La séance est ouverte à dix-sept heures trente.
La commission procède à l'audition de M. Florian Colas, directeur général des douanes et droits indirects (ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique), accompagné de M. Guillaume Vanderheyden, sous-directeur du commerce international, Mme Corinne Cléostrate, sous directrice des affaires juridiques et lutte contre la fraude et Mme Ketty Attal-Toubert, sous directrice du département des statistiques et des études du commerce extérieur.
Mes chers collègues, nous accueillons M. Florian Colas, directeur général des douanes et droits indirects, M. Guillaume Vanderheyden, sous-directeur du commerce international, Mme Corinne Cléostrate, sous-directrice chargée des affaires juridiques et de la lutte contre la fraude, et Mme Ketty Attal Toubert, sous-directrice du département des statistiques et des études du commerce extérieur.
Mesdames, messieurs, je vous remercie de vous être rendus disponibles pour répondre à nos questions. Nous attendons de cette audition qu'elle nous éclaire sur le dispositif européen et français de contrôle des biens agricoles et alimentaires aux frontières, sur la répartition des rôles en la matière au sein de l'État, notamment entre le ministère de l'économie et des finances et le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, sur les principaux types de fraudes dont vous avez à connaître, et sur la façon dont vous établissez les chiffres des importations et des exportations agricoles et alimentaires de notre pays.
L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
(MM. Florian Colas et Guillaume Vanderheyden et Mmes Corinne Cléostrate et Ketty Attal-Toubert prêtent.)
En matière de sécurité et de commerce alimentaire, la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) intervient à deux titres.
Chargée de produire les statistiques du commerce extérieur, elle fait partie des services statistiques de l'administration. Comme telle, elle se conforme aux normes et aux méthodes fixées par l'Insee. Nos statistiques portent sur tous les biens importés et exportés.
Elles sont produites de deux façons. S'agissant des biens importés de pays tiers ou qui y sont exportés, elles se fondent sur les données du dédouanement effectué à nos frontières, qui sont exhaustives. S'agissant des flux intracommunautaires, formés des produits dédouanés dans l'un des États membre de l'Union européenne et circulant librement en son sein, elles se fondent sur l'enquête mensuelle sur les échanges de biens intra-Union européenne, qui est réalisée selon les méthodes de la statistique nationale.
Tout cela nous permet de publier périodiquement des chiffres bruts, assortis d'études thématiques, sur notre site internet.
Par ailleurs, la DGDDI intervient dans le contrôle des produits, à plusieurs niveaux.
Elle intervient d'abord avant le dédouanement. Avant d'obtenir l'autorisation d'entrer et de circuler légalement sur le territoire européen, certains produits alimentaires font l'objet de contrôles portant sur leur état sanitaire et sur la qualité des denrées. Il s'agit exclusivement de produits d'origine non animale. Effectués par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) jusqu'en 2023, ces contrôles ont été confiés à la DGDDI, considérée comme mieux indiquée pour procéder à des contrôles avant dédouanement.
Ceux-ci sont de deux ordres : un contrôle documentaire exhaustif et un contrôle physique – il s'agit de vérifier la correspondance entre la marchandise déclarée et la marchandise présentée. Le taux de contrôle varie selon les produits. Il est fixé par la Commission européenne en fonction d'une estimation du niveau de risque de chaque produit et de chaque provenance, sur la base de couples produit-provenance.
Les denrées alimentaires issues de l'agriculture biologique font l'objet d'un contrôle documentaire visant à vérifier que le produit dispose d'un certificat validant son caractère biologique délivré par une autorité nationale compétente reconnue par la Commission européenne. Les fruits et légumes soumis à des normes spécifiques de commercialisation – relatives à la qualité, aux catégories, aux calibres, au conditionnement, à l'emballage, au stockage, à l'étiquetage… – font l'objet de contrôles de conformité de façon sélective, sur la base d'une analyse de risques.
Lors du dédouanement ensuite, la DGDDI intervient dans le contrôle de tous les produits alimentaires, d'origine animale ou non. La déclaration en douane s'accompagne d'un contrôle documentaire visant à vérifier la présence des documents requis, qui ont pu être émis par d'autres administrations. Tel est notamment le cas pour les denrées alimentaires d'origine animale, que la direction générale de l'alimentation (DGAL) est chargée de contrôler.
Nous contrôlons aussi les produits de la pêche à l'importation, pour contribuer à la lutte contre la pêche illégale. Nous nous assurons que les importateurs présentent des certificats de capture délivrés par l'État d'immatriculation du navire.
À la fin de cette année, nous contrôlerons aussi les produits alimentaires associés à la déforestation ou à la dégradation des forêts, conformément au règlement européen qui oblige les importateurs à fournir des certificats de diligence raisonnée. Il s'agit notamment de l'huile de palme, du soja, de la viande bovine, du cacao et du café.
Par ailleurs, nous sommes une administration importante du contrôle de la viticulture. Nous contrôlons non seulement les flux d'importation et d'exportation mais aussi les conditions mêmes de production, concernant par exemple les parcelles, la production des vins et l'élimination des sous-produits de la vinification.
La DGDDI mène d'importants travaux avec les professionnels de la viticulture, initiés par notre ministre de tutelle, M. Thomas Cazenave. Nous avons avec eux des contacts réguliers pour moderniser les conditions dans lesquelles s'exerce la tutelle de la profession. Nous contribuons également au contrôle des aides européennes attribuées au secteur agricole en vérifiant qu'elles le sont à bon escient.
En tant qu'autorité d'application des lois et des règlements, nous sommes amenés à nous assurer que les produits se présentant à l'entrée du territoire européen sont conformes à l'ensemble des normes et réglementations applicables, pas seulement sanitaires, et pas seulement douanières. Nous contrôlons aussi la bonne application des droits de douane tels qu'ils sont définis par l'Union européenne ainsi que la circulation des produits sur le territoire.
Cette commission a déjà évoqué à plusieurs reprises la restauration hors domicile. Il nous a été suggéré que l'origine de la viande qui est servie dans la restauration rapide – tacos, kebabs et autres – est mal connue, et ne serait de toute façon pas française. Comment se déroulent les contrôles de ce secteur ? Les douanes sont-elles susceptibles de savoir d'où proviennent ces viandes, ou est-ce une autre administration ?
La DGDDI intervient surtout à l'entrée et à la sortie du territoire européen, ainsi que dans le contrôle de la circulation intracommunautaire. La mise à la consommation est de la compétence de la DGCCRF. Cette summa divisio entre les deux administrations est classique, et elles s'articulent bien. Ces contrôles peuvent être effectués dans le cadre des comités opérationnels départementaux antifraudes (CODAF).
Les produits d'origine animale sont contrôlés avant le dédouanement par les services d'inspection vétérinaire de la DGAL, qui autorisent ou non leur entrée sur le territoire. S'ils l'autorisent, ils visent un document sanitaire commun d'entrée (DSCE), dont la douane vérifie la présence lors du dédouanement. Ces tonnes de viande figurent dans nos statistiques en importation, référencées par volume et par pays d'origine.
Par ailleurs, notre système informatique de dédouanement des importations, qui est en train d'évoluer pour se conformer aux normes communautaires, inclut un système d'analyse de risque et de ciblage connecté aux mécanismes d'alerte rapide de la Commission européenne, ce qui permet d'identifier les chargements de produits suspects et de les contrôler.
Nous sommes en capacité de définir, sur la base d'informations issues d'un pays tiers, des profils de sélection. Si la déclaration en douane d'un produit fait apparaître un pays ou un flux particulier, la douane procède à un contrôle physique, voire à des prélèvements d'échantillons analysés en laboratoire pour déterminer si le produit est conforme aux normes de qualité applicables.
Il y a donc un croisement produit-pays. Quels sont les produits et les pays ou zones d'origine qui éveillent le plus de suspicions ?
Les taux de contrôle de chaque couple produit-provenance fixés par la Commission européenne, qui sont publics, fournissent une première réponse à la question. Ces taux ne peuvent être adaptés à l'échelle nationale. C'est une politique qui est définie à l'échelon communautaire.
Les produits dont le taux de contrôle est le plus élevé sont le poivre noir du Brésil, à hauteur de 50 % en raison de risques de salmonelle, ainsi que la pâte d'arachide des États-Unis et le thé de Chine, à hauteur de 20 %, en raison pour ce dernier du risque de résidus de pesticides – c'est un motif assez fréquent de taux de contrôle élevés. On recherche aussi beaucoup de résidus de pesticides dans le riz, par exemple le riz d'Inde.
Les figues de Turquie sont aussi très surveillées. De façon générale, les flux en provenance de Turquie sont fréquemment contrôlés. Les marchandises périssables, telles que les haricots du Kenya, qui ne peuvent rester longtemps sur le tarmac de Roissy et doivent être contrôlées rapidement, font l'objet d'une vigilance élevée, assortie de fréquents contrôles en laboratoire.
À propos des taux de contrôle qui nous sont imposés par la Commission européenne, nous veillons à ce qu'ils soient appliqués à chaque point d'entrée dans le territoire. Par exemple, si le riz fait l'objet d'un taux de contrôle de 10 %, nous évitons que tous les contrôles soient faits au Havre et aucun à Marseille. Le contrôle des importations est homogène.
Le CETA (Accord économique et commercial global) a fait l'objet de maints débats dans notre commission, notamment lors des auditions des représentants de la filière bovine et de vos collègues de la direction générale du Trésor. Les représentants d'INTERBEV, l'association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes, ont notamment dit que le contrôle des flux d'importation de viande bovine est insuffisant et n'offre aucune garantie contre l'importation de viande aux hormones.
J'ai donc pris la liberté d'écrire à la direction générale du Trésor à ce sujet. Son directeur M. Bertrand Dumont m'a répondu par un courrier de trois pages, que j'ai transmis aux membres de la présente commission.
Il écrit notamment que « rien, dans le CETA, n'est de nature à abaisser les normes européennes. Au contraire, le principe de précaution y est consacré ». Puis : « Concernant les antibiotiques promoteurs de croissance, l'Union européenne a interdit leur utilisation en tant qu'additifs dans l'alimentation animale sur son territoire en 2006. Cette interdiction a été étendue aux médicaments antimicrobiens promoteurs de croissance aux animaux et aux produits d'origine animale importés grâce à une “mesure miroir” intégrée dans le règlement dit “médicaments vétérinaires”, règlement entré en application en janvier 2022. » Il serait intéressant que vous expliquiez comment est assuré le respect de cette interdiction.
Je poursuis la lecture : « Cette mesure miroir sera opérationnelle mi-2026, délai permettant à l'UE de renforcer les modalités de mise en œuvre et de contrôle de cette mesure d'une part et aux pays tiers exportateurs des animaux et des produits animaux de s'y conformer d'autre part. Dans l'attente, les autorités françaises ont publié, dès le 21 février 2022, un arrêté suspendant notamment l'importation et la mise sur le marché en France de viandes et produits à base de viande issus d'animaux ayant reçu des médicaments antimicrobiens pour favoriser la croissance ou augmenter le rendement. Cet arrêté, renouvelé en 2023, sera abrogé dès que la mesure miroir prévue au niveau européen s'appliquera. Dans tous les cas, il faut noter que le Canada a, de son côté, interdit l'usage d'antibiotiques facteurs de croissance, sous forme d'additifs, depuis février 2018. »
Ce courrier, de même que les dispositions du CETA relatives aux hormones et aux farines animales et les indications figurant sur le site internet de la direction générale du Trésor, sont de nature à rassurer, mais il y a un doute sur l'effectivité de leur mise en œuvre. Comment les flux agricoles en provenance du Canada, notamment de viande bovine, sont-ils contrôlés ?
La douane n'effectue des contrôles physiques que pour les denrées d'origine non animale, à l'entrée dans le territoire européen. La viande est contrôlée par les services vétérinaires de la DGAL, qui délivrent ou non un certificat sanitaire d'entrée sur le territoire, lequel est automatiquement injecté dans le processus de dédouanement.
Lors du dédouanement, nous disposons donc du résultat des contrôles effectués par la DGAL. Chaque administration intervient dans son périmètre : la DGAL avant le dédouanement, la DGDDI lors du dédouanement et la DGCCRF lors de la mise à la consommation. Leurs interventions s'enchaînent, dans le cadre de protocoles de coopération renforcés par l'interconnexion des systèmes d'information. Il est à noter que les analyses des prélèvements effectués lors des divers contrôles sont réalisées par un outil scientifique commun aux trois administrations, le service commun des laboratoires, qui a plusieurs antennes en France.
En septembre 2019, la direction générale de la santé a réalisé un audit concluant à des marges d'amélioration importante dans le système de contrôle canadien. Sur cette base, la France a demandé à l'Europe de mener un second audit, ce qui a été fait en octobre 2020. Ce second audit n'a pas relevé d'irrégularités flagrantes s'agissant de la capacité des autorités canadiennes à contrôler, sur le plan sanitaire, les produits exportés.
Le courrier de M. Bertrand Dumont comporte des informations qui vont dans le même sens. Il indique que l'entrée sur le territoire de l'ensemble de l'Union européenne a été refusée à une proportion très faible de produits animaux provenant du Canada, et encore pour certains était-ce en raison d'une rupture de la chaîne du froid.
Par quel moyen de transport – avion ou bateau – ces flux arrivent-ils dans l'Union européenne ? Vous dites qu'ils sont contrôlés par vos collègues de la DGAL. Ces contrôles consistent-ils à ouvrir la marchandise à son arrivée sur le territoire français pour effectuer des prélèvements ?
Si la marchandise analysée par les services vétérinaires est conforme, ils délivrent le DSCE, qui est directement injecté dans nos systèmes d'information, ce qui nous permet de la dédouaner. Si elle ne l'est pas, aucun DSCE n'est émis et elle ne peut être dédouanée. Elle est alors bloquée, détruite ou réexpédiée.
Vous vous occupez du contrôle des produits d'origine non animale, qui vous a été progressivement confié par la DGCCRF entre 2020 et 2023. La DGAL, elle, effectue le contrôle des produits d'origine animale. Depuis quand exerce-t-elle cette compétence ?
Il s'agit d'une compétence historique de la DGAL.
De quels moyens la DGDDI dispose-t-elle pour effectuer le contrôle sanitaire des importations de produits d'origine non animale ? Combien de contrôles effectue-t-elle ? Quel pourcentage des produits entrant sur le territoire français cela représente-t-il ? Quel est le taux de produits non conformes ?
Nous réalisons nos contrôles principalement dans les postes de contrôle frontaliers (PCF). À l'échelle du territoire national, la DGDDI dispose de trente-cinq services, dont quatorze PCF qui effectuent des contrôles, soit sanitaires, soit de conformité des certificats biologiques. Les principaux points de contrôle sont Dunkerque, Calais, Marseille – les terminaux portuaires et l'aéroport –, Le Havre, Saint-Nazaire, Sète, la plateforme aéroportuaire de Roissy et, en outre-mer, La Réunion, la Guadeloupe et la Guyane.
Au total, la mission de contrôle sanitaire de la douane est assurée, au sein de ces services, par 200 équivalents temps plein (ETP).
En 2023, un peu plus de 10 000 contrôles sanitaires et 1 600 analyses de laboratoire ont été effectués avant dédouanement ; pour la partie biologique, un peu moins de 8 000 contrôles biologiques et un peu moins de 500 analyses de laboratoires ont été réalisés. Nous pourrons vous transmettre des informations plus détaillées par écrit si vous le souhaitez.
Au-delà des services de première ligne qui assurent les contrôles et le dédouanement, le service commun des laboratoires, partagé entre la douane, la DGAL et la DGCCRF, constitue pour nous un outil clé.
Lorsque nous avons repris cette mission, nous y avons dédié davantage d'agents que la DGCCRF – nous nous devions de faire au moins aussi bien qu'elle ! La plupart d'entre eux, sur les grandes plateformes notamment, sont dédiés à cette tâche, ce qui leur permet de se spécialiser et de gagner en expertise. Les saisies importantes que nous avons réalisées récemment, avec plusieurs dizaines de tonnes de riz saisies au Havre par exemple, prouvent que le dispositif fonctionne bien. Le transfert de cette mission ne s'est pas accompagné d'un transfert d'effectifs mais en y mettant les moyens, nous sommes parvenus à la reprendre correctement.
Connaissez-vous le pourcentage de produits contrôlés par vos services et le taux de non-conformité ?
En moyenne, 16 % des produits sont contrôlés. Ce chiffre, cependant, n'est pas très parlant. Les taux de contrôle imposés par la Commission européenne s'échelonnent en effet entre 5 % et 50 % en fonction du type de produit et de sa provenance. S'agissant du taux de non-conformité, nous vous proposons de vous fournir par écrit des éléments détaillés par type de production.
Je précise que les taux de contrôle que nous impose la Commission européenne varient tous les six mois, l'analyse de risque étant actualisée en fonction des remontées du terrain.
Nous serons très intéressés par les chiffres précis que vous pourrez nous fournir.
Certaines productions, vous l'avez dit, sont particulièrement surveillées, mais le taux maximal de contrôle est de 50 %. Si le taux de contrôle n'est pas de 100 %, il me semble que nous n'avons pas la garantie de ne pas laisser entrer sur notre sol des produits posant un problème ?
Les taux de contrôle sont définis par la Commission européenne et actualisés tous les six mois en fonction de l'analyse de risque actualisée, des découvertes réalisées dans l'ensemble de l'Union européenne et du niveau de non-conformité constaté : cela permet de les faire évoluer et d'ajuster le niveau de pression. Dès lors que les contrôles ne sont pas exhaustifs, nous ne pouvons effectivement pas garantir une conformité absolue. Néanmoins, les contrôles sont aléatoires et, avec un taux de 50 %, la pression est très élevée. Les éventuelles non-conformités découvertes sont prises en compte par la Commission européenne au moment d'ajuster les taux.
À chaque fois que nous réalisons une saisie pour non-conformité, nous effectuons, comme tous les autres services des douanes de l'Union, un signalement dans la messagerie Rapid Alert System for Food and Feed (RASFF), spécifique aux produits alimentaires. Tout le monde a ainsi l'information, y compris la Commission européenne. Nous faisons aussi un signalement à l'autorité du pays de départ – l'Inde, par exemple, s'agissant de la saisie récente de 61 tonnes de riz avec un taux trop élevé de pesticides. C'est un premier point : l'information circule.
La douane dispose par ailleurs au niveau national d'un service d'analyse de risque et de ciblage qui traite toutes les données relatives aux importations. Le pôle dédié à la protection du consommateur et de l'environnement, spécialisé dans les réglementations afférentes, surveille quotidiennement les messageries d'alerte et introduit dans le système d'information des profils de sélection. Son rôle est d'assurer une couverture du risque sanitaire au travers de l'exploration et de l'exploitation des différentes données issues des déclarations d'importation et d'autres données si besoin.
Cette exploitation des données est complémentaire du système de l'analyse de risque semestrielle de la Commission européenne, fondée sur l'étude des non-conformités relevées par les différentes administrations compétentes des États membres. La douane française s'efforce d'aller un peu plus loin dans l'appréhension et la couverture du risque.
Je voudrais revenir sur les limites maximales de résidus (LMR). Le rapport de Dominique Potier pour la commission d'enquête sur les produits phytosanitaires indique – je ne sais pas si ces chiffres sont toujours d'actualité – que l'Union européenne recense 1 498 substances actives, parmi lesquelles 907 sont interdites, que seulement 176 d'entre elles sont contrôlées au niveau européen et que la France en contrôle 568. Sans émettre l'ombre d'un reproche, dans la mesure où la France fait nettement mieux que l'Europe, j'aimerais comprendre pourquoi les 907 substances interdites ne sont pas toutes contrôlées.
De quels moyens disposez-vous, par ailleurs, pour contrôler la présence de ces 568 substances ciblées par la France dans les productions arrivées via un port situé dans un autre pays européen puis transportées jusque dans notre territoire ?
Nous veillons au respect des limites maximales prévues par la réglementation européenne mais aussi, le cas échéant, des limites spécifiques définies par la réglementation nationale, et il arrive effectivement que le standard national soit plus élevé.
Une fois qu'une marchandise est entrée sur le marché européen, elle circule librement sans avoir besoin d'un nouveau dédouanement. La douane procède cependant à des contrôles à la circulation dans l'ensemble du territoire, particulièrement dans les zones frontalières. Même si ce n'est pas leur mission exclusive – ils visent d'abord la recherche de produits prohibés, pour lutter contre les trafics –, ces contrôles peuvent aussi donner lieu à la découverte de non-conformités.
D'une façon plus générale, les douanes européennes ont un rôle important à jouer dans le respect des réglementations non douanières. Un produit qui entre dans le territoire de l'Union est soumis à environ 350 réglementations non douanières, que les douanes sont chargées de faire respecter. Les LMR en sont une. Ces réglementations ne peuvent pas être contrôlées une par une par chaque service mais donnent lieu à l'introduction dans les systèmes d'information de documents obligatoires, sur la base desquels les services peuvent vérifier la conformité du produit. En l'absence du document obligatoire prévu par la réglementation, nous jouons le rôle de gardien : la marchandise n'est pas mise à la consommation et elle est, au choix de l'opérateur, détruite, réexportée ou mise en conformité. Dans le cas où elle est réexportée, nous intégrons l'information dans la messagerie d'alerte afin que l'ensemble des douanes s'assurent que la marchandise rejetée ne revienne pas sur le territoire européen.
Par ailleurs, le service commun des laboratoires, qui dispose dans ses onze implantations d'équipements spécifiques très sophistiqués, est en mesure de nous fournir des analyses scientifiques, par exemple sur le taux de résidus de pesticides. Il fait partie d'un réseau européen de quatre-vingt-neuf laboratoires des douanes qui s'échangent en permanence des informations, des résultats et des méthodes d'analyse – car ce n'est pas si simple que cela – afin d'affiner progressivement le contrôle des produits présentés au dédouanement.
Vous avez indiqué que 16 % des productions alimentaires arrivant aux frontières européennes étaient contrôlées. Pouvez-vous estimer ce taux s'agissant de celles qui arrivent sur le territoire national via un autre pays de l'Union européenne ?
Je n'ai pas cette information et ne suis pas certain d'être en mesure de la produire. Les seuls contrôles enregistrés sont les contrôles positifs, donnant lieu à une constatation douanière et à une procédure. Un contrôle conforme, lui – une camionnette sélectionnée sur la route – n'est pas répertorié dans nos systèmes d'information.
La réunion est suspendue de dix-huit heures vingt-cinq à dix-huit heures quarante-cinq.
S'agissant toujours des produits arrivant d'un autre pays de l'Union européenne, à défaut du taux de contrôle, disposez-vous d'un chiffre concernant les analyses ? J'imagine que, dans ce cas aussi, il y a des analyses à côté des contrôles documentaires.
J'imagine qu'il peut y avoir des analyses. Comme je vous le disais, ces contrôles ont d'abord pour objectif de chercher des produits prohibés, mais il n'est pas à exclure qu'à l'issue des vérifications documentaires, des échantillons soient prélevés.
Nous vous transmettrons quelques statistiques qui vous apporteront une réponse partielle concernant la proportion de productions importées en France en provenance d'un pays de l'Union européenne selon qu'elles en sont initialement originaires ou qu'elles ont seulement transité par ce pays.
En 2023, la part des importations dont le pays de provenance était un pays de l'Union européenne et le pays d'origine un pays tiers s'élevait à 17 % pour les produits agricoles et à 5 % pour les produits des industries agroalimentaires.
Les prélèvements d'échantillons et les analyses en laboratoire faisant suite à des contrôles à la circulation me semblent difficilement traçables.
Nous pouvons obtenir les chiffres globaux par type de produit mais nous ne pourrons pas distinguer les analyses issues des contrôles à la circulation.
Le service des laboratoires peut produire des statistiques sur les types d'échantillons analysés et leur répartition par administration concernée, mais je ne suis pas certain qu'il puisse déterminer s'ils proviennent d'un contrôle à l'entrée ou à la circulation.
Vous aurez compris ma question : il ne sert à rien que la France se contraigne à contrôler la présence d'un plus grand nombre de molécules que le standard européen, ce qui est une très bonne chose, si les importateurs choisissent de faire transiter leurs produits par des ports situés dans les pays les moins-disants ! Sommes-nous capables, très concrètement, de contrôler les marchandises qui passent par d'autres pays européens avant d'arriver en France ?
Le rôle principal de la douane consiste à contrôler, à l'entrée sur le territoire, les produits en provenance de pays tiers. Le principe du marché unique va avec un principe de confiance entre les administrations des douanes, pilotées par la Commission européenne. Il peut effectivement y avoir quelques disparités nationales, notamment concernant les limites de résidus autorisés. Comme je vous l'ai dit, les contrôles à la circulation sont principalement orientés vers la recherche des prohibitions et c'est par incidence que nous trouvons des marchandises non prohibées mais présentant des non-conformités.
Il convient néanmoins de rappeler que d'autres administrations interviennent en aval, au moment de la mise à la consommation des produits. Pour préciser ce que je vous ai dit tout à l'heure, à ce stade de la mise à la consommation interviennent à la fois la DGAL, pour la partie sanitaire, en aval, et la DGCCRF, pour les aspects relatifs à la loyauté concurrentielle.
Je comprends tout cela, mais sincèrement, je ne vois pas l'intérêt qu'il y a à contrôler 568 substances au lieu de 176 obligatoires si ces contrôles ne concernent qu'une partie des produits qui se trouvent sur le territoire national. Je conclus de vos propos qu'il n'est pas difficile de contourner les contrôles en déchargeant simplement sa marchandise dans un autre pays pour l'amener en France par la route. La passoire a des trous gigantesques.
Le dispositif ne repose pas que sur les contrôles à la circulation, mais aussi sur les contrôles au moment de la mise à la consommation.
Certes, mais le rôle de la douane est d'éviter que ces marchandises arrivent sur le sol français. On peut s'en remettre aux contrôles en aval, mais j'imagine que la DGCCRF nous dira qu'elle fait tout ce qu'elle peut mais que ses moyens sont limités et qu'elle cible ses contrôles…
Selon l'article 44 de la loi Egalim de 2018, « Il est interdit de proposer à la vente ou de distribuer à titre gratuit en vue de la consommation humaine ou animale des denrées alimentaires ou produits agricoles pour lesquels il a été fait usage de produits phytopharmaceutiques ou vétérinaires ou d'aliments pour animaux non autorisés par la réglementation européenne ou ne respectant pas les exigences d'identification et de traçabilité imposées par cette même réglementation. » Il semblerait que cet article ne soit pas mis en application, ce dont plusieurs membres de l'Assemblée se sont émus. A-t-on la garantie aujourd'hui de ne pas retrouver dans une production importée un produit phytosanitaire interdit d'usage sur le sol français ? Certaines limites maximales résiduelles sont-elles fixées à un niveau tel qu'elles laissent passer des molécules interdites d'usage en France ?
Ce que nous contrôlons, c'est le respect des normes applicables aux produits d'importation. Si l'interdiction d'un produit phytosanitaire ne s'est pas accompagnée de la définition d'une limite maximale de résidus, il peut arriver que l'on retrouve cette substance dans des produits à l'importation. La logique voudrait que l'imposition d'une norme nationale s'accompagne de sa traduction sur les produits importés.
Il faudrait vous répondre in concreto sur l'existence ou non de ce type de situation. Ce qui est certain, c'est que l'administration des douanes contrôle l'application des limites maximales de résidus ayant été définies. Les éventuelles incohérences entre les limites définies et les interdictions ne sont pas de notre compétence.
On sait que des œufs importés d'Ukraine sont présents sur notre territoire, étiquetés « non conforme aux normes CE » – les agriculteurs français les ont montrés en une des médias. Comment est-il possible qu'ils puissent passer, comment des produits portant une telle étiquette peuvent-ils être mis sur le marché ? Selon vous, quelles peuvent être les conséquences concrètes pour les consommateurs ? Comment la douane gère-t-elle des produits marqués non conformes : les contrôle-t-elle quand même ? Y a-t-il une conformité de la non-conformité ?
Je n'ai pas en tête le cas particulier que vous citez et ne vois donc pas bien à quoi peut ressembler un certificat de non-conformité. Deux cas de figure peuvent se présenter. Si le point d'entrée du produit dans l'Union européenne est en France, il fait l'objet d'une vérification systématique de conformité documentaire au moment du dédouanement. S'il est entré par un autre pays de l'Union européenne, celui-ci est censé appliquer le même type de diligence.
Statistiquement, les taux de contrôle n'étant pas de 100 %, il peut arriver que certains produits non conformes entrent dans l'Union et circulent ensuite librement. Mais les contrôles documentaires, eux, sont exhaustifs et une marchandise ne peut pas avoir été présentée à une douane européenne avec un document affichant sa non-conformité. Normalement, cela ne doit pas se produire.
Je rappelle qu'il y a des contrôles au point d'entrée, des contrôles à la circulation et des contrôles à la mise à la consommation et sur le marché. Ces trois niveaux permettent théoriquement d'éviter que des produits non conformes entrent sur le marché et soient proposés aux consommateurs.
Chaque État membre est tenu de signaler, au travers de la messagerie RASFF, toute non-conformité relevée par l'un de ses services ayant donné lieu à un refus d'importation. Ce signalement des non-conformités sert aussi à actualiser l'analyse de risque tous les six mois.
Si une autorité a considéré que les œufs en question n'étaient pas conformes aux normes applicables à l'entrée dans l'Union, elle a dû le notifier dans le système d'alerte rapide afin que le chargement ne puisse pas pénétrer par un autre point d'entrée.
Il peut également s'agir de contrebande, autrement dit d'un produit introduit sur le territoire européen sans déclaration et sans intention de se conformer à aucune règle.
La douane lutte évidemment contre la contrebande, qui concerne aussi bien des produits prohibés que des produits autorisés mais soumis à réglementation. Il s'agit le plus souvent de stupéfiants, d'armes, de tabac, de contrefaçons ou de médicaments, plus rarement de produits alimentaires. Dans ces cas-là, il s'agit plus de produits de forte valeur ou issus d'espèces protégées que de produits de consommation courante tels que les œufs.
La circulation de ces œufs destinés à la consommation courante a été confirmée par les représentants de la filière française des œufs et a fait l'objet d'une vérification par les journalistes de France Info, qui n'est pas réputée pour sa tendance au complotisme. L'étiquette du produit, dont on trouve facilement la photo, est libellée en français : elle indique que ce sont des « œufs frais de classe A », précise les informations nutritionnelles et spécifie que le mode d'élevage est « non conforme aux normes CE ».
Selon un représentant du Comité national pour la promotion de l'œuf, 45 000 tonnes de ces œufs non conformes ont été importées dans le marché commun et commercialisés sur les étals de la grande distribution. Le dispositif d'alerte dont vous avez parlé ne s'applique pas. Certes, cela ne représente que 1 % de la consommation, mais enfin il s'agit d'un produit de consommation courante et qui peut facilement transmettre des éléments dangereux.
Vous semblez découvrir le sujet. Cela m'étonne, car il était omniprésent durant la mobilisation agricole.
Ce que vous décrivez est de la fraude, et je ne sais pas comment les volumes concernés ont été évalués. Cela existe, tout comme la vente de cigarettes de contrebande.
Les administrations de l'État luttent contre la fraude, chacune dans son ressort. La douane s'occupe de l'entrée des produits sur le territoire européen et français et de leur circulation. Leur mise à la consommation relève de la DGCCRF et de la DGAL. Le cas que vous visez est clairement dans le champ de la mise à la consommation et me paraît être du ressort à la fois de la première au titre de la loyauté concurrentielle et de la seconde au titre des risques sanitaires.
Ce type de situation justifie parfaitement des signalements aux administrations, qui pourront mener des opérations de contrôle, parfois conjointes, dans le cadre d'un CODAF notamment, afin de prendre des sanctions.
Les représentants de la filière volailles et œufs ont évoqué lors de leur audition l'importation de poulets brésiliens traités de manière systématique avec de la flavomycine, un antibiotique interdit dans l'Union européenne depuis 2006. Un reportage diffusé dans « Capital », sur M6, montre que les éleveurs brésiliens, en arrêtant le traitement antibiotique trois à quatre jours avant l'abattage, parviennent à « blanchir » la viande, c'est-à-dire à empêcher la détection de la molécule lors de son exportation sur le marché européen. Mais le président de la filière volailles françaises nous a indiqué sous serment que la flavomycine ne faisait de toute façon pas partie des 88 agents contrôlés par les douanes : interdite en 2006, elle n'intégrera la liste des produits contrôlés qu'en 2026. Un tel décalage de vingt ans me semble inconcevable.
Vous faites référence à une denrée animale. Comme vous l'aurez compris, les contrôles sanitaires, vétérinaires, qui précèdent le dédouanement relèvent de la DGAL et je ne peux rien vous en dire. La douane, quant à elle, vérifie systématiquement lors du dédouanement que le certificat nécessaire a bien été émis.
Enfin, les administrations de contrôle que nous sommes, douane, DGCCRF et DGAL, appliquent la réglementation en vigueur. Elles ne définissent pas elles-mêmes quels produits sont interdits.
Les produits sont-ils réellement contrôlables ? Vous l'indiquiez tout à l'heure, la douane est chargée d'appliquer 350 réglementations non douanières. Selon la nature du produit, des instances différentes sont compétentes. Cette complexité est, pour le consommateur, difficile à appréhender. Cela me semble être une faille, d'autant qu'une partie des produits sont contrôlés aux frontières d'autres pays européens, qui sont parfois des démocraties semblables à la France et parfois non, notamment à l'est de l'Europe. Depuis dix ans que je fais de la politique, j'ai rencontré des douaniers à différents niveaux et je m'interroge : ce système tient-il la route ?
Le consommateur fait confiance à juste titre aux autorités, mais, les accords de libre-échange et le nombre de denrées importées allant en se développant, le marché commun s'élargissant à des pays où les méthodes de travail diffèrent des nôtres, les effectifs et le réseau des postes des douanes étant en forte réduction, avez-vous, en tant que douanier, l'impression de pouvoir faire votre métier comme l'attendent nos concitoyens ?
Il est certain que le dispositif est complexe. Les réglementations sont très techniques et de natures très différentes et les autorités compétentes sont nombreuses. Ainsi, en France, selon qu'il s'agit de normes d'ordre sanitaire, environnemental ou relatives aux produits de la mer, leur application sera contrôlée par des administrations différentes. S'y ajoutent les différences entre pays européens.
Le système pourrait certainement être différent, mais il n'est pas aberrant pour autant : les réglementations ont un bien-fondé technique et chaque autorité a son domaine d'expertise.
Dans ce paysage, en France comme dans les autres pays de l'Union, la douane se charge de collecter tous les certificats de conformité émis par les autorités compétentes au titre des 350 réglementations en question. Elle assure ainsi le dédouanement, qui est le point de passage obligé pour l'entrée de toute marchandise sur le territoire européen.
Ainsi, la douane ne vérifie pas elle-même l'application des 350 réglementations non douanières, car cela demande une expertise dont seules disposent les autorités spécialisées. Elle s'assure simplement de la présence de tous les documents attestant la conformité aux standards. De ce point de vue, le système est bien fait et interconnecté, grâce notamment à une forme d'automatisation. Si la marchandise n'est pas conforme, elle est tout simplement rejetée.
Ce qui est demandé aux douaniers n'est pas d'être des experts dans l'application des normes vétérinaires et environnementales, mais de connaître l'existence de ces normes pour s'assurer de la présence des certificats correspondants. C'est pour cela que nous avons fait le choix d'une spécialisation des agents chargés des contrôles.
Il me semble donc que ce système fonctionne bien. Le défi pour la douane, partout dans le monde, est que les domaines de contrôle sont très variés et portent tant sur le flux de marchandises du domaine légal que sur celui de la contrebande – certaines marchandises pouvant appartenir aux deux. Cela nous impose de redéployer en permanence nos moyens, selon des priorités définies au niveau politique et non administratif.
Chaque marchandise présentée au dédouanement dispose d'un code tarifaire grâce auquel le douanier peut retrouver l'ensemble des réglementations – parfois une seule, parfois plusieurs – qui lui sont associées. Par exemple, les produits alimentaires sont regroupés aux chapitres 1 à 24 du grand catalogue tarifaire général, qui compte quatre-vingt-dix-neuf positions très détaillées.
Nous ne nous occupons pas du fond, car nous ne sommes pas compétents. En revanche, lors du dédouanement, nous vérifions qu'aucun des documents obligatoires ne manque, que leur authenticité et leur signature ne posent pas problème, qu'ils sont complets et émis par la bonne autorité. Si ce n'est pas le cas, le système de dédouanement bloque, car tout est informatisé.
Pour relever le défi de la massification des flux, nous avons créé un outil informatique, le GUN (guichet unique national du dédouanement), dans lequel les administrations compétentes téléchargent les certificats. Ceux-ci s'affichent donc directement lors de la demande de dédouanement. En l'absence de certificat, le bon à enlever, qui permet à la marchandise d'entrer dans le territoire de l'Union, n'est pas délivré et la marchandise reste bloquée. Une telle automatisation permet de massifier le contrôle documentaire qui est obligatoire pour les produits alimentaires.
La douane française considère-t-elle que tous ses partenaires du marché commun sont de même qualité ? Sans vouloir polémiquer ni attaquer des personnes, on peut s'interroger sur les pays auxquels l'Union s'est élargie, ou sur les Pays-Bas, où de nombreuses affaires ont eu lieu. De la même façon, certains de nos partenaires privilégiés, qui n'appartiennent pas au marché commun mais y sont associés à divers titres, suscitent-ils une vigilance particulière ? En somme, avez-vous une espèce de liste rouge, ou orange, informelle ?
S'agissant des denrées alimentaires qui vous intéressent, les choses sont très normées, avec des systèmes d'information à l'échelle communautaire et des taux de contrôle définis et vérifiés par la Commission. La politique en la matière est donc homogène à l'échelle de l'Union. Par ailleurs, le réseau d'analyses en laboratoire repose sur des acteurs fiables.
Si l'on élargit la focale, les administrations douanières européennes diffèrent beaucoup par le champ de leurs missions, leurs moyens et leurs pouvoirs juridiques. C'est un paradoxe, car l'union douanière est l'acte fondateur de la Communauté européenne.
Il y a deux ans, la France a donc lancé un travail de modernisation de l'union douanière, qui a débouché sur le projet de réforme le plus important des dernières décennies. Entre autres initiatives, il permettra de favoriser l'interconnexion des systèmes d'information douaniers des différents pays pour automatiser l'échange de données, mais aussi d'harmoniser les pouvoirs des différentes douanes nationales et de créer une forme d'autorité douanière européenne qui pourrait piloter les opérations, ou en tout cas coordonner les administrations douanières européennes.
La Commission européenne fixe-t-elle, si ce n'est un effectif affecté aux contrôles, au moins un nombre de contrôles à respecter ?
Les douanes consacrent 200 équivalents temps plein au contrôle. Quels étaient les effectifs de la DGCCRF en la matière ?
Enfin, pourrez-vous nous fournir le détail des 16 % de produits importés qui font l'objet de contrôles ? Y incluez-vous les contrôles documentaires ? Quid surtout des analyses des limites maximales de résidus ?
La Commission fixe des taux de contrôle physique par couple produit-pays. On est là dans le champ des contrôles sanitaires, avant dédouanement, sur les denrées alimentaires dont l'origine n'est pas animale. Le chiffre de 16 % est la moyenne de ces différents taux, que nous pourrons vous préciser. Le contrôle documentaire, lui, est exhaustif, systématique, et s'opère au moment du dédouanement.
Le service commun des laboratoires devrait pouvoir vous renseigner sur le nombre d'analyses d'échantillons demandées.
Enfin, je ne connais pas le nombre d'ETP qui étaient consacrés à la mission de contrôle par la DGCCRF.
Je reste étonné que les produits présentés à l'import qui font l'objet d'une alerte ne soient pas contrôlés à 100 %. Avez-vous proposé à votre ministère de tutelle des contrôles exhaustifs, et éventuellement chiffré les moyens humains nécessaires ?
Il s'agirait de dépasser le taux de contrôle exigé par la Commission européenne au nom d'une analyse des risques au niveau national, c'est bien cela ?
Oui. Dès lors que l'on sait que les importations de poivre noir du Brésil posent un problème, pourquoi la Commission ne fixe-t-elle qu'un taux de contrôle de 50 % ? Comment être certain que cela permet d'éviter tout ce qui doit l'être ? Serait-il possible d'aller plus loin au niveau national ?
La Commission analyse la force et la gravité du risque en s'appuyant sur les données qu'elle collecte auprès des douanes des Vingt-Sept. Elle définit les taux de contrôle appropriés en fonction de la gravité du risque et de la probabilité d'occurrence. Si le taux de contrôle du poivre noir du Brésil est de 50 %, c'est qu'il n'a pas été jugé nécessaire de fixer un taux supérieur.
Techniquement, rien n'empêcherait une administration douanière nationale d'outrepasser les taux fixés par la Commission. C'est une question de priorités, les capacités de contrôle étant limitées.
Si nous choisissions, au niveau national, de contrôler 100 % des denrées à risque, cela poserait en outre un problème de compétitivité. Il est certain que les opérateurs qui peuvent réviser leurs chaînes logistiques très rapidement dédouaneraient leurs produits dans un autre pays de l'Union.
Des taux de contrôle de 100 %, ou en tout cas supérieurs à 50 %, ont-ils déjà été appliqués à certains produits à risque ?
En matière sanitaire, je ne crois pas. Des taux de 100 % sont appliqués pour le contrôle des normes de commercialisation de produits tels que la banane, mais c'est autre chose. Nous vous communiquerons la liste des taux fixés par la Commission.
La séance s'achève à dix-neuf heures trente.
Membres présents ou excusés
Présents. – M. Grégoire de Fournas, M. Jordan Guitton, M. Serge Muller, M. Charles Sitzenstuhl, M. Jean-Philippe Tanguy
Excusé. – Mme Mélanie Thomin