La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a examiné la proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile (n° 2129 ) (Mme Anne-Cécile Violland, rapporteure).
La proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile sera discutée en séance publique le 14 mars, dans le cadre de la journée de niche du groupe Horizons.
L'urgence est là. Les activités humaines bouleversent l'environnement à un rythme et avec une ampleur sans précédent depuis des millénaires, voire des centaines de milliers d'années, entraînant des impacts toujours plus ravageurs, généralisés et désormais souvent pour partie irréversibles.
Alors que les vies de milliards de personnes sont déjà affectées par le changement climatique, l'augmentation annoncée des températures de 4 degrés Celsius accroîtra les menaces sur la production alimentaire, les vagues de chaleur intenses, les tensions sur l'approvisionnement en eau. Quand des régions entières ne pourront plus compter sur la fonte estivale des neiges de glaciers disparus, d'autres connaîtront, selon les climatologues, des variations de précipitations de 40 %, en positif ou en négatif, avec pour incidences des inondations ou des sécheresses. D'ici à la fin du siècle, près de la moitié de l'humanité pourrait être confrontée à un stress climatique dramatique et au lot de tensions géopolitiques qui en résulterait.
Ce scénario du pire a beau devenir de plus en plus probable, notre modèle économique, en rupture avec le constat scientifique, nous y rend collectivement aveugles, trop souvent obéissants à la hiérarchie des prix au détriment de l'environnement : l'avion moins cher que le train pour rejoindre une capitale européenne ; la malbouffe plus accessible que l'alimentation de qualité, locale et durable ; les produits importés de l'autre bout du monde, sans normes et produits au charbon, plus compétitifs que nos industries décarbonées.
Cela est particulièrement frappant dans le secteur de l'habillement, qui nous submerge d'injonctions permanentes et quotidiennes à la surconsommation : marketing publicitaire agressif, nouvelles collections hebdomadaires voire quotidiennes, ventes flash et surtout prix cassés. En l'espace de deux décennies, le prix moyen des vêtements a diminué de 30 % tandis que, parallèlement, les quantités achetées ont doublé ; 3,3 milliards de vêtements sont mis sur le marché chaque année, soit 1 milliard de plus qu'il y a dix ans, ce qui représente plus de quarante-huit nouveaux produits par habitant chaque année.
Décorrélé de toute dynamique démographique ou de tout réel besoin, cet emballement conduit simplement les vêtements à être moins portés, plus rapidement relégués au fond de nos placards, pour être jetés quelques années plus tard. Un tiers seulement des vêtements arriveraient en fin de vie par usure ou détérioration. Cette faible durabilité extrinsèque des vêtements est qualifiée d'« obsolescence émotionnelle ».
Cette surconsommation est intimement liée à la montée en puissance de nombreuses enseignes dites de fast fashion ou d'ultra fast fashion – en français, de mode express, mode éphémère ou encore mode jetable. Ces marques inondent les marchés de quantité de nouveaux modèles à des prix défiant toute concurrence. Elles renouvellent leurs collections de manière quasi permanente, pour une durée de commercialisation très courte et avec des promotions continues, afin de créer des effets de mode et provoquer un réflexe d'achat régulier chez les consommateurs. Écrasant toute concurrence, en particulier celle des acteurs du textile traditionnel français, le modèle de la mode jetable et de ses prix chocs tend à s'imposer.
En réalité, ces prix bas ne sont possibles qu'au mépris d'exigences sociales et environnementales élémentaires. In fine, c'est le citoyen qui contribue financièrement pour remédier aux dégâts causés par ce mode de production, à travers les services de collecte, de gestion des déchets et de dépollution, sans parler des ressources publiques mobilisées pour faire face à la multiplication des aléas climatiques et des événements extrêmes – inondations, tempêtes, sécheresses. En vendant les produits à ce prix, les entreprises de la mode éphémère font des profits et écrasent la concurrence, mais laissent à la collectivité une facture considérable.
C'est pour corriger cette « prime au vice » que je vous présente cette proposition de loi, qui s'appuie sur trois piliers.
Le premier est l'information du consommateur. Il est peu connu que l'industrie du textile représente environ 10 % des émissions de gaz à effet de serre – bien plus que les secteurs aérien et maritime réunis ; ce niveau pourrait même atteindre 26 % en 2050 si les tendances actuelles de consommation se poursuivent. Le polyester, qui est la matière première la plus produite, nécessite pour sa fabrication 70 millions de barils de pétrole par an, tandis que le coton, première alternative végétale aux fibres synthétiques, est la première culture consommatrice de pesticides au monde, mobilisant plus de 10 % des volumes épandus. Au stade de la fabrication, la teinture des vêtements requiert la mobilisation de substances toxiques qui finissent dans les milieux aquatiques : 20 % de la pollution des eaux dans le monde serait ainsi imputable à la teinture et au traitement des textiles. En Chine, 70 % des rivières et lacs seraient touchés. Au cours de leur durée de vie, à chaque lavage, les vêtements comportant des matières synthétiques relâchent dans l'environnement des microfibres plastiques équivalant à plus de 24 milliards de bouteilles plastiques par an. Une étude a ainsi constaté que plus de 90 % des microplastiques trouvés sur les rivages de la Suède étaient constitués de fibres textiles synthétiques.
Compte tenu de la responsabilité de la mode éphémère dans l'augmentation des volumes mis en marché et dans ses effets, l'article 1er de la présente proposition de loi définit la pratique commerciale de la mode éphémère et prévoit l'insertion obligatoire sur les sites internet d'un message d'information et de sensibilisation du consommateur sur l'impact environnemental de cette industrie, accompagné d'une communication incitant au réemploi, au recyclage et à la réparation des vêtements et accessoires.
L'article 2 vise à responsabiliser les entreprises du secteur, pour faire évoluer à la fois les pratiques des producteurs et les comportements d'achat des consommateurs. Concrètement, les entreprises de la filière textile seront soumises à un système de primes et de pénalités renforcées sur les articles mis en vente. Le paiement de pénalités sera probablement répercuté sur le prix acquitté par le consommateur. Le signal-prix ainsi envoyé reflétera davantage la réalité de l'impact environnemental du produit, donnant aux Français une opportunité de s'interroger sur le modèle que leur consommation peut soutenir et, éventuellement, de se tourner vers des habits de meilleure qualité et plus durables. Alors que la France vient de traverser une crise du monde agricole, le sujet fait écho aux revendications de nos agriculteurs du paiement au juste prix de nos produits de consommation.
J'entends parfois dire qu'il s'agit d'une taxe supplémentaire, mais cela n'a rien à voir. L'État ne percevra aucun centime de ces contributions ; elles seront directement gérées par la filière de l'habillement et redistribuées immédiatement, dans leur intégralité, pour faire baisser significativement le prix des vêtements durables, encourager la seconde main ou encore financer la prise en charge de la réparation des vêtements et des chaussures pour tous.
Outre son intérêt écologique, cette mesure permettra d'assurer une concurrence plus équitable pour le secteur textile, français comme européen, et de relocaliser de nombreuses industries et des emplois sur notre continent. L'enjeu est crucial, après des décennies de délocalisations de la production et une division par trois du nombre d'emplois dans l'industrie textile depuis 1990, sans parler de la multiplication plus récente des entreprises placées en redressement judiciaire. C'est d'ailleurs un autre fait méconnu du grand public que l'industrie du textile et de l'habillement pèse de plus en plus fortement sur le déficit commercial français – avec plus de 12 milliards d'euros, soit plus de 20 % du déficit global hors énergie, elle est la troisième industrie la plus déficitaire.
L'article 3 s'attaque à la publicité, particulièrement intrusive, agressive et ciblée, des entreprises de la mode éphémère. Le texte porte à cet égard une ambition forte : interdire, pour tout ce qui en relève, toute forme de publicité, directe ou indirecte, traditionnelle ou sur les réseaux sociaux, des marques comme des influenceurs. Il s'agit non pas d'une mesure radicale, mais bien plutôt de bon sens si nous voulons tenir avec sérieux nos objectifs climatiques et poursuivre le travail de mise en cohérence avec ceux-ci du secteur de la publicité, que le législateur a entamé avec la loi « climat et résilience ».
Ce sont là les principales mesures de ce texte, auxquelles je proposerai d'apporter quelques ajustements, nourris par les très nombreuses auditions que j'ai eu la chance de conduire sur ce texte en tant que rapporteure.
Comme vous tous, je sais l'impact social de la production textile à bas prix, souvent lointaine et délocalisée, au regard notamment de la violation des droits humains, du travail forcé ou du travail des enfants. Malheureusement, présentant ce texte dans le cadre d'une niche parlementaire, nous ne pouvons pas traiter l'ensemble des problématiques du secteur – sans compter les contraintes juridiques qui s'imposent à nous –, et n'en avons retenu que l'aspect environnemental. Je mesure la frustration que cela peut susciter ; elle m'affecte au premier chef.
Je conclus en remerciant les nombreux collègues qui se sont investis sur ce sujet, avec qui j'ai eu l'occasion d'échanger : Jean-Marc Zulesi, président de notre commission, Jimmy Pahun du groupe Démocrate, Cyrielle Chatelain, présidente du groupe Écologiste-NUPES, Stéphane Delautrette et Dominique Potier du groupe Socialistes et apparentés, Alma Dufour du groupe La France insoumise-NUPES, Antoine Vermorel-Marques du groupe Les Républicains, et bien d'autres encore.
Depuis le XIXe siècle, nos vêtements sont de plus en plus considérés comme jetables. L'industrie s'est fortement mondialisée, modifiant la répartition géographique de la production dans les secteurs du textile, de l'habillement et de la chaussure. Cette tendance s'est encore accentuée au cours des dernières années, avec l'émergence des phénomènes de fast fashion et d'ultra fast fashion.
Cette mode express est un segment de l'industrie vestimentaire qui se caractérise par le renouvellement très rapide des vêtements proposés à la vente. Le nombre des collections est passé de deux à vingt-quatre par an dans certains magasins, et parfois à de nouveaux modèles chaque jour sur des plateformes d'e-commerce. Plus de 100 milliards de vêtements sont vendus chaque année dans le monde et également exportés dans les pays en développement, au détriment de l'industrie et des savoir-faire locaux, parfois à l'encontre des législations européennes en vigueur.
Ces chiffres sont d'autant plus aberrants que l'industrie textile compte parmi les plus polluantes du monde : son empreinte carbone est estimée à 1,2 milliard de tonnes de CO2, soit environ 10 % des gaz à effet de serre mondial. Si nous n'agissons pas, ces chiffres ne cesseront de croître, contrariant nos ambitions écologiques. Bien sûr, des mesures ont déjà été prises dans le cadre de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec) et avec l'adoption, la même année, de la stratégie de l'Union européenne pour les textiles durables et circulaires.
Le groupe Renaissance soutient la présente proposition de loi, qui entend réguler la fast fashion. Il s'agit d'un pas vers des mœurs plus durables, comme la slow fashion. « La mode passe, le style reste », disait Yves Saint Laurent. Les impacts s'inscrivent toutefois dans le temps et il nous revient de réguler ce secteur.
Nous soutiendrons toute initiative qui pourrait inciter – et non contraindre – nos concitoyens à une meilleure consommation. Le vice de la mode ultra éphémère est celui du consumérisme exacerbé, qui rend fou au point d'oublier ce qu'est un objet, son rôle, sa durée de vie et les conditions humaines dans lesquelles il doit être produit, et d'occulter la distance ahurissante qu'il parcourt par rapport à sa valeur et l'empreinte écologique désastreuse qu'il laisse.
Les entreprises d'ultra fast fashion répondent au même schéma. Situées à l'autre bout du monde – surtout en Asie –, elles emploient une main-d'œuvre dans des conditions s'apparentant trop souvent à un esclavage moderne. Elles rejettent une pollution colossale, autour d'elles et dans les eaux, et proposent une mode très bas de gamme, composée essentiellement de polyester, donc de pétrole.
La position de notre groupe est connue de tous et demeure la même : nous soutenons toute initiative susceptible d'encourager une industrie textile plus locale, plus vertueuse, et par conséquent plus écologique, à l'opposé de celle de la mode éphémère. Nous apprécions tout particulièrement la question de société soulevée par ce texte : la valeur donnée à l'objet et la possibilité de son réemploi. Inciter à réparer plutôt que d'acheter du neuf, tel est le principe qui doit s'appliquer à l'ensemble de notre consommation. Cette proposition de loi est l'occasion de repenser notre façon de consommer et, à notre échelle, de reconsidérer notre responsabilité d'Occidentaux important des produits bon marché pour les réexporter en Afrique sous forme de déchets, pour ne pas faire face à l'urgente nécessité de réindustrialiser notre pays.
Une proposition de loi encadrant la fast fashion comme elle ne l'a jamais été en France, de la part de la droite, nous ne l'avions pas vu venir ! Pour une fois, le groupe Horizons porte bien son nom.
L'industrie textile est ce que la mondialisation a fait de pire. Avec 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre qui en font la troisième industrie la plus polluante au monde ; plus de 2 milliards de vêtements importés chaque année en France, soit 50 par habitant ; des centaines de millions d'invendus venant s'échouer sur les rivages de pays africains, comme le Ghana ; des salaires de misère à 2 dollars par jour au Bangladesh ou en Éthiopie ; du travail forcé dans les camps en Chine et en Ouzbékistan, elle est le symbole parfait des liens entre la crise écologique et l'exploitation des êtres humains. Il n'y a pas de surconsommation sans surproduction, pas de surproduction sans exploitation des travailleurs, jusqu'à l'esclavage.
Au stade où nous en sommes de notre histoire économique, chaque année, en France, nous consommons toujours plus de vêtements et nous perdons toujours plus d'emplois liés à la filière textile, à la fois dans l'industrie, où 375 000 emplois ont été supprimés en cinquante ans dans la fabrication de vêtements, et dans le commerce, avec un solde net des emplois perdus dans la vente de vêtements au cours des dix dernières années de 65 000.
La présente proposition de loi est donc plus que bienvenue. Nous invitons le Gouvernement à accepter les amendements visant à encadrer l'ensemble de la fast fashion, avec des mesures plus drastiques pour la mode ultra éphémère et des pénalités écologiques progressives sur la fast fashion en général, car les problèmes existaient avant l'arrivée de certaines marques ciblées par le texte.
Je viens du territoire de Roanne, dans le bassin lyonnais. Dans les années 1970-1980, nous étions les rois du textile. Puis la vague de délocalisations en Chine a déferlé : pas une seule famille de ma circonscription n'a été épargnée par un licenciement lié à une délocalisation en Asie. À cette époque, seule la production du textile était délocalisée ; la commercialisation ne l'était pas.
Aujourd'hui, des entrepreneurs qui investissent dans le made in France et made in Europe font revivre l'industrie du territoire. Ils sont cependant concurrencés par deux grands changements dans le secteur du textile. Le premier, vertueux, est celui de la seconde main ; le deuxième, beaucoup plus polluant et moins vertueux, est celui de l'ultra fast fashion, qui a conduit à la destruction de 10 000 emplois de proximité en moins d'un an, car c'est désormais la commercialisation qui est délocalisée.
Ce texte dépasse les sensibilités politiques, mais rendons à César ce qui lui appartient et saluons l'engagement de la gauche, notamment européenne : avant les autres, elle a su alerter sur cette question. Puisque nous sommes, dans cette commission, davantage attachés à l'étiquette du vêtement qu'à l'étiquette partisane, j'espère que nous saurons faire aboutir cette proposition de loi. L'ultra fast fashion concurrence de plus en plus notre économie : les industriels français n'y survivront pas si nous n'y mettons pas un terme très rapidement.
Comment le faire ? C'est la question qui pose à travers ce texte. Car selon que nous souhaitons réguler le marché ou l'interdire, nous aurons à choisir entre le bonus-malus – principe que défend le groupe Les Républicains – et l'interdiction de la publicité. Pour paraphraser une influenceuse très connue sur TikTok, le but est de rendre ce texte « trop canon, trop classe » pour le made in France et made in Europe, pas contre la Chine et l'Asie.
Nous ne devons avoir qu'une seule boussole : l'accord de Paris sur le climat. S'il y a une phrase à retenir de l'exposé des motifs, c'est celle que nous ne pourrons pas « tenir nos engagements en matière de lutte contre le changement climatique, en l'absence d'un retour à des volumes de production soutenables ». Le groupe Démocrate partage cette ambition et soutiendra cette proposition de loi.
La fast fashion, ou mode éphémère ou mode à renouvellement rapide, a des conséquences désastreuses sur l'environnement, la biodiversité et le climat, sans réellement bénéficier aux consommateurs, même modestes. Elle nous entraîne dans une spirale destructrice, dans laquelle les entreprises françaises ne peuvent plus suivre la cadence et perdent des parts de marché et les consommateurs achètent sans besoin et sans compter.
Sans doute est-il ringard d'avoir la nostalgie du temps pas si lointain où l'on proposait deux à quatre collections par an, et penser y revenir serait utopique. Mais l'accord de Paris nous oblige à réguler le marché par des décisions ambitieuses et contraignantes, afin de revenir à des volumes de production soutenables.
Nous vous remercions, madame la rapporteure, d'avoir mis ce sujet à l'ordre du jour de nos travaux. Par ailleurs, la loi Agec est en cours d'évaluation : allons au bout de ses dispositions et tenons nos promesses.
À mon tour, je vous remercie, madame la rapporteure, pour cette proposition de loi. Elle permet de mettre sur le devant de la scène l'aberration sociale et écologique que représentent les modèles de la fast fashion et de l'ultra fast fashion. Alors que, traditionnellement, la grande majorité des marques renouvelaient leurs collections de manière semestrielle et saisonnière, les marques de mode express proposent de nouvelles collections chaque semaine, à des prix défiant toute concurrence, poussant ainsi les consommateurs à acheter toujours plus de vêtements de faible, voire de très faible qualité.
Cette stratégie, mise en œuvre le plus souvent au mépris des normes environnementales et sociales qui prévalent en France et en Europe, n'est malheureusement pas sans conséquences : l'industrie textile mondiale est responsable de plus de 10 % des émissions de gaz à effet de serre – un chiffre qui pourrait s'élever à 26 % en 2050 – et utilise plus de 4 % de l'eau potable disponible dans le monde. De plus, elle est une source de pollution majeure de l'eau et de la biodiversité, notamment en raison des produits chimiques et des pesticides utilisés tout au long du processus de fabrication.
L'impact social du secteur est également désastreux. Si l'effondrement, en 2013, du Rana Plaza, au Bangladesh, a provoqué une vaste onde de choc dans notre pays, force est de constater que la production de textile continue à être largement localisée dans des pays ne respectant aucune norme européenne en termes de salaires, de conditions de travail ou d'utilisation de produits chimiques. Aucune industrie ne peut résister à une telle concurrence déloyale. Si l'on constate une division par trois du nombre d'emplois dans l'industrie textile depuis 1990, c'est en grande partie du fait de l'essor de la fast fashion.
Cette proposition de loi entend, à juste titre, s'attaquer à cette surproduction de vêtements, en utilisant notamment les leviers des écomodulations mises en place au sein de la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) du textile. Les membres du groupe Socialistes et apparentés défendront des amendements afin d'aller encore plus loin.
Je félicite et remercie Mme la rapporteure et l'ensemble des membres du groupe Horizons et apparentés pour ce texte majeur. Il s'inscrit dans la continuité des travaux que nous menons depuis plusieurs années au sein de cette commission, avec notamment la loi Agec.
L'industrie textile s'est considérablement transformée ces dernières années. Du fait de la fast fashion ou mode éphémère, le nombre de vêtements proposés annuellement à la vente a progressé de 1 milliard en dix ans, atteignant 3,3 milliards de produits, soit plus de 48 par habitant. Plusieurs enseignes de mode jetable se partagent une partie du secteur de l'habillement en raison du succès économique de ce modèle – le chiffre d'affaires de certaines marques, comme Shein, a progressé de 900 % en seulement trois ans.
Ces bouleversements ne sont pas sans conséquences, et d'abord sur l'environnement : outre la pollution des sols et des eaux, l'industrie du textile est responsable d'environ 10 % des émissions de gaz à effet de serre, soit plus que l'ensemble des vols et des transports maritimes internationaux. Sur le plan social, la production textile, souvent lointaine, se caractérise par des pratiques de volumes importants et de prix bas, qui rend leur concurrence difficile à soutenir pour les acteurs français.
Vous sachant, madame la rapporteure, particulièrement engagée sur le sujet, je ne doute pas qu'avec votre proposition de loi, nous irons plus loin dans la protection de notre filière textile française, grâce notamment au principe de bonus-malus inscrit à l'article 2, et dans celle de l'environnement, à travers la sensibilisation des consommateurs et l'interdiction de la publicité pour les entreprises de fast fashion. Bien entendu, nous soutiendrons ce texte et nous appelons l'ensemble des groupes parlementaires à faire de même.
La fast fashion est le symbole de ce que notre société produit de pire en matière de fléau. Surexploitation des ressources naturelles, pollution sans compter, exploitation des ouvriers et des ouvrières, manipulation des consciences pour encourager à surconsommer, le seul objectif est de toujours tirer vers le bas – les prix, les salaires, les normes et les droits. Les conséquences sont funestes ; chaque jour apporte son lot de faillites et de scandales en matière de pollution ou de conditions de travail pour les femmes et pour les enfants, notamment dans des pays d'Asie.
Comme l'ensemble des intervenants, je me réjouis de la volonté parlementaire de dire clairement stop à ce modèle. De fait, les enseignes ne s'arrêteront pas d'elles-mêmes et il est de notre rôle de législateur de donner un coup d'arrêt à ces pratiques. Le groupe Écologiste-NUPES est historiquement mobilisé contre ce fléau, et je remercie la rapporteure et le groupe Horizons et apparentés d'avoir inscrit cette proposition de loi à notre ordre du jour, et de travailler dans un esprit d'ouverture pour construire le texte le plus efficace possible.
Notre groupe n'aura qu'une priorité : l'adoption de solutions concrètes et efficaces. Nous voulons éviter de laisser des possibilités d'échappatoire aux entreprises, ou de faire porter le poids uniquement sur les consommateurs. Nous présenterons plusieurs propositions : des quotas pour réduire les importations ; la pénalisation de la surproduction ; la définition des différentes sortes de fast fashion ; la fixation de pénalités minimales.
J'espère que nous adopterons un texte ambitieux qui gênera sans doute les intérêts des quelques multinationales enfermées dans un modèle destructeur, mais ouvrira des perspectives positives. Il s'agit de ne plus voir des boutiques fermer, de mettre un terme à la concurrence déloyale et de faire en sorte que les consommateurs puissent acheter des vêtements dans lesquels ils se sentent bien et qui ne mettent pas leur santé en danger.
Il est bien rare que le neuvième orateur soit d'accord avec tous les orateurs qui l'ont précédé ! À mon tour, je tiens à remercier la rapporteure et le groupe Horizons et apparentés de nous proposer de légiférer sur ce sujet de première importance.
La mode jetable doit son essor à un modèle de production combinant volumes et prix bas. Outre qu'il a mis en grande difficulté le secteur de l'habillement, contraignant de nombreuses enseignes à mettre la clé sous la porte, ce modèle se traduit surtout par des atteintes insupportables aux droits humains dans les pays producteurs : travail forcé, travail des enfants, mise en danger de la vie des travailleurs et parfois des riverains des sites de production, conditions de travail et de rémunération inacceptables. Nous regrettons que le texte n'en fasse pas suffisamment mention pour se concentrer sur l'impact environnemental, aussi massif soit-il – j'y reviendrai avec un amendement. Dans ce modèle économique, en effet, l'exploitation des hommes et des ressources va de pair ; on ne peut dissocier les enjeux. C'est la raison pour laquelle nous considérons qu'outre la régulation du secteur, il nous faut envisager l'interdiction pure et simple de la mise sur le marché des produits concernés. Ces produits ne répondent pas aux normes sociales, environnementales et sanitaires minimales que nos concitoyens sont en droit d'exiger. Le minimum que nous puissions faire est d'instaurer un système de quotas d'importation tel que celui qui existait avant 2005. Les pouvoirs publics doivent prendre l'initiative, en coopération avec les ONG, de lancer des campagnes nationales d'information sur les dégâts sociaux et environnementaux occasionnés par la fast fashion et sur les alternatives plus durables à la disposition des consommateurs.
Alors que la directive européenne sur le devoir de vigilance, destinée à mieux protéger les millions de personnes qui souffrent des atteintes aux droits humains et environnementaux, menace d'être définitivement enterrée avec la complicité de la France, nous nous devons de réagir et de ne pas cautionner des pratiques inqualifiables. Votre texte fait un premier pas dans ce sens, sans doute utile mais encore un peu trop timide.
L'histoire industrielle de notre pays est largement liée à celle du textile. Cette industrie a longtemps contribué à la richesse et au dynamisme de nos territoires avant que les entreprises fassent le choix des pays à bas coûts. En vingt ans, le secteur économique a perdu quasiment les deux tiers de ses effectifs et plus de la moitié de sa production. C'est un drame pour les territoires concernés et une catastrophe sociale et environnementale pour les pays où la production a été relocalisée – nous avons tous en tête le drame du Rana Plaza ou les révélations sur le travail forcé des Ouïgours. De même, les dégâts écologiques engendrés par l'industrie de la mode devraient tous nous alarmer, d'autant plus que les tendances à l'achat sont en pleine croissance. Les responsables, nommons-les afin de lutter contre eux, sont les marques de la fast fashion.
Cette proposition de loi met en place des outils utiles pour lutter contre les achats compulsifs. En préambule, la rapporteure nous propose de définir la fast fashion : en relèveront les marques distribuant un nombre de produits neufs dépassant un seuil. Alors que tout l'enjeu réside dans la fixation de ce seuil, le choix de le renvoyer à un décret nous semble hasardeux. Trop haut, le seuil fixé par le Gouvernement ne concernerait qu'une minorité de marques ; trop bas, il risquerait de toucher des fleurons nationaux. Nous devrons être vigilants.
Il nous est également proposé d'interdire aux entreprises de faire la promotion de leurs produits et de leur imposer la publication sur leurs sites internet de messages de sensibilisation. Ces dispositions vont dans le bon sens. De même, nous sommes favorables à l'instauration d'un véritable malus sur les produits issus de la fast fashion. Il est urgent de renchérir leur prix, pour qu'enfin celui-ci en reflète les externalités négatives. Il nous faudra également être vigilants quant à la mise en œuvre de ce malus.
Nul ne peut ignorer qu'un vêtement vendu quelques euros est fait d'économies salariales et de conditions de travail déplorables. C'est pourquoi le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutiendra cette proposition de loi, moyennant quelques ajustements.
Je vous remercie de l'accueil que vous avez réservé à cette proposition de loi. Le devenir de notre planète et l'environnement dépassent les clivages politiques, la manière dont nous avons travaillé l'a bien montré. Je remercie les personnes auditionnées – fédérations, ONG, associations et personnes qualifiées – qui ont éclairé notre réflexion et m'ont amenée à déposer de nouveaux amendements afin de préciser la rédaction de cette proposition de loi.
Article 1er : Définition d'une nouvelle pratique commerciale dans le secteur des textiles, linges et chaussures
Amendements CD165 de M. Édouard Bénard, CD132 de M. Jean-Marc Zulesi et CD146 de M. Antoine Villedieu (discussion commune)
L'amendement CD165 reprend une proposition de la Fédération de la mode circulaire afin de préciser la définition des pratiques commerciales visées par le texte. Outre le critère du volume de modèles commercialisés, il s'agirait de prendre en compte le nombre de modèles mis à la disposition des consommateurs sur les plateformes, la fréquence et l'intensité des promotions ainsi que la réparabilité des produits.
L'amendement multiplie les critères dans le but non pas de restreindre le champ d'application de la loi, mais de mieux identifier les pratiques qu'il s'agit d'encadrer, voire de réprimer.
L'amendement CD132 a été travaillé avec les commerçants de Salon-de-Provence. Il vise à compléter la définition de la fast fashion en y incluant deux critères : le prix de vente moyen et le nombre d'emplois directs créés sur le territoire français.
La proposition de loi retient comme critère exclusif de définition de la mode express le nombre de nouveaux modèles mis à disposition ou distribués quotidiennement. Si cet indicateur est fondamental, il ne suffit pas à identifier ce type de mode, pour deux raisons. Premièrement, il ouvre trop de possibilités de contournement. La multiplication des sous-traitants permettrait de rester sous le seuil fixé par décret et de renouveler plus fréquemment les gammes pour inciter les clients à continuer à se connecter quotidiennement. Deuxièmement, le seuil est susceptible de s'appliquer à des plateformes de vente de produits neufs, qui, à l'instar des places de marché, ne sont pas des producteurs ; ces dernières mettent en valeur des produits de différentes marques qui ne sont pas des acteurs de la mode express. L'amendement CD146 vise donc à compléter le critère du nombre de modèles par ceux de la fréquence du renouvellement, d'une part, et de la régularité et de l'intensité des promotions, d'autre part. Cela rendrait la définition plus complète et plus juste.
Monsieur Bénard, certains des critères que vous proposez paraissent difficiles à mesurer – le respect des droits humains, par exemple. En outre, la quantité globale d'unités produites sur le marché n'est pas nécessairement révélatrice. Ce critère pénaliserait les entreprises qui disposent du réseau de magasins le plus étendu ou qui proposent des collections de vêtements larges, destinées à tous les âges et aux deux sexes. Avis défavorable.
Monsieur le président, le prix de vente moyen ne me paraît pas être le critère le plus pertinent. Beaucoup d'enseignes achètent en grande quantité des produits qu'elles vendent à un très faible prix, ce qui rend difficile le calcul du prix de vente moyen. Je préfère maintenir la rédaction de la proposition de loi, qui se fonde sur des seuils quantitatifs relatifs au nombre de nouveaux modèles et à la durée de commercialisation. Ces critères ont été évoqués systématiquement tout au long des auditions.
Monsieur Villedieu, la mode express ou ultra éphémère peut en effet se caractériser par des pratiques promotionnelles intensives. Néanmoins, votre rédaction ne me paraît pas adaptée. D'une part, la réactivité sera facilitée par l'inscription des seuils dans le décret. D'autre part, nous souhaitons absolument mettre en cause la commercialisation de nouveaux modèles. Avis défavorable.
L'amendement CD132 est retiré.
La commission rejette successivement les autres amendements.
Amendements CD50 de M. Antoine Vermorel-Marques et CD86 de Mme Alma Dufour (discussion commune)
L'amendement CD50 vise à inscrire à l'article 1er la notion de « metteur en marché », qui correspond à la terminologie officielle des filières REP. Cette rédaction serait cohérente avec les dispositions de l'article 2.
La question de savoir si les notions de mode éphémère, de références ou de mise en marché doivent être appréciées au niveau du site web ou de la marque fait débat. Shein, qui est la principale entreprise visée par le texte, est, depuis décembre 2023, une place de marché. Si on exclut les sites web et les places de marché, il sera très facile pour une entreprise comme celle-là de contourner la législation : il lui suffira de demander à ses ateliers en Chine de créer une entité juridique société écran, comme il en existe depuis une dizaine d'années pour AliExpress, Wish ou Amazon ; elle peut même en créer une pour elle-même. Ces structures juridiques séparées sont présentes sur le même site web ; cela ne change rien pour le consommateur, qui ne voit que la marque Shein – le nom du petit vendeur tiers est écrit en caractères minuscules. Le nombre de références est considérablement divisé et la place de marché passe sous les seuils légaux. Ces structures ont précisément été inventées dans le but de contourner les règles : il faut donc absolument les inclure dans la définition et, plus généralement, se pencher sur la question du e-commerce.
Avis défavorable aux deux amendements.
Monsieur Vermorel-Marques, la mise en marché est en effet le terme utilisé dans le cadre des filières à responsabilité élargie des producteurs, mais nous définissons ici une nouvelle pratique commerciale qui n'est pas liée stricto sensu aux principes de la REP en matière de paiement des écocontributions. Or la notion de mise sur le marché pourrait partiellement inclure les places de marché, puisque, assumant le paiement de l'écocontribution pour des vendeurs tiers, elles sont, à ce titre, des metteurs sur le marché, même si elles n'opèrent pas une activité de distribution et ne sont pas considérées comme des opérateurs économiques au sens du droit de l'Union européenne. Nous ne souhaitons pas inclure les places de marché dans la définition de la mode express, dans la mesure où elles jouent un rôle d'intermédiaire. Je préfère maintenir les termes de « mise à disposition » et de « distribution ».
Madame Dufour, nous ne souhaitons pas, comme je viens de le dire, inclure les places de marché dans la définition, pour deux raisons. D'abord, à moins de commercialiser leurs propres produits sous leur marque, les places de marché ne sont pas des producteurs et donc des donneurs d'ordre entrant dans la problématique de la surproduction de vêtements. Je ne nie pas qu'elles facilitent les achats en ligne, mais comment déterminer qui, de la place de marché qui permet l'achat de produits de vendeurs tiers ou du vendeur tiers lui-même, est l'auteur de la pratique commerciale de la mode express ?
Ensuite, on ne peut pas, juridiquement, inclure les places de marché dans la catégorie des personnes qui mettent à disposition ou distribuent des produits. Ces entités ne sont que des intermédiaires entre des clients et des vendeurs. Au sens du droit de l'Union européenne, elles ne constituent pas des opérateurs acteurs économiques. Il faudrait donc les distinguer des personnes effectuant des opérations de mise à disposition et de distribution.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD185 de la rapporteure
Cet amendement vise à compléter la définition de la pratique commerciale par l'ajout du mot « élevé » après le mot « nombre » à l'alinéa 2. Le décret devra prendre en compte cette précision pour la fixation des seuils.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CD105 de la rapporteure
Je vous propose de préciser que pour définir la pratique commerciale, il faut prendre en compte non les produits effectivement commercialisés, mais les nouveaux modèles proposés à la vente.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CD55 de M. Antoine Vermorel-Marques
Il s'agit de substituer au terme « modèles » celui de « références » pour se prémunir d'une interprétation extensive du juge.
J'y suis favorable, car la notion de référence est davantage utilisée dans le secteur de la mode et du textile que celle de modèle, qui n'a pas de véritable définition juridique. La référence renvoie plus précisément à la couleur ; un modèle se décline ainsi en plusieurs références. C'est une unité qui, pour l'entreprise, est plus facile à connaître et à comptabiliser.
La commission adopte l'amendement.
Amendements CD9 de M. Stéphane Delautrette et CD8 de M. Dominique Potier (discussion commune)
Nous proposons de considérer que la mise à disposition ou la distribution d'une quantité supérieure ou égale à 100 000 produits par catégorie et par an caractérise la surproduction et la surconsommation qui en découle.
Vous souhaitez définir une nouvelle pratique commerciale, dite de surproduction et de surconsommation incompatibles avec les limites planétaires, qui serait caractérisée à partir de certains seuils. Il ne me paraît ni nécessaire ni souhaitable de multiplier les caractérisations des pratiques commerciales, compte tenu des impératifs de lisibilité, de simplicité et d'efficacité. N'oublions pas que le texte prévoit des mesures contraignantes particulièrement ambitieuses en matière d'information du consommateur et d'interdiction de la publicité. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD52 de M. Antoine Vermorel-Marques
Le texte devrait cibler les entreprises et non les produits, puisque la REP s'applique aux producteurs. L'enjeu est que les entreprises changent de mode de production.
Cette précision n'apporte rien puisque les producteurs sont soumis à la REP en fonction des produits qu'ils mettent sur le marché. La REP ne vise pas l'entreprise en tant qu'entité juridique. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CD7 et CD6 de M. Stéphane Delautrette, CD5 de M. Dominique Potier, CD49, CD48, CD47 et CD46 de M. Antoine Vermorel-Marques (discussion commune)
Par ces amendements, nous souhaitons préciser dans la proposition de loi, au lieu de nous en remettre au décret, le seuil à partir duquel s'appliquera un malus sur les productions textiles. L'amendement CD7 a pour objet de fixer ce seuil à 30 000 nouvelles références commercialisées chaque année et les amendements CD6 et CD5 proposent de l'établir, respectivement, à 20 000 et 10 000 références annuelles.
Nous sommes tous animés par la ferme volonté de réguler le marché, mais on peut craindre que des pressions diplomatiques sur le pouvoir exécutif ou des menaces de rétorsion commerciale n'influent sur la rédaction du décret et, partant, sur l'application de la loi. C'est la raison pour laquelle nous défendons des amendements visant à définir dans la loi un seuil minimal caractérisant la fast fashion.
Notre objectif est d'être aussi réactifs et agiles que l'industrie de la mode. Il sera bien plus facile de modifier le décret que la loi. J'ai toute confiance dans la détermination du Gouvernement à s'attaquer à la question de la mode express et à fixer des seuils pertinents. M. Béchu a fait des annonces très volontaristes lundi. Je souhaite que nous en restions à la rédaction actuelle.
Dans la loi Agec, était prévue l'application d'un malus pouvant atteindre 20 % du prix du produit dans les filières REP – y compris, donc, dans la filière textile. Ce dispositif devait être précisé par décret ; le Gouvernement ne l'a jamais pris. L'écocontribution s'élève à quelques centimes pour un vêtement, ce qui n'incite en rien les producteurs à adopter les bons comportements. On a perdu quatre ans parce qu'on a laissé au Gouvernement la possibilité de fixer les choses par décret.
Je comprends que M. Vermorel-Marques s'inquiète des conséquences que pourrait avoir la proposition de loi sur nos relations commerciales avec la Chine. Certaines entreprises qui exportent vers ce pays n'ont certes pas intérêt à voir installer des barrières douanières – celles du luxe n'ont pas dû se réjouir de l'arrivée de ce texte. Mais il y a tout un secteur du pays à protéger et à réindustrialiser, qui a besoin de barrières protectionnistes. Voilà pourquoi nous nous devons d'être ambitieux dans la rédaction de l'article 1er – raison pour laquelle nous soutiendrons les amendements de nos collègues socialistes – ainsi que dans celle de l'article 2, concernant le malus progressif.
Nous visons le même objectif. Les législateurs que nous sommes doivent aider l'exécutif à faire preuve d'ambition dans la définition de la fast fashion. Il s'agit d'éviter qu'une fois la loi adoptée, les pressions diplomatiques n'affaiblissent la volonté exprimée par la souveraineté nationale que nous incarnons.
Je comprends la logique qui conduit à recourir au décret, mais il nous faut être très clairs sur les entreprises visées. Au-delà du cas extrême de Shein, il faut s'assurer que le texte s'applique à Primark, à Asos et à l'ensemble des acteurs de la fast fashion. J'aimerais être certain que ce sera le cas, et je voudrais savoir comment on y arrivera – peut-être en fixant des seuils dans la loi. Sans partager complètement les propos de Mme Dufour, je constate également que l'ambition très forte que nous avions exprimée dans la loi Agec n'a pas forcément trouvé de concrétisation. À côté du malus, il faut aussi promouvoir, de manière complémentaire, un bonus – il avantagerait la production française puisque nos entreprises sont les plus vertueuses sur le plan social et environnemental. Compte tenu du montant de nos cotisations sociales et des conditions de fabrication des produits français, le prix de ces derniers est nécessairement plus élevé que celui des articles importés de pays qui n'appliquent aucune règle ou si peu.
Je partage les points de vue qui ont été exprimés. Cela étant, les chiffres qui sont avancés vont un peu dans tous les sens, ce qui justifierait sans doute une étude plus approfondie. Par ailleurs, le dispositif proposé se heurte à des effets de seuil. Il faudrait trouver une définition plus solide pour englober tous ceux que l'on considère comme des acteurs de la fast fashion.
L'amendement CD49 est retiré.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD194 de la rapporteure
Cet amendement vise à ce que le décret mentionné à l'alinéa 2 soit un décret en Conseil d'État, compte tenu de l'importance du sujet et des conséquences du recours à cette pratique commerciale.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CD4 de M. Dominique Potier
Nous vous invitons à suivre les recommandations du Parlement européen, qui appelle les États membres à adopter des mesures destinées à mettre fin à la mode éphémère. Nous nous appuyons sur une résolution qu'il a adoptée concernant la stratégie de l'Union européenne pour des textiles durables et circulaires. Il s'agit, par cet amendement, de cibler la mise à disposition ou la distribution d'un nombre de modèles de produits neufs « fondée sur des volumes importants de vêtements de moindre qualité, à bas prix ».
Je comprends votre démarche, mais une telle formulation me paraît discutable juridiquement. Qu'est-ce qu'un « bas prix » ? Dans quelle mesure peut-on dire qu'un vêtement est « de moindre qualité », alors que certains articles de la mode éphémère composés de polyester peuvent être résistants ? Nous estimons plus prudent de nous en tenir au nombre de nouvelles références et à leur durée de commercialisation, qui sont deux caractéristiques facilement objectivables et déterminantes de la mode éphémère. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
La commission adopte l'amendement rédactionnel CD176 de la rapporteure.
En conséquence, l'amendement CD126 de M. Emmanuel Blairy tombe.
Amendement CD54 de M. Antoine Vermorel-Marques
Il pourrait être utile de fixer dans la loi un seuil que le Gouvernement ne pourrait pas relever, ce qui serait, en quelque sorte, une manière de l'aider.
L'objet de l'amendement CD54 est de prévoir l'inscription du seuil dans la loi.
Je souhaite que la définition des seuils et leurs montants soit fixée par décret et non dans la loi. Comme je l'ai dit, les inscrire dans la loi obligerait à légiférer de nouveau pour les modifier – une procédure bien trop lourde. Il est néanmoins indispensable que la loi précise les critères devant être retenus pour la fixation des seuils. Les deux critères indispensables nous paraissent être celui du nombre de nouveaux modèles ou de nouvelles références par unité de temps et la durée de commercialisation. Avis défavorable.
Il faut travailler avec le Gouvernement pour clarifier cette définition. Je suggère la création d'un groupe de travail transpartisan sur ce sujet. Il faut veiller à ce que des entreprises qui recourent aux pratiques de la mode éphémère ne puissent pas échapper à la loi et, a contrario, s'assurer que des entreprises françaises qui ne se livrent pas à ces pratiques ne soient pas assimilées à des acteurs de la mode express.
Une telle définition doit être inscrite dans la loi dès la semaine prochaine. Madame la rapporteure, je suggère que vous nous soumettiez une proposition, que vous pourriez élaborer en lien avec le Gouvernement. Le texte doit permettre de lutter efficacement contre la fast fashion et inciter à la production en France et en Europe. Si, malgré sa volonté, on laisse une marge de manœuvre trop importante au Gouvernement, il est à craindre que des menaces de rétorsion ou des pressions diplomatiques ne réduisent la loi à rien.
Nous devons en effet accompagner le Gouvernement dans la définition des seuils. Voilà plusieurs semaines que nous travaillons sur le sujet ; il nous en reste une pour finaliser les choses. Nous sommes à la disposition du Gouvernement pour constituer ce groupe de travail dès maintenant, l'objectif étant d'adopter à l'unanimité un amendement commun définissant des seuils.
Je comptais justement proposer au ministre la création d'un groupe transpartisan pour l'accompagner dans la rédaction des décrets. Je suis confiante dans la volonté manifeste du Gouvernement et du ministre de parvenir à une écriture juste et proportionnée.
Monsieur Millienne, la loi vise à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile. Les entreprises les plus polluantes sont ces mastodontes asiatiques, mais les autres sociétés ne sont pas pour autant exclues du champ de la loi. Les dispositions de l'article 2 permettront de jouer sur l'écomodulation des pénalités.
Mon avis demeure défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement rédactionnel CD56 de M. Antoine Vermorel-Marques
Défavorable. Le mot « notamment » est important parce qu'il permettra d'ajouter aux deux critères retenus pour la définition d'autres éléments qui pourraient paraître pertinents au ministère.
La commission rejette l'amendement.
Amendement de coordination CD59 de M. Antoine Vermorel-Marques
Favorable. Par cohérence avec l'alinéa 1er, il est en effet préférable d'employer le mot « références ».
La commission adopte l'amendement.
Amendement CD60 de M. Antoine Vermorel-Marques
Cet amendement a trait à une question que je ne suis pas parvenu à trancher et qui pourrait constituer la seule objection légitimement opposable à la régulation proposée par le texte. Réagissant à une vidéo que j'ai publiée sur les réseaux sociaux, des personnes qui éprouvent des difficultés à s'habiller m'ont indiqué qu'elles ne trouvaient d'articles à leur taille que dans la fast fashion. Je pensais, comme certains viennent de le dire en aparté, que ce n'était pas vrai. Mais les industriels du textile français que j'ai rencontrés m'ont fait part de leurs difficultés à produire une gamme de produits suffisamment large.
Nous devons trouver les moyens de réguler le secteur tout en préservant la dignité humaine et la possibilité pour chacun de s'habiller. C'est l'objet de mon amendement d'appel.
Si vous aviez assisté aux auditions, vous sauriez que la réponse est bien plus nuancée. L'offre existe – des jeunes créateurs sont ainsi capables de produire des grandes tailles et des marques de grande distribution en proposent –, même si le marché est encore limité. Avis défavorable.
Il est difficile de trouver des grandes tailles. Seules les marques à bas prix proposent une large gamme. Dans nombre de boutiques, il n'est pas possible de vous habiller si vous êtes au-delà de la taille 40.
Il faut encourager les metteurs sur le marché à s'intéresser aux grandes tailles et à habiller la population dans toute sa diversité morphologique. N'oublions pas que le désir de s'habiller en XS ou en 36 incite certaines jeunes filles à adopter des comportements alimentaires qui peuvent conduire à l'anorexie.
Le problème est sans doute lié au genre. Les hommes n'ont aucun mal à s'habiller en grande taille, je peux en témoigner. En revanche, c'est plus compliqué pour les femmes, je l'ai noté en accompagnant mon épouse et ses amies dans les magasins.
La fin du délai de dépôt des amendements coïncidait avec la journée mondiale contre l'obésité. Il importe de n'écarter personne et d'assurer la dignité vestimentaire aux personnes en surpoids.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CD57 et CD58 de M. Antoine Vermorel-Marques (discussion commune)
L'amendement CD57 vise à substituer, dans la définition de la fast fashion, les critères de l'intensité des promotions et du mode de distribution, à celui de la durée de commercialisation.
L'amendement CD58 met en avant les critères de l'empreinte carbone et de la durabilité des matières utilisées.
Parce que nous avons conservé l'adverbe « notamment », il sera possible de prendre en considération d'autres critères
S'agissant des promotions, il sera difficile de définir un seuil pertinent.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements CD188 et CD61 de M. Antoine Vermorel-Marques (discussion commune)
Les amendements CD188 et CD61 concernent respectivement une coordination et une correction orthographique.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement CD188.
En conséquence, l'amendement CD61 tombe.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CD62 de M. Antoine Vermorel-Marques.
Amendement CD187 de la rapporteure
L'amendement vise à préciser les seuils qui permettront de discriminer les pratiques commerciales en s'appuyant sur la faible durée de la commercialisation.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement de coordination CD193 de la rapporteure.
Amendement CD171 de M. Vincent Thiébaut
Il s'agit de préciser que les pratiques de déstockage de produits textiles invendus ne relèvent pas de la pratique commerciale de collections à renouvellement très rapide.
La définition du déstockage nécessite sans doute d'être revue, car certaines enseignes stockent des produits avant de les vendre en tant qu'invendus lors des périodes de soldes ou de promotions.
Je suis favorable à l'amendement.
L'objectif est de ne pas assimiler la mise à disposition ou la distribution de produits textiles aux activités des plateformes, au risque de les inclure dans la pratique commerciale de la mode express, quand bien même elle serait le fait de metteurs sur le marché au sens de la REP : il s'agit des plateformes, maintenant essentiellement en ligne, qui font des ventes d'invendus de marques, et donc font du déstockage de produits qui ont déjà été mis sur le marché. Ces ventes dites privées ou de déstockage se font souvent à prix réduit.
On ne peut pas nier l'utilité de telles pratiques au titre de la prévention des déchets puisque, dans un premier temps, ces acteurs évitent aux marques d'avoir trop d'invendus.
Attention aux fausses bonnes idées ! La définition inscrite dans la proposition de loi ouvre la porte à tous les contournements possibles et imaginables.
Il n'est pas question de s'en prendre à Vestiaire collective ou Vinted. Toutefois, si la définition n'est pas plus précise, une marque peut s'abriter derrière le déstockage sur de la surproduction. Vous aurez alors raté la cible. Quant à Internet, comment pourra-t-on vérifier ?
Il faut travailler sur la notion d'acteurs tiers qui font du déstockage par rapport à la marque initiale ainsi que sur la notion d'invendus. Nous sommes défavorables à l'amendement, car les avantages seront moins importants que les inconvénients.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CD1 de M. Stéphane Delautrette et CD118 de M. Jorys Bovet (discussion commune)
L'amendement CD1 vise à mettre l'accent sur la transparence à l'égard des consommateurs en renforçant les obligations d'affichage et d'information des producteurs, distributeurs et importateurs de produits textiles, conformément aux principes édictés dans la loi Agec.
Afin de rendre plus efficaces l'information et la sensibilisation du consommateur, il est proposé de substituer au message affiché à côté du prix de chaque article l'ouverture d'une fenêtre dès l'arrivée sur la plateforme de vente de mode express. Ce dispositif est à la fois plus simple à mettre en place sur le plan technique et plus visible pour le consommateur.
La plupart des achats sur ces sites étant effectués par le biais de smartphones, l'indication supplémentaire risque d'être noyée au milieu de nombreuses autres. La confirmation de lecture du message de sensibilisation serait obligatoire pour faire disparaître la fenêtre et ainsi pouvoir naviguer sur le site.
S'agissant du premier amendement, toutes ces informations sont pertinentes mais elles mêlent impact social et environnemental. Or nous sommes convaincus que, pour être entendus, les messages sur le réemploi et le recyclage doivent être ciblés.
Quant au second, il est contraire au droit européen. On ne peut pas imposer une telle obligation à des acteurs qui opèrent en dehors du territoire français, ce qui est le cas de la plupart des plateformes. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements CD199 de la rapporteure, CD53 et CD51 de M. Antoine Vermorel-Marques et CD87 de Mme Alma Dufour (discussion commune)
Il s'agit de préciser que l'obligation d'afficher sur leur site de vente en ligne des messages de sensibilisation concerne les personnes qui, par leur activité, ont recours à la pratique commerciale nouvellement définie, et non tous les metteurs sur le marché de produits textiles, linges de maison et chaussures (TLC).
Il convient de veiller à ce que les places de marché soient bien comptables du respect de la loi, y compris par des vendeurs tiers, des sociétés écrans que l'on ne pourra jamais poursuivre jusqu'en Chine pour qu'elles se plient à leurs obligations.
L'amendement CD51 est retiré.
La commission adopte l'amendement CD199.
En conséquence, les autres amendements tombent ainsi que l'amendement CD64 de M. Antoine Vermorel-Marques.
Amendement CD10 de M. Dominique Potier
L'amendement vise à ajouter que les informations affichées doivent être fiables sur l'incidence des produits sur l'environnement.
Les données que vous souhaitez voir affichées le sont déjà au titre des obligations d'information des consommateurs imposées par l'article L. 541-9-1 du code de l'environnement. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CD65 et CD66 de M. Antoine Vermorel-Marques (discussion commune)
L'amendement CD65 vise à élargir le message de sensibilisation à l'impact social, sanitaire et économique de la fast fashion.
Du fait de l'adoption de l'amendement CD199, l'obligation d'affichage des messages de sensibilisation ne concerne que les sites de vente de mode express. Votre amendement est donc satisfait.
Il ne l'est pas, car son objet est d'élargir le message. Le consommateur doit être informé des conséquences sanitaires, sociales et économiques de son acte d'achat. L'impact de la fast fashion n'est pas seulement environnemental, il est aussi sanitaire – les études de Greenpeace l'ont montré –, social sous l'aspect des conditions de travail, et économique en menaçant les emplois en France.
Votre amendement est satisfait en ce qui concerne la cible visée. S'agissant du message, il doit s'en tenir aux conséquences environnementales pour une meilleure lisibilité et efficacité.
La commission adopte l'amendement CD65.
En conséquence, l'amendement CD66 tombe ainsi que les amendements CD127 de M. Emmanuel Blairy, CD24 de M. Stéphane Delautrette et CD68 de M. Édouard Bénard.
Amendement CD67 de M. Antoine Vermorel-Marques
Il s'agit de compléter l'affichage obligatoire des informations sur les qualités et les caractéristiques environnementales du produit par un message encourageant le réemploi et la réparation.
Les informations que vous mentionnez, parfois appelées fiche-produit, peuvent être consultables en ligne ou en rayon. Les modalités d'affichage sont déjà définies : souvent l'information est accessible sur une page internet distincte de celle de l'achat. Il semble donc difficile d'articuler cette obligation avec notre dispositif, qui de surcroît ne concerne que la vente en ligne. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD177 de la rapporteure.
Amendements CD63 de M. Antoine Vermorel-Marques et CD123 de M. Daniel Grenon (discussion commune )
Il s'agit d'un débat de fond. De mon point de vue, le message doit être affiché sous forme de bandeau en haut ou en bas de chaque page de la plateforme afin d'être très visible par le consommateur, et pas simplement à côté du prix en petits caractères comme les plateformes pourraient être tentées de le faire. On n'imagine pas un message de prévention sur le tabac qui ne serait pas affiché sur le paquet.
Cet amendement vise à s'assurer que les messages sont bien visibles des consommateurs et pas perdus quelque part sur le site. Il tend donc à préciser que le message doit figurer non pas à proximité mais à côté du prix pour éviter que la plateforme le dissimule.
Les modalités d'affichage envisagées garantissent la visibilité. Par ailleurs, il n'appartient pas à la loi d'entrer dans un tel niveau de précision.
La commission rejette s uccessivement les amendements.
Amendement CD198 de la rapporteure
Il s'agit d'indiquer que le contenu des messages de sensibilisation sera défini par décret.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CD147 de M. Antoine Villedieu
L'objectif de l'article est d'aider les clients à prendre conscience de l'impact environnemental des produits qu'ils achètent.
L'effet de l'affichage du montant de l'écocontribution reste, à ce stade, très limité. Il est proposé de lui substituer, pour les produits textiles, l'affichage du malus ou du bonus appliqué à l'écocontribution. Les modalités seront précisées par décret, mais on peut imaginer de mettre en valeur le bonus et le malus sous la forme de pastilles rouges ou vertes. Ce serait bien plus compréhensible pour le consommateur et plus efficace pour le sensibiliser à l'impact environnemental négatif ou positif d'un produit.
L'obligation d'affichage n'a pas vocation à informer sur la responsabilité élargie des producteurs. En outre, à force de multiplier les informations, on risque de brouiller le message et de perdre en efficacité.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD3 de M. Dominique Potier
L'amendement a pour objet d'imposer aux producteurs de textiles contenant des fibres plastiques des objectifs de performance en matière de recyclage.
L'amendement ne précise pas d'objectifs autres que ceux de la loi Agec. La filière REP des TLC peut déterminer de tels objectifs dans son cahier des charges. Une telle disposition législative n'a pas de portée. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD189 de la rapporteure
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'amendement CD72 de M. Antoine Vermorel-Marques tombe.
Amendement CD88 de M. Gabriel Amard
Je remercie le groupe Horizons et Mme la rapporteure de nous proposer un texte qui vise à réduire l'impact environnemental de l'industrie du textile.
J'y suis particulièrement sensible parce que les directives-cadres n'encadrent pas suffisamment la présence de certaines molécules, appelées polluants éternels ou « PFAS », qui contaminent l'eau, l'air et les sols et que contiennent certains textiles. Les PFAS représentent un risque majeur pour la santé, car ils peuvent entraîner des taux élevés de cholestérol, une diminution de poids à la naissance, des perturbations du fonctionnement du foie et une moins bonne réponse aux vaccins pour les enfants.
Dans votre présentation, vous avez évoqué la dimension consumériste de la fast fashion ainsi que son impact écologique. L'amendement vise à informer les consommateurs, par un affichage ou tout procédé approprié, de la présence de PFAS dans les produits qu'ils achètent.
Je partage évidemment votre préoccupation, mais elle me semble satisfaite par l'article L. 541-9 du code de l'environnement qui concerne toutes les substances dangereuses. Aux termes de l'alinéa 4, « l'autorité administrative peut demander la communication aux personnes mentionnées au premier alinéa du présent III ainsi qu'à leur éco-organisme de tout élément justifiant le taux d'incorporation de matière recyclée de leurs produits et de toutes informations relatives à la présence éventuelle dans leurs produits de substances dangereuses, aux modes de gestion des déchets qui en sont issus et aux conséquences de leur mise en œuvre. »
Je soutiens l'amendement, car nous sommes confrontés à une pollution généralisée aux PFAS.
Leur caractère polluant et leur dangerosité pour la santé sont établis mais ne sont pas reconnus par notre réglementation. Il faut donc aller plus loin. Dans le cadre de notre niche parlementaire, nous présenterons une proposition de loi visant à interdire les PFAS immédiatement dans tous les emballages alimentaires et les vêtements.
C'est un sujet majeur. Il faut que dès à présent, l'étiquetage fasse état de la présence de PFAS.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 1er modifié.
Après l'article 1er
Amendements CD37 de Mme Cyrielle Chatelain et CD85 de Mme Alma Dufour (discussion commune)
La fast fashion représente plus de sept vêtements sur dix vendus en France. Pour endiguer ce véritable raz-de-marée, il faut limiter les importations.
Les impacts environnementaux sont colossaux et croissants. Si on ne fait rien, 26 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial seront liées à l'industrie du textile en 2050.
L'amendement vise donc à limiter les volumes des importations.
L'industrie textile est l'une des plus polluantes du monde à cause des volumes de production. Environ cinquante vêtements par habitant sont importés en France chaque année, et les importations ne cessent de croître année après année – c'est mécanique. Ce n'est pas la demande qui fait l'offre, mais l'offre qui crée la demande et qui trouvera toujours des débouchés. Un vêtement sur deux est aujourd'hui vendu en promotion à cause de la surproduction.
Il y a deux manières de traiter le sujet : la taxation environnementale par le biais du bonus-malus, que vous avez choisie, ou la limitation directe des volumes, notamment des importations.
Nous sommes persuadés que la limitation des importations est socialement plus juste que la taxation environnementale, qui de surcroît ne suffira sans doute pas à faire baisser la consommation.
Nous savons qu'une telle solution n'aura jamais les faveurs des macronistes. C'est bien dommage parce que la Chine fait de même pour protéger ses propres industries quand elle veut les développer. La fin des accords multifibres en 2005 a définitivement signé l'arrêt de mort de l'industrie textile en France.
Pour protéger l'industrie textile que nous voulons recréer en France, il est indispensable d'adopter des quotas d'importation.
La réflexion est intéressante mais l'instauration de quotas d'importation est contraire au droit européen.
Je déplore le mépris avec lequel nous sommes qualifiés de macronistes. Nous vous appelons les députés de la NUPES, jamais les mélenchonistes – pourtant, vous l'êtes.
En ce qui concerne les PFAS, que chacun fasse son examen de conscience. Il y en a partout autour de nous, dans les vêtements, les chaussures, etc. Depuis les années 1940, ils ont montré leur utilité pour l'imperméabilité des vêtements, pour les mousses anti-incendie ou pour le revêtement antiadhésif des poêles Tefal.
Une telle mesure aurait du sens au niveau européen. Il est vrai que les importations provenant de pays lointains devraient être taxées.
L'amendement n'est pas pertinent pour la France, dont la production, qui n'est même pas exclusivement française, en particulier au regard de la matière, ne permet d'habiller qu'une infime partie de la population. C'est peanuts.
Il faut considérer le problème à l'échelon européen. Sachez que Zara, qui fait de la fast fashion, fabrique principalement au Portugal et au Maroc.
L'amendement n'a pas lieu d'être, mais la question se posera, en effet, au niveau européen si nous continuons à importer des produits qui ne respectent aucune norme – outre les conditions de travail qui ne sont pas le sujet de la proposition de loi, je pense en particulier à la pollution des sols. Je suis défavorable à l'amendement.
Cet amendement n'a en effet de sens qu'au niveau européen. Tous les pays n'imposeront pas de barrière douanière. Si nous agissons seuls, nous risquerons notamment de créer une concurrence déloyale.
Quant à la petite polémique, j'appelle bien les LFIstes-NUPES « la famille contre tout », avec beaucoup d'affection.
Bien sûr que cette barrière douanière serait plus efficace au niveau européen ! Mais nous ne voyons rien venir du côté de la Commission européenne. Vous nous dites, chers collègues Renaissance – et non « macronistes » ! –, que l'on verra cela plus tard au niveau européen, en passant sous silence les rapports de force à l'œuvre et les décisions qui y sont véritablement prises. Si l'Europe veut conserver son retard de vingt ans, la France, elle, doit avancer et être suivie par les pays européens. À toujours s'en remettre à l'Europe, il ne se passe rien.
Nous sommes au cœur du débat. Nous proposons en réalité une application pratique de la loi relative à l'industrie verte. Il faut faire progressivement diminuer les importations de vêtements et réindustrialiser la France afin de renforcer notre industrie textile. Certes, il existe des réponses au niveau européen, mais il en faut aussi au niveau français.
Par ailleurs, le Gouvernement est en train de reculer sur les règles en matière de devoir de vigilance. C'est bien beau d'en appeler au niveau européen pour ensuite reculer, alors même que c'est la France, grâce à Dominique Potier, qui est à l'origine de ces avancées ! Ma question est simple : voulez-vous vraiment imposer des normes drastiques à ces industries qui saccagent notre environnement et font travailler des gens dans des conditions inacceptables ? Il y a deux manières d'agir : adopter cet amendement ; être proactifs sur le devoir de vigilance.
Enfin, vous avez raison, il y a des PFAS partout : dans nos sols, dans nos os, dans nos cheveux : 99 % des personnes ont des PFAS dans leur corps. Ils nous font courir de vrais risques en matière de fertilité, de cancers et nuisent à notre santé. Toute une partie d'entre eux peuvent être remplacés par d'autres substances, ce qui n'est pas encore le cas pour les dispositifs médicaux. En revanche, on n'a absolument pas besoin d'en mettre dans les vêtements de sport pour les rendre un peu plus imperméables ! Nous sommes très clairement du côté de la santé et de la protection des personnes. Nous devons aux habitants d'aujourd'hui et aux enfants de demain d'en réduire la présence dans nos vêtements.
Les macronistes sont pro-européens. Le 4 mars dernier, dans le Pacte vert, l'Union européenne s'est accordée sur plusieurs points, parmi lesquels l'interdiction, à partir de 2026, de l'ajout intentionnel de PFAS dans les emballages alimentaires. L'Europe nous a devancés sur la question alimentaire, et elle va poursuivre son travail pour interdire les PFAS. Nous venons de traverser une crise agricole, où il a été beaucoup question de la surtransposition des normes européennes. Macronistes, fiers de l'être, pro-européens, nous continuons à défendre des sujets essentiels pour la France au niveau européen.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques CD22 de M. Stéphane Delautrette et CD45 de Mme Danielle Brulebois
Nous avons longuement abordé la plus-value de la relocalisation de la production en France et toutes ses externalités positives environnementales et sociales. Nous proposons de flécher des fonds de soutien vers la production française et européenne. En pénalisant la fast fashion et en accompagnant l'émergence de cette filière et sa production, nous répondrons plus facilement aux besoins de ceux qui achètent des grandes tailles.
L'amendement vise à définir une production locale et inclusive, la production de textile en France émettant deux fois moins de CO2 qu'une production localisée en Chine.
Je comprends votre intention – et j'en profite pour adresser un petit clin d'œil à toutes les associations et ONG que nous avons reçues. Mais la définition de cette nouvelle pratique locale et vertueuse crée de la confusion. La proposition de loi vise à réglementer la pratique commerciale de la mise à disposition ou de la distribution d'un nombre important de modèles de produits neufs, sans tenir compte de leur origine géographique, même si, bien sûr, on peut prendre en compte leur livraison. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements CD91 de Mme Alma Dufour et CD28 de Mme Danielle Brulebois.
Amendement CD170 de M. Stéphane Delautrette
L'amendement vise à compléter l'information des consommateurs sur les pratiques commerciales incitant à surconsommer, telles que le nombre de modèles proposés et les écarts avec les prix moyens de réparation.
Il ne m'apparaît ni nécessaire ni souhaitable de multiplier les définitions en sus de celle concernant la mode éphémère. Avis défavorable.
Je voterai contre cet amendement, mais j'espère que nos amis socialistes nous suivront lors du prochain projet de loi de finances (PLF), lorsque nous introduirons une TVA circulaire sur les filières de la réparation.
Monsieur Millienne, nous ne demandons qu'à vous suivre sur le PLF ! Mais je ne voudrais pas vous rappeler dans quelles conditions il a été discuté…
La commission rejette l'amendement.
Article 1er bis (nouveau) : Critères de l'affichage environnemental
Amendement CD135 de M. Jean-Marc Zulesi
L'amendement a été élaboré en collaboration avec les excellents commerçants de Salon-de-Provence, qui doivent d'ailleurs nous regarder. Il vise à adapter notre modèle d'écoscore en lui ajoutant un critère de durabilité, particulièrement approprié dans le cadre de la fast fashion.
Votre réflexion est évidemment pertinente. Néanmoins, l'affichage environnemental a fait l'objet de négociations au niveau européen et l'ajout du critère de durabilité irait plus loin que ce qui a été acté. Il introduirait une instabilité réglementaire qui rendrait le dispositif difficilement applicable.
Je soutiens cet excellent amendement. Il est très important que l'affichage environnemental inclue les notions de durabilité et de sobriété.
Je vais venir faire mes courses chez vous, à Salon-de-Provence, monsieur le président, et je vais voter pour votre amendement ! Cela peut vous paraître contradictoire avec ce que j'ai dit sur les droits de douane européens, mais il me semble que cet ajout aurait un impact moindre sur nos commerçants, tout en étant utile au consommateur.
Ce n'est pas la pertinence du critère que je remets en cause : il s'avère qu'il n'a pas été retenu dans l'expérimentation européenne. En revanche, il est déjà pris en compte dans la REP. Sagesse.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 1er
Amendements CD36 de Mme Cyrielle Chatelain et CD84 de Mme Alma Dufour (discussion commune)
L'amendement CD36 a pour objectif de définir des objectifs de réduction, de réemploi et de recyclage pour l'industrie textile française, compatibles avec nos engagements climatiques internationaux. L'industrie textile représente 5 % de l'empreinte carbone française, soit environ 30 millions de tonnes équivalent CO2. Son empreinte croissante s'explique par l'essor de la mise en marché de produits ces dernières années. En France, le nombre de vêtements proposés annuellement à la vente a progressé de 1 milliard en dix ans et atteint désormais 3,3 milliards de produits, soit plus de quarante-huit par habitant.
Pour aligner le secteur textile français avec l'objectif de l'accord de Paris, il nous faut réduire d'un facteur 6 à 10 ses émissions de gaz à effet de serre et passer de quarante-huit pièces par habitant par an à cinq. La comparaison de l'évolution, entre 2013 et 2021, des mises en marché, de 552 000 à 715 000 tonnes, et des capacités de valorisation, de 131 000 à 171 000 tonnes, montre que la quantité mise en marché augmente plus vite que la capacité de valorisation, qui reste structurellement trop faible.
L'amendement reprend le dispositif existant dans la loi sur les emballages plastiques pour l'appliquer au secteur des TLC.
L'empreinte carbone de la France stagne depuis une dizaine d'années. L'augmentation des émissions importées ces quinze dernières années a absorbé le volume des réductions opérées sur notre territoire. Le secteur international du textile n'est pas du tout sur les rails de l'accord de Paris, comme en témoignent les projets pour 2030 déposés par les différentes grandes marques. Même si la décarbonation progresse dans les usines des pays du Sud, elle n'ira pas assez vite dans les dix prochaines années pour respecter la trajectoire de l'accord de Paris, dans un secteur qui part de très loin. Pourquoi le Bangladesh est-il le deuxième producteur de textile mondial ? C'est parce que, d'une part, le coût du salariat y est très bas et que, d'autre part, le coût énergétique y est également très bas, dans la mesure où son mix est composé de charbon et de gaz. Qui dit bas coût de production dit bas coût énergétique et, partant, énergies fossiles.
Si je vous rejoins sur le fond, la forme interroge. Ces objectifs de réduction, de réemploi et de recyclage relèvent plutôt du cahier des charges des filières REP. Une telle stratégie n'est pas adaptée à la manière dont on traite les filières TLC et dépend plutôt du réglementaire.
Pour travailler depuis sept ou huit ans sur les filières REP, je sais que leur cahier des charges ne contient pas d'objectif de réduction des mises en marché, et ce n'est certainement pas le Gouvernement qui va définir une telle obligation par décret. On utilise les filières REP pour régler quelque chose qui ne peut pas l'être par le biais de la taxation environnementale : l'écocontribution est une sorte de taxe environnementale, qui exploite au maximum les possibilités offertes par le droit national. Nous proposons donc d'emprunter la même voie pour ce qui concerne la mise en marché des volumes.
Il n'y a pas d'objectif de baisse de production, étant donné que l'on ne produit quasiment rien en France. En revanche, deux choses ont été mises en place grâce à la loi Agec : une aide à la réparation des produits textiles, qui a été raillée par les partis de droite, et une aide sous forme de bonus destinée aux producteurs français pour récupérer les fibres recyclables, afin de soutenir la production à partir de fibre recyclée, plus coûteuse que celle à partir de fibre neuve.
Ce qui est mis en marché, ce n'est pas ce qui est produit en France, c'est ce qui est vendu. Pourquoi ne pas avoir la même ambition que pour le plastique ? Il y a un consensus sur l'accord de Paris, mais pas sur les solutions pour atteindre ses objectifs.
On peut entendre vos parallèles. Mais les objectifs ne sont pas les mêmes : dans un cas, il s'agit d'exterminer les déchets ; dans l'autre, d'accompagner le verdissement d'une industrie. La question est : comment spécifier dans la stratégie bas-carbone des objectifs relatifs à la filière textile ?
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD20 de M. Stéphane Delautrette
L'amendement vise à pénaliser financièrement les pratiques associées à la fast fashion définies précédemment. Il propose également d'augmenter la pénalité maximale – 100 % du produit hors taxe ou 20 euros maximum – de façon à rendre réellement dissuasif l'achat de certains produits aux prix tellement bas que le seuil maximal de 50 % hors taxe ne saurait suffire.
Votre amendement s'inscrivait à la suite de la définition d'une nouvelle pratique par l'amendement CD170. Dans la mesure où ce dernier n'a pas été adopté, celui-ci est sans objet. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD2 de M. Dominique Potier
L'amendement vise à lutter contre le fléau des décharges textiles à ciel ouvert dans les pays émergents, en interdisant l'exportation de vêtements considérés comme des déchets et en renforçant les obligations pesant sur les producteurs de vêtements contenant des fibres plastiques.
Un transfert illicite de déchets doit répondre à certaines conditions définies à l'alinéa 35 de l'article 2 du règlement 1013/2006 concernant les transferts de déchets, lesquelles ne concernent pas uniquement la nature du déchet. Aussi, il n'est pas possible d'assimiler le transfert de produits textiles contenant des fibres de plastique à un transfert illicite. Les critères de performance en matière de recyclage sont déjà prévus par la loi Agec ; il n'est pas souhaitable de les dédoubler. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD69 de M. Édouard Bénard
C'est un amendement auquel pourraient souscrire les commerçants de Salon-de-Provence ! Nous souhaitons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'opportunité d'organiser une campagne nationale d'information sur les impacts sociaux et environnementaux de la fast fashion. Nous estimons que les obligations d'information sur les plateformes de vente des entreprises concernées, voire sur les places de marché, ne sont pas suffisantes. Les messages sont trop succincts pour alerter nos concitoyens sur l'ampleur des désastres sociaux et environnementaux de la mode jetable. Il serait sans doute plus pertinent de conduire, avec l'appui des ONG, une campagne gouvernementale officielle dans les grands médias, invitant à réduire la consommation de produits textiles et à se détourner des plateformes concernées.
Le ministère de la transition écologique s'est déjà engagé sur ce sujet. Il va lancer une très grande campagne, que j'espère aussi percutante que celle de l'Agence de la transition écologique (Ademe). Par ailleurs, l'éco-organisme Refashion dispose d'un budget destiné à la communication, afin d'agir dans le sens que vous souhaitez. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 2 : Renforcement des critères d'écomodulation dans la filière à responsabilité élargie des producteurs de textiles, linges et chaussures
Amendements identiques CD21 de M. Stéphane Delautrette et CD32 de Mme Danielle Brulebois
L'amendement CD21 vise à proposer une modulation des écocontributions des entreprises textiles en fonction de leurs actions pour réduire leurs impacts sur les droits humains des travailleurs de leurs chaînes d'approvisionnement.
Vous savez à quel point je suis sensible à ces conditions de travail – j'ai bien mentionné l'impact social dans mon propos liminaire. Mais l'objet de la proposition de loi, c'est l'impact environnemental. Les filières REP concernent la gestion des déchets ; on ne peut pas introduire de critères sociaux dans leur fonctionnement. Avis défavorable, dans la mesure où ces critères sont pertinents sur le plan humain, mais pas sur le plan législatif.
Ils sont également pertinents sur le plan environnemental. C'est parce que les salaires sont très bas que la production est encouragée, ce qui a un impact environnemental. Tout est lié.
La commission rejette les amendements.
Amendement CD184 de M. Antoine Villedieu
Je voudrais que l'on cesse d'opposer l'environnement et la condition humaine. La délocalisation des industries textiles de France vers les pays en voie de développement a favorisé un dumping social à la limite de l'esclavage moderne. Lors des auditions, madame la rapporteure, vous avez interpellé les représentants des marques sur les conditions de travail. Leurs réponses ne nous ont pas particulièrement convaincus, notamment leurs justifications douteuses sur les bas niveaux de salaire dans les pays d'Asie du Sud-Est. Nous ne devons plus accepter l'opposition entre environnement et conditions sociales : leurs enjeux sont liés. On ne peut pas ajouter des normes environnementales sans jamais prendre en compte les normes sociales des travailleurs. C'est pourquoi cet amendement fait de l'impact social un facteur essentiel pour juger de la durabilité d'un produit.
Encore une fois, bien sûr que ces questions sont essentielles. Mais comment introduire une telle modulation dans un système de gestion des déchets ? Cela ne veut pas dire que l'on ignore le sujet, mais qu'il faudra aller plus loin, aussi bien sur les questions sociales que celles de santé environnementale.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD70 de M. Édouard Bénard
Nous souhaitons élargir la notion d'impact environnemental aux impacts socio-environnementaux.
Il n'est pas possible d'étendre ce critère à toutes les industries : nous ne parlons que de l'industrie textile.
La modulation des écocontributions dans l'industrie textile va plus loin que la simple recyclabilité des déchets. Elle va plus loin que l'objectif initial de la filière REP, dont on se sert pour contourner l'inertie européenne, calamiteuse sur ce sujet, depuis au moins dix ans. Si l'on accepte de moduler l'écocontribution selon un écoscore basé sur le CO2, qui n'a a priori rien à voir le recyclage des produits, on peut assumer d'y intégrer un critère social. Plusieurs collègues, dont M. Potier, s'étaient battus pour que l'affichage environnemental prévu par la loi Agec soit un affichage environnemental et social. Je peux entendre que l'on n'ait pas de critères objectivables permettant de mettre des notes sociales, mais il va falloir se pencher très sérieusement sur cette question. L'exploitation salariale et l'énergie à bas coût sont au fondement même de la surproduction. Sans elles, il ne serait pas possible de produire de tels volumes de textile et d'impacter à ce point le climat.
La commission rejette l'amendement.
La réunion est suspendue de onze heures vingt à onze heures trente.
Amendements identiques CD162 de Mme Huguette Tiegna et CD164 de M. Jimmy Pahun, amendements CD113 de M. Daniel Grenon et CD148 de M. Antoine Villedieu (discussion commune)
Le troisième alinéa de l'article précise que les contributions financières versées par les producteurs dans le cadre des filières REP sont modulées en fonction de l'impact environnemental et de l'empreinte carbone des produits. L'amendement CD162 vise à permettre une modulation de ces contributions également selon l'impact sur la biodiversité.
L'amendement CD113 vise à introduire l'impact sur la biodiversité parmi les critères de performance environnementale. Durant les auditions, des experts ont souligné le fait que certains produits, bien qu'ayant une empreinte carbone faible, dégradaient fortement la biodiversité au cours de leur processus de fabrication et de leur utilisation.
C'est notamment le cas du textile contenant du polyester. Un rapport du Parlement européen de 2020 indique que les vêtements synthétiques sont responsables de la présence de 35 % des microplastiques primaires rejetés dans l'environnement et qu'une seule lessive de vêtements en polyester peut libérer 700 000 fibres microplastiques, qui peuvent ensuite se retrouver dans la chaîne alimentaire. Cette même étude indique que le lavage des produits synthétiques a provoqué l'accumulation de plus de 14 millions de tonnes de microplastiques au fond des océans.
Outre ce problème mondial, la pollution générée par la production de vêtements a un impact conséquent sur la santé des populations locales, des animaux et des écosystèmes où se trouvent les usines.
En plus de la quantité de matière utilisée ou de la présence de matière recyclée, l'impact environnemental, l'empreinte carbone mais aussi l'atteinte à la biodiversité doivent être intégrés dans le calcul des écocontributions versées par les producteurs. Particulièrement dans l'industrie textile, il est important de différencier les produits en fonction de leur atteinte à la biodiversité. L'industrie textile, quand elle est de mauvaise qualité, est néfaste à l'environnement. C'est le cas lorsque le coton est cultivé de manière non raisonnée, que les teintures et traitements textiles polluent les rivières et les océans ou que les microfibres et microplastiques sont relâchés dans les eaux par les lavages domestiques. Le faible développement des industries de recyclage textile en France participe aussi à cette destruction de la biodiversité, par la pollution des sols et des eaux, ici ou à l'étranger.
Il est en effet important d'introduire la notion d'atteinte à la biodiversité.
Avis favorable sur les amendements identiques, et demande de retrait des deux autres, à défaut de quoi, avis défavorable.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, les amendements CD113 et CD148 tombent.
Amendement CD73 de M. Antoine Vermorel-Marques
Cet amendement visant à prendre en compte la distance entre le lieu de confection et le lieu de consommation favoriserait les circuits courts. Cette disposition est demandée par les industriels du textile européen.
Votre proposition est déjà en partie satisfaite par la prise en compte de l'empreinte carbone. En détacher la distance pour en faire un critère en elle-même ne me paraît pas adapté à toutes les filières REP – on pourrait imaginer des modes de transport propres. Par ailleurs, la politique commerciale de l'Union européenne repose sur le principe constant qu'il est injuste de discriminer un produit selon le seul critère du pays de production ou de la distance entre le lieu de fabrication et le lieu de commercialisation.
Les critiques que nous adressons aux productions délocalisées ne se fondent pas sur ces éléments, mais sur des raisons sociales et environnementales. Aussi l'Union européenne autorise-t-elle les États membres à introduire des critères notamment environnementaux pour pénaliser certains produits, mais pas des critères strictement protectionnistes.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD74 de M. Antoine Vermorel-Marques
Cet amendement cible le mode de transport utilisé par la fast fashion : l'avion, vingt fois plus polluant que le bateau, est en effet inhérent à un modèle de mode éphémère, rapide et à usage unique.
Tous les acteurs de la fast fashion n'utilisent pas l'avion ; on observe vraiment une volonté de ne plus y recourir. Votre proposition est, de toute façon, satisfaite par l'ajout du critère lié à l'empreinte carbone.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Cette volonté existe peut-être sur le papier, mais la réalité est malheureusement tout autre. Le fret aérien lié au e-commerce a explosé ces dernières années, au point qu'aujourd'hui les vêtements prennent plus l'avion que les Français. Au-delà du seul textile, 367 millions de produits vendus par e-commerce arrivent par avion sur le marché français . Le phénomène prend donc de l'ampleur, contrairement aux déclarations des entreprises.
Nous devons d'autant plus nous attaquer à ce sujet que le fret aérien permet de faire du dumping. Si vous pouvez envoyer vos produits par avion, vous n'avez plus besoin d'avoir des entrepôts en France. C'est une vraie préoccupation si l'on veut conserver des entrepôts d'e-commerce en France et éviter qu'ils soient déplacés à l'autre bout de l'Europe, voire en Chine – AliExpress ne possède pas d'entrepôt en France mais peut pourtant livrer les consommateurs en quelques jours grâce à l'avion.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD75 de M. Antoine Vermorel-Marques
Cet amendement vise à ajouter comme nouveau critère de modulation la provenance des matières utilisées. Il a été inspiré par le Fashion Act que l'État de New York a pris pour lutter contre la fast fashion, avec deux objectifs : renforcer la traçabilité du produit en précisant la provenance des matières utilisées, et faire sauter les droits de douane en dessous de 850 dollars. Nous ne pouvons pas jouer sur les droits de douane, mais nous pouvons, en revanche, agir sur la provenance des matières.
La provenance des matières utilisées est déjà indiquée sur la fiche d'informations du produit. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CD76 de M. Antoine Vermorel-Marques.
Amendement CD89 de M. Gabriel Amard
Il s'agit également d'ajouter un nouveau critère de modulation des primes et pénalités délivrées par les éco-organismes : la présence de substances per- et polyfluoroalkylées, autrement appelés polluants éternels ou PFAS. Cela permettrait d'en limiter le recours puisqu'il existe, dans le domaine du textile, des substituts naturels. L'idéal serait bien sûr de les interdire, mais cet amendement constituerait déjà une avancée.
Si je suis d'accord sur le fond, je ne peux pas l'être sur la forme. Les notions d'écotoxicité et de substances dangereuses recouvrent déjà tous ces cas. S'il fallait dresser la liste exhaustive de toutes les substances, on prendrait le risque d'en rater une. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CD149 de M. Antoine Villedieu.
Amendement CD77 de M. Antoine Vermorel-Marques.
Dans l'opinion publique, le malus peut être perçu comme une taxe. Pour garantir son acceptabilité sociale, nous proposons d'inscrire noir sur blanc que l'intégralité des recettes du malus servira à financer le bonus, ce qui empêchera Refashion ou les autres intermédiaires de les utiliser pour mener d'autres actions. Les Français sont prêts à contribuer en fonction de leur mode de consommation, selon le principe pollueur-payeur. Le principe intrinsèque d'un système de bonus-malus est bien que le bonus bénéficie du malus.
D'après les échanges que j'ai eus avec des industriels, le malus pourrait rapporter beaucoup d'argent. Il en résulterait donc une très forte incitation à mettre en place des bonus sur le made in France et le made in Europe.
On peut comprendre le sens, peut-être même le bon sens, de cette proposition, mais elle se heurte au droit.
Vous avez évoqué, comme Mme Dufour avant vous, l'idée d'une taxation. Il ne s'agit cependant pas de taxes, mais de pénalités : pas un seul centime ne va dans les caisses de l'État ; l'argent est directement attribué à l'éco-organisme qui coordonne les actions d'économie circulaire.
Ce que vous proposez est fiscalement impossible, car on ne peut pas affecter ce genre de pénalités. Elles viendront donc abonder le budget de l'éco-organisme, qui les redistribuera ensuite aux différents acteurs.
Je soutiens cet amendement, qui est frappé au coin du bon sens. J'ai connu une époque où les taxes environnementales étaient affectées. En toute transparence, elles permettaient aux citoyens de comprendre le bien-fondé de leur perception pour accompagner la transition écologique. S'il y a bien un amendement à même de garantir l'acceptabilité de l'évolution des prix de la fast fashion, c'est celui-ci.
C'est essentiel, car les Français ne supporteront pas de payer un surcoût financier – puisqu'en effet, il ne s'agit pas d'une taxe – s'il n'est pas réattribué à la filière pour permettre d'offrir des alternatives vertueuses à bas coût. Si l'on fait augmenter le prix des textiles non vertueux, il faut que l'on parvienne à faire baisser celui des textiles vertueux, et notamment du made in France.
Les écarts de coûts de production entre le made in France ou made in Europe, et le made in China ou made in Bangladesh sont vraiment importants. Toute proposition de réduction de TVA indexée sur la performance environnementale étant systématiquement rejetée en loi de finances, une autre solution serait de redistribuer le malus en chargeant l'éco-organisme de soutenir les investissements que les entreprises désireuses d'obtenir le bonus consentiraient pour décarboner les chaînes de production. L'argent resterait bien dans les caisses de l'éco-organisme – s'il abondait le budget de l'État, cela deviendrait une taxe, ce qui n'est en effet pas légal du point de vue du droit européen –, mais les missions de l'éco-organisme seraient étendues au soutien à la production vertueuse locale.
Je soutiens également cet amendement : il ne peut qu'être favorable aux entreprises françaises.
Je comprends l'objectif de cet amendement, mais nous sommes encore en train d'évaluer la loi Agec. Avant d'aller plus loin, il faudrait que l'on évalue le dispositif de bonus-malus tel qu'il existe ainsi que la capacité de contrôle de l'État.
Je reste dubitatif sur les dispositifs de bonus-malus, car ils reposent sur les déclarations du producteur – il y a en ce moment sur Canal+ une très bonne série qui aborde ces sujets. Il pourrait être tentant de s'octroyer, sur simple déclaration, un super bonus, payé par l'État avec les malus récoltés sur les producteurs. Il y aurait moyen d'organiser tout un système de détournement, très loin des objectifs recherchés.
J'attendrais les résultats de la mission d'évaluation de la loi Agec avant d'ajouter de nouvelles couches à ces dispositifs en cours de mise en place. Il faut savoir raison garder.
Une première question est de savoir s'il s'agit d'une proposition de loi uniquement contre l'ultra fast fashion, ou contre celle-ci et en faveur de la production française. La taxe vise-t-elle uniquement à pénaliser la fast fashion ou constitue-t-elle une incitation financière au profit du made in France et du made in Europe ? Il y va de la philosophie du texte.
Une deuxième question soulève un enjeu d'acceptabilité. Si l'on n'écrit pas noir sur blanc dans la loi que l'éco-organisme sera obligé d'investir les recettes du malus dans des bonus pour le made in France, alors, pour l'opinion française, le législateur aura imposé une taxe supplémentaire. Ce sera d'autant plus le cas si l'on n'est pas plus ambitieux quant au montant du malus, comme je le souhaite.
Je ne dis pas qu'il faut offrir des possibilités de dérogation ; ce problème sera traité par des amendements sur la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et sur le contrôle en général. Je dis simplement que c'est le malus qui doit financer le bonus.
Il se pose une question de gouvernance des éco-organismes. Les pouvoirs publics y sont-ils suffisamment représentés ? Y a-t-il des améliorations possibles ?
Nous sommes d'accord sur ce point : il faut définir une boucle vertueuse en matière d'impact environnemental, qui aurait des retombées économiques incontestables sur notre territoire. Nous partageons tous ce postulat.
Flécher l'intégralité des pénalités vers l'encouragement aux entreprises, c'est bien ce que l'on vise au bout de la boucle. Et c'est bien ce qui existe : l'éco-organisme Refashion perçoit toutes les écocontributions – et il en percevra encore davantage si vous êtes d'accord avec les écomodulations que je propose –, et distribue des primes aux entreprises vertueuses, dont les produits répondent aux critères prévus par la loi Agec. Des entreprises nous ont confirmé, lors des auditions, percevoir le bonus, même si le dispositif pourrait encore être amélioré.
Le mastodonte dont on parle beaucoup et qui est notamment visé paye l'écocontribution à Refashion. Même si elles échappent à d'autres contrôles, les entreprises financent quand même à un niveau important les éco-organismes. Cette boucle vertueuse existe donc déjà, selon le principe qui a été défini dans la loi Agec.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CD116 de M. Jorys Bovet, CD151 de M. Antoine Villedieu et CD78 de M. Antoine Vermorel-Marques (discussion commune)
Dans sa rédaction actuelle, la majoration du taux inclut tous les textiles d'habillement, les chaussures et les linges de maison neufs, qu'ils soient issus de la mode express ou non. La majoration du taux à 50 % ne devrait s'appliquer qu'aux articles de la mode express qui ont été définis à l'article 1er, afin que le texte se concentre sur son objet.
Avis défavorable. Comme les pénalités répondent à des critères identiques pour tous les producteurs, appliquer un plafond différencié à certains à raison de leur recours à une pratique commerciale particulière n'apparaît pas le plus pertinent sur le plan juridique.
La meilleure manière de faire contribuer plus fortement les acteurs les moins vertueux, notamment ceux qui répondent à la définition d'ultra mode éphémère, est de se concentrer sur les critères d'écomodulation, comme le fait la présente proposition de loi. Il s'agit de moduler les contributions en fonction de la toxicité des activités de l'entreprise.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD80 de M. Antoine Vermorel-Marques
On est au cœur du débat. Cette proposition de loi vise à modifier le taux plafond de la prime ou de la pénalité, fixé à 20 % par la loi Agec. Le problème de ce taux vient surtout du prix du produit : une pénalité de 20 % sur une voiture ou un téléphone portable est évidemment dissuasive ; elle ne l'est pas sur un t-shirt à 4 euros et ne le sera pas davantage à 50 %. Cet amendement vise donc à supprimer le taux plafond pour que le montant du malus ne soit pas limité par le prix du produit.
Si je comprends l'intention de cette proposition, nous nous devons, en tant que législateurs, d'être justes et proportionnés, notamment à l'égard du pouvoir d'achat de nos concitoyens. Des pénalités correspondant à 100 % du prix d'achat seraient rédhibitoires pour les consommateurs. Étant donné que nous avons l'ambition de définir une trajectoire qui soit suffisamment significative pour les producteurs sans trop affecter les consommateurs, il faut être raisonnable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CD31 de Mme Danielle Brulebois et CD90 de Mme Alma Dufour, et amendements CD14 et CD15 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)
Cet amendement vise à pénaliser financièrement au maximum les pratiques que nous dénonçons, afin d'être réellement dissuasif. Quelques centimes sur un vêtement à 2 ou 3 euros n'ont pas une grosse incidence sur le pouvoir d'achat.
La question du pouvoir d'achat est réglée par le plafonnement du malus à 10 euros ou 20 euros. Si l'on taxe à 20 % un t-shirt à 2 euros, on ne parviendra pas à faire augmenter suffisamment le prix pour avoir une influence sur la consommation des Français.
Il y a un tel écart de prix entre Shein et la moyenne ou haute gamme que raisonner en pourcentages ne permet pas d'atteindre des valeurs cibles en termes de coût raisonnable d'un vêtement pour la transition écologique et sociale. C'est pourquoi nous ne devrions pas nous limiter, d'autant plus que nous avons déjà mis en place un garde-fou pour ne pas exploser les compteurs et ne pas ponctionner les Français plus qu'il ne le faut.
Je partage pleinement les arguments qui ont été avancés en faveur des amendements précédents. Les amendements CD14 et CD15 sont des solutions de repli, qui visent à augmenter le taux du malus, pour le premier, de 50 % à 70 % et, pour le second, de 50 % à 60 %.
Au-delà de la question du pouvoir d'achat, qui peut être relative, ces amendements soulèvent un problème de proportionnalité. Une augmentation du montant des pénalités à 100 % ferait peser un risque juridique sur le dispositif : la mesure pourrait être disproportionnée par rapport à l'objectif poursuivi et constitutive d'un obstacle au marché intérieur.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD128 de M. Emmanuel Blairy
Cet amendement tend à préciser que la majoration du taux des pénalités à 50 % ne s'applique qu'aux entreprises visées par le décret prévu à l'article 1er et non à toutes les activités visées par le onzième alinéa de l'article L. 541-10-1.
Encore une fois, nous voulons être justes envers tous les producteurs. Nous limiter seulement à ceux visés par le décret ne serait pas à la hauteur de l'ambition de ce texte. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CD150 de M. Antoine Villedieu et CD122 de M. Daniel Grenon (discussion commune)
Cet amendement fait écho à une proposition émise par la commission interfilières de responsabilité élargie des producteurs lors des auditions. Comme les alinéas 4 et 13 portent tous deux sur la modulation de la pénalité liée à la REP, on rendrait la proposition de loi plus simple et lisible si on les fusionnait en une seule et même disposition.
Durant les auditions, certains experts ont regretté que l'articulation des différentes pénalités pécuniaires manque de lisibilité. C'est pourquoi, cet amendement vise à regrouper les dispositions financières de cette proposition.
L'alinéa 4 concerne l'ensemble de la filière REP des textiles, alors que l'alinéa 13 vise la fast fashion. Pour une question de cohérence, on ne peut pas les fusionner. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD35 de Mme Cyrielle Chatelain
Cet amendement vise à pénaliser et décourager l'utilisation de polyester par l'application de pénalités plus fortes. Selon le Fonds mondial pour la nature (WWF), il faudrait environ 1,5 kilo de pétrole pour fabriquer 1 kilo de polyester ; l'enjeu est donc très important.
Je continue à ne pas vouloir définir de nouveaux critères. Ces éléments de composition interviendront de toute façon dans la modulation pour définir le montant des pénalités. J'y suis donc défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD42 de Mme Cyrielle Chatelain
Il s'agit de nouveau de pénaliser le transport par avion pour décourager ces activités commerciales d'y recourir.
Peut-être n'ai-je pas été comprise tout à l'heure. Je n'ai pas dit que le transport aérien n'était pas un sujet, puisque je l'ai moi-même évoqué dans mon propos liminaire. Simplement, les entreprises mastodontes envisagent déjà de limiter l'avion.
Ce n'est certes pas encore le cas, et c'est pourquoi nous avons autant d'émissions de gaz à effet de serre. Il faut néanmoins que nous soyons réactifs en fonction de leur adaptation aux dispositifs que nous pourrions mettre en place. Bientôt, l'avion ne sera plus un sujet, car ces entreprises sont en train de développer des plateformes européennes. Nous devons l'anticiper.
Sinon, la réponse est la même que pour l'amendement précédent : je suis défavorable à l'ajout de nouveaux critères.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement de coordination CD178 de la rapporteure.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CD81 de M. Antoine Vermorel-Marques.
Amendement CD192 de la rapporteure
Il s'agit d'une précision de coordination permettant de soumettre aux obligations de REP les interfaces électroniques, appelées plateformes, intermédiaires ou places de marché, qui agissent comme des tiers entre des vendeurs et des acheteurs.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CD179 de la rapporteure.
Amendement CD117 de M. Jorys Bovet
Cet amendement vise à éviter le contournement du dispositif. Si l'on ne précise pas que chaque entreprise doit désigner un mandataire unique, on risque de voir apparaître un phénomène de filialisation, c'est-à-dire de création de plusieurs sous-entreprises. Cela pourrait diluer les responsabilités des entreprises et en complexifier la lecture, notamment dans l'acquittement des écocontributions.
Votre interrogation est légitime, mais je ne suis pas sûre qu'on puisse y répondre avec une telle rédaction. Une société qui voudrait développer plusieurs entités pourrait prendre un mandataire unique et le problème serait contourné. Avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendements identiques CD23 de M. Stéphane Delautrette, CD92 de Mme Alma Dufour et CD143 de M. Antoine Vermorel-Marques
Nous souhaitons responsabiliser les places de marché dès lors que les vendeurs qu'elles hébergent ne sont pas représentés par une entité légale au sein de l'Union européenne.
Nous allons en effet rencontrer un véritable problème si l'on n'ajuste pas les dispositions légales à la question de l'existence des places de marché – l'acteur que l'on souhaite cibler par cette proposition de loi est une place de marché depuis le mois de décembre.
Les places de marché ont organisé un système de fraude à très grande échelle sur les écocontributions et la TVA. Selon l'Inspection générale des finances (IGF), en 2019, 98 % des vendeurs opérant sur des places de marché telles qu'Amazon et Cdiscount fraudaient la TVA. Des mécanismes correcteurs ont été adoptés pour la TVA, mais cela reste plus compliqué pour l'écocontribution. Selon les éco-organismes, la part des écocontributions payées par les sociétés d'e-commerce est bien inférieure à la proportion des ventes qu'elles représentent dans la société. Il y a donc un phénomène d'évasion massif en la matière – c'est un euphémisme.
Avant même d'aller plus loin sur le bonus-malus, il importe de corriger cette faille immense dans le régime actuel, sans quoi l'on risquerait de créer une distorsion de concurrence qui favoriserait encore davantage l'e-commerce. Nous ne pouvons plus reculer.
Encore une fois, je partage votre préoccupation, mais je ne crois pas qu'on puisse y répondre ainsi, notamment en ce qui concerne les évasions d'écocontributions. Cet amendement n'est pas cohérent dans la mesure où tous les producteurs non établis en France ne passent pas par une place de marché.
Vous visez peut-être des situations très précises, mais les plateformes en ligne devront elles-mêmes désigner un mandataire en France. C'est en effet un problème lorsque le producteur à l'étranger ou le vendeur tiers ne respecte pas ses obligations et qu'il n'y a aucun moyen de le prouver, mais l'amendement ne va pas régler cette situation. Avis défavorable.
Nous voulons nous assurer que les producteurs qui passent par une plateforme n'échapperont pas à l'écocontribution. Votre réponse ne peut pas nous satisfaire.
La commission rejette les amendements.
Amendements identiques CD25 de M. Stéphane Delautrette et CD93 de Mme Alma Dufour
Nous estimons que la plateforme doit être considérée comme producteur pour l'ensemble des produits ayant fait l'objet d'une transaction sur celle-ci. Cela éviterait le risque d'un contournement du versement de l'écocontribution.
Ces amendements entendent cibler les vendeurs qui passent par des places de marché.
Vous évoquiez, monsieur le président, les petits commerçants de Salon-de-Provence. Vous savez ce qu'ils pensent de la fraude massive à la TVA qui sévit dans le secteur textile, mais aussi dans celui de la librairie et de l'électronique depuis des années et qui menace leur survie.
Si l'on veut défendre le petit commerce, il faut être cohérent et soumettre les places de marché au paiement de l'écocontribution et du malus. La France a perdu 65 000 emplois dans la vente d'habillement en dix ans. Que vous faut-il de plus pour comprendre que la survie du commerce physique, en particulier du petit commerce, est en danger ? Il ne se passe pas une semaine sans qu'on nous annonce une faillite ou des fermetures de magasins, chez Camaïeu, Naf Naf ou Comptoir des cotonniers. C'est parce que ces entreprises évoluent dans un environnement concurrentiel où elles ne peuvent plus survivre. La question du e-commerce n'est pas un détail ; elle est majeure.
Je vous en supplie, travaillons, d'ici à la séance publique, à une nouvelle rédaction, si celle-ci ne vous convainc pas. Il faut absolument que les places de marché soient prises en compte dans ce texte. On ne peut pas se permettre de laisser un tel trou dans la raquette.
Encore une fois, je ne peux que partager votre constat, mais je crois en effet que cette rédaction ne réglera pas le problème. Les places de marché sont déjà soumises à la REP.
Bien sûr que si ! Elles s'acquittent de la contribution REP lorsque le vendeur tiers ne le fait pas. Cela étant, je suis évidemment prête à travailler avec vous sur cette question. Je vous invite donc à retirer vos amendements et vous propose que nous organisions un groupe de travail sur cette disposition d'ici à la semaine prochaine.
Nous sommes prêts à travailler avec vous, madame la rapporteure, mais je préférerais que nous adoptions d'abord nos amendements.
La commission rejette les amendements.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CD82 de M. Antoine Vermorel-Marques.
Elle adopte l'amendement de coordination CD180 de la rapporteure.
Amendements CD195 de la rapporteure, CD39 de Mme Cyrielle Chatelain, CD94, CD99 et CD140 de Mme Alma Dufour (discussion commune)
On est là au cœur du dispositif.
Je propose d'adosser la trajectoire d'augmentation progressive de la pénalité prévue à l'article 2 à la notation qui sera accordée aux produits de la filière en application de la méthodologie de l'affichage environnemental. Il ressort des auditions que c'est la méthodologie la plus aboutie à ce jour pour prendre en compte la durabilité extrinsèque des produits, qui est au cœur de la problématique de la mode express. Le ministre de la transition écologique a annoncé lundi que l'affichage environnemental devrait entrer en vigueur dès la fin du mois d'avril.
Dans le même esprit, il s'agit de garantir l'application de pénalités minimales en cas de poursuite de pratiques relevant de la fast fashion. Nous proposons l'introduction d'une pénalité minimale de 50 centimes par produit en maintenant la définition, par arrêté, d'une trajectoire progressive permettant d'atteindre une pénalité maximale de 10 euros par produit en 2030.
Une fois n'est pas coutume, je soutiens totalement la démarche de Mme la rapporteure. Il est très important que nous ayons un système de bonus-malus indexé sur l'affichage environnemental. J'avais déposé plusieurs amendements tendant à préciser les critères sur la base desquels le malus pourrait être calculé, en attendant l'entrée en vigueur de l'affichage environnemental. Puisque celui-ci s'appliquera très prochainement, je retire mes amendements au profit de celui de la rapporteure.
Je souhaite toutefois vous mettre en garde : vous avez dit que la version européenne de l'affichage environnemental s'appliquera au droit français lorsqu'elle sera finalisée. Il ne faudrait pas que l'Europe détricote notre indice et en rabaisse les ambitions, alors que l'expérimentation qui est en cours donne de bons résultats.
Les amendements CD94, CD99 et DC140 sont retirés.
La commission adopte l'amendement CD195.
En conséquence, l'amendement CD39 tombe, ainsi que les amendements CD79 de M. Antoine Vermorel-Marques, CD181 de la rapporteure et CD34 de Mme Danielle Brulebois.
Amendement CD26 de M. Stéphane Delautrette
Cet amendement vise à renforcer le principe de modulation des primes et des pénalités en fonction des quantités de produits mises sur le marché. Nous proposons qu'une enseigne ne puisse pas bénéficier d'un bonus, dès lors qu'elle contribue à la surproduction et à la surconsommation.
Nous proposons également de pénaliser progressivement les seuils de mise en marché. L'arrêté du 23 novembre 2022 portant cahiers des charges des éco-organismes et des systèmes individuels de la filière à responsabilité élargie du producteur des textiles, chaussures et linge de maison avait déjà introduit une logique de seuils de mise en marché. Mais il se limitait à réduire la prime au-delà d'un seuil. Pour notre part, nous voulons supprimer toute prime et pénaliser ces pratiques.
Je comprends votre intention, puisque j'ai moi-même réfléchi à cette question, mais cette disposition est contraire au principe des écomodulations. On ne peut pas empêcher que certains produits, à condition qu'ils remplissent les conditions pour l'obtenir, bénéficient d'une prime si d'autres produits de la même enseigne font, quant à eux, l'objet d'une pénalité.
L'idée, je l'ai déjà dit, c'est aussi d'accompagner les entreprises très toxiques et polluantes vers des pratiques plus vertueuses.
La commission rejette l'amendement.
L'amendement CD95 de Mme Alma Dufour est retiré.
Amendement CD191 de la rapporteure
Dans la mesure où nous venons de décider que l'écomodulation se fonderait sur l'affichage environnemental, je propose de donner six mois de plus aux entreprises pour s'adapter. C'est une manière de sécuriser le dispositif.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CD152 de M. Antoine Villedieu
Dans le même esprit que dans mon amendement CD151 relatif à la pénalité de 50 %, je propose de préciser que la pénalité pouvant aller jusqu'à 10 euros ne ciblera que les pratiques de mode express.
On ne peut pas articuler comme vous le faites la notion de produits soumis au principe de la REP et celle de pratique commerciale. Par ailleurs, nous avons décidé d'un commun accord que les critères seraient ceux de l'affichage environnemental. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD27 de M. Stéphane Delautrette
Toujours dans le but de renforcer le principe de modulation des primes et des pénalités en fonction des quantités de produits mises sur le marché, nous proposons que le montant des pénalités suive une trajectoire progressive de 5 euros par produit et par palier de 100 000 pièces par catégories de produits ou de 500 000 pièces pour toutes les catégories confondues.
Vous voulez inscrire dans la loi un barème de pénalités qui augmenterait de 5 euros par palier mais, à la lecture du dispositif, je ne comprends pas comment serait déterminé ce barème. Par ailleurs, vous ne mettez pas de limite à cette pénalité. Avis défavorable.
Vous pourriez sous-amender cet amendement si je le redépose en séance publique. Je suis à votre disposition pour travailler à une meilleure rédaction, qui cadrerait davantage le dispositif.
La commission rejette l'amendement.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD182 et CD186 de la rapporteure.
En conséquence, l'amendement CD96 de Mme Alma Dufour tombe.
Amendement CD17 de M. Dominique Potier, amendements identiques CD18 de M. Stéphane Delautrette et CD33 de Mme Danielle Brulebois, amendement CD83 de M. Antoine Vermorel-Marques (discussion commune)
Nous proposons, avec l'amendement CD17, de porter à 30 euros, à l'horizon 2030, le montant de la pénalité maximale par produit soumis au principe de REP. L'amendement de repli CD18 propose de le porter à 20 euros.
L'article prévoit qu'une trajectoire progressive aboutisse à une pénalité maximale de 10 euros par produit en 2030. Je propose de préciser les choses en prévoyant une augmentation de 1 euro par an. La pénalité serait ainsi de 5 euros par produit en 2025, 6 euros en 2026, 7 euros en 2027, 8 euros en 2028, 9 euros en 2029 et 10 euros en 2030.
En inscrivant cette progressivité dans la loi, on écarte le risque que le Gouvernement décide un jour, pour des raisons diplomatiques ou commerciales, de diminuer ce montant par voie réglementaire.
Je suis défavorable aux amendements qui tendent à augmenter le montant de la pénalité maximale. Sa fixation à 10 euros a suscité des réactions opposées, certains la trouvant insuffisante, d'autres, excessive. En réalité, il s'agit d'une somme très importante et je ne pense pas que l'on puisse aller au-delà. Faire passer la pénalité de quelques centimes à quelques euros aura des effets significatifs sur le consommateur, mais aussi sur le producteur, compte tenu des volumes en jeu.
Je ne suis pas davantage favorable à l'amendement qui vise à rigidifier la trajectoire : je crois préférable d'avoir la liberté de la faire évoluer différemment, en fonction des produits. La perspective d'une pénalité de 10 euros à l'horizon 2030 me paraît à la fois raisonnable et ambitieuse.
Je ne doute pas de votre sincérité et de votre volonté que cette proposition de loi ait des effets réels d'ici à quelques années. Mais si on laisse le Gouvernement fixer lui-même le montant des pénalités, il risque de reculer devant l'obstacle année et après année et de devoir, en 2030, instaurer d'un seul coup une pénalité de 10 euros. Parce que cette mesure sera inacceptable socialement et que les entreprises s'y opposeront, on nous fera modifier la loi en urgence et supprimer cet article.
Il s'est passé la même chose avec les zones à faibles émissions (ZFE) et avec d'autres politiques environnementales qui auraient dû être progressives, mais qui, parce qu'elles ont été conduites brutalement, sont devenues inapplicables. Et c'est ce qui risque de se passer si l'on ne définit pas une trajectoire progressive. Si, dans quelques années, il faut instaurer du jour au lendemain une pénalité de 10 euros, la pression des producteurs et des consommateurs sera telle qu'on l'abandonnera.
J'ajoute que si l'on attend 2030 pour appliquer cette pénalité, il sera trop tard pour l'industrie textile française.
J'entends vos inquiétudes, mais les pénalités qui seront calculées en fonction de l'affichage environnemental pourraient très bien atteindre 10 euros dès la première année. L'inconvénient de vos amendements, c'est qu'ils nous feraient perdre de la souplesse.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CD190 de la rapporteure.
La commission adopte l'amendement.
Amendement CD40 de M. Charles Fournier
Nous proposons d'intégrer dans le périmètre des entreprises soumises à la responsabilité élargie du producteur toutes celles qui facilitent les ventes à distance ou la livraison de produits textiles par l'utilisation d'une interface électronique. C'est une manière de revenir à la question des places de marché : il n'est pas normal que les plateformes numériques contournent l'obligation de payer une écocontribution, ce qui instaure une concurrence déloyale.
Je répète que les places de marché sont déjà soumises à la REP.
Par ailleurs, votre proposition est en contradiction totale avec l'article L. 541-10-9 du code de l'environnement, que vous ne modifiez pas.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CD97 de Mme Alma Dufour.
Amendement CD138 de M. Charles Fournier
Il ne suffit pas de pénaliser la fast fashion, il faut aussi encourager la production locale et inclusive : c'est pourquoi nous proposons d'instaurer une prime en faveur de celle-ci. Il s'agit de ne pas pénaliser les consommateurs et de garantir que des produits continueront d'être mis en marché.
J'ai déjà indiqué que je suis opposée à l'introduction d'une nouvelle pratique commerciale dite de production locale. J'insiste sur le fait que le dispositif de bonus-malus va permettre de soutenir les filières vertueuses, donc les filières françaises. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CD142 de M. Antoine Vermorel-Marques.
Amendement CD38 de Mme Cyrielle Chatelain
Cet amendement est notre dernière chance de fixer dans la loi une pénalité dissuasive sur la fast fashion. Tous les groupes ont indiqué, depuis le début de l'examen de ce texte, qu'ils souhaitaient fixer des seuils. Nous avons fait de multiples propositions en ce sens, à l'article 1er comme à l'article 2. Il importe que la loi soit très claire si nous voulons éviter que des entreprises la contournent.
Encore une fois, je comprends votre intention, mais il me semble que votre amendement aurait pour effet de rigidifier le système. Je répète que, dès que la loi sera votée, on pourra potentiellement appliquer des pénalités allant jusqu'à 10 euros.
Par ailleurs, votre rédaction ne me paraît pas très claire : on ne sait pas si vous visez des entreprises du secteur textile qui commercialiseraient plus de 10 millions de produits ou un produit qui serait vendu à plus de 10 millions d'exemplaires. Dans tous les cas, je ne souhaite pas introduire une pénalité forfaitaire.
Ce qui importe, pour nous, c'est de passer de la possibilité à l'obligation. Par ailleurs, la seule manière de faire changer des entreprises qui sont animées par la logique du vice et qui ne pensent qu'à faire de l'argent, c'est de les pénaliser financièrement.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 2 modifié.
Après l'article 2
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CD104 de M. Antoine Vermorel-Marques.
Amendement CD11 de M. Dominique Potier
Nous proposons qu'un dispositif d'affichage intégrant non seulement des critères environnementaux, mais aussi des critères sociaux, soit obligatoire pour les industriels de l'habillement mettant sur le marché plus de 100 000 unités de produits textiles d'habillement par an.
Il n'est plus possible de modifier les dispositions de l'affichage environnemental, qui est en cours d'expérimentation.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CD13 de M. Dominique Potier et CD101 de Mme Alma Dufour (discussion commune)
Nous proposons d'introduire un affichage social obligatoire dans le secteur textile pour donner au consommateur une information relative au respect de critères sociaux et de droits humains dans la production des vêtements.
Il semble difficile, à terme, d'avoir plusieurs affichages sur les produits textiles. Ce n'est d'ailleurs pas l'objet du texte, qui concerne les déchets. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements CD12 de M. Dominique Potier et CD136 de M. Charles Fournier (discussion commune)
Nous proposons de moduler l'écocontribution des entreprises en fonction de leurs actions pour réduire leur impact sur les droits humains.
L'industrie textile a des conséquences sur l'environnement et sur l'emploi en France, mais elle est aussi responsable de nombreuses violations des droits humains partout dans le monde. Afin de responsabiliser les entreprises, qui font appel à de nombreux sous-traitants, nous proposons que la responsabilité élargie des producteurs intègre les questions relatives aux droits humains et aux droits sociaux.
Je ne peux que partager votre intention et ce sera peut-être l'objet d'un prochain texte, mais je répète que la REP, à l'heure actuelle, ne prend pas en compte ces critères relatifs aux droits sociaux.
La commission rejette successivement les amendements.
Article 2 bis (nouveau) : Critères de l'écomodulation des contributions financières
Amendement CD163 de M. Jimmy Pahun
Vous nous avez dit, madame la rapporteure, que la fabrication annuelle de polyester nécessite 70 millions de barils de pétrole. La mode est très dépendante des énergies combustibles fossiles. Nous avons appris lundi, au ministère, que l'on produit six fois plus de polyester que de coton et que sept pièces en polyester sur dix viennent de la fast fashion. C'est pourquoi nous proposons de proportionner le malus à la quantité de polyester présente dans le vêtement.
J'entends votre préoccupation, mais il paraît difficile d'aller jusqu'à ce niveau de détail dans la loi. Je signale en outre que le polyester, si l'on prend le critère de la durabilité, pourrait obtenir une assez bonne note.
Cela fait plusieurs années que je lis, sur les étiquettes des vêtements, « 40 % de polyester » ou « 70 % de polyester ». Il est donc assez facile de faire varier le malus en fonction du pourcentage de polyester.
Retenir ce critère de modulation contraint à les énumérer tous. Nous ne pouvons pas nous contenter d'ajouter un unique critère.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 2
Amendement CD41 de Mme Cyrielle Chatelain
Cet amendement devrait être largement soutenu, car il est identique à un amendement déposé par les membres du groupe Démocrate et adopté par la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'industrie verte. Il s'agit de lutter contre l'exportation de produits textiles d'habillement contenant des fibres plastiques devenant des déchets qui s'empilent dans certains pays d'Asie et d'Afrique. Loin des yeux, loin de nos préoccupations !
Cette délocalisation des retombées de nos modes de vie et de production n'est plus tolérable. L'amendement des membres du groupe Démocrate nous avait semblé très convaincant. Comme je l'ai indiqué précédemment, la présente proposition de loi se présente comme une mise en application de la loi relative à l'industrie verte.
Comme je l'ai indiqué à M. Stéphane Delautrette, un transfert de déchets, pour être considéré comme illicite, doit remplir plusieurs conditions. La nature des déchets n'y suffit pas. Il n'est pas possible d'assimiler le transfert de produits textiles d'habillement contenant des fibres plastiques à un transfert illicite de déchets.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 3 : Interdiction de la publicité pour les produits et les enseignes de la mode express
Amendement de suppression CD106 de M. Antoine Vermorel-Marques
Un débat de fond, en matière environnementale, est de savoir s'il faut réguler ou interdire. Le système de bonus-malus permet d'internaliser les externalités, qu'elles soient positives ou négatives. L'interdiction de la publicité, telle qu'elle est prévue à l'article 3 pour le secteur de la mode, équivaut à interdire le marché.
On peut plaider en faveur de l'un ou de l'autre, mais pas des deux en même temps. Interdire la publicité pour les entreprises et les produits relevant de la mode éphémère empêche de leur appliquer un malus, faute de marché. Interdire le marché est un choix politique, qui n'est pas le nôtre. Ce qui est sûr, c'est qu'appliquer un système de bonus-malus et interdire le marché sont deux possibilités incompatibles entre elles. Entre régulation et interdiction, il faut faire un choix économique.
Par ailleurs, l'article 3 affaiblit beaucoup la portée de la proposition de loi, compte tenu de la frilosité du Conseil d'État s'agissant de l'interdiction de la publicité, comme l'a montré l'exemple des hydrocarbures. Je crains qu'il ne soit censuré au nom de la liberté d'entreprendre. Au demeurant, ce risque d'anticonstitutionnalité et d'anticonventionnalité est l'argument majeur des opposants au texte.
Au groupe Les Républicains, nous défendons un engagement plus fort sur le système de bonus-malus, pour être plus efficace, d'où la proposition de suppression de l'article 3.
Sans écarter vos arguments, je doute que les mastodontes que sont les enseignes concernées puissent péricliter du jour au lendemain. Il est possible, mais pas certain, que la question du recouvrement des pénalités se pose à plus ou moins court terme.
Au demeurant, si ces enseignes disparaissent, tant mieux ! L'objectif est de les mettre dans le pli de la trajectoire environnementale sous peine de disparaître. Il s'agit d'une mesure ambitieuse. Il importe de maintenir l'interdiction de la publicité pour les entreprises et les produits relevant de la mode éphémère. J'émets un avis très défavorable.
Les écologistes souhaitent limiter, voire interdire la publicité pour les produits climaticides. La loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « climat et résilience », a ouvert la voie. Nous attendons avec impatience la publication de ses décrets d'application.
La loi du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, dite « loi Évin », a interdit la publicité pour l'alcool et les cigarettes, et le marché n'a pas pour autant disparu. Les industries concernées s'en sortent très bien, ce qui au demeurant n'est pas une bonne chose. L'interdiction de la publicité ne les a pas fait péricliter mais a permis de limiter la surconsommation de leurs produits, qui sont dangereux pour la santé.
Nous sommes favorables à l'adoption de dispositions similaires pour les produits dangereux pour l'environnement – la fast fashion l'est au premier chef.
Contrairement aux produits visés par la loi Évin, le textile ne suscite aucune addiction, sinon à la consommation. Surtout, le secteur de la mode dépend étroitement de la publicité. Interdire la publicité, c'est interdire l'industrie.
Quoi qu'il en soit, interdire la publicité et adopter un système de bonus-malus sont deux possibilités incompatibles entre elles, sauf si l'objectif n'est pas de lutter contre la fast fashion pour soutenir les produits fabriqués en France et en Europe, mais est de s'en prendre aux entreprises asiatiques. Le malus finance les industriels français et européens. Interdire la publicité, c'est diminuer les recettes qui en sont issues : certes, nos concurrents asiatiques en seront affaiblis, mais nos industriels ne s'en trouveront pas renforcés.
Pour le bord politique opposé au nôtre, l'interdiction de la publicité est peut-être le vecteur le plus efficace pour lutter contre l'ultra fast fashion, puisqu'il interdit le marché. De notre côté, nous préférons l'instauration d'un système de bonus-malus, pour le réguler.
Nous voterons contre l'amendement. La régulation de la publicité est un complément des autres dispositions du texte.
Nous avons deux impératifs : produire en France les habits dont nous avons besoin, dans le cadre de la réindustrialisation, et en consommer moins, à rebours de la hausse exponentielle de la consommation. Il n'est plus possible de se vêtir avec des habits jetables ; ils doivent durer plus longtemps.
S'agissant de l'addiction, les habits n'en provoquent certes aucune qui soit comparable à celle que suscitent la nicotine et l'alcool. Toutefois, nous sommes confrontés à des entreprises utilisant des outils de marketing basés sur les neurosciences, dont l'objectif est de déclencher une logique d'achat, par exemple en créant un sentiment d'urgence par le biais de promotions exceptionnelles à saisir absolument. Quant à la logique de l'obsolescence émotionnelle, elle induit l'idée qu'il faut avoir plusieurs versions d'un même produit. Ces entreprises travaillent sur nos réflexes pour créer un sentiment d'urgence et une addiction qui nous incitent à consommer.
La régulation de la publicité est l'un des éléments complémentaires et essentiels de la proposition de loi.
Il est déjà arrivé que l'on nous dise que des mesures prises par le Gouvernement étaient contraires à la liberté d'entreprendre et seraient contestées à l'échelon européen. S'agissant du moratoire sur les zones commerciales en périphérie des villes, destiné à lutter contre l'artificialisation des sols, nous avons entendu dire pendant un an qu'il serait censuré en raison de son anticonventionnalité, et que l'Union européenne y verrait une atteinte à la liberté d'entreprendre. Le droit européen est sujet à interprétation, et la France n'a pas été condamnée. Il ne faut pas craindre d'avance le jugement de l'Union européenne.
Par ailleurs, la transition écologique ne doit pas frustrer les gens. Elle doit être bien vécue. Il faut, tout en assurant la progressivité du pouvoir d'achat, assécher l'envie effrénée de consommer. Il est difficile d'encadrer la consommation si les prix augmentent et si la publicité répète à l'envi « C'est génial d'acheter ! » pour faire de nous des consommateurs.
Les classes populaires sont frustrées de ne pas pouvoir consommer ce qu'elles souhaiteraient, d'autant que la publicité en rajoute des couches en permanence. Nous sommes exposés à plus de 1 500 publicités par jour sans même en avoir conscience.
L'article 3 présente un intérêt. Il faut tenter le coup.
La commission rejette l'amendement.
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du jeudi 7 mars 2024 à 9 h 05
Présents. - M. Damien Adam, M. Henri Alfandari, M. Gabriel Amard, Mme Lisa Belluco, M. Édouard Bénard, M. Emmanuel Blairy, M. Anthony Brosse, Mme Danielle Brulebois, M. Pierre Cazeneuve, Mme Cyrielle Chatelain, Mme Bérangère Couillard, M. Stéphane Delautrette, Mme Alma Dufour, M. Charles Fournier, M. Jean-Luc Fugit, M. Daniel Grenon, M. Bruno Millienne, M. Jimmy Pahun, Mme Béatrice Piron, Mme Véronique Riotton, Mme Laetitia Saint-Paul, M. Vincent Thiébaut, Mme Huguette Tiegna, M. Antoine Vermorel-Marques, M. Antoine Villedieu, Mme Anne-Cécile Violland, M. Jean-Marc Zulesi
Excusés. - M. Olivier Becht, M. Jean-Victor Castor, Mme Claire Colomb-Pitollat, Mme Chantal Jourdan, Mme Sandrine Le Feur, M. Marcellin Nadeau