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Intervention de Nicolas Thierry

Séance en hémicycle du jeudi 4 avril 2024 à 9h00
Protéger la population des risques liés aux pfas — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Thierry, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Vous proposez de définir les Pfas. Votre amendement est composé de deux parties : la première reprend une nouvelle définition des Pfas proposée par l'OCDE tandis que la deuxième distingue les différents types de Pfas. C'est cette deuxième partie qui me semble la plus dangereuse. Des scientifiques nous ont en effet alertés, lors des auditions et depuis le dépôt de ces amendements, et je vais essayer de vous expliquer les raisons de leur inquiétude pour que chacun comprenne bien l'enjeu.

Vous proposez d'indiquer que les Pfas se divisent en deux familles, les monomères et les polymères. Cette distinction est erronée scientifiquement et dangereuse politiquement. Tout d'abord, d'un point de vue scientifique et chimique, il n'est pas fait de distinction entre les polymères et les monomères, car les substances non polymériques ne sont pas forcément des monomères : il existe, par exemple, des substances oligomériques, que vous ne citez pas dans l'amendement. Scientifiquement, il n'y a donc pas de sens à distinguer uniquement deux catégories. En outre, la littérature scientifique a clairement établi que les Pfas polymères étaient responsables de rejets de Pfas dangereux lors de leur fabrication ou de leur mise en déchets. Autrement dit, les chaînes de production utilisant des polymères rejettent inexorablement des Pfas non polymériques parmi les plus dangereux. Par ailleurs, les produits sortis des chaînes de production, une fois mis en déchet, sont une source de diffusion massive de Pfas non polymériques.

J'insiste sur la fausse idée selon laquelle les polymères pourraient être considérés comme des substances inertes et non problématiques. C'est faux. Les scientifiques ont fortement insisté sur ce point ces dernières années, ce qui a conduit les institutions européennes et internationales à intégrer ce fait. L'OCDE rappelle ainsi qu' « il est faux de considérer les fluoropolymères comme des polymères peu préoccupants ». L'Echa s'est alignée sur cette conclusion. La deuxième partie de l'amendement doit absolument être supprimée.

Par ailleurs, comme je l'ai dit plus tôt ce matin à M. le ministre, la France soutient l'initiative des cinq pays qui souhaitent une interdiction large des Pfas au niveau européen. Cette initiative s'appuie sur une définition élargie de la famille des Pfas et prend soin de ne pas faire la distinction entre monomères et polymères. Par conséquent, adopter l'amendement irait à l'encontre de la position du projet de restriction européen.

Quant à la première phrase, elle reprend la définition donnée par l'OCDE, qui s'attache uniquement à la structure chimique des substances. L'inscrire dans la loi n'est pas utile et conduirait à figer une définition qui pourrait évoluer dans les années à venir.

Je demande le retrait total de l'amendement ; à tout le moins, il faut supprimer la deuxième partie qui est très problématique. Je donnerai donc un avis favorable à cet amendement, sous réserve de l'adoption de mes deux sous-amendements.

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