France Insoumise (NUPES) PCF & ultramarins (NUPES)
PS et divers gauche (NUPES) EELV (NUPES) Radicaux, centristes, régionalistes...
LREM et proches (Majorité gouv.) MoDem et indépendants (Majorité gouv.) Horizons (Majorité gouv.)
LR et UDI RN et patriotes Non-Inscrits (divers gauche à droite sans groupe)
La séance est ouverte à neuf heures.
Mes chers collègues, cette nuit un piroguier du troisième régiment étranger d'infanterie a disparu et un gendarme de l'escadron mobile de Satory a également été blessé, en Guyane, où les forces armées sont durement frappées puisqu'un gendarme du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) avait déjà été tué par balle, il y a un mois.
J'ai fait le choix de ne pas faire de communication nationale et de laisser le préfet de la région Guyane intervenir. Cet adjudant du régiment étranger d'infanterie a disparu à la suite d'une collision entre la pirogue et un arbre, dimanche dernier. Une enquête judiciaire est ouverte. Il n'a toujours pas été retrouvé. Il est actuellement quatre heures du matin en Guyane et les recherches reprendront dès l'aube. Des moyens importants sont déployés, mobilisant la gendarmerie, la sécurité civile, les forces armées guyanaises et des nageurs de combat. À Camopi, le courant du fleuve est extrêmement fort. La personne disparue est un sous-officier, connaissant particulièrement bien la Guyane, puisqu'il en est originaire, et très engagé contre l'orpaillage illégal, notamment en lien avec les autorités coutumières.
Il y a quatre ans jour pour jour, dans la nuit du 9 au 10 mai, deux commandos marine – Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello – sont décédés en service, au Burkina Faso, dans le cadre de la libération de quatre otages, dont deux Français. Ces événements nous rappellent la dureté du métier des armes.
Mes chers collègues, nous poursuivons l'examen des amendements.
Rapport annexé (suite)
La commission adopte l'amendement rédactionnel DN836 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.
Amendement DN430 de M. Aurélien Saintoul.
Il vise à mettre en avant l'importance du contexte international, de son évolution et de la récente transformation de ses conflictualités, dans la définition des objectifs et des besoins pour nos armées. En effet, la guerre en Ukraine a récemment mis en lumière les manquements et l'insuffisance des modèles d'armée européens. Elle a précipité la rédaction et le vote d'une nouvelle loi de programmation militaire (LPM), en pointant les difficultés encourues par les forces armées, en cas de mobilisation internationale.
Les bouleversements systémiques majeurs ne se limitent pas aux conflits internationaux : s'y ajoutent aussi la crise écologique, la crise financière et l'accélération de la mondialisation. Tout cela accroît la vulnérabilité et les menaces touchant le territoire national. Or ils ne sont que très peu, voire pas du tout, pris en compte dans le projet de LPM. En l'absence de réelle revue stratégique et de Livre blanc, il est important d'y faire référence, au moins dans le rapport annexé.
Sur la forme, il faudra nous expliquer en quoi la guerre en Ukraine a remis en cause les modèles d'armée des pays européens. Quel modèle d'armée proposez-vous, d'ailleurs ? Sur le fond, faire référence au contexte géopolitique me semble être un argument plein de bon sens, même si je me méfie du mot « systémique », qui peut recouvrir des réalités différentes. Je vous invite à retirer votre amendement et à le retravailler pour la séance.
Je ne sais pas si la guerre en Ukraine a remis en question les modèles d'armée, mais vous avez en tout cas jugé nécessaire d'élaborer, en urgence, une LPM, pour y répondre. Cela signifie donc bien qu'il faut, selon vous, changer les choses. J'entends vos arguments quant à l'utilisation du terme « systémique ». Vous reconnaissez néanmoins qu'il est utile que ce que ce mot recouvre puisse figurer dans le rapport annexé. Nous retirons donc notre amendement, pour le retravailler en vue de la séance.
L'amendement DN430 est retiré.
Amendement DN701 de M. Jean-Louis Thiériot, amendement DN489 de M. Bastien Lachaud, amendements identiques DN431 de M. Aurélien Saintoul et DN708 de M. Jean-Louis Thiériot (discussion commune).
L'amendement DN701 est un amendement d'appel. La notion de « puissance d'équilibres », au cœur de tous les documents stratégiques, est ambiguë et n'a fait l'objet d'aucune définition. Cela pose deux problèmes. Le premier est théorique : il suffit de lire ce qu'écrit la Fondation pour la recherche stratégique (FRS), sous la plume de Bruno Tertrais, ou, dans d'autres domaines, l'Institut français des relations internationales (Ifri).
Le second est pratique : tous les pays du flan Est de l'Europe s'interrogent sur ce concept, le lisant comme une prise de distance par rapport à nos alliances, alors que tel n'est pas son esprit. Je propose l'expression de « puissance stratégique d'équilibre », de façon à signifier une puissance équilibrée, pesant dans les affaires du monde, et à éviter les questionnements quant à son interprétation. Je suis prêt à retirer mon amendement, en vue d'une clarification du concept en séance. Le rôle du Parlement n'est toutefois pas de se livrer à une herméneutique du vocabulaire employé par l'exécutif.
Par l'amendement DN489, le groupe LFI-NUPES s'oppose à une définition de la politique étrangère de la France fondée sur le concept flou, mal défini et peu compréhensible de « puissance d'équilibres ». Notre groupe préconise l'emploi des termes d'« indépendance » et de « non-alignement », plus clairs et plus conformes à la tradition diplomatique de notre pays. La France n'a pas vocation à être une puissance « équilibriste », pour reprendre le terme utilisé par Florian Louis, historien des relations internationales et membre de l'équipe de la revue Le Grand Continent.
La dernière revue nationale stratégique ne brille ni par sa clarté ni par son originalité. En effet, alors qu'une logique d'affrontement entre deux blocs tend à s'imposer, la France ne doit pas prêter son concours à cette polarisation. Elle doit rester un tiers-lieu, indépendant et non-aligné sur cette logique. En tout état de cause, elle doit conserver sa souveraineté. Elle ne doit être subordonnée à aucune puissance hégémonique : elle doit faire la démonstration, par son indépendance même, que l'engrenage vers une confrontation globale n'est pas inéluctable.
Par l'amendement DN431, le groupe parlementaire LFI-NUPES s'oppose à la définition de la politique étrangère de la France comme « puissance d'équilibres » et entend y substituer l'expression « puissance d'équilibre ». L'utilisation du pluriel est un artifice rhétorique, cachant mal l'absence de vision du Gouvernement. Si la France peut effectivement avoir une influence utile au maintien de la paix, il est oiseux de revendiquer d'être une « puissance d'équilibres » : cette expression n'a aucune portée concrète. Il convient plutôt de préciser que c'est par son indépendance, son exemplarité, son action résolue en faveur du respect du droit international et sa contribution à la restauration du système onusien que la France peut contribuer à défendre la paix et la stabilité du monde.
Certains pays souhaiteraient assurément que la France ne soit pas une « puissance d'équilibres ». Or, l'honneur et le choix de la France consistent précisément à ne pas s'aligner systématiquement sur l'un ou sur l'autre. Cette notion est importante, comme les auditions auxquelles j'ai procédé l'ont montré. Nous pouvons ainsi agir dans l'intérêt de notre pays et ne pas nous faire dicter nos choix par un bloc ou un autre. Cela nous permet de participer aux grands équilibres du monde. À cet égard, la LPM vise aussi à nous donner les moyens de cette politique d'équilibres. Avis défavorable à l'ensemble de ces amendements.
Dans votre exposé des motifs, vous indiquez, monsieur le député Thiériot, que le concept de « puissance d'équilibres » est « au mieux une forme atténuée du non-alignement gaullien, au pire le cache-misère d'un déclassement relatif dans le concert des puissances, que ne compense pas l'idée d'autonomie stratégique européenne ». Précisément, il s'agit d'une autre manière d'évoquer le non-alignement gaullien.
Voulons-nous encore que la France soit une puissance ? Nous pensons parler de la même chose, mais nos acceptions du mot « puissance » sont différentes, notamment s'agissant du multilatéralisme. Oui, la France a cette singularité, notamment comme alliée au sein de l'Alliance atlantique, de tenir à certains équilibres mondiaux, peut-être moins clivés ou définitifs.
Après une année passée à la tête du ministère des armées, je peux vous dire que la notion de puissance d'équilibre, au singulier ou au pluriel, a du prix dans une partie des pays ne se situant pas dans l'hémisphère nord – le Sud global –, y compris la zone indopacifique. De la diplomatie gaullienne jusqu'à la terminologie employée par le Président de la République aujourd'hui, tout le monde comprend le signal ainsi envoyé. Je vous invite à en discuter avec les Indonésiens, les Indiens et les Émiriens : ils ont compris ce que nous souhaitions faire, et cela se traduit dans des accords de défense ou commerciaux, en matière d'armement. Le concept renvoie aussi à la grande question d'équilibre entre les États-Unis d'un côté, et la Chine de l'autre, voire la Russie. Cette posture est cependant spécifique à la France et mérite d'être toujours défendue. En son temps, le général de Gaulle lui-même était assez minoritaire…
Je n'ai pas compris votre réponse, Monsieur le ministre. Vous considérez que le mot « équilibre » peut être utilisé au singulier comme au pluriel : j'en déduis que vous êtes favorable aux amendements visant à l'écrire au singulier. La notion de « puissance d'équilibres » est pourtant l'une des rares novations de la revue nationale stratégique : a-t-elle été introduite sans raison ? Je n'en suis pas certain.
Par ailleurs, vous considérez qu'il s'agit d'une autre façon de dire notre indépendance ou le non-alignement. Si tel est le cas, autant choisir une formulation claire. Nous ne vous empêchons pas de mener une diplomatie active auprès de toutes celles et ceux qui ne veulent pas être embrigadés dans un affrontement, par exemple entre les États-Unis et la Chine ; au contraire, nous y sommes très favorables. En revanche, choisissez des mots clairs pour exprimer vos intentions. Vous dites être attaché à des équilibres mondiaux : dès lors, utilisez plutôt l'expression de « puissance attachée aux équilibres suivants », en en donnant la liste. Quels sont ces équilibres mondiaux ? Personne ne le comprend.
Je vous propose de considérer le point de vue de la commission des affaires étrangères : le vrai problème est celui de la dissolution programmée du corps diplomatique. Comment peut-on être une puissance d'équilibre, au singulier ou au pluriel, si le corps diplomatique français, qui a le pedigree que l'on connaît, est progressivement écarté ? L'armée n'interviendra qu'en support et en dernier recours. Le débat gagnerait donc à se tenir ailleurs : comment pouvons-nous être une puissance indépendante et d'équilibres, sans une diplomatie digne de ce nom ?
Les amendements DN701 et DN708 sont retirés.
La commission rejette les amendements DN489 et DN431.
Amendement DN98 de Mme Caroline Colombier.
Il nous semble important d'inscrire, si ce n'est dans la loi, du moins dans le rapport annexé, les six fonctions stratégiques qui fondent notre stratégie de défense et de sécurité nationale : connaissance et anticipation, prévention, dissuasion, protection, intervention et influence. Cette inscription est d'autant plus nécessaire qu'elle vient acter la volonté du Président de la République d'ériger l'influence au rang de fonction stratégique, conformément à son discours du 9 novembre 2022, à Toulon.
Cet ajout n'apporte pas de plus-value, puisque cela est déjà implicitement dit dans l'ensemble du texte, ainsi que dans la Revue nationale stratégique. Avis défavorable.
Mon avis est également défavorable, essentiellement en raison de la rédaction de votre amendement, qui considère l'influence comme faisant partie des autres fonctions, alors qu'elle est nouvelle.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN544 de Mme Cyrielle Chatelain.
Il vise à supprimer les mots « véritable projet politique et militaire de transformation ». Le mot « transformation » pose en effet problème. Le projet de LPM s'inscrit dans la continuité des précédentes et plus largement dans celle de la politique de défense menée depuis des dizaines d'années. La tentative d'une politique de défense européenne a été la seule inflexion, mais cette volonté semble avoir disparu, de même que la perspective d'augmentation des opérations de sécurité conjointes, alors même que nous connaissons une reprise des conflits de haute intensité et une multiplication des lieux de tension à travers le monde.
Aujourd'hui, l'Europe est une force, avec un tiers des dépenses militaires mondiales ; son poids économique est colossal. Elle pourrait non seulement permettre la mutualisation des moyens, mais également peser : l'autonomie stratégique que nous avons évoquée doit reposer sur l'Europe. Or, nous ne voyons pas advenir ce tournant de la construction d'une défense européenne.
Par ailleurs, le choix continu de la dissuasion nucléaire reste le pivot de la politique de défense : il n'y a pas le moindre début d'une réflexion sur la manière dont la France pourrait répondre à ses engagements dans le cadre des traités de non-prolifération. Nous considérons donc qu'il s'agit d'un projet de LPM de continuité, et non pas de transformation.
Cette LPM met en œuvre une véritable transformation de nos armées. Face à des ruptures technologiques et géostratégiques importantes, ce projet prend non seulement en compte la nécessité de revoir ce qui relève de l'innovation, mais vise aussi à améliorer la capacité de nos armées à durer et à mener des combats de haute intensité – je vous renvoie notamment aux investissements relatifs au maintien en condition opérationnelle (MCO).
Votre amendement soulève deux questions : la transformation organique des armées et la dimension européenne. Sur le premier point, il ne faut pas sous-estimer la transformation en profondeur, notamment de l'armée de terre, dans les années à venir. Quelque 10 000 ou 15 000 militaires vont voir leur métier complètement évoluer, en particulier en raison du cyber ou de la guerre électronique. Cette transformation sans précédent n'est pas sans incidence sur la manière de fidéliser et de recruter, ou sur le pyramidage des grades.
La fonte des crédits budgétaires pour les armées durant les vingt dernières années a permis de protéger certaines fonctions. Si certaines ne sont pas consensuelles, comme la dissuasion nucléaire, d'autres le sont davantage. Je pense à nos forces spéciales, qui ont été plutôt épargnées – à l'exception des hélicoptères. En revanche, les capacités expéditionnaires ont été globalement abîmées, s'agissant notamment des soutiens. Le service de santé des armées en est un des exemples les plus édifiants, tout comme le service du commissariat des armées (SCA) ou les infrastructures. La remise en cohérence concerne donc non seulement le matériel, mais aussi la capacité à projeter – deux brigades, une division, à terme, en 2030, un niveau corps d'armée. Au sein de l'Otan, à part les États-Unis, personne ne sait le faire : les britanniques le peuvent avec des manques, en raison des coupes budgétaires violentes et importantes qu'ils ont subies, et nous, avec des lacunes, d'où un important champ de transformation pour les combler – défense sol et air, guerre électronique, capacité de tir dans la profondeur. Ainsi, le sujet n'est pas tant d'avoir des Griffons dans chaque régiment, mais d'armer une division tout entière. Les parlementaires qui ont eu l'occasion de voir l'exercice Orion ont compris les propositions des états-majors.
Le spatial, le cyber et les fonds marins sont aussi des champs de transformations importants pour les armées. Je conçois que vous refusiez de donner le point au Gouvernement, pour des raisons politiques, mais lorsque vous visiterez un régiment d'infanterie dans les dix prochaines années, il aura énormément évolué.
Sur la dimension européenne, je vous trouve dure ou pessimiste : jamais l'Europe de la défense n'a autant avancé, sur certains items jusque-là bloqués. La facilité européenne de paix en est un bon exemple. Il est extraordinaire que les membres de l'Union européenne aient été capables d'imaginer un fonds de mutualisation, abondé, permettant à chaque pays de donner des armes à un allié – l'Ukraine – et de se faire rembourser dans une logique de solidarité totale, à due proportion des moyens des pays. Sous la présidence française, un tel instrument avait été imaginé pour l‘Afrique : de fait, il sert aujourd'hui surtout pour l'Ukraine.
Un autre exemple réside dans le dispositif que les armées ont mis en place à Khartoum, au Soudan, avec la capacité à mettre en protection puis à évacuer, non seulement nos diplomates, mais aussi nos ressortissants et la plupart de ceux de l'Union européenne. C'est un cas pratique concret de ce que nos armées doivent pouvoir faire à l'avenir, dans des pays déstabilisés. Sur le volet européen, le texte comporte donc des avancées qui peuvent être consensuelles, ce d'autant que nous ne sommes pas dans une communautarisation, mais dans une Europe de la défense qui respecte la souveraineté nationale.
Les coopérations militaires – système de combat aérien du futur (SCAF), système principal de combat terrestre (MGCS), projets de commandes avec la base industrielle et technologique de défense européenne (Bitde) – sont moins consensuelles, en revanche, mais c'est mieux aujourd'hui qu'il y a dix ou vingt ans.
Le groupe Horizons et apparentés a hâte de débattre du fond. Certains pensent qu'il n'y a pas suffisamment de transformations, ou d'amplification, et je les respecte, même si tel n'est pas notre avis. Toutefois, il semble dommage de vouloir supprimer les mesures ambitieuses d'un texte que l'on considère comme ne l'étant pas assez. Pourquoi ne pas les conserver, en y ajoutant les moyens que vous souhaitez y voir figurer ?
Les réponses apportées, comme les questions posées, concernent le fond. Je remercie à cet égard M. le ministre d'avoir pris le temps d'y répondre. Vos propos sur les moyens capacitaires m'ont convaincue que nous sommes dans une politique de continuité des choix stratégiques. Certes, l'augmentation des moyens permettra de les déployer différemment. Cependant, alors que nous connaissons un changement de contexte très net, que les tensions sont extrêmement fortes, le projet de LPM ne repense pas les choix stratégiques.
Si vous me trouvez pessimiste sur la question de l'Europe, peut-être est-ce parce que j'ai énormément d'ambition pour la politique de défense européenne. Certes, il existe des mécanismes de coopération, mais nous devrions aller beaucoup plus loin compte tenu du conflit en Ukraine. Cela suppose une volonté politique. En matière d'industrie, il faut augmenter les coopérations entre européens et penser les politiques d'armement avec plus d'opérabilité. L'autonomie stratégique viendra de l'ambition que nous aurons en matière de politique de défense européenne.
Ma collègue a parfaitement raison de pointer la notion de transformation : le sens premier de ce terme comporte l'idée d'une radicalité, d'un virage à opérer concernant l'orientation de nos armées. Or, le texte ne semble pas s'inscrire dans une telle démarche et il n'y a pas de changement majeur du modèle. Le constat est le même s'agissant de la défense européenne : aucun élément concret ne vient étayer votre ambition en la matière, monsieur le ministre.
Cet amendement vise à supprimer les mots « véritable projet politique et militaire de transformation », ce qui est loin d'être anodin. Vous présupposez donc que les efforts conséquents que le Gouvernement se propose de faire pour les armées ne seraient que de l'ordre d'une inflexion. Or c'est tout le contraire. Ainsi, les efforts capacitaires augmentent de 300 % en matière de cyber, de 45 % pour le spatial, de 100 % s'agissant des drones, sans oublier les fonds marins. Ces chiffres montrent nettement que nous sommes au-delà d'une inflexion : nous sommes bel et bien dans une démarche de transformation visant à accompagner les évolutions du contexte géostratégique. Ne cherchez donc pas à banaliser ce projet de LPM ! Cette tentative de banalisation ressort de nombre d'interventions des oppositions. Or la représentation nationale se doit de montrer à nos armées que les efforts que nous allons consentir sont véritablement ancrés et adaptés aux évolutions géostratégiques.
J'ai été très étonné de vous entendre dire, Monsieur le ministre, que les armées françaises n'auraient pas été capables de faire une RESEVAC à Khartoum : elles ont toujours répondu présentes quand il a fallu évacuer nos ressortissants. Je ne comprends donc pas pourquoi vous prétendez que nous avons désormais besoin de l'Europe pour évacuer nos ressortissants de par le monde. Ce propos ne devait pas traduire votre pensée.
J'en reviens à l'amendement. Votre texte comporte en effet des formules creuses, plus dignes d'une plaquette de communication que d'un travail de fond pour le Parlement. Il en va de même pour la manière dont sont présentés les « patchs ». Au final, tout cela n'est pas clair.
Alors que nous examinons ce texte, des hommes sont sur le terrain : plutôt que de savoir si l'on amplifie ou si l'on transforme, ils veulent surtout avoir une armée qui fonctionne.
Il ne s'agit pas de refuser d'élargir le champ de compétences de nos armées : l'amendement ne remet pas en cause le modèle actuel. Il souligne qu'il ne s'agit pas d'une transformation. Le Gouvernement continue de choisir le modèle de l'armée globale, mais qui devient toujours plus miniature. Avec le retour de la haute intensité dans le territoire européen, nous avons besoin d'affirmer un volontarisme et une ambition pour la défense européenne. Or ceux-ci apparaissent dans les propos du ministre, mais pas dans le projet de loi, ce qui laisse planer un doute quant à l'équilibre que peut proposer la loi de programmation militaire.
Nous ne remettons donc pas en cause le montant des crédits ni l'objectif de porter l'effort national de défense à 2 % du PIB à compter de 2025, ni le modèle que vous avez choisi – nous discuterons pour déterminer s'il nous convient. Mais le rapport annexé ne fournit pas d'éléments significatifs pour justifier le caractère transformateur de la LPM. Élargir le champ de compétences de nos armées est une chose mais, en cas de conflit, nous avons besoin de tous les champs pour faire masse, ce qui n'est pas inscrit dans le texte.
Il n'y a pas une visite de base aérienne, de bateau ou de régiment dans laquelle les militaires n'expliquent pas qu'ils ont mené ou qu'ils continuent de mener un chantier de transformation. On peut toujours contester les mots qu'ils emploient sur le terrain et ne pas voir ce que ce que la professionnalisation de l'armée de terre a produit dans les années 1990, ni que cette loi de programmation militaire achève la professionnalisation, qui s'accompagne d'importants sauts technologiques. C'est bel et bien une transformation. À force d'ergoter sur les mots « amplifier » ou « transformation », on finit par se prendre les pieds dans le tapis.
La réalité est que, pour l'armée de terre, la transformation est puissante. J'en ai fait la démonstration. Vous ne pourrez pas dire aux 15 000 soldats qui vont changer de métier qu'il n'y a ni transformation ni évolution.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN552 de Mme Cyrielle Chatelain.
Comme toutes les composantes de nos politiques publiques, l'armée doit prendre le virage de la lutte contre le réchauffement climatique. La LPM s'étend jusqu'à 2030, date à laquelle la France devra avoir diminué ses émissions de gaz à effet de serre de 50 %. Cela signifie qu'il faut doubler notre rythme actuel de baisse des émissions. L'armée doit y contribuer en repensant sa dépendance aux produits pétroliers : chaque année, elle en consomme 800 000 mètres cubes, dont les trois quarts servent à faire voler les avions. Elle doit aussi afficher une ambition très forte pour rénover l'ensemble de ses bases militaires. Introduire un objectif clair de contribution des armées à la baisse des émissions de gaz à effet de serre serait un virage bénéfique à tous.
Globalement, une telle attitude aura nécessairement des incidences sur le terrain. Nous le voyons déjà, le réchauffement climatique créera demain les conditions d'une augmentation de nos tensions. Une partie du territoire ne sera plus vivable car, en raison des sécheresses, la nourriture n'y poussera plus. La guerre de l'eau a déjà commencé dans certaines parties du monde. Cet enjeu est non seulement à prendre en compte dans notre réflexion concernant la défense, mais aussi à anticiper. Chaque degré compte. Nous devons, y compris dans le cadre de la politique de défense, anticiper la situation future et contribuer à la baisse des émissions.
Merci pour ce propos. Comme d'autres ministères, le ministère des armées a déjà entrepris de nombreuses actions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Lors de la précédente législature, une mission d'information dont le corapporteur était Jean-Marie Fiévet a étudié les enjeux de la transformation écologique pour le ministère, afin de préparer l'outil de défense au défi climatique.
Quant à la stratégie énergétique de défense, adoptée en 2020, elle vise à maîtriser les consommations d'énergies fossiles et à augmenter l'efficience énergétique dans les armées.
Votre amendement semble aller dans le bon sens mais sa rédaction ne convient pas. Je vous suggère donc de le retirer ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Même si beaucoup ont été accomplis lors des dernières années grâce à une stratégie ad hoc, le ministère des armées doit faire plus. La priorité va à notre parc : nous ne sommes pas un propriétaire vertueux, c'est le moins que l'on puisse dire – bâtiments anciens, épaves thermiques, difficile gestion des fluides.
Nous avons en revanche bien progressé s'agissant du respect de la biodiversité, notamment avec la gestion des sites Natura 2000, des réserves naturelles ou des zones d'intérêt faunistique et floristique. Les armées travaillent sur ces sujets avec beaucoup de cœur, en lien avec des associations ou des opérateurs agréés.
Bien que l'amendement ne les évoque pas directement, son exposé sommaire peut introduire un doute sur les carburants opérationnels, en présentant les armées comme le premier émetteur de CO2 de l'État, qui « consomment chaque année 800 000 mètres cubes de produits pétroliers, dont les trois quarts du volume servent à faire voler les avions. » Même lorsqu'elle est très utile, une mission peut avoir un impact négatif sur la planète !
Nous devons être plus précis et travailler à une rédaction plus consensuelle. Je serai alors prêt à émettre un avis favorable en séance, si l'amendement montre bien ce que le ministère souhaite faire. Surtout, le volet des opérations doit être pondéré : il est compliqué de reprocher aux militaires de polluer, alors qu'ils n'ont pas d'autre choix. À ce titre, je ne souhaite pas ouvrir un autre débat sur la propreté de la propulsion nucléaire du futur porte-avions...
Je vous suggère donc de retirer l'amendement pour que nous puissions le retravailler d'ici à la séance, en vue de trouver une rédaction satisfaisante.
Chers collègues de la NUPES, je peux comprendre l'inquiétude globale liée au changement climatique et aux dangers qui nous menacent, mais je ne peux vous suivre sur ce point. Nous venons de commémorer la fin de la seconde guerre mondiale et nous évoquons un sujet encore plus grave : l'éventualité d'un conflit plus global.
Nous devrions exempter notre défense nationale de l'objectif de baisse des émissions de gaz à effet de serre : nos futurs canons Caesar, nos chars, notre aviation ou nos navires de combat n'avanceront pas à l'électricité et ne seront pas équipés de panneaux solaires.
Certes, c'est un tantinet caricatural, mais je suis persuadée que les Français auront compris que votre proposition est inepte face aux enjeux internationaux actuels.
Nous voterons contre l'amendement car nous devons concentrer nos efforts sur la cohérence et sur la masse. Cette LPM fait déjà la part belle à la décarbonation, avec la confirmation du porte-avions nucléaire de nouvelle génération, ainsi qu'avec la rénovation de nos sous-marins nucléaires lanceurs d'engins.
Tout en partageant l'avis de ma collègue, je rappelle que, lors de la précédente législature, j'avais présenté avec mon collègue Jean-Marie Fiévet un rapport d'information sur les enjeux de la transition écologique pour le ministère des armées. Nos propositions se retrouvent aujourd'hui dans les amendements que j'ai déposés.
Les armées réalisent de nombreuses actions en faveur du climat, des rénovations et de la gestion des espaces naturels autour des bases. L'ampleur de ces initiatives m'avait étonnée, mais s'agissant du bâti, on part de très loin. Un investissement massif est nécessaire : il importe qu'une ligne budgétaire lui soit dédiée.
Une autre mission d'information, conduite notamment par mon collègue Fabien Lainé, avait étudié la politique immobilière du ministère des armées. Nous sommes nombreux à travailler sur ces sujets.
En 2019, le ministère des armées a en effet utilisé 835 000 mètres cubes de produits pétroliers, mais il faut séparer les véhicules et matériels porteurs d'armes et ceux non porteurs d'armes. Sous l'impulsion de Mme Florence Parly, le ministère s'est lancé dans l'acquisition de véhicules d'usage, électriques ou hybrides. Le résultat est très positif : le coût de la pollution engendrée par les militaires est en forte baisse, même s'il faudra confirmer et amplifier ce point.
Compte tenu des réponses reçues, je retire l'amendement afin qu'il puisse être précisé et retravaillé d'ici à la séance. J'entends la volonté d'avancer, ce qui est nécessaire.
Contrairement à ce qui a été dit, j'estime que l'ensemble des politiques d'État doivent être mises à contribution non seulement pour répondre à la question du changement climatique mais aussi parce que les hommes et les femmes de l'armée subiront les incidences de ce changement, en intervenant dans des territoires affectés par le réchauffement climatique. On ne peut pas se retrancher derrière une vision court-termiste. Il faut savoir penser les dangers d'aujourd'hui et de demain.
L'amendement est retiré.
Amendement DN394 de M. Fabien Roussel.
Par cette nouvelle rédaction de l'alinéa 2, nous proposons que partout en France soit mené un débat approfondi sur le modèle d'armée que nous souhaitons, qui va engager notre pays pour les années qui viennent. La proposition s'inscrit dans notre débat sur la transformation ou l'amplification des moyens que nous donnons à notre modèle d'armée. D'ici à 2030, la LPM prévoit de doubler l'effort financier de la France en matière militaire : c'est un changement, une transformation, une amplification des choix de ces dernières années.
Deux choix nécessitent un débat. Il s'agit d'abord d'investir dans une armée de projection, avec l'investissement dans un porte-avions de nouvelle génération. J'entends, monsieur le ministre, que vous envisagez que la France se mette au niveau d'une puissance comme les États-Unis, qui jouent au gendarme du monde.
La transformation est également importante en tant que les moyens que nous mettons dans la dissuasion nucléaire se trouvent amplifiés. L'investissement dans de nouvelles armes nucléaires pousse à un changement profond de notre politique dans ce domaine.
C'est la raison pour laquelle nous invitons à mener un débat avec l'ensemble de nos concitoyens sur les choix de la France en matière de défense.
Nos approches de la dissuasion nucléaire divergent. Comme je l'ai précisé dans la discussion liminaire, elle est pour nous la clé de voûte de la LPM. Doter la dissuasion nucléaire d'une cinquantaine de milliards dans la LPM est un choix délibéré, que nous assumons. Il nous permet d'élever l'ensemble des compétences et des moyens technologiques des armées liés au nucléaire, qu'il s'agisse des vecteurs, des fusées, de la recherche. Les boucles technologiques sont de plus en plus courtes : les missiles hypervéloces se développent. Si notre pays n'a pas la capacité à répondre au feu que nos adversaires éventuels pourraient envoyer, il sera détruit. Nous assumons le fait que nous voulons une France qui puisse être à la table des grands grâce à sa dissuasion nucléaire, mais aussi qui puisse se défendre, si elle en a besoin.
Par ailleurs, la France n'a pas de dépendance envers les opérations extérieures. Elle s'engage soit pour honorer sa parole envers les partenaires avec lesquels elle est liée ; soit parce qu'elle a des intérêts nationaux à défendre.
Avis défavorable.
Monsieur Roussel, au moins, vous n'avancez pas masqué ! Vous avez naturellement le droit de faire cette proposition. Contrairement à vous, je crois à l'efficacité de notre dissuasion nucléaire.
Il n'y a pas de changement de doctrine : nous restons sur une dissuasion nucléaire défensive et suffisante. Le fait de réinjecter de l'argent pour la moderniser et l'adapter en permanence aux différentes contraintes, n'est pas un changement de doctrine ni de doctrine d'emploi, ni de stricte suffisance. C'est un effort à consentir, comme nos prédécesseurs l'ont fait.
La dissuasion nucléaire est aussi affaire de cycles. Nous reparlerons des courbes et des marges budgétaires car certains programmes peuvent être gourmands en crédits de paiement. Lors de la discussion liminaire, il a été dit que la dissuasion était la même. Par définition, la nouvelle génération de vecteurs comme de missiles est nouvelle et requiert un effort important.
On ne peut pas parler de souveraineté à tout va, sans pédagogie. Le fait de mettre en œuvre la dissuasion nucléaire seul, de manière souveraine, à la différence d'un voisin immédiat, a un prix, qu'il faut assumer.
Ce débat a lieu tous les cinq ans et s'appelle l'élection présidentielle. Il est large, puisque tous les Français sont appelés à se prononcer. Cette élection permet au chef de l'État d'affirmer ses orientations. Depuis que la dissuasion nucléaire existe, aucun Président de la République ne l'a remise en question. L'Ukraine aurait-elle été attaquée par la Russie si elle avait conservé son armement nucléaire ?
Nous devons être conscients du trésor que la dissuasion nucléaire, voulue par le général de Gaulle, a représenté pour la France : elle est vraiment la clé de voûte. Si le mémorandum de Budapest, par lequel l'Ukraine a renoncé à la force nucléaire, n'avait pas été signé en contrepartie de garanties concernant leur intégrité territoriale, plusieurs centaines de milliers de morts auraient été épargnées. Si je siège à la commission de la défense nationale, c'est pour sauver des vies.
Quant à la dépendance aux opérations extérieures (Opex), je ne comprends pas ce qu'elle signifie. On sait à quel point on est obligé de financer régulièrement nos Opex, et combien cela affecte le budget de nos armées. C'est une dépense ; cela ne rapporte certainement pas des avantages économiques.
Enfin, on ne doit pas opposer la dissuasion nucléaire et la défense opérationnelle du territoire (DOT). La dissuasion est la clé de voûte ; la DOT vise à éviter un contournement, en dessous du seuil de la prise en compte de nos intérêts vitaux. Nous avons une doctrine cohérente, qu'il faut conserver.
Nous voterons évidemment contre l'amendement.
L'amendement aborde plusieurs sujets et il faut sérier les questions. Comme d'habitude, nos collègues font de la dissuasion nucléaire un totem. Les observations sur le mémorandum de Budapest et l'Ukraine sont toutefois déplacées : l'Ukraine n'avait tout simplement pas les moyens de conserver ses armements nucléaires dans de bonnes conditions. Il suffit de lire le dernier livre de Benoît Pelopidas pour s'en convaincre.
Le groupe La France insoumise a la conviction que le mécanisme de dissuasion est opératoire ; l'amendement de nos collègues communistes prévoit un débat. Mais quand notre collègue Yannick Chenevard explique que le Président de la République a fait campagne sur un modèle d'armée et une doctrine de défense, j'ai envie de rire : nous n'avons pas eu plus de dix minutes de débat de fond sur ces questions dans le cadre de la campagne présidentielle. Par ailleurs, le Président de la République s'affranchit allégrement de toute idée ou promesse de la campagne présidentielle lorsqu'il s'agit de faire passer la réforme des retraites. Il y a matière à discuter et la souveraineté du peuple pourrait largement être mise à contribution sur les sujets qui l'intéressent, indépendamment du vote lors de l'élection présidentielle.
Je conviens cependant que la rédaction de l'amendement pose un problème s'agissant notamment de la dépendance économique aux Opex et à la dissuasion nucléaire. S'il y a un tropisme vers l'Opex, je ne la formulerai pas sous cette forme. La dissuasion est aussi un moyen de tirer vers le haut le modèle industriel. Si elle apparaît comme un moyen rationnel, partagé dans le pays, le débat est possible ; la population fera un choix légitime et fort.
La dissuasion nucléaire est un élément crucial pour notre pays : il est normal de lui allouer des moyens. Nous avons d'ailleurs déposé une proposition de loi constitutionnelle visant à protéger et à garantir la force de dissuasion nucléaire.
Il est gonflé de dire que cette question a fait l'objet de débats lors de l'élection présidentielle. Cela tombe bien : j'étais candidat et je peux vous dire qu'une seule émission a été consacrée à ce sujet. J'y ai participé avec certains candidats ; le candidat Macron a refusé d'y prendre part, comme à d'autres débats. Il n'y a pas eu de débat sur la politique que conduirait la France dans les années à venir en matière de défense.
Qu'auraient dit les Français si le Président de la République avait annoncé qu'il prévoyait d'injecter 50 milliards dans les sept ans pour développer l'armement nucléaire de la France ? L'amendement vise à organiser un débat, avec les Français, sur ces choix financiers et militaires importants. Il ne s'agit pas de remettre en cause, de manière unilatérale, la politique nucléaire de la France en matière de dissuasion nucléaire. Nous sommes une puissance nucléaire ; il ne s'agit pas de cesser de l'être, seuls, du jour au lendemain. Il s'agit de faire en sorte que la France, avec les autres puissances nucléaires, entame un processus de désengagement multilatéral en matière de dissuasion nucléaire, comme le prévoit le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Nous devons donner des signes dans le sens d'un désengagement multilatéral, surtout pas unilatéral. Avoir ce débat avec nos concitoyens est le minimum.
Je propose de réécrire l'amendement d'ici à la séance, afin de clarifier la question des Opex.
Je soutiens l'idée d'un débat sur la dissuasion nucléaire. Vous dites que la question a été tranchée, qu'elle ne ferait plus débat et que les Français la soutiendrait fortement. Alors, allons-y ! Si toutes les parties prenantes sont convaincues que la dissuasion nucléaire est le choix fait par la majorité des Français, elles devraient accepter ce débat, qui nous concerne tous, étant donné sa dangerosité et ce qu'il implique.
Il faut faire œuvre de transparence sur la question de la politique de défense, de la dissuasion nucléaire, de son utilisation, de ce qu'est l'intérêt vital de la nation – certes, seul le Président peut en décider, mais nous devrions pouvoir discuter du cadre dans lequel on peut l'utiliser.
Lors des auditions, des intervenants ont mentionné en quoi la conception de l'intérêt vital de la Russie était en train de changer. Le monde est changeant, mais les dangers qu'apporte l'arme nucléaire restent réels. Tout le monde devrait être favorable à ce débat, et vous, d'autant plus si vous pensez que le débat est tranché et qu'il n'y aura pas de remise en cause de la politique que vous soutenez.
L'amendement est intéressant en tant qu'il permet une clarification. Je rappelle le contexte de l'élection présidentielle de 2022 : la guerre d'Ukraine avait commencé, Vladimir Poutine ne cessait de menacer l'Occident d'utiliser les bombes nucléaires, à tel point que notre ministre des affaires étrangères lui avait vertement répondu.
Matin, midi et soir, les médias n'ont cessé d'expliquer comment fonctionnait la dissuasion nucléaire française et quelles en étaient les composantes et d'énoncer les positions des différents candidats. On ne peut pas dire que les Français n'ont pas voté en connaissance de cause sur ces sujets.
Enfin, en tant que membres de la commission de la défense nationale, il nous appartient de faire vivre ce débat citoyen. Avec Thomas Gassilloud et d'autres collègues, nous avons récemment organisé un débat citoyen sur la dissuasion nucléaire, où chacun a pu donner sa version des faits, et je me réjouis que l'on aborde le sujet.
Nous sommes dans une démocratie représentative ; tous les groupes politiques de l'Assemblée sont représentés dans cette commission. Le vote que nous exprimerons dira la position du pays sur la question de la dissuasion nucléaire.
Le député Thiériot n'a pas tort, mais, par ailleurs, pourquoi avoir peur du peuple et d'un débat plus large sur ces questions ?
Ce débat intéressant a mis en lumière certains aspects. D'abord, le ministre doit arrêter de créer un distinguo entre ceux qui ont une position claire et ceux qui avancent masqués. Le président Fabien Roussel a clairement annoncé la position du parti communiste : le désarmement, mais pas seul. Certes, cette position a pu évoluer car, pendant la campagne présidentielle, j'ai entendu certains de ses porte-parole proposer la signature du traité sur l'interdiction des armes nucléaires (Tian), donc aller vers un désarmement unilatéral.
En tout cas, il n'y a pas de divergence au sein de la NUPES sur la volonté d'en finir avec l'arme nucléaire, mais dans le cadre d'un désarmement multilatéral. N'essayez pas de créer des divisions là où il n'y en a pas.
Cette salle est aujourd'hui pleine à craquer alors qu'elle était vide lors du cycle dédié à la dissuasion nucléaire. Ces mêmes opposants qui demandent un débat, n'étaient pas là.
Nous sommes dans une démocratie représentative ; nous avons tous été élus légitimement. Cette instance est légitime et nous sommes en mesure de discuter de façon légitime de la dissuasion nucléaire.
La façon dont ce débat sur la dissuasion nucléaire est introduit est intéressante. Certains disent qu'ils veulent en sortir, d'autres – nos amis communistes, de La France insoumise et écologistes –, qu'ils veulent en débattre, avec nos concitoyens, au motif que ce débat n'a pas été tranché lors de l'élection présidentielle et qu'il faut en reparler avec le peuple. Nous sommes ici, à l'Assemblée nationale, pour avoir ce débat à travers la discussion sur la loi de programmation militaire.
Élargissons la focale, dans le temps et dans l'espace. Hier, en séance, certains d'entre vous remettaient en cause la construction européenne. Ce matin, en commission de la défense nationale, vous revenez sur la dissuasion nucléaire. Au fond, vous ne reconnaissez pas que notre pays et notre continent vivaient en paix dans un temps long, inédit dans son histoire, que l'invasion de l'Ukraine par la Russie est venue rompre.
Nos amis des pays d'Europe orientale et des pays baltes aimeraient bénéficier de la dissuasion nucléaire pour protéger leur frontière orientale : notre débat leur semblerait hallucinant. Ayons-le en commission de la défense nationale et expliquez-nous, cher collègue François Roussel, comment, sans dissuasion, vous assurerez la sécurité de notre pays et de notre continent dans le temps long. Enfin, comment utiliserez-vous la dissuasion en mode de décision partagée, pour assurer notre sécurité ?
Nous avons eu le débat en janvier. Ce que je récuse, ce sont les termes de l'amendement, non le débat. Qu'il y ait une dépendance militaire et économique aux opérations militaires extérieures n'est pas le sujet. La question à trancher est la façon dont le format d'armée répond aux menaces.
Non, il ne faut pas opposer nucléaire et défense opérationnelle du territoire. Jean-Louis Thiériot l'a dit, la dissuasion, clé de voûte, a son but propre. Par ailleurs, la DOT traite des menaces sous le seuil. Les termes du débat sont mal posés. C'est pourquoi il faut rejeter l'amendement.
Le débat est salutaire et sain. Arrêtez de dire qu'il y a des opinions respectables et d'autres qui ne le seraient pas ; qu'il y a des vérités révélées et, en face, des impies, qui veulent les anéantir. Je le dis d'autant plus facilement que nous voterons contre l'amendement. D'abord, parce que nous sommes attachés à la dissuasion nucléaire, non partagée, souveraine, franco-française.
Concernant les Opex, je suis surpris des termes qu'a utilisés M. Roussel. J'y vois davantage d'idéologie que de pragmatisme. C'est grâce aux Opex que la France a lutté efficacement – du moins, là-bas, au Sahel – contre l'islamisme qui nous attaque ici.
C'est dans les Opex qu'un certain nombre de soldats français sont morts, parfois pour libérer des Français. Nous pouvons tous leur rendre hommage. Vous essayez de propager l'image d'une France encore un peu colonialiste, qui se servirait de ses opérations extérieures pour préserver des puits de pétrole. C'est une vision surannée d'un combat et d'une idéologie surannées. Soyons pragmatiques : les Opex défendent les Français et nos alliés ; elles nous permettent de respecter nos engagements envers d'autres pays. Il faut avoir une vision moins manichéenne et plus nuancée.
Le groupe Socialistes ne remet pas en cause la légitimité de la dissuasion nucléaire car nous la considérons comme le meilleur moyen pour préserver la paix dans le territoire national et européen. En revanche, il souscrit à la façon dont Fabien Roussel questionne la légitimité de certains choix pour nos armées. Il n'a pas tort lorsqu'il évoque le fait que les citoyens ont besoin de débats. Les Français le démontrent tous les jours, en étant des millions à défiler dans les rues. Ils ont besoin de débats, dans un contexte où certains services publics sont sacrifiés ou optimisés jusqu'à la moelle. Pour effectuer nos choix budgétaires, nous avons aussi besoin de grilles de compréhension et il importe de nous rapprocher des citoyens par un débat public.
J'ai déposé un amendement qui met en lumière la notion de citoyen contribuable, pour les choix budgétaires en matière de défense. Parce qu'il s'agit d'argent public, les citoyens sont en droit de recevoir des réponses et d'être inclus dans la réflexion que nous menons à l'Assemblée. À ce titre, nous leur devons d'être informés et inclus dans nos débats
Ayons le débat avec nos concitoyens, pas seulement en commission et dans l'hémicycle car les débats que nous avons ne sortiront pas de ces enceintes.
La dissuasion et le surarmement nucléaires n'ont pas empêché les guerres qui ont lieu sur la planète. Il n'y a jamais eu autant de conflits et de guerres dans le monde. L'arme nucléaire menace la planète : plus il y en a, plus il y a de risques. D'ailleurs, la Russie ne cesse de brandir cette menace dans sa guerre contre l'Ukraine, ce qui montre qu'il y a un risque grave, que la dissuasion n'empêche pas.
De quoi avons-nous besoin pour vivre en paix ? La course aux armements garantit-elle la paix ? Telles sont les questions que nous aimerions poser aux Français, pour entamer un débat avec eux.
Enfin, nos interventions en Afghanistan, au Sahel ou en Libye ont-elles fait reculer l'islamisme ? Là encore, posons la question aux Français. Nous répondons par la négative : non seulement elles ne l'ont pas fait reculer, mais elles l'ont renforcé. Il suffit de voir la situation en Afghanistan, au Mali, en Libye pour se rendre compte que nos choix d'intervention dans ces pays ont surtout provoqué le chaos et renforcé les forces islamistes terroristes qui viennent combattre jusque dans notre pays. Les choix que nous avons faits là-bas n'étaient pas les bons.
En revanche, avoir une armée qui nous permette d'intervenir pour aider nos ressortissants, comme dernièrement au Soudan, est utile et indispensable.
Grâce à ses interventions, en particulier au Levant et en Afghanistan, l'armée française a efficacement réduit la menace terroriste, de façon très significative. On ne peut pas effacer en quelques mots les sacrifices de nos soldats.
Je me réjouis de ce débat nourri, et remercie M. Roussel d'avoir introduit le sujet de la dissuasion nucléaire dans les discussions sur la LPM. Nous en avons parlé pendant tout un cycle de discussions. Le débat existe, donc. Nous regrettons qu'il ne soit pas assez relayé dans les médias mais nous n'avons pas de télévision d'État et nous ne décidons pas des sujets qui doivent être traités.
Naturellement, il faut ouvrir ce débat. D'ailleurs, Fabien Lainé l'a dit, des initiatives sont prises partout dans le territoire pour organiser des discussions sur la politique de défense, notamment sur la dissuasion nucléaire.
Monsieur Lachaud, vous avez finalement mis en évidence les divergences que La France insoumise et le parti communiste entretiennent voire celles du parti communiste lui-même car tous les porte-parole de M. Roussel ne défendaient pas la dissuasion nucléaire. Hier, vous avez évoqué la LPM que vous prépareriez lorsque vous seriez au pouvoir – on peut tout imaginer. Mais comment ferez-vous sur le sujet du nucléaire ? Il y a beaucoup d'incohérences dans votre propos.
Revenons aux faits : notre dissuasion nucléaire se fonde sur la stricte suffisance, qui est nécessaire : c'est notre assurance vie. N'oubliez pas que nos compétiteurs nous regardent, en ce moment même.
La commission rejette l'amendement.
Si nous conservons le rythme actuel, nous aurons besoin de quelque soixante heures de débat pour examiner la totalité des amendements. Je vous propose donc, mes chers collègues, de limiter la durée des interventions à une minute – à l'exception de celles de l'auteur de l'amendement, du rapporteur et du ministre – afin de permettre à tous de s'exprimer dans le temps qui nous est imparti.
Alors que vous venez de mettre en avant le travail de la commission pour justifier l'absence de débat populaire, M. le président nous explique que nous manquons de temps. Ce n'est pas très sérieux.
C'est précisément pour garantir la bonne tenue des débats parlementaires et permettre l'expression des différents points de vue que je propose de réduire la durée des interventions.
Amendement DN61 de la commission des affaires étrangères.
La commission des affaires étrangères reconnaît au texte de nombreuses vertus parmi lesquelles la transformation sincère de notre modèle d'armée mais la thérapie n'en fait pas partie. Il est donc proposé de supprimer la notion d'introspection.
Je peux vous assurer que le travail préparatoire sur le projet de LPM a été très rigoureux et très dense. Avis défavorable.
Il a bien été demandé aux forces armées de mener un travail d'introspection. Cette méthode est plus vertueuse que celle qui consistait par le passé à solliciter l'avis d'intervenants extérieurs sur le devenir de notre modèle d'armées sans jamais consulter les forces armées elles-mêmes.
Avis défavorable ou demande de retrait mais je suis disposé à revoir la rédaction si elle vous semble redondante.
L'introspection est définie ainsi : « observation, analyse de ses sentiments, de ses motivations par le sujet lui-même ; étude psychologique par ce procédé ».
Nos armées ne me semblent pas psychologiquement atteintes. Il ne doit être question que de faits et pas de sentiments. Il s'agit d'un amendement de bon sens. Ne faisons pas de la LPM un tract politique.
La rapporteure pour avis a effectué un travail de toilettage salutaire. Le texte n'a pas besoin de tels falbalas. Les termes objectifs – revue, bilan – ne manquent pas pour qualifier le travail qui a été mené pour élaborer le projet de loi. Soyons, nous aussi, rigoureux.
Je maintiens l'amendement. Pour reprendre le mot de M. Thiériot, il ne s'agit pas de faire de l'herméneutique.
La commission adopte l'amendement.
Amendement DN395 de M. Fabien Roussel et sous-amendement DN928 de M. Bastien Lachaud.
Nos collègues ultramarins souhaitent substituer une formule plus consensuelle au terme de « métropole » qui établit une hiérarchie, non dénuée de connotation coloniale, entre l'Hexagone et les territoires d'outre-mer.
Le groupe LFI-NUPES est favorable à l'amendement sous réserve de remplacer l'expression « dans l'Indopacifique » par les termes plus précis : « dans l'océan Indien et dans l'océan Pacifique ».
L'Indopacifique est un concept importé des États-Unis pour lesquels il s'étend des côtes californiennes jusqu'à Taïwan en passant par l'île de Guam. Il est préférable de recourir à une notion géographique et non stratégique pour désigner nos territoires ultramarins qui sont situés tant dans l'océan Indien que dans l'océan Pacifique.
Aucune des rédactions ne convient. Lorsque j'étais ministre des outre-mer, je parlais d'Hexagone et non de métropole. Mais l'expression « territoire national en Europe, en Amérique et en Indopacifique » ne va pas dans le sens de la clarté que nous revendiquons.
Je vous invite à retirer l'amendement et je suggère à ceux qui le souhaitent d'en déposer un autre reprenant l'expression habituelle « de l'Hexagone et de nos outre-mer ».
L'amendement est retiré.
En conséquence, le sous-amendement tombe.
La commission adopte l'amendement rédactionnel DN893 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.
Amendement DN227 de Mme Anna Pic.
La volonté d'amplifier nos efforts de défense ne trouve pas réellement de traduction budgétaire. Vous justifiez aussi le report de charges par l'incapacité des industriels à accélérer pour franchir le cap de l'économie de guerre.
La stabilité de l'effort budgétaire et le manque de visibilité sur les commandes publiques empêchent les entreprises de se projeter durablement.
La BITD joue un rôle essentiel, nous sommes les premiers à le constater dans nos territoires. Nous pouvons faire confiance à la DGA pour définir les modalités contractuelles appropriées. Et n'oublions pas que la première boussole reste les besoins des forces. Avis défavorable.
À refuser de donner acte au Gouvernement de la hausse des moyens budgétaires, il arrive un moment où vous vous prenez les pieds dans le tapis.
Notre industrie de défense n'a jamais connu une telle visibilité, qui, de surcroît, concerne des moyens en hausse. Je m'étonne d'ailleurs que le débat ne porte pas sur la pertinence de telles dépenses publiques.
Vos amendements remettent en cause la hausse des moyens en parlant de stabilité. C'est sans doute le prix du grand pardon pour avoir abîmé, avec d'autres, les armées françaises pendant des décennies. Certains ont compris que cette époque était révolue, d'autres peinent encore à le croire.
En toute transparence, je vous donne l'augmentation de chiffre d'affaires de chacune des industries de la BITD que la LPM, sous réserve de la discussion parlementaire, leur permet d'espérer : 40 % pour Airbus ; 40 % pour Arquus ; 15 % pour Naval Group ; 90 % pour les autres chantiers navals ; 75 % pour Dassault ; 70 % pour MBDA ; 90 % Nexter ; 70 % pour Thales ; un doublement pour Safran.
L'angle que vous avez choisi, madame la députée, n'est pas le bon. La visibilité est incontestable, les chiffres sont têtus. Citez-moi un autre secteur industriel au profit duquel une cible capacitaire – de surcroît en hausse – est inscrite dans le rapport annexé d'une loi.
Les reports de charge n'ont rien à voir avec les délais de livraison. Ce sont les marges frictionnelles qui permettent de les prendre en considération. Les reports de charge sont d'ailleurs plutôt populaires chez les industriels et pour cause : l'État leur verse des intérêts, lesquels sont moins importants que l'inflation, ce qui permet tout de même à l'État d'être gagnant finalement.
Vous pouvez tenter d'en faire des objets politiques, mais les reports de charges et les marges frictionnelles sont de bons outils qui garantissent la sincérité budgétaire et permettent de lisser l'inflation.
Monsieur le ministre, vous confondez peut-être rentabilité et visibilité. Le chiffre d'affaires, ce n'est pas la visibilité industrielle. Si la production de l'A400M s'arrête à la fin de l'année, est-ce une affaire de rentabilité ou de visibilité et de chaîne de production ? Ne mélangez pas tout.
Vous attaquez nos collègues socialistes avec un peu de forfanterie : le ministre responsable de la baisse des moyens des armées est passé avec armes et bagages du côté de la macronie pour devenir ministre des affaires étrangères. Peut-être s'agit-il d'un règlement de comptes interne mais le procès d'intention se trompe de coupable.
Il nous manque des éléments puisque nous ne connaissons pas les contrats – on nous explique qu'il est difficile de nous les communiquer. Mais quel sera le coût des dédits, du report des livraisons ? S'agit-il de commandes fermes ? On ne sait rien.
Vous mettez en avant des hausses de chiffre d'affaires qui sont en partie la conséquence de commandes de la précédente LPM dont les cibles ne seront pas respectées, dites-vous. Non, il n'y a pas de visibilité.
Les inquiétudes des industriels ne portent pas sur les futures commandes mais sur leur capacité à les honorer. Votre remarque n'a donc aucun sens.
Le maître mot des industriels est l'agilité. C'est un synonyme de la souplesse dont vous gagneriez à faire preuve.
L'organisation des chaînes de production exige de l'anticipation et de la planification. Nous sommes ravis de votre conversion à la planification industrielle, Monsieur le ministre. Moi, je ne me satisfais pas de voir le chiffre d'affaires des entreprises augmenter autant alors que les cibles, si elles ne diminuent pas, sont décalées dans le temps.
Dans la logique de l'économie de guerre, il conviendrait de nationaliser les entreprises de la BITD pour assurer leur pérennité et les mettre entièrement au service de nos armées.
L'horizon de la loi de programmation est 2030 – 2035 pour le matériel en raison du report.
La main-d'œuvre et la structuration de la filière sont des enjeux majeurs pour la BITD. Or la visibilité à cinq ans n'est pas suffisante pour que les industriels investissent sur le long terme. Ils font des marges et du chiffre d'affaires mais ils ne recrutent pas massivement de peur de rester avec des salariés sur les bras et ne contribuent pas à structurer la filière.
C'est la raison pour laquelle l'amendement préconise une planification au-delà des cinq ou dix prochaines années
La BITD n'est pas une industrie comme une autre, c'est une évidence. C'est une industrie stratégique que vous souhaitez mobiliser dans le cadre de l'économie de guerre. Les efforts que vous lui demandez exigent des investissements et des recrutements. Quiconque a travaillé dans une entreprise le sait.
Si nous soutenons l'idée d'une planification pour la BITD afin d'assurer la souveraineté de notre armée et de nos équipements – et ainsi ne pas être obligés de nous jeter dans les bras des Allemands constamment –, nous nous abstiendrons sur l'amendement tant l'exposé sommaire brouille son objectif.
En effet, il y a dans plusieurs amendements du groupe Socialistes et apparentés un décalage entre le dispositif et l'exposé sommaire au nom duquel je serai parfois amené à émettre un avis défavorable.
Toutefois, je partage, madame la députée, votre préoccupation s'agissant de la main-d'œuvre – le rapport annexé n'aura cependant guère d'effet en la matière.
Je suis à disposition d'ici à la séance pour travailler à des améliorations.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN209 de Mme Mélanie Thomin.
L'amendement vise à garantir notre souveraineté en ce qui concerne nos ressources énergétiques, minières, industrielles et scientifiques. La BITD doit pouvoir faire face à des montées en charge rapides dans un environnement très concurrentiel, la guerre en Ukraine nous le rappelle tous les jours.
En 1905, Jean Jaurès insistait déjà sur la nécessité d'anticiper les besoins des armées dans ces domaines. Malgré un contexte bien différent, cette exigence demeure. Nous restons dépendants de pays dont certains sont nos compétiteurs, parmi lesquels la Chine. La sécurité de notre économie de guerre et sa capacité de réaction découlent de ses approvisionnements.
Avis favorable mais il faudrait revoir la rédaction avant la séance pour trois raisons : la liste des ressources n'est pas exhaustive ; il faut manier avec précaution la « mobilisation de ressources minières » ; les plans concernent les exigences de l'État mais aussi celles des industriels vis-à-vis de leurs fournisseurs.
L'accès aux matières premières fait partie des enjeux majeurs, à côté des ressources humaines. Il est utile de développer une culture stratégique en la matière.
Monsieur le ministre, le néogaulliste que vous êtes reconnaît que la planification est une méthode de gouvernement sage et raisonnable.
L'amendement est le pendant de celui de Mme Chatelain que nous avons examiné précédemment visant à inscrire les armées dans l'objectif français de réduction des émissions de gaz à effet de serre et à prendre en considération le réchauffement climatique.
Il est raisonnable d'anticiper. J'alerte notamment nos collègues du Rassemblement national pour lesquels la dernière goutte de pétrole devra aller aux armées : que fera-t-on ensuite ?
Il manque au texte une stratégie de décarbonation et d'indépendance s'agissant des matières premières pour l'ensemble de la production industrielle de défense.
La commission adopte l'amendement.
Amendement DN81 de M. Frédéric Boccaletti.
Nos armées ont de plus en plus recours à l'externalisation.
Dans les domaines touchant à l'autonomie stratégique de la nation, une attention particulière doit être portée à la sécurité.
La professionnalisation de nos armées, les contraintes budgétaires et l'exigence toujours plus importante de performance ont entraîné une refonte de la chaîne d'approvisionnement et une révision des moyens alloués à nos armées.
L'amendement vise à imposer la réalisation d'une étude d'impact sur tout projet d'externalisation. Celle-ci devra s'intéresser aux conséquences opérationnelles et sur notre autonomie stratégique ainsi que sur les savoir-faire vitaux. La réactivité, la fiabilité, la sécurité mais aussi la réversibilité feront l'objet d'une vigilance particulière.
Il faudrait d'abord préciser ce que recouvre l'externalisation. En outre, l'amendement est déjà satisfait. À défaut de retrait, mon avis sera défavorable.
Il fut un temps où les armées recouraient massivement à l'externalisation mais ce n'est plus vrai depuis trois ou quatre ans. Nous cherchons à internaliser ce que nous avions délégué dans de nombreux domaines à cause notamment des risques d'ingérences étrangères et parce que nous voulons développer une culture de souveraineté et de sécurité. Ensuite, nous ne pouvons pas essayer d'attirer des réservistes sans préciser leur doctrine d'emploi. Pourquoi recourir à des prestataires si vous disposez des personnels nécessaires au sein de l'active ou des réserves ?
L'amendement est satisfait parce que l'opportunité de chaque marché est étudiée, notamment à l'aune de la subsidiarité, avant sa passation. J'ai mis la pression sur le Service du commissariat des armées (SCA) et l'économat des armées pour ce qui concerne les fonctions logistiques et de support.
Je vous invite donc à retirer l'amendement, à défaut, avis défavorable.
Je donne acte au ministre du processus de réinternalisation en cours qui doit selon moi être poursuivi. À cet égard, le rôle de l'économat des armées doit être revalorisé et mieux connu.
Il suffit de se rendre à Balard, au siège du ministère des armées, pour se rendre compte des limites de l'externalisation, ne serait-ce qu'en matière de sécurisation et d'accès aux bâtiments.
Il serait souhaitable d'en finir avec des externalisations problématiques à plus d'un titre.
On ne peut pas laisser dire n'importe quoi au sein de la commission au prétexte de le faire avec un certain aplomb.
Vous êtes allé à Balard de nombreuses fois, donc vous le savez : c'est une forteresse. De nombreux militaires me l'ont dit, les Américains nous envient les conditions de sécurité et d'accès au site. Celui-ci est considéré comme l'un des mieux sécurisés d'Europe.
C'est un mensonge de dire que la sécurité est défaillante à cause de l'externalisation.
Je n'ai jamais dit que la sécurité de Balard était défaillante. J'ai évoqué les limites de l'externalisation. Pour moi, cela pose problème de sous-traiter la sécurisation des accès à Balard – un site classé secret-défense – à une société privée alors que les forces militaires pourraient assurer ces fonctions. L'État n'a pas à se dessaisir de cette part de souveraineté.
On ne peut évacuer ainsi la question de l'externalisation en s'abritant derrière la mauvaise rédaction de l'amendement. Oui, cela pose un problème de confier la sécurité de bâtiments sensibles à des entreprises privées. Lorsqu'on externalise la construction d'infrastructures, au risque qu'elles ne soient pas conformes à l'usage qui en sera fait, alors qu'on dispose des savoir-faire en interne, cela pose un problème.
Écoutez les oppositions parfois : on ne peut pas dire que tout va bien dans cette matière. J'entends qu'un effort a été fait pour limiter l'externalisation – je vous en donne acte, monsieur le ministre. Mais nous ne pouvons pas laisser les choses en l'état alors que de l'argent public est dépensé et que la sécurité de la nation est en jeu.
Je suis tout à fait disposé à évoquer dans une audition ad hoc l'externalisation. Cela permettra de rétablir quelques vérités.
Ensuite, les infrastructures des armées sont toujours gardées par les forces armées et les gendarmes. Des prestataires privés gèrent l'accueil et les badges sous l'autorité et le contrôle des forces armées et des gendarmes. Je vous assure que les points d'intérêts vitaux sont toujours gardés par des militaires.
Enfin, il n'y a aucune dépendance aux externalisations en ce qui concerne les capacités opérationnelles. L'externalisation n'a pas d'impact lorsque des forces sont déployées.
Nous pouvons organiser un débat sur les badges à Balard si vous voulez. Mais je vous prie de croire que les officiers de la gendarmerie qui s'occupent de ces questions – des gens de grande confiance – ne laisseraient pas passer une sécurisation insuffisante de Balard.
Le problème est, non pas sécuritaire, mais politique ou idéologique, si vous préférez. C'est une question de principe : l'État ne se dessaisit pas de telles prérogatives au bénéfice du secteur privé. Vous ne partagez pas ce point de vue mais acceptez que l'on puisse considérer qu'il y a un problème.
L'externalisation pèse aussi sur les capacités opérationnelles de nos armées.
À l'Atelier industriel de l'aéronautique (AIA) de Cuers, l'externalisation a créé d'importants problèmes sur le stock, sur la chaîne logistique ainsi que sur le maintien en condition opérationnelle (MCO) des Atlantique 2, qui participent aux actions de l'État en mer et assurent notre souveraineté.
Nous devons en préambule nous entendre sur ce que recouvre l'externalisation. Depuis toujours, une partie du maintien en condition opérationnelle est assurée par nos industriels de défense.
Il faut distinguer l'externalisation qui consiste à abandonner une fonction à un acteur privé et les liens contractuels avec des parties prenantes de la défense qui sont le fruit de notre histoire. On ne peut pas parler d'externalisation s'agissant du MCO.
Je ne veux pas me dérober sur l'externalisation qui est un bon sujet de discussion. Au contraire, et je serai heureux de vous présenter les efforts de réinternalisation que je mène.
Nous ne lâcherons pas. Nous ne disons pas que l'externalisation est mauvaise en elle-même ; nous demandons une étude d'impact avant tout projet de cette nature. En quoi cela vous gêne-t-il de graver dans le marbre une pratique dont vous affirmez qu'elle est déjà réalité ?
Arrêtez de réclamer à l'opposition qu'elle se taise et qu'elle mette le petit doigt sur la couture du pantalon. J'aimerais qu'on n'écoute pas seulement les alliés du Gouvernement.
La commission rejette l'amendement.
La réunion, suspendue à onze heures, est reprise à onze heures dix.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels DN838 et DN839 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.
Amendement DN214 de Mme Isabelle Santiago.
Il vise à insérer, après le mot « terrorisme », les mots « et de conflits asymétriques » à la seconde phrase de l'alinéa 3. Il importe de préciser et d'élargir le champ de l'article.
Monsieur le ministre, j'aimerais obtenir une explicitation. Qu'entendez-vous par « les leçons retenues de la lutte contre le terrorisme » ? Si vous êtes capable de les expliciter en quelques minutes, nous serons sans doute très à l'aise pour voter l'amendement, voire l'article.
La réalité, c'est que nulle part, dans aucun document officiel, n'est dressé un bilan politique et stratégique de ce que vous appelez, de façon un peu générale, la lutte contre le terrorisme. Entendez-vous par là la lutte contre le terrorisme sur le territoire national ? La lutte contre les groupes armés terroristes au Sahel ? En ce cas, j'aimerais savoir quelles leçons vous avez réellement retenues de ces engagements qui, pour tout dire, n'ont pas produit des résultats stratégiques très convaincants.
La commission adopte l'amendement.
Amendement DN728 de Mme Christelle d'Intorni.
Il s'agit de mettre en lumière, dans le contexte des menaces hybrides, l'importance des campagnes de désinformation visant l'opinion publique, et plus particulièrement les populations sujettes aux opérations extérieures (OPEX) de l'armée française dans sa lutte contre le terrorisme. Le sentiment anti-français au Sahel suscité par la propagande et la manipulation, qui a grandement influencé la fin de l'opération Barkhane, illustre l'importance que doit constituer cette menace dans les leçons tirées par nos armées.
Le paragraphe 1.3 du rapport annexé, relatif aux nouveaux lieux de conflictualité, traite de la question. Je suggère le retrait de l'amendement en vue de le retravailler et émets à défaut un avis défavorable.
Même avis. Dresser une liste des menaces hybrides suppose qu'elle soit complète, ce qui suppose d'ajouter à la guerre informationnelle les chantages énergétiques ou alimentaires par exemple, pour illustrer le diagnostic stratégique que nous avons tous formulé de façon similaire. L'hybridité des menaces n'est pas limitée à la guerre informationnelle. Si on dresse une liste, il faut la documenter de façon globale. En outre, une telle liste devrait sans doute figurer ailleurs dans le texte.
Je suggère le retrait de l'amendement en vue de travailler, peut-être en liaison avec le rapporteur, à un amendement explicitant clairement l'hybridité. Il s'agit de l'un des beaux pivots, malheureusement, d'adaptation aux nouvelles menaces. Plus nous serons clairs et complets, mieux cela vaudra.
L'amendement est retiré.
Amendement DN62 de la commission des affaires étrangères.
La plupart des amendements de la commission des affaires étrangères portent sur la désignation de l'influence comme nouvelle fonction stratégique. L'influence ne peut pas être pensée sans la contre-influence.
L'amendement vise à lutter contre les campagnes de désinformation. La France, comme l'a rappelé l'affaire de Gossi, est victime de nombreuses campagnes de désinformation, lesquelles exploitent l'une des fragilités des démocraties. Il importe d'y répondre efficacement.
Je suggère le retrait de l'amendement en vue de le retravailler et émets à défaut un avis défavorable.
L'amendement n'est peut-être pas placé au bon endroit. L'alinéa 4 du rapport annexé porte sur le maintien de la supériorité opérationnelle de nos armées. Or la guerre informationnelle ne saurait être traitée par les seules armées. Elle relève d'une manœuvre étatique globale. Je suggère le retrait de l'amendement en vue d'un travail conjoint des commissions des affaires étrangères et de la défense.
Monsieur le ministre, je vous ai demandé d'expliciter « les leçons de la lutte contre le terrorisme ». J'aimerais obtenir une réponse, même si l'amendement DN214 a été adopté.
S'agissant de la lutte contre les campagnes de désinformation, il s'agit d'un sujet légitime. Nous évoquerons plus amplement la doctrine de lutte d'influence et de contre-influence ultérieurement.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel DN841 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.
Amendement DN215 de Mme Isabelle Santiago.
Il s'agit d'insérer, après le mot « quantique », les mots « des fonds marins » à la première phrase de l'alinéa 4 du rapport annexé, qui énumère plusieurs sauts technologiques attendus dans les prochaines années, notamment dans les domaines du spatial, du cyber, des drones, du quantique et de l'intelligence artificielle.
Insérer la mention fonds marins dans le rapport annexé permet de montrer que cet objectif est également pour nos armées, afin d'anticiper les ruptures novatrices à venir. Au demeurant, la maîtrise des fonds marins est l'un des objectifs du présent projet de loi de programmation militaire, ce dont je me félicite.
L'insertion des fonds marins dans la liste des futurs sauts technologiques n'est pas tout à fait adaptée pour les fonds marins, s'agissant d'une technologie existante et mise en œuvre par de nombreuses nations. La France a même joué un rôle pionnier en la matière, avant d'y renoncer, certaines lois de programmation militaire ayant loupé le coche. En outre, les fonds marins sont évoqués un peu plus loin dans le rapport annexé. Avis défavorable.
Si j'étais espiègle, je dirais que ce que nous allons faire en matière de fonds marins est un bel exemple de transformation. L'amendement est satisfait par l'évocation des fonds marins un peu plus loin dans le texte.
L'amendement est retiré.
Amendement DN228 de Mme Anna Pic.
Il vise à insister sur l'importance de la disponibilité des matériels et à lutter contre les creux capacitaires qui empêchent, dès lors que nous avons une armée d'emploi, de procéder à une préparation opérationnelle optimale conforme à tous les critères que nous souhaitons remplir, notamment dans le cadre de l'OTAN. Il s'agit d'afficher l'objectif de consolidation de la préparation et d'assurer la disponibilité des matériels. D'ailleurs, nous n'avons pas eu de tableau présentant les taux de disponibilité réels, ce qui nous aurait informés sur notre capacité à favoriser la préparation opérationnelle.
L'amendement n'est pas sans justification, mais il n'est pas placé au bon endroit. Demande de retrait ou avis défavorable.
Sur le fond, l'exposé des motifs comme la disposition proposée sont bons. Mieux vaudrait cependant faire porter l'amendement sur le paragraphe 2.2.5 du rapport annexé. J'en suggère le retrait pour le présenter tel quel en séance publique, s'agissant d'une précision qui me semble très utile.
Sur les taux de disponibilité, des informations figurent dans les documents budgétaires et nous pouvons vous en transmettre, à l'exclusion de ceux classés secret-défense.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'amendement rédactionnel DN921 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.
Amendements DN229 de Mme Anna Pic et DN842 de M. Jean-Michel Jacques (discussion commune).
Il s'agit de supprimer une mention relevant davantage de la communication que de la réalité.
J'émets un avis défavorable à l'amendement CD229 et favorable à l'amendement DN842.
La commission rejette l'amendement DN229.
Elle adopte l'amendement DN842.
Amendement DN63 de la commission des affaires étrangères.
Cet amendement a été déposé par M. Lecoq. Nous sommes confrontés à un dilemme : entre la sophistication et la masse, il faut choisir. Il s'agit du grand dilemme structurant le présent projet de loi. Nous ne pouvons pas considérer que la guerre en Ukraine est un nouveau modèle, s'agissant d'une guerre de tranchées basée sur l'artillerie. Toutefois, faut-il céder aux sirènes technologiques ?
Nous sommes conscients de ce dilemme. L'amendement est satisfait par l'alinéa 12, qui prévoit de « concevoir les équipements futurs des armées en trouvant un équilibre entre rusticité et hyper-technologie pour concilier supériorité opérationnelle, délais de production rapide et coût de possession pour l'État ». Demande de retrait ou avis défavorable.
Le sous-jacent est juste et figure ailleurs dans le rapport annexé, dont l'amendement alourdit la rédaction. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN396 de M. Fabien Roussel.
Il ne s'agit pas pour nous, par cet amendement, de mettre en cause notre politique en matière de dissuasion nucléaire et de proposer son abandon unilatéral, mais, à tout le moins, d'ouvrir un débat avec le pays sur les moyens que nous y consacrerons dans le cadre de la nouvelle loi de programmation militaire.
Le budget de la dissuasion nucléaire passera de 5,6 à 7,7 milliards d'euros par an. C'est énorme et sans précédent. Par jour, nous passerons de 15 à 21 millions d'euros. Nous allons dépenser 21 millions d'euros par jour pendant sept ans pour améliorer notre armement nucléaire ! Cela doit nous inviter à avoir ce débat très largement, avec toutes les forces civiles et militaires, pour bien mesurer le choix que nous faisons, peut-être au détriment d'autres investissements, pour notre armée ou pour notre pays en général.
Certes, notre amendement pourrait être rédigé autrement. Il porte sur l'alinéa 7, dont je fais observer et déplore qu'il ne comporte aucune référence au traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).
Le budget du nucléaire ne finance pas uniquement l'armement nucléaire. De nombreux domaines sont duaux et concernent aussi la recherche et développement, et se déploient dans nos territoires. Au surplus, l'arsenal nucléaire de la France est strictement nécessaire à sa défense. Avis défavorable.
M. Roussel nous parle d'augmentation des moyens des forces nucléaires. À la lecture du projet de loi de programmation militaire, je constate que nous nous en tenons à la suffisance. Nous n'augmentons pas le nombre de têtes. Nous améliorons les vecteurs et la capacité de pénétration. Pour être crédible, la dissuasion doit être au top de ses performances. Prendre du retard est contraire à l'intérêt de la sécurité de la France.
Je comprends l'esprit de l'amendement. Faire référence au TNP dans le rapport annexé me semble nécessaire, en rappelant que la France, en le signant, s'est engagée à désarmer, à terme, et à mener des négociations avec les autres puissances dotées pour poursuivre la réduction du nombre de têtes nucléaires mise en œuvre pendant la Guerre froide. Quant au moratoire proposé, il consiste, dans le cadre de telles négociations, à se tirer une balle dans le pied. Il serait utile de rédiger autrement l'amendement d'ici à l'examen du texte en séance publique.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN490 de M. Bastien Lachaud.
Nous en venons au cœur du sujet de la dissuasion : quel doit en être l'usage ? Elle doit empêcher toute puissance de mettre en péril les intérêts vitaux de la France, et donc assurer la sécurité du territoire national. À ce titre, elle ne peut être, compte tenu de notre doctrine de stricte suffisance, que nationale.
Or, depuis quelques années, un flou règne à ce sujet. Tel est le cas dans le rapport annexé. La dissuasion doit-elle être partagée avec nos alliés européens ? Je n'irai pas jusqu'à dire que certains envisagent de la mettre au service de l'OTAN… L'amendement vise à rappeler que la dissuasion doit être strictement nationale, afin de garantir son usage et notre doctrine.
La dissuasion doit être strictement souveraine pour la France. Pour éclairer votre réflexion, je citerai le Président de la République, qui a indiqué, dans un discours à l'École de guerre le 20 février 2020 : « Notre indépendance de décision est pleinement compatible avec une solidarité inébranlable à l'égard de nos partenaires européens. Notre engagement pour leur sécurité et leur défense est l'expression naturelle de notre solidarité toujours plus étroite. […] Soyons clairs : les intérêts vitaux de la France ont désormais une dimension européenne ». Rien de tout cela n'entame notre souveraineté. Avis défavorable.
S'il est un domaine dans lequel, du général de Gaulle à Emmanuel Macron en passant par François Mitterrand, il n'y a pas de flou, c'est bien notre doctrine de dissuasion nucléaire. On peut la désapprouver, mais elle n'est pas floue. Notre dissuasion est purement nationale. Mieux : nous sommes le seul pays de l'OTAN, avec les États-Unis d'Amérique, à la mettre en œuvre de façon complètement autonome, techniquement et budgétairement.
Par ailleurs, certains intérêts vitaux – indépendamment de la dissuasion, mise en œuvre en autonomie et en souveraineté – ont de toute évidence une dimension européenne, pour des raisons géographiques. Lors de la négociation des accords de Lancaster House, le Président Chirac a obtenu des avancées sur la défense en miroir des intérêts vitaux des deux puissances dotées que sont le Royaume-Uni et la France. Ce sujet fait l'objet d'un travail foisonnant et précis, qui n'a rien de flou.
Quant au procès d'intention sur l'OTAN, il est très clair, depuis les années 1960, que la France est absente de sa planification nucléaire. Avis défavorable.
Il n'y a aucun flou sur la dissuasion, mais il est absolument indispensable de l'inscrire dans la Constitution. Nous avons déposé une proposition de loi à cet effet. La dissuasion nucléaire doit être propre à la France. Notre souveraineté en dépend.
Monsieur le rapporteur, votre réponse me surprend. Ce n'est pas parce que le Président de la République a dit quelque chose que nous devons le croire sur parole. La séquence que nous venons de vivre a confirmé ce que nous savons depuis plusieurs années : les mots sont mélangés, le sens des mots n'existe plus, tout est dit et son contraire dans le même paragraphe, voire dans la même phrase.
Comme le dit le bon sens populaire, cela va toujours mieux en le disant, et même en l'écrivant dans la loi, ce qui est de la compétence de la représentation nationale, qui n'a pas à se contenter de prendre acte d'une simple déclaration, faite il y a trois ans à l'École militaire, du président Macron, qui change d'avis tous les quatre matins. Votre réponse ne nourrit pas l'intelligence du débat.
Monsieur le ministre, vous avez cité les présidents Mitterrand et Chirac. N'oublions pas les engagements du président Hollande. Il importe de rappeler le principe essentiel de notre solidarité inébranlable avec nos alliés européens. Notre dissuasion nucléaire a aussi cette signification, ce qui n'entrave pas sa gestion souveraine. Le groupe Socialistes et apparentés tient à rappeler que notre dissuasion est aussi au service des valeurs démocratiques et de la liberté.
L'un des aspects essentiels de notre doctrine de dissuasion nucléaire est l'incertitude, qui renforce son pouvoir dissuasif. Indiquer noir sur blanc ce que nous protégeons grâce à elle en sus de nos intérêts vitaux, y compris à l'échelon européen, me semble malavisé.
La dissuasion nucléaire n'est pas un objet comme un autre. Le discours du Président de la République à son sujet, très attendu et très suivi, fait partie à part entière de la crédibilité de la dissuasion française, donc de notre sécurité. Il n'est pas une simple déclaration à l'École militaire.
Notre collègue Thiériot a raison : il faut parler de ce sujet avec prudence. Notre doctrine comporte une dimension déclaratoire et nous ne sommes pas exempts d'un devoir de responsabilité en la matière.
Souvenons-nous quand même que le Président de la République lui-même n'a pas toujours été irréprochable dans ses déclarations, prenant un mot pour l'autre et parlant alternativement d'intérêts fondamentaux et d'intérêts vitaux. Certes, la déclaration sur la dimension européenne des intérêts vitaux de la nation, rédigée à l'avance, est plus solide.
Quoi qu'il en soit, rien ne nous interdit à nous, parlementaires, de graver dans le marbre de la loi une déclaration de principe comportant elle aussi une dimension diplomatique. Il s'agit d'envoyer un signal à nos partenaires, qui se sont faits fort, ces dernières années, d'expliquer qu'ils sont prêts à financer la dissuasion et que nous ne le sommes pas.
Je loue les efforts de La France insoumise pour défendre la dissuasion nucléaire française. Soyons rigoureux et lisons l'amendement : « La dissuasion nucléaire, cœur souverain de notre défense au caractère strictement national, protège la France ». Notre dissuasion protège les intérêts vitaux français. Cette seule nuance, qui équivaut à un changement de doctrine, justifie un avis défavorable. Vous appelez à la précision, à raison : il faut être précis.
Vous avez le droit d'être en désaccord avec la Constitution. Je vous en donne acte, comme vous le dites souvent, monsieur Saintoul. Il se trouve qu'elle confie au Président de la République la définition des intérêts vitaux de la nation. C'est pourquoi le Président de la République a introduit son élection au suffrage universel direct lorsqu'il s'appelait Charles de Gaulle, en 1962. Il s'agissait de renforcer sa légitimité, comme le montrent les échanges entre le ministre Peyrefitte et le général de Gaulle rapportés dans C'était de Gaulle.
Il ne faut pas que l'anti-macronisme pollue cette affaire. Tous les chefs d'État de puissances dotées, qu'il s'agisse du président français sous la Ve République, du président des États-Unis d'Amérique ou du président russe, définissent la doctrine de dissuasion, qui est observée de très près par les alliés et les compétiteurs dans le monde.
Notre amendement modifie le début de la deuxième phrase de l'alinéa 7 mais ne supprime pas la mention de nos intérêts vitaux, qui figure après. Nous ne modifions en aucun cas la doctrine. Soyons précis, monsieur le ministre.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN432 de M. Aurélien Saintoul.
Si nous souhaitons que la France rejoigne le traité sur l'interdiction des armes nucléaires (TIAN) en tant que membre observateur, c'est avant tout pour clarifier notre vision du rôle de la France à l'international. Sommes-nous réellement une puissance qui aspire à promouvoir la paix entre les peuples ? Ces mots peuvent sembler légers, mais n'oublions pas que la paix ne se construit pas sur de belles paroles. Tel est l'enjeu de ce genre de traité : imaginer, pour l'humanité, l'horizon d'un futur plus soutenable.
Bien entendu, nous ne prônons pas une adhésion ayant pour but immédiat de nous débarrasser de notre arsenal nucléaire, qui demeure le cadre permettant d'assurer notre sécurité collective dans un monde régi par des logiques de puissance. Ce traité ne peut être réduit à sa seule portée symbolique.
En tant que puissance nucléaire, notre parole porte à l'échelle internationale. Elle peut encourager d'autres puissances à s'engager davantage en faveur du désarmement général. Certes, le contexte actuel n'est pas adéquat pour imaginer cette évolution dans un futur proche. Toutefois, nous sommes signataires du TNP, qui empêche les États non dotés de développer un arsenal.
Allons plus loin : en tant que puissance nucléaire, la France a un pouvoir d'impulsion important, susceptible d'avoir des effets bénéfiques pour l'humanité entière. Ne laissons pas les méandres de la Realpolitik nous aveugler ! Adoptons une démarche plus volontariste et soucieuse d'un monde débarrassé de ses armes de destruction massive en rejoignant le TIAN en tant que membre observateur !
Un désarmement ne peut pas être unilatéral. Le monde n'est pas désarmé et la France est exemplaire en la matière. Avis défavorable.
Monsieur le rapporteur, pouvez-vous s'il vous plaît répondre sur le fond ? L'amendement dispose : « La France rejoindra le traité sur l'interdiction des armes nucléaires en tant que membre observateur ». Il n'est donc pas question de désarmement unilatéral. Votre argument ne porte pas sur l'objet de l'amendement. Nous disons, quant à nous, fermement et clairement, que nous sommes pour la dissuasion et pour le désarmement, ce qui est exactement la doctrine française dans le cadre du TNP.
Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas dire que des négociations ont été menées de bonne foi entre les États dotés ces dernières années. La campagne internationale pour abolir les armes nucléaires (ICAN) a rappelé l'insuffisance de la mobilisation des États dotés en faveur du désarmement global. Nous considérons qu'une campagne internationale ne peut pas être balayée d'un revers de main au prétexte que d'autres sont les méchants et ne veulent pas non plus de désarmement. Il ne s'agit pas d'une initiative nulle et non avenue.
J'observe que nos alliés, qui sont sous parapluie nucléaire américain, sont capables, eux, d'assister aux réunions des États parties au TIAN, et qu'ils ne renoncent pas pour autant à leur doctrine ni à leur sécurité. Nous ne pouvons pas adresser ce message à la communauté internationale. Nous devons avoir une attitude plus volontariste. Tel est l'objet de l'amendement.
Monsieur le rapporteur, votre réponse est encore une fois surprenante. Personne n'a proposé un désarmement unilatéral. Personne n'a proposé que nous nous débarrassions dès à présent de nos armes nucléaires.
La promotion de la paix dans le monde est une ligne de crête qu'il n'est pas facile d'emprunter. Il n'y a rien de contradictoire à avoir un pied dans la continuation de la dissuasion au meilleur niveau possible pour protéger nos intérêts vitaux, et un autre dans la promotion patiente et inlassable de la paix et du désarmement dans le monde.
M. le ministre a évoqué la Constitution de la République française. Je citerai le préambule de la Constitution de 1946, qui fait partie du bloc de constitutionnalité de la République française. Issu du programme du CNR – le vrai, le Conseil national de la Résistance, pas le truc inventé il y a quelque temps –, il dispose, en son alinéa 15 : « Sous réserve de réciprocité, la France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l'organisation et à la défense de la paix ». Notre amendement ne fait que mettre en musique la Constitution de notre pays, telle qu'elle a été héritée du Conseil national de la Résistance.
Nous soutenons l'amendement, qui précise notre pensée – il n'y en a qu'une, au Parti communiste français et au sein du groupe GDR, dans ce domaine. Dans l'absolu, nous aimerions que toutes les puissances nucléaires s'engagent dans un traité d'interdiction des armes nucléaires, afin que nous sortions d'un monde où la menace nucléaire plane sans arrêt, ce qui serait idéal. Toutes les puissances nucléaires devraient mener ce combat, comme le TNP les y invite au demeurant.
Dans cette attente, la demande que nous formulons, qui ne remet pas en cause la dissuasion nucléaire actuelle, est que la France assiste aux réunions des États parties au TIAN en tant qu'observateur. Nous déposerons un amendement en séance publique à cet effet, pour que les choses soient claires.
J'admire le sens du timing de La France insoumise. Tandis que la Russie brandit la menace nucléaire régulièrement, au cœur de l'examen du projet de loi de programmation militaire, nous adopterions un statut d'observateur au sein du TIAN, dont chacun sait qu'il est un outil de déstabilisation utilisé par certains de nos compétiteurs stratégiques pour fragiliser la position de certaines puissances, dont la France !
Quant à votre rêve d'un monde dénucléarisé, il signifie pour demain que des forces conventionnelles massives affronteraient des forces conventionnelles massives, que nous n'aurons plus un mais dix Bakhmout, et que nous aurons sur le sol de l'Europe des batailles où le sang coulera. Nous sommes avares du sang français.
Voilà les ravages du « en même temps » ! Tout à l'heure, La France insoumise parlait de notre dissuasion nucléaire comme du cœur souverain de notre défense ; à présent, elle nous explique qu'il faut dénucléariser. C'est cinquante nuances de rouge : on essaie de faire plaisir à plein de gens qui ne pensent pas tous pareil ! La loi de programmation militaire ne doit pas être un objet de fantasmes, ni ceux d'auto-glorification macronienne, ni ceux d'une extrême gauche qui n'a plus rien pour se recoudre et se ressouder.
Soyons sérieux ! Nous parlons de nos armées ! La défense nucléaire est importante, elle est même le cœur de notre défense. Nous avons voté votre amendement à ce sujet, mais là, cela commence à ressembler à du n'importe quoi ! Réglez vos problèmes internes et mettez-vous d'accord entre vous, mais ne prenez pas en otage la loi de programmation militaire !
Nous soutenons l'amendement. Je suis étonnée du niveau de caricature que nous atteignons dans un débat qui est quand même d'une grande complexité. Monsieur le ministre, vous avez admis qu'il était légitime d'avoir des positions différentes sur un sujet aussi important que l'arme nucléaire. Dans le contexte de retour des conflits de haute intensité que nous connaissons, tracer le chemin vers la paix et vers un monde dénucléarisé relève de notre responsabilité.
L'amendement propose un équilibre et une trajectoire. Il est question, non pas de renoncer de façon unilatérale à la dissuasion nucléaire, mais de continuer à progresser sur le chemin d'un monde sans armes nucléaires. C'est quand les conflits sont au plus fort et qu'on les voit revenir qu'il faut promouvoir davantage encore la paix.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN551 de Mme Cyrielle Chatelain.
Il s'agit d'inscrire dans le rapport annexé le respect du TNP, dont la France est signataire. Même s'il date des années 1970, son contenu est resté pertinent.
En signant ce traité, La France rappelle qu'elle est désireuse de promouvoir la détente internationale et le renforcement de la confiance entre les États, afin de faciliter la cessation de la fabrication d'armes nucléaires, la liquidation des stocks d'armes existants et l'élimination des armes nucléaires de leurs vecteurs des arsenaux nationaux, en vertu d'un traité sur le désarmement général et complet, sous un contrôle international strict et efficace.
Ces engagements, la France les a pris et nous devons les rappeler. Certes, nous sommes dans une période de conflit, mais nous n'en devons pas moins continuer à défendre nos engagements pour la paix.
Permettez-moi de vous rappeler que la France est exemplaire en la matière. Sa dissuasion repose sur le principe de stricte suffisance. L'amendement est satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable.
Si on commence à citer un traité, en l'espèce relatif à la dissuasion nucléaire, il faut citer aussi tous les traités relatifs aux questions de défense. Or les citer tous dans un rapport annexé, alors même qu'ils sont déjà en application, relève sinon d'une forme de bavardage, du moins d'un foisonnement de données.
Je suis attaché au TNP, mais j'émets un avis défavorable pour cette raison de forme. La question de l'interdiction des armes chimiques, par exemple, est tout aussi importante.
Monsieur le ministre, votre argumentation pose problème. Vous ne pouvez pas exciper de l'exceptionnalité de la dissuasion nucléaire en raison de son statut de clé de voûte ou de fondement de la défense nationale tout en refusant d'évoquer le TNP dans ce texte.
Nos collègues du Rassemblement national ont évoqué cinquante nuances de rouge. Sachant qu'ils n'aiment ni le rouge ni la nuance, il n'est pas surprenant qu'ils ne s'y retrouvent pas. En l'occurrence, il n'y a aucun problème. Il s'agit d'être cohérent avec la doctrine française qui consiste, au moins depuis la signature du TNP, à promouvoir et la dissuasion et le désarmement. Je vous laisse gamberger à ce sujet.
Notre collègue Thiériot a dit que la dissuasion était de nature à stabiliser et à pacifier les relations entre États. Dans ce cas, pourquoi soutient-il la lutte contre la prolifération nucléaire ? À tout prendre, la multiplication des armes atomiques sur la planète pourrait être un gage de stabilité. Je doute qu'il soit d'accord avec cette affirmation.
Excellente idée, monsieur le ministre : il faudrait aussi parler des armes chimiques, qui sont une autre ligne rouge. Mais un rappel des engagements de la France en matière de non-prolifération des armes nucléaires serait un symbole fort. Il s'agit, non pas d'allonger inutilement le rapport annexe, mais de réaffirmer le chemin qui passe d'abord par la non-prolifération, puis par le désarmement global pour aboutir à la paix. Nous souhaitons que, sur cette question, la parole de la France porte.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN144 de M. Franck Giletti.
Le retard accumulé dans le programme du SCAF, le système de combat aérien du futur, et son avion de nouvelle génération, dont la mise en service ne devrait pas survenir avant l'année 2040 au minimum, nous oblige à développer un cinquième standard du Rafale, le F5, dans la perspective d'assurer la continuité notamment de la composante aéroportée de la dissuasion nucléaire. Pourtant, on ne trouve pas dans le projet de loi de précisions relatives au calendrier retenu pour conduire cette évolution.
Cette lacune est surprenante, surtout vu le contexte international, d'autant que le Président de la République vient de déclarer se donner pour objectif le passage au tout Rafale. Le Gouvernement dispose-t-il d'une visibilité en la matière ?
Dans l'attente de l'hypothétique mise en service du SCAF, il est primordial que l'armée de l'air et de l'espace puisse au moins disposer d'échéances claires concernant le nouveau standard.
Comme l'a indiqué le chef d'état-major de l'armée de l'air et de l'espace devant notre commission, le lancement des travaux de développement du standard F5 vient d'être validé par le ministère. Ce n'est pas un mystère que les Rafale au standard F5 auront vocation à emporter le nouveau missile de la composante nucléaire aéroportée, l'ASN4G, à l'horizon 2035. Le F5 sera donc disponible avant. Il n'y a pas d'enjeu de calendrier spécifique sur le sujet.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Cet amendement me donne l'occasion de faire un point sur le Rafale.
SCAF ou pas, le cinquième standard aurait été développé.
De même, quoi qu'il arrive, le SCAF verra le jour. La question est de savoir avec quels pays et quels industriels le réaliser. Mais le SCAF est le nom de la technologie utilisée par la génération de chasseurs qui suivra le Rafale. Pour effectuer le tuilage, Rafale et SCAF cohabiteront pendant dix à vingt ans. C'est entendu depuis le début. D'ailleurs le SCAF ne succédera au Rafale qu'à terme ; ce ne sera pas le cas dans un premier temps.
J'ai pris la décision, en liaison avec l'industriel concerné, d'engager la production et le déploiement du F5. On commence en effet à disposer de gains technologiques précieux, notamment en matière de détection de cibles furtives et, surtout, de guerre électronique, car les systèmes se transforment rapidement et les avions de chasse risquent d'être vulnérables à la guerre électronique à venir. Le F5 sera muni d'instruments de défense en la matière.
Il est évident que le standard F5 correspond aussi au programme de missiles nucléaires. La cohérence est pour le coup évidente. Je pense, monsieur le rapporteur, que cela se fera avant 2035, vers 2032.
Le F5 est donc bien la génération d'avions de demain. Il faut bien distinguer cette question de celle du SCAF.
Votre amendement me semble donc satisfait. Je le prends comme une demande de précisions.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Il est évident que nous aurons besoin à la fois du nouveau système de combat aérien du futur et de l'avion de nouvelle génération. Je maintiens l'amendement.
De toute évidence, le ministère dispose déjà d'un calendrier de passage au standard F5 : inutile d'en redéfinir un. En revanche, la question se pose de savoir combien de Rafale basculeront dans le nouveau standard. Nous souhaiterions avoir des précisions sur ce point et que le calendrier soit inscrit dans le rapport annexé. Un amendement du Gouvernement en ce sens en séance serait le bienvenu.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN114 de M. Michaël Taverne.
Depuis la fin des essais nucléaires français, les installations permettant d'effectuer des simulations sont devenues essentielles. Celles-ci assurent en effet la fiabilité, la sûreté et la crédibilité de notre dissuasion.
La France compte parmi les pays les plus avancés dans ce domaine, grâce notamment au laser Mégajoule (LMJ), inauguré en 2014 et le plus énergétique au monde, ainsi qu'au supercalculateur Tera 1000, qui était en juin 2018 le quatorzième le plus puissant au monde.
Cette expertise est un atout majeur, qui permet à notre dissuasion de jouer son rôle et d'assurer quotidiennement la sécurité de notre pays. Une attention toute particulière doit lui être portée. Le présent amendement vise à inscrire dans la loi l'objectif de poursuivre les investissements dans ce domaine où la compétition internationale est très forte et où les développements technologiques sont rapides.
Votre description montre bien qu'on fait déjà beaucoup en la matière. L'amendement est donc satisfait.
Demande de retrait ou avis défavorable.
Sur le fond, il est évident que les capacités de simulation sont essentielles. C'était l'enjeu de la reprise des essais décidée dans les années 1990 par le président Chirac. Il s'agit d'une compétence souveraine, qui s'appuie sur des outils technologiques, mais aussi sur de l'ingénierie et sur des ressources humaines remarquables. Elle est pilotée en partie par la direction générale de l'armement (DGA) et, surtout, par la direction des applications militaires (DAM) du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Je peux m'engager devant vous sur le fait que nous disposons en matière de simulation et d'essais numériques d'une visibilité sur plusieurs décennies. C'est une prouesse !
En revanche, je doute de l'opportunité d'inscrire un tel objectif dans le rapport annexé. Je ne veux pas introduire de doute concernant nos capacités de dissuasion.
Demande de retrait ou avis défavorable.
J'ai invité l'autre jour les collègues de la commission qui le souhaitaient à visiter le laser Mégajoule au Barp, dans l'agglomération bordelaise. Le CEA nous a présenté le programme d'investissements lié. Il s'agit d'une installation complexe, complétée régulièrement par de nouveaux faisceaux. Elle ne pose aucun problème. Idem pour les supercalculateurs. Il ne me semble pas judicieux, dans ce domaine, de tout inscrire dans la loi.
La simulation est tellement au cœur de la dissuasion que l'amendement semble en effet superfétatoire. En revanche, il faudra veiller à protéger la filière française des supercalculateurs car c'est un enjeu de souveraineté – j'ai interrogé le directeur général de l'armement à ce sujet. Nous avons déposé un amendement en ce sens. J'espère que nous nous accorderons sur ce point.
L'amendement est retiré.
L'amendement DN115 de Mme Isabelle Santiago est retiré.
Amendement DN889 de M. Jean-Michel Jacques.
Il s'agit, à l'alinéa 8, de substituer aux mots : « de renforcer celle de nos territoires d'outre-mer, en Indopacifique notamment », les mots : « singulièrement de nos territoires d'outre-mer ».
Avis favorable. Chacun des territoires d'outre-mer fait face à des menaces qui lui sont propres. Il faut traiter dans la loi l'ensemble du territoire de la République de manière égale.
La commission adopte l'amendement.
Amendement DN491 de M. Bastien Lachaud.
Cet amendement vise à substituer au mot « Indopacifique » les mots « dans les océans Indien et Pacifique ». L'Indopacifique est un concept géopolitique importé des États-Unis, qui recouvre la zone qui s'étend de la Californie à l'Inde en passant par Hawaï, Guam, Okinawa et la Corée du Sud. Compte tenu de la répartition des collectivités d'outre-mer et des bases françaises à l'étranger, il est préférable de distinguer l'océan Indien et l'océan Pacifique, afin de renvoyer à des notions géographiques claires pour les Français. Que les lois soient intelligibles par tous nos concitoyens doit être pour nous une préoccupation constante. La langue française est assez riche pour ce faire.
Le concept d'Indopacifique, bien que d'origine américaine, s'applique parfaitement à la France, dont les intérêts dans les deux océans sont liés. Soit dit en passant, la France possède plus de territoires dans l'océan Indien que les États-Unis. Le Président de la République a présenté en 2018 une stratégie pour l'Indo-pacifique, reprenant à son compte le concept.
Avis défavorable.
L'origine du concept est peut-être américaine mais les pays riverains eux-mêmes utilisent cette terminologie. Tous ceux qui connaissent la zone le savent. Ne sombrons pas dans l'antiaméricanisme primaire – cela étant, je ne dis pas que vous le faites.
Pas de caricature, s'il vous plaît. Il s'agit simplement de s'assurer qu'on utilise les termes adéquats et une grille d'analyse conforme à nos besoins et à nos intérêts. Nous ne sommes pas les seuls à avoir fait cette remarque – je vous renvoie aux comptes rendus des auditions auxquelles nous avons procédé.
Nous appréhendons la région depuis notre base de Djibouti, Mayotte et La Réunion. En nous laissant imposer nos mots, nous nous laissons aussi imposer une grille d'analyse qui n'est pas conforme à nos intérêts.
« Indopacifique » renvoie à l'océan Indien, à l'océan Pacifique et à la liaison entre les deux. La France est présente dans le canal du Mozambique, à Mayotte et à La Réunion, et dans l'océan Pacifique, en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna et, à environ 5 000 kilomètres de là, en Polynésie française : le terme me paraît s'appliquer parfaitement à cette zone.
Le concept d'Indopacifique a permis aux États-Unis de faire basculer leur flotte du Golfe vers le Pacifique pour organiser une sorte de glacis autour de la Chine. La France est présente, à travers ses territoires d'outre-mer, dans les deux océans, mais nos intérêts se trouvent-ils auprès de Taïwan ou auprès des pays du Golfe ? Utiliser le terme « Indopacifique » est déjà une manière de répondre à cette question. Nous devrons être très précis dans l'utilisation des concepts et prudents dans nos relations tant avec la Chine qu'avec les pays du Golfe.
Spontanément, j'avais une réserve concernant l'utilisation du concept d'Indopacifique car je crois qu'il s'agit de deux réalités distinctes, mais après avoir entendu l'argumentation de notre collègue Lachaud, je voterai contre l'amendement…
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN217 de Mme Isabelle Santiago et sous-amendement DN929 de M. Bastien Lachaud.
Nous souhaitons préciser que le déploiement militaire français dans les outre-mer, notamment en Indopacifique, doit s'accompagner du renforcement substantiel des partenariats stratégiques avec les pays de ladite zone et que ces partenariats doivent permettre d'assurer autant que possible une interopérabilité entre les forces françaises et celles de nos alliés.
Avis favorable sur l'amendement et défavorable sur le sous-amendement, qui vise le même objectif que l'amendement DN491.
Je suis plutôt favorable à l'amendement avec néanmoins la réserve que la précision « notamment en Indopacifique » nous fait tomber dans le travers pointé tout à l'heure : cela reviendrait à dire que l'on ne renforce pas les partenariats stratégiques avec la Guyane, le Brésil, le Suriname ou le Canada. N'établissons pas de distinguos entre les territoires d'outre-mer. Il faudrait soit retirer l'amendement et le modifier d'ici à la séance, soit l'adopter mais effectuer la modification en séance.
L'amendement est retiré.
En conséquence, le sous-amendement n'a plus d'objet.
La commission adopte l'amendement rédactionnel DN819 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.
Amendement DN42 de la commission des finances.
Il s'agit de prévoir la possibilité de conclure des partenariats avec des opérateurs privés et d'utiliser des services commerciaux pour les activités de renseignement et de défense de nos intérêts nationaux. Dans une économie de guerre, l'ensemble des services nationaux et alliés, publics comme privés, doivent être mis à contribution pour la défense de la nation. Cela permettrait de multiplier nos moyens de défense et les outils au service de nos armées. En Ukraine, par exemple, le recours à des prestataires privés a été utile au renseignement.
Je suis stupéfait que le rapporteur et le ministre ne donnent pas plus d'arguments pour justifier leurs avis favorables. Il est ici question de renforcer une tendance bien identifiée, celle de la privatisation des conflits. Quand nous avons abordé la question de l'externalisation, on nous a répondu que nous étions tatillons, qu'il ne s'agissait que de badges à l'entrée de Balard – mais en l'espèce, il n'est plus question de badges, il s'agit de savoir si des moyens de surveillance et même d'action seront confiés à des prestataires privés. Je rappelle qu'il y a quelques années, le ministère avait déjà été critiqué parce que le recours à des prestataires privés pour le transport stratégique n'avait pas été assez transparent. Or cet amendement, qui plus est présenté au lendemain d'un débat en séance sur le groupe Wagner, donc sur les sociétés militaires privées, encourage l'État à se dessaisir une fois encore de ses responsabilités. Vous mettez le doigt dans un engrenage dangereux, je vous le dis. L'État doit être le seul à faire la guerre et à assurer la défense de la France et de sa population.
Nous avons adopté hier à l'unanimité l'inscription de Wagner, une société militaire privée, sur la liste des organisations terroristes. À l'instant, l'un des piliers de la majorité vient d'affirmer que le recours à des prestataires privés durant la guerre en Ukraine avait été utile. Je ne dis pas que vous établissez une relation entre les deux mais, dès lors que l'on enlève les garde-fous, que l'on n'apporte aucune précision ni aucune limite, il y a un risque d'engrenage. Si vous voulez recourir à du renseignement privé, discutons-en, mais qu'entendez-vous par « action » ?
Je cherche au contraire à les révéler. Vous souhaitez que nous argumentions alors que le modèle d'armée que nous promouvons est cohérent et connu de tous. Au contraire, on a du mal à comprendre celui que La France insoumise propose…
J'ai dit que cet amendement apportait quelque chose au texte parce que la rédaction en était précise. Libre à vous de supprimer ensuite ce que vous souhaitez. Mais le déploiement d'offres d'accès à des images satellitaires par Airbus Defence and Space, est-ce comparable à l'action du groupe Wagner ? Attention à ce que vous dites, messieurs les députés !
Un peu, tout de même : vous avez sous-entendu que les partenaires commerciaux français étaient des sociétés militaires privées – mais vous n'en êtes pas au premier dérapage, même si vous vous rattrapez parce que vous avez du métier.
Faut-il que Naval Group cesse de participer aux travaux sur la base de l'île Longue ? Si vous remettez en cause le fait que nos entreprises participent à notre défense, c'est un autre modèle que vous défendez. Dans ce cas, assumez-le et allez jusqu'au bout de votre raisonnement. Si je n'ai pas tout compris de votre position, excusez-moi, mais entre le service militaire obligatoire, la fin de la dissuasion – à laquelle vous êtes néanmoins favorable – et la sortie de l'Otan sans savoir pour autant dans quelle autre alliance on s'insère, je ne sais plus très bien où l'on en est.
Pour ma part, je trouve que M. Plassard propose un bon équilibre. Il n'ouvre pas la voie à une nouveauté, il précise au contraire le champ des possibilités actuelles. Si vous n'êtes pas de cet avis, si vous identifiez des risques de dérive, indiquez-les et l'on amendera le texte.
Notre collègue de la commission des finances promeut à travers cet amendement une vision très libérale de la défense, alors que nous défendons plutôt une conception nationale, fondée sur la souveraineté. Nous avons déjà parlé de l'externalisation et de ses effets sur le maintien en condition opérationnelle des armées, notamment à propos des Atlantique 2 de l'Atelier industriel de l'aéronautique (AIA) de Cuers-Pierrefeu. Certes, le privé dispose d'atouts. Ne nous interdisons pas d'y recourir, mais pas de manière aussi substantielle et permanente.
Si vous voulez supprimer « substantiel » ou préciser que les entreprises en question doivent être françaises, je n'y suis pas opposé – c'est à M. Plassard d'en décider – mais on ne peut pas dire qu'on est fier de notre BITD et refuser de la faire travailler ! Elle participe elle aussi à notre souveraineté.
La commission adopte l'amendement.
Amendement DN247 de Mme Mélanie Thomin.
Il s'agit de promouvoir la lutte contre les ingérences étrangères à l'échelon du littoral. L'accroissement des conflits et des compétitions mondiales entraîne un renforcement des démonstrations de force face à notre zone économique exclusive (ZEE).
D'autre part, le chef d'état-major de la marine et les préfectures maritimes appellent l'attention sur l'ouverture de nouvelles voies en Arctique du fait du réchauffement climatique, ce qui ouvre également de nouvelles voies économiques qui font de l'océan Atlantique le théâtre d'influences nouvelles. Il n'est pas rare d'observer au large de nos côtes, par exemple en mer d'Iroise, des démonstrations de force de la part de certains de nos compétiteurs : câbles coupés, manœuvres de bâtiments russes…
Si l'on veut que la marine nationale se consacre pleinement à ses missions en haute mer, il est nécessaire de renforcer la surveillance de nos côtes par la mise en place d'une flottille côtière complémentaire. L'objet de cet amendement est d'y associer les représentants des collectivités territoriales, en particulier littorales, afin de faciliter le déploiement des moyens.
Étant moi aussi député breton, je comprends votre souci du littoral… Cela étant, la marine nationale fait convenablement son travail, que ce soit avec ses bâtiments ou ses sémaphores. Ce qui importe, et c'est l'un des objets du présent PLPM, c'est de mettre l'accent sur l'espace. D'où la nécessité d'augmenter nos moyens dans ce domaine, afin d'améliorer la surveillance de la surface maritime et des fonds marins.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Vous avez raison, madame Thomin, d'évoquer la problématique de l'Arctique, de la sécurité collective dans l'océan Atlantique et du durcissement de la marine, en particulier des sous-marins russes, dans la zone : c'est une réalité.
Pour ce qui est de l'amendement, il me semble difficile d'inscrire dans la loi qu'« un plan de défense du littoral sera élaborée en lien avec les acteurs locaux ». Des plans de défense existent déjà, fort heureusement, et ils sont pilotés par l'état-major des armées, par les préfets maritimes et par les officiers généraux de zone de défense et de sécurité (OGZDS).
En revanche, y associer les collectivités territoriales me semble une idée intéressante. On pourrait même soulever la question générale de la résilience et de la culture collective de défense nationale, en incluant par exemple les entreprises.
Je vous propose donc de retirer l'amendement et de proposer en séance un dispositif qui, sans évoquer un plan de défense, poserait le principe d'un travail collectif englobant non seulement le littoral mais aussi les zones frontalières et l'outre-mer.
Je pense que le littoral soulève des questions de défense spécifiques. J'accepte néanmoins votre invitation à travailler sur un amendement qui viserait à y associer les collectivités territoriales, en particulier celles situées dans les zones littorales.
L'amendement est retiré.
Amendement DN80 de M. Frédéric Boccaletti.
Le développement des activités économiques a provoqué une croissance exponentielle du nombre de câbles sous-marins, au point d'atteindre 420 câbles. Désormais, 99 % des télécommunications intercontinentales utilisent le câble sous-marin et 10 000 milliards de dollars d'opérations financières transitent quotidiennement par cette voie, selon la Banque centrale américaine.
Les câbles sous-marins constituent donc un enjeu stratégique majeur, au cœur des rivalités internationales. En raison des investissements colossaux qu'ils représentent, l'installation et la maintenance de ces outils sont cruciales. Du fait de leur fragilité, ils peuvent faire l'objet d'actes de malveillance ou d'opérations d'espionnage. La maîtrise des câbles sous-marins est indispensable à la souveraineté et à la place de la France dans le monde. Il y va de l'autonomie stratégique de la France. C'est pourquoi nous vous proposons de compléter l'alinéa 8 par la phrase : « Une attention particulière sera portée à la sécurisation des câbles sous-marins. »
La maîtrise des fonds marins est une priorité ministérielle et le PLPM prévoit le développement de nouvelles capacités allant jusqu'à 6 000 mètres de profondeur, ce qui permettra de sécuriser les câbles sous-marins : demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
L'amendement est intéressant mais il me semble satisfait.
D'autre part, si l'on veut souligner une menace, il faut le faire pour toutes. Pourquoi ne pas sécuriser les pipelines d'hydrocarbures ? Pourquoi ne pas évoquer la guerre des mines ?
Si vous souhaitez lister les menaces pour rendre les choses plus claires, libre à vous – bien que cela ne me semble pas nécessaire –, mais dans ce cas retirez l'amendement et déposez-en un global en séance.
Cet amendement a le mérite de mettre l'accent sur les câbles sous-marins. Toutefois, la mission flash dont ma collègue Métayer et moi étions les rapporteurs a souligné que leur sécurisation active n'était pas réaliste. Les seuls moyens de les protéger sont la redondance et la relocalisation des infrastructures. Un amendement a été déposé en ce sens.
Cela ne signifie pas pour autant qu'il faille éviter d'utiliser des câbles ou renoncer à notre souveraineté sur ces infrastructures. C'est pourquoi nous proposerons un autre amendement, visant à la nationalisation d'Alcatel Submarine Networks. Je vous invite, monsieur le ministre, à préparer d'ores et déjà votre argumentaire, parce que nous ne nous satisferons pas d'une réponse du type : « C'est intéressant mais retirez-le ».
Cet amendement est d'autant plus important que nous vivons un conflit de haute intensité durant lequel on a pu constater que le sabotage était également une arme – j'en veux pour preuve le récent sabotage du gazoduc Nord Stream. Nos installations sous-marines, notamment les câbles sous-marins, peuvent être prises pour cibles ; cela affaiblirait considérablement nos capacités de communication, donc notre défense.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN230 de Mme Anna Pic.
Il vise à prévoir une meilleure information du Parlement concernant la stratégie de la France dans la zone indopacifique à la suite de l'échec de la vente de sous-marins à l'Australie, en distinguant les différents types d'influence que nous pouvons avoir dans cette zone.
Votre commission peut convoquer le chef d'état-major des armées ou le ministre. Si vous estimez que je dois vous rendre compte sur un thème, je suis à votre disposition.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN433 de M. Aurélien Saintoul.
L'utilisation et la gestion des données méritent toute notre attention. Alors que 80 % de nos données sont hébergées dans des centres situés aux États-Unis d'Amérique, la vulnérabilité des câbles sous-marins qui nous relient à eux soulève des interrogations, notamment dans un contexte de guerre hybride. Leur surveillance est impossible et une défaillance majeure ou une attaque d'une puissance étrangère hostile pourrait paralyser un pays, voire un continent. En outre, le mandat présidentiel précédent a montré que l'attachement à l'Union européenne pouvait évoluer… Nous devons donc nous rendre capables de stocker nos données en France ou, à tout le moins, en Europe pour garantir un minimum de souveraineté et de sécurité. Sommes-nous seulement en mesure d'assurer une communication internet et GPS sur notre territoire ?
Il serait difficile de relocaliser toutes les données sur le territoire français. Il faut avoir une approche plus large, tout en gardant la plus grande souveraineté possible dans ces domaines ; beaucoup de mesures interministérielles vont dans ce sens. Avis défavorable.
Il faut distinguer entre les données, certaines ne présentant pas d'intérêt majeur tandis que d'autres sont critiques. Les données classifiées sont évidemment hébergées sur des serveurs militaires, en France ou à l'étranger – des serveurs peuvent se trouver sur nos bases lorsque des forces sont projetées à l'étranger. S'agissant des données non sensibles, des analyses sont désormais faites au cas par cas. Avis défavorable car la référence aux « données » est trop générale : il convient de resserrer la grille d'analyse.
Il s'agit d'un enjeu de résilience en cas de sabotage. L'installation de ces serveurs sur le continent, particulièrement en France, est indispensable car il n'y a pas de perspective crédible de protection active des câbles sous-marins. Il s'agit également d'un enjeu de protection contre l'extraterritorialité du droit américain, puisque ces installations sont le plus souvent situées sur le territoire américain, ce qui nous rend très vulnérables à l'action des États-Unis.
S'agissant de la sensibilité des données, votre argument n'est pas convaincant car les moyens en matière d'exploitation du big data ne permettent presque plus de faire le distinguo entre les données sensibles et celles qui ne le sont pas. Nous devons donc d'ores et déjà nous donner la possibilité de disposer de serveurs en France pour garantir la résilience du réseau.
Je redis ma disponibilité pour étudier une formulation qui serait plus précise, et donc plus opérante, qu'une simple référence aux « données » en général. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement DN594 de M. Christophe Blanchet.
Il vise à rendre plus visible le lien nation-armée rénové, sur lequel s'appuieront les armées pour contribuer davantage à la cohésion et à la résilience de la nation, en particulier par une participation accrue aux cérémonies patriotiques.
Nous avons besoin de résilience. Celle-ci passe par la cohésion nationale et, naturellement, par le renforcement du lien de la nation avec l'armée. Avis favorable.
La commission adopte l'amendement.
Amendements identiques DN231 de Mme Anna Pic et DN434 de M. Aurélien Saintoul.
Notre amendement vise à supprimer la mention du service national universel du rapport annexé. En effet, le SNU est un dispositif mal conçu et coûteux – le repas à 1 euro pour tous dans les Crous coûterait 60 millions d'euros par an, contre 1 milliard pour le SNU pour quelques-uns –, qui ne remplit aucun objectif en matière de défense, d'éducation ou de cohésion sociale.
Le SNU, c'est aussi un florilège de dérives : agressions sexuelles, propos racistes, punitions collectives comme à Strasbourg, sorties en montagne dangereuses et mal encadrées… On a vu bien mieux pour faire vivre les principes républicains ou développer une culture de l'engagement. Nous refusons donc le SNU mais nous soutenons le projet d'une conscription citoyenne permettant de rémunérer au SMIC une classe d'âge pendant neuf mois pour participer à des activités civiles et militaires d'utilité sociale et écologique. Loin du gadget folklorique que constitue le SNU, il s'agirait d'un dispositif réellement égalitaire, au service de l'intérêt général.
Les propos excessifs de notre collègue montrent bien la volonté farouche de décrédibiliser le SNU en évoquant des cas isolés. Je peux vous assurer, pour avoir suivi l'expérimentation du SNU dans le Morbihan, que les jeunes sont heureux de leur expérience. En tout cas, le débat sur la loi de programmation militaire ne doit pas se confondre avec celui sur le SNU. Avis défavorable.
Vos propos sont en effet excessifs, monsieur Fernandes, et je vous invite à participer à un séjour de cohésion pour rencontrer des jeunes qui y participent. S'agissant des faits que vous avez évoqués, les malaises recensés dans les Hautes-Alpes ont été provoqués par des insolations, comme cela se produit chaque année dans des milliers de colonies de vacances. Je ne vous laisserai pas jeter l'opprobre sur plus de 9 000 encadrants venant de l'éducation populaire, de l'éducation nationale, de l'armée et des forces de sécurité intérieure. Si des comportements répréhensibles ont eu lieu, la justice tranchera car nous avons saisi avec beaucoup de fermeté le procureur de la République et l'Inspection générale.
Pourquoi voulez-vous priver des jeunes de mixité sociale, territoriale et d'engagement ? Pourquoi ne pas leur donner une chance de rejoindre un projet qui les fait sortir de leur département, de leur vie de tous les jours et leur fait découvrir d'autres horizons ? Cela ne représente que 140 million d'euros, très loin du milliard que vous avez évoqué. Avis très défavorable.
Les propos de notre collègue sont absolument inacceptables et insultants pour ces jeunes qui s'engagent pour la nation. Il exprime ainsi la tendance antimilitariste de son groupe mais, quand il s'agit de donner des leçons de morale, LFI devrait commencer par balayer devant sa porte.
Le SNU n'a besoin de personne pour se discréditer. Si vous voulez faire de la mixité sociale, c'est simple : revoyez la carte scolaire et vous l'aurez tous les jours à l'école ! Ce sera bien plus utile que quinze jours d'expérience exaltante au SNU.
Par ailleurs, le Président de la République s'était engagé à ne jamais utiliser le budget des armées pour le SNU. Or celui-ci se trouve dans la loi de programmation militaire, avec des embauches fléchées vers le SNU. Le budget des armées servira au SNU : c'est un reniement du président.
Enfin, pouvez-vous, Madame la secrétaire d'État, confirmer les propos que vous avez tenus sur France 3, à savoir que le Président de la République n'avait jamais dit que le SNU serait obligatoire ? Si vous les confirmez, ce soulèverait un problème car cet engagement figurait dans le programme du Président de la République – et même sur le site du SNU, juste avant qu'il ne soit modifié le lendemain de vos propos…
D'une manière générale, il y a un problème de sincérité budgétaire. Le SNU figure dans la loi de programmation militaire alors qu'il n'était pas censé s'y trouver, avec quelque 600 emplois fléchés vers le SNU. Il y a donc un mensonge, une tromperie. Combien d'entre vous le savaient, chers collègues ? Si vous voulez que les enfants découvrent la montagne, organisez des classes vertes, des colonies de vacances, mais ne mélangez pas tout.
Vous affirmez que le SNU ne sera pas obligatoire. Or le général Delion nous a expliqué qu'il espérait atteindre ses objectifs de recrutement de réservistes grâce à un SNU suffisamment ample et large pour inciter une population sensibilisée à devenir réserviste.
Je souhaite dire aux jeunes, aux parents et aux encadrants qu'ils peuvent être très fiers d'avoir choisi cette voie. Alors que certains remettent parfois en cause nos valeurs, je tiens à rappeler que « honneur, patrie, valeur, discipline » font partie de nos fondamentaux.
Le SNU est un caprice qui n'est soutenu par personne, ni la jeunesse ni l'armée. Il y aurait pourtant beaucoup à faire : des missions civiques, sociales et environnementales pourraient être organisées, sur la base du volontariat, pour prendre soin de la population et de l'environnement. Mais l'engagement civil ne se décrète pas et rendre ce service obligatoire ne peut fonctionner. C'est un des points de désaccord que nous avons avec la conscription voulue par nos amis de LFI car elle ne correspond pas aux besoins de la nation ni à ceux de l'armée.
Mme la secrétaire d'État a affirmé que le SNU permettrait d'assurer la mixité sociale. Ses propos sont contredits par un rapport du Sénat sur le SNU, publié en mars 2023, qui démontre que cet objectif n'est pas atteint.
Pour ma part, je ne connais que trois valeurs : liberté, égalité, fraternité. Ce sont elles qui guident mon engagement. Or ces valeurs ne s'incarnent pas dans le SNU. La liberté passe par l'éducation nationale, à qui il faut redonner les moyens d'émanciper par la liberté de penser. L'égalité nécessite d'assurer la mixité dans les écoles, en arrêtant d'affaiblir l'école publique. La fraternité s'exprime au travers de l'éducation populaire et du tissu associatif. Les jeunes aspirent à s'engager autrement : donnons-leur les moyens de le faire sans recourir au SNU et à sa vision paternaliste.
« Honneur, patrie, valeur, discipline », c'est tout simplement ce qui est inscrit sur tous les bâtiments de combat de la marine française.
Quelques incidents ne font pas une généralité. Il faut en finir avec les caricatures sur le SNU, qui ne correspondent en rien à ce que j'ai pu ressentir en allant à la rencontre de ces jeunes dans les centres d'hébergement. Quant à vos affirmations erronées sur le budget du SNU, elles sont insupportables : donnez les vrais chiffres ! Le SNU est certes perfectible mais il est très bien conçu et très utile.
La mixité sociale se travaille évidemment à l'école mais celle-ci ne peut faire se rencontrer des jeunes venant de lycées privés et de lycées publics, de territoires ruraux et de territoires urbains. La mixité sociale s'améliore, avec 22 % des jeunes qui viennent de lycées professionnels. Si nous multiplions le nombre de séjours tout au long de l'année, c'est pour permettre à ceux qui travaillent l'été d'y participer.
Vous parlez de faire confiance aux jeunes mais, en fait, c'est tout l'inverse : vous stigmatisez les quelque 50 000 jeunes qui ont fait le choix de consacrer leurs vacances à un séjour citoyen. Le SNU ne s'oppose d'ailleurs pas au soutien des colonies de vacances : 40 millions seront consacrés cette année aux « colonies apprenantes », 6 millions au développement du Bafa – brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur. Il faut arrêter ce travail de sape ciblé sur le SNU, qui s'améliore année après année.
Contrairement à vous, je ne hiérarchise pas entre les missions choisies par les jeunes : certains prennent plaisir à lever le drapeau, d'autres décident de rejoindre les cadets de la gendarmerie ou la SPA, ou encore d'effectuer leur mission d'intérêt général dans un Ehpad ou une caserne de pompiers. Ma mission n'est pas de faire la morale mais de permettre à chacun de trouver ce qui fait battre son cœur. Si, en plus, cela permet de servir les valeurs de notre république, alors c'est une réussite !
La commission rejette les amendements.
Amendement DN207 de Mme Mélanie Thomin.
Il vise à préciser que le service national universel demeurera fondé sur le volontariat. La généralisation annoncée du SNU est un vrai choix politique, qui fait polémique. Elle a été suspendue car son financement n'est pas abouti – certains rapports évoquent un budget de 3 milliards. De plus, son pilotage par l'éducation nationale n'est pas réaliste.
La jeunesse n'a pas besoin d'un encadrement militaire. Celui-ci n'est d'ailleurs pas souhaité par les armées car ce gadget représente pour elles une charge supplémentaire. Nous sommes favorables au développement de l'engagement citoyen pluriel, sur la base du volontariat, dans le cadre d'associations ou d'institutions comme la protection civile ou la SNSM – Société nationale de sauvetage en mer. Nous pensons plus globalement que c'est à l'éducation nationale d'assurer la mixité sociale et que les enseignants ont besoin de moyens pour concrétiser leurs projets pédagogiques.
Il est encore trop tôt pour décider si le SNU peut être étendu. La question de son caractère obligatoire ou volontaire méritera un débat apaisé et approfondi. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Avis défavorable car le service national universel est encore en déploiement. Le moment n'est pas venu de décider s'il doit être généralisé.
Vous avez évoqué les projets pédagogiques : le Président de la République a annoncé la création d'un fonds d'innovation pédagogique, doté de 500 millions d'euros, pour financer les projets. Il n'est pas nécessaire d'opposer les budgets entre eux : le SNU ne pioche ni dans celui de l'éducation nationale ni dans celui des armées. Il figure dans le Programme 163, Jeunesse et vie associative. De plus, le budget du service civique continue à augmenter.
Vous devriez vous mettre d'accord avec le cabinet de M. Lecornu car son ministère nous a indiqué que 612 emplois, pris sur le budget des armées, seraient fléchés vers le SNU.
Vous faites peser une épée de Damoclès sur la programmation budgétaire en ne précisant pas dès maintenant si le SNU sera obligatoire ou non. Le Président de la République a pris l'engagement que les armées ne seraient pas affectées par le SNU, alors que son encadrement est en partie assuré par les armées, par d'anciens militaires ou par des réservistes. Nous ne vous faisons pas confiance lorsque vous affirmez que cela n'affectera pas les armées.
Le budget des colonies apprenantes s'élève à 40 millions pour 80 000 enfants. Celui du SNU s'élèvera à 160 millions pour 60 000 bénéficiaires : manifestement, tous les enfants ne se valent pas dans ce pays.
Enfin, si vous rendez le SNU obligatoire, vous aurez un grave problème car vous devrez sortir les enfants de leur foyer sans demander leur avis à leurs parents. Je pense que vous n'y parviendrez pas.
Contrairement à ce que vous avez affirmé, le SNU n'est pas encadré par des militaires et ne représente pas de charge pour les armées. Seule la Journée défense et citoyenneté relève de leur budget, et cela ne date pas de la création du SNU.
Quant à son caractère obligatoire ou non, nous ne sommes pas actuellement en mesure d'accueillir toute une classe d'âge de 800 000 jeunes en donnant à chacun les mêmes chances de vivre une expérience inclusive, patriotique et de développement personnel. Il faudra à terme s'en donner les moyens mais nous ne savons pas encore à quelle échéance.
L'engagement des jeunes, quelle que soit sa forme – SNU, association, syndicalisme lycéen et étudiant – doit être respecté. En rendant le SNU obligatoire, vous priveriez les jeunes du droit de choisir la nature de leur engagement.
Nous nous interrogeons également sur l'objectif assigné à ces temps d'engagement. Nous pensons qu'ils doivent servir à l'émancipation, à l'apprentissage. Je suis en désaccord avec le Président de la République quand il affirme que le SNU doit nous permettre de disposer d'une jeunesse parée à tous les périls. Certes, les jeunes peuvent choisir de devenir réservistes ou pompiers, et je les en remercie tous les jours, mais c'est un choix personnel. Le soutien de l'État doit aller à toutes les associations qui accueillent des jeunes souhaitant s'engager. Or, nous le constatons dans nos circonscriptions, il n'y a plus de moyens pour ces associations. Votre choix se fait donc à leur détriment.
Je suis effarée par le dogmatisme des députés LFI, qui contribue à appauvrir le débat, et par leur manque de patriotisme. Le SNU donne l'occasion à des jeunes d'apprendre les valeurs de la République. C'est une belle expérience : vous devriez vous rendre sur place pour échanger avec eux ; ce serait instructif.
Je veux clarifier un point : le SNU n'est pas encadré par des militaires mais par des hommes et des femmes qui, pour un tiers d'entre eux, ont servi sous nos drapeaux et sont sous contrat civil.
Nous voulons préparer les jeunes à tous les périls, qu'ils soient d'ordre climatique, démocratique ou numérique. Cela ne se fera pas au détriment des structures d'éducation populaire, au contraire : le SNU est hébergé dans des bâtiments de la Ligue de l'enseignement, de la Fédération Léo Lagrange et des Francas.
Si vous ne souhaitez pas accompagner le projet des 50 000 jeunes qui choisissent de porter l'uniforme, c'est peut-être parce que cela vous déplaît. Pour notre part, nous pensons qu'il faut mobiliser les efforts de notre pays pour permettre à chacun de trouver l'engagement de son choix. C'est ce que nous faisons avec ce dispositif en trois temps : séjour de cohésion, mission d'intérêt général et engagement long. Ce dernier peut revêtir la forme d'un service civique, autre dispositif dont nous avons augmenté le budget de 20 millions d'euros cette année. Jamais nous n'avons proposé autant de missions de service civique, au point qu'il y a désormais plus de missions que de candidats ! Il n'est donc pas possible d'affirmer que nous avons retiré des crédits au budget de la jeunesse pour les consacrer au SNU. Nous accompagnons l'engagement quelle que soit sa forme : c'est ainsi que l'on fait confiance à notre jeunesse.
La commission rejette l'amendement.
La séance est levée à treize heures dix.
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Jean-Philippe Ardouin, M. Xavier Batut, M. Julien Bayou, Mme Valérie Bazin-Malgras, M. Mounir Belhamiti, M. Christophe Bex, M. Christophe Blanchet, M. Frédéric Boccaletti, M. Benoît Bordat, M. Hubert Brigand, M. Vincent Bru, Mme Cyrielle Chatelain, M. Yannick Chenevard, Mme Caroline Colombier, M. François Cormier-Bouligeon, M. Jean-Pierre Cubertafon, Mme Christelle D'Intorni, Mme Martine Etienne, M. Yannick Favennec-Bécot, M. Emmanuel Fernandes, M. Jean-Marie Fiévet, Mme Stéphanie Galzy, M. Thomas Gassilloud, M. Luc Geismar, Mme Anne Genetet, M. Frank Giletti, Mme Charlotte Goetschy-Bolognese, M. José Gonzalez, M. David Habib, M. Laurent Jacobelli, M. Jean-Michel Jacques, M. Loïc Kervran, M. Bastien Lachaud, M. Fabien Lainé, M. Jean-Charles Larsonneur, Mme Anne Le Hénanff, Mme Murielle Lepvraud, Mme Delphine Lingemann, Mme Brigitte Liso, Mme Alexandra Martin, Mme Pascale Martin, Mme Michèle Martinez, M. Frédéric Mathieu, Mme Lysiane Métayer, M. Christophe Naegelen, M. Karl Olive, M. Laurent Panifous, Mme Anna Pic, M. François Piquemal, Mme Josy Poueyto, Mme Natalia Pouzyreff, M. Julien Rancoule, Mme Cécile Rilhac, M. Fabien Roussel, M. Lionel Royer-Perreaut, M. Aurélien Saintoul, Mme Isabelle Santiago, Mme Nathalie Serre, M. Philippe Sorez, M. Bruno Studer, M. Michaël Taverne, M. Jean-Louis Thiériot, Mme Mélanie Thomin, Mme Corinne Vignon
Excusés. - M. Steve Chailloux, M. Christian Girard, M. Olivier Marleix, M. Max Mathiasin, Mme Valérie Rabault
Assistaient également à la réunion. - M. Christophe Plassard, Mme Laetitia Saint-Paul