Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Réunion du jeudi 4 avril 2024 à 10h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à dix heures.

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Chers collègues, nous poursuivons nos travaux consacrés au volet environnemental de l'autoroute A69. Je souhaite la bienvenue à M. Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à Mme Charlotte Coupé, adjointe au chef de bureau chargé de la dévolution des concessions autoroutières et à M. Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca.

Madame, messieurs, notre commission a divisé ses auditions en plusieurs cycles : après la genèse de l'A69, elle achève quasiment son examen du volet environnemental des actes juridiques pris pour la réalisation de cette autoroute, en particulier la déclaration d'utilité publique (DUP) et l'autorisation environnementale. Elle abordera ensuite les hypothèses sociales et économiques qui sous-tendent l'A69, avant de se pencher sur les tarifs de péage et les clauses financières de la convention entre l'État et Atosca.

Notre audition de ce jour porte sur le volet environnemental des actes pris pour bâtir l'A69, mais il est fortement probable que nous revenions sur les aspects financiers de la convention de concession.

S'agissant du volet environnemental, nous avons pu constater le respect très strict des procédures et l'attention portée au triptyque « éviter- réduire-compenser ». L'A69, voulue par les élus locaux et les chambres consulaires à une très large majorité, peut constituer un projet exemplaire, conciliant développement économique et protection de l'environnement. Un dossier aussi complexe génère néanmoins des questions, mises en lumière lors de nos précédentes auditions. Aussi nous espérons que l'audition de ce jour permettra de les lever.

Je rappelle que notre audition est publique et retransmise sur le portail de l'Assemblée nationale.

Madame et messieurs, en application de l'article 6 de l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, je vais préalablement vous demander de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, et de dire : « Je le jure ».

(M. Balderelli, Mme Coupé et M. Gerlinger prêtent serment.)

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L'audition de ce jour vient quasiment clore la première partie de notre enquête sur le volet environnemental des actes préparatoires à la convention de concession de l'A69, principalement la DUP et l'autorisation environnementale.

À ce stade, je me demande s'il nous faut rester optimistes quant au déroulement de ces actes qui, nonobstant leur juste respect du principe de légalité, nourrissent encore de sérieuses interrogations chez plusieurs membres de cette commission d'enquête ; interrogations que viennent d'ailleurs étayer les nombreuses réserves émises par le Conseil national de la protection de la nature (CNPN), l'Office français de la biodiversité (OFB) et l'Autorité environnementale et qui, à ce jour, ne sont pas intégralement levées.

Le dialogue noué par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) d'Occitanie et la direction départementale des territoires (DDT) du Tarn avec le concessionnaire Atosca a, semble-t-il, permis de prendre en compte certaines remarques émises par les instances consultatives précitées, ce qui, selon les dires du directeur de la Dreal, a donné lieu à certaines améliorations entre le dossier présenté en janvier et les correctifs apportés au mois de juin.

De très nombreuses zones d'ombre subsistent néanmoins, à commencer sur la réalité de la compensation de l'atteinte aux milieux naturels et à la biodiversité. Celle-ci se fonde sur quelques postulats qui nous semblent – et ont semblé à certains – erronés. Je ne citerai à l'appui que la requalification de terres agricoles en zones artificialisées ou la caractérisation des zones humides.

Je m'interroge aussi sur cette étrange opération de communication d'Atosca proclamant que cinq arbres seraient plantés en lieu et place de chaque arbre abattu, annonce que vous aviez confirmée, Monsieur Gerlinger, lors de votre audition devant la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. Nos auditions récentes nous portent cependant à croire qu'il s'agissait là d'un simple slogan, qui aura tout de même eu pour effet d'abuser de nombreux élus et acteurs locaux, des députés et même un ancien ministre.

Seriez-vous prêts à confirmer cette annonce à cette commission et sous serment ?

Je dois bien admettre que nous savons d'ores et déjà qu'il n'en est rien et qu'il conviendrait plutôt de raisonner en termes de zones à boiser. En outre, les jeunes plants d'arbres n'ont pas toujours la chance de survivre et de croître en période de dérèglement climatique et ne rendent pas les mêmes services écosystémiques que des arbres anciens.

Pourquoi donc Atosca-t-elle fondé sa communication sur un argument erroné, alors même que le bureau d'études qui l'assistait raisonnait en termes d'espaces à boiser ?

Par ailleurs, je m'interroge sur la réponse de la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM), du 25 mars dernier, à une demande de communication de l'étude juridique et financière ayant sous-tendu le projet – évoquée par M. Dominique Perben lors de son audition du 27 février dernier. On ne peut imaginer qu'un ministre ne soit pas outillé par ses administrations centrales pour fonder une décision engageant autant un territoire.

Je renouvelle donc ma demande de communication des documents ayant fondé la prise de décision sur le contrat de concession.

Enfin, le 25 mars dernier, je vous ai adressé un questionnaire reprenant l'ensemble des questions communes et des questions spécifiques des uns et autres. Par souci de transparence, tous les membres de cette commission, qu'ils soient favorables ou non à l'autoroute A69, ont été destinataires de ce questionnaire. Je vous propose donc de suivre le fil de ces questions et de nous adresser éventuellement vos précisions par écrit.

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Merci, madame la rapporteure. Je propose maintenant aux personnes auditionnées d'intervenir dans l'ordre qui leur conviendra.

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, en guise de propos liminaire, j'entreprendrai de rappeler le rôle et la responsabilité du concédant, c'est-à-dire de l'État.

D'une part, il est acheteur public en charge de préparer le contrat, de mener la procédure et de s'assurer que le concessionnaire exécute ses obligations sur l'ensemble de la durée de la concession. D'autre part, il représente l'autorité chargée du contrôle et dans ce cadre, s'assure que l'usager est en capacité de circuler en toute condition de commodité et de sécurité.

Ces deux missions conduisent le concédant à effectuer un certain nombre d'actes de contrôles et d'inspections. Avant la mise en service, il réalise deux inspections primordiales. L'inspection des travaux permet de s'assurer que l'autoroute est construite conformément aux dispositions du contrat. L'inspection de sécurité vise à contrôler que les conditions permettent aux usagers de circuler en sécurité sur l'autoroute.

Nous réaliserons des audits pendant toute la durée de la concession, comme nous effectuerons le suivi d'un certain nombre d'indicateurs portant sur la qualité de service aux usagers (fonctionnement du péage, diffusion de l'information de sécurité routière par la radio autoroutière ou par les panneaux à messages variables) et sur des indicateurs relatifs au patrimoine (qualité de la chaussée, qualité des ouvrages d'art).

Nous ferons également le suivi des enjeux économiques et financiers de la concession, notamment en nous assurant que les péages sont configurés conformément aux stipulations contractuelles et aux dispositions réglementaires, mais aussi que les dispositifs de partage des fruits de la concession sont effectivement mis en œuvre. Autant de missions qui se trouvent être indépendantes des obligations réglementaires pesant sur le concessionnaire dans le cadre du code de l'environnement.

Nous sommes régis par le code de la commande publique et dans le cas d'une concession, il est question de délégation de maîtrise d'ouvrage.

Dès la signature du contrat, le concessionnaire devient maître d'ouvrage et de facto responsable de l'ensemble des autorisations administratives nécessaires. L'ensemble des engagements environnementaux pris par l'État – et précisés dans le contrat de concession – est alors transféré au concessionnaire, selon l'annexe 14 du contrat de concession.

L'État peut tout à fait avoir pris d'autres engagements dans le cadre du processus concurrentiel, lesquels engagements sont contractualisés à l'annexe 12 et repris par le concessionnaire après signature : sur les aires de covoiturage, sur les installations de recharge de véhicules électrique, sur la largeur d'un passage aphone en fonction des études préalables ou la longueur des protections phoniques. L'ensemble de ces engagements est indépendant des obligations découlant des autorisations administratives, car le contrat rappelle que l'autorisation environnementale relève de la responsabilité du concessionnaire, en charge de réaliser le dossier en vue d'aboutir à l'arrêté préfectoral. Les services de l'État, notamment ceux en charge de la police de l'environnement, s'assurent de la bonne mise en œuvre ces engagements réglementaires.

Il me semblait important de rappeler cette articulation et de rappeler en quoi le concédant dispose, certes, de pouvoirs étendus, mais sur la base de dispositions contractuelles assez différentes des dispositions réglementaires.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

En introduction, je voudrais vous dire mon plaisir d'être aujourd'hui devant cette commission pour répondre aux différentes questions. J'avais déjà eu l'occasion d'évoquer ces sujets lors de mon audition du 16 janvier dernier par la rapporteure de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, lors de l'examen de la pétition contre l'A69.

Dès le départ, Atosca a souhaité faire preuve de transparence et de concertation pour garantir la réussite du projet. En tant que concessionnaires, nous nous sommes fortement appuyés sur le travail préalable effectué autour de cette opération. L'intense dialogue démocratique sur ce territoire a finalement abouti à la DUP qui, avec les engagements de l'État confirmés en novembre-octobre 2020, forme les actes sur lesquels nous nous appuyons dans la réalisation de ce projet. La DUP de 2018, qui a fait suite à l'enquête publique de 2016-2017, a été la base de nos travaux engagés dès 2019.

Vous m'interrogez sur notre choix des bureaux d'études que vous avez auditionnés. Dès que la DUP a été effectuée et que nous savions qu'un appel d'offres serait prochainement lancé par l'État concédant, nous avons commencé à constituer un groupement de plusieurs entreprises et autres bureaux d'études. Nous savions qu'après le lancement de l'appel d'offres, nous n'aurions que quelques mois pour y répondre. Notre approche visait à anticiper au maximum les étapes pour comprendre le territoire, son environnement et à faire les diagnostics environnementaux qui conviennent en nous appuyant sur les meilleurs bureaux d'études. L'idée a été de monter un groupement mobilisant les compétences et l'engagement les plus forts pour réussir le projet et formuler la meilleure offre au concédant et aux acteurs publics.

Après l'appel à candidatures lancé à la fin de 2019, nous avons soumis une offre en février 2021 et avons été retenus comme « concessionnaire pressenti unique » en octobre 2021. Cette décision nous a permis de nous rendre sur le territoire pour commencer à préparer le terrain et échanger de façon plus précise avec les maires, les riverains et les chambres consulaires. En parallèle, nous avons finalisé le contrat et ses annexes qui ont été signées en avril 2022.

Nous avons poursuivi ce travail préparatoire pendant toute l'année 2022 avec les diagnostics archéologiques, les études détaillées, le dépôt de la demande d'autorisation environnementale, l'enquête publique, jusqu'à l'obtention de l'autorisation environnementale le 1er mars 2022.

À la suite de la DUP, nous avons tout d'abord constaté que l'amélioration de la mobilité sur ce territoire répondait à une demande – et je n'ai entendu personne affirmer le contraire. Ce bassin de vie se compose de 140 000 habitants et de 50 000 emplois. C'est aussi le dernier bassin de ce type qui n'est pas connecté à sa métropole par une autoroute.

Parmi les différentes variantes étudiées (le lien ferroviaire ou le réaménagement de la RN126), c'est in fine l'autoroute qui a été retenue. Bien que ce choix ait été fait avant nous, nous avons souhaité refaire toutes les études pour vérifier que, du point de vue environnemental en particulier, il n'y avait pas d'autre solution que celle du tracé tel que défini.

L'idée d'un réaménagement de la RN126, qui pouvait paraître assez séduisante au départ, impliquait de construire des carrefours dénivelés et un créneau de dépassement pour améliorer la fluidité, soit une solution des années 1960 donnant l'impression d'avoir la sécurité et du confort, mais qui aurait augmenté le risque d'accidents. Un aménagement correct de la RN126 consisterait à réaliser un axe de deux fois deux voies, ce qui reviendrait à empiéter davantage sur les bâtiments existants et inévitablement sur les milieux naturels. En somme, les impacts auraient été bien plus importants que ceux d'une autoroute nouvelle permettant de définir le tracé, en évitant les zones sensibles. Une fois encore, ce choix n'est pas le nôtre, mais celui issu de la DUP. Nous nous sommes donc appuyés sur ce choix et en avons refait la démonstration.

À notre sens, au-delà de la DUP, l'acte fondateur fut l'autorisation environnementale. Madame la rapporteure nous demande pour quelles raisons nous avions occulté certains éléments de l'annexe 12 portant sur le détail des engagements environnementaux. L'annexe 12 reprend les principes retenus et nos engagements environnementaux tels que nous les avions proposés en 2019 et c'est précisément sur la base de ces engagements environnementaux forts que je pense que nous avons été retenus.

Néanmoins, le document qui compte désormais est l'autorisation environnementale. Ce qui vaudra, au final, ce sont bien les engagements complémentaires qui seront pris dans le cadre de cette autorisation. Au-delà des principes évoqués dans l'annexe 12, les mesures qui commençaient déjà à s'esquisser ont été améliorées dans le cadre de l'autorisation environnementale, ce pour quoi elles ont été occultées dans les documents rendus publics. Outre l'annexe 12 d'ailleurs, c'est le cas des autres éléments des annexes du contrat ayant été occultés.

Pour entrer dans le vif du sujet de l'opération actuelle, nous avons reçu l'autorisation de commencer le chantier le 1er mars 2023 et aujourd'hui, le chantier bat son plein. Je serai d'ailleurs très heureux de vous accueillir sur le terrain.

À fin mars, nous avions déjà dépensé près de la moitié du budget de 450 millions d'euros, soit environ 230 millions d'euros. Nous avons effectué la moitié des terrassements et la moitié des zones sont encore en travaux. 800 personnes travaillent quotidiennement sur une quarantaine de chantiers et pour la phase active des terrassements, qui surviendra à la fin du printemps, 1 200 personnes seront mobilisées sur le chantier. La moitié des ouvrages d'art sont en cours de construction ou réalisés. Hier encore, nous réalisions une opération très importante qui est la fin du poussage du deuxième tablier du viaduc de l'Agout ; la connexion entre Castres et Toulouse se traduit symboliquement par ces deux tabliers connectés au-dessus de l'Agout.

À ce jour, le chantier avance bien en vue de la livraison de l'autoroute à la fin de l'année 2025.

À ce stade, je tenais à évoquer l'une de nos difficultés actuelles, à savoir les conditions de travail de nos agents. En effet, autour du bois de la Crémade, nous déplorons un nombre croissant de dégradations : 200 dégradations constatées et 80 plaintes déposées par Atosca à la suite de dégradations d'engins et des agressions de personnels. Le week-end dernier, un groupe électrogène a été brûlé. En début de semaine, le véhicule d'une équipe a été caillassé alors même qu'elle se trouvait à son bord. Les agents du groupement de constructeurs font leur travail correctement, dans des conditions assez difficiles, et je tenais à le signaler.

En outre, je voudrais redire tout le soin que nous avons porté à la constitution d'un dossier exemplaire du point de vue environnemental. Je suppose que vous allez essayer de me dire le contraire, mais je voudrais vous démontrer que l'état d'esprit ayant présidé au projet a été de pousser nos exigences au maximum et d'être à l'écoute du territoire en vue de trouver les meilleures solutions.

En accord avec la logique éviter-réduire-compenser (ERC), notre premier effort a porté sur l'évitement afin que notre tracé n'impacte pas des zones sensibles sur le plan environnemental et épargne au maximum les bâtiments. J'évoquerai pour l'illustrer le réajustement du tracé auquel nous avons procédé, ou le fait de passer à un système de flux libres – comme suggéré par le concédant – n'obligeant plus de s'arrêter à une barrière de péage pour prendre un ticket et à la sortie pour payer. Le système reposant sur des portiques permet effectivement de circuler à vitesse normale et sans pollution, soit une économie de quatre-vingts hectares de terres agricoles et de terres naturelles par rapport à celle prévue par la DUP. De la même manière, quarante bâtiments seront finalement à démolir dans le cadre du projet, contre les soixante envisagés par la DUP. Tout cela illustre le travail d'évitement déjà réalisé.

Nous avons également pris des mesures exigeantes en matière de compensation. La formule « un pour cinq », est peut-être une simplification de la communication. Nous avons estimé que les médias seraient moins réceptifs si nous annoncions cinq fois plus de surfaces boisées que la surface impactée. L'engagement de « un pour cinq » arbres nous a paru plus simple et sera, en outre, réellement mis en œuvre. En effet, un travail fin a été réalisé pour évaluer les impacts sur les zones réellement concernées, sur les densités d'arbres et les types d'arbres qui s'y trouvent. Ce travail a permis d'identifier les boisements à refaire, les alignements d'arbres à reconstituer, ainsi que les types et les densités d'arbres à replanter.

Nous avons également proposé, parmi les mesures compensatoires, de sanctuariser vingt-sept hectares de boisements existants qui, sans cette sanctuarisation, auraient tout à fait pu être coupés par les propriétaires. Pendant 55 ans, ces terrains ne feront l'objet d'aucune intervention ou exploitation. La dynamique forestière naturelle pourra ainsi se remettre en place de façon certaine. Cela fait effectivement partie des soixante et onze hectares de l'ensemble des mesures de reboisement, de densification et de protection d'arbres que l'on identifie par rapport aux treize hectares impactés et sachant qu'en réalité, seulement 4,9 hectares de boisement seront touchés.

Par ailleurs, selon les derniers standards en matière de construction d'autoroutes, des franchissements tous les 250 mètres sont prévus pour la petite faune et pour les habitants. Il y a encore trente ans, ces mêmes standards imposaient un ouvrage tous les trois kilomètres.

En outre, vingt-deux hectares de zones humides sont concernés par le chantier et en retour, nous allons renaturer cinquante-cinq hectares. Je voudrais tout de même revenir à certaines réalités. Sans être un spécialiste des zones humides, de ce que j'en comprends, ces vingt-deux hectares impactés équivalent à quatre hectares de zones humides à forts potentiels. Ce sont donc des zones humides, des prairies humides fonctionnant avec toutes les caractéristiques d'humidités, de milieux et d'habitats existants. De plus, dix-huit hectares (principalement des zones cultivées) présentent un potentiel de zones humides (entre 20 et 50 cm d'humidité) et à ce titre, doivent être classés comme des zones humides potentielles.

Vous faites référence dans votre questionnaire à Monsieur Jacques Thomas, dont je suis tout à fait prêt à regarder le travail ; je crois d'ailleurs qu'il a utilisé une partie de ces arguments dans le cadre d'un recours sur l'opération. Il me semble toutefois que le bureau d'études environnemental avec lequel nous travaillons vous a démontré son sérieux sur cette opération et je puis affirmer qu'il n'est aucunement contraint pour ce faire. Nous ne demandons pas aux bureaux d'études, qui ont des engagements de résultats, d'écrire ce qui nous fait plaisir. Au demeurant, le bureau en question est reconnu nationalement et internationalement pour son travail sur les zones humides et je lui accorde toute ma confiance. Son travail a aussi été reconnu dans le cadre de l'instruction de la procédure que personne n'a remise en cause. Des compléments ont effectivement été apportés et des remarques formulées, mais je n'ai pas d'inquiétude particulière sur ce point.

S'agissant des terres agricoles, nous sommes évidemment conscients qu'au-delà des compensations fortes qui ont été mises en place, le monde agricole est touché pour plus de 300 hectares de terres, que ce soit pour le tracé ou dans le cadre des besoins de compensation. C'est pourquoi il nous a paru fondamental de nouer un dialogue fin avec les chambres d'agriculture, les associations, les exploitants et les propriétaires concernés. Les protocoles très détaillés qui ont ainsi été mis en place avec les chambres d'agriculture sont désormais appliqués. Nous avons trouvé des solutions amiables avec quasiment tous les acteurs concernés. Sur les 98 exploitations agricoles présentes sur le tracé, seulement deux font l'objet d'expropriations ; et même dans ce dernier cas, nous poursuivons les discussions en vue de trouver une solution amiable. Nous avons procédé de la même manière sur les autres surfaces.

On me parle d'une pétition d'agriculteurs opposés au projet qui aurait recueilli 120 ou 150 signatures, mais cette pétition date d'il y a deux ans. Depuis, nous avons rencontré une grande partie des agriculteurs et avons trouvé des solutions. In fine, moins de 10 % des exploitants concernés ont été signataires de cette pétition. Il se trouve que le dialogue est très bon avec l'essentiel des agriculteurs, à l'exception de quelques-uns. Le maintien du dialogue est à nos yeux très important.

Je citerai ici le fonds de compensation collectif, soit une première pour une autoroute. Dans ce cadre, 2,4 millions d'euros seront affectés à des projets de compensation collective, à des projets de dynamisation collective de filières agricoles à l'échelle de ce territoire, et ce, au-delà des compensations individuelles déterminées pour chacun (en cas de rallongement du tracé par exemple). Ce fonds est en place et il s'agit maintenant de le faire fonctionner en lien avec l'État et les chambres d'agriculture.

En conclusion, notre action est guidée par le souci de l'exemplarité environnementale et tient compte des impératifs de la transition énergétique.

Pour rappel, le projet de la DUP 2018 ne tenait pas compte des aires de covoiturage, des bornes de recharge, du flux libre ou encore d'une politique favorable aux véhicules électriques. En France, vous ne trouverez aujourd'hui quasiment aucune aire de repos équipée des bornes de recharge, comme nous le proposons ici. L'A69 sera donc pionnière en la matière.

À côté de l'exemplarité du projet, nous avons aussi tenu à l'exemplarité de la méthode, à cette humilité, à cette volonté d'être à l'écoute et de continuer le dialogue. Certains disent que les mesures compensatoires ne fonctionneront pas, mais je dis l'inverse. Pourquoi ? Parce que nous les avons étudiées finement et que nous nous donnerons les moyens, en lien avec les services instructeurs de l'État et au sein des comités de suivi des mesures compensatoires, de vérifier qu'elles fonctionnent comme prévu. Si tel n'était pas le cas, nous adapterons les plans de gestion et les mesures de sorte que les compensations soient réellement dispensées en vue d'obtenir le résultat escompté.

Nous aurons donc, si nécessaire, à faire évoluer les mesures compensatoires, à commencer par leur conception. Si, à l'expérience, nous devions nous rendre compte que tel n'est pas le cas, nous les adapterons. Quoi qu'il en soit, nous serons tout de même présents pendant 55 ans pour vérifier qu'elles fonctionnent.

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Merci, Monsieur Gerlinger. Je propose aux personnes auditionnées de poursuivre en respectant le fil du questionnaire de madame la rapporteure.

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Parmi les questions qui nous ont été adressées, plusieurs ont trait à l'articulation entre les obligations environnementales et les stipulations du contrat de concession.

Deux des questions portaient sur la politique dite du « 1 % paysage, développement et cadre de vie » et sur la compensation collective agricole. J'indiquerai d'abord que le « 1 % paysage-développement et cadres de vie » ne relève pas d'une disposition réglementaire, mais d'une disposition contractuelle prise pour l'aménagement du réseau routier concédé. Les obligations sont bien celles nées du contrat de concession, notamment l'obligation de financement par le concessionnaire à hauteur de 500 000 euros.

En effet, les opérations doivent être portées par un maître d'ouvrage tiers (une collectivité ou un porteur privé) et sont financées à hauteur de 50 % par le concessionnaire. Le contrat crée l'obligation, mais la mobilisation effective des sommes dépend du fait que des porteurs de projets tiers puissent effectivement présenter des dossiers selon des règles de co-visibilité. Ce n'est d'ailleurs pas le concessionnaire qui a la main sur le choix des dossiers, mais les services de l'État qui élaborent un document-cadre faisant état des types de dossiers pouvant être précisés pour répondre à des enjeux de cadre de vie et des enjeux paysagers. D'une certaine manière, le concessionnaire est uniquement là pour apporter les financements à concurrence de 500 000 euros ; ce montant ayant été fixé par référence avec de précédentes opérations. C'est par exemple le même montant qui a été retenu dans le cas du contournement Ouest de Strasbourg, qui représentait un investissement plus élevé.

Vous avez posé une question sur les compensations collectives agricoles, lesquelles n'étaient pas réglementairement applicables au projet et résultaient d'une articulation entre l'article L. 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime et de son décret d'application n° 2016-1190 du 31 août 2016. Ledit décret prévoyait que la mise en œuvre obligatoire de ces dispositions corresponde à la date de la demande d'ouverture d'enquête publique en vue de la DUP. Le projet étant antérieur, nous étions donc hors délai. L'État a alors souhaité imposer aux concessionnaires la mise en œuvre de cette compensation collective agricole dans les conditions prévues par le code rural et de la pêche maritime, c'est-à-dire que ce qui était facultatif est devenu obligatoire pour le concessionnaire.

Vous avez également posé la question de l'articulation avec l'aménagement foncier agricole forestier et environnemental (Afafe) Cette procédure relève du conseil départemental qui est légalement en charge des aménagements environnementaux. L'enquête publique est préalable à la DUP et les éléments connus ont été pris en compte dans cette procédure. Le concessionnaire lui-même, lorsqu'il constitue le dossier d'autorisation environnementale, se base sur la meilleure connaissance possible de la procédure Afafe mise en œuvre par le département, de manière à ce que l'ensemble des enjeux – connus au moment de la délivrance des autorisations – soit pris en compte. Les conseils départementaux, lorsqu'ils réalisent leur procédure Afafe, ont à répondre des engagements environnementaux qu'ils prendront, à savoir les réaménagements fonciers et le cas échéant, des travaux connexes ; le concessionnaire prenant en charge l'ensemble des dépenses afférentes à l'Afafe, puisque cette dernière est la conséquence de la réalisation de l'autoroute.

Vous nous posiez aussi un certain nombre de questions sur la réalisation du volet environnemental du contrat de concession.

En premier lieu, nous nous employons à compiler l'ensemble des engagements fixés par l'État au moment de la DUP. C'est véritablement au moment où la décision est prise de réaliser le projet que s'opère cette bascule de maîtrise d'ouvrage de l'État vers le concessionnaire et que nous pouvons recenser l'ensemble des éléments issus des meilleures pratiques.

La mise en place de la technologie de perception du péage en flux libre par exemple, bien que n'étant pas prévue dans les études préalables, a été portée par le concédant de manière à réduire l'empreinte foncière des projets. Quatre-vingts hectares ont ainsi été économisés entre les études préalables et le projet du concessionnaire. Cette technologie permet également d'améliorer la performance environnementale de l'autoroute pour les usagers, puisque ceux-ci n'auront plus à s'arrêter et à redémarrer au niveau des barrières de péage ; et pour un poids lourd, l'économie est estimée à environ un litre de carburant à chaque passage. Pour les usagers, un gain de temps sera réalisé du fait qu'ils n'auront plus à passer par des phases de décélération et d'accélération au niveau des barrières de péage. Il en résulte une économie globale de CO2.

L'un des grands enjeux de la transition écologique est la décarbonation de la route et Atosca le prend bien en compte dans ses appels d'offres, notamment par la mise en place de stations de recharge de véhicules électriques sur l'ensemble du réseau autoroutier concédé. Depuis 2023, 100 % des aires de service du réseau autoroutier concédé sont équipées de stations de recharge pour véhicules électriques. Le ministère travaille actuellement à la mise en place d'un schéma directeur pour accompagner cette évolution, y compris pour les poids lourds. C'est l'enjeu principal et le flux libre permet d'accompagner cette évolution.

Dans la mise en place de ce volet environnemental, nous sommes accompagnés par le réseau scientifique et technique du ministère et notamment le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), ainsi que par les services – notamment la Dreal et la DDT – qui ont porté la maîtrise d'ouvrage lors de la phase des études préalables.

Vous posiez une autre question relative à la mise à disposition du contrat de concession et de ses annexes qui auraient été demandés par l'Autorité environnementale. À notre connaissance, cette dernière a bien suggéré la mise à disposition du contrat et de ses annexes pendant l'enquête publique ; demande d'ailleurs reprise à son compte par le commissaire-enquêteur. Pendant la durée de l'enquête publique, l'ensemble des éléments du contrat a été mis à disposition du public et évidemment occulté des secrets protégés par la loi. Nous avons donc mis en œuvre la recommandation de l'Autorité environnementale sur ce point.

Enfin, vous nous interrogiez au sujet du responsable du respect de l'environnement, lequel a effectivement été désigné par Atosca et porté à la connaissance de l'autorité chargée du contrôle. Le groupement des concepteurs/constructeurs a aussi désigné un responsable de l'environnement, ce qui n'était pas une obligation contractuelle, puisque dans le cadre du contrat, le concédant ne connaît que le concessionnaire et non ses sous-traitants. Il existe donc un principe de responsabilité unique du concessionnaire.

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. La mise à disposition du contrat et de ses annexes est effectivement l'une de mes préoccupations majeures. Dans le cadre de mes fonctions de rapporteure spéciale de la commission des finances, en charge des transports, je vous avais demandé communication de ce rapport que vous m'aviez renvoyé avec des parties occultées. Il a fallu que je vous demande à nouveau un nouvel envoi, cette fois non couvert par le soi-disant secret des affaires.

Cette préoccupation est d'ailleurs tellement grande que j'ai pris la peine de vous demander à nouveau le contrat et ses annexes dans le cadre de cette commission d'enquête, de sorte que l'ensemble des membres en dispose et que les députés puissent jouer pleinement leur rôle de contrôle et d'évaluation des politiques de l'État.

J'en reviens au volet environnemental. Vous valorisez les flux libres qui ont des conséquences sur d'autres aspects que nous aborderons dans deuxième partie.

Vous indiquez que la politique de « 1 % paysage, développement et cadre de vie » n'est pas réglementaire, mais contractuelle. Si je comprends bien, elle pourrait ne pas y figurer. Si elle y figure néanmoins, est-elle valorisée et plafonnée à 500 000 euros ? Comment avez-vous évalué cette somme apparemment identique à celle du contournement de Strasbourg ? L'existence même d'un plafond suppose l'existence d'une base pour le mesurer. Quelle est-elle ?

S'agissant du fonds de compensation agricole, je vous avais demandé précision de la dotation et des actions financées. À la suite de l'audition des agriculteurs par cette commission d'enquête, il apparaîtrait en réalité que 180 exploitations sont concernées et non 90 comme monsieur Gerlinger l'affirmait.

Par ailleurs, il n'existe effectivement que trois litiges devant les tribunaux, mais les procédures amiables ne sont pas toutes conclues, ce qui pourrait ouvrir d'autres litiges.

Nous avons également auditionné les syndicats agricoles dans leur diversité. La Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) comme la Confédération paysanne ont exprimé leurs inquiétudes au sujet des compensations, qu'il s'agisse des compensations financières ou de contraintes découlant de la construction de cette autoroute, notamment en termes de remembrements et de partage des exploitations. Il en résulterait de sérieuses difficultés pour rejoindre certaines parcelles.

S'agissant des études d'impact du projet autoroutier, l'Autorité environnementale a rendu un premier avis en 2016. J'aimerais donc savoir comment cet avis a été pris en compte pour la rédaction du cahier des charges et avoir précision des études complémentaires réalisées après la sélection du concessionnaire. Nous avons découvert – ce que nous savions déjà un peu, que le concessionnaire s'était mis dans la position d'être sélectionné très en amont. Dès 2018, autrement dit et sur un contrat qui sera finalement signé en 2022, vous vous étiez mis en position d'être sélectionné au risque de ne pas l'être. S'agit-il d'une pratique habituelle ?

Monsieur Balderelli, les études de trafic ont-elles été actualisées ? Ces études ont des conséquences environnementales, financières et tarifaires. Si ces études ont bien été actualisées, avez-vous véritablement pris en compte les effets des motorisations de nature à impacter le volet environnemental et les émissions de CO2 ?

Monsieur Gerlinger, vous affirmiez avoir démontré que l'autoroute était préférable à l'aménagement de la RN126 sur le plan environnemental. Sur quelles études vous êtes-vous basé pour soutenir une telle affirmation ? Malgré mes demandes multiples, il se trouve que les services de l'État ne m'ont jamais communiqué ladite étude. Comment donc avez-vous pu conduire votre raisonnement sans avoir eu communication de cette étude, datant de 2006 ou 2007 et qui faisait suite à la décision du ministre d'alors – Monsieur Dominique Perben – de privilégier l'autoroute plutôt qu'un aménagement de la RN126, tel que souhaité par les élus locaux ?

Enfin, sur les éléments occultés, vous me parlez de l'annexe 12. Sur quelles bases juridiques vous êtes-vous appuyé pour vous permettre d'occulter ces annexes qui vous étaient demandées? Vous n'ignorez pas que ce sujet a créé une polémique et des interrogations. Parfois, l'inquiétude et la contestation se nourrissent des défauts de transparence.

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Pour anticiper sur les questions qui viendront, je puis déjà vous affirmer que le processus concurrentiel a été efficace et que cette concession a été attribuée dans le cadre d'une concurrence extrêmement féroce entre les différents candidats. En 2018, Atosca a fait un pari effectivement risqué.

Je reviendrai plus précisément sur le « 1 % Paysages, développement et cadre de vie », dans le cadre des réponses écrites à votre questionnaire et nous vous préciserons l'ensemble des références réglementaires en vigueur. Il s'agit en l'occurrence d'une instruction du Gouvernement, donc un texte n'ayant pas de valeur normative et réglementaire. Cette instruction stipule que, dans le cadre des aménagements du réseau routier national et plus particulièrement de ceux du réseau concédé, le contrat de concession prévoit un montant affecté à ces enjeux.

Les enjeux de visibilité ou de covisibilité par rapport à l'emprise des autoroutes sont une conséquence du droit du péage. Ces opérations sont financées dans l'équilibre global de la concession et d'une certaine manière par le péage, qui est une redevance pour le service rendu.

Par ailleurs, puisque ces opérations sont portées par des tiers, la contribution du concessionnaire est plafonnée à 50 % du montant de l'opération. Par exemple, pour la réfection d'une place de mairie entrant dans des conditions de covisibilité de l'autoroute, la collectivité portera au moins 50 % de l'investissement. Ces règles sont précisées par les services de l'État via le document-cadre reprenant les types d'opérations éligibles et les clés de financement. Autrement dit, le concessionnaire n'apporte que les financements. En l'absence d'opération portée selon les critères de la convention, le concessionnaire dépensera moins que les 500 000 euros prévus ; les sommes qui n'auront pas été dépensées seront reversées aux personnes publiques ayant apporté la subvention d'équilibre. Dans tous les cas de figure, le concessionnaire dépensera 500 000 euros. L'objectif est que le montant maximum de cette enveloppe soit dépensé pour accompagner des opérations dans le respect des règles de la convention-cadre qui devra être élaborée par la Dreal. Et si nous atteignons bien ce plafond, la contribution du concessionnaire sera alors plafonnée.

Nous avons essayé de positionner le montant au niveau que nous avons estimé raisonnable par rapport aux précédents constatés et c'est ainsi que nous avons procédé pour le contournement de Strasbourg. Le montant de 500 000 euros pour un territoire tel que celui concerné nous a semblé être une enveloppe raisonnable. Au moment des bilans, nous verrons bien si cette enveloppe a été surdimensionnée ou sous-dimensionnée, mais ce dernier risque nous paraît assez faible. Le but est que l'enveloppe soit légèrement surdimensionnée pour une consommation à hauteur de 90 %, le reliquat étant reversé aux collectivités. Tel est l'esprit de cette politique.

Encore une fois, nous aurions pu ne rien ajouter au contrat de concession. Il nous a pourtant semblé qu'il s'agissait d'un enjeu d'insertion et d'accompagnement des territoires. Nous pourrions aussi avoir ce type d'éléments pour un environnement très particulier, comme une autoroute insérée dans un milieu déjà très anthropisé. Lorsqu'une opération de réaménagement urbain accompagne le projet, il n'est pas nécessaire de mettre en place ce dispositif, car l'accompagnement et l'environnement urbain sont déjà traités par ailleurs. Bien que n'y étant pas obligés, nous y procédons lorsque les enjeux l'exigent.

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Cela répond à ma question. Je souhaiterais évidemment communication des références de l'instruction en question et je rappelle que, dans la hiérarchie des normes, les instructions ont une valeur réglementaire.

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Je disais que ce n'était pas normatif dans la mesure où l'instruction se contente de préciser les règles de mises en œuvre du dispositif et qu'elle prévoit explicitement qu'elles peuvent ne pas être mises en œuvre.

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Nous allons suspendre la séance pour voter dans l'hémicycle.

La séance est suspendue de 11 heures 05 à 11 heures 15.

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

S'agissant de l'étude de 2006-2007, il me semble important de rappeler la temporalité des décisions afférentes à la réalisation de cette autoroute.

Nous n'avons pas retrouvé les éléments évoqués par monsieur le ministre Dominique Perben en 2006-2007. Ce qui a été décidé à cette date n'était pas de construire l'autoroute, mais de soumettre le projet à la concertation et d'étudier l'opportunité de réaliser l'aménagement en recourant à une autoroute à deux fois deux voies.

En novembre 2006 s'était tenue une première consultation des acteurs du territoire et le 31 janvier 2007, une décision ministérielle avait lancé la concertation sur l'opportunité de la mise en concession du projet. Nous étions donc bien sur une décision visant à éclairer – sur la base d'études – l'opportunité de cet aménagement. Ces études ont été commandées le 31 janvier 2007. Nous n'avons pas retrouvé d'études antérieures à cette date. La concertation, survenue entre janvier 2006 et octobre 2007, a donné lieu à un débat public lancé par la saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP) du 23 décembre 2008). Avant cette date et par définition, la décision d'opportunité n'était pas prise. C'est donc bien à partir des suites du débat public que le ministre a pu prendre une décision.

La décision ministérielle du 25 juin 2010 a retenu le principe de l'achèvement de la mise en deux fois deux voies de la liaison Castres-Toulouse par mise en concession autoroutière et selon l'itinéraire de la RN126. Les études préalables à la DUP ont été poursuivies en ce sens.

Il existe bien une articulation des études et des décisions en application du code de l'environnement. Les études d'opportunité permettent d'éclairer la décision, avec une phase de concertation des publics, qui se déroule en amont du débat public et donne lieu à une décision d'opportunité. À la suite de ces éléments, il a été procédé à un travail « en entonnoir » qui a permis de préciser le fuseau, le choix de tracé et d'aboutir aux études préalables à la DUP.

Vous avez également évoqué les alternatives. Dans le cadre des études et du dossier d'enquête préalable de la DUP, l'État, encore maître d'ouvrage à l'époque, avait analysé l'alternative d'une mise à deux fois deux voies de la RN126. Ces études sont retracées dans le dossier d'enquête que nous vous communiquerons. Nous disposons donc d'une analyse comparative révélant – et de manière assez claire – la meilleure performance de la mise en concession par rapport à l'aménagement de la RN126.

Une étude d'aménagement partiel avait été déposée concomitamment à l'enquête publique préalable à la DUP. Cette étude n'a pas été analysée en amont par les services de l'État ni présentée à l'enquête publique – comme cela a été relevé par le commissaire-enquêteur. Dans le cadre des éléments ayant fondé la DUP, la Dreal avait analysé ce scénario alternatif et conclu à des impacts environnementaux plus importants d'une part et d'autre part, qu'il ne permettrait pas d'atteindre les objectifs fonctionnels recherchés par l'autoroute, notamment en termes de sécurité. Un aménagement à trois voies eut été dangereux en termes de sécurité routière et présentait des inconvénients majeurs par rapport à une autoroute. Le bilan socio-économique de l'autoroute montre d'ailleurs que les gains de sécurité équivalent à près de 100 millions d'euros au titre de l'amélioration de la sécurité.

Au moment de constituer son dossier pour l'autorisation environnementale, le concessionnaire a actualisé les études réalisées par l'État. Nous disposons donc bien d'une analyse des alternatives du projet pour chaque étape de la procédure; l'ensemble des analyses ayant été réalisé préalablement aux décisions (autorisation environnementale et DUP). L'avis de l'Autorité environnementale de 2016, préalable à la DUP, ainsi que les éléments ressortant de l'enquête publique, ont bien été pris en compte dans le dossier d'enquête préparé par les services de l'État.

En outre, certains aménagements ont été réalisés à la suite de l'enquête publique. Trois réserves de la commission d'enquête ont d'ailleurs donné lieu à des traitements par les services de l'État : sur le diffuseur de Maurens-Scopont, sur l'accompagnement financier (à la charge du projet) des itinéraires traversant Puylaurens et Soual, et sur le demi-échangeur de Verfeil.

Par conséquent à chaque étape, les éléments de la concertation et des rapports d'enrichissement du projet ont bien été pris en compte. Une fois que la DUP est effectuée, le projet est figé dans ses fonctionnalités et ce sont bien ces dernières qui sont imposées aux concessionnaires qui, ensuite, améliorent l'insertion environnementale, les études et les évolutions technologiques évoquées plus haut.

Enfin, nous disposons bien d'études de trafic réalisées par l'État au moment des études préalables à la DUP, autant d'études que le concessionnaire a ultérieurement reprises à son compte. Les modifications effectuées par le concessionnaire sont d'ailleurs assez marginales et à ma connaissance, n'ont pas modifié les ordres de grandeur de trafics tels que prévus par le projet. De fait, elles n'ont pas changé les éléments d'impact, que ce soit en termes de bruit, d'air, de santé et de gaz à effet de serre.

Après signature du contrat de concession, l'État ne remet plus à jour les études de trafic, qui relèvent dès lors de la responsabilité du concessionnaire.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Je reviendrai d'abord sur les exploitants agricoles présents sur le tracé pour confirmer qu'une centaine est concernée. Le chiffre de 180 que vous évoquez s'applique à l'aménagement foncier pour l'ensemble des agriculteurs des communes concernées.

S'agissant des acquisitions foncières en cours, j'ai assez peu d'inquiétude sur le fait que nous parvenions à les finaliser sans être obligés de recourir à de nombreuses expropriations. À ce jour, nous en sommes à environ 86 % de finalisation des acquisitions et approchons donc de la fin des discussions amiable.

Sur la RN126, nous avons effectivement repris les éléments publics connus. Je ne dispose pas d'étude détaillée de la Dreal. Nous avons repris la position de la Dreal et l'avons actualisée en menant de nouvelles études par nous-mêmes.

Lors de notre actualisation de l'étude d'impact déposée en 2022, nous avons tenu compte de l'avis de l'Autorité environnementale intervenue en 2016. Nous avons ainsi actualisé tous les éléments sur les milieux naturels, les zones humides, les trafics, les accidents, l'hydraulique et les cours d'eau, les aspects réglementaires, l'impact du projet et le bilan carbone. Autant d'éléments intégrés à notre dossier de début 2022, mis à jour en juin 2022 et actualisés à nouveau après l'avis de l'Autorité environnementale de septembre 2022.

Nous avons répondu à l'ensemble des recommandations de l'Autorité environnementale et apporté les compléments opportuns. Je citerai pour exemple l'étude de trafic mise à disposition dans le cadre de l'enquête publique. Nous avons actualisé le bilan socio-économique et répondu à l'ensemble des recommandations qui nous semblaient d'ailleurs tout à fait légitimes.

L'avis du CNPN signalant que les terres agricoles étaient artificialisées est intéressant parce qu'il nous a permis de préciser notre pensée. Bien entendu, nous avons tenu compte du fait qu'il était question de zones anthropisées et non artificialisées, ce qui leur conférait une valeur. Nous avons aussi tenu compte du potentiel de réactivation et avons développé des mesures compensatoires de leur impact agricole. Environ 300 hectares de terres agricoles seront prélevés pour le tracé de l'autoroute et il y aura des compensations de l'impact environnemental de ces surfaces en moins. Nous réaliserons des mesures compensatoires, pour environ 300 hectares, par le biais de conventionnements avec les agriculteurs situés à proximité du tracé. Les zones agricoles existantes s'orienteront vers des pratiques moins intensives et des évolutions de pratiques telles que la mise en place de haies paysagères en vue de compenser l'impact des prélèvements agricoles.

Par ailleurs, à la suite de nouvelles études de trafic que nous avons réalisées sur la base des derniers standards, nous sommes arrivés à des résultats assez similaires à ceux de la DUP, voire légèrement supérieurs. On nous demande parfois si nous avons tenu compte des changements de pratiques telles que le covoiturage ou le télétravail et notre étude de trafic, ultérieure au Covid, a effectivement pris ces éléments en compte. L'étude de trafic était pour nous un élément structurant, ne serait-ce que par notre volonté de sécuriser le projet vis-à-vis de nos différents prêteurs, banques et actionnaires.

S'agissant enfin des aménagements fonciers, avec deux procédures séparées menées en parallèle, un travail d'interface a été conduit, avec croisement des études d'impact, et nous en avons tenu compte dans nos projets respectifs.

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Il conviendrait peut-être de préciser ici cette question de l'aménagement foncier, hors procédures d'expropriation et/ou cession amiable.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

L'aménagement foncier est intéressant en ce qu'il permet de libérer le foncier nécessaire pour le tracé sans avoir à recourir à des expropriations. Les personnes concernées retrouveront à peu près le même potentiel qu'auparavant, mais configuré un peu différemment. Des réserves foncières ont également été faites avec la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer). L'objectif était d'éviter toutes pertes chez les personnes libérant des terrains pour l'arrivée de l'autoroute.

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Considérez-vous avoir aujourd'hui suffisamment de maîtrise foncière (y compris avec la Safer) pour assurer toutes natures de compensations et pour toutes les qualités de terres?

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Nous avons effectivement une bonne maîtrise foncière des terrains nécessaires : soit par acquisition, soit par conventionnement.

Vous évoquiez par ailleurs les obligations réelles environnementales (Ore) lesquelles permettent de sécuriser davantage la vocation des terrains sur 99 ans théoriquement. Cette échéance pose une difficulté puisque notre convention ne court que sur 55 ans. Toutefois, je ne doute pas que dans 55 ans, l'État soit en mesure de remettre l'A69 en concession et de reporter les Ore sur le futur concessionnaire.

Vous posiez enfin la question du déroulement du dernier comité de suivi des engagements de l'État, qui s'est tenu le 18 décembre 2023. Les réunions du comité sont l'occasion de présenter l'actualisation des travaux, de rappeler l'ensemble des engagements de l'État sur les milieux physiques, les milieux naturels et les milieux humains.

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Chers collègues, il nous faut à nouveau suspendre notre séance pour prendre part au vote en cours dans l'hémicycle.

La séance est suspendue de 11 heures 35 à 12 heures 05.

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Nous reprenons notre audition. Notre collègue Philippe Frei, vice-président de la commission d'enquête, en assurera la présidence dans quelques minutes.

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Ma question s'adresse à Monsieur Gerlinger. Le contexte du chantier est très tendu et marqué par des actes de pression, de vandalisme et parfois des actes de violence. Ainsi, 204 dégradations des sites du chantier ont été constatées, comme des incendies ou des atteintes à des véhicules de chantier. Atosca a effectué quatre-vingts dépôts de plainte. Vous évoquiez également des dégradations le week-end dernier au cours duquel un groupe électrogène aurait été incendié. La semaine dernière, un véhicule a été caillassé alors que l'équipe de salariés était présente à son bord. Ces dégradations diverses ne sont d'ailleurs pas que matérielles, mais aussi physiques. Le 15 mars dernier, un chauffeur de balayeuse employé par Atosca a été agressé physiquement, ce qui a entraîné une interruption temporaire de travail. Un mois plus tôt, Atosca a indiqué qu'un autre salarié avait été frappé au visage.

Face à ces tensions fortes, comment vivez-vous la situation et comment la vivent vos équipes sur le terrain ? Avez-vous des précisions quant aux coûts supplémentaires générés par ces actes de vandalisme et de violence ? La sécurité de vos équipes est-elle assurée ?

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Merci infiniment de votre question, monsieur le député.

Je ne dirais pas que la situation est bien vécue par les agents. Jusqu'à présent et bien que de multiples dégradations soient à déplorer depuis notre arrivée sur le chantier, j'en parlais assez peu, car l'intérêt de ce projet, l'attente du territoire et le soutien local que nous avions nous portaient à avancer. Aujourd'hui néanmoins, nous atteignons un point de non-retour qui impose de dire « Stop ». Tout cela pourrait mal finir, ce qui n'est aucunement notre souhait. Nos agents doivent évidemment travailler en toute sécurité.

Comment le vivons-nous au quotidien ? Nous aimons notre métier et nous efforçons de le faire correctement. Nos agents travaillent quotidiennement et sont motivés par ce qu'ils font, si bien qu'ils sont portés à passer outre ce qu'il se passe. Il faudrait cependant que la situation ne se dégrade pas.

Je ne saurais pas chiffrer exactement le coût de ces évènements. Nous utilisons des engins lourds qui, pour l'instant, n'ont pas été abîmés. Il existe assurément un impact en termes de planning, dans la mesure où certaines zones ne peuvent être déboisées et qu'il nous faut alors y procéder à d'autres endroits. À ce jour et au-delà de la complexité de gestion, nous sommes en mesure de travailler sur 53 kilomètres de sorte qu'il n'y ait pas d'impact sur le planning du chantier, en prévision d'une livraison en fin 2025.

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Ma question concerne le débat démocratique et la concertation. Dans ce type de projets, l'acceptabilité est souvent au cœur des débats. Je voudrais savoir quelles actions ont été mises en œuvre depuis le début de la procédure, ce qu'il en sera dans les mois qui viennent et après la mise en exploitation de l'autoroute ? Selon vous, ces concertations étaient-elles de nature à améliorer le projet et, si oui, de quelles manières ?

Par ailleurs, pouvez-vous nous faire un état des lieux des concertations et réunions que vous avez eues avec les élus ? Chacun sait, au sein de cette commission, que les élus locaux, en particulier les maires, sont les acteurs parmi les plus légitimes de notre démocratie.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

En ce qui concerne l'acceptabilité qui, au-delà de l'exemplarité, est l'un des deux leitmotiv de notre projet, nous avons placé tous les curseurs du point de vue environnemental, mais aussi sur d'autres volets : la politique tarifaire ou les mesures de protection individuelle.

Vous demandez ce qui a été amélioré par la concertation. Le dossier tel qui était prévu au moment de la DUP prévoyait trois kilomètres de protection phonique et finalement, nous en réaliserons huit. Lors des échanges, nous avons bien compris qu'à certains endroits, il convenait d'aller un cran plus loin que le prévoyait l'aspect réglementaire. Dès la fin 2021, nous avons entrepris de rencontrer le maximum de personnes : les chambres consulaires, les élus, les services de l'État et autres services instructeurs.

Je me félicite ici de l'état d'esprit dans lequel nous avons travaillé avec les services instructeurs, chacun dans son rôle : nous, en tant que pétitionnaires et l'État en tant qu'instructeur, nous obligeant parfois à faire évoluer notre conception des travaux pour mieux respecter la réglementation.

Nous avons très bien compris que les élus étaient des pivots essentiels de nombreuses initiatives à l'échelle des territoires, à côté des chambres consulaires, des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers. Nous avons rencontré et continuons d'échanger avec tous ces acteurs. Cette concertation s'est traduite par l'organisation de cinq cents réunions, dix réunions publiques et mille personnes participantes, pour des échanges très constructifs.

S'agissant des centrales d'enrobage, j'entends les inquiétudes, probablement accrues, d'ailleurs, par des propos exagérés que j'entends ici ou là. La France compte aujourd'hui 500 centrales d'enrobage et les enrobés qui en sortent servent aussi bien aux nouvelles routes qu'aux réfections de chaussées. Les enrobés sont utilisés sur toutes les routes françaises. Ce sont des pratiques très bien maîtrisées et ne présentant pas de risque. Nous avons tenu deux réunions publiques sur le sujet, en lien avec l'État et allons poursuivre ce travail auprès des riverains tout en étudiant avec la Dreal les éléments potentiels à ajouter sur le plan du contrôle. Pour éviter toute dérive, le constructeur a pris l'engagement d'élaborer un plan de contrôle excédant d'ailleurs les exigences réglementaires, à savoir la mise en place de capteurs au niveau des communes et en sortie d'usine et la vérification de la qualité des terres pour s'assurer que tout fonctionne correctement. C'est là une illustration concrète de la façon dont nous souhaitons travailler avec tous les acteurs concernés.

Je parlais enfin des comités de suivi des mesures compensatoires qui sont une main tendue – et que je continue de tendre – pour continuer à travailler intelligemment sur ce projet. Mon rôle est que le projet se réalise, assurément, mais de manière intelligente. Nous allons donc continuer de travailler au sein des comités de suivi des mesures compensatoires, y compris avec les associations de protection de la nature.

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Si la concertation sur le projet relève à ce stade de la responsabilité du concessionnaire, l'État ne se désintéresse pas du sujet pour autant et a effectivement accompagné le territoire de sorte que ce projet d'autoroute soit également un projet de territoire. La préfecture du Tarn a d'ailleurs affecté un haut fonctionnaire sur le sujet, pour permettre au territoire de s'emparer du projet et d'en tirer toutes les conséquences en termes de développement des mobilités, d'urbanisation, de développement économique et de développement urbain.

Nous sommes déjà bien au-delà de la concertation liée au projet, mais il nous semblait important d'avancer sur ce point. C'est d'ailleurs dans le cadre de cette concertation qu'a pu émerger le projet – porté par le département du Tarn – de voies pour vélos sur un linéaire assez important et qui permettra de répondre à d'autres enjeux de mobilité.

Il importe donc que l'ensemble des élus du territoire se mobilise pour que ce projet d'infrastructure de transport soit également un projet de territoire.

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Merci sincèrement, monsieur Balderelli, pour cette précision que je crois importante. Depuis plusieurs mois, Monsieur Maxime-Yasser Abdoulhoussen se rend sur le territoire pour organiser ce projet sous le contrôle de l'État, avec les élus et les forces vives de ce territoire. Aujourd'hui, le projet de territoire est abouti. Vous avez parlé de la ville-route, mais de nombreuses autres actions sont mises en place dans le cadre de ce projet de territoire.

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Pour ma part, je voudrais vous féliciter pour la transparence dont vous faites preuve, et pas seulement devant cette commission. Je puis témoigner que, depuis le début de la concession, Atosca a effectivement la volonté de communiquer avec tous les acteurs.

Au vu de vos réponses et au fil de cette mission, il apparaît que nous sommes en présence d'une autoroute qui sera l'une des plus vertueuses de France en termes environnementaux, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Comment votre souci environnemental a-t-il influé sur le tarif des abonnements ? Aux yeux des personnes que je côtoie et aux miens, le tarif reste la seule inquiétude des futurs usagers de cette autoroute.

Monsieur Philippe Frei assure la présidence de la commission en remplacement de monsieur Jean Terlier.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Je ne répondrai pas en détail à votre question, monsieur le député, car nous aurons l'occasion d'y revenir lors de futures auditions.

Notre politique tarifaire consiste effectivement à favoriser les véhicules sans émission de gaz à effet de serre, de sorte que les tarifs affichent automatiquement 20 % de réduction par rapport à un véhicule thermique. Cet aspect, prévu dans le contrat, était d'ailleurs une demande du concédant. Nous sommes même allés au-delà en adaptant les abonnements en fonction du nombre de déplacements mensuels, avec des réductions encore plus fortes pour les véhicules électriques. La réduction dont pourrait bénéficier un véhicule électrique s'appliquera sur un tarif lui-même déjà minoré de 20 %.

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Monsieur Gerlinger, comment expliquez-vous que le département du Tarn ait réaménagé l'axe Albi-Castres-Mazamet (RN112), avec des zones de déplacements, pour un passage de 15 000 véhicules par jour et qu'aujourd'hui, la circulation soit fluide ?

Selon vous, il ne serait apparemment pas possible de réaménager la RN126 qui possède déjà deux zones de déplacement à double voie, en plus des déviations de Soual et de Puylaurens, alors que le nombre de passages par jour est d'environ 7 000 à 8 000 véhicules, soit quasiment la moitié et que le trafic est en baisse depuis 2017.

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Personne n'a affirmé qu'il n'était pas possible de réaménager la RN126. En revanche, l'analyse a conclu au choix d'un projet plus performant, à savoir la réalisation d'une autoroute entre Toulouse et Castres. La question n'est donc pas de savoir si c'est possible ou non. C'est bien évidemment possible et l'alternative a été d'ailleurs étudiée par les services de l'État lors de l'enquête préalable d'utilité publique et réétudiée ensuite par le concessionnaire. Il s'agit de choisir le projet le plus performant et soutenu par le territoire.

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Pour rebondir sur les alternatives dont nous n'avons pas de trace, nous souhaiterions communication des conclusions pour nous en assurer.

Monsieur Gerlinger, après une demande d'un habitant sur les centrales d'enrobage, vos services auraient formulé la réponse suivante : « Je vous confirme que la centrale de Puylaurens sera démontée après mise en service de l'A69. Les opérations d'entretien périodique des chaussées de l'A69, qui devraient intervenir au plus tôt douze ans après la mise en place en service et qui représentent 10 % seulement des quantités produites pour la construction de l'A69, pourraient néanmoins justifier l'installation d'une centrale mobile de moindre importance, et ce pour l'ensemble du linéaire du tracé. Cette centrale mobile ne pourra être installée que sur des terrains inclus dans le domaine public autoroutier ou dans les zones d'activité où ce type d'installation est autorisé du point de vue de l'urbanisme/zone PLU. » Confirmez-vous qu'il y aura une autre centrale ou qu'une centrale sera maintenue ?

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Je confirme intégralement cette réponse d'Atosca. Je vous confirme également que les deux centrales d'enrobage sont provisoires et qu'elles serviront uniquement pendant le temps de la réalisation de l'enrobé des 53 kilomètres de l'autoroute, et ce, pour une durée d'environ un an, dont six mois de travail à plein temps.

L'ensemble de la chaussée doit être repris tous les dix à douze ans. Nous serons donc amenés à nous interroger sur la provenance des enrobés, mais pour une quantité beaucoup plus faible et dont j'ignore la localisation exacte à ce stade. Quoi qu'il arrive, les autorisations idoines seront requises. Il est à prévoir qu'une seule centrale sera nécessaire. Nous verrons, d'ici dix à quatorze ans, si les matériaux pourront être récupérés à partir d'une centrale existante.

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Si je comprends bien, des centrales mobiles seront ultérieurement nécessaires à l'entretien des voies pour l'équivalent de 10 % des matériaux et le positionnement de ces centrales sera à définir localement – selon les PLU.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Il s'agira de centrales provisoires, sachant qu'il existera peut-être des possibilités de s'approvisionner ailleurs ; s'il existe des centrales à proximité, nous les utiliserons peut-être.

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Ma dernière question concerne le site de la « Crem'Arbre ».

Le 15 février 2024, vous saisissiez la Dreal pour une demande de déclassement de la zone de la « Crem'Arbre » en vue de l'abattage des arbres. Lors de son audition du 2 avril, M. Berg nous indiquait avoir invalidé cette demande – le mardi 20 février. Cependant, dès le 15 février et surtout le 16 février, vous avez entrepris de commencer les abattages. Autrement dit, vous faites une demande et le même jour, vous abattez sans attendre la réponse. Comment cela est-il possible ?

La Dreal vous a confirmé à nouveau, le 5 mars, que la zone restait à fort enjeu environnemental, interdisant de facto l'abattage. La Dreal a aussi procédé à un rapport de manquement administratif, le 7 mars dernier, interdisant toute coupe et atteinte aux arbres jusqu'au 1er septembre.

Êtes-vous donc au-dessus des lois ou de ce que la Dreal préconise ? En effet, vous avez poursuivi les abattages jusqu'au 24 mars, date à laquelle le préfet a publiquement affirmé le maintien de la qualification de cette zone à fort enjeu environnemental. Dès le 28 mars, vous êtes de nouveau intervenu pour détruire les systèmes racinaires des arbres, ignorant ainsi la mesure MR03 sur la protection des oiseaux et de leurs habitats, prise en application de l'annexe 3 de l'arrêté du 1er mars 2023 et selon l'arrêté ministériel de 2009).

Enfin, pourquoi avoir demandé l'intervention des forces de l'ordre sur une zone où vous n'étiez pas censé intervenir avant le 1er septembre ?

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Monsieur Berg vous a récemment confirmé les difficultés d'instruction et je vous confirme aujourd'hui nos difficultés d'exécution.

Le 15 mars, nous avons transmis à la Dreal un dossier complet et assorti de toutes les analyses d'écologues pour l'appuyer.

Notre autorisation environnementale prévoit effectivement la possibilité de couper des arbres entre le 15 février et le 31 mars, à condition que des écologues vérifient en amont que les zones concernées soient bien exemptes de la présence d'espèces, en particulier d'oiseaux et de chiroptères. Cette mesure avait été proposée et retenue dans notre dossier de demande d'autorisation.

Dans le premier dossier, déposé le 15 mars auprès des services de Monsieur Patrick Berg, ce travail d'écologues n'avait pu être réalisé de façon exhaustive sur le site de la « Crem'Arbre », du fait que des occupants avaient pris position dans des arbres, empêchant ainsi les écologues d'y monter pour effectuer leurs analyses. Ces derniers ont été réalisés de façon progressive, au fur et à mesure de la libération des arbres par les forces de l'ordre. C'est pourquoi les rapports de l'écologue n'ont pu être transmis à la Dreal que de manière progressive.

Nous avons finalement fourni tous les éléments nécessaires dans le cadre de l'autorisation environnementale. Les rapports des écologues attestent aujourd'hui que ce secteur n'abrite ni oiseau ni chiroptère. C'est d'ailleurs assez normal sur cette zone. Au moment de la demande d'autorisation, la « Crem'Arbre » faisait partie d'un ensemble de massifs boisés. Entre septembre et octobre, nous avons coupé une grande partie des arbres de la zone située juste à côté de la «Crem'Arbre ». Il n'y avait donc plus de continuité avec d'autres secteurs. Il est donc assez normal que les écologues n'aient rien trouvé dans les arbres.

Par la suite, nous avons effectivement été amenés à couper quelques arbres, à la demande des forces de l'ordre et compte tenu d'enjeux de sécurisation et de complexité de gestion du site. Je confirme toutefois que nous avons respecté les prescriptions de l'autorisation consistant à vérifier qu'il n'y avait pas d'espèces, et donc pas d'enjeu écologique. Je me tiens à la disposition de la Dreal pour poursuivre nos échanges sur la base de l'ensemble des éléments produits, y compris le rapport final sur l'ensemble du secteur.

Je voudrais aussi ajouter que, contrairement à ce que j'ai entendu, l'OFB n'a jamais dit que la coupe était illégale. L'OFB a indiqué que la mésange bleue était présente dans les arbres et qu'à ce titre, il n'était effectivement plus possible de couper ; décision assurément légitime, le strict respect de notre autorisation impliquant de ne plus couper dès lors que des espèces sont présentes.

Je citerai enfin deux éléments complémentaires démontrant qu'à notre sens, nous avons bien respecté l'autorisation environnementale.

En premier lieu, une plainte avait été déposée par les opposants au moment du début de la coupe, survenus non pas le 16 mars, mais plutôt le 20 mars. Quelques jours après le 20 mars et après le dépôt de plainte, l'OFB s'était rendu sur place avec le substitut du procureur, et avait constaté que les prescriptions étaient respectées, aboutissant à un classement sans suite de la plainte.

En second lieu, un référé « mesures utiles » avait été déposé par les opposants, demandant l'arrêt des travaux et l'obtention de certains documents. À ma connaissance, ce référé également a été rejeté par le tribunal administratif. Ces réalités attestent du sérieux avec lequel nous avons travaillé et des conditions difficiles.

Néanmoins, je comprends tout à fait l'agacement de Monsieur Patrick Berg sur le fait que les éléments lui aient été transmis de façon très parcellaire.

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Pour me rendre régulièrement sur les lieux, contrairement à mes collègues députés tarnais, je vois bien ce qu'il s'y passe. Pourquoi ne pas avoir suspendu les travaux dans l'intervalle et pour la sécurité de tous : travailleurs, concessionnaire, écureuils et habitants ?

Le choix de suspendre les travaux jusqu'à l'obtention des réponses nécessaires aurait évité les tensions, entretenues de part et d'autre et qui mettent en danger tout le monde, y compris les forces de l'ordre.

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Lors de son audition, Monsieur Milanesi, économiste à l'université Paul Sabatier et chercheur au CNRS, nous expliquait que l'agglomération Castres-Mazamet n'était ni enclavée ni une zone défavorisée, mais qu'il s'agissait d'un territoire attractif ne perdant pas d'habitants. La zone d'emploi de Castres-Mazamet accueille 140 000 habitants et 50 000 emplois en 2020. Les cartes montrent que les échanges quotidiens entre Castres et Toulouse sont déjà presque équivalents à ceux existants entre Albi et Toulouse.

Quels critères avez-vous retenus pour décrire l'enclavement d'un territoire ?

S'agissant du gain de temps, comment peut-on croire que l'on va désenclaver un territoire en gagnant treize minutes, d'autant que ce temps pourrait, en période de pointe, être annulé par un effet d'entonnoir à l'arrivée sur les échangeurs de la rocade toulousaine ?

Peut-on être encore assuré de bénéficier d'un gain de temps en période de pointe ? Si oui, à combien estimez-vous ce gain de temps, à mettre en regard avec le coût du trajet de vingt euros aller-retour ?

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

La question que vous posez est fondamentalement celle de l'opportunité de ce projet.

Un premier élément de réponse consiste à évaluer la manière dont l'opportunité d'un projet est appréciée selon les référentiels en vigueur. Pour le calcul des gains de temps, il est procédé à des études de trafics et nous avons déjà parlé des diverses études : études d'impact, enquêtes publiques et autres évaluations socio-économiques. Nous disposons effectivement de référentiels établis par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Les référentiels ne sont donc pas établis par les concessionnaires, mais par des groupes d'experts que sollicitent le commissariat général au développement durable, l'inspection générale de l'environnement et du développement durable et qui associent également des universitaires. Ces référentiels sont ce qu'ils sont. Nous les appliquons et, jusqu'à preuve du contraire, ils font foi.

Les référentiels permettent d'évaluer l'intérêt socio-économique d'un projet, lequel prend en compte les gains de temps, de sécurité, l'amélioration de l'environnement des riverains, notamment la protection contre le bruit, comme des inconvénients tels que le coût du projet, le coût payé par l'usager sur une autoroute à péage ou encore le bilan CO2. L'ensemble de ces éléments aboutit à un bilan socio-économique, lequel bilan se trouve être largement positif dans le cadre de l'opération. La valeur actualisée nette socio-économique s'élève en effet à plus de 500 millions d'euros nets et la rentabilité par euro public investi est de l'ordre de deux euros.

Un aménagement public comme une autoroute procède d'une décision politique. Les fonctionnaires que nous sommes ont la charge de mener le plus exactement possible les procédures préalables et l'ensemble des études. L'ensemble des éléments est mis à la disposition des responsables politiques, en l'occurrence du ministre, de manière à ce qu'il puisse prendre sa décision. Nous sommes donc sur un aménagement extrêmement normé.

Sur ce territoire, il apparaît que l'unanimité de l'ensemble des conseils exécutifs en faveur du projet est extrêmement forte. Il est donc assez rassurant de constater que les évaluations, telles qu'établies selon les référentiels en vigueur, rejoignent l'appréciation – par définition plus subjective – consistant à vouloir ou non réaliser cette autoroute. Je crois que l'unanimité constatée explique fondamentalement les raisons de la réalisation de l'autoroute.

Par conséquent, je ne suis pas le mieux placé pour vous répondre, puisque je ne fais qu'appliquer des référentiels. Mon rôle n'est pas de discuter des conditions et de la définition de l'enclavement tel que Monsieur Milanesi peut la concevoir.

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Il se trouve que le président de la chambre d'agriculture de Haute-Garonne n'avait pas d'argument particulier pour soutenir le désenclavement, alors même qu'il l'avait mis en avant. Selon lui, c'était quelque chose d'évident. Les scientifiques auditionnés nous ont pourtant parlé de cette notion, mais quant à eux, sur la base de faits. Jusqu'à présent, je n'ai pas connaissance de critères objectifs justifiant de la pertinence du projet sur ces notions de désenclavement et de gain de temps, sachant par ailleurs que les coûts financiers et environnementaux sont loin d'être négligeables.

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Je ne vous ai pas répondu précisément sur la notion de désenclavement, car celle-ci ne fait pas partie du référentiel technique que nous utilisons pour apprécier l'évaluation socio-économique d'un projet. Le professeur Milanesi a peut-être sa propre appréciation, aussi subjective d'ailleurs que celle du président de la chambre d'agriculture.

Pour notre part, nous avons appliqué des référentiels ayant abouti aux résultats que je vous ai présentés. Ils ont d'ailleurs été mis en jour en 2019, pour une valeur actualisée des enjeux socio-économiques légèrement supérieure, mais ne changeant pas fondamentalement les résultats. Une fois encore, la décision est politique et assez unanimement partagée. Je regrette que M. Milanesi ne soit pas élu du territoire afin de travailler à la prise de décision.

Sur la question du gain de temps et des prévisions de trafic, là encore, nous utilisons des référentiels pour effectuer des prévisions de trafic et qui prennent en compte plusieurs paramètres : l'état du trafic, les projections de trafic (sur l'axe principal et les axes adjacents). C'est le cas de la RN126, qui deviendra route départementale 126, ou de l'autoroute A68 sur laquelle se branchera l'autoroute. L'ensemble de ces études de trafic, reprises et refaites dernièrement par le concessionnaire, identifie des gains de temps. Je comprends que d'un point de vue subjectif, on puisse se dire que le gain de temps résultant de l'autoroute sera annulé par l'effet entonnoir, mais les études de trafic ne le démontrent pas.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

J'ajoute qu'à la demande du commissaire-enquêteur, nous avons recalculé le gain de temps qui serait in fine de vingt-trois et non de treize minutes.

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Vous indiquez, monsieur Balderelli, que la notion de désenclavement ne fait pas partie du référentiel, or pour de nombreux élus favorables à cette autoroute, c'est l'argument phare. Se baseraient-ils sur quelque chose qui n'existe pas ? Le maire de Mazamet estime l'argument primordial, du fait que l'autoroute s'arrête à Castres et ne désenclavera pas le bassin mazamétain. Cet argument est-il faux ?

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Je ne dirais pas qu'il est faux. Je pense que la façon dont le maire de Castres, celui de Mazamet et les élus départementaux, apprécient le fait que leur département est enclavé correspond à une réalité telle qu'ils peuvent la ressentir. Néanmoins, le désenclavement ne fait pas partie des référentiels que je prends en compte et le bilan socio-économique ne le prend pas non plus en compte. Heureusement qu'une décision politique ne dépend pas que d'une appréciation technicienne…

La décision de réaliser un aménagement de ce type est une décision politique, qui s'appuie sur des éléments d'aide à la décision que les techniciens que nous sommes peuvent mettre à disposition, qui répondent à des référentiels et à une appréciation du territoire par ceux qui y vivent, par leurs élus et qui peut s'exprimer par ce sentiment de désenclavement qui est tout autant légitime que les éléments d'aide à la décision que nous pouvons apporter.

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J'en déduis qu'il s'agit d'un élément ressenti et non d'un argument factuel. À mon sens, un projet ne doit pas se baser sur des éléments ressentis.

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Tout d'abord, la question de l'enclavement, bien que ne faisant pas partie des référentiels, a tout de même été utilisée pour caractériser la raison impérative d'intérêt public majeur, comme elle a fait l'objet de débats dans le cadre de la DUP. Cette notion a donc bel et bien été prise en considération.

S'agissant de la « Crem'Arbre », le 27 février, j'ai écrit à monsieur le préfet du Tarn pour m'enquérir de la base juridique l'autorisant à mobiliser des forces de police, dont un article de presse récent avait évalué le coût. En l'absence de réponse du préfet, j'ai réitéré mon courrier le 13 mars en formulant à nouveau une demande similaire. J'ai également interpellé monsieur Darmanin, au sein de l'hémicycle, quant à la base juridique lui permettant de mobiliser des forces de police pour déloger des personnes occupant cette zone à haute intensité écologique, ce qu'il a prétendu ne pas être le cas, et vous également.

Vous me dites que les premiers arbres ont été abattus le 20 février, mais depuis, le préfet m'a répondu en me communiquant des rapports d'écologues dont M. Berg a fait état devant cette commission, et de manière d'ailleurs assez critique. Ces rapports d'écologues datent du 21 février, du 22 février, du 23 février et du 4 mars. Il a donc été considéré que cette zone n'était plus à haute intensité environnementale alors même que les écologues – que vous-mêmes avez sollicités – n'avaient pas encore rendu leurs rapports ; étant observé que, par ailleurs, ces rapports ne constataient pas à la présence de chiroptères et que les habitats effectivement trouvés avaient été obturés.

J'avoue avoir quelques interrogations sur la façon dont Atosca et le préfet du Tarn articulent leur action, puisque j'imagine que vous ne pouvez pas intervenir en l'absence du feu vert de la préfecture.

S'agissant des centrales d'enrobés, l'arrêté interdépartemental du 1er mars précise bien une capacité totale de 250 tonnes de bitume pour la première (Puylaurens) et de 280 tonnes pour la seconde. Savez-vous si la centrale d'enrobage de Gragnague, qui a été supprimée, était de la même catégorie et si elle a posé des problèmes de pollution ?

Par ailleurs, les besoins en eau du chantier ont été évalués à 120 000 mètres cubes par an. Pourriez-vous nous préciser exactement le volume de mètres cubes consommé en 2023 et 2024 ? Nous avons été alertés du fait que des nettoyages de routes étaient effectués par des pompages d'eaux situées à proximité. Ces volumes font-ils partie des 120 000 mètres cubes ou s'agit-il d'errements commis au moment du chantier et dont vous-mêmes rappeliez l'inopportunité ?

En cas de pénuries, vous seriez naturellement assujettis à d'éventuelles contraintes édictées en termes de consommation d'eau. Avez-vous pris en compte cette éventualité dans le déroulement de votre chantier ? J'imagine que sans eau disponible, vous seriez quelque peu empêchés dans la poursuite du votre chantier, notamment au regard de la poussière qui s'en dégagera et de la chaux que vous semblez utiliser.

Enfin, l'arrêté interdépartemental évoque des besoins en eau, mais à aucun moment ne sont évoquées les contraintes environnementales liées au transport des matériaux, alors que la construction de 53 kilomètres d'autoroute implique l'utilisation de milliers de mètres cubes de matériaux et surtout des milliers de passages de camions et autres transports. Avez-vous intégré cet aspect dans la construction de l'autoroute et de quelle façon en avez-vous tenu compte dans les contraintes environnementales ?

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Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Pour conclure sur le désenclavement, quand un professeur d'université, dans son bureau, estime qu'il n'y aucun enclavement, alors même que celui-ci est ressenti par l'ensemble des exécutifs d'un territoire, j'aurais plutôt tendance à faire confiance auxdits exécutifs plutôt qu'aux modèles d'un chercheur.

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Pardonnez-moi, mais je pense que les élus des territoires, les élus nationaux et de tous niveaux, seraient au contraire bien inspirés de fonder leurs décisions politiques sur des données scientifiques. Les rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat nous alertent constamment sur le sujet, à l'instar de milliers de scientifiques mondiaux. Donc, je ne partage absolument pas votre point de vue, Monsieur Balderelli.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

S'agissant de la « Crem'Arbre », après le rapport de l'écologue ayant travaillé sur ce dossier et aux rapports successifs – parus au rythme de la libération des zones par les occupants, – le rapport final présente l'ensemble des travaux réalisés sur la zone. C'est bien sur la base de ces rapports qu'ont été réalisés les abattages pour sécuriser le site, à la demande des forces de l'ordre. Donc, une vérification est faite en amont des coupes d'arbres effectuées. Je parlais d'un début d'abattage survenu le 20 mars, mais je vous reconfirmerai la date.

Néanmoins, l'engagement clair que je prends ici, sous serment, est qu'aucun arbre n'a été coupé sans validation préalable d'un écologue.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

De l'écologue, sur la base des rapports transmis ensuite à la Dreal.

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J'en déduis que vous avez coupé des arbres avant que la Dreal n'ait validé le travail de l'écologue.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Nous coupons dans une configuration où il existe des enjeux de sécurité publique. Dès lors que nous disposions des éléments rassurants de l'écologue, étant donné les contraintes du site, des abattages ont effectivement été réalisés.

Vous citez en outre l'obturation des cavités, mais il n'y a aucune malice en cela, puisque l'autorisation environnementale prévoit, dès lors que des contrôles sont réalisés et que vérification est faite qu'il n'y a rien dans les habitats, qu'il soit procédé à des obturations pour éviter que les espèces ne reviennent avant que l'abattage n'ait lieu.

Il nous a été reproché que le prestataire ait engagé ce type de travaux en février, avant que nous ne disposions de l'autorisation préventive survenue en mars 2023. Nous sommes effectivement allés un peu trop vite. Maintenant que nous avons l'autorisation, il est tout à fait régulier de procéder ainsi.

Certaines de vos questions relèvent enfin de l'ordre public sur lequel je ne me prononcerai pas, bien entendu.

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Je comprends parfaitement votre impossibilité à vous engager sur la question de l'ordre public. Confirmez-vous néanmoins que tous les éléments dont je viens de faire état – et qui m'ont été confirmés par le préfet – ont été engagés en concertation avec la préfecture ?

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Je vous le confirme.

Bien que ne connaissant pas exactement la centrale de Granague, je puis affirmer qu'elle est différente de celle que nous utiliserons sur les deux sites. Après ce qu'il s'est passé à Gragnague, nous intégrerons des éléments qui viendront d'ailleurs en sus de ce qui se fait traditionnellement pour les centrales d'enrobage, à savoir des systèmes de contrôle, de vérification et d'alerte. Je le réaffirme ici : une centrale d'enrobage fonctionnant correctement ne présente aucun risque sanitaire pour les riverains. En somme, nous faisons le nécessaire pour éviter un dysfonctionnement sur ces deux sites.

Quant à l'eau, le président de la FNSEA locale a indiqué que 120 000 mètres cubes représentaient à peu près l'équivalent de l'irrigation de cinquante hectares de blé. Autrement dit, en prélevant un peu plus de 300 hectares de terres agricoles, nous consommerons beaucoup moins – en pourcentage et en valeur absolue – que ce qui aurait été nécessaire si la culture et l'irrigation de ces zones s'étaient poursuivies. Nous visons naturellement à obtenir l'accord des syndicats habilités pour utiliser de l'eau d'irrigation.

Nous sommes évidemment conscients de l'enjeu de l'eau à notre époque et des tensions qu'il suscite. Dès 2023, Monsieur le préfet Lauch avait attiré notre attention en nous demandant de nouveaux efforts. En 2023, nous avons consommé 30 000 mètres cubes d'eau. En cas de tensions sur l'eau, nous contribuerons logiquement à l'effort de tous et nous nous adapterons. Nous essayons d'optimiser au maximum l'utilisation de notre système d'eau.

En réponse sur les transports de matériaux, nous avons l'objectif de recourir le moins possible à des matériaux de l'extérieur et de faire notre maximum pour que les remblais équilibrent les déblais ; c'est le travail que nous avons réalisé en période d'études. Lors de notre arrivée sur le territoire, certains ont craint que nous ayons à ouvrir de nouvelles carrières. Le dossier de DUP évoquait le besoin de combler un déficit de matériaux de trois millions de mètres cubes de matériaux. Pour être compétitifs dans notre offre et pour anticiper, nous avions envisagé l'hypothèse de carrières supplémentaires et avions commencé des prospections, voire des concertations préalables. Après notre arrivée sur place et avoir engagé des études détaillées, nous avons pu trouver un « profil en long » permettant que les remblais équilibrent les déblais. Il en résulte que nous n'aurons pas besoin de matériaux de l'extérieur. Je ne dis pas qu'il n'y aura pas besoin de concasser ailleurs d'autres sources de matériaux que les matériaux de terrassement, mais c'est une préoccupation fondamentale que nous avons eue et qui a d'ailleurs permis d'économiser le coût du projet.

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Monsieur Gerlinger, vous disiez que toutes les plaintes avaient été classées sans suite. Or des coupes auraient eu lieu en février et sans passage préalable de l'écologue. Selon les informations dont je dispose, la plainte déposée contre x le 17 février, pour demander des mesures provisoires et empêcher les travaux, n'aurait pas encore été classée et l'enquête suivrait encore son cours.

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Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca

Je vous confirme n'avoir pas connaissance de suites à cette plainte.

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Les réponses que vous nous avez faites aux questions me satisfont relativement.

Monsieur Gerlinger, au sujet de l'annonce d'un arbre pour cinq, vous avez évoqué une « simplification de communication ». L'annonce a été reprise par un ministre auquel vous n'avez visiblement pas précisé qu'il s'agissait d'une « simplification ». Je trouve cette approche très légère. Ce type d'annonce contribue à alimenter les doutes sur la communication réalisée autour de ce dossier. Or le sujet mérite d'être abordé avec sérieux, d'autant que vous avez été particulièrement alerté sur la sensibilité de ceux qui, sur ce territoire, sont engagés pour la protection des arbres.

La séance s'achève à treize heures cinq.

*

Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Christine Arrighi, M. Frédéric Cabrolier, Mme Karen Erodi, Mme Sylvie Ferrer, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Jean Terlier