La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
La parole est à M. Yannick Neuder, rapporteur de la commission des affaires sociales.
En raison de la pénurie de professionnels de santé, la démographie médicale en France se trouve dans une situation alarmante, qui met en péril notre système de santé et l'accès aux soins.
Je vous rappellerai quelques chiffres : 30 % des Français vivent dans un désert médical, 6 millions d'entre eux – dont 600 000 personnes atteintes d'une affection de longue durée (ALD) – n'ont pas de médecin traitant et 87 % du territoire français est un désert médical.
De tels chiffres sont inacceptables dans un pays où, aux termes de la Constitution, la nation doit garantir la protection de la santé. Des mesures ont été prises mais le compte n'y est pas, nous le savons. La situation est trop alarmante, nous devons aller plus loin, adopter des mesures complémentaires et activer d'autres leviers.
Notre pays compte 99 500 médecins généralistes ; en 2025, ils seront un peu moins de 80 000, dont seulement 55 000 en exercice. J'ajoute que 50 % des médecins généralistes ont aujourd'hui plus de 60 ans. L'équation est donc la suivante : moins de médecins, un volume d'activité plus faible par médecin et une augmentation des besoins de santé. Vous l'avez compris, nous arrivons dans une impasse.
Mon souhait est de dépasser les postures partisanes pour faire émerger un consensus autour de mesures qui amélioreront concrètement la démographie médicale à court, moyen et long terme. Je me suis efforcé de retravailler mon texte, qui a pu être amélioré en commission ; ce processus se poursuivra ce soir grâce aux amendements que vous défendrez – le plus rapidement possible, je l'espère. Je salue, au passage, votre attitude constructive durant ces travaux.
L'article 1er de la proposition de loi vise à rénover et à rendre effectif le numerus apertus, créé par la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé. Ce dispositif est loin d'avoir produit tous les effets attendus. Notre capacité d'accueil s'élève à 10 000 étudiants en deuxième année de médecine, ce qui permet de retrouver le niveau observé au début des années 1970, quand la France comptait 15 millions d'habitants en moins.
L'article 2 vise à lutter contre la fuite des cerveaux. À cause d'un système trop restrictif, 5 000 étudiants ont décidé de suivre leurs études de santé à l'étranger – 2 000 d'entre eux se trouvent en Roumanie, d'autres étudient en Belgique ou en Espagne. Ceux qui le souhaitent doivent être en mesure de réintégrer une formation de médecine dans notre pays, avant le troisième cycle.
Enfin, l'article 3 permettra de former davantage de médecins grâce au développement des passerelles destinées aux professionnels paramédicaux. Aujourd'hui peu connues et rigides, elles doivent être rénovées. Les professionnels pourront ainsi reprendre des études adaptées et accompagnées.
Nous devons nous mobiliser sans relâche et trouver une unanimité sur ces bancs pour relever le défi de l'accès aux soins.
Ce soir, nous avons l'occasion d'aller plus loin avec ce texte, qui vise la formation d'un plus grand nombre de médecins, en cohérence avec les besoins du territoire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
C'est d'un objectif commun que nous débattons ce soir. Face aux enjeux de démographie médicale et aux tensions auxquelles sont confrontés certains services hospitaliers, nous partageons, en tant que responsables politiques, un même sens du devoir.
Ce devoir consiste – je cite l'exposé des motifs du texte proposé par M. le député Neuder – à « redonner à notre système de santé toute l'efficience qui le caractérisait et qui a toujours fait la fierté de la France ». Les leviers d'action sont nombreux s'agissant des politiques de santé publique ; le Gouvernement s'en saisit pleinement.
Le budget de la sécurité sociale pour 2024, adopté définitivement, comporte des mesures fortes pour améliorer l'attractivité hospitalière et l'accès aux soins. Les négociations conventionnelles avec les médecins libéraux battent leur plein ; nous devrions en rouvrir très prochainement avec les pharmaciens.
Des propositions de loi ont été élaborées ici même ces dernières années ; leur adoption ouvre la voie à des avancées importantes pour accélérer le décloisonnement de notre système de santé. Je pense aux deux lois Rist – la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification ; la loi du 19 mai 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé – mais aussi à la proposition de loi de M. Frédéric Valletoux, visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, sur laquelle une commission mixte paritaire (CMP) a trouvé un accord ce matin.
Car, pour transformer le fonctionnement et l'organisation territoriale du système de santé afin que celui-ci atteigne ses objectifs, il n'y a pas de solution unique, pas de solution miracle.
Nous connaissons les enjeux. Trop longtemps, le numerus clausus a rationné l'offre ; sa suppression a été un acte fondateur. Depuis, nous avons formé plus d'étudiants : leur nombre a augmenté de 15 % par an en moyenne. Je le sais, ce n'est pas suffisant. La charge qui pèse sur les soignants est encore lourde et nous entendons les attentes des Français, en particulier de nos concitoyens vivant dans les territoires les moins dotés.
Nous devons continuer de déployer les outils, les solutions et les organisations qui permettent de faire face, y compris à court terme, aux besoins de santé croissants. Il faut ainsi développer les organisations collectives, accélérer la mise en œuvre des partages de tâches et des délégations de compétences, favoriser l'innovation et l'expérimentation. Nous nous y sommes attelés, d'autant plus que ces politiques sont des éléments majeurs pour l'attractivité des métiers de santé. Nous devons nous saisir de ces leviers pour fidéliser les forces vives et inciter les jeunes à choisir ces professions.
Tout cela ne fonctionnera que si nous parvenons à créer une dynamique collective autour de ces enjeux. Le mouvement doit embarquer les pouvoirs publics et les professionnels de santé, bien sûr, mais aussi, au niveau local, les coalitions rassemblant collectivités, les élus et les citoyens. Les maîtres mots sont « confiance » et « responsabilités partagées ».
Ainsi, je salue l'esprit de l'article 1er de cette proposition de loi. Il vise à mieux prendre en compte la parole des acteurs, notamment les élus d'un territoire, dans la structuration de l'offre de formation, en fonction des besoins identifiés localement. Chacun peut et doit trouver sa place dans ce dialogue renforcé, au plus près des enjeux.
La proposition présente de l'intérêt ; il nous faudra poursuivre la discussion pour évaluer précisément les conséquences que pourrait avoir un tel dialogue. Il faut, en effet, prendre en compte les capacités effectives de formation des universités – une réalité que nul ne saurait ignorer. Même si les facultés ouvrent de plus en plus d'antennes délocalisées, si les campus s'agrandissent et si l'éducation numérique offre de nombreuses perspectives, le principe de réalité reste à la base de tout. La formation doit répondre aux plus hautes exigences de qualité ; nous ne transigerons jamais avec cet impératif, plus crucial encore en médecine.
J'insiste donc sur le fait qu'il ne faut pas perdre l'acquis d'une régulation en partie quantitative. Si nous voulons maintenir une formation qui garantisse la qualité et la sécurité des soins, il est indispensable de prendre en compte les capacités de formation, aussi bien théorique, à l'université, que pratique, à l'hôpital et hors CHU.
La proposition de loi de M. Valletoux, en son article 5 bis, traite aussi de la question de la prise en compte des besoins de santé des territoires. L'articulation entre les deux textes reste donc à préciser. Cependant, grâce à la CMP conclusive – dont je me réjouis –, nous avons déjà abouti à une forme de concrétisation de ce projet, ce qu'il convient de saluer collectivement.
Le principe de réalité doit également nous guider lorsque nous évoquons l'idée d'intégrer, en cours de formation, des étudiants français ayant choisi de suivre leurs études de médecine dans un autre pays européen. La solution proposée à l'article 2 ne nous paraît pas opportune.
D'emblée, je rappelle qu'il existe un principe de reconnaissance des diplômes entre États européens. Celui-ci s'applique aux médecins spécialistes, comme aux dentistes, aux sages-femmes, aux pharmaciens et aux professionnels paramédicaux. Aussi des modalités de retour en fin de cursus sont-elles déjà prévues pour les ressortissants français qui obtiennent leur diplôme en Belgique ou au Portugal, par exemple.
De même, la réglementation encadre les conditions et les modalités d'accès aux études de médecine des étudiants inscrits dans un État membre de l'Union européenne, un État partie à l'Espace économique européen (EEE), la Confédération suisse ou la principauté d'Andorre. Le retour – volontaire – des étudiants français est d'ailleurs une réalité, qu'on observe généralement entre le deuxième et le troisième cycles, au moment des ECN, les épreuves classantes nationales.
Intégrer ces étudiants en cours de cursus, hors des possibilités existantes et qui s'appliquent à tous les étudiants et professionnels européens, poserait des problèmes notamment juridiques, au regard du principe d'égalité de traitement avec les étudiants engagés dans un cursus universitaire en France. Il ne faut pas exclure l'instabilité qu'entraînerait une telle disposition.
Par ailleurs, je tiens à vous assurer que nous nous efforçons de faciliter et de fluidifier encore davantage le parcours des praticiens à diplôme étranger, européen et hors UE, qui souhaitent exercer en France. La proposition de loi de M. Valletoux prévoit des dispositions spécifiques pour les Padhue, les praticiens à diplôme hors Union européenne.
C'est dans cet état d'esprit que j'aborde l'article 3. Je partage, bien entendu, la volonté d'encourager les passerelles. Je rappelle que les auxiliaires médicaux peuvent, depuis 2017, bénéficier d'une passerelle spécifique vers les études médicales et que les titulaires d'un diplôme en odontologie, en pharmacie et en maïeutique peuvent, de longue date, être admis en deuxième ou en troisième année de médecine.
Comme vous, je souhaite encourager ces réorientations et soutenir la motivation des étudiants qui s'y engagent, sans rien sacrifier toutefois à la qualité des parcours. Cet article est à mes yeux un dispositif d'appel, qui ne contredit en rien les dispositions aujourd'hui applicables.
Par ailleurs, je tiens à souligner que les passerelles ne sont pas la seule voie pour monter en compétence dans le système de santé, bien au contraire.
Nous avons besoin des paramédicaux et de toutes les professions de santé, autant que des médecins, dans le système de santé comme dans chaque parcours de soins.
Grâce à la pratique avancée, à l'accès direct, aux partages et aux délégations de compétences – qui doivent se déployer prioritairement dans des organisations territoriales collectives et coordonnées –, les professionnels peuvent se saisir de possibilités d'évolution tout au long de leur carrière. Chaque métier peut ainsi déployer tout son potentiel et trouver sa place dans un système de santé en pleine transformation.
Reconnaissons que, sur les différents sujets évoqués dans cette proposition de loi, les lignes bougent et les choses avancent. Toutes et tous, nous continuons à accorder une attention prioritaire aux sujets essentiels de l'accès aux soins et de la formation des médecins. Cet état d'esprit doit continuer à prévaloir pour que nous construisions collectivement de nouvelles solutions utiles à nos concitoyens.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et sur le banc des commissions – Mme Maud Petit applaudit également.
La France connaît une situation alarmante en matière d'accès aux soins. L'amélioration de la démographie des professionnels de santé est un défi majeur. Comme vous l'indiquez, monsieur le rapporteur, l'offre de soins en médecine générale est à présent déficitaire, ce qui témoigne des difficultés d'exercice des généralistes. En 2019, huit médecins sur dix déclaraient avoir des difficultés à répondre aux sollicitations des patients. D'autre part, l'offre est inégalement repartie : 87 % du territoire est un désert médical.
Cette proposition de loi devrait faire l'unanimité puisqu'elle représente une première réponse pérenne. Elle vise à assurer la formation d'un plus grand nombre de médecins, seul moyen de résoudre le problème des déserts médicaux. Vous proposez que le nombre d'étudiants en médecine soit défini prioritairement en fonction des besoins des territoires et de réintégrer dans nos facultés les étudiants inscrits dans un cursus à l'étranger. Enfin, vous voulez rénover les passerelles pour que les professionnels paramédicaux soient incités à reprendre des études de médecine, ce qui permettra à leurs carrières d'évoluer et d'être plus attractives.
Les députés Les Républicains comptent sur la responsabilité de chacun d'entre vous pour que cette proposition de loi de bon sens soit adoptée !
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.
À l'issue de cette journée, je vous propose la création d'un nouveau véhicule législatif, la PPI – proposition d'intentions. Les textes de ce type sont intéressants mais ils comportent peu d'éléments opérationnels et pas de réalités concrètes pour nos concitoyens.
Notre assemblée examine une nouvelle proposition de loi portant sur l'accès aux soins,…
…après celles de nos collègues Stéphanie Rist et Frédéric Valletoux, cette dernière ayant été adoptée ce matin en CMP.
L'accès aux soins est indéniablement un sujet majeur : six millions de personnes sont aujourd'hui sans médecin traitant, dont près de 600 000 souffrent pourtant d'une affection de longue durée ; un tiers de la population vit dans un désert médical ; 1,6 million de personnes renoncent à des soins.
Le département de la Vienne, comme tant d'autres, n'est pas épargné. Avec l'ensemble des acteurs locaux, nous nous mobilisons sans relâche pour améliorer l'accès de nos concitoyens à la santé en favorisant la création de maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), la délégation de tâches ou encore la constitution de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Cependant, le problème reste aigu.
Il est prévu que les difficultés d'accès aux soins s'aggravent dans trois quarts des départements au cours des prochaines années. Notre pays subit un effet ciseau particulièrement dévastateur : l'augmentation et le vieillissement de la population génèrent davantage de demande médicale, mais l'offre proposée par les professionnels de santé décroît, notamment du fait de départs à la retraite non remplacés.
Cependant, proposer une loi sur l'accès aux soins tous les six mois ne fera pas apparaître par magie des médecins, des dentistes ou des gynécologues.
En matière d'études de médecine, nous savons, hélas, que toute mesure complémentaire à la réforme du numerus clausus de 2019 mettra au moins dix ans à produire un quelconque effet.
On peut tout reprocher à cette majorité, mais au moins aura-t-elle fait la réforme du numerus clausus !
Cette évolution aurait dû être entamée depuis des dizaines d'années. Mais les majorités successives s'y sont refusées… dont les vôtres, chers collèges LR ! Vous proposez ici de faire correspondre l'offre de formation aux besoins en santé du territoire. Le principe est on ne peut plus sain. Mais il est déjà prévu dans la loi – selon des modalités certes différentes.
De plus, l'offre de formation n'est en rien le gage que les besoins du territoire concerné seront pourvus : certaines spécialités ne sont enseignées que dans quelques facultés, et certaines facultés sont remplies d'étudiants venus d'autres régions, qui y retourneront après leurs études. Ainsi, la majorité des étudiants inscrits à Poitiers sont bordelais, du fait de l'accès très sélectif à la faculté de Bordeaux… Pensez-vous qu'ils s'installeront un jour dans les campagnes de la Charente ou des Deux-Sèvres, ou qu'ils prendront une permanence d'accès aux soins de santé – Pass – au CHU de Poitiers ?
La régionalisation des concours est donc une question à se poser.
L'article 2 porte sur la réadmission des étudiants français partis à l'étranger. Au-delà du caractère plutôt discriminatoire dans le cadre européen de la mesure proposée, il faut se demander pourquoi autant de jeunes partent à l'étranger.
Peut-être faut-il s'interroger sur le nombre global de médecins que nous formons dans notre pays ?
À propos de l'article 3, qui porte sur l'accélération des études de médecine pour les professionnels paramédicaux, je m'interroge. Peut-être que dix ans pour former un médecin généraliste, c'est à la fois trop long et surtout repoussoir pour beaucoup de nos jeunes ?
Monsieur le rapporteur, le groupe Démocrate salue votre volonté de chercher à réduire les difficultés d'accès aux soins. Mais les mesures que vous proposez ne sont pas à la hauteur des enjeux car elles n'emportent rien de décisif.
Prenons garde aux messages que nous envoyons à nos concitoyens : ne créons pas de faux espoirs, nous en serions tenus collectivement responsables.
Les seules mesures pertinentes à court terme sont celles qui économisent du temps médical, en faisant coopérer les professionnels de santé, en aidant à l'embauche d'assistants médicaux, en favorisant la prévention pour limiter l'aggravation des pathologies et la consommation de soins. Si l'on veut agir dès maintenant, c'est par l'organisation des soins que nous limiterons le manque de professionnels de santé à court terme. À cet égard, la proposition de loi de notre collègue Valletoux comporte des dispositifs intéressants.
Vous l'aurez compris : le groupe Démocrate préfère s'abstenir sur ce texte, que nous considérons comme insuffisamment opérationnel.
Chacun sur ces bancs connaît la situation critique dans laquelle se trouve notre pays concernant l'accès aux soins et l'accélération de la désertification médicale. C'est pourquoi cette proposition de loi vise à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation et par la formation. Elle contient de petites avancées, certes utiles, mais qui ne s'attaquent pas au cœur du problème ! Car tant que la répartition des professionnels sur le territoire ne sera pas traitée, nous n'endiguerons pas la désertification médicale. La seule solution est de réguler l'installation des médecins.
À cet égard, réformer le numerus apertus pour lier les besoins de santé des territoires à la capacité de formation en faculté de médecine nous paraît absolument nécessaire.
L'article 2 apporte un progrès bienvenu en créant une procédure d'intégration en faculté de médecine des étudiants français inscrits dans un autre pays européen. Cette disposition permettra de limiter légèrement la fuite des futurs médecins français formés à l'étranger. L'amendement adopté en commission, qui conditionne le bénéfice de cette procédure à l'installation dans un désert médical, nous paraît essentiel.
Aussi les députés socialistes voteront-ils le texte issu de la commission.
M. Maxime Minot applaudit.
Bien qu'insuffisant à de nombreux égards, il permettra des avancées minimes pour lutter contre le fléau de la désertification médicale. Mais, je le répète, la seule solution pour endiguer ce fléau est de réguler l'installation des médecins – c'est la mesure phare que le groupe transpartisan, réuni à l'initiative de Guillaume Garot, propose.
Je conclurai en soulignant une forme d'hypocrisie générale. Soyons-en sûrs, certains orateurs, lors de l'examen du projet de loi sur l'immigration, donneront à leurs discours les apparences d'une véritable chasse aux étrangers ; ce sont les mêmes qui, quelques semaines plus tard, demanderont aux médecins étrangers de venir combler les manques dans nos hôpitaux, nos cliniques et nos territoires.
Très juste !
Soyons cohérents car l'heure est grave : mettons en place la régulation, facilitons l'exercice des médecins étrangers et augmentons les capacités de formation. En bref, agissons avant qu'il ne soit trop tard ! Les Français nous regardent.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI – NUPES, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
Je tiens à saluer Yannick Neuder pour cette initiative, son engagement à défendre le système de santé, sa réflexion personnelle et ses analyses, qui convergent souvent avec celles des collègues d'autres groupes. Il connaît les sujets de l'intérieur ; c'est ainsi que l'on est concret et constructif.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LR.
Comme l'a rappelé mon collègue Turquois, nous étions ce matin en CMP, pour clore le parcours de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation de notre système de santé. Les conseils territoriaux de santé sont au cœur de ce texte et je suis très sensible au fait que le rapporteur ait également intégré les CTS dans la proposition de loi qu'il nous soumet ce soir.
La proposition de fixer les objectifs pluriannuels de formation en fonction des besoins des territoires trouve en effet toute sa cohérence dans le renforcement des CTS. Ceux-ci doivent devenir à la fois les outils de la démocratie sanitaire, le lieu de la réflexion et l'endroit où toutes les parties prenantes sur les sujets de santé se retrouvent pour élaborer des stratégies de territoire. Cet axe choisi par le rapporteur convient donc au groupe Horizons.
Nous retenons aussi sa volonté d'améliorer la réintégration des étudiants partis étudier à l'étranger – des étudiants souvent méritants mais qui, parfois pour quelques pouillèmes de points, ont raté la possibilité de suivre un cursus français –, ainsi que de rénover les passerelles destinées aux professionnels paramédicaux. Inspirées par une approche qui vise à décloisonner le système de santé, ces dispositions vont dans le bon sens. Les travaux et les amendements à venir permettront sans doute de fortifier encore l'esprit qui anime ce texte.
En conclusion, je voudrais rappeler que si la suppression du numerus clausus peut prêter à commentaires – j'ai entendu les ricanements sur vos bancs, mesdames, messieurs les députés Républicains –, il n'empêche qu'il y a aujourd'hui 20 % d'étudiants de plus en deuxième année dans les filières de médecine par rapport à 2019. C'est bien le résultat de décisions prises par les gouvernements récents et par la majorité actuelle, qui ont souhaité ouvrir plus largement ces filières. Cette politique commence à produire des effets, qui se poursuivront dans le temps. Une initiative comme celle de Yannick Neuder permettrait de les amplifier. Le groupe Horizons votera donc cette proposition de loi.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Avant de commencer l'examen des articles de cette proposition de loi, un constat : la courbe de la chute de la démographie médicale ne s'inversera qu'en 2030. Cette réalité désolante et profondément dommageable pour la population ne relève ni du hasard ni d'une désertion fortuite des cursus de médecine par les étudiants français. C'est bel et bien l'État qui a organisé la pénurie de médecins généralistes que nous subissons aujourd'hui. Afin de réduire les dépenses de santé, l'État a restreint délibérément le nombre de médecins formés annuellement dans les années 1970. Celui-ci est ainsi passé de 8 000 en 1983 à 3 500 en 1993.
La désertification médicale frappe aujourd'hui une commune sur trois, ce qui veut dire qu'entre six et huit millions de personnes n'ont pas un accès plein aux soins, selon un rapport du Sénat de 2022. La densité médicale dans les zones rurales est, de fait, plus faible que la moyenne de l'OCDE. Rappelons que 6,7 millions de personnes en France, dont 741 000 patients atteints d'une ALD, n'ont pas de médecin traitant. Non seulement nous faisons face à une hausse de la demande couplée à une offre de soins déclinante, mais cet engouffrement de la démocratie médicale est d'abord préjudiciable aux plus pauvres, à ceux dont la santé est la plus fragile.
La loi d'organisation et de transformation du système de santé (OTSS) a bien troqué le numerus clausus pour le numerus apertus, mais en l'absence de mesures ambitieuses pour inverser la donne plus rapidement, c'est tout notre système de santé qui traversera des années noires.
Loin d'inciter au fatalisme, à l'abandon ou au désengagement de l'État, ce constat doit nous pousser à utiliser tous les moyens à notre disposition et à actionner tous les leviers possibles pour accélérer la hausse du nombre de médecins généralistes dans les territoires les plus démunis.
Le relèvement du numerus apertus, au regard des besoins pluriannuels de santé des territoires, est une nécessité. Nous ne pouvons pas naviguer à l'aveugle. Lorsqu'une personne est formée sur son territoire, en particulier dans les zones les moins dotées, nous devons tout faire pour qu'elle y reste. Ainsi, l'article 2, que nous soutenons, va dans le sens d'une responsabilisation plus que bienvenue de l'État, puisque les besoins locaux devront être pris en compte pour fixer les objectifs pluriannuels de formation dans chaque université.
Nous saluons l'adoption en commission de notre amendement à l'article 2, qui vise une meilleure transmission, par les universités, des moyens financiers et humains qu'elles estiment nécessaires pour améliorer leurs capacités de formation, afin que les agences régionales de santé (ARS) et les CTS soient mieux informés.
Mes chers collègues, plus que jamais, nous avons besoin d'une véritable vision de la société qui remette la santé de toutes et de tous au cœur de nos préoccupations.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES. – Mme Sylvie Bonnet applaudit également.
Chers collègues du groupe Les Républicains, vous nous soumettez là une proposition de loi plutôt intéressante, alors que vous nous avez emboucanés toute la journée avec des fantasmes, des lubies, des amalgames, des propositions morbides et des visions moisies de la France, de la République et de l'humanité. C'est triste, c'est grave et, faites attention – cela s'adresse aussi à la majorité –, ça glisse !
Malheureusement, nous sommes contraints de raccourcir ce débat important sur les besoins de notre pays, de notre peuple, pour avoir une chance d'en arriver au vote avant minuit.
Le désert médical avance. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de nous permettre d'évoquer l'enjeu essentiel de l'accès aux soins, que nous avons été empêchés de discuter à l'occasion du non-débat sur le non-financement de la sécurité sociale. Notre système de santé est dégradé, et cela dégrade notre santé.
La proposition de loi s'inscrit dans la lignée de tentatives de bricoler quelque chose qui permettrait de sortir du désastre et d'une action déficiente. La suppression tardive du numerus clausus en 2019 ne suffit pas ; le numerus « ditus » apertus – ou, pour rester fidèle au latin, dicatus apertus –, qui définit chaque année le nombre minimal d'étudiants autorisés à s'inscrire en médecine, demeure de fait limité par les capacités de formation des universités. Il ne traduit pas mécaniquement une ambition suffisante, ni n'induit sa mise en œuvre ; il est capé par Parcoursup. Il nous semble nécessaire de calibrer le numerus apertus en fonction des besoins et d'ajuster les capacités d'accueil des universités en conséquence, grâce à un soutien intégral de l'État.
Les mesures visant à favoriser le retour des étudiants partis à l'étranger sont intéressantes. La fuite de jeunes diplômés vers l'étranger est réelle – on pourrait, à la limite, nous répondre que c'est un juste retour des choses. Enfin, le débat autour des formations passerelles est également important.
Pour limiter les difficultés, pour mieux les répartir et mieux y faire face, il faut prendre des mesures plus puissantes et le faire avec l'ensemble des acteurs du système, qui doivent tous y être associés. Le désert médical avance, madame la ministre déléguée ; vous avez de plus en plus de sable dans les chaussures – et nous toutes et tous avec vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – NUPES.
L'omniprésence de la thématique de l'accès aux soins dans nos débats parlementaires est le douloureux témoin de la gravité de la crise du système de santé. Ce texte, issu du travail de qualité du rapporteur Neuder, tente d'y apporter certaines réponses ; nous les saluons. Le groupe LIOT a d'ailleurs à maintes reprises soutenu l'idée qu'il fallait prendre en compte, en priorité, les besoins sanitaires des territoires pour déterminer les politiques publiques de santé.
Aujourd'hui, les capacités d'accueil des universités limitent le nombre d'étudiants formés et donc de médecins. C'est la philosophie inverse qui doit primer. En effet, le numerus apertus permet une hausse de 15 % du nombre de médecins formés, mais l'effort risque d'être insuffisant pour pallier les départs en retraite. C'est pourquoi nous sommes en parfaite adéquation avec l'article 1er de la proposition de loi.
La réintégration des étudiants partis à l'étranger, prévue à l'article 2, répond elle aussi au besoin d'assurer la formation de nos futurs médecins. Nous y sommes favorables.
Enfin, la proposition de développer les passerelles offertes aux professionnels paramédicaux est une bonne piste. Nous remercions le rapporteur d'avoir consolidé la rédaction de l'article 3 pour répondre à nos interrogations sur la solidité de la formation de médecine qui leur sera dispensée.
Vous l'aurez compris, nous voterons pour ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et LR.
Les problèmes d'accès aux soins rencontrés dans nos territoires sont une réalité indéniable. Nous remercions donc M. le rapporteur de nous permettre d'en débattre à nouveau, cette fois-ci sous l'angle de la formation des professionnels de santé.
Je l'ai dit, nul ne peut nier les problèmes d'accès aux soins, et c'est précisément pour cette raison que le Gouvernement et la majorité agissent depuis 2017. Nous avons supprimé le numerus clausus en place depuis 1971. Cette mesure a déjà permis d'augmenter de 15 % le nombre de places entre 2019 et 2022 ; ce seront donc 15 % de médecins en plus qui s'installeront à la fin de leurs longues études.
Nous avons légiféré pour transformer, simplifier et améliorer le modèle de soins d'ici là. Nous avons réformé les conditions d'exercice pour répondre aux attentes des jeunes générations de médecins, en favorisant l'exercice coordonné et l'interprofessionnalité avec les CPTS. Quelque 83 % du territoire seront couverts fin 2023, et plus de 300 maisons de santé plutiprofessionnelles supplémentaires ouvriront d'ici la fin de l'année. Grâce à ces mesures, 150 000 patients ont déjà retrouvé un médecin.
La loi Rist a permis de dégager du temps médical en développant les délégations de compétences ; vingt délégations existent déjà. Nous avons aussi facilité l'exercice médical en donnant un vrai statut aux assistants médicaux : 5 000 contrats ont été signés, ce qui représente 500 000 consultations disponibles en 2023.
Avec l'instauration de la quatrième année d'internat pour valider la spécialité de médecine générale, ce sont 3 500 docteurs juniors qui iront, dès 2026, dans toute la France travailler à côté de leur maître de stage. En Occitanie, par exemple, ils seront 270. Certains resteront et deviendront potentiellement maîtres de stage, et ceux qui partiront seront remplacés par de nouveaux stagiaires.
La future loi Valletoux incitera l'exercice en groupe, simplifiera l'organisation et améliorer la gouvernance territoriale. La CMP de ce matin a été conclusive et nous nous en félicitons.
Le travail accompli depuis 2017 devra, il est vrai, être évalué.
Fidèles à notre volonté d'aller de l'avant, parce qu'il est toujours possible d'améliorer les situations, nous avons considéré avec attention le texte du rapporteur et fait des propositions pour rendre les dispositions plus simples, plus réalistes et mieux applicables. C'est en ce sens que nous avons souhaité amender l'article 1er ; nous nous réjouissons de la réceptivité du rapporteur sur ce point.
La réintégration des étudiants français partis faire leurs études à l'étranger, objet de l'article 2, est un sujet important. Nous considérons que les conditions de réintégration doivent garantir qu'un tel dispositif ne se transforme pas en un contournement du processus de sélection français. L'article propose que les futurs médecins soient tenus de s'installer dans une zone spécifique, ce qui rappelle un autre débat. Cette mesure n'est ni incitative ni facile à mettre en œuvre ; en l'état, cet article ne peut pas, selon nous, être appliqué.
L'article 3 traite des passerelles qui permettent aux professionnels paramédicaux d'accéder aux études médicales. Or elles existent déjà ; fonctionnelles et utilisées, elles garantissent le maintien d'une formation de qualité. Cet article paraît donc satisfait.
Vous l'aurez compris, il nous importe que nos concitoyens bénéficient des soins dont ils ont besoin ; nous soutiendrons donc toutes les propositions permettant de tendre vers cet objectif. Néanmoins, pour être efficiente – et dépasser l'obstacle du principe de réalité –, une réforme doit être suffisamment opérationnelle. Les incantations, même pétries de bonnes intentions, ne répondent pas à cette exigence. Pour les raisons que je viens d'évoquer, le groupe Renaissance s'abstiendra lors du vote de la proposition de loi.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Plus d'un Français sur dix se retrouve aujourd'hui sans médecin traitant, soit 11 % de la population française. Plus de 30 % de nos concitoyens vivent dans un désert médical. Les chiffres sont alarmants puisqu'on prévoit, pour la fin du quinquennat, 20 millions de patients sans médecin traitant. Entre 2010 et 2021, notre pays a perdu 5 000 médecins alors que la population a augmenté de plus de 2,5 millions d'habitants. Ces chiffres simples et faciles à vérifier ne sont pas cités pour créer la polémique ou susciter la peur, mais pour présenter l'état de l'offre de santé sur le territoire national.
Depuis le début du mandat, nous avons examiné plusieurs textes portant sur l'accès aux soins, notamment la loi Rist et la future loi Valletoux, adoptée ce matin en commission mixte paritaire. Toutes ces lois présentées par la majorité présidentielle ont en commun le fait d'être insuffisantes, bien que l'intervention de l'infirmier en pratique avancée (IPA) dans le cadre d'un exercice coordonné représente une évolution positive. Même si nos débats seront écourtés, sans quoi ils seraient sans fin, je suis donc heureux d'aborder, dans le cadre de la niche parlementaire du groupe LR, la proposition de loi de Yannick Neuder.
Car elle offre une avancée majeure dans l'offre de soins. Au vu de l'état de la santé en France, ce texte apporte en effet des améliorations notables. Le numerus clausus, en vigueur depuis 1971, est pour partie responsable de la carence actuelle de médecins dans notre pays. La réforme de 2019, qui a entraîné sa suppression, est une évolution positive pour la formation médicale, mais le numerus apertus qu'elle a créé reste insuffisant. Pour nos étudiants, c'est un pas en avant, un pas en arrière.
En effet, le nombre de places ouvertes se fonde toujours sur les capacités d'accueil des universités et non sur les besoins du pays. La médecine et les études médicales ont perdu toute attractivité : les jeunes tournent le dos à une filière qu'ils perçoivent comme injuste. Il faut supprimer purement et simplement tout quota dans les études de médecine et permettre aux étudiants de poursuivre leur cursus médical en tenant compte des besoins de la population.
Notre pays connaît également une fuite des savoirs. En effet, bien que nous ne possédions pas de chiffres exacts, nous savons que, pour l'année 2021, ce sont 4 500 médecins diplômés environ qui sont partis exercer à l'étranger. Cette fuite doit être prise très au sérieux. La présente proposition de loi fournit une première réponse à ces départs.
Le texte aborde aussi le sujet important de la formation des professionnels paramédicaux et propose des solutions immédiates. La vigilance reste de mise : il faut éviter les dérives et déterminer de façon précise quels professionnels de santé peuvent reprendre des études de médecine, et dans quelles conditions.
Bien que cette proposition de loi présente de nombreux avantages, le groupe RN regrette qu'elle n'aborde pas la question du contrat d'engagement de service public (CESP), qui constitue à nos yeux une clef pour répondre à la désertification médicale. Il faut redonner à nos jeunes l'envie d'étudier la médecine et de travailler avec une rémunération décente.
Vous l'aurez compris, le sujet est vaste et mériterait plusieurs heures de débat. Nous saluons les grandes lignes de ce texte qui va dans le sens de l'intérêt général et de celui des professionnels de santé, même s'il ne représente qu'un premier pas face aux enjeux qui nous attendent.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe LR.
Ce texte apporte une bonne nouvelle : le numerus clausus est indéfendable ; l'héritage de Valéry Giscard d'Estaing n'existe plus, même à droite ! Tant mieux, puisque le constat est déprimant : le nombre de médecins par habitant va baisser jusqu'à 2030 ; depuis dix ans, nous avons perdu 7 000 généralistes libéraux ; 6 millions de Français n'ont pas de médecin traitant ; plus de 8 millions de nos concitoyens habitent dans un désert médical. Les besoins sont croissants, on reçoit des gens malades dans nos permanences, et pourtant le nombre de médecins recule.
Tout s'annonçait bien : les collègues LR nous présentent un texte aux objectifs louables – ce qui nous change du reste de la journée ! –,…
…mais il faudrait un peu plus d'efforts pour qu'il soit efficace.
Regardons article par article. L'article 1er prévoit d'augmenter les capacités d'accueil des formations en médecine mais deux problèmes se posent : comment la décision est-elle prise et qui la prend ?
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Vous jouez avec les mots pour déterminer le nombre de places en faculté de médecine suivant les besoins de santé du territoire et les capacités de formation. Hélas, on peut retourner le problème dans tous les sens : tant que le nombre de places en faculté dépendra des capacités de formation disponibles et que vous ne donnerez pas plus d'argent aux facultés, vous bloquerez l'augmentation.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI – NUPES.
On peut appuyer tant que l'on veut sur l'accélérateur mais si on n'enlève pas le frein à main, la voiture ne démarre pas. Votre frein à main, c'est l'austérité !
Quant à savoir qui décide, la réponse n'est pas plus rassurante. Vous donnez le pouvoir aux conseils territoriaux de santé. Or ces gens sont les experts des manques actuels, des médecins qui ont le nez dans le guidon, mais ce ne sont pas des prévisionnistes. Leur métier n'est pas d'anticiper l'évolution des besoins de santé. Pourtant, vous confiez aux CTS le soin de rendre un avis conforme. Ils auront le pouvoir de bloquer la décision dans un domaine qui ne relève pas de leur mandat.
Vous prévoyez, à l'article 2, de faire revenir les étudiantes et les étudiants partis étudier la médecine à l'étranger, faute de place en faculté de médecine en France. Ceux inscrits en médecine un an avant la promulgation de votre texte pourront revenir : pour des gens qui ont passé la journée à stigmatiser les migrants, c'est étonnant de dire aux jeunes qu'ils doivent vite s'inscrire à l'étranger dans l'espoir d'une régularisation, car elle n'arrivera qu'une fois !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Soit c'est un fusil à un coup qui fera naître d'énormes frustrations, soit il faudra revoir ce texte chaque année… puisque l'article 1er ne prévoit pas les moyens pour renforcer les capacités de formation au sein des universités !
Dans tous les cas, c'est paradoxal : en organisant le retour des jeunes, vous levez un peu le numerus clausus, mais aux frais de qui ? Soit ils auront choisi une faculté coûteuse et ils auront dû payer la levée du numerus clausus de leur poche, soit ils iront dans une faculté peu coûteuse et ce sont les impôts du pays d'accueil qui auront financé leurs études.
Comme quoi, les migrations forcées, vous n'y êtes pas si hostiles !
Applaudissements sur les bancs du groupe LFI – NUPES.
Enfin, l'article 3 prévoit des passerelles qui existent déjà, sans qu'il soit dressé de bilan ni indiqué d'information complémentaire puisque tout est réglementaire. Remarquons cependant que les études ne sont plus « accélérées » mais « adaptées et accompagnées ». Pourquoi pas, à la limite ?
Ce texte nous permettra de débattre à nouveau de l'amélioration de l'accès aux soins pour nos concitoyens. Trouver un médecin à proximité de son domicile, c'est l'une des principales préoccupations des Françaises et des Français. Il semblerait donc que nous ayons réussi à vous persuader de la nécessité d'améliorer la situation ; il ne reste plus qu'à vous convaincre des moyens pour y parvenir – je pense, vous l'aurez deviné, à la régulation de l'installation des médecins.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES et Écolo – NUPES.
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.
Cet article a un mérite : il prévoit que le nombre de places de formation est défini en fonction des besoins du territoire. Il confie aux élus, qu'ils soient locaux, départementaux ou nationaux, le soin de déterminer ces capacités d'accueil.
Yannick Neuder voulait initialement créer une commission surnuméraire. Après que nous en avons discuté, il a convenu qu'il serait préférable de s'en remettre aux conseils territoriaux de santé concernés.
Le texte tend également à introduire une forme de coercition à l'installation. Le débat a déjà eu lieu et vous savez ce que nous en pensons. Cette mesure ne serait pas du tout opportune dans le contexte actuel. Elle pourrait même aller à l'encontre de l'objectif recherché en décourageant les jeunes médecins de devenir des généralistes alors que cette voie est la plus délaissée.
Si vous ne comprenez rien, c'est que vous écoutez mal ou que vous ne connaissez pas le problème !
Allons, c'est qu'il a peut-être un problème – Jamel Debbouze fait la même chose.
Je vais essayer de parler plus lentement.
Pour résumer l'article 1er, il semblerait que les auteurs aient voulu nous faire croire que si les besoins de santé d'un territoire augmentent et qu'il manque de médecins, il suffira de pousser les murs des facultés pour augmenter les capacités de formation ! Cela me paraît difficile compte tenu des obstacles administratifs et des contraintes budgétaires.
La présidente coupe le micro à l'orateur dont le temps de parole est écoulé.
Nous en arrivons enfin au numerus apertus ! Après plus de vingt années au pouvoir, les Républicains se décident à ouvrir le débat, si important pour les étudiants, les professionnels de santé et nos concitoyens. Nous sommes heureux que d'autres groupes se rangent à l'avis de Marine Le Pen, qui n'a jamais cessé de proposer la suppression du numerus clausus.
Nous sommes bien conscients des difficultés que connaît le secteur. Cette suppression n'est qu'une réponse à la désertification médicale ou à la dégradation de l'accès aux soins. Cependant, cette mesure permettra de former davantage d'étudiants sur notre territoire, ce qui s'intègre dans la stratégie de formation et de simplification de l'offre de soins que porte le Rassemblement national.
Les Français ont besoin de décisions urgentes et fortes, ils ne peuvent plus attendre. Cette mesure doit être accompagnée et soutenue. Notre groupe votera l'article, tout en espérant que le numerus apertus soit à son tour supprimé.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
J'ai proposé en commission, pour tenir compte de nos échanges, de remplacer la commission ad hoc, initialement prévue, par les conseils territoriaux de santé concernés. Je propose ici de limiter le rôle des CTS à la fixation des objectifs pluriannuels de formation, en les désengageant de la détermination des effectifs annuels de formation.
Vous proposez de supprimer la référence aux CTS. En effet, seules les universités détiennent la prérogative de fixer leur capacité de formation. Avis favorable.
La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l'amendement n° 50 .
L'amendement tend à supprimer le critère des capacités de formation. Le conserver contribuerait à déterminer les besoins en fonction des moyens – et à maintenir le principe d'un numerus clausus – plutôt que de déterminer les moyens en fonction des besoins de santé et de formation.
D'autre part, il vise à introduire un indicateur pluriannuel des besoins nationaux de formation en santé. Celui-ci permettrait de constater les besoins de santé actuels et futurs mais aussi les évolutions de la démographie étudiante. Cet indicateur permettrait à l'État, aux universités ainsi qu'aux territoires de fixer des objectifs pluriannuels d'admission en fonction des besoins de santé et de formation.
Vous proposez, en supprimant le critère de capacité, de ne tenir compte que des besoins du territoire. Il ressort des échanges que nous avons eus en commission que, si les deux critères ne peuvent être placés sur le même niveau, il serait trop compliqué d'en supprimer un. Pour notre part, nous préférons privilégier les besoins du territoire et rendre subsidiaires les capacités de formation. Avis défavorable.
Vous proposez d'introduire un indicateur pluriannuel des besoins nationaux de formation. Il faut savoir que les objectifs nationaux pluriannuels relatifs au nombre de professionnels à former, qui remplacent le numerus clausus, tiennent compte des capacités de formation, en stage et hors stage, ainsi que des besoins de santé du territoire. Définis tous les cinq ans, ils sont le fruit des concertations régionales pilotées par les ARS et d'une concertation nationale au cours de laquelle l'ONDPS (Observatoire national de la démographie des professions de santé) recueille l'ensemble des indicateurs nécessaires auprès des représentants des organismes statistiques de l'État, notamment l'Insee et la Drees (direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques).
Les données et les indicateurs permettent d'analyser finement les besoins de santé et les capacités de formation. Je vous invite à retirer l'amendement car il est satisfait, sinon avis défavorable.
L'amendement n° 50 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement n° 8 .
Il s'agit d'un amendement de précision. Notre système de santé souffre depuis de trop nombreuses années d'un manque d'anticipation de nos politiques. Les urgences sont débordées, nous manquons de soignants, ceux qui restent sont épuisés, les tensions montent chez les médecins qui en arrivent à faire grève et les promesses gouvernementales, répétées depuis des années, restent sans effet. Ces signaux ne trompent pas. Ils révèlent des politiques erratiques, peu propices à déployer un système de santé capable de faire face aux besoins de la population.
Dès lors, il est fondamental que la répartition des futurs professionnels de santé tienne compte des besoins de santé à court, moyen et long terme.
Vous poursuivez un objectif louable mais la mesure que vous proposez ne serait pas de nature à sécuriser davantage le dispositif. Avis défavorable si vous ne retirez pas votre amendement.
Tout comme le précédent, cet amendement est satisfait. Nous travaillons sur le sujet et le HCAAM (Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie) doit nous remettre avant la fin du premier semestre l'étude que nous lui avons demandée. Nous pourrons ainsi prendre des mesures à moyen et à long terme. Je vous invite à retirer l'amendement, sinon avis défavorable.
L'amendement n° 8 n'est pas adopté.
Afin de lever totalement le numerus apertus, le Rassemblement national propose de supprimer toute référence aux capacités d'accueil des formations. Il est essentiel de changer radicalement de méthode si l'on veut mettre fin aux déserts médicaux. Le temps n'est plus à la prise en compte des capacités d'accueil mais à celle des besoins de santé. Les Français ne peuvent pas se passer de médecins. Dépassons le stade des simples mesurettes politiciennes et prenons les choses à bras-le-corps !
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'amendement tend à affirmer le caractère prioritaire des besoins de santé dans la détermination du numerus apertus, qui fixe le nombre d'étudiants admis en deuxième année de médecine, de pharmacie, d'odontologie et de maïeutique.
Certes, la proposition de loi prévoit de ne conférer qu'un caractère subsidiaire au critère des capacités de formation mais la rédaction retenue pourrait tout de même prêter à confusion lorsqu'il s'agira d'appliquer la mesure.
Il serait donc préférable de faire reposer la détermination du numerus apertus sur les seuls besoins de santé afin de mieux responsabiliser l'État dans la prise en compte, à long terme, des moyens nécessaires pour que les capacités d'accueil correspondent aux besoins de santé dans les territoires.
C'est l'objet de l'amendement, qui reprend une proposition soutenue par le groupe de travail transpartisan sur les déserts médicaux.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement n° 29 .
Le numerus apertus est contraint par les capacités de formation dont disposent les universités. S'il s'agit de recentrer les objectifs pluriannuels sur les besoins de santé du territoire, les capacités de formation doivent être examinées séparément et ajustées en conséquence, comme le prévoit d'ailleurs le dernier alinéa de l'article 1er .
Les amendements n° 52 de M. Guillaume Garot et n° 53 de Mme Caroline Fiat sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Vous proposez qu'il ne soit plus tenu compte que des besoins du territoire, en s'affranchissant du critère capacitaire. Cette solution paraît peu réaliste.
Ce matin, en CMP, nous avons repris dans l'article 5 bis de la proposition de loi les termes d'un amendement que nous avions voté, et qui donne un caractère subsidiaire au critère des capacités de formation. Je vous invite à retirer l'amendement, sinon j'y serai défavorable.
En complément de ce que vient de dire le rapporteur, je rappelle qu'une formation de médecin se déroule à la fois à la fac et en stage. Lorsque le nombre d'étudiants augmente, l'enjeu ne se situe pas seulement sur les bancs de la fac, il faut aussi avoir suffisamment de places dans les hôpitaux et chez les médecins généralistes. Si l'idée peut paraître séduisante pour la première année, il est illusoire de penser que l'on pourra accueillir autant d'étudiants en stage.
Avis défavorable.
Le temps nous est compté pour examiner cette proposition de loi majeure. Comme l'a dit Frédéric Pierru, chercheur au CNRS (Centre national de la recherche scientifique), la technocratie sanitaire des ARS a connu « un échec patent […] à enrayer le creusement des inégalités sociales et géographiques de santé et d'accès aux soins ».
Le présent amendement tend à promouvoir la démocratie sanitaire et la subsidiarité. Les ARS sont des outils technocratiques, éloignés, déconnectés, suradministrés. Nous devons faire confiance à la concertation et aux élus locaux. Comme je l'ai dit en commission, les ARS doivent être des instances exécutantes, et non exécutives.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l'amendement n° 54 .
Cet amendement du groupe La France insoumise vise à substituer à l'avis conforme des CTS un avis simple.
L'objet de nos travaux en commission était de maintenir l'avis conforme des ARS et de conserver le critère des capacités des universités. Avis défavorable ou, à défaut, demande de retrait.
Avis défavorable : les ARS sont les seules à disposer d'une vision à la fois locale et régionale des capacités. Je tiens pour ma part à saluer leur travail.
Sur l'article 1er , je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l'amendement n° 24 .
La problématique des déserts médicaux est centrale. La ruralité étant particulièrement touchée par le phénomène, un bilan doit être dressé des raisons de cet échec. Le manque de proximité entre les décideurs et les exécutants est très souvent pointé du doigt. Les ARS sont à l'origine de lenteurs administratives et prennent des décisions à une échelle trop éloignée de la réalité du terrain. C'est pourquoi nous proposons de supprimer l'avis conforme de l'ARS au profit d'un avis conforme de la commission des élus locaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'amendement n° 24 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 34 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'alinéa 9 prévoit qu'en cas d'inadéquation entre les besoins de santé d'un territoire et les capacités de formation des universités, les conseils territoriaux de santé ou les agences régionales de santé peuvent enjoindre aux universités de créer des places supplémentaires.
Si l'objectif de faire correspondre les capacités d'accueil au nombre d'étudiants programmé est honorable, nous devons nous assurer qu'une telle mesure puisse être appliquée de manière réaliste et efficace. Or la rédaction actuelle semble relever davantage de l'incantation que de la mise en œuvre de moyens véritablement opérationnels.
C'est pourquoi nous proposons une réécriture permettant aux CTS et aux ARS, sur la base des objectifs pluriannuels des universités, d'appeler ces dernières à prendre des mesures visant à accroître leur capacité d'accueil. L'objectif est d'ouvrir la possibilité aux acteurs du territoire de solliciter les mesures nécessaires à l'accroissement des capacités de formation, tout en s'assurant que les universités auront les capacités, notamment humaines et financières, pour les mettre en œuvre.
Voyez : quand vous lisez votre papier, c'est beaucoup plus clair, on comprend mieux.
L'amendement n° 63 de M. le rapporteur est défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Avis favorable à cette modification du dispositif instituant une forme de contrôle par les ARS et les CTS de l'adéquation entre les objectifs de formation et les capacités d'accueil.
Je rappelle que les universités ne peuvent d'ores et déjà pas déterminer leurs objectifs sans l'avis conforme de l'ARS – que les amendements précédents visaient à supprimer. L'ARS peut demander une réévaluation si ces objectifs ne sont pas en adéquation avec les besoins du territoire et les capacités de formation en stage et hors stage. Il s'agit donc d'une double assurance que les besoins du territoire seront bien pris en compte dans la détermination des capacités d'accueil des universités. La nouvelle rédaction que vous proposez me semble néanmoins plus adaptée que la version adoptée en commission des affaires sociales.
J'entends le message que vous souhaitez faire passer en faveur d'un renforcement du dialogue entre l'ensemble des parties prenantes. L'objectif commun est de former davantage de professionnels, c'est aussi celui du Gouvernement – j'ai eu l'occasion de le dire dans mon propos liminaire. Je souligne néanmoins que la mise en œuvre du dispositif nécessitera d'importants travaux de concertation avec l'ensemble des acteurs.
Comme l'adoption de ces amendements ferait tomber le mien, je souhaiterais dire quelques mots sur ce dernier.
Je crains, madame la ministre déléguée, que l'argument des capacités d'accueil ne vise à cacher un déficit de volonté politique et un manque de moyens pour les universités – général dans notre pays : les universités rencontrent des difficultés à faire face aux besoins de formation dans bien des filières, y compris en médecine. En conséquence, nous souhaiterions qu'il soit clairement inscrit dans le texte que l'État a la responsabilité de pourvoir aux besoins de formation constatés par les universités, les CTS concernés et l'ARS.
Vous êtes de ceux qui ont un avis, pas de ceux qui pensent – sinon, cela se saurait !
…qu'il faut conserver au sein de l'État des structures de pilotage des politiques de santé, mais sous la responsabilité des préfets et dirigées par eux. Les ARS sont un très mauvais outil pour travailler en coopération, notamment avec les élus.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Benoit Mournet applaudit aussi.
Il serait grand temps de remettre le système de santé sous la responsabilité des préfets et de les faire travailler en liaison avec les territoires. Il a été démontré que le couple préfet-maire était efficace. Les directeurs d'ARS qui se prennent pour des préfets de santé, ras-le-bol !
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, HOR et LIOT. – M. Benoit Mournet applaudit aussi.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 107
Nombre de suffrages exprimés 89
Majorité absolue 45
Pour l'adoption 88
Contre 1
L'article 1er , amendé, est adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je salue l'initiative du groupe Les Républicains de déposer une proposition de loi qui, sans être – vous me l'accorderez – révolutionnaire, est utile dans la mesure où il s'agit d'ajuster la formation des médecins aux besoins de santé des territoires.
L'article 2 crée une filière permettant aux Français qui se sont expatriés pour leur formation de revenir. Pourquoi, chers collègues Républicains, ne pas aller jusqu'au bout de votre intuition et faire le lien avec le débat que nous avons eu aujourd'hui et que nous aurons à nouveau la semaine prochaine ? Ouvrons plus largement la porte et ne nous privons pas d'intégrer des talents étrangers, que ce soit en ville ou à l'hôpital !
D'autre part, l'alinéa 3 de l'article, ajouté en commission, ne me semble pas inintéressant. J'y vois un premier pas vers un peu de régulation.
Applaudissements sur certains bancs du groupe RE.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : la première, sur l'amendement n° 36 , par le groupe Rassemblement national ; la seconde, sur l'article 2, par le groupe Les Républicains.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, n° 49 et 58 .
La parole est à M. Frédéric Valletoux, pour soutenir l'amendement n° 49 .
L'article 2 précise les conditions et les modalités d'accès à la formation de médecine des étudiants français inscrits dans les mêmes filières dans les pays de l'Union européenne. Je l'ai dit dans la discussion générale : il s'agit d'une réponse utile à l'enjeu de la démographie médicale.
Néanmoins, à la différence de mon collègue Mournet, je pense que l'alinéa 3 pose deux problèmes. D'abord, il introduit une rupture d'égalité entre étudiants français, selon le pays dans lequel ils ont effectué leurs études. Ensuite, il y est fait référence à des régions dépourvues de CHU ; or, dans notre pays, toutes les régions disposent d'au moins un CHU. La rédaction me semble donc inappropriée.
Pour ces raisons, je propose la suppression de l'alinéa 3.
L'amendement n° 58 de M. le rapporteur est défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Avis favorable à la suppression de cet alinéa qui avait été introduit par la commission. D'une part, comme l'a souligné M. Valletoux, il introduit une rupture d'égalité entre étudiants français, certains étant astreints à une obligation, d'autres pas. D'autre part, le Gouvernement est par principe opposé à tout régime d'obligation.
Les amendements identiques n° 60 de M. le rapporteur et n° 64 de M. Frédéric Valletoux sont défendus.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 107
Nombre de suffrages exprimés 65
Majorité absolue 33
Pour l'adoption 62
Contre 3
L'article 2, amendé, est adopté.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : la première, sur l'amendement n° 33 , par le groupe Rassemblement national ; la seconde, sur l'article 3, par le groupe Les Républicains.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous en venons à l'amendement n° 38 portant article additionnel après l'article 2.
Sur cet amendement, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l'amendement.
Je vous ai interrogé à ce sujet en commission, monsieur le rapporteur. Toutes les études le prouvent, les jeunes qui s'engagent dans les études de santé, en particulier de médecine, ont souvent les mêmes profils : très urbains et issus des catégories socioprofessionnelles supérieures (CSP+). Nous manquons de tels profils dans les zones rurales et périphériques. Pour remédier à ce problème de reproduction sociale, nous proposons une idée très simple : que les territoires dépourvus de centre hospitalier universitaire (CHU) puissent être dotés d'un institut universitaire de santé (IUS), comme il en existe dans les outre-mer et en Corse, où ils fonctionnent plutôt bien.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Nous avons effectivement beaucoup discuté de ce sujet en commission. Je vous ai dit que j'avais moi-même contribué à la création d'instituts de formation en santé. L'idée de créer des IUS est intéressante, mais présente plusieurs limites : d'une part, les formations préparant aux études médicales existent déjà ; d'autre part, il est assez complexe d'orienter les étudiants vers des études médicales sélectives et longues. Nous pourrions travailler sur cette proposition. La commission a émis un avis défavorable. À titre personnel, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
Vous proposez l'ouverture d'IUS après recensement des besoins locaux en soins et en formation médicale. Dans l'enseignement scolaire, des formations instituées dans les lycées offrent d'ores et déjà une orientation vers le secteur sanitaire et social. Dans ces parcours, des stages en milieu professionnel peuvent être réalisés, qui permettent de découvrir pleinement le secteur professionnel envisagé. En complément, la réforme de l'accès aux études de santé a ouvert deux voies d'accès, dont la licence accès santé (LAS), qui permet aux étudiants de suivre une formation en santé dans une université proche de chez eux sans que celle-ci comprenne nécessairement une unité de formation et de recherche (UFR) de santé.
De plus, des antennes universitaires peuvent d'ores et déjà être créées, sans l'intervention d'une loi, ce qui permet un maillage territorial. L'universitarisation est un objectif que nous partageons. Mme Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, et moi-même souhaitons la développer. Ce nouveau maillage territorial de l'offre de formation contribue à la diversification des profils des étudiants et à une meilleure adaptation aux besoins de santé des territoires. Je suis donc défavorable à votre amendement.
Madame la ministre déléguée, j'appelle votre attention sur le fait que de nombreux étudiants qui se forment dans les villes universitaires rencontrent des problèmes de remboursement de leurs frais de déplacement lorsqu'ils effectuent un stage dans une zone rurale. Certains ne sont pas indemnisés ; d'autres le sont faiblement. La doctrine varie d'une région à l'autre, voire d'un institut de formation à l'autre, ce qui crée des inégalités importantes en matière d'accès à la formation, notamment en milieu rural. Selon moi, le ministère devrait réfléchir à une politique plus générale s'agissant du remboursement des frais kilométriques.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 114
Nombre de suffrages exprimés 113
Majorité absolue 57
Pour l'adoption 43
Contre 70
L'amendement n° 38 n'est pas adopté.
Sur l'amendement n° 43 , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l'amendement n° 33 .
C'est un amendement rédactionnel, qui vise à remplacer « reconversions » par « transitions » dans l'alinéa relatif aux reconversions des professions paramédicales vers la profession de médecin. Le terme « reconversion » implique une forme de rupture ; le terme « transition » me paraît plus adapté, car il renvoie à l'idée de passerelle.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.
Pour ma part, je préfère le terme « passerelle » aux termes « transition » et « reconversion ». J'émets donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas du tout rédactionnel, et j'y suis défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 100
Nombre de suffrages exprimés 97
Majorité absolue 49
Pour l'adoption 25
Contre 72
L'amendement n° 33 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 112
Nombre de suffrages exprimés 74
Majorité absolue 38
Pour l'adoption 74
Contre 0
L'article 3 est adopté.
Mme Émilie Bonnivard applaudit.
Sur l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous en venons à des amendements portant article additionnel après l'article 3.
La parole est à M. Thierry Frappé, pour soutenir l'amendement n° 43 .
Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport établissant clairement les besoins en médecins, aussi bien dans les hôpitaux qu'en exercice libéral. En dix ans, le nombre de médecins généralistes exerçant exclusivement en cabinet a chuté de 11 % : il était de 57 033 au 1er janvier 2022, contre 64 142 en 2012. Il convient donc d'analyser les besoins de façon précise, afin d'améliorer notre vision d'ensemble de la situation des médecins.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.
Vous souhaitez la remise d'un rapport relatif à la prise en charge spécifique des zones rurales et des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). La commission a émis un avis défavorable. À titre personnel, j'émets un avis favorable.
Vous souhaitez que le Gouvernement remette au Parlement un rapport portant sur les besoins en médecins hospitaliers et libéraux sur le territoire national. Les principaux besoins que vous souhaitez voir apparaître dans le rapport sont déjà étudiés dans différentes publications. Le nombre de médecins hospitaliers et libéraux est suivi par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) du ministère de la santé et de la prévention, par la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) et par l'Insee, ainsi que par les ordres concernés, notamment l'Ordre des médecins, qui réalisent des atlas démographiques. La Cour des comptes a produit plusieurs rapports sur les besoins du système de santé en ressources humaines, sur les médecins libéraux et sur l'accès aux soins de premier recours. En mars 2021, la Drees a publié un rapport intitulé « Quelle démographie récente et à venir pour les professions médicales et pharmaceutiques ? Constat et projections démographiques ». Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à votre amendement.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 106
Nombre de suffrages exprimés 102
Majorité absolue 52
Pour l'adoption 29
Contre 73
L'amendement n° 43 n'est pas adopté.
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l'amendement n° 51 .
Cet amendement issu du groupe de travail transpartisan sur les déserts médicaux vise à appeler l'attention du Gouvernement et du Parlement sur le levier essentiel que constitue, pour les étudiants en médecine, pharmacie, odontologie et maïeutique, l'accès géographique à la formation. Nous demandons la remise d'un rapport à ce sujet.
Les travaux de recherche relatifs à l'installation des professionnels de santé, notamment ceux de la Drees, montrent que l'attachement au territoire est le facteur le plus déterminant en la matière. Il existe une forte correspondance géographique entre la répartition des médecins sur le territoire français et celle des facultés de médecine et des CHU. Par ailleurs, la distance entre le lieu d'origine et le lieu de formation reste un frein pour de nombreux jeunes qui n'ont pas les moyens d'aller étudier loin de chez eux ou dans une grande ville.
Un tel rapport permettrait de poursuivre, de la manière la plus transpartisane possible, le travail sur les déserts médicaux. La commission a émis un avis défavorable. À titre personnel, j'émets un avis favorable.
M. Arthur Delaporte applaudit.
Non, mon avis est défavorable.
Ces données sont d'ores et déjà disponibles en libre accès sur le site de la Drees. En revanche, il est plus difficile de faire automatiquement le lien entre les informations concernant la formation et la réalité de l'installation des médecins dans une zone sous-dense. Les ARS publient sur leur site internet l'ensemble des arrêtés régionaux déterminant ces zones ainsi que les cartographies associées.
Par ailleurs, je l'ai dit précédemment, l'Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS) réalise un rapport dans le cadre du suivi annuel et de la fixation des objectifs nationaux pluriannuels de professionnels de santé à former. Ce rapport comprend des données relatives aux besoins de santé des territoires, aux capacités de formation et à l'installation des nouveaux professionnels de santé par rapport à leur dernier lieu de formation.
Votre réponse concerne les données statistiques, madame la ministre déléguée, mais nous demandons que le rapport aille au-delà en formulant des propositions visant à garantir l'équité territoriale de l'offre de formation en santé.
Monsieur Peytavie, nous voterons en faveur de cet amendement, car il est de bon sens. Toutefois, je l'ai dit plusieurs fois à Guillaume Garot, le groupe de travail sur les déserts médicaux n'est pas transpartisan.
Pour qu'il le soit, il faudrait qu'y participent l'ensemble des groupes politiques composant cette assemblée, ce qui n'est pas le cas. En revanche, le groupe de travail sur l'accès aux soins est vraiment transpartisan, puisqu'il inclut des députés du groupe Rassemblement national.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
L'amendement n° 51 est adopté.
M. Arthur Delaporte applaudit.
Il vise à ce que le Gouvernement remette un rapport sur le déroulement de l'internat de médecine. Cela correspond à une demande exprimée par les syndicats d'internes. Toutefois, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels a discuté hier soir jusque tard dans la nuit et a achevé ses travaux ce matin de manière conclusive. Le texte qu'elle propose inclut cette demande de rapport. C'est pourquoi je retire l'amendement.
L'amendement n° 59 est retiré.
L'article 4 est adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je l'ai dit au cours de la discussion générale, nous nous abstiendrons sur ce texte. L'intention est louable, et il est certain que nous manquons de médecins. Néanmoins, en matière de formations en santé, les mesures prises ont un effet dans le temps long ; la réforme du numerus clausus portera ses fruits à la fin de la décennie 2020. On ne peut pas adopter des textes à ce sujet tous les six mois ! En le faisant, on donne l'impression à nos concitoyens que la réponse sera rapide.
D'autre part, je vous invite à réfléchir plus avant. Il y a en réalité une corrélation très faible entre l'offre de formation sur un territoire donné et l'exercice des professionnels de santé formés sur ce même territoire. En effet, dans les facultés de médecine, beaucoup d'étudiants sont originaires de territoires autres que celui où la faculté est implantée.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et RE.
Dans cet hémicycle, nous abordons de manière récurrente l'accès aux soins, premier sujet de préoccupation de nos concitoyens, compte tenu des difficultés croissantes en la matière et de la désertification médicale. La majorité relative présidentielle…
…nous rétorque que jamais autant de choses n'ont été faites. Pourtant, le quotidien de nos concitoyens dément cette assertion, psalmodiée séance après séance.
Nos collègues du groupe Les Républicains ont décidé de s'emparer du sujet, dans le cadre contraint d'une proposition de loi. Les mesures qui y figurent demeurent timides, mais, vous l'avez constaté à nos votes, nous considérons que les avancées proposées vont dans le bon sens. En réalité, nos collègues restent en quelque sorte au milieu du gué, car ils n'ont pas l'audace de traiter la question de la régulation, que vous balayez systématiquement d'un revers de la main, madame la ministre déléguée.
Nous soutiendrons le texte mais, nous l'avons dit à plusieurs reprises, nous regrettons ses béances, qui auraient pu être comblées par les propositions du groupe transpartisan – en tout cas de ceux qui ont décidé de travailler ensemble, car souffrez qu'on puisse décider de travailler avec qui on en a envie : les parlementaires gardent tout de même cette latitude ! Ce groupe transpartisan, animé par Guillaume Garot, continuera à faire des propositions qui ne figurent pas dans ce texte : la facilitation de l'exercice des professionnels extra-communautaires, les fameux praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), dont nous avons besoin pour faire tourner l'hôpital public, au moment où d'autres propositions relatives à l'immigration stigmatisent les étrangers ;
Exclamations sur les bancs du groupe LR
le pilotage des politiques territoriales de santé par un indicateur territorial de l'offre de santé ; l'augmentation du nombre de places en faculté de médecine ; l'ouverture sociale et géographique dans ces facultés ; le rétablissement, évidemment, de l'obligation de la permanence des soins. Nous continuerons à nous battre pour ces propositions. En attendant, je le répète, nous soutiendrons ce texte.
Je salue l'initiative du rapporteur : la crise du système est telle qu'on a besoin de toutes les bonnes volontés et de toutes les bonnes idées. Certaines idées, comme la régulation, peuvent paraître faciles ; mais si les solutions étaient simples, cela se saurait et notre système de santé n'en serait pas là.
Mme Christelle Petex-Levet applaudit.
Exactement !
Le sujet est donc complexe et nécessite qu'on l'attaque par tous les bouts, si je puis dire. L'enjeu de la formation, le lien entre les capacités de formation et les besoins de médecins dans les territoires, sont des points qui sont plutôt bien traités par la proposition de loi. Pour les raisons déjà évoquées, notamment la volonté de faire revenir des étudiants qui ont dû quitter le pays pour aller apprendre la médecine ailleurs, ou encore d'explorer des voies nouvelles, le groupe Horizons et apparentés soutiendra le texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.
Le groupe Renaissance ne soutiendra pas la proposition de loi : il s'abstiendra.
Pourquoi ? Parce que nous considérons qu'elle ne comporte aucune véritable avancée et se borne à des incantations.
Certes, l'article 1er permet de tenir compte des réalités du territoire, mais qu'avez-vous fait pour supprimer le numerus clausus quand vous étiez aux affaires ? Les socialistes eux-mêmes l'ont augmenté ! C'est la droite qui l'a créé ! Depuis 1971, vous avez limité le nombre de médecins…
…et nous en payons maintenant les conséquences, puisque pour former un médecin, il faut au moins neuf ans. Nous estimons qu'une grande avancée a été accomplie en 2019.
En attendant, 150 000 patients ont accès à des consultations. En 2026, avec la quatrième année d'internat en médecine générale,…
…ce sont plus de 3 500 docteurs juniors qui iront dans les territoires qui en ont le plus besoin.
…tout en ayant conscience que c'est insuffisant. Nous entendons, dans nos permanences, ce que nous disent les patients et nous savons que nous devons continuer à évoluer. La meilleure façon d'améliorer le système de santé consiste désormais à veiller à la formation des médecins et à celle de toutes les professions médicales. Nous avons en effet beaucoup de retard,…
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.
La France est devenue ce pays où il est plus facile de trouver une aiguille dans une botte de foin qu'une plaque de médecin. Nous sommes d'accord pour considérer que les solutions ici proposées ne vont pas assez loin. Nous savons que la présente proposition de loi ne réglera pas le problème du manque de médecins dès demain, surtout quand on sait que la situation actuelle est le fruit des erreurs du passé, commises par des gouvernements qui se sont succédé pendant plus de trente ans.
Je remercie néanmoins M. Neuder pour avoir présenté ce texte si important pour les Français. Nous saluons les quelques améliorations qu'il apporte. Nous devons être conscients de la gravité de la situation. Les Français se moquent des rivalités partisanes : ils veulent pouvoir aller chez le médecin pour se faire soigner sans devoir attendre des mois et sans devoir parcourir de grandes distances.
Que nous soyons de droite, de gauche ou du centre, nous sommes tous concernés. Le groupe d'études sur les déserts médicaux et l'accès aux soins le montre bien, puisqu'il est composé de plus de 120 députés. Vous l'aurez compris, le groupe Rassemblement national votera le texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe LR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 117
Nombre de suffrages exprimés 68
Majorité absolue 35
Pour l'adoption 68
Contre 0
La proposition de loi est adoptée.
Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe LR, dont plusieurs députés se lèvent.
Je tiens à tous vous remercier pour le travail réalisé en commission et lors des auditions. Je remercie également les administrateurs pour leur collaboration. On peut certes toujours voir le verre à moitié vide plutôt que le verre à moitié plein, mais ce sont des centaines d'étudiants en médecine qui nous regardent ce soir et qui constateront l'augmentation du numerus apertus. Les capacités des universités, définies par les territoires – nous remettons les acteurs locaux au centre des décisions –, s'en trouveront accrues. Cela permettra également à nos étudiants partis à l'étranger de revenir en France pour finir leurs études de médecine. Des milliers de familles nous regardent.
Enfin, ce texte est un message d'espoir pour tous les soignants qui veulent reprendre leurs études de médecine ; nous saurons les accompagner et les encourager.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR dont plusieurs députés se lèvent.
L'ordre du jour appelle la discussion, en application de l'article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution de M. Patrick Hetzel et plusieurs de ses collègues visant à rendre effectifs les soins palliatifs sur tout le territoire national (n° 1782).
Le constat est désormais unanime : il y a une nécessité absolue de développer les soins palliatifs en France. Les rapports se succèdent et arrivent à des conclusions similaires.
La loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite loi Claeys-Leonetti, a confirmé l'importance du droit aux soins palliatifs. C'est même considéré comme une priorité de santé publique. Pourtant, une fois encore, le constat est sévère : « Malgré la mise en œuvre de trois plans triennaux consacrés à développer les soins palliatifs, 80 % des personnes malades n'y ont toujours pas accès. » Des disparités importantes ont été signalées : cinq des vingt-six régions concentrent les deux tiers des unités de soins palliatifs (USP). A également été soulignée la disparité des taux d'équipement en lits des USP. Des parlementaires s'étaient déjà interrogés, lors de l'examen de ce projet de loi, sur le fait que la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, la loi Leonetti, prévoyant un meilleur déploiement des soins palliatifs, n'était pas appliquée ; ils s'étaient demandé si le premier objectif ne devait pas être d'assurer effectivement un meilleur recours aux soins, une meilleure répartition sur le territoire et une formation plus complète des praticiens.
Peut-on accepter que vingt et un départements soient encore dépourvus de toute unité de soins palliatifs ? Peut-on accepter qu'en France, chaque année, plus de 150 000 personnes ne soient pas accompagnées comme elles le devraient aux termes de la loi, cela par manque d'accès aux soins palliatifs ?
Pourtant, le code de la santé publique indique clairement qu'il s'agit d'un droit : « Toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. » Aussi vous demandons-nous, chers collègues, de bien vouloir adopter cette proposition de résolution qui vise à rendre enfin effectif ce droit aux soins palliatifs sur tout le territoire national, comme le prévoit la loi du 2 février 2016.
Le groupe LR espère que cette proposition de résolution, qui nous paraît consensuelle, fera dans quelques instants l'unanimité.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RE. – M. Dominique Potier applaudit aussi.
…elle va au moins nous permettre de débattre d'un sujet de société majeur qui intéresse et préoccupe un nombre considérable de nos compatriotes, je le mesure chaque jour : l'accompagnement de la fin de vie, dans lequel les soins palliatifs jouent évidemment un rôle crucial.
Votre texte est un texte d'affichage – et si j'étais taquin, je vous dirais que vous avez été beaucoup plus prolixe quand il s'agissait de faire de l'obstruction parlementaire.
Nous pourrons cependant nous accorder sur l'objectif, chers collègues, s'il s'agit d'encourager le développement des soins palliatifs sur l'ensemble du territoire national. Je suis comme vous un fervent défenseur des soins palliatifs, et je tiens à saluer le professionnalisme, le dévouement et l'humanité des soignants en soins palliatifs, qui font un travail ô combien difficile et tout à fait admirable.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et LR. – Mme Michèle Peyron et M. Rémy Rebeyrotte applaudissent également.
Cette condition indispensable ne saurait pour autant régler à elle seule, hélas, les questions de fin de vie en France. D'abord, parce que les soins palliatifs, malgré leur grande qualité, ne peuvent pas répondre à toutes les situations de fin de vie. Ils sont la réponse primordiale, principale, à l'immense majorité des situations mais l'honnêteté impose de reconnaître qu'ils ont aussi leurs propres limites face à certaines douleurs réfractaires ou certaines maladies, notamment neurodégénératives.
Ensuite, le développement des soins palliatifs et l'effectivité de leur accès ne peuvent se traiter uniquement par des mesures financières. Bien sûr, il faut plus d'argent pour les soins palliatifs ; mais cela ne suffira pas et il faudra apporter en parallèle des réponses plus structurelles. Évitons d'ailleurs, mes chers collègues, un discours misérabiliste sur les soins palliatifs en France. En 2015, la France se situait dans la moyenne basse des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour son offre de soins palliatifs ; aujourd'hui, comme l'indique la Cour des comptes, elle se trouve dans la première moitié du classement et l'offre de soins palliatifs a augmenté de près de 30 % depuis cette date.
Cependant, le constat est insatisfaisant sur plusieurs aspects. Je ne développerai pas mon propos et vais conclure pour répondre au souhait général.
S'il s'agit pour vous, monsieur le rapporteur, d'affirmer que les soins palliatifs sont la solution unique pour faire face à toutes les situations de fin de vie, je ne pourrai pas vous suivre dans cette réponse trop simpliste à un problème si complexe.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Dem. – M. Rémy Rebeyrotte applaudit également.
En revanche, s'il s'agit d'œuvrer pour développer massivement les soins palliatifs et garantir leur accès dans les meilleures conditions,…
…alors oui, nous serons en phase pour avancer ensemble dans l'intérêt des malades et de leurs proches.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs des groupes RE et LR.
Le 7 octobre dernier se tenait la Journée mondiale des soins palliatifs. Il est un peu triste – mais hélas lucide – de nous réunir deux mois plus tard dans l'hémicycle pour examiner une proposition de résolution qui ne vise qu'à une chose : qu'on respecte la loi que nos prédécesseurs ont votée il y a maintenant sept ans, s'inscrivant eux-mêmes dans la filiation de la loi du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs. Le soulagement de la souffrance est un principe primordial de la médecine. Il s'agit, comme pour tous les autres soins, d'y assurer un accès équitable sur tout le territoire, à tous nos concitoyens et à leurs familles, quelles que soient leurs pathologies. Or nous ne pouvons nous satisfaire de la situation mi-chèvre mi-chou dans laquelle nous nous trouvons.
Ainsi, en 2021, vingt et un départements restaient dépourvus d'unités de soins palliatifs : le Gers, la Creuse, la Guyane, la Meuse, la Mayenne et j'en passe. Le fait qu'on ne respecte pas la loi est insupportable pour tous les républicains que nous sommes. Ce n'est pas acceptable et nous devons réagir. C'est d'ailleurs ce que la commission des affaires sociales a constaté dans un rapport d'évaluation rédigé sous la responsabilité d'Olivier Falorni et qu'il n'a pas eu le temps de mentionner, rapport qui pointe l'ampleur et l'importance de ces disparités territoriales.
Afin de permettre à l'examen du texte d'aller à son terme, je ne serai pas trop long et concentrerai mon propos sur une dimension de l'accès aux soins palliatifs trop souvent négligée : celle des Ehpad – vous ne serez pas surpris de m'entendre les mentionner. L'Ehpad est le dernier lieu de vie pour un quart des personnes décédées en France. Ainsi, 150 000 résidents d'Ehpad décèdent chaque année, dont les trois quarts au sein de l'établissement lui-même.
Il est donc indispensable que ces établissements intègrent la culture du soin palliatif, dans leurs moyens comme dans leur organisation. La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) souligne que près d'un quart des établissements n'ont pas signé de convention avec une équipe mobile de soins palliatifs (EMSP). Les interventions des EMSP dans les Ehpad restent extrêmement limitées : elles représentent à peine 8 % de leurs interventions, et concernent seulement 6 400 résidents d'Ephad.
Certes, toutes les personnes décédant en Ehpad n'ont pas besoin de soins palliatifs. Toutefois, le sujet doit être examiné de plus près. J'espère, madame la ministre déléguée, qu'il figurera dans la stratégie nationale de soins palliatifs à venir.
Ne nous voilons pas la face : si nous en sommes là, c'est assurément parce que les moyens, dont on vous parle – ou dont on essaye de vous parler – à l'occasion de chaque PLFSS, ne suivent pas, et ne permettent pas un déploiement suffisant des soins palliatifs. Comme notre collègue Olivier Falorni, je veux rendre hommage à l'ensemble des professionnels qui attendent cette reconnaissance.
Plus généralement, à travers la question des soins palliatifs, c'est celle de la place de la mort dans notre société qui se pose. Nous, législateur, avons l'habitude d'éviter le mot de « mort » : il ne figure ni dans la loi Leonetti, ni dans la loi Claeys-Leonetti, où c'est le mot « décès » – plus médical et plus juridique – qui apparaît. Si nous évitons parfois les mots, nous ne pourrons esquiver le débat – ô combien nécessaire – sur la place de la mort dans notre société.
Enfin, exiger l'effectivité de la loi Claeys-Leonetti, comme nous le faisons aujourd'hui, ne doit pas nous empêcher de la réformer, dans un avenir que je souhaite le plus proche possible.
MM. Olivier Falorni et Sébastien Peytavie applaudissent.
Vivre plus longtemps, oui, mais dans quelles conditions ? La fin de vie et l'accompagnement des patients constituent un défi pour notre société, déjà aux prises avec le problème du « mal mourir ». Les soins palliatifs sont essentiels pour atténuer la douleur physique et psychique, pour accompagner les patients en préservant leur qualité de vie et pour les reconnaître jusqu'au bout en tant qu'êtres vivants et désirants. Le groupe Horizons et apparentés affirme son attachement à la question de la prise en charge de la fin de vie, et rappelle que le contrôle de l'application des lois est une des prérogatives du Parlement.
À ce titre, nous, parlementaires, devons faire le bilan du développement des soins palliatifs en France dans le cadre de la loi Claeys-Leonetti. Ce texte a ainsi fait l'objet d'une mission d'évaluation, dont le rapport a été examiné le 29 mars dernier en commission des affaires sociales.
Indéniablement, une disparité territoriale d'accès persiste. Cependant, comme le rappelle le rapport de la Cour des comptes Les soins palliatifs : une offre de soins à renforcer, publié en juillet dernier, les progrès en la matière ont été fulgurants, et ont permis à la France de rattraper son retard par rapport à ses voisins européens. Ainsi, l'offre de soins palliatifs a augmenté de 30 % depuis 2015, et les financements de 25 % depuis 2017.
Je ne développerai pas les efforts qui restent à faire – malgré une politique publique très volontariste –, afin de permettre l'achèvement de l'examen de ce texte. Le groupe Horizons sera attentif à ce que la prochaine stratégie décennale 2024-2034 de développement des soins palliatifs, ainsi que l'éventuel projet de loi sur la fin de vie, puissent répondre aux problèmes soulevés, en particulier quant au financement et à l'articulation administrative des politiques déployées.
Nous veillerons également à la bonne application de la stratégie nationale de santé 2023-2033, et plus particulièrement à son volet dédié au développement du parcours de soins. Cette stratégie prévoit de renforcer les organisations chargées de déployer les soins palliatifs dans tous les lieux de vie et de soins, et d'améliorer l'accompagnement de la fin de vie. Cet accompagnement de la fin de vie requiert de prendre en compte les besoins des familles, des proches, des aidants, et de les soutenir, en particulier lorsque les personnes sont soignées à domicile.
Bien qu'indissociables de la fin de vie, les soins palliatifs ne devront pas être l'unique objet du projet de loi annoncé sur ce thème, dont les contours devront être plus larges. Je salue, madame la ministre, votre méthode et votre engagement à ce sujet.
La prévention, ne l'oublions pas, est inévitable s'agissant des soins palliatifs. C'est un droit, qui doit être garanti. Pour toutes ces raisons, le groupe Horizons et apparentés votera cette proposition de résolution.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
« Toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement », dispose la loi du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs. Force est de constater qu'aujourd'hui, ce droit à l'accompagnement n'est pas garanti à nos concitoyens. Je substitue le terme « accompagnement » à celui de « palliatif », car si le second s'intéresse à un traitement par défaut, le premier saisit l'essence de la loi : soulager la souffrance, sauvegarder la dignité et soutenir les proches. Il s'agit bien, en somme, de préserver la qualité de vie des patients et de leurs familles.
En 2007, la Cour des comptes dénonçait la lenteur des mesures d'accompagnement palliatives, conclusion reprise par de nombreux autres rapports jusqu'à aujourd'hui. Après pas moins de six lois et cinq plans nationaux, faisons en sorte que le droit prévu par la loi devienne enfin réalité.
À ce jour, bien que garanti par la loi, il n'est pas effectif : 80 % des personnes éligibles aux soins d'accompagnement n'y ont pas accès. Le nombre de lits disponibles est si faible qu'intégrer un service d'accompagnement est perçu comme une chance au sein d'une vaste loterie. Ainsi, 20 % des départements ne disposent aujourd'hui d'aucune unité de soins palliatifs.
Lutter en faveur de l'instauration de soins d'accompagnement, c'est aussi lutter contre les déserts médicaux : 10 millions de Français vivent actuellement dans une zone où l'accès aux soins est de qualité inférieure à la moyenne nationale ; tout aussi nombreux sont ceux qui vivent à plus de trente minutes d'un service d'urgences.
Ces difficultés s'inscrivent dans un contexte plus large. Notre système de santé va mal, avec un personnel soignant épuisé, un manque de lits et des urgences saturées. C'est le résultat de choix politiques austéritaires de long terme, qui cherchent à limiter les dépenses publiques de santé alors que la population vieillit.
Les soins d'accompagnement sont des dispositifs indispensables pour assister dignement les Français dans les épreuves qu'ils traversent. Nous ne pouvons pas leur demander de traverser le pays pour accompagner le traitement d'un proche, ni leur refuser une prise en charge qui permettrait de soulager des souffrances insupportables. C'est pourquoi nous voterons cette proposition de résolution, complément nécessaire à l'aide active à mourir.
En 2015, 85 % des Françaises et des Français se déclaraient favorables à l'aide active à mourir ; ils sont désormais 94 %. Si les soins d'accompagnement correspondent à une période particulière du parcours de vie, le sujet de la fin de vie ne doit pas être mis sous le tapis. Cette question doit être débattue dans cet hémicycle, sans obstruction ni posture partisane.
M. Maxime Minot applaudit.
Je fais ici appel à votre courage, afin que nous puissions poursuivre le travail à l'occasion de l'examen du projet de loi prévu dans les prochains mois.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem, SOC et GDR – NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.
Le 26 novembre 2004, l'un de mes prédécesseurs, Michel Vaxès, monte à la tribune et déclare : « Sitôt le texte adopté, ce que je souhaite, il restera au Gouvernement à mettre très rapidement en œuvre nos recommandations… ». Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées, Catherine Vautrin, est au banc et répond : « Bien sûr ! ». M. Michel Vaxès poursuit : « …en dégageant les moyens matériels nécessaires et en actualisant les formations. La bonne application de la proposition de loi en dépend. »
Le 19 novembre 2009, Michel Vaxès se trouve de nouveau à la tribune : « L'urgence, pour nous, est d'obtenir que l'État leur donne les moyens de s'exprimer pleinement et partout. C'est loin d'être le cas. C'est pourtant à cette exigence qu'il faut impérativement répondre. »
On pourrait multiplier les citations et les rappels à l'ordre. À chaque fois, nous sommes regardés avec un air de profonde compréhension, et puis plus rien. Si bien que nous en sommes toujours au point de la proposition de résolution.
Les soins palliatifs savent soulager la souffrance ; ils accompagnent la maladie grave que l'on ne peut guérir. Ils constituent un droit, qu'il est particulièrement indécent de ne pas honorer, parce qu'il manifeste la présence indéfectible de la société et, partant, de la communauté humaine aux côtés de celles et ceux qui souffrent.
Selon les chiffres de la Cour des comptes, en 2023, 150 000 personnes pouvant prétendre à des soins palliatifs en sont privées. On comprend, dans ce contexte, que puissent grandir d'autres façons d'aborder la fin de vie que celle en vigueur dans notre pays.
Alors même que le Gouvernement s'apprêterait à soumettre au Parlement un projet de loi sur la fin de vie, il n'y a pas eu d'évaluation récente sur l'effectivité des plans nationaux en la matière depuis 2019.
Cette situation particulière aux soins palliatifs n'est pas sans lien avec la crise de l'hôpital public, alors même qu'augmente le nombre de décès à domicile et en Ehpad et qu'est invoqué un « virage domiciliaire ».
Ce serait une grave méprise de considérer que les soins palliatifs sont une zone hors du soin et de la santé publique, qu'on pourrait traiter sans les personnels soignants. Enfin, il ne faudrait pas que l'adoption de cette résolution permette au Gouvernement de s'exonérer d'engagements chiffrés et précis, à la hauteur des besoins.
Le 8 décembre 2023, je suis monté à cette tribune pour le redire avec une certaine colère.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR – NUPES et SOC.
Le constat, je crois, est partagé : il est nécessaire de développer les soins palliatifs dans notre pays. Les divers travaux et rapports se succèdent, aboutissant à des conclusions similaires : nous sommes en retard, d'une façon importante, ce qui n'est pas acceptable au regard des enjeux. Il s'agit d'améliorer l'existence de personnes en fin de vie, qui se trouvent en phase avancée ou terminale d'une maladie grave et incurable, en prévenant et en soulageant leurs souffrances, qu'elles soient physiques ou psychiques, et ce quel que soit le lieu de vie ou de soins.
Ce sujet essentiel requiert toute notre attention. L'accès aux soins palliatifs demeure très insuffisant. Les lois qui se sont succédé et les moyens mis en œuvre n'ont pas permis de rattraper notre retard ni de résorber les inégalités territoriales.
Quant à la prise en charge extrahospitalière, elle demeure le parent pauvre et reste à construire. Nous insistons sur la nécessité d'investir fortement dans les soins palliatifs, pour permettre un accès égal à toutes et à tous sur le territoire national, que ce soit à l'hôpital, à domicile ou dans les Ehpad.
Un travail important est également à réaliser dans nos facultés de médecine. Aussi incroyable que cela puisse paraître, les services de soins palliatifs n'existent pas partout : vingt et un départements en sont toujours dépourvus. Nous devons corriger cela rapidement.
La culture palliative au sein du corps médical est aussi, sans doute, largement sous-développée dans notre pays.
Nous devons favoriser, avant toute autre mesure, son enseignement dans les écoles et les facultés, et améliorer l'attractivité de cette spécialité. Il y aurait beaucoup à dire, mais vous l'avez compris, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutient cette proposition de résolution.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Je salue cette proposition de résolution du groupe Les Républicains, qui va dans le sens d'un meilleur développement des soins palliatifs en France, tant dans les établissements sanitaires et médico-sociaux qu'à domicile.
Cette proposition s'articule pleinement avec l'une des principales préconisations identifiées par la mission d'évaluation de la loi Claeys-Leonetti, que j'ai eu l'honneur de mener avec mes collègues Olivier Falorni et Caroline Fiat. Garantir l'égal accès aux soins palliatifs pour tous et dans tous les territoires est un chapitre important de notre rapport.
Notre mission avait abouti à cette conclusion simple : si les malades ont le droit, selon cette loi, à « une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance », force est de constater l'inégal accès à ce droit selon l'endroit où l'on se trouve sur le territoire national.
Cette disparité géographique nous invite à agir résolument afin que l'offre de soins palliatifs soit à la hauteur du besoin légitime des malades. C'est tout le sens de la prochaine stratégie décennale 2024-2034 annoncée par le Gouvernement. Elle vise à renforcer la culture palliative de nos soignants, en créant une filière médicale dédiée ; à favoriser les relations interprofessionnelles entre médecine curative et médecine palliative, en instituant des soins d'accompagnement ; à créer dans chaque département qui n'en dispose pas une unité de soins palliatifs, comme le préconise cette proposition de résolution.
Concernant la deuxième partie de cette proposition de résolution, qui appelle à la création d'une équipe mobile de soins palliatifs par département, notons que cette demande est déjà en partie satisfaite, comme le montrent les chiffres fournis par le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie.
Il conviendrait toutefois, aussi bien pour les soins dispensés à domicile que pour ceux dispensés en Ehpad, de créer des consultations longues pour les médecins traitants et d'envisager des financements pour l'ergothérapie, la psychothérapie et la musicothérapie.
Le rapport d'information dont je suis l'un des auteurs aborde également la question du financement des soins palliatifs dans les établissements ; il propose une tarification mixte associant forfait et activité, ainsi qu'une traçabilité budgétaire dans les bilans des établissements de santé.
Pour toutes ces raisons, et parce qu'elle va dans le sens des engagements pris par la majorité et appelle à une meilleure reconnaissance du droit des patients pour une fin de vie digne, confortable et apaisée, ainsi qu'à la discussion d'un projet de loi que nous attendons tous, le groupe Renaissance est favorable à l'adoption de cette proposition de résolution.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, LR et Dem.
Quinze mois déjà se sont écoulés depuis la remise de l'avis du Comité consultatif national d'éthique (CCNE) et le lancement de la Convention citoyenne sur la fin de vie, et nous attendons toujours la présentation du projet de loi devant en découler. Le flou persiste, tant sur son contenu que sur la méthode retenue ou le calendrier. Des avant-projets sont évoqués dans la presse, certains annonçant une légalisation du suicide assisté, d'autres envisageant une exception d'euthanasie. Nous décelons un véritable malaise au sein de l'exécutif.
De la même manière, le lancement prochain d'un grand plan décennal sur les soins palliatifs est annoncé. Nous l'attendons avec le plus grand intérêt, mais nous n'en connaissons pas davantage les contours, ni le budget.
Rappelons que les soins palliatifs ne sont toujours pas accessibles à tous en France. Vingt départements ne sont pas pourvus d'unités de soins palliatifs, et sur les 300 000 patients qui en ont besoin chaque année, seuls 100 000 y ont accès. La loi n'a jamais été correctement appliquée ; surtout, un budget suffisant n'a jamais été alloué.
Les soins palliatifs sont pourtant la base de l'accompagnement, du traitement de la douleur et de la prise en compte systématique des familles. La moitié des patients atteints d'une maladie chronique qui voient approcher la fin de leur vie requièrent l'accès à une structure renforcée en moyens et en compétences. Les unités de soins palliatifs sont destinées à accueillir ces patients présentant des tableaux cliniques complexes : elles doivent couvrir les besoins de tous les Français. Seul un accompagnement précoce, commencé très en amont dans la progression d'une pathologie lourde, est à même d'apporter aux patients le réconfort nécessaire.
Oui, c'est ce que nous faisons !
Depuis 1999, la loi garantit que « toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement ». Cela signifie soulager la douleur, calmer les symptômes, assurer le confort, prendre en compte l'angoisse ou la dépression, assister la famille sur le chemin d'une finitude inéluctable. Il n'est point besoin de légiférer plus avant sur ce sujet : le cadre légal actuel est amplement suffisant. Il suffirait que la volonté politique et les moyens soient au rendez-vous.
Le défaut de soulagement génère encore à ce jour des situations inacceptables, et de nombreux malades meurent en souffrant de douleurs non calmées. Cela vient en partie d'habitudes médicales d'obstination déraisonnable et de traitements à la fois inefficaces, pénibles, difficiles et intenses, ce qui montre que la loi Leonetti de 2005 est insuffisamment appliquée.
C'est la persistance d'une douleur insupportable qui explique les demandes que cela s'arrête, ce qui n'induit d'ailleurs pas nécessairement une demande d'administration de la mort. La réponse attendue est l'instauration d'un traitement antalgique et sédatif efficace, dont l'absence peut alors conduire à une demande d'euthanasie.
Les soignants savent entendre cette détresse, cette peine et parfois – et seulement parfois – cette envie de mourir. Leur mission est de comprendre, de soulager, de rassurer, ce qui est un élément fondamental du soin.
On constate que peu d'actes euthanasiques sont réalisés à l'étranger chez les patients faisant l'objet d'un parcours authentique de soins palliatifs. De nombreux patients passent par des phases de demande d'euthanasie, surtout au début de leur maladie, mais suivant leur accompagnement, celles-ci disparaissent pour 90 % d'entre eux.
Le Gouvernement envisage désormais de légaliser une aide active à mourir, dans un contexte d'extrême fragilité de notre système de santé, et alors que l'urgence n'est assurément pas là. Une telle légalisation fragiliserait des équipes soignantes confrontées au quotidien à des situations complexes et conduirait à un glissement éthique majeur.
En réalité, il s'agit d'éviter l'écroulement des soins palliatifs, car leur avenir est bien sombre. Une enquête réalisée en 2020 indique qu'il manque actuellement 100 médecins dans ces services et qu'il devrait en manquer 300 de plus en 2025. Or sans médecins, c'est tout un service qui ferme.
Un autre point ne peut être occulté : la dimension économique. Comme nous avons pu le constater en Belgique et au Canada, l'introduction de l'euthanasie fait entrer les soins palliatifs dans une spirale négative. S'inscrivant dans une situation déjà dégradée, avec des moyens financiers et humains insuffisants, le recours croissant à l'euthanasie contribue à désemplir les lits d'hôpitaux en général et ceux des services de soins palliatifs en particulier, n'incitant donc pas les pouvoirs publics à y investir.
Il est faux de dire que l'euthanasie compléterait les soins palliatifs. Elle stoppe l'accompagnement du patient ; elle l'élimine. La légalisation de l'aide active à mourir repose sur une éthique d'autonomie, tandis que les soins palliatifs reposent sur une éthique de la vulnérabilité et de la solidarité collective.
Applaudissements sur les bancs du groupe RN, ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.
C'est par le silence que nous devons commencer. Au milieu des décorations joyeuses et des sourires dans les couloirs du service de soins palliatifs de Montpellier, le silence règne, un silence serein. C'est le silence de la douce attention d'une équipe de médecins, d'infirmières, d'aides-soignantes, de psychologues, d'aides sociales, de kinésithérapeutes, d'ergothérapeutes, de musicothérapeutes et de bien d'autres professionnels qui regardent les patients en fin de vie comme des vivants.
À ce silence bienveillant – bien vivant –, répond un lourd silence politique fatal : votre silence depuis 2017. Le service de soins palliatifs de Montpellier ne peut prendre en charge que seize patients : six peuvent être hospitalisés au sein de l'unité d'accompagnement et dix peuvent être suivis par l'unité mobile, ce qui implique des manques pour les territoires ruraux. Un projet de nouvelle unité, reporté à 2027 en raison de l'inflation, doit aboutir à un total de vingt-quatre patients suivis. L'Hérault demeurera donc en deçà des dix lits pour 100 000 habitants nécessaires pour couvrir l'ensemble des besoins.
Nous le savons, la liste des textes adoptés mais non appliqués dans notre pays est longue, trop longue. Ces textes sont le symptôme d'une démocratie qui va mal, au sein de laquelle les gouvernements agissent plus pour communiquer que pour les Français et où les jeux d'ombres sont plus fréquents que les actes sobres.
La loi de 2016 n'est pas appliquée et les services de soins palliatifs manquent cruellement – j'insiste sur ce mot – de moyens. Il est des secteurs de notre vie où la non-application de la loi crée un inconfort supportable ; s'agissant de la fin de vie, les gouvernements perdent littéralement la face.
Chaque année, environ 300 000 patients ont besoin de soins palliatifs, que ce soit à domicile, en Ehpad, à l'hôpital ou dans une unité dédiée. Pourtant, près des deux tiers de ces patients ne peuvent bénéficier de tels soins, faute d'une offre adaptée. Le rapport d'information de Caroline Fiat et Didier Martin sur l'évaluation de la loi de 2016 le dit : la principale difficulté ne concerne pas le cadre juridique instauré, mais les moyens mobilisés pour garantir l'effectivité des droits nouvellement créés.
C'est inacceptable ! Que vingt et un départements ruraux et d'outre-mer soient dépourvus d'unités de soins palliatifs, c'est inacceptable !
Si cette proposition de résolution est suivie d'effet, ce que nous souhaitons, la situation restera loin d'être résolue, eu égard à la question du recrutement dans le secteur médical…
…et à la nécessité absolue de développer une formation de base en soins palliatifs pour tous les personnels des hôpitaux et des Ehpad.
Je terminerai en évoquant l'histoire de Jean-Marc, 45 ans, à qui on a dit qu'il ne restait plus qu'une semaine à vivre. Soigné, sa douleur prise en charge, il formule le vif vœu de faire une bonne bouffe dans un restaurant étoilé et de se marier avec sa compagne, entouré de ses enfants et de ses proches. Un mois plus tard, le repas fait, au lendemain du mariage, Jean-Marc meurt.
L'application d'une loi de progrès ne fera pas de nous de bons élus, mais en nous traitant nous-mêmes comme des autres qui vont inévitablement mourir, nous reprendrons peut-être un visage humain et redonnerons peut-être aussi, aux yeux de nos concitoyens, un peu de sens à la démocratie. Donnons-nous rendez-vous bientôt pour parler de la fin de vie : c'est un débat que nos concitoyens attendent.
Applaudissements sur les bancs des groupes LFI – NUPES, SOC, Écolo – NUPES et GDR – NUPES.
En 1998, c'est la prise de conscience, le grand réveil ! Nos malades sont avant tout des vivants : notre devoir est de les accompagner dignement, jusqu'à la mort. Alors secrétaire d'État chargé de la santé, Bernard Kouchner déclare que « les soins palliatifs et la douleur sont une priorité de santé publique ». Le plan triennal 1999-2001 comporte alors plusieurs actions de formation, ainsi que la création de nouvelles structures de soins.
En 1999, c'est le Parlement qui s'honore en approuvant à l'unanimité la garantie du droit d'accès aux soins palliatifs pour toute personne en fin de vie. Est également institué un congé d'accompagnement, que peuvent prendre des personnes désireuses d'entourer un proche en fin de vie. D'autres dispositions concernent l'intégration des soins palliatifs dans le schéma régional d'organisation sanitaire, ainsi que l'organisation de l'enseignement des soins palliatifs. Enfin, comme un rappel à notre humanité la plus profonde, le bénévolat est organisé : nous prenons conscience que nul ne devrait mourir sans tenir une main, fût-elle celle d'un inconnu.
Depuis, les soins palliatifs sont sur toutes les bouches, mais peinent à s'implanter dans tous les départements. Fin 2021, la France comptait 171 unités de soins palliatifs, contre 164 en 2019. Ces structures prennent en charge les situations de fin de vie les plus complexes, et si elles représentent un progrès, elles demeurent insuffisantes, étant donné que vingt et un départements en sont toujours privés. Cette situation est difficilement acceptable quand on sait que 600 000 personnes meurent chaque année dans notre pays, que 53 % des décès ont lieu à l'hôpital et que les deux tiers des malades qui auraient besoin de soins palliatifs ne peuvent y avoir accès.
Il y a quelques jours, a été définitivement adopté un projet de loi de financement de la sécurité sociale mutique. Pas un centime n'a été alloué au développement des soins palliatifs,…
Si, 20 millions d'euros !
…qui constitue pourtant l'un des rares sujets de consensus dans notre pays et sur ces bancs, et cela alors même que la mission d'évaluation de la loi de 2016 a présenté ses conclusions en mars dernier devant notre assemblée et que carences et grande disparité dans l'offre de soins en sont le triste bilan.
Ainsi, au lieu de prendre le problème des soins palliatifs à bras-le-corps pour permettre à chacun de mourir dignement et sans souffrance, c'est vers la légalisation de l'euthanasie que nous nous dirigeons dans les prochaines semaines. Or, je le crois profondément, intimement même, vouloir supprimer la souffrance, c'est se positionner du côté du malade pour que le passage de la vie à la mort ait lieu paisiblement, naturellement. L'euthanasie ou le suicide assisté, c'est différent, brutal. C'est une heure programmée, un souffle arrêté. Et il y a, disons-le aussi, quelque chose de contre-nature à aider la mort de quelqu'un, surtout quelqu'un qu'on aime.
Parce que je crois à la grandeur d'une société qui donne de l'importance à la vie humaine, je voterai évidemment cette proposition de résolution qui, tout en parlant de la mort, se place résolument du côté de la vie. Je regrette simplement que nous n'en soyons une fois de plus qu'au stade de l'intention.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.
La discussion générale est close.
Sur la proposition de résolution, je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Sourires.
Tout d'abord, je tiens à saluer les prises de position de chacun d'entre vous.
L'enjeu de l'accompagnement de la fin de vie nous mobilise tous, parce qu'il nous renvoie à nos interrogations intimes, peut-être aussi à nos peurs, parce qu'il questionne notre vulnérabilité et nos doutes.
Je veux donc remercier le groupe Les Républicains pour avoir inscrit à l'ordre du jour cette proposition de résolution. C'est un moment important du débat démocratique, parce que ce texte aborde un sujet essentiel : l'égalité d'accès de nos concitoyens aux soins palliatifs. Je tiens également à remercier l'ensemble des professionnels de santé qui s'engagent au quotidien pour accompagner nos concitoyens en fin de vie.
Depuis plus d'un an, je suis pleinement mobilisée sur ce sujet au ministère. Je vous y sais très attentifs, comme en témoignent les travaux conduits sur ce sujet à l'Assemblée nationale, tels que la mission d'évaluation de la commission des affaires sociales sur la loi Claeys-Leonetti,…
…les auditions du groupe d'études sur la fin de vie présidé par Olivier Falorni, mais aussi les nombreuses réunions et les débats que vous avez tenus dans vos circonscriptions.
Sur ce sujet, notre ambition est commune et pleinement partagée.
Notre ambition partagée est, bien sûr, de rendre effective la prise en charge palliative pour tous ceux qui en ont besoin sur le territoire national. Je partage pleinement la conviction qu'il nous faut améliorer l'équité d'accès en assurant l'information de tous : c'est l'un des fils conducteurs de mon action depuis ma prise de fonction.
Dans le cadre des travaux et des réflexions que j'ai engagés en septembre 2022, à la demande du Président de la République et de la Première ministre, sur l'accompagnement de la fin de vie, j'ai souhaité organiser des groupes d'études à l'Assemblée nationale et au Sénat pour que nous réfléchissions ensemble à des propositions sur l'anticipation et la culture palliatives.
Je voudrais d'abord rappeler d'où nous venons et évoquer le cadre dans lequel s'inscrit l'action du Gouvernement. Comme plusieurs orateurs l'ont souligné, le cadre juridique de la politique des soins palliatifs et de la fin de vie s'est structuré autour de trois grandes lois : la loi fondatrice du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs ; la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie ; la loi du 2 février 2016, issue d'un consensus transpartisan et défendue par Jean Leonetti et Alain Claeys, créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie.
Depuis 1999, nous avons progressé dans l'application du droit ouvert par l'article 1er A de la loi visant à garantir l'accès aux soins palliatifs, qui dispose que « Toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. » Vous y faites légitimement référence dans l'exposé des motifs de cette proposition de résolution, et je veux redire notre engagement en faveur de ce droit.
L'État a mené une action forte en matière de soins palliatifs. Au total, cinq plans nationaux de développement des soins palliatifs ont été déployés afin de renforcer l'offre de prise en charge palliative et d'assurer une égale répartition sur le territoire.
Le cinquième et dernier plan, comme vous le savez, a été lancé en 2021 pour une durée de trois ans ; 20 millions d'euros supplémentaires y sont consacrés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024. Ces plans montrent l'existence d'une volonté politique constante pour faire progresser l'offre de soins palliatifs, comme le souligne le rapport établi en 2023 par la Cour des comptes.
L'engagement de l'État en faveur des soins palliatifs représente 1,45 milliard d'euros en 2021. Il a progressé de 25 % depuis 2017, ce qui est inédit.
Cet engagement place la France dans la première moitié du classement des pays de l'OCDE, alors qu'elle se situait encore dans la moyenne basse en 2015. Je mentionne ces chiffres afin de rappeler que nous ne partons pas de rien, même si je suis lucide : il nous reste beaucoup à faire pour que les droits ouverts par la loi de 1999 soient appliqués mieux et plus largement.
L'offre actuelle de soins palliatifs est majoritairement orientée vers la prise en charge des adultes à l'hôpital. Elle s'est certes développée aussi au domicile, mais de manière encore trop limitée et inégale, aussi bien pour les interventions en résidence privée qu'en Ehpad, en particulier dans les territoires ultramarins.
Je voudrais cependant préciser certains chiffres souvent repris dans le débat public, en particulier concernant le nombre de départements qui ne disposent pas d'unités de soins palliatifs. Fin 2022, vingt départements ne disposaient pas d'unités de soins palliatifs. Cela ne signifie pas nécessairement qu'ils ne disposent pas d'une offre de soins palliatifs, mais que celle-ci y est notamment déployée dans les établissements sanitaires, où des lits lui sont dédiés. En outre, l'offre de soins palliatifs est également assurée, sur l'ensemble des départements, par 420 équipes mobiles de soins palliatifs et vingt-trois équipes régionales ressources en soins palliatifs pédiatriques.
Sur les vingt départements que j'évoquais, six ont bénéficié de crédits en 2022 et 2023, dans le cadre du cinquième plan national pour les soins palliatifs et la fin de vie, pour soutenir des projets de création d'unités qui sont en cours de déploiement. C'est un progrès, mais la situation demeure insatisfaisante.
Le Gouvernement s'est engagé pour que d'ici la fin 2024, la totalité des départements qui n'ont pas d'unité de soins palliatifs offrent une prise en charge de proximité des situations les plus complexes. Je suis pleinement mobilisée sur ce sujet.
Au-delà, ma conviction profonde, qui guide les travaux du Gouvernement sur ce sujet, est qu'il nous faut changer de logiciel sur les soins palliatifs. C'est pourquoi j'ai souhaité accélérer le déploiement du cinquième plan de développement des soins palliatifs. C'est également l'objet de la rénovation de la circulaire du 25 mars 2008 relative à l'organisation des soins palliatifs, ainsi que de l'ajustement des moyens alloués aux soins palliatifs pédiatriques.
Pour appuyer le plan national 2021-2024, l'instruction publiée en juillet dernier poursuit plusieurs objectifs essentiels afin de promouvoir une approche transversale et ouverte des soins palliatifs : renforcer le maillage des structures existantes et à venir ; optimiser les organisations professionnelles ; mobiliser plus massivement les professionnels de ville ; améliorer l'accès à l'expertise palliative ; surtout, introduire plus en amont les soins palliatifs dans le parcours de soins. Cette nouvelle instruction, quinze ans après la circulaire qui régissait les conditions de l'offre de soins palliatifs, constitue une étape essentielle dans le développement de véritables filières structurées de soins palliatifs.
Elle forme la première brique de la stratégie décennale pour les soins palliatifs, la prise en charge de la douleur et l'accompagnement de la fin de vie 2024-2034, annoncée par le Président de la République le 3 avril dernier. Une instance dirigée par le professeur Franck Chauvin a été chargée de préfigurer cette stratégie. Depuis juin dernier, d'intenses travaux associant largement les expertises ont été menés ; leurs conclusions me seront présentées la semaine prochaine.
La future stratégie décennale constituera le cadre d'action pour les dix prochaines années. D'ores et déjà, je puis vous annoncer que la diffusion d'une culture palliative au sein de la communauté des professionnels de santé, mais aussi de la société dans son ensemble, en constituera l'une des priorités. Nous voulons instaurer l'accompagnement le plus en amont possible.
En outre, nous consacrerons un effort spécifique aux capacités de prise en charge en ville et dans les Ehpad, ainsi qu'au développement de l'offre de soins palliatifs pédiatriques. L'un d'entre vous l'a évoqué, la formation des professionnels de santé – de manière très large – en constituera également un volet important.
Enfin, la stratégie prendra en compte les conclusions rendues en avril 2023 par la Convention citoyenne sur la fin de vie,…
…qui, vous l'avez rappelé très justement, a insisté sur la nécessité de renforcer l'accès aux soins palliatifs.
Mesdames et messieurs les députés, nous partageons donc le diagnostic sur la nécessité de renforcer plus avant notre offre de soins palliatifs, même si nous ne souscrivons pas aux conclusions selon lesquelles le Gouvernement ferait preuve d'attentisme sur ce sujet. Au contraire, nous sommes pleinement mobilisés.
Si je remercie M. Patrick Hetzel d'avoir inscrit ce sujet à l'ordre du jour, je soutiens que l'action du Gouvernement satisfera pleinement votre proposition de résolution.
Appliquer la loi est un objectif qui nous réunit tous. Cela ne doit pas nous interdire de la faire évoluer. Nous nous retrouverons dans quelque temps pour en débattre.
Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.
Je vous rappelle qu'étant donné qu'il s'agit d'une journée de niche parlementaire, la séance sera levée à minuit, que la proposition de résolution ait ou non été votée.
Dans les explications de vote, la parole est à M. Patrick Hetzel.
Je vous remercie pour la manière dont se sont déroulés les débats sur cette proposition de résolution. Tous les orateurs ont évoqué les sujets majeurs. Premièrement, il faut absolument résorber les inégalités territoriales. Deuxièmement, les 80 % de nos concitoyens pouvant y prétendre qui n'ont hélas pas encore accès aux soins palliatifs doivent pouvoir y accéder. Pour cela, la question des moyens financiers et humains est essentielle.
J'espère que nous nous rassemblerons pour voter unanimement cette proposition de résolution. En tout cas, je vous remercie pour l'esprit constructif qui a animé les débats.
« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Nous nous acheminons vers un vote unanime de cette proposition de résolution. Nous prenons acte des déclarations de Mme la ministre déléguée sur le plan décennal à venir pour le développement des soins palliatifsr. Il faut en effet appliquer la loi de 1999, qui a défini précisément les soins palliatifs en reprenant largement la définition de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Nous aurons l'occasion de revenir sur le sujet de la fin de vie. La Convention citoyenne sur la fin de vie a souligné l'importance du développement des soins palliatifs. 80 % de ses membres ont estimé que la loi actuelle ne permettait pas de répondre de façon satisfaisante à toutes les situations ; elle s'est déclarée à 75 % en faveur d'une aide active à mourir. Le débat est donc devant nous.
Il faut renforcer les soins palliatifs dans le cadre du plan du Gouvernement, développer les soins d'accompagnement et mener un débat sur l'aide active à mourir.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.
Cette proposition de résolution est bienvenue, car elle rappelle à l'État, et donc au Gouvernement, sa responsabilité totale dans les graves carences d'accès aux soins palliatifs dans notre pays. Je rappelle tout de même que Les Républicains et les socialistes, qui s'apprêtent à voter cette proposition de résolution, sont les partis politiques qui ont gouverné pendant des décennies. Vous avez donc, chers collègues, comme les macronistes depuis six ans, une très grande part de responsabilité dans la dégradation de notre système de santé,…
…notamment en ce qui concerne les soins palliatifs, mais aussi l'ensemble des services publics de santé dans nos territoires. L'état des services de soins palliatifs, l'absence d'unités de soins palliatifs dans vingt et un départements français, dont la Haute-Marne, et l'absence de permanence des soins, démontrent que la France n'est pas tout à fait entrée dans le XXI
Applaudissements sur les bancs du groupe RN.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 90
Nombre de suffrages exprimés 90
Majorité absolue 46
Pour l'adoption 90
Contre 0
L'article unique est adopté, ainsi que l'ensemble de la proposition de résolution.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN.
Prochaine séance, lundi 11 décembre, à seize heures :
Discussion du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration.
La séance est levée.
La séance est levée à minuit.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra