La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Suite de la discussion d'une proposition de loi
Ce matin, l'Assemblée a commencé la discussion des articles de la proposition de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 8 portant article additionnel après l'article 3.
Je suis saisie de plusieurs amendements, n° 8 , 11 , 58 , 83 , 22 et 73 , pouvant être soumis à une discussion commune. Les amendements n° 8 , 11 et 58 sont identiques. L'amendement n° 83 fait l'objet d'un sous-amendement.
L'amendement n° 8 de M. Philippe Fait n'est pas défendu.
La parole est à Mme Angélique Ranc, pour soutenir l'amendement n° 11 .
Les enfants handicapés sont avant tout des enfants : ils veulent jouer, s'amuser et profiter de leurs amis. Malheureusement, de nombreuses structures de loisirs refusent de les accueillir en raison du manque de formation de leur personnel. Aussi souhaitons-nous, pour le bien-être de ces enfants, que tous les professionnels des centres de loisirs, des crèches et des clubs sportifs soient formés à l'accueil des enfants handicapés et que ces lieux ne manquent d'aucun des aménagements nécessaires pour les accueillir. Outre la nécessité de mieux les intégrer dans la société et de les aider à sociabiliser avec d'autres enfants, une telle mesure permettrait aux parents de souffler. Il est plus difficile pour les parents d'enfants handicapés que pour les autres de concilier leurs obligations professionnelles et personnelles. Les proches aidants méritent également de bénéficier de moments de répit.
Conscients que la formation de ces professionnels exigerait des moyens importants, nous demandons surtout, avec cet amendement d'appel, que le Gouvernement prenne le sujet en considération.
Il vise à étendre la formation des personnels de l'éducation nationale à l'accueil des enfants handicapés aux personnels des centres de loisirs, des crèches et des clubs sportifs.
Le rapport de la Défenseure des droits, Claire Hédon, et de son adjoint, le Défenseur des enfants, Éric Delemar, intitulé « Le droit des enfants aux loisirs, au sport et à la culture » et publié en novembre 2023, insiste sur le refus de nombre de structures d'accueillir des enfants handicapés faute de personnels formés et de moyens financiers permettant l'accompagnement individuel des enfants. Nous demandons donc qu'une formation des personnels des centres de loisirs, des crèches et des clubs sportifs soit organisée afin qu'ils puissent accueillir les enfants handicapés, ce qui offrirait un peu de répit à leurs parents et aux proches aidants.
Parce que l'inclusion n'est pas uniquement scolaire, il est important d'étendre la formation à l'accueil des enfants handicapés aux professionnels des centres de loisirs, des clubs sportifs et des structures d'accueil de la petite enfance. Cette formation est indispensable pour rendre possible l'accueil des enfants handicapés, grâce à un encadrement adapté. Les enfants porteurs de troubles du neurodéveloppement (TND) doivent bénéficier, comme les autres, des règles de droit commun et être accueillis avec bienveillance. L'accueil des enfants handicapés dans ces structures permettrait en outre aux parents de s'offrir quelques moments de répit. Aujourd'hui, trouver une place dans un centre de loisirs le mercredi après-midi pour un enfant handicapé est un véritable défi. La formation des animateurs des centres de loisirs constituerait une réelle avancée.
Dans la droite ligne de l'amendement n° 23 visant à rétablir l'article 3, le groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES appelle l'attention du Gouvernement sur la formation des professionnels qui prennent en charge des enfants présentant des troubles du neurodéveloppement dans les structures d'accueil du jeune enfant, les centres de loisirs et les clubs sportifs. Cet amendement prévoit une formation spécifique pour ces personnels en matière d'accueil et de suivi des enfants et jeunes handicapés, notamment ceux qui présentent un trouble du neurodéveloppement. Dans son rapport sur le droit des enfants aux loisirs, au sport et à la culture, la Défenseure des droits fait état du refus de certaines structures d'accueillir ces enfants en raison du manque de personnel. De telles pratiques sont intolérables et clairement discriminatoires ; nous devons y remédier. Nous proposons donc d'appliquer le principe d'égal accès des usagers aux services publics – un principe à valeur constitutionnelle. Cette mesure favorisera l'accès aux loisirs et aux sports des enfants présentant un trouble du neurodéveloppement.
L'amendement n° 73 de M. Sébastien Peytavie est défendu.
La parole est à M. Paul Christophe, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à quinze heures cinq, est reprise à quinze heures dix.
La commission approuve l'objectif de ces amendements et était favorable au n° 83 de Mme Dordain sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 85 de Mme Vidal. Ce dernier, qui propose de cibler l'obligation de formation sur les crèches et les modes d'accueil collectif à caractère éducatif, n'a pas été défendu. Avec Mme la ministre déléguée, nous proposons donc qu'une seconde délibération ait lieu au terme de la discussion des articles, ce qui nous permettra d'inscrire la mesure – à laquelle nous tenons tous – dans le texte. À ce stade, mon avis est défavorable sur l'ensemble des amendements.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles, pour donner l'avis du Gouvernement.
Former les professionnels à l'accueil des enfants handicapés est essentiel. La philosophie de ces amendements est donc bonne. Il faut toutefois restreindre cette obligation au champ dans lequel elle pourra réellement être appliquée. Il n'est pas possible, par exemple, de la mettre en œuvre pour les assistantes maternelles, qui ne sont soumises à aucune formation obligatoire. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 83 de Mme Dordain, sous réserve qu'il soit précisé que la mesure concernera uniquement les crèches et les modes d'accueil collectif à caractère éducatif, comme le prévoyait le sous-amendement de Mme Vidal. Je défendrai donc un amendement en ce sens à la fin de nos travaux, dans la lignée de la philosophie développée par les amendements. Pour l'heure, je vous invite à les retirer. À défaut, mon avis sera défavorable.
Je ne comprends pas ces subtilités de la technique législative ! Qu'est-ce que le sous-amendement apporte de plus ? Certes, il clarifie le texte en restreignant le champ de l'obligation de formation, mais vous pourriez accepter les amendements dans un premier temps et les préciser dans un second,…
…y compris par la voie d'un décret. En quoi serait-il contestable que la mesure intègre les assistantes maternelles ? Je ne comprends pas bien la difficulté, en réalité.
Elles n'ont pas de formation obligatoire !
Peut-être, mais cela ne nous empêche pas de leur proposer une formation sur l'accueil des enfants handicapés. Nous en revenons à la question soulevée par l'article 3. J'en conviens, il ne faut pas forcer les gens à se former, mais nous avons l'obligation de leur proposer des formations. Je ne comprends pas pourquoi le sous-amendement est nécessaire.
Il l'est !
Je vous prie d'excuser mon retard, qui m'a empêchée de défendre le sous-amendement n° 85 . Celui-ci a le mérite de préciser les catégories d'établissements qui sont concernées par l'obligation de formation. L'amendement n° 83 de Mme Dordain a une portée très large et je propose de spécifier les personnels concernés afin d'accroître l'efficacité de la mesure et de garantir son caractère opérationnel, en vertu de l'objectif que nous visons. En tout état de cause, il serait bon que nous puissions revenir sur le sujet à la fin de la séance.
Les articles 4 et 5 sont successivement adoptés.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement n° 43 portant article additionnel après l'article 5.
Il reprend la cinquième recommandation du rapport sénatorial consacré à la prise en charge des troubles du neurodéveloppement : « Élargir la solvabilisation de l'accès à des professionnels de santé libéraux face au problème de prise en charge en aval des plateformes de coordination et d'orientation (PCO) rencontrées par les familles. Cet élargissement peut passer, dans un premier temps, par un élargissement du forfait d'intervention […], mais la pérennisation de cet accès nécessitera une négociation conventionnelle entre l'assurance maladie et ces professionnels. »
En effet, pour les professionnels de santé et auxiliaires médicaux conventionnés, l'article R. 2135-2 du code de la santé publique prévoit déjà que les modalités de prise en charge des interventions qu'ils réalisent dans le cadre du parcours de bilan et intervention précoce – le parcours TND, qui nous intéresse – sont fixées par les conventions médicales.
En revanche, les autres professionnels tels que les psychomotriciens et les ergothérapeutes ne sont en effet pas conventionnés par l'assurance maladie ; c'est donc un arrêté qui fixe le montant des tarifs.
Vous renvoyez, pour appuyer votre proposition, à la recommandation du rapport de nos collègues sénateurs, mais il me semble que votre amendement ne traduit pas exactement leur intention. La recommandation en question ne vise pas à fixer les tarifs du forfait d'intervention précoce prévu dans le cadre du parcours TND par négociation conventionnelle, mais à réfléchir à un véritable conventionnement des ergothérapeutes et des psychomotriciens pour que leur intervention soit prise en charge au-delà du forfait d'intervention précoce. Cette question excède largement le champ de cette proposition de loi et requiert de toute évidence une concertation préalable avec l'ensemble des personnes concernées.
Les forfaits d'intervention précoce sont-ils suffisamment attractifs pour les professionnels de santé ? Ces tarifs représentent une véritable innovation, puisqu'ils permettent la prise en charge des frais engagés pour les bilans pratiqués par les psychologues, les psychomotriciens et les ergothérapeutes avant toute démarche devant la maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Les tarifs fixés par l'arrêté du 16 avril 2019 peuvent s'élever à 1 500 euros pour une évaluation et une séquence d'intervention précoce d'un ergothérapeute ; autant pour un bilan psychomoteur ou un bilan en intervention précoce réalisé par un psychologue. Ces forfaits étant cumulables, ils peuvent aller jusqu'à 4 500 euros pour un enfant dont l'état requiert l'intervention d'un ergothérapeute, d'un psychomotricien et d'un psychologue. J'ajoute qu'une majoration de 10 % est prévue pour les départements et collectivités d'outre-mer.
Je ne nie pas que les tarifs pourraient toujours être plus généreux et la durée de prise en charge, plus longue ; mais les efforts fournis sont considérables. Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
Même avis.
Monsieur le rapporteur, vous répondez au problème partiellement ; nous vous demandons, pour notre part, d'y répondre totalement. C'est toute la différence entre nous !
L'inégalité territoriale face à l'accès aux soins est un enjeu important, et la tarification y joue pour beaucoup. J'appelle tout le monde à y remédier en votant l'amendement.
L'amendement n° 43 n'est pas adopté.
Il vise à avancer de dix-huit à neuf mois l'âge du premier examen obligatoire de repérage des troubles du neurodéveloppement. Je l'évoquais dans la discussion générale : les troubles neurovisuels se détectent dès l'âge d'un mois, et s'ils sont pris en charge très rapidement, on peut réparer les lésions cérébrales ; les handicaps sont beaucoup moins lourds par la suite, ce qui facilite l'inclusion à l'école s'il reste quelques séquelles. Pour les troubles neurovisuels, il faudrait aller jusqu'à un mois ; pour les troubles de l'audition, neuf mois est un âge raisonnable, car on préconise que l'examen ait lieu avant l'âge de 1 an.
Une détection plus précoce, une prise en charge rapide, une meilleure réparation au niveau cérébral, un handicap moins lourd et une inclusion facilitée en milieu scolaire : voilà le sens de notre proposition.
Sur l'amendement n°
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 72 .
Nous soutenons nos collègues de La France insoumise : plus le diagnostic est précoce, moins les conséquences sont lourdes. L'amendement répond à une préconisation de la Haute Autorité de santé (HAS), qui recommande de réaliser systématiquement un test de repérage global dès le neuvième mois de l'enfant.
Je comprends mieux votre volonté d'avancer l'examen à neuf mois. Dans la discussion que nous avons eue tout à l'heure en aparté, vous parliez des troubles neurovisuels, alors que l'amendement vise en réalité les troubles du neurodéveloppement – d'où l'incompréhension entre nous.
Les seuils de dix-huit mois et 6 ans correspondent à la période durant laquelle apparaissent les troubles du neurodéveloppement et où il devient possible de les diagnostiquer. Les troubles liés au langage, notamment, se manifestent après neuf mois, entre douze et dix-huit mois – âge auquel on a proposé de fixer la date du premier examen. Je comprends pleinement la justification de votre approche, mais dans la mesure où le texte porte sur les troubles du neurodéveloppement, je propose d'en rester aux dates proposées : dix-huit mois et 6 ans.
Les recommandations de la HAS, monsieur Peytavie, concernent les enfants présentant un risque élevé de troubles du neurodéveloppement, qui sont l'objet de l'article 5 que nous venons d'adopter. L'article 6 prévoit, lui, d'aménager un dispositif de repérage à l'intention de tous les enfants, et non uniquement de ceux qui ont un facteur de risque identifié. Cette différence sémantique est importante à préciser.
Je suggère le retrait des amendements ; à défaut, avis défavorable.
Même avis.
Monsieur le rapporteur, madame la ministre déléguée, comment vous convaincre ? On est au cœur du sujet : la proposition de loi, je l'ai dit dans la discussion générale, présente une lacune dans la mesure où, après la détection des troubles, on attend l'entrée à l'école pour mettre en place des moyens d'inclusion. Nous proposons de détecter et de réparer les problèmes au plus tôt.
Les troubles neurovisuels font bien partie des troubles du neurodéveloppement ; il existe toute une littérature sur le sujet – je vous renvoie en particulier aux travaux de Sylvie Chokron. Votre argumentation me laisse donc un peu perplexe. Avancer l'âge du premier examen de dix-huit à neuf mois ne coûte pas plus cher, ne crée pas de charges et permet une prévention plus précoce. Je ne comprends pas votre position.
Je me réjouis de voir que le présent amendement, qui ne devait pas être discuté lors de notre séance, a été ajouté après l'appel de mes collaborateurs. Comme je le disais dans la discussion générale, il est impératif d'élargir le champ des professionnels de santé qui pourront réaliser les examens de repérage prévus à dix-huit mois et dans l'année suivant le sixième anniversaire. En effet, l'article 6 est essentiel, mais compte tenu des délais d'obtention de rendez-vous pour ces examens et de l'engorgement prévisible du fait de leur élargissement à l'ensemble des enfants, il ne pourra pas être mis en application. Il ne suffit pas d'adopter des propositions pour se donner bonne conscience ; encore faut-il que celles-ci soient applicables. Si vous voulez vraiment que ces examens de repérage soient réalisés sans retards de diagnostic ou de prise en charge, il faut voter le présent amendement.
Je vous demande de faire preuve de responsabilité : il faut inclure parmi les professionnels habilités les pédiatres, neuropédiatres, pédopsychiatres, ergothérapeutes, psychomotriciens, neuropsychologues, orthophonistes et médecins généralistes. D'ailleurs, les professionnels financeront eux-mêmes leur formation, afin de ne pas créer de charges. Il s'agit d'une proposition responsable qui n'a d'autre objectif que de faire en sorte que l'article soit applicable et réellement appliqué.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je vous répondrai moi aussi de façon responsable. Si votre amendement poursuit un objectif louable, il se heurte à un écueil rédhibitoire. En effet, les examens de repérage des troubles du neurodéveloppement ont pour objet de permettre à un médecin d'orienter un enfant présentant des signaux d'alerte vers le parcours de bilan et d'intervention précoce. Or la prise en charge de ce parcours se fait sur prescription médicale. Les ergothérapeutes, psychomotriciens, neuropsychologues ou orthophonistes, n'étant pas médecins, n'ont pas la possibilité de prescrire une telle prise en charge. De ce fait, ils devraient adresser l'enfant à un médecin, pour un deuxième rendez-vous médical, afin qu'il puisse ensuite être orienté vers le parcours en question. Non seulement cela complexifie la démarche, mais ce deuxième rendez-vous serait une consultation normale et ne bénéficierait donc pas de la prise en charge intégrale par l'assurance maladie que le texte prévoit pour l'examen de repérage des TND. Je le redis, l'intention est louable, mais la mesure rendrait le parcours plus complexe tout en ajoutant une charge pour les patients. Voilà pourquoi, comme en commission, je vous propose de retirer l'amendement, sans quoi j'émettrai un avis défavorable.
Même avis.
Votre réponse est pleine de mauvaise foi. Pourquoi ne souhaitez-vous pas sous-amender l'amendement ?
Ce n'est pas mon boulot ! Je ne vais pas réécrire vos amendements non plus…
Il s'agit d'élargir la possibilité de réaliser les examens de repérage à d'autres professionnels. Vous parlez de l'orientation des patients, notamment dans le cadre des PCO, mais la France est un désert médical : il n'y a pas assez de médecins susceptibles d'effectuer ces examens. Si la rédaction de l'amendement ne vous satisfait pas, proposez donc un sous-amendement !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 42
Nombre de suffrages exprimés 37
Majorité absolue 19
Pour l'adoption 17
Contre 20
L'amendement n° 68 n'est pas adopté.
En cohérence avec mes propos de tout à l'heure, nous proposons de permettre, dans le cadre des visites des six premiers mois de l'enfant, de détecter au plus tôt les troubles neurovisuels afin de les réparer le plus précocement possible et d'en limiter les séquelles. La proposition vaut également pour les troubles auditifs.
Je salue la cohérence de M. Pilato, qui appréciera – ou non – la mienne : je me dois en effet d'émettre un avis défavorable tant sur la forme que sur le fond.
Sur la forme, l'amendement modifierait le nouvel article du code de la santé publique portant sur les deux examens de repérage des troubles du neurodéveloppement, alors qu'il devrait plutôt cibler l'article portant sur les vingt autres examens obligatoires, lequel n'est pas modifié par l'article 6 du texte.
Quant au fond, je constate que le nouveau guide de repérage élaboré par la délégation interministérielle à la stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement (DIA-TND) et rendu public en mars dernier à l'occasion du congrès de médecine générale France intègre désormais des questions spécifiques permettant le repérage des troubles neurovisuels, qui font donc bien l'objet d'une attention des pouvoirs publics. Ces nouveaux outils permettront de sensibiliser professionnels et parents. En cohérence avec la position que j'ai déjà exprimée, mon avis est donc défavorable.
L'amendement n° 36 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à corriger une erreur de référence, afin de bien préciser dans la loi que les examens obligatoires de repérage des troubles neurodégénératifs seront exonérés de ticket modérateur et de donner corps à ce que prévoyait le texte initial, à savoir la prise en charge intégrale de ces examens par l'assurance maladie.
L'amendement n° 48 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 6, amendé, est adopté.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 74 portant article additionnel après l'article 6.
Par cet amendement, le groupe Écologiste entend préciser les missions des personnes assurant l'accueil des jeunes enfants dans les crèches pour leur permettre de contribuer au diagnostic précoce. Quelque 15 % des enfants présentent des troubles du neurodéveloppement en France et nous avons pris beaucoup de retard en matière de diagnostic. Les professionnels qui suivent les enfants au quotidien pourraient faciliter le repérage précoce de ces troubles.
La commission avait émis un avis défavorable, considérant que l'amendement était satisfait puisque l'article L. 214-1-1 du code de l'action sociale et des familles prévoit déjà que les personnels des crèches et les assistantes maternelles « veillent à la santé, la sécurité, au bien-être et au développement physique, psychique, affectif, cognitif et social des enfants qui leur sont confiés ». En première analyse, cette disposition nous a semblé impliquer l'attention portée par lesdits professionnels aux troubles du neurodéveloppement.
Compte tenu de l'enjeu, faire explicitement figurer leur contribution au repérage des TND parmi les missions dévolues aux professionnels de l'accueil des jeunes enfants me semble toutefois utile. Pour cette raison, j'émettrai un avis favorable à titre personnel.
Promouvoir partout le repérage des TND me semble opportun. Le travail entrepris avec des professionnels de la petite enfance me conduit à penser que l'amendement sera très bien accueilli dans ce secteur. La commission ayant émis un avis défavorable, je me contenterai d'un avis de sagesse.
Mme Michèle Peyron applaudit.
L'amendement n° 74 est adopté.
Je prends acte de votre vote de tout à l'heure et j'invite toutes les familles dont un enfant souffre de troubles du neurodéveloppement à vous demander des comptes quand elles s'apercevront du caractère inapplicable de l'article 6.
Quoi qu'il en soit, le présent amendement vise à permettre une prise en charge de tous les enfants âgés de plus de 6 ans qui seraient passés au travers des mailles du filet du repérage des TND, en introduisant des grilles de repérage de ces troubles dans les évaluations scolaires intervenant en classes de CP, de CE1, de CM1, de sixième, de quatrième et de seconde ainsi qu'en première année de certificat d'aptitude professionnelle (CAP). Inspirées de celles utilisées au Canada, ces grilles permettraient aux enseignants de détecter d'éventuels TND passés inaperçus jusque-là, de façon à pouvoir accompagner aussi les enfants n'ayant pu bénéficier du dispositif de repérage destiné à l'ensemble de la population infantile.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Cet amendement relève plutôt du champ réglementaire et me semble satisfait par le quatrième alinéa de l'article L. 121-4-1 du code de l'éducation, selon lequel la promotion de la santé à l'école comprend notamment « la réalisation des examens médicaux et des bilans de santé définis dans le cadre de la politique de la santé en faveur des enfants et des adolescents ainsi que ceux nécessaires à la définition des conditions de scolarisation des élèves ayant des besoins particuliers ».
Les livrets et guides de repérage des TND élaborés sous le contrôle de la délégation interministérielle comportent du reste des grilles d'évaluation et sont d'ores et déjà accessibles aux professionnels de la santé scolaire.
Par ailleurs, l'article 2 voté tout à l'heure renforce déjà la prise en compte de ces troubles à l'école dans le cadre de la formation délivrée aux personnels intervenant en milieu scolaire.
Concernant la question spécifique du repérage des enfants âgés de plus de 6 ans, un décret du 1er avril 2021 prévoit déjà la création dans chaque département d'au moins une PCO à destination des 7-12 ans, tranche d'âge qui bénéficie en outre de l'extension du forfait d'intervention précoce. Ces plateformes se déploient de façon progressive, je vous l'accorde. Il faut cependant tenir compte des effets de la crise sanitaire sur notre système de santé et de la nécessité d'identifier les structures sur lesquelles peut s'appuyer un tel dispositif. Selon le rapport d'information sur les troubles du neurodéveloppement adopté en mai 2023 par nos collègues du Sénat, dix-huit PCO 7-12 ans avaient commencé de mailler le territoire. Depuis lors, d'autres ont ouvert, par exemple dans le bassin rennais, et plusieurs agences régionales de santé (ARS), comme celle du Grand Est, ont lancé des appels à candidatures pour doter leur territoire de PCO. Concentrons-nous plutôt sur la création de telles structures dans nos territoires respectifs et la bonne articulation entre les services de l'éducation nationale. Pour toutes ces raisons, je maintiens mon avis défavorable.
Même avis, madame la présidente.
Je veux bien qu'on fasse l'autruche et qu'on ferme les yeux devant la réalité : vous parlez des PCO, mais à quoi servent de telles structures si nous n'avons pas de médecins, notamment libéraux, pour assurer la prise en charge ? Je propose une mesure de bon sens : quotidiennement au contact des élèves, les enseignants sont les mieux placés pour estimer, à différentes étapes de la scolarité, si des enfants présentent des TND. Un fois encore, vous n'écoutez pas la représentation nationale. Il y en a vraiment assez…
…de cette fermeture que vous opposez aux interpellations de gens qui n'ont qu'une idée en tête : l'intérêt général !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je comprends l'émotion que suscite ce sujet. Il importe cependant de respecter la profession de chacun : si les enseignants, et les personnels de l'éducation nationale en général, sont à même d'évaluer certains indices évoquant un TND, notamment en matière d'acquisition des connaissances, il faut néanmoins parvenir à des diagnostics fiables, sous peine d'ajouter de la souffrance à la souffrance. Nous pouvons en l'occurrence réclamer des personnels médicaux supplémentaires pour éviter qu'une infirmière de collège se voie contrainte d'intervenir dans quatre, voire cinq écoles de secteur, ce qui limite sa capacité à effectuer correctement les évaluations. Il faut en tout cas que la responsabilité des diagnostics revienne aux infirmières et aux médecins scolaires – je suis bien placée pour savoir que nous en manquons : dans ma circonscription, nous avons perdu le médecin scolaire depuis longtemps.
Ces évaluations doivent être mises en œuvre par des personnels qualifiés, à même de les comprendre, quand bien même elles seraient formatées de façon à pouvoir repérer les troubles plus rapidement. Il importe au plus haut point que l'enseignant oriente l'élève qui lui semble rencontrer des difficultés particulières vers l'infirmière ou le médecin scolaire, qu'il parle de lui à sa famille ; évitons que tout le monde fasse tout et n'importe quoi, ajoutant l'errance diagnostique aux souffrances de la famille.
L'amendement n° 65 n'est pas adopté.
Nous voici à ce fameux article 7, qui pose tant de problèmes – mais les choses peuvent aller encore plus vite si vous votez mon amendement !
Sourires.
Dès l'examen de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, dite Essoc, nous nous étions opposés à la pérennisation des dérogations au droit du travail pour les personnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) en cas de prestation de suppléance à domicile du proche aidant et de séjour de répit aidant-aidé. Il est possible d'organiser le relayage autrement, en respectant ces métiers.
Votre proposition de loi porte en effet un préjudice important à celles et ceux qui assument la charge de cette mission. La direction générale du travail a elle-même relevé l'état de fatigue des intervenants alors que ces métiers connaissent déjà des conditions de travail alarmantes.
En commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, vous avez reconnu la validité de notre argument sur le fond : la préservation de la qualité des prestations et de la sécurité implique la suppression de ces dérogations en mode « mandataire », c'est-à-dire concernant les salariés du particulier employeur. Le rapport remis la semaine dernière par le Gouvernement au sujet de cette expérimentation dresse d'ailleurs un bilan accablant des conséquences humaines de ces dérogations, bien qu'il reconnaisse que « de tels impacts sur la santé peuvent ne se matérialiser qu'après plusieurs années ». En tout état de cause, ce rapport nous indique que « les intervenants témoignent tous d'un état de fatigue significatif ». Le rapport parle aussi de forte charge mentale. Il faut en tirer les leçons, c'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
Nous y voilà ! Au sujet des Ehpad, je vous disais déjà : vous allez m'inventer le baluchonnage. Vous me répondiez : mais non, madame Fiat, cela n'arrivera pas chez nous, le droit du travail vous protège. Eh bien, voici l'article 7, le 2 mai – on peut noter l'heure. Caroline Fiat avait encore raison !
Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.
Eh oui, chers collègues !
Vous rendez-vous compte ? Six jours durant, le soignant devra habiter chez le résident. Oui, il faut trouver une solution pour les aidants épuisés – je le dis haut et fort depuis 2018. Mais pas en épuisant les soignants, qui démissionnent déjà à tour de bras parce qu'ils n'en peuvent plus de leur métier !
À propos de ces 144 heures de travail d'affilée, j'ai une question. Chez les soignants, nous sommes une majorité de femmes, souvent à la tête de familles monoparentales : avez-vous prévu les nounous pour 144 heures d'affilée ? Qui gardera mes enfants pendant que je serai chez le résident pour six jours ? Quand je m'occupe d'un résident, avec lequel il est parfois difficile de s'entendre, j'ai besoin de rentrer me reposer chez moi, mais je ne peux pas, aggravant ainsi les risques de conflit, voire de maltraitance – bien malgré moi, parce que la fatigue fait son œuvre et que pendant six jours, vous ne me laissez pas me reposer. Voilà ce que vous êtes en train d'inventer !
Je le redis : il faut trouver une solution pour aider les aidants dans notre pays, mais cela ne peut se faire sur le dos des soignants. Vous vous plaignez qu'ils démissionnent tous : faites cela et ils démissionneront encore plus vite ! Pas ça, pas six jours d'affilée !
Permettez-moi de rappeler ce qu'est cette expérimentation et ce qu'elle n'est pas. Débutée en 2018, elle a connu quelques difficultés à cause du covid. Elle repose sur le volontariat et, comme le précise le rapport du Gouvernement, plus de 90 % des volontaires – 94 %, je crois – n'ont plus de charges familiales.
Le rapport, comme d'ailleurs celui de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), démontre très clairement que ce système est bénéfique pour le binôme aidant-aidé. L'aidé, qui n'est pas déplacé de chez lui, ne perd pas ses repères ; l'aidant, lui, peut partir la conscience tranquille car son absence a été préparée. Il est aussi bénéfique pour les intervenants, comme l'indique la synthèse du rapport, à la page 57 : « enfin, de par la satisfaction qu'elles apportent aux intervenants, ces prestations pourraient permettre de renforcer le secteur de l'aide à domicile…
…mais nécessitent d'être encadrées pour éviter tout effet d'aubaine potentiel ». C'est bien ce que nous avons l'intention de faire grâce aux décrets prévus dans le texte. Je ne peux donc pas vous laisser dire que tout est négatif :
Mme Caroline Fiat s'exclame
le rapport est très clair à ce sujet – sauf, évidemment, à ne le lire que partiellement.
Par ailleurs, au-delà de ce que disent les rapports du Gouvernement, de l'Igas ou de Baluchon France,…
…je peux vous le dire – j'ai rendu visite à certaines des équipes concernées, tout près de ma circonscription : l'expérimentation est bénéfique à bien des égards.
Nous encadrerons le dispositif comme il se doit, notamment le repos compensateur, point fondamental qui est bien prévu.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Je ferai une réponse relativement longue, ce qui me permettra d'être plus bref ensuite : l'avis sera défavorable pour tous les amendements qui visent à amoindrir le dispositif. Cher collègue Monnet, je vous encourage toujours à la constance, mais je pensais que les deux semaines de coupure permettraient peut-être aux sénateurs communistes, qui ont voté le texte, de vous convaincre !
Sourires.
Les résultats de l'expérimentation, vous me l'accorderez, sont désormais disponibles.
Je m'y étais engagé, ainsi que le Gouvernement, et le rapport d'évaluation de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a été adressé aux membres de la commission des affaires sociales le 25 avril dernier ; merci, madame la présidente, de vous en être assurée.
Il en ressort que les dispositifs expérimentaux issus de l'article 53 de la loi Essoc s'inscrivent bien dans le paysage de l'offre des soins et des solutions d'accompagnement conçus pour les personnes âgées ou handicapées et en situation de perte d'autonomie et leurs aidants. Ils apportent une réponse complémentaire et adaptée, parmi d'autres, aux besoins de personnes pour lesquelles les autres solutions – l'hébergement temporaire ou l'accueil de jour – montrent des limites.
Ces dispositifs présentent une réelle valeur ajoutée pour le binôme aidant-aidé ; le rapport le confirme. Vous en conviendrez, l'intervention d'un seul salarié au domicile de la personne aidée, plusieurs jours durant, contribue à garantir son bien-être et, partant, la qualité de la prise en charge. Vous savez que pour certaines pathologies, le changement de soignant sur une seule journée est de nature à aggraver la situation. Du reste, une telle organisation revêt un caractère rassurant pour l'aidant, pour qui il devient plus facile de lâcher prise.
Pour 70 % des personnes interrogées, ce facteur a d'ailleurs joué un rôle déterminant dans le choix de recourir à une prestation de relayage. Il faut avoir à l'esprit que selon les acteurs de terrain, la multiplicité des intervenants contribue parfois à dégrader la situation de la personne malade, notamment lorsqu'elle est atteinte de troubles neurodégénératifs.
Ce constat n'est pas nouveau : tous les relayeurs interrogés par l'ancienne députée socialiste Joëlle Huillier, qui a fait un travail remarquable dont est issu le rapport intitulé « Du baluchonnage québécois au relayage en France : une solution innovante de répit », remis au Premier ministre de l'époque en mars 2017, indiquaient même qu'un temps de présence trop court auprès de la personne aidée s'apparente à « une forme de maltraitance ». Au demeurant, les séjours de répit, contrairement aux autres types de séjour, permettent à l'aidant et à l'aidé de rester ensemble ; la perte de repères s'en trouve ainsi limitée.
Deuxièmement, les dispositifs présentent un intérêt pour les intervenants eux-mêmes, dont l'organisation du travail se trouve améliorée et la reconnaissance professionnelle renforcée. Ce constat ressort très clairement du rapport d'évaluation – ce n'est pas moi qui le dis : les salariés mobilisés, volontaires – on l'a rappelé précédemment –, disposent d'une plus grande visibilité sur leur planning et d'une plus grande autonomie dans leur activité ; le nombre et la fréquence de leurs déplacements s'en trouvent limités.
En outre, la durée des prestations permet une meilleure valorisation du temps passé auprès de la personne aidée. Pour beaucoup, la réalisation des prestations de relayage s'apparente à une forme de promotion professionnelle, dans un secteur qui offre peu d'opportunités en la matière – vous l'avez dit. Il est vrai que la réalisation de ces prestations a une incidence négative sur l'état de fatigue et la vie sociale des salariés,…
Là aussi, ce n'est pas moi qui le dis : c'est le rapport d'évaluation, chers collègues ! Elle n'est pas de nature, nous dit-il, à les dissuader de réitérer l'expérience. Lors des auditions effectuées par la commission, les personnes interrogées nous ont également expliqué qu'elles ne comparaient pas la fatigue occasionnée à celle, ordinaire, d'un mois de travail classique.
En définitive, la grande majorité des intervenants portent un jugement positif sur l'expérimentation. 98 % d'entre eux, excusez du peu, ont déclaré être « plutôt » ou « tout à fait » satisfaits à l'issue de l'expérience – là encore, ce n'est pas moi qui le dis.
Troisièmement, la mise en œuvre des dispositifs favorise le rapprochement entre les structures porteuses et les autres acteurs de la prise en charge des personnes âgées ou handicapées et du soutien aux aidants dans les territoires – médecins, infirmiers, dispositifs d'appui à la coordination (DAC), pôles ressources des Ehpad ou services départementaux, entre autres. Elle incite aussi les structures à développer une offre de services aux aidants plus robuste.
À la lumière des bons résultats produits par l'expérimentation, je considère, à l'instar des sénateurs et de la commission des affaires sociales, que la pérennisation des dispositifs peut être envisagée, ce que les acteurs du secteur réclament. Je précise que la pérennisation, qui n'interviendra qu'au 1er
Il est en effet apparu que le mode « mandataire » présentait moins de garanties que le mode « prestataire » – vous vous rappelez d'ailleurs qu'une seule structure avait répondu à l'appel à manifestation d'intérêt (AMI) –, tant en matière de qualité et de sécurité desdites prestations que de respect des garde-fous établis par la loi au profit des intervenants.
En conclusion, il me semble que la disparition pure et simple des dispositifs sans solution de remplacement constituerait un pas en arrière dans les domaines de l'accompagnement des personnes âgées ou handicapées et du soutien aux aidants, à rebours de l'ambition promue par la stratégie nationale 2023-2027 pour les troubles du neurodéveloppement, que je défends depuis 2017. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je ferai moi aussi une réponse générale, pour apporter un éclairage sur l'ensemble de l'article 7. Madame Fiat, monsieur Monnet, vos amendements proposent de supprimer le dispositif de relayage, donc d'empêcher sa généralisation ; or il se trouve que le récent rapport d'évaluation en démontre les bénéfices certains, pour le couple aidant-aidé mais aussi pour les intervenants. Il permet aux aidants de se reposer et j'ajoute qu'il sera restreint – le Gouvernement y sera particulièrement vigilant – à un public particulier, qui en a besoin ; les prestataires bénéficieront en outre d'un accompagnement pour garantir la sécurité des intervenants.
Le Gouvernement est donc favorable à la généralisation du dispositif, sous réserve de l'adoption de son amendement qui permettra, entre autres, de garantir ce dernier point, qui est essentiel. Nous soutenons l'article 7 et sommes donc défavorables à ces amendements de suppression.
Vous dites, chers collègues, que nous n'avons lu le rapport que partiellement ; or vous en rendez vous-mêmes compte de manière incomplète. Évoquant les « impacts négatifs de l'expérimentation sur l'état de fatigue et la vie sociale » des concernés, il signale que « les intervenants ayant réalisé des prestations de suppléance à domicile témoignent tous d'un état de fatigue significatif, bien que gérable selon eux, à l'issue des prestations dérogatoires, a fortiori lorsque celles-ci sont de longue durée. » « En général, ajoute-t-il, cette fatigue n'est pas ressentie au cours de la prestation mais ensuite ».
31 % des intervenants répondant à l'enquête ont indiqué n'avoir pas vraiment pu dormir de nuit complète sans interruption de sommeil. Une intervenante a ainsi signalé continuer à se réveiller en pleine nuit plusieurs jours après la prestation, avant de parvenir à retrouver un rythme de sommeil normal. L'intervenant ne parvient pas toujours à se reposer en même temps que l'aidé, que ce soit lors de la nuit ou de la sieste ; en effet, plusieurs ont indiqué que certaines pathologies requièrent une attention permanente ou, selon l'une d'entre eux, « d'être en permanence en tension et sur le qui-vive ». « Cette hypervigilance, conclut le rapport, liée très généralement à la pathologie de la personne aidée, constitue un facteur important de fatigue. » Quand vous nous faites la lecture d'un rapport, faites-le de manière complète : ce serait plus honnête intellectuellement !
Par ailleurs, j'ai fait le calcul : 94 jours à 24 heures, cela fait 2 200 heures, c'est-à-dire quasiment 36 % de plus que n'importe quel salarié en France. Par conséquent, je suis désolé, mais ce que vous prévoyez là est juste une régression d'un siècle.
Je ferai une première remarque : j'ai entendu l'un de vos collègues de la majorité dire à ma collègue aide-soignante qu'elle ne connaissait pas le sens de l'effort au travail. C'est peut-être en vertu de cette croyance qu'il va voter l'article 7 !
Par ailleurs, on voit bien que dans un rapport, chacun prend les éléments qui l'intéressent : on peut lui faire dire plein de choses ! Il y a des éléments qui plaident pour cet amendement, et d'autres qui plaident contre. Pour ma part, je voudrais vraiment que vous compreniez notre position sur la question du volontariat : une loi est aussi faite pour protéger les gens malgré eux et malgré leur engagement professionnel. La vraie difficulté, dans ce secteur, c'est que les gens qui y exercent sont très engagés ; souvent, on se repose sur cet engagement pour combler les manques. Et ces professionnels sont si engagés qu'ils font bien plus que ce qu'ils devraient faire, ce qui crée des situations d'épuisement professionnel.
Alors certes, il peut être compliqué, pour certains publics, de changer d'intervenant ; mais c'est encore plus grave de ne pas en avoir du tout ! Or c'est ce qui est en train d'arriver à beaucoup.
Nous pensons donc que la question du relayage doit être pensée autrement qu'en dérogeant au droit du travail, qui est le socle permettant d'éviter l'épuisement professionnel dans un métier en tension.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 55
Nombre de suffrages exprimés 40
Majorité absolue 21
Pour l'adoption 9
Contre 31
L'article 7 comporte une dérogation au droit du travail qui, en l'état du texte, est très large et peu précise : il est évident que cela nous inquiète. Par ailleurs, les impacts négatifs mentionnés par mes collègues, qui ont lu les témoignages inclus dans le rapport d'évaluation, montrent bien que l'expérimentation n'a pas permis d'épuiser le sujet. Pour cette raison, nous proposons que l'entrée en vigueur du dispositif soit décalée à 2025, afin d'avoir le temps d'évaluer l'impact à long terme de l'expérimentation sur les intervenants, donc de déterminer si le nombre d'heures de travail envisagé correspond à leurs possibilités réelles, et ce sur le temps long. S'ils s'épuisent pendant une année et ne peuvent plus faire le travail dès la deuxième année, on ne voit pas très bien l'intérêt d'un tel dispositif.
L'amendement n° 3 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme la ministre déléguée, pour soutenir l'amendement n° 81 rectifié .
Il vise à soumettre la réalisation des prestations à un accord préalable de l'autorité compétente – ARS ou conseil départemental. Dans le cadre de l'expérimentation, seuls les services d'aide et d'accompagnement à domicile autorisés en mode « prestataire » et les mandataires agréés pouvaient réaliser des prestations de suppléance à domicile. Néanmoins, l'expérience positive, dans certains Ehpad, de séjours de répit aidants-aidés démontre leur capacité à organiser du relayage à domicile.
C'est peut-être, en effet, un moyen de sécuriser un peu plus le dispositif. À l'heure actuelle, la loi prévoit que la mise en œuvre des prestations et des dérogations au droit du travail est « portée à la connaissance de l'autorité compétente » – président du conseil départemental ou ARS ; l'amendement vise à subordonner cette mise en œuvre à l'accord préalable de ladite autorité. Il s'inscrit donc dans la perspective d'un meilleur encadrement des dispositifs rendus pérennes. C'est pourquoi il y a lieu de lui réserver un accueil favorable.
C'est un sujet essentiel. Quand on voit l'état dans lequel se trouve notre système de santé, notamment en ce qui concerne les questions de handicap et particulièrement s'agissant des TND, quand on observe le nombre de personnes qui, en vieillissant, vont devenir dépendantes, on se rend compte que le sujet des aidants est fondamental. Ce qu'ont évoqué mes collègues peut nous interpeller : est-ce une bonne solution que de tirer ainsi sur la corde ?
Le rapport en atteste. Le dispositif proposé présente, bien évidemment, des bénéfices pour les aidés et les aidants dont la tâche est épuisante. Il suffit de voir le nombre d'aidants qui meurent avant les personnes qu'ils accompagnent pour s'en convaincre. Le problème est réel et il n'est pas question de nier l'intérêt de la mesure.
Vous dites qu'elle reposerait sur le volontariat. Je comprends bien mais il faut prendre en compte le profil des personnes qui s'engagent dans les métiers du soin. Ce sont bien souvent des femmes, d'une certaine sensibilité, dont les motivations dépassent le cadre professionnel. Ce sont en tout cas des personnes qui passeront souvent outre leur état de fatigue. On le voit à l'hôpital : si on demande à des personnels soignants de renoncer à leur week-end ou à leurs vacances pour remplacer un collègue absent, ils acceptent, ils se portent volontaires, même si les conséquences peuvent être terribles pour certains qui finiront par être en burn-out ou par quitter l'hôpital. Ce sont des signaux qui doivent nous alerter. Si l'on ne recrute pas davantage de personnels soignants pour sécuriser le dispositif, si l'on ne crée pas un statut de l'aidant, nous courrons à la catastrophe.
L'amendement n° 81 rectifié est adopté ; en conséquence, l'amendement n° 53 tombe.
Il s'agit de garantir la protection du salarié dont l'état de santé pourrait être altéré par les prestations de suppléance et de répit du proche aidant. Nous avons bien compris qu'il était nécessaire de relayer l'aidant mais les dispositions de l'article 7 dérogent trop largement au droit du travail. Essayons donc de faire en sorte qu'il ne mette pas en péril la santé des salariés.
L'amendement n° 29 tend par conséquent à insérer, à l'alinéa 2, après le mot « permanente », « et à la condition que l'état de santé de cette personne le nécessite et que cet état n'entraîne pas une atteinte excessive à la santé, à la sécurité et à la dignité desdits salariés ».
L'amendement n° 5 est un amendement de repli qui vise le même objectif : limiter les dérogations au droit du travail autorisées dans le cadre de prestations de suppléance et de répit du proche aidant.
Il faut s'assurer que l'état de santé de la personne aidée nécessite une telle dérogation. Bien souvent, en effet, il suffirait qu'un intervenant ne soit présent que par tranches de quarante-huit heures, ou soixante-douze heures, que sais-je…En tout cas, il ressort de plusieurs témoignages que faire assurer par une même personne une garde de six jours d'affilée peut être problématique, surtout dans le cas de certaines pathologies. Il faudrait à tout le moins apporter la preuve de la nécessité de recourir à une seule et même personne, afin de ne pas épuiser les intervenants.
Vous nous promettez que cette solution ne sera retenue qu'en cas d'extrême nécessité mais rien ne le garantit dans le texte.
Nous sommes d'accord sur le fond, et c'est pour cette raison que je vous propose de voter plutôt pour l'amendement n° 78 de Mme Annie Vidal, qui tend à établir des critères d'éligibilité pour réserver ce traitement particulier aux personnes qui en auraient réellement besoin, et que nous examinerons dans quelques instants. Sa rédaction me semble plus satisfaisante car, à vous lire, il y a lieu de se demander si le conditionnement de l'application du dispositif à l'état de santé de la personne aidée ne s'appliquerait pas seulement aux prestations de suppléance à domicile et de répit du proche aidant. Or une telle différence de traitement, si elle était avérée, ne se justifierait pas.
Si l'amendement était adopté, il complexifierait la rédaction de l'alinéa au point de le rendre difficilement intelligible. Je vous invite à le retirer.
Je partage l'avis du rapporteur : nous sommes tous d'accord pour réserver ce traitement aux personnes qui en ont strictement besoin. Cependant, la rédaction de l'amendement n° 78 me semble meilleure, et c'est à celui-ci que je rendrai un avis favorable.
L'amendement n° 80 , accepté par la commission, est adopté.
Cet amendement de repli tend à ce que les dérogations au droit du travail ne s'appliquent pas aux temps de pause ni aux durées quotidiennes et hebdomadaires maximales de travail.
Le répit des aidés ne doit pas s'obtenir au détriment de celui des aidants salariés. De surcroît, ce droit au répit des aidants salariés, outre qu'il est une marque de respect pour leur métier, garantit la qualité de leur intervention.
Le rapport du Gouvernement sur l'expérimentation nous apprend que 31 % des intervenants qui ont assuré une prestation de suppléance à domicile, parmi lesquels 25 % ont permis d'accorder à l'aidant un séjour de répit, ont indiqué n'avoir pas pu dormir sans interruption de sommeil. Une intervenante a signalé avoir continué à se réveiller en pleine nuit plusieurs jours après la prestation avant de retrouver un rythme de sommeil normal. Une autre a déclaré ne pas avoir pu conduire pour retourner à son domicile et avoir dû demander qu'on la raccompagne. S'ajoute au problème du sommeil celui de l'hypervigilance, à savoir cette attention permanente que doit porter l'aidant à la personne aidée, y compris lorsque cette dernière se repose, ce qui a pour conséquence d'altérer le repos dont le salarié devrait bénéficier durant son temps de pause.
Vous voyez bien que l'on peut trouver beaucoup de choses dans un rapport, et que l'on en extrait toujours les informations qui confirment nos préoccupations.
L'amendement n° 25 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La commission des affaires sociales a supprimé la possibilité pour les ESMS, une fois pérennisé le dispositif issu de la loi pour un État au service d'une société de confiance, dite loi Essoc, de mobiliser des salariés du particulier employeur pour réaliser des prestations de suppléance à domicile du proche aidant d'une personne âgée ou handicapée, au motif que cette modalité d'intervention ne présentait pas suffisamment de garanties pour la qualité et la sécurité des prestations et qu'elle n'avait, en tout état de cause, pas été utilisée depuis le lancement de l'expérimentation. Un seul organisme, en effet, s'est porté volontaire.
L'amendement vise à tirer les conséquences de cette modification, en supprimant du futur article L. 313-23-5 du code de l'action sociale et des familles les dispositions qui faisaient référence à cette modalité d'intervention des ESMS, puisqu'elles sont devenues sans objet. Il s'agit presque d'un amendement de coordination.
L'amendement n° 77 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je serais bien tenté de vous faire grâce de l'argumentation, pour une fois, mais sait-on jamais : peut-être finirons-nous par vous convaincre à force de marteler nos arguments. En l'espèce, nous vous proposons de réduire la durée maximale d'une intervention au titre des séjours dits de répit, en la passant de six à quatre jours consécutifs.
Ceux qui ont déjà travaillé six jours d'affilée savent que ce n'est pas une mince affaire, dans ce secteur d'activité. Il s'agit, bien évidemment, d'un amendement de repli.
L'amendement n° 26 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Persévérons, un amendement finira bien par passer… si vous y mettez un peu de bonne volonté ! Il s'agit, là encore, d'un amendement de repli, pour passer de quatre-vingt-quatorze à soixante-trois le maximum de journées d'intervention, pour chaque salarié, comptabilisés sur douze mois consécutifs. Ce serait plus approprié au regard de la nature de ces métiers.
Je vais prendre le temps de répondre à M. le député car il fait preuve de persévérance, en effet. L'article 7 prévoit que le nombre de jours consécutifs d'intervention peut être fixé par un accord de branche. Surtout, ce dispositif de relais ne peut être installé que dans des conditions exceptionnelles, pour offrir un répit aux aidants qui s'occupent de personnes dont l'état requiert la présence continue d'un tiers, ce qui peut conduire à l'épuisement. M. Peytavie l'a lui-même admis, il n'est pas rare que des aidants meurent avant la personne aidée.
Parce que la mesure est exceptionnelle, nous devrons être extrêmement vigilants afin de garantir des conditions de travail sécurisantes pour les aidants professionnels, mais ce répit que nous offrons aux aidants n'aura de sens que s'il dure suffisamment pour leur permettre de reprendre des forces. C'est aussi pour cette raison que le dispositif sera encadré et que le Gouvernement a prévu, par l'amendement que vous avez adopté, de soumettre les établissements qui organiseront ces prestations à l'autorisation des autorités compétentes.
Cet amendement, ainsi que nos échanges, apporteront un éclairage singulier aux discussions de branche. De par mon expérience professionnelle, j'accorde une importance particulière au dialogue social et au paritarisme. Ce secteur, qui est à part, mérite un regard attentif. Partout, les métiers du lien meurent à cause des conditions de travail, que ce soit dans la petite enfance, la protection de l'enfance, les aidants.
Ce n'est donc pas par principe que nous votons contre vos amendements, monsieur le député, mais pour pouvoir offrir du répit aux aidants. Nous serons vigilants pour encadrer au mieux les dérogations. On ne peut toucher au droit du travail que dans des cas « extra-exceptionnels » : en l'espèce, c'est pour soutenir les aidants et les aidés, mais avec prudence. Tout le secteur du soin est touché.
J'ai bien compris le caractère très exceptionnel de ces dérogations mais les situations auxquelles elles auront vocation à s'appliquer ne sont pas exceptionnelles. Si on n'accorde pas des moyens supplémentaires pour entourer des garanties nécessaires tous les métiers du soin et si on ne crée pas un véritable statut de l'aidant, qui lui permette de bénéficier de l'accompagnement dont il aura besoin, ces situations ne seront plus du tout exceptionnelles dans cinq ans ! Nous courons à la catastrophe si de telles dispositions ne sont pas prises.
L'amendement n° 27 n'est pas adopté.
Sur le vote de l'article 7, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Yannick Monnet, pour soutenir l'amendement n° 28 .
C'est le dernier ! Madame la ministre, la situation est telle que je ne sais même pas qui négociera avec qui ces mesures exceptionnelles. Vous mettez le pied dans une porte qui est déjà grande ouverte. Les professionnels sont à bout. Ce qu'ils sont nombreux à vivre aujourd'hui est loin d'être exceptionnel. Regardez comment fonctionnent ces secteurs marqués par la pénurie de main d'œuvre. Et le volontariat ne résoudra rien puisque ces professionnels continueront à s'engager pour remplir leur mission jusqu'au bout. Au contraire, par les dispositions que vous proposez, vous formalisez et institutionnalisez cette situation – peut-être à votre corps défendant, je vous l'accorde. C'est en cela que ces dérogations me posent problème.
J'en viens à l'amendement, qui relève du simple bon sens : que les temps de pause, au moins, ne puissent pas être supprimés. Si vous en arrivez à refuser une telle proposition, je me poserai des questions sur vos intentions.
L'amendement n° 28 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement d'appel. On constate, dans les établissements qui accueillent des personnes en situation de handicap un recours accru aux contractuels. L'amendement vise à limiter ce recours à 30 % de la masse salariale totale.
Je vous alerte en effet sur le fait que ces structures courent le risque de se trouver dans une situation semblable à celle que nos hôpitaux ont connue et connaissent encore – elle n'est pas tout à fait résolue – s'agissant du recours aux urgentistes intérimaires. Avec des soignants transformés en véritables mercenaires, allant là où ça paie le plus, elles rapidement se trouver confrontées à un manque cruel de personnel médical et soignant.
Nous devons nous montrer d'autant plus vigilants que le turnover, au sein de ces structures, est considérable, alors même que – cela a été rappelé – les personnes souffrant de certains types de troubles du neurodéveloppement ont tout particulièrement besoin de stabilité et que les en priver peut avoir des conséquences dramatiques. Je vous invite à en tirer toutes les leçons.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
J'entends qu'il s'agit d'un amendement d'appel et je le prends comme tel. Avis défavorable.
L'amendement n° 64 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l'amendement n° 78 , qui fait l'objet d'un sous-amendement.
Cet amendement prend acte du caractère exceptionnel des prestations de relayage, et prévoit que le décret d'application des dispositions de l'article 7 définisse les critères auxquels les personnes aidées doivent répondre pour avoir accès à ces prestations.
Il est en effet nécessaire de réserver les prestations de relayage de longue durée à des personnes aux besoins particuliers, pour lesquelles la multiplicité des intervenants est susceptibles d'aggraver les troubles.
Cet amendement reprend par ailleurs la recommandation n° 29 du rapport de l'Igas, intitulé : « Soutenir les aidants en levant les freins au développement de solutions de répit ».
Ce sous-amendement vise à ajouter à cet amendement ce qui lui fait défaut. Ce dernier prévoit en effet un premier cadrage, mais il y manque les modalités de préservation de la santé, de la sécurité et de la dignité des salariés.
Madame Vidal, comme je vous l'avais demandé, vous avez retravaillé votre amendement déposé en commission pour qu'il soit examiné en séance, et je vous en remercie.
Au regard des dérogations au droit du travail que leur délivrance implique, mais aussi de leur coût, il ne me paraît pas injustifié que les prestations de relayage s'adressent à un public répondant à des critères précisément définis. Il s'agit en effet de l'une des recommandations de l'Igas, qu'un certain nombre de mes interlocuteurs ont soutenue, à l'occasion des travaux préparatoires à l'examen du texte.
J'émets donc un avis favorable à votre amendement et invite Mme la ministre à livrer quelques précisions sur ses intentions en ce qui concerne le contenu du décret.
S'agissant du sous-amendement, je ne répéterai pas les considérations qui m'ont conduit plus tôt à émettre un avis défavorable. En effet, la motion présentée au titre de la préservation de la santé demeure assez floue sur le plan légistique, de même que l'interprétation de la dignité des salariés mentionnés. C'est le décret qui devra apporter les précisions requises dans le cadre réglementaire. J'entends votre appel à prendre ces éléments en considération lors de sa rédaction.
Mon avis au sujet du sous-amendement est défavorable.
Je suis favorable à l'amendement. S'agissant du sous-amendement, mon avis est le même que celui du rapporteur.
L'objectif de ce sous-amendement sera atteint par la rédaction du décret. Conformément aux recommandations de l'Igas, ce dernier s'appliquera prioritairement dans certaines situations et tiendra notamment compte des types de pathologie et des troubles de l'aidé, en privilégiant les maladies neurodégénératives et les troubles sévères du comportement ou du neurodéveloppement. C'est dans ce cadre que le décret sera porteur de clarifications concernant le conditionnement des prestations.
Le sous-amendement n° 87 n'est pas adopté.
L'amendement n° 78 est adopté.
Cet amendement de repli vise à préciser le contenu du décret d'application, prévoyant une information adéquate des aidants sur leurs droits et les prestations disponibles, une identification claire des bénéficiaires potentiels, une évaluation approfondie des besoins à tous les stades de l'intervention, la définition des compétences et la formation des intervenants, ainsi que la coordination entre professionnels. Il va donc un tout petit peu plus loin que l'amendement n° 78 .
Même avis.
Je reviens sur ce qu'a proposé notre collègue à de multiples reprises s'agissant de la santé, notamment de celle des professionnels. Vous avez peut-être lu La Clinique de la dignité de Cynthia Fleury. Elle y interroge notre manière de garantir la dignité des plus vulnérables, souvent au prix de la dignité de ceux qui s'en occupent. Il en va ainsi de tous les métiers du soin.
La situation actuelle, au vu de la pénurie, des tensions et des difficultés caractérisent ces postes, est évidemment très compliquée. Il faudra néanmoins garder en tête cet enjeu, qui est essentiel pour garantir à moyen et à long terme la préservation et le maintien en poste des professionnels en question. Il faut adopter une autre approche, car c'est à ce prix que l'on préservera la dignité des plus vulnérables.
L'amendement n° 4 n'est pas adopté.
On ne peut qu'être déçu que ce décret ne prévoie aucune évaluation des conséquences de l'article 7 sur la santé des salariés ni les modalités permettant de préserver cette dernière. Cet amendement vise donc à retarder l'entrée en vigueur de l'article 7. Cela nous donnerait le temps d'évaluer correctement l'expérimentation qu'il est proposé de généraliser – en particulier, ses effets sur l'état de santé des salariés –, pour définir et inscrire dans le décret les modalités adaptées.
Nous avons déjà eu ce débat en commission. La date que vous proposez de repousser l'a déjà été au 1er janvier 2025, pour tenir compte de la fin de l'expérimentation en cours, afin d'assurer la continuité de l'offre de services proposée aux couples aidant-aidé. Avis défavorable.
L'amendement n° 7 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 51
Nombre de suffrages exprimés 51
Majorité absolue 26
Pour l'adoption 38
Contre 13
L'article 7, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l'amendement n° 63 , portant article additionnel après l'article 7.
Il s'agit d'une demande de rapport visant à évaluer les moyens financiers et humains requis pour créer et entretenir, sur l'ensemble du territoire national, les dispositifs dédiés à la scolarisation en milieu ordinaire des enfants souffrant de troubles du neurodéveloppement. Comme je l'indiquais en début de séance, nous nourrissons un doute à cet égard. Nous avons parlé des AESH, les accompagnants d'élèves en situation de handicap, mais il faut aussi mettre à la disposition des enseignants des ressources concrètes, afin qu'ils accueillent ces élèves dans les meilleures conditions possibles. Nous craignons que ces dispositifs d'accueil essentiels ne tombent en désuétude par manque de moyens. Ce rapport a pour objet de s'assurer de leur suffisance.
La commission a émis un avis défavorable à cet amendement, comme d'ailleurs à l'ensemble des demandes de rapport formulées. Je rappelle qu'il s'agit d'un véritable travail parlementaire au long cours, qui nécessiterait une évaluation presque annuelle de ces dispositifs, en lien avec la stratégie nationale qui sera développée. Je vous invite à candidater auprès de la commission des affaires sociales, et de sa présidente ici présente, afin que soit mené un travail d'évaluation réel, à la main des parlementaires, plutôt que du Gouvernement.
Même avis. J'ajoute que des éléments à ce sujet sont communiqués régulièrement dans le cadre du suivi de la CNH (Conférence nationale du handicap) et de la stratégie nationale TND annoncée début 2024.
L'amendement n° 63 n'est pas adopté.
Selon la Haute Autorité de santé, les troubles du neurodéveloppement frappent 5 % de la population, soit environ 35 000 naissances par an. Selon un rapport d'information du Sénat, déposé en mai 2023, ces troubles concerneraient plutôt 100 000 enfants par an. Enfin, selon le Gouvernement, ils affecteraient une personne sur six. On s'y perd !
Le fait est que les différents TND, plus ou moins graves ou importants, sont très communs et touchent de plus en plus de Français. Dès lors, il paraît inconcevable qu'aucun chiffrage sérieux n'existe à ce sujet. Cet amendement vise à ce qu'un rapport l'établisse.
Par ailleurs, la plupart des personnes présentant l'un de ces troubles nécessitent des adaptations scolaires et professionnelles. Il est primordial d'identifier les diverses difficultés de prise en charge auxquelles les personnes qui en souffrent, ainsi que leurs familles, font face, du fait notamment du manque de places dans les structures adaptées.
La commission a émis un avis défavorable, suivant les arguments déjà formulés lors du débat précédent. Je rappelle que le développement des actions de repérage est en cours. Un délai de remise de six mois après la promulgation de la loi me paraîtrait vraiment trop court pour permettre une évaluation probante. Avis défavorable, donc.
L'amendement n° 42 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 35 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Par cet amendement d'appel, notre groupe sollicite la remise d'un rapport sur l'amélioration des conditions de scolarisation des enfants présentant un trouble du déficit de l'attention, avec ou sans hyperactivité (TDAH), ou des troubles spécifiques du langage et de l'apprentissage (TSLA). C'était une des observations du rapport de la mission d'information sénatoriale du 31 mai 2023 intitulé : « Prise en charge des troubles du neurodéveloppement : le compte n'y est pas ».
Cet angle mort du titre Ier de la présente proposition de loi, pourtant consacré à l'amélioration des conditions de scolarisation, est d'autant plus significatif que le TDAH et les TSLA s'avèrent être les troubles du neurodéveloppement les plus répandus et constituent un enjeu de santé publique majeur.
Si je partage la préoccupation de M. le député, le délai de six mois après la promulgation de la loi me paraît difficilement compatible avec nos attentes. J'ajoute qu'en tant que parlementaires il nous appartient plutôt de veiller à la bonne exécution de la stratégie nationale mise en œuvre et d'évaluer les effets de la loi une fois que nous l'aurons votée. Avis défavorable.
L'amendement n° 34 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 33 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il a pour objet la remise au Parlement d'un rapport qui dresse un bilan des créations de dispositifs consacrés à la scolarisation, sur l'ensemble du territoire, en milieu ordinaire des élèves présentant un trouble du neurodéveloppement.
Cet amendement vise à donner l'alerte sur le manque très important de places dans les dispositifs dédiés à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves présentant un TND. En effet, si l'on peut noter que le nombre de dispositifs a augmenté de façon significative – passant de 8 700 en 2017 à 11 250 en 2023 –, on compte encore trop peu de dispositifs déployés en milieu strictement ordinaire, ce qui s'explique essentiellement par le nombre insuffisant d'AESH. Si nous constatons cette situation à chaque rentrée, il semble qu'aucune mesure visant à une meilleure reconnaissance du métier d'AESH et de son rôle dans la société n'ait été prise. Nous ne parvenons pas obtenir un nombre suffisant d'AESH pour répondre à l'ensemble des notifications des MDPH, ce qui fragilise bien sûr les dispositifs.
Pour compléter les propos de ma collègue, je rappellerai des chiffres très inquiétants : 34 % des parents d'enfant présentant un trouble du neurodéveloppement n'ont pas pu conserver leur emploi et 35 % ont dû se contenter d'un temps partiel. Ce n'est pas acceptable.
Certes, cet amendement est une simple demande de rapport mais nous avons besoin de documenter ces faits très importants qui ont un impact sur les familles.
Par ailleurs, je sais que nous avons eu ce débat en commission mais – pour mon information – je me demande pourquoi mon amendement, qui était placé après l'article 1er , se retrouve curieusement à présent après l'article 7.
Sourires.
N'y voyez aucune malice de ma part, monsieur Monnet. Simplement – je parle sous le contrôle du service de la séance –, les demandes de rapport sont généralement rassemblées après le dernier article, en l'espèce l'article 7. Je n'ai donc fait preuve d'aucune mauvaise volonté, même si vous connaissez déjà mon avis puisqu'il s'agit d'une demande de rapport.
J'entends néanmoins l'appel que vous avez lancé. La question des AESH fait toujours l'objet d'un débat ouvert sur lequel nous devons avancer sereinement et avec efficacité au vu des données dont vous venez de nous faire part – d'ailleurs vous auriez pu en citer bien d'autres, et nous aurions pu consacrer plusieurs heures à cette question. Concentrons-nous plutôt à présent sur les troubles du neurodéveloppement, un autre beau sujet sur lequel il faut avancer. Avis défavorable.
La création de dispositifs de scolarisation pour des élèves présentant des troubles du neurodéveloppement figure au programme de la nouvelle stratégie nationale 2023-2027 pour les TND. Ces chiffres, qui tracent une trajectoire, sont disponibles dans le rapport comme dans des documents publiés à l'occasion de la CNH. D'ici à 2027, 380 nouveaux dispositifs seront créés, 101 professeurs ressources TSA (troubles du spectre autistique) seront recrutés – venant s'ajouter aux 101 déjà en fonction – et les Ulis, les unités localisées pour l'inclusion scolaire, seront développées.
Par ailleurs, il me semble nécessaire de rappeler que tous les élèves atteints de trouble du neurodéveloppement n'ont pas forcément besoin d'un dispositif d'accompagnement. La question de la formation des professionnels constitue aussi un enjeu essentiel.
Au-delà de la remise d'un rapport, il est important de consolider l'ensemble des dispositifs actuels, les données en la matière étant bien publiées et mises à la disposition de la représentation nationale, notamment grâce aux rapports des commissions. Avis défavorable.
La parole est à M. Christophe Marion, pour soutenir l'amendement n° 82 .
Il prévoit que le Gouvernement évalue, dans le cadre d'un rapport, l'opportunité d'étendre les dérogations au droit du travail permises par l'article 7 de cette proposition de loi aux salariés des personnes morales qui organisent des séjours de répit aidant-aidé.
Cet article prévoit notamment des dérogations à certaines règles de droit du travail pour les salariés volontaires d'établissements ou services sociaux et médico-sociaux effectuant des prestations de suppléance du proche aidant d'une personne qui nécessite une surveillance permanente dans le cadre de séjours de répit aidant-aidé.
De tels séjours pouvant aussi être organisés par des personnes morales, telles que des agences de voyage spécialisées, il me semble important d'étudier la possibilité d'accroître l'offre de séjours adaptés en accordant les mêmes conditions d'organisation des voyages de répit aidant-aidé à tous les acteurs susceptibles de les proposer, dès lors qu'ils font l'objet d'un encadrement et d'un contrôle exigeants – ce qui passe par exemple par la création d'un nouvel agrément.
Il me semblerait préférable que la question que vous abordez soit évoquée dans un rapport plus global sur les dispositifs de répit pour les aidants, qui pourrait être remis non pas six mois après la publication de la loi – un délai relativement bref pour expertiser les dispositions que nous avons adoptées – mais une fois que nous aurons le recul suffisant pour analyser l'application des dispositifs de relayage sous leur forme pérenne.
Je rappelle également que, de façon générale, l'évaluation des politiques publiques ne suppose pas nécessairement la production d'un rapport du Gouvernement. Les parlementaires ont d'autres moyens d'obtenir des informations de la part du pouvoir exécutif : audition des ministres par les commissions permanentes, questions écrites et orales, ou encore débats et séances de questions lors des semaines de contrôle. Je le précise pour que Mme la ministre – que vous ne manquerez pas de solliciter – se tienne prête.
D'autre part, les assemblées disposent de certains outils pour évaluer les politiques mises en œuvre et réfléchir aux moyens de faire évoluer le droit – nous nous en saisissons dans le cadre de nos travaux en commission.
Pour toutes ces raisons, je vous propose de retirer cet amendement et émettrai, à défaut, un avis défavorable.
L'amendement n° 82 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
Sur l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par le groupe Horizons et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 76 .
Sourires.
Néanmoins, et plus sérieusement, nous demandons, par cet amendement, la remise d'un rapport sur les moyens et les conditions de travail des AESH.
En effet, la question du nombre de créations de poste d'AESH donne souvent lieu entre nous à une redoutable bataille de chiffres. En outre, en tant que parlementaires, nous sommes sollicités par de nombreux parents insatisfaits. Pour en avoir discuté régulièrement avec les ministres concernés, je sais que nous ne disposons pas de chiffres précis du nombre d'enfants qui ne bénéficient pas d'un accompagnement complet ni de données sur les conditions de travail des AESH.
Cela pose un réel problème. Si nous voulons réussir le pari de l'école inclusive, il faudra que nous disposions de chiffres clairs. Plutôt que de connaître uniquement le nombre de postes créés, nous devons savoir combien il en manque et comment faire pour améliorer les conditions de travail des AESH. Sans ces données essentielles, nous ne parviendrons jamais à nous hisser à la hauteur des besoins.
Vous connaissez ma passion pour les rapports, cher collègue. Ceci étant dit, je considère, comme pour la question des AESH tout à l'heure, qu'il s'agit d'un amendement d'appel. Nous devons, là encore, avancer sur ce dossier qui peut par exemple faire l'objet, au-delà d'un simple rapport, d'une mission d'évaluation globale – mais peut-être pas d'une commission d'enquête, même si vous subodorez quelques manquements. Lorsqu'on est dans l'opposition, il est un peu paradoxal de faire confiance au Gouvernement s'agissant de la rédaction d'un rapport sur un sujet qui nous passionne.
Je vous soutiendrai en tout cas pleinement sur cette question si vous en avez besoin. En attendant, demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.
Des moyens sont bien sûr prévus, et la question de leur niveau est essentielle. Je rappelle que 380 dispositifs seront créés d'ici à 2027. Le métier d'AESH est devenu le deuxième au sein de l'éducation nationale, ce qui représente 85 502 équivalents temps plein – ETP. Puisque vous demandiez un chiffre concernant les recrutements, sachez que, sur les trois dernières rentrées scolaires, plus de 12 000 ETP ont été recrutés et qu'à la rentrée prochaine 3 000 ETP seront créés.
Plus généralement, toutes ces données sont régulièrement mises à jour dans les rapports parlementaires mais aussi dans le cadre des discussions budgétaires lors du projet de loi de finances de l'automne. Elles figurent aussi dans les bilans réguliers des plans TSA et TND ainsi que dans ceux de la CNH. Ces différentes publications assurent une certaine transparence concernant les recrutements comme le nombre de postes.
Mme Anna Pic proteste.
Voilà pourquoi j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 76 n'est pas adopté.
L'errance médicale – quelle que soit la maladie, mais particulièrement s'agissant des TND – est un poids qu'il nous faut ôter aux malades et aux familles. L'inclusion scolaire représente une chance qu'il nous faut démultiplier. Les frontières sanitaires et sociales doivent disparaître, surtout entre nos enfants, car nous devons leur donner les mêmes chances, et ce dès le début de leur vie et de leur parcours.
Le répit offert aux parents – et parfois, voire de plus en plus souvent, aux enfants – et à l'entourage doit être aménagé et développé. Les personnes extraordinaires qui ne comptent ni leurs heures, ni leurs jours, ni leurs nuits, pour soulager les souffrances de leurs proches doivent être relayées.
Pour toutes ces raisons et parce que cette proposition de loi prévoit de mettre en œuvre les premiers dispositifs nécessaires pour apporter des solutions sur ces questions – et même si nous n'étions pas tous d'accord sur l'ensemble des dispositions –, le groupe MODEM votera en faveur de ce texte.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
L'établissement d'un diagnostic précoce et le renforcement des procédures de détection représentent une avancée importante de ce texte car il s'agit d'enjeux majeurs. En tant que professionnelle – je suis conseillère principale d'éducation –, j'ai trop souvent vu des parents qui se sentaient menacés car on considérait qu'ils avaient des difficultés à éduquer leur enfant sous prétexte que le comportement de celui-ci ne correspondait pas à ce qu'on attendait d'eux. Or, s'ils rencontraient effectivement de telles difficultés, c'était pour une raison profonde qui n'était évidemment pas prise en considération. Pas plus que leurs parents, les enfants n'étaient accompagnés, si bien qu'ils ne pouvaient ni grandir ni apprendre.
Néanmoins, sur différents points, ce texte ne va pas assez loin à nos yeux. S'il comporte des avancées s'agissant de certains dispositifs – je pense à la manière dont on envisage l'accompagnement –, il n'est pas satisfaisant sur la question, absolument primordiale, des AESH. Dans mon département, chaque année 50 % des heures d'accompagnement ne sont pas assurées.
Face à l'augmentation du nombre de personnes atteintes de troubles du neurodéveloppement, nous n'arrivons pas à nous adapter. Chaque année, des familles s'entendent dire qu'un accompagnement n'est pas nécessaire, que la notification des MDPH est trop généreuse et ne tient pas compte de la réalité de la situation. Or qui ne tient pas compte de la réalité de la situation des parents et de l'enfant ?
Comme cela a été dit tout à l'heure, quelque 35 % des parents sont contraints de renoncer à leur vie professionnelle. Est-ce la commission qui ne tient pas compte de la réalité ? Le problème ne vient-il pas du fait que nous ne votons pas les moyens nécessaires à l'accompagnement ? Nous n'avons pas abordé la question de la professionnalisation – nous devons aller plus loin sur cette voie – ou de l'évolution de carrière des AESH, qui pourraient permettre un meilleur accompagnement.
Nous sommes ravis que des dispositifs tels que les Ulis puissent se développer. Toutefois, il faut des solutions adaptées à chacun : tous doivent pouvoir grandir, s'émanciper, trouver leur place dans le monde, tandis que notre école et notre société doivent devenir vraiment inclusives.
L'article 7 est problématique puisque vous n'avez légiféré qu'au bénéfice de la personne aidée sans vouloir trouver les modalités d'encadrement destinées à alléger la souffrance au travail des salariés aidants.
Il nous manque ce volet ! Le groupe Socialistes votera néanmoins pour ce texte, en raison des avancées qu'il contient, en rappelant qu'il peut être amélioré et qu'il convient d'allouer les moyens adéquats.
Monsieur le rapporteur, dans ma déclaration liminaire à la discussion générale, j'avais précisé que notre vote dépendrait de la manière dont vous traiteriez nos amendements. Bien que vous n'en ayez retenu aucun, nous voterons en faveur de ce texte. Une première raison en est que nous avons eu un véritable débat.
La seconde est la suivante : le Président de la République n'a rien fait sur ce sujet lors de son premier mandat. Les manques sont tels aujourd'hui que nous ne pouvons renoncer aux petites avancées contenues dans ce texte.
Cependant, madame la ministre, si ce sujet vous tient à cœur, vous ne pourrez vous contenter d'une proposition de loi. Un projet de loi est nécessaire. Il faut des moyens supplémentaires. Je ne rappellerai pas les chiffres ; ma collègue l'a fait. Si nous voulons avancer correctement, durablement et répondre aux besoins des professionnels et surtout des familles, il faudra un projet de loi qui mette des moyens sur la table. À défaut, nous verrons les différences se creuser.
Nous avons débattu sur l'article 7. Je suis profondément convaincu qu'il va engager une forme de déstructuration du secteur. Je sais que telle n'est pas votre intention, monsieur le rapporteur, mais tel sera son effet. Lorsque les données seront disponibles, nous n'hésiterons pas à nous référer à nos débats pour examiner l'évolution de ce secteur car, je le répète, cet article pose problème.
Attachés aux petites avancées, nous voterons néanmoins pour ce texte. .
M. Marcellin Nadeau applaudit
Au regard de la prévalence des TND comme des nombreux obstacles auxquels sont confrontés enfants et familles, il est important que les parlementaires se saisissent de la situation des enfants atteints de ces troubles. Ils ont besoin de solutions pour améliorer le repérage précoce, l'accompagnement – d'où l'importance des AESH, dont je salue le travail – et pour favoriser leur épanouissement. J'y insiste : il faut veiller à ce que ces enfants se sentent réellement inclus, afin d'éviter qu'ils ne soient rejetés par les autres enfants.
Il convient également d'apporter des solutions pour améliorer la prise en charge, dans un contexte de pénurie de professionnels. Si les notifications MDPH permettent aux enfants d'être suivis et de bénéficier de soins, ils sont encore trop nombreux à ne pouvoir y accéder, pour des raisons financières ou géographiques. Des inégalités territorales d'accès aux soins médico-sociaux perdurent.
En ce qui concerne la scolarisation, il convient que les enseignants soient eux-mêmes formés et accompagnés. Dans ma circonscription, des professionnels du secteur médico-social ont intégré des classes de maternelles dans un cadre expérimental pour épauler les enseignants. Ces derniers, dubitatifs à l'origine, sont très satisfaits et souhaitent la pérennisation de ce dispositif.
Le groupe LIOT votera pour cette proposition de loi tout en rappelant que le travail n'est pas terminé et doit être poursuivi.
Quelques mots pour exprimer ma joie de voir cette proposition de loi débattue au sein de notre hémicycle : elle permettra aux enfants atteints de TND de bénéficier d'un accompagnement renforcé et à leurs aidants d'obtenir un répit nécessaire à leur santé et à leur bien-être.
Comme j'ai pu l'indiquer dans la discussion générale, au-delà des enfants, de leurs familles et de leurs proches, la formation des professionnels et la sensibilisation du grand public sont indispensables afin de construire ensemble une société plus inclusive. Ce texte permet des avancées notables en ce sens. Il nous incombe toutefois de poursuivre nos actions en la matière par des initiatives parlementaires telles que celle à l'origine de ce texte – que j'espère voir adopter largement – et grâce à la volonté du Gouvernement d'accentuer les efforts déjà consentis en faveur des personnes qui en ont besoin.
J'ai bon espoir que le texte soit examiné et voté très prochainement au Sénat et, ainsi, mis en œuvre rapidement.
J'ai bien conscience que l'article 7 peut poser question. Un travailleur social n'a pas à porter la même charge qu'un aidant. Cependant en ma qualité d'ancienne travailleuse sociale, après avoir expérimenté une forme de relayage dans le cadre associatif, je sais qu'il convient de faire confiance aux salariés, aux bénévoles et aux jeunes qui se forment dans ces métiers du soin. Il demeure – et je vous rejoins sur ce point – que nous devons être vigilants et attentifs à accompagner les ESMS dans leur travail et à assurer des ateliers d'analyse des pratiques. Il doit s'agir d'un volontariat véritable.
Mmes Charlotte Parmentier-Lecoq et Stella Dupont applaudissent.
Enfin, n'oublions pas les personnes qui ont – ou n'ont pas – bénéficié de ces dispositifs pendant leur enfance lorsqu'elles arrivent à l'âge adulte. Souvent, rien n'est prévu pour les adultes. Un grand merci pour les enfants qui vont bénéficier de ces dispositifs et pour leurs familles. Le groupe RE votera ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Je voudrais vous faire part de mon sentiment de tristesse cet après-midi, à la suite de notre débat. Nous devrions tous nous rassembler dans l'intérêt général sur ce sujet en faisant fi des appartenances politiques des uns et des autres. Force est pourtant de constater depuis le début de la législature que consigne est donnée dans cette assemblée de rejeter systématiquement tout amendement émanant du groupe Rassemblement national dont je fais partie.
Dans cet hémicycle, nous sommes le seul groupe à ne pas faire preuve de sectarisme. Dès lors qu'un amendement va dans le sens de l'intérêt général, dans l'intérêt des Français que nous représentons et que nous défendons, nous le votons, d'où qu'il émane.
Tout à l'heure, j'ai défendu un amendement qui aurait dû faire consensus. Il visait à élargir le champ des professionnels aptes à réaliser les examens de repérage des enfants souffrants de TND. Vous l'avez rejeté, alors que les professionnels sont saturés. Maman d'un enfant souffrant d'un TND, je suis triste pour tous ces parents qui feront face demain à un retard de repérage et de prise en charge des troubles de leur enfant. Pourquoi ce sectarisme de votre part ? Je vous demande des comptes au nom des Français. Nous ne sommes pas des sous-élus ou des sous-citoyens ! Tous les électeurs que nous représentons méritent d'être entendus.
Tout cela suffit !
Je prends date. Apportez-moi la preuve que cet article 6 sera efficace et applicable demain : je n'y crois pas une seconde pour les raisons que je viens d'évoquer.
Nous voterons cette proposition de loi car elle va dans le bon sens, que nous sommes responsables et que nous ne tenons pas rigueur du sectarisme manifesté à notre égard, mais il faut aller plus loin. Nous manquons de moyens face au chantier immense que représente la prise en charge de tous ces troubles.
Cela a été dit, il n'y a pas assez d'AESH ; ils sont mal reconnus, mal payés, ils doivent être mieux formés. Les élèves ne bénéficient pas des heures d'accompagnement allouées par les MDPH par manque de personnel.
Le chantier est énorme. Soyons intelligents, travaillons tous ensemble dans l'intérêt de tous les Français et des personnes qui souffrent de TND.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il manque quelque chose dans cette proposition : la réparation des lésions cérébrales.
Nous prenons acte des avancées, de votre bonne volonté en matière de détection et de dépistage. Bravo ! Toutefois, il est problématique de ne pas réparer, au motif que l'on ne dispose pas des moyens humains et matériels, et d'attendre l'entrée en classe pour inclure. On détecte et on attend tranquillement, alors qu'on pourrait soigner ! Il y a un volet manquant dans ce texte.
Le groupe La France Insoumise ne peut ni voter contre ce texte ni voter pour. Nous nous abstiendrons car, comme l'a dit notre collègue, la prise en charge des enfants atteints de TND ne sera pas réellement améliorée, tandis que les conditions de travail des aidants seront dégradées. Ce point n'est pas acceptable. Travailler cent quarante-quatre heures sans pause, ne pouvoir s'occuper de ses propres enfants chez soi, voilà une ligne rouge que nous ne pouvons franchir.
Nous nous abstiendrons. Nous ne pouvons pas voter contre ce texte en raison des progrès qu'il contient, mais nous refusons les conditions de l'article 7.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 54
Majorité absolue 28
Pour l'adoption 54
Contre 0
La proposition de loi est adoptée.
Je voulais vous remercier toutes et tous. Nous avons eu l'occasion de débattre ; nous ne sommes pas toujours tombés d'accord mais nous avons abordé de nombreuses questions. Il s'agit d'une proposition de loi : à la différence d'un projet de loi, elle ne peut embrasser tous les sujets. Cela peut nourrir des frustrations ; ainsi le débat reste-t-il ouvert sur les AESH.
Nous avons entendu les craintes que vous avez exprimées à propos de l'article 7. Il nous appartiendra, chers collègues, de faire notre travail de parlementaires, c'est-à-dire d'évaluer, de mesurer et, éventuellement, de déposer un autre texte.
Je regrette que nous ayons abaissé l'âge du premier examen de dépistage à neuf mois. Cela n'est sans doute pas adapté pour l'ensemble des TND, notamment ceux qui n'ont pas de signes précurseurs. En effet, ils se manifestent à l'âge de la verbalisation, soit après douze mois. Le Sénat réengagera sans doute le débat sur ce point et cela donnera peut-être l'occasion d'élargir le texte à d'autres troubles que vous visiez mais qui n'embrassent pas l'ensemble des TND.
Je remercie les trois administrateurs ayant travaillé sur ce texte, les personnes ayant participé aux auditions, mon groupe qui m'a fait confiance et Mme la ministre pour son travail d'accompagnement. Les derniers ajustements qu'elle a acceptés ont permis d'aboutir à un texte de compromis. M. Yannick Monnet l'a dit, ce sont des petits pas mais ils méritaient d'être parcourus pour tous les enfants et les familles concernés.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Je voudrais saluer la qualité des débats sur un sujet absolument essentiel : celui de l'accompagnement des enfants, des familles et de tous les professionnels qui ont suivi nos échanges. Ce texte, issu du travail parlementaire de la sénatrice Jocelyne Guidez et du député Paul Christophe, marque une réelle avancée, et les travaux en commission ont été d'excellente qualité.
Qu'apporte fondamentalement cette proposition de loi ? Du répit pour les parents et pour les aidants, la possibilité d'un dépistage précoce plus rapide et une formation approfondie, qui touchera plus de professionnels. Ce sont autant d'avancées qui contribueront à sortir parents et aidants de l'errance et de l'isolement, avec toutes les conséquences que cela emporte. Au-delà, il va surtout permettre de mettre en lumière des troubles encore beaucoup trop méconnus, trop peu diagnostiqués et donc trop peu accompagnés.
Je crois que tout cela honore cette assemblée.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Prochaine séance, lundi 6 mai, à quinze heures :
Débat sur le thème : « Bilan des politiques publiques de défense et de promotion de la laïcité » ;
Questions sur le thème : « Les comptes publics » ;
Questions sur le thème : « La santé mentale des jeunes ».
La séance est levée.
La séance est levée à dix-sept heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra