Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 3 octobre 2023 à 17h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission des affaires économiques a procédé à l'examen du projet de loi portant mesures d'urgence pour adapter les dispositions du code de commerce relatives aux négociations commerciales dans la grande distribution (n° 1679) (M. Alexis Izard, rapporteur).

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Chers collègues, notre commission est saisie du projet de loi portant mesures d'urgence pour adapter les dispositions du code de commerce relatives aux négociations commerciales dans la grande distribution. Nous avons désigné M. Alexis Izard pour rapporter ce texte.

Dans notre pays, la législation encadre les négociations entre les distributeurs et les fournisseurs et fixe au 1er mars la date limite de signature des contrats. Le Gouvernement souhaite avancer les dates des négociations entre les distributeurs et les plus gros industriels. En effet, les cours de plusieurs matières premières et certains coûts de production ayant commencé à enregistrer des baisses, le Gouvernement propose que le consommateur puisse en constater les effets sur son ticket de caisse sans attendre le 1er mars 2024.

Notre commission a organisé deux tables rondes sur ce sujet le 20 septembre dernier. Elles regroupaient, pour la première, les quatre principaux représentants de la grande distribution et, pour la seconde, quatre fédérations de l'industrie agroalimentaire. Notre collègue rapporteur a par ailleurs mené une vingtaine d'auditions la semaine dernière, auxquelles chacun d'entre vous a pu participer, comme je l'ai fait moi-même pour certaines d'entre elles. Elles nous ont permis d'entendre des acteurs enthousiastes à l'idée de renégocier et pensant être en mesure d'obtenir des baisses pour les consommateurs.

Au-delà de l'intention louable d'une baisse des prix à court terme, un sujet plus structurel me taraude. Si nous sommes amenés à légiférer pour changer la date limite de négociation entre les acteurs, c'est qu'il est peut-être temps de se poser la question de la pertinence de son inscription dans la loi. Nous n'allons pas légiférer chaque année, soit pour avancer la date légale s'il y a une chance de baisser les prix, soit pour la retarder s'il y a un risque de hausse. Le temps est sans doute venu d'accorder un peu plus de flexibilité aux acteurs, afin qu'ils décident eux-mêmes des prochaines dates de négociation. Je me permets de lancer ce débat, en guise d'introduction, et je suis sûr que nous en discuterons tout à l'heure.

Sur les 81 amendements déposés sur ce projet de loi, 4 ont été retirés par leurs auteurs, 1 constituait une charge en application de l'article 40 et 2 ne pouvaient figurer dans une loi.

Par ailleurs, j'ai vérifié avec une grande attention l'existence d'un lien direct ou indirect avec les dispositions du texte, en l'espèce avec le contenu de l'article unique, étant rappelé que le titre du projet de loi n'est pas un critère d'appréciation de ce lien. Les dispositions de l'article unique portant sur l'encadrement temporel des négociations commerciales, j'ai donc été conduit à déclarer irrecevables tous les amendements qui portaient sur le contenu même de ces négociations. À ce titre, 27 amendements constituaient des cavaliers législatifs.

Toutefois, conformément à mon habitude, j'ai déclaré recevables les amendements pour lesquels existait un doute. J'ai ainsi sauvé les amendements CE6 de Julien Dive, CE23 de Dominique Potier, CE40 de Mathilde Hignet, CE52 de Grégoire de Fournas, CE56 de Jérôme Nury et CE66 de Nicolas Meizonnet, portant notamment sur les clauses de renégociation prévue par Egalim 2, dont l'application défaillante conduit à soumettre au Parlement ce projet de loi. Si l'on est obligé de changer la date, c'est probablement parce que ces clauses sont perfectibles ou qu'elles méritent une discussion. J'ai donc considéré qu'il y avait un lien indirect avec le projet de loi, ce qui nous permettra de débattre de cette question. Il nous reste donc quarante-sept amendements à examiner.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme

Je suis convaincue que la raison d'être du politique n'est pas d'intervenir constamment dans les relations commerciales entre acteurs privés ni de légiférer au gré de l'actualité mais, au contraire, de définir le cadre stable dans lequel doivent s'établir durablement les relations économiques. Or l'inflation que nous connaissons depuis deux ans, et contre laquelle le Gouvernement agit depuis ses premières manifestations, vient bousculer nos certitudes en matière de politique économique. C'est une situation d'urgence, qui appelle des réponses d'urgence.

L'État a fixé, depuis la LME (loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie), puis avec Egalim 1 (loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous), Egalim 2 (loi du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs) et la récente loi dite Descrozaille (loi du 30 mars 2023 tendant à renforcer l'équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs), l'un des cadres de négociation commerciale les plus réglementés au monde. Il y a de bonnes raisons à cela, au premier rang desquelles la protection de nos producteurs agricoles dans la chaine de valeur agroalimentaire, qu'il ne saurait être question d'amoindrir. Il n'est pas non plus inutile de rappeler que si, en 2022, la France a connu l'inflation la plus faible de la zone euro, elle le doit beaucoup à la force de la réponse du Gouvernement, structurée autour des boucliers tarifaires, mais aussi à la négociation annuelle des tarifs entre industriels et distributeurs, qui a lissé la répercussion de la hausse des coûts des industriels dans les prix de vente aux consommateurs.

Toutefois, c'est cette même annualité qui, aujourd'hui, empêche l'inflation alimentaire de redescendre rapidement et ainsi de desserrer l'étau sur les achats du quotidien des Français. Le pragmatisme doit commander car chaque jour compte : c'est pourquoi je vous présente, au nom du Gouvernement, un projet de loi dont l'objet est l'adaptation temporaire de la négociation commerciale annuelle. Dans l'arsenal que nous déployons pour lutter contre la vie chère, cette nouvelle arme doit accélérer la baisse des prix des produits de grande consommation en rayon.

Vous avez bien entendu : il s'agit d'accélérer des baisses qui, depuis quelques semaines déjà, ont commencé de se faire sentir sur des produits comme les surgelés ou les changes pour bébé. Depuis quelques mois, l'inflation ralentit, notamment l'inflation alimentaire qui vient de passer sous la barre des 10 % alors qu'elle était de 15,9 % en mars dernier. Est-ce encourageant ? Sûrement. Est-ce satisfaisant ? Pas encore, car les Français constatent que leur ticket de caisse est encore trop élevé. C'est pourquoi nous vous proposons de nous doter des moyens légaux permettant de répercuter les baisses de prix le plus rapidement possible.

Ce texte de bon sens repose sur des constats chiffrés. Nous vous proposons d'avancer de six semaines les négociations commerciales entre distributeurs et industriels, qui se termineront ainsi au 15 janvier 2024 et non au 1er mars 2024 pour les plus grands fournisseurs de la grande distribution, ceux qui produisent la majorité des produits de consommation du quotidien des Français. Six semaines, quand on fait face à de l'inflation alimentaire, cela compte.

Comment être sûr que les prix diminueront ? Le raisonnement est simple : si les coûts des intrants agricoles baissent en un an, il est naturel que le tarif des produits fabriqués à partir de ces intrants en tienne compte. Or les cours d'importantes matières premières agricoles ont chuté : moins 40 % pour le blé tendre depuis l'automne 2022 ; moins 17 % pour les oléagineux par rapport à août 2021. L'Insee a également indiqué qu'en août 2023, les prix agricoles à la production ont continué de reculer, s'établissant à moins 7,4 % en rythme annuel. D'autres matières premières industrielles enregistrent également des baisses, comme le papier et le carton pour les emballages ou encore les prix de l'énergie, qui diminuent après avoir connu un emballement irrationnel l'an passé. Je pourrais multiplier les exemples, même si quelques matières premières subissent encore des hausses de prix.

Tel est le texte tout simple que le Gouvernement vous propose. Je n'ignore pas, bien sûr, que des questions se posent. L'objectif de souveraineté alimentaire et industrielle, qui passe par la préservation des conditions de négociation des PME agroalimentaires, est une priorité – c'est une demande forte de leur part, qui est partagée par tous, y compris les distributeurs – et le Gouvernement souhaite travailler avec vous en ce sens.

Depuis deux ans, le contexte n'a jamais été aussi favorable à des baisses de prix de produits alimentaires en rayon. Nous devons permettre aux industriels et aux distributeurs de se mettre sans plus attendre à la table des négociations. Certains industriels ont déjà envoyé leurs conditions générales de vente (CGV) aux distributeurs. Je les appelle solennellement à amplifier ce mouvement.

Un dernier mot : ce qui compte, ce n'est pas la ligne de départ mais la ligne d'arrivée. Comme chaque année, les industriels proposeront des tarifs à la hausse, les distributeurs s'en plaindront et ces nouveaux tarifs seront âprement négociés. L'essentiel est qu'à l'issue des négociations, les prix baissent.

Mesdames et messieurs les députés, nous visons le même résultat : redonner le plus vite possible du pouvoir d'achat aux Français. Il n'y a pas lieu de se retrancher derrière des postulats économiques ou des théories : il s'agit simplement de savoir si vous acceptez d'avancer de six semaines les renégociations commerciales.

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Volontairement bref et opérationnel, le projet de loi dont nous allons débattre comporte une mesure unique : l'avancement de la date butoir des négociations commerciales entre distributeurs et fournisseurs en 2024. L'objectif que se fixent le Gouvernement et la majorité est simple : faire gagner six semaines de pouvoir d'achat aux Français en répercutant dans les prix de vente aux consommateurs la baisse des coûts des matières premières et de l'énergie.

La lutte contre l'inflation est l'un des combats principaux que nous menons avec le Gouvernement. Des mesures très concrètes ont été adoptées, comme le bouclier tarifaire, l'aide exceptionnelle de rentrée, la revalorisation des bourses étudiantes, des aides APL (aide personnalisée au logement), des minima sociaux et des retraites, ou encore l'indemnité carburant destinée aux travailleurs. D'autres dispositifs concernent plus précisément les produits de grande consommation comme le trimestre anti-inflation et les renégociations commerciales visant à faire baisser les prix de 5 000 produits du quotidien.

Tous les leviers doivent être actionnés pour faire baisser les prix au plus vite ; ce projet de loi est l'un d'entre eux. Nous partons du constat que les prix amont sont en baisse. C'est le cas des matières premières agricoles – céréales, vins, fruits et légumes, oléagineux, café, volaille et œufs. Il en va de même pour de nombreuses matières premières non agricoles comme le papier, le caoutchouc ou le bois. On assiste dans le même temps à une normalisation du prix de l'énergie et à une baisse du prix du baril de Brent.

En mars 2022, juste après la clôture des négociations commerciales, le Gouvernement avait demandé à la grande distribution de rouvrir les négociations afin de concéder des hausses à leurs fournisseurs. Elles étaient à l'époque absolument nécessaires et sans cela, il est très probable que notre industrie agroalimentaire aurait été laminée.

Nous assistons aujourd'hui au mouvement inverse, c'est-à-dire à un reflux des coûts des fournisseurs. Nous pouvons donc anticiper, pour certains produits, une baisse des prix qui doit être répercutée au plus vite dans les rayons, pour les consommateurs. C'est pour cette raison que le projet de loi propose d'avancer de six semaines la date butoir des négociations commerciales afin que les Français puissent profiter, au plus tard le 16 janvier, d'une baisse de prix sur un certain nombre de produits du quotidien.

S'il n'y a pas de doute sur la philosophie de ce texte, qui, au fond, n'est qu'un simple accélérateur, l'efficacité et l'équité du dispositif dépendent d'un certain nombre d'ajustements. Les auditions que j'ai menées avec divers acteurs – syndicats agricoles, distributeurs, fournisseurs, administrations nationales et européennes, cabinets ministériels, économistes et journalistes spécialisés – m'ont conduit à m'interroger sur certains points.

Tout d'abord, se pose la question du seuil. Le texte fixe un seuil de 150 millions d'euros de chiffres d'affaires, ce qui concerne environ 300 entreprises, non seulement de très grandes multinationales mais aussi des ETI (entreprises de taille intermédiaire). Certains proposent de fixer le seuil à 350 millions d'euros, ce qui permettrait de limiter le dispositif aux 75 plus grandes entreprises, qui semblaient visées prioritairement par le Gouvernement. Une autre solution consisterait à supprimer tout simplement le seuil, ce qui avancerait les négociations pour tous les fournisseurs, indépendamment de leur taille.

Cela m'amène naturellement à mon deuxième point : celui des conséquences du texte sur les PME (petites et moyennes entreprises) et les TPE (très petites entreprises).

J'ai auditionné le président de la FEEF (Fédération des entreprises et entrepreneurs de France) et j'entends l'inquiétude des entreprises qu'il représente. Traditionnellement, l'usage veut que les PME négocient avant les grands groupes, généralement avant le 1er janvier. C'est le fruit d'un patient travail de la FEEF, qui a conclu des accords sur ce point avec la grande distribution. Cela permet aux PME de négocier dans de meilleures conditions et de bénéficier de davantage de contreparties. Elles craignent donc de se retrouver dans des conditions dégradées si elles négocient après le 15 janvier, et de ne pas pouvoir négocier avant, même si elles le voulaient, du fait de l'engorgement que provoquera la négociation des grands groupes sur une période réduite.

D'un autre côté, forcer par la loi l'ensemble des PME à conclure avant le 31 décembre, comme le demandent la FEEF et nombre de vos amendements, me paraît délicat car cela créerait un risque juridique fort pour les entreprises qui ne seraient pas prêtes à agir dans des délais aussi serrés. Actuellement, les PME ne sont pas tenues de négocier avant les grands groupes et ne risquent rien si elles ne le font pas. La solution proposée par le Gouvernement, qui consiste en la signature d'une charte entre PME et distributeurs, me paraît offrir un bon équilibre entre sécurité et contrainte. Je laisserai Mme la ministre développer ce point et nous indiquer si ce projet de charte est opérationnel.

La suppression du seuil de 150 millions permet donc de résoudre le double problème du champ des acteurs – tous les fournisseurs, sans distinction, seraient concernés – et de la date – l'ensemble des PME qui n'auront pas signé au 31 décembre pourront négocier au même niveau que les grands groupes. Ce faisant, et malgré un contexte exceptionnel, nous ferons en sorte que les négociations se déroulent le plus sereinement, équitablement et normalement possible.

Ensuite, sur un plan purement opérationnel, se pose la question de la durée des négociations. J'ai été assez convaincu par les arguments de ceux qui disent qu'il n'est pas possible de passer de quatre-vingt-dix à quarante-cinq jours de négociations sans conséquence sur la qualité de celles-ci. J'aimerais donc que nous puissions porter cette durée à soixante jours en avançant la date d'envoi des conditions générales de vente au 15 novembre.

Je voudrais élargir un peu le débat pour aborder deux sujets qui me paraissent essentiels. La date butoir des négociations, qui existe depuis 2008, constitue la clef de voûte de l'architecture des relations commerciales, une architecture complexe sur laquelle le législateur n'a cessé de travailler depuis la LME. Nous y sommes revenus à plusieurs reprises – lois Egalim 1 et Egalim 2, loi Descrozaille – avec un objectif constant : rééquilibrer les relations commerciales entre les maillons les plus faibles de la chaîne alimentaire, en particulier les agriculteurs, et les maillons les plus forts.

La date butoir du 1er mars offre une protection à certains mais exacerbe les tensions et les crispations. On peut même penser que certains dispositifs tels que les clauses de renégociation et de révision automatique des prix seraient mieux rédigés par les acteurs et plus opérationnels si l'on supprimait cette date butoir.

Par ailleurs, les successions de crises économiques, sanitaires et environnementales ont prouvé que l'encadrement juridique français des négociations était insuffisamment adaptable. Les interventions multiples du Gouvernement et du législateur sur cette question en témoignent. Il me semble donc essentiel de repenser ce cadre afin d'en accroître la résilience et l'adaptabilité, tout en préservant et en renforçant les acquis des lois précitées.

La question des centrales d'achat internationales a également été fréquemment soulevée, dans le cadre des auditions comme de nos débats législatifs. En 2019, elle avait été au cœur des travaux de la commission d'enquête présidée par M. Thierry Benoit. La loi défendue par Frédéric Descrozaille, en mars dernier, a permis des avancées majeures. Le phénomène tend néanmoins à s'amplifier et nécessiterait une action au niveau européen pour l'encadrer davantage. C'est un enjeu majeur pour garantir l'effectivité des textes que nous votons.

En conclusion, nous entamons l'examen d'un texte court visant à répondre à une situation d'urgence, bien qu'il soulève également des débats à plus long terme. Je souhaite donc que notre commission débatte de façon sereine et constructive afin d'apporter une réponse aux hausses des prix dans les rayons.

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Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

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Le texte proposé par le Gouvernement repose sur un principe particulièrement simple : après un choc d'inflation exceptionnel en 2022, les cours de nombreuses matières premières et de l'énergie sont en train de baisser en 2023, ce qui devrait entraîner mécaniquement une baisse des prix des produits agroalimentaires. L'idée est donc d'avancer le plus possible la date butoir des négociations commerciales afin de répercuter ces baisses le plus rapidement possible sur le pouvoir d'achat des Français.

Le groupe Renaissance est bien sûr favorable à cette initiative mais aborde cette discussion avec humilité. Humilité tout d'abord parce que nous traitons d'un sujet extraordinairement sensible, celui du pouvoir d'achat des Français, de ce qu'ils mettent dans leurs caddies ou plus précisément de ce qu'ils n'y mettent plus – selon l'Insee, plus d'un Français sur deux a modifié ses habitudes de consommation alimentaire depuis le début de la crise.

Humilité ensuite car on sait qu'il n'existe pas de solution miracle et que ce texte ne doit pas être interprété ni présenté ainsi. Contrairement aux révolutionnaires de gala qui nous feront croire qu'ils sont capables de répondre à l'ensemble des préoccupations des Français en bloquant les prix ou en supprimant la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), nous croyons aux mesures pragmatiques et concrètes : bouclier tarifaire sur l'énergie ; revalorisation des bourses, des APL et des minima sociaux.

Humilité enfin car derrière les Danette, les paquets de pâtes et les boîtes de cassoulet, il y a les agriculteurs et celles et ceux qui nous nourrissent : nous devons continuer à les protéger. La dynamique amorcée par Egalim 1, Egalim 2 et la loi Descrozaille doit absolument être préservée – c'est tout le sens de l'accord sur la modération des marges souhaité par le Président. Nous y serons donc particulièrement vigilants tout au long de l'examen de ce texte.

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Alors que, depuis plus de deux ans, les Français subissent une inflation galopante – explosion des prix de l'énergie, inflation alimentaire de plus de 20 % –, nous allons débattre d'un projet de loi intitulé « mesures d'urgences relatives aux négociations commerciales dans la grande distribution ». Il est assez cocasse que le mot « mesures » soit au pluriel puisque le texte n'en contient plus qu'une seule, à la suite du camouflet essuyé par le Gouvernement concernant la mesure absurde de la vente à perte des carburants.

La mesurette restante vise à avancer de six semaines la date des négociations commerciales entre les industriels et la grande distribution. Voilà donc tout ce qu'il reste dans votre besace pour redonner un peu d'oxygène aux portefeuilles des Français : un maigre projet de loi, qualifié de « coup de com' de Bruno Lemaire » par votre cabinet, madame la ministre, et dont personne n'est en mesure d'affirmer avec certitude qu'il aura réellement un effet déflationniste.

Vous avez dit, monsieur le président, que certains acteurs économiques étaient enthousiastes à l'égard de ce projet : ce n'est pas du tout ce que j'ai ressenti lors des auditions – aucun enthousiasme, ni du côté des distributeurs, ni du côté des fournisseurs. On se demande même si les PME et les ETI ne vont pas subir un préjudice.

Vous avez dit, madame la ministre, que ce texte était tout simple – on peut même dire qu'il est simpliste, et clairement insuffisant compte tenu de ce que sont en droit d'attendre nos compatriotes ! Et pour cause : vous ne vous attaquez jamais aux causes de l'inflation. Celles-ci tiennent non seulement au contexte – la covid, la guerre en Ukraine – mais aussi aux comportements des fournisseurs et des distributeurs, qui imposent des marges exorbitantes, et aux décisions politiques, par exemple la non-contestation des règles du marché européen des énergies.

Puisque vous êtes à court de solutions, je vais vous en proposer quelques-unes : la baisse de la TVA sur les énergies de 20 % à 5,5 %, ou encore la suppression de la TVA sur un panier de 100 produits de première nécessité. Dans ce contexte de crise, l'État doit intervenir dans l'encadrement des prix. Cela ne signifie pas « Carrefour au pays des Soviets ». Dans cette partie de poker menteur à laquelle nous avons assisté entre fournisseurs et distributeurs, l'État doit être capable de reprendre la main et d'encadrer les prix, avec un plancher qui protège nos agriculteurs et nos producteurs, mais aussi un plafond permettant d'éviter les marges trop importantes. Voilà des solutions que nous pensons utiles et efficaces pour nos compatriotes.

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Pour vous répondre sur l'enthousiasme des acteurs que nous avons auditionnés, j'ai entendu M. Dominique Schelcher, président-directeur général de Système U, et M. Michel Biero, de Lidl, dire qu'ils soutenaient ce projet de loi. Par ailleurs, dans un communiqué, la FCD (Fédération du commerce et de la distribution) appelle solennellement le Parlement à voter en faveur de ce texte.

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J'ai bien entendu que les acteurs avaient la même ambition que la nôtre, celle de faire baisser les prix.

Dans votre intervention, j'entends d'abord une attaque sur la forme : vous critiquez le titre – dont acte. Notre objectif est d'agir pour les Français. Ensuite, vous nous parlez sans grande surprise de votre proposition phare sur la TVA. Comme à chaque fois, nous devons vous rappeler que cela a déjà été tenté une fois en France, dans la restauration, et que cela ne s'est pas traduit par une baisse des prix. D'autres pays ont également essayé d'appliquer cette mesure, sans succès : cela ne fonctionne pas. En baissant la TVA, vous diminuez les recettes de l'État, qui servent pourtant à nos écoles et à nos hôpitaux, mais vous ne baissez pas les prix.

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Notre pays fait face à une situation de grave urgence alimentaire : le panier de trente-sept produits du quotidien coûte 20 euros de plus en août 2023 qu'un an auparavant ; un Français sur six ne mange pas à sa faim ; Les Restos du cœur s'attendent à servir 170 millions de repas cette année ; les prix augmentent mais les salaires ne suivent pas ; pour 2023, les hausses de salaires sont attendues à 4,5 % en moyenne pour une inflation à 5 %. En dépit de cet état des lieux alarmant, vous proposez simplement d'avancer les négociations commerciales : ce projet de loi est une blague ! Nous allons de déception en déception.

L'objectif était pourtant clair : faire face à l'augmentation des prix alimentaires. On est dans un nouvel épisode de « Bruno demande » : il demande aux multinationales de l'agrobusiness de bien vouloir renégocier avec la grande distribution pour faire baisser les prix – ces mêmes multinationales qui se sont gavées toute l'année avec l'inflation. Le taux de marge des industries agroalimentaires a augmenté de 71 % en un an et demi. Si elles n'avaient pas augmenté leurs marges, les prix de production agroalimentaire auraient augmenté deux fois moins vite depuis le début de 2022. Croyez-vous réellement que ceux qui nourrissent l'inflation alimentaire depuis des mois vont s'arrêter maintenant ? La grande distribution a, elle aussi, engrangé des profits grâce à l'inflation – certes moins, mais elle a augmenté ses marges sur les produits pour lesquels les industriels n'avaient pas ou peu augmenté les leurs. Tout le monde y gagne, sauf les consommateurs.

Le projet de loi n'aura pour conséquence que d'avancer les négociations de quarante-cinq jours. Nous sommes sceptiques, très sceptiques même, quant à la réelle utilité de cette mesure. Rien ne nous garantit que l'avancée des négociations commerciales ne conduise pas à une augmentation des prix. Pour l'Insee, il n'y aura pas de baisse de prix mais seulement un ralentissement de la hausse. Ajoutons à cela les déclarations faites par les acteurs de la grande distribution la semaine dernière devant notre commission : pour le président du groupement Les Mousquetaires, les tarifs annoncés pour entamer ces négociations seront en hausse de 5 % à 15 %. Tout porte à croire que ce texte n'aura, au mieux, aucun effet, voire contribuera à faire augmenter les prix alimentaires.

De véritables solutions existent pour lutter contre l'inflation : indexer les salaires sur l'inflation ; bloquer à la baisse les marges des industriels agroalimentaires et de la grande distribution ; étendre le bouclier qualité-prix à l'ensemble du territoire national. Pour améliorer la vie de nos concitoyens, il y a urgence à sortir des mesurettes.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

« Bruno demande » mais c'est Olivia qui est présente aujourd'hui.

Je rappelle qu'une négociation dans l'agroalimentaire démarre rarement à la baisse. Elle commence fréquemment à la hausse, tout l'enjeu étant ensuite d'obtenir des baisses. Je rappellerai quelques chiffres : entre juillet 2022 et juillet 2023, le blé tendre a baissé de 30 %, le maïs de 27 %, les huiles de colza, soja, tournesol et les oléagineux de 27,6 %. Nous sommes donc en droit d'attendre une baisse des prix compte tenu de l'importance des matières premières agricoles (MPA) dans la composition des produits. J'ai précisé dans mon introduction qu'il ne m'avait pas échappé que certains cours continuaient à augmenter mais, majoritairement, les MPA, qui constituent le cœur de l'agroalimentaire, sont en baisse.

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Faire ses courses devient un véritable casse-tête pour une grande partie de nos concitoyens, voire une source d'angoisse, car le combat contre la hausse des prix qui nous réunit autour de ce texte est bien concret pour celles et ceux qui sont à l'euro près. Nous saluons donc cette volonté de travailler ensemble à une solution qui, je l'espère, permettra de dépasser les clivages partisans.

Travailler ensemble, c'est d'abord se dire les choses : le texte qui nous est présenté n'est pas celui qui était attendu initialement. Exit la possibilité de vendre à perte le carburant, pourtant annoncée en grande pompe par le Gouvernement. Le carburant mérite mieux qu'un coup de communication ; il faut prendre des mesures rapidement pour faire baisser le prix à la pompe, qui asphyxie surtout les ruraux, dont l'usage de la voiture est quotidien.

Quant à l'article restant, force est de constater qu'il ne fait pas l'unanimité. L'industrie française reste fragile. La hausse des coûts de l'énergie, les investissements massifs dans la transition environnementale et l'appel à la hausse des salaires sont autant de coûts supplémentaires qu'il faut répercuter sur le coût du produit. Rien ne nous permet d'affirmer que faire passer les plus gros industriels avant nos PME dans ces négociations commerciales engendrera une baisse massive des prix. En revanche, on peut penser que ces industriels en tireront des avantages considérables en matière de référencement, de placement en rayon ou de promotion et il n'est pas certain que nos PME, qui font également vivre nos territoires ruraux, s'en sortiront.

Nous proposerons donc plusieurs modifications : un renforcement des sanctions contre une partie de la grande distribution, qui préfère passer par Madrid ou Bruxelles, plutôt que de respecter la loi française ; une révision du calendrier des négociations, qui crée une distorsion de concurrence, ainsi que du seuil de 150 millions, qui pourrait être aligné sur la norme européenne de 350 millions. Nous pensons par ailleurs qu'il faut exclure la filière lait de ce dispositif et conserver une date butoir dans la loi : on peut la modifier, mais il ne faut pas la supprimer, car elle garantit le respect de notre agriculture et de notre souveraineté alimentaire.

Vous l'aurez compris, notre groupe adoptera une démarche constructive afin de lutter contre l'inflation sans fragiliser notre tissu industriel.

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Le Gouvernement propose d'avancer au 15 janvier les négociations commerciales entre les distributeurs et les multinationales, tout en laissant les PME et les ETI négocier jusqu'au 1er mars. Pour avoir négocié dans les box des distributeurs des nuits entières et dans des conditions difficiles, je tiens à alerter le Gouvernement sur le fait que ce texte pourrait desservir nos PME et nos ETI. L'objectif de ces négociations est d'obtenir un prix en l'échange de contreparties. Quand les multinationales auront négocié les leurs, au 15 janvier, les PME et les ETI ne pourront plus négocier de manière équilibrée. Compte tenu du niveau des taux d'intérêt, les distributeurs vont limiter leurs stocks, plus encore qu'à leur habitude, choisir des produits à forte rotation, réduire leur offre et la concentrer sur les meilleures ventes des multinationales, en restreignant drastiquement l'offre des petites marques.

Or les consommateurs apprécient la diversité et aiment trouver dans leurs rayons des produits venant des PME françaises et des produits locaux. S'il protège les consommateurs face à l'inflation, le modèle économique actuel favorise aussi les distributeurs et les multinationales. La politique du prix bas, que défendent ardemment certains distributeurs, dessert nos agriculteurs, nos PME et nos ETI et sert aux Français des produits alimentaires de faible qualité. Les multinationales, comme les distributeurs, doivent participer davantage au partage de la valeur : il y va de notre souveraineté alimentaire.

Le groupe Démocrate défend avec constance l'exigence d'une alimentation de qualité et d'une meilleure protection de nos agriculteurs, de nos PME et de nos ETI. Pour toutes ces raisons, nous avons déposé plusieurs amendements qui prennent en compte la différence entre les multinationales, d'un côté, et les PME et ETI, de l'autre. Ce projet de loi est l'occasion d'inscrire à titre temporaire cette différenciation dans le code de commerce : le groupe Démocrate propose que la date butoir, pour les PME et les ETI, soit fixée quinze jours avant celle qui vaudra pour les multinationales.

J'ajoute que seules 20 % des PME parviennent à un accord avec les distributeurs au 31 décembre ; les 80 % restantes ne s'accordent pas et négocient jusqu'au 1er mars. Par ailleurs, il me semble que la suppression de la date butoir au 1er mars mérite réflexion : une telle décision pourrait apaiser les relations entre fournisseurs et distributeurs si le dispositif est bien encadré, mais elle pourrait aussi être fatale à certaines entreprises. Peut-être une mission parlementaire pourrait-elle se pencher sur cette question.

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C'est une petite mesure, et même une mesurette, que vous nous proposez, mais le groupe Socialistes l'aborde avec attention et concentration. L'orateur de la majorité nous a qualifiés de « révolutionnaires de gala » : je n'ai pas très bien compris cette remarque. Si cette mesure nous paraît utile et qu'elle est assortie de garanties suffisantes, nous la voterons. Dans le cas contraire, nous nous en méfierons, mais il est inutile d'hystériser le débat.

Vous nous proposez une mesure très conjoncturelle, qui n'est pas du tout à la hauteur des enjeux, pas plus que les autres mesures proposées par le Gouvernement. La situation sociale créée par l'inflation est tragique et suscite de grandes souffrances : pour 9 à 10 millions de Français, la fin du mois devient une question existentielle.

Nous aurions aimé qu'un effort équivalent soit demandé à la grande distribution et à l'industrie agroalimentaire, afin de créer les conditions d'un soutien, par les consommateurs, des contrats tripartites pluriannuels garantissant une répartition équitable du bénéfice entre toutes les parties et reconnaissant le travail de chacun. Nous aurions aimé que la situation des outre-mer soit prise en compte, car la situation y est encore plus tragique.

Nous aimerions, au minimum, le respect des lois Egalim, Sapin 2 (loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique) et Descrozaille. Nous aimerions que l'annualité des négociations ne soit pas remise en cause et que les mécanismes de révision des prix s'appliquent, afin que nous n'ayons pas besoin d'y revenir tous les six mois. Ce que révèle ce projet de loi, c'est en effet la défaillance du mécanisme de révision des prix.

Les vrais sujets n'ont pas été abordés. Depuis la LME, c'est un modèle oligarchique qui règne dans la grande distribution, et il a été maintes fois défendu : certaines multinationales de l'agroalimentaire sont en situation de monopole parce qu'elles ont le pouvoir sur notre imaginaire et qu'une sorte de roman national des marques leur permet d'imposer n'importe quelles conditions commerciales aux distributeurs. C'est de cette double servitude dont nous devons sortir, afin de créer une démocratie économique et sociale.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

J'ai bien expliqué en introduction que cette loi a un objectif : gagner quarante-deux jours. Je conçois que vous puissiez être déçu par sa portée et je ne nie pas que certaines des questions que vous soulevez se posent.

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Le groupe Horizons votera ce projet de loi. Ça ne mange pas de pain, mais ce n'est pas cela qui va régler la question de l'inflation des denrées alimentaires pour nos concitoyens.

Nous avons les lois Egalim 1 et 2 et la loi Descrozaille, que nous venons de voter : il faut les appliquer, mais aussi aller plus loin. Ce texte concerne surtout les grands : les grands fournisseurs, les grands industriels et la grande distribution. Le risque, c'est qu'ils donnent le la et que les PME et les TPE soient contraintes d'accepter les mêmes conditions. Pour l'éviter, nous avons des gendarmes. On a tout inventé, en France : la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), l'Autorité de la concurrence, l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (OFPM), la Commission d'examen des pratiques commerciales (CEPC). On a aussi l'Autorité de la concurrence, au niveau européen. Ce qui est malheureux, c'est que les grands de la distribution ont chaque matin une tribune dans les journaux quotidiens, mais aussi à la radio et à la télévision. Michel-Édouard Leclerc n'est pas seulement l'ambassadeur du groupe Leclerc, mais de l'ensemble de la grande distribution. Il nous balade et a plus de pouvoir qu'un ministre de l'agriculture ou du commerce.

Il faut aller plus loin au niveau européen et mettre de l'ordre dans l'écosystème qu'a créé le secteur de la grande distribution, notamment les centrales d'achat internationales. Il faut exiger plus de transparence et sanctionner les mauvaises pratiques. Avec les services fiscaux et les Urssaf, on peut connaître précisément les marges des grands industriels et des distributeurs.

Je suis un fervent défenseur de la TVA sociale. D'aucuns proposent un taux réduit, voire nul, sur certains produits alimentaires. La crise sanitaire nous a permis d'identifier les produits indispensables pour les consommateurs : j'aimerais que le Gouvernement ouvre, dans les mois qui viennent, un débat sur ce sujet.

Enfin, je ne suis pas opposé, sur le principe, à ce qu'une partie des négociations aient lieu juste après la période des récoltes, c'est-à-dire à la fin du printemps ou au début de l'été, si l'on veut qu'elles soient connectées à la réalité et en adéquation avec les productions.

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« Qui aurait pu prédire la vague d'inflation [...] ou la crise climatique aux effets spectaculaires ? », demandait le Président de la République lors de ses vœux le 31 décembre dernier. Si la deuxième partie de la phrase a légitimement fait réagir nombre de scientifiques spécialistes du climat, la première a moins retenu l'attention, alors qu'elle aurait dû. En effet, tout le problème de la politique actuelle est qu'elle repose sur une erreur de diagnostic et sur un manque de lucidité.

L'inflation n'a pas commencé avec la guerre en Ukraine mais dès 2021, avec la boulimie de reprise de la croissance économique qui a suivi la pandémie, sur fond de catastrophes climatiques affectant les denrées alimentaires. En juin 2021, pourtant, le ministre de l'économie nous disait que nous ne devions pas nous préoccuper particulièrement de la poussée inflationniste. En novembre 2021, il nous disait encore que l'inflation serait temporaire et, en février 2022, que le scénario principal du Gouvernement était la baisse de l'inflation à partir de la fin de l'année. Et maintenant, il nous promet que nous allons sortir de cette inflation et il est sûr qu'elle va baisser. Encore faut-il s'entendre sur les mots, car ce que l'on observe est une décélération de la hausse, et non une baisse.

En réalité, nous sommes dans un nouveau régime d'inflation et, dans ce contexte, vous faites un pari. J'ai été très étonnée de lire, dans l'exposé des motifs du Gouvernement, qu'il y aurait un « repli des cours mondiaux des prix des matières premières [...] énergétiques ». C'est la première erreur : je ne crois pas que l'on puisse parier sur une baisse du prix des énergies fossiles. La deuxième erreur, c'est de ne pas s'attaquer à la « profitation », alors que tout le monde fait le même constat dans les rayons : quand les coûts de production augmentent, les prix montent aussitôt, mais quand ils baissent, ça ne baisse pas. Surmarges, surprofits et surdividendes ont amplifié la hausse des coûts de production et plongé dans un état de misère sociale et écologique nombre de nos concitoyens en portant atteinte au droit fondamental à une alimentation suffisante et saine.

Tout cela dépend d'une poignée de groupes en situation d'oligopole, les mêmes qui étranglent les agricultrices et les agriculteurs et qui mettent 3 milliards dans la promotion de la malbouffe. Vous nous apportez un projet de loi sur les relations commerciales – le seizième en dix ans ! – nous promettant un progrès dérisoire durant six semaines dans les supermarchés. C'est un aménagement conjoncturel dont nous redoutons qu'il ne soit qu'un coup d'épée dans l'eau. Nos amendements sur la transparence et la réglementation des marges ayant été refusés, nous nous opposerons à ce projet de loi

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Je partage votre analyse sur l'origine de l'inflation : on en fait trop souvent une conséquence de la guerre en Ukraine alors qu'elle a commencé avant. Parfois, un dessin vaut mieux que des mots : le graphique que voici montre l'évolution de l'inflation alimentaire. Vous parlez de décélération de la hausse mais, pour le coup, on voit bien ici qu'on a amorcé une baisse.

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Nous ne faisons pas des promesses, nous observons une baisse du cours des matières premières. Nous avons consulté l'ensemble des acteurs concernés par ce projet de loi et nous proposons une solution pour apporter du pouvoir d'achat aux Français six semaines plus tôt. Ce ne sont pas des promesses, c'est du concret.

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En lisant ce texte un peu vite, ma grand-mère aurait sans doute dit que ça ne mange pas de pain, ou que ça ne casse pas trois pattes à un canard. Mais seulement en lisant un peu vite, parce qu'en réalité, la situation est très grave.

Les Français n'ont plus de cran pour se serrer la ceinture et la crise de l'inflation se lit sur les visages des familles que nous rencontrons dans nos territoires. Face à cette situation, vous vous contentez, comme le rapporteur vient de le rappeler, d'observer l'évolution du cours des matières premières. En bons libéraux, vous êtes spectateurs du marché.

J'épargnerai la ministre, chargée de défendre un texte vide auquel elle a du mal à croire elle-même. Mais ce texte ne réglera rien : il n'y a rien sur les superprofits, rien sur la répartition des marges, rien sur les superdividendes. Il veut accélérer les négociations, en faisant l'impasse sur la situation des agriculteurs, qui tirent déjà la langue. Avez-vous pensé aux producteurs de lait ? Chez moi, chaque jour, un atelier de transformation laitière met la clé sous la porte et on a 800 vaches de moins qu'il y a six mois. L'agriculture est en train de mourir et les prix rémunérateurs ne sont pas au rendez-vous : les lois Egalim étaient généreuses dans leur principe, mais vous ne les appliquez pas.

Vous refusez par ailleurs de prendre les mesures qui auraient dû être au cœur d'une politique de lutte contre l'inflation : l'indexation des pensions et des salaires sur l'inflation ; le blocage du prix de certains produits de première nécessité afin d'éviter que les plus pauvres d'entre nous mangent des aliments qui nuisent à leur santé ; un travail, enfin, sur la répartition des marges. Prenez le pognon là où il est pour le mettre là où on en a besoin. Cette petite loi, qui pourrait être une circulaire, n'est pas à la hauteur de la situation et nous sommes vent debout.

Nous avons déposé des amendements pour modifier le seuil de 150 millions de chiffre d'affaires : si l'on ne permet qu'aux gros d'entamer les négociations plus tôt, on va fragiliser les PME.

La situation est un peu folle : ceux qui assurent la souveraineté alimentaire de notre pays sont en train de s'essouffler, faute de prix rémunérateurs et, pendant ce temps-là, les Français se lèvent le matin pour aller travailler et se couchent le soir en se demandant comment ils vont pouvoir nourrir leur famille.

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La hausse des prix de l'alimentaire a atteint 18 % en deux ans. Derrière ce chiffre effarant, il y a des caddies non remplis, des renoncements aux produits de qualité, notamment bio et, pour certains de nos concitoyens, des repas sautés. Face à cette crise du pouvoir d'achat, que propose le Gouvernement ? Difficile de ne pas évoquer l'autorisation de vente à perte du carburant, cette fausse bonne idée finalement écartée. Pour le reste, nous sommes face à des mesures peu contraignantes aux effets limités.

Je pense d'abord au trimestre anti-inflation, dont l'UFC-Que choisir estime qu'il n'a qu'un impact résiduel sur les prix. Je songe ensuite aux aides financières accordées aux plus modestes, qui se réduisent au minimum. Les bénéficiaires du chèque alimentaire seront moins nombreux cette année que l'année dernière et, son versement n'étant pas automatique, le risque de non-recours est important. La dernière idée en date est d'avancer les négociations commerciales au 15 janvier 2024, au lieu du 1er mars. Vous espérez ainsi que la baisse des cours de certaines matières premières se traduira par une diminution des prix dans les rayons.

De notre point de vue, c'est un coup de poker sans garantie de résultat. Il est vrai que certaines matières premières voient leur prix baisser, mais combien d'autres continuent d'augmenter ? Qui peut garantir que la grande distribution sortira victorieuse de ce rapport de force avec les grands industriels ? Nous sommes face à un scénario aux multiples inconnues et à l'issue incertaine. Une chose en revanche est certaine : en avançant les négociations commerciales des plus grands groupes, vous pénalisez les plus petits acteurs. Le rapporteur propose désormais d'asseoir tout le monde à la table des négociations au même moment. C'est mieux, mais les PME auront-t-elles seulement les moyens humains et matériels de faire face à ces négociations commerciales précoces ?

Ce texte posant autant de questions qu'il apporte de réponses, il nous est difficile de lui apporter notre soutien.

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Nous en venons aux interventions des autres députés.

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Madame la ministre le graphique que vous nous avez montré présente l'évolution de l'inflation alimentaire : l'inflation diminue, mais elle existe toujours, ce qui signifie qu'il y a seulement une baisse de la hausse des prix. Ils augmentent moins, mais ils augmentent toujours.

M. Thierry Benoit a parlé de TVA sociale, ce qui revient peu ou prou à valider notre proposition d'une TVA à 0 % sur un panier de cent produits de première nécessité. Puisqu'une partie de la majorité pousse aussi cette idée, j'aimerais que le Gouvernement nous fournisse un rapport sur l'opportunité d'une telle mesure, dont la reconduction en Espagne et au Portugal prouve l'utilité.

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Je ne dis pas cela contre vous, madame la ministre, mais ce projet de loi me désole et j'ai presque honte de débattre pour grappiller six semaines. Nous avons déjà légiféré trois fois en cinq ans et vous nous soumettez à présent une loi dite d'exception. Que ferons-nous l'année prochaine si l'inflation est au même niveau, voire plus haut ? Ferons-nous une autre loi d'exception ? Vous ne pouvez pas garantir que ce projet de loi entraînera une baisse des prix. Que se passera-t-il si, le 16 janvier, on constate finalement une hausse ? Nous aurons fait tout cela pour rien. Ce dont nous avons absolument besoin, c'est d'une vraie réforme des relations commerciales.

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Le texte que vous nous présentez est très pauvre. Si ce n'est pas « Bruno demande », c'est peut-être « Olivia supplie » : elle supplie que la négociation entre les industriels et la grande distribution aboutisse à autre chose qu'à une hausse des prix, comme celle que nous subissons depuis des mois.

La moitié de la hausse des prix alimentaires vient des profits de l'agroalimentaire et vous n'en dites rien dans ce projet de loi : le taux de marge de cette industrie atteint 48,5 %, au moment où nombre de nos concitoyens ne parviennent même plus à acheter de quoi nourrir leurs enfants. Et vous espérez qu'en avançant de six semaines une négociation entre deux acteurs privés, la situation va s'améliorer ? Quand l'État va-t-il enfin faire son devoir ? Quand l'État va-t-il enfin permettre à tous les Français de manger à leur faim ? Quand allez-vous enfin arrêter de vous défausser de vos responsabilités et taxer ces superprofits ?

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Depuis plusieurs mois, nous constatons une baisse de la hausse des prix des matières premières, comme l'a bien précisé notre collègue Grégoire de Fournas. Il importe de faire bénéficier les consommateurs le plus rapidement possible de cette baisse, mais les résultats attendus de ce projet de loi sont loin d'être garantis. Ce texte fait craindre une pression tarifaire supplémentaire sur les produits agricoles et une nouvelle menace sur les équilibres des relations commerciales.

Alors que la production agricole reste confrontée à une augmentation de ses charges, la priorité est de garantir une transparence des marges et, surtout, une juste redistribution de celles-ci, comme le prévoient les lois Egalim et Descrozaille. Pouvez-vous nous assurer que ce texte ne fera pas une fois encore des agriculteurs la variable d'ajustement des politiques de lutte contre l'inflation ?

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Madame la ministre, j'estime le travail que vous faites pour nos PME, mais ce texte m'inquiète beaucoup. Vous dites que la grande distribution vous a garanti qu'elle obtiendrait des baisses de prix. Cela signifie-t-il que, pour vous être agréable, elle va encore saigner nos paysans et nos PME et se montrer plus dure que jamais dans les box de négociation, tout en dealant avec les gros industriels ?

Je ne pense pas que ce texte aboutira à une baisse des prix pour le consommateur. Et, si c'est le cas, c'est qu'on aura saigné nos paysans et nos PME.

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Comme notre collègue Julien Dive, je trouve ce projet de loi désolant, inutile et même dangereux. Vous avez dit, madame la ministre, que si les coûts de production baissent, il est naturel que les prix des produits alimentaires baissent aussi dans les rayons. Ces propos sont vraiment symptomatiques de votre foi illimitée dans le marché, de votre méconnaissance de celui-ci et, surtout, de votre impuissance totale face aux multinationales.

Rien ne va dans ce que vous dites. D'abord, aucune baisse des prix de l'énergie n'est prévue dans les prochains mois, bien au contraire. Dans ces conditions, il est très improbable que les coûts de production des industriels reculent. Ensuite, même si, par miracle, ces coûts de production baissaient, dans la mesure où vous ne faites rien pour encadrer les marges des gros industriels agroalimentaires et pour limiter leur position ultradominante sur les marchés, ils augmenteront encore leurs marges, donc les prix alimentaires.

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Le Gouvernement ne fait pas que demander : il quémande. Et la grande distribution, elle, s'ébaudit. Elle rigole, la grande distribution, face à ce texte de loi censé lui faire peur. En attendant, elle continue à jouer sur les marques de distribution et sur les volumes. Elle fait ce que l'on appelle du « déstratage », une pratique qui consiste à faire disparaître un produit des rayons pour faire pression sur le fournisseur. Elle continue, par des stockages stratégiques, à acheter des produits en promotion pour les revendre au prix fort. Elle continue, alors que c'est illégal, à demander une ribambelle de services aux fournisseurs, qui ne servent pas à faire la promotion de leur produit, mais à bénéficier d'emplois déguisés.

Je crois que ce texte de loi est un nouveau cadeau fait à la grande distribution. Il n'aura aucun effet sur les prix, mais un effet catastrophique pour nos agriculteurs.

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La crise inflationniste pousse les consommateurs à se détourner des produits bio et à choisir des produits de premier prix. Les petites industries agroalimentaires, qui valorisent nos productions locales, sont particulièrement touchées et connaissent une baisse importante de leurs ventes. Elles sont par ailleurs percutées par un prix de l'énergie qui continue d'augmenter. Les difficultés de l'agriculture bio sont telles que l'on craint un mouvement massif de déconversion. Je l'observe dans mon département du Gers, le premier département bio de France. Il importe, madame la ministre, de lancer un plan de soutien au bio.

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Vous avez une croyance folle en la main invisible du marché. C'est la même croyance folle qui, pendant des années, nous a poussés à délocaliser notre outil industriel et qui nous pousse désormais à laisser les entreprises de l'agroalimentaire faire flamber les prix. C'est la même croyance folle qui, non seulement a appauvri les consommateurs, mais risque même d'appauvrir encore les producteurs.

Le Fonds monétaire international (FMI) explique que 50 % de la hausse des prix est due aux profits. Si vous voulez agir sur la hausse des prix, attaquez-vous aux profits. Bloquez les prix, attaquez-vous aux marges et, si vous voulez donner un peu de pouvoir d'achat aux Français, indexez les salaires sur l'inflation. En tout cas, enlevez le mot « urgence » du titre de votre projet de loi et mettez plutôt « mesures pour la croyance » ou « mesures pour voir ».

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Je m'inquiétais de lire dans l'exposé des motifs du projet de loi, madame la ministre, que le prix des matières premières agricoles était en baisse et je remercie ceux de nos collègues qui ont indiqué qu'il s'agissait en réalité d'une baisse de la hausse. L'intérêt de nos agriculteurs n'est pas de voir le prix de leur production s'effondrer. Si nous ne voulons pas les voir disparaître, il faudra sans doute aller vers un système de contractualisation, comme celui que propose notre collègue Dominique Potier – mais ce n'est pas l'objet de ce texte.

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Monsieur le rapporteur, vous avez dit tout à l'heure qu'il n'était pas évident que la grande distribution répercute une éventuelle baisse voire une suppression de la TVA sur le prix final des produits. Dès lors, qu'est-ce qui vous garantit que les distributeurs répercuteront les baisses de prix qu'ils auront obtenues des fournisseurs sur le prix payé par le consommateur ? Si l'État ne joue pas son rôle de régulateur, s'il n'encadre pas les prix en fixant un prix plancher qui protège nos producteurs et agriculteurs ainsi qu'un prix plafond qui empêche l'application de marges abusives, alors on ne peut rien faire.

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Imaginons que Système U négocie avec Ferrero le prix d'un paquet de Ferrero Rocher. Si un autre distributeur obtient de Ferrero un prix sensiblement inférieur, Système U n'aura aucun intérêt à vendre les produits à un prix démesurément supérieur à celui pratiqué par son voisin. C'est la concurrence qui garantit que les distributeurs répercutent sur le consommateur les baisses de prix obtenues dans le cadre de leurs négociations avec les industriels.

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Qu'est-ce que cela a donné depuis deux ans ?

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Nous vous parlons d'un blocage des marges.

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…ni des marges. On a vu que cette solution ne fonctionnait pas, que ce soit dans des économies de marché ou dans des économies administrées. La concurrence permet d'obtenir des baisses de prix, le blocage des prix ne le permet pas. J'assume d'avoir une pensée libérale – ce n'est pas un crime.

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Toutes vos interventions sont intéressantes mais témoignent d'une certaine confusion. J'entends d'un côté que les prix ne baisseront pas, de l'autre que nous allons saigner nos PME et nos agriculteurs, qui seront obligés de vendre moins cher. J'entends d'un côté qu'avancer de six semaines le cycle annuel des négociations commerciales ne changera rien, de l'autre que cela changera tout. Si ce texte nous donne une chance de faire baisser les prix, et donc d'augmenter le pouvoir d'achat des Français, avec six semaines d'avance, nous devons y consacrer toute notre énergie. C'est ce que je fais ici de bon cœur.

Article unique

Amendement de suppression CE41 de Mme Aurélie Trouvé

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Ce projet de loi, absolument inepte, fait perdre un temps vital à un grand nombre de Français qui souffrent de la faim. Pire, il offrira peut-être aux grands industriels de l'agroalimentaire la possibilité d'avancer ou d'accélérer la hausse de leurs prix et de leurs marges. C'est effarant : ce texte sera sans doute le premier de l'histoire de France à accélérer la hausse des prix alimentaires. Où avez-vous trouvé que les prix imposés par les grands industriels allaient diminuer, comme par magie, au cours des prochaines semaines ? J'ai beau chercher, je ne vois rien. Les industriels et l'Insee vous disent même le contraire. Emmanuel Cannes, de l'institut Nielsen IQ, indique que ce projet de loi aura peut-être un effet inverse à celui escompté si les hausses l'emportent sur les baisses. Or vous persistez et signez : vous avancez quand même la date des négociations en voulant nous faire croire que cela est utile aux Français. Pas un seul économiste sérieux en France n'accepterait de défendre votre projet de loi absurde.

Pourquoi les prix proposés par les grands industriels à la grande distribution sont-ils susceptibles d'augmenter au cours des prochaines semaines et des prochains mois ? Tout d'abord à cause des coûts de production, d'autant que les prix de l'énergie vont probablement stagner ou augmenter. Ensuite à cause des marges des grands industriels agroalimentaires, qui alimentent l'essentiel de la hausse des prix alimentaires : comme vous ne faites absolument rien pour les réguler, elles ont déjà plus que doublé en un an et demi et continueront évidemment cette progression.

Votre texte est non seulement inutile, mais aussi sans doute dangereux pour nos concitoyens. C'est pourquoi nous demandons la suppression de son article unique.

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Avis défavorable. À vous entendre, la majorité ne fait rien. Faut-il vous rappeler l'instauration du bouclier tarifaire et ses 50 milliards d'euros visant à protéger les Français, le versement d'une aide exceptionnelle de rentrée, ainsi que la revalorisation des APL, des minima sociaux et des retraites ? Vous prétendez en outre que tous les prix vont augmenter ; or d'aucuns redoutent que les industriels et acteurs de l'agroalimentaire voient leur rémunération baisser. Si vous estimez qu'il est vain de s'efforcer de faire gagner du pouvoir d'achat aux Français avec six semaines d'avance, alors nous ne sommes effectivement pas d'accord.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Même avis. Citez-moi un seul pays européen, en dehors de la Hongrie, qui ait bloqué avec succès les prix des produits alimentaires.

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Il n'y en a aucun. En dehors de l'Europe, le gouvernement argentin a décidé de bloquer les prix de la viande : les industriels du pays se sont alors concentrés sur l'exportation, car les prix étaient libres à l'étranger. Quand on leur a imposé de vendre leur production sur le seul marché argentin, ils ont ajouté de la graisse à l'intérieur des paquets de viande, arguant du fait que c'était la seule façon de se conformer aux prix administrés. Dans tous les pays où il a été expérimenté, le blocage des prix a systématiquement entraîné l'arrêt de la production, la pénurie et l'apparition d'un marché parallèle, d'un marché noir où les prix sont négociés sous le manteau ; le jour où les prix sont libérés, ils explosent immédiatement, par effet de rattrapage. Cela a pu être observé dans toutes les économies du monde, qu'elles soient libérales ou administrées. Il est fascinant que le blocage des prix puisse encore être présenté comme une solution miracle.

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Vous avez pris beaucoup de temps, monsieur le président, pour dénoncer le blocage ou la régulation autoritaire, administrative, des prix. J'aimerais démentir la fiction libérale que vous entretenez s'agissant de la libre concurrence. Tout le monde a pu constater une situation oligarchique dans le secteur des achats – de nombreux rapports le confirment. Par ailleurs, quelques multinationales détiennent des marques dont le poids dans l'imaginaire collectif, du fait d'une certaine servitude marchande, leur permet d'imposer le prix de leur mise en rayon. En l'absence de libre concurrence, la vraie solution consiste en une régulation des prix assortie d'un contrôle des superprofits et de l'instauration d'une certaine transparence pour les consommateurs – autant de propositions qui, pour l'instant, n'ont pas été acceptées par la majorité. Sortons de ce débat caricatural entre blocage des prix et concurrence loyale.

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Le présent projet de loi ne prévoit pas le blocage des prix, mais un avancement de six semaines des négociations.

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Vous espérez baisser les prix en six semaines : pour cela, il y a les soldes, qui semblent plus efficaces que la négociation que vous prétendez avancer !

Vous ne voulez pas voir la réalité. Vous ne comprenez pas que la négociation va faire augmenter les prix tout en étouffant les producteurs. Entre le prix payé au producteur et celui payé par le consommateur, il y a quelque chose que vous refusez de voir et qui s'appelle les marges, les profits. C'est là-dessus qu'il y a du gras à prendre, si j'ose dire, pour baisser les prix et permettre aux Français de se nourrir. Si vous refusez de vous attaquer aux profits en bloquant les marges et les prix, vous n'aurez pas d'autre choix que d'implorer, en vain, le dieu concurrence.

Vous prétendez que le blocage des prix ne marche pas. Il a été tenté une seule fois dans notre pays, récemment, pour le gel hydroalcoolique, et il a fonctionné. En revanche, nous pouvons constater que la libre concurrence a augmenté de 20 % les prix des produits alimentaires depuis deux ans. Ayez au moins l'honnêteté de reconnaître que votre système ne marche pas et acceptez d'expérimenter celui que vous avez vous-mêmes mis en place au moment de la crise du covid, pour le gel hydroalcoolique, et qui fonctionne outre-mer au demeurant.

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M. Tavel a rappelé votre position très dogmatique concernant le blocage des prix, une solution que nous ne défendons pas – nous préconisons l'encadrement des marges, ce qui n'est pas la même chose. Or le gouvernement que vous soutenez a déjà imposé le blocage du prix du gel hydroalcoolique. J'ai également eu l'occasion de vous rappeler en séance, lors de la journée de niche du groupe Écologiste-NUPES, qu'un blocage des prix a été mis en place en 1976 par un gouvernement aux positions politiques proches des vôtres, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, et qu'il a été supprimé par un gouvernement certainement très libéral, sous la présidence de François Mitterrand. Les choses sont donc un peu plus complexes que vous ne voulez nous le faire croire.

Pour notre part, nous sommes favorables à un encadrement des marges, donc au pacte de modération des marges défendu il y a quelques jours par le Président de la République mais qui ne figure pas dans votre projet de loi. Voilà encore une annonce bricolée sur un coin de table, avec des convictions aléatoires !

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Plutôt que de discuter de l'encadrement des marges, recentrons nos débats sur la question de la date du cycle annuel de négociations, car il ne s'agit que de cela. Nous souhaitons avancer cette date afin de rapprocher les prix de vente de ceux payés en amont. Depuis deux ans, en effet, la volatilité des cours des matières premières et donc des prix est parfaitement inédite – nous n'avions pas connu pareille situation depuis plus de quinze ans.

Monsieur Nury, vous nous avez demandé un jour s'il y aurait une loi Egalim 4. Elle ne portera pas ce nom-là, mais nous convenons tous que nous n'avons pas fini d'aborder la question des négociations commerciales. Nous en reparlerons au calme, à une autre occasion. Il conviendra peut-être de nettoyer la législation actuelle, qui comporte de nombreuses scories réglementaires, de redéfinir les grands principes qui régissent l'ordre public économique et de nous reposer la question de la date habituelle du cycle annuel de négociations, mais tenons-nous en aujourd'hui à l'objet du présent projet de loi.

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Je ne suis pas favorable à la fixation administrative des prix, mais ce n'est pas parce que vous ne l'instaurez pas que vous empêcherez les industriels, à qui vous réclamez des prix bas, de tricher sur les emballages – ils l'ont déjà fait –, sur la composition des produits – ils ont commencé à le faire – ou sur leur origine. C'est ainsi que M. Leclerc vend en ce moment du lait demi-écrémé qui ne l'est pas, ou encore du beurre doux fabriqué avec du lait venant d'Irlande.

La commission rejette l'amendement.

Amendements identiques CE78 de M. Alexis Izard et CE58 de Mme Anne-Laure Babault, amendements CE18, CE25, CE10 et CE20 de M. Jérôme Nury, amendements CE59 et CE60 de Mme Anne-Laure Babault, amendement CE64 de M. Nicolas Meizonnet (discussion commune)

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L'amendement CE78 vise à supprimer le seuil de chiffre d'affaires annuel de 150 millions d'euros afin d'englober l'ensemble des fournisseurs dans le dispositif à compter du 15 janvier. Il s'agit tout simplement de mettre tout le monde sur un pied d'égalité. Parce que les PME ont l'habitude de signer des accords avant le 31 décembre, d'aucuns souhaitent retenir dans la loi l'échéance du 31 décembre 2023, mais cette solution me paraît trop restrictive. Je propose pour ma part que toutes les PME qui n'auront pas la possibilité de signer de nouveaux accords avant la fin du mois de décembre puissent le faire jusqu'au 15 janvier 2024, à l'instar des autres acteurs.

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Mon amendement CE58 est identique à celui du rapporteur. Il faut que les PME et ETI soient traitées au moins aussi favorablement que les multinationales.

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Nous craignons les effets de cette distorsion de concurrence entre les grands groupes, d'une part, et les PME et ETI, d'autre part. Il serait dangereux de permettre aux premiers de négocier avant les secondes, qui représentent de nombreux emplois dans nos territoires ruraux. Il convient au contraire de donner aux PME un temps d'avance.

Dans cette perspective, l'amendement CE18 vise à permettre aux entreprises réalisant un chiffre d'affaires annuel inférieur à 150 millions d'euros de négocier jusqu'au 15 janvier 2024 et à repousser l'échéance des autres fournisseurs au 31 janvier. Ces quinze jours d'avance paraissent peut-être courts, mais ils permettront au moins aux PME d'entrer plus rapidement dans les négociations commerciales et de promouvoir plus facilement leurs produits.

L'amendement CE25, quant à lui, instaure un seuil de 350 millions d'euros, qui correspond au chiffre d'affaires maximum retenu par l'Union européenne pour définir une PME ou une ETI. L'échéance serait fixée au 31 décembre 2023 pour ces entreprises et au 15 janvier 2024 – toujours quinze jours plus tard, donc – pour les autres fournisseurs.

L'amendement CE10 propose la date du 31 décembre 2023 pour les entreprises réalisant un chiffre d'affaires annuel inférieur à 150 millions d'euros et celle du 15 janvier 2024 pour les autres.

Enfin, l'amendement CE20 retient la date du 15 janvier 2024 pour les entreprises dont le chiffre d'affaires n'excède pas 350 millions d'euros par an et celle du 31 janvier 2024 pour les plus gros fournisseurs.

Les quatre amendements obéissent donc au même principe. Quoi qu'il en soit, ce projet de loi, qui part d'une bonne intention, ne doit pas être pire que le statu quo pour nos PME fragiles.

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Les amendements CE59 et CE60 visent à accorder aux PME et ETI un traitement différent de celui réservé aux multinationales. Le contexte financier actuel, marqué par des taux d'intérêt élevés, a tendance à favoriser ces dernières puisque les distributeurs seront amenés à limiter leurs stocks encore plus que d'ordinaire et donc à choisir les produits à forte rotation proposés par les multinationales. Suivant les recommandations de la Feef, nous souhaitons donc instaurer un seuil de chiffre d'affaires de 350 millions d'euros annuels en deçà duquel les PME et ETI bénéficieraient d'une date d'échéance légale des négociations anticipée – le 31 décembre 2023 au lieu du 15 janvier 2024 aux termes de l'amendement CE59, ou le 15 janvier 2024 au lieu du 31 janvier aux termes de l'amendement CE60.

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L'amendement CE64 vise également à rehausser le seuil fixé par ce projet de loi afin d'exclure du dispositif les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 350 millions d'euros. Il est ressorti des auditions, notamment de la FCD et de la FEEF, que le seuil de 150 millions était trop bas : de ce fait, certaines ETI se retrouvaient sur un pied d'égalité avec des multinationales alors que leurs moyens sont plus modestes. Il ne faudrait pas qu'elles soient, dans l'urgence de la situation, éclipsées par les multinationales du secteur et donc reléguées au second plan des négociations.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Je comprends très bien l'avantage qu'il y aurait à rendre l'échéance du 15 janvier applicable à tous, que ce soit aux PME et ETI ou aux grandes entreprises, comme le proposent les amendements identiques CE78 et CE58. Cela simplifierait le texte et éviterait tout effet de seuil. J'admets que ces amendements ne modifient en rien l'esprit de la loi en vigueur, qui prévoit une date butoir pour toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. M. Nury, Mme Babault et d'autres ont par ailleurs rappelé qu'avec une échéance identique pour tout le monde, les PME ont à cœur de terminer plus rapidement leurs négociations avec les distributeurs que les grandes entreprises, qui prolongent souvent les discussions jusqu'à la date butoir. Il me semble néanmoins nécessaire de s'assurer que les acteurs concernés – en particulier les PME, mais également les distributeurs – sont effectivement en mesure de tenir ce délai du 15 janvier. Je travaille aussi à l'élaboration d'un engagement volontaire, par lequel PME et distributeurs s'obligeraient à achever leurs négociations avant le 31 décembre 2023 en contrepartie d'un envoi précoce des conditions générales de vente.

Dans l'attente de l'issue de cette concertation, je vous propose de retirer ces deux amendements identiques, dont je reconnais qu'ils viendraient enrichir le texte, en échange de mon engagement total à travailler avec les parlementaires et les acteurs concernés pour aboutir en séance publique à une solution viable et surtout effective pour nos PME. À défaut, j'inviterai la commission à rejeter les amendements.

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La diversité des amendements faisant l'objet de cette discussion commune a au moins l'avantage de montrer que le sujet fait débat et que la réponse à apporter ne fait pas forcément consensus.

À mon sens, la suppression pure et simple du seuil permettra d'abord de simplifier le dispositif et d'offrir aux Français des baisses de prix dès le 16 janvier. Elle évitera également à nos PME et à nos petites ETI – celles dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 150 millions d'euros – de passer après les grands groupes si aucun accord n'est passé avant le 31 décembre. Je pense donc que cette mesure est la meilleure.

Certains souhaitent avancer la date butoir au 31 décembre. Si je n'ai pas retenu cette option, c'est parce qu'elle ne me semble pas tenable pour l'intégralité des PME, auxquelles un seul mois de négociations peut ne pas suffire – une petite marge de manœuvre est nécessaire.

D'autres amendements visent à relever le seuil à 350 millions d'euros. Cette solution nous permettrait également de cibler les plus gros industriels et de les faire négocier avant les autres. Toutefois, elle n'offrirait pas à tous les Français des baisses de prix sur l'ensemble des produits le plus rapidement possible ; par ailleurs, le raccourcissement des délais inciterait les plus petites PME à négocier après, ce qui laisserait à leurs produits moins de place dans les linéaires et les catalogues.

Mmes Trouvé et Hignet n'ont pas soutenu leurs amendements créatifs visant à repousser l'échéance au 20, au 22, au 24, au 26 ou au 28 février. Je suis surpris qu'elles ne se soient pas aperçues que 2024 était une année bissextile comportant un 29 février !

Je comprends, madame la ministre, qu'il soit nécessaire de discuter – la diversité de ces amendements montre bien qu'il faut poursuivre la discussion. Je reste convaincu que la suppression du seuil est une mesure importante, qui clarifiera le débat et favorisera la baisse des prix. Je retirerai donc mon amendement pour le redéposer en séance. J'invite mes collègues à faire de même et à rediscuter de tout cela ensemble avant d'adopter en séance la meilleure solution pour nos industries, pour nos agriculteurs, pour la grande distribution et surtout pour les consommateurs.

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Si je comprends bien, monsieur le rapporteur, vous considérez que les PME n'auraient pas assez d'un mois – d'un mois et demi, en réalité – pour négocier. Vous voulez pourtant que du 1er décembre au 15 janvier, l'intégralité des fournisseurs retournent à la table des négociations : vous leur laissez donc le même délai, à savoir un mois et demi, comprenant par ailleurs la période de Noël qui n'est pas la plus propice aux discussions. Mme la ministre expliquait tout à l'heure que les industriels arrivaient rarement avec des baisses de tarifs – ils proposent plutôt des hausses. Souhaitez-vous vraiment leur donner moins de temps qu'en période normale pour négocier ? Tout cela nous laisse craindre que ce texte aboutisse davantage à des hausses de tarifs qu'à des baisses.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Je réitère ma demande de retrait des amendements identiques CE78 et CE58, ainsi que mon invitation à tous les députés qui le souhaitent à échanger avec nous dès demain afin de déterminer ensemble, d'ici à la séance publique, la décision la plus adaptée concernant le seuil. Mon portefeuille ministériel inclut non seulement la consommation, mais aussi les PME ; or nous sommes très nombreux ici à savoir que si ces dernières ne sont pas embarquées dans la négociation, leurs produits risquent d'être mal référencés et de ne pas trouver une bonne place dans les linéaires. Cela n'est pas anodin.

À moins qu'ils ne soient retirés, je donne un avis défavorable aux amendements CE18, CE25, CE10, CE20, CE59 et CE60 tout en invitant M. Nury et Mme Babault à travailler avec nous et à nous faire part de leurs idées sur la question du seuil.

L'amendement CE64 de M. Meizonnet me semble intéressant, mais un rehaussement du seuil de chiffre d'affaires diminuerait le nombre d'entreprises concernées par le dispositif, ce qui va à l'encontre de notre objectif. Je lui donne donc également un avis défavorable.

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Je retire mes amendements et remercie Mme la ministrede nous inviter à échanger avec elle en vue de la séance. Je confirme cependant que le groupe MODEM souhaite qu'il y ait une distinction entre les PME et ETI, d'une part, et les multinationales, d'autre part.

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J'apprécie moi aussi l'ouverture dont fait preuve Mme la ministre, qui a bien compris l'enjeu de cette mesure pour les PME et ETI.

Je suis beaucoup plus réservé s'agissant de la solution proposée par M. le rapporteur. Entre l'envoi des conditions générales de vente et la transmission de l'attestation amont, je crains que les PME, même placées sur un pied d'égalité avec les grands groupes, n'aient pas la capacité ni le temps de s'adapter aussi rapidement. Je rejoins donc la position défendue par le groupe MODEM : il faut donner un temps d'avance aux PME.

On l'a dit, nous vivons une année exceptionnelle. Travaillons donc ensemble, comme l'a proposé Mme la ministre pour éviter que ce projet de loi n'aboutisse à une situation pire que le statu quo. Je retire mes quatre amendements.

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Nous saluons nous aussi l'offre de Mme la ministre d'instaurer une clause de revoyure et de trouver ensemble une solution. Mais les amendements CE22 et CE21 du groupe Socialistes et apparentés nous permettront peut-être de trancher la question et d'économiser notre temps : ils proposent d'organiser la révision des prix non pas à partir d'un seuil de chiffre d'affaires, mais lorsque des profits indus sont constatés par la DGCCRF ou l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Ainsi, tous ceux qui ont triché dans la construction du prix se trouveraient concernés.

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M. le rapporteur a fait allusion à l'amendement CE46, que nous n'avons pas pu soutenir et qui visait à fixer la date butoir des négociations au 28 février. Quitte à être inefficace, impuissant, inopérant, stérile et vain comme l'est votre projet de loi, autant avancer l'échéance de deux jours au lieu de quarante-cinq : on aura moins de risque d'avancer la date de l'augmentation des prix !

Face à la flambée des prix alimentaires, vous nous proposez un bidouillage technique à l'opposé de ce qu'attendent les Français. Tout le monde en pâtit, à l'exception des grands industriels de l'agroalimentaire – c'est bien eux que vous voulez épargner avec ce projet de loi indigent. J'aimerais insister sur votre impuissance coupable envers les grands industriels. Nous vous avions alertés, il y a déjà plusieurs mois, au sujet de la flambée de leurs marges, un phénomène que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque centrale européenne (BCE) reconnaissent également. En un an et demi, la moitié de la flambée des prix alimentaires est liée à la hausse des marges des grands industriels, comme le montrent les chiffres de l'Insee. Aucune des propositions sérieuses évoquées par Mathilde Hignet et d'autres n'ont été prises en compte. Votre inaction est la quintessence de votre extrême libéralisme et l'illustration de la démission de l'État qu'organise le Gouvernement.

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Madame la ministre, je n'ai pas bien compris votre réponse. Vous dites vouloir défendre les PME et ETI ; or nous voulons précisément défendre certaines ETI dont le chiffre d'affaires annuel excède 150 millions d'euros mais qui ne jouent pas dans la même catégorie que les grandes multinationales. C'est pourquoi nous proposons de rehausser le seuil. Nous maintenons donc notre amendement.

La commission rejette l'amendement CE64, tous les autres amendements ayant été retirés.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CE76 de M. Alexis Izard, rapporteur.

Amendement CE19 de M. Dominique Potier

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Il vise à réaffirmer le principe d'annualité auquel les syndicats de producteurs sont très attachés. Je ne dis pas qu'il faut le garder indéfiniment mais il ne doit pas être supprimé dans une discussion parlementaire comme la nôtre. Ce principe n'est pas superfétatoire : il apporte une garantie importante à tous les opérateurs. On n'est pas en train de détruire ce que l'on a lentement bâti, avec les lois Sapin 2, Egalim ou Descrozaille : on consolide un commerce le plus équitable possible s'agissant du partage de la valeur.

Le principe d'annualité protège les plus fragiles et les plus petits. L'amendement rassure les producteurs : s'il y a une baisse des prix, elle ne se fera pas au détriment de ceux qui produisent. On n'améliore pas le pouvoir d'achat des Français en détruisant les emplois industriels et agricoles.

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Le texte ne remet pas en cause le principe d'annualité. Il est déjà possible de conclure des contrats portant sur plusieurs années. L'amendement est donc satisfait. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable. Nous nous sommes par ailleurs engagés à ouvrir une discussion plus large sur les négociations.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Cela va toujours mieux en le disant, même lorsque l'avis est défavorable.

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Le projet de loi ne fait qu'avancer de six semaines les négociations : il ne remet pas en cause le principe d'annualité. On a pu le craindre lorsque certains se sont interrogés sur la date annuelle des négociations – je l'ai fait dans mon propos liminaire. Ce n'est pas ce que dit le texte même si, demain, notre commission pourrait en décider différemment.

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Le monde paysan a raison de se méfier des déclarations de M. Kasbarian. Il est important que la loi protège de ces sorties de route régulières. Je retire l'amendement car vous adopterez certainement les deux suivants.

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Je le dis à nos amis agriculteurs : le projet de loi ne pose pas la question de l'annualité. En revanche, il nous incite à y réfléchir.

L'amendement est retiré.

Amendements CE22 et CE21 de M. Dominique Potier (discussion commune)

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La question du rapport de force ou des superprofits n'est pas nécessairement liée à la taille de l'entreprise : une PME ou une ETI peut être en quasi-monopole pour un produit phare, quand certaines multinationales ne sont pas en mesure d'imposer leurs prix pour des produits banalisés.

Nous proposons un autre critère : si une enquête de la DGCCRF établit que des acteurs de l'industrie agroalimentaire ou de la grande distribution réalisent des profits éhontés, un mécanisme de revoyure peut être décidé, qui court dans les six semaines. De même, si l'Observatoire de la formation des prix et des marges (OFPM) des produits alimentaires constate une rente de situation ou un superprofit, qui méritent d'être corrigés, les négociations commerciales pourront rouvrir de manière anticipée.

La mesure n'est ni universelle ni fondée sur des seuils, qui ont forcément des défauts.

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La question mérite d'être soulevée. Toutefois, ces propositions sont difficiles à appliquer dans le cadre d'un projet de loi d'urgence.

Je ne suis en outre pas favorable à l'idée de conditionner l'application de la loi à la consultation de l'OFPM ou de la DGCCRF.

Enfin, je ne suis pas convaincu que la marge soit l'unique question. Je suis heureux que les entreprises françaises réalisent des marges : elles en ont besoin pour investir dans leurs unités de production, notamment pour la transition environnementale. Ce que je veux, c'est la baisse des prix plutôt que celle des marges.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Je comprends l'objectif des amendements, mais ils semblent peu réalistes. À l'heure actuelle, l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires examine quelques filières et la DGCCRF n'est pas calibrée pour cette tâche.

Les amendements supposent de mener des études approfondies, au sein de chaque filière agroalimentaire, pour établir le partage des marges entre les différents acteurs de la chaîne. Le temps nécessaire à ces études n'est pas compatible avec le calendrier envisagé pour cette loi, qui prévoit d'avancer la date butoir des négociations commerciales au 15 janvier 2024 et ne servirait à rien si elle était adoptée le 10 décembre. Pour cette raison, je donne un avis défavorable aux amendements.

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M. Potier va dans le sens du Président de la République, qui a souhaité une grande conférence pour mettre à plat les marges, et les modérer. Nous soutenons la démarche visant à apporter de la clarté, à mieux répartir les marges et à faire toute la transparence sur cette question.

En revanche, Mme la ministre l'a souligné, nous examinons un texte d'urgence car nous essayons d'avancer de six semaines les négociations. Vous conviendrez qu'il paraît compliqué, dans le temps imparti, de déterminer avec un tel niveau de granularité les entreprises qui réalisent des marges excédentaires, excessives ou non. Nous proposons une clause de revoyure, et un réexamen de ces dispositions dans le cadre d'une future loi Egalim. En l'état, les amendements ne sont pas opérants.

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En se réjouissant des marges des entreprises, le rapporteur est en contradiction avec le Président de la République, qui estime qu'elles sont un problème. Ces marges vont à des actionnaires qui, parfois, se distraient dans les paradis fiscaux. On n'en veut plus ! Cela s'appelle des superprofits, qui n'ont rien à voir avec la réindustrialisation et la consolidation des actifs stratégiques en France. Votre argumentaire, monsieur le rapporteur, donne envie de rejeter le projet de loi.

En revanche, j'entends ce que disent Pierre Cazeneuve et la ministre : on n'a pas le temps. Le problème est pourtant connu : une petite centaine de multinationales font danser les producteurs et quatre oligopoles concentrent 80 % des achats. Une commission, qui pourrait être présidée par Richard Ramos, un membre de la majorité, et rassembler deux ou trois hauts fonctionnaires et des représentants de la DGCCRF et de l' Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (, pourrait établir très rapidement où sont réalisés les superprofits dans notre pays. Elle engagerait le mois suivant une renégociation, pour baisser ces superprofits et redonner du pouvoir d'achat aux consommateurs, sans affaiblir les producteurs.

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La DGCCRF et l'OFPM ne disposent que d'une poignée d'équivalents temps plein : il leur sera difficile de contrôler l'intégralité des entreprises, comme le prévoient les amendements.

J'ai dit que je me réjouissais que les entreprises françaises soient capables d'engranger des marges. Mon objectif est d'observer une baisse des entrants, qui doit être répercutée dans la baisse des coûts, quelle que soit la marge. Je suis d'accord avec vous : il y a des gros, qui ont des marges trop élevées – le Président l'a dit dans son allocution. Mais vos amendements placent tout le monde dans le même panier, y compris les petits industriels, qui réalisent une marge faible et ne peuvent pas se permettre de la diminuer.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CE81 de M. Alexis Izard

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Cet amendement vise à exclure les pharmacies d'officine du dispositif. Le projet de loi n'a pas pour objet d'entamer des négociations anticipées pour toutes les pharmacies de France.

La commission adopte l'amendement.

Suivant l'avis du rapporteur, elle adopte l'amendement de coordination CE80 du Gouvernement.

Amendement CE23 de M. Dominique Potier

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Le présent amendement a pour objet d'intégrer, au sein des contrats qui lient distributeurs et fournisseurs, des indicateurs diffusés par les organisations interprofessionnelles ou, à défaut, proposés et validés par l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.

Le projet de loi démontre la nécessité d'intégrer au sein des conventions un cadre de renégociation fidèle à l'évolution des prix : si les contrats sont mieux encadrés, avec des indicateurs reflétant fidèlement les prix des matières premières, agricoles et industrielles, le législateur n'aura pas besoin d'avancer les dates des négociations commerciales puisque les baisses des prix en grande distribution pourront être répercutées plus rapidement. Si les hausses et les baisses des prix de l'énergie et des matières premières avaient été fidèlement répercutées, sans nourrir les profits que nous avons déjà dénoncés, nous n'aurions pas besoin d'être réunis aujourd'hui pour légiférer. Le fond du problème a bien été résumé tout à l'heure : quand les coûts montent, les prix augmentent dans les rayons ; quand ils descendent, les prix ne baissent pas.

L'amendement est l'occasion, non de faire de la politique à la petite semaine pour d'hypothétiques gains, mais d'établir des principes de révision des prix qui soient conformes à l'esprit des contrats tels que nous les avons voulus dans les lois Egalim, et qui n'ont jamais été appliqués.

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L'amendement est satisfait, bien que les clauses de révision ne soient pas satisfaisantes. La loi Egalim 2 dispose en effet que : « La convention comporte une clause de révision automatique des prix du contrat en fonction de la variation du coût de la matière première agricole, à la hausse ou à la baisse, entrant dans la composition du produit alimentaire ou du produit destiné à l'alimentation des animaux de compagnie. Les parties déterminent librement selon la durée du cycle de production, la formule de révision, et, en application du III de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, les indicateurs utilisés. Lorsque l'acquisition de la matière première agricole par le fournisseur fait l'objet d'un contrat écrit en application du I du même article L. 631-24, la clause de révision inclut obligatoirement les indicateurs relatifs aux coûts de production en agriculture. » En outre, « les évolutions de prix résultant de la clause de révision automatique des prix sont mises en œuvre au plus tard un mois après le déclenchement de ladite clause ».

Ces clauses de revoyure sont récentes et leur utilisation n'est pas satisfaisante. Elles n'étaient pas utiles lorsque les variations de prix étaient faibles. Cette année est la première où l'on se rend compte du besoin de les activer. Or elles ont été mal rédigées, ce qui les conduit à être inopérantes. Les industries et la grande distribution doivent les améliorer.

Je vous propose donc de retirer votre amendement car il est déjà possible d'intégrer de tels indicateurs.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Si je comprends bien, vous voulez intégrer des indicateurs plus réactifs sur l'évolution des prix des matières premières, tout en gardant le principe d'une fixation annuelle des prix.

Pour ce qui est des clauses, je partage votre avis : elles ne fonctionnent pas bien. En réalité, on n'aurait pas besoin de l'État si tout fonctionnait bien.

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Je le disais dans mon propos liminaire, si les clauses de révision fonctionnaient, nous ne serions pas en train d'examiner un projet de loi visant à avancer les négociations de six semaines. Les acteurs seraient tout le temps en train de négocier, et cela fonctionnerait mieux. Nous devons nous interroger sur un tel dysfonctionnement. Ensuite, les députés décideront si la proposition de M. Potier permet de résoudre le problème. Il est évident que la clause de renégociation pose un problème.

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Techniquement, l'amendement ne tient pas. D'abord, parce que l'OFPM ne peut pas se prononcer sur les évolutions en cours : il ne fournit les données qu'avec deux ans de retard.

Ensuite, parce que les organisations interprofessionnelles sont des organismes d'initiative et de droit privés. S'il est possible de leur enjoindre d'utiliser les indicateurs interprofessionnels, lorsqu'ils existent, on ne peut pas les obliger à les intégrer. C'est la question globale de la contrainte qui pèse sur la négociation et de la liberté du commerce. Certes, on doit s'en occuper, mais on ne peut pas réactiver toutes ces questions lors de l'examen d'un article unique, qui vise simplement à rapprocher la négociation de ce qui se passe en une année. On s'emparera du reste en prenant le temps.

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Nous semblons d'accord sur le fond, y compris avec le président Kasbarian : s'il y avait eu une révision des prix pour tenir compte des prix de l'énergie et des matières premières, on n'aurait pas eu besoin d'être réunis aujourd'hui pour modifier la loi car on aurait intégré la tendance à la baisse qui s'est manifestée depuis quelques mois. Tout le monde était d'accord : la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles) et les différents syndicats admettent le principe des indicateurs de variation. Il n'est d'ailleurs pas nouveau : c'est celui des délégations de service public (DSP) ou des contrats privés. Une DSP des services d'eau pendant dix ans intègre le coût de l'énergie et des matériaux. Même un contrat de construction peut inclure des variations de prix.

Ici, cela ne fonctionne pas. Admettez que la rédaction ait pu être imparfaite dans les lois Egalim 1 et 2, et même dans la loi Descrozaille. L'amendement est plus précis, puisqu'il prévoit que les parties « fixent » – au lieu de « peuvent fixer » – les modalités selon lesquelles le prix convenu est révisé. La disposition devient ainsi obligatoire et opposable.

Enfin, les indicateurs sont diffusés par les organisations interprofessionnelles. L'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires intervient seulement par défaut. Il n'y a donc pas de délai de carence.

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Il existe un consensus sur le fait que la clause de renégociation ne fonctionne pas, sinon nous ne serions pas là. Vous admettrez aussi, monsieur Potier, qu'il existe de multiples façons de la rédiger pour qu'elle fonctionne. Personne ne sait si votre proposition est la bonne. Il faut peut-être lancer une mission sur la question.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

En cohérence, j'émets un avis défavorable. Comme M. Descrozaille l'a dit, sans remettre en question le dysfonctionnement des clauses de renégociation, je vois mal comment on pourrait les modifier dans un texte qui vise à avancer de quarante-deux jours les négociations. Je ne suis certes pas Bruno Le Maire, mais je vous le dis : il est important que la représentation nationale se saisisse du problème et étaie ses points de vue, notamment la proposition de M. Potier. Il revient au Gouvernement ou au Parlement de revoir ces clauses.

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Nous sommes d'accord sur le symptôme mais pas sur la maladie. Ma position n'est pas guidée par le dogmatisme, mais par le fait qu'aucune des personnes auditionnées n'a proposé de changer la façon dont les choses fonctionnent. Elles ont plutôt dit qu'elles ne se saisissaient pas assez des dispositions existantes.

L'article unique est dérogatoire pour une année. Il faut avoir une réflexion plus globale sur la question. Des engagements ont été pris pour réfléchir de façon plus générale au fonctionnement des négociations commerciales.

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Les réponses à cette question complexe peuvent être multiples. Je pourrais aussi déposer un amendement pour modifier la date annuelle des négociations. Je ne l'ai pas fait parce que toute disposition a des conséquences, et qu'on a besoin d'en discuter. Si cela ne tenait qu'à moi, on modifierait la date, mais c'est à vous d'en décider.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CE77 de M. Alexis Izard, rapporteur.

Amendements CE79 de M. Alexis Izard, CE67 de M. Nicolas Meizonnet et CE27 de Mme Christine Engrand (discussion commune)

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Nous revenons à une proposition que j'ai faite dans mon propos liminaire. Nous serons tous d'accord pour considérer que quarante-cinq jours de négociations, c'est peu. Mon amendement CE79 vise donc à ramener la date limite d'envoi des conditions générales de vente (CGV) au 15 novembre. Cela permettra d'allonger à deux mois les négociations commerciales, ce qui semble un délai court mais raisonnable.

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Mon amendement et celui de Mme Engrand sont dans la même veine, en tant qu'ils étendent à soixante jours le temps de négociation. Nous ne voudrions pas que le texte favorise un cadre de discussion déséquilibré entre les enseignes de distribution, pressées par un laps de temps restreint, et certains fournisseurs détenant des parts de marché parfois trop importantes pour être boudées. Les deux amendements proposent de fixer le début des négociations au 15 novembre, soit deux mois avant la date butoir.

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Puisqu'il s'agit d'une date limite d'envoi des conditions générales de vente, autant l'avancer au maximum. Il n'est pas nécessaire d'établir des distinctions. Avis défavorable aux amendements CE67 et CE27.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

L'amendement CE79 a pour objectif de garantir un temps suffisant pour la négociation commerciale. Le Gouvernement est ouvert à la proposition d'avancer la date limite d'envoi des conditions générales de vente, qui marquent le début de la négociation. Toutefois, à la suite de nos débats sur la possible extension du seuil, notamment, nous avons encore du travail pour consulter l'ensemble des parties prenantes et nous assurer que cette date avancée soit opérationnelle et partagée. A fortiori si l'on intègre les PME, il importe de poursuivre les échanges pour vérifier que la date limite d'envoi des CGV peut être avancée au 15 novembre. C'est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement, monsieur le rapporteur. À défaut, j'y donnerai un avis défavorable.

Même position sur l'amendement CE67 de M. Meizonnet. Nous avons encore des consultations à mener pour nous assurer qu'une date avancée au 15 novembre est opérationnelle.

Mon avis sur l'amendement CE27 est également défavorable. Il convient de concilier la nécessité de parvenir à des accords rapides et celle de laisser aux industriels le temps d'établir leurs tarifs pour 2024. Depuis la fin du mois d'août 2023, les industriels connaissent notre intention d'avancer la date au 15 janvier. Avec Bruno Le Maire, nous leur avons demandé d'envoyer leurs CGV dès que possible et, au plus tard, le 1er novembre, non le 1er décembre.

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Je souhaiterais m'assurer que la loi sera promulguée avant le 15 novembre, sans quoi le Conseil constitutionnel s'opposerait à la disposition.

Il faudra également corriger une erreur matérielle, puisque l'amendement vise à garantir un délai de deux mois à partir du 15 novembre 2023, non 2024.

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Ce sont deux bonnes raisons pour retirer l'amendement. Néanmoins, il est important de débattre de cette disposition et de nous assurer de laisser aux parties le maximum de temps pour mener des négociations sereines aboutissant à ce que nous voulons tous, des baisses de prix.

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Madame la ministre, pouvez-vous préciser quels industriels connaissent votre intention d'avancer la date ? En l'état actuel du texte, nous ignorons lesquels sont concernés et je ne suis pas certain qu'eux-mêmes soient au courant.

Si vous envisagez de ne pas retenir la date du 15 novembre, donc d'en rester au 1er décembre, pouvez-vous garantir qu'un mois et demi suffira pour que tous les industriels satisfassent à leur obligation de renégocier avec les distributeurs ? Nous devons nous en assurer avant de voter le texte.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Les soixante-quinze plus gros industriels sont au courant puisque nous avons travaillé avec eux avant l'été et engagé des renégociations conduisant à une baisse des prix en juillet. Cette baisse n'a pas été aussi massive que celle que nous attendons avec ce texte, mais nous en avons reparlé avec l'ensemble des représentants des industriels de l'agroalimentaire cet été.

Pour cette seconde étape, après consultations, nous visons un envoi des CGV au 15 novembre, avec un atterrissage au 15 janvier, soit soixante jours après.

La commission rejette successivement les amendements CE67 et CE27, l'amendement CE79 ayant été retiré.

Amendement CE13 de M. Jérôme Nury

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Il a pour objet de faire respecter la date butoir. Si l'on veut que le dispositif fonctionne, des sanctions dissuasives doivent être prononcées. Pour chaque infraction constatée, nous proposons une amende administrative dont le montant ne peut excéder 200 000 euros pour une personne physique et 5 millions d'euros pour une personne morale. Certains contournements semblent n'avoir pas été sanctionnés par la DGCCRF cette année. Nous devons montrer que l'État sait faire preuve d'autorité.

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La loi Descrozaille a déjà renforcé les sanctions : elles peuvent atteindre 150 000 euros pour une personne physique et 1 million pour une personne morale. Je comprends l'idée de punir les gros mais une amende de 1 million est susceptible de déstabiliser une petite structure.

Avis défavorable car les sanctions proposées sont excessives.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Vous proposez d'alourdir les sanctions figurant dans la loi Descrozaille. Je suggère au contraire que l'on observe les effets de ces dispositions, car le texte n'est pas encore entré en vigueur intégralement. Avis défavorable.

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L'idée est de montrer qu'il y a un problème. Les contournements par certaines enseignes appellent une intervention de la DGCCRF : elle doit faire son travail, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Il appartient à l'exécutif de tout mettre en œuvre pour que les dispositions de la loi soient appliquées. Il n'est pas normal que, dès le vote de la loi Descrozaille, des enseignes détournent déjà les fameuses dates butoirs.

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Sur le principe, nous sommes toujours pour augmenter les sanctions des multinationales qui ne respecteraient pas la loi. Le problème est que le projet de loi risque d'être inutile et, surtout, dangereux.

Madame la ministre, comment pouvez-vous être certaine que les prix des produits vendus par les industriels de l'agroalimentaire baisseront grâce à l'avancement de la date des négociations ? Comment prouver qu'ils n'augmenteront pas ? M. Thierry Cotillard, le PDG du groupe Les Mousquetaires, a rapporté qu'un seul des soixante-quinze plus gros acteurs industriels lui a adressé ses tarifs, avec une augmentation proposée de 10 %.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE40 de Mme Mathilde Hignet et amendements identiques CE6 de M. Julien Dive et CE56 de M. Jérôme Nury (discussion commune)

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Mon amendement CE40 a pour objet de renforcer la transparence sur la part des matières premières agricoles dans les tarifs des fournisseurs de produits alimentaires, afin de mieux protéger la rémunération des agriculteurs. Ces derniers ne peuvent pas être la variable d'ajustement : c'est pourquoi nous proposons de supprimer la troisième option du mécanisme de transparence en vigueur, qui ne renseigne pas sur la part des matières premières agricoles dans les tarifs des fournisseurs.

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Avis défavorable. Je suis contre le fait de restreindre la transparence. Retirer cette troisième option va à l'encontre du constat que la plupart des acteurs l'utilisent.

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Mon amendement CE6 vise à préserver l'option 3 du mécanisme de transparence, un dispositif introduit par la loi Egalim 2, qui inclut notamment la non-négociabilité des matières premières agricoles. Cette option, qui prévoit le recours à un tiers de confiance, a été renforcée dans la loi Egalim 3 du 30 mars 2023, qui impose la transmission par ce tiers d'une attestation en amont, après la publication des conditions générales de vente. Or les distributeurs ont estimé qu'en avançant la date butoir du 1er mars au 15 janvier, la négociation démarrera après la publication de cette attestation, ce qui en raccourcira considérablement la durée. Je propose donc de reporter au 1er septembre 2024 l'entrée en vigueur de l'obligation d'attestation, de manière à respecter les délais de négociations.

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Mon amendement CE56, identique à celui de M. Dive, ne reporte pas la certification aval prévue par la loi Egalim. Si la date butoir reste le 15 janvier, les négociations doivent commencer quarante-cinq jours avant, soit à partir du 1er décembre, alors que l'attestation est exigible au 1er janvier. Les industriels n'auront que quinze jours pour négocier, ce qui est très court. Pour une année exceptionnelle comme le sera 2024, avec l'avancement des négociations notamment, on pourrait reporter l'entrée en vigueur de l'attestation amont à l'année prochaine, au 1er septembre 2024.

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Ces deux amendements identiques diffèrent du premier. Je comprends votre crainte, celle d'attendre un mois l'obtention de la certification et de n'avoir plus que quinze jours pour négocier. Rien n'empêche toutefois d'entrer en négociation avant la fin de ce mois. Je suis donc contre un moratoire sur la troisième option.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Avis défavorable, pour les mêmes raisons.

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Nous l'avons dit, la question des seuils sera examinée en séance. Il est question d'avancer la date d'envoi des CGV au 15 novembre.

Il serait prudent d'examiner l'amendement de notre collègue Julien Dive en séance car il marque un point : techniquement, il ne faut pas placer les industriels dans une impasse. Nous ne pouvons pas les presser d'envoyer les CGV car ils risquent de ne pas pouvoir élaborer leurs prix et, surtout, leur plan d'affaires, à cause de cette attestation qu'ils n'auront pas ou qu'ils obtiendront au dernier moment.

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J'entends ce que dit le rapporteur mais de nombreuses enseignes n'acceptent pas de discuter avant d'avoir reçu cette attestation amont. Même si les PME ou le secteur agroalimentaire sont d'accord, l'enseigne peut refuser de discuter, ce qui laisserait quinze jours pour les négociations.

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Dans le cadre de la mission d'application de la loi Égalim 2, j'ai constaté avec Nicole Le Peih que la disposition de la loi Descrozaille concernant la fourniture en amont de l'attestation était souhaitée par tous. Le fait de ne pas en disposer avait posé problème dans les négociations commerciales. Les amendements déposés par les membres du groupe LR semblent revenir à une situation que la loi Descrozaille avait réglée. On peut commencer les négociations avant d'avoir l'attestation, celle-ci devant parvenir quinze jours avant la date butoir. Il est toujours préférable de l'avoir quinze jours avant plutôt que trois mois après !

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Exclure cette certification de l'option reviendrait à pousser les industriels à négocier sur des baisses potentielles de matières premières agricoles, sans devoir attester qu'elles existent. C'est pourquoi l'attestation paraît importante dans les négociations.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Comme le président, il m'arrive de douter, ce qui est sain. À la suite de l'intervention de M. Descrozaille, je ne modifie pas mon avis mais je suggère que nous en reparlions d'ici au 9 octobre. Je n'ai ni la science infuse ni l'omniscience.

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Le débat est intéressant. Les parlementaires ont aussi pour mission de converger vers les dispositions les plus acceptables pour les acteurs. Je retire donc mon amendement pour le retravailler.

La commission rejette l'amendement CE40, les amendements CE6 et CE56 ayant été retirés.

L'amendement CE3 de M. Julien Dive est retiré.

Amendements identiques CE5 de M. Julien Dive, CE11 de M. Jérôme Nury et CE51 de M. Dino Cinieri

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Il s'agit d'exclure l'ensemble de la filière laitière, déjà fragile, du champ d'application de l'article unique. Le prix du lait et les coûts de transformation continuent d'augmenter, principalement du fait de la hausse des coûts de production supportés par les éleveurs laitiers – augmentation des prix des carburants, de l'énergie, des frais de vétérinaire, des matériels et de l'alimentation animale. Le prix du lait n'est pas négocié annuellement mais au mois le mois, dans le cadre de contrats souvent pluriannuels, qui donnent de la visibilité aux éleveurs.

L'amendement vise à se préserver d'une inflation sur les produits laitiers car l'avancement des dates de négociation pourrait entraîner la hausse de leurs prix dans les commerces.

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Les agriculteurs sont inquiets : ils craignent que l'objectif de diminution rapide des prix des produits dans les rayons des supermarchés entraîne une pression sur les prix agricoles et qu'une fois de plus, les agriculteurs soient la variable d'ajustement. Ils souhaitent garder la date du 1er mars comme date butoir pour les négociations commerciales entre fournisseurs et distributeurs et sont fermement opposés à toute suppression d'une date limite de négociation. L'absence d'une telle date créerait une pression tarifaire tout au long de l'année, aggravant la vulnérabilité des exploitations agricoles.

Les agriculteurs sont par ailleurs confrontés à l'augmentation de leurs charges en matière d'énergie, d'intrants ou de main-d'œuvre, confirmée par l'Insee. En cette période d'inflation qui touche tous les secteurs de l'économie, il faut sensibiliser les consommateurs à l'importance de la juste rémunération des acteurs des filières alimentaires.

La filière laitière a de plus été très fragilisée ces dernières années par des hausses des coûts de production. Il convient donc d'exclure les produits laitiers du champ d'application de l'article unique.

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Je reste sur l'idée initiale de ce projet de loi portant mesures d'urgence : faire baisser les prix dans les magasins pour l'ensemble des produits de consommation, dont les produits laitiers. Pour cette raison, je suis défavorable aux amendements.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

En excluant du champ d'application de la loi un grand nombre de produits contenant du lait, ces amendements réduiraient assez fortement l'impact attendu de la mesure en diminuant considérablement le nombre d'acteurs concernés. Nous devons faire attention à ne pas créer de rupture d'égalité avec les autres filières. Je ne crois pas opportun d'exempter des filières dont les produits sont essentiels pour les Français. Cela étant, je reste ouverte au dialogue, sur la base d'éléments objectivés. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

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J'entends Mme la ministre, qui ouvre la porte à une prise en compte des spécificités des produits laitiers. Je retire donc mon amendement.

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On ne peut pas mettre dans le même sac des entreprises comme Lactalis et Danone, qui se portent bien si l'on en croit leurs résultats – notamment la hausse de leurs marges – de ces dernières années, et les producteurs de lait qui, eux, vont mal parce que la loi Egalim ne fonctionne pas correctement.

Par ailleurs, vous ne vous attaquez absolument pas à l'effondrement du bio. Le prix du lait bio est à peu près au même niveau que celui du lait standard en ce moment, et les producteurs que l'on encourage depuis des années à faire du bio sont en train de se déconvertir.

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Il faut faire attention avec les produits laitiers, dont les gros producteurs nous ont dit qu'ils ne pourraient pas baisser les prix. Il me paraît donc nécessaire de retirer ces amendements et de les retravailler pour la séance. C'est vraiment important si nous voulons éviter des crises dans les cours de ferme.

La commission rejette l'amendement CE51, les amendements CE5 et CE11 ayant été retirés.

Amendement CE52 de M. Grégoire de Fournas

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De l'avis général, les clauses de renégociation n'ont pas fonctionné. Cela nous aurait pourtant évité d'avoir à examiner ce texte. Nous proposons donc que des sanctions soient appliquées en cas de refus de renégocier en cours d'année.

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Votre amendement ne s'attaque qu'aux industriels alors que la grande distribution est également responsable.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Avis défavorable.

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Je remercie le rapporteur pour sa suggestion d'inclure la grande distribution : ce sera fait pour la séance. Tous les groupes d'opposition éprouvent de la frustration car ce texte a été rédigé de façon à nous dissuader de déposer des amendements. C'est la raison pour laquelle certains d'entre eux ont été déclarés irrecevables. En l'occurrence, il se trouve que le mien a été jugé recevable : nous pourrions saisir cette occasion pour améliorer le dispositif, sans attendre une hypothétique loi Egalim 4 ou Descrozaille 2.

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Le mauvais fonctionnement des clauses de revoyure étant à l'origine du présent projet de loi, j'ai déclaré recevables tous les amendements qui portaient sur ce sujet car ils ont bien un lien indirect avec le texte.

L'amendement est retiré.

La commission adopte l'article unique modifié.

Après l'article unique

Amendement CE70 de M. Julien Dive

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Ce texte étant une loi d'exception, il ne résoudra pas le problème des négociations commerciales ; un travail de fond demeure nécessaire. L'amendement vise à autoriser la création d'une délégation parlementaire sur ce sujet.

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Je vois cela comme un amendement d'appel. Ce projet de loi génère une certaine frustration car il ne permet pas de modifier d'autres paramètres, par exemple la fréquence de la clause de revoyure. Certains d'entre vous ont été tentés d'amender le projet de loi en ce sens, alors que ces sujets sont structurants et ont un impact important sur les acteurs de la distribution et les fournisseurs.

Cette question mérite toutefois discussion. Mon engagement, en tant que président de commission, est d'étudier la création d'une mission sur ce sujet à la prochaine réunion de bureau. D'autres outils peuvent également être utilisés : le Gouvernement peut confier une mission à des parlementaires sur ce sujet ; une délégation parlementaire peut être créée, à condition que les sénateurs soient d'accord.

Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons nous en tenir à ce projet de loi, qui ne réglera pas le problème des négociations commerciales. Mme la ministre pourra peut-être nous donner quelques perspectives en ce sens.

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Je pense également que nous avons besoin de poursuivre la réflexion sur ce sujet. Toutefois, je ne suis pas d'accord avec la nécessité de créer une délégation parlementaire. Avis défavorable.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Beaucoup de choses restant à améliorer, je vous ferai une proposition détaillée d'ici la séance. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

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Ayant l'engagement de la ministre, je retire mon amendement.

L'amendement est retiré.

Amendement CE31 de M. Dominique Potier

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Pour poursuivre la discussion, on pourrait aussi imaginer une enquête menée conjointement par l'inspection de plusieurs ministères. Pour ma part, je propose la remise d'un rapport par le Gouvernement. Quel que soit le véhicule utilisé, si l'on veut avancer avec Frédéric Descrozaille, Julien Dive et tous ceux qui se passionnent pour ce sujet, il faut absolument que l'on fasse la transparence sur le partage de la valeur. Quand on reçoit les industriels, ils nous disent qu'ils sont à l'os. Quand on reçoit les responsables de la grande distribution, ils nous disent qu'ils n'en peuvent plus. Quant aux producteurs, on connaît leurs conditions de vie et de travail : l'élevage est en train de foutre le camp dans notre pays. Il faut sortir de ce mensonge structurel organisé.

Je donnerai une seule piste : la grande distribution ne nous dit pas la vérité sur ses marges, parce qu'il y a une part d'optimisation sociale et fiscale, notamment à travers l'immobilier. Il faudrait connaître les marges consolidées des uns et des autres avant de légiférer, afin d'organiser un vrai partage de la valeur.

Il existe une voie entre l'économie administrée et la fiction libérale pour laquelle vous plaidez en permanence : c'est l'économie sociale et territoriale, une économie sociale de marché qui permet, dans la transparence, de bâtir des règles du jeu. C'est ce pour quoi nous nous battons et c'est pourquoi nous proposons notamment les contrats tripartites, accessibles aux consommateurs et différenciés sur le plan fiscal. C'est à notre portée et c'est une question de courage.

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Ce que vous décrivez est précisément la mission de l'Observatoire de la formation des prix et des marges. Je ne suis pas favorable à votre demande de rapport.

L'amendement est retiré.

Amendement CE35 de M. Grégoire de Fournas

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Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'opportunité de supprimer la TVA sur un panier de cent produits de première nécessité. Vous ne cessez de déclarer, madame la ministre, que cette mesure serait sans effet. Je rappelle qu'elle en a eu dans d'autres pays et nous ne comprendrions pas que vous n'acceptiez pas, au moins, qu'un rapport en évalue l'opportunité. Il serait problématique, pour les Français qui subissent l'inflation, que vous rejetiez cette idée par principe, sous prétexte qu'elle émane du Rassemblement national.

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Avis défavorable sur la demande de rapport. J'ai déjà dit ce que je pensais de la réduction de TVA et, par ailleurs, je ne crois pas que ce soit au Parlement de choisir 100 produits à destination des ménages les plus défavorisés.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Il n'y a aucune discrimination envers quelque parti que ce soit, encore moins envers un groupe parlementaire. Vous prenez sans cesse l'Espagne en exemple, mais les chiffres sont têtus : malgré l'application de cette mesure, l'inflation a continué d'augmenter jusqu'en mars, puis elle a fléchi et, à l'heure actuelle, elle est toujours supérieure à 10 %, alors que la France est passée en dessous de cette barre en septembre.

Vous savez que le Gouvernement est absolument défavorable à l'instauration d'un taux de TVA à 0 %. Nous estimons que cette proposition serait à la fois coûteuse et inefficace. Vous n'avez pas besoin d'un rapport sur le sujet pour étayer vos propositions.

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Pardonnez-moi, madame la ministre, mais nous n'avons pas de ministère derrière nous pour évaluer ce genre de mesure. Vous, vous avez une armée de fonctionnaires. Je retrouverai les articles qui montrent que cette mesure a eu des effets en Espagne. Vous oubliez que ce pays a subi une très grande sécheresse.

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Il existe effectivement une armée de fonctionnaires à Bercy qui a déjà, à la demande des ministres successifs, examiné tous les scénarios envisageables. Si ce que vous proposez pouvait marcher, on l'aurait fait. Il y a belle lurette que Bercy a tranché cette question.

La commission rejette l'amendement.

Amendement CE66 de M. Nicolas Meizonnet

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Nous demandons un rapport dans lequel le Parlement examinerait les raisons pour lesquelles le dispositif des renégociations, prévu par la loi Egalim, ne porte pas ses fruits. Au cours des auditions, nous avons eu du mal à obtenir des réponses claires à ce sujet. Le dispositif a fonctionné lorsqu'il s'est agi de tirer certains prix vers le haut mais, curieusement, il fonctionne moins bien quand il s'agit de les baisser. Un rapport nous aiderait à déterminer s'il convient de revoir ce dispositif ou s'il faut, comme nous le proposons, sanctionner plus sévèrement ceux qui ne jouent pas le jeu.

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Je suis défavorable à une demande de rapport supplémentaire.

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La crise que nous traversons ne doit pas nous faire croire, comme le répète Michel-Édouard Leclerc, que le prix bas, c'est le bon prix. Ce qu'il faut chercher, ce que nous chercherons lorsque nous serons sortis de cette situation d'urgence, c'est le juste prix, qui permet de rémunérer nos paysans et nos PME, tout en étant accessible pour nos concitoyens.

La commission rejette l'amendement.

Titre

Amendement CE4 de M. Julien Dive

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Cet amendement vise à « troller » le Gouvernement et à l'aider à assumer pleinement l'ambition qui est la sienne avec cette grande réforme. Je propose de renommer le projet de loi de la manière suivante : « Mesures d'urgence pour lutter contre l'inflation concernant les produits de grande consommation ».

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Ce titre ne me paraît pas si mal mais, si c'est pour nous troller, j'émettrai un avis défavorable.

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Olivia Grégoire, ministre déléguée

Je m'en remets à la sagesse de la commission.

La commission adopte l'amendement.

La commission adopte l'ensemble du projet de loi modifié.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 3 octobre 2023 à 17 h 30

Présents. - M. Xavier Albertini, M. Laurent Alexandre, Mme Anne-Laure Babault, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Éric Bothorel, M. Jean-Luc Bourgeaux, M. Bertrand Bouyx, Mme Maud Bregeon, Mme Françoise Buffet, M. Pierre Cazeneuve, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Romain Daubié, M. Frédéric Descrozaille, M. Julien Dive, Mme Christine Engrand, M. Frédéric Falcon, M. Grégoire de Fournas, M. Charles Fournier, M. Éric Girardin, Mme Mathilde Hignet, M. Alexis Izard, M. Sébastien Jumel, M. Guillaume Kasbarian, M. Maxime Laisney, M. Luc Lamirault, M. Pascal Lavergne, Mme Annaïg Le Meur, Mme Nicole Le Peih, M. Bastien Marchive, Mme Sandra Marsaud, M. Éric Martineau, M. Damien Maudet, M. Nicolas Meizonnet, M. Philippe Naillet, M. Jérôme Nury, M. Nicolas Pacquot, M. Patrice Perrot, Mme Anne-Laurence Petel, M. Dominique Potier, M. Richard Ramos, M. Charles Rodwell, M. Vincent Rolland, Mme Anaïs Sabatini, M. Benjamin Saint-Huile, M. David Taupiac, M. Matthias Tavel, M. Lionel Tivoli, M. Stéphane Travert, Mme Aurélie Trouvé, M. Jean-Pierre Vigier, M. Stéphane Vojetta

Excusés. - M. Perceval Gaillard, M. Johnny Hajjar, Mme Hélène Laporte, Mme Julie Lechanteux, M. Max Mathiasin, M. Paul Midy, M. Jiovanny William