La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé n'est pas encore arrivée. Je suspends donc la séance quelques minutes.
La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour exposer sa question, n° 420, relative à l'assurance des professionnels de santé.
Madame la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, je souhaite vous interroger sur les conséquences du développement de la téléconsultation sur la prime de responsabilité des professionnels de santé. Depuis plusieurs années, le recours à la téléconsultation est encouragé par les pouvoirs publics en tant que réponse à la désertification médicale qui frappe notre pays.
Les modalités de consultation à distance ont été assouplies par décret dès 2018 et de nombreuses collectivités ont investi dans des cabines de téléconsultation – c'est le cas dans ma circonscription en Seine-et-Marne. La crise sanitaire a accentué cette dynamique en démocratisant la pratique pour un grand nombre de Français et de généralistes.
Cependant, le développement de la téléconsultation ne doit pas se faire au détriment de la situation économique des médecins. Dans mon département de Seine-et-Marne, l'un des plus sous-dotés de France métropolitaine en médecins généralistes, de premiers effets néfastes sont déjà observés sur leurs cotisations d'assurance. Les assureurs ont en effet relevé leur prime de responsabilité civile en mentionnant explicitement l'aggravation de la sinistralité entraînée par l'exercice en téléconsultation. D'après des études menées par le secteur assurantiel, les rendez-vous à distance présenteraient des risques accrus de mise en cause du praticien, nécessitant l'intervention de l'assureur.
Parmi les motifs de litiges les plus réguliers, figurent la sous-évaluation de la gravité de l'état de santé du patient à distance et la prescription de traitements inappropriés. Alors qu'il s'agissait d'améliorer l'offre de soins, le relèvement des primes risque de fragiliser les professionnels qui s'engagent dans les téléconsultations en aggravant leurs charges. Ce problème est-il identifié par votre ministère et, le cas échéant, des mesures sont-elles envisagées pour éviter que la téléconsultation ne dégrade la prime d'assurance des médecins ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Nous partageons la volonté de tout mettre en œuvre pour favoriser l'accès aux soins à nos concitoyens. Nous avions d'ailleurs soutenu ensemble plusieurs initiatives en ce sens lors du précédent quinquennat. La téléconsultation fait partie des leviers qu'il nous faut mobiliser, tout en veillant à l'encadrement et à la régulation de son déploiement. Vous m'interrogez sur les pratiques de certains assureurs dans votre circonscription et sur l'augmentation des primes de responsabilité civile des médecins réalisant une partie de leur activité en téléconsultation. Votre question recouvre une interrogation plus large, celle de l'encadrement de cette pratique utile et nécessaire pour favoriser l'accès aux soins et de la lutte contre d'éventuelles dérives.
Tout d'abord, la téléconsultation n'est pas censée représenter un risque plus important qu'une consultation en présentiel. Elle est en effet conçue comme une pratique alternative et complémentaire, et ne peut constituer plus de 20 % du volume d'activité du médecin. Le recours à la téléconsultation relève, en outre, de la seule décision du médecin traitant ou correspondant, qui juge de la pertinence d'une prise en charge médicale à distance plutôt qu'en face-à-face. La téléconsultation est donc impossible pour toute consultation complexe ou toute pathologie ne permettant pas un suivi à distance.
En outre, afin de mieux structurer l'offre de téléconsultation au profit des patients, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023 a renforcé l'encadrement des sociétés de téléconsultation par une procédure d'agrément, dont les textes d'application seront publiés d'ici la fin de l'année. Il s'agit d'éviter toute dérive préjudiciable aux patients et de garantir la qualité des soins dans le respect des exigences de déontologie et d'éthique.
D'après mes services, nous n'avons pas de remontées faisant état de difficultés particulières en lien avec la responsabilité civile médicale. Quant aux cas précis que vous évoquez, je propose que nous y travaillions ensemble.
Je vous remercie pour cette réponse. Je partage en tout point votre analyse et votre diagnostic. Comme vous m'y invitez, je vous transmettrai les informations relatives aux cas concrets dont j'ai eu connaissance, afin que vos services puissent les analyser.
La parole est à M. Emmanuel Taché de la Pagerie, pour exposer sa question, n° 428, relative au centre hospitalier d'Arles.
Le centre hospitalier d'Arles nécessite une recapitalisation tant sa situation financière est dégradée : son déficit cumulé représente plus du tiers de son budget et il est donc dans l'incapacité d'assurer par autofinancement le projet d'investissement de presque 40 millions d'euros visant à regrouper toutes les activités hospitalières chirurgicales publiques et privées sur le site.
S'il a pu compter sur un soutien précieux des collectivités et une rallonge cruciale de l'agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) pour financer l'opération qui permet d'assurer ce regroupement, mais aussi la modernisation et la mise aux normes des activités hospitalières publiques, l'incertitude demeure s'agissant de la réalisation effective des travaux. La viabilité du projet d'investissement du centre hospitalier d'Arles repose sur des fondamentaux que le contexte économique général fragilisera nécessairement. L'appel d'offres visant à attribuer les travaux vient d'être publié dans un contexte d'inflation générale, alors que les indices des coûts de la construction se sont dégradés de 23 % depuis 2019 et de 8 % l'an dernier. À l'ouverture des plis, l'équilibre économique de l'opération risque d'être remis en cause par des facteurs exogènes et incontrôlables.
Dans un tel contexte, le Gouvernement prévoit-il des mesures pour sécuriser la réalisation effective d'opérations hospitalières structurantes comme celle d'Arles ? Si la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, la loi « 3DS », permet aux collectivités de financer les travaux des établissements publics de santé, la dégradation de la situation financière des hôpitaux risque de conduire à systématiser le recours à cette possibilité. Or elle nécessite l'accord de toutes les parties prenantes et la définition d'une stratégie, commune et partagée, d'investissement dans le secteur de la santé.
Sans revenir sur la possibilité offerte par la loi « 3DS », comment le Gouvernement prévoit-il de redonner aux établissements publics de santé financièrement les plus fragiles les moyens de réaliser les investissements indispensables aux territoires sans subir un processus de décision qui joue en leur défaveur ?
J'invite le ministre de la santé et de la prévention, M. Aurélien Rousseau, en Arles afin qu'il puisse constater de lui-même la situation.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
C'est ce gouvernement qui s'est engagé dans la reprise d'une partie de la dette hospitalière, afin précisément de redonner de l'air à notre système hospitalier. Ainsi, dans le cadre du Ségur de l'investissement annoncé à l'été 2020, 15,5 milliards d'euros seront alloués aux établissements de santé jusqu'en 2029 : 7,5 milliards pour le soutien aux projets prioritaires, 1,5 milliard pour l'investissement courant et 6,5 milliards pour la restauration des capacités financières.
Cette dernière brique concerne la situation que vous évoquez, celle d'établissements endettés qu'il est nécessaire d'accompagner vers une amélioration de leur situation financière, afin qu'ils retrouvent les marges de manœuvre nécessaires à la réalisation des projets des communautés hospitalières.
Vous m'interrogez sur le projet de groupement de coopération sanitaire (GCS) à Arles, dans votre circonscription. Les travaux du projet public-privé visant à regrouper l'offre hospitalière d'Arles sur le site du centre hospitalier Joseph-Imbert débuteront l'année prochaine. Le soutien financier de l'État à cette opération a d'ailleurs été annoncé très en amont, dans le cadre du plan Ségur de l'investissement hospitalier, dès 2021. Cet investissement d'envergure représente un coût de plus de 37 millions d'euros. Dans cette évaluation, les surcoûts prévisibles que vous évoquez ont bien été pris en compte par le maître d'ouvrage.
Dès que la dernière estimation financière a été connue, l'ARS a engagé un tour de table des financeurs pour équilibrer le nouveau budget. L'ensemble des collectivités territoriales ont répondu favorablement et se sont engagées dans le soutien financier du projet : la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, le conseil départemental des Bouches-du-Rhône, l'agglomération Arles Crau Camargue Montagnette (ACCM) et la ville d'Arles, ces deux dernières collectivités devant encore préciser leur engagement financier.
Dès que les collectivités auront répondu – si possible avant la fin de l'année –, le directeur général de l'ARS se rendra sur place pour rencontrer les acteurs et valider le plan de financement final. L'État prendra évidemment sa part dans le financement des surcoûts déjà identifiés et de ceux qui pourraient éventuellement survenir dans la suite de la procédure. Le Gouvernement, avec l'ensemble des acteurs du territoire, est donc pleinement mobilisé.
Je vous remercie pour cette réponse, qui a le mérite d'être claire. Vous indiquez que tous les élus sont parties prenantes dans ce projet. Mais le processus décisionnel est long. Je tiens d'ailleurs à remercier l'administration hospitalière locale, qui se démène. Il faut aussi saluer la direction et les personnels administratifs de l'hôpital d'Arles, ainsi que les personnels soignants, pour leur mobilisation exemplaire. Si, sur le papier, notre hôpital est malheureusement à la traîne, il peut compter sur l'investissement de ses personnels.
Pour ma part, je vais agir pour tenter d'accélérer la prise de décision de la région, du département et de l'agglomération. Enfin, je le répète, j'invite le ministre, M. Rousseau, à venir en Arles constater l'avancée du projet et, éventuellement, arbitrer.
La parole est à Mme Anne Stambach-Terrenoir, pour exposer sa question, n° 408, relative à la psychiatrie publique.
C'est un cri d'alarme que j'adresse à M. le ministre de la santé de la prévention : la psychiatrie publique manque de tout, de médecins, de soignants, de lits, de moyens en général. Dans ce tableau dramatique, la Haute-Garonne fait partie des départements les moins bien dotés de France car les moyens de la politique sectorielle n'ont pas suivi l'explosion démographique du département.
Au début des années 1970, un secteur de psychiatrie adulte couvrait environ 70 000 habitants. Aujourd'hui, c'est plus de 170 000, voire jusqu'à 200 000 habitants. Vous rendez-vous compte ? Derrière ces chiffres, il y a des situations dramatiques : il faut six mois à plus d'un an d'attente pour un premier rendez-vous en centre médico-psychologique (CMP). Évidemment, les patients qui n'ont pas pu être pris en charge à temps finissent par atterrir aux urgences un jour de crise. Mais les urgences sont également saturées. Alors certains d'entre eux se retrouvent à dormir plusieurs nuits sur des brancards, dans des pièces sans fenêtre. Ils doivent parfois même être sédatés dans le hall, devant d'autres patients. Les soignants sont désespérés. C'est à des êtres humains en situation de détresse psychique qu'on fait cet accueil catastrophique. Les conséquences de ce manque de moyens chronique, c'est l'inhumanité, tout simplement…
La Haute-Garonne connaît une répartition particulièrement déséquilibrée des moyens entre secteurs public et privé : on compte un lit dans le secteur public pour quatre lits dans le secteur privé. C'est unique en France, et ce n'est pas anodin, parce que le secteur privé, qui obtient l'essentiel des ouvertures de lit ces dernières années, ne prend pas sa part dans la prise en charge des situations les plus complexes – hospitalisation à la demande d'un tiers, personnes en situation de grande précarité, patients cumulant souffrance psychique et addiction. En outre, l'Occitanie est l'une des régions les plus pauvres de France, la précarité se concentrant autour de la métropole toulousaine. Or cette précarité tend à fragiliser les personnes sur le plan psychique et rend plus difficile l'accès aux droits et aux soins.
Face à cette situation, un collectif d'une centaine de médecins psychiatres a interpellé le ministère en 2019 afin de demander le renforcement de la politique de secteur. La création d'un neuvième secteur avait même été envisagée par l'agence régionale de santé (ARS), qui avait mis en place un groupe de travail, interrompu au moment de la crise sanitaire du covid-19.
Tous les personnels de santé que j'ai rencontrés m'ont fait part de la même demande : il faut renforcer les moyens de la politique de secteur dans l'organisation de la psychiatrie publique, ce qui permettrait de répondre à la majorité des besoins. Au lieu de cela, on fait perdre un temps fou aux professionnels en leur demandant de répondre à des appels à projets, dans l'espoir d'obtenir des moyens via des dispositifs innovants, limités dans le temps – la start-up nation à l'assaut de la santé mentale, en somme !
Cet été, le centre hospitalier Gérard-Marchant a fermé temporairement le seul pavillon d'admission pour les jeunes adultes de toute la région Occitanie, faute de personnels, alors qu'un jeune adulte sur cinq présente des troubles dépressifs et que les situations de détresse psychique ont explosé depuis la crise sanitaire chez les jeunes. En septembre, la direction de l'hôpital a annoncé la fermeture de quinze lits au sein de deux unités d'hospitalisation. Il manque en effet seize médecins et trente infirmiers pour prendre correctement en charge les patients.
Se contenter de déplorer le manque de personnels dans le public pour justifier l'orientation des moyens vers le secteur privé est tout simplement irresponsable. Car si les soignants manquent en psychiatrie, s'ils n'en peuvent plus, c'est faute de moyens et de conditions de travail dignes de ce nom ; c'est le résultat d'années d'abandon, d'une politique de sacrifice de la santé publique sur l'autel de l'austérité budgétaire – comme le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, que vous avez honteusement adopté par voie de 49.3 dimanche à vingt et une heures, l'a encore confirmé.
Madame la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, allez-vous enfin entendre les professionnels de santé et doter l'ARS d'Occitanie de moyens suffisants pour garantir une psychiatrie publique de proximité ? Allez-vous, par exemple, créer un neuvième secteur de psychiatrie adulte en Haute-Garonne sans pour autant ponctionner les dotations accordées à d'autres départements ? Ou bien allez-vous poursuivre la privatisation de la prise en charge de la santé mentale, déjà si avancée dans notre département ?
Plus que des applaudissements et des déclarations émouvantes sur leur héroïsme pendant la crise sanitaire, les professionnels de la santé ont besoin de pouvoir exercer leur métier, de pouvoir faire ce pour quoi ils s'engagent corps et âme au quotidien : nous soigner.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Nous partageons tous le constat des difficultés du secteur de la psychiatrie, et le Gouvernement est pleinement mobilisé sur ce sujet essentiel. Dès 2018, nous avons adopté une stratégie d'ensemble pour la santé mentale, que nous avons amplifiée en 2021. Au cours de la période 2018-2026, nous avons engagé plus de 3,3 milliards pour mettre en œuvre des réformes et des mesures importantes en matière de prévention, de parcours de soins et d'inclusion sociale. La psychiatrie a toute sa place dans cette stratégie.
Nous actionnons tous les leviers pour faire face à une crise dont les causes sont multifactorielles. Pour renforcer l'attractivité des métiers et la fidélisation des personnels, nous avons facilité l'exercice mixte entre ville et hôpital prévu par la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé (OTSS). Les professionnels exerçant dans les services de psychiatrie bénéficient aussi des revalorisations du Ségur de la santé. Pour valoriser la discipline et accroître la visibilité de ces carrières, nous avons accentué l'universitarisation de la filière psychiatrique et pédopsychiatrique. Enfin, nous avons promu la pratique avancée en psychiatrie et santé mentale et mené une action résolue pour renforcer les centres médico-psychologiques (CMP).
En septembre 2022, les assises de la santé mentale et de la psychiatrie ont abouti à la création d'un accompagnement spécifique pour renforcer les CMP, afin de réduire les délais d'accès. Pas moins de 24 millions ont d'ores et déjà été attribués à cet objectif en 2022 et 2023, dont plus de 2 millions pour la région Occitanie. Une attention particulière a été portée aux publics vulnérables : à la suite des assises de la psychiatrie en 2021, 720 000 euros supplémentaires ont été débloqués pour la prise en charge des personnes précaires dans cette région. En Haute-Garonne, des recrutements sont en cours pour permettre l'intervention de psychologues et d'infirmiers formés en santé mentale au sein des structures destinées à l'accueil des publics sans domicile stable. Enfin, le conseil territorial de santé (CTS) de Haute-Garonne, aux activités duquel vous avez été invitée à participer, élaborera sa feuille de route et ses plans d'action dès le début de l'année 2024. Comme vous le voyez, nous sommes pleinement mobilisés.
La parole est à M. Jérôme Nury, pour exposer sa question, n° 413, relative au centre hospitalier d'Argentan.
Madame la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, j'aimerais appeler votre attention sur la place que tient l'aumônerie dans les centres hospitaliers, plus particulièrement à Argentan, dans ma circonscription de l'Orne, où vous vous êtes rendue hier.
En mars dernier, la direction du centre hospitalier a pris la décision de ne plus financer le temps de l'aumônier sur les fonds de l'établissement, au motif que ce financement ne respectait pas la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État. Cette suppression de poste suscite de vives inquiétudes parmi les habitants et les patients de notre territoire, très majoritairement catholiques, qui ont le sentiment d'être victimes de positions anticléricales militantes. Contrairement à ce que prétend la direction de l'hôpital d'Argentan, la loi de 1905 prévoit que « pourront toutefois être inscrites auxdits budgets les dépenses relatives à des services d'aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons. »
Tous les hôpitaux de l'Orne assurent le fonctionnement d'un service d'aumônerie destiné à répondre aux besoins spirituels des patients qu'ils accueillent. Tous, sauf désormais celui d'Argentan ! Faire reposer le libre exercice du culte sur la seule intervention de bénévoles, comme le suggère par provocation la direction, est illusoire. Comment l'activité des fidèles pourrait-elle compenser un mi-temps salarié, alors qu'ils ont bien d'autres tâches à assumer dans les paroisses ?
L'hôpital d'Argentan est un établissement de qualité, dont les personnels et les professionnels de santé sont compétents, attentifs et investis. Le service d'aumônerie est un atout du point de vue spirituel et psychologique pour les patients, croyants ou pas, qui choisissent d'y recourir. La suppression du demi-poste d'aumônier est donc très mal vécue : non seulement elle pénalise les patients de l'établissement, mais elle a eu lieu subrepticement, alors que le poste était vacant. Or toutes les candidatures de personnes qualifiées et formées proposées par le diocèse et l'évêque de Sées ont depuis été écartées.
Madame la ministre déléguée, dans cet hémicycle où la laïcité est chère à notre République, pouvez-vous à tout le moins prendre l'engagement de soutenir le maintien d'un poste d'aumônier à l'hôpital d'Argentan ? Afin que cette situation ne se reproduise pas ailleurs dans notre pays, interviendrez-vous, par le biais d'une nouvelle directive plus claire, pour rappeler l'importance de ces services et préciser les modalités de leur financement par les établissements publics de santé ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
J'ai effectivement eu le plaisir de passer la journée d'hier dans votre département, l'Orne, pour découvrir les dispositifs déployés par les acteurs locaux pour satisfaire les besoins de santé de nos concitoyens. Votre interpellation concerne la situation de l'aumônerie de l'hôpital d'Argentan. Vous l'avez dit, conformément à l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905, le principe de laïcité de l'État doit être concilié avec celui de la liberté d'exercice des cultes. C'est pourquoi ce même article dispose qu'en dérogation au principe de non-financement des cultes par l'État, « pourront toutefois être inscrites auxdits budgets les dépenses relatives à des services d'aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons. »
En application de la liberté d'exercice des cultes, rappelée par le code de la santé publique et la charte de la personne hospitalisée, les établissements hospitaliers publics doivent organiser un service d'aumônerie lorsque les ministres d'un culte en font la demande, pour répondre aux éventuels besoins spirituels des patients qu'ils accueillent. Un établissement ayant recruté un aumônier par contrat ne peut donc y mettre fin au motif du principe de séparation des Églises et de l'État. Pour que le libre exercice des cultes soit effectif, les établissements doivent assurer une information suffisante et adaptée à destination des usagers, en précisant les modalités de l'exercice des cultes par voie d'affichage dans un lieu accessible aux patients, ainsi que dans le livret d'accueil.
S'agissant du cas que vous évoquez, les discussions sont toujours en cours entre le centre hospitalier d'Argentan et l'association du diocèse pour aboutir à une offre en adéquation avec les besoins du centre hospitalier.
Je rappelle que les principes d'organisation des aumôneries et d'exercice des missions des aumôniers ont été définis par plusieurs circulaires du ministère chargé de la santé, en particulier celles du 20 décembre 2006 relative aux aumôniers des établissements de la fonction publique hospitalière et celle du 5 septembre 2011 relative à la charte des aumôneries dans les établissements de la fonction publique hospitalière. La circulaire du 5 septembre 2011 est en cours de réactualisation et sera diffusée aux établissements début 2024 pour leur rappeler les règles applicables au sein des établissements publics de santé. Je ne manquerai pas de vous en tenir informé.
Vous nous avez rappelé la législation comme je l'avais fait moi-même. Vous dites que des discussions sont en cours avec le diocèse, mais ce n'est pas le cas, puisque la direction du centre hospitalier nous a invités à trouver des bénévoles ! De manière générale, on manque pourtant cruellement de bénévoles dans les paroisses et les diocèses.
Il faut que vous preniez les choses en main, madame la ministre déléguée. Nous ne pouvons pas tolérer une telle inégalité territoriale : les patients hospitalisés à Flers, à Alençon ou à L'Aigle peuvent avoir recours à un aumônier, mais pas ceux d'Argentan ! Au-delà de l'aspect juridique, vous savez combien une aumônerie est importante pour le bien-être des patients. Nous avons besoin que vous nous prêtiez main-forte dans ce dossier. Je vous remercie par avance !
La parole est à Mme Christelle Petex-Levet, pour exposer sa question, n° 415, relative au service public de psychiatrie en Haute-Savoie.
Madame la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, je me dois de vous interpeller une nouvelle fois à propos de la dégradation alarmante du service public de psychiatrie en Haute-Savoie. À ce jour, la situation est dangereuse. Le ministère de la santé peut-il la prendre à bras-le-corps afin d'apporter davantage que des pansements ?
Au cœur de ma circonscription de Haute-Savoie se trouve un établissement public de santé mentale (EPSM), un hôpital spécialisé en psychiatrie. La direction, le personnel et les représentants des usagers ne cessent de m'alerter sur leur situation, marquée par une multitude de difficultés.
La capacité d'accueil de l'EPSM, réduite de moitié depuis plusieurs mois, faute de personnel soignant, est dérisoire. Souffrant des mêmes difficultés, les centres médico-psychologiques (CMP), chargés des soins ambulatoires, sont incapables de compenser, même partiellement, la disparition des lits d'hospitalisation complète. Sous-dimensionnés par rapport aux besoins et manquant également de personnel, certains espaces d'accueil de jour du département ferment d'ores et déjà leurs portes, alors qu'ils avaient récemment ouvert.
La gérontopsychiatrie n'est pas épargnée : les vingt-cinq lits de l'unité de l'EPSM ont été fermés en 2021 et les patients qui y étaient hospitalisés ont été dispersés dans d'autres services, inadaptés. L'agence régionale de santé (ARS) a également décidé de supprimer ou de réduire les équipes mobiles d'accompagnement des patients souffrants de maladies psychiatriques. Vous mettez ainsi fin à une action concrète, appréciée et indispensable, qui soulageait les établissements de santé !
La Haute-Savoie est par ailleurs confrontée à une cohabitation forcée entre les services de pédopsychiatrie et de pédiatrie. En effet, dans les cas les plus graves nécessitant une hospitalisation en psychiatrie, les mineurs les plus jeunes sont aujourd'hui redirigés vers les services de pédiatrie, les plus âgés vers les services de psychiatrie pour adultes. Ces services ne sont pas adaptés à leurs maux et leur présence pose de graves problèmes d'organisation, mais surtout de sécurité.
Venons-en au cœur du problème : les malades psychiques. J'ai honte ! Comment peuvent-ils adhérer à un traitement, nouer une alliance thérapeutique et envisager de se reconstruire quand ils ne sont plus hospitalisés qu'en état de crise et sous la contrainte, puis rapidement redirigés vers un suivi extra-hospitalier, malheureusement hypothétique ? Dans ce contexte, la qualité des soins, la sécurité et le respect des droits des patients sont en péril.
Madame la ministre déléguée, je ne cesse de vous interpeller : quelles solutions durables mettrez-vous en place pour sauver la psychiatrie en Haute-Savoie et pour aider les malades psychiatriques, qui ont le droit d'être soignés ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Comme je l'ai souligné il y a quelques minutes en répondant à une autre question, nous partageons pleinement le constat des difficultés du secteur de la psychiatrie. Le Gouvernement entend actionner tous les leviers pour y faire face. Dès 2018, nous avons adopté une stratégie d'ensemble pour la santé mentale, que nous avons amplifiée en 2021. Au cours de la période 2018-2026, nous avons engagé plus de 3,3 milliards pour mettre en œuvre des réformes et des mesures importantes en matière de prévention, de parcours de soins et d'inclusion sociale. La psychiatrie a toute sa place dans cette stratégie.
Nous actionnons tous les leviers pour faire face à une crise dont les causes sont multifactorielles. Pour renforcer l'attractivité des métiers et la fidélisation des personnels, nous avons facilité l'exercice mixte entre ville et hôpital prévu par la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé (OTSS). Par ailleurs, les revalorisations du Ségur de la santé bénéficient aux professionnels exerçant dans les services de psychiatrie. Pour valoriser la discipline et accroître la visibilité de ces carrières, nous avons accentué l'universitarisation de la filière psychiatrique et pédopsychiatrique.
L'une des spécificités du département de Haute-Savoie est son positionnement géographique, qui engendre une tension forte dans les ressources médicales et paramédicales. S'agissant des difficultés de l'établissement public de santé mentale de La Roche-sur-Foron, dans votre circonscription, nous avons engagé depuis plusieurs mois un suivi rapproché pour soutenir son activité. Les établissements de psychiatrie des départements voisins de l'Ain, de la Savoie et du Rhône ont été mis à contribution. L'ARS a reçu l'autorisation d'augmenter le plafond de la prime de solidarité territoriale afin de mobiliser les praticiens des autres établissements. Une cellule de régulation est déployée plusieurs fois par semaine pour trouver des lits aux patients nécessitant une hospitalisation à temps plein. Enfin, un nouveau directeur prendra prochainement ses fonctions.
En lien avec l'ensemble des services de l'État, nous souhaitons poursuivre notre action de soutien aux personnels et apporter des solutions pérennes permettant de renforcer les équipes soignantes.
Je vous remercie d'avoir rappelé l'historique des actions de l'État : nous le connaissons. En effet, un nouveau directeur prendra bientôt ses fonctions à l'EPSM de La Roche-sur-Foron et les établissements voisins ont fait tout leur possible pour soutenir l'établissement – mais il ne s'agit que de pansements. Le personnel est à bout : venez visiter cet établissement de Haute-Savoie, vous le constaterez !
Nous n'avons plus de psychiatres libéraux et pas de places dans les hôpitaux psychiatriques. Nous en sommes témoin quand nous passons des journées en immersion dans les services : en pédiatrie, des enfants hospitalisés pour une appendicite ou une jambe cassée côtoient des jeunes souffrant de troubles psychiatriques dangereux. Nous avons eu de la chance jusqu'à présent, il n'y a pas eu de problème grave, mais nous sommes tous préoccupés et nous avons peur – nous avons bien sûr été frappés par ce qui s'est passé à Annecy au printemps dernier.
Madame la ministre déléguée, je vous remercie d'entendre notre cri d'alarme et de prendre en compte la situation de la Haute-Savoie.
La parole est à M. Emmanuel Mandon, pour exposer sa question, n° 399, relative au centre hospitalier du Gier.
J'appelle l'attention du Gouvernement sur l'inquiétude des personnels des services hospitaliers liée à l'adaptation de la planification de l'offre de soins, à court et moyen terme, dans de nombreux territoires.
En Auvergne-Rhône-Alpes, à l'issue de plusieurs mois de réflexion et d'expertise, un état des lieux a été dressé dans le but d'élaborer le nouveau schéma régional de santé pour les années 2023-2028. Selon l'Agence régionale de santé (ARS), les documents qui ont fait l'objet de cette révision tiennent compte de la situation actuelle du système de santé et de l'évolution des besoins en soins. Mais ces réflexions ont été conduites dans la période post-covid, à un moment où le contexte était particulièrement contraint, en raison notamment d'une dégradation des marges financières des établissements publics hospitaliers et des établissements médico-sociaux.
Il convient donc d'être particulièrement attentif à ce que la planification élaborée tienne compte des conditions régulières de fonctionnement et des évolutions prévisibles, d'autant que l'offre médico-sociale et l'offre de soins sont déclinées en fonction des activités autorisées et des territoires, ce qui nécessite un travail fin d'analyse des conséquences des arbitrages réalisés par les ARS, et ce pour chaque établissement.
S'agissant spécifiquement du centre hospitalier du pays du Gier, à Saint-Chamond, il m'a été indiqué que le service de soins intensifs, dits dérogatoires, pourrait se transformer en service de soins continus. Bien qu'il existe un référentiel pour les soins critiques, rappelons que tout changement de statut ainsi programmé ne manque pas de susciter de réelles interrogations, voire de véritables inquiétudes. En effet, la fermeture d'un service de soins intensifs n'est absolument pas anodine pour un établissement et pour la pérennité des structures hospitalières. Il existe un risque de perdre rapidement des compétences et des capacités d'intervention et de prise en charge de patients critiques sur un site, soit un impact préjudiciable sur l'offre de soins. J'ai cité le centre hospitalier de Saint-Chamond, mais cette situation concerne le groupement hospitalier de territoire (GHT) de la Loire dans son ensemble.
J'en conviens, la situation dans ce département n'est pas des plus tendues. L'hôpital du Gier a consenti de gros efforts, notamment pour la rénovation de son service d'urgences. Les équipes sont très motivées, en particulier les urgentistes, les anesthésistes-réanimateurs et les infirmières formées en soins intensifs.
Madame la ministre déléguée, quelles mesures opérationnelles pouvez-vous garantir pour maintenir la qualité et la sécurité des soins, mais aussi pour rassurer les équipes de soignants, les habitants du pays du Gier et les élus ? J'appelle de mes vœux l'ouverture d'une concertation avec l'ensemble des acteurs locaux.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Le schéma régional de santé de la région Auvergne-Rhône-Alpes pour la période 2023-2028 a été publié à la fin du mois d'octobre. Ces derniers jours, vous en avez discuté avec le cabinet du ministre de la santé et de la prévention, Aurélien Rousseau. Permettez-moi de vous fournir des éléments d'information complémentaires.
S'agissant des autorisations relatives à la réanimation et aux soins intensifs polyvalents, l'ARS avait délivré provisoirement, pour faire face à la crise du covid, onze autorisations dérogatoires de réanimation adulte, conformément aux demandes des établissements. Six d'entre elles sont encore actives. Il a été décidé de les prolonger jusqu'à la mise en œuvre de nouvelles autorisations prévues dans le schéma régional de santé, afin d'éviter les ruptures d'organisation dans les établissements, qui se verront attribuer des autorisations de soins critiques. Aucun établissement ne verra sa situation dégradée par rapport aux autorisations ou aux reconnaissances qu'il détient actuellement.
S'agissant du centre hospitalier du pays du Gier, il n'est pas, à ce jour, détenteur d'une autorisation pérenne de réanimation adulte, mais d'une reconnaissance contractuelle de soins continus. Par ailleurs, il n'a pas fait l'objet d'une autorisation dérogatoire durant la crise du covid. Le schéma régional de santé prévoit la possibilité de créer une autorisation supplémentaire de soins polyvalents dérogatoires par rapport à l'existant dans la Loire. Les établissements de santé du département pourront donc demander la création d'une unité de soins intensifs polyvalents dérogatoires.
Je vous remercie, madame la ministre déléguée, pour ces précieuses informations. Les mots ont leur importance.
Oui !
Je souhaite la meilleure organisation possible, dans l'intérêt du territoire et du service rendu à nos concitoyens. Je connais les contraintes de notre pays dans un contexte difficile. En tout état de cause, je suis optimiste quant à la situation du centre hospitalier du pays du Gier.
La parole est à M. Michel Castellani, pour exposer sa question, n° 410, relative au centre hospitalier de Bastia.
Madame la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, je souhaite appeler votre attention sur le projet de refondation du centre hospitalier de Bastia et souligner, une fois de plus, à quel point il est important de doter la ville d'un nouvel hôpital. Cet enjeu est prioritaire pour les habitants de la commune et pour l'ensemble de la Corse. L'établissement couvre les besoins hospitaliers de 60 % de la population de l'île et d'environ 600 000 personnes durant la période estivale. Si des investissements d'urgence ont été consentis pour tenter d'atténuer l'obsolescence de la structure, il n'en demeure pas moins que le diagnostic architectural de 2018 reste d'actualité : saturation du site, insuffisance des espaces médicaux et paramédicaux, manque de surface pour les activités d'urgence, vétusté de plusieurs services logistiques et difficulté à atteindre le nombre standard de lits par unité d'hospitalisation.
Face à un tel constat, le Gouvernement avait pris la décision de nommer des experts dans le cadre du Conseil national de l'investissement en santé (Cnis). Malgré mes demandes répétées, les conclusions de leur rapport n'ont jamais été rendues publiques. Le 5 mai dernier – il y a plus de six mois –, vous m'aviez vous-même indiqué qu'elles le seraient avant la fin de l'été, mais ce n'est toujours pas le cas.
Une issue positive tend cependant à se dégager depuis le mois de septembre. À l'occasion de son voyage sur l'île, le Président de la République a formulé une volonté claire : « Je veux que Bastia dispose dans les prochaines années d'un centre hospitalier à la hauteur des besoins des habitants. » Madame la ministre déléguée, quels sont la nature et l'échéancier des mesures que prendra le Gouvernement pour concrétiser cette décision du Président de la République ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Monsieur Castellani, voici les éléments dont je tenais à vous faire part au sujet de la refondation du centre hospitalier de Bastia. La nécessité d'un projet immobilier pour améliorer les conditions d'accueil et de travail dans cet établissement est reconnue et l'engagement pris par le Président de la République sera respecté. Un projet de cette ampleur requiert des choix structurants, éclairés par des expertises techniques. Il implique un temps d'instruction qui peut paraître long, j'en conviens, mais qui est gage de la solidité technique et financière des options qui seront retenues.
À la demande de l'agence régionale de santé (ARS) de Corse, le centre hospitalier de Bastia a instruit un nouveau scénario en faveur d'un projet immobilier capable de répondre à ses besoins, mais aussi de régler les difficultés que les hypothèses étudiées jusque-là ne résolvaient pas. Ce nouveau scénario sera élaboré grâce à l'expertise renouvelée du Cnis, dont des membres se rendront sur place dans les meilleurs délais. Ce projet est suivi de manière prioritaire par l'ARS de Corse, en lien avec les équipes du ministère de la santé et de la prévention. Nous veillerons à votre bonne et régulière information par son intermédiaire.
Je vous remercie pour votre réponse. Le Gouvernement doit prendre conscience du caractère indispensable de la refondation de l'hôpital de Bastia. Je ne souhaite nullement vous mettre en difficulté, mais il faut agir ! J'invite M. le ministre de la santé et de la prévention à venir à Bastia pour constater par lui-même les conditions désastreuses dans lesquelles travaille le personnel, auquel je rends hommage.
Je continuerai à vous solliciter autant que de besoin, puisqu'il s'agit d'un enjeu prioritaire pour la santé des Corses et des visiteurs de la Corse.
La parole est à M. Jean-François Rousset, pour exposer sa question, n° 421, relative aux Ehpad.
Dans ma région, comme partout en France, les Ehpad connaissent des difficultés financières profondes. Je m'exprime ici en ma qualité de député aveyronnais et en accord avec mon collègue Stéphane Mazars. L'inflation a eu un impact direct sur les coûts de fonctionnement des établissements, des charges soumises aux prix de l'énergie et de l'alimentation et les salaires des personnels. Cette tension, liée à la conjoncture économique, résulte également d'une difficulté de recrutement des personnels soignants, obligeant les établissements à recourir à des personnels contractuels. Un directeur d'établissement m'a récemment confié : « Nous avons deux fois moins d'infirmiers, qui nous coûtent deux fois plus cher. »
Face à cette crise, le Gouvernement a débloqué des moyens inédits, dont un engagement financier historique pour revaloriser les métiers de l'aide à domicile, par le biais de l'avenant 43. Il a également reconduit les moyens de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), octroyer des aides exceptionnelles pour faire face à l'inflation et instaurer un bouclier tarifaire sur les dépenses d'énergie. Ces mesures étaient nécessaires, mais il faut aller plus loin.
Ne faudrait-il pas, en particulier, mener une réflexion approfondie sur le financement des Ehpad et sur le double portage entre les départements et les agences régionales de santé (ARS), qui dédouble la tutelle ? Des expérimentations ont-elles été menées ? Comment abordez-vous l'enjeu de la formation des infirmiers ? De quels leviers disposons-nous pour détendre la pression sur les effectifs ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Mme la ministre des solidarités et des familles, Aurore Bergé, m'a priée de vous fournir la réponse suivante : face aux difficultés financières des Ehpad, exacerbées par l'inflation, l'État a pris plusieurs mesures d'accompagnement. En 2022, 440 millions d'euros ont été alloués, dont 100 millions pour contrer l'inflation. Le bouclier tarifaire sur l'électricité et le gaz a été élargi aux Ehpad rétroactivement, à compter de juillet 2022. En 2023, ce soutien se poursuit, avec le maintien du bouclier tarifaire et la hausse de 5,1 % des ressources dédiées aux Ehpad dans la loi de financement de la sécurité sociale.
Les ARS surveillent étroitement les Ehpad en difficulté. Un fonds exceptionnel de 100 millions a été créé l'été dernier pour les établissements et les services médico-sociaux connaissant des difficultés de financement. En outre, un groupe de travail a été lancé pour revoir le modèle économique des Ehpad : il examine notamment la fusion des sections soins et dépendance, répondant ainsi à une demande du secteur, mais aussi l'amélioration du recours au tarif global ou encore le financement des places habilitées à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale. Ces possibles évolutions s'appuieront sur les conclusions du groupe de travail et du rapport sur le reste à charge en Ehpad de Christine Pires Beaune.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024 prévoit une réforme structurante à partir de 2025. Les départements et les Ehpad en difficulté seront soutenus financièrement grâce à la simplification et à la pérennisation du financement des établissements. Pour les départements qui le souhaitent, en lien avec le besoin de soins croissant des résidents, la sécurité sociale financera la section dépendance des Ehpad. Ce soutien financier est primordial compte tenu de la situation difficile de certains établissements. Il permettra de renforcer les actions de prévention dans les Ehpad.
Enfin, comme vous le savez, nous avons lancé la restructuration du métier d'infirmier et de sa formation. Les professionnels qui auront bénéficié de cette nouvelle formation exerceront d'ici quelques mois ou quelques années.
La parole est à Mme Géraldine Bannier, pour exposer sa question, n° 398, relative aux fleurs françaises aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024.
Je souhaite interroger le Gouvernement au sujet de la participation de la filière des fleurs françaises aux Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de 2024. Une nouvelle variété de dahlia a été créée pour les JOP de Paris. De couleur rouge, comme la flamme olympique, la fleur sera visible partout dans la capitale. Dans une plantation près de Paris, une jardinière et son équipe ont entre leurs mains ce dahlia imaginé dans un laboratoire du parc floral, qui embellira les espaces des Jeux l'été prochain.
Pour les producteurs de fleurs et les fleuristes français, tout comme pour les agriculteurs de nos terroirs, les JOP de 2024 constituent une belle opportunité de se faire valoir. Les Jeux sont l'occasion de promouvoir le label Fleurs de France, propre à favoriser une production française locale et de qualité. Les horticulteurs français sont d'ailleurs mobilisés pour fournir l'intégralité des plantes du futur village olympique.
Cependant, aucune annonce n'a été faite concernant les fleurs offertes en récompense aux athlètes vainqueurs. La cérémonie de remise des médailles est pourtant une tradition et serait une belle vitrine pour les fleuristes et horticulteurs français. Il paraît naturel que ces derniers soient mobilisés pour fournir les fleurs remises lors des cérémonies de remise de prix ; ils y sont prêts.
La filière des fleurs coupées serait particulièrement fière de se mettre au service d'un tel événement. Le Collectif de la fleur française et ses membres – floriculteurs, fleuristes et grossistes – travaillent tous les jours à la relocalisation de la production de fleurs sur notre territoire. Ces Jeux ont une ambition environnementale très forte ; les fleurs françaises ne peuvent qu'y contribuer.
Aussi, madame la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, dans quelle mesure la filière française des producteurs de fleurs sera-t-elle mise à contribution à l'occasion des JOP de 2024 ? Au-delà de l'embellissement des espaces, est-il prévu d'intégrer les fleurs françaises aux récompenses offertes lors des Jeux ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Mme la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra, m'a chargée de vous répondre. Nous nous réjouissons que la filière horticole française soit mise à l'honneur lors des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, notamment dans le cadre des aménagements du futur village des athlètes. Elle bénéficiera ainsi d'une large visibilité de son savoir-faire.
Vous l'évoquez fort justement : la France témoigne d'une ambition environnementale inédite puisqu'elle prévoit de diviser par deux l'empreinte carbone de ces Jeux par rapport aux précédents – ce sera l'un des sept marqueurs de cette édition, la première à s'aligner sur l'accord de Paris. Pour atteindre cet objectif, il convient de limiter au maximum toute source d'émission de CO
Aussi n'est-il effectivement pas prévu d'offrir des fleurs aux athlètes lors des cérémonies de remise de médailles. Nous choisissons, vous l'aurez compris, la sobriété et l'excellence environnementale, comme l'ensemble des parties prenantes de Paris 2024. L'aménagement floral réalisé par les horticulteurs au sein du village des athlètes constituera néanmoins sans nul doute une très belle victoire du savoir-faire français, dont nous serons tous très fiers.
La parole est à Mme Marie Pochon, pour exposer sa question, n° 400, relative aux violences faites aux femmes dans les territoires ruraux.
Dans 91 % des cas de violences sexuelles, les femmes connaissent leurs agresseurs : ce sont nos partenaires, nos amis, nos frères, nos collègues, nos conjoints souvent. En France, 213 000 femmes sont chaque année victimes de violences physiques ou sexuelles de la part de leur conjoint ou ex-conjoint. Plus d'une femme sur deux – une sur deux ! – a été ou sera harcelée et agressée sexuellement au cours de sa vie. C'est moi, c'est ma sœur, c'est vous, peut-être votre maman, votre fille, votre tante, votre compagne – nous toutes.
Cette réalité en masque une autre, glaçante : la moitié des féminicides ont lieu en zone rurale, alors même que seulement 30 % de la population y vit. On en parle peu. Nous, femmes des villages et des petites villes, en parlons tout aussi peu, malheureusement. Seulement un quart des appels pris en charge par le 3919 proviennent d'un département majoritairement rural. Sont en cause l'isolement, les grandes difficultés d'accès aux services publics et le manque de connaissance des droits, qui mène au non-recours. Ajoutez à cela le fait qu'en milieu rural tout le monde se connaît, la persistance de normes sociales genrées et la difficulté à se déplacer, conséquence des inégalités d'accès au permis de conduire ou du prix du carburant.
La délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de l'Assemblée nationale avait déjà, il y a deux ans, rendu un rapport édifiant à ce sujet. Afin d'améliorer la vie et la sécurité des femmes en ruralité, il proposait soixante-dix mesures, dont certaines étaient urgentes : création de brigades de gendarmerie mobiles, de cellules spécialisées au sein des gendarmeries, de points d'écoute dans les maisons France Services, campagne de sensibilisation dans les écoles, désignation d'élus référents dans chaque équipe municipale.
Près de la moitié des quinze interventions pour des faits de violences intrafamiliales que mène toutes les heures la gendarmerie dans notre pays ont lieu dans ces territoires. Faute de services publics de proximité, les professionnels de santé, les associations et les élus locaux sont en première ligne pour tenter de venir en aide aux femmes victimes de violences dans les territoires ruraux. Je veux ici les en remercier.
Madame la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, il est grand temps que cette « grande cause du quinquennat » se concrétise dans nos campagnes, alors que les femmes sont, une fois de plus, les grandes oubliées de votre plan France ruralités. L'année dernière, lors de l'examen de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), nous avions obtenu, dans l'ensemble des villages les plus petits et les plus enclavés de France, l'expérimentation pour cinq ans de brigades de gendarmerie mobiles dédiées au recueil de la parole des femmes victimes de violences. La mesure a été retoquée en commission mixte paritaire. J'ai une nouvelle fois proposé, il y a quelques semaines, lors de l'examen du budget, un soutien financier à ces expérimentations, lequel a été balayé par le 49.3.
Il est grand temps de cesser de sous-estimer ces violences. Les moyens destinés à la création de nouvelles brigades de gendarmerie n'ont pas été fléchés et les brigades existantes demeurent insuffisamment dotées pour lutter efficacement. J'en suis persuadée, les femmes rurales ne sont pas que des victimes. Elles sont les héroïnes d'un monde qui reste à construire, celui de l'égalité réelle. Quand allez-vous enfin amplifier et financer la lutte contre les violences faites aux femmes en milieu rural ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.
Vous avez raison, les femmes qui vivent en milieu rural sont plus vulnérables. Elles représentent 30 % de la population rurale, mais 50 % des victimes de violences conjugales. Depuis 2019, nous agissons sans relâche pour protéger ces femmes, notamment en renforçant les dispositifs « d'aller vers » et en enregistrant les plaintes des victimes à l'hôpital ou à leur domicile. En 2023, treize régions ont reçu un financement pour déployer soixante-deux dispositifs « d'aller vers » ; 1,7 million d'euros seront mobilisés en 2024 pour poursuivre leur déploiement.
Le plan Toutes et tous égaux permettra de renforcer les permanences des associations d'aide aux victimes au sein des maisons France Services et des bus France Services, en formant des référents violences et en renforçant les bus itinérants associatifs d'information en zone rurale. Compte tenu de leur couverture territoriale, les maisons France Services constituent des acteurs clés pour repérer et orienter les victimes.
Nous soutenons également, à hauteur de 20 000 euros, le programme Élus ruraux relais de l'égalité (Erre), lancé par l'Association des maires ruraux de France (AMRF) pour sensibiliser les élus de ces territoires et permettre une meilleure coordination entre les acteurs concernés. Une convention de partenariat a été signée le 29 septembre lors du congrès de l'AMRF avec la fédération nationale des centres d'information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF).
Enfin, nous avons soutenu les acteurs associatifs en ruralité dans le cadre de l'agenda rural, avec un financement de 1,5 million sur deux ans en 2021 et 2022 : quarante-neuf projets ont été financés afin d'améliorer l'information, l'accompagnement et la prise en charge des femmes en difficulté ou des victimes de violences. Soyez assurée, madame la députée, de la détermination du gouvernement.
La parole est à Mme Eléonore Caroit, pour exposer sa question, n° 422, relative au certificat de nationalité française.
Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux.
Nos compatriotes qui résident à l'étranger rencontrent souvent des difficultés lorsqu'ils doivent apporter la preuve de leur nationalité française. Je suis alertée très régulièrement par des Français établis hors de France à qui les autorités consulaires du pays de résidence demandent, à l'occasion d'un renouvellement de titre d'identité ou d'une première demande de passeport, un certificat de nationalité française (CNF).
La procédure d'obtention de ce certificat, particulièrement longue et lourde – nécessitant la production de nombreux documents originaux –, est souvent vécue comme une injustice par les Français nés à l'étranger car elle n'est pas obligatoire pour les Français nés en France. La perte de nationalité, à laquelle peut aboutir la procédure, est généralement incomprise et très mal vécue par nos concitoyens, a fortiori lorsqu'ils ont été considérés comme Français par le consulat pendant des années, possèdent un numéro d'identification consulaire (Numic), sont inscrits sur le registre des Français établis hors de France et votent aux élections françaises, voire même, comme cela a été le cas au Mexique pour l'un d'entre eux, ont été élus de la République.
Je me suis rendue récemment au service central d'état civil des Français nés hors de France, à Nantes, pour comprendre le problème. Face à cette situation, le Gouvernement a pris le décret du 17 juin 2022 modifiant les modalités d'instruction et de recours des demandes de CNF, entré en vigueur en septembre dernier, afin de fluidifier la procédure et de réduire les délais. Un an après l'entrée en vigueur du décret, je souhaiterais connaître l'évolution du nombre de procédures d'instruction, du nombre de recours et des délais de procédure relatifs au certificat de nationalité française.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.
Nous connaissons votre engagement sur la question des certificats de nationalité française, madame la députée. Vos échanges réguliers avec le cabinet du garde des sceaux à ce sujet en témoignent. Je rappelle qu'en application des textes relatifs aux titres d'identité, l'usager qui sollicite la délivrance d'un tel document doit justifier de son identité, de son état civil et de sa nationalité française. Les services consulaires sont ainsi fondés à demander la production d'un CNF lorsque la situation du demandeur au regard de la nationalité française nécessite une analyse approfondie.
Tel est le cas, souvent complexe, pour les Français de l'étranger, en raison d'éléments d'extranéité qui nécessitent d'analyser des actes d'état civil étrangers, d'établir une chaîne de filiation jusqu'au premier ascendant français et de vérifier l'absence de perte de la nationalité française. À l'inverse, la situation des Français résidant sur le territoire national, en grande majorité nés en France de parents eux-mêmes nés en France, ne connaît pas une telle complexité.
En matière de nationalité française, les services des consulats, des préfectures et des tribunaux sont confrontés, comme vous le savez, à un phénomène de fraude documentaire important, notamment en ce qui concerne les pièces de l'état civil. C'est pourquoi ils font preuve de prudence. Quant à l'évolution des demandes de certificats de nationalité française depuis la réforme du 17 juin 2022, le garde des sceaux ne sera en mesure de vous apporter des éléments chiffrés qu'au cours du second semestre 2024, lorsque les données statistiques seront consolidées. Soyez assurée qu'il n'y manquera pas.
La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.
La parole est à M. Frédéric Zgainski, pour exposer sa question, n° 397, relative au centre pénitentiaire de Gradignan.
J'ai déjà alerté M. le garde des sceaux par courrier de la situation extrêmement préoccupante du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan, en Gironde. Je me fais le porte-voix du personnel et de la direction, de leur détresse psychologique et physique quant à leur condition de travail et à leur avenir.
Malgré nos alertes, la situation reste critique. Comment pouvons-nous ne pas agir alors que le centre pénitentiaire pâtit de taux d'occupation exceptionnels, parmi les plus élevés de France ? Pour rappel, voici les chiffres : 231,15 % dans le quartier des hommes, 242,86 % dans le quartier des femmes, soit une moyenne de 221,20 % à Gradignan – la moyenne française est de 125 % –, avec 111 matelas disposés au sol.
On s'en doute, les tensions entre détenus et surveillants croissent, la détresse psychologique s'étend chez les uns comme chez les autres, la situation devient intenable, et nous ne faisons rien. Il y a quelques jours, un détenu a jeté de l'eau bouillante au visage d'une surveillante. Je lui apporte tout mon soutien, ainsi qu'à ses collègues, et je lui souhaite un prompt et complet rétablissement. Ajoutez à cela une dégradation extrême du bâtiment, symbolisée par des caillebotis endommagés, qui permettent des livraisons de drogue par drone, et vous en conclurez que la sécurité n'est assurée pour personne.
Des avancées avaient pourtant été constatées après la conclusion d'un accord inédit entre le centre pénitentiaire et les tribunaux judiciaires de Bordeaux et Libourne, prévoyant de réguler le taux de criticité en deçà de 190 %. Il n'est cependant pas respecté aujourd'hui. Un nouveau centre doit être livré à partir du milieu de l'année 2024 et achevé en 2026, dans plus de deux ans.
Madame la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire, que comptez-vous faire pour faire appliquer avec efficacité le mécanisme de régulation carcérale et sécuriser le centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan en remplaçant l'ensemble des caillebotis endommagés ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire.
Je vous prie d'excuser l'absence du ministre de la justice.
Je vous remercie pour votre question, qui me permet de rappeler les objectifs du plan immobilier pénitentiaire de construction de 15 000 places de prison : assurer l'effectivité de la réponse pénale et améliorer les conditions de travail et de sécurité de nos agents pénitentiaires.
J'ai bien conscience de la difficulté des conditions de détention au centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan. L'édification d'un nouvel établissement de 600 places sur le domaine actuel est largement engagée. Un premier bâtiment, dont les travaux de construction ont débuté en avril 2021, sera mis en service au premier trimestre 2024. Les détenus hébergés dans le bâtiment B de l'établissement actuel y seront transférés afin de permettre la construction du second bâtiment, qui sera mis en service en 2026.
Les services de l'administration pénitentiaire œuvrent chaque jour pour désencombrer l'établissement en orientant les personnes détenues vers d'autres établissements pénitentiaires et en développant les alternatives à la détention provisoire et les aménagements de peine lorsque cela est possible.
Un accord a été signé le 28 novembre dernier entre les chefs de juridiction de Bordeaux et de Libourne et la direction interrégionale des services pénitentiaires (Disp) de Bordeaux. Il stipule que le chef d'établissement du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan informe tous les acteurs de ce protocole, de manière hebdomadaire, du taux d'occupation. En outre, afin de sécuriser l'établissement, 44 caillebotis de protection seront remplacés d'ici la fin de l'année 2023, pour un montant de 46 000 euros. Depuis mars 2022, la sécurité de l'établissement a été renforcée par le déploiement d'une équipe locale de sécurité pénitentiaire composée de dix agents.
Je vous remercie pour ces éléments de réponse. Les crédits que nous avons adoptés dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 sont, certes, importants à l'échelle nationale. En l'espèce, ce qui m'importe, c'est l'application de l'accord du 28 novembre. Je vous confirme que le directeur du centre pénitentiaire de Gradignan communique bien le taux d'occupation des différents bâtiments aux acteurs concernés, mais les chiffres que j'ai cités montrent que nous sommes loin de l'objectif d'un taux d'occupation inférieur à 190 %.
Nous avons constaté un progrès lorsque l'administration a décrété un « stop écrou » au centre pénitentiaire de Draguignan, mais celui-ci ne souhaite pas en être réduit à recourir de nouveau à ce dispositif. J'insiste donc sur la nécessité de faire appliquer l'accord, dont l'ensemble des parties dépendent du ministère de la justice. Il y va des conditions de travail et de la qualité de vie au travail du personnel pénitentiaire, qu'il convient d'améliorer si nous voulons pouvoir recruter de nouveaux agents.
La parole est à Mme Alexandra Martin (Alpes-Maritimes), pour exposer sa question, n° 414, relative au programme Syracuse V.
Je souhaite appeler l'attention du ministre des armées sur le développement du programme de télécommunication Syracuse V – système de radiocommunication utilisant un satellite. Du point de vue opérationnel, les systèmes spatiaux sont des multiplicateurs d'efficacité et des catalyseurs de forces. Durant la préparation des opérations, ils contribuent à l'élaboration du renseignement. Les satellites donnent également accès à des informations concernant le positionnement, la météorologie, l'hydrographie ou la synchronisation temporelle, indispensables à l'efficacité de l'action militaire. La loi de programmation militaire 2024-2030, que nous venons d'adopter, alloue 6 milliards d'euros au spatial de défense. Un tel budget est d'autant plus nécessaire que les systèmes spatiaux ont démontré leur contribution à l'efficacité de nos forces armées.
Il se trouve qu'est implanté à Cannes, au cœur de ma circonscription, un grand acteur industriel du spatial national et mondial : Thales Alenia Space. Cette entreprise, qui fabrique depuis trente ans les télescopes des satellites de renseignement français – Helios, Pléiades et composante spatiale optique (CSO) –, a intégré le programme de satellites de télécommunications militaires Syracuse.
Or, ce leader du spatial a quelques inquiétudes quant à son avenir. En effet, malgré la reconnaissance de sa compétence et de ses savoir-faire, cette entreprise a cessé de travailler sur des programmes spatiaux de la défense depuis deux ans, à la suite de la livraison du dernier télescope du programme CSO et du satellite Syracuse 4A, mis en orbite en 2021.
Par ailleurs, la disparition annoncée du satellite Syracuse 4C expose le secteur à des risques graves en le privant de commandes de satellites militaires pendant plusieurs années. Les conséquences en seront très préjudiciables non seulement pour le pays, sur le plan de sa souveraineté, mais aussi pour le site cannois de Thales Alenia Space, dont le chiffre d'affaires sera affecté.
C'est pourquoi je souhaiterais savoir si le ministère des armées envisage de lancer très rapidement les études de développement de Syracuse V afin, d'une part, de garantir aux armées françaises leur connectivité et la supériorité opérationnelle d'un système de communication souverain, et, d'autre part, de permettre au site cannois de Thales Alenia Space de maintenir son expertise et à l'ensemble de ses salariés de regarder l'avenir avec sérénité.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire.
Je tiens, en premier lieu, à vous confirmer l'importance de cette société qui se caractérise par le haut niveau de son savoir-faire et de sa technicité. Du reste, l'accompagnement de Thales Alenia Space par la direction générale de l'armement dans le cadre des programmes militaires lui a permis de développer et de maintenir des savoir-faire indispensables et de se positionner au meilleur niveau mondial sur un marché exigeant et concurrentiel.
Pour la suite, Thales Alenia Space est appelé à s'inscrire pleinement dans le contexte de la loi de programmation militaire 2024-2030, qui consacre 6 milliards d'euros au spatial. Je peux ainsi vous assurer de la vigilance du ministère des armées sur le maintien des compétences de cet acteur, qui fait l'objet d'un suivi particulier de la direction générale de l'armement (DGA), dont une délégation s'est d'ailleurs très récemment rendue sur le site de Cannes.
Le programme majeur Iris – infrastructure de résilience et d'interconnexion sécurisée par satellite –, successeur du programme CSO d'observation spatiale, est prévu par la loi de programmation militaire. La DGA est pleinement investie dans la conduite de ce programme. Ainsi le ministère a-t-il lancé, depuis plusieurs années, au titre de sa préparation, des études de maturation technologique, toujours en cours, dont une grande partie a été attribuée à Thales Alenia Space. Il est prévu que ces développements technologiques, qui contribuent de façon significative au maintien des compétences de la société, se poursuivent, notamment grâce aux financements alloués par la loi de programmation militaire.
Enfin, une démarche similaire est à l'étude dans le domaine des communications par satellite, en vue notamment de préparer le programme Syracuse V. En conséquence, vous pouvez compter sur le soutien des équipes du ministère, notamment de la DGA, pour accompagner Thales Alenia Space dans le temps et conserver en France un savoir-faire reconnu au profit d'un acteur industriel qui se situe au meilleur niveau mondial.
La parole est à Mme Christine Decodts, pour exposer sa question, n° 418, relative à la médecine du travail.
Je souhaite appeler l'attention de M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, sur la situation de la médecine du travail.
Dans l'agglomération dunkerquoise, plus de 20 000 emplois directs seront créés d'ici à 2030. C'est historique ! Près de 40 % des travailleurs recrutés devront faire l'objet d'un suivi médical renforcé, qui ne peut être assuré que par un médecin du travail. Or, à Dunkerque, l'association interprofessionnelle qui remplit les missions de prévention et de santé au travail peine à recruter des médecins du travail.
Grâce à la mobilisation de M. le sous-préfet de Dunkerque, du Medef et des syndicats – que je remercie tous –, des coopérations avec d'autres associations ont été mises en œuvre, mais elles ne permettent pas de remédier à l'ensemble des difficultés. Les dispositions de la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention et la santé au travail ont permis aux médecins de dégager du temps médical, mais, là encore, ces progrès ne règlent pas tous les problèmes.
Du point de vue des acteurs locaux, que je partage, quatre pistes au moins pourraient être exploitées. On pourrait, premièrement, renforcer l'attractivité de la médecine du travail, trop souvent considérée comme une médecine administrative ; deuxièmement, inciter les médecins à recourir plus souvent aux entretiens infirmiers ; troisièmement, développer la pratique encadrée de la téléconsultation ; enfin, offrir la possibilité aux infirmières et aux infirmiers en santé au travail de procéder aux visites individuelles renforcées moyennant une formation adaptée.
Des mesures sont-elles envisagées pour faire évoluer la situation de la médecine du travail, en particulier à Dunkerque, et accompagner les futurs salariés qui participeront à un renouveau industriel exceptionnel, lequel concourra au plein emploi, à l'industrie verte, à la décarbonation et à notre souveraineté nationale ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire.
Je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, Olivier Dussopt.
La médecine du travail est effectivement confrontée à une dégradation structurelle du nombre des médecins du travail, dont les effectifs ont diminué de plus de 15 % en dix ans. Cette situation est préoccupante, car elle prive les services de prévention et de santé au travail des moyens humains nécessaires à la réalisation de leurs missions. Elle l'est d'autant plus dans votre circonscription du Dunkerquois que plus de 20 000 emplois devraient y être créés, en majorité dans le secteur industriel.
Le Gouvernement est conscient de ces enjeux et mobilisé pour redonner des marges de manœuvre à la médecine du travail. Ainsi, la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail comporte un certain nombre de leviers qui permettent de dégager du temps médical. Elle étend notamment les possibilités de confier une délégation de visite aux infirmiers de santé au travail, notamment pour les visites de reprise ou de préreprise. Cette évolution doit permettre aux médecins du travail de se consacrer à la prévention en entreprise et aux visites médicales les plus complexes.
D'autres mesures ont été prises, comme la possibilité de recourir à la télésanté au travail ou de faire appel, dans le cadre de protocoles, à des médecins de ville pour les visites les plus simples.
Mais il nous faut aller plus loin, en particulier pour renforcer l'attractivité de la profession de médecin du travail. Je vous confirme que le Gouvernement compte avancer rapidement dans ce domaine, en concertation avec les partenaires sociaux et l'ensemble des acteurs de la prévention de la santé au travail, pour répondre aux besoins des salariés et des employeurs sur l'ensemble du territoire. Le ministre est au travail !
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie, ainsi que le ministre du travail, pour cette réponse. Compte tenu de la situation exceptionnelle, historique, du Dunkerquois et des perspectives enthousiasmantes qui lui sont offertes, il est nécessaire que nous travaillions à améliorer la situation avec les services du ministère – j'y suis prête, pour ma part. Parmi les futurs salariés se trouvent des jeunes relevant des missions locales et, dans le cadre de la loi sur le plein emploi, des bénéficiaires du RSA ; il faut vraiment les accompagner. La médecine du travail et la prévention sont très importantes, notamment dans les métiers du nucléaire et de l'industrie des batteries. Je me tiens donc à votre disposition pour travailler également à nos propositions locales.
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour exposer sa question, n° 423, relative à la défiscalisation des dons en nature.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des comptes publics, Thomas Cazenave, et concerne la défiscalisation des dons des agriculteurs et producteurs aux associations d'utilité publique.
Ces personnes, qui pensaient pouvoir bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu de 66 % du montant versé, font face à une situation absurde lorsqu'ils décident de donner, donc de déclarer, une partie de leur production à ces associations. Cette problématique m'a été signalée par un agriculteur maraîcher de ma circonscription, qui avait décidé de livrer de façon régulière à l'une d'elles une partie de sa production non commercialisée.
En effet, l'an dernier, il a donné l'équivalent de 10 000 euros de fruits et légumes au Secours populaire. Or, étant soumis à l'impôt sur le revenu et non à l'impôt sur les sociétés, la valeur de ce don a été réintégrée à son résultat au titre de la production, donc à son chiffre d'affaires, de sorte que cette somme a été soumise à un taux de cotisation de 27 % au titre des charges versées à l'Urssaf et au taux marginal de 30 % au titre de l'impôt sur le revenu.
Si ce don lui permet de bénéficier d'une réduction de son impôt sur le revenu de 66 %, il doit régler 57 % de taxes et d'impôts supplémentaires, si bien que son crédit d'impôt réel n'est que de 9 %. Encore doit-il s'estimer heureux que le taux marginal de son imposition n'ait été, l'an dernier, que de 30 %, car s'il avait été de 41 %, il aurait payé des taxes et des impôts supérieurs à sa réduction d'impôt ! Ces personnes ont le sentiment de travailler dur pour n'obtenir qu'une réduction d'impôt très faible, voire négative, selon les résultats de l'année. La situation semble totalement ubuesque.
Aussi, serait-il possible de revenir sur l'obligation de réintégrer le montant des dons en nature dans le chiffre d'affaires afin que ces dons bénéficient d'une réelle incitation fiscale et soient ainsi encouragés ? Les associations rencontrent de plus en plus de difficultés financières et peinent à assurer l'aide alimentaire ; elles ont besoin de davantage de dons.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire.
Je vous prie d'excuser l'absence du ministre délégué chargé des comptes publics, Thomas Cazenave, retenu au Sénat pour l'examen du projet de loi de finances pour 2024.
Votre question porte sur la réduction d'impôt accordée au titre des dons en nature effectués par les agriculteurs et producteurs aux associations d'aide aux personnes en difficulté. Vous le savez, les versements réalisés par les entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés, au profit d'œuvres ou d'organismes d'intérêt général, ouvrent droit à une réduction d'impôt égale à 60 % de ces versements. À cet égard, le taux de 66 % que vous avez mentionné concerne la réduction d'impôt sur le revenu au titre des dons faits par les particuliers.
Le taux de la réduction d'impôt est abaissé à 40 % pour les versements supérieurs à 2 millions d'euros. Par exception, le taux de 60 % est retenu pour les versements – quel que soit leur montant – effectués par les entreprises au profit d'organismes sans but lucratif qui fournissent une aide de première nécessité à des personnes en difficulté.
Dès lors que son entreprise est soumise à un régime réel d'imposition, un producteur agricole peut bénéficier de cet avantage fiscal au titre des dons de biens issus de sa production à des organisations d'aide alimentaire, à condition que ces dons en nature ne diminuent pas le résultat imposable.
Dans le cas inverse, le don en nature effectué par l'exploitant lui permettrait de profiter d'un double avantage : non seulement il bénéficierait d'une réduction d'impôt égale à 60 % de la valeur du don, mais il bénéficierait en plus d'une diminution de sa base imposable à concurrence de la valeur de ce même don. C'est pourquoi la valeur du don doit être réintégrée de manière extracomptable dans le résultat imposable.
Comme l'a relevé la Cour des comptes, la réduction d'impôt au titre du mécénat des entrepreneurs est l'un des régimes de soutien au mécénat les plus généreux du monde – son coût s'est élevé à plus de 1,13 milliard d'euros en 2022. L'année dernière, plus de 100 000 entreprises ont bénéficié de ce dispositif.
Pour ces raisons, le Gouvernement ne souhaite pas instituer une mesure qui permettrait, sans justification fiscale ou économique, à la fois la réduction des dons et le bénéfice d'une réduction d'impôt.
Je vous remercie pour cette réponse complexe et riche en informations. Je vais me renseigner, mais j'ai tout de même l'impression qu'il y a une différence entre les agriculteurs constitués en société, qui paient par conséquent l'impôt sur les sociétés et peuvent déduire une part de leurs dons de ce dernier, et les particuliers ou agriculteurs soumis à l'impôt sur le revenu et qui, eux, bénéficient non seulement d'une réduction d'impôt mais encore d'une réduction de charges.
La parole est à M. Michaël Taverne, pour exposer sa question, n° 425, relative au commissariat d'Aulnoye-Aymeries.
Ma présente concerne la construction d'un commissariat de police dans ma circonscription, à Aulnoye-Aymeries. C'est une bonne chose pour les policiers qui assurent la sécurité des habitants jour après jour, au péril de leur vie, mais ce n'est qu'une récompense logique, normale, puisqu'ils travaillent dans un commissariat parmi les plus vétustes de France. Reste que la question fondamentale est celle des effectifs.
Depuis que Gérald Darmanin est ministre de l'intérieur, il a supprimé ce qu'on appelle l'effectif de référence. Auparavant, dans chaque circonscription de sécurité publique, le nombre de policiers était déterminé en fonction de la densité de la population, de la superficie du territoire concerné et de la particularité de la délinquance. Or, à Aulnoye-Aymeries, nous allons avoir un commissariat de police à moitié vide, si je puis dire. Il faut donc rétablir l'effectif de référence afin que les chefs de circonscription bénéficient d'effectifs à même de lutter contre l'insécurité.
Il en va de même pour la gendarmerie puisque le référentiel concernant les effectifs doit lui aussi être supprimé – ce qui démontre bien qu'il y a toujours un tour de passe-passe. Il y a des arrivées de policiers, certes, mais il y a également des départs, qui, en général, ne sont pas compensés. Je rappelle que le ministre de l'intérieur avait promis la création de brigades de gendarmerie à deux élus de ma circonscription, l'un à Maroilles et l'autre à Carnières. Malheureusement, cette promesse n'a pas été tenue.
Le rétablissement de l'effectif de référence permettrait d'affecter des policiers et des gendarmes selon les besoins des territoires – ce que je demande pour ma circonscription, où ces besoins sont des plus pressants. Le commissariat d'Aulnoye-Aymeries doit être pourvu au minimum de 90 % des effectifs nécessaires.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire.
Le Gouvernement a fait de la sécurité une priorité qui s'est traduite par une augmentation sans précédent des moyens budgétaires : 15 milliards d'euros, grâce au vote de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi). Ce texte permet d'amplifier l'action des policiers et des gendarmes sur le terrain et d'accroître leur présence sur la voie publique. À cette fin, l'an prochain, nous allons recruter 2 000 policiers et gendarmes. Ainsi, dans le département du Nord, le nombre de gradés et de gardiens de la paix est passé de 3 437 à la fin de 2016 à 3 561 à ce jour.
Pour ce qui est de la circonscription de sécurité publique de Maubeuge agglomération, elle dispose d'un effectif opérationnel de 208 gradés et gardiens de la paix. J'ajoute qu'elle sera renforcée d'ici à la fin de l'année par l'arrivée de dix gardiens de la paix pour un seul départ – j'espère vous avoir rassuré puisque vous disiez que l'équilibre entre les arrivées et les départs n'est pas toujours respecté.
Le commissariat du secteur d'Aulnoye-Aymeries dispose pour sa part d'un effectif de trente-neuf agents, alors qu'il n'était que de trente-sept agents à la fin 2016. J'insiste sur le fait que, comme toutes les autres villes, Aulnoye-Aymeries bénéficie des moyens de la circonscription de police dont elle relève, qu'il s'agisse des missions de police secours, de l'ordre public ou des investigations. En outre, Aulnoye-Aymeries bénéficie, chaque fois que cela est nécessaire, du renfort des unités de la direction départementale de la sécurité publique (DDSP), dotée de 529 gradés et gardiens de la paix.
Pour finir, je me félicite de la construction d'un nouveau commissariat. Même si des aléas de chantier ont quelque peu retardé le calendrier, il devrait être livré à la fin du premier trimestre 2024, pour le bonheur des habitants et des policiers d'Aulnoye-Aymeries.
Je prends acte de votre réponse et de la très bonne nouvelle que des policiers seront affectés à mon territoire. J'insiste néanmoins sur le fait que les chefs de circonscription demandent que soient rétablis les effectifs de référence afin d'avoir une idée des affectations et des départs année après année. Cela vaut également pour les circonscriptions de gendarmerie : si la création d'une brigade mobile est envisagée à Avesnes-sur-Helpe, toujours dans ma circonscription, la plupart des brigades du territoire ne sont malheureusement pas à 100 % de leur effectif. Aussi faudrait-il déjà les pourvoir de gendarmes. J'interpelle de nouveau le ministre de l'intérieur sur sa promesse de créer une brigade à Maroilles et une autre à Carnières, dans le Cambrésis.
La parole est à M. Stéphane Delautrette, pour exposer sa question, n° 431, relative à l'implantation d'une gendarmerie à Verneuil-sur-Vienne.
Le 2 octobre dernier, le Président de la République a dévoilé la carte des 239 futures brigades de gendarmerie prévues à l'horizon 2027. Je tiens, en préambule, à dire ma gratitude pour le travail remarquable accompli par l'ensemble des gendarmes de Haute-Vienne.
Si nous pouvons nous réjouir de l'arrivée d'une brigade mobile dans la commune de Boisseuil, l'annonce a néanmoins suscité une profonde insatisfaction chez nombre d'élus et de citoyens haut-viennois. Et pour cause ! Alors que deux unités étaient attendues en Haute-Vienne, quelle ne fut pas notre surprise d'apprendre que seuls trois gendarmes viendraient renforcer les rangs des brigades de notre département, faisant de notre territoire le moins bien doté de Nouvelle-Aquitaine. La surprise est d'autant plus grande qu'un projet d'implantation est défendu de longue date par la municipalité de Verneuil-sur-Vienne. Conçu en lien étroit avec les services de l'État, celui-ci répond à un réel besoin et remplit l'ensemble des critères d'éligibilité.
En effet, la commune de Verneuil-sur-Vienne fait face à une double hausse – démographique et de la délinquance – qui aurait pleinement justifié l'installation d'une nouvelle caserne et ainsi équilibré la charge de travail des gendarmes de la brigade d'Aixe-sur-Vienne, située à 15 kilomètres.
D'un point de vue logistique et stratégique, le terrain, déjà acquis à dessein par la commune, se situe à la croisée de deux axes nationaux majeurs, la RN 520 et la RN 141, et à proximité d'équipements structurants tels que l'aéroport.
Madame la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, les élus locaux de Verneuil-sur-Vienne et tout particulièrement leur maire, Pascal Robert, sont dans l'incompréhension la plus totale. Alors même qu'ils étaient, dès cette année, en mesure d'accueillir trois gendarmes dans des locaux dédiés et pouvaient envisager la construction d'un nouvel établissement sur un terrain réservé, ils sont toujours dans l'expectative.
Je connais votre attachement au juste maillage territorial des forces de l'ordre et aux liens avec la population qu'il apporte. C'est pourquoi je vous saurais gré de considérer avec le plus grand sérieux le cas spécifique de Verneuil-sur-Vienne. En toute objectivité, les projets retenus ont-ils le même degré de maturité que celui présenté ici ? Le plan annoncé est-il figé ou pouvons-nous espérer en Haute-Vienne, d'ici à 2027, d'autres ouvertures de brigades plus en adéquation avec les besoins exprimés ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Je vous remercie, monsieur le député Delautrette, pour vos mots sympathiques de reconnaissance pour les gendarmes de la Haute-Vienne, mots que je partage.
Le juste maillage territorial des forces de l'ordre ne doit pas se faire aux dépens de la garantie de la sécurité de nos concitoyens. La préservation de cet équilibre a été au cœur des réflexions sur la répartition des 239 nouvelles brigades de gendarmerie prévues dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur.
En Haute-Vienne, deux projets d'implantation étaient initialement prévus, l'un à Boisseuil, l'autre à Aixe-sur-Vienne. Cependant, soucieux de préserver cet équilibre et de garantir ainsi la sécurité de tous nos concitoyens partout sur le territoire national, nous avons fait le choix de privilégier l'implantation d'une brigade unique et mobile à Boisseuil. La mobilité de cette unité fonde notre choix. Surtout, l'évolution de l'insécurité en France a conduit à une répartition légèrement différente de celle envisagée, ce que nous vous demandons de comprendre.
Destinées à renforcer le lien de confiance entre la gendarmerie et la population et ses élus, les brigades mobiles offrent une accessibilité, une disponibilité favorisant les échanges avec les citoyens, dans une démarche « d'aller vers ». Ainsi, située à trente minutes de Verneuil-sur-Vienne, la brigade de Boisseuil ne limitera pas son action à sa seule commune d'implantation puisqu'elle remplira ses missions de prévention et de sécurité sur l'ensemble du territoire. En outre, dans le cadre de cette création, les effectifs de gendarmerie du département augmenteront de six militaires.
Par ailleurs, le processus de densification des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie, qui s'achèvera en 2024, renforcera également l'empreinte au sol des unités territoriales et contribuera à l'augmentation de leur présence sur la voie publique de façon significative.
Le ministre Gérald Darmanin reste pleinement à l'écoute des demandes qui pourraient être faites localement. Une adaptation des dispositifs aux problèmes et aux besoins de la population locale pourra, si c'est nécessaire, être envisagée.
Madame la ministre déléguée, j'entends votre réponse ; elle ne peut cependant me satisfaire. C'est bien mal connaître la Haute-Vienne que de penser que l'implantation d'une brigade de gendarmerie à Boisseuil permettra de répondre à la demande de sécurité des habitants de Verneuil-sur-Vienne, situé à près de 30 kilomètres.
Implanter une brigade à Verneuil était un projet de longue date, concerté avec les gendarmes et la préfecture. Il mériterait d'être réexaminé, à la lumière des difficultés locales que j'ai rappelées – explosion démographique et montée afférente de la délinquance. Alors que ce projet conserve toute sa pertinence, les élus de Verneuil-sur-Vienne doivent-ils en abandonner l'idée ?
La parole est à M. Jean-François Portarrieu, pour exposer sa question, n° 404, relative à la sécheresse et à l'état de catastrophe naturelle.
Les modalités de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle à la suite de la sécheresse et de la réhydratation des sols soulèvent plusieurs difficultés, notamment en Haute-Garonne – un département que madame la ministre déléguée connaît bien.
Les phénomènes de sécheresse s'amplifient du fait du dérèglement climatique et transforment, depuis de nombreuses années, les espaces concernés ; dans le Sud-Ouest, le Nord toulousain est, comme d'autres territoires de France, régulièrement touché. Afin de répondre aux inquiétudes fort légitimes des habitants, le Gouvernement a pris un arrêté interministériel, publié le 8 septembre, relatif à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Il prend notamment en compte les « mouvements de terrains différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols ».
Cet arrêté, pourtant censé clarifier la situation, a suscité l'incompréhension de nombreux maires, ainsi que de leurs administrés. En effet, le choix des critères de classement pose des problèmes sur le terrain, entraînant des situations assez étonnantes ; ainsi, deux communes éloignées de seulement quelques kilomètres et jouissant d'un climat et d'un sol identiques en viennent à ne pas bénéficier de la même reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle – condition pourtant indispensable en vue d'obtenir des assurances la réparation des dégâts causés.
À ces difficultés rencontrées, en première ligne, par les maires, s'ajoute le désarroi des habitants, qui constatent des dégâts évidents sur leurs habitations : lézardes profondes, craquelures dans les sols, et ainsi de suite.
Si, chaque année, de très nombreux dossiers de demande de reconnaissance sont déposés à l'échelon communal, l'échec régulier de ces démarches et la lassitude qui en découle pourraient, à terme, avoir de graves conséquences sur la sécurité des habitations.
J'ai été interpellé en ce sens par plusieurs maires du Nord toulousain. Dans son rapport sur le retrait-gonflement des argiles (RGA) intitulé « RGA, n'attendons pas que ce soit la cata ! », qu'il a remis le 9 octobre au ministre de l'intérieur, notre collègue Vincent Ledoux a formulé plusieurs recommandations sur ce point. Aussi, je souhaiterais connaître les dispositions prévues par le Gouvernement pour répondre à ce sentiment d'incompréhension, ainsi que les démarches envisageables pour prendre en compte les sinistres non reconnus, et pourtant bien réels.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
L'épisode de sécheresse et de réhydratation des sols survenu en 2022 a été particulièrement sévère et a donné lieu au dépôt d'un nombre inédit de 8 992 demandes communales de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle – quatre-vingt-quatorze départements sont concernés. Parmi les communes ayant déposé un dossier, 73 % ont été reconnues en état de catastrophe naturelle – il s'agit du taux le plus élevé, pour ce type de phénomène, depuis plus de vingt ans. La Caisse centrale de réassurance évalue le montant des indemnisations associées à plus de 3 milliards d'euros.
Dans le département de la Haute-Garonne, parmi les 384 demandes communales déposées, 174 ont été reconnues par les arrêtés précités. Néanmoins, la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle n'est prononcée que lorsque les épisodes de sécheresse présentent une intensité anormalement avérée, au vu de critères révisés en 2019.
Des documents explicatifs propres à chaque commune leur sont transmis. Par ailleurs, la transparence des motivations des décisions a été renforcée par la loi du 28 décembre 2021 relative à l'indemnisation des catastrophes naturelles, permettant un léger progrès.
Tirant les conséquences des limites actuelles de la prise en charge, l'article L. 161 de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite 3DS – loi que vous avez votée, monsieur le député –, a habilité le Gouvernement à entreprendre, par voie d'ordonnance, une réforme des modalités d'indemnisation de ce phénomène.
Au terme de travaux approfondis, une ordonnance a été présentée le 8 février 2023, relative à la prise en charge des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols. Elle devrait augmenter sensiblement le nombre de communes éligibles, en assouplissant les conditions d'analyse sur trois points : l'aménagement des critères ; la prise en compte des communes ayant subi une succession anormale de sécheresses d'ampleur significative, mais dont l'intensité n'est pas exceptionnelle ; enfin, une meilleure appréciation de la situation des communes adjacentes.
Ces évolutions répondent à une partie des recommandations du rapport de M. Ledoux que vous avez cité. Nous pouvons espérer que quelques communes supplémentaires pourront ainsi être reconnues en état de catastrophe naturelle dans les semaines qui viennent. Je vous invite à écrire en ce sens au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour exposer sa question, n° 405, relative au permis de conduire.
Je souhaite interpeller le Gouvernement quant au manque d'inspecteurs du permis de conduire, pour les véhicules légers comme pour les poids lourds.
Pour ces deux catégories de véhicules, les auto-écoles assurent la formation de leurs moniteurs, et disposent de l'encadrement et du matériel pour dispenser les leçons de conduite.
Cependant, depuis plusieurs années – en dépit de quelques fluctuations –, le manque d'inspecteurs augmente au point de devenir criant. Les DDTM – directions départementales des territoires et de la mer, en l'espèce celles de Bretagne – ont du mal à fournir un nombre d'inspecteurs à la hauteur du nombre de candidats – jeunes ou moins jeunes – au permis de conduire.
Ces difficultés ont des effets sur l'activité économique. Elles obligent les auto-écoles à différer voire à limiter l'inscription de jeunes candidats au permis de conduire, tout comme des candidats moins jeunes désireux de se reconvertir en chauffeurs de poids lourds. Ainsi, un secteur potentiellement créateur d'emplois se trouve, par manque d'inspecteurs, mis en échec.
Il est ennuyeux que, dans un grand pays comme la France – qui doit le rester –, on ne soit pas fichus d'anticiper ce type de difficultés. Cela vaut pour les inspecteurs comme pour les médecins, dont nous découvrons aujourd'hui la pénurie, alors que nous disposions de tous les outils statistiques nécessaires pour prévoir cette évolution.
Que compte faire le Gouvernement pour doter les départements d'un nombre suffisant d'inspecteurs du permis de conduire ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Vous avez raison : l'évolution des effectifs d'inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière (IPCSR) requiert toute notre attention. Nous travaillons en ce sens avec la délégation à la sécurité routière de l'Ille-et-Vilaine.
À la suite de la décision du ministre de l'intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, de recruter 100 IPCSR de 2023 à 2026, votre département accueillera 2 des 15 IPCSR recrutés en 2023 et l'un des 38 IPCSR dont le recrutement est prévu en 2024.
Néanmoins, compte tenu des mouvements récents de personnel, l'Ille-et-Vilaine accuse un déficit d'environ 3 équivalents temps plein par rapport à l'effectif cible. Pour y faire face, une examinatrice du permis B, issue du groupe La Poste, sera affectée dans ce département dès le 18 décembre. Le ministère de l'intérieur et des outre-mer souhaite également y affecter un ou deux autres examinateurs de La Poste, parmi les trente-cinq dont le recrutement est prévu en 2024.
Nous travaillons avec les autorités locales à une répartition plus efficace des places d'examen du permis B et du permis poids lourds. L'activité de formation au permis poids lourds est importante en Ille-et-Vilaine et mérite effectivement d'être mieux prise en compte.
Par ailleurs, un autre levier destiné à fluidifier le fonctionnement du système des examens mérite d'être actionné, à savoir les examens supplémentaires que de nombreux IPCSR acceptent de réaliser, notamment le samedi. Cette possibilité, qui existe dans de nombreux départements, n'a pas encore été exploitée en Ille-et-Vilaine ; les services de l'État sont mobilisés pour y remédier.
Enfin, nous souhaitons qu'un dialogue plus étroit s'établisse entre les services de l'éducation routière et les représentants des établissements de l'enseignement de la conduite automobile.
Je prends note de la prise de conscience du Gouvernement. Cent inspecteurs, cela revient à un inspecteur par département : c'est peu.
Oui, ce n'est pas beaucoup.
Il faudrait tenir compte de la démographie de l'Ille-et-Vilaine – je suis député de ce département, raison pour laquelle je m'y attarde – qui gagne, depuis une quinzaine d'années, environ 10 000 habitants par an, du fait de l'attractivité exercée par la métropole de Rennes et par les villes moyennes – et sous-préfectures – de Saint-Malo, Fougères, Vitré et Redon.
Un travail étroit avec les services de l'État est nécessaire pour avancer concrètement ; il faudrait que vous donniez mission, peut-être à la préfecture compétente, de mener dans les meilleurs délais un examen approfondi et efficace. C'est aussi un enjeu de développement économique…
Bien sûr.
…et d'intégration des populations par l'emploi. Le secteur de la conduite, de véhicules légers – ambulances ou taxis – comme de poids lourds – pour la logistique –, est crucial en matière d'emploi. Je remercie le Gouvernement de bien vouloir accélérer la prise en compte de cette demande.
Je le ferai.
La parole est à M. Louis Boyard, pour exposer sa question, n° 409, relative au commissariat de Villeneuve-Saint-Georges.
Madame la ministre déléguée, laissez-moi vous faire le plaisir d'évoquer le temps où je n'étais pas encore élu, et où mon honorable prédécesseur, Laurent Saint-Martin, représentait la troisième circonscription du Val-de-Marne. Vous rappelez-vous de lui ? Il était rapporteur général de la commission des finances sous la XV
Je vous propose un voyage dans le temps. Le 9 février 2022, à l'invitation de Laurent Saint-Martin, le ministre de l'intérieur s'est rendu à Villeneuve-Saint-Georges. En l'espace de trois mois, toujours à la demande de M. Saint-Martin, une dizaine de ministres se sont rendus dans cette commune, dont Élisabeth Borne en personne, ce qui a fait dire au Parisien, dans ses colonnes du 27 avril 2022 : « On n'aura jamais vu autant de ministres […] défiler à Villeneuve-Saint-Georges en quelques mois ». Tout cela à quelques semaines des élections législatives de 2022 ! Coïncidence ? Ce n'est pas à moi d'en juger.
De tous ces ministres, le plus sérieux fut M. Darmanin, qui – grand seigneur – annonçait à son arrivée à Villeneuve-Saint-Georges que l'État était prêt à investir 7 millions d'euros dans la reconstruction du commissariat, dont le délabrement dramatique est de notoriété publique.
L'État a donc promis 7 millions, alors qu'entre 14 et 16 millions sont nécessaires. Comment faire ? Le Gouvernement propose de faire payer le reliquat aux collectivités. Or la sécurité est une fonction régalienne, que l'État doit assumer. C'est précisément ce qu'ont fait remarquer la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse, et le président du département, Olivier Capitanio, deux personnalités de droite, en boycottant la réunion organisée à Beauvau le 24 mai 2022.
Ce débat n'a pas été tranché et, depuis les élections législatives de 2022, il n'a plus jamais été question de cet argent. Ma question est donc très simple : était-ce une promesse électorale au service de Laurent Saint-Martin, ou était-ce une promesse du ministre de l'intérieur Gérald Darmanin, qu'il ne manquera pas de tenir ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Je suis très étonnée par le ton de vos propos, mais je vais tenter de vous répondre aussi objectivement que possible. Le commissariat central de Villeneuve-Saint-Georges, chargé de la sécurité publique dans les communes de Villeneuve-Saint-Georges, Valenton et Limeil-Brévannes, dispose effectivement de locaux inadaptés – exigus, vétustes et inconfortables – pour accueillir un commissariat. Les policiers du commissariat doivent pouvoir travailler et accueillir le public dans de bonnes conditions, et les habitants de la circonscription doivent disposer d'un commissariat de police à la hauteur des exigences d'un service public moderne.
Des études de faisabilité ont été lancées pour examiner différents scénarios de relocalisation ou de reconstruction, dont la possibilité de construire un nouveau commissariat sur un terrain mis à disposition par la commune de Valenton. Ce projet, estimé à 12,5 millions d'euros, consiste en la construction d'un bâtiment en superstructure de 2 500 mètres carrés, ainsi qu'en la création d'un parking d'environ 100 places.
Le scénario d'un maintien du nouveau commissariat dans la commune de Villeneuve-Saint-Georges a également été envisagé. Cependant, l'absence d'un site adapté et fonctionnel pose de réelles difficultés. Le site doit en effet disposer de la taille suffisante pour accueillir l'intégralité des véhicules nécessaires au bon fonctionnement d'un commissariat. Le projet d'implantation du nouveau commissariat à Villeneuve-Saint-Georges ne peut donc pas, en l'état, être retenu.
D'autre part, les collectivités locales concernées n'ont pas souhaité participer au financement du projet – comme cela se fait ailleurs –, laissant l'État prendre en charge l'intégralité des investissements nécessaires. Leur décision ralentit l'avancée du dossier, malgré l'engagement de participation de l'État à hauteur de 7 millions d'euros.
J'évoquerai, pour terminer, le projet de création d'un centre de formation et d'entraînement au maintien de l'ordre, sur le site du fort de Villeneuve-Saint-Georges. Ce projet, annoncé en juillet 2022, s'inscrit dans le sillage du Beauvau de la sécurité qui s'est tenu en 2021. Les services du ministère de l'intérieur et des outre-mer élaborent actuellement une programmation pluriannuelle des travaux à réaliser sur cette emprise.
Je rappelle que la gestion des commissariats est une compétence de l'État, ce dernier ayant d'ailleurs financé à 100 % la construction de celui des 13
Deuxièmement, si le commissariat est déplacé à Valenton, qu'adviendra-t-il de celui de Villeneuve-Saint-Georges ? Est-il entendable pour les habitants que vous investissiez des millions dans un centre de formation dont l'objet demeure obscur – nous ne savons pas exactement ce que vous souhaitez en faire –, quand, dans le même temps, vous expliquez que la rénovation du commissariat n'avance pas, faute de fonds suffisants ? Vous comprendrez que ce double discours n'est pas acceptable.
Je rappelle enfin qu'on nous avait dit pendant la campagne pour les élections législatives que les choses avanceraient très vite. Or nous n'en avons plus entendu parler depuis. Mon impression est donc qu'il s'agissait d'une promesse électorale au service de la campagne de M. Saint-Martin.
Je le répète : il n'est pas entendable pour les Villeneuvoises et les Villeneuvois que vous investissiez des millions dans un centre de formation alors que le projet de rénovation du commissariat n'avance pas et alors que vous envisagez même de déplacer ce service public dans une autre commune. Je suis donc peu satisfait de votre réponse.
C'est normal !
La parole est à M. Yannick Monnet, pour exposer sa question, n° 402, relative à la sécurité pendant les Jeux olympiques et paralympiques 2024.
La mobilisation exceptionnelle des forces de sécurité intérieure à l'occasion des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de l'été prochain, mobilisation évidemment nécessaire et légitime, pose la question de la disponibilité des effectifs pour sécuriser les autres événements sportifs et culturels qui se tiennent habituellement à cette période de l'été sur nos territoires.
Par une circulaire de décembre 2022, des consignes ont été transmises aux préfets de département en fonction des dates et de l'ampleur des événements concernés, notamment pour les plus importants d'entre eux, qui nécessitent des renforts en unités de force mobile.
S'agissant des événements de moindre ampleur, qui ne nécessitent que le recours à des moyens locaux en forces de sécurité intérieure, cette circulaire indique clairement qu'ils ont vocation à être maintenus, dans le dialogue avec les collectivités territoriales. Le manque d'effectifs de police et de gendarmerie a pu toutefois conduire les préfets à prescrire le report de certains autres événements.
Dans mon département de l'Allier, c'était le cas depuis plusieurs mois du Hadra Trance Festival, festival de musique électronique, dont l'édition 2024 était par conséquent incertaine. J'ai été prévenu hier par la préfète de l'Allier qu'une solution semble avoir été trouvée. Je m'en félicite évidemment, mais il n'empêche que ce type de manifestations ne peuvent être plongées dans une incertitude portant préjudice à leur organisation.
Ces festivals, ces manifestations sportives et culturelles représentent une richesse inestimable, a fortiori pour les territoires ruraux dont ils conditionnent la vitalité pendant la période estivale. Ils ne peuvent se permettre de subir une année blanche et ne sauraient être sacrifiés au motif que les moyens de sécurité de notre pays seraient insuffisants pour couvrir en plus les Jeux olympiques. Ce serait d'autant plus inacceptable quand on connaît le prix de vente des billets pour les JOP, qui exclut de fait une bonne partie de la population à qui nous ne pouvons faire subir une double peine en ne lui donnant accès ni à cette manifestation mondiale, ni aux événements locaux.
Pouvez-vous donc vous engager à attribuer suffisamment de moyens en forces de sécurité aux collectivités locales pour qu'aucun festival et aucune manifestation sportive, pourvu que ces événements ne requièrent pas d'unités de force mobile, n'ait à pâtir de l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques 2024 ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
L'organisation de la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques de 2024, événement inédit sur le territoire national, constitue un défi important. Il s'agit, dans un contexte de forte exposition internationale, de sécuriser les sites de compétition et les lieux de rassemblement, tout en continuant de protéger l'ensemble du territoire.
Cette approche globale conduit le Gouvernement à édicter des dispositions particulières sur la tenue des festivals et manifestations festives et sportives de l'été 2024 – objet de votre question. Il s'agit, en jouant notamment sur le calendrier des événements, de concilier le maintien de manifestations qui font – vous l'avez dit – la vitalité culturelle et sociale de nos territoires et le respect des engagements pris par la France à l'appui de sa candidature pour l'accueil des JOP.
En matière d'affectation des forces, si l'intérêt général commande de porter l'effort sur les zones les plus directement concernées par l'événement, il n'est pas question de baisser la garde ailleurs. Dans cet esprit, plusieurs leviers seront activés.
Premièrement, les congés estivaux des policiers et des gendarmes seront suspendus pendant la période olympique – suspension dont les modalités d'application et de compensation seront prochainement formalisées dans le cadre d'une concertation.
Les ressources locales – deuxième élément – seront optimisées, en s'affranchissant si nécessaire des zones habituelles de compétence entre police et gendarmerie.
Enfin, la police et la gendarmerie travaillent à l'augmentation de leurs réserves opérationnelles.
Au moment où la France s'apprête à accueillir le plus grand événement au monde, des instructions ont été données aux préfets, qui s'attachent depuis de longs mois à élaborer avec les collectivités territoriales, les organisateurs et les autres acteurs de terrain des solutions constructives pour préserver la vie culturelle et festive des territoires. Je vous invite, comme vous l'avez déjà fait, à vous rapprocher de la préfète de votre département si nécessaire.
La parole est à M. Benoît Bordat, pour exposer sa question, n° 417, relative aux trains de nuit.
Par cette question, je tiens à porter à l'attention du ministre délégué chargé des transports une préoccupation cruciale qui concerne de nombreux habitants de Bourgogne-Franche-Comté : il s'agit des lignes ferroviaires de nuit Briançon-Paris et Nice-Paris.
Cet été, la fréquentation des trains de nuit a encore battu des records, celle-ci ayant été tirée par le haut par des destinations vertes comme la Bourgogne et par le phénomène de retour au rail. Si nous pouvons nous en féliciter, de nombreuses évolutions sont vivement souhaitées et attendues par les usagers, les collectivités locales, ainsi que par les acteurs du tourisme.
La région Bourgogne-Franche-Comté et plus particulièrement la ville de Dijon ont longtemps été desservies par les trains de nuit reliant Paris à Briançon et Paris à Nice. Or si ces trains existent toujours, ils ne s'arrêtent plus à Dijon. Il convient de rappeler que cette ville constitue pourtant un nœud ferroviaire essentiel, étant interconnectée avec d'autres grandes villes comme Mulhouse, Besançon et Lausanne. Le rétablissement de l'arrêt des trains de nuit à Dijon représenterait donc un véritable atout pour les habitants de nombreuses agglomérations, qui comptent sur les liaisons ferroviaires.
Le Gouvernement s'est résolument engagé dans la lutte contre le changement climatique. À l'heure de la transition écologique et énergétique et dans le cadre de l'objectif de neutralité carbone à atteindre à l'horizon 2050, les trains de nuit représentent une véritable solution vertueuse et bénéfique pour l'ensemble de nos territoires. Ils offrent la possibilité de créer un réseau plus vaste, composé de davantage d'arrêts et de destinations.
Les fonds alloués aux mobilités durables doivent cependant irriguer l'intégralité de nos territoires, dans le souci de préserver notre environnement et d'améliorer la qualité de vie de nos concitoyens. Je vous demande donc d'entamer une discussion avec la SNCF avant les changements d'horaires prévus le 12 décembre prochain au sujet des trains Briançon-Paris et Nice-Paris. Je vous remercie de l'attention que vous portez à cette question d'importance et pour votre engagement continu en faveur d'une mobilité durable.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Le Gouvernement partage la conviction selon laquelle le train de nuit constitue une offre de transport nécessaire pour répondre à des enjeux majeurs d'aménagement du territoire, ainsi qu'une offre écologique et sociale pour effectuer de longues distances. Des efforts importants ont ainsi été entrepris au cours des dernières années et continueront d'être consacrés à cet effet.
Tout d'abord, soixante et onze voitures utilisées sur des lignes existantes – celles reliant Paris à Briançon, à Rodez, à Toulouse, à Latour-de-Carol et à Cerbère – sont actuellement rénovées grâce à un investissement de 44 millions d'euros de la part de l'État.
Ensuite, deux lignes arrêtées en 2017 ont été remises en service en 2021. Il s'agit des lignes Paris-Nice – liaison que vous avez évoquée – et Paris-Tarbes-Lourdes. Le plan de relance a permis la remise en circulation de matériels de nuit, l'adaptation d'installations de service et les aménagements nécessaires au sein des gares pour l'exploitation de ces trains.
Dans cette dynamique, l'État relancera deux nouvelles lignes de trains d'équilibre du territoire (TET) de nuit à partir du mois de décembre. Il s'agit des lignes Paris-Aurillac et Paris-Vienne ou Paris-Berlin, dont les ventes viennent d'ouvrir et dont l'exploitation commencera dans une dizaine de jours.
Cependant, les sillons actuels pour les trains de nuit reliant Paris à Briançon et Paris à Nice, et a fortiori ceux envisagés pour l'année 2024, ne permettent malheureusement pas d'assurer un arrêt commercial à Dijon à des horaires raisonnables et attractifs pour les voyageurs. De plus, les montées et descentes pourraient s'avérer très gênantes pour les voyageurs en train de dormir, ce qui dégraderait l'attractivité générale du train de nuit.
Dans le cadre du groupe de travail créé il y a quelques mois à la demande du ministre délégué chargé des transports et présidé par la préfète de la région Grand Est, des travaux ont toutefois été engagés pour améliorer, voire remettre en service certaines liaisons de jour, dont la Bourgogne et Dijon pourraient bénéficier. Je vous invite donc à vous rapprocher de Mme la préfète.
Je vous remercie pour ces éléments et pour vos efforts en faveur du transport ferroviaire. Un autre grand enjeu est effectivement celui du rétablissement de la ligne Dijon-Lille.
Cela étant, je continue de penser que la question des trains de nuit devra être rediscutée le plus rapidement possible, car même si j'entends vos explications sur la qualité du service, la nuit, pour les usagers, ces trains ont existé par le passé.
La parole est à Mme Caroline Colombier, pour exposer sa question, n° 426, relative à la route nationale 10.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des transports.
La route nationale 10 (RN10), véritable poumon économique de l'Europe de l'Ouest, de l'Espagne à la Belgique et du Portugal aux Pays-Bas, demeure une voie fortement accidentogène et anxiogène.
En effet, sur les 19 kilomètres séparant les communes de Villegats et d'Aussac-Vadalle, six routes départementales traversent les quatre voies de la RN10. Ces carrefours ne sont annoncés que par de simples panneaux cédez-le-passage, sans voie d'insertion ni dispositif de sécurité. À chaque traversée, les automobilistes, riverains, agriculteurs et chauffeurs de poids lourd ou de car s'engagent la boule au ventre, de crainte d'être percutés par des camions lancés à 80 kilomètres heure, qui se doublent souvent dans ce couloir exigu.
Outre le problème primordial de la sécurisation de cet axe important, la variation de vitesse à chaque carrefour provoque une pollution inutile liée aux freinages et aux accélérations, la limitation oscillant entre 90 et 110 kilomètres par heure tous les 3 kilomètres pour les véhicules légers.
Ce manque de sécurité n'est pas un enjeu strictement charentais, mais concerne également les départements des Deux-Sèvres et de la Vienne s'agissant du tronçon Angoulême-Poitiers. Une étude visant à améliorer la circulation et, partant, la sécurité sur cette section de la RN10 a d'ailleurs été commandée il y a bientôt deux ans par le précédent ministre délégué chargé des transports, Jean-Baptiste Djebbari.
Notons que les défaillances de l'État en matière d'infrastructures dans le département de la Charente ne concernent pas que la partie nord de la RN10, mais également la route nationale 141, qui traverse le département d'est en ouest, ainsi que la ligne de TER (train express régional) Angoulême-Limoges.
Ainsi, pour la sérénité de tous, avez-vous des éléments à apporter quant au calendrier adopté par le Gouvernement pour sécuriser la RN10 qui, je le répète, est un axe majeur de circulation pour l'Europe de l'Ouest ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Le problème posé par les derniers carrefours plans de la RN10 dans le département de la Charente – sujet sur lequel vous appelez l'attention du ministre délégué chargé des transports – est clairement identifié par l'État, qui a financé la dénivellation de plusieurs d'entre eux au nord du département dans le cadre du contrat de plan État-région (CPER) 2015-2022. Les travaux sont en cours et leur finalisation apportera une réponse concrète au besoin de sécurité des usagers de cet axe, ce qui était très attendu.
Je précise que les services de l'État étudient désormais les possibilités de sécurisation des derniers carrefours plans existant en Charente. Les négociations entre l'État, la région Nouvelle-Aquitaine et l'ensemble des collectivités concernées par le volet mobilités du CPER sont également en cours. Le financement de ce projet fait donc l'objet d'échanges, dont je ne puis encore vous assurer du résultat.
J'entends que vous appelez de vos vœux un calendrier mais, je l'ai dit, les travaux et les discussions sont en cours. Dans cette attente, l'État reste pleinement mobilisé pour assurer la sécurité des usagers de la RN10 sur l'ensemble de son tracé, en lien avec les collectivités intéressées.
J'entends votre réponse, mais nous n'en sommes pas moins perplexes quant au traitement réservé à la Charente en matière de transport. L'inaction des gouvernements successifs au sujet de la RN10 est à l'image de celle dont ils ont fait preuve s'agissant de la RN141, qui souffre des mêmes problèmes d'est en ouest depuis maintenant trente ans.
Hier, les communautés d'agglomération du Grand Cognac et du Grand Angoulême ont annoncé le déblocage de 30 millions d'euros pour la réalisation de la déviation entre Hiersac et Malvieille. Ainsi, les acteurs locaux cherchent une nouvelle fois à pallier les défaillances gouvernementales sur un sujet crucial.
La semaine dernière, la presse locale titrait : « Un camion de paille en feu : la RN10 coupée à Courcôme », ce qui a entraîné cinq kilomètres de bouchons, notamment de camions, ou encore « Touvérac : les poids lourds de la RN10 empoisonnent leur quotidien » ; elle publie encore un article aujourd'hui sur ce sujet. La nature et les riverains souffrent réellement des dégradations commises par le transport international de marchandises.
Je rappelle que l'étude sur la RN10 n'a rendu aucune conclusion ni entraîné aucune action pour l'instant. Cela fait presque trente ans que l'aménagement de la RN141 entre Malvieille et Hiersac est attendu. Cela fait cinq ans que la ligne de train Angoulême-Limoges est suspendue. Quand donc rattrapera-t-on tous ces retards ? Les Charentais paient les pots cassés du commerce international et de sa mauvaise planification. La balle est dans le camp de l'État pour apporter une réponse définitive à tous ces problèmes ; les Charentais l'attendent de pied ferme.
La parole est à M. Jean-Pierre Pont, pour exposer sa question, n° 419, relative à l'enfouissement des déchets.
L'amélioration écologique incontournable du traitement des déchets entraîne une perte de redevances pour les communes suite aux lois relatives au tri sélectif et au recyclage interdisant, à court terme, l'enfouissement.
J'appelle votre attention sur le cas de la commune de Dannes, dans l'arrondissement de Boulogne-sur-Mer. Plusieurs communautés d'agglomération, dont celle du Boulonnais, ont renoncé à l'enfouissement des déchets ; ils ont choisi le centre d'incinération Flamoval à Arques, qui se situe pourtant à 60 kilomètres de Dannes. Le délégataire de l'opération, Suez, verse actuellement une redevance de 5,20 euros par tonne de déchets enfouis à la commune de Dannes, pour laquelle le passage à l'incinération représente d'emblée une perte annuelle de 52 000 euros.
À cette perte s'ajouteront 313 000 euros par an quand deux autres communautés de communes, Desvres-Samer et la Terre des Deux Caps, ne feront plus enfouir leurs déchets à Dannes mais les enverront au centre d'incinération d'Arques. Dans ces conditions, la commune de Dannes perdra 18 % de son budget de fonctionnement de 1,7 million d'euros lorsqu'elle ne percevra plus la redevance sur l'enfouissement des déchets.
Dannes s'est engagée résolument dans des projets de transition écologique depuis trois ans, tels que la modernisation du parc d'éclairage public pour diminuer la consommation ou la construction d'une nouvelle école moins énergivore. Or, du fait de sa perte financière, ses projets seront à coup sûr remis en cause. Quelles compensations budgétaires et quels mécanismes de solidarité le Gouvernement envisage-t-il pour couvrir les pertes que subiront la commune de Dannes en particulier et, plus généralement, les communes se trouvant dans le même cas de figure ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
La réduction de la mise en décharge des déchets ménagers est une obligation instaurée par la loi de transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015. Cette loi prévoit la réduction de 50 % de la mise en décharge des déchets ménagers entre 2020 et 2025.
L'ensemble des mesures adoptées dans la loi « antigaspillage » promulguée en 2020 contribue à atteindre ces objectifs en réduisant la mise sur le marché d'objets en plastique à usage unique, en favorisant le réemploi ainsi que le recyclage des déchets afin de créer de nouveaux produits et en limitant ainsi le recours à des matières extraites du territoire national ou importées depuis l'étranger.
Conscient des efforts à consentir par les collectivités locales pour mener à bien cette transition écologique, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, M. Christophe Béchu, a pris un ensemble de mesures destinées à soutenir financièrement ces collectivités, à commencer par le fonds Vert qui, comme vous le savez, est doté dans la loi de finances pour 2024 de 2,5 milliards d'euros.
Parmi les travaux des collectivités susceptibles d'être financés figurent la rénovation de l'éclairage public et la rénovation énergétique des bâtiments.
Par ailleurs, plusieurs mesures ont été prises pour aider les collectivités et les entreprises à adopter des solutions alternatives à l'élimination des déchets. Premièrement, la TVA sur les activités de tri, de recyclage et de prévention des déchets a été réduite à 5,5 %. Deuxièmement, les frais de gestion perçus par l'État sur la taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative ont été réduits. Troisièmement, le fonds économie circulaire de l'Agence de la transition écologique (Ademe) finance les projets de tri et de recyclage des collectivités comme ceux des entreprises. Quatrièmement, le programme France relance a soutenu cinquante projets industriels de recyclage.
Je vous invite donc à prendre contact, si vous le voulez bien, avec la préfecture, pour examiner les dispositifs de soutien dont la commune de Dannes pourrait bénéficier pour réaliser ses projets.
La parole est à Mme Eva Sas, pour exposer sa question, n° 401, relative aux personnes sans-abri.
Je souhaiterais soulever la question du sans-abrisme et plus largement celle du mal-logement en France. Il est nécessaire de consacrer plus de moyens à l'hébergement d'urgence, mais surtout à la politique du « logement d'abord », qui est la seule réponse durable au sans-abrisme.
Je pourrais vous parler de Mario ou de Mickaël, qui dorment dans la rue dans mon quartier et qui n'ont plus d'espoir d'avoir un hébergement d'urgence, puisque les places sont, du fait de la pénurie, réservées aux enfants, aux femmes et aux familles. Je pourrai vous parler de Zekerya, un petit garçon de 3 ans scolarisé à l'école maternelle Traversière et qui, le soir, dort sous une tente avec sa petite sœur de 6 mois et ses parents.
La rue est le réceptacle des échecs de toutes nos politiques publiques, telles que l'accueil des migrants ou la prise en charge des troubles psychiatriques, qui est très dégradée, comme elle est le lieu de l'errance des jeunes sortis de l'aide sociale à l'enfance. Bref, vous laissez à elles-mêmes les personnes les plus vulnérables de la société.
En Île-de-France, cette situation risque d'empirer à l'occasion des Jeux olympiques. Au reste, soixante-quinze associations se sont réunies dans un collectif nommé Le Revers de la médaille pour dénoncer les risques qui pèsent sur les sans-abri, les exilés, les étudiants et l'ensemble des personnes précarisées, du fait de l'organisation des Jeux.
Vous avez notamment créé des « sas d'accueil temporaires régionaux » pour accueillir dans différentes régions les sans-abri d'Île-de-France où l'hébergement d'urgence est saturé et où les places d'hôtel seront occupées pendant la période des Jeux. Cela pourrait être l'occasion d'un nouveau départ pour les personnes en situation de précarité, malheureusement les conditions d'accompagnement et d'accueil sont très insuffisantes, alors que les transferts ont déjà commencé.
Dès lors, je vous poserai trois questions, madame la ministre déléguée.
D'abord, quel sera le nombre de places en pension de famille et de logements sociaux très accessibles créés en 2024, pour que le « logement d'abord » ne soit pas seulement un slogan ? Ensuite, quel est le bilan des sas régionaux ? Enfin, comment assurer la continuité de la prise en charge par les associations des personnes sans-abri pendant la période des Jeux olympiques ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
La prise en charge des publics sans-abri fait l'objet d'une politique gouvernementale ambitieuse et particulièrement volontariste, qui repose sur le plan « logement d'abord », que vous avez cité, et sur la mise à l'abri dans le parc d'hébergement d'urgence pour répondre aux situations d'urgence et de détresse.
Le plan « logement d'abord » a permis d'engager une transformation du modèle d'action publique pour lutter contre le sans-abrisme et pour favoriser l'accès et le maintien dans le logement en prévenant les expulsions. Cette transformation s'est traduite par des résultats reconnus par l'ensemble des acteurs : plus de 440 000 personnes sans domicile ont accédé au logement depuis 2018.
Malgré ces efforts colossaux, la tension reste forte dans de nombreux territoires, comme vous l'avez dit, madame la députée. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé de maintenir le parc d'hébergement d'urgence à un niveau élevé : 203 000 places en 2024.
En ce qui concerne les opérations de mise à l'abri en Île-de-France, dans un contexte de forte saturation des dispositifs d'hébergement locaux, des personnes se voient proposer, sur la base du volontariat, une orientation vers des sas d'accueil temporaire régionaux. Une fois mises à l'abri, les personnes volontaires bénéficient d'une évaluation de leur situation administrative et d'un accompagnement social et sanitaire. Selon leur situation, elles pourront déposer une demande d'asile ou poursuivre leur demande si celle-ci a déjà été déposée. Elles pourront également solliciter un examen ou un réexamen de leur situation.
Le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour les plus vulnérables, comme en témoignent les récentes annonces du pacte des solidarités et les moyens considérables alloués à la veille sociale.
J'ai bien entendu votre réponse. Néanmoins, sachez que nous serons vigilants quant à la prise en charge des personnes sans-abri pendant la période des Jeux olympiques. Les associations attendent notamment la communication des périmètres de sécurité, pour savoir comment elles pourront intervenir pour mieux prendre en charge, pendant la période des Jeux, les personnes sans-abri et les exilés.
Elles attendent également le bilan de l'instauration des sas régionaux. Actuellement, les personnes sans-abri et les exilés sont déplacés pendant trois semaines en région, après quoi elles reviennent à Paris. Ce dispositif n'est pas du tout satisfaisant car il ne constitue pas une situation pérenne. Nous attendons donc que le Gouvernement présente un bilan plus précis sur la prise en charge des personnes sans-abri.
La parole est à M. Emmanuel Fernandes, pour exposer sa question, n° 406, relative à Stocamine.
Ma question porte sur Stocamine et se décline en quatre points.
Premièrement, le tribunal administratif de Strasbourg a enjoint le préfet du Haut-Rhin de « prendre les mesures nécessaires afin d'assurer la maintenance du site de Stocamine et en particulier de l'ensemble des galeries ». Considérez-vous que les budgets alloués chaque année par l'État aux Mines de potasse d'Alsace (MDPA), entre 2 et 11 millions d'euros, soient suffisants pour permettre l'intervention lourde d'engins en milieu minier déconsolidé ? Allez-vous réévaluer ces montants suite à l'injonction du tribunal ou considérez-vous que le tribunal se trompe et que l'entretien des galeries est satisfaisant ?
Deuxièmement, vous avez introduit un amendement dans le projet de loi de finances pour 2024 pour prétendre à une réversibilité de l'enfouissement. Au-delà de la communication, quelle est l'utilité concrète de cet amendement ? Considérez-vous qu'une base légale soit nécessaire pour les travaux d'extraction des déchets ? Le cas échéant, pourquoi une telle base légale n'était-elle pas nécessaire pour l'extraction des déchets mercuriels effectuée entre 2014 et 2017 ? Vous estimez que les travaux d'enfouissement « doivent impérativement être terminés dès 2027 », d'après le communiqué du ministère du 20 septembre 2023. Outre la fin d'autorisation d'exploitation du site accordée par l'arrêté préfectoral de 1997 pour une durée de trente ans, sur quelle étude scientifique – j'y insiste : scientifique – vous fondez-vous pour justifier cette date butoir ? Si elle n'existe pas, pourquoi vous précipiter pour enfouir les déchets ?
Troisièmement, en ce qui concerne la pollution de l'eau, il existe un consensus scientifique qui considère l'ennoiement des galeries comme inéluctable, tout comme l'expulsion, par effet de seringue, de la saumure souillée jusqu'à la nappe phréatique. Disposez-vous d'un chiffrage de la quantité cumulée – et non sur une période donnée – de polluants qui remonteront ? Si tel n'est pas le cas, comment pouvez-vous prétendre que la remontée des déchets toxiques sera sans danger pour le vivant et la biodiversité ?
Quatrièmement, je veux vous interroger sur le volume des déchets polluants. Pouvez-vous nous prouver que des études toxicologiques ont été effectuées sur les 30 000 tonnes de sels contaminés par l'incendie du bloc de stockage n° 15 en 2002 ? Ni l'enquête pénale sur les causes de l'incendie, ni les 310 études ultérieures menées par la tierce expertise n'ont porté sur ces 30 000 tonnes de sels contaminés suite aux inévitables transformations chimiques et effets cocktails dus à la chaleur, à l'eau ou aux produits introduits pour éteindre l'incendie. Le cas échéant, cette omission n'entraîne-t-elle pas une erreur fondamentale dans l'évaluation du risque de contamination de la nappe ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Comme je l'ai dit en réponse à votre question au Gouvernement le 14 novembre, je rappelle que 134 études, mobilisant 123 experts internationaux, ont été produites sur le sujet et que toutes leurs conclusions convergent. La réponse à vos multiples questions figure dans ces nombreuses études, qui sont toutes publiques.
L'exploitation minière présente des risques mortels, comme l'a montré cette année le décès de plusieurs mineurs dans une mine de potasse en Espagne. Or les experts indiquent qu'une prolongation importante de la durée d'utilisation de la mécanique de l'un des puits au-delà de 2027 présente un risque considérable pour le personnel.
La date de 2027 n'a pas été remise en cause par les parlementaires et les élus locaux du département lors de la concertation menée par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, M. Christophe Béchu, ces derniers mois.
L'urgence, pour protéger la nappe d'Alsace, est de procéder au confinement sûr de ces déchets. Sinon, dans plusieurs centaines d'années, l'ennoiement progressif des anciennes galeries des mines pourrait provoquer une remontée de substances polluantes.
En l'absence de confinement, le débit de remontée de saumure polluée vers la nappe d'Alsace est évalué à 700 mètres cubes par an, contre 0,7 mètre cube par an avec les barrières de confinement. Les chiffres parlent d'eux-mêmes.
Le Gouvernement a inscrit dans le projet de loi de finances pour 2024 un dispositif de garantie pour aller chercher ces déchets lorsque des solutions technologiques permettront d'envoyer des robots en toute autonomie. Il crée donc, dès maintenant, les conditions budgétaires et juridiques pour remplir pleinement nos obligations vis-à-vis des générations futures, afin qu'elles puissent vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé.
Le Gouvernement agit sur cette question avec une volonté indéfectible de protéger la nappe d'Alsace, de préserver la sécurité des mineurs de fond et le droit des générations futures, en y consacrant les moyens financiers nécessaires, y compris pour assurer durablement la maintenance courante des galeries de la mine.
Je répète que 2027 n'est pas la date à partir de laquelle l'enfouissement ne serait plus possible, mais seulement la date de fin de validité de l'autorisation d'exploitation du site accordée par l'arrêté préfectoral de 1997, qui n'est d'ailleurs fondée sur aucune étude scientifique.
S'agissant des potentiels accidents du travail liés à l'extraction des déchets mercuriels, je rappelle que les manipulations liées à l'extraction du produit le plus toxique, qui étaient les plus complexes et les plus susceptibles de générer des accidents, ne seront désormais plus nécessaires pour atteindre les colis de poisons et extraire les 42 000 tonnes de déchets toxiques toujours présents à quelque 500 mètres de la plus grande nappe phréatique d'Europe. Si elle est amenée à progresser encore, la robotique permet déjà les manœuvres en question : en Allemagne, certaines entreprises possèdent des bras télescopiques de cinquante mètres de long, capables d'aller chercher ces déchets sous terre, et d'autres expériences internationales sont des réussites, à l'image de celles menées par la Suisse à la décharge de Bonfol, dans le Jura, où sont stockés des déchets toxiques industriels, et à la décharge pour déchets spéciaux de Kölliken. Inutile, donc, de tabler sur la progression de la robotique dans le futur.
La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour exposer sa question, n° 430, relative à la tempête Ciaran.
Permettez-moi, madame la ministre déléguée, de vous interroger sur le retour d'expérience suite au passage de la tempête Ciaran dans le Finistère. Si je salue la réussite des mesures de prévention, qui ont évité des pertes humaines lors de cet événement – preuve que nous avons su apprendre des catastrophes précédentes –, de nombreux points d'amélioration de la gestion post-tempête sont apparus depuis le 2 novembre.
Les réseaux de communication ont été sévèrement endommagés, privant les communes de tout lien non seulement avec leurs administrés, mais aussi avec les services de l'État et Enedis, entravant ainsi la gestion opérationnelle de la crise et l'information des sinistrés. Nombre de nos concitoyens dont les habitations sont totalement dépendantes à l'électricité – en particulier des femmes âgées, seules et isolées dans les hameaux – ont été privés de lumière, de chauffage et de nourriture chaude, et les denrées stockées dans les congélateurs ont été perdues. La vulnérabilité des points de captage d'eau et la défaillance électrique de certaines usines de traitement ont entraîné une coupure d'alimentation d'eau potable, et les régimes assurantiels agricoles se révèlent inadaptés face à une telle calamité, en particulier pour les serristes, en raison du critère de vétusté des installations. Enfin, la procédure et les critères de reconnaissance des tempêtes hors des zones cycloniques comme des catastrophes naturelles reste problématique.
Quelles premières leçons le Gouvernement tire-t-il de cette catastrophe climatique d'ampleur exceptionnelle ? Comment pouvons-nous améliorer notre réactivité dans la gestion opérationnelle de la crise ? Les communes étant le premier échelon institutionnel de prise en charge et de solidarité de proximité, ne devrait-on pas équiper chaque commune à risque de moyens de communication autonomes et d'un groupe électrogène pour gérer l'urgence ? Il s'agit d'un enjeu stratégique. Des évolutions législatives sont-elles prévues pour reconnaître les tempêtes comme des catastrophes naturelles ? Enfin, comment cette expérience pourrait-elle permettre à notre société, vouée à faire face à des aléas climatiques de plus en plus nombreux et intenses, à être plus résiliente encore à l'avenir ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Je vous remercie d'avoir salué le travail de prévention mené avant le passage de la tempête Ciaran, l'une des plus violentes de ces dernières décennies. Le Gouvernement a tiré de cette tempête deux leçons. La première, c'est l'importance de l'anticipation : les bulletins de vigilance émis par Météo-France ont permis de concentrer les moyens et de positionner les acteurs de la sécurité civile au plus près des zones exposées, en amont du passage de la tempête. L'activation du dispositif FR-Alert a, quant à elle, permis d'informer rapidement la population, évitant ainsi des pertes humaines et réduisant la sollicitation des acteurs engagés sur le terrain.
En ce qui concerne la prise en charge, par les assurances, des dégâts liés aux événements climatiques, le Gouvernement poursuit l'important travail engagé depuis la loi du 28 décembre 2021 relative à l'indemnisation des catastrophes naturelles, dite loi Baudu, pour renforcer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. Notons que les dégâts provoqués par les vents violents, qui n'entrent pas dans le champ de la garantie catastrophe naturelle, sont couverts par tous les contrats d'assurance au titre de la garantie tempête, obligatoire. Ainsi, tous les particuliers et toutes les entreprises et collectivités territoriales dont les biens assurés ont été endommagés par les effets du vent seront indemnisés par les assureurs, sans qu'une reconnaissance préalable de l'état de catastrophe naturelle soit nécessaire.
Par ailleurs, comme l'a annoncé Christophe Béchu le 17 novembre, l'État pourra prendre en charge une partie des travaux de reconstruction, à l'identique, décidés par les collectivités locales : la première mission du sous-préfet chargé de la coordination, nommé le vendredi 23 novembre, sera d'accompagner les collectivités concernées, qui disposent de deux mois pour transmettre aux services de l'État une première évaluation des dommages.
Seconde leçon : la prévention, qui passe par la maîtrise de l'urbanisation et l'établissement de règles constructives adaptées aux territoires, reste le meilleur moyen d'assurer leur résilience. Le Gouvernement soutient ces actions de réduction de la vulnérabilité des biens grâce aux aides du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds Barnier.
Un mois après le passage de la tempête, des inquiétudes fortes persistent concernant le processus d'indemnisation, car il reste encore des trous dans la raquette, comme on dit sur le terrain. Après vos annonces, les filières et les petits exploitants exclus du régime assurantiel classique se retrouvent bien seuls : en l'absence de directives claires, ils ne savent toujours pas, pour le moment, à qui s'adresser. Alors que les plantations pour les saisons prochaines se jouent dès maintenant, les agriculteurs non assurés, comme les serristes, dont les dommages ne sont de fait pas pris en charge par les assurances, n'ont toujours pas compris à quoi ils avaient droit. Le déclenchement du régime des calamités agricoles, qui permet d'indemniser les pertes de fonds, ne leur apporte rien, car les serres et les systèmes d'irrigation, qui sont leur outil de travail, en sont exclus. Quelle sera la prise en charge, à long terme, des pertes de récoltes à venir ? À Telgruc-sur-Mer, la cidrerie Rozavern a perdu la moitié des arbres de ses vergers : les conséquences de cette perte sur la production se ressentiront au moins pour les quinze prochaines années.
Dans certains élevages privés d'électricité pendant quinze jours, 1 500 euros de carburant ont été nécessaires pour alimenter les groupes électrogènes qui ont permis d'assurer la traite. Quelle sera la prise en charge de ces dépenses ? Les agriculteurs bio sont parmi les plus désavantagés par le processus d'indemnisation, car les aides versées dans le cadre du fonds d'urgence seront comptabilisées au titre des aides publiques, limitées, selon la règle de minimis, à 20 000 euros par exploitation, déduction faite des autres aides déjà perçues. C'est un point d'alerte important.
Madame la ministre déléguée, le monde agricole attend une prise en charge efficace et, surtout, lisible : il y va de l'avenir des filières locales.
La parole est à Mme Martine Froger, pour exposer sa question, n° 411, relative à la route nationale 20.
Signé en mars 2017, le protocole conclu avec l'État s'agissant de l'itinéraire de la route nationale 20 (RN20) en Ariège vise non seulement à limiter la congestion – notamment en période d'affluence touristique –, à améliorer le confort et la sécurité routière et à réduire les nuisances pour les riverains des bourgs traversés, mais aussi, comme les cofinanceurs l'ont rappelé, à réaliser le contournement de Tarascon-sur-Ariège, qui constitue le principal point de ralentissement de la RN20 en direction de l'Espagne et de la principauté d'Andorre.
Cette déviation structurante, particulièrement importante pour renforcer l'attractivité de la haute vallée de l'Ariège et soutenir son développement touristique et économique, permettrait, selon les estimations, de réduire d'au moins trente minutes le temps de trajet entre Tarascon-sur-Ariège et Ax-les-Thermes – un gain de temps considérable.
Dans la lignée de celui de 2017, un deuxième protocole, signé le 5 février 2022 par Jean Castex, alors Premier ministre, a entériné le scénario préférentiel et la répartition du financement – 111 millions d'euros pour l'État, 37 millions d'euros pour la région et autant pour le département. En signant ce nouveau protocole, les partenaires s'étaient engagés à apporter leur soutien financier à l'opération dans le cadre du volet mobilités du contrat de plan État-région (CPER) pour les années 2023 à 2027. Le volet routier du CPER en cours inclut le plan de financement prévu dans le protocole. Or, d'après les informations dont disposent les élus locaux, seuls 10 millions d'euros de crédits auraient été ouverts – une somme qui serait très largement insuffisante pour honorer les engagements sur ce projet, et, de fait, contraire aux dispositions du protocole.
Ma question est donc simple : madame la ministre déléguée, pouvez-vous nous confirmer que les engagements pris par l'État dans le cadre du volet mobilités du CPER 2023-2027 pour construire la déviation de Tarascon-sur-Ariège seront effectivement respectés ? Afin de ne pas retarder les travaux, serait-il envisageable de débloquer dès à présent 42 millions d'euros de crédits au titre du CPER en cours, le reste pouvant être programmé dans le prochain ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Vous m'interrogez sur les perspectives de financement du contournement de Tarascon-sur-Ariège au titre du volet mobilités du CPER Occitanie pour les années 2023 à 2027, – un projet nécessaire, que je connais bien, et que je sais très attendu par les habitants de votre belle Ariège. Tout ce que vous avez rappelé est absolument exact : l'État s'est effectivement engagé, dans deux protocoles, à poursuivre et à financer cette opération essentielle pour le département de l'Ariège et l'amélioration de la liaison avec l'Espagne et l'Andorre.
Le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) n'est pas défavorable au projet : dans son avis, il rappelle que Tarascon-sur-Ariège est un point dur de cette liaison internationale et conditionne explicitement son engagement à financer une partie de l'opération, dans le cadre du CPER pour les années 2028 à 2032, au résultat des négociations en cours entre l'ensemble des cofinanceurs – État, région Occitanie, ensemble des collectivités territoriales compétentes en matière de mobilité. Ces négociations s'inscrivent pleinement dans le cadre de la planification écologique définie par la Première ministre, qui a engagé une réorientation de nos priorités en matière de mobilité – en particulier s'agissant des infrastructures –, afin de favoriser autant que possible les mobilités décarbonées, comme le rail, mais aussi les mobilités actives et le transport fluvial. À l'inverse de la dynamique qui a prévalu au cours des précédentes décennies, cela implique de limiter nos investissements dans les modes de déplacement les plus polluants, au premier rang desquels le transport routier. Le travail avec la région Occitanie se poursuit – je sais que vous y participez – afin d'élaborer un protocole qui permette d'avancer au mieux sur le projet que vous évoquez, mais aussi, plus largement, sur l'ensemble des sujets relatifs à la mobilité à l'échelle régionale, en fonction des ressources financières de chacun et des priorités de la planification écologique.
Nous resterons mobilisés, car l'attractivité et la sauvegarde du tissu économique de notre territoire sont en jeu avec ce projet : si les dispositions du CPER n'évoluaient pas dans le sens prévu par les protocoles signés par les plus hauts représentants de l'État, il s'agirait d'un grave manquement de l'État à ses engagements sur ce projet très attendu par les élus locaux et les populations concernées.
Nous tiendrons nos engagements !
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour exposer sa question, n° 416, relative au prêt à taux zéro.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du logement. Béziers s'est réjouie de figurer dans l'arrêté du 3 octobre 2023, qui tendait à classer de nouvelles communes en zone tendue – B1 ou A. Ce changement de zonage la rend en effet éligible à des aides à l'investissement locatif et à l'accession à la propriété, ce qui est une très bonne nouvelle, et favorisera l'accès au logement des Biterrois et la construction de logements neufs, donnant ainsi un sérieux coup de pouce au secteur du bâtiment – pour mémoire, depuis que Béziers est sortie du dispositif dit Pinel, on y compte 400 logements neufs de moins par an.
Revers de la médaille – car il y a toujours un revers –, ce changement de zonage fait perdre aux Biterrois l'accès au prêt à taux zéro (PTZ) dans l'ancien, puisque cette aide est conditionnée à la situation du logement dans une zone détendue. Dès 2024, il ne sera ainsi plus possible de bénéficier d'un prêt à taux zéro pour acheter un logement situé dans toutes les villes jusqu'à présent classées B2 ou C, nouvellement classées B1 ou A, hormis s'il s'agit d'un logement neuf dans de l'habitat collectif – un curieux paradoxe, vous en conviendrez, quand on sait que la vacance des logements anciens est l'un des maux contre lesquels luttent les villes du programme Action cœur de ville.
Avant l'examen du projet de loi de finances (PLF), le ministre délégué chargé du logement avait exprimé la volonté que continuent à bénéficier du prêt à taux zéro les villes moyennes nouvellement classées B1 et faisant partie du dispositif Action cœur de ville. Cette mesure devait être intégrée au texte par voie d'amendement gouvernemental : il semble qu'elle ait été passée par pertes et profits à la suite du 49.3. Or, vous le savez, madame la ministre déléguée, il est indispensable, surtout en matière de logement, de faire du sur-mesure dans nos régions. Pourriez-vous me confirmer que la disposition en cause figurera bien dans la rédaction finale du PLF ?
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Au nom de Patrice Vergriete, madame la députée, je commencerai par rappeler que le zonage ABC, classant les communes françaises selon le degré de déséquilibre que l'on y constate entre l'offre et la demande de logement, détermine en effet leur éligibilité à des dispositifs tels que la réduction d'impôt dite Pinel, le logement locatif intermédiaire (LLI) et, à compter de 2024, le PTZ pour les logements collectifs neufs. Or, à la suite du volet logement du Conseil national de la refondation, 209 communes, dont Béziers, ont été reclassées A ou B1, alors que depuis des années le PTZ concernant les biens anciens à rénover est centré sur les zones détendues, soit C et B2, afin de répondre, dans un contexte de maîtrise de la dépense fiscale, aux besoins prioritaires ; ne peuvent donc en bénéficier que les communes situées dans ces zones, même si elles font par ailleurs partie d'Action cœur de ville.
Néanmoins, dans les zones tendues, le Gouvernement soutient le parc de logement ancien grâce à cinq dispositifs : Loc'avantages, qui permet aux bailleurs privés, à condition de plafonner les loyers, de bénéficier de réductions d'impôts et d'aides à la rénovation énergétique – or le classement B1 de Béziers, en rehaussant le plafond de ressources des candidats locataires, favorise ce cas de figure – ; l'éco-PTZ, visant à financer les travaux effectués par les ménages afin d'améliorer la performance énergétique de leur logement ; le dispositif dit Denormandie, destiné à encourager la rénovation de biens anciens, dans les quartiers dégradés, en vue d'une location ; l'apport financier spécifique d'Action logement et de la Caisse des dépôts aux opérations d'acquisition-amélioration d'immeubles anciens, s'agissant de location ou d'accession sociale à la propriété ; enfin, dans le cadre du PLF pour 2024, le LLI en acquisition-amélioration, expressément ouvert aux communes ayant engagé une opération de revitalisation de territoire, c'est-à-dire entre autres celles qui relèvent d'Action cœur de ville. J'espère avoir répondu à votre question.
Vous y avez répondu partiellement mais ce qui est dommage, dans cette histoire, c'est qu'en matière de logement, encore une fois, nous n'arrivons pas à faire du sur-mesure. Les villes moyennes incluses dans Action cœur de ville, comme Béziers, ont besoin du classement B1, qui, je le répète, constitue pour nous une bonne nouvelle ; simplement, comme dans beaucoup d'autres domaines, il faudrait faire de la dentelle, ne pas appliquer en bloc ce zonage à une ville où il conviendrait de procéder presque quartier par quartier afin de répondre au plus près aux préoccupations des habitants. Le centre-ville historique de Béziers, qui en compte 23 000, requiert une aide spécifique ; c'est pourquoi il est regrettable que l'amendement dont je parlais, pourtant originellement voulu par le Gouvernement, n'ait pas été retenu. À défaut, nous nous satisferons des mécanismes actuels, mais seul un travail de dentelle permettra de remédier à la crise du logement.
La parole est à M. Frédéric Maillot, pour exposer sa question, n° 403, relative à l'affaire Sankara.
Leader du panafricanisme, précurseur du combat féministe, avocat du patriotisme économique africain, refusant jusqu'au dernier souffle de devenir la marionnette de l'Occident, clamant que son Afrique n'aurait aucune dette, modèle, père spirituel, inspirateur de la lutte pour l'émancipation des peuples colonisés : tel était Thomas Sankara, président du Burkina Faso, le « pays des hommes intègres », et l'un des plus grands chefs d'État qu'ait connus l'Afrique. Son opposition au néocolonialisme, au capitalisme et à l'impérialisme qui continuent de gangréner le continent lui a coûté la vie.
En 2017, lors de son déplacement au Burkina Faso, notre président, Emmanuel Macron, promettait que « tous les documents produits par les administrations françaises pendant le régime de Sankara et après son assassinat » et couverts par le secret défense seraient déclassifiés afin d'être « consultés en réponse aux demandes de la justice burkinabée ».
Si dette il y a, c'est celle de la transparence au sujet de cet assassinat. L'État ayant déclassifié des documents classés « confidentiel défense », pourquoi ceux classés « secret défense » n'ont-ils pas été restitués ? Par ailleurs, lors du procès des assassins, plusieurs témoins ont raconté avoir vu des Français retirer du matériel d'écoute placé par les services de sécurité intérieure burkinabés au lendemain de la mort du président Sankara : pourquoi ces écoutes n'ont-elles pas été transmises aux autorités du Burkina Faso ? François Mitterrand disait de Thomas Sankara : « C'est vrai, il vous titille, il pose des questions… Avec lui, il n'est pas facile de dormir en paix : il ne vous laisse pas la conscience tranquille ! » Serait-ce toujours le cas ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger.
En réponse aux demandes de la justice burkinabée, le Président de la République s'est en effet engagé en novembre 2017, à l'occasion de son déplacement à Ouagadougou, à déclassifier et à transmettre les archives françaises relatives à l'assassinat de Thomas Sankara, archives détenues par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères et par celui des armées.
Entamée en octobre 2018, cette opération s'est achevée le 17 avril 2021 par la remise aux autorités burkinabées du dernier lot de documents. La France a donc tenu la promesse du président Macron de transmettre « tous les documents produits par les administrations françaises pendant le régime de Sankara et après son assassinat ».
La parole est à Mme Annick Cousin, pour exposer sa question, n° 427, relative à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques.
La chambre d'agriculture du Lot-et-Garonne m'a fait part de son inquiétude face à la forte hausse du prix du carburant qui, conjuguée à l'augmentation significative de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) touchant le gazole non routier (GNR), contraint les exploitants à des avances de trésorerie de plus en plus importantes. Tant dans la filière conventionnelle que dans la filière biologique, la tendance à la suppression des molécules autorisées dans les traitements agricoles entraîne en effet une augmentation des passages mécaniques, accroissant la consommation de GNR. L'accroissement, annoncé jusqu'en 2030, du reste à charge au titre de la TICPE aggrave la situation. Les finances des agriculteurs ne sont pas en mesure d'absorber de telles hausses de charges, surtout dans le contexte économique actuel. Ne serait-il pas opportun de leur conserver l'exonération de TICPE dont, à l'instar des pêcheurs ou des transporteurs routiers, ils bénéficient ?
La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Merci, madame la députée, de votre question, qui va me permettre d'éclaircir les choses au sujet de la TICPE. Considérons la réalité : la taxation d'un hectolitre de gazole s'élève pour les agriculteurs à 3,86 euros, contre 45 euros pour les transporteurs routiers, l'importance de l'écart justifiant qu'une première marche soit franchie dès 2024. J'aimerais insister sur trois points : tout d'abord, qu'il s'agisse de la trajectoire ou des mesures de compensation, cette réforme a été conçue, en toute transparence, avec les organisations professionnelles agricoles. Il ne s'agit pas, ensuite, de supprimer l'avantage fiscal, mais de le réduire progressivement d'un tiers d'ici à 2030 : en 2024, le surcoût serait ainsi de l'ordre de 285 euros pour une consommation moyenne de 10 000 litres par an. Enfin, nous avons fixé un principe dont l'énoncé devrait répondre à votre question : chaque euro d'économie généré par cette mesure sera redirigé vers les exploitations.
Le Gouvernement prévoit donc une réduction progressive assortie d'incitations – 80 millions d'euros supplémentaires – à la décarbonation, ainsi que d'allègements de la fiscalité : relèvement du seuil d'exonération des plus-values agricoles, de celui du régime des microbénéfices agricoles – dont davantage de petites exploitations pourront dès lors bénéficier grâce à la simplification des démarches – et du plafond de la déduction pour épargne de précaution. Par ailleurs, afin de limiter les effets que vous avez évoqués en matière de trésorerie, nous allons créer, en deux acomptes annuels, une avance pérenne correspondant à 50 % du remboursement de la TICPE. Dans le même temps, nous réunirons tous les acteurs pour aboutir à une feuille de route de la décarbonation. Trajectoire de cette décarbonation, évolution de la fiscalité, mécanisme de compensation à l'euro près, et même un peu plus : tout cela constitue un ensemble logique, vertueux, permettant d'engager un peu plus le monde agricole dans une transition nécessaire.
Les agriculteurs ne veulent pas vivre d'aumônes mais de leur travail, et ils en ont assez d'être traités comme une espèce rare à protéger. La hausse des prix du carburant, comme la concurrence déloyale des produits importés, leur porteront vite le coup de grâce si votre réaction n'est pas à la hauteur de leurs attentes.
La parole est à M. Frédéric Falcon, pour exposer sa question, n° 429, relative à la filière viticole d'Occitanie.
Samedi dernier, à Narbonne, dans ma circonscription, les viticulteurs d'Occitanie se sont mobilisés, lors d'une journée historique, pour crier leur désespoir. Depuis des mois, je ne cesse de vous alerter, monsieur le ministre, au sujet de la viticulture audoise : alors que le climat change, que l'eau manque, tout projet destiné à retenir les pluies, au lieu qu'elles se perdent dans la Méditerranée, est bloqué par une administration toute-puissante qu'a infiltrée l'idéologie écologiste. Comme tout le Sud de la France, le Languedoc mérite pourtant un plan d'irrigation planifié par l'État, à l'instar du projet d'aqueduc allant du Rhône à Perpignan, défendu en son temps par Georges Frêche, mais aucun aménagement du territoire n'est envisagé : nous préférons vendre l'eau du Rhône à Barcelone !
Encore une fois, la France est paralysée par sa technocratie, sans compter le harcèlement des écologistes ou les descentes musclées dans les exploitations de l'Office français de la biodiversité, dont les contrôles au sein des zones de non-traitement impliquent des agents armés – alors même que la cartographie sur laquelle se fondent ces opérations est obsolète, répertoriant des cours d'eau qui n'existent plus et des canaux d'irrigation d'antan et hors d'usage. Cette situation kafkaïenne ne peut que susciter l'incompréhension.
En matière de négociations commerciales, le rapport de force face à la grande distribution est manifestement défavorable aux viticulteurs audois : malgré la hausse constante des charges, encore aggravée par l'inflation, et leurs efforts considérables en vue d'améliorer la qualité de leur production, leurs prix de vente restent inchangés, cependant que la grande distribution continue d'engranger des marges indécentes. Les cahiers des charges toujours plus contraignants des labels, alors que des produits affranchis de nos normes sociales et environnementales sont importés en toute légalité, alimentent la colère – et vous choisissez ce moment pour vous attaquer au gazole non routier ! Enfin, bien que la consommation intérieure diminue, vous n'apportez aucune aide à l'exportation de nos produits viticoles.
Mes interpellations n'ont encore fait l'objet d'aucune réponse de votre part : avez-vous encore les moyens d'agir, ou êtes-vous sous la tutelle de l'Union européenne et de la technocratie ? Est-ce vous qui achèverez la viticulture audoise et plus largement languedocienne, car si rien n'est fait, d'ici à la fin du second mandat d'Emmanuel Macron, la plupart des vignerons de l'Aude auront disparu ?
La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
On ne gagne jamais à donner dans la caricature : je vous invite à regarder ce qui a été accompli, depuis le début de l'année, en faveur de la filière viticole. Je ne peux non plus vous laisser dire que cela fait des années que nous ne faisons rien : les gels de 2021 et 2022 nous auront coûté plus de 1 milliard d'euros, nous avons réagi à la guerre en Ukraine, instauré des prêts garantis par l'État (PGE). Certes, il reste toujours possible d'ânonner que nous n'agissons pas, mais nous agissons, et les viticulteurs le savent.
En revanche, la vérité m'oblige à dire que les difficultés se sont accumulées depuis des années : les « taxes Trump » – vertu de la fermeture des frontières que vous prônez par ailleurs ; la crise du covid ; la guerre en Ukraine, avec ses effets inflationnistes et la baisse de la consommation.
Pour y remédier, nous avons essayé d'agir dans différents domaines. Nous avons fait évoluer les PGE en les prolongeant sous forme de prêts bonifiés, pour permettre aux viticulteurs qui le souhaitent d'alléger leurs charges de trésorerie. Deuxième élément que vous avez oublié de signaler – ce n'est peut-être rien pour vous, mais pour les viticulteurs, c'est important : 200 millions d'euros pour la distillation de la viticulture. Cette mesure qui concerne l'Aude, mais pas seulement, vise à réduire les volumes sur le marché, afin de faire remonter les prix.
Nous avons agi également sur la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) et sur le report ou l'exonération des cotisations sociales. Dans le seul département de l'Aude, cette mesure s'élève à 1,4 million d'euros : si vous considérez que ce n'est rien, c'est dommage car il me semble que c'est un élément important.
Quatrième élément : en 2023, nous avons réformé l'assurance récolte – pour un budget de 680 millions d'euros – afin que les agriculteurs soient mieux couverts contre les risques, liés en particulier au dérèglement climatique.
Nous devons gérer les crises, et c'est ce que nous faisons. Je serai demain dans l'Hérault pour le Salon international des filières viticole, vinicole, arboricole et oléicole (SITEVI), où j'échangerai avec les producteurs pour étudier ce que nous pouvons faire de plus. Nous n'avons même pas terminé la campagne de distillation. Nous devons donc étudier, avec les éléments de la récolte, les actions complémentaires à mener. Nous y travaillons d'arrache-pied avec les producteurs, sans démagogie et avec le sens de la responsabilité.
Il faut travailler aussi – vous avez raison sur ce point – sur les grands horizons, celui du dérèglement climatique notamment. Il faut aller plus loin sur la question des retenues d'eau et des simplifications. Des annonces devront être faites dans les semaines et les mois qui viennent, dans la mesure où des projets de bon sens sont aujourd'hui bloqués. C'est valable pour l'Aude qui a souffert et souffre encore d'une pluviométrie trop faible ; il faut adapter les projets en question au dérèglement climatique.
Il faut travailler enfin sur l'exportation, voie de l'avenir pour ce secteur d'excellence qu'est la viticulture de votre région. Pour ce faire, il convient de réfléchir à la demande des consommateurs, à la segmentation du marché, à la valorisation de la production et, éventuellement, à son évolution face à celle de la demande. C'est ce qu'a fait la région Languedoc-Roussillon avec succès il y a vingt-cinq ans – c'est dire que la crise n'est pas récente. Il faut s'emparer de nouveau de cette question, car la consommation et la demande ont évolué.
Vous avez en partie répondu à mes questions. Nous ne serons pas toujours d'accord, mais nous le serons peut-être sur un point, celui de l'aménagement du territoire. Nous ne comprenons pas pourquoi il n'existe pas de grand plan d'aménagement du territoire dans le Languedoc, notamment pour l'irrigation. D'autres pays l'ont fait, comme l'Espagne, avec des excès sans doute. Il faut absolument exhumer des dossiers tels que le projet Aqua Domitia en Languedoc-Roussillon et Catalogne, qui permettrait d'irriguer toute la plaine du Languedoc et de sauver ainsi notre agriculture.
La parole est à M. Francis Dubois, pour exposer sa question, n° 412, relative à la filière veau sous la mère.
Je souhaite interroger le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire à propos des aides du programme opérationnel veaux labels et leur répartition. Il s'agit d'une situation critique qui menace l'avenir de la filière d'élevage du veau sous la mère ou veau label, une filière d'excellence qui constitue non seulement une tradition, mais aussi un patrimoine agricole français, notamment corrézien, structuré sous l'impulsion d'un conseiller municipal de Sainte-Féréole, en Corrèze – Jacques Chirac.
Cette filière représente 50 % des veaux labels commercialisés en France, et 60 % en Corrèze. Elle réunit plus d'un millier d'éleveurs, dont 97 % sont adhérents à une organisation de producteurs (OP). Je vous laisse imaginer leur réaction lorsqu'ils ont appris par les services de la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE) que les conditions d'accès au programme opérationnel les laisseraient sur le carreau.
Et pourquoi ? Parce que les modalités de commercialisation, sans transfert de propriété, pratiquées au sein des organisations de producteurs, ne répondraient pas aux critères d'éligibilité de ces aides, alors même qu'elles sont agréées en France selon les critères de reconnaissance de l'Union européenne. Le tort de ces éleveurs serait de ne pas contractualiser, alors que leur méthode de vente très spécifique leur apporte une plus-value supplémentaire.
Pourtant, ils maintiennent un élevage traditionnel de qualité et veulent garder la main sur leur méthode de commercialisation, en négociant individuellement le prix de leurs veaux, en foire, en foire primée ou en ferme, garantissant ainsi le niveau élevé du cours du veau. De plus, Elvea France, un réseau réunissant vingt-neuf associations d'éleveurs, s'engage à fournir l'ensemble des éléments nécessaires pour répondre aux critères d'éligibilité de l'aide.
Monsieur le ministre, cette aide représenterait en moyenne 4 000 euros par élevage et par an. Vous ne pouvez donc pas rester indifférent face à cette iniquité, qui non seulement mettra en péril une filière d'excellence déjà fragilisée, mais créera en outre une distorsion de concurrence. Ainsi est-il urgent et plus que nécessaire de rassurer nos éleveurs et de trouver une solution pour pérenniser ce modèle traditionnel de production de qualité, durable et unique en Europe.
La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Vous avez raison de parler de filière d'excellence. Dans le cadre de la mise en œuvre de la politique agricole commune (PAC), la France a fait le choix – elle n'en avait pas l'obligation – de mettre en œuvre à compter de 2024 des programmes opérationnels à destination des OP dans plusieurs secteurs, notamment celui du veau Label rouge afin de les accompagner.
À cet effet, mes services ont, en août, transmis à la Commission européenne une demande de modification du plan stratégique national de la PAC pour que nous puissions nous y conformer. La proposition de programme opérationnel dédié à la filière du veau Label rouge a été notifiée dans le cadre de cette modification. Elle prévoit une enveloppe prévisionnelle de 3 millions d'euros pour l'année 2024 et 3,5 millions d'euros pour les années 2025, 2026 et 2027. Vous avez rappelé les effets induits au sein de chaque exploitation.
Cette enveloppe consacre le soutien du Gouvernement en faveur d'une filière, certes restreinte en volume, mais dont le modèle particulièrement vertueux présente un caractère identitaire pour les éleveurs et génère de nombreuses externalités positives pour les territoires concernés – votre département ainsi que d'autres.
Depuis mai 2023, nous avons travaillé à la mise en œuvre de ce programme. Vingt-quatre organisations de producteurs ont été identifiées comme étant éligibles au programme opérationnel lors des concertations conduites par mes services. Dix-sept d'entre elles ont indiqué vouloir déposer un programme opérationnel dès l'année 2024.
Une organisation de producteurs peut déposer un programme opérationnel dès lors qu'elle est reconnue comme organisation du secteur de l'élevage bovin et qu'elle réalise la commercialisation de la production ou organise la mise en marché des productions de veau Label rouge, via des contrats négociés. Ce point de la réglementation européenne avait été souligné dès 2021 à l'intention des professionnels : il n'y a donc pas de surprise.
Je vous confirme qu'une organisation de producteurs sans transfert de propriété qui structure la mise en marché de la production, est éligible au programme opérationnel veau Label rouge. Des discussions sont en cours avec mes services et mon cabinet pour définir précisément le dernier point en suspens, à savoir les critères prévus, permettant de justifier la structuration de la mise sur le marché de la production par une organisation de producteurs.
Nous sommes conscients des actuelles difficultés et nous ne manquerons pas d'y trouver une solution. Dans le cadre européen que nous connaissons, une partie de la contrainte a déjà été levée. Nous allons poursuivre le travail pour que, dès 2024, plusieurs organisations de producteurs puissent s'engager dans cette structuration et bénéficier de ces moyens inédits pour la filière du veau sous la mère.
Vous avez répondu en partie à ma question, en nous assurant que les organisations de producteurs seront éligibles. Après les dernières discussions, celles-ci proposent, pour que la valeur de production commercialisée corresponde aux critères européens, de vous fournir les contrats de production signés entre l'organisation et le producteur, en y incluant les volumes prévisionnels. Ces contrats permettront de justifier l'apport respectif des volumes de l'éleveur et de l'organisation de producteurs afin que celle-ci réalise la mise en marché selon le schéma conforme. J'espère que ces éléments leur permettront de bien percevoir l'aide prévue. C'est leur attente. Avec la différenciation qui prévaut sur le marché de la viande, il serait dommage de perdre cette filière qui est un patrimoine historique français et corrézien.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur le modèle économique des entreprises de crèches et la qualité de l'accueil des jeunes enfants au sein de leurs établissements ;
Proposition de résolution européenne visant à faire respecter le droit international dans le secours des migrants en mer Méditerranée.
La séance est levée.
La séance est levée à onze heures cinquante-cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra