France Insoumise (NUPES)
PCF & ultramarins (NUPES) PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES)
Radicaux, centristes, régionalistes... LREM et proches (Majorité gouv.)
MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.) LR et UDI
RN et patriotes
Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'Europe et des Affaires étrangères. Il ne s'est pas passé un jour cette semaine sans que l'Azerbaïdjan viole le cessez-le-feu de novembre 2020 et tire sur les positions militaires ou sur des cibles civiles en Arménie et dans le Haut-Karabakh.
La terrorisation du peuple arménien continue dans l'indifférence de la communauté internationale. Avec le blocus du corridor de Latchine, le Haut-Karabakh est devenu une prison à ciel ouvert. À chaque instant, 120 000 Arméniens, dont 30 000 enfants, risquent leur vie. Ne fermons pas les yeux !
Depuis six mois, ces populations manquent de tout et peinent à survivre. Le gaz et l'électricité sont coupés, les biens de première nécessité comme la nourriture et les médicaments ne peuvent plus être acheminés. Pendant ce temps, l'Europe accroît ses importations de gaz depuis l'Azerbaïdjan. Or les crises majeures que nous traversons ne sauraient nous faire oublier la situation du peuple arménien. C'est une réalité que nous devons regarder en face. La France a un lien historique et fraternel avec l'Arménie. Il est du devoir de notre nation d'agir.
Madame la ministre, la France doit soutenir l'adoption sans délai d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies visant à rétablir la libre circulation entre l'Arménie et le Haut-Karabakh et faire respecter l'accord tripartite de cessez-le-feu signé le 9 novembre 2020.
Il convient de demander la mise en place d'une force d'interposition et de donner enfin à l'Arménie les moyens de se défendre. À cette même tribune, le 3 novembre 1896, Jean Jaurès dénonçait le prélude du génocide des Arméniens de 1915. Alors, une nouvelle fois, indignons-nous et réagissons.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC, sur de nombreux bancs des groupes RN et LR et sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
La parole est à Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Je vous remercie pour votre question qui m'offre l'occasion de rappeler qu'aucun pays – je dis bien aucun – n'agit autant que le nôtre pour aboutir à un accord de paix entre l'Arménie et son voisin.
Nous sommes aux côtés de l'Arménie pour aller vers une paix juste. La France l'a encore démontré lorsque le Président de la République a réuni le 1er juin, à Chisinau, en marge du sommet de la Communauté politique européenne, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian et le Président de l'Azerbaïdjan Ilham Aliyev, en présence également du chancelier Scholz et du président du Conseil européen. Une nouvelle réunion se tiendra à Bruxelles le 21 juillet. Nous saluons par ailleurs les efforts de médiation de notre partenaire américain avec lequel nous nous coordonnons de façon étroite.
Nous sommes aussi aux côtés de l'Arménie lorsqu'il s'agit de faire baisser les tensions sur le terrain. Nous l'avons démontré lorsque, à la fin du mois d'avril, pour encourager les deux dirigeants à trouver un accord de paix, je me suis rendue en Arménie ainsi qu'en Azerbaïdjan, y compris à la frontière, auprès de la mission d'observation de l'Union européenne, qui doit son existence, pour une grande part, à notre pays et qui joue un rôle très utile pour apaiser les tensions.
Enfin, nous sommes aux côtés de l'Arménie pour lui apporter notre soutien sur le plan humanitaire. Cette question a d'ailleurs été évoquée lors du sommet de Chisinau tout comme, bien sûr, les conséquences du blocage du corridor de Latchine, lequel est illégal, comme l'a indiqué la Cour internationale de justice qui, le 22 février dernier, a ordonné à l'Azerbaïdjan d'y mettre fin. Nous demandons à l'Azerbaïdjan d'appliquer cette décision.
Vous le voyez, nous sommes aux côtés de l'Arménie et des Arméniens.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
J'ai bien compris qu'une action était menée. Nous sommes tous mobilisés. Cependant cette situation dure depuis six mois. Il y va de la survie d'un peuple. Voilà pourquoi il est important de rappeler ces faits à l'occasion de la séance des questions au Gouvernement, en précisant que nous soutenons totalement le peuple arménien.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, RN, LFI – NUPES, LR, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je vous informe que je recevrai, dans les prochaines semaines, mon homologue arménien qui doit venir en visite à l'Assemblée nationale. Nous pourrons alors lui rappeler notre soutien.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et sur quelques bancs du groupe LR.
Monsieur le ministre de l'intérieur et des outre-mer, sept Français sur dix sont favorables à un référendum sur la politique migratoire. Ils sont 80 % à demander de la fermeté en la matière. Les Français subissent une immigration dérégulée, massive et anarchique qui a de lourdes conséquences. Voici trente ans qu'ils sont privés de leur droit d'être consultés sur le sujet. Ils n'en peuvent plus de cette immigration massive qui change le visage de notre pays…
…et est vecteur d'insécurité. Les Français ne veulent plus la financer. Ils en ont assez de voir des demandeurs d'asile ou même des étrangers sous OQTF, l'obligation de quitter le territoire français, remplir les pages des journaux, non pas pour des actes positifs mais pour des meurtres et des agressions quotidiennes.
Pourquoi donc avez-vous toujours refusé de donner la parole au peuple sur cette question ? Vous semblez patiner alors que si ce sujet majeur était pris, tel le taureau, par les cornes, nous économiserions des dizaines de milliards par an. Cela devrait d'ailleurs intéresser le ministre délégué chargé des comptes publics et votre gouvernement, lequel est à la rue financièrement puisque, rappelons-le, il détient le record de dette qui s'élève à 3 000 milliards.
Si vous vous attaquiez enfin au sujet de l'immigration, les Français pourraient aussi retrouver leur tranquillité. Cela devrait guider votre action chaque matin car votre devoir est de protéger ceux qui ne peuvent le faire eux-mêmes, notamment nos compatriotes les plus fragiles.
Qu'attendez-vous pour agir ? Nous avons un projet déjà prêt, clés en main, celui de Marine Le Pen.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – « Ah ! sur les bancs du groupe RE.
Nous vous donnons notre accord pour le copier-coller. Vous pourriez ainsi vous attaquer au droit du sol et à la délinquance en expulsant les délinquants étrangers, réformer l'AME, l'aide médicale de l'État, ainsi que le droit d'asile.
Bref, vous pourriez, avec le projet de Marine Le Pen, répondre aux attentes légitimes des Français et tourner la page du manque de courage politique. Vous pourriez aussi tourner le dos à tous ceux qui se succèdent depuis des décennies…
…et se contentent d'assister à l'ensauvagement de notre pays sans rien faire, en détournant le regard.
Monsieur le ministre, quand agirez-vous enfin et nous présenterez-vous un projet solide pour protéger les Français ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
J'aimerais faire deux remarques. Premièrement, je vous remercie d'avoir enfin retrouvé un peu de décence et de ne pas vous être jetés sur votre téléphone ou sur votre clavier d'ordinateur
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe RN
pour dénoncer je ne sais quel dysfonctionnement de la part du Gouvernement afin d'appuyer vos thèses, fondées sur la peur.
Vous vous êtes sans doute inscrit pour poser cette question au Gouvernement avant de vous rendre compte du caractère énorme, innommable et insupportable de vos réactions le jour des événements absolument désastreux qui se sont produits à Annecy
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Protestations vives et prolongées sur les bancs du groupe RN
et à propos desquels je veux dire quelques mots.
D'ailleurs, les victimes ne vous intéressent pas.
Dans votre question, vous n'avez pas eu mot pour les enfants ni pour les parents. Il semble que l'histoire ne se déroule pas comme l'imaginaient Mme Le Pen et l'ensemble du Rassemblement national. Je peux vous dire que c'est du dégoût que nous inspirent vos propos sur ce sujet.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Deuxièmement, vous avez parlé d'appel au peuple. Mais je vous ferai remarquer que Mme Le Pen a déjà été jugée sur son programme.
Par deux fois elle a été battue à l'élection présidentielle.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Depuis cinquante ans, votre parti prône la division, le refus de l'altérité et la haine, et chaque fois les Français lui disent non. C'est un grand peuple que le peuple français.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Jeudi, un peu avant 10 heures, sur le jardin du Pâquier à Annecy, un homme est entré dans une aire de jeu et a poignardé des enfants jusque dans leurs poussettes.
Depuis, nos pensées sont avec Peter, 22 mois, avec Ennio et Alba, 2 ans, avec Ettie, 3 ans, ainsi qu'avec Manuel, 72 ans et Yusuf, 78 ans. Nous pensons à eux.
Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.– Mmes et MM. les membres du Gouvernement se lèvent également.
Tous sont en vie grâce au prodigieux rempart d'humanité qui s'est immédiatement dressé contre la barbarie.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Ce rempart a le visage d'Henri, celui des passants et des agents d'entretien qui se sont interposés. Il a le visage des policiers d'Annecy, des militaires, des pompiers, du Samu et de la sécurité civile. Il a le visage des soignants d'Annecy, de Grenoble et de Genève.
Aujourd'hui, devant la représentation nationale, je leur dis – nous leur disons – merci.
Applaudissements sur tous les bancs.
Dès jeudi, madame la Première ministre, vous êtes allée sur place avec le ministre de l'intérieur. Le lendemain, le Président de la République s'est rendu à son tour à Annecy pour exprimer la reconnaissance de toute la nation. Dimanche, Annéciennes et Annéciens, nous nous sommes rassemblés fraternellement pour partager cette gratitude plus forte que les mensonges des récupérateurs sordides et des opportunistes de la haine.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Protestations sur les bancs du groupe RN.
Mais cette gratitude ne suffira pas face aux questions qui nous hantent. Nous aurons besoin de réponses en matière de mécanismes européens d'asile, de sécurité de proximité et de psychiatrie. Pour cela, nous avons besoin que la justice fasse son travail.
Madame la Première ministre, pouvez-vous nous communiquer les derniers éléments de l'enquête ?
Nous avons été frappés de stupeur face à l'attaque sauvage dont ont été victimes de tout petits enfants jeudi dernier à Annecy. Quelques heures après cet événement, le ministre de l'intérieur et des outre-mer et moi-même étions en effet sur place avec vous.
Mes pensées vont en premier lieu à ces petits enfants, à leurs familles ainsi qu'aux autres victimes, adultes, de cette terrible attaque.
Je veux à mon tour rendre hommage aux forces de l'ordre, remercier la police nationale et la police municipale.
Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.– Mmes et MM. les membres du Gouvernement se lèvent également.
Ils sont intervenus quelques minutes après le début de cet événement et ont neutralisé l'agresseur.
Je veux également rendre hommage aux forces de secours qui se sont retrouvées en première ligne face à ce drame absolu au cours duquel de tout petits enfants ont été blessés. Avec les soignants, ils ont su prendre en charge ces victimes dont la vie, heureusement, n'est plus en danger aujourd'hui.
L'heure est à l'émotion. Naturellement, l'enquête doit permettre de faire toute la lumière sur le parcours de l'agresseur et sur ses motivations. En revanche, ne mélangeons pas tout. Ne récupérons pas des drames épouvantables tels que ceux que nous avons traversés.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.
Apportons, dans la sérénité, des réponses à nos concitoyens que nous devons plus que jamais protéger.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Ce n'est pas tant une question que je veux poser à cet instant à Mme Schiappa mais une supplication que je formule : démissionnez ! Faites-le séance tenante.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Permettez-nous de croire un instant que le mot « responsabilité » peut avoir du sens pour un membre du Gouvernement.
La création et l'attribution de l'argent du fonds Marianne constituent d'ores et déjà une immense tache que seule votre démission peut laver. Quelle que soit l'hypothèse retenue : que vous ayez fait preuve de légèreté, d'incompétence ou d'un cynisme révoltant, pour répondre politiquement de vos actes il faut démissionner.
Et si vous vous obstinez à vouloir rester, la Première ministre doit vous congédier.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le scandale du fonds Marianne est proprement inouï et intolérable dans un régime démocratique. Mme Schiappa a permis, et peut être même organisé, l'instrumentalisation de l'assassinat ignoble de Samuel Paty.
Vives exclamations sur de nombreux bancs des groupes RE et Dem. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce crime abominable qui voulait mettre à l'épreuve l'unité de notre peuple, elle l'a utilisé pour cibler des adversaires politiques, pour détourner des moyens de l'État au service d'une campagne électorale et pour stipendier de prétendus experts de la lutte contre l'islamisme !
Mêmes mouvements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Tout le confirme : les auditions publiques de la commission d'enquête au Sénat, le rapport de l'inspection de l'administration et la démission de M. Gravel, l'homme lige de M. Valls, à qui elle a confié comme une récompense le soin de lutter contre la radicalisation. Tout est lamentable dans ce scandale, y compris la tentative de diversion impudente qu'elle a organisée en posant pour un magazine de charme.
« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Comment la honte ne l'a-t-elle pas ensevelie ? Comment soutient-elle encore le regard de ses pairs au Gouvernement et le regard de la représentation nationale ?
Où que vous soyez aujourd'hui, je vous en adjure, madame Schiappa, démissionnez !
Mmes et MM. les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent longuement. – Mme Sandrine Rousseau applaudit également.
Visiblement, vous ignorez ce qu'est l'État de droit, un État dans lequel c'est la justice qui juge et ce ne sont ni le tribunal populaire ni les députés !
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE et Dem.
Et la justice, vous le savez tous, a pris en main ce dossier. La ligne du Gouvernement a été claire depuis le début : transparence et réactivité. Dès connaissance des premières alertes sur le sujet,…
En octobre, j'ai posé une question écrite et on ne m'a toujours pas répondu !
…Gérald Darmanin et moi avons saisi l'inspection générale de l'administration – l'IGA – et la procureure de la République de Paris sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale. Le premier rapport de l'IGA a été rendu public et met en évidence des erreurs, voire des fautes, en matière de suivi administratif du fonctionnement du fonds. L'enquête judiciaire est ouverte : il n'appartient donc pas plus aux députés qu'au Gouvernement de la commenter.
Mais le Gouvernement n'est dupe de rien, monsieur le député Saintoul : certains ici se réjouissent de cette affaire qu'ils instrumentalisent à souhait ,
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES
dont vous-même, pour mettre à terre l'esprit de cette initiative lancée après le terrible attentat de Conflans-Sainte-Honorine qui nous avait tous terriblement choqués. En salissant l'action engagée de Marlène Schiappa en la matière, vous aimeriez, au-delà du fonds Marianne, mettre un terme à la politique publique de contre-discours républicains et de lutte contre les séparatismes qui est menée par l'État depuis les vagues d'attentats qui ont meurtri notre pays. En matière d'Islam radical, les discours les plus violents, les plus dangereux, ne sont plus dans les mosquées, mais sur les réseaux sociaux. Et je veux saluer l'action du secrétariat général du CIPDR, le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, qui tous les jours, au service de la France, combat ces menaces.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme Estelle Folest applaudit également.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé.
S'il y a bien une préoccupation majeure et ancienne que nous entendons tous les jours au cœur de nos territoires, c'est la difficulté d'accès aux soins.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LIOT.
Les collectivités se mobilisent pour y répondre ; la région Occitanie, par exemple, s'est engagée activement en recrutant des médecins pour ses territoires sous-dotés, dans le cadre du dispositif « Ma santé, ma région ». À l'Assemblée nationale, un groupe transpartisan sur les déserts médicaux s'est constitué, apportant de nombreuses propositions, et d'autres initiatives parlementaires se multiplient : les lois Khattabi et Rist viennent d'être promulguées et nous sommes en train d'examiner la proposition de loi Valletoux. Nous nous réjouissons forcément, au groupe LIOT, que des propositions de loi soient examinées… même lorsqu'elles constituent des charges pour l'État. Car c'est la preuve que le travail parlementaire, lorsqu'il est respecté, madame la présidente, est utile…
Mêmes mouvements.
Néanmoins, l'accumulation de ces initiatives interroge sur la cohérence et sur la stratégie du Gouvernement, plus précisément sur les moyens que vous êtes prêt à investir pour garantir l'accès aux soins de tous, ainsi que sur vos priorités et sur l'urgence pour vous à agir. Vous me répondrez certainement : « numerus apertus », « pratiques avancées », « assistants médicaux », « Ségur ».
Toutes ces décisions sont certes positives et à mettre au crédit de votre ministère, mais c'est encore insuffisant et, en attendant davantage, la désertification médicale s'aggrave, les conditions d'accueil mais aussi de travail dans les hôpitaux et dans les Ehpad se dégradent, les délais de prise en charge s'allongent à la veille de la période estivale et les urgences ferment déjà dans trop de territoires. Il faut aller plus loin que les mesures prises ! On ne peut pas attendre dix ans que les nouveaux médecins arrivent.
M. Guillaume Garot applaudit.
Tout n'a pas été fait, tout n'a pas été essayé. N'est-il pas temps de s'engager sur une grande loi Santé et territoires ? N'est-il pas temps de faire de la santé une priorité nationale ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et SOC.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Vous l'avez dit : la santé est en effet la première préoccupation de nos concitoyens. Et c'est bien pour cette raison que le Gouvernement est pleinement mobilisé, que nous faisons feu de tout bois pour répondre à cette problématique. Chacun connaît le diagnostic et sait qu'il n'existe pas de solution unique parce que les besoins de santé sont différents selon les territoires. Notre cap est clair et cohérent depuis 2017, il a été rappelé par le Président de la République lors de ses vœux au personnel soignant en janvier dernier. Notre méthode est très claire de par son pragmatisme : avancer avec les territoires, pour les territoires et à partir des territoires, aux côtés des professionnels. Nous devons mobiliser tous les leviers à notre disposition, créer de nouvelles solutions et les développer pour répondre de façon concrète au problème de l'accès aux soins. C'est le sens du plan « maisons de santé pluriprofessionnelles » que j'ai annoncé hier à Sisteron, l'objectif étant qu'il y en ait 4 000 d'ici 2027, sachant qu'un médecin dans une maison de santé pluriprofessionnelle traite 160 patients par an en plus. Voilà le sens des mesures que nous allons développer pour l'« aller vers » et faire le dernier kilomètre.
Il s'agit aussi de mieux coopérer et d'élargir les compétences des professionnels. Ainsi, dans le cadre de l'exercice coordonné, le plan « communautés professionnelles territoriales de santé » – CPTS – prévoit que le territoire concerné sera couvert à 100 % à la fin de l'année, sachant que des professionnels mieux organisés, ce sont des patients mieux soignés.
Mais il s'agit également de développer le partage des compétences, au-delà des vingt nouvelles mesures et des vingt protocoles qui ont été signés. C'est le sens de la proposition de loi Rist qui a été promulguée le mois dernier. L'objectif est de solliciter les soignants au meilleur de leurs compétences tout en rappelant que le médecin généraliste doit rester la pierre angulaire de notre système de santé.
Par ailleurs, il est prévu de simplifier et de libérer les soignants des contraintes administratives, sachant qu'un assistant médical – vous l'avez évoqué –, c'est deux consultations de plus disponibles chaque jour pour nos concitoyens.
Enfin, il s'agit de fidéliser et de valoriser les professionnels en redonnant du sens à l'exercice professionnel, en valorisant les gardes, en respectant et en développant le travail de nuit, mais aussi en mettant en place la quatrième année de médecine générale et en traitant de la santé et de la sécurité des professionnels de santé – et aussi en avançant sur la réforme de la procédure concernant les Padhue, les praticiens à diplôme hors Union européenne, dont nous aurons l'occasion de discuter.
Monsieur le ministre de la fonction publique, après une revalorisation de 3,5 % du point d'indice l'an passé quand l'inflation a atteint presque le double, le Gouvernement annonce désormais une hausse de 1,5 % quand l'inflation sur l'année dépasse le triple… À ce rythme, faudra-t-il tabler sur une hausse négative du point d'indice l'année prochaine ? Depuis tant d'années, on demande aux agents du service public d'accepter sans broncher coupes budgétaires, réductions d'effectifs et modération salariale au point qu'ils ont perdu 20 % de pouvoir d'achat en vingt ans ! J'ai bien dit 20 % ! Une perte de pouvoir d'achat accompagnée d'une dégradation de leurs conditions de travail, résultat de la logique comptable que vous appliquez et qui produit pour les fonctionnaires une immense perte de sens et pour les usagers tant de problèmes d'accès à des services publics de qualité.
Les agents du service public résistent, depuis vingt ans, contre la logique austéritaire, mais vous les avez usés jusqu'à la corde ! Aujourd'hui, la fonction publique est désertée ! Non content de les faire travailler deux ans de plus malgré la pénibilité de leur tâche, vous faites perdurer par cette hausse ridicule le sentiment que le service public n'est pas la solution. Quoi ? Notre société n'aurait pas les moyens de rémunérer correctement les femmes et les hommes qui éduquent nos enfants, qui soignent nos parents, qui gèrent nos forêts ou qui nettoient nos rues, ceux qui ont neutralisé l'agresseur d'Annecy ou qui ont porté secours à ses victimes ? On ne pourrait les rémunérer correctement ? Ce n'est pas vrai ! Vous pourriez le faire si le service public avait une valeur à vos yeux. Vous allez certainement me répondre « primes » et autres « pactes », mais le service public a besoin qu'on croie en lui, qu'on réinvestisse pour lui dans la durée. Toutes ces primes, tous ces pactes seront rayés d'un trait de plume lorsque vous voudrez faire de nouvelles économies, et votre trajectoire des finances publiques nous porte à croire qu'il n'y aura pas long à attendre !
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur de nombreux bancs du groupe GDR – NUPES.
La parole est à M. le ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Au fond, la question qui vous me posez comme à l'ensemble du Gouvernement est celle de la responsabilité. Est-ce que nous sommes à la hauteur de nos responsabilités…
…pour répondre aux préoccupations premières des agents de la fonction publique, concernés comme les autres Français par les questions de pouvoir d'achat ? Je m'exprime devant vous en ayant sur cette question toujours pris mes responsabilités. Tout d'abord, je vous rappelle que je suis le ministre de la fonction publique qui a, l'année dernière, le plus augmenté le point d'indice, bien davantage que sous toutes les majorités précédentes. C'était une augmentation historique, jamais atteinte depuis trente-sept années !
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RE.
Et je suis cette année encore à la hauteur de mes responsabilités.
J'ai reçu ainsi hier l'ensemble des organisations syndicales et j'ai pu leur faire des annonces fortes sur la question du pouvoir d'achat et de la rémunération de nos agents publics. J'ai annoncé d'abord que nous allions, cette année encore, consacrer à la revalorisation des salaires des fonctionnaires la même enveloppe que l'année dernière. Nous renouvelons donc cette année un effort historique. Il y aura ainsi une augmentation de 2,5 % de la rémunération indiciaire, c'est-à-dire de la part fixe, à savoir 1,5 % dès juillet et des distributions de points supplémentaires pour tous dès janvier 2024.
Mme Anne Brugnera applaudit.
Mais j'assume aussi que nous devons concentrer nos efforts sur les bas salaires et sur les classes moyennes de la fonction publique. Et c'est la raison pour laquelle j'ai aussi annoncé des mesures spécifiques pour accompagner les bas salaires en atténuant l'écrasement des grilles indiciaires pour apporter plus de progressivité : plus de 600 millions d'euros seront consacrés à cette mesure d'ici la fin de l'année.
Et en effet, j'assume aussi de répondre dans les médias à la question du pouvoir d'achat, et d'apporter une prime de pouvoir d'achat aux agents de la fonction publique les moins bien rémunérés : la moitié des fonctionnaires recevront, dès septembre, une prime de 300 à 800 euros brut sur leur compte en banque. Voilà une réponse immédiate aux questions de pouvoir d'achat.
Vous le voyez : nous prenons, comme cette majorité, nos responsabilités.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme Agnès Carel applaudit également.
Quand ce gouvernement décide de donner la possibilité aux propriétaires d'augmenter les loyers de 3,5 %,…
…tandis que les fonctionnaires ne sont augmentés que de 1,25 %, on se dit…
Son temps de parole étant écoulé, le micro de l'oratrice est coupé. – Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Sébastien Jumel applaudit également.
Ma question s'adresse à M. Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Il est des événements auxquels notre mandat nous confronte et dont nous ne trouvons les mots à la hauteur de nos émotions. Ainsi, à Annecy, jeudi dernier, trois enfants et deux adultes étaient gravement blessés, sans oublier les témoins malgré eux de cette tragédie. Tout notre soutien leur est adressé. C'est un acte d'une violence inouïe, de l'ordre de l'irreprésentable, de l'indicible, qui nous a d'abord tous sidérés, puis particulièrement bouleversés. S'il n'existe aucune explication à un geste d'une telle atrocité, ne cédons pas à l'instrumentalisation et à la démagogie : l'enquête poursuit son cours.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes HOR et RE.
Soyons fermes et justes ! Faisons pleinement confiance à la justice pour permettre aux familles et aux victimes de se reconstruire. De ce drame indicible, souvenons-nous de celles et de ceux qui protègent, de celles et ceux qui sauvent, de ces pompiers, de ces médecins, de ces infirmiers, de ces policiers et ces gendarmes à qui nous devons tant, et aussi des premiers témoins, ces héros qui ont tenté de s'interposer, dont Henri. Sans la réactivité et le professionnalisme de ces femmes et de ces hommes, le bilan aurait été encore plus tragique.
Aux côtés des forces de l'ordre et de secours, ce sont aussi nos maires et l'ensemble de nos élus locaux que nous devons soutenir et remercier car ils sont eux aussi, au quotidien, les premiers de cordée au service de notre pays et de sa protection. Cette solidarité et cette humanité font la fierté de notre nation. Nous leur en sommes immensément reconnaissants. Notre action politique se doit d'être à la hauteur de leur engagement au quotidien. Comment pouvons-nous accompagner, monsieur le ministre, nos élus locaux pour les aider à faire face à ces situations d'urgence et de crise, et pour développer davantage l'« aller vers » des structures d'accueil de ces populations marginales ?
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR, RE et Dem.
Comme l'a dit Mme la Première ministre, à Annecy, l'innommable s'est produit. Vous vous êtes rendue sur place, madame Violland, aux côtés de vos collègues parlementaires et du maire d'Annecy. Je me joins également à la Première ministre pour remercier les policiers municipaux, les pompiers et le personnel de santé qui, étant intervenus très rapidement, ont permis de sauver la vie de ces bébés et de ces très jeunes enfants. En moins de trois minutes, la police est parvenue à interpeller l'assaillant et, en quelques secondes, les blessés les plus graves ont été conduits vers les hôpitaux de d'Annecy, de Grenoble et de Genève.
Vous avez aussi évoqué le travail très important que nous menons avec l'ensemble des collègues du département pour aider les élus locaux à intervenir dans ce genre de drame, quel qu'il soit – celui-là est particulièrement grave et touchant. Dans votre département, si quelque chose à permis de sauver la vie de ces bébés, c'est bien le travail accompli en symbiose par les pompiers et les personnels du ministère de la santé.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR.
En Haute-Savoie, il existe d'ailleurs une plateforme unique – un numéro d'urgence – qui assure le plus rapidement possible la coordination entre le Samu, les pompiers et les autres personnels dont le métier consiste à sauver la vie des gens. J'ai organisé une visite sur place à vos côtés, madame la députée. J'ai été heureux de constater que, malgré ces événements particulièrement dramatiques, la police, les pompiers, le Samu et les médecins ont pu intervenir en moins de trois minutes pour sauver la vie de ces enfants.
J'espère que cela nous inspirera toutes et tous : faisons en sorte que les « Bleus », les « Blancs » et les « Rouges », comme on dit au ministère de l'intérieur, soient encore plus réactifs demain pour sauver d'autres vies.
Mêmes mouvements.
Madame la Première ministre, on compte trois fois plus de médecins généralistes pour 100 000 habitants sur l'arc Atlantique et sur la Côte d'Azur que dans les départements du centre de la France, et dix fois plus d'ophtalmologistes à Paris que dans le département du Cher, sans oublier les plus grands déserts médicaux de notre pays que sont Mayotte, la Guyane et la Seine-Saint-Denis. La réalité, c'est que des millions de concitoyens vivent l'absence de médecins traitants comme une violence, une injustice, une rupture d'égalité d'accès aux soins – c'est le symbole d'une France humiliée.
M. Antoine Léaument applaudit.
Quand les déserts médicaux avancent, c'est la République qui recule !
La République qui recule, c'est la progression, pour la première fois depuis 1945, de la mortalité infantile dans notre pays ; c'est aussi l'engorgement des urgences dans nos hôpitaux. La position du Gouvernement est intenable, madame la Première ministre. Oui, il fallait desserrer le numerus clausus. Mais cela ne sera pas suffisant, alors que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) augmente moins que l'inflation – ce qui affaiblit encore la santé demain – et que, d'ici 2030, le nombre de médecins généralistes continuera de diminuer.
Nous sommes 205 députés, issus de tous les bancs de l'arc républicain – à gauche, à droite et au centre –, à proposer un pas vers la régulation en permettant l'installation des médecins dans les territoires qui en manquent, pour ne pas accentuer la concentration des professionnels de santé. Les députés communistes ont, pour leur part, toujours défendu le conventionnement sélectif. Nous savons qu'un petit pas vaut mieux que mille promesses. Nous sommes pour la régulation, l'amélioration de l'accès aux études de médecine pour les jeunes issus des classes modestes – en zones rurales comme dans les quartiers populaires – et la facilitation de l'intégration des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue). Écoutez les députés qui, ensemble, proposent des solutions nationales et locales pour répondre à cette exigence simple et légitime de nos concitoyens : avoir un médecin à qui s'adresser pour pouvoir se soigner !
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Enfin, soutenez notre amendement à la proposition de loi de M. Valletoux pour réguler l'installation des professionnels de santé : vous feriez œuvre utile !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe LIOT.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Ce que vous dites n'est pas vrai : il n'existe pas de territoires dans lesquels il y aurait trop de médecins.
Exclamations sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.
Aujourd'hui, 87 % des territoires en France sont des déserts médicaux. La régulation de l'installation est une idée séduisante en apparence, mais il s'agit en fait d'une fausse bonne idée : elle est malheureusement inadaptée à la réalité de notre démographie médicale et n'a d'ailleurs jamais été adoptée par aucun gouvernement, ni de droite ni de gauche, pour la simple et bonne raison qu'elle ne fonctionne pas.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire : la régulation ne résoudra malheureusement pas nos problèmes – vous qui êtes sur le terrain, vous le savez autant que moi. Qui peut me prouver qu'il y a trop de médecins sur son territoire ? Je serais curieuse de le savoir. La mesure que vous évoquez risque de décourager les étudiants en médecine, voire de créer une médecine à deux vitesses en encourageant le déconventionnement des médecins. Or je sais que vous ne le souhaitez pas.
Notre responsabilité nous impose de dire à nos concitoyens qu'il n'y a pas de baguette magique pour résoudre le problème de l'accès aux soins. Il existe plutôt de multiples leviers, que le Gouvernement est pleinement mobilisé à actionner. Je les ai présentés en détail tout à l'heure, mais je peux de nouveau en citer quelques-uns, comme le gain de temps médical, la formation et la coopération entre professionnels. Bien entendu, beaucoup reste à faire : soyez assurés que nous y travaillons tous les jours ! Ce que nous proposons, ce sont des solutions concrètes et pragmatiques, qui apportent des résultats tangibles. La régulation n'apportera, malheureusement, rien de tout cela.
Mme Natalia Pouzyreff applaudit.
Je veux avant tout, à la suite des événements dramatiques d'Annecy, renouveler mes pensées pour les victimes et leur famille. Je veux également remercier les secours et plus particulièrement le jeune Henri ,
« Bravo ! » sur les bancs du groupe RN
pour son courage, son sens de l'altruisme et son civisme : Les Français peuvent être fiers de l'héroïsme dont il a fait preuve.
Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent. – Les membres du Gouvernement se lèvent également.
Monsieur le ministre de l'intérieur, dimanche matin, à l'appel du collectif Les Soulèvements de la Terre, des militants écologistes ont arraché, près de Nantes, des plants de muguet et des tuyaux qui les irriguaient pour dénoncer l'utilisation intensive de l'eau et du sable. User de la violence, saccager le travail d'autrui et commettre des détériorations gratuitement est tout simplement inacceptable. Aucun prétexte, aucune cause ne peut justifier de détruire ainsi le pacte républicain. Le militantisme est une chose : chacun a le droit d'exprimer ses idées dans le cadre démocratique. L'activisme destructeur en est une autre,…
…d'autant qu'il frappe une profession agricole qui travaille dur et qui souffre beaucoup. Comment admettre ces appels à la violence et au sabotage en toute impunité ? Aujourd'hui, les actes sont signés, revendiqués et assumés.
Il est d'autant plus urgent d'agir que les prochains méfaits sont ouvertement annoncés avec le mode d'emploi : « couper l'eau aux accapareurs », « démanteler des mégabassines », « squatter des piscines »,…
…« bétonner les accès aux vannes », « mener des opérations contre divers sites comme la ligne Lyon-Turin » – et j'en passe !
Monsieur le ministre, il y a quelques semaines, vous annonciez qu'une procédure de dissolution était engagée à l'encontre des Soulèvements de la Terre.
Comment comprendre qu'elle n'ait toujours pas abouti, alors que cette association continue à semer la haine et la violence autour d'elle ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
« Oh non ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe LR.
Je vous remercie pour votre question, madame Louwagie. L'association à laquelle vous faites allusion prétend aimer la Terre et la servir avec une forme d'activisme qui lui appartient.
Quand on aime la Terre qu'on veut la préserver, on développe les énergies renouvelables : c'est ce que nous faisons en multipliant par dix les installations solaires et en créant cinquante parcs éoliens en haute mer.
« Et alors ? Quel est le rapport ? » sur les bancs du groupe RN.
Quand on aime la Terre, on fait le choix du nucléaire, qui est une énergie propre,…
…on engage une rénovation thermique massive des bâtiments, on interdit les véhicules thermiques, on arrête les locations de passoires énergétiques.
Protestations sur les bancs du groupe LR. – Mme Clémence Guetté s'exclame.
Attendez, je vais répondre à votre question, madame la députée. Quand on aime la Terre, on interdit l'exploitation des fonds sous-marins : c'est ce qu'a demandé le Président de la République et il a obtenu que cela puisse être réalisé à l'échelle mondiale.
Exclamations sur les bancs des groupes RN, LFI – NUPES et LR.
Quand on aime la Terre, on organise des forums mondiaux pour venir en aide aux forêts, on prend des mesures concrètes qui sont efficaces pour la planète et pour ceux qui l'habitent.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Cette association ne fait rien de cela. Vous dénoncez son activisme à raison, car il est négatif : en effet, on n'aime pas et on n'aide pas la Terre lorsqu'on arrache des salades ou du muguet et lorsqu'on s'en prend aux agriculteurs qui nous nous nourrissent et nous font vivre. Pire encore, on n'aime pas la Terre ni les humains lorsqu'on organise des manifestations interdites, auxquelles on convie des militants violents étrangers dans le seul objectif est de s'en prendre aux forces de l'ordre et de fouler aux pieds la République.
Madame la députée, le Gouvernement partage votre indignation et vos marques de soutien à destination de tous les agriculteurs de ce pays ;…
…il s'indigne avec vous de la présence d'élus locaux ou nationaux qui, en soutien à cette association, portent l'écharpe tricolore sur les lieux de certaines manifestations.
Mme Mathilde Panot s'exclame.
Je vous rappelle qu'à la demande du ministre de l'intérieur, un dossier a été monté en vue de procéder à la dissolution des Soulèvements de la Terre ,
« Ah ! » sur les bancs du groupe RN
si les conditions sont réunies.
Monsieur le ministre, vous n'avez finalement répondu que partiellement à ma question. En effet, la cause écologique est encore une fois dévoyée par ceux qui prétendent le mieux la servir.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Mais il y a une chose plus grave : l'État doit se faire respecter et faire respecter la loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE, RN et LR.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, c'est une bombe sanitaire qui vient d'exploser avec l'enquête journalistique « Vert de rage ». Au minimum, 700 000 enfants sont en danger dans notre pays car ils pourraient respirer de l'amiante dans leurs écoles, en particulier dans les quartiers populaires et les zones rurales.
Cette enquête révèle que sur près des 20 000 écoles primaires et maternelles passées au crible de l'investigation, 30 % sont amiantées. Huit fois sur dix, il y avait de l'amiante dans la salle de classe. S'ils respirent cet amiante, les enfants pourraient développer un cancer d'ici trente à quarante ans. Monsieur le ministre, il y a urgence ! Nous devons savoir combien d'élèves, de collégiens, de lycéens, de professeurs, d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), d'agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), d'employés de cantines scolaires et d'agents d'entretien ont respiré et continueront de respirer de l'amiante !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Comme vous le savez, ce sont les collectivités qui sont chargées du bâti scolaire et, depuis vingt ans, elles sont également chargées du désamiantage de leurs équipements publics.
Mmes Sophia Chikirou et Mathilde Panot s'exclament.
Néanmoins, le ministère de l'éducation nationale, par définition, se préoccupe de la santé et de la sécurité de ses personnels et des élèves. Il veille donc particulièrement à ce que les procédures de désamiantage soient suivies de manière régulière. En fonction des cas, il est nécessaire d'évaluer les risques. Aussi les collectivités doivent-elles transmettre des informations relatives à la présence d'amiante dans les locaux scolaires, afin que les chefs d'établissement puissent prendre toute mesure nécessaire. C'est notamment vrai pendant les phases de travaux.
Nous avons également créé, en 2019, une cellule « Bâti scolaire et aménagement d'espaces pédagogiques »,…
…qui a publié un guide de désamiantage de manière à informer les usagers et les collectivités.
Nous sommes conscients de certaines données de santé publique dont vous faites état. À ce titre, je suis tout à fait favorable à ce qu'un partage d'informations entre le ministère de l'éducation nationale et les collectivités puisse avoir lieu, de manière à avancer sur cette question importante de santé publique.
Monsieur le ministre, comment pouvez-vous être satisfait de cette réponse ? Vous parlez, mais rien ne change. C'est pourtant vous qui avez la responsabilité d'assurer la sécurité des enseignants et des élèves !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Exclamations sur les bancs des groupes RE, LR et Dem.
Vous n'avez pas de chiffres, alors organisez des prélèvements dans toutes les écoles et publiez vos résultats !
Vous demandez aux mairies de rénover les écoles, mais vous savez très bien qu'elles n'en ont pas les moyens. C'est à l'État qu'il revient de créer un fonds public national pour les rénover.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous ne faites rien de tout cela : vous préférez faire l'autruche et sacrifier les générations futures, juste pour ne pas avoir à payer.
Au sujet de l'amiante, la réponse de l'État, c'est l'omerta. Je me tourne donc vers vous, chers collègues. Dans cette assemblée, pas un seul d'entre nous n'est épargné :
« Oh ! sur les bancs des groupes RN et LR
il y a des enfants exposés à l'amiante dans chacune de nos circonscriptions. Au-delà des clivages politiques, nous avons tous le devoir d'agir. Aussi, madame la présidente de l'Assemblée nationale, acceptez notre demande de créer une commission d'enquête pour trouver les solutions et protéger les enfants contre l'amiante ! C'est le devoir de notre assemblée que de ne pas sacrifier les générations futures.
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent.
Je viens de vous répondre en vous indiquant qu'il s'agit d'une question importante de santé publique. Sachez que nous nous en saisissons :…
« Oh ! Rasseyez-vous ! » sur les bancs du groupe LR.
…cela vaut mieux que votre numéro habituel de démagogie !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme Géraldine Bannier applaudit également.
Il nous faut travailler sérieusement sur cette question ; nous sommes d'ailleurs en lien avec les collectivités. Je vous prie de croire que nous y travaillons sérieusement. Encore une fois, cela vaut mieux que de la démagogie.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Mme Caroline Abadie se lève et applaudit.
Monsieur le ministre délégué chargé des transports, la loi d'orientation des mobilités de 2019 a fixé un objectif de doublement de la part modale du transport ferroviaire dans les grands pôles urbains. Depuis, les annonces se succèdent. Celle du Président de la République concernant la construction de RER métropolitains a été suivie par celle relative à un plan inédit de développement du ferroviaire, doté de 100 milliards d'euros d'ici à 2040. Cette semaine, vous-même avez annoncé une dotation de 8,6 milliards pour les contrats de plan État-région pour les années 2023 à 2027. Les deux tiers de cette enveloppe iront aux infrastructures ferroviaires et aux transports publics.
À un moment où il faut inciter les Français à utiliser des transports décarbonés et multiplier les mobilités propres, il est indispensable que tous les territoires bénéficient d'un réseau de transport performant et adapté à notre temps. Ce réseau doit s'inscrire dans un projet de territoire consensuel et respectueux des collectivités, des usagers et des riverains, prenant en compte les contraintes environnementales.
Les projets pensés peu ou prou au siècle dernier sont-ils encore pertinents ? Ainsi en est-il, en Île-de-France, du T Zen, conçu il y a quinze ans, pour lequel une étude d'impact environnementale serait nécessaire. Je parle de ma circonscription, mais le sujet est bien présent dans nos territoires : les annonces que vous avez faites la semaine passée à propos de la liaison Lyon-Turin n'attendent plus qu'une réponse de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Dans cette même région, il y a aussi la question du Clermont-Paris, nécessaire au désenclavement de certaines communes ou agglomérations.
À l'heure où les négociations entre l'État et les régions vont débuter, pouvez-vous nous préciser l'évolution des moyens consacrés à ces questions dans les contrats de plan ainsi que les modalités de mise en œuvre de ces financements, leur calendrier et leur articulation avec l'enveloppe de 100 milliards annoncée ? Comptez-vous intégrer pleinement les critères environnementaux dans ces projets et de quelle manière ? Allez-vous prévoir une clause de revoyure, ce qui permettrait de réévaluer les projets anciens qui ne seraient plus adaptés ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.
Vous avez souligné l'importance de notre investissement dans le domaine des transports. C'est un enjeu essentiel pour la vie quotidienne de nos concitoyens et pour de nombreux territoires, notamment votre circonscription et ceux que vous avez cités. C'est aussi un enjeu central pour la décarbonation, puisque les transports représentent, nous le savons, 30 % de nos émissions de gaz à effet de serre.
C'est dans cet esprit et dans le prolongement de la loi d'orientation des mobilités que la Première ministre a annoncé au mois de février dernier, un investissement exceptionnel, dans le cadre du plan d'avenir pour les transports. Nous sommes en train de décliner ces annonces faites il y a quelques semaines.
Nous avons engagé une concertation avec les régions. J'ai effectivement annoncé la semaine dernière que, dans les contrats de plan État-région, qui manifestent notre partenariat et notre investissement partagé, les montants annuels consacrés à l'investissement dans les transports seraient très significativement augmentés, de 50 % ; l'État est prêt à porter sa contribution à 8,6 milliards. Derrière ces grands chiffres, il y a des choix très clairs, notamment la priorité donnée au ferroviaire, aux transports publics et aux RER métropolitains annoncés par le Président de la République. À cet égard, je salue la proposition de loi déposée par Jean-Marc Zulesi, président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. Elle sera examinée dans quelques jours dans cet hémicycle et sera, je l'espère, votée, puisqu'il s'agit, au-delà des moyens budgétaires, de donner aux métropoles et aux régions les outils nécessaires pour accomplir cet effort d'investissement.
D'autre part, nous devons poursuivre l'investissement engagé depuis quelques années dans les trains d'équilibre du territoire. Je pense notamment au Paris-Clermont, qui fait l'objet d'un programme d'investissement exceptionnel. Je citerai un simple chiffre : outre les 8,6 milliards que j'ai évoqués dans le cadre des contrats de plan, l'État est en train d'investir 5 milliards dans les trains d'équilibre du territoire. Il s'agit des liaisons Paris-Clermont, Paris-Limoges, Paris-Le Havre, Bordeaux-Marseille et de nombreuses autres. Vendredi dernier, je me suis rendu à Bordeaux, où j'ai annoncé un effort de renouvellement de l'ensemble du parc de rames.
Vous le voyez, l'État est au rendez-vous. Nous attendons désormais les réponses des régions, ainsi que vous l'avez évoqué pour la liaison Lyon-Turin. Nous reverrons un certain nombre d'autres projets, car la priorité accordée au ferroviaire implique une plus grande sélectivité dans les projets routiers, ce que nous assumons.
En tout cas, c'est un investissement massif, inédit et dans la durée que nous réalisons pour nos territoires, partout en France.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.
Ma question s'adresse au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Connaissez-vous le point commun entre vous et l'Union Européenne ? Votre totale incompétence, qui engraisse la banque et la finance sur le dos des contribuables !
« Oh ! » sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
Quatre cent quatorze pour cent ! C'est la hausse, en 2022, du coût de la dette indexée sur l'inflation, dont vous êtes responsables, avec la gauche qui a créé cette indexation et avec Les Républicains qui l'ont perpétuée pendant des décennies. À ce stade, rien qu'en intérêts, 14 milliards sont encore prévus cette année !
Trois cents pour cent ! Les sommes sont considérables ! C'est la hausse estimée du coût pour le plan de relance européen, les intérêts prévus s'élevant désormais à 42 milliards, au lieu de 15. Dans cette histoire, la France est le dindon de la farce, puisqu'elle n'a perçu que 37 milliards sur les 40 prévus dans ce plan.
La dette n'est pas un bon vin : elle n'est pas meilleure parce qu'elle est plus chère ! On apprend que les 15 milliards initialement prévus pour huit ans seront épuisés dès cet été et que, pour couvrir l'année prochaine et uniquement celle-ci, Bruxelles recommande déjà aux États de doubler l'enveloppe prévue pour 2024, en la portant de 2 à 4 milliards – une paille !
Valérie Hayer, l'une de vos députées européennes, indique déjà qu'il va falloir créer de nouvelles ressources propres et qu'il est « hors de question de baisser les dépenses du budget européen ». Sachant que l'Union européenne ne fera pas d'effort, quelle taxe allez-vous créer pour financer ces charges de dette qui explosent ?
Quand allez-vous vous attaquer à notre dette, qui nous coûte désormais plus que le budget de notre défense ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
J'ai été assez surpris par votre question.
Vous nous donnez des leçons de responsabilité budgétaire ,
« Oui ! » sur les bancs du groupe RN
alors que, dans les débats budgétaires que nous avons eus depuis un an, vous n'avez jamais été capables de proposer une piste d'économie sérieuse.
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe RN.
En revanche, vous proposez systématiquement des dépenses supplémentaires. Je vous avoue que c'est un peu difficile d'entendre de telles leçons de votre part, mais nous aurons prochainement d'autres débats à ce sujet.
Vous bottez en touche, monsieur le ministre délégué ! Ne vous défilez pas !
Pour ce qui est de la trajectoire et du désendettement, Bruno Le Maire et moi avons présenté il y a quelques semaines un nouveau programme de stabilité pour les cinq années à venir, plus ambitieux encore que le précédent : il accélère d'un an le désendettement de la France ; il prévoit un retour du déficit budgétaire à 2,7 % du PIB en 2027, donc sous les 3 % du PIB, et une diminution de 4 points de la charge de la dette rapportée au PIB.
Cela étant dit, il va nous falloir réaliser un certain nombre d'économies.
Or, chaque fois que nous proposons des économies et une maîtrise de la dépense publique, je constate que vous n'êtes jamais au rendez-vous, que vous refusez de nous accompagner.
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe RN.
En revanche, vous proposez systématiquement des dépenses supplémentaires. C'est un problème, car cela va à l'encontre du discours que vous affirmez tenir sur la souveraineté et l'indépendance de notre pays. Vous voulez condamner notre pays à rester durablement endetté, donc durablement soumis aux marchés financiers et à la dette.
Mêmes mouvements.
Nous assumons d'agir pour l'indépendance et la souveraineté de notre pays.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Décidément, la modestie ne vous étouffe pas. Pourtant, vous devriez en afficher un peu. Les cadeaux que vous faites aux banques, volontairement ou par incompétence, permettraient de financer plusieurs fois la baisse de TVA que Marine Le Pen et nous proposons ,
Applaudissements sur les bancs du groupe RN
outre une hausse des salaires par une diminution des charges. Les cadeaux que vous faites aux banques permettraient de financer un plan d'envergure pour lutter contre la désertification médicale. Bref, les cadeaux que vous faites aux banques et à l'Union européenne, qui nous prend plus qu'elle ne nous donne, devraient plutôt profiter aux Français. Avec Marine Le Pen, nous leur rendrons leur argent.
Mêmes mouvements.
Quels cadeaux faisons-nous donc à l'Union européenne ? Vous critiquez en permanence la contribution de la France à l'Union européenne, mais ce qui vous pose un problème, c'est l'adhésion de la France à l'Union européenne.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – « Non ! » sur les bancs du groupe RN.
Vous vous cachez derrière des questions budgétaires, mais, en réalité, ce que vous voulez, c'est la sortie de la France de l'Union européenne. Vous prétendez que ce serait une mesure d'économie, alors que ce serait la ruine de notre pays ! Voilà ce qui arriverait si vous accédiez aux responsabilités.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem ainsi que sur quelques bancs du groupe HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Madame la Première ministre, la question que je vous pose ce 13 juin n'est pas la mienne. Pour la première fois, des citoyens de ma circonscription se sont réunis pour poser au Gouvernement une question citoyenne. Ces citoyens, qui sont présents dans les tribunes
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES – M. Stéphane Peu applaudit aussi
et dont je ne suis que la porte-parole, ont retenu plusieurs thèmes : les déserts médicaux, la vie chère et le manque d'enseignants. Néanmoins, c'est la question de la démocratie qu'ils ont choisie, et leur défiance qu'ils ont décidé d'exprimer ici.
Ils disent tous qu'ils continuent à s'intéresser à la politique, mais que rien n'a changé pour eux, ni avec le grand débat, ni avec les conventions citoyennes, ni avec les promesses d'une démocratie plus représentative.
« Au contraire, disent-ils, nous assistons à l'utilisation en rafale des articles 49.3, 47-1 et, dernièrement, de l'article 40. »
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et Écolo – NUPES. – M. François Piquemal applaudit aussi.
Or la démocratie ne se limite pas à des procédures constitutionnelles. Ce qui la caractérise, c'est la délibération et la discussion publique, où s'échangent les arguments contradictoires. Ces citoyens considèrent qu'ils ne pèsent plus sur le cours des choses et que nous, députés qui les représentons, sommes ligotés, que notre mandat est vidé de sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Neuf d'entre eux sont ici présents pour vous alerter sur le fossé qui se creuse avec les gouvernants.
Bien évidemment, le comportement des députés de la NUPES n'y est jamais pour rien !
Ils vous demandent si vous en avez conscience et quelles mesures concrètes et immédiates vous entendez proposer pour que la vie politique renoue avec le « tous ensemble ». Je précise qu'ils vous écoutent ; ne les décevez pas.
Mmes et MM. les députés du groupe SOC se lèvent et applaudissent. – Les députés du groupe Écolo – NUPES ainsi que plusieurs députés des groupes LFI – NUPES, GDR – NUPES et LIOT applaudissent aussi.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Je salue les neufs citoyens dont vous vous faites le porte-voix et vous félicite à titre personnel pour cette initiative fondamentale. Bienvenue à tous les citoyens qui sont présents dans les tribunes, comme c'est le cas chaque semaine, et écoutent nos débats. Ils sont parfois interloqués par le bruit qui peut régner lors de certaines interventions…
…et, en général, se font assez vite une idée de qui, dans cet hémicycle, sont les pompiers et de qui sont les pyromanes.
« Oh, le démago ! » et « Pas de leçons ! » sur les bancs du groupe RN.
Vous l'avez dit, nous traversons une crise de confiance dans le politique. La crise de confiance concerne aussi les médias que l'on qualifie désormais de « traditionnels », comme pour mieux les distinguer de médias qui seraient « non traditionnels », que l'on voit notamment sur les réseaux sociaux. La crise de confiance touche la science, comme nous l'avons vu pendant le covid-19.
En tout cas, la crise de confiance dans le politique dépasse tous les clivages. Il y a quelques années, madame Untermaier, nous siégions sur les mêmes bancs…
…et faisions le même constat. Cela rend modeste, mais cela nous donne surtout la notion de l'urgence qui s'attache à retisser du lien lorsque l'on veut servir le public et l'intérêt général, ce qui est le cas de tous les députés ici réunis. Vous êtes ici pour servir l'intérêt général, et non votre intérêt personnel,…
…au-delà des clivages partisans ou politiques. Vous savez combien vos missions sont difficiles à l'Assemblée nationale comme dans vos circonscriptions respectives.
Comment repenser les mécanismes démocratiques ?
Peut-être n'obtenons-nous pas tous les succès que vous espérez, mais nous essayons de le faire. La convention citoyenne sur la fin de vie a été un modèle du genre. Dans tous les territoires de France, des milliers d'établissements scolaires et des centaines de communautés soignantes participent aux concertations menées dans le cadre du Conseil national de la refondation, pour repenser l'école et la santé de demain. Mentionnons aussi le grand débat national organisé lors du mandat précédent. Tout cela montre que nous sommes en train de chercher non pas la martingale, mais le moyen de dire à tous les Français, quelles que soient leurs idées, qu'ils comptent, qu'ils sont utiles et que nous avons besoin du lien qui nous unit à eux.
« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Je vous remercie de cette réponse, monsieur le ministre délégué. J'ajoute simplement que le chemin est difficile et que nous aurons besoin d'être tous ensemble pour que le débat citoyen vive encore.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Monsieur le ministre de l'intérieur et des outre-mer, nous sommes tous encore choqués par le drame qui s'est déroulé il y a quelques jours à Annecy, drame qui a bouleversé la France et le monde. Toutes nos pensées, cet après-midi, se tournent vers les victimes et leurs proches.
Le drame a eu lieu. Cependant, je voudrais saluer ici la formidable chaîne de solidarité et de coopération dans la gestion de ce drame et de ses conséquences, qui ont pu être contenues. Les premiers qui sont intervenus sont les promeneurs, les lycéens et les acteurs du tourisme présents sur place : ils ont agi de façon courageuse ,
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes LR et Dem
soit en appelant les secours, soit en faisant des traductions en langue étrangère, soit en formant un cordon sanitaire pour éviter que les plus petits ne soient exposés à ces si terribles scènes.
Dans un temps record, les professionnels sont intervenus – les forces de police et les pompiers, puis les soignants et toute la chaîne de secours. Bien sûr, ils sont formés pour intervenir, et le formidable dispositif mobilisé a permis de limiter les victimes et les blessures. Toutefois, on n'est jamais préparé à une telle horreur. L'émotion qu'ils ont ressentie immédiatement après témoigne de la fragilité de notre humanité. Le temps sera long pour refermer ces plaies, et il nous faudra prendre soin d'eux.
Je tiens à le dire ici cet après-midi, toutes les décisions prises ont permis de sauver ces enfants et ces adultes, d'éviter qu'il y ait d'autres victimes. À ces héros du quotidien ou professionnels avertis, je souhaite que la nation exprime sa reconnaissance et sa gratitude. Selon vous, comment pouvons-nous les honorer de la manière la plus juste et la plus républicaine, ainsi qu'ils le méritent ?
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR.
Vous avez raison, c'est le service public et les femmes et les hommes qui le composent, quelle que soit leur mission, qui a permis de sauver ces enfants et d'éviter qu'il y ait davantage de victimes.
J'ai une pensée pour le préfet et ses équipes, qui ont commandé les opérations de secours et de sécurité. En quelques instants, ils ont organisé la mise en sécurité des lycéens qui se trouvaient à proximité du drame, ainsi que des écoliers. Lorsque se produit une telle abomination, la première question que doit se poser le préfet est celle-ci : « Y a-t-il, en d'autres endroits de la ville, d'autres personnes qui peuvent passer à l'acte ? » Dans ces cas-là, la panique est bien légitime et il faut que les services de l'État rassurent la population. C'est ce qu'a su faire le préfet, tout en menant les opérations de secours et de sécurité.
Il faut dire aussi que l'organisation du ministère de l'intérieur, si elle doit toujours être améliorée, a montré son efficacité. Je rappelle qu'en moins de trois minutes, un équipage de police est intervenu ; une équipe à moto a pu interpeller la personne et mettre fin à sa marche terrible. J'ai une pensée particulière pour ces policiers qui ont risqué leur vie dans des conditions qui, à la connaissance du ministère de l'intérieur, furent d'un grand professionnalisme. Ils étaient tous les deux formateurs au tir et majors de la police nationale ; l'un d'eux a utilisé son arme de service.
J'ai proposé au Président de la République que des décorations soient imaginées, dans les prochaines promotions, pour tous ceux qui ont contribué à sauver ces personnes. Quand l'enquête sera terminée, nous tirerons le bilan, du service des étrangers jusqu'aux opérations de secours. L'exemple d'Annecy, où, malgré l'innommable, la réponse des forces de l'ordre a permis de sauver des vies, nous permettra de nous améliorer.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Nous apprenions, il y a quelques jours, que l'Arctique pourrait être privé de banquise dès 2030, soit dix ans plus tôt que les pires projections du Giec – Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. L'un des piliers de notre climat vient de tomber de manière irréversible. La disparition de la glace augmentera le nombre d'événements météorologiques extrêmes partout dans le monde – je dis bien partout dans le monde – et générera un chaos climatique. Sa fonte entraînera celle du pergélisol, qui émettra des gaz à effet de serre et, par voie de conséquence, fera disparaître la calotte glaciaire du Groenland. Les scientifiques parlent d'une élévation du niveau des mers de 6 à 7 mètres, causant des déplacements de population massifs. Ce sont les scientifiques qui parlent !
Ils sont 188, dont Heïdi Sevestre, éminente glaciologue française, à avoir signé une tribune appelant à arrêter le projet Eacop – East African Crude Oil Pipeline – en Ouganda et en Tanzanie, et tous les nouveaux projets fossiles conduits par TotalEnergies. Le projet Eacop, plus long oléoduc chauffé au monde, pourrait entraîner le rejet de 379 millions de tonnes de CO
Le sommet pour un nouveau pacte financier mondial, qui sera organisé à Paris les 22 et 23 juin, est une occasion unique de proposer des solutions. Il faut proposer d'y inclure des financements pour permettre à des pays, comme l'Ouganda et la Tanzanie, de se développer sans exploiter leurs ressources fossiles.
Dans le cas contraire, nous en paierons les conséquences – eux les premiers. Et quand je dis payer, c'est dans tous les sens du terme : comme les assureurs l'ont expliqué en commission des finances, en réponse à ma question sur la couverture du risque, le système assurantiel mondial est construit pour couvrir les risques conjoncturels, et non les risques structurels.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES et GDR – NUPES. – M. Paul Molac applaudit également.
Merci, madame la députée, d'avoir salué l'initiative du Président de la République. Le sommet de Paris pour un nouveau pacte financier mondial nous permettra de revoir les modalités des financements destinés aux pays vulnérables au changement climatique. Il s'agit d'ouvrir une nouvelle voie pour ces pays qui, actuellement, ne peuvent pas se développer à la vitesse qu'ils souhaitent, en combinant développement et solutions de futur. Quand je dis solutions du futur, je parle d'un développement basé sur les énergies renouvelables, sur une énergie décarbonée.
C'est ce que nous faisons aujourd'hui au travers des projets JETP – partenariats de transition énergétique juste. Ils consistent en un investissement massif dans la décarbonation de certaines économies – la sortie du charbon pour l'Afrique du Sud, la sortie des énergies fossiles pour le Vietnam – et en l'accompagnement de projets créateurs de richesses et d'emplois. Il s'agit, au fond, d'inventer un nouveau modèle de développement durable pour éviter à ces pays de passer par la case d'un développement fondé sur les énergies fossiles.
Quel est l'objectif du Président de la République ? D'abord, réformer le financement multilatéral car, comme vous l'avez souligné, il est difficile d'y accéder. Ensuite, il faut concentrer les subventions climatiques publiques pour faire émerger des projets qui soient rationnels d'un point de vue économique, climatique et social – il faut les « dérisquer » et s'assurer qu'ils soient réellement lancés. La France y prend toute sa part, avec 6 milliards d'euros. Enfin, il faut faire en sorte que les financements privés puissent se diriger vers ces pays.
Le sommet de Paris fixera une feuille de route qui devra être déclinée lors de la COP28 et des événements sur le climat qui se tiendront cette année.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Que vaut la vie d'une adolescente de 15 ans ? Humiliée, violée, tabassée, poignardée quinze fois, le visage aspergé d'essence et brûlée vive. Brûlée vive ! Que vaut, dans notre République, le martyre de Shaïna ?
L'assassin de la jeune Shaïna, dont le corps a été retrouvé calciné au fond d'un cabanon de Creil, vient d'être jugé. Le bourreau a écopé de dix-huit ans de réclusion ; trente ans avaient été requis. Il fera, tout au plus, douze ans derrière les barreaux. Voilà ce que vaut l'assassinat de Shaïna : douze petites années de réclusion.
L'excuse de minorité aura sauvé le bourreau ; pas Shaïna. Comment accorder l'excuse de minorité à des actes dont l'horreur et le caractère prémédité font qu'ils ne ressemblent en rien à ceux d'un mineur ? Le soir du crime, l'auteur a raconté fièrement à ses amis qu'il avait « fumé » Shaïna. Au procès, il a parlé d'elle comme d'une « pute ». Elle a été brûlée vive – enceinte. Six ans d'attente pour le premier procès ! Le violeur a retrouvé librement sa victime et l'a tabassée, deux ans avant l'assassinat !
Le meurtre de Shaïna faisait partie des 146 féminicides de 2019. Nous en sommes à 55 depuis le début de l'année. Une juridiction spécialisée contre les violences faites aux femmes avait été promise par Emmanuel Macron ; elle a été enterrée.
Notre justice ne sait plus prononcer la perpétuité réelle. Elle aménage, elle excuse. Vous êtes devenu le gouvernement d'une justice impuissante et injuste. Les règles doivent changer. Si nous oublions Shaïna, nous serons – vous serez – d'une lâcheté impardonnable !
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RN et Écolo – NUPES.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Permettez-moi d'excuser le garde des sceaux, qui est retenu au Sénat pour le vote d'une loi importante sur la justice.
Je partage votre peine et votre colère devant le drame inhumain qui a touché la jeune Shaïna et sa famille. J'ai eu l'occasion de rencontrer son frère Yacine. J'ai un immense respect pour son combat courageux, ainsi que pour ses parents.
L'assassin a perdu une part de son humanité en commettant cet acte. Il a tenté d'affaiblir notre humanité collective. Mais nous sommes forts, et la République est là pour assurer la protection des victimes et rendre le jugement.
Ce qui me gêne dans votre interpellation, c'est qu'il existe dans notre pays un principe fondamental : la séparation des pouvoirs.
Exclamations sur les bancs du groupe LR, auxquelles répondent des exclamations sur les bancs du groupe RE.
Sans avoir de leçon à donner aux législateurs, je veux rappeler, en tant que représentant de l'exécutif, que cette décision de justice, quoi qu'elle puisse vous inspirer, a été rendue par un jury populaire, dans une cour d'assises.
À l'heure où je vous parle, le délai qui permet à la famille de faire appel, si elle le souhaite, court encore. Cette affaire n'est donc pas complètement jugée.
Vous interrogez le Gouvernement sur son action, notamment en ce qui concerne les juridictions spécialisées. Je vous confirme que des pôles spécialisés sont en train d'être créés pour venir en aide aux victimes et juger les cas de violences intrafamiliales et de féminicides.
Personne ne dit que nous sommes allés au bout de la démarche, mais pas moins de quatre lois sur le sujet ont été adoptées depuis 2017.
C'est la grande cause de deux quinquennats successifs. Nous avons mis en place les bracelets électroniques, les téléphones grave danger et une ligne d'écoute vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Nous avons multiplié par deux le nombre de condamnations au pénal pour les auteurs de violences.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Nous développons non pas un, ni même cinq, mais des dizaines de centres qui viennent en aide aux femmes victimes de violences, quelle que soit leur forme.
Ce combat, monsieur le député, n'est pas idéologique. Il ne porte pas une couleur politique. Il doit nous unir tous.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Dans le parcours de Shaïna, il y a des failles qu'il est irresponsable de ne pas voir. Des failles de la justice : un premier auteur de viol collectif, relâché, interdit d'approcher Creil, a fini par y être autorisé et a tabassé la petite Shaïna. Dans le parcours de Shaïna, il y a beaucoup de nos faiblesses. Ne pas les voir, c'est là la véritable lâcheté ! Nous avons le pouvoir d'agir ; vous devriez l'avoir à l'esprit.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.
Vous n'aviez pas réduit le budget de la justice quand vous étiez aux responsabilités ? Nous, nous l'avons augmenté !
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Plus que dans n'importe quel autre pays de l'OCDE – Organisation de coopération et de développement économiques –, le système éducatif français reproduit les inégalités sociales au lieu de les corriger. Pire, il les aggrave. C'est la raison pour laquelle vos déclarations en faveur d'un renforcement de la mixité scolaire ont suscité un tel intérêt dans le pays : oui, l'assignation et l'enfermement des enfants à leur situation sociale d'origine sont indignes de la France !
L'excellence éducative se concentre désormais dans les cœurs gentrifiés des métropoles et les territoires les plus bourgeois, comme en témoignent les disparités accablantes des indices de position sociale (IPS) entre les établissements, statistiques que l'État a trop longtemps tenues secrètes. Il s'agit là d'un véritable séparatisme qui mine les fondements de notre République. Nous en sommes convaincus : un pays qui laisse les inégalités se creuser est un pays qui régresse. Nous ne voulons pas ouvrir une nouvelle guerre scolaire, mais nous ne supportons plus la guerre sociale dont sont victimes les élèves issus des milieux populaires.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES.
J'ai donc deux questions.
Quelle suite entendez-vous donner au rapport dans lequel la Cour des comptes s'émeut de l'absence de contrôle et de contrepartie en matière de mixité sociale dans l'enseignement privé sous contrat, sachant qu'il est financé à 73 % par l'État et les collectivités ?
Alors que le département le plus riche de la France hexagonale est mitoyen du département le plus pauvre, quelle suite donnerez-vous à la proposition, que vous avez vous-même jugée « décoiffante », de réunir dans une même académie Paris et la Seine-Saint-Denis ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Vous avez raison : favoriser la mixité sociale et scolaire, c'est améliorer le système scolaire en général et améliorer le climat social ; c'est aussi favoriser les principes de laïcité.
C'est pour cela que nous avons élaboré un protocole d'accord avec le secrétariat général de l'enseignement catholique ainsi qu'avec certains conseils départementaux, les collectivités ayant une responsabilité éminente en matière de sectorisation. Nous avons fixé l'objectif d'une amélioration de la mixité sociale de 20 %, en laissant aux recteurs le soin de choisir ces leviers – les moyens diffèrent selon les territoires – et de passer contrat avec le président du conseil départemental.
En outre, pour la première fois depuis trente ans, un protocole a été signé avec l'enseignement privé sous contrat. Celui-ci prend un certain nombre d'engagements, dont celui d'établir des relations pérennes avec les autorités académiques. Nous avons également des moyens d'incitation, comme celui d'attribuer des postes aux établissements privés sous contrat qui feraient des efforts en ouvrant une classe Segpa – section d'enseignement général et professionnel adapté – ou une classe Ulis – unité localisée pour l'inclusion scolaire.
La proposition du président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis n'est pas de nature à améliorer la situation – nous avons fait des simulations sur dix ans, le temps que prendrait sa mise en ?uvre. Nous préférons nous concentrer sur les collèges les plus en difficulté. Dans ces quarante établissements, soit un tiers des collèges du département, le conseil départemental et l'éducation nationale investiront massivement.
Mme Stella Dupont applaudit.
Le site expérimental des maraîchers nantais est le cœur de la transition de la filière vers une culture plus durable. Et pourtant, des personnes qui se disent défenseurs de la planète ont anéanti une partie de ce travail essentiel ce week-end.
C'est aussi désolant qu'inacceptable. Je tiens, avec Yannick Haury et les députés de la majorité présidentielle élus du département, à apporter tout notre soutien aux maraîchers victimes de ces actes insupportables.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem et sur plusieurs bancs du groupe LR.
Ces actions s'inscrivent dans une mouvance ancienne, consistant à considérer les actions directes et violentes comme nécessaires pour forcer les gouvernements à agir. L'idéologie radicale ne cherche pas à construire : elle ne cherche qu'à créer des lieux d'affrontements.
Ces activistes peuvent même compter, et c'est un comble, sur le soutien actif de membres de notre assemblée ;…
…en effet, quand l'un de nous affirme dans la presse qu'« il faut faire la distinction entre la violence et la dégradation des biens », quand un élu de la République, qui plus est législateur, ne sait pas que la dégradation des biens d'autrui est illégale,…
…je crois qu'il est bon de rappeler le sens et l'exigence auxquels renvoie le port de l'écharpe tricolore, dans les bâtiments de la République mais aussi à l'extérieur.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Il n'est pas plus acceptable qu'une minorité de la population bafoue l'État de droit, quel qu'en soit le motif. Une société dans laquelle les individus considèrent qu'ils peuvent faire pression de manière illégale pour défendre une cause, sans aucune conséquence, c'est une société qui ne garantit plus le vivre-ensemble.
Monsieur le ministre délégué, ces actions ne peuvent rester impunies si nous voulons garantir l'État de droit et la confiance dans nos institutions.
Mes questions sont simples : quelle réponse apporter à nos concitoyens victimes de ces actions ? Quels dispositifs prévoyez-vous pour les protéger ? Où en sommes-nous du démantèlement du collectif Les Soulèvements de la Terre ? Quelles modalités réglementaires pourraient permettre de démanteler dans la durée ce type de structures ? Enfin, comment garantir l'exemplarité des représentants de la nation et des élus qu'on est en droit d'attendre dans un État de droit ?
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et LR.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Le Gouvernement partage évidemment votre indignation, comme il partage celle de Mme Louwagie, qui m'a interrogé sur le même sujet. Nous apportons notre soutien plein et entier à l'ensemble des agriculteurs, dont j'imagine la stupeur à la vue de cette serre détruite et taguée, ces plants de salade arrachés, et ce muguet…
Vous m'expliquerez comment on défend la planète en arrachant des salades et des plants de muguet !
Pour cette association qui se fait appeler Les Soulèvements de la Terre, l'écologie n'est en fait qu'un prétexte !
Et c'est un rappel à la représentation nationale, s'il le fallait, du fait que l'obscurantisme est une plaie pour l'humanité. De tels actes ne font pas avancer, ils ne font pas progresser ; ils ne servent ni la cause écologique ni la cause agricole !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR.
Aux élus que je vois s'associer à de telles actions, je dis : c'est un mauvais combat !
À vous qui regardez avec mansuétude, voire avec envie, ces actions menées par de prétendus activistes je dis : c'est un mauvais combat, c'est une mauvaise manière de défendre l'écologie !
Je le répète volontiers : ce qui fait avancer la cause écologique,…
…ce sont les réformes que vous votez, mesdames et messieurs les députés, et que nous soutenons à l'échelle européenne et à l'échelle mondiale, afin de préserver notre biodiversité. Voilà des actions courageuses et efficaces !
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Et ne nous leurrons pas : si c'est en France que des associations comme Les Soulèvements de la Terre viennent mener de telles actions, c'est précisément parce que la France est un pays qui est à l'écoute de la cause écologique, et qui agit pour la faire avancer.
S'ils avaient du courage, ils iraient faire leurs actions dans des pays où l'écologie ne compte pas et où l'on pollue la planète jour après jour !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR et Dem.
Madame la députée, pour dissoudre une association, il faut des éléments absolument imparables. Comme l'a expliqué le ministre de l'intérieur, un dossier est en train d'être monté ; il sera présenté devant la justice pour obtenir la dissolution de cette association. Le Gouvernement est déterminé à apporter tout son soutien aux agriculteurs et à l'écologie, à ne jamais accepter ce type d'exactions et ce prétendu activisme.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Le ministre de l'économie et des finances, M. Bruno Le Maire déclarait en novembre 2021 : « l'inflation est temporaire » ; en août 2022 : « nous sommes au pic de l'inflation » ;…
…en septembre 2022 : « le pouvoir d'achat des Français continuera de progresser » ; en février 2023 : « il n'y aura pas de mars rouge ».
Les archives de vos promesses et de vos prédictions sont accablantes, tout autant que votre bilan. Et pour cause ! Votre action politique se résume à aller quémander à la grande distribution quelques efforts, à menacer les industriels qui ne baisseraient pas leurs prix de diffuser leur nom – mais, comme le dit l'adage, « chien qui aboie ne mord pas » – et à multiplier les chèques avec le retour du fameux chèque alimentaire,…
Pourtant, ce n'est pas faute de vous avoir mis en garde : la politique des chèques, c'est la politique de l'échec !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Les résultats parlent d'eux-mêmes : la hausse des prix des produits alimentaires a atteint plus de 14 % sur un an.
Alors, les Français souffrent : 3 millions d'entre eux ont recours à l'aide alimentaire ; un Français sur trois vit avec 100 euros à partir du 10 du mois ; un Français sur quatre dit avoir des difficultés à nourrir sa famille.
C'est la conséquence de votre obstination à ne pas appliquer les mesures pérennes que le Rassemblement national vous propose depuis des mois :…
Applaudissements sur les bancs du groupe RN
…la suppression de la TVA sur un panier de cent produits de première nécessité, et la baisse de la TVA de 20 % à 5,5 % sur l'ensemble des énergies.
Nous savons désormais que ces mesures, que vous avez tenté de disqualifier par le mensonge,…
…portent leurs fruits. Au Portugal, où la TVA a été supprimée sur les produits alimentaires, l'inflation est à 4 %, le prix des denrées de base a baissé et le pouvoir d'achat s'est amélioré.
« Quand je me regarde, je me désole, quand je me compare, je me console. » Mais votre politique produit l'exact contraire. Ma question est la suivante : qu'attendez-vous pour faire votre autocritique et appliquer ces mesures, pour le bien des Français ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme.
Oui, l'inflation sur les produits alimentaires baisse enfin au Portugal, et il faut, je crois, s'en réjouir ! En effet, si l'on veut débattre de ce sujet, il faut être précis : au Portugal, cette inflation a dépassé 15 % depuis l'été dernier.
L'histoire est éclairante : chez nous, elle n'a franchi ce seuil qu'en février 2023,…
Les gens ne mangent plus ! Et vous, vous passez des coups de fil aux grandes boîtes !
Puis-je répondre, éventuellement ? C'est lassant, c'est toujours la même limonade : on ne peut jamais répondre !
Si le débat vous intéresse, apprenez qu'au Portugal, en février, l'inflation était à plus de 20 %.
Considérons maintenant votre proposition et demandons-nous si la baisse de l'inflation sur les produits alimentaires est due à la baisse de la TVA. Prenons deux exemples. En Allemagne, l'inflation a reculé tout aussi fortement qu'au Portugal alors que rien n'a été fait en matière de TVA.
Pas du tout ! Ils ont baissé la TVA en Allemagne ! Vous racontez n'importe quoi !
Ça va bien se passer, monsieur Tanguy, gardez votre calme ! L'exemple de l'Espagne est tout aussi éclairant. La TVA a été supprimée…
…mais depuis quand l'inflation sur les produits alimentaires reflue-t-elle ? C'est un quiz.
Depuis la fin du mois d'avril, alors que la TVA a été supprimée en décembre. Pendant quatre mois, l'inflation alimentaire a continué à augmenter.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Vous campez sur votre seule proposition, mais nous n'avons toujours aucune garantie sur le fait qu'elle ferait baisser les prix pour les consommateurs.
Mêmes mouvements.
Alors plutôt qu'une proposition qui coûterait plus de 10 milliards d'euros, nous agissons avec les distributeurs et les industriels !
Les prix commencent à baisser ; pendant que certains pérorent, notamment sur ces bancs ,
Protestations sur les bancs du groupe RN
les industriels sont en train de négocier. Les baisses seront de 5 % à 20 % dans les semaines qui viennent !
Il y a toujours ceux qui causent, et ceux qui font !
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Ma question s'adresse au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Depuis plusieurs mois, je suis interpellé quasiment chaque semaine par des parents d'élèves au sujet du non-remplacement des professeurs absents. Cette situation est inquiétante et doit être résolue de toute urgence ; elle concerne de nombreux établissements dans le Bas-Rhin et bien d'autres encore en France.
Vous en connaissez les conséquences dramatiques : les élèves se retrouvent dans des classes surchargées ou n'ont plus cours que deux jours par semaine jusqu'à la fin de l'année scolaire. Les parents sont obligés de s'absenter de leur travail pour garder leurs enfants – une mère de famille m'a confié qu'elle avait dû démissionner tant elle ne pouvait plus gérer les absences non remplacées des enseignants de ses enfants. La situation est vraiment inquiétante.
Le 26 mai, le collectif Éducation 67, qui regroupe dix-huit associations de parents d'élèves et syndicats enseignants du Bas-Rhin, a tenu une conférence de presse à Strasbourg pour donner l'alerte sur ce sujet. Il a créé un système de QR code pour signaler les situations inquiétantes, et quatre-vingt-sept alertes sont remontées depuis le mois de février.
Dans sa feuille de route, hier, la Première ministre a annoncé vouloir « changer les choses » s'agissant des professeurs absents. Cette question, nous devons la prendre à bras-le-corps ; il y va de l'avenir de notre système éducatif, mais surtout – avant tout – de l'avenir de nos enfants.
Monsieur le ministre, envisagez-vous un véritable fléchage ministériel de postes dédiés au remplacement ? Afin de rassurer les parents d'élèves, pouvez-vous nous dire quels sont vos plans d'action pour assurer, dès la rentrée prochaine, une scolarité normale à l'ensemble des enfants ?
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe RE.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
La question que vous posez est importante et renvoie à celle de la continuité du service public d'éducation. À ce problème des remplacements non assurés, qui sont un fait incontestable – plusieurs millions d'heures sont perdues chaque année –, nous répondons de deux manières.
À partir de la rentrée prochaine, le pacte enseignant comportera de nouvelles missions, parmi lesquelles des remplacements de courte durée – cela se pratique déjà, d'ailleurs, dans certains établissements –, afin que les trous dans les emplois du temps disparaissent. Au vu de l'inscription des professeurs pour ces nouvelles missions, nous sommes très confiants quant au démarrage rapide du pacte, dès le 1er septembre.
L'autre élément de réponse réside dans l'attractivité du métier. En effet, à la fin de chaque année budgétaire, nous « rendons » plusieurs milliers de postes que nous n'avons pas pu pourvoir ; par conséquent, l'enjeu n'est pas tant d'augmenter le nombre de postes que de les pourvoir, dans certaines académies pour le premier degré, dans certaines disciplines pour le second degré.
C'est pour cette raison que le Président de la République, la Première ministre et le Gouvernement consentent un effort budgétaire considérable pour augmenter la rémunération des enseignants : pour les quinze premières années de carrière, les augmentations iront de 7,8 % à 11,3 % ; s'y ajoutent les missions possibles, elles aussi rémunérées.
Nous avons également à travailler sur les carrières et à répondre à une question sociale, celle de la place que nous souhaitons donner à nos professeurs dans le pays. Je souhaite que cette place soit revalorisée, à la fois symboliquement et socialement.
La France veut-elle encore de ses troupeaux de salers, d'aubrac, de limousines, de charolaises, de blondes d'Aquitaine ;
« Oui ! » sur les bancs du groupe LR
veut-elle encore de ses prairies, que ces animaux pâturent ? Ou préfère-t-elle miser sur les éleveurs brésiliens…
…pour remplir les assiettes de nos concitoyens, quitte à voir ses paysages se transformer et ses territoires ruraux se vider ?
La question mérite d'être posée, tant nos éleveurs sont régulièrement mis au banc des accusés. Même la Cour des comptes s'en est mêlée !
À en croire certains, nos élevages seraient devenus de véritables industries polluantes. Quelle hérésie !
Dans le Cantal, où il y a bien plus de vaches que d'habitants, nous respirons pourtant bien mieux qu'à Paris !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Stéphane Travert applaudit également.
Eh oui, monsieur le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, le Cantal est le département le moins pollué de France, même avec ses vaches !
Aujourd'hui, les éleveurs luttent pour leur survie. En soixante ans, la France a perdu 3 millions de vaches et cette dynamique terrifiante s'accélère : sur les sept dernières années, la perte s'élève à 1 million !
Dans le même temps, 2 000 éleveurs ont quitté leur activité.
La conséquence directe est un pic des importations et la perte de notre souveraineté alimentaire.
Près de 30 % de la viande bovine que nous consommons est importée de pays dont les éleveurs n'ont pas façonné nos paysages, n'ont pas contribué à l'animation de nos villages, et alors que la France est réputée dans le monde entier pour son élevage.
Dans un tel contexte fait de provocations au monde agricole, accepteriez-vous, monsieur le ministre, de travailler à un plan de relance de la filière ? Si c'est le cas, quels en seraient les axes ? Accéderez-vous à la demande de la profession d'exclure la viande bovine de ces renégociations commerciales internationales ? Et quand…
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur. – Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Désolé, cher collègue, votre temps de parole est écoulé.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur Bony, je vais commencer par la conclusion, comme cela vous serez fixé sur l'intention du Gouvernement : vive l'élevage, vive l'agriculture française ! C'est dit.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Nous partageons l'émoi des agriculteurs, relayé par de nombreux élus, provoqué par la publication du rapport de la Cour des comptes, qui nous semble omettre certaines données concernant l'élevage. D'ailleurs, les éleveurs et les agriculteurs en ont marre d'être stigmatisés par certaines prétendues associations et sur certains plateaux de télé.
Les agriculteurs nous font manger, donc ils nous font vivre. Nous avons besoin d'eux et nous devons leur dire que nous les aimons.
Les preuves d'amour, le Gouvernement leur en apporte et il le fera encore à l'occasion des renégociations de traités européens et internationaux auxquels vous faites allusion.
Nous aimons les agriculteurs parce qu'ils nous nourrissent, mais aussi parce que l'agriculture est bonne pour la planète et l'écologie. Vous savez que j'aime les chiffres, en voici quelques-uns : chaque hectare de prairie permanente absorbe 110 kilogrammes de CO
Mme Sophia Chikirou s'exclame.
Pourquoi criez-vous, alors que nous sommes d'accord ?
Ah, je n'étais pas visé cette fois-ci.
Alors, allez-y !
Sourires.
Sourires.
Je me fais le défenseur de l'opposition de gauche qui a aussi le droit d'écouter en silence la réponse du ministre.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
L'élevage produit des engrais organiques qui sont nécessaires à l'agriculture biologique et contribue à la lutte contre les incendies – nous l'avons constaté l'été dernier et, malheureusement, nous le constaterons encore à l'avenir.
En résumé, il y a des mots d'amour, mais aussi des preuves d'amour. Comptez sur le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, qui est actuellement en Suède pour un conseil informel des ministres de l'agriculture de l'Union européenne, pour approuver ma conclusion : vive l'élevage et vive l'agriculture française !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe Dem.
Monsieur le ministre délégué chargé des transports, la région Grand Est, transfrontalière à part entière, a des attentes particulièrement fortes concernant les mobilités, notamment dans notre beau département de la Moselle. Plus de 100 000 Français du sillon lorrain partent travailler tous les jours au Luxembourg et vivent ces enjeux au quotidien. Or ils sont entassés dans des trains – fréquemment retardés, voire annulés – ou bloqués pendant des heures dans leur voiture pour faire 50 kilomètres sur l'autoroute A31, axe routier surchargé.
Ces problématiques montrent que nous vivons sur un territoire dynamique, qui a besoin de préparer son avenir sereinement en pérennisant son attractivité. Pour ce faire, le maintien et le développement de l'aéroport Metz-Nancy et de la gare Lorraine TGV, qui se trouvent à quelques kilomètres l'un de l'autre, au cœur de ma circonscription, sont essentiels. Tout aussi essentiels sont la liaison ferroviaire Nord-Sud, de la Lorraine vers la Méditerranée, et le port de Metz, le plus grand port céréalier fluvial de France.
Une région comme la nôtre, au cœur de l'Europe et qui concentre les échanges Nord-Sud et Est-Ouest, a besoin d'annonces fortes pour son avenir touristique, écologique et économique. De plus, ces annonces doivent être en lien avec l'enjeu mondial du réchauffement climatique, en permettant de favoriser le transport décarboné et responsable ainsi que les plateformes multimodales.
Vous avez annoncé un investissement total de plus de 8 milliards d'euros avant la fin du quinquennat, soit une augmentation de plus de 50 % par rapport à la période précédente. Dans la région Grand Est, 650 millions d'euros seront investis dans le cadre des contrats de plan État-région, en plus des financements attendus des collectivités locales. Le développement de notre territoire par la mobilité garantit le développement économique, favorise le lien social et l'accessibilité. Aussi, la mobilité pour tous doit répondre aux besoins des personnes en situation de handicap.
Monsieur le ministre délégué, nous vous remercions pour cet effort considérable. Pouvez-vous nous détailler le plan d'avenir pour les transports, particulièrement pour la région Grand Est et la Moselle ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Votre question me donne l'occasion de revenir sur les enjeux et le contenu du plan d'avenir pour les transports. L'État y investit des montants inédits, notamment par le biais des contrats de plan État-région, engagés la semaine dernière sous l'autorité de la Première ministre – les mandats de négociation de ces contrats ont été signés par les préfets de région.
Pour l'ensemble du pays, cet effort sans précédent représente 8,6 milliards d'euros, un montant en hausse de 50 % par rapport à celui de la génération précédente de contrats de plan. Le ferroviaire et les transports publics s'arrogent 70 % de l'enveloppe, ce qui représente un doublement des montants. Nous démontrons ainsi clairement notre choix en faveur des transports publics et des transports décarbonés, qui n'ont jamais bénéficié d'investissements de cette ampleur. Que ce soit dans la région Grand Est ou les autres régions de France, notre engagement est très clair, très fort, sonnant et trébuchant. Il ne peut plus y avoir de doute sur notre volonté de décliner ce plan de 100 milliards d'euros annoncé en février par la Première ministre.
Vous connaissez mon attachement à la région Grand Est, à votre beau département de la Moselle – où j'ai effectué un récent déplacement – et mon intérêt pour les questions de transport et mobilité qui s'y posent. Sans préjuger de l'issue des discussions sur différents projets, je crois pouvoir dire que le président de région, Franck Leroy, est ouvert au dialogue et satisfait de l'engagement de l'État. J'espère que nous pourrons conclure ce contrat de plan État-région dans les semaines à venir.
Il contiendra des engagements majeurs, concernant notamment le sillon lorrain. Il s'agit de décongestionner les axes routiers mais aussi de développer le transport ferroviaire et les transports publics – je pense au projet de RER métropolitain, l'un des axes structurants de ce plan en France et dans la région Grand Est.
D'autres discussions porteront sur les liaisons transfrontalières en général. Je me suis aussi engagé à faire en sorte que nous trouvions ensemble des solutions sur d'autres projets très précis tels que la liaison Nancy-Lyon, chère à votre cœur ainsi qu'à celui de nombreux autres élus – je salue le président Valence. D'ici à la fin de l'année, nous trouverons des solutions pour rétablir cette liaison essentielle.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Merci, monsieur le ministre délégué, pour ces réponses. Le milieu économique vous attend. Votre réponse précise celle que vous aviez adressée aux membres de l'association Impact Lorraine Mobilités. Je vous remercie également en leur nom.
M. David Valence applaudit.
Ce matin, une tribune inédite, signée par le collectif des familles de victimes et une cinquantaine d'associations marseillaises, a été publiée dans Mediapart. Soutenue par plus de 200 parlementaires et une dizaine de maires, elle rappelle l'État à ses obligations et exige la mise en place d'une réponse politique globale.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES.
Il faudra traiter aussi bien des conséquences de ces violences que des causes qui les alimentent.
Les semaines et les mois passent, les fusillades et les assassinats se multiplient à Marseille et partout en France. Ces meurtres sont l'arbre qui cache une forêt de renoncements beaucoup plus systémiques auxquels vous ne semblez pas vouloir vous attaquer, ni vous, ni votre gouvernement. Les habitants de nos quartiers vivent dans la misère et la précarité ; ils ont de plus en plus difficilement accès au droit car les services publics ferment. Ce sont des générations entières qui naissent et grandissent à l'écart de l'égalité républicaine.
Mêmes mouvements.
À l'abandon généralisé s'ajoute un discours raciste, plein de mépris et de haine. À l'Assemblée nationale, on ne parle jamais des miens ni de leur avenir, sauf pour les salir à travers des discours qui visent à rendre coupables celles et ceux qui sont, en fait, les principales victimes de la situation.
Mêmes mouvements.
Nos quartiers ne refusent pas la République. Au contraire, ils la portent haut, chaque jour, dans les actions d'un Kamel Guemari, d'une Anriette Said, d'un Yvan Sorel, d'un Soly M-baé, d'une Anissa Cheurfa, de tous ces hommes et femmes qui se substituent à un État depuis trop longtemps démissionnaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Monsieur Darmanin, j'espère que l'inefficacité des mesures que vous avez mises en place vous conduit à faire preuve d'un peu plus d'humilité. Rendez aux habitantes et aux habitants de nos quartiers la justice et la paix. Monsieur Darmanin, vous qui n'avez eu aucun mot pour ces morts, qu'attendez-vous pour rétablir l'égalité républicaine ?
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent, ainsi que plusieurs députés des groupes SOC et Écolo – NUPES.
Monsieur le député Sébastien Delogu, je peux partager nombre de vos constats. Vous êtes issu et élu de quartiers populaires. Moi aussi.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.
Vous avez parfaitement raison : la base de tout est l'égalité républicaine et l'accès au logement, à l'école, à la santé, à l'éducation. Je ne peux que vous rejoindre dans ce combat républicain. Si les dérives ne sont pas excusables, elles justifient une action beaucoup plus puissante de notre pays pour sauver ces enfants de la République, souvent les plus pauvres de nos concitoyens.
Le ministère de l'intérieur agit sur les conséquences, notamment sur trafic de drogue, très présent à Marseille où les fusillades déciment des familles entières. La police judiciaire s'intéresse aux deux clans qui s'affrontent actuellement à Marseille.
L'État agit aussi en amont, notamment dans le cadre du plan Marseille en grand, annoncé par le Président de la République qui se rendra prochainement sur place. Vous aurez alors l'occasion de discuter avec lui des efforts sans précédent consentis pour sauver les enfants de Marseille et leur assurer un avenir – toutes les villes de France aimeraient bénéficier d'un tel plan.
Monsieur le député, je voulais vous remercier d'une chose : comme je vous y avais encouragé lors de notre dernier échange, vous avez rencontré les services de police, la préfète de police, les CRS, les policiers de la brigade anticriminalité (BAC). Vous avez pu constater la difficulté de leur métier.
Pour votre part, vous m'avez demandé à rencontrer les collectifs de Marseille. Je le ferai quand je reviendrai dans cette très jolie ville avec le Président de la République ou à votre invitation. La différence d'appréciation n'est pas si grande : oui, les enfants des quartiers populaires sont avant tout ceux qu'il faut protéger, et pas seulement par l'intervention de la police.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.
Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Promulguée depuis bientôt deux mois, la réforme des retraites est pleinement engagée par les services de l'État avec la sortie des premiers décrets début juin. Au-delà de la mesure d'âge, cette réforme permettra de mettre plus de justice sociale dans notre régime de retraite, en revalorisant les plus petites pensions et en réduisant le nombre d'années de cotisation pour les carrières longues.
Nous l'avons vu depuis six mois et encore hier, le débat public sur cette réforme a trop souvent été pollué par de fausses informations et des raccourcis qui ont pu induire certains de nos concitoyens en erreur, tant et si bien qu'ils sont désormais en demande d'une information claire et fiable sur le sujet, comme le montre d'ailleurs la saturation du simulateur de retraite mis à jour hier.
Cette information claire et fiable, c'est aussi et surtout auprès des personnels de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) qu'ils la trouveront dans les prochains mois, provoquant de fait une surcharge de travail pour ces agents, alors même que l'arrivée à la retraite de la génération des baby-boomers accroît déjà l'activité de la Cnav de 5 % par an et que les effectifs baissent régulièrement depuis le début des années 2010. Je pourrais ainsi prendre l'exemple de mon département des Yvelines où les effectifs sont passés de 41 à 26 collaborateurs au cours des dix dernières années.
Monsieur le ministre, je comprends parfaitement et soutiens votre volonté de rendre plus efficients nos services publics. Un grand nombre de ces évolutions passent notamment par la numérisation et l'automatisation de certaines tâches pour permettre aux agents de se concentrer sur les dossiers les plus complexes. Je connais également votre attachement aux conditions de travail des agents publics.
Face aux inquiétudes légitimes des personnels de la Cnav, relayées de manière constructive et objective – je tiens à le signaler –, j'aimerais savoir si un plan spécifique est prévu pour faire face à l'afflux de demandes liées à la réforme des retraites. À plus long terme, quelles sont les garanties que vous pouvez apporter au personnel de la Cnav quant au maintien de bonnes conditions de travail ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels.
Monsieur le député Millienne, vous interrogez le Gouvernement sur l'entrée en vigueur de la réforme des retraites ainsi que sur les moyens qui y sont consacrés. Je vous prie d'excuser le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, qui est en déplacement.
Il y a des vocations : on cherche une veste à retourner ! Les coutures de sa veste craquent !
Tous les services de l'État et des caisses de retraite sont pleinement engagés dans ce chantier. La réforme sera mise en œuvre dès le 1er septembre. Comme vous l'avez rappelé, les premiers décrets ont été publiés il y a dix jours. D'autres sont en cours de rédaction, qui ont trait aux régimes spéciaux, à la pénibilité et aux petites pensions. Certains concernent la transition entre l'activité et la retraite car, au-delà des mesures d'âge, ce sont aussi de nouveaux droits que nous construisons pour nos concitoyens.
Comme vous l'avez souligné, ce chantier mobilise tout particulièrement la Cnav, qui bénéficie pour cela de moyens supplémentaires. Sans attendre le déploiement de la réforme, nous avons anticipé ses conséquences et permis à la caisse de recruter déjà plus de 200 nouveaux collaborateurs.
Nous avons également souhaité accompagner cette transformation en confortant les moyens qui seront déployés pendant les cinq prochaines années, dans le cadre d'une convention d'objectifs et de moyens qui donnera aux agents de la visibilité sur les moyens qu'ils pourront engager dans la durée. Cette convention vient d'être adoptée par le conseil d'administration de la Cnav – dans le respect, bien entendu, du dialogue avec les partenaires sociaux – et est désormais signée. Elle prévoit notamment le maintien des effectifs de la Cnav, et même leur renforcement, puisque 400 CDI supplémentaires seront créés en 2024 et que le recours à plus de 600 CDD est prévu.
En Île-de-France, la Cnav compte près de 2 500 experts engagés, 25 agences de proximité, 9 points d'accueil retraites et surtout 160 maisons France Services. La totalité de la population francilienne habite donc à moins de trente minutes d'un service de la Cnav, ce qui constitue évidemment un point très important à nos yeux.
Ma question s'adresse au ministre de l'éducation nationale et fait, du reste, suite à plusieurs interrogations que j'avais eu l'occasion de lui soumettre en août dernier. L'inclusion scolaire est érigée au rang de priorité par votre ministère. Mais l'est-elle réellement, au vu du statu quo qui caractérise la situation des accompagnants des élèves en situation de handicap ou à besoins spécifiques (AESH) ?
Ce mardi 13 juin, les AESH sont de nouveau en grève et nous alertent sur la précarité de leur métier, pourtant essentiel au dispositif. Les avancées se font au compte-goutte. Vous aviez, à une époque, évoqué la possibilité de prendre en considération le temps de travail périscolaire. Il s'agit là d'un réel enjeu, à tel point que le coprésident du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, Christophe Naegelen, avait déposé, le 21 mars, une proposition de loi en ce sens.
Le problème est toutefois plus large et il me semble que les questions centrales restent toujours sans réponse. Je pense en particulier au temps de travail réellement effectué au-delà du temps passé avec les élèves – formation, travail avec les équipes pédagogiques, préparation –, ou encore à l'organisation du temps de travail, qui n'est pas non plus satisfaisante : la mutualisation des AESH au sein des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (Pial) nuit parfois à la qualité de l'accompagnement, certains étant contraints de jongler entre plusieurs établissements.
Enfin, nous devons donner de vraies perspectives de carrière aux AESH, ce qui implique non seulement d'améliorer leur formation, mais aussi de valoriser leurs acquis. Nous sommes encore bien loin de la juste reconnaissance du métier d'AESH. La question de leur titularisation doit d'ailleurs pouvoir être étudiée sans tabou.
Rémunération, temps de travail, conditions de travail et formation : ces quatre enjeux ne doivent plus être traités de manière séparée, mais appellent une réponse globale. Pensez-vous, en effet, que l'école puisse être réellement inclusive sans que les AESH bénéficient d'un véritable statut ? Les élus du groupe LIOT estiment que ce statut est indispensable pour les personnels, bien sûr, mais aussi et surtout pour les élèves accompagnés. Sur ce point, beaucoup d'annonces ont été faites. J'aimerais connaître aujourd'hui la position du Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
La situation économique des AESH est déterminante pour la qualité de la scolarisation des élèves en situation de handicap.
Je partage donc évidemment les préoccupations que vous exprimez. Nous avons, ces derniers temps, réalisé trois avancées très importantes de nature à améliorer nettement leur situation.
Premièrement, la loi de finances pour 2023…
…prévoit une augmentation salariale nette de 10 % au 1er septembre 2023, grâce, d'ailleurs, à l'adoption d'un amendement défendu par les députés des groupes Renaissance, Démocrate et Horizons. Cette hausse représente une enveloppe supplémentaire de 80 millions d'euros au titre de l'exercice 2023.
Deuxièmement, cette revalorisation s'ajoute aux primes perçues par les agents exerçant dans un réseau d'éducation prioritaire (REP) ou dans un réseau d'éducation prioritaire renforcé (REP+), lesquelles ont été étendues aux AESH et aux assistants d'éducation (AED) le 1er janvier dernier.
Enfin, après l'adoption définitive de la loi Victory du 16 décembre 2022 visant à lutter contre la précarité des accompagnants d'élèves en situation de handicap et des assistants d'éducation, les AESH pourront désormais obtenir un CDI au bout de trois ans, et non de six ans, ce qui leur ouvrira la possibilité de construire une carrière.
Par ailleurs, dans le cadre de la Conférence nationale du handicap (CNH), le Président de la République a annoncé, le 26 avril, plusieurs avancées s'appliquant également aux AESH. Elles incluent notamment la volonté de tendre vers des contrats de 35 heures. Nous agissons en ce sens avec les collectivités territoriales, en signant des conventions faisant de l'État l'employeur unique : les AESH travaillent 35 heures – cette durée incluant le temps scolaire et le temps périscolaire – et les collectivités remboursent l'État au titre du temps périscolaire effectué.
Nous souhaitons aller plus loin, en proposant aux AESH d'effectuer des missions, notamment en lien avec la vie scolaire. Nous travaillons également à leur formation, la durée actuelle de soixante heures étant insuffisante, de manière à améliorer leur situation et à progresser ensemble.
Dans un an, la France aura l'honneur d'accueillir les Jeux olympiques (JO) pour la troisième fois de son histoire. Dans le même temps, le défi de la sécurité privée autour des JO n'a jamais semblé aussi difficile à relever, 25 000 agents de sécurité privée devant encore être recrutés. Selon la Fédération française de la sécurité privée, la filière déplore déjà un déficit structurel de 20 000 agents pour assurer ses activités quotidiennes. Dans ce contexte, les sociétés préféreront toujours assurer les prestations pour leurs clients réguliers plutôt que de conclure un contrat de quelques semaines pour les JO. La preuve en est que les lots des appels d'offres lancés auprès des entreprises de la branche ne sont pas tous pourvus.
Cet événement historique était pourtant l'occasion rêvée de moderniser et de valoriser les métiers de la sécurité humaine. Où en est le fameux « continuum de sécurité » censé associer sécurité publique et sécurité privée ? Plutôt que de déployer une vision de long terme pour la profession, vous avez choisi de créer une carte professionnelle mentionnant la spécialité « surveillance de grands événements ». Mais qui acceptera de suivre une formation de cent six heures, valable un an, pour travailler deux semaines en étant payé au Smic ? Croyez-vous vraiment qu'une telle mesure permettra de recruter les 25 000 agents manquants ?
Deuxième – et dernière – des mesures envisagées : Mme la ministre des sports entend recruter des agents de sécurité privée vivant dans d'autres pays francophones. Quelle méconnaissance totale de la question pour qui sait que ces agents sont payés 50 % plus cher en Belgique – sans parler de la Suisse – qu'en France !
Monsieur le ministre de l'intérieur et des outre-mer, nous ne voulons pas revivre l'humiliation de la finale de la Ligue des champions 2022, au cours de laquelle vous aviez déjà failli à votre mission. Alors que les professionnels considèrent qu'il est déjà trop tard, comment comptez-vous trouver les 25 000 agents de sécurité dont la France a besoin pour encadrer les Jeux olympiques ? Quand prendrez-vous réellement en considération les 180 000 agents de sécurité présents sur notre territoire ?
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je m'associe d'abord à la reconnaissance, légitime, que vous exprimez envers les agents de sécurité privée : ils exercent un travail difficile, essentiel et important, comme ils le feront encore demain à l'occasion de la Coupe du monde de rugby que la France accueillera en septembre et, bien sûr, lors des Jeux olympiques et paralympiques.
Permettez-moi de m'étonner de votre question : si nous avons davantage de difficultés à recruter des agents de sécurité privée et si nous avons créé de nouvelles cartes professionnelles, c'est parce que nous sommes désormais plus exigeants. J'aimerais savoir ce que le Rassemblement national a pensé des décisions qu'a prises le Gouvernement…
…quand il a choisi de ne plus accepter des personnes qui ne parlent pas français, de prévoir un contrôle des agents par tous les services de renseignement avant de valider leur engagement professionnel, et d'exiger leur présence depuis au moins cinq ans sur le territoire national. Êtes-vous d'accord avec ces mesures ?
Acceptez-vous donc que nous soyons plus exigeants, parce qu'il se pourrait…
Ce sont des questions au Gouvernement, pas au Parlement ! Répondez à la question !
La parole est libre, monsieur le député. Je sais que je n'ai pas souvent l'occasion de répondre à vos arguments démagogiques, mais permettez-moi de revenir à mon propos, puisqu'il me reste quelques secondes pour répondre.
Il se pourrait que soyez à la fois pyromane et pompier ,…
Protestations sur les bancs du groupe RN
…puisque vous affirmez vouloir vous montrer plus exigeant avec le secteur, tout en nous reprochant précisément cette exigence accrue.
Encore une fois, vous répondez à côté : si vous manquez d'agents de sécurité, c'est parce que des dizaines d'agents détenteurs d'une carte professionnelle ont quitté le métier en raison de la dévalorisation dont il fait l'objet.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je constate qu'il est plus facile de critiquer que de formuler des propositions.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Je constate que vous n'assumez jamais aucune responsabilité.
La vérité, c'est que nous travaillons à l'organisation des Jeux olympiques avec l'ensemble des agents de sécurité. Des augmentations de salaires sont prévues pour les salariés de la branche : une première hausse, très forte, a déjà eu lieu et nous encourageons les entreprises à en accorder d'autres. Puisque vous les connaissez manifestement,…
…n'hésitez pas à les inciter à mieux payer leurs salariés : ce serait une bonne chose. Soyez du côté des ouvriers de la sécurité et moins du côté des patrons.
C'est un pompier ! Le traiter de pyromane, c'est lamentable ! Quel irrespect pour les pompiers !
Les fonctionnaires, comme l'ensemble des Français, sont confrontés à l'érosion de leur pouvoir d'achat et de leur reste à vivre, en raison de l'inflation galopante apparue avec la reprise économique post-covid puis à l'occasion de la guerre en Ukraine. Cette inflation, qui touche en particulier les produits alimentaires, pèse sur les salaires les plus bas et précarise certains ménages, qui peinent à joindre les deux bouts. Les témoignages en ce sens ne manquent pas dans ma circonscription.
Aussi, le Gouvernement vient d'annoncer une série de hausses de rémunération, avec un effort particulier en faveur des plus modestes,…
…à savoir les fonctionnaires de catégorie B, et surtout de catégorie C, dont le différentiel de salaire par rapport au Smic se réduit. Ainsi, les hausses générales seront complétées par des attributions de points d'indice plus favorables aux bas salaires. Il convient donc d'apprécier ces hausses non pas seulement sur la base de l'augmentation générale du point de 1,5 %, mais en prenant aussi en considération les dispositifs spécifiques dédiés aux agents de catégorie B et C. Cela suppose cependant de faire preuve d'un peu d'objectivité et de se départir de la mauvaise foi manifestée ici même par la NUPES à l'occasion de la question posée en début de séance par Mme Taillé-Polian.
Au total, après les 7,5 milliards d'euros accordés en juillet 2022, pas moins de 3,5 milliards seront engagés dès cette année, puis 6 milliards supplémentaires en 2024, pour revaloriser les salaires des fonctionnaires. Pouvez-vous détailler l'ensemble des mesures en faveur du pouvoir d'achat des fonctionnaires que vous avez annoncées sans attendre aux partenaires sociaux ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
La parole est à M. le ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Vous avez raison de souligner que l'inflation, si elle décélère et qu'elle est plus faible en France que partout ailleurs en Europe – le Gouvernement s'engage pleinement dans ce combat, comme Olivia Grégoire l'a encore rappelé –, reste forte, en particulier sur les produits alimentaires, et a des conséquences très concrètes.
Elle touche de plein fouet les plus bas niveaux de rémunération, aussi bien dans le secteur privé que dans le secteur public, et entraîne la hausse du salaire minimum, que nous ajustons systématiquement dans la fonction publique. Là encore, ces évolutions emportent des conséquences concrètes : elles causent parfois un phénomène, bien connu de tous les employeurs publics, de non-progressivité des carrières et d'écrasement des grilles. Elles entraînent aussi une augmentation du nombre d'agents payés au Smic, du fait de la dynamique que connaît le salaire minimum.
Face à cette situation, nous avons pris nos responsabilités, dans un esprit de concertation – ma collègue Dominique Faure et moi-même avons réuni l'ensemble des associations d'élus – et de dialogue social avec les organisations syndicales.
Nous avons assumé à la fois de déployer les moyens importants auxquels vous avez fait référence – 3,5 milliards d'euros au deuxième semestre 2023 et 6 milliards d'euros en année pleine – et de concentrer ces moyens sur les plus bas niveaux de rémunération. C'est ce que nous faisons quand nous accordons des points d'indice supplémentaires à l'ensemble des agents, cette mesure ayant des effets plus forts pour les agents en bas de grille ; mais aussi quand nous attribuons des points d'indice spécifiquement aux agents de catégorie B et C situés aux premiers échelons, précisément pour garantir le caractère progressif de leurs carrières. J'assume effectivement, en outre, de débloquer une prime de pouvoir d'achat pour l'ensemble des agents percevant moins de 3 250 euros brut.
Enfin, la préservation du pouvoir d'achat, si elle implique certes des mesures salariales – je viens d'en faire la démonstration –, passe aussi par des décisions pratiques. Quand le ministre délégué aux transports et moi-même décidons de revaloriser la prise en charge des transports en commun, ce choix a des conséquences très concrètes : un agent francilien dont le remboursement du passe Navigo est porté de 50 % à 75 % économisera ainsi 20 euros par mois.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous l'aurez compris : nous prenons nos responsabilités et nous agissons en faveur des bas salaires et des classes moyennes dans la fonction publique.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE. – Mme Anne Le Hénanff applaudit également.
Nous pouvons évidemment comprendre que les Français espèrent davantage, mais il faut aussi savoir saluer les efforts qui sont consentis.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
À Saint-Nazaire, une unité pour adolescents et une unité d'admission fermées ; à Blain, dix-sept lits fermés ; à Allonnes, quarante-deux lits fermés. Idem à Laval, Rennes, Marseille, Toulouse ou Draguignan – la liste est bien trop longue.
Voici les mots d'Alice, infirmière en psychiatrie : « Quarante-deux, c'est le nombre de lits qui ont fermé à l'hôpital psychiatrique dans la Sarthe. Quarante-deux ans, c'est aussi mon âge – pas si vieille, me direz-vous, mais un dinosaure dans mon métier, après dix-huit ans de bons et loyaux services. L'accueil inconditionnel, l'empathie, l'échange, l'asile aux plus vulnérables, la réflexion : toutes ces choses sont devenues indésirables dans nos hôpitaux. Le turn over, le flux patient, les case managers, les bed blockers : voilà de quoi nous parlons maintenant. »
Les soignants et les médecins ne sont pas les seuls à tirer la sonnette d'alarme : la Cour des comptes, dont on ne saurait prétendre qu'elle est insoumise, pointe elle aussi votre manque de volonté politique dans les moyens attribués à la psychiatrie et à la pédopsychiatrie en particulier.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Des lits ferment dans tout le territoire ; la solidarité régionale ne fonctionne plus ; l'ambulatoire sature… Une équation insoluble parce que subsiste une inconnue : comment sortir de cet état de crise permanent et, surtout, comment soigner avec humanité ?
Comme l'a dit Mathilde Panot hier à la tribune : « Votre monde est devenu un océan de malheur. » Et cela avec ses conséquences terribles pour des milliers de gens qui n'arrivent plus à surmonter un quotidien pénible et ne pourront faire face à un avenir assombri.
La situation de détresse que vous provoquez en psychiatrie est symptomatique. Partout, les conséquences de vos mauvais choix politiques font reculer l'accès aux soins et les prises en charge.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI – NUPES.
Qu'il s'agisse des Ehpad, des services de l'aide sociale à l'enfance (ASE), des prisons, de l'école, de la justice, partout les services publics reculent, partout l'humain recule.
C'est le résultat de votre action politique et de celle de vos prédécesseurs.
Mêmes mouvements.
Depuis l'instauration de la tarification à l'acte et de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), vous avez imposé l'idéologie néolibérale dans notre système de santé – contre l'avis de la communauté soignante. Vous avez transformé le soin en marchandise, en source de profits pour vos amis les plus riches, et en maltraitance pour les soignants et les patients.
Cette politique nous mène droit dans le mur. Aussi, monsieur le ministre, aurez-vous le courage de rendre à l'établissement public de santé mentale (EPSM) de la Sarthe ses quarante-deux lits, de rendre à l'hôpital ce que vous lui avez pris, de défendre un réel plan d'urgence pour la psychiatrie ? Si vous ne le souhaitez pas, passez la main.
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent pour applaudir. – M. Benjamin Lucas applaudit également.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Je tiens à réaffirmer l'importance que nous accordons à la santé mentale et à la psychiatrie.
Il s'agit d'un déterminant majeur de la santé globale dont nous défendons le principe.
Je n'ignore pas le climat actuel d'inquiétude face aux grandes difficultés auxquelles est confrontée la psychiatrie, en particulier dans le secteur public. Je sais combien la crise sanitaire a mis cet enjeu en évidence, notamment chez les plus jeunes.
Je sais aussi combien cet enjeu a pu être mis en lumière par des drames récents, et parfois instrumentalisé.
Je tiens à vous rassurer, madame la députée : le Gouvernement est pleinement mobilisé sur le sujet …
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
…qui est une priorité de sa politique de santé et de prévention.
Depuis 2018, nous avons défini une feuille de route ambitieuse.
Elle a été enrichie en 2021 par des mesures annoncées par le Président de la République aux assises de la santé mentale et de la psychiatrie.
Ce sont près de cinquante mesures déployées sous la supervision du délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie, le professeur Frank Bellivier.
Nous avons fait un bilan d'étape de l'exécution de la feuille de route en mars dernier devant les acteurs concernés. Sans nier les difficultés, on peut dire que les choses avancent : lancement de campagnes de communication pour déstigmatiser la santé mentale ; développement de la prévention avec l'établissement des compétences psycho-sociales à l'école, d'actions de prévention du suicide grâce au numéro national 3114 ou encore du dispositif vigilance ; amélioration de la prise en charge de près de 90 000 patients grâce à 300 000 consultations dans le cadre du dispositif MonParcoursPsy, dont 20 % de mineurs ; renforcement des centres médico-psychologiques et des maisons des adolescents, centres présents dans tous les départements depuis fin 2022 ; allongement de la formation en psychiatrie ; augmentation du nombre de postes hospitalo-universitaires (HU) en pédopsychiatrie et du nombre d'infirmiers en pratique avancée (IPA) en psychiatrie ; enfin, travaux des assises nationales de la protection de l'enfance.
Bien sûr, ce n'est pas encore suffisant et beaucoup reste à faire. Nous nous y employons activement.
La santé mentale doit être reconnue comme composante indissociable de la santé globale.
À ce titre, la santé mentale sera mieux prise en compte dans l'établissement des bilans de prévention aux âges clés et dans la prochaine stratégie nationale de santé.
M. Christophe Bex applaudit ironiquement.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures quinze, sous la présidence de Mme Hélène Laporte.
L'ordre du jour appelle la discussion, en application de l'article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution de M. Pascal Lecamp et plusieurs de ses collègues relative à l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur (n° 1173).
La proposition de résolution sur laquelle nous allons nous prononcer aujourd'hui est un appel en faveur d'un nouveau pacte de confiance pour le libre-échange.
Je ne choquerai personne en disant que les poussées protectionnistes sont nombreuses. En tant que fervent défenseur du commerce international, je suis convaincu qu'il faut les combattre. Il le faut non en ignorant les préoccupations environnementales, sanitaires et sociales qui les nourrissent parfois, mais au contraire en proposant un chemin d'ouverture qui inscrive le commerce international dans les transitions. Voilà quelle est notre responsabilité.
Or l'accord entre l'Union européenne (UE) et le Mercosur, dans sa forme négociée jusqu'en 2019, relève d'un logiciel complètement obsolète. Selon une étude récente, l'environnement est la préoccupation principale de 60 % des jeunes Français âgés de 15 à 35 ans. Comment pourrions-nous justifier auprès d'eux l'adoption d'un texte qui aurait pour effet une accélération de la déforestation en Amazonie de plus de 5 % par an ? Et comment expliquerions-nous que la France, qui a accueilli la COP21 et qui a fait œuvre de ses meilleurs talents diplomatiques pour parvenir aux accords de Paris, accepte un texte qui ne fait pas de leur respect une clause essentielle, une clause incontournable ?
Avec l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur dans sa forme actuelle, ce sont aussi 99 000 tonnes équivalent-carcasse de bœuf sud-américain, potentiellement élevé aux antibiotiques, que nous importerions sans imposer de droits de douane, et ce alors même que nous avons, à raison, banni les antibiotiques de croissance en Europe depuis le 1er janvier 2006. Quel retour en arrière ce serait donc, sachant que, par surcroît, 27 % des ingrédients actifs utilisés au Brésil sont interdits au sein de l'Union européenne. La concurrence déloyale, le dumping social et les risques sanitaires qui résulteraient de cet accord sont injustifiables, notamment envers nos agriculteurs, et en particulier nos éleveurs, à qui, je le rappelle, nous demandons dans le même temps d'assurer notre souveraineté alimentaire.
Ainsi, à la Commission européenne et aux États membres de l'Union européenne, nous disons que ce texte n'est pas le bon, et qu'il faut le retravailler en toute transparence.
Dans cette démarche, nous sommes alignés sur nos collègues parlementaires européens qui, à l'initiative de Marie-Pierre Vedrenne, se sont opposés à l'accord dans sa forme actuelle.
Nous tenons évidemment à un accord politique et commercial avec les pays du Mercosur que sont l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay, mais la réciprocité dans les normes de production, les mesures miroirs et le respect des accords de Paris, avec des contrôles appropriés, doivent être des conditions non négociables : il y va de l'acceptabilité du commerce extérieur. Le Président de la République lui-même l'a affirmé lors de la présidence française du Conseil de l'Union européenne : l'absence de clauses miroirs doit constituer une ligne rouge infranchissable dans nos négociations, au risque d'autoriser un écocide.
Nous disposons d'une formidable occasion : celle de faire des traités de libre-échange un levier très puissant en faveur de la transition écologique, de standards sociaux plus élevés et d'un meilleur respect du bien-être animal. Pour ceux qui ne le sauraient pas, l'Union européenne a importé pour près de 2 000 milliards d'euros de biens en 2019, ce qui correspond peu ou prou au PIB du Brésil. L'Europe représente donc un marché essentiel à l'économie internationale. Utilisons cette grande force pour harmoniser par le haut les normes de production, sanitaires et environnementales, et contribuons ainsi à atteindre les objectifs de développement durable des Nations unies.
La présente proposition de résolution a été travaillée avec plusieurs de nos collègues, dans une large coalition et dans un esprit constructif que je tiens à saluer : les contributions des uns et des autres ont été intégrées. Dans cette enceinte, nous donnons fréquemment à voir aux Françaises et aux Français des images d'affrontement trop souvent stériles. Considérant l'urgence de la situation et la forte pression pour aboutir à un accord avant le sommet UE-Celac – Communauté d'États latino-américains et caraïbes – des 17 et 18 juillet prochains, pression issue en particulier du gouvernement espagnol qui prendra la présidence du Conseil de l'UE le 1er juillet, je me félicite que nous soyons parvenus à nous retrouver de manière transpartisane pour soutenir ce texte d'intérêt général.
Chers collègues, j'espère que nous saurons envoyer un signal fort en faveur d'un futur accord entre l'UE et le Mercosur – accord qui devra être plus juste et ne pas être conclu à n'importe quel prix. Approuvons donc unanimement cette proposition de résolution.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.
L'étude prospective Agrimonde-Terra parue en 2020, à laquelle ont comme toujours participé des dizaines d'organisations nationales dont, pour ce qui concerne la France, l'Inrae – Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement –, le Cirad – Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement – et l'AFD – Agence française de développement –, a abouti à une conclusion totalement partagée et positive : nous pouvons nourrir les 10 milliards d'habitants que comptera le monde en 2050. Il n'y a pas de limite physique qui nous en empêcherait : c'est possible !
En revanche, pour ce faire, quelques conditions sont à respecter. Si ces conditions sont simples, elles n'en sont pas moins porteuses de bouleversements et elles nécessiteraient de sortir de nos trajectoires de développement. Ces conditions sont les suivantes : mettre un terme à l'accaparement des terres et les partager, assurer le renouvellement des générations en garantissant un revenu digne à tous les paysans partout dans le monde, et établir un commerce équitable non seulement entre les espaces ruraux et les métropoles, mais aussi entre les pays et entre les continents. Je le répète, en instaurant un commerce équitable, en assurant un revenu digne aux paysans et en protégeant les terres agricoles, nous pouvons nourrir le monde. C'est le défi de notre génération, en lien avec un autre enjeu connexe et imbriqué : celui du climat.
Le traité UE-Mercosur tient-il compte de ces défis majeurs, sur lesquels nous serons jugés par nos enfants et nos petits-enfants qui, dans trente ans, nous demanderont ce que nous avons fait, en 2023, quand nous avons eu à nous prononcer sur cette question ? Nous recherchions la formule exacte du cardinal de Retz avant la reprise de la séance, monsieur le ministre délégué : j'invite le Président de la République, la Première ministre, l'exécutif dans son ensemble, à sortir de l'ambiguïté. Dans le cas contraire, ainsi que l'affirment toutes les études, ce sont 1 million d'hectares de l'Amazonie qui pourraient être détruits au profit des cultures de soja.
Une telle issue mettrait en péril notre sécurité alimentaire, car en détruisant l'Amazonie, non seulement nous contribuerions indirectement à l'accélération du dérèglement climatique et à l'épuisement d'une partie de notre réserve de biodiversité, mais nous porterions atteinte à l'économie de nos élevages, notamment aux 5 millions d'hectares du Massif central dont l'écosystème constitue pour ainsi dire un réservoir d'eau pour l'ensemble de notre pays.
Bref, si nous nous engageons en faveur de ce traité et si vous ne sortez pas de l'ambiguïté, nous risquons d'engager des processus irréversibles dans les domaines environnemental et social, qui sont très liés, mais aussi s'agissant du respect des droits humains des peuples d'Amazonie et des paysans d'Amérique du Sud, de France et d'Europe.
Il faut donc rejeter ce traité : c'est le sens de cette proposition de résolution, et je salue à cet égard Pascal Lecamp ainsi que les collègues de droite comme de gauche qui se sont engagés en faveur de ce texte.
Nous sommes parvenus à nous réunir autour de positions communes. Manquent-elles de clarté ? Je ne le crois absolument pas.
Nous demandons que le traité commercial ne soit pas séparé du traité global : pouvez-vous nous apporter une réponse précise sur ce point, monsieur le ministre délégué ?
Pouvez-vous également nous assurer que vous militerez pour que cet accord soit un accord mixte, nécessitant donc l'approbation des assemblées des différents États membres de l'Union européenne et non de la seule Commission européenne ?
Enfin, dernière revendication – qui surplombe les deux autres –, des questions aussi importantes que celles dont il est ici question – nous parlons d'écocide et de droits humains fondamentaux – ne pourraient-elles pas être négociées de manière transparente ?
Ce traité est non seulement archaïque sur le fond – je crois que nous l'avons largement démontré – mais aussi sur la forme. Cet accord ubuesque, insensé, est élaboré dans l'opacité. S'il devait entrer en vigueur, nous permettrions, dans une forme d'hubris, à des industriels de l'automobile ou de l'aéronautique d'échanger leurs capacités de développement, ce qui ruinerait les chances de survie de l'humanité.
Au minimum, nous avons besoin de transparence. Il nous faut un traité de nouvelle génération, ou pas de traité du tout. Pouvez-vous nous donner de manière claire, monsieur le ministre délégué, la vision de la France sur cet accord ? En effet, cette proposition de résolution transpartisane vise essentiellement à faire pression sur le Gouvernement français, dont les signaux ont été pour le moins ambigus ces derniers temps, pour que lui-même fasse pression sur l'Europe.
Au nom de la défense de notre humanité et de notre santé communes et des combats qui nous rassemblent, nous disons « non » au Mercosur, du moins pour le moment. Nous n'agissons pas à des fins protectionnistes, mais au nom d'une souveraineté solidaire, afin que la France affirme ses valeurs universelles et défende ses propres intérêts, lesquels rejoignent en l'occurrence ceux de l'humanité.
Êtes-vous donc en mesure, monsieur le ministre délégué, de rassurer sans ambiguïté aussi bien le monde paysan, les ONG, que les députés que nous sommes et qui, issus de neuf groupes différents, se sont engagés et rassemblés pour mener ce combat ? Il nous faut enfin des garanties certaines afin d'éviter le pire et, peut-être, dessiner une mondialisation plus heureuse.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – M. Sébastien Jumel et Mme Marie Pochon applaudissent également.
La proposition de résolution relative à l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur que nous examinons aujourd'hui est le fruit d'un travail transpartisan pour lequel je tiens à remercier nos collègues Pascal Lecamp et Frédéric Descrozaille, qui n'ont pas ménagé leurs efforts pour aboutir à ce texte. Sa discussion intervient un mois avant la tenue, les 17 et 18 juillet prochains à Bruxelles, du sommet UE-Celac.
Ainsi, avec l'adoption de cette proposition de résolution, nous souhaitons envoyer un signal fort aux institutions européennes : aucun nouveau traité de libre-échange ne pourra être soutenu par la France sans l'intégration des demandes mentionnées.
L'agriculture française fait notre fierté. Reconnue pour son excellence, notre production se distingue par sa fiabilité, grâce à la qualité, notamment sanitaire et environnementale, de nos exploitations et à la stabilité de leurs rendements.
Si nous croyons au multilatéralisme et à la régulation du commerce international par des accords de libre-échange, il est indéniable que l'accord de principe entre l'Union européenne et le Mercosur, tel qui a été envisagé en 2019, est loin d'être satisfaisant au vu des gages insuffisants obtenus au cours des négociations. En effet, l'accord qui sera conclu et, in fine, ratifié doit couvrir l'ensemble de nos préoccupations et ne doit en aucun cas défavoriser nos agriculteurs. Nos partenaires commerciaux doivent être soumis aux mêmes règles et obligations afin de conclure des échanges équitables. Il n'est pas acceptable d'importer du soja issu de la déforestation ou des viandes d'élevage qui ne sont pas soumises aux normes sanitaires européennes.
En vous disant cela, je pense à tous mes amis éleveurs, aux règles sanitaires que nous leur imposons et aux nombreux efforts d'adaptation qu'ils doivent réaliser. Une concurrence déloyale ne serait pas acceptable pour notre agriculture.
Ainsi, avec mes collègues, nous nous opposons à tout découpage en deux parties de ce texte qui empêcherait l'examen du volet commercial de cet accord par les parlements nationaux des États membres, nous privant ainsi du droit à la parole.
M. Julien Bayou applaudit.
Nous nous opposons à un accord qui ne respecte pas nos engagements environnementaux, sanitaires et sociaux.
Pour que cet accord s'applique dans le respect de nos valeurs, nous demandons une stricte application des normes européennes de production aux produits importés. Cela implique une subordination des clauses tarifaires préférentielles au respect de ces normes environnementales, sanitaires, de bien-être animal et de durabilité et de traçabilité. Nous demandons la mise en place de clauses miroirs, c'est-à-dire une réciprocité dans le respect des normes de production dans les échanges commerciaux, afin de protéger notre agriculture et nos agriculteurs. Nous ne pouvons en effet exposer le monde agricole à de possibles distorsions de concurrence en l'absence de telles clauses suffisamment fortes et contrôlées. Nous demandons l'intégration du respect des accords de Paris de 2015 comme clause suspensive de l'accord. Nous demandons que l'accord conclu dans son intégralité soit soumis à la procédure de ratification prévue pour les accords mixtes, donc à un vote par le Parlement.
Soucieux de protéger nos agriculteurs et notre souveraineté alimentaire tout en renforçant l'ambition de notre action en matière agricole et environnementale, le groupe Horizons et apparentés votera en faveur de cette proposition de résolution.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
« Cet accord, tel qu'il a été conçu et pensé, ne peut pas être compatible avec notre agenda climatique et de biodiversité » disait Emmanuel Macron en 2021. Aujourd'hui, monsieur le ministre délégué, vous affirmez qu'il faut évidemment conclure cet accord de libre-échange avec Lula. Le retour de la démocratie après Bolsonaro autorise donc la déforestation et les accords injustes.
Nous n'avons jamais dit cela !
Un changement de gouvernement plus tard et c'est reparti pour un tour ! Voilà que von der Leyen et notre ministre du commerce extérieur partent au Brésil, tandis que l'Espagne, qui prendra la présidence de l'Union le 1er juillet, souhaite que l'accord soit signé d'ici la fin de l'année. Sans hésitation, nous, écologistes, appelons à rejeter l'accord, en l'état et à l'avenir.
M. Julien Bayou applaudit.
Ce deal a souvent été qualifié de « viande contre voitures », en libéralisant d'un côté le commerce de bœuf, de poulet, de soja ou d'éthanol du Mercosur vers l'Europe, et de l'autre celui des biens industriels, des marchés publics et des services de l'Europe vers le Mercosur. Autrement dit, nous serons submergés de produits agricoles sud-américains et les peuples d'Amérique latine verront leurs services publics se dégrader et être vendus à la découpe à des multinationales prédatrices.
Cet accord est aussi un désastre pour les éleveurs et agriculteurs des deux côtés de l'Atlantique. Les importations de bœuf en provenance du Mercosur pourraient augmenter de près de 50 %. Nous vous entendons chaque jour parler de souveraineté alimentaire sur tous les bancs de cet hémicycle. Comment l'assurer face à un accord qui menace le bien-vivre de celles et ceux qui nous nourrissent ? Nous l'affirmons : même à conditions sanitaires et environnementales égales, ce qui, pour l'instant, est loin d'être garanti, le but premier de l'agriculture n'est pas d'être compétitive. Elle doit en priorité s'attacher à nous nourrir, dans les meilleures conditions possibles pour les paysans, les citoyens et le vivant.
Alors que les incendies ravagent la planète, cet accord, en l'état et à l'avenir, contribuera aussi à l'accélération du dérèglement climatique, à la déforestation, à la mondialisation de la malbouffe et à la crise agricole. Rendez-vous compte : l'accord pourrait être suspendu si l'Europe ne respectait pas son quota d'importation de poulet congelé mais le non-respect du climat et des droits sociaux n'entraînerait ni sanction ni suspension. C'est choquant et inacceptable ! Pour pallier cet anachronisme, la Commission européenne propose une lettre interprétative qui aborderait les enjeux du climat et de la déforestation, mais sans aucune valeur légale contraignante. C'est une mascarade, un greenwashing affligeant !
L'Amazonie est à son point de bascule ; cet accord pourrait entraîner une accélération de la déforestation jusqu'à 25 %, autant dire un désastre. En 2023, n'importe quel accord devrait être assujetti à la protection du climat et de la biodiversité, au respect de l'État de droit et des droits sociaux et humains. Toute négociation d'un accord devrait associer les citoyens et la société civile pour que l'intérêt général prévale sur les intérêts privés. L'accord entre l'Union européenne et le Mercosur, comme le Tafta – traité de libre-échange transatlantique – et le Ceta – accord économique et commercial global –, faillit à ces deux principes fondamentaux.
Au sommet du G7 en 2019, le Président de la République, dénonçant l'écocide en cours dans la forêt amazonienne, avait indiqué que la France ne pouvait pas soutenir cet accord. Qu'est-il arrivé depuis ? Quels sont les éléments, dont nous n'avons pas connaissance, qui vous conduisent à affirmer que cet accord contient des dispositions très favorables à nos entreprises et que la France n'a jamais été opposée à la signature de cet accord ?
Avec cette résolution, c'est la représentation nationale tout entière qui vous le demande : où en sont les négociations ? Quel message envoyez-vous aux Français et aux Européens, à moins d'un an des élections européennes ? Que l'Europe est un outil de destruction de notre agriculture ? Que l'Europe est un outil de concurrence entre les peuples et les économies ? Que l'Europe n'est pas une démocratie mais une lobbycratie ? Comme moi et comme les écologistes, vous dites aimer l'Europe. Ne donnez donc pas du grain à moudre aux populistes, aux sceptiques, aux nationalistes !
Il aurait fallu que cette résolution dise toute notre détermination à ne plus laisser la mondialisation galopante abîmer ce qui nous est commun – de nos acquis sociaux à la préservation du vivant – et à faire primer la solidarité entre les peuples sur les lois du marché. Elle aurait dû demander à mettre fin à l'opacité délétère des négociations, exiger que l'accord inclue ses conséquences en matière de droits humains et affirmer que la pleine application de clauses miroirs est aujourd'hui impossible au vu des règles de l'OMC – Organisation mondiale du commerce. Mais cette résolution dit cependant une chose essentielle : il faudra faire avec l'Assemblée nationale et avec les représentants de toutes les nations européennes. Elle dit que nous pourrons rejeter cet accord.
Par cette résolution transpartisane, nous vous demandons de confirmer que la représentation nationale pourra débattre et voter tout nouvel accord de commerce décidé à l'échelle européenne et que vous vous engagiez à ce que le découpage voulu par la Commission européenne ne soit pas appliqué. Nous vous demandons de vous engager à porter notre voix et celle de millions de Français au Conseil européen.
Parce qu'il est temps que les règles du commerce international bénéficient aux peuples du monde et à la préservation de la planète plutôt qu'aux grandes firmes multinationales, nous, écologistes, soutiendrons cette résolution. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir, aux côtés des paysans et des peuples vivant de part et d'autre de l'Atlantique, pour que cet accord soit rejeté.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, RE, LFI – NUPES, Dem, SOC, HOR et GDR – NUPES.
Avec constance et cohérence, le groupe communiste, notamment par la voix de Jean-Paul Lecoq, s'est toujours opposé aux traités de libre-échange, quels qu'ils soient, parce qu'ils abîment les vies et la planète.
Aujourd'hui, l'agriculture française a des allures de forteresse assiégée : elle est envahie du dehors par le dumping social et environnemental et elle est affaiblie à l'intérieur, avec des acteurs de moins en moins nombreux et fragilisés par des prix bas et un avenir climatique incertain. En l'espace de vingt ans, nous avons laminé notre agriculture à coups de libre-échange. En refusant de protéger nos productions de la concurrence déloyale, la France a capitulé dans la bataille alimentaire. Le doublement de nos importations alimentaires entre 2000 et 2019 a fait exploser notre dépendance sur un très grand nombre de productions : aujourd'hui, la France importe la moitié de sa consommation de poulet, les deux tiers de sa consommation de poissons, alors qu'elle dispose du deuxième domaine maritime mondial, et plus de la moitié de sa consommation de fruits et légumes.
Bref, la France n'assume plus sa souveraineté alimentaire parce qu'elle a renoncé à réguler les prix et les rémunérations et parce qu'elle a préféré importer à bas prix plutôt que de défendre une agriculture de qualité et le pouvoir d'achat. Alors que ce constat devrait nous obliger, la France a poursuivi, en catimini et de manière opaque sous les présidences de Hollande et de Macron, un intense de travail de collaboration pour conclure un accord entre l'Union européenne et le Mercosur, au mépris de tous les enjeux climatiques, alimentaires et sociaux.
L'accord, dont la teneur est bien résumée par la formule « des voitures contre des vaches », risque de polluer nos assiettes en échange de la promesse de préserver nos parts de marché avec l'Amérique du Sud dans certains secteurs, dont l'automobile. Il se fera au détriment de la santé des Français : aujourd'hui 27 % des pesticides utilisés par l'agriculture brésilienne sont interdits au sein de l'Union européenne.
Sa ratification enfoncera encore un clou dans le cercueil du climat puisque l'accord provoquera une augmentation sensible de la déforestation – entre 5 % et 25 % dans les premières années – alors même que les pays du Mercosur abritent une réserve inestimable de biodiversité.
En passe d'être signé, cet accord a été élaboré dans le mépris le plus grand de la démocratie car il est tout sauf transparent. Comment expliquer autrement les manœuvres de la Commission européenne pour en séparer les différents volets afin que sa ratification échappe aux États membres ? Nous avons besoin d'être rassurés : l'accord ne doit pas être séparé afin que l'avis du Parlement soit sollicité. Mais pouvons-nous compter sur le Président de la République ? Je l'ai rappelé ce matin en conférence de presse : l'avis d'Emmanuel Macron sur l'accord avec le Mercosur souvent varie ; il a dit tout et son contraire, en fonction de la météo ou de ses interlocuteurs. Mes collègues ont déjà cité ses propos, je vous épargne leur lecture.
Les Français nous demandent plus de protections pour nos productions ; nous devons commencer par l'agriculture, la mère de toutes. Nous aurions rédigé ce texte différemment si nous avions pu tenir la plume. Il n'est pas maximaliste – sa rédaction s'en tient au plus petit dénominateur commun – et il n'est pas contraignant – comme toute proposition de résolution, il n'a pas de valeur juridique. Loin de proposer la fin de la politique des accords de libre-échange, il reste cependant un symbole fort.
Il ne nous a pas échappé que les libéraux sont restés libéraux, et que le groupe GDR – NUPES demeure favorable à un État qui protège et qui prend soin.
Comment pourrait-il en être autrement ? Il faut se réjouir que l'ensemble de l'arc politique, y compris la majorité, ait été contraint de concéder que les importations devaient être assujetties à nos standards sociaux et environnementaux. Il est salvateur de se retrouver ensemble autour de l'idée que la démocratie n'est pas négociable : ce mauvais accord doit être soumis au vote du Parlement. Quelles que soient les modifications à la marge qui seront apportées à cet accord, nous nous y opposerons. Des différences tactiques peuvent exister au sein de la gauche, car elle est riche de sa diversité, mais nous sommes tous convaincus que le libre-échange promu par l'accord avec le Mercosur fragilise notre agriculture et notre planète. Cet accord n'est bon pour personne. Nous voterons donc pour cette proposition de résolution.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Dem.
Vingt ans après le début des négociations, l'Union européenne et le Mercosur ont signé un accord de libre-échange en juin 2019. Deux semaines plus tard, la France signalait son refus de signer la partie de l'accord relative au commerce, pour contester le peu de considération pour le volet environnemental, notamment au vu de la déforestation au Brésil. Au contraire, les piliers de la négociation consacrés à la coopération et au dialogue politique n'ont pas soulevé de difficultés.
En 2020, le rapport remis par M. Stefan Ambec au nom de la commission d'évaluation du projet d'accord entre l'UE et le Mercosur rappelait que l'accord ne pouvait être signé en l'absence de garanties relatives à la déforestation importée et au respect de l'accord de Paris. Aujourd'hui, le secteur agricole est vent debout contre cet accord déloyal, qui ne tient pas compte des règles sanitaires et environnementales européennes, ni de notre conception du bien-être animal.
L'application d'un tel accord avec le Mercosur permettrait des gains de pouvoir d'achat minimes pour les consommateurs européens. C'est en réalité surtout le secteur industriel qui pourrait bénéficier de débouchés significatifs. De tels accords de libre-échange sont-ils en phase avec les enjeux de notre temps ? L'heure est à la relocalisation des moyens de production, à la décarbonation et non à la déforestation massive et à l'accaparement des terres des peuples autochtones. Enfin, sur le plan sanitaire et phytosanitaire, l'accord avec le Mercosur est une occasion manquée d'introduire des exigences élevées dans les modes de production de nos partenaires.
Dès lors, deux constats s'imposent à nous. Premièrement, il est nécessaire que la France rappelle sa position actuelle et affirme clairement son opposition à toute signature du texte en l'état. C'est l'objet de la proposition de résolution, que le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires votera. Deuxièmement, même si nous prenons acte que de tels accords permettent à certaines entreprises européennes d'exporter leurs produits et de trouver ainsi de nouveaux débouchés, ils ne doivent pas menacer les secteurs les plus fragiles de nos économies, en causant des faillites, des pertes de compétence, d'emplois – voire la perte de notre souveraineté alimentaire, ce qui n'est pas rien.
Rappelons-le, cet accord ne suscitera notre intérêt que s'il satisfait trois critères. D'abord, les contrôles doivent être nombreux, effectifs et contraignants. La traçabilité des produits et la qualité de l'information mise à disposition du consommateur final doivent être irréprochables. Or je me suis laissé dire que seulement 2 % du cheptel brésilien seraient soumis à des contrôles ; ainsi 98 % ne le seraient pas. Ce laxisme étonne, au vu des contraintes auxquelles sont soumis les éleveurs français, à la suite, notamment, de la crise de la vache folle.
Ensuite, le respect de l'accord de Paris doit être une condition sine qua non de la signature et de l'application de l'accord de libre-échange. Toute application des dispositions internationales doit être évaluée à l'aune de cet accord. S'il s'avère que nos partenaires américains ne respectent plus leurs engagements climatiques, le volet commercial de l'accord Mercosur devra être suspendu. De fait, la radicalité de certains changements politiques contemporains en Amérique latine suscite une inquiétude légitime.
Enfin, nos filières agricoles doivent être protégées. Elles ne peuvent être mises en concurrence avec une agriculture qui n'est pas soumise aux mêmes normes sanitaires ou sociales et qui emploie des produits phytosanitaires interdits en France. C'est un paradoxe : nous sommes prêts à importer des marchandises dont nous n'accepterions pas les conditions de production ici ! Les paysans français nous le rappellent, ils sont soumis à des injonctions contradictoires : d'un côté, ils doivent respecter des règles environnementales de plus en plus draconiennes, car c'est nécessaire pour l'environnement, de l'autre, ils sont exposés à la concurrence de producteurs qui n'ont pas à respecter de telles règles.
Nos campagnes sont donc vent debout contre cet accord et je peux les comprendre.
Ces questions agricoles sont pour nous essentielles, car il y va de la vitalité de notre agriculture, des milieux ruraux français et de notre souveraineté alimentaire. Nous l'avons déjà vu, 98 % de la viande de volaille consommée dans la restauration hors domicile est importée. C'est un vrai problème. Faut-il sacrifier l'agriculture pour vendre quelques produits industriels ? Je ne le crois pas. Si nous pouvons nous passer de beaucoup de choses, nous ne pouvons nous passer de manger. En matière de souveraineté alimentaire, il faut donc faire très attention.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Beaucoup a déjà été dit. Si je souscris à l'essentiel des propos tenus depuis le début de la discussion, je souhaiterais revenir sur le contexte en matière d'accords de libre-échange et de développement des échanges internationaux.
Nous discutons de cet accord particulier alors que le multilatéralisme est à l'agonie. Je rappelle que les quatre grandes institutions de la mondialisation que nous connaissons ont été créées au lendemain de la seconde guerre mondiale : la Banque mondiale, le FMI – Fonds monétaire international –, l'ONU et le système du Gatt – Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce….
…qui a débouché sur la création de l'OMC, avec la signature des accords de Marrakech, en 1994, à l'issue du cycle d'Uruguay. L'agriculture, qui n'était pas à l'ordre du jour des négociations internationales, est alors devenue l'un des sujets débattus dans le cadre du multilatéralisme.
Ce multilatéralisme nouveau, né en 1994, a connu une série d'échecs – un premier, avec la conférence ministérielle de Seattle, puis un second, avec celle de Cancún –, certes interrompue par l'accord de Hong Kong. À chaque fois, la culture de multilatéralisme et de développement des échanges commerciaux issue du Gatt a buté sur la question agricole.
Alors que le cycle de Doha devait durer trois ans, il est à l'agonie. Le multilatéralisme qui servait de cadre au développement des échanges dont nous avons besoin n'est plus : lors des accords de Marrakech, il a été décidé que toutes les formes de soutien à l'agriculture, partout dans le monde, devaient être réduites jusqu'à disparaître. C'était une erreur grave, dont nous devons prendre conscience alors qu'il faut rebâtir un cadre multilatéral. Nous avons besoin d'échanges internationaux, mais en changeant de logiciel, en rompant avec le paradigme actuel.
Rappelons l'équation agricole et alimentaire mondiale : le monde compte environ 1 milliard de personnes sous-alimentées et 2 milliards de personnes malnutries – c'est-à-dire souffrant de carences en macronutriments ou en micronutriments ; 80 % de ces affamés sont des paysans. Ainsi, les besoins alimentaires sont massivement insatisfaits et le problème concerne essentiellement les paysans.
Il n'est donc pas possible de signer des accords d'échange sans traiter l'alimentation pour ce qu'elle est : l'une des cinq ressources géostratégiques disposant d'un statut à part dans le champ économique, avec l'eau, l'énergie, la monnaie et les armes – d'ailleurs, l'alimentation a un impact sur l'eau. Nous ne pouvons continuer à négocier des accords sans juger de leur pertinence globale selon une grille d'analyse centrée sur l'accès à l'alimentation des paysanneries les plus pauvres, les plus précaires et sur l'impact pour notre agriculture. L'agriculture et l'alimentation ne sont pas simplement un volet des accords que nous devons négocier.
Le groupe Renaissance fait appel à la liberté de vote de chacun, sur un texte compliqué, fruit d'un cheminement inédit, qui doit être salué.
Je me félicite que nous sachions forger des objets politiques sans rester prisonniers de la discipline partisane qui nous contraint souvent ; cette proposition de résolution le montre.
J'ai évoqué la paysannerie la plus précaire, qui souffre de l'essentiel des besoins alimentaires insatisfaits, mais nous avons également la responsabilité de protéger notre propre agriculture, non seulement pour notre souveraineté, mais aussi pour assurer la sécurité alimentaire mondiale, qui n'est garantie que par cinq zones de production, dont l'Europe de l'Ouest – essentiellement la France.
Nous avons la responsabilité de ne pas porter atteinte à ce potentiel de production, puisque nous contribuons directement à la stabilité géopolitique du monde. Je vous rappelle que selon le Giec – le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat –, cette stabilité est essentiellement menacée par la rupture des chaînes d'alimentation et de l'accès à l'alimentation. Gardons-le à l'esprit et refusons de ratifier cet accord en l'état. Développons les échanges dont nous avons besoin, en étant à la hauteur de notre responsabilité ! Écrivons un nouveau cadre multilatéral en plaçant l'agriculture et l'alimentation au centre de notre grille d'analyse de la pertinence des accords commerciaux.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et LIOT.
Le commerce international existait avant le libre-échange et il continuera d'exister !
Par cette proposition de résolution, vous confirmez ce que le Rassemblement national a toujours dénoncé : les dérives du mondialisme et d'un libre-échange dérégulé. Si vous nous accusiez il y a quelques années de jouer les Cassandre, le réel vous rattrape et nous donne raison. Les industries et les agriculteurs français font face depuis des années à une concurrence déloyale. Les uns ont dû mettre la clé sous la porte, les autres délocaliser leur activité pour survivre. Ce n'est que la conséquence de vos décisions passées, que nous déplorons. Vous avez sacrifié l'environnement sur l'autel d'une économie mondialisée, profitant à quelques financiers sans scrupule. Depuis 2018, Marine Le Pen et le Rassemblement national alertent sur les dangers du Mercosur. Les différences salariales, les écarts de revenus moyens, de protection sociale, de normes sanitaires ou encore écologiques créent les conditions d'un dumping social et environnemental injuste. Ce néolibéralisme imposé à marche forcée par l'Union européenne détruit notre agriculture.
En poursuivant votre fuite en avant, vous souhaitez limiter ces dérives par des clauses miroirs. Le réel vous a rattrapés, vous reconnaissez implicitement la nécessité d'instaurer un protectionnisme.
C'est un début, mais ayez le courage de la cohérence, écoutez-nous jusqu'au bout, sans perdre de temps pour la France et les Français : adoptez le programme du Rassemblement national.
Si les clauses miroirs, dont nous ne connaissons pas l'étendue, visent à instaurer une forme de réciprocité, il est impossible de bâtir les fondements d'une relation commerciale équilibrée entre des pays présentant de telles disparités de développement. Les revenus nets des pays d'Amérique latine sont environ cinq fois inférieurs à ceux d'Europe.
Un récent rapport du Sénat affirme que la hausse des charges des producteurs, les surtranspositions et la fiscalité sont la cause de la perte de notre compétitivité. Toutes ces spécificités françaises seront-elles intégrées dans les clauses miroirs ? Non.
Chers collègues, plutôt que de simplement limiter la casse, arrêtons net cette folie, tant qu'il en est encore temps. Sauvons ce qu'il reste de notre agriculture, de nos petites et moyennes industries de transformation. Renoncez à l'accord avec le Mercosur ! L'intérêt français doit primer sur une idéologie destructrice.
Les fédérations professionnelles ont toutes exprimé leurs craintes. La FNSEA – Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles – manifeste ses plus vives inquiétudes, en dénonçant les ambitions sans actes dans l'application de ces clauses miroirs. L'association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes – Interbev – s'alarme de l'importation dans l'Union européenne de produits agroalimentaires qui ne respectent pas les normes sanitaires auxquelles sont soumis nos élevages et nos industries de transformation. Le cas du Brésil est édifiant : 30 % des substances autorisées sur son sol sont interdites en France.
L'accord avec le Mercosur instaurerait une concurrence déloyale, avec des produits de moins bonne qualité. Comment pourrons-nous avoir la certitude que les clauses miroirs permettront de lutter efficacement contre cette concurrence malhonnête ? Comment leur application sera-t-elle contrôlée ? À ce stade, nous n'avons pas de réponse claire.
Alors que notre économie est sans cesse soumise à de nouvelles normes énergétiques et environnementales imposées de façon stricte et pénalisante pour notre compétitivité, l'importation de produits agricoles depuis l'Amérique du Sud est un non-sens absolu. Contrairement aux affirmations mensongères du Gouvernement, l'économie française sort affaiblie des six années de mandat d'Emmanuel Macron.
L'inflation des prix de l'énergie, à laquelle vous refusez de vous attaquer en sortant la France du marché européen de l'énergie et en baissant les taxes, fragilise la compétitivité de nos industries et de notre agriculture. Avec la dette publique, la balance commerciale française est sans doute l'un des points noirs du bilan d'Emmanuel Macron. Le déficit commercial atteint un niveau record de 160 milliards d'euros. Depuis dix ans, la balance commerciale agricole ne cesse de se dégrader. Son solde positif a été divisé par deux et l'accalmie observée avec la récente inflation ne doit pas dissimuler l'effondrement du volume des exportations. Nous importons désormais 28 % des légumes, 71 % des fruits, 56 % de la viande ovine et 22 % de la viande bovine que nous consommons. En 2017, Emmanuel Macron affirmait souhaiter la souveraineté alimentaire. Force est de constater que la majorité gouvernementale a accentué le déclin de l'agriculture.
Cette proposition de résolution va dans le bon sens, en encourageant une inflexion protectionniste ; elle amorce un changement de paradigme dans la doctrine du libre-échangisme alors que les peuples aspirent à retrouver leur souveraineté. Si nous sommes favorables aux mesures miroirs, nous militons avant tout pour la non-ratification de cet accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur, dernier clou planté dans le cercueil de l'agriculture française.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Cette proposition de résolution a un mérite : elle permet à l'Assemblée de tenir un débat sur un accord de libre-échange négocié en catimini depuis près de trente ans.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Elle aurait pu se focaliser sur le rejet de la méthode dite du découpage, grâce à laquelle la Commission européenne entend contourner le vote des parlements nationaux. Elle aurait ainsi servi de point d'appui pour exiger que la représentation nationale décide, en dernier ressort, de l'adoption ou non de cet accord.
Mais, une fois passé un exposé des motifs trompeur, comme l'a souligné très honnêtement notre collègue Pascal Lecamp, il apparaît que l'objectif principal de cette résolution est de nous faire accepter le principe même de l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur…
…dans une déclinaison rejoignant miraculeusement la communication d'Emmanuel Macron, qui fait mine de tout changer pour que rien ne change.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Si cet accord est adopté, il freinera la diversification économique nécessaire aux pays du Mercosur. Il favorisera un modèle agricole extensif voué à l'exportation, au détriment des cultures vivrières. Il aggravera le saccage de la forêt amazonienne, bien commun essentiel à la vie humaine. Chez nous, il servira les intérêts de certains entrepreneurs agricoles…
…au détriment de la masse des paysans, et de notre souveraineté alimentaire, déjà fragilisée par le sacrifice des productions les moins compétitives à l'export ,
Mêmes mouvements
et donc d'une polyculture qui faisait la force de l'agriculture française.
On nous dit que cet accord renforcera notre autonomie stratégique en diversifiant les approvisionnements.
Au contraire, il aggravera la dépendance de l'Union européenne aux marchés mondiaux des matières premières, connus pour leur instabilité.
Allons plus loin : à quoi rime de demander des garanties écologiques alors qu'il s'agit d'augmenter les flux commerciaux de biocarburants, de bœuf, de soja, de papier, de boissons
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – Mme Danièle Obono s'exclame
et d'accélérer la déforestation ?
Vos garanties sociales sont tout aussi chimériques. C'est la nature même du libre-échange que de mettre en concurrence les producteurs, dans une course au moins-disant social et écologique. Et qu'attendre des clauses miroirs, aisément contournables ? Elles reposent sur l'idée que le modèle européen serait vertueux. C'est oublier un peu vite qu'au sein même de l'Union Européenne, le dumping social et écologique est de mise. C'est postuler, également, que nous disposons en l'état des moyens de contrôles nécessaires, alors que des décennies de néolibéralisme ont affaibli nos services douaniers.
En définitive, cette proposition de résolution offre au Gouvernement une porte de sortie. Lorsqu'il a détourné la présidence française de l'Union européenne au service de sa campagne, Emmanuel Macron avait affirmé qu'il refusait de signer l'accord. Depuis, sa position a évolué. La finalité est claire, énoncée sans fard par le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger : « nous n'avons jamais été opposés à la signature de cet accord » ; « il faut évidemment conclure » …
L'oratrice montre le ministre délégué de la main.
Et la suite ?
…de préférence après les élections européennes, pensait-il sûrement sans le dire.
Nous ne sommes pas d'accord ! Le libre-échangisme est d'abord une politique de classe. Quelques-uns ont à y gagner, beaucoup ont à y perdre.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Les opinions publiques l'ont compris, comme les 400 associations et syndicats qui, de part et d'autre de l'Atlantique, s'opposent à l'accord. Parmi elles, la Confédération paysanne, qui n'a pas pu participer, malgré sa demande, à la conférence de presse de présentation de cette résolution.
M. Grégoire de Fournas s'exclame.
Comment croire encore aux vertus du doux commerce et d'une mondialisation heureuse profitant à tous ? Comme si l'explosion des déséquilibres commerciaux ne participait pas à l'instabilité structurelle des économies ! Comme si la pandémie n'avait pas eu lieu ! Comme si la crise écologique n'était pas là ! Comme si nous n'assistions pas au spectacle d'une infime minorité se servant des pénuries, aggravées voire provoquées par les mécanismes des marchés, pour accroître ses profits !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'adoption de l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur lancera la machine folle. Quel nouvel accord de libre-échange nous sera servi dans la foulée, au terme d'une gestation opaque ? Celui avec la Nouvelle-Zélande ou l'Australie ? Avec l'Inde, la Thaïlande ou le Kenya ? Ces grands accords pensés dans les années 1990 sont les résidus d'une phase révolue de la mondialisation.
Mêmes mouvements.
Entendez-le : le libre-échangisme est obsolète. Tous ces dispositifs néfastes et destructeurs ont fait leur temps, et un peu de greenwashing ne suffira pas à leur donner une nouvelle jeunesse.
Nous ne pouvons donc pas apporter notre soutien à ce texte. Une autre organisation du commerce international est possible et nécessaire, qui subordonnerait les échanges à des objectifs politiques, économiques et sociaux supérieurs, tenant compte de l'intérêt social et écologique du plus grand nombre, et non des profits de quelques-uns.
M. Grégoire de Fournas s'exclame.
Elle interdirait les déséquilibres abyssaux des échanges commerciaux. Nous l'avons fait par le passé, et cela n'a pas empêché le commerce international !
Promouvoir la négociation de telles règles, dans le cadre de ce que nous appelons un protectionnisme solidaire ,
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
est une condition nécessaire pour relever les immenses défis nationaux et mondiaux qui sont devant nous.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Quelques députés du groupe LFI – NUPES se lèvent pour applaudir.
La présidente de la Commission européenne était hier au Brésil. Le Président Lula rencontre Emmanuel Macron le 22 juin et vous-même, monsieur le ministre délégué, avez récemment déclaré en anglais devant de la presse européenne, « l'accord avec le Mercosur contient des dispositions très favorables à nos entreprises. C'est pourquoi nous n'avons jamais été opposés à la signature de cet accord. » Fin de citation.
Ce n'est pas la fin de la citation !
Personnellement, monsieur le ministre délégué, je crois que cet accord est très défavorable aux agriculteurs et éleveurs européens, mais aussi à l'avenir de notre planète !
Chaque rapprochement de ce type entre la France et les quatre pays du Mercosur est un coup de couteau supplémentaire dans le cœur de notre agriculture.
Ce nouveau traité, hors-sol, vient s'ajouter aux multiples décisions qui enfoncent la France dans une politique autodestructrice de sa souveraineté agricole.
Beaucoup ont considéré que l'autonomie alimentaire de la France était un acquis, mais le paradigme a bien changé. La ratification de l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur présenterait un risque immense pour les agriculteurs et finirait d'achever notre modèle français ! Il encouragerait l'importation de produits agricoles hors standards de production européens, donnant un avantage considérable aux pays du Mercosur.
Les propos du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, M. Bruno Le Maire, le 17 mai dernier, n'encouragent d'ailleurs pas l'élevage français. Il vante la production de steaks végétaux et dénonce les éleveurs français. En tant qu'ancien ministre de l'agriculture, il mord la main qui l'a nourri !
La Cour des comptes, à son tour, s'empresse d'achever la filière bovine en appelant, dans son dernier rapport, à réduire le cheptel français. Ce ne sont pas des recommandations, mais une importante décapitalisation de l'élevage français, et de notre souveraineté. On ne demande pas à la Cour de compter les bouses des vaches, mais de conseiller le Gouvernement sur une stratégie de réduction de la dette. Ce ne serait déjà pas si mal !
Monsieur le ministre délégué, vous devez dénoncer ces actes ! Notre agriculture est à l'agonie, nos éleveurs sont démunis, mais rien n'est entrepris ! Cet accord est comparable au Ceta, dont la ratification a été autorisée de justesse en France le 23 juillet 2019, par 266 voix pour et 213 voix contre à l'Assemblée nationale.
Son application est encore provisoire car le Sénat ne s'est pas prononcé. Qu'attend le Gouvernement pour demander l'inscription de ce texte à l'ordre du jour du Sénat ?
Chaque jour, l'agriculture française est attaquée par les bien-pensants, incapables de voir plus loin que le bout de leur nez ! Ils s'en prennent à une filière respectueuse, exigeante, mais affaiblie.
Les Soulèvements de la Terre sont à l'origine des destructions à Sainte-Soline et, le week-end dernier, de celle des cultures sans pesticides de maraîchers. Notre agriculture ne peut être bafouée jour après jour par cette bande de punks à chien, mêlés à des soixante-huitards nostalgiques !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN. – Mme Danièle Obono, M. Matthias Tavel et Mme Sandrine Rousseau s'exclament.
Regardez au Brésil : les bêtes sont parquées dans douze mètres carrés par tête !
Entre les parcs d'engraissement ou feed-lots brésiliens et Martine à la ferme, il y a l'agriculture française et nous devons la protéger !
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Maxime Minot et Mme Emmanuelle Anthoine s'exclament.
Cette ratification entraînerait une concurrence déloyale pour les éleveurs européens.
Brouhaha.
L'entrée de telles quantités de viandes produites à bas coût, bénéficiant d'une réduction de droits de douane et de contingents tarifaires, ne ferait qu'empirer la situation.
Mme Danièle Obono s'exclame.
En outre, les antibiotiques de croissance sont autorisés en Amérique du Sud, ainsi que de nombreux produits phytosanitaires dont l'usage est interdit dans l'Union européenne. Ainsi, en 2020, 27 % des ingrédients actifs utilisés au Brésil étaient interdits au sein de l'Union européenne.
En trois ans, près de 1 200 nouveaux pesticides ont d'ailleurs été autorisés au Brésil, dont 193 contenant des substances interdites au sein de l'Union européenne. Les instances européennes ont relevé de nombreuses défaillances dans les contrôles sanitaires effectués dans plusieurs pays du Mercosur. Or l'accord prévoit des mesures d'allègement des contrôles sanitaires en dépit des scandales à répétition qui ont notamment secoué le Brésil et mis en lumière un système de contrôle corrompu. L'asymétrie dans les conditions de production, en l'absence de mesures miroirs, conduirait à une situation de concurrence déloyale.
Enfin, cet accord est absolument incompatible avec l'urgence climatique ! S'il venait à entrer en vigueur, la forêt amazonienne connaîtrait un processus de déforestation encore plus colossal, ce qui aurait des conséquences dramatiques sur le climat, la biodiversité et les agriculteurs.
Protestations de Mmes Marie-Charlotte Garin et Marie Pochon.
Par conséquent, il est urgent de sauver la filière agricole avec trois priorités : garantir un jeu commercial à armes égales avec nos partenaires européens et internationaux afin que les produits importés soient soumis aux mêmes règles de production que les produits français ; exiger la réciprocité pour assurer l'équité du jeu concurrentiel et…
…donner les moyens financiers et matériels aux agriculteurs d'anticiper les conséquences du réchauffement climatique.
Le traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Mercosur étant absolument contraire à ces trois objectifs,…
…le groupe LR demande un rejet ferme et définitif de toute ratification et votera donc cette proposition de résolution afin de préserver, plus que jamais, le système de production français.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe Dem. – M. Stéphane Travert applaudit également.
Cette proposition de résolution est la bienvenue. Mais n'est-elle pas l'alibi d'un double jeu ?
Voilà la vraie question ! Sur cet accord, le Président de la République a dit tout et son contraire. Et les récentes déclarations du Gouvernement ne peuvent que nous inquiéter. N'oubliez pas que vous avez laissé faire la Commission de Bruxelles laquelle, avec son approche dogmatique du libre-échange intégral, a signé ce texte qui ne sert ni les intérêts de la France, ni ceux des pays du Mercosur.
Tout d'abord, parce qu'il augmente les quotas d'importations non assujetties à des droits de douane – 99 000 tonnes de viande bovine, 180 000 tonnes de volaille, 26 000 tonnes de viande porcine –, c'est un accord suicidaire pour notre agriculture. Celle du Mercosur n'est pas soumise aux normes européennes et utilise des antibiotiques et des pesticides interdits chez nous. La concurrence sera donc obligatoirement déloyale, nos agriculteurs ne pouvant s'aligner sur les prix de ceux du Mercosur.
Mais cet accord est également dangereux pour les nations du Mercosur. En tant que président du groupe d'amitié France-Brésil, je peux vous dire que nombreux sont ceux qui s'inquiètent, au Brésil, de la suppression des droits de douane pour leur industrie, qui va être déstabilisée. D'ailleurs, quand il était dans l'opposition, le président Lula avait dénoncé cet accord.
Enfin, la négociation a été lancée en 2000 et l'accord ne prend donc pas en compte le changement d'époque et la préoccupation environnementale mondiale. Ce n'est pas en spécialisant les continents – agrobusiness pour le Mercosur, industrie pour l'Allemagne – que l'on réduira l'effet de serre des transports de marchandises entre continents et que les différents pays pourront s'engager dans un développement diversifié, donc harmonieux !
Une fois de plus, l'hypocrisie de la Commission de Bruxelles est insupportable. Comment ose-t-elle présenter cet accord comme « un engagement à lutter contre la déforestation » alors que si, par malheur, il était approuvé, ce texte favoriserait encore plus la spécialisation agricole du Brésil au sein du système libre-échangiste mondial. Il conduirait donc à une augmentation de la production intensive de soja et, en conséquence, à davantage de déforestation en Amazonie. C'est évident !
Quelle incohérence que d'interdire la production et la consommation de certains pesticides en Europe quand on autorise les entreprises chimiques – notamment allemandes – à les revendre en Amérique du Sud, pour les retrouver, enfin, dans les produits importés ! Je le répète, quelle incohérence !
C'est pourquoi la France doit impérativement mettre son véto à cet accord non transparent. Monsieur le ministre délégué, en commission des affaires étrangères, il a un peu moins d'un mois, vous n'avez pas été très clair : allez-vous refuser la scission de l'accord pour éviter que, contrairement à celui avec le Chili ou au Ceta, il ne puisse pas s'appliquer sans ratification parlementaire ?
Allez-vous enfin développer une véritable politique avec l'Amérique du Sud ? Tous les présidents de la République ont choyé ce continent – souvenez-vous de la célèbre tournée du général de Gaulle ! Un seul n'y a jamais été, excepté un passage de deux jours à Buenos Aires pour le sommet du G20. C'est Emmanuel Macron : deux jours en six ans !
Nos concurrents allemands, anglais, portugais ou espagnols ne se gênent pas pour récupérer nos marchés dans ce magnifique continent où nous avons des intérêts culturels et économiques communs.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
La vraie question est de savoir si, plutôt que de laisser Mme von der Leyen faire ses affaires en Amérique du Sud, en défendant l'industrie allemande au détriment de l'agriculture française, votre gouvernement aura le courage d'être cohérent, en usant de son droit de veto au mois de juillet, lors du sommet réunissant l'Union européenne et la Celac, dans l'intérêt de l'agriculture et de la planète, et pour promouvoir une nouvelle forme de libre-échange, qui respecte les peuples et l'équilibre du monde.
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger.
Je vous remercie d'avoir inscrit cette proposition de résolution à l'ordre du jour de votre assemblée. Au-delà de l'accord avec le Mercosur, elle nous permet de débattre de la politique commerciale, voire du commerce international. En effet, les interventions de la gauche et de l'extrême droite de l'hémicycle
« Ah ! » sur les bancs du groupe RN
tendent à remettre en cause le commerce international lui-même.
C'est faux ! Ce n'est pas bien de mentir, quand on est au Gouvernement !
Disons-le tout de suite : le protectionnisme solidaire que vous appelez de vos vœux serait mortifère pour notre économie.
Exclamations prolongées sur les bancs des groupes RN et LFI – NUPES.
Vous voulez ériger des murailles autour de notre pays ; peut-être empêcheront-elles les produits des autres d'y entrer.
M. Nicolas Meizonnet s'exclame.
Le commerce international existait avant les accords et il existera encore après !
Néanmoins, certains ne sont pas produits en France, et ne le seront jamais :
Exclamations sur les bancs du groupe RN
si demain nous interdisons les importations de pétrole, il n'y aura plus d'essence à la pompe.
C'est une réalité ! Il existe en économie des avantages comparatifs : il est plus facile et moins cher de produire certains produits dans certains pays que dans d'autres. C'est ce qui a permis aux ménages français d'acquérir, durant les trente ou quarante dernières années, des biens d'équipements à moindre coût.
Vives exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et LR.
En 1980, le prix d'un téléviseur était équivalent à un mois du salaire médian ; aujourd'hui, à moins d'une semaine.
Votre protectionnisme solidaire reviendrait donc à imposer aux ménages français une inflation qui réduira fortement leur pouvoir d'achat ,…
Mêmes mouvements
…les empêchant d'accéder à certains biens d'équipement. Il faut le dire.
Brouhaha.
Ensuite, ces mêmes murailles empêcheront également nos produits de sortir :
Exclamations sur les bancs des groupes RN, LFI – NUPES et LR
votre mesure pénaliserait la majorité des entreprises françaises exportatrices, les PME et PMI comme les grandes entreprises. Le constat vaut également pour l'agriculture :…
…certaines grandes filières, comme les vins et spiritueux, les céréales, le lait – la filière laitière exporte 40 % de sa production –, l'élevage porcin ont une balance commerciale largement excédentaire.
Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.
On nous avait ainsi annoncé que le Ceta, conclu avec le Canada,…
…serait le dernier clou enfoncé dans le cercueil de la filière bovine française ; sur les bancs du Rassemblement national, les mots employés étaient les mêmes qu'aujourd'hui. Or l'agriculture a augmenté ses exportations de plus de 30 % ; nous exportons trois fois plus de bœuf français au Canada que nous n'importons de bœuf canadien. Voilà les chiffres : c'est la réalité !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem. – Protestations sur quelques bancs des groupes RN et LR.
Cela signifie-t-il que nous devons privilégier un libre-échange dépourvu de limites ? La réponse est non.
Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI – NUPES.
Certes, au cours des dernières décennies, le libre-échange, notamment sur certains produits, avec certains pays, a pu engendrer un dumping social, environnemental et sanitaire qui n'est favorable ni aux consommateurs français, ni aux consommateurs européens.
Ce n'est que ça, tout le temps ! C'est la nature même du libre-échange !
Aussi menons-nous, depuis quelques années, une révolution de la politique commerciale.
« Ah ! » sur quelques bancs des groupes RN et LFI – NUPES.
Une révolution : voilà qui devrait plaire aux bancs de la gauche !
Elle vise à replacer l'humain et la planète au cœur des considérations.
La défense de l'humain passe par l'introduction dans les traités des conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT), afin de lutter contre le travail forcé et contre le travail des enfants, avec des mécanismes de sanctions. Elle passe aussi par le vote de mesures miroirs visant à protéger les consommateurs des pesticides, des antibiotiques de croissance et des néonicotinoïdes.
Pour défendre la planète, nous imposons le respect des normes sanitaires et environnementales de l'Union européenne, le règlement contre la déforestation et la dégradation des forêts et l'inscription obligatoire dans les traités d'une clause relative à l'accord de Paris.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Voilà la révolution que nous menons pour garantir plus de responsabilité et, surtout, une vraie réciprocité entre les partenaires commerciaux.
Venons-en au Mercosur
« Ah ! » sur de nombreux bancs
– si tant est que la question vous intéresse : depuis sept minutes et sept secondes, on n'entend que hurlements sur les bancs de l'extrême gauche comme de l'extrême droite, qui ne font preuve d'aucun respect.
Je vous ai, quant à moi, écouté religieusement ,
Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI – NUPES
sans intervenir ; or, depuis que j'ai pris la parole, vous vociférez.
M. Thibault Bazin s'exclame.
Le fond du sujet ne vous intéresse pas : vous êtes, par principe, opposés à tout échange économique.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Dans l'intérêt de tous, je vous remercie de vous calmer. La parole est à M. le ministre délégué, et à lui seul.
Parlons…
…du Mercosur, donc, même au milieu des vociférations. Il réunit quatre États,…
…le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay, avec lesquels nous entretenons de bonnes relations. Depuis vingt-trois ans, nous menons des négociations avec lui. En 2019, un accord a été présenté au Conseil européen. La France a pris ses responsabilités et affirmé qu'il était inacceptable en l'état. De fait, il était totalement opposé à cette révolution de la politique commerciale que nous souhaitons mener, afin de prendre en considération les aspects humain et environnemental.
J'y reviendrai dans un instant :…
…nous tenons le même discours dans tous les cercles. À la demande du Président de la République, nous avons donc posé trois conditions pour envisager de conclure un accord avec les pays du Mercosur.
Premièrement, l'accord de Paris doit faire l'objet d'une clause essentielle. Si l'un des États du Mercosur se retirait des signataires de l'accord de Paris, l'accord commercial deviendrait immédiatement caduc. Deuxièmement, nous avons imposé les normes sanitaires et environnementales de l'Union européenne : les mesures miroirs tendent à prescrire aux producteurs des pays concernés les règles qui s'appliquent aux producteurs français, notamment dans le secteur agricole.
Nous avons été très clairs sur ce point. Pierre angulaire de notre politique, le règlement contre la déforestation interdit toute importation de produits, y compris alimentaires, issus de la déforestation, que celle-ci touche l'Amazonie, la forêt atlantique ou d'autres forêts de ces pays.
La troisième condition était d'inscrire dans l'accord des mécanismes de sanction précis et opérationnels devant entrer en vigueur en même temps que lui.
Nous avons posé ces trois conditions sur la table et les avons défendues à la fois devant le Conseil des ministres de l'Union européenne, devant la Commission européenne et, surtout, devant les autorités brésiliennes : j'ai tenu exactement le même discours à Brasilia la semaine dernière. Il n'y a aucune ambiguïté et aucun double discours : les conditions de la France sont très claires. De leur seule acceptation lors des négociations entre la Commission européenne et les États du Mercosur dépendra notre décision.
Sur cette proposition de résolution, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de votre assemblée.
Exclamations sur les bancs du groupe RN.
Entre le fond du texte et la position du Gouvernement, la convergence est évidente.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Sur la proposition de résolution, je suis saisie par les groupes La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, Les Républicains, Démocrate (MODEM et indépendants) et Socialistes et apparentés, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Dans les explications de vote, la parole est à M. Pascal Lecamp.
Voici venu le moment de voter le texte ; pour chacun de nous, c'est l'heure de vérité. Préservation de l'environnement et de la forêt amazonienne, protection de nos éleveurs : ces deux préoccupations s'imposent à nous et nous obligent.
Collègues Insoumis qui voulez voter contre cette proposition de résolution :…
…en agissant de la sorte, vous démontreriez une nouvelle fois que vous n'appartenez pas à l'axe républicain
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
M. Arnaud Le Gall fait tourner son index sur sa tempe.
Je ne l'ai pas vu ; je vais me renseigner.
Monsieur Lecamp, vous avez la parole.
M. Erwan Balanant et M. Arnaud Le Gall s'invectivent. – Brouhaha persistant.
M. Lecamp finit son intervention. Ensuite, je suspendrai la séance pour deux minutes.
En refusant le fruit d'un compromis transpartisan, élaboré entre autres avec l'un des plus engagés des vôtres, François Ruffin,…
…et en refusant d'envoyer à nos partenaires de l'Union européenne un signal d'autant plus fort qu'il aurait été unanime, vous tombez encore et toujours dans l'opposition systématique !
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.
Vous affaiblissez un peu plus la voix de la France, mais c'est surtout la vôtre qui devient inaudible.
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce n'est pas en traitant les collègues Insoumis d'antirépublicains que vous allez les convaincre !
Chers collègues Insoumis, nous n'avons pas encore voté : il n'est pas trop tard ! Un vote défavorable serait incohérent et contraire à notre engagement collectif de protéger, avec exigence, la biodiversité en général et la forêt en particulier.
Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est sympa de travailler dans cette ambiance ! Je vous ai écoutés, vous pourriez m'écouter à votre tour !
« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et RE.
Nous avons tous en partage l'objectif de rendre accessible une alimentation de qualité, avec une traçabilité incontestable et incontestée ; voter contre ce texte reviendrait à porter un coup majeur à l'agriculture française.
Nous sommes les garants de ses standards et d'une production de qualité. Je n'ose donc imaginer des votes défavorables, qui enverraient un signal désastreux aux agriculteurs…
…et constitueraient un pied de nez à l'environnement. Le groupe Démocrate votera bien évidemment pour cette résolution.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe RE.
Je ne sais pas par quelle magie cette proposition de résolution, censée dénoncer l'ambiguïté du Gouvernement et du Président de la République, revêtirait elle-même une forme d'ambiguïté.
Pour avoir été, au nom du groupe Socialistes et apparentés, au cœur de la construction de l'arc opposé à l'accord UE-Mercosur, je tiens à rappeler qu'il est fondé sur des valeurs très claires…
…la dignité des travailleurs de la terre de chaque côté de l'Atlantique ;
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes Dem et Écolo – NUPES
la défense, avec la même énergie, de l'Amazonie et des herbages du Massif central ; la défense de notre sécurité alimentaire collective, qui suppose la lutte contre l'accaparement des terres, leur partage et l'installation, partout, de paysans aux revenus dignes.
Jamais l'alimentation et la nourriture ne seront une marchandise comme les autres.
M. Philippe Brun applaudit.
Nous devons coopérer et inventer des coopérations multiples. C'est à cette condition que 10 milliards d'individus pourront vivre dignement en 2050.
Le libre-échange, c'est terminé : nous devons inventer le juste échange, ce que dit très clairement cette résolution. L'accord UE-Mercosur est le complice de tous les libéraux. L'ultralibéralisme nourrit la dérive illibérale, qui aujourd'hui dénonce l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) ou les règlements européens. Nous devons nous méfier de cette grave dérive et réaffirmer nos valeurs : celles de la régulation et du commerce équitable.
C'est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés s'est engagé dans cette proposition de résolution. Je veux en réaffirmer la clarté : nous sommes au cœur d'un rassemblement qui défend une souveraineté solidaire dans la mondialisation.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, Dem et Écolo – NUPES et sur quelques bancs des groupes RE, HOR et LIOT.
Je voudrais dire un mot liminaire à notre collègue Lecamp, qui voit dans le vote de cette proposition de résolution un choix pour ou contre le camp républicain : ce n'est pas digne. Votre comportement sectaire, qui instrumentalise un sujet majeur pour jeter l'opprobre sur nos collègues Insoumis, est tout simplement indigne.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Ce n'est pas le vote d'une résolution qui détermine l'appartenance à l'arc républicain ; c'est encore moins à vous d'en décider.
Si nous avions des doutes quant à la nécessité de voter cette proposition de résolution, le pénible laïus du ministre délégué aurait achevé de nous convaincre. Ceux qui l'ont écouté ne peuvent plus douter : il faut la voter !
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Elle concerne au moins trois enjeux sur lesquels les députés du groupe Écologiste – NUPES se sont approprié les arguments des députés écologistes européens.
Le premier enjeu est environnemental et concerne le climat. L'accord UE-Mercosur est une catastrophe pour le climat, pour la biodiversité et pour notre agriculture. Le deuxième enjeu est social : il touche au secteur de l'agriculture, mais concerne plus largement les droits humains dans toute l'Amérique du Sud. Le troisième et dernier enjeu vous concerne, chers collègues : c'est un enjeu démocratique de contrôle de l'action du Gouvernement. Par cette proposition de résolution, nous affirmons que nous refusons de nous voir déposséder de ce contrôle, c'est-à-dire de la possibilité de nous prononcer sur la ratification de cet accord.
Ce dernier enjeu doit nous rassembler. Si, contrairement à moi, vous avez confiance dans ce gouvernement – qui ne nous l'a d'ailleurs pas demandée –, votez la proposition de résolution, afin d'être en mesure de ratifier l'accord. Si vous n'avez pas confiance en lui, votez-la également, afin d'être en mesure de ne pas le ratifier. C'est parce que nous sommes résolument opposés à l'accord UE-Mercosur que nous voterons la proposition de résolution.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Les députés du groupe Horizon et apparentés voteront cette proposition de résolution, coconstruite par les représentants de neuf groupes parlementaires. Il s'agit d'affirmer, en France et dans le cadre de l'Union européenne, l'importance de la réciprocité. La France reste ouverte aux échanges avec le monde mais, comme cela a été dit par plusieurs orateurs – notamment Dominique Potier –, il n'est possible d'échanger qu'en respectant les femmes et les hommes qui produisent, les conditions de vie des animaux et l'environnement.
Nous recherchons des relations capables de s'inscrire dans la durée : c'est ce que l'on appelle le développement durable. Du point de vue politique, nous devons le réaffirmer depuis le niveau local et territorial jusqu'au niveau national, notamment dans le cadre de la construction européenne. Il est bienvenu qu'un État membre tel que la France soit un fer de lance en matière d'exigences imposées à nos interlocuteurs internationaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. – MM. Philippe Brun et Philippe Vigier applaudissent.
Je commencerai par rappeler deux ou trois principes basiques. Sans dimension transpartisane, il n'y aurait pas eu de proposition de résolution et nous n'aurions donc pas eu une seule minute de débat sur l'accord UE-Mercosur. Peut-être que cela aurait arrangé le très libéral ministre délégué ?
Pas du tout !
Soyons donc satisfaits que cette démarche transpartisane ait contraint le Gouvernement à parler de négociations qu'il aurait préféré mener en catimini dans les couloirs de Bruxelles.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.
Ensuite, je voudrais dire à mon collègue Lecamp, que j'avais trouvé plutôt ouvert, sympathique, au téléphone : ne vous perdez pas dans des postures politiciennes sur des sujets qui méritent mieux !
C'est vrai que c'est un peu l'hôpital qui se fout de la charité !
Ne croyez pas qu'en tirant sur notre camp, vous nous diviserez : lorsque l'on tire sur notre camp, nous sommes unis comme à bord, comme on dit à Dieppe. Ne tombez pas dans les postures politiciennes !
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Au ministre délégué, je voudrais dire qu'il aurait pu nous éviter sa prise de parole, tant il est un mauvais ambassadeur de cette proposition de résolution.
Au nom du groupe des parlementaires communistes, j'ai expliqué à quel point le vote de cette proposition de résolution signifiait pour nous la réaffirmation de notre opposition à ce mauvais accord. Comme l'a très bien dit Dominique Potier, celui-ci porte atteinte à la dignité des paysans, à la biodiversité de la planète, en particulier aux forêts de l'ensemble des pays concernés, et à notre souveraineté alimentaire durable. C'est parce que nous sommes opposés à l'accord UE-Mercosur que les députés du groupe GDR – NUPES voteront, à quelques exceptions près, la proposition de résolution.
Je profite des quelques minutes restantes pour vous poser une question, monsieur le ministre délégué, parce que j'ai l'impression que vous n'avez pas lu la proposition de résolution. Dans son dernier paragraphe, il est écrit : « La présente proposition de résolution vise ainsi à demander au Gouvernement de marquer son refus quant à la signature de l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur tel que conclu en 2019 et à toute tentative de découpage dudit accord par la Commission européenne. » Vous n'avez pas répondu au sujet votre obligation de rendre compte au Parlement de toute velléité de découpage de cet accord, qui le ferait devenir encore plus mortifère à nos yeux.
Il n'y a pas d'accord !
Voilà ce que m'inspire le débat que nous venons d'avoir. Je le répète : il n'y a pas, à gauche, de ventres mous ou de ventres durs, de courageux ou de froussards. Nous sommes tous alignés sur une conviction : le libre-échange fait mal aux vies, à la planète et aux acteurs de la souveraineté alimentaire. Nous pouvons opter pour des tactiques différentes ; l'essentiel, c'est de réaffirmer l'idée d'une coopération entre les peuples plus juste, plus solide et plus solidaire. Tel est le sens que les députés communistes donnent à leur vote.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et Écolo – NUPES.
Certains ici ont une appréciation différente de cette proposition de résolution. Je note que même ceux qui voteront contre sont opposés à l'accord UE-Mercosur ; notre assemblée est tout de même unanime !
Mme Aurélie Trouvé applaudit.
Je ne suis pas de ceux qui pensent que tel ou tel système serait forcément vertueux ou néfaste. Le libre-échange présente des avantages et des inconvénients, mais le socialisme dans un seul pays avait aussi ses désagréments. Le protectionnisme n'est pas non plus l'alpha et l'oméga de la protection.
Il faut voter cette proposition de résolution transpartisane, afin de donner un cap au Gouvernement. Le suivra-t-il ? Il nous appartiendra de le contrôler et de lui faire savoir, le cas échéant, notre désaccord. Je note avec satisfaction une volonté partagée, dans cette assemblée, de défendre notre agriculture face à des pratiques inacceptables. Il fut un temps où nous n'étions pas nécessairement unanimes à ce sujet, mais nous avons compris qu'il nous était impossible de mettre nos agriculteurs en concurrence, alors que les conditions environnementales et sociales faussent celle-ci.
Le groupe LIOT votera la proposition de résolution, en espérant que, par la suite, le Gouvernement s'y tiendra.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.
Il y a vingt ans, l'Union européenne et les pays du Mercosur lançaient des négociations…
Pardon ! Bonjour, madame la présidente et monsieur le ministre délégué.
Il y a vingt ans, l'Union européenne et les pays du Mercosur lançaient des négociations dans le but de conclure un accord de libre-échange européen concernant 40 milliards d'euros de flux financiers et 780 millions de personnes. Si la portée de cet accord était initialement commerciale, deux décennies de négociations complexes l'ont considérablement transformée.
Nous sommes désormais loin de l'accord « viande contre voitures » des années 2000. Depuis 2019 et de manière inchangée, la France subordonne cet accord au respect de l'accord de Paris, à un encadrement de la déforestation et au respect des clauses miroirs en matière de normes sanitaires et environnementales européennes. Si l'élection de Lula, l'an dernier, marque un nouveau tournant…
…les négociations sont toujours en cours. La Commission européenne rencontrera fin juin les représentants du Mercosur, pour trouver un terrain d'entente sur l'addendum environnemental transmis en mars. Les parties ont indiqué vouloir se donner les moyens d'atteindre un accord ambitieux et respectueux de l'environnement.
Qu'est-ce qui est en jeu aujourd'hui ? Pourquoi sommes-nous ici ? La signature de l'accord UE-Mercosur est un enjeu stratégique pour l'Europe, pour les pays du Mercosur, mais aussi pour la France et les Français. Cet accord devrait nous faciliter l'accès à un immense marché, à la fois en pleine croissance et en transition écologique. En ce sens, il est une oppportunité qui permettra aux entreprises françaises de faire valoir leur savoir-faire et se développer à l'international.
Cet accord ne se limite pas à diminuer les droits de douane, qui sont d'ailleurs très élevés. Il protège nos investissements à l'étranger, ainsi que 357 indications géographiques européennes, comme le jambon de Parme ou le comté.
Le plus important, c'est qu'il nous permettra de renforcer les liens avec l'Amérique latine. C'est un enjeu de taille, parce que pour réduire nos dépendances à l'égard de la Chine et pour atténuer les risques pesant sur les chaînes d'approvisionnement en matières premières – comme on l'a vu lors de la guerre en Ukraine –, il est nécessaire que des régions, proches sur le plan des intérêts et des valeurs, nouent un partenariat stratégique.
Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.
L'Union européenne et l'Amérique latine seront mieux placées pour faire face ensemble aux défis du XXI
Alors, nous devons saisir cette occasion de renforcer notre partenariat stratégique avec l'Amérique latine, afin d'avancer ensemble pour la défense d'un système international fondé sur des règles de droit et respectueux de l'environnement. En effet, si la France et l'Union européenne se détournent de l'Amérique latine, ce sont la Chine et la Russie qui seront au rendez-vous.
C'est la Chine qui va aider notre agriculture ? Revoyez votre plaidoirie !
Vous avez évoqué la question environnementale. L'accord entre l'Union européenne et le Mercosur doit être un atout pour exercer une influence vertueuse sur la réglementation mondiale en matière d'environnement. L'Amérique latine est vitale pour l'équilibre écologique de la planète : elle abrite 50 % de la biodiversité, fournit 14 % des denrées alimentaires et constitue une véritable centrale d'énergies renouvelables. Il y a quelques jours, à Brasilia, j'ai échangé avec des ONG qui sont très actives dans le domaine de la défense de l'environnement. Vous serez peut-être surpris, mais elles étaient très favorables à ce qu'on continue, par cet accord, à mettre la pression, afin de signer un texte ambitieux et contraignant sur le volet environnemental. Ne nous détournons pas des régions qui sont largement dérégulées.
Quelle est ma position personnelle ? Ne nous y trompons pas : se trouver des prétextes, s'opposer par principe et voter contre la présente proposition de résolution, c'est faire le jeu du protectionnisme et du repli sur soi.
Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.
Depuis 2019, la France maintient – et a réaffirmé à de nombreuses occasions – sa position exigeante et sans équivoque en matière environnementale.
Quel est donc l'intérêt de voter la proposition de résolution qui répète ce que la France dit déjà ? Dans le contexte actuel, n'envoyons pas de signal négatif à nos partenaires d'Amérique latine. Après des décennies de négociations sinueuses, les conditions sont enfin réunies pour conclure un bon accord.
L'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur doit être un instrument efficace pour faire respecter l'accord de Paris sur le climat, et un accord équilibré garantissant la diffusion et l'application de normes environnementales exigeantes, par-delà nos frontières – les appliquer à l'intérieur de nos seules frontières ne servirait à rien.
Cet accord n'est pas une fin en soi, c'est un chemin commun en vue de créer un cadre institutionnel nécessaire pour favoriser la coopération entre l'Union européenne et l'Amérique latine, dans le respect de l'environnement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
À toutes fins utiles, je vous rappelle qu'il est d'usage de saluer la présidence, le Gouvernement ainsi que vos collègues.
La parole est à M. Grégoire de Fournas.
Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, monsieur le rapporteur, chers collègues, votre choix sectaire de faire signer la proposition de résolution par des représentants de tous les groupes, à l'exception du groupe Rassemblement national, est un hommage du vice à la vertu.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Depuis cinquante ans, nous défendons la souveraineté contre toutes vos attaques et tous vos mensonges. Nous avons été le phare du bon sens dans l'océan de vos errements mondialistes, qui ont mis à genoux l'économie française, particulièrement notre agriculture. Nous ne pouvons que nous réjouir que vous vous rangiez enfin à cette impérieuse et vitale nécessité de la souveraineté économique et, en l'occurrence, alimentaire.
Ce n'est pas nous qu'il faut convaincre que si ce traité de libre-échange avec le Mercosur était signé, nous courrions à la catastrophe, mais vous, les macronistes, à commencer par le Président de la République, qui n'est pas contre le principe de ce traité, et M. Becht, le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger. Pas plus tard que la semaine dernière, il a déclaré que le projet d'accord était très proche de la position du Gouvernement. Au Parlement européen, vos amis du groupe Renew Europe ainsi que le PPE – Parti populaire européen – ne s'y opposent pas non plus.
Nous voterons évidemment la proposition de résolution qui, bien que très insuffisante, va dans le bon sens. Néanmoins, le travail est colossal, alors que vous-mêmes, nouveaux convertis à la souveraineté, n'en êtes qu'à vos balbutiements. Alors que la balance commerciale agricole ne cesse de se dégrader,…
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Pour lutter contre le dumping social et environnemental, il faut instaurer des régulations à toutes les frontières, y compris avec les pays européens, en engageant d'urgence une inflexion du marché commun. Vos coups de communication ne trompent personne. Le doigt sur la couture du pantalon, vous avez pris le parti d'être les meilleurs élèves de l'Union européenne, au détriment des intérêts de la France. Que les agriculteurs gardent espoir, nous arrivons !
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Monsieur le ministre délégué, vous venez de prononcer une ode caricaturale au libre-échange. Nous n'avons aucun doute – du reste, vous l'avez dit dans la presse hier soir –, vous finirez par voter l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et Mercosur ; ce n'est qu'une question de temps.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Il serait bienvenu d'éviter toute caricature : non, nous ne sommes pas contre le commerce international, mais nous sommes pour un commerce international régulé, comme ce fut le cas durant les Trente Glorieuses, qui ne soit pas le vecteur d'un dumping social, environnemental et sanitaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La proposition de résolution était pleine de bonnes intentions : elle prévoit que notre assemblée débatte et se prononce sur l'accord avec le Mercosur. Oui, il le faut. D'ailleurs, être républicain, n'est-ce pas s'engager fermement à ce que l'Assemblée nationale puisse voter cet accord ? Or vous ne l'avez toujours pas fait.
La proposition de résolution prévoit de subordonner tout accord futur entre l'Union européenne et le Mercosur au respect de l'accord de Paris et des normes sanitaires et environnementales de l'Union européenne, ce qui revient à accepter le principe d'un accord de libre-échange. Or un accord de libre-échange vertueux, cela n'existe pas.
Mêmes mouvements.
Au passage, la proposition de résolution oublie un petit détail : les droits de douane. Je vous rappelle que cet accord prévoit d'exonérer de droits de douane d'énormes quantités de viande, de volaille et de bœuf.
Or les éleveurs français ne feront jamais le poids face à la libre concurrence brésilienne ou argentine.
Mêmes mouvements.
Peu importe que les règles sanitaires soient ou non respectées, ils ne feront jamais le poids face aux feed-lots et à ces élevages de plusieurs milliers de bêtes, nourries au soja et au maïs OGM.
Mêmes mouvements.
L'agriculture doit être protégée de toute libéralisation des échanges, quelles qu'en soient les modalités ,
Mêmes mouvements
car un accord de libre-échange vertueux, cela n'existe pas.
Puis, je nous souhaite bonne chance pour vérifier que ces normes sanitaires – les fameuses clauses miroirs – auront bien été respectées au Brésil ou en Argentine, et que, par exemple, à aucun moment au cours de sa vie, une vache n'aura été traitée avec des hormones de croissance.
Mêmes mouvements.
C'est impossible sur le plan tant pratique que juridique. Un accord de libre-échange ne peut prévoir de discrimination entre des produits en fonction de la méthode de production – ma collègue Marie Pochon l'a rappelé. Vous ne pouvez que le constater : un accord de libre-échange,…
Mêmes mouvements.
Par ailleurs, vous posez comme condition à la signature de cet accord le respect de l'accord de Paris par les pays du Mercosur. Très bien. Pourquoi ne pas inclure les pays européens ?
Mes collègues Antoine Vermorel-Marques, du groupe Les Républicains, et Laurence Heydel Grillere, du groupe Renaissance, viennent de rendre un rapport édifiant, selon lequel il faudrait doubler le rythme de réduction de nos émissions pour respecter les engagements que nous avons pris en ratifiant l'accord de Paris. En réalité, aucun pays européen n'a pris de mesures relatives au climat en vue d'atteindre ces objectifs.
Mêmes mouvements.
À La France insoumise, nous sommes altermondialistes et considérons que l'accord de libre-échange avec le Mercosur sera tout aussi mauvais pour les éleveurs, pour les paysans européens que pour ceux des pays du Mercosur.
Mêmes mouvements.
Or la proposition de résolution n'aborde pas ce point.
Il n'est donc pas surprenant que toute la minorité présidentielle soit heureuse de défendre la présente proposition de résolution, qui traduit la position du président Macron depuis deux ans. Rien de neuf sous le soleil : il s'agit de greenwashing qui vise à nous faire avaler l'accord in fine. Nous ne l'acceptons pas.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre la proposition de résolution.
M. Erwan Balanant hue l'oratrice.
Comme le disent cinquante associations et syndicats, dont des organisations paysannes, cette proposition, qui comporte trois conditions conformes à la position de Macron, est insuffisante.
Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent. – Les députés des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES applaudissent également.
Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues. Tout d'abord, je remercie les différents groupes qui ont participé à la rédaction de cette proposition de résolution transpartisane, largement inspirée des positions de la Fédération nationale bovine, ce dont nous nous réjouissons.
N'importons pas l'agriculture et l'alimentation dont nous ne voulons pas. Faisons de cet accord, un accord de juste échange.
Le respect de nos normes sanitaires, sociales et environnementales doit constituer un préalable non négociable, afin de protéger notre agriculture et notre alimentation.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Finalement, paysans et consommateurs, même combat. Nous voterons la proposition de résolution car nous sommes contre le Mercosur.
Enfin, je répète la question de notre collègue Julien Dive, restée sans réponse : où en est la ratification du Ceta au Sénat ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Philippe Vigier applaudit également.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 339
Majorité absolue 170
Pour l'adoption 281
Contre 58
La proposition de résolution est adoptée.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à dix-neuf heures cinq.
Suite de la discussion d'une proposition de loi
Hier soir, l'Assemblée a commencé la discussion des articles de la proposition de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 353 à l'article 1er .
Il s'agit d'un amendement rédactionnel. Puisqu'il est prévu, à l'article 1er , de renommer « territoires de santé » les territoires de démocratie sanitaire, il convient d'appliquer ce changement de dénomination au dernier alinéa de l'article L. 1434-9 du code de la santé publique.
La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires sociales, pour soutenir l'amendement n° 545 .
La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention, pour donner l'avis du Gouvernement.
Avis favorable.
Qui peut le plus, peut le moins. Nous proposons que les territoires de santé soient délimités au niveau, non plus infrarégional, mais infradépartemental, et ce pour une raison très simple.
Les territoires de santé serviront de base géographique pour l'établissement du diagnostic territorial partagé. Or les problématiques d'accès aux soins varient non seulement à l'intérieur d'une même région – dans le Centre-Val de Loire, par exemple, la densité médicale n'est pas la même à Tours qu'à Bourges –, mais aussi au sein d'un même département, où peuvent exister de très grandes disparités : la densité médicale n'est pas la même à Bourges et dans le Pays Fort, à Aubigny-sur-Nère ou à Vailly-sur-Sauldre. La granularité doit donc être un peu plus fine que celle qui est prévue dans le code de la santé publique. Encore une fois, qui peut le plus, peut le moins.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l'amendement n° 206 .
Nous proposons, quant à nous, que les territoires de santé soient redéfinis à l'échelle départementale. Le département est en effet un acteur majeur du secteur de la santé, en raison de ses compétences en matière de solidarité humaine et territoriale. Que ce soit dans le domaine de la petite enfance, de la prise en charge des femmes enceintes, de l'éducation sexuelle, de l'aide sociale à l'enfance, du handicap ou des personnes âgées, le département se mobilise déjà en faveur de l'accès à la santé de tous. Il est donc l'échelon pertinent pour la définition du territoire de santé.
On le sait, la Cour des comptes l'a relevé, les apports des territoires de santé ont été irréguliers, voire hétérogènes : ceux-ci ne vivent pas de la même manière. Leur découpage est donc un véritable enjeu.
Or, il est prévu que, parmi les membres des conseils territoriaux de santé, figurent non seulement les parlementaires – lesquels sont associés à un département : c'est vrai pour les députés et ça l'est davantage encore pour les sénateurs –, mais aussi des représentants des services départementaux – c'est bien l'échelon départemental qui est également retenu, ici – de protection maternelle et infantile.
Par ailleurs, les régions – en particulier la nôtre, monsieur le ministre – ont une taille XXL. Pour ce qui est de la région Grand Est, par exemple, le niveau infrarégional peut correspondre à la Lorraine – à laquelle vous et moi sommes attachés – ou à l'échelon départemental. Il serait bon de clarifier ce point : si le territoire de santé est défini au niveau infrarégional, l'est-il à l'échelon supradépartemental ou infradépartemental ? En tout cas, plus le périmètre est étendu, plus il est difficile de réunir l'ensemble des acteurs dans le cadre de la concertation et d'assurer ensemble la permanence des soins.
C'est pourquoi nous proposons que les territoires de santé soient définis à l'échelon départemental.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement n° 443 .
M. Bazin a très bien exposé la situation. J'ajouterai que la crise liée au covid-19 a bien montré combien l'échelon départemental a du sens : proche des territoires, il est garant de l'équité territoriale.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 728 .
Nous sommes au cœur du débat : quel est l'échelon pertinent pour définir l'organisation territoriale de la santé ? Un échelon infrarégional ne signifierait rien : il ne serait ni opérationnel ni efficace. Du reste, la création des grandes régions est une immense erreur.
Prenons l'exemple de la Bourgogne-Franche-Comté : lorsque vous êtes dans le Jura, vous êtes tout au bout, à la frontière de la région, de sorte que vous n'existez pas : vous êtes les grands oubliés de toutes les politiques régionales – une collègue de la majorité peut en attester. L'échelle régionale n'est pas pertinente.
Nous souhaitons donc que les territoires de santé soient redéfinis à l'échelle départementale. Pourquoi ? Parce que les départements ont déjà réalisé des investissements importants et pris de nombreuses initiatives pour améliorer l'accès aux soins et contribuer à pallier l'absence de professionnels de santé. Je pense à l'attribution de bourses aux étudiants, aux aides à l'installation, au financement des maisons de santé ou, comme l'a rappelé Thibault Bazin, à la protection maternelle et infantile.
L'échelon départemental demeure le plus adapté : il permet d'être proche des territoires – la proximité s'impose dans le cadre de l'aide sociale – et d'avoir une vision efficace et équilibrée de l'ensemble des cantons. Sincèrement, s'il est une mesure à prendre aujourd'hui, c'est bien celle qui consiste à faire des départements la référence en matière de territoires de santé.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement n° 748 .
S'agissant des territoires de santé – nul ne doute de l'intérêt de les définir et de les prendre en compte –, il importe de coller à la réalité. Les situations étant diverses – vous l'avez rappelé à plusieurs reprises, monsieur le ministre –, il convient de différencier les politiques à conduire, et donc de retenir le périmètre le plus pertinent pour coller aux besoins, répondre aux préoccupations et prendre en compte la diversité des situations.
Le périmètre régional est, il est vrai, très vaste et comprend des situations très hétérogènes. Or, je l'ai dit, il importe d'être au plus près de la réalité, du terrain. À cet égard, le département nous paraît tout à fait pertinent. Les politiques départementales sont, du reste, très diverses. Ainsi, dans l'Orne, nous avons soutenu la construction de maisons de santé tandis que d'autres départements sont intervenus dans d'autres domaines, selon un agenda propre. Pour coller au terrain, à la réalité, le département est l'échelon pertinent.
Je veux tout d'abord vous faire part de mon plaisir de débattre aujourd'hui de l'accès aux soins et de la recherche d'un maillage qui soit le meilleur possible en la matière sur nos territoires. Je salue également la création de la notion de territorialisation de la santé.
Cela étant dit, je souhaite, comme mes collègues, rappeler le rôle central que joue le département. L'action en direction de la jeunesse ou des personnes âgées mais aussi la prévention sont ainsi des compétences qui relèvent de cet échelon. Je siège au conseil départemental de l'Ain qui s'est engagé contre les déserts médicaux en salariant des médecins ou en subventionnant des maisons de santé. Les départements disposent de connaissances solides sur ces questions.
Je rappelle également que les départements apparaissent comme un maillage de proximité, comme on a pu l'observer pendant la crise covid. Ils font preuve d'une réactivité dont ne témoignent pas d'autres échelons territoriaux. Je suis élu d'une circonscription située en Auvergne-Rhône-Alpes. Pour aller d'un bout à l'autre de la région, il faut rouler plus de cinq heures, ce qui pose un problème du point de vue de la logistique et de la connaissance des situations.
Je soutiens donc avec force que l'échelon pertinent est le département, eu égard à ses compétences en matière d'action sociale, à notre expérience au moment de la crise de la covid-19 et a tout ce qui y a été entrepris dans le domaine des soins, par exemple dans l'Ain.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et RE.
Pour éclairer la représentation nationale, je précise bien que cet amendement n'est pas identique aux précédents. Ne parlons pas de repli. Il pourrait s'agir de l'amendement idéal.
Il est nécessaire de coller aux réalités territoriales en matière tant d'action que de concertation.
Bien sûr, dans des régions de taille XXL – dimension qu'on peut juger regrettable –, il est important de pouvoir raisonner à échelle infrarégionale. Cependant, par défaut, lorsque les périmètres ne sont pas forcément pertinents, l'échelle doit être départementale. Je propose donc, par cet amendement, d'ajouter « ou départementale » car cela répondrait à une véritable nécessité.
Il est nécessaire que différents représentants participent, comme c'est prévu, aux conseils territoriaux de santé – une question qui vous tient à cœur, monsieur le ministre. Or on bute sur un problème d'organisation et de démocratie sanitaire car les représentants des professionnels de santé ou des ordres ne sont pas forcément choisis dans le périmètre des territoires de santé. Certains d'entre eux, qui ne font pas partie du périmètre, participent pourtant aux conseils territoriaux. Nous devons nous demander si c'est souhaitable.
La question des interlocuteurs se pose également. Il est prévu que les organismes de sécurité sociale et l'État soient représentés au sein de ces conseils. Or l'organisation de l'État ne comprend pas d'échelle infrarégionale : l'échelle est soit régionale soit départementale.
Vous me citerez peut-être l'exemple des arrondissements mais je vous répondrai que le périmètre des territoires de santé n'est pas défini en fonction des arrondissements. J'irai plus loin : dans la région que j'ai déjà citée et que vous connaissez bien, les territoires de santé ne correspondent parfois même pas aux périmètres des contrats locaux de santé.
Au bout du compte, tout le monde vient discuter mais on a parfois le sentiment que l'on s'est réuni pour rien.
Il faut donc être efficace et apporter de la lisibilité – ce que permet l'échelon départemental – et de la simplicité.
Il se fonde sur l'article 48.
Franchement, les conditions de l'organisation des débats sur cette proposition de loi sont inacceptables. Ils seront en effet entrecoupés de discussions sur six autres textes.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LR, Dem, HOR, SOC et Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe RE.
C'est insupportable car cela ne permet pas d'avoir une vraie discussion. C'est un manque de respect à l'égard d'un sujet qui – j'en suis à peu près convaincu – nous intéresse tous. Je ne comprends pas cette organisation.
Jusqu'à vendredi, des textes viendront donc se glisser çà et là. Dès lors, comment assurer un suivi sérieux ? Une telle organisation des débats me semble – j'essaie de peser mes mots – assez minable. Je proteste énergiquement contre elle.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LR, Dem, HOR, SOC et Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe Re.
Je prends acte de vos remarques et j'en ferai part à Mme la présidente.
Il ne faut pas magnifier l'échelon départemental. Je tiens d'abord à vous rassurer : nous avons employé le mot « infrarégionale » et non « régionale », ce qui laisse aux acteurs de terrain la liberté de définir les périmètres en choisissant l'échelon qu'ils jugent le plus pertinent en matière de politique de santé, en fonction du bassin de vie ou de la cohérence globale. Dans certaines régions, il s'agira peut-être du département,…
Dans d'autres régions, il est peut-être pertinent. En tout cas je ne voudrais pas que le législateur, par gourmandise rédactionnelle, fixe, en vase clos, des périmètres alors que nous essayons justement de rédiger un texte qui part du terrain et qui vise à laisser aux acteurs sur place la liberté de définir ces périmètres à une échelle qui leur semble pertinente. Je ne pense pas que nous puissions, ici, à Paris, dans l'hémicycle, juger de la pertinence des périmètres.
La rédaction telle qu'elle est proposée, avec le mot « infrarégionale », offre cet espace de liberté. Certains voudront conserver l'échelon départemental – grand bien leur fasse. D'autres voudront – pour tenir compte des métropoles, des aires urbaines ou d'autres formes de cohérence géographique – définir d'autres périmètres. L'article leur permettra de le faire. Avis défavorable sur ces amendements.
Oui, laissons de la souplesse aux territoires et ne concevons pas une loi rigide.
Vous m'avez interpellé en citant plusieurs exemples. Je me permettrai de répondre en procédant de la même manière.
Monsieur Bazin, vous avez évoqué une région chère à notre cœur. Comment gérez-vous le cas de Briey, commune située au nord de la Meurthe-et-Moselle mais qui est rattachée au secteur de Metz – soit un autre département ? Pensez-vous, d'autre part, que les enjeux soient les mêmes dans le Sillon mosellan et dans l'Est mosellan, territoire transfrontalier où se pose la question du travail avec l'Allemagne ? Non, ils sont différents. Laissons donc de la souplesse.
Madame Dalloz, vous avez cité le cas de la Franche-Comté, région que je connais bien également. Elle correspond à un secteur sanitaire qui comprend deux départements puisque le Territoire de Belfort dispose de l'hôpital Nord Franche-Comté tandis que la ville de Montbéliard est située dans le Doubs.
On pourrait multiplier les exemples à l'envi. Laissons de la souplesse, laissons les territoires s'organiser. Bien sûr, il est possible que certains départements soient à cheval sur plusieurs secteurs. Nous multiplierons alors la représentation des ARS, les agences régionales de santé, dans chaque région car la réponse sanitaire doit s'élaborer à partir des territoires et non en suivant des règles trop rigides. Avis défavorable.
J'aime bien M. Bazin mais je propose de voter contre son amendement – voici pourquoi.
Je préside un conseil territorial de santé. Or, en Seine-Maritime, conscients que la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite HPST, avait constitué un déménagement du territoire sanitaire, nous nous sommes battus pour obtenir trois conseils territoriaux de santé, un autour du Havre, un à Rouen – parce qu'ils préfèrent rester entre eux – et un à Dieppe, dans le nord du département.
Il me semble souhaitable de préserver des instances de démocratie sanitaire au plus près des territoires, d'autant plus que – cela ne vous aura pas échappé – l'article 6 de cette proposition de loi bancale vise à doter de la personnalité morale les GHT, les groupements hospitaliers de territoires. Or l'effet pervers d'une telle mesure est que les hôpitaux rattachés au GHT de référence ne pourront plus disposer d'un conseil de surveillance et donc agir avec le plus grand souci de proximité possible. Avec cette loi, vous accentuez les effets pervers de la loi HPST – comme l'illustre avec éclat la disparition de ces conseils de surveillance.
C'est la raison pour laquelle je considère que le choix de l'échelon départemental – qui part d'une bonne intention – aurait pour effet pervers de réduire le pouvoir de décision des territoires concernés.
Moi qui ai présidé pendant dix ans le conseil territorial de santé de Saône-et-Loire, j'ai rêvé de ce que vous proposez, monsieur le rapporteur : réunir autour de la table davantage d'acteurs – notamment financiers, cela me semble un élément clé – et agir pour que les périmètres soient réellement adaptés aux logiques et aux flux que l'on observe sur le terrain en matière de santé.
J'ai été maire d'une ville qui, en raison de la présence du Morvan, était, en matière de santé, à la fois la cinquième ville la plus importante de Saône-et-Loire, la deuxième de la Nièvre et la troisième de Côte-d'or. Je n'ai jamais réussi à faire entendre qu'en raison de sa situation géographique particulière, loin des centres, la ville avait besoin d'une organisation spécifique en matière de santé. On m'a toujours répondu que la ville était uniquement rattachée au département de Saône-et-Loire, tout simplement parce que l'ARS avait redécoupé les territoires de santé selon sa propre logique, en coupant parfois les départements en deux – souvent d'ailleurs pour des raisons un peu politiques mais je referme la parenthèse.
Si je vous donne cet exemple, c'est parce que vous devez aussi parvenir à faire évoluer la culture de certaines ARS. La démocratie de santé ne relève pas seulement de la sphère administrative : elle doit se vivre. Pour l'organiser, il faut écouter les acteurs et mobiliser les ARS, lesquelles doivent se considérer un peu moins comme des superpréfets de santé – comme les uns et les autres ont pu le constater – et un peu plus comme les acteurs, parmi d'autres, d'un projet collectif qu'il faut faire avancer pour le bien de la population.
Monsieur le rapporteur, vous avez dit que l'échelon départemental n'était pas pertinent s'agissant du découpage administratif de la région parisienne, ce qui n'avait échappé à personne. Cependant, jusqu'à preuve du contraire, l'ensemble des autres territoires français sont organisés autour des départements.
Ne faites pas d'une exception très caractéristique une généralité.
Monsieur le ministre, laissons un espace de liberté, comme vous dites. Il est vraiment urgent de laisser un peu de liberté à nos territoires. Car, aujourd'hui, le pilotage régional et infrarégional par les ARS ne présente pas l'efficacité que l'on attendait, je suis désolée.
Sur le papier, c'est merveilleux, tout le monde est à son poste, on remplit des cases, tout va bien. Dans la réalité, c'est différent. Par exemple en région Bourgogne-Franche-Comté, selon que l'on vit à Sens, à Dijon, à Besançon ou encore dans les cantons de Nozeroy ou de Moirans-en-Montagne qui se trouvent dans le Jura, on n'a pas du tout les mêmes préoccupations et on n'a pas les mêmes besoins. Si certains sont d'ailleurs beaucoup moins exigeants, vous devriez au moins convenir que le département est un échelon pertinent pour discuter.
Vous n'avez pas compris ce que nous proposions avec ces amendements de bon sens. Il serait logique que l'organisation du système de santé se fasse au plus près du terrain, en répondant à la demande des Français. Nos concitoyens ruraux n'en peuvent plus de n'avoir accès à rien, notamment à des soins lorsqu'ils rencontrent des difficultés. Je pourrais vous parler du centre hospitalier de Champagnole dont le service des urgences a fermé. Face à une réalité difficile dans les territoires, on a le sentiment que votre perception des problèmes se limite à l'échelle régionale ou infrarégionale.
Si, en Île-de-France, les départements – par exemple l'Essonne – ne représentent rien de particulier, dans ma circonscription la situation est tout autre. Le département constitue un repère. L'avantage de cet échelon est que sa délimitation est claire. On a vu son efficacité lors de la crise covid…
…et à travers les différentes actions menées en matière d'accès aux soins. Au niveau de la région, les demandes de la population varient d'un endroit à l'autre. Ma circonscription compte ainsi, à elle seule, une zone rurale, une zone urbaine et une zone minière, chacune avec des besoins distincts. Il me paraît donc difficile d'obtenir un territoire de santé cohérent si le périmètre est étendu à la région.
Nous disposons déjà en France d'un échelon, le département, qui se caractérise par son expérience en matière médico-sociale, qui est identifié par nos concitoyens et qui se révèle pertinent en tant que maillage de proximité et par la vision d'ensemble qu'il offre.
Face au millefeuille administratif auquel personne, parmi nos concitoyens, ne comprend rien, je ne m'explique pas qu'on invente encore un dispositif complexe qui sera appliqué différemment dans l'ensemble du pays et qui accentuera la mise à l'écart de certains territoires alors que la proposition de loi vise à donner un meilleur accès aux soins.
Il faut adopter ces amendements eu égard à l'expérience et aux compétences naturelles des départements.
Je tiens à revenir sur certains propos contradictoires. Personne ne veut étendre les territoires de santé à l'échelon régional. Une telle affirmation est le fruit d'une confusion ou d'une méprise. M. Frappé vient d'expliquer pourquoi il ne pouvait en être question.
Prévoir une dimension infrarégionale permettra de laisser la main aux acteurs de santé pour délimiter les périmètres qui leur semblent les plus appropriés. Et je rappelle que les compétences des départements citées à l'instant, aussi nobles et utiles soient-elles, relèvent des politiques sociales alors que l'on traite ici du sanitaire, plus précisément de l'accès aux soins et de la prise en charge de nos concitoyens ainsi que du médical. C'est tout de même éloigné de leurs compétences. Je souligne qu'on essaie de faire émerger à travers ce texte la cohérence des territoires sanitaires. Ceux-ci existeront à l'échelle infrarégionale : départementale s'il plaît aux acteurs dudit département d'en décider ainsi, et infradépartementale quand ce sera localement pertinent. Chaque conseil territorial de santé sera libre d'en décider. Cela fera du bien aux acteurs de terrain d'apprendre que les députés ont jugé positif de leur donner une vraie liberté dans la définition de leur espace d'activité. Je réitère donc mon avis défavorable à l'ensemble de ces amendements.
Je rappelle que j'ai permis à un orateur par groupe de s'exprimer parce que le sujet est d'importance. Dès lors, il convient que l'on s'entende au sein de chaque groupe pour choisir l'orateur.
On n'a pas le droit de s'exprimer en ce cas. Le règlement n'est pas à géométrie variable !
Laissez-moi expliquer pourquoi. Je ne le retire pas si je n'ai pas le droit de m'expliquer !
L'amendement n° 237 n'est pas adopté.
L'amendement n° 427 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à apporter de la souplesse, étant donné que les territoires de santé sont conçus selon une géographie précise, qui prend en compte les espaces d'organisation des soins, et que les cloisonnements sont encore à ce stade trop importants. Il faudrait laisser aux territoires de santé la liberté de s'organiser pour construire des solutions collectives en tenant compte, par exemple, des déplacements de la population, y compris des flux hospitaliers, vers des structures de soins et d'autres types de services qui n'existent pas sur place. Il faut rappeler en outre qu'il y a de grandes différences démographiques entre ces différents territoires et que dans ceux de petite taille, le recours à des plateaux spécialisés est compliqué, de même que le recours à la psychiatrie. Il serait intéressant de permettre de construire des territoires de santé à l'échelle des bassins de vie.
Il y a une passion française pour les structures en millefeuille : on adore créer des machins compliqués. À cet égard, l'article 1er suscite de notre part les plus grandes réserves. Mais pour limiter les dégâts, nous souhaitons apporter de la souplesse au dispositif en autorisant le directeur général de l'ARS à conclure des contrats incluant plusieurs territoires de santé et plusieurs territoires métropolitains de santé.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement n° 422 .
Il est clair que construire une réponse cohérente aux besoins de santé de la population, surtout à l'heure de la transition écologique et sociale, nécessite souvent de s'émanciper des frontières administratives pour élaborer des stratégies et des réciprocités à de nouvelles échelles. C'est l'objectif visé par cet amendement : il s'agit de permettre de construire des solutions collectives à l'échelle des bassins de vie.
Monsieur le ministre, je vous rejoins sur la Meurthe-et-Moselle puisque c'est exactement le cas où l'échelle pertinente en matière d'accès aux soins ne correspond pas au périmètre administratif du fait des différences entre le nord et le sud du département – c'est d'ailleurs pourquoi j'avais défendu un amendement n° 427 , que vous n'avez pas évoqué dans votre avis, sans doute par souci de synthèse, mais je suis sûr que même M. Jumel l'aurait apprécié s'il y avait prêté suffisamment d'attention…
Le département de Meurthe-et-Moselle compte six territoires de santé. Ceux-ci recoupent parfois des GHT différents et il y a même plusieurs territoires de santé au sein du même GHT. Et cela constitue de vrais freins en matière de coopération dans le parcours du patient, vous le savez bien, et limite la démarche de responsabilité populationnelle, même dans les expérimentations en cours, parce qu'il arrive qu'un contrat local de santé ou une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) ne corresponde pas exactement au véritable bassin de santé.
Il me semble donc vraiment pertinent d'introduire de la souplesse pour permettre la conclusion de contrats interterritoriaux, portant sur des aspects particuliers, entre territoires de santé et territoires métropolitains de santé. C'est un véritable enjeu. À défaut, on risque d'aggraver des fractures territoriales de santé, sachant que les échelles de concertation sont parfois plus proches des centres de décision, notamment départementaux et hospitalo-universitaires, et dans d'autres cas plus éloignées. La logique contractuelle permettrait de régler la question en introduisant plus d'efficience dans notre système de santé.
À l'instar de mes collègues, je pense qu'il faut maintenant que tous les territoires concernés puissent communiquer entre eux au travers des bassins de vie,…
…quitte à remettre en question les GHT actuels, l'objectif étant clairement de coller auxdits bassins et de répondre ainsi au mieux aux besoins et aux attentes de nos concitoyens en matière de santé.
L'amendement n° 851 de M. Hadrien Ghomi est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Il ne faut pas rigidifier à l'extrême le fonctionnement des territoires de santé. Rien n'interdira demain que deux, trois ou quatre de ces territoires conventionnent ensemble comme rien ne l'interdit aujourd'hui aux communes. Et puis l'article 1er prévoit déjà que les contours des territoires de santé pourront être revus à tout moment par les acteurs desdits territoires. Ces amendements sont donc totalement satisfaits et je suis défavorable à leur adoption.
Les directeurs généraux d'ARS peuvent déjà, en raison de la nature de leur fonction, établir des coopérations interrégionales pour des prises en charge de patients particuliers. Ces amendements sont satisfaits. Je le répète : il n'y a pas lieu de complexifier ce texte de loi, je vous rejoins tous dans votre souci de simplification. À défaut d'un retrait, l'avis serait défavorable.
J'entends tous les arguments avancés sur l'échelle à prendre en compte, départementale, infrarégionale ou encore résultant d'accords interrégionaux, mais, de grâce, il ne faut pas complexifier les choses ! Ayons toujours en tête que l'important, c'est que les territoires de santé puissent s'organiser…
…et que les acteurs aient la capacité de s'adapter aux spécificités locales. Je citerai l'exemple de ma région, le Centre-Val de Loire : depuis Nogent-le-Rotrou, vous faites un kilomètre et vous vous retrouvez dans l'Orne, changeant ainsi de région, et ma CPTS comporte quatre communes du département d'à côté, le Loir-et-Cher. On attend de vous, monsieur le ministre, que vous donniez des consignes de souplesse…
…aux ARS pour qu'ils finissent par comprendre que ce sont les acteurs eux-mêmes qui définissent les territoires de santé. Le département peut être la bonne maille, mais ce ne sera pas toujours le cas et, à l'intérieur du même département, comme l'a très bien dit François Cormier-Bouligeon tout à l'heure, il peut y avoir des situations extrêmement hétérogènes. Laissons les acteurs s'organiser, des territoires de santé naîtront en conséquence, d'autant plus qu'ils ont six mois pour y parvenir après la promulgation de la loi.
C'est très bien. Si la souplesse prédomine, je pense qu'on trouvera le bon chemin.
On reconnaît parfois les amendements des libéraux à leur caractère inopérant… Tant que les gens n'auront pas de médecin, ils ne pourront pas se soigner. Nous devons donc pouvoir implanter des médecins là où il en faut et ceux-ci doivent participer à la permanence de soins quand elle n'est pas complètement assurée. Il faut enfin prévoir les moyens nécessaires pour y parvenir. Ce ne sont donc évidemment pas des amendements proposant des coopérations interrégionales qui résoudront le problème.
Cela dit, l'argumentation des auteurs de ces amendements correspond tout de même à une partie de la réalité. Je vais prendre l'exemple de ma circonscription qui borde l'Oise et la Somme : je vous assure, monsieur le ministre, que le directeur général de l'ARS de Normandie parle peu souvent avec son homologue de l'ARS de la Picardie ou des Hauts-de-France. Il en est de même des préfets d'ailleurs.
M. le ministre proteste.
Et cela relève de votre responsabilité ; nul besoin de modifier la loi sur ce point. Vous avez cité le cas du transfert d'un patient d'un hôpital à un autre, mais le contact se fait alors non entre les directeurs généraux des ARS, mais au niveau des présidents de CME – les commissions médicales d'établissement – ou des directeurs d'hôpitaux, et c'est heureux car, à l'échelle des agences régionales de santé, le problème ne serait pas réglé de sitôt ! En tout cas, les auteurs des amendements ont raison de vous interpeller : il faut prendre en compte le fait que les frontières sanitaires interrégionales ou interdépartementales peuvent être nombreuses, sachant que les habitants vont là où il y a des toubibs. Chez moi, si on est au Tréport, on va à Amiens ou à Dieppe pour trouver un médecin.
L'amendement n° 851 n'est pas adopté.
L'amendement n° 492 vise à imposer une fréquence annuelle dans l'analyse des délimitations du territoire. Il semble en effet nécessaire de réaliser ces analyses chaque année : on permettra aux CTS d'anticiper l'offre de soins et de répondre aux demandes en la matière afin d'apporter des réponses à la fois rapides et efficaces en analysant régulièrement les divers besoins des territoires. L'amendement n° 493 est de repli. Il vise à imposer un rythme biennal.
Même raisonnement que précédemment : ne rigidifions pas trop le fonctionnement des CTS, faisons confiance aux acteurs de terrain pour adopter le rythme qu'ils souhaitent. Je suis défavorable à toute approche visant à corseter le dispositif. Il faut donner plus de liberté pour que les acteurs de terrain soient plus responsables. Avis défavorable.
Même avis. On a certes besoin de souplesse, mais aussi de stabilité pour pouvoir assurer une organisation pérenne dans les territoires.
Il vise à mettre le conseil départemental de l'Ordre des médecins au cœur de l'organisation de la délimitation des territoires de santé. Le fait que le directeur général de l'agence régionale de santé soit ainsi accompagné permettrait d'améliorer la délimitation des territoires de santé auprès des acteurs du territoire, au bénéfice de l'organisation et des stratégies qui visent à assurer l'égal accès aux soins. La présence du conseil départemental de l'Ordre offrirait une analyse pratique et des connaissances sur la délimitation du territoire vis-à-vis des professionnels déjà en activité. Elle assurerait en outre un accompagnement axé sur les remontées du terrain.
Il me semble que cette demande est satisfaite par l'énumération des acteurs qui sont parties prenantes au CTS. Je sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
C'est l'ensemble des professionnels de santé qui intervient dans la définition de ces territoires. Le Conseil national de l'Ordre des médecins a d'ailleurs donné l'exemple de cette stratégie. Je tiens ici à saluer le travail du Comité de liaison des institutions ordinales (Clio) : n'oublions pas qu'au-delà de l'Ordre des médecins, il existe l'ordre des infirmiers, des sages-femmes ou des kinésithérapeutes. Ce travail montre que les professionnels de santé d'un territoire participent à la discussion avec les citoyens et les élus. Avis défavorable.
L'amendement n° 507 n'est pas adopté.
La délimitation des territoires de santé doit être faite en concertation avec les associations d'élus et les organisations syndicales, même si certains d'entre eux peuvent déjà siéger au sein des CTS. Nous sommes inquiets de l'empilement des structures, qu'il s'agisse du CTS, de la CPTS, du CTEL – le comité territorial des élus locaux – ou du GHT. Nous multiplions les structures sans forcément gagner en efficacité. Pour ma part, j'aimerais bien que nous parvenions assez vite au cœur du problème : comment faire pour avoir des médecins sur le territoire ?
D'une part, les CTS n'ont pas vocation à être un lieu d'échanges entre les organisations syndicales et les employeurs : ils ont une raison d'être bien plus large que cela. D'autre part, les organisations syndicales sont déjà parties prenantes dans le cadre de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie (CRSA) et disposent donc déjà d'un lieu pour échanger. Avis défavorable.
L'amendement n° 607 n'est pas adopté.
Il traite des unions régionales des professionnels de santé (URPS) qui, de fait, sont un interlocuteur privilégié des agences régionales de santé ; elles participent à la mise en œuvre du projet régional de santé. Eu égard aux missions que remplissent les URPS, il paraît naturel de les associer à la délimitation des territoires de santé. Cet amendement a été travaillé avec le syndicat des médecins libéraux (SML).
Permettez-moi d'apporter quelques explications.
Bien entendu, les URPS sont des éléments essentiels de l'ensemble du dispositif. Elles sont d'ailleurs parties prenantes aux CTS en tant que représentantes des professions de santé. Il n'est donc pas nécessaire d'en rajouter et, surtout, de leur donner un rôle supérieur par rapport aux autres représentants des professions de santé. Avis défavorable.
L'amendement n° 118 n'est pas adopté.
Il vise à modifier la manière dont s'opère le découpage des territoires de santé. Il existe divers objectifs, tels que l'efficacité, qui a déjà été mentionnée, ou l'habitude de travail préexistante. Nous comprenons ces objectifs, mais ils laissent de côté un enjeu fondamental : la solidarité entre les territoires. Nous ne pouvons pas progresser sur la question des territoires de santé si nous ne faisons pas de leur structuration et de leurs frontières la résultante d'une mission explicite de maintien de la cohésion territoriale. Le but de l'amendement est d'éviter qu'en se constituant, les territoires de santé ne se structurent autour de zones qui seraient d'ores et déjà caractérisées par des inégalités assez fortes. Il nous semble utile de le rappeler dans le texte.
Nous quittons à la fois le sujet des délimitations géographiques et celui de la composition des territoires de santé pour en venir au cœur de leurs missions. Cet amendement vise en effet à enrichir la rédaction initiale en affirmant le besoin d'équilibre et de solidarité entre les territoires ; c'est essentiel pour tout un tas de fonctions. Avis favorable.
J'y suis également favorable.
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, pourriez-vous préciser votre avis sur l'amendement n° 606 ?
L'amendement n° 606 est retiré.
L'amendement n° 828 est adopté.
L'amendement n° 778 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement de repli vise à imposer une fréquence dans l'analyse des délimitations des territoires de santé selon des conditions déterminées par décret. Je ne reviendrai pas sur les délimitations qui permettent d'obtenir une vision générale dans l'offre de soins ni sur l'importance de cette fréquence, que j'ai déjà soulignée en présentant les amendements précédents.
L'amendement n° 506 n'est pas adopté.
Il vise à supprimer les alinéas 7 à 9, pour la simple raison qu'ils introduisent une notion assez curieuse de « responsabilité collective ». De deux choses l'une : soit cela n'a aucun sens, auquel cas c'est une loi bavarde que nous élaborons – même si je sais que nous en avons l'habitude –, et dans ce cas, je vous invite à voter mon amendement afin de supprimer ces dispositions ; soit nous nous efforçons de préciser cette notion qui vise à rendre collectivement responsables plusieurs acteurs lorsque des objectifs ne sont pas atteints. En l'état, cette notion est si vague qu'elle en devient menaçante.
Je ne suis pas favorable à votre approche. Rendre les acteurs responsables – nous y reviendrons lorsque nous discuterons des missions des CTS –, c'est s'assurer que le collectif qui va se créer au niveau de chaque territoire prendra en main les missions qui lui seront conférées par le texte. Il y a de toute évidence un lien entre les missions exercées et attendues de la part du collectif d'acteurs et la responsabilité collective qui lui incombe de mener à bien ses missions. J'émets un avis défavorable : cet amendement tue l'esprit de la proposition de loi.
J'ai eu l'occasion d'évoquer cette question avec le rapporteur à plusieurs reprises. Il indique que la création des territoires de santé doit aussi se faire en articulation avec tout ce qui peut exister sur les territoires, en particulier les CPTS. Voilà qui permet d'éviter l'impression de doublon. Je répète ce que j'ai dit tout à l'heure à propos des coopérations interrégionales et de la bonne maille départementale ou infrarégionale : il faudra bien que cette articulation intelligente ait lieu, car il n'y aura pas les mêmes acteurs au sein du territoire de santé et des CPTS, lesquelles ne regroupent que des professionnels de la santé – M. le ministre le sait très bien.
Il va donc falloir mettre un peu d'huile dans les rouages afin de ne pas décourager les territoires qui ont su engager une coopération depuis de longues années et supporteraient peut-être mal d'être coiffés par un territoire de santé. Je comprends la pertinence de la stratégie du territoire de santé. Que dire de la phase opérationnelle ? Faisons confiance aux CPTS lorsqu'elles existent. Si nous parvenons à faire vivre cette dualité intelligente, le succès sera à la clé.
Je ne comprends pas votre réponse, monsieur le rapporteur. Je persiste à penser que la notion de responsabilité collective est tellement vague qu'elle peut recouvrir des tas de choses ! Qu'envisagez-vous exactement ? Vous dites que, si les acteurs concernés manquent à remplir leurs objectifs, ils seront collectivement responsables. Mais que va-t-on faire en pratique ? Va-t-on les sanctionner financièrement, les envoyer aux galères ou leur demander d'assurer la garde du 25 décembre pendant les dix prochaines années ? Cette responsabilité collective, que signifie-t-elle vraiment ? Pour ma part, je considère qu'elle est totalement inadaptée à la contrainte : ce n'est pas comme cela que vous réussirez à faire travailler les professionnels de santé ni que vous obtiendrez d'eux davantage de bonne volonté.
Monsieur Juvin, nous discuterons plus tard des missions des conseils territoriaux de santé, qu'il s'agisse de la permanence des soins, de la meilleure répartition de l'offre de soins dans les territoires et des moyens de la garantir, ou encore de la facilitation de l'accès aux soins. En vertu du principe de responsabilité collective, l'article prévoit qu'en cas de carence des réponses – c'est-à-dire si les acteurs du territoire n'arrivent pas à proposer des solutions –, le directeur de l'ARS prendra les mesures qui s'imposent.
Cette proposition de loi est conçue pour faire confiance aux acteurs locaux pour qu'ils trouvent des réponses adaptées à chaque territoire, en cas de carence avérée. Le cas échéant, le directeur de l'ARS prendra ses responsabilités.
Mais les acteurs du territoire auront bel et bien été consultés : simplement, il se trouve qu'ils n'auront pas collectivement répondu aux problèmes posés.
Il n'y a donc pas sanctions, il y a simplement une gradation dans la responsabilité.
L'amendement n° 123 n'est pas adopté.
Je propose de supprimer l'alinéa 8, puisque la responsabilité ne peut valoir que vis-à-vis des patients effectivement pris en charge. Une carence d'un professionnel de santé ne peut pas entraîner la responsabilité des autres professionnels de santé du territoire, sauf dans le cadre de la délégation de tâches, où le médecin délégant reste systématiquement responsable.
La parole est à Mme Angélique Ranc, pour soutenir l'amendement n° 713 .
Il est ici question de la responsabilité, qui ne peut valoir que vis-à-vis des patients effectivement pris en charge. La potentielle carence d'un professionnel de santé ne peut engager la responsabilité d'autres professionnels de santé du territoire d'ordre général, sauf dans le cadre de la délégation de tâches où le médecin délégant est responsable. Le terme « collectivement » comporte trop de risques d'interprétations différentes, d'autant que le texte comporte déjà les mots « l'ensemble des acteurs ». Cet amendement vise donc à supprimer cette mention et à limiter la modification du I A de l'article L. 1434-10 du code de la santé publique.
Il n'y a pas lieu de confondre responsabilité individuelle et responsabilité collective : je suis défavorable à ces amendements.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, je partage tout à fait la préoccupation exprimée par nos deux collègues qui viennent de défendre les amendements. Je le répète, la notion de responsabilité collective des médecins et des professionnels paramédicaux est incompréhensible. Tout à l'heure, monsieur le rapporteur, vous m'avez fait une demi-réponse en indiquant que le directeur général de l'ARS prendrait des mesures. Dites-nous lesquelles ! Quelles mesures prendra-t-il donc ? En droit français, la responsabilité collective n'existe pas – nos deux collègues ont tout à fait raison.
Peut-être faut-il reporter ce débat afin de retravailler le texte ? C'est du bricolage législatif !
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra