La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
La parole est à M. Nicolas Thierry, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
C'est avec gravité que je vous soumets ce matin une proposition de loi sur les Pfas, ces substances per- et polyfluoroalkylées que vous connaissez peut-être mieux sous le nom de « polluants éternels ». Les Pfas sont un véritable fléau, qui a ses victimes. Je pense aux travailleurs et aux travailleuses de chaînes de production industrielle, aux salariés dont les analyses sanguines livrent des résultats alarmants : pour certains, mille fois plus de PFOA – acide perfluorooctanoïque – que la moyenne française. Je pense aussi aux riverains de sites pollués, atteints de maladies chroniques et à qui nous ne donnons pas de réponse à la hauteur des enjeux. Ce fléau a aussi ses lanceurs d'alerte. Je pense à l'avocat Robert Bilott, qui, le premier, a tiré la sonnette d'alarme sur la contamination aux polluants éternels dans l'est américain. Je pense également à ces journalistes qui documentent minutieusement la pollution et qui vont de révélation en révélation. Ce fléau a ses scientifiques. Je pense à l'inestimable qualité de la recherche française, à la précision et au dévouement des chimistes et des toxicologues qui peuplent les plus grands instituts et centres de recherche du pays. Ce fléau, enfin, a ses activistes. Je pense aux associations mobilisées sur les terrains les plus pollués pour faire entendre la voix des citoyennes et des citoyens, mobilisées plus largement pour nous convaincre d'agir collectivement et de rehausser notre ambition dans la lutte contre la civilisation des toxiques.
La portée de ce fléau – je mesure l'ampleur de la comparaison – est de l'ordre de celle du désastre du chlordécone ou des ravages de l'amiante. Nous, parlementaires, devons toutefois dire notre humilité. Si nous intervenons, c'est grâce à l'énergie déployée par ceux dont je viens de souligner l'action. À toutes les personnes mobilisées, aux journalistes, aux chercheurs, aux associations et aux activistes, je tiens à dire ma gratitude.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Édouard Bénard applaudit également.
Si nous légiférons en tant que représentants de la nation, ce n'est que pour remplir humblement la première de nos nobles missions : protéger nos concitoyens sans jamais céder aux sirènes des tenants de l'inaction. En commission, il y a une semaine, nous avons su nous montrer à la hauteur de l'enjeu. Je tiens d'emblée à vous en remercier, chers collègues, car nous sommes parvenus à adopter un texte de compromis qui nous honore. Puisse notre discussion en séance être du même acabit. Tout recul remettrait en cause l'ambition collectivement arrêtée il y a une semaine. Toute tergiversation serait incompréhensible.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Gabriel Amard applaudit également.
En ouverture de notre débat, il convient de prendre quelques instants pour énoncer brièvement les principales caractéristiques des Pfas. Celles-ci désignent des familles de substances chimiques qui regroupent chacune plusieurs combinaisons d'atomes que l'on ne trouve pas à l'état naturel. Il existe aujourd'hui plus de 12 000 composés dans la famille des polluants éternels. Leur point commun est leur composition : une chaîne d'atomes de carbone et de fluor qui leur confère toutes sortes de propriétés recherchées dans l'industrie. Les Pfas restent stables sous de fortes chaleurs, sont imperméables, repoussent les graisses et ont des propriétés antitaches ou antiadhésives. Nous avons tous à l'esprit le cas de certaines poêles de cuisson, mais ce n'est qu'un exemple parmi des centaines d'applications différentes.
Revers de ces qualités, les composés des Pfas ne se dégradent pas, ou très peu, dans l'environnement. Ils s'infiltrent dans les sols, dans l'eau, dans l'air et dans les tissus organiques, aussi bien ceux des humains que ceux de la faune et de la flore. Pour le dire autrement, les Pfas sont à l'origine d'une pollution systémique, et dans certains cas éternelle, en raison notamment de leur extrême persistance. Il est donc impossible, pour nous les humains comme pour les autres êtres vivants, d'échapper à une exposition croissante aux Pfas : plus nous en produisons, plus nous y sommes exposés. On a même retrouvé ces polluants éternels dans le sang d'ours polaires. Or il est difficile de s'en débarrasser une fois qu'ils ont pénétré l'organisme : leurs propriétés chimiques les mettent hors de portée de l'action des enzymes qui devraient les dégrader et favoriser leur élimination par le corps.
Cette exposition subie, massive, est extrêmement grave : les scientifiques considèrent que ces substances représentent un sérieux risque pour la santé. Nous disposons de nombreuses études qui caractérisent le risque sanitaire lié à une exposition à ces substances. Les risques pathologiques les plus documentés sont l'altération de la fertilité, des maladies thyroïdiennes, des taux élevés de cholestérol, des lésions au foie, des cancers du rein et des testicules, une réponse réduite aux vaccins ou encore un faible poids à la naissance. Nous sommes bel et bien face à un problème sanitaire d'une gravité et d'une portée inédites.
Le problème concerne toute la famille des Pfas. Or, depuis plusieurs jours, des opérations sont menées par des intérêts privés pour détourner notre regard de la famille des polluants éternels. Ces lobbys jouent sur la méconnaissance que nous avons de ces molécules. Il est ainsi avancé que les polymères seraient des molécules inertes, donc sans danger. Je le dis sans détour : de grossières erreurs scientifiques ont été répandues sciemment dans le paysage médiatique. Les polymères sont une famille de Pfas composée de deux sous-familles : les fluoropolymères et les polymères à chaînes latérales fluorées. La littérature scientifique a clairement établi que ces deux types de polymères étaient responsables de rejets de Pfas dangereux lors de leur fabrication ou de leur mise en déchet. En d'autres termes, les chaînes de production utilisant des polymères rejettent inexorablement des Pfas non polymériques parmi les plus dangereux. Les produits sortis de ces chaînes de production, une fois mis en déchet, sont par ailleurs source de diffusion massive de Pfas non polymériques.
De nombreux sites industriels implantés sur le territoire national, dans le Rhône, dans l'Oise ou en Haute-Savoie, utilisent des Pfas polymères et rejettent – et continueront fatalement de rejeter – des Pfas non polymériques parmi les plus préoccupants. Je mets au défi quiconque de contredire ce que je viens d'avancer.
La lutte contre les Pfas doit donc nécessairement cibler les polluants éternels dans leur ensemble, sans opérer une distinction scientifiquement absurde. L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l'Agence européenne des produits chimiques (Echa), le gouvernement français et le rapport de notre collègue Isaac-Sibille sont formels : il faut traiter les Pfas dans leur ensemble, au risque de perdre toute efficacité dans l'action publique. Revenir aujourd'hui sur ce point serait faire prendre un tournant dangereux à notre législation et faire fi de la science. La représentation nationale ne doit pas perdre de vue son unique boussole : l'intérêt général.
Forts de ce constat, nous pouvons, je crois, nous accorder à dire que la proposition de loi est tout à fait mesurée et que les mesures qu'elle comporte sont raisonnables. Celles-ci, je le rappelle, ont été adoptées à l'unanimité en commission il y a une semaine et s'inscrivent dans la continuité de travaux entrepris par plusieurs de nos collègues : je pense à la proposition de loi de notre collègue David Taupiac et, plus récemment, au rapport que Cyrille Isaac-Sibille a remis au Gouvernement.
La première mesure vise à limiter la pollution aux Pfas à la source, en restreignant leur utilisation de manière échelonnée selon la disponibilité de solutions alternatives. Je vous propose d'agir dès 2026 sur quatre usages, pour lesquels nous savons faire autrement : les ustensiles de cuisine, les cosmétiques, le fart et les textiles d'habillement. Certains parmi vous me rappelleront qu'un projet de restriction des Pfas est en cours au niveau européen : il est nécessaire, mais pas suffisant ; je le soutiens, mais je ne m'en contente pas. Vous le savez, la procédure sera longue. Lorsque l'Echa aura terminé son travail, en 2027, la proposition de restriction sera soumise aux États membres : qui peut prédire aujourd'hui la position de chacun de nos partenaires européens ? Comme Cyrille Isaac-Sibille dans les recommandations 10 et 11 de son rapport, je vous propose de prendre des mesures anticipées au niveau national pour protéger la santé de nos concitoyens.
M. Sébastien Peytavie applaudit.
Le texte de compromis adopté la semaine dernière à l'unanimité cible plusieurs produits identifiés, également mentionnés dans le rapport de notre collègue du groupe MODEM.
La deuxième mesure concerne le contrôle de l'eau potable. Je vous propose, dès la promulgation de la loi, d'inclure les Pfas dans le contrôle sanitaire de la qualité de l'eau potable. Cette disposition va au-devant de la réglementation actuelle et de celle prévue par la directive européenne sur l'eau destinée à la consommation humaine.
M. Dominique Potier applaudit.
Elle évite d'attendre 2026 et impose la recherche obligatoire des Pfas que nous savons détecter. Pour rappel, le droit européen nous obligera seulement à rechercher une vingtaine de Pfas et n'inclut pas, par exemple, le TFA – acide trifluoroacétique –, retrouvé massivement autour de Salindres dans le Gard.
La troisième mesure a été ajoutée en commission et vise à mettre progressivement fin aux rejets de Pfas par certains sites industriels. La rédaction de la disposition n'est pas encore satisfaisante, mais je soutiens son ambition. Je vous propose par ailleurs d'introduire une redevance assise sur les rejets de Pfas dans l'eau pour que les industriels à l'origine de la pollution contribuent financièrement à la dépollution, en vertu du principe pollueur-payeur.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
J'insiste, chers collègues, sur le coût que représentera la pollution aux Pfas dans nos territoires et pour nos collectivités. Dès l'entrée en vigueur du contrôle de la présence des Pfas dans l'eau, nombre de nos communes connaîtront des dépassements de la norme réglementaire. Nos collectivités devront alors consentir des investissements massifs pour traiter l'eau. La redevance que je vous propose est un premier levier pour anticiper ce mur d'investissement. J'espère que nous serons nombreux à nous retrouver sur cette disposition, adoptée à l'unanimité en commission.
En conclusion, je veux dire que nous avons aujourd'hui l'opportunité de nous montrer collectivement au rendez-vous pour engager une avancée dans la lutte contre les toxiques qui empoisonnent nos vies.
Mme Christine Arrighi applaudit.
Nous sommes observés, certains attendent beaucoup de cette proposition de loi et j'espère que nous saurons être à la hauteur. Sur ce sujet, chaque année perdue se compte en vies humaines.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
La parole est à M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie.
Le débat d'aujourd'hui n'oppose pas ceux qui sont pour les produits dangereux et ceux qui sont contre : c'est une évidence, nous y sommes tous opposés.
J'espère qu'il n'opposera pas non plus ceux qui sont pour l'industrie française et ceux qui sont contre.
Mme Danielle Brulebois applaudit. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Une grande majorité des députés présents sur ces bancs sont convaincus, j'en suis sûr, que l'industrie fait partie des solutions à la crise environnementale plutôt qu'elle n'y contribue.
M. Gabriel Amard et Mme Christine Arrighi s'exclament.
Rêver d'une France sans usines ,
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Écolo – NUPES
dans laquelle les produits seraient toujours disponibles, mais fabriqués dans d'autres pays, reviendrait à fermer les yeux pour se débarrasser du problème et serait contre-productif.
Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Je pensais que notre débat n'opposerait pas ceux qui sont pour l'industrie et ceux qui sont contre, mais certains ici ne sont apparemment pas d'accord.
Il est évident, cependant, qu'il n'opposera pas ceux qui sont pour la protection de la santé publique et ceux qui sont contre, car nous y sommes tous favorables.
Nous sommes également tous favorables à la protection de l'environnement. Contre les produits dangereux, pour l'industrie, pour la protection de la santé publique et pour la protection de l'environnement : ces grands principes doivent nous rassembler dans l'examen de cette proposition de loi.
La raison pour laquelle le Gouvernement émettra un avis favorable sur les amendements de suppression de plusieurs articles tient principalement à la méthode choisie. En effet, s'il était adopté dans sa rédaction actuelle, le texte serait inefficace, inopérant et probablement contre-productif. Pourquoi ? Tout d'abord, monsieur le rapporteur, parce que vous visez les usages plutôt que les produits : vous interdisez tous les Pfas dans certains usages au lieu de vous focaliser sur les Pfas effectivement dangereux dans tous les usages. Ce faisant, vous risquez d'interdire des Pfas qui ne sont pas dangereux tout en maintenant l'autorisation de Pfas dangereux dans d'autres usages – tout cela au détriment des quatre principes que j'ai énoncés.
Enfin – et je m'attarderai un peu sur ce point –, en privilégiant une approche nationale qui, contrairement à ce que vous avez indiqué, ne complète pas l'approche européenne mais va à son encontre, vous mettriez en danger le fonctionnement même du marché unique. Pour un parti qui se dit pro-européen, c'est dommage ! Surtout, vous entendez compromettre une procédure, à savoir la réglementation européenne d'autorisation ou d'interdiction des produits chimiques, qui a fait ses preuves et est reconnue dans le monde entier comme une des plus exigeantes.
Je le répète : en introduisant une démarche orthogonale à celle de l'Union européenne, fondée sur les usages plutôt que sur les produits, vous complexifieriez la réglementation, au risque de mettre en danger l'approche européenne elle-même et d'aboutir à un texte contre-productif.
En imposant des valeurs limites irréalistes – zéro – et en prévoyant de faire reposer le financement des mesures à prendre pour les atteindre essentiellement, voire exclusivement, sur l'industrie, vous mettriez en danger l'industrie française sans vous assurer d'aucune façon d'atteindre le résultat escompté, puisque les produits concernés seront probablement fabriqués ailleurs, parfois selon des procédés présentant une performance sanitaire ou environnementale dégradée.
L'Europe bénéficie d'un cadre exemplaire, celui du règlement Reach (enregistrement, évaluation, autorisation des substances chimiques et restrictions applicables à ces substances), reconnu par les organisations environnementales et les industriels comme une des normes les plus protectrices et efficaces au monde – car on peut être à la fois protecteur et efficace. Il s'agit d'un cadre scientifique – j'insiste sur ce point –, qui garantit la cohérence et l'exhaustivité de l'analyse des risques. Ce règlement, qui constitue l'une des briques du marché unique, assure la qualité de la réponse européenne face aux risques chimiques en garantissant son caractère coordonné et rigoureux. Depuis son entrée en vigueur en 2007, il protège ainsi efficacement nos concitoyens des risques chimiques. Nous devons continuer d'agir en ce sens en Européens, en mettant à profit la force du marché unique et de l'expertise scientifique collective.
Que sont les Pfas ? Je ne m'étendrai pas sur leur définition, le rapporteur ayant déjà avancé un certain nombre d'éléments, mais ce terme désigne les composants chimiques contenant au moins un atome de carbone entouré d'atomes de fluor – voilà tout. Il englobe donc des produits très divers – leur nombre est estimé entre 5 000 et 12 000 selon les sources –, se caractérisant par une liaison carbone-fluor, laquelle compte parmi les liaisons chimiques les plus fortes et donne à ces composés des propriétés de résistance remarquables qui les rendent particulièrement adaptés à de nombreuses applications, notamment pour permettre à des produits de résister aux températures, aux frictions ou au feu. C'est la raison pour laquelle ces composés sont utilisés pour fabriquer des objets très divers comme les tenues ignifugées protégeant les pompiers ou les ouvriers du bâtiment et de l'industrie lourde, les mousses destinées à éteindre les incendies, ou encore des dispositifs médicaux comme les prothèses de hanche ou les cathéters.
Ils servent également à protéger les câbles électriques et les réservoirs d'avion, à fabriquer les membranes de batteries électriques dont nous aurons tant besoin pour réussir la transition écologique ainsi que les membranes des électrolyseurs d'hydrogène, ou encore – cela a été largement commenté – à rendre les poêles antiadhésives.
Leur grande résistance explique aussi que ces composés se dégradent très peu : ils sont très persistants dans l'environnement, d'où l'usage du terme « polluants éternels » pour les décrire.
Au-delà de ces propriétés communes, ils constituent cependant une famille de composés très divers, comprenant, je le répète, 5 000 produits selon l'OCDE et jusqu'à 10 000 en comptant leurs multiples variations. Cette diversité des produits se traduit par la diversité des risques qui y sont associés. Les monomères, c'est-à-dire les Pfas de petite taille, très susceptibles de s'accumuler dans nos organismes, sont ainsi probablement dangereux, voire très dangereux – ce sont en tout cas les plus dangereux. Ceux dont la toxicité a été la plus signalée, à savoir le PFOA et le Pfos – sulfonate de perfluorooctane –, sont déjà interdits.
À l'autre extrémité du spectre, les polymères de grande taille, plus stables et peu susceptibles de passer la barrière biologique, donc de s'accumuler dans l'organisme, sont probablement les moins dangereux. Ils sont d'ailleurs utilisés jusque dans certains dispositifs médicaux, comme les prothèses de hanche, que j'évoquais précédemment.
Le sujet qui nous occupe ce matin est donc complexe : il couvre des produits divers, affectés à des usages divers et présentant des risques divers. La proposition de loi soumise à votre examen, qui vise à leur appliquer un traitement « à taille unique », si je puis dire, pourrait donc se révéler trop exigeante, tout en s'appliquant à un champ trop limité, ce qui la rendrait, je le répète, à la fois inefficace et inopérante, voire, pour certains composés, contre-productive.
Que fait la France ? D'abord, elle agit dans un cadre européen, sur la base des études qui ont établi la toxicité de certains Pfas. La pollution qu'ils engendrent est évidemment un enjeu majeur de santé publique et de protection de l'environnement. J'insiste : sur ce point, il n'existe aucune divergence d'appréciation entre le Gouvernement et l'ensemble des députés qui sont sensibles à ce risque. Je remercie d'ailleurs les parlementaires qui ont inscrit ce débat à l'ordre du jour.
Le risque lié aux Pfas présente deux dimensions. La première réside dans les contacts entre les consommateurs et des produits contenant des Pfas – la tenue ignifugée des pompiers, les poêles antiadhésives. Traiter ce risque implique de réguler la mise sur le marché de ces produits, leur importation et leur exportation, ce qui ne saurait se faire, nous en sommes convaincus, qu'à l'échelle européenne. L'autre dimension concerne la contamination de notre environnement par les Pfas, en lien avec la production de certaines substances chimiques, susceptible d'occasionner des rejets de produits polluants. Soyons très clairs : la prise en charge de ce risque relève de la réglementation nationale. Nous devons le traiter et nous le ferons en imposant à la fois la réduction des rejets et la dépollution de l'environnement – il s'agit, d'une certaine façon, de diminuer à la fois les flux et les stocks, en cessant de rejeter des produits polluants dans la nature et en traitant ceux qui s'y trouvent déjà.
Sur ces deux aspects, le Gouvernement agit pour protéger nos concitoyens.
S'agissant d'abord de la mise sur le marché, nous avons déjà interdit des Pfas à l'échelle européenne lorsque nous disposions d'un niveau de preuve suffisant. Nous savons en effet que certains de ces produits sont fortement toxiques : ils ont fait l'objet d'études scientifiques pendant plusieurs décennies et sont désormais interdits. C'est le cas du Pfos et du PFOA, interdits respectivement depuis 2009 et 2020. D'autres sont en passe d'être proscrits, comme le PFHXA – acide perfluorohexanoïque –, dont l'évaluation s'est révélée négative et qui sera interdit dans les prochains mois.
Pour d'autres, une forte présomption de toxicité existe et des analyses ont été lancées il y a plusieurs années au niveau européen. Je songe par exemple aux acides carboxyliques perfluorés (ACPF). Des restrictions s'y appliquent déjà et des interdictions seront prononcées dans des délais brefs.
Enfin, il est des Pfas pour lesquels nous ne disposons pas de suffisamment de données et dont, pour certains, nous pouvons raisonnablement penser qu'ils ne sont pas dangereux. C'est le cas du PVDF – polyfluorure de vinylidène –, un composé clef des batteries électriques, à ce titre indispensable pour accélérer la transition écologique des véhicules fabriqués en France et en Europe,…
…ou du désormais célèbre PTFE – polytétrafluoroéthylène –, utilisé comme antiadhérent pour les matériels de cuisine, qui, à en croire les experts avec qui nous dialoguons, ne présente très probablement pas de danger.
Pardon, mais j'aimerais que nous nous abstenions de nous envoyer des études à la figure.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Si j'ai bien une conviction, c'est qu'il ne revient pas aux parlementaires ni au Gouvernement d'évaluer la qualité scientifique des études qui nous sont soumises.
Mme Danielle Brulebois et M. Philippe Berta applaudissent.
Je suis en effet intimement persuadé – comme nous devrions tous l'être – que la meilleure, et même la seule façon d'évaluer la qualité scientifique des travaux qui nous sont soumis, consiste à s'appuyer sur des autorités indépendantes.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR et Dem.
Vous avez vos opinions et j'ai les miennes, mais nous devrions nous accorder sur le fait qu'en France comme en Europe, la préservation d'une autorité scientifique indépendante est la seule manière d'évaluer de manière objective ce type de dangerosité.
Étant donné les risques avérés d'autres produits de la famille des Pfas, nous avons demandé qu'une analyse exhaustive soit menée à l'échelle européenne, en accompagnant la démarche des cinq États – Pays-Bas, Suède, Norvège, Danemark et Allemagne – qui ont déposé un dossier auprès de l'Echa en 2023. Nous soutenons cette démarche, que nous souhaitons accélérer, car il importe que l'Europe prenne des décisions fortes, même difficiles, en la matière. Pour ce faire, nous mobilisons plusieurs outils. Le règlement Reach, que j'ai mentionné, a déjà permis d'interdire le PFOA. Le règlement du 29 avril 2004, dit règlement POP (polluants organiques persistants) a quant à lui conduit à l'interdiction précoce du Pfos.
À l'issue de cette démarche, certains produits seront proscrits, quand d'autres seront probablement exemptés d'interdiction.
Contrairement à ce qui a été dit dans la presse et à ce que j'ai cru entendre de la bouche du rapporteur à la tribune, l'interdiction totale des Pfas n'est pas inéluctable si certains n'ont pas d'impact sanitaire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
En l'absence de solution alternative, si un produit n'est pas considéré comme toxique et si sa fin de vie est contrôlée – comme c'est le cas pour les Pfas utilisés dans les batteries électriques –, il est très probable que l'Echa autorise son usage.
L'analyse est en cours depuis un an. Je le reconnais, il s'agit là d'un processus long, qui pourra prendre encore un à deux ans. Une note préparée par les services de mon ministère et ceux de mon collègue Christophe Béchu a d'ailleurs été transmise aux autorités européennes dès cet été pour demander son accélération.
Pourtant, vous préférez faire de la politique plutôt que d'accélérer les choses !
Évidemment, nous n'attendrons pas que les 5 000 – voire 12 000 – Pfas existants soient examinés pour prendre des décisions : à chaque fois que le comité compétent identifiera des Pfas comme dangereux, nous en tirerons les conséquences, soit en prononçant des interdictions sectorielles, soit en régulant les flux ou les usages des produits concernés. Les interdictions sectorielles seront prévues dans tous les règlements européens en cours de discussion, comme l'illustre d'ailleurs l'adoption récente du principe d'interdiction des Pfas dans les emballages alimentaires dès 2026. Nous nous engageons à procéder de la même façon pour les règlements relatifs aux jouets, aux cosmétiques, ou encore aux textiles, à mesure que les connaissances scientifiques progresseront. Cette démarche n'empêche nullement les filières de s'engager également, ce que certaines font d'ailleurs. Cet engagement à agir à l'échelle européenne est public : il figure dans le plan d'action relatif aux Pfas dévoilé aujourd'hui par le Gouvernement.
Le second point, tout aussi important, consiste à réduire les pollutions de l'environnement – ce que j'appelais tout à l'heure les stocks et les flux de rejets. Ce travail – réduire les rejets de Pfas, dépolluer les écosystèmes, assurer la qualité de l'eau potable – relève de la responsabilité nationale. Il a d'ailleurs été lancé dès 1998, par le biais d'un arrêté du 2 février établissant une valeur limite de concentration de 25 microgrammes par litre dans les eaux rejetées en milieu naturel, complété par l'ordonnance du 22 décembre 2022 relative à l'accès et à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, qui généralise la réalisation d'un diagnostic Pfas.
Nous avons accéléré cette démarche depuis 2023, à travers le plan ministériel lancé en janvier 2023 en vue de mesurer les impacts des Pfas sur 5 000 installations classées et, plus largement, sur l'ensemble des prélèvements d'eau. Ces contrôles, effectués par les industriels, les agences régionales de santé (ARS) et la direction générale de la prévention des risques (DGPR), permettront de dresser un diagnostic des contaminations. Le bilan de cette campagne sera bientôt connu et je m'engage à faire la pleine transparence sur ses résultats. Dès qu'ils seront consolidés – lorsque les trois mesures distinctes effectuées sur chaque site auront été effectuées –, ils seront publiés sur les sites internet des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal). Les premiers résultats disponibles en Auvergne-Rhône-Alpes permettent déjà de dresser un constat important : l'origine des contaminations n'est pas seulement industrielle, les aéroports étant une source majeure de pollution aux Pfas à travers les mousses utilisées dans le cadre des exercices anti-incendie.
Le plan interministériel d'action sur les Pfas, publié aujourd'hui par le Gouvernement, rassemble les actions déjà existantes en les complétant. Élaboré par les ministères chargés de la transition écologique, du travail et de la santé, de l'intérieur, de l'agriculture, des armées, et de la recherche, il permettra de coordonner toutes les administrations pour étendre la campagne de mesures, réduire les rejets le plus vite possible et dépolluer l'environnement, à travers vingt-six actions qui seront chacune confiées à une administration pilote, afin de responsabiliser les acteurs. Bercy, par exemple, sera chargé du contrôle systématique des Pfas interdits dans les produits importés par les douanes – contrôles que les services assurent évidemment déjà pour les PFOA et les Pfos, interdits au niveau européen. Le directeur général de la prévention des risques et le directeur général de la santé feront un rapport régulier aux ministres concernés.
Concrètement, ce plan comporte trois mesures phares. En premier lieu, des arrêtés préfectoraux seront pris pour réduire au plus vite les rejets industriels au minimum techniquement réalisable, sur la base à la fois des mesures des rejets de 5 000 installations industrielles et des travaux de l'Echa, au niveau européen, et de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), au niveau national.
En second lieu, des dispositifs de traitement des Pfas seront mis en place dans les installations traitées par des mousses anti-incendie, notamment les aéroports.
En troisième et dernier lieu, il prévoit, le cas échéant, la dépollution des Pfas par les collectivités avec le soutien des agences de l'eau.
Pour protéger nos concitoyens, le Gouvernement agit donc dans les deux dimensions de la lutte contre les polluants éternels, et ce dans une optique d'efficacité, c'est-à-dire à l'échelle pertinente pour chaque mesure. Pour encadrer les rejets des installations classées, l'échelle pertinente se situe au niveau du préfet, de l'installation elle-même ou du territoire. Pour interdire ou restreindre la mise sur le marché ou l'usage de produits chimiques, il convient d'agir dans le cadre européen…
…régi par le règlement Reach. Entré en vigueur en 2007, ce texte est à la fois reconnu, y compris par les organisations environnementales, comme constituant une des régulations les plus efficaces au monde dans ce domaine et salué par les industriels pour son caractère scientifique et, partant, opposable. Il a permis d'identifier 181 produits ayant un impact négatif sur la santé et d'interdire le bisphénol A, le PFOA et les nonylphénols, perturbateurs endocriniens qui ne sont pas encore prohibés aux États-Unis.
Pourquoi ce cadre, qui protège les Européens depuis dix-sept ans, ne serait-il plus adapté ? Mes collègues des pays qui défendent l'interdiction des Pfas au niveau européen, à savoir l'Allemagne – dont le gouvernement inclut des écologistes –, les Pays-Bas, le Danemark…
…la Norvège et la Suède, avec qui nous travaillons étroitement, sont profondément surpris que la France fasse cavalier seul.
Ils s'étonnent que nous ne respections pas les cadres européens que nous nous sommes donnés, d'autant que cette méthode est inefficace : agir en Européens, c'est mieux protéger nos concitoyens. La force normative du marché unique assure l'effectivité des interdictions dans un marché européen au sein duquel les produits, les hommes et les femmes circulent de manière libre.
Le cadre européen assure également la rationalité de notre action : nous sommes plus puissants épaulés par des institutions européennes qui rassemblent des experts des vingt-sept États membres. Là où l'Echa a besoin de vingt-quatre à trente-six mois pour analyser 5 000 Pfas, il aurait fallu des années à une agence nationale. Vous croyez à l'Europe, rassemblons-nous derrière les institutions européennes !
Je suis désolé, mais la méthode que vous proposez n'est pas la bonne. Ce n'est pas grâce à une proposition de loi adoptée à l'échelle nationale que nous pourrons protéger efficacement les Françaises et les Français, ce qui constitue in fine notre objectif commun.
Si l'approche nationale est privilégiée dans chaque pays de l'Union européenne, que se passera-t-il ? Chaque pays interdira dans son coin une liste différente de Pfas, en se fondant sur des travaux scientifiques de qualité variable. Vingt-sept réglementations différentes : c'est la voie vers une application défaillante, une santé mal protégée et des contrôles aux frontières créant des situations absurdes. Imaginez-vous les douaniers contrôlant les produits en provenance d'Allemagne, de Pologne, d'Italie, d'Espagne ou des Pays-Bas pour s'assurer que les 5 000 Pfas que vous avez interdits dans les textiles n'y sont pas présents ? C'est tout simplement inopérant.
Je crois au marché unique européen…
…– j'avais cru comprendre que vous y croyiez aussi – et en la nécessité de travailler en Européens. L'Europe est un gain de puissance, c'est un tout plus grand que la somme des parties. C'est vrai pour la réglementation chimique comme pour beaucoup d'autres sujets.
La méthode de cette proposition de loi n'est pas la bonne, car elle ignore le rôle des scientifiques et le travail des agences indépendantes. Le périmètre visé dans votre texte est instructif, puisqu'il manquera probablement sa cible : il n'interdit pas les Pfas anti-incendie, qui constituent à ce jour la première cause de contamination dans les mesures objectives faites en Auvergne-Rhône-Alpes. À l'inverse, il interdit des produits qui ne sont probablement pas toxiques, comme les fameux revêtements antiadhésifs de cuisine. Mais voilà, vous vous êtes payé la poêle Tefal, vous êtes heureux ! Pour le reste, la pollution se poursuit.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
La proposition de loi risque de laisser croire qu'on traite le sujet alors que la législation sera nécessairement incomplète.
Seul le cadre scientifique assure cohérence et exhaustivité. Prendre le temps de l'expertise, ce n'est pas perdre du temps,…
Nous en perdons sur notre niche parlementaire, car vous êtes trop long !
…c'est en gagner en évitant les mauvaises décisions. La crise sanitaire nous l'a appris.
Je l'ai dit et je le répéterai à l'occasion de la défense des amendements, le Gouvernement souhaite bien sûr protéger la santé de nos concitoyens ainsi que l'environnement…
…et disposer d'une législation non pas contre-productive, mais efficace.
Ces principes, et eux seuls, guideront notre discussion sur les amendements. Je suis très heureux d'entamer la discussion générale.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.
Dans cent ans, quelle trace aurons-nous laissée dans l'histoire ? A priori, les pyramides seront toujours debout, on pourra continuer d'admirer les colonnes du Parthénon et on écoutera peut-être encore Beethoven, Led Zeppelin et pourquoi pas Orelsan. Mais dans cent ans, nos successeurs devront aussi s'occuper d'un héritage autrement plus encombrant : les polluants dits éternels, plusieurs millions de tonnes de ces substances aussi appelées Pfas, répandus au fil des décennies dans nos sols, notre air ou dans l'eau que nous buvons.
Tout le monde expliquera ici, ou a expliqué ailleurs, ce que sont les Pfas : extrêmement persistants, extrêmement résistants, ils sont partout, dans 99 % des corps des Français et même dans l'estomac des ours polaires.
Tout le monde a appelé ou appellera l'attention sur le caractère généralisé de cette pollution. Tout le monde redira combien les Pfas sont pernicieux, à cause de leur fâcheuse tendance à se déplacer très vite dans l'environnement et à s'accumuler dans les tissus vivants et les milieux, d'où leur qualification de « polluants éternels ».
Tout le monde a souligné qu'ils sont omniprésents dans notre quotidien : ustensiles de cuisine, emballages alimentaires, textiles, cosmétiques, farts de ski. Les fabricants de poêles n'ont pas l'apanage des Pfas et nous ne nous payons pas Tefal, bien au contraire. Nous avons d'ailleurs rencontré hier les salariés de l'entreprise – j'y reviendrai.
Tout le monde dira ici que nul n'est ou ne sera épargné par les Pfas : ni les femmes et les hommes ayant banni des produits utilisant des Pfas, ni les nouveau-nés qui se nourrissent du lait maternel, ni les ours polaires. Je ne vis pas dans la vallée de la chimie. Pourtant, mes cheveux contiennent des valeurs très importantes de PFOA et de Pfos, alors même que le premier est interdit depuis 2020 et la production et l'utilisation du second très fortement restreintes depuis 2009.
La vérité, c'est que les Pfas constituent le scandale sanitaire de notre siècle, un scandale de la même ampleur que ceux de l'amiante ou du tabac !
Tout le monde sait ce qui se passe à Pierre-Bénite, dans la vallée de la chimie, au sud de Lyon. Les salariés de Daikin et Arkema en témoignent : « C'est partout, c'est dans l'air ». Les salariés de l'industrie chimique sont les premiers exposés et ils veulent que nous le sachions, comme ce salarié de Total que j'ai rencontré à Saint-Avold et qui se demandait pourquoi nous ne faisions rien sur les Pfas.
Tout le monde sait qu'après avoir été exposé à une Pfas, on peut garder la substance jusqu'à la fin de sa vie, ce qui fait courir des risques sanitaires importants, avec des conséquences dramatiques sur la santé.
Je vous laisse imaginer l'état de santé des salariés de l'industrie chimique ayant été exposés à de fortes doses : « Je n'ai même pas 40 ans et je suis malade » nous dit un salarié d'Arkema dans une enquête de France 3. D'autres salariés expriment des regrets : « On croit ce que dit l'entreprise ; si j'avais su, je n'aurais peut-être pas risqué ma vie pour 2 000 euros par mois ».
Le monde industriel et une partie du monde politique savent que ces produits sont toxiques, et ce depuis 1950. Aux États-Unis, le sujet est sur la table depuis fort longtemps.
On sait et pourtant, on tergiverse…
Monsieur le ministre, vous avez souvent vanté dans cet hémicycle la coconstruction des textes. Nous présentons une proposition de loi – tel est bien le sens d'une niche parlementaire – pour avancer sur le sujet. Et vous nous dites que celui-ci doit être renvoyé à plus tard, qu'un plan sera mis en œuvre, que l'initiative parlementaire n'aurait aucun sens en l'espèce.
Non, je n'ai pas dit cela : vous n'avez pas écouté.
Selon vous, nous opposerions emploi et écologie. Ce n'est pas le cas, et vous le savez. Vous savez que j'effectue un tour de France sur les questions industrielles pour marier demain emploi et écologie.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Lors du débat sur la loi relative à l'industrie verte, vous avez refusé d'intégrer le sujet des Pfas. Nicolas Thierry a fait des propositions, j'en ai fait aussi.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES. – M. Marcellin Nadeau applaudit également.
Aucune n'a été retenue, ce n'était pas le sujet du moment.
Aujourd'hui, ce sujet est devant nous et nous devons le traiter. Nous n'avons pas le temps d'attendre. Oui, nous sommes Européens et nous souhaitons que l'Europe adopte les mesures les plus ambitieuses en la matière, mais nous ne pouvons faire un pari sur ce point.
Nous voulons faire comme le Danemark, qui a déjà interdit les Pfas dans tous les emballages alimentaires. Si le Danemark l'a fait, la France peut être un fer de lance pour pousser l'Europe à aller le plus loin possible.
En ce moment, l'Europe recule sur la réglementation Reach et sur la notation extra-financière et nous nous en inquiétons. La France doit se positionner pour être en pointe sur le sujet.
Mme Christine Arrighi applaudit.
Nous aurions pu attendre des mesures européennes, mais cela serait insuffisant. Il nous faut agir maintenant.
Après l'argument nous invitant à attendre, on utilise la technique du brouillage technique en distinguant polymères et monomères.
C'est important, la technique !
Cette distinction ne vise qu'à perdre l'auditoire. L'ensemble des catégories posent problème. Un polymère chauffé à plus de 340 degrés comme cela se produit dans les processus industriels peut redevenir un monomère. Les deux sont indissociables ; c'est un même sujet. Nous devons assumer nos responsabilités et appliquer le principe de précaution.
Vous évoquez un plan interministériel, à l'image des plans sur l'eau ou la sobriété.
Cela fonctionne !
Mais ils n'ont pas donné de résultats suffisants. Nous avançons vite lorsque nous légiférons, et c'est ce que nous vous proposons de faire aujourd'hui.
Enfin, on agite l'épouvantail du chômage et des suppressions d'emplois. Nous avons discuté avec les salariés de Tefal, qui semblaient ignorer ce que dit l'ARS des eaux et boues rejetées par Tefal – on y trouve encore des PFOA, interdits depuis 2020. Nous avons pu avoir une discussion constructive. Il est possible de transformer les chaînes de production et de continuer à fabriquer des poêles. Nous n'allons pas supprimer tous les emplois, mais il faut changer les modes de production.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Cyrille Isaac-Sibille proteste.
Il faut agir vite et nous proposons des délais raisonnables. Nicolas Thierry a présenté de nombreux amendements de compromis. Le texte a été voté à l'unanimité parce que des compromis ont été trouvés grâce au rapporteur, qui mérite de nombreux applaudissements.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Une autre industrie est possible, d'autres emplois sont possibles. Une véritable industrie verte n'est pas une industrie décarbonée, mais une industrie qui n'altère pas la santé, qui n'utilise pas de perturbateurs endocriniens, qui fait le pari de la qualité, de la proximité, de la coopération et de la santé de ses salariés.
Maintenant que tout cela a été dit, qu'est-ce qui justifierait d'attendre ? Pourquoi distinguer les sujets, pourquoi interdire les Pfas dans les cosmétiques et renvoyer à demain leur interdiction dans les ustensiles de cuisine ? Il existe des alternatives : Tefal fabrique déjà des poêles sans Pfas. La plupart des industriels que nous avons auditionnés se disent prêts à modifier leurs procédés rapidement : la Fédération française de ski est disposée à supprimer les Pfas dans les farts, l'Union des industries textiles est d'accord pour avancer sur le sujet, McDonald's a supprimé les Pfas dans ses emballages. Pourquoi attendre encore ? Il faut répondre à l'urgence, et c'est le sens de la proposition de loi de Nicolas Thierry.
Allez voir le film Dark Waters ! Il s'agit d'un vrai film et non d'un documentaire, vous ne vous ennuierez pas. Vous apprendrez beaucoup de choses sur les Pfas. Vous apprendrez ce qui se passe aux États-Unis depuis les années cinquante : les malformations des bébés, les vaches qui meurent. Vous découvrirez le travail de l'avocat Robert Bilott, qui continue à se battre sur le sujet. Il faut voir ce film.
Applaudissements sur les bancs du groupes Écolo – NUPES et sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Allez voir aussi le documentaire de Camille Étienne qui vient de sortir ! Vous apprendrez beaucoup. Elle est ici dans les tribunes : je la salue.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES. – M. Marcellin Nadeau applaudit également.
Nous avons besoin de courage politique. Il nous faut mettre les industriels devant leurs responsabilités. Je n'oppose pas écologie et emplois. Au contraire, repousser les décisions à demain mettrait les emplois en péril dans un certain nombre d'activités. Celles et ceux qui sauront faire ces changements garantiront les emplois à long terme.
Les Pays-Bas nous ont ouvert la voie. D'autres pays les imitent ; la France doit être le fer de lance de ces évolutions.
Auparavant, nous devons marteler ici que le meilleur moyen de vider une baignoire est de couper le robinet – car cela coûte cher. En l'occurrence, il faut le couper au niveau de la production, mais aussi des rejets, stopper aussi bien l'un que l'autre.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Sur cette question, je partage le point de vue du collègue Isaac-Sibille,…
…dont je salue une nouvelle fois le rapport tout en rappelant qu'il doit être suivi d'effets à la hauteur.
Cette proposition de loi n'est pas punitive. Dans de nombreux secteurs, comme le textile ou les sports d'hiver, le marché est déjà prêt. Allons donc plus loin, monsieur le ministre ! Osons dès aujourd'hui franchir une étape, de manière raisonnable, vers une sortie des Pfas – nous avons renvoyé à plus tard les questions difficiles. Grâce au travail du rapporteur, de nombreuses personnes se sont mobilisées autour de cette question.
Comme nous l'avons fait en commission, nous devons ici voter ce texte à l'unanimité. C'est indispensable : il y va de notre avenir et de celui de nos enfants.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et LFI – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.
Les polluants éternels : ainsi désigne-t-on les substances per- et polyfluoroalkylées ou Pfas. L'adjectif « éternels » n'est pas choisi au hasard : une fois libérées dans notre environnement, ces substances persistent pendant des décennies, s'accumulant dans les écosystèmes et les organismes vivants, y compris les nôtres.
Les Pfas rassemblent plus de 4 000 composés chimiques, largement répandus dans notre quotidien car ils ont des propriétés antiadhésives, imperméabilisantes et thermorésistantes. Cependant, ils représentent une menace sérieuse pour la santé humaine et pour la biodiversité.
Les scientifiques ont mis en évidence un large éventail d'effets néfastes de ces substances, allant de maladies bien identifiées à des réactions plus subtiles de notre organisme. Parmi les effets les plus préoccupants sur la santé, citons une diminution importante de la réponse immunitaire et une augmentation du risque de cancer du rein – des risques unanimement reconnus. Le 1er décembre 2023, le Centre international de recherche sur le cancer a classé le PFOA comme substance cancérogène pour les humains et le Pfos comme probablement cancérogène.
En légiférant sur ce sujet, la France a une nouvelle fois l'occasion de se placer en pionnière à l'échelle européenne et de montrer l'exemple en matière de protection des citoyens et de la nature.
Le texte dont nous allons débattre revêt une importance capitale pour la santé de nos concitoyens et la préservation de notre environnement. Il est impératif que nous agissions avec détermination pour limiter l'exposition de notre population aux Pfas. Pour garantir une protection contre les risques associés à ces substances, il est nécessaire d'agir à la fois sur leur diffusion et sur leur production.
Dans cette optique, il est d'abord essentiel de réduire l'utilisation des Pfas. C'est pourquoi nous défendons l'interdiction des produits contenant ces substances dans les secteurs des cosmétiques et du textile et dans les farts.
Nous sommes également conscients des défis que représente cette transition pour certaines industries, notamment celles qui produisent des ustensiles de cuisine. Nous ne devons pas abandonner un secteur qui fait la fierté de l'industrie française et où des milliers d'emplois sont en jeu. Une interdiction prématurée de ces produits serait une erreur ouvrant la voie à des substitutions hasardeuses – nous en avons connu par le passé.
En outre, nos acteurs industriels ont manifesté leur volonté d'agir et d'évoluer vers des solutions plus durables. Il est donc nécessaire de les accompagner dans cette voie et de les soutenir.
Parallèlement, il est impératif d'agir au niveau de la production. Il est urgent de s'attaquer aux rejets industriels de Pfas dans l'eau, qui émanent d'un petit nombre d'installations industrielles mais représentent un risque significatif pour notre environnement et notre santé. Nous proposons donc d'établir une trajectoire nationale de réduction de ces rejets, avec des objectifs clairs et contraignants pour les installations concernées. Cette proposition est issue du rapport de notre collègue Cyrille Isaac-Sibille.
Le débat sur le financement de la dépollution devra également avoir lieu. II sera nécessaire d'accompagner les collectivités territoriales dans cette démarche. En vertu du principe pollueur-payeur, les émetteurs de Pfas doivent soutenir l'effort de dépollution.
Par ailleurs, il est essentiel d'informer au mieux le public. Il importe donc d'assurer une transparence totale sur le sujet, notamment en rendant publiques chaque année les analyses d'eau potable effectuées par les agences régionales de santé.
Pour conclure, je tiens à rappeler que la question dont nous discutons nous est familière. Le rapport d'information présenté par nos collègues Yannick Haury et Vincent Descoeur a mis en lumière les problèmes posés par ces substances dans le cadre de la politique de l'eau. Une mission gouvernementale a été diligentée à cet effet et nous devons nous appuyer sur le travail exemplaire de M. Isaac-Sibille pour orienter nos débats.
Il y a un an, le groupe LIOT a déposé une proposition de loi sur le même sujet. Aujourd'hui, un autre texte est à l'étude.
Il est impératif que nous agissions. J'espère que nous pourrons débattre dans les meilleures conditions afin de surmonter nos divergences et de voter un texte qui revêt une importance cruciale pour les Français.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et HOR et sur quelques bancs du groupe Dem.
Les Pfas, ces substances aux propriétés chimiques remarquables, sont présentes dans une multitude de produits de notre quotidien, offrant des caractéristiques telles que la résistance à la chaleur et à la lumière, ainsi que des propriétés antiadhésives et antitaches. Leur utilisation ayant contribué au développement de nombreux secteurs industriels, il est important de reconnaître leur valeur dans notre économie.
Cependant, nous ne pouvons ignorer les préoccupations légitimes concernant leur impact sur la santé publique et l'environnement. Il est essentiel de prendre des mesures pour évaluer et atténuer les risques associés à ces substances tout en garantissant la continuité des activités industrielles.
Une interdiction immédiate des Pfas pourrait avoir des répercussions néfastes sur plusieurs secteurs économiques. Il est donc nécessaire d'adopter une approche souple qui permette aux entreprises de s'adapter. Cela suppose d'investir dans la recherche et le développement de solutions alternatives, tout en offrant un soutien aux industries pour faciliter leur transition vers des pratiques plus durables.
Cette proposition de loi va plus loin que le règlement européen Reach. Elle établit une législation encore plus contraignante en interdisant notamment toute substance Pfas dans le domaine des ustensiles de cuisine. Nos producteurs seraient alors confrontés à la concurrence déloyale d'autres pays européens, et plus de 6 000 emplois menacés dans le seul domaine des ustensiles de cuisine.
Par ailleurs, nous pouvons nous interroger sur la capacité de nos services de douane – qui effectuent un travail remarquable dans des conditions très difficiles – à contrôler la présence des Pfas dans les milliers de tonnes de marchandises qui arrivent chaque année en France.
Avant d'interdire les Pfas, il faut s'assurer que plusieurs conditions sont réunies. Il faut instaurer un contrôle rigoureux des marchandises que nous importons sur le sol français pour éviter que des produits étrangers contenant des Pfas arrivent sur le territoire national. Il faut également développer nos connaissances en matière de Pfas. En effet, il existe entre 4 000 et 15 000 substances. Nous devons approfondir leur étude afin de connaître leurs spécificités et surtout leur niveau de dangerosité pour la santé humaine.
Je tiens à vous alerter sur la terrible menace que représente l'alinéa 5 de l'article 1er , qui prévoit d'interdire dès 2026 les ustensiles de cuisine contenant des Pfas. Cette mesure, si elle était adoptée, condamnerait un fleuron de l'industrie française et pourrait plonger des milliers de travailleurs dans le chômage et la précarité.
Imaginez la catastrophe industrielle qui se prépare : les usines produisant des poêles Tefal, telles que celles de Rumilly en Savoie ou de Tournus en Bourgogne, seraient contraintes de fermer leurs portes.
Ces sites de production, qui emploient actuellement 1 800 personnes, risqueraient de délocaliser à l'étranger. Ce sont tout le savoir-faire des travailleurs et les richesses d'un territoire qui disparaîtraient.
Pensons à ces 1 800 travailleurs dont les vies seraient bouleversées, jetés dans l'inquiétude du chômage et dans l'incertitude sur leur avenir. J'ai une pensée plus particulière pour les 140 salariés du groupe Seb, ancré dans ma circonscription, dans la commune de Faucogney-et-la-Mer. Leur espoir, c'est que nous laissions le temps aux producteurs d'ustensiles de cuisine de trouver un substitut satisfaisant plutôt que d'interdire brutalement, sans solution de remplacement.
Des substituts aux Pfas ont déjà été trouvés dans les autres secteurs mentionnés dans l'article 1
Chers collègues, ne cédez pas à la tentation de l'écologie punitive qui menace de désindustrialiser encore un peu plus la France. Ne sous-estimons cependant pas non plus les réels dangers que représentent les Pfas pour la santé et l'environnement.
Mon collègue Pierre Meurin, député du Gard, regrette de ne pouvoir être présent aujourd'hui. Il est particulièrement conscient du problème de la pollution aux Pfas et de ses impacts sur la santé des habitants – il est même concerné puisque la question se pose à Salindres.
Il est impératif de mettre en œuvre des mesures de dépollution et de protection tout en veillant à ne pas compromettre la viabilité économique de notre pays. Nous devons également rester vigilants pour éviter le remplacement des Pfas par des substances tout aussi préoccupantes et pour empêcher l'importation de produits en contenant.
Par exemple, s'agissant des poêles de cuisine, la seule solution antiadhésive alternative est la céramique. Or celle-ci a un impact environnemental et énergétique bien pire que les Pfas.
Il serait donc contre-productif d'interdire un produit sans avoir au préalable trouvé une solution de substitution viable et respectueuse de la santé humaine et de l'environnement.
En effet, les poêles en céramique ont une durée de vie plus courte. Il faudrait donc en produire plus, ce qui ne serait pas très vertueux d'un point de vue environnemental.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Je tiens tout d'abord à saluer le travail et l'engagement des collectifs citoyens et des associations mobilisés sur la question des polluants éternels.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Marcellin Nadeau et M. le rapporteur applaudissent également.
Merci à Notre affaire à tous, à PFAS contre Terre, à Ozon l'eau saine, à Générations futures ou encore à Bien vivre à Pierre-Bénite.
Producteurs de savoirs, vous avez obligé la puissance publique et l'Assemblée à se saisir de cette question. Au siècle dernier, les Pfas étaient produits à grande échelle. Par temps de guerre, ils servaient à assurer l'étanchéité des chars d'assauts. Par temps de paix, ils ont accompagné les politiques de production et de consommation populaires au service du capitalisme et du productivisme.
On les retrouve dans d'innombrables produits de consommation courante comme les textiles infroissables et imperméables aux graisses, les emballages alimentaires, les mousses anti-incendie, les revêtements antiadhésifs, les ustensiles de cuisine, les couches pour bébés, les protections périodiques ou encore les cosmétiques.
Ces substances possèdent de nombreuses propriétés – antiadhésion, imperméabilité ou encore résistance aux fortes chaleurs – qui, aussi intéressantes soient-elles, ne peuvent occulter la réalité qu'elles provoquent : une pollution généralisée des écosystèmes et du vivant à l'échelle du jardin planétaire. Ces polluants ne se dégradent pas ou persistent dans l'environnement en se dégradant. Pire, ils s'accumulent. Cela s'explique par les liaisons chimiques – carbone et fluor – qui les composent.
Les Pfas sont présents absolument partout : dans l'eau, dans l'air, dans les sols et dans l'ensemble du vivant, c'est-à-dire dans les végétaux, dans l'ensemble de la chaîne alimentaire et donc, bien sûr, dans les organismes vivants, c'est-à-dire les animaux – les humains comme les non-humains.
Mme Anne Stambach-Terrenoir applaudit.
À Salindres dans le Gard, à Oullins-Pierre-Bénite dans le Rhône ou encore à Tavaux dans le Jura, les milieux sont pourris par les rejets des industries Solvay, Daikin et Arkema. Il est urgent d'interdire les rejets de ces usines ainsi que la mise sur le marché et l'importation de produits contenant ces substances. Nous devons protéger le peuple de France.
La présence des polluants éternels dans le vivant n'est pas anodine. Elle occasionne de graves dangers sanitaires. Les académies nationales des sciences, d'ingénierie et de médecine des États-Unis en 2022, l'Agence européenne pour l'environnement dès 2019, l'Autorité européenne de sécurité des aliments dans son rapport de 2020 convergent : elles font le lien entre d'un côté, l'exposition aux Pfas, et de l'autre, de mauvaises réponses immunitaires aux vaccins, des cancers ou encore des taux élevés de triglycérides, des amas de graisse provoquant AVC – accidents vasculaires cérébraux – et infarctus.
Pouvons-nous vraiment dire que nous avons besoin de plus de temps pour agir ?
Pouvons-nous dire que nous avons besoin de plus d'informations précises sur chacune des 10 000 molécules composant la famille des Pfas ? Évidemment non ! Interdire une unique molécule encouragerait seulement les industriels à en créer d'autres pour contourner les réglementations. Le principe de précaution, consacré dans la Charte de l'environnement, qui fait partie de notre bloc de constitutionnalité, doit primer !
Alors que nous étions au beau milieu de nos travaux parlementaires sur ce sujet, des décisions inacceptables, contre lesquelles je ne peux que m'insurger, ont été prises. Dans le département du Rhône, une autorisation d'extension a été donnée à l'entreprise Daikin alors qu'il est urgent de protéger les habitants ! Et que dire de l'épandage des boues d'épuration contaminées aux Pfas dans l'Est lyonnais, autorisé par l'État alors que les services signalaient cette contamination depuis plus d'un an ?
Le groupe La France insoumise soutient par conséquent cette proposition de loi. Aux dirigeants des entreprises qui veulent instrumentaliser nos travaux pour orchestrer un chantage à l'emploi, je réponds ceci : ne racontez pas d'histoires ! Les salariés de vos entreprises savent faire des ustensiles de cuisine sans polluer !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Marcellin Nadeau applaudit également.
La France aura toujours besoin de matériaux résistant aux températures et aux fortes pressions, toujours besoin de batteries et de dispositifs médicaux. Mais il faut équiper le pays d'incinérateurs efficaces au lieu d'exporter ses concentrats de Pfas en Belgique pour les minéraliser.
Collègues, adopter cette proposition de loi sera un grand pas à valeur d'exemple pour l'humanité et pour le vivant.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES, dont quelques députés se lèvent, et sur plusieurs bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Marcellin Nadeau applaudit également.
Avec cette proposition de loi sur les substances per- et polyfluoroalkylées, les Pfas, on peut dire qu'on revient de loin ! S'appuyant sur des engagements très allants mais un peu hâtifs de la majorité, les auteurs de ce texte avaient initialement proposé d'interdire tous les produits en contenant dès 2027, en avance sur le calendrier européen. Cette interdiction franco-française généralisée aurait tout simplement constitué une surtransposition par rapport aux intentions de nos partenaires, à l'image de ce que nous ne cessons de faire en matière d'agriculture. C'est avec ce genre de réglementation ne s'appliquant qu'à nos produits, alors même que nous continuons à en importer du monde entier, que l'on a fragilisé l'ensemble de la filière fruits et légumes.
Ne faisons pas la même erreur avec notre industrie. Ne soyons pas hypocrites : le contexte économique, en raison du coût de l'énergie, n'est pas idéal pour soumettre le secteur de la chimie à de nouvelles contraintes. Ce sont jusqu'à 3 milliards d'euros d'investissements par an et dix ans de recherches qu'il faudra déployer au niveau européen pour trouver des composés de substitution, alors même que l'État est aux abonnés absents pour ce qui est du soutien financier. La proposition de restriction initiée par cinq États européens nous semble donc le moyen le plus sûr d'aboutir à une régulation ordonnée des Pfas les plus nocifs, tout comme les divers règlements sectoriels qui seront adoptés au fur et à mesure par l'Union européenne dans les prochaines années. Un contrôle de l'ensemble des Pfas sera ainsi possible d'ici 2027 ou 2028 grâce à l'adoption de textes harmonisés au niveau européen, ce qui évitera toute distorsion de concurrence nuisible à la compétitivité de nos entreprises et de notre industrie.
La nouvelle rédaction proposée par le rapporteur nous paraît plus acceptable, puisqu'elle vise d'abord des produits disposant d'alternatives facilement mobilisables comme les cosmétiques, le fart pour le ski ou les textiles. Il reste cependant du chemin à faire pour rendre le texte acceptable. Je pense tout d'abord à l'interdiction prévue par l'article 1
Il y a ensuite le sujet de la dangerosité de chaque substance et le risque d'aboutir à une interdiction généralisée des 10 000 Pfas au lieu de ne cibler que les seules substances préoccupantes. Le terme « Pfas » est un terme général qui ne dit pas si une substance est nocive ou non, mais qui indique seulement qu'elle comporte une liaison carbone-fluor. Contrairement à ce qu'affirme M. le rapporteur, le consensus scientifique tend à distinguer les Pfas préoccupants d'autres polymères. De nombreuses études existent à cet égard de par le monde. Enrichissons-les donc avant de prendre une décision à l'emporte-pièce. Les évolutions réglementaires que j'évoquais au niveau européen prévoient d'ailleurs de différencier ces substances. Mais si la rédaction actuelle de la proposition de loi était confirmée, la France serait le seul pays à pratiquer une telle surtransposition. Il s'agit pour nous, au groupe Les Républicains, d'une ligne rouge. En effet, l'analyse scientifique et la recherche doivent prévaloir, et des délais doivent être octroyés aux industriels pour entamer leur mutation, sous peine de ruiner l'économie et l'emploi de régions entières de notre pays.
Notre objectif est le même que le vôtre, monsieur le rapporteur, mais il s'agit pour nous d'aboutir à une régulation mesurée et différenciée des Pfas, alignée sur le calendrier européen et dans des délais raisonnables, sans omettre d'autres pistes de régulation tout aussi pertinentes. Je pense notamment à des systèmes d'autorisation substance par substance, usage par usage, et aussi à l'incitation que peut représenter une redevance sur la pollution ou bien à des arrêtés préfectoraux en cas de dépassement de seuil. Un accompagnement des pouvoirs publics serait par ailleurs vital pour encourager la recherche en matière de développement d'alternatives viables en cas d'interdiction.
Vous l'aurez compris, notre groupe ne pourra voter en faveur de ce texte que si des avancées sont obtenues sur les différents points que je viens d'évoquer.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Ce matin, nous traitons d'un sujet grave de santé publique : l'imprégnation insidieuse des Pfas dans les milieux de tous nos territoires, dans l'organisme de tous nos concitoyens. Alors que cette pollution est connue depuis vingt-cinq ans aux États-Unis d'Amérique mais aussi en France, aucun gouvernement, de droite comme de gauche, aucun ministre de l'écologie ne s'en était saisi chez nous. Je tiens donc, en préambule, à remercier l'équipe Vert de rage, composée de journalistes, qui a révélé cette pollution en mai 2022, dans ma circonscription, au sud de Lyon. Je remercie également notre gouvernement et notre ministre de la transition écologique, Christophe Béchu, que j'ai interpellé dès juillet 2022 à ce sujet et qui a rapidement réagi en formulant un plan Pfas en six points, ce qui permet de recenser tous les territoires français pollués par ces molécules. Je sais enfin gré à Élisabeth Borne, alors Première ministre, de m'avoir confié une mission pour émettre des recommandations qui sont reprises en partie dans la proposition de loi. Je reconnais que mon rapport est dense, mais si vous en avez pris connaissance, vous avez pu appréhender l'extrême complexité de cette pollution. Certains veulent faire croire que la question est simple, mais c'est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît.
Permettez-moi d'aborder les deux principales préoccupations des habitants de ma circonscription qui sont exposés aux Pfas.
Leur première demande, c'est l'arrêt des rejets industriels dans les milieux naturels, notamment les fleuves et les rivières. J'ai fait adopter en commission un amendement permettant de faire cesser ces rejets rapidement. Je souhaite que vous confirmiez ainsi la fermeture du robinet. Voilà la première priorité.
La seconde, c'est le traitement des eaux que des centaines de milliers de nos concitoyens boivent alors que le seuil recommandé de 100 nanogrammes par litre est dépassé. J'attends un geste du Gouvernement pour aider au financement des installations permettant de dépolluer l'eau du robinet des foyers concernés.
Résoudre ces deux problématiques relève de notre responsabilité. Aujourd'hui, nous pouvons démontrer notre utilité en apportant des solutions.
J'en viens à la complexité des Pfas, à commencer par leur complexité chimique : nous ne disposons toujours pas de valeur toxicologique de référence, c'est dire ! Aucune agence française, européenne ou américaine n'est d'accord avec une autre sur le sujet. Quant à la complexité des usages, je rappelle que toutes les filières de production utilisent des Pfas. Cela veut dire que la France ne peut résoudre seule cette question. Pour ce faire, nous devons additionner les intelligences, les expertises et les moyens au niveau de l'Europe : c'est elle qui nous apportera les connaissances scientifiques nécessaires. Cependant, comme le préconise mon rapport, la France peut envoyer des messages à l'Europe pour lui dire qu'elle est prête à restreindre les usages les plus simples, c'est-à-dire ce qui concerne le fart, les cosmétiques et le textile. Aujourd'hui, les restrictions d'utilisation sont promues par six pays, dont la France, et l'Agence européenne des produits chimiques a commencé à faire des propositions.
Ce matin, nous avons une responsabilité. Lorsque j'ai présenté mon rapport aux commissions de notre assemblée, tous les groupes ont été d'accord pour avancer sur le sujet.
Ce matin, nous devons trouver un consensus pour montrer à nos concitoyens que nous sommes unis pour traiter ce problème, hors des polémiques politiciennes. Je pense ici particulièrement à ma collègue Marie-Charlotte Garin, qui a trouvé comme seul argument, pour se montrer dans les médias, que je serais le porte-parole de l'industrie chimique, influencé par les lobbys. Merci pour cet argument de haute tenue !
Ce matin, nous devons montrer au Gouvernement et aux sénateurs que l'Assemblée est unie et qu'elle ne souhaite pas que cette proposition de loi se perde dans les méandres de la navette entre nos deux chambres, voire dans les limbes parlementaires. Je fais confiance au rapporteur Nicolas Thierry pour l'éviter. Je le remercie pour sa proposition de loi et je fais confiance à la présidente de son groupe, Cyrielle Chatelain, ainsi qu'au ministre pour parvenir à un consensus.
Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas trouver ce consensus tout seul. J'espère que vous écouterez et que nous trouverons une solution permettant de voter ce texte. Chacun doit être prêt à faire un pas afin d'envoyer un message fort à l'Europe et d'accélérer sur les restrictions d'usage des Pfas en matière industrielle.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.
Nous avons déjà eu plusieurs fois l'occasion de débattre des Pfas et nous savons tous que les propriétés pour lesquelles ces substances ont été largement développées, utilisées et répandues depuis des décennies sont aujourd'hui à l'origine de multiples problèmes de pollution et de toxicité. Face à une telle situation, les questions d'adaptation, de réglementation voire d'interdiction se posent plus que jamais. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, des échanges que nous avons eus, comme je vous sais gré de nous offrir à nouveau l'opportunité de débattre de ce sujet essentiel.
Est-il encore besoin de s'étendre sur les dangers de ces polluants éternels ? L'utilisation variée de ces composés chimiques, combinée à leur caractère très persistant, entraîne une contamination de tous les milieux : l'eau, l'air, les sols et les sédiments. Certains s'accumulent dans les organismes vivants et se retrouvent dans la chaîne alimentaire ; d'autres, plus mobiles, sont transportés sur de très longues distances par l'eau ou par l'air, et peuvent se retrouver jusque dans les océans Arctique et Antarctique. On retrouve certaines de ces substances, même plusieurs années après leur interdiction, dans les différents écosystèmes. Leur impact sur la santé humaine, animale et végétale et sur celle des écosystèmes en est d'autant plus préoccupant. Ces substances peuvent provoquer chez l'être humain une augmentation du taux de cholestérol, entraîner des cancers, causer des effets sur la fertilité et le développement du fœtus. Elles sont également suspectées d'interférer avec le système endocrinien et immunitaire.
Cette proposition de loi s'inscrit donc dans l'objectif de réduire l'exposition de la population aux risques des Pfas. Partageant cette préoccupation majeure, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, M. Christophe Béchu, a présenté un plan d'action interministériel pour la période 2023-2027.
Ce plan vise à réduire les risques à la source, à poursuivre la surveillance des milieux, à accélérer la production des connaissances scientifiques, à faciliter l'accès à l'information pour les citoyens et à soutenir l'inscription de la question dans le cadre réglementaire européen. Je tiens à cette occasion à saluer le travail et l'engagement de mes collègues Cyrille Isaac-Sibille, Jimmy Pahun et David Taupiac sur le sujet.
Vu l'importance des enjeux sanitaires et environnementaux, il importe de sortir de l'opposition entre écologie et économie. Le principe du développement durable est clair : il s'agit d'intégrer dans une perspective à long terme les contraintes environnementales et sociales à l'économie, de manière à répondre aux besoins du présent sans compromettre les capacités des générations futures. C'est de cela qu'il s'agit aujourd'hui.
Parce que le législateur se doit d'être rationnel, juste et mesuré, le groupe Horizons a déposé des amendements visant non seulement à protéger l'homme, le végétal et les différents écosystèmes contre la pollution aux Pfas, mais aussi à préserver les aspects économiques.
Il serait malhonnête et irresponsable d'interdire sans prévoir d'autre solution. D'où la proposition de permettre aux entreprises de travailler sur ces autres solutions jusqu'en 2030, sous réserve que la révision du règlement européen Reach intervienne avant cette date – ce que je souhaite vivement.
S'agissant des substances concernées, j'abonde dans votre sens, monsieur le ministre : il est indispensable de se fier aux agences indépendantes. Je remercie notamment l'Anses de contribuer à éclairer nos arbitrages. Je la remercie aussi, ainsi que les directions concernées des ministères de la santé, de l'agriculture et de la transition écologique, pour leur apport aux travaux du groupe santé environnement, que je préside.
Vous avez, monsieur le ministre, évoqué le plan Pfas publié ce jour. Permettez-moi de vous interpeller en tant qu'ancienne maire d'un petit village haut-savoyard.
La dépollution des eaux représente des sommes considérables. Il est impensable de laisser cette charge aux collectivités territoriales. J'ai retiré mon amendement visant à taxer à la source la fabrication des Pfas, taxe qui aurait été complémentaire de la redevance sur les rejets. Cette piste me semblait pertinente, mais j'entends que nous ne disposons pas de l'étude d'impact nécessaire pour rendre un arbitrage juste. En conscience, je ne veux pas fragiliser la compétitivité de nos industries françaises. Je m'en remets donc à votre vigilance. Je vous demande néanmoins de prendre un engagement ferme concernant le financement de cette dépollution.
Vous pouvez compter sur ma coopération et sur mon obstination constructive lors du prochain projet de loi de finances (PLF). Je saurai rappeler à votre bon souvenir la nécessité d'apporter un soutien aux collectivités territoriales.
Mme la présidente coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur quelques bancs du groupe Dem.
La journée est consacrée à une niche parlementaire, chère collègue !
La parole est à M. Bertrand Petit.
Les Pfas, substances perfluorées et polyfluorées, sont encore peu connues du grand public. Pourtant, on les trouve partout dans les objets du quotidien. Il faut dire qu'elles sont imperméabilisantes, antitaches, antiadhésives, ininflammables et isolantes. Il y en a dans nos chaussures, dans nos vêtements de sport, dans nos produits cosmétiques ainsi que dans l'ameublement et dans nos couettes.
Ces substances chimiques sont toxiques. Du fait des rejets industriels, on les retrouve dans notre environnement, dans l'eau, l'air et les sols. Indestructibles dans la nature, susceptibles de migrer sur de très longues distances, ce sont des « produits chimiques éternels », qui peuvent persister pendant des milliers d'années.
En raison de la capacité de ces substances à s'accumuler dans les tissus des organismes vivants, tous les maillons de la chaîne alimentaire sont touchés. Elles sont aujourd'hui présentes dans l'ensemble du vivant, de notre environnement à notre organisme.
Leurs effets sur la santé humaine nous exposent à une véritable catastrophe sanitaire. Elles affectent notre métabolisme, notre système cardiovasculaire, notre système reproductif, notre système immunitaire. Elles nous exposent à des cancers et provoquent des dérèglements endocriniens et thyroïdiens. Selon l'Anses, 100 % de la population française est contaminée.
Nous débattons donc d'un texte d'intérêt général : il s'agit de protéger les Français des risques liés à l'exposition aux Pfas.
Le rapport de l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd) fait état d'une situation critique et recommande à l'État d'engager sans tarder les actions de maîtrise du risque les plus urgentes.
Dans son rapport, notre collègue Cyrille Isaac-Sibille relève qu'en l'absence d'avancées européennes, la France peut restreindre certains de leurs usages – fart, cosmétiques, textiles d'habillement, emballages alimentaires, papier carton…. – en distinguant les usages essentiels de ceux qui ne le sont pas et en prenant en considération l'existence ou non d'autres solutions.
La proposition de loi prévoit d'interdire la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché de ces produits, en fixant comme horizon 2025 pour les produits pouvant être facilement remplacés et 2027 pour l'ensemble des produits contenant des Pfas.
Elle applique le principe du pollueur-payeur, en instituant une redevance dont ceux dont les activités entraînent des rejets de Pfas devront s'acquitter.
Eu égard à l'ampleur du problème sanitaire et environnemental que posent les Pfas, le groupe Socialistes et apparentés remercie le rapporteur de mettre ce sujet dans le débat public et de soumettre ce texte à notre assemblée. Il l'accueille très favorablement et le soutiendra.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Nous remercions M. le rapporteur et nos collègues du groupe Écologiste de proposer, avec ce texte, que la France prenne les devants en Europe dans la lutte contre les Pfas.
Largement utilisées depuis les années 1950 dans une grande diversité de produits de consommation courante, ces substances constituent une grave menace pour la santé humaine et pour l'environnement. Ces polluants éternels se sont accumulés partout : dans l'air que nous respirons, dans l'eau que nous consommons, dans nos aliments, dans les sols. Je ne reprendrai pas l'exposé des motifs, mais nous sommes unanimement convaincus, parce qu'il y a un consensus scientifique sur le sujet, qu'ils représentent un danger, qu'il convient d'appréhender avec sérieux : s'il est une certitude incontournable, c'est leur toxicité.
L'Agence européenne pour l'environnement a exposé les risques sanitaires pour lesquels le niveau de certitude est élevé ; ils sont nombreux : maladies thyroïdiennes, taux élevé de cholestérol, lésions au foie, cancers du rein, retards de développement du fœtus, réponse réduite aux vaccins.
Face à ces risques avérés, les réglementations françaises et européennes sont balbutiantes.
L'Allemagne, les Pays-Bas, la Norvège, la Suède et le Danemark ont déposé l'an dernier auprès de l'Echa une proposition de restriction ciblant la fabrication, la mise sur le marché et l'utilisation de l'ensemble des Pfas.
Comme vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur, ce processus risque de prendre trop de temps avant d'aboutir à une éventuelle réglementation. Compte tenu du nombre de substances concernées, de la variété de leurs utilisations et des pressions que ne manqueront pas d'exercer les lobbys, de lourdes incertitudes pèsent sur lui.
La présente proposition de loi nous entraîne dans un changement de paradigme, tant pour nos modes de consommation que pour nos modes de production. Et parce qu'il s'agit d'un sujet majeur, au creux de nos échanges se logent des doutes, nourris d'affirmations et de contrevérités.
Il a été dit tout à l'heure qu'il s'agissait d'une loi trop exigeante, avec un champ trop limité, opposant l'écologie à l'industrie. D'aucuns, au-delà de ces murs, pourraient nous dire que nous n'avons pas le recul nécessaire, que des études sont en cours à l'échelon européen, que des réglementations sont en voie d'élaboration, que ces textes-là se font un peu rapidement… Au risque de me répéter, l'écologie sans la lutte des classes, c'est du jardinage !
M. Gabriel Amard applaudit.
Il n'est pas étonnant que les propos de ce genre soient plus particulièrement proférés par ceux qui ne voient dans de telles mesures qu'une atteinte à leurs profits.
Opposer l'emploi à l'environnement ou à la santé n'est qu'une vulgaire manœuvre pour diviser ceux que tout devrait rassembler.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
À ceux qui voudraient faire peser sur les épaules des pouvoirs publics les retards d'investissement dans leurs processus industriels, tandis que les dividendes continueraient de se déverser dans leurs poches, nous répondons que le pollueur-payeur n'est pas qu'un principe, il est une condition.
Je pense en cet instant aux débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle quant à l'usage de l'amiante au détriment des travailleurs et des populations.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Je pense aux travailleurs qui ont vu leur corps usé par la surexposition exponentielle à ces substances portant atteinte au système immunitaire. Je pense aux populations qui ont vu fermer les captages d'eau situés à proximité de leurs habitations à cause d'une surconcentration en polluants éternels cancérogènes. Et cela alors même que dans les industries textile, cosmétique ou des ustensiles, d'autres solutions existent et sont disponibles – Charles Fournier l'a rappelé.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES. – M. Jean-Charles Larsonneur applaudit aussi.
À problème de santé publique, il faut une réponse publique. Non, nous n'utiliserons plus de Pfas dans nos processus de production. Non, nous n'en importerons plus. Notre pays doit prendre ses responsabilités.
Le groupe GDR – NUPES salue votre initiative, monsieur le rapporteur, et soutient votre souhait d'aboutir à un texte à la fois volontariste et équilibré. Nous nous félicitons du renforcement du contrôle sanitaire de la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, aujourd'hui défaillant. Nous approuvons bien entendu l'application du principe pollueur-payeur aux émetteurs de Pfas au moyen d'une contribution directe à l'effort de dépollution.
Compte tenu des incertitudes qui pèsent sur le processus européen, manifestes dans l'ajournement sine die du projet de révision du règlement Reach, et alors que les publications scientifiques internationales sont de plus en plus alarmantes, je me réjouis du pas important que vous nous proposez de faire aujourd'hui.
« La production capitaliste ne se développe qu'en épuisant dans le même temps la terre et le travailleur » écrivait, il y a plus de cent cinquante ans, un philosophe dont les initiales sont K et M.
Sourires.
Nous le constatons. Nous tentons, aussi humblement soit-il, d'y répondre.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Une fois encore, les Pfas sont à l'ordre du jour de nos travaux. On compte désormais trois propositions de loi, dont deux en moins d'un an, parmi lesquelles celle du groupe LIOT, présentée en juin dernier, ainsi qu'un récent rapport remis par notre collègue Isaac-Sibille. C'est la preuve de la prise de conscience de l'urgence qu'il y a à réglementer l'utilisation de ces polluants éternels, qui contaminent massivement notre environnement. Les travailleurs, les riverains des usines, les consommateurs, la nourriture, l'eau, les sols et, selon les dernières études, l'air sont concernés.
À cause de leur persistance et de leur capacité à s'accumuler dans les tissus des organismes vivants, les Pfas contaminent tous les maillons de la chaîne alimentaire.
Santé publique France a montré que 90 % des Pfas auxquels nous sommes exposés provenaient de l'alimentation, en particulier des poissons, de la viande, des charcuteries, des plats composés et de l'eau potable. Les études concernant la contamination de cette dernière tendent à démontrer une pollution généralisée et largement sous-estimée.
Or, à ce jour, seuls deux types de Pfas sont interdits au niveau international : les PFOA et les Pfos. La pollution se poursuit donc. En 2020, près de 75 000 tonnes de Pfas ont été émises en Europe. Selon les experts, près de 4,4 millions de tonnes devraient être relâchées en Europe d'ici à 2030, si rien n'est fait pour diminuer la pollution à la source.
Une prise de conscience se fait jour, et avec elle les premières actions politiques. Le Parlement européen a ainsi proposé d'interdire les Pfas dans les emballages alimentaires – ce que je prévoyais moi aussi dans ma proposition de loi. C'est un premier pas, mais tant reste à faire !
Nous partageons le constat de notre collègue Nicolas Thierry : l'encadrement des sources de pollution est insuffisant. Ce point avait d'ailleurs été signalé par notre collègue Isaac-Sibille dans son rapport rédigé à la demande du Gouvernement.
Pour réduire la pollution à la source, la proposition de loi impose un cadre strict – mais nécessaire au vu de leurs dangers sanitaires et environnementaux – à l'utilisation des Pfas. Cela passe par une interdiction graduelle de l'utilisation de ces molécules.
Nos travaux en commission ont fait progresser ce texte vers un compromis satisfaisant au sujet du calendrier. À partir de 2026, l'utilisation des Pfas serait interdite dans les ustensiles de cuisine, les cosmétiques, les produits de fart et les textiles d'habillement. Pour ces produits avec lesquels nous sommes en contact direct, il existe des solutions alternatives. Eu égard aux enjeux sanitaires, il appartient aux industriels de se mobiliser pour offrir aux consommateurs des produits ne mettant plus leur santé en péril.
Nous entendons les inquiétudes de certains, mais opposer emploi et santé est une position d'arrière-garde face à l'ampleur du scandale sanitaire. Se tourner dès que possible vers la recherche de nouvelles solutions industrielles représentera à terme un avantage décisif dans des secteurs qui, en raison de l'inquiétude croissante des consommateurs, excluront progressivement les Pfas. Cette transition devra être accompagnée dans le cadre de la stratégie nationale pour une industrie verte.
Par ailleurs, nous considérons que ce n'est pas à la collectivité, notamment aux collectivités territoriales, de payer le coût de la pollution causée par les industriels. Aussi soutenons-nous la mesure visant à ajouter les Pfas à la liste des substances assujetties à la redevance pour pollution de l'eau.
Ce principe du pollueur-payeur fait d'ailleurs son chemin, y compris parmi les industriels. Ainsi, le 18 mars, le Groupe Seb a annoncé que son usine Tefal de Rumilly allait prendre en charge les frais de fonctionnement de l'unité de traitement des eaux mise en place dans la commune pour juguler la pollution aux Pfas. Ce n'est que justice et c'est la preuve que les industriels sont en mesure de prendre en charge les dépenses qui leur incombent.
Il nous faut ouvrir les yeux, sans dogmatisme, sur le danger que représentent ces polluants dans toute la chaîne environnementale et sanitaire. La responsabilité du législateur est d'agir le plus rapidement possible. Il est temps qu'une proposition de loi sur les Pfas aboutisse. C'est pourquoi notre groupe, conscient de ses responsabilités, votera ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre délégué.
Permettez-moi de répondre rapidement à certaines des remarques qui ont été faites. Je n'ai pas vraiment entendu d'arguments pour s'opposer à l'approche européenne, qui me paraît être pertinente – ce dont j'essaie de convaincre l'Assemblée nationale. Il y a eu des remarques sur les délais. À ce sujet, je précise à nouveau que la France insiste pour que l'Union européenne accélère. En revanche, je n'ai entendu personne soutenir que les choses iront mieux si la France fait quelque chose et laisse les vingt-six autres États membres faire autre chose. En cette journée de niche parlementaire, je voudrais comprendre en quoi l'approche européenne – qui est en train de devenir la plus efficace – pose un problème au rapporteur et à celles et ceux qui soutiennent sa proposition.
Comme cela vient d'être dit, l'approche européenne a tendu jusqu'à présent à traiter les produits les uns après les autres. Parmi les milliers qui existent, seuls trois ont été interdits. Il faut donc élargir le mouvement. Mais ce problème est traité par la demande – formulée par l'Allemagne, le Danemark et les Pays-Bas et soutenue par la France – de traiter désormais les Pfas par familles de produits. Cette méthode sera plus efficace et plus rapide, puisqu'au fur et à mesure que les familles seront analysées par le comité d'évaluation des risques de l'Agence européenne des produits chimiques, nous soutiendrons les interdictions prises à l'échelle de l'Union, comme cela a été le cas pour les produits alimentaires.
M. Fournier a parlé des Danois. La seule mesure qu'ils ont prise avant les autres pays est l'interdiction des Pfas dans les emballages alimentaires. À l'initiative de la France, elle est désormais en vigueur partout en Europe, ce qui conduit les Danois eux-mêmes à privilégier une approche européenne. Sans vouloir opposer le Parlement au Gouvernement ou la nation à l'Europe, je constate que la démarche européenne est la plus efficace.
Il m'a été reproché d'opposer emploi et environnement.
Murmures sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Non, monsieur Peytavie, ce n'est pas ce que j'ai dit. Non, trois fois non ! Nous ne sacrifierons pas la santé des Français pour préserver l'emploi, à condition évidemment que l'on parle de produits dangereux. Pour ceux dont la dangerosité n'est pas connue ou à propos desquels des études concluent à une probable absence de danger, faut-il s'en remettre à des autorités indépendantes, aux avis des uns et des autres ou à des documentaires qui – fussent-ils très bien faits – mettent en avant des témoignages individuels ?
Pour ma part, je crois à la science et je pense que la loi doit être fondée sur des faits, non sur des émotions.
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Je suis persuadé qu'il faut s'en remettre à des évaluations indépendantes, de manière à légiférer au niveau pertinent – national ou européen – et sur la base de faits.
Je reconnais la capacité d'un certain nombre de documentaires, de films et de reportages à sensibiliser les populations. M. Fournier a parlé de Dark Waters…
Je m'attendais, monsieur Fournier, à ce qu'on s'envoie des études scientifiques à la figure, mais là, c'est pire… Ce film a effectivement accru la sensibilisation des populations à des phénomènes observés aux États-Unis – et en aucun cas, heureusement, en France ou ailleurs en Europe –, en lien avec une contamination très importante des nappes phréatiques causée par les comportements déviants d'industriels américains qui utilisaient deux Pfas désormais interdits, le PFOA et le Pfos.
Au moins, vous avez des cheveux, ce qui n'est plus mon cas !
Sourires.
Le film, qui raconte une histoire vieille de quinze ans, a été utile – et on l'en remercie. Mais depuis, ces Pfas ont été interdits en Europe, où on est en train d'accélérer le mouvement. Donc Dark Waters n'a rien à voir avec le schmilblick !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Une étude épidémiologique sur 69 000 personnes, c'est ça qu'il faut regarder !
J'essaye d'avoir une approche que je pense raisonnable. J'écoute vos arguments et je m'efforce d'y répondre. Si vous préférez que l'on s'invective et que l'on s'interrompe, nous pouvons le faire aussi, mais je ne crois pas que ce sera très efficace.
J'ai été interrogé par M. Amard sur l'extension du site Daikin de Pierre-Bénite. Elle a été autorisée par la Dreal sur la base de l'utilisation des meilleures techniques disponibles pour limiter les rejets dans l'air, sous forme de poussière, de Pfas de type bisphénol AF. Dans l'air, parce que l'entreprise a déjà mis en œuvre tout ce qu'il faut pour limiter les rejets dans l'eau. L'activité du site est très encadrée : pas de rejets dans l'eau, donc, et une limite très restrictive d'un microgramme de bisphénol AF par nanomètre cube de rejet dans l'air. Enfin, un plan de substitution a été demandé à l'industriel dans un délai de trois ans. Je vous détaille cela pour démontrer que des mesures sont prises et que les industriels s'engagent.
On peut donc se pointer du doigt les uns les autres ou bien privilégier, du côté de la consommation, l'approche européenne, la seule qui soit opérante, la seule qui va nous permettre de remporter ce combat. Du côté des rejets, il faut avoir une approche installation par installation, comme cela a été indiqué dans le plan annoncé hier. Les préfets prendront des arrêtés qui, compte tenu des spécificités de chaque installation, seront parfois plus restrictifs que ce que vous souhaitez, parfois moins.
C'est plus compliqué qu'une mesure passe-partout, qu'une « taille unique » qui interdit tout et partout – sauf pour quelques usages où n'existent pas de solutions alternatives – et qui ne va pas protéger les Françaises et les Français. Mais c'est une approche bien plus rationnelle, bien plus efficace et bien plus opérationnelle. C'est donc celle que défendra le Gouvernement tout au long de l'examen du texte.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – M. Frédéric Petit applaudit également.
Je vais être bref, car dans le cadre d'une niche parlementaire, il ne faut pas s'éterniser ni enliser les débats. Aucune agence, européenne ou française, ne préconise une approche substance par substance plutôt qu'une approche par usage. Il y a un consensus entre toutes les études scientifiques pour dire que tous les polluants éternels, tous les Pfas, se caractérisent par leur persistance et que cela suffit pour les classer comme substances préoccupantes.
L'approche substance par substance…
M. Sébastien Peytavie approuve.
Aux États-Unis, le débat s'est enlisé pendant vingt-cinq ans précisément à cause de cette approche. Je vous propose de ne pas faire la même erreur et d'écouter les agences.
Par ailleurs, vous rappelez que la France soutient les cinq pays européens qui ont saisi l'Echa. Or ils demandent une approche par famille. Je vois là une contradiction : d'un côté, vous soutenez l'initiative de ces cinq pays et de l'autre, vous nous dites qu'il faudrait une approche substance par substance.
Vous ne dites pas « substance par substance », mais vous dites qu'il n'y a qu'une famille, celle des Pfas, et des sous-familles. Or les sous-familles ne sont pas reconnues par le texte des cinq pays européens.
Il faut donc clairement choisir : soit vous adoptez cette approche, soit vous soutenez l'initiative des cinq pays.
On les soutient !
Par ailleurs, vous prétendez que la France ne serait pas capable de réguler seule ce qui est mis sur le marché. Il y a pourtant de multiples exemples qui prouvent le contraire. Prenons celui du bisphénol A.
Il est interdit !
Exactement ! La France l'a interdit trois ans avant les autres pays et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a tout à fait su contrôler le marché, en anticipant des normes européennes. Idem avec le colorant E 171, qui était présent à peu près partout et que nous avons interdit avant tout le monde ; là aussi, nous avons su contrôler.
À propos des hormones de croissance dans la viande, qui avaient fait scandale, la France – à raison – a anticipé la réglementation européenne. Là aussi, on a su contrôler. Et aujourd'hui, sur les Pfas, sur les polluants éternels, pour le nombre limité d'usages qui figurent dans la proposition de loi, vous nous dites que la France ne serait pas capable de le faire ! Je vous livre mon impression : les arguments que vous avez avancés sont extrêmement fragiles.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Marcellin Nadeau applaudit également.
Je ne veux pas faire durer les débats ,
Exclamations sur les bancs du groupe Écolo – NUPES
mais ayant été interpellé sur des points très précis, je souhaite, pour la clarté des débats, y répondre de manière très concrète. J'irai vite sur le reste.
Vous dites que nous avons une approche substance par substance. Or je viens de dire exactement l'inverse. Nous avons poussé pour que la directive et le processus Reach passent d'une procédure substance par substance à une procédure par familles, ou sous-familles si vous préférez. Soit on interdit, comme vous le préconisez, les 12 000 Pfas – option que je persiste à trouver contre-productive –, soit, sur la base d'une étude objective, on soutient la demande d'évaluation formulée par les cinq pays auprès de l'Echa.
Cette évaluation se déroule en deux étapes. Dans la première, le comité des risques établit si les produits, ou les familles de produits, ou les sous-familles de produits, sont risqués ou non. Si ce comité produit un diagnostic selon lequel les produits de telle ou telle famille ne sont pas risqués, l'agence ne proposera pas de les interdire. Peut-être que 5 000 Pfas, voire les 12 000 qui existent, sont hyper-risqués, conformément à votre conviction.
Pour ma part, je préfère fonder l'expertise sur des analyses précises.
Ensuite, un second comité, celui dit d'analyse socio-économique, étudie, usage par usage, la possibilité d'avoir des substituts et le temps nécessaire pour en trouver, en intégrant les enjeux socio-économiques. Cela peut en effet se traduire par des interdictions avec des dates d'entrée en vigueur différentes, selon les usages.
On peut, faute de substituts, garder les Pfas dans les prothèses de hanche pendant trois, quatre ou cinq ans, et les interdire immédiatement pour les produits alimentaires, comme cela a été fait.
Pour le bisphénol dans les biberons puis les emballages alimentaires, effectivement, la France a pris de l'avance. Vous proposez aujourd'hui que la France prenne « de l'avance » – je mets ces mots entre guillemets, car de mon point de vue, cela pourrait être du retard – pour 12 000 produits. Ce que vous proposez impliquerait que chaque tee-shirt qui entre en France soit contrôlé à la frontière par un douanier. Je préfère agir au niveau européen et employer nos douaniers à autre chose que contrôler tous les tee-shirts entrant en France depuis un autre pays européen.
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.
En vous invitant à adopter la présente proposition de loi, nous ne vous demandons pas de choisir entre santé et industrie ; au contraire, nous affirmons qu'il est possible de les concilier.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
Députée de la deuxième circonscription de l'Isère, où est implantée une plateforme chimique, je sais qu'Avery Dennison a modifié ses procédés de fabrication, il y a plusieurs années, pour respecter les normes de qualité de l'air ; je sais que l'industrie de la papeterie est en train d'exclure les Pfas des emballages alimentaires. Autrement dit, nous demandons de faire quelque chose qui est non seulement possible et faisable, mais indispensable.
Monsieur le ministre, les méta-analyses sont très claires : les Pfas, polluants éternels, sont dangereux pour la santé. Ils augmentent les risques de cancer et d'infertilité ; ils ont même des impacts sur le développement des embryons. Nous devons exprimer collectivement ce que disent les Françaises et les Français : on ne peut pas sacrifier notre santé à l'industrie. Nous pouvons faire en sorte qu'il y ait des emplois ; nous pouvons nous appuyer sur les compétences, sur les capacités et sur l'envie de faire des ouvriers et des ingénieurs français pour réussir à produire des matières qui ne nous mettent pas en danger. Nous savons le faire ; nous pouvons le faire.
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
J'en viens au volet européen de la question. Oui, notre pays doit être pionnier. Le Danemark l'a été en interdisant les Pfas dans les emballages alimentaires, et l'Europe a suivi. Si la France est pionnière en interdisant les Pfas dans les cosmétiques, le fart et les ustensiles de cuisine, nous parviendrons à enclencher une dynamique européenne.
Qui plus est, nous devons légiférer pour une raison simple : lorsque l'Europe légifère, si la France ne se fixe pas d'objectifs, elle ne respecte pas les normes européennes.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Gabriel Amard applaudit également.
En octobre 2021, la Cour de justice de l'Union européenne a condamné la France pour non-respect des directives relatives à l'eau potable.
Mes chers collègues, soyons fiers :…
…lorsque nous retournerons dans nos circonscriptions, nous pourrons dire, pour une fois, que nous avons agi !
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
L'article 1er n'a pas fait l'objet d'une étude d'impact. En réalité, on nous demande de surtransposer une directive européenne. Je m'interroge : en quoi serions-nous plus malins et plus efficaces que la convention de Stockholm et le règlement Reach ? Sur le fondement de ce dernier ont déjà été interdits, en 2022, les principaux Pfas – le PFOA, le Pfos et le perfluorohexane sulfonique.
Nous sommes tous préoccupés par l'exposition aux Pfas. Nous convenons tous qu'il faut agir. Toutefois, pour agir, il faut aussi laisser le temps à nos entreprises de s'adapter et à la recherche de faire son travail. Chers collègues, regardez sur vous : il y a des Pfas dans votre costume, dans votre papier, dans vos lunettes, dans vos chaussures, dans votre smartphone ! On dit beaucoup de mal des Pfas, mais on oublie de rappeler que, depuis les années 1950, ils ont permis de nombreux progrès humains, non seulement dans la vie quotidienne – je viens d'en donner des exemples – mais aussi dans le domaine de la santé : les Pfas sont présents dans les implants dentaires et dans les prothèses, notamment de hanche.
Il est dangereux d'agiter les peurs, car cela altère la confiance de nos concitoyens dans le progrès scientifique, en particulier dans celui que permet la chimie.
Murmures.
Mais enfin, que veut-on ? L'usine Solvay a été mise en cause. Pourtant, elle a été sollicitée pour fabriquer des batteries lithium-ion, car le PVDF qu'elle produit est plus résistant que l'inox.
Cela nous permettra de relocaliser la fabrication des batteries en France, de ne plus les importer de Chine…
Mme la présidente coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Monsieur le rapporteur, mon intervention sera brève, car je ne souhaite pas prendre de temps sur votre niche parlementaire. Je ne reviens pas sur les arguments que j'ai développés dans la discussion générale. Comme je l'ai expliqué, l'alinéa 5, qui vise à interdire tous les ustensiles de cuisine contenant des Pfas, nous pose un problème. Nous n'avons pas déposé d'amendement de suppression de l'article 1er . En revanche, nous en avons déposé un qui tend à supprimer l'alinéa 5, qui constitue pour nous une ligne rouge.
Êtes-vous prêt à accepter cet amendement ? Si tel était le cas, nous serions d'accord pour voter l'article 1er . A contrario, si vous ne preniez pas d'engagement en ce sens, nous serions dans l'obligation d'utiliser les moyens à notre disposition pour bloquer l'adoption de l'alinéa 5, donc de voter en faveur des amendements de suppression de l'article déposés notamment par Mme Brulebois et par nos collègues du groupe Les Républicains. La balle est dans votre camp.
Grâce à ce texte de loi, nous nous attaquons à la pollution aux Pfas. Il s'agit de milliers de composés chimiques toxiques qui s'accumulent dans notre environnement. Ces polluants éternels présentent, nous le savons, un risque majeur pour notre santé.
Le texte que nous étudions est une version de compromis issue des travaux de la commission du développement durable, autrement dit une version réduite par rapport à la proposition de loi initiale de M. Thierry. Nous avons accepté ce compromis parce qu'il permet de dégager un consensus entre nous.
Mme Marie Pochon applaudit.
En effet, nous pensons qu'il est urgent d'avancer sur la question.
Collègues, je suis vraiment atterrée par le nombre d'amendements déposés, qui visent soit à supprimer l'article 1er , soit à réduire encore le champ d'application de la loi, soit à ralentir l'action. Honnêtement, ce n'est pas sérieux ! On ne peut pas, une fois de plus, reculer.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur plusieurs bancs des groupes SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je fais un petit rappel. En février 2022, on a découvert que les puits et les nappes phréatiques de la région de Rouen étaient pollués aux Pfas. En février 2023, dans la banlieue de Lyon, plus de 200 000 personnes se sont retrouvées avec une eau potable présentant des taux de Pfas supérieurs aux normes. En novembre 2023, en Île-de-France, une pollution généralisée a atteint les œufs de poule, qui ont été déclarés impropres à la consommation.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – MM. Benjamin Lucas-Lundy et Marcellin Nadeau applaudissent également.
En février 2024, il y a quelques semaines, on a découvert des taux records de Pfas à Salindres, dans le Gard. Or il y a aussi malheureusement, dans cette même commune, un taux anormal de tumeurs au cerveau.
Ne voyez-vous pas que les scandales vont se multiplier, que l'inquiétude va grandir ? Tous les scientifiques nous alertent, la situation est complètement sous-estimée. Lorsque le prochain scandale sanitaire se produira dans votre circonscription, que direz-vous aux habitants ?
Mêmes mouvements.
Qu'il y avait un règlement européen, sur le fondement duquel on allait peut-être agir en 2029, et qu'il était donc urgent d'attendre ? Ce n'est pas sérieux !
Selon les scientifiques, la pollution aux Pfas doit être considérée, au même titre que le changement climatique, comme une limite planétaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Or, si on la considérait comme telle, cette limite serait déjà franchie ! En réalité, il est question du droit des générations futures à la vie. Votez pour l'article 1er !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES, dont plusieurs membres se lèvent, et sur plusieurs bancs des groupes SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Il ne faut pas tout mélanger. D'abord, il faut bien distinguer la pollution historique et la pollution à venir. La pollution qui a affecté ma circonscription est historique : elle est liée au fait que des industriels ont déversé, pendant des décennies, des Pfas dans les milieux naturels. Par cette proposition de loi, il est question de restreindre les usages pour empêcher la pollution à venir.
S'agissant de la pollution à venir, j'aimerais introduire, à ce stade de nos débats, une autre distinction, entre les substances à propos desquelles il existe un consensus scientifique et celles à propos desquelles il n'y en a pas. En ce qui concerne les Pfas, il existe un consensus au sujet des monomères, qui présentent des particularités : ce sont des tensioactifs, autrement dit des surfactants, qui sont, nous le savons, agressifs pour la santé. En revanche, il n'y a pas de consensus à propos des polymères. On peut s'interroger sur ce que donne leur dégradation dans le temps, mais rien n'est établi. Selon moi, il convient de distinguer ces deux sous-familles, que M. le rapporteur et M. le ministre ont évoquées. Il faut que notre assemblée soit consciente de ces différences.
Il est anormal que les monomères, qui sont dangereux, soient déversés dans la nature. Il importe, pour l'avenir – je ne parle donc pas de la pollution historique –, d'instaurer un suivi de ces monomères, tout au long de la filière, de leur production jusqu'à leur destruction, en passant par leur utilisation. C'est ce que je proposerai par amendement. Pour le moment, cette filière n'est pas contrôlée.
Voilà pour les monomères. Pour les polymères, il n'y a pas de consensus.
Il vise effectivement à supprimer l'article 1er . L'introduction de restrictions nationales ciblées avant l'entrée en vigueur de la restriction qui sera adoptée au niveau européen présenterait des risques importants : non-atteinte de l'objectif que l'on cherche à atteindre, non-conformité de la loi française aux règles européennes, fragmentation du marché intérieur, non-conformité des produits mis sur le marché national. Une telle mesure serait donc disproportionnée. Elle affecterait fortement la compétitivité de nos entreprises, en particulier de celles qui commercialisent des produits à l'export. J'ai mentionné la société Solvay, implantée dans le Jura. Mes collègues de Haute-Savoie auront à cœur de défendre Tefal.
Il convient de privilégier l'introduction d'une restriction européenne relative à la fabrication, à la mise sur le marché et à l'utilisation des Pfas, qui portera notamment sur leur présence dans les produits manufacturés.
En 2023, le Gouvernement a adopté un plan d'action ambitieux relatif au Pfas, visant à les contrôler et à réduire les émissions. En juin de la même année, il a pris un arrêté pour imposer aux sites industriels d'analyser les émissions de Pfas dans l'eau qui sont issues de leur activité et de communiquer les résultats. Je peux vous dire que c'est effectif : dans le Jura, la préfecture effectue régulièrement des contrôles très exigeants et très rigoureux.
Sur ces amendements de suppression, n° 28, 44, 56, 78 et 105, je suis saisie par les groupes Rassemblement national, Les Républicains et Écologiste – NUPES d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 44 .
Je souhaite poser quatre questions à propos de l'article 1er .
Premièrement, un certain nombre de substances, dont la dangerosité a été identifiée, sont déjà interdites. En ce qui concerne les autres substances, avons-nous des certitudes ? Leur dangerosité est-elle avérée ? Non, nous n'avons pas de certitude : M. le ministre l'a rappelé, les études sont controversées. La prudence est donc nécessaire. Tant que nous n'avons pas de certitude, évitons de légiférer ainsi, dans l'urgence.
Deuxièmement, est-il possible de trouver des produits de substitution aux Pfas qui entrent dans la composition de certains biens ? Je pense aux prothèses de hanche, aux vêtements de protection des sapeurs-pompiers – comment ferait-on pour les défendre ? – ou aux batteries électriques – une grande priorité. Soyons un peu réalistes !
Troisièmement, l'article 1er vise à interdire aussi l'importation de produits contenant des Pfas. A-t-on déjà vu cela ? Avons-nous des garanties à ce sujet ? Une fois encore, nous laisserons entrer sur le marché des produits qui feront une concurrence totalement déloyale à nos propres productions.
Nous avons été champions en la matière et nous allons continuer !
Quatrièmement, sommes-nous contraints d'anticiper sur la réglementation européenne ? Je pense que non.
Sur tous ces points, nous n'avons que des incertitudes. Il est donc urgent de supprimer l'article 1er .
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 56 .
Nous comprenons bien l'intention : ne plus utiliser ni consommer de produits néfastes pour la santé. Néanmoins, l'article 1er pose un problème : il s'agit certes de polluants éternels, mais aucune distinction n'est établie entre les Pfas qui sont nocifs et ceux qui ne le sont pas – par exemple, les fluoropolymères. Quant aux Pfas utiles pour assurer notre compétitivité et notre souveraineté industrielle, il faut évidemment les réglementer et les contrôler, mais on ne peut pas les interdire ainsi, purement et simplement.
Les interdictions générales et arbitraires entraînent souvent des effets négatifs. Ce sera sans doute le cas ici. Je pense notamment à la destruction d'emplois, surtout dans la filière des ustensiles de cuisine.
Nous partageons tous l'ambition d'une régulation rapide, puis d'une interdiction des Pfas les plus dangereux pour la santé et pour l'environnement. Cependant, il va de soi que leur interdiction dans les ustensiles de cuisine dès le 1er
En outre, il est absolument nécessaire de préserver l'emploi.
Exclamations sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
L'article 1er entraînerait la perte de milliers d'emplois en Europe et aurait des conséquences désastreuses pour notre compétitivité industrielle.
Il convient donc de supprimer l'article et de travailler à une nouvelle rédaction, par exemple en faisant la différence entre les substances nocives pour la santé et les autres.
Notre industrie a besoin de temps pour trouver des solutions. L'adoption dans la précipitation de cette proposition de loi aurait pour seule conséquence de l'affaiblir, puisque l'importation de ces produits depuis d'autres pays ne serait pas interdite. Arrêtons de pénaliser notre industrie en anticipant des transpositions européennes encore hypothétiques !
La France soutient l'Europe dans son processus de restriction des Pfas d'ici à 2027 ou 2029, selon un calendrier de travail établi. La publication d'avis et de résultats précis est attendue. Nous devons adopter une position commune avec l'Europe plutôt qu'anticiper, sans étude d'impact solide, des décisions européennes. La volonté est là. La France et l'Europe ont clairement manifesté leur intention de restreindre l'usage des Pfas et la révision des règlements en cours permettra d'obtenir des interdictions bien plus efficaces.
L'amendement vise donc supprimer l'article 1er afin de mettre le texte en accord avec la réglementation européenne.
La parole est à M. Louis Margueritte, pour soutenir l'amendement n° 105 .
Je soutiens mes collègues Roseren et Brulebois. L'intention est la bonne et j'ose espérer qu'il y a sur ces bancs une volonté unanime d'aller dans le sens de l'histoire, mais c'est un sujet qui relève typiquement de la compétence européenne.
« Ah ! » sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Je ne dis pas cela pour mettre en avant l'Europe, qui est un sujet d'actualité.
Exclamations sur les mêmes bancs.
Chers collègues, je vous ai écoutés avec attention, je vous prie de faire de même.
Ce n'est pas en interdisant l'ensemble des molécules sans distinction, alors que leurs conséquences pour la santé ne sont pas toutes connues ni appréciées de la même façon, qu'on empêchera les entreprises de les faire entrer dans notre marché. Elles ne sont pas des lapins de six semaines, elles finiront par trouver un moyen ! Vous avez le droit de ne pas y croire mais il se passera la même chose que pour les produits phytosanitaires dans l'agriculture.
Agissons plutôt au niveau européen. La France est pilote dans ce domaine et je suis sûr que le ministre et ses services font le maximum pour pousser le sujet auprès des autres États membres.
Mme Véronique Riotton applaudit.
Les amendements proposent de supprimer l'article 1er , qui vise à réduire l'exposition de la population aux Pfas. Vous comprendrez que j'y sois fermement opposé.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et SOC.
Il prévoit d'interdire la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché d'un certain nombre de produits entre 2026 et 2030 sans attendre que le processus décisionnel européen porte ses fruits. Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre encore des années, surtout quand il existe des solutions de remplacement pour des produits qui sont des sources d'exposition pour la population. Je le répéterai autant qu'il le faut : chaque année, chaque mois perdu se compte en vies humaines abîmées ou fauchées.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et GDR – NUPES.
J'ai entendu la députée Stambach-Terrenoir opposer ceux qui seraient pour la santé à ceux qui seraient prêts à la sacrifier au nom de l'emploi. J'ai même entendu un député dire : « Même les cancers, ça crée de l'emploi. » Je pense que nous pouvons mieux faire.
J'ai essayé de dire sereinement dans mon intervention liminaire qu'il n'y a pas ceux qui sont pour la santé et ceux qui sont contre la santé,…
…tout comme j'aime à imaginer qu'il n'y a pas ceux qui sont pour l'industrie et ceux qui sont contre l'industrie. En tout cas, je suis convaincu que le Gouvernement et la totalité des députés présents sur ces bancs, quel que soit leur groupe, y compris ceux avec qui je suis en désaccord sur tout, considèrent que la santé publique des Français est une priorité absolue. Si l'on pouvait éviter de se renvoyer ce genre d'argument, tout le monde y gagnerait, et la qualité du débat aussi.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Imaginer que certains voteront pour la suppression de l'article parce qu'ils sont prêts à sacrifier des milliers de vies pour sauver 100 jobs, c'est insultant pour le ministre, mais aussi pour tous ceux qui ont déposé ces amendements.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
J'assume. J'ai parlé vingt minutes avant la discussion générale et je suis convaincu que la manière la plus efficace de traiter le sujet pour protéger la santé de nos concitoyens, c'est…
…de le faire en Européens, aussi vite que possible.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Sous la législature précédente, j'ai assisté à d'innombrables débats qui consistaient à corriger des mesures prises cinq ou six ans auparavant parce que l'on s'était dit : « Tout va bien, la France sera le phare de la démocratie globale et le reste du monde nous suivra comme un seul homme… » Ah non, finalement, nous avons été les seuls à interdire telle ou telle substance ,
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES
des filières se sont écroulées et il a fallu, en urgence, voter des exemptions.
On peut décider d'être tout simplement anti-européen : il y a certains députés sur ces bancs…
Exclamations sur les bancs du groupe Écolo – NUPES
…je ne dis pas tous, madame la députée, mais certains députés sur ces bancs le sont. Celles et ceux qui sont européens devraient privilégier une approche européenne…
…fondée, je le répète, sur les faits, sur la science, sur des analyses objectives qui nous permettront d'avancer ensemble, en Européens, suivant une approche opérante qui n'ira pas à rebours des intérêts de la nation. Avis favorable aux amendements de suppression.
La position du groupe Renaissance est claire depuis le début. Nous l'avons exprimée en commission et nous la reprenons aujourd'hui.
Monsieur le rapporteur, nous avons eu des échanges constructifs, basés pour une bonne partie sur les conclusions du rapport de notre collègue Cyrille Isaac-Sibille. J'ai reconnu votre travail et il est certain que nous avons des points de convergence, en particulier la suppression dès 2026 des Pfas dans les farts et dans les cosmétiques et en 2030 dans le textile. Nous avons aussi, depuis le début, un désaccord concernant les ustensiles de cuisine.
Ce désaccord persiste pour des raisons évidentes qui tiennent aux risques de délocalisation et de perte de compétitivité. En deux ans, Seb et les autres entreprises qui produisent en France des ustensiles de cuisine ne sont pas capables de transformer leur outil de production. Nous sommes donc contre cette partie de l'article 1er mais favorables au reste, en particulier à la redevance sur les rejets. Nous proposerons d'ailleurs des amendements pour améliorer ces dispositions.
Nous voterons donc contre ces amendements qui tendent à supprimer intégralement l'article 1er , mais nous voterons ensuite l'amendement de Mme Brulebois visant à supprimer l'alinéa 5 pour retirer les ustensiles de cuisine de l'équation.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 237
Nombre de suffrages exprimés 236
Majorité absolue 119
Pour l'adoption 50
Contre 186
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES. – M. Jean-Charles Larsonneur applaudit également.
Il semble que nous puissions trouver un consensus et j'espère que nous poursuivrons dans cette voie, sur la base des éléments qu'a rappelés Pierre Cazeneuve.
Brouhaha sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Chers collègues, M. Isaac-Sibille est en train de présenter un amendement.
Les Pfas se divisent en deux sous-familles. D'un côté, il y a celle des monomères, qui sont des assemblages de molécules de carbone et de fluor ; très nombreux, ils sont utilisés comme tensioactifs et coadjuvants. Ce sont ces molécules qu'il faut surveiller depuis leur production jusqu'à leur destruction.
De l'autre côté, il y a celle des polymères, qui sont stables mais qui pourraient – il n'y a pas de consensus sur ce point – se dégrader en monomères avec le temps. L'amendement vise à faire la distinction entre ces deux sous-familles. Il est essentiel de contrôler dès maintenant la filière des monomères pour éviter leur diffusion, car ce sont eux qui sont toxiques et qui polluent. Je compte sur votre soutien.
Vous proposez de définir les Pfas. Votre amendement est composé de deux parties : la première reprend une nouvelle définition des Pfas proposée par l'OCDE tandis que la deuxième distingue les différents types de Pfas. C'est cette deuxième partie qui me semble la plus dangereuse. Des scientifiques nous ont en effet alertés, lors des auditions et depuis le dépôt de ces amendements, et je vais essayer de vous expliquer les raisons de leur inquiétude pour que chacun comprenne bien l'enjeu.
Vous proposez d'indiquer que les Pfas se divisent en deux familles, les monomères et les polymères. Cette distinction est erronée scientifiquement et dangereuse politiquement. Tout d'abord, d'un point de vue scientifique et chimique, il n'est pas fait de distinction entre les polymères et les monomères, car les substances non polymériques ne sont pas forcément des monomères : il existe, par exemple, des substances oligomériques, que vous ne citez pas dans l'amendement. Scientifiquement, il n'y a donc pas de sens à distinguer uniquement deux catégories. En outre, la littérature scientifique a clairement établi que les Pfas polymères étaient responsables de rejets de Pfas dangereux lors de leur fabrication ou de leur mise en déchets. Autrement dit, les chaînes de production utilisant des polymères rejettent inexorablement des Pfas non polymériques parmi les plus dangereux. Par ailleurs, les produits sortis des chaînes de production, une fois mis en déchet, sont une source de diffusion massive de Pfas non polymériques.
J'insiste sur la fausse idée selon laquelle les polymères pourraient être considérés comme des substances inertes et non problématiques. C'est faux. Les scientifiques ont fortement insisté sur ce point ces dernières années, ce qui a conduit les institutions européennes et internationales à intégrer ce fait. L'OCDE rappelle ainsi qu' « il est faux de considérer les fluoropolymères comme des polymères peu préoccupants ». L'Echa s'est alignée sur cette conclusion. La deuxième partie de l'amendement doit absolument être supprimée.
Par ailleurs, comme je l'ai dit plus tôt ce matin à M. le ministre, la France soutient l'initiative des cinq pays qui souhaitent une interdiction large des Pfas au niveau européen. Cette initiative s'appuie sur une définition élargie de la famille des Pfas et prend soin de ne pas faire la distinction entre monomères et polymères. Par conséquent, adopter l'amendement irait à l'encontre de la position du projet de restriction européen.
Quant à la première phrase, elle reprend la définition donnée par l'OCDE, qui s'attache uniquement à la structure chimique des substances. L'inscrire dans la loi n'est pas utile et conduirait à figer une définition qui pourrait évoluer dans les années à venir.
Je demande le retrait total de l'amendement ; à tout le moins, il faut supprimer la deuxième partie qui est très problématique. Je donnerai donc un avis favorable à cet amendement, sous réserve de l'adoption de mes deux sous-amendements.
Je donne un avis défavorable aux deux sous-amendements présentés par le rapporteur. Quant à l'amendement n° 106 du député Isaac-Sibille, je demande son retrait en faveur d'un autre qu'il a lui-même déposé, l'amendement n° 109 , que nous examinerons ultérieurement. Vous proposez de reprendre la définition de l'OCDE, qui est largement acceptée par la communauté scientifique, mais vous ajoutez à celle-ci une catégorisation distinguant monomères et polymères, qui pourrait introduire de la confusion. C'est plus compliqué que cela : il y a des milliers de Pfas, je l'ai déjà précisé, et la distinction entre monomères et polymères n'est pas complètement pertinente. La plupart des monomères sont dangereux ; certains polymères le sont également mais d'autres ne le sont pas.
Nous préférons donc votre amendement n° 109 , qui tend à préciser cette définition par décret en Conseil d'État. Inscrire ce type de précision scientifique dans la loi me semble très dangereux et risque de scléroser l'ensemble du dispositif.
Il est important que nous en discutions dès maintenant. J'entends, monsieur le ministre, que vous seriez favorable à l'amendement n° 109 ; à mon sens, il est essentiel que les Pfas monomères soient contrôlés depuis leur production jusqu'à leur élimination. Il faut donc caractériser les monomères.
Compte tenu de ce qu'ont dit le rapporteur et le ministre, je suis prêt à retirer l'amendement, à condition qu'ils précisent tous les deux leur avis concernant l'amendement n° 109 .
Il est positif sur le n° 109.
Je vais retirer mon amendement, parce que nous essayons tous de faire des pas en avant.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Mais j'aimerais que vous cessiez de croire que vous pouvez faire consensus tout seul, comme vous l'avez fait en commission. Je reconnais que votre texte reprend de nombreuses propositions formulées dans mon rapport, qui avait été demandé par le Gouvernement. Mais je vous en supplie, monsieur le rapporteur, faites des pas en avant pour que nous puissions adopter ensemble cette proposition de loi. Je retire l'amendement n° 106 , mais je vous demande de reconsidérer votre position sur l'amendement n° 109 .
L'amendement n° 106 est retiré.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 52 .
Il vise à supprimer les alinéas 4 à 8 de l'article 1er , qui conduiraient à interdire la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché à titre onéreux ou gratuit d'un certain nombre de produits d'ici 2026. Je l'ai déjà dit : une telle échéance me paraît très prématurée, d'autant que, comme certains orateurs l'ont dit avant moi, aucune étude d'impact n'a été fournie pour évaluer les conséquences de ces interdictions pour notre industrie.
Je le répète, des mesures votées par notre assemblée pour interdire certains produits, pendant cette législature ou la précédente, l'ont été beaucoup trop rapidement : on s'est rendu compte, par la suite, de toutes les conséquences négatives qu'elles pouvaient avoir. On ne peut pas voter des interdictions à l'emporte-pièce, en l'absence de produits de substitution ou de solutions alternatives, que ce soit pour notre industrie ou, bien entendu, pour la protection de notre santé et de l'environnement.
L'adoption de votre amendement enlèverait toute ambition au texte. Avis défavorable.
Je ne sais pas quoi dire ! Vous souhaitez supprimer plusieurs alinéas auxquels le Gouvernement est opposé, pour les raisons que j'ai mentionnées tout à l'heure, mais vous en gardez d'autres auxquels nous sommes tout aussi opposés.
Une interdiction générale des Pfas dans les textiles en 2030, que votre amendement conduit de fait à privilégier, ne nous semble pas forcément opportune. Avis de sagesse.
L'amendement n° 52 n'est pas adopté.
Dans l'esprit de l'amendement que j'avais défendu tout à l'heure, celui-ci vise à adapter le calendrier du texte à celui de l'Union européenne. Conserver l'article 1
Par conséquent, mon amendement vise à modifier le calendrier prévu afin d'éviter qu'il ne devance les prochaines dispositions européennes.
Je m'en suis expliqué tout à l'heure : repousser de plusieurs années toute avancée entraînerait un problème de santé publique. Chaque mois et chaque année que nous perdons, ce sont des vies humaines en moins. Avis défavorable.
Avis favorable : l'amendement est parfaitement cohérent avec tout ce que je raconte depuis quelques heures.
L'amendement n° 79 n'est pas adopté.
Je tiens d'abord à signaler qu'il est assez étrange de voir le ministre régulièrement désavoué par sa propre majorité – enfin, minorité.
Oh, vous savez…
Exclamations sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
L'amendement n° 40 est un amendement d'appel, dont l'objectif est de mettre le sujet sur la table : il faut que les choses soient dites. Il est évident que si l'on interdit la fabrication de certains produits contenant des Pfas, il faut également en interdire l'importation sur notre sol. Toutefois, une telle interdiction serait-elle suivie d'effet ? Les services chargés des vérifications nécessaires en auront-ils les moyens, sachant qu'elles sont particulièrement complexes à réaliser et que peu de laboratoires en ont la capacité ? La France fera-t-elle ce qu'il faut pour tenir cet engagement ? Quels seront les moyens dont disposeront les agents de l'État ? Les importations de ce type de produits ont-elles été quantifiées ?
En commission, le rapporteur soulignait, à juste titre, la qualité des agents de la DGCCRF. Le Gouvernement peut-il nous assurer qu'ils seront pourvus d'une formation et de moyens suffisants pour contrôler la bonne application d'une telle interdiction ?
Je m'en suis en effet expliqué en commission. La DGCCRF accomplit un travail formidable – je citais tout à l'heure les exemples du bisphénol A, du colorant E171 (dioxyde de titane) ou du bœuf aux hormones : on a su contrôler par le passé, et j'ai pleinement confiance en l'administration pour mener ce travail.
Retirer les importations du texte, comme vous le proposez, me semble en contradiction avec l'esprit du texte. Avis défavorable.
Avis défavorable. J'y vois un amendement d'appel, qui vise à interroger les modalités de contrôle des interdictions prévues par la proposition de loi, dont j'ai bien dit dans mon intervention liminaire qu'elles étaient totalement inopérantes. En effet, si l'on interdit le passage des 5 000 Pfas présents dans tous les textiles à nos différentes frontières – franco-allemande, franco-belge, franco-espagnole ou franco-italienne –, nos douaniers, qui ont tout de même autre chose à faire, auront beaucoup de mal à procéder aux contrôles nécessaires.
Des actions coordonnées de contrôle sur les réglementations en matière de produits chimiques ont évidemment lieu chaque année à l'échelle européenne, car c'est à ce niveau – je l'ai dit et je le répète – qu'il faut agir.
Si le règlement Reach décide d'autoriser certains Pfas pour certains usages, ces substances feront également l'objet d'un contrôle au niveau européen. De telles mesures ont du sens à l'échelle européenne…
…mais au niveau national, elles introduisent malheureusement beaucoup de complexité, des coûts supplémentaires, y compris – sans doute – administratifs, et de l'inefficacité. Avis défavorable, donc, à défaut d'un retrait.
Les réponses très optimistes du rapporteur et celles, plus réalistes, du Gouvernement, sont conformes à ce que nous attendions. Nous allons bien évidemment retirer cet amendement, qui était un amendement d'appel ; au moins, les choses ont été dites.
L'amendement n° 40 est retiré.
Je défendrai en même temps l'amendement n° 80 , qui fait partie de la discussion commune. La gauche, qui est l'avant-garde du Gouvernement pour ruiner économiquement la France ,
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
Sachez que l'industrie concernée représente plus de 10 000 entreprises et 600 000 emplois en France.
Ces entreprises travaillent déjà sur des solutions de rechange aux Pfas ; celles-ci ne sont certes pas encore abouties, mais cela ne se fait pas en un claquement de doigts ! Les Pfas sont utilisés dans la fabrication de plus de 10 000 produits ! Elles sont nécessaires et indispensables notamment dans les ustensiles de cuisine, dont il a été question tout à l'heure : on ne peut pas les supprimer comme ça ! Sinon, vous allez ruiner ce qui reste de l'industrie française.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Alors cessons de mener des politiques ruineuses et brouillonnes : laissons le temps au temps…
Laissez-moi parler ! Laissons le temps aux entreprises de trouver des produits de substitution aux Pfas !
Mêmes mouvements.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – « C'est ridicule ! » sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur les amendements identiques n° 1 , 7 , 18 , 30 et 80 , par les groupes Renaissance, Rassemblement national, Les Républicains et Écologiste – NUPES ; sur les amendements identiques n° 92 , 99 et 107 , par le groupe Renaissance, et sur le sous-amendement n° 124 , par le groupe Écologiste – NUPES.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Pierre Vatin, pour soutenir l'amendement n° 7 .
Comme nous l'avons dit lors de la discussion générale, nous souhaitons supprimer l'alinéa 5 de l'article 1er , afin de retirer tout ustensile de cuisine contenant des substances perfluoroalkylées ou polyfluoralkylées de la proposition de loi. Il est évident que nos industriels ne peuvent effectuer cette transition sans prendre un temps incompressible – nous l'avons déjà expliqué. J'insiste donc fermement là-dessus, afin que nos entreprises puissent assurer la mutation que nous leur demanderons dans un délai raisonnable.
Il vise à supprimer l'alinéa 5 de l'article 1er , et donc à exempter les ustensiles de cuisine contenant des substances perfluoroalkylées ou polyfluoralkylées de l'interdiction de fabrication. En effet, la rédaction actuelle de l'article ne fait aucune distinction entre les Pfas préoccupants et les autres, notamment les fluoropolymères, aux caractéristiques chimiques particulièrement utiles et dont l'innocuité est avérée ; une telle distinction est pourtant indispensable si nous voulons maintenir la compétitivité et la souveraineté industrielle de la France.
On l'a dit, il n'est pas si facile de trouver des produits de substitution. En aura-t-on d'ici 2026 ? Non ! Il arrive même que le remède soit plus nuisible que le mal. Par exemple, les plastiques à usage unique ont été interdits et remplacés par des cartons ; or ces cartons ne sont pas imperméables. Qu'a-t-on mis à l'intérieur ? Des Pfas ! Je pense aussi aux pailles en carton importées, qui remplacent les pailles en plastique : elles contiennent aussi des Pfas.
Ce sont des milliers d'emplois qui sont en jeu et, comme l'ont dit les salariés de l'entreprise Seb, supprimer cette partie du texte – l'alinéa 5 – reviendrait à maintenir des emplois. S'ils perdent leur travail, ce seront aussi leurs familles qui en souffriront : il faut les entendre !
Par ailleurs, une telle interdiction pousserait à la destruction immédiate de tous ces articles, ainsi que des pièces détachées destinées à leur réparation, qui ne contiennent pas de Pfas. Cela irait totalement à contre-courant de l'excellente loi Agec, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, que nous avons votée.
Comme évoqué tout à l'heure, cet amendement vise à permettre aux industries de prendre le temps de développer d'autres techniques. Il entend décaler l'interdiction appliquée aux ustensiles de cuisine au 1er janvier 2030. En effet, qu'il s'agisse des industries cosmétiques, du fart ou de l'industrie textile d'habillement, les fabricants d'ustensiles ne seront pas prêts d'ici deux ans.
Cependant, comme ces produits sont utilisés au quotidien, il apparaît important de prévoir une interdiction à terme, en donnant un calendrier précis aux acteurs de la filière. C'est un message très important qu'il faut leur adresser, dans le cadre de l'anticipation de la révision du modèle de production et de l'interdiction des Pfas.
L'adoption de l'amendement permettrait également d'articuler l'interdiction des produits textiles et des ustensiles de cuisine contenant des Pfas avec les futures mesures de restriction européennes en cours d'élaboration, dans le cadre du règlement Reach. Tant pour les textiles que pour les ustensiles, le cadre européen semble être le plus approprié pour définir une trajectoire de sortie des Pfas de ces secteurs.
La parole est à Mme Claire Colomb-Pitollat, pour soutenir l'amendement n° 99 .
J'aurai les mêmes arguments que ma collègue Anne-Cécile Violland pour présenter cet amendement qui tend à décaler l'interdiction appliquée aux ustensiles de cuisine au 1er janvier 2030. Les ustensiles de cuisine relevant de notre quotidien, il apparaît important de prévoir une interdiction à terme et de donner un calendrier précis aux acteurs de cette filière.
L'adoption de l'amendement permettrait également d'articuler l'interdiction des produits textiles et des ustensiles de cuisine contenant des Pfas avec les futures mesures de restrictions européennes en cours d'élaboration dans le cadre du règlement Reach. Encore une fois, ce règlement doit faire foi sur les usages. Tant pour les textiles que pour les ustensiles, le cadre européen semble être le plus approprié. Nous devons suivre ces révisions et prévoir une clause-filet au cas où elles s'appliqueraient plus rapidement que ce texte.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l'amendement n° 107 .
Il s'agit d'un amendement commun aux trois groupes de la majorité. Monsieur le rapporteur, êtes-vous prêt à un compromis ? Il y a trois façons de voir les choses. Certains veulent supprimer l'alinéa 5, pour mettre de côté les ustensiles de cuisine. Vous souhaitez, de votre côté, les interdire dès 2026. La majorité, quant à elle, tient à trouver un consensus. Nous proposons donc l'horizon 2030 car nous espérons bien que, d'ici là, l'Europe aura avancé grâce au règlement Reach et que nous aurons une meilleure connaissance scientifique des polymères.
Il est important que vous vous prononciez maintenant, avec les groupes de l'opposition. Si vous êtes prêts à un compromis, dites-le. Nous ne voterons pas la suppression et nous trouverons un accord.
En revanche, si vous refusez le compromis pour vous en tenir à l'horizon 2026, si vous décidez de retoquer notre amendement, nous serons obligés de voter la suppression de l'alinéa. Monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les écologistes, vous avez le sort de ces amendements entre vos mains. Je vous remercie de préciser ce que vous allez faire.
La parole est à M. Charles Fournier, pour soutenir le sous-amendement n° 124 .
Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous nous avez reproché de « balancer » des études. Mais j'ai entendu toute une série d'arguments qui faisaient référence à des études scientifiques ! Y aurait-il donc les bons et les mauvais scientifiques ?
Nous avons étudié ce que disent les scientifiques.
Mme Marie Pochon applaudit.
Ils sont largement d'accord entre eux et je ne me permettrai pas d'affirmer que certains Pfas seraient dangereux et pas d'autres. Je lis ce qu'écrivent les scientifiques car notre rôle est de prendre des décisions politiques à partir de leurs études.
Ensuite, quand je vous invite à regarder le film Dark Waters, ce n'est pas pour vous proposer une bonne soirée mais pour vous sensibiliser à la gravité du problème : le film montre en effet comment la plus grande étude épidémiologique de l'histoire mondiale, menée auprès de 69 000 personnes, a révélé l'extrême dangerosité des Pfas et la nécessité d'agir pour nous en protéger.
Le rapporteur a accepté de faire des compromis et de reculer des dates.
Je vous propose un nouveau compromis. L'horizon 2030, c'est dans six ans ! Allons-nous expliquer à nos concitoyens que nous nous occuperons des ustensiles de cuisine, qui sont dans leur maison, dont ils se servent dans la vie courante, dans seulement six ans ?
Non, nous vous proposons l'horizon 2027, ce qui laisserait trois ans aux industriels pour changer les chaînes de production.
Permettez-moi de rappeler que, pendant le covid, nous avons su adapter très rapidement les chaînes de production, afin de leur donner d'autres usages. Chez moi, dans l'industrie cosmétique, on a su fabriquer du gel hydroalcoolique en quelques mois. Nous savons le faire, c'est possible. Trois ans est un délai raisonnable et j'espère que vous accepterez ce nouveau compromis.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Je vais essayer de répondre méthodiquement à ces nombreuses propositions. Je suis opposé à une suppression totale de l'alinéa 5. Il existe des ustensiles de cuisine alternatifs, sans polluants éternels.
Ils sont déjà commercialisés par les marques que nous avons citées. Je pense, par exemple, aux ustensiles en inox. L'Agence européenne des produits chimiques a pris soin d'identifier les produits pour lesquels il est possible de se passer des polluants éternels immédiatement, sans dérogation. Les ustensiles de cuisine en font partie.
Ma proposition de loi ne fait que s'aligner sur les recommandations de cette agence et sur le rapport de notre collègue Isaac-Sibille.
Ensuite, je dois répondre à un autre argument : celui de l'emploi. Rappelons le contexte actuel. Nous parlons du scandale sanitaire des polluants éternels qui a éclaté aux États-Unis il y a vingt-cinq ans. Des industries y sont traînées devant les tribunaux et payent des dizaines de milliards pour éviter des procès.
En Europe, cinq pays ont saisi l'Agence européenne pour interdire largement les Pfas. Les consommateurs sont de plus en plus sensibilisés et vigilants quant à la présence de Pfas dans les produits. Dans ce contexte, un industriel annonce qu'il mise son avenir sur les polluants éternels.
Ce qui menace l'emploi, ce n'est pas une réglementation visant à protéger la santé publique mais le manque d'anticipation de la sortie du Téflon.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES.
Vous pourrez le vérifier : la sortie totale du Téflon était annoncée dès le début des années 2010 par certaines des marques que nous avons évoquées mais, faute de réglementation, les industriels ont laissé traîner.
Mme Véronique Riotton s'exclame.
Et aujourd'hui, on voudrait demander encore des délais pour gagner une dizaine d'années. Je le répète, ce qui pose problème pour l'emploi, c'est un flagrant délit de manque d'anticipation et non pas une norme supplémentaire de santé publique. Je m'oppose donc à la suppression de la mention des ustensiles de cuisine dans le texte.
Cependant, une démarche de compromis est proposée.
Cela a été mon état d'esprit tout au long des débats en commission. Je vais être très clair sur mes avis.
M. Cyrille Isaac-Sibille s'exclame.
Laissez-moi donc m'expliquer. Mon collègue Fournier a proposé une solution de compromis pour porter l'échéance à 2027. Je donne un avis favorable à ce sous-amendement, car ce délai me semble raisonnable. Néanmoins, je comprends aussi votre démarche, qui consiste, non pas à revenir sur l'interdiction des ustensiles de cuisine contenant du Pfas mais à la reporter à l'horizon 2030. Je m'en remets à la sagesse de l'assemblée pour cette proposition de la majorité.
Si je comprends bien, vous donnez un avis favorable à l'amendement s'il est sous-amendé et un avis de sagesse s'il ne l'est pas.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Nous sommes au cœur de ce qui nous oppose, à la fois dans la démarche et dans l'analyse. M. le rapporteur a parlé de l'entreprise que nous évoquons tous sans oser prononcer son nom, comme dans Harry Potter : Seb, connue de tous les Français, dont les produits sont appréciés dans notre pays et dans le monde entier. Cette entreprise contribue positivement à la balance commerciale mais aussi à une économie plus durable, en proposant par exemple aux consommateurs de rapporter les produits pour les recycler. C'est une entreprise exemplaire du point de vue environnemental – même pour ce qui concerne les Pfas.
Selon M. le rapporteur, les industriels auraient, en quelque sorte, dormi au gaz en attendant que la réglementation européenne les force à sortir des Pfas. Veuillez m'écouter, s'il vous plaît.
Seb a cessé d'utiliser du PFOA en 2012. Le PFOA permettait de coller le revêtement antiadhésif aux poêles Seb. La réglementation européenne l'a interdit en 2020. Il est donc malheureux de pointer du doigt l'une des entreprises les plus exemplaires.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Je ne suis pas l'avocat des industriels. Je le répète une dernière fois, personne, sur ces bancs ou au Gouvernement, ne souhaite sacrifier la santé des Françaises et des Français à l'emploi. Personne ! Arrêtons les jugements pseudo-moraux qui opposent les méchants industriels polluants aux gentils sanitaires anti-européens. J'en ai marre d'entendre ça !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Par ailleurs, nous nous opposons sur la méthode. Si nous retrouvons le calme, madame la présidente, je pourrai peut-être expliquer en quoi ces amendements le montrent. Depuis plus de dix ans, le PTFE remplace le PFOA dans les poêles Tefal. Il sera vraisemblablement considéré comme étant un Pfas non dangereux. Je crois à la science et je m'en remets à l'avis des autorités européennes.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Aujourd'hui, en tout cas, sa bien moindre dangerosité que les autres fait consensus. Pourtant, au fil des amendements, nous débattons de son interdiction en 2026, 2027 ou 2030, alors que, d'ici 2027, vous aurez l'avis de l'Autorité européenne.
Cet avis, qui est rendu par une instance indépendante, permettra de prendre des décisions éclairées. Je suis, bien évidemment, favorable aux amendements de suppression et j'inviterai à retirer les amendements qui visent à reporter l'interdiction aux calendes grecques car il serait incohérent de prendre une telle décision alors que, d'ici là, nous aurons obtenu un avis qui nous conduira soit à autoriser ces produits soit à les interdire !
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à onze heures cinquante-cinq.
Je souhaite revenir sur l'un des sujets qui bloque nos débats depuis le début, celui des ustensiles de cuisine au sens large – pas uniquement les poêles. Le rapporteur nous a proposé une solution de compromis qui nous semble acceptable.
Nous ne sommes ni les amis, ni les ennemis, de l'industrie mais je voudrais vous citer l'exemple de l'usine Daikin qui vient d'inventer un nouveau Pfas, le bisphénol A fluoré, comme le révèle l'enquête de France 3 Rhône-Alpes. Alors que nous discutons, de nouveaux Pfas arrivent sur le marché !
C'est pourquoi il faut légiférer, et vite. Le délai de trois ans que nous proposons est raisonnable. Il permet de modifier les chaînes de production et l'organisation industrielle sans supprimer d'emplois.
Il est temps d'agir. Je vous invite à voter notre sous-amendement.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Monsieur le rapporteur, chers collègues vous ne pouvez décréter le consensus seuls.
Nous avions proposé un amendement de compromis.
Mais le rapporteur a réservé un traitement inégal aux propositions en rendant un avis favorable au sous-amendement de son collègue Fournier qui visait à reporter l'interdiction à 2027.
Oui « sagesse » s'agissant de notre amendement. Il y a donc bien un décalage.
Ce vote est important. S'il avait rendu un avis favorable aux deux, la situation aurait été différente. Nous vous avions tendu la main
M. Charles Fournier et Mme Marie Pochon font « non » de la tête
et nous souhaitions un compromis. Vous ne nous tendez pas la main si vous proposez 2027 !
Vous voulez arriver au compromis seuls !
Nous n'avons plus confiance dans vos avis, monsieur le rapporteur. C'est pourquoi le groupe Démocrate votera pour la suppression de l'alinéa 5.
Messieurs les écologistes, vous êtes trop équivoques dans vos prises de parole !
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 246
Nombre de suffrages exprimés 241
Majorité absolue 121
Pour l'adoption 128
Contre 113
Mme Edwige Diaz et M. Emeric Salmon applaudissent.
Il relève du bon sens : les vêtements de protection destinés aux professionnels de la sécurité et de la sécurité civile doivent pouvoir déroger à l'interdiction des textiles d'habillement.
Brouhaha.
Ces vêtements sont conçus pour la protection des personnes qui accomplissent des missions de défense ou de sécurité civile – leur liste sera précisée par décret.
La parole est à Mme Claire Colomb-Pitollat, pour soutenir l'amendement n° 101 .
Il s'agit du même amendement : il vise à préciser que les textiles d'habillement bénéficiant d'une dérogation à l'interdiction prévue par le texte sont destinés à l'habillement des professionnels travaillant dans le domaine de la protection des personnes.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l'amendement n° 108 .
C'est l'occasion pour moi d'évoquer les pompiers, qui manipulent des Pfas tous les jours. Pour éteindre des feux d'hydrocarbures ou de voitures, les pompiers ont besoin d'émulsifiants. Or ces émulsifiants sont des Pfas – c'est dire leur intérêt dans certaines situations. Aussi les pompiers doivent-ils porter des vêtements pour s'en protéger ; d'où cet amendement.
Vous proposez de préciser le périmètre des dérogations à l'interdiction, afin d'y inclure tous les textiles d'habillement conçus pour la protection des personnes. Ceci me paraît pertinent et va dans le sens du texte ; j'émets donc un avis favorable.
Même avis.
Je suivrai l'avis du rapporteur, mais je voudrais revenir sur le vote qui vient d'avoir lieu et qui a abouti à supprimer l'interdiction des Pfas dans les ustensiles de cuisine ; il n'est pas anodin. Nous avons tous grandi en suivant cette consigne : « Attention à ne pas gratter la poêle avec la fourchette ! », consigne qui s'expliquait par la présence de PFOA dans les poêles – aujourd'hui elles contiennent du PTFE. Or que retrouve-t-on, aujourd'hui encore, dans les rejets de l'usine Tefal de Rumilly ? Du PFOA. Ce que vous qualifiez de « sûr » ne l'est pas ! Aucun consensus scientifique ne soutient une telle affirmation. Par ce vote, vous venez de faire gagner encore un peu plus de temps à une industrie, au détriment de la santé des Français !
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
C'est vous qui établissez une hiérarchie, en mettant l'industrie au-dessus de la santé !
Les seuls qui garantissent l'industrie et la santé, ce sont les députés écologistes et les députés de gauche, voilà la vérité ! Nous avions négocié un compromis : au départ, l'interdiction devait intervenir en 2025 ; puis nous sommes convenus de la reporter à 2027 ; puis 2028 ; et le rapporteur a finalement émis un avis de sagesse sur l'amendement retardant l'échéance à 2030. Nous avons construit un compromis pas à pas, afin de fixer un horizon : vous l'avez refusé !
Mmes Marie Pochon et Raquel Garrido applaudissent.
L'avis favorable du rapporteur émis à l'instant démontre, de nouveau, notre capacité à trouver des compromis. La suppression de l'alinéa 5 de l'article 1
Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo – NUPES, LFI – NUPES et GDR – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC.
Vous m'avez tout autant déçu, madame Chatelain, lors du vote qui vient d'avoir lieu.
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Lors des négociations qui se sont tenues hier encore, vous ne vouliez pas du sous-amendement repoussant l'interdiction à 2030 ! Disons les choses devant la nation ! Que le rapporteur donne un avis asymétrique en préférant une interdiction à partir de 2027…
…à un amendement de compromis repoussant l'échéance à 2030, on peut le regretter.
Mêmes mouvements.
On peut en revanche s'accorder sur un point : l'article 1
On constate une fois de plus, et j'en suis désolé, le caractère…
…inefficace voire potentiellement contre-productif de votre texte.
Je vends du poison ?
Pardonnez-moi, madame la députée, mais si l'on pouvait éviter les noms d'oiseaux et les caricatures…
Exclamations sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – Brouhaha.
Puis-je expliquer la raison pour laquelle, dans le cas d'espèce, vous apportez la preuve flagrante que votre approche à sens unique est contre-productive, ou vais-je me faire insulter à chaque fois ?
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem. – Protestations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Vous avez le choix : soit vous me traitez de tous les noms à chacune de mes interventions, mais j'utiliserai tout de même mon temps de parole ; soit j'essaie de vous montrer de manière raisonnable, en conservant le ton qui a été le mien jusqu'à présent, en quoi plusieurs dispositions du présent texte sont inopérantes.
Vous vous dites prêts, dans votre grande sagesse, à attendre 2030. D'ici là, grâce à l'Agence européenne des produits chimiques, à laquelle je souhaite me référer, nous connaîtrons la vérité ! D'ici à 2027, elle nous aura peut-être avertis des dangers de certains produits.
Nous proposerons alors des réglementations pour les interdire.
Cette agence nous dira peut-être aussi, ce qui semble le plus probable au vu des analyses, que ces produits ne sont pas dangereux ! Vous aurez alors voté…
Il ne s'agit pas du principe de précaution en l'occurrence, puisque vous dites « Ceinture, bretelles et airbags » alors même que nous ne sommes pas encore en route !
Quand l'Echa rendra son avis, vous aurez voté l'interdiction d'un produit jugé non dangereux…
On avait dit que ce n'était pas dangereux au début, mais maintenant ça l'est !
Entre-temps, la production aura évidemment été exportée ailleurs.
Exclamations sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Nous ne pourrons plus les produire, mais nous aurons toujours des poêles au revêtement antiadhésif ! Celles-ci ne seront toujours pas dangereuses… elles auront seulement – et c'est la seule différence – été fabriquées hors de France.
L'amendement n° 53 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 54 .
Par cet amendement, je propose de supprimer l'alinéa 9 de l'article 1er qui vise à interdire, à compter du 1er janvier 2030, la fabrication, l'importation et l'exportation et la mise sur le marché à titre onéreux ou gratuit de tout produit textile contenant des polluants éternels, et ce pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment : cette interdiction est trop rapide, elle menace notre industrie.
Sagesse.
L'amendement n° 54 n'est pas adopté.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l'amendement n° 111 .
Nous avons adopté des amendements et j'espère que nous adopterons l'article 1er . En interdisant les textiles, nous sommes en avance, en Europe…
M. Sébastien Jumel se tourne vers les bancs des groupes RE et Dem.
…et nous envoyons ainsi un message intéressant à nos voisins. En revanche, si l'Union européenne venait à prendre des mesures légèrement différentes, il faudrait se coordonner. Tel est l'objet de cet amendement.
Votre amendement tend à faire primer un éventuel cadre européen qui réglementerait l'usage des Pfas dans les produits textiles. Je m'y oppose pour une bonne et simple raison : le présent texte va plus loin et assurément plus vite. Il n'est pas non plus inutile de rappeler que les règlements européens s'appliquent de plein droit. Avis défavorable.
J'ai entendu M. Jumel, pour ne pas le citer, dire que nous avions délocalisé toute l'industrie textile. Nous sommes justement en train de la relocaliser !
« Oh… » et exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Sourires sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
Eh oui ! L'entreprise Petit Bateau augmente ses lignes de production à Troyes, dans l'Aube !
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Cyrille Isaac Sibille applaudit également.
Des start-up très performantes se relocalisent en France. On a l'espoir de refaire du textile made in France, y compris du textile technique, du textile recyclé, y compris…
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Brouhaha.
Je suis désolé, madame la présidente, mais il est difficile de poursuivre dans ces conditions. Hurlez tant que vous voulez !
Même pour les JO, vous n'avez pas fait appel à des entreprises françaises !
Même pour les JO, vous n'avez pas fait appel à des entreprises françaises !
La France comptait en 2023 une vingtaine d'usines en plus par rapport à l'année précédente. Vous pouvez brailler et hurler, c'est la réalité. J'expose des faits : oui, nous créons des entreprises qui fabriquent des textiles techniques, des textiles sportifs, des chaussures de sport, des tee-shirts et des shorts de running qui sont compétitifs. On peut considérer que cela importe peu, et continuer à importer des tee-shirts fabriqués ailleurs parce qu'on ne peut pas le faire sur notre sol, ou alors – et c'est la raison pour laquelle je suis favorable à l'amendement – on peut reconnaître qu'on est allé un peu trop loin en votant des lois qui vont au-delà de la réglementation européenne pourtant fondée sur les analyses d'une agence indépendante et qu'il faut donc se conformer à la réglementation européenne !
Mme Sandra Marsaud et M. Cyrille Isaac-Sibille applaudissent.
Je ne comprends pas comment des partis, des mouvements ou des groupes qui se prétendent pro-européens peuvent en arriver à penser qu'ils connaissent mieux la situation que tous les autres, et qu'ils peuvent donc conserver leur législation visiblement inadaptée en dépit de l'adoption d'une nouvelle réglementation européenne…
« C'est pas grave, on garde notre truc ! L'Europe ? On s'en moque ! » : je trouve ça franchement décevant de la part de partis qui se prétendent pro-européens.
Protestations sur les bancs du groupe Écolo – NUPES.
Quant à vous, si vous étiez pro-européen, vous appliqueriez les directives européennes sur notre sol !
Appliquons les directives européennes et cessons de les surtransposer, cela n'a que trop duré : depuis des années, nos industriels et nos agriculteurs en meurent. Libre à vous de continuer !
Nous sommes évidemment opposés à l'amendement. Par ailleurs, je rappelle au ministre que l'on peut être pro-européen et critiquer les décisions européennes…
…lorsqu'elles ne sont pas bonnes – et cela arrive régulièrement. De fait, on constate, depuis peu, la constitution, au niveau européen, d'une sorte d'alliance contre les mesures écologiques. Ce n'est pas parce que nous nous opposons aux décisions qui ne vont pas dans le bon sens que nous sommes anti-européens : nous sommes des Européens convaincus qui se battent pour que l'on adopte de bonnes mesures.
En l'espèce, nous voulons des règles plus exigeantes. La révision du règlement Reach a été reportée : à chaque fois que des avancées écologiques sont proposées, l'ensemble de la droite s'unit pour s'y opposer.
Vous porterez la responsabilité de cette absence de décision, à l'échelle européenne comme à l'échelle nationale !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Écolo – NUPES.
On verse dans la caricature à force de vouloir construire des clivages là où il n'y en a pas. Tout le monde veut protéger la santé
« Non ! » sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES
et prolonger l'espérance de vie, à commencer par l'industrie, qui est à l'origine de nombreux progrès.
Le confort dans lequel nous vivons et l'amélioration de notre santé, nous les devons à notre capacité de produire à grande échelle des solutions aux problèmes environnementaux et sanitaires. L'accroissement du confort quotidien de nos concitoyens contribue lui-même à améliorer leur santé.
Mais lorsqu'on cherche à isoler l'Europe du reste du monde, on handicape notre industrie…
…et, in fine, on délocalise la pollution dans des pays qui n'ont pas, comme nous, les moyens de la réduire et d'innover. Des mesures telles que celles que vous proposez ont ainsi coûté, il y a quelques semaines, soixante-dix emplois dans ma circonscription. De fait, si l'on ne produit plus en France, on le fera à l'autre bout de la planète. La production ne s'arrête pas ; elle se fait ailleurs.
Oui à l'exigence, à condition qu'elle nous permette de continuer à produire et à avancer. J'ajoute que les risques doivent être clairement identifiés et certains...
…et non s'apparenter à des peurs dont on espère, à quelques semaines des élections, qu'elles mobiliseront les électeurs. La peur, en politique, a toujours conduit à des catastrophes démocratiques !
Exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 183
Nombre de suffrages exprimés 164
Majorité absolue 83
Pour l'adoption 76
Contre 88
L'amendement n° 111 n'est pas adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – Mme Ségolène Amiot et M. Sébastien Delogu applaudissent également.
Par cet amendement, nous proposons d'autoriser, dans certaines conditions, fixées par décret, des dérogations aux interdictions prévues à l'article 1er . Nous l'avions déposé dans l'hypothèse notamment où l'alinéa 5 aurait été maintenu, mais il conserve sa pertinence.
L'alinéa 8, par exemple, ne prévoit pas d'exception pour les vêtements de protection portés par des professionnels autres que ceux exerçant dans les secteurs de la sécurité ou de la sécurité civile. Or des vêtements utilisés dans l'industrie ou le secteur du bâtiment et travaux publics (BTP) peuvent contenir des Pfas. Il convient donc de laisser le temps à ces filières de trouver une alternative qui ne mette pas en danger le personnel.
L'amendement n° 55 de Mme Emmanuelle Ménard est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Même avis que le rapporteur.
J'écoute attentivement nos débats, et je dois dire qu'il y a tout de même un truc insupportable à entendre pour un élu qui a grandi et vit encore dans un bassin industriel.
Vous avez laissé notre industrie se faire laminer, pendant des années, à force de renoncements et d'abandons de souveraineté qui ont provoqué des drames humains et des saignées dans nos territoires.
Ce qui a produit cette situation, ce ne sont pas les règles environnementales ,
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo – NUPES
c'est le fait que les tauliers, les libéraux, bref : les politiques qui se sont succédé, ont considéré qu'il fallait permettre à des gens de faire du pognon partout dans le monde, au détriment des salariés et de leurs familles.
Même mouvement.
C'est vrai pour le textile, la sidérurgie, l'automobile : tous les secteurs industriels !
Entendre des élus de droite et d'extrême droite, des libéraux, verser des larmes de crocodile et prétendre que l'écologie serait responsable des délocalisations, ce n'est pas acceptable, notamment pour le député communiste que je suis !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
Vous avez laissé faire : la crise du covid a montré à quel point vous avez renoncé à des pans entiers de notre souveraineté et, à présent, vous nous donnez des leçons ! C'est inacceptable, malhonnête et hypocrite !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES, LFI – NUPES et SOC.
La parole est à M. François Ruffin.
Vous êtes pour l'amendement, n'est-ce pas, monsieur Ruffin ?
Je soutiens les propos du collègue Jumel.
Nous avons perdu 2 millions d'emplois industriels, notamment dans les secteurs du matériel de transport, de l'électronique et de l'électroménager.
Notre pays ne compte plus une seule usine de fabrication de lave-linge alors qu'il y en a deux dans la petite Suisse !
Qui nous fera croire que tout cela, c'est la faute des contraintes environnementales et de l'écologie ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES et sur quelques bancs du groupe SOC.
C'est la faute des gouvernements qui se succèdent depuis quarante ans et qui ont fait le choix de la mondialisation, de l'Europe du marché et du seul marché !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous devons transformer notre économie, notre industrie, notre énergie, pour affronter la catastrophe écologique en cours. Pour les poêles, on veut se donner une décennie pour résoudre le problème, alors qu'on doit relever un défi : transformer tout le reste. Or nous ne pourrons le faire que si les pouvoirs publics, l'État, la politique protègent la santé mais aussi l'emploi des salariés.
Si nous disons aux gens, aux salariés et aux ouvriers, qu'il va falloir changer, sans les rassurer en leur offrant la possibilité de changer de métier, ça va craquer ! Par conséquent, ce que devrait faire le Gouvernement, monsieur le ministre, c'est créer un contrat de sécurité professionnelle pour les salariés.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs des groupes Écolo – NUPES et GDR – NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.
Or vous faites tout l'inverse : réforme après réforme, vous installez la précarité et l'instabilité !
Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo – NUPES. – M. Sébastien Jumel applaudit également.
Mes chers collègues, je vous rappelle que nous examinons ce texte dans le cadre d'une niche parlementaire. Désormais, je donnerai donc la parole à un orateur pour et à un orateur contre l'amendement.
La parole est à M. le ministre délégué.
MM. Jumel et Ruffin nous donnent des leçons dont l'un et l'autre ont le secret.
Un peu de respect, monsieur le ministre : arrêtez de nous parler de cette manière !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Protestations sur les bancs du groupe RE.
Monsieur le député Corbière, je vais répéter exactement ce que je viens de dire et vous m'expliquerez en quoi je vous ai manqué de respect, à vous ou à qui que ce soit.
Vous arrivez comme un cow-boy et vous parlez mal aux députés ! D'accord ?
Monsieur Corbière, M. le ministre répond à une interpellation – s'il ne vous répondait pas, le problème serait différent. Nous allons donc l'écouter.
Je ne vais pas répondre à M. Corbière, en définitive ; je vais le laisser hurler. Et, ce disant, je ne lui manque pas de respect : je l'ai entendu alors qu'il ne s'exprimait même pas au micro.
MM. Ruffin et Jumel, disais-je, nous ont donné une leçon dont ils ont le secret.
Je les côtoie depuis six ans maintenant, puisque nous avons été membres de la même commission sous la précédente législature. Qu'avons-nous fait au cours de ces cinq années, monsieur Ruffin ? Nous n'avons pas détruit 2 millions d'emplois industriels.
Puis-je m'exprimer, madame la présidente ? Je suis désolé, j'essaie de garder mon calme, mais…
Monsieur le ministre, notre assemblée est un lieu de débat. Je m'efforce, depuis tout à l'heure, de faire redescendre la pression, mais je ne peux guère faire plus que demander le silence.
Nous avons créé 130 000 emplois industriels.
Je parle de créations nettes. Arrêtez, ce n'est pas possible ! C'est l'Insee qui le dit. Lorsqu'on calcule la différence entre le nombre des emplois industriels créés et le nombre de ceux qui ont été détruits, au cours des sept dernières années – car c'est ainsi que fonctionne l'économie, monsieur : des emplois sont détruits, d'autres sont créés –, on constate que le bilan de la majorité est de plus 130 000
Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit également
alors que celui des décennies précédentes a été, effectivement, de moins 2 millions.
Pourquoi a-t-on obtenu ce résultat, monsieur Jumel ? Parce que nous avons adopté des mesures courageuses
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES
contre lesquelles, du reste, vous avez voté de manière systématique – je pense à la réforme du code du travail. Il y a quinze jours, un entrepreneur m'a dit que la mesure qui lui avait permis de doubler le nombre de ses salariés, en le portant de dix à vingt, c'est la réforme des prud'hommes.
Je vous parle, madame, du dirigeant d'une PME dont le nombre de salariés est passé de dix à vingt et qui doit gagner moins d'argent que vous chaque année. Ce petit entrepreneur m'a remercié, car les mesures courageuses adoptées par la majorité ont permis de créer 130 000 emplois.
Qu'en est-il des usines ? Lorsque j'ai pris mes fonctions au ministère de l'industrie, j'ai demandé un baromètre objectif des créations et des destructions d'usines. Car, oui, monsieur le député, des usines ouvrent quand d'autres ferment – ce qui compte, c'est que les premières soient plus nombreuses que les secondes –, des lignes de production ouvrent – par exemple, chez Petit Bateau, dans l'Aube – et d'autres ferment, malheureusement, notamment à Condat, dans la circonscription de M. Peytavie. Toujours est-il que, l'an dernier, le bilan présentait un solde positif de 201 créations et, l'année précédente, de 176 créations.
Dans l'agroalimentaire, les industries vertes et l'économie circulaire, on compte près de trente usines et lignes de production supplémentaires. Je crois à l'industrie verte, au caractère éminemment industriel de la révolution écologique. Je suis sans doute l'un des ministres les plus écolos du Gouvernement !
Sourires et exclamations sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je m'attendais un peu à cette réaction. Nous allons créer de l'emploi dans l'industrie d'hier en la verdissant et dans celle de demain en favorisant son développement en France. L'an dernier, notre pays comptait dix-neuf usines textiles de plus que l'année précédente. C'est vrai, elles fabriquent les textiles de demain, des textiles techniques. Si nous adoptons une réglementation plus contraignante que les normes européennes, elles souffriront d'un déficit de compétitivité. Vous pouvez continuer à hurler : c'est la réalité.
J'ai soutenu l'amendement n° 111 , qui a, hélas, été rejeté. Je continue à penser que l'industrie est l'une des contributions essentielles à la révolution écologique.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l'amendement n° 109 .
Je vais défendre en même l'amendement n° 110 , madame la présidente.
J'ai de la suite dans les idées. Il est nécessaire de créer une filière qui englobe la fabrication, l'utilisation et la destruction des monomères. Ces produits ne font l'objet d'aucun suivi alors qu'on connaît leur dangerosité. L'amendement n° 109 , auquel M. le ministre a annoncé qu'il donnerait un avis favorable, tend à préciser la notion de monomères. Quant à l'amendement n° 110 , il vise à créer la filière que je viens d'évoquer.
Pour éviter que les monomères, qui sont dangereux, ne se retrouvent dans les différents milieux, il est important d'assurer leur suivi. Lorsque l'Agence européenne des produits chimiques a lancé une consultation sur les Pfas, elle a reçu plus de 5 000 contributions, alors qu'elle n'en avait reçu que 500 lors de sa consultation sur les plastiques. Cela signifie que tous les acteurs industriels sont concernés.
Vous proposez de renvoyer la définition des Pfas à un décret en Conseil d'État. J'ai indiqué tout à l'heure que cela ne me paraissait pas opportun. Il est en effet nécessaire de se reporter aux définitions scientifiques en retenant une acception large de la notion de Pfas. Or, si cette définition figurait dans un décret, elle serait figée. Avis défavorable.
Il est favorable. L'amendement vise à ce que les substances per- et polyfluoroalkylées soient définies par décret, ce qui serait tout à fait opportun.
La caractéristique de cette famille de plusieurs milliers de substances – dont on ne peut même pas dresser la liste complète, cela a été répété – est sa très haute persistance dans l'environnement. Préciser la notion de substances Pfas dans le cadre d'un décret nous permettrait de nous appuyer sur les travaux de l'OCDE. Ceux-ci évoluent dans le temps et la définition technique des Pfas que propose cette organisation est largement acceptée par la communauté scientifique.
Il s'agit donc d'un amendement de bon sens.
Je soutiens cet amendement en rappelant que, si l'on veut interdire, ou du moins minimiser l'usage des Pfas, il nous faut trouver des compromis et des voies de passage.
En effet, on ne peut s'opposer systématiquement à ce qui vient de l'industrie.
L'industrie française est engagée en faveur de la dépollution. Vous connaissez mon soutien à l'industrie spatiale, mais aussi mon engagement sincère en faveur de la dépollution et de la lutte contre le réchauffement climatique.
Je souhaite voter cette proposition de loi, mais si nous continuons d'échouer à trouver des compromis, au sujet des dates d'application des mesures, ou concernant les régions devant être réindustrialisées dans l'optique de créer des emplois, nous allons braquer une partie de la population, qui ne voudra plus comprendre pourquoi nous devons lutter contre les polluants et contre le réchauffement climatique.
J'y insiste : quand il existe des solutions de compromis qui nous permettent d'avancer sur nos deux jambes, il faut s'en saisir.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.
Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 189
Nombre de suffrages exprimés 189
Majorité absolue 95
Pour l'adoption 82
Contre 107
L'amendement n° 109 n'est pas adopté.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES, SOC et Écolo – NUPES.
Je l'ai dit dans ma précédente intervention et n'y reviendrai pas : selon moi, il est important de créer une filière de traitement des Pfas.
Ce qui m'étonne, particulièrement alors que nous parlons de coconstruction et de consensus, c'est que le rapporteur ait donné un avis défavorable à la définition des monomères dans la loi. Car en l'absence d'une telle définition, comment pourrions-nous créer une filière pour leur traitement ?
J'anticipe donc votre réponse au présent amendement, monsieur le rapporteur. N'allez-vous pas me dire qu'il serait très intéressant de créer une filière, mais que comme les monomères ne sont malheureusement pas définis, vous ne pouvez émettre un avis favorable ?
La parole est à M. Nicolas Ray, pour soutenir le sous-amendement n° 121 .
Il vise à préciser l'amendement de notre collègue Isaac-Sibille, car aux termes de celui-ci, tous les déchets contenant des Pfas devraient être considérés comme des déchets dangereux. Or une telle rédaction empêcherait de poursuivre le traitement habituel des déchets ne contenant qu'une quantité très minime de ces substances.
Le présent sous-amendement vise donc à fixer par décret des seuils limites de concentration de Pfas, comme il en existe pour d'autres substances. De cette manière, les déchets qui n'en contiennent qu'un faible volume pourraient être orientés vers les filières de traitement adaptées à leur dangerosité.
La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir le sous-amendement n° 126 .
L'amendement n° 110 de notre collègue Isaac-Sibille vise, d'une part, à créer un mécanisme de suivi et de contrôle des Pfas et, d'autre part, à ce que les déchets contenant des monomères de Pfas relèvent du statut des déchets dangereux. Cet amendement aurait donc pour conséquence de ne confier la destruction des Pfas qu'aux seules installations de traitement des déchets dangereux. Nous partons donc du principe que ces substances chimiques ne sont actuellement pas considérées comme des déchets dangereux et qu'elles suivent donc un processus de traitement classique, à des températures qui ne permettent pas leur destruction, provoquant ainsi leur diffusion dans l'environnement.
Il n'en demeure pas moins que les travaux scientifiques, tant au niveau français qu'au niveau européen, sont toujours en cours pour déterminer les solutions et les conditions d'élimination de ces substances. Or il est nécessaire de se fonder sur des analyses scientifiques et des méthodes éprouvées pour déterminer les solutions d'élimination les plus réalisables et efficaces possible.
L'acquisition de connaissances scientifiques sur cette vaste famille de substances, ainsi que la définition de méthodologies de caractérisation et d'analyse scientifique, sont indispensables pour que les évolutions réglementaires à venir, s'agissant aussi bien des niveaux de surveillance pour la population et les salariés que du traitement et de l'élimination des Pfas, s'appuient sur des données fiables, vérifiables et reproductibles.
Ce sous-amendement vise donc à ce que les valeurs limites de concentration de ces substances soient définies par décret, afin de déterminer les installations de traitement les plus adaptées à leur dangerosité.
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements identiques et sur l'amendement ?
Ma réponse est toujours la même. Cher collègue Isaac-Sibille, isoler les monomères parmi les Pfas, comme votre amendement tend à le faire, revient à faire une distinction qui n'est pas fondée scientifiquement.
Rien que pour cette raison, et par cohérence avec ce que j'ai dit depuis le début des débats, mon avis sera défavorable aussi bien sur les sous-amendements que sur l'amendement.
Une fois n'est pas coutume, et même si mes raisons sont différentes, mon avis sera le même que celui du rapporteur. La gestion des déchets dangereux est régie par une directive européenne. Par cet amendement, monsieur Isaac-Sibille, vous proposez d'y intégrer les Pfas par un moyen détourné, ce qui constituerait une surtransposition de fait. Nous le faisons déjà fréquemment, aussi suggérerai-je le retrait des sous-amendements et de l'amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Pendant six mois, je me suis penché sur la question des Pfas, et ce qui m'interpelle, c'est combien le groupe Écologiste s'est focalisé sur les poêles en téflon, sans considérer les tonnes de monomères actuellement répandus dans la nature, alors qu'ils ne sont contrôlés par personne. La dépollution s'effectue en effet grâce à des charbons actifs qui, à la fin, deviennent un concentrat de monomères Pfas. Or, je le répète, qui contrôle leur devenir ?
Monsieur le rapporteur, je vous suggère de lire une deuxième fois mon rapport sur les Pfas, car bien davantage que les poêles, ce qui est important, ce sont ces tonnes de monomères rejetés dans la nature sans contrôle. Si je puis comprendre la position du ministre, la vôtre, monsieur le rapporteur, qui êtes normalement sensibilisé à la question des Pfas et aux sujets environnementaux, me surprend.
Je ne comprends pas que vous donniez un avis défavorable au contrôle des monomères qui se trouvent dans la nature.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.
L'amendement n° 110 n'est pas adopté.
Les termes « eaux potables » et « eaux destinées à la consommation humaine » sont parfaitement synonymes. Le présent amendement vise donc à supprimer le pléonasme figurant à l'alinéa 11.
Votre amendement ne modifierait en rien le sens de l'alinéa 11. J'en demande donc le retrait, à défaut de quoi l'avis sera défavorable.
L'amendement n° 20 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 74 de M. le rapporteur est rédactionnel.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
L'amendement est rédactionnel, mais son adoption changerait tout de même le sens de l'alinéa 12. Les mots « cartographie », qui est l'étude des cartes, et « cartes », ne sont pas équivalents. J'aimerais donc connaître, en deux mots, le but de cette modification rédactionnelle.
Nous voulons établir une carte et non en étudier une : voilà la nuance sémantique.
L'amendement n° 74 est adopté.
Il vise à ce que la carte des sites émetteurs tienne compte de tous les types de substances définies comme des Pfas, la rédaction actuelle de l'alinéa 12 omettant de mentionner les substances polyfluoroalkylées.
Il vise tout simplement à ce que les mesures de prévention à appliquer par les personnes résidant dans des communes faisant face à un danger élevé ou très élevé d'exposition aux Pfas soient établies par les agences régionales de santé. De cette manière, les préconisations seraient mieux adaptées aux réalités locales, et donc plus pertinentes et plus efficaces.
Je vous informe que sur les amendements identiques n° 94 , 102 et 112 , dont nous venons de commencer l'examen, je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Claire Colomb-Pitollat, pour soutenir l'amendement n° 102 .
Comme l'a exposé Anne-Cécile Violland, ces amendements identiques visent à confier aux agences régionales de santé les missions d'information du public et de prévention s'agissant de l'exposition aux Pfas, afin que soient proposées les mesures les plus adaptées aux spécificités locales.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l'amendement n° 112 .
Cette question est très importante. Lorsque la pollution aux Pfas a été révélée dans le Rhône il y a deux ans, la question de la coordination de l'information s'est posée, étant donné que celle-ci émanait aussi bien de la préfecture que la Dreal et de l'ARS. Des prélèvements ont été faits dans les eaux, dans les sols, sur les poules, dans les œufs, conduisant à la collecte de milliers de données qui n'étaient pas nécessairement compréhensibles par les citoyens, ni par les élus.
Or vous ne pouvez pas imaginer la réaction d'un élu à qui on dit que des tests font état de la présence de Pfas sur son territoire, par exemple sur un terrain football, ou une butte au sein d'une école. L'élu en question, désemparé, se demande ce que cela signifie, ce qu'il doit faire, quelles préconisations il doit prendre. Quant aux citoyens, comme je le disais, eux non plus ne disposent pas toujours d'une information lisible et claire.
Ces amendements identiques sont donc importants, car ils permettraient la centralisation des informations par les ARS, qui mettraient les données à disposition du public et émettraient les recommandations adéquates. Lorsqu'on vit une crise sanitaire, le plus important est de donner une information claire et compréhensible. C'est le sens de ces amendements.
Dans sa version actuelle, l'alinéa 13 prévoit la publication de la liste des communes les plus exposées aux Pfas. Ces amendements identiques sont plus précis, en ce qu'ils visent à confier aux ARS le soin de prendre les mesures de prévention à destination des résidents de ces communes. Je leur donnerai donc un avis favorable.
Face à tant de concorde, mon avis sera également favorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 181
Nombre de suffrages exprimés 180
Majorité absolue 91
Pour l'adoption 179
Contre 1
Cet amendement vise à compléter l'amendement n° 112 qui vient d'être adopté, en proposant que les ARS fournissent une information compréhensible.
L'amendement n° 113 est retiré.
Sur l'article 1er , je suis saisie par le groupe Renaissance d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Antoine Villedieu, pour soutenir l'amendement n° 87 .
Notre connaissance en matière de Pfas est très éparse. Or si nous souhaitons les interdire, nous devons avoir une idée claire et précise des dangers que représente chaque Pfas. Il n'existe aucune classification de ces substances en fonction de leur dangerosité. Il faut d'abord cibler les Pfas les plus dangereux en vue de les interdire totalement et prendre le temps de trouver des substances alternatives moins dangereuses.
Cet amendement vise donc à ajouter une classification des Pfas selon leur dangerosité dans le rapport relatif aux normes sanitaires pour les Pfas.
Même avis.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 183
Nombre de suffrages exprimés 178
Majorité absolue 90
Pour l'adoption 14
Contre 164
L'amendement n° 87 n'est pas adopté.
L'amendement n° 43 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement, proposé par le groupe Socialistes et apparentés, vise à organiser une campagne nationale de sensibilisation pour prévenir les risques associés aux Pfas, sur lesquels je ne reviendrai pas – nous en avons malheureusement beaucoup parlé.
Il s'agit d'informer la population sur leurs dangers et à promouvoir les produits de substitution existants. Je me permets un clin d'œil : je suis Breton, je cite donc l'inusable crêpière Billig en fonte usinée ,
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES
qui permet de faire d'excellentes galettes au sarrasin en Bretagne et partout dans le monde.
En répondant à la recommandation n° 7 du rapport de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable relatif à l'analyse des risques de présence de Pfas dans l'environnement et à la recommandation n° 2 du rapport de notre collègue Cyril Isaac-Sibille, commandé par l'ancienne Première ministre, Élisabeth Borne, cet amendement s'inscrit dans une démarche proactive visant à protéger la santé publique et à limiter l'exposition aux Pfas.
Il est important que le rapport se focalise sur un seul sujet, à savoir les normes appliquées en matière de contrôle sanitaire de l'eau potable. Mon avis est donc défavorable.
Cela devient dangereux, car je suis d'accord avec le rapporteur !
Sourires. – Mme Nadège Abomangoli fait mine de rire.
J'ajoute que cet amendement est déjà satisfait, tant par notre beau débat qui a franchi le mur du son, que par le fait qu'au niveau local, les ARS et les services déconcentrés des ministères communiquent sur les dangers et les risques associés aux Pfas ainsi que sur les cas de contamination.
Je l'ai dit lors de la présentation du texte : nous avons annoncé un plan d'action ministériel dont l'un des six axes vise à mieux informer pour mieux lutter contre la pollution. À cet égard, une plaquette d'information destinée au grand public est en cours d'élaboration. Ce travail sera documenté et mobilisera des experts, notamment de Santé publique France. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable, comme le rapporteur.
L'amendement n° 6 n'est pas adopté.
Ils sont satisfaits. Demande de retrait.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 199
Nombre de suffrages exprimés 192
Majorité absolue 97
Pour l'adoption 187
Contre 5
L'article 1er , amendé, est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES et sur plusieurs bancs du groupe RE. – Mme Marie Pochon se lève.
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 1er .
La parole est à M. David Taupiac, pour soutenir l'amendement n° 51 .
Il vise à imposer aux metteurs sur le marché d'afficher clairement que leur produit contient des Pfas, par voie d'étiquetage ou, lorsque ce n'est pas possible, par un autre moyen.
Comme le souligne Cyrille Isaac-Sibille dans la recommandation n° 9 de son rapport, il est nécessaire d'« informer l'ensemble des acteurs de la chaîne de valeur concernant l'utilisation des Pfas et exiger la transparence, en amont pour les fournisseurs, et en aval pour les consommateurs ».
Votre amendement vise à introduire une obligation d'information du consommateur en cas de présence de Pfas dans un produit. Je ne peux pas contester l'intérêt de la mesure dès lors que les consommateurs sont très peu informés de l'existence et de l'usage de ces substances chimiques.
Néanmoins, je rencontre un problème d'ordre législatif : je ne souhaite pas introduire de nouveaux sujets dans ce texte, dans la perspective de la navette parlementaire et en vue de faire aboutir ce texte. Mon avis est défavorable.
L'amendement n° 51 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à établir une liste répertoriant les substances Pfas utilisées, produites, traitées ou rejetées par les installations classées pour la protection de l'environnement – ICPE. Cette liste serait rendue publique et mise à jour de façon hebdomadaire. Elle est cruciale puisqu'elle fournirait une information sur le niveau d'exposition à ces substances chimiques cancérigènes.
En plus de sensibiliser les riveraines et les riverains des installations classées, cette liste permettrait aux agriculteurs locaux d'avoir une connaissance plus éclairée de leur production. Enfin, cette pollution est principalement due à l'activité industrielle de certaines entreprises. Le caractère public de cette liste contribuerait ainsi à responsabiliser ces entreprises et les inciterait à prendre des mesures afin de respecter les réglementations en vigueur relatives aux rejets.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je vous invite à retirer votre amendement. En effet, l'article 1er bis prévoit d'imposer aux ICPE de cesser tout rejet aqueux de Pfas. Je propose d'étendre cette mesure aux rejets gazeux. Nous partageons le même objectif.
Je comprends votre volonté de bien informer les populations. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles le plan d'action ministériel, que j'ai annoncé tout à l'heure, prévoit d'organiser des campagnes de mesures des rejets dans l'air, ciblées sur les installations présentant les risques les plus importants d'émettre des Pfas dans l'air. Selon l'activité de l'installation classée et ses caractéristiques, la présence de Pfas ou leur utilisation sur l'installation n'entraîne pas nécessairement de risques d'émissions notables.
Ce ciblage, qui sera fondé sur une analyse exhaustive de tous les sites industriels potentiels, devra être réalisé en tenant compte des résultats des travaux engagés avec l'Anses, afin de mieux connaître l'imprégnation des compartiments environnementaux et la hiérarchisation des voies d'exposition des populations. Les résultats de ces campagnes de mesures seront rendus publics, au même titre que ceux de la campagne relative à la présence de Pfas dans les rejets aqueux de 5 000 sites industriels. Votre amendement étant satisfait, j'y suis défavorable.
L'amendement n° 63 est retiré.
Vous nous renvoyez régulièrement aux règles communautaires. L'article 129 du règlement Reach nous donne déjà la possibilité de prendre des mesures en urgence afin de protéger nos concitoyens en cas de scandale sanitaire.
Bien que le PFOA soit interdit en matière sanitaire, j'appelle votre attention sur le fait qu'il est également présent dans les ustensiles de cuisine. Une autre substance, l'Adona, qui a les mêmes propriétés que le PFOA, n'est pas interdite à ce jour. Ainsi, dans l'hypothèse où, à l'avenir, nous rencontrerions des difficultés sanitaires, je vous invite à voter cet amendement, qui vise à permettre au Gouvernement d'agir en urgence pour protéger nos concitoyens, en application du règlement Reach en vigueur depuis 2007.
L'Europe et vous, cela fait deux. L'amendement vise à interdire tous les Pfas, sauf dérogations relatives à des usages essentiels, en vertu de la clause de sauvegarde du règlement Reach. Qu'est-ce que la clause de sauvegarde ?
Oui. Elle a déjà été invoquée par plusieurs États, et nous soutenons cette démarche. Nous ne pouvons invoquer la clause de sauvegarde si elle a déjà été invoquée par un État membre. D'ailleurs, si cette mesure venait à être votée et notifiée à la Commission européenne, il est très probable que l'Europe rappellerait qu'un processus est en cours – j'aimerais éviter ce risque. Je crois en l'Europe et en sa capacité à agir de manière plus raisonnable que vous. Surtout, cette mesure pourrait entrer en conflit avec la réglementation européenne.
J'émets un avis défavorable sur cet amendement inefficace, inopérant et qui risque d'aller à rebours de l'histoire.
Ce n'est pas sérieux. Cette clause de sauvegarde permet à la France de prendre les devants pour protéger le peuple.
Nous vous invitons simplement à prévoir dans ce texte la possibilité d'invoquer, dès que cela sera nécessaire, la clause de sauvegarde du règlement Reach. Ce n'est pas en contradiction avec le fait que d'autres pays l'invoquent pour protéger leur population.
Eh bien si !
Nous nous occupons des Françaises et des Français, et de tous ceux qui habitent dans notre pays.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
C'est vous qui n'êtes pas sérieux ! À invective, invective et demie !
Je n'ai pas commencé. J'ai simplement dit que l'Europe et vous, cela faisait deux. Un projet de restriction des Pfas, avec le même champ d'application, est déjà en cours d'examen au niveau européen. Ce processus vise à identifier les substances alternatives, à déterminer des périodes de transition et à adapter les dérogations pour les usages essentiels dans de très nombreux secteurs dans lesquels ces substances sont utilisées. La mesure de sauvegarde que vous proposez n'est donc ni pertinente ni opérationnelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il est maintenant acté que les Pfas se retrouvent partout. Le traitement par incinération des déchets qui en contiennent contribue à leur diffusion dans notre écosystème en contaminant l'eau, l'air et la nourriture – 99 % des Français en ont dans leur corps.
Une synthèse bibliographique réalisée par l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) en décembre 2023 et qui porte sur la dégradation thermique des Pfas par incinération précise qu'une température supérieure à 1 400 degrés Celsius garantit la minéralisation de tous les Pfas. Nous savons maintenant que la température moyenne d'incinération des ordures ménagère, située entre 750 et 1 100 degrés Celsius, ne permet pas cette minéralisation. Pire, cette chauffe insuffisante provoque la production de nouveaux Pfas.
La France dispose actuellement de 126 incinérateurs, soit le parc le plus important d'Europe. Selon l'Agence de la transition écologique (Ademe), la capacité d'incinération française est suffisante. Malgré nos efforts pour réduire nos déchets, huit incinérateurs sont à l'état de projet, l'un d'entre eux en Charente. Ce projet, comme tant d'autres, est inutile et ne permettra pas la destruction des Pfas.
Si mettre à niveau les incinérateurs actuels pour qu'ils atteignent la température de 1 400 degrés Celsius est impossible, il est indispensable que la construction de nouveaux équipements respecte cette contrainte. Le présent amendement apporte cette garantie : l'autorisation d'exploiter une nouvelle usine d'incinération sera délivrée à condition que l'incinération soit effectuée à une température supérieure à 1 400 degrés Celsius.
M. Antoine Léaument applaudit.
Dans le cas contraire, elle s'avérerait non seulement inutile, mais productrice de Pfas – donc dangereuse. Dans l'intérêt de la santé publique, je vous invite donc à voter cet amendement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Ce sujet doit être étudié en détail, car les incinérateurs actuels ne peuvent probablement pas éliminer les Pfas. Cependant, comme nous souhaitons que cette proposition de loi bénéficie des apports de la navette parlementaire, je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, avis défavorable.
Avis défavorable.
Je maintiens mon amendement car il concerne les nouveaux incinérateurs.
Le vote à main levée n'ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 123
Nombre de suffrages exprimés 116
Majorité absolue 59
Pour l'adoption 44
Contre 72
L'amendement n° 82 n'est pas adopté.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à protéger la population des risques liés aux substances per- et polyfluoroalkylées ;
Discussion de la proposition de loi visant à garantir un revenu digne aux agriculteurs et à accompagner la transition agricole ;
Discussion de la proposition de loi constitutionnelle visant à garantir un article 49 respectueux de la représentation nationale ;
Discussion de la proposition de loi visant à protéger la liberté éditoriale des médias sollicitant des aides de l'État ;
Discussion de la proposition de loi visant à instaurer de nouveaux objectifs de programmation énergétique pour répondre concrètement à l'urgence climatique ;
Discussion de la proposition de loi visant à reconnaître et à protéger la santé menstruelle et gynécologique dans le monde du travail ;
Discussion de la proposition de loi visant à protéger les Français des risques climatiques et financiers associés aux investissements dans les énergies fossiles ;
Discussion de la proposition de loi relatif à la dépénalisation de l'accès à la nature.
La séance est levée.
La séance est levée à treize heures cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra