gouvernement, mais nous devons débattre entre nous, car cela peut conduire les positions de certains à évoluer. Pour rendre possible le débat ultérieur, j'y insiste, il est important que nous maintenions l'alinéa 7 dans l'article 4.
Quand il y a des positions différentes au sein d'un groupe, j'accepte de prendre deux orateurs pour les exprimer.
Sourires.
J'exprime une position personnelle ; je crois utile de le rappeler. Je n'ai pas changé d'avis pendant le dîner : je pense que le débat sur les directives anticipées et l'aide à mourir doit avoir lieu dans le cadre de l'article 6 du titre II. Je voterai donc les amendements qui tendent à supprimer l'alinéa 7, tout en réaffirmant mon intention de porter, avec d'autres, le débat sur l'ouverture des directives anticipées à l'aide à mourir. Cependant, j'aimerais que tout le monde fasse preuve de la même cohérence : dès lors que nous adoptons cette position, je ne voudrais pas que, à l'occasion de ces amendements de suppression, d'autres anticipent sur le débat que nous aurons à l'article 6. Il me semble équitable de le réclamer.
Pardonnez-moi de rappeler une évidence : par définition, la mort administrée est irréversible. Si on intègre la mort administrée dans les directives anticipées, on inclut la situation particulière du coma, or il est médicalement attesté que, dans certains cas et fort heureusement, le coma peut être réversible et pris en charge médicalement. Ainsi, considérer que les choses sont jouées dès les directives anticipées serait contraire, d'une part, aux évolutions de la recherche, d'autre part, à la disposition que le Gouvernement veut instaurer. C'est la raison pour laquelle nous soutiendrons évidemment ces amendements de suppression de l'alinéa 7.
Je partage en tout point la position de Gilles Le Gendre : nous aurons l'occasion de parler des directives anticipées dans le cadre de l'article 6 du titre II. Je pense, à titre personnel, que l'article 4 du titre Ier n'est pas le bon endroit pour le faire. Si nous l'envisageons dans le titre II, nous devrons débattre des conditions dans lesquelles les directives anticipées peuvent être invoquées dans le cadre du processus pour solliciter l'aide à mourir. J'assume donc une position divergente de celle de Stéphane Delautrette, mais cela fait la richesse de notre discussion. Je suis sûr que nous aurons un débat de qualité la semaine prochaine, au moment où nous aborderons le titre II et en particulier l'article 6.
Ce texte est très intéressant et les dispositions qu'il contient font l'objet de positions divergentes au sein du groupe La France insoumise. Je suis pour supprimer l'alinéa 7, par souci de cohérence. Actuellement, les directives anticipées existent et s'appliquent dans le cadre de la loi Claeys-Leonetti. Le titre I
Le groupe Écologiste est favorable au maintien de cette disposition. Nous soutenons avec d'autres que la rédaction des directives anticipées doit être accompagnée et mûrement réfléchie, mais cette réflexion doit permettre d'envisager une situation où la personne a perdu conscience : les directives anticipées servent, dans ce cas, à donner l'information aux soignants. Ensuite, en tout état de cause, une discussion collégiale a lieu entre les médecins et la personne de confiance, mais l'information concernant l'aide à mourir peut être précieuse pour comprendre les souhaits profonds de la personne qui rédige ses directives anticipées. Nous considérons donc qu'il est important de maintenir cette rédaction.
Nous devons tenir compte des volontés exprimées par les personnes qui rédigent leurs directives anticipées quel que soit leur état de santé au moment où elles s'engagent dans cette réflexion : certaines le font en pleine santé, d'autres à l'aube d'une maladie. Toutes doivent pouvoir, en se sentant pleinement légitimes, imaginer, réfléchir et se projeter dans diverses situations. En outre, nous estimons que l'expression de la volonté concernant l'aide à mourir serait une information importante à prendre en considération si le patient perd conscience alors qu'il est dans une situation proche du décès.
On peut comprendre qu'on veuille supprimer l'alinéa 7 puisqu'il s'inscrit dans l'article 4 du titre Ier , qui ne concerne pas l'aide à mourir. Je poserai cependant une question à laquelle je souhaite avoir une réponse. Je pense qu'il appartient à la personne de décider ce qu'elle inclut dans ses directives anticipées. De fait, l'état actuel du droit prévoit qu'elle peut écrire ce qu'elle veut. Par conséquent, on ne peut pas interdire à une personne d'écrire quelle est sa volonté au sujet de l'aide à mourir, surtout si les directives anticipées sont rédigées au moment de la demande. Cela me paraît très important.
Mme Danielle Simonnet applaudit.
Je dois dire que, depuis le début de l'examen de ce texte, j'ai beaucoup hésité et changé plusieurs fois de position. J'ai reçu des associations et des personnes qui soutiennent que, en refusant de l'envisager dans les directives anticipées, on exclut la possibilité d'accorder l'aide à mourir dans certaines situations. Néanmoins, ma réflexion m'a conduite à la conclusion qu'il faut maintenir une des conditions clés pour accorder l'aide à mourir, qui est la volonté libre et éclairée à chaque étape, jusqu'à la fin.
Par conséquent, il est incohérent d'intégrer à l'alinéa 7 de l'article 4 l'aide à mourir dans les directives anticipées, tandis que l'article 6 prévoit la condition suivante : « Être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée. » Cela entraîne beaucoup de confusion.
Je rappelle que les directives anticipées sont « une déclaration écrite que vous rédigez pour préciser vos souhaits liés à la fin de votre vie. Vous exprimez ainsi par avance votre volonté de poursuivre, limiter, arrêter ou refuser des traitements ou actes médicaux. » Je pense qu'il est nécessaire de maintenir cette définition.
On le sait, les directives anticipées sont le recueil des volontés des personnes. Elles permettent d'exprimer par avance la volonté de poursuivre, limiter, arrêter ou refuser des traitements. Ce droit avait été établi en 2005 et renforcé par la loi Claeys-Leonetti en 2016. Il faut savoir que le médecin peut refuser de les appliquer dans deux situations : en cas d'urgence vitale et lorsque les directives apparaissent inappropriées ou non conformes à la situation.
Nous en sommes à l'examen du titre Ier , qui traite de l'organisation des soins palliatifs et des soins d'accompagnement pour la personne malade. Les directives anticipées ne correspondent pas du tout aux dispositions du titre Ier et l'aide à mourir n'y a pas sa place.
Il me paraît bizarre de permettre à une personne de rédiger des directives anticipées tout en lui interdisant d'exprimer sa volonté d'avoir ou non accès à l'aide à mourir.
Rumeurs.
Cela ne veut pas dire qu'on appliquera ce qui figure dans les directives anticipées si la personne a perdu conscience et si on n'autorise pas quelqu'un à se substituer à elle, car le projet de loi ne l'autorise pas. Mais il me semble important qu'elle puisse, si elle en a envie, écrire dans les directives anticipées ce qu'elle souhaite au sujet de l'aide à mourir.
En outre, c'est important pour l'équipe médicale. Dans un cas similaire à celui de Vincent Humbert, mais où la personne aurait complètement perdu conscience, cette information pourrait en effet aider l'équipe médicale à prendre une décision, non pas celle de pratiquer d'euthanasie, mais de refuser l'acharnement thérapeutique, par exemple, en s'appuyant sur la déclaration réitérée de la personne de son refus d'un tel acharnement.
L'amendement n° 3398 est retiré.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 64
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 49
Contre 13
La parole est à M. Thierry Frappé, pour soutenir l'amendement n° 2555 .
Il vise à rendre opposable au médecin la prise en compte de la personne de confiance dans le cadre des directives anticipées portant sur le suicide assisté et l'euthanasie. L'objectif est de garantir à la personne qui a rédigé ces directives la prise en compte de ses intérêts, lorsqu'elle n'est plus en mesure d'exprimer ses souhaits parce qu'elle a perdu ses facultés de discernement.
Même avis.
Le 29 septembre 2008, un infirmier en psychiatrie était victime d'un accident de la route. L'homme de trente-deux ans, devenu tétraplégique, était plongé dans un profond coma artificiel. Cette histoire, vous la connaissez tous : c'est celle de Vincent Lambert, qui mourut le 11 juillet 2019, onze ans après son accident, à l'issue d'une bataille juridique qui a duré des années.
Mme Danielle Simonnet applaudit. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.
Si je rédige mes directives anticipées sur papier libre – comme c'est autorisé –, si j'ai clairement décrit la situation – en cas d'accident de la route, qui me laisse tétraplégique et plongée dans le coma artificiel, je veux qu'une aide active à mourir me soit apportée –, si j'ai réitéré mes directives anticipées à plusieurs reprises, alors la question est simple : allez-vous me laisser sur mon lit pendant des années, laissant les tribunaux choisir pour moi, alors que mon choix a été clairement exprimé ? Madame la ministre, comme des milliers de personnes, je veux savoir si vous êtes prête à faire preuve d'humanité.
S'il y a bien une personne persuadée de la nécessité d'écrire ses directives anticipées, c'est moi. Je déplore cependant que trop peu de Français – 13 % – l'aient fait. Si je demandais ici qui a écrit ses directives, vous constateriez que la proportion est peut-être moindre que dans la population française.
Les exemples ont un sens, et je ne peux pas être d'accord avec celui que je viens d'entendre. L'histoire de Vincent Lambert s'est produite précisément parce qu'il n'avait pas écrit ses directives anticipées. S'il l'avait fait, les machines auraient été débranchées, mais cela n'aurait pas été une aide à mourir. Le sujet est difficile. Dans ce cas précis, si Vincent Lambert avait écrit ses directives anticipées, la famille ne se serait pas déchirée pendant des années.
Il n'y aurait pas eu cette dérive médiatique. S'il avait écrit : « Si jamais je me trouve dans cet état, je ne veux pas qu'on me maintienne dans mon lit », les soins se seraient arrêtés. Je tiens donc à dire que ce n'est vraiment pas un bon exemple.
Je soutiens l'amendement de mon collègue Frappé : quand des directives anticipées claires, nettes et précises, ont été rédigées et réitérées, alors que la personne était en pleine possession de ses moyens et de sa santé mentale, il me semble important de dire que cette personne a exprimé sa volonté. Pour reprendre les termes de l'amendement, « [d]ans le cadre du suicide assisté ou de l'euthanasie, le médecin doit prendre en compte l'avis de la personne de confiance expressément indiquée dans les directives anticipées ». Il est important de maintenir cette disposition ; je voterai donc en faveur de l'amendement.
Il est écrit dans l'amendement de M. Frappé que « [d]ans le cadre du suicide assisté ou de l'euthanasie, le médecin doit prendre en compte l'avis de la personne de confiance expressément indiquée dans les directives anticipées ». Depuis tout à l'heure, nous affirmons qu'il y a une vraie étanchéité entre le titre Ier et le titre II du texte. Les directives anticipées donnent une information qui peut être utilisée par les médecins et les personnels soignants qui suivent le patient, ainsi que ses proches. Le patient peut alors bénéficier de la sédation profonde et continue, qui est déjà inscrite dans notre loi.
S'il y a des informations en ce sens dans les directives anticipées, le colloque entre la famille et l'équipe médicale peut aboutir à une décision.
Le titre II du texte traitera d'un autre sujet, très différent : l'aide à mourir, qui met en avant la volonté du patient. Il est écrit dans le projet de loi que c'est le patient qui fait la demande et qu'il doit être en capacité d'exprimer et de réitérer sa volonté libre et éclairée, jusqu'au moment de l'aide à mourir.
Soyons donc bien précis : il s'agit de deux notions différentes. Concrètement, inclure la demande de bénéficier de l'aide à mourir dans les directives anticipées n'est pas un droit opposable et ne permettrait pas, à ce stade du texte, de bénéficier de cette aide. En effet, le patient n'aurait pas la capacité d'exprimer et de réitérer sa volonté.
Voilà la différence précise entre ces deux notions.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet applaudit.
Je comprends parfaitement ce qu'a dit Mme la ministre et j'y adhère. Toutefois, de la même manière qu'il ne faut pas anticiper le débat sur l'article 6, il ne faudrait pas non plus, parce que nous avons jusqu'ici respecté l'étanchéité entre les deux titres, que nous soyons privés de la possibilité de faire évoluer un des critères des directives anticipées, pendant le débat sur le titre II.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et SOC.
Comme de nombreux députés, je respecte l'étanchéité entre les deux titres, mais que cela ne préjuge pas du débat ni du vote sur l'ouverture des directives anticipées à l'aide à mourir, dans le cadre de l'article 6 !
Madame la ministre, plaider l'étanchéité entre les titres d'un texte unique est difficile, et cela a des limites.
Ce sont quand même deux titres distincts !
Je n'étais pas là, mais c'est un fait. D'ailleurs, vous êtes obligés d'en parler pendant des heures et d'y revenir sans arrêt – je ne suis pas la première à le faire. C'est donc une difficulté majeure et nous ne vous suivons pas sur ce point.
Quand on rédige des directives anticipées et qu'on se projette dans ces situations difficiles, il me semble problématique, au regard du respect des souhaits de chacun, de penser que la personne n'aurait pas le droit d'émettre un avis sur ce qu'elle préférerait entre la sédation profonde et continue, et l'aide active à mourir. Il existe déjà un dispositif de sédation profonde et continue, prévue par la loi Claeys-Leonetti. Or, si nous introduisons l'aide active à mourir dans le titre II, inévitablement, des gens se poseront la question suivante : si je perdais conscience et que mon état était irréversible, ne préférerais-je pas qu'on m'aide à mourir, plutôt qu'on m'endorme dans la sédation profonde, dont on sait qu'on ne sait pas grand-chose, en particulier sur ce que ressentent les patients ?
Comme mon collègue Le Gendre, j'aimerais que les directives anticipées soient prises en compte dans le titre II, après les deux premières réitérations, et qu'elles soient opposables. On en débattra le moment venu. J'aimerais maintenant partager avec vous un cheminement de pensée. Aujourd'hui, n'importe qui peut bénéficier des dispositifs de la loi Claeys-Leonetti, mais tant que les critères du titre II ne sont pas remplis, il n'est pas possible de demander l'aide à mourir. C'est clair : aujourd'hui, c'est illégal.
Tout à fait !
Si la situation relève du titre Ier , tout est garanti – on a développé les soins palliatifs et prévu les soins d'accompagnement ; mais dès que les critères du titre II sont remplis, la situation ne relève plus du titre Ier et nous nous battrons pour qu'après deux réitérations, les directives anticipées soient opposables en cas de perte de conscience.
En comprenant cela, nous serons peut-être plus enclins à trouver une voie d'équilibre. Nous verrons ce que l'Assemblée décidera.
L'amendement n° 2555 n'est pas adopté.
Il vise à modifier l'alinéa 9 de l'article 4 en supprimant la possibilité de communiquer ses directives anticipées par un moyen audiovisuel. Quand on regarde les évolutions de l'intelligence artificielle, on constate qu'il est possible de réaliser des choses étonnantes. La seule manière d'être sûr que c'est bien l'intéressé qui est à l'origine du document, c'est de s'en tenir à une forme écrite.
Je suis défavorable à cet amendement qui vise à exclure la possibilité de formaliser ses directives anticipées sous le format audiovisuel. Aucun document n'est à l'abri de la falsification, pas même un document écrit. Soyons donc modernes !
Je partage l'avis du rapporteur. Il faudra préciser les modalités techniques des conditions de conservation, mais sur le principe, pourquoi pas.
Nous allons essayer d'accélérer le débat. Je donne la parole à deux orateurs : un pour, un contre.
La parole est à M. Jocelyn Dessigny.
Aujourd'hui, nul ne peut ignorer ce qu'on est capable de faire avec l'intelligence artificielle. Demain, vous introduirez l'euthanasie et le suicide assisté dans les directives anticipées. Cela signifie qu'en bidouillant un peu une vidéo sur l'ordinateur, on peut faire dire à n'importe qui, peut-être même à vous, que vous souhaitez – ou pas – l'euthanasie.
C'est très grave. On ne peut pas jouer avec des décisions aussi importantes.
Un orateur opposé à l'amendement veut-il s'exprimer ? Manifestement non.
L'amendement n° 699 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l'amendement n° 1832 .
Indépendamment des conditions de prise en compte des directives anticipées, prévues au titre Ier , et de l'opportunité d'y inscrire l'aide à mourir – puisque c'est le débat qui nous occupe –, le présent amendement vise, dans une logique inverse à celle du texte, à annexer les directives anticipées au plan personnalisé d'accompagnement lorsque celui-ci est formalisé par le patient, afin que les médecins et, plus largement, les soignants, puissent y avoir accès.
Certains pourraient souhaiter que leurs directives anticipées ne puissent pas être consultées par l'ensemble des professionnels qui prennent part à leur plan personnel d'accompagnement. Avis défavorable.
Même avis.
Quand on rédige des directives anticipées sur la manière dont on aimerait finir sa vie, c'est bien pour qu'elles puissent être consultées et appliquées – c'est d'ailleurs pour cette raison qu'est généralement désignée une personne de confiance, chargée d'exprimer les volontés de celui qui ne serait plus capable de le faire lui-même. L'accompagnement pouvant être long, je peux comprendre que certains préfèrent, dans un premier temps, les garder confidentielles. Mais vous auriez très bien pu, monsieur le rapporteur, préciser dans un sous-amendement : « si la personne intéressée le souhaite », ce qui aurait permis de couvrir les deux cas de figure.
L'amendement n° 1832 n'est pas adopté.
Il tend à prévoir, au sein de chaque équipe de soins, la désignation d'un référent « discussions anticipées ». De plus en plus répandu dans la littérature scientifique, ce terme, qui a la préférence des équipes de professionnels que j'ai pu rencontrer – notamment en unités de soins palliatifs et dans les services de cancérologie des établissements hospitaliers –, illustre bien la possibilité d'anticiper un certain nombre de discussions.
La Haute Autorité de santé (HAS) a développé un nouveau référentiel d'évaluation externe des établissements et services sociaux et médico-sociaux, qui comprend entre autres un volet sur les droits des personnes accompagnées. Les experts vérifient notamment si un référent « discussions anticipées » a été désigné, et s'il existe une commission au sein de l'établissement pour traiter de ces questions – j'ai assisté à un rendu à chaud des conclusions de l'évaluation d'un Ehpad, c'est très intéressant.
Désigner un référent « discussions anticipées » au sein d'une équipe de soins permettrait en outre au soignant concerné de développer une expertise et d'assurer un rôle de conseil dans certaines situations compliquées, comme celles que nous abordons depuis ce matin.
Le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie propose des fiches simples et pédagogiques pour aider chacun à rédiger ses directives anticipées. Il ne me paraît pas nécessaire de prévoir un référent dédié dans les équipes de soins, ni que l'Agence régionale de santé (ARS) diffuse un modèle de directives anticipées. Avis défavorable.
Je partage l'avis du rapporteur. En pratique, votre proposition serait très compliquée à appliquer, car il faudrait à tout moment que le référent soit présent pour assurer la coordination avec l'équipe médicale.
Par ailleurs, le modèle de directives anticipées est conçu selon les règles européennes pour une information facile à lire et à comprendre (Falc). Son intelligibilité est donc assurée, et votre intention satisfaite.
Pour ces raisons, j'émettrai un avis défavorable.
Je comprends votre intention, monsieur Bazin, mais en pratique, ce n'est pas possible, ne serait-ce que parce que, sur des sujets aussi sensibles, les patients et résidents choisissent eux-mêmes le soignant à qui ils veulent se confier.
Exactement !
Ils pourraient ne pas avoir suffisamment confiance dans le référent désigné pour le faire.
Quant à l'expertise, ne vous inquiétez pas : tous les soignants maîtrisent très bien les directives anticipées. Je ne soutiendrai donc pas cet amendement.
Soyons clairs : je ne propose pas de désigner un référent pour chaque cas, qui soit présent en permanence, mais bien, comme cela se fait déjà pour plein d'autres thématiques, un référent par équipe de soins – par essence pluridisciplinaire – pour rappeler au besoin les bonnes pratiques, essentielles dans ces situations souvent complexes.
L'amendement n° 42 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement n° 1999 .
Issu des recommandations du rapport de la mission d'évaluation de la loi Claeys-Leonetti – ce qui devrait faire plaisir au rapporteur –, il tend à s'assurer que le modèle de directives anticipées est accessible au format Falc. C'est du bon sens, mais il vaut mieux le préciser : cela devrait déjà être satisfait par la loi, mais ce n'est pas le cas en pratique.
Nous en avons déjà parlé, l'amendement est satisfait. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 1999 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le titre Ier vise à bâtir un modèle global de prise en charge de la fin de vie, et à favoriser le recours aux différents dispositifs afférents. Dans le prolongement des précédents, cet amendement tend ainsi à prévoir que la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de chaque département informe l'assuré, à sa majorité, des dispositions en vigueur relatives à la fin de vie, notamment de la possibilité de rédiger ses directives anticipées ou de les confirmer. Ce genre d'actions de promotion fait d'ailleurs partie de ses missions.
L'amendement que j'avais présenté en commission était trop technique, j'ai donc réduit son ambition à un objectif plus modeste : informer le plus largement possible les assurés.
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour soutenir l'amendement n° 2123 .
Sans aller jusqu'à faire une campagne de pub avec des affiches de quatre mètres sur trois dans toutes les villes, il faut informer les assurés de la possibilité de rédiger des directives anticipées, et les inciter à le faire. Avec cet amendement, je propose donc qu'à la majorité de l'assuré, la CPAM lui adresse un courrier ou un courriel…
…pour l'informer des modalités de rédaction des directives anticipées, comme elle le fait déjà s'agissant de différents soins ou dépistages.
Amendement modeste, certes, mais dont l'application nécessite des moyens considérables : laissons cette mission au Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie. Avis défavorable.
Pour ma part, je trouve que c'est une très bonne idée ,…
M. Jérôme Guedj applaudit
…car nous avons encore des efforts à accomplir en matière de communication. Pour ce faire, il serait effectivement possible de s'appuyer sur les stratégies de communication de la caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), ou des ministères sociaux – comme je vous l'ai annoncé cet après-midi, le ministère du travail, de la santé et des solidarités et la délégation à l'information et à la communication (Dicom) lanceront bientôt une campagne sur les métiers des pôles sociaux, car ces métiers de l'humain sont un enjeu majeur.
Si assurer une meilleure information sur les directives anticipées paraît indispensable, votre proposition me semble relever davantage du domaine réglementaire : je m'engage à donner des instructions en ce sens.
Je vais donner la parole à un orateur pour, et un orateur contre.
La parole est à M. Jocelyn Dessigny.
Je ne suis pas pour cet amendement, mais pas forcément contre non plus.
Rires et exclamations.
Rassurez-vous, je ne suis pas normand ! Informer les assurés, à leur majorité, de la possibilité de rédiger des directives anticipées, comme le proposent Mme Rousseau et M. Le Gendre, n'est pas forcément une mauvaise idée. Seulement, si quelques années plus tard, ils ont changé d'avis, il ne faudrait pas qu'ils se trouvent prisonniers d'une décision qu'ils ont prise jeune…
…et qu'ils auront peut-être même oubliée. Il faudrait prévoir que ces directives sont actualisées tous les cinq ou dix ans.
Sourires.
C'est une très bonne nouvelle que vous soyez favorable à cette proposition, madame la ministre, car que l'amendement soit adopté ou non, vous allez pouvoir dès demain donner des instructions à la Cnam ou aux services du ministère pour que les directives anticipées fassent l'objet d'une information auprès des assurés, par voie postale ou numérique.
Tout à fait.
Bien sûr !
On ne sait pas ce qu'il peut se passer ; du jour au lendemain, le Gouvernement pourrait tomber – au détour de l'adoption d'une motion de censure, ou d'une très forte mobilisation, par exemple.
Sourires.
Imaginez, madame la ministre, que la personne qui vous succède ne partage pas vos convictions. Si cette disposition, à laquelle nous sommes a priori très majoritairement favorables, est inscrite dans la loi, nous aurons la garantie qu'elle sera appliquée. Alors adoptons cet amendement !
Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 60
Nombre de suffrages exprimés 60
Majorité absolue 31
Pour l'adoption 24
Contre 36
L'amendement n° 2343 n'est pas adopté.
L'amendement n° 2123 n'est pas adopté.
L'amendement n° 1699 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à compléter l'alinéa 12 afin que les directives anticipées soient conservées sur la carte vitale : « Les directives anticipées sont conservées dans le dossier médical partagé mentionné à l'article L. 1111-14 et sont mentionnées sur la carte vitale. » Elles seraient ainsi disponibles à tout moment et pourraient toujours être prises en compte, y compris lors d'une prise en charge non programmée, par exemple après un accident. L'espace numérique de santé (ENS) est, on le sait, peu utilisé, à l'inverse de la carte vitale, dont tous les Français disposent.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Défavorable. La carte vitale sert à beaucoup de choses, mais pas à cela.
À ce jour, ce n'est effectivement pas possible. J'émets donc un avis défavorable. En revanche, si la loi est adoptée, dans les mois à venir, Mon espace santé pourra héberger les directives anticipées. Je ne doute pas qu'un jour, le Gouvernement veillera à ce que ce soit aussi le cas de la carte vitale, car cela relève du domaine réglementaire. Nous y viendrons. Cela fait partie des évolutions prévisibles, de même que la carte d'identité a évolué, au fil du temps, pour contenir davantage de données.
L'amendement n° 1833 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Nathalie Serre, pour soutenir l'amendement n° 1621 .
Il tend à supprimer la seconde phrase de l'alinéa 12, qui prévoit de rappeler régulièrement au patient en soins palliatifs l'existence de directives anticipées dans son dossier médical, ce qui n'est pas une bonne idée.
Je rappelle que la carte vitale biométrique est sur la table depuis longtemps : mon excellent collègue Patrick Hetzel a cosigné une proposition de loi tendant à l'instituer ; nous l'appelons de nos vœux.
M. Patrick Hetzel sourit.
L'amendement n° 1621 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous souhaitons préciser, à l'alinéa 12, que ces directives anticipées, qui restent valables tant que l'auteur n'en décide pas autrement, peuvent être révisées à tout moment.
Pour inciter à formuler des directives et faciliter leur élaboration, des modèles types sont proposés. Indiquer en outre qu'elles sont révisables à tout moment permettrait de rassurer ceux qui hésitent encore à les rédiger. Cela serait d'ailleurs cohérent avec l'expression, que vous défendez, d'un consentement libre et éclairé à tout moment.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement n° 1836 .
Sourires.
L'amendement a pour objet de rappeler régulièrement la possibilité de réviser les directives anticipées. Rappeler qu'elles existent est une bonne chose ; rappeler qu'elles sont modifiables et qu'on peut changer de personne de confiance – et d'avis comme de chemise – en est une autre.
Elle a raison !
Une directive anticipée n'est pas figée. J'irais jusqu'à dire qu'il s'agit presque d'un amendement rédactionnel.
Ce n'est pas complètement faux.
L'amendement n° 2663 de Mme Brigitte Liso est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Favorable sur l'amendement de Mme Fiat ; demande de retrait sur les deux autres, au profit du sien.
Même avis.
L'amendement de Mme Fiat, comme le précédent de Mme Sandrine Rousseau, va dans le bon sens, puisqu'il incite à réviser régulièrement les directives anticipées, ce qui est primordial, car on peut tout à fait oublier les avoir données dix ans auparavant, ou changer d'avis au cours de son existence. Après tout, il y a bien des gens qui votaient à gauche à dix-huit ans et qui, retrouvant la raison, bien plus tard, votent finalement pour nous.
Sourires.
Ces amendements n'apportent pas grand-chose car les directives, une fois rédigées, sont déposées dans l'ENS. Leur auteur y a donc accès, à sa guise, et peut les réviser. Mon espace santé est d'ailleurs bien conçu : lorsque vous y déposez vos directives anticipées, la plateforme vous prévient que vous recevrez un message, tous les trois ans, demandant si vous les maintenez en l'état ou si vous souhaitez les réviser. L'amendement n'apporte rien qui ne figure déjà dans le texte.
L'amendement n° 2663 est retiré.
« Oui ! » et sourires sur plusieurs bancs des groupes RE et LFI – NUPES.
L'amendement n° 2530 est retiré.
La parole est à M. Pierrick Berteloot, pour soutenir l'amendement n° 2106 .
Les directives anticipées constituent parfois les dernières traces de la volonté claire et sans équivoque du patient. Elles sont précieuses et d'une importance capitale dans les cas où ce dernier n'est plus en mesure de s'exprimer. S'il est important de rappeler au patient leur existence en vue de leur potentielle mise à jour, le texte, en l'état, ne propose qu'un rappel sous forme numérique. Or les patients en soins palliatifs, on l'imagine aisément, sont très affaiblis, ou très âgés, et ils n'ont pas forcément accès à internet. Il serait donc préférable que le corps médical les avertisse oralement ; cela simplifierait la démarche.
Défavorable, car le corps médical n'a pas besoin que nous inscrivions cela dans la loi. Laissons-le faire son travail d'accompagnement !
L'amendement n° 2106 n'est pas adopté.
L'amendement n° 1371 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisie de cinq amendements, n° 2669 , 2668 , 2666 , 1834 et 1835 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 1834 et 1835 sont identiques.
Les amendements n° 2669 , 2668 et 2666 de Mme Brigitte Liso sont défendus.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement n° 1834 .
L'amendement n° 1834 est retiré.
Nous avons repris l'amendement n° 2666 de Brigitte Liso visant à rendre obligatoire la révision des directives anticipées tous les cinq ans, en précisant simplement « le cas échéant », à savoir dans le cas où son auteur les aurait en effet rédigées.
Il est satisfait !
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Même avis.
Madame la ministre, tout à l'heure, Mme Annie Vidal a évoqué un courriel de rappel envoyé automatiquement tous les trois depuis l'ENS : pouvez-vous nous confirmer la chose ?
Si c'est bien le cas, je ne vois pas l'intérêt des présents amendements.
L'amendement n° 2669 n'est pas adopté.
L'amendement n° 1835 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierrick Berteloot, pour soutenir l'amendement n° 670 rectifié .
Les directives anticipées seront conservées dans le dossier médical partagé, c'est-à-dire dans un espace de stockage numérique. Afin de prévenir toute dérive, il est impératif d'inscrire dans la loi que les données de santé sont obligatoirement hébergées sur le territoire national.
En vertu de l'article L. 1111-8 du code de la santé publique, l'ensemble des données contenues dans les ENS doivent être hébergées par un organisme certifié HDS – hébergeur des données de santé. En pratique, elles sont stockées dans deux sites distincts en France, l'un dans l'Est, l'autre dans le Nord. L'amendement est donc satisfait. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Votre réponse montre bien qu'en matière de sécurité des données, il y a la théorie d'un côté, et la pratique de l'autre. Je mentionnais l'évaluation par la HAS de la transmission sécurisée des données de santé dans les Ehpad. Dans les faits, la situation évolue : un résident d'Ehpad peut exprimer des souhaits auprès de professionnels, qui quittent ensuite l'établissement. Idéalement, les communications devraient s'effectuer au moyen d'une messagerie sécurisée, mais les informations doivent aussi pouvoir se transmettre facilement, oralement, lors de discussions informelles, au cours desquelles le patient exprime ses attentes. La sécurité des informations échangées est un enjeu, y compris entre les professionnels eux-mêmes, entre le personnel paramédical et les médecins. Nous devons progresser en la matière ; j'appelle votre attention sur ce point.
Madame la ministre, malgré le texte que vous avez cité, une entreprise française peut héberger les données à l'étranger et une entreprise étrangère peut héberger les données en France, ce qui, dans tous les cas, peut poser un problème. Il faut préciser les choses dans la loi et l'amendement de notre collègue Chenu, défendu par notre collègue Berteloot, est un bon amendement : il permet de sécuriser ce qui est probablement la donnée la plus précieuse, importante et sensible, la donnée de santé.
M. Pierrick Berteloot applaudit.
L'amendement n° 670 rectifié n'est pas adopté.
La parole est à M. Gilles Le Gendre, pour soutenir l'amendement n° 3004 .
Cet amendement de Mme Stéphanie Rist prévoit d'autoriser les infirmiers en pratique avancée (IPA) à aider les patients dans la rédaction de leurs directives anticipées. Mme Rist soutient, à juste titre, que les IPA sont parfaitement compétents pour assurer un tel accompagnement.
Cette mesure irait dans le sens des dispositions que nous avons prises par ailleurs dans le domaine de la santé afin de reconnaître à ces personnels soignants des compétences élargies.
Les professionnels de santé qui effectuent les rendez-vous de prévention – dont les infirmières – auront notamment pour mission d'informer les patients sur la possibilité de rédiger leurs directives anticipées. Je préfère conserver la rédaction actuelle de l'article, issue de l'adoption en commission de l'amendement de notre collègue Christophe Marion. Avis défavorable.
L'amendement n° 3004 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je vous remercie de vouloir nous faire gagner du temps. Comme je l'ai annoncé au début de la séance, je souhaite que nous terminions le titre Ier . Ce serait préférable pour la clarté de nos débats et pour commencer, la semaine prochaine, avec le titre II.
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l'amendement n° 2912 .
Nous avons redéposé cet amendement issu des propositions formulées par le collectif Handicaps : l'objectif est que les personnes placées sous tutelle dont les fonctions cognitives ne sont pas altérées puissent rédiger leurs directives anticipées, sans solliciter au préalable l'autorisation du juge des tutelles. Cette disposition permettrait non seulement de lever un obstacle supplémentaire pour ces personnes, mais également de reconnaître en tous lieux leur personnalité juridique, comme le prévoit la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées. Elle favoriserait le développement d'une forme de culture des directives anticipées et garantirait le droit à la reconnaissance des personnes sous tutelle.
Lorsqu'une personne fait l'objet d'une mesure de protection juridique, l'autorisation du juge ou du conseil de famille, s'il a été constitué, est nécessaire pour la rédaction des directives anticipées. La personne chargée de la mesure de protection ne peut ni l'assister ni la représenter à cette occasion.
Même avis pour les mêmes raisons.
Je connais les textes en vigueur. Nous vous proposons précisément de les modifier, afin de reconnaître aux personnes sous tutelle leur personnalité juridique. Si leurs facultés cognitives ne sont pas particulièrement altérées, reconnaissons-leur la possibilité de décider de leur avenir. Ce serait reconnaître leur liberté et leur donner une possibilité d'émancipation. Si des raisons justifient effectivement qu'elles soient placées sous tutelle, elles doivent pouvoir, en revanche, rédiger leurs directives anticipées et rester maîtres de leur corps et du choix de leur fin de vie.
Je ne partage pas l'avis de notre collègue. Que les personnes placées sous tutelle puissent rédiger leurs directives anticipées avec l'aide d'une tierce personne est une chose ; toutefois, il y a un risque d'abus de faiblesse. Personnellement, je ne voterai pas cet amendement.
L'amendement n° 2912 n'est pas adopté.
La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l'amendement n° 906 .
Une communication régulière doit informer les citoyens sur la possibilité de rédiger ses directives anticipées.
Votre demande est satisfaite. Je vous invite donc à le retirer ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 906 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à supprimer l'alinéa 17 de l'article 4. En effet, faute d'encadrement et de contrôles, cet alinéa expose clairement le titulaire de l'espace numérique de santé à des risques d'abus de faiblesse. La personne de confiance, ou toute autre personne, pourrait être amenée à modifier les données de l'espace numérique de santé, à l'insu du titulaire, par exemple en modifiant les volontés qu'il a exprimées. Qu'une personne de confiance soit en mesure de modifier de telles informations nous paraît particulièrement troublant. Nous alertons sur le risque que cette disposition entraînerait. Nous considérons qu'il s'agit d'une ligne rouge.
La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such, pour soutenir l'amendement n° 2369 .
Comme celui de M. Hetzel, cet amendement a pour objet de supprimer l'alinéa 17. Il s'agit de protéger le patient avant tout : il ne faut pas qu'à l'insu de ce dernier, la personne de confiance, ou toute autre personne, puisse modifier les données de l'espace numérique.
La parole est à M. Thierry Frappé, pour soutenir l'amendement n° 2562 .
Il a pour but de supprimer purement et simplement l'alinéa 17, comme viennent de le dire mes collègues. Autoriser une tierce personne – même un proche ou un membre de la famille – à effectuer des actions sur l'espace numérique de santé est presque une ineptie juridique. Seul le propriétaire de cet espace peut agir en son propre nom et, surtout, procéder à des modifications. Ouvrir cette possibilité de modification à des tiers pourrait entraîner des dérives extrêmes.
Je suis défavorable à ces amendements identiques. Permettez-moi de vous renvoyer à mon propre amendement n° 2808 à l'alinéa 17, que nous examinerons un peu plus tard. Il tend à sécuriser la rédaction des directives et précise que la personne de confiance peut effectuer des actions sur l'espace numérique de santé pour le compte du titulaire, « à l'exception de celles qui auraient pour effet de porter atteinte à l'intégrité d'un document enregistré dans l'espace numérique de santé ». S'il comporte ce verrou, cette sécurité, il me semble que nous pouvons conserver l'alinéa 17.
Nous sommes face à un dilemme. D'un côté, nous voulons généraliser les directives anticipées et en faciliter l'accès ; de l'autre, il faut, à juste titre, protéger celles et ceux qui, pour des raisons personnelles de facilité, auraient donné un accès à leur espace à un tiers. C'est pourquoi je me permets de vous renvoyer moi aussi, mesdames et messieurs les députés, à l'amendement du rapporteur, qui a pour objectif de sécuriser l'accès de celles et ceux qui auraient demandé à des proches aidants de les accompagner dans la rédaction de leurs directives anticipées. Avis défavorable à ces amendements identiques.
Vous l'avez dit vous-même, monsieur le rapporteur : vous allez tenter de sécuriser le dispositif. Ce n'est pas suffisant ! Alors qu'il y a de nos jours des risques de cyberattaques, que 33 millions de Français sont concernés par un piratage des données de la sécurité sociale, on ne peut pas se satisfaire de « tenter » ! Il faut être absolument certain !
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 60
Nombre de suffrages exprimés 59
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 19
Contre 40
Nous ne choisissons pas les numéros de nos amendements ; j'espère que celui-là me portera chance.
Sourires.
Cet amendement de repli vise à supprimer non pas l'alinéa 17 dans son entier, mais sa deuxième phrase. Elle pose un problème parce qu'elle introduit la possibilité qu'un tiers modifie les données de l'espace numérique de santé sans l'accord du titulaire. Certes, dans la plupart des cas, ça ne se produira pas, mais nous sommes ici pour faire la loi et protéger les personnes en fin de vie, notamment les plus vulnérables – c'est le plus important.
Il ne faut pas que les volontés du titulaire de l'espace numérique de santé puissent être modifiées à son insu. Nous savons bien qu'il existe des personnes malintentionnées ou qui sont mues par des enjeux liés, par exemple, au patrimoine. Déléguer l'accès à un proche aidant peut donc se révéler dangereux.
Tel que l'article est rédigé, la tierce personne « peut effectuer des actions » pour le compte du titulaire de l'ENS. Quelles sont donc les actions en question ? On peut comprendre qu'un tiers puisse intervenir pour effectuer des actions du quotidien, celles qui n'ont que peu de conséquences – cela permet de faciliter, de façon générale, l'accès à l'espace numérique. En revanche, certaines actions ont des conséquences très importantes, qui nécessiteraient de vérifier le consentement libre et éclairé du titulaire.
En l'état, cette disposition présente un risque trop important par rapport à l'équilibre que vous avez évoqué, madame la ministre, entre la généralisation des directives anticipées et la protection en cas d'abus.
Vous avez dit, monsieur le rapporteur, avoir déposé un amendement afin de résoudre le problème. J'ai du mal à voir en quoi il apporte une solution. Pour moi, ce n'est toujours pas suffisant.
Je persiste et je signe. Mon amendement n° 2808 complétera la phrase que vous souhaitez supprimer : la sécurité que vous réclamez sera alors assurée.
C'est bien tenté, monsieur Bazin, mais ce sera un avis défavorable.
L'amendement n° 2278 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La personne de confiance, un parent ou un proche peuvent bénéficier de l'accès à l'espace numérique de santé. Cet amendement de mon collègue Colombani vise à créer une hiérarchie et à faire en sorte que soit sollicitée en priorité la personne de confiance ou, « à défaut », – c'est l'ajout que propose ledit amendement – un proche.
L'explication donnée par le collègue est parfaite. Par conséquent, je retire mon amendement.
L'amendement n° 1844 est retiré.
La parole est à Mme Astrid Panosyan-Bouvet, pour soutenir l'amendement n° 2429 .
M. Panifous a très bien présenté l'objet de l'amendement. Il s'agit de limiter les risques d'erreur et de mauvaise interprétation des volontés du titulaire ou d'éventuels désaccords entre les personnes pouvant accéder à cet espace.
Je ne suis pas favorable à ces amendements qui tendent à rigidifier le dispositif. Le titulaire doit rester libre de donner accès à son espace numérique de santé et à son dossier médical à qui il le souhaite. Avis défavorable.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n°
Je vous informe que, sur ces amendements, le groupe Socialistes et apparentés demande un scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Stéphane Delautrette, pour soutenir l'amendement n° 2167 .
Dans la droite ligne de ce qui vient d'être expliqué, afin de sécuriser le dispositif, il vise à limiter l'accès à l'espace numérique de santé à la personne de confiance. Il peut s'agir d'un parent ou un proche, mais elle est délibérément choisie par la personne – c'est inscrit dans le texte.
L'amendement n° 2450 de Mme Annie Vidal est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Avis défavorable. Il faut laisser la possibilité d'autoriser un proche, qu'il s'agisse ou non d'un parent, à accéder à l'espace numérique de santé et à y effectuer des actions, avec le consentement du titulaire.
Même avis.
Pardonnez-moi de revenir sur cette question. Nous sommes en train de prendre un risque énorme. Avez-vous conscience que, juridiquement, c'est une véritable ineptie ?
D'un côté, nous prenons des précautions énormes pour protéger les plus vulnérables, et là, il n'y a aucune protection. Je ne comprends pas. Vraiment, sur ce sujet comme celui-là, nous avons besoin d'un minimum de garanties.
Il y a un amendement qui arrive !
Il y aurait un amendement qui arrive ? Nous sommes en train de débattre et pour le moment, nous n'avons pas de garanties.
Comme son nom l'indique, la personne de confiance est quelqu'un que le patient choisit et il peut la choisir en dehors de la famille. Il peut avoir de bonnes raisons de décider qu'il ne souhaite pas partager certaines décisions avec un proche ou une personne de sa famille, notamment parce que les affects entrent en jeu.
Si je prends mon exemple personnel, ma personne de confiance n'est pas un membre de ma famille, pour qu'au moment où il faudra prendre une décision difficile, l'affect n'entre pas en jeu. En introduisant cette possibilité, vous allez à l'encontre de mes dérives ,
Sourires
Votre rédaction est précisément une dérive, et vous allez à l'encontre de mes directives anticipées – mes proches pourront les lire et m'embêter matin, midi et soir et me demander pourquoi j'ai écrit cela. J'ai choisi une personne de confiance qui n'est pas un proche – c'est mon choix, ce n'est pas celui de tout le monde. À titre personnel, je suis totalement opposée à ce que les proches puissent accéder à l'espace numérique de santé du patient.
Vous postulez qu'il existe un alignement total entre toutes les parties prenantes. C'est un postulat risqué, monsieur le rapporteur, madame la ministre. L'harmonie n'est pas toujours présente. En outre, des personnes bien intentionnées peuvent commettre des erreurs du fait de la multiplication des intervenants dans un même espace sécurisé. Alors que vous voulez protéger les droits des personnes en prévoyant un maximum de garanties, je trouve qu'il y a une forme de légèreté quant à l'encadrement de l'espace numérique.
Je suis assez d'accord avec ce qui vient d'être dit : l'espace numérique doit être absolument protégé des mauvaises intentions, des maladresses comme des méconnaissances. Et il y a de nombreuses raisons qu'on rencontre l'une ou l'autre dans les situations dont nous parlons, autour les personnes qui ont formulé des directives anticipées. Sans vouloir prêter de mauvaises intentions ni à la personne de confiance, ni aux proches, je pense que nous avons absolument besoin de sécuriser l'accès à l'espace numérique.
Il y a un problème avec cet amendement. Il est écrit dans son exposé sommaire : « ainsi d'inscrire dans les directives anticipées stockées dans l'espace numérique de santé la volonté de la personne de recourir ultérieurement à l'aide à mourir ».
Nous sommes au titre Ier . Cette question ne se pose pas. Le Gouvernement ne peut pas être favorable…
Il est défavorable.
Vous avez dit défavorable ! Toutes mes excuses, madame la ministre.
Quoi qu'il en soit, nous sommes contre ces amendements. Ce n'est pas le sujet du titre Ier !
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 58
Nombre de suffrages exprimés 58
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 21
Contre 37
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement n° 2171 .
C'est un amendement de repli par rapport à celui défendu par mon collègue Stéphane Delautrette. J'espère que M. le rapporteur y sera plus favorable.
L'amendement n° 2171 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierrick Berteloot, pour soutenir l'amendement n° 2088 .
Il vise à renforcer la sécurité de l'espace numérique de santé du patient, qui contient des informations privées importantes, dont les directives anticipées. S'il n'est plus en état d'en assurer lui-même sa gestion ou souhaite être secondé, le patient peut nommer un proche gestionnaire de cet espace, ce qui suppose une grande confiance.
Si ce proche était mal intentionné ou guidé par un autre intérêt que celui du patient, il pourrait y avoir des conséquences dramatiques. Pour éviter de telles dérives, l'amendement précise que le proche autorisé à être gestionnaire de cet espace ne doit pas être lié au patient par un contrat de travail. Un supérieur ou un employé du patient par exemple pourraient nourrir des intérêts financiers ou une rancœur envers le patient. Cela n'est bien sûr pas toujours le cas, mais avec ce type de lien, les intérêts de la personne désignée peuvent être contraires à ceux du patient. Par sécurité, je vous invite à voter en faveur cet amendement.
L'amendement n° 2088 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Étant donné le caractère sensible des données qui y sont conservées, la modification de l'espace numérique de santé doit rester un acte personnel. Cet amendement de repli de notre collègue Annie Genevard vise à supprimer les mots « et à y effectuer des actions pour son compte » à la fin de la deuxième phrase de l'alinéa 17.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l'amendement n° 2110 .
Il vise à supprimer la possibilité pour la personne de confiance, la famille ou un proche d'un patient de modifier les informations contenues dans l'espace numérique de santé du patient. Comme je l'ai dit en commission spéciale, les directives anticipées sont un peu comme un testament. Comment imaginer qu'un tiers puisse modifier votre testament ? Il s'agit d'un document personnel : une tierce personne ne doit pas pouvoir le modifier.
La parole est à M. Thierry Frappé, pour soutenir l'amendement n° 2563 .
Cet amendement de repli a pour objectif de maintenir l'accès d'une une tierce personne à l'espace numérique de santé du patient tout en excluant la possibilité d'y effectuer des actions pour son compte. Cet espace est personnel et seul son détenteur doit pouvoir inscrire ses souhaits et procéder aux modifications éventuelles.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
M. Isaac-Sibille a bien présenté cet amendement, qui vise à préciser les modalités de l'accès à l'espace numérique de santé du malade. Nous préconisons qu'il ne soit accessible qu'à la consultation pour la tierce personne. Le type d'action que la personne de confiance, le parent ou le proche, pourrait effectuer n'étant pas défini – cela reste assez flou –, pour éviter toute dérive, il serait préférable de limiter cet accès à la consultation.
La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l'amendement n° 3144 .
La confiance n'exclut pas le contrôle. En soi, le fait que l'espace numérique de santé soit accessible à une personne de confiance ne pose pas de problème, mais, je suis d'accord avec mes collègues, elle ne doit pas pouvoir décider d'une modification en lieu et place du patient.
Je demande leur retrait au profit de mon amendement n° 2808 , qui prévoit que la personne de confiance, le proche, ou le parent, qui a été autorisé à accéder à l'espace numérique de santé lorsque le malade n'est plus capable de le faire lui-même, peut téléverser des documents que la personne lui a confiés,…
…sans pouvoir, en aucun cas, modifier ce qui avait déjà été inscrit dans cet espace.
Le titulaire peut autoriser un tiers à effectuer des actions pour son compte « à l'exception de celles qui auraient pour effet de porter atteinte à l'intégrité d'un document enregistré dans l'espace numérique de santé ».
À défaut, j'émettrai un avis défavorable sur tous ces amendements identiques.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, j'émettrai un avis favorable à l'amendement n° 2808 de M. le rapporteur. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable aux autres amendements.
J'irai dans le sens du rapporteur d'autant que j'ai déposé un amendement n° 2002 qui complète bien le sien en précisant qu'une tierce personne doit utiliser ses propres codes personnels pour accéder à l'espace de santé numérique du titulaire. Cela permet une véritable traçabilité qui répond aux inquiétudes qui se sont exprimées – inquiétudes qui étaient aussi les nôtres.
Vous affirmez que votre amendement sera plus complet, mais l'espace numérique de santé sera davantage accessible à une tierce personne. Notre objectif est vraiment d'empêcher la modification des informations par un tiers.
Nous parlons de données confidentielles. Imaginons que la tierce personne soit un héritier et que la personne qui a rédigé ses directives anticipées ait demandé l'aide à mourir ! Si la personne est toxique, ou mal conseillée, ou mal intentionnée, elle pourra modifier ces données : c'est très grave. Nous devons vraiment protéger ces données personnelles : les directives ne doivent être modifiées que par la personne qui les a rédigées. Sans cela, vous n'obtiendrez jamais la confiance de la population et les Français resteront peu nombreux à rédiger des directives anticipées. Pour les développer, rendez-les inaccessibles et sécurisées.
Je ne veux surtout pas remettre en cause le travail du service de la séance, car je sais que ce très long texte et ses nombreux amendements lui ont donné beaucoup de travail, mais il aurait pu être intéressant de discuter de l'amendement du rapporteur en même temps que des nôtres, car on a le sentiment qu'on pourrait tous les retirer à son profit.
Tout ce que voulons, c'est protéger les personnes en fin de vie et éviter qu'elles soient victimes d'abus de faiblesse. M. le rapporteur nous propose en quelque sorte de nous replier sur son amendement qui vise à compléter la deuxième phrase de l'alinéa 17 par les mots : « à l'exception de celles qui auraient pour effet de porter atteinte à l'intégrité d'un document enregistré dans l'espace numérique de santé. »
Pour ma part, je me suis demandé ce que signifiait l'expression « porter atteinte à l'intégrité d'un document ». J'ai bien trouvé une définition : cela « consiste à garantir que le document n'a pas été modifié ou corrompu sans autorisation ». Très bien ! Mais comment vérifier a posteriori que cela ne s'est pas produit ?
C'est une vraie question, surtout si le titulaire de l'espace numérique en question est décédé. Autour des personnes en fin de vie se nouent des enjeux tels que certains peuvent avoir intérêt à de semblables agissements, en particulier s'il est question de patrimoine. Cela arrive rarement, bien sûr, mais ce n'est pas impossible.
Je ne suis pas sûr que votre rédaction de repli nous sécurise suffisamment pour prévenir les abus de faiblesse dans des situations de ce type, dont on mesure la complexité.
L'amendement n° 2808 du rapporteur vise à compléter la deuxième phrase de l'alinéa 17, sur laquelle portent les amendements que nous sommes en train d'examiner. Souhaitez-vous que nous l'appelions dès maintenant ?
Êtes-vous tous d'accord pour discuter immédiatement de l'amendement du rapporteur ?
Approbations sur de nombreux bancs.
Ils font partie d'une grande discussion au cours de laquelle nous appellerons des amendements prévus jusqu'à celui du rapporteur, qui tendent tous à modifier la même phrase.
Merci, madame la présidente, il y a du métier !
Nous en venons donc à l'amendement du rapporteur.
Monsieur le rapporteur, vous avez la parole pour soutenir l'amendement n° 2808 .
Lorsqu'une personne n'est plus en capacité d'enregistrer elle-même ses directives anticipées, elle « peut autoriser la personne de confiance […], un parent ou un proche à accéder à son espace numérique de santé et à y effectuer des actions pour son compte ». Pour ce faire, l'individu autorisé accède à cet espace numérique au moyen d'identifiants, de telle sorte que l'équipe soignante ou le médecin qui prendront connaissance de ce nouvel accès seront en mesure de déterminer son identité.
Cela assure sa traçabilité.
En effet, madame la ministre. Bien qu'il soit permis à cette personne traçable, identifiable, d'ajouter des éléments aux directives anticipées du titulaire de l'espace numérique de santé, elle ne pourra en aucun cas modifier ce qui aura été précédemment enregistré dans cet espace, si le présent amendement est adopté. À cette fin, il complète la deuxième phrase de l'alinéa 17 par les mots : « , à l'exception de celles qui auraient pour effet de porter atteinte à l'intégrité d'un document enregistré dans l'espace numérique de santé ».
Cette disposition, telle que je vous l'ai expliquée, garantit l'impossibilité de modifier les éléments précédemment enregistrés.
Je rappelle à M. Bazin qu'il n'est aucunement question, dans les documents concernés, de transmissions patrimoniales, mais seulement de données de santé.
Je vais donc appeler des amendements qui auraient dû l'être avant celui du rapporteur.
La parole est à Mme Sandrine Rousseau, pour soutenir l'amendement n° 2124 .
Il vise à limiter l'accès à l'espace numérique de santé accordé à la personne de confiance, à un parent ou à un proche de telle sorte qu'il ne puisse y effectuer que des actions de gestion et non de modification. C'est le moins que l'on puisse faire pour assurer la sécurité et le respect des directives anticipées.
Nous souhaitons préciser clairement que toute modification ou suppression des directives anticipées d'une personne sur son espace numérique de santé est interdite.
Dans le même sens que l'amendement de M. Delautrette, il tend à garantir que, si la personne de confiance, le parent ou le proche désigné a accès à l'espace numérique de santé du titulaire, il ne peut pas modifier ses directives anticipées. Dans le cas contraire, nous entrerions dans une logique potentiellement problématique.
Je réagirai également à la réponse que M. le rapporteur a faite à M. Thibault Bazin : si la personne autorisée est un ayant droit, susceptible d'hériter du titulaire de l'espace numérique, elle peut avoir intérêt à modifier ses données de santé, en raison de l'impact d'une telle modification sur cet héritage. C'est de telles altérations qu'il faut se protéger, d'où notre amendement, qui permet au seul titulaire de l'espace numérique de santé de modifier ses directives anticipées.
Sourires.
L'amendement de notre rapporteur, Didier Martin, apporte une réponse sécurisée aux préoccupations qui se sont exprimées. Cette réponse complète les dispositions prévues à l'article L. 1111-19 du code de la santé publique.
Un certain nombre d'entre vous veulent s'exprimer sur ces amendements.
La parole est à M. René Pilato.
J'invite les collègues à prendre connaissance de mon amendement n° 2002 qui sera bientôt appelé. Il impose à la personne de confiance, au proche ou au parent désigné de se connecter au moyen d'identifiants différents de ceux du titulaire, afin de permettre une véritable traçabilité, ce que ne fait pas l'amendement n° 2808 du rapporteur. C'est pourquoi je souhaitais que ces deux amendements soient examinés en même temps.
Je suis bien sûr favorable à l'amendement du rapporteur, qui préserve l'intégrité numérique des documents en question. Mais il faut aussi prendre en considération l'amendement n° 2173 de mon collègue Delautrette, auquel je suis également favorable, car il interdit de toucher aux directives anticipées.
Comme on l'a déjà dit sur plusieurs bancs, on ne confie pas ces directives à n'importe qui. Elles évoluent avec la personne, à mesure qu'elle avance en âge, ou lorsqu'on lui annonce qu'elle souffre d'une maladie. Elles doivent rester à la seule main de leur auteur.
Merci d'avoir permis cette discussion commune, madame la présidente : elle assure la clarté de nos débats et permet qu'ils avancent sans que nous ayons à revenir sans cesse sur le même sujet.
Vous proposez, monsieur le rapporteur, d'autoriser la personne désignée par le titulaire d'un espace numérique de santé à y effectuer toutes actions, exception faite de celles qui porteraient atteinte à l'intégrité d'un document qui y est enregistré. Suivant la définition qu'en donnent tous les experts des systèmes d'information, garantir l'intégrité d'un document, c'est garantir qu'il n'a pas été modifié ou corrompu sans autorisation. Il ne s'agit donc pas de garantir qu'il n'a pas été modifié ; il s'agit de savoir s'il y a eu ou non autorisation. Comment vérifier que cette autorisation a été accordée ?
Dans cet espace numérique peuvent se trouver des documents dont la modification par un tiers est susceptible d'avoir des conséquences considérables.
Pensons par exemple aux directives anticipées d'une personne résidant dans un Ehpad au financement duquel participent ses ayants droit : qui vérifiera qu'ils ne les ont pas modifiées sans autorisation ?
Je n'ai pas l'impression que nous ayons atteint le terme de notre discussion. Je vois bien que nous nous apprêtons à adopter l'amendement du rapporteur. J'espère toutefois, madame la ministre, que, dans le cadre de la navette, nous pourrons faire expertiser cette notion d'intégrité d'un document.
Mme la ministre acquiesce.
Je ne suis pas certain que cette rédaction permette d'atteindre l'objectif visé : éviter les abus de faiblesse.
Je ne comprends pas comment il est possible de déterminer si un document a été modifié ou supprimé. Qui pourra dire ce qui est arrivé, ce qui se trouvait dans l'espace numérique avant le passage de la personne de confiance, du parent ou du proche, et ce qui s'y trouvait après ? Comment le contrôler ?
Je voudrais demander à ceux de mes collègues qui ont ouvert un compte Mon espace santé comment ils font pour y accéder.
Effectivement, comme sur FranceConnect. Il suffit peu ou prou de se connecter à FranceConnect pour accéder à Mon espace santé et le modifier. Il en va de même d'un compte en banque ou d'une carte bancaire, auxquels un code est associé.
Monsieur Pilato, comment proposez-vous de distinguer les identifiants du titulaire et de la personne désignée ? Faudrait-il, pour ainsi dire, associer un deuxième code à une même carte bancaire ?
Je défends mon amendement n° 2110 et les amendements identiques. Il est clair que la loi doit disposer que Mon espace santé est conçu comme un coffre-fort personnel contenant les données de santé de son titulaire et que personne d'autre n'a le droit d'y toucher, au même titre qu'un coffre-fort ou qu'un compte en banque. Bien sûr, il est toujours possible au titulaire d'un compte en banque de confier ses codes à un tiers mais, par principe, personne d'autre que lui-même ne doit accéder à son compte, pas plus qu'à son dossier médical partagé (DMP).
J'aimerais – j'y insiste pour que les choses soient claires – qu'on ne touche pas au coffre-fort personnel contenant les données de santé.
Notre débat était un peu confus, mais nous commençons à nous faire une idée plus précise de notre responsabilité. Malheureusement, je ne suis pas sûre qu'il soit possible de comparer le traitement précis des directives anticipées d'une personne et la gestion d'un compte en banque, qui présentent des différences radicales.
Encore heureux ! Mais cela suffit-il pour accepter qu'une personne de confiance, un parent ou un proche modifie le contenu des directives anticipées ? Je suis très perplexe.
Comme l'a dit le collègue Bazin, on n'est pas à l'abri de la malveillance. L'argument, reposant sur une comparaison entre l'espace numérique et un compte en banque, fait office de contre-argument. Un compte en banque est certes sécurisé, mais on voudrait que les directives anticipées, étant donné le type de décisions qu'elles contiennent, le soient davantage.
Il faudrait donc que tous les proches sachent qu'ils ne peuvent pas les modifier. Il doit y avoir une règle qui leur dise clairement : vous ne pouvez pas modifier les directives anticipées !
Cette présentation commune permet d'avoir le débat une fois pour toutes. Pour notre part, nous ne voterons pas l'amendement du rapporteur Martin parce que même s'il protège l'intégrité des documents déjà enregistrés, il n'empêche pas de nouvelles modifications. Il n'est donc pas suffisamment sécurisant.
Il en est de même pour l'amendement n° 2002 de M. Pilato relatif à la traçabilité que nous allons bientôt examiner : nous n'avons pas d'opposition de principe, mais il n'empêche pas non plus de nouvelles modifications.
Nous préférerons donc les amendements identiques de nos collègues Annie Genevard, Cyrille Isaac-Sibille, Thierry Frappé, Maud Petit… et le mien.
M. Thierry Frappé applaudit.
Pendant la discussion, j'ai évidemment refait le tour du sujet avec mes équipes pour que les bases du débat soient les plus précises possibles : j'ai fait référence à l'article L. 1111-19 du code de la santé publique, qui prévoit que le titulaire peut « prendre connaissance des traces d'accès à son dossier » et donc constater toute modification éventuelle. Il y a donc bien déjà une traçabilité. La difficulté mise en avant lors de cette discussion, c'est qu'il faut un élément de sécurité supplémentaire car savoir ce qui s'est passé, c'est bien, mais savoir qui a fait évoluer le contenu du dossier, c'est mieux.
C'est la raison pour laquelle je vous propose d'adopter deux amendements : celui du rapporteur et, même si j'anticipe, l'amendement n° 2002 de M. Pilato, qui va le compléter puisqu'il prévoit des codes spécifiques permettant à la personne de confiance d'intervenir.
On saura ainsi non seulement qui a fait quoi mais aussi à quel moment : le code de la santé publique prévoie que les accès sont horodatés, il y a donc une traçabilité au jour et à l'heure près. Cela permet d'assurer la sécurité des informations concernées
L'amendement n° 2808 est adopté.
L'amendement n° 2002 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Mme Danielle Simonnet applaudit.
La parole est à M. Gilles Le Gendre, pour soutenir l'amendement n° 961 .
C'est un amendement de notre collègue Benoit Mournet qui souhaiterait que la personne de confiance qui intervient sur l'espace numérique de santé informe systématiquement le médecin traitant des actions qu'elle a effectuées au nom du titulaire.
L'amendement n° 961 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l'amendement n° 3148 .
Cet amendement propose que toute modification effectuée dans l'espace numérique de santé fasse l'objet d'une notification envoyée au titulaire.
C'est déjà prévu.
Il est satisfait.
L'amendement n° 3148 est retiré.
Nous en venons aux amendements identiques n° 701 de M. Patrick Hetzel et 1259 de Mme Anne-Laure Blin.
Les amendements n° 2783 de M. Daniel Grenon et 1627 de Mme Mireille Clapot sont défendus.
Cet amendement de ma collègue Annie Genevard porte sur un sujet important : le risque d'abus de faiblesse. Je pense notamment aux titulaires d'un espace de santé numérique qui font l'objet d'une mesure de protection juridique.
L'alinéa 19 prévoit que les personnes qui en sont chargées puissent accéder et gérer l'espace numérique de santé, et donc y effectuer des actions. Une nouvelle fois, je pense qu'il faut être extrêmement prudent quand il s'agit de titulaires qui font l'objet d'une mesure de protection juridique. Nous devrons avoir un débat sur ce point au titre II… c'est-à-dire pas ce soir.
Ah bon ?
Sourires.
Mais je pense qu'il faut mettre des garde-fous dès l'article 4 et c'est pourquoi nous demandons la suppression de l'alinéa 19.
Des personnes sont sous protection juridique parce qu'elles sont particulièrement vulnérables, ce qui signifie que concentrer le pouvoir d'agir pour leur compte sur un seul et même représentant fait courir un risque énorme. C'est la raison pour laquelle ces amendements sont des amendements d'alerte. Nous pensons qu'il serait préférable qu'un autre tiers se charge spécifiquement de ce volet.
Je rappelle que le code de la santé publique prévoit de manière générale et dans l'intérêt de celui ou de celle qui est placé sous mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, que la personne chargée de la mesure est destinataire des informations sur l'état de santé du majeur protégé. Il ne serait donc pas cohérent de lui interdire l'accès à l'espace numérique de santé de la personne protégée. L'avis est donc défavorable.
Même avis, même argumentaire.
La dernière phrase de l'alinéa 19 que nous voulons supprimer est la suivante : « Lorsque le titulaire n'est pas apte à exprimer sa volonté, la personne chargée de la mesure de protection peut gérer l'espace numérique pour son compte, en tenant compte de son avis. » On voit bien ce que cela veut dire et quel pouvoir de grande portée lui est dévolu. Il faudrait donc au moins préciser ce qu'il faut entendre par « gérer l'espace numérique ». Si on inclut, par exemple, des actions liées aux directives anticipées, on comprend le type de risque que l'on est susceptible de faire prendre à des personnes vulnérables. Permettez-moi, une nouvelle fois, de vous alerter sur ce point précis.
La parole est à Mme Cécile Rilhac, pour soutenir l'amendement n° 1628 .
Cet amendement de ma collègue Mireille Clapot vise à expliciter au sens du code civil les termes « personne majeures » utilisés à l'alinéa 19. En effet, il existe des cas où l'incapacité à s'exprimer peut être contournée par des moyens imaginatifs ou faisant appel à des technologies modernes. Ainsi, certaines personnes ne s'expriment que par des battements de paupières. Autre exemple : il est possible, même avec des capacités d'expression réduites, de pouvoir exprimer l'intensité de sa souffrance sur une réglette d'échelle de couleurs, ou son état d'esprit par des images. Ce sont bel et bien des formes d'expression. Aussi, l'inaptitude a exprimé sa volonté doit être vérifiée avec attention par un médecin expérimenté en ce domaine pour déceler les capacités cachées, en l'absence desquelles il conclurait, alors seulement, à l'incapacité.
L'amendement n° 1628 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 2907 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je propose de supprimer la seconde phrase de l'alinéa 19 afin de supprimer la possibilité qu'un titulaire incapable d'exprimer sa volonté soit lié par la décision de la personne chargée de la mesure de protection. Voici ce qu'il en est dans la rédaction actuelle : « Lorsque le titulaire n'est pas apte à exprimer sa volonté, la personne chargée de la mesure de protection peut gérer l'espace numérique de santé pour son compte, en tenant compte de son avis. »
Il y a là une vraie contradiction puisque, alors même qu'il s'agit explicitement du cas où le titulaire ne serait pas apte à exprimer sa volonté, il faudrait tout de même que la personne chargée de la mesure de protection fasse des choix de gestion en tenant compte de l'avis du titulaire. Quelle que soit l'opinion que l'on ait sur le degré de protection qu'il faut exercer, il y a un problème de rédaction parce que si le titulaire est reconnu inapte à donner son avis et que la personne en charge de sa protection doit tout de même le lui demander…
L'objectif de mon amendement est d'alerter là-dessus, sachant que même en supprimant cette phrase, on voit bien que l'alinéa demeure insatisfaisant.
Si quelqu'un souhaite que l'examen de ce texte se termine dans les délais prévus, c'est bien moi. Vous avez dit en début de séance que vous aimeriez qu'on finisse ce soir l'examen du titre Ier , éventuellement au prix d'une petite prolongation. Étant donné le nombre d'amendements restants, il faudrait une énorme prolongation pour en venir à bout. Nous sommes tous là depuis lundi et la fatigue commence à se faire sentir. Pouvons-nous nous mettre d'accord pour arrêter à minuit ?
Je ferai comme vous voulez. Je suis là également depuis lundi, présente à quasiment tous les débats. Je vous invite à, au moins, finir l'examen de l'article 4. Nous avons traité 144 amendements et il en reste 76.
Je pense que nous pourrions aller vite sur la fin du titre Ier après l'article 4, mais c'est comme vous voulez. Finissons-en avec cet article puis je vous ferai voter pour savoir si vous voulez continuer ou non. Nous sommes dans le temple de la démocratie.
On continue !
La parole est à Mme Nathalie Serre, pour soutenir l'amendement n° 1156 .
Il vise à substituer, à la fin de la seconde phrase de l'alinéa 19, les mots « et après avis du juge des tutelles » aux mots « en tenant compte de son avis ». Il s'agit de la même idée que celle défendue précédemment par notre collègue Patrick Hetzel.
L'intervention du juge des tutelles ne me paraît pas nécessaire dans ce cas. Avis défavorable.
L'amendement n° 1156 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 1211 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 3422 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement n° 1979 .
Il vise à préciser qu'une information claire est portée à la connaissance du professionnel par une mention sur tous les supports de l'espace numérique en santé du patient. Car, à partir du moment où l'on permet à un tiers d'accéder à cet espace, il est important de se prémunir contre toutes les sujétions qui peuvent découler de cette possibilité.
L'amendement n° 1979 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierrick Berteloot, pour soutenir l'amendement n° 2092 .
À l'alinéa 26, les termes « une alimentation favorable à la santé » me paraissent trop vagues. Il faut préciser que, lors des rendez-vous de prévention, il est expliqué ce qu'est une alimentation saine et quelle est l'alimentation la plus adaptée au patient. En effet, certaines pathologies requièrent une alimentation particulière.
L'amendement n° 2092 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 3150 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est prévu que les rendez-vous de prévention soient l'occasion de « promouvoir la rédaction des directives anticipées ». Il nous semble que le mot « promouvoir » n'est pas approprié car chacun devrait être libre d'entrer ou non dans une démarche de rédaction. Nous préférerions une formulation indiquant que, lors de ces rendez-vous, « une information complète sur les directives anticipées » est apportée.
Issu des débats en commission, cet amendement vise à préciser que les rendez-vous de prévention ont notamment pour objectif, dans une logique pédagogique, de « faire connaître » le rôle des directives anticipées et de la personne de confiance plutôt que d'en « promouvoir » respectivement la rédaction et la désignation.
La parole est à M. Stéphane Delautrette, pour soutenir l'amendement n° 2169 .
Il s'inscrit dans la même logique. Nous proposons la formulation « informer sur » plutôt que « promouvoir ».
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l'amendement n° 2909 .
Quand on a un débat sur des mots à cette heure-ci, il faudrait presque que chacun sorte son dictionnaire pour déterminer quelle est la meilleure formulation. « Informer » sur les directives anticipées nous semble être la première étape à franchir dans notre société. Nous discutions récemment entre députés pour savoir qui avait rédigé ses directives anticipées. Nombre de participants à la discussion, dont moi, ne savaient même pas à quoi cela devait ressembler ni ce qu'on pouvait bien y inscrire. Je pense donc que, dans un premier temps, il faut informer sur les directives anticipées avant de penser à les promouvoir.
Je demande le retrait de tous, à l'exception de celui que j'ai défendu.
Même avis que celui de M. le rapporteur.
L'amendement n° 1252 n'est pas adopté.
Sur l'article 4, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement n° 1617 .
Il a pour objet de compléter les alinéas 26 à 29, qui fixent quatre objectifs aux rendez-vous de prévention de santé, notamment ceux de « prévenir les cancers » et de « promouvoir la santé mentale ». Il nous semble pertinent d'ajouter à cette liste la prévention du suicide.
En 2017, plus de 9 000 personnes se sont suicidées en France, et les tentatives de suicide y ont occasionné plus de 88 000 hospitalisations. Ce sujet doit faire partie de la politique de prévention de santé : il faut ajouter la prévention du suicide aux quatre objectifs déjà fixés.
L'amendement n° 1617 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 58
Nombre de suffrages exprimés 49
Majorité absolue 25
Pour l'adoption 49
Contre 0
L'article 4, amendé, est adopté.
Je crois comprendre en vous voyant tous préparer vos affaires que vous n'avez pas très envie de continuer.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, lundi 3 juin, à treize heures trente :
Sous réserve de la décision de la conférence des présidents, discussion et votes sur les deux motions de censure déposées en application de l'article 49, alinéa 2, de la Constitution ;
Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra