La séance est ouverte.
La séance est ouverte à dix-sept heures.
L'ordre du jour appelle la discussion et le vote sur la motion de censure déposée, en application de l'article 49, alinéa 2, de la Constitution, par Mme Mathilde Panot et soixante-quatorze de ses collègues, la Première ministre ayant engagé la responsabilité du Gouvernement sur l'adoption en nouvelle lecture de la première partie du projet de loi de finances pour 2023.
La parole est à M. Éric Coquerel.
Madame la Première ministre, on ne peut gouverner ainsi. Vous ne pourrez gouverner longtemps ainsi. Cette fois, pour votre huitième utilisation du 49.3 – avant la neuvième, dans quelques heures –, vous n'avez même pas laissé le temps d'une seule minute de débat. À chacun de ces huit 49.3, vous avez innové dans les prétextes. Cette fois, c'est le calendrier du budget qui serait perturbé par les motions de censure de La France insoumise… En affichant un tel toupet, vous avez dû rire sous cape. Cette fois, c'est l'histoire de l'œuf et de la poule, car, pour qu'il ait motion de censure – la seule façon que nous ayons trouvée de redonner le droit de voter au Parlement –, il a bien fallu qu'il y ait 49.3.
Un autre de vos députés a déclaré, sans rire : « Pourquoi discuter, puisqu'on sait qu'ils ne voteront pas pour ? » Voilà donc votre façon de considérer désormais le Parlement. Après avoir été privé de vote, il est désormais privé de débat au prétexte que l'opposition voudrait s'opposer. Vous pourriez aller plus vite en supprimant le Parlement…
Mais là encore, ce ne sont que des prétextes. La seule raison pour laquelle vous avez annoncé votre 49.3 sans même laisser les groupes s'exprimer, c'est qu'il y avait une motion de rejet préalable sur laquelle vous aviez peur que votre groupe et ses alliés soient minoritaires. Tout revient à cela. Vous privez l'Assemblée de son droit essentiel, celui de voter, parce que vous y êtes minoritaires. Pour la huitième fois, vous infligez une blessure à la souveraineté nationale, parce que vous êtes minoritaires.
Collègues des partis gouvernementaux, derrière vos applaudissements qui ont de nouveau accueilli cette sentence, laquelle vous prive pourtant, vous aussi, de votre raison d'être ici, se cache le soulagement de ceux qui sont minoritaires. Le 49.3 est d'ordinaire un pis-aller pour un gouvernement cherchant à éviter soit la fronde de quelques-uns parmi sa majorité, soit une obstruction parlementaire. C'est déjà une entorse à notre conception de la démocratie, celle d'une démocratie parlementaire pleine et entière, à l'opposé de la monarchie présidentielle qu'est la V
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également.
Dès lors, vous aviez le choix – que vous aviez fait mine d'offrir avec les dialogues de Bercy – : soit composer avec le Parlement, soit le soumettre par la brutalité du 49.3. Il vous aurait même été possible de tenir compte de la nouvelle donne – votre situation minoritaire – dans l'utilisation du 49.3, en y intégrant des votes manifestement majoritaires au Parlement. C'eût été au moins une façon de reconnaître un état de fait et, au-delà, la souveraineté de la représentation nationale.
Il en est ainsi, par exemple, de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Ici, en première lecture, vous avez arrêté les débats juste avant l'article 5, certains que vous seriez contraints d'effacer ou au moins de reporter sa suppression. La même sentence vous est venue du Sénat. Résultat : vous imposez sa suppression par le 49.3. Pourtant, même des députés plutôt économiquement libéraux vous alertent : est-il normal que vous fassiez payer à tous les Français – par plus de déficit, par une baisse des dépenses publiques, ou par les deux – ces 4 milliards de baisse de la fiscalité des entreprises, qui, de surcroît, bénéficient pour les trois quarts aux grosses entreprises ?
Est-ce normal, alors même que le chef de l'État admet lui-même un taux de croissance d'un demi-point – soit 14 milliards – inférieur à celui de 1 % que vous avez maintenu mordicus, contre toutes les prévisions des organismes internationaux, pour établir votre budget ? Ces 4 milliards de recettes volatilisés auraient été pourtant bien utiles au moment de pallier les effets de cette différence sur votre budget. Votre entêtement idéologique est une erreur économique funeste, mais il prive aussi le Parlement de son rôle premier, celui même qui fut son acte fondateur : décider de l'impôt.
Les deux chambres avaient aussi toutes les deux voté, sous des formes différentes, pour plus de moyens accordés aux rénovations thermiques. Vous leur opposez un « réalisme » qui vous conduit à limiter la progression du budget alloué à la transition écologique, pourtant indispensable, en dessous de l'inflation. En fait, ce réalisme-là est aveugle à l'urgence de la situation, que vous avez pourtant fait mine de défendre à la COP27. Pour cela, les générations à venir ne pourront que vous en vouloir, je vous le garantis. Car ce budget, et c'est peut-être sa plus lourde faute, nous fait perdre de nouveau un temps précieux, peut-être irrattrapable, dans la course de vitesse avec le réchauffement climatique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Le think tank Institut de l'économie pour le climat (I4CE) le confirme, en soulignant que les investissements prévus dans ce budget pour la transition écologique s'éloignent fortement des 10 milliards par an d'investissements qui avaient été promis par le Président pendant sa campagne ; et il s'inquiète de l'absence de moyens suffisants pour apporter une réponse structurelle à cette crise et « éteindre l'incendie » – ce que l'économiste Pisani-Ferry chiffre à plus de 70 milliards par an.
C'est vrai aussi du soutien au transport ferroviaire – 3 milliards votés ici, et une baisse de la TVA à 5,5 % pour les trains et les transports en commun votée au Sénat – qui, plus que jamais, dans la même optique environnementale, devrait pourtant bénéficier d'investissements massifs, fret compris, alors même qu'on continue à supprimer des trains et des arrêts en gare, partout en France, notamment sur la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Cela dépasse l'entendement de voir le chef de l'État imaginer des RER dans les grandes métropoles quand le RER existant – de même que le métro et les bus – placent 10 millions de nos concitoyens franciliens dans une galère toujours insupportable en raison de transports trop chers, saturés, sans cesse en retard ou en panne.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Enfin, c'est vrai aussi des collectivités locales, auxquelles vous voulez faire payer l'austérité de manière punitive, sous la forme de contraintes inacceptables, alors qu'au contraire, elles devraient au minimum bénéficier de dotations indexées sur l'inflation.
Votre incurie, qui se traduit par une incapacité à proposer un budget suffisant pour répondre aux besoins environnementaux, n'a d'égal que votre cynisme, lequel vous conduit à imposer des solutions indignes : comment choisissez-vous d'aider l'Office français de la biodiversité (OFB) qui, en dépit de son rôle important, manque de moyens humains ? en augmentant son budget ? Non, en créant un loto de la biodiversité ! Voilà l'importance qu'accorde votre gouvernement à la protection de l'environnement : au lieu d'augmenter le budget de l'OFB, au moment où la COP15 biodiversité tire, elle aussi, le signal d'alarme sur la sixième extinction des espèces, vous faites de l'État le croupier de la Française des jeux !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Philosophiquement, c'est un affaiblissement de l'État. Peut-on accepter qu'une politique majeure soit financée de manière aussi incertaine ? Après le loto du patrimoine et le loto de la biodiversité, jusqu'où ira votre imagination : un bingo pour les sans-abri ? Un poker contre la pauvreté ?
Cette proposition est d'autant plus indigne qu'elle encourage les jeux d'argent. Nous savons que les personnes qui sombrent dans l'addiction sont les plus jeunes et les plus défavorisées. En leur donnant une bonne raison de jouer, vous ne faites que les entraîner encore plus dans l'addiction. Alors que ce loto de la biodiversité a été rejeté à droite comme à gauche, supprimé au Sénat ainsi qu'en commission à l'Assemblée, vous le maintenez.
Par ailleurs, alors que vous nous opposiez le manque de moyens dans un budget prétendument à l'euro près, vous créez une nouvelle niche fiscale pour les captives de réassurance. Par un article, vous permettez aux entreprises qui créent une filiale de réassurance de pouvoir déduire de leurs bénéfices les fonds transférés à ces filiales de réassurance. Autrement dit, elles peuvent, à leur main, modifier leurs bénéfices artificiellement, en transférant des fonds vers ces filiales.
D'une part, c'est un nouveau cadeau aux grandes entreprises : connaissez-vous une seule PME disposant d'une captive d'assurance ? Publicis et Total, elles, ont créé des captives d'assurance, pourtant je doute qu'elles aient besoin de nouvelles niches pour se protéger. D'autre part, vous justifiez cette niche par le fait qu'en l'absence de celle-ci, les grandes entreprises créent ces captives, mais le font au Luxembourg ou en Suisse. Alors, prétendant faire preuve de pragmatisme, vous préférez aligner la législation fiscale française sur celles de ces États, faire de la France un paradis fiscal plutôt que de lutter contre l'évasion : ce n'est pas la demande des Français !
Le retrait de cette disposition du premier texte de la loi de finances issu du 49.3 devait illustrer votre prétendue volonté d'écoute. Cette prétendue volonté d'écoute, Bruno Le Maire l'a illustrée en retirant l'amendement, puis Élisabeth Borne en n'intégrant pas cette proposition dans le texte retenu à l'issue du 49.3. Mais cette volonté d'écoute a désormais disparu, puisque la proposition fait maintenant partie du projet de loi. L'écoute des députés disparaît après un mois, mais l'écoute des lobbys – ceux des très grandes entreprises qui sollicitent un tel dispositif –, elle, demeure !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Au nom de la parole que vous aviez donnée devant cet hémicycle, je vous demande solennellement d'écouter la représentation nationale et de retirer cette disposition du texte de loi.
Ces méthodes, vous ne pourrez pas les prolonger très longtemps : écouter les lobbys et museler les oppositions parlementaires n'est pas un projet démocratique. Hier le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), aujourd'hui le projet de loi de finances (PLF), demain les retraites par un PLFSS rectificatif,…
…votre gouvernance à coups de 49-3 ne durera pas, votre autoritarisme aveugle aux besoins des Français non plus.
Votre surdité aux appels des députés, des sénateurs et des citoyens est intenable face à l'ampleur des crises sociales, énergétiques et écologiques que nous traversons.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Et ce qui est tout aussi intenable, c'est votre obstination à détruire notre modèle social pour ne surtout pas puiser du côté des revenus du capital afin de nous permettre de nous en sortir.
Demain encore, les Français marcheront et manifesteront pour s'opposer à votre projet inique de faire payer la crise et vos cadeaux aux plus grandes entreprises par le plus grand nombre, dans votre projet de retraite. Minoritaires au parlement, minoritaires face aux syndicats unanimes, minoritaires dans le pays sur cette question des retraites, il vous faudra cette fois bien plus d'un 49.3 pour vous en sortir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES et sur quelques bancs du groupe GDR – NUPES.
Pour la huitième fois en deux mois, vous avez eu recours, madame la Première ministre, à l'article 49.3 de notre Constitution. Nous en avons désormais l'habitude : à la procédure du 49.3 succède systématiquement le vote d'une motion de censure déposée par La France insoumise. Je veux d'ailleurs vous remercier, madame Panot. Nous ne partageons en rien vos motivations, vos idées et vos arguments, mais sans votre motion de censure, aucun des groupes parlementaires n'aurait pu s'exprimer en séance sur la nouvelle lecture de ce PLF pour 2023.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je pourrais également vous remercier, madame la Première ministre, puisque vous m'avez fait gagner du temps de travail. En effet, j'avais prévu de vous dire jeudi l'essentiel de ce que je vous dis aujourd'hui ! Blague à part, le moment où vous déclenchez l'article 49.3 constitue en lui-même une décision éminemment politique. Et cette décision est particulièrement regrettable, puisqu'il vous aura fallu moins de trois minutes pour revenir presque intégralement sur le travail de trois semaines du Sénat. Vous avez sciemment décidé de nous priver de tout débat, mais plus encore de tout moyen d'expression à cette tribune !
Vous nous vantez le dialogue – et vous lancez d'ailleurs les dialogues de Bercy – pour mieux l'interdire ensuite dans l'hémicycle. En première lecture, déjà, nous n'avions pas pu examiner grand-chose de ce texte, seulement quatre articles sur les quarante-sept que compte le PLF, et seulement cinq missions budgétaires sur vingt-trois, avant que deux 49.3 viennent faire cesser soudainement les débats.
De ce fait, nous avons été privés de débat sur les finances des collectivités territoriales, sur le soutien aux entreprises pour faire face aux envolées des prix de l'énergie, sur l'éducation, sur la défense, et sur tant d'autres sujets d'importance capitale.
Vous avez justifié le recours à l'article 49.3 en indiquant qu'aucun groupe d'opposition ne vous avait fait connaître une évolution de sa position sur son vote final. C'est exact, en tout cas du côté des Républicains mais, vous-même, madame la Première ministre, avez-vous décidé de revoir votre copie ? Aucunement.
Parlons en premier lieu des hypothèses macroéconomiques retenues par votre Gouvernement. Sourds à toute remise en cause, vous campez coûte que coûte sur une hypothèse de croissance de 1 % pour 2023, quand le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), ainsi que tous les instituts sérieux, vous disent qu'elle est trop optimiste et donc intenable.
Pire que cela, c'est désormais le Président de la République lui-même qui vous désavoue en précisant dans une interview donnée il y a huit jours au Parisien que « le taux de croissance pour 2023 devrait se situer entre 0,5 et 0,7 % ». À défaut d'avoir écouté les députés du groupe Les Républicains et le HCFP, vous auriez au moins pu suivre le Président de la République pour ajuster ce taux de croissance car, sans cela, nous le savons, votre budget sera à l'évidence insincère.
Interrogeons-nous, en deuxième lieu, sur l'annonce que vous avez faite d'un chèque de 100 euros destiné à compenser les augmentations du prix du carburant pour les 10 millions de travailleurs français les plus modestes. Nous avons découvert en commission des finances, à l'occasion d'une question que j'ai posée mercredi soir, que les crédits correspondants à cette aide, de 1 milliard, ne figuraient pas dans ce PLF, alors que le versement est prévu en janvier 2023. C'est le rapporteur général lui-même qui me l'a indiqué. Là encore, on peut se demander où est la sincérité budgétaire.
Je veux revenir, en troisième lieu, sur l'article 40 quater réintroduit en commission des finances, qui n'est rien d'autre que la copie de l'article 23 de la loi de programmation des finances publiques portant sur le pacte de contrôle des collectivités. Dénoncé par toutes les oppositions, il acte la mise sous cloche des collectivités. Rappelons qu'il a été rejeté à l'Assemblée nationale en commission et en séance, puis au Sénat, tant il pénalise des collectivités déjà étranglées par la hausse des prix de l'énergie.
J'aimerais, en quatrième lieu, insister sur une préoccupation majeure de tous les Français et de toutes les entreprises, pourtant insuffisamment prise en compte dans ce PLF : le coût de l'énergie. Pour 2023, les tarifs d'électricité et du gaz proposés aux entreprises seront beaucoup élevés qu'en 2022 – en tout cas pour certaines d'entre elles – et, en dépit de l'article 42 ter , la situation inquiète terriblement car les mesures de soutien de l'État risquent de laisser certaines entreprises dans une position intenable. En commission des finances, aucun débat sur les fondamentaux, le périmètre, le montant des crédits, les entités éligibles aux mesures figurant dans cet article n'a permis d'éclairer les députés sur cette question si essentielle pour nos entreprises et notre pays.
Pour finir, j'insisterai sur un sujet qui m'est cher, le taux réduit de TVA sur la filière équine, promesse des gouvernements précédents, objet d'un combat gagné à Bruxelles sous la présidence française, mais promesse aujourd'hui trahie par votre gouvernement.
Une chose est claire : en refusant tout compromis, en rejetant toutes les avancées issues de vos oppositions et du Sénat, madame la Première ministre, vous n'avez pas réuni les conditions pour que nous puissions changer d'avis sur le PLF pour 2023. J'en veux pour preuve la réintroduction de l'article 40 quater, à la suite de l'adoption mercredi soir en commission d'un amendement du rapporteur général, alors que vous vous étiez engagée solennellement lors du congrès des maires et des présidents d'intercommunalité de France à le retirer ! Comment voulez-vous qu'un lien de confiance s'établisse avec les élus locaux dans de telles conditions ?
La confiance ne se décrète pas, elle se bâtit, notamment grâce au respect de la parole donnée et à la loyauté.
Nous sommes sur une ligne de crête : il s'agit, pour nous, Les Républicains, de pousser nos propositions et d'obtenir des résultats sans nous laisser compromettre, et pour vous, madame la Première ministre, de nous entendre et de nous écouter, sans vous contenter d'en donner l'illusion. Le chemin est étroit mais, malgré cela, nous avons trouvé comment avancer à l'occasion des deux projets de loi de finances rectificative pour 2022 : vous nous avez entendus – et je veux saluer le travail que nous avons effectué avec l'exécutif – et nous avons, nous, députés Les Républicains, fait le choix de l'intérêt général en ne rejetant pas ces textes.
Toutefois, sur ce PLF, votre gouvernement refuse toujours de nous écouter au sujet de la trajectoire des dépenses publiques. Nous déplorons plus que jamais votre renoncement à la maîtrise des dépenses publiques, qui nous conduit dans le mur de la dette. Le Fonds monétaire international (FMI) note d'ailleurs que vous procrastinez en la matière. L'agence de notation Standard & Poor's vient de placer la France sous surveillance négative, ce qui est une première. Notre dette flambe et vous regardez ailleurs. Je le répète, il serait bon de disposer d'une loi de programmation des finances publiques. Là encore, la balle est dans votre camp : les sénateurs et les députés Les Républicains vous ont fait des propositions de trajectoires nettement plus conformes à ce qu'exige l'intérêt général.
Jusqu'à présent, vous les avez balayées d'un revers de la main ; aussi, je vous enjoins de ne pas les rejeter une nouvelle fois dans les jours qui viennent.
Venons-en à l'objet de notre présence ici : cette énième motion de censure, les députés Les Républicains ne la voteront pas. En dépit de nos divergences avec le Gouvernement, nous savons que la France a besoin de se doter d'un budget et d'une loi de financement de la sécurité sociale avant le 31 décembre 2022, si notre pays veut fonctionner en 2023. Ne soyons donc pas dupes de l'hypocrisie de la NUPES sur ce point. Nous regrettons ce énième recours à l'article 49, alinéa 3, mais en aucun cas, nous ne pouvons nous étonner, ni nous offusquer de cela.
Nous ne voterons pas cette motion de censure car nous ne rentrerons pas dans le jeu dangereux de la NUPES et du Rassemblement national, qui peuvent s'allier pour mener la politique du pire. Les députés de La France insoumise et du Rassemblement national auront beau, tour à tour, tenter de nous discréditer, la vérité, c'est que les députés Les Républicains sont la seule opposition utile et responsable, la seule à agir dans l'intérêt du pays, ne vous en déplaise, la seule à obtenir des avancées concrètes pour les Français.
Murmures sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Nous l'avons vu, il y a dix jours, avec l'adoption de deux de nos propositions de loi, visant l'une à améliorer la retraite des agriculteurs, l'autre à mieux lutter contre les violences conjugales.
Ne nous y trompons pas, députés LFI et RN peuvent trouver un intérêt à s'unir, comme les jours précédents nous l'ont montré. Derrière une apparente hostilité mutuelle, ils défendent ensemble une taxe sur les superprofits,…
…votent ensemble des motions de censure et demain, peut-être, l'un des deux groupes reprendra, à la virgule près, le texte défendu par l'autre hier. Pendant cinq ans, continuerez-vous ainsi à vous toiser du regard et à vous faire des clins d'œil ?
Je me tourne une nouvelle fois vers la majorité et le Gouvernement : ne pensez pas que nous soyons satisfaits. Nous avons jusqu'ici fait preuve d'une grande bienveillance et d'une grande patience dans l'intérêt du pays, mais cela ne présage en rien de notre attitude dans les prochains mois. Le recours au 49.3 le même jour que le report à la dernière minute d'une CMP d'importance capitale nous a fortement irrités. L'intérêt du pays reste notre cap, mais n'allez pas croire, madame la Première ministre, que vous pouvez jouer avec le feu et refuser le compromis sur les prochains textes.
Prenez garde car la tentation de déposer notre propre motion de censure pourrait faire son chemin.
Nous nous retrouvons en ce dimanche après-midi pour discuter de la huitième motion de la législature, et l'hémicycle est toujours plus vide que la fois précédente. On en vient presque à croire que les plus enragés – terme que j'emprunte à l'histoire de la Révolution, clin d'œil qui sera, je le sais, apprécié par certains d'entre vous – ont perdu leur mordant et sont désormais aux abonnés absents.
Le nombre de votants s'est progressivement tassé : de 239 lors de l'adoption en première lecture de la première partie de la loi de finances, il est passé à 87 pour l'adoption définitive du PLFSS, soit à peine plus de 55 % des députés NUPES.
Est-il d'ailleurs encore pertinent de parler de NUPES ? Au fil des motions de censure, La France insoumise fait désormais cavalier seul, au milieu de cet attelage baroque qui survit bon an mal an, au gré des saillies, tantôt complotistes, tantôt antieuropéennes, tantôt complaisantes avec les violents, d'un chef de file qui n'a plus que rancœur et frustrations à offrir aux Français. Une fois de plus, vous êtes seuls à déposer cette motion de censure, et permettez-moi de vous dire que cela se voit !
J'ai comparé sa rédaction avec celle sur le PLFSS, le 30 novembre dernier, à laquelle s'étaient joints l'ensemble de vos prétendus partenaires, et un détail m'a frappé. Si le fond reste quasiment le même – et je respecte tout à fait les différences que nous avons à ce titre –, la forme, elle, a changé car un paragraphe a disparu, et pas n'importe lequel : celui qui empêche à coup sûr l'extrême droite de voter la motion. Quelle conclusion en tirer après la semaine que nous venons de passer, semaine au cours de laquelle, je le rappelle,…
…la France insoumise a assumé pendant de longues heures, et non sans une certaine fierté, le fait que l'un de ses membres soit rapporteur de l'un des textes retenus par le RN pour sa niche.
Je vous le dis avec d'autant plus de tranquillité que j'ai personnellement appelé dès le 13 juin à voter pour vous lors de duels avec le RN. Il est, sur ce point comme sur tant d'autres, grand temps de mettre en cohérence vos paroles et vos actes, il y va de votre crédibilité, en tout cas de ce qu'il en reste.
Certains s'étonnent du nombre de fois où le Gouvernement a engagé sa responsabilité depuis fin octobre. Cela peut paraître impressionnant, il est vrai, si l'on n'en explique pas les raisons. En réalité, c'est un seul et même budget sur lequel le 49.3 a été utilisé. Dès lors, nous devrions considérer qu'il s'agit d'un seul et même recours à cette procédure, comme le sous-entend le texte de la Constitution.
Je crois d'ailleurs pouvoir dire qu'il n'y a pas vraiment d'autres options : toutes les oppositions, de l'extrême droite à la gauche extrême, avaient annoncé vouloir voter contre ce projet de loi de finances avant même sa présentation. Il faut bien donner un budget à la France, et je crois que le recours à une ordonnance, prévu à l'avant-dernier alinéa de l'article 47 de la Constitution, pour mettre les dispositions de ce PLF en vigueur aurait, à raison probablement, suscité des critiques plus fortes encore.
Mercredi soir, lors d'une réunion de la commission des finances, j'ai entendu le président Coquerel établir un lien entre droits du Parlement, consentement à l'impôt et démocratie. Je veux vous dire à quel point vous avez raison, cher collègue. Vous oubliez simplement dans votre raisonnement un point d'importance : ce qui confère à un régime sa qualité de parlementaire, c'est la responsabilité du Gouvernement devant la chambre, devant la représentation nationale prévue par la Constitution.
Loin d'être une atteinte pure et simple aux droits du Parlement, l'engagement de la responsabilité par le Gouvernement sur un texte est l'un des moyens les plus forts dont nous disposons, nous parlementaires, pour contrôler son action.
C'est donc la huitième motion que nous examinons, et je ne vais pas être trop long pour exprimer une huitième fois le soutien des députés du groupe Démocrate à votre gouvernement, madame la Première ministre, et au budget que vous nous présentez. Plutôt que de vous faire un long discours sur les mesures qu'il contient, ce que nous avons eu l'occasion de faire à trois reprises au cours des dernières semaines et que sauront faire, je n'en doute pas, mes collègues orateurs de la majorité, je voudrais mettre en lumière deux points souvent omis dans la défense de ce texte et pourtant déterminants.
Le premier est l'ambition écologique que nous souhaitons inscrire dans ce PLF, et je le dis alors que se termine une semaine où nous avons passé de nombreuses heures à nous écharper sur certains points, à nous retrouver sur d'autres, lors de la discussion du projet de loi d'accélération de la production des énergies renouvelables. Je pense en premier lieu à l'article 7, qui continue à adapter notre système fiscal aux exigences de la transition énergétique, notamment à travers le relèvement des droits d'accises pour le charbon ou la consolidation du dispositif prêt à taux zéro (PTZ) mobilité que nous avons introduit, sous la précédente législature, dans la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience ». L'article 8 modifie dans le même sens la taxe incitative relative à l'utilisation d'énergies renouvelables dans les transports (Tiruert), notamment en permettant de mieux traiter fiscalement l'intégration de certaines sources d'énergie, comme les huiles usagées ou les amidons résiduels, dans la propulsion des véhicules. Si nous voulons ralentir et atténuer le changement climatique en adoptant une vraie stratégie de sobriété, il nous faut retrouver la grande maxime de Lavoisier : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. »
Bien sûr, toute notre ambition écologique n'est pas contenue dans le projet de loi relatif à l'accélération de la production des énergies renouvelables, ni même dans ce PLF, fort heureusement. Nos débats l'illustrent bien. Ce PLF comporte toutefois d'autres avancées intéressantes en la matière. Citons, en seconde partie, les importants crédits en faveur du dispositif MaPrimeRenov' ou encore le fonds vert, doté de 1 milliard d'euros, pour l'accompagnement des collectivités dans leurs projets liés à la transition énergétique. Comme le montre le texte sur les énergies renouvelables, c'est en nous appuyant sur nos territoires que nous réussirons, dans les prochaines années, à atteindre la neutralité carbone.
L'évocation du fonds vert à destination des collectivités me conduit au second enjeu sur lequel je souhaite insister : le soutien que l'État apporte aux collectivités, confrontées pour certaines à de fortes tensions financières. Ainsi, pour la première fois depuis dix ans, la dotation globale de fonctionnement (DGF) augmente :…
…95 % des collectivités verront leur DGF croître l'an prochain et je m'en réjouis.
La hausse du prix de l'énergie touche aussi nos collectivités, et ce PLF vise à soutenir de nos élus locaux sur ce plan. J'insisterai sur trois dispositifs. Les petites communes, à l'instar des ménages et des très petites entreprises, continueront d'être couvertes par le bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité.
Les autres collectivités bénéficieront de l'amortisseur électricité. Nous avons aussi souhaité proroger le filet de sécurité introduit et voté par le Parlement cet été, avec des critères pour 2023 plus adaptés à la situation à venir. Il bénéficiera ainsi aux collectivités territoriales et à leurs groupements ayant subi en 2023 une perte d'épargne brute supérieure ou égale à 15 %. Le montant de la dotation correspondra à la moitié de la différence entre la progression des dépenses d'énergie et la moitié de la hausse des recettes réelles de fonctionnement.
Ce filet de sécurité a été introduit cet été à l'initiative de Mme Pires Beaune,…
… soutenu en première lecture par les groupes de la majorité, puis modifié fortement par les sénateurs, avant d'être réécrit dans sa version finale par un amendement de Lise Magnier établissant, en quelque sorte, une synthèse de tous les travaux précédemment évoqués. Comme quoi, même en recourant à l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, le Gouvernement peut rester à l'écoute du Parlement…
…et nous vous en sommes gré, madame la Première ministre.
J'ai précisé en introduction que je ne serai pas trop long, de peur de faire fuir le peu de députés de la NUPES, et des autres groupes, encore présents. J'espère toutefois avoir été suffisamment explicite quant aux raisons qui conduisent mon groupe à ne pas voter la présente motion de censure.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Nous nous retrouvons ce dimanche à l'occasion de la huitième motion de censure déposée à la suite du huitième recours, par le Gouvernement, à la procédure du 49.3, visant à faire adopter le budget de l'État pour 2023.
Cette intervention me permettra de revenir sur la configuration actuelle de ce budget qui, je l'ai rappelé la dernière fois, ouvre une brèche dans notre démocratie. Citons les chiffres qui démontrent de manière implacable à quel point, en recourant de façon répétée au 49.3, vous avez, madame la Première ministre, dépossédé l'Assemblée nationale de son pouvoir en matière budgétaire : sur la partie relative aux recettes, l'Assemblée a examiné cinq articles sur vingt-six, et sur la partie relative aux dépenses, elle a examiné cinq missions sur quarante-six !
Cette situation est unique au sein des grandes démocraties et suscite même des interrogations de la part de nos partenaires les plus proches. À titre d'exemple, le gouvernement allemand doit solliciter l'accord du Bundestag pour engager 30 millions d'euros de dépenses destinés à des achats militaires. Lorsque je leur explique, comme je l'ai fait la semaine dernière, que le Gouvernement français décide tout seul de près de 1 200 milliards d'euros de dépenses pour le budget de l'État et celui de la sécurité sociale, leur étonnement est à la mesure de la brèche démocratique que vous avez ouverte.
Mme Mathilde Panot et M. Benjamin Lucas applaudissent.
Que vous le vouliez ou non, madame la Première ministre, avec ces 49.3, vous abîmez la démocratie française non seulement aux yeux de nos concitoyens, mais aussi aux yeux de nos partenaires en Europe et dans le monde. C'est pourquoi nous vous lançons une véritable alerte, pour que la France reste ce qu'elle a toujours été : une inspiration démocratique pour les autres.
Cette alerte lancée, j'utiliserai, comme Mme Louwagie, le temps de parole qui m'est imparti pour aborder les cinq sujets cruciaux que j'avais prévu d'évoquer jeudi dernier, à l'occasion de l'examen en nouvelle lecture du PLF pour 2023.
Première question : votre budget pour 2023 permettra-t-il de circonscrire les risques que court notre économie ? Non ! Tout simplement parce qu'il laisse sans solution un grand nombre d'acteurs économiques face à la hausse vertigineuse des coûts de l'électricité. Faisons ensemble un rapide calcul : selon l'Insee, la consommation finale d'électricité pour le secteur de l'industrie s'élève à 124 térawattheures. En prenant l'hypothèse d'un prix de l'électricité qui passerait de 120 à 580 euros le mégawattheure, la facture d'électricité totale pour l'industrie passerait de 15 milliards à plus de 70 milliards.
Et l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique, madame Rabault, que faites-vous de l'Arenh ?
Ce chiffre donne une idée vertigineuse du choc que notre économie devra encaisser. La situation est plus préoccupante pour nombre de petites et moyennes entreprises (PME) et très petites entreprises (TPE) qui ont encore moins les moyens que les plus grandes entreprises, de disposer d'une trésorerie leur permettant d'encaisser le choc de la hausse du prix de l'électricité. Vous me répondrez sans doute que, si elles ont moins de dix salariés et réalisent moins de 2 millions d'euros de chiffre d'affaires, elles bénéficient du bouclier tarifaire que vous avez instauré. C'est vrai. Si toutefois, à l'instar des 35 000 artisans boulangers, elles ont besoin d'un four dont la puissance est supérieure à 36 kilovoltampères, condition requise pour bénéficier du bouclier tarifaire, elles subiront une hausse abyssale des coûts de l'électricité. Elles n'auront alors que deux options : soit passer le prix de la baguette à 2 euros, soit mettre la clef sous la porte en janvier 2023.
Vous me répondrez encore que ces entreprises peuvent bénéficier de l'amortisseur électricité.
C'est vrai. Sauf que, de l'aveu même du ministre de l'économie et des finances mardi dernier dans cet hémicycle, l'aide compensera 20 % de la hausse du tarif, ce qui est largement insuffisant et n'empêchera pas les fermetures de boulangerie au mois de janvier prochain. Madame la Première ministre, si vous ne faites rien, janvier 2023 sera le mois des faillites de boulangers, et la responsabilité vous en incombera, que vous le vouliez ou non. C'est pourquoi il faut accorder le bouclier tarifaire, c'est-à-dire le tarif réglementé, aux boulangers et à toutes les petites entreprises qui ont besoin d'une puissance électrique supérieure à 36 kilovoltampères.
Non, ma chère collègue, ce n'est pas le cas ! Écoutez donc le ministre de l'économie et des finances ! Il l'a reconnu ici même, mardi dernier, lors des questions au Gouvernement !
Il a fait une nouvelle annonce depuis !
Enfin, je veux dire un mot des collectivités territoriales, qui sont en première ligne face à la crise, comme elles l'ont été face à l'épidémie de covid-19, et subissent la hausse des tarifs de l'électricité. Cela a déjà été rappelé, un amendement de ma collègue Pires Beaune a été adopté, visant à instituer un filet de sécurité. Les collectivités locales, c'est vrai, pourront bénéficier de l'amortisseur électricité. Mais, une fois encore, les seuils fixés laisseront nombre d'entre elles sur le carreau. Il faut donc que chaque collectivité locale bénéficie du bouclier tarifaire.
Deuxième question : le projet de loi de finances pour 2023 a-t-il des équilibres budgétaires tenables ? Nous avons le droit d'en douter. Le PLF est construit sur l'hypothèse d'une croissance économique en 2023 à 1 % – chiffre relevé d'ailleurs par plusieurs d'entre nous. Or, il y a quatre jours, le Président de la République remettait lui-même en cause ces prévisions, en évoquant une croissance en 2023 de l'ordre de 0,5 % à 0,7 %.
Au-delà de cet élément, vous n'abordez jamais, madame la Première ministre, la question du financement, celui de la dette notamment. La France empruntera sur les marchés financiers comme jamais elle ne l'a fait auparavant : 270 milliards d'euros ! Le 2 décembre, les agences de notation Moody's et Standard & Poor's ont requalifié la perspective sur la dette française de « stable » à « négative ». Je pose donc une question très claire : l'État français pourra-t-il continuer à emprunter en euros…
…ou sera-t-il contraint de le faire en dollars, comme le fait déjà la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) ? Le poids de la dette affecte également le montant des intérêts payés : ils passeront ainsi en 2023 à 50,8 milliards ; c'est vertigineux !
Troisième question : le PLF est-il juste ? La réponse est non ! Vous faites le choix de tout faire reposer sur la dette, ce qui signifie que vous ferez payer la facture à tous les Français. Vous commencez d'ailleurs, avec la réforme des retraites et votre volonté de reporter l'âge légal de départ à la retraite à 65 ans, afin de récupérer des recettes supplémentaires.
Ce budget est également injuste parce que, dans le même temps, des superprofits se constituent ici ou là, en raison de la hausse du prix des matières premières.
Une fois encore, vous avez refusé d'instaurer une taxe sur ces superprofits, contrairement à l'Allemagne, à l'Italie,…
…à l'Espagne, à la Grande-Bretagne et à la Grèce. Pire, vous continuez de dégrader les finances publiques en supprimant la CVAE, ce qui représentera un manque à recevoir de près de 8 milliards d'euros.
Ce budget est également injuste car vous avez écarté tous les amendements qui avaient été votés et qui tendaient à introduire un peu de justice : celui du groupe Démocrate, visant à créer une taxe sur les superdividendes, pourtant largement plébiscité par notre assemblée, avec 227 voix pour et 88 contre ;…
…celui de ma collègue Christine Pires Beaune, visant à réduire le reste à charge des résidents d'Ehpad ou encore celui voté en faveur des bénévoles d'associations.
Quatrième question : le PLF permet-il de débloquer de l'argent pour l'avenir, en favorisant l'investissement ? Cette question est d'autant plus cruciale que les États-Unis viennent d'annoncer un plan d'investissement massif de 430 milliards de dollars, plan tellement massif que le Président de la République l'a qualifié de « super agressif ». Il me semble, madame la Première ministre, que plutôt que de demander aux autres de faire moins, il faudrait agir mieux et plus en France, c'est-à-dire investir.
Je vais lire ce qu'écrit le rapporteur général dans son rapport relatif au budget pour 2023, ainsi, vous ne pourrez pas dire que c'est de la mauvaise foi de ma part : sur les 34 milliards d'euros du plan France 2030 lancé en octobre 2021, « les crédits de paiement de la mission "Investissements " pour la France de 2030 devraient atteindre 6,1 milliards d'euros en 2023, après un total de 7 milliards en 2022 ». On observe donc une baisse de presque 1 milliard par rapport à 2022 ! En outre, la part de l'investissement public dans notre PIB est également fragilisée. Oui, il faut remuscler la part des investissements !
Enfin, cinquième et dernière question, d'ordre juridique : le PLF court-il un risque constitutionnel ? Bien sûr, l'appréciation de la constitutionnalité du budget pour 2023 relève du seul Conseil constitutionnel et je ne me permettrais pas d'empiéter sur ses prérogatives.
Néanmoins, je souhaite vous interroger, madame la Première ministre. Depuis la révision constitutionnelle de 2008, les lois de finances s'appuient sur une loi de programmation.
Et depuis votre réforme, en 2021, de la loi organique relative aux lois de finances, la loi de programmation devient « l'outil de référence pour piloter les prévisions de solde structurel et de solde effectif des administrations publiques ».
Bizarrement, vous faites comme si cette loi de programmation n'existait pas,…
…sans doute parce que vous avez essuyé un vote de rejet du projet de loi lors de son examen en première lecture, ce qui constitue, là encore, une première. Vous faites comme si cette loi n'existait pas, au point de reporter à janvier 2023 son examen en deuxième lecture. Or vous n'ignorez pas que l'article liminaire du PLF pour 2023 s'appuie explicitement sur une loi de programmation, qui n'existe pas puisqu'elle n'est pas votée ! Vous conviendrez avec moi que, sur ce point, vous donnerez matière à réflexion au Conseil constitutionnel pendant ses congés de Noël.
Madame la Première ministre, ces cinq alertes devraient vous interpeller, car des pans entiers de notre économie sont en jeu.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Les séances se suivent et se ressemblent presque. C'est la huitième fois que nous nous retrouvons en cet automne budgétaire pour discuter d'une motion de censure.
Mais je remarque que les bancs sont de plus en plus clairsemés pour soutenir et voter la destitution du Gouvernement.
Malheureusement pour La France insoumise, les motions de censure ne se votent pas sur Twitter ni même sur Twitch, mais bien ici, à l'Assemblée nationale. Et une absence dans l'hémicycle c'est, en quelque sorte, un soutien au Gouvernement !
Je suis donc heureux, madame la présidente Panot, que de plus en plus de députés de la NUPES valident, en creux, en ne la censurant pas, l'action de la Première ministre ! Vous-mêmes n'y croyez plus : j'en veux pour preuve que cette motion réunit moins de signataires que la précédente. Elle fait ainsi voler en éclats votre union écologique et sociale, les groupes écologistes et socialistes ayant refusé, une nouvelle fois, de signer votre texte.
Il faut bien le dire, cette motion sans émotion a bien moins de panache que la première que vous aviez déposée, et pour cause. À en juger par leur absence, vous ne pourrez pas non plus compter sur les voix du Rassemblement national pour soutenir votre texte : la dernière fois, vous les aviez pourtant bien volontiers accueillies, provoquant notre étonnement devant un tel rapprochement.
Finalement, tout cela est comme le reste : une grande opération de communication de La France insoumise, qui se ment à elle-même comme elle ment aux Français. Vous leur promettez tous les jours le Grand Soir et, ce soir, comme les fois précédentes, vous mobilisez du temps parlementaire qui aurait pu être consacré au terrain ou au travail utile pour nos concitoyens !
Cela n'a pas échappé aux autres groupes de la gauche, qui semblent adopter une position responsable en se désolidarisant de votre opération de communication à laquelle ils ne prennent plus part. En effet, il est bien aise de se complaire dans l'opposition systématique ; il est facile de dire que rien ne va ou que tout aurait pu être mieux fait. En revanche, il semble bien plus difficile de prendre vos responsabilités et de vous asseoir autour d'une table pour discuter du budget de l'État.
Cette table, vous préférez la renverser, car c'est une posture beaucoup plus simple. Mais elle vous expose à vos propres contradictions. En effet, vous vous prétendez les députés du peuple, et pourtant : nous avons voté la contribution temporaire de solidarité, applicable aux entreprises des secteurs du pétrole, du charbon, du raffinage et du gaz, qui remplace de manière pragmatique la taxe sur les superprofits des pétroliers ;…
…nous avons voté l'octroi de la demi-part fiscale aux veuves d'anciens combattants, vous vous y êtes opposés ; nous avons voté l'augmentation d'un tiers des taux de la taxe sur les logements vacants pour lutter contre le mal-logement, vous vous y êtes opposés !
Pendant plusieurs semaines, notre assemblée a discuté du projet de loi de finances pour 2023. Ce projet est présenté dans un contexte d'inflation mondiale inédit.
L'Italie fait face à une inflation de près de 12 %, le Royaume-Uni de 11 %, la zone euro de 10 %. Avec une inflation à 6,2 %, la France s'en sort mieux, sans être pour autant épargnée.
Les premiers touchés sont les plus fragiles, ainsi que les communes.
Les collectivités locales voient leurs dépenses augmenter sous l'effet de l'inflation et de l'accroissement de leurs responsabilités. Je le constate chaque jour en Charente-Maritime, de Royan à Genouillé, d'Oléron à Saint-Hippolyte : les maires, élus de nos villages, reçoivent toujours plus de sollicitations de la part de leurs administrés, mais n'ont pas assez de moyens ; ils sont obligés de trouver eux-mêmes des solutions à des problèmes qu'ils n'ont pas créés mais qu'ils subissent de plein fouet.
Entre autres exemples, ils sont tiraillés par la hausse du point d'indice : d'un côté, ils la savent absolument nécessaire pour les agents communaux mais, de l'autre, ils se demandent comment ils pourront boucler leur budget.
Face à cette situation, le Gouvernement, la majorité et les députés du groupe Horizons et apparentés ont été présents : ils ont été présents pour la transition écologique, en créant un fonds vert de 2 milliards d'euros ; ils ont été présents pour les collectivités locales, en instaurant un filet de sécurité à hauteur de 1,5 milliard d'euros pour les protéger contre la hausse des prix de l'énergie ; ils ont été présents pour les communes et les services publics locaux, en augmentant la DGF de 320 millions d'euros, ce qui garantit une hausse ou, au minimum, un maintien de leur dotation pour 95 % des communes
Les débats ont été nourris ; les groupes ont discuté et amendé le texte, et chacune des commissions permanentes y a intégré de nombreux amendements, y compris lorsqu'ils provenaient des oppositions. Pourtant, rien n'y fait : tout ce qui ne vient pas de vos bancs, tout ce qui ne porte pas un pin's rouge en boutonnière est forcément à combattre.
Alors, vous vous fermez à la discussion – pire, vous empêchez la discussion. Pourtant, la discussion a bien eu lieu : en première lecture, rien qu'en séance publique, nous avons consacré cinquante-cinq heures à l'examen du projet de loi de finances.
La discussion a bien eu lieu mais, plutôt que de vous en extraire, vous avez voulu l'empêcher par un dépôt massif d'amendements piochés dans le dictionnaire des synonymes, et vous avez empêché les députés d'en venir au vote de la loi.
Vous n'attendez qu'une chose de vos méthodes : que le Gouvernement soit contraint d'utiliser l'article 49.3, pour mieux crier, ensuite, au coup d'État. Mais personne ne s'y trompe, pas même vos alliés – qui ont déserté les rangs de la séance de ce soir : il n'y a pas plus de coup d'État qu'il n'y a eu, de votre part, de coup d'éclat. Par cette motion de censure, vous n'aurez réussi qu'un huitième coup d'épée dans l'eau.
Je regrette ces méthodes, qui donnent une bien triste image de nos travaux et qui nourrissent l'antiparlementarisme sur lequel prospèrent les extrêmes.
Ce projet de loi de finances lance la politique du quinquennat à venir ; le Gouvernement peut compter sur le groupe Horizons et apparentés pour veiller à sa bonne exécution, pour effectuer un travail de pédagogie et de relais auprès des élus locaux et des Français, et pour faire des retours du terrain. C'est ainsi que, en relation avec les territoires, nous pourrons préparer collectivement, dès à présent, le prochain exercice budgétaire. Madame la Première ministre, chers collègues, vous l'aurez compris : le groupe Horizons et apparentés soutient le Gouvernement et ne votera pas cette motion de censure.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.
Pas une minute, pas un amendement, pas même une explication par groupe pour cette deuxième lecture de la première partie du projet de loi de finances ! Dans l'outrage au Parlement, vous rivalisez constamment d'ingéniosité avec vous-mêmes, pour nous priver de débat et de parole.
C'est bien dommage, car cette première partie du projet de loi de finances comportait de nombreux sujets qui auraient mérité que nous nous y arrêtions – les intervenants précédents l'ont souligné. M. Plassard vient d'affirmer que nous emploierions mieux notre temps sur le terrain ; or j'étais hier dans ma circonscription, comme beaucoup d'entre vous, et j'ai rencontré de nombreux élus locaux qui souffrent de la crise actuelle et qui auraient aimé que l'Assemblée débatte de la façon dont sont traitées les collectivités territoriales.
Certes, la DGF a augmenté en valeur absolue, mais, comme l'a rappelé M. Sansu, elle n'augmente pas lorsqu'on tient compte de l'inflation. Telle est la réalité à laquelle sont confrontées les collectivités. Je pourrais citer de nombreux exemples de gymnases qui n'auront bientôt plus d'électricité ni de chauffage, ou d'associations sportives et culturelles – j'en ai rencontré encore hier – qui ne pourront plus remplir leur importante mission dans les semaines à venir, faute de compensation financière et de protection suffisantes contre la hausse des prix de l'énergie. Les élus auraient aimé que nous débattions des services publics locaux, qui sont la première protection des Françaises et des Français face aux crises.
À travers les députés, vous avez aussi insulté celles et ceux qui font vivre les collectivités locales, ces véritables hussards de la République qui se tiennent en première ligne face aux crises, aux angoisses et aux colères des Françaises et des Français.
Par l'absence complète ne serait-ce que d'un semblant de débat, ce nouveau spécimen de 49.3 résume à lui seul votre ambiguïté face à la démocratie ; il nourrit légitimement votre procès en autoritarisme et en déni de démocratie. Les indices concordent ; j'en retiendrai quelques-uns, à commencer par l'arrogance que vous manifestez dans l'exercice de vos responsabilités, et le sens que vous donnez au mandat que vous avez reçu des Français. Rappelons-le : si vous siégez sur ces bancs, madame la Première ministre, mesdames et messieurs les ministres, si le Président de la République, Emmanuel Macron, a été élu et réélu, ce n'est pas parce qu'un quitus a été donné à sa politique, mais parce qu'il a été conduit à faire barrage à l'extrême droite au second tour de l'élection présidentielle – vous le savez parfaitement.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Il a tout de même recueilli 28 % au premier tour ! C'est vous qui êtes dans le déni de démocratie !
Nous en aurons une nouvelle démonstration lors du débat consacré aux retraites.
Quel sens donner aux résultats des élections législatives du 19 juin dernier ? Les Françaises et les Français ont fait le choix libre, conscient et éclairé d'une Assemblée nationale dans laquelle vous n'avez pas la majorité absolue et dans laquelle vous ne pouvez plus gouverner seuls. Le recours répété au 49.3, sans même passer par le débat, par la discussion et par la recherche de compromis sur certains aspects, sans même respecter les votes souverains du Parlement – notamment sur les collectivités locales – montre que vous n'avez pas entendu le message des Françaises et des Français le 19 juin.
Vous avez fait preuve d'arrogance vis-à-vis de la démocratie quand vous avez cru effacer, supprimer, voire anéantir le clivage entre la gauche et la droite, pourtant constitutif de notre démocratie et de l'histoire de la République. Vous manifestez un déni de démocratie quand vous entretenez une confusion historique, grave pour l'histoire de l'Assemblée, en renvoyant dos à dos l'extrême droite et la gauche – nous en avons eu l'illustration il y a quelques instants. Ce laxisme à l'égard de l'extrême droite,…
…alors que cette dernière a encore fait subir à nos collègues une violence insupportable ces derniers jours, est dangereux pour notre démocratie.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES.
Pensons aussi au silence ou à la timidité du Gouvernement quand, il y a quelques jours, une enseignante a dû renoncer à une sortie scolaire parce que des groupuscules d'extrême droite ont considéré qu'elle ne devait pas enseigner la réalité de la vie des migrantes et des migrants, et qu'ils ont fait pression sur elle avec la force et la violence qu'on connaît aux obscurantistes. Vous êtes restés bien laxistes quand il s'agissait de la soutenir, et de défendre l'école républicaine et la liberté pédagogique face à cette attaque scandaleuse !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.
L'arrogance et le déni de démocratie caractérisent votre méthode parlementaire. J'évoquais les violences de l'extrême droite : le moment que nous vivons nous invite à respecter et à valoriser le Parlement, quand, chaque jour, des permanences parlementaires sont attaquées – une de nos collègues de La France insoumise en a encore fait les frais hier –, quand des réunions publiques dans lesquelles s'expriment des députés de la nation sont perturbées à coups de barres de fer par des milices d'extrême droite,…
…quand nous recevons chaque jour des injures et des menaces, quel que soit notre bord politique. Est-ce vraiment le moment de mépriser et de fouler aux pieds le Parlement, et de transmettre à nombre de nos concitoyens l'idée que nous ne servirions à rien ?
Est-ce le moment de fouler aux pieds le Parlement et de contester sa capacité à débattre et à voter sereinement la loi, notamment la loi budgétaire ? Il y a là matière à nous interroger.
Votre méthode s'appliquera bientôt – nous l'avons entendu – sur la réforme des retraites. J'en dirai un mot, puisque, hier ou ce matin, François Bayrou a expliqué que cette question tenait essentiellement à de la pédagogie. La pédagogie s'adresse aux enfants ; or les Françaises et les Français ne sont pas des enfants : s'ils sont lucidement opposés – à une très large majorité – à votre réforme des retraites, ce n'est pas parce qu'ils ne l'ont pas comprise, mais parce qu'ils l'ont trop bien comprise. Cette réforme ne renvoie pas à des équations économiques ou financières, mais à un débat de société qui touche au cœur de notre pacte démocratique : doit-on ou non travailler plus longtemps ?
Le mépris dont vous faites preuve pour nos concitoyens, en expliquant que le Parlement ne pourrait pas débattre sereinement de cette question, est proprement insupportable. On nous a déjà annoncé la brutalité avec laquelle vous comptiez traiter ce dossier. Sachez toutefois que si l'on vit plus longtemps – ce qui reste d'ailleurs à nuancer, tant l'espérance de vie varie selon la profession et l'origine sociale –,…
…c'est parce que les progrès de la science, de la technique et de la médecine nous le permettent.
Quelle drôle de conception du progrès, que de vouloir voler ces avancées de la science et de la médecine aux Françaises et aux Français, en leur reprenant les années précieuses de leur vie que sont les premiers temps de leur retraite ! Travailler plus tard, ce sera mourir plus tôt : est-ce là le débat de société que vous voulez esquiver en annonçant dès maintenant un 49.3 à ce sujet ?
Je reviendrai, pour finir, sur votre brutalité. Nous pouvons avoir des désaccords sur le projet de loi de finances : c'est bien normal. Vous reprochez aux oppositions d'y être opposées ; mais si nous représentons l'opposition à votre politique, il y a bien une raison ! Nous sommes là pour défendre les engagements que nous avons pris devant les Françaises et les Français contre votre politique, et contre ce que nous estimons être des régressions. Je suis frappé, chers collègues de la majorité, que vous trouviez normal et légitime que nous ne puissions même pas débattre un instant…
Si nous sommes là, c'est parce que nos collègues de la France insoumise ont déposé une motion de censure qui nous permet d'aborder le projet de loi de finances.
Vous faites en sorte que, pour un débat aussi important que l'orientation budgétaire de la nation, seuls quelques dizaines de collègues puissent entrer dans le fond des sujets en commission des finances.
Nous aurions aimé pouvoir débattre sereinement des collectivités locales, de la fiscalité des énergies renouvelables et d'autres questions importantes en période de crise ; chacun aurait ensuite voté. Or nous n'avons eu droit qu'à votre fébrilité – M. Coquerel l'a dit tout à l'heure.
Le Parlement avait voté l'amendement de M. Mattei – je suis surpris que M. Millienne n'ait pas évoqué le déni de démocratie qu'a subi le groupe Démocrate en la matière. Pour rappel, nous avons voté très largement, par esprit de coconstruction, un amendement proposé par l'un de ses membres ; or il a été balayé par le 49.3. Est-ce à dire, chers collègues, que vous renoncez à vos droits de parlementaires pour servir l'intérêt du Gouvernement ?
Nous devrions aussi nous interroger sur le sens de notre travail et sur la nécessité de redonner au Parlement la force démocratique qui doit être la sienne.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
En déclenchant le 49.3 en moins de trois minutes, jeudi dernier, vous vous êtes comportés en Hybris, arrogants et péremptoires, mais vous finirez en Pyrrhus, car il est des victoires qui sonnent comme des défaites : victoire au Parlement, grâce à l'anomalie démocratique qu'est l'engagement de la responsabilité du gouvernement, déclenché huit fois déjà sur les textes budgétaires – le 49.3 étant la condition de la motion de censure, et non le contraire –, mais défaite dans le pays, car vous mesurez mal la colère qui monte : celle du boulanger qui n'en peut plus de voir ses factures d'énergie tripler ou quadrupler ; celle des salariés modestes qui voient arriver une période de fêtes où l'insouciance fait place à l'angoisse de ne pouvoir garnir le pied du sapin ; celle de l'aide-soignante qui court de chambre en chambre et n'accepte plus la logique comptable qui sacrifie le système de soins ; celle, enfin, des millions de femmes et d'hommes qui s'apprêtent à se lever contre votre contre-réforme inique des retraites.
Ne vous y trompez pas : les attentes sont immenses, et le passage en force que vous comptez faire pour imposer vos options politiques – qui ne dérogent pas à des règles libérales de plus en plus honnies – ne fait qu'agrandir les fractures qui gangrènent notre pays. Pendant que la majorité de nos compatriotes tire le diable par la queue, une petite caste continue de faire bombance, gavant les actionnaires au détriment des salariés, et accroissant les patrimoines des ultrariches.
Voilà à quoi sert le 49.3 : à préserver des options exigées par l'Europe libérale, qui heurtent tant de nos concitoyens, qui épuisent la planète et qui accentuent les divisions.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
Je ne ferai pas tomber une pluie de chiffres ; j'en citerai seulement quelques-uns, particulièrement significatifs : 1 000 milliards d'euros de patrimoine pour les 500 plus grosses fortunes – un record ; plus de 10 millions de personnes sous le seuil de pauvreté – encore un record, et parmi elles, combien d'enfants qui vivent dehors ? Ajoutez à cela plus de 20 % de nos compatriotes qui souffrent déjà de la précarité énergétique, avant même la hausse redoutable des coûts de l'énergie en janvier.
Ces quelques agrégats démontrent qu'il est temps d'emprunter un chemin différent, un chemin respectueux de nos valeurs républicaines, à commencer par l'égalité, si malmenée.
De votre côté, vous convoquez souvent ce bon vieux docteur Coué pour expliquer que tout va pour le mieux. C'est un florilège d'autosatisfaction : « nous sommes le pays qui résiste le mieux », « nous avons la plus faible inflation », bla bla bla…
Les ministres font assaut de flagornerie envers le chef, jusqu'à oser proclamer que le Président a été élu sur son programme. Encore une fois, l'humilité et la lucidité devraient percer vos certitudes. Nous sommes des millions d'électeurs à avoir mis dans l'urne un bulletin au nom d'Emmanuel Macron, car nous savons que la République ne se galvaude pas, tout en restant farouchement opposés à des politiques libérales destructrices. Nous serons plus nombreux encore à nous mobiliser contre la réforme des retraites, inique et inefficace.
Bien entendu, si j'évoque ce futur combat, c'est parce que chacun sait que cette réforme fait partie des mesures libérales exigées par la doxa bruxelloise. M. le ministre de l'économie et des finances prévoit même de récupérer 9 milliards d'euros en faisant reculer l'âge de la retraite – comme si c'était aux cotisations sociales de payer le déficit de l'État.
Quelle confusion des genres ! N'en doutez pas, le peuple fera échouer ce projet.
Pourquoi, dès lors, s'acharner à détricoter le modèle de protection sociale ? Pourquoi faire payer les plus pauvres, les privés d'emplois – comme le fait votre loi de culpabilisation générale –, les retraités modestes, les salariés qui triment depuis plus de quarante ans, souvent dans des métiers pénibles ? Pourquoi taper sans cesse sur les plus pauvres ? Tout bonnement parce que vous êtes les dignes héritiers de Colbert, qui voulait taxer les pauvres car ils sont plus nombreux !
Vos rodomontades n'y changent rien, d'autant qu'il est inutile de discuter de vos hypothèses de croissance et d'inflation : elles sont caduques, comme l'a annoncé le Président de la République. Le pic d'inflation est pareil à l'horizon qui se dérobe : on n'en voit pas la fin. Et de reflux, à ce jour, pas le moindre !
Après le prix de l'énergie, c'est désormais celui des denrées alimentaires qui flambe, augmentant de 12 % en moyenne, alors même que ces deux postes de dépenses sont particulièrement importants dans les foyers modestes. La fin de la ristourne sur le carburant renchérira encore les prix à la pompe et confortera le sentiment d'abandon des zones rurales, qui subissent également la perte des services publics et la désertification médicale.
Le bouclier tarifaire, qui sera bientôt le premier poste de dépenses si l'on continue ainsi, s'élève à 47 milliards d'euros…
…et rend apparente l'impéritie du Gouvernement devant les exigences des acteurs du marché européen libéralisé de l'énergie. Laisser ces acteurs s'engraisser tout en tentant d'amortir le choc pour les familles, pour les entreprises, pour les collectivités locales, quelle gabegie ! Cette gestion désastreuse vous conduit désormais à gouverner par la peur,…
…en annonçant de possibles coupures d'électricité, en culpabilisant tout le monde,…
…pour tenter de cacher votre absence de stratégie en matière d'indépendance énergétique. C'est insupportable.
Nous n'oublions pas que c'est aussi le résultat du sous-investissement chronique dans les transports en commun, dans le ferroviaire ou encore dans la rénovation thermique, autant de domaines que l'Assemblée nationale avait défendus avec vigueur en votant des crédits nouveaux. Ceux-ci ont été effacés sans ménagement, mais avec la volonté de faire le ménage, par la serpillière du 49.3.
De la même manière, vous continuez de faire peser sur les collectivités locales des mesures de défiance. Ainsi, le fameux article 23 de la loi de programmation des finances publiques constitue désormais la monnaie d'échange avec la droite républicaine, sur laquelle vous comptez pour sauver la face devant la Commission européenne.
Mais quel sketch que le parcours de cet article 23 qui disposait les sanctions contre les mauvais élèves, rejeté en séance à l'Assemblée nationale comme au Sénat, revenu il y a peu par le truchement du rapporteur général, et peut-être désormais sacrifié sur l'autel des combinazione !
De tous les sujets liés aux collectivités locales, qu'il s'agisse de l'indexation de la DGF – qui subit une baisse nominale de 4 % – ou de la suppression de la CVAE, nous n'avons pu débattre qu'en commission, menant ainsi un dialogue dont le Gouvernement s'est exclu lui-même. Drôle de façon de procéder, quand on prétend respecter les collectivités et vouloir restaurer la confiance. Supprimer la CVAE est une erreur politique et une faute budgétaire. Toutes les associations d'élus du bloc communal se sont opposées à cette disposition, ainsi que le Sénat.
D'ailleurs, si le Gouvernement, dans son aveuglement idéologique, souhaitait faire un énième cadeau aux entreprises – notamment aux plus grandes, qui n'en ont pas besoin –, pourquoi ne pas avoir choisi de supprimer la C3S, la contribution sociale de solidarité des sociétés ?
M. Mathieu Lefèvre s'exclame.
C'eût été plus respectueux des collectivités locales que vous n'écoutez décidément pas et en qui vous devriez avoir davantage confiance, car comme elles l'ont démontré pendant la crise sanitaire, elles sont les meilleures sentinelles devant les difficultés du quotidien.
M. Charles Sitzenstuhl s'exclame.
Cela suffit, monsieur Sitzenstuhl ! Puis-je parler ? Madame la présidente, ce n'est plus possible, tout de même…
Rires sur les bancs du groupe RE.
Nous sommes en désaccord avec eux ; mais ils ne sont pas d'accord pour qu'on ne soit pas d'accord !
Vous me permettrez également de regretter profondément que nos compatriotes ultramarins n'aient pas été respectés à la mesure de ce qu'exigeait la situation extrêmement tendue dans ces territoires. En effet, là aussi, le 49.3 a fait son œuvre de nettoyage, au mépris des choix majoritaires dans notre hémicycle. C'est encore une erreur politique.
Madame la Première ministre, le chemin budgétaire que vous empruntez comporte beaucoup d'injustices et d'inefficacité. Nous avons, tant que nous en avons eu l'occasion – cela n'a pas été très long –, émis des propositions visant à fonder les recettes de l'État sur un impôt plus juste, plus direct, plus progressif, assis sur les revenus et sur le patrimoine, pour les ménages comme pour les entreprises.
Toutes les études le démontrent : les choix budgétaires et fiscaux que vous avez faits depuis cinq ans ont profité aux classes les plus aisées. Ils ont pour conséquence la colère et la division entre nos compatriotes. C'est ainsi que, contrairement à ce que vous affirmez, vous nourrissez le nationalisme et l'extrême droite, comme vos amis l'ont fait en Italie.
Comme l'écrit Pierre Serna : « La vie politique française, malgré ce qu'en dit toute une tradition historiographique, n'est pas bloquée par une lutte handicapante entre droite et gauche, mais par un poison : celui d'un extrême centre flexible, prétendu modéré, mais implacable qui vide de sa substance démocratique la République, en la faisant irrémédiablement basculer vers la République autoritaire. Le macronisme n'est pas une révolution, c'est une vieille histoire. »
Approbation sur plusieurs bancs du groupe LFI – NUPES. – Protestations sur quelques bancs du groupe RE.
Ni dans la forme, ni dans le fond, nous ne vous donnerons quitus. Les députés communistes et ultramarins du groupe Gauche démocrate et républicaine sont unanimement opposés à votre projet de loi de finances et voteront la motion de censure.
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Désormais, madame la Première ministre, nous vous donnons rendez-vous pour la réforme des retraites : la partie est loin d'être terminée !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et LFI – NUPES.
Nous examinons ce dimanche soir une énième motion de censure déposée par La France insoumise – NUPES.
Je dis « énième » car, dans ce concours d'agitation auquel se livrent depuis six mois les députés « insoumis », nous peinons de plus en plus à dénombrer leurs manœuvres d'entrave.
Dans sa motion, Mme Panot – qui a d'ailleurs disparu, montrant bien le peu d'intérêt qu'elle porte au texte qu'elle a elle-même écrit et déposé –…
…dénonce un « déni de démocratie contre l'ensemble du peuple français ». Rien que ça !
Vous savez, chers collègues de La France insoumise, les mots ont un sens. S'il y a déni de démocratie contre l'ensemble du peuple français, c'est vous qui en êtes les auteurs depuis le printemps dernier.
C'est vous qui n'arrivez pas à lire correctement le résultat de la dernière élection présidentielle, ni d'ailleurs celui de la précédente. Êtes-vous bien au courant que c'est Emmanuel Macron qui a été choisi majoritairement, puis reconduit largement, pour présider notre République ?
Vous êtes au courant que nous avons été élus ? Vous n'êtes ni à l'Élysée, ni ministre ! La courtisanerie élyséenne n'a pas sa place à l'Assemblée nationale !
C'est lui qui, en obtenant plus de 9,7 millions de voix au premier tour et plus de 18,7 millions de voix au second, a été élu démocratiquement par le peuple français.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Ce n'est pas votre candidat, défait trois fois d'affilée, qui l'a emporté, ni les candidats des partis alliés avec vous : M. Mélenchon, M. Jadot, M. Roussel et Mme Hidalgo ont tous été éliminés au premier tour de l'élection présidentielle.
Mme Raquel Garrido s'exclame.
J'y viens. En juin, les Français ont placé une nouvelle fois la majorité présidentielle en tête. Cette majorité est certes relative, moins étendue que sous la précédente législature, mais elle n'en demeure pas moins la majorité. Les groupes Renaissance, Démocrates et Horizons forment, par le vote des Français, la première force de l'Assemblée nationale.
Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Quant à M. Mélenchon, dont vous annonciez l'entrée imminente à Matignon, c'est plutôt chez lui qu'il est rentré, où il n'est plus désormais qu'un commentateur amer et rabougri de la vie politique.
En avril et en juin 2022, la démocratie – la vraie démocratie, celle des urnes – a donc parlé : elle a confié le pouvoir à Emmanuel Macron,…
…aux députés de son camp et au gouvernement d'Élisabeth Borne, qui, ayant été elle-même élue députée, possède donc une double légitimité populaire.
Vous n'avez pas la majorité, car le peuple français ne vous l'a pas confiée. Le véritable déni de démocratie, c'est votre refus d'admettre que, depuis des années, vous perdez toutes les élections nationales auxquelles vous vous présentez et que vous cherchez à obtenir par des combines et des abus de procédure ce que le suffrage universel vous a refusé.
Vous ne savez pas que tous ceux qui siègent dans cet hémicycle ont été élus ?
Depuis six mois, l'Assemblée nationale travaille. Grâce à la main tendue à maintes reprises par la Première ministre, nous avons pu construire des majorités et voter des textes transpartisans : le paquet pouvoir d'achat, adopté dès la session extraordinaire d'été, le texte visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation, la réforme de l'assurance chômage, la loi de programmation du ministère de l'intérieur, qui augmentera les moyens de la police et de la gendarmerie, ou encore l'inscription dans la Constitution du droit à l'interruption volontaire de grossesse – cette dernière proposition venait d'ailleurs de La France insoumise. Ces quelques exemples montrent bien que nous voulons travailler avec tout le monde et tendre la main.
Mais lorsqu'on tend la main, encore faut-il qu'il se trouve quelqu'un pour la saisir de manière sincère. Or force est de reconnaître qu'en ce qui concerne les projets de loi de finances, les oppositions n'ont pas joué le jeu. Arrêtons l'hypocrisie : vous n'avez pas voulu travailler avec le Gouvernement pour l'aider à adopter les budgets. Derrière ces motions de censure répétitives, il y a beaucoup de tartuferie. Vous aviez annoncé d'emblée, dès l'été, avant même de commencer l'examen des textes, que vous vous opposeriez aux lois de finances. Certains orateurs de l'opposition l'ont d'ailleurs rappelé tout à l'heure.
Pourtant, le Gouvernement a engagé dès le mois de septembre les dialogues de Bercy.
Cet exercice inédit d'association des oppositions à la construction du budget de la nation s'est traduit par la prise en compte, dans les différents textes budgétaires, de plusieurs amendements déposés par les oppositions.
La responsabilité de la majorité, dès lors, consistait à faire en sorte que les budgets soient votés. Ne pas faire adopter les budgets reviendrait à bloquer le fonctionnement de l'État et à ajouter de l'instabilité à des temps déjà instables.
Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI – NUPES et GDR – NUPES.
Quel gouvernement sérieux, dans une période de forte inflation, de ralentissement mondial de l'économie et de guerre en Europe, jouerait aux dés pour faire adopter ses budgets ?
Le Gouvernement n'a eu d'autre choix, vous ne lui avez laissé d'autre choix, que de faire usage de l'article 49 de la Constitution.
La Première ministre est dans son droit le plus absolu lorsqu'elle y recourt. Il n'y a donc là nul déni de démocratie, puisque cette possibilité est offerte par la Constitution – à moins que vous ne reconnaissiez aucune valeur à la Constitution actuelle.
Oui, le Gouvernement doit s'assurer de l'adoption des budgets dans les délais constitutionnels impartis.
Chers collègues de La France insoumise – NUPES, la question que nous nous posons est la suivante : à quoi riment vos motions de censure répétitives ?
Pour avoir moi-même observé votre comportement depuis six mois dans l'hémicycle et discuté régulièrement avec les habitants de ma circonscription alsacienne, je dois vous dire que vous faites peur à la grande majorité des Français.
« Oh ! » sur plusieurs bancs des groupes LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Vous leur faites peur, tant votre attitude s'apparente parfois à celle de zadistes ou d'agitateurs d'amphithéâtre. Pas une semaine ne passe chez moi, en Alsace, sans que des compatriotes viennent me demander, effarés, inquiets : « Pourquoi tant d'excitation, tant d'agressivité sur les bancs de gauche à l'Assemblée nationale ? »
Par votre violence, par vos outrances, par vos dérapages, vous faites du mal à la politique et à la démocratie parlementaire.
La France que vous nous proposez serait apocalyptique. Pour étayer mes propos, je m'en tiendrai à vos discours et à vos actes récents, survenus depuis le début de la législature.
Vous pointez du doigt les forces de l'ordre et – il faut le rappeler – vous les accusez de tuer.
Mme Raquel Garrido s'exclame.
Vous professez une laïcité à géométrie bien trop variable. Vous niez la menace séparatiste qui gangrène notre pays et préférez voler au secours d'un imam islamiste, antisémite et misogyne. Vous refusez de condamner la Russie de Vladimir Poutine – une position que vous partagez d'ailleurs avec l'extrême droite.
Vous défendez les squatteurs. Vous allez manifester avec les casseurs qui terrorisent les agriculteurs. Vous instrumentalisez les migrants et les sans-papiers.
Protestations sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES
et l'envie envers toute personne qui réussit, qui investit, qui s'enrichit, qui progresse par son travail.
Vous voulez noyer les entreprises et la classe moyenne sous un déluge de taxes et d'impôts. Vous vous fourvoyez désormais dans les théories antivax qui frisent le complotisme et, l'espace de quelques heures, vous avez même envisagé de défendre un texte lors de la niche du Rassemblement national, en vous alliant à l'extrême droite.
J'arrête là cette liste, car je ne veux pas faire de cauchemar cette nuit. Chers collègues, le projet que cette gauche-là propose au pays est en effet cauchemardesque. Ce pot-pourri d'anarchisme, de multiculturalisme, de robespierrisme et de collusion avec l'islamisme serait un désastre. La majorité présidentielle préfère le sérieux, la stabilité et l'ordre. Oui, nous préférons Colbert à Robespierre !
Les Français attendent de leurs députés qu'ils travaillent, pas qu'ils déposent une motion de censure chaque semaine. La majorité présidentielle est à la tâche et, malgré les embûches semées par ceux qui veulent le chaos, nous avançons.
En conséquence, le groupe Renaissance ne votera pas la motion de censure et vous renouvelle, madame la Première ministre, sa confiance.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Alors que M. Charles Sitzenstuhl regagne sa place en passant par les travées situées à droite de l'Hémicycle, Mme Raquel Garrido l'apostrophe.
Vous devriez aller vous asseoir à l'extrême droite : cela vous irait très bien !
Exclamations sur les bancs du groupe RE.
En règle générale, le dimanche, nous partageons un repas avec nos familles. Aujourd'hui, nous sommes réunis à cause d'un plat bien indigeste proposé par le Gouvernement, la spécialité de la Première ministre Borne : le 49.3.
Madame la Première ministre, c'est déjà la troisième fois que vous utilisez cette arme constitutionnelle pour le projet de loi de finances pour 2023. En toute logique – votre logique, en tout cas –, vous en déclencherez un quatrième pour la seconde partie du PLF. Ce sera le huitième ! Si vous continuez ainsi, vous allez finir par égaler le record de Michel Rocard, qui eut vingt-huit fois recours au 49.3 en trois ans. Mais il faudrait, pour cela, que vous teniez trois ans, ce dont je doute.
Vous avez le droit d'user du 49.3, non pas d'en abuser. De fait, vous en avez oublié l'essence, qui est d'éviter le blocage des institutions, et le but ultime, qui est de discipliner la majorité. Vous en avez banalisé le maniement en l'appliquant systématiquement, automatiquement, à l'ensemble des textes budgétaires, aussi bien le projet de loi de finances que le projet de loi de financement de la sécurité sociale. C'est une technique assez maligne pour distiller dans l'opinion publique sa banalisation. Vous espérez qu'ainsi, l'exercice se répétant souvent, personne ne verra le jeu dangereux auquel vous jouez.
Car par cette attitude, le gouvernement d'Emmanuel Macron ne fait qu'exprimer son mépris pour les représentants du peuple, élus par le peuple, que sont les députés. Cette surabondance de 49.3 sert à préparer l'utilisation qui en sera faite lors de la terrifiante réforme des retraites que vous organisez pour le début de l'année prochaine. Nous ne sommes pas dupes de votre manipulation, et les Français non plus.
Nous voilà donc réunis pour une énième motion de censure qui, comme les précédentes, sera un échec. Mais, là encore, cette répétition enlève à cet acte de sa solennité, de sa puissance et de sa gravité. Car une motion de censure est toujours un geste lourd de sens. Hélas, en le répétant à outrance,…
…on banalise le droit qu'ont les députés de censurer le Gouvernement. Le suspense est, bien sûr, inexistant, et les causes de l'échec sont toujours les mêmes.
La NUPES multiplie les motions de censure pour faire croire qu'elle est le premier parti d'opposition, mais c'est un leurre, puisqu'elle refuse les voix des députés du Rassemblement national, qui sont, comme les siens, élus par le peuple français. Ainsi, c'est la voix de millions de Français que rejette, une fois de plus, l'extrême gauche NUPES, montrant là tout son mépris pour le peuple de France.
Enfermés dans leur logique et leurs intérêts, les députés de la NUPES refusent également de voter nos motions de censure. Sans doute ont-ils trop peur de se retrouver devant les électeurs si l'une d'entre elles est adoptée. Nous autres, députés du Rassemblement national, n'avons pas cette crainte.
Quant aux LR, ils nous montrent chaque jour qu'ils ne sont que les béquilles consentantes du Gouvernement, une force d'appoint dans laquelle la majorité relative va piocher pour éviter de tomber.
Mme Véronique Louwagie sourit et s'exclame.
Auraient-ils, eux aussi, peur d'une dissolution ? Sans aucun doute ! Leur manque de courage en fait des alliés objectifs de la Macronie.
Une motion de censure n'est ni une proposition de loi, ni un programme commun, ni une coalition partisane. Elle est un outil constitutionnel qui agrège plusieurs groupes d'opposition. Il ne s'agit pas de faire allégeance à celui qui la dépose ou à ceux qui la votent. La motion de censure est une forme de référendum parlementaire qui permet de dire « stop » ou « encore » au Gouvernement. Tant que l'ensemble des oppositions ne la percevra pas ainsi, tant que les intérêts partisans de certains mouvements politiques passeront avant l'intérêt des Français, le Gouvernement et sa politique dévastatrice pour la France sortiront gagnants.
Oui, bien sûr, il faut un budget à la France. Nous, députés du Rassemblement national, nous ne sommes pas des irresponsables : nous ne voulons pas bloquer les institutions. Mais le budget imposé par le Gouvernement est inacceptable.
Un budget est la traduction chiffrée d'une vision politique. Dans son volet recettes, il exprime le consentement à l'impôt – dans un pays où le niveau des prélèvements obligatoires est le plus élevé du monde –, des choix fiscaux et une vision de la répartition de l'impôt. Le budget est donc le reflet d'une certaine vision de la France et de son avenir. En l'espèce, la vision du Gouvernement est limpide : seul compte son propre avis, au mépris des oppositions.
Depuis des mois, sur tous les plateaux de télévision, les ministres expliquent qu'ils veulent le dialogue, qu'ils veulent coconstruire le budget 2023. Mais ce n'est qu'une posture car, une fois en commission et en séance publique, le Gouvernement rejette toutes les propositions des oppositions. Pour preuve, il a refusé tous les amendements, les nôtres comme ceux des autres groupes, sur la taxation des superprofits et des superdividendes. Cette mesure de justice était pourtant facile à mettre en œuvre.
Les mesures relatives à la fiscalité des entreprises reflètent bien la vision du Gouvernement : il s'agit de laisser les plus grosses sociétés pratiquer l'optimisation fiscale et de faire peser de facto la fiscalité sur les petites et moyennes entreprises, qui sont pourtant les principaux vecteurs de l'emploi. Une hérésie de plus – nous commençons, hélas, à en avoir l'habitude.
Vous avez montré le peu de cas que vous faites des collectivités en rejetant notre amendement de compensation de la hausse du point d'indice dans la fonction publique territoriale. De même, vous avez rejeté l'instauration de l'impôt sur la fortune financière au lieu de l'impôt sur la fortune immobilière, pour ne pas froisser vos amis millionnaires. À moins que vous ne méconnaissiez les préoccupations du petit peuple, vous qui appartenez à un gouvernement dont la presse annonce qu'il est composé uniquement de millionnaires.
« Caricature ! » sur les bancs du Gouvernement.
Vous avez également refusé notre amendement visant à instaurer une TVA à 0 % pour un panier de 100 produits de première nécessité. À l'heure où les Français ont faim, ce refus est une honte pour vous et une tragédie pour certains de nos concitoyens !
Vous avez rejeté un amendement de justice visant à relever le plafond du crédit d'impôt pour la garde d'enfant. Alors que la France connaît une chute historique de sa natalité – l'Insee annonce une diminution de 10 % du nombre des naissances cet automne en France –, cette mesure de justice sociale aurait permis d'inciter les Français à avoir plus d'enfants.
Vous refusez tout et dans tous les domaines, comme notre amendement visant à favoriser le mécénat d'entreprise pour la sauvegarde du patrimoine français par les PME.
Plus grave encore, vous refusez avec obstination d'abaisser de 20 % à 5,5 % le taux de la TVA sur toutes les énergies !
Du reste, la crise énergétique que nous traversons est révélatrice de la vision du Gouvernement : une vision court-termiste, qui privilégie, dans ce domaine comme dans d'autres, la politique du chèque. Le Gouvernement, qui demande aux Français de faire preuve de sobriété, a, quant à lui, la dépense publique facile : il mène une politique de l'endettement massif et des impôts différés, sans investissement ni retour sur investissement. Le boomerang fiscal est inéluctable ; il viendra percuter violemment les Français. Pourtant, d'autres voies étaient possibles.
Que nos concitoyens en aient bien conscience, le bouclier tarifaire est une politique ruineuse. Entre 2022 et 2023, 100 milliards d'euros d'argent public ont été dépensés ! Qui plus est, cette politique dépensière est peu efficace. Le Rassemblement national vous avait proposé une politique déflationniste efficace et pérenne, grâce à la baisse de la TVA sur les énergies ; vous avez préféré dépenser 100 milliards qui n'ont pas réellement aidé les Français. En effet, jamais un chèque de 100 euros n'arrivera à compenser la hausse de 700 euros du coût du remplissage d'une cuve de fioul.
Cent milliards, c'est ce qu'a coûté notre parc nucléaire. C'est également le coût de 100 à 200 centres hospitaliers universitaires flambant neufs !
Cette situation résulte de mauvais choix de gestion, de mauvais choix politiques et d'un manque de vision. Elle résulte d'une absence d'investissements dans les infrastructures stratégiques de notre pays, de l'absence de volonté politique d'assurer notre souveraineté dans des secteurs pourtant essentiels à la bonne marche de notre nation, et de la soumission à des règles européennes absurdes qui desservent les intérêts français.
À cette ruineuse politique du chèque, à cette politique sans avenir, nous, au Rassemblement national, nous préférons l'investissement dans le nucléaire, la baisse de la fiscalité et la sortie du marché européen de l'électricité. Que le Gouvernement ne vienne pas claironner que celle-ci est impossible : nos voisins Espagnols et Portugais l'ont réalisée avec succès. Loïk Le Floch-Prigent indiquait cette semaine que la France produit un kilowattheure à 50 euros que le système européen nous revend 600 euros !
Ce n'est donc pas l'offre d'énergie qui pose problème, mais le calcul de son prix de vente, qui se fait au seul avantage, là encore, de nos amis Allemands. La France a le réseau d'électricité le plus efficace d'Europe, mais vous préférez sauver l'Union européenne, par pure idéologie, au détriment des Français.
Les tarifs actuels de l'électricité ont des conséquences catastrophiques : faillites et chômage de masse attendent la France à cause de votre incapacité à dire non à l'Europe, non à l'Allemagne. Pire, la hausse des tarifs de l'énergie nous conduit vers une crise alimentaire majeure. Déjà, de grands groupes alimentaires français ferment des unités de production sur tout le territoire. Vous donnez ainsi aux entreprises une raison de plus pour délocaliser leur production. Votre gouvernement plonge les Français dans le froid, la faim, le chômage et l'obscurité !
La crise que nous traversons exige que nous mobilisions toutes nos forces, tous nos moyens, pour affronter la tempête. Or, il n'en est rien.
Sur l'ensemble des sujets abordés lors de la discussion du budget pour 2023, nous avons fait de très nombreuses propositions constructives et, pour certaines, consensuelles : baisse de la TVA sur les énergies, taxation des superprofits, baisse des impôts pour les TPE-PME, création d'un bouclier face à l'explosion prévisible de la taxe foncière, baisse des dépenses liées à l'immigration et privatisation de l'audiovisuel public.
Nos propositions ne consistent pas uniquement dans des baisses d'impôts et des hausses de dépenses. Nous avons pour la France une autre ambition que la vôtre, une ambition qui passe par une vision à long terme et des choix budgétaires bien différents. Nous voulons rétablir la justice fiscale, éradiquer les dépenses superflues, simplifier les démarches administratives pour les particuliers comme pour les entreprises, investir dans les infrastructures publiques essentielles et rétablir notre souveraineté stratégique et énergétique.
Même si nous regrettons l'usage intempestif du 49.3, le groupe Rassemblement national ne votera pas cette motion de censure. De ce fait, le Gouvernement ne tombera pas ce soir, comme le souhaitent aussi bien les LR que l'extrême gauche NUPES.
Mes chers collègues, je vous donne rendez-vous pour la prochaine motion de censure de la NUPES, qui sera déposée lors du prochain 49.3, lequel sera déclenché par le Gouvernement lors de la nouvelle lecture de la seconde partie du PLF 2023.
Voilà le huitième 49.3, la huitième motion de censure ! Huit 49.3 en moins d'un trimestre : la preuve par l'exemple, madame la Première ministre, que vous êtes vraiment minoritaire dans cet hémicycle. Contrairement aux usages en vigueur sous la V
Voici votre conception de la démocratie parlementaire : le désert du débat, le désert de la pensée. Quasiment personne dans l'hémicycle pour vous contredire. Personne pour vous rappeler les déclarations contradictoires, pour ne pas dire les mensonges permanents, d'Emmanuel Macron sur toutes les crises, de celle du covid à celle qui s'annonce sur les retraites, en passant par celle du prix de l'énergie. Personne pour vous remémorer votre responsabilité dans l'effondrement du pays et la souffrance des Français.
C'est tellement plus simple, une démocratie sans parlement, madame la Première ministre – qui n'écoutez jamais les orateurs !
C'est tellement plus simple, une démocratie sans peuple, et sans majorité à dompter puisqu'en vérité, vous avez refusé le moindre débat sur le volet recettes du projet de loi de finances, car certains députés de votre majorité voulaient imposer les superprofits des oligarques qui vous commandent.
Pis, par ce 49.3, vous effacez tout le travail mené au Sénat comme à l'Assemblée et vous reniez même vos promesses, faites notamment aux collectivités locales lors du salon des maires – il n'y a pas si longtemps. Vous répétez sans cesse dans la presse qu'Emmanuel Macron a été élu sur un programme et que vous êtes là pour l'appliquer.
Vous oubliez simplement – c'est gênant ! – que notre Constitution, celle de la V
En fait, vous n'avez jamais digéré votre défaite aux élections législatives.
Sourires sur les bancs du groupe RE.
Vous voulez donc passer en force. Mais au huitième 49.3, cela commence à se voir. Nos concitoyens découvrent avec effarement que vous n'hésitez jamais à les piétiner – et cela vous fait rire ! Mais pourquoi le faites-vous, avec ce degré de mépris, d'arrogance, et même d'inconscience ? C'est ce que je me demande quand je vous vois rire.
Cela s'explique tout simplement par le fait que votre gouvernement n'est plus au service du peuple français. Vous obéissez à l'Union européenne ; vous servez les oligarques du régime qui ont installé Emmanuel Macron à la tête de l'État.
Exclamations sur les bancs du groupe RE.
Vous privilégiez les plus riches. Vous gouvernez contre l'intérêt général, contre l'intérêt national. Voilà la réalité.
J'en apporte trois preuves récentes très concrètes.
Tout d'abord, ce projet de loi de finances pour 2023 ne répond pas au choc économique que représente la hausse du prix de l'énergie pour nos entreprises. Certes, vous avez instauré un bouclier tarifaire pour les particuliers – heureusement ! – mais vous laissez tomber nos PME, nos artisans, nos boulangers, nos commerçants, les entraînant dans la faillite, et on dénombrera des dizaines de milliers de chômeurs de plus au mois de janvier.
Et pourtant, vous auriez pu, par une mesure simple, rétablir un prix national de l'électricité comme l'ont fait l'Espagne ou le Portugal. Mais vous ne voulez pas déplaire à votre maître : M. Bruno Le Maire est le ministre allemand de l'économie ; il n'est pas le ministre français. Vous n'êtes pas la Première ministre de la France, mais de l'Allemagne.
Protestations sur les bancs du Gouvernement, ainsi que sur les bancs du groupe RE.
Vous préférez engraisser des opérateurs privés qui achètent l'électricité à EDF à 42 euros le mégawatt pour le revendre jusqu'à vingt fois plus cher.
Madame Borne, je vous invite à rencontrer une boulangère de Brunoy, dans ma circonscription, qui va mettre la clé sous la porte, et qui m'expliquait hier qu'on lui vendait maintenant le mégawatt 650 euros contre 105 euros hier. Sa facture d'électricité est déjà passée de 3 200 euros à 16 000 par mois – vous imaginez ? Vous pourriez rétablir un prix garanti comme l'Espagne ou l'Allemagne – pourquoi ne le faites-vous pas ?
Vous avez tellement l'habitude de passer en force que, dans un autre domaine, vous ne voulez toujours pas réintégrer les soignants non vaccinés alors que la majorité de cet hémicycle le voulait. Vous avez procédé à de l'obstruction parlementaire pour empêcher cette mesure de justice qui existe dans tous les pays du monde.
Et puis, comme vous voulez toujours passer en force sans comprendre ce qui adviendra dans le pays prochainement, vous voulez effectuer maintenant, alors même que la CFDT s'y oppose, votre réforme des retraites. Cette réforme…
…plongera des centaines de milliers de personnes au RSA, car on ne trouve pas de travail entre 62 et 63 ans. Vous voulez mener cette réforme pour économiser quelques milliards alors que vous ne luttez pas contre les 20 milliards de fraude aux cartes vitales ni contre les 10 milliards donnés à l'Union européenne.
Voilà pourquoi, en définitive, je voterai cette motion de censure.
Je regrette que toutes les oppositions qui passent leur temps à vous critiquer ne la votent pas. Vous devez partir !
Deux jours de débat qui n'auront pas pu avoir lieu…
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
…et des délais constitutionnels toujours plus contraints. Voilà à nouveau, le constat que je dresse devant vous. Voilà le résultat de cette nouvelle motion de censure.
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Il y a quelques jours, à cette tribune, je vous ai proposé de construire une nouvelle méthode démocratique,…
…transparente, qui respecte les droits constitutionnels de chacun,…
…une méthode qui nous permette aussi de répondre à notre volonté collective de pousser plus loin les échanges, le débat, et d'aboutir parfois – pardonnez-moi d'employer ce mot presque indécent pour certains parmi vous – à des compromis.
J'ai conscience que ce mot ne sonne pas juste dans votre partition politique fondée sur l'affrontement et le blocage, fondée sur l'attente presque fébrile d'un tête-à-tête avec le Rassemblement national.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Je ne prétends pas que le chemin que je propose est aisé mais, une fois encore, je souhaite que nous travaillions collectivement, faute de quoi nous nous enfermerons dans une forme de frustration qui n'aboutira à rien de bon pour la démocratie elle-même. En effet, en refusant la méthode démocratique que je vous ai proposée,…
…il y a quelques jours, en déposant à nouveau une motion de censure, copié-collé de celles que vous avez précédemment déposées sur chaque partie, sur chaque lecture, ce sont bien deux jours de débat sur le PLF que vous avez retirés.
Ce sont deux jours précieux, compte tenu du temps qu'il nous reste pour examiner le texte et disposer d'un budget au 1er janvier 2023.
Mesdames et messieurs les députés de La France insoumise, une fois de plus, vous vous plaignez des conséquences de ce que vous provoquez.
Par la multiplication de motions de censure, vous contraignez le temps de la discussion. Vous faites valoir vos droits constitutionnels – cela n'appelle pas de commentaire de ma part, mais cela a des conséquences que vous devez assumer.
Chaque motion de censure, ce sont au moins deux jours de débat sur le fond des textes dont vous privez le Parlement.
Protestations prolongées sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
J'en conviens, monsieur le président de la commission des finances Éric Coquerel, nous n'avons pas la majorité absolue dans cette assemblée et, quand toutes les oppositions nous disent vouloir rejeter le PLF quel que soit son contenu, nous prenons nos responsabilités en engageant la responsabilité du Gouvernement ,
Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR
mais cela n'implique pas le dépôt systématique d'une motion de censure avec les conséquences que je viens d'évoquer sur le temps imparti au débat.
En trois ans, Michel Rocard a utilisé vingt-huit fois le 49.3 tandis que les oppositions ont déposé cinq motions de censure.
Alors, finalement, pourquoi avez-vous si peur du débat ?
Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES. – Les députés du groupe LFI – NUPES se lèvent et applaudissent en riant. – Mme Élisabeth Borne sourit également.
Nous, nous ne le fuyons pas. Je vous rappelle que sur ce texte, en première lecture, nous avons laissé, au contraire, les débats se tenir pendant plus de cinquante heures. Ainsi, madame Rabault, sur la partie recette, 100 % du temps prévu a été utilisé. J'aurais aimé que cela soit à nouveau le cas. Mais par huit fois sur les textes financiers, fidèle à sa politique de posture permanente, le groupe La France insoumise a déposé des motions de censure. Du fait de son comportement, nous manquons de temps.
« Quelle mauvaise foi ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
J'aimerais croire que les autres groupes de la NUPES ne s'y trompent pas.
Mesdames et messieurs les députés de La France insoumise, vos textes se suivent et se ressemblent. Ils respectent ce que l'on peut maintenant qualifier de recette classique de motion de censure insoumise. Contre-vérités, invectives, attaques : tout y est.
Protestations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Tout y est donc, sauf la volonté de construire, de sortir par le haut.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
J'en prends acte, mais nous devons agir en responsabilité. Or notre responsabilité est de s'assurer que la France dispose d'un budget dans moins d'un mois.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
J'aimerais, de mon côté, dire un mot de ce qui se trouve effectivement dans ce texte, plutôt que de répondre aux leçons assénées et aux sous-entendus douteux de M. Benjamin Lucas. Je n'ai pas de leçon de République ni de leçon de démocratie à recevoir de vous qui sacrifiez le temps du débat prévu pour le PLF pour tenter pour la huitième fois de nous censurer.
Mêmes mouvements.
Ce texte témoigne du respect de notre engagement vis-à-vis des Français : pas de hausse d'impôts.
Les recettes nous permettront d'agir pour protéger le pouvoir d'achat des Français, notamment en prévoyant une indemnité carburant travailleurs. Je veux vous rassurer, madame Véronique Louwagie, les crédits sont bien dans le PLF…
…en déplaçant les crédits de la dotation pour aléas à la mission "Écologie" .
Ces recettes nous permettront aussi de mener la bataille du plein emploi, pour investir dans notre transition écologique, pour donner corps à l'égalité des chances et pour fortifier notre souveraineté.
La première partie du projet de loi de finances a été améliorée grâce au travail parlementaire. Elle reprend des propositions du groupe Les Républicains sur la demi-part des veuves ou sur le plafond des tickets restaurant.
Elle intègre des idées de la NUPES, comme la TVA à 5,5 % sur les masques, l'autorisation de nouveaux carburants alternatifs ou encore le prolongement de l'aide fiscale pour les investissements dans les outre-mer.
Elle reprend des amendements défendus par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, par exemple pour la prorogation du crédit d'impôt investissement en Corse.
Elle comprend aussi des avancées défendues par la majorité, comme le crédit d'impôt pour la garde d'enfants ou le relèvement du plafond de l'impôt sur les sociétés sur les PME.
Enfin, elle reprend des propositions de vos collègues sénateurs.
Vous êtes la démocratie à vous toute seule ! Finalement, on pourrait fermer cette maison…
Je pense aux dispositifs permettant d'exonérer d'impôts et de frais de dédouanement les colis envoyés entre particuliers vers les outre-mer, ou encore à l'amélioration de la lutte contre la fraude.
Enfin, c'est aussi la volonté permanente du Gouvernement de s'adapter à la situation économique. Nous avons ainsi annoncé la semaine dernière des mesures supplémentaires en faveur des TPE et des PME très consommatrices d'énergie, notamment les boulangeries. J'en conclus, madame Rabault, que si vous l'aviez écoutée, vous auriez salué cette annonce.
Le nouveau texte porte, enfin, une amélioration sensible du filet de sécurité pour aider les collectivités face à la hausse des prix. Nous avons entendu l'appel des maires. Nous devions simplifier les dispositifs prévus. Et je m'y suis engagée personnellement devant eux au congrès de l'Association des maires de France. Nous tenons cet engagement.
En partant de vos travaux, enrichis par ceux du Sénat, nous proposons dans cette première partie du PLF un dispositif simplifié, plus accessible et donc plus protecteur pour les collectivités. Nous supprimons le critère fondé sur l'écart entre l'évolution des recettes et celle des dépenses d'énergie ; nous baissons le taux de perte d'épargne de 25 % à 15 % pour être éligible ; nous compensons davantage les collectivités qui voient leurs dépenses d'énergie grimper. En résumé, plus de communes seront aidées et elles seront mieux aidées. Voilà ce que nous vous proposons dans ce texte ; voilà ce que la France insoumise veut censurer.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Je regrette que les manœuvres de certains nous empêchent de débattre autant que nous ne le voudrions.
Mais c'est ainsi. Pour ma part, avec le Gouvernement, je tiendrai le cap, et nous donnerons un budget à la France le 1er janvier.
Mmes et MM. les députés du groupe RE se lèvent et applaudissent. – M. Christophe Plassard applaudit également.
La discussion est close.
Je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je rappelle que seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin, et que le vote se déroule dans les salles voisines de l'hémicycle.
Le scrutin va être ouvert pour trente minutes : il sera donc clos à dix-neuf heures dix.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à dix-neuf heures dix.
La séance est reprise.
Voici le résultat du scrutin :
Majorité requise pour l'adoption de la motion de censure, soit la majorité absolue des membres composant l'Assemblée 288
Pour l'adoption 78
La majorité requise n'étant pas atteinte, la motion de censure n'est pas adoptée.
En conséquence, la première partie du projet de loi de finances pour 2023 est considérée comme adoptée en nouvelle lecture.
Nous voilà face à la démonstration même de ce que je vous disais, à cette tribune, il y a quelques minutes : nous aurions pu discuter, autant que possible, de cette seconde partie du projet de loi de finances pour 2023.
Mais les faits sont là, et ils sont têtus : la multiplication des motions de censure a considérablement restreint le temps de discussion sur le projet de loi de finances (PLF) comme sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Force est de constater que certains ont préféré parler des textes de leurs motions de censure, plutôt que des projets de loi.
Aujourd'hui, et je le regrette, nous ne pouvons pas engager l'examen de la seconde partie du texte avec l'espoir de l'achever dans les délais impartis.
Exclamations sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Si c'est le cabinet McKinsey qui vous a fourni cet argument, virez-le !
Aujourd'hui, et je le regrette également, bien que cette seconde partie ait été adoptée par deux fois en commission, malgré l'adoption de l'ensemble du texte en première lecture,…
…malgré l'inscription de 4,5 milliards d'euros de dépenses supplémentaires en faveur de l'environnement ,
Mêmes mouvements
de l'augmentation du salaire des enseignants, du recrutement de 3 000 policiers et gendarmes, malgré de profondes modifications – y compris à l'initiative de La France insoumise – du budget consacré à l'outre-mer, aucun groupe d'opposition ne nous a fait savoir qu'il était prêt à reconsidérer sa décision de rejeter ce projet de loi, quoi qu'il contienne.
Mesdames et messieurs les députés, je regrette ces postures, mais je n'abandonne pas ; je ne renonce pas à ma volonté de bâtir des compromis. Or, je le répète, le texte a été profondément modifié, amélioré, grâce à vous et aux sénateurs. Parmi les apports du Sénat à cette seconde partie, je citerai ainsi le travail qui s'engage au sujet du financement des transports publics en Île-de-France, ou encore l'augmentation des crédits destinés à lutter contre l'habitat indigne dans les territoires ultramarins : ce sont là des sujets importants.
« Bien sûr ! » sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
J'insisterai en outre sur un changement important pour nos collectivités territoriales : je vous confirme, madame Louwagie, la suppression des mécanismes de sanction, assimilés par beaucoup à de nouveaux contrats de Cahors. Je m'y étais engagée devant les maires de France : c'est là une nouvelle illustration de la relation de dialogue et de confiance…
…que nous avons désormais établie avec les élus.
Grâce à nos échanges avec vous et avec les associations d'élus, le texte a également été enrichi d'autres dispositions : 300 millions de soutien aux autorités organisatrices des transports, 140 millions d'un soutien global exceptionnel aux régions et bien sûr l'indemnité carburant de 100 euros allouée aux Français dont les revenus sont modestes et qui ont besoin de leur voiture pour travailler.
Encore une fois, mesdames et messieurs les députés, ces avancées issues du travail parlementaire ont amélioré le budget de notre pays : nous avons à présent besoin qu'il entre en vigueur dans les temps, c'est-à-dire le 1er janvier prochain. Ainsi, sur le fondement de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, j'engage la responsabilité de mon Gouvernement sur la deuxième partie et l'ensemble du projet de loi de finances pour 2023.
Applaudissements sur les bancs du groupe RE.
Mmes et MM. les députés du groupe LFI – NUPES quittent l'hémicycle.
L'Assemblée nationale prend acte de l'engagement de la responsabilité du Gouvernement, conformément aux dispositions de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. Le texte sur lequel la Première ministre engage la responsabilité du Gouvernement sera inséré en annexe au compte rendu de la présente séance.
En application de l'article 155, alinéa 1er , du règlement, le débat sur ce texte est immédiatement suspendu. Le projet de loi sera considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée avant demain, dix-neuf heures quinze, est votée dans les conditions prévues à l'article 49 de la Constitution.
Dans l'hypothèse où une motion de censure serait déposée, la conférence des présidents fixera la date et les modalités de sa discussion.
Prochaine séance, demain, à seize heures :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures quinze.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra