Intervention de Jérôme Guedj

Séance en hémicycle du jeudi 7 décembre 2023 à 21h30
Soins palliatifs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Guedj :

Le 7 octobre dernier se tenait la Journée mondiale des soins palliatifs. Il est un peu triste – mais hélas lucide – de nous réunir deux mois plus tard dans l'hémicycle pour examiner une proposition de résolution qui ne vise qu'à une chose : qu'on respecte la loi que nos prédécesseurs ont votée il y a maintenant sept ans, s'inscrivant eux-mêmes dans la filiation de la loi du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs. Le soulagement de la souffrance est un principe primordial de la médecine. Il s'agit, comme pour tous les autres soins, d'y assurer un accès équitable sur tout le territoire, à tous nos concitoyens et à leurs familles, quelles que soient leurs pathologies. Or nous ne pouvons nous satisfaire de la situation mi-chèvre mi-chou dans laquelle nous nous trouvons.

Ainsi, en 2021, vingt et un départements restaient dépourvus d'unités de soins palliatifs : le Gers, la Creuse, la Guyane, la Meuse, la Mayenne et j'en passe. Le fait qu'on ne respecte pas la loi est insupportable pour tous les républicains que nous sommes. Ce n'est pas acceptable et nous devons réagir. C'est d'ailleurs ce que la commission des affaires sociales a constaté dans un rapport d'évaluation rédigé sous la responsabilité d'Olivier Falorni et qu'il n'a pas eu le temps de mentionner, rapport qui pointe l'ampleur et l'importance de ces disparités territoriales.

Afin de permettre à l'examen du texte d'aller à son terme, je ne serai pas trop long et concentrerai mon propos sur une dimension de l'accès aux soins palliatifs trop souvent négligée : celle des Ehpad – vous ne serez pas surpris de m'entendre les mentionner. L'Ehpad est le dernier lieu de vie pour un quart des personnes décédées en France. Ainsi, 150 000 résidents d'Ehpad décèdent chaque année, dont les trois quarts au sein de l'établissement lui-même.

Il est donc indispensable que ces établissements intègrent la culture du soin palliatif, dans leurs moyens comme dans leur organisation. La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) souligne que près d'un quart des établissements n'ont pas signé de convention avec une équipe mobile de soins palliatifs (EMSP). Les interventions des EMSP dans les Ehpad restent extrêmement limitées : elles représentent à peine 8 % de leurs interventions, et concernent seulement 6 400 résidents d'Ephad.

Certes, toutes les personnes décédant en Ehpad n'ont pas besoin de soins palliatifs. Toutefois, le sujet doit être examiné de plus près. J'espère, madame la ministre déléguée, qu'il figurera dans la stratégie nationale de soins palliatifs à venir.

Ne nous voilons pas la face : si nous en sommes là, c'est assurément parce que les moyens, dont on vous parle – ou dont on essaye de vous parler – à l'occasion de chaque PLFSS, ne suivent pas, et ne permettent pas un déploiement suffisant des soins palliatifs. Comme notre collègue Olivier Falorni, je veux rendre hommage à l'ensemble des professionnels qui attendent cette reconnaissance.

Plus généralement, à travers la question des soins palliatifs, c'est celle de la place de la mort dans notre société qui se pose. Nous, législateur, avons l'habitude d'éviter le mot de « mort » : il ne figure ni dans la loi Leonetti, ni dans la loi Claeys-Leonetti, où c'est le mot « décès » – plus médical et plus juridique – qui apparaît. Si nous évitons parfois les mots, nous ne pourrons esquiver le débat – ô combien nécessaire – sur la place de la mort dans notre société.

Enfin, exiger l'effectivité de la loi Claeys-Leonetti, comme nous le faisons aujourd'hui, ne doit pas nous empêcher de la réformer, dans un avenir que je souhaite le plus proche possible.

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