Jeudi 6 avril 2023
La séance est ouverte à 17 heures.
(Présidence de M. Guillaume Vuilletet, président de la commission)
La commission auditionne des représentants des chambres de commerce et d'industrie membres de l'Association des chambres de commerce et d'industrie des outre-mer.
Mes chers collègues, nous reprenons les auditions de la commission d'enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la Constitution.
Nous allons entendre, en table ronde, les représentants des chambres de commerce et d'industrie (CCI) membres de l'association des chambres de commerce et d'industrie des outre-mer (ACCIOM) :
– Mme Carine Sinaï-Bossou, présidente de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de la région Guyane ;
– M. Philippe Jock, président de la CCI de la Martinique ;
– Mme Delphine Dagort, présidente de la chambre d'agriculture, de commerce, d'industrie, de métiers et de l'artisanat (CACIMA) de Saint-Pierre-et-Miquelon ;
– Mme Angèle Dormoy, présidente de la chambre consulaire interprofessionnelle de Saint-Martin (CCISM) ;
– M. Nassroudine Mlanao, membre de la CCI de Mayotte ;
– M. Johny Arnachellum, membre de la CCI de La Réunion ;
– M. Thierry Greaux, directeur général de la chambre économique multiprofessionnelle (Cem) de Saint-Barthélemy ;
– et M. Pierre Dupuy, directeur général de l'Association des Chambres de commerce et d'industrie des outre-mer.
Mesdames, Messieurs, je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie de prendre le temps de répondre à notre invitation.
Je vous remercie également de nous déclarer tout autre intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations.
Avant de vous céder la parole, je rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
Je vous invite donc, Mesdames, Messieurs, à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
(Mme Carine Sinaï-Bossou, M. Philippe Jock, Mme Delphine Dagort, Mme Angèle Dormoy, M. Nassroudine Mlanao, M. Johny Arnachellum, M. Thierry Greaux et M. Pierre Dupuy prêtent successivement serment.)
Je regrette de ne disposer de données comptables relatives aux ressources humaines consolidées que pour les cinq départements d'outre-mer (DROM). Les CCI des cinq DROM totalisent 750 équivalents temps plein et 186 élus au service de 150 000 ressortissants des cinq territoires.
Ces services publics qui accompagnent les entreprises des secteurs du commerce, de l'industrie et des services sont gérés par des chefs d'entreprise élus par leurs pairs pour une durée de cinq ans. Leurs missions, définies à l'article L. 710-1 du code de commerce, sont le conseil, l'information et accompagnement des entreprises et des entrepreneurs, l'appui et le conseil à l'internationalisation des entreprises, la formation professionnelle initiale et continue, la représentation des intérêts des entreprises et la gestion d'équipement.
S'y ajoute l'Association des CCI des outre-mer, association loi de 1901, créée en 2011, dont j'assume la direction. Elle a pour mission de représenter les intérêts collectifs des chambres de commerce et d'industrie dans les collectivités d'outre-mer (COM), qu'il s'agisse des DROM ou des collectivités d'outre-mer et de coordonner les travaux réalisés en commun par les CCI ultramarines. Lors de la crise sanitaire, nous avons ainsi publié un livre blanc concernant la situation des outre-mer.
La question de la cherté de la vie dans les DROM ou dans les COM ne relève pas directement de la compétence des CCI. Nous la traitons incidemment dans le cadre de notre action pour les relations interentreprises.
Nous participons aux observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR) instaurés par la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer, dite « loi Lurel ». Dans certaines CCI, des observatoires économiques établissent des statistiques sur l'activité, et nos élus en ont connaissance par le biais de notre activité quotidienne au contact des chefs d'entreprises.
Les causes de la cherté de la vie sont connues mais difficiles à contrer : l'isolement géographique lié à l'éloignement et aux difficultés d'accès aux territoires, dont l'éloignement des grandes lignes maritimes pour l'approvisionnement en biens, les risques environnementaux et sociaux accrus, l'étroitesse des marchés locaux limitant les économies d'échelle pour les entreprises, la faiblesse des revenus, notamment à cause d'un taux de chômage élevé, la faiblesse de la productivité de facteurs de production comme le travail ou le capital, le manque de productivité des économies, ce qui renchérit les coûts de production et la fiscalité locale qui pèse sur les prix à la consommation.
Sans remettre en question l'existence de l'octroi de mer, nous avons identifié trois difficultés qui appelleraient une réforme – rappelons qu'il convient de distinguer l'octroi de mer interne, pour les biens produits et vendus sur le territoire, de l'octroi de mer externe, applicable aux biens d'importation.
Tout d'abord, le fait que la base fiscale de l'octroi de mer externe soit le prix coût, assurance et fret (CAF), qui inclue le prix des assurances sur les biens importés et le prix du fret, a eu un effet procyclique dans la crise que nous traversons. Quand la crise sanitaire a accru sensiblement le prix du fret, le produit de l'octroi de mer externe a augmenté mécaniquement sans grande incidence sur la protection des productions locales.
Ensuite, nous considérons qu'un choix doit être opéré entre deux objectifs concurrents et paradoxaux, puisque l'octroi de mer est la fois un impôt de rendement, générateur de recettes pour les collectivités locales, et une taxe protectrice de la production locale. Cette double étiquette conduit à une situation paradoxale. Des taux élevés pèsent sur des biens non produits en outre-mer mais aussi sur des biens de première nécessité, produits en outre-mer, qui doivent être protégés. Au contraire, il conviendrait de moins taxer les biens qui pèsent le plus lourdement dans le budget des ménages les plus pauvres, pour réduire le coût de la vie. Le dispositif manque de cohérence parce qu'il vise trop d'objectifs à la fois.
Enfin, indépendamment de sa taille, une production locale peut justifier un écart de taux entre l'octroi de mer interne et l'octroi de mer externe, afin de protéger des structures qui produisent l'équivalent d'un point de part de marché. On renchérit le coût de la vie en taxant des importations sans favoriser l'activité. Les collectivités locales doivent observer une discipline dans la fixation des taux d'octroi de mer et opérer des choix stratégiques rationnels.
Le coût de la vie n'est pas seulement une question de prix, mais aussi de revenus, compte tenu, non seulement des taux de chômage sensiblement plus élevés dans les départements et collectivités d'outre-mer que dans l'Hexagone, mais aussi de la spécialisation des économies, laquelle explique en bonne partie les différences de revenus entre l'Hexagone et les outre-mer.
Enfin, si l'intégration régionale des outre-mer permettrait de réduire les coûts, il convient de veiller à ne pas pénaliser les entreprises ultramarines qui subissent la concurrence des pays voisins, et ne pas remettre en question la capacité des entreprises ultramarines à s'insérer dans le marché français et européen en créant des dérogations aux normes qui nous feraient sortir du marché unique européen.
Chef d'entreprise dans le numérique, je préside la commission « numérique, process, développement et innovation » de la chambre de commerce et d'industrie. J'ai été désigné pour intervenir dans cette audition en tant que représentant de la chambre de commerce à l'OPMR de La Réunion.
Je n'ajouterai rien à la description de notre environnement faite par M. Dupuy. Je reviendrai ultérieurement sur les marges de manœuvre dont nous disposons en matière de fret et pour limiter les positions dominantes qui existent dans nos îles.
Je suis présidente de la chambre de commerce et d'industrie de Guyane, vice-présidente de l'ACCIOM, trésorière adjointe de CCI France, présidente du syndicat des transports en commun de Guyane, mais mon activité principale est la présidence de la société Auto Car Service Sinaï. Je gère donc une entreprise de transport de personnes sur le territoire de la Guyane.
La Guyane, territoire de 83 846 kilomètres carrés, est le seul pays ultramarin continental, puisqu'il est situé en Amérique du Sud. Voisins du Brésil et du Surinam, nous sommes soumis à une forte immigration et à l'entrée informelle de denrées alimentaires dont les prix concurrencent les prix officiels du marché. Environ 53 % de la population guyanaise vivent sous le seuil de pauvreté, contre 14 % en France hexagonale. Plus de la moitié de la population vit avec moins de 1 010 euros par mois, et 29 % des Guyanais, en situation de grande pauvreté, vivent avec moins de 470 euros par mois.
Dans ces conditions, l'économie informelle, les importations non contrôlées et les trafics répondent aux besoins d'une clientèle qui ne pourrait s'approvisionner exclusivement par les circuits officiels. Le coût élevé de la vie favorise l'économie informelle et réduit la clientèle des entreprises légales, dont la pérennité est parfois menacée. Après l'arrivée de la Covid-19 et la fermeture de la frontière avec le Surinam, les commerçants de la ville frontière de Saint-Laurent-du-Maroni ont vu leur chiffre d'affaires augmenter de 40 %, ce qui a révélé l'importance de l'entrée informelle de produits. Dans des villes comme Maripasoula ou Papaichton, à la frontière du Surinam, des commerçants ne s'approvisionnent pas en Guyane mais traversent le fleuve pour chercheur leur matière première sans droits de douane.
De plus, l'approvisionnement de nos territoires est difficile. Faute de routes, certaines villes ne sont accessibles que par voie aérienne. Il leur est très difficile d'obtenir des marchandises en provenance d'Europe, ce qui incite les habitants à recourir à l'économie informelle.
Expert-comptable et commissaire aux comptes, je travaille pour des entreprises de la grande distribution et des entreprises de production locale, notamment dans le secteur industriel.
La chambre de commerce et d'industrie de Martinique, gérée par trente-six élus et treize membres associés, compte 45 892 ressortissants. Les sociétés en nom collectif qui sont des véhicules fiscaux en sont exclues. Nous accompagnons 26 869 entreprises. En dépit des crises sociales, sanitaires et économiques, la dynamique de création d'entreprises reste forte. Notre CCI compte 110 salariés, y compris les personnes en contrat à durée déterminée et les apprentis. Pour 2023, son budget est de 16 millions d'euros.
J'appelle toutefois l'attention de la commission d'enquête sur la baisse des ressources des chambres de commerce et d'industrie. Entre 2015 et 2022, les recettes fiscales de la seule CCI de Martinique ont baissé de 3 579 000 euros, soit 44 %, dans un environnement composé à 97 % de très petites entreprises qui ont besoin de l'accompagnement des chambres consulaires.
Nous avons mené quelques actions phares.
Concernant la transmission-reprise, la situation est comparable à celle de l'Hexagone : environ 25 % des chefs d'entreprise ont plus de 60 ans, ce qui deviendra une sérieuse préoccupation dans un horizon très proche – près de 10 000 emplois sont concernés.
Nous accompagnons les entreprises dans la transition digitale et environnementale. Dans une île confrontée aux problèmes des déchets et de l'économie d'énergie, c'est une mission que nous prenons à cœur.
Cherté de la vie, emploi et revenus sont liés. La réponse passe par la formation. Nous sommes passés de 500 jeunes en formation ou en apprentissage en 2016 à 715 aujourd'hui. Nous sommes un acteur essentiel de ces secteurs.
L'une des forces des chambres de commerce, en particulier celle de la Martinique, est l'accompagnement à l'export. Depuis de nombreuses années, nous débattons de l'intégration de nos entreprises dans la géographie mondiale. Soutenus par la Team France Export, nous y travaillons souvent avec la CCI de Guyane et celle des îles de Guadeloupe. Nous accompagnons les projets d'internationalisation des entreprises martiniquaises pour qu'elles se développent dans l'environnement proche de la Caraïbe, mais aussi en Afrique, où quelques acteurs martiniquais ont investi.
Nous déployons les marques qualité tourisme et qualité accueil, commerce et services. Le renforcement des compétences des entreprises permettrait d'insérer plus d'acteurs dans l'activité et d'augmenter le pouvoir d'achat.
Un observatoire économique fonctionne depuis 2020. Des études récentes traitent de la maturité digitale des entreprises, des conséquences de la crise sanitaire, en particulier sur le mode de consommation des Martiniquais. Des fiches sectorielles sont établies autour du tourisme ou du service à la personne. Nous publions un tableau de bord trimestriel illustré de chiffres clés et un « mémento éco » reprenant l'ensemble des informations. Notre travail complète celui de l'Insee. Nous avons récemment demandé à un cabinet d'économistes de réaliser une étude sur la formation des prix en Martinique en 2023.
Tout comme mes collègues, je participe aux travaux de l'OPMR, mais je regrette le manque de moyens humains et matériels.
À l'initiative de la collectivité territoriale de la Martinique, un groupe de travail auquel participe la chambre de commerce et d'industrie étudie mille produits dont le prix devrait baisser.
Enfin, j'essaie d'apporter la contribution des acteurs économiques à une commission ad hoc sur l'octroi de mer.
Je préside la Cacima de Saint-Pierre-et-Miquelon depuis le 18 novembre 2021. C'est une interchambre, à la fois CCI, chambre de métiers et de l'artisanat et chambre d'agriculture. Je dirige deux sociétés, l'une dans le domaine de la distribution alimentaire, l'autre dans celui des matériaux de construction.
La Cacima, établissement public administratif sous tutelle de l'État, est la seule chambre à disposer de ce statut. Elle est administrée par seize élus, dont huit issus du commerce et de l'industrie, six de l'artisanat et deux de l'agriculture. Nous accompagnons 700 établissements représentatifs du tissu économique, dont 120 dans le secteur du commerce et 79 dans celui de la construction.
Nos missions sont les mêmes que celles des autres chambres : accompagnement, création, transmission. Nous sommes particulièrement attentifs aux transmissions et aux reprises d'entreprises, puisque 50 % des dirigeants d'entreprise de Saint-Pierre-et-Miquelon ont plus de 55 ans.
En 2021, nous avons ouvert un centre de formation d'apprentis pour répondre à la demande car nous rencontrons localement un problème démographique mais aussi de main-d'œuvre. Alors que nous sommes en situation de plein-emploi depuis cinq ans, nous manquons cruellement de salariés dans tous les domaines, qualifiés ou non. Notre mission principale est de faire venir du monde dans le territoire, mais nous déplorons par ailleurs un manque cruel de logements. Pour loger ces salariés, il nous faut de l'immobilier.
L'approvisionnement est un gros enjeu, parce que nous sommes un territoire isolé, desservi via le Canada. Nous n'avons pas de lien direct avec la métropole et la situation a été particulièrement compliquée après la crise sanitaire.
Nous souhaiterions que soit établie une équivalence des normes entre des produits européens et des produits canadiens ou nord-américains, afin de faciliter les délais et les coûts d'approvisionnement. Ce serait une piste pour réduire le coût de la vie.
Toutes nos entreprises agissent pour améliorer le pouvoir d'achat. C'est l'enjeu crucial des années à venir.
Consultant en commerce de grande distribution, je suis élu de la CCI de Mayotte qui compte plus de 90 % de petits commerçants et de microentreprises de zéro à cinq salariés.
En plus des difficultés soulignées par mes collègues, notre territoire présente la particularité d'être confronté une forte insécurité, laquelle vient encore de faire la une des journaux nationaux. Les entreprises doivent consentir d'énormes efforts financiers pour sécuriser les biens et les personnes. Depuis cinq ans, les coûts de gardiennage et le budget consacré aux matériels de sécurisation ainsi qu'à l'emploi d'agents de surveillance flambent et connaissent une croissance à deux chiffres.
Outre sa représentation à l'observatoire des prix et des marges, la CCI de Mayotte mène de front plusieurs actions contre la vie chère.
Nous avons lancé une étude sur la création d'une compagnie maritime régionale destinée à faciliter les échanges de la sous-région. Nous connaissons des difficultés d'approvisionnement depuis l'Hexagone, l'Europe et le reste du monde, car les navires ne viennent pas directement jusqu'à Mayotte. Les compagnies maritimes ont installé des moyens de cabotage depuis les ports environnants, en sorte que nous attendons parfois plusieurs mois l'arrivée de conteneurs.
Pour lutter contre la fuite des cerveaux, la CCI a créé des formations initiales et professionnelles. Faute de structures d'enseignement supérieur suffisantes, les bacheliers partent suivre des formations à La Réunion ou dans l'Hexagone et, bien souvent, les Mahorais ne reviennent pas dans leur territoire, notamment à cause de l'insécurité.
À cela s'ajoute le manque d'eau. Depuis neuf mois, nous subissons deux à trois coupures hebdomadaires. À la fin de la saison des pluies, les retenues collinaires ne sont toujours pas remplies. Cela pose des difficultés aux entreprises, qu'elles utilisent l'eau pour leurs productions directement ou indirectement.
La CCI construit une technopole destinée à la recherche, en espérant que la richesse de la biodiversité sera une source d'attractivité. Conscients de l'étroitesse du territoire, nous souhaitons produire des biens à valeur ajoutée plutôt que des biens de première nécessité en autosuffisance. Moins de 10 % des produits manufacturés viennent du territoire. Les plus de 90 % de produit importés le sont avec difficulté, tant par le flux maritime que par le flux aérien, ce dernier étant très coûteux. Le flux maritime est si intermittent que les acteurs économiques doivent stocker inconsidérément et prévoir des entrepôts logistiques surdimensionnés. Il en résulte des surcoûts et des pertes constatées dans le port de Longoni, ce qui contribue augmenter le coût de la vie.
La CCI recherche donc modestement des solutions au travers de ses projets de compagnie maritime et de technopole, tout en essayant de fédérer les 90 % de microentreprises. Elle est présente sur le terrain pour accompagner leur digitalisation et la mutualisation des réseaux d'importation.
Je suis chef d'une entreprise de restauration, et comme il faut avoir plusieurs casquettes à Saint-Martin, je m'occupe également d'une société de gestion.
La CCI de Saint-Martin est un établissement public industriel et commercial (Epic) qui exerce les missions de service public et d'intérêt général de toute chambre de commerce. Chambre consulaire interprofessionnelle, nous représentons la chambre de métiers, la chambre d'agriculture et la chambre de commerce. Nous défendons les intérêts de plus de 8 000 entreprises de notre territoire, dont environ 6 200 du secteur du commerce et de l'industrie.
Notre chambre est administrée par vingt-trois élus, dont neuf pour le bureau, et des membres associés. Nous employons treize salariés pour un budget de 1,5 million d'euros que nous espérons augmenter. Nous sommes membres de tous les réseaux consulaires nationaux et de réseaux tels que le réseau caribéen de chambres de commerce – Caribbean Chambers of Commerce ou Caricham.
Saint-Martin compte 35 000 habitants et affiche un taux de chômage supérieur à 30 %, qui frappe principalement les jeunes et les femmes. Nous comptons surtout de très petites entreprises sans masse salariale ou dont la masse salariale est très faible. Le tissu économique est tertiaire pour l'essentiel, tourné vers les services et les activités touristiques. Nous comptons quelques grandes structures dans le secteur hôtelier, la grande distribution et la filière du bâtiment et des travaux publics (BTP). Cette structuration économique place souvent l'entrepreneur dans une situation délicate parce qu'il est aussi comptable, gestionnaire, administratif et même développeur de marketing, au point d'oublier parfois le métier pour lequel il a été formé et pour lequel il a créé son entreprise.
Les récentes et profondes mutations ont bouleversé l'économie de notre territoire. La crise sanitaire a aggravé les difficultés de reconstruction après le passage du cyclone Irma. Beaucoup d'entreprises n'ont pas réussi à reconstituer leur clientèle et à réembaucher des collaborateurs.
Nos difficultés sont les mêmes que celles de mes collègues, en particulier le coût de la vie qui s'aggrave. Faute d'observatoire, nous ne disposons pas de statistiques et beaucoup de nos données sont mélangées avec celles de la Guadeloupe. L'observatoire de Saint-Martin vient d'être créé par délibération de la collectivité et il devrait commencer à fonctionner dans les prochaines semaines. D'ici quelque temps, nous pourrons vous transmettre davantage d'éléments sur la situation économique de notre territoire.
Notre structure, la Cem, est comparable à celles de Saint-Pierre-et-Miquelon et Saint-Martin. Nous regroupons la chambre de métiers de l'artisanat, la CCI et la chambre d'agriculture. Établissement public créé par la collectivité et sous tutelle de la collectivité, la Cem dispose d'une autonomie de gestion et elle est administrée par quatorze élus représentant les différents corps de métier. Nous défendons les intérêts des secteurs des services, de l'industrie, du commerce, de l'artisanat, de l'agriculture, les professions libérales réglementées et assimilées.
Pierre Dupuy a bien décrit les missions de la Cem. Nous facilitons les créations d'entreprises, nous accompagnons leurs transitions, nous les informons de la réglementation et des autorisations nécessaires et nous développons les formations à destination des entrepreneurs.
Le 15 juillet 2007, Saint-Barthélemy a obtenu, en même temps que Saint-Martin, le statut de collectivité d'outre-mer. Nous sommes également pays et territoire d'outre-mer (PTOM) depuis le 1er janvier 2012, ce qui ne nous soumet pas aux règles de l'Union européenne en matière d'importation et d'exportation. La majeure partie de nos importations provient des États-Unis.
La Cem n'a pas de service statistique capable de mesurer l'indice des prix à la consommation (IPC) ou le PIB ni de comparer l'évolution de l'inflation ou du coût de la vie, si ce n'est au regard des pays depuis lesquels nous importons.
L'État nous a transféré des compétences en matière de fiscalité, de transport routier, de port maritime, de voirie, de tourisme, de droit domanial, d'accès au travail des étrangers, d'urbanisme, de construction de logements, d'environnement, d'énergie, de création et d'organisation des services des établissements publics de la collectivité.
Nous rencontrons les mêmes difficultés que les autres îles, c'est-à-dire éloignement géographique et hausse des prix des matières premières. L'ouragan Irma et la crise sanitaire ont augmenté encore davantage le coût de la vie.
En 2019, notre taux de chômage était de 4,2 %, notre taux d'activité de 87,4 % et notre taux d'emploi de 83,7 %, en progression annuelle d'environ 2 % entre 2011 et 2019.
Quant à la répartition des emplois, en 2021, 18 % étaient exercés dans le commerce, 20 % dans le BTP, 34 % dans le secteur de l'hébergement et de la restauration, 19 % pour les autres services marchands. La Chambre économique représente les intérêts d'environ 7 000 entreprises.
M. Otilone Tokotuu, président de la CCIMA de Wallis-et-Futuna, ne semble pas être parvenu à se connecter.
Structurellement et conjoncturellement, le coût de la vie concerne l'usager mais aussi l'entreprise. Sa position intermédiaire de créateur d'activité, d'emploi, de services et de commerces, peut piéger l'usager. Comment évaluez-vous les coûts structurels et les surcoûts des entreprises de vos territoires ? Si vous avez réalisé des études à ce sujet, nous souhaiterions les connaître.
Quel est le poids des grands groupes dominants créateurs de monopoles et d'oligopoles dans vos CCI ?
Pourriez-vous nous fournir la liste des entreprises adhérentes à vos CCI et leurs relations avec le grand groupe dominant, la maison mère, puisque des entreprises ne portant pas le même nom peuvent avoir le même papa et la même maman ? Nous souhaiterions connaître, par CCI, les entreprises qui se regroupent, soit en intégration verticale, notamment dans la grande distribution, soit en intégration horizontale, pour avoir une visibilité juridique du poids de ces structures dans l'économie de chaque territoire.
L'octroi de mer semble être devenu l'élément phare de la fiscalité et l'on n'entend pas parler de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) alors qu'ils représentent, l'un et l'autre, 1 milliard d'euros. Pourtant l'octroi de mer reste dans les territoires tandis que la TVA en repart. Que pourriez-vous en dire ?
Je ne pense pas trahir la pensée du rapporteur en vous invitant à nous communiquer une partie des réponses par écrit.
Je n'ai pas de réponse des grands groupes et je laisserai parler les représentants des chambres. Le débat se focalise sur l'octroi de mer et non sur la TVA en raison de difficultés intrinsèques qui ne sont pas insolubles. De son côté, sans doute parce que son dispositif a été pensé par les juristes les plus éminents, la TVA fonctionne bien.
L'octroi de mer entre dans la composition du coût de revient du produit alors que la TVA, impôt indirect prélevé en sortie, n'y participe pas. Des marges sont réalisées sur l'octroi de mer, puisque l'entreprise l'inclut dans le prix de revient de son produit. Un élément participe donc plus que l'autre à la cherté de la vie.
La chambre de commerce et d'industrie de Martinique a récemment fait réaliser une étude sur la formation des prix. Après appel d'offres, elle avait été confiée à M. Olivier Sudrie, du cabinet DME, que vous avez déjà auditionné. Je n'y reviendrai donc pas.
Concernant le poids des grands groupes dans l'économie, l'Autorité de la concurrence ou la direction générale des finances publiques seraient plus à même de vous répondre que la CCI de Martinique. Nous connaissons le nombre d'entreprises, nous pouvons recouper les dirigeants, mais il nous est impossible de connaître leurs chiffres d'affaires, ni par secteur ni par entreprise. Cela n'entre pas dans les missions de la chambre.
Quant à la concentration verticale et horizontale, on trouve à la Martinique, dans la chaîne de valeurs et la composition du coût final au consommateur, des grossistes et des distributeurs, dont certains sont aussi grossistes. Je ne doute pas que le rapporteur les connaisse.
Je fais état du coût global de la vie, que le mécanisme intervienne avant ou après. Puisque la TVA non perçue récupérable a été abrogée il y a plus de trois ans, pour un montant de près de 100 millions d'euros, celle-ci continue à être payée et apparaît dans le coût des produits, car le calcul de la marge prend en compte toutes les charges des entreprises. Il y a peut-être un problème de gestion de l'octroi de mer mais je m'attends à ce que les entreprises s'intéressent à l'ensemble de la fiscalité et pas seulement à un volet.
Je ne vous demande pas de nous fournir les chiffres d'affaires dont vous ne disposez pas, mais la liste de toutes les filiales et sous-filiales, de la maison mère à la filiale, de toutes les entreprises, avec leurs coordonnées juridiques et leur numéro de Siret, afin d'identifier le poids des grands groupes dans nos territoires.
Comment considérez-vous la concurrence au regard des monopoles et des oligopoles ? C'est criant à l'extérieur, dans l'aérien, mais à l'intérieur, quel niveau de concurrence jugez-vous juste ?
Monsieur Jock, vous avez dit que les recettes de la chambre de commerce avaient diminué de 3 millions d'euros, ces dernières années, alors que la création d'entreprises reste vive. Comment l'expliquez-vous ?
Je comprends mal la relation que vous faites entre la TVA non perçue récupérable et la cherté de la vie. Comme son nom l'indique, celle-ci n'était pas perçue mais récupérée. Cette subvention indirecte sur les investissements avait déjà disparu pour les produits de la liste de l'article 50 duodecies du code général des impôts, relatif aux matériaux de construction.
La baisse des ressources est liée à des dispositions fiscales et au choix des gouvernements successifs de réduire les dotations des chambres de commerce, lesquelles n'ont cessé de baisser. Ce dispositif n'est pas particulier à la Martinique mais national. Je le répète, je regrette l'absence de dispositif particulier en outre-mer pour favoriser la création d'entreprises et accompagner les très petites entreprises.
Nous pouvons vous fournir, à partir du fichier, la liste des entreprises ayant les mêmes dirigeants, mais nous sommes incapables, et mes collègues doivent être dans la même situation, s'agissant de sociétés par actions simplifiées, de fournir le détail du capital. Je peux vous dire qu'il y a cinquante sociétés dirigées par M. X, mais je ne saurais vous indiquer les liens juridiques et les liens capitalistiques entre ces sociétés.
Merci de nous fournir ce que vous pouvez. La TVA non perçue récupérable ayant été supprimée en 2019, elle est aujourd'hui payée par les entreprises.
Auparavant, elle n'était que récupérée, alors même qu'elle n'était pas payée ! C'était sa particularité. En tant qu'expert-comptable, je connais bien les mécanismes de la TVA.
L'éloignement est souvent cité comme facteur de vie chère. Les outre-mer sont éloignés de la France européenne, mais pas de tout. On croit souvent que la France et l'Europe encouragent la coopération et les échanges entre les territoires d'outre-mer et les pays de leurs bassins régionaux, alors que la coopération régionale reste insignifiante. Nous continuons d'importer d'Europe des tonnes de pâtes et de riz, alors que la Guadeloupe, la Martinique, la République dominicaine et Haïti, la Dominique et Sainte-Lucie réunies sont capables de fournir assez de patates douces et d'ignames pour couvrir les besoins en féculents de toute la Caraïbe. Peut-on envisager de lever les prix réglementaires qui empêchent les échanges intra-bassins dans le bassin caraïbe ?
L'étroitesse des marchés est, dit-on, facteur de vie chère. La Guadeloupe et la Martinique comptent chacune moins de 400 000 habitants, mais en ajoutant ces deux DROM à la Dominique et à Sainte-Lucie, on cumule un million d'habitants sur moins de 300 kilomètres. Des secteurs économiques ne pourraient-ils bénéficier de l'addition de ces petits marchés, ce qui les rendrait plus attractifs que le cordon outre-mer-Europe ?
Les îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin sont souvent oubliées. De plus, les données spécifiques à ces îles sont rares et généralement regroupées avec celles de la Guadeloupe, ancien département de rattachement. Les données statistiques manquent pour éclairer les dirigeants. N'aurait-on pas intérêt à distinguer les données économiques, sociales et financières de chacune de ces îles, compte tenu de leurs modes de fonctionnement différenciés ?
Si on ouvre les frontières aux produits agricoles et alimentaires, je crains qu'on mette aussi les producteurs locaux, en l'occurrence antillais, en concurrence avec ceux des autres îles.
Pour transformer la remarque en question, y a-t-il un risque concurrentiel à l'ouverture sur l'économie régionale ? Beaucoup de nos interlocuteurs estiment qu'elle ouvrirait de nouveaux marchés et que l'adaptation des normes serait de nature à faire baisser les prix. Mais, à l'inverse, ne risquerait-on pas de déstabiliser l'ensemble de la zone ?
On nous répète souvent que le développement de la Réunion serait compromis par les contraintes du territoire, c'est-à-dire l'étroitesse du marché, l'éloignement du marché européen, le coût de la main-d'œuvre. C'est oublier notre appartenance au marché européen et une situation géographique qui fait de nous la porte d'entrée de l'Europe dans l'océan Indien. Dans cette partie du monde, nous passons à côté des possibilités offertes par des pays émergents comme l'Inde et l'Afrique du Sud. Leurs productions ne sont pas toujours aux normes européennes mais en leur offrant les services d'une agence de certification, ils pourraient proposer des produits aux normes européennes et faire de l'import de substitution afin de développer une production sinon industrielle, du moins semi-industrielle, conforme aux normes européennes.
Sur cent conteneurs qui arrivent à La Réunion, vingt seulement repartent à plein, obligeant la compagnie maritime à faire une escale technique pour récupérer les quatre-vingts conteneurs vides. Le coût du retour étant pris en compte par l'importateur, développer une activité à même de les remplir ferait baisser le coût du fret. Exonérer de coût le retour du conteneur à plein procurerait un avantage compétitif si les produits fabriqués à La Réunion bénéficiaient d'un fret quasiment gratuit pour entrer sur le marché européen.
Ces deux éléments ne sont pas encore validés ni étayés par des études mais, quand nous les avons exposés à l'ambassadeur de l'Inde lors de sa venue à la chambre de commerce, il s'est demandé pourquoi nous ne tirions pas avantage de notre proximité, d'autant plus que l'Europe met au point un accord de libre-échange avec son pays. Si nous étions incapables d'agir en ce sens alors que nous sommes une porte d'entrée pour des produits sur le marché européen, nous passerions à côté d'une belle opportunité.
La Guyane n'étant pas soumise à la TVA, il nous serait difficile de parler d'une autre fiscalité que l'octroi de mer.
Le monopole de la compagnie CGA CGM provoquant des difficultés de transport maritime, les entrepreneurs guyanais sont obligés de stocker pour éviter les ruptures d'approvisionnement. Depuis le début de la guerre en Ukraine, il est de plus en plus difficile d'obtenir des bouteilles de verre pour conditionner le rhum. Nous rencontrons aussi des difficultés dans le transport aérien en raison du monopole d'Air France pour les lignes des Antilles.
Je confirme que nous ne connaissons pas la structuration du capital social des sociétés. Le 1er janvier, on nous a retiré le centre de formalités des entreprises, en sorte que nous n'avons de chiffres que jusqu'au 31 décembre 2022. On peut vous dire qui dirige telle société, dans quel secteur d'activité, en recoupant avec les données du fichier, mais on ne peut rien vous dire de l'intégration d'une structure horizontale ou verticale. Dans la grande distribution, nous constatons le monopole de certains groupes mais nous ignorons leurs pourcentages par rapport à l'ensemble.
Concernant les études, nous n'avons que les chiffres que veulent bien nous fournir nos ressortissants. Ce n'est pas le rôle de la chambre de déterminer la structure d'un prix. L'effectif du siège est passé de 120 personnes en 2017 à une trentaine en 2023, parce que notre recette fiscale se limite à 440 000 euros depuis 2017. Faute de personnel, nous ne pouvons plus accompagner les observatoires ou décomposer les résultats. Nous n'avons plus les moyens de payer ce type de service.
Certes, la Guyane est proche du Surinam et du Brésil mais c'est aussi le seul pays européen d'Amérique du Sud et, en tant que tel, assujetti aux règles et normes européennes. Quand on veut importer de la viande du Brésil, l'un des plus grands fournisseurs de viande bovine, faute de poste d'inspection filtrage (PIF), la viande doit remonter au Havre avant de redescendre en Guyane. Nous réaliserions des économies si on nous permettait d'avoir un PIF pour traiter directement avec les pays voisins. Toutefois, nous ne serons jamais concurrentiels face à un mastodonte comme le Brésil compte tenu de la grande différence de cours entre le réal et l'euro et du prix de la main-d'œuvre qui en résulte. De plus, nous sommes très hostiles à la venue à Cayenne de transporteurs brésiliens car nous payons les autocars 290 000 euros, bien loin du réal brésilien, et nous appliquons la réglementation européenne qui prévoit temps de transit, temps de repos, chronotachygraphes et limiteurs, ce qu'ignore un transporteur de Macapa dont les chauffeurs font en une journée l'aller-retour jusqu'à Cayenne.
Les normes et les critères de rentabilité font obstacle à l'ouverture de notre marché. Nous pourrions seulement gagner en productivité et devenir plus concurrentiels grâce à des aides fiscales, mais c'est très compliqué. On peut ouvrir mais pas à n'importe quel prix, car nous risquerions de détruire l'économie guyanaise.
La CCI de Guyane regroupe 18 000 entreprises, dont plus de 67 % de microentreprises qui comptent de zéro à un salarié. Le poids des grands groupes n'est pas considérable au regard du nombre d'entreprises. Certains commerçants s'approvisionnent au Surinam parce que c'est moins cher. De surcroît, ils arrivent à échapper aux droits de douane. C'est utile pour une partie de la population, mais il faudra trouver une solution, pour nous aider à travailler. Il serait intéressant de faire venir des produits non disponibles en Guyane mais il faut protéger, par l'octroi de mer, ce qui est fabriqué en Guyane. Au Brésil, la lessive est beaucoup moins chère et une entreprise en Guyane ne sera jamais concurrentielle dans ce domaine.
Pourriez-vous nous aider à obtenir ce fameux poste inspection filtrage (PIF) qui, dans certains secteurs, permettrait une économie de fret monumentale ?
Régie par une fiscalité propre, Saint-Barthélemy n'a pas de TVA et est déclaré pays et territoire d'outre-mer (PPOM). Nous ne sommes donc pas soumis aux règles de l'Union européenne, ni au suivi des importations et des exportations. Je n'ai pas d'éléments à vous transmettre concernant le capital des sociétés. Je ne peux pas fournir de listing, je n'ai pas de données objectives pour cibler telle ou telle entreprise en situation d'oligopole ou de monopole.
Saint-Barthélemy est un territoire attractif par son dynamisme économique. L'ouragan Irma et la pandémie ont augmenté le coût de la vie. Reposant principalement sur le tourisme, en particulier l'hôtellerie et la restauration, l'économie de Saint-Barthélemy doit répondre à un besoin croissant d'employés et de saisonniers. Pour assurer la pérennité de la main-d'œuvre, les employeurs sont contraints de trouver à tout prix des logements, ce qui provoque une surenchère des loyers. Le tourisme haut de gamme nécessite de construire des infrastructures de haut niveau. Il faut bâtir du neuf, rénover les immeubles existants. Le secteur de la construction est très dynamique. Après le passage de l'ouragan Irma, 700 millions d'euros ont été versés par les assurances pour la reconstruction de l'île, et les carnets de commandes sont remplis pour plusieurs années. Certains bâtiments ne sont toujours pas reconstruits.
La population se densifie. Elle atteint 12 000 habitants, contre 10 000 au dernier recensement de 2014 et peut atteindre 18 000 personnes en haute saison. Cela encourage les projets d'investissement, ce qui augmente, là encore, la demande de logements et entraîne par conséquent la hausse des prix des loyers. Pour construire, il faut des matériaux. La forte demande de construction et de rénovation renchérit leur coût dans un marché tendu par la pandémie et les suites de l'ouragan Irma. Par un effet boule de neige, les entreprises de BTP répercutent l'augmentation du coût de construction sur le coût de la vie et le prix des loyers. L'augmentation du coût de la vie s'explique donc par la rareté des logements sur l'île, la rareté des matériaux de construction et l'attractivité de l'île. Après des taux d'emprunt restés faibles, face à une forte demande, les banques exigent plus de garanties, et les gens ont tendance à déposer des dossiers assortis de précisions de loyers plus élevées afin de répondre à leurs exigences. En outre, le système de location Airbnb prend davantage de parts de marché et raréfie l'offre, provoquant une poussée inflationniste sur les logements récents.
À Saint-Martin, nous ne sommes concernés ni par la TVA ni par l'octroi de mer.
À Saint-Martin, nous n'avons pas de grands groupes. Seules huit entreprises, telles qu'EDF, la collectivité et quelques hôtels, emploient plus de cinquante salariés. Les grands groupes ne sont pas obligés de s'immatriculer chez nous.
Concernant l'ouverture des marchés, Monsieur Gumbs, nous rencontrons des difficultés comparables à celles de la Guyane en matière de coûts de production et de normes, qui créent des freins et entraînent des concurrences déloyales. Déjà un peu en concurrence avec notre sœur, la partie hollandaise, nous mesurons les limites des transferts ou de la collaboration.
En tant que membres du réseau caribéen Caricham, nous cherchons à améliorer nos capacités d'exportation et à envisager le positionnement de Saint-Martin en matière d'importation dans la Caraïbe. Des propositions devraient sortir d'ici quelques mois du procédé en cours.
Nous avons identifié plusieurs causes de vie chère. La première est le coût du fret et des transports. Sans avoir la possibilité d'étudier la structuration des marges, nous constatons une augmentation continue du coût du fret.
La deuxième est l'augmentation du prix des matières premières. Dans la perspective de cette audition, nous avons demandé à plusieurs grandes entreprises de plus de vingt salariés de notre territoire de nous détailler l'augmentation de leurs coûts de production. Le prix des matières premières, en provenance principalement d'Europe, a augmenté de plus de 30 %, à cause de la guerre en Ukraine. À cela s'ajoutent des difficultés d'embauche de personnels qualifiés.
La troisième cause est l'augmentation constante du coût de l'énergie.
La quatrième est l'augmentation des surfaces de stockage liée aux difficultés de transport et d'approvisionnement, qui occasionnent des coûts supplémentaires, dont celui des caristes.
Nous souffrons de la double insularité. Loin de la métropole, loin de la Guadeloupe, le coût de la continuité territoriale est en constante augmentation. Un déplacement entre Saint-Martin et la Guadeloupe, distante de moins de 200 kilomètres, coûte 450 euros, contre environ 600 euros pour un Paris-Martinique, un Paris-Saint-Martin ou un Paris-Guadeloupe, peut-être parce que Saint-Martin et Saint-Barthélemy sont des destinations très demandées.
L'exploration des différentes pistes doit nous permettre de faire des propositions pour réduire les facteurs de la hausse du coût de la vie. Il ne s'agit pas de vous demander ce que vous ne pouvez pas nous fournir.
Le fret coûte-t-il cher parce que la norme vous impose d'importer des biens de loin, parce que la situation des entreprises leur permet d'afficher des prix exorbitants ou parce que l'absence de place pour plusieurs entreprises entraîne mécaniquement un surcoût à cause de l'éloignement des grandes lignes de fourniture ? La libéralisation des échanges par des normes plus adaptées réduirait-elle le coût du transport ? Faut-il plus de concurrence et est-ce possible ? Si la cherté du fret tient à l'étroitesse du marché, pourquoi des territoires environnants ne sont-ils pas touchés de la même façon ?
Une étude de l'Observatoire des prix, des marges et des revenus (OPMR) de La Réunion a montré que deux groupes représentent 65 % du marché de la grande distribution, l'un d'eux concentrant 50 % des dépenses. En visite chez nous, la présidente de région s'en est offusquée. Également présidente des régions ultrapériphériques, elle voulait le faire remonter au Gouvernement et demander que des mesures soient prises pour éviter des positions aussi dominantes dans un territoire. En tant que chambre de commerce, je ne vois pas ce que nous pouvons faire. Nous héritons d'une situation. Il existe aussi une position dominante dans le secteur de la quincaillerie et du bricolage. Avec de telles structures, il est difficile de créer une véritable concurrence.
Le prix du fret ne représente pas beaucoup dans les prix d'importation. Nous sommes plus gênés par l'opacité de la composition de la formation du prix. On ne connaît pas les marges des importateurs ni celles des intermédiaires. Ceux qui opèrent sur ces marchés préfèrent payer des amendes plutôt que de publier leur bilan. Il est difficile de connaître la source de cet écart de prix. Entre la métropole et La Réunion, les différences de prix d'un même article vendu par la même enseigne varient parfois du simple au double sans qu'on puisse expliquer pourquoi.
L'octroi de mer produit une rente de situation. Les yaourts produits en métropole sont grevés d'octroi de mer pour protéger la production locale, mais les yaourts fabriqués localement restent chers. Dans un marché aussi étroit, celui qui en produit souhaite voir les yaourts importés taxés par l'octroi de mer afin de protéger l'industrie locale, ce qui surenchérit tous les prix. De même, en raison de la présence d'un unique fabricant de matelas employant moins de dix salariés, tous les matelas arrivant à La Réunion sont grevés d'octroi de mer. Face à ces entraves, nous sommes assez démunis, puisque nous ne pouvons pas agir sur l'octroi de mer. Les commerçants préféreraient la TVA à l'octroi de mer, parce que celle-ci est déductible alors que l'octroi de mer est une taxe, donc une charge complète.
À Mayotte, où il n'y a pas de TVA, se pose seulement la question de l'octroi de mer, et je ferai le lien avec la remarque de M. Gumbs au sujet du commerce avec la sous-région. Mayotte ressemble assez bien à la Guyane, à ceci près que c'est un petit territoire qui ne peut produire en autosuffisance. Mayotte a grandement besoin de sa sous-région européenne alors qu'il lui serait possible d'échanger avec le voisinage. Nous manquons de liaisons de fret aériennes ou maritimes. C'est pourquoi la CCI s'emploie avec le conseil départemental à créer de telles infrastructures.
Je n'évoquerai pas la contribution de l'octroi de mer au prix de revient des produits et à la cherté de la vie mais une difficulté tient à ce que les navires ne touchent pas directement Mayotte. Un transbordement est opéré à Maurice, à La Réunion ou en Arabie saoudite, mais Mayotte est souvent délaissée par les deux principales compagnies, même si l'une pèse plus de 70 % du marché. Cette difficulté engendre des surcoûts de stockage pour les acteurs économiques qui doivent investir dans des entrepôts. Il est fréquent de voir arriver au port de Longoni des denrées conduites sans dédouanement à la destruction parce qu'elles ont dépassé la date de péremption. Ces surcoûts pèsent sur le prix de revient puisque les commerçants doivent se « rattraper » sur ce qui arrive à bon port.
J'ai signalé le surcoût lié à l'insécurité, sujet sur lequel une commission sénatoriale s'est penchée. Il en résulte des surcoûts d'achat de matériels et de frais de gardiennage qui pèsent sur les entreprises, donc sur les prix de vente.
La Guyane présente des points communs avec Mayotte. Les représentants des compagnies maritimes m'ont dit qu'il leur était difficile de maintenir la ligne Cayenne-Le Havre passant par les Antilles, parce que beaucoup de conteneurs repartaient à vide. Nous n'avons qu'un seul port et quasiment une seule compagnie ayant le monopole de la ligne. On nous dit qu'il faut produire plus, mais 94 % du territoire guyanais est inconstructible, protégé par les lois sur l'eau ou les lois relatives au parc amazonien. Nous sommes surprotégés. Quand une entreprise veut s'installer en Guyane, c'est la croix et la bannière, on est attaqués par les écolos. Pourquoi tant d'acharnement à l'encontre d'un pays déjà si peu constructible ? On se bagarre pour attirer des entreprises en Guyane, on les accompagne et on les aide mais c'est difficile. D'autres compagnies ont du mal à venir, parce qu'encore trop de conteneurs repartent vides, vont au Brésil d'où ils repartent pleins. Je n'arrive pas à obtenir des informations sur le coût. On me dit qu'il ne représente que 5 % du prix final de la marchandise. J'ai demandé plus d'informations mais on ne me les a pas fournies. On ne peut pas industrialiser, on a des retards d'infrastructure. Même pour aller récupérer quelque chose en Guyane, il faut parfois prendre l'avion.
De même qu'à Mayotte, l'insécurité provoquée par l'immigration entraîne des surcoûts inconnus dans l'Hexagone. Hier encore, des migrants syriens, arrivés on ne sait pas par quelle filière, apparemment du Brésil, se sont installés devant l'église de Cayenne. Depuis ce matin, la maire de Cayenne appelle au secours. C'est un flux énorme que l'on n'arrive pas à gérer. Notre territoire souffre pourtant d'un manque de main-d'œuvre mais, comme en métropole, on n'en trouve pas. On est obligé d'augmenter le coût de la main-d'œuvre pour appâter des gens car, par peur de la Guyane ou de Mayotte, certains préfèrent aller à La Réunion. La mauvaise image de nos territoires entraîne un surcoût de la main-d'œuvre comparé à la France métropolitaine. Les responsables du fret maritime affirment qu'ils maintiennent nos lignes bien qu'ils les trouvent peu rentables, parce que le gouvernement les y contraint. Vous avez seuls le pouvoir de prolonger l'investigation.
Je pars d'un principe simple : plus le pouvoir d'achat des clients sera élevé, plus il y aura d'activité, plus on créera de l'emploi, plus on pourra investir et mieux les entreprises se porteront. Je ne vous demande pas de nous fournir ce que vous n'avez pas, je vous demande de nous fournir ce que vous avez pour nous aider à améliorer la vitalité et la revitalisation des entreprises face aux contraintes multiples. La diminution des charges est un élément important. D'évidence, si les charges baissent, vous pourrez diminuer le prix des prestations ou le prix de vente des produits.
Quels sont les axes de réduction des charges de vos entreprises de nature à réduire les coûts de prestations et le prix des produits ? Augmenter les revenus, cela veut dire recruter des chômeurs, donner du travail à des gens pour qu'ils aient plus de pouvoir d'achat. Il faut intégrer un cercle vertueux.
Si la TVA est à zéro à Mayotte et en Guyane, elle s'applique pleinement en Martinique, en Guadeloupe et à La réunion. Uniquement récoltée et transmise, bien que déductible et remboursée à l'entreprise, elle représente un coût pour l'usager. À la Martinique, à la Guadeloupe et à La Réunion, seriez-vous favorables à une TVA équitable, comme c'est le cas à Mayotte et en Guyane ? Sommes-nous assez riches pour supporter une telle mesure ?
On risque de s'enfermer dans un système où les monopoles et les oligopoles tueront la concurrence, ce qui placer les entreprises dans une situation encore plus difficile. Que faire pour augmenter les revenus sans augmenter les charges des entreprises, voire en les réduisant ? Augmenter les revenus, c'est créer de l'activité pour créer de l'emploi, générer des revenus complémentaires pour augmenter le pouvoir d'achat des usagers.
Je vous demande aussi de nous fournir les fichiers dont vous disposez qui recouperaient les éléments des entreprises ayant des dirigeants communs.
Comment devenir plus concurrentiels dans le bassin caribéen ou les bassins voisins alors que les charges fiscales et sociales pèsent plus lourdement sur nos entreprises ? Comment améliorer le modèle économique afin de baisser globalement le coût de la vie dans nos territoires ? Comment dynamiser les petites et moyennes entreprises en difficulté et renforcer l'attractivité pour éviter la fuite des cerveaux, qui aggrave la concurrence entre des travailleurs moins qualifiés et appauvrit l'ingénierie locale ? La dépendance vis-à-vis de l'extérieur s'en trouve d'autant plus accrue.
J'attends des réponses par écrit, faute de temps.
L'octroi de mer a pour objectif initial de privilégier la production locale mais nous avons constaté, peu avant les élections, une forte augmentation sur certains biens qui n'étaient même pas produits dans notre territoire. J'ai parfois l'impression que des collectivités utilisent ce dispositif pour équilibrer leur budget, ce qui favorise la surenchère. Sur certains produits, l'octroi de mer a augmenté de 6,5 %, ce qui est énorme. Nous aimerions un peu plus de visibilité. La CCI est récemment montée au créneau pour demander que soit créée une commission pour étudier la révision des taux. Certains ont été augmentés avant les élections sans qu'on en comprenne la raison. C'est sans doute qu'on a besoin d'argent mais, en tout cas, l'inflation s'en est trouvée aggravée.
Les poids lourds de travaux publics étaient exonérés d'octroi de mer en raison des énormes coûts de fret induits pour leur livraison dans notre département. Nous sommes en retard pour construire les infrastructures et nous avons besoin de ce matériel. Or les principaux donneurs d'ordre sont la collectivité territoriale et l'État. Quand on passe de l'exonération à 6,5 %, l'augmentation est répercutée à la collectivité, puisque nous dépendons majoritairement des marchés publics. Nous avons demandé la raison d'une telle augmentation sur l'achat de poids lourds, alors qu'il n'y a pas d'usine Mercedes en Guyane et que nous avons besoin de ces engins pour la centrale EDF ou la cité scolaire de Saint-Georges. Nous avons renouvelé les lignes scolaires cet été. La hausse du coût du matériel a été répercutée sur les tarifs du transport et le panier de la ménagère a encore augmenté. Nous ne comprenons pas ces augmentations.
J'ai appris de l'observatoire que le taux de l'octroi de mer avait augmenté pour EDF, comme si le prix de l'électricité avait besoin de cela pour augmenter encore ! Des gens ont du mal à joindre les deux bouts et à payer correctement leurs factures d'électricité et d'eau. Pour des petits secteurs en bout de chaîne, cela finit par faire de gros montants.
Quand j'ai dit que 6,5 % représentaient une augmentation de 39 000 euros par véhicule, cela a surpris. Ces augmentations sont parfois décidées sans concertation ni étude préalable.
Nous ne cherchons pas à remettre en question l'octroi de mer mais nous souhaitons une meilleure péréquation des taux. Pour des produits fabriqués localement, un différentiel de taux paraît légitime, puisqu'il permet de compenser partiellement les surcoûts de la production locale. Il est vrai que certains produits sans équivalents locaux sont taxés, ce qui contribue à élever le coût de la vie. Je citerai les pâtes à tartiner taxées à 15 % alors qu'on n'en produit pas en Martinique, ou les lessives taxées à 20 %, alors qu'il n'y a pas de fabricant de lessive. À l'inverse, des produits faiblement taxés ont une élasticité de prix faible. Augmenter de deux ou trois points, non les véhicules utilitaires mais les voitures de tourisme d'une certaine taille, ne changerait pas le nombre de véhicules vendus. On doit améliorer la péréquation des taux plutôt que remettre en question l'octroi de mer. C'est la position de la chambre de commerce et d'industrie, qui souhaite clairement que les produits concurrents de la production locale ne bénéficient pas de la péréquation.
Pour les entreprises, la TVA n'est ni une charge ni un produit, elle est traitée en compte de tiers. Sa suppression aurait un effet sur les comptes de l'État et le panier du consommateur mais elle serait sans conséquence pour le compte de résultat des entreprises.
C'est en envisageant globalement l'attractivité du territoire que nous lutterons contre la fuite des cerveaux. Les jeunes s'en vont parce qu'ils ne trouvent pas de travail, qu'ils ont du mal à se loger et à se déplacer. Il faut aussi s'interroger sur l'employabilité de certains d'entre eux, puisque la journée défense et citoyenneté révèle que 33 % des jeunes Martiniquais ont des difficultés pour lire et écrire. Pour améliorer les revenus et l'emploi, il faut reconsidérer l'éducation et la formation. Cela va au-delà du sujet de votre commission d'enquête, mais c'est une préoccupation pour les chefs d'entreprise que nous sommes parce que nous n'aurons bientôt plus la main-d'œuvre nécessaire, y compris dans les emplois non qualifiés, et le taux de chômage restera élevé. Interrogeons-nous collectivement et globalement sur ce que nous devons faire.
Concernant notre insertion dans l'environnement géographique, nous pouvons plus facilement partager avec nos voisins nos savoir-faire et nos compétences. Il convient d'engager une réflexion sur l'immatériel, alors que depuis toujours nous nous focalisons sur le matériel. Nos voisins produisent les mêmes choses que nous à des coûts moindres mais nous pouvons leur vendre nos compétences en matière de constructions parasismiques et anticycloniques, d'énergie renouvelable, de numérique, même si, en ce domaine, la compétition est plus ouverte.
Les chambres de commerce contribuent significativement à la réflexion sur l'intégration dans la Caraïbe. La chambre de commerce et d'industrie de Martinique est à l'origine, avec d'autres, de la création du réseau Caricham regroupant vingt-six chambres de commerce du nord au sud de la Caraïbe jusqu'à Cuba. Des échanges que nous avons avec eux et le Team France Export, il ressort bien que le savoir-faire est ce que nous pouvons leur apporter de mieux.
Quant aux importations, au-delà du risque de déstabilisation de notre agriculture, veillons à éviter un problème sanitaire. Nos normes de sécurité sanitaire sont sans doute contraignantes, mais elles nous protègent. Le chlordécone nous a causé des difficultés suffisamment graves pour que nous en tirions les leçons !
Nos territoires français outre-mer peuvent se flatter non seulement de leur savoir-faire mais aussi de vivre dans un État de droit.
Une légende urbaine dit que les prix sont élevés parce que les collectivités locales donneuses d'ordres paient mal et que pour compenser les retards de paiement, les entreprises en viennent à augmenter leurs prix. Est-ce une réalité ?
Dans nos territoires, les délais de paiement sont catastrophiques. Mais dire que les chefs d'entreprise augmentent leurs prix à cause de cela relève de la légende urbaine. Nous répondons à des appels d'offres et si nos prix étaient trop élevés, nous perdrions le marché. Comme nous dépendons majoritairement de la commande publique, nous ne pouvons pas nous permettre ce genre d'aléa. Cela étant, si on pouvait imputer des intérêts de retard aux collectivités, nous en serions tous très heureux. Bien que ce soit légal, nous n'osons pas le faire, parce qu'au prochain appel d'offres, nous craindrions d'être mal notés. Les délais de paiement majoritairement dépendants de la commande publique sont très longs. Je suis en train de récupérer des factures de 2021. C'est une catastrophe pour la trésorerie. On prend sur nous en ne facturant que très rarement les intérêts moratoires.
Les délais de paiement anormalement longs expliquent que le nombre de défaillances d'entreprise soit plus élevé chez nous. Nous en déplorons régulièrement dans le secteur du BTP. Plusieurs pistes ont déjà été évoquées, notamment l'affacturage inversé, mais on sent bien les réticences des collectivités à assumer financièrement ces retards de paiement.
Des surcoûts n'ont pu être répercutés sur les prix du transport, malgré une clause d'indexation sur le carburant, car les donneurs d'ordre ont montré beaucoup de réticence à l'appliquer. Dans le secteur du BTP, de nombreuses entreprises, qui n'ont pu répercuter au client final la hausse de tout ce qui entrait dans la fabrication, sont en difficulté.
À La Réunion, notre position sur l'octroi de mer est plus nuancée. On peut comprendre son utilité tant qu'il protège, mais quand il fait entrer artificiellement de l'argent dans la caisse des collectivités, ce n'est pas sans conséquence pour la cherté de la vie. À la rigueur, on pourrait l'affecter au financement de la continuité territoriale et en consacrer une partie au gommage du surcoût du fret entre la métropole et La Réunion.
Je me réjouis d'avoir entendu Philippe Jock inviter à orienter les échanges avec les pays voisins vers des biens immatériels. Je le disais il y a quelques jours lors de l'audition de deux économistes. J'en suis tout à fait partisane, car nous savons le faire et le coût serait probablement moindre.
Nous devrions peut-être nous saisir du problème des délais de paiement des collectivités territoriales car il existe aussi dans l'Hexagone, et met des entreprises en difficulté.
Pourriez-vous nous envoyer une réponse écrite sur le coût des télécommunications ? Le prix de l'internet a un peu baissé mais pourriez-vous confirmer que ceux de la téléphonie mobile restent élevés ? Je crois que vous ne pouvez pas bénéficier des tarifs low cost dans vos territoires.
Madame la députée, en Guyane, on envoie des fusées, mais en beaucoup d'endroits, il n'y a encore ni téléphone ni internet.
J'attends une réponse écrite sur la diminution des financements d'État. Comment réduire les charges des entreprises pour améliorer, à la fin, le prix de vente aux usagers ? Le montant de la défiscalisation est passé d'un milliard à 500 millions d'euros. Des exonérations fiscales et sociales pour les petites et moyennes entreprises ont disparu, à hauteur de 40 millions d'euros, ce qui représente des charges pour vous. La TVA non perçue récupérable a disparu, ce qui est une difficulté pour les entreprises. Des financements d'État ont partiellement disparu, ce qui incite des collectivités locales à augmenter leurs impôts. Puisque les recettes diminuent, elles vont en chercher ailleurs. C'est la cause principale des retards de paiement aux entreprises en lien avec les collectivités locales. Quelles mesures prises par l'État pourrions-nous conserver, en termes de défiscalisation, de niches fiscales ? Comment réduire les charges des entreprises pour créer de l'activité, de l'emploi, des revenus, et renforcer le pouvoir d'achat ?
Merci, Mesdames, Messieurs, pour vos réponses et votre contribution à cette riche discussion.
La commission auditionne ensuite M. Philippe Liou, directeur par intérim de l'Institut de la statistique de la Polynésie française (ISPF) et de Mme Florence Bouliou, responsable du département prix à l'ISPF.
Mes chers collègues, nous poursuivons nos auditions en entendant les représentants de l'Institut de la statistique de la Polynésie française (ISPF) : M. Philippe Liou, directeur par intérim, et Mme Florence Bouliou, responsable du département prix. Établissement public territorial, l'ISPF produit, récolte, analyse et diffuse des données statistiques en Polynésie française.
Madame, monsieur, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie de prendre le temps de répondre à notre invitation. Je vais vous donner la parole pour une intervention liminaire d'une dizaine de minutes, qui précédera notre échange sous forme de questions et réponses, à commencer par celles de notre rapporteur.
Je vous remercie également de nous déclarer tout autre intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations.
Auparavant, je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc, madame, monsieur, à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
(Mme Florence Bouliou et M. Philippe Liou prêtent successivement serment.)
Nous nous proposons de vous présenter la façon dont se constituent les prix en Polynésie française. Je dois préciser que nous sommes en période de réserve, en raison des élections territoriales qui se dérouleront les 16 et 30 avril ; cela ne nous empêche pas de participer à cette audition, mais notre intervention restera neutre et informative.
Je présenterai tout d'abord les organismes qui interviennent sur le sujet des prix en Polynésie française, et qui peuvent aussi être des sources de données et d'informations. Puis je vous exposerai les sujets sur lesquels l'ISPF peut faire valoir son expertise, à savoir les niveaux de revenus et les niveaux de prix.
Parmi les quatre organismes qui interviennent sur le sujet des prix en Polynésie, le premier est la direction générale des affaires économiques (DGAE). Son rôle est de mettre en œuvre les politiques économiques du gouvernement de la Polynésie française. C'est l'organe spécialiste de la réglementation des prix. La DGAE suit l'évolution des prix et des coûts, contrôle les pratiques en matière de prix et intervient pour faire respecter la réglementation.
Le deuxième organe est l'Autorité polynésienne de la concurrence (APC). Elle assure le bon fonctionnement des marchés au service des consommateurs et des entreprises de la Polynésie française. Elle dispose d'un pouvoir d'enquête, de sanction et de conseil en matière de régulation économique.
L'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM) assure, quant à lui le rôle de banque centrale dans les collectivités d'outre-mer ayant pour monnaie le franc pacifique, comme la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et la Polynésie française. Ses quatre grandes missions sont la stratégie monétaire, la stabilité financière, les services à l'économie et les spécificités ultramarines.
Notre institut, enfin, produit et diffuse des informations statistiques sur l'économie, la société et l'environnement de la Polynésie française, afin de cultiver l'information et d'alimenter les idées. Pour ce faire, les quelque cinquante agents de l'ISPF exercent des missions de collecte et d'analyse de données, réalisent des enquêtes et des études et diffusent de l'information.
J'en viens aux sujets d'expertise de l'Institut de la statistique de la Polynésie française : le niveau de vie et le niveau des prix.
Le niveau de vie en Polynésie française est moins élevé qu'en métropole. Notre enquête de référence est celle sur le budget des familles, qui centralise l'ensemble des données relatives aux revenus des ménages, à savoir les salaires, les aides et les revenus fonciers et immobiliers. La dernière édition de cette enquête date de 2015 ; cette année-là, le revenu médian mensuel par unité de consommation a été estimé à 905 euros en Polynésie française ; il était de 1 692 euros en métropole, soit un écart de 46,5 %. Cet écart s'explique, pour partie, par le marché de l'emploi. En Polynésie française, le taux d'emploi est plus faible qu'en métropole : 53 % contre 68 %. De plus, l'allocation chômage n'existe pas en Polynésie : si l'on est sans emploi, on ne bénéficie d'aucun revenu au titre du chômage.
Par ailleurs, le salaire moyen net est moins élevé. En la matière, nos données datent de 2018. Le salaire moyen net en Polynésie s'établissait alors à 2 067 euros, contre 2 392 euros en métropole. Les revenus du travail représentant 88 % des ressources des ménages, cela contribue grandement à l'écart des niveaux de revenus. De plus, le montant du salaire minimum interprofessionnel garanti (Smig) polynésien est nettement inférieur – de 8,5 % – au salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) métropolitain. En outre, les inégalités salariales sont plus marquées qu'en métropole ; le rapport entre le salaire du premier décile et celui neuvième décile est de 3,28 en Polynésie, contre 2,80 en métropole. Je précise que ces comparaisons salariales, réalisées en 2018, ne prennent pas en compte, pour les salariés métropolitains, le prélèvement d'impôt sur le revenu qui, à l'époque, n'était pas encore prélevé à la source.
Le seuil de pauvreté correspond à 60 % du revenu médian. En Polynésie française, il s'élève à 543 euros. Si l'on applique ce seuil aux deux populations, 27 % de la population de Polynésie française vit en dessous, contre moins de 5 % en métropole. Si l'on prend le seuil de pauvreté de la métropole, qui s'élève à 1 015 euros, 62 % de la population polynésienne vit en dessous, contre 14 % de la population en métropole.
Le second sujet d'expertise de l'ISPF a trait au niveau de prix.
Le constat global est que le niveau de prix en Polynésie française est plus élevé qu'en métropole. Nous participons à l'enquête de comparaison spatiale des prix organisée par l'Insee, qui compare, sur tous les territoires français, le prix d'un même panier de consommation. Les derniers résultats datent de 2016 et concluent à des prix plus élevés de 39 % en Polynésie française. Une nouvelle édition de l'enquête a été effectuée en 2022. Les données sont en cours de traitement et d'analyse. Les publications sont prévues en juillet pour la France métropolitaine et en septembre pour la Polynésie.
Dans l'étude de 2016, les principales contributions aux écarts de prix venaient des produits alimentaires et des boissons non alcoolisées – 12 % –, du logement – 6 % – et des autres biens et services, particulièrement des assurances – 4,5 %. Ce niveau de prix élevé est plus marqué pour les ménages plus modestes. En effet, les dépenses de première nécessité, telles que se nourrir et se loger, représentent une part plus importante de leurs dépenses : en 2016, elles représentaient 47,8 % des dépenses des ménages modestes, contre 42,4 % pour la moyenne des ménages.
Ces différences de niveau de prix tiennent d'abord à des facteurs géographiques : l'éloignement de la Polynésie française des grands pôles de développement, la petite taille démographique de la destination et le vaste territoire qu'elle représente. Tous ces faits géographiques engendrent des coûts importants d'infrastructures et de transport, mais aussi des coûts liés à la douane et aux taxes.
De plus, le territoire est dépendant de l'importation : 94 % des biens de consommation sont importés, dont 59 % de produits des industries agroalimentaires. Sur le marché, l'offre locale est faible sur les lieux de consommation. La Polynésie est isolée et le marché, assez petit. Cela limite les ressources, notamment lorsqu'il s'agit de secteurs dans lesquels il faut investir. En conséquence, la concurrence est assez faible, comme la compétitivité.
En conclusion, les niveaux de vie et de revenus sont significativement moins élevés en Polynésie française qu'en France métropolitaine ; le niveau de prix, lui, y est plus élevé.
(Présidence de Mme Maud Petit, vice-présidente de la commission)
Le modèle politique et économique de la Polynésie française, régie par l'article 74 de la Constitution, est différent de celui de la métropole. Quelles caractéristiques de ce régime politique expliquent selon vous la réalité économique de la Polynésie française ?
Pays d'outre-mer (POM), la Polynésie française a un statut d'autonomie et est compétente en matière d'économie, de travail, de santé et dans d'autres domaines.
La Polynésie perçoit-elle moins de financements de l'État depuis qu'elle est régie par l'article 74 ? Qu'est-ce qui a changé depuis qu'elle est régie par cet article ? Quelles recettes ne percevez-vous pas ? Que devez-vous produire vous-mêmes ?
L'allocation chômage n'existe pas en Polynésie française. La Caisse de paiement social (CPS) a donc instauré le régime de solidarité de la Polynésie française (RSPF) et nous devons trouver les financements pour accorder un revenu aux personnes sans travail.
En effet, le gouvernement de la Polynésie française a la compétence en matière de fiscalité et les charges des entreprises ne sont pas les mêmes qu'en métropole.
Les revenus en Polynésie française sont bien plus faibles que ceux de la France hexagonale, mais votre régime est différent. Il n'est pas évident de comparer votre situation à celle des territoires régis par l'article 73 de la Constitution. Vous avez des revenus plus faibles et des prix plus élevés : c'est une caractéristique des territoires ultramarins. Comment mesurez-vous les prix ? Et comment déterminez-vous le panier de dépenses ? Par ailleurs, quel est le poids de l'économie informelle en Polynésie française, notamment celui de l'autoconsommation ?
Nous mesurons les prix au travers de l'indice des prix à la consommation (IPC). C'est le même indicateur qu'en France métropolitaine, mais nous le mesurons sur un panier de dépenses propre aux ménages polynésiens, déterminé par l'enquête « budget des familles ». Sur une période donnée, nous demandons à chaque famille ce qu'elle dépense et, grâce à cela, nous obtenons des pondérations que nous appliquons aux variations de prix observées chaque mois par une équipe de sept personnes sur 14 000 prix.
Comment composez-vous ce panier ? Quels produits servent de référence pour établir une comparaison et mesurer les écarts de prix entre la France hexagonale et la Polynésie française ?
Nous nous appuyons, d'une part, sur un indicateur interne à la Polynésie qui permet de mesurer l'inflation et, d'autre part, sur l'enquête de comparaison spatiale des coûts, commune avec l'Insee, qui s'appuie sur un panier commun.
Les indicateurs de prix se fondent sur une nomenclature appelée la classification des fonctions de consommation des ménages ( Classification of Individual Consumption by Purpose – COICOP). Les trois premiers niveaux de cette nomenclature sont communs à l'échelle internationale. L'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) décide d'un panier composé de 500 produits, dont il informe tous les territoires. Si nous avons un produit qui est beaucoup plus consommé sur notre territoire qu'en métropole, nous demandons qu'il soit intégré à cette comparaison ; cela donne lieu à un échange. La limite est budgétaire : on ne peut pas relever le prix d'autant de produits que dans notre indice mensuel.
La composition du panier est décidée d'un commun accord. En métropole, on relève le prix des bonnets en laine ; nous, nous ne pouvons pas le faire, car c'est une offre qui n'existe pas chez nous. Il y a donc certains produits du panier dont nous ne tenons pas compte, parce qu'ils ne peuvent pas faire l'objet d'une comparaison pertinente.
Quant au panier IPC, il est basé sur l'enquête « budget des familles », dont la dernière édition date, comme l'a rappelé Mme Bouliou, de 2015.
Sur ces dix dernières années, les prix ont augmenté, et la crise liée à la pandémie a donné un coup de fouet à cette inflation sur l'ensemble des produits, particulièrement l'alimentaire. Comme l'ensemble des départements d'outre-mer, nous sommes soumis aux importations, notamment par voie maritime. Or, le coût du fret a explosé, ce qui a contribué à l'augmentation des prix.
À Saint-Pierre-et-Miquelon, ils s'approvisionnent directement par le Canada, via le port d'Halifax. Dans la mesure où vous relevez de l'article 74, n'avez-vous pas le droit de commercer et de discuter avec vos voisins du Pacifique ?
Si, nous importons de Nouvelle-Zélande, des États-Unis et de Chine, mais notre première source d'importation reste la France métropolitaine.
Elle est de l'ordre de 23 % pour l'ensemble des biens de consommation, pas seulement pour l'alimentaire.
Donc 77 % proviennent du voisinage.
Rencontrez-vous des situations de monopole et d'oligopole dans vos territoires ? Si oui, comment cela se caractérise-t-il ?
Le territoire connaît une concentration de l'ensemble des marchés, notamment ceux ayant des besoins en investissement, comme les transports, l'énergie, les télécommunications. Avec peu d'acteurs, le secteur bancaire est également très concentré.
Ce secteur compte de nombreuses entreprises. En revanche, le chiffre d'affaires est concentré sur les premières. Cela reste donc malgré tout un secteur concentré.
Il faudra interroger l'Autorité polynésienne de la concurrence (APC). J'avoue ne pas savoir.
Avez-vous fait une étude pour savoir comment abaisser le coût de la vie dans votre territoire ?
Non, cela n'entre pas dans les attributions de l'ISPF.
Vous dites qu'il n'y a pas beaucoup de concurrence. Quels sont les obstacles à la concurrence qui font que les groupes, les activités se concentrent ?
Ce n'est pas forcément lié à la concurrence. C'est structurel, si je puis dire.
C'est cela.
C'est lié à la petitesse du marché.
En disant que c'est structurel, vous donnez le sentiment que l'on ne peut pas y remédier. Il y a une forme de fatalisme : rien ne pourra changer, les prix resteront toujours aussi élevés et les revenus aussi faibles.
Nous ne sommes pas spécialistes de la concurrence.
Pour m'en tenir à votre compétence en matière d'études statistiques, combien d'études réalisez-vous par an ? Avez-vous les moyens de travailler convenablement et de produire les études nécessaires ?
Par ailleurs, disposez-vous d'éléments concernant l'impact de la Covid-19 sur le niveau de vie ?
Nous sommes cinquante personnes à travailler à temps plein à l'institut. Nous ne sommes pas en mesure de réaliser une enquête « budget des familles » tous les cinq ans, comme nous le souhaiterions, afin de suivre plus finement l'évolution des dépenses et des ressources des ménages. La dernière enquête date de 2015. Pour réaliser des études plus régulières, il nous faudrait être plus nombreux.
En 2019, je suis venue en Polynésie pour travailler sur un rapport relatif au sport et à la santé. J'avais auditionné des représentants de votre Institut et vos collègues m'avaient expliqué que vous aviez un bouclier qualité-prix personnalisé. Ne disposant pas du bouclier issu du dispositif de la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer, dite « loi Lurel », vous avez créé votre propre système d'encadrement des prix. Comment fonctionne ce bouclier ? Est-il efficace ou nécessiterait-il des évolutions ?
Une réglementation des prix est effectivement gérée par la DGAE, qui encadre deux types de produits.
Les produits de première nécessité (PPN) sont les produits ou les services nécessaires à la vie courante des ménages, à la santé des personnes ou à la lutte contre une calamité naturelle. Ils sont exonérés de toute taxe, qu'il s'agisse des droits et taxes à l'importation, de la TVA ou de la contribution pour la solidarité, qui existe aussi en Polynésie. Pour les réglementer, des marges ou des prix maximaux sont fixés et ces PPN sont affichés sur un support rouge dans les magasins afin que tout le monde les repère. Pour ce qui les concerne, le fret inter-îles est gratuit et pris en charge par le pays.
Le second type de produits, également exonérés de TVA et de contribution pour la solidarité, englobe les produits ou services de grande consommation habituellement utilisés dans la vie courante. Là encore, des prix et des marges sont fixés, mais ils ne font pas l'objet d'un affichage spécifique.
Il faut encore mentionner une aide sur les prix du carburant, qui diffère de celle existant en métropole ; du fait de cette subvention, le prix des carburants, en Polynésie française, est inférieur à celui pratiqué en métropole.
Cette aide sur le prix des carburants existait-elle avant la période d'inflation actuelle et la guerre en Ukraine ?
Oui, elle existait déjà.
Nous avons un fonds de régulation du prix des hydrocarbures (FRPH), qui est alimenté par les fluctuations du prix du baril : lorsque celui-ci baisse, le prix est maintenu, ce qui permet de compenser la hausse lorsqu'il monte.
S'agissant des PNN, vous indiquiez que vous avez des bornes sur les prix et sur les marges maximales.
Sur l'un ou sur l'autre.
Comment déterminez-vous les marges ? Et, en période d'inflation, ces bornes ne posent-elles pas un problème ? N'ont-elles pas des conséquences pour les producteurs ou les distributeurs ?
En période d'inflation, les prix des PPN peuvent augmenter, si le prix est fixé sur un taux de marge maximal.
Le calcul des marges relève de la DGAE, pas de l'ISPF.
Durant le premier trimestre de 2023, on a fait l'essai d'un panier à prix bloqué, qui se rapproche du bouclier mis en place en métropole. Une liste de produits a été discutée avec les distributeurs, qui se sont engagés à maintenir leur prix durant trois mois. En avril, ils ont fait le bilan et un seul opérateur a décidé de poursuivre ; les autres n'ont pas réussi à maintenir ce prix.
Avez-vous des études académiques sur le coût de la vie ? Si tel est le cas, pouvez-vous nous en dire quelques mots et nous les transmettre ? Par ailleurs, je n'ai pas eu de réponse sur l'économie informelle. Avez-vous mesuré la part de l'autoconsommation ? Enfin, avez-vous conduit une étude sur l'aérien, dont la situation s'est dégradée partout ?
Notre étude sur le coût de la vie est celle sur le budget des familles, réalisée en 2015. Elle nous permet d'avoir une vision globale et de mesurer la part des circuits informels, notamment l'autoconsommation. Dans l'informel, j'inclus le travail au noir, qui peut être mesuré lorsque nous interrogeons les ménages.
L'autoconsommation, en Polynésie française, représente 8 % de la consommation totale et 24 % de la consommation alimentaire. Nous vous transmettrons tous les supports d'analyse des études qui ont été réalisées. J'ai déjà préparé une bibliographie à cette fin.
Pour la métropole et les DOM, nous les aurons en juillet ; pour nous, en septembre.
Pourriez-vous nous envoyer un point d'étape d'ici à la fin mai si vous disposez d'éléments qui ont du sens pour la commission d'enquête ?
Bien sûr.
Dans vos études, faites-vous des préconisations pour réduire le coût de la vie dans vos territoires ?
Ce sont des choix politiques qui ne relèvent pas de l'ISPF.
(Présidence de M. Guillaume Vuilletet, président de la commission)
Je pense qu'en ce moment, la réserve liée à proximité des échéances électorales incite nos invités à la prudence sur ces questions.
J'avoue que je suis surpris de la précision de vos réponses. Je vous en félicite : vos informations sont précises et riches.
La Polynésie française est un territoire très vaste et, pour se déplacer d'île en île, il est souvent nécessaire d'avoir recours au transport aérien. J'avais retenu de ma visite que les coûts des transports inter-îles étaient particulièrement élevés. Que pouvez-vous nous en dire ?
Une autre de mes interrogations porte sur les opérateurs de téléphonie mobile. Pouvez-vous dire un mot de l'accès à internet et des tarifs des télécommunications ?
Pour le transport domestique, on peut utiliser le bateau ou l'avion. Par rapport à la métropole, les dépenses liées aux transports pèsent deux fois plus. Les transports routiers sont bien moins utilisés. Globalement, les services de transport sont consommés au même niveau, mais ce ne sont pas les mêmes.
En matière de transport aérien domestique, l'acteur historique est Air Tahiti. Il est le principal transporteur aérien, avec 99 % des passagers et du fret. L'offre commence à se diversifier. Depuis deux ans, de nouveaux acteurs pénètrent le marché, mais il faut une flotte adaptée à toutes les spécificités locales des îles. Dans une des îles, la piste d'atterrissage se termine dans une montagne : tous les avions ne peuvent pas s'y poser. Air Tahiti bénéficie de subventions, parce que c'est une mission de service public de desservir l'ensemble des îles habitées de Polynésie française. Pour ce qui est du niveau de prix pratiqué, je n'ai pas de données en tête.
Mais les prix sont élevés : se rendre aux Marquises est plus cher que se rendre à Honolulu ou Hawaï.
Oui, le territoire de la Polynésie française représente le même territoire que l'Europe, du Portugal à l'Estonie. Il est aussi étendu.
Cela tient aussi à la petitesse du marché : il faut remplir l'avion.
Dans le secteur de la téléphonie, nous avons trois acteurs. Nous assistons ces derniers temps à une baisse mécanique des prix. Ils ne baissent pas forcément sur la facture, mais les services apportés aux consommateurs s'améliorent : désormais, on leur propose des forfaits illimités, et plus des forfaits d'une heure ; on leur propose aussi des paquets de données internet plus volumineux. Avec l'arrivée de la fibre, de même, on passe de forfaits internet restreints à des forfaits illimités. Nous assistons donc à une baisse mécanique des prix, du fait de l'amélioration du service.
Nous arrivons au terme de cette audition. Je vous remercie pour cette présentation. Pourriez-vous nous remettre, sous forme de contribution écrite, quelques éléments sur les prix de l'énergie ?
La commission auditionne ensuite Mme Johanne Peyre, présidente de l'Autorité polynésienne de la concurrence.
Mes chers collègues, nous entendons maintenant Mme Johanne Peyre, présidente de l'Autorité polynésienne de la concurrence (APC).
Avocate et juriste d'entreprise, spécialisée en droit de la concurrence et des affaires, Mme Johanne Peyre a été précédemment directrice juridique de GSK. Elle a notamment développé des actions en dommages et intérêts privés dans l'Union européenne.
Créée en 2015, l'APC est une autorité administrative indépendante agissant au nom de la Polynésie française, qui lui a délégué une partie de son pouvoir réglementaire dans le domaine du droit de la concurrence.
Madame la présidente, je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure. »
(Mme Johanne Peyre prête serment.)
Je tiens tout d'abord à vous remercier de l'occasion offerte à l'Autorité polynésienne de la concurrence de participer à votre commission sur un sujet qui est, à nos yeux, d'importance capitale.
J'ai effectivement été directrice juridique de la concurrence pour GSK. J'étais auparavant avocate spécialisée en droit de la concurrence. J'ai pris mes fonctions de présidente de l'APC il y a un peu moins de deux ans.
L'APC est une autorité administrative indépendante, structurée selon un modèle classique que l'on retrouve à l'Autorité de la concurrence de la métropole, mais également à l'Autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie.
Nous sommes une petite équipe, d'une dizaine de personnes. L'APC se compose d'un service d'instruction, d'un collège, qui est l'organe de décision, ainsi que d'un service de la présidence comportant un bureau de la procédure, qui fait office de secrétariat et de greffe de notre autorité.
La Polynésie française est régie par un droit qui lui est propre. Le code polynésien de la concurrence est distinct du droit national, mais ses dispositions sont très similaires. Nos décisions sont susceptibles de recours devant des juridictions françaises, notamment devant la cour d'appel de Paris. De ce fait, nous nous référons fréquemment à la jurisprudence de l'Autorité de la concurrence nationale.
Nos missions sont similaires à celles des autorités de la concurrence de métropole et de Nouvelle-Calédonie : nous assurons le contrôle des pratiques anticoncurrentielles, que nous détectons et pouvons sanctionner, ainsi que le contrôle des concentrations. Nous avons également un rôle consultatif.
Les autorités de la concurrence de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie remplissent aussi une mission particulière que n'exerce pas l'Autorité de la concurrence nationale, à savoir le contrôle des aménagements commerciaux. Il s'agit d'un instrument préventif intéressant, car les petites économies insulaires ont tendance à être très concentrées. Ce contrôle des concentrations permet de faire de la prévention au niveau macro des entreprises et de préserver un fonctionnement concurrentiel des zones de chalandise. Il porte sur tout ce qui a trait à l'implantation de surfaces commerciales, aux changements d'enseignes et à l'accroissement des surfaces commerciales de plus de 300 mètres carrés.
Le droit de la consommation est réservé à la direction générale des affaires économiques (DGAE), qui agit un peu comme la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) en métropole.
Notre action porte uniquement sur les marchés ouverts à la concurrence, sachant que des barrières réglementaires, qui viennent limiter la concurrence dans différents secteurs, sont susceptibles d'avoir une incidence sur les prix.
Je sais que vous avez déjà évoqué les barrières classiques au cours de vos précédentes auditions. Les barrières tarifaires, à savoir la perception de droits et de taxes à l'importation – de l'ordre d'une vingtaine –, représentent près de 30 % du montant cadre des importations. Je pense aussi à la taxe de développement local (TDL), l'équivalent polynésien de l'octroi de mer applicable dans les départements et régions d'outre-mer (DROM). Il existe également des barrières non tarifaires, parmi lesquelles des interdictions d'importation, des quotas, notamment en matière agricole, une réglementation des prix, ou encore une défiscalisation locale qui bénéficie de manière privilégiée à des acteurs déjà puissants, parfois au détriment de nouveaux entrants. En outre, une restriction des investissements directs étrangers limite l'entrée de nouveaux opérateurs ou producteurs sur le marché. Enfin, des règles sanitaires classiques s'appliquent : l'étiquetage en langue française est obligatoire tandis que les normes sanitaires sont similaires à celles de l'Union européenne.
L'action de l'APC s'insère dans l'économie de la Polynésie française. Aussi souhaiterai-je, à partir du constat de ce qu'est l'économie polynésienne, exposer son incidence en termes d'analyse concurrentielle.
L'économie de la Polynésie est un archétype d'une petite économie soumise aux mêmes contraintes que les DROM. En Polynésie, 300 000 habitants sont répartis sur plus d'une centaine d'îles, 75 % de la population étant regroupée dans les Îles du Vent, principalement à Tahiti et Moorea. La Polynésie est très éloignée des producteurs internationaux. Comme dans toutes les petites économies insulaires, on observe un degré très élevé de concentration des opérateurs économiques. C'est un phénomène fréquent dans les économies de cette taille, où seul un nombre restreint d'acteurs économiques peuvent véritablement opérer de manière efficace. Par voie de conséquence, cela réduit la concurrence.
On observe également un degré élevé de concentration par agrégat : un nombre limité d'acteurs contrôlent une large part de l'économie locale au travers de holdings actives dans les différents secteurs de l'économie.
La concentration permet aux acteurs économiques d'être plus efficaces. Dans une économie de taille restreinte, certains degrés de concentration sont nécessaires pour réaliser des économies d'échelle. Cela peut présenter des aspects bénéfiques, à condition qu'elles se répercutent ensuite sur le prix de vente ou sur la qualité des produits offerts au consommateur. Il faut éviter que ces économies d'échelle se traduisent par un accroissement des marges des différents acteurs économiques. Souvent, le même acteur est importateur, centrale d'achat et distributeur. Le principal levier d'action de l'APC consiste à ouvrir davantage les différents marchés à la concurrence. En augmentant la pression concurrentielle sur les entreprises, les fournisseurs et les importateurs, ceux-ci seront incités à baisser leurs prix ou à proposer des produits de meilleure qualité.
Il faut toutefois veiller à ne pas franchir un seuil de concentration qui renforcerait un pouvoir de marché déjà très présent. Si la concentration dépassait un certain plafond, à déterminer au cas par cas, les opérateurs seraient affranchis de toute pression concurrentielle et nous serions confrontés à un risque de hausse des prix, de baisse de la qualité et de baisse du choix, ce qui découragerait toute innovation. Cela créerait une sorte de phénomène de rente.
Cela rend le processus décisionnel de notre autorité plus complexe. Dans une économie de ce type, le droit de la concurrence ne peut être appliqué comme il l'est dans une économie plus mature, comme celle de la métropole. En contrôle préventif, l'Autorité de la concurrence cherche généralement à éviter de créer ou de renforcer une position dominante – je rappelle que la position dominante est autorisée ; ce qui n'est pas permis, c'est d'en abuser, même lorsqu'elle a été acquise par le mérite. Ainsi, nous pouvons soit interdire une concentration ou un aménagement commercial, soit l'accepter sous réserve de la cession d'un actif ou de certains engagements – de non-discrimination, par exemple.
La difficulté est de réussir, en amont, à déterminer si l'opérateur est dominant. Nous prenons en compte de nombreux critères économiques. Le plus souvent, les autorités de la concurrence se réfèrent à un seuil en parts de marché : dans les économies matures, on estime ainsi généralement qu'à partir de 30 % ou 50 % de parts de marché, selon les juridictions, il y a présomption de concurrence. Nous considérons que, dans des petites économies, ce seuil devrait être plus bas : dans la mesure où les barrières à l'entrée sont plus élevées, l'opérateur dominant est moins contraint par des entrants potentiels à adopter les bons comportements. Il subit moins de pression et redoute moins que de nouvelles entreprises viennent le concurrencer sur ses marchés. En outre, la concurrence étant généralement très fragmentée, de gros acteurs sont implantés sur chacun des secteurs tandis que de petits acteurs détiennent des parts de marché significativement plus réduites. Cette fragmentation des opérateurs concurrents renforce le pouvoir de marché de l'opérateur dominant dans le secteur.
Notre défi est de rester sur une ligne de crête en matière de contrôle des concentrations. Il faut, d'un côté, veiller à ne pas être trop restrictif, à ne pas bloquer une opération qui pourrait présenter des aspects proconcurrentiels et favoriser des économies d'échelle qui se répercuteraient sur les prix payés par le consommateur ; de l'autre, veiller à ne pas autoriser une opération qui restreindrait la concurrence ou renforcerait le pouvoir de marché d'un opérateur.
Cette dernière situation est la plus dommageable. En effet, si nous autorisons une opération qui n'aurait pas dû l'être parce que le pouvoir de marché s'en trouve renforcé, la correction des effets négatifs du renforcement de position dominante devient bien plus compliquée, car ces marchés restreints n'ont pas un pouvoir d'autocorrection. Autrement dit, ils ne se régulent pas par eux-mêmes. Les seuls outils dont dispose l'autorité de la concurrence sont le repérage et la sanction des pratiques anticoncurrentielles par le biais des procédures classiques, pour entente ou abus de position dominante. Cela nécessite un temps long – au moins deux ans. En outre, la mission est plus complexe, car le standard de preuve est très élevé et, même si nous prenons une décision qui pourrait remédier à certains comportements, le mal est déjà fait. Mieux vaut disposer d'outils de prévention adaptés et plus étoffés que de s'appuyer sur des sanctions et un contrôle ex post.
S'agissant des outils préventifs, nous manquons de ressources. Nous n'avons pas encore eu les moyens de procéder à une analyse économique rigoureuse. Ce sera peut-être du cas par cas, mais peut-être pourrions-nous déjà parvenir à établir une méthodologie économique pour nous aider dans l'analyse concurrentielle et réussir à déterminer, en fonction des caractéristiques de l'économie polynésienne et de chaque secteur, le fameux seuil, en parts de marché, à partir duquel on peut considérer qu'il y a une présomption de position dominante.
Nous aimerions pouvoir nous appuyer sur une méthodologie sérieuse et étayée. Il serait très utile de créer un groupe de travail sur l'outre-mer, peut-être chapeauté par l'Autorité de la concurrence nationale, composé d'économistes qui pourraient travailler sur ces sujets avec nous et avec les DROM – nous sommes confrontés à des problèmes similaires, en termes de structures ou de barrières réglementaires, par exemple.
Ces économies particulières se caractérisent par de nombreux oligopoles, qui facilitent une coordination tacite : les acteurs alignent leur comportement sans avoir besoin d'un accord formel, voire informel. Cela rend la détection des pratiques illicites très difficile car nous avons du mal à prouver qu'il y a eu coordination.
De manière assez classique également, les liens sociaux entre acteurs économiques, politiques et autres sont très importants. Les intérêts croisés de nombreuses entreprises et de gros acteurs économiques dans des marchés connexes, via des holdings, rendent les outils classiques de contrôle ex post inopérants. Le programme de clémence qui fonctionne pour des autorités de la concurrence plus matures, comme l'Autorité de la concurrence nationale, et qui incite les opérateurs victimes de pratiques anticoncurrentielles à dénoncer ces dernières, ne fonctionne pas en Polynésie française. La solution serait de renforcer la coopération avec certains services du pays – nous l'avons déjà engagée avec la DGAE – pour recevoir plus de signalements de suspicion ou d'indices de pratiques anticoncurrentielles.
Un argument qui nous est fréquemment opposé par les acteurs économiques est que, dans ces économies restreintes, il n'y a de la place que pour un seul opérateur. Or nous disposons aujourd'hui du recul suffisant pour observer qu'y compris dans ces économies, le maintien de l'ouverture à la concurrence est un facteur de baisse des prix. L'APC a déjà rencontré quelques succès, même si, créée en 2016, elle est une autorité très jeune compte tenu du temps de montée en puissance.
Nous avons observé ce phénomène de baisse de prix consécutif à l'ouverture à la concurrence des secteurs du transport aérien international, du transport aérien domestique et de la téléphonie. Ces phénomènes ont également été observés chez nos voisins du Pacifique, en Papouasie et en Nouvelle-Guinée qui, pour ce qui est de la téléphonie, sont passés comme nous d'un opérateur à trois. Nous échangeons avec nos voisins des Fidji, de Papouasie, de Nouvelle-Calédonie, de Nouvelle-Zélande et d'Australie, pour connaître leurs réponses et savoir ce qui fonctionne et ne fonctionne pas, à travers un réseau de coopération des autorités de la concurrence du Pacifique auquel est associée l'Autorité de la concurrence de métropole qui, dans la zone, a juridiction sur Wallis-et-Futuna.
Je pourrais revenir sur les différents avis rendus par l'APC, notamment sur un avis de 2019 relatif aux mécanismes d'importation, mais vous l'avez sans doute déjà à votre disposition.
J'ai été très intéressé par votre exposé pragmatique et surtout rigoureux.
Ma première question porte sur la gouvernance. Qui est habilité à engager une procédure d'investigation, et sur quelle base ? Qui vous interroge ou vous consulte ?
De manière assez classique, pour les missions consultatives, le président de la Polynésie française, le président de l'assemblée de Polynésie française, les entreprises, les représentants d'organisations syndicales ou professionnelles et les représentants des associations de consommateurs peuvent nous solliciter.
S'agissant des pratiques anticoncurrentielles, les entreprises, associations de consommateurs et organismes professionnels peuvent soit nous signaler certains faits, soit porter plainte directement. Le service d'instruction est saisi du dossier ; il a la possibilité de le rejeter ou de poursuivre l'enquête. Dans ce dernier cas, s'ensuivra une procédure classique, avec éventuellement une notification de grief. Une fois le dossier d'instruction clos, il passera en formation de décision, devant le collège de l'Autorité, qui est composé de huit personnes.
Oui, tout au moins pour ce qui est du dépôt de la plainte ou du signalement. Ce serait parfait si l'anonymat pouvait être conservé jusqu'à l'aboutissement du dossier mais, dans certaines affaires contentieuses, il est difficile de le maintenir parce qu'il faut garantir le respect des droits de la défense. Ce sont des questions classiques, mais compliquées.
Vous avez fait le choix d'être davantage dans la prévention que dans la coercition, parce que les procédures juridiques et judiciaires sont longues et que vous n'avez pas nécessairement les moyens de les faire aboutir. Pourriez-vous nous citer un ou deux dossiers symboliques qui ont abouti, en présentant des éléments de synthèse qui nous permettent de comprendre la façon dont cela fonctionne puisque les oligopoles et les monopoles sont présents partout dans les territoires d'outre-mer ?
Vous avez dit beaucoup de choses très intéressantes, mais il en est une que j'ai notée : malgré l'exiguïté des marchés, il est possible de développer la concurrence.
J'en suis convaincue.
Nous n'avons pas fait le choix de mettre l'accent sur le préventif ; c'est plutôt ce qui ressort de l'analyse que j'ai été amenée à faire pour préparer cette audition. À mon sens, la façon la plus rapide et efficace pour favoriser une baisse des prix est d'ouvrir à la concurrence. Il convient donc d'éviter, de manière préventive, que la concurrence ne se ferme, car les seuls moyens dont nous disposons sont alors des moyens curatifs qui imposent des procédures longues. C'est une question de logique. Cela ne résulte pas d'un choix.
La mission première d'une autorité de la concurrence est de détecter et de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles. Nous sommes, si je puis dire, le « docteur » de la concurrence sur le marché et notre service de l'instruction est amené à traiter de nombreux dossiers contentieux. L'instruction est un temps long, qui prend plusieurs années. L'année dernière a été une année record en décisions : vingt-six au total ! Le problème est que tout ce qui relève du droit des concentrations et des aménagements commerciaux doit être traité en temps contraint. Le service d'instruction se compose d'une petite équipe, qui a connu des départs ; nous sommes en cours de recrutement. Aussi, lorsque nous recevons des dossiers à traiter en temps contraint, le service d'instruction doit arrêter de traiter les dossiers de fond en contentieux pour s'en occuper.
Nous avons également reçu de nombreuses demandes d'avis sur des propositions de loi à traiter en urgence, en quinze jours. Cela nous impose d'y consacrer une ressource qui, pendant ce temps, s'extrait des dossiers contentieux. Nous en avons eu beaucoup l'année dernière. Cette année, le service d'instruction peut se concentrer sur les dossiers contentieux, mais ceux-ci sont relativement nombreux, ce qui est assez classique dans des économies qui se sont récemment dotées d'un droit de la concurrence et d'une autorité de la concurrence. Ces dossiers concernent essentiellement les industries de réseau : énergie, télécoms, etc.
Dans ces petites économies insulaires, le marché n'est pas infini, une certaine inertie des comportements liée aux habitudes s'opère et une logique de sentier se développe. Pour illustrer mon propos avec un exemple observé sur mon territoire, la principale réticence à l'installation de terrains de foot en gazon synthétique tient avant tout à l'habitude des services et des collectivités de travailler avec certaines entreprises.
S'agissant des économies de réseau, face aux enjeux énergétiques liés à la diversité des îles, à la production d'énergie, aux infrastructures ainsi qu'aux innovations en termes d'habitat, comment arrivez-vous à appréhender et à faciliter une concurrence qui passe aussi par l'innovation ?
Il faut bien distinguer deux volets.
La définition des orientations relève plutôt de la décision politique. L'APC, quant à elle, ne peut agir que sur les marchés ouverts à la concurrence. En Polynésie, un travail a déjà été engagé sur le sujet ; nous pourrions aller plus loin et déterminer, pour ces industries de réseau, ce qui doit véritablement être régulé et ce qui doit relever des acteurs privés et donc faire l'objet d'une ouverture à la concurrence.
Pour ce qui est de la régulation, il serait intéressant que la Polynésie dispose d'un régulateur indépendant : cela favoriserait une certaine agilité par rapport à ce qui se fait actuellement. Le gouvernement y réfléchit, mais je ne sais pas exactement où en est sa réflexion.
D'après mes souvenirs de rapporteur du projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française, non seulement il s'agit d'une économie insulaire dispersée sur un territoire équivalent à celui de l'Union européenne, mais il faut également prendre en compte l'éloignement.
Un des outils de concurrence, dont on peut certes discuter la pertinence, est le e-commerce, qui vient concurrencer le fret et les modes de distribution traditionnels. Existe-t-il en Polynésie française ? Si non, quels sont les obstacles à son développement ? Est-il complètement hors-jeu du fait même des contraintes structurelles ?
Avant de prendre mes fonctions actuelles, j'avais fait un passage à New York. J'ai été frappée de constater combien le commerce électronique ou e-commerce en provenance de l'extérieur est peu développé en Polynésie française. Je pense qu'en la matière, les choix relèvent davantage du politique, car les droits de douane rendent le e-commerce compliqué. Même si vous achetez par internet, les marchandises doivent être acheminées et le coût du transport en Polynésie est très élevé, d'autant que des droits de douane et des taxes à l'entrée viennent s'ajouter.
Dans ces territoires, entre la multiplication des marges due au grand nombre d'intermédiaires et l'augmentation du coût des transports, placer un colis dans la soute d'un avion devient quasiment compétitif. Nous avons été amenés à légiférer sur la taxe postale liée au colis. Sans cet environnement tarifaire, la concurrence serait-elle possible entre le container et la soute d'avion ?
L'incitation serait plus forte si les taxes étaient abaissées. Quant à savoir si cela aurait un impact significatif sur la concurrence, je ne saurais l'affirmer ; il faudrait réaliser une étude.
J'entends ce que vous dites à propos de la concentration. Constatez-vous des restrictions à l'apparition de produits nouveaux ou de produits de substitution qui viendraient soit troubler les circuits commerciaux existants, soit empêcher l'émergence de produits locaux ?
Je ne sais pas… Voulez-vous parler d'habitudes de consommation ou de restrictions réglementaires ?
Je pensais plutôt à une augmentation du coût d'entrée pour les acteurs économiques ou à une réticence à prendre en compte de nouveaux produits pour protéger les acquis, mais peut-être des habitudes de consommation viennent-elles effectivement se greffer.
Il faut plutôt mettre en cause certaines barrières réglementaires, des interdictions ou quotas d'importation, ou encore la TDL. Cette dernière aurait dû être limitée dans le temps mais a finalement perduré. Son assiette nous semble un peu trop large – cela a fait l'objet de plusieurs avis de l'APC –, car elle n'englobe pas uniquement des biens produits localement mais également la transformation, l'embouteillage et le conditionnement. Tout cela crée des situations de rente pour certains acteurs et n'incite ni à baisser les prix, ni à gagner en qualité, ni à faire entrer de nouveaux produits.
Nous observons en outre que des exclusivités d'importation sont accordées à certains importateurs ; dans ce contexte de concurrence restreinte, avec une concentration par agrégat et beaucoup d'interactions verticales, ces acteurs ne sont pas incités à innover ou à chercher ailleurs, ce qui limite davantage encore la concurrence.
L'interdiction des accords exclusifs d'importation a été supprimée en 2018 ou 2019. Il s'agissait pourtant d'un outil préventif intéressant, qui supprimait une incitation à la captation de la marge, augmentait la pression concurrentielle de la part du fournisseur ou de l'importateur et incitait ce dernier à se dépasser et à répercuter une partie de sa marge sur le prix de vente pour rester compétitif. On nous oppose souvent que les exclusivités d'importation n'ont pas fait leurs preuves. Peut-être le mécanisme était-il trop récent. En tout cas, il est sûr que cette suppression n'incite pas les opérateurs à baisser les prix et que cela ne va pas dans le sens d'une ouverture à la concurrence.
Autant, avec la massification toute relative des économies, avoir un seul opérateur localement peut se justifier – disons que cela peut être une contrainte qui s'impose –, autant il n'en va pas de même lorsqu'il s'agit de fournisseurs internationaux, sauf si la rentabilité du service rend le marché nécessairement monopolistique. N'est-ce pas notamment le cas du fret ? Les fournisseurs ont-ils le choix des affréteurs de containers ?
Les produits en provenance d'Europe et de métropole sont moins taxés que ceux venant de pays de la région, comme l'Australie ou la Nouvelle-Zélande. L'étiquetage devant se faire en français, l'importation de produits de pays anglophones représenterait, nous dit-on, un surcoût plus important. Toujours est-il que cela leur revient moins cher de faire venir les produits de pays européens, notamment de France. Il n'existe d'ailleurs qu'un seul affréteur, la Compagnie maritime d'affrètement - Compagnie générale maritime (CMA CGM).
Elles sont horriblement chères.
J'entends bien, mais plus chères que lorsque les produits sont destinés aux îles Salomon ou au Vanuatu ?
Nous n'avons pas établi de comparaison. Il serait intéressant de le savoir.
Si d'aventure vous aviez cette information avant la clôture de notre commission d'enquête, ce serait très bien.
Vous semblez dire que vous auriez besoin d'études pour définir le seuil de parts de marché au-dessus duquel un monopole existerait. L'Institut de la statistique de la Polynésie française (ISPF) ne peut-il pas les mener ? N'avez-vous d'autre solution que de les demander à l'extérieur ? Des chercheurs à l'université pourraient-ils vous accompagner ? Quels sont les outils qui pourraient aider l'APC ? Des observatoires des prix, des marges et des revenus existent dans les DROM. En avez-vous un chez vous, grâce auquel vous pourriez disposer d'éléments permettant de mieux appréhender le sujet et d'envisager les réponses à apporter ?
Les éléments factuels comme les prix et les marges sont disponibles auprès de la DGAE, l'équivalent de la DGCCRF en métropole. Nous pourrions réussir à obtenir ces données, mais il faudrait ensuite les compiler… Nous avons besoin d'une étude économique adaptée à notre analyse concurrentielle. Le sujet est plus complexe qu'il n'y paraît. L'utilité d'une telle étude irait au-delà de l'usage qu'en ferait l'APC : elle pourrait permettre d'établir une méthodologie, à adapter en fonction de la taille des marchés, de leur structure ou des barrières à l'entrée. Aussi, il serait très utile de monter un groupe de travail rassemblant l'Autorité de la concurrence nationale pour les DROM, l'Autorité de la concurrence de Nouvelle-Calédonie et l'APC. Nous avons besoin d'être épaulés par des économistes spécialisés en droit de la concurrence – il en existe, mais pas en Polynésie française.
Le même problème se pose un peu partout : nous avons des outils mais manquons de moyens. Nous avons entendu quelques économistes. L'idée d'un groupement qui travaillerait sur des analyses précises me paraît intéressante.
À ma connaissance, de telles études n'ont jamais été menées sur les petites économies insulaires. Nous nous appuyons beaucoup sur les travaux d'une spécialiste du domaine, Michal S. Gal. Le collège de l'Autorité de la concurrence compte des économistes très compétents qui commencent à travailler sur ces sujets, notamment Henri Piffaut, qui est d'ailleurs également membre de notre collège – ce qui lui permet d'avoir une vision de ces sujets au plus près du terrain. Ces études pourraient profiter à toutes nos économies insulaires. J'inclus la Guyane car, même si ce n'est pas une île, elle peut se considérer comme telle, à l'instar d'Israël qui estime avoir une économie insulaire.
Aujourd'hui, les concentrations verticales et horizontales se consolident dans l'ensemble des territoires insulaires, malgré la présence d'autorités de la concurrence. Pourquoi n'arrive-t-on pas à enrayer ce phénomène ?
La concentration, qu'elle soit verticale ou horizontale, est nécessaire jusqu'à un certain degré pour que les entreprises soient efficientes. Sans ce seuil de concentration, les prix seraient plus élevés. Dans les petites économies où le marché est plus restreint, pour réaliser des économies d'échelle et abaisser les prix, la taille des acteurs économiques doit être supérieure à ce qu'elle est dans les économies matures. Il faut donc un peu de concentration et d'intégration, mais pas trop car, dès que le seuil est franchi, le pouvoir de marché des acteurs peut devenir excessif et empêcher l'arrivée de concurrents ou l'animation concurrentielle – autrement dit, les acteurs ne sont plus incités à baisser les prix, à favoriser la qualité ou à innover.
La difficulté est que les dossiers sont nombreux, notre équipe petite, et que nous travaillons sur les dossiers au cas par cas. Ce qui nous aiderait, c'est de pouvoir déterminer une méthodologie sur laquelle nous appuyer afin d'acquérir un standard de preuve suffisant pour prendre de bonnes décisions n'affectant pas le marché et les sécuriser.
Nous agissons tout de même. Ainsi, nous avons rendu une décision d'interdiction d'un supermarché sur l'île de Moorea parce que nous avions jugé que l'animation concurrentielle aurait été trop restreinte et que cela aurait renforcé de manière excessive le pouvoir de l'opérateur dominant. Pour parvenir à cette conclusion, nous avons pris en considération le nombre d'acteurs dans la zone, leur taille, et étudié les projets. Nous avons estimé que les concurrents présents sur la zone de chalandise risquaient de disparaître. Nous avons aussi pris en compte le fait que l'opérateur qui allait s'installer était très intégré et disposait d'une centrale d'achat qui alimentait également ses concurrents ; nous voulions nous assurer que cette dernière continuerait d'alimenter ces derniers de manière non discriminatoire. Cet acteur nous a présenté un certain nombre d'engagements qui ne nous ont pas paru suffisants pour répondre aux préoccupations de concurrence : cela nous a amenés à interdire l'opération.
Dans le secteur de la téléphonie, nous avons récemment rendu une décision de mesure conservatoire. Un opérateur historique, en position de monopole, était le seul à disposer de l'infrastructure sur des centaines d'îles d'archipels éloignés. Les concurrents plus petits, qui ont besoin d'accéder à cette infrastructure pour être actifs, ont sollicité l'adoption rapide d'une mesure conservatoire leur permettant d'accéder à l'infrastructure dans un délai très court, en attendant que l'affaire soit jugée au fond.
Nous avons également rendu une décision relative à une entente anticoncurrentielle dans le secteur des pompes funèbres car, à la suite de la crise liée à la Covid-19, des prestataires funéraires s'étaient entendus pour augmenter les prix.
Nous agissons donc en rendant des décisions contentieuses et un certain nombre d'avis, dont certaines recommandations sont reprises par le gouvernement.
Il faudrait que nous puissions effectuer des sondages. L'APC est une autorité encore jeune. Une fois que les décisions contentieuses sont rendues, si des acteurs ont pris des engagements, nous demandons généralement à un mandataire d'en vérifier le respect et de nous remettre un rapport annuel pendant cinq ans à ce sujet. Quant au recouvrement des pénalités financières, nous le contrôlons facilement avec les services du pays.
J'en viens à l'encadrement des prix des produits de première nécessité. Vous disiez qu'une marge maximale était fixée. Comment en garantissez-vous le respect ?
Il ne nous revient pas de contrôler le respect des marges – cette mission relève plutôt de la DGAE. Pour notre part, s'agissant des produits de première nécessité, nous avons rendu des avis, et non des décisions. Notre principale recommandation était de ne pas se référer à une marge comme assiette, mais plutôt à des prix en valeur absolue.
Pour conclure, j'aimerais évoquer l'expansion de la consolidation à travers le rachat de parts de marché ou de surfaces commerciales par de grands groupes locaux, peu nombreux. D'autres territoires insulaires considèrent que, le marché étant exigu, il n'est pas possible de faire intervenir d'autres entreprises concurrentes. Est-ce également une réalité en Polynésie française, ou l'implantation d'autres opérateurs vous semble-t-elle toujours possible ? Vous avez évoqué le secteur aérien, qui a été ouvert – ce qui prouve bien que cela est possible. Les parts de marché se répartissent-elles vraiment toujours entre les mêmes acteurs ?
Ne pas ouvrir à la concurrence, c'est se priver de la possibilité de voir arriver des acteurs extérieurs, ou de nouveaux acteurs locaux d'ailleurs, sur ces marchés. Nous considérons qu'il faut tout faire pour ouvrir au maximum les possibilités d'entrer, et donc réduire les barrières à l'entrée. Nous ne sommes pas là pour réguler le nombre d'acteurs qui doivent opérer sur les marchés, mais nous pouvons inciter à lever les barrières de sorte que de nouveaux entrants puissent essayer de concurrencer les entreprises déjà présentes. Si leur business model ne leur permet pas de perdurer, ce n'est pas grave – cela fait aussi partie de l'émulation concurrentielle. Peut-être un nouvel entrant réussira-t-il à percer sur une petite niche ou à être suffisamment disruptif pour secouer les opérateurs en place. Cela ne peut qu'être bénéfique et susciter plus d'innovation, pas seulement en termes de produits, mais également d'offre de services. Cela ne concerne pas uniquement les prix, mais bien d'autres facteurs qui stimulent l'économie.
Le principal argument que l'on nous oppose est qu'il n'y a de place que pour un seul acteur. Or, lorsque des marchés ont été ouverts à la concurrence, nous avons pu constater l'arrivée d'autres acteurs. Certes, il n'y a peut-être pas la place pour dix acteurs dans le secteur de la téléphonie, mais au moins pourront-ils essayer de se développer. Nous verrons alors combien subsisteront – il arrive d'ailleurs que des concurrents plus performants se substituent aux acteurs en place. Quoi qu'il en soit, cela participera d'une économie plus saine.
Je vous remercie pour la précision de vos réponses. Je vous propose de compléter nos échanges en nous adressant les documents que vous jugerez utiles et en répondant au questionnaire qui vous a été envoyé pour préparer cette audition.
La séance s'achève à vingt-et-une heures dix.
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Perceval Gaillard, M. Frantz Gumbs, M. Johnny Hajjar, Mme Joëlle Mélin, Mme Lysiane Métayer, M. Philippe Naillet, Mme Maud Petit, M. Guillaume Vuilletet
Assistait également à la réunion. - Mme Karine Lebon