La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Suite de la discussion d'un projet de loi
Vendredi 29 septembre, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 1477 à l'article 7.
Par cet amendement, nous vous proposons d'adopter une vision de long terme : les formations devraient tenir compte des besoins additionnels de qualification des privés d'emploi et se conformer aux objectifs de développement durable édictés par l'ONU, plutôt que de chercher à correspondre aux besoins des entreprises. Il s'agit d'anticiper les besoins futurs des entreprises qui s'engagent dans le développement durable, et non de répondre aux besoins actuels de celles qui ne font pas le nécessaire pour rendre les métiers attractifs, notamment en améliorant les conditions de travail et les salaires. Notre société gagnerait en efficacité plus rapidement et nous pourrions ainsi atteindre nos objectifs écologiques et de développement durable ; quant aux emplois proposés, ils auraient du sens et seraient plus durables.
C'est un amendement tout bénef, si j'ose dire,…
…tant pour les privés d'emploi, qui retrouveraient du sens au travail, que pour les emplois eux-mêmes, qui deviendraient plus innovants, durables et pérennes. En tant que société, nous devrions nous donner les moyens d'atteindre nos objectifs écologiques – nous en avons tous cruellement besoin.
La parole est à M. Paul Christophe, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les titres Ier et II, pour donner l'avis de la commission.
Nous partageons bien évidemment votre ambition, mais l'objectif du plan d'investissement dans les compétences (PIC) est de favoriser l'insertion professionnelle. Aussi, orienter ce plan vers les seuls objectifs de développement durable de l'ONU, au demeurant formulés en des termes très théoriques – éliminer la faim dans le monde, éradiquer la pauvreté sous toutes ses formes, permettre à tous de vivre en bonne santé –, ne permettrait pas de les atteindre. Ces objectifs doivent inspirer nos politiques publiques, vous avez raison. Mais en l'occurrence, ils s'écartent de l'objectif principal qui est fixé par le présent texte. Avis défavorable.
La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, pour donner l'avis du Gouvernement.
Pour les mêmes raisons, et dans la continuité des débats que nous avons interrompus vendredi soir, j'émettrai un avis défavorable.
Comme l'a dit ma collègue Ségolène Amiot, cet amendement vise simplement à sortir d'une logique court-termiste. Nous pensons qu'il faut saisir toutes les occasions possibles pour basculer vers une économie qui profite aux vivants : il faut travailler pour vivre, et non vivre pour travailler. C'est précisément cette logique qui est induite par le présent amendement. Nous souhaitons que les qualifications puissent être mises au service d'emplois respectueux des droits de l'homme, des droits sociaux et, en priorité, de l'environnement. Nous n'en sommes pas tout à fait sûrs, mais il semble que le Président de la République commence à comprendre, puisqu'il emploie désormais des expressions que nous étions les premiers à utiliser, notamment celle de « planification écologique ». Mais encore faut-il donner du sens à ces mots.
Pour cela, nous devons assurer à la planification des qualifications une sortie par le haut en concevant des emplois qui s'avèrent vertueux pour l'environnement sur le long terme. Il faut sortir de la politique de l'offre et d'une logique court-termiste pour revenir au temps long : il y va tout simplement de la survie de l'espèce humaine. Nous le savons, les ressources du monde dans lequel nous vivons sont finies. Alors, insérons dès à présent la planification écologique partout où nous le pouvons, y compris dans la planification des qualifications !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Vous avez raison, chers collègues : tout cela est fondamental. Toutefois, le développement durable ne saurait devenir l'alpha et l'oméga des politiques d'insertion, qu'elles soient sociales ou professionnelles. Il y a des tas d'activités humaines qui peuvent entrer dans le cadre d'activités d'insertion, sans pour autant relever du développement durable. En cela, je considère que vous réduisez la voilure avec votre amendement.
Accessoirement, enfin, le fait de remplacer « des entreprises » par « de la société » à l'alinéa 6 de l'article 7 a pour conséquence que les mots « notamment celles », qui suivent, n'ont plus aucun sens.
« Il a raison ! »sur les bancs du groupe LR.
L'amendement n° 1477 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l'amendement n° 1478 .
Cet amendement de notre collègue Jean-Hugues Ratenon vise à ce qu'il soit véritablement tenu compte des coûts spécifiques aux collectivités d'outre-mer, notamment dans l'affectation par France compétences de fonds à l'État pour la formation des demandeurs d'emploi. Les coûts de formation varient d'une région à une autre et il est essentiel de prendre en compte les spécificités ultramarines : par exemple, les frais liés à l'utilisation de plateaux techniques spécifiques sont souvent plus élevés dans les outre-mer en raison de l'éloignement géographique et des contraintes logistiques.
Nous devons garantir un accès équitable à la formation pour tous les demandeurs d'emploi. Il apparaît donc nécessaire d'adapter le montant alloué en fonction des réalités territoriales. On ne connaît que trop bien le retard dont souffrent les territoires ultramarins dans le développement de nos services publics – et je ne parle même pas des moyens qui leur sont alloués !
Voilà pourquoi nous devons rectifier le tir. Si nous souhaitons vraiment garantir un égal accès aux formations, il faut tenir compte des spécificités des collectivités d'outre-mer et leur allouer davantage de moyens. J'espère que l'ensemble de nos collègues voteront cet amendement.
Vous ciblez France compétences, qui s'insère non pas à l'alinéa 6, mais à l'alinéa 9. Je réitérerai les propos que nous avons déjà tenus ces derniers jours : nous devons porter une attention toute particulière aux territoires d'outre-mer, ce que manifestent les dispositions de l'article 11, qui trouveront leur traduction au niveau du comité national. Avis défavorable.
Comme l'a indiqué M. le rapporteur, la formation des demandeurs d'emploi relève du PIC, et non pas de France compétences, comme opérateur de financement de la formation. Sachez que nous avons bien tenu compte des spécificités ultramarines dans le cadre des négociations que nous avons ouvertes avec les régions pour mettre sur pied un PIC de nouvelle génération.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
À entendre le rapporteur et le ministre, l'amendement serait potentiellement satisfait. Je leur propose d'en être certains : adoptons cet amendement et il sera doublement satisfait !
« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
On ne sait jamais : imaginons que, par mégarde, vous vous soyez trompés, que vous ayez mal lu les alinéas. Avec cet amendement, vous vous dotez d'un garde-fou contre vos propres erreurs éventuelles. Bref, je pars du principe que vous avez émis un avis favorable, sans vraiment le dire !
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
L'amendement n° 1478 n'est pas adopté.
L'amendement n° 1189 de M. Frédéric Maillot est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
L'amendement est déjà satisfait : je demande donc qu'il soit retiré ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis.
L'amendement n° 1189 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l'amendement n° 1349 .
Les territoires ruraux possèdent leurs particularités propres – jusqu'ici je ne vous apprends rien –, notamment en matière de formation. D'un côté, on déplore un manque de structures à proximité du domicile, ainsi que des difficultés de mobilité pour accéder à un centre de formation ; de l'autre, on observe que les bassins d'emploi sont parfois très spécialisés, aussi bien dans l'agriculture que dans l'industrie ou le secteur tertiaire.
Ces caractéristiques doivent donc être incluses dans les actions de formation organisées et financées par l'État pour les jeunes non scolarisés et sans qualification, tout comme pour les personnes à la recherche d'un emploi exigeant un diplôme inférieur ou égal au baccalauréat. Les actions de formation doivent être réalisées en proximité et adaptées aux besoins locaux. Cet amendement vient donc ajouter les zones de revitalisation rurale (ZRR) aux côtés des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) dans la prise en compte des besoins spécifiques.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Il est déjà possible de prendre en considération les ZRR au sein du PIC. Votre amendement étant satisfait, j'en demande le retrait ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Il me semble que M. Raux a commis une erreur : ne souhaitait-il pas plutôt parler de « France revitalisation rurale », soit le nouveau nom donné aux ZRR ? Dès lors que vous prévoyez de renommer Pôle emploi en « France Travail », il conviendrait, monsieur le ministre, de sous-amender l'amendement de mon collègue. Voilà qui uniformiserait les appellations auxquelles le présent projet de loi recourt : France Travail, France compétences, France revitalisation rurale – bref, bienvenue en France !
Sourires.
Dans la continuité de ce que vient de dire M. Delaporte, bienvenue à France usine à gaz ! Avec la mobilité et les zones rurales, nous touchons au cœur du problème. Pourtant, ni le rapporteur ni le ministre n'ont souhaité l'évoquer. Notre collègue Raux a tout à fait raison de souligner la particularité des zones rurales – si seulement vous pouviez m'accorder un minimum d'attention en levant les yeux de votre téléphone !
Exclamations sur les bancs du groupe RE et sur le banc des commissions.
La ruralité est un point noir de votre texte. Vous n'avez jamais tenu compte des particularités des zones rurales, dans lesquelles vivent pourtant des milliers de Français. Ces derniers se trouveront en conséquence un peu plus en marge de l'emploi, ou en seront tout bonnement exclus. Je le répète, ce texte était pour vous l'occasion de créer des antennes de proximité rurales, de sorte que chaque citoyen, dans son village ou dans sa ville, puisse bénéficier, au plus proche de lui, du suivi d'un conseiller Pôle emploi. Mais vous avez préféré créer une usine à gaz ne visant qu'à faire cohabiter des services et des acteurs qui travaillent déjà ensemble. Encore une fois, les grands perdants de cette loi, ce sont les demandeurs d'emploi qui vivent dans les villages composant notre ruralité !
M. José Beaurain applaudit.
L'amendement n° 1349 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l'amendement n° 1479 .
Les formations qui sont proposées pour acquérir les qualifications et les compétences nécessaires avant l'entrée en entreprise doivent déboucher sur la signature d'un contrat, y compris pour les personnes en situation de handicap. Vous avez prévu que la nature et la durée du contrat conclu à l'issue de cette formation soient définies par décret, ce qui nous interpelle. Pourquoi les définir par décret ? Est-ce votre façon d'ouvrir la voie à des contrats plus précaires, d'une durée inférieure au minimum légal de douze mois ? Cette disposition n'est-elle pas un chèque en blanc pour promouvoir la multiplication de contrats courts ? Encore une fois, cela nous inquiète grandement ! Nous aimerions donc que vous puissiez nous rassurer en adoptant cet amendement ; vous montreriez ainsi que vous êtes attachés à la lutte contre la précarité et que vous soutenez les personnes en situation de handicap, mais aussi les autres.
En 2019, Eurostat – l'office statistique de l'Union européenne – a montré que la France était, avec la Croatie, la championne européenne des contrats courts inférieurs à trois mois, qui représentent 5 % des emplois salariés. Aujourd'hui, 9 millions de contrats courts pourraient être transformés en contrats stables, pour un volume de 235 000 équivalents temps plein (ETP), soit 27 % du volume total de contrats courts dans le secteur privé. C'est la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) elle-même qui a publié ces chiffres en 2023.
Il convient donc de supprimer les alinéas 11 et 12, afin d'assurer aux personnes d'entrer dans l'emploi stable, dans le bon emploi. C'est dans cette logique que nous agissons contre le non-emploi. Pour quelle raison faudrait-il, à chaque fois, précariser davantage les contrats de travail ?
Vous souhaitez supprimer le renvoi à un décret de la détermination des contrats éligibles à une POEI, une préparation opérationnelle à l'emploi individuelle. Bien évidemment, nous y sommes défavorables, et cela pour plusieurs raisons.
D'abord, les POEI sont particulièrement utiles aux demandeurs d'emploi, qui pourront les valoriser après leur première expérience en CDD.
Ensuite, le renvoi à un décret est conforme à l'avis du Conseil d'État, qui considère que ces dispositions relèvent du pouvoir réglementaire et permettent une plus grande adaptation de la POEI à l'évolution du marché du travail et des types de contrat proposés.
L'amendement n° 1479 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à ne pas laisser au Gouvernement le pouvoir de définir par décret les contrats de travail éligibles à la préparation opérationnelle à l'emploi.
Ce dispositif, qui permet de former une personne recrutée, avant sa prise de poste, aux frais de l'État, est ouvert aux CDI, aux contrats de professionnalisation d'une durée minimale de douze mois, aux contrats d'apprentissage et aux contrats à durée déterminée d'une durée minimale de douze mois.
Avec les alinéas 14 et 15, on pourrait l'ouvrir à d'autres formes de contrat, par nature plus précaires, ce qui aurait pour conséquence d'engager des deniers publics pour former un néorecruté en contrat à courte durée, avec un risque élevé qu'il revienne à la case départ.
Il convient par conséquent de maintenir l'état du droit pour ce type de contrats.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public, l'une sur l'amendement n° 1483 par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, l'autre sur l'article 7 par le groupe Renaissance.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l'amendement n° 1052 .
Nous voulons supprimer les alinéas 14 et 15 parce que nous ne les comprenons pas. Ils renvoient à un décret la détermination du type de contrat conclu à l'issue de la formation. Pourtant, le code du travail est très clair sur ce point. L'article L. 6326-1, notamment, mentionne quatre types de contrats possibles : à durée indéterminée ; de professionnalisation d'une durée minimale de douze mois ; d'apprentissage ; à durée déterminée d'une durée minimale de douze mois.
Pourquoi préciser par décret la nature de ces contrats, si ce n'est pour augmenter le nombre de contrats courts et précaires ?
Avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment, concernant l'avis du Conseil d'État.
J'ajoute que l'ouverture de la POEI à d'autres types de contrat permettra de donner une base légale à des programmes déjà mis en œuvre par Pôle emploi, notamment l'action de formation préalable au recrutement – AFPR –, et qui bénéficient à des personnes en contrat de moins de six mois.
Même avis.
J'entends vos explications, mais pouvez-vous nous garantir qu'il n'y aura aucun moins-disant par rapport à ce qui figure dans le code du travail ?
À la question que vient de poser M. Monnet s'ajoute celle de l'enveloppe de financement, qui est extrêmement floue.
Combien, monsieur le ministre, allez-vous consacrer à l'amélioration de la préparation opérationnelle à l'emploi ?
Le financement est prévu dans le cadre de la loi de finances pour 2024 et du plan d'investissement dans les compétences. Je précise, pour la clarté des débats, que les volets régionaux de ce dernier, les Pric, pactes régionaux d'investissement dans les compétences, sont financés par convention avec les régions ; leur discussion est en cours. Quant au volet national du plan d'investissement dans les compétences, il est financé soit par le budget de l'État, soit par une part du fonds de concours de France compétences.
Les décisions concernant les affectations et les priorités en matière de POEI reviennent pour l'heure à Pôle emploi et à lui seul. Pour la nouvelle génération de pactes d'investissement dans les compétences, pour laquelle les négociations avec les régions ont commencé la semaine dernière, nous proposons d'associer les régions à la définition des priorités en matière de POEI dans leur territoire afin qu'il y ait une articulation avec leurs propres dispositifs. Par exemple, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, il existe depuis longtemps des contrats d'aide et de retour à l'emploi durable – Cared –, mis en place par la région.
Cela explique pourquoi, pour faire écho à ce qu'a dit le rapporteur, on a besoin d'un peu de souplesse s'agissant des délais de mise en œuvre des contrats concernés.
D'autre part, dans le cadre du plan d'investissement dans les compétences, l'enveloppe nationale, qui sera désormais copilotée – on pourrait même parler d'une troisième enveloppe, entre le PRIC et le PIC –, représentera 240 millions en 2024, soit plus que les années précédentes.
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l'amendement n° 1483 .
Nous avons bien compris que vous aimiez beaucoup la préparation opérationnelle à l'emploi, qui consiste à faire financer par de l'argent public la formation initiale permettant à une personne d'accéder à un emploi. Bref, il s'agit de faire payer les embauches par celles et ceux qui payent des impôts, c'est-à-dire celles et ceux qui ont été embauchés ailleurs. C'est une invention tout à fait extraordinaire.
Vous dites qu'après la formation, il y aura un emploi : très bien – je n'irai pas jusqu'à dire que nous en sommes convaincus, mais nous prenons acte. Vous indiquez que cet emploi sera d'une nature et d'une durée spécifique : certes, mais vous oubliez une dimension importante de l'emploi, à savoir sa durée horaire, la quotité de travail.
Vous dites que l'on dirigera les gens vers des CDI de six mois, mais si c'est pour qu'ils travaillent trois ou quatre heures par semaine, cela ne vaut pas la peine.
Brouhaha.
Je parle de temps partiel, mais cela n'a pas l'air de vous passionner. Pourtant, il concerne dans notre pays un quart des femmes et un quart des jeunes. Le temps partiel, c'est la triple peine : on est moins payé au mois parce qu'on fait moins d'heures ; on est moins payé à l'heure parce qu'on est moins qualifié ; et l'on passe un temps fou à organiser son temps de travail quotidien. Vous feriez donc mieux d'être attentifs. Ce sont 4 millions de personnes qui sont concernées, et qui se demandent pourquoi leur sort ne vous intéresse pas.
Certains d'entre vous affirment qu'il s'agit d'un choix. Bizarrement, ce choix est quatre fois plus courant chez les employés que chez les cadres ! Soit il existe une différence biologique entre cadres et employés, soit, plus vraisemblablement, il s'agit d'une contrainte sociale plutôt que d'un choix !
Pour toutes ces raisons, et parce que nous trouvons que le temps partiel est une souffrance imposée aux personnes et une dégradation de leur existence personnelle et de celle de leur famille ,
Mme Caroline Fiat applaudit
nous réclamons un garde-fou consistant à spécifier la durée horaire minimale des emplois vers lesquels les gens seront dirigés.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je rappelle que la préparation opérationnelle à l'emploi individuelle s'adresse à un demandeur d'emploi ou à un salarié répondant à certains critères et ayant accepté un contrat de travail nécessitant une formation. Il peut s'agir d'un mi-temps afin de permettre une insertion professionnelle en parallèle d'une levée d'autres freins périphériques – on en a cité beaucoup au cours de ce débat ; la formation pourra ensuite être valorisée dans le cadre d'un autre contrat. Pour cette raison, la POEI est prescrite dans le cadre d'une évaluation des besoins du demandeur d'emploi. L'adaptation au poste doit le justifier et tenir compte du nombre d'heures adapté à l'intéressé.
Cet amendement rigidifierait le dispositif. Avis défavorable.
Même avis.
Monsieur le ministre, ma question me semble claire : est-ce que le fait de déterminer par décret la nature et la durée du contrat de travail ouvrira la porte à des contrats de moins de douze mois ?
Je l'ai dit à M. Delaporte.
Si c'est le cas, dites-le publiquement – et l'explication du rapporteur ne tiendra plus : c'est pour rendre possible des contrats précaires que vous voulez définir les choses par décret.
J'attends de votre part une réponse officielle.
Il semble évident que le nombre d'heures doit être défini dans le texte, et non par décret. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, pouvez-vous nous dire clairement ce qu'il représentera, en journées de travail ? Il serait important que nous le sachions.
Je vais répéter ce que j'ai dit à M. Delaporte. Nous voulons de la souplesse, notamment dans le cadre des discussions avec les régions, puisqu'elles seront associées aux POEI. D'autre part, nous souhaitons fusionner les AFPR, qui sont financées par Pôle emploi et concernent des contrats de six, neuf ou douze mois, et les POEI. Notre objectif n'est pas de diminuer la durée des contrats, mais de gagner en souplesse, parce que certains contrats de neuf mois peuvent être intéressants.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 180
Nombre de suffrages exprimés 179
Majorité absolue 90
Pour l'adoption 74
Contre 105
L'amendement n° 1483 n'est pas adopté.
C'est toujours la même chose : il s'agit d'inscrire expressément dans la loi, sans laisser un simple décret en décider, que les contrats proposés à l'issue de la formation seront d'une durée minimale d'un an. Cet amendement vise à limiter le recours aux contrats précaires, ces fameux contrats de deux ou trois mois qui servent habilement à faire baisser les chiffres du chômage sans pour autant améliorer la situation économique et sociale des travailleurs.
Les contrats courts sont surutilisés dans notre pays – il y en a beaucoup à La Poste, par exemple. Comme l'a souligné ma collègue Danielle Simonnet, la France détient le record en la matière : ils représentent 5 % de l'ensemble des contrats salariés – c'est énorme !
Ce n'est pas ainsi qu'on réglera le problème du chômage, de la privation d'emploi et de la précarité. Et en l'état, votre projet de loi ne va certainement pas améliorer les choses.
La parole est à M. Lionel Vuibert, pour soutenir l'amendement n° 1707 .
Cet amendement vise à garantir au demandeur d'emploi qui s'investit dans une formation qu'il recevra une offre d'emploi d'une durée minimale de douze mois, une fois sa formation achevée. Une telle mesure permettra d'accroître la stabilité de la situation professionnelle trouvée par le chômeur.
En garantissant aux individus engagés dans des programmes de formation une offre d'emploi d'au moins douze mois à la fin de leur formation, on leur offre une perspective de stabilité et de continuité professionnelle.
De plus, on assure une meilleure adéquation entre les formations proposées et les besoins du marché du travail. En incitant les demandeurs d'emploi à suivre des formations répondant aux besoins actuels de l'emploi, on contribue à réduire les écarts de compétences et à renforcer la compétitivité du marché du travail.
Applaudissements sur certains bancs du groupe RE.
Ce sera pour moi l'occasion de profiter des derniers instants de présence du ministre dans l'hémicycle, parce qu'après l'article 7, il va nous quitter – ou pas, d'ailleurs.
Toujours est-il qu'on en viendra aux questions de handicap et d'accueil du jeune enfant, ce qui, je l'espère, nous permettra de travailler en plus grande intelligence…
…et de manière plus consensuelle.
Je voudrais, à travers ces sous-amendements, évoquer des questions restées jusque-là sans réponse et donner au ministre l'occasion d'y répondre avant la fin de l'examen de l'article 7.
La première de ces questions concerne les heures obligatoires qui seront imposées aux allocataires du RSA. Monsieur le ministre, il est encore temps de nous dire, au-delà des déclarations générales, quelles sont vos projections, ce que cela va représenter et combien d'heures vous allez financer.
Ça semble vous poser un problème, que les gens reprennent une activité !
La deuxième question sans réponse porte sur les sanctions et leurs effets anticipés. J'ai appris ce week-end qu'un programme appelé Reliance avait été lancé par la caisse d'allocations familiales (CAF) de Meurthe-et-Moselle. Vous n'en avez jamais présenté les résultats, alors qu'il s'agit d'un dispositif d'accompagnement renforcé des allocataires du RSA qui, s'il présente l'inconvénient de coûter cher à l'État, semble porter ses fruits. Si l'on veut favoriser l'insertion, il faut de l'argent. Plutôt que de prévoir des sanctions, peut-être aurait-il été préférable d'examiner les résultats des expérimentations qui ont été lancées et qui sont en cours d'évaluation. Or vous ne nous les avez jamais présentés.
Par ailleurs, au-delà des 300 recrutements prévus l'an prochain, combien y aura-t-il de recrutements, à terme, pour le service public de l'emploi, afin qu'il puisse faire face aux bouleversements que vous allez produire ? Malheureusement, vous n'avez jamais répondu à cette question.
Vous n'avez jamais répondu non plus à notre question sur le niveau des sanctions. Vous avez chaque fois renvoyé aux départements, en indiquant qu'une concertation aurait lieu pour le fixer – à 25 %, à 50 % ou à 100 % du montant de l'allocation. Or c'est un sujet important.
J'en viens à la dernière question : vous n'avez jamais indiqué pourquoi vous vouliez inscrire automatiquement à Pôle emploi les conjoints des allocataires, même lorsque lesdits conjoints travaillent.
Sur ces cinq points, nous restons sur notre faim. D'une manière générale, je tiens à vous faire part de notre frustration : au cours de ce débat, nous n'avons pas obtenu grand-chose, si ce n'est des non-réponses de votre part.
Sur les amendements identiques n° 1721 rectifié et 1833 rectifié , je suis saisie par le groupe Horizons et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements identiques et sur les sous-amendements ?
Pour les raisons évoquées précédemment, j'émets bien évidemment un avis défavorable. J'ajoute que, même dans le cas où elle est suivie dans l'objectif de conclure un CDD de six mois, une formation peut être un tremplin vers l'insertion et un emploi plus durable.
Même avis.
J'insiste sur l'importance des amendements n° 1480 et 1707 , qui visent à ce que le contrat pouvant être conclu à l'issue de la formation ne soit pas d'une durée inférieure à douze mois. Monsieur le ministre, mes collègues et moi vous avons interrogé récemment sur les chiffres de l'emploi, puisque nos collègues macronistes ne cessent de vanter les résultats mirifiques de la politique de votre gouvernement en matière d'emploi, affirmant que 2 millions d'emplois ont été créés depuis 2017. J'appelle votre attention sur une donnée : sur les 5,8 millions de demandeurs d'emploi – une paille ! –, 35 % ont un contrat d'une durée inférieure à 79 heures par mois ; il s'agit de la catégorie B. Il me semble donc qu'à tout le moins, des garanties devraient être apportées.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Qu'il s'agisse de la préparation opérationnelle à l'emploi collective (POEC) ou individuelle (POEI), il nous semblait important que soit fixé un nombre minimal d'heures de travail par semaine pour le contrat de travail pouvant être conclu à l'issue de la formation, ainsi que le prévoyait l'amendement n° 1483 . En revanche, il nous paraît aberrant de vouloir imposer, comme le prescrivent les présents amendements, que le contrat soit d'une durée minimale de douze mois, ce qui est considérable. Cela bloquerait de facto le recrutement dans ces formations de toutes les personnes qui sont en contrat de travail temporaire. Cela irait selon moi à l'encontre de ce que vous souhaitez défendre et du bon sens que nous devons tous garder à l'occasion de l'examen de ce projet de loi. Nous voterons donc contre ces amendements.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 188
Nombre de suffrages exprimés 147
Majorité absolue 74
Pour l'adoption 108
Contre 39
L'article 7, amendé, est adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 1721 rectifié et 1833 rectifié , portant article additionnel après l'article 7.
La parole est à M. François Gernigon, pour soutenir l'amendement n° 1721 rectifié .
Il a pour objet d'une part de renforcer l'accompagnement des demandeurs d'emploi en facilitant leurs démarches et en leur permettant de valoriser leurs compétences acquises, d'autre part de permettre à l'opérateur France Travail et à certains membres du réseau des acteurs de l'insertion et de l'emploi de disposer des données nécessaires à l'exercice de leurs missions.
Comme le préconise le rapport relatif à France Travail remis en avril 2023, l'accès de certains acteurs de ce réseau aux données du passeport d'orientation, de formation et de compétences, dans le cadre de l'exercice de leurs missions d'orientation, d'accompagnement, de formation et d'insertion, pourrait faciliter certaines démarches du titulaire.
L'usager resterait le seul titulaire de ses données et pourrait les compléter, les modifier ou les confirmer dans son espace personnel France Travail ou dans son passeport d'orientation, de formation et de compétences. Cela réduirait les risques d'erreur et les oublis, en particulier s'agissant des ressources ou de certains documents administratifs. Dans toute autre hypothèse, l'accès d'un tiers aux données du passeport demeurerait conditionné au consentement préalable du titulaire.
Dans cette perspective, l'amendement vise également à étendre le champ des données pouvant constituer et alimenter le passeport d'orientation, de formation et de compétences. D'une part, nous souhaitons que le passeport puisse comprendre toutes les informations qui pourraient être valorisées comme compétences et être mentionnées comme données certifiées par la Caisse des dépôts (CDC), par exemple les examens de conduite ou les engagements volontaires et bénévoles. D'autre part, nous proposons de compléter les sources d'alimentation du passeport.
Enfin, il est nécessaire que les organismes et ministères certificateurs – moins de 3 000 organismes et ministères sont concernés – puissent recueillir et transmettre à la CDC le numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques (NIR) dans le cadre des échanges avec le système d'information du compte personnel de formation (SI-CPF). C'est en outre indispensable pour que les demandeurs d'emploi puissent bénéficier de données complètes et fiabilisées dans leur passeport de compétences en vue de leurs futures démarches de recherche et d'insertion dans l'emploi.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe HOR.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 1833 rectifié .
Il est identique à celui que mon collègue François Gernigon vient de défendre brillamment. J'émets donc un avis favorable sur les deux amendements.
Applaudissements sur quelques bancs.
Favorable.
Les intentions quant au partage de l'information et à la protection des données sont louables, mais l'amendement risque d'être lourd de conséquences.
D'une part, nous l'avons constaté par le passé, l'installation d'un système d'information commun à différents opérateurs prend du temps. Ce portail sera-t-il prêt au moment de la promulgation de la loi, monsieur le ministre ? Ce point nous inquiète, car d'autres opérateurs que France Travail ont besoin d'avoir accès à ces données.
D'autre part, cet article additionnel n'a pas fait l'objet d'une étude d'impact. A-t-on néanmoins sollicité l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) ? Dès lors qu'un certain nombre d'organismes référents pourront accéder aux données, celles-ci vont-elles circuler ? Quelles seront les conséquences ? Nous recevons en permanence des publicités nous vendant des formations susceptibles d'être financées par le CPF, le compte personnel de formation. Il faut que l'on puisse sécuriser le système et garantir à nos concitoyens qu'ils ne seront pas submergés par de la propagande ou de la publicité inutile.
Je suis un peu étonné de vous voir présenter cet amendement, monsieur le rapporteur.
J'ai moi-même présenté la semaine dernière un amendement visant à fusionner les fichiers de tous les services de l'État concernés afin de mieux lutter contre la fraude, et l'on m'a répondu que cela ne passerait pas au regard du règlement général sur la protection des données (RGPD). Or, par cet amendement, vous souhaitez vous aussi fusionner des fichiers.
La vision du RGPD serait-elle différente selon que la proposition émane de vous ou de nous ?
En tout cas, nous voterons pour cet amendement, car nous trouvons qu'il va dans le bon sens. Nous regrettons néanmoins que vous n'ayez pas donné un avis favorable à notre amendement qui prévoyait une mesure analogue pour la répression des tricheurs et des fraudeurs.
Monsieur Bazin, une version bêta du portail est en cours de finalisation. Cependant, l'objectif n'est pas de le mettre en service dès le 1er janvier 2024 – il ne serait pas entièrement opérationnel à cette date –, mais plutôt en avril 2024.
Ce passeport sera évidemment soumis au RGPD. Précisons qu'il sera principalement accessible aux opérateurs de Pôle emploi, devenu France Travail, et aux opérateurs compétents en matière de conseil en évolution professionnelle. L'accès aux données ne sera pas ouvert au grand public ; il ne sera pas aussi étendu que vous le craignez, ce qui limitera grandement le risque que vous avez évoqué. Le modèle n'est pas du tout celui du CPF.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 1721 rectifié et 1833 rectifié .
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 167
Nombre de suffrages exprimés 162
Majorité absolue 82
Pour l'adoption 156
Contre 6
Les amendements identiques n° 1721 rectifié et 1833 rectifié sont adoptés.
L'article 8 vise à favoriser l'accès à l'emploi des personnes en situation de handicap, dont le taux de chômage demeure supérieur à celui des autres salariés – il est environ deux fois plus élevé, même s'il est passé de 19 % à 12 % au cours des dernières années. Dans le prolongement des actions engagées depuis 2007, l'article comprend des mesures destinées à favoriser l'insertion professionnelle des intéressés, l'objectif étant de leur offrir de l'aide et des conditions respectueuses de la situation de chacun.
Ces mesures reprennent en outre plusieurs recommandations de la Conférence nationale du handicap (CNH) : l'application des dispositions destinées aux titulaires de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) à toutes les personnes relevant d'une autre catégorie bénéficiant de l'obligation d'emploi, notamment les dispositions relatives à l'allongement de la durée d'apprentissage, à la majoration de la rémunération des stagiaires, à la formation professionnelle et au recrutement par une entreprise adaptée ; le principe selon lequel le milieu ordinaire est l'orientation de droit commun, ouverte à tous sans validation préalable ; le transfert à l'État de la gestion de l'emploi accompagné ; l'introduction dans le droit commun du CDD tremplin et de l'entreprise adaptée de travail temporaire (EATT) ; la création d'un service numérique personnel recensant l'ensemble des aménagements dont la personne a bénéficié pour sa scolarité ou au travail, afin de faciliter les aménagements nécessaires pour qu'elle puisse intégrer une formation ou accéder à un nouvel emploi ; la portabilité des équipements de compensation en cas de changement d'emploi, afin de faciliter la mobilité ; le recours à l'intérim.
L'expérimentation du recours à l'intérim avait été introduite par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et prolongée jusqu'au 31 décembre 2023 par la loi « 3DS », relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale. Elle sera pérennisée : le recours à l'intérim sera désormais permis lorsque le salarié est bénéficiaire de l'obligation d'emploi.
Nous devrions être d'accord sur tous les bancs : grâce à l'article 8, la personne handicapée sera considérée pour ce qu'elle a comme compétences, comme capacités et comme possibilités pour accéder à un emploi, de préférence en milieu ordinaire, ou, au besoin, en milieu protégé – et non l'inverse.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Je suis consternée par l'approche particulièrement technocratique de cet article qui concerne les personnes en situation de handicap.
J'informe notre assemblée que nous avons découvert en commission qu'il était prévu que des personnes invalides, par définition inaptes au travail, soient concernées par l'obligation de travailler et, partant, inscrites d'office à France Travail. On atteint là un niveau stratosphérique d'imbroglio et de délire ; c'est l'absurdité la plus totale.
L'absurdité ne s'est pas arrêtée là, puisque vous n'aviez pas prévu de formation pour le personnel de France Travail chargé de suivre les personnes en situation de handicap. Heureusement, mon collègue Sébastien Peytavie a proposé un amendement pour garantir que toutes les personnes qui accompagnent vers l'emploi ces personnes en situation de handicap soient correctement formées.
Il demeure un grave problème de moyens, car strictement rien n'est prévu pour que les salariés de France Travail puissent correctement s'adresser aux personnes en situation de handicap, les accompagner et les orienter. Tout cela doit être mis en place par une circulaire ; autant dire que nous n'avons aucune garantie.
Cela éveille des inquiétudes. J'étais vendredi dans un Esat – établissement et service d'aide par le travail – à Villepinte, où l'on m'a fait remonter que la MDPH – maison départementale des personnes handicapées – mettait un temps infini à orienter les dossiers, par manque de moyens. L'angoisse est que France Travail fasse encore pire et que, faute de moyens et avec une bureaucratie et des contraintes toujours plus grandes, les personnes en situation de handicap soient moins bien considérées et moins correctement orientées.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et SOC. – Mme Cyrielle Chatelain applaudit également.
Le titre III aborde un point important pour les personnes en situation de handicap. L'idée est de banaliser le plus possible leur situation, c'est-à-dire de les amener le plus possible vers le droit commun. Cela ne veut pas dire nier les difficultés du handicap, bien évidemment, mais essayer de coller à leur situation pour leur permettre une meilleure insertion dans la vie active et dans la vie tout court.
Nous ne sous-estimons pas les poids technocratiques existants. Cela dit, je suis toujours amusé d'entendre nos amis du groupe LFI tenir de tels propos, eux qui sont si bons en technocratie ; si on les écoutait, absolument tout avancerait sur des rails identiques dont on ne pourrait jamais s'écarter. Mais pas de polémique – puisque vous n'en faites pas, je n'en ferai pas non plus.
La question des moyens peut se poser, en effet, tout comme celle de la formation, laquelle sera abordée dans plusieurs amendements. Il n'en demeure pas moins que l'article 8 permet une meilleure prise en compte des personnes en situation de handicap par l'extension des droits liés à la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé – c'est un vrai plus, il faut le souligner –, par l'insertion simplifiée d'un certain nombre de travailleurs en situation de handicap sur le marché du travail – je crois que nous pouvons tous nous accorder sur ce point –, par le transfert à l'État du dispositif d'emploi accompagné – je ne vois pas ce qui pourrait gêner là-dedans – et par la possibilité donnée aux entreprises adaptées de recourir aux CDD tremplins.
Bref, il y a là un pari extrêmement positif. Ce n'est pas l'un de ces paris où on lance une pièce en l'air sans savoir de quel côté elle retombera ; c'est un pari sur l'intelligence collective et sur ces personnes qui, faut-il le rappeler, ont toute leur place dans la société.
L'article 8 du projet de loi contient des avancées majeures pour l'emploi des personnes en situation de handicap. Il promeut l'émancipation et l'épanouissement par le travail. Il s'inscrit en cela dans la droite ligne du décret du 23 février 2022, qui a rendu plus favorable la reprise d'activité et a permis d'améliorer le pouvoir d'achat de la très grande majorité des personnes reconnues comme en situation d'invalidité, mais pas de l'ensemble d'entre elles.
Grâce à l'action résolue de Geneviève Darrieussecq, le seuil utilisé pour le calcul des pensions d'invalidité a été augmenté, passant de 1 à 1,5 plafond mensuel de la sécurité sociale. Cette action s'est accompagnée d'une application rétroactive jusqu'aux mensualités perçues en décembre 2022. Près de 90 % des personnes concernées bénéficieront ainsi du rétablissement de leur pension. Compte tenu de l'esprit de l'article 8, il est important que nous puissions travailler sur les 10 % restants, notamment pour continuer à favoriser le cumul emploi-ressources et encourager le retour et le maintien dans l'emploi des personnes en situation d'invalidité. Je pense notamment aux travaux engagés avec les organismes de prévoyance.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Ces articles sont l'une des manifestations des dégâts que risque de causer la réforme que vous êtes en train d'essayer de faire adopter. En effet, cette réforme fera augmenter le nombre de travailleurs pauvres et instaure une logique de pression et d'injonction au travail à l'égard des bénéficiaires du RSA et des assurés de l'Unedic – et il y en aura davantage, après la réforme des retraites que nous avons connue il y a quelques mois. Elle constitue également une rupture pour les personnes en situation de handicap, qui se voient appliquer cette même injonction au travail salarié, par un renversement de la manière dont les choses étaient conçues jusqu'à présent.
Le problème, c'est que le travail des personnes en situation de handicap n'est pas qu'une question d'information et de bon vouloir de la personne concernée ; il faut aussi créer les conditions qui rendent l'emploi possible en adaptant les postes. Il faut également que le service public de l'emploi prenne en compte la situation particulière liée au handicap. Ce que la République doit défendre, c'est un droit égal pour toutes et pour tous, mais il ne faut pas faire comme si cette situation n'existait pas.
Le texte propose quelques améliorations qui ne suffisent pas à corriger tout ce qui ne va pas actuellement et que votre réforme va aggraver. Parmi les mesures que nous souhaiterions voir y figurer, il y a la véritable reconnaissance des travailleurs et des travailleuses en Esat. Nous nous interrogeons également sur l'élargissement des contrats tremplins.
Une fois n'est pas coutume, permettez-moi de commencer par exprimer ma satisfaction. L'élargissement du statut de titulaire de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé aux bénéficiaires de l'obligation d'emploi était une demande de longue date des collectifs de personnes en situation de handicap. C'est une mesure pertinente qui leur ouvrira un accès plus large aux droits et aux prestations.
J'ai néanmoins plusieurs regrets, notamment celui que la question du statut des travailleurs en situation de handicap et de l'amélioration de leurs conditions de travail soit abordée dans une loi répressive dont la seule philosophie est la sanction. C'est problématique, car cela veut dire que vous faites un lien entre la conditionnalisation du RSA, la sanction et le meilleur accès au travail des personnes en situation de handicap. Je pense qu'il aurait fallu une loi spécifique pour réfléchir plus largement à toutes ces questions. Au-delà des conditions et des droits des travailleurs dans les Esat, on aurait pu réfléchir, par exemple, au financement des places dans ces établissements. En disant cela, je m'avance un peu sur les articles suivants, mais tout est lié.
L'article 8 aura pour conséquence de faciliter l'utilisation de contrats précaires par les entreprises adaptées de travail temporaire, ce qui suscite un certain nombre d'inquiétudes. Des contrats de mission et des CDI intérimaires pourront désormais être conclus avec des travailleurs titulaires de la RQTH. Cette mesure aurait mérité une meilleure évaluation. En effet, le texte aura pour effet de généraliser le travail précaire, ce qui risque d'avoir une incidence sur les travailleurs en situation de handicap, dont on espère qu'ils ne connaîtront pas à leur tour une précarisation renforcée dans leur accès au travail.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Nous voilà au cœur d'un sujet particulièrement complexe, celui des travailleurs en situation de handicap. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans l'idée que nul ne doit être inemployable : à moins de réduire la question de l'être humain à celle de la performance, ce qui obligerait chacun à se projeter dans cette situation, je crois qu'il faut arriver à entendre qu'il y a un certain nombre de personnes qui ne peuvent et ne doivent pas se retrouver là-dedans.
Il y a en France un tel retard sur la question de l'emploi des personnes en situation de handicap et un tel décalage dans les contrats, notamment dans les Esat, que nous avons été épinglés à ce sujet par l'ONU et, je crois, par l'Europe. Il y a encore fort à faire et, si le texte propose des progrès évidents, nous sommes encore loin du compte sur des points tels que la rémunération, les cotisations et les retraites. Si l'on va au bout de la logique, il faudrait se demander si le modèle de l'Esat est tenable, ce qui pose la question de son financement ; il est évident que la question n'est pas abordée à cet endroit du texte.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.
Enfin, sur les questions d'emploi et de sanctions, quand on voit que, depuis trente-six ans, les pénalités ne fonctionnent pas et que l'on pourrait aujourd'hui modifier ces pénalités, il n'est pas sérieux de poursuivre dans la même voie. Nous devons être vraiment exigeants.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et SOC, ainsi que sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Sur les amendements identiques n° 76 , 1491 et 1760 , je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement n° 1514 .
L'article 8 prévoit des dispositions qui vont dans le sens d'une amélioration de l'insertion des personnes en situation de handicap. Toutefois, certaines règles de notre droit commun font parfois obstacle à la continuité des parcours et nuisent de ce fait à l'insertion professionnelle. Je pense notamment aux règles sur le délai de carence.
En application des règles de droit commun, un délai de carence s'impose entre deux missions lorsque l'entreprise utilisatrice, cliente d'une EATT, ne conclut pas de CDI avec le salarié intérimaire ou lorsqu'elle n'a pas usé de la faculté de renouveler la mission avant la date de fin de la mise à disposition, par exemple parce que le besoin de main-d'œuvre s'est révélé quelques jours seulement après le départ de l'intérimaire. De même, un délai de carence est appliqué lorsqu'à l'issue du contrat de mission, le salarié est embauché sur le même poste en CDD par l'entreprise utilisatrice.
L'application d'un délai de carence est nécessaire lorsqu'il s'agit de lutter contre la multiplication des contrats de courte durée contribuant à la précarisation des salariés. Toutefois, dans une perspective d'insertion professionnelle, cette règle peut dans certains cas faire obstacle à la continuité des parcours. C'est le cas lorsqu'un délai de carence est imposé entre deux missions prenant place au cours d'un parcours d'accompagnement en EATT, ou lorsqu'il est imposé à l'entreprise utilisatrice qui propose d'embaucher le salarié en situation de handicap à l'issue de sa mission.
Cet amendement déposé par Stéphane Viry, avec de nombreux collègues de notre groupe, propose de lever le délai de carence pour les salariés en EATT, lorsque les contrats s'inscrivent dans un parcours d'accompagnement, ou à l'issue d'un tel parcours lorsque le recrutement est réalisé pour un CDD d'une durée minimale de deux mois, en raison de leur mission particulière et du public spécifique qu'elles accompagnent. Les EATT ont en effet pour mission d'accompagner les personnes en situation de handicap vers l'emploi durable. L'amendement propose d'étendre cette dérogation aux entreprises de travail temporaire d'insertion.
La parole est à Mme Christine Le Nabour, rapporteure de la commission des affaires sociales pour les titres III, IV et V, pour donner l'avis de la commission.
Je suis très heureuse de prendre le relais de Paul Christophe pour vous rapporter les titres III et IV de ce projet de loi éminemment important pour l'accès à l'emploi de nos concitoyens, et en particulier des plus éloignés de l'emploi.
Monsieur Bazin, j'approuve totalement les arguments que vous avez avancés en présentant l'amendement de M. Viry. En effet, dans la perspective d'une insertion professionnelle, les délais de carence constituent des freins à la continuité des parcours. J'émets donc un avis favorable à cet amendement.
L'amendement de M. Viry qu'a présenté M. Bazin permet de corriger des scories de notre droit en matière d'accès à l'emploi des personnes en situation de handicap. Il est ici question des délais de carence, mais on obéit à la même logique quand on aligne les droits des bénéficiaires d'une obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) sur ceux des titulaires d'une RQTH, par exemple en matière d'accès à l'entreprise adaptée. Chaque fois qu'il est possible de lever des freins pour faciliter la vie des personnes en situation de handicap, il faut le faire. Avis favorable.
Je trouve cet amendement de notre collègue Stéphane Viry, défendu par notre honorable collègue Thibault Bazin, assez pertinent. Si la règle du délai de carence est louable, puisqu'elle vise à lutter contre les contrats précaires, il faut tenir compte du fait que certains travailleurs éprouvent des difficultés pour trouver un emploi, notamment les personnes en situation de handicap qui peuvent parfois subir des discriminations. Il serait intéressant d'exonérer ces personnes du délai de carence, car cela leur permettrait de trouver un travail plus facilement. Cependant, pour favoriser leur maintien dans l'emploi et empêcher l'exclusion sociale, nous aurions pu aller plus loin et inclure également les seniors ; en effet, du fait de la réforme des retraites qu'ils vont subir, les plus de 55 ans vont être eux aussi concernés par la recherche d'emploi.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
L'amendement n° 1514 est adopté.
Il vise à supprimer la nouvelle disposition qui conduit à réduire, pour les entreprises recrutant des salariés lourdement handicapés, la contribution devant être versée en cas de non-respect de l'obligation d'emploi. En effet, une telle mesure pourrait créer une distorsion qui serait favorable à l'employeur ne respectant pas l'obligation d'employer au moins 6 % de personnes en situation de handicap – il bénéficierait d'un double avantage –, et défavorable à l'employeur vertueux qui, dépassant le seuil de 6 %, ne pourrait prétendre qu'à l'aide prévue à ce titre.
Plutôt que de créer un dispositif supplémentaire de réduction de la contribution, il semble donc préférable d'améliorer encore le dispositif d'aide existant. D'ailleurs, un chantier a été engagé pour rénover le domaine de la reconnaissance de la lourdeur du handicap (RLH), en lien avec l'Agefiph – Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées –, qui est en train d'évaluer ce qui se fait. Il semble donc préférable d'attendre ses conclusions.
La parole est à Mme Clémentine Autain, pour soutenir l'amendement n° 1491 .
Vous voulez atténuer la contribution que doivent verser les employeurs ne respectant pas l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés. Or le taux de chômage de ces personnes stagne autour de 13 %, soit quasiment le double de la moyenne nationale générale. Nous n'approuvons pas du tout cette disposition et notre amendement vise à la supprimer, afin que les entreprises assument leurs responsabilités et ne puissent pas se soustraire à l'obligation d'atteindre les quotas fixés. Je rappelle que le quota de 6 % existe depuis 1987 ; notre priorité devrait donc être de l'augmenter et certainement pas d'atténuer la responsabilité des entreprises en la matière.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 1760 .
Il est motivé par l'incompréhension que nous inspire un gouvernement qui prétend faire de l'insertion des personnes en situation de handicap une « priorité » – je reprends les mots employés par la ministre déléguée, Mme Fadila Khattabi –, mais qui continue de donner des gages aux entreprises pour leur permettre d'échapper à leurs obligations d'emploi de ces personnes. Le présent amendement vise donc à supprimer la disposition réduisant le montant de la contribution en cas de non-respect de l'OETH, si l'entreprise maintient dans l'emploi ou recrute des personnes dont la lourdeur du handicap a été reconnue.
Je dois vous faire part de mon étonnement face au non-sens légistique de cet alinéa, puisqu'il suffit à l'employeur de respecter l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés pour ne pas avoir à payer de contribution. Ce non-sens révèle l'intention derrière la proposition : il s'agit de permettre aux entreprises de passer par la sous-traitance pour ne pas avoir à recruter directement de personnes en situation de handicap.
Alors que les entreprises doivent compter, je le rappelle, au moins 6 % de personnes en situation de handicap, elles n'atteignent en moyenne, trente-six ans après l'instauration de cette obligation, qu'une proportion de 3,5 %. Notre question est la suivante : comment voulez-vous que le travail en milieu ordinaire soit la norme si, au lieu de renforcer les obligations des employeurs, vous leur donnez carte blanche pour recourir à la sous-traitance ?
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et SOC.
Je voudrais tout de même vous rappeler que c'est le Sénat qui a introduit ce dispositif…
…et que nous allons évidemment revenir dessus. Cependant, je vous demanderai de retirer vos amendements au profit du mien, le n° 1828, que nous examinerons juste après…
…et qui vise à conférer une base légale à un dispositif existant qui a le même objectif : l'aide à l'emploi des travailleurs handicapés (AETH).
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, pour donner l'avis du Gouvernement.
Puisque c'est la première fois que je m'exprime en tant que ministre ,
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR
sachez que je suis ravie de vous retrouver. Je voulais d'abord rassurer M. Delaporte : ne vous inquiétez pas, le ministre Dussopt sera bien présent tout au long de l'examen du texte.
« C'est dommage ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je tenais à le dire : je me réjouis que M. le ministre Dussopt se soit saisi du sujet de l'emploi des personnes en situation de handicap. En effet, même si leur situation s'est améliorée, il reste encore beaucoup à faire ; vous devriez donc plutôt, monsieur le député, vous réjouir de ces deux articles qui concernent les personnes en situation de handicap – et plus globalement les personnes en situation de vulnérabilité.
Partout, lors de nos déplacements, ces personnes nous disent qu'elles ont le droit, elles aussi, de travailler, et qu'elles ont surtout le droit de bénéficier des dispositifs relevant du droit commun. C'est le sens d'une démarche inclusive et j'espère, monsieur Delaporte, que vous en prendrez bonne note. Mme la rapporteure l'a très bien expliqué,…
Ne vous inquiétez pas : les chakras sont ouverts !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Je vous propose de retirer vos amendements au profit de celui de Mme Le Nabour, que nous examinerons juste après. À défaut, avis défavorable.
Mme Natalia Pouzyreff applaudit.
La représentation nationale est là pour travailler sur le texte : il faut donc y revenir. Je veux bien que l'on simplifie les choses pour éclairer les députés présents, mais on fait dire à cet alinéa 2 du présent article davantage que ce qu'il contient. En effet, il se contente de compléter l'article L. 5212-9 du code du travail, selon lequel « tout employeur qui n'a pas satisfait à l'obligation mentionnée à l'article L. 5212-2 est tenu de s'en acquitter en versant une contribution annuelle, dans des conditions fixées par décret, pour chacun des bénéficiaires de l'obligation qu'il aurait dû employer. » Le Sénat a proposé d'ajouter une phrase précisant que le montant de la contribution « tient également compte de l'effort consenti par l'entreprise en matière de maintien dans l'emploi ou de recrutement direct des bénéficiaires […] pour lesquels a [été reconnue] la lourdeur du handicap. » Il ne s'agit donc pas du tout de supprimer la contribution !
L'alinéa ajouté par le Sénat éclaire donc le Gouvernement en vue de la rédaction du décret. Ne soyons pas hypocrites : pour ce qui est des personnes en situation de handicap, il y a des embauches plus faciles que d'autres ! Il faut donc prendre en compte le fait que certains employeurs consentent des efforts plus importants, en ayant le souci d'encourager l'insertion professionnelle de personnes dont la lourdeur du handicap a été reconnue par l'Agefiph. Voilà ce à quoi se limite l'ajout du Sénat ! Vous lui faites dire beaucoup de choses que l'on trouve certes à d'autres endroits de l'article, mais pas dans cet alinéa 2. Vous voulez ainsi le supprimer alors qu'il ne fait que préciser la teneur du décret, en complétant l'article du code du travail que j'ai mentionné, sans le remplacer ni le modifier. Il ne s'agit pas de raboter, mais bien de proposer une vision plus globale afin de tenir compte de ceux pour qui les freins à l'insertion professionnelle sont les plus importants.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 183
Nombre de suffrages exprimés 183
Majorité absolue 92
Pour l'adoption 75
Contre 108
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 1828 .
Le Sénat a en effet réintroduit dans le code du travail ce dispositif, qui avait été supprimé par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Or cela ne paraît pas pertinent, parce qu'il existe un autre dispositif que l'entreprise peut mobiliser aux mêmes fins : l'aide à l'emploi des travailleurs handicapés, qui est attribuée au titre de la reconnaissance de la lourdeur du handicap. Elle est versée pour une durée de trois ans renouvelable et son montant, qui varie en fonction de la lourdeur du handicap de la personne employée, peut dépasser 6 000 euros par an pour une décision à taux normal et 12 000 euros par an pour une décision à taux majoré.
La réintroduction de ce dispositif ajouté par le Sénat reviendrait à favoriser les employeurs ne respectant pas l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés – qui doivent compter pour 6 % des salariés –, aux dépens des employeurs qui s'acquittent de leur obligation légale et ne pourraient bénéficier que de l'aide existante, mais pas du dispositif ainsi réintroduit.
Le présent amendement substitue donc à ce que propose le Sénat un dispositif qui confère une base légale, comme je l'ai dit précédemment, à l'aide à l'emploi des travailleurs handicapés.
Avis favorable. Très bien défendu !
Madame la rapporteure, vous dites que vous allez donner une base légale à l'AETH. Mais la base légale existe déjà ! Je comprends le tour de passe-passe légistique qui vous a été conseillé afin de justifier la suppression de cet alinéa du Sénat, mais le dispositif existe déjà. Certes, vous en précisez certains aspects, mais nous pourrions tout à fait conserver l'alinéa du Sénat, qui contient lui aussi des précisions utiles, tout en votant votre amendement ! Pourquoi voulez-vous supprimer la mention du Sénat ? En quoi vous pose-t-elle problème ?
Elle n'est pourtant pas prescriptive : elle peut servir au Gouvernement et je sens le ministre, ainsi que la ministre déléguée, à l'écoute – ils veulent que nous parvenions finalement à un accord sur le texte.
Sourires sur les bancs du Gouvernement.
Je ne comprends donc pas pourquoi vous voulez la supprimer ! Le constat est clair : des difficultés existent qui freinent l'emploi et donc l'insertion des personnes en situation de handicap, en particulier celles dont le handicap a été reconnu comme très lourd. Vous dites qu'un dispositif existe pour traiter leur cas et qu'il va être pris en compte, mais ce que propose le Sénat, c'est de compléter la portée du décret en allant encore plus loin, afin d'accompagner encore plus les employeurs qui font un effort supplémentaire.
Monsieur le ministre, je ne suis pas contre la précision apportée par Mme la rapporteure mais je trouve dommage de supprimer ce que vous proposait le Sénat, c'est-à-dire un peu de souplesse permettant d'adapter le dispositif et peut-être d'accompagner encore mieux ceux qui font des efforts en matière d'insertion des personnes en situation de handicap, notamment celles dont le handicap a été reconnu comme particulièrement lourd.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
La parole est à M. Jean-François Coulomme, pour soutenir l'amendement n° 1493 .
Pour illustrer la défense de cet amendement, je vais vous lire un extrait de l'encyclopédie morale du XIX
« D'une voix artificielle, plaintive et monotone, ils articulent, en traînant, le nom de Dieu, et vous poursuivent dans les rues avec ce nom sacré ; mais ces misérables ne craignent ni sa justice ni sa présence. Ils mentent à chaque passant. Entretenus par les aumônes, ils font semblant d'être souffrants, mutilés, pour se dérober au travail qu'ils détestent […] ; mais, quand la nuit vient, suivez ces vagabonds dans le cabaret reculé de quelque faubourg, lieu du rendez-vous ; vous verrez tous ces estropiés, droits et dispos, se rassembler pour leurs bruyantes orgies […] Ils boivent, ils chantent, ils s'enivrent.
À rebours de cette vision misérabiliste et culpabilisatrice, nous souhaitons protéger les handicapés, que vise l'esprit de cette loi, en particulier de cet article 8. Établir une liste des handicaps irréversibles, qui fera l'objet d'une actualisation annuelle, et dresser ainsi un inventaire actualisé des pathologies et maladies invalidantes permettra aux personnes en situation de handicap d'être exemptées des rigueurs de la logique de votre loi.
Vous souhaitez que l'évolution des pathologies, maladies invalidantes et autres formes de handicap soit prise en compte dans le processus de reconnaissance du handicap. L'article L.5213-2 du code du travail prévoit déjà que la qualité de travailleur handicapé est attribuée de façon définitive lorsque le handicap est irréversible. Le projet de loi ne modifie pas ce principe.
Du reste, je ne suis pas favorable au principe de l'établissement d'une liste de handicaps : il serait illusoire de parvenir à une liste exhaustive, ce qui nous ferait courir le risque d'omettre certaines situations. Avis défavorable.
L'amendement n° 1493 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Avant d'en venir à l'amendement, je rappelle que c'est la loi Macron de 2015 qui a démultiplié les possibilités pour les entreprises de contourner l'obligation d'employer 6 % de travailleurs handicapés.
L'amendement porte sur les départs anticipés en retraite, qui sont soumis à différentes contraintes, le nombre de trimestres cotisés mais aussi le taux d'incapacité permanente dont le travailleur doit pouvoir justifier. Issu des propositions formulées par le collectif Handicaps, il propose que la délivrance de la RQTH soit systématiquement assortie d'un taux d'incapacité, afin de faciliter les départs en retraite anticipée.
Sachez que les personnes en situation de handicap passent en moyenne 8,5 années sans emploi après 50 ans, contre 1,8 année pour l'ensemble de la population. Cette situation les pousse à retarder au maximum leur départ en retraite pour valider le plus de trimestres possible – elles liquident leur retraite à 62,4 ans en moyenne – alors qu'elles ont souvent une espérance de vie minorée. La possibilité de partir en retraite plus tôt permettrait peut-être un certain rééquilibrage.
La parole est à Mme Fatiha Keloua Hachi, pour soutenir l'amendement n° 903 .
Le taux d'incapacité doit être mentionné lors de l'attribution de la RQTH. Il s'agit d'éviter aux bénéficiaires potentiels un travail laborieux de reconstitution a posteriori du taux pour prétendre au bénéfice de la retraite anticipée.
Si l'article 8 tend à faciliter l'accès à la RQTH et aux droits qu'elle confère, il n'est pas prévu que la délivrance de la RQTH soit assortie d'un taux d'incapacité. Or, pour partir en retraite anticipée, les personnes en situation de handicap ont absolument besoin que cette précision soit mentionnée. Les associations rapportent de nombreux témoignages de personnes qui errent pour retrouver des justificatifs témoignant d'une incapacité supérieure à 50 %. Le problème n'a pas été réglé par la dernière réforme des retraites, adoptée au printemps dernier.
La parole est à M. Benjamin Saint-Huile, pour soutenir l'amendement n° 1055 .
Travaillé avec le collectif Handicaps, il vise à faciliter les départs en retraite anticipée. Nous n'avons pas pu avancer sur le sujet lors de la dernière réforme des retraites, qui a soulevé les passions. Le présent texte nous offre l'occasion de créer les conditions qui faciliteraient l'anticipation de la retraite pour les bénéficiaires potentiels de la RQTH : la mention du taux d'incapacité leur éviterait une espèce de labyrinthe administratif conduisant à une impasse. Merci pour eux.
Si je ne souhaite pas refaire le débat sur la réforme des retraites ce soir, il me semble néanmoins nécessaire de permettre un accès simplifié à la retraite anticipée pour les personnes en situation de handicap. Pour pallier le manque de document justifiant le taux d'incapacité, la RQTH doit le mentionner. Avouez qu'il s'agirait d'une mesure de bon sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Depuis maintenant dix ans, pour avoir droit à un départ en retraite anticipée, c'est-à-dire avant l'âge légal, il ne faut plus seulement disposer d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, il faut arborer un taux d'invalidité d'au moins 50 %.
En dix ans, il s'est passé beaucoup de choses : à l'époque, M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion était encore socialiste et n'avait pas encore volé deux ans de retraite à tout le pays.
M. François Cormier-Bouligeon s'exclame.
Cette évolution, révélatrice sur le plan politique, conduit à une injustice criante : la RQTH n'implique pas la reconnaissance d'un taux d'invalidité, cette dernière devant faire l'objet d'une autre demande. Ce faisant, la majorité de l'époque a dressé un nouvel obstacle sur le chemin des personnes en situation d'invalidité qui souhaiteraient exercer leur droit à partir à un âge où elles ne sont pas encore totalement abîmées par leur poste de travail.
Nous voulons donc faire en sorte que la RQTH soit systématiquement assortie de la notification du pourcentage d'invalidité associé. Ces personnes ont un droit reconnu par la loi, mais techniquement, elles ne peuvent l'exercer en raison de formulaires administratifs et de tracasseries bureaucratiques.
Que signifie le taux de 50 % d'invalidité dont il est ici question ? Il peut, par exemple, correspondre à la perte d'un pied, d'un genou ou de la voix. Quelqu'un qui a perdu ces différents attributs – et a donc une telle invalidité reconnue – passe néanmoins par un parcours du combattant pour partir dès 55 ans à la retraite. C'est injuste. Adopter cet amendement permet de rendre justice à ces personnes. Il est temps.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 1739 .
Avec cet amendement, travaillé avec le collectif Handicaps, nous proposons que la notification d'attribution de la qualité de travailleur handicapé précise le taux d'incapacité.
Cette mesure permettra de faciliter les départs en retraite anticipée des travailleurs handicapés (RATH). Depuis la réforme de 2014, les associations reçoivent de nombreux témoignages de personnes ne pouvant faire valoir leurs droits à la retraite anticipée parce qu'elles n'ont pas les justificatifs exigés par les organismes de retraite, la RQTH n'étant plus un justificatif valable.
Puisque l'article propose une évolution de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, nous proposons de prévoir aussi la mention du taux d'incapacité lors de l'attribution de la RQTH.
La loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 a facilité l'accès au dispositif de retraite anticipée pour les travailleurs en situation de handicap, en abaissant de 80 % à 50 % le taux d'incapacité autorisant la saisine de la commission nationale chargée de valider rétroactivement les périodes de handicap pour lesquelles l'assuré ne dispose pas de justificatif.
Le présent projet de loi vise précisément à simplifier et à accélérer l'attribution de la RQTH pour faciliter l'insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. Or le fait d'indiquer systématiquement le taux d'incapacité sur les RQTH ralentirait le processus.
L'assuré qui ne possède pas les justificatifs peut s'adresser au secrétariat de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), compétent pour établir des attestations ou des duplicatas. Si la CDAPH ne peut pas établir les documents demandés, l'assuré peut, sous certaines conditions, produire une déclaration sur l'honneur, dès lors qu'il a saisi la commission d'une demande de reconnaissance d'une incapacité permanente ou d'une demande de RQTH. À défaut, la caisse de retraite lui propose de saisir la commission nationale placée auprès de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), dès lors qu'il remplit plusieurs conditions.
En conclusion, il existe des mécanismes qui permettent de prouver la réalité du taux d'incapacité pour bénéficier de la retraite anticipée. Avis défavorable.
Pour des raisons totalement identiques à celles évoquées par Mme la rapporteure, j'émets aussi un avis défavorable. Nous avons eu ce débat au moment de l'examen de la réforme des retraites avec les mêmes arguments de part et d'autre.
J'ai senti revenir la réforme des retraites, source de profondes divisions. Peut-être faudrait-il mettre de côté ces sujets alors que nous examinons l'article 8, qui témoigne d'une réelle volonté de travailler sur l'emploi des personnes en situation de handicap ? Centrons-nous sur les personnes en situation de handicap qui veulent que l'on ne voie pas leur handicap, même s'il existe et qu'il faut en tenir compte.
Cette intervention m'étonne : notre collègue nous explique qu'il ne faudrait pas parler de retraite au moment où il est question du droit à la retraite des personnes en situation de handicap. De quoi faut-il parler alors, de leur handicap ou de leurs droits ? Ce n'est pas très sérieux.
Nous discutons ici d'une revendication de justice fondamentale : l'exercice d'un droit reconnu par notre loi commune, mais entravé par un obstacle de caractère bureaucratique – le fait que l'on ne remette pas automatiquement le papier permettant le départ anticipé.
Il ne s'agit pas de revenir sur la réforme des retraites – même si nous sommes toujours disponibles si vous le souhaitez… Nous voulons seulement que les personnes en situation de handicap puissent exercer pleinement leurs droits, en faisant en sorte que la RQTH soit systématiquement assortie d'une notification du taux d'invalidité. Connaissant son taux, la personne saura à quel âge elle pourra partir en retraite. Elle pourra faire ses projets de vie, savoir comment elle s'investit au boulot. Ces amendements touchent à des questions très ordinaires du quotidien, et j'espère qu'ils seront adoptés.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 1077 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 153
Nombre de suffrages exprimés 149
Majorité absolue 75
Pour l'adoption 65
Contre 84
Depuis l'adoption de la loi « 3DS » en 2022, les jeunes en situation de handicap, âgés d'au moins 16 ans et déjà connus par la MDPH au titre de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH), de la prestation de compensation du handicap (PCH) enfant ou d'un projet personnalisé de scolarisation, bénéficient d'une équivalence de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. Cette disposition leur évite une démarche administrative et leur permet de bénéficier rapidement des droits et dispositifs concernant les emplois ouverts aux personnes handicapées, notamment les aides dédiées à l'apprentissage.
En 2022, nous avons ainsi franchi le cap des 10 000 personnes en situation de handicap commençant un apprentissage, avec 11 700 nouveaux apprentis, contre 4 700 en 2019. Lors de l'examen du texte au Sénat, le Gouvernement a fait adopter un amendement visant à étendre le bénéfice de cette disposition jusqu'à l'âge de 20 ans, afin de favoriser la transition avec les droits dont bénéficient les adultes.
Avec le présent amendement, nous proposons d'abaisser l'âge des jeunes susceptibles de bénéficier de cette équivalence à 15 ans, pour sécuriser leur entrée dans le parcours vers l'emploi, en particulier dans le cadre d'un contrat d'apprentissage, et ainsi favoriser les transitions, à 15 ans comme à 20 ans.
Je remercie le Gouvernement de défendre cet amendement qui représente une charge au sens de l'article 40 de la Constitution. Avis favorable.
Nous soutenons pleinement cet amendement. Nous nous demandons même si cette dynamique en faveur de l'insertion professionnelle des personnes en situation de handicap ne pourrait pas s'étendre aux jeunes relevant du droit commun, afin d'améliorer leur insertion professionnelle dès le plus jeune âge. Nous estimons en effet que l'apprentissage pourrait commencer beaucoup plus tôt.
Pour viser le plein emploi, il nous faut mettre sur la table cette question, envisager de revenir sur le collègue unique et d'ouvrir plus largement les voies de professionnalisation.
L'amendement n° 1966 est adopté.
La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat, pour soutenir l'amendement n° 1801 .
Il vise à changer la dénomination des établissements et services d'aide par le travail en remplaçant le mot « aide » par le mot « accompagnement ». Une telle modification fait consensus, en particulier auprès des représentants du secteur. Elle est justifiée par l'évolution des missions prévue dans le plan de transformation des Esat ainsi que par les dispositions de la loi « 3DS » et des décrets d'application des 13 et 22 décembre 2022.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
C'est une question de sémantique, mais en lien avec le plan de transformation des Esat. Avis favorable.
Même avis.
Nous comprenons bien l'intérêt de cet amendement : il s'agit d'opérer un changement sémantique en renommant les Esat. Toutefois, ce qui nous pose problème dans leur intitulé n'est pas tant le mot « aide » que le mot « travail »,…
Exclamations sur les bancs du groupe RE
…les personnes accueillies en Esat étant sous-payées. Je profite donc de cet amendement pour plaider…
Vous voyez, vous êtes contre la coconstruction : dès que l'opposition dit quelque chose, vous hurlez sans écouter la fin de la phrase. C'est dingue, l'attitude de cette majorité !
Murmures sur les bancs du groupe RE.
Nous avons un problème avec le sens que vous donnez au mot « travail » : nous estimons que tant qu'on pourra payer les employés des Esat à hauteur de 55 % du Smic, il n'y aura pas reconnaissance de leur travail.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'urgence est de progresser vers le statut de salarié. Nous serons toujours disposés à voter des mesures allant dans ce sens.
L'occasion nous est donnée, par cet amendement, de répéter que la reconnaissance du droit au salaire des personnes travaillant en Esat est la priorité – sans quoi on ne saurait parler de « travail ».
Mêmes mouvements.
L'amendement n° 1801 est adopté.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 1740 .
Il tend à préciser les modalités d'organisation du dispositif d'emploi accompagné, en indiquant que l'accompagnement prévu dans ce cadre intègre une expertise dans les domaines relevant des champs de l'insertion professionnelle, du social et du médico-social, et ne fait l'objet d'aucune restriction quant à sa durée.
L'emploi accompagné permet aux personnes en situation de handicap d'accéder à l'emploi en milieu ordinaire et de s'y maintenir, en bénéficiant d'un accompagnement. Nous nourrissons déjà de sérieux doutes quant aux moyens qui seront accordés pour permettre aux équipes de France Travail d'accompagner au mieux ces personnes. Par cet amendement, issu des recommandations du collectif Alerte, nous souhaitons nous assurer que le dispositif d'emploi accompagné ne dérivera pas vers une logique productiviste.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Le dispositif d'emploi accompagné est plébiscité, bien que peut-être encore mal connu. L'article L. 5213-2-1 du code du travail prévoit déjà qu'il inclut « un accompagnement médico-social et un soutien à l'insertion professionnelle », qui permettent aux bénéficiaires « d'accéder et de se maintenir dans l'emploi rémunéré sur le marché du travail ». Il s'adresse en particulier aux individus atteints d'un handicap invisible.
Ce dispositif présente la particularité de proposer un soutien à la fois aux travailleurs et à l'employeur : il peut être sollicité tout au long du parcours professionnel en complément des services, aides et prestations existants. L'état du droit me semble donc satisfaire votre demande, au moins en partie. Avis défavorable.
Vos propositions relèvent du domaine réglementaire, mais elles nous conviennent pour l'essentiel. Malgré quelques points de divergence, nous nous accordons sur la nécessité de revoir, avec les acteurs concernés, les définitions applicables en matière d'emploi accompagné. J'assistais ce matin à l'ouverture des Journées nationales de l'emploi accompagné à Lyon, où cette question a été abordée.
Votre amendement est l'occasion pour moi de redire que nous y croyons. En 2020, l'État consacrait ainsi – c'est parfois à cela que l'on mesure la foi – 14 millions d'euros à cette question, auxquels s'ajoutaient 7 millions versés par l'Agefiph et le fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) en 2020. Cette année, cet engagement atteint 25,7 millions pour l'État et 15 millions pour les deux fonds. Pour l'an prochain, l'État inscrit 38,7 millions à son budget et la contribution des fonds ne sera pas inférieure au montant mobilisé cette année. Notre objectif consiste à accompagner 25 000 personnes, contre 7 500 actuellement et 2 500 il y a trois ans.
Le reste de l'amendement relève vraiment du domaine réglementaire. Nous pourrons y revenir, mais j'émets un avis défavorable pour cette seule raison.
L'amendement n° 1740 n'est pas adopté.
Il vise à sanctuariser le fonctionnement en plateforme de l'emploi accompagné. À l'article 8, l'État réaffirme sa volonté de piloter le dispositif tout en l'ouvrant à des acteurs extérieurs au secteur médico-social. Cette ouverture fait craindre une désorganisation alors que le dispositif monte en charge – l'objectif est de 30 000 personnes accompagnées d'ici la fin du quinquennat, contre 7 666 personnes fin 2022.
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l'amendement n° 1494 .
Vous souhaitez ouvrir le dispositif de l'emploi accompagné à de nouveaux acteurs et mobiliser ainsi de nouveaux intervenants, parfois extérieurs au secteur médico-social. Pourquoi pas ? On peut en débattre. Le problème réside dans la méthode : vous expliquez que ces personnes seront désignées par conventionnement, c'est-à-dire sans que soient définies a priori des règles permettant de délimiter la nature des acteurs en question : nous ne savons pas exactement de qui il s'agira, quels seront leur statut, leurs modalités d'organisation et même leurs objectifs.
Ce problème se posera d'autant plus vivement que vous voulez quadrupler le nombre de bénéficiaires – ce dont, là encore, on peut débattre. Nous n'avons pas d'objection de principe, mais nous sommes confrontés à un double écueil : nous ignorons qui seront ces acteurs et comment ils seront choisis ; nous avons une confiance limitée dans les conventionnements prévus.
Cet amendement vise à réécrire le IV de l'article L. 5213-2-1 du code du travail pour maintenir le fonctionnement en plateforme des structures existantes, qui font très bien leur travail.
L'objet de ces amendements n'est pas tout à fait celui que vous décrivez, monsieur Clouet.
Votre demande est satisfaite : je vous renvoie à l'alinéa 12, qui dispose que le dispositif est « organisé par l'État sous la forme de plateformes départementales de services intégrés ». Avis défavorable.
Même avis.
Merci pour cette relecture de nos amendements, madame la rapporteure. Il me semble malheureusement que vous en avez oublié une partie : nous souhaitons préciser que les services intégrés « mutualis[e]nt les moyens et savoir-faire des acteurs du médico-social et de l'emploi ». La rédaction proposée précise ainsi qui sont les acteurs concernés. Je comprends qu'elle fasse débat – nous sommes là pour ça –, mais lisez tout de même nos amendements jusqu'au bout !
Il vise à encadrer le recours aux CDD par les entreprises adaptées, notamment en précisant qu'elles devront respecter certaines règles de droit commun – pour remplacer un salarié ou en cas d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, par exemple.
L'amendement n° 1761 de M. Sébastien Peytavie est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques ?
La modification que vous proposez ne me semble pas opportune, car elle s'articule mal avec la modification apportée en commission des affaires sociales : le texte prévoit désormais que le CDD tremplin a vocation à être conclu sur le fondement de l'article L. 1242-3 du code du travail, lequel autorise la conclusion d'un CDD au titre de dispositions légales destinées à favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi. Suivant cette logique, le texte prévoit que le contrat pourra déroger aux dispositions du code du travail relatives à la durée des CDD et aux conditions de leur renouvellement, ou encore aux règles encadrant les modalités de suspension ou de rupture du contrat à l'initiative du salarié. Avis défavorable.
Il vise à encadrer le recours aux contrats de mission par les nouvelles EATT, en prévoyant notamment qu'un décret sera pris après avis des associations représentatives des travailleurs en situation de handicap.
La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l'amendement n° 1275 .
Nous reprenons l'excellent amendement présenté par le groupe Socialistes et apparentés en commission. Le fait que les personnes en situation de handicap bénéficient des dispositifs de droit commun d'entrée sur le marché du travail est une bonne chose – si tant est, bien évidemment, que les professionnels de France Travail soient formés pour accompagner cette évolution, ce qui n'est hélas pas prévu. Nous aurions également pu nous passer de la logique d'obligations et de sanctions qui préside à l'ensemble du texte.
Mais attention : cette volonté ne doit être ni un cheval de Troie de la précarité pour l'ensemble des travailleurs, ni un prétexte pour condamner les personnes en situation de handicap à toujours plus de précarité. Il faut donc encadrer le recours aux contrats de mission. Nous souhaitons qu'un décret, pris après avis des associations représentatives des travailleurs en situation de handicap, définisse les conditions dans lesquelles les nouvelles EATT pourront porter à vingt-quatre mois la durée des contrats de mission ou déroger à la durée hebdomadaire minimale de travail, en prévoyant des règles précises.
Ces règles devront être cohérentes avec les actions d'accompagnement et de formation professionnelle conduites auprès du travailleur : ce n'est qu'en partant du projet professionnel de la personne concernée qu'on peut en venir à déroger au code du travail, et en aucun cas en fonction des intérêts de l'employeur. L'entreprise ne doit pas pouvoir profiter de cette souplesse pour précariser encore davantage le travailleur, sous prétexte qu'elle emploie une personne en situation de handicap. Ces travailleurs ont le droit à la stabilité, et non à la précarité !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Notre objectif n'est nullement d'accroître la précarité : comme l'article 79 de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, le futur article L. 5213-13-3 prévoit que la durée du contrat de mission, comme le temps de travail hebdomadaire, pourra déroger aux règles fixées par le code du travail uniquement lorsque le cas de la personne en situation de handicap le justifie.
Le renvoi au décret ne paraît pas pertinent. À toutes fins utiles, je précise que l'article 8 a fait l'objet d'un avis favorable du CNCPH, le Conseil national consultatif des personnes handicapées. Avis défavorable.
Même avis.
Comme à chaque fois, vous nous expliquez que vous êtes d'accord sur le fond, que la mesure est déjà prévue puis vous donnez un avis défavorable. Si vous êtes d'accord sur le fond, reprécisez les choses !
Je peux vous dire que les associations représentatives des travailleurs en situation de handicap ne veulent pas que des décisions soient prises sans qu'elles y soient associées. Qu'un décret soit pris après leur avis me semble tout de même la moindre des choses.
Plus généralement, arrêtez d'arguer que, sur le fond, vous êtes d'accord avec les mesures que nous réclamons et qu'elles sont même déjà prévues. En réalité, vous n'en voulez pas. Ayez un peu d'honnêteté !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
L'amendement n° 1383 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'Agefiph – dans le secteur privé – et le FIPHFP dans la fonction publique doivent pouvoir participer au réseau des acteurs de l'insertion et de l'emploi ainsi qu'au comité national de France Travail.
L'amendement n° 1967 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement n° 1080 .
Je sais bien qu'on accorde peu d'importance aux évaluations, y compris à celles qui portent sur des expérimentations, mais je vous propose d'en tenir compte pour une fois. Il s'agit de repousser de trois mois la mise en œuvre des dispositions de cet article, autrement dit la généralisation et la pérennisation du CDD tremplin et de l'EATT. Cela permettra d'attendre les résultats de l'évaluation confiée à la DGEFP, la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle.
Ce projet de loi ne prévoit pas seulement la pérennisation du dispositif tremplin, il le modifie en portant la durée du CDD à vingt-quatre mois et jusqu'à soixante mois en cas de renouvellement, dans des conditions qui seront définies par décret en Conseil d'État. Sachant que 32 % des personnes en situation de handicap sont déjà embauchées à temps partiel, cette extension des dimensions du CDD mérite d'être sérieusement évaluée avant d'entrer dans le droit commun.
Si l'on n'y regarde pas de plus près, on risque en effet de créer un appel d'air qui ne profitera qu'aux entreprises adaptées remplissant facilement leur obligation d'emploi. Les travailleurs en situation de handicap, eux, seront davantage enfermés dans la précarité alors même qu'ils devraient acquérir plus d'autonomie grâce à leur emploi.
Par ailleurs, il nous semble toujours de bonne politique d'attendre qu'une évaluation soit arrivée à son terme pour légiférer.
La portée de votre amendement est nettement plus large puisqu'il vise à repousser au 1er avril 2024 l'entrée en vigueur de la majorité des mesures figurant à l'article 8. Cela ne semble pas justifié.
En outre, les deux dispositifs donnent de bons résultats, notamment au vu des taux de sortie en emploi durable. C'est ce qu'ont confirmé les représentants du secteur de l'emploi adapté et des associations durant les auditions.
Même avis.
Si mon amendement vous semblait trop généreux, vous pouviez le sous-amender.
Une nouvelle fois, nous sommes obligés de vous croire. Une expérimentation est en cours et, d'après l'analyse que vous en avez déjà faite, tout se passe formidablement bien – nous devons donc être d'accord avec vous. Pourtant, une expérimentation est censée donner lieu à une évaluation contradictoire, objectivée, qui s'appuie sur des données à partir desquelles nous pouvons discuter, débattre et éventuellement être en désaccord.
Je me permets donc d'insister en demandant d'attendre la publication des travaux d'évaluation définitifs – trois mois, ce n'est pas très long –, avant de mettre en œuvre les nouvelles dispositions.
M. Arthur Delaporte applaudit.
On a l'impression, monsieur le ministre, que vous avez un problème avec les expérimentations. Vous les lancez, vous les laissez suivre leur cours, vous demandez à des personnes de mettre en place des processus d'évaluation… mais vous n'attendez pas les résultats pour présenter le texte devant le Parlement. C'est à se demander pourquoi vous procédez à ces expérimentations !
Ou bien elles n'ont aucun intérêt, et ce n'est alors pas la peine de demander à des personnes de perdre leur temps à y travailler, ou bien elles ont un véritable intérêt et il faut attendre qu'elles arrivent à leur terme pour en tirer le bilan et déterminer les mesures à prendre.
L'amendement n° 1080 n'est pas adopté.
Les entreprises adaptées qui salarient des collaborateurs en CDD tremplin ont recours au modèle de la prestation de service au sein des entreprises clientes où ces travailleurs sont affectés. Ainsi, elles peuvent faire appel à des encadrants qui les accompagnent socialement et professionnellement et leur transfèrent un savoir-faire métier en lien avec l'activité de l'entreprise cliente.
Les collaborateurs en CDD tremplin qui s'immergent ainsi dans l'entreprise cliente peuvent découvrir et s'habituer aux processus opérationnels de celle-ci. Cette condition est un prérequis pour qu'ils soient ensuite embauchés, ce qui est bien sûr l'objectif de ce type de contrat.
Cependant, selon l'inspection du travail, lorsqu'un salarié effectue un travail en lien avec les processus et l'outil opérationnel de l'entreprise alors qu'il est en prestation de service, celle-ci peut être requalifiée en prêt de main-d'œuvre illicite. Cela pénalise fortement les modalités de développement du CDD tremplin.
Nous proposons donc d'exclure le CDD tremplin du champ de la loi sur le prêt de main-d'œuvre illicite. Il s'agit d'autoriser, à titre dérogatoire, une opération de prêt de main-d'œuvre à titre lucratif avec une pleine immersion et un accompagnement des collaborateurs en CDD tremplin dans l'entreprise accueillante. Cet amendement a été travaillé avec le collectif Handicaps.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – Mme Ségolène Amiot applaudit également.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement n° 1333 .
Comme vient de le dire notre collègue, il s'agit d'exclure le CDD tremplin du champ de la loi sur le prêt de main-d'œuvre illicite, notamment au vu de l'intérêt qu'il présente pour les entreprises adaptées.
Lors de la présentation d'un amendement similaire au Sénat, le Gouvernement a proposé de prendre pour cadre la mise à disposition à titre non lucratif, adossée à une convention d'appui à titre onéreux. Cette modalité ne répond pas à notre objectif, qui est d'accompagner la pleine intégration du salarié dans le cadre du CDD tremplin. Elle s'effectuerait au préjudice économique de l'entreprise adaptée puisque le montant de l'aide octroyée par l'État dans le cadre de la mise à disposition représente la moitié de celui de l'aide accordée dans le cadre d'une prestation de CDD tremplin.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Le cadre juridique actuel ne présente aucune faille puisqu'il permet aux entreprises adaptées de recourir au statut de la mise à disposition plutôt qu'à la prestation de service.
Grâce à la mise à disposition à but non lucratif, le salarié handicapé peut être placé sous l'autorité de l'entreprise cliente sans qu'elle coure le risque d'une infraction au code du travail. Du reste, la mise à disposition n'empêche pas l'entreprise adaptée de continuer à accompagner le salarié.
Par ailleurs, vos amendements visent le 1
La position du Gouvernement est la même que celle de la commission. Ces amendements ont toutefois ceci d'excellent qu'ils nous ont permis de rappeler le cadre juridique, comme nous l'avions fait au Sénat. La mise à disposition répond aux exigences en la matière.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 130
Nombre de suffrages exprimés 104
Majorité absolue 53
Pour l'adoption 103
Contre 1
L'article 8, amendé, est adopté.
Il vise à supprimer la liste des emplois exigeant des conditions d'aptitude particulières, dite Ecap. Celle-ci a été définie en 1987 lors de la mise en œuvre initiale de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) pour accorder une exemption, probablement de manière transitoire, à certaines branches professionnelles. Elle n'a jamais été révisée, en dépit de plusieurs tentatives. Des travaux, menés en 2019, ont abouti à un texte règlementaire qui n'est jamais paru.
Alors que l'accès à un emploi librement choisi est un droit fondamental, l'existence d'une telle liste vient en complète contradiction avec ce principe et la nécessaire implication des entreprises dans la lutte contre les discriminations à l'embauche.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 1741 .
Comme vient de le rappeler mon collègue, la liste des Ecap existe depuis trente-six ans. Si certains métiers peuvent être moins compatibles avec certaines formes de handicap, cette liste constitue un frein absolu à la mise en accessibilité des lieux et des postes de travail. Elle entretient l'idée que ce sont les personnes en situation de handicap qui ne sont pas adaptées au monde du travail alors que c'est bien le manque d'inclusion qui est un obstacle à leur emploi.
Le travail ne pourra pas être un vecteur d'émancipation pour les personnes en situation de handicap si des dispositifs tels que celui-ci permettent encore aux employeurs de fuir leurs obligations. Le groupe Écologiste, en défendant cet amendement suggéré par le collectif Handicap, appelle à une évolution de la législation. Elle passe par la suppression de cette liste qui banalise la discrimination à l'embauche des personnes handicapées.
La loi du 5 septembre 2018 faisait déjà obligation aux branches professionnelles d'engager des négociations en vue de formuler des propositions pour réviser cette liste établie en effet en 1987, mais ce travail n'a pas abouti. Le secteur associatif réclame depuis très longtemps la révision ou la suppression de cette liste.
La Conférence nationale du handicap, en avril dernier, s'est engagée à ce que cette liste soit révisée, mais pas n'importe comment. Seuls les partenaires sociaux, pour qui le sujet revêt une sensibilité particulière en raison notamment des conséquences financières d'une telle évolution, peuvent conduire cette révision. Je propose que l'Assemblée se garde de légiférer avant le terme du processus de concertation. Avis défavorable.
Défavorable.
Quand un pompier, suite à un accident en mission, a été déclaré en inaptitude professionnelle, il a besoin de pouvoir rester dans son service, quitte à ce que son poste soit aménagé en fonction de ses incompatibilités physiques. J'entends que vous souhaitiez laisser les partenaires sociaux négocier en amont, madame la rapporteure, mais il serait bon que l'Assemblée nationale montre, par ces amendements, qu'elle prend elle aussi position.
L'amendement n° 567 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le sort de cet amendement ne s'est pas joué à grand-chose en commission parce qu'il a un caractère presque rédactionnel.
La définition du travailleur en situation de handicap, dans le code du travail, n'est pas la même que celle qui figure au code de l'action sociale et des familles. Cette dernière est à nos yeux mieux-disante car elle est plus claire et englobe plus de cas.
L'article L5213-1 du code du travail dispose que : « est considérée comme travailleur handicapé toute personne dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l'altération d'une ou plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique. » L'article L114 du code de l'action sociale et des familles dispose que « constitue un handicap […]toute limitation d'activité […] subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant. »
Nous proposons que l'article L5213-1 du code du travail renvoie à la définition du handicap figurant à l'article L114 du code de l'action sociale et des familles. Cela permettrait de rendre justice à toutes les formes de handicap.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M Gérard Leseul applaudit également.
L'amendement n° 1759 de M. Sébastien Peytavie est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
On ne peut pas dire, mon cher collègue, que « cet amendement ne s'est pas joué à grand-chose »… puisqu'il n'a pas été défendu en commission. Vous étiez partis vous reposer ; vous ne vouliez pas siéger tard dans la nuit.
Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je reconnais que je suis un peu taquine… Mais il faut bien de temps en temps animer l'hémicycle !
Mouvements divers.
L'article du code du travail définit la qualité de travailleur handicapé – qui permet d'obtenir un aménagement du poste de travail et du temps de travail ainsi que des aides humaines –, tandis que l'article du code de l'action sociale et des familles définit le handicap – qui ouvre droit à des prestations sociales telles que la prestation de compensation du handicap.
On peut admettre qu'il y ait une distinction entre les deux notions, au regard de la différence des droits qui en découlent. Cette distinction ne soulève d'ailleurs pas de difficultés particulières et votre proposition n'a été relayée par aucun des acteurs associatifs que nous avons rencontrés.
J'ajoute que la procédure de reconnaissance par la CDAPH de la qualité de travailleur handicapé, après évaluation de la demande de l'équipe pluridisciplinaire de la MDPH, permet aux demandeurs de faire valoir leurs observations.
Enfin, la modification que vous appelez de vos vœux pourrait provoquer des effets de bord difficilement identifiables dans l'immédiat. Avis défavorable.
Même avis.
Tous les groupes, sauf ceux de la minorité présidentielle et le RN, ont quitté la commission parce qu'ils trouvaient scandaleux que des sujets aussi importants que les personnes en situation de handicap ou la petite enfance soient traités à la hussarde, au cœur de la nuit. Il nous semblait pourtant possible de consacrer une matinée supplémentaire à un examen sérieux de ces thématiques.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Protestations sur de nombreux bancs du groupe RE.
Sur le fond, il va de soi qu'il faut conserver la définition du code de l'action sociale et des familles, bien plus englobante et judicieuse que celle du code du travail, par ailleurs plus ancienne. Harmoniser en faisant référence à la définition du code de l'action sociale des familles permettra de ne pas restreindre la question du handicap à la difficulté d'accès à l'emploi, mais bien de l'étendre à toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société. Il me semble important de reconnaître que des difficultés d'insertion peuvent être imputables à l'environnement de la personne handicapée, d'autant que l'on reconnaît ainsi le caractère interactif du handicap et pas uniquement les altérations de ses capacités.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Madame la rapporteure, vous ne pouvez pas dire que des députés ont quitté la commission pour aller se coucher. Ce n'est pas correct.
Ils ont exprimé leur opposition à un certain mode de travail. Ils en avaient le droit, cela faisait partie du débat. Vous ne pouvez pas discréditer leur action politique en disant qu'ils sont allés se coucher.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a prévu une période transitoire pendant laquelle les dépenses de partenariat et d'adhésion à une association œuvrant pour la formation et l'insertion professionnelle des travailleurs en situation de handicap peuvent être déduites de la contribution due au titre de l'OETH. Cette période prendra fin le 31 décembre 2024.
Cette disposition aura pourtant permis le développement de ces associations au cœur de nos territoires, au plus grand bénéfice des travailleurs en situation de handicap. Nous proposons de la rendre pérenne.
La portée de la modification que vous proposez est plus large puisque votre amendement, s'il était adopté, conférerait un caractère pérenne à toutes les catégories transitoires de dépenses déductibles, pas seulement à la déduction résultant d'un partenariat avec une association ou un organisme œuvrant pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes en situation de handicap. En outre, ce que vous proposez relève du réglementaire et non du législatif. Avis défavorable.
Même avis.
Nous avons travaillé cet amendement avec l'Arpejeh, – Association régionale pour l'éducation et le placement des jeunes handicapés –, qui bénéficie du dispositif prévu à l'article 67 de la loi du 5 septembre 2018, et qui prendra fin le 31 décembre 2024.
J'aurais souhaité, madame la rapporteure, avoir davantage de précisions car le dispositif n'est pas uniquement de nature réglementaire et un engagement du ministre ou de la ministre déléguée sur la pérennisation de cette expérimentation.
Je confirme que nous pouvons le pérenniser par voie réglementaire et que cela sera fait.
L'amendement n° 913 est retiré.
Cet article va dans le bon sens et le groupe Socialistes et apparentés est plutôt pour. Madame la rapporteure, il n'est pas acceptable que vous disiez que nous sommes partis dormir alors que vous vouliez qu'on discute jusqu'à l'aube, sachant que nous siégions depuis neuf heures du matin, sur des sujets aussi essentiels que le handicap. Je vous prie de bien vouloir confirmer que c'était de l'humour, non une attaque contre la représentation nationale.
M. Gérard Leseul applaudit.
Mme la rapporteure l'a dit tout à l'heure, mais peut-être ne l'avez-vous pas entendu.
L'incident est clos.
La parole est à M. Emmanuel Fernandes, pour soutenir l'amendement n° 1495 .
Le présent article crée un dispositif de sac à dos numérique pour les personnes en situation de handicap, qui recense l'ensemble des aménagements dont elles ont bénéficié dans leur parcours.
Cette mesure, retenue lors de la Conférence nationale du handicap, demeure périphérique. La question centrale demeure celle des moyens, et les débats que nous aurons autour du projet de loi de finances – ou pas d'ailleurs, selon le moment fatidique où tombera le couperet du 49.3… – permettront de mesurer votre volonté d'améliorer l'existence des personnes en situation de handicap.
Le sac à dos numérique permettra de faciliter la mise en place de nouveaux aménagements quand la personne en situation de handicap intégrera une formation ou quand elle accédera à un emploi, et de lutter contre les « ruptures d'aménagement ».
Par cet amendement, nous proposons d'étendre le dispositif aux personnes en situation de handicap âgées de 15 ans. Ce serait cohérent avec l'adoption de l'amendement du Gouvernement, qui abaisse à 15 ans l'âge des bénéficiaires d'une équivalence de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé.
Les règles actuelles encadrant l'apprentissage permettent en effet la signature d'un contrat d'apprentissage dès l'âge de 15 ans – ce que nous pouvons par ailleurs regretter, notre philosophie consistant plutôt à prolonger jusqu'à 18 ans l'instruction obligatoire – dès lors que la personne signant ce contrat a accompli une scolarité de premier cycle de l'enseignement secondaire.
Aucune raison valable ne justifierait que des personnes en situation de handicap travaillant dès l'âge de 15 ans aient à franchir des obstacles supplémentaires liés au recueil d'informations et à la portabilité numérique de données touchant aux aménagements dont elles peuvent bénéficier dans leur environnement professionnel ; cela alors même que le sac à dos numérique faciliterait l'insertion professionnelle des travailleurs en situation de handicap âgés d'au moins 16 ans.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Le sac à dos numérique est une disposition introduite par le Gouvernement au Sénat, visant à recenser les aménagements dont une personne en situation de handicap a bénéficié tout au long de sa vie.
La loi ne fixe pas d'âge minimal. Ces informations seront conservées dans un système d'information national géré par la CDC. Elles pourront être consultées par le titulaire d'un CPF, qui pourra en disposer sur un espace personnel au sein d'une plateforme sécurisée. Cette plateforme pourrait être le passeport de prévention ou le passeport de compétences.
Je rappelle que le CPF est ouvert à toute personne âgée de 16 ans et plus ou de 15 ans lorsqu'elle est en apprentissage. Je rappelle également que les travailleurs âgés de 15 ans inscrits dans un parcours professionnel relèvent de la catégorie des apprentis. Les apprentis, dès l'âge de 15 ans, pourront accéder par conséquent à ces informations. Votre intention paraissant satisfaite, j'émets un avis défavorable.
Même avis. L'amendement est satisfait puisque les personnes âgées de 16 ans et plus ayant une activité professionnelle peuvent accéder à un CPF. Or le fait d'avoir un CPF donne droit à la visualisation du passeport. L'accès au CPF, assorti de la même possibilité de visualisation, est avancé pour les apprentis âgés de 15 ans.
L'amendement n° 1495 n'est pas adopté.
L'amendement n° 1387 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Florian Chauche, pour soutenir l'amendement n° 1237 .
Le sac à dos numérique regroupe les informations relatives aux aménagements dont a bénéficié la personne en situation de handicap tout au long de sa scolarité, de sa formation et de sa carrière. Ces informations doivent être facilement accessibles et consultables par le titulaire.
Pour favoriser l'accès et pallier l'illectronisme, nous souhaitons que les informations contenues dans le sac à dos numérique soient délivrées à la demande de l'intéressé dans une version Falc – facile à lire et à comprendre – ou dans une version papier.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Votre amendement est satisfait en ce qui concerne la version Falc. Je précise que les conseillers en évolution professionnelle, qu'on oublie un peu trop, peuvent accompagner gratuitement les personnes qui ont le plus besoin d'utiliser les services numériques.
Ensuite, le Gouvernement a mis en place un réseau de structures labellisées – les maisons France Services –, afin de renforcer la présence des services publics de proximité dans chacun des territoires et d'accompagner les usagers. Ces structures permettent d'obtenir des conseils et de l'aide pour effectuer des démarches administratives ou pour utiliser un service numérique. Grâce à un maillage territorial dense, chacun doit pouvoir y accéder en trente minutes. Avis défavorable.
Même avis.
Je soutiens l'amendement et rappelle que tous les services publics gagnent à utiliser le Falc. Nous aussi, dans notre propagande électorale, dans notre manière de communiquer avec nos concitoyens dans notre territoire, pouvons nous en inspirer. Même si cela représente un effort, c'est utile pour nombre d'entre eux.
M. Arthur Delaporte applaudit.
L'amendement n° 1237 n'est pas adopté.
L'article 8 bis A, amendé, est adopté.
On le sait, un employeur doit aménager un poste de travail afin de le rendre accessible à la personne qui l'occupera – c'est bien sûr le cas des personnes en situation de handicap pour lesquelles on a inventé des outils extraordinaires comme des écrans en braille, des écrans adaptés, des fauteuils spécifiques ; sur les chaînes de montage de l'usine de Safran, des fauteuils se déplient mécaniquement pour que l'employé puisse peindre à plusieurs mètres de hauteur. Des entreprises sont spécialisées dans ce genre d'inventions.
Ce texte prévoit qu'une entreprise peut céder le matériel d'adaptation une autre. Ainsi, quand vous bénéficiez d'un équipement adapté qui vous aide à faire votre travail et à surmonter un handicap, votre entreprise peut transmettre cet équipement à votre nouvelle entreprise, pour peu que vous y occupiez un poste similaire.
Nous proposons d'aller un peu plus loin et d'en faire une obligation : dès lors qu'on est parvenu à trouver la bonne manière d'aider la personne à travailler, que cette personne s'y est habituée et qu'elle a pris goût à son travail, il convient de garantir ce bonheur au travail en obligeant l'entreprise à céder l'ensemble de l'équipement d'adaptation à la nouvelle entreprise. Ce qui n'est qu'une faculté nous paraît de nature à causer des souffrances inutiles. Nous pourrions y mettre fin dès à présent en en faisant un droit à l'adaptation.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Sur l'amendement n° 1742 , je suis saisie par le groupe Écologiste – NUPES d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission ?
Vous proposez de rendre automatique, à l'occasion d'un changement d'employeur, la cession des équipements contribuant à l'adaptation du poste de travail. Il va de soi que la portabilité des équipements doit être encouragée. C'est le sens de l'article 8 bis B, introduit au Sénat par le Gouvernement. C'est aussi le sens de l'amendement n° 1742 de M. Peytavie qui propose d'étendre le dispositif au cas où la mobilité s'effectuerait entre une entreprise privée et un employeur public, amendement auquel je donnerai un avis favorable.
Toutefois, dans certains cas, la cession des équipements ne s'impose pas, ainsi lorsque le nouvel employeur peut mettre à la disposition de la personne handicapée un matériel plus moderne. Je ne pense pas qu'une application automatique de la mesure, qui ne laisserait aucune place à l'intervention du travailleur handicapé dans le processus, soit pertinente. Il me semble indispensable, en revanche, que le ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion communique sur le nouveau dispositif, de sorte que les salariés et les employeurs se l'approprient rapidement – mais je crois savoir que telle est l'intention du Gouvernement. Je donne un avis défavorable.
Défavorable également.
L'amendement de M. Clouet part d'une bonne intention mais le dispositif pourrait se retourner contre le travailleur concerné. Celui-ci pourrait se trouver obligé de travailler avec son ancien matériel alors que la nouvelle entreprise pouvait mettre à sa disposition un nouveau matériel. Il pourrait aussi, dans le cas où il rejoindrait une entreprise proche, ne pas être autorisé à partir avec son matériel très spécialisé. La proposition est intéressante mais elle est si rigide qu'elle pourrait nuire au travailleur lui-même.
Il me semble que l'obligation ne consiste pas à transporter le matériel mais à discuter d'une convention. Dès lors, si un matériel est déjà disponible dans la nouvelle entreprise, il n'y a aucune raison pour que la convention aboutisse à la conclusion qu'il faut transporter l'ancien. Aussi la rigidité que vous craignez me semble-t-elle dépourvue de réalité.
Si on « peut » transporter le matériel d'adaptation, le risque est que ce transfert n'ait pas lieu et que la personne prenne son nouveau poste sans cet équipement et ne puisse donc travailler. Si, comme nous le souhaitons, on « doit » transporter le matériel, quel est le risque ? Qu'il y ait deux équipements ? Eh bien, je prends ce risque !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 116
Nombre de suffrages exprimés 98
Majorité absolue 50
Pour l'adoption 27
Contre 71
L'amendement n° 1236 n'est pas adopté.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 1742 .
Nous savons la lourdeur de la procédure pour monter un dossier auprès de l'Agefiph afin d'obtenir du matériel. L'article 8 bis B rend possible la portabilité des équipements d'aménagement du poste de travail en cas de changement d'employeur, par le biais d'une convention entre les deux entreprises. Cette mesure permet ainsi d'adopter pour le secteur privé les dispositions déjà en vigueur dans la fonction publique. Cependant, le texte ne dit rien concernant les cas où un travailleur handicapé passerait du secteur public au secteur privé, ou inversement.
Le groupe Écologiste propose de combler cette lacune et d'élargir le périmètre de l'article en permettant aux entreprises privées et aux administrations publiques de conclure des conventions de portabilité des équipements d'adaptation du poste de travail. En outre, nous avons pris en considération les suggestions rédactionnelles formulées par Mme la rapporteure en commission. Cela permettra ainsi de couvrir tous les cas de mobilité professionnelle des travailleurs en situation de handicap.
Comme je viens de l'annoncer, je donne un avis favorable à cette avancée.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES. – MM. Arthur Delaporte, Thibault Bazin et Philippe Juvin applaudissent également.
Avis favorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 112
Nombre de suffrages exprimés 112
Majorité absolue 57
Pour l'adoption 112
Contre 0
L'amendement n° 1742 est adopté à l'unanimité.
Applaudissements.
L'article 8 bis B, amendé, est adopté.
Prochaine séance, demain, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la discussion du projet de loi pour le plein emploi.
La séance est levée.
La séance est levée à minuit.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra